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N° 1302

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 11 octobre 2018.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE LÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2019 (n° 1255),

 

PAR M. Joël GIRAUD,

Rapporteur Général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 26
 

 

GESTION DES FINANCES PUBLIQUES
ET DES RESSOURCES HUMAINES

 

FONCTION PUBLIQUE

 

CRÉDITS NON RÉPARTIS

 

 

Rapporteures spéciales : Mmes Cendra MOTIN et Mme Valérie PETIT

 

Députées

____

 


 

 


–  1 

SOMMAIRE

___

Pages

donnÉes clÉs sur la fonction publique

introduction

I. faire de la GRH publique un levier de la transformation de l’action publique

A. vers une vraie politique de rémunération de l’état

1. L’impact de la politique de rémunération sur l’évolution de la masse salariale

a. La masse salariale, principal poste de dépenses de l’État

b. Les nouvelles mesures annoncées lors du rendez-vous salarial de juin 2018

c. La reprise du protocole PPCR

2. Encourager l’engagement des agents

a. Le RIFSEEP : un dispositif insuffisant

b. Promouvoir la performance individuelle et collective

3. Vers une remise à plat des structures de rémunération des agents publics

4. La politique de rémunération doit accompagner la transformation et l’action de l’État

B. Au-delà de la rémunération, développer des leviers de l’engagement

1. Investir dans la formation

a. Mettre en œuvre le schéma directeur de la formation professionnelle des agents de l’État

b. Optimiser la formation initiale

c. Faire évoluer le compte personnel de formation

2. Favoriser la mobilité

a. Favoriser la mobilité inter versants de la fonction publique

b. Répondre aux besoins de souplesse et de diversification des compétences des employeurs publics

c. Développer de nouvelles perspectives de mobilité

3. Améliorer la qualité de vie au travail

a. Un dialogue social rénové

b. Le Fonds interministériel pour l’amélioration des conditions de travail (FIACT)

c. La lutte contre le micro-absentéisme

d. Le financement de l’action sociale

4. Être exemplaire en matière d’égalité et de diversité

a. L’action sociale interministérielle au service des familles

b. Un nouveau cap en matière d’égalité entre les femmes et les hommes

II. Faire de l’éna l’école du leadership européen

A. diagnostic de la situation financière de l’éna

1. La situation financière de l’ENA

a. Des recettes insuffisantes…

b. … face à l’accroissement des dépenses

c. Une situation financière critique

2. D’insuffisantes ressources propres

a. Sur la formation continue

b. Sur les actions internationales

c. La recherche de nouvelles ressources propres

3. Une organisation perfectible

a. Le suivi des processus internes comptables

b. La structure complexe des services

B. se redonner des objectifs pour…

1. Retrouver des marges de manœuvre budgétaires

a. Les pistes de l’audit

b. Les décisions du conseil d’administration

2. Former et accompagner les leaders de la transformation de l’action publique

a. Fournir une formation sur-mesure adaptée aux compétences nécessaires aux hauts dirigeants de l’État

b. Affecter les élèves vers les missions prioritaires du Gouvernement

c. Poursuivre la formation des cadres dirigeants de l’État tout au long de leur vie professionnelle

3. Renforcer le rayonnement européen de la France

a. Une stratégie européenne efficace…

b. … qui mérite d’être renforcée

4. Innover et s’ouvrir

a. La mise en place d’un partenariat avec Paris Sciences et Lettres

b. La mise en place d’une fondation

c. S’ouvrir à de nouveaux profils

EXAMEN EN COMMISSION

Article 39 et état B

Article 39 et état B

PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURES SPÉCIALES

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

Au 10 octobre 2018, 54 % des réponses étaient parvenues à la commission des finances.


–  1  

   donnÉes clÉs sur la fonction publique

Évolution de la masse salariale de l’état

(en milliards d’euros)

Source : rapport annuel de performances de 2010 à 2017 et projet annuel de performances de 2018 et 2019.

 

Composition par statut de la fonction publique d’état

(1) Dans la FPE, la catégorie "Autres catégories et statuts" recouvre principalement des enseignants et documentalistes des établissements privés sous contrat, des ouvriers d'État et des apprentis.

Source : DGAFP, rapport annuel sur l’état de la fonction publique, septembre 2018.

 

effectifs par statut – (données 2016)

Source : Siasp, Insee. Traitement DGAFP - Département des études, des statistiques et des systèmes d'information.

Champ : Emplois principaux, tous statuts, situés en métropole et DOM (hors Mayotte), hors COM et étranger. Hors bénéficiaires de contrats aidés.

(1) EQTP annualisé : équivalent temps plein annualisé calculé sur l'ensemble des postes actifs de l'année.

(2) La catégorie " Autres catégories et statuts " recouvre principalement des enseignants des établissements privés sous contrat et des ouvriers d'État dans la FPE, des assistants maternels et familiaux dans la FPT, des médecins dans la FPH et des apprentis dans les trois versants.

(3) Dans la FPE, le nombre d'apprentis croît très fortement en raison du plan de relance de l'apprentissage et de la création du statut d'étudiant apprenti professeur en remplacement de celui d'emploi d'avenir professeur.

(4) Pour respecter le secret statistique, dans la FPT les militaires sont regroupés avec les fonctionnaires et les militaires volontaires avec les contractuels.

 

 


évolution de la subvention et des ressources propres de l’ENA depuis 2006

(en euros)

Source : commission des finances, d’après les données du secrétariat général de l’ENA.

 

évolution du fonds de roulement de l’éna depuis 2006

(en millions d’euros)

Source : commission des finances, d’après les données du secrétariat général de l’ENA.

 

 


 

LES PROPOSITIONS DES RAPPORTEURES

 

FAIRE DE LA GRH PUBLIQUE UN LEVIER DE LA TRANSFORMATION DE L’ACTION PUBLIQUE

1) Créer une mission d’évaluation et de contrôle (MEC) sur la politique de rémunération de l’État qui pourra faire une évaluation des mesures du protocole et de son impact sur les situations des fonctionnaires et l’évolution de la dépense publique ;

2) Rendre obligatoire le complément indemnitaire annuel (CIA), sous forme de bonus annuel, et instaurer un taux plancher qui permettrait de faire de ce bonus un réel levier de motivation chez les agents ;

3) Établir des indicateurs à la fois qualitatifs et quantitatifs mais également personnels et collectifs, afin que la réussite de tous soit le reflet de celle de chacun ;

4) Remettre à plat les dispositifs d’indemnité de résidence et de supplément familial de traitement, en les questionnant vis-à-vis de dispositifs d’action sociale interministérielle renforcés, qui ont un caractère collectif ;

5) Faire de la réforme des retraites une opportunité pour réfléchir à la rémunération des agents publics et revoir en profondeur la structure de leur rémunération en questionnant le système indiciaire / indemnitaire ;

6) Créer de véritables responsables « rémunération et avantages sociaux » (compensation and benefits) au sein des ministères et de la DGAFP ;

7) Initier une réflexion sur la création d’une agence nationale de gouvernance de la formation professionnelle et de l’apprentissage propre à la fonction publique, un « France Compétences Fonction Publique » ;

8) Définir, via la DGAFP, un plan pour une égalité réelle entre les femmes et les hommes objectif 2022.

 

FAIRE DE L’ENA L’ECOLE DU LEADERSHIP EUROPÉEN

1) Réviser le concours interne pour le faire reposer sur des compétences professionnelles (techniques et humaines) et moins sur des savoirs académiques, pour redonner l’envie aux agents des services publics de progresser par cette voie ;

2) Transformer le cycle préparatoire pour adopter les modalités de sélection des candidats afin de garantir une meilleure représentation de la diversité et de la parité et d’améliorer le niveau de sélection par cette voie ;

3) Accorder des marges de manœuvres financières plus importantes à l’École lors des premières années de mise en place de son plan de redressement ;

4) Fusionner tous les corps de sortie en trois grands corps : un corps d’inspection, un corps d’administrateurs et un corps de magistrats ;

5) Opter pour une politique tarifaire exigeante afin de changer le positionnement stratégique et marketing de l’École.


   introduction

 

 

La fonction publique emploie 5,480 millions d’agents ([1]) au sein d’organismes dont le statut commun de recrutement est le droit public.

44 % sont employés dans la fonction publique d’État (2,427 millions d’agents), 35 % dans la fonction publique territoriale (1,886 millions d’agents) et 21 % dans la fonction publique hospitalière (1,167 millions d’agents). Parmi eux, 3,851 millions ont le statut de fonctionnaire. La fonction publique, tous statuts confondus, représente 19,9 % de l’emploi total en France.

Le champ du projet de loi de finances ne concerne que les agents employés par l’État et ses opérateurs.

L’article 38 du projet de loi de finances pour 2019 fixe le plafond d’autorisation des emplois rémunérés par l’État à 1 964 659 ETPT, soit 4 326 de plus que la loi de finances initiale pour 2018 et 15 131 de plus que le projet de loi de finances rectificative pour cette même année (1 949 528 ETPT) qui ramène l’écart entre le plafond voté et la consommation effective des emplois à 1 % (contre 1,7 % en 2017). Notons que la correction apportée en PLFR porte à titre principal, sur les ministères de l’éducation nationale (– 3 466 ETPT), des armées (– 3 327 ETPT) et de l’action et des comptes publics (– 1 472 ETPT).

TABLEAU D’EVOLUTION DES PLAFONDS D’EMPLOI

(en ETPT)

Ministère ou budget annexe / Programme

LFI
2018

PLFR 2018

PLF
2019

Budget général

1 948 952

1 938 288

1 953 310

Action et comptes publics

126 536

125 064

124 973

Agriculture et alimentation

30 362

30 362

30 097

Armées

274 580

271 253

274 595

Cohésion des territoires

573

573

564

Culture

11 148

11 084

11 089

Économie et finances

13 137

12 944

12 801

Éducation nationale

1 021 721

1 018 255

1 027 527

Enseignement supérieur, recherche et innovation

8 016

7 354

7 960

Europe et affaires étrangères

13 530

13 459

13 669

Intérieur

287 325

286 845

287 771

Justice

84 969

84 770

86 629

Outre-mer

5 525

5 525

5 548

Services du Premier ministre

11 536

11 443

11 701

Solidarités et santé

9 938

9 938

9 524

Transition écologique et solidaire

40 805

40 328

39 850

Travail

9 251

9 091

9 012

Budgets annexes

11 381

11 240

11 349

Contrôle et exploitation aériens

10 677

10 536

10 686

Publications officielles et information administrative

704

704

663

Total

1 960 333

1 949 528

1 964 659

Source : projet de loi de finances pour 2019 ; projet de loi de finances rectificative pour 2018.

La hausse du plafond d’emplois doit être relativisée par un schéma d’emploi de – 4 164 équivalents temps plein (ETP) qui pèse, comme l’an dernier, sur les opérateurs (– 2 593 ETP) et sur les ministères (– 1 571 ETP). La hausse du plafond d’emploi s’explique notamment par le transfert de 11 200 contrats aidés en 6 400 ETPT AESH. Les principaux contributeurs à l’effort sont le ministère de l’action et des comptes publics (– 1 947 ETP pour l’État et – 336 ETP pour ses opérateurs), le ministère de l’éducation nationale (– 1 800 ETP), le ministère de la transition écologique et solidaire (–  811 ETP pour l’État et – 267 ETP pour ses opérateurs) et le ministère du travail (– 1 385 ETP sur les opérateurs).

Schéma d’emplois de l’état et de ses opérateurs

(en ETP)

 

LFI 2018

PLF 2019

Évolution

(LFI 2018 + PLF 2019)

Schéma d’emplois État

– 324

– 1 571

– 1 895

Schéma d’emplois opérateurs

– 1 276

– 2 593

– 3 869

TOTAL

 1 600

 4 164 

 5 764

Le présent rapport spécial examine les crédits du programme 148 Fonction publique de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines et de ceux de la mission Crédits non répartis.

Mission Crédits non répartis

La mission Crédits non répartis comprend deux dotations prévues par la LOLF.

« Une dotation pour mesures générales en matière de rémunérations, dont la répartition par programme ne peut être déterminée avec précision au moment du vote des crédits » : 79 millions d’euros de titre 2 sont prévus pour 2019 afin de financer les mesures décidées lors du rendez-vous salarial avec les organisations syndicales (revalorisation du barème kilométrique, des nuitées d’hôtels lors des déplacements des agents de l’État et création d’une indemnité de mobilité propre).

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 551 DEPUIS 2012

(en millions d’euros)

 

2008

2009

2010 à 2015

2016

2017

2018

PLF 2019

Crédits ouverts

AE = CP

150

150

0

11,44

0

0

79

Exécution

AE = CP

146,26

150

0

11,44

0

-

-

Sources : documents budgétaires.

« Une dotation pour dépenses accidentelles destinée à faire face à des calamités et pour dépenses imprévisibles » : le projet de loi de finances pour 2019 prévoit, comme en 2018, 424 millions d’euros en AE et 124 millions d’euros en CP sur ce programme. En exécution, ces fonds sont en partie utilisés pour abonder les fonds spéciaux (6,95 millions d’euros de transfert en 2018).

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DU PROGRAMME 552 DEPUIS 2010

(en millions d’euros)

 

2012

2013

2014

2015

2016

2017

LFI 2018

PLF 2019

Crédits ouverts

AE

332,9

334,15

335,00

314,42

324

324

424

424

CP

32,99

34,15

35,00

14,42

24

24

124

124

Exécution

AE

137,67

9,97

105

312,25

324

129,82

-

-

CP

28,67

9,97

33

12,25

24

17,2

-

-

Sources : documents budgétaires.


Mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines - Programme 148 Fonction publique

Le programme 148 intitulé Fonction publique ne comprend que les 206,9 millions d’euros de crédits transversaux pour la fonction publique, gérés par la DGAFP. Ce programme finance notamment :

– des mesures pour la formation des fonctionnaires (centres de préparation aux concours, allocations pour la diversité dans la fonction publique, écoles de formation) pour 82 millions d’euros ;

– un socle minimal d’action sociale interministérielle à hauteur de 120 millions d’euros.

La diminution des crédits du programme (– 32 millions d’euros par rapport à la loi de finance 2018) est avant tout due à un effet de périmètre. En effet, il a été décidé de transférer directement les crédits dédiés à l’apprentissage (30 millions d’euros en LFI pour 2018) aux ministères concernés dans le but de remédier à une procédure très lourde en gestion.

Le projet de loi de finances pour 2019 prévoit également une diminution des dotations des opérateurs du programme que sont l’ENA (30,2 millions d’euros pour 2019, soit une diminution de 879 000 euros) et les Instituts régionaux d’administration (44 millions d’euros en diminution de 1,2 million d’euros).

Au-delà des actions qu’il finance, ce programme donne à l’État, en finançant l’action de la DGAFP, les moyens d’élaborer une stratégie et de mener une politique de ressources humaines interministérielle qui constitue, selon les rapporteures, l’embryon d’une véritable direction des ressources humaines (DRH) de l’État – appellation qu’elle a pris l’année dernière et qui peine à s’imposer – à même de mener une politique de ressources humaines partagée, moderne et efficace. Cette politique RH modernisée est le levier humain de la transformation de l’action publique. Elle s’appuie sur un système de rémunération plus juste et plus incitatif, un plan de formation en phase avec les besoins réels de missions et des postes des agents, une action volontaire sur la lutte contre les discriminations (âge, genre) et l’inclusion, et une amélioration des conditions en phase avec les attentes en matière de télétravail et d’équilibre des temps de vie. Elle suppose aussi une mobilisation efficace de toute la communauté des acteurs RH publics pour diffuser les meilleures pratiques en matière de maîtrise des dépenses publiques, de pilotage de la performance RH, de mobilisation des managers publics et d’engagement des agents dans l’innovation et la transformation de nos services publics.

Quatre cycles de concertation ont été lancés avec les organisations syndicales en 2018 : sur la rénovation du dialogue social, l’élargissement du recours au contrat, une rémunération plus individualisée et l’accompagnement à la mobilité. C’est dans ce contexte que se dérouleront les élections professionnelles, organisées tous les quatre ans, le 6 décembre prochain, pour l’ensemble de la fonction publique.

Les rapporteures spéciales entendent donc se saisir pleinement de ce rapport pour traiter des différentes problématiques afférentes à la fonction publique en général.

Améliorer la qualité du service public, repenser la place et les missions de l’État tout en maîtrisant les dépenses publiques, tels sont les enjeux portés par le Gouvernement. Les grandes missions du service public, auxquelles les Français sont attachés ([2]), sans être remises en cause doivent opérer une transformation profonde qui est nécessaire pour répondre aux exigences nouvelles des Français, tout en garantissant une trajectoire équilibrée des finances publiques.

C’est la feuille de route qu’a confiée le Gouvernement aux quarante‑quatre membres du comité Action publique 2022 présidé par Véronique Bédague‑Hamilius ([3]), Ross McInnes ([4]) et Frédéric Mion ([5]) au mois d’octobre 2017. Si vos Rapporteures spéciales ne considèrent pas que la réflexion doive se limiter aux 22 propositions du rapport, elles soutiennent son triple objectif :

– améliorer la qualité des services publics pour les usagers ;

– offrir un environnement de travail modernisé pour les agents publics ;

– accompagner la baisse des dépenses publiques pour les contribuables
(– 3 points de PIB d’ici 2022).

Les rapporteures insistent que le rôle stratégique de la GRH publique dans la transformation de l’action publique. Elle est le levier humain de celle-ci et doit donc être modernisée pour être efficace et efficiente. Dans ce cadre, Action Publique 22 ne doit pas uniquement être l’occasion de réformes sectorielles, par ministères, elle doit intégrer une vraie politique RH commune permettant de repenser le leadership public dans sa globalité. La mobilisation de l’ensemble des managers publics – par-delà les versants, ministères et grades – est essentielle.

Cette politique RH pourra s’appuyer sur deux puissants leviers :

1. La politique de rémunération : elle doit engendrer la motivation et la reconnaissance des agents et être pensée dans sa globalité, sans rester focalisée sur les aspects indiciaires ;

2. La formation des leaders : via l’expertise des grandes écoles d’administration publique mais aussi avec l’accroissement de la diversité des recrutements et des possibilités de mobilité.

I.   faire de la GRH publique un levier de la transformation de l’action publique

La politique de rémunération de l’État représente un double enjeu : la maîtrise de la masse salariale de l’État, 131,7 milliards d’euros en 2019, et l’émergence d’une fonction publique moderne.

Les négociations actuellement conduites dans le cadre du « rendez-vous salarial » ont un impact visible dès le PLF 2019. La reprise du PPCR après une année de suspension et conformément à l’engagement du Gouvernement devrait peser pour 744 M au total et les mesures additionnelles actées coûteront au minimum 45 M. Ces mesures conduisent à une forte augmentation des « crédits non répartis » qui progressent de 79 M en 2019.

Au-delà de ces mesures concrètes, c’est la structure même de la rémunération des fonctionnaires qui doit être repensée pour mieux récompenser l’engagement des personnels et préparer la future réforme des retraites. La discussion qui s’est ouverte sur la rémunération devrait permettre à la fois de valoriser la performance individuelle et promouvoir l’implication collective. Plusieurs pistes sont possibles, mais déjà, le dispositif RIFSEEP semble particulièrement inadapté pour remplir cet objectif.

Mais au-delà de la rémunération, il existe bien des leviers qui sont mobilisables et qui doivent être activés. Ainsi, il apparaît essentiel de favoriser la mobilité - inter/intra fonction publique et externe -, de rénover la formation – en lien avec l’utilisation du CPF-, d’améliorer la qualité de vie au travail des agents – en intégrant une logique de « retour sur investissement » – et de rendre la fonction publique exemplaire en matière de diversité, d’inclusion et d’égalité.

A.   vers une vraie politique de rémunération de l’état

1.   L’impact de la politique de rémunération sur l’évolution de la masse salariale

a.   La masse salariale, principal poste de dépenses de l’État

Les dépenses de personnel de l’État ont permis de rémunérer 1,9 million d’agents en équivalents temps plein en 2018, faisant de l’État le premier employeur de France. Or à ce jour, la gestion de la masse salariale reste du domaine de chaque ministère et il n’existe pas de consolidation de celle-ci. Du fait des enjeux qu’elle revêt, il semble important que l’État se dote d’outils de pilotage de la masse salariale au service d’une réelle politique de ressources humaines pour accompagner la transformation de l’action publique.

Les dépenses de personnel comprennent les rémunérations d’activité, les cotisations sociales et contributions sociales à la charge de l’employeur, ainsi que les prestations sociales et allocations diverses.

Décomposition des dépenses du titre 2

(Données 2016)

(en milliards d’euros)

 

Source : DGAFP, rapport annuel sur l’état de la fonction publique, décembre 2017.

 

D’après les données communiquées par les ministères, en 2018, le montant des mesures indemnitaires nouvelles est resté élevé (+ 626M) avec la mise en place des mesures liées au PPCR de 2017 dans l’ensemble des corps (418,5 M), le déploiement du RIFSEEP (18,4 M et 16 nouveaux corps concernés) et d’autres mesures diverses (190 M). Les premiers ministères bénéficiaires de ces mesures étant l’éducation nationale, l’armée, l’action et comptes publics et l’intérieur.


