N°273

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUATORZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2017

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2018 (n° 235),

 

PAR M JOËL GIRAUD,

Rapporteur Général

Député

 

——

 

 

ANNEXE N° 4
 

 

agriculture, ALIMENTATION, FORÊT ET AFFAIRES RURALES :

 

POLITIQUES DE L’AGRICULTURE, FORÊT, PÊCHE ET AQUACULTURE

 

 

DÉVELOPPEMENT AGRICOLE ET RURAL

 

 

Rapporteurs spéciaux : Mme Émilie CARIOU et M. Hervé PELLOIS

 

 

Députés

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— 1 —

SOMMAIRE

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Pages

PRINCIPALES ObSERVATIONS DES RAPPORTEURS SPéCIAUX

DONNÉES CLÉS

INTRODUCTION

I. les crÉdits DE LA MISSION AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT ET AFFAIRES RURALES POUR 2018

A. le programme 149 ComPÉTITIVITÉ ET DURABILITÉ DE L’AGRICULTURE, DE L’AGROALIMENTAIRE, DE LA FORêT, DE LA PÊCHE ET DE L’AQUACULTURE

1. Le soutien aux exploitations agricoles

2. Les autres actions du programme

3. Les moyens des opérateurs

4. La politique forestière

5. La pêche et l’aquaculture

B. lE PROGRAMME 215 CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES DE L’AGRICulture

C. Le compte d’affectation spÉciale dÉveloppement agricole et rural

II. LES ATOUTS ET LES DÉFIS DE L’AGRICULTURE FRANÇAISE

A. L’ORGANISATION DES ÉTATS GÉNÉRAUX DE L’ALIMENTATION

B. LE RETARD DE VERSEMENT DES AIDES DE LA POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE

C. LA croissance « à deux chiffres » de l’agriculture biologique

D. LE RÔLE STRATÉGIQUE DES INDUSTRIES AGROALIMENTAIRES

E. L’INDISPENSABLE EFFORT DE RENOUVELLEMENT DES GÉNÉRATIONS EN AGRICULTURE

F. L’Insuffisante valorisation de la forêt et de la filiÈre bois

article rattaché

Article 49 Suppression du fonds d’accompagnement de la réforme du micro-bénéfice agricole

EXAMEN EN COMMISSION

PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LEs RAPPORTEURs SPÉCIAUX

ANNEXES

Annexe I : CONCOURS PUBLICS à L’AGRICULTURE en 2018

ANNEXE 2 :  Calendrier de versement des aides PAC depuis 2014

 

 

 


— 1 —

   PRINCIPALES ObSERVATIONS DES RAPPORTEURS SPéCIAUX

Le budget de l’agriculture pour 2018 s’élève à 5,27 milliards d’euros en crédits de paiement pour 2018, enregistrant ainsi une hausse de 1,6 % par rapport à 2017.

Cette évolution recouvre un maintien de crédits pour des actions essentielles, le soutien à l’installation des jeunes en agriculture, le versement des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN) dans les zones défavorisées et de montagne ou encore le financement du plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations agricoles (PCAE), devenu une pièce maîtresse de la politique d’encouragement à l’agroécologie.

D’autres actions entraînent le budget à la hausse ; une dotation de 300 millions d’euros est pour la première fois retenue dans le budget de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, afin de gérer les refus d’apurement communautaire qui seront notifiés par la Commission européenne en 2018, ainsi que les aides de crises, récurrentes dans le monde agricole. Plusieurs petits dispositifs voient également leurs crédits augmentés (foncier, aide aux agriculteurs en difficulté, lutte contre la prédation du loup).

La question du retard de versement des aides de la politique agricole commune reçoit elle-même des éléments de solution, avec une augmentation des crédits de paiement bénéficiant aux mesures agroenvironnementales (MAEC), la réévaluation de la subvention à l’agence de services et de paiement (ASP), l’opérateur de l’État en charge du versement des aides, et l’embauche de 300 vacataires dans les directions départementales des territoires (DDT) chargées de l’instruction des demandes d’aides.

Ces efforts vont de pair avec une rigueur de gestion renforcée, qui se traduit, pour le nouvel exercice budgétaire, par la suppression de 225 postes (130 pour le ministère, 95 pour les opérateurs de l’État).

Les actions en faveur de la pêche et de l’aquaculture sont intégrées pour 2018 dans la mission ; les crédits qui sont essentiellement des crédits de soutien à la politique commune de la pêche sont stables, mais le monde de la pêche redoute aujourd’hui les conséquences du Brexit.

La politique forestière semble offrir cette même stabilité, à la faveur, pour la forêt publique, du contrat d’objectifs et de performance (COP) applicable pour la période 2016-2020 ; en revanche, le soutien aux investissements dans la forêt privée paraît marquer le pas.

 

Plusieurs sujets de préoccupation ont retenu l’attention des rapporteurs spéciaux : la difficulté croissante pour les exploitants d’obtenir des niveaux de revenus couvrant leurs coûts de production, la complexité que présente parfois la politique des régions, désormais gestionnaires des aides de la politique agricole commune, l’érosion des parts de marché à l’international pour nos industries agroalimentaires, ou encore la difficulté, pour les jeunes qui s’installent en agriculture, d’accéder au foncier comme de réaliser des investissements de plus en plus coûteux.

Le secteur de l’agriculture biologique, qui connaît actuellement une « croissance à deux chiffres » est victime lui-même d’incertitudes, quant au soutien public qui lui est accordé : en effet, pour 2018, sont annoncés le maintien du crédit d’impôt dont bénéficient les producteurs, mais aussi la fin des aides « au maintien » de l’agriculture biologique versées par l’État.

Les rapporteurs spéciaux font également remarquer que, bien que le rapport ne porte pas sur les questions sanitaires, le sujet de l’interdiction de certains produits phytosanitaires, comme le glyphosate a été soulevé, au cours des auditions auxquelles ils ont procédé.

S’il apparaît crucial aujourd’hui d’encadrer ces pratiques, il est absolument nécessaire de porter ces réglementations au niveau européen : à défaut, l’objectif de santé publique ne pourra être atteint et les producteurs se trouveront placés dans des conditions non concurrentielles. L’interdépendance des marchés agricoles rend pertinent l’établissement d’une harmonisation des normes sanitaires en Europe.

2017 a été l’année des États généraux de l’alimentation tenus à l’initiative du Président de la République, qui réunissent les différents acteurs du milieu agricole autour de deux thèmes de réflexion et d’action : la place des producteurs agricoles dans la filière alimentaire et la promotion d’une alimentation saine, durable et accessible à tous. Le Gouvernement a annoncé, par ailleurs, la mise en place d’un plan pluriannuel d’investissement doté de 5 milliards d’euros.

Les rapporteurs spéciaux approuvent ces choix qui témoignent d’une ambition forte au service de notre agriculture et de nos agriculteurs qui vivent depuis plusieurs années de grandes difficultés.

 

 


— 1 —

   DONNÉES CLÉS

ÉVOLUTION DES CRÉDITS POUR 2018-2020
Plafonds de la mission (hors contribution de l’État au CAS pensions)

(en millions d’euros)

 

 

LFI 2017 au format 2018 (1)

PLF 2018

2019

2020

Plafond des crédits de paiement

2 789

3 187

2 882

2 842

Source : Projet annuel de performances 2018.

(1) La LFI 2017 est présentée au format de la maquette budgétaire retenue pour la programmation 2018-2020 ;

elle est également retraitée des modifications de périmètre et de transferts impactant la mission en PLF 2018.

*

OBJECTIFS ET INDICATEURS LES PLUS REPRÉSENTATIFS DE LA MISSION

OBJECTIF MAC.1 (P149.1) : Combiner la performance économique et environnementale des exploitations agricoles, des filières agroalimentaires et forestières

Indicateur P149.1.1 : Concours publics à l'agriculture / Excédent brut d'exploitation des entreprises agricoles

(du point de vue du contribuable)

(en pourcentages)

 

2015 Réalisation

2016 Réalisation

2017

Prévision

PAP 2017

2017 Prévision actualisée

2018 Prévision

2020

Cible

Concours publics à l'agriculture/ Excédent brut d'exploitation des entreprises agricole

29,89

30,74

SO

29,18

28,18

27,45

Source : Projet annuel de performances 2018.

 

Indicateur P149.1.4 : Part des superficies cultivées en agriculture biologique dans la superficie agricole utilisée (S.A.U.)

(du point de vue du citoyen)

(en pourcentages)

 

2015 Réalisation

2016 Réalisation

2017

Prévision

PAP 2017

2017 Prévision actualisée

2018 Prévision

2020
Cible

Part des superficies cultivées en agriculture biologique dans la superficie agricole utilisée (S.A.U.)

5,1

5,8

8

6,6

7,5

9,2

Source : Projet annuel de performances 2018.

 

 

Agriculture biologique

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Source : Ministère de l’agriculture et de l’alimentation.

 

 

 

 

 

 

 


— 1 —

   INTRODUCTION

Le monde agricole connaît aujourd’hui une crise structurelle importante, avec une baisse de compétitivité des exploitations agricoles, un progrès technique lent et un manque de coordination des filières.

Il connaît également des crises conjoncturelles aussi bien économiques, que sanitaires ou climatiques. La volatilité des prix, couplée à la fin de mesures de protection comme les quotas laitiers a considérablement affaibli les agriculteurs. Les problèmes climatiques et sanitaires à répétition de 2015 et 2016 ont, eux aussi, contribué à une crise agricole de grande ampleur.

Les conséquences en sont nombreuses : performance commerciale dégradée, écosystèmes « à bout de souffle » ou encore exploitants appauvris.

Ce n’est pas l’Europe qui est responsable, mais une façon de faire l’Europe. Le manque de convergence entre les pays de l’Union européenne, la sur-transposition de certaines normes et les retards accumulés dans le versement des aides de la politique agricole commune sont les illustrations d’un système trop complexe. Les agriculteurs eux-mêmes subissent les incertitudes touchant à la future PAC, dont le contenu sera lié au cadre financier pluriannuel dépendant des négociations sur le Brexit.

C’est enfin notre modèle national qu’il convient de repenser dans sa globalité. Le prix du marché intérieur est encore trop soumis à un rapport de forces défavorable aux agriculteurs. La « course aux prix bas » et le regroupement des centrales d’achat les privent de toute marge de négociation.

En proie aux évolutions technologiques rapides, à la montée en puissance des attentes sociétales et aux problématiques environnementales, l’agriculture française dispose pourtant de tous les atouts, pour répondre à ces nouveaux défis.

L’organisation des États généraux de l’alimentation et l’annonce d’un plan d’investissement de 5 milliards d’euros en faveur de l’investissement sont l’illustration d’une prise de conscience politique. La reconnaissance envisagée d’ « un droit à l’erreur » par l’administration témoigne du même souci, même si sa mise en œuvre paraît difficile dans le cadre communautaire.

Les citoyens sont, eux aussi, prêts à soutenir une consommation de produits alimentaires sains, respectueux de l’environnement et garantissant un niveau de vie suffisant aux producteurs.

La discussion du budget de l’agriculture, de l’alimentation, de la forêt et des affaires rurales pour 2018 intervient dans ce contexte compliqué, mais porteur d’avenir.

Les moyens affectés à la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales pour 2018 représentent un montant global (y compris le compte Pensions) de 3,32 milliards d’euros en autorisations d’engagement (– 3,09 % par rapport à 2017) et 3,43 milliards d’euros en crédits de paiement (+ 1,28 % par rapport à 2017).

Si l’on ajoute à ces montants, les crédits de l’enseignement technique agricole et ceux de l’enseignement supérieur et de la recherche agricoles, le budget total alloué au secteur agricole atteint 5,12 milliards d’euros en autorisations d’engagement (– 1,4 % par rapport à 2017) et 5,27 milliards d’euros en crédits de paiement (+1,6 %).

Le financement de certains dispositifs relève, par ailleurs, en totalité ou partiellement du budget communautaire, depuis la dernière réforme de la politique agricole commune entrée en vigueur en 2015.

L’appréciation des concours publics alloués au secteur agricole ne peut d’ailleurs se limiter à l’analyse des seuls crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales. Il faut principalement y ajouter les aides communautaires qui s’élèveront en 2018 à 8,907 milliards d’euros. Elles sont largement consacrées à des interventions économiques, soit, en 2018, 7,239 milliards d’euros pour les dépenses du premier pilier – celles qui concernent le soutien des marchés et des prix agricoles – et, pour celles du deuxième pilier, relatives au développement rural, 1,668 milliard d’euros.

Il faut également prendre en compte les moyens alloués au financement de la protection sociale agricole, qui atteignaient en 2016, 13,41 milliards d’euros et 13,38 milliards d’euros en 2017.

Les aides versées par les collectivités territoriales (communes, communauté de communes, départements, régions) sont de l’ordre d’1 milliard d’euros.

Les montants alloués par le budget au secteur agricole représentent ainsi, avec 5,27 milliards d’euros, moins de 20 % des concours apportés à l’agriculture, y compris les aides à la protection sociale agricole.

Ces différentes données sont rappelées dans un tableau figurant en Annexe 1 (hors aides à la protection sociale agricole).

Il faut mesurer de surcroît le fait que, dans les économies mondialisées, où les questions agricoles sont plus que jamais un enjeu de puissance majeur, les actions prévues dans le budget de l’État ne peuvent répondre, par elles-mêmes, à toutes les problématiques : demeurer une puissance agricole en Europe et dans le monde, développer sa compétitivité, maintenir la diversité de son agriculture, concilier progrès économiques, sociaux et environnementaux, répondre aux demandes des consommateurs, garder une résilience face aux risques.

Les rapporteurs spéciaux mettront l’accent, dans ce rapport, sur quelques-uns des grands défis auxquels sont confrontés notre agriculture et nos agriculteurs et sur les atouts dont ils disposent, après avoir procédé à l’examen des moyens pour 2018 de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales.

I.    les crÉdits DE LA MISSION AGRICULTURE, ALIMENTATION, FORÊT ET AFFAIRES RURALES POUR 2018

Doté pour 2018 de 5,27 milliards d’euros en crédits de paiement, le budget d’ensemble de l’agriculture est en augmentation de 1,6 % par rapport à 2017.

S’y ajoutent les allégements de charges en faveur des entreprises agricoles résultant de la réduction des cotisations sociales patronales et personnelles des exploitants, ainsi que du crédit d’impôt compétitivité emploi (CICE), qui s’élèveront à 2,28 milliards d’euros en 2018.

2018 sera la quatrième année de mise en œuvre de la politique agricole commune définie pour la période 2015-2020 et pour laquelle plusieurs objectifs ont été retenus : le renforcement de la compétitivité de notre agriculture, la redistribution en faveur de l’élevage et de l’emploi et la consolidation du projet agro‑écologique dans le cadre de la régionalisation des programmes de développement rural.

Le programme 149 est le principal programme de la mission et porte les différentes dimensions de la politique agricole et forestière. Il s’intitule désormais Compétitivité et durabilité de l’agriculture, de l’agroalimentaire, de la forêt, de la pêche et de l’aquaculture, mettant bien l’accent sur la double orientation économique et environnementale de la politique agricole et forestière et intégrant désormais les crédits de la pêche et de l’aquaculture.

Le programme 215 Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture qui correspond aux crédits de fonctionnement du ministère garde son autonomie.

Sont, comme pour les exercices précédents, exclues de ce rapport les questions que posent l’enseignement agricole (programme 143 rattaché à la mission interministérielle Enseignement scolaire), ainsi que la sécurité et la qualité sanitaires de l’alimentation (programme 206). Sont analysés, en revanche, comme les années précédentes, les moyens du compte d’affectation spéciale Développement agricole et rural.

