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N° 1054

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

  QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 13 juin 2018.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES
SUR LA PROPOSITION DE LOI visant à renforcer
les droits des consommateurs en matière de démarchage téléphonique
(n° 779)

PAR M. Pierre Cordier,

Député.

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 Voir le numéro : 779.


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SOMMAIRE

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Pages

introduction

I. le constat : un dÉmarchage tÉlÉphonique constant, qui traduit les lacunes de la rÉglementation en vigueur

A. Une rÉglementation insuffisante car reposant sur le principe du droit d’opposition et non sur celui du consentement explicite

1. Un encadrement juridique existant

2. Un système incomplet car reposant sur le droit d’opposition

B. Un dispositif d’opposition partiel et peu efficace

1. Le principe : l’inscription sur la liste d’opposition Bloctel

2. La pratique : une liste d’opposition qui n’empêche pas un démarchage téléphonique constant

II. l’objectif de la proposition de loi : garantir le consentement et accroÎtre la transparence du dÉmarchage tÉlÉphonique

A. Garantir le consentement au dÉmarchage tÉlÉphonique

B. Rendre plus transparents les appels de démarchage téléphonique

TRAVAUX DE LA COMMISSION

discussion gÉnÉrale

EXAMEn des articles

Article 1er (art. 38-1 [nouveau] de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés) Obligation d’accord exprès pour l’utilisation de données personnelles à des fins commerciales

Article 2 (art. L. 221-16 du code de la consommation) Précision du contenu des appels de démarchage commercial

Après l’article 2

Article 3 (art. L. 221-17 du code de la consommation)  Mise en place d’un indicatif unique pour les appels de démarchage commercial

Article 3 bis (nouveau) (art. L. 223-1 du code de la consommation)  Interdiction du démarchage téléphonique en cas de relations contractuelles préexistantes

Article 4 (art. L. 223-2 du code de la consommation) Accord exprès à la communication des données personnelles lors de la conclusion d’un contrat avec un opérateur de téléphonie

Article 5 (art. L. 226-18-1 du code pénal) Actualisation des sanctions

Article 6 (nouveau) (art. L. 242-16 du code de la consommation) Augmentation des sanctions contre les contrevenants au dispositif Bloctel

Liste des personnes auditionnées par le rapporteur


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   introduction

 

« Harcèlement », « pénible », « abusif », « spam incessants », « de pire en pire », « sauvage », etc. Les réactions les plus courantes, lorsque la question du démarchage téléphonique est abordée, sont éloquentes.

Ce démarchage par téléphone, chez des particuliers, souvent en soirée ou durant le week-end, est en effet récurrent, dans tous les territoires de France. Il ne fait pas de distinction sociale ou politique. Il exaspère chacun, sans qu’aucune justification ne puisse lui être trouvée : bien souvent, ces appels poussent à la consommation et jouent sur l’incapacité des interlocuteurs à évaluer les risques et la portée de leur engagement. Ils ciblent en particulier les publics fragiles, notamment les seniors ou les ruraux, et peuvent, dans certains cas, s’apparenter à un abus de faiblesse caractérisé.

Le droit existant n’apparaît pas en mesure de répondre à ces difficultés, pour deux raisons :

– en premier lieu, il repose sur un droit d’opposition, et non sur un consentement préalable. Ceci ne peut apporter une réponse satisfaisante, dans la mesure où les consommateurs ne sont pas systématiquement informés de leur droit ou ne savent pas comment le mettre en œuvre ;

– en second lieu, le dispositif Bloctel, créé pour recenser les particuliers ne souhaitant pas être démarchés, n’est pas efficace : nombre de ceux qui y sont inscrits reçoivent toujours autant d’appels intempestifs.

Il en résulte une atteinte à la vie privée, une intrusion dans l’intimité non souhaitée et potentiellement risquée. Les consommateurs devraient avoir le droit de ne pas être importunés chez eux contre leur gré, mais ce droit n’est pas respecté.

C’est pourquoi, il apparaît urgent d’agir.

Votre rapporteur avait déjà déposé un amendement en ce sens dans le cadre du projet de loi pour un État au service d’une société de confiance ([1]). Cet amendement demandait au Gouvernement de remettre au Parlement un rapport présentant les modifications législatives à apporter pour protéger les consommateurs des abus du démarchage téléphonique. Le rapporteur de ce projet de loi à l’Assemblée nationale, M. Stanislas Guerini, avait reconnu que le sujet était d’importance, mais estimé qu’il n’avait pas sa place dans un projet de loi traitant des relations entre l’administration et les citoyens.

Votre rapporteur a donc pris la responsabilité de rédiger une proposition de loi consacrée exclusivement à ce sujet crucial.

Cette proposition de loi poursuit deux objectifs principaux :

– garantir le consentement à l’utilisation des données téléphoniques à des fins commerciales, en mettant en œuvre une obligation de consentement explicite et préalable ainsi qu’en prévoyant des sanctions appropriées pour ceux qui contreviendraient à cette obligation ;

– rendre plus transparents les appels de démarchage téléphonique, en établissant un indicatif unique pour tous les appels de sollicitation commerciale et en renforçant les obligations de présentation de la personne appelant, dès le début de l’appel. Il en résultera une meilleure capacité du consommateur à discerner la nature commerciale de l’appel.

En revanche, cette proposition de loi n’a ni pour objet, ni pour effet, de supprimer tout démarchage téléphonique. Elle vise simplement à garantir que seuls ceux qui y consentent effectivement en fassent l’objet. Ceci n’affectera donc ni l’emploi, ni l’activité commerciale de nos entreprises. En effet, certaines personnes consentiront à être démarchées, comme elles consentent aujourd’hui à recevoir des propositions par courriel ou par SMS, parce qu’elles y voient un intérêt. De plus, il restera, en tout état de cause, d’autres moyens de prospection et de démarchage que les appels téléphoniques, sans doute plus efficaces pour toucher les jeunes générations. Enfin, un tel encadrement est souhaité par les entreprises elles-mêmes, celles qui démarchent ou prospectent d’une manière honnête, contrôlée et légitime. Les professionnels des centres d’appels, auditionnés par votre rapporteur, l’indiquent : les appels intempestifs portent également préjudice au démarchage classique et justifié : ils augmentent le sentiment de nuisance et d’agacement des consommateurs qui, par conséquent, refusent davantage de prendre un appel ou d’y donner suite. Ces professionnels sont conscients de la gêne occasionnée par les appels importuns et souhaitent également y mettre un terme, car ceux-ci menacent leur équilibre économique.

Il est également à noter que onze États membres de l’Union européenne ont fait le choix d’un système d’accord préalable, sans pour autant que des difficultés n’aient été relevées. L’Allemagne, par exemple, comparable à la France en de nombreux domaines, a choisi ce principe. La dimension « culturelle » d’une plus ou moins grande tolérance aux sollicitations ne semble pas pouvoir être avancée, dans la mesure où les États ayant choisi ce principe de consentement sont à la fois des États de l’Europe du nord, comme le Danemark, de l’Europe du sud, comme le Portugal, ou d’Europe de l’est, comme la Lituanie.

Enfin, cette proposition de loi s’inscrit dans la continuité du nouveau règlement général européen de protection des données personnelles, dit « RGPD », qui a fait l’objet d’un projet de loi visant à l’adaptation du droit national adopté en lecture définitive par l’Assemblée nationale le 14 mai dernier. La mise en conformité des opérateurs de communication électroniques avec les nouvelles règles de confidentialité est en cours et ne semble pas poser de difficultés techniques. Ne serait-il pas cohérent que les opérateurs de téléphonie en fassent de même ?

Il s’agirait ainsi de redonner au consommateur la maîtrise de ses données et de sa vie privée.

 


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I.   le constat : un dÉmarchage tÉlÉphonique constant, qui traduit les lacunes de la rÉglementation en vigueur

A.   Une rÉglementation insuffisante car reposant sur le principe du droit d’opposition et non sur celui du consentement explicite

1.   Un encadrement juridique existant

Le démarchage téléphonique fait déjà l’objet d’un encadrement par la réglementation française.

Ainsi, la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, dite loi « informatique et libertés », prévoit, à son article 38, que « toute personne [...] a le droit de s’opposer, sans frais, à ce que les données la concernant soient utilisées à des fins de prospection, notamment commerciale, par le responsable actuel du traitement ou celui d’un traitement ultérieur ».

Ce droit figure également dans le code des postes et des communications électroniques, qui dispose, à l’article R. 10, que « toute personne [...] peut obtenir gratuitement de l’opérateur auprès duquel elle est abonnée ou du distributeur de ce service [...] que les données à caractère personnel la concernant issues des listes d’abonnés ou d’utilisateurs ne soient pas utilisées dans des opérations de prospection directe [...] ».

Enfin, l’article L. 223-1 du code de la consommation dispose que « le consommateur qui ne souhaite pas faire l’objet de prospection commerciale par voie téléphonique peut gratuitement s’inscrire sur une liste d’opposition au démarchage téléphonique. Il est interdit à un professionnel, directement ou par l’intermédiaire d’un tiers agissant pour son compte, de démarcher téléphoniquement un consommateur inscrit sur cette liste, sauf en cas de relations contractuelles préexistantes ».

2.   Un système incomplet car reposant sur le droit d’opposition

Pourtant, ce système repose exclusivement sur le droit d’opposition, et non sur l’autorisation préalable du consommateur à l’utilisation de ses données personnelles à des fins de démarchage commercial. Il fait ainsi de la prospection téléphonique, le seul système de démarchage où le consentement par défaut du consommateur est admis. Pour les messages courriels et les SMS, en revanche, c’est bien le système de l’autorisation préalable qui prévaut, le consommateur devant explicitement accepter de recevoir des sollicitations commerciales.

Seule la prospection dans certains domaines d’activité est parfois encadrée, notamment en matière d’appel à l’épargne, de proposition de prêts ou de droit bancaire (articles L. 341-1 et suivants du code monétaire et financier).

Ceci ne saurait constituer une protection suffisante. En effet, nombre de citoyens ne sont pas informés de leur droit d’opposition. D’autres, qui le connaissent, ne savent pas en faire usage, ou sont découragés par les démarches à accomplir. Comment, dès lors, peut-on affirmer que ce droit d’opposition est effectif ?

B.   Un dispositif d’opposition partiel et peu efficace

1.   Le principe : l’inscription sur la liste d’opposition Bloctel

Le dispositif Bloctel a été mis en place en juin 2016, à la suite de l’adoption de l’article 9 de la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014 relative à la consommation. Il s’agit d’une liste d’opposition au démarchage téléphonique, sur laquelle tout consommateur peut s’inscrire gratuitement afin de ne plus être démarché par un professionnel avec lequel il n’a pas de relation contractuelle en cours. Il lui faut, pour cela, procéder à une demande en ligne ou par courrier.

La loi précise qu’il est interdit à tout professionnel, directement ou par l’intermédiaire d’un tiers agissant pour son compte, de démarcher par téléphone un consommateur inscrit sur cette liste. Les opérateurs qui vendent ou acquièrent des fichiers de numéros téléphoniques doivent s’assurer qu’ils ont été expurgés des numéros inscrits sur Bloctel.

Plusieurs exceptions, autorisant le démarchage des personnes inscrites sur la liste, sont toutefois prévues. Celles-ci pourront en effet être appelées :

– par les professionnels chez qui elles ont un contrat en cours ;

– pour des appels de prospection en vue de la fourniture de journaux, de périodiques ou de magazines ;

– pour des motifs qui ne concernent pas la vente de biens ou de services tels que : les appels émanant d’un service public ; les appels émanant d’instituts d’études et de sondage ; les appels émanant d’associations à but non lucratif ;

– si le particulier a communiqué de manière libre et non équivoque son numéro afin d’être rappelé ;

– en cas de relations contractuelles préexistantes.