MESURES CATEGORIELLES 2018 

 (en euros)

 

PPCR

Autres mesures

RIFSEEP

Total hors RIFSEEP

Total RIFSEEP inclus

Action et comptes publics

100 437 832

7 394 684

 

107 832 516

107 832 516

Agriculture

5 188 695

901 200

 

6 089 895

6 089 895

Armées

87 771 356

39 013 985

9 733 570

126 785 341

136 518 911

Culture

7 035 862

8 357 908

 

15 393 770

15 393 770

Économie et finances

2 050 571  

651 544

58 000

2 702 115

2 760 115

Éducation nationale

190 878 583

38 235 554

 

229 114 137

229 114 137

Europe et affaires étrangères

3 514 398

2 161 587

291 812

5 675 985

5 967 797

Intérieur

3 802 676

72 823 829

3 200 000

76 626 505

79 826 505

Justice

15 615 090

 

4 231 190

15 615 090  

19 846 280

Outre-mer

273 104

545 513

 

818 617

818 617

Services du PM

949 302

1 867 389

72 000

2 816 691

2 888 691

Travail

1 041 515

692 210

 

1 733 725

1 733 725

Solidarité et santé

 

339 824

 

339 824  

339 824

Transition écologique

 

16 691 411

 

16 691 411

16 691 411

Enseignement supérieur

 

 

752 093

-

752 093

Total

418 558 984

189 676 638

18 338 665

608 235 622

626 574 287

En comptabilité budgétaire, les dépenses de personnel du budget général de l’État s’élèvent à 131,7 milliards d’euros en prévision pour 2019, soit 27,5 % du budget général (hors fonds de concours), ce qui en fait le principal poste de dépenses du budget de l’État.

En 2015, la Cour des comptes signalait dans son rapport sur la masse salariale de l’État : « Les dépenses de personnel pèsent pour près d’un quart de la dépense publique et les effectifs de la fonction publique représentent un cinquième des emplois, ce qui place la France en tête des pays de l’OCDE avec les pays scandinaves. » Les données Eurostat pour l’année 2017 signalent elles aussi l’importance relative de la masse salariale publique française : plus de 12 % du PIB contre 10 % en moyenne dans la zone euro, 8,5 % au Royaume-Uni et moins de 8 % en Allemagne. Seules la Suède et la Belgique atteignaient alors un niveau proche.

 

 

On observe une augmentation de la masse salariale de 2,08 milliards d’euros sur le budget général de l’État par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale 2018, liée à l’augmentation des cotisations et contributions sociales (+ 830 millions d’euros), l’impact des mesures catégorielles (+ 600 millions dont 348 millions au titre du protocole PPCR), au solde du glissement-vieillesse-technicité (+ 360 millions d’euros) et à l’effet sur 2019 des créations d’emplois de 2018 (+ 100 millions d’euros).

Les rapporteures notent certaines divergences entre les données communiquées par les ministères et celles affichées par le Gouvernement :

– 362 M au lieu de 348 au titre du protocole PPCR ;

– 594 M au lieu de 600 au titre des mesures catégorielles.

Ces différences mériteraient des clarifications et soulignent le besoin d’avoir un outil de pilotage et de suivi de la masse salariale de l’État.

b.   Les nouvelles mesures annoncées lors du rendez-vous salarial de juin 2018

Contenir l’évolution de la masse salariale et piloter les rémunérations sont des enjeux majeurs pour la maîtrise des dépenses publiques. En conséquence, le Gouvernement a confirmé le gel du point d’indice de la fonction publique pour 2019. Il n’a d’ailleurs connu depuis 2010 que deux revalorisations ; une augmentation de 0,6 % le 1er juillet 2016 et de 0,6 % le 1er février 2017. Ces deux revalorisations ont contribué à augmenter la masse salariale des trois fonctions publiques de 2,5 milliards d’euros sans effet fort sur les rémunérations individuelles des agents.

Étant donné la nécessité de contribuer à l’effort de maîtrise des dépenses publiques et compte tenu de l’inefficacité des dispositifs généraux, les rapporteures spéciales soutiennent la décision du Gouvernement de ne pas augmenter le point d’indice pour 2019.

Pour garantir le pouvoir d’achat des agents publics dont le traitement indiciaire ne progresse pas au même rythme que l’inflation, le Gouvernement a décidé de reconduire la garantie individuelle du pouvoir d’achat (GIPA) pour la période de référence allant du 31 décembre 2013 au 31 décembre 2017. Au vu de l’importance des mesures catégorielles adoptées, la dépense estimée pour 2018 est de 2 millions d’euros pour la fonction publique d’État contre 21,6 millions en 2017.

 

 

Coût annuel de la Gipa depuis 2010

(en millions d’euros)

 

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017²

2018²

FPE¹

43,4 M€

65,3 M€

99,4 M€

79,9 M€

131,9 M€

144,2 M€

61,6 M€

21,6 M€

2 M€

FPH

nd

28,8 M€

53,4 M€

36,2 M€

65,1 M€

62,3 M€

nd

nd

0,6 M€

FPT

nd

34 M€

75,8 M€

nd

nd

nd

nd

nd

0,3 M€

¹ Hors militaires, établissements publics et enseignement privé.

² Il s’agit de prévisions et non de dépenses exécutées.

Cette composante vient diminuer la force que peut avoir la politique de rémunération comme levier de motivation et de maîtrise des dépenses en lissant les rémunérations et en atténuant l’effet des mesures catégorielles ou individuelles. C’est un système qui contribue à une vision focalisée sur le régime indiciaire.

Lors du rendez-vous salarial entre le ministre de l’action et des comptes publics et les organisations syndicales, avancé au mois de juin, de nouvelles mesures ont été annoncées. Les financements de ces mesures, à hauteur de 79 millions d’euros, sont inscrits pour 2019 sur le programme 551 de la mission Crédits non répartis.

Il s’agit de revaloriser :

– le barème de monétisation des jours épargnés sur un compte-épargne temps ainsi qu’un abaissement du seuil permettant la monétisation de 20 à 15 jours (+ 24 millions d’euros pour la FPE) ;

– l’indemnité kilométrique versée aux agents en déplacement à hauteur de l’inflation observée depuis 2006 ;

– le plafond des barèmes des frais de nuitée, qui passe de 60 à 70 euros (90 euros dans les grandes villes et 110 euros à Paris). Pour les agents à mobilité réduite, le barème de remboursement atteint 120 euros, en raison du prix des nuitées plus élevées dans les hôtels accessibles aux personnes à mobilité réduite (+ 21 millions d’euros pour la FPE).

Le programme 551 permettra également de financer à hauteur de 9 millions d’euros pour l’ensemble de la fonction publique d’État l’introduction du « forfait mobilité durable » qui a pour objet d’encourager l’usage du vélo pour les trajets domicile - travail. Il s’agit d’un transfert du programme 203 Infrastructures et services de transports.

Le programme 551 contribuera aussi à l’amélioration de l’accès au logement intermédiaire et au remodelage de l’aide à l’installation des personnels en fonction de la situation du marché de l’immobilier (dans la continuité des modifications effectuées en 2018 sur la NIB et la prime à l’installation REP+).

 

c.   La reprise du protocole PPCR

Le protocole relatif aux parcours professionnels, carrières et rémunérations dans la fonction publique dit « PPCR », conclu en juillet 2015, consiste en un processus de rénovation des grilles indiciaires pour prendre en compte l’allongement de la durée des carrières.

Le Gouvernement a confirmé la reprise au 1er janvier 2019 du protocole qui avait été suspendu pendant un an afin de concilier la revalorisation des rémunérations des agents publics et l’impératif de redressement des comptes publics. Le calendrier a donc été revu en conséquence jusqu’à la fin du protocole avec une compensation de l’arrêt du protocole en 2018.

coût actualisé de PPCR

Coût annuel HCAS

2016

2017

2018

2019

2020

2021

Total 2016-2021

Fonction publique d’État

33

793

112

348

550

121

1 957

Fonction publique territoriale

24

426

– 122

183

171

313

995

Fonction publique hospitalière

75

276

– 52

214

107

152

772

TOTAL

132

1 495

 62

745

828

586

3 724

Source : Gouvernement.

Vos rapporteures spéciales constatent la reprise du protocole qui illustre la volonté du Gouvernement de respecter ses engagements. Elles soulignent néanmoins son impact important sur les finances publiques – concernant le projet de loi de finances pour 2019, 55 % des mesures catégorielles, soit 348 millions d’euros, sont liées à l’application du PPCR. Elles proposent la création d’une mission d’évaluation et de contrôle (MEC) sur la politique de rémunération de l’État qui pourra faire une évaluation des mesures du protocole et de son impact sur les situations des fonctionnaires et l’évolution de la dépense publique.

De manière globale, les rapporteures spéciales considèrent que toute mesure générale représente un coût très important pour les dépenses publiques alors qu’elles n’ont qu’un impact très limité pour les agents. Ainsi en est-il de l’augmentation du point d’indice ou d’un protocole tel que PPCR. Elles souhaitent que la rémunération devienne un outil plus efficace et plus maniable de reconnaissance et d’engagement pour les agents publics et qu’elle procède plus d’une volonté managériale que d’une obligation légale.


2.   Encourager l’engagement des agents

a.   Le RIFSEEP : un dispositif insuffisant

Le régime indemnitaire tenant compte des fonctions des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel (RIFSEEP) a été créé en 2014 dans le but d’unifier un certain nombre de primes et d’indemnités dans un cadre interministériel commun à l’ensemble de la fonction publique d’État.

Applicable à la grande majorité des filières métier et à toutes les catégories, le RIFSEEP se compose de deux volets détachables :

– le socle de base obligatoire, l’indemnité relative aux fonctions, aux sujétions et à l’expertise (IFSE), a trait aux responsabilités exercées ;

– le second volet, le complément indemnitaire annuel (CIA), est facultatif et doit reconnaitre l’engagement professionnel et à la manière de servir.

Au 1er janvier 2018, près de 360 000 agents de l’État, appartenant à 265 corps et emplois ministériels et interministériels, bénéficient du RIFSEEP. En application du principe de parité entre la fonction publique de l’État et la fonction publique territoriale, les employeurs territoriaux doivent mettre en œuvre le RIFSEEP pour leurs cadres d’emplois homologues dès lors que les corps de la fonction publique de l’État en bénéficient

Un bilan du RIFSEEP et de la rémunération au mérite a été réalisé à l’été 2018 sous l’égide de la DGAFP et présenté aux organisations syndicales représentatives de la fonction publique dans le cadre de la concertation sur la refondation du contrat social avec les agents publics. Bien que le déploiement du dispositif ne soit pas encore achevé, ce premier bilan a permis d’identifier les principaux enjeux du développement de la rémunération au « mérite ».

Le RIFSEEP n’est qu’une première étape dans la prise en compte de la performance dans la rémunération des agents publics. Les rapporteures spéciales font le constat que les dispositifs existants censés intégrer une part de rémunération liée à l’engagement et à la performance sont insuffisamment incitatifs.

Dans son rapport spécial de juin 2018, la rapporteure Cendra Motin avait constaté que la part individuelle du RIFSEEP, le complément indemnitaire annuel, est insuffisamment appliquée alors même que ce complément indemnitaire individuel ne représente qu’une part minime de la prime (un maximum de 15 %), ce qui constitue un recul par rapport à la prime de fonctions et de résultats dont la partie « résultat » pouvait atteindre jusqu’à 40 % du montant de la prime. Elle avait relevé deux principaux obstacles à sa mise en place :

– la difficulté à définir des critères d’évaluation transparents, compris et acceptés par les agents eux-mêmes ;

– la crainte que la rémunération à la performance n’introduise des comportements individualistes perçus comme nocifs pour le service public.

La France apparaît effectivement en retrait sur ce point au regard des autres pays de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE). Selon une étude de Stéphane Jacobzone, conseiller à l’OCDE, publiée par Acteurs publics, sur une échelle de 0 (aucune utilisation) à 1 (utilisation élevée), l’indice français de la rémunération fondée sur la performance était de 0,767 en 2016, soit à la 22e place sur les 28 pays du classement.

Les rapporteures estiment qu’il est important de poursuivre l’effort pour qu’une culture de la reconnaissance de l’implication et de la performance se développe au sein de la fonction publique. Pour ce faire, il est nécessaire d’arbitrer la part de rémunération à la performance dans la rémunération globale, la place respective du mérite individuel et du mérite collectif, ainsi que la pertinence des modes d’évaluation quantitatifs et qualitatifs.

b.   Promouvoir la performance individuelle et collective

Rémunération des agents « au mérite », « à l’engagement », « à la performance » ; les dénominations sont nombreuses mais l’idée est la même. Il s’agit de renforcer le lien entre la rémunération et l’investissement des agents et de valoriser la performance. Bien que la prise en compte de l’engagement soit bien perçue par les agents, le terme de « prime au mérite » est particulièrement mal accueilli, du fait qu’il introduit un jugement de valeur, bien éloigné de l’objectivité avec laquelle chacun peut souhaiter être traité dans son travail. C’est pourquoi, les rapporteures spéciales préfèrent la notion de « prime d’objectifs ».

Dans le cadre de la démarche Action Publique 2022, le Gouvernement poursuit cet objectif de mieux valoriser l’engagement des agents. C’est donc un sujet dont s’est emparé la DGAFP qui en a fait un de ces quatre chantiers principaux.

 La performance individuelle

Une des pistes évoquées par le Gouvernement serait de généraliser le complément indemnitaire annuel (CIA), second volet facultatif du RIFSEEP, afin de le transformer en « bonus annuel universel ». Il serait d’abord nécessaire d’en simplifier l’architecture et les composantes mais également de délier les calendriers de déploiement territoriaux actuellement dépendants du déploiement étatique.

Le CIA représente actuellement 10 à 25 % du total du RIFSEEP et a bénéficié à près de 217 000 agents en 2017. Les rapporteures regrettent que beaucoup d’employeurs aient préféré ne pas activer le CIA alors qu’il peut constituer un bon moyen de récompenser l’implication de chacun.

Lors de l’audition de M. Olivier Dussopt avec les rapporteures spéciales, il a évoqué la possibilité de rendre obligatoire le CIA, sous forme de bonus annuel, et d’instaurer un taux plancher, de l’ordre de 10-15 %, afin d’en garantir les effets.

Les rapporteures spéciales soutiennent ce projet qui permettrait de faire de ce bonus un réel levier de motivation chez les agents.

Cependant, la principale difficulté dans la prise en compte de la performance réside dans la définition de critères d’évaluation transparents et surtout acceptés par les agents, sous peine d’entraîner une forte démotivation, contraire à l’effet recherché. On retrouve également parmi les agents la crainte que la rémunération à la performance n’introduise des comportements individualistes qui pourraient nuire à l’image du service public. Enfin, le manque de culture de valorisation de la performance au sein du management public aujourd’hui doit aussi être pris en compte dans les inquiétudes qui s’expriment quant à l’évaluation des agents.

 La performance collective

Compte tenu de l’importance du travail d’équipe et dans l’optique de motiver les agents dans l’amélioration continue des services rendus au public, il est nécessaire de valoriser également la performance collective.

L’intéressement est dans cette optique l’outil à privilégier lorsqu’il s’agit de prendre en compte la performance des agents de manière collective. C’est un complément de rémunération collectif qui permet d’associer les salariés à l’accroissement des performances et résultats de l’entité d’appartenance selon des critères objectivables et connus de tous. L’intéressement est en ce sens un outil vertueux dans la mesure où il n’est versé que si les objectifs préalablement établis ont été atteints.

Notons qu’un système d’intéressement collectif existe bien dans la fonction publique d’État depuis 2012 avec la prime d’intéressement à la performance collective (PIPC) destinée à récompenser chaque année la performance collective des agents des services les plus performants, sur des critères comme la qualité de service, la maîtrise des coûts, l’amélioration des conditions de travail ou encore le développement durable. Le bilan de la PIPC est cependant plus que contrasté. Dans la FPT, le bilan du déploiement de la PIPC n’est pas possible compte tenu de l’absence de données consolidées disponibles. Dans la fonction publique de l’État, la PIPC a été déployée dans une dizaine de services, essentiellement des établissements publics ou des structures gérant un service mesurable, et concerne moins de 10 000 agents. Cette faible adhésion au dispositif peut être analysée comme résultant du développement parallèle de la reconnaissance du mérite individuel, de la rigidité du cadre de définition des montants peu incitatif, des objectifs et indicateurs.

 

La prise en compte de la performance collective nécessite une mesure claire et objective de celle-ci. Elle peut être appréciée par référence à la qualité du service rendu comme le taux de satisfaction de l’usager ou le délai de traitement des dossiers, à la maîtrise des coûts, à la gestion des ressources humaines. Il appartient à l’employeur de s’assurer également que les moyens d’atteinte des objectifs sont garantis aux agents pour assurer une évaluation loyale de la performance.

La réflexion pour qu’un système d’intéressement au mérite collectif soit opérant doit encore être poursuivie notamment pour donner les outils permettant aux managers des services publics d’identifier les indicateurs qui sont adaptés à leurs communautés de travail afin d’apprécier au plus juste leur performance collective.

Partant de ce constat, les rapporteures spéciales préconisent des indicateurs à la fois qualitatifs et quantitatifs mais également personnels et collectifs, afin que la réussite de tous soit le reflet de celle de chacun. Ces objectifs doivent ensuite être régulièrement actualisés en fonction des projets du service, de l’établissement ou du ministère.

3.   Vers une remise à plat des structures de rémunération des agents publics

Pour les rapporteures spéciales, le développement de la rémunération liée à la performance individuelle et/ou collective suppose de repenser le système des primes au profit d’une meilleure articulation entre progression à l’ancienneté, indemnisation des fonctions et sujétions et reconnaissance de l’engagement des agents. À titre d’exemple, l’automaticité de la progression individuelle indiciaire, via l’avancement d’échelon, mériterait d’être questionnée.

Les différents éléments du système de rémunération des agents publics visent plusieurs objectifs dont il convient de déterminer s’ils sont atteints ou s’ils sont toujours pertinents.

Les rapporteures spéciales ont déjà souligné l’an dernier les faiblesses des différents accessoires du traitement, que sont l’indemnité de résidence et le supplément familial de traitement.

L’indemnité de résidence repose sur un zonage largement dépassé qui ne correspond plus au coût de la vie sur un territoire donné. Elle est attribuée en fonction de la résidence administrative du fonctionnaire et est proportionnelle au traitement indiciaire : 3 % pour la zone 1 (qui est supposée regrouper les territoires où le coût de la vie est le plus élevé), 1 % en zone 2 et 0 % en zone 3. Ce découpage territorial n'a pas été modifié depuis 2001 et n’est plus adapté aux écarts de coût de la vie entre les zones géographiques.

 

Le supplément familial de traitement est versé en fonction du nombre d’enfants et comprend une part proportionnelle au traitement brut de l’agent. Il peut atteindre jusqu’à 284 euros mensuel pour un agent qui a trois enfants et se cumule avec les autres allocations familiales auxquelles l’agent a droit.

Les rapporteures sont d’avis qu’une remise à plat de ces dispositifs est nécessaire afin de les rendre plus efficaces, voire de les questionner au profit de dispositifs d’action sociale interministériels renforcés, qui ont un caractère collectif.  

En outre, un dispositif comme la nouvelle bonification indiciaire, que les fonctionnaires occupant certains emplois comportant une responsabilité ou une technicité particulière perçoivent sous forme de points d’indice majoré supplémentaires, fait double emploi avec d’autres indemnités reconnaissant la technicité et la responsabilité, telles que le RIFSEEP.

La réforme des retraites annoncée par le Président de la République entend créer « un système universel de retraites où un euro cotisé donne les mêmes droits, quel que soit le moment où il a été versé, quel que soit le statut de celui qui a cotisé ». Les Rapporteures spéciales estiment que cette réforme doit être l’occasion de mener une réelle réflexion de fond sur la rémunération des agents publics, de  revoir en profondeur la structure de leur rémunération et de questionner le système indiciaire / indemnitaire. Cela permettrait en outre, d’assurer une meilleure mobilité des agents dans leur mobilité inter-fonction publique ou vers le secteur privé.

 

L’évolution de la structure de rémunération de l’État
depuis le début des années 2000

 

Les rémunérations dans la fonction publique sont structurées en deux blocs : la rémunération indiciaire, déterminée selon les grilles indiciaires et la valeur du point d’indice, et la rémunération indemnitaire, composée de différentes indemnités dont l’indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ou encore les composantes du RIFSEEP.

Cette structure détermine les outils dont dispose l’État en matière de politique salariale : la valeur nationale du point d’indice, les grilles indiciaires et les indemnités. Notons que l’évolution des grilles indiciaires est relativement contrainte dans la mesure où elles sont formées selon le corps d’appartenance, le grade (procédure sélective) et les échelons (ancienneté, lié au « glissement vieillissement technicité »).