A.   le programme 149 ComPÉTITIVITÉ ET DURABILITÉ DE L’AGRICULTURE, DE L’AGROALIMENTAIRE, DE LA FORêT, DE LA PÊCHE ET DE L’AQUACULTURE

(en euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Numéro et intitulé du programme et de l’action

Ouvertes en LFI pour 2017

 

Demandées pour 2018

FDC et ADP attendus en 2018

Ouverts en LFI pour 2017

 

Demandés pour 2018

FDC et ADP attendus en 2018

149. Compétitivité et durabilité de l’agriculture, de l’agroalimentaire, de la forêt,de la pêche et de l’aquaculture

2 266 596 101

2 117 142 865

-

2 232 723 858

2 225 442 865

-

21. Adaptation des filières à l’évolution des marchés

204 384 785

219 250 000

-

205 143 544

219 650 000

-

22. Gestion des crises et des aléas de la production

3 814 777

5 484 000

-

5 487 672

5 584 000

-

23. Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles

154 772 184

138 071 192

-

119 836 206

140 443 738

-

24. Gestion équilibrée et durable des territoires

389 848 837

394 936 853

-

380 566 130

471 951 620

-

25. Protection sociale

915 852 757

480 382 865

-

915 852 375

480 392 865

-

26. Gestion équilibrée et durable de la forêt et de la filière bois

268 519 497

242 891 303

-

276 434 667

271 403 990

-

27. Moyens de mise en œuvre des politiques publiques et gestion des interventions

284 560 664

590 816 652

-

284 560 664

590 816 652

-

28. Pêche et aquaculture

44 842 600

45 300 000

-

44 842 600

45 300 000

-

Source : projet annuel de performance

La dotation pour 2018 du programme 149 représente ainsi 2,117 milliards d’euros en autorisations d’engagement (soit – 6,6 % par rapport à 2017) et 2,225 milliards d’euros en crédits de paiement (soit – 0,3 % par rapport à 2017).

Les dépenses « agricoles » du programme 149 (hors pêche et exonérations sociales pour emplois saisonniers) s’élèvent à 1,59 milliard d’euros en AE et à 1,7 milliard d’euros en CP (soit respectivement une hausse de 26,2 % et 38,5 % par rapport à 2017).

Cette hausse s’explique, pour l’essentiel, par la création d’une provision de 300 millions d’euros, pour le financement des refus d’apurement et l’octroi d’aides de crises, qui témoigne d’un effort de sincérité budgétaire de la part du Gouvernement. Les crédits de paiement alloués aux mesures agroenvironnementales et au soutien à l’agriculture biologique sont revalorisés, ainsi que plusieurs petits dispositifs sensibles (aide au foncier, soutien aux agriculteurs en difficulté, lutte contre la prédation du loup). Une enveloppe supplémentaire à la filière canne à sucre est également allouée dans les départements d’outre-mer.

À l’inverse, le montant de 438 millions d’euros correspondant à la compensation par le budget de l’État de la réduction de 7 points des cotisations d’assurance maladie des exploitants qui figurait dans le budget pour 2017 et qui était liée au plan de soutien aux agriculteurs en difficulté n’est pas reconduit en 2018, en raison de l’achèvement du plan correspondant.

1.   Le soutien aux exploitations agricoles

Les crédits de l’action 23 Appui au renouvellement et à la modernisation des exploitations agricoles, qui représentent 6,5 % des moyens du programme 149 s’élèvent à 138,07 millions d’euros en autorisations d’engagement (au lieu de 160,5 millions d’euros en 2017, soit – 10,8 %) et à 140,44 millions d’euros en crédits de paiement (au lieu de 125,29 millions d’euros en crédits de paiement en 2017, soit + 17,2 %)

a.   Les aides à l’installation

L’appui au renouvellement des exploitations agricoles prend logiquement la forme d’une aide à l’installation des jeunes agriculteurs. Pour 2018, les moyens de la dotation aux jeunes agriculteurs (DJA) se montent à 38,37 millions d’euros en AE (au lieu de 40 millions d’euros en 2017) et à 35,02 millions d’euros en CP (au lieu de 22,4 millions d’euros en 2017).

Instituée en 1973, la DJA est destinée à faciliter la première installation de porteurs de projets qui satisfont à des conditions d’âge (de 18 à 40 ans) et de capacité professionnelle et qui ont élaboré un plan de développement de leur exploitation sur quatre ans. La DJA constitue une aide qui doit permettre aux bénéficiaires de couvrir les premières dépenses liées à leur installation. La subvention est allouée en contrepartie d’engagements pris par l’agriculteur qui s’installe, notamment la mise aux normes et le maintien de l’activité pendant cinq ans. Depuis 1973, près de 300 000 exploitants ont bénéficié des aides publiques à l’installation.

L’installation est une priorité essentielle de la politique nationale. Un objectif de 6 000 installations aidées a été prévu dans le cadre de la programmation 2014-2020.

Le dispositif de la DJA bénéficie depuis 2014 d’un cofinancement par le FEADER à hauteur de 80 %. Son montant varie de 8 000 à 36 000 euros, suivant la zone d’installation (de plaine, défavorisée ou de montagne) et les caractéristiques du projet. La moyenne nationale des montants de DJA attribuées, toutes zones confondues, s’est établie à 20 000 euros en 2016.

En 2017, le dispositif a été renforcé de 14 millions d’euros, s’élevant à 40 millions d’euros, en autorisations d’engagement (+ 50 % par rapport à 2016) et de 3,4 millions d’euros en crédits de paiement (22,4 millions d’euros, au lieu de 19 millions d’euros). Cette revalorisation de la DJA allait de pair avec la suppression en 2017 d’un autre dispositif, celui des prêts bonifiés à l’installation devenus peu attractifs dans un contexte de taux de marché particulièrement bas.

Les crédits consacrés à la dotation aux jeunes agriculteurs sont maintenus en autorisations d’engagement en 2018, ce qui témoigne de l’effort accompli par le Gouvernement en faveur de la relève agricole. La hausse de 13,7 millions d’euros observée pour les crédits de paiement nécessaire au versement de la DJA revalorisée en 2017 permettra de financer en outre les « restes à payer » sur les prêts bonifiés.

Il faut mentionner également les stages à l’installation (2 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement), qui financent le plan de professionnalisation personnalisé (PPP), ensemble de préconisations devant permettre à tout candidat éligible aux aides à l’installation en agriculture de se préparer au métier de responsable d’exploitation agricole.

Ces crédits qui sont reconduits à leur niveau de 2017 financent les indemnités versées aux maîtres exploitants qui accueillent des stagiaires entrant dans un parcours de professionnalisation, les bourses de stage de ces derniers ainsi que les structures et les centres qui organisent ces stages.

Les rapporteurs spéciaux prennent acte de cette évolution des dispositifs d’aide à l’installation (DJA, stages), tout en observant que l’existence de ces mécanismes n’est pas le principal paramètre pris en compte par les jeunes qui s’installent, ceux-ci étant attentifs avant tout aux débouchés de marchés et au dynamisme des différents secteurs de production agricoles.

b.   Les aides à la cessation d’activité

Parallèlement à ces aides à l’installation, le projet de budget pour 2018 prévoit des aides à la cessation d’activité, pour 1,5 million d’euros en AE comme en CP, niveau qui était déjà celui de 2016 et de 2017. Elles prennent principalement la forme d’une aide à la réinsertion professionnelle (ARP) des agriculteurs contraints de cesser leur activité pour des motifs économiques.

Les exploitants agricoles ne cotisant pas à un régime d’assurance chômage ne peuvent bénéficier, en effet, d’un revenu de remplacement, en cas de cessation d’activité. La mesure comporte une prime de départ forfaitaire de 3 100 euros, augmentée de 50 %, soit 1 550 euros, en cas de déménagement, lorsque l’exploitant est obligé de quitter son lieu d’habitation. Cette prime est attribuée à l’exploitant, à son conjoint ou éventuellement à l’aidant familial qui travaille sur l’exploitation, dans la limite de deux primes par exploitation cessant son activité. Une aide à la formation plafonnée à 2 500 euros peut être éventuellement prévue, en plus de la prime de départ.

En 2016, ont été accordées 258 aides au départ et au déménagement, ainsi que 5 prises en charge des frais de formation.

Les rapporteurs spéciaux considèrent que le niveau de cette aide à la reconversion professionnelle reste insuffisant au regard des aides prévues dans le cadre des plans sociaux dans le secteur privé.

c.   Les aides à la modernisation des exploitations

Le renouvellement des exploitations passe aussi par un soutien à leur modernisation.

Des crédits sont prévus à hauteur de 1,6 million d’euros en AE et en CP, pour financer les charges de bonification des prêts à moyen terme spéciaux aux coopératives pour l’utilisation de matériels agricoles (CUMA) ainsi que des aides aux investissements immatériels (conseil stratégique) et matériels (ateliers) de ces organismes.

En 2015, a été mis en place, par ailleurs, un nouveau dispositif important, le plan de compétitivité et d’adaptation des exploitations agricoles (PCAE), pièce maîtresse de la politique en faveur de l’agro-écologie.

Le PCAE poursuit plusieurs objectifs :

– la modernisation des élevages ;

– la réduction et la maîtrise de l’emploi des intrants pour les productions végétales ;

– l’amélioration de la performance énergétique des exploitations par la réalisation d’économies d’énergie et l’utilisation d’énergies renouvelables ;

– l’encouragement à l’agro-écologie et aux performances économiques, environnementales et sociales ;

– l’amélioration des conditions de travail et de sécurité des travailleurs.

Ce dispositif est cofinancé par le FEADER à hauteur de 63 % dans les régions en transition et de 53 % dans les autres régions.

Selon les indications fournies par le projet annuel de performances, le PCAE doit bénéficier de financements renforcés de l’État, mais également de financements communautaires, de contributions des collectivités territoriales, des agences de l’eau et de l’ADEME.

 

Il constitue un outil majeur pour la mise en œuvre par l’agriculture de la nouvelle démarche agro-écologique. Il a permis, en 2017, d’accompagner la filière élevage dans un contexte de crise.

Le plan bénéficiera en 2018 de 71 millions d’euros en autorisations d’engagement (84,5 millions d’euros en 2017) et de 76,7 millions d’euros en crédits de paiement (66,3 millions d’euros en 2017).

À partir de 2018, le budget du PCAE intègre de nouveaux éléments : un complément de 5 millions d’euros permettant de financer les investissements de biosécurité dans la filière des palmipèdes et un complément de 10 millions d’euros pour les investissements en faveur de la qualité de l’air dans les bâtiments d’élevages porcin et avicole.

Une augmentation de 15 % du nombre des dossiers déposés est attendue en 2018 par rapport à 2017, année pendant laquelle une augmentation de 20 % par rapport à 2016 avait déjà été constatée. En 2017, le nombre des bénéficiaires du PCAE dans l’ensemble des demandeurs d’aides PAC était de 3 % ; l’objectif retenu pour 2020 est de 4 %.

Le PCAE apparaît comme un outil essentiel dans la marche vers des systèmes de production tenant compte des nouvelles exigences environnementales. Il devra s’articuler avec le volet agricole du Grand plan d’investissement.

2.   Les autres actions du programme

 Les crédits de l’action 21 (10,4 % des moyens du programme 149) Adaptation des filières à l’évolution des marchés s’élèvent en 2018 à 219,25 millions d’euros en autorisations d’engagement (au lieu de 204,35 millions d’euros en 2017, soit +7,4 %) et à 219,65 millions d’euros en crédits de paiement (au lieu de 205,15 millions d’euros en 2017, soit + 7,2 %).

Les moyens affectés à l’action 21 visent à agir sur l’offre de produits agricoles et agroalimentaires, en favorisant son adéquation avec la demande du marché. Sont ainsi recherchés la valorisation des produits et la politique de qualité, l’organisation et la modernisation des filières, l’aide aux entreprises de transformation et de commercialisation de produits agricoles, le soutien des entreprises à l’international, le soutien aussi des filières en crise.

● Les aides versées dans le cadre de l’intervention en faveur des filières agroalimentaires (organisation des producteurs, valorisation des produits sur les marchés français et étrangers, études, panels, le cas échéant, mesures de crise) qui sont gérées principalement par FranceAgriMer et par l’ODEADOM s’élèvent à 76 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement (au lieu de 71 millions d’euros en 2017).

En 2018, FranceAgriMer doit mettre en œuvre des crédits en provenance du compte d’affectation spéciale Développement agricole et rural, pour financer des actions de recherche, d’expérimentation, de génétique animale et d’appui technique.

Les crédits ainsi alloués à FranceAgriMer s’élèvent à 23,5 millions d’euros, diminuant d’1,2 million d’euros par rapport à 2017. Les crédits relatifs à l’organisation des filières dans les départements d’outre-mer initiés dans le cadre du Conseil interministériel de l’Outremer (dites « Mesures Ciom ») s’élèvent, quant à eux, à 40 millions d’euros, comme en 2017.

 La promotion collective des produits sur les marchés extérieurs bénéficie pour 2018 de 8,3 millions d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement, niveau qui était déjà celui de 2017, où ces crédits avaient connu une hausse de 21 %.

Ces crédits financent des conventions annuelles passées avec plusieurs organismes en charge de la promotion à l’étranger des technologies et des produits français : la SOPEXA, qui bénéficie d’une délégation de service public (DSP) pour la promotion et la défense de la culture alimentaire française et l’accompagnement des entreprises sur les marchés internationaux ; l’ADEPTA, (association de développement des échanges internationaux de produits et techniques agricoles) ; le Centre national des expositions et concours agricoles (CENECA) pour le financement du Salon international de l’agriculture et, plus particulièrement, du Concours général agricole (CGA) et enfin Business France pour les statistiques du commerce extérieur et le financement d’études sur les marchés à l’exportation.

Les rapporteurs spéciaux prennent acte du maintien en 2018 des crédits de promotion sur les marchés internationaux, rappelant que la France doit demeurer un acteur majeur sur les marchés agricoles mondiaux

Un développement mettant l’accent sur l’érosion de nos parts de marché à l’extérieur depuis plusieurs années sera consacré à ce thème important dans la deuxième partie du rapport.

 L’emploi et l’innovation dans les entreprises agroalimentaires sont dotés de 3,9 millions d’euros en autorisations d’engagement (3,86 millions d’euros en 2017 et de 4,3 millions d’euros en crédits de paiement (4,26 millions d’euros en 2017).

Les crédits de paiement financent des opérations en faveur des industries agroalimentaires et l’animation des pôles de compétitivité. Ils financent également les restes à payer du Fonds d’intervention stratégique des industries agroalimentaires (FISIAA) qui a permis de soutenir 64 dossiers d’investissements d’entreprises entre 2007 et 2011.

Cette sous-action finance également la poursuite du partenariat entre Bpi France et le ministère de l’agriculture en faveur de l’innovation dans les industries agroalimentaires. Depuis 2007, cette collaboration a permis de soutenir 184 projets innovants de faisabilité, de recrutement de personnels de recherche-développement et de partenariat technologique dans les PME agroalimentaires pour un montant de plus de 6 millions d’euros.

 Les aides à la filière canne à sucre dans les départements d’outre-mer, autorisées par l’organisation commune du marché du sucre, pour compenser les baisses de prix, atteignent, pour 2017, 124,4 millions d’euros (114 millions d’euros en 2017). Ce soutien financier est essentiel au maintien de la filière canne à sucre dans les départements d’outre-mer ([1]) , dans un contexte d’ouverture du marché du sucre à la concurrence internationale, à la suite la suppression des quotas sucriers en Europe actée au 1er octobre 2017, dans le cadre de la réforme de la PAC.

Les crédits supplémentaires votés en 2017 (+ 10 millions d’euros) s’expliquent par l’existence, à compter du 1er octobre 2017, d’un nouveau dispositif visant à faciliter l’adaptation des sucreries ultramarines à la fin des quotas. Il vise à compenser les écarts de coûts de production entre les sucres de métropole et ceux des DOM qui sont vendus sur les mêmes marchés de consommation. Ce dispositif prend la forme d’une aide (à hauteur de 38 millions d’euros pour 2018) aux sucres de canne raffinés en concurrence directe avec les sucres issus de la production de betteraves beaucoup plus compétitifs.