En cas d’appel de démarchage par un professionnel en dehors des cas listés ci-dessus, le particulier concerné peut remplir un formulaire de réclamation sur le site internet du dispositif Bloctel.

Bloctel est financé par les entreprises, qui acquittent une redevance pour pouvoir soumettre et faire expurger des fichiers de coordonnées téléphoniques, selon des forfaits débutant à 150 euros (permettant de soumettre deux fichiers de 3 000 noms). Quatre milliards de numéros ont ainsi été filtrés parmi les fichiers d’entreprises depuis la création du dispositif.

2.   La pratique : une liste d’opposition qui n’empêche pas un démarchage téléphonique constant

Malgré l’entrée en vigueur de ce dispositif, les appels de démarchage téléphonique n’ont pas diminué. Ainsi, selon une enquête réalisée par l’UFC‑Que Choisir en 2017, 91 % des Français interrogés se disent excédés par le démarchage téléphonique, qu’ils estiment en recrudescence, regrettant des appels à répétition, y compris le soir et le week-end, pour des motifs divers, masquant en réalité une démarche commerciale : travaux de la maison (68 %), énergies renouvelables (55 %), fournisseurs d’énergie (42 %), etc. La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) elle-même, auditionnée par votre rapporteur, reconnaissait que le dispositif ne répondait pas aux attentes des consommateurs.

En effet, alors même que, depuis son lancement, près de 3,5 millions de personnes se sont inscrites sur le fichier Bloctel, pour un total de 7,4 millions de numéros de téléphone censés échapper au démarchage, près de la moitié des personnes inscrites s’agacent de recevoir toujours autant d’appels de démarchage commercial. 81 % des Français interrogés par l’UFC-Que Choisir estiment que le dispositif Bloctel n’est « pas efficace ». Certaines remontées de terrain indiquent que l’opposition serait effective pendant une courte période, mais que les appels intempestifs reprendraient après quelques semaines ou quelques mois. Aucun consommateur n’a vu d’arrêt définitif des démarchages.

Ceci résulte de plusieurs facteurs :

– trop peu d’entreprises soumettent leurs fichiers à Bloctel pour les expurger des numéros de téléphone des particuliers ayant manifesté leur opposition ;

– les contrôles sont trop peu nombreux ;

– les réclamations donnent peu lieu à des sanctions. Dès la fin de l’année 2016, soit six mois après le lancement du dispositif Bloctel, le Gouvernement annonçait le dépôt de plusieurs milliers de réclamations sur le site internet. Ces réclamations ont donné lieu à 638 contrôles depuis 2016, dont 200 depuis le 1er janvier 2018. Ces contrôles ont eux-mêmes donné lieu à 203 injonctions et à 90 amendes prononcées, chiffre bien faible au regard des milliers d’appels quotidiens ([2]) ;

– les sanctions, lorsqu’elles sont prononcées, sont trop faibles pour être dissuasives. Ces sanctions sont de 75 000 € pour un démarcheur qui contacte une personne inscrite sur le fichier d’opposition – 15 000 € s’il s’agit d’une personne physique et non d’une personne morale. En outre, ces sanctions ne sont pas suffisamment rendues publiques pour que l’image de marque d’une entreprise en soit affectée. Face à cela, il pourrait sembler que, pour ces entreprises, « le jeu en vaut la chandelle » ;

– l’absence de traçabilité de certains démarcheurs entretient une forme d’impunité. En effet, 90 % des démarchages intempestifs ne peuvent être sanctionnés car les numéros ne correspondent pas à la personne qui réalise en réalité le démarchage.

Pour les représentants des centres de contact, auditionnés par votre rapporteur, tout se passe comme si des automobilistes pouvaient rouler à vive allure, sans craindre les radars, ni les amendes, et en masquant leur plaque d’immatriculation. Comment un tel système pourrait-il être efficace ?

 

 

La question des fraudes

Aux démarchages commerciaux, s’ajoutent de nombreuses pratiques frauduleuses – qui dépassent le cadre de cette proposition de loi, mais doivent toutefois être abordées.

Ainsi en est-il des fraudes aux numéros surtaxés, aussi appelées Ping Call : un individu reçoit un appel ou un message lui demandant de rappeler un numéro de téléphone pour réceptionner un colis, déplacer un rendez-vous médical, bénéficier d’un bon d’achat lié à son programme de fidélité en grande surface, etc. Lorsqu’il rappelle, le numéro est surtaxé et l’auteur de la fraude peut percevoir quelques euros par appel. Ceci, multiplié par des milliers de cas, représente une somme significative.

Ainsi en est-il également des appels automatiques, générés par des robots, conduisant à ce qu’il n’y ait personne au bout du fil, et occasionnant malgré tout une nuisance pour le particulier dérangé par une sonnerie. Comme l’explique l’UFC-Que Choisir, « afin de limiter au maximum les pertes de temps, des sociétés de télémarketing ont recours à des systèmes de gestion des appels qui se chargent de composer automatiquement le numéro du destinataire avant qu’un téléopérateur ne soit disponible. Il peut arriver qu’aucun conseiller ne soit en mesure de prendre l’appel au moment où le destinataire décroche. Ce dernier se retrouve alors sans personne au bout du fil. Autre explication possible : [le] numéro a été composé par un robot dont la mission est de vérifier que les numéros contenus dans sa base de données sont bien attribués ».

Ces fraudes sont toutefois difficiles à tracer car l’opérateur qui appelle utilise, le plus souvent, un numéro erroné et usurpe parfois le numéro d’une entreprise ou d’un particulier. Elles représentent environ 66 % des réclamations adressées à Bloctel pour appel intempestif. Toutefois, elles ne rentrent pas dans le champ de compétence de l’opérateur, car ne constituent pas du démarchage commercial.

En conséquence, le constat partagé reste celui d’une inefficacité du droit en vigueur pour lutter contre le démarchage téléphonique intempestif. Comme l’indique la DGCCRF, « on ne peut pas nier que certaines pratiques posent de sérieux problèmes ».

Comme mentionné par l’exposé des motifs de la proposition de loi, « il est par conséquent nécessaire de renforcer sans plus attendre les droits des consommateurs, qui devraient pouvoir ne plus être importunés chez eux, contre leur gré, et ne plus être assaillis d’offres et d’informations commerciales diverses qu’ils n’ont pas sollicitées ».

 

 

 

II.   l’objectif de la proposition de loi : garantir le consentement et accroÎtre la transparence du dÉmarchage tÉlÉphonique

A.   Garantir le consentement au dÉmarchage tÉlÉphonique

Le premier objectif de la proposition de loi est de garantir que les consommateurs consentent explicitement, et de manière préalable, à être démarchés à des fins commerciales. Il s’agit de renverser le paradigme pour passer d’un droit dopposition à une obligation dautorisation.

À cette fin, larticle 1er dispose que les personnes répertoriées sur les listes d’abonnés auprès d’un opérateur de communications téléphoniques doivent donner expressément leur accord pour que leurs données personnelles puissent être utilisées à des fins commerciales avant toute prospection ou démarchage. Il précise qu’à défaut d’accord, les données personnelles des consommateurs sont réputées confidentielles, et ne peuvent en aucun cas être utilisées à des fins commerciales. Il s’agit d’établir la liste des personnes acceptant d’être démarchées, plutôt qu’une liste de personnes le refusant, comme c’est déjà le cas pour le démarchage par courriel ou par SMS.

Larticle 4 contribue également à atteindre cet objectif en précisant que les personnes concluant un nouveau contrat auprès d’un opérateur de téléphonie devront donner explicitement leur accord pour le démarchage au moment de la signature du contrat. À l’heure actuelle, l’acheteur est seulement informé de son droit à s’inscrire sur une liste d’opposition au démarchage.

Enfin, larticle 5 actualise et augmente les sanctions applicables en cas de traitement non autorisé des données téléphoniques.

B.   Rendre plus transparents les appels de démarchage téléphonique

La proposition de loi a également pour objectif de rendre plus transparents et mieux identifiables les appels de démarchage téléphonique.

Larticle 2 oblige toute personne effectuant un appel de démarchage à indiquer, dès le début de l’appel, le nom de la personne qui l’emploie, en plus de son identité, le cas échéant de l’identité de la personne pour le compte de laquelle elle effectue cet appel et de la nature commerciale de celui-ci. Il doit en résulter une meilleure information du particulier appelé et un meilleur discernement de la nature commerciale de l’appel.

Larticle 3 prévoit de mettre en place un indicatif unique pour le démarchage téléphonique, de manière à permettre également aux particuliers de distinguer plus facilement les appels à vocation commerciale.


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   TRAVAUX DE LA COMMISSION

   discussion gÉnÉrale

Au cours de sa séance du mercredi 12 juin 2018, la commission a procédé à l’examen de la proposition de loi visant à renforcer les droits des consommateurs en matière de démarchage téléphonique (n° 779), sur le rapport de M. Pierre Cordier.

M. Pierre Cordier, rapporteur. Monsieur le président, mes chers collègues, « harcèlement », « pénible », « abusif », « gonflant », « spams incessants », « de pire en pire », « sauvage » : voilà quelques exemples des remontées de terrain, des réactions les plus courantes lorsque j’aborde, dans ma circonscription, la question du démarchage téléphonique.

Ce démarchage par téléphone, chez des particuliers, souvent en soirée ou en week‑end, est, en effet, récurrent dans tous les territoires de France. Il ne fait pas de distinction sociale ou politique, il exaspère chacun d’entre nous, sans qu’aucune justification ne puisse lui être trouvée. Bien souvent, ces appels poussent à la consommation et jouent sur l’incapacité des interlocuteurs à évaluer les risques de leur engagement. Ils ciblent en particulier les publics fragiles, notamment les seniors ou les ruraux, et peuvent, dans certains cas, s’apparenter à un abus de faiblesse caractérisé.

Ma proposition de loi a pour objet d’encadrer le démarchage téléphonique, pour restaurer le droit des consommateurs. Certes, il existe déjà un encadrement légal, mais celui-ci est parfaitement inefficace pour plusieurs raisons.

Premièrement, il repose sur un droit d’opposition et non sur un consentement préalable. Cela fait de la prospection téléphonique le seul système de démarchage où le consentement par défaut du consommateur est admis. Pour les courriels et les SMS, en revanche, c’est bien le système de l’autorisation préalable qui prévaut, le consommateur devant explicitement accepter de recevoir des sollicitations commerciales. Ce droit d’opposition ne saurait constituer une protection suffisante. En effet, nombre de citoyens ne sont pas informés de leurs droits. D’autres, qui le connaissent, ne savent pas en faire usage ou sont découragés par les démarches à accomplir. Comment, dès lors, peut-on affirmer que ce droit d’opposition est effectif ?

Deuxièmement, le dispositif d’opposition mis en place au travers de la plateforme Bloctel est inefficace. Il s’agit d’une liste d’opposition au démarchage téléphonique sur laquelle tout consommateur peut s’inscrire gratuitement en ligne ou par courrier. Pourtant, depuis l’entrée en vigueur de Bloctel, les appels intempestifs n’ont pas cessé chez les particuliers qui s’y sont inscrits, et 81 % des Français estiment qu’il ne fonctionne pas. Ces particuliers qui, dans un premier temps signalaient ces appels aux autorités, ont fini par lâcher prise en l’absence de réaction.

