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N° 1924

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 3 mai 2019

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L’ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI, APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE,

 

 

de transformation de la fonction publique
(n° 1802)
 

PAR Mme Émilie CHALAS
Députée

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 Voir les numéros :

Assemblée nationale : 1802, 1873, 1909 et 1924.

 


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SOMMAIRE

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  Pages

AVANT-PROPOS............................................ 11

SYNTHÈSE

I. PRÉSENTATION SYNTHÉTIQUE Du projet de loi initial

1. La modernisation des instances de dialogue social (titre Ier)

2. Le développement dune pluralité de leviers managériaux (titre II)

3. La transparence et léquité du cadre de gestion (titre III)

4. Lamélioration de la formation et la mobilité (titre IV)

5. Le renforcement de légalité professionnelle (titre V)

II. PRINCIPAUX APPORTS DE la COMMISSION DES LOIS

1. Apport n° 1 : étendre les attributions des futurs comités sociaux

2. Apport n° 2 : préciser la nouvelle organisation des commissions administratives paritaires

3. Apport n° 3 : encadrer louverture des recrutements contractuels

4. Apport n° 4 : renforcer les lignes directrices de gestion

5. Apport n° 5 : renforcer la culture déontologique dans la fonction publique

6. Apport n° 6 : garantir la transparence des rémunérations de la haute fonction publique et lencadrement des pratiques dans les autorités administratives indépendantes

7. Apport n° 7 : favoriser la mutualisation des missions des centres de gestion au niveau régional

8. Apport n° 8 : encadrer la rupture conventionnelle

9. Apport n° 9 : renforcer les garanties pour les fonctionnaires détachés doffice

10. Apport n° 10 : améliorer le dispositif de signalement

Commentaire des articles du projet de loi

TITRE Ier  Promouvoir un dialogue social plus stratégique et efficace dans le respect des garanties des agents publics

Article 1er  (art. 9 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983) Principe de participation des fonctionnaires

Article 2  (art. 9 ter de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 et art. 8 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984) Nouvelle faculté de saisine unique du Conseil commun de la fonction publique et représentation des plus grandes communes et de leurs établissements publics intercommunaux au sein du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale

Article 3 (art. 12, 13, 15, 15 bis [nouveau], 16 [abrogé], 17, 19, 21, 34 et 43 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, art. 7-1, 8, 12, 23, 32, 32-1 [nouveau], 33, 33-1, 33-2 [nouveau], 35 bis, 49, 57, 62, 88, 97, 100-1 et 120 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, art. 11, 25, 27 bis, 41, 49-2 et 104 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986, art. L. 3641-4, L. 3651-3, L. 5111-1, L. 5111-7, L. 5211-4-1, L. 5211-4-2 et L. 5219-12 du code général des collectivités territoriales, art. L. 6133-7, L. 6135-1, L. 6143-2-1, L. 6143-5, L. 6144-3, L. 6144-3-1, L. 6144-3-2, L. 6144-4, L. 6144-5, L. 6144-6-1 et L. 6414-2 du code de la santé publique et art. L. 14-10-2 et L. 315-13 du code de laction sociale et des familles) Fusion du comité technique et du comité dhygiène, de sécurité et des conditions de travail en une instance unique de concertation

Article 3 bis (art. L. 342-19 du code de la construction et de lhabitation) Création dun comité social dadministration au sein de lAgence nationale de contrôle du logement social

Article 3 ter (art. L. 1432-11 du code de la santé publique) Création dun comité dagence et des conditions de travail  au sein des agences régionales de santé

Article 3 quater (art. L. 4312-3-2 du code des transports) Création dun comité social dadministration central au sein de Voies navigables de France

Article 4 (art. 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, art. 13, 14 et 14 bis [nouveau] de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 28 et 30 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, art. 14, 20-1, 21, 45, 87 et 119 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 et art. L. 5211-4-1, L. 5211-4-2, L. 5212-33, L. 5214-28 et L. 5216-9 du code général des collectivités territoriales) Réorganisation des commissions administratives paritaires

Article 4 bis (art. L. 953-6 du code de léducation) Réorganisation des commissions paritaires détablissement dans lenseignement supérieur

Article 4 ter (art. L. 953-6 du code de léducation) Mise en place dune commission consultative paritaire unique dans la fonction publique territoriale

Article 4 quater (art. 33-2-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984) Organisation des instances représentatives de consultation en cas de fusion de collectivités ou détablissements publics locaux

Article 5 Habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance afin de favoriser la conclusion daccords négociés dans la fonction publique

TITRE II Transformer et simplifier la gestion des ressources humaines

Chapitre Ier Donner de nouvelles marges de manœuvre aux encadrants dans le recrutement de leurs collaborateurs

Section I Élargir le recours aux contrats

Article 6 (art. 32 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983) Mise en place dune procédure de recrutement dagents contractuels garantissant légal accès aux emplois publics

Article 7 (art. 3 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 47 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et art. 53 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986) Extension de la possibilité de recrutement contractuel sur les emplois de direction de la fonction publique

Article 8 (art. 7 bis [nouveau] de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et art. 9-4 [nouveau] de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986) Création dun contrat de projet

Article 9 (art. 3, 4, 6 et 6 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 et art. 16 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017) Extension du recrutement contractuel pour les emplois permanents de la fonction publique de lÉtat

Article 10 (art. 3-3, 25 et 104 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984) Extension du recrutement contractuel pour les emplois permanents de la fonction publique territoriale

Section II Mutations

Article 11 (art. 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984) Faciliter les mouvements de mutation des fonctionnaires de lÉtat

Chapitre II Reconnaissance de la performance professionnelle

Article 12 (art. 6, 6 bis, 6 ter A, 6 ter, 6 quinquies, 17 et 23 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, art. 55 et 55 bis [abrogé] de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 76 et 125 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et art. 65, 65-1 [abrogé] et 65-2 [abrogé] de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986) Suppression de la notation et généralisation de lentretien professionnel comme modalité dévaluation individuelle des fonctionnaires

Article 13 (art. 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, art. 78-1 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 et art. L. 6152-4 du code de la santé publique) Encadrement de la rémunération des agents contractuels et prime dintéressement collectif dans la fonction publique hospitalière

Article 14 (art. 18, 26 et 58 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 33-3 [nouveau], 39, 78-1 et 79 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et art. 25, 26 et 69 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986) Établissement des lignes directrices de gestion en matière de promotion et davancement

Chapitre III Discipline

Article 15 (art. 66 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de lÉtat, art. 89 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et art. 81 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) Harmoniser léchelle des sanctions entre les trois versants de la fonction publique

titre III

Simplifier le cadre de gestion des agents publics

Article 16 (art. 25 ter, 25 septies et 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) Renforcer la transparence et léquité des règles en matière de contrôle déontologique

Article 16 bis (art. 19, 20 et 23 de la loi n° 2013 907 du 11 octobre 2013  relative à la transparence de la vie publique) Fusion de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique et de la commission de déontologie de la fonction publique

Article 16 ter (art. 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) Publication annuelle des hautes rémunérations de la fonction publique

Article 16 quater (art. 16 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes) Prise en compte de la pension de retraité dans le calcul de la rémunération des dirigeants des autorités administratives indépendantes

Article 16 quinquies (art. 16 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes) Encadrement des rémunérations des dirigeants des autorités administratives indépendantes

Article 17 Habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance afin de simplifier et moderniser diverses dispositions relatives à la protection sociale des agents publics

Article 18 (art. 7-1 et 136 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale) Harmoniser le temps de travail dans la fonction publique territoriale

Article 19 (art. 12-4, 14 et 18-2 [nouveau] de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale) Fusion de centres de gestion et rapport annuel du centre national de la fonction publique territoriale au Parlement

Article 20 (art. 4, 6, 19 et 79 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) Simplification de certaines mesures relatives à la gestion des emplois de la fonction publique hospitalière

titre Iv

FAVORISER LA MOBILITé et accompagner les transitions professionnelles des agents publics

Chapitre Ier Formation, mobilité

Article 21 (art. 22 quater de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, art. 2–1 de la loi n° 84–594 du 12 juillet 1984 relative à la formation des agents de la fonction publique territoriale et complétant la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et art. L. 6323–3 du code du travail) Garantir la portabilité des droits liés au compte personnel de formation en cas de mobilité entre les secteurs publics et privé

Article 22 Habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance pour réformer la formation des agents publics

Article 22 bis (art. 22 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) Formation au management des fonctionnaires  lorsquils accèdent à des fonctions dencadrement

Article 22 ter Rapport du Gouvernement sur les freins à lapprentissage  dans la fonction publique

Article 23 (art. 42 et 46 de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de lÉtat) Diminuer le coût pour les employeurs territoriaux et hospitaliers de laccueil dun fonctionnaire de la fonction publique de lÉtat

Article 24 (art. 36 bis [nouveau] de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires  relatives à la fonction publique de lÉtat) Évolution des règles daffectation en position normale dactivité

Article 25 (art. 6 ter de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de lÉtat, art. 3–5 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et art. 9–6 [nouveau] de la loi n° 86–33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) Extension de la portabilité du CDI en inter-versants

Article 26 (art. 150 de la loi n° 2008–1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 et art. 244 [abrogé] de la loi n° 2018–1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019) Rupture conventionnelle pour les agents publics  et droit à lallocation de retour à lemploi

Article 26 bis Extension du dispositif de rupture conventionnelle collective aux agents de la Caisse des dépôts et consignation

Chapitre II curiser les transitions professionnelles  en cas de restructuration

Article 27 (art. 62 bis [nouveau] de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de lÉtat et art. 93 de la loi n° 86–33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) Création dun dispositif daccompagnement des agents de la fonction publique de lÉtat et de la fonction publique hospitalière dont lemploi est supprimé dans le cadre dune restructuration

Article 28 (art. 14 quater [nouveau] de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983  portant droits et obligations des fonctionnaires) Création dun mécanisme de détachement automatique pour les fonctionnaires concernés par lexternalisation de leur activité

titre V

renforcer légalité professionnelle

Chapitre Ier Égalité professionnelle et prévention des discriminations

Article 29 (art. 6 quater A et 6 septies [nouveau] de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, art. 26–2 [nouveau] de la loi 84–53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et art. 51 [abrogé] de la loi n° 2012–347 du 12 mars 2012 relative à laccès à lemploi titulaire et à lamélioration des conditions demploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique) Obligation de plans daction « égalité professionnelle » au sein des employeurs publics dici à 2020

Article 30 (art. 6 quater de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) Extension et renforcement du dispositif de nominations équilibrées sur les emplois de direction

Article 31 (art. 16 ter et 16 quater [nouveaux] de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, art. 20 bis, 26 bis et 58 bis [abrogés] de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de lÉtat, art. 42 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, art. 30–1 [abrogé] et 35 de la loi n° 86–33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière et art. 55 [abrogé] de la loi n° 2012–347 du 12 mars 2012 relative à laccès à lemploi titulaire et à lamélioration des conditions demploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique) Sécurisation des règles de composition équilibrée et de présidence alternée pour les jurys et comités de sélection

Article 32 (art. 115 de la loi n° 2017–1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 et art. 88 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires  relatives à la fonction publique territoriale) Inapplication du jour de carence pour les congés maladie liés à la grossesse et maintien des primes de la fonction publique territoriale en cas de congé maternité

Article 33 (art. 51, 54, 54–1 [nouveau] et 58 de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de lÉtat, art. 72, 75, 75–1 [nouveau] et 79 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, art. 64, 64–1 [nouveau] et 69 de la loi n° 86–33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) Maintien des droits à lavancement/promotion en cas de congé parental et de disponibilité de droit pour élever un enfant - Égal accès des femmes et des hommes dans les procédures davancement

Chapitre II Favoriser légalité professionnelle pour les travailleurs  en situation de handicap

Article 34 (art. 6 sexies de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, art. 27 de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de lÉtat, art. 35 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, art. 27 de la loi n° 86–33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) Développement du parcours professionnel des personnes en situation de handicap et amélioration de la prise en compte des aménagements nécessaires lors du déroulement des concours et examens

Article 35 Introduction à titre expérimental dun mécanisme dérogatoire de détachement pour les personnes en situation de handicap

Article 36 Entrées en vigueur différées

audition de M. olivier dussopt, secrétaire d’état auprès du ministre de l’action et des comptes publics

Réunion du mercredi 10 avril 2019 à 9 heures 30

Comptes rendus des débats

1. Première réunion du jeudi 2 mai 2019 à 9 heures 30 (discussion générale puis avant l’article premier à article 4)

TITRE Ier  Promouvoir un dialogue social plus stratÉgique et efficace dans le respect des garanties des agents publics

2. Deuxième réunion du jeudi 2 mai 2019 à 15 heures (article 4 à article 12)

TITRE II Transformer et simplifier la gestion  des ressources humaines

Chapitre Ier Donner de nouvelles marges de manœuvre aux encadrants dans le recrutement de leurs collaborateurs

Section I Élargir le recours aux contrats

3. Troisième réunion du jeudi 2 mai 2019 à 21 heures 15 (article 12 à après l’article 16)

Chapitre II Reconnaissance de la performance professionnelle

Chapitre III Discipline

titre III

1. Première réunion du vendredi 3 mai 2019 à 9 heures 30 (après l’article 16 à après l’article 22)

titre Iv

FAVORISER LA MOBILITé et accompagner les transitions professionnelles des agents publics

Chapitre Ier Formation, mobilité

1. Seconde réunion du vendredi 3 mai 2019 à à 15 heures (après l’article 22 à article 36)

Chapitre II Sécuriser les transitions professionnelles  en cas de restructuration

titre V

renforcer l’égalité professionnelle

Chapitre II Favoriser l’égalité professionnelle pour les travailleurs en situation de handicap

Personnes entendues

déplacements


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Mesdames, Messieurs,

 

Le projet de loi de transformation de la fonction publique, déposé le 27 mars 2019 sur le Bureau de l’Assemblée nationale, est une réforme attendue par l’ensemble de nos concitoyens et par les près de 5,5 millions de femmes et d’hommes qui travaillent chaque jour pour le service public. Son intitulé poursuit une ambition très claire : transformer la fonction publique. Il ne s’agit pas de renier ses fondements issus des lois statutaires de 1946 et de 1983 mais de mettre en œuvre les moyens indispensables à sa modernisation.

 

Cet impératif s’inscrit précisément dans un contexte où la place et le rôle qu’occupent nos services publics suscitent des interrogations : les nombreux échanges qui ont émaillé le grand débat national l’ont montré. Face aux multiples enjeux entourant l’évolution de la fonction publique, notre corpus juridique s’adapte de façon continue, principalement à l’échelle règlementaire mais aussi sur le plan législatif, comme en témoigne la récente loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.

 

En dépit de cette nécessaire mutabilité, qui correspond par ailleurs à l’un des principes cardinaux du service public, une exigence de réforme demeure, dans le but de rendre notre fonction publique à la fois plus ouverte et plus efficace. Œuvrer en faveur de l’intérêt général commande aussi bien de renforcer les droits et garanties dévolus aux agents que de permettre à l’ensemble des employeurs publics, dans les trois versants, de disposer de moyens d’action adaptés aux défis auxquels l’action publique du XXIè siècle est aujourd’hui confrontée. Ce projet de loi s’inscrit pleinement dans cette perspective.

 

Issu d’un cycle de concertations menées depuis plus d’un an entre le Gouvernement, les organisations syndicales et les représentants des employeurs, il présente cinq axes de transformation complémentaires.

 

Le titre Ier réforme les instances de concertation consultatives au sein des trois versants de la fonction publique. Il assouplit les procédures de saisine des conseils supérieurs à l’échelle nationale, en renforçant l’approche transversale qui caractérise le rôle du Conseil commun de la fonction publique. Parallèlement, une réforme des organes de proximité est engagée grâce à la fusion des comités techniques et des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail au sein d’une instance unique que constitueront les futurs comités sociaux. Les commissions administratives paritaires font également l’objet d’une vaste réorganisation en lien avec la mise en place des lignes directrices de gestion, dans un objectif de simplification et d’amélioration de la qualité du dialogue social.

 

Le titre II vise à développer une pluralité de leviers managériaux dont les employeurs publics vont pouvoir se saisir. Si l’élargissement des facultés de recrutement contractuel, y compris pour les emplois de direction, s’inscrit dans une dynamique d’ouverture légitime, ce mouvement s’accompagnera de la mise en place de plusieurs garanties importantes en matière de transparence et d’équité, conformément au principe d’égal accès aux emplois publics que protège l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789.

 

Le titre III vise à simplifier le cadre de gestion des agents publics. Il encourage pour cela la fusion des centres de gestion départementaux volontaires et déconcentre un certain nombre d’actes de gestion de la fonction publique hospitalière. Il renforce dans le même temps les obligations déontologiques de la fonction publique en confiant de nouveaux pouvoirs à la commission de déontologie.

 

Le titre IV a pour objet d’offrir de meilleures et plus larges perspectives professionnelles aux agents publics en favorisant leur mobilité au sein des trois versants. Il introduit en outre, à titre expérimental, la possibilité d’une rupture conventionnelle, qui n’existe actuellement que pour le secteur privé.

 

Le titre V vise à renforcer l’égalité professionnelle dans la fonction publique. Il transpose notamment plusieurs mesures de l’accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique du 30 novembre 2018. Ces mesures s’inscrivent dans le cadre des annonces du Président de la République relatives à la grande cause du quinquennat consacrée à l’égalité homme-femme. Le titre consacre par ailleurs un chapitre permettant de promouvoir les carrières au sein de la fonction publique des personnes en situation de handicap.

 

Les dispositions que contient ce projet de loi de transformation de la fonction publique ont l’ambition d’être utiles à la fois aux agents dans l’exercice de leurs missions, aux employeurs dans la responsabilité de gestion et d’encadrement qui leur incombe et aux citoyens dans leurs relations avec le service public.

 

Votre rapporteure souscrit pleinement à cette démarche. Dans le prolongement de son rapport pour avis sur le projet de loi de finances pour 2019 et à l’issue de la quarantaine d’auditions et de déplacements qu’elle a effectués, elle a formulé de nombreuses propositions destinées à renforcer la portée de ce texte, dans un souci d’équilibre et de justice. Présentées dans ce rapport, ces propositions permettent de concrétiser la triple ambition qui structure la réforme : libérer, protéger et unir, au service de l’intérêt général.


   SYNTHÈSE

I.   PRÉSENTATION SYNTHÉTIQUE Du projet de loi initial

1.   La modernisation des instances de dialogue social (titre Ier)

L’article 1er étend l’application du principe de participation des fonctionnaires à la définition des orientations relatives à la gestion des ressources humaines, en lien avec la réforme des instances consultatives dans les trois versants.

L’article 2 permet la saisine unique du Conseil commun de la fonction publique (CCFP) lorsqu’un projet de texte comporte à la fois des dispositions communes à au moins deux fonctions publiques et des dispositions applicables à seulement l’une des trois fonctions publiques, à la condition que celles-ci présentent un lien avec les dispositions communes. Il modifie également la composition du collège des employeurs territoriaux au sein du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) afin d’intégrer la représentation des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et de garantir celle des plus grandes communes.

L’article 3 vise à fusionner le comité technique et le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) au sein d’un comité social, celui-ci devenant la nouvelle instance unique de concertation au sein des trois versants.

L’article 4 tend à réorganiser les commissions administratives en généralisant, d’une part, leur structuration par catégories de fonctionnaires (A, B et C) et, d’autre part, en recentrant leurs attributions en matière d’examen des décisions individuelles.

L’article 5 habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour clarifier l’identité des personnes habilitées à négocier et les domaines sur lesquels peut porter la négociation, permettre l’articulation des accords nationaux avec des accords locaux et définir la portée juridique des accords majoritaires.

2.   Le développement dune pluralité de leviers managériaux (titre II)

L’article 6 précise que le recrutement d’agents contractuels s’effectue au terme d’une procédure permettant de garantir l’égal accès aux emplois publics, selon des modalités déterminées par voie réglementaire.

L’article 7 élargit les possibilités de recruter des agents contractuels afin d’occuper des emplois de direction au sein des trois versants de la fonction publique.

L’article 8 rend possible la conclusion de contrats de projet au sein des trois versants de la fonction publique afin de recruter un agent par un contrat à durée déterminée dont l’échéance correspond à la réalisation du projet ou de l’opération qui a justifié son recrutement.

L’article 9 étend les conditions de recrutement d’agents contractuels pour occuper des emplois permanents et assouplit les possibilités de procéder à des primo-recrutements à durée indéterminée dans la fonction publique de l’État.

L’article 10 vise principalement à étendre les possibilités de recrutement contractuel dans la fonction publique territoriale. À titre subsidiaire, il autorise les centres de gestion à mettre des agents contractuels à disposition des communes sur des emplois permanents et assouplit les conditions de recrutement de fonctionnaires sur des emplois à temps non complet.

L’article 11 tend à faciliter les mouvements de mutation des fonctionnaires de l’État en supprimant l’avis préalable des commissions administratives paritaires sur ces décisions et en octroyant à l’administration la faculté de définir des durées minimales et maximales d’occupation de certains emplois.

L’article 12 supprime le recours à la notation et généralise l’entretien professionnel en tant que modalité d’évaluation individuelle des fonctionnaires au sein des trois versants.

L’article 13 établit un cadre de rémunération des agents contractuels au sein des trois versants et précise le champ d’application et les modalités de la prime d’intéressement collectif susceptible d’être versée aux agents relevant de la fonction publique hospitalière.

L’article 14 prévoit que des lignes directrices de gestion sont établies par les autorités administratives compétentes au sein de chaque versant afin de définir les orientations générales en matière de promotion et d’avancement, après avis du comité social.

Larticle 15 harmonise l’échelle des sanctions entre les trois versants de la fonction publique afin de lui donner plus de cohérence. Il introduit notamment pour cela l’exclusion temporaire de trois jours dans les fonctions publiques d’État et hospitalière et la radiation du tableau d’avancement dans la fonction publique territoriale.

3.   La transparence et léquité du cadre de gestion (titre III)

L’article 16 modifie en profondeur les compétences et attributions de la commission de déontologie de la fonction publique. Il restreint tout d’abord le périmètre des agents publics soumis à son contrôle obligatoire pour le limiter aux agents présentant le plus de risques. En contrepartie il introduit une nouvelle procédure, qui instaure un filtre du référent déontologue avant une éventuelle saisie de la commission. L’article 16 instaure par ailleurs un contrôle de déontologie pour les personnes qui rejoignent le secteur public en provenance du secteur privé et comprend diverses dispositions visant à assurer une meilleure effectivité au contrôle exercé par la commission.

L’article 17 habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance afin de simplifier et moderniser diverses dispositions relatives à la protection sociale des agents publics.

L’article 18 vise à harmoniser la durée du travail dans la fonction publique territoriale en supprimant les régimes dérogatoires à la durée légale du travail de 1 607 heures.

L’article 19 a pour objet, d’une part, de permettre la fusion des centres de gestion de la fonction publique territoriale situés dans des départements limitrophes et, d’autre part, de prévoir la transmission au Parlement d’un rapport annuel du centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT).

L’article 20 comprend diverses mesures de simplification de la gestion des emplois de la fonction publique hospitalière.

4.   Lamélioration de la formation et la mobilité (titre IV)

L’article 21 vise à garantir la portabilité des droits acquis au titre du compte personnel de formation entre le secteur public et le secteur privé.

L’article 22 habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour faire évoluer le financement et l’organisation des établissements de formation des agents publics, renforcer les synergies entre la formation initiale et continue des agents de catégorie A et, enfin, améliorer la formation professionnelle des agents les moins qualifiés.

L’article 23 favorise la mobilité des fonctionnaires de l’État vers les versants territorial et hospitalier de la fonction publique en ramenant le coût de la contribution patronale pour pensions pesant sur l’employeur d’accueil au niveau de celui que ce dernier supporterait en employant un fonctionnaire de son versant.

L’article 24 définit les règles relatives à la position normale d’activité en les élevant au niveau législatif et en limitant cette mobilité dans le temps.

L’article 25 crée les conditions d’une portabilité du contrat à durée indéterminée entre les différents versants de la fonction publique.

L’article 26 étend – à titre expérimental – la rupture conventionnelle au secteur public. Il modifie en conséquence les règles relatives au régime de l’allocation de retour à l’emploi des agents publics.

L’article 27 dote les administrations des fonctions publiques étatique et hospitalière des outils leur permettant d’accompagner les fonctionnaires dont l’emploi est supprimé dans le cadre de la restructuration d’un service.

L’article 28 crée un mécanisme de détachement automatique pour les fonctionnaires concernés par l’externalisation de leur activité visant à faciliter les opérations de transfert d’activités vers une personne morale de droit privé ou de droit public gérant un service public industriel et commercial.

5.   Le renforcement de l’égalité professionnelle (titre V)

L’article 29 rend obligatoire pour certains employeurs publics l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan d’action relatif à l’égalité professionnelle et met en place un dispositif de signalement, de traitement et de suivi des violences sexuelles et sexistes auprès de chaque employeur public.

L’article 30 élargit le périmètre du dispositif de nominations équilibrées sur les emplois de direction en y intégrant de nouveaux emplois et employeurs publics. Il encourage les actions volontaristes engagées par les employeurs publics.

L’article 31 rassemble les règles de composition équilibrée des jurys et instances de sélection, actuellement fixées dans différents textes. Il permet par ailleurs une application périodique de l’alternance de la présidence des jurys.

L’article 32 exclut les congés de maladie pendant la grossesse du champ d’application du délai de carence et maintient, pour la fonction publique territoriale, le versement des primes et indemnités durant les congés de maternité, d’adoption, de paternité et d’accueil de l’enfant.

L’article 33 maintient les droits à l’avancement en cas de congé parental et de disponibilité de droit pour élever un enfant et garantit le respect de l’égalité entre les femmes et les hommes dans les procédures d’avancement.

L’article 34 encourage le développement du parcours professionnel des personnes en situation de handicap et facilite la mise en œuvre des aménagements en faveur des candidats handicapés lors du déroulement des épreuves des concours et examens.

L’article 35 prévoit, à titre expérimental, un mécanisme dérogatoire de détachement afin de permettre aux fonctionnaires en situation de handicap d’accéder aux emplois relevant d’un corps de niveau supérieur ou de catégorie supérieure, sous réserve d’avoir accompli une certaine durée de services publics.

L’article 36 prévoit l’entrée en vigueur différée de certaines dispositions du projet de loi ainsi que la mise en place de plusieurs mesures transitoires.

II.   PRINCIPAUX APPORTS DE la COMMISSION DES LOIS

1.   Apport n° 1 : étendre les attributions des futurs comités sociaux

La Commission a adopté deux amendements à l’article 3 tendant à élargir le champ d’intervention des comités sociaux.

D’une part, à l’initiative de la rapporteure et de M. Guillaume Gouffier-Cha (LaREM), la Commission a choisi d’inclure les enjeux relatifs à l’égalité professionnelle et à la lutte contre les discriminations dans le champ d’intervention des comités sociaux au sein des trois versants de la fonction publique. D’autre part, sur proposition de la rapporteure, la Commission a étendu les compétences des comités sociaux au télétravail ainsi qu’aux dispositifs de régulation des outils numériques.

Ces questions spécifiques apparaîtront ainsi explicitement parmi les domaines d’attribution de ces instances consultatives, afin de consacrer la prise en compte de ces enjeux dans le dialogue social.

2.   Apport n° 2 : préciser la nouvelle organisation des commissions administratives paritaires

À l’initiative de M. Paul Molac (Libertés et Territoires), la Commission a précisé, à l’article 4, que les représentants du personnel siégeant à la commission administrative paritaire (CAP) sont élus au scrutin proportionnel de liste. Elle a également adopté plusieurs articles additionnels notamment afin d’adapter la nouvelle organisation des CAP aux spécificités des établissements d’enseignement supérieur et de permettre la fusion des commissions consultatives paritaires dans la fonction publique territoriale.

3.   Apport n° 3 : encadrer louverture des recrutements contractuels

La Commission a adopté deux amendements identiques à l’article 6 présentés par la rapporteure et par M. Guillaume Gouffier-Cha (LaREM) afin de garantir la publicité des vacances et créations d’emplois susceptibles d’être pourvus par des agents contractuels, conformément à l’impératif de transparence.

À l’article 7, la Commission a adopté deux amendements identiques présentés par la rapporteure et par M. Guillaume Gouffier-Cha (LaREM) tendant à prévoir la définition des conditions de rémunération des agents contractuels occupant des emplois de direction par décret en Conseil d’État.

Sur proposition de la rapporteure, la Commission a également adopté un amendement prévoyant que les fonctions exercées par les directeurs généraux des services dans la fonction publique territoriale seront définies par décret en Conseil d’État, dans un objectif de reconnaissance et de clarification du rôle qu’occupent ces derniers au sein des collectivités.

La Commission a enfin adopté deux amendements de la rapporteure dans le but de préciser, d’une part, que les contrats des agents occupant des emplois de direction ne donnent lieu à aucune reconduction sous la forme d’un contrat à durée indéterminée, et, d’autre part, que les formations suivies par les agents contractuels occupant des emplois de direction dans le versant hospitalier porteront notamment sur les questions relatives à l’organisation et au fonctionnement des services publics.

À l’article 8, sur proposition de la rapporteure, la Commission a instauré la mise en place d’un délai de prévenance avant l’échéance du contrat de projet dont les modalités seront déterminées par décret en Conseil d’État. Il s’agit de garantir à l’agent recruté une visibilité sur le terme de sa mission, sur le modèle du droit applicable dans le secteur privé.

À l’article 10, la Commission a adopté un amendement de la rapporteure tendant à élargir les compétences que peuvent exercer les centres de gestion aux questions relatives à l’emploi et à la gestion des ressources humaines. Elle a également adopté trois amendements identiques présentés par la rapporteure, M. Éric Poulliat (LaREM) et Mme Marietta Karamanli (Socialistes et apparentés) visant à recentrer la liberté de recrutement contractuel sur tous les emplois aux EPCI regroupant moins de 15 000 habitants.

4.   Apport n° 4 : renforcer les lignes directrices de gestion

À l’initiative de la rapporteure, la Commission a adopté un amendement à l’article 14 tendant à renforcer la portée des lignes directrices de gestion établies par les autorités compétentes au sein des trois versants. Cet amendement consacre les lignes directrices de gestion en tant que véritable outil de pilotage pluriannuel des ressources humaines qui déclineront ainsi la stratégie de management des administrations, dans une perspective transversale. Par cohérence, l’amendement permet d’aligner la procédure d’élaboration applicable à la fonction publique de l’État sur celle des fonctions publiques territoriale et hospitalière qui prévoit l’avis préalable du comité social sur les lignes directrices de gestion édictées par l’autorité compétente.

Sur proposition de la rapporteure, la Commission a également modifié cet article afin de préciser que les modalités selon lesquelles seront consultés les comités sociaux territoriaux (CST) des collectivités affiliées au centre de gestion sur les lignes directrices de gestion établies en matière de promotion interne seront déterminées par décret en Conseil d’État.

5.   Apport n° 5 : renforcer la culture déontologique dans la fonction publique

La commission des Lois a adopté plusieurs amendements aux articles 16 et 16 bis, présentés par votre rapporteure ainsi que par M. Fabien Matras et les membres du groupe La République en Marche, qui procèdent à la fusion de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) et de la commission de déontologie de la fonction publique.

Cette fusion des deux instances, évoquée de longue date et soutenue par une large majorité des groupes politiques présents, doit permettre de renforcer l’indépendance et l’expertise de la Haute Autorité et contribuer à diffuser plus largement une culture de la déontologie dans l’ensemble de la fonction publique.

Pour soutenir la diffusion de cette culture déontologique, la Commission a adopté un amendement de votre rapporteure qui vise à rendre publics les avis rendus par la Haute Autorité au titre de ses fonctions de contrôle déontologique des agents publics, à condition que les agents aient effectivement pris le poste ayant fait l’objet du contrôle de compatibilité.

Elle a également adopté, à l’article 19, un amendement présenté par M. Éric Poulliat qui précise que le rapport annuel du CNFPT doit comprendre un bilan des formations délivrées en matière de déontologie et que les centres de gestion au niveau régional pourront remplir une mission d’appui aux référents déontologues des collectivités.

6.   Apport n° 6 : garantir la transparence des rémunérations de la haute fonction publique et lencadrement des pratiques dans les autorités administratives indépendantes

La Commission a introduit un nouvel article, l’article 16 ter, à l’initiative de la présidente de la commission des Lois Mme Yaël Braun-Pivet et des membres du groupe La République en Marche, soutenus par une large majorité des députés présents, qui prévoit une publication annuelle des hautes rémunérations de la fonction publique.

La Commission a également adopté deux amendements présentés par M. Guillaume Gouffier-Cha et les membres du groupe LaREM qui, d’une part limitent la rémunération des présidents d’autorités administratives indépendantes (AAI) en prenant en compte, dans le calcul de leur rémunération, leur éventuelle pension de retraité de la fonction publique (article 16 quater) et, d’autre part, instituent un dispositif d’encadrement de la rémunération des dirigeants et des membres des AAI (article 16 quinquies).

7.   Apport n° 7 : favoriser la mutualisation des missions des centres de gestion au niveau régional

La Commission a adopté, à l’article 19, trois amendements de votre rapporteure qui visent à encourager le mouvement de mutualisation des centres de gestion au niveau régional afin de renforcer leur niveau d’expertise :

– le premier crée un schéma régional ou interrégional de coordination, de mutualisation et de spécialisation en remplacement des actuelles chartes élaborées par les centres de gestion ;

– le deuxième vise à introduire l’obligation pour le centre de gestion coordonnateur au niveau régional de conventionner avec le CNFPT afin d’articuler leurs actions territoriales ;

– le troisième, enfin, complète la liste des missions qui peuvent être confiées aux centres de gestion au niveau régional. Les missions en question font appel à un niveau d’expertise assez élevé qui ne nécessite pas nécessairement une proximité départementale.

8.   Apport n° 8 : encadrer la rupture conventionnelle

La Commission a adopté deux amendements identiques de la rapporteure et des membres du groupe LaREM visant à mieux encadrer le dispositif prévu par l’article 26 en définissant la rupture conventionnelle, en affirmant les principes de la liberté des parties, de l’homologation des conventions de rupture et d’un montant minimum de l’indemnité.

9.   Apport n° 9 : renforcer les garanties pour les fonctionnaires détachés doffice

La Commission a adopté à l’article 28 un amendement des membres du groupe Libertés et territoires prévoyant que les fonctionnaires faisant l’objet d’un détachement d’office ne peuvent percevoir une rémunération inférieure à celle perçue, pour les mêmes fonctions, par les salariés de l’organisme d’accueil.

10.   Apport n° 10 : améliorer le dispositif de signalement

La Commission a adopté à l’article 29 un amendement présenté par les membres du groupe Socialistes et apparentés permettant d’ouvrir le dispositif de signalement des actes de violence, de harcèlement moral ou sexuel et des agissements sexistes aux témoins de ces actes.

Elle a également adopté un amendement soutenu par la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes visant à encourager les mutualisations des dispositifs de signalement.


Commentaire des articles du projet de loi

TITRE Ier
Promouvoir un dialogue social plus stratégique et efficace dans le respect des garanties des agents publics

Article 1er
(art. 9 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983)
Principe de participation des fonctionnaires

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article étend l’application du principe de participation des fonctionnaires à la définition des orientations relatives à la gestion des ressources humaines et en limite la portée en matière de décisions individuelles.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 9 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires a été modifié par la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique qui a précisé les objectifs que poursuit l’action sociale dont bénéficient les agents publics.

I.   L’état du droit

Le principe de participation découle du huitième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 qui prévoit que tout travailleur participe, par l’intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu’à la gestion des entreprises.

Les articles 20 et 21 de la loi n° 46-2294 du 17 octobre 1946 relative au statut général des fonctionnaires déterminent les compétences des instances de concertation au sein desquelles les représentants des fonctionnaires exercent des fonctions consultatives sur l’ensemble des questions afférentes à l’organisation des services et aux décisions individuelles relatives aux carrières. Si le premier statut général de la fonction publique ne garantit donc pas de façon explicite un « droit de participation » dévolu aux fonctionnaires, il fixe le cadre dans lequel ces derniers sont indirectement associés à l’élaboration et à la mise en œuvre des mesures qui les concernent.

La jurisprudence du Conseil constitutionnel ([1]) a finalement consacré l’applicabilité du principe de participation dans la fonction publique, rejoignant la position exprimée par le Conseil d’État dans sa décision rendue le 9 juillet 1986 ([2]).

L’article 9 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 concrétise le principe figurant au huitième alinéa du Préambule de 1946 en énonçant que les fonctionnaires participent par l’intermédiaire de leurs délégués siégeant dans des organismes consultatifs à l’organisation et au fonctionnement des services publics, à l’élaboration statutaire et à l’examen des décisions individuelles relatives à leur carrière.

Cette participation se décline à deux niveaux.

D’une part, elle s’exerce à l’échelle nationale au sein des trois conseils supérieurs propres à chaque versant ([3]) et du Conseil commun de la fonction publique ([4]). Ces instances réunissent des représentants des administrations et des fonctionnaires. Elles exercent principalement des missions consultatives en formulant des avis sur les projets de texte (projets de loi, d’ordonnance ou de décret) visant à modifier les dispositions prévues par chaque loi statutaire. Les conseils supérieurs de la fonction publique de l’État et de la fonction publique hospitalière sont également compétents pour examiner les recours formés en matière disciplinaire.

D’autre part, la participation s’applique dans les organes de concertation de proximité que constituent les diverses instances consultatives propres à chaque administration. Comprenant un nombre égal de représentants des fonctionnaires et de l’administration, les commissions administratives paritaires (CAP) ([5]) donnent obligatoirement leur avis sur les décisions individuelles affectant la carrière des fonctionnaires.

Les comités techniques (CT) sont majoritairement composés de représentants du personnel depuis la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 ayant mis fin au paritarisme au sein de ces organes consultatifs. Leur champ d’intervention inclut l’organisation des services, la gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences, l’élaboration des règles statutaires, les évolutions technologiques, les conditions de travail et les orientations relatives à la formation et à l’égalité professionnelle.

Les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) créés par la loi de 2010 précitée ([6]) sur le modèle des structures existantes dans le secteur privé sont majoritairement composés de représentants du personnel désignés par les syndicats. Ils sont consultés sur l’ensemble des questions relatives à la santé et à la sécurité au travail et disposent de plusieurs prérogatives d’intervention, telles que le droit d’accès et de visite des locaux.

De façon transversale, la participation s’exprime également dans le cadre des négociations sociales menées entre les employeurs publics et les syndicats représentatifs afin d’aboutir à la conclusion d’accords, dont la mise en œuvre requiert une transposition réglementaire ou législative.

Le caractère consultatif de ces organes de concertation relativise la portée du principe de participation des fonctionnaires, dans la mesure où les avis formulés par l’ensemble des instances représentatives ne lient pas l’administration.

II.   La réforme proposée

Le présent article complète l’article 9 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 afin d’étendre la participation des fonctionnaires à la définition des orientations en matière de politique de ressources humaines.

Concomitamment à la réforme des attributions des commissions administratives paritaires prévue par l’article 4 du projet de loi, il restreint, dans le même temps, le périmètre des décisions individuelles affectant la carrière des fonctionnaires qui sont examinées par les instances consultatives, leur compétence en la matière ne s’exerçant plus que pour les décisions mentionnées à l’article 4 précité et celles déterminées par décret en Conseil d’État.

De nature principielle, le présent article s’articule avec la modernisation de l’architecture et des attributions des instances consultatives prévue par les articles 3, 4, 11 et 14 du projet de loi. Il s’inscrit dans une perspective de pilotage transversal de la gestion des ressources humaines, répondant ainsi à l’objectif de définition d’une stratégie globale permettant d’appréhender efficacement l’ensemble des enjeux auxquels la fonction publique est aujourd’hui confrontée.

III.   La position de la commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

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*     *

Article 2
(art. 9 ter de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 et art. 8 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984)
Nouvelle faculté de saisine unique du Conseil commun de la fonction publique et représentation des plus grandes communes et de leurs établissements publics intercommunaux au sein du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise à permettre la saisine unique du Conseil commun de la fonction publique (CCFP) lorsqu’un projet de texte comporte à la fois des dispositions communes à au moins deux fonctions publiques et des dispositions applicables à seulement l’une des trois fonctions publiques, à la condition que celles-ci présentent un lien avec les dispositions communes.

Il modifie également la composition du collège des employeurs territoriaux au sein du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) afin d’intégrer la représentation des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et de garantir celle des plus grandes communes.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 9 ter de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 a été modifié par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires qui a notamment étendu la compétence du Conseil commun de la fonction publique aux projets de texte dont les dispositions concernent au moins deux fonctions publiques.

La loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions statutaires relatives à la fonction publique a modifié l’article 8 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 en supprimant le caractère paritaire de la composition du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, bien que celle-ci présente encore aujourd’hui un nombre égal de représentants des employeurs et des fonctionnaires selon les règles de répartition prévues par le décret n° 84-346 du 10 mai 1984.

       Modifications apportées par la Commission

À l’initiative de Mme Marietta Karamanli (Socialistes et apparentés), la Commission a adopté un amendement tendant à préciser que les établissements intercommunaux représentés au sein du CSFPT seront uniquement les EPCI à fiscalité propre.

I.   L’état du droit

1.   Le champ de compétence du CCFP

Le CCFP a été créé par la loi n° 2010-714 du 5 juillet 2010, à la suite des « accords de Bercy » signés le 2 juin 2008 par la majorité des syndicats représentatifs de la fonction publique et le ministre chargé de la fonction publique. Instance transversale du dialogue social inter-fonctions publiques, il s’inscrit dans une perspective d’unification des consultations habituellement menées au sein de chaque conseil supérieur propre aux trois versants.

Depuis la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016, le CCFP est structuré autour de deux collèges. D’une part, le collège des employeurs publics réunit 18 représentants des administrations territoriales, hospitalière et de l’État. D’autre part, le collège des représentants des organisations syndicales de fonctionnaires rassemble 30 membres, dont les sièges sont répartis selon les résultats des élections professionnelles organisées dans les trois versants. En outre, six membres de droit ([7]) assistent aux réunions du CCFP sans prendre part au vote. Les membres du CCFP disposent d’un mandat de quatre ans ([8]). Ils siègent en assemblée plénière présidée par le ministre de la fonction publique ou au sein des formations spécialisées du CCFP ([9]).

L’article 2 du décret n° 2012-148 du 30 janvier 2012 précise que la saisine pour avis du CCFP est obligatoire pour l’examen de projets de loi ou d’ordonnance modifiant la loi du 13 juillet 1983 ou dérogeant à celle-ci, ainsi que pour les projets de texte législatif ou réglementaire qui ont une incidence sur la situation statutaire des fonctionnaires, comportent une dimension indiciaire ou modifient les règles générales de recrutement et d’emploi des agents contractuels.

La loi du 20 avril 2016 a élargi le champ de la saisine du CCFP : ses attributions consultatives s’exercent désormais sur les textes précités qui contiennent des dispositions communes à au moins deux fonctions publiques ([10]). Dans cette hypothèse, le quatrième alinéa de l’article 9 ter de la loi du 13 juillet 1983 prévoit que l’avis consultatif rendu par le CCFP remplace celui des conseils supérieurs concernés.

Cependant, si le projet de texte comporte des dispositions spécifiques à l’un des versants, la consultation du conseil supérieur concerné demeure obligatoire, parallèlement à la consultation du CCFP, ce qui aboutit à la multiplication de saisines consultatives portant sur un même projet de texte.

2.   La composition du CSFPT

Créé par l’article 8 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, le CSFPT est l’instance de consultation de la fonction publique territoriale. Exerçant des compétences consultatives similaires à celles des conseils supérieurs de la fonction publique de l’État (CSFPE) et de la fonction publique hospitalière (CSFPH) ([11]), il est composé de 40 membres répartis en deux collèges égaux réunissant d’une part les représentants des fonctionnaires territoriaux et, d’autre part, les représentants des employeurs territoriaux ([12]).

Le décret n° 84-346 du 10 mai 1984 détermine les règles de répartition des sièges au sein des collèges, en fonction du poids démographique des collectivités et des effectifs d’agents publics dont elles disposent.

RÉPARTITION DES SIÈGES
AU SEIN DU COLLÈGE DES EMPLOYEURS TERRITORIAUX DU CSFPT

 

Nombre des représentants des collectivités territoriales

Nombre de fonctionnaires territoriaux

Nombre d’habitants

Communes de moins de 20 000 habitants

7

505 820

39 702 492

Communes de plus de 20 000 habitants

7

516 035

24 325 466

Départements

4

358 538

64 027 958

Régions

2

81 885

64 027 958

TOTAL

20

1 462 278

64 027 958

Source : étude dimpact, p. 23.

Les établissements publics de coopération intercommunale ne sont pas représentés. En outre, la distinction entre les communes dont la population est inférieure ou supérieure à 20 000 habitants ne permet pas nécessairement de garantir la représentation des plus grandes communes eu égard à la forte hétérogénéité caractérisant l’ensemble des communes de plus de 20 000 habitants.

II.   La réforme proposée

Le présent article étend le champ de compétence du CCFP et modifie les règles de répartition des sièges au sein du collège des employeurs territoriaux.

Premièrement, il prévoit que le CCFP peut être consulté sur les projets de texte qui comportent des dispositions communes à deux fonctions publiques ainsi que des dispositions propres à l’une des fonctions publiques, à la condition qu’elles présentent un lien avec les dispositions communes. Ainsi, l’avis rendu par le CCFP se substituerait à celui du conseil supérieur concerné par les dispositions spécifiques. Cette modification a pour objet de rationaliser le processus de consultation préalable à l’entrée en vigueur d’un texte réglementaire ou législatif, en renforçant le rôle du CCFP en tant qu’instance transversale du dialogue social au sein de la fonction publique. Le nombre de saisines consultatives redondantes devrait être restreint ([13]). La rédaction prend en compte l’avis du Conseil d’État.

Il était initialement prévu que la mise en œuvre de ce dispositif – qui demeure facultatif – supposait la saisine du CCFP par le président du conseil supérieur du versant concerné par les dispositions spécifiques. Cette condition de saisine aurait porté préjudice à l’effectivité du nouveau dispositif. De plus, le Conseil d’État estime que ce mécanisme aurait pu placer les présidents des conseils supérieurs en porte-à-faux vis-à-vis des membres qui les composent.

Le présent article prévoit explicitement que la nouvelle faculté de saisine consultative du CCFP ne peut être mise en œuvre qu’à la condition que les dispositions spécifiques à l’une ou l’autre des fonctions publiques ne soient pas dépourvues de lien avec les dispositions communes que comporte le projet de texte. En l’espèce, le ministre chargé de la fonction publique ([14]) pourra donc solliciter à cette fin le CCFP.

Deuxièmement, la composition du collège des employeurs territoriaux du CSFPT est modifiée afin d’intégrer en son sein les représentants des établissements publics intercommunaux, ce qui justifie la modification du quatrième alinéa de l’article 8 de la loi du 26 janvier 1984. La représentation des grandes communes au sein de ce collège relevant du seul niveau réglementaire, le décret n° 84-346 du 10 mai 1984 devra être modifié en ce sens.

RÉPARTITION MODIFIÉE DES SIÈGES
AU SEIN DU COLLÈGE DES EMPLOYEURS TERRITORIAUX DU CSFPT

 

Nombre des représentants des collectivités territoriales

Nombre de fonctionnaires territoriaux

Nombre d’habitants

Communes de moins de 20 000 habitants

7 (dont un représentant d’EPCI)

505 820

39 702 492

Communes de 20 000 à 100 000 habitants

4 (dont un représentant d’EPCI)

331 338

14 491 249

Communes de plus de 100 000 habitants

3 (dont un représentant d’EPCI)

184 697

9 834 217

Départements

4

358 538

64 027 958

Régions

2

81 885

64 027 958

TOTAL

20

1 462 278

64 027 958

Source : étude dimpact, p. 27.

Cette nouvelle composition a vocation à garantir une meilleure représentation des équilibres territoriaux existants. Elle entrera en vigueur après les élections municipales de mars 2020 qui modifieront la représentation des communes au sein du CSFPT.

III.   La position de la commission

La Commission a adopté un amendement de Mme Marietta Karamanli (Socialistes et apparentés) qui a recueilli un avis favorable de votre rapporteure et du Gouvernement tendant à préciser que la représentation des EPCI au sein du CSFPT ne concernera que les EPCI à fiscalité propre, c’est-à-dire les communautés de communes, les communautés d’agglomération, les communautés urbaines et les métropoles.

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Article 3
(art. 12, 13, 15, 15 bis [nouveau], 16 [abrogé], 17, 19, 21, 34 et 43 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, art. 7-1, 8, 12, 23, 32, 32-1 [nouveau], 33, 33-1, 33-2 [nouveau], 35 bis, 49, 57, 62, 88, 97, 100-1 et 120 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, art. 11, 25, 27 bis, 41, 49-2 et 104 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986, art. L. 3641-4, L. 3651-3, L. 5111-1, L. 5111-7, L. 5211-4-1, L. 5211-4-2 et L. 5219-12 du code général des collectivités territoriales, art. L. 6133-7, L. 6135-1, L. 6143-2-1, L. 6143-5, L. 6144-3, L. 6144-3-1, L. 6144-3-2, L. 6144-4, L. 6144-5, L. 6144-6-1 et L. 6414-2 du code de la santé publique et art. L. 14-10-2 et L. 315-13 du code de laction sociale et des familles)
Fusion du comité technique et du comité dhygiène, de sécurité et des conditions de travail en une instance unique de concertation

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise à fusionner le comité technique et le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) au sein d’un comité social, qui constituerait une nouvelle instance unique de concertation.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté a modifié l’article 15 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, l’article 33 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, l’article L. 6144-3 du code de la santé publique et l’article L. 315-13 du code de l’action sociale et des familles afin de prévoir l’information des comités techniques sur la mise en œuvre du service civique.

La loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires a complété l’article 33-1 de la loi du 26 janvier 1984 en prévoyant notamment que les collectivités territoriales et leurs établissements publics accordent à chacun des représentants des organisations syndicales au CHSCT un crédit de temps syndical nécessaire à l’exercice de son mandat.

       Modifications apportées par la Commission

Outre plusieurs amendements rédactionnels ou de coordination émanant de votre rapporteure, la Commission a adopté deux amendements identiques présentés par votre rapporteure et M. Guillaume Gouffier-Cha (LaREM) qui ont recueilli un avis favorable du Gouvernement tendant à élargir les attributions des comités sociaux aux enjeux et aux politiques d’égalité professionnelle et à la lutte contre les discriminations.

Sur proposition de votre rapporteure et avec l’avis de sagesse du Gouvernement, la Commission a adopté un amendement visant à inclure le télétravail et les dispositifs de régulation des outils numériques au sein du champ d’intervention des comités sociaux.

La Commission a également adopté quatre amendements du Gouvernement ayant recueilli l’avis favorable de la rapporteure afin de rendre possible la création d’un comité social commun propre à certains groupements de coopération sanitaire, de permettre la représentation des personnels médicaux au sein des formations spécialisées en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail, de maintenir les compétences dévolues aux actuels comités techniques universitaires dans le cadre d’une formation spécialisée intégrée au comité social d’administration ministériel de l’enseignement supérieur et de la recherche et de créer, au sein des commissions hygiène et sécurité des établissements publics locaux d’enseignement et de formation professionnelle agricole (EPLEFPA), une formation restreinte aux seuls représentants concernés par les problématiques relatives aux conditions de travail.

I.   L’état du droit

1.   Le comité technique

Présents dans chaque versant selon des règles de composition et d’attributions similaires, les comités techniques constituent la principale instance de consultation des personnels au sein de l’administration depuis le premier statut de 1946 ([15]).

Dans la fonction publique de l’État, les comités techniques sont structurés au niveau ministériel et dans chaque service déconcentré et établissement public. Dans la fonction publique territoriale, un comité technique est institué dans chaque collectivité ou établissement public employant au moins 50 agents ([16]). Dans la fonction publique hospitalière, un comité technique est organisé au sein de chaque établissement public social, médico-social ou hospitalier et dans chaque agence régionale de santé. 8 173 comités techniques sont ainsi dénombrés dans l’ensemble de la fonction publique ([17]).

La loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale a supprimé le caractère paritaire des comités techniques, afin de revaloriser le poids des organisations syndicales, dont les représentants élus au comité technique bénéficient de garanties renforcées dans le but d’exercer pleinement leurs prérogatives ([18]).

Les comités techniques sont donc aujourd’hui majoritairement ([19]) composés de représentants du personnel élus pour quatre ans ([20]). La jurisprudence du Conseil d’État précise que les membres élus au comité technique représentent l’ensemble des agents du service, qu’ils soient fonctionnaires ou agents contractuels ([21]). Le nombre de membres titulaires est déterminé selon l’effectif des agents représentés ([22]).

Ces instances exercent une mission consultative sur l’ensemble des questions dont la liste est déterminée par voie réglementaire dans la fonction publique de l’État ([23]) et dans la fonction publique hospitalière ([24]), et par l’article 33 de la loi n° 84-53 relative à la fonction publique territoriale. Le périmètre des attributions dévolues aux comités techniques est similaire entre les trois versants.

De manière générale, leur consultation par l’autorité administrative est obligatoire pour les questions ayant trait à l’organisation des administrations, des établissements et des services, à la gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences, aux règles statutaires et à l’échelonnement indiciaire, aux évolutions technologiques et aux méthodes de travail, aux grandes orientations en matière indemnitaire ainsi qu’à la formation et à l’égalité professionnelle.

Dans la fonction publique de l’État, les comités techniques sont informés et débattent du bilan social annuel de l’administration, de l’établissement ou du service auprès duquel ils ont été créés ([25]). Une disposition similaire s’applique dans la fonction publique territoriale ([26]). Dans le versant hospitalier, l’article R. 6144-40 du code de la santé publique précise que le comité technique est informé du contrat pluriannuel d’objectif et de moyens signé par l’établissement.

La jurisprudence du Conseil d’État souligne la nécessité pour l’autorité administrative de procéder à la consultation du comité technique lorsque celle-ci est requise, sous peine d’entacher la décision d’illégalité ([27]), à l’exception des cas où le vice de procédure n’a pas influé sur le sens de la décision prise ou n’a pas privé les requérants d’une garantie ([28]).

2.   Le CHSCT

L’article 23 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 impose le respect de conditions d’hygiène et de sécurité de nature à préserver la santé et l’intégrité physique des fonctionnaires. Cette disposition du statut général a justifié la création, au sein des trois versants ([29]), de comités d’hygiène et de sécurité (CHS) dont la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 a étendu le champ de compétence aux conditions de travail, justifiant ainsi la nouvelle dénomination de CHSCT ([30]). Le nombre de membres titulaires est déterminé selon l’effectif des agents représentés ([31]). Environ 7 000 CHSCT sont recensés dans l’ensemble de la fonction publique ([32]).

Contrairement à la fonction publique de l’État et à la fonction publique territoriale, les CHSCT au sein du versant hospitalier ne sont pas régis par les lois statutaires mais par le code du travail. Si l’ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 relative à la nouvelle organisation du dialogue social et économique dans l’entreprise et favorisant l’exercice et la valorisation des responsabilités syndicales a supprimé les CHSCT dans le secteur privé dans le cadre de la fusion des instances représentatives du personnel, son article 10 dispose que les articles L. 4611-1 à 4614-16 du code du travail, bien qu’abrogés, demeurent applicables en tant qu’elles s’appliquent aux établissements publics relevant de la fonction publique hospitalière.

La structuration des CHSCT dans la fonction publique répond à des règles similaires à celles applicables aux comités techniques. Dans la fonction publique de l’État, des CHSCT de réseau ou spéciaux peuvent être créés de manière facultative, en cas de regroupement d’agents dans un même immeuble ou de risques professionnels particuliers. Dans les collectivités territoriales employant moins de 50 agents, c’est le comité technique placé au sein du centre de gestion qui assure les missions du CHSCT. Une disposition identique s’applique dans la fonction publique hospitalière, lorsque l’établissement est doté de moins de 50 agents.

Les CHSCT sont composés de représentants de l’administration et de représentants désignés par les organisations syndicales ([33]), sur la base des résultats observés lors des élections aux comités techniques. Comme pour ces derniers, le nombre de membres titulaires est déterminé selon l’effectif des agents représentés ([34]).

Comme leurs homologues du secteur privé jusqu’à la réforme dite « Pénicaud » du 22 septembre 2017, les CHSCT ont pour mission de contribuer à la protection de la santé physique et mentale des agents et d’améliorer leurs conditions de travail, conformément aux prescriptions légales et réglementaires en la matière.

Les attributions des CHSCT se répartissent en deux catégories.

D’une part, comme pour les comités techniques, ils sont obligatoirement consultés par l’autorité administrative sur la mise en œuvre de mesures ou de textes entrant dans leur champ de compétence à l’instar des décisions d’aménagement de locaux ou de transformation de postes de travail, de l’introduction de nouvelles technologies, des mesures envisagées en faveur du maintien au travail des agents handicapés ou des rapports et programmes relatifs au bilan de santé et à la prévention des risques.

D’autre part, les CHSCT disposent de moyens d’action. Outre un pouvoir de proposition vis-à-vis de l’autorité administrative, ils détiennent un droit d’accès aux locaux administratifs et peuvent réaliser des enquêtes en cas d’accidents du travail ou de maladies professionnelles. Ils peuvent également solliciter l’autorité administrative afin de diligenter une expertise aux frais de celle-ci ([35]), en cas de risque grave ou de projet emportant des conséquences en matière de santé et de sécurité. Si elle s’oppose à cette demande, l’administration doit alors substantiellement motiver son refus. Dans la fonction publique hospitalière, la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation considère que ces prestations d’expertise ne sont pas soumises aux règles de la commande publique ([36]).

3.   L’articulation complexe des attributions du comité technique avec celles du CHSCT

Au-delà du caractère fragmentaire des instances de concertation du personnel au sein des trois versants, les champs d’intervention du comité technique et du CHSCT font apparaître une certaine incertitude. Plusieurs attributions sont partiellement communes aux deux instances, telles que l’organisation et le fonctionnement des services, les évolutions technologiques et des méthodes de travail ou les mesures contribuant à garantir l’égalité professionnelle, notamment vis-à-vis des femmes et des agents handicapés.

Ce relatif enchevêtrement contribue à complexifier le dialogue social de proximité. Il conduit notamment les autorités administratives à solliciter les consultations conjointes des deux instances sur un même projet ou une même mesure, afin de prévenir tout risque d’annulation contentieuse sur la base d’une irrégularité de procédure.

Le Conseil d’État a ainsi considéré que la consultation du CHSCT est simplement facultative lorsqu’une question relève du champ de compétence des deux instances ([37]). Cette position implique une forme de hiérarchie entre le CHSCT et le comité technique, dans la mesure où la consultation obligatoire du premier demeure subordonnée à l’incompétence du second.

II.   La réforme proposée

Sur le modèle de l’ordonnance du 22 septembre 2017 qui a fusionné, dans le secteur privé, les trois instances représentatives du personnel (comité d’entreprise, CHSCT, délégué du personnel) au sein d’un comité social et économique (CSE) ([38]), le présent article vise à fusionner le comité technique et le CHSCT au sein d’une instance de concertation unique : le comité social ([39]).

Dans chaque versant, le comité social exercera une compétence consultative sur quatre domaines majeurs :

– l’organisation et le fonctionnement des services ;

– les orientations stratégiques sur les politiques de ressources humaines ([40]) ;

– l’examen des lignes directrices de gestion prévues à l’article 14 du projet de loi en matière de mobilité, de promotion et de valorisation des parcours professionnels qui définiront notamment les règles applicables en matière d’avancement et de mutation ;

– les questions relatives à la protection de la santé physique et mentale, à l’hygiène, à la sécurité et aux conditions de travail.

Le comité social sera également compétent pour connaître des projets de statuts particuliers. De plus, un décret en Conseil d’État précisera les autres questions susceptibles de compléter la liste précitée ([41]). L’étude d’impact précise qu’il disposera des prérogatives d’action que détient l’actuel CHSCT (droit d’accès aux locaux, sollicitations d’expertises…).

Le regroupement des attributions dévolues au comité technique et au CHSCT poursuit un objectif de simplification qui se conjugue à la mise en œuvre d’une stratégie globale de gestion des ressources humaines sur laquelle se prononcera le comité social. Cette refonte organisationnelle des instances de consultation s’inscrit dans une volonté de « décloisonner » le dialogue social de proximité.

Les membres du comité social seront élus au scrutin proportionnel de liste ([42]). Le caractère électif assoit la légitimité des représentants du personnel, qui procède en l’état du droit applicable au CHSCT d’une simple désignation effectuée par les organisations syndicales représentatives. Un décret déterminera les règles de désignation dérogatoires applicables en cas d’insuffisance d’effectifs ou de mise en place de comités sociaux facultatifs.

Afin de garantir un niveau de protection des agents optimal, le présent article prévoit la mise en place de formations spécialisées en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail (FSSCT).

Les FSSCT seront obligatoires dans les collectivités territoriales ou leurs établissements employant plus de 300 agents ([43]), ainsi que dans les administrations de l’État et les établissements relevant de la fonction publique hospitalière au-delà d’un seuil d’effectifs déterminé par décret en Conseil d’État.

Elles seront facultatives pour les administrations et établissements présentant des effectifs inférieurs au seuil précité, dès lors que l’existence de risques professionnels particuliers le justifie. Les actuels CHSCT spéciaux ([44]) seront maintenus sous la forme de FSSCT.

Les FSSCT exerceront les attributions traditionnelles des CHSCT et disposeront des prérogatives d’action précitées, à l’exception des deux situations suivantes :

– les questions relatives à la santé, à la sécurité et aux conditions de travail abordées dans le cadre d’un projet de réorganisation de services seront uniquement examinées par le comité social, afin d’éviter la saisine concurrente de celui-ci et de la FSSCT ;

– un décret précisera les conditions de mise en œuvre d’un pouvoir d’évocation du président ou de la majorité des membres composant le comité social sur toute question relevant de la compétence de la FSSCT ([45]).

Les membres titulaires de la FSSCT seront désignés parmi les titulaires et suppléants du comité social, conformément au principe d’unicité du mandat ([46]).

À titre subsidiaire, le présent article étend les compétences dévolues au comité consultatif national régi par l’article 25 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant statut de la fonction publique hospitalière à la protection de la santé physique et mentale, à l’hygiène, à la sécurité et aux conditions de travail.

La réforme proposée entrera en vigueur en 2022, lors du renouvellement général des instances. Dans l’intervalle, la compétence unique des actuels comités techniques en matière de réorganisation et d’examen des lignes directrices de gestion prévues par l’article 14 du projet de loi constituera une mesure transitoire ([47]) préfigurant le futur cadre de concertation.

III.   La position de la commission

Outre une douzaine d’amendements de nature rédactionnelle ou de coordination présentés par la rapporteure, la Commission a adopté deux amendements tendant à élargir le champ d’intervention des comités sociaux.

D’une part, à l’initiative de la rapporteure et de M. Guillaume Gouffier-Cha (LaREM), un amendement a été adopté afin d’inclure les enjeux relatifs à l’égalité professionnelle et à la lutte contre les discriminations dans le champ d’intervention des comités sociaux au sein des trois versants de la fonction publique.

D’autre part, un amendement présenté par la rapporteure a été adopté afin d’étendre les compétences des comités sociaux au télétravail ainsi qu’aux dispositifs de régulation des outils numériques.

Ces questions spécifiques apparaîtront explicitement parmi les domaines d’attribution de ces instances consultatives, afin de consacrer la prise en compte de ces enjeux dans le dialogue social.

La Commission a également adopté quatre amendements du Gouvernement ayant recueilli un favorable de la rapporteure visant à :

– rendre possible la création d’un comité social commun propre à certains groupements de coopération sanitaire dont les effectifs seront inférieurs à un seuil fixé par décret en Conseil d’État ;

– autoriser les représentants des personnels médecins, pharmaciens et odontologistes, représentés au sein de la commission médicale d’établissement, à siéger au sein de la formation spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail, ainsi que d’y disposer d’une voix délibérative ;

– instituer une formation spécialisée exclusivement compétente pour élaborer ou modifier les règles statutaires relatives aux enseignants-chercheurs de statut universitaire et aux assistants de l’enseignement supérieur au sein du comité social d’administration du ministère en charge de l’enseignement supérieur et de la recherche ;

– créer, au sein des commissions hygiène et sécurité des établissements publics locaux d’enseignement et de formation professionnelle agricole (EPLEFPA), une formation restreinte aux seuls représentants concernés par les problématiques relatives aux conditions de travail.

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Article 3 bis
(art. L. 342-19 du code de la construction et de lhabitation)
Création dun comité social dadministration au sein de lAgence nationale de contrôle du logement social

Introduit par la Commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article tend à créer un comité social d’administration au sein de l’Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS), par coordination avec la réforme prévue par l’article 3 du présent projet de loi.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) a créé l’article L. 342-19 du code de la construction et de l’habitation qui définit les personnels et les instances de concertation que comprend l’ANCOLS.

       Modifications apportées par la Commission

Cet article est issu d’un amendement du Gouvernement ayant recueilli un avis favorable de la rapporteure.

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Créé par la loi ALUR du 24 mars 2014, l’ANCOLS est un établissement public administratif qui comprend un comité technique compétent pour les personnels de droit public, un comité d’entreprise pour les personnels de droit privé, et un CHSCT compétent pour l’ensemble des personnels de l’établissement.

Dans une logique de coordination avec les dispositions prévues par l’article 3, le présent article met en place un comité social d’administration unique exerçant les mêmes prérogatives que celles détenues par les comités sociaux d’administration mentionnés à l’article précité. En raison des spécificités statutaires caractérisant les personnels de l’ANCOLS, ce comité social comprendra deux commissions respectivement compétentes pour les questions relatives aux personnels de droit public et pour celles concernant les salariés.

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Article 3 ter
(art. L. 1432-11 du code de la santé publique)
Création dun comité dagence et des conditions de travail
au sein des agences régionales de santé

Introduit par la Commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article tend à créer un comité d’agence et des conditions de travail au sein des agences régionales de santé (ARS), par coordination avec la réforme prévue par l’article 3 du présent projet de loi.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a modifié l’article L. 1432-11 du code de la santé publique afin de relever à 50 % des suffrages exprimés le seuil de validité des accords collectifs signés par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives au sein des ARS.

       Modifications apportées par la Commission

Cet article est issu d’un amendement du Gouvernement ayant recueilli un avis favorable de la rapporteure.

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Les instances de concertation au sein des ARS sont organisées de façon spécifique. Elles regroupent ainsi un comité d’agence, un CHSCT, des délégués du personnel représentant les personnels salariés et des délégués syndicaux.

Poursuivant une logique de coordination similaire à celle de l’article 3 bis, le présent article met en place un comité d’agence et des conditions de travail procédant de la fusion du comité d’agence et du CHSCT. Une commission spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail est obligatoirement créée au sein des ARS dont les effectifs dépassent un seuil fixé par décret en Conseil d’État. En outre, le présent article crée un comité national de concertation ayant pour objet de débattre des questions communes à l’ensemble des agents des ARS, quel que soit leur statut.

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Article 3 quater
(art. L. 4312-3-2 du code des transports)
Création dun comité social dadministration central au sein de
Voies navigables de France

Introduit par la Commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article tend à créer un comité social d’administration central au sein de Voies navigables de France, par coordination avec la réforme prévue par l’article 3 du présent projet de loi.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article L. 4312-3-2 du code des transports a été modifié par l’ordonnance  n° 2017-1718 du 20 décembre 2017 visant à compléter et mettre en cohérence les dispositions prises en application de la loi n° 2017-1340 du 15 septembre 2017 d’habilitation à prendre par ordonnances les mesures pour le renforcement du dialogue social.

       Modifications apportées par la Commission

Cet article est issu d’un amendement du Gouvernement ayant recueilli un avis favorable de la rapporteure.

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Établissement public à caractère administratif, Voies navigables de France comprend un comité technique unique (CTU) composé de deux formations spécialisées représentant, d’une part, les agents de droit public, et, d’autre part, les salariés de droit privé, ainsi que d’une formation plénière issue des deux précédentes. Un CHSCT central est également institué. Cette organisation se décline à l’échelon local par le biais de CTU et de CHSCT de proximité.

Dans le même objectif de coordination, le présent article prévoit la création d’une instance unique, le comité social d’administration central (CSA), procédant de la fusion du CTU et du CHSCT central. Cette fusion s’applique aussi aux instances de proximité précitées. En outre, une commission des droits des salariés est créée au sein du CSA central reprenant les attributions dévolues aux anciens délégués du personnel.

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Article 4
(art. 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, art. 13, 14 et 14 bis [nouveau] de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 28 et 30 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, art. 14, 20-1, 21, 45, 87 et 119 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 et art. L. 5211-4-1, L. 5211-4-2, L. 5212-33, L. 5214-28 et L. 5216-9 du code général des collectivités territoriales)
Réorganisation des commissions administratives paritaires

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article tend à réorganiser les commissions administratives en généralisant, d’une part, leur structuration par catégories de fonctionnaires (A, B et C) et, d’autre part, en recentrant leurs attributions en matière d’examen des décisions individuelles.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires a modifié l’article 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 en garantissant l’information de la commission administrative paritaire des mesures prises par l’autorité administrative à l’encontre d’un fonctionnaire faisant l’objet de poursuites pénales.

       Modifications apportées par la Commission

À l’initiative de M. Paul Molac (Libertés et Territoires), la Commission a adopté un amendement tendant à préciser que les représentants du personnel siégeant à la commission administrative paritaire sont élus au scrutin proportionnel de liste.

La Commission a également adopté un amendement du Gouvernement visant à simplifier la composition des commissions administratives paritaires nationales des corps et emplois de direction dans la fonction publique hospitalière.

I.   L’état du droit

1.   La structure des CAP

Les commissions administratives paritaires (CAP) constituent les instances de représentation des personnels titulaires ([48]) de la fonction publique dans chaque administration. Elles formulent des avis sur les questions relatives aux carrières individuelles des fonctionnaires.

Conformément à leur dénomination, les CAP respectent le principe du paritarisme qui prévoit une représentation égale de l’administration et des fonctionnaires dont les représentants sont élus au scrutin de liste proportionnel ([49]). Leurs effectifs varient en fonction de seuils démographiques ([50]).

Elles sont structurées par corps au sein de la fonction publique de l’État ([51]), avec une représentation par grade ([52]), à l’échelle nationale ou déconcentrée. Dans le versant territorial, les CAP sont organisées par catégories de fonctionnaires (A, B et C) et segmentées en deux groupes hiérarchiques (de base et supérieur) ([53]). Elles sont obligatoirement placées auprès des centres de gestion pour les collectivités et établissements employant moins de 350 fonctionnaires. Dans le versant hospitalier, les CAP sont également organisées par catégories, éventuellement classés en groupes et sous-groupes ([54]). Elles sont placées auprès de l’établissement et à l’échelle départementale ou nationale.

2.   Les attributions des CAP

Les CAP se prononcent par des avis préalables sur les décisions individuelles affectant la carrière des fonctionnaires prises par l’administration. Leur champ de compétences, similaire entre chaque versant, correspond essentiellement aux domaines relevant de la gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences.

Les CAP examinent notamment les décisions de titularisation ou non-titularisation ([55]), de promotion interne ([56]), d’avancement de grade ([57]), de détachement ([58]), de disponibilité ([59]), de mutation ([60]) ou de reclassement ([61]). Elles se prononcent également sur les recours formés par les agents à l’encontre des comptes rendus d’entretiens d’évaluation ou des notes attribuées à ces derniers ([62]). Elles interviennent enfin en matière disciplinaire lorsqu’elles siègent en tant que conseil de discipline.

3.   Le fonctionnement des CAP demeure perfectible

L’avis rendu par la CAP ne lie pas l’autorité administrative. Cependant, si la décision finale de celle-ci ne se conforme pas à l’avis de la CAP, le Conseil supérieur de la fonction publique compétent peut être saisi aux fins de rendre un nouvel avis.

La consultation de la CAP est obligatoire. La jurisprudence administrative considère la décision finale prise par l’administration entachée d’illégalité en cas d’irrégularité de la procédure ([63]). La Cour administrative d’appel de Lyon a par exemple annulé une décision relative au refus de congés de formation professionnelle pour laquelle la CAP n’a pas été consultée ([64]).

Les membres siégeant à la CAP sont soumis à une obligation générale d’impartialité ([65]) dont découle le respect de principes déontologiques à l’instar de l’obligation incombant à un membre de se retirer dès lors qu’il se trouverait en concurrence avec un agent pour lequel la CAP doit étudier la situation ([66]). Un impératif de discrétion justifie également l’interdiction de publier les avis rendus par la CAP ([67]).

Le fonctionnement des CAP se heurte à plusieurs obstacles identifiés par le rapport rendu en 2003 par le Conseil d’État sur les perspectives de la fonction publique et le « rapport Pêcheur » remis au Premier ministre le 29 octobre 2013. Un constat partagé de rigidité excessive du cadre des CAP souligne les lourdeurs et le formalisme qui affectent leur fonctionnement. La préparation des réunions de CAP est particulièrement fastidieuse eu égard à l’étendue de leur champ d’intervention alors même que beaucoup de décisions individuelles soumises à leur examen ne présentent aucune difficulté. Cette situation contribue à ralentir la dynamique de gestion des ressources humaines au sein des administrations en raison d’une obligation d’examen systématique des décisions individuelles par les CAP susceptibles de provoquer des difficultés d’appariement.

En outre, les CAP dans le versant territorial peuvent être confrontées à des difficultés d’organisation tenant à leur répartition en groupe hiérarchique. Cette exigence impose aux organisations syndicales représentatives de présenter un nombre minimal de candidats appartenant au même groupe hiérarchique, ce qui n’est pas nécessairement envisageable compte tenu des effectifs disponibles.

De manière plus générale, le fonctionnement des CAP se caractérise souvent par une logique corporatiste qui repose presque exclusivement sur le principe d’avancement à l’ancienneté, au risque d’aboutir à une gestion des ressources humaines impersonnelle et uniformisatrice. Il apparaît ainsi difficile de véritablement prendre en compte les mérites propres de chaque fonctionnaire, en dépit de la jurisprudence du Conseil d’État qui rappelle que le critère de l’ancienneté prévaut uniquement pour départager des fonctionnaires de valeur équivalente ([68]).

II.   La réforme proposée

Le présent article engage une refonte des CAP, en modifiant leur architecture et leur champ de compétences ([69]).

Premièrement, l’organisation des CAP dans la fonction publique de l’État s’effectuera par catégories (A, B et C), sur le modèle existant des CAP dans les versants territorial et hospitalier. Cette mesure de simplification s’accompagne de la possibilité de créer plusieurs CAP au sein d’une même catégorie, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

Par ailleurs, au sein de la fonction publique de l’État et de la fonction publique territoriale, la mise en place d’une CAP unique regroupant des représentants de plusieurs catégories hiérarchiques est également prévue si l’insuffisance des effectifs le justifie.

De plus, la structuration des CAP en groupes hiérarchiques dans les versants territorial et hospitalier est supprimée. Ainsi, l’ensemble des fonctionnaires siégeant dans la même CAP pourront examiner toutes les questions individuelles soumises à l’avis de la commission, y compris lorsque celle-ci siège en formation disciplinaire, quel que soit le grade des membres de la CAP et du fonctionnaire dont la situation est étudiée ([70]). Cette disposition vise à simplifier les règles de composition des CAP qui imposent notamment aux organisations syndicales de présenter des candidats appartenant à différents groupes hiérarchiques.

Deuxièmement, les attributions des CAP sont recentrées sur certaines décisions individuelles. Si l’énumération de celles-ci par le présent article comporte des différences selon les trois versants en raison de l’ancrage réglementaire ou législatif de certaines décisions ([71]), les CAP resteront compétentes pour examiner les décisions relatives aux refus de titularisation, de licenciement en cas de refus de trois postes successifs pour le fonctionnaire mis en disponibilité en vue de sa réintégration et de refus de formation et de congé de formation professionnelle ou syndicale ([72]). Leurs prérogatives en matière disciplinaire sont maintenues ([73]) ainsi que leur compétence pour connaître des recours formés à l’encontre des comptes rendus d’évaluation professionnelle ([74]).

Les CAP n’examineront plus les décisions en matière d’avancement, de promotion, de mobilité ([75]) et de mutation ([76]). Cette évolution s’articule avec la création des comités sociaux qui formuleront un avis sur les lignes directrices de gestion prévues par l’article 14 du projet de loi dont l’objet est de fixer les critères à l’aune desquels l’administration prendra des décisions individuelles dans les domaines précités.

Conformément aux dispositions prévues par la circulaire du 23 avril 2012 relative aux modalités d’application du décret n° 2010-888 du 28 juillet 2010, le présent article prévoit que les fonctionnaires pourront bénéficier de l’assistance d’un conseiller syndical dans l’exercice des recours qu’ils engageront contre les décisions individuelles défavorables relatives à l’avancement, à la promotion et à la mutation.

III.   La position de la commission

La Commission a adopté un amendement de M. Paul Molac (Libertés et Territoires) ayant recueilli les avis favorables de la rapporteure et du Gouvernement tendant à préciser que les représentants du personnel siégeant à la commission administrative paritaire sont élus au scrutin proportionnel de liste.

La Commission a également adopté un amendement du Gouvernement ayant recueilli un avis favorable de la rapporteure visant à simplifier la composition des commissions administratives paritaires nationales des corps et emplois de direction dans la fonction publique hospitalière.

Il s’agit de prévoir la faculté laissée à l’organisation la plus représentative des établissements hospitaliers de proposer la désignation d’un ou plusieurs de ses représentants afin de siéger au sein des CAP précitées.

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Article 4 bis
(art. L. 953-6 du code de léducation)
Réorganisation des commissions paritaires détablissement dans lenseignement supérieur

Introduit par la Commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article prévoit la réorganisation des commissions paritaires d’établissement dans l’enseignement supérieur, par coordination avec la réforme prévue par l’article 3 du présent projet de loi.

       Modifications apportées par la Commission

Cet article est issu d’un amendement du Gouvernement ayant recueilli un avis favorable de la rapporteure.

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Créées par le décret n° 99-272 du 6 avril 1999, les commissions paritaires d’établissement représentent les instances consultatives de représentation des personnels exerçant leurs fonctions dans l’enseignement supérieur.

Le présent article tend à réorganiser ces commissions en recentrant leurs attributions consultatives, conformément à la réforme des CAP proposée par l’article 4, tout en prenant en compte les spécificités inhérentes aux établissements d’enseignement supérieur, à l’instar du maintien de la mention des corps en matière de désignation des représentants des ingénieurs et personnels techniques et administratifs de recherche et de formation.

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Article 4 ter
(art. L. 953-6 du code de léducation)
Mise en place dune commission consultative paritaire unique dans la fonction publique territoriale

Introduit par la Commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article prévoit la mise en place d’une commission consultative paritaire (CCP) unique au sein de chaque collectivité ou établissement public compétente à l’égard de l’ensemble des agents contractuels, sans distinction de catégorie.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 136 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 a été modifié par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.

       Modifications apportées par la Commission

Cet article est issu d’un amendement présenté par la rapporteure ayant recueilli un avis favorable du Gouvernement.

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Les commissions consultatives paritaires représentent les instances consultatives compétentes à l’égard des agents contractuels. Elles sont structurées par catégories d’agents dans le versant territorial, selon le décret n° 2016-1858 du 23 décembre 2016. Leur récente mise en place s’est heurtée à de nombreuses difficultés, notamment dues à l’absence de candidats.

Contrairement à la fonction publique de l’État et à la fonction publique hospitalière pour lesquelles les règles relatives aux CCP sont uniquement déterminées par décret, l’article 136 de la loi du 26 janvier 1984 établit le cadre des CCP dans la fonction publique territoriale.

Dans un objectif de simplification, le présent amendement prévoit l’instauration d’une CCP unique par collectivité ou établissement public, sans distinction de catégorie.

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Article 4 quater
(art. 33-2-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984)
Organisation des instances représentatives de consultation en cas de fusion de collectivités ou détablissements publics locaux

Introduit par la Commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article prévoit les modalités d’organisation des instances représentatives de consultation en cas de fusion de collectivités ou d’établissements publics locaux.

       Modifications apportées par la Commission

Cet article est issu d’un amendement présenté par le Gouvernement ayant recueilli un avis favorable de la rapporteure.

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En cas de fusion de collectivités ou d’établissements publics, aucune procédure n’encadre, en l’état actuel du droit, la réorganisation des instances de consultation du personnel concernées par la fusion précitée.

Le présent article précise que chacune de ces instances siège au sein de formations communes à la nouvelle collectivité ou au nouvel établissement, avant l’organisation de nouvelles élections au plus tard un an après la fusion ([77]). En outre, les droits syndicaux acquis au moment de la fusion demeurent maintenant jusqu’à la mise en place de ceux issus des nouvelles élections.

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Article 5
Habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance afin de favoriser la conclusion daccords négociés dans la fonction publique

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour clarifier l’identité des personnes habilitées à négocier et les domaines sur lesquels peut porter la négociation, permettre l’articulation des accords nationaux avec des accords locaux et définir la portée juridique des accords majoritaires.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires a modifié l’article 8 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 afin d’assouplir les modalités de calcul des règles de l’accord majoritaire. Seuls les suffrages exprimés en faveur des organisations syndicales habilitées à négocier et à signer un accord sont désormais pris en compte pour atteindre le seuil de validité fixé à 50 %.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté deux amendements rédactionnels présentés par la rapporteure.

I.   L’état du droit

Le dialogue social s’inscrit dans un cadre normatif international déterminé par la convention n° 98 de l’Organisation Internationale du Travail ratifiée par la France le 26 octobre 1951.

À l’échelle nationale, l’article 8 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 issu de la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique énonce les règles applicables aux accords négociés entre les organisations syndicales représentatives des fonctionnaires ([78]) et les représentants des employeurs publics au sein des trois versants. Ces dispositions assurent la transposition législative des « accords de Bercy » signés le 2 juin 2008 entre le ministre de la fonction publique et six syndicats représentatifs.

Outre les questions liées à la rémunération et au pouvoir d’achat des agents publics susceptibles d’être discutées au seul niveau national, le champ de la négociation inclut les conditions et l’organisation du travail, le déroulement des carrières et la promotion professionnelle, la formation professionnelle et continue, l’action sociale et la protection sociale complémentaire, l’hygiène, la sécurité et la santé au travail, l’insertion des handicapés et l’égalité entre les hommes et les femmes. La circulaire du 22 juin 2011 précise que cette liste n’est pas limitative.

L’article 8 bis prévoit qu’un accord national peut être décliné à l’échelle locale, à la condition que les négociations au niveau inférieur ne visent qu’à préciser ou améliorer le contenu des stipulations de l’accord national.

Il fixe également un critère de validité des accords. Ces derniers sont considérés comme valides dès lors qu’ils sont signés par une ou plusieurs organisations syndicales de fonctionnaires ayant recueilli au moins 50 % du nombre des voix à l’occasion des dernières élections professionnelles organisées au niveau auquel l’accord est négocié.

Cependant, si la validité des accords leur octroie une certaine force politique, elle n’emporte aucun effet juridique contraignant. Leur entrée en vigueur reste subordonnée à leur transposition législative ou réglementaire. C’est notamment ce que prévoit le titre V du présent projet de loi afin de mettre en œuvre les stipulations de l’accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique conclu le 30 novembre 2018. À l’échelle réglementaire, plusieurs décrets ont été publiés en 2016 afin de mettre en œuvre le protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR), bien que celui-ci ne soit pas valide selon le critère déterminé à l’article 8 bis.

Contrairement au droit du travail, l’absence de caractère contraignant des accords signés au sein de la fonction publique se justifie par la situation statutaire et réglementaire des fonctionnaires vis-à-vis de l’administration, aux termes de l’article 4 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 et conformément à la position constante du Conseil d’État ([79]). Un accord est donc dépourvu de portée juridique et ne constitue pas un acte faisant grief susceptible de recours devant le juge administratif ([80]).

Les stipulations d’un accord ne sont pas invocables dans le cadre d’un recours porté à la connaissance du tribunal administratif ([81]), que le requérant soit une organisation syndicale, un usager du service public ou un agent public ([82]). En outre, la méconnaissance des règles procédurales relatives à la négociation des accords n’emporte aucune conséquence sur la légalité des décrets pris au terme de celle-ci ([83]).

La transposition juridique des accords relève d’une décision discrétionnaire des autorités compétentes, ce qui fragilise leur véritable portée et peut expliquer le nombre relativement réduit d’accords conclus au sein de la fonction publique ([84]). Pour y remédier, plusieurs rapports ont avancé des préconisations tendant à prévoir la mise en place d’une procédure d’homologation des accords majoritaires ([85]) ou de donner force obligatoire aux accords portant sur des questions non-statutaires telles que la formation ou les conditions de travail ([86]).

II.   LA Mesure proposée

Sur le fondement de l’article 38 de la Constitution, l’article 5 du projet de loi habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance dans un délai de quinze mois à compter de l’entrée en vigueur du présent projet de loi afin de réformer le cadre du dialogue social au sein de la fonction publique. L’objectif est de favoriser la conclusion d’accords locaux et nationaux.

Premièrement, il s’agira de définir les autorités compétentes pour négocier le périmètre des questions susceptibles de faire l’objet de négociations.

Deuxièmement, les modalités d’articulation entre les négociations engagées à l’échelle nationale et locales seront précisées, ainsi que les conditions dans lesquelles les accords locaux peuvent être conclus en l’absence d’accords nationaux.

Troisièmement, l’ordonnance définira la portée juridique des accords majoritaires et les conditions requises afin qu’ils revêtent un caractère contraignant. Cette évolution, qui soulève de forts enjeux juridiques et questionne la dimension statutaire de la fonction publique, implique une réflexion approfondie quant aux seuils de validité et aux éventuelles procédures d’approbation ou d’homologation ([87]) susceptibles d’être mises en œuvre pour faciliter et sécuriser l’entrée en vigueur des accords.

Le délai de quinze mois précité permettra de réaliser les concertations nécessaires entre les organisations syndicales et les employeurs publics.

III.   La position de la commission

La Commission a adopté deux amendements rédactionnels de la rapporteure.

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TITRE II
Transformer et simplifier la gestion des ressources humaines

Chapitre Ier
Donner de nouvelles marges de manœuvre aux encadrants dans le recrutement de leurs collaborateurs

Section I
Élargir le recours aux contrats

Article 6
(art. 32 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983)
Mise en place dune procédure de recrutement dagents contractuels garantissant légal accès aux emplois publics

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article précise que le recrutement d’agents contractuels s’effectue au terme d’une procédure permettant de garantir l’égal accès aux emplois publics, selon des modalités déterminées par voie réglementaire.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 32 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 créé par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires et modifié par l’ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d’activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique précise que les agents contractuels sont recrutés après appréciation de leur capacité à exercer les fonctions à pourvoir.

L’ordonnance précitée a complété l’article 41 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 afin de publier les créations ou vacances d’emplois permanents dans les collectivités territoriales et leurs établissements dans un espace numérique commun à l’ensemble des administrations publiques.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté deux amendements identiques de la rapporteure et de M. Guillaume Gouffier-Cha (LaREM), qui ont recueilli un avis de sagesse du Gouvernement, tendant à inscrire le principe de la publicité de la vacance et de la création des emplois susceptibles d’être pourvus par des agents contractuels.

I.   L’état du droit

L’égal accès aux emplois publics est consacré par l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. La jurisprudence constitutionnelle garantit le respect de ce principe ([88]), qui s’applique quel que soit le mode de recrutement ([89]).

Le recrutement contractuel ([90]) d’agents publics est ainsi soumis à l’exigence d’égalité d’accès qui revêt une double dimension. D’une part, la procédure de recrutement doit faire l’objet de mesures de publicité, conformément à un objectif de transparence. D’autre part, les conditions d’accès aux emplois doivent préserver l’égalité de traitement entre les candidats.

1.   La publicité de la procédure de recrutement contractuel

La procédure de recrutement d’un agent contractuel doit respecter une condition de publicité propre à garantir la transparence des emplois publics à pourvoir. L’autorité administrative compétente est ainsi tenue d’assurer la publicité des emplois vacants ([91]). Le décret n° 2018-1351 du 28 décembre 2018 prévoit que la publicité des emplois vacants s’effectue sur un espace numérique commun aux trois versants intitulé « Place de l’emploi public », sur le modèle existant de la bourse interministérielle de l’emploi public (BIEP) réservée aux seules offres d’emplois dans la fonction publique de l’État. L’article 3 du décret dispose que l’offre d’emploi précise les principales caractéristiques de l’emploi vacant, à l’instar de la catégorie statutaire dont il relève, de l’organisme ou de la structure d’accueil, des références du métier et de sa localisation.

La jurisprudence administrative a progressivement encadré les règles relatives à la publicité du recrutement contractuel. S’il est acquis que le recrutement d’un agent contractuel afin de pourvoir un emploi permanent vacant implique une mesure de publicité ([92]), l’avis de vacance doit seulement indiquer que l’emploi est susceptible d’être pourvu par un tel recrutement et non circonscrire son occupation aux seuls agents contractuels ([93]). L’obligation de publicité de la vacance s’impose également lorsque le poste à pourvoir concerne un emploi occupé par un agent non titulaire dont le contrat arrive à échéance ([94]).

Cependant, la transparence de la procédure de recrutement admet plusieurs aménagements. L’article 2 du décret du 28 décembre 2018 précise que l’obligation de publicité des emplois vacants ne s’applique pas aux emplois supérieurs dont la nomination est laissée à la décision du Gouvernement ([95]), bien que celle-ci doive prendre en compte les capacités des candidats requises pour l’exercice des attributions afférentes à ces emplois ([96]). Par ailleurs, la jurisprudence récente du Conseil d’État ([97]) relative aux emplois fonctionnels dans la fonction publique territoriale tels que mentionnés à l’article 47 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 semble exempter le recrutement d’agents contractuels à ces postes de direction de l’obligation de publicité prévue par l’article 41 de la loi précitée.

En dépit de ces exceptions, le principe de publicité encadrant la procédure de recrutement contractuel vise à garantir l’égal accès à ces emplois grâce à l’information des candidats potentiels, dont l’égalité de traitement est assurée par le respect de conditions d’accès similaires à celles applicables au recrutement de fonctionnaires.

2.   Des conditions d’accès similaires à celles applicables au recrutement de fonctionnaires

Prévues par le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986, le décret n° 88-145 du 15 février 1988 et le décret n° 91-155 du 6 février 1991, les conditions requises pour être recruté en tant qu’agent contractuel au sein de la fonction publique sont similaires à celles qui prévalent en matière de recrutement de fonctionnaires, telle que la jouissance des droits civiques ([98]). La seule différence entre les deux régimes réside dans l’ouverture du recrutement contractuel aux ressortissants étrangers hors citoyens de l’Union européenne ([99]), à l’exception des emplois impliquant des prérogatives de puissance publique et, plus généralement, des nécessités du service ou de dispositions législatives particulières s’y opposant ([100]).

L’interdiction de discrimination en raison des opinions politiques ([101]), syndicales, religieuses ou philosophiques, ou fondées sur l’orientation sexuelle, l’ethnie ou la race s’applique quel que soit le mode de recrutement, conformément au principe d’égal accès aux emplois publics découlant de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

II.   LA Mesure proposée

Le présent article complète les dispositions prévues à l’article 32 de la loi du 13 juillet 1983 portant statut général de la fonction publique en précisant que le recrutement d’agents contractuels pour pourvoir des emplois permanents s’effectue dans le cadre d’une procédure permettant de garantir l’égal accès à ces emplois. Cette procédure n’est pas applicable aux recrutements relatifs aux emplois supérieurs dont la nomination est laissée à la décision du Gouvernement.

En outre, un décret en Conseil d’État précisera les modalités de la procédure, lesquelles pourront être adaptées selon le niveau hiérarchique et la nature des fonctions concernées, la taille de la collectivité territoriale ou de l’établissement public recruteur et la durée du contrat envisagée.

Le présent article rappelle que le principe d’égalité d’accès aux emplois publics s’applique au recrutement d’agents contractuels, dans un contexte où la part de ces derniers au sein des effectifs de la fonction publique est susceptible d’augmenter ([102]). Il contribue à renforcer le cadre procédural du recrutement contractuel dans l’ensemble de la fonction publique, conformément aux exigences de transparence et de non-discrimination qui fondent historiquement l’admission aux emplois publics.

En ce qui concerne les emplois de direction ouverts aux recrutements contractuels, l’article 7 du présent projet de loi prévoit qu’un décret propre à chaque versant définira les modalités de recrutement spécifiques à ces emplois.

III.   La position de la commission

La Commission a adopté deux amendements identiques présentés par la rapporteure et par M. Guillaume Gouffier-Cha (LaREM) qui ont recueilli un avis de sagesse du Gouvernement. Répondant à un objectif de transparence, ces amendements rappellent la nécessité de garantir la publicité des vacances et créations d’emplois susceptibles d’être pourvus par des agents contractuels, à l’exception des emplois laissés à la décision du Gouvernement tels que prévus par l’article 25 de la loi du 11 janvier 1984.

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Article 7
(art. 3 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 47 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et art. 53 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986)
Extension de la possibilité de recrutement contractuel
sur les emplois de direction de la fonction publique

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article élargit les possibilités de recruter des agents contractuels afin d’occuper des emplois de direction au sein des trois versants de la fonction publique.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 3 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 a été modifié par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires tendant à préciser que les agents occupant des emplois qui requièrent des qualifications professionnelles particulières indispensables à l’exercice de leurs missions spécifiques au sein d’établissements publics peuvent être recrutés par contrat à durée indéterminée.

       Modifications apportées par la Commission

Outre plusieurs amendements rédactionnels de la rapporteure, la Commission a adopté trois amendements de la rapporteure tendant à :

– préciser que les contrats des agents occupant des emplois de direction ne donnent pas droit à leur reconduction en contrat à durée indéterminée ;

– renvoyer à un décret en Conseil d’État le soin de définir les fonctions exercées par les directeurs généraux des services dans la fonction publique territoriale ;

– préciser le contenu des formations suivies par les agents contractuels occupant des emplois de direction dans la fonction publique hospitalière.

La Commission a également adopté deux amendements identiques de la rapporteure et de M. Guillaume Gouffier-Cha (LaREM) afin de prévoir la définition des conditions de rémunération des agents contractuels occupant des emplois de direction par décret en Conseil d’État.

I.   L’état du droit

L’article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 dispose que les emplois permanents de la fonction publique sont occupés par des fonctionnaires, sauf dérogation prévue par la loi. À ce titre, certains emplois de direction admettent des conditions de recrutement spécifique, par la voie du détachement ou du recrutement direct sous contrat, dans chaque versant.

De manière générale, les emplois de direction correspondent aux emplois caractérisés par un haut niveau de responsabilité conjugué à une forte proximité avec les décideurs politiques locaux ou nationaux, ce qui justifie notamment le respect de règles dérogatoires relatives à la cessation de ces fonctions. Le décret n° 2012-601 du 30 avril 2012 précise que la primo-nomination à ces emplois est soumise à l’obligation de respecter un quota minimal de 40 % de personnes de chaque sexe.

1.   Les emplois supérieurs laissés à la décision du Gouvernement dans la fonction publique de l’État

Parmi les emplois permanents de l’État susceptibles d’être pourvus par des agents contractuels, le 1° de l’article 3 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 mentionne les emplois supérieurs dont la nomination est laissée à la décision du Gouvernement, conformément à l’article 25 de la loi précitée. La jurisprudence administrative ne qualifie pas précisément cette catégorie d’emplois, appréhendés alternativement comme des emplois participant à la fonction gouvernementale ([103]) ou comme des fonctions placées au sommet de la hiérarchie sous la dépendance directe du Gouvernement ([104]).

S’ils n’embrassent pas l’ensemble des emplois de direction au sein de la fonction publique de l’État ([105]), le décret n° 85-779 du 24 juillet 1985 établit la liste non-limitative de ces emplois supérieurs, complétée par le décret n° 59-587 du 29 avril 1959 relatif aux nominations aux emplois de direction de certaines entreprises et établissements publics. Il s’agit principalement des fonctions de secrétaire général, directeur général et directeur d’administration centrale, délégué interministériel, ambassadeur, préfet et recteur d’académie. Sur ces 683 emplois, 37 sont aujourd’hui occupés par des agents contractuels ([106]). La nomination de non-titulaires à ces emplois n’entraîne pas leur titularisation ([107]), ces derniers demeurant révocables à tout moment.

2.   Les emplois fonctionnels de direction dans la fonction publique territoriale

La loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 énonce limitativement les emplois fonctionnels de direction susceptibles d’être pourvus, dans la fonction publique territoriale, par la voie d’un recrutement contractuel. L’article 47 désigne les emplois de directeur général des services des départements et des régions ([108]), de directeur général des services et de directeur général des services techniques de communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre de plus de 80 000 habitants, de directeur général adjoint des services des communes et des EPCI à fiscalité propre de plus de 150 000 habitants et de directeur général des établissements publics locaux dont les caractéristiques et l’importance le justifient ([109]).

Le décret n° 88-545 du 6 mai 1988 précise que les personnes recrutées sous contrat sur ces emplois doivent être titulaires d’un diplôme sanctionnant une formation d’une durée totale au moins égale à cinq années d’études supérieures après le baccalauréat ou avoir exercé pendant au moins cinq ans des fonctions de catégorie A dans un établissement ou une administration publique.

En dessous de ces seuils, ces emplois ne peuvent être pourvus que par un fonctionnaire dans le cadre de ses fonctions et de son grade. Le recrutement contractuel sur ces emplois fonctionnels n’entraîne pas la titularisation dans la fonction publique territoriale, ni la conclusion d’un contrat à durée indéterminée ([110]). Le champ d’application de l’article 47 concerne 1522 emplois, dont 239 sont aujourd’hui occupés par des agents contractuels ([111]).

3.   Les emplois fonctionnels de chefs d’établissement au sein de la fonction publique hospitalière

L’article 3 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 prévoit que des agents contractuels peuvent être recrutés pour occuper les emplois de directeur des établissements sanitaires, sociaux ou médicaux sociaux dont la liste figure à l’article 2 de la loi précitée. Le décret n° 2012-562 du 24 avril 2012 détermine la liste des emplois fonctionnels de direction au sein de la fonction publique hospitalière. Sur les 284 emplois ouverts aux non-titulaires, 37 sont aujourd’hui occupés par des agents contractuels ([112]).

Leur nomination sur ces emplois, révocable à tout moment, n’entraîne pas leur titularisation. L’article 3 prévoit que ces personnes suivent une formation à l’École des hautes études en santé publique ou dans tout autre organisme adapté afin de les préparer à leurs nouvelles fonctions.

II.   LA Mesure proposée

Dans une perspective de diversification des profils des cadres dirigeants de la fonction publique, le présent article étend le champ des recrutements sous contrat concernant les emplois de direction au sein des trois versants. À l’exception des emplois mentionnés précédemment ([113]), la plupart des emplois de direction dans la fonction publique demeurent aujourd’hui réservés aux seuls titulaires.

Il est donc proposé de modifier les trois lois statuaires afin d’élargir la faculté laissée aux employeurs publics de recruter des non-titulaires sur les emplois de direction. Pour chaque versant, un décret en Conseil d’État précisera les modalités d’application de ces dispositions, en fixant notamment le cadre procédural permettant de garantir le principe d’égal accès aux emplois publics, conformément à l’article 6 du projet de loi.

Dans la fonction publique de l’État, l’ensemble des emplois de direction ([114]) pourront être pourvus par des agents contractuels. Près de 3 800 emplois seraient ainsi concernés ([115]), dont 1 800 emplois fonctionnels interministériels ([116]) et 2 000 emplois de direction ministériels ([117]). Le décret précité précisera la liste des emplois ouverts au recrutement contractuel.

Dans la fonction publique territoriale, le présent article abaisse les seuils ([118]) actuellement prévus par l’article 47 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 au-delà desquels le recrutement contractuel sur des emplois fonctionnels est autorisé. Désormais, un seuil de 40 000 habitants serait établi de façon uniforme pour le recrutement contractuel de directeurs généraux des services, directeurs généraux des services techniques et directeurs généraux adjoints dans les communes et EPCI à fiscalité propre. Le nombre d’emplois fonctionnels ainsi ouverts aux non-titulaires s’élèverait ainsi à 2 700 ([119]), et concernerait au moins 125 communes et 154 EPCI ([120]).