Cette aide s’ajoute à l’aide accordée aux planteurs de canne à sucre (56 millions d’euros), à l’aide au soutien logistique (10 millions d’euros) et au complément à l’aide forfaitaire (20,4 millions d’euros) du Programme d’options spécifiques à l’éloignement et à l’insularité (POSEI).

● Au titre de l’action 21, il faut citer également les mesures qui visent le fonds Avenir bio à hauteur de 4 millions d’euros, comme en 2015, 2016 et 2017.

Ce fonds créé en 2008 a pour objectif de renforcer les filières existantes en agriculture biologique et de faire émerger celles de taille plus modeste, mais qui répondent à de fortes attentes (pour les grandes cultures notamment). Sa gestion a été confiée à l’Agence Bio.

L’agriculture biologique connaît un succès croissant auprès des consommateurs et des exploitants. Les demandes de financement à travers le fonds avenir bio ont été particulièrement importantes en 2017, ce qui traduit la vitalité profonde de ce secteur, qui connaît depuis plusieurs années une croissance « à deux chiffres ».

Un développement sera consacré à cette thématique de l’agriculture biologique dans la deuxième partie de ce rapport.

● Les crédits de l’action 22 Gestion des crises et des aléas de la production agricole ne comptent que pour une très faible partie (0,3 %) des moyens du programme 149. Ils atteignent, pour 2018, 5,48 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement (au lieu de respectivement 3,85 millions d’euros et 5,44 millions d’euros en 2017).

Ces crédits permettent de fournir un appui financier aux exploitations touchées par des crises ou des calamités agricoles et à aider au redressement des agriculteurs en difficulté. Lors de la crise de l’élevage survenue en 2015 et 2016, cette action a fait l’objet d’importants abondements complémentaires.

Le dispositif traditionnel « agriculteurs en difficulté » Agridiff est destiné aux exploitations endettées, qui peuvent bénéficier d’un plan de redressement sur 3 à 5 ans (agréé par le préfet, après avis de la commission départementale de l’orientation agricole). La mise en œuvre du dispositif Agridiff est conditionnée à un engagement financier de l’exploitant, dont la contribution au plan doit représenter au moins 25 % des coûts de restructuration. 500 exploitations en moyenne bénéficient de ce dispositif chaque année, particulièrement utile au monde agricole.

La dotation d’Agridiff qui atteignait 4 millions d’euros en 2012 ne s’élevait plus qu’à 1,85 million d’euros de 2015 à 2017 en AE et en CP.

Portée pour 2018 à 3,58 millions d’euros pour les autorisations d’engagement comme pour les crédits de paiement, cette dotation qui est payée par l’Agence de services et de paiement (ASP) et, pour la Corse, par l’Office de développement agricole et rural de la Corse (ODARC) est ainsi réévaluée de 1,7 million d’euros pour les AE, ce qui explique la hausse du même niveau observée pour les moyens de l’ensemble de l’action 25.

Cette évolution témoigne de la volonté du Gouvernement qui a prévu, par ailleurs, la mise en place d’une provision pour la gestion des crises, (action 27 du programme 149), de tenir particulièrement compte des problèmes de l’agriculture en difficulté.

Il faut noter, sur ce point, que le ministère de l’agriculture a récemment conclu à la nécessité, s’agissant de l’outil Agridiff, d’améliorer les modalités de l’audit des exploitations ; le dispositif est en cours de modification, afin de devenir plus attractif et plus efficace, de tenir compte du nombre croissant de dossiers déposés suite aux différentes crises, de permettre enfin une identification au plus tôt des agriculteurs en difficulté.

Une évolution de crédits similaire à celle du dispositif Agridiff est observée pour les moyens du fonds d’allégement des charges (FAC), qui prend en charge une partie des intérêts bancaires supportés par des exploitants en difficulté, du fait d’aléas exceptionnels d’origine sanitaire (encéphalopathie spongiforme bovine, fièvre catarrhale ovine, influenza aviaire, par exemple), mais aussi de crises conjoncturelles de marché (le plan de soutien à l’élevage initié en 2015) ou d’aléas climatiques exceptionnels.

Les crédits du fonds qui étaient de 8 millions d’euros en 2012 ont été simplement maintenus de 2015 à 2017 à 1,56 million d’euros en AE et en CP.

Les moyens du FAC sont portés pour 2018 à 1,9 million d’euros. Ce dispositif est payé par FranceAgriMer.

Rappelons aussi que l’État appuie traditionnellement le développement des couvertures privées contre les risques climatiques dans le cadre du dispositif d’assurance récolte. Ce soutien public à l’assurance récolte est, depuis la campagne 2015, financé en totalité sur crédits communautaires, dans le cadre du second pilier de la PAC. Il n’existe donc plus de crédits nationaux dédiés à ce dispositif depuis 2016.

La technique de l’assurance récolte dont le contenu a pourtant été récemment rénové est inégalement représentée dans les différents secteurs agricoles : pour 2016, 26,3 % dans les grandes cultures, 25 % en viticulture, 14,8 % en maraîchage et seulement 2,7 % en arboriculture.

● Les crédits de l’action 24 Gestion équilibrée et durable des territoires (18,7 % des crédits du programme 149) regroupent 394,93 millions d’euros en autorisations d’engagement (389,79 millions d’euros en 2017, soit + 1,3 %) et 471,95 millions d’euros en crédits de paiement (380,52 millions d’euros en 2017, soit + 24 %)

Complétant les crédits de l’action 21 qui visent à favoriser une agriculture compétitive et de qualité, cette action a pour but de favoriser l’attractivité des territoires ruraux, le maintien de la population, notamment agricole, sur ces territoires, le développement de l’emploi, la diversification des activités et l’amélioration des pratiques agricoles respectueuses de l’environnement.

Il s’agit principalement des indemnités compensatoires de handicaps naturels (ICHN) qui visent au maintien d’exploitations agricoles durables dans les zones défavorisées dites « simples » ou « de montagne ». Ces indemnités sont attribuées aux hectares de superficies fourragères et à certaines cultures de montagne sèche exploitées par des agriculteurs des zones défavorisées. Elles permettent d’indemniser les agriculteurs pour tout ou partie des coûts supplémentaires et pour les pertes de revenus marquées résultant des contraintes de ces zones pour la production et le revenu agricoles (– 30 à 40 % en moyenne par rapport aux agriculteurs des zones de plaine).

Le dispositif concerne 75 départements et près de 99 000 exploitations représentant 4,3 millions d’hectares.

Il a fait l’objet de deux importantes évolutions depuis 2015, avec la revalorisation de son montant et son attribution à de nouvelles catégories de bénéficiaires.

Afin de traduire l’engagement du Président de la République, lors du Sommet de l’élevage à Cournon en 2013, l’ICHN a ainsi été revalorisée de + 15 % en 2015, cet effort ayant été poursuivi en 2016, année pendant laquelle l’enveloppe en AE comme en CP a atteint 256 millions d’euros, au lieu de 232 millions d’euros en 2015.

La dernière étape de la revalorisation progressive de l’ICHN est intervenue en 2017, ce qui a permis d’atteindre un niveau de 264 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, soit + 8 %. C’est ce même montant de 264 millions d’euros qui est prévu en 2018.

Le mécanisme de l’ICHN fait l’objet d’un cofinancement communautaire à hauteur de 75 %. L’enveloppe totale prévue en 2017 (État + Union européenne) s’élève ainsi à 1,056 milliard d’euros.

Parallèlement, l’ICHN a été ouverte, en 2016, à de nouvelles catégories de bénéficiaires, – les éleveurs laitiers de piémont et des zones défavorisées simples – ce qui a porté le nombre de bénéficiaires de 90 000 à près de 99 000.

Le dispositif ICHN est payé par l’Agence de services et de paiement (ASP) et, pour la Corse, par l’Office de développement agricole et rural de la Corse (ODARC).

 Les mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC) et les aides à l’agriculture biologique bénéficient de 81,4 millions d’euros en AE (85 millions d’euros en 2017) et de 157,91 millions d’euros en CP (75,8 millions d’euros en 2017).

Ces mesures sont destinées à accompagner les exploitations agricoles qui adoptent des pratiques particulièrement respectueuses de l’environnement. Elles sont souscrites volontairement par les agriculteurs pour une durée de cinq ans. En contrepartie du respect d’un cahier des charges, le bénéficiaire perçoit une aide annuelle pendant la durée de son engagement. Les MAEC répondent ainsi aux enjeux environnementaux des territoires, tels que la préservation de la qualité de l’eau, des sols ou de la biodiversité.

Les financements de l’État sont complétés par les collectivités territoriales et les agences de l’eau, dont l’action porte sur la reconquête de la qualité des eaux. Les MAEC bénéficient aussi d’un cofinancement du FEADER à 75 %. Elles sont mises en œuvre dans le cadre du second pilier de la PAC. L’année 2018 sera la quatrième année d’application de la programmation 2015-2020, pour laquelle les régions sont autorité de gestion.

La hausse très importante de 82,1 millions d’euros alloués aux MAEC en crédits de paiement s’explique par la forte dynamique de contractualisation au titre des campagnes 2015 et 2016, ainsi que par rattrapage des paiements d’aides non intervenus au titre de ces campagnes.

 Les aides à l’agriculture biologique sont elles aussi mises en œuvre depuis 2015, dans le cadre du deuxième pilier de la PAC.

Elles recouvrent des aides à la conversion destinées aux agriculteurs qui s’engagent pour 5 ans à convertir leur exploitation en totalité ou en partie à l’agriculture biologique et des aides au maintien de ce type d’agriculture pour les producteurs déjà concernés.

Rappelons que l’agriculture biologique a connu un développement significatif au cours des dernières années : en 2015, le nombre des producteurs s’est accru de 9 % par rapport à 2014, celui des surfaces exploitées suivant ce mode de production, de 23 %. L’agriculture biologique rassemble désormais 6,5 % des exploitations françaises et valorise 5,8 % de notre surface agricole utile (SAU). À la fin de 2016, les exploitations biologiques représentaient 7,3 % des exploitations françaises et plus de 10,8 % de l’emploi agricole.

Il faut mentionner aussi, s’agissant de l’action 24, les crédits de formation et d’information des syndicats agricoles (5,9 millions d’euros en 2018, au lieu de 5,7 millions d’euros en 2017) et l’appui aux SAFER (3,75 millions d’euros en AE et en CP). Il vise à prendre en compte les difficultés financières rencontrées par les SAFER de Corse et des départements d’outre-mer (500 000 euros comme en 2017, où ce montant était celui de l’ensemble de la dotation) ainsi que le volet foncier du protocole d’accord Guyane signé au printemps 2017.

Enfin, des crédits cofinancés par le FEADER à 50 % sont dédiés à diverses actions environnementales, en particulier, la lutte contre la prédation du loup dont la présence, initialement limitée à la zone alpine s’étend constamment (16 millions d’euros, en hausse de 5 millions d’euros, le montant moyen versé aux éleveurs étant de 7 000 euros par an).

 Les crédits de l’action 25 Protection sociale rassemblent 22,7 % des moyens du programme 149. Ils s’élèvent à 480,39 millions d’euros en AE comme en CP.

Ils financent des mesures de compensation par l’État d’exonérations de charges sociales et de réglementation et de sécurité au travail.

La très importante réduction des crédits observée sur l’action 25 (ces crédits atteignaient 918,35 millions d’euros en 2017) s’explique par la nonreconduction en 2018 de la compensation par l’État de la mesure de réduction de 7 points de la cotisation d’assurance maladie, qui avait été retenue pour tous les chefs d’exploitation exerçant leur activité à titre exclusif ou principal, dans le cadre du plan de soutien aux agriculteurs en difficulté et qui n’est plus en application à compter du 31 décembre 2017. Avec la fusion intervenue en septembre 2017 de leur régime avec celui des travailleurs indépendants, les cotisations maladie des agriculteurs sont désormais alignées en termes de barèmes sur celles des indépendants.

Pour 2018, les exonérations de charges sociales sont estimées à 480 millions d’euros (438 millions d’euros en 2017). Ces crédits correspondent à la compensation par l’État des moindres recettes perçues par les organismes de sécurité sociale, principalement la Caisse centrale de mutualité sociale agricole (CCMSA), du fait de la mise en œuvre d’une mesure d’exonération dégressive de charges patronales pour l’embauche de travailleurs agricoles occasionnels et de demandeurs d’emploi (TO-DE).

Cette mesure traditionnelle a bénéficié en 2016 à 71 335 entreprises et à 904 228 contrats. Le dispositif concerne toutes les activités saisonnières liées au cycle de la production végétale et animale, mais aussi aux travaux forestiers et aux activités de transformation, de conditionnement et de commercialisation de produits agricoles, lorsqu’elles sont accomplies sous l’autorité d’un exploitant agricole et qu’elles constituent le prolongement direct de l’acte de production.

Le dispositif TO-DE

L’exonération pour les employeurs est totale pour les rémunérations égales ou inférieures à 1,25 fois le montant mensuel du salaire interprofessionnel de croissance (SMIC), puis devient dégressive et s’annule pour les rémunérations égales ou supérieures à 1,5 SMIC. Elle concerne les cotisations patronales de sécurité sociale (maladie, vieillesse) et certaines cotisations patronales conventionnelles obligatoires (retraite complémentaire, formation) et s’applique pour une durée maximale de 119 jours ouvrés consécutifs ou non par année civile pour un même salarié.

Le dispositif a été modifié en 2013, afin de centrer ses effets sur les bas salaires et de supprimer l’exonération de cotisations d’accident du travail, dans un souci de responsabilisation des employeurs, puis en 2015, en excluant les entreprises de travaux agricoles, ruraux et forestiers (ETARF) éligibles au CICE et aux allégements de prélèvements obligatoires prévus dans le Pacte de responsabilité et de solidarité.

Principal utilisateur, avec la catégorie des cultures spécialisées, du dispositif TO-DE, (392 675 contrats pour la viticulture sur 904 228 en 2016), le secteur viticole rencontre aujourd’hui des difficultés à recruter des travailleurs pour les vendanges, du fait de la nature du travail, physique et à caractère saisonnier, mais aussi de possibilités d’hébergement souvent insuffisantes.

Les Rapporteurs spéciaux insistent sur le fait que l’allégement de cotisations sociales TO-DE, qui est apprécié par le monde agricole, auquel il apporte un soutien important doit être maintenu et amélioré.

L’action 25 Protection sociale prévoit également des crédits finançant des dispositifs de prévention en matière de sécurité au travail. Ils s’inscrivent dans le plan « santé au travail » initié par le ministre chargé du travail pour la période 2016-2020 et auquel contribue le ministre de l’agriculture, en qualité de ministre du travail des professions agricoles.

Les moyens prévus à ce titre s’élèvent à 392 865 euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement pour 2018, au lieu de 354 327 euros en 2017.

3.   Les moyens des opérateurs

Les crédits de l’action 27 Moyens de mise en œuvre des politiques publiques et gestion des interventions (27,9 % des dotations du programme 149), qui retracent les subventions pour charges de service public des opérateurs sous tutelle sur le volet agriculture et agroalimentaire atteignent, pour 2018, 590,81 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, au lieu de 254,86 millions d’euros prévus en 2017.

Cette hausse inédite des crédits de l’action 27 s’explique, comme on le verra ci-après, par la mise en place d’une provision s’élevant à 300 millions d’euros, prévue notamment pour la gestion des situations de crise.

Il faut noter également, à l’action 27, l’octroi d’une dotation de 30,1 millions d’euros à l’Agence de services et de paiement (ASP), qui aidera à compenser les retards récemment observés pour le versement des aides de la politique agricole commune aux exploitants.