Les impératifs de maîtrise de la masse salariale de l’État ont conduit les gouvernements à limiter l’évolution de la valeur du point d’indice, désindexé de l’inflation dès 1984. L’augmentation du point d’indice, qui s’applique à tous les fonctionnaires, s’avère en effet particulièrement coûteuse alors qu’elle génère des gains individuels faibles pour les agents.

Face à ce constat, deux dispositifs ont été ajoutés pour protéger les agents de baisse de pouvoir d’achat sans impacter la valeur du point : la garantie individuelle de pouvoir d’achat (Gipa) à partir de 2008 et l’indexation du minimum de traitement sur le SMIC par une augmentation du nombre de point d’indice au niveau de ce minimum.

Par ailleurs, la politique générale de revalorisation du point a été remplacée par des politiques catégorielles avec des revalorisations de grades, la mise en cohérence de grilles indiciaires… Ces modifications ont eu un impact particulièrement disparate au niveau des collectivités dans lesquelles elles sont le reflet des rapports de force locaux. On a ainsi vu apparaître : une augmentation des primes, la création d’avantages annexes (jours de congés, …) ou encore un avancement dès le délai minimum atteint. Sans prendre en compte les impacts du protocole PPCR, ces choix ont conduit à un tassement progressif des grilles et salaires pour certaines catégories de fonctionnaires, notamment de catégorie C, et une réduction des écarts entre agents débutants des différentes catégories. Ils ont aussi généré une grande diversité de rémunération extra-indiciaires aux modalités d’attribution variables.

Les évolutions décrites ont créé une opposition durable entre deux visions de la politique de rémunération de l’État : la vision des derniers gouvernements, qui se focalise sur la rémunération globale de l’agent sur l’année, et celle des syndicats, qui s’intéresse spécialement à l’évolution du point d’indice et exclu de la rémunération prise en compte l’avancement ou le glissement vieillissement technicité. Cette opposition est à l’origine, avec les politiques de gel du point d’indice, un mécontentement salarial important alors même que les rémunérations globales continuaient d’augmenter. Dans ce contexte, l’extension du dialogue social au-delà des questions de rémunération, lancée dès 2010, c’est avéré difficile et la question des rémunérations a largement déterminé le contenu des autres discussions ouvertes.

Les politiques de réduction des effectifs, qui ont été mises en place par intermittence, ont aussi contribué à l’augmentation des rémunérations globales en s’accompagnant de mesures ciblées de revalorisation.

En parallèle, le recentrement de la structure de rémunération sur les métiers, emplois et l’investissement professionnel lancé à partir de 2009 n’a été que très partiellement mis en place, et n’a donc bouleverser ni la structure et ni les pratiques en place. La prime de fonction de résultat a été remplacée par le RIFSEEP en 2014 mais, comme nous l’avons évoqué dans un rapport précédent, son attribution n’est aujourd’hui pas incitatif, son ampleur reste limitée et son développement a été très progressif et ne sera achevé qu’en 2019-2020. Si 63 % des corps sont désormais régis par des dispositions statutaires et indiciaires harmonisées, le nombre total de corps reste particulièrement important (293 corps prévus fin 2018) et leur réduction est bien trop lente (8 corps de supprimés depuis 2016).

4.   La politique de rémunération doit accompagner la transformation et l’action de l’État

La politique de rémunération dans la fonction publique doit permettre d’attirer et de fidéliser des personnels qualifiés et compétents. La plus grande mobilité souhaitée par et pour les agents des services publics, qu’elle soit inter-versants ou vers le secteur privé, doit être mieux accompagnée. Conseil en évolution professionnelle, bilan de compétences, formation et accompagnement salarial sont des outils essentiels de cette politique de mobilité.

C’est pourquoi il semble nécessaire de pouvoir harmoniser les référentiels de rémunération afin de rendre lisibles et comparables tous les éléments de rémunération directe et indirecte auxquels les agents peuvent prétendre. De même, il est essentiel de rendre plus cohérente la politique de rémunération des contractuels pour faire de ce statut une opportunité pour des agents qui y trouveraient un intérêt et pour les salariés du secteur privé qui souhaiteraient s’engager dans un parcours dans le service public.

C’est pourquoi les rapporteures préconisent la création de véritables responsables « rémunération et avantages sociaux » (compensation and benefits) au sein des ministères et de la DGAFP afin d’avoir une réflexion d’ensemble et un pilotage plus global de la politique de rémunération dans la fonction publique d’État a minima.

B.   Au-delà de la rémunération, développer des leviers de l’engagement

Les rapporteures spéciales soulignent que le levier de la rémunération ne doit pas constituer l’unique voie d’incitation des agents à la performance.

D’autres leviers de motivation sont régulièrement cités par les agents : l’accès à des opportunités de formation et de développement des compétences, les possibilités de mobilité, la qualité de l’encadrement, le sentiment de faire un travail qui compte et de se sentir soutenu ou encore un bon équilibre entre la vie professionnelle et la vie personnelle.

1.   Investir dans la formation

a.   Mettre en œuvre le schéma directeur de la formation professionnelle des agents de l’État

Les budgets consacrés à la formation des fonctionnaires sont inscrits dans les dotations de chaque ministère et le détail n’est pas retracé dans les documents annexés à la loi de finances. Les rapporteures spéciales regrettent que le rapport sur l’état de la fonction publique et les rémunérations, « jaune » annexé au projet de loi de finances, ne soit toujours pas publié le 5 novembre 2018, alors que les crédits relatifs à la fonction publique ont été examinés par la commission des finances de l’Assemblée nationale depuis deux semaines.


Le dernier rapport sur l’état de la fonction publique ([6]), publié en décembre 2017,retrace les dépenses de formation dans les ministères en 2015. On distingue dans ces calculs les formations professionnelles ([7]) des formations statutaires ([8]).

dépenses de formation dans les ministères en 2015

 

Dépenses (en M€)

Part des dépenses dans la masse salariale (en %)

Évolution des dépenses 2015/2014

Ministères hors enseignement

dont formation professionnelle

1 767,5

874,2

7,8 %

3,9 %

+ 2,3 %

 1,1 %

Ministères de l’enseignement

dont formation professionnelle

1 213,9

1 027,1

3,4 %

2,9 %

 7,3 %

 4,4 %

Ensemble

dont formation professionnelle

2 981,5

1 901,3

5,1 %

3,3 %

 1,9 %

 2,9 %

Source : rapport annuel sur l’état de la fonction publique, DGAFP, édition 2017.

nombre de jours de formation professionnelle par agent dans les ministères de 2005 à 2015

(en nombre de jours par agent)

La diminution de l’accès à la formation professionnelle des agents de la fonction publique d’État sur les années 2005-2015 suscite l’inquiétude des rapporteures spéciales. Elles soulignent cependant, que d’après les dernières données publiées par la DGAFP ([9]), la situation s’est légèrement améliorée en 2016 où 5,3 millions de jours de formation ont été dispensés aux agents civils des ministères, hors ministères de l’enseignement (éducation nationale et enseignement supérieur et recherche). Chaque agent a suivi en moyenne 5,1 jours de formation statutaire et 3,3 jours de formation professionnelle. Au total, le nombre moyen de jours de formation par agent en fonction s’établit à 8,4 jours. Ce sont, comme les années précédentes, les agents de catégorie C qui ont le moindre accès à la formation (5,7 jours en moyenne en 2016).

Les rapporteures soulignent que la formation professionnelle n’est pas uniquement un moyen de développer les compétences des agents dans le cadre des fonctions qu’ils exercent mais aussi un levier qui permet de faciliter les transitions professionnelles et d’accompagner toutes les mobilités.

En 2018, un nouvel outil de pilotage de la formation professionnelle a été mis en place ([10]). Ce schéma directeur de la formation professionnelle tout au long de la vie des agents de l’État couvre une période de trois ans. Il est structuré autour de cinq axes stratégiques qui doivent guider les politiques de formation à tous les niveaux d’actions. Les rapporteures souhaitent qu’il s’accompagne d’un référentiel managérial, afin de mieux former et aligner les managers de la fonction publique, faisant écho aux objectifs et offres des IRA/ENA en matière de formation.

schéma directeur de la formation professionnelle tout au long de la vie des agents de l’Etat

1. Structurer l’offre de formation pour accompagner collectivement les agents dans un contexte de transformation de l’action publique

1/ Diffuser une culture renouvelée de la relation à l’usager auprès de l’ensemble des agents

2/ Développer une offre de formation ayant pour objet d’accompagner la transformation de l’action publique

3/ Structurer des parcours de formation au sein des filières professionnelles en mettant en place un dispositif interministériel de labellisation

2. Utiliser le numérique comme levier de la transformation des administrations et de l’appareil de formation de l’État

4/ Développer l'offre de formation à distance et la rendre accessible à tous les agents publics via une plateforme interministérielle dédiée

5/ Développer les formations et certification des compétences numériques pour tous les agents et pour les métiers numériques et SIC

6/ Définir une stratégie de convergence des SI Formation ministériels et interministériels

3. Accompagner les encadrants dans la mise en œuvre des politiques publiques et l’exercice de leurs responsabilités managériales

7/ Diffuser une culture managériale commune en rendant obligatoire une formation au management pour tout primo-encadrant et tout agent nommé à la direction d'un opérateur ministériel et en proposant des modules adaptés aux besoins de formation des managers tout au long de leurs parcours professionnels

8/ Former les cadres aux enjeux de l’égalité professionnelle, de la prévention et de la lutte contre les violences faites aux femmes (harcèlement, sexisme…)

4. Rendre l’agent pleinement acteur de son parcours professionnel, en renforçant l’individualisation dans les formations initiales et l’accompagnement des projets d’évolution professionnelle

9/ Mettre en œuvre une nouvelle articulation entre formation initiale et formation continue en renforçant l’évaluation des compétences et en individualisant les parcours de formation

10/ Développer des portefeuilles de compétences dans le cadre d’expérimentations concernant des filières métiers, des territoires et des ministères

11/ Mobiliser l’ensemble des outils de la formation professionnelle pour accompagner les transitions, reconversions et mobilités professionnelles

12/ Développer une offre de formation professionnelle à l’attention des conseillers et acteurs RH en charge de l’accompagnement personnalisé des agents dans la construction de leur parcours professionnels

5. Renforcer le pilotage de la politique de formation dans un souci de qualité et de performance

13/ Développer une offre de formation interministérielle pour les filières métiers transverses à l’attention de l’administration centrale et des services déconcentrés, en s’appuyant sur des porteurs interministériels et ministériels

14/ Développer l’analyse des coûts de formation et proposer des outils permettant de mieux évaluer la formation menée dans un souci de qualité et de performance

15/ Expérimenter en région une démarche de mutualisation des moyens de formation dans la perspective d’élaborer un schéma directeur régional de la formation professionnelle tout au long de la vie

Source : DGAFP.

Ce schéma directeur s’articule avec le Grand plan d’investissement 20182022 afin d’accompagner les réformes structurelles portées par le Gouvernement. Afin de favoriser un recentrage d’une partie des crédits de formation des ministères et établissements publics sur les priorités définies au titre du GPI et du schéma directeur, l’ensemble des actions mises en œuvre à ce titre pourront bénéficier d’une exonération de régulation qui se traduira par une absence de mise en réserve de crédits de fonctionnement (titre 3).

 

Les rapporteures soutiennent pleinement cet investissement important dans la formation professionnelle des fonctionnaires afin d’améliorer l’adéquation des compétences aux besoins des employeurs publics et de développer pour les agents des perspectives de mobilité.

Les rapporteures encouragent également le Gouvernement à initier une réflexion sur la création d’une agence nationale de gouvernance de la formation professionnelle et de l’apprentissage propre à la fonction publique, un « France Compétences Fonction Publique », qui pourrait être une déclinaison publique de l’agence en cours de création suite à la promulgation de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel. En mutualisant les ressources des trois versants de la fonction publique et en s’appuyant sur les opérateurs de compétences existants, il serait alors possible de donner à tous les agents les mêmes chances de progression et de formation tout au long de sa vie professionnelle, de piloter au plus juste le nouveau schéma de formation continue et d’accompagner les mobilités.

b.   Optimiser la formation initiale

Le programme 148, dont les rapporteures spéciales suivent les crédits chaque année lors de l’examen du projet de loi de finances, rassemble une partie des crédits dédiés à la formation des fonctionnaires.

L’action 1 Formation des fonctionnaires est dotée de 82,5 millions d’euros en AE et en CP dans le projet de loi de finances pour 2019, soit une diminution de 1,9 million d’euros par rapport aux crédits ouverts en 2018.

90 % de la dotation de l’action correspond aux subventions pour charge de service public des écoles de formation interministérielles sur lesquelles la DGAFP exerce sa tutelle : l’École nationale d’administration (ENA) ([11]) et les cinq Instituts régionaux d’administration (IRA).

ÉVOLUTION DE LA SUBVENTION pour LÉna ET les IRA

(en millions deuros)

 

LFI 2012

LFI 2013

LFI 2014

LFI 2015

LFI 2016

PLF 2017

LFI 2018

PLF 2019

ENA

35,47

33,20

32,48

32,27

31,9

31,9

31,05

30,1

IRA

40,60

40,40

40,20

39,60

38,9

40,9

45,2

44

TOTAL

76,07

73,60

72,68

71,87

70,8

72,8

76,3

74,1

Sources : documents budgétaires.


● L’ENA

Le projet de loi de finances pour 2018 prévoit d’allouer à l’ENA une subvention de 30,1 millions d’euros en AE et CP, en diminution de 879 000 euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2018.

Le projet de loi de finances pour 2019 fixe le plafond d'emplois de l’ENA à 467 ETPT et 12 ETPT hors plafond dont 3 contrats aidés. Le schéma d’emploi 2019 de l’ENA s’établit donc à – 4 emplois permanents et – 10 élèves soit – 14 ETPT. En tenant compte du projet de loi de finances pour 2019, l’ENA aura connu 46 suppressions de poste depuis 2008, soit une baisse des effectifs de 20 %.

Le directeur de l’École, M. Patrick Gérard ([12]), avait attiré l’attention des rapporteures spéciales sur les difficultés financières de l’établissement, il a depuis demandé un audit budgétaire de l'ENA. L’école connaît en effet un déficit qu’elle qualifie de « structurel » depuis 2013 en raison de l’augmentation des charges de rémunération, de la diminution de la subvention de l’État et de mesures prises par le Gouvernement précédent qui n’ont pas été financées, telles que l’augmentation du nombre d’élèves par promotion. Les rapporteures ont donc souhaité examiner cette situation plus précisément, ce qui fait l’objet de la seconde partie du présent rapport.

Elles en concluent que l’ENA doit redresser sa situation financière et se recentrer sur le cœur de sa mission pour pleinement accompagner les réformes entreprises par le Gouvernement et être un acteur à part entière de la transformation de l’action publique. D’après les informations transmises aux rapporteures spéciales, la diminution de la subvention à l’ENA devrait être atténuée en cours d’examen du projet de loi de finances, compte tenu des engagements de l’école, pris lors de son conseil d’administration du 10 octobre dernier. Les rapporteures se félicitent d’une décision qui viendrait soutenir une volonté avérée de toutes les équipes de faire le nécessaire pour assainir les finances de l’école tout en préservant l’excellence de sa formation.

● Les IRA

Implantés à Bastia, Lille, Lyon, Metz et Nantes, les instituts régionaux d’administration (IRA) sont conçus comme des opérateurs interministériels chargés du recrutement et de la formation de l’encadrement intermédiaire de la fonction publique de l’État. Ils assument, en outre, des missions dans le domaine de la formation continue interministérielle.

La subvention allouée aux IRA s’établit à 44 millions d’euros, en diminution de 1,2 million d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2018.

Les IRA font actuellement l’objet d’un ambitieux projet de réforme qui s’inscrit dans le cadre des recommandations du rapport de l’Inspection générale des finances consacré aux dépenses de formation initiale et continue de l’État ([13]).

Il s’agit d’une part de mettre les compétences et l’individualisation de la formation au cœur du dispositif et d’autre part de réduire la durée de formation des élèves au sein des IRA, de 12 à 8 mois, au profit d’un accompagnement renforcé à la prise de poste sous forme de formation continue. La formation sera complétée par une période de stage auprès de l’employeur d’affectation et c’est de ce dernier que dépendra la titularisation du stagiaire.

Ce dispositif doit permettre d’augmenter le nombre d’élèves formés afin de mieux répondre aux besoins de recrutement exprimés par les ministères et de limiter le développement de concours directs de recrutements par les ministères. Dès 2019-2020, les IRA devraient pouvoir accueillir 820 élèves, répartis sur deux promotions contre 730 aujourd’hui pour une seule promotion de 12 mois.

Cette réforme devrait également permettre de réaliser des économies en réduisant la charge financière de la formation de 12 à 8 mois. L’objectif est de réduire la subvention pour charge de service public des IRA de 5 millions d’euros d’ici 2020. Des investissements spécifiques sont néanmoins nécessaires, la nouvelle formation faisant davantage appel au numérique.

L’année 2019 est une année de transition. Le plafond d’emplois pour les cinq instituts est fixé à 728 ETPT (et 5 contrats aidés hors plafond), soit une baisse des emplois permanents de – 109 ETPT. Cette importante baisse du plafond d’emploi s’explique par le caractère transitoire entre deux dispositifs de l’année 2019. Le nombre d’élève formé sera de 730 sur 8 mois puis de 400 sur 4 mois. Il est donc retenu un nombre lissé sur l’année de 623 ETPT élèves pour un plafond d’emploi global de 728 ETPT en incluant les personnels permanents.

c.   Faire évoluer le compte personnel de formation

Le compte personnel d’activité (CPA), lequel comprend le compte personnel de formation, doit permettre de favoriser l’accès des agents publics à la formation professionnelle. Il s’applique aux fonctionnaires et agents contractuels de la fonction publique depuis le 1er janvier 2017 conformément aux dispositions de l’article 22 ter de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, tel que modifié par l’ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017.

Les agents peuvent donc depuis le 15 juin 2018, consulter leur compte personnel de formation sur l’espace moncompteactivité.gouv.fr. Les employeurs pourront à compter du 15 octobre 2018 décrémenter ces comptes des droits utilisés pour obtenir le financement d’une formation. Cette plateforme est financée via le Fonds système d’information ressources humaines du programme 148. Le projet a été financé par ce Fonds pour un coût de 1,8 M en phase projet lancée en 2017 et 1,3 M en 2018. En 2019, année du lancement de la phase de fonctionnement de la plateforme, le coût prévisionnel de celui-ci est de 1,317 M.

Le vote récent de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, adoptée définitivement par le Parlement le 1er août dernier, amène aujourd’hui le Gouvernement à engager des réflexions sur l’évolution du compte personnel de formation applicable aux agents publics.

Les principes de l’universalité et de la portabilité des droits nous semblent devoir amener le Gouvernement à effectuer, soit dans le cadre d’une loi applicable à la fonction publique, soit dans le cadre réglementaire de la gestion des droits à la formation, des ajustements quant aux modalités de gestion des droits relevant du compte personnel de formation, dans l’objectif d’accroître l’attractivité de ce dispositif ainsi que sa lisibilité.

Plus qu’un bénéfice chiffré, c’est un changement culturel dans l’approche des politiques de formation qui est attendu du compte personnel de formation. En effet, l’objectif est de faire évoluer les politiques menées par les employeurs publics afin de développer une offre de formation qui accompagne davantage les mobilités et les transitions professionnelles, en tenant mieux compte des souhaits d’évolution des agents, en leur offrant de nouvelles perspectives et une plus grande liberté de choix.

Une telle évolution suppose l’identification de parcours de formation lisibles pour les agents et pour leurs managers. Elle implique également le développement en parallèle de formes d’accompagnement personnalisé permettant de faire le point sur les compétences acquises et celles susceptibles d’être développées au moyen de la formation, ainsi qu’un engagement de l’encadrement pour que l’accès à la formation soit appréhendé non plus uniquement pour mieux exercer les fonctions occupées, mais aussi pour préparer l’avenir professionnel de chaque agent.

Les rapporteures soutiennent, à termes, la mise en place d’un compte personnel de formation (CPF) soit identique soit unique, au mode de fonctionnement commun aux agents publics et aux salariés du privé qui contribuerait au décloisonnement et à la diversification des formations et des parcours.

 

2.   Favoriser la mobilité

Le développement de la mobilité dans la fonction publique doit répondre à de nombreux enjeux : améliorer l’attractivité de la fonction publique, permettre aux agents d’être acteurs de leur parcours professionnel, trouver un meilleur équilibre entre les besoins en compétences des employeurs et les projets professionnels des agents et répondre à la fois aux besoins de continuité et d’adaptabilité du service public.

a.   Favoriser la mobilité inter versants de la fonction publique

La mobilité des agents publics est extrêmement limitée : en 2015, 8,9 % des agents de la fonction publique présents en 2014 et 2015 sont mobiles (471 300 agents). À l’occasion de leur mobilité, seuls 50 % d’entre eux ont changé d’employeur, 47 % de zone d’emploi et 33 % de statut ou de situation d’emploi.

Ainsi, parmi l’ensemble des agents employés dans la fonction publique en 2014 et en 2015 (5,3 millions d’agents), 4,5 % ont changé d’employeur en 2015, dont 3,8 % vers un employeur dans le même versant et 0,7 % dans un autre versant.