Dans la fonction publique hospitalière, le recrutement contractuel sera ouvert aux emplois visés au deuxième alinéa de l’article 4 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986, que le présent article regroupe sous la nouvelle dénomination « d’emplois supérieurs hospitaliers » correspondant aux fonctions de directeur général adjoint, directeur de service central et adjoint au directeur d’hôpital. Cet élargissement porterait à 365 ([121]) le nombre d’emplois susceptibles d’être pourvus par des agents contractuels dans la fonction publique hospitalière ([122]).

III.   La position de la commission

Outre plusieurs amendements rédactionnels, la Commission a adopté deux amendements identiques présentés par la rapporteure et par M. Guillaume Gouffier-Cha (LaREM) qui ont recueilli un avis de sagesse du Gouvernement, tendant à prévoir la définition des conditions de rémunération des agents contractuels occupant des emplois de direction par décret en Conseil d’État.

Contre l’avis du Gouvernement, la Commission a adopté un amendement de la rapporteure qui prévoit que les fonctions exercées par les directeurs généraux des services dans la fonction publique territoriale seront définies par décret en Conseil d’État, dans un objectif de reconnaissance et de clarification du rôle qu’occupent ces derniers au sein des collectivités.

De plus, la Commission a adopté deux amendements de la rapporteure ayant respectivement recueilli un avis favorable et un avis de sagesse du Gouvernement, précisant, d’une part, que les contrats des agents occupant des emplois de direction ne donnent lieu à aucune reconduction sous la forme d’un contrat à durée indéterminée, et, d’autre part, que les formations suivies par les agents contractuels occupant des emplois de direction dans le versant hospitalier porteront notamment sur les questions relatives à l’organisation et au fonctionnement des services publics.

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Article 8
(art. 7 bis [nouveau] de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et art. 9-4 [nouveau] de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986)
Création dun contrat de projet

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article rend possible la conclusion de contrats de projet au sein des trois versants de la fonction publique afin de recruter un agent par un contrat à durée déterminée dont l’échéance correspond à la réalisation du projet ou de l’opération qui a justifié son recrutement.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises a complété l’article L. 1242-2 du code du travail en créant une nouvelle catégorie de contrat à durée déterminée afin de recruter des ingénieurs ou des cadres en vue de la réalisation d’une mission définie.

       Modifications apportées par la Commission

Outre deux amendements rédactionnels et de précision, la Commission a adopté un amendement de la rapporteure tendant à prévoir la mise en place d’un délai de prévenance avant l’échéance du contrat de projet.

I.   L’état du droit

Dans la fonction publique, le régime applicable aux contrats à durée déterminée ne prévoit pas la possibilité de conclure des « contrats de projets » tels qu’ils existent dans le secteur privé, conformément au 6° de l’article L. 1242-2 du code du travail.

1.   Le régime des contrats à durée déterminée dans la fonction publique

Depuis la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique, les contrats à durée déterminée conclus dans la fonction publique ne peuvent excéder trois ans. Ils sont renouvelables une fois. Au-delà de six ans, les agents contractuels disposent obligatoirement d’un contrat à durée indéterminée ([123]). Les employeurs publics peuvent avoir recours à des agents contractuels afin de satisfaire des besoins permanents ou temporaires, dans les cas limitativement prévus par chaque loi statutaire ([124]) dérogeant au principe posé par l’article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 selon lequel les emplois permanents sont occupés par des fonctionnaires.

Les décrets n° 86-83 du 17 janvier 1986, n° 88-145 du 15 février 1988 et n° 91-155 du 6 février 1991 déterminent les règles applicables à la situation des agents contractuels au sein des trois versants. Recrutés pour une durée inférieure à un an et destinés à l’exécution d’un acte déterminé ou d’une mission ponctuelle ([125]) les vacataires ne relèvent pas de ce régime et ne peuvent donc pas être assimilés à des agents contractuels ([126]).

Ces derniers ne bénéficient d’aucun droit au renouvellement de leur contrat ([127]). L’absence de renouvellement du contrat n’équivaut pas à un licenciement ([128]). En cas de licenciement avant le terme du contrat, une indemnité est versée à l’agent ([129]), sauf si le licenciement intervient à titre de sanction disciplinaire ([130]). À l’expiration de son terme, aucune indemnité de fin de contrat ou prime de précarité ([131]) n’est versée aux agents dont le contrat n’est pas renouvelé, à l’exception des praticiens hospitaliers contractuels ([132]). L’employeur public est tenu d’avertir l’agent du non-renouvellement de son contrat en respectant un délai de préavis adapté à la durée de celui-ci ([133]).

Si la décision de ne pas renouveler le contrat ne doit pas être motivée par l’employeur, la jurisprudence administrative considère que le non-renouvellement ne peut être uniquement fondé sur le fait que le contrat arrive à échéance ([134]). En outre, l’agent contractuel non renouvelé peut obtenir le versement d’une indemnité si l’administration n’a pas tenu sa promesse de le maintenir en fonction ([135]). La responsabilité de l’administration peut également être engagée si le non-renouvellement du contrat repose sur des motifs étrangers à l’intérêt du service ([136]).

Ainsi, les contrats à durée déterminée conclus dans la fonction publique ne sont pas adaptés à la réalisation d’une mission précise, contrairement aux contrats à objet défini dans le secteur privé généralisés par la réforme du 20 décembre 2014.

2.   L’existence d’un contrat à durée déterminée à objet défini dans le secteur privé

Expérimentés par la loi n° 2008-596 du 28 juin 2008 portant modernisation du marché du travail, les contrats à durée déterminée et à objet défini ont été généralisés par la loi n° 2014-1545 du 20 décembre 2014 relatif à la simplification de la vie des entreprises, créant ainsi une nouvelle catégorie de contrat à durée déterminée.

Le 6° de l’article L. 1242-2 du code du travail prévoit le recours à un contrat en vue de la réalisation d’un objet défini réservé aux cadres et ingénieurs, sous réserve des conditions déterminées par les accords de branche, ou à défaut les accords d’entreprise. Un tel contrat est conclu pour une durée comprise entre dix-huit et trente-six mois et ne peut pas être renouvelé ([137]).

L’article L. 1242-12-1 précise que le contrat comporte une clause descriptive du projet et sa durée prévisible, l’événement ou le résultat objectif déterminant la fin de la relation contractuelle, le délai de prévenance ([138]) de l’arrivée au terme du contrat. Il prévoit également une possibilité de rupture à la date anniversaire de la conclusion du contrat, par l’une ou l’autre partie, pour un motif réel et sérieux ainsi que le droit pour le salarié, lorsque cette rupture est à l’initiative de l’employeur, de percevoir une indemnité égale à 10 % de sa rémunération totale brute.

Comme pour les autres contrats à durée déterminée, l’échéance du contrat implique le versement d’une prime de précarité correspondant à une indemnité de fin de contrat à hauteur de 10 % de la rémunération brute totale perçue par le salarié.

II.   LA Mesure proposée

Le présent article ouvre la possibilité de conclure un contrat à durée déterminée de projet, d’une durée comprise entre un ([139]) et six ans, dont l’échéance correspond à la réalisation de l’opération ayant justifié sa conclusion. Sa durée est fixée dans le contrat, celui-ci pouvant être prolongé pour mener à bien le projet ([140]). Si la durée ne peut être établie lors de la signature, le contrat est conclu pour une durée maximale de six ans.

Le contrat est rompu si le projet s’achève de façon anticipée ou qu’il arrive à son terme. Il prend également fin si le projet pour lequel le contrat a été conclu ne peut aboutir.

Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application relatives à ce nouveau contrat à durée déterminée, notamment les conditions de mise en œuvre d’une indemnité de rupture anticipée. En revanche, conformément aux règles applicables aux contrats publics à durée déterminée ou indéterminée, les agents ne percevront aucune indemnité de fin de contrat à l’échéance de celui-ci.

L’étude d’impact ([141]) précise que ce nouveau contrat est ouvert à toute personne, fonctionnaire ou non-titulaire, et qu’il n’ouvrira pas droit à l’obtention d’un contrat à durée indéterminée ou à la titularisation dans la fonction publique, dans la mesure où il correspond à la satisfaction d’un besoin temporaire relatif à une mission strictement déterminée ([142]). Les motifs de rupture de droit commun (démission, licenciement) seront précisés par le décret d’application.

Adapté aux besoins des employeurs publics, ce contrat de projet peut contribuer à internaliser des activités faisant aujourd’hui l’objet de délégation à des entreprises privées en raison de la difficulté inhérente à mobiliser de façon rapide et efficace une expertise ad hoc sur une mission déterminée. Il vise à renforcer l’appui de la maîtrise d’ouvrage afin de mener à bien les projets qu’elle entreprend, en ajustant les recrutements contractuels aux spécificités propres à l’opération mise en œuvre.

III.   La position de la commission

Outre un amendement rédactionnel, la Commission a adopté un amendement de la rapporteure tendant à rappeler les motifs de droit commun de rupture du contrat que constituent le licenciement et la démission.

À l’initiative de la rapporteure, la Commission a également adopté un amendement, qui a recueilli un avis favorable du Gouvernement, prévoyant un délai de prévenance avant l’échéance du contrat, déterminé par décret en Conseil d’État. Il s’agit de garantir à l’agent une visibilité sur le terme de sa mission.

Cette disposition s’inspire du droit applicable dans le secteur privé tel que prévu par l’article L. 1243-5 du code du travail.

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Article 9
(art. 3, 4, 6 et 6 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984
et art. 16 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017)
Extension du recrutement contractuel pour les emplois permanents de la fonction publique de lÉtat

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article étend les conditions de recrutement d’agents contractuels pour occuper des emplois permanents et assouplit les possibilités de procéder à des primo-recrutements à durée indéterminée dans la fonction publique de l’État.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 16 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes leur garantit la faculté d’employer de façon indifférenciée des personnels titulaires ou contractuels.

La loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires a modifié l’article 6 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 afin de pérenniser la possibilité de procéder au primo-recrutement d’agents contractuels à durée indéterminée en cas d’absence de corps de fonctionnaires susceptibles d’assurer les fonctions correspondantes.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté trois amendements rédactionnels, dont deux identiques présentés par la rapporteure et par M. Boris Vallaud (Socialistes et apparentés).

I.   L’état du droit

Les agents non titulaires représentent 16,4 % des effectifs de la fonction publique de l’État ([143]). Leur position contractuelle s’inscrit dans le cadre des dérogations législatives au principe établi par l’article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 selon lequel les emplois permanents sont occupés par des fonctionnaires.

La loi du 11 janvier 1984 relative au statut de la fonction publique de l’État énumère les conditions dans lesquelles le recrutement d’agents contractuels pour occuper des emplois permanents est autorisé et précise également la durée des contrats susceptibles d’être conclus.

1.   Les dérogations permettant de recruter des agents contractuels pour occuper des emplois permanents

Outre les emplois supérieurs laissés à la décision du Gouvernement, l’article 3 de la loi du 11 janvier 1984 établit une liste limitative d’emplois permanents ([144]) susceptibles d’être pourvus par des agents contractuels. Ainsi, le recrutement de non-titulaires est possible pour occuper :

– les emplois des établissements publics inscrits sur une liste fixée par un décret en Conseil d’État qui requièrent des qualifications professionnelles particulières ([145]) indispensables à l’exercice de leurs missions spécifiques et non dévolues à des corps de fonctionnaires ;

– les emplois ou catégories d’emplois des autorités administratives et publiques indépendantes ([146]) ;

– les emplois des centres hospitaliers et universitaires occupés par certains personnels médicaux et scientifiques ;

– les emplois occupés par du personnel affilié aux régimes de retraite des ouvriers des établissements industriels de l’État et des marins ;

– les emplois occupés par les assistants d’éducation, les maîtres d’internat et les surveillants d’externat des établissements d’enseignement.

L’article 4 de la loi du 11 janvier 1984 autorise le recrutement contractuel dans deux hypothèses distinctes.

Premièrement, l’État peut recourir à cette faculté lorsqu’il n’existe pas de corps de fonctionnaires susceptible d’assurer les fonctions correspondantes quelle que soit la catégorie de l’emploi (A, B ou C) concernée. Si la jurisprudence administrative exige que l’administration en apporte la justification ([147]), elle admet la démarche consistant à « éteindre » progressivement un corps de fonctionnaires dans le but de confier à des agents contractuels les emplois précédemment occupés par les fonctionnaires précités ([148]).

Deuxièmement, le recrutement d’agents contractuels pour les seuls emplois relevant de la catégorie A ([149]) est autorisé à la condition alternative que la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient. La circulaire du 22 mai 2013 précise que la nature des fonctions doit correspondre à l’exigence de compétences hautement spécialisées et les besoins du service découler de la vacance d’un poste qui ne peut être pourvu par un fonctionnaire du fait de l’infructuosité de la procédure de recrutement ([150]) et des impératifs afférents à la continuité du service.

L’article 5 permet le recrutement de non-titulaires afin de pourvoir aux emplois d’enseignants-chercheurs des établissements supérieurs et de recherche.

L’article 6 impose le recrutement contractuel sur des emplois de toute catégorie (A, B ou C) afin d’assurer des fonctions correspondant à des besoins permanents inférieurs à 70 % d’un temps complet ([151]). La jurisprudence administrative encadre strictement cette procédure dérogatoire à l’article 3 de la loi du 13 juillet 1983 en vérifiant que l’emploi occupé correspond véritablement à un besoin permanent impliquant un temps de travail inférieur à 70 %, et non à satisfaire en réalité un besoin permanent à temps complet ([152]).

En outre, le recours à des agents contractuels pour occuper à titre temporaire un emploi permanent est également prévu par les articles 6 quater et 6 quinquies qui permettent respectivement de recruter des personnels contractuels afin de remplacer à titre temporaire des agents ([153]) momentanément absents et de pourvoir à la vacance de ces emplois pendant une durée d’un an.

2.   La durée déterminée ou indéterminée des primo-recrutements d’agents contractuels pour occuper des emplois permanents

Le primo-recrutement d’agents contractuels répondant aux conditions fixées par les articles 4 et 5 s’effectue nécessairement à l’aide d’un contrat à durée déterminée d’au plus trois ans, renouvelable dans la limite de six ans. L’article 6 bis précise que leur renouvellement au-delà de six ans entraîne leur transformation en contrat à durée indéterminée.

En ce qui concerne les emplois permanents occupés à titre temporaire par des agents contractuels, l’article 6 quater prévoit que leur contrat est renouvelable dans la limite de la durée de l’absence de l’agent titulaire ou non-titulaire qu’ils remplacent. L’article 6 quinquies dispose que le contrat est conclu pour une durée d’un an ([154]) en cas de vacance temporaire de l’emploi.

Le primo-recrutement contractuel à durée indéterminée est prévu dans trois hypothèses, dont l’une pour laquelle il revêt un caractère obligatoire.

Ainsi, le recrutement d’agents contractuels prévu par le 2° de l’article 3 pour occuper des emplois au sein d’établissements publics qui requièrent des qualifications professionnelles particulières s’effectue obligatoirement par un contrat à durée indéterminée.

Le recrutement peut être effectué sous la forme d’un contrat à durée déterminée ou indéterminée lorsqu’il est justifié par la satisfaction d’un besoin permanent à temps incomplet inférieur à 70 % prévu par l’article 6 ou qu’il vise à pourvoir un emploi permanent pour lequel il n’existe pas de corps de fonctionnaires en vertu du 1° de l’article 4.

II.   LA Mesure proposée

Le présent article assouplit les conditions de recrutement contractuel dans la fonction publique de l’État, tout en maintenant le caractère dérogatoire de l’occupation d’emplois permanents par des agents contractuels.

Premièrement, la possibilité prévue par le 2° de l’article 3 de la loi du 11 janvier 1984 de recruter un agent contractuel au sein des seuls établissements publics inscrits sur une liste fixée par un décret en Conseil d’État est étendue à l’ensemble de ces derniers, à l’exception des huit établissements publics à caractère scientifique et technologique ([155]). Si cette ouverture se justifie eu égard à l’autonomie dont disposent ces établissements publics, l’avis rendu par le Conseil d’État rappelle cependant la nécessité de respecter le principe de neutralité des règles applicables au recrutement dans la fonction publique et se prononce en faveur d’une uniformisation des conditions de recrutement contractuel entre l’État et ses établissements publics.

Deuxièmement, la faculté laissée à l’État de recruter des agents contractuels de catégorie A lorsque la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient ([156]) fait l’objet d’une extension et d’un assouplissement.

D’une part, le périmètre de ce recrutement est élargi aux agents des catégories B et C.

D’autre part, les conditions relatives à la nature des fonctions et aux besoins du service sont illustrées de manière non-limitative et présentent une portée plus souple que les critères avancés par la circulaire du 22 mai 2013 précitée. En effet, les fonctions concernées doivent simplement nécessiter des compétences techniques spécialisées ou nouvelles, et non plus correspondre à des « compétences hautement spécialisées ». De même, l’exigence d’infructuosité de la procédure de recrutement d’un fonctionnaire imposée par la jurisprudence n’est plus requise : l’autorité de recrutement devra simplement démontrer son incapacité à pourvoir l’emploi par un fonctionnaire présentant l’expertise ou l’expérience professionnelle adaptée aux missions correspondant à l’emploi ([157]).

En outre, le présent article crée une troisième hypothèse de recrutement contractuel à l’article 4, en plus des deux hypothèses déjà existantes relatives à l’absence de corps de fonctionnaires (1° de l’article 4) et à la justification reposant sur la nature des fonctions ou les besoins du service (2° de l’article 4). Le recrutement d’un agent contractuel sera également autorisé lorsque l’emploi concerné ne nécessite pas une formation statutaire donnant lieu à titularisation dans un corps de fonctionnaires. Aujourd’hui, environ 31 % des recrutements de fonctionnaires toutes catégories confondues ne donnent lieu à aucune formation initiale ([158]). L’ensemble de ces emplois pourront ainsi être ouverts au recrutement contractuel.

Troisièmement, le primo-recrutement d’agents par contrat à durée indéterminée déjà autorisé en cas d’absence de corps de fonctionnaires et d’emploi à temps incomplet inférieur à 70 % est étendu à l’ensemble des recrutements fondés sur l’article 4, incluant donc le nouveau cas pour lequel l’emploi concerné ne donne pas lieu à titularisation dans un corps de fonctionnaire. Parallèlement, l’obligation incombant aux établissements publics de recruter un agent à durée indéterminée ([159]) est supprimée, ouvrant ainsi le choix d’un recrutement à durée déterminée ou indéterminée en la matière.

À titre subsidiaire, le présent article prévoit deux dispositions de coordination afin, d’une part, de supprimer le 3° de l’article 3 relatif au recrutement contractuel effectué par les autorités administratives ou publiques indépendantes qui présente un caractère redondant avec l’article 16 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017, et, d’autre part, de compléter celui-ci par un alinéa rendant applicables aux agents contractuels recrutés par les AAI et API les dispositions réglementaires générales prises en application de l’article 7 de la loi statutaire du 11 janvier 1984.

III.   La position de la commission

La Commission a adopté trois amendements de nature rédactionnelle, dont deux identiques de la rapporteure et de M. Boris Vallaud (Socialistes et apparentés).

 

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Article 10
(art. 3-3, 25 et 104 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984)
Extension du recrutement contractuel pour les emplois permanents de la fonction publique territoriale

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise principalement à étendre les possibilités de recrutement contractuel dans la fonction publique territoriale.

À titre subsidiaire, il autorise les centres de gestion à mettre des agents contractuels à disposition des communes sur des emplois permanents et assouplit les conditions de recrutement de fonctionnaires sur des emplois à temps non complet.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 25 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 a été modifié par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative aux droits et obligations et à la déontologie des fonctionnaires afin d’élargir le champ de compétences des centres de gestion à des missions d’archivage, de numérisation, de conseils en organisation et de conseils juridiques à la demande des collectivités et de leurs établissements.

       Modifications apportées par la Commission

Outre un amendement rédactionnel, la Commission a adopté un amendement de la rapporteure, qui a recueilli un avis favorable du Gouvernement, tendant à élargir les compétences que peuvent exercer les centres de gestion aux questions relatives à l’emploi et à la gestion des ressources humaines.

Après un avis de sagesse du Gouvernement, la Commission a également adopté trois amendements identiques présentés par la rapporteure, par M. Éric Poulliat (LaREM) et Mme Marietta Karamanli (Socialistes et apparentés) visant à recentrer la liberté de recrutement contractuel sur tous les emplois aux EPCI regroupant moins de 15 000 habitants.

I.   L’état du droit

1.   Les dérogations permettant de recruter des agents contractuels pour occuper des emplois permanents

Les agents non titulaires représentent 18,9 % des effectifs de la fonction publique territoriale ([160]). Comme dans les autres versants, leur position contractuelle s’inscrit dans le cadre des dérogations législatives au principe établi par l’article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 selon lequel les emplois permanents sont occupés par des fonctionnaires.

Par symétrie avec les règles applicables à la fonction publique de l’État ([161]), les articles 3-1 et 3-2 de la loi du 26 janvier 1984 autorisent le recrutement à titre temporaire d’agents contractuels afin de remplacer des agents ([162]) momentanément absents et de pourvoir à la vacance d’un emploi dans l’attente du recrutement d’un fonctionnaire.

L’article 3-3 présente les autres dérogations autorisant le recrutement d’agents par la voie contractuelle dont certaines soulignent les spécificités propres au versant territorial.

Par analogie avec l’article 4 de la loi du 11 janvier 1984, les 1° et 2° de l’article 3-3 autorisent le recrutement contractuel en cas d’inexistence d’un cadre d’emplois ([163]) susceptible d’assurer les fonctions correspondantes ([164]), ou lorsque la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient et sous réserve qu’aucun fonctionnaire n’ait pu être recruté sur cet emploi. Ainsi, la nature de la fonction implique la maîtrise de qualifications particulières ou de connaissances spécialisées qui, selon la jurisprudence administrative, ne sont pas nécessairement requises pour exercer les fonctions de responsable d’un service de communication ([165]) ou de directeur général des services ([166]), ce qui interdit conséquemment à l’employeur de fonder un recrutement contractuel sur ce motif.

Les 3° et 4° de l’article 3-3 ont pour objet de répondre aux enjeux de ressources humaines auxquelles sont confrontées les plus petites communes, celles dont la population est inférieure au seuil de 1 000 habitants, qui peuvent éprouver d’importantes difficultés de recrutement. Le 3° autorise ainsi ces communes de moins de 1 000 habitants à recruter leur secrétaire de mairie par la voie contractuelle. Le 4° leur permet également de recruter des agents contractuels pour occuper des emplois dont la quotité de travail est inférieure à 50 %. Ces deux dispositions sont applicables aux groupements composés de communes dont la population moyenne est inférieure au seuil d’habitants précité.

En outre, le 5° de l’article 3-3 autorise les communes de moins de 2 000 habitants et les groupements de communes de moins de 10 000 habitants à recruter un agent contractuel pour occuper un emploi dont la création ou la suppression dépend de la décision d’une autorité qui s’impose à la collectivité en matière de création, de changement de périmètre ou de suppression d’un service public.

2.   Le recrutement de fonctionnaires sur des emplois à temps incomplet

Contrairement à l’article 6 de la loi statutaire du 11 janvier 1984 qui prévoit que les emplois dont la quotité de travail est inférieure à 70 % ne peuvent être pourvus que par des agents contractuels dans la fonction publique de l’État, l’article 104 de la loi du 26 janvier 1984 et le décret n° 91-298 du 20 mars 1991 déterminent les règles applicables au recrutement de fonctionnaires territoriaux dont la quotité de travail est inférieure à 50 %. Au-delà de 50 % de temps de travail, les collectivités peuvent librement recruter des fonctionnaires, quel que soit le cadre d’emplois auquel ils appartiennent.

Le recrutement de fonctionnaires dont le temps de travail est inférieur à la moitié de la durée légale présente une certaine complexité ([167]) eu égard à un triple critère de seuil d’habitants, de cadres d’emplois et de nombre maximal d’emplois pouvant être créés. Il en résulte un encadrement très strict des recrutements d’agents titulaires, sans que les règles applicables répondent à des justifications véritablement claires et cohérentes.

3.   La mise à disposition de fonctionnaires par le centre de gestion

Exerçant un rôle transversal dans la gestion et le suivi de la carrière des agents publics territoriaux, les centres de gestion sont des établissements publics locaux principalement organisés à l’échelle départementale.

L’article 25 leur attribue une compétence facultative par laquelle ils assurent notamment la mise à disposition de fonctionnaires vis-à-vis de collectivités ou d’établissements dans le but de les affecter à des missions permanentes à temps complet ou incomplet. Cette disposition s’inscrit dans une perspective plus large consacrant les centres de gestion comme une forme de « groupement d’employeurs » participant à la mutualisation des effectifs au sein de la fonction publique territoriale.

II.   LES Mesures proposées

Le présent article prévoit cinq évolutions visant chacune à desserrer les contraintes de recrutement auxquelles sont assujettis les collectivités territoriales et leurs établissements.

Afin de lutter contre la multiplication de pratiques illégales que constitue le recours abusif aux vacataires, le présent article prévoit le recrutement sans condition de fonctionnaires et d’agents contractuels pour des emplois à temps incomplet dont la quotité est inférieure à 50 %. Cette double ouverture des recrutements statutaires ([168]) et contractuels ([169]) concerne l’ensemble des collectivités territoriales et leurs établissements, sans distinction de seuils démographiques ([170]) ou de cadre d’emplois ([171]).

L’objectif est de lutter contre les situations de précarité induites par les « faux vacataires » qui correspondent à des agents publics ne bénéficiant pas des garanties applicables aux agents contractuels ([172]) en dépit du caractère permanent et régulier des fonctions qu’ils exercent. En raison des restrictions encadrant le recrutement de fonctionnaires à temps incomplet inférieur à 50 % et de l’interdiction pour les communes de plus de 1 000 habitants de recruter des agents contractuels à temps incomplet, certaines communes ont recours de manière palliative à de nombreux vacataires dans les domaines périscolaires et médico-sociaux.

La jurisprudence sanctionne fréquemment ces pratiques. Dès lors que les fonctions exercées par les agents revêtent un caractère permanent, le vacataire concerné doit être considéré comme un agent contractuel ([173]), a fortiori lorsque le vacataire est recruté à plein temps ([174]). Le juge administratif estime que le simple fait que la rémunération versée à l’agent soit liée à un volume horaire ne suffit pas à retenir la qualification de vacataire lorsque le nombre d’heures travaillées est élevé et que l’engagement de la personne présente une certaine continuité ([175]).

Par ailleurs, le présent article autorise les communes de moins de 1 000 habitants et les groupements composés de communes dont la population moyenne est inférieure à ce seuil à recruter des agents contractuels sur l’ensemble de leurs emplois, sans aucune restriction.

Le recrutement contractuel justifié par la nature des fonctions et les besoins du service sur le fondement du 2° de l’article 3-3 ([176]) est étendu aux emplois de catégorie B. Cependant, contrairement aux dispositions de l’article 9 du projet de loi tendant à élargir les possibilités de recrutement contractuel dans la fonction publique de l’État, l’extension prévue par le présent article n’inclut pas les emplois de catégorie C et ne mentionne pas la nécessité de détenir des « compétences techniques spécialisées » ni l’examen par l’employeur de « l’expertise ou de l’expérience professionnelle adaptée aux missions à accomplir » du fonctionnaire éventuellement candidat au recrutement ([177]).

En outre, l’article 25 de la loi du 26 janvier 1984 est modifié afin d’élargir aux agents contractuels le dispositif de mise à disposition d’agents mis en œuvre par les centres de gestion en faveur des collectivités et de leurs établissements afin d’accomplir des missions permanentes en leur sein, à temps complet ou incomplet.

III.   La position de la commission

Outre un amendement rédactionnel, la Commission a adopté un amendement de la rapporteure, ayant recueilli un avis favorable du Gouvernement, qui affirme la compétence que peuvent exercer les centres de gestion en matière d’emploi et de gestion des ressources humaines.

La Commission a également adopté trois amendements identiques présentés par la rapporteure, par M. Éric Poulliat (LaREM) et par Mme Marietta Karamanli (Socialistes et apparentés), qui ont recueilli un avis de sagesse du Gouvernement, tendant à recentrer la liberté de recrutement contractuel sur tous les emplois aux EPCI regroupant moins de 15 000 habitants.

Cette délimitation s’avère plus stricte que celle résultant de la rédaction initiale de l’alinéa 5 du présent article mentionnant les groupements composés de communes dont la population moyenne est inférieure au seuil de 1 000 habitants, ce qui aurait pu aboutir à élargir de façon excessive l’application de ces dispositions à des intercommunalités de plusieurs dizaines de milliers d’habitants.

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Section II
Mutations

Article 11
(art. 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984)
Faciliter les mouvements de mutation des fonctionnaires de lÉtat

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article tend à faciliter les mouvements de mutation des fonctionnaires de l’État en supprimant l’avis préalable des commissions administratives paritaires sur ces décisions et en octroyant à l’administration la faculté de définir des durées minimales et maximales d’occupation de certains emplois.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 a été modifié par la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique afin que la décision d’affectation prenne en compte, parmi d’autres priorités, les intérêts matériels et moraux des fonctionnaires vis-à-vis des collectivités ultra‑marines et de la Nouvelle-Calédonie.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement rédactionnel présenté par la rapporteure.

I.   L’état du droit

La mutation correspond au changement d’affectation administrative du fonctionnaire, prononcé à sa demande ou d’office dans l’intérêt du service. Elle peut être effectuée en interne au sein de son administration, ou à l’extérieur de celle-ci par l’intermédiaire d’une mise à disposition ou d’un détachement.

La mutation s’inscrit dans le cadre plus large de la mobilité professionnelle au sein de la fonction publique ([178]), qui constitue une garantie fondamentale reconnue à tout fonctionnaire selon l’article 14 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983. Cependant, la mutation n’est pas reconnue comme un droit ([179]). Le refus de mutation ne figure pas parmi les décisions défavorables dont la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 exige la motivation ([180]). Les règles applicables en matière de mutation sont fixées par les lois et décrets statutaires et ne sauraient être déterminées par de simples circulaires ([181]).

Si la mutation est prononcée d’office par l’employeur, elle est décidée dans l’intérêt du service. Cette mesure est ainsi envisageable lorsqu’un agent perturbe le service, ou en cas de fort dissentiment entre celui-ci et son supérieur hiérarchique, sans pour autant que les faits soient constitutifs d’une faute disciplinaire ([182]). La jurisprudence veille à ce que les nouvelles fonctions de l’agent comportent les mêmes garanties de carrière ([183]), afin de vérifier qu’il ne s’agisse pas d’une sanction déguisée ([184]).

Si la mutation est à l’initiative du fonctionnaire, la demande doit être effectuée librement et sans contrainte ([185]). Perçue comme un facteur de diversification du parcours professionnel, elle constitue souvent l’opportunité de permettre un rapprochement géographique pour des besoins personnels ou familiaux.

L’administration doit comparer l’ensemble des candidatures à un poste selon l’intérêt du service et la situation personnelle des intéressés ([186]). L’article 60 de la loi du 11 janvier 1984 établit cinq critères prioritairement examinés par l’administration en matière de mutation :

– être séparé géographiquement de son conjoint ou partenaire de pacs ([187]) ;

– être en situation de handicap ;

– exercer dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles ;

– être confronté à la suppression de son emploi ;

– justifier de centres d’intérêts matériels et moraux dans les collectivités ultra-marines ou en Nouvelle-Calédonie.

Le premier critère est le plus souvent invoqué mais l’administration peut refuser une demande fondée sur cette priorité, en justifiant sa décision par l’intérêt du service ([188]). L’employeur conserve une marge d’appréciation susceptible de justifier son refus, à l’instar du cas où le fonctionnaire présente une demande d’affectation dans un autre département que celui où son conjoint réside.

Les décisions de mutation requièrent le respect de règles procédurales. Les demandes de mutation peuvent être présentées sur des postes vacants ou dans le cadre de tableaux permettant à l’administration de classer les demandes pour occuper un poste susceptible de devenir vacant, quand bien même celui-ci n’a pas encore été déclaré vacant à la date où la demande a été formulée ([189]). Dès lors que des barèmes publics sont mis en place ([190]), le classement des demandes peut être déterminé à l’aide de critères supplémentaires à titre subsidiaire ([191]).

L’article 60 prévoit la réunion obligatoire de la commission administrative paritaire dans deux hypothèses, selon l’existence de tableaux de mutation. Si tel est le cas, la commission administrative paritaire se réunit au moment de leur établissement afin de prononcer un avis sur les décisions de mutation envisagées. Dans le cas contraire, son avis est requis uniquement lorsque la mutation implique un changement de résidence, telle que la nécessité pour le fonctionnaire de quitter son logement de fonction ([192]), ou de situation hiérarchique ([193]). En cas de méconnaissance de ces règles, la décision de mutation est susceptible d’être annulée par le juge administratif.

Le formalisme qui caractère cette procédure consultative entrave la fluidité des mouvements de mutation, dont le processus apparaît lent et peu adapté aux exigences de réactivité en matière de mobilité des fonctionnaires.

II.   LA Mesure proposée

Le présent article vise à faciliter les mouvements de mutation des fonctionnaires de l’État ([194]). Il procède à une réécriture des dispositions de l’article 60 de la loi du 11 janvier 1984 tout en maintenant les mêmes critères prioritaires que ceux actuellement en vigueur. Tendant à garantir une meilleure prise en compte des besoins exprimés par l’administration, cette réforme implique trois évolutions.

Premièrement, les administrations compétentes pourront fixer des durées minimales et maximales d’occupation de certains emplois, dans des conditions précisées par décret en Conseil d’État. L’objectif est d’éviter une rotation excessive des effectifs susceptible de déstabiliser le service. Cette mesure pourrait également permettre de « fidéliser » certains personnels, notamment au sein des administrations déconcentrées.

Deuxièmement, le présent article supprime l’avis préalable des commissions administratives paritaires en matière de mutation, dans la perspective du recentrage de leur champ d’intervention ([195]) et de la réforme globale des instances consultatives engagée par ce projet de loi.

Troisièmement, les modalités de prise de décision relatives aux mutations sont clarifiées.

D’une part, les décisions de mutation tiendront compte ([196]) des lignes directrices de gestion ([197]) qui seront soumises à l’avis de la nouvelle instance consultative que constitue le comité social d’administration, issu de la fusion du comité technique et du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ([198]).

D’autre part, un décret en Conseil d’État établira la liste des administrations ou services qui pourront prononcer des décisions de mutation sur la base de tableaux périodiques de mutation, pour lesquels l’autorité compétente pourra procéder à un classement préalable des demandes de mutation grâce à un barème public, respectant les critères prioritaires précités. Conformément à la jurisprudence ([199]) et aux dispositions du dernier alinéa de l’article 60 dans sa rédaction actuelle, l’utilisation d’un barème ne se substituera pas à l’examen de la situation individuelle des fonctionnaires.

III.   La position de la commission

La Commission a adopté un amendement de nature rédactionnelle à l’initiative de la rapporteure.

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Chapitre II
Reconnaissance de la performance professionnelle

Article 12
(art. 6, 6 bis, 6 ter A, 6 ter, 6 quinquies, 17 et 23 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, art. 55 et 55 bis [abrogé] de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 76 et 125 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et art. 65, 65-1 [abrogé] et 65-2 [abrogé] de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986)
Suppression de la notation et généralisation de lentretien professionnel comme modalité dévaluation individuelle des fonctionnaires

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article supprime le recours à la notation et généralise l’entretien professionnel en tant que modalité d’évaluation individuelle des fonctionnaires au sein des trois versants.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles a modifié l’article 76 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 afin de généraliser l’entretien professionnel en lieu et place de la notation au sein de la fonction publique territoriale.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté trois amendements de coordination et de précision rédactionnelle présentés par la rapporteure.

I.   L’état du droit

1.   Le remplacement de la notation par l’entretien professionnel dans la fonction publique de l’État et la fonction publique territoriale

La notation des fonctionnaires est prévue par l’article 17 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983. Cependant, les statuts particuliers peuvent déroger à la notation qui constitue historiquement le principal mode d’évaluation de la valeur professionnelle des fonctionnaires par leurs supérieurs hiérarchiques.

Le régime juridique de la notation a été progressivement précisé par la jurisprudence administrative. Les recours contre la notation individuelle sont acceptés depuis 1962 ([200]), l’office du juge étant circonscrit au contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation ([201]). La notation n’est pas un droit exercé par le chef de service mais un devoir qui lui incombe ([202]).

La note s’échelonne de 0,1 à 20 ([203]) et ne peut être établie à l’aide d’une cotation par lettre (A à E) ([204]). Le notateur doit se prononcer exclusivement sur la valeur professionnelle du fonctionnaire ([205]) et accomplir un examen de la situation propre de l’agent, indépendamment du grade auquel il appartient ([206]). Des barèmes de notation et autres dispositifs de péréquation peuvent être mis en place entre les services afin d’assurer une harmonisation régulière des notes sous réserve de respecter les prescriptions légales et réglementaires, et de ne pas provoquer des inégalités de traitement entre les fonctionnaires ([207]).

En pratique, la notation s’apparente à un exercice d’une utilité relative, dans la mesure où les notes attribuées sont souvent très hautes et par conséquent peu significatives : elles ne permettent pas de déterminer la véritable valeur des fonctionnaires. Outre sa dimension scolaire voire infantilisante, la notation est ainsi progressivement apparue comme une technique d’évaluation archaïque.

Dans cette perspective, la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 et la loi n° 2009-972 du 3 août 2009 ont expérimenté respectivement dans la fonction publique de l’État et dans la fonction publique territoriale le recours à l’entretien professionnel en lieu et place de la notation, avant sa pérennisation depuis le 1er janvier 2012 pour les fonctionnaires de l’État et à la suite de la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 dite loi « MAPTAM » dans le versant territorial. Un régime similaire applicable aux agents contractuels de ces deux versants est prévu par voie réglementaire ([208]).

Cependant, l’article 55 de la loi statutaire du 11 janvier 1984 garantit le maintien du système de la notation pour certains corps relevant d’un statut particulier ([209]) tel que les personnels enseignants des premier et second degrés ([210]) qui ne sont pas soumis à l’entretien professionnel en tant que modalité d’évaluation.

L’entretien professionnel est conduit par le supérieur hiérarchique direct du fonctionnaire. Il a lieu chaque année. Il porte principalement sur :

– les résultats professionnels obtenus par le fonctionnaire eu égard aux objectifs qui lui ont été assignés et aux conditions d’organisation et de fonctionnement du service dont il relève ;

– les objectifs assignés au fonctionnaire pour l’année à venir et les perspectives d’amélioration de ses résultats professionnels, compte tenu, le cas échéant, des perspectives d’évolution des conditions d’organisation et de fonctionnement du service ;

– la manière de servir du fonctionnaire ;

– les acquis de son expérience professionnelle ;

– le cas échéant, la manière dont il exerce les fonctions d’encadrement qui lui ont été confiées ;

– les besoins de formation du fonctionnaire eu égard, notamment, aux missions qui lui sont imparties, aux compétences qu’il doit acquérir et à son projet professionnel ;

– ses perspectives d’évolution professionnelle en termes de carrière et de mobilité.

L’entretien professionnel fait l’objet d’un compte rendu qui est systématiquement porté à la connaissance des commissions administratives paritaires dans la fonction publique territoriale ([211]). Dans les trois versants, ces dernières peuvent demander la révision du compte rendu ou de la note ([212]) à l’autorité compétente, à la demande du fonctionnaire concerné.

Le remplacement de la notation par l’entretien professionnel n’a conduit à aucune évolution substantielle de la jurisprudence en la matière. Le juge administratif vérifie que le compte rendu commente la réalisation de tous les objectifs assignés au fonctionnaire et non pas seulement une partie d’entre eux ([213]). Il exige également que les reproches formulés à l’encontre du fonctionnaire reposent sur des faits significatifs et circonstanciés ([214]).

2.   Le maintien du système de notation dans la fonction publique hospitalière

L’expérimentation d’un entretien professionnel au sein de la fonction publique hospitalière a été mise en œuvre par la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 et s’est déroulée entre 2011 et 2013. Ses résultats se sont révélés décevants. Un faible nombre d’établissements y ont eu recours, en raison d’un mauvais « cadrage » du dispositif et d’un défaut d’adhésion des personnels concernés ([215]).

Ainsi, à l’exception des statuts particuliers mentionnés précédemment, seul le versant hospitalier utilise encore aujourd’hui la notation en tant que modalité d’évaluation professionnelle des agents.

II.   LA Mesure proposée

Le présent article consacre l’entretien professionnel comme le mode d’évaluation de droit commun au sein des trois versants. Il supprime toute référence à la notation dans chaque loi statutaire. Déjà généralisée dans la fonction publique de l’État et dans la fonction publique territoriale, l’appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires se fondera donc sur un entretien professionnel annuel conduit par le supérieur hiérarchique direct.

Les statuts particuliers demeureront autorisés à prévoir des modalités différentes d’appréciation de la valeur professionnelle des agents, afin de prendre en compte les spécificités propres à certains corps de fonctionnaires.

Dans un objectif de simplification, le présent article permet d’aligner le rôle des commissions administratives paritaires entre les trois versants, en supprimant l’automaticité de la transmission des comptes rendus d’entretiens professionnels aux commissions administratives paritaires dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière. Il s’agit ici de généraliser le modèle actuellement en vigueur dans la fonction publique de l’État qui prévoit que les commissions administratives paritaires sollicitent la révision des comptes rendus d’entretiens professionnels auprès de l’autorité compétente uniquement à la demande du fonctionnaire concerné.

III.   La position de la commission

La Commission a adopté trois amendements de coordination et de nature rédactionnelle à l’initiative de la rapporteure.

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*     *

Article 13
(art. 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, art. 78-1 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986
et art. L. 6152-4 du code de la santé publique)
Encadrement de la rémunération des agents contractuels
et prime dintéressement collectif dans la fonction publique hospitalière

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article établit un cadre de rémunération des agents contractuels au sein des trois versants et précise le champ d’application et les modalités de la prime d’intéressement collectif susceptible d’être versée aux agents relevant de la fonction publique hospitalière.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 78-1 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 qui prévoit qu’une prime d’intéressement collectif peut être versée aux agents titulaires et non titulaires de la fonction publique hospitalière a fait l’objet d’une modification rédactionnelle par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires afin de préciser que la prime précitée tiendra comptes des « résultats collectifs » des services et non de leur « performance ».

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement rédactionnel présenté par la rapporteure.

I.   L’état du droit

1.   L’absence d’encadrement législatif transversal de la rémunération des agents contractuels

Contrairement à la rémunération des agents titulaires dont les principes sont fixés par l’article 20 de la loi du 13 juillet 1983, la rémunération des agents contractuels ([216]) ne fait pas l’objet d’un même encadrement législatif, à l’exception des dispositions prévues par l’article 136 de la loi du 26 janvier 1984 qui renvoie à un décret en Conseil d’État le soin de préciser les modalités d’évolution de leur rémunération.

À l’échelle réglementaire, l’article 1-3 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 relatif aux agents contractuels de l’État et l’article 1-2 du décret n° 91-155 du 6 février 1991 relatif aux agents contractuels relevant de la fonction publique hospitalière précisent que le montant de leur rémunération est fixé par l’autorité administrative qui tient compte des fonctions occupées, de la qualification requise pour leur exercice, de la qualification détenue par l’agent ainsi que de son expérience. Que les agents soient sous contrat à durée déterminée ou indéterminée, leur rémunération fait l’objet d’une réévaluation triennale.

La jurisprudence administrative a progressivement élaboré un cadre de rémunération des agents contractuels tendant à respecter des garanties minimales. Ainsi, le Conseil d’État a dégagé l’existence d’un principe général du droit selon lequel la rémunération minimale d’un agent public correspond au taux horaire du SMIC ([217]). Lorsqu’un agent contractuel remplace un fonctionnaire, l’administration doit alors principalement fixer la rémunération selon le niveau de la rémunération accordée à ce dernier, et, à titre accessoire, le niveau de diplôme et son expérience ([218]). Le droit à bénéficier de l’indemnité de résidence et du supplément familial a également été reconnu aux agents contractuels ([219]).

Les conditions de rémunération des agents non-titulaires restent par essence fixées par la voie contractuelle, ce qui témoigne de la marge de manœuvre relativement importante dont dispose l’administration en la matière. Elle peut décider de s’inspirer ou non des grilles indiciaires auxquelles sont soumis les fonctionnaires ou s’en affranchir et opter pour un montant global ou calculé sur la base d’un taux horaire.

2.   La faculté de verser une prime d’intéressement collectif dans la fonction publique hospitalière

La prise en compte du mérite personnel et des résultats collectifs obtenus par les fonctionnaires a été consacrée par la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 qui a intégré cette dimension, à titre facultatif, à la composition du régime indemnitaire dont ils bénéficient.

En ce qui concerne la fonction publique de l’État et la fonction publique territoriale, le décret n° 2011-1038 du 29 août 2011 et le décret n° 2012-624 du 3 mai 2012 déterminent le cadre de la prime d’intéressement à la performance collective susceptible d’être versée aux agents titulaires et non-titulaires, selon la fixation d’objectifs et d’indicateurs.

Dans la fonction publique hospitalière, cette prime n’a pu être mise en œuvre en l’absence d’un décret nécessaire afin de déterminer les critères d’attribution de celle-ci. En outre, son champ d’application est réservé aux seuls personnels non-médicaux.

II.   LA Mesure proposée

Le présent article détermine les principes encadrant la rémunération des agents contractuels dans l’ensemble de la fonction publique. De nature principielle, il constitue la base juridique sur laquelle s’appuieront les dispositions réglementaires ultérieures. Ainsi, l’autorité compétente devra tenir compte des fonctions exercées, de la qualification requise pour leur exercice et de l’expérience des agents contractuels afin de déterminer le niveau de leur rémunération.

En outre, conformément au régime indemnitaire des fonctionnaires, leur rémunération pourra prendre en compte les résultats professionnels individuels ou collectifs.

Enfin, le présent article modifie la rédaction des dispositions de l’article 78-1 de la loi du 9 janvier 1986 afin de rendre applicables les primes d’intéressement collectifs dans la fonction publique hospitalière, dans des conditions qui seront précisées par décret. Cette évolution s’inscrit dans la logique que poursuit le plan « Ma Santé 2022 » qui fixe pour objectif d’améliorer la qualité du service rendu par les établissements de santé. Appréciée par les chefs d’établissement, l’atteinte ou non de ces objectifs déterminera le versement de la prime d’intéressement, dans une perspective managériale.

Initialement réservé aux seuls personnels non-médicaux, ce dispositif est étendu aux personnels médicaux mentionnés à l’article L. 6152-1 du code de la santé publique.

III.   La position de la commission

La Commission a adopté un amendement rédactionnel à l’initiative de la rapporteure.

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Article 14
(art. 18, 26 et 58 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 33-3 [nouveau], 39, 78-1 et 79 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et art. 25, 26 et 69 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986)
Établissement des lignes directrices de gestion
en matière de promotion et davancement

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article prévoit que des lignes directrices de gestion sont établies par les autorités administratives compétentes au sein de chaque versant afin de définir les orientations générales en matière de promotion et d’avancement, après avis du comité social.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 a modifié l’article 78-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 afin de supprimer la possibilité de contingenter l’accès à l’échelon spécial d’un ou plusieurs grades du cadre d’emploi selon un effectif maximal déterminé par le statut particulier duquel il relève.

       Modifications apportées par la Commission

Outre deux amendements rédactionnels, la Commission a adopté un amendement de la rapporteure visant, d’une part, à renforcer la portée des lignes directrices de gestion établies par les autorités compétentes au sein des trois versants, et, d’autre part, à prévoir l’examen pour avis de ces lignes directrices par le comité social d’administration, sur le modèle de la procédure applicable dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière.

La Commission a également adopté un amendement présenté par la rapporteure tendant à renvoyer à un décret en Conseil d’État la définition des modalités de consultation des collectivités par les centres de gestion dans le cadre de la procédure d’élaboration des lignes directrices de gestion.

I.   L’état du droit

Dans les trois versants, les commissions administratives paritaires rendent un avis préalable consultatif sur les promotions internes ([220]) telles que les changements de corps, à la suite de la réussite à un examen professionnel ou au choix de l’autorité via l’établissement d’une liste d’aptitude, et d’avancement de grade ([221]) des fonctionnaires.

Bien que la jurisprudence administrative considère l’ancienneté comme un motif permettant seulement de départager des fonctionnaires de valeur égale ([222]), ce critère demeure en pratique décisif. Il prévaut sur la prise en compte des mérites propres de chaque fonctionnaire, au risque d’uniformiser les règles d’avancement. En outre, le formalisme qui caractérise la procédure consultative des commissions administratives paritaires contribue à alourdir la gestion des ressources humaines dans la fonction publique ([223]).

En lien avec la réforme des instances de concertation prévue par l’article 3 et l’évolution corrélative de l’architecture et des attributions dévolues aux commissions administratives paritaires engagée par l’article 4, le présent article redéfinit les règles applicables en matière d’avancement et de promotion interne.

II.   LA Mesure proposée

L’article 14 prévoit l’édiction de lignes directrices de gestion par les autorités compétentes des trois versants de la fonction publique, sur lesquelles le comité social rend préalablement un avis ([224]). Ces lignes directrices de gestion déterminent les orientations générales relatives à la mobilité ([225]) ainsi qu’à la promotion ([226]) et à la valorisation des parcours.

Si elles permettent de définir de façon transparente les critères qui détermineront les décisions de mobilité, d’avancement et de promotion des agents, les autorités conservent une marge d’appréciation pour examiner les spécificités inhérentes à chaque situation individuelle. Les lignes directrices de gestion prises en la matière sont communiquées aux agents dans un souci de visibilité quant aux critères applicables. Conformément à la jurisprudence du Conseil d’État ([227]), ces lignes directrices de gestion seront invocables devant le tribunal administratif si un fonctionnaire souhaite contester la validité de décisions prises sur leur fondement. Leur opposabilité permet ainsi de responsabiliser l’administration et de renforcer les garanties dont disposent les fonctionnaires quant à l’examen des décisions affectant leur carrière.

Par coordination avec l’article 4 du projet de loi, le présent article supprime la compétence consultative des commissions administratives paritaires en matière de promotion de corps ou d’avancement de grade au sein des trois versants.

Dans la fonction publique de l’État, l’avancement de grade pourra également être subordonné à l’exercice préalable de certaines fonctions correspondant à des conditions d’exercice difficile ou comportant des missions particulières, selon la nouvelle rédaction du troisième alinéa de l’article 58 de la loi du 11 janvier 1984.

Avant l’entrée en vigueur des nouveaux comités sociaux en 2022, les actuels comités techniques représenteront à titre transitoire les instances de concertation consultées sur les lignes directrices de gestion élaborées par les autorités compétentes.

III.   La position de la commission

Outre deux amendements rédactionnels, la Commission a adopté un amendement de la rapporteure ayant recueilli un avis favorable du Gouvernement tendant à renforcer la portée des lignes directrices de gestion établies par les autorités compétentes au sein des trois versants. Cet amendement consacre les lignes directrices de gestion en tant que véritable outil de pilotage pluriannuel des ressources humaines qui déclineront ainsi la stratégie de management des administrations. Par cohérence, il s’agit aussi d’aligner la procédure d’élaboration applicable à la fonction publique de l’État sur celle des fonctions publiques territoriale et hospitalière qui prévoit l’avis préalable du comité social sur les lignes directrices de gestion édictées par l’autorité compétente.

La Commission a également adopté un amendement de la rapporteure ayant recueilli un avis favorable du Gouvernement qui précise que les modalités selon lesquelles seront consultés les comités sociaux territoriaux (CST) des collectivités affiliées au centre de gestion sur les lignes directrices de gestion établies en matière de promotion interne seront déterminées par décret en Conseil d’État.

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Chapitre III
Discipline

Article 15
(art. 66 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de lÉtat, art. 89 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et art. 81 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière)
Harmoniser léchelle des sanctions entre les trois versants
de la fonction publique

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise à harmoniser l’échelle des sanctions entre les trois versants de la fonction publique afin de lui donner plus de cohérence. Il introduit notamment pour cela l’exclusion temporaire de trois jours dans les fonctions publiques d’État et hospitalière et la radiation du tableau d’avancement dans la fonction publique territoriale.

       Dernières modifications législatives intervenues

Les dispositions relatives aux sanctions ont été modifiées, pour la fonction publique territoriale, par la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement de M. Boris Vallaud et plusieurs députés du groupe Socialistes et apparentés qui modifie, à des fins d’harmonisation, l’ordre de présentation des sanctions du deuxième groupe dans la fonction publique territoriale.

I.   L’état du droit

● S’il n’existe pas, dans la fonction publique, de définition légale de la faute disciplinaire des fonctionnaires, les sanctions qui leur sont applicables en cas de manquement à des obligations professionnelles sont en revanche prévues et détaillées par le statut général des fonctionnaires.

Les sanctions sont classées en quatre groupes par ordre croissant d’importance :

– le premier groupe comprend les sanctions les moins sévères, notamment l’avertissement et le blâme. Elles ont le caractère de réprimande et ne sont privatives d’aucun avantage : ce sont en fait des sanctions morales, qui atteignent le fonctionnaire dans son honneur.

L’avertissement ne figure pas au dossier de l’agent : il est conservé dans un registre séparé et supprimé automatiquement au bout de trois ans. Le blâme figure au dossier et est effacé au bout de trois ans si aucune autre sanction n’est prononcée.

Un avertissement peut par exemple être délivré à un fonctionnaire en cas d’utilisation exagérée du téléphone à des fins personnelles ([228]).

Dans la fonction publique territoriale s’ajoute l’exclusion temporaire de fonction pour une durée maximale de trois jours ;

– le deuxième groupe comprend la radiation du tableau d’avancement (seulement pour la fonction publique d’État), l’abaissement d’échelon, l’exclusion temporaire et le déplacement d’office. Ces sanctions, particulièrement les deux premières, affectent directement le déroulement de carrière et ont un impact sur l’évolution de la rémunération, immédiat en cas d’abaissement d’échelon, et différé en cas de radiation du tableau d’avancement.

En outre, l’exclusion temporaire des fonctions est une période durant laquelle l’agent ne perçoit plus sa rémunération et n’acquiert plus de droits à la retraite.

La jurisprudence considère par exemple qu’une attitude irrespectueuse, hautaine et méprisante à l’égard de la hiérarchie, des autres membres de l’équipe administrative et des usagers peuvent motiver un déplacement d’office ([229]) ;

– les sanctions du troisième groupe sont la rétrogradation et l’exclusion temporaire de trois mois à deux ans. Là encore, les effets sur la rémunération sont importants et le déroulement de la carrière est affecté. Il convient de souligner que la radiation du tableau d’avancement peut être prononcée à titre complémentaire des sanctions des deuxième et troisième groupes.

Pour donner un exemple, la rédaction et l’expédition à sa hiérarchie de deux courriers anonymes comportant des propos offensants envers cette hiérarchie et revendiquant avoir infiltré et manipulé le système informatique de l’établissement peuvent motiver une exclusion temporaire de trois mois ([230]) ;

– les sanctions du quatrième groupe, enfin, mettent un terme au lien entre l’agent et son administration : il s’agit de la mise à la retraite d’office (si l’agent remplit la condition minimale de quinze ans de service) et de la révocation.

Le fait d’agresser verbalement, injurier, menacer ses collègues de travail de façon récurrente et générer par ses agissements un climat délétère et peu propice au bon fonctionnement du service peuvent justifier une révocation ([231]).

À l’exception des sanctions du premier groupe, les sanctions sont prononcées après consultation du conseil de discipline ([232]). Ce dernier formule une proposition de sanction après avoir pris connaissance des éléments du dossier.

Seules les sanctions ayant fait l’objet d’un examen en conseil de discipline sont ensuite susceptibles de recours administratif devant les commissions de recours des conseils supérieurs des fonctions publiques de l’État et hospitalière et devant le conseil de discipline de recours de la fonction publique territoriale.

● Selon la fonction publique à laquelle ils appartiennent, les fonctionnaires ne sont donc pas soumis exactement aux mêmes sanctions (cf. tableau ci-dessous) :

– l’exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours n’existe ainsi que dans la fonction publique territoriale et est une sanction du premier groupe. Elle peut être assortie d’un sursis total ou partiel ;

– dans le troisième groupe, l’exclusion temporaire de fonctions est de seize jours à deux ans dans la fonction publique territoriale mais de trois mois à deux ans dans la fonction publique d’État et la fonction publique hospitalière ;

– à l’inverse, la radiation du tableau d’avancement, sanction la moins sévère du deuxième groupe, n’existe pas dans la fonction publique territoriale mais est présente dans les deux autres versants.

éCHELLE DES SANCTIONS DANS LES TROIS VERSANTS DE LA FONCTION PUBLIQUE

 

Fonction publique dÉtat

Fonction publique territoriale

Fonction publique hospitalière

Premier groupe

– avertissement

– blâme

– avertissement

– blâme

– exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours

– avertissement

– blâme

Deuxième groupe

– radiation du tableau d’avancement

– abaissement d’échelon

– exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours

– déplacement d’office

– abaissement d’échelon

– exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre de quinze jours

 

– radiation du tableau d’avancement

– abaissement d’échelon

– exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours

 

Troisième groupe

– rétrogradation

– exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans

– rétrogradation

– exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans

– rétrogradation

– exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans

Quatrième groupe

– mise à la retraite d’office

– révocation

– mise à la retraite d’office

– révocation

– mise à la retraite d’office

– révocation

Source : étude dimpact du projet de loi

II.   la réforme proposée

Le présent article a pour objet d’harmoniser les échelles de sanctions des trois versants de la fonction publique afin de leur donner une gradation plus complète et équilibrée.

● Il crée, tout d’abord, dans le premier groupe, une nouvelle sanction dexclusion temporaire de fonctions de trois jours dans la fonction publique d’État (alinéa 3) et la fonction publique hospitalière (alinéa 23).

Il s’agit là de donner un levier supplémentaire aux encadrants de proximité, l’effet dissuasif des deux autres sanctions du premier groupe, le blâme et l’avertissement, étant assez limité.

En outre, le défaut de sanction d’exclusion temporaire dans le premier groupe peut conduire certains employeurs publics à prononcer des exclusions de quinze jours, assorties de sursis de douze à treize jours afin de sanctionner des fautes disciplinaires peu graves, ce qui est plus complexe pour l’administration en termes de procédures.

Le but est donc de donner aux employeurs une marge de manœuvre nouvelle entre le blâme, sanction la plus forte du premier groupe, et la radiation du tableau d’avancement, sanction la plus faible du deuxième groupe.

Comme le blâme, l’exclusion temporaire de fonctions de trois jours sera inscrite au dossier du fonctionnaire, et effacée au terme d’un délai de trois ans si aucune autre sanction n’est prononcée (alinéas 10 et 27).

● L’article 15, ensuite, aligne les durées des exclusions temporaires de fonctions des deuxième et troisième groupes de la fonction publique d’État et de la fonction publique hospitalière sur les durées de la fonction publique territoriale.

Dans le cas d’une sanction de deuxième groupe, la durée de l’exclusion serait ainsi de quatre à quinze jours (alinéas 6 et 24), et dans le cas d’une sanction du troisième groupe, de seize jours à deux ans (alinéas 9 et 26), contre trois mois à deux ans actuellement.

Cette harmonisation permet d’introduire, dans le premier cas, une clarification rédactionnelle en lien avec la création de l’exclusion temporaire de trois jours et, dans le second cas, de mieux graduer l’échelle des sanctions.

● L’article 15 étend également la sanction de deuxième groupe de radiation du tableau davancement à la fonction publique territoriale (alinéa 19).

Il s’agit là aussi de donner un levier supplémentaire aux encadrants de proximité. Cette sanction présente en effet l’utilité de sanctionner un agent qui a commis une faute, par exemple, peu de temps après la proposition de son inscription au tableau d’avancement.

● Par ailleurs, l’article 15 précise, pour les trois fonctions publiques, que l’abaissement d’échelon doit permettre de reclasser l’agent sanctionné exclusivement à l’échelon correspondant à un indice immédiatement inférieur à celui afférent à l’échelon détenu par l’agent (alinéas 5, 14 et 26).

Il est également précisé que la rétrogradation doit permettre de reclasser l’agent au grade immédiatement inférieur à un échelon correspondant à un indice égal ou à défaut immédiatement inférieur à celui afférent à l’échelon (alinéas 8, 17 et 24).

Il s’agit ainsi de prémunir les agents publics de pratiques diverses de la part des autorités disciplinaires et d’inscrire dans le droit positif la jurisprudence en la matière. La cour administrative de Douai avait ainsi jugé que la rétrogradation au grade immédiatement inférieur était la solution la plus équitable, car elle ne conduisait pas à considérer comme inexistantes les années de service entre la date de la dernière promotion et la sanction ([233]).

● Le déplacement d’office demeure en revanche une sanction applicable seulement dans la fonction publique d’État, cette sanction étant difficile à mettre en œuvre dans le cas de collectivités territoriales et d’établissement hospitaliers sans employeur commun.

éCHELLE DES SANCTIONS prévue par le projet de loi

 

Trois versants de la fonction publique

Premier groupe

– avertissement

– blâme

– exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de trois jours

Deuxième groupe

– radiation du tableau d’avancement

– abaissement d’échelon

– exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quatre de quinze jours

Troisième groupe

– rétrogradation

– exclusion temporaire de fonctions pour une durée de seize jours à deux ans

– déplacement d’office (uniquement FPE)

Quatrième groupe

– mise à la retraite d’office

– révocation

III.   la position de la commission

Suivant l’avis favorable de votre rapporteure, la Commission a adopté un amendement de M. Boris Vallaud et plusieurs députés du groupe Socialistes et apparentés qui modifie l’ordre de présentation des sanctions du deuxième groupe dans la fonction publique territoriale afin d’harmoniser la rédaction avec celles prévues pour la fonction publique d’État et la fonction publique hospitalière.

*

*     *

  titre III

  Simplifier le cadre de gestion des agents publics

Article 16
(art. 25 ter, 25 septies et 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983
portant droits et obligations des fonctionnaires)
Renforcer la transparence et léquité des règles
en matière de contrôle déontologique

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article modifie en profondeur les compétences et attributions de la commission de déontologie de la fonction publique. Il restreint tout d’abord le périmètre des agents publics soumis à son contrôle obligatoire pour le limiter aux agents présentant le plus de risques. En contrepartie, il introduit une nouvelle procédure, qui instaure un filtre du référent déontologue avant une éventuelle saisie de la commission de déontologie.

L’article 16 instaure par ailleurs un contrôle de déontologie pour les personnes qui rejoignent le secteur public en provenance du secteur privé et comprend diverses dispositions visant à assurer une meilleure effectivité au contrôle exercé par la commission.

       Dernières modifications législatives intervenues

Les dispositions relatives à la déontologie ont été profondément modifiées par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires et la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique – dite « Sapin II ».

       Modifications apportées par la Commission

À l’initiative de la rapporteure et des membres du groupe La République en Marche, la Commission a adopté un amendement qui confie, dans un souci de rationalité et d’efficacité, les compétences de la commission de déontologie à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP).

La Commission a également adopté un amendement de votre rapporteure qui vise à rendre publics les avis de la Haute Autorité lorsqu’elle se prononce sur le départ d’un fonctionnaire vers le secteur privé, à condition que ce départ ait été effectif.

I.   L’état du droit

Initialement créée par le décret n° 91-109 du 17 janvier 1991, la commission de déontologie de la fonction publique (CDFP) a été consacrée par le législateur par l’article 87 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques, dite « loi Sapin ».

Elle est actuellement régie par l’article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.

La commission est chargée de donner un avis sur les déclarations des agents des trois fonctions publiques qui souhaitent exercer une activité privée lucrative ou créer ou reprendre une entreprise en cumul avec leur emploi public.

Sa mission est d’apprécier, selon l’article 25 octies de la loi du 13 juillet 1983, si « lactivité quexerce ou que projette dexercer le fonctionnaire risque de compromettre ou de mettre en cause le fonctionnement normal, lindépendance ou la neutralité du service, de méconnaître tout principe déontologique […] ou de placer lintéressé en situation de commettre linfraction prévue à larticle 432-13 du code pénal », c’est-à-dire de prise illégale d’intérêt.

Elle peut également être amenée à rendre des avis ou à formuler des recommandations, notamment sur des projets de charte ou des situations individuelles.

 

Composition et moyens de la commission de déontologie de la fonction publique

Placée auprès du Premier ministre mais rattachée administrativement à la direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP), la commission de déontologie comprend quatorze membres, nommés pour trois ans, renouvelables une fois*.

● Elle est présidée par un conseiller dÉtat – M. Roland Peylet depuis 2017** – et comprend un conseiller maître à la Cour des comptes, un magistrat de l’ordre judiciaire et trois personnalités qualifiées, dont l’une au moins doit avoir exercé des fonctions au sein d’une entreprise privée.

Elle est organisée, selon le versant dont relève l’agent dont le dossier lui est soumis, en quatre formations spécialisées qui comprennent, outre les six membres permanents :

– pour la formation spécialisée pour la fonction publique dÉtat, deux directeurs d’administration centrale ;

– pour la formation spécialisée pour la fonction publique territoriale, un représentant d’une association d’élus de la catégorie de collectivité territoriale ou d’établissement public dont relève l’intéressé, ainsi qu’un directeur ou ancien directeur général des services d’une collectivité territoriale ;

– pour la formation spécialisée pour la fonction publique hospitalière, une personnalité qualifiée dans le domaine de la santé publique, ainsi qu’un inspecteur général des affaires sociales ou un ancien directeur d’hôpital ;

– lorsqu’elle exerce ses attributions en application des articles L. 531-1 à L. 531-16 du code de la recherche, deux personnalités qualifiées dans le domaine de la recherche ou de la valorisation de la recherche.

● La commission est ensuite dotée d’un rapporteur général et d’un rapporteur général adjoint, tous deux issus du Conseil d’État, ainsi que d’une équipe comprenant une vingtaine de rapporteurs issus des juridictions administratives et financières ainsi que d’un universitaire.

● La commission comprend, enfin, un secrétariat de six agents : un de catégorie A et cinq de catégorie B. Son budget pour 2018 sélevait à 429 671 euros, pour assurer la rémunération des agents du secrétariat, l’indemnisation du président, du rapporteur général et du rapporteur général adjoint, ainsi que les vacations des rapporteurs extérieurs et l’organisation des séances.

* Article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

** Décret du 17 février 2017 portant nomination à la commission de déontologie de la fonction publique.

1.   Champ de compétences

Le champ des personnes soumises au contrôle de la commission de déontologie comprend :

– les fonctionnaires civils et les agents contractuels des administrations de l’État, des régions, des départements, des communes et de leurs établissements publics, y compris les établissements publics de santé, seuls les agents ayant la qualité de fonctionnaire étant concernés dans les services et établissements publics à caractère industriel et commercial ([234]) ;

– les praticiens hospitaliers mentionnés aux 1° à 4° de l’article L. 6152‑1 du code de la santé publique ([235]) ;

– les agents contractuels de droit public et de droit privé des nombreux établissements publics, organismes ou autorités mentionnés au I de l’article L. 1451-1 du code de la santé publique ainsi que les agents contractuels de droit public et de droit privé d’une autorité administrative ou publique indépendante, sans préjudice des dispositions spécifiques qui peuvent leur être applicables ([236]) ;

– les membres de cabinets ministériels, les collaborateurs du Président de la République et les collaborateurs de cabinet des autorités territoriales ([237]) ;

– les fonctionnaires civils des services publics – établissements publics d’enseignement supérieur, établissements publics de recherche, établissements de santé, entreprises publiques – où la recherche publique est organisée ([238]).

2.   Mode de fonctionnement

● La commission de déontologie se prononce dans les cas de figure suivants :

– lorsquun agent cesse, temporairement ou définitivement, ses fonctions et se propose dexercer une activité lucrative, salariée ou non, « dans une entreprise privée ou un organisme de droit privé ou une activité libérale ». Est assimilé à une entreprise privée « tout organisme ou toute entreprise exerçant son activité dans un secteur concurrentiel conformément aux règles du droit privé » ([239]) ;

– lorsquun agent demande à cumuler une activité accessoire avec son activité principale. Les activités accessoires susceptibles d’être autorisées sont notamment : l’expertise et la consultation, les activités à caractère sportif ou culturel, l’activité de conjoint collaborateur dans une entreprise artisanale, les services à la personne ou encore la vente de biens fabriqués personnellement par l’agent ([240]) ;

– lorsquun agent demande à accomplir un service à temps partiel pour créer ou reprendre une entreprise. Dans ce cas l’autorisation est accordée pour une durée maximale de deux ans, renouvelable pour une durée d’un an.

L’agent concerné doit informer son administration trois mois au moins avant le début de son activité. L’administration saisit alors la commission de déontologie dans les quinze jours. L’agent peut également saisir directement la commission, à condition d’en informer son administration.

Lorsqu’elle est saisie, la commission peut :

– demander au fonctionnaire ou à l’autorité dont il relève tout document nécessaire à l’examen de la saisine ;

– recueillir auprès des personnes publiques et privées toute information nécessaire à l’accomplissement de sa mission ;

– entendre ou consulter toute personne dont le concours lui paraît utile ([241]).

Les référents déontologues

La loi du 20 avril 2016 a créé pour les fonctionnaires et agents publics un droit de « consulter un référent déontologue, chargé de lui apporter tout conseil utile au respect des obligations et des principes déontologiques ([242]) ».

Il en découle l’obligation pour les administrations, les collectivités territoriales et les établissements publics de santé de se doter d’un référent déontologue pour permettre à leurs agents d’exercer ce droit.

Le décret n° 2017-519 du 10 avril 2017 laisse aux administrations une grande liberté dans la mise en place de cette fonction : elle peut être exercée seule ou de façon collégiale, à temps plein ou pas.

Le chef de service a obligation de mettre à la disposition du référent déontologue les moyens nécessaires à l’exercice de sa mission et porter à la connaissance des agents placés sous son autorité les moyens de se mettre en rapport avec lui.

Moins de deux ans après le décret, il est difficile d’apprécier la mise en œuvre de ses dispositions. Pour ce qui concerne la fonction publique d’État, un référent déontologue a été nommé dans chaque département ministériel, à l’exception du ministère de la Justice, en cours de nomination, soit onze référents déontologues nommés pour un total de douze. Parmi eux, sept ont été organisés sous la forme d’un collège de déontologie.

Dans la fonction publique territoriale, les pratiques sont diverses : les fonctions de référent déontologue sont exercées par un agent de la collectivité ou une personnalité extérieure, comme un professeur d’université, par exemple. Beaucoup de centres de gestion exercent par ailleurs cette compétence pour le compte des collectivités. Une charte a été élaborée, en mai 2017, par la Fédération nationale des centres de gestion pour diffuser un cadre de référence et les bonnes pratiques.

La Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) s’est également saisie du sujet et a élaboré récemment un guide déontologique à l’usage des responsables publics et des référents déontologues.

● La commission se prononce ensuite dans un délai de deux mois. En vertu du principe du « silence valant acceptation », l’absence d’avis de la commission à l’expiration de ce délai vaut avis de compatibilité ([243]). La commission peut prononcer :

– un avis de compatibilité ;

– un avis de comptabilité avec réserves, celles-ci étant prononcées pour une durée de deux ans en cas de création ou de reprise d’entreprise et de trois ans en cas de cessation de fonction pour exercer une activité dans le secteur privé ;

– un avis d’incompatibilité ;

– un avis d’incompétence, d’irrecevabilité ou de non-lieu à statuer, le cas échéant.

Dans un souci d’efficacité, le législateur a prévu que les situations les plus simples du point de vue déontologique pouvaient faire l’objet d’avis en forme simplifiée rendus au nom de la commission par son président, ces avis prenant alors la forme d’ordonnances.

En 2017, les avis en forme simplifiée représentaient de 80 à 93 % des avis rendus par la commission, selon le versant de la fonction publique considérée.

Répartition des avis rendus par la commission de déontologie*

 

2014

2015

2016

2017

Avis de compatibilité

1 187

(38,9 %)

1 145

(36,3 %)

1 539

(43,3 %)

-

Avis de compatibilité avec réserves

1 363

(44,7 %)

1 525

(48,4 %)

1 564

(44 %)

-

Avis dincompatibilité

36

(1,2 %)

73

(2,3 %)

74

(2,1 %)

-

Autres (incompétence, non-lieu)

459

(15,1 %)

406

(12,9 %)

375

(10,5 %)

-

Total

3 045

3 149

3 552

7 216

* À lexclusion des avis en forme simplifiée

Source : étude dimpact du projet de loi

Depuis l’entrée en vigueur, en février 2017, de la réforme prévue par la loi du 20 avril 2016, qui instaurait un contrôle obligatoire de la commission pour tous les agents publics, l’activité de la commission a progressé de 128 % pour passer de 3 552 saisies en 2016 à 7 216 en 2017 et probablement plus de 8 000 en 2018.

● Les avis de compatibilité avec réserves et d’incompatibilité lient l’administration et s’imposent à l’agent. S’il ne les respecte pas, l’agent s’expose aux sanctions suivantes :

– s’il est fonctionnaire, il peut faire l’objet de sanctions disciplinaires ;

– s’il est retraité, il peut faire l’objet d’une retenue sur pension dans la limite de 20 % pendant les trois ans suivant la cessation de ses fonctions ;

– s’il est contractuel, son contrat prend fin à la date de notification de l’avis, sans préavis ni indemnité de rupture.

II.   la réforme proposée

Le présent article réécrit en grande partie les dispositions relatives à la commission de déontologie prévues par la loi du 13 juillet 1983 pour, d’une part, y apporter une plus grande cohérence rédactionnelle et surtout, d’autre part, y introduire des modifications significatives.

1.   Le recentrage du contrôle de la commission sur les situations les plus exposées

Le de l’article 16 modifie le III de l’article 25 septies de la loi du 13 juillet 1983 pour restreindre le périmètre des agents concernés par la saisine obligatoire de la commission de déontologie en cas de départ, définitif ou temporaire, vers le secteur privé, ou de demande de création ou de reprise d’une entreprise (alinéa 5).

Il s’agit de tenir compte de l’activité de la commission observée ces dernières années, quand près de 90 % des avis, parce qu’ils ne posent pas de difficulté, sont rendus sous forme simplifiée, et que près de la moitié des avis rendus sous forme collégiale sont des avis de compatibilité. Au total, seulement 2 % des avis rendus par la commission sont des avis d’incompatibilité.

Cette disposition a donc pour objet de limiter la saisine directe aux personnes pour lesquelles le risque déontologique, notamment celui de conflit d’intérêts, est le plus élevé en raison de la nature des fonctions ou du niveau hiérarchique qu’elles occupent. La liste exacte des emplois concernés sera fixée par décret en Conseil d’État (alinéa 45).

S’il est difficile d’évaluer le nombre de dossiers qui pourraient être soumis à la commission, il est probable que ce chiffre ne dépassera pas quelques centaines par an, selon l’étude d’impact du projet de loi. Pour ces dossiers, la commission sera donc en mesure d’effectuer un contrôle plus approfondi.

Pour les autres emplois, c’est-à-dire la très grande majorité des emplois publics, l’article prévoit un mécanisme nouveau, avec l’intégration du référent déontologue, créé par la loi du 20 avril 2016, dans la procédure.

L’autorité hiérarchique saisira ainsi le référent déontologue en cas de doute sérieux sur la compatibilité de l’activité envisagée. C’est seulement si l’avis du référent ne permet pas de lever ce doute que l’autorité hiérarchique pourra alors saisir la commission de déontologie. Le  de l’article modifie à cette fin le III de l’article 25 octies de la loi du 13 juillet 1983 (alinéa 19).

Ce nouveau mécanisme permet de tirer les conséquences de la mise en place des référents déontologues en leur confiant une mission centrale.

Dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d’État estime que cette réforme, en déconcentrant largement ce contrôle de déontologie, « met en place des mécanismes propres à renforcer une indispensable diffusion de la culture de la déontologie chez les agents et les employeurs publics ».

2.   Linstauration dun contrôle lors dune entrée depuis le secteur privé

L’article instaure un contrôle de la commission, de même nature que celui qui existe en cas de départ vers le secteur privé, sur le retour ou le recrutement dans l’administration de personnes ayant exercé une activité privée au cours des trois années précédant leur prise de fonction.

Le  insère à cette fin un nouveau paragraphe V à l’article 28 octies de la loi du 13 juillet 1983 ainsi qu’un nouvel alinéa dans la liste des compétences de la commission de déontologie.

Il s’agit de corriger la dissymétrie qui existe aujourd’hui entre les départs, encadrés par la loi, et les arrivées ou retours, qui ne sont soumis à aucune obligation déontologique. Cette mesure avait été proposée par nos collègues Fabien Matras et Olivier Marleix dans leur rapport d’information sur la déontologie des fonctionnaires ([244]). Elle est également rendue indispensable par la volonté du Gouvernement d’assurer une plus grande fluidité des parcours entre le secteur public et le secteur privé et de faciliter le recours à l’emploi de contractuels.

Cela concernera à la fois les fonctionnaires qui ont cessé temporairement leurs fonctions dans le secteur public et les contractuels qui accèdent pour la première fois à un emploi public (alinéa 16).

Concrètement, l’alinéa 22 précise que la commission de déontologie sera saisie pour les nominations de directeurs d’administration centrale ou de dirigeant d’établissement public qui relèvent d’un décret en conseil des ministres. Ces emplois sont, selon l’étude d’impact du projet de loi, au nombre de 228.

Pour les autres emplois, il appartiendra à l’autorité hiérarchique dont relève l’emploi concerné de saisir, en cas de doute sérieux, le référent déontologue puis, le cas échéant, la commission de déontologie (alinéa 23).

3.   Assurer une meilleure effectivité au contrôle de la commission

L’article 16 entend assurer une meilleure effectivité au contrôle exercé par la commission de déontologie par deux moyens :

– en améliorant la capacité dauto-saisine de la commission en cas de défaut de saisine préalable par l’administration ou l’agent.

Le VII de l’article 25 octies de la loi du 13 juillet 1983 issu de la rédaction proposée par le présent article précise ainsi que le président de la commission pourra saisir la commission dans les trois mois à compter de la découverte d’un défaut de saisine, et non plus à compter du début de l’activité exercée dans le secteur privé ou la date de création de l’entreprise (alinéa 25) ;

– en créant une sanction nouvelle pour les contractuels : l’impossibilité d’être recruté par l’administration pendant trois ans à compter du jour où celle-ci a eu connaissance de l’avis de la commission (alinéa 41) ;

– en étendant l’application de l’ensemble des sanctions aux cas des agents qui n’ont pas saisi leur autorité hiérarchique d’une demande préalable à un départ dans le secteur privé (alinéa 43).

4.   Les autres dispositions

L’article 16 comprend par ailleurs plusieurs dispositions de clarification essentiellement rédactionnelles.

Son de l’article modifie ainsi le I de l’article 25 ter de la loi du 13 juillet 1983 pour toiletter les dispositions relatives aux modalités de gestion de déclaration d’intérêt.

Le modifie le I de l’article 25 octies de la loi du 13 juillet 1983 pour y faire figurer la composition de la commission de déontologie. Sa composition détaillée ne figure toutefois plus dans la loi et est renvoyée à un décret. Il y est également précisé que le respect de l’obligation de parité ne s’appliquera plus aux seuls membres titulaires, mais aussi à leurs suppléants (alinéa 10).

III.   LA POSITION DE la COMMISSION

● La commission des Lois a adopté deux amendements identiques, avec avis favorable du Gouvernement, présentés par votre rapporteure et par M. Fabien Matras et les membres du groupe La République en Marche, qui procède à la fusion de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) et de la commission de déontologie de la fonction publique.

Il confie pour cela les compétences de la commission de déontologie, prévues à l’article 25 octies de la loi du 13 juillet 1983, à la HATVP et procède aux nombreuses coordinations rendues nécessaires par cette fusion.

Cette fusion avait été proposée par nos collègues Fabien Matras et Olivier Marleix dans leur rapport d’information précité et était déjà préconisée, en 2011, par la commission de réflexion sur la prévention des conflits d’intérêt dans la vie publique, présidée par M. Jean-Marc Sauvé, qui avançait alors un « souci de rationalisation administrative, de cohérence et defficacité » ([245]).

Il convient en effet de mettre fin aux chevauchements de compétences lorsqu’il s’agit de se prononcer sur des agents publics et de bénéficier de moyens, d’expertise et d’une visibilité renforcés.

● Outre de nombreux amendements rédactionnels de votre rapporteure, la commission a adopté deux autres amendements :

– un amendement de notre collègue Laurence Vichnievsky, sous-amendé par votre rapporteure, avec avis favorable du Gouvernement, qui vise à compléter la liste des situations dans lesquelles l’administration doit se conformer aux avis de la Haute Autorité ;

– un amendement de votre rapporteure, avec avis favorable du Gouvernement, qui vise à rendre publics les avis rendus par la Haute Autorité au titre de ses fonctions de contrôle déontologique des agents publics, à condition que les agents aient effectivement pris le poste ayant fait l’objet du contrôle de compatibilité. Il s’agit d’une recommandation suggérée de longue date, qui doit permettre de diffuser la doctrine en la matière.

*

*     *

Article 16 bis
(art. 19, 20 et 23 de la loi n° 2013 907 du 11 octobre 2013
relative à la transparence de la vie publique)
Fusion de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique et de la commission de déontologie de la fonction publique

Introduit par la Commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 16 bis a pour objet de procéder, dans la loi n° 2013 907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique, à la fusion de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) et de la commission de déontologie de la fonction publique.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique a été modifiée par la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes.

       Modifications apportées par la Commission

Cet article est issu d’un amendement de M. Fabien Matras et des membres du groupe La République en Marche, adopté avec avis favorables de la rapporteure et du Gouvernement.

___

Le présent article procède, dans la loi du 11 octobre 2013 qui détaille la composition et les compétences de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), à la fusion de celle-ci et de la commission de déontologie de la fonction publique en une seule et même autorité. Il y effectue, par cohérence avec les dispositions adoptées à l’article 16, les coordinations nécessaires.

Le dispositif adopté par la Commission prévoit la coexistence de deux collèges : un qui conserverait les compétences actuelles de la Haute Autorité, et un nouveau collège, compétent à l’égard des agents publics en application de l’article 25 octies de la loi du 13 juillet 1983, en remplacement des attributions exercées jusqu’ici par la commission de déontologie.

*

*     *

Article 16 ter
(art. 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires)
Publication annuelle des hautes rémunérations de la fonction publique

Introduit par la Commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 16 ter vise à prévoir une publication annuelle des plus hautes rémunérations de la fonction publique.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires a été modifié par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.

       Modifications apportées par la Commission

Cet article est issu de l’adoption d’un amendement de Mme Yaël Braun-Pivet, présidente de la commission des Lois, et des membres du groupe La République en Marche, après avis favorables de la rapporteure et du Gouvernement

___

Le présent article prévoit la remise au Parlement d’un rapport sur les hautes rémunérations dans la fonction publique, qui précisera, pour chacune des trois fonctions publiques, le montant moyen des rémunérations au dernier centile, le nombre d’agents concernés et les principaux corps ou emplois occupés.

*

*     *

Article 16 quater
(art. 16 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes)
Prise en compte de la pension de retraité dans le calcul de la rémunération des dirigeants des autorités administratives indépendantes

Introduit par la Commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 16 quater vise à limiter la rémunération des présidents d’autorités administratives indépendantes en prenant en compte, dans le calcul de leur rémunération, leur éventuelle pension de retraité de la fonction publique.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 16 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes a fixé les règles d’emploi des fonctionnaires.

       Modifications apportées par la Commission

Cet article est issu de l’adoption d’un amendement de M. Guillaume Gouffier-Cha et des membres du groupe La République en Marche, après avis favorables de la rapporteure et du Gouvernement.

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Le présent article a pour objet de prendre en compte la liquidation de leur pension dans le calcul de la rémunération des personnels retraités de la fonction publique qui seraient amenés à reprendre une activité professionnelle au sein d’une autorité administrative indépendante en la qualité de membre ou de président, afin d’en limiter le montant.

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Article 16 quinquies
(art. 16 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 portant statut général des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes)
Encadrement des rémunérations des dirigeants
des autorités administratives indépendantes

Introduit par la Commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 16 quinquies a pour objet d’instituer un dispositif d’encadrement de la rémunération des dirigeants et des membres des autorités administratives et publiques indépendantes afin d’harmoniser les pratiques, très diverses, relevées par un rapport de la Cour des comptes du 12 février 2018 ([246]).

       Modifications apportées par la Commission

Le présent article est issu de l’adoption d’un amendement de M. Guillaume Gouffier-Cha et des membres du groupe La République en Marche, après avis favorables de la rapporteure et du Gouvernement.

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Article 17
Habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance afin de simplifier et moderniser diverses dispositions
relatives à la protection sociale des agents publics

Adopté par la Commission avec modifications

  Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour réformer et adapter à la fonction publique les modalités de financement de la protection sociale complémentaire des agents publics, l’organisation des instances médicales et de la médecine agréée, les règles applicables en matière d’aptitude physique à l’entrée dans la fonction publique ainsi que certaines dispositions relatives au congé pour maternité, au congé pour adoption, au congé de paternité et au congé du proche aidant.

  Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté plusieurs amendements rédactionnels présentés par votre rapporteure.

I.   L’état du droit

● Les modalités de financement de la protection sociale complémentaire des agents publics ont été modifiées par l’article 39 de la loi n° 2007-148 du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique. Cet article a ouvert la possibilité aux employeurs publics de participer au financement des garanties de protection sociale complémentaire de leurs agents, dès lors que les contrats garantissent la mise en œuvre de dispositifs de solidarité entre les bénéficiaires, actifs et retraités ([247]).

Dans la fonction publique de l’État, le dispositif mis en place conduit au versement a posteriori par l’employeur public d’une aide à un organisme référencé, choisi pour sept ans au terme d’une procédure de mise en concurrence ([248]). Dans la fonction publique territoriale, les collectivités peuvent participer au financement de la protection complémentaire de leurs agents soit par le biais d’une convention de participation conclue avec un organisme complémentaire, soit par le biais d’une labellisation délivrée à un organisme complémentaire ([249]). Dans la fonction publique hospitalière, le fonctionnaire en activité bénéficie pour sa part de la gratuité des soins qui lui sont délivrés dans l’établissement dans lequel il exerce ([250]).

Ces dispositifs apparaissent aujourd’hui peu adaptés et peu équitables par rapport au secteur privé, dans la mesure où la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi a généralisé, pour l’ensemble des salariés, la participation obligatoire des employeurs à leur couverture complémentaire. Le Gouvernement a initié l’année dernière une mission, confiée à des membres de l’inspection générale des affaires sociales, de l’inspection générale des finances et de l’inspection générale de l’administration, pour dresser un état des lieux de la couverture sociale complémentaire des agents publics et identifier des pistes de réformes. Ses conclusions devraient être rendues avant la fin de l’année 2019.

● Les instances médicales sont des instances consultatives compétentes en matière de droit à congés pour raison de santé et d’accidents et maladies professionnels ainsi qu’en matière de retraite pour invalidité et d’allocation temporaire d’activité. Elles rencontrent aujourd’hui de nombreuses difficultés en raison de la multiplicité des intervenants et du cloisonnement de certains dispositifs qui génèrent des délais de procédure anormalement longs. Une mission diligentée par le Gouvernement a rendu un rapport de diagnostic en mars 2017 qui envisage plusieurs pistes pour améliorer le pilotage de ces instances, la rémunération des médecins agréés ainsi que le financement et la coordination de l’ensemble du dispositif ([251]).

En matière de médecine de prévention, les collectivités et leurs établissements publics rencontrent des difficultés, compte tenu notamment de la pénurie de médecins du travail en France, pour respecter leurs obligations et développer des politiques de prévention de nature à améliorer les conditions de vie et de travail de leurs agents.

● La condition daptitude physique des fonctionnaires est vérifiée par des médecins agréés au cours d’une visite médicale. Or il semble que, mis à part quelques corps et cadres d’emplois spécifiques, l’utilité de cette condition d’aptitude est relative, notamment au regard, d’une part, des possibilités de compensation du handicap et, d’autre part, du caractère discriminant de l’éviction d’un candidat au regard de son état de santé.

● L’ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d’activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique, a simplifié la procédure d’octroi du temps partiel pour raison thérapeutique (TPT) en supprimant la saisine systématique des instances médicales et en permettant l’octroi du TPT après un jour d’arrêt de travail. Cette ordonnance a également créé la période de préparation au reclassement (PPR) visant à accompagner les agents publics déclarés inaptes à leurs fonctions dans une reconversion professionnelle.

Face à l’enjeu de prévention de la désinsertion professionnelle des agents publics dont l’état de santé est diminué, il apparaît nécessaire de poursuivre les efforts engagés précédemment en renforçant ces dispositifs, voire en en construisant de nouveaux, afin de favoriser le reclassement des agents publics devenus inaptes. Il apparaît également nécessaire, en s’inspirant des évolutions intervenues dans le secteur privé, d’ouvrir une réflexion en matière de maintien et de retour en emploi des agents publics.

● En matière de couverture des risques liés à la maternité, ladoption ainsi que la paternité et laccueil de lenfant, si les droits accordés aux agents publics sont, en termes de durée des congés, identiques à ceux prévus par le code de la sécurité sociale pour les salariés du secteur privé affiliés au régime général, ils ne le sont pas intégralement en termes de rémunération.

La présidente de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, Mme Marie-Pierre Rixain, avait remis à la ministre des Solidarités et de la Santé, l’année dernière, un rapport relatif aux congés pour maternité qui formulait des propositions afin de permettre aux femmes de bénéficier d’un système plus lisible, équitable et favorisant le libre choix dans la prise de congés malgré les contraintes spécifiques à chaque activité professionnelle ([252]). Par ailleurs, la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a substitué le congé du proche aidant au congé de soutien familial pour les salariés du secteur privé, dont ne peuvent aujourd’hui bénéficier les agents publics.

II.   LA Réforme proposéE

Sur le fondement de l’article 38 de la Constitution, le présent article habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour, en prenant en compte les réflexions en cours et les pistes avancées par les récents rapports :

– réformer la participation des employeurs publics au financement des garanties de protection sociale complémentaire de leurs personnels pour favoriser la couverture sociale complémentaire des agents publics ;

– réformer l’organisation et le fonctionnement des instances médicales et de la médecine agréée et autoriser la mutualisation des services de médecine de prévention pour faciliter la prise en charge des agents publics.

Compte tenu des nécessaires consultations à mener, ces ordonnances seront prises dans un délai de quinze mois à compte de la promulgation de loi.

L’habilitation autorise également le Gouvernement à :

– simplifier les règles applicables aux agents publics relatives à l’aptitude physique à l’entrée dans la fonction publique, aux différents congés et positions statutaires pour maladies d’origine non professionnelle et professionnelle et aux prérogatives et obligations professionnelles des agents publics traitant les dossiers d’accidents et maladies professionnels ;

– réformer les dispositions applicables aux agents publics en matière de temps partiel pour raison thérapeutique et de reclassement par suite d’une altération de leur état de santé pour favoriser le maintien et leur retour à l’emploi ;

– clarifier et compléter, en transposant et, le cas échéant, en adaptant les évolutions intervenues en faveur des salariés relevant du code du travail et du régime général de sécurité sociale, les dispositions relatives au congé pour maternité, au congé pour adoption, au congé de paternité et d’accueil de l’enfant et au congé du proche aidant des agents publics.

Dans ces trois derniers cas, la durée de l’habilitation est limitée à douze mois.

Ainsi que l’a souligné le Conseil d’État dans son avis sur le projet de loi, le champ de l’habilitation est défini de manière suffisamment précise et n’appelle donc pas d’observation particulière de la part de votre rapporteure.

III.   lA POSITION DE la COMMISSION

La Commission a adopté plusieurs amendements rédactionnels de votre rapporteure.

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Article 18
(art. 7-1 et 136 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale)
Harmoniser le temps de travail dans la fonction publique territoriale

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise à harmoniser la durée du travail dans la fonction publique territoriale en supprimant les régimes dérogatoires à la durée légale du travail de 1 607 heures.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 7-1 de la loi n° 84-53 a été modifié par la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010 relative à la rénovation du dialogue social et comportant diverses dispositions relatives à la fonction publique.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement rédactionnel de votre rapporteure.

I.   L’état du droit

La mise en œuvre de l’aménagement et de la réduction du temps de travail (ARTT), en 2001, qui n’était initialement pas prévue pour la fonction publique, s’est effectuée assez rapidement dans les trois versants.

La nouvelle durée du temps de travail y a été déterminée comme suit :

Durée de travail dans la fonction publique

Nombre de jours dans l’année

365 jours

Nombre de jours de repos hebdomadaires

104 jours

Nombre de jours fériés (moyenne)

8 jours

Nombre de jours de congés prévus

25 jours

Nombre de jours de travail

228 jours

Nombre d’heures travaillées annuellement

1 596 heures (228 x 7)

Le volume de 1 596 heures, arrondi à 1 600, a été porté à 1 607 heures à compter du 1er janvier 2005 en raison de l’institution de la journée de solidarité pour l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées ([253]).

Dans la fonction publique territoriale, la règle des 1 607 heures s’applique sur la base de l’article 1er du décret n° 2001-623 du 12 juillet 2001, pris en application de l’article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique territoriale.

L’article 7-1 précise ainsi que « les règles relatives à la définition, à la durée et à laménagement du temps de travail des agents des collectivités territoriales et des établissements publics mentionnés au premier alinéa de larticle 2 sont fixées par la collectivité ou létablissement, dans les limites applicables aux agents de lÉtat, en tenant compte de la spécificité des missions exercées par ces collectivités ou établissements. »

Pour ne pas méconnaître le principe de libre administration des collectivités territoriales, inscrit à l’article 72 de la Constitution, les règles relatives au temps de travail sont fixées par délibération des collectivités, dans les limites applicables à la fonction publique d’État.

Par dérogation aux règles de droit commun, le même article 7-1 de la loi du 26 janvier 1984 prévoit néanmoins la possibilité de maintenir des régimes de travail inférieurs à la durée légale, à la double condition qu’ils aient été mis en place antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001 relative à la résorption de l’emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique territoriale, et que cette dérogation ait été formalisée par une décision expresse de l’organe délibérant de la collectivité, après avis du comité technique.

À l’époque, les collectivités avaient été en effet encouragées à baisser leur volume horaire de travail afin de créer une dynamique de recrutements supplémentaires, à condition de le formaliser par une délibération. Chaque collectivité devait donc délibérer sur l’application des 35 heures et, le cas échéant, sur le maintien de la situation antérieure.

Le rapport de la mission sur le temps de travail dans la fonction publique, présidée par M. Philippe Laurent ([254]), cite, sans toutefois le reprendre à son compte, le chiffre de 1 500 collectivités – sur 50 000 employeurs locaux – qui auraient ainsi conservé leur régime dérogatoire, sans toujours le formaliser par une délibération.

L’existence de cette dérogation a pour conséquence un temps de travail effectif moyen, dans la fonction publique territoriale, inférieur à 1 607 heures.

S’il n’existe pas de statistique nationale sur la question, compte tenu de la multiplicité des employeurs locaux, la Cour des comptes a procédé, en 2016 ([255]), à une évaluation à partir d’un échantillon de 103 collectivités locales dont la gestion a été contrôlée par les chambres régionales des comptes en 2015. Les chambres régionales ont mesuré le temps de travail annuel tel qu’il est fixé par les assemblées délibérantes de chaque collectivité. Selon leurs résultats, la durée théorique de travail des agents, dans les collectivités contrôlées, était en moyenne de 1 562 heures par an. Dans seulement 20 % de ces collectivités, elle était alignée sur la durée réglementaire.

Le rapport précité de la mission sur le temps de travail dans la fonction publique propose une estimation sensiblement supérieure : 1 578 heures, toujours assez loin des 1 607 heures.

II.   La réforme PROPOsée

● Le présent article a pour objet de supprimer les régimes dérogatoires antérieurs à 2001 dans la fonction publique territoriale.

Si, dans la lignée de la circulaire du 31 mars 2017 relative à l’application des règles en matière de temps de travail dans les trois versants de la fonction publique, certaines collectivités ont déjà engagé une démarche tendant à l’abrogation de ces régimes, il apparaît en effet nécessaire que l’ensemble des collectivités s’y engagent à leur tour.

Ainsi que le souligne la Cour des comptes dans son rapport précité, « ces minorations du temps de travail amputent le potentiel disponible pour assurer les services publics locaux. Elles renchérissent le coût unitaire de lheure ou du jour travaillé. » L’allongement de la durée annuelle effective par son alignement sur la durée légale pourrait permettre, toujours selon la Cour, une réduction des effectifs d’environ 3 %, soit 57 000 agents ainsi qu’une économie de l’ordre de 1,2 milliard d’euros.

● Le I de l’article 18 impose aux collectivités et établissements ayant maintenu un régime de travail dérogatoire de déterminer, dans les conditions de droit commun, de nouveaux cycles de travail.

Les collectivités concernées disposeront d’un délai d’un an à compter du renouvellement de leur assemblée délibérante pour mettre en œuvre la suppression de ces régimes, soit mars 2021 pour le bloc communal et mars 2022 pour les conseils départementaux et régionaux.

Le II abroge le dernier alinéa de l’article 7-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, qui prévoyait cette dérogation.

Le III, enfin, modifie l’article 136 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 pour rendre applicables aux contractuels les dispositions de l’article 7-1.

III.   lA POSITION DE la COMMISSION

La Commission a adopté un amendement rédactionnel de votre rapporteure.

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Article 19
(art. 12-4, 14 et 18-2 [nouveau] de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale)
Fusion de centres de gestion et rapport annuel du centre national de la fonction publique territoriale au Parlement

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 19 vise à permettre, d’une part, la fusion de centres de gestion de la fonction publique territoriale situés dans des départements limitrophes et, d’autre part, la transmission au Parlement d’un rapport annuel du centre national de la fonction publique territoriale.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 12-4 de la loi du 26 janvier 1984 a été modifié par la loi n° 2007-209 du 19 février 2007 relative à la fonction publique territoriale et l’article 14 par l’ordonnance n° 2016-1562 du 21 novembre 2016 portant diverses mesures institutionnelles relatives à la collectivité de Corse.

       Modifications apportées par la Commission

À l’initiative de la rapporteure, la Commission a adopté trois amendements qui visent à encourager la mutualisation, au niveau régional, de certaines missions des centres de gestion qui nécessitent une expertise pointue. Elle a également adopté un amendement de notre M. Éric Poulliat qui précise que le rapport annuel du CNFPT doit comprendre un bilan des formations délivrées en matière de déontologie.

I.   L’état du droit

Depuis la loi n° 87-529 du 13 juillet 1987 modifiant les dispositions relatives à la fonction publique territoriale, le recrutement, la gestion et la formation des fonctionnaires territoriaux est assurée par deux organismes ([256]) :

– le centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT), établissement public en charge de la formation des agents des collectivités territoriales, mais aussi de l’organisation des concours et examens des catégories d’encadrement supérieur ;

– les centres de gestion de la fonction publique territoriale, organisés au niveau départemental, qui recrutent et gèrent, au profit des collectivités qui leur sont affilées, leurs agents.

● Les centres de gestion de la fonction publique territoriale sont des établissements publics locaux, régis par les articles 13 et suivants de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale. Ils regroupent les collectivités territoriales et établissements qui leur sont affiliés à titre obligatoire, pour ceux qui emploient moins de 350 fonctionnaires, ou volontaire.

Dans les conditions prévues par l’article 23 de la loi du 26 janvier 1984, ils assument, au profit des collectivités et établissements affiliés, des missions, obligatoires, de gestion des personnels territoriaux : organisation des concours de recrutement, aide au reclassement, fonctionnement des commissions administratives paritaires et des conseils discipline, assistance juridique statutaire, etc.

Pour l’exercice des missions obligatoires, une cotisation, obligatoire, est versée par les collectivités et les établissements, assise sur la masse salariale, dont le taux est fixé par le conseil d’administration du centre de gestion, dans la limite maximale de 0,8 %.

Outre les missions obligatoires, les centres de gestion peuvent assumer des missions facultatives comme l’assistance juridique, l’exercice des secrétariats des commissions de réforme et des comités médicaux. Ces missions donnent lieu, pour leur financement, soit à une cotisation additionnelle, soit à un financement par convention.

● Les centres sont organisés dans chaque département et administrés par un conseil de quinze à trente membres, élus locaux représentant les collectivités et établissements affiliés.

Ainsi que le prévoit l’article 14 de la loi du 26 janvier 1984, ils peuvent décider, par délibérations concordantes de leurs conseils d’administration, de constituer un centre commun au niveau départemental, auquel ils peuvent confier tout ou partie de leurs missions.