L’action 27 regroupe les moyens en personnels et de fonctionnement de :

– l’Établissement national des produits de l’agriculture et de la mer (FranceAgriMer), établissement public administratif placé sous la tutelle du ministre chargé de l’agriculture qui mobilise 84,82 millions d’euros en 2018 en autorisations d’engagement et en crédits de paiement (93,51 millions d’euros en 2017). Il met en œuvre l’ensemble des interventions économiques du ministère et de l’Union européenne en faveur des filières agricoles et peut être chargé de la mise en œuvre de mesures dans le cadre de la gestion de crises ;

– l’Agence de services et de paiement (ASP), établissement public administratif sous la tutelle des ministres chargés de l’agriculture et de l’emploi qui mobilise 96,7 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement (109,16 millions d’euros en 2017). Elle constitue l’organisme payeur de diverses aides nationales et de la plupart des aides communautaires de la PAC hors Corse. L’ASP a bénéficié, depuis 2015, d’une augmentation de ses moyens, lui permettant notamment de développer les outils informatiques de la politique agricole commune ; une dotation exceptionnelle pour investissements de 11,3 millions d’euros en AE et en CP a été prévue sur ce point en 2017, pour permettre une instruction plus rapide des dossiers PAC. Pour 2018, cette dotation connaît à nouveau une hausse importante, en étant portée à 30,1 millions d’euros ;

– l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO), établissement public administratif placé sous la tutelle du ministre chargé de l’agriculture qui a en charge la gestion de l’ensemble des signes officiels d’identification de la qualité et de l’origine (SIQO), appellation d’origine, indication géographique protégée (IGP), label rouge, spécialité traditionnelle garantie (STG) et agriculture biologique (17,12 millions d’euros, au lieu de 16,82 millions d’euros en 2017) ;

– l’Institut français du cheval et de l’équitation (IFCE), établissement public administratif placé sous la tutelle des ministres en charge de l’agriculture et des sports, qui est l’opérateur public accompagnant la professionnalisation de la filière équine ; il bénéficie pour 2018 de 38,57 millions d’euros en autorisations d’engagement comme en crédits de paiement (39,37 millions d’euros en 2017) ;

– l’Agence nationale pour le développement et la promotion de l’agriculture biologique, groupement d’intérêt public qui bénéficie de 1,42 million d’euros (1,44 million d’euros en 2017) ;

– l’Office de développement de l’économie agricole des départements d’outre-mer (ODEADOM), établissement public sous la tutelle des ministres en charge de l’agriculture et de l’outre-mer qui a pour mission l’adaptation des filières et des marchés ultramarins et bénéficie de 5 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement (4,56 millions d’euros en 2017) ;

– l’Office de développement agricole et rural de Corse (ODARC) qui bénéficie, quant à lui, de 295 480 euros en AE comme en CP, soit un niveau identique à ceux de 2014 à 2017 ; placé sous la tutelle de la collectivité territoriale de Corse, il est agréé pour la période 2014-2020 comme organisme payeur des fonds européens agricoles pour les mesures inscrites au Plan de développement territorial de la Corse.

Les contrats d’objectifs et de performance (COP) des différents opérateurs ont été renouvelés en 2015 ; ils ont couvert la période 2015-2017, intégrant ainsi les grandes orientations du triennal budgétaire. À l’exclusion de celui de l’ASP, le renouvellement des différents COP doit intervenir à la fin 2017, après une évaluation opérée par le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), pour une entrée en vigueur en 2018.

Deux innovations figurent dans cette action pour le budget 2018.

Il s’agit tout d’abord d’une dotation de 8,7 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement destinée à couvrir les investissements courants de FranceAgriMer.

Il s’agit surtout d’une nouvelle dotation de 300 millions d’euros (en AE et CP), qui vise à gérer les dépenses imprévisibles du programme 149, en particulier les refus d’apurement communautaire qui seront probablement notifiés par la Commission européenne en 2018 ([2]) ainsi que les aides de crises. Constatant la multiplication des crises agricoles depuis plusieurs années, le Gouvernement a opté pour une dotation importante, qui correspond à la moyenne annuelle sur les dix dernières années des sommes versées au titre des aléas. Ce choix témoigne, par ailleurs, d’un effort de sincérité budgétaire.

Les rapporteurs spéciaux observent, par ailleurs, avec intérêt l’augmentation des moyens accordés à l’Agence de services et de paiement (ASP) qui doit aider à l’instruction des dossiers d’aides de la PAC, au bénéfice de nos agriculteurs qui dénoncent souvent la complexité des mécanismes de la nouvelle politique agricole commune et la lenteur des paiements.

4.   La politique forestière

Les crédits de l’action 26 Gestion durable de la forêt et de la filière bois (inscrits jusqu’en 2016 dans un programme spécifique), s’élèvent en 2018, à 242,89 millions d’euros en autorisations d’engagement (273,43 millions d’euros en 2017, soit – 9,8 %) et à 271,4 millions d’euros en crédits de paiement (281,54 millions d’euros en 2017, soit - 1,8 %).

La politique forestière porte sur trois axes prioritaires : mobiliser plus et mieux valoriser les ressources en bois, en développant, en particulier, la commercialisation, (la récolte de bois ne portant aujourd’hui que sur moins de 60 % de la production biologique) ; gérer les forêts de manière durable et mieux préserver la biodiversité, en aménageant les forêts publiques et en développant les plans de gestion des forêts privées ; anticiper le phénomène du changement climatique. Le Gouvernement est soucieux aussi de développer les emplois induits, en renforçant la compétitivité de la filière bois et de faire participer les produits de la forêt au développement d’une économie plus sobre en carbone.

La politique forestière prend en compte également la gestion des risques : les crédits correspondants ont visé ainsi à la reconstitution des forêts après les tempêtes de 1999 et 2009 (respectivement 741 et 475 millions d’euros). Ils portent aussi de manière structurelle sur la restauration des terrains en montagne (RTM), pour prévenir les risques naturels et sur la défense des forêts contre les incendies (DFCI).

a.   La gestion des forêts publiques

Ces crédits concernent les forêts relevant d’un régime spécifique, le régime forestier qui s’applique aux forêts du domaine privé de l’État et à celles des collectivités ([3]) ; ils financent la gestion foncière de ces forêts, l’établissement de plans d’aménagement, la surveillance et la réalisation de programmes de travaux et de coupes. Ces diverses responsabilités sont mises en œuvre par l’Office national des forêts (ONF).

Ils financent aussi la restauration des terrains en montagne (RTM) par l’État sur les terrains domaniaux. 8,58 millions d’euros en autorisations d’engagement et 9,6 millions d’euros en crédits de paiement y sont consacrés en 2018, soit un niveau identique à ceux de 2016 et 2017. Il s’agit de travaux visant à assurer la sécurité des personnes et des biens face aux risques naturels en montagne (crues torrentielles, avalanches).

Ils financent surtout le versement compensateur de l’État à l’Office national des forêts (ONF) maintenu depuis plusieurs années à 140,4 millions d’euros. La subvention exceptionnelle d’équilibre à l’ONF qui avait été allouée en raison de la baisse des prix du bois s’établit à 12,5 millions d’euros étant maintenue à son niveau de 2017.

22,3 millions d’euros (soit un niveau identique à ceux de 2014 à 2017) sont en outre consacrés au financement de diverses missions d’intérêt général (MIG) confiées par voie de conventions spécifiques à l’ONF (défense contre les incendies en région méditerranéenne, appui aux directions départementales de l’agriculture, de l’alimentation et de la forêt des départements d’Outre-mer, pour la mise en œuvre de la politique forestière de l’État, travaux d’investissements nécessaires pour contenir le mouvement des dunes domaniales littorales sur la côte atlantique).

Il faut noter enfin que le nouveau contrat d’objectifs et de performance (COP) pour la période 2016-2020 a été adopté. Il poursuit plusieurs grands objectifs :

– accroître la mobilisation du bois au bénéfice de la filière et de l’emploi ;

– relever le défi du changement climatique et de préservation de la biodiversité ;

– mieux répondre aux attentes spécifiques de l’État et des citoyens ;

– adapter la gestion de l’ONF aux spécificités des DOM ;

– stabiliser les effectifs et accompagner les évolutions de l’établissement par une gestion dynamique des ressources humaines ;

– améliorer la durabilité du modèle ONF et consolider son équilibre financier.

L’équilibre financier de l’Office qui regroupe 9 113 salariés devra être assuré pendant la durée du nouveau contrat d’objectifs et de performances par un effort conjoint de l’État, des collectivités propriétaires de forêts (augmentation de la récolte de bois, regroupement et contractualisation des ventes de bois, calcul des frais de garderie) et de l’ONF (maîtrise des dépenses de fonctionnement et de la masse salariale, rénovation de la gestion des ressources humaines).

b.   Les moyens de la forêt privée

Trois grands objectifs sont poursuivis en matière de gestion des forêts privées :

– l’amélioration de la compétitivité de la filière bois, afin de valoriser au mieux la ressource disponible ;

– l’accroissement de la récolte de bois, afin d’utiliser le potentiel de production biologique des forêts françaises (près de 40 millions de m 3 d’accroissement annuel ne sont pas valorisés) ;

– l’amélioration de la gestion des forêts privées, qui représentent 75 % de la surface forestière et qui sont particulièrement morcelées, étant réparties entre 3,5 millions de propriétaires privés.

Depuis 2013, le budget a poursuivi l’objectif d’une reconstitution du potentiel de production des forêts sinistrées par la tempête Klaus survenue le 24 janvier 2009 dans les régions du Sud Ouest, qui a touché près de 700 000 hectares, représentant l’équivalent de plus de cinq années de récolte, soit un coût économique global évalué à 5 milliards d’euros. La majorité des crédits prévus était destinée à faciliter la reconstitution du potentiel de production par nettoyage des parcelles et plantation des forêts affectées par cette tempête.

Le coût total du plan a été de 490 millions d’euros (475 millions d’euros de crédits nationaux, 15 millions d’euros de crédits en provenance du FEADER).

Les crédits en question atteignent, pour 2018, 26,05 millions d’euros en crédits de paiement (35 millions d’euros en 2017) consacrés aux derniers paiements qui doivent s’étaler jusqu’en 2022. Il n’existe plus, en revanche, pour cette nouvelle année, de crédits prévus en autorisations d’engagement.

Ces crédits financent également une subvention pour charges de service public au bénéfice du Centre national de la propriété forestière (CNPF), qui s’élève à 14,97 millions d’euros en 2018.

Un nouveau COP pour la période 2017-2021 a été signé le 2 février 2017 qui intègre les orientations du programme national de la forêt et du bois (2016-2026).

Des subventions sont enfin allouées à l’Institut technologique Forêt, cellulose, bois-construction, ameublement, le FCBA (7,06 millions d’euros), qui mène des actions de recherche, d’assistance technique, de formation et de conseil dans le domaine du bois et de sa mise en valeur et permet la mise en œuvre de synergies entre les acteurs de la forêt, de l’industrie et des territoires. Les crédits sont maintenus au niveau de 2017.

c.   Les actions du Fonds stratégique de la forêt et du bois

En 2015 a été créé, en application de la loi pour l’avenir de l’agriculture, l’alimentation et le forêt de 2014, un Fonds stratégique de la forêt et du bois destiné à accompagner les investissements dans les filières d’amont et d’aval.

Ce fonds est financé par le transfert de la taxe additionnelle à la taxe sur le foncier non bâti perçue sur les surfaces forestières au profit du financement des chambres d’agriculture et par le produit de l’indemnité de défrichement.

Le fonds finance essentiellement des investissements forestiers et dans la filière bois, notamment la création de dessertes forestières, des aides aux scieries, des actions de préservation de la santé des forêts, de renouvellement des peuplements forestiers ou de mécanisation des exploitations. Il sera doté de 17,8 millions d’euros en AE et en CP en 2018 (25,4 millions d’euros en 2017).

5.   La pêche et l’aquaculture

Parmi ses innovations, le projet de loi de finances pour 2018 marque l’intégration dans le programme 149 de l’ancienne action 6 du programme 205 Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture, qui était dédiée à la gestion durable des pêches et de l’aquaculture, au sein de la mission Écologie, développement et mobilité durable. Cette action, qui correspond aux crédits gérés par la direction de la pêche maritime et de l’aquaculture (DPMA) représente désormais 2,1 % des crédits du programme 149.

Le rattachement à la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales était souhaité par les professionnels ; il s’appuie sur trois arguments : l’existence, pour la pêche comme pour l’agriculture, de politiques communautaires ; le fait que, dans de nombreux pays, ces deux secteurs relèvent d’un même responsable ministériel ; le fait aussi que les pêcheurs contribuent, comme les agriculteurs, à l’alimentation des Français.

Les dotations de la pêche et de l’aquaculture s’élèvent pour 2018 en autorisations d’engagement et en crédits de paiement à 45,3 millions d’euros (soit +1 % par rapport à 2017).

Ces crédits concernent en premier lieu l’élaboration et le contrôle du cadre réglementaire de la politique commune de la pêche (16,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement).

Ils financent :

 Le suivi scientifique des ressources halieutiques (6,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement) indispensable aux évaluations nécessaires à la conduite de la politique commune de la pêche et à la définition des positions de la France dans les négociations européennes et internationales.

– Le contrôle des pêches (5,96 millions d’euros en AE et en CP) essentiel à la mise en œuvre de la politique commune de la pêche.

Parmi les actions menées, figure la mise en place de la traçabilité qui permettra à terme au consommateur de disposer d’informations sur l’origine des produits, ainsi que le suivi de la nouvelle obligation de débarquement des captures jusque-là rejetées.

 Le financement du système de gestion et de contrôle du Fonds européen des affaires maritimes et de la pêche (FEAMP) pour la période 2014-2020 qui permet l’accompagnement de la mise en place du fonds par la DPMA, autorité de gestion. Ce sont des frais d’instruction, de contrôle et de paiement supportés majoritairement par l’Agence de services et de paiement (ASP), payeur unique du FEAMP. Ces frais sont estimés à 1,9 million d’euros en 2018.

Les crédits de l’action 28 portent également des actions d’amélioration de la performance des filières pêche et aquaculture (29,25 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement).

Ces moyens sont affectés principalement à des interventions socio-économiques (6,3 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement), en l’espèce, à la participation de l’État au financement des caisses chômage‑intempéries, qui sont des systèmes de garantie financière auxquels peuvent adhérer tous les marins actifs embarqués à bord d’un navire de pêche.

Ce mécanisme original permet de couvrir l’absence de revenu en cas d’intempéries et de diminuer les prises de risque par les marins, dont le métier est fortement accidentogène. Les professionnels du Comité national des pêches que les rapporteurs spéciaux ont rencontrés y restent très attachés et demandent en toute hypothèse le maintien des subventions de l’État.

Les professionnels de la pêche qui ont vu la flotte française divisée par deux avec la perte de 1 000 navires, au cours des dernières années, manifestent leur attachement à la politique commune des pêches réformée en 2012 et à l’association des pêcheurs et des scientifiques pour l’expertise de la ressource, qui a donné des résultats satisfaisants.

La question des répercussions du Brexit se pose évidemment avec une particulière acuité, étant donné l’importance traditionnelle des eaux britanniques pour la pêche française.

Les rapporteurs spéciaux demandent que les accords qui interviendront aient un caractère global et non sectoriel, pour que la pêche ne soit pas isolée et considérée comme une simple variable d’ajustement.

Un autre sujet de préoccupation réside dans l’absence de développement de l’activité aquacole liée à la difficulté de mettre au point des projets sur notre territoire. Il n’a pas été créé ainsi de ferme aquacole en France depuis 1996. La France dispose pourtant d’atouts, comme le montre la production d’alevins destinés essentiellement à l’exportation.

