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N° 1270

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 3 octobre 2018.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SUR LA PROPOSITION de loi visant lorientation pour lavenir de la santé,

 

 

tome i

avant-propos, commentaires darticles et annexes

 

 

Par M. Jean-Carles GRELIER,

 

 

Député.

 

——

 

 

 

 

 

Voir le numéro :

Assemblée nationale :  1229.

 


 

 


—  1  —

SOMMAIRE

___

Pages

AVANT-PROPOS

I. Replacer la prévention et le patient au cœur de notre politique de santé

A. Développer la prévention pour permettre à chacun de réaliser son potentiel de santé

B. Privilégier lapproche préventive tout en remettant le patient au cœur du système de santé

1. Reconnaître le rôle clé de la prévention et linscrire dans une perspective pluriannuelle

2. Renouveler la gouvernance de la prévention

3. Améliorer la formation des professionnels de santé en matière de prévention et déducation à la santé

4. Promouvoir la santé dès le plus jeune âge

5. Intégrer les actions de prévention dans un « parcours de prévention » individualisé, au financement adapté

II. Améliorer laccès à la santé et la qualité des soins pour tous les citoyens

A. Un système de santé segmenté et peu adapté aux prises en charge complexes

B. Encourager de nouveaux modes dexercice et de financement et restaurer la confiance des professionnels de santé

1. Agir sur le recrutement et la formation des professionnels de santé

2. Développer de nouvelles approches de la médecine favorisant la transversalité et améliorant les prises en charge complexes

3. Améliorer laccès aux soins grâce à un financement adapté

4. Sécuriser les conditions dexercice des professionnels de santé

5. Améliorer laccès aux soins

commentaires darticles

TITRE Ier Pour une politique de prévention globale et ambitieuse

Article 1er Faire de la prévention la grande cause nationale pour 20182022

Chapitre Ier La gouvernance de la prévention

Article 2 Nouvelle gouvernance et élargissement des missions de lAgence nationale de santé publique

I. Santé publique France : une agence nouvelle À consolider

II. Le dispositif proposÉ

A. Placer Santé publique France sous la tutelle du Premier ministre

B. Élargir le pÉrimÈtre dintervention de SantÉ publique France

1. Stratégie nationale de prévention

2. Prévention et formation en matière de santé mentale

3. Coordination et suivi en matière de prévention

4. Éducation thérapeutique et actions de sensibilisation

C. Revaloriser les moyens de Santé publique France et repenser les modalités de suivi de ses actions

Article 3 Informations relatives au parcours individuel de prévention au sein du dossier médical partagé

Chapitre II La formation à la prévention en santé et à léducation à la santé

Article 4 Enseignement obligatoire relatif à la prévention au cours des études supérieures médicales, paramédicales ou sportives

Article 5 Enseignement obligatoire relatif à la prévention dans les écoles primaires, collèges, lycées et centres de formation des apprentis

Article 6 Actions de prévention et de dépistage des troubles visuels et bucco-dentaires

TITRE II De la modernisation des formations médicales et paramédicales

Chapitre Ier La réforme des études médicales

Article 7 Repenser le mode de sélection des étudiants en fin de PACES

Article 8 Encourager les stages extrahospitaliers au cours des études de médecine

Article 9 Patient-formateur

Article 10 Création dun diplôme détudes spécialisées et dune formation spécialisée de médecine polyvalente hospitalière

1. La médecine « polyvalente » : un besoin croissant à lhôpital, mais qui souffre dune absence de reconnaissance statutaire

2. La création dune spécialité de médecine polyvalente hospitalière

3. La formation spécialisée transversale de médecine polyvalente hospitalière

Chapitre II La réforme des études paramédicales

Article 11 Création de conférences pédagogiques communes aux professions paramédicales

Article 12 Création dun statut dinfirmier de pratiques avancées

1. Les infirmiers, un maillon essentiel du système de santé en mal de reconnaissance

2. La création dun diplôme dÉtat dinfirmier en pratique avancée (DEIPA) à lété 2018 : une réforme attendue mais inachevée

3. Le dispositif proposé

a. Création du statut dinfirmier de pratiques avancées

b. Niveau de rémunération

c. Entrée en vigueur

TITRE III Pour un accès à la santé pour tous, plus proche et plus rapide

Chapitre Ier Les villages de la santé

Article 13 Création des villages de la santé

a. Objet et missions des villages de la santé

b. Statut

c. Périmètre

d. Modalités de contractualisation

e. Gouvernance et financement

f. Modalités de financement

g. Dispositions dérogatoires

Chapitre II Dispositions diverses

Article 14 Internats territoriaux

Article 15 Conférences territoriales de santé

1. Missions des conférences territoriales de santé

2. Périmètre et composition

Article 16 Accorder un droit de prescription aux médecins coordonnateurs en EHPAD

1. Le médecin coordonnateur en EHPAD : une fonction récente aux pouvoirs limités

2. Le dispositif proposé

TITRE IV Modernisation de lexercice libéral de la médecine

Chapitre Ier Les négociations conventionnelles

Article 17 Suppression dune obligation de transmission dinformations et de propositions à la commission des équipements matériels lourds dimagerie médicale

Article 18 Modalités dapplication de la convention entre lUNCAM et les syndicats représentatifs des médecins libéraux

Article 19 Clause dindexation au sein de la convention entre lUNCAM et les syndicats représentatifs des médecins libéraux

Chapitre II Mesures diverses

Article 20 Conditions de détention des sociétés créées par des professionnels de santé

Article 21 Exercice de la médecine par un médecin remplaçant retraité

1. Le cumul emploi-retraite des médecins

2. Le dispositif proposé

Article 22 Protection des professionnels de santé en cas dagression ou doutrage

1. Les professionnels de santé, des personnels particulièrement exposés au risque dagression

2. Assimiler les professionnels de santé à des personnes chargées dune mission de service public pour améliorer leur protection en cas doutrage

TITRE V Innovation et données de santé

Article 23 Intégration des données relatives à la prévention au sein des données de santé

Article 24 Faciliter laccès aux données de santé

TITRE VI Financement

Article 25 Projet de loi de programmation en santé

1. De la nécessité dinscrire les politiques de santé dans une perspective de long terme

2. Le dispositif proposé

Article 26 Paiement forfaitaire au parcours de soins

1. La rémunération à lacte des professionnels et établissements de santé, un mode de rémunération inadapté à la prise en charge de certaines pathologies

2. Instaurer une rémunération forfaitaire au parcours de soins

a. Le dispositif proposé

b. Les avantages attendus

Article 27 Définition du contenu du panier de garanties collectives pris en charge dans le cadre des contrats collectifs dassurance complémentaire

1. Les contrats dassurance complémentaire dentreprise

2. Le dispositif proposé

Article 28 Gage

annexe  1 : Liste des personnes auditionnées par lE rapporteur

annexe  2 : Liste des textes susceptibles d’être abrogés ou modifiés à l’occasion de l’examen de la proposition de loi


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   AVANT-PROPOS

La Nation garantit à chaque citoyen « la protection de la santé ». Cet engagement, proclamé solennellement par le préambule de la Constitution de 1946, répond à l’une des attentes principales et ô combien légitime des Français : être en mesure de vivre, en bonne santé, le plus longtemps possible.

Pourtant, notre système de santé traverse aujourd’hui une crise majeure, reflet d’un système de santé construit au sortir de la Seconde Guerre mondiale qui n’a pas su s’adapter aux défis du XXIe siècle. Alors que ce modèle, « centré sur lhôpital et la prise en charge des soins aigus, modèle dans lequel soins, prévention et médico-social relèvent de sphères distinctes » ([1]), a permis pendant des décennies à la France de s’enorgueillir de posséder l’un des systèmes de santé les plus performants au monde, ce modèle n’est pas parvenu à se transformer à temps pour répondre aux nouveaux enjeux que représentent le vieillissement démographique et la montée en charge des maladies chroniques.

En conséquence, l’accès à la santé qui, selon la définition de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), représente un « état de complet bien-être physique, mental et social », est désormais défaillant. La politique de prévention et de promotion de la santé, encore peu développée et peu organisée en France, en porte sûrement une partie de la responsabilité. L’incapacité de notre système de santé à s’adapter aux récentes transformations démographiques, technologiques ou sociales, expliquent certainement quant à elle les inégalités sociales et géographiques d’accès aux soins ainsi que la dégradation de la qualité des soins.

En premier lieu, alors que la prévention a constitué historiquement le socle du développement de notre système de santé en se fondant sur le triptyque : hygiénisme, vaccination et lutte contre les fléaux sociaux, depuis plusieurs décennies, au profit du développement de la sécurité sociale, de la généralisation de l’accès aux soins et des fulgurants progrès médicaux, la prévention est devenue le parent pauvre de notre système de santé.

Il serait évidemment erroné et irrespectueux à l’égard de ceux qui s’attachent quotidiennement à développer la prévention, d’affirmer que rien n’a été fait en cette matière. Mais, alors qu’une politique volontariste en matière de prévention, notamment chez les plus jeunes, permet d’éviter ou a minima de retarder la survenance de certaines affections chroniques, force est de constater que, d’une part, les financements alloués à ce pan de notre système de santé ne sont pas à la hauteur des enjeux et, d’autre part, que l’absence de gouvernance et de coordination interministérielle des actions conduites en matière de prévention et d’éducation à la santé nuit à leur qualité.

En second lieu, les agrégats dans lesquels s’inscrit notre système de santé se sont transformés ces dernières années. Les médecins font face au vieillissement inexorable de la démographie médicale, conséquence des choix politiques de restriction du recrutement de ces professionnels effectués il y a plusieurs décennies par nos gouvernements, qui se traduit par la disparition de l’offre de soins dans certains territoires.

Concomitamment, les modes d’exercice des nouveaux médecins se métamorphosent : la féminisation de la profession, la meilleure information des patients grâce à internet, l’essor des nouvelles technologies offrant de nouvelles possibilités ou encore la croissance exponentielle des maladies chroniques plaident pour davantage de coordination entre les professionnels de santé.

Face à ces transformations démographiques, technologiques, sociales et sanitaires, l’exigence de qualité des soins et d’accessibilité des soins implique en effet une rénovation urgente des modalités de prise en charge des patients, grâce à une réorganisation de la médecine de ville et au développement de l’exercice regroupé entre professionnels de santé. Seule une réponse rapide, coordonnée et adaptée à ces défis permettra de résoudre la problématique de l’accès aux soins et de freiner la dégradation de la qualité des soins.

Ces constats, loin d’être récents, sont bien connus et partagés. Si les solutions proposées pour y répondre sont abondantes – et le présent texte en distille quelques-unes jugées prioritaires –, l’auteur et rapporteur de cette proposition de loi est néanmoins convaincu que la réussite de la transformation de notre système de santé résultera de sa capacité à « se penser, simaginer, se construire et se déployer à partir du patient » ([2]), et non à partir des structures ou des systèmes existants. Ainsi, la compréhension par chaque individu des enjeux de la santé et ce, dès le plus jeune âge grâce aux actions de prévention, est sans nul doute la clé de l’adhésion de l’individu – également sujet et acteur de santé – à un parcours de santé personnalisé, élaboré en lien avec les professionnels de santé, privilégiant avant tout la proximité avec son domicile.

Outre le fil directeur que constitue l’attention portée au patient au sein de cette proposition de loi, une attention toute particulière est également apportée aux professionnels de santé, premiers affectés par la crise de notre système de santé. Confrontés de plein fouet à la désertification médicale et à l’exigence de renouvellement des pratiques, les médecins, mais également les professionnels paramédicaux – infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, etc. – seront les leviers essentiels de la transformation de notre système de santé. Car le rapporteur en est bien conscient : aucune réforme systémique n’aboutira sans l’adhésion pleine et entière des professionnels de santé. En toute logique, cette proposition de loi s’attache donc à défendre des mesures respectueuses de leur statut et de leurs compétences, sans pour autant faire fi de l’urgence de la transformation, qui exige, comme l’expliquait il y a peu l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), « que les signes donnés, par les pouvoirs publics et les professionnels eux-mêmes, soient désormais ceux dun réel basculement vers un exercice médical différent, respectueux à la fois des équilibres historiques entre médecine libérale et médecine salariée et de la nécessité de promouvoir les logiques interprofessionnelles et leurs outils » ([3])

Cette proposition de loi est le fruit de nombreuses consultations menées par le rapporteur – complétées par une dizaine d’auditions et de tables rondes dans le cadre de l’élaboration de ce rapport – et qui ont donné lieu, en amont du dépôt du texte, à la rédaction d’un livre blanc rassemblant 28 propositions ([4]). Le texte en formule également 28, qui ne reprennent pas nécessairement les formulations du livre blanc mais en respectent les fils directeurs.

En préambule, parce que les acteurs de la santé ainsi que les patients gagneraient à bénéficier d’une plus grande visibilité des politiques de santé, la proposition de loi propose à l’article 25 d’inscrire les mesures prises en matière de santé dans une perspective prospective et stratégique pluriannuelle, grâce à l’élaboration tous les cinq ans d’un projet de loi de programmation en santé, soumis à l’évaluation du Parlement.

La proposition de loi s’efforce ensuite :

 de placer le patient au centre du système de santé, et d’ériger la prévention et l’éducation à la santé comme priorités absolues de notre système de santé, d’une part (I) ;

 de présenter des solutions pour lutter contre les inégalités dans l’accès aux soins et la dégradation de la qualité des soins (II), qui recouvrent des actions à conduire en matière de formation, de financement, de simplification administrative ou en termes d’évolution des pratiques médicales.

I.   Replacer la prévention et le patient au cœur de notre politique de santé

A.   Développer la prévention pour permettre à chacun de réaliser son potentiel de santé

Le premier défi auquel la proposition de loi s’attache à répondre est celui de la prévention et de la promotion de la santé, car ces deux objectifs permettent de donner à tous les individus le moyen de réaliser pleinement leur potentiel de santé.

Définie pour la première fois en droit positif par la loi du 4 mars 2002, la politique de prévention « a pour but daméliorer létat de santé de la population en évitant lapparition, le développement ou laggravation des maladies ou accidents et en favorisant les comportements individuels ou collectifs pouvant contribuer à réduire le risque de maladie et daccident. À travers la promotion de la santé, cette politique donne à chacun les moyens de protéger et daméliorer sa propre santé. » ([5]).

La prévention se dit ainsi de toute démarche tendant à intervenir en amont d’une pathologie pour éviter ou retarder son apparition, la prendre en charge le plus précocement possible, diminuer au maximum ses effets sur la qualité de vie des personnes atteintes. Trois niveaux de prévention sont généralement distingués : 

 la prévention primaire, qui rassemble l’ensemble des mesures éducatives ou normatives destinées à lutter contre l’apparition de la maladie – par exemple, la diffusion de messages éducatifs permettant d’éviter le risque tabagique ;

 la prévention secondaire, qui consiste notamment en la réalisation d’actions de dépistage permettant une prise en charge thérapeutique précoce ;

 la prévention tertiaire, qui réunit les mesures visant à réduire les déficiences ou handicaps dus à la maladie – par exemple, la prise en charge d’un diabète permettant d’éviter les complications vasculaires.

Or, alors qu’une politique de prévention efficiente permet d’éviter, de retarder ou d’atténuer la survenance de certaines pathologies, et de limiter en conséquence les effets négatifs et les coûts pour la société, les dysfonctionnements et les carences en termes de financement, de gouvernance, de formation des professionnels de santé et de moyens alloués à la prévention en France ne sont pas à la hauteur des enjeux.

Historiquement, notre système de santé s’est fondé sur l’idée que les risques sanitaires sont en grande majorité évitables grâce à la prévention. Mais à partir de la deuxième moitié du XXe siècle, le système de santé s’est détourné des enjeux de prévention, au profit des grandes avancées médicales et de la place centrale accordée à l’hôpital dans l’organisation des soins. La tendance ne s’est pour l’heure jamais inversée, et le rapporteur est convaincu que la préférence accordée à l’approche curative de la santé, au détriment de l’approche préventive, est au moins en partie responsable de la dégradation de notre système de santé.

Ce manque d’investissement dans la politique préventive se traduit tout d’abord dans les statistiques. Ainsi, alors que leur rôle est essentiel pour prévenir les risques de nature professionnelle, le nombre de médecins du travail reste extrêmement faible au regard du nombre de salariés de notre pays : on recensait ainsi 5 524 médecins du travail au 1er janvier 2016 ([6]), soit à peine 2,5 % du total des médecins. Cette situation est vouée à empirer puisque le nombre de postes de médecine du travail pour l’année universitaire 2017-2018 s’élevait à 138 postes sur 8048 postes ([7]), ce qui représente seulement 1,7 % des postes offerts.

Le nombre de médecins scolaires, estimés à 1 770 praticiens en 2015, est tout aussi inquiétant compte tenu du rôle clé joué par ces praticiens en matière de prévention primaire auprès des jeunes enfants. Un rapport de l’Académie de médecine s’alarmait ainsi en 2017 de l’état délétère de la médecine scolaire : « une gouvernance imprécise avec labsence dévaluation et de priorités daction, les visites médicales obligatoires en péril, le nombre de médecins scolaires en diminution inquiétante, labsence déquipe de santé scolaire et un manque de reconnaissance de la médecine scolaire moderne » ([8]).

Ensuite, les modes de financement des professionnels de santé laissent peu de place à la prise en charge des actions de prévention. La tarification à l’acte et à l’activité, privilégiée pour le financement des établissements de santé et des professionnels, est difficilement compatible avec une prise en charge globale du patient incluant la conduite d’actions de prévention au même titre que la dispensation de soins. En effet, les actions de prévention ne sont pas, en soi, lucratives, puisque ce n’est que dans le long terme que s’observent leurs effets.

Depuis plusieurs années, le dispositif de la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP) vise toutefois à encourager les médecins à faire évoluer leurs pratiques en réduisant la part de la rémunération à l’acte pour accentuer celle des forfaits et améliorer la prise en charge de certains volets de la politique de santé. Cependant, le volet relatif à la prévention ne comprend qu’une dizaine d’indicateurs calculés et deux déclaratifs, qui n’emportent pas tous le même succès auprès des professionnels de santé : si le dépistage du cancer colorectal a par exemple connu une importante progression en 2016, tel n’a pas été le cas du dépistage du cancer du sein, pour lequel les actions de dépistage sont en diminution la même année ([9]). Faute de temps médical disponible, l’action de prévention est ainsi souvent délaissée par les médecins au profit d’autres actes.

Mais ces données ne sont que l’illustration d’une absence totale de gouvernance en matière de prévention. Comme l’a souligné le rapporteur, « les politiques de prévention mises en œuvre aujourdhui manquent cruellement dune stratégie globale, dune coordination interministérielle et dune véritable évaluation » ([10]).

La prévention est par nature un domaine pluridisciplinaire : elle a par exemple vocation à s’appliquer dans le domaine sanitaire, environnemental ou encore nutritionnel, en fonction de l’objectif recherché. La mise en place d’une politique de prévention et de promotion de la santé relève ainsi souvent de plusieurs départements ministériels : le ministère de la santé et le ministère de l’agriculture pour la sécurité des produits alimentaires, par exemple, ou le ministère de la santé et celui de l’éducation nationale pour les actions de santé en direction de la jeunesse.

Pour autant, la diversité des acteurs de la santé – pouvoirs publics, professionnels de la santé et des secteurs sociaux et économiques, associations, collectivités locales – pourrait être un atout, comme le relevait déjà l’IGAS il y a une quinzaine d’années : « Toute politique de prévention est par construction polycentrique. Aussi sa mise en œuvre passe-t-elle par une coordination étroite, à tous les échelons, national, régional, local entre tous les services concernés ; et son succès dépend-il, en amont, de la participation de toutes les organisations sollicitées à la définition des objectifs, des stratégies, des moyens à mobiliser ».

En pratique, cependant, l’absence de gouvernance en mesure d’orchestrer l’ensemble de ces acteurs pose un problème d’efficacité et d’illisibilité de l’ensemble du système. Des efforts ont pourtant été réalisés pour combler ce déficit de gouvernance : la création en 2016 de l’agence nationale de santé publique « Santé publique France », se donnait par exemple pour ambition « dêtre au service des populations sur lensemble du champ sanitaire, de la production de connaissance à laction de prévention ou en réponse à une situation de crise » ([11]). Mais les moyens alloués à cette instance, tout comme son absence de positionnement interministériel, n’ont pas suffi à rénover la gouvernance en matière de prévention et de promotion de la santé. 

Les carences de la politique de prévention ont des répercussions considérables en termes d’accès à la santé et d’éducation à la santé. Alors que les dépenses de santé demeurent parmi les plus élevées au monde et que l’étendue de la couverture sociale et sanitaire permet en théorie à chacun d’accéder à la santé, la France « fait partie des pays où les inégalités sociales de mortalité et de santé sont les plus élevées en Europe occidentale et celles-ci nont eu aucune tendance à régresser ces dernières années, contrastant avec lamélioration du niveau moyen de létat de santé » ([12]).