Pourquoi une si faible efficacité ? Premièrement, parce que trop peu d’entreprises soumettent leurs fichiers à Bloctel pour les expurger des numéros de téléphone des particuliers ayant manifesté leur opposition. Deuxièmement, parce que les contrôles sont trop peu nombreux. Troisièmement, parce que les sanctions sont trop faibles pour être dissuasives. Quatrièmement, parce que certains appels ne sont pas traçables.

Pour certaines personnes que nous avons auditionnées, tout se passe comme si des automobilistes pouvaient rouler à vive allure sans craindre les radars ni les amendes, et en masquant leur plaque d’immatriculation. Comment un tel système pourrait-il être efficace ? Il en résulte une atteinte à la vie privée, une intrusion dans l’intimité non souhaitée et potentiellement risquée. Les droits des consommateurs, qui devraient pouvoir ne plus être importunés chez eux contre leur gré et ne plus être assaillis d’offres et d’informations commerciales diverses qu’ils n’ont pas sollicitées, ne sont pas respectés. C’est pourquoi il est aujourd’hui urgent d’agir : il convient de redonner au consommateur la maîtrise de ses données téléphoniques et le droit de consentir à être démarché s’il le souhaite.

La proposition de loi que je présente poursuit donc deux objectifs principaux : premièrement, garantir le consentement à la transmission des données ; deuxièmement, rendre plus transparents les appels de démarchage téléphonique.

En ce qui concerne le consentement, l’article 1er permet de garantir que les consommateurs consentent explicitement et de manière préalable à être démarchés à des fins de prospection commerciale. Il s’agit de renverser le paradigme pour passer d’un droit d’opposition à une obligation d’autorisation.

L’article 4 contribue également à atteindre cet objectif, en précisant que les personnes concluant un nouveau contrat auprès d’un opérateur de téléphonie devront donner explicitement leur accord pour le démarchage au moment de la signature du contrat. À l’heure actuelle, l’acheteur est seulement informé de son droit à s’inscrire sur une liste d’opposition au démarchage.

L’article 5 actualise et augmente les sanctions applicables en cas de traitement des données téléphoniques d’une personne n’ayant pas donné son accord. Je propose par ailleurs un amendement visant également à renforcer les sanctions contre les personnes démarchant les consommateurs inscrits sur Bloctel.

En ce qui concerne la transparence, l’article 2 oblige les personnes appelant pour démarcher un particulier à des fins commerciales à donner, dès le début de l’appel, un certain nombre d’informations les concernant et concernant leur entreprise. Il doit en résulter une meilleure information du particulier appelé et un meilleur discernement de la nature commerciale de l’appel.

L’article 3 enfin prévoit de mettre en place un indicatif unique pour le démarchage téléphonique, de manière à aider également les particuliers à repérer plus facilement les appels à vocation commerciale.

Ces dispositions permettront ainsi d’améliorer le respect de la vie privée, de renforcer la protection des données personnelles et de limiter les abus de faiblesse. En cela, la proposition de loi s’inscrit dans la droite ligne des démarches entreprises dans le cadre européen du nouveau règlement général sur la protection des données (RGPD). Ce texte, adopté par l’Union européenne, a également fait l’objet en France de la loi sur la protection des données personnelles, actuellement examinée par le Conseil constitutionnel. Je rappelle d’ailleurs que ce texte a été voté par l’opposition dans une démarche constructive, et que j’ai voté ce texte émanant du Gouvernement.

Par ailleurs, la proposition de loi n’entre pas en confrontation avec les négociations en cours sur la révision de la directive « vie privée ». En effet, l’article 16 de cette directive laisse aux États membres le choix entre un système d’accord préalable ou un système de droit d’opposition au démarchage. Selon les informations que nous avons reçues, cet article ne serait pas concerné par la révision. Aussi, le cadre européen, puis le cadre national ne seront pas contraints d’évoluer et il nous est donc possible d’agir d’ores et déjà sur ce secteur.

En conclusion, je souhaite insister sur deux aspects fondamentaux. En premier lieu, cette proposition de loi est transpartisane, elle dépasse les clivages politiques. Nous avons tous fait nous-mêmes l’expérience du démarchage téléphonique et en avons tous été agacés. C’est pourquoi je souhaite que nous ne soyons pas dans des postures dogmatiques mais que nous accomplissions la mission pour laquelle nous avons été tous élus : la défense des droits de nos concitoyens. En second lieu, et il faut être très clair là-dessus, cette proposition de loi n’a pas pour objectif d’empêcher complètement le démarchage téléphonique : elle tend simplement à garantir que seuls les abonnés qui y consentent effectivement en fassent l’objet. Ce principe qui, je le répète, prévaut pour les messageries électroniques, comme pour les SMS, n’affectera pas sensiblement l’emploi ou l’activité commerciale de nos entreprises. L’exemple du démarchage par SMS le montre. Premièrement, certaines personnes consentiront à être démarchées comme d’autres consentent aujourd’hui à recevoir des propositions par courriels et SMS, parce qu’elles y voient un intérêt. Deuxièmement, il restera en tout état de cause d’autres moyens de prospection et de démarchage que les appels et sans doute plus efficaces pour toucher les jeunes générations.

De plus, onze États membres de l’Union européenne ont fait le choix d’un système d’accord préalable, sans pour autant que des difficultés n’aient été relevées. L’Allemagne, par exemple, comparable à la France en de nombreux domaines, a choisi ce principe. La dimension culturelle d’une plus ou moins grande tolérance aux sollicitations ne semble pas pouvoir être avancée dans la mesure où les pays ayant choisi un système opt-in sont à la fois des pays d’Europe du nord comme le Danemark, d’Europe du sud comme le Portugal, ou d’Europe de l’est comme la Lituanie. Enfin, un tel encadrement est même souhaité par les entreprises honnêtes, celles qui démarchent ou prospectent d’une manière contrôlée et légitime. Les professionnels des centres d’appels que nous avons rencontrés nous l’indiquent. Les appels intempestifs portent également préjudice au démarchage classique et justifié, ils augmentent le sentiment de nuisance et d’agacement des consommateurs qui, par conséquent, refusent davantage de prendre un appel ou d’y donner suite. Ces professionnels sont parfaitement informés de la gêne occasionnée par les appels intempestifs et souhaitent également y mettre un terme, car ceux-ci menacent très clairement leur équilibre économique.

Pour toutes ces raisons, je vous demande de voter cette proposition de loi. Je reconnais cependant que ce texte est perfectible, et je ne demande pas mieux que de préciser et d’améliorer un certain nombre de points avec vous. Je ne doute pas, Monsieur le président, que nos débats resteront policés et constructifs.

M. le président Roland Lescure. C’est presque toujours le cas ici !

M. Pierre Cordier, rapporteur. Pour terminer, je signale qu’une question orale sans débat a été posée ce matin par Mme Bérangère Abba, députée de la majorité, relative à ce fléau qui empoisonne la vie quotidienne de nos concitoyens, dans laquelle elle explique que la plateforme Bloctel est inefficace. Mme la secrétaire d’État Delphine Gény-Stephann lui a répondu qu’une proposition de loi serait discutée en séance publique le 21 juin prochain – en l’occurrence celle que j’ai l’honneur de vous présenter aujourd’hui –  et que le Gouvernement avait l’intention de soutenir certaines de ses dispositions, considérant que toutes n’étaient pas de nature législative.

M. le président Roland Lescure. Je vous remercie, Monsieur le rapporteur, de ne pas préjuger de l’avis des parlementaires sur ce sujet et espère, compte tenu de ses observations lors de l’examen de l’autre proposition de loi de votre groupe, que M. Daniel Fasquelle a noté l’ouverture du Gouvernement à l’égard de cette proposition de loi.

Mme Annaïg Le Meur. Je remercie tout d’abord le rapporteur pour les échanges que nous avons eus dans le cadre des auditions que nous avons menées.

Le démarchage téléphonique est effectivement une pratique que beaucoup de Français trouvent très intrusive dans leur vie privée. Comme vous le soulignez dans votre rapport, Monsieur Pierre Cordier, la dernière enquête d’UFC‑Que Choisir met en évidence que 91 % des Français trouvent le démarchage téléphonique très agaçant. Quel Français n’a pas connu ce moment pénible, souvent le soir à l’heure du repas, où sonne le téléphone et où, à l’autre bout du fil, un opérateur tente – presque désespérément, parfois – de lui vendre un bien ou un service ?

C’est pourquoi la « loi Hamon » du 17 mars 2014 a prévu plusieurs dispositions, parmi lesquelles la création d’un registre d’opposition au démarchage Bloctel plus efficace que l’ancienne version Pacitel, et l’obligation faite au démarcheur d’informer les particuliers de la nature commerciale de l’appel et de l’identité de la société qui en est à l’origine. Toutes ces mesures allaient dans le sens d’une protection accrue du consommateur et de la lutte contre la manipulation et la vente forcée. Depuis son lancement opérationnel en juin 2016, Bloctel regroupe 3,5 millions de personnes inscrites, représentant 8 millions de numéros de téléphone. C’est une preuve supplémentaire de l’ampleur du phénomène de démarchage téléphonique.

Bloctel donne-t-il entière satisfaction ? Le résultat est mitigé avec un tiers des réclamations provenant de personnes inscrites sur Bloctel concernant effectivement un démarchage abusif. Ce résultat mitigé s’explique par une faille du système. Certaines entreprises ne respectent pas, en effet, leurs obligations, démarchant des numéros inscrits sur Bloctel. Cependant, j’attire votre attention sur la méconnaissance qu’ont parfois de ces obligations les chefs de petites entreprises. Il ne faut pas non plus sous-estimer la confusion que font parfois certains entre la prospection commerciale et le démarchage dans le cadre d’une relation contractuelle. Il y a une grande différence entre un appel prospectif et une arnaque ou un numéro surtaxé qu’on appelle aussi ping call. Plus grave, l’usurpation du numéro de téléphone d’un particulier à des fins malveillantes est très en vogue en ce moment. La mise en place de Bloctel a nourri l’espoir auprès de nos concitoyens que tous ces appels intrusifs allaient cesser alors que ce n’est pas la vocation de ce système. Je pense d’ailleurs qu’une campagne de communication de la part du Gouvernement serait nécessaire sur ce point. J’ai déjà commencé à en parler dans ma circonscription, notamment au sein des chambres de commerce et d’industrie (CCI).

Si je partage certaines des propositions du rapporteur, d’autres me laissent plus sceptique. Je commencerai par celles auxquelles je suis plutôt favorable. L’article 2 impose davantage de transparence en obligeant l’opérateur en centre d’appels à signaler de manière explicite l’identité de son employeur ou de la personne morale pour le compte de qui est effectué l’appel. C’est une bonne chose car cela protège davantage le consommateur. De même, le renforcement des sanctions envers les entreprises qui contreviennent aux règles de Bloctel est nécessaire. Les auditions ont permis de mettre en lumière que les amendes actuelles – administratives et non pas pénales comme le propose notre collègue – étaient insuffisamment dissuasives. C’est pourquoi le groupe La République en Marche propose de porter les amendes administratives à 375 000 euros pour les personnes morales. D’autre part, ces sanctions peuvent être rendues publiques mais ne sont pas diffusées. C’est une autre piste à explorer car l’image des entreprises est importante. La création d’un indicatif d’appel est une piste intéressante prévue à l’article 3 mais est-ce vraiment utile pour les consommateurs, sachant que l’usurpation de numéros de particuliers par certains centres d’appels peu scrupuleux rendrait déjà l’application de cet indicatif inefficace et ne ferait pas cesser ces appels ?

S’agissant en revanche des articles 1er et 4, le groupe majoritaire est très réservé concernant l’instauration d’un système d’opt-in dans lequel le consommateur serait réputé ne pas avoir donné son consentement à l’exploitation commerciale ou à la revente de ses données personnelles, y compris dans le cadre contractuel. Ce serait une révolution dans les relations contractuelles – sans garantie pour les Français d’être enfin tranquilles.