B.   lE PROGRAMME 215 CONDUITE ET PILOTAGE DES POLITIQUES DE L’AGRICulture

 

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Numéro et intitulé du programme et de l’action

Ouvertes en LFI pour 2017

Demandées pour 2018

FDC et ADP attendus en 2018

Ouverts en LFI pour 2017

Demandés pour 2018

FDC et ADP attendus en 2018

215. Conduite et pilotage des politiques de l’agriculture

653 652 938

650 198 270

5 174 000

652 686 553

656 243 819

5 174 000

1. Moyens de l’administration centrale

206 971 467

206 591 927

420 000

205 905 403

210 594 176

420 000

2. Évaluation de l’impact des politiques publiques et information économique

18 257 550

18 285 823

1 900 000

18 257 550

18 285 823

1 900 000

3. Moyens des directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt, des directions de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt et directions départementales des territoires (et de la mer)

360 644 627

355 757 495

200 000

360 644 627

355 757 495

2 000 000

4. Moyens communs

677 792 294

69 563 025

854 000

677 878 973

716 063 325

854 000

Le programme 215 porte les moyens en personnel et en fonctionnement de l’administration centrale et des services déconcentrés du ministère. Il finance également l’évaluation de l’impact des politiques publiques et l’information statistique ainsi que des actions faisant l’objet d’un pilotage national, au titre des grands projets informatiques ou immobiliers, de la formation continue, de l’action sanitaire et sociale et de l’information et de la communication institutionnelle du ministère.

Ces crédits passent, entre 2017 et 2018, de 653,65 à 650,19 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 652,68 à 656,24 millions d’euros en crédits de paiement.

Le ministère s’est engagé dans un effort transversal de modernisation de son action et de rationalisation de ses coûts de fonctionnement, qui lui permet de contribuer à l’indispensable redressement des comptes publics. Les diminutions enregistrées correspondent ainsi au cadrage fixé par le Gouvernement depuis 2012.

Les moyens en personnels passent à 569,39 millions d’euros pour 2018, au lieu de 572,12 millions d’euros en 2017.

Pour ce ministère, qui compte environ 45 000 agents, sont prévues 130 suppressions de postes dans les services centraux (qui emploient 6 500 agents). Il faut y ajouter 95 postes supprimés pour les opérateurs de l’État, soit un total de 225 postes. Les moyens en personnels de l’enseignement technique agricole (18 000 agents) et de la protection sanitaire (5 000 agents) sont en revanche maintenus.

300 postes de vacataires sont, par ailleurs prévus en 2018 dans les directions départementales de territoires (DDT), pour l’instruction des dossiers de demandes d’aides au titre de la PAC.

● Les crédits de l’action 1 Moyens de l’administration centrale (31,8 % de l’ensemble) s’élèvent à 206,59 millions d’euros en autorisations d’engagement (256,97 millions d’euros en 2017) et à 210,59 millions d’euros en crédits de paiement (205,9 millions d’euros en 2017).

Cette première action regroupe les fonctions de pilotage des politiques du ministère, soit principalement les moyens consacrés à la rémunération des personnels de l’administration centrale (171,72 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement), à la gestion immobilière de cette dernière, à l’action sanitaire et sociale (les crédits correspondants ont augmenté de 6,2 millions d’euros en 2017, afin de procéder à l’engagement sur sept ans du nouveau référencement des mutuelles et cet engagement n’est pas renouvelé en 2018), à la formation continue des agents du ministère, ainsi qu’à l’ensemble des dépenses de fonctionnement courant.

● Les crédits de l’action 2 Évaluation de l’impact des politiques publiques et information économique (2,8 % des moyens du programme 215) atteignent 18,28 millions d’euros en AE et CP (au lieu de 18,25 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement en 2017).

Cette action regroupe des moyens de collecte et d’étude. Il s’agit principalement des statistiques agricoles, en particulier du réseau d’information comptable agricole (RICA), qui constitue une source d’information essentielle à la connaissance des revenus agricoles et des exercices de prospective et d’analyse stratégique préparatoires aux négociations communautaires et internationales.

Un montant de 1,8 million d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement est prévu pour le lancement des opérations relatives au recensement général de l’agriculture qui se déroulera en 2020. Des développements informatiques seront initiés, à cet effet, dès 2018.

● Les crédits de l’action 3 Moyens des directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DRAAF), des directions de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (DDAF) et des directions départementales des territoires correspondent à 54,7 % des moyens du programme 215) s’élèvent pour 2018 à 355,75 millions d’euros en autorisations d’engagement, comme en crédits de paiement, au lieu de 360,79 millions d’euros en 2017.

Cette action regroupe certaines fonctions de pilotage et de soutien des DRAAF, qui interviennent sur l’ensemble des politiques conduites par le ministère et certaines actions ministérielles conduites par les directions départementales en métropole ou dans les régions ultramarines. L’action 3 regroupe ainsi l’ensemble des moyens de personnel, d’action sanitaire et sociale et de formation de ces services déconcentrés.

Il faut noter que, depuis le 1er janvier 2016, l’organisation des services du ministère en région a été mise en cohérence avec la nouvelle carte des régions, portant à treize le nombre des directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt en métropole.

● Les crédits de l’action 4 Moyens communs (10,7 % des moyens du programme) atteignent 69,56 millions d’euros en autorisations d’engagement, au lieu de 67,77 millions d’euros en 2017 et 71,6 millions d’euros en crédits de paiement, au lieu de 67,87 millions d’euros en 2017. Regroupant les moyens communs à l’ensemble des services du ministère, ils concernent essentiellement la formation et portent à hauteur de 38,79 millions d’euros sur les dépenses de personnels (charges de rémunération des élèves et stagiaires en formation, dépenses de personnels des agents mis à disposition).

Les augmentations constatées concernent pour près d’1 million d’euros la politique immobilière : relance des travaux entrepris sur les bâtiments des sites parisiens interrompus depuis 2016, du fait de contraintes budgétaires ; démarrage d’études relatives à la délocalisation des agents du ministère de l’agriculture et de l’alimentation à Mayotte.

Sont également concernés les moyens de fonctionnement de l’INFOMA, l’Institut national de formation des personnels du ministère de l’Agriculture, chargé de la formation initiale des fonctionnaires de ce ministère et d’une grande variété d’actions de formation continue à destination des agents, notamment dans les domaines de la PAC et du contrôle sanitaire.

Les crédits de l’action 4 regroupent aussi les moyens de la politique d’information et de communication interne et externe du ministère, de sa politique informatique (est prévue sur ce plan une augmentation de 0,8 % en autorisations d’engagement et en crédits de paiement pour 2018) ainsi que les moyens consacrés aux frais judiciaires et aux réparations civiles.

Les rapporteurs spéciaux soulignent enfin les progrès réalisés par le ministère de l’Agriculture en matière de déploiement de procédures dématérialisées : toutes les procédures Télépac sont ainsi dématérialisées en 2017, la télédéclaration des demandes d’aides PAC ayant été rendue obligatoire.

C.   Le compte d’affectation spÉciale dÉveloppement agricole et rural

Créé par l’article 52 de la loi du 30 décembre 2005 de finances pour 2006, ce compte (CasDAR) retrace :

– en recettes, une fraction égale à 100 % du produit de la taxe sur le chiffre d’affaires des exploitants agricoles prévue à l’article 302 bis MB du code général des impôts ;

– en dépenses, les opérations relatives au développement agricole et rural.

Deux programmes composent ce compte d’affectation spéciale : le programme 775 Développement et transfert en agriculture qui soutient les programmes pluriannuels de développement agricole et rural mis en œuvre par les Chambres d’agriculture, les coopératives agricoles, les organismes chargés de la sélection génétique des animaux d’élevage et huit organismes nationaux à vocation agricole et rurale (ONVAR) dans le cadre de contrats d’objectifs passés avec l’État et le programme 776 Recherche appliquée et innovation en agriculture qui permet de soutenir les programmes pluriannuels des instituts et centres techniques agricoles ainsi que des appels à projets.

L’affectation de la totalité de la recette de la taxe sur le chiffre d’affaires n‑1 des exploitants agricoles à compter de 2015 a conduit à réévaluer le plafond de dépense à 147,5 millions d’euros en 2016. Ce montant supérieur aux prévisions de collecte a été reconduit en 2017. Pour 2018, il est proposé d’établir le montant plafond à 136 millions d’euros.

Les dépenses qui avaient été transférées les exercices précédents de l’ex programme 154 sont conservées dans le CasDAR, en particulier les programmes d’appui technique et d’expérimentation mis en œuvre par FranceAgriMer.

Le projet de loi de finances pour 2018 prévoit un montant de 65 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement pour le Programme 775 (au lieu de 70,5 millions d’euros en 2017) et de 71 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement pour le Programme 777 (au lieu de 76,5 millions d’euros en 2017).

L’accent est particulièrement mis sur la transition écologique de l’agriculture et sur la promotion de la diversité des modèles agricoles et des systèmes de production, dans la ligne des priorités retenues par le Programme national de développement agricole et rural (PNDAR).

II.   LES ATOUTS ET LES DÉFIS DE L’AGRICULTURE FRANÇAISE

L’analyse stricte de l’évolution des crédits de la mission agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales pour 2018 constitue un exercice indispensable, riche d’enseignements, mais qui ne permet pas, par lui-même, d’appréhender l’ensemble des problèmes posés à notre agriculture et à ceux qui en vivent.

Dans cette seconde partie, les rapporteurs spéciaux proposent de développer trois sujets en lien avec l’actualité la plus récente : l’organisation des États généraux de l’alimentation, temps original de réflexion partagée entre les différents acteurs sur les problèmes de la filière agricole et de la consommation alimentaire, le retard, depuis 2015, du versement des aides de la politique agricole commune, qui a pesé parfois lourdement sur la trésorerie des exploitants agricoles et enfin le développement de plus en plus marqué et prometteur de l’agriculture biologique dans notre pays.

Trois autres thèmes plus traditionnels seront ensuite abordés : la situation des industries agroalimentaires, qui demeurent un des « fers de lance » de notre économie, la question de l’indispensable renouvellement des générations en agriculture et celle des difficultés permanentes de la forêt française.

A.   L’ORGANISATION DES ÉTATS GÉNÉRAUX DE L’ALIMENTATION

Annoncés par le Président de la République au mois de juin, les États généraux de l’alimentation (EGA) ont été ouverts le 20 juillet par le Premier ministre. Ils ne doivent pas être un nouvel état des lieux de l’agriculture française, mais un temps de réflexion et de construction collectives menées par l’ensemble des acteurs sur les grandes questions qui se posent à l’agriculture et pour l’alimentation des Français. Deux chantiers ont été retenus : la création et la répartition de la valeur dans la filière alimentaire ; l’accès des consommateurs à une alimentation saine, durable et accessible à tous.

Le débat initié par les États généraux de l’alimentation associe - c’est là un élément de son originalité – l’ensemble des parties prenantes réunies dans 14 ateliers thématiques : les élus, le monde agricole et de la pêche, les industries agroalimentaires, la distribution, les consommateurs, la restauration collective, les partenaires sociaux, les acteurs de l’économie sociale et solidaire et de la santé, les ONG, les associations caritatives et d’aide alimentaire, les banques et les assurances.

Le premier thème retenu, la création et la répartition de la valeur concerne un sujet souvent analysé, en particulier dans les rapports des la commissions des Finances et de l’Economie, celui de la place dans la chaîne alimentaire, du producteur, dominé par les secteurs d’aval, la transformation et la distribution. Rappelons que, sur 1 euro payé en production alimentaire, 6 centimes seulement bénéficient au producteur. Les travaux de ce premier chantier se sont achevés en septembre. L’objectif de la réflexion menée est bien de permettre aux agriculteurs, quel que soit leur modèle de production, de vivre dignement de leur travail par le paiement de prix justes.

Les travaux du second chantier, celui de la promotion de choix de consommation privilégiant une alimentation sûre, saine et durable doivent s’achever, quant à eux, en novembre.

Le 11 octobre, à l’issue de la première phase des États généraux de l’alimentation consacrée à une meilleure prise en compte de la situation des producteurs agricoles, premières victimes de la « course aux prix bas », le Président de la République a annoncé plusieurs mesures concrètes qui s’inscriront dans une loi qui devrait être examinée et votée au premier semestre 2018.

Mesures annoncées par le Président de la République

– une contractualisation rénovée, avec un contrat proposé par les agriculteurs et non plus par les acheteurs ; le prix tiendra compte ainsi des coûts de production ;

– un regroupement des agriculteurs en organisations de producteurs leur permettant de peser dans les négociations, en tirant profit des possibilités existantes du droit de la concurrence ;

– une réorganisation des filières, avec notamment une contractualisation pluriannuelle sur trois à cinq ans ;

– une saisine de l’autorité de la concurrence, donnant une interprétation précise du droit de la concurrence et permettant de négocier dans un cadre clair ;

– un renforcement du rôle du médiateur des relations commerciales agricoles ;

– un relèvement du seuil de revente à perte pour les produits alimentaires et l’encadrement des promotions, afin que le juste revenu aux producteurs soit garanti et qu’une qualité supérieure des produits pour les consommateurs puisse être l’objectif collectivement recherché.

D’ici à la fin 2017, les interprofessions devront élaborer des contrats de filières avec les représentants de la transformation et de la distribution.

Les rapporteurs spéciaux soulignent la prise en considération par les États généraux de l’alimentation des problèmes de notre agriculture, de celui, en particulier, de la faiblesse des prix payés aux producteurs agricoles, régulièrement dénoncé. Les propositions issues des EGA dessineront sans doute un nouveau visage de l’agriculture et pourront inspirer utilement les positions que la France défendra dans les négociations sur la future politique agricole commune applicable à compter de 2020.

Le Président de la République a annoncé également la mise en œuvre d’un plan pluriannuel d’investissement agricole doté de 5 milliards d’euros et visant à la fois la transformation environnementale de notre modèle productif et la « montée en gamme » de nos produits agricoles. Ce plan mobilisant des crédits budgétaires, des fonds européens et des instruments financiers devrait permettre l’accès à des financements nouveaux pour des projets de modernisation des exploitations ayant un impact positif sur l’environnement et pour des projets de développement d’activités de transformation et de distribution privilégiant les circuits courts et les projets coopératifs. Les rapporteurs spéciaux insistent sur l’intérêt et l’ambition de ce plan d’investissement très constructif, qui s’attelle, comme les États généraux de l’alimentation, à la compétitivité de notre agriculture et à l’encouragement donné à des orientations politiques porteuses d’avenir.

B.   LE RETARD DE VERSEMENT DES AIDES DE LA POLITIQUE AGRICOLE COMMUNE

La question du retard de versement des aides de la PAC s’est posée avec force depuis 2015, suscitant une grave incompréhension des agriculteurs, déjà exposés à des difficultés de revenus particulièrement marquées. Cela a été notamment le cas des exploitants engagés dans des démarches agroenvironnementales ou ayant opté pour le mode de production biologique.

Ont été rendus responsables de cette situation des dysfonctionnements de l’Agence de services et de paiement (ASP) ou une mauvaise gestion des régions, autorité de gestion des crédits du second pilier de la PAC. Les rapporteurs spéciaux ont interrogé les services du ministère de l’agriculture et les responsables de l’ASP qui leur ont apporté des informations précises sur cette question.

Il apparaît ainsi que le décalage observé dans le paiement des aides des campagnes PAC 2015 et 2016 est dû à la révision complète du référentiel des surfaces agricoles imposée par la Commission européenne, à la suite de la correction financière de plus d’un milliard d’euros sur l’application de la PAC en France des années 2008 à 2012 et de la mise en œuvre concomitante de la réforme de la PAC. Le plan d’action retenu pour répondre aux exigences de la Commission européenne a ainsi conduit les autorités françaises à engager la rénovation complète du registre parcellaire graphique, avec une photo-interprétation systématique de l’ensemble des photos aériennes et la constitution d’une base de données graphiques répertoriant l’ensemble des surfaces non agricoles situées au sein des îlots déclarés par les exploitants agricoles.

Ceci a représenté un chantier considérable désormais achevé. Ces travaux de mise à jour du référentiel parcellaire graphique, puis l’instruction complète des dossiers de demande d’aide, conformément aux règles européennes étaient néanmoins un préalable incontournable, avant de pouvoir payer les aides PAC 2015.