L’espérance de vie à la naissance, par exemple, varie en fonction du sexe et du niveau de vie mensuel : selon l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), plus une personne est aisée, plus son espérance de vie est élevée : parmi les 5 % de personnes les plus aisées, l’espérance de vie à la naissance des hommes est de 84,4 ans en moyenne, contre 71,7 parmi les 5 % les plus pauvres, soit 13 années d’écart ([13]). Outre les difficultés financières, qui peuvent limiter l’accès aux soins, l’INSEE relève que les comportements moins favorables à la santé sont plus fréquents chez les non-diplômés que chez les diplômés : par exemple, 39 % des personnes âgées de 15 à 64 ans sans diplôme fument quotidiennement, contre seulement 21 % des diplômés du supérieur.

Or, plusieurs études de la DREES ont démontré que les inégalités de santé ont la particularité de se former très précocement, dès l’école maternelle pour certains des indicateurs de santé analysés tels que la surcharge pondérale ou la santé bucco-dentaire ([14]). Ces inégalités se développent notamment en l’absence d’actions de prévention destinées à l’ensemble de la population, ou faute de ciblage suffisant à destination des publics prioritaires.

B.   Privilégier l’approche préventive tout en remettant le patient au cœur du système de santé

Prendre résolument le parti de faire de la prévention et de léducation à la santé le fil directeur de la politique de santé, comme le propose cette proposition de loi, vise à rompre avec les schémas de pensée classiques qui considèrent la santé publique et la médecine curative comme deux sphères distinctes et autonomes. En effet, « les stratégies de prévention ne peuvent quêtre globales. Il sagit déviter toute rupture, toute distorsion, entre le dépistage, léducation, la prise en charge, le suivi dune même personne. Le citoyen, comme le malade, nest quun ; ses besoins de santé ne sont pas divisibles à limage de lorganisation administrative » ([15]).

Cette volonté implique avant toute chose de redonner à l’individu la capacité de faire les choix favorables à sa santé, en toute connaissance de cause. Le rapporteur est en effet convaincu, comme l’a affirmé la Charte d’Ottawa il y a plus d’une trentaine d’années, que « la promotion de la santé appuie le développement individuel et social grâce à linformation, à léducation pour la santé et au perfectionnement des aptitudes indispensables à la vie. Ce faisant, elle donne aux gens davantage de possibilités de contrôle de leur propre santé et de leur environnement et les rend mieux aptes à faire des choix judicieux » ([16]).

En conséquence, en vue d’orienter davantage le secteur de la santé vers la promotion de la santé, cette proposition de loi propose en premier lieu de reconnaître solennellement le rôle clé de la prévention, et de l’inscrire dans une stratégie pluriannuelle (1).

Ensuite, parce que la promotion de la santé exige une action coordonnée de l’ensemble des acteurs intervenant dans le champ de la santé, une nouvelle gouvernance interministérielle visant à dépasser les cloisonnements actuels sera mise en place (2).

Pour faire évoluer l’attitude et l’organisation des services et professionnels de santé à l’égard de la prévention, en les recentrant sur la totalité des besoins de l’individu considéré dans son intégralité, la proposition de loi propose également de faire évoluer la formation des professionnels de santé, en intégrant la dimension d’éducation à la santé (3).

Corollaire du développement de la formation en matière de prévention chez les personnels soignants, la formation des enseignants en matière de prévention et d’éducation à la santé sera également rendue obligatoire, en vue de dispenser un enseignement obligatoire de prévention auprès de l’ensemble des élèves des écoles primaires, collèges et lycées (4).

Enfin, des actions de prévention ciblées sur certains publics ainsi que le développement de « parcours de prévention », avec le cas échéant un financement dédié, sont envisagés par la proposition de loi, afin que la nouvelle politique de prévention se fonde sur des valeurs de responsabilité et de participation (5).

1.   Reconnaître le rôle clé de la prévention et l’inscrire dans une perspective pluriannuelle

Pour répondre à l’ensemble des objectifs qui lui sont assignés, la politique de prévention gagnerait à être davantage résolue, constante, et inscrite dans une perspective de long terme.

Afin d’entériner le virage de la politique de santé en faveur de la  promotion de la santé, l’article 1er de la proposition propose donc de faire de la politique de prévention, d’éducation à la santé et d’éducation thérapeutique la « grande cause nationale » pour la période 2018-2022. Cet objectif, décliné au sein d’un plan pluriannuel d’action dénommé « Objectif santé 2022 », pourra être intégré au sein du projet de loi de programmation en santé proposé à l’article 25.

2.   Renouveler la gouvernance de la prévention

La mise en place d’une politique de prévention globale intégrant l’ensemble des actions de prévention menées par les différents acteurs compétents suppose, pour être efficace, un portage au plus haut niveau de l’État, pour dépasser l’étanchéité qui prévaut entre le curatif et le préventif, la ville et l’hôpital ou encore l’assurance maladie et l’État.

En l’état du droit, c’est a contrario une segmentation des compétences en matière de prévention qui a été privilégiée, conséquence de la spécialisation des enveloppes financières résultant de logiques budgétaires et comptables. L’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM), par exemple, est divisé en six sous-catégories (soins de ville, établissements tarifés à l’activité, autres établissements de santé, établissements et services pour personnes âgées, établissements et services pour personnes handicapées, autres modes de prise en charge), qui enferment les acteurs dans des stratégies spécifiques de défense de leurs sphères de compétences, au lieu de privilégier des approches transversales et pluridisciplinaires. Le budget alloué à la prévention est d’ailleurs réparti entre des enveloppes relevant soit de l’État (mission « Santé » du projet de loi de finances), soit de l’assurance maladie.

L’article 2 de la proposition de loi propose en conséquence de poser les fondements d’une nouvelle gouvernance en matière de prévention, en plaçant la tutelle de « Santé publique France » sous l’égide du Premier ministre, et en confiant à cette agence l’ensemble des moyens humains et financiers en charge de la prévention, libre à elle de les répartir dans un second temps entre les différents acteurs de la prévention, qu’elle aura d’ailleurs pour mission de coordonner.

3.   Améliorer la formation des professionnels de santé en matière de prévention et d’éducation à la santé

Lors des auditions préparatoires à l’élaboration de cette proposition de loi, le rapporteur a pu constater que l’attention portée aux actions de prévention et de promotion de la santé au cours des études paramédicales et médicales est particulièrement réduite, voire inexistante dans certains cursus. Or, « léducation à la santé ne se réduit pas, en effet, à la maîtrise, certes indispensables, dun certain nombre de techniques ou de savoir-faire. » ([17]).

Chaque professionnel de santé a en effet un rôle essentiel à jouer auprès de chaque individu, de chaque patient, pour appréhender dans leur intégralité ses habitudes de vie et besoins en soins, et lui proposer, lorsque cela est nécessaire, une prise en charge globale en lorientant, le cas échéant, vers les professionnels compétents. Dailleurs, la plupart des médecins ont déjà une activité de prévention importante. Mais cette dernière est insuffisamment reconnue, identifiée et rémunérée à la hauteur de lenjeu que représente la prévention primaire. De surcroît, les professionnels de santé sont peu préparés à cette nouvelle approche globale du patient en effet, les cours dispensés relatifs à la prévention  ne sont pas sanctionnés par un examen , ce qui invite à repenser en profondeur leur formation.

Daprès lIGAS, « programmer la formation en éducation pour la santé dun grand nombre de professionnels – on pourrait même dire de tous les professionnels de laction éducative, sociale, culturelle et sanitaire – parait une voie plus pertinente pour diffuser la prévention que la spécialisation de quelques-uns, forcément peu nombreux » ([18]). Larticle 4 propose en conséquence dinstaurer un enseignement obligatoire relatif à la prévention pour lensemble des étudiants de formations médicales, paramédicales et sportives.

4.   Promouvoir la santé dès le plus jeune âge

Pour lutter contre l’apparition d’inégalités de santé dès la petite enfance, l’article 5 de la proposition de loi propose la mise en place d’enseignements obligatoires consacrés à la prévention à l’école, et adaptés à chaque public : élèves, collégiens et lycéens. Les enseignants bénéficieront d’une formation spécifique pour dispenser cet enseignement obligatoire.

Le renforcement, dès le plus jeune âge, de la compréhension des enjeux individuels et collectifs inhérents à la santé permettra ainsi aux citoyens de demain de faire des choix pertinents en matière de santé, dans leur intérêt propre mais aussi dans lintérêt général. Cela contribuera également à une meilleure acceptation des messages de prévention, car « linformation, linjonction ou lincantation ne peuvent seules convaincre les individus de changer leurs habitudes. Une modification des comportements passe par une implication de lindividu dans un projet qui le touche » ([19]).

En complément, des actions de dépistage des troubles bucco-dentaires et visuels dans les établissements maternels et primaires seront mises en place à l’école maternelle et primaire (article 6).

5.   Intégrer les actions de prévention dans un « parcours de prévention » individualisé, au financement adapté

Le dernier rapport du Haut conseil pour l’avenir de l’Assurance maladie (HCAAM) considère que « dans un système où le patient a une grande liberté de choix, linclusion réelle des usagers et des patients aux processus de prévention, de soins et de suppléance est non seulement une exigence pour répondre à leurs attentes, mais également une condition indispensable de lamélioration de la pertinence des recours, des performances et de la qualité de notre système de santé » ([20]) .

Longtemps négligée, la place de l’individu et du patient au sein du système de santé doit être repensée pour lui permettre d’être à la fois acteur de sa santé, et de bénéficier d’une prise en charge cohérente, individualisée et adaptable en fonction de l’évolution de ses besoins.

La proposition de loi propose d’utiliser et d’enrichir les outils existants, tels que le dossier médical personnel (DMP), pour mieux suivre l’ensemble des actions et actes réalisés par chaque individu en matière de prévention, dès la naissance et jusqu’à la fin de vie (article 3).

Mieux renseignées dans les systèmes de données de santé, les données relatives à la prévention pourraient ainsi être mises à profit pour développer une meilleure connaissance des carences de la politique de prévention (article 23) ; cela suppose néanmoins de lever au préalable les obstacles administratifs freinant l’accès à ces données (article 24). Plus largement accessibles, dans une approche transparente, les données relatives à la prévention laisseraient ainsi davantage de place au débat public et, le cas échéant, contradictoire.

Confier au patient la responsabilité de gérer son parcours de soins, en lien avec les professionnels et les établissements de santé concernés, constitue par ailleurs l’une des réponses apportées par le texte pour développer la prévention, et sans doute l’une des plus innovantes. L’article 26 introduit ainsi la notion de financement au parcours de soins, afin que certains patients atteints de pathologies chroniques bénéficient d’une prise en charge exhaustive, où la rémunération des établissements et professionnels de santé intervenant dans le cadre du parcours de santé du patient serait décomptée d’une enveloppe initiale alloué au patient pour la réalisation de son parcours de santé. Ce dernier serait géré par le patient lui-même, à partir de sa carte vitale.

II.   Améliorer l’accès à la santé et la qualité des soins pour tous les citoyens

A.   Un système de santé segmenté et peu adapté aux prises en charge complexes

Organisé autour de l’offre de soins au détriment d’une approche globale intégrant la prévention, le système de santé français se caractérise en outre par des modes d’intervention très cloisonnés ainsi qu’un prisme « hôpital » très marqué notamment dans la formation des étudiants en médecine. Alors que cette organisation a permis d’assurer pendant des années un haut niveau de soins, le contexte dans lequel ce système avait été pensé s’est métamorphosé et ce dernier n’est plus adapté à l’évolution des demandes médicales. En particulier, le vieillissement démographique des médecins et l’évolution des pratiques médicales qui en résulte génèrent d’importantes difficultés d’accès aux soins et conduisent à une lente dégradation de la qualité des soins.

Conçu pour traiter en priorité des épisodes de soins aigus et spécialisés, le système de santé se trouve par ailleurs confronté au défi majeur que constitue le développement des pathologies chroniques, qui s’explique notamment par l’évolution des modes de vie et le vieillissement de la population. Environ vingt millions de personnes seraient ainsi atteintes d’au moins une pathologie chronique ; parmi elles, les maladies cardiovasculaires, le diabète, les maladies respiratoires chroniques ou encore les maladies psychiatriques sont en forte croissance, de l’ordre de 2 à 5 % par an selon les pathologies.

Cette évolution nécessite, selon un récent rapport de lIGAS, « une transformation de lorganisation du système de soins, conçu actuellement pour répondre ponctuellement à la demande des patients souffrant de pathologies aiguës, vers un système plus proactif et continu, en mesure par exemple de contacter les patients pour sassurer du suivi de leur plan de soins, et de les accompagner par léducation thérapeutique dans la prise en charge de leur maladie (observance médicamenteuse, mode de vie, respect du parcours de soins, etc.) » ([21]).

La clé de cette transformation, selon ce rapport, « repose sur la capacité de la médecine de ville à prendre en charge de manière organisée patients et populations ». Or, tel qu’il est structuré depuis des décennies, notre système de soins est inadapté pour répondre à ce défi. Les interventions des professionnels de santé en ville, à l’hôpital ou dans le secteur médico-social demeurent segmentées, faisant généralement reposer la gestion des parcours sur les patients et leurs familles. Une meilleure prise en compte de l’enjeu territorial est dès lors absolument indispensable : c’est en raisonnant à partir des spécificités de chaque territoire, en promouvant la coopération interprofessionnelle au sein d’un périmètre donné, que les réformes de la santé parviendront à inverser la tendance actuelle de segmentation des compétences.

D’autres facteurs inhérents à notre système de santé sont responsables d’importants dysfonctionnements dans l’accès aux soins. La démographie des médecins – et notamment des médecins généralistes – est en effet inquiétante : en raison de la faiblesse du nombre de médecins formés jusqu’en 1998, sous l’effet du numerus clausus, les effectifs des médecins ne permettent plus de répondre à la demande de soins. Certains territoires sont particulièrement affectés, tels que les départements des Ardennes, de la Haute-Marne, de la Nièvre et de la Seine-Saint-Denis ([22]).

Conjugué à cette évolution de la démographie médicale, le mode d’exercice des jeunes médecins évolue également au bénéfice notamment d’un meilleur équilibre entre vie personnelle et vie professionnelle : les visites à domicile sont en nette diminution depuis plusieurs années, puisqu’elles ne représentent plus que 10 % de l’activité des médecins généralistes en 2013 contre 14 % en 2005 ; 63 % des nouveaux médecins sont salariés – contre 43 % des médecins en exercice – et deux tiers de ceux qui commencent en tant que libéraux ou en ayant un exercice mixte travaillent comme remplaçants.

En conséquence, les inégalités d’accès aux soins se développent : dans les communes rurales et les zones périurbaines, les populations ont de moins en moins accès au médecin généraliste, pourtant pivot du parcours de soins. Dès lors, les faiblesses d’organisation du système de santé sont pour l’essentiel supportées et compensées par les patients et leur entourage, comme l’a souligné le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie ([23]) : « [les patients] sont en première ligne, et peu armés, lorsque confrontés à des pathologies chroniques ou plurielles, ils se trouvent trop souvent devoir coordonner eux-mêmes des intervenants multiples, sorienter avec peine dans un univers complexe, trouver le bon professionnel ou le bon service et opérer des choix, tout en gérant les complexités administratives ou encore les conséquences de leur pathologie sur leur vie professionnelle ou personnelle ».

Moins de médecins et une mauvaise répartition de ces derniers sur l’ensemble du territoire, davantage de pathologies chroniques rendant les modes habituels de prise en charge des patients obsolètes, la recherche par les patients de solutions alternatives de prise en charge : la crise du système de santé n’est pas sans répercussion sur les conditions de travail des professionnels de santé.

Selon l’IGAS ([24]), « les professionnels eux-mêmes, et notamment les médecins, vivent difficilement cette situation de crise (…). Les symptômes de cette cirse sont bien connus : déformation de « lautorité médicale », diffusion des connaissances parfois vécue comme déqualifiante, cloisonnement du parcours patient qui fragmente aussi lintervention des professionnels et dévalorise lexercice médical, mauvaise gestion du temps médical et dégradation de la qualité au travail, isolement, déclin de lattractivité, etc. »

Pour pallier ces difficultés, lexercice regroupé des professionnels de santé se développe, comme le démontre lessor des maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) par rapport à lexercice libéral en cabinet isolé, moins attractif pour les jeunes médecins : en 2018, près de 20 000 professionnels de santé exercent dans un millier de MSP environ. Mais lexercice regroupé pluriprofessionnel en est encore à ses balbutiements, puisquil concerne moins de 10 % des médecins généralistes et environ 8 % des professionnels paramédicaux ([25]). De plus, le regroupement de ces professionnels reste en France très majoritairement mono-professionnel et de petite taille : les trois quarts des médecins en groupe exercent dans des cabinets médicaux de deux ou trois médecins.

Si les MSP sont en pleine croissance, soutenues en ce sens par les pouvoirs publics, elles ne sont pas exemptes de défauts : en réunissant géographiquement en un même lieu plusieurs professionnels de santé, elles contribuent souvent à assécher l’offre de soins dispensée sur un territoire donné.

De nombreux dispositifs ont été créés par ailleurs depuis les années 2000, de nature tantôt sanitaire – tels que les réseaux de cancérologie – ou relevant du secteur médico-social, comme les centres locaux d’information et de coordination (CLIC) ou les Méthodes d’action pour l’intégration des services d’aide et de soins (MAIA). Mais selon l’IGAS, les activités de ces différents dispositifs « se chevauchent, voire se font concurrence, alors même que certains aspects de la coordination de certains parcours sont souvent non ou peu couverts – par exemple les ruptures liées à la situation sociale des populations en état de précarité sociale ou les interactions entre santé mentale et pathologies somatiques ».

Les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), dernier dispositif en date créé par la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, avaient vocation à dépasser cet écueil en confiant à l’Agence régionale de santé (ARS) le soin d’organiser la prise en charge de patients relevant de parcours de santé complexes et les fonctions d’appui en soutien aux professionnels de santé, afin de prévenir notamment les hospitalisations évitables et les ruptures de parcours. Elles associent des professionnels de santé du premier et du second recours, sur la base d’un projet de santé, pour une meilleure organisation des parcours des patients.

Si l’intention ayant conduit à la naissance de ces structures est louable, en pratique, le dispositif souffre de plusieurs difficultés, soulignées par le rapport de l’IGAS consacré à son évaluation :

 une « modestie du pilotage central » par les ARS, contrastant avec le volontarisme du suivi d’autres actions telles le déploiement des MSP ou, plus récemment, la constitution de groupements hospitaliers de territoire (GHT) ;

 un suivi de type traditionnel dans les ARS (rédaction de guides, cahiers des charges, documents de cadrage) pouvant donner lieu « à des procédures formelles parfois excessivement lourdes et décourageantes au regard des enjeux financiers, même potentiels » ;

 un soutien financier des ARS aux CPTS extrêmement modeste : selon les régions, l’aide à l’élaboration des CPTS est comprise entre 7 000 et 50 000 euros.

En outre, le périmètre relativement restreint de ces communautés – qui excluent les établissements médico-sociaux et l’absence de moyens leur permettant de jouer leur rôle d’animation et d’organisation réduit considérablement le potentiel des CPTS et leur capacité à répondre aux besoins de santé sur le territoire dont elle relève. L’organisation de la prise en charge des patients par l’ARS elle-même risque, de l’avis du rapporteur, d’éloigner les professionnels de santé de ces structures alors que le développement de la coordination entre les acteurs et la progression de l’exercice regroupé sont indispensables. Le faible nombre de communautés d’ores et déjà installées semble malheureusement confirmer cette prédiction : selon l’IGAS, environ deux cents communautés sont à l’état de projet, et seules une vingtaine étaient, au 30 juin 2018, validées par les agences régionales de santé compétentes.

B.   Encourager de nouveaux modes d’exercice et de financement et restaurer la confiance des professionnels de santé

Face à la désertification médicale, au manque de transversalité des prises en charge chroniques entraînant des carences dans les parcours de santé des patients, et face au malaise exprimé par les professionnels de santé, de plus en plus démunis pour affronter ces situations, il est urgent d’agir.

Cette proposition de loi propose en conséquence d’améliorer en premier lieu l’accès et la qualité des soins des patients, grâce au développement de nouvelles pratiques, plus coordonnées, plus cohérentes : l’objectif poursuivi est que chaque citoyen puisse être soigné au plus près de chez lui, le plus rapidement possible, et dans le cadre d’une prise en charge cohérente. Il est  proposé d’autre part de restaurer la confiance des professionnels de santé eux-mêmes dans le système de santé, car ces professionnels accomplissent, chaque jour, un travail de terrain remarquable au plus près des populations. Or, il est indispensable de leur redonner confiance dans le système de santé pour continuer à leur donner les moyens d’exercer dans de bonnes conditions. 