Globalement, nous sommes plutôt favorables aux articles 2, 3 et 5. C’est l’opt-in qui nous pose plus problème.

M. Daniel Fasquelle. Je voudrais saluer le travail de notre collègue Pierre Cordier, député de terrain à l’écoute de ses concitoyens. Le texte qu’il nous propose va sans aucun doute dans le bon sens puisqu’il répond à un problème rencontré au quotidien par les Français.

Le sujet n’est pas nouveau : il avait déjà été abordé dans le projet de loi défendu par M. Frédéric Lefebvre dont je fus le rapporteur en 2011. Malheureusement, le texte, adopté à l’Assemblée nationale puis au Sénat, est resté en navette et n’a pas pu être adopté définitivement par notre assemblée avant l’élection présidentielle de 2012. Le sujet a donc été repris dans le cadre de la loi Hamon en 2014.

On pensait avoir réglé le problème avec l’instauration du dispositif Bloctel, issu de cette loi Hamon, mais tel n’est malheureusement pas le cas. Une enquête réalisée par UFC-Que Choisir démontre que neuf Français sur dix sont excédés par ces appels. En tout état de cause, il suffit d’être à l’écoute de nos administrés sur le terrain pour s’apercevoir que ce dispositif ne fonctionne pas.

Par ailleurs, il faut aussi tenir compte de l’évolution du contexte européen. Le règlement européen relatif à la protection des données personnelles ouvre largement la voie à un principe d’opt-in. Il serait vraiment dommage de ne pas retenir ce principe, déjà adopté par d’autres pays, et de préférer essayer de rafistoler un système qui ne fonctionne pas et qui ne fonctionnera jamais.

Au nom du groupe Les Républicains, je veux exprimer tout notre soutien à cette proposition de loi qui prévoit, d’une part, l’interdiction de démarcher un particulier tant que celui-ci n’a pas donné expressément son accord et, d’autre part, une actualisation des sanctions applicables. Il convient en effet d’imposer au démarchage téléphonique les règles applicables aux courriels et aux SMS. J’espère que nous trouverons sur ce texte un terrain d’entente et que vous n’invoquerez aucun prétexte, aucun autre véhicule législatif pour ne pas adopter cette proposition de loi et pour pouvoir en reprendre les dispositions à votre compte. Si le groupe La République en Marche est convaincu qu’il y a un problème, trouvons ensemble la solution, améliorons ce texte et faisons enfin œuvre utile dans un esprit constructif, comme l’a souhaité notre rapporteur Pierre Cordier.

M. Nicolas Turquois. Je tiens tout d’abord à remercier nos collègues du groupe Les Républicains pour cette proposition de loi qui nous conduit à débattre d’un sujet fort préoccupant pour nos concitoyens. À la suite de scandales récents dans le cadre desquels de grands groupes ont livré les données personnelles de leurs utilisateurs, les questions de la protection des données et du respect de la vie privée sont d’une actualité immédiate et retiennent toute notre attention. Nous accueillons donc avec intérêt votre proposition de loi qui s’inscrit dans la continuité du projet de loi tendant à renforcer la protection des données personnelles.

Vous partez du constat de la pression commerciale récurrente subie par l’ensemble de nos concitoyens du fait d’entreprises peu scrupuleuses qui ne respectent pas le droit existant. La législation est en effet déjà suffisamment claire sur le sujet. L’usager dispose d’un droit d’opposition : grâce au dispositif Bloctel voté dans la loi Hamon, un consommateur peut ne plus être démarché par téléphone par un professionnel avec lequel il n’a pas de relation contractuelle en cours.

Toutefois, force est de constater que ce dispositif connaît de nombreuses limites puisque les consommateurs continuent de recevoir des appels non sollicités. Nous partageons bien entendu avec vous la conviction que les consommateurs ont le droit de ne pas être importunés à leur domicile, surtout lorsqu’ils ont fait la démarche de s’inscrire sur la liste Bloctel. Ce démarchage devient un véritable fléau pour les consommateurs les plus fragiles, sujets à des pratiques trompeuses ou à du harcèlement téléphonique, qui confine parfois à l’abus de faiblesse.

Il appartient donc au législateur de renforcer la protection des consommateurs face aux dérives constatées. Afin d’inverser cette tendance, vous proposez, Monsieur le rapporteur, que les consommateurs donnent expressément leur accord pour que leurs données personnelles puissent être utilisées à des fins commerciales. Désormais, les entreprises n’exerceraient plus leurs activités sur le fondement d’un consentement par défaut. En cas de non-consentement, les données personnelles des consommateurs seraient considérées comme confidentielles et ne pourraient en aucun cas être utilisées à des fins commerciales. Vous proposez par ailleurs que tout professionnel du démarchage doive décliner explicitement son identité et utiliser un numéro de téléphone à indicatif unique permettant aux particuliers d’identifier plus facilement ces numéros, voire de les bloquer.

Si l’indicatif unique nous paraît efficace, tout comme la présentation claire de l’identité de l’auteur de l’appel au début de la conversation, nous craignons que le principe du consentement obligatoire préalable ait des effets négatifs sur la viabilité économique de certaines entreprises de démarchage. En effet, de nombreuses petites entreprises, y compris françaises, dépendent du démarchage téléphonique pour la vente de services ou de produits. Nous ne pouvons d’un trait de plume condamner les centaines d’emplois concernés – ce serait le cas dans mon département, la Vienne. Les articles 1er et 4 de la proposition de loi ne nous paraissent donc pas appropriés à l’objectif recherché. Au-delà de ces dispositions qui, nous l’espérons, feront l’objet de modifications lors de la navette parlementaire, nous soutenons l’intention de cette proposition de loi qui tend à renforcer la protection des données personnelles ainsi que le respect de la vie privée. Les données des personnes sont aujourd’hui essentielles dans les modèles économiques des entreprises – a fortiori avec l’essor du numérique. C’est pourquoi le groupe du Mouvement démocrate et apparentés (MODEM) votera cette proposition de loi, sous réserve que les articles 1er et 4 soient modifiés.

M. Nicolas Démoulin. Je vous remercie, Monsieur le  rapporteur, pour le dépôt de cette proposition de loi qui vise à résoudre un problème récurrent. J’ai néanmoins quelques interrogations à formuler.

En introduction, vous parlez de « consommateurs ». Quid des entreprises qui se font démarcher ? Je ne vois rien dans le texte qui les concerne. Or elles perdent énormément de temps à répondre à ce type d’appels.

De même, vous visez les « professionnels du démarchage ». Une entreprise qui se crée et qui essaie de démarcher entre-t-elle dans cette catégorie ? J’espère que tel n’est pas le cas. Lorsque j’ai monté mon entreprise, il y a vingt‑deux ans, je n’aurais pas pu faire démarrer mon activité sans pouvoir téléphoner à de futurs clients ! M. Nicolas Turquois craint des suppressions d’emplois dans les grosses centrales téléphoniques, je m’inquiète, quant à moi, de ce qui pourrait advenir des petites entreprises. Un artisan pourrait ainsi vouloir appeler les habitants de son village pour les informer de la création de son activité. Au-delà de la démarche commerciale, c’est d’abord de l’information. Qu’en pensez-vous ?

M. Fabien di Filippo. J’associe à mon propos mon collègue Dino Cinieri. Je remercie tout d’abord Pierre Cordier pour cette excellente proposition de loi que nous sommes nombreux à avoir immédiatement cosignée. Elle traduit en effet parfaitement l’exaspération légitime de beaucoup de nos concitoyens. Force est de constater que le service Bloctel issu de la dernière loi relative à la consommation est totalement inefficace puisqu’il n’empêche pas le harcèlement téléphonique à des fins commerciales. Si vous tapez le mot « Bloctel » sur un moteur de recherche, vous consulterez des témoignages qui vont tous dans le même sens : « Ras le bol ! », « Harcèlement », « Insupportable ! ». Comme l’ont rappelé le rapporteur et M. Daniel Fasquelle, 91 % des Français se déclarent plus qu’agacés par ces appels intempestifs. Bloctel est une déception. C’est pourquoi nous voulons sans plus attendre réaffirmer le droit des consommateurs à ne pas être dérangés en permanence à leur domicile ou dans le cadre familial.

Nos collègues du groupe La République en Marche s’apprêtent cependant à défendre des amendements de suppression des principales mesures de cette proposition. Cela nous étonne beaucoup car ce sont précisément celles qui permettront une réelle évolution de la situation. Ce matin, Mme Bérangère Abba, députée de la Haute-Marne, a demandé au Gouvernement lors de la séance des questions orales sans débat des mesures fortes pour empêcher le démarchage téléphonique abusif. Il est pour le moins paradoxal que quelques heures plus tard, nos mesures vous paraissent subitement beaucoup trop fortes et que vous changiez d’avis. J’espère, comme notre rapporteur, que vous saurez dépasser les clivages politiques stériles dont nos concitoyens ne veulent plus et que vous voterez pour cette proposition de loi de bon sens – sans la vider de sa substance.

M. Thibault Bazin. Je salue à mon tour l’engagement de notre collègue Pierre Cordier qui mène depuis plusieurs mois un combat contre le démarchage téléphonique intempestif. Je me réjouis que le groupe Les Républicains ait choisi d’inscrire à l’ordre du jour un texte touchant aux préoccupations des Français. J’ai moi aussi reçu de nombreux courriers de nos concitoyens qui n’en peuvent plus –je les ai transmis au rapporteur. Si je me réjouis de l’ouverture du groupe La République en Marche, j’espère que ce texte ne sera pas affaibli. Il faut, en effet, qu’on puisse s’armer contre les abus et donc éviter d’en atténuer la portée. C’est tout l’enjeu de nos discussions à venir.

M. Pierre Cordier, rapporteur. Ce sont effectivement les réactions sur le terrain, cher Daniel Fasquelle, qui m’ont conduit à déposer cette proposition de loi. Nous sommes tous des élus nationaux mais aussi des élus locaux, pour la plupart. Et nous rencontrons tous nos concitoyens dans nos permanences ou à l’occasion de diverses manifestations, notamment le week-end.

Le projet de loi défendu par Frédéric Lefebvre n’ayant pu être voté du fait d’un calendrier resserré, c’est la loi Hamon qui, partant d’une intention très noble, a instauré le système Bloctel. Cependant, lorsqu’on s’est interrogé sur la mise en place de ce dispositif, puis lors des auditions que j’ai menées avec Mme Annaïg Le Meur, on s’est rendu compte que celui-ci était clairement un échec. Nos concitoyens estiment, en effet, qu’au bout de trois à cinq semaines, Bloctel cesse d’être efficace et que tout redevient comme avant. Cette proposition vise donc à tirer les conséquences de cet échec.

Monsieur Nicolas Démoulin, nous pourrons revenir, lors de l’examen des articles, sur vos interrogations. On peut faire un parallèle entre cette proposition de loi et le texte sur le RGPD que nous avons voté il y a quelques semaines : dans les deux cas, il s’agit de tenir compte de la volonté expresse du consommateur. Depuis quelques jours, nous recevons tous sur nos téléphones portables des messages nous demandant si nous voulons toujours recevoir les courriels de telle ou telle entreprise. On retrouve là cette notion de consentement du consommateur.