Comme le souligne la DGAFP dans son dernier rapport sur l’état de la fonction publique, « fluidifier le marché de l’emploi public, dans un contexte de maîtrise de la masse salariale et de réduction des effectifs, requiert de croiser une approche ministérielle, aujourd’hui structurée par programme budgétaire et par corps, et une approche interministérielle, voire inter-fonction publique, organisée par bassin d’emplois et par filières professionnelles ».

Accroître la mobilité des agents permet de répondre tout d’abord aux attentes des agents, mais c’est également un moyen d’augmenter l’attractivité de la fonction publique et un mode non contraignant de réaffectation et de réduction d’effectifs.

L’ordonnance n° 2017‑543 du 13 avril 2017 portant diverses mesures relatives à la mobilité dans la fonction publique élargit les possibilités de mobilité entre les trois versants de la fonction publique. Elle prévoit la possibilité de créer de nouveaux cadres de gestion statutaires inter-fonctions publiques, sans remettre en cause les corps et cadres d’emplois existants, pour permettre des recrutements ou des formations conjoints et faciliter les mobilités au sein d’une même filière professionnelle.

D’autre part, l’ordonnance garantit la portabilité du compte épargne temps en cas de mobilité d’un agent dans un autre versant de la fonction publique ; jusque‑là cette portabilité n’était reconnue qu’au sein d’un même versant.

Enfin, le texte prévoit la création d’un portail commun aux trois versants de la fonction publique pour la publication des offres d’emplois. La création d’une plateforme numérique de l’emploi public ouverte à tous a été annoncée. Cet outil, qui sera ouvert en 2019, offrira une géolocalisation des offres afin de faciliter les mobilités inter-versants dans un même bassin d’emploi.

Les rapporteures spéciales se réjouissent de la création de cette bourse de l’emploi public qui permettra de favoriser les mobilités et qui participera à rendre plus lisibles et attractives les offres d’emplois publics.

Néanmoins, une telle bourse à l’emploi ne saurait être une réponse en soi. Elle nécessite un véritable accompagnement pour l’identification des compétences et des opportunités accessibles avec ou sans formation préalable. Dans cette optique, il serait utile que l’information sur les différents dispositifs d’accompagnement soient mis en ligne sur la plateforme de l’emploi public. Par ailleurs, les rapporteures souhaitent que l’État et chaque ministère se dotent de véritables « marques employeurs ». Pour cela, ils pourront s’appuyer sur les différents outils numériques déjà mis en place, sur les projets innovants portés par le Fonds pour la transformation de l’action publique mais aussi sur l’expérience singulière de l’Armée en la matière.

b.   Répondre aux besoins de souplesse et de diversification des compétences des employeurs publics

Moins d’un agent sur cinq qui travaille dans la fonction publique est contractuel. Cette part, en baisse, est quasi identique dans les trois fonctions publiques territoriale (18,9 %), hospitalière (18,2 %) ou d’État (18,6 %) à iso périmètre. Les rapporteures sont favorables à ce qu’il soit donné davantage de souplesse aux employeurs publics dans leur politique de recrutement en facilitant le recours au contrat. Elles notent que la part de contractuel dans la FPT semble avoir sensiblement diminuée (25 % en 2015) comme dans la FPH (21 % en 2015) pour revenir à un niveau bas comparable à celui de la FPE (19 % en 2016).

On observe par ailleurs que la proportion de contractuels dans la fonction publique diminue quand le niveau hiérarchique augmente. Les rapporteures considèrent que, pour favoriser une plus grande variété d’expériences parmi les managers publics, il est nécessaire d’ouvrir plus largement les emplois de cadres et cadres dirigeants au secteur privé. Elles soulignent que cette ouverture ne pourra être un succès qu’à condition de proposer des offres attractives et de ne pas reléguer les contractuels à un rôle de fonctionnaire de « seconde catégorie ».

De nouvelles mesures d’ouverture du contrat devraient figurer dans le cadre du futur projet de loi relatif à la fonction publique et plusieurs emplois fonctionnels de direction de la fonction publique d’État seront ouverts aux contractuels.

Ces mesures permettront de diversifier les compétences de la haute fonction publique mais également d’offrir de nouvelles perspectives professionnelles aux contractuels qui exercent déjà leurs fonctions au sein de l’administration. Le secrétaire d’État chargé de la fonction publique, M. Olivier Dussopt, souhaite que cette réforme de la fonction publique soit l’occasion d’améliorer les conditions d’emplois des contractuels et de lutter contre la précarité notamment l’enchaînement de contrats courts. La fixation d’un référentiel de salaire pour les contractuels est également à l’étude.

Par ailleurs, il convient également de valoriser l’expérience acquise en dehors de la fonction publique pour ceux qui intègrent la fonction publique et en la prenant en compte dans la promotion des agents. Pour favoriser cette fluidité des parcours professionnels, l’article 108 de la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel ([14]) permet à un fonctionnaire en disponibilité de conserver pendant cinq ans ses droits à l’avancement, lorsqu’il exerce une activité professionnelle comparable aux fonctions qu’il exerçait dans la fonction publique au regard de leur nature ou du niveau de responsabilité exercée.

c.   Développer de nouvelles perspectives de mobilité

La transformation de l’action publique doit, outre une redéfinition du rôle de la puissance publique dans la société, permettre de rationnaliser la dépense publique et d’atteindre l’objectif de réduction du nombre de fonctionnaires qui découlera des choix des missions, de la modernisation des outils et des simplifications d’accès aux services publics. Pour la fonction publique d’État, ce sont 50 000 postes qui seront concernés à horizon 2022.

Conscient des limites et des difficultés rencontrées par l’ensemble des agents dans leur parcours de mobilité, tant interne qu’externe, le Gouvernement a souhaité annoncer, à l’occasion du 2ème Comité interministériel de la transformation publique qui s’est tenu le 29 octobre 2018, la création d’une fonction dédiée à la reconversion et à la mobilité des agents de l’État confiée à la DGAFP et qui reposera d’une part sur une structure centrale légère et d’autre part sur les plateformes RH régionales existantes renforcées. Cette agence de reconversion doit s’inspirer de celle du ministère des armées, Défense mobilité, qui accompagne chaque année près de 14 000 personnes.

À l’occasion de ce 2e CITP, de nouveaux dispositifs indemnitaires ont été annoncés pour accompagner les restructurations et les mobilités :

– doublement de la couverture des frais liés aux mobilités, dont le plafond passera de 15 000 euros à 30 000 euros ;

– versement d’un complément de salaire pendant une durée pouvant aller jusqu’à 6 ans en cas de rémunération moins élevée dans le nouveau poste ;

– assouplissement des conditions d’ouverture des droits à l’indemnité de départ volontaire existante accessible jusqu’à 2 ans de l’âge d’ouverture des droits à pension, contre 5 actuellement ;

– ouverture du bénéfice de l’assurance chômage aux agents de la fonction publique.

 

Il s’agit enfin de rendre plus attractive l’indemnité de départ volontaire qui existe depuis 2008 dans la fonction publique d’État, sans pour autant connaître un grand succès. Outre son montant limité, elle suppose en effet une démission de l’agent – qui ne peut pas prétendre au chômage – et qui doit s’engager à ne pas réintégrer la fonction publique pendant cinq ans, sous peine de rembourser l’intégralité de l’indemnité.

l’indemnité de départ volontaire dans la FPE

Source : DGAFP.

Bilan de l’indemnité de départ volontaire dans la FPE

Le dispositif de l’indemnité de départ volontaire (IDV) a été introduit dans la réglementation en 1998 au sein de la fonction publique hospitalière puis étendu aux deux autres fonctions publiques dans le cadre des restructurations prévues par la révision générale des politiques publiques en 2008.

Dans la fonction publique de l’État (FPE), le bénéfice de l’IDV est ouvert aux fonctionnaires, aux agents contractuels en CDI et aux ouvriers d’État, autres que ceux appartenant au ministère des armées.

Il est réservé aux agents quittant définitivement la fonction publique de l’État dans le cadre d’une restructuration éligible à la prime de restructuration de service, ou pour créer ou reprendre une entreprise, indépendamment de toute restructuration.

Le montant de l’IDV, plafonné à deux fois la rémunération brute annuelle perçue au cours de l'année civile précédant celle de la demande de démission. La définition de l’assiette de référence du calcul de l’IDV a été précisée en le fondant uniquement sur le traitement indiciaire et les primes statutaires et fonctionnelles, à l’exception de tout autre élément de rémunération.

Pour bénéficier de l’IDV, l’agent ne doit pas être à moins de 5 ans de l’âge d’ouverture des droits à la retraite et s’il devait être à nouveau recruté en tant que fonctionnaire stagiaire ou agent contractuel dans la fonction publique (d'État, territoriale ou hospitalière) dans les 5 ans suivant sa démission. À défaut, il devra rembourser son IDV.

 

Sur les 7 988 IDV versées entre 2009 et 2017, le ministère de l’éducation nationale est le principal employeur concerné (4 644 depuis 2009 dont 2 460 de professeurs et 1 096 d’instituteurs), ce qui correspond à la part de ce ministère parmi les emplois de l’État. Le nombre d’IDV versé au sein de la FPE a varié au cours du dispositif pour connaître un pic en 2012 avec 1287 IDV versées pour un coût total de 39 millions d’euros (montant moyen versé : 30 192 euros) avant de décroître pour se stabiliser en 2017 à 745 indemnités versées pour un coût total de 15 millions d’euros (montant moyen versé : 20 174 euros).

Les bénéficiaires de l’IDV se répartissent équitablement entre les hommes et des femmes, sont à plus de 60 % âgés de plus de 45 ans et sont à plus de 80 % des agents titulaires. Parmi ces derniers, 70 % sont des agents de catégorie A, 20 % de catégorie B et 10 % de catégorie de C. Cette répartition est stable depuis 2012.

Source : DGAFP.

Les rapporteures souhaitent attirer l’attention du Gouvernement sur le fait que les modalités évoquées sont susceptibles de transformer l’IDV en un dispositif de retraite anticipée générant des effets d’aubaines importants pour une réduction de la dépense publique moindre et une possible désorganisation des services. En effet, l’ouverture de l’IDV jusqu’à deux ans de la retraite avec une indemnité s’élevant à 24 mois de travail rendrait ce dispositif particulièrement attractif aux personnes approchant de la retraite comme l’illustre la pyramide des âges ci-dessous.

Par ailleurs, les rapporteures notent qu’aucun dispositif d’accompagnement ou de formation des agents optant pour l’IDV n’a été présenté. En l’état, l’absence d’accompagnement des projets, pourrait théoriquement amener un agent à quitter son emploi sans projet professionnel défini, lui faisant prendre le risque de le conduire directement au chômage.

D’autres mesures impliquent des évolutions législatives qui seront portées dans le projet de loi prévu en 2019, notamment le bénéfice des droits au chômage.

Les rapporteures spéciales saluent la création d’un nouveau programme 351 Fonds d’accompagnement interministériel RH rattaché à la mission Action et transformation publique dont l’objet est d’accompagner les politiques RH et ces transformations.

Financé pour 2019 à hauteur de 50 millions d’euros, il a vocation à être abondé pour les exercices postérieurs. Il s’inscrit dans les plans ministériels de transformation de l’action publique et constitue une mise de départ pour financer des opérations de reconversion RH. Les ministères et opérateurs de l’État pourront candidater pour le co-financement de leurs transformations RH : dispositifs indemnitaires, accompagnement des agents (bilan de compétence, aide à la mobilité, accompagnement familial) et des services (audit organisationnel, étude d’impact RH).

L’enjeu de la DGAFP à travers ce programme est de doter la fonction RH d’une action d’accompagnement opérationnelle. En effet, l’État à travers sa politique RH doit accompagner les agents publics dont les missions et les emplois évoluent afin notamment de favoriser des mobilités fonctionnelles et / ou géographiques, au sein de la fonction publique ou vers le secteur privé.

Les rapporteures notent que l’État accélère fortement sa politique de développement numérique au sein de la fonction publique. Le Fonds d’innovation ressources humaines (FIRH) du programme 148 a ainsi permis de financer 51 projets innovants sur la gestion des ressources humaines et l’emploi public. Parmi eux, plusieurs projets sont de véritables outils d’accompagnement de mobilité des agents.

Les projets du FIRH : l’exemple du e-portfolio de compétences

Le projet « e-portfolio » de compétences créé en Bourgogne-Franche-Comté a permis de développer un espace numérique, dédié à l’identification des compétences et des possibilités d’évolution, accessible aux agents et aux managers.

Sur cet espace, les agents font un état des lieux de leurs acquis professionnels et extra-professionnels. Ils ont accès à des diagnostics « sur-mesure » (aide à l’orientation, identification des compétences transversales…) et se construisent directement un profil professionnel et un parcours nouveau. Les managers peuvent se servir de cette plateforme pour identifier les compétences de leurs équipes

3.   Améliorer la qualité de vie au travail

a.   Un dialogue social rénové

À l’issue du Comité interministériel de transformation publique du 1er février 2018 visant à « refonder le contrat social avec les agents publics », le Gouvernement a engagé une concertation avec les organisations syndicales portant sur l’amélioration de la qualité et de l’efficacité du dialogue social. L’enjeu de ce chantier vise à définir un nouveau modèle plus efficace de dialogue social dans la fonction publique.

La première grande évolution envisagée porte sur la création d’une nouvelle instance de dialogue social en matière de questions collectives, issue du rapprochement des CT et CHSCT actuels. L’objectif recherché est de moderniser les conditions de travail des agents publics ainsi que l’organisation des services, sans remettre en cause les efforts de professionnalisation des représentants du personnel et des administrations sur les questions santé, sécurité et conditions de travail.

Afin de permettre le travail des managers qui conduisent les transformations, il est nécessaire d’encourager le dialogue social de proximité
– comme cela a déjà été fait dans le secteur privé – en donnant notamment la possibilité de négocier des accords dérogatoires au cadre de la fonction publique et de mettre en place des accords sociaux locaux.

Les rapporteures spéciales soutiennent pleinement cette démarche, l’amélioration du dialogue social ayant pleinement un rôle à jouer dans la modernisation de l’État.

Par ailleurs, dans le cadre d’une contribution à Action Publique 2022, les rapporteures spéciales avaient proposé de ré-impulser une démarche de qualité de vie au travail au sein des organisations visant à redonner du sens au rôle et aux missions des partenaires sociaux en établissant notamment le ratio du mal-être au travail et le coût relatif à celui-ci afin de mettre en évidence à partir des indicateurs existants (absentéisme, arrêt maladie, accident de travail) les impacts socio‑économiques sur la performance de l’organisation. La démarche s’inscrit dans une logique « gagnant-gagnant » pour les agents et les organisations.

b.   Le Fonds interministériel pour l’amélioration des conditions de travail (FIACT)

Le fonds interministériel damélioration des conditions de travail (FIACT), créé en 2018, a pour objet la mise en œuvre de meilleures conditions de travail pour les agents et l’accompagnement des transformations, tout en s’assurant des conditions de travail protectrices de leur santé. Il est doté de 1 million d’euros dans le projet de loi de finances pour 2019. La création de ce fonds s’inscrit dans le cadre du programme Action Publique 2022 dans la mesure où il permet « d’offrir aux agents publics un environnement de travail modernisé en les impliquant pleinement dans la définition et le suivi des transformations » ([15]).

Le FIACT fonctionne sur la base d’un appel à projet national dont les modalités de mise en œuvre ont été précisées dans la circulaire du 5 janvier 2018. Le FIACT a suscité une importante mobilisation auprès des employeurs puisque 200 dossiers ont été déposés. Dans un contexte de transformation, le FIACT est un réel outil d’accompagnement des réformes et semble répondre à de réelles attentes.

Les rapporteures spéciales soutiennent les initiatives prises pour mener un travail collaboratif des acteurs de terrain et de la DGAFP afin d’améliorer la qualité de vie au travail. Elles tiennent cependant à souligner les importantes marges de progrès restantes sur ces sujets et la nécessité d’un travail qui s’inscrit sur le long terme et dans la collaboration avec les différents acteurs de la QVT

c.   La lutte contre le micro-absentéisme

L’article 115 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 a introduit un délai de carence d’une journée en cas d’arrêt maladie dans la fonction publique.

Cette mesure vise, d’une part, à améliorer la qualité du service public en réduisant les absences pour raison de santé de courte durée dans les administrations publiques et, d’autre part, à faire converger les règles applicables aux secteurs public et privé en matière de prise en charge des absences maladie.

En réduisant le micro-absentéisme qui désorganise les services, cette mesure doit améliorer les conditions de travail des agents publics.

À ce jour, il n’est pas encore possible d’avoir des résultats consolidés sur le nombre et la durée des arrêts de travail de l’année 2018 pour les comparer aux années précédentes. Ce sera donc à l’occasion du printemps de l’évaluation que nous pourrons tirer un premier bilan de cette décision et que nous pourrons vérifier son impact sur la qualité de service rendue au public.

Le Gouvernement a annoncé souhaiter poursuivre son action sur la question de la santé au travail. Le rapport Lecocq propose comme un défi commun aux secteurs public et privé, les enjeux d’amélioration de la santé au travail.


d.   Le financement de l’action sociale

 L’action sociale ministérielle

Comme pour la formation, l’essentiel du financement de l’action sociale pour les agents de l’État repose sur les dotations ministérielles. Les ministères financent ainsi :

– les actions sociales ministérielles, qui sont définies par chaque ministère, complétant l’offre interministérielle en tenant compte des spécificités de chaque ministère ;

– les prestations d’action sociale à réglementation commune, fixées au niveau interministériel, mais financées par chaque ministère.

Selon les derniers chiffres consolidés de la DGAFP, elles s’élèvent à 528,1 millions d’euros en 2017.

Action sociale ministérielle en 2017

(en millions d’euros)   

Source : DGAFP, rapport annuel sur l’état de la fonction publique 2017.

 L’action sociale interministérielle

L’action sociale interministérielle est financée sur l’action 2 du programme 148. L’estimation de dépenses est de 119,8 millions d’euros en AE et en CP, à laquelle s’ajoute 3 millions de fonds de concours. La dotation représente plus de la moitié des crédits du programme 148.

Le tableau suivant illustre l’évolution des crédits consacrés à l’action sociale interministérielle.

crÉdits du programme 148 consacrÉs
au financement de l’action sociale interministÉrielle

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Évolution

(%)

Crédits de paiement

Évolution (%)

LFI 2018

Demandées pour 2019

LFI 2018

Demandés pour 2019

Aides
aux
familles

Chèque vacances

39,4

38,5

+ 0,3 %

39,4

38,5

+0,3 %

CESU garde d’enfants

32,4

33,1

 6 %

32,8

33,1

 6,2 %

Réservations de places en crèche

24,8

25,6

-

25

25,4

-

Logement

Réservations

de logements sociaux

0

-

-

0,2

0,2

-

Aide à l’installation des personnels de l’État

8,3

8,5

+ 2,4 %

10

8,5

+ 2,4 %

Logement d’urgence

0,3

0,3

 50 %

0,3

0,3

 50 %

Aide
aux
retraites

Participation de l’État au financement de la CNSA

0

-

-

0

-

-

Aide au maintien à domicile

0,5

3,9

+ 680 %

0,5

3,9

+ 680 %

SRIAS

4,4

4,1

 2,4 %

4,4

4,1

-

Restauration (Rénovation des restaurants inter-administratifs)

6,8

5,7

 16,2 %

6,7

5,7

 13,6 %

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

En 2017, 130 500 agents ont bénéficié du Chèque-vacances, pour une dépense de 36,78 millions d’euros, soit 1,37 million d’euros de plus qu’en 2016. On constate une stabilité de la bonification moyenne accordée aux bénéficiaires, qui s’établit à 256 euros. Pour 2019, le montant de la dépense est estimé à 38,5 millions d’euros. Ces crédits devraient permettre de financer l’ouverture de droits d’environ 130 000 agents, comme en 2017.

L’aide à l’installation des personnels de l’État (AIP) est destinée à prendre en charge, sous condition de ressources, une partie des frais d’installation des agents de l’État « primo-arrivants » ou affectés dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Il s’agit d’une aide financière pour le paiement du premier mois de loyer (provision pour charges comprises) ainsi que des frais d’agence, de dépôt de garantie et des frais de déménagement, non cumulable avec des aides de même nature versées le cas échéant par les ministères.

Le montant de la prestation était majoré à 900 euros pour les agents affectés en Île-de-France, PACA ou au sein des quartiers prioritaires de la politique de la ville, le montant de droit commun s’élevant à 500 euros pour une affectation dans une autre région. Depuis la circulaire du 21 juin 2018 relative à l’aide à l’installation des personnels, seuls les agents s’installant dans les zones ALUR ou les agents qui exercent la majeure partie de leurs fonctions dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville peuvent bénéficier de la majoration. Cette modification permet essentiellement de mettre en cohérence les zones immobilières les plus chères qui bénéficient du montant majoré de l’aide, avec le zonage ALUR. En effet, si une grande partie des agglomérations situées en zone ALUR se trouvent dans les régions PACA et Ile-de-France, ce n’est pas le cas de toutes et les deux périmètres ne coïncidaient pas parfaitement. L’aide n’est pas cumulable avec les aides à l’installation de même nature versées, le cas échéant, par les ministères. En 2019, la dépense devrait s’élever à 8,5 millions d’euros pour un peu plus de 10 500 bénéficiaires. Les principaux bénéficiaires sont issus des ministères de l’éducation nationale, de l’intérieur et de la justice, qui représentent 92,6 % des demandeurs.