Le texte propose ainsi de réformer le recrutement et la formation des futurs médecins pour leur permettre, dès l’université, de mieux appréhender les différents modes d’exercice, en ville ou à l’hôpital, en salarié ou en libéral ; de mieux connaître le mode et le périmètre d’intervention des autres professionnels paramédicaux, mais également de bénéficier du retour d’expérience des patients, pour comprendre les attentes de ces derniers et mieux répondre à leurs besoins (1).

Afin de développer l’exercice coordonné de la médecine de ville et d’améliorer les prises en charge complexes, il est ensuite proposé aux professionnels de santé et aux collectivités territoriales de s’entendre pour créer des « villages de la santé », un dispositif de regroupement de professionnels de santé plus souple que les dispositifs existants, pour s’adapter aux réalités de chaque territoire et favoriser une approche horizontale et coordonnée de l’ensemble des professionnels de santé compétents lors de la prise en charge. D’autres dispositions visant à officialiser le statut de ceux qui s’occupent d’ores et déjà de prises en charge complexes (médecins polyvalents hospitaliers, infirmiers de pratiques avancées) sont également proposées (2).

L’amélioration de l’accès aux soins grâce à un financement adapté à chaque patient est ensuite envisagée au travers de deux dispositifs spécifiques : l’instauration d’un financement « au forfait » pour certaines pathologies inadaptées à la tarification à l’activité, et la fixation d’un panier de soins minimal pour toute assurance complémentaire souscrite par les travailleurs salariés (3).

Le texte veille enfin à améliorer les conditions d’exercice des professionnels de santé, en levant le cas échéant certains obstacles d’ordre administratif et financier (4).

1.   Agir sur le recrutement et la formation des professionnels de santé

La formation des étudiants en médecine est particulièrement marquée par le biais « hospitalo-centré » de notre système de santé.

Dès le recrutement, les étudiants médicaux sont ainsi sélectionnés sur le fondement de leurs connaissances scientifiques, sans que leurs qualités humaines ne soient prises en compte. Pour y remédier, l’article 7 propose l’instauration d’un entretien obligatoire, en fin de première année commune aux études de santé, afin d’évaluer ces aptitudes.

Par la suite, la structuration des études de médecine et notamment le pilotage des formations par le système hospitalo-universitaire se traduit par une spécialisation très forte des étudiants en médecine. Cette hyper-spécialisation, encouragée par des stages réalisés dans leur grande majorité à l’hôpital, a deux écueils : le premier est de négliger l’apprentissage des spécificités de l’exercice libéral par les étudiants en médecine ; le second est l’absence de polyvalence et d’expertise transversale des futurs médecins, qui rendra difficile, par la suite, la réponse aux prises en charge par nature complexes.

La proposition de loi propose en conséquence d’encourager les stages en dehors de l’hôpital (article 8) et ce, dès le deuxième cycle des études de médecine (externat). La possibilité donnée aux collectivités territoriales, en lien avec des professionnels de santé, d’instaurer des internats territoriaux (article 14) participe à cet objectif.

Afin de faciliter la coopération entre professionnels de santé dès la sortie des études, il est par ailleurs proposé de créer, dans le ressort de chaque faculté de médecine, des conférences pédagogiques réunissant les établissements de formation paramédicaux (article 11), qui auraient notamment pour mission de mettre en cohérence les parcours de formation et de favoriser les rencontres et échanges entre les étudiants.

L’association des patients aux enseignements dispensés en médecine est enfin proposée, grâce à la formalisation du rôle des « patients-formateurs », qui interviennent déjà dans certaines facultés, et la sécurisation juridique de leurs missions (article 9).

2.   Développer de nouvelles approches de la médecine favorisant la transversalité et améliorant les prises en charge complexes

La proposition de loi propose en second lieu de répondre au défi de la prise en charge des pathologies complexes et de la désertification médicale, par un maillage précis du territoire et le développement de spécialités médicales transversales. La réponse à ces enjeux suppose en effet d’encourager l’exercice de groupe, qui permet une mise en commun des moyens, une plus grande souplesse en matière de conditions de travail et de disponibilité, ainsi que davantage de temps dégagé pour la formation et l’encadrement des étudiants stagiaires.

La première mesure vise à aller plus loin que les modes de regroupement existants – et notamment que les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) en proposant aux professionnels de santé médicaux et paramédicaux de se réunir au sein de « villages de la santé » (article 13).

L’objectif poursuivi correspond à l’impératif fixé par le dernier rapport de l’IGAS consacré à l’évaluation des CPTS, qui rendait compte de l’urgence « de basculer vers un exercice médical différent, avec une forme nouvelle dexercice coordonné de la médecine de ville, juridiquement moins intégrée que les centres de santé ou les MSP, et respectant les équilibres historiques entre médecine libérale et médecine salariée » ([26]).

Afin d’assurer à chacun un accès rapide et de qualité aux soins, et d’encourager les professionnels à choisir l’exercice regroupé plutôt que la pratique isolée, la proposition de loi envisage de laisser aux professionnels de santé le soin de définir eux-mêmes le périmètre et les modalités de fonctionnement de ces villages.

En effet, de l’avis du rapporteur, le principe de la validation obligatoire des projets de CPTS par les agences régionales de santé (ARS) est un frein considérable à leur développement : de fait, la montée en puissance de ces CPTS est très lente, avec à peine une vingtaine de projets validés au 30 juin 2018. Le soutien financier et logistique apporté par les ARS est de surcroit très faible.

Dès lors, les villages de la santé prennent le contrepied de ces contraintes administratives en laissant les professionnels de santé souhaitant se regrouper au sein d’un village de la santé entièrement libres de s’entendre sur le projet de santé du village, de définir leurs modalités de coopération entre professionnels de santé, sous réserve d’assurer l’engagement d’apporter aux habitants du territoire une réponse de qualité au plus vite et au plus près de chez eux.

Le type de regroupement très libre permis par les villages de la santé offrirait aux patients, tout en respectant leur libre choix, « une garantie daccès aux soins, de fluidité de leurs parcours, et de prise en compte par les professionnels de santé de missions actuellement insuffisamment développées, telles le dépistage ou léducation thérapeutique ».

Afin d’assurer le bon fonctionnement de ces villages, notamment grâce à un investissement financier initial et une capacité d’animation durable du réseau de professionnels de santé, la proposition de loi propose d’associer les collectivités territoriales intéressées à la gouvernance des villages de la santé. Le soutien des élus locaux qui sont, depuis des années, en première ligne dans la recherche de solutions pour garantir l’accès aux soins dans leurs territoires, apparaît en effet indispensable à la réussite du projet de village de la santé.

La création d’une spécialité de médecine polyvalente hospitalière, proposée à l’article 10, vise par ailleurs à combler des lacunes dans la prise en charge, à l’hôpital, de patients aux parcours complexes. De même, l’instauration d’un véritable statut pour les infirmiers de pratiques avancées (article 12) permet de reconnaître leur rôle clé dans la transformation des modes de prise en charge des patients et notamment dans la plus grande collaboration avec le médecin traitant dans la prise en charge des patients atteints de pathologies chroniques.

La collaboration entre professionnels de santé a enfin vocation à dépasser le cloisonnement entre la ville et l’hôpital : à cette fin, les conférences territoriales de santé créées par l’article 15 invitent l’ensemble des professionnels et des représentants des établissements de santé d’un territoire à échanger en amont de l’élaboration du projet médical partagé et de la carte sanitaire d’un groupement hospitalier de territoire (GHT).

3.   Améliorer l’accès aux soins grâce à un financement adapté

Pour certains patients atteints de pathologies chroniques, la tarification à l’acte ou à l’activité pratiquée par les professionnels ou établissements de santé manque de pertinence : en effet, ces modes de tarification cloisonnés ne favorisent ni la coopération interprofessionnelle, ni la pertinence des soins délivrés, puisque chaque professionnel ou établissement de santé a un intérêt à facturer les actes les plus rémunérateurs. Dans le cas de pathologies chroniques en particulier, la tarification à l’activité ne permet pas de prévenir leur apparition.

Pour adapter la prise en charge en fonction des patients et notamment fluidifier la prise en charge de patients au parcours de soins complexe, l’article 26 propose donc l’instauration d’une tarification forfaitaire au parcours de soins pour certaines pathologies. Cette rémunération au parcours de soins, gérée par le patient lui-même à partir de sa carte vitale, permet à la fois d’améliorer la coopération entre les professionnels de santé et de responsabiliser le patient, puisque c’est à ce dernier de suivre le parcours qui lui est proposé.  

Afin de garantir l’équité entre tous les salariés, la proposition de loi propose ensuite de mieux définir le panier de garanties collectives dans le cadre des contrats de complémentaire santé d’entreprise souscrits par les salariés (article 27), en fixant par voie réglementaire une liste de garanties minimales. 

4.   Sécuriser les conditions d’exercice des professionnels de santé

Comme il a été dit, l’organisation actuelle de notre système de santé est à l’origine d’importants dysfonctionnements en matière d’accès à la santé et de qualité des soins. L’insatisfaction croissante des usagers du système de santé et la dégradation des conditions d’exercice des professionnels générées par cette situation renvoient toutes deux, selon le HCAAM, « à une perte de sens qui ne trouve pas de réponse dans un univers où dominent aujourdhui des logiques techniques ou financières ».

Pour le Haut Conseil, « le terrain des valeurs est, dès lors, à réinvestir par lensemble des acteurs non pour donner un supplément dâme à un projet technocratique, mais pour refonder des principes partagés ». En priorité, il convient de redonner confiance aux professionnels de santé pour leur permettre d’exercer dans de bonnes conditions. Ces derniers étant particulièrement exposés, du fait de leur contact permanent avec le public, au risque d’agression et d’outrage, l’article 22 propose de renforcer leur protection juridique en élargissant le cadre des mesures pénales applicables en cas d’agression ou d’outrage à l’encontre d’un professionnel de santé.

Plusieurs dispositions proposent ensuite de lever des obstacles administratifs (articles 17 et 20) liés notamment aux conditions de détention des sociétés créées par des professionnels de santé.

Les modalités de conventionnement des professionnels de santé avec l’assurance maladie sont également revues, afin de ne pas pénaliser les professions de santé par une entrée en vigueur tardive des dispositions de revalorisations tarifaires et de favoriser une revalorisation régulière de ces dernières (articles 18 et 19).

La poursuite d’activité des médecins exerçant en zone sous-dense et atteignant l’âge de la retraite est enfin encouragée par l’article 21, grâce à un assouplissement des règles applicables au cumul emploi-retraite.

5.   Améliorer l’accès aux soins

La proposition de loi s’attelle en dernier lieu à corriger deux dispositifs spécifiques freinant l’accès aux soins : elle accorde un droit de prescription aux médecins coordonnateurs des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), d’une part (article 16), et propose ensuite de mieux définir le panier de garanties collectives dans le cadre des contrats de complémentaire santé d’entreprise souscrits par les salariés (article 27).

La proposition de loi accorde enfin à larticle 16 un droit de prescription aux médecins coordonnateurs des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), en vue à la fois d’améliorer l’accès aux soins des résidents de ces établissements, souvent privés de médecins traitants, et de sécuriser les conditions de prescription par les médecins coordonnateurs.

 

 

 

 


—  1  —

   commentaires d’articles

Lensemble des articles de la proposition de loi ayant été rejetés, le texte est considéré comme rejeté par la commission.

En conséquence, aux termes de larticle 42 de la Constitution, la discussion en séance publique aura lieu sur le texte initial de cette proposition de loi.

TITRE Ier
Pour une politique de prévention globale et ambitieuse

Article 1er
Faire de la prévention la grande cause nationale pour 20182022

Rejeté par la commission

Cet article propose de déclarer « Grande cause nationale » la prévention en matière de santé, pour la période courant de 2018 à 2022.

Afin que cette déclaration soit suivie d’effets concrets, dès cette année, il est proposé que les actions à poursuivre en matière de prévention pour la période précitée soient définies dans un plan pluriannuel intitulé « Objectif santé 2022 ». Ce plan pourrait être intégré au projet de loi de programmation en santé prévu à l’article 25 de la présente proposition de loi.

L’objectif est de mieux connaître les actions à conduire en matière de prévention, d’éducation à la santé et d’éducation thérapeutique, afin d’améliorer leur pilotage, leur évaluation et, le cas échéant, flécher les financements correspondants.

Les mesures susceptibles d’être définies dans le plan pluriannuel devront s’inscrire dans une approche très large de la prévention, à savoir la prévention en matière :

       de santé – et notamment de santé mentale – ;

       d’éducation à la santé ;

       et d’éducation thérapeutique, qui a pour objectif, selon l’article L. 1161-1 du code de la santé publique, « de rendre le patient plus autonome en facilitant son adhésion aux traitements prescrits et en améliorant sa qualité de vie ».

Le Parlement disposera d’un droit de regard sur les mesures élaborées par le Gouvernement, puisque le plan lui sera soumis pour avis avant adoption.

*

*     *

Chapitre Ier
La gouvernance de la prévention

Une constellation d’acteurs de toute nature interviennent dans le champ de la prévention : acteurs institutionnels, professionnels de santé – infirmiers, médecins, sages-femmes, pharmaciens, chirurgiens-dentistes, etc. –, associations, etc. Cette pluralité d’acteurs permet en théorie un maillage précis du territoire et une bonne diffusion des actions de prévention.

En réalité, faute de gouvernance efficiente et de coordination entre les acteurs, l’efficacité de ces actions ne fait pas l’objet d’une évaluation suffisante, et ne répond pas à une stratégie clairement définie au niveau central.

Ce chapitre propose d’y remédier en confiant à un seul opérateur, l’Agence nationale de santé publique, le soin de définir une stratégie univoque en matière de prévention, et de coordonner l’ensemble des actions en cette matière.

Article 2
Nouvelle gouvernance et élargissement des missions de lAgence nationale de santé publique

Rejeté par la commission

Cet article a pour ambition de faire de l’Agence nationale de santé publique (ANSP) – communément appelée « Santé publique France » – l’opérateur exclusif dans le champ de la prévention en santé.

Il propose à cette fin :

d’enrichir significativement ses missions en matière de prévention et de l’éducation pour la santé et ses moyens humains et budgétaires ;

de placer l’Agence directement sous l’autorité du Premier ministre, afin qu’elle ait toutes les cartes en main pour définir les orientations à suivre en matière de prévention.

I.   Santé publique France : une agence nouvelle À consolider

Créée en 2016, Santé publique France est un établissement public de l’État à caractère administratif, placé sous la tutelle du ministre chargé de la santé. Cette agence assure l’ensemble des missions auparavant réparties entre trois agences distinctes, l’institut de veille sanitaire (InVS), l’institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) et l’établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS).

Les missions dévolues à Santé publique France sont actuellement définies à l’article L. 1413-1 du code de la santé publique et recouvrent un périmètre d’intervention très large. L’agence a en effet pour mission :

 de surveiller l’état de santé des populations ainsi que les risques sanitaires les menaçant (1° et 2°) ;

 de promouvoir et développer la santé, la prévention et l’éducation pour la santé, tout en réduisant les risques sanitaires (3° et 4°) ;

 de préparer et répondre aux menaces, alertes et crises sanitaires, en ayant recours, le cas échéant, au lancement de l’alerte sanitaire (5° et 6°).

Bien que Santé publique France soit l’opérateur le mieux placé pour définir une stratégie cohérente et exhaustive en matière de prévention, cette agence ne dispose pas de l’exclusivité des moyens et des actions relatifs à la prévention.

La prévention sanitaire recouvre en effet deux volets : la prévention institutionnelle – individuelle et collective – et la consommation de soins et biens médicaux (CSBM) à visée préventive, en ville et à l’hôpital. La dépense totale sur ces deux volets est estimée à 15 milliards d’euros par an, dont près de 11 milliards (soit 73 % du total) sont financés par l’assurance maladie, l’État et les collectivités territoriales.

Les moyens alloués à l’ANSP ne représentent qu’une infime part de l’ensemble de ces dépenses de prévention, de l’ordre de 150 millions d’euros en 2018. L’agence n’est en effet financée que par l’État sur la mission « santé » du projet de loi de finances ; le programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » dont elle relève ne contribue lui-même qu’à hauteur de 380 millions d’euros aux dépenses de prévention.

L’agence dispose d’à peine 600 agents pour accomplir ses missions de prévention, un chiffre en diminution constante depuis la création de l’agence : 604 équivalents temps plein travaillés [ETPT] votés lors de la loi de finances initiale de 2016, 597 ETPT en 2017 et 582 ETPT en 2018. En conséquence, des pans entiers de la politique de prévention ne peuvent être pris en compte, faute de moyens humains nécessaires.

La création de l’ANSP n’a en outre pas suffi à résoudre la difficulté liée à l’éparpillement des acteurs intervenants en matière de prévention : aux côtés de Santé publique France, de nombreux opérateurs institutionnels, les collectivités territoriales, les professionnels de santé ou encore le secteur associatif continuent de conduire des politiques de prévention, sans coordination de l’ensemble de leurs actions.

D’ailleurs, le fait d’avoir choisi pour tutelle de l’ANSP le ministère de la santé est contradictoire avec l’ambition même portée par cette nouvelle agence, comme le souhaitait la ministre de la santé elle-même : « Il sagit de changer de paradigme dans la façon dont nous envisageons la santé de nos concitoyens, en passant dun parcours de soins à un parcours de santé. Cette prévention suppose que nous menions des actions interministérielles de nature à favoriser la prise de conscience par lensemble de nos concitoyens de sa nécessité » ([27]).

II.   Le dispositif proposÉ

A.   Placer Santé publique France sous la tutelle du Premier ministre

Le du présent article propose en premier lieu de placer l’agence sous l’autorité du Premier ministre, afin de conférer un caractère interministériel à son action.

L’ambition portée par cet article est en effet de confier à un seul opérateur, Santé publique France, l’ensemble des missions de coordination et de mise en œuvre des actions de prévention sanitaire alors qu’à ce jour, la fragmentation des acteurs compétents en matière de prévention nuit à la lisibilité de l’ensemble. Le fait de placer l’agence sous un pilotage interministériel devrait permettre d’équilibrer les rapports de force entre l’ensemble des acteurs intervenant dans le champ de la prévention.

B.   Élargir le pÉrimÈtre d’intervention de SantÉ publique France

Sans revenir sur les missions d’observation épidémiologique et de surveillance de l’état de santé des populations et des risques sanitaires, ni sur la préparation et la réponse aux menaces, alertes et crises sanitaires, le présent article propose d’étoffer significativement les missions de prévention et d’éducation pour la santé dévolues à Santé publique France.

Ces nouvelles missions, inscrites à l’article L. 1413-1, se déclinent en quatre volets.

1.   Stratégie nationale de prévention

Le premier volet confère à l’ANSP la définition d’une stratégie nationale de prévention en santé, d’éducation à la santé et d’éducation thérapeutique.

Cette stratégie nationale pourra être déclinée au sein du plan pluriannuel de prévention prévu à l’article 1er de cette proposition de loi, puisque l’agence sera également chargée de la mise en place du plan « Objectif santé 2022 » prévu à l’article premier, c’est-à-dire qu’elle devra en définir les objectifs précis – dans les contours définis par le Gouvernement après avis du Parlement – ainsi que les priorités et les moyens financiers et humains. La coordination de l’ensemble des services de l’État en charge de la mise en application du plan reviendra également à Santé publique France.

2.   Prévention et formation en matière de santé mentale

Le deuxième volet vise à améliorer la prise en charge des pathologies mentales, en améliorant la connaissance de ces pathologies par les professionnels de santé.

L’ANSP sera ainsi chargée de définir un programme d’actions, d’information, de sensibilisation et de formation initiale et continue des professionnels de santé aux pathologies mentales, en veillant à faire connaître les modalités de dépistage de ces maladies, leurs facteurs de risques et leur prise en charge.

3.   Coordination et suivi en matière de prévention

Il est ensuite proposé de confier à l’agence un rôle de coordination, de suivi et d’évaluation des actions de prévention mises en place par l’ensemble des acteurs intervenant en matière de prévention sanitaire, d’éducation à la santé et d’éducation thérapeutique.

L’agence sera, d’une part, chargée de coordonner les actions conduites par ces différents acteurs, en lien avec les ministères concernés – ministères de l’Éducation nationale et de l’enseignement supérieur s’agissant de la prévention des risques en milieu scolaire ou universitaire, ministère du travail s’agissant de la prévention des risques professionnels, etc.

Elle sera chargée, à ce titre, du suivi et de l’évaluation des actions de formation dans tous les établissements scolaires – qu’ils soient publics, privés, généraux ou professionnels –, dans les centres de formation des apprentis (CFA) ainsi que dans les facultés de médecine et les établissements de formation aux études paramédicales et médico-sociales.