Monsieur Nicolas Turquois, je sais que des personnes donnent leur accord au démarchage commercial parce qu’elles y trouvent leur compte. Certaines m’ont en effet expliqué qu’elles avaient pu obtenir des réductions intéressantes grâce au démarchage. L’idée n’est absolument pas d’interdire le démarchage téléphonique. J’ai bien entendu à l’esprit la question de l’emploi et des entreprises. Il n’en demeure pas moins que l’établissement d’un fichier des personnes acceptant d’être appelées évitera aux entreprises de faire « chou blanc » : sur cent appels, quatre‑vingt-dix se concluent par un « Foutez-moi la paix, cela ne m’intéresse pas ! », cinq personnes disent qu’elles vont réfléchir et cinq autres, qu’elles sont intéressées. Si les entreprises ont la liste des personnes susceptibles d’être intéressées, quelle que soit la démarche commerciale, elles perdront forcément moins de temps à se faire raccrocher au nez. D’où la démarche d’acceptation que nous proposons d’instaurer.


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   EXAMEn des articles

Article 1er
(art. 38-1 [nouveau] de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers
et aux libertés)
Obligation d’accord exprès pour l’utilisation de données personnelles à des fins commerciales

1.   L’état du droit

L’ensemble des dispositions du droit en vigueur en matière de démarchage téléphonique pose le principe d’un droit d’opposition des particuliers ne souhaitant pas être démarchés.

Ainsi, l’article 38 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, dite loi « informatique et libertés », dans sa rédaction résultant de de l’article 5 de la loi n° 2004-801 du 6 août 2004 relative à la protection des personnes physiques à l’égard des traitements de données à caractère personnel, prévoit que « toute personne physique a le droit de s’opposer, pour des motifs légitimes, à ce que des données à caractère personnel la concernant fassent l’objet d’un traitement. Elle a le droit de s’opposer, sans frais, à ce que les données la concernant soient utilisées à des fins de prospection, notamment commerciale, par le responsable actuel du traitement ou celui d’un traitement ultérieur ».

Ce droit figure également dans le code des postes et des communications électroniques qui dispose, à l’article R. 10, que « toute personne [...] peut obtenir gratuitement de l’opérateur auprès duquel elle est abonnée ou du distributeur de ce service [...] que les données à caractère personnel la concernant issues des listes d’abonnés ou d’utilisateurs ne soient pas utilisées dans des opérations de prospection directe [...] ».

De plus, l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 créé au code de la consommation un article L. 223-1 disposant que « le consommateur qui ne souhaite pas faire l’objet de prospection commerciale par voie téléphonique peut gratuitement s’inscrire sur une liste d’opposition au démarchage téléphonique. Il est interdit à un professionnel, directement ou par l’intermédiaire d’un tiers agissant pour son compte, de démarcher téléphoniquement un consommateur inscrit sur cette liste, sauf en cas de relations contractuelles préexistantes ».

Toutefois, ces articles créent un « droit d’opposition », a posteriori. Ils entretiennent une présomption de consentement par défaut, qui va à l’encontre de ce qui existe dans d’autres secteurs : le démarchage par messagerie électronique, notamment, doit systématiquement faire l’objet d’une demande ou d’un accord de la personne dont l’adresse est utilisée.

2.   Les dispositions de la proposition de loi

L’article 1er de la proposition de loi a pour objet de renverser le paradigme, en rendant obligatoire le consentement préalable à l’utilisation de données personnelles – en l’occurrence le numéro de téléphone – à des fins de démarchage commercial.

Il créé pour cela un article 38-1 dans la loi « informatique et libertés ». Cet article additionnel dispose que les données à caractère personnel issues des listes d’abonnés ou d’utilisateurs de communications électroniques ou téléphoniques ne peuvent être utilisées dans des opérations de prospection commerciale directe sans l’accord préalable et explicite de la personne physique à laquelle ces données à caractère personnel se rapportent. Il précise par ailleurs que cet accord préalable peut être dénoncé à tout moment par l’abonné et que l’opérateur est tenu de l’informer de cette possibilité de dénonciation.

L’article indique que, pour tous les abonnements contractés avant la promulgation de la loi, cet accord devra être expressément adressé à l’opérateur de téléphonie. Il pourra également être recueilli par la personne qui fait le démarchage, impérativement sous forme écrite s’il se traduit par une vente ou une prestation de service payante.

Toutefois, et de manière parallèle à l’article 38 de la loi relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés, le nouvel article 38-1 mentionne que ses dispositions ne s’appliquent pas lorsque le traitement de ces données répond à une obligation légale ou de sécurité publique.

Votre rapporteur propose deux amendements à cet article, ayant pour objet de préciser le champ de la proposition de loi, en la limitant aux seules coordonnées téléphoniques – et non à l’ensemble des données à caractère personnel – et aux seules communications téléphoniques – et non à l’ensemble des communications électroniques.

3.   La position de la commission

La commission, contre l’avis du rapporteur, a voté pour un amendement de suppression de cet article.

*

*     *

La commission est saisie de l’amendement de suppression CE4 de Mme Annaïg Le Meur.

Mme Annaïg Le Meur. Nous nous sommes aperçu que 70 % des appels dont se plaignaient les personnes que nous avons auditionnées n’étaient pas filtrés par Bloctel mais étaient de nature frauduleuse et étaient le fait de ping calls ou de robots. Ce sont autant d’appels qu’on ne parviendra pas à faire disparaître avec ce qui est ici proposé.

Nous proposons donc un amendement de suppression de l’article 1er, qui est beaucoup trop large, afin de préserver l’emploi. On nous a expliqué au cours des auditions qu’à Saint-Omer, par exemple, 400 emplois seraient perdus si cet article était adopté. Mieux vaudrait étudier l’impact de l’opt-in avant d’en imposer le principe.

M. Pierre Cordier, rapporteur. Je suis bien évidemment défavorable à cet amendement de suppression. L’essentiel du texte est à l’article 1er, qui pose le principe du consentement exprès, déjà applicable aux SMS et aux courriels et qui a été repris dans la loi sur la protection des données personnelles défendue par Mme Nicole Belloubet, il y a quelques jours. Sans lui, la proposition de loi ne tient plus.

Vous dites que cet article est trop large puisqu’il viserait l’ensemble des opérations de prospection commerciale directe. J’ai précisément déposé deux amendements qui restreignent sa portée aux seules communications téléphoniques. Votre amendement est donc satisfait à cet égard.

Par ailleurs, vous dites que l’article 1er renverse le principe du droit d’opposition à l’obligation de consentement mais c’est justement tout l’objet de cette proposition de loi – un objet rendu indispensable par l’exaspération de nos concitoyens.

Vous mentionnez ensuite l’impact lourd de cette mesure sur l’emploi et l’activité commerciale des TPE et PME. Je ne le crois pas : ces entreprises peuvent gagner à une réduction du démarchage intempestif. En outre, beaucoup de centres d’appels ne sont pas situés en France. Nous pouvons tous faire état d’expériences personnelles – moi le premier qui reçois parfois des appels de personnes que j’ai du mal à comprendre parce qu’elles téléphonent de Tunisie, du Maroc ou d’Irlande et que leur français est assez approximatif.

Vous estimez enfin que Bloctel a permis de trouver un équilibre entre protection des consommateurs et défense des intérêts économiques des entreprises. Je ne le crois pas davantage : 81 % des Français estiment que Bloctel est inefficace. Il me semble que nous sommes loin d’un équilibre.

C’est pourquoi je souhaite le maintien de l’article 1er.

M. Daniel Fasquelle. Il faut que tous ensemble nous entrions cet après‑midi dans le nouveau monde, s’agissant des postures des uns et des autres, et de la protection des données. L’entrée en vigueur du RGPD change complètement la donne – vous l’avez constaté par vous-mêmes. Désormais, il nous est systématiquement demandé si nous acceptons d’être recontactés ou de recevoir des notifications. M. Pierre Cordier propose une mesure du même ordre. Si nous ne l’adoptons pas aujourd’hui, nous le ferons dans deux, trois, quatre ou cinq ans : c’est nécessairement dans cette voie que nous nous dirigerons. Cela correspond aux attentes de nos concitoyens. C’est dans les textes européens. Donc soit on reste avec un coup de retard, soit on décide d’avoir un coup d’avance – ou du moins d’être en phase avec ce que propose l’Europe.

Faut-il protéger les consommateurs ou les entreprises ? Si l’on s’en tient au dispositif en vigueur, les consommateurs vont continuer à être dérangés au nom de la protection de l’activité des entreprises. Vous ne mettrez pas fin au démarchage intempestif, sauf à adopter cet article 1er. La proposition de loi assure précisément un bon équilibre entre la protection des consommateurs et celle des entreprises. Comme l’a dit le rapporteur, combien de fois les personnes qui font du démarchage téléphonique se heurtent-elles à des consommateurs mécontents qui leur raccrochent au nez ? Il serait beaucoup plus efficace pour les entreprises que vous acceptiez ce fichier positif. Il y a forcément des consommateurs qui trouveront un intérêt à être contactés pour tel ou tel type de produits ou de services : quand les entreprises les appelleront, elles seront certaines d’avoir au bout du fil un consommateur attentif à leur appel. Elles cesseront ainsi de dépenser de l’argent et de l’énergie pour déranger nos concitoyens.

Si l’Allemagne a choisi l’opt-in, c’est que ce système protège l’emploi, les entreprises et les consommateurs. Beaucoup d’autres pays européens ont fait le même choix. Ne soyons pas les derniers en Europe à adopter ce dispositif.

M. Nicolas Démoulin. Vous prenez toujours l’exemple des SMS et des mailings lists. Le contact téléphonique, lui, passe par la voix, ce qui est très différent. Si je vous suis, dans cinq ans, on interdira le porte-à-porte ou on le soumettra au principe d’opt-in. Nous sommes tous d’accord pour lutter contre le démarchage insupportable et notamment contre les arnaques. À partir du moment où la présentation d’une offre est extrêmement claire, la personne non seulement n’est pas obligée de décrocher puisque les numéros s’affichent sur son téléphone mais une fois qu’elle a décroché, elle peut très simplement dire qu’elle n’est pas intéressée et raccrocher. Votre proposition de loi vise bien à lutter contre les abus et les arnaques, pas contre les simples coups de téléphone. Que fera demain l’artisan qui n’aura plus le droit de prospecter pour informer la population d’un nouveau service ?

M. Vincent Rolland. J’apporte mon soutien à cette proposition de loi de notre collègue Pierre Cordier. M. Daniel Fasquelle rappelait la nécessité de protéger les consommateurs. Mettez-vous aussi un instant à la place des personnes qui font du démarchage et qui se font systématiquement rembarrer – et fort peu aimablement – par leurs interlocuteurs, que l’on comprend également. La proposition de loi permettrait de prendre en considération ces personnes, souvent employées de manière quelque peu exotique.

M. Daniel Fasquelle. Le démarchage à domicile est déjà encadré depuis 1972. La première loi française – et peut-être européenne – de protection des consommateurs est un texte sur le sujet. À l’époque, la France était précurseur. Elle le sera à nouveau si M. Pierre Cordier est entendu. Elle ne le sera malheureusement pas si vous supprimez l’article 1er. Les entreprises ont bien évidemment besoin de se faire connaître mais les moyens qu’elles emploient à cet effet sont encadrés depuis toujours – ou alors il ne faudrait pas leur interdire de mettre des panneaux au bord de toutes les routes. Or vous n’allez pas à l’encontre de cette interdiction au motif que cela les empêcherait de se faire connaître. Nous avons la responsabilité d’encadrer les moyens qu’ont les entreprises de se faire connaître dans le respect des bords de nos routes, de nos paysages mais également de la tranquillité de nos concitoyens.

M. Guillaume Kasbarian. Nous partageons tous le même constat : le démarchage téléphonique intempestif est insupportable pour nos concitoyens. Ils nous le disent tous. Nous recevons tous les mêmes lettres, quelle que soit notre couleur politique. Exaspérées, certaines personnes en viennent même à résilier leur ligne de téléphone fixe.