Enfin, il pourrait être intéressant de rapprocher les besoins des agents en mobilité dans des zones de logement dites « en tension » avec le programme interministériel de réservation de logements, qui peut également apporter une solution dans ces territoires. Il conviendrait enfin d’aborder, à propos de l’indemnité de résidence, non seulement la question de son zonage en s’alignant là aussi sur les zones ALUR, mais également le lieu de résidence de ses bénéficiaires et non leur lieu de travail.

La caisse nationale d’assurance vieillesse (CNAV) gère, pour le compte de l’État, la prestation d’aide au maintien à domicile dont la mise en œuvre a débuté au second semestre 2012, à la suite de la signature de la convention et du versement de l’enveloppe de 10 millions d’euros budgétée à cet effet en LFI 2012.

Cette aide n’a pas rencontré son public, si bien que le coût cumulé de la prestation n’excédait pas 10 millions d’euros jusqu’en 2018, d’où l’absence de dotation sur cette sous-action. Les crédits versés en 2012 à la CNAV seront intégralement épuisés en 2018. La dotation pour 2019 a été fixée à 3,9 millions d’euros. Il paraît nécessaire de considérer avec attention les crédits alloués à ce dispositif car la pyramide des âges des agents de la fonction publique d’État peut laisser présager d’une montée en charge de ce service dans les prochaines années.

4.   Être exemplaire en matière d’égalité et de diversité

a.   L’action sociale interministérielle au service des familles

L’action sociale interministérielle s’attache notamment à permettre aux agents publics de concilier leur vie professionnelle et familiale.

Une des principales mesures de l’action sociale interministérielle porte sur la réservation de berceaux en crèches (25,6 millions d’euros en AE et 25,4 millions d’euros en CP). La politique de réservation de places en crèches a été renforcée à partir de 2008 et connaît depuis une forte dynamique. Les contrats sont passés au niveau déconcentré, avec des structures d’accueil implantées dans des aires adaptées aux besoins des agents (non exclusivement dans leur commune de résidence). En 2018, plus de 330 nouveaux berceaux ont été réservés au niveau déconcentré, portant le parc à plus de 3 200 places de crèches réservées au bénéfice des agents de l’État.

Par ailleurs, la prestation CESU-garde d’enfant de 0 à 6 ans prend en charge, sous la forme de chèques emploi-service universels préfinancés, une partie des frais engagés par les agents pour la garde de leurs enfants de moins de six ans durant leurs heures de travail. Le projet de loi de finances pour 2019 fixe la dotation à 33,1 millions d’euros en AE et CP, correspondant à environ 69 000 bénéficiaires.

b.   Un nouveau cap en matière d’égalité entre les femmes et les hommes

Dans un rapport récent ([16]), la DGAFP dresse le bilan des actions engagées et des réalités mesurées en termes d’égalité entre les femmes et les hommes dans la fonction publique. Certaines données ont retenu l’attention des rapporteures spéciales et rappellent le chemin qui reste à parcourir en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique.

 La fonction publique compte 62 % de femmes, soit une proportion plus élevée que dans le privé (46 %). Cependant, parmi les 122 140 postes dans les corps et emplois A +, seulement 40 % sont occupés par des femmes (elles sont moins de 20 % dans le secteur privé). Par ailleurs, 82 % des postes à temps partiels sont occupés par des femmes.

Les ministères les plus féminisés sont les ministères de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la recherche et les ministères sociaux (respectivement 67 % et 71 %) et les moins féminisés sont ceux de la Défense (22 %) et de l’Intérieur/Outre-mer (29 %).

Concernant la rémunération, en moyenne dans la fonction publique, le salaire net des femmes est inférieur de 13,1 % à celui des hommes. Pour mémoire l’écart de rémunération dans le secteur privé est supérieur à 18 %.

C’est dans ce contexte que le Gouvernement a ouvert début septembre les négociations sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans le but de signer un accord avant les prochaines élections professionnelles. Le précédent accord ([17]) n’a été que partiellement mis en œuvre. Le projet d’accord se développe en cinq axes et doit permettre à la fonction publique de franchir un nouveau cap en matière d’égalité entre les femmes et les hommes.

Il s’agit tout d’abord de renforcer la gouvernance des politiques d’égalité avec la mise en place de « référents Égalité » et en rendant obligatoire l’élaboration d’un plan pluriannuel d’action, un outil déjà présent dans l’accord précédent mais qui n’avait pas fonctionné.

Le deuxième axe du projet d’accord consiste à créer les conditions d’un égal accès aux métiers et aux responsabilités professionnelles. Les employeurs devraient notamment établir un diagnostic concernant l’obligation de mobilité géographique qui constitue souvent une condition à l’avancement et qui pénalise de fait les femmes et le cas échéant proposer des solutions alternatives à la mobilité géographique.

Autre ambition du Gouvernement, traiter les situations d’écarts de rémunération et de déroulement de carrière et combattre les écarts inexpliqués de rémunérations entre les femmes et les hommes à corps, cadre d’emplois et fonction identiques. Dans les négociations, l’instauration de pénalités financière pour les employeurs a notamment été évoquée. Le Gouvernement souhaiterait également neutraliser l’impact des différents congés familiaux, y compris le congé parental, sur la rémunération et les parcours professionnels. Dans ce cadre, les rapporteures demandent à ce que la DGAFP définisse un plan pour une égalité réelle entre les femmes et les hommes objectif 2022.

Une meilleure conciliation entre vie personnelle et vie professionnelle est également un enjeu des négociations. Il se concrétiserait notamment en permettant aux agents publics d’exercer leurs fonctions en télétravail au-delà de la limite actuelle qui est de trois jours.

Enfin, le dernier axe de ce projet s’attache à renforcer la prévention et la lutte contre les violences sexuelles et sexistes. Le Gouvernement réaffirme ainsi la tolérance zéro de l’État dans ce domaine. Un guide de la procédure disciplinaire sera donc diffusé à l’attention des employeurs publics.

Les rapporteures spéciales se réjouissent que le secrétaire d’État et la DGAFP se saisissent de la question de l’égalité femmes-hommes et sont favorables à la majeure partie des propositions énoncées, l’employeur public se devant d’être exemplaire en la matière.

Les rapporteures spéciales soulignent la nécessité de mettre en place une fonction publique plus inclusive, reflétant la diversité de la société. Elles souhaiteraient que des opérations régulières de comparaison au sein des institutions permettent de suivre les avancées réalisées et de repérer les obstacles afin de déterminer les actions à mener.

Les rapporteures spéciales prennent acte de l’adoption le 24 octobre dernier dans le cadre de la quatrième mouture du protocole d’accord sur l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans le secteur public d’une résolution concernant la suppression du jour de carence pour les femmes enceintes (cette disposition, présentée par amendement lors de l’examen du PLF 2018 avait été rejetée par l’Assemblée nationale). Comme le stipule ce document : « Les congés de maladie pendant la grossesse seront exclus du champ d'application de la journée de carence, qu'ils résultent ou non d'un état pathologique lié à la grossesse ». L'évolution législative correspondante serait prévue pour figurer dans le futur projet de loi sur la fonction publique. En l'absence de modifications, seules les agentes de la fonction publique bénéficieraient de cet aménagement. Les autres femmes enceintes salariées ou indépendantes seraient toujours soumises à une durée de carence, variable selon les conventions et les statuts. Les raisons qui pourraient justifier l'adoption de la mesure pour les agentes publiques sont tout autant applicables à ces autres femmes. Les rapporteures soulignent donc que l'application de la mesure du protocole induirait une inégalité de traitement entre les femmes enceintes de statuts professionnels différents qui semble difficilement compatible avec nos principes constitutionnels d’égalité.

Elles invitent plutôt à traiter les vraies raisons de l’inégalité : garde des enfants, télétravail, réduction des écarts de rémunération, lutte contre les discriminations, sensibilisation aux stéréotypes, programme de mentoring... Elles rappellent que le combat pour l’égalité femme/homme est un combat pour l’égalité des individus indépendamment de leur genre et non une approche genrée des politiques publiques qui consisterait in fine à reproduire une organisation toute aussi inégalitaire du travail, pour les hommes et pour les femmes, et donc reproduire la « valence différentielle des sexes », selon l’expression de Françoise Héritier, qui est le socle de siècles d’inégalités.

 


II.   Faire de l’éna l’école du leadership européen

L’École nationale d'administration est un établissement public administratif de l'État, doté de l'autonomie financière et placé sous la tutelle du Premier ministre.

L’école a pour rôle principal de recruter et former les cadres dirigeants de l’État depuis sa création en 1945. Ces missions se sont peu à peu diversifiées, notamment au travers de la fusion avec l’Institut international d’administration publique puis le Centre des études européennes de Strasbourg. Le règlement lui confère désormais pour mission :

– « la formation permanente des fonctionnaires français et le perfectionnement de fonctionnaires étrangers ayant reçu dans leur pays d’origine une formation initiale complète et acquis une expérience professionnelle ;

 « la coopération européenne et internationale, bilatérale et multilatérale, dans le domaine de l’administration publique et dans le cadre de la politique étrangère du Gouvernement français, avec les institutions et établissements étrangers, notamment par la réponse aux appels d’offre internationaux ;

 « la recherche et la publication dans ces différents domaines, notamment en droit et administration comparés ([18]) ».

A.   diagnostic de la situation financière de l’éna

Les documents que se sont procurés les rapporteures spéciales témoignent du fait que l’ENA est dans une situation financière critique. Pour financer ses dépenses, la contraction de la subvention pour charges de service public et l’insuffisance de ses ressources propres ont conduit l’école à largement puiser dans son fonds de roulement. Conscient de ses difficultés, le directeur de l’ENA, M. Patrick Gérard, a commandé un audit financier de l’école, qui a été remis le 13 juillet 2018.

1.   La situation financière de l’ENA

a.   Des recettes insuffisantes…

Pour financer ses missions, l’ENA bénéficie d’une subvention inscrite sur le programme 148. Sur les dix dernières années, cette subvention a varié entre 36,5 millions d’euros, son plus haut niveau, en 2009, et 29,3 millions d’euros en 2013.

Depuis 2011, la subvention de l’État à l’ENA diminue régulièrement (à l’exception de 2014), affichant un total de – 5,08 millions d’euros entre 2011 et 2018, ce qui représente une baisse de 14,2 %.

évolution de la subvention et des ressources propres de l’ENA depuis 2006

(en euros)

Source : commission des finances, d’après les données du secrétariat général de l’ENA.

Comme l’illustre le graphique ci-dessus, l’ENA bénéficie également de ressources propres, qu’elle tire essentiellement de la facturation de ses formations professionnelles continues et de ses activités européennes et internationales. Ces ressources propres croissent faiblement (de l’ordre de 1 % par an), ne permettant pas toujours de couvrir le coût des missions qu’elles mettent en œuvre (cf. infra).

b.   … face à l’accroissement des dépenses

Les dépenses de déplacement, missions et réception ont augmenté de 3 % entre 2016 et 2017 alors même que l’école était en difficulté financière.

Mais ce sont surtout les charges de rémunération qui pèsent lourd sur lebudget (75 %) : le total des dépenses de personnel atteint 30,96 millions d’euros en 2017, soit 210 000 euros de moins que le total de la subvention pour charges de service public de l’année (31,17 millions d’euros).

La masse salariale prend en compte en 2017 la rémunération des 180 élèves (deux promotions), des 134 stagiaires de cycles préparatoires, des 193 personnels permanents ainsi que des intervenants ponctuels. Le personnel permanent de l’école représente un petit peu moins de la moitié des dépenses de personnel.

Pour 2018, la répartition des dépenses de personnel en fonction des catégories est illustrée par le graphique suivant.

les dépenses de personnel de l’ENA en 2018

(en millions d’euros)

Source : commission des finances, d’après les données du secrétariat général de l’ENA.

En réponse à certaines attaques récentes concernant la rémunération des élèves de l’ENA, les rapporteures soulignent que dès leur admission, les élèves de l’ENA deviennent des fonctionnaires stagiaires et sont soumis à ce titre aux droits et obligations des fonctionnaires. Ils effectuent d’ailleurs leur première année presque exclusivement en situation professionnelle puisqu’ils ont l’obligation d’effectuer des stages.

Les élèves sont rémunérés à l’indice brut 395 correspondant à 1 682,28 euros bruts par mois, à laquelle s’ajoute une indemnité de résidence de 16,82 euros bruts mensuels. Les élèves issus du concours interne et du troisième concours perçoivent par ailleurs une indemnité forfaitaire mensuelle (IFM) fixée forfaitairement à 843,48 euros bruts mensuels et peuvent également percevoir une indemnité compensatrice entre leur rémunération dans leur corps d’origine et l’indice de rémunération en tant qu’élève afin de ne pas subir une trop forte perte de rémunération. Tous bénéficient en outre d’une indemnité de formation (568 euros bruts mensuels) ou de stage (qui varie en fonction du lieu d’affectation) selon la période de scolarité.

Les lauréats du concours interne étant assurés, par différents dispositifs, de garder un niveau de rémunération comparable à celui dont ils bénéficient avant d’intégrer cette formation, il parait intéressant, comme le fait le rapport d’audit de se questionner sur la chute des postulants à ce concours et de l’impact de la baisse de sélectivité qui en découle. Contrainte géographique et personnelle, multiplication des accès aux administrations par concours directs, concours jugé trop académique et réputation en régression expliquent cette chute de potentiels.

 

Les rapporteures sont favorables à la révision du concours interne reposant plus sur des compétences professionnelles (techniques et humaines) et moins sur des savoirs académiques, pour redonner l’envie aux agents des services publics de progresser par cette voie.

Les élèvent perçoivent également une « indemnité de difficultés administratives », étrange legs institué en 1946 pour les personnels civils des départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle afin de pallier les difficultés éprouvées momentanément par les fonctionnaires chargés d'y introduire la législation et la réglementation française après quatre années d'occupation. La suppression de cette indemnité a été différée à plusieurs reprises sans jamais aboutir. Son montant n’a pas varié depuis des années. Désormais, son caractère modique (moins de 3 euros bruts mensuels) prête davantage à sourire qu’à s’insurger même si son existence apparaît particulièrement incongrue et qu’une suppression serait logique et cohérente.

Les rapporteures spéciales tiennent à saluer les efforts de gestion importants de l’école : 42 emplois ont été supprimés en dix ans sur les personnels permanents, soit 18 % des effectifs.

Les représentants du personnel, rencontrés par Mme Cendra Motin lors de son déplacement en juillet 2018, ont souligné que l’inquiétude budgétaire pesait sur les personnels de l’École. Actuellement, le recrutement serait gelé sur dix postes. La diminution des effectifs entraîne naturellement l’accroissement de la charge de travail des personnes en place. Des modifications structurelles, plus que de simples suppressions d’emplois, sont donc aujourd’hui nécessaires pour accompagner la diminution des dépenses de masse salariale.

dépenses de personnel de l’Ena

(en millions d’euros)

Source : commission des finances, d’après les données du secrétariat général de l’ENA.

La diminution des effectifs permanents ne permet cependant pas de diminuer d’autant la masse salariale en raison de l’augmentation de certaines charges imposées par l’État. Ainsi en est-il de l’augmentation de la contribution au compte d’affectation spéciale « Pensions » ([19]) (+ 4,73 millions d’euros), de l’augmentation du point d’indice (+ 0,9 million d’euros). Le glissement-vieillesse-technicité (+ 0,7 million d’euros) et l’évolution du régime indemnitaire (+ 0,6 million d’euros) ont également pesé sur ces dépenses.

c.   Une situation financière critique

Les variations de subventions suivent l’évolution des missions de l’école et du nombre d’élèves par promotion. M. Stéphane Escoubet, chef du service des ressources humaines et du pilotage financier, a cependant souligné lors de son audition par les rapporteures, que certaines nouvelles missions assignées à l’école n’avaient pas été financées à leur juste niveau. Ainsi en serait-il de l’accueil de 10 élèves supplémentaires par promotion en 2015-2016, dont le coût pour deux promotions s’élève à 1,4 million d’euros, ou encore de la prolongation de la prise en charge des stagiaires des cycles préparatoires aux concours interne et troisième concours, lorsqu’ils sont admissibles à l’ENA ([20]) qui coûte 270 000 euros par an.

Selon l’École, la subvention ne représente plus aujourd’hui que 77 % des ressources de l’école et couvre à peine les charges de rémunération. Les dépenses de fonctionnement et d’investissement de l’École ont ainsi été financées par les ressources propres et le prélèvement sur le fonds de roulement de l’établissement.

M. Escoubet a souligné la tension dans le dialogue budgétaire avec la direction du budget et la DGAFP. Compte tenu du déficit d’image de l’école en France - certains parlent d’ « éna-bashing » - il peut paraitre difficile de porter son budget et de le défendre. Pourtant, l’ENA est une école de renommée internationale, qui forme de très nombreux hauts fonctionnaires venus de tous les pays du monde. L’excellence de ses formations est particulièrement recherchée par les pays de l’Europe dans et hors de l’UE.

En intégrant l’impact des mesures réglementaires récentes pesant sur les charges de rémunération, l’ENA estime son déficit – qu’elle qualifie de « structurel » – entre 1,6 et 1,8 million d’euros, selon les aléas budgétaires de chaque exercice.

Pour 2017, le déficit de l’école atteint 2,13 millions d’euros. Le budget rectificatif pour 2018 indique un déficit de 1,48 millions d’euros. Le besoin en fonds de roulement a augmenté de 242 % par rapport à 2016.

Jusqu’à aujourd’hui, ces besoins en fonds de roulement ont été couverts.

évolution du fonds de roulement de l’éna depuis 2006

(en millions d’euros)

Source : commission des finances, d’après les données du secrétariat général de l’ENA.

En 2007, l’ENA a bénéficié d’une dotation de 15 millions d’euros sur le produit de la vente du bâtiment rue de l’Université à Sciences Po. Cette dotation, remise à l’ENA en prévision du financement des travaux pour la construction d’un nouveau bâtiment, a permis d’assurer un fonds de roulement conséquent. Les travaux ont finalement coûté moins cher (9 millions d’euros) et le fonds de roulement a permis à l’école de financer le déficit de fonctionnement depuis 2013. Le fonds de roulement s’établit à 7,4 millions d’euros au 31 décembre 2017 et 5,94 millions d’euros fin 2018 selon le budget rectificatif. L’école ne dispose plus que d’à peine deux mois d’avance de trésorerie.

La réorganisation des services permettra de répartir les missions de la Direction des relations internationales, sise 2, rue de l’Observatoire à Paris, dans de nouvelles directions métiers. Il peut donc sembler opportun, à cette occasion, de se poser la question de la pertinence de conserver à Paris, un bâtiment historique, qui abrite principalement une direction qui va être réorganisée. La vente d’un tel bâtiment pourrait représenter une manne financière importante et de nature à aider et à accélérer la transformation de l’école et le rétablissement de ses finances.

2.   D’insuffisantes ressources propres

L’ENA bénéficie de ressources propres, tirées de la formation continue (2,64 millions d’euros en 2017) et de la coopération européenne et internationale (2,41 millions d’euros en 2017).

On observe sur les dix dernières années une croissance faible de ces ressources propres.

évolution des ressources propres de l’éna

(en millions d’euros)

Source : commission des finances, d’après les données du secrétariat général de l’ENA.

a.   Sur la formation continue

L’ENA est bien plus connue pour sa formation initiale que pour son action en matière de formation continue. Elle assure pourtant cette mission de formation professionnelle tout au long de la vie, organisée au profit de bénéficiaires français et étrangers. Aux termes de l’article 52 du décret n° 2015-1449 du 9 novembre 2015 relatif aux conditions d'accès et aux formations à l'École nationale d'administration, « l’ENA élabore et met en œuvre des programmes ayant pour objectif l’approfondissement des compétences dans les domaines du management, de la gestion publique et de l’action publique dans une dimension d’administration comparée ».

La formation continue de l’ENA se divise en trois branches : la formation réglementaire, la formation continue concurrentielle et les cycles diplômants ou certifiants.

 

Le coût des formations réglementaires, comme la formation continue de l’encadrement supérieur et dirigeant de l’État, notamment pour une prise de poste sur certaines fonctions, est estimé à hauteur de 1,42 million d’euros en 2017 (ou 1,85 million d’euros en coût complet) est couvert par la SCSP et la participation aux frais de formation.

D’autres formations sont payantes et ouvertes à tous, comme celles présentées sur le catalogue de formation ou les masters spécialisés organisés avec des universités partenaires ([21]). En outre, l’ENA répond également à des appels d’offre en matière de formation et propose des formations sur mesure (payantes).