4.   Éducation thérapeutique et actions de sensibilisation

Le quatrième volet confie à l’ANSP la responsabilité de la rédaction de guides d’éducation thérapeutique et d’actions de sensibilisation à destination des professionnels de santé, des employeurs, des collectivités territoriales et de la population.

C.   Revaloriser les moyens de Santé publique France et repenser les modalités de suivi de ses actions

Le propose ensuite de confier à l’ANSP l’ensemble des financements consacrés par le budget de l’État et l’Assurance maladie à la prévention, charge à l’agence de redistribuer ensuite ces financements vers les opérateurs concernés, en fonction des objectifs fixés au sein de la stratégie nationale de prévention.

Il précise également que l’agence dispose « des moyens humains nécessaires » à ses missions.

En contrepartie, l’agence aura l’obligation de soumettre chaque année au Parlement, dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) :

 des « objectifs quantifiés dactions à conduire » en matière de prévention en santé, d’éducation à la santé et d’éducation thérapeutique ;

un rapport d’évaluation des objectifs et actions conduites sur l’exercice précédent.

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Article 3
Informations relatives au parcours individuel de prévention au sein du dossier médical partagé

Rejeté par la commission

Afin de faciliter le suivi des actions de prévention propres à chaque individu, tout au long de sa vie, cet article propose d’intégrer, au sein du dossier médical partagé (DMP), un volet relatif au « parcours individuel de prévention ».

Véritable « Carnet de santé numérique », le dossier médical partagé permet de conserver de manière confidentielle les données de santé d’un individu. Le patient peut consulter à tout moment ces données et les partager, s’il le souhaite, avec son médecin traitant et l’ensemble des professionnels de santé qui le prennent en charge ; il leur revient ensuite de l’alimenter à leur tour, dans le respect du secret médical.

Le DMP permet par exemple de partager les informations relatives aux pathologies et allergies éventuelles d’un patient, à ses antécédents, ses traitements médicamenteux, ses comptes rendus d’hospitalisation ou encore ses résultats d’examens médicaux.

L’article L. 1111-14 du code de la santé publique créant le DMP précise que cet outil vise notamment à favoriser « la prévention, la coordination, la qualité et la continuité des soins », sans plus de précision sur ce que recouvre la notion de prévention.

Le présent article propose donc la création d’un article L. 1111-14-1 au sein du même code précisant que le DMP doit contenir un volet spécifique relatif au parcours individuel de prévention « destiné à favoriser le suivi des actes et actions de prévention en matière de santé, déducation à la santé et déducation thérapeutique de la néo-natalité à la fin de vie ».

L’intégration d’un volet relatif à la prévention au sein du DMP facilitera la communication entre les professionnels de santé car à ce jour, en dehors des actions de vaccination renseignées dans le carnet de santé de l’enfant, il n’existe aucun dispositif permettant de suivre l’ensemble des actions de prévention d’un individu tout au long de la vie.

Les professionnels de santé évoluent en effet régulièrement dans des sphères différentes qui communiquent peu, voire pas du tout entre elles : ainsi, le médecin préconisant à un jeune patient une action de prévention dans un centre de protection maternelle et infantile (PMI) n’aura le plus souvent jamais de communication formelle avec le médecin ou l’infirmier scolaire, qui eux-mêmes n’auront aucun échange avec le futur médecin du travail.

Le volet prévention du DMP permettra à chaque professionnel intervenant dans le parcours de santé d’un patient de connaître les actions réalisées en matière de prévention et, le cas échéant, d’en évaluer la pertinence a posteriori.

Par cohérence avec l’article 2 de la proposition de loi visant à confier à l’Agence nationale de santé publique (ANSP) la coordination des actions en matière de prévention, la définition des informations et indicateurs de suivi du parcours de prévention ayant vocation à figurer au sein du DMP sera confiée à l’ANSP.

Dans un second temps, et sous réserve des règles applicables en matière de conservation et d’utilisation des données personnelles de santé, les données contenues au sein du volet prévention du DMP pourraient être consolidées au sein d’une base de données, en vue d’améliorer les actions et les programmes conduits par l’agence.

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Chapitre II
La formation à la prévention en santé et à léducation à la santé

Que chaque usager « comprenne, valide et participe à son parcours de santé » ([28]) : tel est l’enjeu de ce chapitre.

De nombreux exemples illustrent en effet aujourd’hui les effets délétères de la complexité de notre système de soins : faute de coordination suffisante entre les professionnels et les établissements de santé, les patients atteints de maladies chroniques sont souvent conduits à organiser eux-mêmes leurs parcours de santé, quitte à commettre des erreurs dans la prise en charge. Or, la perte de chance résultant d’une mauvaise orientation d’un patient vers le professionnel de santé ou l’établissement compétent pour répondre à son besoin constitue de fait un réel obstacle du système de soins.

S’il est essentiel d’agir pour améliorer la lisibilité du système de santé, il est possible dès aujourd’hui d’en améliorer l’équité, grâce à des enseignements ciblés d’éducation à la santé, et au développement de la prévention primaire dans le milieu scolaire.

Ce chapitre propose donc de renforcer la formation académique en matière de prévention sanitaire, d’éducation à la santé et d’éducation thérapeutique dans tous les établissements d’enseignement, dès l’école primaire (article 5), et au sein des formations universitaires médicales, paramédicales et sportives (article 4).

Il propose en second lieu de renforcer les actions de prévention et de dépistage pour évaluer la santé oculaire et bucco-dentaire des élèves entrant à l’école maternelle ou primaire (article 6).

Article 4
Enseignement obligatoire relatif à la prévention au cours des études supérieures médicales, paramédicales ou sportives

Rejeté par la commission

Alors que les approches préventives plutôt que curatives de nombreuses pathologies ont, à de maintes reprises, prouvé leur efficacité pour améliorer l’état de santé des populations, la formation des professionnels de santé à la prévention et à l’éducation à la santé est, encore aujourd’hui, le parent pauvre des études médicales, paramédicales et sportives. Cet article vise donc à instaurer un enseignement obligatoire de prévention.

La prévention et l’éducation à la santé ne sont ainsi que trop rarement abordées au titre d’une discipline à part entière : au cours des études de médecine, par exemple, seuls les étudiants souhaitant acquérir une compétence particulière dans ces questions au travers de formations complémentaires (diplômes universitaires d’éducation en santé ([29]), par exemple) bénéficieront d’une approche exhaustive de la prévention. Or, cela ne représente qu’une infime minorité d’étudiants, alors que la prévention devrait faire partie intégrante du cursus de l’ensemble des professionnels de santé.

Cet article vise en conséquence à instaurer un enseignement obligatoire consacré à la prévention en matière de santé, à l’éducation à la santé et à l’éducation thérapeutique pour :

 les étudiants suivant des études médicales, odontologiques, pharmaceutiques ou maïeutiques ;

 les étudiants en licence de sciences et techniques des activités physiques et sportives ;

 les étudiants inscrits dans les écoles et instituts de formation aux professions paramédicales.

Les modalités d’application de cet article non codifié, en particulier le contenu, le volume de l’enseignement et les conditions de son contrôle seront précisées par un arrêté conjoint des ministres chargés de l’enseignement supérieur, de l’éducation nationale et de la santé pris après avis de l’Agence nationale de santé publique.

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Article 5
Enseignement obligatoire relatif à la prévention dans les écoles primaires, collèges, lycées et centres de formation des apprentis

Rejeté par la commission

À l’instar de l’obligation d’enseignement en matière de prévention sanitaire, d’éducation à la santé et d’éducation thérapeutique créée à l’article 4, le présent article propose, à l’article  L. 312-16-1 nouveau du code de l’éducation, la création d’un enseignement obligatoire de prévention en matière de santé et d’éducation à la santé dans l’ensemble des écoles primaires, collèges, lycées et centres de formation des apprentis (CFA), quel que soit leur statut – public ou privé.

La promotion de la santé implique de créer, dès le plus jeune âge, des conditions de vie permettant d’adopter et de conserver des modes de vie favorables à la santé. Selon Santé publique France, en effet, « si les enfants et les jeunes sont globalement en bonne santé et se perçoivent comme tel, les comportements qui sinstallent à cette période conditionnent leur avenir en matière de santé ». Des comportements préoccupants à l’enfance tels que la sédentarité, l’obésité, ou, à l’adolescence, la consommation d’alcool ou de tabac, ont des conséquences tout au long de la vie.

Or, les habitudes de vie des enfants et des adolescents sont encore en construction : il s’agit en conséquence d’une population particulièrement réceptive aux actions de prévention.

L’obligation d’enseignement relatif à la prévention et à l’éducation à la santé en milieu scolaire créée par le présent article permettra donc de délivrer à l’ensemble des enfants et jeunes les mêmes messages de prévention sur des thèmes qui les concernent, tels que la nutrition et l’activité physique pour les plus jeunes ou les risques de la consommation d’alcool ou de tabac pour les adolescents. L’éducation à la santé permettrait par ailleurs de démocratiser l’accès à la connaissance médicale, tout en formant les élèves, collégiens, lycées ou apprentis à devenir des « patients avertis », sur l’accès aux soins de premier recours ou le bon usage des médicaments par exemple.

Interrogés par le rapporteur, les syndicats d’étudiants en médecine se sont montrés favorables à cette mesure, qui se révèle complémentaire au « service sanitaire » que tout étudiant en santé doit effectuer depuis la rentrée universitaire 2018.

Le contenu et la durée de cet enseignement obligatoire seront précisés par un arrêté conjoint des ministres chargés de l’éducation, de la santé et de l’agriculture, pris après avis de l’Agence nationale de santé publique. Cet arrêté précisera également les conditions de formation des enseignants à ces nouvelles disciplines.

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Article 6
Actions de prévention et de dépistage des troubles visuels et bucco-dentaires

Rejeté par la commission

Cet article propose de rendre obligatoires, à l’école, les actions de prévention et de dépistage des troubles visuels et des carences de l’hygiène dentaire par des professionnels de santé.

L’organisation de ces actions de prévention serait confiée aux professionnels exerçant au sein des villages de la santé créés par la présente proposition de loi (cf. commentaire de l’article 13).

1.   Santé bucco-dentaire et dépistage des troubles visuels : des inégalités dès le plus jeune âge

Dès le plus jeune âge, les enquêtes de santé scolaire font état d’importantes inégalités sociales. Ces inégalités sont parfois le reflet d’habitudes de vie – obésité, survenance de caries traduisant une mauvaise hygiène alimentaire ou dentaire – mais elles témoignent le plus souvent de difficultés d’accès aux soins  dents cariées non traitées, troubles visuels non détectés , pour des raisons notamment financières.

La santé bucco-dentaire des enfants, en premier lieu, est le reflet des inégalités sociales ou territoriales dans notre pays. Une étude de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) ([30]) de 2013 a ainsi montré que la prévention en matière d’hygiène dentaire et le recours aux soins dentaires chez les jeunes enfants demeurent très hétérogènes. Ces inégalités, qui s’observent tant dans la prévention des troubles que dans l’accès aux soins, se forment dès le plus jeune âge :

9 enfants de cadres âgés de 6 ans sur 10 n’ont jamais eu de caries, contre 7 enfants d’ouvriers sur 10 en 2006 ;

en maternelle, 4 % des enfants de cadres ont au moins une carie non soignée, contre 23 % des enfants d’ouvriers ;

 en outre, les enfants scolarisés dans les départements d’outre-mer (DOM) ont deux fois plus souvent des caries non traitées qu’en métropole.

En dépit des recommandations de la Haute Autorité de santé (HAS) préconisant une visite de contrôle annuelle chez le chirurgien-dentiste dès l’apparition des dents de lait, selon une étude citée par la Drees, en 2008, 30 % des enfants âgés de 5 à 15 ans n’avaient pas consulté de dentiste au cours des douze mois précédent l’enquête. L’absence de consultation d’un chirurgien-dentiste ne concernait que 21 % des enfants dont la mère est cadre, contre 69 % des enfants d’employées et 60 % des enfants d’ouvrières. L’Assurance maladie prévoit pourtant depuis 2007 un examen de prévention (M’T DENTS) pris en charge à 100 % sans avance de frais, chez le chirurgien-dentiste de son choix, pour les enfants et adolescents de 6, 9, 12, 15 et 18 ans : force est de constater que la relative méconnaissance de ce dispositif entretient les disparités d’accès aux soins.

S’agissant des troubles visuels, la Drees a relevé en 2015 ([31]) que la part des enfants non équipés de lunettes et présentant une anomalie de la vision de loin (myopie) s’élevait à 10,5 % en moyenne, contre 14 % dans les écoles relevant de l’éducation prioritaire.

2.   Assurer un égal accès de tous les enfants à la prévention et au dépistage des troubles visuels et bucco-dentaires dans le cadre scolaire

Cet article propose en conséquence de rendre obligatoire, pour l’ensemble des enfants entrant à l’école maternelle et primaire, le dépistage des troubles visuels et bucco-dentaires. Il crée à cette fin un article L. 2134-2 au sein du code de la santé publique, qui précise les conditions de mise en place de ces actions de prévention et de dépistage.

Les personnes concernées par ces actions de dépistage sont « les enfants entrant en école maternelle et élémentaire » (I).

L’organisation des actions de prévention et de dépistage incombe aux professionnels de santé des villages de la santé, en lien avec les établissements scolaires relevant de leur territoire.

L’action de dépistage ou de prévention donnerait systématiquement lieu à l’établissement d’une fiche de liaison récapitulant, le cas échéant, les recommandations adressées aux parents (II).

La rémunération des professionnels de santé ou des établissements pour lesquels ils exercent leur activité serait assurée exclusivement par les villages de la santé ayant mis en place les actions de prévention et de dépistage, dans des conditions précisées par un arrêté conjoint des ministres chargés de l’éducation et de la santé.

L’article précise les modalités spécifiques applicables pour les enfants déjà porteurs de lunettes de vue : dans ce cas, comme le prévoit l’article L. 4362-10 du code de la santé publique, un opticien-lunetier peut adapter les prescriptions médicales initiales de verres correcteurs en cours de validité, sauf opposition du médecin.

Le cas échéant, la fiche de liaison établie par l’opticien-lunetier devra obligatoirement et explicitement indiquer que le dépistage « ne saurait remplacer une consultation dun ophtalmologiste ». De plus, afin d’éviter toute ambigüité, il est précisé qu’une action de dépistage effectuée par un opticien‑lunetier ne peut être suivie d’un acte de vente par ce même professionnel (III).

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TITRE II
De la modernisation des formations médicales et paramédicales

La réforme de la formation est indissociable d’une réforme en profondeur de notre système de santé. Rencontrés par le rapporteur dans le cadre de l’élaboration de ce rapport, les représentants des étudiants ainsi que des instances ordinales ont fait part de leurs fortes attentes à l’égard de l’universitarisation des études de santé, de la professionnalisation des étudiants grâce à la réalisation de stages de terrain diversifiés, et d’une plus grande coopération entre les professionnels de santé.

Le présent titre propose donc de repenser le mode de sélection des étudiants en fin de première année commune des études de santé (PACES) ainsi que les modalités d’échange entre les étudiants de plusieurs formations, de favoriser les stages à l’extérieur de l’hôpital, et enfin de mieux reconnaître la médecine polyvalente hospitalière ou l’exercice en pratique avancée pour les infirmiers.

Le point de vue du patient-usager est pleinement pris en compte, grâce à la formalisation d’un statut de patient-formateur intervenant au sein des facultés de médecine.

Chapitre Ier
La réforme des études médicales

 

Article 7
Repenser le mode de sélection des étudiants en fin de PACES

Rejeté par la commission

Cet article propose d’améliorer les modalités d’admission des étudiants à l’issue de la première année des études de santé (PACES), en prévoyant la tenue obligatoire d’un entretien avec un jury chargé d’évaluer « la motivation et les qualités personnelles des candidats, notamment leur capacité découte et dempathie ».

Conditionnée par le numerus clausus, la sélection des étudiants à la fin de la première année des études de santé soulève de nombreuses difficultés, décriées de longue date par l’ensemble des acteurs.

Outre le taux d’échec très élevé – plus de 80 % – qui génère une frustration importante chez les étudiants, l’exigence de sélection efficace d’un nombre restreint d’aspirants médecins a de fait délaissé l’évaluation des qualités humaines des étudiants en fin de PACES au profit d’une sélection sur le fondement des seules connaissances académiques des étudiants.

La grande majorité des épreuves se borne en effet à évaluer les connaissances scientifiques des étudiants par l’intermédiaire de questionnaires à choix multiples (QCM). Les qualités humaines des candidats – notamment l’écoute et l’empathie, deux qualités a priori incontournables chez un professionnel de santé ne font l’objet d’aucune évaluation dans le cadre de l’actuelle sélection des étudiants en fin de PACES, à de rares exceptions près. Depuis plusieurs années, la faculté de médecine d’Angers a ainsi introduit parmi les examens de fin de PACES un entretien oral avec un jury chargé d’apprécier les qualités humaines, empathiques et compassionnelles des candidats ([32]).

Bien que le Gouvernement envisage la suppression du numerus clausus dès 2020, aucune information sur le dispositif s’y substituant n’a été donnée. En particulier, les modalités d’évaluation des étudiants en santé à l’issue de la première année n’ont pas été précisées.

Cet article propose donc de généraliser l’épreuve d’entretien oral expérimentée dans certaines facultés à l’ensemble des étudiants de PACES afin, d’une part, de mieux évaluer les qualités humaines des candidats indispensables au bon exercice de la médecine et, d’autre part, d’élargir le périmètre du recrutement des futurs médecins à de jeunes étudiants parfois moins brillants d’un point de vue académique, mais qui témoignent d’une véritable vocation à devenir médecin.

Les modalités d’organisation de cet entretien obligatoire, inscrit à l’article L. 631-1 du code de l’éducation, seront déterminées par voie réglementaire.

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Article 8
Encourager les stages extrahospitaliers au cours des études de médecine

Rejeté par la commission

L’enseignement de la médecine en France privilégie encore largement une approche « hospitalo-centrée », comme en témoigne la nature des stages effectués par les étudiants en médecine.

Cet article vise donc à encourager les étudiants en médecine à effectuer des stages en dehors de l’hôpital dès le deuxième cycle d’études, en autorisant les étudiants à réaliser des stages dans l’ensemble des établissements de santé et auprès de professionnels de santé libéraux.

Pour les étudiants de premier et de deuxième cycle de médecine, les stages sont en effet, dans leur immense majorité, effectués au sein des centres hospitaliers universitaires (CHU). Les stages d’externat permettant de découvrir la médecine libérale ou les établissements de santé autres que l’hôpital sont peu nombreux, voire inexistants ([33]) dans certaines spécialités, privant les étudiants de la découverte de l’exercice de la médecine de ville ou d’une approche de la médecine différente de celle dispensée à l’hôpital. De surcroît, peu de médecins exerçant en libéral consentent à accueillir des stagiaires, compte tenu de l’investissement que cela requiert au regard du faible accompagnement proposé par les facultés de médecine et du faible niveau de contrepartie pécuniaire.

Cette situation contribue notamment à la méconnaissance des spécificités de l’exercice libéral par les aspirants médecins, qui ne découvrent pour la plupart cette modalité d’exercice de la médecine qu’au cours de l’internat, une fois leur spécialisation choisie au terme de l’examen classant national (ECN).

Si les stages de troisième cycle de médecine (internat) en dehors de l’hôpital sont, depuis peu, encouragés par des dispositions de nature réglementaire ([34]), les stages de deuxième cycle demeurent pour l’essentiel effectués à l’hôpital.

Cet article crée en conséquence un article L. 632-3 au sein du code de l’éducation précisant ainsi que les stages effectués par les étudiants des deuxième et troisième cycles de médecine peuvent être réalisés « indistinctement en pratique de ville, toutes spécialités confondues, dans les établissements publics, privés et privés non lucratifs de santé et dans les établissements sociaux et médico-sociaux » (I).

Une liste recensant le nombre de stages proposés pour chacune de ces catégories d’établissements de santé sera rendue publique chaque année par le doyen de la faculté de médecine aux membres du conseil d’administration de l’unité de formation et de recherche (UFR) concernée. Cette mesure de publicité permettra de se rendre compte du nombre de stages proposés à l’hôpital ou en dehors de l’hôpital.

En outre, afin dencourager les étudiants en médecine à exercer des stages dans des zones sous-dotées, le III de larticle L. 632-3 nouveau autorise les collectivités territoriales à fixer, par délibération de leurs assemblées délibérantes, des indemnités de déplacement, dhébergement et de restauration, pour la durée du stage.

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Article 9
Patient-formateur

Rejeté par la commission

Cet article vise à sécuriser le cadre juridique qui permet à certains patients disposant d’une expertise particulière de dispenser des formations auprès des étudiants en médecine.