Le paiement des aides directes (couplées et découplées) de la PAC 2015 est donc intervenu en septembre-octobre 2016, celui des aides directes 2016 en mai et juin 2017.

Pour faire face au décalage du calendrier de paiement des aides PAC 2015 et 2016, des apports de trésorerie remboursables (ATR) ont été versés aux agriculteurs. Ces aides exceptionnelles, entièrement financées par le budget de l’État ont pour objectif d’éviter aux agriculteurs des difficultés de trésorerie.

La résorption du retard se poursuit, mais elle ne pourra être complète pour la campagne 2017. L’objectif est un retour à un calendrier normal de paiement pour les aides directes du premier pilier en 2018. Le calendrier de paiement des aides directes sera donc le suivant :

– aides couplées ovins-caprins : acompte au cours de la deuxième quinzaine d’octobre ; solde début décembre 2017 ;

– aides couplées bovines : courant décembre 2017 ;

– aides découplées et aides couplées végétales : février 2018.

Le calendrier de versement des aides directes 2017 doit enregistrer ainsi une amélioration significative par rapport au calendrier des campagnes 2015 et 2016. Un ATR pour la campagne 2017 doit être payé à partir du 1er octobre.

Ces évolutions ont également impacté le calendrier de paiement des aides surfaciques du second pilier de la PAC, ICHN, MAEC et aides à l’agriculture biologique.

La réglementation communautaire ne prévoyant pas de date limite de paiement pour ces dispositifs, la priorité a été mise sur les travaux nécessaires au paiement des aides du premier pilier et à l’ICHN qui représente le montant le plus important des aides surfaciques du second pilier.

Les moyens ont été ensuite déployés vers les autres dispositifs, afin de permettre leur mise en paiement, ce qui se traduit :

– pour l’ICHN, par un démarrage des paiements en novembre 2016, pour les aides 2015 et, en juillet 2017, pour les aides 2016. Pour les demandes au titre de la campagne 2017, un acompte sera versé en décembre et le solde en février 2018 ;

– pour les MAEC et les aides à l’agriculture biologique, par des paiements en novembre 2017 pour les aides 2015, en mars 2018, pour les aides 2016 et enfin, en juillet 2018, pour les aides 2017.

L’ICHN, les MAEC et les aides à l’agriculture biologique ont, par ailleurs été inclus dans le champ de l’ATR pour les campagnes 2015 à 2017. L’ATR représentera 90 % pour les aides pour l’ICHN et 80 % pour les MAEC et sera versé à compter du 16 octobre.

Cette longue énumération doit permettre, selon vos rapporteurs spéciaux, de mieux analyser cette question du retard de versement des aides de la PAC. Elle ne méconnaît évidemment en rien les grandes difficultés éprouvées par le monde agricole depuis trois années, du fait de ces retards, difficultés de trésorerie, mais aussi de gestion par les agriculteurs de leurs entreprises, difficultés aussi, peut-être pour certains, de garder confiance en l’action publique.

Une remarque importante doit être faite, par ailleurs, sur le rôle des régions en tant que gestionnaires des aides aux agriculteurs. Les rapporteurs spéciaux estiment que les règles posées par les régions ont présenté une trop grande diversité, ce qui a rendu difficile l’élaboration d’un outil commun et présenté souvent une complexité excessive.

C.   LA croissance « à deux chiffres » de l’agriculture biologique

La dynamique récente de croissance du secteur de l’agriculture biologique se poursuit en France, avec une nette accentuation depuis 2015.

Selon les données de l’Agence Bio, à la fin de l’année 2016, on comptait plus de 47 000 opérateurs ayant une activité biologique, dont 14 000 transformateurs et distributeurs et plus de 32 000 exploitations bio (soit 7,3 % des exploitations françaises), la hausse enregistrée étant de 10 % par rapport à 2015.

Ces exploitations valorisaient 1 538 047 ha (soit 5,7 % de la SAU des exploitations françaises), la hausse étant de 17 % par rapport à 2015. La valeur totale du marché des produits biologiques était estimée à plus de 7 milliards d’euros, (soit + 22 % par rapport à 2015, + 15 % en 2015 par rapport à 2014).

Après trois années de mise en œuvre du « Programme Ambition Bio 2017 », la surface exploitée selon le mode de production biologique a augmenté de 44 %. Ces résultats permettent d’envisager un développement important de l’offre territoriale, avec une hausse prévue des surfaces certifiées bio de 20 % pour chacune des deux années à venir, sachant que ceci ne devrait pas suffire à répondre à la demande forte du marché en produits biologiques français.

Le développement de la production biologique reste cependant toujours contrasté selon les filières et les régions. Ainsi, 34 % des surfaces consacrées aux légumes secs sont conduites en production biologique, 17 % en arboriculture, 18 % des plantes aromatiques, 15 % des ruches, 9 % en viticulture et 8 % des poules pondeuses. Seulement 3 % de surfaces de grandes cultures sont conduites en production biologique, avec toutefois un développement sans précédent de ce secteur depuis 2015 (la hausse des surfaces était de 20 % en 2016, après une hausse de 30 % en 2015).

La surface agricole utilisée (SAU) bio représente plus de 19 % de la SAU en région Provence-Alpes-Côte d’Azur et 11,5 % en Occitanie, mais seulement 1,2 % dans la région Hauts-de-France. Il apparaît que les fortes croissances en surface et en nombre d’exploitations se concentrent dans les régions où l’agriculture biologique est déjà la plus développée, soit Auvergne Rhône-Alpes, Nouvelle Aquitaine, Occitanie et Pays de Loire.

Depuis 2015, les aides à la conversion et au maintien de l’agriculture biologique sont financées par le second pilier de la PAC. Ces deux mesures sont mises en œuvre dans chaque région dans le cadre des programmes de développement rural régionaux (PDRR).

L’aide à la conversion est attribuée à tout agriculteur qui en fait la demande et peut être plafonnée au choix des régions. Pour l’aide au maintien, les régions ont la possibilité de cibler ou de prioriser les demandes, afin notamment de développer l’agriculture biologique dans les zones à fort enjeu environnemental, d’accompagner des démarches collectives ou la structuration de certaines filières.

Les aides en faveur de l’agriculture biologique ont été demandées en 2016 par plus de 26 000 exploitations pour une surface d’environ 1,26 million d’hectares. Ces demandes concernaient pour près de 44 % les aides à la conversion.

Le plan de développement de l’agriculture biologique « Ambition Bio 2017 » élaboré par le Ministère chargé de l’agriculture et les régions en 2013 a prévu qu’un montant de 160 millions d’euros par an en moyenne (75 % de crédits FEADER et 25 % de crédits nationaux du ministère de l’agriculture et de la forêt) serait consacré au financement de ces deux mesures sur la période 2015-2020. Toutefois, ces montants restant insuffisants, face à la croissance importante de ce secteur, le transfert de 4,2 % du 1er pilier de la PAC vers le 2e pilier à partir de 2018 est de nature à permettre de contribuer à financer ces aides. D’autres marges disponibles sont en discussion avec les régions (redéploiement de Feader vers la bio dans les maquettes régionales, financement par les Agences de l’Eau).

Ces dispositifs d’aide peuvent être complétés, au niveau régional, notamment par des aides à la certification et à la promotion de l’agriculture biologique.

Les filières du secteur de l’agriculture biologique bénéficient également d’un fonds national de structuration dit « fonds avenir Bio », géré par l’Agence Bio.

Doté initialement d’un montant de 3 millions d’euros par an pendant 5 ans dans le cadre du plan de développement de l’agriculture biologique 2008‑2012, il a vu son montant porté à 4 millions d’euros par an depuis 2014 dans le cadre du programme « Ambition Bio 2017 ». Ce fonds est destiné à aider des projets structurants, pluriannuels, nationaux ou suprarégionaux, multipartenariaux (de la production à la distribution). Depuis sa mise en place jusqu’en 2016, 92 projets de structuration de filières ont été accompagnés, pour un total de 490 partenaires sur l’ensemble du territoire. Sur la période 2008‑2016, les projets soutenus ont représenté un investissement total de 120 millions d’euros pour les opérateurs économiques des filières biologiques, dont 26,3 millions d’euros de soutien par le fonds avenir Bio.

Le crédit d’impôt bénéficiant aux exploitations en agriculture biologique, initialement mis en place en 2006 a été prorogé par la loi de finances de 2015 et ce jusqu’en 2017 pour accompagner le programme « Ambition bio 2017 ».

Son montant de 2 500 euros est inchangé et peut être cumulé avec les aides à la conversion et au soutien à l’agriculture biologique, dans la limite de 4 000 euros. Ce dispositif de crédit d’impôt en faveur des agriculteurs biologiques complète efficacement les aides de la PAC, pour le maintien et la conversion des surfaces en bio, notamment pour les petites exploitations.

Les dernières données disponibles font état pour 2015 de 10 587 bénéficiaires pour un montant de 24 millions d’euros.

La reconduction de ce crédit d’impôt est prévue pour 2018, en principe jusqu’à 2020 et devrait figurer dans le projet de loi de finances rectificative pour 2018. Il devrait être également augmenté, pour atteindre 4 000 euros, au lieu de 2 500 actuellement.

Au cours de l’été 2017, deux mesures relatives à l’agriculture biologique ont été annoncées par le Gouvernement : le transfert de 4,2 % des montants du premier pilier consacré aux aides à l’hectare et aux aides couplées au second pilier qui concerne le développement rural et qui est géré par les régions et la fin en 2018 du mécanisme des aides au maintien pour les producteurs déjà certifiés en agriculture biologique, l’État décidant de « se concentrer » sur les aides à la conversion et considérant que la forte demande du marché permettait elle-même de soutenir le maintien du bio.

Ces décisions fondées sur des considérations de bonne gestion ont suscité une certaine incompréhension des acteurs de l’agriculture biologique et des organisations professionnelles agricoles.

En toute hypothèse, pour continuer à bénéficier des cofinancements européens, il est nécessaire que les agences de l’eau et les régions financent désormais pour 25 % ces aides au maintien, ce qui est loin d’être garanti.

Notons enfin que le nombre des producteurs qui se désengagent (les « déconversions ») est constant d’une année à l’autre, soit 4 % des producteurs. Trois profils de producteurs ont été identifiés par l’agence bio : ceux qui rencontrent des difficultés économiques et quittent parfois la production agricole, ceux qui connaissent des difficultés techniques, pour appliquer le cahier des charges de l’AB et reviennent au mode de production conventionnel et enfin ceux pour lesquels intervient un changement de structure juridique de l’exploitation.

Les rapporteurs spéciaux estiment que le mode de production biologique doit être encouragé, car il est profondément en phase avec les demandes d’un nombre croissant de consommateurs en matière de santé et de respect de l’environnement.

S’ils soulignent l’importance des objectifs retenus par le Président de la République : 8,5 % de la surface agricole utilisée en agriculture biologique en 2020 (6,5 % en 2016) et 50 % de produits bios en restauration collective en 2022, ils estiment que la France devrait peut-être s’inspirer de l’exemple de certains de ses partenaires européens, tels que l’Allemagne ou l’Espagne qui ont retenu un objectif de 20 % de surface agricole utilisée en agriculture biologique pour les années à venir.

 

D.   LE RÔLE STRATÉGIQUE DES INDUSTRIES AGROALIMENTAIRES

La bonne santé de notre économie dépend largement de celle de nos industries agroalimentaires (IAA). Le secteur de l’élevage, en particulier, joue un rôle irremplaçable en matière d’emploi, d’occupation du territoire, de présence sur les marchés extérieurs.

Ces industries, si elles disposent de remarquables atouts, souffrent aussi de certaines faiblesses.

Les entreprises du secteur des industries agroalimentaires (IAA) étaient, au 31 décembre 2015, si l’on inclut le secteur de l’artisanat commercial, au nombre de 62 225, plus de 95 % d’entre elles comptant moins de 250 salariés, 89 % moins de 10 salariés. Elles occupaient, à cette date, la première place au sein de l’industrie, représentant respectivement 21,7 %, 21,6 % et 18,7 % des résultats de l’ensemble du secteur manufacturier, pour l’emploi, le chiffre d’affaires et la valeur ajoutée. Les industries agroalimentaires ont réalisé, par ailleurs, en 2015 un chiffre d’affaires de 184,5 milliards d’euros.

Les industriels français de l’agroalimentaire se distinguent de leurs concurrents européens par la place accordée à la transformation des produits de l’élevage : 42 % de l’emploi sont assurés par les industries de la viande et du lait qui sont à l’origine de 30 % de la valeur ajoutée.

Maillant le territoire au plus près de la ressource agricole dont elles assurent 70 % des débouchés, les industries agroalimentaires sont aussi le premier employeur industriel (593 080 salariés au 31 décembre 2014). L’ensemble des régions françaises participe d’ailleurs à la formation de la valeur ajoutée des IAA.

L’emploi et la production ont mieux résisté à la crise financière de 2008-2009, dans les IAA, que dans d’autres secteurs. C’est ainsi que le secteur agroalimentaire a perdu entre 2000 et 2014, 6 % de ses effectifs, alors que ceux des industries manufacturières ont été réduits de plus du quart. Les dernières données disponibles font d’ailleurs état d’une création nette de 5 700 emplois en 2015 dans ce secteur.

Le marché national représente le premier débouché des IAA (80 % du chiffre d’affaires réalisé) ; quant aux exportations, elles sont dirigées, pour les deux tiers, vers les pays de l’Union européenne (pour 64 %), mais ce sont les exportations vers les pays tiers qui ont connu les plus fortes hausses au cours des dernières années.

Les industries agroalimentaires ne réalisent que 21 % de leur chiffre d’affaires à l’exportation, cette proportion étant de 36 % pour le reste de l’industrie ; l’exportation ne concerne que 3 entreprises sur 10, du fait de leur rentabilité insuffisante, du « mille-feuilles » administratif des organismes d’aide à l’exportation comme de l’absence d’un « guichet unique ».

En 2014, l’excédent des échanges agroalimentaires français, après trois années de haut niveau, est passé de 11,2 à 9,2 milliards d’euros ; les exportations françaises ont subi, en effet, la baisse importante des prix agricoles due au niveau élevé des récoltes 2013 et 2014 et les conséquences de l’embargo russe sur les produits agroalimentaires européens qui a pesé sur les prix des produits laitiers et des viandes porcines. Pour 2015 en revanche, un redressement a été observé (+ 0,4 milliard d’euros par rapport à 2014).

Cette évolution s’accompagne, en outre, d’importantes disparités sectorielles : le solde largement excédentaire des produits du terroir (en particulier le vin ou les fromages produits sous AOC) compense le déficit des produits de deuxième transformation (tels que les produits alimentaires à base de céréales, les préparations de viandes et de poissons, les confiseries, les aliments pour animaux). Le solde commercial des IAA après déduction du vin et des spiritueux est ainsi négatif depuis 2004.

Alors que la France était le troisième exportateur mondial en 2000, ses parts de marché à l’exportation agroalimentaire se sont dégradées, surtout vis-à-vis de nos voisins allemands ; notre pays se situe désormais au 6e rang dans le monde, ayant été dépassé par l’Allemagne, le Brésil et la Chine.

La taille parfois réduite de certaines entreprises et leur faible rentabilité handicapent leur accès aux financements nécessaires pour investir, innover, exporter et conquérir de nouveaux marchés. Les PME enregistrent ainsi des résultats en baisse, que compense en partie la bonne performance de grands groupes, tels que Lactalis et Danone pour les produits laitiers (2e et 3e producteur mondial) ou Pernod-Ricard pour les vins et spiritueux (2e producteur mondial).

Le secteur nécessite donc des efforts de restructurations dans une perspective de consolidation, d’internationalisation et de recherche d’une taille critique.