Sur la part concurrentielle des formations, le catalogue 2018 est structuré autour de cinq axes : se développer, manager, gouverner, innover, influencer. Le tarif d’une formation de deux jours varie entre 950 euros (« communiquer en situation de crise »), 1 200 euros (« lobbying et communication d’influence ») et 1 500 euros (« réflexes pour réussir sa prise de poste »). Pour une journée de formation, il faut compter entre 550 euros (« le manager philosophe ») et 800 euros (« mediatraining »).

Sur les formations diplômantes en partenariat avec des universités, comme le master européen de gouvernance et d’administration (MEGA) ou le mastère spécialisé « prévention et gestion territoriales des risques », les tarifs des formations sur catalogue distinguent un prix public et un prix administration. Ainsi les frais d’inscription au MEGA s’élèvent à 4 000 euros pour un agent public et à 10 000 euros pour les autres participants.

Selon le rapport d’audit, « la formation continue de l’ENA peine à convaincre de sa valeur spécifique sur un marché, il est vrai, très concurrentiel. En recherchant à développer son activité pour couvrir ses coûts fixes, l’école a élargi sa formation à l’encadrement intermédiaire au risque de se trouver en concurrence directe avec de nombreux organismes de formation ministériels ».

Le coût de ces formations ne couvre pas les frais engagés par l’École pour les mettre en œuvre. Ainsi, le compte financier 2017 estime à 2,72 millions d’euros le coût complet des formations sur mesure et sur catalogue. Les recettes ne couvrent que 48 % de cet effort (1,32 million d’euros). Pour les formations diplômantes, le coût complet est évalué à 1,28 million d’euros et les ressources propres atteignent 826 000 euros (65 %). Sur ce point, la comptabilité par destination de l’école estime que la différence est couverte par la SCSP.

Au total, les ressources propres de la formation continue de l’ENA atteignent 2,64 millions d’euros en 2017. Si l’on ajoute une ventilation de la SCSP, elles sont passées de 4,96 millions d’euros en 2006 à 4,48 millions d’euros en 2016. Les rapporteures notent cependant que le taux de couverture de la SCSP selon les actions diffère entre le rapport d’audit et les documents du secrétariat général de l’ENA. Cette répartition n’est pas inscrite dans le contrat d’objectifs et de performance de l’école et semble discrétionnaire, permettant de souligner ou non le caractère déficitaire de certaines actions.

Les rapporteures considèrent que la politique tarifaire des formations de l’ENA pourrait être plus ambitieuse. Elle doit valoriser ses prestations à hauteur de la qualité de celles-ci et peut pour cela prendre exemple sur les grandes écoles françaises et internationales. S’il est difficile de moduler le coût des formations réglementaires, c’est sur les formations continues et les formations en partenariats que l’École peut le mieux établir ses marges. La clé du positionnement stratégique et marketing de l’école, sa capacité à continuer à être perçue comme une filière d’excellence en France comme en Europe, tiendra à la politique tarifaire exigeante que l’éna doit mettre en œuvre et qui assurera sa santé financière.

Par ailleurs, l’ENA n’a pas vocation à être un opérateur de formation de masse et il est inutile d’entrer en concurrence sur des segments déjà largement couverts par d’autres acteurs publics ou privés. En revanche, sur des formations spécifiques, l’ENA peut se différencier en vendant sa marque, synonyme d’excellence. Il est aujourd’hui nécessaire d’opérer ce recentrage au moment où l’encadrement supérieur et dirigeant de l’État est confronté à des défis que seule la formation continue peut lui permettre de relever.

b.   Sur les actions internationales

En 2002, l’ENA a fusionné avec l’Institut international d’administration publique (IIAP), qui avait pour mission de développer la coopération administrative internationale, succédant à l’Institut des hautes études d’outre-mer.

Les missions de l’IIAP ont donc été intégrées à celles de l’ENA. Le directeur des affaires internationales de l’École est traditionnellement un fonctionnaire détaché du ministère chargé des affaires étrangères. Cette direction est installée sur l’ancien site de l’IIAP au 2 avenue de l’Observatoire à Paris.

Trois types de missions sont confiés à la direction des affaires internationales de l’ENA :

– le recrutement des élèves et auditeurs étrangers : en 2017 l’ENA a accueilli 56 élèves étrangers (deux promotions) en formation initiale, ainsi que 73 élèves de cycles internationaux de perfectionnement (deux promotions) et 573 auditeurs des cycles internationaux spécialisés d’administration publique (CISAP) ;

– les relations protocolaires avec les États étrangers, pour les demandes d’entretien avec le directeur ou les services, les visites d’études, la participation aux multiples réseaux de coopération administrative ;

– la coopération administrative, qui repose sur des financements bilatéraux ou multilatéraux.

En 2014, l’école s’est dotée d’une stratégie internationale, dont elle a tiré un premier bilan en juin 2018. On lit ainsi dans la note au conseil d’administration que « l’étude du portefeuille d’actions à financement multilatéral opéré par l’ENA de 2002 à 2014 fait apparaître un spectre quasi-illimité des programmes, sans cohérence ni thématique ni géographique ». Certains programmes s’éloignent en effet du cœur de métier de l’école : protection juridique des opérateurs économiques (Russie, 2000-2002), appui à la commission parlementaire du Mercosur (2002-2003), plan Phnom Penh pour le développement de programmes de formation en gestion publique (sous-région du Grand Mékong, 2006-2009), projet de gestion des risques (Chine, 2012-2016)…

Les projets menés actuellement correspondent davantage à des pays des voisinages sud et oriental de l’Union européenne, comme l’appui à la mise en œuvre de la réforme de la fonction publique en Albanie (2018-2021) ou le soutien à la réforme de l’administration publique en Ukraine (2018-2022).

De nouveaux concurrents internationaux émergent, à l’image de la Mohammed Ben Rashid School of Government à Dubaï et ou Lee Kuan Yew School of Government de Singapour.

Dans ce secteur particulièrement compétitif, certains succès sont revendiqués. L’ENA a été choisie par le Président al-Sissi pour accompagner la nouvelle Académie nationale de formation de tous les hauts fonctionnaires et responsables publics égyptiens.

Cependant l’érosion des recettes se confirme : le ministère des affaires étrangères, qui apportait 18 % des recettes de la direction des relations internationales (DRI) en 2011-2013, ne compte plus aujourd'hui que pour moins de 12 %. Les ressources des États tiers sont également en diminution.

Selon le rapport d’audit, ce recentrage des activités internationales ne va pas assez loin et l’activité de coopération internationale de l’ENA « s’essouffle sur un spectre géographique et thématique trop large ».

Le compte financier 2017 estime le coût des actions internationales et européennes à 4,44 millions d’euros (5,8 millions d’euros en coût complet après ventilation des fonctions support) alors que les ressources propres (MEAE, appels d’offre) s’élèvent à 2,41 millions d’euros.

La vision du directeur de l’ENA est que, l’école doit se concentrer sur des pays à fort enjeu. D’autres actions doivent être menées par les opérateurs ad hoc, à l’instar d’Expertise France.

 

Les rapporteures ont bien conscience que ces missions contribuent grandement à la renommée internationale de l’école et, avec elle, au soft power français dans l’organisation administrative et la formation des cadres de la haute fonction publique. Les retours sur investissement ne sont donc pas financiers mais invisibles, difficiles donc à quantifier. Dans ce cadre, elles soutiennent la volonté du directeur de recentrer l’action de l’École et de privilégier ainsi les projets à fort enjeu. Elles notent que ce recentrage devra prendre en compte la « valeur ajoutée » des projets pour la France, ses alliés, et l’École mais aussi concerner spécifiquement le cœur de compétence de celle-ci.

c.   La recherche de nouvelles ressources propres

Les actions nouvelles prévues par le contrat d’objectifs et de performance (COP) 2017-2019 incitent l’école à disposer des ressources suffisantes pour conduire sa mutation.

Le COP prévoit la création d’une fondation, « nécessaire au soutien et au développement des activités de l’école », notamment à l’augmentation des ressources propres. Cependant, l’ENA souligne que ce projet devrait obéir à des modes de comptabilité et de gestion distincts et que les financements ne pourront pas être affectés à la couverture des déficits induits par la réalisation des missions de service public de l’école.

L’ENA considère cependant, dans une note transmise aux rapporteures que « la diminution de la subvention ne peut être compensée par l’augmentation des ressources propres qui sont par définition conjoncturelles et aléatoires ».

Les rapporteures soutiennent la création d’une fondation de l’ENA qui permettra de promouvoir l’École tout en améliorant ses finances et participera au maintien d’un réseau international d’anciens élèves. Elles insistent cependant sur le fait que les bénéfices financiers à attendre de celle-ci sont particulièrement limités à court et moyen terme.

3.   Une organisation perfectible

a.   Le suivi des processus internes comptables

Le rapport de l’agent comptable de l’ENA sur le compte financier 2017 fait état de créances non soldées au 31 décembre 2017 à hauteur de 2,12 millions d’euros – contre un montant de 1,57 million d’euros au 31 décembre 2016. Ce décalage s’explique en partie par un nombre important de liquidations de recettes assez tardives (sur les trois derniers mois de 2017), mais cette situation a un impact négatif sur le besoin en fonds de roulement et sur le solde budgétaire. On observe ainsi un écart important en 2017 entre le déficit comptable (2,13 millions d’euros) et le déficit budgétaire (2,72 millions d’euros), principalement en raison du retard d’encaissement de deux créances.

Selon ce rapport, l’analyse des créances non soldées par typologie de client est la suivante :

analyse des créances 2017 non soldées par typologie de clients

 

Nombre de titres 2017 non soldés

Montant

Part

Clients privés _ France

34

95 916,69 €

5 %

Clients publics _ France

128

722 125,74 €

36 %

Clients internationaux

37

1 193 732,13 €

59 %

 

199

2 011 774,56 €

100 %

Source : rapport de présentation de l’agent comptable de l’ENA sur l’exercice financier 2017.

En nombre, ces créances non soldées concernent principalement des clients publics (64 %), notamment pour des prestations de formations.

En montant, l’enjeu financier concerne majoritairement les clients internationaux (59 %), principalement dans les partenariats avec l’Afrique et le Moyen-Orient.

Le rapport d’audit note que le pilotage économique de l’ENA apparaît insuffisant et que « les directions opérationnelles n’intègrent pas assez l’exigence de rentabilité minimale de leurs activités ».

L’agent comptable, M. Éric Simon, a également souligné la nécessité de rationaliser et de fiabiliser les processus face à la démultiplication des acteurs. Il propose notamment la création d’une plateforme de gestion partagée entre l’ordonnateur et le comptable, la mise en place de processus établis et la formation des différents intervenants aux fonctions financières. Un service facturier existe pour la partie dépenses (sept personnes à l’agence comptable) mais mériterait d’être élargi aux recettes, notamment pour suivre les échéances des projets multilatéraux à fort enjeu financier.

Les rapporteures prennent acte des premières mesures prises pour réduire le volume des créances et de la volonté de l’École de poursuivre ses efforts en la matière. Elles soulignent l’importance que peuvent avoir ces créances sur la comptabilité de l’ENA : en 2017, elles atteignaient 2 M d’euros ce qui représentait 94 % du déficit de l’École la même année (2,13 M). Cependant, elles insistent sur le fait qu’une réduction drastique du volume de créances semble peu réaliste à court terme si les activités internationales de l’École restent les mêmes. Enfin, il semble important que s’opère une véritable prise de conscience collective des enjeux financiers des projets et des prestations délivrées par l’école pour en assurer leur complète réussite. 

 

b.   La structure complexe des services

L’organisation des services de l’ENA repose sur une structure complexe. Elle compte quatre directions (formation, stage, relations internationales, relations européennes) et un secrétariat général. Les directions comprennent outre un directeur, un voire deux directeurs adjoints et des chefs de services. En tout, l’ENA comprend 11 postes A + et quatre niveaux hiérarchiques.

organigramme de l’ENA

Source : site de l’ENA.

 

Les rapporteures soutiennent qu’une simplification de l’organigramme permettrait de donner plus d’agilité au fonctionnement de l’école.

Il est ainsi envisagé de créer une direction des enseignements et de la recherche (DER), rassemblant la direction de la formation et la direction des affaires européennes. Il est également proposé que le directeur des stages soit le coordonnateur des enseignements « territoires et politiques publiques » et que l’un des diplomates en fonction à l’ENA soit le coordonnateur des enseignements internationaux.

La direction des relations internationales est quant à elle appelée à disparaître : ses activités seraient réparties entre une structure « protocole » au sein du cabinet du directeur, la sélection des élèves à la direction des stages, la conduite des projets de formation et de coopération confiée à une mission auprès du directeur.

B.   se redonner des objectifs pour…

1.   Retrouver des marges de manœuvre budgétaires

a.   Les pistes de l’audit

Le directeur de l’école, Patrick Gérard, a demandé un audit budgétaire de l’école dont les conclusions ont été présentées au conseil d’administration.

Cet audit identifie plusieurs « pistes de redressement financier » présentant un potentiel estimé entre 9 et 11 millions d’euros, soit 25 % du budget de l’établissement.

Parmi les propositions du rapport, on peut citer :

– la suppression des cycles préparatoires à l’ENA (6 millions d’euros) ;

– le retour à deux stages et une contraction de la durée de la scolarité (1,4 million d’euros) ;

– le recentrage de la formation continue (0,8 million d’euros) ;

– la simplification de l’organisation (0,6 million d’euros).

L’audit imagine trois scénarii :

– le « repli » implique une « réduction drastique » des activités de formation continue, européennes et internationales, ainsi qu’une contraction de la scolarité. Cette solution permettrait de réduire la subvention de 6 à 8 millions d’euros à moyen terme ;

– le « recentrage », « visant à réduire les charges de l’école tout en assurant la cohérence entre ses activités et son positionnement de grande école d’application pour les dirigeants publics français » qui permettrait un retour à l’équilibre sous deux ans et une réduction de la subvention de 3 à 4 millions d’euros à moyen terme ;

– la « transformation » vise à faire de l’ENA « l’institution de référence pour la formation des cadres supérieurs et dirigeants publics en Europe » : ce scénario implique un réinvestissement significatif dans les capacités pédagogiques et académiques de l’école et un maintien de la subvention.

b.   Les décisions du conseil d’administration

Lors du conseil d’administration du 10 octobre 2018, l’ENA a adopté un plan de redressement financier sur trois années, qui poursuit l’objectif de réduire le déficit à –  441 000 euros en 2019 et d’atteindre l’équilibre dès 2020. Le rapport présentant les « orientations pour transformer l’ENA », présenté au conseil d’administration, exclut catégorique la stratégie de repli : « le repli sur quelques missions signifierait recul ».

La voie médiane choisie par le conseil d’administration se situe donc entre le « recentrage » (notamment sur le recul des activités internationales et les préparations au concours) et la « transformation ».

Ce plan de redressement implique également une diminution des ressources propres. Sur trois ans, ce plan doit aboutir à une diminution de 5,66 millions d’euros de dépenses, de 1,98 million d’euros de ressources, soit une amélioration du solde de 3,68 millions d’euros.

impact des mesures du plan de redressement financier

(en milliers d’euros)

 

Variation des dépenses

Variation des recettes

Variation du solde

Préparation aux concours

– 3 870

73

3 943

Recrutement des élèves de l’ENA

0

0

0

Formation initiale

– 535

8

543

Formation continue

923

– 94

– 1 017

Recherche et publications

– 15

0

15

Actions internationales et européennes

– 1 724

– 1 559

165

Support

– 436

20

456

Variation SCSP

 

– 429

– 429

TOTAL

– 5 657

– 1 981

3 676

Source : ENA, Orientations pour transformer l’ENA, rapport présenté au conseil d’administration du 10 octobre 2018.

i.   La transformation du cycle préparatoire au concours

La principale mesure d’économie proposée concerne la préparation aux concours (– 3,87 millions d’euros). Il existe un cycle préparatoire en présentiel d’une durée d’un an, accessible sur concours, pour accompagner les candidats au concours interne et au troisième concours. Les stagiaires du cycle préparatoire sont en position de détachement lorsqu’ils sont titulaires et mis en congés dans leur administration d’origine s’ils sont contractuels de la fonction publique. Ils bénéficient d’une prise en charge financière par l’ENA.

En 2017, le coût du cycle préparatoire est estimé à 6,6 millions d’euros, comprenant les opérations de sélection (305 931 euros), la rémunération et la gestion des préparationnaires (5,9 millions d’euros) et les dépenses pédagogiques (393 533 euros).

D’après les « Orientations pour transformer l’ENA » présentées au conseil d’administration du 10 octobre 2018, « cette charge ne serait pas en soi une difficulté si ce dispositif s’avérait un puissant levier de mobilité et de progression professionnelle tout au long de la vie. Or, ce n’est pas le cas. Le dispositif actuel est à bout de souffle ».

Lors de son entretien avec les rapporteures, M. Patrick Gérard a souligné à plusieurs reprises le coût du cycle préparatoire aux concours. En effet, seule l’ENA en assume le financement alors que les stagiaires y préparent d’autres concours de la fonction publique, tels que celui de l’école des hautes études en santé publique ou l’institut national des études territoriales. Le directeur de l’ENA a évoqué l’idée de facturer à ces écoles du service public le coût de la formation en fonction du nombre de reçus. Cette option paraît cependant délicate à mettre en œuvre, obligeant à calculer chaque année la participation de chaque établissement et pouvant freiner le recrutement des stagiaires du cycle compte tenu du coût de leur préparation.

Il est finalement proposé de transformer cette préparation en cycle « hybride », alternant des sessions d’enseignement et d’entraînement en présentiel avec des enseignements à distance. La préparation ne serait donc pas à plein temps. Ce rapport propose également que les préparationnaires soient sélectionnés par les employeurs et que leur rémunération reste à la charge de l’employeur, via l’adossement à ce dispositif du compte personnel de formation.

Cette réforme devrait être menée sur deux ans, avec un plein effet en 2021.

Les rapporteures sont très favorables à cette évolution, qu’elles jugent compatible avec la maîtrise des dépenses publiques exigée de l’école et le maintien de la qualité de formation. Elles souhaitent en revanche s’assurer que les modalités de sélection des candidats garantiront une meilleure représentation de la diversité de la fonction publique et d’égalité entre les femmes et les hommes, et que le niveau de sélection par cette voie interne en sera amélioré.

ii.   La réforme de la scolarité

Les économies sur la formation continue portent essentiellement sur la diminution de 10 postes offerts au concours qui s’applique dès la promotion 2018-2019 (– 500 000 euros).

En outre, l’ENA prévoit de diminuer de 2,5 mois la scolarité des élèves qui entreront à l’école en janvier 2019, tout en conservant la variété des 3 stages. Cette réduction sera permise par la réduction de la durée des stages (de 11 à 10 mois) et la réforme des enseignements. Le développement d’une banque de contenus digitaux pourra offrir des gains de temps en présentiel. Les épreuves de classement de la promotion entrante en 2019 devraient se tenir fin juillet 2020, le classement serait connu en septembre et l’affectation en octobre. Cette mesure d’organisation devrait à elle seule permettre une économie de 858 000 euros.

Cette réduction minime de la durée de formation (l’hypothèse de 2 stages ayant été évoquée) doit s’articuler avec un meilleur accompagnement des élèves après leur prise de poste.

iii.   Les économies de fonctionnement

Outre les réorganisations internes, évoquées supra, le plan de redressement des comptes de l’ENA confirme la poursuite de diminution des emplois permanents de l’école, avec 12 suppressions d’emplois d’ici 2021, ramenant le plafond d’emplois du personnel permanent à 177 ETPT au 31 décembre 2021. Les économies sur les charges de rémunération sont estimées à 7,99 millions d’euros sur trois ans, réparties sur les rémunérations des personnels administratifs (– 1,23 million d’euros), des élèves (– 1,35 million d’euros), des stagiaires du cycle préparatoire (– 5 millions d’euros) et des intervenants et experts (– 0,4 million d’euros).

Les rapporteures notent que la variation de SCSP prise en compte (– 429 000 euros) diffère de celle qui figure dans le projet annuel de performance (– 879 000 euros). Au vu des nombreuses transformations que devra assumer l’École, et compte tenu de ses efforts notables, les rapporteures préconisent d’accorder des marges de manœuvres financières plus importantes à l’École lors des premières années de mise en place de son plan de redressement. Une révision de la subvention pour 2019 à hauteur de 450 000 euros leur apparaîtrait pour cela pleinement justifiée.


2.   Former et accompagner les leaders de la transformation de l’action publique

Le cœur de métier de l’ENA demeure le recrutement et la formation initiale des futurs cadres dirigeants de l’État. Dans ce domaine, l’ENA doit rester l’établissement de référence.

a.   Fournir une formation sur-mesure adaptée aux compétences nécessaires aux hauts dirigeants de l’État

Chaque année, l’accès à l’ENA est ouvert par la voie des concours externe, interne ou du troisième concours. Le nombre de places offertes est déterminé chaque année par arrêté. Pour le concours 2018, le concours ouvre 40 places en externes, 32 en interne et 8 au titre du troisième concours (80 postes ouverts). Une nouvelle voie de recrutement devrait être ouverte en 2019 à des docteurs en sciences afin de continuer le mouvement d’ouverture à des profils différents, nécessaires pour enrichir notre haute fonction publique.