1.   Impliquer les patients dans la formation des professionnels de santé : des initiatives en plein essor

Depuis plusieurs années, une tendance visant à élargir la formation des étudiants médicaux ou paramédicaux à de nouvelles pratiques plus attentives, davantage à l’écoute des usagers ou patients, se développe. En effet, les formations médicales et paramédicales reposant sur une simple logique de transmission de connaissances scientifiques négligent, le plus souvent, le vécu et le ressenti des patients face à la maladie : dès lors, les techniques pédagogiques gagneraient à être repensées pour sortir d’une approche purement académique de la prise en charge des pathologies et s’adapter aux nouvelles attentes des professionnels et de leurs patients.

Dans certains cas, notamment lorsqu’il est atteint d’une maladie chronique, le patient peut acquérir une expertise sur lui-même qui en fait le mieux placé pour évoquer son rapport à la maladie, à la douleur ou à la prise en charge médicale par exemple. 

Cest à partir de ce constat que se sont développées, notamment à létranger mais également en France, plusieurs initiatives visant à associer des patients à la formation des professionnels de santé tant médicaux que paramédicaux.

Selon une enquête de l’Institut pour la démocratie en santé (IPDS) ([35]), 82 % des instituts de formation en soins infirmiers (IFSI) et 50 % des unités de formation et de recherche (UFR) en médecine ont déclaré faire participer les usagers à la formation des étudiants, le plus souvent dans le cadre de conférences ou débats. Mais certaines facultés de médecine ou instituts ont franchi un pas supplémentaire en formalisant des relations avec les patients, en les intégrant dans les équipes pédagogiques et en les associant étroitement à l’analyse des pratiques (cf. encadré sur la place des patients-formateurs à l’UFR de Bobigny).

L’association des patients à la formation des professionnels de santé répond ainsi à plusieurs attentes exprimées à la fois par les professionnels et les patients eux-mêmes : humaniser la médecine scientifique, mieux comprendre les interactions entre le médecin et le patient ou encore changer le regard des soignants sur l’appréciation des symptômes ou de la douleur.

Lintervention de patients-intervenants au sein des formations médicales en médecine générale : lexemple de Paris XIII - Bobigny ([36])

À l’UFR de médecine de l’université Paris XIII, l’intervention de patients-intervenants dans la formation médicale initiale, dispensée dans presque tous les enseignements de médecine générale, est axée sur :

la décision médicale ;

les principes éthiques et déontologiques ;

l’ouverture de la parole des patients sur des pans de vie ou des connaissances, pas forcément explorés par « l’interrogatoire médical » ;

les postures non souhaitables ;

les outils facilitant l’alliance thérapeutique.

Les patients-intervenants se sont donnés pour objectif d’en  améliorer  la  transparence,  faire  apparaître les  éventuelles  zones  d’incertitude,  développer la recherche de l’avis et des préférences des patients et/ou de leurs proches. Ils  donnent  également  aux étudiants des  clés  pour  améliorer  la  qualité  des  alliances  thérapeutiques  qu’ils nouent avec leurs patients.  De plus, ils apportent des éléments de compréhension du système de santé et des indications sur les lois qui l’encadrent.

Et ils ne se privent pas de relever des postures ou des notions qui ont du sens dans l’entre-soi médical mais qui méritent d’être réinterrogées. Cela concerne par exemple la notion de « droit de retrait », qui a tendance à être utilisée par les internes en dehors de  son cadre légal pour justifier leur refus de soigner des personnes dont les comportements heurtent leurs principes moraux.

Enfin, ils veillent à ce que les droits des malades soient connus et à ce que les internes  aient le réflexe d’être proactifs dans l’accès aux droits sociaux de leurs patients.

S’il existe désormais une réelle volonté de développer l’association des patients à la formation des professionnels de santé, les initiatives restent encore timides à ce stade compte tenu du flou juridique dans lequel elles s’inscrivent : seules quelques universités ont franchi le pas du recrutement de patients enseignants rémunérés en tant que vacataires ; la plupart des autres unités de formation se contentent d’associer les patients lors de conférences-débats ou de tables rondes.

2.   Reconnaître et encadrer le statut de « patient-formateur »

Afin de sécuriser juridiquement et d’encourager les initiatives visant à proposer aux patients de diffuser leur savoir auprès des futurs médecins, l’article L. 632-8 nouveau crée un statut de « patient-formateur » (I), dont le recrutement serait assuré par les facultés de médecine elles-mêmes. Le patient-formateur serait employé en tant que collaborateur occasionnel du service public ([37]).

Le recrutement d’un patient-formateur devra obligatoirement donner lieu à l’établissement d’un contrat écrit entre la faculté employeur et le patient-formateur. Ce contrat, d’une durée d’une année renouvelable, définira à la fois les missions pédagogiques confiées et les conditions dans lesquelles elles s’exercent.

Le II précise que les fonctions de patient-formateur sont exercées à titre gratuit. Toutefois, le contrat conclu entre la faculté et le patient-formateur peut prévoir le remboursement, le cas échéant, des frais de déplacement, d’hébergement ou de restauration.

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Article 10
Création dun diplôme détudes spécialisées et dune formation spécialisée de médecine polyvalente hospitalière

Rejeté par la commission

Cet article vise à répondre à plusieurs des « angles morts » de la formation actuelle des étudiants en médecine : la prise en charge, à l’hôpital, des patients atteints de maladie chronique, des patients en fin de vie, des patients nécessitant un accompagnement médical, psychologique et social global, ou encore l’organisation du retour à domicile et les modalités de maintien à domicile de ces patients.

À cette fin, l’article L. 632-9 nouveau du code de l’éducation crée, dans le cadre du troisième cycle des études de médecine :

d’une part, une nouvelle spécialité dite de « médecine hospitalière polyvalente », sanctionnée par un diplôme d’études spécialisées (DES) ;

d’autre part, une formation spécialisée transversale (FST) de médecine hospitalière polyvalente.

1.   La médecine « polyvalente » : un besoin croissant à l’hôpital, mais qui souffre d’une absence de reconnaissance statutaire

Au terme de l’examen classant national (ECN), en fin de sixième année des études de médecine, tous les étudiants doivent choisir une spécialité en fonction de la place obtenue à ce classement. Au total, plus d’une quarantaine de spécialités sont proposées chaque année (médecine générale, anesthésie-réanimation, gériatrie, oncologie, etc.).

Si toutes ces spécialités permettent l’acquisition de connaissances scientifiques et de pratiques médicales, les enseignements dispensés ne préparent pas les étudiants aux défis du terrain, notamment en milieu hospitalier.

Or, compte tenu de la diversité des situations et des patients accueillis, de l’accroissement des maladies chroniques, du vieillissement de la population et de l’ambition de développer l’hospitalisation à domicile, la connaissance des moyens de prise en charge des patients à l’hôpital requiert une meilleure préparation des futurs médecins à ces enjeux.

Pour répondre à ce besoin croissant, on relève depuis plusieurs années le développement de la « médecine polyvalente hospitalière » qui concernerait, selon la Fédération hospitalière de France (FHF) ([38]), environ 3 000 praticiens à temps plein et 500 à temps partiel. Pourtant, cette médecine dite « polyvalente » peine à se structurer car elle n’est aujourd’hui ni une discipline d’exercice reconnue par les ordres de santé, ni identifiée par une formation diplômante universitaire spécifique, et les praticiens qui l’exercent ne sont pas reconnus comme médecins spécialistes.

Principales caractéristiques de la médecine polyvalente hospitalière

Selon le rapport de la FHF précité, l’exercice de la médecine polyvalente hospitalière est pratiqué principalement par des médecins qualifiés en médecine générale, disposant parfois d’une compétence supplémentaire en médecine d’urgence ou gériatrie. La médecine polyvalente se retrouve principalement :

dans les services de médecine « aiguë », dans lesquels les patients sont principalement orientés après un passage aux urgences ;

dans les services de soins de suite et de réadaptation (SSR) ;

dans les services de chirurgie, voire de spécialités médicales d’organe : dans ces services hyperspécialisés, la prise en charge des problèmes médicaux ne relevant pas précisément de la spécialité du service serait en effet insuffisante sans l’intervention de la médecine polyvalente ;

au sein des établissements spécialisés en psychiatrie.

2.   La création d’une spécialité de médecine polyvalente hospitalière

Cet article propose donc la création d’une nouvelle spécialité dite de « médecine hospitalière polyvalente » dans le cadre du troisième cycle des études de médecine (I de l’article L. 632-9 nouveau).

Cette spécialité, accessible dès l’année universitaire 2019-2020 pour les étudiants en première année de troisième cycle (II du même article), permettrait aux étudiants de mieux appréhender les modes de prise en charge des patients à l’hôpital. Au terme de leurs études, ces médecins seraient ainsi en mesure d’assurer une meilleure prise en charge ou un accompagnement adapté des patients en fonction de leurs besoins, tout en déchargeant les autres médecins spécialistes de cette tâche.

Les étudiants de cette spécialité pourraient par exemple être formés aux modalités de prise en charge ou à l’accompagnement :

 des patients atteints de maladies chroniques, « lorsque lintervention continue des spécialistes nest pas nécessaire » ;

 des patients ayant bénéficié de soins aigus mais n’étant pas encore en mesure de retourner à leur domicile ;

 des patients en fin de vie ;

 des patients nécessitant une prise en charge globale médicale, psychologique et sociale.

Ils pourraient également être formés à l’organisation du retour ou aux modalités de maintien à domicile de certains patients.

La formation des étudiants se concentrerait notamment sur les modalités de prise en charge des patients dans les services post-urgences, dans les structures dites « d’aval » tels que les soins de suite et de réadaptation (SSR) mais également dans les services de médecine hospitalière, de chirurgie ou de psychiatrie.

Le nombre d’heures et le contenu précis des enseignements dispensés au sein de cette spécialité, de même que les conditions d’accès et d’évaluation, seront définis par un arrêté conjoint des ministres chargés de l’enseignement supérieur, de l’éducation nationale et de la santé (III du même article).

Il est précisé au V du même article que les praticiens de médecine hospitalière polyvalente bénéficient du « développement professionnel continu ». Tel que défini à l’article L. 4021-1 du code de la santé publique, le développement professionnel continu a pour objectifs le maintien et l’actualisation des connaissances et des compétences ainsi que l’amélioration des pratiques.

3.   La formation spécialisée transversale de médecine polyvalente hospitalière

En vue de former le plus grand nombre d’étudiants aux problématiques spécifiques de la prise en charge des patients à l’hôpital, le IV du même article propose la création d’une formation spécialisée transversale (FST) de médecine hospitalière polyvalente.

Accessibles aux étudiants dans le cadre du troisième cycle des études de médecine, les FST permettent aux futurs médecins d’élargir leurs domaines de compétences et d’enrichir leurs pratiques, tout en individualisant leur parcours de formation. La FST de médecine hospitalière polyvalente offrirait ainsi aux étudiants de troisième cycle une connaissance concrète et exhaustive des étapes et modalités de prise en charge des patients en milieu hospitalier.

Le contenu de cette formation sera précisé par un arrêté conjoint des ministres chargés de l’enseignement supérieur, de l’éducation nationale et de la santé.

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Chapitre II
La réforme des études paramédicales

 

Article 11
Création de conférences pédagogiques communes aux professions paramédicales

Rejeté par la commission

Cet article propose la création, au sein de chaque unité de formation et de recherche (UFR) de médecine, d’une conférence pédagogique réunissant l’ensemble des établissements publics et privés de formation aux professions paramédicales exerçant leur activité au sein du ressort territorial de l’UFR.

Créées à l’article L. 636-2 nouveau du code de l’éducation, ces conférences pédagogiques auraient pour mission, d’une part, d’assurer la cohérence des parcours des étudiants suivant une formation paramédicale, et d’autre part, de préparer l’intégration des formations paramédicales au parcours « licence, master, doctorat » pour la rentrée universitaire 2020-2021.

1.   Les missions confiées aux conférences pédagogiques

La première mission confiée aux conférences pédagogiques serait d’assurer la cohérence des parcours de formation paramédicale, tout en favorisant les échanges entre les étudiants de ces formations.

Les disciplines paramédicales désignent en effet un grand nombre de formations – infirmier, orthophoniste, ambulancier, masseur-kinésithérapeute, auxiliaire de puériculture, etc. , dont les conditions d’admission, la nature et la durée de formation ainsi que le mode d’évaluation sont extrêmement variés.

Les formations paramédicales sont, selon les cas, accessibles sans le baccalauréat (ambulancier, aide-soignant) ou post-bac. Selon les disciplines, elles  conduisent soit à un diplôme d’État (DE), et se déroulent alors en écoles ou instituts de formations – parfois rattachés à des universités , soit par un certificat de capacité (CC), lesquels se préparent à l’université. Les formations se déroulent sur une durée de 18 mois (ambulancier) à cinq ans (orthophoniste).

La création des conférences pédagogiques doit permettre d’améliorer la cohérence de l’ensemble de ces formations, y compris la cohérence entre les maquettes de formation médicale et paramédicale. Elle vise également à favoriser les échanges entre les formateurs et entre les étudiants de ces différentes disciplines, pour créer les conditions permettant de partager sur leurs pratiques et leurs professions.

Les conférences pédagogiques auront en outre pour mission de préparer l’intégration des formations paramédicales dans le parcours licence, master, doctorat (LMD) (II du même article) puisqu’à ce jour, seules quelques formations sont dispensées selon ce schéma universitaire : c’est notamment le cas des DE d’ergothérapeute, validés par une licence grâce à l’acquisition de crédits européens (ECTS). L’intégration devra être effective à la rentrée universitaire 2020-2021.

2.   L’organisation des conférences pédagogiques

Le III de l’article L. 636-2 nouveau précise enfin que la conférence pédagogique est composée, d’une part, du doyen de l’UFR ou de son représentant et, d’autre part, des responsables de formation des établissements membres.

Elle devra se réunir au moins une fois par année universitaire, dans des conditions fixées par décret.

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Article 12
Création dun statut dinfirmier de pratiques avancées

Rejeté par la commission

Cet article propose de reconnaître le rôle essentiel des infirmières et infirmiers dans notre système de santé, grâce à la création d’un statut d’infirmier de pratiques avancées.

1.   Les infirmiers, un maillon essentiel du système de santé en mal de reconnaissance

Trait d’union essentiel entre les patients et le médecin, acteurs incontournables de la prise en charge des patients à domicile, les infirmières et infirmiers sont aujourd’hui un maillon indispensable à l’efficience de notre système de santé. Cette affirmation est d’autant plus vraie qu’à l’heure où les déserts médicaux se multiplient et où les établissements de santé surchauffent, notamment dans les services d’urgence, les actes pratiqués par les infirmiers sur le terrain permettent de colmater, au moins en partie, les brèches d’un système de soins en souffrance.

Or, la formation initiale des infirmiers demeure pour l’essentiel très générale, et ne valorise pas la diversité des actes que les infirmiers pourraient être amenés à effectuer tout au long de leur carrière.

La formation des infirmiers, dispensée au sein d’instituts de formation en soins infirmiers (IFSI) publics ou privés pour une période de trois ans, est en effet sanctionnée par un diplôme d’État (DE) généraliste. Seules deux spécialisations complémentaires sont reconnues. Accessibles après plusieurs années de pratique professionnelle et une formation complémentaire, elles confèrent à leur titulaire un statut et une rémunération spécifiques ; il s’agit :

du diplôme d’État d’infirmier de bloc opératoire (IBODE), qui fait l’objet d’une formation complémentaire de dix-huit mois ;

du diplôme d’État d’infirmier-anesthésiste (IADE), qui s’obtient au terme d’une formation complémentaire de deux années.

2.   La création d’un diplôme d’État d’infirmier en pratique avancée (DEIPA) à l’été 2018 : une réforme attendue mais inachevée

Afin d’ouvrir une nouvelle voie d’évolution et d’expertise pour la profession d’infirmiers, cinq textes réglementaires publiés en juillet 2018 ont créé un diplôme d’État d’infirmier en pratique avancée (DEIPA), en se fondant sur le cadre réglementaire défini à l’article L. 4301-1 du code de la santé publique (cf. encadré).

Le cadre juridique de lexercice en pratique avancé

(article L. 4301-1 du code de la santé publique)

L’article 119 de la loi n° 2016-41 de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016 a créé le métier d’auxiliaire médical en pratique avancée au sein du code de la santé publique.

Les conditions et les règles de l’exercice en pratique avancée sont codifiées à l’article L. 4301-1 du code de la santé publique, qui précise que les auxiliaires médicaux peuvent exercer en pratique avancée :

au sein d’une équipe de soins primaires coordonnée par le médecin traitant, ou d’une équipe de soins d’un centre médical du service de santé des armées coordonnée par un médecin des armées ;

au sein d’une équipe de soins en établissements de santé, en établissements médico-sociaux ou en hôpitaux des armées coordonnée par un médecin.

L’exercice en pratique avancée est réservé aux professsionnels justifiant d’une durée d’exercice minimale de leur profession et d’un diplôme de formation en pratique avancée délivré par une université habilitée à cette fin.

La profession infirmière est la première concernée par cette évolution.

Ainsi, depuis la rentrée universitaire 2018-2019, les infirmiers pouvant justifier d’une expérience professionnelle de trois ans peuvent suivre une formation initiale ou continue d’infirmier en pratique avancée à l’université (article R. 4301-8 du même code). Le diplôme délivré à l’issue de la formation leur confère le grade de master.

Après examen du dossier médical, le médecin pourra déterminer les patients auxquels un suivi par un infirmier en pratique avancée (IPA) est proposé. Dans le cadre de ce suivi, l’IPA pourra effectuer des tâches habituellement réservées au médecin telles que le renouvellement ou l’adaptation de prescriptions médicales en cours, la prescription d’examens complémentaires ou d’actes de prévention nécessaires au patient, ou encore la prescription de dispositifs médicaux.

La création de ce diplôme d’État d’infirmier en pratique avancée consacre une juste reconnaissance des compétences et du rôle essentiel des infirmiers auprès des patients. Elle s’inscrit en outre pleinement dans la logique d’universitarisation de la profession défendue par le rapporteur.

Pourtant, les avancées de cette réforme ne se traduisent pour l’heure ni par un statut, ni par une revalorisation de la rémunération des infirmiers choisissant de s’investir dans une formation complémentaire en pratique avancée.

3.   Le dispositif proposé

Afin de parachever la réforme engagée par le ministère de la santé, et de sécuriser sans attendre les infirmiers qui auraient fait le choix, dès la rentrée universitaire de cette année, de s’engager dans une formation en pratique avancée, cet article propose la création d’un véritable statut d’infirmier de pratiques avancées (IPA), qui permettrait de bénéficier en contrepartie d’une revalorisation de la rémunération.

a.   Création du statut d’infirmier de pratiques avancées

Il crée à cette fin un article L. 4311-1-1 au sein du code de la santé publique, dont le I crée le statut « d’infirmier de pratiques avancées » (IPA).

Le II du même article précise que les IPA peuvent exercer indifféremment dans le cadre libéral, au sein de la fonction publique hospitalière ou au sein de la fonction publique territoriale.

Les conditions d’accès et d’exercice de la profession d’infirmier de pratiques avancées, les mentions de spécialisation et l’organisation de l’enseignement à l’université, ainsi que les conditions dans lesquelles les IPA peuvent effectuer des prescriptions et actes en rapport avec leur spécialisation seront définies par décret (V).

Afin d’harmoniser le statut et les rémunérations de l’ensemble des infirmiers justifiant d’une formation complémentaire, le IV du même article dispose qu’à compter de la publication de la présente loi, les infirmiers de bloc opératoire (IBODE) ainsi que les infirmiers anesthésistes (IADE) sont reconnus infirmiers de pratiques avancées, chacun dans leur discipline.

b.   Niveau de rémunération

Le III du même article dispose que les représentants de la profession d’IPA fixeront par convention avec l’assurance maladie la tarification de leurs actes, après autorisation par la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS).

S’agissant des infirmiers de pratiques avancées relevant de la fonction publique hospitalière (FPH) ou de la fonction publique territoriale (FPH), un décret fixera leurs conditions de rémunération et d’avancement.

c.   Entrée en vigueur

Le VII précise que l’ensemble des décrets d’application de cet article devront être publiés au plus tard dans l’année suivant la promulgation de la présente loi.

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TITRE III
Pour un accès à la santé pour tous, plus proche et plus rapide

Liée au vieillissement de la population des médecins et à la raréfaction de l’offre de soins dans certains territoires, notamment ruraux ou périurbains, la désertification médicale pose d’importantes difficultés en termes d’équité d’accès aux soins. De surcroît, notre système de santé souffre, comme il a été dit, d’un cloisonnement des métiers et des spécialisations peu propice aux échanges entre les différents professionnels de santé, et qui nuit nécessairement à la qualité et à la cohérence de la prise en charge des patients, a fortiori dans le cadre de parcours de santé complexes.