Ils peuvent également s’organiser, au niveau régional ou interrégional, pour l’exercice de leurs missions. Ils élaborent alors à cette fin une charte, qui désigne le centre chargé d’assurer la coordination et les modalités d’exercice des missions.

Quelques centres de gestion spécifiques existent : deux centres interdépartementaux pour l’ensemble de la région Ile-de-France ([257]), un centre de gestion unique pour le département du Rhône et la métropole de Lyon ([258]), deux centres de gestion pour la Corse ([259]). La ville de Paris, enfin, ne relève d’aucun centre de gestion ([260]).

À l’exception des cas particuliers ci-dessus, il existe pour chaque département de France métropolitaine et chaque collectivité d’outre-mer un centre de gestion, soit 96 au total. Ils emploient environ 4 000 agents.

II.   La réforme PROPOSée

● Le de l’article 19 complète l’article 12-4 de la loi du 26 janvier 1984 pour prévoir la remise par le CNFPT dun rapport annuel au Parlement portant sur son activité et ses ressources.

Dans la mesure où la ressource principale de cet établissement provient d’une cotisation obligatoire assise sur la masse salariale des agents des collectivités – pour une recette de 386 millions d’euros en 2017 – il apparaît en effet indispensable que le Parlement soit informé de manière à la fois plus transparente et plus complète de son utilisation.

Le rapport devra être transmis au Parlement avant le 30 septembre de chaque année afin de permettre aux parlementaires, qui votent le taux plafond de la cotisation, d’apprécier l’activité du centre et sa gestion avant l’examen du projet de loi de finances.

● Le du présent article ajoute une exception à l’organisation départementale des centres de gestion en créant un nouvel article 18-3 à la loi du 26 janvier 1984 qui autorise les centres de gestion de départements limitrophes à fusionner pour constituer un centre de gestion interdépartemental commun.

Comme le souligne l’étude d’impact du projet de loi, la mutualisation des missions des centres de gestion se fait de façon assez hétérogène sur le territoire. Or là où ils ont mutualisé leurs missions, ils sont désormais capables de développer des expertises pointues dans certains domaines et d’offrir ainsi des services de plus grande qualité aux collectivités et à leurs agents.

Il s’agit d’aller plus loin que la simple mutualisation en rendant possible la fusion, selon le modèle éprouvé des centres interdépartementaux de la région Ile-de-France. Ces fusions doivent permettre de générer certaines économies d’échelle, mais surtout de professionnaliser ces nouvelles entités.

L’introduction dans la loi de cette faculté nouvelle est donc de nature à encourager les centres à s’inscrire dans une dynamique de rapprochement plus grande. Seuls les centres de gestion des départements limitrophes seront autorisés à fusionner, cette faculté n’étant en revanche pas limitée au ressort administratif des régions.

Cette proposition figurait dans le rapport sur la formation et la gestion des carrières des agents des collectivités territoriales, remis par nos collègues Jacques Savatier, député de la Vienne, et Arnaud de Belenet, sénateur de la Seine-et-Marne, au Premier ministre le 12 février dernier ([261]).

III.   La position de la commission

● La Commission a adopté un amendement de M. Éric Poulliat, avec avis favorables de votre rapporteure et du Gouvernement. Issu des travaux de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, il vise à préciser que le rapport au Parlement que devra remettre le CNFPT en application du présent article devra consacrer des développements spécifiques aux formations dispensées en matière de déontologie.

● Outre un amendement rédactionnel, la Commission a également adopté trois amendements de votre rapporteure, avec avis favorables du Gouvernement, qui visent à encourager le mouvement de mutualisation des centres de gestion au niveau régional afin de renforcer leur niveau d’expertise :

– le premier crée un schéma régional ou interrégional de coordination, de mutualisation et de spécialisation en remplacement des chartes actuellement élaborées par les centres de gestion qui organisent certaines de leurs missions au niveau régional. Ce schéma précisera les missions exercées par le centre coordonnateur pour le compte des autres centres et celles exercées par un ou plusieurs centres pour le compte des autres. Il définira également les moyens mis en commun pour l’exercice des missions régionalisées ;

– le deuxième vise à introduire l’obligation pour le centre de gestion coordonnateur au niveau régional de conventionner avec le CNFPT afin d’articuler leurs actions territoriales ;

– le troisième, enfin, complète la liste des missions qui peuvent être confiées aux centres de gestion au niveau régional. Les missions en question font appel à un haut niveau d’expertise qui ne nécessite pas une proximité départementale. On y trouve notamment une mission d’appui aux référents déontologues.

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Article 20
(art. 4, 6, 19 et 79 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires
relatives à la fonction publique hospitalière)
Simplification de certaines mesures relatives à la gestion des emplois de la fonction publique hospitalière

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article comprend différentes mesures relatives à la gestion de la fonction publique hospitalière : définition des emplois supérieurs hospitaliers, déconcentration depuis le centre national de gestion vers les établissements des actes de gestion les plus courants et suppression des arrêtés indiciaires.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 4 de la loi du 9 janvier 1986 a été modifié par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires.

I.   L’état du droit

Les emplois de direction et d’encadrement de la fonction publique hospitalière sont assurés par trois corps de fonctionnaires :

– les directeurs dhôpital (DH). Recrutés par voie de concours et formés pendant deux ans à l’école des hautes études en santé publique (EHESP), ils ont vocation à exercer dans les établissements publics de santé de plus de 250 lits, dont ils assurent alors la direction. Ils ont également la possibilité de partir en détachement dans une autre fonction publique, en collectivité territoriale ou en administration centrale. Ils étaient 2 502 en activité en 2018 ;

– les directeurs détablissement sanitaire, social et médico-social (D3S). Recrutés par voie de concours et formés également pendant deux ans à l’EHESP, ils dirigent des structures comme les établissements pour personnes âgées dépendantes, les maisons d’enfants à caractère social ou les maisons d’accueil spécialisées. Ils peuvent exercer en tant que directeur adjoint dans les établissements hospitaliers. Ils étaient 1 471 en activité en 2018 ;

– les directeurs de soins (DS) sont également recrutés par concours. Ils suivent une formation d’un an à l’EHESP. Ils peuvent exercer ensuite dans un établissement hospitalier, pour la coordination générale des soins infirmiers, diriger un institut de formation préparant aux formations paramédicales, ou encore assurer une fonction de conseiller technique au sein d’une agence régionale de santé. Ils étaient 711 en activité en 2018.

Leur recrutement, que ce soit par la voie du concours mais aussi par détachement ou au tour extérieur, ainsi que la gestion de leur carrière sont effectués au niveau national, ainsi que le prévoit l’article 4 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.

Ces compétences sont assurées par le centre national de gestion. Établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère en charge de la santé, le centre national de gestion assure en effet le recrutement, la gestion statutaire et le développement des ressources humaines des personnels de direction de la fonction publique hospitalière et des praticiens hospitaliers ainsi que de l’organisation des concours nationaux administratifs et médicaux ([262]).

Le centre national de gestion assure donc, pour les corps de direction, les procédures de nomination sur emplois fonctionnels, d’avancement de grade, d’avancement d’échelon ou encore de recours sur les évaluations professionnelles et le régime indemnitaire. Il assure également le secrétariat de nombreuses instances consultatives nationales, comme les commissions administratives paritaires nationales, le comité consultatif national ainsi que, pour les directeurs, celui de la commission des conditions de travail ([263]).

II.   la réforme proposée

● Le du présent article a tout d’abord pour objet d’assurer la bonne application des dispositions prévues par l’article 7 du projet de loi, qui prévoit d’ouvrir aux contractuels de nouveaux postes d’emplois fonctionnels. Pour ce qui concerne la fonction publique hospitalière, ce sont ainsi 81 emplois, actuellement dévolus à des directeurs d’hôpital, qui seraient ouverts à des contractuels, portant le total des postes ouverts à 365 emplois.

Pour ce faire, il apparaît indispensable de définir avec une précision suffisante les emplois d’encadrement de la fonction publique hospitalière, et de recenser parmi eux ceux qui seraient ouverts aux contractuels.

L’alinéa 5 modifie donc à cette fin l’article 4 de la loi du 9 janvier 1986 pour y introduire la notion « d’emplois supérieurs hospitaliers » et renvoie à un décret la fixation d’une liste qui recenserait ces différents emplois.

● Le vise à déconcentrer, dans un souci de simplification, certains actes de gestion des emplois de direction, DH, D3S et DS, du centre national de gestion vers les établissements eux-mêmes.

La gestion des carrières de près de 5 000 directeurs nécessite en effet la production massive, chaque année, de décisions individuelles ou collectives par le centre national de gestion. Ainsi que le souligne l’étude d’impact du projet de loi, « il napparaît pas pertinent que des décisions sans véritable incidence sur la carrière des agents soient centralisées au niveau national ».

Aussi, l’alinéa 7 modifie l’article 6 de la loi du 9 janvier 1986 pour y prévoir que la gestion des personnels de direction et des directeurs de soin pourra être déconcentrée. Selon les informations recueillies par votre rapporteure, il ne s’agira toutefois que des actes de gestion courante, comme les congés statutaires, le temps partiel thérapeutique, les autorisations spéciales d’absence, le congé parental ou encore les changements internes d’affectation.

Cette mesure de déconcentration va nécessiter le déploiement d’un système d’information commun entre le centre national de gestion et les différents établissements de santé. Le centre national de gestion conserve en revanche sa compétence en matière de recrutement au niveau national.

Cette mesure s’inscrit dans la lignée de ce qui a déjà été mis en œuvre dans la fonction publique de l’État par le décret n° 2015-510 du 7 mai 2015 portant charte de la déconcentration.

● Le comprend une mesure de simplification : la suppression des arrêtés d’échelonnement indiciaire.

L’article 79 de la loi du 9 janvier 1986 prévoit en effet, d’une part, que le classement indiciaire des corps, grades et emplois de la fonction publique hospitalière est fixé par décret et que, d’autre part, un arrêté détermine l’échelon indiciaire qui leur est applicable.

Lalinéa 11 supprime donc la référence à la grille commune de traitement prévue à l’article 15 du titre 1er du statut général, cet article 15 ayant été abrogé par la loi n° 87-529 du 13 juillet 1987 modifiant les dispositions relatives à la fonction publique territoriale. Il procède également à un alignement rédactionnel avec l’article 6 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

L’échelonnement indiciaire applicable aux corps, grades et emplois de la fonction publique hospitalière sera donc désormais fixé par décret.

III.   la position de la commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

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  titre Iv

  FAVORISER LA MOBILITé et accompagner les transitions professionnelles des agents publics

Chapitre Ier
Formation, mobilité

Article 21
(art. 22 quater de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, art. 2–1 de la loi n° 84–594 du 12 juillet 1984 relative à la formation des agents de la fonction publique territoriale et complétant la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et art. L. 6323–3 du code du travail)
Garantir la portabilité des droits liés au compte personnel de formation en cas de mobilité entre les secteurs publics et privé

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise à garantir la portabilité des droits acquis au titre du compte personnel de formation entre le secteur public et le secteur privé.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a prévu que les droits à formation acquis au titre d’une activité régie par le code du travail ne sont plus comptabilisés en heures, mais en euros.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement de Mme Catherine Fabre qui prévoit que, lors de leur entretien professionnel annuel, les fonctionnaires reçoivent une information sur leur compte personnel de formation.

I.   L’état du droit

● Introduit dans la loi du 13 juillet 1983 par l’ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d’activité, le compte personnel de formation (CPF) permet au fonctionnaire daccéder à une qualification ou de développer ses compétences dans le cadre d’un projet d’évolution professionnelle.

Le fonctionnaire utilise, à son initiative et sous réserve de l’accord de son administration, les heures qu’il a acquises sur ce compte en vue de suivre des actions de formation.

Dans le cadre actuellement prévu par l’article 22 quater de la loi du 13 juillet 1983, les agents acquièrent 24 heures par année de travail dans la limite de 120 heures, puis douze heures par an en respectant un plafond de 150 heures.

Les agents de catégorie C qui ne sont pas titulaires d’un diplôme de niveau V – certificat d’aptitude professionnelle (CAP) ou brevet – bénéficient de modalités d’alimentation renforcées, leur permettant d’atteindre un plafond de 400 heures.

Les actions de formation suivies au titre du CPF ont lieu, en priorité, pendant le temps de travail. Le CPF peut être utilisé en combinaison avec le congé de formation professionnelle. Il peut être utilisé en complément des congés pour validation des acquis de l’expérience et pour bilan de compétences. Il peut enfin être utilisé pour préparer des examens et concours administratifs, le cas échéant en combinaison avec le compte épargne-temps.

La mobilisation du compte personnel de formation fait l’objet d’un accord entre le fonctionnaire et son administration. Toute décision de refus opposée à une demande de mobilisation du compte personnel de formation doit être motivée et peut être contestée à l’initiative de l’agent devant l’instance paritaire compétente. L’administration ne peut s’opposer à une demande de formation relevant du socle de connaissances et compétences.

Les actions donnant lieu à utilisation des droits CPF sont financées par lemployeur public concerné, et non au moyen d’une cotisation dédiée, comme dans le secteur privé.

Il convient enfin d’observer que le CPF ne couvre pas l’ensemble des actions de formation des agents publics, mais uniquement celles qui s’inscrivent dans un projet d’évolution professionnelle. Les formations statutaires, les formations d’adaptation au poste et les formations de renforcement des compétences ne sont donc pas décomptées du CPF.

● La loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a introduit d’importants changements aux modalités de gestion du compte personnel de formation de l’ensemble des salariés et personnes soumises aux dispositions du code du travail, en prévoyant notamment la monétisation des droits et la désintermédiation de l’offre de formation.

Concrètement, la monétisation des droits signifie que la comptabilisation des droits à la formation des salariés du secteur privé ne s’effectue plus en heures, mais en euros. Dorénavant, pour les salariés, le CPF est alimenté à hauteur de 500 euros par an, jusqu’à un plafond de 5 000 euros (hors personnes dépourvues de qualification).

Les heures de formation précédemment acquises à l’entrée en vigueur de ces décrets sont converties en euros, à raison de quinze euros par heure.

II.   La réforme proposée

● Le I du présent article modifie les règles relatives au compte personnel de formation prévues à l’article 22 quater de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 précitée afin de permettre la portabilité entre le secteur public et le secteur privé des droits acquis au titre du CPF.

Il tire ainsi les conséquences de la monétisation des droits à la formation introduite pour les salariés par la loi du 5 septembre 2018.

Il prévoit pour cela la possibilité pour les agents publics de convertir en heures des droits acquis précédemment en euros au titre d’une activité privée (alinéa 5) et supprime les références aux différents rythmes d’alimentation et plafonds du CPF, renvoyant les modalités d’application du présent article à un décret en Conseil d’État.

● Le II modifie en conséquence l’article 2–1 de la loi n° 84–594 du 12 juillet 1984 relative à la formation des agents de la fonction publique territoriale et complétant la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

● Le III complète l’article L. 6323–3 du code du travail afin de permettre la conversion en euros des droits acquis en heures, de façon à faire bénéficier personnes ayant quitté le secteur public de leurs droits acquis au titre d’un emploi public.

III.   LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Outre un amendement rédactionnel, la Commission a adopté un amendement de Mme Catherine Fabre, après avis favorables de votre rapporteure et du Gouvernement, qui prévoit que, lors de leur entretien professionnel annuel, les fonctionnaires reçoivent une information sur l’ouverture et l’utilisation de leur compte personnel de formation.

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Article 22
Habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance pour réformer la formation des agents publics

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Cet article habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour faire évoluer le financement et l’organisation des établissements de formation des agents publics, renforcer les synergies entre la formation initiale et continue des agents de catégorie A et, enfin, améliorer la formation professionnelle des agents les moins qualifiés.

I.   LE DISPOSITIF PROPOSé

● Au moment où les chantiers de la transformation de l’action publique se mettent en place, le Gouvernement souhaite faire évoluer l’organisation des acteurs de la formation de la fonction publique afin d’en accroître l’efficacité, mieux accompagner les agents et améliorer le service rendu au public.

Le système actuel de formation repose en effet, dans les trois fonctions publiques, sur des dispositifs très différents, héritiers de notre organisation administrative, mais pas toujours adaptés aux enjeux contemporains.

Il s’agit donc de développer une synergie entre les écoles qui concourent à la formation des cadres des trois versants – notamment l’école nationale d’administration, l’institut national des études territoriales et l’école des hautes études en santé publique – et renforcer ainsi une culture commune de l’encadrement au sein de la fonction publique.

Il s’agit aussi d’éviter les freins au changement que peut constituer la méconnaissance des différents environnements administratifs mais aussi de faciliter les mobilités géographiques et fonctionnelles, pour diversifier les parcours professionnels et les mobilités entre les trois versants.

Il s’agit, enfin, de favoriser l’évolution professionnelle des agents les plus fragiles, en leur permettant d’accéder plus facilement aux qualifications.

● Si beaucoup de dispositions relatives à l’organisation de la formation des agents publics sont de nature règlementaire, les statuts de plusieurs établissements sont en revanche d’ordre législatif.

C’est pourquoi, sur le fondement de l’article 38 de la Constitution, le présent article vise à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance dans un délai de dix-huit mois afin :

– d’organiser le rapprochement et modifier le financement des établissements publics et services qui concourent à la formation des agents publics pour améliorer la qualité du service rendu aux agents et aux employeurs publics ;

 de réformer les modalités de recrutement, harmoniser la formation initiale et développer la formation continue, notamment en matière d’encadrement, des corps et cadres d’emploi de catégorie A en vue de développer une culture commune de l’action publique et de mieux structurer les parcours professionnels des agents concernés, notamment en termes de mobilités géographique et fonctionnelle ;

– de renforcer la formation en vue de favoriser l’évolution professionnelle des agents les moins qualifiés, des agents en situation de handicap ainsi que des agents les plus exposés aux risques d’usure professionnelle.

Le champ de l’habilitation demandée est assez vaste et doit permettre au Gouvernement de procéder aux réorganisations indispensables. La réforme du recrutement et de la formation des hauts fonctionnaires s’appuiera, ainsi que le Président de la République l’a indiqué dans son intervention du 25 avril 2019, sur la mission qui a été confiée à M. Frédéric Thiriez en ce sens.

II.   LA POSITION DE la COMMISSION

La Commission a adopté cet article sans modification.

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Article 22 bis
(art. 22 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires)
Formation au management des fonctionnaires
lorsquils accèdent à des fonctions dencadrement

Introduit par la Commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 22 bis a pour objet de permettre aux fonctionnaires de bénéficier de formations au management lorsqu’ils accèdent à des fonctions d’encadrement.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 22 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires a été modifié par l’ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d’activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique.

       Modifications apportées par la Commission

Cet article est issu d’un amendement de votre rapporteure, adopté après avis favorable du Gouvernement.

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Le présent article a pour objet de permettre aux fonctionnaires, quelle que soit leur catégorie, de bénéficier de formations au management lorsqu’ils accèdent à des fonctions d’encadrement au titre de leurs droits à formation. Il complète à cette fin la loi du 13 juillet 1983 afin que cela soit applicable aux trois fonctions publiques.

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Article 22 ter
Rapport du Gouvernement sur les freins à lapprentissage
dans la fonction publique

Introduit par la Commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 22 ter demande la remise d’un rapport au Parlement sur le développement de l’apprentissage dans la fonction publique. Ce rapport doit permettre de faire un état des lieux de la situation et d’établir des propositions pour lever les freins à son développement.

       Modifications apportées par la Commission

Le présent article est issu d’un amendement de M. Jean-Pierre Cubertafon, adopté malgré un avis défavorable de votre rapporteure et de sagesse du Gouvernement.

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Article 23
(art. 42 et 46 de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires
relatives à la fonction publique de lÉtat)
Diminuer le coût pour les employeurs territoriaux et hospitaliers de laccueil dun fonctionnaire de la fonction publique de lÉtat

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise à favoriser la mobilité des fonctionnaires de l’État vers les versants territorial et hospitalier de la fonction publique en ramenant le coût de la contribution patronale pour pensions pesant sur l’employeur d’accueil au niveau de celui que ce dernier supporterait en employant un fonctionnaire de son versant.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’ordonnance n° 2017–543 du 13 avril 2017 portant diverses mesures relatives à la mobilité dans la fonction publique a permis de lever différents freins à la mobilité au sein de la fonction publique (publication des postes vacants sur un portail commun aux trois versants de la fonction publique, portabilité des droits acquis au titre du compte épargne temps lors d’une mobilité entre les trois versants).

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté deux amendements rédactionnels de la rapporteure.

I.   L’état du droit

1.   Le régime juridique du paiement de la contribution employeur dans le cadre d’un détachement ou d’une mise à disposition

La mise à disposition est la situation du fonctionnaire qui demeure dans son corps d’origine, est réputé occuper son emploi, continue à percevoir la rémunération correspondante, mais qui exerce des fonctions hors du service où il a vocation à servir. Elle n’est possible qu’auprès d’un nombre limité d’organismes ([264]).

La mise à disposition donne lieu à remboursement, sauf exceptions prévues par la loi ([265]). L’employeur d’origine est directement redevable de la contribution employeur au compte d’affection spéciale (CAS) « Pensions », cette contribution faisant ensuite l’objet d’un remboursement par l’employeur d’accueil.

Le détachement est la position du fonctionnaire placé hors de son corps d’origine mais continuant à bénéficier, dans ce corps, de ses droits à l’avancement et à la retraite. Le fonctionnaire détaché ne peut être affilié au régime de retraite dont relève la fonction de détachement, ni acquérir, à ce titre, des droits quelconques à pensions ou allocations, sous peine de la suspension de la pension ([266]).

Sous réserve de certaines dérogations fixées par décret en Conseil d’État, la collectivité ou l’organisme auprès duquel un fonctionnaire est détaché est redevable, envers le Trésor, d’une contribution pour la constitution des droits à pension de l’intéressé.

2.   Une différence de taux importante et croissante entre la contribution employeur à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) et celle au CAS Pensions

Le taux de la contribution employeur au CAS Pensions est actuellement de 74,28 % du traitement indiciaire brut. Il est presque 2,5 fois plus élevé que celui auquel cotisent les collectivités territoriales et les établissements publics de santé pour leurs fonctionnaires affiliés à la CNRACL (30,65 %).

Cet écart important ne cesse en outre de se creuser, ainsi que le souligne l’étude d’impact : « déterminé chaque année selon la prévision de dépenses du CAS, des autres recettes, y compris les cotisations des agents, et de la prévision dévolution de lassiette contributive, il est passé progressivement, depuis la mise en place du CAS Pensions en 2006, de 49,90 % à 74,28 % (ce niveau est toutefois inchangé depuis 2014). Sur la même période, le taux de contribution employeur à la CNRACL est passé de 27,30 % à 30,65 %. La dynamique importante dévolution du taux de contribution employeur au CAS Pensions a ainsi creusé lécart entre ce taux et le taux de contribution employeur à la CNRACL. » ([267])

Cette situation constitue un frein à la mobilité des fonctionnaires de l’État dans les deux autres versants de la fonction publique, les employeurs territoriaux et hospitaliers n’étant pas incités à les recruter au regard des contraintes budgétaires auxquelles ils sont soumis.

II.   Le dispositif proposé

Le du présent article modifie l’article 42 de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État en prévoyant qu’en cas de mise à disposition d’un fonctionnaire de l’État auprès d’un employeur territorial ou hospitalier, le remboursement par cet employeur d’accueil à l’employeur d’origine de la contribution patronale au CAS Pensions se fait sur la base d’un taux abaissé par décret. L’employeur d’origine reste, quant à lui, redevable de cette contribution au taux normal.

L’étude d’impact indique que cette mesure impliquera un « impact financier négatif pour le budget de lÉtat », qui est évalué à 103 millions d’euros par an (en prenant en compte la dernière situation connue pour le nombre d’agents concernés) ([268]).

Le du présent article modifie l’article 46 de cette même loi :

– le a) remplace le renvoi à un décret en Conseil d’État par un renvoi à un décret simple en ce qui concerne la détermination du taux de la contribution patronale au CAS Pensions due en cas de détachement ;

– le b) prévoit qu’en cas de détachement d’un fonctionnaire de l’État auprès d’un employeur territorial ou hospitalier, le paiement par cet employeur d’accueil au CAS Pensions de la contribution patronale pour pension sera calculé sur la base d’un taux abaissé par décret.

III.   La position de la commission

La Commission a adopté deux amendements rédactionnels de la rapporteure.

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Article 24
(art. 36 bis [nouveau] de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires
relatives à la fonction publique de lÉtat)
Évolution des règles daffectation en position normale dactivité

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article définit les règles relatives à la mobilité interministérielle, dite « position normale d’activité », en les élevant au niveau législatif et en limitant cette mobilité dans le temps.

       Dernières modifications législatives ou réglementaires intervenues

Le décret n° 2008-370 du 18 avril 2008 organisant les conditions d’exercice des fonctions, en position d’activité, dans les administrations de l’État a généralisé la possibilité pour un fonctionnaire d’exercer ses fonctions à son grade dans un autre département ministériel que celui assurant la gestion de son corps.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté deux amendements rédactionnels de la rapporteure.

I.   L’état du droit

Aux termes de l’article 33 de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État : « [l]activité est la position du fonctionnaire qui, titulaire dun grade, exerce effectivement les fonctions de lun des emplois correspondant à ce grade dans les administrations de lÉtat, les autorités administratives indépendantes et les établissements publics administratifs de lÉtat. »

Pour faciliter la mobilité des fonctionnaires d’une administration de l’État à une autre sans être contraint au détachement ou à la mise à disposition, le décret n° 2008-370 du 18 avril 2008 a organisé la possibilité pour un fonctionnaire d’exercer les fonctions correspondantes à son grade dans un autre département ministériel ou établissement public que celui qui assure la gestion de son corps.

Dans cette situation, le fonctionnaire conserve ses droits à l’avancement d’échelon ou de grade et relève de la commission administrative paritaire de son corps. Les actes relatifs à la situation individuelle des fonctionnaires exerçant leurs fonctions dans une autre administration de l’État que celle dont ils relèvent peuvent être pris par l’autorité compétente de l’administration d’accueil, à l’exception de ceux qui sont soumis à l’avis préalable de la commission administrative paritaire compétente.

 

Tableau comparatif de laffectation, de la mise à disposition et du détachement

Source : Circulaire FP n° 2179 du 28 janvier 2009 relative à la mise en œuvre

du décret n° 2008-370 du 18 avril 2008 (organisant les conditions dexercice des fonctions, en position dactivité, dans les administrations de lÉtat).

Comme le souligne l’étude d’impact, ce type de mobilité statutaire est l’un des plus utilisés actuellement.

 

Répartition du nombre de fonctionnaires en position de mobilité statutaire

au 31 décembre 2016

Source : étude dimpact du projet de loi, p. 248.

L’étude d’impact pointe néanmoins l’existence d’un certain nombre de contraintes dans l’organisation de cette mobilité :

– à défaut d’une disposition légale ou réglementaire faisant mention du contraire, elle n’est pas limitée dans le temps ;

– le retour dans l’administration d’origine ne peut intervenir qu’après accord conjoint de l’agent et de cette administration.

II.   Le dispositif proposé

Le présent article insère un article 36 bis à la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État visant à organiser un cadre normatif pour la position normale d’activité.

Le premier alinéa prévoit que l’affectation en « position normale dactivité » prononcée au titre du décret n° 2008-370 du 18 avril 2008 organisant les conditions d’exercice des fonctions en position d’activité dans les administrations de l’État est désormais limitée à une durée renouvelable, fixée par décret. À l’issue de cette période le fonctionnaire réintègre son administration d’origine, au besoin en surnombre provisoire.

Le deuxième alinéa précise le champ d’application de la mesure, afin de prendre en compte le principe d’autonomie des établissements publics.

Le troisième alinéa renvoie à un décret en Conseil d’État les modalités d’application du présent article.

III.   La position de la commission

La Commission a adopté deux amendements rédactionnels de la rapporteure.

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Article 25
(art. 6 ter de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de lÉtat, art. 3–5 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et art. 9–6 [nouveau] de la loi n° 86–33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière)
Extension de la portabilité du CDI en inter-versants

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article crée les conditions d’une portabilité du CDI entre les différents versants de la fonction publique, afin d’améliorer les perspectives de carrière des contractuels recrutés en CDI et de diversifier le vivier de recrutement des employeurs publics.

       Dernières modifications législatives intervenues

La portabilité du CDI au sein de la fonction publique territoriale et de la fonction publique de l’État a été créée par la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté plusieurs amendements rédactionnels de la rapporteure.

 

I.   L’état du droit

L’article 6 ter de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État prévoit une portabilité du contrat en CDI entre les différents employeurs publics étatiques, à l’exception toutefois des autorités administratives indépendantes. L’article 3–5 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale permet également cette portabilité du CDI au sein de la fonction publique territoriale. Une telle disposition n’existe pas dans la fonction publique hospitalière, ce qui s’explique, par le fait que l’article 9 de la loi n° 86–33 du 9 janvier 1986 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière prévoit des cas de recours élargis au CDI.

La proportion de contractuels en CDI au sein de chaque fonction publique est respectivement de :

– 55 % dans la fonction publique de l’État ;

– 33,7 % dans la fonction publique territoriale ;

– 46,6 % dans la fonction publique hospitalière.

II.   Le dispositif proposé

Le présent article se structure en trois parties, relatives respectivement à la fonction publique de l’État (I), à la fonction publique territoriale (II) et à la fonction publique hospitalière (III), afin de rendre possible la portabilité du CDI entre les trois versants de la fonction publique.

Le I du présent article modifie l’article 6 ter de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 précitée afin de prévoir que l’État ou un établissement public à caractère administratif puisse proposer un CDI à un agent contractuel lié par un CDI à l’une des personnes morales mentionnées :

– à l’article 2 de ladite loi – administrations de l’État, autorités administratives indépendantes et établissements publics de l’État ;

– à l’article 2 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée – communes, départements, régions et établissements publics en relevant ;

– à l’article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 précitée – établissements publics de santé, centres d’accueil et de soins hospitaliers, établissements publics locaux accueillant des personnes âgées, établissements publics locaux relevant des services départementaux de l’aide sociale à l’enfance, établissements publics locaux et établissements non dotés de la personnalité morale gérés par des personnes morales de droit public autres que l’État et ses établissements publics prenant en charge des mineurs ou adultes handicapés, présentant des difficultés d’adaptation ou atteints de pathologies chroniques et établissements publics locaux et établissements non dotés de la personnalité morale gérés par des personnes morales de droit public autres que l’État et ses établissements publics prenant en charge des personnes ou des familles en difficulté ou en situation de détresse ou des demandeurs d’asile.

Le II procède à la même modification à l’article 3–5 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 précitée s’agissant de la fonction publique territoriale, et le III à l’article 9–6 (nouveau) de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 précitée s’agissant de la fonction publique hospitalière.

III.   La position de la commission

La Commission a adopté quatre amendements rédactionnels de la rapporteure.

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Article 26
(art. 150 de la loi n° 2008–1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 et art. 244 [abrogé] de la loi n° 2018–1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019)
Rupture conventionnelle pour les agents publics
et droit à lallocation de retour à lemploi

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article crée une nouvelle modalité de cessation définitive des fonctions pour les fonctionnaires – à titre expérimental – et pour les contractuels : la rupture conventionnelle. Il étend par ailleurs, le régime de l’allocation de retour à l’emploi (ARE) des agents publics aux cas de privation d’emploi résultant d’une rupture conventionnelle et de démission donnant droit à indemnité de départ volontaire au titre d’une restructuration.

       Dernières modifications législatives intervenues

Le mécanisme de la rupture conventionnelle a été introduit dans le code du travail par la loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail.

       Modifications apportées par la Commission

Outre plusieurs amendements rédactionnels de la rapporteure, la Commission a adopté deux amendements identiques de la rapporteure et des membres du groupe La République en marche visant à mieux encadrer la rupture conventionnelle et un amendement du Gouvernement relatif à l’application aux agents contractuels de droit public relevant d’employeurs publics ayant adhéré au régime d’assurance chômage des mêmes règles que celles applicables aux agents relevant d’employeurs publics en auto-assurance.

I.    La création d’une rupture conventionnelle

1.   Les modalités de cessation définitive des fonctions

Aujourd’hui, les différentes modalités de cessation définitive des fonctions entraînant radiation des cadres et perte de la qualité de fonctionnaire sont définies à l’article 24 de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Il s’agit :

– de l’admission à la retraite ;

– de la démission régulièrement acceptée ;

– du licenciement ([269]) ;

– de la révocation.

Les deux modalités de cessation définitive des fonctions d’un contractuel sont le licenciement et la démission. Ces dispositions relèvent, ainsi que l’a rappelé le Conseil d’État dans son avis sur le présent projet de loi, du domaine réglementaire ([270]).

La rupture conventionnelle, définie à l’article L. 1237–11 du code du travail comme étant la situation où l’employeur et le salarié conviennent en commun des conditions de la rupture du contrat de travail qui les lie, n’existe pas dans le droit de la fonction publique.

L’étude d’impact sur le présent projet de loi déplore que « les outils statuaires ne permettent pas suffisamment dinciter les agents qui le souhaitent à quitter la fonction publique et à les accompagner dans leur projet de mobilité ou de reconversion » ([271]).

2.   Le dispositif proposé

Le I du présent article introduit, à titre expérimental du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2025, une nouvelle modalité de cessation définitive des fonctions des fonctionnaires des trois versants de la fonction publique : la rupture conventionnelle (alinéa 1er). Cette dernière donne lieu au versement d’une indemnité. Contrairement à ce qui est prévu à l’article 1237–13 du code du travail pour le secteur privé, aucun montant minimum n’est cependant prévu.

Les alinéas 2 à 5 prévoient que cette rupture conventionnelle n’est pas susceptible de s’appliquer dans une série de cas limitativement énumérés :

– pendant la période de stage () ;

– aux fonctionnaires ayant atteint l’âge d’ouverture du droit à une pension de retraite et justifiant de la durée d’assurance, tous régimes de retraite de base confondus, égale à la durée de services et bonifications exigée pour obtenir la liquidation d’une pension de retraite au pourcentage maximum (2°) ;

– aux fonctionnaires détachés en qualités d’agent contractuel (3°).

Les alinéas 6 à 8 prévoient une clause de remboursement de l’indemnité en cas de retour dans l’emploi public au sein respectivement de la fonction publique de l’État (alinéa 6), territoriale (alinéa 7) et hospitalière (alinéa 8) dans les trois années suivant la conclusion d’une rupture conventionnelle.

Il faut noter que le champ d’application de ce dispositif diffère très sensiblement selon le versant de la fonction publique :

– s’agissant de l’État, il s’applique à l’ensemble des emplois au sein de la fonction publique étatique ;

– s’agissant de la fonction publique territoriale, il ne s’applique qu’à la collectivité avec laquelle la rupture conventionnelle a été conclue ou avec l’EPCI dont cette collectivité relève ;

– s’agissant de la fonction publique hospitalière, il ne s’applique qu’à l’établissement avec lequel la rupture a été conclue.

Le remboursement doit avoir lieu dans les deux ans suivant le recrutement. Aucune mesure de ce type n’est prévue par le code du travail.

Aux termes de l’alinéa 9, le fonctionnaire peut se faire assister par un conseiller désigné par une organisation syndicale représentative de son choix. Cette protection est également prévue à l’article 1237–12 du code du travail.

Un décret en Conseil d’État définira les modalités d’application de cet article (alinéa 10). Il pourrait notamment prévoir une procédure d’homologation des ruptures conventionnelles afin, notamment, de s’assurer du respect de la procédure et du libre consentement des deux parties, comme prévu à l’article L. 1237–14 du code du travail.

Le II prévoit la présentation au Parlement, un an avant son terme, d’une évaluation de l’expérimentation portant notamment sur le nombre de fonctionnaires couverts par ce dispositif et son coût global.

Le III pose le principe de l’instauration de la rupture conventionnelle aux contractuels et aux ouvriers d’État – personnels affiliés au régime de retraite institué en application du décret n° 2004-1056 du 5 octobre 2004 relatif au régime des pensions des ouvriers des établissements industriels de l’État. Les règles régissant les contractuels relèvent en effet du domaine réglementaire.

II.   L’allocation de retour à l’emploi

1.   L’état du droit

Conformément aux dispositions du code du travail, notamment de son article L. 5424-1, les agents publics ont droit à un revenu de remplacement lorsqu’ils sont involontairement privés d’emploi, aptes au travail et recherchent un emploi et qu’ils satisfont à des conditions d’âge et d’activité antérieure.

Ces cas de perte involontaire d’emploi recouvrent une grande diversité de situations :

– fonctionnaire licencié, révoqué ou radié d’office des cadres (en cas de condamnation pénale entraînant la privation de ses droits civiques) ;

– fonctionnaire non réintégré et maintenu d’office en disponibilité au terme d’un détachement ou d’une disponibilité ([272]) ;

– contractuel en CDI licencié ;

– contractuel en CDD dont le contrat est arrivé à expiration et auquel l’administration n’a pas proposé de renouvellement ;

– contractuel en CDD dont le contrat est arrivé à expiration et qui a refusé la proposition de renouvellement pour un motif légitime. La jurisprudence considère comme fondé sur un motif légitime le refus lié notamment à des considérations d’ordre personnel (pour suivre le conjoint obligé de déménager pour des raisons professionnelles, par exemple) ou motivé par une modification substantielle du contrat sans justification de l’employeur ;

– fonctionnaire ou contractuel qui démissionne pour un motif légitime.

2.   Le dispositif proposé

Le IV étend le régime d’auto-assurance chômage des agents publics civils aux cas de privation d’emploi résultant d’une rupture conventionnelle ou d’une démission donnant droit à indemnité de départ volontaire au titre d’une restructuration – qui n’existe aujourd’hui que pour les ouvriers d’État du ministère de la Défense.

Il rassemble par ailleurs, dans une disposition unique, tous les cas d’ouverture du droit à l’allocation de retour à l’emploi :

– privation d’emploi involontaire (), jusque-là mentionnée à l’article 244 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 ;

– privation d’emploi résultant d’une rupture conventionnelle, cas nouvellement créé par le présent article () ;

– démission donnant lieu à la perception d’une indemnité de départ volontaire dans le cadre d’une restructuration ou d’une réorganisation prévu au III de l’article 150 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 s’agissant des ouvriers d’État du ministère de la Défense ().

Un décret en Conseil d’État devra fixer les conditions d’application de cet article et notamment les modalités de détermination de la rémunération de référence servant au calcul de l’allocation de retour à l’emploi.

En conséquence, le V abroge le III de l’article 150 de la loi n° 2008-1425 du 27 décembre 2008 précitée et l’article 244 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 précitée.

III.   La position de la commission

Outre plusieurs amendements rédactionnels de la rapporteure, la Commission a adopté :

– deux amendements identiques de la rapporteure et des membres du groupe La République en marche – avec un avis de sagesse du Gouvernement – visant à mieux encadrer le dispositif en inscrivant au niveau législatif la définition de la rupture conventionnelle, l’affirmation du principe selon lequel la rupture conventionnelle ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties, le principe d’un montant minimum de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle et celui de l’homologation de la convention de rupture ;

– un amendement du Gouvernement – avec l’avis favorable de la rapporteure – permettant d’appliquer aux agents contractuels de droit public relevant d’employeurs publics ayant adhéré au régime d’assurance chômage les mêmes règles que celles applicables aux agents relevant d’employeurs publics en auto-assurance, en ouvrant le droit à l’allocation chômage d’une part, au cas où ces agents en CDI sollicitent le bénéfice d’une indemnité de départ volontaire suite à la suppression de leur emploi dans le cadre d’une restructuration de service et, d’autre part, au cas où ces agents, lorsqu’ils sont en CDI, bénéficient d’une rupture conventionnelle au sens des dispositions statutaires qui leur sont applicables.

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*     *

Article 26 bis
Extension du dispositif de rupture conventionnelle collective aux agents de la Caisse des dépôts et consignation

Introduit par la Commission

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 26 bis étend le dispositif de rupture conventionnelle aux agents de la Caisse des dépôts et consignation (CDC).

       Dernières modifications législatives intervenues

Le mécanisme de la rupture conventionnelle a été introduit dans le code du travail par la loi n° 2008-596 du 25 juin 2008 portant modernisation du marché du travail.

       Modifications apportées par la Commission

Cet article est issu d’un amendement du Gouvernement ayant recueilli un avis favorable de la rapporteure.

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La Caisse des dépôts et consignations employant à la fois des personnels de droit public et de droit privé, cela a incité le législateur, par le passé, à mettre en cohérence les règles sociales applicables aux différents statuts qu’elle gère.

L’article 26 bis procède de la même logique et précise les conditions dans lesquelles les accords portant rupture conventionnelle collective visés aux articles L. 1237-19 et suivants du code du travail – et qui s’appliquent donc par construction aux salariés de la CDC – peuvent s’appliquer également aux agents publics de la CDC.

Le dispositif de rupture conventionnelle collective ne peut être mis en place que par un accord collectif majoritaire. C’est sur le fondement d’un tel accord, que l’employeur et les organisations syndicales peuvent définir ensemble les modalités selon lesquelles un nombre déterminé de personnels peut quitter ses fonctions, sur une base uniquement volontaire, et bénéficier d’indemnités spécifiques et de mesures d’accompagnement et de reclassement renforcées.

Le présent article vise ainsi à permettre aux agents publics de la CDC de bénéficier des mesures favorables prévues dans le cadre d’une rupture conventionnelle collective, au même titre que les salariés de la CDC.

Le premier alinéa prévoit l’application aux agents publics de la CDC des dispositions du code du travail relatives aux accords portant rupture conventionnelle collective, seuls les agents contractuels employés pour une durée déterminée étant exclus du champ.

Le second alinéa prévoit que l’instance unique du personnel de la CDC tient lieu, pour l’application de cet article, de comité social et économique et doit être consultée dans les mêmes conditions.

Le troisième alinéa prévoit des mesures d’adaptation tenant compte des spécificités des régimes dont relèvent les personnels publics. Il prévoit notamment que ces agents bénéficieront des indemnités prévues par l’accord portant rupture conventionnelle collective dans les mêmes conditions que les salariés, ainsi que des mêmes mesures d’accompagnement, sans préjudice des mesures pouvant être prévues en droit de la fonction publique. Il est prévu, par ailleurs, la non-application des dispositions relatives aux salariés protégés qui sont sans objet s’agissant des agents publics.

Le quatrième alinéa précise les conséquences de l’acceptation, par la CDC, des candidatures au départ des agents publics en spécifiant que cette acceptation emporte la radiation des cadres pour les fonctionnaires et la rupture du lien pour les agents contractuels de droit public. Il prévoit en outre explicitement le bénéfice du régime de l’allocation d’assurance.

Enfin, le dernier alinéa prévoit que la contestation éventuelle de la cessation des fonctions dans le cadre de l’accord portant rupture conventionnelle collective relève, pour les agents publics, de la compétence de la juridiction administrative.

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Chapitre II
curiser les transitions professionnelles
en cas de restructuration

Article 27
(art. 62 bis [nouveau] de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de lÉtat et art. 93 de la loi n° 86–33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière)
Création dun dispositif daccompagnement des agents de la fonction publique de lÉtat et de la fonction publique hospitalière dont lemploi est supprimé dans le cadre dune restructuration

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article dote les administrations d’État et de la fonction publique hospitalière des outils leur permettant d’accompagner les fonctionnaires dont l’emploi est supprimé dans le cadre de la restructuration d’un service.

       Dernières modifications législatives intervenues

Le compte personnel de formation a été créé par l’ordonnance n° 2017-53 du 19 janvier 2017 portant diverses dispositions relatives au compte personnel d’activité, à la formation et à la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté plusieurs amendements rédactionnels de votre rapporteure.

I.   L’état du droit

La direction générale de l’administration et de la fonction publique définit la restructuration comme étant une fermeture, une dissolution, un regroupement, un transfert d’établissements, un changement de statut juridique, une réorganisation interne liée à l’évolution des missions ou une externalisation de ces dernières ([273]).

Plusieurs dispositifs permettent d’accompagner les fonctionnaires dont l’emploi est supprimé dans le cadre d’une restructuration, mais ils sont disparates, s’appliquent différemment selon les versants de la fonction publique et sont relativement peu attractifs.

1.   La formation professionnelle

Aux termes de l’article 22 de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, « le droit à la formation professionnelle tout au long de la vie est reconnu aux fonctionnaires. »

L’un des moyens permettant la mise en œuvre de ce droit est le compte personnel dactivité (CPA), qui comprend un compte personnel de formation et un compte d’engagement citoyen. Le CPA s’applique aux fonctionnaires et agents contractuels de la fonction publique depuis le 1er janvier 2017.

Les trois versants de la fonction publique prévoient par ailleurs un congé de formation professionnelle (CFP) ([274]), dont la durée ne peut excéder trois années pour l’ensemble de la carrière. Il doit permettre aux agents de parfaire leur formation personnelle par le biais de stages de formation à caractère professionnel ou personnel qui ne leur sont pas proposés par l’administration, ou pour des actions organisées par l’administration en vue de la préparation aux concours administratifs. La première année du congé de formation professionnelle ouvre droit au bénéfice d’une indemnité mensuelle forfaitaire.

Enfin, dans la fonction publique de l’État, le décret du 19 mars 1993 a institué un congé de restructuration au bénéfice de certains agents de l’État, dont l’objet est de donner à ses bénéficiaires la possibilité de préparer l’accès à un autre corps, cadre d’emplois ou emploi de l’une des trois fonctions publiques, ou à une autre profession des secteurs public ou privé.

2.   Les dispositifs indemnitaires

Plusieurs dispositifs indemnitaires peuvent être mobilisés :

– la prime de restructuration de service a vocation à accompagner les mutations et/ou les délocalisations de services consécutives à une opération de restructuration. Elle peut être versée aux fonctionnaires et aux contractuels en CDI mutés ou déplacés dans le cadre d’une restructuration du service. Elle peut être complétée par une allocation d’aide à la mobilité du conjoint qui, du fait de la mobilité subie par l’agent concerné par une restructuration de service, se trouve confronté à une perte d’emploi ([275]) ;

– l’indemnité de départ volontaire peut être attribuée aux agents concernés par une opération de restructuration, dans les conditions fixées par arrêté au niveau de chaque administration ([276]) ;

– le complément indemnitaire daccompagnement est un dispositif de maintien, à titre personnel, de la rémunération en cas de mutation, de détachement ou d’intégration directe d’un fonctionnaire de l’État dans un autre corps ou cadre d’emploi de l’une des trois fonctions publiques consécutif à une mobilité imposée du fait d’une suppression de poste ([277]).

3.   Les priorités de mutation et les dispositifs de reclassement

     Dans la fonction publique de lÉtat

L’alinéa 2 de l’article 62 de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État prévoit une priorité – dans toute la mesure compatible avec les nécessités de fonctionnement du service – de détachement, d’intégration directe dans un corps de même catégorie et de niveau comparable à celui de son corps ou cadre d’emplois d’origine et, le cas échéant, de mise à disposition si un service ou une administration ne peut offrir au fonctionnaire affecté sur un emploi supprimé un autre emploi correspondant à son grade.

     Dans la fonction publique hospitalière

L’article 93 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière organise les conséquences d’une suppression d’emploi dans la fonction publique hospitalière. Le fonctionnaire continue d’être rémunéré par l’établissement pendant une période maximale de six mois. Durant cette période, il bénéficie d’une priorité de recrutement sur tout emploi correspondant à son grade et vacant dans l’un des établissements hospitaliers, de santé ou médico–social qui lui est proposé. Lorsque l’intéressé a accepté l’un des emplois proposés, l’établissement concerné peut être contraint de recruter le fonctionnaire.

Le fonctionnaire ayant refusé trois propositions de poste ou n’ayant pas trouvé de nouvelle affectation au terme des six mois suivant la suppression de poste est licencié, sauf s’il peut bénéficier de ses droits à la retraite ou s’il demande à être mis en disponibilité.

Néanmoins, comme le souligne l’étude d’impact, en l’état, ces dispositions ne sont pas applicables en l’absence de dispositions réglementaires : « Saisi de cette question, le Conseil dÉtat a, à loccasion dune décision du 25 octobre 2017 (Syndicat département CFDT des services de santé et des services sociaux des Hauts-de-Seine et Mme Rachel n° 405239) enjoint ladministration de prendre ce décret. Or en raison de la sensibilité du sujet, notamment du caractère défavorable du dispositif au regard de celui spécifiquement applicable dans la fonction publique hospitalière aux personnels de direction, ce décret na pas été pris à ce jour. En effet les personnels de directions de la fonction publique hospitalière ne sont pas soumis aux articles 93 à 94 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 et bénéficient dune position spécifique dite de recherche daffectation très favorable, leur garantissant, par une prise en charge par le Centre national de gestion, le maintien de leur rémunération sans limitation de durée ainsi quun accompagnement personnalisé dans leur recherche de poste. » ([278])

     Dans la fonction publique territoriale

L’article 97 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale organise les modalités de reclassement du fonctionnaire en cas de suppression du poste.

Si la collectivité ou l’établissement ne peut offrir au fonctionnaire un emploi correspondant à son grade dans son cadre d’emplois ou, avec son accord, dans un autre cadre d’emplois, le fonctionnaire est maintenu en surnombre pendant un an. Durant cette période, tout emploi créé ou vacant correspondant à son grade dans la collectivité ou l’établissement lui est proposé en priorité.

La collectivité ou l’établissement, la délégation régionale ou interdépartementale du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) et le centre de gestion (CDG) examinent les possibilités de reclassement.

Au terme de ce délai, le fonctionnaire est pris en charge par le CDG dans le ressort duquel se trouve la collectivité ou l’établissement, ou par le CNFPT. L’intéressé reçoit alors la rémunération correspondant à l’indice détenu dans son grade à hauteur de 100 % les deux premières années de prise en charge. Cette rémunération est ensuite réduite chaque année jusqu’à atteindre 50 % de la rémunération initiale. Pendant cette période, le centre peut lui confier des missions.

La prise en charge cesse après trois refus d’offre d’emploi. Ne peut être comprise dans ce décompte qu’une seule offre d’emploi émanant de la collectivité ou de l’établissement d’origine. Pour l’application de ces dispositions aux fonctionnaires de catégorie C, les emplois proposés doivent se situer dans le département où le fonctionnaire était précédemment employé ou un département limitrophe.

II.   Le dispositif proposé

Le I du présent article modifie plusieurs dispositions de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de lÉtat.

Le supprime la priorité de mutation instituée à lalinéa 2 de larticle 62 dès lors quune nouvelle mesure plus générale est créée par le 2° du présent article.

Le crée un article 62 bis instituant un dispositif global daccompagnement des agents de la fonction publique de lÉtat.

L’alinéa 4 précise le cadre de ce nouveau dispositif puisque celui–ci pourra seulement être mis en œuvre en cas de restructuration de l’État ou de l’un de ses établissements publics, dans un périmètre et pour une durée fixée par voie réglementaire. Il aura pour but d’accompagner le fonctionnaire dont l’emploi est supprimé vers une nouvelle affectation correspondant à son grade, vers un autre corps ou cadre d’emplois de niveau au moins équivalent, ou, à sa demande, vers le secteur privé.

Il pourra également être mis en œuvre pour accompagner les membres d’un corps (alinéa 5).

L’alinéa 6 précise que parmi ces dispositifs figurent :

– l’accompagnement personnalisé dans l’élaboration et la mise en œuvre d’un projet professionnel et l’accès prioritaire à des actions de formation (alinéa 7) ;

– le congé de transition professionnelle (nouveau) qui permet au fonctionnaire, avec l’accord de son employeur, de suivre les actions de formation longues nécessaire à l’exercice d’un nouveau métier auprès d’un employeur public ou privé (alinéa 8).

L’alinéa 9 prévoit qu’en cas de suppression de son emploi, le fonctionnaire est affecté dans un emploi vacant correspondant à son grade au sein de son département ministériel dans le département où il réside.

Les alinéas 10 à 13 créent de nouvelles priorités de mutation pour les fonctionnaires dont l’emploi est supprimé :

– une priorité de mutation ou de détachement au niveau national au sein du même département ministériel ainsi que vers un établissement public sous tutelle (alinéa 10) ;

– dans le cas où le fonctionnaire ne peut se voir offrir un autre emploi correspondant à son grade en application des deux possibilités évoquées ci–dessus, une priorité d’affectation ou de détachement sur les emplois vacants correspondants à son grade dans un autre département ministériel ou dans un établissement public de l’État, dans le département ou à défaut dans la région où il réside (alinéa 11).

Dans ce dernier cas, la mutation ou le détachement est prononcé par le représentant de l’État dans la limite d’un pourcentage applicable aux vacances d’emplois ouvertes au sein du département ministériel concerné ou de l’établissement public concerné (alinéa 12).

Ces nouvelles priorités prévalent sur celles énoncées à l’article 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée ([279]) (alinéa 13).

L’alinéa 14 organise une possibilité de mise à disposition, en vue de la reconversion professionnelle du fonctionnaire, vers un organisme privé pour une durée maximale d’un an.

Cette disposition déroge aux règles actuellement prévues par l’article 42 de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 précitée qui encadre très strictement les institutions auprès desquelles une mise à disposition est possible ([280]).

Cette mise à disposition est limitée à un an et donne lieu à un remboursement partiel de la rémunération du fonctionnaire par l’entreprise d’accueil.

L’alinéa 15 prévoit une indemnité de départ volontaire et l’octroi du bénéfice de l’allocation de retour à l’emploi pour les fonctionnaires démissionnaires.

L’alinéa 16 précise que le comité social d’administration est consulté sur le dispositif d’accompagnement prévu en cas de restructuration et qu’il est informé de la mise en œuvre des différents dispositifs d’accompagnement.

L’alinéa 17 renvoie à un décret en Conseil d’État la définition des modalités d’application de l’article.

Le II modifie l’article 93 de la loi n° 86–33 du 9 janvier 1986 précitée afin de prévoir pour la fonction publique hospitalière un dispositif d’accompagnement qui, bien que de moins grande ampleur, présente des similitudes avec celui créé pour la fonction publique de l’État.

L’alinéa 19 précise le cadre dans lequel ce dispositif est susceptible de s’appliquer. Il est prévu que le fonctionnaire est maintenu en activité auprès de son établissement en cas de suppression de son emploi, sous réserve de deux conditions :

– il ne peut pas prétendre à une pension de retraite à jouissance immédiate et à taux plein ;

– si l’établissement ne peut offrir au fonctionnaire un autre emploi correspondant à son grade.

Les alinéas 20 et 21 précisent que le fonctionnaire demeure sous l’autorité de son directeur et qu’il reste soumis aux droits et obligations attachés à sa qualité de fonctionnaire.

Les alinéas 22 à 24 octroient au fonctionnaire le bénéfice des dispositifs individuels qui sont les mêmes que ceux prévus aux alinéas 7 et 8 pour la fonction publique de l’État.

L’alinéa 25 prévoit l’affectation par l’autorité administrative du fonctionnaire dont l’emploi est supprimé dans un autre établissement hospitalier, de santé ou médico–social situé dans le même département.

L’alinéa 26 prévoit une priorité de recrutement dans le département ou la région d’origine dans tout établissement hospitalier, de santé ou médico–social. Aux termes de l’alinéa 27, le fonctionnaire doit être recruté par le nouvel établissement. Cette nouvelle priorité prévaut sur celles énoncées à l’article 38 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 précitée ([281]) (alinéa 28).

L’alinéa 29 organise une possibilité de mise à disposition vers un organisme privé pour une durée maximale d’un an, dans les mêmes conditions que celles prévues pour la fonction publique de l’État.

L’alinéa 30 précise que le comité social d’établissement est consulté sur le dispositif d’accompagnement et informé de sa mise en œuvre.

L’alinéa 31 précise que ces dispositions ne s’appliquent pas aux personnels de direction et directeurs de soins.

L’alinéa 32 renvoie à un décret en Conseil d’État la définition des modalités d’application de l’article.

III.   La position de la commission

La Commission a adopté plusieurs amendements rédactionnels de votre rapporteure.

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Article 28
(art. 14 quater [nouveau] de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983
portant droits et obligations des fonctionnaires)
Création dun mécanisme de détachement automatique pour les fonctionnaires concernés par lexternalisation de leur activité

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article crée un mécanisme de détachement automatique pour les fonctionnaires concernés par l’externalisation de leur activité visant à faciliter les opérations de transfert d’activités vers une personne morale de droit privé ou de droit public gérant un service public industriel et commercial (SPIC).

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2009-972 du 3 août 2009, relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique, a introduit des nouveaux mécanismes de reprise des contrats des contractuels concernés par des transferts d’activités.

       Modifications apportées par la Commission

Outre plusieurs amendements rédactionnels de votre rapporteure, la Commission a adopté un amendement des membres du groupe Libertés et territoires prévoyant que les fonctionnaires faisant l’objet d’un détachement d’office ne peuvent percevoir une rémunération inférieure à celle perçue, pour les mêmes fonctions, par les salariés de la personne morale de droit privé ou de l’organisme de droit public gérant un SPIC. Elle a également adopté un amendement du Gouvernement permettant aux fonctionnaires qui exercent leurs missions auprès d’une personne morale de droit privé d’être détachés d’office dans le cadre du présent article.

I.   L’état du droit

Deux dispositions régissent aujourd’hui le droit applicable aux contractuels en cas de transfert d’activité, selon que l’activité est reprise par une personne morale de droit public ou privé.

Aux termes de l’article L. 1224-3-1 du code du travail, lorsque l’activité d’une personne morale de droit public employant des contractuels est reprise par une personne morale de droit privé ou par un organisme de droit public gérant un service public industriel et commercial, cette personne morale ou cet organisme propose à ces agents un contrat de droit privé.

Le contrat proposé reprend les clauses substantielles du contrat dont les agents sont titulaires, en particulier celles qui concernent la rémunération.

En cas de refus des agents d’accepter le contrat proposé, leur contrat prend fin de plein droit. La personne morale ou l’organisme qui reprend l’activité applique les dispositions de droit public relatives aux agents licenciés.

Aux termes de l’article 14 ter de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, lorsque l’activité d’une personne morale de droit public employant des contractuels est reprise par une autre personne publique dans le cadre d’un service public administratif, cette personne publique propose à ces agents un contrat de droit public, à durée déterminée ou indéterminée selon la nature du contrat dont ils sont titulaires.

En cas de refus des agents d’accepter le contrat proposé, leur contrat prend fin de plein droit. La personne publique qui reprend l’activité applique les dispositions relatives aux agents licenciés.

II.   Le dispositif proposé

Le présent article insère un article 14 quater à la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires instaurant, dans les cas de transfert d’activité, la possibilité d’un transfert automatique des fonctionnaires concernés.

Le I prévoit la possibilité d’un détachement d’office des fonctionnaires applicable en cas de reprise de l’activité par une personne morale de droit privé ou par une personne de droit public gérant un service public industriel et commercial. Ce détachement prend la forme d’un contrat à durée indéterminée.

Le II organise le maintien de la rémunération du fonctionnaire et des droits à avancement dans le corps ou cadre d’emploi. Les services accomplis dans le cadre de ce détachement sont considérés comme des services effectifs.

Le III permet aux fonctionnaires de mettre fin à ce détachement pour pourvoir un emploi vacant au sein de l’administration, sous réserve d’un préavis de trois mois. Ce préavis ne s’applique pas dans les cas où le détachement ou la disponibilité est de droit.

Le IV prévoit la prorogation d’office du détachement en cas de renouvellement du contrat d’externalisation. Il dispose par ailleurs qu’en cas de conclusion d’un contrat d’externalisation avec un autre acteur, le fonctionnaire est détaché d’office auprès de ce nouvel organisme d’accueil – dans les mêmes conditions que celles prévues au II.

Le V organise, à l’issue du contrat, un droit d’option pour le fonctionnaire entre la radiation des cadres aux fins de permettre la poursuite du contrat de travail dans l’organisme d’accueil – qui s’accompagne alors d’une indemnité – ou la réintégration de plein droit dans l’administration d’origine.

Si le fonctionnaire détaché et bénéficiant d’un CDI est licencié par l’organisme d’accueil il est réintégré de plein droit dans son administration d’origine.

Le VI instaure le bénéfice d’une indemnité à tout moment en cas de départ volontaire.

Le VII renvoie à un décret en Conseil d’État la fixation des modalités d’application du présent article.

III.   La position de la commission

Outre plusieurs amendements rédactionnels de votre rapporteure, la Commission a adopté – avec l’avis favorable du Gouvernement et l’avis défavorable de votre rapporteure – un amendement des membres du groupe Libertés et territoires prévoyant que les fonctionnaires faisant l’objet d’un détachement d’office ne peuvent percevoir une rémunération inférieure à celle perçue, pour les mêmes fonctions, par les salariés de la personne morale de droit privé ou de l’organisme de droit public gérant un service public industriel et commercial.

Elle a également adopté un amendement du Gouvernement – avec l’avis favorable de votre rapporteure – permettant aux fonctionnaires qui, en dehors des dispositions prévues par le statut général et dans le cadre de dispositions législatives qui leur sont propres, exercent leurs missions auprès d’une personne morale de droit privé, d’être détachés d’office sur un contrat de travail pour poursuivre leurs activités au sein de cette même personne morale.

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  titre V

  renforcer l’égalité professionnelle

Chapitre Ier
Égalité professionnelle et prévention des discriminations

Article 29
(art. 6 quater A et 6 septies [nouveau] de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, art. 26–2 [nouveau] de la loi 84–53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et art. 51 [abrogé] de la loi n° 2012–347 du 12 mars 2012 relative à laccès à lemploi titulaire et à lamélioration des conditions demploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique)
Obligation de plans daction « égalité professionnelle » au sein des employeurs publics dici à 2020

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise à mettre en œuvre deux actions de l’accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique du 30 novembre 2018 :

 – rendre obligatoire pour tout employeur public l’élaboration et la mise en œuvre d’un plan d’action « égalité professionnelle » pluriannuel ;

 – mettre en place un dispositif de signalement, de traitement et de suivi des violences sexuelles et sexistes auprès de chaque employeur public.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a introduit la condamnation des agissements sexistes dans le statut général de la fonction publique.

       Modifications apportées par la Commission

Outre plusieurs amendements rédactionnels de votre rapporteure, la Commission a adopté un amendement des membres du groupe Socialistes et apparentés permettant d’ouvrir le dispositif de signalement des actes de violence, de harcèlement moral ou sexuel et des agissements sexistes aux témoins de ces actes.

La Commission a également adopté plusieurs amendements soutenus par la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes visant à encourager les mutualisations des dispositifs de signalement, préciser les principaux axes du plan d’action pluriannuel, compléter et rendre public les rapports de situation comparée établis par les administrations.

I.   L’état du droit

Le principe de l’égalité de traitement et de lutte contre les discriminations entre les agentes et les agents publics est consacré depuis 2001 ([282]) par l’article 6 bis de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

Dans ce cadre, la loi dite « Sauvadet » du 12 mars 2012 ([283]) a prévu que chaque année est présenté devant les comités techniques, dans le cadre du bilan social, un rapport relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes comportant notamment des données relatives au recrutement, à la formation, au temps de travail, à la promotion professionnelle, aux conditions de travail, à la rémunération et à l’articulation entre activité professionnelle et vie personnelle.

Par ailleurs, la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a introduit la condamnation des agissements sexistes dans le statut général de la fonction publique. La circulaire du 9 mars 2018 relative à la lutte contre les violences sexuelles et sexistes dans la fonction publique prévoit la mise en place de dispositifs de signalement et de traitement des violences sur le lieu de travail et rappelle la nécessaire sanction des auteurs de violences sexuelles et sexistes. De nombreux employeurs publics ont déjà mis en place des dispositifs de traitement des violences sexuelles et sexistes, selon différentes modalités.

II.   Le dispositif proposé

Le I du présent article modifie la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

Le insère un article 6 quater A relatif à l’obligation de mise en place d’un dispositif de signalement des violences sexuelles, du harcèlement et des agissements sexistes. Le dispositif recouvre le recueil des signalements, l’orientation de la victime et le traitement des faits signalés.

Les trois versants de la fonction publique sont assujettis à cette obligation.

Un décret en Conseil d’État précise les conditions d’application de ce nouvel article.

Le crée un nouvel article 6 septies instaurant une obligation d’élaboration par les employeurs publics d’un plan d’action « égalité professionnelle ». Ce plan d’action doit être pluriannuel, d’une durée maximale de trois ans renouvelables.

Y sont assujettis :

– l’État et ses établissements publics administratifs ;

– les collectivités territoriales et leurs EPCI de plus de 20 000 habitants ;

– les établissements publics de santé et médico-sociaux.

Le 7ème alinéa prévoit que le plan d’action comprend notamment des mesures relatives à la prévention et à la lutte contre les discriminations, aux rémunérations, à la promotion et à l’avancement de grade.

Le 8ème alinéa précise que le plan est élaboré sur la base des données figurant dans le rapport de situation comparée renforcé. Le contenu de ce rapport, prévu actuellement à l’article 51 de la loi n° 2012–347 du 12 mars 2012 précitée, est désormais renvoyé à un décret (alinéa 11).

Le 9ème alinéa prévoit que les instances de dialogue social compétentes sont consultées sur le plan d’action et qu’elles sont informées chaque année de l’état de la mise en œuvre du plan.

Le 10ème alinéa précise la nature de la sanction applicable en cas de non-respect de l’obligation d’élaboration du plan d’action : il s’agit, comme le prévoit l’accord du 30 novembre 2018, d’une pénalité financière dont le montant ne peut excéder 1 % de la rémunération brute globale de l’ensemble des personnels de l’administration concernée.

Il faut noter qu’il s’agit uniquement d’une obligation de moyens. Dans le secteur privé, en application de l’article L. 1142–10 du code du travail, les entreprises dont les résultats en matière d’écarts de rémunération entre les femmes et les hommes ne sont pas satisfaisants disposent d’un délai de mise en conformité de trois ans, au terme duquel elles peuvent se voir appliquer une pénalité financière.

Le 11ème alinéa renvoie à un décret en Conseil d’État la fixation des modalités d’application du présent article.

Le XIII de l’article 33 du présent projet de loi prévoit que les plans d’action doivent être élaborés au plus tard le 31 décembre 2020.

Le II du présent article insère un article 26-2 (nouveau) au sein de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale prévoyant la possibilité pour les centres de gestion de mettre en place le dispositif de signalement prévu au I, pour le compte des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, s’ils le demandent.

Le III abroge l’article 51 de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 précitée, cette disposition étant reprise au I du présent article.

III.   La position de la commission

Outre plusieurs amendements rédactionnels de votre rapporteure, la Commission a adopté – avec l’avis favorable de votre rapporteure et du Gouvernement – un amendement des membres du groupe Socialistes et apparentés permettant d’ouvrir le dispositif de signalement des actes de violence, de harcèlement moral ou sexuel et des agissements sexistes aux témoins de ces actes.

La Commission a également adopté – avec un avis favorable de votre rapporteure et du Gouvernement – plusieurs amendements issus de recommandations de la Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes :

– un amendement visant à faciliter et encourager les mutualisations et les approches territorialisées dans le déploiement des dispositifs de signalement ;

– un amendement précisant dans la loi les principaux axes du plan d’action pluriannuel ;

– un amendement complétant les rapports de situation comparée établis par les administrations ;

– un amendement prévoyant la publication systématique des rapports de situation comparée.

*

*     *

Article 30
(art. 6 quater de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires)
Extension et renforcement du dispositif de nominations équilibrées sur les emplois de direction

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article élargit le périmètre du dispositif de nominations équilibrées sur les emplois de direction en y intégrant de nouveaux emplois et employeurs publics. Il encourage les actions volontaristes engagées par les employeurs publics.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes a élargi le périmètre du dispositif de nominations équilibrées sur les emplois de direction et accéléré sa mise œuvre.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté plusieurs amendements rédactionnels de votre rapporteure.

I.   L’état du droit

La révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 a inscrit au sommet de la hiérarchie des normes le rôle de la loi en matière de promotion de l’égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sociales.

L’article 6 quater de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, introduit par la loi dite « Sauvadet » ([284]), impose un taux minimum de personne de chaque sexe parmi les personnes nommées pour la première fois aux principaux emplois de l’encadrement supérieur et dirigeant de l’État, des collectivités territoriales et de la fonction publique hospitalière.

Il s’agit des nominations dans les emplois supérieurs pour lesquels les nominations sont laissées à la décision du Gouvernement, dans les autres emplois de direction de l’État, dans les emplois de directeur général des agences régionales de santé, dans les emplois de direction des régions, des départements ainsi que des communes et des établissements publics de coopération intercommunale de plus de 80 000 habitants et dans les emplois de direction de la fonction publique hospitalière.

Le dispositif ne s’applique qu’aux primo–nominations. Il ne concerne ni les renouvellements dans un même emploi ([285]) ni les nominations dans un même type d’emploi ([286]).

Ce dispositif conçu de manière progressive – 20 % en 2013 et 2014 et 30 % en 2015 et 2016 – prévoyait une montée en charge qui s’est achevée le 1er janvier 2017 en portant le taux de primo–nomination à 40 %.

Une montée en charge progressive des objectifs à atteindre

Source : bilan de la mise en œuvre du dispositif des nominations équilibrées
au cours de lannée 2017, DGAFP.

Le respect de cette obligation est apprécié, au terme de chaque année civile, par département ministériel pour l’État et les agences régionales de santé par autorité territoriale ([287]) et, globalement, pour les établissements publics de santé et médico–sociaux.

En cas de non-respect de cette obligation, une contribution est due, selon le cas, par le département ministériel, la collectivité territoriale ou l’établissement public de coopération intercommunale concerné ainsi que le centre national de gestion pour la fonction publique hospitalière. Le montant de cette contribution est égal au nombre d’unités manquantes au regard de l’obligation, constaté au titre de l’année écoulée ([288]), multiplié par un montant unitaire. Pour chaque « unité manquante », l’employeur est tenu de verser 90 000 euros de pénalités.

Au total, quelque 6 000 emplois d’encadrement supérieur et dirigeant de la fonction publique sont concernés. L’annexe du décret n° 2012-601 du 30 avril 2012 relatif aux modalités de nominations équilibrées dans la fonction publique recense les emplois entrant dans le champ du dispositif des nominations équilibrées.

Le taux de primo-nominations féminines est passé de 32 % en 2013 à 36 % en 2017.

 

Source : bilan de la mise en œuvre du dispositif des nominations équilibrées
au cours de lannée 2017, DGAFP.

L’objectif de 40 % de primo-nominations de personnes de chaque sexe n’a donc pas été atteint dans l’ensemble de la fonction publique en 2017 : 21 employeurs publics de l’État et territoriaux ont donc été contraints au versement de la pénalité financière, soit un montant global de 4 500 000 €.

 

Des taux de primo–nominations variables entre les versants de la fonction publique ([289])

 

En 2017, seule la fonction publique hospitalière a atteint le taux de 40 % de primo-nominations de personnes de chaque sexe. Au sein des fonctions publiques d’État et territoriale, le taux de primo-nominations féminine est respectivement de 36 % et de 34 %.

Au sein de l’État, 6 des 11 départements ministériels n’ont pas atteint l’objectif légal de primo-nominations en 2017. Le montant total de la pénalité financière due au titre de l’année 2017 est de 2 340 000 €. Elle correspond à 26 unités manquantes :

– ministère de l’Europe et des affaires étrangères : 5 unités manquantes soit une pénalité financière de 450 000 €,

– ministère des armées : 1 unité manquante soit une pénalité financière de 90 000 €,

– ministères économiques et financiers : 19 unités manquantes soit une pénalité financière de 1 710 000 €,

– ministère de l’intérieur : 1 unité manquante soit une pénalité financière de 90 000 €.

Concernant la fonction publique territoriale, en 2017, 17 des 41 collectivités territoriales ou EPCI ayant achevé ou accompli un cycle complet de nominations soit 41 % n’ont pas atteint l’objectif annuel de primo-nominations. Le montant total de la pénalité financière due par ces employeurs territoriaux s’élève à 2 160 000 €.

 

II.   Le dispositif proposé

Le présent article prévoit une nouvelle rédaction de l’article 6 quater de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée.

Le deuxième alinéa reprend le champ d’application du dispositif actuel en l’élargissant aux EPCI de plus de 40 000 habitants (au lieu de 80 000 aujourd’hui) et au centre national de la fonction publique territoriale.

Le troisième alinéa reprend la disposition actuelle sur l’appréciation du respect de l’obligation de nomination équilibre à une exception près : l’appréciation se fait désormais également par établissement public (et non plus au sein du département ministériel) s’agissant de la fonction publique de l’État.

Les alinéas quatre à six introduisent des dispositions spécifiques à la fonction publique territoriale :

– l’alinéa quatre exclut du champ d’application de l’obligation de nomination équilibrée les collectivités territoriales et les EPCI disposant de moins de trois emplois fonctionnels de direction ;

– l’alinéa cinq prend en compte le cas particulier des fusions. Ainsi, en cas de fusion de collectivités territoriales ou d’EPCI, la nomination dans un emploi de direction de la nouvelle collectivité ou du nouvel EPCI, dans les six mois à compter de la fusion, d’un agent occupant précédemment un emploi de direction dans les structures fusionnées, est considérée comme un renouvellement dans le même emploi (et donc non assujetti à l’obligation de nomination équilibrée) ;

– l’alinéa six prévoit que lorsqu’au titre d’une même année civile, l’autorité territoriale n’a pas procédé à des nominations dans au moins 4 emplois (au lieu de 5 actuellement) soumis à l’obligation de nomination équilibrée, cette dernière s’apprécie sur un cycle de 4 nominations successives entre deux renouvellements généraux des assemblées délibérantes.

Les alinéas sept et huit conservent les modalités actuelles de paiement de la contribution due en cas de non–respect de l’obligation de nomination équilibrée.

L’alinéa neuf introduit une dispense de contribution si les emplois assujettis à l’obligation de primo–nominations équilibrées relevant de sa gestion sont occupées par au moins 40 % de personnes de chaque sexe.

Comme actuellement, l’alinéa dix renvoie les modalités d’application de cet article à un décret en Conseil d’État.

Le XIV de l’article 33 du présent projet de loi prévoit une disposition d’entrée en vigueur différée pour certaines modifications (les collectivités et EPCI entrant dans le périmètre se voient appliquer le dispositif des nominations équilibrées à partir du prochain renouvellement général de leurs assemblées délibérantes).

III.   La position de la commission

La Commission a adopté plusieurs amendements rédactionnels de votre rapporteure.

*

*     *

Article 31
(art. 16 ter et 16 quater [nouveaux] de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, art. 20 bis, 26 bis et 58 bis [abrogés] de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de lÉtat, art. 42 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, art. 30–1 [abrogé] et 35 de la loi n° 86–33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière et art. 55 [abrogé] de la loi n° 2012–347 du 12 mars 2012 relative à laccès à lemploi titulaire et à lamélioration des conditions demploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique)
Sécurisation des règles de composition équilibrée et de présidence alternée pour les jurys et comités de sélection

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article rassemble et précise les règles de composition équilibrée des jurys et instances de sélection, actuellement fixées dans différents textes. Il permet par ailleurs une application périodique de l’alternance de la présidence des jurys.

       Dernières modifications législatives intervenues

L’article 166 de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté a inscrit au sein de chacun des trois versants de la fonction publique le principe d’une alternance entre les femmes et les hommes à la présidence des jurys et instances de sélection.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement rédactionnel de votre rapporteure.

 

I.   L’état du droit

Si l’article 55 de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique pose le principe d’une composition équilibrée – au moins 40 % de personnes de chaque sexe – des jurys et instances de sélection pour les trois versants de la fonction publique, il subsiste néanmoins, de manière éparse, un certain nombre de dispositions relatives à ce sujet :

– aux articles 20 bis, 26 bis, 58 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État ;

– au dernier alinéa de l’article 42 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

– à l’article 30-1 et à l’article 35 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.

Un hiatus existe en outre entre les dispositions actuelles des articles 20 bis, 26 bis et 58 bis de la loi n° 84-16 du 26 janvier 1984 précitée, dont la rédaction – issue de la loi n° 2001-397 du 9 mai 2001 relative à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes – renvoie toujours la fixation de la proportion à un décret en Conseil d’État, et celles de l’article 55 actuel issues de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 précitée qui fixent directement le taux à 40 %.

 


Dispositions relatives à la composition équilibrée et de présidence alternée pour les jurys et comités de sélection

Loi du 12 mars 2012

Fonction publique de lÉtat

Fonction publique territoriale

Fonction publique hospitalière

Article 55 : À compter du 1er janvier 2015, pour la désignation des membres des jurys et des comités de sélection constitués pour le recrutement ou la promotion des fonctionnaires relevant de la fonction publique de l’État, de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière, l’autorité administrative chargée de l’organisation du concours, de l’examen ou de la sélection respecte une proportion minimale de 40 % de personnes de chaque sexe.

À titre exceptionnel, les statuts particuliers peuvent, compte tenu des contraintes de recrutement et des besoins propres des corps ou cadres d’emplois, fixer des dispositions dérogatoires à la proportion minimale prévue au premier alinéa.

Dans le cas de jurys ou de comités de sélection composés de trois personnes, il est au moins procédé à la nomination d’une personne de chaque sexe.

Article 20 bis : Les jurys dont les membres sont désignés par l’administration sont composés de façon à concourir à une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes. La présidence est confiée de manière alternée à un membre de chaque sexe. Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article, et notamment la proportion des membres des jurys appartenant à chacun des sexes ainsi que les conditions de dérogation au principe d’alternance de la présidence des jurys.

Article 26 bis : Les jurys et les comités de sélection, dont les membres sont désignés par l’administration, sont composés de façon à concourir à une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes. Un décret en Conseil d’État fixe les conditions d’application du présent article et notamment la proportion des membres des jurys et des comités de sélection appartenant à chacun des deux sexes.

Article 58 bis : Les jurys et les comités de sélection constitués pour la promotion dans un grade, dont les membres sont désignés par l’administration, sont composés de façon à concourir à une représentation équilibrée entre les hommes et les femmes.

Article 42 : Les jurys sont composés de façon à concourir à une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes. La présidence est confiée de manière alternée à un membre de chaque sexe, sauf dérogation prévue par décret en Conseil d’État.

 

Article 30-1 : Les jurys dont les membres sont désignés par l’autorité organisatrice de concours compétente sont composés de façon à concourir à une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes. La présidence est confiée de manière alternée à un membre de chaque sexe, sauf dérogation prévue par un décret en Conseil d’État.

Article 35 : En vue de favoriser la promotion interne, les statuts particuliers fixent une proportion d’emplois susceptibles d’être proposés au personnel appartenant déjà à l’administration ou à une organisation internationale intergouvernementale non seulement par voie de concours, selon les modalités définies au 2° de l’article 29, mais aussi par la nomination de fonctionnaires ou de fonctionnaires internationaux (…).

Les jurys dont les membres sont désignés par l’autorité organisatrice des examens professionnels compétente sont composés de façon à concourir à une représentation équilibrée entre les femmes et hommes.


1

 

II.   Le dispositif proposé

Le I du présent article insère deux articles, 16 ter et 16 quater, dans le chapitre III de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires relatif aux carrières.

L’article 16 ter rassemble les dispositions relatives à la composition équilibrée des jurys et instances de sélection.

Le premier alinéa reprend le principe de la composition équilibrée des jurys et instances de sélection pour le recrutement ou l’avancement des fonctionnaires dans les trois versants : concours et examens professionnels de recrutement, examens et concours professionnels d’avancement de grade, recrutements sans concours, PACTE, tours extérieurs et recrutement de personnes en situation de handicap.

Le 2ème alinéa reprend la disposition selon laquelle, lors de la désignation des membres de jury, l’administration doit respecter une proportion minimale de 40 % de chaque sexe.

Le 3ème alinéa reprend la possibilité de déroger au principe de la composition équilibrée du fait des contraintes de recrutement et des besoins propres aux corps ou cadres d’emploi.

Le 4ème alinéa reprend la disposition selon laquelle, dans le cas de jurys ou de comités de sélection composés de trois personnes, il est au moins procédé à la nomination d’une personne de chaque sexe.

Le 5ème alinéa renvoie à un décret en Conseil d’État la fixation des modalités d’application du présent article.

L’article 16 quater rassemble les dispositions relatives à la présidence alternée des jurys de concours et instances de sélection.

Le premier alinéa rappelle le principe de l’alternance de la présidence des jurys et des instances de sélection constituées pour le recrutement ou l’avancement des fonctionnaires et fixe une périodicité maximale de quatre sessions consécutives pour l’application de l’alternance.

Les alinéas 2 à 5 précisent le champ d’application du principe fixé au 1er alinéa en procédant à une uniformisation du champ pour les trois versants de la fonction publique. Sont dès lors concernés :

– les concours (article 19 de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 précitée, article 36 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée et article 29 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 précitée) ;

– les examens professionnels de recrutement (1° de l’article 26 de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 précitée, 1° de l’article 39 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée et 1° de l’article 35 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 précitée) ;

– les examens et concours professionnels d’avancement de grade (2° et 3° de l’article 58 de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 précitée, 2° et 3° de l’article 79 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 précitée et 2° et 3° de l’article 69 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 précitée).

Le champ est donc élargi aux examens professionnels de recrutement et aux examens et concours professionnels d’avancement de grade pour la fonction publique de l’État et la fonction publique hospitalière.

Le 6ème alinéa maintient la possibilité de déroger au principe de l’alternance dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État.

En conséquence, les II, III, IV et V du présent article procèdent aux abrogations nécessaires.

III.   La position de la commission

La Commission a adopté un amendement rédactionnel de votre rapporteure.

*

*     *

Article 32
(art. 115 de la loi n° 2017–1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 et art. 88 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires
relatives à la fonction publique territoriale)
Inapplication du jour de carence pour les congés maladie liés à la grossesse et maintien des primes de la fonction publique territoriale
en cas de congé maternité

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article exclut les congés de maladie pendant la grossesse du champ d’application du délai de carence et maintient le versement des primes et indemnités durant les congés de maternité, d’adoption, de paternité et d’accueil de l’enfant.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 a instauré un jour de carence entre le début d’un congé maladie et le bénéfice du maintien de traitement ou de rémunération, ou du versement de prestations en espèces par l’employeur.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement rédactionnel de votre rapporteure.

I.   L’état du droit

Le I de l’article 115 de la loi n° 2017-1837 précitée prévoit que les agents publics ne bénéficient du maintien de leur traitement ou de leur rémunération, ou du versement de prestations en espèces par l’employeur, qu’à compter du deuxième jour de ce congé. Il prévoit néanmoins un certain nombre d’exceptions (II) :

– lorsque la maladie provient d’une invalidité résultant de l’exercice des fonctions (1°) ;

– au deuxième congé de maladie, lorsque la reprise du travail entre deux congés de maladie accordés au titre de la même cause n’a pas excédé 48 heures (2°) ;

– au congé pour invalidité temporaire imputable au service, au congé du blessé, aux congés pour accident de service ou accident du travail et maladie professionnelle, au congé de longue maladie, au congé de longue durée et au congé de grave maladie (3°) ;

– aux congés de maladie accordés postérieurement à un premier congé de maladie au titre d’une même affection de longue durée pour une période de trois ans à compter de ce premier congé de maladie (4°).

L’article 88 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale prévoit par ailleurs que les organes délibérants des collectivités territoriales et de leurs établissements publics fixent les régimes indemnitaires, dans la limite de ceux dont bénéficient les différents services de l’État. Ces régimes indemnitaires peuvent tenir compte des conditions d’exercice des fonctions et de l’engagement professionnel des agents. Aucune mesure n’est prévue pour maintenir le versement des primes et indemnités durant les congés de maternité, d’adoption et de paternité et d’accueil de l’enfant.

II.   Le dispositif proposé

Le I du présent article met en œuvre l’action 4.2 de l’accord du 30 novembre 2018 relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique en excluant les congés de maladie pendant la grossesse du champ d’application du délai de carence. Pour ce faire, il crée une nouvelle exception d’application du délai de carence en ajoutant un 5° au II de l’article 115 de la loi de finances pour 2018 précitée.

Votre rapporteure ne peut que se réjouir de l’instauration de cette exception, qui est une mesure qu’elle promeut depuis le début de la législature. Les femmes enceintes sont en effet en situation de plus grande fragilité physique que les autres agents publics, ne serait–ce que parce que la prise d’un grand nombre de médicaments leur est interdite.

Le II du présent article met quant à lui en œuvre l’action 3.4 de l’accord du 30 novembre 2018 précité en insérant, au premier alinéa de l’article 88 de la loi du 26 janvier 1984 précitée, le principe de maintien dans les mêmes proportions que le traitement des primes et indemnités durant le congé pour maternité, le congé d’adoption et le congé de paternité et d’accueil de l’enfant.

III.   La position de la commission

La Commission a adopté un amendement rédactionnel de votre rapporteure.

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*     *

Article 33
(art. 51, 54, 54–1 [nouveau] et 58 de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de lÉtat, art. 72, 75, 75–1 [nouveau] et 79 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, art. 64, 64–1 [nouveau] et 69 de la loi n° 86–33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière)
Maintien des droits à lavancement/promotion en cas de congé parental et de disponibilité de droit pour élever un enfant - Égal accès des femmes et des hommes dans les procédures davancement

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article met en œuvre deux mesures de l’accord du 30 novembre 2018 relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique, visant à supprimer les inégalités dans les déroulements de carrière en maintenant les droits à l’avancement en cas de congé parental et de disponibilité de droit pour élever un enfant et en garantissant le respect de l’égalité entre les femmes et les hommes dans les procédures d’avancement.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel a prévu que les agents publics en situation de disponibilité pour exercer une activité professionnelle bénéficient d’un maintien de leurs droits à l’avancement

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté plusieurs amendements rédactionnels de votre rapporteure.

I.   L’état du droit

Une étude menée par le Centre d’études de l’emploi et du travail pour le compte de la DGAFP et le Défenseur des droits a montré l’effet négatif de la maternité sur la carrière des femmes. Cet effet s’accroît avec le nombre d’enfants ([290]).

effet de la naissance d’un enfant sur le salaire journalier, le nombre d’heures et le salaire horaire ds femmes et des hommes selon le secteur d’appartenance, trois années après la naissance

 

 

Femmes

Hommes

 

Salaire journalier

Heures

Salaire horaire

Salaire journalier

Heures

Salaire horaire

FPE

1ère naissance

-2.6 %

-5.4 %

+2.1 %

+1.3 %

0.1 %

+0.9 %

2ème naissance

-3.5 %

-6.1 %

+3.4 %

+2.3 %

-2.5 %

+7.7 %

3ème naissance

-12.4 %

-17.8 %

+5.3 %

+3.3 %

+0.1 %

+3.5 %

FPH

1ère naissance

-2.6 %

-5.8 %

+2.1 %

+1.5 %

+2.1 %

%

2ème naissance

-6.6 %

-11.6 %

+4.5 %

+3.0 %

+4.9 %

%

3ème naissance

-13.2 %

-23.7 %

+5.3 %

+41.8 %*

+2.3 %*

+28.7* %

FPT

1ère naissance

-5.5 %

-6.9 %

+0.8 %

+1.4 %

-0.6 %

+2.6 %

2ème naissance

-8.7 %

-29.9 %

+6.6 %

+5.7 %

-4.8 %

+5.1 %

3ème naissance

-17.9 %

-13.9 %

+4.3 %

+2.8 %

-7.5 %

+5.2 %

Secteur privé

1ère naissance

-7.1 %

-9.4 %

-1.5 %

+1.9 %

-1.3 %

+0.8 %

2ème naissance

-17.0 %

-28.2 %

+0.2 %

+1.3 %

+0.7 %

+0.8 %

3ème naissance

-17.7 %

-36.8 %

-0.2 %

-3.0 %

-3.2 %

-3.9 %

Source : panel tous salariés, 1994-2011.

Lecture : au sein de la FPE, les mères ayant donné naissance à leur premier enfant perçoivent un salaire journalier (en équivalent temps plein), trois années après cette naissance, en moyenne 2.6 % inférieur à celui perçu par les femmes n’ayant pas encore donné naissance à un enfant. La naissance d’un deuxième enfant engendre une perte additionnelle de salaire journalier en moyenne de 3.5 % trois années après cette naissance et celle d’un troisième enfant une perte supplémentaire de salaire journalier de 12.4 %

* : ces résultats concernant la FPH sont à considérer avec précaution en raison du faible nombre de pères de trois enfants considérés (moins de 50).

Note : les effets de la naissance des enfants sur le salaire journalier, le nombre d’heures et le salaire horaire ont été estimés de façon indépendante. Il en résulte une différence d’estimation entre l’effet sur le salaire par équivalent plein-temps (journalier) d’une part et le cumul des effets sur le volume de travail et le salaire horaire d’autre part.

Source : Centre national d’études de l’emploi et du travail, Écarts de rémunérations entre les femmes et les hommes dans la fonction publique : sous le prisme des inégalités de genre, 10 mars 2015, étude conduite pour le compte de la DGAFP et du Défenseur des droits.

Le congé parental est la position du fonctionnaire qui est placé hors de son administration ou service d’origine pour élever son enfant.

Cette position est accordée de droit sur simple demande du fonctionnaire après la naissance ou l’adoption d’un enfant. Le congé parental prend fin au plus tard au troisième anniversaire de l’enfant ou à l’expiration d’un délai de trois ans à compter de l’arrivée au foyer de l’enfant, âgé de moins de trois ans.

Dans cette position, le fonctionnaire n’acquiert pas de droit à la retraite, il conserve ses droits à l’avancement d’échelon pour leur totalité la première année, puis réduits de moitié. Le congé parental est considéré comme du service effectif dans sa totalité la première année, puis pour moitié les années suivantes. Cette situation est fortement pénalisante pour la carrière des femmes, qui représentent plus de 90 % des fonctionnaires prenant ce congé.

II.   Le dispositif proposé

 Le I du présent article met en œuvre pour la fonction publique de lÉtat – loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État – la mesure 3.4 de l’accord du 30 novembre 2018 relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique, visant à supprimer les inégalités dans les déroulements de carrière en neutralisant l’impact des congés familiaux sur la rémunération et les déroulements de carrière et la mesure 3.6 garantissant le respect de l’égalité entre les femmes et les hommes dans les procédures d’avancement.

Le complète l’article 51 afin de prévoir qu’en cas de disponibilité pour élever un enfant, le fonctionnaire conserve, pendant une durée maximale de cinq ans, ses droits à l’avancement. Cette période est assimilée à des services effectifs dans le corps.

Le 2° modifie l’article 54 afin de maintenir les droits à avancement, dans la limite d’une durée de cinq ans pour l’ensemble de sa carrière, au lieu précédemment d’une conservation des droits pour leur totalité la première année, puis réduits de moitié. De même, il est prévu que cette période est assimilée à des services effectifs dans le corps alors qu’auparavant, seule la première année était comptabilisée intégralement, les autres années étaient considérées pour moitié.

Le 3° instaure un article 54-1 (nouveau), pour permettre une prise en compte de la disponibilité pour élever un enfant et du congé parental en matière d’avancement et de service effectif dans la limite de cinq ans.

Le 4° ajoute un nouvel alinéa à l’article 58, précisant qu’il est tenu compte de la situation des femmes et des hommes dans les corps et grades concernés, dans le cadre des nouvelles lignes directives de gestion introduite par le présent projet de loi. En outre, le tableau annuel d’avancement précise la part respective des femmes et des hommes dans le vivier des agents promouvables et celle parmi les agents promus.

Le II du présent article met en œuvre les mêmes mesures que celles prévues au I au sein de la fonction publique territoriale – loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

Pour ce faire, le modifie l’article 72 afin d’instaurer la prise en compte des droits à avancement dans la limite de cinq ans et à des services effectifs en cas de disponibilité pour élever un enfant.

Le modifie l’article 75 afin de permettre le maintien des droits à avancement et la prise en compte comme service effectif dans la limite de cinq ans en cas de congé parental.

Le instaure un article 75-1 (nouveau) précitée, pour permettre une prise en compte de la disponibilité et du congé parental en matière d’avancement et de service effectif dans la limite de cinq ans.

Le ajoute un troisième alinéa à l’article 79 permettant la prise en compte de la situation des femmes et des hommes dans les corps et grades concernés, dans le cadre des nouvelles lignes directives de gestion introduite par le présent projet de loi.

Le III du présent article met en œuvre les mêmes mesures que celles prévues au I et au II au sein de la fonction publique hospitalière – loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.

Le complète l’article 62 afin de prévoir qu’en cas de disponibilité pour élever un enfant, le fonctionnaire conserve, pendant une durée maximale de cinq ans, ses droits à l’avancement. Cette période est assimilée à des services effectifs dans le corps.

Le 2° modifie l’article 64 afin d’instaurer la prise en compte des droits à avancement dans la limite de cinq ans et à des services effectifs en cas de disponibilité pour élever un enfant.

Le 3° instaure un article 64-1 (nouveau), pour permettre une prise en compte de la disponibilité pour élever un enfant et du congé parental en matière d’avancement et de service effectif dans la limite de cinq ans.

Le 4° ajoute un nouvel alinéa à l’article 69 permettant la prise en compte de la situation des femmes et des hommes dans les corps et grades concernés, dans le cadre des nouvelles lignes directives de gestion introduite par le présent projet de loi.

III.   La position de la commission

La Commission a adopté plusieurs amendements rédactionnels de votre rapporteure.

*

*     *

Chapitre II
Favoriser légalité professionnelle pour les travailleurs
en situation de handicap

Article 34
(art. 6 sexies de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, art. 27 de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de lÉtat, art. 35 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, art. 27 de la loi n° 86–33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière)
Développement du parcours professionnel des personnes en situation de handicap et amélioration de la prise en compte des aménagements nécessaires lors du déroulement des concours et examens

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise, d’une part, à encourager le développement du parcours professionnel des personnes en situation de handicap et, d’autre part, à faciliter la mise en œuvre des aménagements en faveur des candidats handicapés lors du déroulement des épreuves des concours et examens.

       Dernières modifications législatives intervenues

La loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées prévoit, pour les employeurs publics, le versement d’une contribution au Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique en cas de non-respect du taux légal de 6 % d’emploi de personnes en situation de handicap prévu par l’article L. 5212-2 du code du travail.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement rédactionnel de votre rapporteure.

I.   L’état du droit

L’article 6 sexies de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dispose que les employeurs des trois fonctions publiques prennent, en fonction des besoins dans une situation concrète, les mesures appropriées pour permettre aux travailleurs handicapés d’accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l’exercer et d’y progresser ou pour qu’une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée, sous réserve que les charges consécutives à la mise en œuvre de ces mesures ne soient pas disproportionnées, notamment compte tenu des aides qui peuvent compenser en tout ou partie les dépenses supportées à ce titre par l’employeur. Ces mesures comprennent notamment l’aménagement de tous les outils numériques concourant à l’accomplissement de la mission des agents, tels que les logiciels métiers et de bureautique ainsi que les appareils mobiles.

Le taux d’emploi légal s’établit à 5,49 % dans les trois versants de la fonction publique en 2017.

Le concours représente le mode de recrutement de droit commun pour les personnes en situation de handicap, même si un dispositif dérogatoire de recrutement direct sans concours a été créé dans les trois versants de la fonction publique par la loi n° 87-517 du 10 juillet 1987 en faveur de l’emploi des travailleurs handicapés. Chacune des lois statutaires de la fonction publique pose à cet effet le principe d’un aménagement des épreuves par dérogation aux règles normales de déroulement des concours et examens.

II.   Le dispositif proposé

Le I du présent article modifie l’article 6 sexies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée, afin de renforcer les obligations des employeurs publics en vue de garantir l’égalité professionnelle pour les personnes en situation de handicap.

Parmi les obligations incombant aux employeurs sont ajoutés « le développement dun parcours professionnel », « laccès à des fonctions de niveau supérieur » et le fait de bénéficier « dune formation adaptée à leur besoin tout au long de leur vie professionnelle ».

Le II modifie l’article 27 de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État.

Le supprime la référence à l’orientation en milieu ordinaire de travail par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées afin d’avoir une acception plus large des personnes en situation de handicap susceptibles de bénéficier des aménagements prévus lors des concours et examens.

Le supprime la référence aux seuls moyens physiques des candidats afin de prendre en compte toutes les formes de handicap. En effet, la situation actuelle crée une différence de traitement entre les personnes en fonction du type de handicap dont elles souffrent, ce qui est contraire aux dispositions de l’article 6 sexies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée ainsi qu’à la directive 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 portant création d’un cadre général en faveur de l’égalité de traitement en matière d’emploi et de travail.

Il permet par ailleurs aux candidats de bénéficier d’une durée plus longue pour préciser les aménagements requis puisque la demande devra être faite « préalablement au déroulement des épreuves » et non plus lors de l’inscription. Un décret en Conseil d’État doit permettre de fixer les modalités d’application de cette disposition.

Le remplace la référence aux fonctionnaires handicapés par les « agents publics en situation de handicap » afin que l’ensemble des agents publics – fonctionnaires et contractuels – dans cette situation bénéficient des aménagements prévus par l’article 6 sexies.

Le III modifie l’article 35 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et procède aux mêmes modifications que celles apportées à l’article 27 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée.

Le propose les mêmes modifications que le 1° du II.

Le procède aux mêmes modifications que le 2° du II.

Le procède à la même modification que le 3° du II.

Le IV modifie l’article 27 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière et procède aux mêmes modifications que celles apportées à l’article 27 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée.

Le propose les mêmes modifications que le 1° du II.

Le procède aux mêmes modifications que le 2° du II.

Le procède à la même modification que le 3° du II.

III.   La position de la commission

La Commission a adopté un amendement rédactionnel de votre rapporteure.

*

*     *

Article 35
Introduction à titre expérimental dun mécanisme dérogatoire de détachement pour les personnes en situation de handicap

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article prévoit, à titre expérimental, un mécanisme dérogatoire de détachement afin de permettre aux fonctionnaires en situation de handicap d’accéder aux emplois relevant d’un corps de niveau supérieur ou de catégorie supérieure, sous réserve d’avoir accompli une certaine durée de services publics.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement rédactionnel de votre rapporteure.

I.   lE DISPOSITIF proposé

L’article 13 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires pose le principe selon lequel le détachement ou l’intégration directe a lieu entre corps et cadres d’emplois appartenant à la même catégorie et de niveau comparable.

Le premier alinéa introduit, à titre expérimental du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2025, un mécanisme dérogatoire de détachement permettant aux fonctionnaires en situation de handicap d’accéder aux emplois relevant d’un corps de niveau supérieur ou de catégorie supérieure, sous réserve d’avoir accompli une certaine durée de services publics. Au terme du détachement, qui peut être renouvelé, le fonctionnaire peut être intégré dans le corps concerné.

Cette rédaction prend en compte une observation du Conseil d’État. Celui‑ci a en effet souligné, dans son avis sur le présent texte, que « [s]i tel mécanisme de discrimination positive peut, dans son principe, répondre à un motif dintérêt général susceptible de fonder une atteinte au principe dégalité et sil est en lespèce entouré de certaines garanties, le Conseil dÉtat souligne les lacunes de létude dimpact qui aurait pu être davantage documentée quant au nombre dagents concernés et à la nature des difficultés rencontrées, afin de mieux établir la justification dune telle dérogation au droit commun. Il considère quil est préférable de ne lui donner quun caractère temporaire afin de pouvoir en mesurer les effets, au terme dune période de six ans, avant den envisager la pérennisation. » ([291])

Le deuxième alinéa renvoie à un décret en Conseil d’État les conditions d’application de ce détachement. Le contenu de ce décret est néanmoins assez précisément encadré puisqu’il devra fixer :

– la durée de services publics exigée des candidats ;

– les modalités d’appréciation de l’aptitude professionnelle préalable au détachement ainsi que celles préalables à l’intégration ;

– la durée minimale du détachement ;

– les conditions éventuelles du renouvellement du détachement.

Le décret devra par ailleurs fixer la composition de la commission chargée d’apprécier l’aptitude professionnelle du fonctionnaire.

Le troisième alinéa prévoit qu’une évaluation du dispositif sera présentée au Parlement un an avant son terme.

II.   La position de la commission

La Commission a adopté un amendement rédactionnel de votre rapporteure.

*

*     *

Article 36
Entrées en vigueur différées

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article prévoit l’entrée en vigueur différée de certaines dispositions du projet de loi ainsi que la mise en place de plusieurs mesures transitoires.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté quatre amendements rédactionnels de votre rapporteure ainsi qu’un amendement de coordination du Gouvernement.

I.   LE dispositif proposé

Le premier alinéa prévoit l’entrée en vigueur du II de l’article 2 relatif à la représentation des établissements publics de coopération intercommunale au sein du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) lors du prochain renouvellement général de leurs assemblées délibérantes, soit en mars 2020.