La formation dispensée à l’école doit s’adapter à cette diversité de recrutement : la moitié de la promotion n’a aucune expérience professionnelle quand l’autre bénéficie en moyenne de sept ans d’expérience.

Actuellement, les lauréats du concours sont en stage pour la première année de scolarité. Trois stages sont obligatoires : un stage international, un stage en administration déconcentrée et un stage en entreprise. Ils sont sur le site de Strasbourg pour leur deuxième année de formation, à l’issue de laquelle le classement de sortie est défini.

L’ENA entend désormais développer un projet pédagogique axé sur les compétences, afin de « permettre aux élèves d’être davantage acteurs de leur scolarité ». La prise en compte du profil professionnel des élèves doit se traduire par des entretiens « balises » en cours de scolarité pour identifier les compétences acquises par l’élève et l’adéquation avec son projet professionnel.

Les compétences attendues des employeurs (compétences techniques, transversales et humaines) devraient être référencées pour permettre aux élèves de se préparer au mieux à leur future prise de poste.

Le taux de satisfaction des employeurs et des élèves 18 mois après leur sortie de l’école est l’un des indicateurs retenus dans le contrat d’objectifs et de performance 2017-2019. Ainsi, pour la promotion Jean de la Fontaine, 89 % des employeurs considèrent, dix-huit mois après l’intégration d’un ancien élève, que sa formation a été bonne ou très bonne, et on retrouve un taux proche côté élèves (81 %).

 

b.   Affecter les élèves vers les missions prioritaires du Gouvernement

L’usage veut que les élèves les mieux classés de l’ENA choisissent, dans l’ordre, l’Inspection générale des finances, le Conseil d’État et la Cour des comptes. Puis vient le ministère des affaires étrangères, suivi de près par certaines directions de Bercy et par les inspections générales de l’administration et des affaires sociales. Les rapporteures spéciales s’interrogent sur la pertinence du classement de sortie de l’École. Il est difficile encore aujourd’hui de ne pas associer « les meilleurs » aux « mieux classés », rappelle M. François Charlottin, délégué des élèves de la promotion Clémenceau que la rapporteure a rencontré. Si l’on supprime le classement, la crainte classique est la cooptation.

Pour favoriser la mobilité, les rapporteures soutiennent l’idée, évoquée par les représentants des élèves, de fusionner tous les corps de sortie en trois grands corps : un corps d’inspection, un corps d’administrateurs et un corps de magistrats.

Si ce n’est pas l’objet du présent rapport, les rapporteures considèrent que l’ENA doit également relever le défi de la diversification de ses débouchés dans les administrations centrales dans le cadre de sa mutation. Comme l’a souligné le Président de la République, «pour savoir correctement évaluer, contrôler, auditer l'État, pour rendre la justice, il faut avoir une expérience professionnelle suffisante. Je ne veux pas que l'État fabrique des « castes » administratives, avec des carrières toutes tracées ».

Le Président de la République a souligné la nécessité d’affecter les mieux classés dans les missions prioritaires du Gouvernement. Cette annonce a suscité à la fois des réticences pour des raisons logistiques et un réel engouement pour les missions proposées.

Des mesures d’accompagnement des élèves dans leur prise de poste vont être mises en place par l’École. Leur coût est évalué à 74 000 euros en 2020 et 111 000 euros en 2021.

c.   Poursuivre la formation des cadres dirigeants de l’État tout au long de leur vie professionnelle

Les besoins de l’État évoluent, de même que les compétences nécessaires en fonction de l’évolution des carrières. Ainsi, le lien entre les cadres de l’État et l’établissement de formation qu’est l’ENA ne doit pas se couper à l’issue de la formation initiale.

L’ENA considère comme pertinente la proposition du rapport d’information de la mission d’évaluation et de contrôle (MEC) de l’Assemblée nationale sur la formation continue et la gestion des carrières dans la haute fonction publique qui incitait à la création d’un cycle de formation commun pour l’ensemble des recrutements de hauts fonctionnaires de l’État. « Un tel cycle favoriserait une culture partagée de l’action publique en incluant l’intégration et l’acculturation des futurs cadres supérieurs contractuels recrutés par l’État sur des emplois fonctionnels » peut-on lire dans le rapport d’orientation.

Le coût de la mise en place d’un tel cycle est estimé à 1,5 million d’euros.

Cette charge supplémentaire peut être partiellement compensée par un meilleur ciblage de l’offre de formation continue ouverte à tous. Le rapport d’orientation indique ainsi que « l’ENA doit rechercher dès 2019 d’importantes économies en recentrant son offre sur les publics cibles et sur des thèmes de formation différenciant et l’augmentation de la rentabilité par une augmentation de ses tarifs ».

3.   Renforcer le rayonnement européen de la France

Depuis 1991, le siège de l’ENA est situé à Strasbourg. En 2015, l’ENA se dote d’un pôle européen en intégrant le Centre des études européennes de Strasbourg, rattaché totalement en 2009, et devenant la direction des affaires européennes en 2010.

a.   Une stratégie européenne efficace…

En 2014, l’ENA s’est dotée d’une stratégie européenne, qui poursuit deux objectifs principaux, selon la directrice des affaires européennes de l’ENA :

– faire des hauts fonctionnaires français des champions techniques des questions européennes ;

– redonner de la visibilité à l’ENA au sein des institutions à Bruxelles.

Depuis 2007, la direction des affaires européennes (DAE) de l’ENA organise le cycle des hautes études européennes (CHEE) pour les hauts potentiels de l’administration publique ou du privé : il rassemble en moyenne 45 auditeurs par promotion, qui bénéficient de 35 jours de formation sur 10 mois (à raison de 2 à 5 jours par mois). Ce programme s’appuie sur un réseau d’anciens élèves et d’intervenants de haut niveau et contribue à la visibilité et à la renommée de l’ENA. Il doit être lancé en langue anglaise en 2019.

La DAE organise également des préparations aux concours européens, auxquels les préparationnaires obtiennent des résultats remarquables. Le service « concours européens » de l’ENA est le seul centre préparatoire pour la France recensé par l’Office européen de sélection du personnel (EPSO). Sur les concours généralistes, l’ENA forme environ 20 % des lauréats à l’échelle de l’UE et plus de 60 % des lauréats français. Sur les concours spécialisés, elle forme près de 40 % des lauréats.

L’ENA répond enfin à des appels d’offre pour la formation d’agents publics dans l’Union européenne. En 2017, l’ENA a remporté l’appel d’offre visant à renforcer les compétences de l’administration bulgare en vue de la présidence tournante du Conseil européen. En quelques mois, l’ENA a formé 300 futurs présidents de groupe de travail au Conseil. Un autre partenariat a été mis en place avec la Roumanie pour la présidence roumaine. Selon Mme Dauphinelle Clément, directrice des affaires européennes, ces appels d’offre permettent une stratégie d’influence mais ne sont pas financièrement rentables, ce qui pose une réelle question à laquelle il faut une réponse de principe.

b.   … qui mérite d’être renforcée

Les rapporteures estiment que le « système d’aide à la décision à trois branches » cité par la directrice des affaires européennes lors de son audition mériterait d’être appliqué à l’ensemble des actions conduites par l’école :

1)     « Est-ce bien dans le cœur de mission de service public de l’ENA ? 

2)     Est-ce rentable ?

3)     Est-ce que l’action rapporte à la France en matière d’influence ?»

En matière de réponses aux appels d’offre européens et internationaux, les orientations du conseil d’administration du 10 octobre dernier invitent à resserrer leur périmètre d’intervention sur les plans géographique et thématique. Elle ne devrait retenir en 2019 qu’un nombre réduit de projets, considérés comme stratégiques et dégageant une marge significative. L’économie induite n’est cependant pas significative, dans la mesure où les ressources propres de l’école diminuent également. Pour 2019, le rapport d’orientation estime une mesure d’économie de 1,709 million d’euros et une perte de recettes de 1,609 million, soit un effet positif de 100 millions d’euros.

L’activité internationale doit se centrer sur l’appui aux gouvernements et la formation de très haut niveau. La création d’un futur groupe Agence française de développement-Expertise France pourrait permettre une mutualisation de certaines actions.

L’activité européenne, quant à elle, doit renoncer aux missions « excessivement preneuses d’ETP/jour », dont le modèle économique n’est pas satisfaisant.

Les points d’excellence que sont le cycle des hautes études européennes, les masters spécialisés, ou les préparations aux concours européens méritent, selon les rapporteures, d’être renforcés et revalorisés. Elles saluent ainsi la création d’un nouveau master spécialisé d’ « expert en affaires publiques européennes ».

L’action publique française ne peut plus faire l’économie d’une formation approfondie aux questions européennes. Les hauts fonctionnaires français doivent être plus présents à Bruxelles, pour influencer les décisions européennes, ce qui nécessite des connaissances techniques. De même, les ministères mériteraient de voir leurs équipes renforcées par des spécialistes des questions européennes.

En cela, l’ENA peut et doit s’imposer comme l’école de référence pour la formation de nos leaders de la transformation tant au niveau national qu’au niveau européen.

4.   Innover et s’ouvrir

La situation financière de l’ENA ne freine pas la volonté de réforme et les nouveaux projets engagés par la direction.

a.   La mise en place d’un partenariat avec Paris Sciences et Lettres

D’après certains éléments transmis à vos rapporteures, l’ENA a noué des contacts avec Paris-Sciences-et-Lettres, établissement universitaire structuré sur le statut d’une communauté d’universités et d’établissements (ComUE). Cette structure universitaire rassemble 9 établissements membres, parmi lesquels l’école normale supérieure, l’école nationale des chartes ou encore l’école pratique des hautes études et l’université Paris-Dauphine. Des établissements peuvent également être associés, à l'instar du collège de France ou de l’école des hautes études en sciences sociales.

L’ENA a déjà lancé une chaire partenariale avec l’ENS, intitulée « Savoir, prévoir, pouvoir ». L’école entend poursuivre ce partenariat avec PSL et pourrait devenir membre associé dès le 1er janvier prochain.

b.   La mise en place d’une fondation

En lien avec l’association des anciens élèves de l’ENA, l’école a engagé les démarches constitutives pour la création d’une fondation abritée par la Fondation de France.

Elle a notamment pour but de renforcer les actions visant à la diversité de l’école, à accueillir des chercheurs étrangers, et à développer des contenus pédagogiques innovants. Ainsi, les fonds recueillis n’ont pas vocation à financer des actions pour lesquelles la SCSP s’avère insuffisante. Ils doivent s’inscrire dans leur prolongement.

c.   S’ouvrir à de nouveaux profils

i.   Une nouvelle classe préparatoire intégrée pour ouvrir l’école à plus de diversité

Environ 70 % des élèves sont issus des classes supérieures, contre 45 % dans les années 1950 et 1960, selon une étude du Cevipof.

Pour promouvoir la diversité, qui fait encore trop souvent défaut parmi les lauréats du concours de l’ENA, une seconde classe préparatoire intégrée devrait s’installer à Strasbourg. D’après les informations transmises aux rapporteures, elle générera un coût net de 13 000 euros en 2019, avec une rentrée prévue en novembre et un soutien de la région Grand Est. En année pleine, le coût de cette classe préparatoire est évalué à 73 000 euros pour l’accueil de 10 élèves, soit 206 000 euros de moins que sa grande sœur parisienne qui en accueille 24.

ii.   Un nouveau concours pour les docteurs

Le directeur de l’ENA en a fait une de ses priorités : l’ouverture de l’école à de nouveaux profils, et notamment aux docteurs. Un décret du 16 septembre 2018 prévoit d’ouvrir cette nouvelle voie à titre expérimental : trois postes seront ouverts pour le concours 2019.

La prise en charge de trois élèves supplémentaires au titre du concours « docteurs » est estimée à 182 000 euros en 2020 et 144 000 euros supplémentaires en 2021. L’ouverture d’un concours supplémentaire pour ces candidats génère des charges supplémentaires estimées à 10 000 euros.

Les rapporteures soulignent que la pertinence de ce concours devra être observée au regard du nombre de candidats se présentant à celui-ci.

L’ouverture de l’ENA à de nouveaux profils est l’un des enjeux essentiels de la transformation que doit opérer l’école dans les trois prochaines années. Pour changer les schémas de pensée, permettre et encourager la créativité, le design thinking, promouvoir le travail collectif et la co-construction plutôt que la compétition, trouver des leaders de la transformation publique qui donneront du sens à l’action publique de demain. Tels sont les profils que l’ENA doit recruter et former, tant pour notre administration nationale que pour notre administration européenne. L’esprit de caste doit laisser la place à l’esprit d’initiative. Le conformisme doit être remplacé par l’audace. L’ENA doit devenir l’école du leadership européen.


   EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion du 23 octobre 2018 à 21 heures, la commission examine les crédits des missions Gestion des finances publiques et des ressources humaines, Action et transformation publiques et Crédits non répartis.

[…]

Mme Cendra Motin, rapporteure spéciale (Fonction publique et Crédits non répartis). Parmi les grands chantiers du quinquennat, il est en un qui nous tient tous à cœur : la meilleure maîtrise de la dépense publique et son efficience.

C’est dans cette optique que le Gouvernement a lancé, dès le début du quinquennat, la transformation de l’action publique, qui nécessite une modernisation de la fonction publique que le Gouvernement entend mettre en œuvre très rapidement. De nombreuses propositions ont été apportées par le comité « Action publique 2022 » et quatre cycles de concertation ont été ouverts avec les organisations syndicales de la fonction publique sur la rénovation du dialogue social, l’ouverture de la fonction publique, la structure de la rémunération et son articulation entre reconnaissance des expertises, de l’engagement et de la carrière, et l’accompagnement à la mobilité dans et hors de la fonction publique.

Dans le projet de loi de finances pour 2019, la masse salariale du budget général de l’État atteint 131,7 milliards d’euros, soit 28,4 % du budget qui nous est présenté. L’augmentation est de 2,1 milliards d’euros depuis la loi de finances initiale pour 2018 en tenant compte de l’augmentation des cotisations et contributions sociales de plus 800 millions d’euros. Le 1,35 milliard supplémentaire de rémunération d’activité est lié aux mesures catégorielles ; 600 millions d’euros dont 350 millions pour la reprise du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » et au glissement vieillesse technicité.

Compte tenu des sommes en jeu, il nous semble primordial de conduire une véritable réforme de la rémunération des agents, afin d’encourager leur engagement tout en maîtrisant la dépense publique.

Dans mon rapport à mi-parcours, j’avais choisi de travailler sur l’incitation à la performance. Plusieurs options sont en discussion. Premièrement, l’intensification de l’harmonisation des indemnités rémunérant l’expertise des agents et la généralisation du complément indemnitaire annuel à tous, quelle que soit leur catégorie ou leur grade, pour mieux prendre en compte l’investissement et l’implication personnelle. Cette partie liée à la performance de l’agent n’est souvent pas utilisée par les employeurs publics ou à des niveaux trop faibles pour être significatifs et attractifs. Deuxièmement, l’incitation à la performance collective via un dispositif d’intéressement à la réussite des chantiers de transformation de l’action publique à tous niveaux.

Dans tous les cas, il s’agit aujourd’hui d’avancer vers la remise à plat de la structure de rémunération des fonctionnaires pour mieux l’articuler avec la réforme des retraites et pour rendre celle-ci plus attractive et moins automatique.

Les réformes de l’action publique doivent permettre de réduire le nombre d’agents publics tout en conservant un haut niveau de service au public, grâce à une action repensée et modernisée ; c’est l’engagement du Président de la République et de la majorité. Pour 2019, l’excédent des suppressions par rapport aux créations d’emplois s’élève à 4 164 équivalents temps plein (ETP) dont 1 571 ETP pour l’État et 2 593 ETP pour les opérateurs.

Il nous a été confirmé, que conformément à l’article 11 de la loi de programmation des finances publiques 2018-2022, le plafond d’emplois devrait être revu en cours d’examen, en fonction du schéma de fin de gestion arrêté dans le projet de loi de finances rectificative pour 2018. En effet, à compter de cet exercice 2019, le plafond des autorisations d’emplois ne peut excéder de plus de 1 % la consommation des emplois constatée dans la dernière loi de règlement, corrigée des schémas d’emplois, des mesures de transfert et de périmètre. Cette nouvelle règle doit nous permettre de suivre au plus près la réalité des emplois de l’État, afin de rompre avec la pratique un quelque peu absurde de déconnexion entre le plafond d’autorisations d’emplois et les emplois réels.

Quelques mots maintenant sur les crédits des programmes 148, 551 et 552.

La mission Crédits non répartis contient deux dotations prévues par la loi organique relative aux lois de finances : « une dotation pour mesures générales en matière de rémunérations, dont la répartition par programme ne peut être déterminée avec précision au moment du vote des crédits » prévue au programme 551 ; « une dotation pour dépenses accidentelles destinées à faire face à des calamités et pour dépenses imprévisibles » inscrite au programme 552.

Pour la première, le Gouvernement a inscrit 70 millions d’euros résultant des décisions du rendez-vous salarial de juin dernier afin de revaloriser le barème de monétisation des jours épargnés sur un compte épargne temps, le barème kilométrique et les barèmes pour frais de nuitées des agents en déplacement. Il y a ajouté 9 millions d’euros pour tenir l’engagement de promouvoir les mobilités durables au sein de la fonction publique et pour rembourser, à ce titre, une indemnité kilométrique « vélo » pour les trajets domicile-travail.

Pour la seconde, 424 millions d’euros en autorisations d’engagement et 124 millions d’euros en crédits de paiement doivent permettre de faire face à des dépenses accidentelles.

Au sein de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines, le programme Fonction publique prévoit 206,9 millions d’euros pour financer la formation des fonctionnaires et l’action sociale interministérielle. Le fait le plus notable est la diminution de 31 millions d’euros des crédits qui résulte de la suppression de la part « direction générale de l’administration et de la fonction publique » (DGAFP) de l’appui à la rémunération des apprentis : il incombe désormais à chaque ministère de rémunérer les apprentis sur sa propre dotation.

Les opérateurs du programme que sont l’École nationale d’administration (ENA) et les instituts régionaux d’administration (IRA) voient leurs subventions diminuer pour 2019 : 44 millions d’euros pour les IRA, en diminution de 1,2 million d’euros. Quelque 30,2 millions d’euros finançaient l’ENA, soit une diminution initialement prévue de 879 000 euros, qui, du fait de l’engagement de l’École à redresser ses comptes, sera revue à la baisse lors de l’examen du texte en séance publique.

La situation financière de l’ENA est complexe. Le déficit de 2,13 millions d’euros pour 2017 nous a inquiétés et nous avons conduit un contrôle sur place au mois de juillet en nous rendant à Strasbourg puis en septembre dans les locaux parisiens. Nous voulions effectivement comprendre l’origine et les raisons d’être d’un déficit décrit comme structurel par plusieurs interlocuteurs.

 

L’ENA bénéficie chaque année d’une subvention inscrite sur le programme 148. Elle couvre globalement les frais de préparation aux concours – dont 7 millions d’euros pour le cycle préparatoire d’élèves qui réussiront, in fine, d’autres concours que l’ENA –, l’organisation des concours et la formation initiale des élèves français et étrangers. En revanche, les actions de formation continue et les actions internationales sont le plus souvent menées à perte. Il en résulte que l’ENA doit jongler avec des retards de paiement importants, une obligation qui lui est souvent faite de ne pas valoriser ses formations à leur juste prix, sans compter les efforts d’intégration d’élèves et de nouvelles structures qui ont été réalisés sans un véritable alignement des moyens.

Le nouveau directeur de l’ENA, M. Patrick Gérard, nommé l’été dernier, a pour mission de refaire de l’ENA le fer de lance de notre administration publique et de former les leaders de la transformation publique de demain. Bien conscient de la situation de cette institution et de la nécessité d’une réflexion plus globale sur le rôle et la place de cette école d’excellence, il a pour la première fois diligenté un audit indépendant de l’école qui l’a amené à proposer, en accord avec la DGAFP, un plan de redressement sur trois ans, qui devrait voir ses comptes repasser dans le vert.

L’ENA doit pour cela devenir une véritable école du leadership public européen, aussi bien sur la formation initiale que sur la formation continue. Force est de constater qu’elle peine à viser les plus hauts cadres dans ses actions de formation continue alors que cela devrait être son cœur de métier. C’est donc sur cela qu’elle va se recentrer, en simplifiant son organisation interne pour la rendre plus agile et plus experte, en rationalisant les coûts de formation des élèves et en revalorisant sa marque.

En outre, il apparaît clairement que son activité de coopération internationale s’essouffle sur un spectre géographique trop large. L’école devrait se concentrer sur l’Europe, où elle obtient des résultats remarquables : en 2017, l’ENA a remporté l’appel d’offres visant à renforcer les compétences de l’administration bulgare en vue de la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne. En quelques mois, l’ENA a formé 300 futurs présidents de groupes de travail au Conseil. Un autre partenariat a été mis en place pour la présidence roumaine du premier semestre 2019. Nous sommes convaincues que l’ENA peut devenir l’institution de référence en Europe pour la formation des hauts potentiels et dirigeants publics ; cela sans augmentation des coûts. Nous ferons en ce sens plusieurs propositions dans notre rapport spécial.