Pour résoudre cette équation, le titre III propose de créer, dès le stade de la formation, une dynamique de compétences partagées entre les professionnels de santé, susceptible de préfigurer le regroupement de ces professionnels au sein de « villages de la santé », c’est-à-dire des communautés professionnelles développées en lien avec les élus locaux en vue d’assurer la continuité des soins sur un même territoire.


Chapitre Ier
Les villages de la santé

 

Article 13
Création des villages de la santé

Rejeté par la commission

Cet article propose la création de « villages de la santé », pour répondre à l’exigence d’accessibilité et de qualité des soins sur l’ensemble du territoire national.

Ces villages, à vocation interdisciplinaire, visent à améliorer la coordination de l’ensemble des professionnels et établissements de santé sur un territoire donné, tout en laissant à ces derniers une grande liberté dans la définition de leurs modalités d’association.

De manière innovante, grâce au soutien des élus des communautés territoriales, les villages de la santé se construiront à partir de la demande en santé existant sur un territoire, et non de l’offre de santé. Les patients bénéficieront dès lors d’un accès rapide et pertinent aux soins, et d’une prise en charge coordonnée grâce à la coopération des professionnels et des établissements de santé au sein du village.

1.   Les villages de la santé : un projet plus ambitieux et plus cohérent que les réseaux territoriaux de professionnels de santé existants

Le projet de création de villages de la santé part d’un constat simple, mais récurrent d’année en année : en dépit de nombreuses initiatives et de textes législatifs permettant aux professionnels de santé de se regrouper pour assurer, sur un territoire donné, des soins de qualité, force est de constater que l’accès aux soins demeure, pour une grande partie de la population française, un parcours du combattant.

Les villages de la santé créés par cet article ont l’ambition de permettre à chaque citoyen de disposer, à proximité de son domicile et dans des délais rapides, d’une prise en charge par un professionnel de santé adaptée à son besoin.

À l’instar des actuelles structures de regroupement de professionnels de santé auxquelles les villages de santé se substitueront, telles que les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) créées par la loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016, les villages de la santé permettent aux professionnels de santé d’un même territoire de se regrouper pour assurer une continuité et une cohérence des soins.

Mais le projet de villages de la santé est bien plus ambitieux que les structures existantes, qui ont été créées en « mille-feuilles », sans s’assurer de la cohérence entre elles, et sans évaluation de leur efficacité.

Les professionnels de santé membres du village de la santé n’exerceront pas nécessairement, à la différence des maisons de santé pluridisciplinaires, en un lieu unique : les professionnels de santé libéraux pourront par exemple continuer d’exercer au sein de leur cabinet, l’objectif étant d’assurer un maillage précis du territoire.

L’objectif premier des villages de la santé est d’orienter le plus rapidement et le plus efficacement possible les patients vers les professionnels de santé adéquats, en construisant l’offre de soins autour et à partir de la demande. Les patients ne seraient ainsi pas nécessairement examinés par un médecin en premier lieu, mais par un professionnel de santé compétent, soit pour répondre directement à son besoin si cela relève de son niveau de qualification , soit pour évaluer son état de santé et l’orienter vers un autre membre du réseau compétent qui prendra le relais dans la prise en charge.

Le projet de village de la santé proposé par cet article introduit en outre quatre nouveautés par rapport aux réseaux existants : la possibilité pour les structures médico-sociales d’être intégrées au sein du village de la santé, la possibilité de contractualiser avec les collectivités territoriales du territoire, la possibilité de déroger au parcours de soins lorsque les soins sont dispensés par un professionnel de santé membre du village de santé au titre de la permanence des soins, et la souplesse du mode d’organisation limitant la capacité de contrôle des agences régionales de santé.

Les villages créeront ainsi une réelle dynamique d’interdisciplinarité entre les différentes professions de santé, aujourd’hui trop souvent amenées à exercer dans des sphères parallèles qui communiquent peu entre elles.

2.   Les modalités d’installation et d’organisation des villages de la santé

Les villages de la santé sont créés à l’article L. 1434-15 d’une nouvelle section 6 au sein du chapitre IV relatif à la territorialisation de la politique de santé du titre III du livre IV de la première partie du code de la santé publique (I).

a.   Objet et missions des villages de la santé

Le I de l’article L. 1434-15 autorise les professionnels de santé, sociaux et médico-sociaux d’un territoire à se constituer librement au sein de communautés territoriales de santé dénommées « villages de la santé » pour « apporter une réponse aux demandes de santé des habitants de ce territoire ».

Selon le II du même article, ces professionnels définissent un projet de santé partagé organisant, dans un territoire donné, l’offre et l’accès aux soins, les conditions de la permanence des soins, ainsi que les modalités de prise en charge des patients. Les signataires du projet partagé « sengagent notamment à apporter aux habitants du territoire une réponse de qualité au plus vite et au plus près de chez eux ».

b.   Statut

L’un des écueils des actuelles communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) est lié au pilotage du dispositif par les agences régionales de santé (ARS), à qui il revient de définir le projet de santé et le périmètre. L’évaluation des CPTS conduite par l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) relevait ainsi que « les agences régionales de santé (ARS), à quelques exceptions près, se sont peu saisies du sujet et nont pas organisé de politiques actives de soutien à lémergence des CPTS ».

Convaincu que le pilotage par les ARS est voué à l’échec, le rapporteur a souhaité au sein de la proposition de loi donner aux professionnels et établissements de santé une vraie liberté d’action dans la constitution des villages de la santé, sans que les modalités de regroupement soient dictées par les ARS.

D’ailleurs, selon l’IGAS, les cinq facteurs de mobilisation réussie des professionnels de santé sur un territoire pour un projet de communauté sont :

un intérêt à agir pour la résolution pragmatique de problèmes au service de la population (démographie médicale, organisation des soins non programmés, sujets de santé publique…) ;

un diagnostic fondé sur une approche populationnelle et une analyse du territoire ;

l’impulsion et l’accompagnement d’une logique interprofessionnelle forte ;

le portage de l’initiative par des professionnels de santé ambulatoire ;

 l’identification d’un porteur de projet rapidement soutenu et accompagné.

Pour donner aux professionnels de santé une réelle liberté dans la définition du projet, du périmètre et des modalités de fonctionnement du village de la santé, le I de l’article L. 1434-15 dispose que les villages de la santé sont constitués sous forme d’associations, régies par la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association.

Tout projet de village de la santé devra faire l’objet d’une déclaration préalable auprès de l’agence régionale de santé (ARS) territorialement compétente : cette simple formalité déclarative ne remet pas en cause la liberté, pour les professionnels de santé, de définir les contours du village de la santé

c.   Périmètre

L’une des plus-values des villages de la santé par rapport aux réseaux de professionnels de santé existants est d’associer l’ensemble des structures non seulement médicales mais également médico-sociales d’un territoire.

Le III de l’article L. 1434-15 permet en effet à l’ensemble des professionnels de santé ainsi qu’aux établissements de santé – publics, privés d’intérêt collectif ou privés – et aux établissements sociaux et médico-sociaux de rejoindre un ou plusieurs villages de la santé.

Ce périmètre élargi permettra d’organiser un suivi global des patients, en fonction de leurs besoins, et sans rupture dans la prise en charge.

d.   Modalités de contractualisation

Afin d’inscrire le projet de santé partagé du village de la santé dans une démarche cohérente et durable d’accès aux soins sur un territoire donné, le IV de l’article L. 1434-15 autorise les villages de la santé à conclure un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM) avec l’ARS territorialement compétente, les collectivités territoriales volontaires et les caisses d’assurance maladies obligatoires.

Ce contrat, conclu pour une durée maximale de cinq ans renouvelable, a pour vocation :

d’une part, d’organiser la prise en charge des patients, de la permanence des soins ainsi que des soins dits « non programmés » que l’on peut définir comme des soins « ayant vocation à répondre à une urgence ressentie, mais ne relevant pas médicalement de lurgence et ne nécessitant pas une prise en charge par les services hospitaliers daccueil des urgences » ([39]) ;

d’autre part, de définir les objectifs et actions à poursuivre en matière de prévention sanitaire, d’éducation à la santé et d’éducation thérapeutique.

Le CPOM devra également définir les modalités de coordination permettant aux professionnels de santé des villages de la santé de se structurer et d’organiser la prise en charge des patients.

e.   Gouvernance et financement

Le V de l’article L. 1434-15 précise que chaque village de la santé dispose d’un conseil d’administration.

Outre le président du village de la santé, qui doit impérativement être un professionnel de santé libéral élu pour un mandat de deux ans renouvelable une fois, siègent au sein de ce conseil d’administration, avec voix délibérative :

un représentant de l’agence régionale de santé ;

un représentant de la caisse primaire d’assurance maladie ;

un représentant de la mutualité sociale agricole.

En outre, chaque collectivité territoriale signataire du CPOM conclu avec le village de la santé est tenue de désigner un élu siégeant au sein du conseil d’administration avec voix délibérative.

Enfin, afin d’impliquer les usagers dans la démarche d’amélioration de la qualité et de l’accessibilité des soins poursuivie par les villages de la santé, les statuts du village de la santé devront prévoir leur représentation, au sein du conseil d’administration, avec voix délibérative.

f.   Modalités de financement

Il est précisé que les collectivités territoriales signataires peuvent verser au village de la santé des subventions de fonctionnement et d’investissement, dans le cadre et les limites fixés par le CPOM.

Cette possibilité de contractualisation et de subventionnement des villages de la santé par les collectivités territoriales permettrait aux collectivités d’investir auprès de projets assurant un véritable maillage du territoire, grâce à une démarche en réseau, horizontale et pluridisciplinaire, contrairement à certaines formes de regroupement existantes, telles que les maisons de santé pluridisciplinaires, qui tendent à assécher l’offre de soins sur certains territoires en concentrant les professionnels de santé dans un même lieu. Les collectivités pourraient donc contribuer par exemple au financement de la coordination des villages de la santé ou à l’installation d’un système informatique commun.

g.   Dispositions dérogatoires

Le II prévoit, pour les patients pris en charge par un professionnel membre du village de la santé dans le cadre de la permanence des soins, une dérogation à la majoration de la participation prévue par l’article L. 162-5-3 du code de la sécurité sociale pour les assurés d’au moins seize ans consultant un médecin sans prescription de leur médecin traitant ou n’ayant pas choisi de médecin traitant.

L’objectif des villages de la santé étant de permettre à chaque citoyen d’obtenir rapidement une réponse en cas de souci de santé sur un territoire donné, il n’y aurait en effet pas de sens à sanctionner par une majoration pécuniaire les patients ayant fait le choix de recourir à un professionnel du village de la santé sans consultation préalable de leur médecin traitant.

3.   Modalités d’application

Le III dispose que dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la loi visant l’orientation pour l’avenir de la santé, les villages de la santé se substituent à l’ensemble des structures de regroupement de professionnels de santé existantes, en particulier aux CPTS prévues par les articles L. 1434-12 et L. 1434-13 du code de la santé publique. 

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Chapitre II
Dispositions diverses

 

Article 14
Internats territoriaux

Rejeté par la commission

Cet article vise à encourager les étudiants en médecine à effectuer des stages auprès de médecins exerçant en libéral, en autorisant les collectivités territoriales à créer des « internats territoriaux », en lien avec les facultés de médecine et les professionnels de santé.

Non codifié, cet article permet en effet à une ou plusieurs collectivités territoriales de signer, avec les professionnels de santé et les unités de formation et de recherche (UFR) de médecine relevant de leur territoire, une convention prévoyant les conditions d’accueil et d’hébergement des étudiants de médecine effectuant un stage au sein de leur territoire.

Cette disposition a pour objet d’encourager les étudiants en médecine à découvrir l’exercice libéral, qu’ils méconnaissent trop souvent faute de praticiens disposés à les accueillir, ou par crainte de se trouver isolé sur le terrain de stage. 

Le conventionnement avec les professionnels de santé présente deux intérêts : il permet d’abord aux étudiants de rencontrer plus facilement un praticien disposé à les accueillir pour une période de stage ; il permet ensuite aux collectivités territoriales de décider, au sein de la convention, d’allouer une indemnité de déplacement, d’hébergement et de restauration aux étudiants réalisant un stage auprès d’un professionnel de santé signataire de la convention.

Les internats territoriaux seront destinés prioritairement aux étudiants de deuxième cycle (externes) ou de troisième cycle (internes) de médecine. Toutefois, la convention devra également prévoir la possibilité d’accueillir en leur sein les étudiants de formations paramédicales effectuant un stage sur le territoire dont relève l’internat : l’un des objectifs des internats territoriaux est en effet de favoriser une meilleure connaissance par les étudiants de santé des compétences de chacun, préfigurant ainsi le regroupement multiprofessionnel des professionnels soignants à la sortie de leurs études. 

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Article 15
Conférences territoriales de santé

Rejeté par la commission

Cet article propose la création, auprès de chaque groupement hospitalier de territoire (GHT), d’une assemblée consultative dénommée « conférence territoriale de santé ». Cette assemblée aurait pour mission d’émettre un avis sur le projet médical partagé du GHT.

1.   Missions des conférences territoriales de santé

Il est proposé à cette fin de compléter par un IX l’article L. 6132-1 du code de la santé publique, qui crée les groupements hospitaliers de territoire.

Les groupements hospitaliers de territoire (GHT)

Créés par la loi de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016, les GHT sont un dispositif conventionnel obligeant les établissements publics de santé d’un même territoire à se coordonner autour d’une stratégie de prise en charge et graduée du patient, formalisée dans un projet médical partagé.

L’objectif poursuivi par la création des GHT est d’organiser la complémentarité des établissements de santé, en incitant ces derniers à mutualiser leurs équipes médicales et à mieux organiser les prises en charge au sein d’un territoire donné, grâce à un projet médical répondant aux besoins de la population.

Dans le prolongement de la création des villages de la santé proposée à l’article 13 de cette proposition de loi, la conférence territoriale de santé a pour vocation de permettre à tous les acteurs de santé d’un territoire – établissements de santé publics, privés et professionnels de santé libéraux –  de se rencontrer et d’échanger pour définir conjointement :

le projet médical du groupement hospitalier de territoire, d’une part ;

et la carte sanitaire définie au sein de ce groupement, d’autre part.

En effet, en l’état actuel du droit, seuls les établissements publics de santé appartenant à un groupement hospitalier de territoire sont chargés d’élaborer le projet médical partagé. Ni les établissements de santé privés, ni les professionnels de santé médicaux ou paramédicaux exerçant en ville, ni les ordres qui les représentent ne sont obligatoirement consultés pour l’élaboration de ce projet.

2.   Périmètre et composition

Pour assurer une meilleure cohérence de l’offre de soins dispensée sur le territoire, le présent article propose en conséquence de regrouper au sein de la conférence territoriale de santé de chaque GHT, un ou plusieurs représentants :

du groupement hospitalier de territoire lui-même (et notamment du comité des élus, du directoire et de la commission médicale du GHT) ;

des établissements privés d’hospitalisation à but lucratif ou à but non lucratif exerçant leur activité dans le ressort territorial du GHT,

des établissements sociaux et médico-sociaux publics et privés exerçant leur activité dans le ressort territorial du GHT ;

des instances ordinales départementales des professions médicales et paramédicales exerçant leur activité dans le ressort territorial du GHT ;

de l’agence régionale de santé (ARS) dont dépend le GHT.

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Article 16
Accorder un droit de prescription aux médecins coordonnateurs en EHPAD

Rejeté par la commission

Cet article vise à accorder un droit de prescription aux médecins coordonnateurs exerçant au sein d’un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD).

1.   Le médecin coordonnateur en EHPAD : une fonction récente aux pouvoirs limités

Créée en 1999, la fonction de médecin coordonnateur en EHPAD a été précisée par voie réglementaire (décrets de 2005, 2007, 2011 puis 2016), puis consacrée par la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2009, à l’article L. 313-12 du code de l’action sociale et des familles.

Sous la responsabilité et l’autorité administratives du responsable de l’établissement, le médecin coordonnateur est chargé d’assurer l’encadrement médical de l’équipe soignante, et notamment :

 d’élaborer, avec son concours, le projet d’établissement, de le coordonner et d’évaluer sa mise en œuvre ;

 de donner un avis sur les admissions des personnes à accueillir en veillant notamment à la compatibilité de leur état de santé avec les capacités de soins de l’établissement ;

d’évaluer et de valider l’état de dépendance des résidents et leurs besoins en soins.

Toutefois, le droit de prescription des médecins coordonnateurs est très limité – ce droit n’est d’ailleurs reconnu qu’au niveau réglementaire et ne fait l’objet d’aucune disposition législative.

Les médecins coordonnateurs ne peuvent ainsi effectuer des prescriptions médicales pour les résidents de l’établissement au sein duquel ils exercent leurs fonctions qu’ « en cas de situation durgence ou de risques vitaux ainsi que lors de la survenue de risques exceptionnels ou collectifs nécessitant une organisation adaptée des soins ».

Le cas échéant, les médecins traitants des résidents concernés doivent impérativement être informés des prescriptions réalisées : en effet, conformément au principe de libre-choix du médecin par le malade consacré par le code de la santé publique et par le code de la sécurité sociale, le médecin coordonnateur n’est pas le médecin traitant des résidents en EHPAD.

Or, l’impossibilité pour les médecins coordonnateurs de prescrire en dehors des situations d’urgence ou de risques exceptionnels pose des difficultés pour la santé des résidents d’EHPAD, d’une part, et en termes d’attractivité de la profession, d’autre part.

Les résidents d’EHPAD sont ainsi les premiers à pâtir de l’impossibilité pour les médecins coordonnateurs de prescrire en dehors des situations d’urgence ou de risques professionnels, notamment car de moins en moins de médecins généralistes sont en mesure d’effectuer des visites à domicile ou en EHPAD. De ce fait, « la difficulté daccès au médecin traitant a des conséquences non négligeables sur la bonne organisation des soins en EHPAD : les visites se font souvent à la fin de la journée, les médecins doivent régulièrement se contenter de faxer leurs prescriptions, létablissement doit parfois se charger lui-même de trouver un nouveau médecin traitant à un résident sil nen na pas déjà un ou si celui-ci naccepte plus de se déplacer… » ([40]).  

L’impossibilité de prescrire pour les médecins coordonnateurs se traduit également par d’importantes difficultés de recrutement pour les établissements : un tiers des EHPAD n’auraient actuellement pas de médecins coordonnateurs, et l’impossibilité de prescrire est l’une des raisons fréquemment évoquées pour expliquer cette situation.

2.   Le dispositif proposé

Cet article propose en conséquence d’accorder un droit de prescription au médecin coordonnateur d’EHPAD.

Il crée à cette fin un article L. 312-2 au sein de la section I du chapitre II du titre I du livre III du code de l’action sociale et des familles, qui précise que le ou les médecins coordonnateurs « disposent dun droit de prescription dans les conditions du droit commun ».

Le renforcement de ce droit de prescription permettrait ainsi d’améliorer la qualité et l’adéquation de la prise en charge médicale dispensée en EHPAD, tout en améliorant significativement l’attractivité de la fonction de médecin coordonnateur.

Selon le rapport d’information sur les EHPAD publié en mars 2018 par les députées Mmes Monique Iborra et Mme Caroline Fiat ([41]), les professionnels rencontrés sur le terrain se sont montrés « assez favorables » à l’extension du droit de prescription des médecins coordonnateurs et, selon une enquête de l’Association nationale des médecins coordonnateurs et du secteur médico-social (MCOOR) citée par le même rapport, « plus des trois quarts des jeunes médecins coordonnateurs souhaitent lélargissement de leurs possibilités de prescrire ».

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TITRE IV
Modernisation de l’exercice libéral de la médecine

Chapitre Ier
Les négociations conventionnelles

Article 17
Suppression dune obligation de transmission dinformations et de propositions à la commission des équipements matériels lourds dimagerie médicale

Rejeté par la commission

Cet article vise à supprimer l’obligation pour le directeur général de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM) de formuler des informations et des propositions relatives à l’évolution, au financement et à la classification des équipements matériels lourds d’imagerie médicale soumis à autorisation.

L’article 99 de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2017 a créé à l’article L. 162-1-9 du code de la sécurité sociale une commission compétente pour rendre un avis motivé sur les propositions émises par le directeur général de l’UNCAM portant sur le champ de l’imagerie médicale, par période de trois ans.

Présidée par le directeur général de l’UNCAM, cette commission est composée de représentants de professions médicales spécialisées en radiodiagnostic, en imagerie médicale et en médecine nucléaire ainsi que de représentants des fédérations hospitalières représentatives et de l’UNCAM.

Selon l’article L. 162-1-9-1 du même code, l’avis motivé rendu par la commission porte sur les propositions d’évolution :

 des rémunérations liées à l’acquisition et au fonctionnement des équipements d’imagerie médicale, d’une part ;

de classification des équipements, d’autre part.