Cela étant, ce n’est pas parce que nous faisons le même diagnostic que nous devons tous faire de la démagogie. Le texte de la proposition de loi dispose que les données à caractère personnel issues des listes d’abonnés ou d’utilisateurs de communication ne peuvent être utilisées dans des opérations de prospection commerciale directe sans l’accord préalable explicite de la personne physique auxquelles ces données à caractère personnel se rapportent. Cela signifie que plus aucune opération commerciale ne sera possible par téléphone. Ainsi, un artisan qui aura fait votre plomberie, votre carrelage, votre maçonnerie ou votre peinture et qui voudra vous proposer par téléphone une promotion ou un nouveau produit ne pourra plus le faire. Les TPE, les artisans et les commerçants qui utilisent leur fichier client ne pourront plus appeler leurs clients réguliers. Nous sommes d’accord pour cibler les appels intempestifs, les offres peu claires ou provenant d’une plateforme complètement anonyme mais, tel qu’il est rédigé, l’article 1er va priver nos TPE, parfois fragiles et qui ont besoin du téléphone pour convaincre leurs clients, d’un canal de communication et d’un outil de publicité. Veillons, au sein de la commission des affaires économiques, à ne pas pénaliser nos TPE, nos PME, nos artisans et nos commerçants.

M. Julien Dive. Puisque vous dites, cher collègue, que nous sommes tous d’accord quant au diagnostic et à la réponse à apporter mais que le texte pose un problème de rédaction, votez cette proposition de loi, quitte à l’amender en séance publique de manière qu’il préserve mieux nos artisans.

M. Thierry Benoit. Monsieur le rapporteur, une formation politique qui voudrait appeler ses adhérents pour la remise à jour de ses cotisations pourrait-elle le faire sans l’accord préalable de ces derniers ? Ce qu’a dit notre collègue Nicolas Turquois sur l’entrepreneuriat est vrai, tout autant que la réalité de ce harcèlement téléphonique. Je salue au passage le travail du rapporteur et tiens à dire à la commission que je soutiens cette proposition de loi.

M. Nicolas Turquois. Je suis sensible à ce qu’ont dit MM. Guillaume Kasbarian et Nicolas Démoulin sur les petits commerçants. Dans mon secteur, les sociétés qui font du contrôle technique automobile téléphonent, par exemple, à leurs clients qui n’ont pas de téléphone portable pour leur rappeler la date du dernier contrôle de leur véhicule. À titre personnel, ces rappels m’ont servi plusieurs fois.

M. Pierre Cordier, rapporteur. L’article 1er ne vise pas du tout à interdire le démarchage téléphonique. Le client qui aura fait venir un artisan chez lui pour lui faire faire des travaux ou qui aura fait appel à une société de contrôle technique aura simplement à donner expressément son accord, sur le contrat le liant à l’artisan ou à la société, pour pouvoir être rappelé par la suite. Quand j’étais étudiant, j’avais une voiture qui avait beaucoup de kilomètres au compteur. J’avais alors apprécié que l’entreprise qui m’avait fait mon premier contrôle technique me rappelle avant l’échéance du suivant mais le dispositif que nous proposons n’existait pas. Aujourd’hui, il suffira de cocher la case adéquate pour être recontacté par tel artisan ou commerçant.

S’agissant du porte-à-porte, j’ai toujours réussi à me faire élire lors des scrutins dans lesquels j’étais le candidat sortant grâce cette méthode, cher collègue. Ce n’est donc certainement pas moi – qui ai fait des kilomètres et des kilomètres pour aller voir mes concitoyens et essayer de les convaincre – qui vais remettre en cause cette possibilité. Ce type de démarche n’est pas commercial mais politique. Soyez rassuré !

Lorsque vous avez voté le projet relatif au RGPD, je ne vous ai pas entendus remettre en cause l’idée d’accord exprès du client. Ce texte gouvernemental me paraît être un bon parallèle avec la proposition de loi qui vous est soumise aujourd’hui. Comme vous, je suis très attaché à l’emploi. Comme vous, je pense que les petits commerçants et les petits artisans doivent pouvoir continuer à démarcher. Simplement, si je leur donne mon accord pour le faire, cela leur évitera de faire « chou blanc ».

M. Daniel Fasquelle. À entendre M. Pierre Cordier, on voit le travail de fond qu’il a fait : ses réponses sont de qualité.

J’ai été choqué que notre collègue Guillaume Kasbarian parle de démagogie s’agissant de l’article 1er de cette proposition de loi. J’aimerais bien qu’il retire ce mot tout à fait déplacé au regard du travail effectué et de la qualité de nos échanges depuis le début de l’examen de ce texte.

La commission adopte l’amendement CE4.

L’article 1er est ainsi supprimé.

En conséquence, les amendements CE11 et CE12 du rapporteur tombent.

Article 2
(art. L. 221-16 du code de la consommation)
Précision du contenu des appels de démarchage commercial

1.   L’état du droit

L’article L. 221-16 du code de la consommation dispose que « le professionnel qui contacte un consommateur par téléphone en vue de conclure un contrat portant sur la vente d’un bien ou sur la fourniture d’un service indique au début de la conversation son identité, le cas échéant l’identité de la personne pour le compte de laquelle il effectue cet appel et la nature commerciale de celui-ci ».

Toutefois, le professionnel n’est, à l’heure actuelle, pas tenu de préciser le nom de la personne morale qui l’emploie, si celle-ci est distincte de la personne pour le compte de laquelle il effectue l’appel. En outre, la mention « le cas échéant » seulement de la personne pour laquelle il effectue l’appel peut être interprétée de manière extensive.

2.   Les dispositions de la proposition de loi

L’article 2 propose une nouvelle rédaction de l’article L. 221-16 du code de la consommation, pour rendre obligatoire, dès le début de l’appel, la mention de l’identité de la personne qui appelle, de l’identité de la personne morale qui l’emploie, de l’identité de la personne pour laquelle l’appel est effectué si elle est distincte, et de la nature commerciale de l’appel. Il doit en résulter une meilleure information du particulier, et une plus grande facilité à identifier la nature commerciale de l’appel.

Comme indiqué par la DGCCRF, cet article complète utilement le droit existant, et est parfaitement compatible avec ce droit. Il renforce les exigences en matière de transparence.

3.   La position de la commission

La commission a adopté un amendement de M. Démoulin. Cet amendement complète utilement l’article 2 de la proposition de loi, en ce qu’il impose aux personnes contactant par téléphone un particulier à des fins de démarchage commercial, d’indiquer, en plus des informations déjà mentionnées dans l’article 2, l’objet social de la société qui les emploie. Il doit en résulter une plus grande information des particuliers démarchés, et une plus grande capacité à identifier la nature commerciale de l’appel.

*

*     *

La commission examine l’amendement CE1 de M. Nicolas Démoulin.

M. Nicolas Démoulin. Il est défendu.

M. Pierre Cordier, rapporteur. Je suis défavorable à votre amendement qui a pour effet – si ce n’est pour objet – de limiter les obligations de présentation initiale aux seules entreprises de démarchage, c’est-à-dire aux centres d’appel. Cela conduirait à ce que les autres entreprises, de tous types, appelant pour faire du démarchage, ne soient pas obligées de décliner leur identité, le nom de la personne morale qui les emploie et la nature commerciale de l’appel.

Vous mentionnez, dans l’exposé sommaire, votre volonté de ne pas sanctionner les PME qui font du démarchage. Toutefois, bien souvent, ce ne sont pas des PME qui font ce démarchage mais de très grandes entreprises, notamment dans le domaine de l’énergie ou des communications. Il me semble donc nécessaire que toutes les entreprises qui passent des coups de téléphone à des fins commerciales, qu’elles soient petites ou grandes, se présentent de manière explicite. Il en va de la bonne information et du bon discernement du consommateur.

En outre, la rédaction que vous proposez s’insère mal dans le dispositif.

Mme Annaïg Le Meur. Notre groupe partage l’avis du rapporteur, considérant, d’une part, qu’il n’est pas forcément aisé de définir ce qu’est une entreprise de démarchage et, d’autre part, que les grandes entreprises se livrent également au démarchage téléphonique.

L’amendement est retiré.

La commission examine, en discussion commune, les amendements CE5 et CE3 de M. Nicolas Démoulin.

M. Nicolas Démoulin. Outre le fait que la personne qui démarche par téléphone doit d’emblée décliner son identité – et j’entends sa réelle identité, et non un nom d’emprunt supposé être mieux reçu, pratique insupportable qu’il faut absolument interdire – je propose que soit également annoncé l’objet social de la société.

L’amendement CE5 va plus loin et propose notamment que, lorsque une société est dénommée par un sigle, ce sigle soit développé, de manière à éviter toute confusion avec des entreprises de renom, confusion sur laquelle n’hésitent pas à jouer les personnes pratiquant ce type de démarchage.

M. Pierre Cordier, rapporteur. Je suis favorable à l’amendement CE5, qui me paraît apporter une précision nécessaire. Il peut, en effet, être souhaitable que la personne qui appelle ne mentionne pas uniquement son nom et celui de son entreprise, mais également l’objet social de l’entreprise qui l’emploie.

De même, il est nécessaire que les sigles soient développés. Cela permettra, une fois encore, de clarifier la nature commerciale de l’appel, et d’éviter une tromperie du consommateur par l’utilisation d’un nom d’entreprise équivoque.

En conséquence, je suis plutôt défavorable à l’amendement CE3.

Mme Annaïg Le Meur. Notre analyse est différente. Nous estimons en effet que l’ajout de l’adresse du siège social de la société à l’origine du démarchage téléphonique à la liste des informations à communiquer aux consommateurs comporte un risque de discrimination à l’égard de pays tiers, ce qui pourrait poser problème au regard du principe européen de la libre prestation de services.

Nous sommes donc défavorables à l’amendement CE5, mais favorables à l’amendement CE3.

La commission rejette l’amendement CE5.

Puis elle adopte l’amendement CE3.

M. Pierre Cordier, rapporteur. Avant que nous mettions l’article 2 aux voix, je voudrais rappeler qu’il porte sur le contenu de l’appel de démarchage et précise que le démarcheur devra se présenter dans le cadre de sa démarche commerciale. Ce n’est pas le cas aujourd’hui, et le démarcheur évite au contraire soigneusement de donner d’emblée le nom de sa société et l’objet de son appel, afin d’éviter qu’on lui raccroche au nez. L’idée est donc que la personne qui reçoit un coup de téléphone de démarchage sache à quel interlocuteur elle a affaire.

Mme Annaïg Le Meur. Notre groupe votera pour cet article.

L’article 2 est adopté.

Après l’article 2

La commission est saisie de l’amendement CE2 de M. Nicolas Démoulin.

M. Nicolas Démoulin. Il s’agit de permettre à la personne ayant été démarchée par téléphone de s’entretenir, dans le cas où elle rappellerait la société, avec son interlocuteur précédent, et non avec une tierce personne. Néanmoins, l’amendement étant mal rédigé, je le retire.

L’amendement est retiré.