La commission en vient à l’examen des amendements.

Article 39 et état B

La commission examine lamendement II-CF295 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Cet amendement propose d’augmenter les effectifs d’une des directions de Bercy chargées de lutter contre la fraude fiscale : la direction des grandes entreprises (DGE). Il fait notamment écho à de récentes révélations, dont celles du consortium international des journalistes d’investigation, publiées par le journal Le Monde.

On constate qu’au cours des dernières années le ministère des finances paie le plus lourd, en termes de réduction d’effectifs, il s’agit donc de créer 136 équivalents temps plein supplémentaires au profit unique du service de lutte contre la fraude fiscale de la DGE.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur spécial. Vous abordez la question de savoir si plus d’ETP sont nécessaires à la DGFiP, et en particulier à la DGE, pour être plus efficace dans la lutte contre la fraude fiscale. C’est un long débat.

J’apporterai deux réponses à cette question. Je ne reviendrai pas sur le projet de loi contre la fraude fiscale, que nous avons adopté récemment à la suite d’une commission mixte paritaire qui a abouti.

Le Fonds de transformation de l’action publique, que j’ai évoqué tout à l’heure, a choisi de financer un programme de ciblage de la fraude, sans pour autant en faire l’alpha et l’oméga de l’action de l’administration. Je vous invite à l’étudier de près, car il est extrêmement performant. Il va tenter de mêler au maximum les talents de la DGFiP, mais aussi ceux de la douane et de l’ensemble des administrations de Bercy, afin d’être plus efficace dans l’échange de données pour améliorer la lutte contre la fraude fiscale, notamment dans les grandes entreprises.

Il ne me semble pas opportun d’augmenter pour cela les crédits de la DGE. Je rappelle que les crédits de l’action que vous ciblez augmenteront de 3,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 3,8 millions d’euros en crédits de paiement, ce qui répond très concrètement à votre demande, et que le plafond d’emplois augmentera également de 41 ETP, soit de plus 3 %. Je n’ignore pas la baisse d’effectifs importante de 2 000 ETP au sein de la DGFiP, mais elle ne concerne pas l’action que vous mentionnez, bien au contraire. D’ailleurs, sans aucun esprit polémique je vous rappellerai l’histoire récente : entre 2013 et 2017, cette action a connu une diminution de 5 % de ses effectifs, soit 76 ETP de moins. Nous faisons donc l’inverse, en renforçant les emplois au sein de cette direction et dans cette lutte contre la fraude fiscale des grandes entreprises. Pour l’ensemble de ces raisons, mon avis est défavorable.

La commission rejette lamendement.

Elle se saisit ensuite de lamendement II-CF306 de Mme Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Cet amendement vise à augmenter les effectifs de la DGDDI de 150 ETP. Cette augmentation est rendue nécessaire par le Brexit, que pouvons d’ailleurs redouter de connaître dans sa version hard.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur spécial. Je crois que le Gouvernement répond à votre à votre attente, puisqu’il prévoit une augmentation de 350 ETP, ce qui est colossal, pour anticiper un Brexit, et même un Brexit hard, comme vous le dites. La DGDDI bénéficie d’ailleurs d’une augmentation de titre 2 essentiellement à travers cette action, ce qui répond tout à fait à votre préoccupation.

Je rappelle qu’entre 2016 et 2019, votre Gouvernement y avait également participé ; ce sont quasiment 1 000 créations nettes d’emplois pour la DGDDI qui ont été décidées. Il faut certes savoir le saluer, mais aussi dire que ces proportions sont importantes, et qu’il va falloir savoir former ces personnels, et distribuer sur le réseau. Je considère donc que ces 6 % d’effectifs supplémentaires par rapport à 2016 sont largement suffisants pour anticiper le Brexit ; mon avis est donc défavorable.

La commission rejette lamendement.

M. Daniel Labaronne. On peut tout d’abord se féliciter de constater une certaine forme de sincérisation budgétaire.

L’institution d’une dotation de prise en charge des apprentis pour chaque ministère, contribuera à simplifier et à rendre beaucoup plus lisible ce fléchage budgétaire.

On peut par ailleurs se féliciter que l’ENA s’oriente vers des activités externes qui lui permettent d’accroître ses ressources. À cet égard, je rappelle que le Conseil d’État tire une partie de ses ressources de missions qu’il mène à l’étranger ; cela constitue une source de revenus importante qui lui permet notamment de financer ses réparations et aménagements immobiliers. De son côté, le Conseil économique, social et environnemental augmente ses ressources grâce à des activités extérieures telles des manifestations publiques ou commerciales comme des défilés de mode.

S’agissant des effectifs de la DGFiP, je souhaite rappeler l’engagement très fort du ministre lors des débats relatifs à la loi sur la fraude fiscale, qui a constamment rappelé que les effectifs dévolus au contrôle ne diminueraient pas. Un débat s’est engagé sur la question de la police fiscale de Bercy et de la brigade nationale de répression de la fraude, au cours duquel il a été affirmé qu’il ne s’agissait pas de dépouiller la seconde au profit de la première. En effet, la lutte contre la fraude fiscale constitue une priorité du Gouvernement et de la majorité ; et par conséquent les effectifs devaient être à la hauteur de cette ambition.

Mme Véronique Louwagie. Je souhaite interroger les rapporteurs spéciaux sur quelques indicateurs figurant dans le projet annuel de performances, notamment ceux qui concernent le taux de déclaration de recouvrement spontané et l’efficacité de la lutte contre la fraude fiscale.

Nous disposons d’un sous-indicateur « Taux de paiement des amendes » qui évalue ce taux à 71 % pour 2018 et à 76 % pour 2019 et 2020. Je suis surprise par cette proportion faible, qui signifie qu’une amende sur quatre n’est pas recouvrée. Connaissez-vous le coût associé à ce faible taux de recouvrement ?

Un autre indicateur, relatif à l’efficacité de la lutte contre la fraude fiscale par la DGFiP en termes de droits et pénalités sur créances de contrôle fiscal, prévoit un taux net de recouvrement de 65 %, ce qui revient à dire qu’un tiers des recouvrements ne serait pas réalisé. Disposez-vous d’éléments que vous pourriez nous fournir, car je suis étonnée par ces chiffres ?

M. Vincent Ledoux. Je salue la qualité des rapports présentés ce soir, et confirme que nous voterons les crédits demandés. Toutefois, nous voulons donner l’alerte sur le fait que nous ne supprimons pas assez de postes ; on ne va pas assez loin, quand bien même l’orientation vers la dématérialisation et la simplification est bienvenue.

S’agissant des conséquences d’un Brexit « dur », je souhaite savoir comment se sont organisés les services de Bercy et surtout si le travail est conduit à l’échelon interministériel.

Par ailleurs, vous avez évoqué les postes de douaniers supplémentaires ; pour ma part, j’évoquerai les postes d’agents des services vétérinaires. Pour la région Hauts‑de‑France par exemple, il y aura un point noir puisque 2,5 ETP seulement sont prévus alors que 230 seraient nécessaires pour un contrôle sanitaire efficace, et ce sans compter les investissements à réaliser, le foncier à acquérir, etc. Comment vous êtes-vous organisés pour répondre à ces besoins ?

Ensuite, je suis naturellement favorable à la réforme de la rémunération des agents, qui rejoint la problématique de l’ENA évoquée par Mme Motin : cet établissement doit effectivement changer, car il est responsable de la formation du leadership. Je m’inquiète cependant pour le rôle international de l’ENA. Vous avez évoqué la stratégie consistant à recentrer l’École sur l’Europe, or je considère pour ma part qu’elle doit continuer de rayonner dans le monde – je pense notamment à l’Afrique subsaharienne, voire à l’Afrique tout court, que le Président de la République a consacrée comme le continent sur lequel la France porte toute sa vigilance. Il s’agit non seulement de former des étudiants étrangers, mais aussi d’affirmer notre présence sur place.

Je m’inquiète également d’apprendre que nous éprouvons des difficultés à recruter des agents à haute valeur ajoutée dans les grandes administrations, notamment au ministère des affaires étrangères pour lequel, fait inédit, seuls neuf candidats ont postulé.

Pensez-vous que les fonctionnaires soient motivés et mobilisés pour atteindre les objectifs de la réforme ?

M. Jean-Louis Bourlanges. Je voudrais faire une remarque très « ancien monde ». Ce que j’entends au sujet de l’ENA et du Conseil d’État est assez préoccupant, car l’École nationale d’administration est destinée à former de hauts fonctionnaires du service public français. Si ses élèves consacrent leur temps libre à autre chose, cela signifie qu’ils ne s’occupent pas de cette mission principale, celle pour laquelle ils sont rémunérés.

Il me semble que cela doit être sérieusement encadré, car les besoins de formation, notamment permanente, au sein de l’administration française sont suffisamment nombreux pour que ce temps libre soit utilisé autrement. Je comprends très bien le souci de former des leaders, particulièrement lorsque ce sont des fonctionnaires étrangers, car cela participe du rayonnement international et culturel de la France, ce que je trouve très positif. Toutefois, cela doit faire partie de la mission de service public ; il est tout à fait normal que l’ENA serve à former les fonctionnaires accroissant par-là le rayonnement et la réputation des méthodes administratives françaises, mais ce ne doit pas être quelque chose d’extérieur. Pour ma part, je me méfie toujours de ces systèmes dans lesquels on gagne de l’argent à l’extérieur de la mission confiée et où, en fin de compte, au nom de cet argent, on oublie la mission qui vous est confiée.

L’évolution de Sciences Po, qui, pour financer son patrimoine immobilier, diversifie au maximum ses activités en recevant des étudiants à l’étranger, en accueillant des personnes qui ne sont pas toujours de bonne qualité, mais qui sont de solides payeurs, donne l’exemple d’une déviation dont il faut se méfier. Je ne conteste pas le dynamisme de Sciences Po ni celui de l’ENA, je ne conteste pas non plus le souci d’ouverture du Conseil d’État, mais je crois que tout ceci doit être encadré politiquement en conservant à l’esprit les missions de service public, fussent-elles diversifiées.

Mme Sabine Rubin. Il a été dit qu’il nous tenait tous à cœur de diminuer la dépense publique. Je m’inscris en faux : ce n’est pas la préoccupation du groupe politique auquel j’appartiens.

Une baisse drastique des crédits de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines a été annoncée.

Je souhaite plus particulièrement m’intéresser à la baisse du programme 156 Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local, qui accuse une diminution de 1 862 emplois par rapport à 2018. Cela ne manquera pas d’affecter le service rendu aux petites et moyennes entreprises de proximité, l’appui aux collectivités territoriales ainsi que les trésoreries les plus proches du public.

De ce fait, j’établis un lien avec la mission Action et transformation publiques : nous avons bien compris que le service au public serait moins bien rendu. Vous annoncez de nombreuses mesures de dématérialisation, de recours à l’intelligence artificielle, etc., mais cela ne répond pas au besoin d’avoir en face de soi des êtres humains, des interlocuteurs vivants, ceux-là mêmes dont vous programmez la disparition dans nos quartiers.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur spécial. Je partage, chère collègue Louwagie, l’inquiétude que vous inspire ce taux de recouvrement des amendes, également évoqué par Charles de Courson, en commission élargie ou lors du printemps de l’évaluation. Le ministre avait dit qu’il fallait effectivement améliorer la situation. Las ! Force est de constater qu’elle s’est encore détériorée.

La DGFiP m’a apporté quelques explications. J’ai ainsi découvert, lors d’une audition, que les amendes infligées dans certains transports en commun, qui s’avèrent particulièrement difficiles à recouvrer, étaient intégrées dans le calcul de cet indicateur.

J’ai demandé à M. Bruno Parent, directeur général des finances publiques, de proposer des pistes d’amélioration concrètes. On ne peut se satisfaire de voir le taux de recouvrement passer de 76 % à 71 % entre 2017 et 2018. Ce qui est en jeu, c’est de l’argent public. Comment justifier des suppressions de postes et une réorganisation quand le recouvrement des amendes n’est pas satisfaisant ? Certes, le montant en jeu est faible par rapport aux crédits globaux du programme 156 mais je partage votre interrogation et j’attends des réponses.

M. Ledoux évoquait une insuffisante réduction du nombre d’emplois publics. Tout de même, à la DGFiP, la réduction du nombre d’ETP frise les 2 000 cette année, et il y en avait déjà 1 600 en moins l’an dernier. Si la DGFiP peut servir d’exemple, arrivera un moment où d’autres administrations devront suivre cet exemple ! Si nous voulons atteindre notre objectif d’une réduction de 50 000 du nombre de fonctionnaires à la fin du quinquennat, la DGFiP n’y suffira pas.

Quant au Brexit, il s’agit déjà de savoir où placer ces 350 ETP supplémentaires pour les douanes. L’objectif est plutôt ambitieux et ce sujet est cher à l’élu des Hauts-de-France que vous êtes, cher collègue, mais qu’en sera-t-il donc du déploiement de ces 350 ETP ? Sur quel site ? Avec quelles fonctions ? La question est d’autant plus difficile que nous ignorons encore quelles seront les conditions du Brexit. Nous avons fait le pari que 350 ETP seraient suffisants, mais c’est surtout au moment de la discussion du PLF 2020 que nous verrons si c’était le nombre de fonctionnaires supplémentaires adéquat.

La commission adopte les crédits de la mission Gestion des finances publiques et des ressources humaines, non modifiés.

Après larticle 77

La commission se saisit de lamendement II-CF308 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Il s’agit de demander au Gouvernement un rapport afin d’examiner si l’indemnité de résidence actuellement versée aux fonctionnaires est suffisante pour faire face au coût de la vie.

Mme Cendra Motin, rapporteure spéciale. Je vous remercie, chère collègue, de reprendre à votre compte un amendement que j’avais moi-même déposé l’an dernier. Je partage effectivement le constat : non seulement l’indemnité de résidence mais également le supplément familial de traitement sont déconnectés de la réalité du terrain et de la vie des agents, nonobstant la mission interministérielle qui prévoit notamment un certain nombre d’actions sociales, telle la mise à disposition de places de crèche. C’est un point qui a été abordé dans les négociations salariales par le ministre, pas plus tard qu’hier, et sur lequel il souhaite mener une réflexion dans le cadre de la négociation avec les partenaires sociaux d’une « remise à plat » bien plus large de la rémunération des agents des services publics – il prépare également l’avenir et le passage à un régime de retraite universel.

Je ne donnerai pas un avis favorable à cet amendement dans la mesure où le ministre a vraiment pris les choses en main et que ce sera un vrai sujet de négociation avec les partenaires sociaux, sitôt passées les échéances électorales de décembre.

Lamendement est retiré.

Article 39 et état B

 

[…]

 

Elle se saisit de lamendement II-CF277 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Il s’agit d’étendre à la fonction publique hospitalière le bénéfice de l’accord conclu le 18 juin dernier en matière de compte épargne-temps (CET), afin de monétiser un peu mieux les jours épargnés.

Mme Cendra Motin, rapporteure spéciale. Dans le cadre de la négociation évoquée, une avancée a effectivement été enregistrée, avec une revalorisation de 10 euros des jours monétisés et une baisse du seuil de déclenchement pour en bénéficier – à partir de quinze jours épargnés, et non plus de vingt. L’indemnité kilométrique versée aux agents et les barèmes de nuitée ont également été revus, parce qu’ils n’étaient même plus possible aux agents de venir suivre une formation à Paris. N’oublions pas non plus, avec le forfait mobilité durable, l’indemnité kilométrique vélo, car l’engagement avait été pris d’encourager l’usage du vélo. Ce sont quand même 79 millions d’euros qui sont déjà inscrits sur ce programme. Je comprends votre souhait d’en étendre le bénéfice à la fonction publique hospitalière, mais les fonctionnaires hospitaliers dépendent du budget de la sécurité sociale. C’est pourquoi je me vois obligée d’émettre un avis défavorable.

Mme Christine Pires Beaune. Est-il précisément prévu d’étendre cet accord à la fonction publique hospitalière dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale ?

Mme Cendra Motin, rapporteure spéciale. Je ne saurais vous répondre précisément sur le CET, mais des mesures sociales sont prévues dans le cadre du plan « Ma santé 2022 » pour accompagner les fonctionnaires hospitaliers. Je regarderai cela pour vous répondre plus précisément.

Lamendement est retiré.

La commission adopte les crédits de la mission Crédits non répartis, non modifiés.

 

*

*     *

 

 


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   PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LES RAPPORTEURES SPÉCIALES

Ministère de laction et des comptes publics

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics

M. Christophe Guerin-Linxe, chef de cabinet, conseiller parlementaire

Direction générale de ladministration et de la fonction publique (DGAFP)

M. Thierry Le Goff, directeur général

Mme Marie-Alixe Meier, adjointe à la cheffe du bureau des ressources humaines, des affaires financières et des moyens généraux

Direction interministérielle pour la transformation publique (DITP)

M. Thomas Cazenave, directeur

Universitaire

M. Luc Rouban, Cevipof

École nationale dadministration

À Strasbourg, le 5 juillet 2018 :

M. Patrick Gérard, directeur

M. Stéphane Escoubet, chef du service des ressources humaines et du pilotage financier

Mme Cheffi Brenner Adanlete, déléguée des élèves de la promotion Georges Clémenceau

M. François Charlottin, délégué des élèves de la promotion Georges Clémenceau

M. Mohamed Mansy, délégué des élèves étrangers du cycle international

M. Gabriel Revel, délégué des élèves étrangers du cycle international

M. Christophe Hemous, élève de la promotion Georges Clémenceau

M. Lionel Boyon, représentant syndical

M. Jean-Pierre Voyer, représentant syndical

Mme Nathalie Tournyol-du-Clos, directrice de la formation

Mme Michèle Bornert, chef du service du recrutement et des évaluations

Mme Cécile Boss, conseillère pédagogique

Mme Chloé Crowther-Alwyn, conseillère pédagogique

Mme Mariella Iunnissi, conseillère pédagogique

M. Jean-Baptiste Pointel, conseiller pédagogique

M. Aboubakry Sy, conseiller pédagogique

M. Jean-Claude Doillon, chef du service des sports

Mme Christelle Laux, chef du service des stages

M. Eric Simon, agent comptable

À Paris, site de lObservatoire

M. Pierre Thenard, directeur des affaires internationales

Mme Dauphinelle Clément, directrice des affaires européennes

 

 


([1]) Rapport annuel sur l’état de la fonction publique, septembre 2018 : effectifs physiques au 31 décembre 2016.

([2]) D’après un sondage Ifop de 2017, 69 % des Français se disent « attachés » aux services publics de proximité.

([3])  Secrétaire générale de Nexity.

([4])  Président du conseil d’administration de Safran.

([5])  Directeur de l’Institut d’études politiques de Paris.

([6])  https://www.fonction-publique.gouv.fr/files/files/statistiques/rapports_annuels/2017/Formation.pdf

([7])  On compte parmi les formations professionnelles les actions de formation continue, les préparations aux examens, concours ou essais, les congés de formation, les formations accordées dans le cadre de la validation des acquis de l’expérience, les bilans de compétences, les formations suivies dans le cadre des périodes de professionnalisation.

([8]) La formation statutaire regroupe la formation suivie avant titularisation pour donner aux personnes accédant à un emploi une formation professionnelle qui leur permettra d’exercer les fonctions correspondantes, ainsi que les actions de formation suivies dans le cadre de la formation obligatoire prévue par le statut des agents.  

([9]) DGAFP, La formation statutaire et professionnelle des agents des ministères en 2016, février 2018.

([10])  Article 11 du décret n° 2016‑1804 du 22 décembre 2016 relatif à la direction générale de l’administration  et de la fonction publique et à la politique de ressources humaines dans la fonction publique.

([11]) L’ENA est sous la double tutelle de la DGAFP et du secrétariat général du Gouvernement.

([12]) M. Gérard a été nommé par décret du 9 août 2017, en remplacement de Mme Loiseau, devenue ministre chargée des affaires européennes.

([13]) Revue de dépenses « Dépenses de formation initiale et continue des agents de l’État », Inspection générale des finances, octobre 2016

([14])  Loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel.

([15]) Circulaire du Premier ministre du 26 septembre 2017

([16]) Rapport annuel sur l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes dans la fonction publique, Août 2017.

([17]) Protocole d’accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique du 8 mars 2013.

([18])  Décret n° 2002-49 du 10 janvier 2002 relatif aux missions, à l'administration et au régime financier de l'École nationale d'administration.

([19]) dont le taux est passé de 33 % en 2006 à 74,6 % en 2013. En outre, les élèves ont intégré l’assiette en 2008.

([20]) Articles 21 et 26 du décret n° 2015-1449 du 9 novembre 2015 relatif aux conditions d’accès et aux formations à l’ENA.

([21]) L’ENA n’est pas habilitée à délivrer des diplômes.