Cet article prévoit également la transmission à la commission, par le directeur général de l’UNCAM, d’autres informations de nature à éclairer les travaux de la commission. Il précise en outre qu’à défaut d’accord sur l’évolution des rémunérations et de la classification à l’expiration d’un délai de soixante jours à compter de la transmission des informations prévues à l’article L. 162-1-9-1, le directeur général de l’UNCAM peut procéder à leur détermination. Sa décision est réputée approuvée sauf opposition motivée des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.

Comme l’avait souligné la commission des affaires sociales du Sénat lors de l’examen de cet article à l’automne 2016, le dispositif adopté au sein de la LFSS pour 2017 s’immisce de manière illégitime dans les négociations conventionnelles entre les syndicats du secteur de l’imagerie médicale et l’assurance maladie. Ainsi, la possibilité donnée au directeur général de l’assurance maladie de déterminer de manière unilatérale des forfaits techniques, sans même avoir recours à un arbitrage, est particulièrement dérogatoire aux pratiques conventionnelles habituelles, puisqu’elle ne laisse aucune place à la négociation conventionnelle.

En conséquence, le présent article propose l’abrogation de l’article L. 162‑1-9-1 du code de la sécurité sociale.

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Article 18
Modalités dapplication de la convention entre lUNCAM et les syndicats représentatifs des médecins libéraux

Rejeté par la commission

Cet article vise à préciser que toute convention conclue entre l’assurance maladie et les syndicats représentatifs des médecins libéraux est « dapplication immédiate dès sa ratification ».

En l’état actuel du droit (article L. 162-15 du code de la sécurité sociale), les conventions négociées entre l’assurance maladie et les médecins n’entrent en effet pas immédiatement en vigueur, en raison de plusieurs dispositions.

En premier lieu, les conventions signées sont en effet transmises par l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM), au nom des parties signataires,  aux ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale.

En outre, le Conseil national de l’ordre des médecins, des chirurgiens-dentistes, des sages-femmes, des masseurs-kinésithérapeutes, des infirmiers ou des pédicures-podologues sont consultés par l’UNCAM sur les dispositions conventionnelles relatives à la déontologie de ces professions.

Les conventions ne sont réputées approuvées qu’à l’issue d’un délai de vingt et un jours à compter de la réception du texte, si les ministres n’ont pas entre temps fait connaître aux signataires de la convention leur opposition du fait de la non-conformité aux lois et règlements en vigueur ou pour des motifs de santé publique ou de sécurité sanitaire ou lorsqu’il est porté atteinte au principe d’un égal accès aux soins.

En second lieu, selon le I de larticle L. 162-14-1-1 du code de la sécurité sociale, toute mesure conventionnelle ayant pour effet une revalorisation des tarifs des actes (honoraires, rémunérations et frais accessoires des professionnels de santé) entrent en vigueur dans un délai de six mois minimum après la conclusion de la convention, de laccord ou de lavenant comportant cette mesure.

Ces délais sont difficilement compréhensibles pour les professionnels de santé, qui subissent un décalage forcé de l’entrée en vigueur des dispositions pourtant négociées et acceptées par l’assurance maladie.

Afin d’assurer sans attendre l’effectivité des dispositions négociées, cet article propose, dans une disposition non codifiée, un principe d’application immédiate des conventions entre l’UNCAM et les syndicats représentatifs des médecins.

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Article 19
Clause dindexation au sein de la convention entre lUNCAM et les syndicats représentatifs des médecins libéraux

Rejeté par la commission

Cet article invite les syndicats représentatifs des professionnels de santé – médecins, chirurgiens-dentistes, infirmiers, auxiliaires médicaux à négocier, au sein de la convention qui les lie respectivement à l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (UNCAM), « une clause annuelle dindexation des tarifs des actes ».

L’objectif de cette mesure est d’éviter les situations de gel de la tarification des actes pendant des années, comme cela a été le cas par exemple pour les médecins généralistes, jusqu’à la revalorisation de la consultation à 25 euros prévue par la convention entre l’assurance maladie et les médecins libéraux signée en août 2016.

Les modalités de mise en œuvre de cette indexation annuelle notamment les indices de référence seront fixées par décret.

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Chapitre II
Mesures diverses

 

Article 20
Conditions de détention des sociétés créées par des professionnels de santé

Rejeté par la commission

L’objectif du présent article est de sécuriser les modalités de détention des sociétés détenues par des professionnels de santé, en évitant l’ouverture du capital à des capitaux majoritairement étrangers à des fins exclusivement financières.

Cet article vise ainsi à préciser que toute société civile ou commerciale créée par des professionnels de santé doit être « majoritairement détenue par des professionnels de santé régulièrement inscrits auprès dun ordre français ».

En l’état du droit, les professionnels de santé souhaitant exercer en libéral et créer une société à cette fin peuvent choisir entre plusieurs catégories juridiques de sociétés, notamment :

 pour les professionnels souhaitant exercer seuls : la société d’exercice libéral (SEL) unipersonnelle à responsabilité limitée (SELURL) ou par actions simplifiée unipersonnelle (SELASU) ;

 pour les professionnels souhaitant s’associer avec d’autres médecins : la société d’exercice libéral à responsabilité limitée (SELARL) à forme anonyme (SELAFA), par action simplifiée (SELAS) ou en commandite par actions (SELCA) ; la société civile de moyens (SCM) ; la société civile professionnelle (SCP) ou encore la société de participation financière de professions libérales (SPFPL).

Selon le 2° de l’article 6 de la loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 ([42]), pour les sociétés ayant pour objet l’exercice d’une profession de santé, plus de la moitié du capital social des sociétés d’exercice libéral peut aussi être détenue par des personnes exerçant la profession constituant l’objet social ou par des sociétés de participations financières de professions libérales.

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Article 21
Exercice de la médecine par un médecin remplaçant retraité

Rejeté par la commission

Cet article vise à encourager les médecins remplaçants ayant fait valoir leurs droits à la retraite à exercer de nouveau au sein de zones confrontées à d’importantes carences dans l’offre de soins.

Il propose à cette fin aux médecins volontaires une exonération intégrale de cotisations sociales et de cotisations au régime d’assurance vieillesse en contrepartie de leur reprise d’activité dans ces zones.

1.   Le cumul emploi-retraite des médecins

Selon l’Atlas de la démographie médicale publié chaque année par le Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM) ([43]), parmi les plus de 75 000 médecins retraités inscrits au tableau de l’Ordre, 26 % d’entre eux ont fait le choix de continuer d’exercer la médecine. S’agissant plus particulièrement des médecins remplaçants, un quart d’entre eux sont inscrits au tableau de l’Ordre en tant que médecins retraités actifs.

Les praticiens souhaitant continuer à exercer la médecine alors qu’ils ont atteint l’âge de la retraite ou le nombre de trimestres requis ont le choix entre plusieurs alternatives : le cumul emploi-retraite, ou la poursuite d’une activité sans liquidation de la retraite.

Le dispositif du cumul emploi-retraite est autorisé pour les médecins sous réserve d’avoir validé l’intégralité des trimestres de cotisations, ou d’avoir atteint l’âge légal de la retraite à taux plein, et à condition que l’ensemble de leurs droits à la retraite aient effectivement été liquidés.

En pratique, selon une étude de la Caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF) ([44]), le dispositif du cumul emploi-retraite n’est pas toujours financièrement intéressant pour les médecins ayant atteint l’âge de la retraite.

L’étude prend ainsi l’exemple d’un médecin de 65 ans, marié, sans enfant à charge, exerçant en secteur 1 et déclarant 80 000 euros annuels de bénéfices non commerciaux (BNC). Ce médecin cotise depuis 30 ans à la CARMF et a déjà réuni tous les trimestres lui permettant de partir au régime de base sans décote : si, dans l’immédiat, le cumul de la retraite et d’une activité libérale peut sembler plus intéressant, la poursuite, ne serait-ce que pour une année, d’une activité libérale sans liquidation de ses droits à la retraite se révèle in fine plus avantageuse que le cumul, puisque le médecin pris pour exemple recevrait, sur la durée de perception de la retraite (estimée à 20 ans avec réversion), une somme supérieure de 10 203 euros par rapport au cumul emploi-retraite.

Par ailleurs, selon l’Atlas de la démographie médicale du CNOM, les médecins retraités actifs font encore rarement le choix d’exercer dans des zones sous-dotées : dans la région des Pays-de-la-Loire par exemple, 303 communes sont déficitaires en médecin généraliste, or seuls 65 médecins retraités actifs exercent une activité dans ces communes.

Le cumul emploi-retraite des médecins mériterait pourtant d’être particulièrement encouragé, puisqu’il peut constituer l’une des réponses à la désertification médicale en cas d’incitation spécifique à exercer dans les zones sous-dotées.

Plusieurs dispositions récentes ont fait un premier pas dans ce sens : ainsi, à compter de l’exercice 2018, les médecins cumulant retraite et activité libérale qui exercent dans des zones caractérisées, par l’agence régionale de santé compétente (ARS), par une offre de soins insuffisante ou par des difficultés dans l’accès aux soins peuvent être dispensés du paiement des cotisations d’assurance vieillesse, sous réserve que le revenu non salarié net de l’année 2016 soit inférieur à 40 000 euros.

2.   Le dispositif proposé

Cet article vise en conséquence à apporter une réponse supplémentaire au corpus de mesures de la présente proposition de loi relatives à l’accessibilité aux soins dans les zones sous-dotées en médecins.

La création d’un article L. 161-22-1 B au sein du code de la sécurité sociale encourage ainsi les médecins remplaçants ayant fait valoir leurs droits à la retraite à exercer de nouveau au sein de zones dites « sous-denses », définies par les agences régionales de santé (ARS).

L’idée est notamment d’offrir à ces médecins la possibilité de réaliser une période de « tuilage » avec le jeune médecin qui a vocation à les remplacer : cela permettrait d’une part à la patientèle de s’habituer au nouveau médecin venant remplacer leur médecin de famille et, pour ce jeune médecin, de prendre ses marques avec la pratique de la médecine libérale qu’il n’a pas forcément eu l’occasion d’appréhender pendant de longues périodes au cours de ses études d’avoir quelqu’un vers qui se tourner pour une aide ou un conseil ou encore d’apprendre la gestion d’un cabinet les syndicats de jeunes médecins rencontrés par le rapporteur regrettent de ne pas avoir de cours de gestion au long de leurs études. Pour cette raison, la durée maximale du dispositif de cumul emploi-retraite proposée par cet article ne devra pas excéder vingt-quatre mois cumulés.

Pour rendre ce dispositif véritablement attractif, il est proposé d’exonérer de la totalité des cotisations sociales et de vieillesse les revenus perçus par le médecin retraité au titre de son activité de remplacement, sous réserve que ces derniers n’excèdent pas 90 000 euros de revenus annuels.

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Article 22
Protection des professionnels de santé en cas dagression ou doutrage

Rejeté par la commission

Cet article vise à mieux protéger les professionnels de santé médicaux et paramédicaux face au risque d’agression ou d’outrage dont ils sont susceptibles d’être victimes dans l’exercice de leur profession, en les assimilant à des personnes chargées d’une mission de service public pour l’application des dispositions prévues par le code pénal en cas d’outrage.

1.   Les professionnels de santé, des personnels particulièrement exposés au risque d’agression

« La violence au travail affecte pratiquement tous les secteurs et toutes les catégories de travailleurs, mais elle menace particulièrement les professionnels qui sont en contact avec la population et doivent gérer des situations générant du stress. » ([45]). Compte tenu de leur proximité avec le public, les personnels soignants sont particulièrement exposés au risque d’agression verbale ou physique de la part de certains patients ou de leur famille.

L’hôpital est le premier affecté par la recrudescence des incivilités : dans les services d’urgence, par exemple, le sentiment de frustration et d’insatisfaction à l’égard de la rapidité de la prise en charge, pour des soins considérés comme urgents, peut générer des situations de violence.

Ainsi, selon le rapport 2018 de l’Observatoire national des violences en milieu de santé (ONVS), pour la seule année 2017, 446 établissements de santé (soit 7,71 % des établissements) ont déclaré 22 048 signalements, soit une augmentation de signalements de 25,3 % par rapport à l’année précédente. Sur l’ensemble de ces signalements, 80 % représentent des atteintes aux personnes, de gravité diverse, comme l’indique le tableau ci-dessous.

Nombre de signalements d’atteintes aux personnes effectués par les établissements de santé

Par niveau de gravité

 

Échelle des niveaux de gravité

Nombre de signalements datteintes aux personnes

1/ Insultes, injures

6 247

33 %

2/ Menaces datteinte à lintégrité physique

3 261

17 %

3/ Violences physiques

9 273

49 %

4/ Violences avec armes

215

1 %

Total

18 996

100 %

Source : Ministère chargé de la santé – Direction générale de l’offre de soins (DGOS)/ONVS – Plateforme signalement

Ces chiffres élevés sont d’autant plus alarmants que les données de signalement reposant sur la base du volontariat des établissements, ils sont, de l’aveu de l’ONVS lui-même, sous-estimés.

Les professionnels de santé libéraux sont également victimes d’actes de violence par certains patients ou leur entourage : selon l’Observatoire pour la sécurité des médecins du Conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM), plus de mille incidents ont été signalés par des médecins en 2017  un chiffre en forte hausse depuis 2010. Dans 50 % des cas, l’agresseur du médecin était le patient lui-même. Les agressions verbales et menaces représentaient 62 % du total des agressions, contre 23 % pour les vols ou tentatives de vols, 8 % pour les actes de vandalisme et 7 % pour les agressions physiques.

Or, les incivilités, outrages et violences – verbales ou physiques – représentent un véritable fardeau pour les personnels soignants : elles contribuent à la dégradation des conditions de travail des  professionnels de santé, peuvent générer un sentiment d’insécurité et, dès lors, influer sur la qualité des soins.

Afin d’aider les professionnels libéraux et les établissements de santé à renforcer leur sécurité, les ministères de la santé ([46]) et de la justice ([47]) ont mis à leur disposition des guides et fiches thématiques présentant les bons réflexes pour se prémunir ou réagir en cas d’agression.

2.   Assimiler les professionnels de santé à des personnes chargées d’une mission de service public pour améliorer leur protection en cas d’outrage

Les personnes responsables d’atteintes volontaires à l’intégrité de la personne – tortures et actes de barbarie, violences ou menaces – à l’encontre de professionnels de santé sont passibles de peines d’amende ou d’emprisonnement en fonction de la gravité de l’atteinte (section I du chapitre II du titre II du livre II du code pénal).

Cet article propose de renforcer le corpus juridique applicable en cas d’agression ou d’outrage perpétré à l’encontre d’un professionnel de santé, en élargissant au personnel soignant les dispositions du code pénal relatives à l’outrage applicables dans le cadre d’atteintes à l’administration publique.

Il est ainsi proposé de reconnaître comme personnes chargées d’une mission de service public l’ensemble des professionnels médicaux et paramédicaux dont le statut est défini au sein de la quatrième partie du code de la santé publique, à savoir :

au livre Ier : les médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes ;

au livre II : les pharmaciens, préparateurs en pharmacie, préparateurs en pharmacie hospitaliers, physiciens médicaux ;

 au livre III : les infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, ergothérapeutes, manipulateurs délectroradiologie médicale, techniciens de laboratoire médical, audioprothésistes, opticiens-lunetiers, prothésiste et orthésiste pour lappareillage des personnes handicapées, aides-soignants, auxiliaires de puériculture, ambulanciers et assistants dentaires.

En cas d’outrage perpétré à l’encontre d’un professionnel de santé, c’est-à-dire, selon la définition de l’article 433-5 du code pénal, « les paroles, gestes ou menaces, les écrits ou images de toute nature non rendus publics ou lenvoi dobjets quelconques adressés à une personne chargée dune mission de service public, dans lexercice ou à loccasion de lexercice de sa mission », l’outrage sera désormais puni selon les dispositions prévues à ce même article 433-5 du code pénal, soit :

7 500 euros d’amende lorsque l’outrage est de nature à porter atteinte à la dignité du professionnel de santé ou au respect dû à la fonction dont il est investi ;

7 500 euros d’amende et six mois d’emprisonnement si cet outrage est commis en réunion.

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TITRE V
Innovation et données de santé

Article 23
Intégration des données relatives à la prévention au sein des données de santé

Rejeté par la commission

Cet article vise à compléter les finalités du système national des données de santé (SNDS) afin d’améliorer la définition, la mise en œuvre et l’évaluation des politiques de prévention et d’éducation à la santé ainsi que la recherche et l’innovation dans ces domaines.

La loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 relative à la modernisation de notre système de santé a défini un nouveau cadre d’accès aux données à caractère personnel relatives aux usagers des services de santé.

Selon le III de l’article L. 1461-1 du code de la santé publique, les données de santé de l’ensemble des patients, sur tout le territoire, sont en effet recueillies et conservées au sein de bases de données, et ce à des fins :

d’information sur la santé, l’offre de soins et la prise en charge médico-sociale (1°) ;

de définition, de mise en œuvre et d’évaluation des politiques de santé et de protection sociale (2°) ;

de connaissance des dépenses de santé, des dépenses de l’assurance maladie et des dépenses médico-social (3°) ;

d’information des professionnels, structures et établissements de santé ou médico-sociaux sur leur activité (4°) ;

de surveillance, de veille et de sécurité sanitaire (5°) ;

de recherche, d’études et d’innovation dans les domaines de la santé et de la prise en charge médico-sociale (6°).

Par cohérence avec l’ambition de cette proposition de loi visant à améliorer la prévention en santé et l’éducation à la santé, cet article propose :

d’une part, de compléter le 2° afin de préciser que le recueil des données de santé aura également vocation à améliorer la définition, la mise en œuvre et l’évaluation des politiques de prévention et de l’éducation à la santé, grâce à l’analyse des données épidémiologiques ;

d’autre part, de compléter le 6° pour que l’exploitation des données de santé puisse également contribuer à la recherche, aux études, à l’évaluation et à l’innovation dans les domaines de la prévention et de l’éducation à la santé.

Article 24
Faciliter laccès aux données de santé

Rejeté par la commission

Cet article vise à simplifier les modalités d’utilisation des données de santé en encadrant le délai de réponse de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) autorisant la consultation de certaines données de santé relevant du système national de données de santé (SNDS).

Certaines données de santé, lorsqu’elles sont croisées avec des données détenues par ailleurs, présentent un risque d’identification de la personne et ne sont en conséquence pas mise à la disposition du public.

Pour assurer la confidentialité de ces données susceptibles de faire l’objet d’une réidentification, directe ou indirecte, l’article L. 1461-3 du code de la santé publique créé par la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé a mis en place, en conséquence, une procédure d’autorisation des responsables de traitement.

Les personnes souhaitant utiliser ces données doivent avoir été préalablement autorisées, selon une procédure adaptée aux objectifs poursuivis par le demandeur et à la finalité du SNDS. Larticle L. 1461-3 distingue deux cas de figure :

 le premier prévoit un accès permanent pour l’accomplissement des missions des autorités publiques, celles-ci n’étant pas exclusive des fins de recherche, d’étude ou d’évaluation ;

le second vise à autoriser l’accès à ces données à des fins de recherche, d’étude ou d’évaluation répondant à un motif d’intérêt public.

Dans ce second cas, une procédure d’accès sur autorisation par la CNIL est appliquée. Cette procédure est définie, selon le II de l’article L. 1461-3, au chapitre IX de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. Ainsi, l’autorisation du traitement est accordée par la CNIL après avis :

du comité de protection des personnes compétent (article L. 1123-6 du code de la santé publique), pour les demandes relatives aux recherches impliquant la personne humaine ;

du comité d’expertise pour les recherches, les études et les évaluations dans le domaine de la santé, pour les demandes d’autorisation relatives à des études ou à des évaluations ainsi qu’à des recherches n’impliquant pas la personne humaine.

Cette procédure d’autorisation, contraignante, n’est actuellement encadrée par aucun délai. En conséquence, afin d’assouplir cet obstacle administratif, le présent article propose de modifier l’article L. 1461-3 du code de la santé publique afin de limiter à six mois, à compter du dépôt du dossier devant la CNIL, le délai dans lequel la commission devra rendre son avis. Faute de réponse dans les six mois, l’avis de la commission sera réputé « favorable et opposable ».

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TITRE VI
Financement

 

Article 25
Projet de loi de programmation en santé

Rejeté par la commission

Cet article vise à inscrire l’action des pouvoirs publics en matière de santé dans une dimension prospective, grâce à la présentation par le Gouvernement d’un projet de loi quinquennal de programmation en santé.

1.   De la nécessité d’inscrire les politiques de santé dans une perspective de long terme

Une politique de santé ne peut en effet se contenter d’objectifs de court terme, sans cesse remis en cause au gré des majorités politiques. La santé de chacun de nos concitoyens mérite, au contraire, que les déterminants de la politique de santé soient définis et ajustés grâce à une vision sur le long terme, afin de s’adapter à l’évolution de leurs besoins tout au long de la vie.