Les IAA ont peut-être été longtemps victimes aussi d’une image négative auprès des consommateurs et des citoyens, alimentée par des problèmes sanitaires fortement médiatisés (ESB, grippe aviaire, E.Coli), d’amalgames récurrents avec les problématiques agricoles (OGM, pesticides) et peut-être aussi d’un climat général de défiance touchant à l’alimentation.

Les relations commerciales avec la grande distribution (70 % des débouchés des IAA) restent essentiellement de type client-fournisseur et caractérisées par un déséquilibre important dans les pouvoirs respectifs de marchés ; les tensions demeurent, exacerbées par un contexte de plus forte volatilité.

Les métiers spécifiques aux IAA souffrent, par ailleurs, sans doute encore d’un déficit général d’image du secteur pouvant apparaître insuffisamment attractif, notamment pour les jeunes : des conditions de travail souvent difficiles, des salaires sensiblement plus faibles que dans d’autres branches industrielles, des perspectives de carrières professionnelles jugées moins intéressantes, un niveau de qualification parfois faible. Les professionnels estiment que 10 000 postes par an ne seraient ainsi pas pourvus.

Probablement insuffisamment actives en matière de recherche-développement (la part des dépenses liées à l’innovation est de 1 % du chiffre d’affaires, alors qu’elle atteint 4 % pour le reste de l’industrie manufacturière), les IAA sont pourtant dans l’obligation de constamment innover, afin de se différencier, d’améliorer leurs produits et de gagner des parts de marché. Elles sont contraintes d’adapter en permanence leurs stratégies aux besoins des consommateurs, en termes de goût, de nutrition, de diversité, de naturalité. Or l’innovation reste essentiellement le fait des grandes entreprises et porte surtout sur les produits, le marketing et de nouveaux modes de production plus respectueux de l’environnement.

Le crédit d’impôt-recherche, premier dispositif de soutien à la recherche-développement dans le secteur agroalimentaire est largement plébiscité par les industriels de ce secteur, leurs dépenses de recherche‑développement et d’innovation déclarées au titre de ce dispositif dans l’agroalimentaire ayant connu, par exemple, une croissance de près de 10 % entre 2011 et 2013, croissance similaire à celle de tous les autres secteurs confondus.

Si elles sont ainsi confrontées à de réelles difficultés, les industries agroalimentaires demeurent pour notre pays un véritable atout économique. Leur vitalité même permet à notre pays de demeurer un acteur agricole majeur dans le monde d’aujourd’hui. Ce secteur présente d’ailleurs la particularité d’avoir peu délocalisé et d’avoir perdu moins d’emplois au cours des dernières années que les autres secteurs industriels français.

La force des industries agroalimentaires réside sans doute dans leur résilience : la production y est stable depuis trois ans et, dans cette même période, le secteur a réalisé plus de 11 000 créations nettes d’emplois.

Malgré certaines faiblesses, une présence incertaine à l’international et des efforts de recherche insuffisants, nos industries agroalimentaires restent, pour vos rapporteurs spéciaux, un secteur d’avenir à fort enjeu économique.

E.   L’INDISPENSABLE EFFORT DE RENOUVELLEMENT DES GÉNÉRATIONS EN AGRICULTURE

La vitalité de l’agriculture et du secteur agroalimentaire français que l’on vient de souligner suppose que soit mené un effort constant et vigoureux en faveur de la « relève agricole », tout particulièrement hors du cadre familial.

Ce nécessaire renouvellement des générations est une évidence, quand on pense au poids de l’agriculture en termes de production, d’emploi, de réponse aux attentes de la société et, plus encore peut-être, d’aménagement du territoire.

Initiée par la loi d’orientation agricole de 1960, la politique d’installation des jeunes agriculteurs a permis d’accompagner depuis cinquante ans ce renouvellement des générations et de participer à la modernisation et à l’adaptation de l’agriculture française. Plus d’une installation de jeune agriculteur sur deux est soutenue aujourd’hui par ce dispositif inscrit dans le deuxième pilier de la politique agricole commune consacré au développement rural.

Dans le cadre du transfert aux régions de la gestion du Fonds européen agricole de développement régional (FEADER), les conditions de mise en œuvre des aides à l’installation sont désormais déclinées au sein de programmes régionaux dont les éléments communs sont issus d’un document cadre national. Les aides à l’installation cofinancées par le FEADER le sont à 80 %.

La dotation jeune agriculteur (DJA) est une aide en trésorerie permettant de faire face au démarrage de l’activité. Le montant de la DJA varie de 8 000 à 36 000 euros, selon la zone d’installation (de plaine, défavorisée ou de montagne) et les caractéristiques du projet.

La technique de la DJA a fait l’objet de perfectionnements constants. Depuis 2015, la DJA est modulée à la hausse pour les installations hors cadre familial, les projets agro-écologiques et ceux qui sont favorables à l’accroissement de la valeur ajoutée et de l’emploi. En 2017, a été ajoutée une nouvelle modulation de la DJA pour les projets comportant un effort de reprise-modernisation important et des dispositions sont intervenues, par ailleurs, pour permettre l’accès aux aides dans le cadre d’installations progressives.

La moyenne nationale des montants proposés, toutes zones confondues, s’établissait en 2016 à 20 000 euros (+ 20 % par rapport à 2014).

Les prêts bonifiés à l’installation (dits « à moyen terme spéciaux ou MTS‑JA »), ont eu pour objet de faciliter l’installation des jeunes, en leur permettant de réaliser, dans des conditions financières avantageuses, les investissements favorisant le démarrage de leur activité. Ces prêts ont été octroyés aux jeunes agriculteurs ou aux sociétés auxquelles ils appartenaient, dans le cadre d’un plan de développement de l’exploitation, d’une durée de 5 ans.

Les prêts « MTS-JA » bénéficiaient, soit d’un taux de 2,5 % et d’une durée bonifiée de 7 ans, pour les exploitations situées en zone de plaine, soit d’un taux d’1 % et d’une durée bonifiée de 9 ans, pour les exploitations situées en zone défavorisée ou de montagne.

Le mécanisme des prêts bonifiés est apparu récemment moins attractif, du fait du niveau très bas des taux de marchés, de la lourdeur de sa gestion et de la restriction de la durée de bonification prévue dans le cadre du nouveau règlement FEADER. À la fin de l’année 2016, il a été décidé de supprimer les prêts bonifiés, cette suppression étant compensée par une augmentation de la DJA visant à soutenir l’effort de reprise des jeunes agriculteurs en fonction des investissements prévus dans le cadre de leur plan d’entreprise. Cette modification est effective dans toutes les régions depuis juillet 2017.

Les aides du Programme pour l’installation des jeunes en agriculture et de développement des initiatives locales (PIDIL) ont été destinées, quant à elles, à encourager les transmissions d’exploitations à des jeunes s’installant hors cadre familial ou sur de petites structures ayant besoin d’être confortées.

Ce programme, qui n’était pas cofinancé par l’Union européenne (mais simplement notifié à la Commission en tant qu’aide d’État) comportait des actions destinées à encourager financièrement les cédants et les propriétaires fonciers à louer leurs terres et leurs bâtiments aux jeunes qui s’installent. Il prévoyait des aides à destination des jeunes (audits d’exploitations à reprendre, stages de parrainage, compléments locaux de DJA).

Ce dispositif est remplacé depuis 2016 par le Programme pour l’accompagnement à l’installation-transmission en agriculture (AITA).

Le programme AITA met particulièrement l’accent sur les actions de formation, de conseil, de communication à destination des cédants et surtout des nouveaux agriculteurs. Il se distingue du PIDIL, en proposant en particulier, une ouverture des dispositifs d’accompagnement à l’installation à l’ensemble des porteurs de projets (aidés ou non aidés) souhaitant s’installer en agriculture. En outre, tous les porteurs de projets en agriculture inscrits dans une démarche volontaire de professionnalisation renforcée peuvent désormais réaliser un plan de professionnalisation personnalisé (PPP), leur permettant de suivre des formations et des stages en entreprise, afin de compléter leur formation initiale.

Depuis 2015, suite à la disparition du FICIA (Fonds d’incitation et de communication pour l’installation en agriculture), le financement de l’AITA est issu de la taxe sur les cessions de terres rendues constructibles et sur la ligne budgétaire destinée au financement des stages, contenue à l’action 23 du programme 149.

Autre dispositif important, les exonérations fiscales nationales, réservées aux bénéficiaires de la DJA ou des prêts bonifiés diminuent le poids de différents impôts lors de l’installation.

La DJA est, par ailleurs, exclue de l’assiette des cotisations sociales et de la CSG–CRDS et les jeunes agriculteurs à titre principal bénéficient d’une exonération partielle de cotisations.

Les jeunes agriculteurs bénéficient également d’aides découplées de la PAC. En 2015, la réforme de la PAC s’est traduite notamment par la mise en place du régime des droits à paiement de base (DPB) : les jeunes qui s’installent bénéficient dans ce cadre d’un accès à la réserve, qui permet de doter en DPB la surface de leur exploitation et de revaloriser les droits qu’ils détiennent au niveau de la moyenne nationale.

En outre, depuis 2015, un paiement additionnel aux jeunes agriculteurs, d’un montant unique de 68 euros à l’hectare est payé en complément des DPB, à chaque exploitation comportant un jeune agriculteur, dans la limite de 34 hectares ; ce paiement est accordé pendant les cinq premières années d’installation. L’enveloppe prévue atteignait 72 millions d’euros en 2017.

La tendance à long terme et, ce point est essentiel, est à la décrue des installations aidées, dans un contexte de baisse, du nombre total des nouveaux exploitants s’installant dans l’année (– 25 % entre 1998 et 2016). Sur la même période, le nombre de départs par année dans un contexte de diminution du nombre total des chefs d’exploitation a diminué également.

Pour la programmation 2007-2013, l’objectif annoncé par le Gouvernement a été d’atteindre 6 000 installations aidées par an. Les crises sectorielles de 2009 ainsi que l’abandon des dispositifs de préretraite en 2008 ont pourtant provoqué une chute des installations aidées dont le rythme annuel s’est stabilisé à 5 000.

En 2015, le nombre de bénéficiaires de la DJA a connu une baisse importante explicable notamment par une anticipation des installations en 2013 et 2014 liée à la fin des quotas laitiers, par un différé d’installations en 2015, compte tenu de la crise de l’élevage et par une baisse d’attractivité des prêts bonifiés.

Cet objectif de 6 000 installations aidées par an a été reconduit pour la période 2014-2020. On peut escompter que la réforme des aides à l’installation mise en œuvre depuis le début de l’année 2015 et poursuivie en 2016 et 2017, suite aux assises de l’installation, devrait aider à la réalisation de ce résultat.

Les Gouvernements qui se sont succédé depuis cinquante ans ont fait preuve, comme le montre l’énumération des mesures intervenues, d’un volontarisme évident dans le domaine de l’installation des jeunes en agriculture, cependant que les outils de cette politique s’affinaient sans cesse.

Pourtant, cela est-il suffisant ? Des auditions auxquelles ils ont procédé, les rapporteurs spéciaux tirent la conclusion, que d’autres facteurs déterminants pèsent sur les décisions des jeunes : l’accès au foncier qui est souvent très difficile, le coût des investissements à réaliser qui est de plus en plus lourd et le choix lui-même de s’installer en agriculture, qui est de plus en plus influencé par la prise en compte des débouchés de marché et du dynamisme de nos différents secteurs agricoles.

F.   L’Insuffisante valorisation de la forêt et de la filiÈre bois

La forêt doit répondre à l’exigence de produire plus de bois, tout en protégeant la biodiversité et en répondant à de multiples attentes sociales. Elle est aussi au cœur des préoccupations sur la question du changement climatique.

La réorientation de la consommation vers des modes plus responsables est une préoccupation essentielle de la filière ; la préparation du « mix énergétique » 2020 ne peut, en effet, se faire sans la contribution majeure de ce secteur et l’effort d’aménagement du territoire ne peut s’entendre, en laissant de côté la forêt.

Et pourtant, ses apports sont trop peu ou mal valorisés. La question du stockage du carbone en est un exemple. Ce service de « puits de carbone », bien que reconnu par tous, n’est pas rémunéré à ce jour, alors qu’il pourrait l’être en rendant éligibles à la bourse carbone les forêts éco-certifiées.

Or, malgré des « fondamentaux économiques » favorables, une ressource disponible importante en métropole (2,6 milliards de m3 de bois sur pied), une demande de produits forte et des compétences humaines avérées, une diversification des espèces sans équivalent en Europe (135 essences forestières différentes), le développement du secteur reste insuffisant.

Le déficit commercial de la filière bois s’est ainsi élevé à 5,5 milliards d’euros en 2015 pour l’ensemble de la filière ; les exportations portent essentiellement sur des produits bruts, les importations concernant plutôt des biens de consommation, tels que des meubles ou du papier carton.

Les scieries françaises étant de taille plus modeste que leurs concurrentes européennes, le tiers de la demande en sciages est aujourd’hui satisfait par des produits d’importation. Le secteur de la pâte à papier, en particulier, est confronté à une forte concurrence des producteurs de pays émergents (Brésil, Chine).

Mobiliser et transformer davantage en France, dans le cadre d’une filière économique organisée doit être ainsi un objectif prioritaire de la politique forestière.

La forêt française souffre d’une manière générale de sous-exploitation, alors que la demande est aujourd’hui croissante, que ce soit pour le bois de sciage, la trituration ou le bois destiné à la production d’énergie. Ce défaut de croissance entraîne lui-même la faiblesse de l’investissement forestier et pose la question du renouvellement de notre forêt, qui pourrait ne plus être garanti. Ceci est d’autant plus préoccupant que, plus que tout autre milieu, la forêt est concernée par les conséquences du changement climatique.

Retrouver un cadre sécurisé d’investissement, pour assurer une régénération efficace de la forêt française, compatible avec les contraintes du changement climatique et les objectifs de protection de la biodiversité et de production de bois est ainsi devenu un impératif pour les années qui viennent. La longueur des cycles forestiers impose d’agir dès à présent.

Cette stratégie devra toujours prendre en compte le rôle de protection essentiel que la forêt joue en zone de montagne (dans la lutte contre les éboulements ou l’érosion des sols) et en zone littorale (fixation des dunes et des cordons littoraux), mais aussi les risques que la forêt elle-même encourt, du fait des incendies et des phénomènes de dépérissements dus aux périodes de canicule et de sécheresse.

Les rapporteurs spéciaux insistent sur le rôle irremplaçable que jouent dans la politique forestière plusieurs organismes nationaux, dont les cadres d’actions ont été récemment consolidés ou renouvelés.

C’est principalement le cas de l’Office National des Forêts (ONF), qui a fait l’objet d’importantes réformes d’organisation depuis dix ans et qui a vu son rôle et son développement confortés dans les contrats pluriannuels d’objectifs et de performances (COP) conclus avec l’État ; rassemblant 5 000 fonctionnaires et autant de salariés, dont 3 000 ouvriers, l’ONF qui dispose d’un budget voisin d’1 milliard d’euros est le premier gestionnaire en France d’espaces naturels. Vu de plus en plus comme en établissement public de plein exercice, il pourrait être orienté dans l’avenir vers une logique d’entreprise publique.

Le Centre national de la propriété forestière (CNPF) est issu du regroupement intervenu en 2010 entre les Centres régionaux de la propriété forestière (CRPF), le Centre national professionnel de la propriété forestière (CNPPF) et l’Institut du développement forestier (IDF). Son contrat d’objectifs, sur la même période 2012-2016, a fixé les orientations stratégiques de moyen terme, déclinées à partir de la stratégie nationale. Le contrat d’objectifs pour la période 2017-2021 a été signé en février 2017 ; il est axé sur une plus grande mobilisation du bois en forêt privée par le développement des documents de gestion durable et sur la recherche et l’innovation, notamment sur la question des changements climatiques.