Article 3
(art. L. 221-17 du code de la consommation)
Mise en place d’un indicatif unique pour les appels de démarchage commercial

1.   L’état du droit

L’article L. 221-17 du code de la consommation précise les modalités d’utilisation d’indicatif téléphonique pour les appels de démarchage téléphonique. Il dispose ainsi que « lorsqu’un professionnel contacte un consommateur par téléphone dans les conditions prévues à l’article L. 221-16, l’utilisation d’un numéro masqué est interdite ». Il indique que « le numéro affiché avant l’établissement de l’appel en application du premier alinéa est affecté au professionnel pour le compte duquel l’appel est effectué. En cas de rappel du consommateur à ce numéro, ce professionnel s’identifie préalablement à la facturation de toute prestation de services autre que le prix de la communication ». Il indique enfin qu’ « un arrêté conjoint des ministres chargés de la consommation et de l’économie numérique, pris après avis de l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes, définit les tranches de numéro qui ne peuvent être utilisées comme identifiant d’appel par un professionnel qui joint un consommateur, en tenant compte du plafond de tarification et du format de ces numéros ».

Il ne mentionne toutefois pas l’obligation d’utiliser un indicatif unique. Les numéros employés par les démarcheurs sont ainsi multiples, et non identifiables par les consommateurs. En outre, cette absence d’indicatif unique ne permet pas de lutter contre des pratiques frauduleuses telles que l’usurpation de numéro. Ainsi, alors même que depuis la loi de 2014 relative à la consommation, les sociétés pratiquant le démarchage téléphonique n’ont plus le droit de passer des appels en numéro masqué et que le numéro qu’elles affichent doit permettre de rappeler le prestataire du produit (et non le centre d’appel), certaines entreprises parviennent à afficher sur le téléphone du destinataire un autre numéro que le leur, afin de ne pas être identifiées ou de cacher le fait qu’elles appellent de l’étranger. Cette technique, appelée « spoofing », est assez répandue et facile à mettre en œuvre. Elle permet notamment de contourner l’utilisation de bloqueurs d’appels : ces boitiers, que les particuliers peuvent installer sur leur ligne (entre la prise murale et le téléphone) et paramétrer afin de bloquer les numéros masqués, les numéros appelant de l’étranger, ou certains numéros enregistrés, ou de manière à n’autoriser que les numéros de leurs proches ou émis depuis une zone géographique définie, perdent toute efficacité si les démarcheurs modifient les numéros pour les faire passer pour des appels locaux. De même, la fonction permettant que le dernier numéro ayant appelé ne puisse plus rappeler n’est plus pertinente si les démarcheurs changent régulièrement de numéro.

2.   Les dispositions de la proposition de loi

L’article 3 a pour objet de faire relever du champ de l’arrêté mentionné à l’article L. 221-17 la mise en place d’un indicatif unique pour l’ensemble des appels de démarchage. En effet, cette mesure ne relève pas du domaine de la loi, mais doit trouver sa place au sein de cet arrêté.

Cette mise en place d’un indicatif empêcherait les démarcheurs téléphoniques de contourner certaines dispositions légales ainsi que les dispositifs physiques d’opposition au démarchage et garantirait une meilleure identification du démarchage par les particuliers.

Comme mentionné par l’UFC-Que Choisir, auditionné par votre rapporteur, cet article « va dans le bon sens », celui d’une plus grande « protection des consommateurs ».

Votre rapporteur propose un amendement de précision juridique.

3.   La position de la commission

La commission a adopté, après un avis de sagesse du rapporteur, un amendement présenté par M. Démoulin, limitant l’obligation de recourir à un indicatif unique aux seules entreprises de démarchage, ou pour lesquelles le démarchage constitue l’activité principale. Il s’agit de ne pas pénaliser les petites et moyennes entreprises en les contraignant à avoir recours à un numéro de téléphone spécifique pour leurs opérations de démarchage.

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*     *

La commission est saisie de l’amendement CE9 du rapporteur.

M. Pierre Cordier, rapporteur. L’article 3 prévoit de mettre en place un indicatif unique pour le démarchage téléphonique, de manière à permettre aux particuliers de repérer les appels à vocation commerciale.

L’amendement CE9 est un amendement de précision.

Mme Annaïg Le Meur. Nous sommes favorables à cet amendement. S’agissant de l’article, nous avons des doutes sur la faisabilité de cette mesure.

La commission adopte l’amendement.

La commission est saisie de l’amendement CE6 de M. Nicolas Démoulin.

M. Nicolas Démoulin. On peut penser qu’une proportion importante de personnes voyant s’afficher un indicatif spécifique sur leur téléphone choisira de ne pas répondre, ce qui risque de porter préjudice aux petites et moyennes entreprises qui prospectent des clients. Afin que ces PME ne se trouvent pas sanctionnées, je propose avec l’amendement CE6 de limiter le dispositif de l’indicatif unique aux seuls centres d’appel ou entreprises de démarchage.

M. Pierre Cordier, rapporteur. Je vous rassure, Monsieur Nicolas Démoulin, ce dispositif ne vise pas les petites entreprises locales, qu’il s’agisse du contrôle technique ou du menuisier qui a déjà effectué des travaux chez vous et veut vous proposer d’en faire d’autres : si ces entreprises contactent un client se trouvant déjà dans leurs fichiers, c’est parce qu’il a coché, dans le cadre d’un précédent contrat, la case « J’accepte d’être démarché par l’entreprise unetelle »…

M. Nicolas Démoulin. C’est bien pourquoi mon amendement ne vise que la prospection, c’est-à-dire la recherche de nouveaux clients !

M. Pierre Cordier, rapporteur. En tout état de cause, je suis défavorable à votre amendement, qui a pour objectif de limiter l’indicatif unique aux centres d’appel ou aux entreprises dont l’activité principale est le démarchage téléphonique.

En effet, il me semble nécessaire que les particuliers puissent identifier facilement tous les appels de démarchage, y compris lorsque ceux-ci sont opérés par des entreprises dont ce n’est pas l’activité principale. Là encore, je tiens à rappeler que dans bien des cas, ce ne sont pas des PME qui démarchent, mais de grandes entreprises.

Il ne serait pas difficile à ces entreprises de disposer d’un numéro de téléphone pour leurs activités variées, et d’un numéro de téléphone distinct, précédé d’un indicatif identifiable, pour leurs activités de démarchage.

M. Nicolas Turquois. En milieu rural, il est très fréquent que de petites entreprises commencent leur activité en procédant à un démarchage ciblé sur les communes qui les entourent, afin de se constituer une première clientèle avant que le bouche-à-oreille ne prenne le relais. Il ne serait pas opportun de les freiner dans leur installation en les empêchant de procéder à ce démarchage.

Mme Annaïg Le Meur. Notre groupe est favorable à l’amendement CE6 de M. Nicolas Démoulin, consistant à réserver l’indicatif unique à de grandes entreprises identifiables, et votera en faveur de cet amendement.

M. Pierre Cordier, rapporteur. Cette question mérite sans doute d’être étudiée de manière plus approfondie avant l’examen du texte en séance publique.

La commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 3 modifié.

Article 3 bis (nouveau)
(art. L. 223-1 du code de la consommation)
Interdiction du démarchage téléphonique en cas de relations contractuelles préexistantes

La commission a adopté un amendement du rapporteur portant article additionnel après l’article 3.

Cet amendement a pour objet de supprimer l’exception permettant aujourd’hui à des entreprises de démarcher des personnes inscrites sur Bloctel, pour peu qu’elles aient eu avec elles des relations contractuelles préexistantes.

Les personnes et organismes auditionnés par votre rapporteur ont, en effet, regretté une interprétation et une utilisation abusives de cette exception, parfois plusieurs années après la fin du contrat, ou pour un produit n’ayant aucun rapport avec l’objet du contrat initial. Il en résulte un grand nombre d’appels intempestifs, non souhaités par les consommateurs.

Il convenait de supprimer cette exception.

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*     *

La commission examine l’amendement CE13 du rapporteur.

M. Pierre Cordier, rapporteur. Cet amendement a pour objet de supprimer l’exception permettant aujourd’hui à des entreprises de démarcher des personnes inscrites sur Bloctel, pour peu qu’elles aient eu avec elles des relations contractuelles préexistantes.

En effet, cette mention est utilisée de manière abusive, parfois plusieurs années après la fin du contrat, ou pour un produit n’ayant aucun rapport avec l’objet du contrat initial. Il en résulte un grand nombre d’appels intempestifs, non souhaités par les consommateurs.

Il convient donc de la supprimer, ce qui est l’objet de l’amendement CE13.

Mme Annaïg Le Meur. Cette disposition ayant pour effet de renforcer l’action de Bloctel, nous y sommes favorables.

La commission adopte l’amendement.

Article 4
(art. L. 223-2 du code de la consommation)
Accord exprès à la communication des données personnelles lors de la conclusion d’un contrat avec un opérateur de téléphonie

1.   L’état du droit

L’article L. 223-2 du code de la consommation indique que « lorsqu’un professionnel est amené à recueillir auprès d’un consommateur des données téléphoniques, il l’informe de son droit à s’inscrire sur la liste d’opposition au démarchage téléphonique. Lorsque ce recueil d’information se fait à l’occasion de la conclusion d’un contrat, le contrat mentionne, de manière claire et compréhensible, l’existence de ce droit pour le consommateur ».

Une nouvelle fois, le droit en vigueur ne prévoit qu’un droit d’opposition – y compris pour les personnes signant un nouveau contrat avec un opérateur de téléphonie – et non un accord préalable exprès à l’utilisation de leurs données personnelles à des fins commerciales. Quand bien même la mention de ce droit est claire et compréhensible, cela ne saurait constituer une protection satisfaisante des données personnelles.

2.   Les dispositions de la proposition de loi

L’article 4 a pour objet de prévoir qu’à la conclusion d’un contrat entre un consommateur et un opérateur de téléphonie, l’opérateur recueille de manière explicite l’accord du consommateur pour que les informations personnelles collectées à cette occasion soient utilisées à des fins de démarchage téléphonique. Le droit d’opposition est ainsi transformé en accord préalable explicite et l’article 4 complète utilement l’article 1er s’agissant des nouveaux contrats conclus.

Il modifie pour cela le deuxième alinéa de l’article L. 223-2 du code de la consommation pour le rédiger de la manière suivante : « lorsque ce recueil d’information se fait à l’occasion de la conclusion d’un contrat, le contrat recueille  l’accord exprès du consommateur pour être démarché. À défaut d’un tel accord, le numéro ne peut être communiqué pour un usage commercial de démarchage téléphonique ».

3.   La position de la commission

La commission a adopté un amendement de votre rapporteur, précisant le champ que doit recouvrir cet accord exprès : le consommateur doit pouvoir donner son autorisation non seulement au démarchage par l’opérateur avec lequel le contrat est conclu, mais également par toute entreprise à laquelle cet opérateur de téléphonie aurait cédé ses données téléphoniques.

*

*     *

La commission est saisie de l’amendement de suppression CE7 de Mme Annaïg Le Meur.

Mme Annaïg Le Meur. L’opt-in ne pouvant être considéré comme la bonne solution tant que nous ne disposons pas d’une étude d’impact portant sur l’ensemble des entreprises autorisées à pratiquer le démarchage, nous proposons avec l’amendement CE7 de supprimer l’article 4.

M. Pierre Cordier, rapporteur. Si la France était le premier pays à proposer de mettre en place l’opt-in, on jugerait sans doute sa démarche audacieuse, si ce n’est révolutionnaire. Or, comme l’a rappelé M. Daniel Fasquelle, onze pays de l’Union européenne ont déjà fait le choix de ce système. Pour ma part, je tiens beaucoup à l’article 4, que j’estime indispensable pour protéger les consommateurs concluant de nouveaux contrats avec un opérateur téléphonique. Il s’agit pour eux de consentir à être démarchés par cet opérateur, ou par d’autres entreprises auxquelles cet opérateur aurait transmis les données téléphoniques.