Dès le plus jeune âge, par exemple, l’accent devrait être mis sur la prévention et l’éducation à la santé, permettant aux futurs adultes d’acquérir des habitudes pour prendre soin de leur santé et se prémunir de la survenance de certaines pathologies liées au mode de vie ou à l’environnement. Pour un grand nombre de maladies dites « évitables », seule une politique de long terme en matière de prévention est efficace : c’est le cas, par exemple, de la politique vaccinale, qui ne porte ses fruits qu’à la condition que l’ensemble de la population à risque soit effectivement vaccinée pendant une période suffisante pour écarter tout risque.

Or, les politiques de santé conduites en France ne se sont pas toujours inscrites dans une perspective de long terme. L’état actuel de la démographie médicale, caractérisée par une carence importante de médecins dans certains territoires et un vieillissement préoccupant de médecins – les médecins âgés de 60 ans et plus représentent 47 % de l’ensemble des médecins inscrits au tableau de l’Ordre contre 27 % en 2007 – témoigne ainsi d’un manque d’anticipation des problématiques de recrutement des professionnels de santé, avec le maintien pendant des années d’un numerus clausus strict. La désertification médicale, conséquence au moins indirecte de ce choix, se traduit dès lors par une dégradation de l’accessibilité et de la qualité des soins. Pour éviter cet écueil, il y a donc une impérieuse nécessité d’inscrire les politiques de santé dans le long terme.

2.   Le dispositif proposé

Le projet de loi pluriannuel proposé par le présent article, obligatoirement soumis à l’examen du Parlement, aura ainsi pour mission de fixer les objectifs de la politique publique de santé ainsi que les moyens correspondants, sur l’ensemble des composantes suivantes : 

la prévention et l’éducation à la santé (1°) ;

la santé mentale (2°) ;

l’organisation territoriale de la santé (6°) ainsi que la médecine du travail et la médecine scolaire (3°) ;

la démographie médicale et la formation des médecins (4°, 5° et 10°) ;

les établissements de santé (nombre, organisation et financement des urgences, évolution des effectifs hospitaliers : 7°, 8°, 9°) ;

la recherche, l’innovation et le déploiement du numérique (11° et 12°) ;

la qualité des soins (performance, qualité, évaluation des soins ; accès aux médicaments : 13° et 14°).

Chaque année, le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) aura pour double mission d’évaluer la conformité des actions entreprises par le Gouvernement avec les objectifs fixés par la loi de programmation, d’une part, et de décliner ces objectifs pour l’année suivante, d’autre part.

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Article 26
Paiement forfaitaire au parcours de soins

Rejeté par la commission

Cet article propose d’instaurer une tarification forfaitaire au parcours de soins pour certains soins dispensés par les établissements de santé ou les professionnels de santé exerçant en ville.

1.   La rémunération à l’acte des professionnels et établissements de santé, un mode de rémunération inadapté à la prise en charge de certaines pathologies

La tarification à l’acte et à l’activité constituent aujourd’hui le principal mode de rémunération des professionnels et établissements de santé de notre système de santé. À l’hôpital en particulier, la tarification à l’activité (T2A) privilégie la rémunération à l’acte plutôt que la rémunération des structures.

 Pourtant, la pertinence et l’efficience du paiement à l’acte des soins de santé peuvent être interrogées dans le cadre de certaines pathologies. S’agissant par exemple de la prise en charge des maladies chroniques, le Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie estimait en 2015 que « le système actuel apparaît contre-productif, avec un parcours « segmenté », une coordination non valorisée, des prestations utiles et nécessaires comme léducation thérapeutique financées sur des bases fragiles et non pérennes » ([48]).

Ce mode de rémunération est en effet susceptible d’entraîner, dans certains cas, la réalisation d’actes inappropriés ou superfétatoires – mais rentables – ainsi qu’une fragmentation de la prise en charge et un manque de coordination entre les soins réalisés en ville et à l’hôpital. En outre, les actions de prévention ou d’éducation thérapeutique des patients concernés, très chronophages et peu valorisées, sont le plus souvent délaissées au profit d’actes plus rémunérateurs.

2.   Instaurer une rémunération forfaitaire au parcours de soins

Partant du constat que certaines prises en charge recouvrent un ensemble d’actes et de prestations cohérentes, qui justifieraient la mise en place d’un forfait plutôt qu’une facturation au coup par coup, cet article propose d’instaurer un principe général de paiement forfaitaire au parcours de soins, quel que soit le secteur d’activité considéré (ville ou hôpital), pour une liste de parcours de soins déterminée.

a.   Le dispositif proposé

Selon le I, le paiement au parcours de soins s’appliquera ainsi « dans les mêmes conditions » à l’ensemble des établissements de santé et à tous les professionnels de santé exerçant en ville : cette condition est essentielle pour assurer la mise en place de financements transversaux et adaptés à la pathologie de chaque patient.

En revanche, seuls certains parcours de soins bénéficieront de la rémunération forfaitaire : en effet, la prise en charge au forfait est adaptée dans le cadre de certaines pathologies chroniques, telles que le diabète, mais beaucoup moins pour la prise en charge de pathologies « aigues » nécessitant une prise en charge rapide, limitée dans le temps et nécessitant l’intervention d’un nombre de professionnels de santé limité. En conséquence, la liste des parcours de soins concernés par la rémunération au forfait sera définie par décret.

Le II dispose que la rémunération forfaitaire des parcours de soins éligibles sera effectuée « sur la base de la valorisation dun nombre dactes établi pour chaque parcours par la Haute Autorité de santé ». Il reviendra donc à la Haute Autorité de santé (HAS) de déterminer, au cas par cas, le niveau de dépenses global envisagé ainsi que la ventilation des dépenses au sein du parcours.

La HAS pourra s’appuyer à cette fin sur l’évaluation médico‑économique des parcours de soins réalisée conjointement par l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH) et par l’assurance maladie.

En pratique, lorsque le patient entre dans un parcours de soins éligible au financement forfaitaire, chacun des actes réalisés au cours du parcours sera déduit de l’enveloppe globale allouée au parcours (III). De manière innovante, c’est le patient lui-même qui sera amené à gérer son parcours à partir de sa carte Vitale. À ce titre, chaque acte réalisé dans le cadre d’un parcours fera l’objet d’un financement appelé par la carte vitale du patient ou, le cas échéant, par une feuille de soins.

Lorsqu’ils sont nécessaires, les actes supplémentaires effectués en dehors du parcours de soins feront l’objet d’un remboursement au patient ou au professionnel de santé, sous réserve que l’établissement ou le professionnel de santé aient fait connaître la justification médicale de l’acte à l’assurance maladie.

Le IV précise enfin que les agences régionales de santé (ARS) devront publier chaque année un état des indicateurs de qualité de certains soins définis par décret.

b.   Les avantages attendus

Contrairement à la situation actuelle, dans laquelle les offreurs de soins sont incités à facturer des actes pour bénéficier de financements correspondants, dans le cadre d’un financement au parcours de soins, les professionnels de santé seraient désormais encouragés à mettre en place la combinaison de moyens la plus efficace pour chaque parcours, en veillant notamment à limiter le recours à l’hospitalisation, au titre de la maîtrise des coûts et de la qualité des soins.

Les établissements de santé seraient ainsi davantage incités à se coordonner avec les praticiens exerçant en ville ou les acteurs médico-sociaux pour préparer la sortie de l’hôpital et réduire le taux de complications ou de ré‑hospitalisations.

La prise en charge au forfait permettrait en outre d’enrichir le parcours de soins du patient par un volet consacré exclusivement à l’éducation thérapeutique et à l’accompagnement du patient : un accompagnement qui fait souvent défaut, aujourd’hui, faute de rentabilité.

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Article 27
Définition du contenu du panier de garanties collectives pris en charge dans le cadre des contrats collectifs dassurance complémentaire

Rejeté par la commission

Cet article vise à définir un panier identique de garanties collectives pour tous les contrats collectifs d’assurance complémentaire d’entreprise.

1.   Les contrats d’assurance complémentaire d’entreprise

Conformément à la volonté des partenaires sociaux traduite dans l’accord national interprofessionnel (ANI) du 11 janvier 2013, la loi de sécurisation de l’emploi du 14 juin 2013 a instauré à l’article L. 911-7 du code de la sécurité sociale une obligation de couverture complémentaire en matière de santé pour l’ensemble des salariés.

Ainsi, depuis le 1er janvier 2016, tous les salariés ont accès à une couverture complémentaire collective, financée au moins pour moitié par leur employeur, dans des conditions prévues par accord ou, à défaut, par décision unilatérale de l’employeur.

Les dépenses prises en charge au titre de la couverture collective comprennent a minima :

le ticket modérateur laissé à la charge du patient mentionné au I de l’article L. 160-13 du code de la sécurité sociale ;

le forfait journalier hospitalier prévu à l’article L. 174-4 du même code ;

les dépassements d’honoraires pratiqués pour certains soins dentaires et pour certains dispositifs médicaux à usage individuel admis au remboursement.

Sagissant des dépenses de santé non fixées dans ce « panier de soins » minimal, elles ne sont pas encadrées par la loi et varient ainsi en fonction du niveau de garantie des contrats de complémentaire santé souscrits par les employeurs.

2.   Le dispositif proposé

La généralisation de la complémentaire santé collective d’entreprise a sans conteste permis d’améliorer la couverture santé des travailleurs français. De surcroît, pour les salariés, l’adhésion à la complémentaire collective permet en théorie d’accéder à des garanties plus avantageuses en contrepartie d’une cotisation moindre, grâce à la prise en charge partielle ou totale par l’employeur.

Toutefois, l’absence de définition précise du panier de soins minimal pris en charge dans le cadre de la complémentaire d’entreprise peut conduire certains employeurs, pour des raisons tenant au coût de la complémentaire, à souscrire des contrats avec des garanties minimales, ne permettant pas aux salariés de bénéficier d’une prise en charge avantageuse de leurs frais de santé. L’adhésion à la complémentaire santé étant obligatoire – sauf rares cas de dérogations  , certains salariés, notamment dans les très petites ou petites et moyennes entreprises (TPE-PME), peuvent se trouver dans une situation moins avantageuse qu’avant la généralisation de la couverture santé obligatoire, avec un renchérissement du coût de leur complémentaire ou de moindres garanties par rapport à leur précédent contrat.

Le présent article propose en conséquence de définir chaque année un panier minimal de garanties collectives dans le cadre des contrats collectifs d’assurance complémentaire, afin que chaque salarié bénéficie du même niveau de prise en charge de ses dépenses de santé – à l’exception de la part prise en charge par l’employeur –, quelle que soit la taille de l’entreprise qui l’emploie.

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Article 28
Gage

Rejeté par la commission

Cet article vise à prévoir un mécanisme de compensation des charges pour les collectivités territoriales, les organismes de sécurité sociale et pour l’État, qui résulteraient de la mise en place des articles 1er à 27 de cette proposition de loi.

Le dispositif proposé repose sur une augmentation à due concurrence des droits pesant sur les tabacs mentionnés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts et qui concernent : les cigarettes, cigares, cigarillos, tabacs fine coupe destinés à rouler les cigarettes ainsi que les autres tabacs à fumer, priser et mâcher.

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—  1  —

   annexe N° 1 :
Liste des personnes auditionnées par lE rapporteur

     Caisse nationale de lassurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) – Mme Delphine Champetier, directrice de l’offre de soins

     Table ronde de syndicats infirmiers :

       Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI)  M. Thierry Amouroux, secrétaire général, et M. William Perel

       Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (SNIIL)  Mme Catherine Kirnidis, présidente, et Mme Marianne Pache, secrétaire générale adjointe

       Fédération nationale des infirmiers (FNI) M. Philippe Tisserand, président

       Convergence Infirmière – Mme Ghislaine Sicre, présidente

       Organisation nationale des syndicats dinfirmiers libéraux (ONSIL) – Mme Antoinette Tranchida, vice-présidente nationale, Mme Vassila Brunel, Trésorière nationale, et Mme Françoise Pacchioli, présidente Onsil Rhône-Alpes

     Conférence des Doyens des facultés de Médecine  M. Jean Sibilia, président, et M. Djillali Annane, vice-président

     Santé publique France – M. François Bourdillon, directeur général, et M. Mili Spahic, directeur de cabinet

     Table ronde « Formation des étudiants en médecine » :

       Association des étudiants en médecine de France (ANEMF) – M. Thomas Iampietro, vice-président chargé des perspectives professionnelles

       Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (ISNAR-MG) – M. Maxence Pithon, président

       Intersyndicale nationale des internes (ISNI) – Mme Isabelle Riom, chargée de mission médecine générale

       Syndicat national des jeunes médecins généralistes (SNJMG) – Mme Sayaka Oguchi, présidente

       Inter syndicat national des chefs de clinique et assistants (INSCCA) – M. Emanuel Loeb, président

     Table ronde des Ordres :

       Conseil national de lOrdre des médecins (*) ‑ M. Patrick Bouet, président

       Conseil national de lOrdre des chirurgiens-dentistes M. Serge Fournier, président, Mme Myriam Garnier, vice-présidente en charge de la santé publique et des relations avec les organismes

       Conseil national de lOrdre des infirmiers M. Patrick Chamboredon, président

       Conseil national de lOrdre des pharmaciens (*) – Mme Carine WolfThal, présidente, et Mme Hélène Leblanc, directrice des affaires publiques, européennes et internationales

     Mme Véronique Wallon (IGAS), co-auteure du rapport « Déploiement des communautés professionnelles territoriales de santé » (août 2018)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

(*) Ces représentants dintérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité de transparence pour la vie publique sengageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de lAssemblée nationale

 


—  1  —

   annexe N° 2 :
Liste des textes susceptibles d’être abrogés ou modifiés à l’occasion de l’examen de la proposition de loi

 

Projet de loi

Dispositions en vigueur modifiées

Article

Codes et lois

Numéro d'article

2

Code de la santé publique

L1413-1

3

Code de la santé publique

L1111-14-1 [nouveau]

5

Code de l'éducation

L312-16-1 [nouveau]

6

Code de la santé publique

L2134-2 [nouveau]

7

Code de l'éducation

L631-1

8

Code de l'éducation

L632-3 [nouveau]

9

Code de l'éducation

L632-8 [nouveau]

10

Code de l'éducation

L632-9 [nouveau]

11

Code de l'éducation

L636-2 [nouveau]

12

Code de la santé publique

L4311-1-1 [nouveau]

13

Code de la santé publique

Section 6 article L1434-15 [nouveau]

13

Code de la sécurité sociale

L162-5-3

15

Code de la santé publique

L6132-1

16

Code de l'action sociale et des familles

L312-2 [nouveau]

17

Code de la sécurité sociale

L162-1-9-1 [abrogé]

21

Code de la sécurité sociale

L161-22-1B [nouveau]

23

Code de la santé publique

L1461-1

24

Code de la santé publique

L1461-3

27

Code de la sécurité sociale

L911-7

 


([1]) Haut Conseil pour lavenir de lAssurance maladie (HCAAM), « Rapport sur la Stratégie de transformation de notre système de santé », 2018.

([2])  M. Jean-Carles Grelier, « L’avenir de la santé. 28 propositions pour la santé de demain », préface du Pr. Jean-Luc Harousseau, 2018.

([3]) Inspection générale des affaires sociales (IGAS), « Déploiement des communautés professionnelles territoriales de santé »,  Mme Emilie Fauchier-Magnan et Véronique Wallon, août 2018.

([4]) M. Jean-Carles Grelier, Ibid.

([5]) Article 79 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.

([6]) Données de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) du ministère de la Santé.  

([7]) Arrêté du 6 juillet 2017 fixant au titre de l’année universitaire 2017-2018 le nombre d’étudiants susceptibles d’être affectés à l’issue des épreuves classantes nationales en médecine, par spécialité et par centre hospitalier universitaire.

([8]) Académie nationale de médecine, « La médecine scolaire en France », 2017.

([9]) Assurance maladie, « La rémunération sur objectifs de santé publique en 2018, bilan à un an du nouveau dispositif », dossier de presse, 25 avril 2018.

([10]) M. Jean-Carles Grelier, Ibid.  

([11]) M. François Bourdillon,  « Agence nationale de santé publique. Rapport de préfiguration », 2 juin 2015.

([12]) M. Thierry Lang et Mme Valérie Ulrich, « Les inégalités sociales de santé », Actes du séminaire de recherche de la DREES 2015-2016.

([13]) Mme Nathalie Blanpain,  «Lespérance de vie par niveau de vie : chez les hommes, 13 ans décart entre les plus aisés et les plus modestes », INSEE Première, n° 1687, février 2018.

([14]) DREES, « La santé des élèves de grande section de maternelle en 2013 : des inégalités sociales dès le plus jeune âge », n° 920, juin 2015.

([15]) IGAS, Rapport annuel 2003 : « Santé, pour une politique de prévention durable ».

([16]) OMS, Charte dOttawa pour la promotion de la santé, 21 juin 1986.

([17])  IGAS, Rapport annuel 2003 : « Santé, pour une politique de prévention durable ».

([18]) Ibid. 

([19]) IGAS, 2003, Ibid.

([20]) HCAAM, Ibid.

([21]) IGAS, août 2018, Ibid. 

([22]) Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM), « Atlas de la démographie médicale en France », situation au 1er janvier 2017.

([23])  HCAAM, Ibid.

([24]) IGAS, août 2018, Ibid.

([25]) Données recueillies par l’IGAS, dans son rapport d’août 2018.  

([26]) IGAS, août 2018, Ibid.

([27]) Audition conjointe de la commission des affaires sociales avec la commission des affaires culturelles et de léducation, de Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé, et de Mme Laura Flessel, ministre des sports, sur le thème « Activités physiques, activités sportives et santé » du 26 septembre 2017.

([28]) Propos de M. Patrick Bouet, président du Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM), recueillis lors de la table ronde avec les représentants des ordres de santé organisée le 26 septembre 2018.

([29]) Exemples de diplômes universitaires ou masters offrant un enseignement spécifique en matière de prévention et d’éducation à la santé : http://inpes.santepubliquefrance.fr/FormationsEpS/liste.asp.

([30]) Drees, « Santé bucco-dentaire des enfants : des inégalités dès le plus jeune âge », Études et résultats n° 847, juillet 2013.

([31]) Drees, « La santé des élèves de grande section de maternelle en 2013 : des inégalités sociales dès le plus jeune âge », Études et résultats n° 920, juin 2015.

([32]) Initiative tirée du Livre blanc « L’avenir de la santé. 28 propositions pour la santé de demain » présenté par M. Jean-Carles Grelier, rapporteur de la présente proposition de loi, 2018.

([33]) Selon les syndicats détudiants en médecine rencontrés par le rapporteur, 95 % des stages réalisés par les externes se déroulent au sein de centres hospitaliers universitaires (CHU).

([34]) Arrêté du 12 avril 2017 portant organisation du troisième cycle des études de médecine.

([35])  Institut pour la démocratie en santé, Rapport du Groupe de travail « Les initiatives du changement des pratiques des professionnels de santé favorables à la démocratie en santé », Chantal de Singly, Véronique Tirard-Fleury, 2017.

([36]) Extrait adapté du rapport de l’IPDS précité.  

([37]) Le 21° de l’article L. 311-3 du code de la sécurité sociale définit les collaborateurs occasionnels du service public comme « les personnes qui contribuent à lexécution dune mission de service public à caractère administratif pour le compte dune personne publique ou privée, lorsque cette activité revêt un caractère occasionnel. ».

([38])  « Médecine polyvalente à l’hôpital. Rapport et recommandations établis par la Fédération hospitalière de France », juin 2018.

([39]) Définition proposée par le rapport de M. Thomas Mesnier, député, à la Ministre des Solidarités et de la Santé, « Assurer le premier accès aux soins – Organiser les soins non programmés dans les territoires », mai 2018.

([40]) Extrait du rapport d’information de Mmes Monique Iborra et Caroline Fiat, députées, sur les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) (n° 769), mars 2018.

([41]) Ibid.  

([42]) Loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 relative à lexercice sous forme de sociétés des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé et aux sociétés de participations financières de professions libérales.

([43]) Conseil national de lOrdre des médecins, « Atlas de la démographie médicale en France », situation au 1er janvier 2017.

([44]) Guide 2018 du cumul retraite – activité libérale de la CARMF.

([45]) https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/guide_onvs_prevention_atteintes_aux_personnes_et_aux_biens_2017-04-27.pdf

([46])  Ibid.

([47]) https://www.interieur.gouv.fr/Archives/Archives-des-actualites/2017-Actualites/Securisation-des-professionnels-de-sante

([48])  « Rémunération à lépisode de soins », document annexé au rapport « Innovation et système de santé » du Haut Conseil pour lavenir de lassurance maladie (HCAAM), 25 février 2015.