Le deuxième alinéa prévoit l’entrée en vigueur de l’article 3 relatif à la création des comités sociaux lors du prochain renouvellement général des actuels comités techniques et CHSCT prévu en décembre 2022.

Les alinéas trois à six prévoient plusieurs mesures transitoires entre l’entrée en vigueur du projet de loi et décembre 2022 :

– les comités techniques seront seuls compétents pour examiner les questions relatives aux projets de réorganisation de service ;

– les comités techniques et les CHSCT pourront être réunis conjointement afin d’examiner des questions communes. Le cas échéant, l’avis rendu par la formation conjointe remplacera ceux du comité technique et du CHSCT ;

– les comités techniques seront compétents pour examiner les lignes directrices de gestion.

Le septième alinéa précise que le I de l’article 10 de l’ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 relatif aux CHSCT dans la fonction publique hospitalière sera abrogé lors de la mise en place des comités sociaux d’établissement en décembre 2022.

Le huitième alinéa prévoit que l’article 4 relatif à la réorganisation des commissions administratives paritaires s’appliquera en vue de l’élaboration des décisions individuelles prises au titre de l’année 2021.

Les alinéas neuf à onze précisent que les décisions individuelles relatives aux mutations et aux mobilités ne relèvent plus des attributions des commissions administratives paritaires (CAP) dès le 1er janvier 2020 au sein des versants territorial et hospitalier. En outre, la suppression de l’architecture par corps et grade des CAP et la faculté de créer des CAP inter-catégorie entreront en vigueur lors du prochain renouvellement de ces instances.

L’alinéa 12 prévoit que les articles 7, 9 et 10 relatifs à l’ouverture des recrutements contractuels entreront en vigueur à compter du lendemain de la publication des dispositions réglementaires prises pour l’application de l’article 6 relatif à la mise en place d’une procédure permettant de garantir l’égal accès aux emplois publics.

L’alinéa 13 prévoit que les dispositions de l’article 11 relatives aux décisions de mutation dans la fonction publique de l’État s’appliqueront aux décisions individuelles prenant effet à compter du 1er janvier 2020.

L’alinéa 14 prévoit que l’article 12 relatif à la généralisation de l’entretien professionnel ([292]) dans la fonction publique hospitalière entrera en vigueur le 1er janvier 2021.

L’alinéa 15 prévoit que les dispositions de l’article 14 relatives aux lignes directrices de gestion applicables aux orientations générales en matière de mobilité dans la fonction publique de l’État s’appliqueront aux dispositions individuelles prises à compter du 1er janvier 2020.

L’alinéa 17 précise que les dispositions relatives à la composition des conseils de discipline de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière entreront en vigueur après le prochain renouvellement général des instances.

L’alinéa 18 précise que les saisines de la commission de déontologie enregistrées avant l’entrée en vigueur de l’article 16 seront régies par les dispositions actuellement applicables.

L’alinéa 20 prévoit que les dispositions de l’article 21 relatives au compte personnel de formation entrent en vigueur à compter de la publication des mesures réglementaires nécessaires et au plus tard le 1er janvier 2020.

L’alinéa 21 prévoit que les dispositions de l’article 23 qui diminuent le coût de la contribution patronale pour pensions pesant sur l’employeur d’accueil dans certains cas s’appliqueront aux mises à disposition et détachements prononcés ou renouvelés avec prise d’effet à compter du 1er janvier 2020.

L’alinéa 22 prévoit que les plans d’action en matière d’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes devront être élaborés d’ici le 31 décembre 2020.

S’agissant du dispositif de nominations équilibrées prévu par l’article 30, l’alinéa 23 prévoit que ses dispositions entreront en vigueur à compter du prochain renouvellement général des collectivités territoriales et EPCI et, s’agissant du CNFPT, à compter du renouvellement de son conseil d’administration.

II.   La position de la commission

La Commission a adopté quatre amendements rédactionnels de votre rapporteure ainsi qu’un amendement de coordination du Gouvernement.


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audition de M. olivier dussopt, secrétaire d’état auprès du ministre de l’action et des comptes publics

Réunion du mercredi 10 avril 2019 à 9 heures 30

Lors de sa réunion du mercredi 10 avril 2019, la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République auditionne M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics.

Lien vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.7522579_5cad98faeb9d3.commission-des-lois--m-olivier-dussopt-secretaire-d-etat-aupres-du-ministre-de-l-action-et-des-co-10-avril-2019

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Monsieur le secrétaire d’État, nous sommes ravis de vous accueillir au sein de la commission des Lois, que vous connaissez bien. Vous allez nous présenter le projet de réforme de la fonction publique. Cette audition ne vaut pas discussion générale. Après votre intervention, les députés qui le souhaitent pourront vous poser des questions d’une durée n’excédant pas deux minutes.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Madame la présidente, mesdames, messieurs les députés, je suis très heureux de retrouver la commission des Lois pour cette audition sur le projet de loi de transformation de la fonction publique. Permettez-moi d’excuser l’absence de Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics, retenu au conseil des ministres.

Le projet de loi que je vais vous exposer a été présenté au conseil des ministres le 27 mars dernier. Il répond à l’objectif de transformation de l’action publique, que défend le Président de la République, ainsi qu’aux orientations dessinées par le Premier ministre, à l’occasion du comité interministériel de la transformation publique du 1er février 2018. Il représente une profonde modernisation de la gestion des ressources humaines de la fonction publique, mais aussi un outil, une condition nécessaire pour mettre en œuvre les autres transformations publiques dans chaque périmètre ministériel, ainsi que dans les autres versants de la fonction publique.

Dès lors que l’on s’intéresse à la question des ressources humaines de la fonction publique, il faut rappeler que l’on évoque 5 500 000 agents publics, dont 1 million de contractuels, et avoir en tête que neuf agents sur dix sont quotidiennement au contact avec les usagers, sous des formes diverses, pour l’exercice de leurs missions. Nous savons, parce que les organisations représentatives nous l’ont dit, mais aussi parce que j’ai eu l’occasion d’organiser de nombreuses réunions avec les agents, territoire par territoire, sans filtres ni conditions, qu’ils sont attachés à l’exercice de leur mission et ont à cœur de rendre un service de qualité. À chacun de mes déplacements, j’ai entendu des agents soucieux d’évoluer professionnellement dans la fonction publique, parfois de mettre fin à un sentiment d’assignation à résidence professionnelle, et certains même envisager une seconde carrière dans le secteur privé.

Dans le même temps, nos concitoyens expriment de fortes attentes, que nous avons pu mesurer à l’occasion du grand débat, sur la capacité des services publics à répondre à leurs besoins, à être réactifs, à garantir la continuité qui est au cœur de leur engagement. Les employeurs publics, pour leur part, comme les élus, nous ont fait part de leur volonté de bénéficier d’outils managériaux nouveaux et de voir les outils actuels améliorés. Ils nous ont surtout demandé de leur faire confiance et de leur accorder de l’autonomie dans les fonctions qui leur incombent et pour les réformes qu’ils ont à mener.

Au regard de ces exigences, nous devons répondre à un triple enjeu : offrir aux agents publics de nouveaux droits et de nouvelles perspectives d’évolution professionnelle ; accorder aux employeurs publics, élus ou encadrants, une plus forte autonomie dans le recrutement et la gestion de leurs équipes ; apporter une nouvelle souplesse, mais aussi des outils de décloisonnement, pour améliorer la réactivité et l’efficacité du service public. Il faut inventer une nouvelle souplesse, pour être plus efficaces, mais aussi apporter de nouveaux droits et des perspectives professionnelles à tous les agents.

Ce projet de loi est avant tout le fruit d’une année de concertations avec les neuf organisations syndicales et les employeurs du versant hospitalier comme territorial. Il s’inscrit dans un cadre, une volonté clairement affichée : ne pas remettre en cause le statut défini par la loi de 1983, auquel nous sommes attachés, ainsi qu’aux valeurs qui le sous-tendent et qui caractérisent l’engagement dans la fonction publique. Mais nous sommes aussi attachés à le moderniser et à le rénover, pour lui permettre de s’adapter à des contraintes nouvelles, que ce soient des évolutions technologiques ou territoriales ou celles des besoins exprimés par les usagers.

Avant de vous présenter les principales dispositions du texte, je dirai un mot sur sa méthode d’élaboration et la concertation conduite depuis quinze mois. Toutes les organisations syndicales ont pris part jusqu’au bout à la concertation, qui a pris la forme de plusieurs dizaines de réunions, pendant plusieurs centaines d’heures. Ces organisations étaient aussi présentes dans les instances : les conseils supérieurs des trois versants du secteur public, comme le Conseil commun de la fonction publique, qui a été saisi pour avis. Ces instances ont eu à examiner environ trois cents amendements, déposés par les employeurs, ainsi que par la CFDT et l’UNSA, les autres organisations syndicales ayant fait le choix de ne pas en présenter. À la demande de ces deux syndicats, j’avais accordé un délai supplémentaire pour le dépôt d’amendement, de manière à permettre leur examen et la défense des différentes positions.

Si l’on met de côté les amendements de suppression d’articles du texte, dont la défense a été l’occasion de présenter un certain nombre de positions de principe, nous avons pris en compte la moitié des amendements déposés par les deux syndicats, soit en introduisant des dispositions nouvelles dans le texte – rôle du conseiller syndical dans certaines procédures ou amélioration de l’accès à la formation pour certains agents particulièrement fragiles –, soit en nous engageant à les prévoir dans les décrets d’application, dans la mesure où le droit de la fonction publique relève pour une grande part du domaine réglementaire.

S’agissant des employeurs publics, nous avons fait le choix de la coconstruction avec la fédération hospitalière de France et les employeurs territoriaux. Je me suis appuyé sur la coordination des employeurs territoriaux, lancée par Philippe Laurent, président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, qui réunit l’ensemble des associations représentatives d’élus locaux, par strates, à commencer par les trois plus connues, l’Association des régions de France (ARF), l’Assemblée des départements de France (ADF) et l’Association des maires de France (AMF). Nous avons prévu des possibilités de différenciation pour la fonction publique territoriale. Par exemple, sur l’élargissement de la possibilité de recours aux contrats, sur la rupture conventionnelle ou sur des sujets relatifs à la formation, nous avons veillé à ce que les dispositions que nous vous présentons aujourd’hui soient coconstruites. Elles l’ont été à tel point que ce sont les amendements mêmes des employeurs territoriaux qui ont été intégrés dans le texte.

Tout cela témoigne d’une volonté de consultation et de concertation que nous allons poursuivre sous des formes différentes, à l’occasion du débat parlementaire, en souhaitant qu’il soit l’occasion d’autres enrichissements.

Sur le fond, le texte est organisé autour de cinq piliers. Le premier a trait au dialogue social, que nous souhaitons à la fois plus stratégique et recentré sur des enjeux qualitatifs. Notre volonté est également de le simplifier : il existe actuellement 22 000 instances de dialogue différentes – parfois avec des organisations contradictoires – couvrant les 5,5 millions d’agents. Nous souhaitons déconcentrer les décisions, notamment en matière de mobilité, et recentrer l’instance unique que nous allons créer par fusion des comités techniques (CT) et des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) sur les grands enjeux de chacune des catégories de personnel concernées.

Ces nouvelles dispositions vont permettre aux employeurs publics et aux encadrants de recruter directement les compétences dont ils ont besoin et qu’ils auront choisies : les commissions administratives paritaires (CAP) n’examineront plus les dossiers individuels de mobilité des agents publics. Les nouvelles instances de dialogue social – notamment l’instance unique susmentionnée – auront à définir les règles de portée générale et les voies de recours spécifiques. Ainsi, en matière d’accès à la mobilité ou à la promotion, les règles seront définies au sein d’instances uniques par le biais du dialogue social et seront ensuite appliquées par les encadrants. Bien entendu, les agents publics auront toujours des possibilités de recours internes et, le cas échéant, contentieux.

Nous souhaitons aussi décentraliser le dialogue social et permettre la conclusion d’accords majoritaires au niveau local, indépendamment ou non d’un accord national. C’est un levier important pour permettre à tous les acteurs locaux du dialogue social de travailler ensemble sur certaines thématiques, qu’il faudra arrêter en lien avec les partenaires sociaux. C’est d’ailleurs l’objet d’une des demandes d’habilitation à légiférer par ordonnance.

Le deuxième pilier du projet de loi vise à développer des leviers managériaux pour que l’action publique soit plus efficace. Le premier objectif de ce second pilier – et sans doute une des mesures les plus discutées – concerne le recours aux contractuels. Cette ouverture n’est pas nouvelle : un million d’agents sont déjà contractuels et ils servent avec la même intensité, les mêmes droits et les mêmes devoirs que les fonctionnaires, comme le prévoit l’article 30 du statut de 1983.

Cet élargissement du recours aux contrats va garantir une plus grande diversité des profils, faciliter les recrutements – notamment dans les métiers pour lesquels les écoles de service public ne proposent pas de formation –, mais aussi répondre aux besoins des employeurs publics qui, de manière récurrente, nous indiquent ne pas toujours trouver les compétences et les profils dont ils ont besoin dans le vivier des agents titulaires.

Cette mesure rendra possible le recrutement de cadres de haut niveau aux compétences rares, qui peuvent souhaiter s’engager pour le service public, non pas pour toute une carrière, mais de manière plus limitée dans le temps – ainsi pour les emplois de direction ou les contrats de projet. Ces derniers seront ouverts dans les trois fonctions publiques, pour mobiliser des compétences externes afin de conduire ou mettre en œuvre un projet spécifique, pendant une durée inférieure à six ans. Par exemple, un maire qui souhaite mettre en place un plan de rénovation urbaine et a besoin d’un spécialiste pendant quatre à cinq ans, ou pendant la durée d’un programme, pourra y recourir. Il n’y aura aucune obligation, simplement la volonté de faciliter son recours, en assouplissant les conditions d’accès.

Parallèlement, nous souhaitons mieux lutter contre la précarité des contractuels. C’est pourquoi nous élargissons le recours à l’emploi contractuel et titulaire pour l’exercice de missions qui nécessitent un service à temps non complet – durant le temps périscolaire ou la cantine par exemple – et ainsi supprimer le recours parfois abusif aux vacations.

Dans la même logique managériale, nous voulons renforcer l’évaluation et la reconnaissance de l’engagement professionnel : la notation sera supprimée afin que l’entretien d’évaluation professionnelle se généralise et que l’évaluation soit plus qualitative.

Nous voulons aussi faciliter, sans la rendre obligatoire, l’intégration de parts variables dans la rémunération. Ce sera désormais possible pour les contractuels, alors que seuls les titulaires peuvent actuellement y prétendre. Des mécanismes d’intéressement collectif pourront être mis en place dans la fonction publique hospitalière, comme dans les deux autres fonctions publiques.

Le troisième pilier du texte vise à la fois à renforcer l’équité, mais aussi l’égalité, entre les agents. L’équité suppose l’alignement des régimes de temps de travail – certaines collectivités appliquent actuellement des protocoles inférieurs à 1 607 heures. L’équité, c’est le renforcement et la modification du cadre d’examen des situations de déontologie, en prenant en compte l’expérience des deux dernières années, afin que l’examen de déontologie soit centré sur les métiers à risques, pas seulement à la sortie de la fonction publique, mais aussi au retour ou à l’entrée dans la fonction publique, à la suite du recrutement de contractuels sur des postes considérés comme sensibles.

L’égalité, c’est aussi travailler, et avoir un peu de temps pour le faire dans la concertation, grâce à des habilitations à légiférer par ordonnance sur la protection sociale complémentaire, sur la prévention des risques psychosociaux ou la réforme du système de formation.

Le quatrième pilier touche à la mobilité entre fonctions publiques, mais aussi avec le secteur privé. Il s’agit d’abord de garantir la portabilité des droits – du contrat à durée indéterminée, du compte personnel de formation et par le biais d’un mécanisme de conversion pour celles et ceux qui font des allers-retours entre le secteur public et le secteur privé. Il convient ensuite de prévoir un dispositif global d’accompagnement en cas de restructuration de services : accompagnement personnalisé et renforcé, mise en place d’une priorité d’affectation locale pour permettre à un fonctionnaire dont le poste serait supprimé – quelle qu’en soit la raison – de rester fonctionnaire, en changeant de ministère ou de service déconcentré et en s’appuyant sur un congé de transition professionnelle lui permettant d’être formé à ce nouveau métier.

En outre, nous allons proposer d’ouvrir le mécanisme de la rupture conventionnelle aux contractuels de droit public et, à titre expérimental, aux agents titulaires de la fonction publique. Nous l’avions envisagé pour la fonction publique d’État (FPE) et la fonction publique hospitalière (FPH). À l’issue de la concertation, les employeurs et l’une des organisations syndicales nous ont proposé de l’expérimenter également dans la fonction publique territoriale. Par ce biais, nous souhaitons faciliter les deuxième ou troisième carrières dans le secteur privé, en donnant aux agents publics les mêmes garanties qu’aux salariés – le bénéfice d’une indemnité de rupture et de l’assurance chômage.

Enfin, le cinquième pilier vise à renforcer l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Il s’agit de transposer dans la loi le protocole d’accord du 30 novembre 2018 sur l’égalité entre les femmes et les hommes, signé par les employeurs des trois fonctions publiques et par sept des neuf organisations syndicales. Des plans d’action devront obligatoirement être adoptés pour traiter les écarts de rémunération et prévenir les violences et discriminations sexistes et sexuelles. Le dispositif de nominations équilibrées sera renforcé pour les emplois de direction. Il conviendra que la répartition femmes-hommes des promotions et avancements au choix soit conforme à la répartition femmes-hommes des effectifs concernés dans le corps ou le cadre d’emploi.

Nous plaidons également pour le maintien des primes et indemnités versées par les collectivités territoriales aux agents durant les congés de maternité, d’adoption, de paternité ou d’accueil de l’enfant. Nous proposerons de supprimer le jour de carence pour les femmes enceintes, de la déclaration de grossesse au départ en congé de maternité.

Indépendamment du protocole sur l’égalité femmes-hommes, certaines dispositions visent à favoriser l’égalité professionnelle des agents en situation de handicap : nouvelles obligations pour les employeurs en matière de lutte contre les discriminations, reconnaissance de nouveaux handicaps susceptibles de bénéficier d’aménagement d’épreuves lors des concours, création d’une procédure de promotion dérogatoire élargie par le biais de la suppression de la référence au seul handicap physique. Cette volonté d’inclusion complétera utilement les dispositions déjà adoptées à l’occasion de la loi sur la liberté de choisir son avenir professionnel défendue par la ministre du travail Muriel Pénicaud.

Le projet de loi n’épuise pas les thématiques relatives à la fonction publique puisque des concertations sont aussi ouvertes sur l’attractivité des concours – qui relèvent du champ réglementaire –, importante pour garantir l’attractivité des métiers de la fonction publique. Nous réfléchissons également au développement de l’apprentissage et au renforcement de la politique de prévention et de santé au travail.

En conclusion, le projet de loi que je vous propose répond à nos objectifs : trouver de nouvelles souplesses et moderniser le statut de la fonction publique, tout en garantissant de nouveaux droits aux agents, et notamment le droit fondamental de mieux maîtriser leur parcours et leur vie professionnels, voire d’envisager – pour ceux qui le souhaitent – une deuxième ou une troisième carrière, dans le secteur public ou privé.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le projet de loi de transformation de la fonction publique que la commission des Lois examinera au début du mois de mai est une réforme attendue par nos concitoyens et par les 5,5 millions de femmes et d’hommes qui travaillent chaque jour pour le service public. Le titre de ce projet de loi poursuit une ambition très claire : transformer la fonction publique, non pas pour renier ses fondements, mais pour mettre en œuvre les moyens nécessaires à sa modernisation.

Cet impératif de modernisation s’inscrit précisément dans un contexte où les fonctionnaires sont souvent la cible de critiques injustes et de stigmatisations qui alimentent un climat de défiance nauséabond. Nous devons toutes et tous être fiers de notre fonction publique et des agents qui y travaillent : leur engagement au service de l’intérêt général doit être salué. Quel que soit leur domaine d’intervention, au sein de l’État, dans les collectivités ou à l’hôpital, nous pouvons compter sur leur professionnalisme et leur dévouement en faveur du bien public. Ils sont les chevilles ouvrières de nos décisions politiques, dans un souci de neutralité, d’expertise et de service. Il me paraît particulièrement important de le rappeler, à l’heure où il est parfois trop courant et trop facile de participer à un exercice stérile de « fonctionnaire-bashing » d’autant plus insupportable qu’il méconnaît la réalité.

Nous construisons cette réforme avec eux, pour eux ; ne laissons pas croire que nous œuvrons contre eux. Aucune réforme ne rayonne lorsqu’elle est portée contre une partie de nos concitoyens. Ce texte et le travail parlementaire à venir œuvrent à libérer, à protéger et à unir. Monsieur le secrétaire d’État, ce texte a fait l’objet d’un long cycle de concertations que vous avez conduites depuis plus d’un an, entre autres avec les organisations syndicales et les représentants des employeurs des trois versants de la fonction publique. Les enjeux qui entourent cette réforme sont nombreux. Ils suscitent à la fois des espoirs, mais aussi des inquiétudes. Notre devoir collectif est d’y répondre, dans le cadre d’un débat parlementaire approfondi qui, je l’espère, sera à la hauteur des défis auxquels la fonction publique est aujourd’hui confrontée.

Je ne reviendrai pas dans le détail sur chacune des mesures que contient ce projet de loi, qu’il s’agisse de la réforme des instances de concertation, du développement du recours au contrat, de la mobilité, de l’accompagnement des transitions professionnelles ou des mesures en faveur de l’égalité.

À titre personnel – et je pense que la plupart de mes collègues partagent cet avis –, je me félicite de l’exemption du jour de carence pour les femmes enceintes prévue par l’article 32. C’est une avancée concrète, que j’appelais de mes vœux depuis près de deux ans.

D’autres avancées sont indispensables. Les nombreuses auditions que je mène en tant que rapporteure soulignent un besoin de clarification ou d’approfondissement du texte.

Développer une véritable stratégie managériale dans la fonction publique n’est pas un gros mot. Comme je l’ai déjà souligné dans l’avis budgétaire que j’ai rendu sur le programme « Fonction publique » du projet de loi de finances pour 2019, le management n’est pas un concept réservé à la sphère privée : parce que les fonctionnaires mettent en œuvre nos politiques publiques, le sens de l’action doit être porté ; la situation et les envies des agents doivent être entendues. C’est une réalité du quotidien – notamment dans les services publics de proximité – que vivent chaque jour des milliers d’agents publics qui exercent des fonctions d’encadrement technique ou intermédiaire. Les prochaines semaines seront utiles afin de réfléchir aux propositions que j’aurais l’opportunité de vous présenter lors de l’examen du texte en commission des Lois, qu’il s’agisse d’outils supplémentaires ou de dispositifs d’évaluation.

À ce stade, monsieur le secrétaire d’État, je souhaiterais vous interroger sur plusieurs sujets essentiels abordés par le projet de loi. L’article 22 entend habiliter le Gouvernement à prendre différentes mesures relatives aux modalités de recrutement, à la formation, au développement d’une culture commune et à la mobilité des trois versants de la fonction publique. Pouvez-vous nous préciser vos intentions en la matière ? Cette question touche également aux évolutions relatives à la haute fonction publique : quelles sont les perspectives envisagées par le Gouvernement ?

Par ailleurs, en lien avec la réforme de l’apprentissage dans le secteur privé qui modifie notamment les modalités de financement, quels sont les engagements du Gouvernement afin de garantir le développement de l’apprentissage dans la fonction publique ?

L’article 17 habilite le Gouvernement à réformer par ordonnance les règles relatives à la protection de la santé des agents publics. Pouvez-vous nous préciser quelles avancées pourront être opérées en matière de médecine préventive et de complémentaire santé ?

L’article 6 du projet de loi pose le principe d’un égal accès à l’emploi public applicable au recrutement contractuel. Un décret précisera les modalités de cette procédure. Cela inquiète les employeurs publics. Quels en seront les contours ?

Enfin, promouvoir l’égalité des chances doit constituer l’un des piliers de notre action. L’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen dispose que tous les citoyens « sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics ». Il nous appartient de faire davantage en ce domaine. Je me réjouis que le titre V du projet de loi apporte de nombreuses garanties en matière d’égalité professionnelle, afin de réduire les inégalités qui minent la carrière des agents. Mais, monsieur le secrétaire d’État, ne pourrait-on pas aller plus loin, en renforçant par exemple le dispositif des classes préparatoires intégrées aux écoles du service public, afin de consacrer une véritable égalité des chances ?

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. La transparence salariale est un sujet qui a été abordé à de nombreuses reprises dans le grand débat. Certes, la transparence absolue a ses limites, mais quelles évolutions seraient nécessaires pour retisser le lien de confiance entre les citoyens et leur administration, afin que les rémunérations soient plus transparentes, notamment dans la haute fonction publique ?

M. Guillaume Gouffier-Cha. Après dix-huit mois de concertation, le projet de loi de transformation de la fonction publique a été présenté en conseil des ministres le 27 mars dernier. En préambule, au nom du groupe La République en Marche, je salue le travail que vos équipes et vous-même avez réalisé, ainsi que la disponibilité dont vous avez fait preuve.

Nous partageons votre constat et vos objectifs. Trois questions intéressent plus particulièrement le groupe La République en Marche : comment ce projet de loi s’inscrit-il au sein d’« Action publique 2022 », programme lancé au début du quinquennat afin d’accélérer la transformation de la fonction publique ?

Les différentes ordonnances prévues dans le projet de loi concernent des sujets majeurs : l’organisation du dialogue social, la formation professionnelle ou la santé des agents et la médecine du travail. Nous portons une vigilance particulière sur ces sujets. Pourriez-vous nous préciser le périmètre exact des ordonnances, leur contenu et leurs modalités d’exécution ?

Pour les questions touchant à la haute fonction publique, et plus particulièrement à la déontologie, je laisserai la parole à notre collègue Fabien Matras, qui travaille sur le sujet depuis deux ans.

Les dispositions du projet de loi relatives à l’égalité entre les femmes et les hommes et aux droits des femmes qui font suite au protocole adopté le 30 novembre dernier marquent de réelles avancées. Mais ne pensez-vous pas que nous pouvons aller plus loin, notamment concernant les plans d’action et les nominations équilibrées ?

M. Olivier Marleix. Je regrette que nous soyons privés d’une discussion générale, d’autant que la rapporteure a pu s’exprimer cinq minutes alors que les groupes d’opposition n’auront droit qu’à deux minutes chacun !

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Vous n’êtes pas privé de discussion générale : nous sommes convenus qu’elle aurait lieu le 2 mai, avant l’examen des articles !

M. Olivier Marleix. Il reste que la rapporteure parle cinq minutes, sans doute parce qu’elle est de la majorité, alors que les oppositions n’ont que deux minutes pour poser leurs questions…

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. La rapporteure dispose de cinq minutes parce qu’elle est rapporteure.

M. Olivier Marleix. Monsieur le secrétaire d’État, d’où vient cette volonté de supprimer les CAP pour les mesures dites favorables – si tant est qu’un refus de mutation ou d’avancement soit une mesure favorable pour l’agent ? Les associations d’élus que nous avons auditionnées ne le demandent pas et considèrent même que la CAP est un lieu qui garantit l’examen équitable de la situation de chaque agent dans les collectivités territoriales. Je comprends qu’au sein de certains ministères, notamment celui de l’éducation nationale, le système soit largement perfectible mais, même en supprimant les compétences des CAP sur les mutations et les avancements, il vous restera un million d’agents à gérer ! Par quoi allez-vous les remplacer et comment seront réalisés les mouvements ? Les enseignants, les fonctionnaires de police attendent des réponses précises, que votre texte n’apporte pas.

Ma deuxième question concerne la déontologie. Avec Fabien Matras, nous avons réalisé une mission d’information et notre rapport a été adopté à l’unanimité en commission. Pourtant, nous ne retrouvons pas nos propositions dans le projet de loi. Au contraire, on recule ! Nous préconisions par exemple la fusion de la Commission de déontologie avec la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) afin d’assurer une véritable indépendance, comme c’est le cas pour tous les élus. Pourquoi ne pas avoir retenu cette proposition ? Préférez-vous rester dans l’entre-soi ?

Nous réclamions également la publicité des décisions de la commission de déontologie ; ce n’est pas davantage repris dans le projet de loi.

Enfin, en quoi cette réforme contribue-t-elle à la réduction de la dépense publique ? Y avez-vous renoncé ?

Ma dernière question prolongera celle de la présidente : j’ai découvert avec stupéfaction que notre pays compte 70 000 fonctionnaires civils d’État, rémunérés en hors échelle lettre, ce qui représente, primes incluses, plus de 5 000 euros nets par mois. Il y en avait 25 000 avant la décentralisation. Comment expliquer cette évolution, monsieur le secrétaire d’État ? Une réduction de 10 %, ce serait 1 milliard d’euros d’économies !

Mme Laurence Vichnievsky. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie pour cet exposé et la facilité avec laquelle nous pouvons travailler avec vous. Nous ferons valoir notre position dans le cadre de la discussion générale du 2 mai, mais avons d’ores et déjà quelques questions précises.

L’article 3 du projet de loi prévoit de fusionner les comités techniques et les CHSCT. Cette fusion entraînera-t-elle une diminution sensible et conséquente des représentants du personnel, élus ou désignés ? C’est une crainte de beaucoup d’organisations syndicales.

S’agissant de l’article 13, le problème tenant à la différenciation des rémunérations a largement été évoqué, notamment dans la fonction publique hospitalière. Évidemment, une infirmière travaillant à Paris ou à Clermont-Ferrand n’a pas les mêmes charges. Comment le prendre en compte ? Certains employeurs publics sont contraints de recourir à des moyens quasiment illégaux pour favoriser leurs agents, sous peine de ne plus pouvoir en recruter.

Enfin, monsieur le secrétaire d’État, notre regret majeur est que la haute fonction publique ne soit pas concernée par ce projet de loi. C’est pourquoi nous serons très attentifs au contenu de l’article 16 qui appellera plusieurs questions de mon collègue Vincent Bru. Certaines des fonctions dévolues à la nouvelle commission placée auprès du Premier ministre ne pourraient-elles pas être confiées aux juridictions administratives ou financières, celles-ci ayant récemment joué un rôle protecteur en matière de conflit d’intérêts ?

M. Pierre Morel-À-L’Huissier. Concernant la transparence et l’équité, avez-vous tenu compte des travaux de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique et des différentes commissions de déontologie ? A-t-on une vision globale des problématiques liées aux flux entre secteur public et secteur privé ?

S’agissant des incompatibilités et inéligibilités, vous parlez aussi de transparence et souhaitez la garantir, tout en simplifiant. Mais tous les sujets ont-ils été traités ? Seriez-vous prêts à accepter des amendements ?

Mme Marietta Karamanli. Quelques observations préalables sur la méthode. Pour commencer, le groupe Socialistes et apparentés, comme les organisations syndicales représentatives, considère que, s’il y a bien eu une cinquantaine de réunions de concertation, celles-ci n’ont pas permis d’engager un vrai dialogue.

D’autre part, le projet de loi renvoie certains sujets très importants – santé, protection sociale, conditions de travail, formation – à des ordonnances. Notre groupe le regrette, tant sur le fond que sur la forme : le recours aux ordonnances vient contredire le principe de la discussion avec tous les agents, mais aussi le débat public et contradictoire assuré par l’Assemblée nationale.

Enfin, nous déplorons votre choix de la procédure accélérée.

Sur le fond, réformer la fonction publique, c’est réformer un élément déterminant de l’État, ses ressources humaines permanentes et ses compétences administratives et techniques. Le texte ne traite pas de la gestion de la fonction publique et n’apporte pas une vision du sens de l’engagement des agents. Dans son avis, le Conseil d’État constate d’ailleurs que « la multiplication des possibilités, déjà nombreuses, de recruter des agents contractuels, sans qu’il soit possible de dégager des modifications proposées des critères simples et clairs, ne contribue pas à la lisibilité du dispositif ni à la bonne appréciation de ses conséquences ».

Pouvez-vous nous dire ce qui ressort de l’évaluation des dispositions existantes en matière de recours aux contractuels ? Qu’attendez-vous de la multiplication des dispositifs ? Combien de contrats et de contractuels sont actuellement recensés dans les trois fonctions publiques ? Quelle est leur proportion par rapport aux agents titulaires et quelle est leur rémunération moyenne et médiane ?

Parmi les dispositions que vous envisagez de prendre par ordonnance, quelles grandes orientations entendez-vous promouvoir dans le domaine de la couverture santé complémentaire – souvent, les agents sont moins bien couverts en matière de prévoyance – et dans celui, essentiel, de la formation, afin de permettre aux agents d’évoluer dans leur carrière et afin d’améliorer la qualité du service ?

M. Ugo Bernalicis. Je rejoins ma collègue : vous évoquez les organisations syndicales et le dialogue, mais votre discours ressemble fortement à celui que l’on nous a tenu sur le projet de loi de réforme de la justice ! Des heures de discussions, de débats, d’échanges et, à la fin, vous vous êtes mis tout le monde à dos… Continuez ainsi, vous êtes une fois de plus sur la bonne voie !

Certes, nous nous félicitons des derniers articles du projet de loi en matière d’égalité femmes-hommes, de la suppression du jour de carence pour le congé maternité, de la valorisation du congé parental et des dispositions concernant le handicap. Sur ces mesures-là au moins, vous pourrez compter sur notre soutien.

Mais nous déplorons le recours massif aux ordonnances et votre volonté de recruter des contractuels sur des emplois permanents. Certes, vous précisez bien que ce sera par dérogation, pour rassurer tout le monde, mais sans fixer ni seuil ni objectifs. Qu’est-ce qui empêchera que 100 % des emplois de direction soient pourvus par des contractuels ? Il en sera de même pour tous les emplois dans les établissements publics. On voit bien ce qui nous attend par la suite…

Du reste, pourquoi vous focaliser sur les emplois de direction, monsieur le secrétaire d’État ? Si les contractuels, c’est si génial, si souple, si cela améliore l’agilité et libère les énergies, pourquoi ne pas avoir ouvert le recrutement de contractuels à tous les emplois permanents ? Voilà qui aurait été ambitieux et aurait vraiment transformé la fonction publique ! Les avez-vous restreints aux seuls emplois de direction pour les réserver aux copains et aux copines, à tous vos amis qui travaillent dans le secteur privé, mais qui aimeraient bien donner un coup de main pour mettre en place vos réformes ? Peut-être craignent-ils d’être un peu trop mal payés s’ils devenaient fonctionnaires… Ils préféreraient des postes de contractuels pour pouvoir négocier leurs rémunérations. Est-ce cela votre objectif ?

Monsieur le secrétaire d’État, où est la simplification quand vous créez une telle diversité entre contractuels et titulaires ? En quoi est-il plus simple de gérer à la fois des contractuels et des titulaires ? En quoi est-il plus simple de gérer des rémunérations différentes ? En quoi est-il plus simple de gérer des évolutions de carrière différentes ? En quoi est-ce plus simple de gérer des mobilités différentes ? Je ne vous suis pas, monsieur le secrétaire d’État : c’est plus complexe. Mais c’est plus facile pour recruter les copains !

M. Stéphane Peu. À mon tour de le relever, après mes deux collègues : cela devient une habitude de légiférer contre l’unanimité des acteurs ! Pourtant, avec ce que nous avons vécu au cours des derniers mois, je croyais la méthode révolue…

Le 15 mars, le Conseil commun de la fonction publique s’est réuni et les neuf organisations syndicales – qu’elles aient amendé ou non votre projet de loi – ont voté contre. Même les organismes représentant les employeurs se sont abstenus. Pas un seul n’a approuvé votre projet de loi. Ce qui pose tout de même un problème : prétendre faire le bonheur à la place des gens, voire contre eux, est une idée qui devrait être depuis longtemps jetée aux poubelles de l’histoire – et c’est moi qui vous le dis ! Votre projet de loi est engagé sur de très mauvais rails.

Autre mauvaise habitude : l’absence d’étude d’impact. Nous ne savons pas où nous allons. Pas davantage de visions prospectives dans votre propos liminaire : pardonnez-moi de vous le dire, mais on est plus dans un discours de directeur des ressources humaines (DRH) que dans celui d’un ministre de la République ! Forcément, tout cela laisse un goût un peu amer.

Je souhaiterais vous poser deux questions, car à défaut d’une étude d’impact, peut-être disposez-vous d’une étude prospective.

Vous prétendez vouloir maintenir le statut tout en élargissant le recours à la contractualisation. Nous sommes nombreux ici à avoir géré des collectivités locales, des organismes HLM ou à avoir été employeurs dans la fonction publique ; nous avons pu constater que, dans certains secteurs, le statut de la fonction publique a progressivement été éteint en ouvrant la possibilité de recruter des contractuels. Êtes-vous capable de nous dire, études prospectives à l’appui, si, dans dix ans il y aura plus ou moins de fonctionnaires au statut ?

Par ailleurs, sachant que 20 % de la population active de ce pays est composée de fonctionnaires, avez-vous conduit une étude comparative entre les secteurs public et privé sur les mérites du statut pour la mobilité des salariés ; n’est-il pas plus performant dans le secteur public que dans le secteur privé ? Pour ma part, je soutiens que le statut de la fonction publique est un meilleur garant de la mobilité des salariés que ne l’est celui de droit privé.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Vous remarquerez que j’ai concédé aux orateurs des groupes un temps de parole assez large ; il n’en sera pas de même pour les interventions à titre personnel, qui seront limitées à deux minutes.

M. Yannick Favennec Becot. Merci, madame la présidente, de m’accueillir ponctuellement dans votre commission ; je poserai quatre questions à M. le secrétaire d’État.

Votre réforme propose un nouveau contrat de projet spécifique à la fonction publique, qui s’inscrira dans une durée limitée, sans ouvrir droit à un contrat à durée déterminée ni à une titularisation. Sa durée minimale sera d’un an et ne pourra excéder au maximum six ans ; le groupe Libertés et Territoires s’inquiète de la précarité qu’un tel contrat entraînera. Il semble en effet qu’une personne pourra successivement être engagée sur la base de ce type de contrat pour des projets qui s’enchaîneront sans jamais bénéficier de la garantie de l’emploi ; elle n’aura donc jamais de visibilité au-delà de six ans.

Par ailleurs, la durée minimale d’un an paraît très contraignante : un projet peut nécessiter une embauche pour une durée plus limitée. Pourriez-vous nous rassurer sur cet aspect ?

Vous indiquez encore que cette réforme permettra à certains de nos concitoyens issus du secteur privé de s’engager dans le service du public pour un temps de leur parcours professionnel. Comment envisagez-vous de financer les salaires de ces personnes venues du privé, alors que les salaires dans le secteur privé ne sont pas les mêmes que ceux de la fonction publique ?

Vous voulez renforcer les mécanismes de reconnaissance de la performance professionnelle des agents publics : comment cette évaluation sera-t-elle réalisée ? Sur la base de quels critères ?

Enfin, vous souhaitez généraliser l’entretien professionnel afin d’apprécier la valeur professionnelle des fonctionnaires ; cet entretien concernera-t-il aussi les contrats de projet ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État chargé de la fonction publique. Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie pour toutes ces interventions, et particulièrement celles et ceux qui ont apporté un soutien au texte ou à certaines de ses dispositions.

Madame la rapporteure, nous sommes effectivement déterminés à mieux encadrer les questions de recrutement. Faciliter le recours aux contractuels doit s’accompagner du respect du principe de l’égal accès à l’emploi public, qui nécessite d’être attentif à deux points.

Le premier est la transparence ; nous avons franchi un pas depuis le 28 décembre dernier avec la publication d’un décret qui oblige chaque employeur public à rendre publique toute offre d’emploi vacant, titulaire et contractuel, de plus d’un an, sur un espace numérique commun nommé Place de l’emploi public. Nous pensions qu’à peu près 5 000 offres d’emplois vacants seraient ainsi rendues publiques, or nous en comptons 9 000 aujourd’hui, ce qui démontre que les employeurs jouent le jeu et respectent cette obligation, alors que le site n’est véritablement opérationnel que depuis le 15 février.

Ce décret veille à ce que la procédure de recrutement soit respectueuse de l’égalité de traitement en précisant un certain nombre de modalités : les candidats doivent être entendus par un jury composé des mêmes personnes, de façon à garantir un examen objectif sur les questions de compétences et d’objectivation des compétences requises ou encore sur les questions de constitution minimale de dossiers, ce qui renvoie d’ailleurs à un certain nombre de propositions pouvant notamment porter sur la déontologie et une déclaration simplifiée d’intérêts.

Nous devons ensuite veiller à ce que ces procédures soient adaptées à la taille de l’administration employeur. Nous ne pouvons pas imposer les mêmes mécanismes à une commune de quelques milliers d’habitants, qui ne dispose pas nécessairement d’un service RH, et à une métropole, une région, un département ou encore un opérateur de l’État. C’est pourquoi le décret prévoira cette possibilité de différenciation.

Seront concernées les différentes catégories hiérarchiques, y compris la haute fonction publique pour les emplois de direction ; et pour ce qui est de la possibilité de recruter des contractuels sur des emplois de direction dans les trois versants, nous veillerons tout particulièrement à la question des compétences. La fonction publique hospitalière nécessite un travail particulier, en lien avec les référentiels du type de ceux établis par l’École des hautes études en santé publique de Rennes.

Nous souhaitons par ailleurs développer l’apprentissage. On dénombre un peu plus de 14 000 apprentis dans la fonction publique ; l’objectif est d’augmenter ce nombre et de favoriser ce type de formation. Il faut toutefois noter que cela ne relève pas du domaine de la loi, mais plutôt de celui du règlement, et nous nous heurtons à ce sujet à plusieurs difficultés.

La première tient aux modalités de financement de l’apprentissage dans la fonction publique ; les employeurs publics ne bénéficient pas des mêmes avantages que les employeurs privés en matière d’exonération de cotisations ou de primes au recrutement d’apprentis.

Par ailleurs, lorsqu’un apprenti achève son cycle de formation, sa seule possibilité d’intégration à la fonction publique est, soit la titularisation par voie de stage dans le premier échelon de la catégorie C, ce qui est très peu attractif ; soit le concours externe, ce qui implique un premier groupe d’épreuves particulièrement académiques, pour lesquelles ils ne sont pas nécessairement formés, en tout cas pas aussi bien que d’autres candidats issus d’autres cycles de formation, notamment universitaire.

Nous devons donc prévoir des concours adaptés et des modalités de recrutement différentes ; à cet égard, j’ai eu cette année l’occasion d’ouvrir un cycle de concertations avec les organisations syndicales et les employeurs sur l’organisation et la nature des concours dans les trois versants, ainsi que sur le type d’épreuves présentées. Les questions relatives au concours relèvent certes du domaine réglementaire, mais je peux vous assurer que vous y serez associés à chaque fois que vous le souhaiterez.

L’article 16 autorise le Gouvernement à prendre par ordonnances une série de mesures relevant du domaine de la santé et de la couverture sociale complémentaire des agents publics.

Force est de constater une inégalité flagrante : les agents du secteur public ne bénéficient que très rarement d’une véritable aide de leur employeur à la souscription d’un contrat en matière de protection sociale complémentaire santé ou prévoyance. Certains ministères participent à des contrats individuels ou prévoient des contrats de groupe, certains employeurs territoriaux également. La situation est encore plus hétérogène dans la fonction publique hospitalière.

Nous avons donc demandé aux trois inspections un rapport afin de dresser un panorama exhaustif de la situation et de son hétérogénéité et d’identifier les écueils juridiques à éviter ou à garder à l’esprit, notamment le fait qu’une participation obligatoire serait assimilée à un élément de la rémunération, donc passible de l’impôt, contrairement à une participation volontaire qui peut relever de l’action sociale et donc échapper à l’imposition.

Ce rapport nous sera remis prochainement pour être immédiatement transmis à l’ensemble des partenaires sociaux ; l’habilitation à légiférer par ordonnances nous permettra de disposer d’un délai de dix-huit mois pour avancer avec les partenaires, les employeurs et les représentants du personnel. Nous avions initialement prévu un délai de neuf mois, mais les organisations syndicales nous ont demandé un peu plus de temps, ce qui nous a paru légitime pour un sujet aussi important que la protection sociale complémentaire.

S’agissant de la santé, avec Gérald Darmanin et le Premier ministre, j’ai demandé à la députée Charlotte Lecocq, qui a travaillé sur ce sujet pour ce qui touchait à l’emploi privé, de poursuivre ses travaux sur la partie emploi public. Il s’agit de redonner de l’attractivité aux métiers de la médecine de prévention, de faciliter les reclassements et le maintien dans l’emploi, et de veiller à ce que l’ensemble des agents publics puissent bénéficier d’une prévention des risques psychosociaux à la hauteur des besoins ; force est de constater que, globalement, c’est loin d’être le cas. Nous allons donc commencer à travailler avec Mme Lecoq ; ensuite seulement, nous pourrons réformer les instances médicales.

Chacun sait qu’on ne présente pas au Parlement des projets de loi portant réforme de la fonction publique tous les deux ou trois ans ; les intervalles sont beaucoup plus longs. Or la formation, la médecine professionnelle, la protection sociale complémentaire et la déconcentration ou décentralisation du dialogue social méritent une concertation approfondie. La procédure des ordonnances permettra de disposer du temps nécessaire à la conduite de ces concertations sur ces quatre sujets et de donner à leurs résultats force de loi.

Je suis totalement ouvert à l’idée que les conditions dans lesquelles se présenteront ces ordonnances soient précisées par le législateur. Cet engagement que je prends aujourd’hui vaut pour la concertation, mais il vaudra également pour les objectifs à atteindre et les ambitions poursuivies, afin que les volontés politiques de l’Assemblée nationale soient parfaitement traduites dans le cadre de cette habilitation.

Enfin, madame la rapporteure, vous avez évoqué la question du renforcement de la préparation au concours, et notamment celle du développement des classes préparatoires intégrées. Cela relève du domaine réglementaire, mais sachez que nous y sommes extrêmement favorables. J’ai, pour ce qui me concerne, une préférence pour les préparations dispensées dans le cadre des Instituts de préparation à l’administration générale (IPAG), qui préparent leurs élèves stagiaires à des concours. En effet, en cas d’échec, les IPAG, contrairement aux classes préparatoires intégrées, ont le mérite d’être diplômants ; ainsi l’investissement dans le temps de préparation au concours peut faire l’objet d’un diplôme qui sera valorisable dans d’autres parcours professionnels.

Vous avez évoqué, ainsi que d’autres de vos collègues, madame la présidente, la question de la transparence salariale. Cela rejoint les questions de déontologie posées par MM. Gouffier-Cha et Marleix portant sur la transparence des plus hautes rémunérations de la fonction publique.

Je rappelle tout d’abord quelques éléments de contexte pour dire qu’il ne faut pas fantasmer sur le niveau de rémunération des plus hauts fonctionnaires, et comparer le niveau moyen de rémunération d’un cadre supérieur de la fonction publique avec celui d’un cadre du secteur privé. Le traitement tourne autour de 6 500 euros par mois pour un cadre supérieur de la haute fonction publique ; pour un même niveau de responsabilité, le salaire dans le secteur privé atteint 9 500 à 10 000 euros. Et lorsque l’on compare le 1 % de salariés du secteur privé et le 1 % d’agents publics les mieux rémunérés, on s’aperçoit que la rémunération des premiers avoisine 18 000 euros brut par mois, contre 9 500 à 10 000 euros brut par mois pour les seconds. C’est ce qui ressort d’une étude de l’INSEE. L’écart de rémunération est donc conséquent, et cela souligne le fait que nous cherchons à recruter des profils excellents sur des postes de responsabilité, alors qu’une difficulté d’attractivité en matière salariale existe déjà.

Nous sommes favorables à un approfondissement en matière de transparence. Les autorités administratives indépendantes, qui parfois sont au cœur des débats, sont déjà tenues de rendre public le niveau de rémunération de leurs présidents ; par ailleurs, les traitements des plus hauts fonctionnaires sont généralement reconstituables, mais nous pouvons progresser dans ce domaine.

En revanche, je ne suis pas favorable à la publication de listes nominatives mentionnant la rémunération à l’euro près de ceux qui sont concernés, mais je suis très favorable à la publication de référentiels indiquant combien, dans tel ministère, un poste de direction d’administration centrale est rémunéré, suivant une échelle de salaire resserrée suffisamment explicite pour donner une indication claire. Nous pourrions ainsi progresser ; je sais que de nombreux députés travaillent sur ce sujet, notamment MM. Matras et Marleix qui ont publié un rapport voilà quelques mois. Pour avoir discuté longuement avec Fabien Matras, je sais que des propositions ont été formulées, notamment en matière de transparence et déontologie, auxquelles nous saurons donner suite.

J’associe à cette idée la question de la déontologie, sur laquelle plusieurs orateurs se sont exprimés. Le bilan de la Commission nationale de déontologie de la fonction publique depuis 2016 est d’ores et déjà positif, mais peut être amélioré.

La loi du 21 avril 2016 relative à la déontologie dans la fonction publique a prévu un contrôle systématique des situations sous l’angle de la déontologie pour un très grand nombre de fonctions et de métiers. Le nombre de dossiers devant être examinés par la Commission a explosé pour atteindre plus de 8 000, au point que leur instruction présente une véritable difficulté. Par conséquent, bon nombre des postes qui font l’objet d’un contrôle systématique à la sortie du public vers le privé ne présentent pas de risque déontologique, alors que d’autres, qui le mériteraient, en sont exempts.

C’est la raison pour laquelle j’envisage – et je compte beaucoup sur les travaux de Fabien Matras et les discussions que j’ai eues avec lui – de restreindre le champ du contrôle automatique aux seuls métiers présentant de véritables risques, mais, en revanche, d’améliorer le système en prévoyant un certain contrôle « retour », pour l’heure non systématique et soumis à l’appréciation du chef de service. Mais si nous ouvrons les emplois de direction à des contractuels, nous devrons prévoir un contrôle à l’entrée, même si celle-ci n’est que temporaire ou intervient dans le cadre d’un autre parcours. Nous pouvons encore progresser dans le domaine de la publication des avis ainsi que sur la possibilité de sanctions à l’égard de ceux qui n’auraient pas pris en compte les avis défavorables.

Monsieur Gouffier-Cha, ce texte s’inscrit bien dans la volonté de réforme et de modernisation de l’action publique et du programme Action publique 2022. C’est l’une des briques de ce programme, dont fait partie l’adoption l’année dernière de la loi pour une société de confiance, qui a bouleversé un certain nombre d’aspects quasi culturels de l’action publique, avec le droit à l’erreur et au rescrit, et cette injonction de bienveillance plutôt que de contrôle faite à l’administration. Nous travaillons aujourd’hui sur la question des ressources humaines, car il n’y a pas de service public sans agents, et dans les prochains mois nous nous attacherons à mettre au point des textes réglementaires portant sur l’organisation territoriale de l’État et la manière de garantir la présence du service public sur le territoire. Ce projet de loi permettra aussi la mise en œuvre de ces transformations ainsi que de ces nouvelles organisations ; c’est en cela qu’il s’inscrit dans le programme Action publique 2022.

S’agissant de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, je pense comme vous que nous pouvons aller plus loin, à deux nuances près.

Je tiens d’abord à souligner les progrès réalisés grâce au protocole du 30 novembre dernier par rapport à celui du 8 mars 2013, en insistant sur la nouvelle obligation que nous envisageons, représentative de la répartition femmes-hommes dans les promotions et les avancements au choix. Malheureusement, nous éprouvons une certaine difficulté, dans bien des ministères, et cela ne vaut d’ailleurs pas seulement pour la fonction publique de l’État, à tenir nos engagements de nominations équilibrées entre femmes et hommes aux emplois de direction.

Ceux qui butent sur cette obligation nous répondent souvent qu’avec un vivier parfois très masculin, il peut être difficile de trouver des femmes à nommer aux emplois de direction. La meilleure façon de constituer un vivier de candidats plus équilibré et mieux réparti entre les femmes et les hommes est de garantir l’accès à l’avancement et la promotion à tout le monde de la même manière. Il n’est donc plus acceptable de voir des corps composés pour 80 % de femmes et 20 % d’hommes et dans lesquels l’attribution des promotions, les avancements au choix bénéficient pour 80 % à des hommes et pour 20 % à des femmes. Il faut encore veiller à ce que cette répartition des promotions et des avancements soit représentative, avec évidemment une marge d’appréciation comme il est d’usage en matière de nomination équilibrée et de la répartition femmes-hommes dans les corps et établissements concernés.

La seconde nuance, au-delà des progrès mêmes réalisés grâce au protocole, tient au fait que celui-ci a été négocié et adopté par l’ensemble des employeurs et sept des neuf organisations syndicales, et qu’il est ainsi adossé à un équilibre issu de cette négociation. Aller plus loin peut évidemment être intéressant ; mais je reste, d’une certaine manière, le gardien de cet équilibre obtenu dans la négociation formelle majoritaire entre les parties prenantes.

Je crois avoir répondu à la question sur la déontologie posée par M. Marleix, à l’exception peut-être du sujet de la fusion de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) avec la Commission nationale de déontologie de la fonction publique. Cette fusion ne nous paraît pas forcément opportune, car les publics concernés ne sont pas les mêmes. Mais nous sommes ouverts à cette réflexion ; peut-être trouverons-nous les voies et moyens de trouver un accord sur cette question, d’améliorer le système de contrôle, et d’en garantir l’indépendance.

S’agissant des commissions administratives paritaires (CAP) et de la réforme du dialogue social, nous souhaitons modifier profondément les règles du dialogue social dans le domaine de la mobilité et de la promotion. Pour l’heure, trois types d’instances coexistent : les comités techniques, qui travaillent sur l’organisation des services et parfois sur les questions de rémunération, les comités d’hygiène et sécurité qui travaillent uniquement sur les questions d’hygiène et de sécurité, et enfin les CAP, qui examinent les dossiers individuels à l’aune de règles que leurs membres n’ont pas fixées.

À aucun moment il n’est prévu que les partenaires sociaux soient véritablement et officiellement associés à la définition des règles d’accès à la mobilité ou à la promotion. Nous souhaitons que l’instance unique que nous créons dispose clairement de cette compétence et puisse délibérer de ces questions. La délibération confère un caractère en quelque sorte opposable à ces lignes directrices de gestion qui s’appliquent dans le domaine de la promotion et de la mobilité. Dès lors que c’est opposable et transparent, que cela fait l’objet d’une publication du barème – ce à quoi nous veillerons y compris par voie réglementaire –, dès lors qu’une possibilité de recours est garantie pour les agents, il nous semble possible de laisser l’employeur prendre un certain nombre de décisions en matière de mobilité et de promotion, ce qui permettra de gagner du temps.

Je prends un exemple, qui évidemment est peut-être le pire, mais illustre bien la situation : lorsque, dans un service déconcentré d’État, un emploi devient vacant et que vous souhaitez recruter quelqu’un qui n’est pas de la même catégorie hiérarchique, pas de la même zone géographique, et ne vient pas du même ministère, il faut recueillir l’avis de huit services, avec le risque que certains avis soient contradictoires. La durée moyenne de cette procédure pour pouvoir procéder au recrutement est de huit à quatorze mois, ce qui nuit à la continuité du service.

C’est la raison pour laquelle nous inventons un nouveau système qui garantit la transparence et l’association des partenaires sociaux à la définition de ces règles, qui assure la possibilité de recours, mais permet de gagner du temps et de sortir aussi parfois, vous l’avez évoqué à demi-mot, d’un certain nombre d’habitudes de gestion ou de coalitions, si l’on me permet d’utiliser ce terme.

Mme Vichnievsky a évoqué la fusion des comités techniques avec les comités d’hygiène et sécurité, qui n’est effectivement pas sans conséquence sur la question des moyens syndicaux et des droits ; cette question fait déjà l’objet d’une discussion avec les intéressés. Nous avons prévu les ajustements nécessaires, en fonction de ce qui existera, pour garantir les moyens de fonctionnement et d’existence des organisations syndicales, car le Gouvernement et les employeurs ont besoin d’interlocuteurs solides et légitimes ; nous devons également revoir un certain nombre de dispositions qui, au fil du temps, se sont sédimentées ; on s’aperçoit, ici où là, par exemple que les moyens syndicaux ne sont pas calculés en fonction des effectifs du moment, mais sur ceux d’avant la RGPP… Un travail considérable reste donc à faire pour tenir ces objectifs de bon fonctionnement des organisations syndicales et d’ajustement des moyens ; tout cela fera l’objet d’une concertation spécifique.

Nous prévoyons des possibilités de différenciation de rémunération sans pour autant les rendre obligatoires, ce qui consiste en l’introduction d’une part variable dans la rémunération des contractuels, chose interdite aujourd’hui. Sur le plan réglementaire, nous veillerons aussi à ce que, en matière de déploiement du RIFSEEP (Régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel), les choses soient plus simples : pour l’instant, les collectivités locales ne peuvent mettre en œuvre ce dispositif auprès des cadres d’emploi qui leur appartiennent qu’après que l’État l’a appliqué en homologie à ses propres corps d’emploi. Autrement dit, nous allons délier les calendriers.

Nous veillerons, madame Vichnievsky, à faciliter ces possibilités de différenciation ; il n’en demeure pas moins, et cela fait écho à ce que je disais tout à l’heure au sujet du niveau de rémunération, que la différence entre le secteur public et le secteur privé est réelle, et je ne suis absolument pas convaincu que les employeurs publics disposent des moyens financiers pour s’aligner sur le secteur privé. Ce qui renvoie à d’autres questions relatives à l’attractivité et la question de l’engagement, tant pour les contractuels que pour les titulaires.

Toujours à propos de la haute fonction publique et de la déontologie, une remarque sur les conflits d’intérêts : autant leur traitement, lorsque les faits sont avérés ou suspectés, mérite à mon sens une instruction judiciaire, autant il ne me paraît pas utile à ce stade d’en judiciariser la prévention. La HATVP comme la Commission de déontologie ne relèvent pas aujourd’hui de ce processus et font correctement leur travail de prévention ; je reste convaincu que l’on peut maintenir ce système, quitte à l’améliorer pour le rendre plus efficace en matière de prévention, en réservant le traitement judiciaire aux faits qui sembleraient avérés ou feraient l’objet d’une enquête après le travail de signalement de ces autorités.

M. Morel-À-L’Huissier a évoqué, et cela fait écho à la conversation que j’ai eue avec votre collègue Francis Vercamer, les dispositions du code électoral et des questions d’incompatibilité et d’inéligibilité des élus ; si j’ai bien compris, la situation diffère selon que l’on est fonctionnaire d’une commune ou d’une intercommunalité, et élu d’une commune ou d’une intercommunalité. Nous n’avons pas encore examiné cette question, dont je dois avouer qu’elle a surgi à l’occasion de cet échange avec M. Vercamer il y a seulement quelques heures ; nous allons continuer à travailler et voir si nous pouvons apporter des réponses.

Plusieurs questions ont ensuite été posées, notamment par Mme Karamanli, sur la qualité du dialogue social. Nous avons eu de longs moments de discussion, et je peux vous assurer que nous avons intégré beaucoup de propositions des organisations syndicales. Au-delà des 50 % d’amendements ou presque acceptés dans le cadre de la consultation des instances, l’avant-projet de loi avait intégré de nombreuses dispositions. Ainsi en est-il de la neutralisation de l’impact des congés parentaux sur le déroulement de la carrière, qui répond à une demande syndicale : en l’état actuel des textes, lorsqu’un agent public prend un congé parental, son avancement est réduit de 50 % en année 2 et en année 3. Le rôle du conseil syndical en matière d’accompagnement des recours, des procédures disciplinaires et des futures procédures de rupture conventionnelle relève aussi de cette discussion avec les organisations syndicales.

Il en est de même pour ce qui touche à la formation et au renforcement de l’accès au droit de trois publics dont nous considérons qu’ils peuvent rencontrer plus de difficultés que les autres : les agents publics dont la formation initiale est la moins élevée, les agents publics en situation de handicap et les agents publics qui occupent notamment, dans la fonction publique territoriale, des postes à usure professionnelle. Cela aussi s’inscrit dans cette volonté de dialogue avec les organisations syndicales. De même que la composition de la formation spécialisée « hygiène et sécurité », assortie de la possibilité d’un mandatement pour les postes de suppléant notamment afin de valoriser les expertises existant dans leur sein, ou encore de l’amélioration des conditions d’emploi en matière de contrat de projet. Les exemples sont légion, je ne vais pas tous les citer, nous aurons l’occasion d’y revenir lors du débat et à l’occasion de l’examen des amendements. Je n’en reconnais pas moins qu’un certain nombre de points de désaccord subsistent, notamment au sujet du rôle des CAP, qui peuvent justifier tel ou tel positionnement par rapport au texte.

On dit parfois que « biscuit avalé n’a plus de goût » ; dès lors que des dispositions, qui répondent à de réelles demandes, sont acquises et inscrites dans l’avant-projet ou le projet de loi, plus personne n’en parle… Mais cela ne signifie pas qu’il ne faille pas en rappeler la paternité, à plus forte raison lorsqu’elle est d’origine syndicale.

Un million d’agents contractuels sont employés dans la fonction publique, autrement dit à peu près 20 % des salariés en France relèvent de l’article 32 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Cet article dispose que les agents contractuels sont soumis aux mêmes devoirs, aux mêmes engagements, et bénéficient des mêmes droits que les agents titulaires, ce qui est aussi une réponse à ceux qui s’inquiètent d’un recrutement plus important de contractuels.

Nous ne prévoyons pas de fixer un minimum ou un maximum de recrutement d’agents contractuels, pour une raison toute simple ; certains services ne comptent que 3 % ou 4 % de contractuels, et parfois aucun, alors que d’autres en comptent beaucoup plus, et le recours aux contractuels n’est ni un gage de réussite ni un gage d’échec. C’est pourquoi nous ouvrons cette possibilité sans imposer aucune obligation ; nous permettons simplement aux uns et aux autres d’y recourir.

Nous disposons d’un exemple très révélateur en termes d’évaluation : dans le cadre de la loi de programmation militaire (LPM), nous avons, pour la première fois, autorisé, à titre expérimental et dans quatre régions, le recrutement de personnels de catégorie B dans les domaines de l’analyse de données et de l’informatique sur des contrats de deux fois trois ans. Ces postes étaient vacants depuis vingt-quatre à trente-six mois : nous avions même eu connaissance de cas de lauréats du concours organisé par le ministère des armées, qui avaient renoncé aux postes qu’on leur offrait parce qu’ils ne souhaitaient pas accepter l’affectation géographique proposée ; ce qui était parfaitement leur droit. Nous avons ouvert cette possibilité de recrutement contractuel et les postes sont aujourd’hui pourvus : nous avons trouvé dans ces territoires des personnes compétentes en matière d’analyse de données et d’informatique, qui n’avaient pas passé le concours, ne souhaitaient pas nécessairement le passer, mais qui voulaient continuer à vivre et à travailler dans la région où ils avaient grandi, où ils s’étaient installés, alors même que les lauréats aux concours ne souhaitaient pas y aller.

On peut trouver une forme de réponse dans les concours nationaux localement affectés, mais cela ne suffit pas : l’exemple des douanes montre que, même pour des concours interrégionaux, nous rencontrons parfois ces difficultés liées à des refus ou des renoncements au bénéfice du concours.

Vous avez été plusieurs à évoquer la formation de la fonction publique de l’État et de la fonction publique territoriale. L’appareil de formation de l’État a été renforcé, il y a un an, par la publication d’un schéma de formation continue des agents de l’État, doté de 1,5 milliard d’euros répartis sur la durée du quinquennat ; c’est la somme la plus importante qui lui a jamais été consacrée. Nous voulons encore assurer la parfaite effectivité du compte personnel de formation pour tous les agents des trois fonctions publiques, afin de garantir une véritable égalité des droits.

En ce qui concerne la fonction publique territoriale, nous avons à faire un travail de clarification des compétences entre les centres de gestion et le CNFPT (Centre national de la fonction publique territoriale) pour l’accompagnement de l’apprentissage dans les collectivités territoriales, même si la loi de 2016 lui a confié cette mission d’accès global à la formation.

Nous avons besoin d’un peu de temps pour nous appuyer notamment sur les conclusions du rapport de MM. Jacques Savatier et Arnaud de Belenet sur la formation et la gestion des carrières des agents des collectivités territoriales, remis au Premier ministre le 12 mai dernier, et travailler avec les acteurs concernés. Mais notre objectif est bien d’améliorer l’accès à la formation ; j’ajoute que ce que j’ai dit il y a un instant au sujet de l’accès renforcé à la formation pour les agents considérés comme les plus fragiles s’inscrit dans ce cadre, et sera prévu par cette ordonnance.

Je crois avoir répondu à M. Bernalicis en ce qui concerne les droits et les devoirs des contractuels. Je précise simplement, pour le rassurer – si je peux y arriver – que si nous ne voulons pas créer une grille indiciaire pour les contractuels, un référentiel sera mis en place pour éviter les sur-rémunérations, mais aussi les sous-rémunérations. Certains agents que j’ai rencontrés craignaient que les contractuels soient mieux rémunérés qu’eux pour assurer les mêmes tâches ; mais il faut également veiller à ce que le recours aux contrats ne soit pas l’occasion de sous-payer une compétence.

M. Peu m’a posé plusieurs questions auxquelles je crois aussi avoir répondu, notamment les CAP. J’ajoute qu’il n’y a aucune volonté d’extinction du statut : sinon, nous ne pourrons pas travailler à la revalorisation et à l’amélioration de l’attractivité des concours, que nous voulons maintenir.

M. Stéphane Peu. Ma question était de savoir si vous aviez des éléments prospectifs. Il n’y a pas d’étude d’impact.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Il y en a une, et le Conseil d’État l’a considérée de bonne qualité – c’est dans son avis. Elle fait 349 pages. Je vais vous la dédicacer et vous la remettre.

M. Stéphane Peu. Je l’ai lue ! Ne prenez pas ce ton-là pour me répondre. J’ai aussi lu l’avis du Conseil d’État, que je pourrais commenter pour vous. Il est beaucoup moins favorable que vous ne voulez le croire, même s’il reste poli, comme c’est la règle dans cette maison. Il y a matière à trouver dans cette étude d’impact beaucoup d’éléments pour ceux qui s’opposent fortement à votre réforme, comme je le fais. Il n’y a pas de perspectives sur les dix prochaines années, alors que ce fut le cas pour d’autres réformes de la fonction publique.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Je ne partage pas votre point de vue en ce qui concerne l’avis du Conseil d’État, qui est favorable. Vous avez dit à plusieurs reprises qu’il n’y a pas d’étude d’impact. Or elle est là : vous ne pouvez pas dire qu’elle n’existe pas. Enfin, si nous avions fait une prospective sur dix ans, d’une part cela n’aurait pas eu de sens puisqu’il s’agit de possibilités et non d’obligations, et d’autre part vous nous auriez reproché de poser un objectif quantitatif en matière de recours aux contrats. Nous voulions peut-être éviter cet écueil… En tout cas, je garde l’étude d’impact à votre disposition, et nous pourrons continuer à en parler.

M. Yannick Favennec Becot a évoqué deux sujets à propos desquels je n’ai pas encore apporté de réponse. S’agissant de l’évaluation, oui, nous voulons supprimer la note car nous considérons qu’elle est parfois infantilisante et que ce n’est plus une méthode d’évaluation. Nous entendons généraliser l’entretien d’évaluation professionnelle, ce qui nécessite aussi de prévoir la formation de celles et ceux qui seront amenés à conduire les entretiens. Cela implique également, et je le fais avec Agnès Buzyn, de réaliser un travail particulier dans le secteur hospitalier, où il existe un lien assez automatique entre la note et la rémunération ainsi que l’avancement professionnel. Nous travaillons à ce que l’entretien d’évaluation permette de garder la maîtrise de ces outils.

Pour ce qui est du contrat de projet, nous souhaitons qu’il s’agisse d’un CDD pour une raison précise. Depuis la loi de 2012, quand on reste six ans dans un même poste au sein de la fonction publique, le contrat devient automatiquement un CDI. Nous ne voulons pas introduire de confusion entre les différents modèles. En revanche, si un agent est renouvelé au-delà de six ans, il aura le droit d’obtenir un CDI – cela correspondra alors à un choix de l’employeur.

Permettez-moi également de souligner une forme de contradiction ou de paradoxe dans votre intervention. Vous craignez une forme de précarité en parlant d’une échelle de quatre ou cinq ans, et vous dites dans le même temps qu’une durée minimale d’un an vous paraît trop contraignante. Nous avons prévu cette mesure, à la demande des organisations syndicales, pour éviter que le contrat de projet ne soit une machine à contrats courts. Nous avions en tête l’exemple, ou plutôt le contre-exemple, de l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP), qui avait généralisé des types de contrats de quelques jours, sans fixer leur nombre – par définition, ou presque, le nombre de jours de fouille n’est pas connu à l’avance. Cela ne nous paraît pas un bon système, car c’est trop précaire. Nous avons donc prévu une durée minimale d’un an.

Par ailleurs, je précise que le contrat de projet sera conclu pour une durée prévisionnelle. Il est hors de question de dire à un agent contractuel qu’il est là pour une durée comprise entre un ou six ans. Il faudra indiquer, si la mission dure quatre ans ou quatre ans et demi, que le contrat est conclu pour cette durée. Dans le cadre du dialogue social, nous avons prévu une indemnité particulière en cas de rupture anticipée par rapport à la date prévisionnelle du contrat, de manière à donner de la visibilité et une garantie aux agents qui seraient victimes d’une rupture anticipée, quel qu’en soit le motif.

Mme Yaël Braun-Pivet. Nous allons entamer une nouvelle série de questions.

M. Stéphane Peu. Le secrétaire d’État n’a pas répondu sur la mobilité.

M. Fabien Matras. Nous traversons une période où les citoyens sont de plus en plus attachés à un exercice irréprochable de l’action publique. C’est sur la base de ce constat que nous avons choisi de faire de la moralisation de la vie publique le premier texte de cette législature. Dès notre élection, nous avons adopté une loi qui impose légitimement aux élus certaines règles visant à assurer la transparence et un exercice irréprochable de leur mandat. Or les élus ne sont pas les seuls à être au service de l’intérêt général. Cela vaut aussi pour les agents de l’administration. Pour les uns comme pour les autres, cela ne doit pas nous conduire à franchir la frontière de la suspicion généralisée. Dans l’immense majorité des cas, les nouvelles règles ne viennent que formaliser des comportements déjà exigeants et irréprochables.

Comme nous nous y étions engagés, la présidente de la commission des Lois a décidé de créer une mission d’information sur la déontologie des fonctionnaires dès la rentrée 2017. Olivier Marleix et moi-même avons remis un rapport, adopté à l’unanimité de cette commission, dans lequel nous sommes arrivés à la conclusion que, d’une part, le système tel qu’il est issu des dernières avancées législatives fonctionne mais que, d’autre part, des ajustements sont nécessaires pour assurer son efficacité. Nous pensons notamment que l’indépendance de l’autorité en charge de lutter contre les conflits d’intérêts doit être améliorée, que les allers-retours entre le secteur public et le secteur privé doivent être contrôlés et que la transparence doit être la règle.

Je voudrais vous remercier, monsieur le secrétaire d’État, pour la méthode de concertation que vous avez appliquée. Nous avons pu échanger à de nombreuses reprises, comme vous l’avez dit, et je tiens à vous assurer de toute l’implication de la majorité sur les questions de déontologie. Nous sommes plusieurs députés à travailler sur ce sujet depuis des mois, à la suite du travail déjà accompli avec M. Marleix. Sans entrer dans le détail des ajustements que nous défendons, je voudrais savoir quel est votre sentiment. De quelle manière appréhendez-vous ce volet indispensable de la réforme de la fonction publique qu’est, à mon sens, la déontologie ?

Mme Typhanie Degois. Ma question porte sur l’article 18 du projet de loi, qui concerne le temps de travail des fonctionnaires territoriaux. L’Inspection générale des finances (IGF) a rendu, le 26 mars dernier, à la demande de votre ministère, un rapport qui conclurait que 310 000 fonctionnaires d’État travailleraient moins que le seuil légal de 1 607 heures par an. La suppression des exceptions existant dans la fonction publique de l’État représenterait, selon l’IGF, une économie de 30 000 postes. Alors que l’article 18 du projet de loi porte exclusivement sur la fonction publique territoriale, à l’heure actuelle, entendez-vous l’étendre aux fonctionnaires de l’État ? Sinon, quelles mesures comptez-vous adopter pour garantir que ces derniers travaillent bien en conformité avec le seuil légal ?

M. Sacha Houlié. J’ai trois questions à vous poser, monsieur le secrétaire d’État.

Vous avez déjà répondu, en partie, à la première, qui concerne le statut de la fonction publique et le fait que les dispositions figurant dans le texte ne prévoient pas sa remise en cause. C’est un sujet sur lequel portait la majeure partie des discussions que vous avez eues et que nous avons pu avoir avec les partenaires sociaux. J’aimerais que vous précisiez les contours du texte et ce qu’il n’a pas vocation à comporter. Je pense au plan de transformation de la fonction publique : s’il y a un objectif chiffré, il ne fait pas état d’une nécessité absolue en ce qui concerne la réduction du nombre d’agents. Pouvez-vous nous dire que cela ne figure pas dans le texte que nous allons examiner ?

En ce qui concerne le titre IV, que vous avez présenté comme un alignement des modalités applicables aux agents de la fonction publique sur celles des salariés, j’aimerais savoir si, au-delà des règles relatives aux mutations et au droit à la formation, on ne pourrait pas aller plus loin pour ce qui est des droits des agents publics, notamment en introduisant un droit à la prime de précarité à la fin d’un contrat. La fonction publique est souvent l’employeur le plus précarisant sur le plan de la qualité du travail. Ne pourrait-on prévoir, comme on l’a fait en 2013 pour les salariés du privé, que l’employeur a obligation de fournir une mutuelle ? Ce serait un alignement des régimes et des droits.

Ma dernière question, déjà abordée par plusieurs collègues, concerne la haute fonction publique. De nombreux travaux ont été réalisés en la matière. M. Tourret nous a fait part de ceux qu’il a conduits, avec vous, sur ce sujet. Pouvez-vous nous dire si vous avez avancé, et en particulier s’il est prévu un rapprochement des différentes écoles qui concourent à la formation des agents de la fonction publique et de la haute fonction publique, et si quelque chose est envisagé à propos de l’affectation des agents, afin qu’ils aient les mêmes préoccupations et les mêmes remontées que les élus que nous sommes, quand nos concitoyens nous saisissent dans nos permanences ?

M. Rémy Rebeyrotte. À travers ce projet de loi, vous nous proposez d’accompagner l’évolution de la société et d’essayer de maintenir l’attractivité de nos trois fonctions publiques aux yeux des nouvelles générations. C’est un enjeu majeur et le Centre national d’évaluation des normes (CNEN), qui est composé des grandes associations représentant les collectivités territoriales et les élus locaux, ne s’y est pas trompé : il a voté pour votre projet de loi à l’unanimité, moins une voix, fait assez exceptionnel dans le cadre du CNEN.

Les centres départementaux de gestion de la fonction publique territoriale se caractérisent par une grande hétérogénéité dans leurs dimensions, qui est notamment fonction de celle du département concerné et du nombre de communes, mais aussi en ce qui concerne leur capacité à accompagner les nouvelles missions de nos fonctions publiques. Plusieurs présidents de centres de gestion m’ont interpellé et m’ont fait part de leur souhait de voir émerger une structure nationale un peu plus solide que l’actuelle fédération, pour harmoniser l’organisation des concours et assurer une péréquation entre les grands centres de gestion et les plus petits, à l’intérieur du système. Il faudrait peut-être avoir, en quelque sorte, un pôle « ressources » de référence, qui aiderait notamment les plus petits centres de gestion à opérer leur transformation et à se mettre encore davantage au service des collectivités mais aussi de la fonction publique territoriale. Certains appellent à la création d’un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC). Sans aller jusque-là, quel est votre point de vue sur cette question ?

M. Jean-Louis Masson. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez fait état d’un certain nombre de réunions de concertation que vous avez personnellement présidées. Le fait que neuf syndicats aient rejeté votre texte, comme mes collègues Peu et Bernalicis l’ont déjà souligné, m’interpelle comme beaucoup d’autres députés. Je voudrais simplement savoir si c’est aussi le cas pour vous. Le fait que l’ensemble des organisations syndicales rejette votre texte est-il un détail ?

Ce texte est défendu avec des arguments qui peuvent être amers pour un certain nombre d’agents. Pour que cette réforme soit une réussite, nos fonctionnaires doivent être mieux considérés et donc mieux rémunérés. Pour paraphraser l’ancien Président de la République Nicolas Sarkozy, je suis pour travailler plus ou mieux, mais pas en gagnant moins… Vous n’avez pas évoqué cette question. Je vous la pose donc : envisagez-vous dans le cadre de cette réforme, en vue de mobiliser les fonctionnaires, de reconsidérer la grille indiciaire et de prévoir des avancées en matière de salaire, d’une manière ou d’une autre, pour que cette réforme puisse être acceptée ?

M. Arnaud Viala. Je m’étonne, en préambule, qu’une réforme de la fonction publique ne se place à aucun moment du point de vue de l’usager. J’ai regardé avec attention la manière dont le projet de loi est construit et les chapitres que vous avez présentés : j’observe que le service rendu à l’usager n’est pas une préoccupation au moment où vous vous apprêtez à réformer la fonction publique. Cela m’interpelle et j’aimerais donc vous interroger sur ce sujet.

J’ai une question précise au sujet du chapitre IV, qui concerne la formation et la mobilité des agents de la fonction publique. Vous avez évoqué un certain nombre de points, mais je pense que le sujet va bien au-delà. Les agents de la fonction publique se heurtent à une rigidité extrême sitôt qu’il s’agit d’évoluer au sein de leur propre administration et évidemment d’une fonction publique à l’autre, si jamais telle est leur intention, ou de faire valoir un certain nombre d’acquis s’ils envisagent de quitter la fonction publique pour le privé. Cet aspect revêt une importance particulière au moment où, quoi qu’on en dise par ailleurs, les carrières deviennent plus longues. Pouvez-vous nous préciser ce que vous avez imaginé pour faciliter les évolutions des agents des fonctions publiques pendant leur carrière ?

M. Vincent Bru. Dans le cadre du mouvement des « gilets jaunes » et du grand débat national voulu par le Président de la République, nous avons beaucoup entendu parler du souhait de nos concitoyens d’une plus grande transparence dans la fonction publique et d’un rétablissement de la confiance. La présidente l’a dit, et d’autres intervenants l’ont également souligné. J’ai deux questions sur ce sujet.

S’agissant des rémunérations de la très haute fonction publique, dont vous avez un peu parlé, on aimerait en savoir plus sur les avantages liés aux fonctions exercées, notamment les rémunérations principales des agents. Certains sont rémunérés mais n’ont pas réellement d’emploi. Est-ce un phénomène important ? Nos concitoyens ont été choqués, comme vous le savez, par les rémunérations versées dans certains organismes publics, autorités administratives indépendantes et autres, et par le cumul des rémunérations et des retraites. Même si c’est un peu en dehors du projet de loi, quelles mesures comptez-vous adopter pour prendre véritablement à bras-le-corps ce problème qui préoccupe nos concitoyens ?

S’agissant des conflits d’intérêts, et comme c’était déjà le cas lorsque nous avons adopté la loi pour la confiance dans la vie politique, je trouve que l’article 16 ne va pas suffisamment loin. La commission de déontologie de la fonction publique est rattachée au Premier ministre. Seriez-vous d’accord pour aller plus loin en ce qui concerne son indépendance statutaire, sa composition et peut-être ses pouvoirs ? Si j’ai bien compris, elle rend des avis simples, et non des avis conformes. Ne peut-on pas se prémunir davantage contre les conflits d’intérêts ?

M. Hervé Saulignac. Il est important de commencer à se projeter en avant à propos des effets de ce texte. Afin de ne pas tenir un propos trop généraliste, monsieur le secrétaire d’État, je comptais vous parler plus particulièrement de la Direction générale des finances publiques (DGIFP), d’autant qu’il était prévu d’auditionner M. Darmanin en même temps que vous. Beaucoup de gens se demandent si l’on ne va pas bientôt créer le premier service sans agents, ce qui serait un paradoxe au moment où les Français réclament plus de justice fiscale. Ils veulent que l’on s’occupe de la fraude et que l’administration garde une proximité, mais on voit au contraire des fermetures de trésoreries dans le cadre extrêmement romantique d’une « géographie revisitée » – très jolie manière de camoufler des fermetures –, une dématérialisation extrêmement poussée et des procédures de travail à l’évidence dégradées, qui vont à l’encontre de l’objectif que l’on peut assigner à ce service, à telle enseigne que l’on peut envisager sa quasi-extinction, à je ne sais quel horizon. Ce service est pourtant au cœur du pacte républicain. Nombreux sont ceux qui considèrent aujourd’hui que la DGFIP est à l’os, si vous voulez bien me pardonner cette expression. Pourriez-vous nous assurer que ce service ne va pas recevoir le coup de grâce avec cette réforme ? Je pense que ce serait une grave erreur politique.

Mme Emmanuelle Ménard. J’ai lu votre projet de loi visant à réformer la fonction publique et je dois dire que je partage un certain nombre d’idées qui y sont développées. Il me semble néanmoins qu’il reste quelques lacunes ou interrogations à propos desquelles je suis impatiente de recueillir vos lumières. Je vais vous les livrer en vrac.

Je ne vous cache pas mon étonnement quand je vois que ce projet de loi ne s’attaque pas à ces niches qui prospèrent dans notre administration, en particulier celle de l’État – je veux parler, bien sûr, de la haute administration. Dans le cadre du grand débat, de nombreux Français ont fait savoir qu’ils voudraient rendre publics et plafonner les salaires des hauts fonctionnaires. L’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) a publié, le 21 février dernier, une enquête très fouillée dont il ressort que pas moins de 48 500 agents, représentant les 1 % les mieux payés, touchent au moins 6 410 euros nets par mois. Beaucoup d’entre eux se trouvent dans la fonction publique hospitalière, mais le reste des emplois les mieux payés est essentiellement au sein de l’État, où le salaire net moyen s’élève à 10 500 euros pour les directeurs d’administration et les postes à la discrétion du Gouvernement, par exemple. Or je n’ai rien vu sur ce sujet dans votre projet de loi. On pourrait aussi prendre l’exemple des fonctionnaires de notre institution, l’Assemblée nationale, ce qui aurait notamment le mérite de mettre fin à tous les fantasmes qui circulent à propos d’elle. Je suppose que je ne suis pas la seule députée à avoir été interpellée sur cette question durant le grand débat.

Vous expliquez, s’agissant du titre premier, votre volonté de fusionner les comités techniques et les comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Le but est tout à fait compréhensible à mon sens, mais les modalités ne sont pas très claires. Y aura-t-il une réduction du nombre de représentants ? Par ailleurs, quelles seront leurs nouvelles compétences ?

Le titre II évoque la possibilité d’avoir recours plus facilement aux contractuels. C’est très bien, mais il me semble que vous l’envisagez pour les catégories A, B et C dans la fonction publique d’État et seulement pour les catégories A et B en ce qui concerne la fonction publique territoriale. Qu’en est-il, et pourquoi cette distinction ?

Ma dernière question, par manque de temps, concerne le titre V et l’égalité hommes-femmes. Une fois encore, ce sont surtout de beaux discours. Vous proposez de demander aux collectivités territoriales un plan d’action annuel pour l’égalité hommes-femmes, assorti de pénalités financières ; mais c’est encore un plan, un de plus, alors que les collectivités territoriales n’en peuvent plus. Ce que vous prévoyez est extrêmement contraignant : le délai laissé pour la mise en œuvre est très court et les pénalités envisagées en cas de défaillance très lourdes. Je rappelle que l’on demande un rapport sur l’égalité hommes-femmes, un rapport sur l’état de la collectivité, tous les deux ans, un bilan social et bientôt le bilan annuel prévu par le titre I, qui sera présenté au nouveau comité social territorial. Cela fait beaucoup, ce qui est dommage s’agissant d’un texte qui dit vouloir simplifier et assouplir.

J’aurais bien d’autres questions à vous poser, mais ce sera pour une prochaine fois. (Sourires.)

M. Didier Paris. Parmi les éléments fondamentaux de ce projet de loi, il y a notamment la mobilité entre les fonctions publiques – de l’État, territoriale et hospitalière – mais aussi entre la fonction publique, quelle qu’elle soit, et le secteur privé. C’est évidemment une évolution très significative en ce qui concerne le regard que l’on peut porter sur la fonction publique et les attentes de nos concitoyens. Néanmoins, cela peut créer une zone d’inquiétude, ou d’angoisse, pour certains fonctionnaires, notamment s’il y a une expérimentation portant sur la rupture conventionnelle pour les fonctionnaires ou les titulaires de CDD ou de CDI. Pourriez-vous revenir sur ce sujet afin d’apporter des clarifications sur les modalités – une partie du dispositif devant être adopté par ordonnance –, les bornes et la logique selon laquelle ces évolutions fondamentales seront mises en œuvre dans le cadre de ce texte ou dans celui des dispositions réglementaires qui seront adoptées en complément ?

Mme Émilie Guerel. Merci, monsieur le secrétaire d’État, pour la présentation que vous avez faite de cette réforme majeure. Dans le cadre de la transformation de la fonction publique, il est prévu de renforcer la place des contractuels. Je partage tout à fait cette ambition, puisque le nombre de contractuels ne s’élève qu’à environ 1 million aujourd’hui, ce qui place notre pays dans une position singulière en Europe. Toutefois, comment garantir l’équilibre entre fonctionnaires et contractuels au sein de l’administration ? Entre autres pistes à suivre, ne pourrait-on instaurer un quota de contractuels dans les administrations, a minima, par exemple pour les emplois de direction ?

M. Christophe Blanchet. Dans le cadre du quatrième axe du projet de loi, relatif à la mobilité, il faut aussi permettre aux fonctionnaires de se rendre disponibles pour aller dans le secteur privé. Il existe dans ce secteur un congé sabbatique sans solde, qui est encadré par la loi : la période du congé ne doit pas excéder un an, il faut avoir été présent dans l’entreprise depuis trente-six mois, et on doit avoir cumulé six années de travail sans interruption. Quelle est votre position sur une éventuelle transposition de ce dispositif dans toute la fonction publique ? Si votre réponse est positive, comment envisagez-vous de l’appliquer – dans les mêmes termes ou non – à la haute fonction publique ?

M. Robin Reda. Avec ce projet de loi, vous allez donner des outils pour moderniser la fonction publique, à certains égards, mais certainement pas pour la transformer. Au prétexte de l’urgence, vous oubliez l’éléphant dans la pièce, qui est la réforme des rémunérations et des retraites. Je comprends la nécessité d’une répartition du dialogue social. On oublie aussi, ou en tout cas on ne veut pas voir, pour le moment, les questions que vous traiterez ensuite par ordonnance. J’ai entendu vos réponses. La négociation collective, la participation des employeurs au financement des garanties de protection sociale, les congés et le temps partiel pour raison thérapeutique, sont évidemment des questions que nos fonctionnaires se posent aujourd’hui.

Un autre sujet plus fondamental me semble oublié dans ce projet de loi, pour le moment, et qui méritera d’être discuté : c’est la dimension humaine du management. Je pense notamment à la fonction publique territoriale, où l’enjeu n’est pas moins la contractualisation des grands postes de direction que la montée en puissance de l’encadrement intermédiaire.

Vous inscrivez dans le texte les notions de projet collectif et de valorisation collective des agents, mais en les réservant à la fonction publique hospitalière, alors que la territoriale en a certainement bien besoin. J’aimerais savoir de quelle manière on pourrait étendre les notions d’intéressement collectif et de projets collectifs aux trois versants de la fonction publique.

Mme Danièle Obono. Je voudrais d’abord revenir rapidement sur ce que nous considérons comme une remise en cause du statut de la fonction publique, malgré vos dénégations, plus ou moins fermes. Il faut rappeler que le statut des fonctionnaires est le résultat de luttes sociales et républicaines, un acquis issu du gouvernement d’union nationale qui a suivi le programme du Conseil national de la Résistance : il ne protège pas simplement les fonctionnaires, mais aussi l’intérêt général et la République. Le ou la fonctionnaire est au service de l’intérêt général alors que les salariés sont au service de l’employeur en application d’un contrat. Remettre en cause cette spécificité lierait l’agent public à des intérêts particuliers. C’est une des raisons centrales de notre opposition à ce texte.

Comme l’a indiqué notre collègue Ugo Bernalicis, il y a néanmoins des questions sur lesquelles nous pourrions contribuer positivement, notamment la lutte contre les discriminations, que vous avez mise en avant. Mais là aussi, nous avons relevé un certain nombre de contradictions et de manques criants.

Il y a en particulier une contradiction majeure entre les déclarations d’intention concernant la lutte contre les discriminations sexistes et le fait de fragiliser l’accès au statut de fonctionnaire, c’est-à-dire la sécurité de l’emploi, alors que les contrats de catégorie C touchent surtout les femmes. Celles-ci représentent 62 % de la fonction publique, mais seulement 40 % des emplois de catégorie A +. Par ailleurs, 23 % des femmes sont à temps partiel, contre 5 % des hommes. On compte 61 % de femmes dans la fonction publique territoriale, notamment dans les emplois du soin aux personnes – le taux atteint 77 % chez les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (ATSEM). Ce sont des contrats précaires pour beaucoup. Selon nous, la lutte contre les discriminations passe par une sécurisation des emplois qui touchent plus les femmes et qui sont plus précaires. La remise en cause du statut des fonctionnaires va à l’encontre de cet objectif.

Pour ce qui est des manques criants dans ce texte, il n’y a rien ou presque en ce qui concerne la lutte contre les discriminations raciales dans l’accès à l’emploi public et dans l’emploi lui-même, alors que le rapport remis en 2016 par M. L’Horty pointait un certain nombre de problèmes graves. Je note aussi qu’aucune des considérations du Défenseur des droits sur ce sujet n’est prise en compte.

Pouvez-vous nous expliquer ces manques et ces contradictions ?

Mme Laurence Vichnievsky. Ma question est très brève. Dans le cadre de l’article 16 du projet de loi, qui nous occupe beaucoup, il est prévu, comme c’est déjà le cas actuellement, que les personnes quittant la fonction publique pour exercer une activité dans le secteur privé doivent faire l’objet d’un avis a priori. Existe-t-il des contrôles a posteriori, et si ce n’est pas le cas, pourrait-on imaginer les mettre en place ? Une question peut se poser non pas au moment du départ, mais très peu de temps après.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. La dernière question de Laurence Vichnievsky fait écho à votre intervention, monsieur Matras. L’excellent rapport que vous avez produit avec Olivier Marleix sur la déontologie des fonctionnaires et l’encadrement des conflits d’intérêts contient des pistes qui doivent être expertisées et discutées, notamment la fusion de la commission de déontologie de la fonction publique – CFDP – avec la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique – HATVP.

Sur trois points, nous sommes attentifs et ouverts aux propositions des parlementaires. Nous souhaitons améliorer le fonctionnement de la commission de déontologie en recentrant son travail sur les postes les plus sensibles à cet égard ; pour les autres, la loi de 2016 prévoit que le supérieur hiérarchique peut, en cas de doute, saisir la commission. Nous voulons aussi mettre en œuvre un contrôle au retour de l’agent, pour le moment facultatif puisque soumis à l’appréciation du supérieur. Par ailleurs, nous souhaitons créer un contrôle à l’entrée : il serait assuré par la commission pour les postes les plus exposés, mais pourrait prendre, pour les autres, la forme d’une déclaration d’intérêts simplifiée. Toute prise de fonction serait ainsi accompagnée des garanties nécessaires, afin de protéger tant l’agent public, ou le contractuel, que le chef de service.

Il nous faut aussi améliorer la publicité des avis de la CFDP en précisant, ce qui répond à la question de Vincent Bru, que ces avis émanant de l’administration, qu’ils engagent l’employeur public et ont un caractère prescriptif. La difficulté, et c’est un aspect sur lequel nous pourrions travailler, tient au fait qu’il existe peu de modalités de sanction, pour ne pas dire aucune, si un avis défavorable n’est pas suivi d’effet. L’article 16 du projet de loi pose ces orientations, mais je ne doute pas qu’il sera enrichi par les débats et les amendements que vous proposerez.

Mme Thyphanie Degois m’a interrogé sur le temps de travail. L’article 18 vise à supprimer les régimes dérogatoires à la durée légale du travail de 1 607 heures antérieurs à la loi du 3 janvier 2001 et impose aux collectivités concernées de redéfinir de nouveaux cycles de travail. Ne sont pas concernés les régimes établis pour tenir compte de sujétions spécifiques, comme le travail fractionné, de nuit, le dimanche. Les collectivités disposeront d’un délai d’un an à compter du prochain renouvellement des assemblées délibérantes, ce qui permettra aux nouvelles équipes municipales, départementales ou intercommunales de se saisir de ce projet dès leur prise de fonction.

Un rapport de l’inspection générale des finances, publié en février, montre que 310 000 agents de l’Etat travaillent moins de 1 607 heures. Précisons que cette étude ne porte que sur 1,1 million des 2,3 millions d’agents d’État ; les enseignants, soumis à des régimes horaires spécifiques, en sont par exemple exclus. Il ressort que si près de 120 000 agents bénéficient de compensations horaires liées aux sujétions inhérentes à l’exercice de leur fonction, la durée de travail des 190 000 autres n’est pas justifiée. Le Gouvernement pourra prendre des engagements pour corriger ces situations, sachant qu’elles relèvent essentiellement du domaine réglementaire ; le Parlement sera informé des efforts mis en œuvre dans ce domaine.

Monsieur Sacha Houlié, je vous confirme que le statut de la fonction publique n’est pas remis en cause. Nous en gardons scrupuleusement les principes, les valeurs et les articles fondamentaux, convaincus qu’il est utile et qu’il traduit l’engagement des agents publics, contractuels ou titulaires. Le statut offre par ailleurs, aux agents comme aux employeurs, des outils dont certains sont parfois peu connus. Toutes les dispositions ne sont pas appliquées, certaines sont parfois tombées dans l’oubli ; il nous appartient de les remettre en lumière afin que chacun puisse s’en saisir.

Le projet de loi comporte des avancées en matière d’alignement public/privé : je pense notamment à la portabilité des droits, aux mesures de lutte contre la précarité, à la possibilité de signer des contrats longs ou de recruter des titulaires, y compris pour des postes qui nécessitent des temps non complets, comme dans le périscolaire. Le fait qu’il s’agisse de régimes juridiques différents rend ardue la question de l’accompagnement des fins de contrat. Le cadre des contrats de droit public est maintenu, leur durée peut aller jusqu’à trois ans.

Madame Ménard m’a demandé pourquoi la possibilité de signer des contrats de deux fois trois ans était ouverte aux catégories A, B et C dans la FPE et la FPH, et uniquement aux catégories A et B dans la FPT. La réponse est très simple : les représentants des employeurs, les associations d’élus locaux que j’ai consultés n’ont pas souhaité que cette disposition concerne la catégorie C. Fidèle à l’engagement que j’ai pris sur la coconstruction, je respecte cette volonté. Je vous sens dubitative…

Mme Emmanuelle Ménard. Cela ne correspond pas à ce que j’entends sur le terrain.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. … mais c’est la seule réponse que je peux vous faire à ce stade pour expliquer cette différenciation.

La formation des hauts fonctionnaires et les conditions d’accès aux grands corps doivent retenir notre attention. Cette question ne peut se réduire à la seule École nationale d’administration, elle concerne toutes les écoles et les trois versants. L’égalité d’accès, que nous devons garantir, renvoie à la question des classes préparatoires intégrées et des instituts de préparation à l’administration générale (IPAG). Le dispositif ENA+2, expérimenté depuis quelques mois, oblige les hauts fonctionnaires ayant intégré deux ans plus tôt les grands corps à occuper un poste défini comme prioritaire, à Paris et dans les services déconcentrés. Cela permet aux administrations de bénéficier de la compétence et de l’expertise des élèves sortis dans le haut du classement et de garantir à ces derniers une expérience opérationnelle.

Le Président de la République et le Premier ministre ont demandé aux membres du Gouvernement, aux personnalités qualifiées, aux parlementaires et à tous ceux qui le souhaitent de réfléchir à ces questions, afin d’apporter une réponse aux remarques formulées dans le cadre du grand débat, qu’il s’agisse de la transparence des rémunérations ou encore de la possibilité, pour les directeurs des AAI, de cumuler leurs émoluments avec d’autres revenus – retraite ou revenus tirés d’autres activités. Peut-être devra-t-on effectivement envisager un écrêtement.

Monsieur Rebeyrotte, tout le monde s’accorde à dire que l’offre des centres départementaux de gestion de la fonction publique territoriale est très hétérogène et dépend de la taille des équipes, de leur engagement ou de leur expérience. Nous avons demandé au député Jacques Savatier et au sénateur Arnaud de Belenet de nous faire des propositions. Le centre national de la fonction publique territoriale – CNFPT –, tout comme la fédération nationale des centres de gestion – FNCDG – sont associés à cette démarche. Dans le cadre des ordonnances, nous pouvons travailler à des mesures visant à mieux coordonner l’action de la délégation régionale du CNFPT et celle des centres de gestion, à améliorer les schémas de mutualisation des centres de gestion au niveau régional et à clarifier les flux financiers et la répartition des compétences entre les deux entités.

Pour répondre à ces trois enjeux, je ne suis pas certain qu’il faille créer un établissement national ou une structure juridique différente de la fédération. Nous pouvons procéder autrement et avancer, en lien avec les centres de gestion. Il faut garder à l’esprit que la FNCDG est administrée par les élus, alors que le modèle du CNFPT est paritaire : c’est une différence fondamentale, à laquelle peuvent se heurter les tentatives de rapprochement.

À Jean-Louis Masson, qui a dû nous quitter, je répondrai que ce texte ne touche pas aux grilles indiciaires : cette discussion ne relève pas de la loi mais du dialogue social.

Si Arnaud Viala était encore présent, je lui dirais que la question de la prise en compte de l’usager dépend essentiellement de la loi ESSOC, dont l’objet est de changer les rapports entre usagers et administrations. Les dispositions du projet de loi relatives au reclassement ou à la continuité du service visent à libérer du temps et accroître la présence des agents au guichet, afin qu’il soit répondu plus rapidement aux besoins des usagers.

Arnaud Viala a également posé une question importante sur l’accompagnement des agents vers le secteur privé. Les départs seront toujours sur la base du volontariat. Nous souhaitons améliorer les conditions d’accès à l’indemnité de départ volontaire et permettre l’accès à la rupture conventionnelle. Celle-ci sera accompagnée d’une allocation de retour à l’emploi, sur un principe d’auto-assurance et donc d’autofinancement par les employeurs. Nous veillons également à la conversion public-privé du compte personnel de formation afin de garantir la portabilité des droits acquis au moment du passage d’un secteur à l’autre, voire des allers-retours.

Monsieur Blanchet, ce que vous proposez existe déjà : cela s’appelle la disponibilité pour convenance personnelle. Lors du conseil des ministres du 27 mars, j’ai présenté un décret qui vise à faciliter les retours après l’exercice de ce droit. Contrairement au détachement, qui garantit l’avancement et le déroulement de la carrière, la disponibilité pour convenance personnelle s’accompagne d’un gel de l’avancement. Il est prévu que l’avancement sera maintenu pour les fonctionnaires souhaitant faire valoir ce droit pour occuper un poste dans le privé, suivre un conjoint muté ou élever un enfant, pour peu que leur absence n’excède pas cinq ans. Cette disposition apparaît également comme un outil de réduction des inégalités salariales entre les femmes et les hommes, dans la mesure où ce sont majoritairement les femmes qui sont amenées à faire usage de ce droit.

Monsieur Saulignac, vous m’avez interrogé sur la DGFIP. Nous nous éloignons du texte, mais je vous réponds avec plaisir ! Je partage votre constat : en dix ans, 1 200 perceptions, soit un tiers environ, ont fermé. Nous construisons un nouveau réseau, avec l’ambition d’instaurer de nouvelles méthodes. Les plans annuels d’aménagement et de restructuration des services, qui n’offraient aucune visibilité aux élus – nous l’avons constaté dans un département qui nous est cher –, deviendront pluriannuels. Notre deuxième objectif est d’augmenter le nombre de points de contact, grâce à des permanences conventionnées, fixes et organisées dans le temps, dans le cadre des maisons de service au public, afin de garantir un contact physique avec les usagers.

Les services des finances publiques ont déjà consenti beaucoup d’efforts, dans tous les départements. Il n’y aura pas d’extinction de service, ni de l’accueil. Celui-ci sera même renforcé, quitte à en modifier les conditions. De nombreuses perceptions expérimentent l’accueil sur rendez-vous, qui évite de longues attentes aux usagers et leur permet d’être accueillis par un agent spécialisé dans le sujet qui les concerne. La technique du contre-appel entre la prise de rendez-vous et le rendez-vous effectif permet souvent, en apportant un éclaircissement, d’éviter un déplacement inutile.