Cette disposition ne serait pas du tout de nature à arrêter le démarchage commercial entre une entreprise et son client, dans le cadre d’une relation contractuelle. On le voit aujourd’hui, beaucoup de consommateurs consentent à être démarchés par les entreprises avec lesquelles ils concluent un contrat, notamment par courriel ou par SMS. Il ne fait nul doute que beaucoup cocheraient la case et donneraient leur accord pour être appelés et recevoir des offres promotionnelles ou d’autres propositions d’amélioration de leurs contrats – je n’ai d’ailleurs jamais entendu personne se plaindre d’avoir reçu un appel visant à lui rappeler que le contrôle technique de son véhicule devait être effectué prochainement, ou une proposition d’un artisan local de le faire bénéficier de conditions avantageuses pour la réalisation de travaux.

Prenons garde, mes chers collègues, à ne pas vider ce texte de sa substance en l’amputant de ses articles les plus importants, à savoir les articles 1er et 4. Ce faisant, nous aboutirions à une sorte de « Bloctel 2 » qui, au bout de quelques mois, se révélerait tout aussi inefficace que Bloctel et susciterait donc les mêmes réactions de mécontentement chez nos concitoyens. Certes, quelques améliorations peuvent être apportées au texte, et je peux souscrire aux propositions visant à permettre aux entreprises de recontacter leurs clients, mais il ne faut surtout pas affaiblir cette proposition de loi en la privant d’une partie de sa portée.

M. Daniel Fasquelle. La portée de l’article 4 n’est pas celle de l’article 1er. On trouve désormais au bas de tous les contrats des cases à cocher visant à autoriser la société à envoyer des sollicitations commerciales, sous la forme de courriels ou de SMS, et ce dispositif de l’opt-in répond tout à fait aux besoins et aux attentes des consommateurs, qui peuvent trouver pratique qu’une société leur rappelle qu’ils doivent prochainement faire effectuer le contrôle technique de leur véhicule ou l’entretien de leur chaudière.

Mme Annaïg Le Meur. Je considère que nous n’avons pas assez d’éléments pour voter l’article 4, et que nous avons besoin de réfléchir encore un peu. Aussi, je retire cet amendement pour le retravailler d’ici à l’examen du texte en séance publique. Effectivement, ce n’est pas la même chose quand on a un contrat avec la personne qui appelle.

M. Pierre Cordier, rapporteur. Cette disposition répond aussi à la sollicitation de M. Thierry Benoit s’agissant des démarches  politiques. Quand il mettra en place le mouvement Agir dans sa région, il suffira qu’il informe son éventuel adhérent pour qu’il donne son accord pour être démarché en 2019, 2020 et 2021 si ce mouvement existe toujours, ce que je lui souhaite (Sourires). C’est vrai chez Les Républicains, au parti socialiste ou au parti communiste. Je crois savoir que La République en Marche ne donne pas de carte. Vous ne serez donc pas ennuyés, chers collègues.

M. le président Roland Lescure. L’adhésion est gratuite, voilà tout !

M. Daniel Fasquelle. Vous n’avez pas de carte ?

M. le président Roland Lescure. Monsieur Daniel Fasquelle, on est dans le nouveau monde : on n’a pas besoin d’avoir une carte pour être membre de La République en Marche. Il suffit d’être inscrit. Et l’on ne se fait pas harceler au téléphone : on échange !

L’amendement est retiré.

La commission examine ensuite l’amendement CE15 du rapporteur.

M. Pierre Cordier, rapporteur. Cet amendement a pour objet de préciser le champ de l’article 4 de manière à en limiter les possibilités d’interprétation. Le consommateur concluant un contrat avec un opérateur de téléphonie devra ainsi donner son accord préalable pour pouvoir être démarché, aussi bien par cet opérateur de téléphonie que par toute entreprise à laquelle l’opérateur de téléphonie aurait cédé ces données téléphoniques.

Nous sommes dans le vif du sujet. Les personnes ayant déjà un opérateur téléphonique seront sollicitées, comme dans le cadre prévu dans le texte défendu par Mme la garde des sceaux, Nicole Belloubet, pour donner leur accord. Lorsque vous ferez appel à un nouvel opérateur téléphonique, vous donnerez votre accord pour qu’il puisse vous recontacter dans le cadre d’une démarche commerciale.

Mme Annaïg Le Meur. Vous connaissez nos réticences. Notre groupe s’abstiendra sur cet amendement et sur l’article 4.

M. Nicolas Turquois. Avant que la proposition de loi soit votée, j’indique à mes collègues du groupe UDI, Agir et indépendants que la carte du MoDem est à 50 % jusqu’au 30 juin ! (Sourires.)

Plus sérieusement, nous nous abstiendrons pour les mêmes raisons que celles évoquées par Mme Annaïg Le Meur. Je trouve cette mesure un peu trop radicale, même si j’en comprends l’esprit. J’aurais souhaité une rédaction plus souple.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 4 modifié.

Article 5
(art. L. 226-18-1 du code pénal)
Actualisation des sanctions

1.   L’état du droit

L’article L. 226-18-1 du code pénal dispose actuellement que « le fait de procéder à un traitement de données à caractère personnel concernant une personne physique malgré l’opposition de cette personne, lorsque ce traitement répond à des fins de prospection, notamment commerciale, ou lorsque cette opposition est fondée sur des motifs légitimes, est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende ».

2.   Les dispositions de la proposition de loi

L’article 5 met en cohérence l’article L. 226-18-1 du code pénal avec les dispositions de la proposition de loi, en mentionnant qu’est sanctionné non pas le fait de procéder à un traitement de données personnelles concernant une personne physique malgré son opposition, lorsque ce traitement est opéré à des fins commerciales, mais le fait de procéder à un traitement de données personnelles concernant une personne physique sans que la personne physique concernée n’ait donné son accord préalable.

L’article L. 226-18-1 du code pénal tel que modifié par la proposition de loi serait donc ainsi rédigé : « le fait de procéder à un traitement de données à caractère personnel concernant une personne physique sans que cette personne physique n’ait donné son accord préalable et écrit pour que ses données soient utilisées, lorsque ce traitement répond à des fins de prospection commerciale est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 300 000 euros d’amende ».

Il faudra toutefois que les contrôles soient suffisamment fréquents et les sanctions effectivement appliquées pour que leur effet dissuasif soit significatif.

Votre rapporteur propose également d’augmenter les sanctions actuellement imposées aux opérateurs démarchant une personne pourtant inscrite sur le dispositif Bloctel, pour porter cette sanction de 75 000 € à 375 000 € pour les personnes morales, et de 15 000 € à 315 000 € pour les personnes physiques. Cette disposition a semblé recueillir l’accord de la DGCCRF. Elle fait l’objet d’un amendement portant article additionnel.

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*     *

M. Pierre Cordier, rapporteur. L’article 5 actualise et augmente les sanctions. – c’est un élément qui a été évoqué par les parlementaires de la majorité et de l’opposition – applicables en cas de traitement des données téléphoniques d’une personne n’ayant pas donné son accord.

La commission adopte l’article 5 sans modification.

Article 6 (nouveau)
(art. L. 242-16 du code de la consommation)
Augmentation des sanctions contre les contrevenants au dispositif Bloctel

La commission a adopté un amendement de votre rapporteur, sous-amendé par Mme Annaïg Le Meur, portant article additionnel après l’article 5.

L’article 6 (nouveau) a pour objet de renforcer les sanctions imposées aux opérateurs démarchant des consommateurs ayant manifesté leur refus de l’être en s’inscrivant sur la liste d’opposition Bloctel.

En effet, ces sanctions, actuellement de 15 000 € pour une personne physique et de 75 000 € pour une personne morale, sont trop faibles pour être suffisamment dissuasives et contribuer à la lutte contre le démarchage intempestif. Il convient de les porter, respectivement, à 75 000 et 375 000 €, de manière à garantir plus efficacement le droit du consommateur au respect de ses données personnelles.

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*     *

La commission examine, en discussion commune, les amendements CE10 du rapporteur et CE8 de Mme Annaïg Le Meur.

M. Pierre Cordier, rapporteur. Cet amendement répond aux observations formulées par les parlementaires de la majorité. Il vise à renforcer les sanctions imposées aux opérateurs démarchant des consommateurs ayant manifesté leur refus de l’être en s’inscrivant sur la liste d’opposition Bloctel.

En effet, ces sanctions, actuellement de 15 000 euros pour une personne physique et de 75 000 euros pour une personne morale, sont trop faibles pour être dissuasives. Il convient de les porter respectivement à 315 000 euros et 375 000 euros, de manière à garantir plus efficacement le droit du consommateur au respect de la transmission de ses données personnelles.

Mme Annaïg Le Meur. Monsieur le rapporteur, je vous propose de rectifier votre amendement et de fixer à 75 000 euros l’amende à l’encontre des personnes physiques. Les sanctions administratives du code de la consommation doivent être cinq fois plus élevées que celles prévues pour les personnes physiques.

M. Pierre Cordier, rapporteur. Le montant passerait donc de 15 000 euros à 75 000 euros pour les personnes physiques, et de 75 000 euros à 375 000 euros pour les personnes morales. Je suis d’accord.

La commission adopte l’amendement CE10 ainsi rectifié.

En conséquence, l’amendement CE8 tombe.

La commission adopte enfin l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

M. Pierre Cordier, rapporteur. Monsieur le président, je vous remercie pour la manière dont vous conduisez les débats. Nous venons de prouver que nous pouvons être efficaces dans un temps relativement limité. Je remercie également les parlementaires qui ont permis d’enrichir le texte. Je reste bien sûr très attaché à l’article 1er et je ne manquerai pas, d’ici à l’examen du texte en séance publique, de consulter, d’échanger avec tous les parlementaires de la majorité pour trouver un accord afin que nous puissions adopter les cinq articles de cette proposition de loi. (Applaudissements.)

M. le président Roland Lescure. Je vous engage à travailler aussi sur l’article 4 car son adoption en séance publique n’est pas assurée.

 


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Liste des personnes auditionnées par le rapporteur

Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes

M. Paul-Emmanuel Piel, chef du bureau « médias, des télécommunications, des biens et des services culturels »

M. Philippe Guillermin, chef du bureau de la politique de protection des consommateurs et de la loyauté

Syndicats des professionnels des centres de contact

M. Patrick Dubreil président

Syndicat national de la communication directe

M. Éric Huignard, président

UFC - Que Choisir ? *

Mme Karine de Crescenzo, responsable des relations institutionnelles

M. Guilhem Fenieys, chargé de mission relations institutionnelles

Fédération française des télécoms

M. Thomas Puijalon, responsable des affaires publiques du groupe ALTICE SFR

M. Anthony Colombani, directeur des affaires publiques de Bouygues Télécom

Mme Alexandra Laffitte, chargée de mission de la fédération française des télécoms

Mme Claire Chalvidant, directrice des relations institutionnelles chez Orange

M. Olivier Riffard, directeur des affaires publiques de la fédération française des télécoms

Mme Violaine Godet, Orange

 

 

* Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire des représentants d’intérêts de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), qui vise à fournir une information aux citoyens sur les relations entre les représentants d’intérêts et les responsables publics lorsque sont prises des décisions publiques.


([1]) Amendement n° 337, après l’article 43 : « Dans un délai de six mois suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport évaluant le dispositif Bloctel et préconisant des modifications législatives pour protéger les consommateurs du démarchage commercial téléphonique abusif ».

([2]) Sur ces réclamations, il convient de noter qu’environ 34 % relèvent effectivement du démarchage commercial. 44 % relèvent de la pratique du « Ping Call » et 22 % d’appels par des robots (cf. encadré), soit des pratiques frauduleuses, non liées à du démarchage commercial, et qui, par conséquent, ne rentrent pas dans le périmètre de Bloctel.