L’Inventaire forestier national (IFN) a vu, quant à lui, ses missions consolidées dans le cadre de sa fusion le 1er janvier 2012 avec l’Institut géographique national (IGN), au sein de l’Institut national de l’information géographique et forestière.

Enfin l’Institut technologique FCBA (forêt, cellulose, bois-construction, ameublement) est devenu en 2007 l’établissement unique de référence en matière de technologie du bois. Son objectif d’appui aux entreprises pour intégrer les innovations techniques est également décliné dans le cadre d’un contrat de performances pour la période 2012-2019.

L’action de l’État en faveur des investissements forestiers prend elle-même de multiples formes.

Depuis le début des années cinquante, les investissements forestiers ont été encouragés au moyen de subventions et de prêts du Fonds forestier national (FFN) créé en 1946. En raison de la suppression du FFN en 1999, l’ensemble des aides directes à l’investissement forestier figure désormais, comme précédemment indiqué, dans le programme 149 de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales.

Dans le cadre de la programmation 2007-2013 du règlement du développement rural, le programme de développement rural hexagonal (PDRH) avait inscrit, par ailleurs, comme l’une de ses priorités, l’amélioration de la compétitivité du secteur forestier.

L’autorité de gestion a été ensuite transférée, dans le cadre de la programmation 2014-2020, aux régions, qui ont élaboré des programmes de développement ruraux régionaux.

Le premier axe retenu pour le programme de développement rural hexagonal a concerné la reconstitution des peuplements sinistrés par les tempêtes.

L’engagement de l’État pour la reconstitution des forêts après les tempêtes Lothar et Martin de 1999 s’est achevé en 2009. Le bilan du « plan chablis » s’établit à environ 340 000 hectares nettoyés et 225 000 hectares reconstitués, pour une enveloppe totale de financement public (État et FEADER) de 732 millions d’euros sur dix ans.

Pour reconstituer les surfaces sinistrées par la tempête Klaus survenue le 24 janvier 2009 dans trois régions du Sud Ouest, l’État a engagé un important plan d’action sur huit ans (2009-2016) doté à l’origine de 415 millions d’euros. Le montant a été porté à 536 millions d’euros (dont 61 du FEADER) sur la période 2009-2017. Au 1er janvier 2016, 446,5 millions d’euros de subventions avaient été engagés et 350 millions d’euros payés.

Le deuxième axe de la politique suivie concerne la desserte forestière permettant d’améliorer la desserte interne aux massifs dans une perspective de mobilisation immédiate du bois. Sont ciblées les actions sur la voirie privée communale et sur les forêts propriétés de particuliers ou de leurs groupements.

Depuis le début de la programmation PDRH en 2007, près de 92 millions d’euros de dépenses publiques ont permis de créer et de mettre aux normes plus de 4 760 km de routes et de pistes forestières. Ces investissements ont rendu exploitables 315 000 hectares de forêts qui ne l’étaient pas auparavant. Ce dispositif a aussi financé la création de 2 700 places de dépôt et autres travaux annexes.

Les investissements visent aussi à améliorer la valeur économique des forêts.

Les opérations d’amélioration de la valeur économique des forêts ont pour objectif principal d’accompagner les sylviculteurs dans l’amélioration de la valeur d’avenir des peuplements par un accroissement à terme de la qualité technologique des produits au moyen d’opérations, par exemple, d’élagage ou de renouvellement favorisant la stabilité et la vitalité des peuplements.

Entre 2007 et 2015, dans le cadre du PDRH, près de 10 millions d’euros de dépenses publiques ont permis la réalisation de travaux sur près de 10 000 hectares de forêts.

Le contrat d’objectifs et de performances (COP) 2012-2016 de l’ONF insistait enfin sur la nécessité d’investissements dans les forêts domaniales permettant d’en assurer le renouvellement. Le COP a visé un objectif moyen de programmation de 87 millions d’euros par an de travaux patrimoniaux (investissement, entretien y compris de desserte et reconstitution), dont 50 % de travaux d’investissement, le minimum de réalisation envisagé étant de 80 millions d’euros par an. Ce montant n’a malheureusement pas été atteint en 2012 et 2013, du fait des difficultés économiques de l’ONF (70,2 et 62,6 millions d’euros en 2013 et en 2014).

Les défis lancés à notre politique forestière ne manquent pas : il nous faut préserver le régime forestier, parvenir à une meilleure exploitation de nos forêts qui doivent contribuer davantage à la lutte contre le changement climatique, stabiliser la situation financière de l’ONF dont les personnels doivent être mieux mobilisés, réduire le phénomène du morcellement de la forêt privée.

Les éléments positifs existent eux aussi ; le bois garde une importance dans le secteur de l’énergie, ce qui est essentiel dans la recherche actuelle du « mix énergétique » et il est utilisé à nouveau dans la construction, notamment d’immeubles de moyenne et de grande hauteur.

Pour l’avenir, il paraît nécessaire que le marché du bois soit de plus en plus vu comme un marché mondial et que nos concitoyens consomment eux-mêmes plus de bois, mais cela, ce point es essentiel, nécessite au préalable la reconstitution d’une véritable filière forestière française.

 


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   article rattaché

Article 49
Suppression du fonds d’accompagnement de la réforme du micro-bénéfice agricole

 

L’article 33 de la loi n° 2015-1786 du 29 décembre 2015 de finances rectificative pour 2015 a remplacé le régime fiscal du bénéfice forfaitaire par un régime fiscal de micro-bénéfice agricole (« micro-BA »), dans lequel le revenu imposable est égal aux recettes réelles diminuées d’un abattement forfaitaire représentatif des charges.

L’assiette sociale des exploitants agricoles se déduit de l’assiette fiscale ; cette réforme a eu dès lors une incidence sur le montant des prélèvements sociaux. Le dernier alinéa du IV de l’article précédemment mentionné a institué un fonds d’accompagnement exceptionnel sur une durée de 5 ans (de 2017 à 2021), afin de compenser financièrement les agriculteurs concernés par une augmentation des cotisations sociales pour cette période de 2017-2021. Le fonds est abondé à hauteur de 8 millions d’euros pour les années 2017 à 2019, de 6 millions d’euros pour l’année 2020 et de 3 millions d’euros pour 2021. Sa gestion est confiée à la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole qui verse en année N+1 les sommes déléguées par l’État en année N au titre des cotisations sociales dues par les exploitants en année N.

Le décret n° 2017-591 du 20 avril 2017 relatif au fonds d’accompagnement institué par la loi précitée a précisé les cotisations sociales qui peuvent faire l’objet d’une prise en charge totale ou partielle au titre du fonds d’accompagnement et énuméré les régimes d’imposition applicables aux exploitants agricoles pour en bénéficier.

Les modalités de bascule entre cotisations sociales et CSG prévues par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 pour les exploitants agricoles conduisent à ce que les trois premiers quartiles des exploitrants agricoles sont concernés par une baisse de leurs prélèvements sociaux, pour un montant estimé à 25 millions d’euros par an. Les exploitants relevant du régime du « micro-BA » bénéficieront de cet allègement de cotisations sociales.

Dans le contexte des mesures prévues en faveur des indépendants par le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, la pertinence d’un accompagnement des agriculteurs par un fonds spécifique est remise en cause. Les cas particuliers seront traités dans le cadre des dispositifs de prise en charge des cotisations de droit commun de la MSA.

L’articler 49 du projet de loi de finances proppose donc de supprimer le fonds d’accompagnement, à partir de 2018, tout en maintenant ses effets pour les cotisations sociales dues au titre de 2017, les compensations devant être versées aux exploitants agricoles concernés en 2018.

La réforme opérée procède ainsi à une rationalisation des dispositifs de prise en charge des cotisations des exploitants agricoles ; elle est associée à la réalisation d’économies budgétaires, dans un contexte d’évolution des cotisations favora              ble à une majorité d’exploitants relevant du régime du « micro-BA ».

 

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   EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de M. Stéphane Travert, ministre de l’agriculture et de l’alimentation (voir le compte rendu de la commission élargie du jeudi 26 octobre 2017 ([4])), la commission des finances examine les crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales (M. Hervé Pellois, Mme Émilie Cariou, M. Michel Lauzzana, rapporteurs spéciaux).

 

Article 29 et état B

La commission examine l’amendement II-CF 136 de M. Castellani relatif au financement de la lutte contre la Xylella Fastidiosa.

Michel Castellani. La prolifération de cette bactérie constitue une menace très sérieuse et tout particulièrement en Corse, où il devient indispensable de stopper la diffusion de cet agent. Il est regrettable qu’aucune étude d’impact n’ait été conduite sur cette question.

M. Michel Lauzzana, rapporteur spécial. Il s’agit, en effet d’un risque très important, auquel des crédits à hauteur de 13,4 millions d’euros sont consacrés dans le projet de loi de finances pour 2018. Des mesures significatives étant déjà prévues. Mon avis est donc défavorable.

L’amendement n°II-CF136 est rejeté

Suivant l’avis favorable de M. Hervé Pellois et de Mme Émilie Cariou, rapporteurs spéciaux pour les Politiques de l’agriculture, et suivant l’avis favorable de M. Michel Lauzzana, rapporteur spécial pour la Sécurité alimentaire, la commission adopte les crédits de la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, ainsi que les crédits du compte spécial Développement agricole et rural.

Article 49 : Suppression du fonds d’accompagnement de la réforme du microbénéfice agricole

Suivant l’avis favorable des rapporteurs spéciaux, la commission adopte l’article 49.

Après l’article 49

La Commission examine l’amendement n°II-CF107 de Mme Magnier.

M. Antoine Herth. Cet amendement prévoit que le gouvernement remet au Parlement, avant le 1er février 2018, un rapport étudiant les modalités de financement des aides compensatoires de handicaps naturels (ICHN), des mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC) et des aides à la conversion en agriculture biologique, pour les années 2019 et 2020. Cet éclairage est indispensable, pour pouvoir préparer dans de bonnes conditions la nouvelle politique agricole commune qui sera mise en place en 2020.

Mme Émilie Cariou, rapporteure spéciale. Je suis favorable à cet amendement à condition qu’il soit rectifié. Il faudrait, en effet, prévoir un délai plus long pour la remise de ce rapport. La date du 1er juin 2018 serait plus adaptée.

La Commission adopte l’amendement n°II-CF107 ainsi rectifié.


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   PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LEs RAPPORTEURs SPÉCIAUX

ONF : M. Christian DUBREUIL, directeur général, M. Patrick SOULÉ, directeur général adjoint

Assemblée permanente des chambres d’agriculture : M. Claude COCHONNEAU, président, M. Justin LALLOUET, chargé de mission affaires publiques

Coordination rurale : M. François LUCAS, premier vice-président

Confédération paysanne : Mme Temanuata GIRARD, secrétaire générale, Mme Cécile MURET, secrétaire nationale, M. Jacques BONATI, juriste, M. Bernard BRETON, animateur

Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) : M. Robert VERGER, membre du bureau et président commission sociale et fiscale, M. Patrick BENEZIT, secrétaire général adjoint, M. Antoine SUAU, directeur département économie et développement durable, M. Nadine NORMAND, attachée parlementaire, Mme Monelle ECKERT MALECOT, fiscaliste

Jeunes Agriculteurs : M. Aurélien CLAVEL, vice-président, responsable du dossier fiscal et social, M. Romain QUESNEL, juriste, M. Basile FAUCHEUX, administrateur national

Confédération nationale de la mutualité, de la coopération et du crédit agricoles (CNMCCA) : M. Jean-Yves DAGÈS, président, M. Marc FOSSEUX, directeur de la fédération nationale Groupama

Fédération nationale des SAFER : M. Emmanuel HYEST, Président, Mme Muriel GOZAL, directrice, Mme Sabine AGOFROY, relations publiques, affaires européennes et internationales

Association nationale des industries agroalimentaires (ANIA) : M. Christian DIVIN, directeur général de l’ADEPALE membre de l’ANIA (secteur des plats préparés / conserves), M. Alexis DEGOUY, directeur des affaires publiques de l’ANIA

Association des régions de France : M Gilles MERGY, directeur général, Mme Marie-Reine DU BOURG, conseillère parlementaire, Mme Hélène AUSSIGNAC, conseillère agriculture

Fédération des forestiers privés de France (FFPF) : M. Antoine D’ AMÉCOURT, président, M. Luc BOUVAREL, directeur général

Union de la Coopération Forestière Française (UCFF) : M. Cyril LE PICARD, président, M. Julien BLUTEAU, secrétaire général

Fédération nationale de l’agriculture biologique (FNAB) : Mme Stéphanie PAGEOT, présidente de la FNAB, Mme Sophia MAJNONI D'INTIGNANO, M. Félix LEPERS, chargé de mission réglementation et politiques agro-environnementales

Ministère de l’Agriculture : Mme Valérie METRICH-HECQUET, secrétaire générale, M. Christian LIGEARD, directeur des affaires financières, M. Marc DUFOURMANTELLE, chef du bureau de la synthèse budgétaire à la sous-direction des affaires budgétaires et comptables du service des affaires financières, sociales et logistiques

Ministère de l’Agriculture et de l’alimentation : M. Frédéric GUEUDAR DELAHAYE, directeur des pêches maritimes et de l’aquaculture, M. Dominique GUILLOT, adjoint à la Cheffe de la Mission des Affaires Générales

Agence des services et de paiement : M. Stéphane LE MOING, président directeur général

Comité national des pêches maritimes et des élevages marins (CNPMEM) : M. Hubert CARRÉ, directeur général du comité national des pêches maritimes et des élevages marins, Mme Emilie GÉLARD, juriste

 

 

 

 

 



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   ANNEXES

Annexe I : CONCOURS PUBLICS à L’AGRICULTURE en 2018

 

 

 

 

 

 

 


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ANNEXE 2 :  Calendrier de versement des aides PAC depuis 2014

 

Campagne 2014

Campagne 2015

Campagne 2016

Campagne 2017

Campagne 2018

Retour à un calendrier normal

Aides découplées

Avance :

mi-octobre 2014

 

Solde :

décembre 2014

Septembre-octobre 2016

Juin 2017

Février 2018

Avance :

mi-octobre 2018

 

Solde :

décembre 2018

   Ovins

Avance :

mi-octobre 2014

 

Solde :

décembre 2014

Avance :

mi-octobre 2015

 

Solde : décembre 2015

Décembre 2016

Avance : mi-octobre 2017

 

Solde : décembre 2017

Avance

mi-octobre 2018

 

Solde :

décembre 2018

   Bovins

Avance : décembre 2014

 

Solde :

mars 2015

Mai-juin 2016

Février-mars 2017

A partir de décembre 2017

Décembre 2018

ICHN

Acompte :

mi-septembre 2014

 

Solde :

mi-octobre 2014

Octobre-novembre 2016

Juillet 2017

Acompte : décembre 2017

 

Solde : février 2018

Acompte :

mi-septembre 2018

 

Solde :

mi-octobre 2018

MAEC/Bio

PHAE :

à partir de mi-octobre 2014

 

Autres MAE :

à partir de décembre 2014

Premiers paiements : novembre 2017

Premiers paiements : mars 2018

Premiers paiements : juillet 2018

Premiers paiements : mars 2019

Source : Ministère de l’agriculture et de l’alimentation.

 

 

 


([1])  à la Réunion, la Guadeloupe et la Martinique, où la culture de la canne à sucre occupe respectivement 52 %, 37 % et 16 % de la surface agricole utile (SAU).

([2]) Depuis 2015, la Commission européenne met en œuvre une procédure annuelle d’apurement comptable qui sanctionne le non-respect des délais de paiement et des plafonds réglementaires ; pour 2018, le refus d’apurement devrait porter principalement sur les retards de paiement des aides du 1er pilier et l’insuffisance des contrôles des aides versées au titre des ICHN et des MAEC.

([3])  Les forêts publiques représentent 25 % de la superficie des forêts françaises, contribuant à près de 40 % de la récolte de bois.

([4]) http://www.assemblee-nationale.fr/15/budget/plf2018/commissions_elargies/.