Dans les prochaines semaines, à l’initiative de Gérald Darmanin, nous annoncerons les principes de la réforme et demanderons à l’ensemble des directeurs départementaux des finances publiques de travailler avec les élus locaux et les parlementaires pour bâtir la carte du réseau des finances publiques en 2022 et en définir les étapes. Nous intégrons à cette réflexion la situation professionnelle des agents, dont nous savons qu’elle n’est plus acceptable dans un certain nombre de points de contact où ils peuvent se retrouver seuls et isolés lorsque les autres ETP ne sont pas pourvus, faute de recrutement ou à cause de congés pour raison médicale. J’aurai à m’occuper assez directement du département qui nous est cher.

Madame Ménard, l’instance unique que nous envisageons de créer – le comité social d’administration, territorial ou d’établissement – aura pour compétence l’organisation et le fonctionnement des services, c’est une reprise intégrale de la compétence des comités techniques. Il aura un rôle stratégique en matière d’orientation des politiques de ressources humaines – accès au recrutement, à la formation, à la mobilité, à la promotion, égalité professionnelle, gestion prévisionnelle des emplois et des compétences. Le comité sera consulté sur les lignes directrices de gestion en matière de mobilité, de promotion et de valorisation des parcours professionnels. Il reprendra enfin intégralement les compétences des CHSCT en matière de protection, de santé physique et mentale, d’hygiène et de sécurité ; nous avons veillé à ce qu’aucune ne disparaisse dans la fusion des deux instances.

Monsieur Houlié, je vous confirme que ce texte ne comporte aucun objectif quantitatif en matière de suppression, ni même d’ailleurs de création d’emplois, puisque cela relève de la loi de finances.

Monsieur Paris, la rupture conventionnelle n’est pas le seul outil de mobilité, nous avons aussi prévu de généraliser l’affectation en position normale d’activité. De fait, et pour répondre à Stéphane Peu, nous pouvons faire mieux en termes de mobilité : actuellement, seuls 4 % des agents changent de poste chaque année et 0,4 % changent de versant. La mobilité est très limitée, et bien moindre que dans le secteur privé. Permettez-moi de prendre un exemple très technique, mais le texte l’est tout autant : aujourd’hui, un employeur territorial désireux de recruter en détachement un agent de l’État devra, en tant qu’employeur territorial, cotiser au titre de la retraite à hauteur de 32 % ; s’il désire procéder à une intégration directe, il devra cotiser au même niveau que l’Etat, soit 76 %. Nous souhaitons neutraliser ce différentiel de 40 points de cotisation, qui renchérit considérablement le poste.

Pour la rupture conventionnelle, nous prévoyons une procédure d’homologation, comme dans le secteur privé. Les agents pourront bénéficier de l’allocation de retour à l’emploi grâce à l’auto-assurance, ce qui permet de réguler le système et d’éviter les recours abusifs. Durant toute la procédure, l’agent pourra être accompagné du conseiller syndical de son choix. En cas de rejet par l’agent de la proposition, le conseiller aura pour rôle d’alerter, afin que l’agent ne fasse pas l’objet de représailles liées à ce refus. C’était une demande des organisations syndicales, que nous avons intégrée.

Madame Guerel, nous ne prévoyons pas de quotas de contractuels, ni minimums, ni maximums : le recours aux contractuels est une possibilité, non une obligation.

Robin Réda a demandé que la mise en œuvre d’un intéressement collectif ne soit pas uniquement réservée à la FPH. Il se trouve que des dispositions prévoyant l’intéressement collectif existent déjà pour la FPE et la FPT ; elles sont peu connues et gagneraient à être mises en lumière. L’article 13 ne vise qu’à harmoniser les dispositions entre les trois versants.

Votre rapporteure, Émilie Chalas, est l’auteure d’un excellent rapport pour avis sur le PLF 2019 qui traite de la question du management dans la fonction publique. Nous pourrions envisager ensemble un certain nombre de mesures visant à la formation préalable des agents appelés à exercer des fonctions d’encadrement.

Le champ des ordonnances, Marietta Karamanli l’a souligné, est effectivement très étendu. Je le répète, nous ménagerons un temps de concertation avec les organisations syndicales, les employeurs publics, les parlementaires qui le souhaitent. Si le Parlement souhaite préciser les conditions de l’habilitation, les objectifs et les modalités de concertation, je me montrerai très ouvert aux propositions. Nous partageons les mêmes objectifs.

Sans espérer vous convaincre, madame Obono, je vous répète que le statut de la fonction publique n’est pas remis en cause. En matière de luttes contre les violences et les discriminations sexistes et sexuelles, nous souhaitons généraliser les dispositifs de signalement à l’ensemble des employeurs, y compris par mutualisation pour les plus petits d’entre eux. Nous veillons à ce qu’ils soient parfaitement appliqués.

Vous avez évoqué le « rapport L’Horty » : nous avons travaillé avec cette équipe sur les discriminations sexistes ou sexuelles au recrutement ou dans l’exercice quotidien, sur les risques de discriminations fondées sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre. Nous attendons la suite de leurs travaux, sur les autres discriminations, notamment raciales. Nous veillons à ce que la fonction publique soit exemplaire en la matière. Les premiers travaux montrent que, dans ce domaine comme dans d’autres – inégalités de rémunération, d’accès aux emplois de direction, inégalités d’accès à l’emploi pour les personnes en situation de handicap –, elle n’a pas à rougir par rapport au secteur privé. Mais le fait d’être un peu meilleur ne signifie pas que c’est suffisant, et il y a encore beaucoup de progrès à faire !

Mme Coralie Dubost. Ma question revient sur plusieurs sujets déjà évoqués : lutte contre les discriminations, transparence ou relations avec les élus. Je rassemblerai ces sujets sous le vocable de responsabilité sociétale des organisations : tous ces termes se rapportent aux relations avec les parties prenantes, qu’elles soient internes ou externes, et à la méthodologie employée. Or qui dit méthodologie dit aussi indicateurs et référentiels. Je crois savoir que certaines collectivités ont déjà engagé des démarches de labellisation en matière de diversité pour mettre en place des plans d’action et des politiques de diversité dédiées.

Une telle démarche est-elle envisagée de manière plus générale dans toutes les fonctions publiques ? Je crois savoir que dans la fonction publique hospitalière, ces pratiques sont peu usuelles. Est-il envisagé de spécifiquement sensibiliser à ce sujet, et d’accompagner ? L’État envisage-t-il d’adopter son propre référentiel – à l’image du label européen d’excellence en matière de gouvernance (ELOGE) élaboré par le Conseil de l’Europe – afin de suivre l’évolution en matière d’égalité femmes-hommes, de discrimination sur un autre critère ou de politique de responsabilité sociétale de manière générale ?

Mme Catherine Fabre. Ce projet de loi offre de nombreuses possibilités pour dynamiser et diversifier les trajectoires de carrière des agents de la fonction publique. Je souhaite vous interroger sur les ponts existants entre votre vision et celle que nous avons portée il y a six mois dans la loi pour choisir son avenir professionnel, dont j’ai été rapporteure du volet formation professionnelle et apprentissage.

Je tiens à rappeler la nécessité de développer un pilotage stratégique de la formation professionnelle par filières métiers, en déployant une véritable gestion prévisionnelle des emplois et des compétences.

Je souhaite également revenir sur le droit individuel à la formation, qui existe depuis plusieurs années. L’enjeu est de lui donner toute son effectivité, et qu’il ne reste pas purement théorique. Les individus devraient pouvoir acquérir des compétences indépendamment de la volonté de leur employeur, ce qui me paraît important pour la sécurisation de leur parcours et leur bien-être au travail. En quoi cette réforme de la fonction publique permettra-t-elle de faire progresser le droit individuel pour les agents ? Quelle est votre vision à dix ans ? Faut-il organiser la création de fonds dédiés au compte personnel de formation ?

S’agissant du développement du pilotage stratégique d’une prospective, il se traduit par la création d’opérateurs de compétences chargés de développer une analyse prospective, avec des plans de formation stratégiques et l’accompagnement des établissements pour l’innovation pédagogique. J’aimerais connaître votre vision à moyen terme : est-il prévu de créer un opérateur chargé d’accompagner des établissements pour l’innovation pédagogique, ainsi que les ministères et les différentes fonctions publiques, dans une vision stratégique ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Madame Dubost, nous partageons vos objectifs en matière de responsabilité sociétale des organisations. Il existe des procédures de labellisation dans les ministères : labellisation diversité et labellisation égalité. Ces labels font l’objet d’un travail, et la moitié des ministères ont obtenu cette labellisation ou sont sur le point de l’obtenir. L’autre moitié travaille à l’élaboration de leur dossier de candidature.

Nous développons aussi ces actions en lien avec les collectivités : nombre d’entre elles ont rejoint cette démarche de labellisation ou de normalisation, y compris dans le cadre de démarches ISO. Nous avons à travailler pour aller plus avant dans le secteur hospitalier, dans lequel il reste des marges de progression.

Parmi les ministères ayant obtenu ces labels, certains représentent beaucoup d’emplois. C’est le cas des ministères économiques et financiers – tout le pôle de Bercy –, le ministère de l’intérieur, le ministère des affaires étrangères, l’ensemble des ministères sociaux. Tous sont déjà inscrits dans ce processus de labellisation.

Sur la question spécifique de l’égalité femmes-hommes, nous nous inspirons de la loi présentée par Muriel Pénicaud, qui définit un référentiel pour mesurer les écarts d’accès aux emplois de direction ou en matière de salaires. Mais celui que nous retenons s’en distingue notablement dans la mesure où il comporte beaucoup plus de critères et d’indices dans le faisceau que celui retenu dans le secteur privé. Nous l’avons présenté aux partenaires sociaux et aux employeurs publics lors d’une réunion qui s’est tenue au début du mois de mars 2019, et ils l’ont très bien accueilli. Tous se sont accordés à dire que notre démarche serait certainement plus pointue pour mesurer ces inégalités et les localiser dans l’espace et un certain nombre de corps.

Nous sommes très attentifs sur ce sujet, et les plans de réduction des inégalités que nous avons inscrits dans la loi permettront aussi d’y contribuer. Je précise que les plans de réduction des inégalités seront obligatoires à partir de 20 000 habitants, mais les collectivités en deçà de ce seuil ne seront pour autant dispensées d’aucune obligation en matière d’égalité femmes-hommes : l’obligation de présentation du rapport de situation comparée devant les instances est identique, que la population dépasse 20 000 habitants ou non. Il en est de même s’agissant de la répartition équilibrée des promotions entre les femmes et les hommes. La seule obligation supplémentaire pour les collectivités de plus de 20 000 habitants tient à la formalisation de ce plan et à sa présentation devant les instances.

J’en viens à votre dernière question, madame Fabre. Si nous partageons votre objectif, il nous faut tenir compte de difficultés d’ordre essentiellement technique. Nous garantissons la conversion du compte personnel de formation entre public et privé lors des passages d’un secteur à l’autre, qui peuvent être nombreux lors d’une carrière.

En revanche, le financement de la formation dans le secteur privé est extrêmement différent de celui qui existe dans le secteur public, et les modalités d’accès le sont aussi. Cela nous invite à rester prudents en la matière à ce stade du texte, mais nous sommes ouverts à toutes les améliorations possibles pour assurer une véritable continuité entre le système de formation et les droits à la formation dans le secteur public et le secteur privé. Je sais que, pour avoir beaucoup travaillé sur ce sujet avec mes équipes et mon cabinet, vous en mesurez les difficultés et les enjeux.

La gestion prévisionnelle des emplois et des compétences fait partie des nouvelles attributions que nous octroyons à l’instance unique, alors qu’elle n’était exercée de manière formelle par aucune des instances jusqu’à présent. Après la promulgation du texte, l’instance unique devra nécessairement travailler sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, et donc sur les perspectives de reconversion et de reclassement, pour des secondes et des troisièmes carrières, au bénéfice d’agents qui peuvent être usés ou dont le poste serait mis en cause par des évolutions technologiques.

J’ajoute que je suis très heureux de deux choses. La première ne relève pas de la loi : je veux parler du schéma de formation continue des agents de l’État, crédité d’1,5 milliard d’euros sur le quinquennat, qui permettra d’apporter des solutions de reclassement et d’accompagnement des mobilités fonctionnelles, géographiques et personnelles.

La deuxième est que les organisations syndicales et les employeurs de la fonction publique territoriale ont proposé de prévoir l’équivalent d’un « Plan d’investissement compétences », ou PIC, pour les agents dont la formation initiale est la moins importante, ceux en situation de handicap ou ceux qui occupent des postes à usure professionnelle. C’est une belle manière de mieux accompagner ces agents qui ont le plus de difficultés à envisager cette reconversion et cette deuxième partie de carrière. Il faudra en assurer la bonne articulation avec d’autres dispositions réglementaires sur l’accompagnement et la prévention des situations d’inaptitude, sur l’accès à la formation et le maintien dans l’emploi.

Mme la présidente. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie d’avoir été aussi complet.

 


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Comptes rendus des débats

Lors de ses réunions des jeudis 2 et vendredi 3 mai 2019, la Commission examine, en première lecture, le projet de loi de  transformation de la fonction publique.

1.   Première réunion du jeudi 2 mai 2019 à 9 heures 30 (discussion générale puis avant l’article premier à article 4)

Lien vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.7566840_5cca9c15819b1.commission-des-lois--transformation-de-la-fonction-publique-2-mai-2019

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, nous entamons ce matin l’examen du projet de loi relatif à la modernisation de la fonction publique. Nous avons d’ores et déjà, comme vous le savez, réalisé l’audition du secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics, à qui vous aviez posé un certain nombre de questions.

Ce matin, nous procéderons donc uniquement à une courte discussion générale. Monsieur le ministre, puis-je vous demander de tenir un propos introductif assez bref ? Puis nous entendrons pour environ cinq minutes les orateurs des groupes, ainsi que les rapporteurs des différentes délégations. Ensuite, nous procéderons à l’examen des 750 amendements dont nous sommes saisis.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Mesdames et messieurs les députés, madame la présidente, j’ai eu l’occasion de présenter le projet de loi devant votre commission le 10 avril dernier, lors d’une audition.

Je rappellerai donc simplement que ce texte est articulé autour de cinq titres. Il procède d’abord d’une volonté affichée et affirmée d’un dialogue social simplifié, concentré sur l’essentiel et permettant d’associer les représentants du personnel aux décisions les plus importantes. Puis le titre II est consacré à la recherche d’une nouvelle souplesse dans le recrutement, notamment grâce à l’élargissement des conditions de recours aux contractuels et à la lutte contre la précarité en matière de contrats de droit public. Le titre III exprime la volonté de mettre en place de nouveaux outils d’équité. Cela passe par l’ouverture de travaux sur la protection sociale complémentaire, sur les questions de médecine professionnelle, de temps de travail et de formation, dans les trois versants de la fonction publique.

Quant au titre IV, il vise à améliorer les mobilités : les mobilités choisies, bien évidemment, mais aussi ce qu’on pourrait appeler parfois des mobilités contraintes, à l’occasion de mutations d’office ou de restructurations de services, que nous devons mieux accompagner, notamment dans la fonction publique de l’État, qui n’est pas, c’est le moins que l’on puisse dire, un employeur tout à fait exemplaire en la matière.

Enfin, le titre V du projet de loi vise à inscrire dans la loi les dispositions issues du protocole d’accord intervenu le 30 novembre 2018 en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique, ainsi qu’un certain nombre de dispositions elles aussi relatives à des questions d’égalité – je pense notamment à l’accueil et au maintien dans l’emploi public des personnes en situation de handicap.

Je remercie la rapporteure pour le travail que nous avons conduit jusqu’à présent, et souligne qu’un grand nombre des propositions qu’elle porte avec d’autres – je pense notamment à Guillaume Gouffier-Cha – permettront d’enrichir substantiellement le texte, de renforcer son impact et son efficacité.

Le Gouvernement, pour sa part, a déposé une quinzaine d’amendements, de précision ou de coordination. Il s’agit, par exemple, de mieux définir les conditions d’accès des agents publics à l’allocation de retour à l’emploi et, partant, à l’assurance chômage, ainsi que d’étendre ou d’adapter les dispositions du texte, notamment en matière de dialogue social, à certains établissements que l’on pourrait qualifier d’hybrides, dans la mesure où ils accueillent en leur sein des personnels de droit public et des personnels de droit privé, comme par exemple les agences régionales de santé (ARS).

Mme Emilie Chalas, rapporteure. Ayant déjà eu l’occasion de m’exprimer lors de l’audition du ministre il y a deux semaines, je concentrerai mon intervention, madame la présidente, sur quelques sujets que j’estime essentiels : la précarité, la déontologie et la rupture conventionnelle.

Ce projet de loi de transformation de la fonction publique nous donne l’occasion d’œuvrer en faveur de l’égalité, principe qui s’impose, bien sûr, en matière d’accès à la fonction publique et de lutte contre les discriminations, mais qui doit aussi s’appréhender vis-à-vis de l’extérieur, c’est-à-dire en comparaison avec les règles applicables dans le secteur privé. Or, précisément, il est un domaine dans lequel une injustice demeure, c’est celui de la précarité, notamment des personnels de catégorie C, qui sont souvent les plus fragiles. Sans tomber dans les stéréotypes, ces personnels sont souvent des femmes seules avec enfants à charge, sujet auquel le Gouvernement est particulièrement sensible.

Le code du travail prévoit, dans le secteur privé, le versement d’une prime de précarité s’élevant à 10 % de la rémunération brute du salarié en contrat à durée déterminée à l’échéance de celui-ci, tandis que, dans la fonction publique, aucune disposition similaire n’existe aujourd’hui pour les agents contractuels. Voilà un exemple flagrant d’inégalité de traitement manifeste, à situation professionnelle identique. Face à ce constat, j’ai proposé, comme d’autres collègues issus d’horizons politiques différents, d’instaurer le versement d’une prime de précarité pour les contrats à durée déterminée (CDD) de courte durée dans la fonction publique. J’ai été confrontée, comme eux, à l’obstacle de la recevabilité financière, mais cela n’altère en rien ma détermination sur ce sujet.

Je souhaite donc savoir, monsieur le ministre, si le Gouvernement est disposé à prendre l’engagement ferme de mettre en place le versement d’une prime de précarité en faveur des agents contractuels dont le CDD, d’une durée inférieure ou égale à douze mois, arrive à échéance, hors contrats saisonniers et contrats de projet, à hauteur de 10 % de la rémunération brute versée à l’agent.

Le cas échéant, je proposerai cette mesure lors du débat dans l’hémicycle, car ce serait une avancée importante, et plus que légitime, pour nombre de nos concitoyens. Il y va de la responsabilité et de l’exemplarité sociale de l’ensemble des employeurs publics.

J’en viens à la déontologie, sujet qui nous tient tous particulièrement à cœur. Nos collègues Fabien Matras et Olivier Marleix ont rendu l’année dernière, au nom de notre commission, un excellent rapport sur la question et feront plusieurs propositions, comme beaucoup d’entre vous, pour compléter le projet de loi qui nous est soumis.

Le premier sujet est la fusion de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) et de la Commission de déontologie de la fonction publique (CDFP), évoquée depuis longtemps et proposée par plusieurs amendements. Nous sommes nombreux ici à y être favorables, pour des raisons évidentes d’unité de la doctrine, ainsi que de renforcement de l’indépendance et de l’expertise de l’autorité chargée de ces questions. Le groupe La République en Marche et moi-même proposerons plusieurs dispositions en ce sens, sachant que nous nous réservons la possibilité de compléter ces amendements en séance pour préciser la composition de la nouvelle autorité et ses missions.

Le deuxième sujet est celui de la publicité des avis en matière de déontologie : nous y sommes également tous favorables, selon des modalités sensiblement différentes.

Sur ces deux questions, étant donné leur importance et notre volonté partagée d’avancer, j’espère que nous nous retrouverons, d’ici l’examen du texte en séance, sur des positions communes, au-delà de nos clivages politiques.

Enfin, je suis tout à fait favorable à l’instauration d’une rupture conventionnelle pour les fonctionnaires. Je me réjouis donc que le présent projet de loi l’introduise, à titre expérimental, à l’article 26. Néanmoins, il m’a semblé que cet article n’était pas assez encadré et n’offrait pas de garanties suffisantes aux fonctionnaires. J’ai donc déposé un amendement permettant de mieux définir la rupture conventionnelle, de prévoir le principe d’une homologation et d’un montant minimum de l’indemnité de rupture, et d’affirmer le principe du libre consentement des parties.

Je voudrais, en conclusion, aborder un dernier sujet essentiel en termes de lisibilité et d’accessibilité du droit : la codification du droit de la fonction publique. Monsieur le ministre, me confirmez-vous votre accord pour avancer sur cette question ? La codification permettrait de reconnaître la situation des fonctionnaires, qui ne disposent pas de l’équivalent du code du travail applicable aux salariés du privé, de graver dans le marbre l’importance, la spécificité et l’unité de la fonction publique française. Elle nous permettrait également d’y voir plus clair, car lorsque l’on rassemble les dispositions, on voit les incohérences, ce qui ne fonctionne pas, ce qu’il faut dépoussiérer, toutes choses indispensables lorsque l’on veut moderniser et transformer la fonction publique. Il y a donc un vrai enjeu opérationnel, pour les fonctionnaires comme pour les employeurs publics, mais j’y vois aussi, et surtout, l’affirmation de symboles forts de l’importance et de la qualité de notre fonction publique.

M. Eric Poulliat, au nom de la délégation aux collectivités locales et à la décentralisation. Les Français nous ont rappelé le besoin de la présence des services publics dans les territoires, au plus proche d’eux. Ce projet de loi a précisément fait l’objet d’une concertation longue et intense avec les organisations syndicales et les employeurs, notamment territoriaux.

Je tenais à souligner la qualité des échanges, notamment la volonté d’un traitement transversal et d’une prise en compte réelle des besoins des employeurs territoriaux. Se réjouissant de la décentralisation, la délégation aux collectivités territoriales est heureuse de se saisir pour avis de ce projet de loi et rappelle qu’elle a été animée par une préoccupation double : celle de prendre en compte les problématiques spécifiques des collectivités territoriales, qui sont, rappelons-le, de différents niveaux et de tailles très diverses ; celle d’assurer un juste équilibre entre les besoins des employeurs territoriaux et les droits des agents.

Je tiens à rappeler aussi, au nom de la délégation, que les ordonnances prévues dans ce projet de loi concernent des champs qui intéressent particulièrement les employeurs territoriaux, sur des sujets comme la précarité des agents de catégorie C, la complémentaire santé, la santé au travail ou encore l’accès et l’organisation des concours.

C’est pourquoi nous participons à cette discussion avec joie. Nous rappelons qu’il faut faire de la fonction publique territoriale un outil de proximité au service des citoyens, en la dotant de levier managériaux souples et efficaces, qui permettent à ses agents, même temporaires, de s’enrichir de la culture territoriale et de la dimension humaine du service public.

Mme Laurence Gayte, au nom de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Je me contenterai d’attirer votre attention sur trois points. D’abord, je me réjouis de l’importance qui a été accordée à l’égalité professionnelle dans ce projet de loi. Je pense qu’il est important de le souligner. Ensuite, je note aussi les avancées en la matière et la prise en compte de tous ces enjeux ; je salue la qualité des échanges avec le Gouvernement sur ces sujets. Enfin, je vous indique que les amendements déposés par la délégation me donneront l’occasion de revenir sur tous ces points.

M. Guillaume Gouffier-Cha. Au groupe La République en Marche, nous sommes attachés au service public, aux femmes et aux hommes qui assurent leur fonctionnement au quotidien, qu’ils soient titulaires ou contractuels. C’est pourquoi nous soutenons ce projet de loi de transformation de la fonction publique, projet tant attendu par toutes et tous sur le terrain. C’est aussi pourquoi nous nous devons de le discuter de manière responsable, en pensant en permanence aux plus de 5 millions d’agents qui font vivre nos services publics.

Les agents publics sont présents dans la vie de chaque Française et de chaque Français. Ce sont plus de 2,45 millions d’agents fonctionnaires de l’État, 1,18 million de fonctionnaires hospitaliers et 1,9 million de fonctionnaires territoriaux qui sont au service de nos concitoyens, dont près de neuf sur dix à leur contact direct. Par leur engagement et leur professionnalisme, ils contribuent au quotidien à la cohésion sociale et territoriale de notre pays.

Or, depuis de nombreuses années, trop de normes et de lourdeurs entravent leur action et le bon fonctionnement des services publics, les premiers à le dire étant les agents eux-mêmes. Je l’ai constaté moi-même lors des nombreux échanges que j’ai eus avec les agents des trois versants, comme lors de votre venue en février dans le Val-de-Marne, monsieur le ministre, ou à l’occasion des nombreuses auditions que nous avons menées avec notre rapporteure ou sur le terrain au cours des dernières semaines. Face à l’évolution rapide de leur métier, le sens de leurs missions et de leur engagement doit être aujourd’hui conforté face à un statut qui ne leur offre pas la reconnaissance et les perspectives professionnelles escomptées. De nouvelles attentes se font jour pour aller vers une fonction publique plus attractive et plus réactive, des parcours professionnels plus diversifiés et une plus grande prise en considération de la qualité de vie au travail.

Tout en réaffirmant notre attachement au statut des fonctionnaires et à ses valeurs, ce projet de loi nous propose d’aller plus loin dans la modernisation du statut et la mise à disposition de leviers pour permettre aux agents de mieux exercer leur mission. Nous saluons cette démarche pragmatique et exigeante. Pour atteindre ses objectifs, ce projet de loi promet un dialogue social plus stratégique et efficace, dans le respect des garanties des agents publics. Il développe les leviers managériaux pour une action publique plus efficace. Il simplifie et garantit la transparence et l’équité du cadre de gestion des agents publics. Il favorise la mobilité et accompagne les transitions professionnelles. Il renforce l’égalité entre les femmes et les hommes, et permet de mieux lutter contre les violences sexistes et sexuelles au travail.

Les grands axes de ce projet de loi sont clairs et cohérents et nous débattrons de leur contenu exact durant les jours à venir, avec sérieux et ambition pour notre fonction publique. Monsieur le ministre, au-delà de ces objectifs que nous partageons, le groupe La République en Marche a eu à cœur de travailler principalement sur trois grands axes.

Premièrement, nous nous sommes attachés au renforcement du dialogue social et à sa lisibilité, comme à son positionnement sur les questions plus stratégiques. Nous vous proposerons de densifier les compétences de la nouvelle instance que représente le comité social, notamment à travers la prise en considération des questions d’égalité entre les femmes et les hommes, ainsi que les problématiques de transition numérique.

Deuxièmement, nous défendons l’objectif de renforcer l’encadrement du recrutement des contractuels dans la fonction publique, mais également la lutte contre la précarité. Nous souhaitons, comme l’a dit il y a un instant notre rapporteure, mettre en place, dans le secteur public, la prime de précarité pour les contrats à durée déterminée. Je sais que nos travaux, dans les jours qui viennent, nous permettront d’aboutir sur ce sujet.

Troisièmement, dans la droite ligne des valeurs qui nous ont conduits à construire le mouvement La République en Marche, dans la continuité de la loi sur la moralisation de la vie politique que nous avons adoptée au début de cette législature, nous vous proposerons plusieurs amendements pour renforcer la transparence et la déontologie dans le secteur public. Nous proposerons notamment de fusionner la HATVP et la Commission de déontologie au sein d’une seule et même autorité indépendante. Je tiens tout particulièrement à saluer les travaux de notre collègue Fabien Matras sur le sujet, car ils nous ont permis d’avancer.

Enfin, particulièrement attentifs aux travaux qui ont été menés par notre rapporteure, nous tenons à soutenir sa proposition de création d’un code de la fonction publique. Au nom du groupe La République en Marche, je vous demande, monsieur le ministre, de bien vouloir reprendre cette proposition et nous proposer, lors de nos échanges, des amendements allant dans ce sens.

M. Olivier Marleix. Pour la fonction publique, le projet du candidat Emmanuel Macron était « libérer et protéger ».

Pour « libérer », on comprend. Votre projet de loi facilite pour les employeurs le recours aux contractuels en ajoutant du dérogatoire au principe du recrutement sous statut. Ces perspectives sont plutôt bonnes à prendre. Elles posent néanmoins des problèmes auxquels votre texte n’apporte pas de réponse.

Ainsi, l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen proclame « l’égal accès aux emplois publics. » Concrètement, comment sera-t-il assuré dans un système qui va banaliser le recours au contrat de gré à gré ? Le fait de recopier dans la loi ce principe déjà inscrit dans la Constitution est un peu tautologique. La loi ne devrait pas rappeler cette finalité, mais devrait fixer les règles garantissant le respect de ce principe, c’est-à-dire ce que dit l’article 34 de la Constitution. À ce stade, vous ne le faites pas.

Le recours aux contrats à durée déterminée (CDD) que sont les contrats de mission correspond probablement à un besoin pour des fonctions d’encadrement ou des fonctions très techniques, mais il ne convient pas, à l’évidence, au recrutement des personnels de catégorie C. Avec eux, vous ne ferez finalement qu’ajouter à la précarité que vous prétendez par ailleurs combattre. Je note que le Gouvernement est d’ailleurs en pleine contradiction : il propose aux partenaires sociaux de pénaliser le recours aux CDD, mais facilite, pour lui-même et pour les collectivités territoriales ou les hôpitaux, le recours aux mêmes contrats courts…

Je relève enfin le risque d’une fonction publique à deux vitesses. Par exemple, je pense aux postes de direction, hors emplois fonctionnels, qui sont déjà ouverts dans les collectivités locales. Ils étaient l’apanage des lauréats du concours d’ingénieur ou d’attaché. Quel intérêt auront des jeunes désormais à passer ces concours ?

En réalité, bien plus qu’une « réforme systémique », vous organisez un « mitage » du statut. Il aurait été préférable de définir préalablement les missions de l’État, des hôpitaux, des collectivités, qui ont vocation à être exercées par des agents titulaires, car il y a un enjeu évident de neutralité, de garantie d’une forme d’indépendance par rapport aux pressions politiques, et celles pour lesquelles il n’y a pas les mêmes précautions à prendre, voire pour lesquelles, au contraire, il y a besoin de plus d’adaptabilité. Le Conseil d’État, dans son avis, relève que « la multiplication des possibilités déjà nombreuses de recruter des contractuels sans qu’il soit possible de dégager des modifications proposées des critères simples et claires ne contribue pas à la lisibilité du dispositif ni à la bonne appréciation de ses conséquences ». Bref, c’est la politique de Gribouille.

Au bout du compte, il y a un vrai doute sur la crédibilité de cette transformation. Il y a déjà environ 20 % de contractuels dans la fonction publique. Quel sera l’impact de votre réforme ? Vous ne le dites pas, ce que je constate après avoir consulté attentivement l’étude d’impact du projet de loi. Et, comme un contractuel coûte généralement plus cher à l’employeur, et notamment aux collectivités territoriales aujourd’hui soumises à des contraintes fortes, on peut avoir un doute sur la portée réelle de votre réforme.

L’autre ambition, c’était « protéger ». Là, c’est peu dire que le compte n’y est pas. Vous réduisez comme peau de chagrin le rôle des commissions administratives paritaires (CAP). D’où vient cette volonté de supprimer les CAP pour les mesures dites favorables ? Si tant est qu’un refus de mutation ou d’avancement soit une mesure favorable pour l’agent… Les associations d’élus employeurs que nous avons auditionnées ne le demandent pas et considèrent même que la CAP est un lieu qui garantit l’examen équitable de la situation de chaque agent dans les collectivités territoriales. Chez beaucoup d’élus, on sent un vrai attachement à ces moments de partage où toutes les situations sont passées en revue. Je comprends bien qu’au sein de certains ministères, notamment celui de l’éducation nationale, le système des CAP soit trop lourd. Mais les avancements peuvent se déconcentrer. Ils le sont déjà parfois, même si l’on peut sans doute faire plus.

Mais quelles garanties allez-vous donner aux enseignants, aux fonctionnaires de police ? Quelles règles d’équité ? Je pense notamment aux mutations d’une région à l’autre. C’est un sujet qui inquiète beaucoup et sur lequel je ne trouve pas, pour l’instant, de réponse dans votre texte. Votre texte est assez imprécis sur ces sujets et n’apporte pas de garanties suffisantes.

En l’état, dans la rédaction du projet de loi, on peut par exemple s’inquiéter que les lignes directrices de gestion entrent en concurrence, pour les mutations, avec les cas prioritaires énoncés par la loi. Il faudra lever cette ambiguïté pendant le débat.

Le risque d’arbitraire existe plus dans la fonction publique qu’ailleurs. Parce que l’absence de critère de rentabilité y permet des décisions non rationnelles. S’y ajoutent les risques liés aux alternances politiques. Je note que le Conseil d’État vous met en garde contre le risque d’appauvrissement du dialogue social.

Finalement, le plus gênant, dans ce texte, c’est ce qu’il ne contient pas. La rapporteure a déjà mis le doigt sur ce point et je l’en remercie. Par exemple, il ne comporte pas de dispositions sur le pouvoir d’achat des fonctionnaires, qui a baissé de 10 % en dix ans. Quelles perspectives donnez-vous à ceux qui ont les plus faibles rémunérations ? Je pense notamment aux personnels de catégorie C.

Rien non plus sur la réforme des cadres d’emploi, qui aurait permis plus de souplesse entre les catégories de fonction publique. Avec votre texte, il sera plus facile d’aller du privé au public, et vice versa, que de la fonction publique de l’État à la fonction publique territoriale !

Rien non plus, ou presque, à ce stade, sur la déontologie.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Monsieur le député, je vous prie de conclure…

M. Olivier Marleix. Le ministre et la rapporteure ont pu s’exprimer !

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Les orateurs des groupes disposent de cinq minutes…

M. Olivier Marleix. Enfin, et surtout, il n’y a rien, dans votre texte, qui permette de réduire la dépense publique. Ce devrait pourtant être l’objectif n°1 de toute réforme en la matière. Rien sur les 39 heures ! La seule ambition de M. Darmanin, c’est d’appliquer, vingt ans après, la loi Aubry – sans doute un tropisme lillois ! (Sourires.)

Je déplore qu’il n’y ait rien non plus sur la transparence des très hautes rémunérations dans la fonction publique. On compte pourtant non moins de 70 000 emplois rémunérés hors échelle lettres. Ce chiffre est passé de 25 000 à 70 000 depuis 1985… Cette évolution mérite des explications. La rigueur ne doit pas être pratiquée seulement en bout de chaîne, dans les territoires, mais également dans les administrations centrales.

Mme Laurence Vichnievsky. C’est avec intérêt que le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés (MODEM) accueille ce projet de loi visant à moderniser la fonction publique.

Il me semble important de souligner tout d’abord que le Gouvernement a fait le choix de ne pas remettre en cause le statut de la fonction publique, considérant qu’il s’agissait d’une protection nécessaire à l’accomplissement des missions de service public.

En revanche, ce texte permet un recours accru à la contractualisation. C’est une évolution positive. Il ne s’agit pas d’opposer fonctionnaires et contractuels mais, au contraire, de leur permettre d’agir en complémentarité : il faut pouvoir recruter le profil adéquat au poste à pourvoir, en faisant appel à des compétences qui ne figurent pas forcément dans le vivier de la fonction publique. C’est notamment l’objet du contrat de projet, créé par l’article 8 du projet de loi.

Je me permets, à ce sujet, de souligner ce que Mme la rapporteure a évoqué tout à l’heure – car nous, parlementaires, sommes contraints par l’article 40 de la Constitution. Il faut prévoir des aménagements en vue de sécuriser les fins de contrat, avec des indemnités adéquates. L’employeur public ne peut être moins disant que le secteur privé.

L’une des réformes majeures de ce texte, par ailleurs, est de permettre aux fonctionnaires l’exercice, au cours d’une même carrière, d’expériences professionnelles plus nombreuses et plus variées. Pour rester attractive et efficace, la fonction publique doit prendre en compte, elle aussi, les changements intervenus dans l’ensemble de la société en matière de parcours professionnels. La fonction publique doit faciliter la mobilité de ses agents entre les différents versants de la fonction publique et entre secteur public et secteur privé.

Cette plus grande fluidité des parcours doit nécessairement s’accompagner d’un renforcement du contrôle déontologique. Le groupe MODEM fera plusieurs propositions en ce sens. Nous sommes notamment favorables à une fusion de la commission de la déontologie de la fonction publique et de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), sous l’égide de cette dernière. Le recours à une autorité administrative indépendante, tant dans son mode de fonctionnement que dans la désignation de ses membres, comme c’est le cas aujourd’hui pour la Haute Autorité, nous paraît fournir les meilleures garanties.

Encore faut-il que les avis rendus par la Haute Autorité soient contraignants pour l’administration, c’est-à-dire pour l’autorité de nomination, et qu’ils soient rendus publics, pour répondre à l’attente légitime de nos concitoyens, qui exigent plus de transparence. C’est pourquoi, outre un amendement général sur l’intégration de Commission de déontologie de la fonction publique (CDFP) au sein de la Haute Autorité, nous présenterons des amendements étendant à l’ensemble des saisines relatives à des situations individuelles le principe de l’avis conforme et la règle de la publicité de ces avis.

Par ailleurs, nous proposerons, comme d’autres collègues, plusieurs amendements visant à renforcer la transparence des rémunérations au sein des autorités administratives, des autorités publiques indépendantes et de la haute fonction publique, ainsi qu’à encadrer le cumul des pensions de retraite des fonctionnaires avec une autre rémunération.

Enfin, nous proposerons des amendements destinés à réduire les inégalités de rémunération entre les femmes et les hommes, ainsi qu’à favoriser la parité des nominations dans les postes de la haute fonction publique.

Mme Marietta Karamanli. Comme nous l’avons dit lors de l’audition du ministre, et comme nous le rappellerons de manière plus approfondie aujourd’hui, le projet de loi dont nous débattons a pour prétention de transformer notre fonction publique. Mais ce projet appelle tout d’abord trois observations de méthode de la part du groupe Socialistes et apparentés.

D’une part, s’il y a bien eu une cinquantaine de réunions de concertation, je rappelle que, selon les organisations syndicales représentatives, qui sont un élément de notre démocratie et qui participent à la transparence des décisions, ces réunions n’ont pas permis d’engager un vrai dialogue. D’autre part, sur un certain nombre de points, le projet renvoie à des ordonnances, ce que notre groupe regrette tant au fond que sur la méthode. Sur le fond, le débat public et contradictoire par notre assemblée constitue un élément d’appropriation des enjeux et des dispositions. Le recours aux ordonnances vient donc contredire le principe de la discussion avec l’ensemble des agents. Or, la santé, la protection sociale, les conditions de travail, la formation, qui sont des éléments essentiels de l’attractivité, sont exclues du texte, donc d’une discussion collective.

Enfin, une nouvelle fois, alors même que le discours évoque le renforcement des droits du Parlement, ce projet sera examiné en procédure accélérée… L’exception à une double lecture par les deux ensembles parlementaires devient la norme, en contradiction avec le principe posé par l’article 45 de notre Constitution !

Sur le fond, je souhaite exprimer, au nom de mon groupe, la réflexion suivante : réformer la fonction publique, c’est réformer un élément déterminant de l’État, ses ressources humaines permanentes et ses compétences administratives et techniques. Force est pourtant de constater que le texte ne traite que de la gestion de la fonction publique et qu’il comporte de nombreuses dispositions visant simplement à supprimer des emplois pérennes, pour continuer à recruter des contractuels, sans aucune vision du sens de l’engagement des agents !

Partir du présupposé que la méthode de la fonction publique à la française est inadaptée, sans se demander pourquoi nos concitoyens choisissent d’y travailler et de donner ainsi un sens à leur activité malgré des rémunérations qui restent parfois faibles pour un niveau de qualification élevé, ne manque pas d’interroger.

Dans un rapport établi en 2016 par France Stratégie, alors présidé par Jean Pisani-Ferry, étaient critiquées les réformes dites paramétriques, en ce qu’il s’agit de réformes de circonstance, visant uniquement à régler un problème. En l’occurrence, il s’agit ici du nombre jugé trop important de fonctionnaires, et de leurs statuts jugés trop rigides. Mais on nous explique que l’on va régler une question bien plus large, en ajoutant des dispositions complémentaires à des dispositions supplémentaires… S’il y a une crise des services publics, ce n’est pas le nouveau management public promu ici qui va la régler.

Il y a, à l’inverse, un risque réel de déstabiliser un système en ne réglant pas la question de l’attractivité d’une carrière où le service aux autres reste un élément d’engagement et, je le souligne, de qualité. Le Conseil d’État, dans son avis, constate que la multiplication des possibilités, déjà nombreuses, de recruter des agents contractuels, sans qu’il soit possible de dégager des modifications proposées des critères simples et clairs, ne contribue pas à la lisibilité du dispositif ni à la bonne appréciation de ses conséquences. Si le Conseil d’État, spécialiste du droit de la fonction publique, fait ce constat, bon nombre d’entre nous peuvent le faire également.

Je voudrais terminer par un certain nombre de questions, que nous aurons l’occasion d’approfondir. Ce projet de loi ne supprime pas le statut des fonctionnaires, c’est vrai, mais il multiplie les dérogations à ce statut et affaiblit son attractivité. Lutte-t-il, pour autant, contre la précarité qui touche les agents contractuels ? Non, il l’aggrave même. Renforce-t-il davantage le dialogue social ? Non, il l’affaiblit, par la réduction de nombreuses attributions des instances de dialogue social. Améliore-t-il des règles déontologiques ? Non, il marque aussi un recul important.

Peut-on parler, comme certains l’ont fait, d’une « loi travail » de la fonction publique ? J’entendais la rapporteure indiquer qu’une codification permettrait de reconnaître la situation des fonctionnaires qui ne disposent pas de l’équivalent du code du travail des salariés du privé. Mais, si ce texte est adopté, ce code pourrait aussi bien s’appliquer à eux !

Monsieur le ministre, je regrette que, lors de votre audition, alors que j’attendais de vous beaucoup de réponses, nous n’ayons obtenu que des réponses techniques, insuffisamment étayées par une vision politique.

M. Pascal Brindeau. Le contexte de crise sociale que notre pays vit depuis plusieurs mois, et même les conclusions du grand débat, montrent les attentes très fortes de nos concitoyens envers la puissance publique en général, ainsi qu’un besoin de services publics de proximité.

Chacun est bien conscient que l’environnement juridique, technique, technologique, économique que connaissent à la fois les collectivités territoriales, mais aussi l’État et la fonction publique hospitalière, a fait considérablement évoluer les métiers de la fonction publique, et que les parcours professionnels des agents publics et leurs besoins n’ont rien à voir avec ce qu’ils étaient il y a seulement quinze ou dix ans.

Personne ne conteste aujourd’hui la nécessité de faire évoluer, d’adapter, de réformer et de moderniser la fonction publique dans son ensemble, ainsi que le droit qui régit le statut. Le Gouvernement a affirmé un certain nombre d’ambitions à travers un grand nombre de déclarations du Premier ministre et des ministres en charge de ces questions. Nous avons assisté à un peu plus d’une année de consultations et de préparation du texte qui nous est aujourd’hui soumis.

Mais, à sa lecture, on a le sentiment que le Gouvernement est resté au milieu du gué. En effet, même s’il y a cinq grands chapitres dans le projet, l’ensemble des enjeux actuels de la fonction publique n’y sont pas traités. Est notamment omis le problème qui nous semble majeur : celui de son attractivité par rapport au secteur privé.

On recherche dans ce texte le sens profond et l’orientation réelle de la réforme que vous voulez mener. On comprend bien, dans un certain nombre de cas, l’esprit qui consiste à transposer en quelque sorte dans le secteur public le droit du travail et le droit qui régit le secteur concurrentiel – je pense au dialogue social, notamment, ou au recours accru aux contrats. Mais cela ne passe pas par un choix clair au sein des métiers et des fonctions qui régissent le secteur public. Il fallait soit conserver et réaffirmer le statut, ce qui était cependant en contradiction, dans une certaine mesure, avec le recours accru aux contrats, soit, pour certains métiers ou certaines missions, dire clairement qu’ils ne relèveront plus demain du statut tel qu’on le connaît aujourd’hui, pour un certain nombre de raisons qu’on pourrait expliquer.

Ensuite, le projet de loi est percuté par les annonces toutes récentes du Président de la République, à savoir, par exemple, la suppression de l’École nationale d’administration (ENA). Cette question n’est évidemment pas traitée dans ce projet de loi, ce qui soulève le problème du recrutement futur d’un certain nombre d’agents de l’État qui relèvent aujourd’hui de cette école. Il en va de même de l’abandon a priori de l’objectif de suppression des 120 000 fonctionnaires qui était dans le programme d’Emmanuel Macron ; il percute aussi le projet de loi tel qu’il est aujourd’hui présenté.

À l’UDI aussi, nous regrettons, comme nous l’avons fait sur un certain nombre de textes, le recours systématique et, de notre point de vue, non justifié aux ordonnances sur des sujets extrêmement importants, tels que les organismes chargés de la gestion de la carrière et de la formation des agents publics, ou encore l’environnement social et la médecine professionnelle.

Nous avons donc déposé un certain nombre d’amendements, tout comme d’autres groupes, pour obtenir plus de protection d’un certain nombre d’agents recrutés par contrat. Nous envisageons, par exemple, même si nous tombons ce faisant sous le coup de l’article 40, la création d’une indemnité de fin de mission pour les nouveaux contrats de mission, à l’instar du secteur privé.

Nous avons également déposé des amendements sur la transparence de la rémunération des hauts fonctionnaires. Ils reprennent d’ailleurs les propositions de la proposition de loi de notre collègue Thierry Benoit. Nous avons déposé aussi des amendements sur le devenir de l’ENA, sujet cher à mon collègue Michel Zumkeller, qui, lui aussi, a déposé une proposition de loi visant à supprimer et à remplacer l’École nationale d’administration.

M. Ugo Bernalicis. Vous n’avez pas osé, dans le titre de ce projet de loi de « transformation » de la fonction publique, parler de « modernisation » de la fonction publique, mais je sens bien que nous allons beaucoup parler de souplesse et d’agilité – c’est une sorte de yoga mental. Je n’en tiens pas moins à vous féliciter, monsieur le secrétaire d’État, mesdames et messieurs les députés de la majorité : vous avez quand même, encore une fois, réussi à vous mettre 100 % des organisations syndicales à dos. Personne n’y était parvenu ; vous-mêmes, après l’avoir déjà fait avec le projet de loi de réforme de la justice, récidivez. J’espère que vous n’allez pas renouveler cela jusqu’à la fin de votre mandat, car cela risquerait de précipiter celle-ci. Neuf organisations syndicales refusent ce texte.

Certes, vous proposez quelques avancées réelles – pour l’égalité entre les femmes et les hommes, contre les discriminations – mais, pas plus que la revalorisation du traitement des catégories ou la mise en place d’une prime de précarité, elles ne feront oublier l’essentiel : ce texte est une attaque en règle contre le statut de la fonction publique, qui deviendra demain l’exception et non plus la règle, tant vous multipliez les dérogations qui permettraient qu’un emploi public permanent soit occupé non par un fonctionnaire titulaire mais par un contractuel – certes en contrat à durée indéterminée.

Cela me fait penser que l’objectif n’est peut-être pas tant d’augmenter le nombre de contractuels en soi – c’est une étape. Nous en sommes déjà à 18 % de contractuels, peut-être y en aura-t-il demain 40 % ou 50 %. Je ne sais pas si vous avez un objectif chiffré – on se rappelle celui de la suppression de 120 000 postes, il semble que le Président de la République vous ait un peu rabroué à ce propos. Votre préoccupation, c’est de mieux « profiler », d’avoir les profils les plus adéquats aux missions. En campagne, le candidat Emmanuel Macron avait effectivement annoncé une sorte de spoil system à la française, avec un passage en revue de tous les directeurs d’administration centrale, à la suite duquel ceux-ci auraient été confirmés dans leurs fonctions ou non, en fonction de leur adhésion au projet politique d’Emmanuel Macron. Cela tranche avec la conception de la fonction publique qui prévalait, selon laquelle les serviteurs de l’État, y compris aux postes de direction, sont globalement loyaux et suivent les ordres donnés, moyennant quoi il n’est pas besoin de tous les changer du jour au lendemain. Sans doute avez-vous essayé, monsieur le secrétaire d’État, de changer quelques directeurs d’administration centrale – nous connaissons l’exemple du préfet de police – mais, globalement, il n’y a pas eu beaucoup de changements. Peut-être le statut a-t-il été un frein, peut-être le corps préfectoral s’est-il mobilisé pour éviter de subir des jeux de chaises musicales, peut-être le seul moyen qui vous reste est-il de légiférer pour ouvrir les emplois permanents à des contractuels, en commençant par les emplois de direction.

À la place d’un directeur d’administration centrale, j’aurais aujourd’hui un peu peur, et je me dépêcherais d’aller dans le privé. Certes, beaucoup le font déjà, pour revenir ensuite, mais c’est un autre problème – il faudrait, à mon sens, renforcer la Commission de déontologie de la fonction publique, même fusionnée avec la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP).

Votre deuxième objectif est de continuer à décliner cette idéologie du new public management selon laquelle les méthodes du privé seraient, par principe, en vertu de quelque dogme, meilleures que celles du public, selon laquelle il faudrait donc les dupliquer dans la fonction publique. Vous reprenez en l’occurrence la méthode des « ordonnances travail », pour aboutir à la fusion du comité technique et du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT). Vous prétendez que la question de la souffrance au travail sera mieux prise en compte, mais on se demande bien comment, alors que moins de temps y sera consacré et que les délégués syndicaux siégeront dans la nouvelle instance avec une double casquette. Aujourd’hui, des délégués syndicaux se consacrent à cette mission d’hygiène et de sécurité, et cela se passe souvent très bien ; Les directeurs des ressources humaines et les administrations sont globalement contents, et personne ne vous demandait cette fusion.

Quant à la réforme des CAP, elle ne fait que manifester plus nettement encore ce que nous savions déjà : vous n’aimez pas les fonctionnaires ni les syndicalistes.

La méthode des ordonnances est une nouvelle fois utilisée, notamment à propos de la formation initiale et de la formation continue, avec une habilitation extrêmement large, qui peut permettre de réformer l’ENA – ou de la « supprimer », pour reprendre les mots du Président de la République qui connaît lui-même la question. Bien sûr, il faudrait que les titulaires des postes de direction reflètent mieux la sociologie du pays, mais peut-être une réforme du concours eût-elle amplement suffi. Bref, nous nous opposerons à vous sur l’essentiel de ce texte, aux côtés des syndicats, notamment le 9 mai prochain.

Mme Elsa Faucillon. Effectivement, avec ce projet de loi de transformation de la fonction publique, vous n’attaquez pas frontalement le statut de la fonction publique. Vous le faites quand même de manière plus grossière que nous ne l’aurions imaginé et tout indique que vous préparez l’extinction de ce statut.

Notre groupe n’est pas attaché au statut de la fonction publique en raison d’une simple filiation historique – Maurice Thorez, Anicet Le Pors… – ni comme à un simple acquis que nous voulons défendre. Nous considérons que c’est un modèle pour l’avenir. Le fonctionnaire, selon nous, doit être régi par un statut, des dispositions réglementaires, être soumis non à un contrat mais à la loi, dans le but d’œuvrer à l’intérêt général. Nous croyons aussi aux vertus du concours, qui permet d’assurer l’impartialité et l’égalité dans le recrutement. Nous croyons que le statut doit être protecteur, garantir la neutralité du service public et permettre de responsabiliser l’agent public afin que celui-ci puisse rendre compte de sa mission à la société.

Pour préparer cette extinction, le texte reprend à bon compte tous les poncifs néolibéraux, des sortes de lubies, les poncifs du new public management. J’évoquerai notamment le recours massif aux agents contractuels, y compris pour occuper des emplois permanents ou des postes de direction. L’obsession est toujours la même : le salut viendrait du secteur privé. Évidemment, cela revient à nier l’immensité des compétences de nos fonctionnaires et leur dévotion pour nos services publics, qu’ils portent souvent à bout de bras, sans moyens, sans soutien de la puissance publique.

Cela nous expose surtout à un risque accru de conflit d’intérêts, de clientélisme et de captation de l’action publique par l’oligarchie financière.

Rappelons tout de même que, depuis leur mise en place, les quatre titres qui composent le statut général de la fonction publique ont connu plus de deux cents modifications législatives, plus de trois cents au niveau réglementaire. C’est assez souligner que la vertu cardinale d’adaptabilité de la fonction publique et des textes qui la régissent s’est concrétisée à grande échelle. Oui, le statut doit en permanence être adapté ; il n’a, en revanche, pas besoin d’être attaqué. Le statut, c’est avant tout une garantie pour les citoyens et les citoyennes, la garantie d’une fonction publique qui assure l’égalité de traitement de toutes et tous, qui évite les dérives de toutes sortes. Les véritables carcans, l’insupportable rigidité sont plutôt le fait de ceux qui, en prêchant le recours massif à l’emploi instable, placent les personnels concernés dans des situations de dépendance iniques.

Procède également des poncifs que j’évoquais l’instauration d’un contrat de projet au caractère ô combien précaire, qui me rappelle mes premières années d’engagement, contre le contrat première embauche (CPE), tandis que la fusion des CHSCT et CT, sur le modèle des ordonnances travail, marque une attaque contre la démocratie sociale – on voit que le Gouvernement s’inscrit dans d’autres filiations que nous. J’évoquerai encore une attaque contre les instances paritaires, avec la réduction drastique du rôle des CAP. Il n’est pas question de rester stoïque face à cette démolition en règle, d’une ampleur que nous jugeons inégalée. L’urgence sociale et l’urgence écologique exigent de la puissance publique une prise en considération de ce qui relève de l’intérêt collectif, de l’intérêt général. L’époque actuelle appelle à plus de service public, à plus de démocratie. Pour cela, il faut des hommes et des femmes, pour les faire vivre avec neutralité, pour assurer leur solidité, leur adaptabilité et leur proximité.

Ce texte n’y contribue en aucun cas. À notre sens, il aggravera au contraire les fractures existantes.

M. Yannick Favennec Becot. Mes chers collègues, les membres du groupe Libertés et Territoires attendent de cette réforme qu’elle renforce l’efficacité de la fonction publique dans les territoires, tout en améliorant la carrière des fonctionnaires, que ce soit en termes de mobilité, de rémunération ou de retraite.

Nous souhaitons que cette réforme s’articule autour de trois piliers ; l’un relatif à la déconcentration et à la décentralisation, avec une plus grande mobilité des fonctionnaires entre les trois versants de la fonction publique ; un autre axé sur la carrière des fonctionnaires, afin de favoriser leur évolution, d’améliorer leur rémunération et d’assurer un calcul des retraites plus équitable entre les différentes fonctions publiques ; un dernier pilier consacré au renforcement de la déontologie.

Par ailleurs, le groupe Libertés et Territoires dénonce le recours aux ordonnances sur des points majeurs comme l’organisation du dialogue social, la formation professionnelle, la santé des agents ou encore la médecine du travail. Il est indispensable que le débat parlementaire permette de préciser le périmètre exact des ordonnances, leur contenu et les modalités de leur exécution.

Enfin, nous tenons à souligner l’absence de mesures en matière de déontologie dans la haute fonction publique.

La réforme de la fonction publique est, selon nous, l’occasion pour le Gouvernement de répondre aux attentes des Français et des agents publics. Or, telle qu’elle se présente, la réforme répond plus à un objectif comptable qu’à un véritable mouvement de transformation de la fonction publique pour la préparer aux enjeux de demain. La véritable question qui se pose est celle de savoir quelle fonction publique nous voulons – et non pas combien de fonctionnaires en moins nous voulons. Cela pose inévitablement la question des compétences qui doivent être assumées par l’État et de celles qui doivent être assumées par les collectivités territoriales. Or, à l’heure où l’Assemblée nationale entame l’examen de ce projet de loi, nous ne connaissons pas précisément les contours du mouvement de décentralisation et de déconcentration annoncé par le Président de la République la semaine dernière. Par ailleurs, la transformation de la fonction publique nécessite de prendre en compte le volet numérique, notamment en matière de formation, ce que ne fait pas votre projet de loi.

Nous tenons également à appeler à la plus grande vigilance en ce qui concerne le contrat de projet, qui ne doit pas conduire à une plus grande précarité des agents. C’est bien là notre inquiétude.

Le groupe Libertés et Territoires tient également à saluer le volet consacré à l’égalité professionnelle. Il regrette cependant le flou qui entoure un certain nombre de dispositions, notamment en matière d’égalité salariale.

Quant au dialogue social, une instance unique, le comité social – d’administration, territorial ou d’établissement –, est instituée dans les trois versants de la fonction publique, afin de débattre des sujets d’intérêt collectif. Cette instance est issue de la fusion des actuels comités techniques et comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail. Le groupe Libertés et Territoires n’est pas opposé au principe de cette instance unique mais il souhaite que cela contribue au renforcement du dialogue social et de la transparence. Aussi attendons-nous des contreparties concrètes à cette fusion.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. J’ai relevé un certain nombre de questions, auxquelles je vais essayer d’apporter des éléments de réponse. Je terminerai par les interrogations de Mme la rapporteure sur un certain nombre de points importants, sinon sensibles.

Beaucoup d’entre vous, mesdames et messieurs les députés, ont évoqué la question du statut. Mme Faucillon, il y a un instant, évoquait l’attachement aux missions et les dizaines ou centaines d’ajustements et d’adaptations du statut. J’aurais pu souscrire à son propos, hors l’appréciation portée sur ce projet de loi – mais j’aurais parlé de dévouement plutôt que de dévotion. Nous avons précisément veillé à ce que les éléments les plus fondamentaux du statut ne soient pas remis en cause. L’avis du Conseil d’État, important parce qu’il permettait de garantir en droit le respect des principes du statut, vient l’illustrer. Ainsi, dans le dix-septième considérant de l’avis rendu, le Conseil d’État estime que le principe de l’occupation des emplois permanents par des agents titulaires édicté à l’article 3 de la loi du 13 juillet 1983 est maintenu. De même, alors que nous considérons qu’il est fondamental pour le statut de garantir le droit à la participation des agents, le Conseil d’État, dans son neuvième considérant, estime que les modalités que nous envisageons garantissent tout à fait son exercice.

Une crainte est parfois exprimée au sujet du lien entre le maintien du statut et le recrutement de contractuels. C’est d’abord faire fi de deux éléments. Tout d’abord, la fonction publique comprend aujourd’hui près de 20 % de contractuels. Personne ne pense que cela remet en cause le statut ni la capacité à servir. Ensuite, l’article 32 de loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dispose – c’est un point fondamental – que les agents contractuels, quelle que soit la nature de leur contrat, bénéficient des mêmes droits et de la même protection et sont soumis aux mêmes devoirs que les agents titulaires.

Je tiens aussi à souligner qu’aucun quota ni plancher ni plafond n’est prévu à aucun article de la loi. Si nous donnons une nouvelle liberté aux employeurs publics ainsi qu’aux Françaises et aux Français, il serait tout à fait contre-productif de fixer un nombre minimum de contractuels, comme il serait inutile d’en fixer un nombre maximum. Aujourd’hui, des services, des établissements fonctionnent avec 0 %, 2 %, 5 % de contractuels, d’autres avec plus de 70 % de contractuels. Nous devons donc permettre cette adaptation sans leur imposer des critères arithmétiques.

Si le Gouvernement demande effectivement une habilitation à légiférer par voie d’ordonnances sur la déconcentration et la décentralisation du dialogue social, la santé au travail, la protection sociale complémentaire et la formation, c’est que ce sont des sujets ardus. J’ai dit, lors de mon audition, que nous devons aussi avoir des temps de concertation spécifique, et que j’étais ouvert à l’association des parlementaires – comme à celle des organisations syndicales et des représentants des employeurs – à l’élaboration de ces ordonnances et, au-delà, à celle des textes réglementaires d’application de ce projet de loi.

Je précise, puisque M. Bernalicis a évoqué la question, que cette habilitation permettra d’intégrer, le moment venu, si nous les retenons, les propositions que formulera M. Thiriez dans son rapport sur la haute fonction publique, pas seulement l’ENA mais toute la haute fonction publique, son recrutement, sa formation, la gestion des carrières. Cela fait partie des objectifs fixés par le Président de la République.

M. Marleix s’inquiète légitimement de l’égal accès à l’emploi public. Garanti par la Constitution, rappelé par la loi de 1983, ce principe trouve deux applications dans le cadre de cette réforme. La première tient à un décret déjà pris, daté du 28 décembre 2018, relatif à l'obligation de publicité des emplois vacants sur un espace numérique commun aux trois fonctions publiques, qui fixe les modalités de la publication des offres d’emplois titulaires ou contractuels de plus d’un an et la durée de vacance au terme de laquelle il est possible de recruter un contractuel. La deuxième tient à un décret d’application prévu par le projet de loi, visant à encadrer les procédures de recrutement. J’aurai l’occasion d’y revenir lorsque nous débattrons de l’article 6, pour préciser ce qui pourrait être intégré au décret, notamment en termes de composition du dossier de candidature et de définition des modalités d’examen des candidatures. Il me semble par exemple absolument impératif que tous les candidats soient auditionnés par le même jury, dans la même composition, puisque c’est un des principes de l’égal accès.

Quant aux compétences des comités sociaux, je souscris aux propos de M. Gouffier-Cha sur la nécessité de les densifier, mais je tiens à vous rassurer : si vous craignez que les lignes directrices de gestion des ressources humaines soient en contradiction avec les priorités légales d’affectation, cette inquiétude n’est pas fondée. Les priorités légales d’affectation sont fixées par la loi, tandis que les lignes directrices sont arrêtées par les comités sociaux dans les termes et selon les procédures prévus par le projet de loi. Par définition, ces lignes directrices de ressources humaines n’ont pas de valeur légale. Les priorités légales d’affectation ont une valeur, une puissance juridique évidemment supérieure, et s’imposeront aux lignes directrices.

J’ai entendu différentes appréciations, plutôt positives, sur la question de l’égalité entre les femmes et les hommes. Je sais qu’un certain nombre d’amendements visent à préciser quelques mesures. Je voudrais simplement dire, au risque de me prêter à un exercice périlleux devant vous, que ce protocole d’accord sur l’égalité entre les femmes et les hommes a été conclu par sept des neuf organisations syndicales représentatives et par l’intégralité des employeurs des trois versants. Il s’agit donc d’un protocole équilibré, qui résulte d’une longue concertation et d’une longue négociation. Vous ne serez donc pas surpris si je m’attache particulièrement à veiller, lors de l’examen des amendements, à ce que la loi transcrive fidèlement cet accord.

Il faut effectivement, madame la députée Faucillon, travailler sur la question des concours, de leur attractivité, de leur mode d’organisation et de la diversification des voies d’accès au titulariat de la fonction publique, mais cela relève intégralement du domaine réglementaire. Une concertation inscrite à l’agenda social pour 2019 nous permettra d’avancer. Je pense notamment à l’idée de créer des concours adaptés – pardonnez-moi si le terme manque de précision –, pour donner à ceux qui sont formés en apprentissage dans la fonction publique la possibilité d’accéder au titulariat sans être renvoyés, comme c’est le cas aujourd’hui, au seul concours externe, avec les difficultés qu’ils peuvent rencontrer du fait du caractère académique ou universitaire du premier groupe d’épreuves.

Monsieur Favennec Becot, une réflexion est effectivement en cours sur l’organisation territoriale de l’État et la déconcentration. Les modalités du dialogue social et de la déconcentration de décisions de gestion prévues par ce texte sont aussi en adéquation avec cette volonté de déconcentration et de rapprochement de la décision du terrain. Dans quelques semaines, le Premier ministre aura l’occasion de s’exprimer à ce sujet.

Vous avez raison, monsieur le député, de relever que le texte ne comporte pas d’objectifs chiffrés en matière d’emploi. Je ne reviens pas sur les déclarations du Président de la République, qui a donné à ces décisions politiques la primauté sur la question des effectifs ; cela paraît évidemment très logique. De surcroît, ce texte n’a jamais comporté de dispositions tendant à la suppression ou à la création d’emplois. Il s’agit des outils de gestion des ressources humaines.

Je termine par quelques points évoqués par Mme la rapporteure et M. Gouffier-Cha. Nombre d’entre vous, mesdames et messieurs les députés, souhaitent un code de la fonction publique, c’est une demande importante, que j’ai entendue. Cela procède à la fois d’un souci de lisibilité, de la volonté de regrouper les éléments de droit qui concernent le statut et ses principes et de procéder à une forme de simplification – la codification, on le sait, est l’occasion de retravailler un certain nombre de coordinations. Il est vrai, M. Gouffier-Cha l’a dit, que la codification se fait généralement par voie d’ordonnances, après habilitation. Je vous confirme donc que le Gouvernement demandera au Parlement, lors de l’examen en séance, de bien vouloir l’habiliter à prendre une ordonnance de codification des textes de la fonction publique pour donner suite à l’initiative du groupe majoritaire.

Quant à la rupture conventionnelle, Mme la rapporteure a dit souhaiter améliorer, par voie d’amendement, les conditions dans lesquelles elle peut avoir lieu. Le Gouvernement se montrera extrêmement ouvert à ses propositions, pour sécuriser les agents mais aussi les employeurs.

En matière de déontologie, madame la rapporteure, monsieur Gouffier-Cha, madame Vichnievsky, nous sommes ouverts à l’idée de travailler sur un écrêtement des rémunérations non pas des fonctionnaires mais de celles et ceux qui sont amenés à présider des autorités administratives indépendantes et qui, par ailleurs, bénéficient d’autres sources de revenus, de même que nous sommes ouverts à l’idée de travailler à un meilleur encadrement des nominations. Par ailleurs, en 2016, à l’occasion de l’examen du texte sur la déontologie et les droits des fonctionnaires, la question d’une fusion, d’un rapprochement de la Commission de déontologie, rattachée au Premier ministre, et de la HATVP, autorité administrative indépendante, avait été posée ; le débat n’est pas récent. Je tiens à souligner que les publics concernés sont différents, et accèdent aux responsabilités en vertu de règles différentes ; cela nécessite un traitement qui reste différencié. Le Gouvernement a pris note avec beaucoup d’attention de l’amendement CL709 de M. Matras, qui ne l’a pas surpris, étant donnés le rapport qu’il a remis avec M. Marleix et la proposition de loi qu’il a déposée, vu les nombreux échanges que nous avons eus avec lui. Cet amendement a pour objet de permettre de rapprocher la Commission de déontologie et la HATVP, de faire en sorte que la Commission de déontologie accède au rang d’autorité administrative indépendante, tout en préservant une possibilité d’instruction et d’examen des dossiers différenciée, pour tenir compte des différences entre les publics concernés. Cette solution nous paraît extrêmement intéressante. Il faut y regarder de plus près et creuser cela.

Nous devons aussi travailler, d’ici à la séance, sur la publication des avis. Il faut que les deux autorités dont nous parlons puissent publier les avis dans certaines conditions. Il me paraît intéressant de le faire, que l’avis ait été favorable ou non, lorsque la personne tenue de consulter l’instance en question accède à l’emploi à propos duquel elle le faisait. En revanche, lorsque tel ou tel agent public ou élu sollicite une autorité de contrôle pour obtenir un avis en vue d’une éventuelle nomination ou d’une éventuelle candidature, c’est une démarche de prudence qui, à mon sens, ne justifie pas que l’avis soit rendu public, soit que l’avis fût défavorable et ait été respecté, soit qu’il fût favorable et suivi d’une nomination, soit qu’il fût favorable et non suivi d’une nomination – on peut être intéressé par une fonction et y renoncer ensuite, il n’est pas nécessaire de rendre cela public.

Quant à la précarité, je ne méconnais pas, bien évidemment, l’application de l’article 40 de la Constitution, qui explique le sort réservé aux amendements tendant à créer une prime de précarité pour les agents contractuels de la fonction publique. D’ici à la séance, nous avons quelques jours pour travailler sur un amendement du Gouvernement visant à instaurer une prime de précarité pour les contrats d’une durée égale ou inférieure à un an, dans des conditions qui devront être définies. Un certain nombre de pistes ont été évoquées par Mme la rapporteure et M. Gouffier-Cha. C’est important, parce que nous ne pouvons pas demander aux employeurs privés de se comporter de manière exemplaire quand il s’agit de recourir aux contrats de courte durée si les employeurs publics peuvent, eux, multiplier les contrats courts.

La Commission en vient à l’examen des articles.

Avant l’article 1er

La Commission examine l’amendement CL33 de Mme Alice Thourot.

Mme Alice Thourot. Cet amendement vise à codifier les dispositions applicables aux trois fonctions publiques. Aujourd’hui, il n’existe pas de code de la fonction publique. Les dispositions concernées sont éparses, très nombreuses et peu lisibles pour les agents. En clair, il s’agit de simplifier et d’améliorer l’accès au droit de la fonction publique.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je souscris, chère collègue, à l’idée de codifier à droit constant l’ensemble des dispositions relatives à la fonction publique, c’est effectivement un enjeu réel de lisibilité et d’accessibilité du cadre juridique – législatif et réglementaire – dans lequel évolue la fonction publique.

Cependant, cet amendement ne présente pas, en soi, de véritable portée puisqu’il est nécessaire, pour atteindre cet objectif, d’habiliter le Gouvernement à procéder à la codification par ordonnance, immense chantier qui nécessite une forte mobilisation des services de l’État pendant plusieurs mois. M. le secrétaire d’État ayant précisément annoncé le dépôt d’un amendement visant à habiliter le Gouvernement, je vous invite à retirer le vôtre.

Mme Alice Thourot. Merci, madame la rapporteure, monsieur le secrétaire d’État, pour l’attention accordée à la question que je soulève par cet amendement. Compte tenu de l’engagement pris, je le retire, avec l’espoir de pouvoir en rediscuter en séance, et de voter en faveur d’un amendement du Gouvernement.

L’amendement est retiré.

TITRE Ier
Promouvoir un dialogue social plus stratÉgique et efficace dans le respect des garanties des agents publics

Article 1er (art. 9 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983) : Principe de participation des fonctionnaires

La Commission examine les amendements identiques CL102 de M. Stéphane Peu, CL178 de M. Ugo Bernalicis, CL193 de M. Jean-Louis Masson et CL441 de Mme Marietta Karamanli.

Mme Elsa Faucillon. Sous couvert de réaffirmer le principe constitutionnel de participation des agents publics par l’intermédiaire de leurs délégués au fonctionnement des services publics, cet article vise, à nos yeux, à supprimer la mention prévoyant l’examen par les syndicats des décisions individuelles relatives aux carrières. Il procède d’une volonté de réduire le poids de la démocratie sociale au sein de la fonction publique afin de donner la part belle aux managers. Nous réaffirmons pour notre part nos convictions et notre attachement à une fonction publique de carrière et pas à cette fonction publique d’emploi dont le projet de loi creuse le sillon.

M. Ugo Bernalicis. Il est étrange que le texte de ce projet de loi s’ouvre sur un tel article, comme si l’objectif de cette transformation de la fonction publique était de réduire la capacité des syndicalistes à se prononcer sur les décisions individuelles dans des organes dont je rappelle qu’ils ne sont que consultatifs et n’ôtent rien aux capacités de décision de l’administration. Les différents services des ressources humaines sont d’ailleurs très heureux de pouvoir discuter ainsi de toutes les décisions individuelles, des mutations, des avancements ou encore des réductions d’ancienneté. Un certain nombre de mes anciens collègues se le demandent : comment cela se passera-t-il concrètement ? Si ne sont plus examinées que les décisions problématiques, il y aura finalement beaucoup plus de contentieux et beaucoup plus de difficultés, et les syndicats seront bien moins en mesure de connaître la situation globale. On voudrait compenser cela par ces fameuses lignes directrices mais rien n’empêchait de prendre une disposition permettant une discussion globale sur des lignes directrices tout en maintenant les actuelles CAP ! Voilà qui aurait apporté une véritable plus-value. Il aurait été possible de discuter des enjeux de service et des trajectoires collectivement avec les syndicats. Tout le monde parle de la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, sans qu’on ne la voie jamais à l’œuvre ; ce n’est pas dans une CAP restreinte que nous pourrons en discuter, ni dans l’instance issue de la fusion du CT et du CHSCT. Finalement, vous voulez renforcer un certain autoritarisme, qui n’est même pas souhaité par les cadres de la fonction publique.

M. Jean-Louis Masson. J’ai du mal à comprendre. Alors que vous disiez, monsieur le secrétaire d’État, dans votre propos liminaire, qu’il est important d’associer les fonctionnaires aux décisions qui les concernent, vous proposez de retirer aux commissions administratives paritaires leur compétence en matière de promotion et d’avancement. Ce n’est pas logique. En outre, ayant présidé pendant dix-sept ans, et jusqu’à une date récente, une collectivité importante, j’ai toujours trouvé intéressant d’écouter les propositions des commissions administratives paritaires sur ces sujets.

Pour moi, ce que vous proposez n’est pas une avancée. Je ne comprends même pas pourquoi vous le proposez, et je suis impatient d’entendre vos explications.

Mme Marietta Karamanli. Nous proposons de supprimer cet article qui a mobilisé contre lui l’ensemble des organisations syndicales. Au-delà de la méthode – il n’est issu d’aucun dialogue –, il remet en question un principe essentiel en vertu duquel les uns et les autres, représentant les agents, pouvaient discuter, présenter leurs arguments, échanger avec les employeurs dans le cadre d’une structure. Sous couvert de promouvoir le dialogue social, vous réduisez paradoxalement le nombre des instances avec la fusion des comités techniques et des CHSCT et vous retirez aux commissions administratives paritaires plusieurs de leurs attributions. C’est contradictoire.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis évidemment défavorable à ces amendements de suppression de l’article 1er, lequel réaffirme le principe constitutionnel de participation des fonctionnaires, tel que prévu à l’article 9 de la loi du 13 juillet 1983. Cet article permet en effet d’étendre le principe de participation des fonctionnaires à la définition des orientations en matière de politique de ressources humaines au sein des administrations dans lesquelles ils travaillent. C’est bien sûr l’objet de la création des comités sociaux qui constitueront les véritables enceintes du dialogue social de proximité, dans une perspective de pilotage transversal des ressources humaines.

Ce principe de participation, loin d’être abandonné, est donc enrichi par cette réforme. Les représentants syndicaux participeront directement à la définition de la stratégie globale mise en œuvre par l’administration et feront entendre leur voix et leurs positions sur tous les sujets liés à la gestion des ressources humaines au sein de ces comités sociaux, notamment sur les lignes directrices de gestion des ressources humaines, qui détermineront de façon claire et transparente les critères d’examen des décisions individuelles affectant les carrières des agents. J’ajoute que la mise en œuvre des lignes directrices de gestion fera l’objet d’un bilan devant les comités sociaux, sur la base des décisions individuelles, ce qui renforce bien évidemment le pouvoir de contrôle des représentants syndicaux sur ces sujets.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Le Gouvernement est évidemment défavorable à ces amendements de suppression.

Cet article 1er rappelle et réaffirme le principe de participation, tel que défini par l’article 9 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires. Le Conseil d’État, je l’ai dit, a considéré qu’en droit le dispositif proposé ne remet pas en cause le principe de participation et vient le confirmer.

Lors de l’examen des articles 3 et 4, nous aurons l’occasion de revenir sur les questions de la compétence des CAP et des lignes directrices de gestion des ressources humaines. Cela étant, en l’état actuel du dialogue social, les comités techniques ne se prononcent peu, voire pas – et plutôt pas que peu, sur les questions relatives aux règles générales d’accès à la mobilité ou à la promotion, à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences, à l’évolution des métiers et des carrières, les comités d’hygiène et de sécurité n’ont pas cette compétence et les CAP se bornent, pour l’essentiel, à vérifier que les dossiers individuels présentés sont conformes à des règles arrêtées sans concertation par l’administration.

Le modèle que nous proposons, avec la fusion des CHSCT et des CT en une instance unique, et avec les compétences que nous donnons aux comités sociaux, permettra aux organisations syndicales et aux représentants de l’administration de discuter, de délibérer et de voter sur les lignes directrices de gestion des ressources humaines, à la fois en termes de GPEC, d’évolution des carrières, de règles d’accès à la mobilité et à la promotion. En termes de dialogue social, il est plus intéressant pour les uns et les autres de participer à l’élaboration de règles générales plutôt que de consacrer autant de temps à l’examen de situations individuelles. Par ailleurs, cela permettra de gagner du temps – actuellement, dans 92 % des cas, c’est un avis favorable qui est rendu –, sans être lié par les contraintes du calendrier et les rythmes de réunions des différentes CAP. Notre volonté est à la fois de réaffirmer le principe de participation édicté à l’article 9 de la loi du 13 juillet 1983 et de nous doter d’un modèle plus efficace.

M. Olivier Marleix. Le problème que soulèvent les auteurs de ces amendements de suppression n’est évidemment pas le principe de participation des agents. C’est la suppression de ce cadre de la participation qu’étaient jusqu’à présent les CAP. Et Jean-Louis Masson vous posait très simplement la question : pourquoi donc ?

En vingt ans de vie d’élu local ou de vie professionnelle dans le service public local, je n’ai jamais entendu des élus ni des employeurs locaux demander la suppression des CAP. Il est très précieux, quand on gère une collectivité qui emploie 2 000 agents, d’avoir un écho de la situation de l’agent le plus éloigné. Toutes les situations sont passées en revue, c’est un moment d’équité, en même temps qu’une garantie très importante pour les agents.

Certes, les agents conserveront leur droit de recours, qui existe indépendamment de ce que vous proposez, mais vous supprimez un cadre de dialogue social extrêmement important, suppression que personne n’a jamais demandée. Je vous repose donc la question de Jean-Louis Masson : d’où vous vient cette idée ? Pourquoi ?

M. Ugo Bernalicis. J’appuie la question. C’est clairement une énigme ! Au sein de l’État, aucun directeur des ressources humaines (DRH), ni aucun de mes anciens collègues chargés de telles fonctions n’a émis le souhait d’une telle suppression ou d’une focalisation sur les contentieux. Vous avez évoqué les 92 % d’avis favorables des CAP, mais ils sont liés à l’analyse concomitante des 8 % ! Cela permet des échanges. Demain, vous allez rigidifier 92 % des situations et mettre en concurrence les 8 % restant, alors qu’ils connaissent des problèmes ou ne sont pas contents de leur mutation…

En réalité, comment cela va-t-il se passer dans les administrations ? Localement, les DRH vont rencontrer les syndicats dans un cadre informel pour éviter d’éventuels contentieux. On va donc passer du cadre formalisé existant à des discussions informelles, partout, en fonction des appétences des uns et des autres et de leur capacité à discuter, échanger, négocier. Les syndicats n’auront plus de vision d’ensemble des mouvements, juste le cadre général des lignes directrices. Ce n’est pas satisfaisant.

Loin de nous l’idée de dire qu’il ne faut pas de discussion sur les lignes directrices, au contraire. Il serait même intéressant de discuter d’un contrat de service, qui n’intégrerait pas seulement la thématique des ressources humaines, mais toutes les dimensions du service. En effet, la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) n’est pas seulement un sujet de « ressources humaines ». Elle s’inscrit dans une réflexion sur l’avenir du service dans lequel on travaille et sa vision à moyen et long termes. Le contrat de service pourrait faire l’objet d’une discussion en comité technique, le volet « ressources humaines » étant décliné en CAP.

Cela ne tient qu’à nous, mais aussi aux administrations, de le vouloir. En filigrane, – je l’ai entendu dans la bouche de certains députés de La République en Marche, voire du ministre –, vous estimez que les syndicats sont peu transparents et peu disposés à discuter de ces sujets. Ce n’est pas vrai ! Ils demandent justement à pouvoir ouvrir cette discussion. Ce n’est pas ce que vous faites avec ce texte…

M. Boris Vallaud. Comme d’autres collègues, j’ai présidé toutes ces instances dans des administrations de l’État ou des collectivités locales. Elles sont fondamentales en termes de management et de projets de service. Aucun employeur ne réclame cette fusion. De même, les acteurs du dialogue social, dont vous passez votre temps à chanter les louanges, nous disent lorsque nous les recevons qu’en dépit des amendements qu’ils ont formulés sur le projet de loi lorsqu’ils se sont prêtés à la négociation, ils n’ont pas été entendus. Mis à l’épreuve du dialogue social que vous prônez, vous ne vous y livrez pas avec sincérité.

En outre, même si nous n’en sommes qu’au début, je voudrais vous faire partager le résultat des premières auditions que j’effectue en tant que co-rapporteur d’évaluation des ordonnances réformant le code du travail avec Laurent Pietraszewski. Nous avons déjà reçu des organisations de salariés. Je vous rappelle que la loi défendue par Mme Muriel Pénicaud visait au « renforcement du dialogue social ». Quand on leur demande si c’est bien le cas, deux ans après sa mise en œuvre, ils répondent sans ambages par la négative. Seule la ministre peut encore prétendre – ce ne sont que des mots – que la réforme du code du travail commence à porter ses fruits ! La réalité est toute autre : le dialogue social, les moyens des organisations de salariés et le débat sur les sujets relevant de la stratégie de l’entreprise pâtissent lourdement de la mise en place des comités sociaux et économiques. La suppression des comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) nuit à la sécurité et à la santé au travail.

Or le présent projet est très inspiré de ce qu’a fait Mme Pénicaud il y a deux ans. En tant que parlementaires, nous serions coupables de ne pas tenir compte du travail d’évaluation en cours qui, pour l’instant, tire des conclusions calamiteuses en termes de qualité et de progrès du dialogue social . J’ai peur que nous n’empruntions ce même mauvais chemin pour la fonction publique…

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. J’ai déjà apporté des éléments d’explication et nous aurons l’occasion d’y revenir aux articles 3 et 4. Nous voulons gagner du temps : dans les services déconcentrés, les délais de mutation sont parfois de huit à quatorze mois. Cela nuit à la continuité du service. Notre objectif est de simplifier le dispositif, tout en garantissant les droits des agents, y compris par la publicité des barèmes et des critères. Cela répond à l’une de vos inquiétudes, monsieur Bernalicis. Nous formalisons aussi le droit de recours, même s’il est évident qu’il est déjà inscrit dans le droit.

Vous m’interpellez sur la qualité du dialogue social et évoquez les amendements déposés devant les instances de consultation. En faisant exception des amendements de suppression, qui visaient à rappeler une opposition de principe – tout à fait légitime –, la moitié des amendements proposés par les deux organisations syndicales qui en ont déposé ont connu un sort favorable, soit par intégration à l’avant-projet de loi, soit par des engagements de travail réglementaire. On ne peut pas dire que le dialogue social a été vain ; il a au contraire été particulièrement fructueux, notamment pour ceux des syndicats qui ont joué le jeu.

La Commission rejette les amendements.

Elle en vient à l’amendement CL440 de M. Boris Vallaud.

M. Boris Vallaud. Cet amendement de repli vise à compléter le périmètre de mise en œuvre du principe de participation, afin de tenir compte de la reconfiguration des instances de dialogue social dans la fonction publique.

Alors que les futurs comités sociaux d’administration, territoriaux ou d’établissement seront consultés pour la définition des lignes directrices de gestion en matière de mutations, de mobilités, de promotion et d’avancement, l’article 1er ne fait pas référence à cette nouveauté, sachant que la notion d’« orientations en matière de politique de ressources humaines » utilisée par cet article ne correspond pas exactement au périmètre des lignes directrices de gestion.

D’ailleurs, l’étude d’impact de l’article le dit explicitement : « il renforce le dialogue social sur de nouveaux objets de dialogue social liés à la définition des orientations en matière de politique de ressources humaines ou à la définition de lignes directrices de gestion en matière de mutations, de mobilités, de promotion et d’avancement ».

Je rappelle que nous ne sommes pas favorables à l’article 1er, dont nous avons demandé la suppression…

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je ne partage pas votre lecture. Votre amendement est satisfait par la rédaction de l’article 3 du projet de loi qui prévoit explicitement la compétence des comités sociaux sur les lignes directrices de gestion en matière de mobilité et de promotion et valorisation des parcours professionnels. Je vous demanderai de bien vouloir le retirer. À défaut, mon avis sera défavorable.

M. Ugo Bernalicis. L’amendement de M. Vallaud est un bon amendement. Il supprime la notion de liste établie par décret en Conseil d’État, évitant ainsi de restreindre les décisions individuelles à un contentieux spécifique. Je le voterai.

Nous ne sommes pas contre une discussion sur les lignes directrices de gestion des ressources humaines, au contraire. Mais quand le secrétaire d’État souligne que deux organisations syndicales ont « joué le jeu » et amendé l’avant-projet de loi, c’est faux ! Je les ai rencontrées : elles font grève, rejettent le texte en bloc et toutes les deux demandent son retrait. Elles ont simplement tenté de sauver les meubles et, comme nous, déposé des amendements de repli, mais cela ne les satisfait pas. Alors, évitez de les mettre dans votre escarcelle, comme si le dialogue social avait fonctionné !

M. Boris Vallaud. Monsieur le secrétaire d’État, vous aurez noté que la journée du 9 mai sera un mouvement unitaire. Votre appétit de dialogue social ne saurait donc être satisfait…

Madame la rapporteure, vous indiquez que les dispositions sont prévues à l’article 3. Le prévoir dès l’article 1er ne dégraderait pas le projet de loi. Je vous suggère donc de soutenir l’amendement, puisqu’il ne contredit pas l’article 3, et vous invite à le voter !

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL417 de M. Jean-François Cesarini.

M. Alain Perea. Vous parlez beaucoup des bienfaits des CAP mais, pour avoir géré jusqu’à 1 000 agents de la fonction publique, je peux témoigner des problèmes que l’on peut rencontrer, avant et après les CAP. Je ne veux pas rallonger les débats – ils vont être suffisamment longs. Dans l’hémicycle, nous aurons le temps d’expliquer tous les dysfonctionnements que cet article va contribuer à régler.

Pour autant, nous entendons les inquiétudes. Notre amendement vise donc à substituer à la liste établie par décret en Conseil d’État toutes les décisions individuelles concernant la carrière des fonctionnaires, afin de les rassurer et de souligner l’intérêt que le Parlement y porte.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Par cohérence avec la réforme globale de l’architecture des instances de concertation dont nous allons discuter lors de l’examen des amendements aux prochains articles, je suis défavorable à cet amendement, qui s’oppose aux évolutions de l’organisation et des attributions des CAP que propose le projet de loi.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 1er sans modification.

Après l’article 1er

La Commission examine l’amendement CL167 de M. Stéphane Peu.

Mme Elsa Faucillon. Cet amendement prévoit que les propositions et avis des fédérations syndicales émis au moment de la préparation des lois, décrets et règlements concernant les fonctionnaires devaient être ajoutés en annexe de l’exposé des motifs afin que le législateur puisse en prendre connaissance. Ce serait un apport intéressant. En outre, cela fait suite à un amendement censé consacrer la participation des fonctionnaires.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Il n’est pas utile de placer en annexe de l’exposé des motifs l’ensemble des procès-verbaux de séance des conseils supérieurs saisis sur chaque projet de loi ou d’ordonnance : les conseils supérieurs assurent déjà la publicité de leurs travaux. Ainsi, le Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) met en ligne sur son site internet l’ensemble des dossiers et des communiqués de presse afin d’indiquer les votes et les positions des organisations syndicales sur les projets de texte.

La Commission rejette l’amendement.

Article 2 (art. 9 ter de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 et art. 8 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984) : Nouvelle faculté de saisine unique du Conseil commun de la fonction publique et représentation des plus grandes communes et de leurs établissements publics intercommunaux (EPCI) au sein du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale

La Commission examine l’amendement CL103 de M. Stéphane Peu.

Mme Elsa Faucillon. Nous sommes opposés à l’éloignement du lieu de la consultation par rapport à l’administration de rattachement des personnels concernés. Nous proposons donc la suppression de cet article qui affaiblit le rôle des conseils supérieurs des trois versants de la fonction publique. Chaque conseil supérieur doit être consulté sur tous les projets de textes ou de rapports qui intéressent la situation des agents de chaque versant de la fonction publique.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis défavorable à cet amendement de suppression de l’article 2 qui, je le rappelle, prévoit deux dispositions distinctes.

Il vise à permettre la saisine unique du Conseil commun de la fonction publique (CCFP) lorsqu’un projet de texte comporte à la fois des dispositions communes à au moins deux fonctions publiques et des dispositions applicables à l’une des trois fonctions publiques, à la condition que ces dispositions présentent un lien avec les dispositions communes. Il s’agit d’une mesure de rationalisation qui permet de fluidifier le processus de consultation. Cela ne diminue en rien la représentation de chaque versant puisqu’ils sont tous représentés au sein du CCFP, ainsi consacré comme structure transversale du dialogue social inter-fonctions publiques.

L’article 2 modifie également la composition du collège des employeurs territoriaux au sein du CSFPT afin d’intégrer la représentation des établissements publics de coopération intercommunale et de garantir celle des plus grandes communes – par décret pour ces dernières. Intégrer les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) au sein du collège employeurs du CSFPT me paraît tout à fait justifié, eu égard à la place et au rôle croissant qu’ils détiennent dans nos territoires.

Mme Elsa Faucillon. La représentativité n’est pas la même dans les trois versants et cet élément est remis en cause par le projet de loi.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL518 de M. Pierre Cordier.

M. Jean-Louis Masson. Afin de mieux garantir le fonctionnement autonome du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, il est proposé, en cas de saisine du Conseil commun, d’ajouter l’accord préalable du président du CSFPT pour toute disposition relative à la fonction publique territoriale.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cet amendement reprend une disposition qui a été écartée par le Conseil d’État dans son avis. Elle aurait placé le président du CSFPT en situation de porte-à-faux vis-à-vis des membres qui le composent.

C’est la raison pour laquelle il a été explicitement prévu que la nouvelle faculté de saisine du Conseil commun ne puisse être mise en œuvre qu’à la condition que les dispositions spécifiques à l’un ou l’autre des versants ne soient pas dépourvues de lien avec les dispositions communes que comporte le projet de texte. Mon avis est donc défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL179 de Mme Danièle Obono.

M. Ugo Bernalicis. Nous proposons de supprimer l’alinéa 4 qui permet au Conseil commun de court-circuiter les trois autres en cas de sujet transversal. Je ne suis pas opposé à ce que le Conseil commun se prononce sur les sujets transversaux mais cela devrait venir après les discussions dans les conseils des trois fonctions publiques. En effet, les règles, la discussion et la représentation syndicale ne sont pas les mêmes. Les conseils propres à chaque grande fonction publique permettent de soulever des points plus précis, alors que le propos est plus ramassé en Conseil commun.

Selon vous, cela tombe sous le sens que ce dernier reprenne les sujets transversaux, tout comme cela tombe sous le sens que les CAP se concentrent sur les 8 % d’avis défavorables. Nous ne sommes pas d’accord, ce n’est pas comme cela que le dialogue social – que vous souhaitez développer – fonctionne !

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Pour les raisons précédemment soulignées, j’émets un avis défavorable. Contrairement à ce qui est indiqué dans l’exposé sommaire de votre amendement, les représentants des organisations syndicales sont majoritaires au sein du Conseil commun : ils sont trente, contre dix-huit représentants des employeurs répartis entre les trois versants. Il n’y a donc aucune volonté de faire taire qui que ce soit, mais simplement celle d’organiser le dialogue social au niveau le plus pertinent.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle se saisit de l’amendement CL180 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. Par cet amendement, nous proposons que le Conseil commun de la fonction publique et que les conseils supérieurs des fonctions publiques de l’État, territoriale et hospitalière soient aussi consultés sur les projets de lois de finances (PLF) et les projets de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), ainsi que les projets de loi rectificatifs de ceux-ci.

En effet, ces conseils regroupent les experts et expertes des trois fonctions publiques. Ils doivent d’ores et déjà statuer sur les conditions d’exercice des fonctionnaires et agents publics dans leurs missions de service public. En outre, ils doivent nécessairement connaître, et donner leur avis, sur les moyens – humains et financiers – effectivement alloués pour réaliser ces missions.

Or les politiques de réduction des moyens – révision générale des politiques publiques, modernisation de l’action publique, Action publique 2022 –, qui affectent les conditions de travail et d’exercice du service public, passent par les PLF et PLFSS qui déterminent les grandes masses d’emplois et de budgets affectés pour le fonctionnement des services publics. Leur point de vue permettrait peut-être d’éclairer le débat parlementaire. Il nous semble important qu’ils jouent une part plus importante dans ce dialogue.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Les conseils supérieurs et le Conseil commun ont compétence pour connaître de tout projet de loi dérogeant ou modifiant les lois statutaires et tout projet d’ordonnance ou de décret qui a une incidence sur la situation statutaire des fonctionnaires ou sur les règles générales de recrutement et d’emploi des agents contractuels. Outre l’alourdissement du processus de consultation que générerait cette expérimentation, quelle serait la plus-value, étant donné que les conseils sont déjà compétents sur les projets qui concernent leur versant ? Mon avis sera donc défavorable.

Mme Danièle Obono. Savoir si, dans un projet de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale, on retire des moyens dans un budget où l’on flèche les dépenses selon une vision comptable ou plutôt selon une vision qui défend l’intérêt général, concerne directement les conditions de travail et la capacité à assurer les missions de service public. Ce n’est pas une simple question technique ou de statut. Il s’agit de permettre l’exercice du service public par les fonctionnaires, les premiers et premières à savoir comment fonctionnent les services, car ils sont au contact du public et peuvent évaluer la réalité du service rendu.

Notre amendement est donc tout à fait pertinent. Votre réponse est contradictoire avec la démarche que semble vouloir engager le Président de la République – il a relayé ce discours auprès de ses ministres : il veut être beaucoup plus à l’écoute, y compris des fonctionnaires. Notre amendement vous permettrait d’anticiper sa demande, afin que les conseils jouent une part plus importante dans le débat parlementaire, qui deviendrait ainsi plus représentatif. Nous maintenons l’amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL181 de Mme Danièle Obono.

M. Ugo Bernalicis. Nous proposons que les quatre conseils incluent des usagers du service public, et non uniquement des représentants des employeurs et des syndicats. Cela permettrait de faire évoluer le service public dans son ensemble : en effet, bien souvent, les administrations semblent hermétiques aux remarques des usagers sur les services qui leur sont rendus. Certes, on met en place ici ou là de petits questionnaires de satisfaction. Mais cette troisième voix, celle des associations d’usagers du service public – déjà présentes dans d’autres instances –, serait utile pour enrichir la discussion.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Les compétences exercées par les conseils nécessitent une expertise et une connaissance fine des enjeux auxquels la fonction publique est confrontée. C’est le cas des représentants syndicaux et des représentants des employeurs publics, qui personnalisent les deux facettes du dialogue social dans le cadre de ces conseils. Mon avis sera donc défavorable.

M. Ugo Bernalicis. Les usagers seraient donc des tocards qui ne comprennent rien et qui n’ont pas le droit d’exprimer un avis, voire d’acquérir des compétences sur le fonctionnement des administrations ? Mais que faites-vous des associations qui défendent les précaires, de celles qui défendent les usagers du service public ? Ainsi, les comités d’usagers de lignes de TER sont régulièrement interrogés : que pensent-ils des trains qu’ils prennent ? Comment cela se passe-t-il ? Qu’en est-il des horaires ?

Les usagers ne sont pas plus bêtes que d’autres. Ils savent s’organiser. Si on leur donne les moyens de s’exprimer, ils s’en saisiront avec pertinence. En outre, cela permettrait de disposer d’un regard moins technique, moins centré sur le fonctionnement et les rouages administratifs et d’élargir un peu les œillères avec lesquelles les discussions internes à l’administration sont parfois conduites.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie ensuite de l’amendement CL182 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Nous proposons que les quatre conseils – le Conseil commun de la fonction publique et les trois conseils supérieurs des fonctions publiques d’État, territoriale et hospitalière – soient composés à parité de femmes et d’hommes. En effet, les compositions actuelles semblent toujours marquées par un déséquilibre, tant parmi les membres permanents que suppléants. Cette mesure concrète ferait progresser la parité.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cet amendement propose un dispositif de parité obligatoire au sein de chaque conseil supérieur : si je souscris à l’objectif final qui consiste à garantir une représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des conseils – même si le quota 50/50 peut apparaître un peu rigide –, les modalités opérationnelles sont de niveau réglementaire. Ainsi, le décret du 29 septembre 2016 prévoit le respect d’une proportion minimale de 40 % de personnes de chaque sexe parmi les représentants du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, cette disposition étant applicable au 1er janvier 2019.

Je vous demanderai donc de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, mon avis sera défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine, en discussion commune, les amendements CL194 de M. Jean-Louis Masson et CL153 de M. Benjamin Dirx.

M. Jean-Louis Masson. L’amendement CL194 vise à instaurer une meilleure représentativité des collectivités territoriales au sein du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale, en prévoyant que les représentants des collectivités territoriales sont majoritaires par rapport aux représentants des organisations syndicales de fonctionnaires territoriaux. Nous souhaitons également la présence des présidents d’établissements publics de coopération intercommunale lors de l’élection des représentants des collectivités territoriales, tel que le projet de loi le prévoyait initialement.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis défavorable à l’amendement CL194 qui mettrait fin sans véritable justification au caractère paritaire de la représentation au sein du CSFPT. Sa composition est équilibrée : vingt représentants des employeurs publics locaux et vingt représentants des organisations syndicales. Cet équilibre est sain.

Concernant l’amendement CL153, vous avez raison, mais la coordination rédactionnelle suggérée par notre collègue Masson après l’article 2 est plus complète.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. L’avis du Gouvernement est défavorable sur l’amendement CL194 car il remet en cause le principe paritaire des conseils supérieurs.

Je demanderai aux auteurs de l’amendement CL153 de bien vouloir le retirer, car la loi du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral a déjà procédé au remplacement des termes « conseils généraux » par « conseils départementaux ». La délégation interministérielle en charge de la légistique y travaille. Plusieurs amendements similaires ont été déposés, sur lesquels mon avis sera identique.

L’amendement CL153 est retiré.

La Commission rejette l’amendement CL194.

Elle examine ensuite l’amendement CL442 de Mme Marietta Karamanli.

M. Hervé Saulignac. Notre amendement précise la composition du collège des présidents d’EPCI qui participe à l’élection des représentants des collectivités au sein du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale. Il prévoit que ce collège soit uniquement composé de présidents d’EPCI à fiscalité propre, en excluant les présidents d’EPCI sans fiscalité propre – comme les syndicats de communes, par exemple.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis favorable à cet amendement de précision.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Le Gouvernement y est également favorable. La modification de la composition du collège des employeurs a été pensée en lien avec les associations d’élus, le collège des employeurs et son président, Philippe Laurent. Il s’agit d’intégrer les EPCI dans les représentants des employeurs, pour tenir compte de leur montée en puissance et du nombre désormais important d’équivalents temps plein qui leur sont rattachés. Mais nous souhaitions ne prendre en compte que les EPCI à fiscalité propre – les principaux en termes de compétences et d’enjeux managériaux.

La Commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL430 de M. Pierre Cordier.

M. Jean-Louis Masson. Afin de garantir un dialogue social de qualité, il est indispensable de maintenir les règles de paritarisme et le parallélisme des votes entre les collèges. Ainsi, au sein du CSFPT, en cas de vote défavorable unanime, les représentants syndicaux ont la possibilité de renvoyer un projet de texte. Il serait légitime d’ouvrir le même droit au collège des employeurs territoriaux.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Ces dispositions de nature opérationnelle relèvent du domaine réglementaire, puisqu’elles sont déterminées à l’article 14 du décret du 10 mai 1984. Mon avis sera donc défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 2 modifié.

Après l’article 2

La Commission examine l’amendement CL195 de M. Jean-Louis Masson.

M. Jean-Louis Masson. Il s’agit de remplacer les mots « conseil général » par « conseil départemental » dans la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis favorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Comme je l’ai déjà indiqué, la loi de 2013 précitée a déjà prévu une disposition balai. Votre demande est donc satisfaite. Je vous demanderai de bien vouloir retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL286 de Mme Danièle Obono.

M. Ugo Bernalicis. Cet amendement est issu d’une sollicitation de la Confédération générale du travail (CGT). Certes, elle n’a pas joué le jeu en Conseil commun et n’a pas déposé d’amendements, mais nous les a transmis et nous en avons repris certains. Nous proposons de rétablir le droit de vote des représentants syndicaux au conseil d’administration du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) sur tous les points ayant trait à la formation. Il est étrange de consacrer le droit à la participation, mais pas sur tous les sujets – notamment la formation. Nous proposons de corriger cette erreur. Monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure, au vu de vos envolées lyriques sur le droit à la participation à l’article 1er du projet de loi, je ne doute pas que vous donnerez un avis favorable à cet amendement de bon sens de la CGT !

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Les délibérations du conseil d’administration du CSFPT sur les taux de cotisation et de prélèvement supplémentaire supportés par les collectivités afin de financer le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) concernent en premier chef les représentants des employeurs publics : il est donc légitime que le droit de vote sur ces questions budgétaires leur soit réservé. Mon avis sera défavorable.

M. Ugo Bernalicis. « Touche pas au grisbi ! » Dès que l’on parle de gros sous, les représentants du personnel peuvent repasser ! Je ne suis pas d’accord : le droit à la participation, c’est aussi la participation aux questions budgétaires. Je ne vois pas en quoi cela poserait un problème…

La Commission rejette l’amendement.

Article 3 (art. 12, 13, 15, 15 bis [nouveau], 16 [abrogé], 17, 19, 21, 34 et 43 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, art. 7-1, 8, 12, 23, 32, 32-1 [nouveau], 33, 33-1, 33-2 [nouveau], 35 bis, 49, 57, 62, 88, 97, 100-1 et 120 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, art. 11, 25, 27 bis, 41, 49-2 et 104 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986, art. L. 3641-4, L. 3651-3, L. 5111-1, L. 5111-7, L. 5211-4-1, L. 5211-4-2 et L. 5219-12 du code général des collectivités territoriales, art. L. 6133-7, L. 6135-1, L. 6143-2-1, L. 6143-5, L. 6144-3, L. 6144-3-1, L. 6144-3-2, L. 6144-4, L. 6144-5, L. 6144-6-1 et L. 6414-2 du code de la santé publique et art. L. 14-10-2 et L. 315-13 du code de l’action sociale et des familles) : Fusion du comité technique et du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) en une instance unique de concertation

La Commission examine les amendements identiques CL119 de M. Stéphane Peu, CL183 de M. Ugo Bernalicis, CL450 de M. Boris Vallaud, CL557 de M. Pascal Brindeau et CL838 de M. Paul Molac.

Mme Elsa Faucillon. Dans la droite ligne des ordonnances réformant le code du travail, vous souhaitez fusionner les comités techniques et les CHSCT en un comité social. Lors de la séance publique, nous argumenterons plus longuement. Je me contenterai ici de souligner que les élus vont devoir être compétents sur des sujets beaucoup plus larges et divers qu’auparavant, ce qui entraînera une moins bonne défense des personnels. C’est pourquoi l’amendement CL119 vise à supprimer l’article 3.

Mme Danièle Obono. L’amendement CL183 vise à s’opposer à la création de comités sociaux dans les trois versants de la fonction publique, en remplacement des actuels comités techniques (CT) et comités d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT).

L’article 3 prévoit la diminution du nombre des formations spécialisées : les CHSCT ne seront créés qu’au-delà de trois cents agents pour la fonction publique territoriale et qu’au-delà d’un chiffre défini par décret pour la fonction publique hospitalière et la fonction publique de l’État – contre cinquante agents actuellement.

C’est également une dégradation et une limitation des compétences des comités par rapport à l’existant. Ainsi, les nouvelles formations spécialisées – ex-CHSCT – ne seront plus compétentes sur les projets de réorganisation de service.

Toutes ces mesures amplifient la dégradation des conditions de travail et de la représentation des salariés, dans la droite ligne de la casse initiée par les ordonnances de 2017. C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’article 3.

M. Boris Vallaud. L’amendement CL450 vise à supprimer l’article 3, qui reconfigure les instances de dialogue social dans la fonction publique, en fusionnant les comités techniques et les CHSCT pour former les comités sociaux – d’administration, territoriaux ou d’établissement selon les versants. Cela représentera un recul pour la prévention en matière de santé et de conditions de travail. Il en est de même avec la réduction importante des attributions des commissions administratives paritaires, qui ne se pencheront plus que sur certaines décisions individuelles.

Je le redis, les similitudes entre les ordonnances réformant le code du travail de Mme Pénicaud et le projet présenté par Olivier Dussopt sont claires… Or les premières auditions des organisations de salariés dressent un tableau peu flatteur de la mise en œuvre des ordonnances s’agissant du renforcement du dialogue social et de la meilleure prise en compte des questions de sécurité et d’hygiène au travail. Il n’y a là aucun progrès ! Le pragmatisme et l’efficacité ne peuvent prévaloir sur le dialogue social, qui peut certes être long, mais est aussi de qualité.

La mise en œuvre des ordonnances est un fiasco au regard des objectifs initialement affichés. Vous affichez à nouveau les mêmes ; je crains que nous n’aboutissions au même résultat…

M. Pascal Brindeau. L’amendement CL557 vise essentiellement à maintenir les CHSCT, plus particulièrement au sein de la fonction publique territoriale, pour plusieurs raisons. Ces comités sont de création récente et leurs bienfaits n’ont pas encore été évalués. En outre, au sein de ces instances, les représentants du personnel et des collectivités territoriales bénéficient de formations spécifiques obligatoires sur les sujets d’hygiène, de sécurité et de conditions de travail. Dans de nombreuses collectivités territoriales, cela permet à l’employeur public d’être proactif dans l’amélioration des conditions de travail individuelles – ergonomie des postes par exemple – ou collectives – meilleur environnement de travail des agents par exemple.

Enfin, le CHSCT est seul habilité à traiter de sujets nominatifs – ni le comité technique ni, demain, le comité issu de la fusion, ne peuvent citer nominativement des agents.

Nous souhaitons donc le maintien de cette instance particulière.

M. Paul Molac. L’amendement CL838 tend également à supprimer cet article, comme le demandent la totalité des syndicats de la fonction publique, car la santé, la sécurité et le bien-être des agents sont en cause. N’oublions pas que 5 % d’entre eux sont en burn out sévère et que, par ailleurs, l’insertion professionnelle des personnes en situation de handicap est présentée comme grande cause du quinquennat.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je vais prendre le temps de répondre en détail car l’article 3 est important.

La réorganisation des instances de concertation par la fusion des comités techniques et des CHSCT en une instance unique – le comité social – présente trois avantages majeurs en termes de simplification, d’efficacité et de représentation.

C’est une mesure de simplification, d’abord, car la création des comités sociaux permettra de rassembler au sein d’une même instance l’essentiel des sujets qui concernent la vie des agents publics dans leur administration. Actuellement, la répartition des compétences entre les comités techniques et les CHSCT peut être complexe, car ces instances détiennent plusieurs attributions communes, tels les sujets relatifs à l’organisation et au fonctionnement des services ou aux évolutions des technologies et des méthodes de travail. Il en résulte un certain enchevêtrement de compétences qui n’améliore en rien la qualité du dialogue social, mais au contraire complexifie ce dernier. Il nourrit d’ailleurs de nombreux contentieux de nature purement procédurale, ce qui soulève ainsi une question d’efficacité – c’est mon deuxième point.

L’enjeu d’efficacité consiste à ne plus devoir solliciter de façon redondante les consultations respectives des comités techniques et des CHSCT : l’unicité du dialogue social se trouve ainsi consacrée à travers le comité social. La jurisprudence administrative avait notamment considéré, dans un arrêt rendu par le Conseil d’État le 2 juillet 2014, que la consultation du CHSCT était simplement facultative lorsqu’une question relève du champ de compétence des deux instances, ce qui induisait une forme de hiérarchie au profit du comité technique. Par ailleurs, le comité social connaîtra des questions relatives à l’ensemble des domaines d’attribution des actuels comités techniques et CHSCT : il n’y aura aucune restriction du périmètre de la consultation. La spécificité des questions d’hygiène et de sécurité est également préservée, grâce à la création de formations spécialisées en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail.

Enfin, il s’agit aussi d’un progrès en matière de représentation, puisque tous les membres des comités sociaux seront élus, alors que les agents ne désignent pas les membres des actuels CHSCT, puisqu’ils sont nommés par les organisations syndicales.

Pour l’ensemble de ces raisons, je suis défavorable aux amendements de suppression.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Le Gouvernement est lui aussi défavorable à ces amendements et je partage tous les arguments de Mme la rapporteure. J’ajouterai seulement trois points.

D’abord, en matière de formation aux enjeux de sécurité et de conditions de travail, nous avons prévu dans le texte – et ce sera évidemment précisé dans le décret – qu’en l’absence de formation spécialisée, tous les membres de l’instance unique bénéficieront d’une formation aux enjeux d’hygiène et de sécurité, comme c’était le cas jusqu’à présent pour les seuls membres des CHSCT. Lorsqu’il existe une formation spécialisée, l’ensemble de ses membres bénéficieront de cette formation, comme aujourd’hui dans les CHSCT. J’ajoute que le congé de formation syndicale relatif à ces questions, qui n’existait pas dans toute la fonction publique, est élargi à l’ensemble des trois versants. Cela permet de garantir une formation et d’éviter une perte d’acuité sur ces sujets.

Ensuite, la création de la formation spécialisée en matière d’hygiène et de sécurité sera obligatoire dans tous les établissements publics dépassant le seuil de 300 équivalents temps pleins travaillés, mais il faut préciser que les employeurs – je pense notamment aux collectivités territoriales – qui souhaiteraient, même s’ils sont au-dessous du seuil, sur la base du volontariat, créer une formation spécialisée, pourront évidemment le faire : c’est l’obligation qui intervient au-delà du seuil de 300.

Enfin, en réponse à M. Molac, concernant le handicap, je précise que l’article 34 du projet de loi nous permettra d’y revenir : en complément de dispositions notamment relatives au financement du Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP), que nous avions intégrées dans la loi du 5 septembre 2018, défendue par Muriel Pénicaud, cet article comporte des mesures destinées à favoriser le maintien dans l’emploi, le remplacement et la prévention des situations d’inaptitude.

M. Ugo Bernalicis. Monsieur le ministre, vous dites que les membres des comités sociaux qui n’auront pas de formation spécialisée se verront tout de même dispenser une formation aux questions d’hygiène et de sécurité. Je comprends que vous vouliez assurer cette formation car on passerait quand même de 2 054 CHSCT à 1 214 formations spécialisées. Autrement dit, il y aura un gros trou dans la raquette et, dans de nombreux endroits, on ne discutera plus d’hygiène et de sécurité.

Comme vous le savez, les réunions des comités techniques et des CHSCT durent souvent une journée entière et débordent même parfois sur la soirée. Vous aurez beau fusionner les instances, ce sera toujours pareil. Votre comité social se réunira-t-il pendant deux ou trois jours pour balayer l’intégralité des sujets qui étaient auparavant examinés dans différentes instances ? On sait très bien que non : les réunions vont être ramassées, il va falloir aller vite et aborder les différents sujets de manière stratégique. Qui plus est, les élus auront plusieurs casquettes.

Par ailleurs, oui, c’est une bonne chose que, dans les CHSCT, les syndicats désignent leurs représentants : en fonction des sujets qui sont traités, ils peuvent mandater tel ou tel de leurs syndiqués, plus au fait des questions. Surtout, cela leur donne une certaine souplesse, avec le jeu des mutations, qui entraînent des arrivées et des départs, au contraire de ce qui se passe dans les comités techniques, dont l’organisation est plus rigide.

Du reste, le système actuel est extrêmement récent : on a assez peu de reculs sur la mise en place des CHSCT, notamment dans la fonction publique de l’État. De plus, tout le monde en est content : tout le monde est satisfait des sujets qui sont abordés dans les CHSCT et de la manière dont les discussions s’y déroulent. Contrairement à la caricature qu’il m’a été donné d’entendre, dans les CHSCT, on ne discute pas seulement de la manière dont on va déplacer une armoire.

Bref, vous êtes en train de casser quelque chose qui fonctionne, une nouvelle fois par dogmatisme et par souci de parallélisme avec la casse en règle du code du travail à laquelle vous vous êtes livrés pour les travailleurs du privé.

M. Robin Reda. La question sous-jacente qui se pose est celle de la formation et de la montée en puissance de l’encadrement intermédiaire, notamment dans la fonction publique territoriale. En effet, les réunions des CT et des CHSCT sont polluées par des sujets très terre à terre et qui, en réalité, empêchent d’avoir une vision globale, stratégique et d’intérêt collectif de l’organisation des services de la fonction publique. Sur le fond, je ne suis pas du tout opposé à la fusion des CT et des CHSCT, mais je considère qu’il faut être très vigilant à ce que le caractère nécessairement plus général du nouveau comité social soit pris en compte dans la formation des agents qui encadrent, sur le terrain, toutes celles et tous ceux qui sont amenés à connaître de sujets personnels ou collectifs liés à l’organisation des services.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Je partage l’attention que porte M. Reda à la formation de l’encadrement : l’amélioration de la qualité de vie au travail est, en définitive, la meilleure façon d’éviter d’avoir à traiter de ces sujets dans les comités sociaux.

Je voudrais apporter deux précisions sur l’organisation des formations spécialisées. D’abord, nous avons accédé à une demande des organisations syndicales concernant leur composition : les membres titulaires des formations spécialisées seront désignés par les organisations syndicales parmi les titulaires ou les suppléants – les uns et les autres étant élus – de l’instance unique, mais les suppléants pourront, eux, être mandatés. Ainsi, les syndicats pourront désigner aux postes de suppléants des experts qu’ils comptent en leur sein.

M. Ugo Bernalicis. Vous êtes grands seigneurs !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Ensuite, nous avons prévu d’établir une cartographie précise, de manière à ce que, pour les établissements publics ayant plusieurs sites présentant des niveaux d’exposition à des risques professionnels différents, il puisse y avoir des formations spécialisées différentes. Cela donnera plus de souplesse et d’efficacité au dispositif en matière de prévention des risques professionnels.

La Commission rejette les amendements.

Elle examine ensuite l’amendement CL184 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Par cet amendement, nous proposons de renforcer la parité aux élections professionnelles dans la fonction publique, pour éviter qu’un genre se voie de fait sous-représenté après s’être vu attribuer des places non éligibles. Il s’agirait d’introduire un principe d’alternance dans la liste des candidatures. En effet, en l’état actuel du droit, les listes de candidats aux élections professionnelles sont composées d’un nombre de femmes et d’hommes correspondant à la part de femmes et d’hommes représentés au sein de l’instance concernée. Cela a certes permis, dans une certaine mesure, de renforcer la parité lors des dernières élections professionnelles, qui ont eu lieu en novembre et décembre 2018, mais nous pensons qu’il faut poursuivre dans cette logique en posant un principe d’alternance : une candidate femme, un candidat homme – et ainsi de suite.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Comme vous le disiez, la loi du 20 avril 2016 dispose que les listes de candidats aux élections professionnelles doivent être composées d’un nombre de femmes et d’hommes correspondant à la part de femmes et d’hommes représentés au sein de l’instance concernée. La première application a eu lieu lors des élections professionnelles de novembre et décembre 2018. En pratique, il me paraît compliqué d’imposer un principe d’alternance entre femmes et hommes dans chaque liste, car le nombre de candidates et de candidats dépend justement de la proportion de femmes et d’hommes dans chaque service, laquelle n’est pas nécessairement la même. En outre, je sais que les organisations syndicales travaillent déjà à une représentation équilibrée entre les femmes et les hommes au sein des listes qu’elles proposent. Pour ces raisons, je vous demande de retirer votre amendement ; à défaut, avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est alors saisie de l’amendement CL347 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Afin de garantir l’application des prescriptions légales relatives à l’égalité professionnelle, il est important de confier au comité social d’administration des attributions en la matière.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je souscris à l’objectif ; c’est d’ailleurs pourquoi j’ai déposé un amendement en ce sens. La rédaction de votre amendement est un peu restrictive car elle ne concernerait que la fonction publique de l’État. Je vous demande donc de retirer votre amendement au profit de mon amendement CL874.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL711 de la rapporteure.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements identiques CL874 de la rapporteure et CL687 de M. Guillaume Gouffier-Cha, ainsi que l’amendement CL100 de Mme Laurence Gayte.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’amendement CL874 vise à inclure les enjeux relatifs à l’égalité professionnelle et à la lutte contre les discriminations dans le champ d’intervention des comités sociaux au sein des trois versants de la fonction publique. Ces questions spécifiques doivent apparaître explicitement comme étant l’un des domaines d’attribution de ces instances consultatives, afin de consacrer la prise en compte de ces enjeux dans le dialogue social.

M. Guillaume Gouffier-Cha. L’amendement CL687 a lui aussi pour objet d’inclure les enjeux relatifs à l’égalité professionnelle – notamment entre les femmes et les hommes – et à la lutte contre les discriminations dans le champ d’intervention des comités sociaux au sein des trois versants de la fonction publique. Ces questions spécifiques doivent apparaître explicitement comme étant l’un des domaines d’attribution de ces instances consultatives, afin de consacrer la prise en compte de ces enjeux dans le dialogue social.

Mme Laurence Gayte. L’objectif de l’amendement CL100 est exactement le même. Je me réjouis de constater que la recommandation de la délégation aux droits des femmes a été largement reprise et que la question de l’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes est désormais clairement identifiée comme un enjeu à part entière, y compris dans les discussions entre les partenaires sociaux. Il me paraît indispensable que ce point puisse faire l’objet d’un échange dédié au moins une fois par an dans les nouveaux comités sociaux d’administration. Mon amendement rejoint les amendements identiques, mais ces derniers s’insèrent peut-être mieux dans le texte. J’attends donc vos observations.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Le Gouvernement approuve l’objectif poursuivi à travers ces trois amendements, tout en proposant de se rallier à l’amendement de Mme la rapporteure et à l’amendement identique.

Je tiens à préciser, pour que personne n’en soit surpris le moment venu, que je déposerai en séance un amendement purement rédactionnel. Les auteurs des trois amendements parlent des « enjeux » et des politiques d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Nous proposerons en séance de remplacer ce terme par le mot « actions », de manière à assurer la cohérence de la rédaction par rapport à d’autres dispositions législatives et à donner une définition plus précise.

La Commission adopte les amendements identiques CL874 et CL687.

En conséquence, l’amendement CL100 tombe.

La Commission est ensuite saisie de l’amendement CL559 de M. Pascal Brindeau.

M. Pascal Brindeau. C’est un amendement de repli par rapport à mon amendement de suppression. Il s’agit de réaffirmer la spécificité non seulement de l’instance en elle-même, mais du travail qui est fait au sein des CHSCT, dont l’esprit n’est pas du tout le même que celui des comités techniques, y compris lorsque les élus territoriaux ou les représentants du personnel sont les mêmes dans les deux formations.

J’ai bien entendu la réponse de M. le ministre concernant la formation des membres de la future formation spécialisée du comité social. Je répète qu’à l’heure actuelle, ce n’est que devant le CHSCT que peuvent être évoquées les situations individuelles nominatives, puisque les comptes rendus de ses réunions ne sont pas rendus publics, tandis que les comptes rendus des réunions de CT le sont obligatoirement. Comment ces questions vont-elles pouvoir être abordées, dès lors que la formation spécialisée restera de toute façon un élément du comité social de la collectivité ?

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cet amendement vise à supprimer l’ensemble des compétences du futur comité social en matière de protection de la santé physique et mentale, d’hygiène, de sécurité des agents, d’organisation et d’amélioration des conditions de travail, c’est-à-dire l’ensemble des attributions dévolues aux actuels CHSCT. Je ne peux qu’émettre un avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Même avis. Pour répondre à la question de M. Brindeau, les compétences des CT et des CHSCT sont intégralement reprises par l’instance unique, y compris la capacité à examiner des situations individuelles. Là où existera une formation spécialisée, c’est elle qui aura cette capacité ; en l’absence d’une telle formation, c’est l’instance plénière qui en aura la possibilité, comme c’est le cas actuellement quand il n’y a pas de CHSCT.

M. Pascal Brindeau. J’entends bien, mais le caractère public des débats au sein de cette instance va rendre impossible l’évocation d’une situation nominative.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. La possibilité sera donnée à la formation spécialisée d’évoquer un cas nominatif, comme le peut actuellement le CHSCT. Ses membres auront une obligation de secret et de discrétion professionnelle, comme c’est le cas aujourd’hui, et il sera impossible de faire apparaître au compte rendu les informations nominatives permettant d’identifier les personnes. Nous reprenons exactement le droit existant.

M. Olivier Marleix. L’exposé des motifs de l’article 3 traite de la fusion des CT et des CHSCT, mais il importe de réaliser un travail d’analyse – auquel, à titre personnel, je n’ai pas pu me livrer – pour voir si toutes les compétences et tous les pouvoirs du CHSCT, qu’ils aient été fixés par la loi ou par le règlement, sont repris. Certaines dispositions sont extrêmement précises – je pense notamment au pouvoir d’enquête du CHSCT en cas d’accident du travail. M. le ministre peut-il prendre l’engagement, devant notre commission, que toutes les dispositions qui concernent le CHSCT ont vocation à être reprises ? Autrement dit, il convient de s’assurer que le nouveau comité ne sera pas moins-disant en termes de prévention et de protection de la santé et de l’hygiène au travail.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. La réponse est oui – en cela, j’anticipe d’ailleurs sur l’amendement CL443 de Mme Karamanli. Les compétences des CT et des CHSCT sont fixées à la fois par la loi et par des décrets. Nous faisons en sorte de procéder à une cartographie des compétences qui soit une reprise totale, par la loi lorsqu’il s’agit d’éléments législatifs et par décret pour ce qui relève du domaine réglementaire. Je prends donc l’engagement devant la commission des lois de veiller à ce que la reprise soit intégrale. Je prendrai de nouveau le même engagement au banc du Gouvernement lorsque nous aurons à évoquer cet article en séance.

L’amendement est retiré.

La Commission examine ensuite, en discussion commune, les amendements CL443 de Mme Marietta Karamanli et CL348 de M. Paul Molac.

Mme Marietta Karamanli. J’ai écouté avec attention ce que M. le ministre vient de répondre au sujet du précédent amendement et j’ai bien entendu l’engagement qu’il a pris. L’amendement CL443 vise justement à préciser les compétences des comités sociaux d’administration, territoriaux et d’établissement, en y incluant les questions relatives à la prévention des risques professionnels, à la protection de la santé physique et mentale, et à l’amélioration des conditions de travail et de respect des prescriptions légales. Monsieur le ministre, vous devriez accepter d’émettre un avis favorable sur cet amendement dont l’objectif est de compléter les compétences de la future instance, car cela correspond à l’intention que vous avez manifestée.

M. Paul Molac. L’amendement CL348 vise à préciser les compétences de la nouvelle instance, en indiquant qu’elle aura à connaître des questions relatives à la prévention des risques professionnels. En effet, ceux-ci ne sont pas spécifiquement recouverts par la notion de « sécurité » au travail, puisqu’ils peuvent être d’ordre mécanique – contraintes posturales, gestes répétitifs –, physiques – on pense notamment au niveau sonore – ou encore psychologiques – harcèlement, agressions verbales, stress.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. S’agissant de l’amendement CL443, pour des raisons de rédaction, je pense que les sujets relatifs à l’accès des femmes aux emplois publics ne doivent pas nécessairement être inclus au sein du périmètre des questions d’hygiène et de sécurité. C’est d’ailleurs pour cette raison que j’ai déposé un amendement dont l’objet est de viser spécifiquement l’égalité professionnelle et la lutte contre les discriminations parmi les attributions du comité social. Je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, avis défavorable.

En ce qui concerne l’amendement CL348, la notion de « risques professionnels » est incluse dans celles de « santé physique et mentale » et de « sécurité des agents dans leur travail », qui figurent explicitement à l’alinéa 10 de l’article 3. Là encore, je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Le Gouvernement demande lui aussi le retrait de ces amendements, pour les raisons évoquées.

Je précise de nouveau, comme je l’ai fait en réponse à M. Marleix, que l’intégralité des compétences sera reprise soit dans la loi, par les dispositions que nous proposons, soit par le décret – je réitère, à cet égard, l’engagement que j’ai pris de veiller à ce que celui-ci reprenne exactement les compétences prévues actuellement.

Mme Marietta Karamanli. Nous maintenons tout de même notre amendement et suivrons le débat en séance.

M. Paul Molac. Quant à moi, je retire le mien.

L’amendement CL348 est retiré.

La Commission rejette l’amendement CL443.

Elle examine ensuite l’amendement CL875 de la rapporteure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cet amendement vise à renforcer le déploiement du télétravail dans les trois versants de la fonction publique, ainsi qu’à définir, dans chaque administration, collectivité territoriale et établissement des dispositifs de régulation des outils numériques, tout en adaptant leurs modalités de mise en œuvre aux spécificités de l’environnement professionnel dans lequel les agents exercent. Il appartiendra ainsi aux comités sociaux de définir les règles applicables en la matière, à chaque niveau pertinent.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Le Gouvernement considère que l’amendement est satisfait, puisque les règles relatives au télétravail, de même que les enjeux relatifs à la régulation des outils numériques en dehors du temps de travail sont abordés, dans le cadre des comités sociaux, sous l’angle de l’organisation du travail et des conditions de travail. Je demande donc, à ce stade, le retrait de cet amendement. Nous verrons si nous pouvons améliorer les choses d’ici à la séance.

M. Guillaume Gouffier-Cha. Le groupe La République en Marche se félicite de cet amendement de la rapporteure, tant nous sommes attentifs aux sujets liés au numérique. Ces derniers doivent être pris en compte par la nouvelle instance. Nous allons donc l’adopter et nous proposerons même, en séance, d’aller plus loin, notamment en ce qui concerne le droit à la déconnexion, en prenant en compte le souci de concilier la nécessité de continuité du service public et les nouveaux enjeux que soulève le numérique.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Au vu de la position de mon groupe, je maintiens mon amendement.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL349 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Si le statut des fonctionnaires garantit l’égalité de traitement entre les agents à toutes les étapes de la carrière, les écarts de rémunération dans la fonction publique n’en sont pas moins bien réels. D’après les dernières données fournies par la direction générale de l’administration et de la fonction publique, l’écart moyen de salaire net est de 18 % environ en 2015, avec néanmoins de fortes disparités entre les trois fonctions publiques. Ces inégalités proviennent essentiellement de deux facteurs : la difficulté d’accéder aux emplois aux rémunérations les plus élevées et la différence de volume horaire, notamment à la suite de la naissance d’un enfant.

Il convient donc d’agir sur ces deux facteurs aggravants afin de parvenir à l’égalité salariale entre les femmes et les hommes dans la fonction publique – raison pour laquelle cet amendement vise à préciser que la nouvelle instance devra veiller au respect des prescriptions légales concernant l’accès des femmes à tous les emplois et à la prise en compte des situations liées à la maternité.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Même réponse que précédemment : pour des raisons de rédaction, je pense que les questions relatives à l’accès des femmes aux emplois publics ne doivent pas nécessairement être incluses dans le périmètre des questions d’hygiène et de sécurité. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Le Gouvernement demande le retrait de cet amendement et, à défaut, émettra un avis défavorable, dans la mesure où la commission vient d’adopter l’amendement CL874 de la rapporteure, qui a inscrit l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes au nombre des compétences des comités sociaux pour les trois versants de la fonction publique. La demande de M. Molac me paraît donc satisfaite. Peut-être même est-il plus satisfaisant que le sujet soit traité dans l’instance elle-même plutôt que dans la formation spécialisée.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL445 de Mme Marietta Karamanli.

Mme Marietta Karamanli. Cet amendement vise à consacrer explicitement un droit à la déconnexion au bénéfice des agents publics des trois versants. Un tel droit a déjà été introduit pour le secteur privé en janvier 2017 : il serait donc normal qu’on ouvre la même possibilité aux agents publics.

À défaut d’accord négocié, l’autorité administrative devra élaborer une charte définissant les modalités de l’exercice du droit à la déconnexion et prévoira la mise en œuvre, à destination des agents et du personnel d’encadrement et de direction, des actions de formation et de sensibilisation à un usage raisonnable des outils numériques. C’est une préoccupation importante aujourd’hui à tous les niveaux.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je comprends le sens de votre proposition. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle j’ai déposé un amendement sur ce sujet, adopté précédemment.

Cela étant, je pense qu’il est nécessaire d’être très prudent quant à la notion de droit à la déconnexion dans la fonction publique, eu égard aux spécificités évidentes de nombreux emplois, notamment ceux ayant trait aux activités régaliennes de l’État, comme la sécurité. Dans ces conditions, je vous propose de retirer votre amendement. À défaut, avis défavorable. Nous travaillerons à la question d’ici à la séance.

Mme Marietta Karamanli. Dire que l’on va réfléchir d’ici à la séance, demander le retrait de l’amendement et laisser entendre qu’on déposera soi-même un amendement en tant que rapporteure, ce n’est pas une réponse, je vous le dis franchement. Vous pourriez très bien émettre un avis favorable en attendant de voir ce que vous proposerez au moment de la séance.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. La rapporteure est libre de ses avis.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Merci, madame la présidente !

Mme Cécile Untermaier. Vous dites que c’est une affaire complexe, que le statut de la fonction publique suppose l’exercice de certaines missions sensibles, ce qui appelle une approche du numérique différente de celle que l’on a dans le secteur privé, mais tout cela, vous en conviendrez, ne doit pas nous empêcher de réfléchir à la question. Je récuse les termes de la réponse : nous devons être extrêmement allants dans ces domaines. La question du numérique est devant nous – et même derrière nous pour certains –, et il serait un peu gênant que nous n’ayons pas, dans ce texte, une réflexion partagée. Le fait que le sujet soit complexe plaide précisément en faveur d’une réflexion. Je partage donc l’avis de ma collègue : nous plaidons pour l’adoption de cet amendement, de sorte que le sujet soit vraiment sur la table et que nous y réfléchissions ensemble.

M. Ugo Bernalicis. Nos collègues socialistes ont fondamentalement raison, d’autant que, dans les souffrances au travail qui existent aujourd’hui, beaucoup concernent les cadres, qui sont connectés à leur téléphone et à leur ordinateur professionnels en permanence, disponibles quasiment vingt-quatre heures sur vingt-quatre, sans bénéficier du régime d’astreinte, par exemple, ni recevoir la moindre compensation. Cela prend une ampleur phénoménale, comme s’il était normal que quelqu’un réponde à vingt-deux heures à un message que son chef lui a envoyé à vingt et une heures, avant la réunion prévue dans le service le lendemain matin à neuf heures. Des discussions sur ces sujets doivent avoir lieu dans l’instance dont il est ici question. Nos collègues ont donc raison de les aborder de la sorte.

Mme Cécile Untermaier. Vous nous donnez le sentiment que nos interventions vous ennuient ? Si c’est le cas, dites-le nous !

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Ce n’est absolument pas comme cela que les choses se passent dans cette commission, madame Untermaier, et vous le savez très bien.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine alors l’amendement CL444 de M. Boris Vallaud.

M. Boris Vallaud. Cet amendement vise à permettre aux comités sociaux d’administration, territoriaux et d’établissement d’être informés sur les incidences des principales décisions à caractère budgétaire sur la gestion des emplois. En effet, ces décisions sont directement liées à d’autres questions sur lesquelles les comités sociaux sont consultés, comme les orientations en matière de politique de ressources humaines ou les questions d’organisation et de conditions de travail. Cette information supplémentaire me semble donc nécessaire à l’exercice des fonctions que vous leur confiez par ailleurs.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je pense que votre préoccupation est satisfaite par les alinéas 6 à 8 de l’article 3, qui englobent l’ensemble des questions relatives à la gestion des emplois, incluant par nature celles qui se poseraient consécutivement à la prise de décisions d’ordre budgétaire. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

M. Boris Vallaud. Je trouve assez audacieux de faire une interprétation pour ainsi dire jurisprudentielle de ces dispositions qui sont tout sauf claires. Nous proposons justement de les clarifier. Si vous avez le sentiment que ce que nous proposons va dans le sens de ce qui est déjà supputé dans votre lecture d’un certain nombre d’alinéas, vous ne verrez pas d’inconvénient à l’adoption de cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL350 de M. Philippe Vigier.

M. Yannick Favennec Becot. Cet amendement vise à permettre aux comités sociaux d’administration d’avoir connaissance de la gestion des emplois au sein de chaque administration à travers l’usage qui est fait du cadre d’emplois régi par un décret en Conseil d’État, relativement aux modalités de recrutement, de nomination et de titularisation, des règles d’avancement et de promotion interne.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Sur le fond, je pense que vos préoccupations sont satisfaites par les attributions des comités sociaux d’administration, qui auront ainsi à connaître des questions relatives au fonctionnement et à l’organisation des services, ainsi que des orientations stratégiques en matière de gestion des ressources humaines.

Sur la forme, je pense que l’utilisation de la formule « cadre d’emplois » n’est pas appropriée dans le cas de la fonction publique de l’État, au sein de laquelle le cadre de gestion de la carrière des fonctionnaires se structure plutôt par corps. Je vous propose donc de retirer votre amendement ; à défaut, avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL712 de la rapporteure.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CL351 de M. Paul Molac et CL446 de M. Boris Vallaud.

M. Paul Molac. Tous les agents, quel que soit leur statut et quels que soient les effectifs de l’administration ou de l’établissement public concerné, devraient pouvoir bénéficier d’une formation spécialisée en matière de santé, de sécurité, de conditions de travail et d’égalité professionnelle. C’est une sécurité pour l’agent, mais aussi pour ceux qui travaillent à ses côtés.

Nous avons adopté récemment une proposition de loi visant à lutter notamment contre l’arrêt cardiaque. Le problème, quand un événement de cet ordre se produit, est de trouver la bonne personne au bon endroit, en l’occurrence la personne qui est capable d’utiliser un défibrillateur, quand il y en a un. Or, force est de constater que, dans la fonction publique, tous les personnels ne sont pas formés aux gestes qui sauvent. J’en sais quelque chose : durant toute ma carrière de fonctionnaire, qui a duré une vingtaine d’années, je n’ai jamais reçu quelque formation que ce soit en la matière.

M. Boris Vallaud. L’amendement CL446 vise à fixer dans la loi le nombre d’agents au-dessus duquel il est obligatoire d’instituer au sein des comités sociaux d’administration, territoriaux ou d’établissement, une formation spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail (FSSCT) – en l’occurrence, 50 agents.

Dans sa version actuelle, l’article 3 fusionne les CT et les CHSCT en une nouvelle instance de dialogue social, dénommée « comité social d’administration » dans la fonction publique de l’État, « comité social territorial » dans la fonction publique territoriale et « comité social d’établissement » dans la fonction publique hospitalière. Il prévoit l’institution, dans ces comités, d’une FSSCT de façon obligatoire au-dessus d’un certain seuil. Dans la fonction publique territoriale, le seuil est fixé à 300 agents ; dans la fonction publique de l’État et la fonction publique hospitalière, il serait fixé par décret en Conseil d’État. Le seuil de 300 agents est identique à celui qui est retenu dans le code du travail. Nous proposons d’abaisser le seuil.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Contrairement à ce qui se passe dans la fonction publique territoriale, où le seuil de l’effectif requis – qui s’élèvera à 300 agents – doit être fixé au niveau législatif, dans la fonction publique de l’État et dans la fonction publique hospitalière, la détermination du seuil au-delà duquel la mise en place d’une formation spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail est obligatoire relève du niveau réglementaire, ce qui explique le renvoi à un décret en Conseil d’État.

Cette disposition présente une symétrie avec le droit applicable dans le secteur privé, pour lequel l’article L. 2315-36 du code du travail précise qu’une commission de santé, sécurité et conditions de travail doit être instituée au sein du comité social et économique pour les entreprises de plus de 300 salariés.

Je précise que cette disposition n’interdit pas la création facultative de formations spécialisées pour les administrations présentant des effectifs inférieurs au seuil requis, dès lors que l’implantation géographique des services ou l’existence de risques professionnels particuliers le justifient.

Pour les administrations dans lesquelles il n’y aura pas de formation spécialisée, l’intégralité des compétences des actuels CHSCT sera bien entendue exercée par le comité social. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Je précise que le décret d’application pour la fonction publique de l’État et pour la fonction publique hospitalière fixera le seuil à 300 agents – comme dans la fonction publique territoriale. Le seuil sera donc le même pour les trois versants.

M. Boris Vallaud. Je répète que ce seuil ne nous paraît pas adapté : 300 agents, c’est considérable. À mon avis, peu de préfectures atteignent ce seuil, ce qui veut dire qu’il n’y aura pas de formation dans des entités qui sont autonomes. Au fond, fixer le seuil à 50 agents paraissait davantage de nature à faire prospérer la prévention en matière de sécurité, de santé et d’hygiène au travail.

M. Paul Molac. Je maintiens également mon amendement. Vous dites que la disposition relève du domaine réglementaire, mais ce n’est pas bien grave : dans la hiérarchie des normes, le pouvoir législatif, que nous représentons, peut très bien dire au pouvoir réglementaire qu’il veut ceci ou cela et pas autre chose. En ce qui concerne le seuil, le chiffre de 300 agents me paraît aussi très important.

La Commission rejette successivement les amendements.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette successivement les amendements CL352, 353 et 354 de M. Paul Molac.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL713 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement CL773 de M. Éric Alauzet.

M. Éric Alauzet. Cet amendement traite des indicateurs de la qualité de vie au travail, sujet éminemment important. Il y aurait, dit-on, une dégradation générale de la qualité de vie au travail. Or les appréciations sont incertaines et on a du mal à définir des indicateurs, comme je l’ai démontré dans mon rapport pour avis sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale. La question est d’autant plus cruciale que l’augmentation du nombre d’années de cotisations pour la retraite nous met dans une situation de vieillissement qui expose davantage aux risques. On constate d’ailleurs que, très souvent – pas toujours pour ces raisons-là, mais en partie –, des personnes partent à la retraite avant d’avoir atteint l’âge légal ou d’avoir le nombre d’années de cotisations requis. Mon amendement vise à faire en sorte qu’un travail approfondi puisse avoir lieu dans les comités sociaux des trois secteurs, pour évaluer chaque année les indicateurs existants et, selon les lieux, proposer des indicateurs spécifiques.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je comprends le sens de votre amendement, mais je pense que cette disposition est prématurée, dans la mesure où la mise en place des indicateurs de qualité de vie au travail (QVT) est en cours dans la fonction publique, comme en a témoigné, très récemment, le lancement de la plateforme numérique « Santé travail fonction publique », conçue par l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (ANACT). En conséquence, je vous propose de retirer votre amendement ; à défaut, avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Le Gouvernement demande lui aussi le retrait de cet amendement. Comme vient de l’expliquer Mme la rapporteure, les indicateurs QVT n’existent pas encore dans la fonction publique. Il paraît donc prématuré de les intégrer dans le texte. En plus des initiatives évoquées par Mme la rapporteure, j’ouvrirai au troisième trimestre une concertation sur la question. Ce sera l’occasion de formaliser les indicateurs, de manière à les utiliser ensuite comme une piste d’amélioration des conditions de vie de chacun de nos agents sur son lieu de travail.

M. Éric Alauzet. Puisque l’ouvrage est sur le métier, il est important d’en parler. J’ai donc bien fait de soulever la question, et je l’évoquerai de nouveau en séance. Il est bon d’agir très en amont : on a moins de surprises à la fin… Je retire mon amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL839 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Cet amendement vise à maintenir les compétences actuelles des CAP. En supprimer une grande part est une erreur car les syndicats, qui ont aussi à faire valoir la bonne marche du service, ont un regard sur l’administration et sont en mesure d’en expliquer les décisions. Lorsqu’un fonctionnaire reçoit la même réponse de la part de l’administration et des syndicats, la décision administrative s’en trouve légitimée : cela évite les recours devant le tribunal administratif. La suppression des compétences des CAP créera de nombreux problèmes.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cet amendement remet profondément en cause les dispositions du projet de loi. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL355 de M. Paul Molac. 

M. Paul Molac. Les circonstances permettant de déroger à l’élection des représentants du personnel siégeant aux comités sociaux d’administration doivent être précises et exhaustives. Il convient d’éviter l’ambiguïté issue de la rédaction du projet de loi et de ne retenir que les circonstances relatives à l’insuffisance des effectifs ou à la nature de l’instance.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Les cas où il pourra être dérogé à l’élection seront précisées par le décret pris en Conseil d’État, le motif de l’insuffisance des effectifs étant un exemple. Il conviendra en effet de tenir compte de la diversité et de la spécificité de certains comités techniques actuels, dont la composition ne procède pas directement d’une élection mais d’une extrapolation à partir de la composition d’un autre comité technique dont le ressort est plus large ou plus étroit. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte successivement l’amendement de cohérence CL714 et l’amendement de coordination CL843 de la rapporteure.

Elle examine, en discussion commune, les amendements identiques CL123 de M. Stéphane Peu, CL447 de Mme Marietta Karamanli, CL558 de M. Pascal Brindeau, CL774 de M. Éric Alauzet et CL811 de M. Paul Molac ainsi que les amendements CL448 de M. Boris Vallaud, CL53 de M. Éric Poulliat et CL520 de M. Pierre Cordier.

Mme Elsa Faucillon. Il sera difficile de compenser la perte du CHSCT, dont la suppression entraînera la disparition du budget dédié et l’amenuisement du rôle de ses représentants formés ; nous proposons a minima d’abaisser le seuil de création d’une formation spécialisée en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail (FSSCT) au sein du comité social territorial de 300 à 50 agents.

Mme Cécile Untermaier. Au regard de la diversité des situations dans les collectivités territoriales, le seuil retenu de 300 agents nous semble excessif ; nous proposons nous aussi de l’abaisser à 50 agents.

M. Pascal Brindeau. Le seul argument du Gouvernement est que le seuil de 300 salariés est celui qui a été retenu dans le secteur privé. Il convient pourtant d’affirmer la spécificité des CHSCT, surtout dans la fonction publique territoriale. Et si l’on peut entendre que les questions de sécurité, de conditions de travail et d’hygiène seront prises en compte par le comité social territorial lorsque la création d’une formation spécialisée ne sera pas obligatoire, on peut craindre de voir se créer un système à deux vitesses, où ces sujets ne seront pas abordés de la même façon, où les décisions seront différentes selon la taille des collectivités, et où, en définitive, on sera en retrait sur les questions de conditions de travail.

M. Paul Molac. Je l’ai dit précédemment, tous les agents devraient bénéficier d’une telle formation. Abaisser le seuil à 50 agents me semble un minimum, pour tenir compte des services peu étoffés de certaines administrations.

M. Boris Vallaud. L’amendement CL448 est un amendement de repli, qui vise à abaisser le seuil de 300 à 150 agents. Nous ne revenons pas sur nos arguments, nous nous en tenons à notre constance et à notre obstination !

M. Éric Poulliat. S’il est préférable de retenir des seuils identiques pour des dispositifs similaires applicables dans les secteurs privé et public, les auditions ont montré que le seuil de 300 agents, dans la fonction publique territoriale, est trop élevé. En effet, de nombreux postes comportent des risques particuliers en matière de santé, de sécurité ou de conditions de travail, qui requièrent la mise en place d’une formation spécialisée. Il suffirait de publier un décret abaissant le seuil à 200 agents dans les trois versants de la fonction publique pour harmoniser les dispositifs.

M. Jean-Louis Masson. Il convient de rappeler que 76 % des agents de la fonction publique territoriale appartiennent à la catégorie C – une part plus élevée encore dans les communes – et qu’ils sont nombreux à occuper des postes à risques ou à hauts facteurs de pénibilité. Cet amendement propose de fixer le seuil à 200 agents, celui-là même en vigueur pour la création des CHSCT dans les collectivités avant 2010.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je me suis déjà exprimée sur le niveau du seuil à l’occasion d’amendements portant sur la fonction publique de l’État. Par cohérence, j’émets un avis défavorable sur ces amendements.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. J’ajoute que la création de la formation spécialisée ne sera pas obligatoire, mais toujours possible pour ceux qui le souhaitent, en deçà de ce seuil. Par ailleurs, lors des concertations que nous avons menées avec les associations d’élus et les collectivités, certains ont proposé de relever le seuil à 350 agents, à l’image du seuil d’affiliation obligatoire aux centres de gestion. Nous avons néanmoins retenu le seuil de 300 agents, afin d’harmoniser et de couvrir davantage de collectivités.

M. Olivier Marleix. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez tenté de nous expliquer que rien ne changerait du fait de ces fusions, mais nous tenons là un exemple contraire. Alors que le CHSCT était obligatoire au-dessus de 50 agents, la formation spécialisée ne sera obligatoire qu’au-dessus de 300 agents. C’est un changement très important et le dispositif proposé est moins disant pour ce qui est des questions de sécurité et de conditions de travail. Cela est d’autant plus regrettable que la grande majorité des personnels appartiennent à la catégorie C et qu’ils sont plus exposés aux risques en raison des fonctions techniques qu’ils exercent ou les produits qu’ils manipulent. Il est dommage que ce texte marque un recul dans la protection des agents par rapport à la loi Sauvadet, qui avait abaissé le seuil de création du CHSCT de 200 à 50 agents.

La Commission rejette les amendements identiques CL13, CL447, CL558, CL774 et CL811, puis, successivement, les amendements CL448, CL53 et CL520..

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL715 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CL356 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Cet amendement propose de ne pas faire figurer dans l’article la notion non pertinente d’« impact sur les personnels », dans la mesure où celle-ci est consubstantielle à toute décision relative à l’organisation et au fonctionnement des services, à l’égalité professionnelle et aux évolutions des administrations.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable, étant précisé qu’une mention similaire sera prévue pour les comités sociaux des fonctions publiques de l'État et hospitalière par voie réglementaire.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’examen de l’amendement CL357 de M. Paul Molac. 

M. Paul Molac. Il s’agit d’un amendement de cohérence.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL 716 de la rapporteure.

En conséquence, l’amendement CL521 de M. Pierre Cordier tombe.

La Commission examine l’amendement CL55 de M. Éric Poulliat.

M. Éric Poulliat. Comme l’amendement CL445 de Mme Karamanli dont nous avons déjà débattu, cet amendement issu des travaux de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation propose d’inscrire dans les attributions des comités sociaux territoriaux la définition des modalités d’exercice par les agents de leur droit à la déconnexion et la mise en place de dispositifs de régulation de l’utilisation des outils numériques.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CL449 de Mme Marietta Karamanli, CL56 de M. Éric Poulliat et CL358 de M. Paul Molac.

M. Hervé Saulignac. L’article 3 ne reprend pas la rédaction de l’article 33 de la loi du 26 janvier 1984, qui précisait le contenu du rapport que l'autorité territoriale devra présenter, au moins tous les deux ans, au comité social territorial. C’est l’objet de cet amendement qui prévoit aussi que le rapport dresse le bilan des promotions, des mobilités et des ruptures conventionnelles – introduites dans la fonction publique par l’article 26 du projet de loi.

M. Éric Poulliat. Cet amendement, issu de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, reprend les dispositions de l’article 33 de la loi du 26 janvier 1984 et les complète en prévoyant notamment un bilan des recrutements et des avancements ainsi que des mobilités depuis ou vers d’autres employeurs publics.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Ces amendements sont satisfaits par la rédaction de l’alinéa 48 qui prévoit que la mise en œuvre des lignes directrices de gestion fait l’objet d’un bilan, sur la base des décisions individuelles, devant le comité social. Je vous demande de bien vouloir les retirer, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL717 de la rapporteure.

Puis elle en vient à l’amendement CL703 de M. Pierre Cordier. 

M. Jean-Louis Masson. Alors qu’aucune étude d’impact n’a été réalisée, l’attribution d’un crédit de temps syndical en lieu et place des autorisations spéciales d'absence aurait des conséquences importantes sur le fonctionnement des collectivités territoriales. Il convient de supprimer l’alinéa 56.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable : l’alinéa 56 reprend, par simple coordination, les dispositions prévues par l’article 33-1 de la loi du 26 janvier 1984 relative à la fonction publique territoriale en matière d'exercice des mandats syndicaux au sein des CHSCT.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL718 et CL719 de la rapporteure.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL359 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. La dimension médico-sociale doit être englobée dans l’offre territoriale, qui ne doit pas se limiter aux soins.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cette rédaction me paraît excessivement large et pas nécessairement adaptée aux enjeux de terrain auxquels sont confrontés les établissements.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL720 de la rapporteure.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL859 du Gouvernement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Au regard des effectifs parfois très limités de certains groupements de coopération sanitaire de moyens, il apparaît utile d’introduire la possibilité de ne pas constituer de comité social d’établissement et de prévoir qu’un comité social commun puisse être constitué.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis favorable à l'ouverture de cette faculté aux groupements de coopération sanitaire.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL721 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CL360 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. L’alinéa 97 modifie l’article L. 6144-4 du code de la santé publique et précise les conditions d’élection des représentants du personnel siégeant aux comités sociaux des établissements publics de santé, sans toutefois définir le mode de scrutin, comme c’est le cas du texte en vigueur. C’est l’objet de cet amendement.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je ne pense pas que cette précision soit judicieuse pour les comités sociaux, dans la mesure où certains scrutins peuvent s’organiser non pas de façon nominative mais sur la base de sigles.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL361 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Contrairement au texte en vigueur, l’article 3 ne prévoit pas que le personnel sera consulté s’il est dérogé à l’élection des représentants du personnel siégeant aux comités sociaux des établissements publics de santé. Cela pourrait se justifier, dans la mesure où cette dérogation ne serait due qu’à une insuffisance de personnel, le seuil étant défini par décret en Conseil d’État. Toutefois, la nouvelle rédaction laisse la porte ouverte à d’autres motifs de dérogation.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Comme évoqué précédemment, le décret prévoira explicitement l’ensemble des cas où il ne peut y avoir d'élection. Je ne citerai que le cas de la création d’un organe commun à deux établissements de santé, se superposant aux organes existants : il n’y aura pas lieu de procéder à une autre élection car la composition du nouvel organe pourra être déterminée à partir d’une agrégation des suffrages.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL722 de la rapporteure.

Puis elle est saisie de l’amendement CL858 du Gouvernement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Au sein des établissements publics de santé, il n’existe pas de structure spécifique aux professions médicales et pharmaceutiques où pourraient être traitées les questions relatives à la sécurité, à l’hygiène et aux conditions de travail. Cet amendement vise à tenir compte de cette spécificité propre au secteur hospitalier, à permettre de continuer à assurer cette représentation croisée au sein des instances représentatives des personnels : il prévoit que les représentants des personnels médecins, pharmaciens et odontologistes pourront siéger au sein de la formation spécialisée et y disposer d’une voix délibérative.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis favorable à cette mesure permettant la représentation du personnel médical au sein de la FSSCT.

La Commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’examen de l’amendement CL865 du Gouvernement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Il s’agit de faire en sorte que les compétences du comité technique « universitaire » actuel soient exercées par une formation spécialisée au sein du comité social d’administration ministériel de l’enseignement supérieur et de la recherche.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL362 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Il s’agit d’un amendement en cohérence avec notre amendement CL359.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

Elle adopte successivement l’amendement de coordination CL844, l’amendement rédactionnel CL845 et l’amendement de coordination CL723 de la rapporteure.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL866 du Gouvernement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Il s’agit de l’un des amendements que j’ai annoncés dans mon propos liminaire et qui prévoit de créer des formations spécialisées dans des établissements à statuts particuliers.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement de coordination CL706 de la rapporteure.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Nous souscrivons à cet objectif de coordination et y travaillerons d’ici la séance.

La Commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’examen de l’amendement CL245 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Par cet amendement, nous proposons que soit expérimenté un espace de travail socle pour les agents publics, inspiré des dispositions du code du travail visant à réduire les risques de santé et les risques psycho-sociaux, à l’origine de bien des souffrances exprimées par les agents.

Un nombre minimum de mètres carrés pour chaque espace de travail, l’accès à la lumière naturelle et la proximité d’un espace de convivialité et de repos devraient concourir à réduire la charge et les difficultés ressenties par bon nombre de fonctionnaires dans l’exercice de leur mission.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis défavorable à cet amendement, non sur l’objectif visé, que nous partageons tous, mais sur le fait d’utiliser un texte normatif pour y insérer des dispositions de nature déclarative, sans effet juridique.

L’aménagement des espaces de bureaux relève des sujets dont doivent débattre les acteurs du dialogue social au sein de l’administration, au plus près des spécificités et des réalités de chaque service, en l’adaptant, dans la mesure du possible, aux besoins exprimés par les agents. C’est un élément du dialogue social dont se saisiront justement les comités sociaux.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 3 modifié.

Après l’article 3

La Commission examine les amendements CL856, CL861 et CL864 du Gouvernement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Ces amendements portent sur des transpositions relatives respectivement à l’Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS), aux agences régionales de santé (ARS) qui accueillent en leur sein des salariés de statut privé et de statut public, et à l’établissement public Voies navigables de France (VNF)

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte successivement les amendements. Les articles 3 bis, 3 ter et 3 quater sont ainsi rédigés.

Puis elle est saisie de l’amendement CL800 de M. Jean-Félix Acquaviva. 

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je comprends le sens de cet amendement, j’en partage la philosophie. Il est primordial que chaque collectivité se saisisse de l’ensemble des sujets « ressources humaines » (RH) afin de débattre de la stratégie globale qu’elle compte mener dans ces domaines. C’est aujourd’hui le cas dans le versant territorial, grâce au rapport sur l’état de la collectivité présenté et débattu tous les deux ans au sein du comité technique. Mais je fais aussi le constat de l’insuffisance des outils actuels, en raison de leur caractère fragmentaire et peu efficient.

Je pense que ces enjeux supposent la refonte globale des différents rapports que doit produire l’administration afin d’aboutir à la rédaction d’un bilan unique RH, qui servira d’outil de pilotage annuel permettant d’agréger les données clefs de chaque administration et de brosser un panorama complet de tous les sujets RH afin notamment de réinterroger les lignes directrices de gestion décidées par les autorités compétentes.

Cette évolution, qui devra concerner les trois versants, suppose des coordinations pour construire un dispositif efficace, à la fois clair et solide. Je mène avec le Gouvernement et ses services un travail à ce sujet, que j’espère pouvoir conclure en vue de l’examen de ce texte en séance. Je vous propose donc de retirer cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL809 de M. Sacha Houlié.

M. Sacha Houlié. Cet amendement, issu de discussions avec des mutuelles de fonctionnaires de la territoriale, vise à inscrire à l’ordre du jour des assemblées délibérantes des collectivités la stratégie en matière de ressources humaines. Alors que certaines collectivités comptent un nombre conséquent d’agents, et qui sera appelé à croître encore du fait des fusions, du regroupement et de la mutualisation des moyens, il est important que ces questions soient débattues au vu et au su de tous et que le bien-être des agents soit pris en compte. De ce point de vue, je crois tout à fait utile la coordination entre les élus, qu’ils appartiennent à la majorité ou à l’opposition.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je partage la philosophie de cet amendement. Comme je l’ai expliqué à M. Favennec Becot, un projet de bilan unique RH est en cours de rédaction pour la séance. Il constituera un outil de pilotage plus intéressant que ne le sont les rapports successifs, souvent mal ou peu utilisés. Je vous propose de retirer cet amendement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. J’ajoute que j’ouvrirai des discussions sur la protection sociale complémentaire, sur la base d’un rapport des inspections qui nous sera remis prochainement, dont les partenaires sociaux seront saisis et les parlementaires tenus informés. Cette mission d’information a fourni l’occasion de rencontrer et d’entendre la voix des organismes mutualistes.

L’amendement est retiré.

Article 4 (art. 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, art. 13, 14 et 14 bis [nouveau] de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 28 et 30 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, art. 14, 20-1, 21, 45, 87 et 119 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 et art. L. 5211-4-1, L. 5211-4-2, L. 5212-33, L. 5214-28 et L. 5216-9 du code général des collectivités territoriales) : Réorganisation des commissions administratives paritaires

La Commission examine les amendements identiques CL112 de M. Stéphane Peu, CL185 de M. Ugo Bernalicis, CL453 de Mme Marietta Karamanli, CL560 de M. Pascal Brindeau et CL812 de M. Paul Molac.

Mme Elsa Faucillon. Cet article est symptomatique de la volonté du Gouvernement de transformer la fonction publique en fonction publique d’emplois. Selon les poncifs libéraux de l’exposé des motifs, la réduction drastique des commissions administratives paritaires (CAP) se justifie car il convient de « déconcentrer les décisions individuelles au plus près du terrain » et de « doter les managers des leviers de ressources humaines nécessaires à leur action ». Les députés communistes, profondément attachés à la préservation d’une fonction publique de carrière – seule à même de concourir à la mise en œuvre de l’intérêt général –, sont opposés en tous points à cet article.

Mme Danièle Obono. Nous nous opposons à ce que les CAP des trois fonctions publiques voient, au détour de la réforme, leurs compétences régresser. En effet, cet article prévoit que les CAP ne seront plus consultées avant les prises de décisions relatives aux carrières des fonctionnaires, mais uniquement comme instances consultatives. Les CAP ne porteront plus sur les corps ou les cadres d’emplois mais sur les catégories, ce qui conduira à réduire l’expertise et à diminuer le nombre de représentants syndicaux.

Le Gouvernement souhaite faciliter le pouvoir des gestionnaires en enlevant le pouvoir de contrôle des représentants du personnel, en leur retirant les compétences relatives à l’avancement, à la mobilité et à la mutation, alors même que ces décisions souvent discrétionnaires peuvent être l’objet de discriminations de toutes sortes. Le Conseil d’État a pointé ainsi explicitement le risque d’un « appauvrissement du dialogue social ».

L’intention du Gouvernement est claire : supprimer des emplois dans les CAP pour les redéployer dans des fonctions « d’appui aux projets d’évolution professionnelle et de mobilité » revient à affaiblir le contrôle des gestionnaires par les représentants du personnel, et à le remplacer par une fonction de soutien en ressources humaines.

Les économies seraient de 40 000 euros brut par ministère. Cette démarche boutiquière et comptable amoindrira la démocratie sociale. Les CAP sont une garantie de protection pour les agents et doivent, à ce titre, être renforcées.

Mme Cécile Untermaier. Cet article 4 est un élément important du texte, puisqu’il traite du dialogue social. En réalité, il concourt à l’affaiblir, en réduisant les compétences des CAP. Notons que toutes les organisations syndicales sont opposées à ces dispositions, ce qui doit nous alerter.

Les CAP sont les socles admis par tous, traitant de l’individu dans sa vie professionnelle et même familiale, puisque l’on y traite des mutations. Concrètement, les CAP ne seront plus compétentes sur des sujets aussi majeurs que la mutation, l’avancement et la promotion 

Il nous est demandé de légiférer à l’aveugle, sans connaître les projets de décrets qui listeront les attributions des CAP. Le Gouvernement s’était pourtant engagé à les publier en même temps que la présentation du projet de loi. Peut-être le secrétaire d’État nous éclairera-t-il sur ce point ?

Pour conclure, il faut rappeler qu’aucune instance sociale n’est décisionnelle dans la fonction publique. Réduire les compétences des CAP, c'est réduire l'acceptabilité des décisions prises par les employeurs publics. Nous ne sommes pas opposés à une modernisation des CAP, mais à ce stade, nous souhaitons proposer un amendement de suppression afin d’engager le débat.

M. Pascal Brindeau. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez expliqué à l’article 1er que l’objectif du texte était d’alléger les procédures et de raccourcir les délais s’agissant des décisions concernant les carrières. Ici, vous renvoyez ces décisions à la responsabilité directe de l’employeur public, en supprimant le filtre que constitue le dialogue syndical, et bien que les lignes de gestion et les critères seront discutés par le comité social. Dans le même temps, vous faites de la commission paritaire une instance d’appel des décisions défavorables, à la demande des agents. Les CAP continueront d’être embouteillées, mais par des procédures d’appel.

Or les agents comprennent mieux la décision qui leur est défavorable lorsque c’est une instance extérieure qui en a délibéré ; ils la comprendront moins bien lorsque l’employeur – ou le manager – leur annoncera abruptement une décision unilatérale. Je ne vois pas en quoi ces nouvelles dispositions constituent un progrès en matière de dialogue social et je crains que nous assistions à un développement du contentieux.

M. Paul Molac. Il s’agit d’un amendement de cohérence par rapport à notre amendement de suppression de l’article 3. Je pense que cela n’ira pas dans le sens d’une pacification des rapports entre les agents et leur chef de service.

Quand une instance externe décide que quelqu’un ne peut être promu ou ne peut avoir la mutation dont il rêvait depuis un certain temps, on l’accepte. Quand c’est le chef de service qui prend la même décision, il a intérêt à être remarquable ! Certes, beaucoup le sont, mais il y en a aussi quelques-uns après lesquels, chaque fois qu’ils passent quelque part, il faut recoller les morceaux, parce qu’ils ont mis un désordre terrible en faisant la promotion de leurs copains, de sorte qu’on se retrouve avec des procédures devant le tribunal administratif. Pour ma part, je pense que vous mettez même les chefs de service en difficulté.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis évidemment défavorable à ces amendements de suppression, car j’estime que cet article s’inscrit dans la logique de la réforme des instances de concertation et de la création des lignes directrices de gestion prévue par l’article 14.

Le fonctionnement de nos CAP est perfectible. J’entends dire que tout va très bien, qu’il n’y a rien à modifier, qu’il ne faut surtout toucher à rien… Je pense au contraire que les constats que nous pouvons faire aujourd’hui justifient pleinement une refonte des CAP. Le rapport rendu par le Conseil d’État en 2003 et le rapport Pêcheur de 2013 soulignent conjointement la rigidité du cadre des CAP et les lourdeurs de fonctionnement qu’il implique. Les CAP de la fonction publique de l’État sont aujourd’hui structurées par corps, ce qui contribue directement au cloisonnement et au réflexe corporatiste que nous dénonçons régulièrement et à juste titre. Aussi l’article 4 prévoit-il que les CAP seront désormais organisées par catégorie, comme dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière.

Dans le même souci de simplification, la structuration des CAP par groupe hiérarchique dans ses deux versants sera supprimée, ce qui permettra d’assouplir les règles de composition des CAP, lesquelles imposent jusqu’à présent aux organisations syndicales de présenter des candidats appartenant à différents groupes hiérarchiques, ce qui, selon les effectifs d’agents, n’est pas toujours aisé. En matière de compétences, leur champ d’attribution sera effectivement recentré sur les décisions individuelles défavorables, telles que les refus de titularisation, le licenciement en cas de refus de trois postes successifs pour le fonctionnaire mis en disponibilité ou le refus de formation et de congé de formation professionnelle ou syndicale. Les CAP sont aujourd’hui compétentes pour beaucoup de décisions individuelles qui ne présentent aucune difficulté réelle, ce qui freine sans raison la dynamique RH dans les administrations, comme l’exemple des décisions relatives à la mutation ou à la mobilité le démontre bien trop souvent.

Elles ne connaîtront plus des décisions individuelles en matière d’avancement, de promotion, de mutation et de mobilité. Mais il faut rappeler que toutes ces décisions seront désormais prises à l’aune des lignes directrices de gestion que le comité social, devenu l’instance unique du dialogue social, examinera pour avis. Les lignes directrices seront communiquées aux agents ; elles seront invocables et opposables à l’administration. Les critères seront transparents, ce qui n’est pas le cas aujourd’hui, puisque l’ancienneté prime très souvent sur l’appréciation des mérites propres à chaque fonctionnaire, ce que les CAP se contentent souvent d’avaliser en pratique et ce dont personne ne peut se réjouir, me semble-t-il.

Cette modernisation des instances est un véritable levier de transformation RH de l’administration, qui participe directement à sa modernisation. Avis défavorable sur tous ces amendements de suppression.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Même avis. La rapporteure, dans sa réponse, a dit pour quelles décisions les CAP demeureront compétentes. Je confirme que le décret et les différents textes d’application reprendront les éléments qu’elle a énoncés.

J’ajoute que nombre d’entre vous ont cité la troisième phrase du onzième considérant de l’avis du Conseil d’État, qui appelle à veiller à la qualité du dialogue social. C’est un objectif que nous partageons. Mais les deux premières phrases du même considérant soulignent l’importance de cette réforme, qui s’inscrit dans la ligne des recommandations de l’étude annuelle du Conseil d’État pour 2003. Il y avait révélé les insuffisances et les rigidités des modes de gestion des fonctionnaires de l’État.

La deuxième phrase, en particulier, précise que, sans se heurter à aucun obstacle juridique, cette réforme est de nature à remédier à de nombreux effets négatifs sur la mise en œuvre du régime juridique actuel. La réforme que nous présentons vise en effet à simplifier, tout en garantissant le respect des droits des agents, ainsi que la publicité des avis, si ce dernier point peut répondre à l’interrogation ou à l’inquiétude de M. Brindeau. J’ajoute même que nous travaillerons à des barémisations, afin que les choix soient les plus objectifs possibles.

M. Olivier Marleix. Dans certains cas, les CAP étaient probablement tout à fait perfectibles. D’ailleurs, il faut reconnaître qu’au sein de l’État, un certain nombre de ministères ont fait des efforts pour accélérer les mouvements.

Je sais, par exemple, que le ministère de l’intérieur l’a fait, en organisant dans certains cas deux CAP par an plutôt qu’une seule, de façon à éviter que des postes restent vacants pendant plus d’un an, le temps qu’il y ait de nouveaux candidats. Mais, en l’occurrence, on a un peu le sentiment que vous jetez le bébé avec l’eau du bain. Vous supprimez les CAP partout, y compris là où personne ne vous l’a jamais demandé…

Lorsque j’étais directeur des services d’une collectivité de 2 000 agents, j’étais heureux de disposer de cet instrument extrêmement précieux qui me donnait la certitude de pouvoir discuter avec les organisations syndicales de toutes les situations et de tout passer en revue. C’est aussi extrêmement rassurant pour les personnels.

Mais ce que je comprends encore moins, c’est comment tout cela va fonctionner. Prenons l’exemple des CAP de mutation, dans la fonction publique de l’État. Vous me dites qu’elles examineront désormais les décisions d’appel. Mais si, entre-temps, quelqu’un a été nommé sur le poste auquel vous postuliez, l’appel devant la CAP vous fera « une belle jambe » ! Le million de fonctionnaires de l’éducation nationale se demande toujours à quelle sauce il sera mangé. Il est très important que vous nous disiez comment, demain, un enseignant pourra être muté d’une région à une autre. Les postes seront-ils publiés par chaque rectorat, auquel il faudra envoyer sa candidature afin qu’il l’examine sur la base d’un barème-points ? Comment tout cela fonctionnera-t-il ? Nous n’avons pas eu, pour l’instant, d’éléments de réponse.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. L’exemple de l’éducation est un exemple intéressant, car c’est sans doute le seul ministère employeur à avoir besoin de décider l’affectation géographique de plusieurs centaines de milliers d’agents à une même date dans l’année. Cela dit, d’autres ministères, comme l’intérieur que vous avez évoqué, ou encore la gendarmerie, ont systématisé des pratiques de nomination à des dates relativement fixes dans l’année.

Pour le ministère de l’éducation nationale, nous travaillons, avec Jean-Michel Blanquer, sur les questions de barèmes et de publicité des critères, en reprenant une partie des éléments qui existent aujourd’hui. Rien dans le texte ne remet en cause une pratique désormais acquise, à savoir le tableau des mutations. Il y a aujourd’hui tout un travail de préparation de ce tableau, qui est ensuite soumis, pour chacune des décisions individuelles qu’il comporte, à l’avis des CAP.

À l’avenir, la définition des lignes directrices de gestion des ressources humaines permettra de connaître le barème, les critères et les priorités, qui seront rendues publiques. La préparation du tableau de mutation n’est donc pas remise en cause, mais nous gagnerons du temps sur l’étape actuelle de sa présentation devant les CAP.

La Commission rejette les amendements.

2.   Deuxième réunion du jeudi 2 mai 2019 à 15 heures (article 4 à article 12)

Lien vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.7570872_5ccae7bb448a0.commission-des-lois--transformation-de-la-fonction-publique-suite-2-mai-2019

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, nous reprenons nos travaux là où nous les avons laissés ce matin, c’est-à-dire à l’article 4 du projet de loi de transformation de la fonction publique. Nous avions, je vous le rappelle, rejeté les amendements tendant à la suppression de l’article.

Article 4 (suite) (art. 30 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, art. 13, 14 et 14 bis [nouveau] de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 28 et 30 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, art. 14, 20-1, 21, 45, 87 et 119 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 et art. L. 5211-4-1, L. 5211-4-2, L. 5212-33, L. 5214-28 et L. 5216-9 du code général des collectivités territoriales) : Réorganisation des commissions administratives paritaires

La Commission est saisie de l’amendement CL451 de M. Boris Vallaud.

Mme Marietta Karamanli. Cet amendement ouvre la possibilité d’organiser les commissions administratives paritaires (CAP) par corps ou par catégorie hiérarchique. Cette souplesse permettrait de respecter les particularités qui peuvent exister entre et au sein des trois fonctions publiques.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Comme je l’ai déjà indiqué, je pense que la création dans la fonction publique de l’État de CAP par catégorie et non plus par corps est une avancée nécessaire sur laquelle il ne convient pas de revenir. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite les amendements identiques CL196 de M. Jean-Louis Masson et CL416 de M. Jean-François Cesarini.

M. Jean-Louis Masson. L’amendement CL196 souligne l’importance pour les fonctionnaires de conserver la possibilité de former un recours relatif à leur avancement auprès de l’organe supérieur, le Conseil supérieur de la fonction publique de l’État.

M. Alain Perea. L’amendement CL416 est défendu.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Ces amendements visent à maintenir les attributions des CAP en matière d’avancement. Comme je l’ai expliqué précédemment, je ne peux y être favorable : l’intérêt de cette réforme est de clarifier les critères qui détermineront les décisions individuelles affectant la carrière des agents, dont celles relatives à l’avancement, grâce à la mise en œuvre de lignes directrices de gestion qui seront communiquées aux agents et opposables à l’administration.

La Commission rejette ces amendements.

Elle est saisie de l’amendement CL197 de M. Jean-Louis Masson.

M. Jean-Louis Masson. La création d’une commission administrative paritaire unique pour plusieurs catégories hiérarchiques en cas d’insuffisance des effectifs ne nous paraît pas fondée : des agents de la fonction publique de l’État de catégorie C seraient amenés à apprécier la situation d’agents de catégorie A, notamment en cas de licenciement pour insuffisance professionnelle, alors qu’ils méconnaissent les responsabilités qui leur incombent. Cette possibilité n’est donc ni souhaitable ni envisageable.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. La faculté de création d’une CAP unique pour plusieurs catégories hiérarchiques sera circonscrite à des cas rares, uniquement lorsque l’insuffisance des effectifs le justifie. Le principe général restera celui de la structuration des CAP à l’échelle de chacune des catégories A, B et C, comme c’est aujourd’hui le cas dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL363 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Amendement de cohérence : il importe de préciser le mode de scrutin selon lequel les représentants du personnel aux CAP sont élus.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Favorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine, en discussion commune, les amendements CL420 de M. Jean-François Cesarini et CL452 de Mme Marietta Karamanli, les amendements identiques CL198 de M. Jean-Louis Masson et CL418 de M. Jean-François Cesarini, et les amendements CL419 de M. Jean-François Cesarini et CL199 de M. Jean-Louis Masson.

M. Alain Perea. L’amendement CL420 est défendu, de même que les amendements CL418 et CL419.

Mme Marietta Karamanli. La mobilité, la mutation, l’avancement, la promotion méritent d’être débattues. Elles relèvent de la concertation et du dialogue social et démocratique. Nous voulons faire en sorte, par notre amendement de repli CL452, que les CAP redeviennent compétentes en ces domaines.

M. Jean-Louis Masson. Afin que les décisions individuelles liées aux avancements de grade soient soumises à l’avis des commissions administratives paritaires, l’adjonction de la référence à l’article 58 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État nous paraît nécessaire. Tel est l’objet de l’amendement CL199.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Pour les raisons que j’évoquais avant notre pause, l’avis est défavorable à ces amendements qui visent à neutraliser le recentrage des attributions des CAP prévu par l’article 4.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Tout à l’heure, nous avons donné un avis défavorable aux amendements de suppression de l’article 4. Et nous sommes également défavorables à ces amendements présentés comme étant de repli, mais qui visent à rétablir des dispositions que l’article 4 supprime par ailleurs… Autrement dit, madame Karamanli, votre repli a des effets assez conséquents, convenez-en !

Mme Marietta Karamanli. Nous faisons des efforts, monsieur le secrétaire d’État, car nous considérons qu’il faut pouvoir parvenir au consensus qui n’a pas su être trouvé avec les organisations syndicales. À chaque rentrée scolaire, il y a des cas individuels de mutation à traiter. Faute de ménager un espace de discussion, le projet de loi risque d’opacifier la procédure : son caractère contradictoire serait amoindri alors qu’il est aussi nécessaire dans la fonction publique.

La Commission rejette successivement ces amendements.

Elle en vient à l’amendement CL199 de M. Jean-Louis Masson

M. Jean-Louis Masson. Je retire cet amendement qui n’aurait eu de sens que si l’article 1er avait été supprimé.

L’amendement CL199 est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL200 de M. Jean-Louis Masson.

M. Jean-Louis Masson. La création d’une commission administrative paritaire unique pour plusieurs catégories hiérarchiques en cas d’insuffisance des effectifs n’est pas pertinente, comme j’ai déjà eu l’occasion de le souligner. D’où la suppression proposée de l’alinéa 15.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’avis est à nouveau défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL525 de M. Pierre Cordier.

M. Jean-Louis Masson. Cet amendement est défendu.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL202 de M. Jean-Louis Masson.

M. Jean-Louis Masson. Afin que les décisions individuelles liées aux promotions internes, aux avancements de grade et au tableau annuel d’avancement dans la fonction publique territoriale soient soumises à l’avis des commissions administratives paritaires, l’adjonction des références aux articles 39, 78 et 80 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale nous paraît nécessaire. Nous considérons en outre qu’il importe de supprimer la référence à l’article 46 de cette même loi pour ne pas entraver le pouvoir de nomination aux emplois de l’autorité territoriale et la libre administration des collectivités territoriales.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Par cohérence, avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL201 de M. Jean-Louis Masson.

M. Jean-Louis Masson. Cet amendement est retiré, du fait de l’adoption de l’article 1er.

L’amendement CL201 est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL49 de M. Olivier Marleix.

M. Olivier Marleix. Le groupe Les Républicains attache une grande importance à cet amendement. Nous voulons bien entendre votre argumentation sur l’intérêt pour l’État de simplifier le mode de fonctionnement des CAP : la lourdeur des procédures est assez incontestable. Toutefois, les employeurs publics locaux ne font pas le même constat. J’ai eu l’occasion de m’entretenir avec Philippe Laurent, président du Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT), qui me confirmait que cette évolution n’était pas souhaitée par les collectivités territoriales. La plupart d’entre elles sont en effet attachées aux CAP en tant que lieu de dialogue et de concertation pour examiner individuellement le plus grand nombre de situations.

Notre amendement propose de laisser la faculté aux collectivités territoriales qui le désirent de continuer à fonctionner comme elles le font aujourd’hui. Nous sommes dans une République décentralisée. Pourquoi forcer les collectivités locales à changer une pratique qui fonctionne parfaitement à ce jour ?

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cette possibilité de maintien des compétences des CAP dans la seule fonction publique territoriale nuirait à la cohérence et à la lisibilité de la réforme, qui vise justement à rationaliser le cadre de gestion dans l’ensemble des versants de la fonction publique. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Je partage l’avis de la rapporteure. En outre, votre solution poserait des difficultés pour les collectivités dans le choix des centres de gestion auxquels elles devraient obligatoirement s’affilier. Votre argument sur la libre administration des collectivités territoriales serait donc assez largement remis en cause par votre modèle à géométrie variable…

M. Olivier Marleix. Je ne partage pas l’argument avancé par la rapporteure qui prône une organisation qui n’aurait qu’une seule tête. C’est d’ailleurs un travers que l’on retrouve tout au long de ce texte : au nom de la rationalisation et de la simplification, il tend à casser des initiatives décentralisées. C’est notamment le cas à l’article 2, lorsque vous permettez au président du Conseil supérieur de la fonction publique d’État, autrement dit le ministre de la fonction publique, de se dispenser de demander l’avis du CSFPT. Sous couvert de simplification, on sent bien la volonté recentralisatrice qui transparaît dans ce texte. Je ne sais même pas si cela facilitera la vie de la direction générale de l’administration de la fonction publique (DGAFP). Pourquoi ne pas accepter que les collectivités locales continuent à s’administrer librement ? Je vous parle, monsieur le secrétaire d’État, des collectivités qui ont leur propre CAP et qui n’ont jamais réclamé la suppression de cette instance de dialogue.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL823 de M. Alain Perea.

M. Alain Perea. Pour nos collègues qui ne sont pas spécialistes, je précise que l’avancement à l’ancienneté dans la fonction publique dépend de quotas spécifiques à chaque grade gérés par les CAP. Si nous supprimons l’intervention de ces commissions, il nous paraît cohérent de supprimer aussi la règle des quotas.

Cela permettrait de donner plus de responsabilités et de souplesse aux acteurs locaux, qu’il s’agisse d’élus, de fonctionnaires ou de représentants des fonctionnaires.

Plus important encore, cela permettrait de prendre en compte le cas des petites collectivités territoriales où l’avancement risque d’être bloqué. Si le changement de grade ne se fait qu’au bout de quatre recrutements et qu’il n’y a qu’un seul employé, celui-ci ne pourra jamais changer de grade. Cette logique de quotas relève d’une histoire de la fonction publique aujourd’hui dépassée.

Mme Émilie Chalas, rapporteur. Je comprends la philosophie de cet amendement, monsieur Perea. Toutefois, je ne pense pas qu’il soit opportun de supprimer cette disposition. Le projet de loi prévoit que ce quota sera fixé par l’assemblée délibérante de la collectivité territoriale après avis du comité social territorial, ce qui relève donc de l’appréciation de la collectivité elle-même, au plus près des réalités de la gestion des ressources humaines auxquelles elle est confrontée.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Même avis. Le projet de loi permet aux collectivités de fixer des quotas qui tiennent compte des rythmes de recrutement. Les collectivités qui relèvent de centres de gestion procéderont en lien avec les comités sociaux territoriaux du fait de la procédure d’association. Je pense que l’amendement que vous proposez est satisfait par cette liberté nouvelle offerte à chaque autorité territoriale.

M. Alain Perea. Je retire l’amendement.

L’amendement CL823 est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CL529 de M. Pierre Cordier.

M. Jean-Louis Masson. L’article 4 du projet de loi redéfinit le champ de compétences des CAP. Leur avis préalable sur les questions liées aux transferts d’agents entre collectivités est, entre autres, supprimé. Si le champ des questions d’ordre individuel sur lesquelles les CAP sont obligatoirement consultées pour avis doit être réduit, nous estimons que les questions relatives aux transferts d’agents en cas de mutualisation ou de restitution de compétences doivent demeurer de la compétence de ces instances.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable, par cohérence.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement CL862 du Gouvernement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Cet amendement vise à modifier la représentation des employeurs hospitaliers au sein de la commission administrative paritaire nationale corps et emplois des personnels de direction et des directeurs de soins. Il donne la possibilité à l’organisation la plus représentative des établissements hospitaliers de proposer la désignation d’un ou de plusieurs représentants parmi les membres siégeant au sein de la CAP nationale et ce, au titre de l’administration. Cette disposition est issue d’une concertation avec les employeurs hospitaliers qui ont souhaité améliorer leur représentation.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis favorable à cette mesure de coordination.

La Commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL203 de M. Jean-Louis Masson.

M. Jean-Louis Masson. Afin que les décisions individuelles liées aux promotions internes et aux avancements de grade dans la fonction publique hospitalière soient soumises à l’avis des commissions administratives paritaires, l’adjonction de références aux articles 35, 68 et 69 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière nous apparaît nécessaire.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est enfin saisie de l’amendement CL574 de M. Pascal Brindeau.

M. Pascal Brindeau. Cet amendement est dans le même esprit que ceux qui visent à éviter que tout le champ des règles d’avancement échappe aux CAP : nous voulons inverser la logique du projet de loi qui fait de la CAP une sorte de chambre d’appel après conflit. Il s’agirait de faire en sorte que la CAP puisse être saisie à la demande des représentants du personnel, préalablement à la décision liée à l’avancement d’un agent.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable : cet amendement aurait pour effet potentiel de neutraliser la portée de la réforme des CAP.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 4 modifié.

Après l’article 4

La Commission est saisie de l’amendement CL857 du Gouvernement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Il s’agit d’un amendement de cohérence relatif à l’éducation nationale.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

L’article 4 bis est ainsi rédigé.

Elle examine ensuite, en discussion commune, l’amendement CL522 de M. Pierre Cordier, les amendements identiques CL533 de M. Pierre Cordier et CL612 de M. Rémy Rebeyrotte et l’amendement CL876 de la rapporteure.

M. Jean-Louis Masson. L’amendement CL522 vise à supprimer la nouvelle commission consultative paritaire chargée de représenter les contractuels. Ce dédoublement des instances n’est pas souhaitable. Il peut être porteur de lourdeurs administratives et contribuer à un manque de visibilité.

Je défends en même temps l’amendement CL533, madame la présidente.

M. Rémy Rebeyrotte. L’amendement CL612 est également défendu.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Les commissions consultatives paritaires (CCP) dans la fonction publique territoriale sont organisées par catégorie, comme le précise le décret du 23 décembre 2016 relatif aux commissions consultatives paritaires et aux conseils de discipline de recours des agents contractuels de la fonction publique territoriale.

Les difficultés de mise en place de ces nouvelles instances à la suite des élections professionnelles de décembre 2018 sont dues en partie au faible nombre d’agents contractuels par catégorie, notamment en raison de l’absence de candidats.

Pour la fonction publique de l’État et la fonction publique hospitalière, les règles relatives aux CCP sont déterminées uniquement par décret ; pour la fonction publique territoriale, c’est l’article 136 de la loi du 26 janvier 1984 qui définit le cadre des CCP. Dans un objectif de simplification, nous proposons par l’amendement CL876 de modifier ledit article afin de mettre en place une CCP unique par collectivité ou établissement public compétent pour l’ensemble des agents contractuels, sans distinction de catégorie.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Les CCP existent dans la fonction publique de l’État et dans la fonction publique hospitalière depuis quelques années et ont été mises en place dans la fonction publique territoriale lors des élections professionnelles du 6 décembre dernier.

À cette occasion, nous avons pu constater à quel point il a été difficile pour les organisations syndicales et pour les employeurs territoriaux d’installer ces instances, souvent faute de candidats. On comprend aisément que des contractuels recrutés pour un, deux ou trois ans, à droit constant, aient du mal à s’engager pour un mandat de quatre ans.

Les CCP ont toutefois l’intérêt de permettre au personnel contractuel de disposer d’un lieu au sein duquel les questions les concernant peuvent être discutées. Nous avons dit aux organisations syndicales et aux employeurs que nous souhaitions faire un bilan de la mise en place de ces commissions. Ce qui suppose que l’intégralité des instances soit reconstituée après les élections.

Plutôt que de supprimer purement et simplement les CCP pour les intégrer aux CAP comme certains d’entre vous le proposent, votre rapporteure propose dans son amendement CL876 une CCP unique qui regrouperait l’ensemble des contractuels, quel que soit leur grade ou leur cadre d’emploi. Cette solution me paraît plus pertinente. Ce lieu d’expression serait plus facile à construire au moment des élections que des CCP par catégorie.

Je suis donc défavorable aux autres amendements en discussion commune.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je ne suis pas défavorable à l’objectif final d’une fusion des CAP et de CCP. Je comprends la logique qui sous-tend cette évolution, notamment dans une perspective d’unification des instances et de simplification des cadres de gestion. Elle me semble toutefois prématurée à ce stade.

L’amendement CL612 est retiré.

La Commission rejette les amendements CL522 et CL533.

La Commission adopte l’amendement CL876.

L’article 4 ter est ainsi rédigé.

Elle en vient à l’amendement CL860 du Gouvernement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. La loi statutaire de 1984 ne prévoit pas de période transitoire en cas de fusion des collectivités ou d’établissements publics. L’amendement du Gouvernement comble cette lacune en définissant des modalités d’organisation et de réélection des instances de dialogue.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis favorable.

M. Pascal Brindeau. Le délai d’un an fixé dans cet amendement me semble un peu court. Nous savons que l’année qui suit la décision de fusion des établissements publics de coopération intercommunale est particulièrement dense puisque les EPCI doivent choisir les compétences qu’ils conservent ou qu’ils transfèrent. Leur imposer en plus la charge d’organiser en plus des élections professionnelles me semble compliqué. Ne pourrait-on pas fixer un délai de deux ans ?

La Commission adopte l’amendement.

L’article 4 quater est ainsi rédigé.

Article 5 : Habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance afin de favoriser la conclusion d’accords négociés dans la fonction publique

La Commission est saisie des amendements identiques CL104 de M. Stéphane Peu, CL126 de M. Robin Reda, CL186 de M. Ugo Bernalicis, CL204 de M. Jean-Louis Masson, CL455 de M. Boris Vallaud et CL561 de M. Pascal Brindeau.

Mme Marie-George Buffet. L’article 5 habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance, dans un délai de quinze mois, « toutes dispositions relevant du domaine de la loi afin de favoriser, aux niveaux national et local, la conclusion d’accords négociés dans la fonction publique ». Le champ de l’habilitation est donc très large. Il englobe des sujets de grande importance. L’ordonnance définira les autorités compétentes pour négocier, fixera les modalités d’articulation entre les différents niveaux de négociations, la condition des accords, les cas et conditions dans lesquels les accords majoritaires disposent d’une portée ou d’effets juridiques.

Nous considérons que ce recours aux ordonnances n’est pas acceptable. C’est pourquoi nous proposons par l’amendement CL104 la suppression de cet article.

M. Robin Reda. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez dit vous-même lors de notre première discussion générale que ce projet de loi était le résultat de quinze mois de concertation. Vous en demandez quinze supplémentaires pour de nouvelles concertations sur l’habilitation à prendre par ordonnance des mesures favorisant le dialogue social. Cela prouve bien que l’urgence n’était pas si évidente : vous auriez pu vous donner davantage de temps pour élaborer un projet de loi beaucoup plus ambitieux transformant en profondeur nos trois fonctions publiques.

Il y a, en outre, quelque chose d’antinomique à vouloir reporter la discussion pour la négociation dans l’entre-soi des ordonnances alors que des discussions avec les représentants de la nation auraient été appréciées.

Autant de raisons qui nous conduisent, par notre amendement CL126, à demander la suppression de l’article 5.

M. Ugo Bernalicis. Je ne sais pas si les organisations syndicales ont vraiment envie de continuer à négocier compte tenu des résultats auxquels vous avez abouti : neuf organisations sur neuf sont opposées à votre projet de loi. Elles seraient davantage rassurées si elles pouvaient échanger avec l’opposition et la majorité sur des dispositions discutées au Parlement et faire évoluer ce texte.

Je ne pense pas que le recours aux ordonnances soit la bonne méthode, sauf si votre volonté est de vous opposer aux organisations syndicales ou de chercher à faire les choses « à votre sauce » sans chercher leur assentiment. Si c’est la voie que vous poursuivez, continuez, c’est bien parti… Nous proposons donc, par notre amendement CL186, de supprimer l’article 5.

M. Jean-Louis Masson. Mon amendement CL204 est défendu. Je n’ai rien à ajouter aux excellents arguments avancés par Robin Reda.

M. Hervé Saulignac. Le Parlement est dépossédé de son droit à légiférer sur des questions pourtant essentielles : la négociation au niveau local, la formation, la santé. Tout ce qui peut conduire notre République à s’appuyer sur une fonction publique solide et protégée ne semble plus devoir intéresser notre assemblée. C’est la raison pour laquelle nous nous opposons nous aussi au recours aux ordonnances et demandons, par notre amendement CL455, la suppression de cet article.

M. Pascal Brindeau. Par principe, le recours aux ordonnances n’est pas bien accueilli par les parlementaires que nous sommes et il nous paraît encore plus problématique s’agissant de tels enjeux. Vouloir, d’un côté, favoriser le dialogue social autour d’accords nationaux et locaux, susceptibles d’avoir des répercussions majeures sur les droits essentiels des salariés et agents publics et sur leurs conditions de travail et, de l’autre, évincer le Parlement de ces négociations nous paraît contradictoire. D’où notre amendement CL561.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’article 5 habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance dans trois domaines : clarifier l’identité des personnes habilitées à négocier et les domaines sur lesquels peut porter la négociation, définir l’articulation des accords nationaux avec les accords locaux, définir la portée juridique des accords conclus. Cela nécessite la poursuite de nombreuses concertations avec les syndicats et les employeurs publics, notamment territoriaux, ainsi qu’une expertise juridique particulièrement approfondie puisque ces enjeux questionnent directement la dimension statutaire de la fonction publique et l’évolution du dialogue social en son sein.

Dans ces conditions, eu égard au délai de quinze mois prévu par l’habilitation, le recours à l’ordonnance me semble justifié. Avis défavorable à ces amendements de suppression.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. La décentralisation du dialogue social et la possibilité de conclure des accords majoritaires locaux dans les établissements publics sont des questions qui sont apparues à la fin du cycle de concertation avec les organisations syndicales. C’est la raison pour laquelle il importe de définir l’échelon auquel un accord local peut être conclu et l’échelon auquel la primauté de l’accord national doit être respectée. J’ajoute qu’à chaque fois qu’il y a un accord national, l’accord local ne saurait évidemment que le décliner ou l’améliorer et en aucun cas le dégrader en faisant du moins-disant.

Dans l’avant-projet, nous avions prévu un délai plus court pour la rédaction de l’ordonnance. C’est à la demande des organisations syndicales, au sein des instances de concertation, que nous avons porté le délai à quinze mois car elles considéraient qu’il fallait davantage de temps pour fixer la liste des champs ouverts aux accords locaux.

M. Ugo Bernalicis. Je m’étonne, monsieur le secrétaire d’État, de vous entendre dire que les organisations syndicales ont souhaité ouvrir la discussion sur les accords locaux : c’est plutôt l’inverse qui m’a été rapporté… Je trouve un peu étrange d’avoir consacré plusieurs mois à la concertation et de découvrir dans la dernière ligne droite que de tels sujets devaient être traités par ordonnance. Je vous invite à travailler d’ici à la séance à un texte complet et à vous passer du recours aux ordonnances. Ce sera mieux pour tout le monde, pour les parlementaires comme pour les syndicalistes.

Vous dites encore qu’un accord local ne peut être que plus favorable qu’un accord national. Si vous en êtes persuadé, je pense que vous ne verrez aucun inconvénient à donner un avis favorable aux amendements qui viennent le préciser. Si ce n’est pas le cas, nous aurons la confirmation que vous voulez utiliser la même méthode que pour les ordonnances « travail », autrement dit faire du moins-disant au motif qu’on se sera mis d’accord au niveau local pour faire moins bien que ce qui se faisait niveau national. Excusez-moi, monsieur le secrétaire d’État, ne pas croire un traître mot de ce que vous racontez.

M. Olivier Marleix. Monsieur le secrétaire d’État, c’est une des caractéristiques de ce projet de loi de renvoyer de manière systématique aux ordonnances. On peut comprendre que dans certains domaines, y recourir soit nécessaire mais on comprend moins qu’en un an de concertation, à travers une cinquantaine de réunions, vous n’ayez pas été en mesure d’identifier les échelons pertinents pour négocier et conclure les accords. J’ai rarement vu des projets de loi d’habilitation aussi sommaires : le législateur est très peu appelé à encadrer cette négociation. Il s’agit pourtant de questions importantes comme la détermination de ce qui revient au niveau local et ce qui appartient au niveau national ou la fixation des modalités d’appréciation de la validité des accords majoritaires.

Comme vient de le dire Ugo Bernalicis, je pense qu’on gagnerait à ce que vous précisiez le champ de l’habilitation, en prévoyant un peu plus de garde-fous.

Quant à votre argument, madame la rapporteure, selon lequel ces questions sont juridiquement trop complexes pour qu’on laisse les parlementaires en décider, il me laisse pantois. Quelle image avez-vous donc du travail parlementaire ?

La Commission rejette les amendements.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL725 de la rapporteure.

Elle en vient à l’amendement CL454 de Mme Marietta Karamanli.

Mme Cécile Untermaier. Nous souhaitons par cet amendement préciser le champ de l’habilitation. Nous voulons nous assurer à l’alinéa 3 que les négociations engagées à un niveau ne pourront que préciser ou améliorer l’économie générale d’un accord conclu au niveau supérieur. Vous avez laissé entendre, monsieur le secrétaire d’État, qu’il en serait ainsi, mais mieux vaut l’inscrire dans la loi.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Ce sera précisément l’objet et le but de l’ordonnance que de définir les règles applicables en matière d’articulation des accords juridiques conclus aux niveaux inférieur et supérieur. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Avis défavorable ou demande de retrait. L’article 8 bis de la loi du 13 juillet 1983, que nous ne remettons pas en cause, indique que tout accord conclu à un niveau inférieur ne peut que préciser un accord conclu au niveau national ou en améliorer l’économie générale. Votre amendement est donc parfaitement satisfait dans la mesure où ne touchons en rien à ce dispositif.

M. Ugo Bernalicis. Je dois dire que je suis un peu perdu, parce que nous venons d’entendre des arguments assez contradictoires. Vous parlez, madame la rapporteure, de l’articulation entre le national et le local, ce qui laisse à penser que, dans certains domaines, sans doute particuliers, les accords conclus au niveau local pourront être différents de ceux conclus au niveau national – pour ne pas dire moins-disants. Monsieur le secrétaire d’État, vous nous assurez, quant à vous, que vous ne remettrez pas en cause, dans les ordonnances, l’article 8 bis de la loi de 1983. Vous nous donnez votre parole, mais il nous semblerait préférable d’écrire en toutes lettres dans la loi que vous ne toucherez pas à cet article. Si tel est effectivement votre objectif, mieux vaut l’écrire : cela nous évitera de vous faire des procès d’intention.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Les procès d’intention peuvent être faits dans les deux sens… Ce n’est pas ma parole que je vous donne, mais celle du Gouvernement : il ne sera pas touché à l’article 8 bis. Mme la rapporteure a néanmoins raison d’évoquer la question de l’articulation entre le national et le local, car nous devons la prévoir pour les cas où il n’y aurait pas d’accord national, mais seulement des accords locaux. Il n’y a aucune contradiction entre la position de la rapporteure et la mienne : vous aurez l’occasion de vous en rendre compte sur chacun des amendements et des articles de ce texte. Je répète que le Gouvernement est très attaché à l’article 8 bis de la loi de 1983.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL187 de Mme Danièle Obono.

M. Ugo Bernalicis. Cet amendement vise à préciser que les dispositions introduites à l’article 5 doivent se faire « sans diminution effective du seuil de représentativité du caractère majoritaire des accords d’ores et déjà prévu par le dernier alinéa de l’article 8 bis de la loi de 1983 ». Nous voulons préserver la disposition qui prévoit qu’un accord n’est valide que s’il a été approuvé par au moins 50 % des organisations syndicales. C’est un garde-fou important, notamment pour les accords locaux : vous venez de nous dire, monsieur le secrétaire d’État, que des accords locaux pourraient être conclus même en l’absence d’un accord national, ce qui n’est pas pour nous rassurer.

Monsieur le secrétaire d’État, vous nous avez donné votre parole, mais vous ne seriez pas le premier à prendre un engagement et à ne pas le tenir par la suite. La loi, elle, est opposable, et je maintiens qu’il serait préférable d’écrire tout cela noir sur blanc. Pardonnez-moi d’accorder davantage de crédit aux textes que nous votons ici qu’à vos paroles…

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avec les mêmes arguments que sur l’amendement précédent, je rappellerai que c’est l’objet même de l’ordonnance que de préciser les modalités d’appréciation du caractère majoritaire. J’espère que nous aurons un débat parlementaire riche et constructif sur le contenu des ordonnances lors de l’examen du projet de loi de ratification.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement CL726 rédactionnel de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CL877 de la rapporteure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Le présent amendement permet de préciser le contenu de l’habilitation du Gouvernement et de prévoir de manière explicite la mise en place d’un dispositif d’homologation des accords majoritaires conclus dans la fonction publique, dispositif dont la validité a été reconnue par la jurisprudence du Conseil constitutionnel. J’aimerais, monsieur le secrétaire d’État, connaître votre position sur ce sujet.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Il faut rappeler d’abord que l’objectif de l’article 5 est de promouvoir le rôle et la culture de la négociation et d’en développer la pratique, en particulier aux niveaux de proximité qui constituent le quotidien des agents. Nous devons rechercher les raisons du faible recours à la négociation et définir des pistes d’amélioration. Dans cet article, nous n’excluons pas de recourir à une procédure d’homologation, qui intégrerait le principe de l’accord majoritaire, tel que le propose le rapport Fournier de 2002. Toutefois, le Conseil constitutionnel a cantonné les procédures d’homologation conformes à la Constitution aux seules mesures de portée limitée. Il nous semble donc nécessaire d’approfondir l’analyse juridique de cet outil et d’en définir les conditions d’usage avant d’en confirmer l’utilisation. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons, à ce stade, en rester aux modalités d’approbation. Je vous invite donc, madame la rapporteure, à retirer cet amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement CL281 de M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Cet amendement, qui traduit une demande de la CGT, propose de rendre la négociation obligatoire, d’une part lorsqu’un accord national doit être décliné au niveau local, d’autre part lorsque la demande d’un thème de négociation émane de l’ensemble des organisations syndicales représentatives.

Puisque vous vous dites très attachés au dialogue social, vous ne pourrez voir que d’un bon œil cette obligation de négociation, notamment lorsque la demande émane de l’ensemble des organisations syndicales représentatives. On caricature souvent les organisations syndicales en prétendant qu’elles ne font que s’opposer au Gouvernement et que leur action est contre-productive. Avec cette disposition, vous auriez la démonstration qu’elles savent aussi se mettre d’accord pour faire surgir des sujets de discussion.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cher collègue, au risque de vous décevoir, je ne crois pas à l’introduction d’une obligation de négocier. Je vois d’ailleurs une forme de contradiction dans les termes mêmes de cette expression, dans la mesure où la négociation suppose par principe un accord de volontés, du moins sur l’idée même d’y recourir. Sur le fond, les travaux que le Gouvernement mènera, dans le cadre de l’ordonnance, sur la conclusion d’accords dans la fonction publique permettront de définir un nouveau cadre de négociation, dans un objectif de clarté et d’efficacité. Avis défavorable.

Mme Marie-George Buffet. Ce débat nous montre les effets négatifs du travail par ordonnance : vous nous répondez, madame la rapporteure, que nous pourrons débattre de ces questions au moment de la loi de ratification des ordonnances, mais il aurait été plus simple de nous présenter aujourd’hui un projet de loi complet, sur lequel nous aurions pu avoir une vraie discussion. Au lieu de cela, vous reportez le débat à l’examen de la loi de ratification. C’est tout le problème des ordonnances, et cela ne va pas dans le sens de la simplification du travail parlementaire voulue par le Président.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Madame Buffet, je sais que ma réponse ne vous satisfera pas totalement. J’ai indiqué, lors de l’audition du 10 avril, que j’associerai à la préparation des ordonnances, non seulement les organisations syndicales et les représentations des employeurs, mais aussi les parlementaires. Il ne s’agira certes pas d’un débat parlementaire, mais je tiens à ce que les parlementaires soient associés à cette concertation, de façon à ce que la discussion ne se limite pas à la seule ratification de l’ordonnance.

M. Ugo Bernalicis. Que proposez-vous exactement, monsieur le secrétaire d’État ? De délocaliser la commission des Lois pour discuter avec les organisations syndicales des futures ordonnances ? Nous pourrions aussi inviter les organisations syndicales ici, cela irait plus vite.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Disons que vous m’habilitez à organiser cette consultation dans les formes qui conviennent. (Sourires.)

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 5 modifié.

 

TITRE II
Transformer et simplifier la gestion
des ressources humaines

Chapitre Ier
Donner de nouvelles marges de manœuvre aux encadrants dans le recrutement de leurs collaborateurs

Section I
Élargir le recours aux contrats

Avant l’article 6

La Commission examine l’amendement CL456 de M. Boris Vallaud.

M. Hervé Saulignac. Cet amendement vise à insérer un nouvel article dans le statut général des fonctionnaires. Il nous semble important, au moment où l’on va recourir de manière beaucoup plus importante aux contractuels, d’envoyer quelques signaux aux fonctionnaires qui ont travaillé dur pour préparer leur concours et qui vont voir arriver autour d’eux, à des fonctions diverses et importantes, des agents qui n’auront pas connu le même parcours qu’eux.

Le Gouvernement, avec l’élargissement massif de l’ouverture au contrat, va considérablement réduire l’attractivité du statut des fonctionnaires, ce qui aura pour conséquence un affaiblissement des leurs perspectives de carrière. C’est la raison pour laquelle nous voulons préciser que les dispositions introduites par votre texte ne doivent pas entraver le développement et le parcours professionnels, la mobilité, la promotion ainsi que l’accès aux différents niveaux de qualification existants des fonctionnaires.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je perçois une forme de crainte dans cet amendement de principe, qui semble considérer l’ouverture des facultés de recrutement contractuel comme une menace, alors que je l’envisage, à titre personnel, comme une chance et une opportunité pour moderniser notre fonction publique. Il ne fait aucun doute que les fonctionnaires sauront se prévaloir de leur expérience et de leurs qualités professionnelles. J’émets donc, par cohérence, un avis défavorable sur cet amendement.

M. Ugo Bernalicis. La discussion commence mal, mais elle a le mérite de montrer que votre projet de créer deux voies d’accès à la fonction publique, loin de simplifier les choses, va les compliquer à tous les étages, puisque vous allez devoir gérer deux systèmes concurrents. Imaginez la situation du gestionnaire d’équipe qui aura sous sa responsabilité, sur deux postes à peu près équivalents, un fonctionnaire titulaire et un contractuel ! Même s’ils font le même travail, ils ne seront pas payés de la même façon, n’auront pas les mêmes possibilités de mobilités, ni le même régime du point de vue des ressources humaines. Cela va être un casse-tête monstrueux ! Et vous osez nous parler de simplification et de modernisation ?

Vous avez dit, lors d’un débat, que si le Gouvernement l’avait voulu, il aurait fait passer tout le monde au statut de contractuel et que s’il ne le fait pas, c’est qu’il ne veut pas le faire. À la limite, j’aurais mieux compris cette décision ; elle aurait au moins eu le mérite de la cohérence. Mais là, vous allez créer un vrai micmac. L’amendement de notre collègue a le mérite de rappeler que le concours et le statut de fonctionnaire doivent apporter certaines garanties aux agents de la fonction publique. Cela ne signifie pas que les contractuels font moins bien leur travail, mais seulement qu’ils n’ont pas les mêmes garanties à faire valoir que les fonctionnaires, particulièrement dans certaines situations critiques, que ce soit dans l’intérêt de l’administration ou de l’intérêt général.

Mme Cécile Untermaier. Au cours des auditions que nous avons menées, j’ai vivement ressenti la crainte des fonctionnaires face à l’arrivée de contractuels. Plutôt que de balayer cette crainte, il faut essayer de la comprendre, et surtout rassurer les fonctionnaires. Alors qu’ils ont passé des concours parfois très difficiles, quelle que soit la catégorie à laquelle ils appartiennent, ils ne comprennent pas qu’on puisse les mettre en concurrence avec des contractuels.

Il ne s’agit pas de remettre en cause le principe de la contractualisation, qui existe déjà dans un certain nombre de fonctions bien identifiées. Mais comment allons-nous organiser ces deux voies parallèles ? Quel intérêt présentera désormais le concours, si l’on peut atteindre les mêmes catégories d’emploi par la voie contractuelle ? Je ne cherche pas à faire de polémiques, mais il me semble que c’est une vraie question et qu’il faut y répondre.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je comprends que cette disposition suscite un débat, et nous devons l’avoir, mais je vous rappelle que les contractuels représentent déjà 18 à 20 % des personnels, soit un sur cinq, dans les trois versants de la fonction publique. Pour répondre à vos inquiétudes, monsieur Bernalicis, je vous dirai que les gestionnaires d’équipe et les managers, qu’ils soient de catégorie A ou intermédiaire, savent parfaitement gérer cet état de fait. Il est rare que les différences de statut créent des difficultés au sein des équipes et je ne crois pas que les contractuels fassent moins bien leur travail que les titulaires.

Vous parlez des garanties qui tiennent au statut des fonctionnaires. Comme je l’ai déjà indiqué, ce sont précisément ces garanties qui permettront aux fonctionnaires de défendre la qualité de leur travail, notamment lorsqu’ils déposeront leur candidature à des postes également ouverts aux contractuels.

Enfin, madame Untermaier, je ne crois pas que l’état d’esprit que vous décrivez soit celui de l’ensemble des fonctionnaires. Vous en avez entendu un certain nombre, mais j’en ai entendu d’autres au cours des soixante-dix auditions menées par le groupe de travail sur la fonction publique et de celles que j’ai menées comme rapporteure sur ce texte. J’en ai rencontré aussi durant le tour de France qui m’a menée dans tous les territoires de l’hexagone et qui m’a fait rencontrer des centaines d’agents. Je peux vous dire que nous sommes loin de la situation que vous décrivez de manière caricaturale.

Mme Marietta Karamanli. Madame la présidente, madame la rapporteure, je suis désolée, mais la réalité n’est pas tout à fait celle que vous décrivez.

D’abord, il faut rappeler que la proportion de contractuels au sein de la fonction publique est demeurée assez stable dans le temps.

Ce que je regrette, surtout, c’est qu’il ne soit pas question dans ce texte de l’intérêt général. Alors que c’est une valeur cardinale pour les fonctionnaires, on ne la retrouve pas toujours chez les contractuels, précisément parce qu’ils n’ont pas le même statut. Vous êtes en train de passer très vite, et sans débat, sur un sujet pourtant essentiel, et nous ne pouvons pas l’accepter.

Si vous ne pouvez pas nous répondre sur ce point, madame la rapporteure, peut-être M. le secrétaire d’État pourra-t-il le faire ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. L’article 7 ouvre la possibilité de recruter des contractuels sur des emplois de direction. Cela nous paraît une bonne mesure, puisqu’elle nous permettra de diversifier les profils des agents de la fonction publique, tout en offrant à des hommes et des femmes qui relèvent du secteur privé l’occasion de mettre leur expérience au service de l’action publique pendant quelques années, sans nécessairement s’inscrire à l’échelle d’une carrière. L’article 32 du statut prévoit les mêmes droits et les mêmes devoirs pour les contractuels et pour les titulaires.

J’ajoute que cet article va également ouvrir des perspectives de carrière, au sein des établissements publics dans lesquels ils travaillent, aux agents publics qui sont en CDI depuis de longues années et qui, parce qu’ils ne sont pas titulaires, ne pouvaient jusqu’ici accéder à des emplois de direction.

Je le répète, il s’agit selon nous d’une bonne mesure, puisqu’elle permettra à la fois de diversifier les profils des personnes recrutées sur les emplois de direction et d’offrir de nouvelles perspectives à celles et ceux qui sont en CDI.

M. Ugo Bernalicis. Monsieur le secrétaire d’État, vous savez qu’il existe une voie d’accès à la fonction publique qui vise précisément à recruter des profils originaux venant du secteur privé : il s’agit du troisième concours, qui s’ajoute au concours interne et au concours externe. Du reste, certains candidats au concours externe ont déjà eu une expérience dans le privé, et les oraux permettent justement de faire sortir du lot les gens qui ont des parcours atypiques et des compétences particulières à faire valoir dans nos administrations.

Je ne crois donc pas qu’il soit nécessaire de faciliter le recrutement de personnes venues du secteur privé – dans la haute administration, on se plaint plutôt du pantouflage que de l’inverse – sauf, naturellement, si le but est de pouvoir placer les copains. Si tel est votre objectif, alors il faut effectivement voter les articles 6 et 7 ! En effet, les « copains » qui viennent dans l’administration n’ont pas envie d’être soumis aux contraintes inhérentes au statut de la fonction publique : le gel du point d’indice, les règles de mobilité, qui font qu’on ne peut pas faire ce qu’on veut comme on veut quand on veut, les principes de neutralité, de loyauté, de continuité du service public et d’intérêt général. Je me doute bien que les personnes qui viendront en CDI sur des emplois de direction dans la fonction publique pour servir telle majorité changeront de travail quand une autre majorité arrivera au pouvoir : je peux le comprendre, car cela répond à une certaine logique, mais ce n’est pas celle du service public à la française, qui a fait la force de l’État, de la fonction publique française et de toutes les garanties qui y sont associées.

Vous êtes en train de détruire l’idée même du service public, ce qui est un peu dommage pour un ancien socialiste – mais ce ne sera pas la première fois… Nous pouvons déjà parfaitement, par la voie du concours, faire entrer des profils originaux dans la fonction publique. Quant aux contractuels, l’immense majorité d’entre eux est en CDD aujourd’hui, et c’est bien le problème. Prenez le cas des policiers, des adjoints de sécurité. Normalement, ils peuvent passer en CDI au bout de six ans de service, mais on s’arrange en général pour leur dire, juste avant qu’ils aient atteint six ans d’ancienneté, qu’ils ne pourront pas être embauchés tant qu’ils n’auront pas passé le concours de gardien de la paix. On pourrait les titulariser, on pourrait réfléchir à un moyen de titulariser les personnels qui sont en CDI depuis trop longtemps. Voilà un débat qui serait intéressant ! Mais ce n’est pas votre choix.

Mme Marietta Karamanli. Monsieur le secrétaire d’État, vous nous avez parlé des emplois de direction, mais cela concerne l’article 7, alors que nous sommes en train de débattre de l’article 6. Le nombre de contractuels dans la fonction publique a connu une relative stagnation au cours des dix dernières années puisqu’il est passé de 16 % en 2007 à 17,6 % aujourd’hui – et non à 20 %. Autrement dit, l’évolution n’est pas énorme. Par ailleurs, les lois dites « Sauvadet » et « Lebranchu » – vous connaissez bien cette dernière, puisque vous l’avez accompagnée – contenaient également des plans de titularisation pour les contractuels. Ce n’est pas le cas de votre loi, et c’est un problème à mes yeux.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Vous avez raison, madame Karamanli : je suis allé un peu vite en besogne en évoquant trop tôt l’article 7. Pour répondre aux remarques qui ont été faites, je dirai d’abord que le recours aux contractuels n’est pas contradictoire avec la préservation du statut des fonctionnaires. Comme je l’ai dit ce matin, nous travaillons actuellement à la réorganisation des concours, qui relève du niveau réglementaire, au développement des concours de troisième voie, ainsi qu’à la modification des critères donnant accès au concours interne. Je ne crois pas que ce travail, que nous menons parallèlement à ce projet de loi, soit antinomique avec le recrutement de contractuels. En cela, je partage le point de vue de la rapporteure.

Madame Karamanli, vous avez évoqué le plan de titularisation contenu dans la loi du 12 mars 2012. Ce plan de titularisation a consisté en l’organisation de nombreux concours, pour lesquels 128 000 emplois réservés avaient été identifiés comme pouvant faire l’objet d’une titularisation de celles et ceux qui les occupaient, ou de toute personne réunissant les critères pour accéder au concours sur emplois réservés. Lorsque nous avons fait le bilan de ce plan de titularisation il y a quelques mois, nous avons constaté que seules 58 000 personnes avaient été titularisées. Nous avions organisé plusieurs dizaines de concours et, pour une bonne moitié d’entre eux, il y avait eu moins de candidats que de postes ouverts, ce qui pose la question de l’attractivité même du statut de fonctionnaire titulaire. Je vous parle d’une période qui s’étend de 2012 à 2019, au cours de laquelle des majorités différentes se sont succédé.

Nous n’avons pas voulu procéder de la même manière, car un nouveau plan de titularisation se serait probablement heurté aux mêmes difficultés. En revanche, nous travaillons, par voie réglementaire, à rendre les carrières plus attractives dans la fonction publique, mais aussi à améliorer les modalités de recrutement et les voies de la titularisation.

La Commission rejette l’amendement CL456.

Article 6 (art. 32 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983) : Mise en place d’une procédure de recrutement d’agents contractuels garantissant l’égal accès aux emplois publics

La Commission est saisie des trois amendements identiques CL113 de M. Stéphane Peu, CL188 de Mme Danièle Obono et CL536 de M. Pierre Cordier, tendant à supprimer l’article 6.

Mme Marie-George Buffet. En permettant un recours accru aux contractuels dans la fonction publique, le projet de loi tourne le dos à la conception française de la fonction publique de carrière, au profit de la fonction publique d’emploi. Or le statut de fonctionnaire est un atout pour la mise en œuvre de la loi dans notre pays et pour l’égal accès aux droits et aux devoirs des citoyens et des citoyennes.

Pourquoi ? D’abord, parce que ce statut évite l’instauration d’un rapport de domination entre une hiérarchie et les fonctionnaires, entre un pouvoir politique et les fonctionnaires. Ensuite, parce que le statut permet d’œuvrer à l’intérêt général sans subir la pression de la précarité. Cela permet, en outre, de garantir une égalité de traitement. En encourageant la contractualisation dans la fonction publique, vous allez petit à petit grignoter le statut. Dans certaines entreprises publiques, on a vu peu à peu diminuer la proportion de ceux qui avaient le statut de fonctionnaire, tandis que la précarité des salariés augmentait.

Par ailleurs, je n’accepte pas l’idée selon laquelle il faudrait des contractuels pour moderniser la fonction publique. Nos fonctionnaires sont pleinement capables, si on leur donne les outils et les moyens nécessaires, de s’adapter aux défis de notre époque et d’y faire face avec leurs compétences et leur dévouement, au service de l’intérêt général et de l’État. Encore faut-il que nous soyons capables de valoriser les métiers de la fonction publique, en offrant à ces hommes et à ces femmes qui sont au service de la République et de l’État la reconnaissance qu’ils méritent, en leur garantissant une évolution de carrière, un bon niveau de salaire et une possibilité de formation continue.

Pour toutes ces raisons, nous demandons, par l’amendement CL113, la suppression de cet article.

Mme Danièle Obono. L’amendement CL188 vise également à supprimer l’article 6, car nous sommes opposés au remplacement des fonctionnaires par des contractuels au sein de la fonction publique. Derrière l’apparence louable d’instaurer une égalité d’accès aux emplois publics pour les contractuels, cet article consacre un principe qui fait déjà partie de notre droit positif, en y ajoutant des dérogations qui soulèvent des incertitudes.

En effet, vous prévoyez une procédure de recrutement pour les contractuels sur des emplois permanents qui permettra de garantir l’égal accès aux emplois publics dans les trois versants de la fonction publique. Mais vous précisez que les modalités de cette procédure, définies par décret en Conseil d’État, pourront être adaptées « au regard du niveau hiérarchique, de la nature des fonctions ou de la taille de la collectivité territoriale ou de l’établissement public ».

Cet article va consacrer le mouvement de contractualisation de la fonction publique en détaillant la procédure de recrutement des agents contractuels. Il participe donc, selon nous, à un alignement du public sur le privé et constitue une atteinte au service public, dont il menace la neutralité.

Vous prétendez défendre le principe de l’égalité d’accès aux emplois publics, mais un flou total entoure les modalités de recrutement et les éventuelles dérogations. De plus, les emplois à la discrétion du Gouvernement pourront échapper à cette procédure de recrutement, ce qui risque de favoriser le népotisme et de multiplier les conflits d’intérêts à des postes élevés. Or le débat public montre que c’est un enjeu important aux yeux d’un grand nombre de nos concitoyens et de nos concitoyennes. Nous ne défendons pas le statut pour le statut, mais pour les garanties et les protections qu’il offre aux agents et la qualité du service rendu. Pour toutes ces raisons, nous demandons la suppression de cet article.

M. Jean-Louis Masson. Nous avons le sentiment que vous avancez masqués avec ce texte, et particulièrement avec cet article. Le fait d’encadrer la procédure de recrutement pourrait être interprété comme un défi lancé aux exécutifs locaux, que l’on accuse parfois de faire des recrutements à visée électoraliste, ce qui est absurde, parce que les présidents des exécutifs locaux sont très soucieux de la bonne gestion de leur commune et de l’adéquation des contractuels aux emplois qui sont proposés.

Vous avancez masqués, disais-je, car on voit bien que votre véritable objectif est de remplacer les fonctionnaires par des contractuels. Si vous le disiez franchement, nous pourrions au moins en débattre, mais vous agissez d’une manière particulièrement perfide. Je suis d’accord avec plusieurs de mes collègues, qui sont pourtant éloignés de ma sensibilité politique : vous avez entrepris de déconstruire la fonction publique, qui est engagée au service de la République, et je ne peux m’en satisfaire. C’est pourquoi notre groupe demande, par l’amendement CL536, la suppression de l’article 6.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’article 6 pose le principe que le recrutement d’agents contractuels en vue de pourvoir des emplois permanents s’effectue au terme d’une procédure qui permet de garantir l’égal accès aux emplois publics selon des modalités fixées par voie réglementaire.

Il s’agit de consacrer dans la loi un principe de transparence corrélé au principe d’égal accès aux emplois publics que proclame l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et dont le Conseil constitutionnel garantit le respect, quel que soit le mode de recrutement.

Il est donc tout à fait logique de fixer un cadre pour la procédure de recrutement contractuel, puisque les employeurs publics seront libres d’y recourir dans un nombre croissant de situations. C’est une exigence de transparence et d’égalité qui suppose, d’une part, la mise en œuvre d’une publicité optimale des emplois à pourvoir et, d’autre part, la détermination de critères de sélection objectifs, afin de ne distinguer que les mérites et les talents propres à chacun.

Enfin, madame Buffet, vous avez dit qu’il fallait pouvoir travailler dans la fonction publique sans subir la pression de la précarité. L’introduction de la prime de précarité pour les contractuels va évidemment lever cette inquiétude. Par ailleurs, la modernisation de la fonction publique ne passera pas seulement par le recrutement de contractuels : de nombreuses autres dispositions contenues dans ce texte contribueront à moderniser la fonction publique et il est évident que nous n’avons nullement l’intention de résumer la modernisation à l’ouverture aux contractuels.

J’émets un avis défavorable sur ces trois amendements.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Lorsqu’on parle du recrutement de contractuels, on imagine souvent qu’il va s’agir de multiplier les contrats courts. Or, comme j’ai eu l’occasion de le dire ce matin, nous trouverons, d’ici la séance, un dispositif pour encadrer et sanctionner le recours à ces contrats courts.

Par ailleurs, on oublie souvent de dire que le recrutement de contractuels peut aussi prendre la forme de contrats courts. Il était déjà possible, dans la fonction publique hospitalière, de procéder à des primo-recrutements en CDI. Avec ce texte, nous élargissons cette possibilité à la fonction publique de l’État. Les employeurs territoriaux avec lesquels Gérald Darmanin et moi-même avons eu des discussions assez longues nous ont dit qu’ils ne souhaitaient pas bénéficier d’un élargissement des possibilités de primo-recrutement en CDI, et nous en avons tenu compte.

J’aimerais, enfin, répondre aux craintes exprimées par Mme Marie-George Buffet d’une extinction progressive du statut. Certes, nous facilitons le recrutement de contractuels, mais nous travaillons parallèlement à accroître l’attractivité des concours et à réformer les écoles qui forment les fonctionnaires – et pas seulement les hauts fonctionnaires. Nous avons déjà lancé ce programme de réforme des écoles : au cours des dernières semaines, nous avons par exemple acté la réforme du cycle de formation des instituts régionaux d’administration, les IRA, qui prendra effet dès la rentrée prochaine. Si nous réformons les écoles de service public et si nous travaillons à l’attractivité et à l’organisation des concours, c’est précisément parce que nous voulons préserver les voies de recrutement de titulaires.

Vous avez dit, madame Buffet, qu’il existait des entreprises publiques où la part des fonctionnaires avait fondu. Vous aviez sans doute en tête l’ancienne administration des PTT : cette évolution s’explique par le fait qu’il n’y avait plus d’entrée par le titulariat, alors qu’aujourd’hui, nous maintenons le recrutement de titulaires. Je rappelle, enfin, que nous maintenons l’article 3 de la loi de 1983, qui affirme le principe de l’occupation des emplois permanents par des agents titulaires.

M. Ugo Bernalicis. Décidément, les choses seraient plus claires si vous disiez que vous voulez faire passer l’ensemble des fonctionnaires sous statut de contractuels !

Vous voulez mettre des contractuels à la place des titulaires, mais vous vous dites que ce n’est pas aussi simple que cela et qu’il ne faudrait pas embaucher n’importe qui n’importe comment. Donc vous fixez une règle pour garantir l’égal accès à l’emploi public. Vous vous dites aussi que vous ne pouvez pas les rémunérer n’importe comment, et vous définissez une grille de salaire. Et comme il faut aussi prévoir des règles de mobilité, vous en créez ! Résultat, vous avez pour ainsi dire dupliqué le statut de la fonction publique à destination des contractuels. C’est, du reste, ce qu’ont fait certaines administrations comme Pôle Emploi où les contractuels, en tout cas les « historiques », se retrouvaient avec un quasi-statut de la fonction publique.

On voit bien que votre projet, c’est de vous passer du concours pour recruter qui vous voulez. Les règles vont être plus ou moins les mêmes que pour les marchés publics : quand vous êtes en dessous d’un certain seuil, la mise en concurrence se limite à faire trois devis. Là, ce sera la même chose : on mettra le poste en ligne, on constatera qu’il y a eu deux ou trois candidatures et on sélectionnera le CV qu’on voudra. On donnera ainsi la pseudo-garantie d’une égalité d’accès à l’emploi public. À ceci près que vous n’en saurez rien : un recrutement direct n’offrira jamais les mêmes garanties qu’un recrutement sur concours.

Quant à la réforme des concours, dites-nous, monsieur le secrétaire d’État, ce que vous comptez faire ! C’est un sujet qui m’intéresse beaucoup, mais les ordonnances renvoient malheureusement ces questions aux calendes grecques. S’agissant de la réforme des IRA, je peux déjà vous dire qu’elle ne rencontrera pas le succès que vous escomptez. La formation initiale dispensée dans les instituts régionaux d’administration, qui était auparavant de deux ans, est passée à un an et vous la ramenez à six mois, parce que vous trouvez que cela coûte trop cher. Or vous avez un petit problème qui s’appelle l’éducation nationale, parce que les gens qui devront travailler en établissement public local d’enseignement (EPLE) doivent être dans le cycle de mutation de septembre…

M. Paul Molac. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, de nous avoir donné des éclaircissements, car j’avoue que je me suis posé beaucoup de questions à la lecture de cet article. J’ai craint qu’il ne favorise le copinage : est-ce que les maires n’allaient pas désormais propulser tel de leurs amis au poste de DGS ? Même si la plupart des élus sont vertueux, je vous l’accorde, il peut arriver que certains d’entre eux se laissent guider par l’affect ou leurs liens d’amitié. L’introduction de garde-fous est donc plutôt de nature à me rassurer, même si j’aimerais en savoir plus.

M. Olivier Marleix. Monsieur le secrétaire d’État, cet article est très intéressant, car il révèle l’espèce d’entre-deux dans lequel vous vous trouvez. Comme cela a déjà été dit, on ne comprend pas bien où vous voulez aller : vous avancez subrepticement sur un sujet qui mériterait pourtant une attitude plus franche. De deux choses l’une : ou bien le recours aux contractuels demeurera exceptionnel, auquel cas ces dispositions ne sont même pas nécessaires – c’est d’ailleurs ce que le Conseil d’État vous a dit : le pouvoir réglementaire peut apprécier qui il veut recruter ; ou bien vous voulez aller vers une généralisation du recours aux contractuels et vous vous dites que vous devez quand même respecter la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui prévoit un égal accès des citoyens aux charges publiques.

Mais si votre but est bien celui-ci, ce n’est pas de cette manière qu’il faut vous y prendre. La Constitution dispose clairement, dans son article 34, que la loi fixe les règles concernant « les garanties fondamentales accordées aux fonctionnaires civils et militaires ». Si vous voulez vraiment élargir les modes de recrutement à la fonction publique par voie contractuelle, il faut aller au bout et c’est à la loi de fixer des règles. Vous ne pouvez pas vous contenter de ce machin hybride : un copier-coller de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et le renvoi à un décret en Conseil d’État, sans savoir ce qu’il y aura dedans.

Madame la rapporteure, vous avez évoqué le principe de transparence. Je suis désolé, mais je n’en vois pas trace dans cet article. Il faut que la loi soit plus précise et qu’elle fixe des règles claires : ces emplois feront-ils, oui ou non, l’objet de publicité ? Les critères de recrutement seront-ils, oui ou non, rendus publics, comme c’est le cas pour les marchés publics ? Vous ne dites rien de tout cela et vous restez dans une sorte d’entre-deux. Malheureusement, cela donne un sentiment de bricolage.

Mme Cécile Untermaier. Nous n’avons pas déposé d’amendement de suppression de cet article, parce que la volonté de fixer des règles de procédure pour l’accès à un emploi donné nous apparaissait plutôt comme une bonne chose. Cela me semble une condition indispensable, mais non suffisante.

Vous renvoyez à un décret, mais nous souhaiterions en savoir davantage sur son contenu. Par ailleurs, vous parlez d’une « procédure » garantissant l’égal accès aux emplois publics. Qu’entendez-vous par là ? S’agit-il d’une procédure de sélection ? C’est en tout cas ce que nous demandons : il faut que la loi précise clairement la nature de cette procédure, dans la mesure où nous sommes en train de toucher au statut de la fonction publique. Je ne dis pas qu’il s’agit d’un texte sacré, mais il est tout de même protégé par la Constitution et nous devons faire preuve d’une grande prudence.

C’est une bonne chose que le Gouvernement rappelle le principe de l’égal accès aux emplois publics, mais comment garantir cette égalité d’accès à des personnes ayant des statuts aussi différents que les fonctionnaires et les contractuels ? C’est une vraie question. Que signifie l’égal accès, dès lors que l’on a deux dispositifs totalement différents ? J’attends vos éclaircissements sur ce sujet.

La Commission rejette les amendements identiques.

La Commission est saisie de l’amendement CL159 Mme Coralie Dubost.

Mme Coralie Dubost. Tel que rédigé, l’article 6 commence par l’exception avant d’énoncer le principe. Nous proposons d’inverser cette rédaction, ne serait-ce que pour une raison symbolique compte tenu de toutes les craintes exprimées même si, à mon avis, elles sont injustifiées. Dans le secteur privé, il existe de nombreuses procédures qui permettent un recrutement non discriminatoire, fondé sur des compétences objectives, sans verser dans le copinage. Il me semble néanmoins qu’il serait préférable de poser d’abord le principe et ensuite l’exception. J’avoue avoir besoin d’éclaircissements sur le choix de la rédaction actuelle.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Dans la mesure où la rédaction actuelle prévoit explicitement que les emplois laissés à la décision du Gouvernement sont clairement hors du champ d’application de l’article, je ne vois pas l’intérêt de la reformulation proposée. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Même avis. Nous avons voulu poser le principe de l’élargissement des possibilités de recours au contrat mais en précisant d’emblée que les emplois dits supérieurs ou à la discrétion du Gouvernement n’étaient pas concernés. En termes de rédaction pure, cela nous paraît plus cohérent avec le reste du droit.

Cela étant, votre amendement renvoie à certaines questions comme celle qui vient d’être posée par Mme Untermaier : comment garantir l’égal accès et organiser la procédure de sélection ? En fait, « sélection » est un terme réducteur. Ce mot peut renvoyer à un concours avec des items très objectifs alors que dans l’intégralité des processus de recrutement, nous sommes davantage dans une appréciation des compétences des candidats par un jury ou par un directeur des ressources humaines lorsque le recrutement est effectué par une seule personne.

Un décret, publié le 28 décembre dernier, pose l’obligation générale de publicité des emplois vacants. Cette obligation concerne les emplois de titulaires et les emplois contractuels de plus d’un an – nous n’avons pas voulu l’étendre aux contrats de remplacement, notamment pour des raisons pratiques.

Ce décret vient compléter le décret du 9 mai 1995 sur le délai entre l’ouverture et la clôture des inscriptions, les modalités d’accusé de réception de la candidature et la possibilité de modifier le dossier jusqu’à la date de candidature.

En termes d’égalité d’accès, il est aussi indiqué que les candidats doivent tous être auditionnés par le même jury quand il y en a un, quelle que soit sa composition. Un des critères de l’égalité réside dans le fait que ceux qui effectuent le choix soient les mêmes pour tous les candidats, autrement dit qu’il n’y ait pas de jurys à géométrie variable. Cela peut actuellement arriver et le texte nous permet de mettre fin à ces pratiques.

Dans le futur décret d’application du texte, nous voulons préserver une forme de souplesse : dans la fonction publique territoriale par exemple, nous ne pouvons pas imposer les mêmes modalités de recrutement à une collectivité de quelques centaines d’habitants et à une autre de taille très importante, y compris pour des raisons de capacités d’organisation des services. En revanche, nous devons veiller à ce qu’il y ait des caractéristiques permanentes et des points communs, qu’il s’agisse de la composition du dossier de candidature, des modalités et conditions d’examen de ces dossiers, des précisions sur une éventuelle convocation à un entretien, de la fiche de poste, de l’établissement des grilles d’évaluation des candidatures, du processus de validation ou de sélection des candidats, de l’articulation entre candidats titulaires et contractuels : le projet donne aux recruteurs le choix entre des candidats titulaires ou contractuels pour certains postes, mais pour d’autres types de fonctions, nous en restons au principe dérogatoire de constat de la vacance d’offres de candidatures de titulaires.

Dans le futur décret, nous préciserons aussi les modalités d’une nouvelle déclaration de vacance en cas de recrutement infructueux et d’encadrement de la déclaration d’infructuosité de la procédure de recrutement.

Pour résumer, le décret du 28 décembre 2018 complète celui du 9 mai 1995, et un deuxième décret sera publié, en application du présent texte, qui comportera les éléments que j’ai mentionnés. Pour des raisons purement rédactionnelles, nous écartons d’emblée la question des nominations en conseil des ministres. Pour le reste, nous faisons en sorte que le texte et les futurs décrets garantissent le principe d’égal accès à l’emploi public pour tous les candidats.

C’est ce qui justifie ma demande de retrait. J’espère avoir aussi apporté quelques éléments de réponse aux interrogations qui ont été exprimées sur les modalités de sélection.

Mme Coralie Dubost. Au bénéfice de ces explications, je retire mon amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL457 de Mme Marietta Karamanli.

Mme Marietta Karamanli. Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés vise à préciser la nature de la procédure pour le recrutement des agents contractuels, en disposant qu’il s’agit d’une procédure de sélection. Cet élément essentiel est rappelé dans le statut général de la fonction publique. Nous ne sommes pas contre l’article 6, je le répète, mais nous pensons qu’il faut apporter des précisions et des garanties.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je comprends le sens de cet amendement mais j’émets un avis défavorable. La notion de procédure inclut bien sûr les modalités stricto sensu de sélection des candidats, mais revêt un sens plus large, qui correspond finalement au cadre du recrutement contractuel au sein duquel figure, par exemple, le principe de publicité des vacances et des créations d’emplois, conformément à un impératif de transparence. J’espère que cette explication rassurera M. Marleix.

Mme Cécile Untermaier. Monsieur le secrétaire d’État, j’ai bien entendu vos explications, mais l’existence d’une procédure de sélection signifie seulement qu’il y a une procédure de nature à départager divers candidats sur des critères connus au préalable. Vous voulez un dispositif large et adaptable aux collectivités mais cela ne change rien aux modalités de publicité, de délais et autres.

Il me semble important que les agents et les contractuels de la fonction publique sachent qu’il y aura une procédure de sélection. C’est déjà compliqué de faire comprendre à des fonctionnaires qu’ils vont se trouver en concurrence avec des contractuels pour un poste qu’ils ont vocation à occuper ; ce serait un manquement de ne pas préciser très clairement dans le texte qu’il y aura une procédure de sélection objective. Cela ne coûte finalement pas grand-chose que de le rajouter.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Le problème n’est pas tant sur le fond – une procédure de recrutement implique une sélection – que sur la forme : le mot « sélection » renvoie à des modalités plus restrictives que celui de « procédure ». En vous donnant des éléments du décret, je songeais notamment aux petites collectivités territoriales qui n’ont pas forcément les moyens d’organiser ce qui s’apparenterait à un concours, mais qui pourraient plutôt porter une appréciation des compétences des uns et des autres.

Nous pouvons donc nous retrouver sur l’idée mais le fait d’écrire « procédure de sélection » pourrait devenir trop enfermant et contraignant. Nous préférons garantir les fondamentaux que sont l’égalité d’accès et l’égalité des candidats entre eux.

Mme Marietta Karamanli. Monsieur le secrétaire d’État a évoqué la nécessité d’une appréciation lors des recrutements. Le dictionnaire Larousse donne une définition similaire du terme de sélection : « action de choisir les personnes ou les choses qui conviennent le mieux ». C’est la même chose que l’appréciation.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CL101 de Mme Laurence Gayte.

Mme Laurence Gayte. Le Gouvernement a pris la mesure des biais existant au moment d’un recrutement et il a mis en place des modules de formation spécifiques pour tous les jurys de concours. La lutte contre les discriminations – notamment celles qui sont fondées sur le sexe et le genre – passe d’abord par une prise de conscience des stéréotypes avec lesquels nous vivons quotidiennement. Mieux identifiés, ils sont mieux combattus et ainsi nous pourrons assurer un recrutement exclusivement fondé sur le mérite et les compétences.

La Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances souhaite que les personnes assurant le recrutement des contractuels aient également accès à ces formations. Le projet de loi prévoit que le recrutement s’assurera de l’égal accès des candidats. La formation visée ne pourrait que contribuer à l’atteinte effective de cet objectif constitutionnel.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je partage l’objectif de cet amendement mais je précise que ces formations à destination des recruteurs existent déjà en l’état actuel du droit, sans qu’il soit nécessaire de l’insérer ici dans la loi. Je vous propose donc de retirer votre amendement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Cette possibilité est prévue à l’article 6 de la loi de 1983. Le droit existant, y compris d’un point de vue réglementaire, le précise. Cela sera réaffirmé dans le décret que nous aurons à prendre en application de l’article 6.

Depuis ma prise de fonctions aux côtés de Gérald Darmanin, nous avons veillé à sensibiliser tous les jurys de recrutement de titulaires ou de contractuels à ces questions de refus des discriminations. Nous avons aussi organisé des campagnes de testing pour vérifier que l’identité de genre et l’orientation sexuelle n’étaient pas des critères discriminants pour l’entrée dans tel ou tel corps ou catégorie d’emplois. C’est un chantier auquel nous attachons beaucoup d’importance.

L’amendement est retiré.

La Commission examine les amendements identiques CL878 de la rapporteure et CL688 de M. Guillaume Gouffier-Cha.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Dans mon propos liminaire sur l’article 6, j’évoquais la transparence. L’amendement CL878 devrait rassurer quelques-uns d’entre vous : il rappelle la nécessité de garantir la publicité des vacances et créations d’emplois. Ce principe de transparence, dont les juridictions contrôlent le respect, doit structurer les modalités de la procédure qui seront précisées par décret en Conseil d’État en vue de garantir l’égal accès aux emplois publics.

M. Guillaume Gouffier-Cha. Au quotidien, les agents titulaires et contractuels de la fonction publique travaillent ensemble et je suis persuadé qu’ils remplissent leur mission avec le même attachement aux valeurs qui régissent notre fonction publique et les services publics. Si nous sommes attachés à l’ouverture et à l’élargissement au contrat, c’est dans un souci d’améliorer le fonctionnement de nos services publics et de répondre à des besoins criants. Dans ce cadre, nous sommes attachés à la transparence et à un encadrement des règles de recrutement afin de garantir un égal accès aux emplois publics. C’est pourquoi nous avons déposé l’amendement CL688.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Les quatre lois statutaires et le décret du 28 décembre 2018 prévoient déjà le principe de publicité et de transparence. Cela étant, ce décret s’arrête à des modalités sur la publicité et la transparence. Il peut être de bon aloi de réaffirmer dans la loi, comme le proposent Mme la rapporteure et M. Gouffier-Cha, le principe de la transparence pour l’ensemble des recrutements. Même si je considère que ces amendements sont assez largement – pour ne pas dire pleinement – satisfaits, j’émets un avis de sagesse.

M. Olivier Marleix. Au moment de mon intervention sur l’insuffisance des garanties apportées pour être conforme à l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, je n’avais pas connaissance de l’amendement de la rapporteure, je l’avoue. Cet amendement me réjouit mais je pense que le législateur intervient, une fois encore, a minima : on pose une règle, la publicité, entraînant plus ou moins de transparence. S’agissant des emplois permanents dont il est question à l’article 6, on aurait pu aller un peu plus loin, notamment sur les critères. En légiférant si peu et en revoyant au Conseil d’État, je me demande si nous ne tombons pas dans l’incompétence négative.

La Commission adopte les amendements.

Puis elle adopte l’article 6 modifié.

Après l’article 6

La Commission est saisie de l’amendement CL26 de M. Olivier Marleix.

M. Olivier Marleix. Cet amendement vise à pointer une incohérence du texte. Une fois encore, nous sommes dans un entre-deux. Contrairement à ce qu’il semble annoncer quand il communique sur ce texte, le Gouvernement n’a pas fait le choix d’un recours au contrat en parallèle du recours au statut. S’il a vraiment la volonté d’élaborer deux modes de recrutement équivalents, il doit en tirer toutes les conséquences. Comme l’avait suggéré Jean-Ludovic Silicani dans un rapport il y a quelques années, il faut alors réécrire la loi de 1983 et prévoir deux voies d’accès aux fonctions publiques.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je ne suis pas favorable au retournement conceptuel qu’opère cet amendement. Je crois nécessaire de maintenir le principe posé par l’article 3 de la loi du 13 juillet 1983, à savoir que les emplois permanents sont pourvus par des fonctionnaires, sauf dérogation prévue par une disposition législative : c’est en cela que le statut de la fonction demeure d’actualité et qu’il constitue la première porte d’entrée dans la fonction publique. Cela n’empêche évidemment pas de le moderniser et de développer d’autres voies d’accès, notamment par l’élargissement des facultés – car il ne s’agit aucunement d’obligations – de recourir à des agents contractuels. Il ne s’agit pas d’avoir à choisir entre des agents tous contractuels ou tous fonctionnaires, il s’agit de laisser le libre arbitre aux employeurs publics en fonction de leurs besoins de service.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Monsieur Marleix, votre amendement ne me surprend pas puisque, début avril 2019, vous avez donné une interview dans laquelle vous posiez la question du maintien du statut pour l’ensemble des fonctions et des métiers de l’État.

Nous avons une conviction : le maintien du statut – ce que nous voulons –, passe par le maintien de l’article 3 de la loi 1983 qui pose le principe de l’occupation des emplois permanents par des agents titulaires. Avec un petit peu de malice, je note que M. Masson nous a reproché de vouloir revenir sur ce principe posé à l’article 3 et par le fait de remettre en cause le statut. C’est un peu différent de ce que vous proposez avec cet amendement.

Nous sommes favorables au maintien de l’article 3 même si, comme l’a dit Mme la rapporteure, nous travaillons à élargir les dérogations – j’insiste sur ce terme – pour le recrutement des contractuels.

M. Ugo Bernalicis. Monsieur Marleix, c’est comme les sessions extraordinaires à l’Assemblée nationale : c’est une dérogation mais, finalement, elles sont systématiques… Là, c’est pareil. Le Gouvernement et la rapporteure avancent masqués. Leur objectif est bien celui que vous pouviez poursuivre lorsque vous vous interrogiez sur le périmètre et l’utilité du statut de la fonction publique.

M. Olivier Marleix. Monsieur le secrétaire d’État, notre vision est très claire. Nous vous reprochons d’avancer un peu à tâtons, masqué. En fait, vous ne proposez pas de transformer la fonction publique, vous proposez une espèce de mitage progressif du statut : vous rajoutez des dérogations aux cinq qui existent déjà pour le recrutement de contractuels.

Pour notre part, nous sommes favorables à une vraie réflexion sur ce que doit être demain le périmètre de la fonction publique. Comme Mme Buffet, je pense que certaines fonctions sont extrêmement importantes – cela ne doit pas vous faire sourire – et pour lesquelles il faut une garantie de neutralité pour l’usager du service public. On imagine assez mal des agents des services fiscaux tentés d’être instrumentalisés par leur hiérarchie pour fournir certains éléments en violant la loi au passage. Pour certaines fonctions, le service public ne peut être exécuté que par des personnels sous statut, vous ne nous ferez pas dire le contraire. En revanche, ce statut n’est pas forcément nécessaire pour d’autres missions – on le voit quand le recours aux contractuels dépasse déjà largement le taux de 20 % – et on peut avoir besoin de plus d’agilité pour le recrutement à des fonctions de direction.

Nous vous reprochons de ne pas avoir fait ce travail et de rester dans une espèce d’entre-deux. Cet amendement est une incitation un peu provocatrice à une clarification absente de ce texte. Vous ajoutez de la confusion. Dans son avis, le Conseil d’État a d’ailleurs eu des mots très durs à ce sujet : « la multiplication des possibilités, déjà nombreuses, de recruter des agents contractuels, sans qu’il soit possible de dégager des modifications proposées des critères simples et clairs, ne contribue pas à la lisibilité du dispositif ni à la bonne appréciation de ses conséquences. »

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL458 de M. Boris Vallaud.

M. Hervé Saulignac. Il y a quelques instants, la rapporteure a dit qu’il fallait laisser aux employeurs leur libre arbitre dans le recrutement. Est-ce une phrase malheureuse qui lui a échappé ? En tout cas, il n’y a actuellement pas de libre arbitre laissé aux employeurs en matière de recrutement. Et dans l’intérêt du service public, et donc des Français, nous ne souhaitons pas que leur soit laissé un libre arbitre.

C’est tout l’objet de cet amendement garde-fou, prudentiel, que vous ne pouvez qu’approuver : il dit tout simplement que, dans le statut général de la fonction publique, il y a impossibilité de réserver un emploi public à un agent contractuel, en cas de vacance. Cela ne veut pas dire qu’il ne peut pas, dans certaines conditions, être confié à un contractuel. Cela veut dire qu’il ne peut pas être, par avance, réservé un contractuel.

Pour quelle raison nous semble-t-il important d’introduire cette mesure prudentielle ? On voit le risque, notamment dans les collectivités territoriales : des exécutifs pourraient constituer une forme d’administration politique. Personne ne peut souhaiter cela pour la République. Avec le concours, la République recrute ses serviteurs indépendamment de toute autre considération que leurs compétences. Avec le contrat, c’est à peu près l’inverse… Nous voulons nous prémunir d’une forme de dérive : on ne peut pas remplacer des fonctionnaires statutaires par des contractuels au motif que nous laisserions leur libre arbitre aux employeurs.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. La notion de libre arbitre était particulièrement choisie : lors de nos échanges, vous nous opposez souvent la libre administration des collectivités territoriales… Et à vous entendre, elle serait quasiment au-dessus des lois ! Je vous renvoie à la responsabilité des élus locaux qui, en conscience et vertu de leur libre arbitre, vont recruter en ouvrant les postes à des fonctionnaires et à des contractuels sans présupposés. Ils choisiront la compétence, l’opportunité qu’ils estimeront nécessaire en confiance parce qu’ils ont la libre administration et parce qu’ils ont la confiance de leurs électeurs.

M. Hervé Saulignac. C’est extrêmement dangereux !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Le droit actuel, notamment les lois de 1983, 1984 et 1986, interdisent de réserver un emploi à un contractuel. Nous donnons plus de liberté d’avoir recours à des contractuels sans jamais autoriser à réserver un emploi à un contractuel. En l’état du droit, votre amendement est déjà satisfait.

La Commission rejette l’amendement.

Article 7 (art. 3 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 47 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et art. 53 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986) : Extension de la possibilité de recrutement contractuel sur les emplois de direction de la fonction publique

La Commission examine les amendements identiques CL105 de M. Stéphane Peu, CL189 de M. Ugo Bernalicis et CL463 de Mme Marietta Karamanli.

Mme Marie-George Buffet. Cet article autorise le recrutement de contractuels pour les emplois de direction de l’État, des collectivités territoriales et des établissements de la fonction publique hospitalière.

Ce dispositif avait déjà été introduit dans la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel avant d’être censuré par le Conseil constitutionnel en tant que cavalier législatif.

L’étude d’impact est très claire sur les objectifs du dispositif : « La disposition envisagée vise à la fois à diversifier les viviers de recrutement dans l’encadrement supérieur et dirigeant de la fonction publique et à favoriser la fluidification des parcours professionnels entre le secteur privé et le secteur public. »

Si elle peut sembler séduisante, cette idée comporte de nombreux risques : confusion des finalités du privé et du public, multiplication des conflits d’intérêts, captation de l’action publique par des intérêts privés.

Revenons sur cette notion de libre arbitre, madame la rapporteure. Un maire peut choisir entre un contractuel et un fonctionnaire, mais il y a une différence entre les deux. Le fonctionnaire est protégé par son statut ; le contractuel est tenu d’appliquer les directives de celui qui l’a choisi, ce qui peut le mettre en difficulté, quelles que soient sa bonne foi et ses compétences, entre, d’un côté, le respect de la loi et des valeurs de la République et, d’un autre côté, les exigences de celui qui l’a embauché en usant de son libre arbitre. C’est pour cela qu’il faut un statut des fonctionnaires à même de garantir leur indépendance et leur capacité à résister à des pressions politiques.

M. Ugo Bernalicis. Au début, je me suis posé une question sur cet article : pourquoi les emplois de direction ? C’est clairement la volonté du Président de la République, du candidat Emmanuel Macron, de faire le ménage au sein de l’administration de de l’État et des administrations centrales pour y avoir des gens complètement loyaux au sens politique du terme, des serviteurs zélés de la politique du Gouvernement, s’écartant peut-être d’un libre arbitre qui pourrait leur être salutaire et qui, pour le coup, est bien davantage garanti par le statut.

Finalement, je me suis dit : ne serait-ce pas pour placer à des postes à responsabilité certains copains qui gravitent dans de grandes entreprises comme Vinci, Bouygues, Total, Sanofi, bref, tous ceux qui ont financé la campagne du Président de la République ? (Murmures.) J’entends dire derrière moi qu’ils sont beaucoup mieux payés dans ces entreprises. C’est tout le problème ! C’est pour cela qu’il faut avoir recours aux contractuels puisque, dans le contrat, vous pouvez discuter de votre niveau de rémunération, ce que vous ne pouvez pas faire avec ces fichues grilles indiciaires de la fonction publique. Je sais que vous n’aimez pas les rigidités, les freins, les ennuis, les embêtements. Là, vous avez l’occasion de vraiment libérer les énergies des copains – qui peuvent évidemment être des copines, ne voyez aucune distinction de genre dans mon propos.

Je crois que c’est vraiment la volonté du chef de l’État. Le secrétaire d’État Dussopt la poursuit d’une drôle de manière. Je ne savais pas que c’était dans son ADN politique ; mais lui-même s’étant recasé comme un ami, peut-être est-ce la poursuite d’un engagement récent…

C’est pourquoi, par notre amendement CL189, nous nous opposons formellement et intégralement à cet article 7, peut-être plus qu’à d’autres. J’adjure les directeurs et les cadres des hautes administrations de se défendre et de ne pas laisser leurs seuls subordonnés aller manifester !

Mme Marietta Karamanli. Nous aussi, par notre amendement CL493, souhaitons la suppression de cet article. Il ne s’agit pas ici de nous opposer d’une manière dogmatique au recours à des agents contractuels dans la fonction publique ; nous reconnaissons qu’il peut répondre à des besoins. Cependant, la loi du 13 juillet 1983 précise clairement que le recours à des contractuels est une dérogation en cas de besoin de compétences très particulières.

Mon collègue Ugo Bernalicis a rappelé certains éléments problématiques de cet article. Il ouvre des emplois de direction aux agents contractuels, en sortant du cadre dérogatoire. L’étude d’impact montre que le nombre de postes concernés passerait de 638 à 3 800 dans la fonction publique de l’État, de 1 522 à 2 700 dans la fonction publique territoriale, et de 284 à 365 dans la fonction publique hospitalière. On voit bien où se trouvent les enjeux. En revanche, l’étude d’impact ne nous permet pas de mesurer clairement les conséquences de cet article sur l’organisation et sur l’esprit même qui anime la fonction publique.

Nous sommes contre cet article, monsieur le secrétaire d’État, parce que la priorité d’un projet de loi sur la fonction publique doit être de donner du sens aux missions des fonctionnaires. Cela n’apparaît pas et nous craignons le pire avec cette ouverture de postes de direction aux contractuels.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis là encore – et sans surprise, je le concède – défavorable à ces amendements de suppression.

Je tiens à rappeler que certains emplois de direction de la fonction publique sont déjà ouverts aux recrutements contractuels dans les trois versants. Le présent article vise à élargir le périmètre des emplois de direction susceptibles d’être pourvus par des agents contractuels en rendant ainsi accessibles les emplois de direction de l’État, les emplois fonctionnels des collectivités et établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre regroupant plus de 40 000 habitants – contre 80 000 actuellement –, et les emplois supérieurs hospitaliers. Les chiffres cités par Mme Marietta Karamanli sont à rapporter au nombre total de 5 millions de fonctionnaires.

Cette mesure s’inscrit pleinement dans la volonté de décloisonner la fonction publique, en favorisant les mobilités avec le secteur privé. L’administration ne doit pas être un vase clos ni se recroqueviller sur elle-même.

L’intérêt de cette mesure, c’est de ne pas priver la haute administration des talents qui existent dans les entreprises et qui seraient volontaires pour poursuivre leur carrière dans le service public, sans altérer en rien les talents de nos fonctionnaires. L’administration a tout à gagner en bénéficiant de leur expertise dans des postes à haute responsabilité où ils pourront mettre leurs compétences au service, précisément, de l’intérêt général.

L’ouverture de l’accès à ces emplois de direction aux non-titulaires offre aussi des perspectives de progression professionnelle pour les agents contractuels qui travaillent déjà au sein de la fonction publique et dont les évolutions se heurtent à des obstacles qui ne sont liés en rien à leurs mérites personnels, mais uniquement à leur situation juridique.

Bien sûr, cette ouverture doit aussi s’accompagner de garanties qui devront notamment décliner le principe de l’égal accès aux emplois publics, affirmé par l’article 6 du projet de loi. Les décrets en Conseil d’État prévus afin de préciser l’application de ces dispositions devront contribuer à professionnaliser la procédure de recrutement. Le renforcement des obligations déontologiques est également une nécessité, et nous aurons l’opportunité d’en rediscuter lors de l’examen du titre III. Les employeurs publics ont, effectivement, de grands pouvoirs. Comme nous le savons, de grands pouvoirs donnent de grandes libertés, mais aussi de grandes responsabilités.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Cet élargissement des viviers ne va pas seulement permettre de recruter des gens issus du secteur privé à des postes de direction. Il va aussi permettre à des contractuels de droit public – et notamment des personnes en CDI – d’avoir accès à des emplois de direction auxquels ils ne peuvent pas prétendre actuellement alors qu’ils mènent une carrière dans la fonction publique. Pour eux, c’est une mesure de justice.

Madame Buffet, je voudrais vous apporter un contre-argument. Vous avez évoqué la possibilité de la pression et la nécessité de l’indépendance à l’égard des élus, notamment pour les emplois de direction dans la fonction publique territoriale. Nous abaissons le seuil à partir duquel il est possible de recruter des contractuels pour les emplois de direction : il passe de 80 000 à 40 000 habitants. Même avec cet élargissement, nous restons à un niveau de collectivité où les emplois de direction sont fonctionnels : même titulaires, les agents qui les occupent sont détachés. Cette question de la confiance entre l’agent concerné et son élu employeur trouve aussi là une limite ou une application : l’agent titulaire détaché sur l’emploi fonctionnel peut se faire remettre à disposition assez rapidement, en tout cas aussi rapidement que l’on aurait pu licencier un agent contractuel pour défaut de confiance. Pour la fonction publique territoriale, que vous aviez prise comme illustration de votre propos, je pense qu’à partir de 40 000 habitants, il s’agit d’emplois fonctionnels.

C’est l’une des raisons pour lesquelles, en accord avec les représentants d’employeurs, nous avons choisi le nombre de 40 000 et non pas 20 000 ou 10 000 comme cela avait pu être proposé. Plus nous descendons dans la grille démographique et moins nous avons de l’emploi fonctionnel dans les directions, ce qui incitait à une certaine prudence. À partir de 40 000 habitants, les emplois de direction sont en général fonctionnels.

M. Robin Reda. Je ne suis pas d’accord avec la dernière affirmation du secrétaire d’État sur les strates démographiques, mais nous aurons l’occasion d’y revenir lors de l’examen d’un prochain amendement.

Les propos de Mme Buffet m’inquiètent. Elle décrit un élu dont les volontés clientélistes et folles seraient limitées par l’intervention d’un directeur général des services. Cette caricature me paraît assez dangereuse. Le fondement de tout cela, c’est la relation de confiance : que la personne en position de responsabilité soit un fonctionnaire titulaire ou un contractuel, elle engage de toute manière, à un moment à un autre, la responsabilité politique voire juridique et judiciaire de l’élu. Mme Buffet prend le cas d’un élu qui pourrait essayer de se détourner de la loi ; on pourrait prendre celui du fonctionnaire, tiers de confiance, qui profiterait de sa technicité pour prendre des libertés avec la législation dans le dos de l’élu. Le statut de la fonction publique ne vaut pas probité et loyauté : tout dépend de la relation de confiance qui existe entre l’élu et son directeur général ou son directeur général adjoint.

Mme Marie-George Buffet. Ce que vous dites, monsieur le secrétaire d’État, est exact, mais il y a quand même une différence entre le fonctionnaire qui occupe un poste fonctionnel et le contractuel lorsque survient un désaccord ou un manque de confiance avec le responsable élu : le premier gardera son emploi de fonctionnaire alors que le second sera obligé d’en rechercher un autre…

Je ne dis pas que le statut de fonctionnaire est un gage de probité mais je voudrais quand même que l’on reconnaisse ici, monsieur Reda, que les fonctionnaires de la République française ont fait preuve, génération après génération, de beaucoup de probité et d’engagement au service de la République. J’ai toujours un réflexe de colère quand j’entends le « tous pourris » à l’égard des élus. Cela vaut aussi pour les fonctionnaires. Il peut y avoir des individus malhonnêtes, mais la masse des fonctionnaires fait son travail au service de l’État. Il faudrait quand même le souligner. Respectons ces hommes et ces femmes qui travaillent au service de l’État et qui n’ont pas toujours la reconnaissance qu’ils méritent – je pense notamment aux fonctionnaires de l’éducation nationale.

M. Didier Paris. Dans la fonction publique comme ailleurs, il est nécessaire de garantir une certaine dynamique. Nous essayons de décloisonner la haute fonction publique, ce qui suppose une ouverture des corps et une certaine mobilité. Nous en avons d’autant plus besoin que l’acte administratif devient plus complexe et les phénomènes économiques et sociaux de plus en plus divers et difficiles à appréhender. Je ne vois donc pas pour quelles raisons les décideurs publics, locaux ou nationaux, se priveraient de compétences plurielles et de possibilités de mobilité et de transversalité indispensables.

J’ai connu la fonction publique de l’État, j’ai été directeur général d’une région ; cela n’a posé aucune difficulté : au contraire, on potentialise les parcours individuels des uns et des autres. Il n’en est pas moins vrai que, dans les emplois dits fonctionnels, le lien de proximité et de confiance est essentiel : que vous soyez fonctionnaire de l’État ou employé sur la base d’un contrat de droit privé, dès lors que la confiance n’existe plus, vous quittez le poste de haute responsabilité qui vous a été confié. On retourne alors dans l’administration, ce qui offre certes plus de sécurité, ou dans la sphère privée, conformément au contrat passé entre l’administration et l’agent.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle examine l’amendement CL461 de M. Boris Vallaud.

M. Hervé Saulignac. Cet amendement de repli s’appuie en grande partie sur l’avis du Conseil d’État qui considère que l’étude d’impact jointe au projet de loi « ne fournit aucune donnée chiffrée quant au nombre de fonctionnaires en attente d’affectation ni ne présente d’éléments relatifs à l’impact possible d’un accroissement sensible du nombre d’agents contractuels occupant dans le cadre de contrats à durée indéterminée tous types d’emplois dans la fonction publique. » Manière politiquement correcte – on connaît le Conseil d’État – de dire que tout cela est très flou, pour ne pas dire très mal maîtrisé…

Notre amendement vise donc à réduire le périmètre d’ouverture aux contrats dans les emplois de direction de la fonction publique de l’État et dans la fonction publique territoriale. Ainsi, ce ne seront plus tous, mais seulement certains emplois de direction, dont la liste sera fixée par décret en Conseil d’État, de l’État et de ses établissements publics qui seront ouverts au contrat.

Nous proposons par ailleurs que l’ouverture au contrat pour les postes de DGS, DGS adjoint et DGST ne soit possible que pour les communes et EPCI de plus de 60 000 habitants. Ouvrir l’ensemble des emplois de direction aux agents contractuels sort du cadre de la dérogation. Ce recours au contrat par dérogation avait été fixé dans la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; or cette ouverture tous azimuts ne respecte pas ce principe de dérogation.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Concernant l’ouverture des emplois de direction dans la fonction publique de l’État, l’alinéa 2 prévoit bien qu’un décret précisera la liste des emplois concernés.

Je suis par ailleurs défavorable au seuil de 60 000 habitants dans le versant territorial : le seuil de 40 000 habitants correspond à celui de création des emplois fonctionnels pourvus par des agents de la catégorie A+, ce qui correspond concrètement aux grades de directeur, d’administrateur et d’ingénieur en chef. C’est le seuil que j’avais défendu lors de l’examen du projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel ; je serai donc cohérente avec moi-même.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Le seuil des 40 000 habitants a été fixé pour deux raisons : l’existence effective d’emplois fonctionnels, comme je l’ai expliqué tout à l’heure, et le fait qu’il correspond au seuil du droit commun pour autoriser le recrutement d’administrateurs territoriaux dans la fonction publique territoriale.

Pour les autres directions de la fonction publique de l’État, nous ne proposons pas une ouverture générale comme pour la fonction publique territoriale pour la seule et bonne raison que certains emplois de direction requièrent des prérogatives de puissance publique et relèvent du champ régalien. Nous n’envisageons donc pas d’ouvrir la possibilité de recruter des contractuels dans des emplois de direction sur des postes qui auraient un caractère régalien.

M. Olivier Marleix. Malgré tous mes efforts, j’ai parfois du mal à suivre la cohérence de certains raisonnements.

Vous venez de nous dire, madame la rapporteure, que vous reteniez le seuil de 40 000 habitants pour pouvoir recruter des contractuels dans des emplois fonctionnels de directeur général au motif que c’est celui à partir duquel on avait la possibilité de recruter un administrateur territorial. Je trouve cela un peu dommage : c’est à partir du moment où on peut recruter un administrateur territorial que vous proposez que l’on puisse s’en priver !

N’y voyez pas le seul plaisir de relever une contradiction : nous avons le plus grand besoin de savoir, une fois toutes ces dispositions adoptées, quel intérêt des jeunes gens qui rêvent de servir les collectivités locales ou l’État dans le service public auront à passer le concours à ces postes d’attaché, d’attaché territorial, d’ingénieur territorial ou d’administrateur territorial. Je ne comprends pas votre raisonnement.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Il n’est pas bien grave que vous ne suiviez pas mon raisonnement… En tout état de cause, l’avantage du seuil de 40 000 habitants tient au fait que c’est celui à partir duquel on estime être obligé de faire appel à des compétences bien particulières. C’est ce qui permet de recruter en catégorie A + ; il s’agit bien de postes de direction, d’emplois potentiellement fonctionnels sur lesquels il doit être possible de recruter des contractuels présentant des parcours professionnels particuliers. Nous n’allons pas créer un énième seuil ; c’est là toute la pertinence du raisonnement.

La Commission rejette cet amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, l’amendement CL460 de Mme Marietta Karamanli et les amendements identiques CL879 de la rapporteure et CL689 de M. Guillaume Gouffier-Cha.

Mme Marietta Karamanli. L’amendement CL460 précise que les décrets en Conseil d’État pris pour appliquer l’ouverture de tous les emplois de direction de la fonction publique au contrat devront fixer les conditions de rémunération individuelle qui ne pourront pas excéder celles prévues par la grille indiciaire et le régime indemnitaire correspondant à l’emploi concerné. Autrement dit, les agents contractuels qui occuperont ces postes ne doivent pas être mieux rémunérés qu’un fonctionnaire occupant le même emploi. C’est un principe auquel nous sommes très attachés.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je partage l’idée de Mme Karamanli : c’est pourquoi mon amendement CL879 propose que les décrets en Conseil d’État pris en application de cet article préciseront les conditions de rémunération des agents contractuels recrutés afin d’occuper des emplois de direction, dans les trois versants de la fonction publique. Ces décrets établiront ainsi un cadre de rémunération applicable à l’ensemble des agents contractuels occupant ces fonctions.

Ces dispositions relèvent du domaine réglementaire : c’est la raison pour laquelle mon amendement renvoie au décret. Je suggère donc à ma collègue de retirer son amendement.

M. Guillaume Gouffier-Cha. Le groupe La République en Marche salue cet article, qui n’a pas pour objet de favoriser le copinage, mais de diversifier les recrutements dans la haute fonction publique et d’être à même de recruter des compétences rares qui permettront de mieux faire fonctionner nos services publics. Il s’agit aussi de promouvoir des agents contractuels ayant fait les preuves de leurs compétences et qui doivent être mis en avant dans leurs responsabilités. Cela réclame évidemment un certain encadrement : c’est pourquoi notre amendement CL689 précise les conditions de rémunération de ces agents.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Je donnerai un avis de sagesse sur les amendements proposés par Mme la rapporteure et M. Gouffier-Cha. Nous avions prévu dans le décret d’application de l’article d’indiquer les conditions de rémunération des agents. Si les parlementaires souhaitent que la loi fasse explicitement mention de ces éléments, nous y sommes tout à fait ouverts.

L’amendement présenté par Mme Karamanli nous pose une difficulté d’un autre ordre : la rémunération d’un agent est déterminée par rapport à un poste, mais aussi, pour les agents titulaires, par rapport à un parcours professionnel, une ancienneté et un positionnement dans le déroulement de carrière.

En l’état actuel des choses, lorsque l’on doit recruter un agent contractuel, on tient compte évidemment de son parcours personnel et professionnel, sans pouvoir le positionner par analogie à telle ou telle place de manière précise dans une grille indiciaire. De ce fait, poser comme principe strict que la rémunération d’un contractuel ne peut être supérieure à celle d’un agent titulaire revient à ne pas tenir compte de la diversité des parcours de celui ou celle qui va occuper l’emploi, mais ne tient compte que de l’emploi occupé, ce qui peut poser une difficulté d’appréciation.

Le renvoi dans le décret aux conditions de rémunération que propose la rapporteure et M. Gouffier-Cha nous permettra aussi de travailler sur ces questions et de disposer, non pas d’une grille de rémunération des agents contractuels – ce serait du titulariat –, mais d’un certain nombre d’indications et de références permettant un encadrement.

À l’occasion de mes déplacements, j’ai eu l’occasion de rencontrer plusieurs centaines d’agents, et la question m’a régulièrement été posée au sujet des contractuels : « Nous avons déjà des contractuels dans nos services, parmi nos collègues, pourquoi pas plus ? On n’a jamais eu de difficulté à travailler avec eux, mais garantissez-vous qu’ils ne seront pas payés trois fois plus que nous ? » Ce à quoi je répondais que c’était bien notre volonté, mais que je souhaitais également que les contractuels ne soient pas trois fois moins payés que les titulaires… Avec l’encadrement de la rémunération et la fixation d’un référentiel, sans tomber dans un cadre aussi strict que celui que vous proposez, la garantie ira dans les deux sens, vers le haut et vers le bas : car si le recours à un contractuel ne doit pas être l’occasion de surpayer une compétence, il ne doit pas pour autant être l’occasion de la sous-payer.

Les amendements de Mme la rapporteure et de M. Gouffier-Cha ont le mérite de poser une obligation en matière de conditions de rémunération et de référentiel, mais dans des conditions moins « enfermantes » que le strict blocage proposé par l’amendement de Mme Karamanli, qui de surcroît risquerait de créer des difficultés pour la prise en compte des parcours personnels.

M. Éric Poulliat. Au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, je souhaite appeler l’attention de mes collègues de la commission des Lois sur le fait que l’adoption de ces amendements pourrait aboutir à la mise en place d’une sorte de statut des contractuels placés en situation d’agents de direction. Graver dans le marbre les conditions de leur rémunération priverait d’une certaine marge de manœuvre les employeurs territoriaux, par nature défavorables à tout ce qui pourrait bloquer ou rigidifier la relation entre l’employeur et le dirigeant.

Mme Cécile Untermaier. Je suis pour ma part satisfaite des propos du secrétaire d’État, particulièrement lorsqu’il considère que le principe de l’égal accès des contractuels à une même rémunération doit valoir dans tous les champs. Notre amendement visait seulement à faire en sorte que cette exigence soit précisée dans la loi. Par égard pour les intéressés, nous devons affirmer dans la loi que la rémunération ne peut pas tout à la fois être dérogatoire pour le contractuel et déterminée par la grille indiciaire pour le fonctionnaire. Je veux bien que le détail soit précisé dans le décret, mais le principe doit être inscrit dans la loi.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Nous pouvons nous rejoindre sur ce point : les amendements de Mme la rapporteure et de M. Gouffier-Cha posent le principe de l’encadrement des conditions de rémunération. À nous de faire en sorte que le décret soit précis et aille dans le sens que j’ai indiqué.

En écho à ce que vient de dire M. Poulliat, et pour appuyer la demande de retrait de l’amendement de Mme Karamanli, je rappelle que la loi de 2012 prévoyait qu’un décret en Conseil d’État vienne modifier celui qui encadre déjà sommairement la rémunération des agents contractuels. À l’époque, les partenaires sociaux étaient déterminés à aller très loin dans la définition du niveau de rémunération des contractuels, au point d’établir quasiment une grille, avec toutes les contraintes évoquées par M. Poulliat. Le Conseil d’État n’avait pas accepté ce décret, considérant que l’encadrement de la rémunération des contractuels ne devait pas aller au point de s’apparenter à une grille. C’est la raison pour laquelle, dans le décret à venir, nous privilégierons la voie des référentiels.

La Commission rejette l’amendement CL460, puis elle adopte les amendements identiques CL879 et CL689.

La Commission adopte les amendements rédactionnels CL727 et CL728 de la rapporteure.

Ensuite de quoi, la Commission examine, en discussion commune, les amendements CL880 de la rapporteure et CL459 de M. Boris Vallaud.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’amendement CL880 précise que les contrats des agents occupant des emplois de direction ne donnent pas droit à un contrat à durée indéterminée (CDI).

Mme Marietta Karamanli. L’amendement CL459 du groupe Socialistes et apparentés participe du même esprit : les personnes recrutées par contrat sur les emplois de direction dans les trois versants de la fonction publique ne peuvent pas bénéficier d’une transformation de leur CDD en CDI aux termes du contrat.

Toutefois, je m’interroge sur nos méthodes de travail : notre amendement a été déposé avant celui de la rapporteure. Si celui-ci est adopté, il tombera… Cela ne me semble pas respectueux des droits de l’opposition.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Ces amendements sont appelés en discussion commune, ils ne sont pas ordonnés de façon chronologique.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je rappelle que le temps imparti au rapporteur pour déposer ses amendements n’est pas le même que celui dont disposent les commissaires.

Par ailleurs, sur le fond, le terme de « transformation » utilisé dans votre rédaction n’a pas d’existence juridique à proprement parler : il s’agit d’une reconduction.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Je confirme qu’en droit, on parle de reconduction de contrat en contrat à durée indéterminée et non de transformation. Sur le fond, l’objet de ces deux amendements est donc exactement le même. Et je pense même que madame Karamanli acceptera de retirer son amendement puisque la rédaction de la rapporteure est plus adaptée en droit, et que la paternité – la maternité en l’occurrence – peut en être raisonnablement partagée…

Mme Marietta Karamanli. Au-delà de la maternité, je concède que le terme de « reconduction » est préférable ; mais je n’ai pu bénéficier du conseil d’un administrateur de l’Assemblée nationale, je ne suis qu’une simple députée !

Nous acceptons donc de retirer notre amendement au profit de celui de la rapporteure, même si j’en revendique la maternité…

L’amendement CL459 est retiré.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Il s’agit donc d’une maternité partagée ; monsieur Molac voulez-vous en endosser la paternité ? (Sourires.)

M. Paul Molac. Je souhaite surtout obtenir une précision. Je comprends mal pourquoi, lorsque quelqu’un est recruté par contrat, une fois qu’il est formé et « fait l’affaire », on doit le renvoyer au bout d’un certain temps au motif que son contrat arrive à échéance et qu’il n’est pas possible de le réembaucher en CDI. J’avoue que cette logique m’échappe totalement ; lorsque je trouve quelqu’un qui donne satisfaction, je le garde ; s’il ne fait pas l’affaire, je m’en sépare. Nous avions eu la même discussion avec le ministre à propos des auxiliaires de vie scolaire qui s’occupent d’enfants en situation de handicap : une fois qu’ils ont été employés pendant six ans sous deux CDD, on ne peut pas les embaucher en CDI, et ils doivent chercher autre chose. On gâche ainsi de la main-d’œuvre formée !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Ce que vous dites, monsieur Molac, est vrai pour tous les contrats et toutes les catégories d’emplois. Par contre, les amendements proposés par Mme la rapporteure et Mme Karamanli sur la « non-CDIsation » – on me pardonnera le barbarisme – ne concernent à l’article 7 que les emplois de direction qui, dans la fonction publique territoriale, correspondent à des emplois fonctionnels et pour la fonction publique de l’État, à des emplois de cadres supérieurs. Lorsque vous signez un CDI, vous êtes engagé sur une mission et sur un poste pour une durée indéterminée ; lorsque vous êtes fonctionnaire titulaire, vous êtes « propriétaire » de votre grade et pas de votre emploi. Il est un peu compliqué de lier de manière irrémédiable l’occupation d’un poste de direction ; or c’est seulement de ces emplois de direction dont il est question.

La Commission adopte l’amendement CL880.

Elle se saisit ensuite de l’amendement CL537 de M. Pierre Cordier.

M. Jean-Louis Masson. Encore une fois, monsieur le secrétaire d’État, je ne comprends pas l’objectif poursuivi par ce projet de loi, qui traduit à mes yeux une forme de mépris à l’endroit de la fonction publique.

Vous retenez le seuil de 40 000 habitants pour le recrutement de contractuels en disant que c’est précisément le niveau à partir duquel on peut recruter des administrateurs territoriaux, et que vous avez besoin de rechercher des compétences chez les contractuels ! Quel respect avez-vous donc pour le concours d’administrateur et pour la fonction publique en général ?

Monsieur le ministre, avec ce texte vous jouez les apprentis sorciers, mais pas celui de Goethe, celui de la Fantasia de Walt Disney ! Que peut-il se passer dans une collectivité au-delà du seuil de 40 000 habitants si l’autorité territoriale se met à recruter des contractuels et à se constituer un hypercabinet ? L’administration ne joue plus le rôle qui lui est dévolu. Dans une collectivité territoriale, l’intérêt est d’avoir un équilibre entre le cabinet et l’administration ; c’est la conjugaison des deux qui en garantit l’efficacité et la réussite.

Quel avenir offre-t-on enfin aux fonctionnaires territoriaux de catégorie A et A + qui passent des concours, les réussissent, deviennent administrateur ou directeur territorial et se voient au bout du compte supplantés par des contractuels ? Quel est leur avenir dans la profession ? Comment tout cela va-t-il finir ? Je ne comprends pas l’objectif poursuivi, caché ou non, de ce projet de loi.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable. Je vous renvoie à l’argumentation que j’ai précédemment développée à l’occasion de l’examen d’un autre amendement.

Par ailleurs, je suis sensible à la question du rôle des DGS que vous évoquez dans l’exposé sommaire de votre amendement : c’est pourquoi j’en ai moi-même déposé un afin d’en préciser le contenu.

M. Hugo Bernalicis. Mon collègue de droite a raison, une fois n’est pas coutume… (Sourires.) Il existe une alchimie intéressante entre les emplois de cabinet et l’administration qui ensuite fait son travail. Et d’ailleurs, pourquoi cela ne vous pose-t-il aucun problème qu’à la fin les contrats ne soient pas reconduits en CDI pour ces emplois de direction ? Tout simplement parce que lorsqu’un changement de majorité surviendra, les copains de votre majorité que vous aurez embauchés n’auront aucune envie de rester : ce qui les intéresse, ce n’est pas d’être au service à l’intérêt général et à la fonction publique, mais bien d’être loyal de celui qui sera élu. Or cela vaut précisément pour les emplois de cabinet, pas pour ceux d’administration ; mais vous confondez tout et vous voulez étendre cette logique à toute la fonction publique.

Nous avons déjà eu ce débat ; mettez-vous à la place de ceux qui ont fait une carrière dans le secteur privé et qui voient leurs amis passés par l’ENA faire aussi facilement des allers-retours entre le public et le privé. C’est une injustice profonde : eux aussi devraient avoir le droit de pouvoir aller prendre une part du gâteau dans le service public et mettre leurs compétences au service de l’intérêt général, comme vous le dites si bien…

Vous être en train de détricoter une idée du service public à la française, qui a fait la grandeur de notre pays, tout cela pour des intérêts particuliers et boutiquiers, et pour quelques amitiés.

La Commission rejette cet amendement.

Puis elle adopte l’amendement de précision CL729 de la rapporteure.

Ensuite, elle examine, en discussion commune, l’amendement CL79 de M. Raphaël Schellenberger, les amendements identiques CL127 de M. Robin Reda et CL840 de M. Alain Perea, et les amendements CL75 de M. Julien Dive, CL128 et CL129 de M. Robin Reda et CL364 de M. Paul Molac.

M. Robin Reda. Je défendrai ensemble les amendements CL79 et CL127.

Un peu à contre-courant des amendements précédents, j’aurais souhaité les présenter dans un contexte exempt de polémique ; nous proposons d’abaisser le seuil démographique de la strate des collectivités territoriales pouvant recourir à des contractuels pour les emplois de direction.

Pour ma part, j’ai été maire d’une ville de 16 000 habitants, président d’une agglomération de 100 000 habitants et je constate que le besoin de personnels contractuels dans les directions est plus ressenti dans les villes moyennes que dans les grands établissements publics de coopération intercommunale. En effet, les grands EPCI sont attractifs pour ceux qui ont réussi des concours : les jeunes attachés ou administrateurs territoriaux rêvent de rejoindre la strate la plus élevée, et notamment les EPCI.

Cela fait des collectivités de 30 000 à 40 000 habitants des parents pauvres, des villes moyennes moins attractives pour les cadres de la haute fonction publique, avec une masse salariale en grande partie titularisée, peu de rotations des cadres, particulièrement chez les cadres intermédiaires. C’est donc là que le besoin est plus pressant d’attirer des compétences extérieures afin de compléter celles de la fonction publique territoriale de proximité.

C’est aussi une hypocrisie : certaines villes de 10 000 à 40 000 habitants sont des cœurs d’agglomération avec des DGS à double emploi – il me semble que c’est le cas d’Annonay, monsieur le secrétaire d’État. Lorsqu’une ville de 10 000 à 20 000 habitants est elle-même administrée par un DGS d’une agglomération supérieure à 40 000 habitants, cela signifie que certaines strates inférieures à 40 000 habitants auront potentiellement accès à des DG contractuels alors que d’autres en seront privées.

M. Alain Perea. Le seuil de 40 000 habitants ne me convient pas, je l’ai dit à plusieurs reprises. On a considéré que pour ces postes très complexes de direction générale, il fallait prendre dans le « haut du panier », et pour ce faire permettre le recrutement de contractuels à partir du seuil de 40 000 habitants. Je veux bien que l’on soit logique dans le raisonnement, mais encore faut-il qu’il le soit !

Par ailleurs, il est vrai que, dans certaines régions, une commune de 10 000 ou 20 000 habitants n’a pas forcément de poids ; mais dans beaucoup d’autres territoires, une ville de 20 000 ou 30 000 habitants a un rôle tout à fait structurant. Et lorsque l’on dit vouloir donner des compétences à ces collectivités, que l’on prétend vouloir doter les territoires de moyens de fonctionner, il faut avoir le courage d’aller jusqu’au bout et donner véritablement aux territoires les moyens de fonctionner en permettant aux communes de la strate de plus de 10 000 habitants la possibilité de recruter des contractuels.

Ajoutons que, dans les grandes collectivités supérieures à 40 000 habitants, un emploi fonctionnel de DGS ou de DGA, est par nature très généraliste, car il peut s’appuyer sur un DRH et des chefs de service ou autres, alors que dans des collectivités de taille moindre, les DGS et surtout les DGA devront être beaucoup plus spécialisés. C’est la raison pour laquelle on doit pouvoir aller chercher dans le secteur privé des gens présentant des particularités qu’ils pourront mettre à la disposition du service public. Ayons le courage d’aller au bout de notre réforme et abaissons ce seuil à 10 000 habitants, comme le propose mon amendement CL840.

M. Jean-Louis Masson. L’amendement CL75 est défendu.

M. Robin Reda. Les amendements CL128 et CL129 sont de repli.

M. Paul Molac. Le débat porte effectivement sur les seuils ; dans un premier temps, je souhaitais vous interroger sur le seuil de 40 000 habitants, madame la rapporteure, mais vous avez déjà répondu. J’ai proposé dans mon amendement CL364 le seuil de 50 000 sans être certain que cela soit la bonne échelle. Je suis toutefois sensible aux propos de notre collègue Perea, qui me semblent frappés au coin du bon sens. Je retire donc mon amendement et je voterai celui de M. Perea.

L’amendement CL364 est retiré.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. J’essaie de voir clair dans ces propositions de seuil, notamment celles de nos amis Les Républicains… Après nous avoir reproché d’ouvrir les postes de direction aux contractuels, on nous propose maintenant d’abaisser le seuil à 20 000 ou 10 000 habitants. C’est à n’y plus rien comprendre ! Je ne crois pas que les collectivités locales de 10 000 habitants ou plus dysfonctionnent alors que des fonctionnaires sont à leur tête. Bien évidemment, je maintiens mon argumentation en faveur du seuil de 40 000 habitants, qui me semble constituer un bon équilibre. Avis défavorable sur tous ces amendements.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Je me suis déjà exprimé à l’occasion de l’examen d’amendements précédents, et mon avis reste le même.

J’entends la remarque de M. Reda sur les DGS qui font double emploi dans des collectivités de moins de 40 000 habitants. Il a d’ailleurs cité l’exemple que je connais bien d’une collectivité où une administratrice occupe les deux fonctions de directrice générale de la ville et de l’agglomération, avec une ampleur démographique assez importante.

M. Masson a visiblement un problème avec le seuil des 40 000 habitants : après avoir été partisan de son relèvement à 80 000, voilà qu’il prône son rabaissement à 10 000 habitants ; il va nous falloir trouver un autre seuil afin qu’il soit plus à l’aise !

M. Jean-Louis Masson. Je vais éclairer la lanterne de Mme la rapporteure et peut-être celle de M. le secrétaire d’État, car nous sommes tout à fait d’accord.

À partir de 40 000 habitants, aucune collectivité ne rencontre de difficulté pour recruter un DGS en tant qu’administrateur. En revanche, une collectivité de 8 000 ou 10 000 habitants est bloquée au grade d’attaché principal ; il s’agit de lieux souvent reculés, où l’on a du mal à trouver des directeurs généraux.

Autant il y aurait besoin de recruter des contractuels dans de petites communes, qui sont limitées dans le domaine des grades, à moins de les déverrouiller, autant on n’a aucun problème pour recruter des administrateurs dans les communes de 40 000 habitants. Ce qui explique les difficultés rencontrées.

M. Robin Reda. Au-delà des critiques légitimes que nous exprimons, on ne peut pas nous accuser d’aborder ce texte dans un esprit non constructif. La manière dont vous balayez nos arguments avec dédain, madame la rapporteure, en réduisant la personnalité de chacun des parlementaires à son appartenance à un groupe politique afin de relever de prétendues contradictions ne me paraît pas de nature à élever notre débat.

Par ailleurs, je vous demande, monsieur le secrétaire d’État, de réfléchir en vue de la séance publique, et peut-être d’ouvrir un peu plus la concertation sur le sujet : comme Jean-Louis Masson vient à juste titre de le rappeler, c’est dans les collectivités moyennes que le besoin le plus important de combinaison des compétences et des ressources humaines se fait ressentir. Les grandes collectivités n’éprouvent aucune difficulté à attirer les meilleurs cadres, qu’ils proviennent de la fonction publique ou qu’ils soient contractuels.

Les petites collectivités ont une structure particulière qui permet à l’encadrement intermédiaire d’assurer des missions d’encadrement et de service public de proximité. La véritable problématique est celle des collectivités que l’on pourrait qualifier de la classe moyenne, trop pauvres pour accéder à de bons cadres et trop riches pour se contenter de leurs personnels propres. C’est dans cette catégorie que le besoin d’ingénierie et d’encadrement est le plus pressant. C’est pourquoi je vous demande solennellement de réfléchir à deux fois à cette situation, même si cela doit prendre un peu plus de temps que le simple cadre de ce projet de loi. Je rappelle simplement que, depuis le début, nous dénonçons la précipitation qui nous est imposée pour l’examen de ce projet de transformation de la fonction publique avec des propos grandiloquents, alors que les réalités de terrains mériteraient d’être mieux prises en compte.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis navrée, Monsieur Reda, que vous viviez aussi mal le paradoxe que je viens de constater.

Si je comprends bien votre raisonnement, il aurait fallu proposer une fourchette de 10 000 à 40 000 habitants pour l’ouverture aux postes de direction, pas davantage, pour attirer des candidats là où ils font défaut… Mon avis reste défavorable. Je maintiens le seuil à 40 000 habitants.

M. Alain Perea. Je rappelle que l’on compte en France un peu moins de deux cents communes de 40 000 habitants, et mille dans la fourchette de 10 000 à 40 000 habitants.

Nous défendons l’idée qu’un subtil équilibre entre des gens ayant effectué un parcours dans le secteur privé et des gens ayant effectué un parcours dans le secteur public formera de bonnes directions pour les collectivités territoriales. Donnons à ces mille collectivités, souvent situées dans des territoires ruraux ou périurbains, les moyens de se doter de postes de direction et d’équipes de direction à la mesure des projets que nous défendons. Comment peut-on s’arrêter sur le seuil des 40 000 habitants au seul motif que c’est celui qui est retenu pour le recrutement d’administrateurs ? Je suis désolé, je ne comprends pas !

M. Robin Reda. Il n’aurait pas été possible d’établir une fourchette entre 10 000 et 80 000 habitants dans la mesure où les EPCI et collectivités se situant au-delà d’un effectif de 80 000 habitants peuvent déjà recourir à des contractuels. En revanche, il était possible d’abaisser le seuil pour les collectivités les plus grandes qui souhaitent avoir recours à des contractuels si elles ne trouvent pas les cadres adéquats : pourquoi pas ? Mais là encore, la réalité est que les collectivités intermédiaires risquent d’être lésées par cet oubli.

La Commission rejette successivement ces amendements.

Puis elle se saisit des amendements CL17 et CL52 de M. Olivier Marleix.

M. Olivier Marleix. Je défendrai en même temps les amendements CL17 et CL52, qui selon moi sont mal placés dans le dérouleur. Compte tenu du sort qui leur sera réservé, je me contenterai d’en présenter l’esprit : l’idée est de prévoir dans la loi un taux maximum d’emplois que les contractuels pourraient pourvoir – nous en avons d’ailleurs discuté lors des auditions.

Il faut conserver des postes sur ces emplois de direction pour des jeunes qui ont passé des concours afin de leur garantir des perspectives de carrière satisfaisantes et faire en sorte que tous ces emplois ne soient pas exclusivement occupés par des contractuels et mis systématiquement en concurrence. Faute de quoi, c’est la vocation de ces jeunes qui passent des concours d’attaché ou d’ingénieur qui va s’éteindre.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’instauration de quotas ne me semble pas être une mesure opportune : elle risque de rigidifier la gestion des ressources humaines au sein des collectivités alors même que l’ambition de ce texte est de desserrer les contraintes de recrutement qui leur sont imposées.

Le recours au recrutement contractuel n’est évidemment en rien une obligation, il n’y a aucun objectif chiffré à atteindre. C’est simplement un moyen dont disposeront les employeurs publics de façon souple, s’ils l’estiment nécessaire, et dans le cadre fixé par la loi.

Je suis donc défavorable à ces deux amendements.

Les amendements CL17 et CL52 sont successivement rejetés.

La Commission adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL730 de la rapporteure.

Elle en vient à l’amendement CL882 de la rapporteure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Issu des concertations menées avec plusieurs associations de dirigeants de collectivités, notamment le syndicat national des dirigeants des grandes collectivités territoriales (SNDGCT), cet amendement tend à clarifier le rôle dévolu aux directeurs généraux des services des collectivités territoriales et des établissements publics de coopération intercommunale.

Au contact direct des exécutifs locaux, les directeurs généraux des services accomplissent des missions essentielles à la mise en œuvre des orientations politiques décidées par les élus, dans le cadre des responsabilités managériales et juridiques qui leur incombent au sein des collectivités.

Il conviendrait ainsi de préciser, au niveau réglementaire, les compétences et fonctions qu’ils exercent. La rédaction retenue pourrait être la suivante : « Sous l’autorité et le contrôle de l’autorité territoriale, le directeur général des services des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, dirige et coordonne l’ensemble des services, prépare et exécute dans le cadre de la légalité, les délibérations, décisions et arrêtés de la collectivité ou de l’établissement. À cette fin, il conseille l’autorité territoriale, assure et coordonne les documents, études ou actes d’exécution au bénéfice des secrétaires élus ou des organes délibérants et des instances décisionnelles et consultatives de la collectivité ou de l’établissement. Il propose à l’exécutif la validation des évaluations professionnelles de l’ensemble des agents. Il est en outre chargé du pilotage des ressources humaines et de veiller à la bonne mise en œuvre du dialogue social. Hors les textes qui le prévoient expressément, un membre de la direction générale peut, à la demande de l’autorité territoriale, représenter la collectivité ou l’établissement sans voix délibérative, dans une instance où ils sont amenés à participer ».

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. C’est un sujet à propos duquel nous avons échangé avec la rapporteure, et qui nous pose une difficulté : nous considérons que les directeurs généraux de service ne disposent pas de pouvoirs propres, mais seulement ceux que leur délèguent les autorités territoriales dont ils relèvent, lesquelles bénéficient de la légitimité conférée par l’élection. Il ne nous paraît pas utile, à ce stade, d’aller au-delà de l’encadrement réglementaire des emplois de direction des collectivités territoriales.

Je demande donc le retrait de cet amendement, en précisant qu’un travail de concertation doit être mené sur les questions de haute fonction publique, il offrira l’occasion d’une nouvelle réflexion à ce sujet en y intégrant les employeurs territoriaux. Les organisations syndicales, que la rapporteure a évoquées, ont défendu leur position, mais celle-ci s’oppose frontalement à celle des employeurs territoriaux, notamment l’Association des maires de France. Je n’imagine pas que nous puissions redéfinir cette relation très particulière entre l’autorité territoriale et son directeur général des services sans une concertation avec les élus directement concernés.

C’est pourquoi, au-delà de l’intérêt à mieux faire connaître ce que recouvrent les fonctions de directeur général des services, je demande le retrait de cet amendement.

M. Éric Poulliat. La délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation voit d’un très mauvais œil cet amendement, dans la mesure où les employeurs territoriaux sont farouchement opposés à cette forme d’encadrement du pouvoir de l’autorité territoriale en matière de recrutement, surtout concernant le lien qu’il entretient avec ses directeurs et directeurs généraux.

Comme l’a dit le ministre, cet amendement émane d’un souci corporatiste des directeurs généraux des services de collectivités territoriales, que nous pouvons comprendre ; j’ai moi-même entendu leurs revendications. Mais il apparaît en décalage avec l’esprit du texte qui évite les mesures catégorielles, et il contreviendra fortement au principe de la liberté des autorités territoriales à l’égard de leurs équipes de direction.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je reste convaincue que la situation des directeurs généraux des services, à qui le renforcement de la décentralisation au cours des dernières années a donné de plus en plus de responsabilités, mérite un éclaircissement. J’ai également entendu les représentants des employeurs publics territoriaux, qui reconnaissent aussi la responsabilité des DGS. Les directeurs généraux et les représentants d’un certain nombre de filières – administrateurs, attachés territoriaux – défendent aussi la nécessité d’éclaircir cette relation, certes particulière, mais qui requiert néanmoins un encadrement. Je maintiens mon amendement.

M. Guillaume Gouffier-Cha. Le groupe La République en Marche soutient l’amendement de la rapporteure. Il apporte une clarification qui aurait pu être faite il y a quelques années, lors de l’évolution du statut de secrétaire général à directeur général.

M. Pascal Brindeau. J’entends l’objectif poursuivi par la rapporteure et les syndicats de directeurs généraux : protéger la fonction de directeur général contre les excès d’autorité possibles de la part d’élus territoriaux. Mais le contenu de l’amendement, qui rédige un décret, relève ou bien d’une fiche de poste, qui doit être déterminée par l’autorité territoriale, ou bien d’éléments purement légaux qui existent déjà, par exemple la validation des évaluations professionnelles.

Autant je comprends l’objectif, autant sa traduction dans cet amendement ne me paraît pas cohérente dans la mesure où il reprend des dispositions législatives déjà existantes ou empiète sur ce qui fonde la relation entre l’employeur public et le directeur général, qui est de toute façon protégé par son statut. Et si un ordre illégal devait lui être donné par l’autorité territoriale, le directeur général est fondé à ne pas l’appliquer, conformément à une jurisprudence très ancienne du Tribunal des conflits.

M. Ugo Bernalicis. Je ne sais pas s’il faut voir dans cet amendement la crainte des futurs contractuels qui ne bénéficieront pas des garanties du statut, mais je ne comprends pas la cohérence de la rapporteure. Elle qui nous expliquait précédemment que l’essentiel était le libre arbitre, qu’il fallait pouvoir s’adapter, être agiles et souples, demande soudain un décret dont la rédaction même est fixée dans l’exposé des motifs. C’est assez innovant, je vous l’accorde ! C’est très clairement un amendement corporatiste, dont je ne vois pas l’intérêt dans ce texte.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte les amendements rédactionnels CL731 et CL732 de la rapporteure.

Elle en vient à l’amendement CL881 de la rapporteure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cet amendement précise que les formations suivies par les agents contractuels recrutés pour occuper des emplois de direction dans la fonction publique hospitalière devront leur permettre d’acquérir l’ensemble des connaissances requises en matière d’organisation et de fonctionnement des services publics.

Ces agents contractuels doivent en effet être pleinement informés de la spécificité des enjeux juridiques et opérationnels entourant la gestion publique, afin de garantir l’exercice de leurs nouvelles fonctions dans les meilleures conditions.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Je m’en remets à la sagesse de la commission. Nous avions d’ores et déjà prévu de nous appuyer sur l’expertise de l’École nationale de la santé de Rennes pour veiller à ce que les contractuels recrutés aux emplois de direction dans les hôpitaux reçoivent la formation ad hoc sur les enjeux spécifiques du monde hospitalier.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte les amendements rédactionnels CL733 et CL734 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement CL762 de Mme Laurence Vichnievsky.

Mme Laurence Vichnievsky. Cet amendement peut paraître modeste au regard des enjeux qui ont été évoqués tout au long de cette journée, mais j’y tiens néanmoins. En l’état actuel du droit, aucune règle n’impose la parité dans la composition des comités d’audition pour la nomination des directeurs d’administration centrale. Afin de garantir une présence égalitaire des femmes au sein de ces comités, dont la composition est fixée par décret, il conviendrait d’inscrire dans la loi le principe de la parité.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Des comités d’auditions ont effectivement été mis en place pour la nomination des chefs de service des administrations de l’État grâce au décret du 24 mai 2016. L’introduction d’une mesure de parité dans la composition de ces comités, qui ne concernent pas tous les emplois laissés à la décision du Gouvernement, relèverait du niveau réglementaire.

Je partage néanmoins l’objectif des auteurs de l’amendement ; peut-être pourrions-nous avoir une orientation du secrétaire d’État à ce sujet ? Je suggère le retrait de cet amendement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Je demande également le retrait de cet amendement, afin de traiter de ce sujet au niveau réglementaire, comme le suggérait la rapporteure. Les conditions de composition des comités d’audition relèvent d’un décret, qui sera modifié.

En l’état actuel des choses, en plus du secrétaire général du Gouvernement ou son représentant, ces comités doivent être composés d’au moins quatre personnes, une appartenant au ministère concerné, une extérieure à ce ministère, une qualifiée dans les domaines de compétence à pourvoir et une justifiant de compétences en matière de ressources humaines. Ces quatre personnes exercent leurs fonctions au sein du comité d’audition à titre gratuit. Il faut trouver un moyen pour féminiser les jurys, nous le faisons et des articles de loi y pourvoient ; il faut également féminiser les comités d’audition, en gardant à l’esprit que l’addition de tous ces critères rend parfois l’exercice un peu compliqué.

Quoi qu’il en soit, cette mesure relève du niveau réglementaire ; je prends l’engagement d’y travailler avec vous pour améliorer la situation.

Mme Laurence Vichnievsky. Je vous remercie de ces précisions, et je vais retirer cet amendement, en souhaitant qu’à l’avenir, notre commission ne s’immisce jamais dans ce qui relève du domaine réglementaire…

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je vous promets d’y veiller attentivement !

L’amendement est retiré.

L’article 7 est adopté, modifié.

Après l’article 7

La Commission examine les amendements CL770 de Mme Barbara Pompili et CL829 de M. Alain Perea.

M. Alain Perea. Depuis que je suis député, j’ai régulièrement affaire à la haute fonction publique, comme vous tous ici. Ce sont toutes des gens très compétents qui ont un vrai fond et font un excellent travail, cela a été dit à plusieurs reprises et je n’y reviendrai pas.

Le problème est qu’au-delà de mon accent, nous ne parlons pas du tout des mêmes choses. Nous ne nous comprenons pas, car nous n’avons pas du tout la même façon d’aborder les sujets, ni les mêmes réalités de terrain ou les mêmes relations avec les citoyens. Tout simplement parce que, au sein d’une certaine sphère, les problèmes ne sont pas les mêmes que dans une commune de 500 habitants comme celle dont j’ai eu à connaître.

L’objet de notre amendement CL770 est de commencer à mettre le doigt sur l’évolution de cette haute fonction publique, en proposant que toutes les personnes en poste de direction d’agents de l’État, notamment dans les administrations centrales, effectuent trente jours de stage ou de présence sur le terrain dans les services déconcentrés relevant de l’administration dont ils assurent la direction.

L’amendement CL829 participe du même esprit.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je comprends le sens de votre amendement, qui rejoint d’ailleurs la nécessité de renforcer la présence des hauts fonctionnaires au contact des usagers du service public dans nos territoires. Je pense que ce sujet sera également abordé dans le cadre de la mission que le Président de la République a récemment confiée à M. Frédéric Thiriez afin de proposer des pistes de réforme de la haute fonction publique.

Cependant, le dispositif prévu par votre amendement impliquerait la réalisation d’une étude préalable afin d’évaluer son caractère véritablement opérationnel et les conséquences que sa mise en place ferait peser sur l’organisation des services centraux et déconcentrés.

Je vous demanderais donc de bien vouloir retirer votre amendement, à défaut avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Je demande également le retrait de cet amendement, pour trois raisons.

Tout d’abord, l’amendement vise les emplois de direction de l’État. Parmi eux, il y a la direction des services déconcentrés. Votre rédaction amènerait à demander à des directeurs de services déconcentrés de faire des stages dans les services déconcentrés…

M. Alain Perea. Cela ne leur ferait pourtant pas de mal !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. En second lieu, nous nous sommes engagés à affecter les agents publics en priorité sur le terrain plutôt qu’en administration centrale.

Enfin, nous avons mis en place depuis septembre dernier un système d’affectation sur les missions prioritaires pour faire en sorte que celles et ceux qui, diplômés de l’ENA, intègrent les grands corps – inspection des finances, Cour des comptes et Conseil d’État –, soient obligés à une mobilité sur des missions prioritaires après deux ans d’exercice. Cette année, les postes proposés pour les missions prioritaires seront en majorité hors de la région Île-de-France afin que le caractère prioritaire se double d’un caractère déconcentré. Nous faisons un certain nombre de choses, mais le dispositif que vous proposez n’est pas opérant à nos yeux bien que nous comprenions sa logique consistant à s’assurer que les cadres de l’État ont une connaissance du terrain.

M. Alain Perea. Je ne retirerai pas les amendements, pour deux raisons. Tout d’abord, l’un d’eux a été déposé par Mme Pompili, qui ne m’a pas mandaté pour le retirer à sa place, et je crois de plus qu’il faut affirmer notre volonté d’aller dans cette direction, même si cela doit se faire sous d’autres formes.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle examine ensuite l’amendement CL18 de M. Olivier Marleix.

M. Olivier Marleix. Monsieur le secrétaire d’État, si l’on en croit l’intitulé de votre projet de loi, vous prétendez transformer la fonction publique, dans le prolongement du Président de la République qui a écrit un livre intitulé Révolution : c’est dire si votre volonté de transformation est censée être profonde.

Nous avons parlé du besoin de recours au contrat, nous avons également parlé des limites et de la précarité de certaines situations contractuelles. Quitte à recourir au contrat, je propose d’innover et, à titre expérimental, d’essayer de mettre en place le contrat de travail unique tel que l’a théorisé notre prix Nobel d’économie Jean Tirole.

Le contrat de travail unique supprimerait la barrière entre les CDD et les CDI et permettrait au salarié de voir ses droits se consolider avec l’ancienneté. Il peut être du rôle de la puissance publique d’innover, et si nous considérons que les propositions de Jean Tirole sont fondées et qu’il y a lieu de s’intéresser à cette piste, l’État pourrait montrer l’exemple.

Je propose de le faire avec la fonction publique hospitalière, qui est sans doute aujourd’hui l’une des fonctions publiques les plus en souffrance, avec de véritables problèmes de recrutement. Nous voyons bien que des dispositifs sont à inventer en termes de passerelles ou de coopération entre le secteur public et le secteur privé. Ce nouveau cadre gagnerait à être expérimenté dans la fonction publique hospitalière.

Voilà qui serait vraiment une transformation, pour ne pas dire une révolution !

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’idée de contrat de travail unique peut être théoriquement intéressante ; encore faudrait-il préalablement en définir précisément les contours et le contenu, ce qui n’est pas le cas en l’état actuel du droit.

Par conséquent, j’émets un avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Même avis que la rapporteure. Peut-être que M. Marleix a-t-il des exemples de centres hospitaliers ayant porté cette demande d’expérimentation ? Aucun ne l’a fait auprès de nous lors des concertations.

M. Olivier Marleix. Il ne nous est pas interdit d’être autre chose qu’une chambre d’enregistrement des desiderata des uns et des autres… La France n’a eu que deux prix Nobel d’économie en cent ans, les réflexions de Jean Tirole méritent le plus grand intérêt. L’État aime beaucoup avoir des idées pour les autres ; il me semble que nous pourrions proposer d’expérimenter et d’innover. Je ne dis pas que nous devrions prendre un hôpital complet et lui imposer de recruter avec le contrat unique, mais nous pouvons essayer de donner du corps au contrat unique d’embauche.

Je reconnais, madame la rapporteure, que tout reste à écrire. J’ai eu la maladresse de renvoyer à un décret ; nous pourrions renvoyer à une ordonnance si cela pose des problèmes juridiques trop compliqués pour l’Assemblée nationale…

La Commission rejette l’amendement.

Article 8 (art. 7 bis [nouveau] de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et art. 9-4 [nouveau] de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986) : Création d’un contrat de projet

La Commission est saisie de trois amendements identiques, CL120 de M. Stéphane Peu, CL191 de M. Ugo Bernalicis, CL466 de M. Boris Vallaud.

Mme Marie-George Buffet. L’article 8 vise à créer un nouveau type de contrat à durée déterminée dans la fonction publique : le contrat de projet. Ce contrat, d’un an à six ans, n’ouvre droit ni à la conclusion d’un contrat à durée indéterminée ni à la titularisation, et peut être rompu si son objet ne peut être réalisé, arrive à terme ou prend fin de manière anticipée.

Ce contrat va créer davantage de précarité dans la fonction publique, et je ne vois pas trop quels projets ne pourraient pas être effectués par un fonctionnaire. Il est question de projets d’une durée d’un an, donc assez courts, à six ans, autrement dit plus longs que le mandat d’une collectivité territoriale. Je ne vois pas où est le besoin de créer un tel contrat. D’où notre amendement de suppression CL120.

M. Ugo Bernalicis. Mon amendement CL191 va dans le même sens : je partage l’intervention de Mme Buffet et j’avoue que j’ai été un peu déçu à la lecture du texte de voir qu’il ne s’agit même pas d’un CDI de chantier. Vous n’avez pas copié-collé in extenso les ordonnances sur le code du travail, vous créez le CDD de chantier… Je reconnais que c’est plus logique : celui qui a un CDI de chantier aujourd’hui, s’il va solliciter un prêt auprès d’une banque, s’entend dire que son contrat n’est pas vraiment un CDI. Votre proposition est au moins cohérente, mais je m’interroge sur la création d’un nouveau contrat précaire dans la fonction publique.

Par ailleurs, vous prévoyez de mettre en place une prime de précarité – très bien –, mais uniquement pour les contrats d’une durée inférieure ou égale à un an. Donc tous ceux qui s’engageront dans le fameux contrat de projet pour plus d’un an ne bénéficieront pas de la prime de précarité.

Vous semblez penser que la prime de précarité sera une manière d’effacer la précarité, mais ce n’est pas le cas. La prime de précarité acte la précarité, et la compense un petit peu. Mais la précarité reste la précarité, avec ou sans prime.

Mme Cécile Untermaier. L’amendement CL466 a le même objet. Nous nous interrogeons sur ce contrat de projet. Je pose au secrétaire d’État la question qu’il posait à M. Marleix à propos du contrat de travail unique : à quels contrats pense-t-il, et quelles sont les demandes faites en ce sens ?

Mme Émilie Chalas, rapporteure. J’émets un avis défavorable à ces amendements de suppression de l’article 8 qui prévoit la mise en place d’un contrat de projet au sein des trois versants de la fonction publique.

Le contrat de projet existe dans le secteur privé ; il constitue un levier de recrutement en vue de la réalisation d’une opération définie, puisqu’il permet d’adapter la durée du contrat à la durée prévisionnelle du projet. C’est précisément ce projet qui a motivé le choix de l’employeur de recruter une personne afin de contribuer à sa réalisation.

L’instauration d’un contrat de projet dans la fonction publique permet de répondre au même objectif, en liant le recrutement d’un agent à la mission pour laquelle il a été recruté.

Cette disposition présentera un avantage majeur pour l’administration, en ce qu’elle lui permettra d’internaliser, par le recrutement d’agents sur cette base, des activités qu’elle peut avoir tendance à externaliser et à confier par délégation au secteur privé, non véritablement par choix, mais en raison de l’absence d’outils managériaux lui permettant d’accomplir par elle-même les missions qu’elle souhaite mener à bien. Cela contribuera directement à renforcer les maîtrises d’ouvrages publiques dans la conduite de leurs opérations.

Les employeurs publics pourront ainsi mobiliser des expertises particulières au service des projets qu’ils veulent mettre en œuvre. Par symétrie, ce contrat attirera aussi des travailleurs du secteur privé qui n’ont pas nécessairement envie de s’engager pour toute leur carrière au sein de la fonction publique, mais qui seraient intéressés par la réalisation d’opérations enclenchées par le secteur public et pour lesquelles leurs compétences s’avéreront précieuses.

L’article 8 détermine les principales règles qui encadreront le recours au contrat de projet : une durée, comprise entre un an minimum et six ans maximum ; les motifs de rupture du contrat ; et le principe du versement d’une indemnité de rupture anticipée du contrat, dont les modalités seront fixées par décret en Conseil d’État.

C’est un dispositif équilibré et utile dont il appartiendra aux employeurs publics de se saisir. Je vous confirme l’intérêt pour ce dispositif témoigné par l’ensemble des employeurs publics que j’ai auditionnés. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Je ne pourrai dire mieux que la rapporteure… Je me contenterai de vous donner quelques illustrations potentielles, en restant dans le champ de la fonction publique territoriale.

Ce type de contrat pourrait être utile pour assurer le suivi d’un projet de rénovation urbaine, à l’échelle de quatre, cinq ou six ans, ou encore pour bénéficier du concours d’un spécialiste de l’urbanisme pendant une durée limitée afin de mettre en place un PLUI dans une intercommunalité. Autant de tâches qui requièrent des compétences que l’on peut trouver dans le secteur public, mais dont la collectivité en question n’a pas nécessairement besoin à l’échelle d’une carrière, mais plutôt pour une durée plus limitée, comprise entre un et six ans.

Ces contrats répondront donc à ce type de besoins, et permettront aussi à l’administration de s’adjoindre des compétences issues du secteur privé. Par parallélisme des formes, ils permettront à des hommes et des femmes du secteur privé qui ont les compétences nécessaires de s’impliquer sur un projet pour une durée fixée à l’avance.

Je précise ce point car à la lecture de l’article, on pourrait imaginer que le contrat est signé pour une durée comprise entre un et six ans, alors qu’en réalité il sera signé pour la durée de la mission, laquelle durée fera l’objet d’une évaluation. C’est la raison pour laquelle nous avons introduit, dans le cadre de la concertation avec les organisations syndicales, une indemnité spécifique en cas de résiliation du contrat de manière anticipée par rapport à la durée prévue au moment de sa signature.

Mme Cécile Untermaier. Ce contrat de projet existe déjà, il a été utilisé pour la mise en œuvre de dossiers ANRU : à l’issue du chantier, la personne partait. Quels changements par rapport à la situation actuelle apporte précisément ce contrat ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Permettez-moi un partage d’expérience plutôt qu’une réponse théorique. Souvent, ce sont des contrats équivalents à des cadres A qui occupent les postes de chefs de projets ANRU, pour lesquels il est possible de recruter avec un contrat de trois ans, renouvelable une fois. Si le projet excède cette période et que les personnes sont reconduites, le contrat est automatiquement requalifié en CDI.

Le problème de ce type de contrat est qu’il est très difficile de proposer un contrat de deux ans seulement à quelqu’un que vous avez déjà recruté pour trois ans et dont vous avez encore besoin pour un an ou deux afin de mener à bien le projet de rénovation urbaine. Soit les contrats durent deux fois trois ans, ce qui peut être trop long, soit ils durent trois ans, ce qui peut être trop court.

Ce type de contrat permet de calibrer la durée du contrat à la durée d’une procédure.

La Commission rejette les amendements.

La réunion, suspendue à dix-huit heures dix, reprend à dix-huit heures vingt.

La Commission est saisie de l’amendement CL562 de M. Pascal Brindeau.

M. Pascal Brindeau. Cet amendement vise à encadrer les missions pour lesquelles un contrat de projet peut être mis en place. Le groupe UDI, Agir et indépendants soutient la mise en œuvre de ce contrat qui répond à certains besoins des employeurs territoriaux pour des missions très précises. Il permettra notamment, lorsqu’il n’est pas possible de recruter des fonctionnaires pour une mission, de recruter au sein de la collectivité avec ce type de contrat plutôt que d’externaliser des missions auprès de bureaux d’études.

Toutefois, afin d’éviter que ce contrat de projet ne soit critiqué pour le risque de précarisation qu’il pourrait faire courir à un certain nombre d’agents publics, nous proposons qu’il soit plus encadré.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cet amendement reprend la formulation des critères permettant déjà aux employeurs publics de recruter des agents contractuels de catégorie A en lieu et place de fonctionnaires. Ce faisant, il vide de sa substance le dispositif du contrat de projet, puisqu’il s’agit déjà du droit applicable, que l’article 9 du projet de loi étendra aux catégories B et C dans la fonction publique de l’État, et à la seule catégorie B dans la fonction publique territoriale.

Cet amendement priverait donc l’article 8 de tout effet utile – je suppose que c’est d’ailleurs l’objet recherché. Je demande donc son retrait.

M. Pascal Brindeau. J’avoue n’avoir pas compris l’argumentation de la rapporteure. Nous précisons seulement la nature de la mission, nous n’utilisons pas les dispositions légales qui permettent aujourd’hui de recruter par contrat.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. À la lecture de votre amendement, ce sont les mêmes termes qui sont employés.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Par ailleurs, le Gouvernement tient à ce que la possibilité d’avoir recours à un contrat de projet soit la plus large possible. La formulation proposée dans votre amendement est trop restrictive ; d’où notre avis défavorable.

De la même manière, nous souhaitons que l’ensemble des catégories hiérarchiques aient accès au contrat de projet.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CL19 de M. Olivier Marleix et CL765 de M. Jean-Pierre Cubertafon.

M. Jean-Louis Masson. L’amendement CL19 précise que le contrat de projet proposé à l’article 8 ne peut être destiné aux catégories C, car les emplois remplis par cette catégorie ne devraient pas être concernés par ce nouveau type de contrat.

Mme Laurence Vichnievsky. L’amendement CL765 est pratiquement identique. Il ressort des discussions que nous venons d’avoir que ces contrats de projet sont destinés à des conducteurs de projet. Du reste, monsieur le secrétaire d’État, vous répondiez précédemment à Mme Untermaier qu’il concernait des équivalents de catégorie A. Si l’on considère les projets que vous avez évoqués, comme la conduite d’un projet d’urbanisme, l’organisation du Tour de France ou des Jeux olympiques, nous nous adressons à des conducteurs de projet. Ce type de contrat ne nous paraît donc pas du tout adapté aux catégories C. C’est pourquoi nous souhaitons limiter le recours aux contrats de projet – dont nous ne contestons pas l’intérêt – aux catégories A et B. Faute de quoi, nous nous exposerions à un risque de détournement et une précarisation pour les emplois de catégorie C.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je ne pense pas qu’il faille exclure les agents de catégorie C du dispositif du contrat de projet.

Certes, en pratique, il semble plus probable que ces contrats de projet concernent majoritairement des agents des catégories A et B, eu égard au degré de qualification professionnelle potentiellement élevée que certaines missions peuvent exiger. Mais les catégories C peuvent tout à fait entrer dans le champ d’application du contrat de projet : des administrations et établissements publics, selon leur domaine d’intervention, peuvent ainsi avoir besoin de recourir à des agents présentant des compétences techniques que détiennent des agents de catégorie C afin de réaliser des opérations ponctuelles présentant une certaine complexité.

On peut ainsi supposer, dans la fonction publique territoriale, qu’une collectivité souhaite mettre en œuvre des dispositifs de désherbage sans utiliser de produits phytosanitaires ; un accompagnement des méthodes et des savoir-faire peut être prévu, auquel cas l’équivalent d’un chef d’équipe peut venir accompagner ce projet. De même, sur un chantier public délégué à des entreprises privées, il peut être nécessaire de recourir à un professionnel du niveau catégorie C pour suivre le chantier. Ces contrats de projet peuvent donc avoir leur pertinence pour les catégories C, particulièrement dans la fonction publique territoriale. Avis défavorable.

M. Raphaël Schellenberger. Dans ce genre de discussion, mieux vaut éviter les exemples… Si l’argument justifiant la création de contrats de projet se résume au fait que les collectivités doivent pouvoir désherber sans pesticides, nous n’irons pas bien loin, car je vois au moins trois ou quatre solutions alternatives qui permettraient de répondre concrètement à ce besoin.

L’esprit de l’amendement déposé par le groupe Les Républicains est que les emplois de catégories C sont les moins bien rémunérés, et par nature les plus précaires. Les moyens d’embaucher pour de courtes périodes existent déjà et suffiront largement à couvrir les besoins, y compris dans la fonction publique territoriale. Nous pensons que les catégories C, de par la nature de leur emploi, doivent être davantage protégées que des catégories A ou B auxquelles le niveau de technicité permet d’être plus mobiles.

Voilà pourquoi il me semble peu opérant qu’un emploi de catégorie C fasse l’objet d’un contrat de projet.

M. Ugo Bernalicis. Je suis d’accord avec ce qui vient d’être dit : il est intéressant d’entendre un député de droite expliquer que l’on esclavagise déjà suffisamment les fonctionnaires de catégorie C pour ne pas trop tirer sur la corde ! Pour dire les choses différemment, brut de décoffrage…

C’est pourtant bien la réalité : à la différence des CDD qui peuvent être conclus aujourd’hui pour des emplois non permanents, en cas de surcharge de travail ponctuelle, le seul intérêt du machin que vous nous proposez tient au fait que vous pourrez virer les gens à la fin de la mission, sans être contraint de respecter la durée exacte d’un CDD… Autrement dit, on aura tout loisir de précariser davantage la situation des gens. On pouvait espérer que cet amendement de repli permettrait de laisser les catégories C à l’abri de cette nouvelle forme de précarité.

Je connais la capacité du Président de la République à faire un projet d’à peu près tout ce qui est possible et imaginable, dans le but de précariser l’intégralité de la fonction publique. Le champ a déjà été ouvert dans le secteur privé avec les CDI de chantier ; je n’ai pas l’impression, madame la rapporteure, que les chiffres de création d’emplois soient suffisamment glorieux pour que vous puissiez vous en enorgueillir.

Mme Marie-George Buffet. Permettez-moi d’intervenir dans cette discussion et, du même coup, de défendre par avance notre amendement CL230 qui vise lui aussi à éviter que le contrat de projet ne s’applique à la catégorie C. Ces employés effectuent des travaux difficiles et perçoivent des salaires très bas. N’ajoutons pas davantage de précarité à leurs conditions de travail. Les exemples que vous citez, madame la rapporteure, ne sont pas opérants : vous évoquez des postes qui relèvent plutôt de la catégorie B que de la catégorie C. Encore une fois, faisons au moins en sorte que ces contrats de projet, contre lesquels je m’élève, ne soient pas imposés aux agents de la catégorie C : c’est un minimum pour le respect des employés des collectivités !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Le Gouvernement est défavorable à ces amendements, pour les mêmes raisons que celles que la rapporteure a exposées. Nous souhaitons que le champ ouvert soit le plus large possible, y compris pour qu’il soit possible, si nécessaire, de constituer des équipes projet – même si, comme l’a rappelé Mme Vichnievsky, cela concernera le plus souvent des agents des catégories A et B, j’en suis convaincu. Il n’est pas question d’imposer quoi que ce soit, mais simplement de conserver une possibilité ouverte.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je réaffirme qu’il ne s’agit que d’une possibilité offerte à l’employeur public, sans aucune systématicité. Jusqu’à trois options étaient envisageables dans les cas que j’ai cités ; en voilà donc une quatrième. Aucune atteinte n’est portée à l’encontre des fonctionnaires de catégorie C puisqu’ils exercent des missions qui, par nature et par définition, ne sont pas permanentes. Enfin, le projet de loi ouvrira – je suppose que, par cohérence, certains d’entre vous s’y opposeront – le champ des CDD à la fonction publique de l’État. Par concordance, il faut donc étendre la possibilité des contrats de projet aux agents de catégorie C.

La Commission rejette successivement ces deux amendements.

Elle examine l’amendement CL365 de M. Philippe Vigier.

M. Yannick Favennec Becot. Cet amendement vise à faire du contrat de projet un contrat à durée non pas déterminée mais indéterminée, sur le modèle des contrats de chantier déjà évoqués, qui s’achèvent sans délai précis, une fois le chantier achevé.

Le CDI est plus sécurisant, par exemple pour obtenir un logement ou souscrire un emprunt bancaire. Il permet en outre de mobiliser des profils plus variés pour conduire des projets ou des opérations dont le terme ne peut être défini.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis défavorable à la transformation du contrat de projet en CDI sur le modèle du contrat de chantier. Le CDI de chantier tel qu’il existe dans le secteur privé n’est pas réellement transposable dans la fonction publique. Dans le secteur privé, les accords collectifs de branche peuvent prévoir une obligation de réembauche ou de reclassement à la charge de l’employeur à l’échéance du chantier ; à défaut, la fin du chantier constitue un motif de licenciement qui donne droit au versement d’une indemnité au salarié. Par ailleurs, les CDD y sont limités à une durée de dix-huit mois – sauf les contrats ayant un objet défini et réservés aux cadres et ingénieurs, qui peuvent durer jusqu’à trois ans – ce qui implique naturellement de basculer vers le CDI pour des durées plus longues.

Ces modalités ne sont pas appropriées à la fonction publique, au sein de laquelle les CDD ont une durée maximale de trois ans renouvelable une fois, soit six ans au maximum. De plus, les deux cas de figure de fin de CDI de chantier ne sont pas adaptés, car il s’agit pour les employeurs publics de recruter des agents pour une mission strictement définie correspondant à des besoins temporaires, et non d’envisager leur recrutement comme un moyen d’intégration dans la fonction publique. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine les amendements identiques CL230 de M. Stéphane Peu et CL516 de Mme Marietta Karamanli.

Mme Marie-George Buffet. J’ai présumé un peu trop vite que ma précédente intervention servirait de défense de cet amendement CL230 étant donné votre refus d’entendre les arguments concernant le contrat de projet et la catégorie C, qui donne à voir ce qu’est vraiment votre projet de loi. Le rejet de ces amendements relatifs à la catégorie C est injustifié : il donne le sentiment qu’il s’agit d’une opération de déstabilisation de la fonction publique territoriale et de la fonction publique de l’État. Je regrette que face à cette démarche qui aggrave la précarité, aucune protection de la catégorie C ne soit envisagée en se fondant sur la réalité du terrain.

Mme Cécile Untermaier. Notre amendement CL516 a le même objet : nous assistons à une véritable entreprise de déstabilisation de la fonction publique, au point que l’on ne sait plus où ou en est. Pourquoi ce contrat de projet dès lors qu’il peut s’appliquer à la catégorie C ? Ce champ trop vaste le dénature et sème le doute sur un dispositif auquel je n’avais pas d’opposition a priori, sinon la crainte d’un risque de détournement par l’employeur, comme l’a évoqué Mme Vichnievsky. Nous avons ici le souci d’apporter des garanties pour que la précarité que subissent les agents de catégorie C ne soit pas aggravée. Quelles garanties fournirez-vous pour éviter que le contrat de projet ne se retourne contre ces agents en les précarisant davantage ?

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable pour les mêmes raisons que précédemment. J’ajoute que la création de postes relevant de contrats de projet sera naturellement soumise à publicité et qu’à ce titre, la mission, l’objet et la durée potentielle du contrat seront précisés en toute transparence. Il va de soi que la responsabilité de l’exécutif ou de l’organe décidant sera engagée si cette mission est fourvoyée.

Encore une fois, je suis navrée de le redire, l’objectif de ce projet de loi est bien d’ouvrir le recours aux contractuels dans l’ensemble des catégories. Le contrat de projet dans la catégorie C permettra aux personnes ainsi recrutées d’acquérir une expérience valorisée et valorisable pendant une durée allant d’une à six années. Les agents recrutés dans le cadre de contrats de moins d’un an seront quant à eux accompagnés grâce à la prime de précarité. La perspective d’un contrat durant d’un à six ans ne me paraît pas forcément précaire.

La Commission rejette les amendements.

Elle en vient à l’amendement CL367 de M. Philippe Vigier.

M. Yannick Favennec Becot. Il est défendu.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

Elle examine les amendements identiques CL131 de M. Robin Reda et CL464 de M. Boris Vallaud.

M. Robin Reda. Il serait inconvenant que la fonction publique soit moins-disante par rapport au droit du travail. Pour rendre le CDD de projet plus attractif et en limiter le caractère précaire, je propose par l’amendement CL131 d’en aligner la durée minimale sur celle du CDD « à objet défini » de droit privé, telle qu’elle figure dans le code du travail, c’est-à-dire dix-huit mois.

Mme Marietta Karamanli. L’amendement CL464 est défendu.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Si dans le secteur privé, la durée de dix-huit mois correspond à la durée maximale des CDD, elle n’a pas de réelle signification dans le secteur public. Dans la fonction publique, la durée d’un an est bien connue des employeurs car elle correspond à celle d’un CDD destiné à faire face à une vacance temporaire d’emploi dans l’attente du recrutement d’un fonctionnaire. Dans un souci d’équilibre et de lisibilité du dispositif, la fixation d’une durée minimale d’un an applicable au contrat de projet me semble donc tout à fait pertinente. Avis défavorable.

La Commission rejette les amendements.

Elle en vient à l’amendement CL371 de M. Philippe Vigier.

M. Yannick Favennec Becot. Amendement de cohérence avec les précédents.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL735 de la rapporteure.

Elle examine l’amendement CL133 de M. Robin Reda.

M. Robin Reda. Cet amendement vise à rendre le CDD de projet plus attractif et à en limiter le caractère précaire en prévoyant la renégociation systématique de la rémunération de l’agent concerné au terme de trois années d’exercice au sein de la collectivité en cas de renouvellement.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cet amendement me semble satisfait puisqu’une une disposition est déjà prévue en ce sens dans le droit commun – par exemple, pour le versant territorial, à l’article 1-2 du décret du 15 février 1988. Cette renégociation s’appliquera donc aux contrats de projet. Je propose le retrait de l’amendement ; à défaut, avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Même avis. Je confirme que cet amendement est satisfait par le droit commun, qui prévoit une obligation de réévaluation, tous les trois ans, de la rémunération des agents contractuels.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement de précision CL883 de la rapporteure.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CL884 de la rapporteure et CL132 de M. Robin Reda.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’amendement CL884 vise à obliger l’employeur à respecter un délai de prévenance fixé par décret avant l’échéance du contrat de projet, afin de garantir à l’agent une visibilité sur le terme de sa mission. Cette disposition s’inspire du droit applicable dans le secteur privé tel que le prévoit l’article L. 1243-5 du code du travail.

M. Robin Reda. Je suis ravi d’être en phase avec Mme la rapporteure et de proposer la même mesure : mon amendement CL132 précise que le délai de prévenance est de deux mois, mais il peut en effet être fixé par décret. L’objectif est toujours le même : rendre le CDD de projet plus attractif et limiter son caractère précaire.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Avis favorable à l’amendement de la rapporteure, qui renvoie à un décret. Ce délai de prévenance sera utile.

M. Ugo Bernalicis. Peut-on savoir quel délai vous avez en tête, monsieur le secrétaire d’État ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Il dépendra avant tout de la concertation avec les partenaires sociaux – les employés et les organisations syndicales. Nous examinerons également les délais prévus dans d’autres hypothèses pour l’harmoniser au mieux. Le délai de deux mois est une piste intéressante, mais elle sera explorée dans le cadre de la concertation.

La Commission adopte l’amendement CL884.

En conséquence, l’amendement CL132 tombe.

La Commission se saisit des amendements identiques CL548 de M. Pierre Cordier et CL615 de M. Rémi Rebeyrotte.

M. Jean-Louis Masson. L’amendement CL548 est défendu.

M. Rémi Rebeyrotte. L’amendement CL615 également.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.

M. Rémi Rebeyrotte. Je retire mon amendement.

L’amendement CL615 est retiré.

M. Olivier Marleix. L’amendement de la rapporteure que la commission vient d’adopter concernant le délai de prévenance montre que le chef-d’œuvre qu’est le contrat de projet n’est pas encore complètement abouti. Je regrette que M. Rebeyrotte ait retiré son amendement, car une telle réflexion de bon sens mérite d’être partagée.

Une fois de plus, ce contrat de projet a du sens pour la catégorie A ou, le cas échéant, pour des fonctions techniques relevant de la catégorie B. Compte tenu de ses particularités, notamment du fait que sa durée peut être inférieure à celle de la mission, le dispositif ne peut que créer de la précarité. Il va de soi qu’il se trouvera des demandeurs d’emploi qui l’accepteront, mais il ne me semble pas très protecteur de leurs droits, s’agissant d’emplois réellement précaires et compte tenu du faible niveau de rémunération des agents de catégorie C de la fonction publique.

Si l’argument de la rapporteure consiste à juger notre proposition insuffisante car elle s’applique à la fonction publique d’État alors que celle de M. Rebeyrotte concernait la fonction publique territoriale, nous présenterons en séance un amendement qui couvre les trois versants. En tout état de cause, je soutiens l’idée du contrat de mission mais ne nous trompons pas d’objet : limitons-le aux catégories A et B. Nous ne rendrions pas service à la catégorie C en l’englobant dans la mesure.

M. Raphaël Schellenberger. On me pardonnera de prolonger le débat, madame la présidente, mais il me semble utile de s’y attarder puisque presque tous les groupes politiques ont déposé un amendement allant dans le même sens. Je souhaite reprendre l’amendement de M. Rebeyrotte, même si nous proposions une rédaction légèrement différente. Je ne vois pas, en effet, ce qui empêche d’établir qu’il faut protéger les emplois de catégorie C plus que les autres car, d’une certaine manière, ils contribuent à assurer la permanence de l’action de l’État dans les territoires et justifient à ce titre le statut de la fonction publique. Les choix politiques et les projets peuvent varier, mais l’action de l’État, souvent conduite au premier chef par les agents du service du public que sont les employés de catégorie C, est permanente. C’est pourquoi il y a lieu de protéger particulièrement les emplois de cette catégorie.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je maintiens mes arguments et mon avis défavorable.

La Commission rejette les deux amendements.

Elle en vient à l’amendement CL368 de M. Philippe Vigier.

M. Yannick Favennec Becot. Cet amendement de cohérence avec les précédents, qui visaient à instaurer un contrat de projet à durée indéterminée, est défendu, et l’amendement CL369 l’est aussi par la même occasion.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL575 de M. Pierre Cordier.

M. Jean-Louis Masson. Cet amendement vise à ouvrir le contrat de projet aux titulaires par détachement.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Le contrat de projet sera effectivement ouvert aux titulaires par détachement, mais cette précision relève du domaine réglementaire. Je vous propose de retirer l’amendement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Même avis. Je précise que le droit réglementaire en vigueur ne fait pas obstacle au détachement d’un fonctionnaire dans le cadre d’un contrat, sous réserve qu’il ne soit pas détaché dans sa propre administration, sa collectivité ou son établissement public. Votre amendement est donc satisfait.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL552 de M. Pierre Cordier.

M. Jean-Louis Masson. Cet amendement vise à inscrire des dispositions de rupture du contrat de droit commun autres que les seules prévues par l’article 6, à savoir l’arrêt, le terme ou la non-réalisation du projet ou de l’opération.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je partage l’objectif de cet amendement qui rejoint celui de l’amendement de précision que j’ai déposé. Cependant, pour des motifs rédactionnels, et parce que mon amendement CL884 vise les trois versants, je vous propose de retirer le vôtre.

M. Jean-Louis Masson. Je fais confiance à la rapporteure.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL369 de M. Philippe Vigier.

M. Yannick Favennec Becot. Je l’ai défendu.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

Elle se saisit alors de l’amendement CL370 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. La valeur professionnelle des contractuels liés par un contrat de projet doit être évaluée, à étapes régulières, au regard du projet à conduire.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Votre amendement est satisfait par le droit en vigueur et relève du domaine réglementaire. J’en demande de retrait.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Même avis. Je précise que nous généraliserons dans d’autres articles l’entretien d’évaluation comme système d’évaluation de la valeur professionnelle, et que cela s’appliquera également aux contrats de projet. Votre amendement est donc satisfait par le droit réglementaire et le sera davantage encore par les articles à venir.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL563 de M. Pascal Brindeau.

M. Pascal Brindeau. Formulé de manière à contourner l’article 40 de la Constitution qui interdit aux parlementaires de déposer des amendements ayant pour effet d’alourdir la charge de l’État, mon amendement CL563 vise en fait à ce que tous les contrats de projet soient assortis d’une prime de fin de mission. C’est la transposition à l’identique de la mesure prévue dans le droit du travail au titre du contrat de mission. Il serait anormal que le secteur public, en particulier l’État, soit moins exemplaire au vu de ce qu’il exige du secteur privé.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Sans évoquer la demande de rapport, je comprends cet amendement d’appel. Je précise que les contrats de projet n’entreront pas dans le champ de la prime de précarité à laquelle le ministre – peut-être le confirmera-t-il en complément de mon intervention – s’est engagé. Elle ciblera en effet les contrats d’une durée inférieure ou égale à un an. Les contrats de projet, dont la durée sera comprise entre un et six ans, n’entreront donc pas dans le champ de cette mesure. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 8 modifié.

Article 9 (art. 3, 4, 6 et 6 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 et art. 16 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017) : Extension du recrutement contractuel pour les emplois permanents de la fonction publique de l’État

La Commission examine les amendements identiques CL246 de M. Ugo Bernalicis et CL469 de M. Boris Vallaud.

Mme Danièle Obono. Dans la continuité des amendements que nous avons défendus précédemment, l’amendement CL246 vise à supprimer l’article 9. Nous nous opposons à l’extension du recours aux contractuels dans la fonction publique de l’État, qui remet en cause le statut des fonctionnaires et les garanties d’intérêt général qu’il protège. L’article tend en effet à étendre le recours aux contractuels à tous les emplois permanents des établissements publics, sauf dans le domaine de la recherche, et aux emplois de toutes les catégories, et non plus de la seule catégorie A, dès lors que la nature des fonctions et les besoins des services le justifient. Il aligne ainsi les dispositions relatives aux contractuels employés dans les autorités administratives indépendantes et dans les autorités publiques indépendantes sur celles de la fonction publique de l’État. De ce fait, il aggrave la précarisation que subissent les contractuels. C’est pourquoi nous demandons sa suppression.

Mme Marietta Karamanli. En effet, l’article 9 élargit la possibilité de recourir à des agents en CDI et ouvre l’ensemble des emplois des établissements publics de l’État – à l’exception des emplois pourvus dans le domaine de la recherche – aux fonctionnaires et aux contractuels en CDD ou en CDI. L’étude d’impact montre que 486 établissements publics seraient concernés, et que huit seulement – le Centre national de la recherche scientifique (CNRS), l’Institut national d’études démographiques (INED), et ainsi de suite – conserveront le principe du recrutement de fonctionnaires.

Les fonctions et besoins des services justifiant le recours à des contractuels seront définis par décret. Il avait été annoncé qu’ils nous seraient précisés lors de l’examen du projet de loi, mais cette promesse n’a pas été tenue. En outre, ouvrir la possibilité de recruter des contractuels en CDD ou en CDI lorsque l’emploi ne nécessite pas une formation statutaire donnant lieu à la titularisation dans un corps de fonctionnaires, soit 31 % des emplois existants dans la fonction publique, donne l’impression que le statut gêne le Gouvernement au regard de l’impératif de continuité du service public, alors même qu’il a précisément été instauré pour respecter cet impératif. C’est une nouvelle contradiction qui nous incite, par l’amendement CL469, à demander la suppression de cet article.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’article 9 permet d’étendre les possibilités de recrutement contractuel dans la fonction publique de l’État. Force est de constater que nous avons une divergence de fond sur cette question de l’ouverture de la fonction publique aux agents contractuels. Je considère que c’est une chance pour l’administration mais aussi pour les agents venus du secteur privé : la diversité des profils dans la fonction publique et la diversification des carrières sont des enrichissements mutuels.

Sur le fond, cet article permet de donner des outils managériaux efficaces aux administrations de l’État en ouvrant notamment la possibilité de recruter des agents contractuels de catégories B ou C lorsque la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient. Il n’y a évidemment aucune obligation de recruter des agents contractuels ; il s’agit simplement d’élargir la faculté par laquelle l’administration pourra y recourir.

Cet article étend également la possibilité pour l’administration d’effectuer des primo-recrutements en CDI, ce qui était seulement réservé à des cas limitatifs. Là encore, c’est une double avancée bénéficiant autant aux administrations qu’à la sécurisation de la carrière des agents.

Autant de raisons pour lesquelles je suis défavorable à ces amendements de suppression.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Même avis.

M. Ugo Bernalicis. Autrement dit, un établissement public pourrait, par dérogation au principe, employer 100 % de contractuels. C’est proprement génial ! C’est à se demander comment faire respecter le principe… Quoi qu’il en soit, j’en prends acte. Ce que vous appelez une avancée, une richesse ou une expérience nouvelle constitue finalement un recul pour les usagers du service public, qui n’auront plus face à eux les mêmes garanties dont ils bénéficiaient jusqu’à présent avec des agents sous statut. Vous passez par le biais des établissements publics pour ne pas intervenir frontalement sur le gros morceau, à savoir la fonction publique de l’État, puisque vous réservez les emplois publics permanents aux postes de direction mais, à l’évidence, votre volonté est d’en finir avec le statut, d’en faire une catégorie marginale au sein de l’administration, voire un folklore réservé à quelques dinosaures. Pourtant, il n’y a rien de plus moderne que le statut de la fonction publique à la française – comme la sécurité sociale.

En persistant dans cette logique de filialisation de l’État, vous êtes sur la mauvaise pente : ce projet de loi ne vise pas la transformation de la fonction publique mais sa destruction et la précarisation de la société. C’est une nouvelle forme d’externalisation qui ne dit pas son nom.

M. Raphaël Schellenberger. Nous ne sommes pas opposés à l’introduction d’une certaine souplesse dans le recrutement. Cela étant, la rédaction de cet article – et du projet de loi dans son ensemble – témoigne de l’absence de stratégie gouvernementale concernant le périmètre de l’État. Si les fonctions exercées par les agents publics s’inscrivaient toujours dans le périmètre de l’État, nous discuterions beaucoup moins des possibilités d’assouplissement du statut. En clair, le Gouvernement a totalement abandonné l’idée selon laquelle il faut s’attaquer à la source, c’est-à-dire que l’État s’occupe de beaucoup trop de choses, surtout des choses dont il ne devrait pas s’occuper.

La Commission rejette les amendements.

Elle passe à l’amendement CL226 de M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Cet amendement vise à fixer un seuil maximal de contractuels. Dans notre esprit, il y aura toujours des contractuels dans la fonction publique : il peut être nécessaire d’y assurer des fonctions ponctuelles ou des remplacements. Notre objectif n’est donc pas d’éradiquer définitivement l’emploi contractuel mais de le limiter en fixant un plafond de 15 % – la moyenne actuelle étant de 17,5 %. C’est en quelque sorte un plan de résorption de la précarité et un plan de titularisation ; tel est notre état d’esprit. Je suppose que vous me répondrez que cette mesure est orthogonale par rapport à la volonté du Gouvernement ; mais précisément, l’objectif est de montrer l’orthogonalité qui existe entre deux visions de la fonction publique – et du monde –, la vôtre et la nôtre. Il nous semblerait beaucoup plus progressiste – pour employer votre propre langage – de fixer un seuil de 15 % de contractuels, donc de précaires, dans la fonction publique.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je ne partage pas la logique qui sous-tend le principe d’un objectif chiffré du nombre d’agents contractuels ou de fonctionnaires. Rendre notre fonction publique plus forte et efficace, tout comme améliorer la fluidité et la valorisation des parcours professionnels des agents ne dépendent pas de ratios, qui seraient tout aussi rigides qu’inefficaces et complexes à mettre en œuvre en pratique. Avis défavorable.

M. Ugo Bernalicis. Voilà une réponse qui combine tous les mots gagnants : qu’importe leur ordre, cela fait une belle phrase ! Pourquoi pas ? Je pensais que vous me répondriez qu’il existe déjà de très nombreuses personnes employées en CDI dans les administrations, dans des emplois techniques ou d’informaticiens, par exemple – notamment à l’Agence nationale de la sécurité informatique (ANSI), qui a régulièrement recours à des contractuels. Je vous aurais alors répondu qu’il faut ouvrir de nouveaux corps de fonctionnaires et de nouvelles voies de concours, et que la fonction publique en soi n’a pas de limite. Il existe même un principe, celui de la mutabilité, qui permet de s’adapter au « monde qui bouge ». Je pourrais moi aussi faire une belle phrase : « Grâce à la mutabilité dans le service public, nous pouvons nous adapter aux défis d’aujourd’hui et de demain pour être au plus près des préoccupations du terrain », et ainsi de suite. En bref, j’espérais une réponse sérieuse à une proposition sérieuse, qui vise à résorber la précarité en deçà d’un seuil de 15 %, plutôt acceptable à mon sens…

Mme Émilie Chalas, rapporteure. C’est bien la preuve qu’il vous faut éviter de penser à ma place la réponse que je vous apporte…

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte les amendements de coordination identiques CL737 de la rapporteure et CL467 de M. Boris Vallaud.

Elle examine l’amendement CL468 de M. Boris Vallaud.

Mme Cécile Untermaier. Notre amendement vise à réduire le champ du recours aux contrats dans la fonction publique de l’État. C’est en effet un aspect de cet article que nous critiquons, car il envoie un message négatif aux fonctionnaires. Au fond, les fonctionnaires n’ont qu’une envie : évoluer dans leur métier et accompagner l’évolution de la société. Lorsque des innovations surviennent, ils attendent de leurs employeurs qu’ils les encouragent à se former pour leur permettre de s’adapter. Il faudrait réécrire cet article avec prudence pour en réduire le champ et montrer aux fonctionnaires qu’il ne s’agit pas d’un geste de méfiance à leur égard et envers leur capacité à suivre les innovations qui s’imposent à tous, dans tous les secteurs professionnels.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je ne peux que souscrire à ce discours, mais l’amendement lui-même vise à supprimer l’extension du champ du recours aux contractuels dans les emplois de catégorie B et C ainsi que l’assouplissement des conditions permettant d’y recourir. Je ne peux donc qu’y être défavorable, pour les motifs que j’ai exposés.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement CL76 de M. Julien Dive.

M. Robin Reda. Par cet amendement, Julien Dive souhaite mettre fin au principe selon lequel le recrutement d’un contractuel se fait par défaut si les compétences nécessaires n’ont pas été trouvées au sein du corps des fonctionnaires. Lorsqu’un emploi est à pourvoir et qu’un non-fonctionnaire est plus compétent qu’un fonctionnaire, l’autorité de recrutement doit pouvoir faire le choix de recourir à un contractuel.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cet amendement supprime l’alinéa 10 qui assouplit justement, par rapport au droit actuel, les conditions dans lesquelles l’administration peut avoir recours à un recrutement contractuel. Or cet alinéa octroie à l’administration une nouvelle marge d’appréciation des candidatures sur les emplois à pourvoir afin d’évaluer le niveau de l’expertise ou de l’expérience professionnelle requise pour exercer ces fonctions. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État. Je vous suggère de retirer l’amendement car son application produirait un effet inverse à l’objectif recherché : l’alinéa que vous souhaitez supprimer est précisément celui qui permet de l’atteindre.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL77 de M. Julien Dive.

M. Robin Reda. Le texte prévoit que les contrats seront fixés pour une durée de trois ans et renouvelables pour une durée maximale de six ans. Pour ne pas rebuter les contractuels à qui il est d’abord proposé un contrat à durée déterminée et qui peuvent ensuite devoir attendre six ans avant d’espérer un CDI, nous proposons d’abaisser la durée maximale du CDD.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je ne suis pas favorable à la modification de la durée maximale des CDD avant leur transformation en CDI, soit une durée de trois ans renouvelable une fois dans la limite de six ans. Ces dispositions sont conformes au droit européen tel qu’il résulte de la directive de 1999 et sont depuis lors bien ancrées dans le cadre de gestion des ressources humaines de la fonction publique. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL738 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 9 modifié.

Article 10 (art. 3-3, 25 et 104 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984) : Extension du recrutement contractuel pour les emplois permanents de la fonction publique territoriale

La Commission aborde l’examen de l’amendement CL248 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Toujours dans la continuité de nos précédents amendements de suppression, cet amendement vise à éviter l’extension du recrutement de contractuels dans la fonction publique territoriale car elle remettrait en cause le statut et aggraverait la précarité des contractuels. Il est en effet prévu d’accorder aux collectivités territoriales une possibilité de dérogation afin qu’elles recrutent des contractuels à des postes de catégorie B dans les mêmes conditions que celles qui s’appliquent actuellement aux postes de catégorie A, alors qu’ils sont réservés à des fonctionnaires, d’ouvrir à la contractualisation tous les emplois permanents des communes et groupements de communes de moins de mille habitants et tous les emplois à temps non complet inférieur à 50 % aux autres collectivités territoriales, et d’autoriser les centres de gestion à recruter des contractuels et à les mettre à disposition des collectivités.

Nous estimons que cet article revient à généraliser les dérogations à l’emploi de fonctionnaires, ce qui menace le statut en encourageant le recours aux contrats, notamment précaires. Rappelons que selon le rapport annuel 2018 sur l’état de la fonction publique, les trois cinquièmes des contractuels sont employés en CDD et 72 % de ces CDD sont d’une durée inférieure à un an. Rappelons également que pour le Conseil d’État, l’étude d’impact est insuffisante sur ce point : elle ne contient aucune donnée chiffrée concernant le nombre de fonctionnaires en attente d’affectation, l’impact d’une hausse du nombre de contractuels et la coexistence des deux catégories d’agents – selon le considérant 18 de l’avis du Conseil. Autant de raisons qui nous conduisent à demander la suppression de l’article 10.

Mme George Pau-Langevin. L’amendement CL472 vise également à supprimer l’article 10, qui élargit les possibilités de recourir au contrat dans la fonction publique territoriale.

Nous ne sommes pas contre l’idée de recourir aux agents contractuels lorsque c’est utile. Mais cela doit rester une exception. Or l’article 10 en fait quasiment une règle. Ce n’est souhaitable ni pour le service ni pour le recrutement d’agents de qualité.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Mon avis sera évidemment défavorable à ces amendements de suppression de l’article 10 relatif à la fonction publique territoriale. Cet article s’inscrit dans la suite logique du précédent, dans une optique d’élargissement des facultés de recours au recrutement contractuel, notamment dans les plus petites communes qui peuvent souffrir de sérieuses difficultés d’attractivité et donc de problèmes réels de ressources humaines.

Pour l’ensemble des collectivités, l’article élargit la faculté de recrutement contractuel aux emplois de catégorie B, dès lors que la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient.

Mais surtout, cet article constitue un premier levier d’action afin de lutter efficacement contre le fléau que représente la multiplication de pratiques illégales comme le recours abusif à des vacataires horaires, qui ne bénéficient pas des garanties applicables aux agents contractuels alors que leur emploi satisfait un besoin permanent. Le recours croissant à de faux vacataires n’est pas une solution pérenne pour les collectivités et enferme ces personnes dans la précarité.

L’article 10 permet de répondre à ces enjeux en ouvrant sans condition le recrutement de fonctionnaires et d’agents contractuels pour des emplois à temps incomplet dont la quotité est inférieure à 50 %, sans distinction de seuils démographiques ou de cadres d’emplois. Il va donc dans le bon sens.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Je suis, moi aussi, défavorable à la suppression de cet article. Je rejoins la rapporteure : nous dotons les collectivités d’outils pour lutter contre la multiplication des faux vacataires, soit par l’accès à des contrats plus solides et plus stables, soit par l’accès à des postes de titulaires à temps non complet. Nous avons pléthore d’exemples d’agents dont le maintien dans l’emploi ne dépend que d’un arrêté municipal renouvelé tous les deux ou trois mois, de vacataires payés irrégulièrement ou de contrats courts pour des besoins dits occasionnels, que l’on interrompt pendant deux mois – le temps des vacances scolaires – avant de les reprendre en septembre, en maintenant les personnels dans la précarité. Les outils proposés par cet article permettent de répondre à ces situations.

Cet article permettra aussi de modifier et de conforter les missions des centres de gestion dans leur rôle de groupement d’employeurs : l’alinéa 8 précise dans quelles conditions les centres de gestion pourront s’imposer comme groupement d’employeurs. L’objectif est de permettre à des agents de la fonction publique territoriale de travailler pour plusieurs collectivités, en disposant d’un temps plein avec un employeur unique – le groupement d’employeurs. Cela facilitera leurs relations administratives avec l’employeur, leur donnera de la visibilité et luttera contre la précarité. Cet article vise réellement à sortir les agents disposant de très faibles quotités de la précarité.

M. Olivier Marleix. Avec ces amendements, nous arrivons au terme des dispositions qui concernent le recours au contrat. Dans son avis, le Conseil d’État a pointé l’insuffisance de l’étude d’impact sur ce point, notamment sur les effets concrets qu’auront les dispositions que vous nous proposez d’adopter.

Évidemment, pour les collectivités locales, vous n’êtes pas les mieux placés pour répondre, du fait de leur liberté d’action. On sait qu’un contractuel coûte plutôt plus cher qu’un agent titulaire. Quand on connaît les contraintes que l’État impose aux collectivités locales, tant en termes de dotations que de finances publiques, je ne suis pas sûr que les collectivités locales vont se précipiter pour recourir aux contractuels !

Ainsi, une petite commune de moins de 1 000 habitants qui recrute un contractuel et le garde plus de deux ans peut avoir la surprise de découvrir qu’elle lui doit une indemnisation au titre du chômage, même si le salarié a démissionné. Les collectivités locales avancent prudemment sur le sujet.

Monsieur le secrétaire d’État, je ne comprends toujours pas où vous voulez en venir. Quelle ambition l’État s’assigne-t-il alors qu’il y a aujourd’hui autour de 20 % de contractuels ? Souhaitez-vous atteindre 30, 40, 50 ou 60 % ? Que ferez-vous des outils que vous nous demandez de voter ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Nous n’avons pas d’objectifs chiffrés, monsieur Marleix. Cela n’aurait aucun sens… Certains services et établissements publics de l’État emploient déjà 60 à 100 % de contractuels. Ils fonctionnent et rendent les services qu’on attend d’eux. Certains sont probablement améliorables. Cela passe-t-il par plus ou moins de contractuels ? Pas nécessairement. Cela passe avant tout par des réorganisations et une amélioration de la qualité du service rendu. Nous ne voulons pas nous enfermer dans une logique arithmétique qui consisterait à fixer des seuils ou des plafonds au recrutement de contractuels.

Je le dis et le répéterai jusqu’à la fin de la discussion : il n’y a pas d’objectifs chiffrés.

M. Ugo Bernalicis. Je ne comprends pas : quand un emploi permanent n’est pas pourvu par un fonctionnaire, on peut déjà recruter un contractuel. Vous voulez désormais pouvoir embaucher en primo-recrutement des contractuels à durée indéterminée sur des emplois permanents. Assumez-le ! Arrêtez de prétendre qu’il n’y a pas de fonctionnaires disponibles et qu’il est compliqué de recruter. Sinon, ouvrez des postes aux concours !

L’étude d’impact ne nous fournit aucune indication : il existe un phénomène de « reçus-collés » pour les catégories A – des reçus aux concours qui ne trouvent pas de poste. Est-ce la même chose pour les catégories B et C de la fonction publique territoriale ? N’y avait-il pas d’autres pistes ?

Quant à l’argument des vacations abusives, auxquelles on substitue des contrats à durée déterminée tout aussi précaire, mais tout de même moins, vous avez raison : sur l’échelle du pire, c’est un peu mieux. C’est mieux que si c’était pire, comme je le dis souvent dans cette commission, malheureusement !

Pourquoi ne renforcez-vous pas le contrôle de légalité concernant le recours abusif aux vacataires ? Pourquoi n’ouvrez-vous pas la fonction publique à l’inspection du travail ? Les inspecteurs du travail pourraient alerter sur les abus. Vous pourriez éventuellement prévoir un petit droit à l’erreur – vous le voyez, je suis vos travaux. Qu’en pensez-vous ? Cela ne serait-il pas plus sécurisant et progressiste ? Je vous donne quelques idées…

La Commission rejette les amendements.

Puis elle passe à l’amendement CL822 de M. Alain Perea.

M. Alain Perea. Le présent amendement vise à autoriser les employeurs territoriaux à recruter par voie contractuelle afin de remplacer un fonctionnaire absent pour cause de disponibilité pour convenance personnelle.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je ne comprends pas la plus-value qu’apporterait cet amendement. Le droit applicable permet déjà aux collectivités de procéder au remplacement de fonctionnaires bénéficiant d’une disponibilité pour convenance personnelle. Le recrutement d’un agent contractuel peut alors être envisagé sur le fondement de l’article 3-2 de la loi du 26 janvier 1984 pour pallier temporairement à une vacance d’emploi dans l’attente du recrutement d’un fonctionnaire, le contrat étant alors conclu pour une durée maximale d’un an renouvelable une fois. Le recours à l’article 3-3 est également possible, dans des conditions plus souples, comme je l’ai précisé précédemment. Par conséquent, mon avis est défavorable.

M. Alain Perea. Je ne suis pas d’accord ! Actuellement, on utilise abusivement ces dispositions : quand un agent part en disponibilité pour convenance personnelle pour six ans, on passe son temps à mentir au contrôle de légalité, en utilisant des contrats inadaptés.

Je ne vois pas en quoi cela modifierait l’économie du texte que d’offrir aux ressources humaines et au directeur général des services la possibilité de faire signer un contrat sur la durée de l’absence pour convenance personnelle, en toute transparence et en toute légalité. Nous mettrions enfin le droit en phase avec les pratiques. J’ai moi aussi réalisé des auditions : les acteurs de terrain en ont assez de mentir au contrôle de légalité.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient aux amendements identiques CL61 de M. Éric Poulliat, CL585 de M. Pierre Cordier et CL618 de M. Rémy Rebeyrotte.

M. Éric Poulliat. Dans la fonction publique territoriale, en cas de vacance temporaire d’emploi et dans l’attente du recrutement d’un fonctionnaire, il est possible de conclure un contrat d’une durée maximale d’un an, renouvelable une seule fois – soit deux ans au total.

L’amendement CL61 propose de porter à trois ans la durée maximale des contrats. L’intervalle maximum entre l’organisation de deux concours de la fonction publique territoriale étant de trois ans, cet allongement de la durée maximale permettrait aux agents sous contrat, s’ils le souhaitent, de se présenter au concours et d’être le cas échéant recrutés comme fonctionnaire sur le poste qu’ils ont commencé à occuper comme contractuel. Cet allongement de la durée maximale constituera un outil supplémentaire de lutte contre la précarité dans la fonction publique territoriale, en donnant à des agents entrés comme contractuels une possibilité nouvelle d’y rester comme fonctionnaires s’ils sont reçus au concours.

M. Jean-Louis Masson. Dans la fonction publique territoriale, en cas de vacance temporaire d’emploi et dans l’attente du recrutement d’un fonctionnaire, il est possible de conclure un contrat pour les besoins de continuité du service, d’une durée maximale d’un an renouvelable une seule fois. Or le droit de la fonction publique de l’État ouvre la possibilité de conclure des contrats d’une durée supérieure à un an. Cette mesure de simplification et d’harmonisation pourrait être étendue à la fonction publique territoriale et le contrat pourrait être renouvelable deux fois – soit trois ans au total. Tel est l’objet de l’amendement CL585.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis plutôt défavorable à ces amendements d’extension des CDD d’agents recrutés pour faire face à une vacance temporaire d’emploi dans l’attente du recrutement d’un fonctionnaire à une durée totale de trois ans.

La disposition prévue à l’article 3-2 de la loi du 26 janvier 1984 permettant le recrutement d’un agent contractuel pour un CDD d’un an renouvelable une fois se justifie eu égard au caractère strictement temporaire de la vacance de l’emploi. Je ne pense pas que rendre possible la succession de CDD d’un an soit véritablement efficace afin de lutter contre la précarité au sein de la fonction publique territoriale. En outre, deux ans me semblent un délai raisonnable pour recruter un fonctionnaire.

M. Éric Poulliat. J’entends vos arguments, mais donner l’opportunité à nos contractuels d’intégrer la fonction publique territoriale vise également à réduire la précarité. Ainsi, dans la filière culturelle de la fonction publique territoriale, certains concours importants ne sont organisés que tous les trois ans. Or un agent sera beaucoup plus performant au concours lorsqu’il est en situation d’emploi : il pourra notamment profiter de la préparation au concours – qui pourra être financée par sa collectivité. Il me semblait intéressant d’éviter la coupure, le retour au privé ou à la case Pôle emploi, afin de préparer le concours sereinement : l’amendement permettait d’« héberger » le contractuel avec bienveillance jusqu’à l’organisation d’un nouveau concours.

M. Rémy Rebeyrotte. Je retire mon amendement CL618.

L’amendement CL618 est retiré.

M. Jean-Louis Masson. Madame la rapporteure, il ne s’agit pas de situations exceptionnelles… Il arrive régulièrement de ne pas pourvoir un emploi pendant un ou deux ans dans certaines collectivités, notamment celles qui ne se trouvent pas au sein de métropoles. En outre, il faut trouver un fonctionnaire qui dispose du grade exigé. Enfin, certaines compétences spécifiques, notamment dans la filière informatique, ne sont pas faciles à trouver au bon grade et avec la bonne compétence, ce qui rend parfois les recrutements complexes. Il ne s’agit pas de cas isolés, mais du quotidien de bon nombre de communes.

La Commission rejette les amendements CL61 et CL185.

Elle en vient à l’examen de l’amendement CL470 de M. Boris Vallaud.

Mme Marietta Karamanli. Tout en maintenant les dispositions qui permettent de lutter contre le recours aux faux vacataires, notre amendement propose que l’ouverture au contrat ne puisse concerner les emplois de catégorie B.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cet amendement conduirait à supprimer l’extension des possibilités de recrutement aux emplois de catégorie B, lorsque la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient. Comme je l’ai déjà expliqué à plusieurs reprises, j’y suis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Même avis. La demande est portée par les employeurs territoriaux. Nous souhaitons maintenir cette possibilité. Nous leur avions même proposé d’inclure les catégories B et C, pour des contrats de deux fois trois ans, comme nous le faisons dans la fonction publique de l’État ou hospitalière. Les employeurs territoriaux ont demandé à ne bénéficier de l’ouverture que pour les catégories B.

Mme Marietta Karamanli. Ce n’est pas ce que nous demandons. Nous maintenons l’amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Elle passe à l’amendement CL217 de M. Jean-Louis Masson.

M. Jean-Louis Masson. Dans le but d’assurer une équivalence avec la fonction publique de l’État, il paraît nécessaire de pouvoir recruter par contrat toutes les catégories hiérarchiques de la fonction publique territoriale, et pas seulement les catégories A et B comme le prévoit le projet de loi. L’élargissement des emplois permanents de la fonction publique territoriale à des agents contractuels de catégorie A, B ou C resterait soumis aux deux conditions cumulatives prévues dans la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 : les besoins du service ou la nature des fonctions doivent le justifier et aucun fonctionnaire n’a pu être recruté.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Nous avons déjà eu cette discussion lors de l’audition de M. le secrétaire d’État sur le projet de loi : l’extension des recrutements contractuels sous la forme de CDD de deux fois trois ans pour les emplois de catégorie C n’était pas une demande expressément formulée par les employeurs territoriaux, ce qui explique la différence avec la mesure d’ouverture prévue pour la fonction publique de l’État.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL372 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. S’il est important de donner plus de souplesse au recrutement de contractuels dans les trois versants de la fonction publique, il est également essentiel de réaffirmer que l’ouverture accrue des emplois permanents aux contractuels ne peut se faire que de manière dérogatoire.

Il est donc proposé de supprimer les dispositions de cet article qui autorisent les communes de moins de 1 000 habitants et leurs groupements à recourir au contrat pour l’ensemble de leurs emplois permanents, quelle que soit la quotité de temps de travail de ces emplois. Les emplois permanents, notamment lorsque la quotité de travail est inférieure à 50 % de la durée légale dans les autres collectivités territoriales, doivent être pourvus par des recrutements de fonctionnaires à temps non-complet. C’est pourquoi nous proposons également la suppression de cette mesure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Votre amendement, tel qu’il est rédigé, revient à supprimer l’essentiel des dispositions de l’article 10. J’émets donc un avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL172 de M. Arnaud Viala.

M. Jean-Louis Masson. Plus de 31 000 communes – soit environ 86 % des communes françaises – ont une population comprise entre 0 et 2 000 habitants. Il ne s’agit pas de « villes », dont le seuil est fixé à 2 000 habitants. Cet amendement vise à ouvrir aux communes et aux groupements de communes de 1 000 à 2 000 habitants la possibilité de recourir à des agents contractuels pour tous les emplois.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je ne suis pas favorable à la hausse du seuil de 1 000 habitants en dessous duquel cet article prévoit que les petites communes peuvent recruter des agents contractuels pour l’ensemble de leurs emplois sans aucune restriction. Il s’agit d’une mesure à caractère dérogatoire, qui englobe d’ores et déjà près de 22 000 communes et concerne potentiellement 70 000 emplois. Mon avis sur l’amendement est donc défavorable.

M. Raphaël Schellenberger. L’exemple des professeurs de musique est très intéressant et leur emploi public pose question. Sans vouloir être péremptoire, je ne pense pas que les communes de moins de 1 000 habitants proposent des emplois publics de professeur de musique. Par contre, dans des communes de moins de 2 000 habitants, on doit pouvoir en trouver. Or ce sont rarement des emplois pourvus à temps plein : il s’agit le plus souvent d’emplois à temps partiel, partagés entre différentes communes. Proposez-vous d’exclure ce cas particulier du dispositif ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Il est effectivement rare que des professeurs de musique soient sur un pupitre à temps plein. C’est pourquoi ils pourront bénéficier des dispositions concernant les titulaires à temps non complet. Le dispositif proposé permet aussi de répondre à ce cas de figure.

Un autre amendement présenté ultérieurement pourra aussi les intéresser : il concerne la mutualisation par le biais des groupements d’employeurs portés par les centres de gestion. Dans ce type d’activité, les agents concernés sont amenés à travailler sur plusieurs sites.

La Commission rejette l’amendement.

Elle passe aux amendements identiques CL885 de la rapporteure, CL62 de M. Éric Poulliat et CL471 de Mme Marietta Karamanli.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’amendement CL885 a été suggéré par la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation. Il a retenu toute mon attention. Je vais laisser mon collègue Éric Poulliat le défendre en même temps que son amendement CL62.

M. Éric Poulliat. Je vous remercie pour cette élégance, et d’avoir rappelé dans votre exposé sommaire que votre amendement a été inspiré par nos travaux.

L’article 10 a un double objet : d’une part, élargir les possibilités de recruter des personnels contractuels dans la fonction publique territoriale ; d’autre part, assouplir les règles de recrutement sur les emplois à temps non complet.

L’extension de la possibilité de recruter des personnels contractuels pour tous les emplois dans les communes de moins de 1 000 habitants est bienvenue : dans ces petites communes qui emploient très peu de personnel et peuvent avoir des difficultés à attirer des agents, il est nécessaire d’élargir les possibilités de recrutement contractuel.

En revanche, l’extension de la possibilité de recruter des personnels contractuels pour tous les emplois dans les groupements composés de communes dont la population moyenne est inférieure à ce seuil de 1 000 habitants n’a pas la même portée et pourrait même poser problème. On peut même parler de « trou dans la raquette » : ainsi, un EPCI de 50 000 habitants composé de cinquante et une communes qui a une population moyenne par commune de moins de 1 000 habitants pourrait donc, avec la modification proposée par le projet de loi, recruter des contractuels pour tous ses emplois. La portée de cette modification n’a probablement pas été mesurée dans l’écriture initiale du texte.

L’amendement CL62 prévoit donc de limiter la possibilité de recruter des agents contractuels sur tous les emplois aux EPCI de moins de 15 000 habitants. Cette dérogation au principe du recrutement de fonctionnaires sur les emplois permanents, limitée à ces « petits » EPCI, est cohérente avec le seuil retenu pour déterminer la taille minimale des EPCI, en dessous duquel des EPCI peuvent, par dérogation, être constitués dans les territoires peu denses ou de montagne. Au-delà de cette taille, en revanche, il ne paraît pas souhaitable de permettre de façon aussi large le recrutement de personnels contractuels sur tous les emplois.

Mme Marietta Karamanli. L’amendement CL471 a été rédigé dans le même esprit. La raison doit l’emporter s’il est soutenu par Mme la rapporteure et, je l’espère, M. le secrétaire d’État. Nous nous appuyons sur le seuil actuellement prévu pour les EPCI, qui est de 15 000 habitants.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Je m’en remets à la sagesse de la commission.

La Commission adopte les amendements.

Elle en vient à l’amendement CL886 de la rapporteure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Le présent amendement affirme la compétence de conseil des centres de gestion auprès des communes et établissements publics locaux en matière d’emploi et de gestion des ressources humaines. Cette disposition présente un certain parallélisme avec les attributions dévolues aux groupements d’employeurs dans le secteur privé, telles que prévues par l’article L. 1253-1 du code du travail. Il s’agit de consacrer le rôle essentiel des centres de gestion comme organes de pilotage transversal des ressources humaines à l’échelle locale.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL739 de la rapporteure.

Elle se saisit de l’amendement CL63 de M. Éric Poulliat.

M. Éric Poulliat. Cet amendement est issu des travaux de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation. La situation de précarité dans laquelle peuvent se trouver, contre leur gré, certains agents contractuels recrutés dans des collectivités est renforcée par les situations de temps partiel subi. La lutte contre la précarité dans la fonction publique devant rester une priorité du législateur, le présent amendement propose, d’une part, de permettre aux collectivités et à leurs établissements de faire assurer la gestion des agents contractuels qu’ils recrutent à temps non complet par les centres de gestion. Avec l’accord des agents concernés, les centres de gestion pourront mettre ces agents à disposition d’un ou plusieurs autres employeurs publics, dans la limite de la durée légale du travail, avec l’objectif que leur temps de travail se rapproche autant que possible d’un temps complet.

Cette mesure aura également l’intérêt de permettre aux collectivités de bénéficier de mises à disposition d’agents déjà employés dans d’autres collectivités, sans avoir à assurer elles-mêmes le recrutement, ni à gérer les contrats des personnes ainsi mises à disposition.

D’autre part, l’amendement prévoit que la quotité de travail des agents contractuels de la fonction publique territoriale ne saurait être inférieure à 30 % de la durée légale du travail. Une telle durée de travail apparaît en effet contraire à l’intérêt des agents concernés, qui perçoivent une rémunération très faible tout en ayant des contraintes horaires – surtout s’ils travaillent pour plusieurs employeurs ou plusieurs collectivités – souvent difficilement compatibles avec la recherche d’un autre emploi, ainsi qu’à l’intérêt des collectivités elles-mêmes, qui emploient des personnes trop peu présentes dans leur emploi pour être pleinement intégrées à la vie de la collectivité.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Nous avons eu cette discussion à l’occasion des amendements précédents : fixer une quotité horaire minimale applicable aux recrutements contractuels ou titulaires ne permettra pas de résoudre le problème majeur du recours abusif aux faux vacataires, qui ne disposent pas des mêmes droits que les agents contractuels en matière de congés, de formation, de compléments de rémunération ou de reclassement. Par conséquent, mon avis sera défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Je suis du même avis.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte enfin l’article 10 ainsi modifié.

Après l’article 10

La Commission examine l’amendement CL190 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. Nous souhaitons faire un point sur la précarité actuelle des agents contractuels dans la fonction publique et demandons une étude sur les conséquences économiques, sociales, physiques et psychologiques pour les personnes concernées d’une absence de titularisation ou de recours à des contrats – tant précaires, tels les CDD, que CDI. Nous voudrions avoir une idée précise des effets de cette précarité sur le fonctionnement des services et de la qualité effective du service public rendu aux usagers par le recours actuel de personnes par le biais du contrat. Nous voudrions disposer d’un chiffrage budgétaire de la titularisation de tous les agents publics contractuels. Aucun bilan ne semble avoir été effectué quant aux effets délétères qui sont relevés par les agents et organisations syndicales, tant sur la situation des contractuels que sur le bon fonctionnement des services. D’où cette demande de rapport.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. La commission des Lois est en règle générale défavorable aux demandes de rapport au Gouvernement pour au moins deux raisons : ils alourdissent les textes de loi sans avoir de réelle portée normative et le Parlement dispose de ses propres moyens d’évaluation. Mon avis sera donc défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL225 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Cette nouvelle demande de rapport au Gouvernement nous semble pertinente. Nous considérons que, malheureusement, en l’état actuel du système, le Parlement n’a pas les moyens de disposer d’autant d’informations précises que le Gouvernement, d’autant que les nombreuses ordonnances prévues par le projet de loi rendent difficile la maîtrise des décisions par le Parlement.

Nous souhaitons avoir un bilan de la loi du 12 mars 2012 dite Sauvadet, dont les résultats ont été décevants en termes de déprécarisation des agents contractuels, afin de prévoir un nouveau plan de titularisation qui atteindrait réellement ses objectifs au regard des erreurs passées.

Nous nous opposons à ce que de telles vagues de contractualisation rapprochent la fonction publique des méthodes du privé, qui favorisent la précarité et remettent en cause les protections statutaires. Il est important de réaliser ce bilan pour faire évoluer la réponse législative dans le sens de l’intérêt général et d’un service public plus adapté aux besoins.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Même avis que précédemment : défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Article 11 (art. 60 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984) : Faciliter les mouvements de mutation des fonctionnaires de l’État

La Commission aborde l’examen des amendements identiques CL249 de Mme Danièle Obono et CL564 de M. Pascal Brindeau.

Mme Danièle Obono. L’amendement CL249 propose la suppression de l’article 11. Nous nous opposons à l’extension des pouvoirs des autorités compétentes de la fonction publique de l’État en matière de mutations des fonctionnaires, du fait de la suppression de l’avis obligatoire des commissions administratives paritaires (CAP).

Cet article octroie un nouveau pouvoir à l’autorité compétente : elle pourra définir des durées minimales et maximales d’occupation de certains emplois. Il impose à l’autorité compétente d’édicter, en respectant les priorités et après avis des comités sociaux, des lignes directrices fixant les orientations générales et les grandes priorités en matière de mobilité, promotion et valorisation des parcours.

Il s’agit d’une régression dans les droits des fonctionnaires de l’État : les pouvoirs des gestionnaires centraux seront renforcés et ils pourront procéder à des mutations sans demander le moindre avis aux CAP – contrairement à la pratique actuelle – et imposer une durée d’occupation de l’emploi, ce qui ouvre la voie à l’arbitraire et aux discriminations. Ce mouvement est conforté par l’obligation pour les gestionnaires de mettre au point des lignes directrices en matière de mobilité, de promotion et de valorisation des parcours, sans avoir à faire participer les agents à leur élaboration.

M. Pascal Brindeau. L’amendement CL564 de suppression est un amendement de cohérence avec ceux que notre groupe a présentés à l’article 4, qui visaient à maintenir les prérogatives des commissions administratives paritaires en matière de mutations.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. J’émets sans surprise un avis défavorable sur ces amendements de suppression. Premièrement, l’article 11 s’inscrit dans la logique de la réforme des instances consultatives – dont nous avons abondamment discuté lors de l’examen du titre Ier – et du recentrage des attributions des CAP prévu par l’article 4. L’article 11 comprend des mesures de coordination relatives aux mouvements de mutation des fonctionnaires de l’État.

Deuxièmement, cet article permettra à l’administration de fixer la durée minimale et maximale de certains emplois, dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État, afin d’améliorer la gestion prévisionnelle des ressources humaines dans certains services.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Même avis.

La Commission rejette les amendements.

Elle en vient à l’amendement CL173 de M. Arnaud Viala.

M. Jean-Louis Masson. La famille est un socle essentiel de notre société. C’est pourquoi notre amendement propose de prendre en compte le besoin de proximité géographique pour les parents seuls avec enfants.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je comprends l’idée qui sous-tend cet amendement, mais sa rédaction excessivement large pourrait recouvrir de multiples situations qui engloberaient indistinctement des enfants majeurs ou mineurs.

J’ajouterai que l’alinéa 3 de l’article 11 rappelle que les affectations tiennent compte des demandes des intéressés et de leur situation familiale, ce qui permet de répondre de façon souple aux cas de figure que vous évoquez. Pour toutes ces raisons, mon avis sera défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL174 de M. Arnaud Viala.

M. Jean-Louis Masson. Les problèmes sociaux et de sécurité ne se posent pas uniquement dans les quartiers urbains visés à l’alinéa 6 de l’article 11 : la notion de « territoire » que nous proposons englobe à la fois les zones urbaines et les zones rurales.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. La rédaction actuelle de l’alinéa 6, qui vise les quartiers urbains où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, reprend à droit constant la priorité de mutation déjà applicable aujourd’hui, telle que prévue par l’article 60 de la loi du 11 janvier 1984.

Sur le fond, cette rédaction vise les anciennes zones urbaines sensibles, transformées depuis 2015 en quartiers prioritaires de la politique de la ville. Outre les problèmes sociaux – qui existent aussi, bien évidemment, dans de nombreux territoires ruraux –, ces zones se caractérisent surtout par des problèmes majeurs en matière de sécurité. C’est le constat qu’établit le récent rapport de l’Observatoire national de la politique de la ville pour 2018, qui souligne notamment l’existence de faits de délinquance supérieure à la moyenne nationale. Pour ces raisons, mon avis sera défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL474 de M. Boris Vallaud.

Mme George Pau-Langevin. L’article 11 introduit la possibilité pour les employeurs publics de définir des durées minimales et maximales d’occupation de certains emplois. Cette disposition nous paraît intéressante car elle permettra de faire tourner les emplois peu attractifs. Néanmoins, il est nécessaire de fixer la durée minimale d’occupation de ces emplois à trois ans, afin de garantir une certaine stabilité aux fonctionnaires.

Dans certains endroits, il est très difficile de garder les fonctionnaires en poste ; la question de leur remplacement se pose donc très régulièrement. Cette durée minimale nous semble particulièrement utile.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je ne pense pas que la définition d’un seuil minimal uniforme de trois ans soit nécessairement adaptée à la diversité des situations auxquelles sont confrontés les différents services de l’administration.

Le décret en Conseil d’État prévu par l’alinéa 9 de l’article prévoira les conditions d’application de la définition de ces durées minimales ou maximales. Mon avis sera défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Même avis. J’ajoute que nous renverrons cette question aux lignes directrices de gestion des ressources humaines, afin d’adapter la durée minimale aux spécificités de chaque service. Fixer une durée de trois ans de manière uniforme pour tous établissements et structures nous semble un peu contraignant car tous n’ont pas les mêmes problématiques, ni les mêmes besoins de mobilité.

Mme George Pau-Langevin. En Seine-Saint-Denis comme en Guyane – pour prendre des exemples très différents –, on constate pourtant des rotations de fonctionnaires parfois inférieures à un an. Or il est très difficile de s’imprégner des réalités d’un territoire, et d’y remédier en restant si peu de temps en fonction…

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Nous partageons ce constat ; mais plutôt que de fixer des durées uniformes partout, nous voulons les adapter administration par administration, tout en favorisant des dispositifs de fidélisation. Nous le savons, certains territoires sont extrêmement difficiles pour les agents publics : nous avons du mal à les y garder et, souvent, il s’agit de fonctionnaires qui sortent d’école ou dont c’est la première affectation – ils n’ont donc pas d’autre choix.

Laissons les administrations fixer des durées minimales adaptées et travaillons aussi – même si cela relève du pouvoir réglementaire, voire de la gestion quotidienne – aux moyens de fidéliser et de reconnaître les services réalisés dans les territoires les plus difficiles.

M. Raphaël Schellenberger. Ma question porte sur les intentions qu’il y a derrière cet alinéa que je trouve très intéressant, mais pour des raisons inverses : en tant qu’élu d’un territoire particulièrement attractif, c’est la durée maximale qui retient mon attention… Nous avons l’habitude de voir circuler préfets et sous-préfets ; mais, du fait de l’évolution de certains services déconcentrés de l’État, d’autres postes sont devenus particulièrement stratégiques en matière d’action de l’État dans les territoires. Le fait que certains fonctionnaires occupent des postes très longtemps conduit à une différenciation dans l’application du droit – c’est un phénomène que l’on observe souvent dans le domaine de l’urbanisme. Dans les directions départementales des territoires (DDT), une personne peut interpréter le droit de façon totalement différente que dans d’autres départements. J’avais interrogé le Gouvernement par écrit sur cette question ; malheureusement, il n’y a que très peu de moyens de contrôle réel. Pour les directeurs départementaux mais aussi pour des fonctionnaires occupant des postes de niveau inférieur, mais très stratégiques, dans l’organigramme, il importerait de fixer des durées maximales d’occupation afin de s’assurer que, sur l’ensemble du territoire national, le droit s’applique de façon uniforme et non de façon plus ou moins stricte selon les départements.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. C’est précisément l’objectif de l’alinéa 8, dans lequel est évoquée la piste de la fixation d’une durée maximale, à ceci près que nous renvoyons à un décret en Conseil d’État et aux lignes directrices de gestion, pour les mêmes raisons que celles que j’ai évoquées précédemment en réponse à Mme Pau-Langevin.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL740 de la rapporteure.

Elle est saisie de l’amendement CL20 de M. Olivier Marleix.

M. Olivier Marleix. Cet amendement appelle une précision de la part de Mme la rapporteure et du secrétaire d’État. Les lignes directrices de gestion, qui auront désormais une base légale, prendront, si je comprends bien, la forme d’un arrêté ministériel publié par chaque ministre gestionnaire. J’aimerais être certain qu’en aucun cas, elles ne pourraient avoir pour effet d’écarter un fonctionnaire prioritaire au titre des alinéas 2 à 7 de l’article 11. Si la réponse est très claire, je suis tout à fait prêt à retirer mon amendement.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Votre amendement me semble satisfait : je vous renvoie à l’alinéa 5 de l’article 14 qui précise que les lignes directrices de gestion en matière de mobilité respectent les priorités énumérées au présent article. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, j’y serai défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Même avis. J’ajoute que les priorités légales d’affectation ont été fixées par la loi et que par la loi, elles s’imposent à tout autre de document qui serait publié, qu’il s’agisse d’un arrêté ou d’un décret. En vertu de la hiérarchie des normes, je vous confirme donc que la priorité légale prend le pas sur la ligne directrice de gestion.

M. Olivier Marleix. Autrement dit, une ligne directrice ne pourra jamais avoir pour effet d’écarter un fonctionnaire prioritaire, monsieur le secrétaire d’État ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Exactement.

M. Olivier Marleix. En ce cas, je retire mon amendement.

L’amendement CL20 est retiré.

La Commission examine enfin l’amendement CL603 de Mme Danielle Brulebois.

M. Rémy Rebeyrotte. Cet amendement est défendu.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’encadrement du dispositif de permutation entre deux agents titulaires proposé par cet amendement présenterait peu de différence avec le système actuel de demande de mutation dans la mesure où l’autorité administrative conserverait la main sur la décision d’affectation. Des procédures de mutations croisées existent déjà au sein de l’administration, ce qui permet de répondre à votre préoccupation. Je vous suggère donc, monsieur Rebeyrotte, de retirer cet amendement.

M. Rémy Rebeyrotte. Je pense que je peux me permettre de retirer cet amendement au nom de Mme Brulebois…

L’amendement CL603 est retiré.

La Commission adopte l’article 11 modifié.

3.   Troisième réunion du jeudi 2 mai 2019 à 21 heures 15 (article 12 à après l’article 16)

Lien vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.7573490_5ccb4067464b5.commission-des-lois--transformation-de-la-fonction-publique-suite-art-12-a-apres-l-art16-adt--2-mai-2019

Chapitre II
Reconnaissance de la performance professionnelle

Article 12 (art. 6, 6 bis, 6 ter A, 6 ter, 6 quinquies, 17 et 23 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, art. 55 et 55 bis [abrogé] de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 76 et 125 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et art. 65, 65-1 [abrogé] et 65-2 [abrogé] de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986) : Suppression de la notation et généralisation de l’entretien professionnel comme modalité d’évaluation individuelle des fonctionnaires

La Commission examine l’amendement CL373 de M. Philippe Vigier.

M. Yannick Favennec Becot. Il s’agit de préciser que les entretiens qui permettent d’apprécier la valeur professionnelle des agents devront être menés par le supérieur hiérarchique direct, lequel devra être formé à cet effet.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Votre amendement est satisfait par la pratique, puisque les évaluateurs bénéficient déjà de formations en la matière. Je vous demande donc de bien vouloir le retirer ; à défaut, avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL741 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CL374 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Par cet amendement, nous proposons que l’évaluation individuelle du fonctionnaire soit mise en perspective avec le bon accomplissement des missions assignées à l’ensemble du service auquel il appartient. L’évaluation ne peut, en effet, se fonder que sur une obligation de moyen et non sur une obligation de résultat.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. En pratique, l’évaluation individuelle ne s’effectue pas hors-sol ; elle correspond, bien entendu, à l’appréciation de l’activité de l’agent au sein d’un service donné. L’environnement professionnel dans lequel il exerce ses fonctions est donc déjà pris en compte. Les décrets du 28 juillet 2010 et du 16 décembre 2014 prévoient en effet que sont discutés « les résultats professionnels obtenus par le fonctionnaire eu égard aux objectifs qui lui ont été assignés et aux conditions d’organisation et de fonctionnement du service dont il relève ». Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL375 de M. Philippe Vigier.

M. Yannick Favennec Becot. Si les services devant apprécier la valeur professionnelle des agents ne disposent pas en interne d’un supérieur hiérarchique formé à cet effet, l’employeur public doit pouvoir faire appel à un intervenant extérieur à la fonction publique reconnu pour ses compétences en la matière.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis totalement défavorable à cet amendement. Il permettrait en effet d’externaliser l’appréciation de l’activité des agents alors que cette mission relève, par essence, des attributions des personnes en situation d’encadrement.

La Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette l’amendement CL137 de M. Robin Reda.

Elle adopte successivement les amendements de coordination CL742 et CL853 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 12 modifié.

Après l’article 12

La Commission est saisie de l’amendement CL205 de M. Jean-Louis Masson.

M. Raphaël Schellenberger. Il convient de supprimer la possibilité pour les statuts particuliers de ne pas prévoir de système de notation, afin de favoriser une culture de l’évaluation commune à l’ensemble de la fonction publique.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cette préoccupation est prise en compte à l’article 12. Demande de retrait.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL206 de M. Jean-Louis Masson.

M. Raphaël Schellenberger. Il s’agit de conforter l’esprit de la loi de 1905 et de faciliter l’application de l’article 25 de la loi de 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires en ajoutant, à l’alinéa 3 de cet article, après le mot : « manifester », les mots : « par son expression, son attitude et sa tenue vestimentaire ».

Mme Émilie Chalas, rapporteure. La manifestation d’opinions religieuses est d’ores et déjà interdite par le droit applicable, eu égard à l’exigence de neutralité qui caractérise de longue date notre fonction publique et qui est réaffirmée à l’alinéa 3 de l’article 25 de la loi du 13 juillet 1983. Cet amendement n’apporte pas de plus-value. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis, suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette l’amendement CL209 de M. Jean-Louis Masson.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL210 de M. Jean-Louis Masson.

M. Raphaël Schellenberger. Il convient de préciser que les disponibilités ne peuvent excéder cinq ans car, au-delà de cette limite, elles désorganisent les services.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. La disposition proposée ne me paraît pas opportune. Tout d’abord, l’article 52 de la loi de 1984 dispose que les conditions de la mise en disponibilité, sa durée et les modalités de réintégration relèvent du domaine réglementaire. Ensuite, une mise en disponibilité pouvant être demandée pour un grand nombre de motifs différents, elle ne peut être soumise à une durée unique. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL211 de M. Jean-Louis Masson.

M. Raphaël Schellenberger. Nous proposons, là encore, de favoriser une culture commune de l’évaluation afin de favoriser la mobilité des agents au sein de la fonction publique.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cet amendement me paraît satisfait par l’article 12. Je demande donc son retrait ; à défaut, avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CL212 de M. Jean-Louis Masson.

M. Raphaël Schellenberger. Pour l’avancement d’échelon, il convient de substituer à la primauté de l’ancienneté celle de la valeur professionnelle. La qualité du service public rendu aux administrés commande en effet de faire prévaloir l’engagement professionnel de l’agent plutôt que son ancienneté. Cet amendement me paraît particulièrement important.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Dès lors que vous ne contestez pas l’automaticité de l’avancement d’échelon, il me semble nécessaire que celui-ci demeure soumis à un critère purement objectif, en l’occurrence l’ancienneté. L’article 57 de la loi du 11 janvier 1984 dispose que l’avancement peut être fonction de la valeur professionnelle, mais il me paraît important que cette option demeure subsidiaire. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Article 13 (art. 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, art. 78-1 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 et art. L. 6152-4 du code de la santé publique) : Encadrement de la rémunération des agents contractuels et prime d’intéressement collectif dans la fonction publique hospitalière

La Commission est saisie de l’amendement CL251 de M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Par cet amendement, nous proposons de supprimer les bases juridiques qui permettent l’application de régimes d’intéressement collectif dans les trois fonctions publiques. En effet, nous estimons que les budgets des services étant globalisés, l’intéressement se fera probablement – c’est le cas actuellement – par un ajustement à la baisse des rémunérations, de sorte que la prime serait fictive. Surtout, cette pratique relève d’une culture de la mise en concurrence des services de l’État et de rentabilité financière importée du secteur privé qui nous semble particulièrement problématique. En outre, la plupart des études n’ont pas démontré que la mise en œuvre de tels régimes d’intéressement produisait un gain d’efficacité substantiel.

Ceux-ci sont souvent l’enjeu de batailles internes aux services, lorsqu’ils ne sont pas soumis à des modalités parfaitement ubuesques. De fait, l’enveloppe étant trop réduite pour récompenser, parce qu’ils ont bien travaillé, l’ensemble des membres d’un service, il faut faire un choix entre les différentes équipes qui le composent. Ainsi, soit vous les mettez en concurrence, soit vous décidez d’attribuer la prime à une équipe différente chaque année. C’est ubuesque ! De plus, il suffit qu’un agent obtienne sa mutation au mauvais moment pour être privé de la prime qui, pour les personnels administratifs du ministère de l’intérieur, par exemple, s’élève tout de même à 500 euros.

J’ajoute que, dans les administrations où il n’existe pas, l’absence de régime d’intéressement n’empêche pas les services de fonctionner. L’administration pénitentiaire, par exemple, doit demeurer une énigme pour ceux d’entre vous qui sont partisans de l’intéressement collectif. Eh oui, les surveillants font leur travail, même s’ils ne perçoivent pas de prime !

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable. La loi du 5 juillet 2010 a intégré de façon facultative la prise en compte du mérite personnel et des résultats collectifs obtenus par les fonctionnaires dans la composition du régime indemnitaire dont ils bénéficient. Ce n’est pas une obligation mais une simple possibilité, susceptible d’être utilisée selon la fixation d’objectifs et d’indicateurs définis à l’échelle réglementaire.

M. Ugo Bernalicis. Votre réponse est un peu technocratique. La part variable est de plus en plus importante dans le régime indemnitaire, même si la situation diffère d’un ministère à l’autre. Le régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel (RIFSEEP) a plutôt sanctuarisé, voire aggravé les choses, à cet égard.

Nous devrions discuter de la manière dont nous pourrions renforcer le socle de la rémunération, plutôt que la part indemnitaire. Actuellement, celle-ci représente souvent une part considérable, de l’ordre de 30 % à 40 %, de la rémunération, de sorte que, dans les administrations où aucune part indemnitaire n’est prévue, les agents perçoivent des salaires de misère – je pense à l’éducation nationale. Ayons donc une discussion globale sur les grilles indiciaires plutôt que d’ajouter des rémunérations à la tête du client, qui créent davantage de difficultés qu’elles n’apportent de solution.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL236 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Par cet amendement, nous proposons qu’à l’instar de ce que prévoient les règles en vigueur dans l’économie sociale et solidaire, la différence entre les rémunérations les plus élevées et les rémunérations les plus faibles de la fonction publique ne puisse excéder un écart de un à dix. Si, actuellement, cet écart semble limité en ce qui concerne la part « traitement » de la rémunération des fonctionnaires, l’incertitude demeure, en raison des indemnités et des primes, quant à l’amplitude réelle entre les rémunérations les plus élevées et les moins élevées.

Une telle mesure permettrait d’en finir avec les fantasmes sur les rémunérations extravagantes que percevrait tel ou tel haut fonctionnaire et favoriserait ainsi la salubrité du débat public. J’ajoute qu’elle inciterait au relèvement des bas salaires si l’on considère que le travail fourni par l’agent situé au sommet de la hiérarchie mérite d’être rémunéré par un très haut salaire. De fait, rien n’est possible sans l’ensemble des fonctionnaires, quel que soit leur niveau.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable. Il ne me paraît pas pertinent de fixer par principe un écart maximal de rémunération dans la fonction publique, où les salaires ne sont pas aussi extravagants que vous le laissez entendre. Le dispositif qui renforcera la transparence devrait vous rassurer à cet égard. Il me semble que c’est plutôt en créant la prime de précarité, qui sera versée aux titulaires de CDD d’une durée égale ou inférieure à un an, et en luttant, grâce aux dispositions de l’article 10, contre le recours abusif aux vacataires que nous combattrons efficacement la précarité dans la fonction publique.

Mme Danièle Obono. Madame la rapporteure, je crois que vous avez mal lu notre amendement. Nous proposons de limiter, non pas le niveau maximal des salaires, mais l’écart entre les rémunérations les plus élevées et les rémunérations les plus faibles. Ainsi une augmentation des plus hauts salaires entraînerait automatiquement celle des salaires les plus bas. Cette mesure se justifie par le fait que l’ensemble des personnels concourent à la qualité du service.

Par ailleurs, mon propos ne visait pas à alimenter les fantasmes sur la rémunération des très hauts fonctionnaires mais, au contraire, à répondre aux caricatures, souvent déplacées, qui ont cours dans ce domaine. Le Gouvernement et la majorité n’y sont, du reste, pas étrangers si l’on pense, par exemple, à la révélation de la rémunération de Mme Jouanno, qui visait à décrédibiliser son opposition au grand débat. La mesure que nous proposons permettrait d’assainir le débat public et de renforcer la transparence au sein de la fonction publique.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. J’avais bien compris le contenu de l’amendement. Je confirme mon avis défavorable.

M. Olivier Marleix. La question des plus hautes rémunérations dans la fonction publique mériterait d’être traitée. Je vous renvoie, à ce sujet, à l’enquête réalisée par un grand reporter de L’Obs, Vincent Jauvert, qui a révélé que 700 hauts fonctionnaires étaient mieux payés que le chef de l’État – je ne parle pas, ici, des présidents d’autorité administrative indépendante mais bien de hauts fonctionnaires.

En 2016, j’avais adressé à votre prédécesseur, monsieur le secrétaire d’État, une question écrite pour lui demander combien de hauts fonctionnaires étaient rémunérés « hors échelle lettre », c’est-à-dire entre 4 000 et 12 000 euros nets par mois. La réponse qui m’a été faite m’a un peu sidéré, puisqu’il se trouve que ces hauts fonctionnaires sont au nombre de 70 000 – et je ne parle là que des fonctionnaires civils. Faut-il rappeler qu’on propose de diminuer de 150 le nombre des parlementaires au motif que nous coûtons trop cher ? J’ajoute, et c’est le plus édifiant, que, selon le rapport annuel annexé au projet de loi de finances sur l’état de la fonction publique, le nombre des fonctionnaires rémunérés « hors échelle lettre » était, jusqu’en 1985, de 25 000 ; il a donc augmenté de manière très importante après la décentralisation. Cela soulève tout de même quelques questions.

Monsieur le secrétaire d’État, je vous ai demandé à plusieurs reprises, en vain, comment se répartissaient ces 70 000 plus hauts salaires de la fonction publique, sachant que si l’on réduisait leur nombre de 10 %, on réaliserait une économie de 1 milliard d’euros – cette nouvelle approche de la diminution du poids de la dépense publique mériterait que l’on s’y intéresse. Si je vous pose cette question, c’est parce que le tableau retraçant cette répartition, qui figurait dans le rapport annuel sur l’état de la fonction publique jusque dans les années 1990, a, depuis, mystérieusement disparu. Une réponse précise de votre part permettrait d’éclairer nos débats, notamment sur l’amendement de Mme Obono.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Je vais essayer de vous apporter quelques éléments de réponse, tout en vous précisant d’emblée, monsieur Marleix, que je n’ai pas en tête le chiffre que vous me réclamez ; je vous le ferai donc communiquer.

M. Olivier Marleix. Ce n’est pourtant pas la première fois que je vous le demande !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Il se trouve qu’un certain nombre de grilles ont été relevées au cours du temps, si bien qu’aujourd’hui, les agents d’un certain nombre de corps et de cadres d’emploi terminent leur carrière « hors échelle lettre ». Un attaché d’administration centrale qui se trouve dans cette situation perçoit un traitement brut mensuel supérieur à 4 079 euros. On peut considérer qu’il s’agit d’une rémunération conséquente au regard de la moyenne des rémunérations en France, mais ce ne sont pas des salaires astronomiques.

Deuxièmement, on intègre le centile des 48 500 fonctionnaires les mieux payés lorsqu’on perçoit un traitement mensuel de 6 410 euros. Je précise cependant qu’en 2016, 42,3 % d’entre eux étaient des praticiens hospitaliers. Il convient donc de relativiser cette donnée. En tout état de cause, on est très loin des niveaux de rémunération du secteur privé. Du reste, la moyenne des rémunérations des fonctionnaires appartenant à ce centile est de 9 500 euros, contre 17 800 euros, soit le double, pour la moyenne du centile des salariés du secteur privé les mieux payés.

Troisièmement, nous donnerons un avis favorable à des amendements que nous examinerons ultérieurement et qui visent à renforcer la transparence. Gérald Darmanin et moi-même l’avons dit, nous sommes hostiles à la publication d’une liste nominative indiquant les salaires à l’euro près. En effet, selon que l’on occupe un poste de directeur d’administration centrale à 40 ans ou à 55 ans, on ne perçoit pas la même rémunération car on n’est pas au même stade de sa carrière. En revanche, nous sommes favorables à la publication de la moyenne du centile ou des dix salaires les plus élevés ainsi qu’à l’élaboration d’une forme de référentiel qui permettrait de connaître – pour les cinq ou dix dernières années, par exemple – la moyenne des rémunérations d’un poste de directeur d’administration centrale.

Enfin, je vous remercie d’avoir souligné la différence entre la rémunération des agents publics, donc des fonctionnaires, et celle des présidents d’autorité administrative indépendante. Les uns perçoivent un traitement, les autres une indemnité : ces deux types de rémunérations ne sont ni comparables ni assujetties aux mêmes règles, notamment en matière de cumul avec une retraite, en tout cas à droit constant.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL743 de la rapporteure.

Puis, suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette l’amendement CL475 de Mme Marietta Karamanli.

Elle en vient aux amendements CL140 et CL139 de M. Robin Reda.

M. Raphaël Schellenberger. Ces deux amendements ont pour objet de rendre obligatoire la prise en compte, actuellement facultative, des résultats professionnels des agents contractuels et des fonctionnaires dans leur rémunération.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable. C’est une souplesse managériale offerte à l’administration, qui doit avoir le choix d’y recourir ou non.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Nous avons considéré que le fait de rendre obligatoire la détermination d’une part variable dans le régime indemnitaire des agents publics pouvait avoir des conséquences sur la structure des rémunérations. Celle-ci est, schématiquement, composée d’une part indiciaire et d’une part indemnitaire, laquelle est soumise à un système de cotisation au régime de retraite très différent. Or, la réforme des retraites, que nous examinerons dans les semaines à venir, a notamment pour objectif d’intégrer cette part indemnitaire dans l’assiette de cotisation. Le passage d’une retraite calculée sur les six derniers mois à un régime par points modifiera nécessairement la manière d’appréhender la structure de la rémunération des fonctionnaires. C’est pourquoi nous avons jugé inutile d’y toucher avant d’aborder la réforme des retraites.

Par ailleurs, nous savons que lorsqu’une part variable est rendue obligatoire, elle se traduit nécessairement, au cours des premières années, par une augmentation de la prime versée aux plus méritants, donc de la masse salariale puisqu’on ne prend pas aux uns pour payer la prime des autres. Imposer une telle obligation serait ainsi contraire à l’effort de modération des dépenses de fonctionnement demandé aux collectivités territoriales. C’est la raison pour laquelle le projet de loi offre simplement la possibilité, qui n’existait pas jusqu’à présent, d’introduire une part variable dans la rémunération des contractuels.

La Commission rejette successivement ces deux amendements.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL250 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. Cet amendement tend à supprimer les alinéas 3 à 6 de l’article 13, car nous nous opposons à la création, dans la fonction publique hospitalière, d’un intéressement collectif lié à la qualité du service rendu, intéressement qui pourrait être attribué à l’échelle des services. En effet, nous estimons que les budgets de ces derniers étant globalisés, l’intéressement se fera probablement par un ajustement à la baisse des rémunérations, de sorte que la prime serait fictive. Surtout, cette culture de la mise en concurrence des services et de rentabilité financière est importée du secteur privé et nous semble particulièrement problématique ; elle est, du reste, régulièrement dénoncée par des syndicats tels que la CGT. En outre, dans le contexte actuel, alors que les fonctionnaires hospitaliers revendiquent non seulement une amélioration de leurs conditions de travail mais aussi le dégel du point d’indice, une telle mesure renforcerait leur sentiment d’être méprisés. Comment peut-on en effet vouloir encourager l’émulation dans un secteur où les fonctionnaires font déjà preuve d’une véritable abnégation ?

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Défavorable à cet amendement, qui vise à supprimer la faculté de prévoir, dans la fonction publique hospitalière, un intéressement collectif qui existe déjà dans les deux autres versants de la fonction publique.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 13 modifié.

Après l’article 13

La Commission est saisie de l’amendement CL141 de M. Robin Reda.

M. Raphaël Schellenberger. Par cet amendement, nous proposons que les indemnités des fonctionnaires tiennent compte de leurs résultats professionnels ainsi que des résultats collectifs des services. Il convient en effet de rendre obligatoire ce dispositif aujourd’hui facultatif, afin d’accroître la part de la rémunération au mérite.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL21 de M. Olivier Marleix.

M. Olivier Marleix. Cet amendement a trait à un sujet totalement absent de votre projet de loi, celui du pouvoir d’achat des fonctionnaires, dont l’Institut Montaigne estime, dans une étude récente, qu’il a baissé de 10 % au cours des dix dernières années. Or, cette baisse touche, bien entendu, davantage les fonctionnaires de catégorie C que le dernier centile que l’on vient d’évoquer.

Pour remédier à cette situation, nous proposons, compte tenu des limites qui nous sont imposées par l’article 40 de la Constitution, que le Gouvernement remette au Parlement un rapport dans lequel il évaluerait la possibilité de moduler temporairement la revalorisation du point d’indice en fonction des différentes catégories de la fonction publique. De fait, en l’état actuel de la législation, une augmentation du point d’indice s’appliquerait à l’ensemble de la grille et aurait donc un effet minime sur la rémunération du fonctionnaire de catégorie C et un effet maximal sur celle du fonctionnaire rémunéré « hors échelle lettre ». En revanche, si, de manière temporaire, on appliquait au point d’indice un coefficient différent selon la catégorie, les fonctionnaires de catégorie C bénéficieraient davantage de la revalorisation que ceux de la catégorie B qui, eux-mêmes, en profiteraient plus que ceux de la catégorie A, dont le régime indemnitaire est généralement plus favorable.

La question du pouvoir d’achat des fonctionnaires de catégorie C, qui était aussi au cœur de la crise des « Gilets jaunes », est absente de votre projet de loi. Il est temps, me semble-t-il, que nous nous mettions autour de la table pour trouver des solutions.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. La commission des Lois est plutôt défavorable aux demandes de rapport. Qui plus est, dans le domaine que vous évoquez, le Parlement dispose de ses propres moyens d’évaluation. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Le Gouvernement n’envisage pas de « décorréler » la gestion du point d’indice entre les trois versants de la fonction publique, non plus que son évolution entre les différentes catégories, ne serait-ce que parce que, dans le système proposé, même s’il s’appliquait de manière temporaire, des agents qui se trouveraient en haut de la grille de catégorie C et qui, à la faveur d’une promotion, passeraient en catégorie B verraient baisser la valeur du point d’indice qui structure leur revenu.

Je précise que nous avons pris un certain nombre d’engagements. Ainsi, après avoir été gelée pendant un an, l’application du protocole « parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) a repris son cours : le montant des mesures prises dans ce cadre s’élève, en 2019, à 850 millions d’euros. Cette décision a un effet sur les grilles indiciaires les plus basses, puisque ce sont ces traitements qui bénéficient le plus de la transformation de primes en points. Par ailleurs, nous avons pris un certain nombre de mesures qui ne sont pas d’ordre salarial mais qui participent au pouvoir d’achat. Je pense à la revalorisation, pour la première fois depuis 2006 ou 2007, des tarifs de remboursement kilométrique, qui ont été augmentés de 17 %.

Comme j’ai eu l’occasion de l’évoquer ce matin, nous travaillons aussi sur la question de la protection sociale complémentaire. Les premiers chiffres dont nous disposons en matière d’exonération des heures supplémentaires se sont traduits, pour la seule fonction publique de l’État, qui compte 2,3 millions d’agents sur les 5,5 millions, par un gain de 36 millions d’euros pour le premier trimestre de l’année 2019. Au-delà de ces aspects, je partage votre observation : l’augmentation du point d’indice peut avoir un coût collectif très important pour un rendement individuel extrêmement faible. Il faut avoir en tête qu’une augmentation du point d’indice de 1 % se traduirait par une augmentation de 14 euros pour un traitement de 2 000 euros net et par une dépense publique de 2 milliards d’euros. Nous souhaitons étudier d’autres manières de consolider le pouvoir d’achat que la seule augmentation du point d’indice.

M. Olivier Marleix. Je vous remercie, monsieur le secrétaire d’État, pour votre réponse assez complète et transparente. Nous restons néanmoins sur notre faim ! Les chiffres montrent que le système n’est plus soutenable. Nous pourrions profiter de la dynamique du grand débat national, qui n’a certes pas apporté les réponses escomptées, pour nous mettre autour de la table et revoir le système des grilles. Vous trouverez sans doute des mesures temporaires, comme la défiscalisation des heures supplémentaires – je me réjouis que nous y soyons enfin revenus –, mais ces 36 millions d’euros restent dérisoires au regard de la masse salariale. Il faut trouver des solutions durables.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL233 de M. Ugo Bernalicis. 

M. Ugo Bernalicis. Même si je connais la politique de la Commission à l’égard des rapports – à géométrie variable, d’ailleurs –, notre amendement vise à demander au Gouvernement un rapport pour détailler précisément la perte de revenus globale et cumulée pour les agents des trois fonctions publiques due au gel du point d’indice depuis 2008. Selon nos calculs, l’économie réalisée en onze ans est de 119,5 milliards d’euros. On comprend mieux pourquoi le point d’indice est gelé ! Par conséquent, il faut davantage partager les richesses, pour éviter de diminuer le pouvoir d’achat des fonctionnaires, qui font leur travail, alors qu’on voit, dans le même temps, les rémunérations du CAC40 s’envoler et atteindre des montants records d’une année sur l’autre. L’année dernière, ce sont plus de 57 milliards d’euros de dividendes qui ont été versés aux actionnaires !

Or tout le monde bénéficie des structures publiques, des services publics, des avantages publics. C’est d’ailleurs cet écosystème qui attire beaucoup d’investisseurs en France. Il faut que tout le monde passe à la caisse pour le financer. Nous réclamons un chiffrage, parce que nous souhaitons dégeler le point d’indice, dont le gel n’a que trop duré. Si vous cherchez des pistes de financement, sachez que le rapport sur la délinquance financière que le Président de la République a demandé à la Cour des comptes a déjà été réalisé il y a deux mois…

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable.

M. Ugo Bernalicis. J’imagine que vous avez donc d’autres propositions pour augmenter la rémunération des fonctionnaires ! Augmenter le point d’indice nous coûterait plusieurs milliards d’euros : soit vous nous annoncez un gel ad vitam aeternam, ce qui semble être votre projet, soit vous prenez des mesures catégorielles – le secrétaire d’État a mentionné les PPCR, dont il est bien placé pour parler, puisque le protocole a été défini sous la précédente législature. Il était au moins urgent de revoir la grille des catégories C pour éviter que les agents en début de grille ne soient payés en dessous du SMIC !

Alors que les syndicats étaient très favorables à une transformation du régime indemnitaire en points d’indice dans la grille, c’est encore la stratégie des petits pas qui a été retenue. Les cotisations sociales coûtent de l’argent et quand vous désocialisez les heures supplémentaires, vous videz une autre caisse de notre bien commun. En réalité, vous ne faites pas une économie de 36 millions d’euros, mais vous creusez un nouveau trou de 36 millions d’euros. Bravo, monsieur le secrétaire d’État !

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CL377 de M. Philippe Vigier. 

M. Yannick Favennec Becot. L’amendement risque de ne pas plaire à Mme la rapporteure, puisqu’il s’agit d’une nouvelle demande de rapport, concernant les heures supplémentaires effectuées et non payées dans les différentes fonctions publiques.

Le nonpaiement des heures supplémentaires est un véritable fléau, qui porte grandement atteinte au pouvoir d’achat des fonctionnaires et à leur engagement professionnel. À ce jour, près de 300 millions d’euros d’heures supplémentaires ne sont pas payées aux policiers, sans compter la fonction publique hospitalière.

Il est urgent de trouver des solutions concrètes pour mettre un terme à cette situation. Comment faire évoluer la fonction publique sur la voie d’une rémunération fondée sur le critère de l’engagement professionnel et du mérite, sans être en mesure de leur payer les heures supplémentaires dues ou à venir ?

Les demandes de rapport sont justifiées, dans la mesure où ces sujets ne sont pas abordés dans le projet de loi et que nous avons besoin d’un éclairage dessus.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable. Ce n’est évidemment pas une réponse au fond de la question. Si elle doit être examinée, je vous invite à mobiliser les outils à disposition des députés.

M. Ugo Bernalicis. Êtes-vous en train de nous dire que nous allons créer une mission d’information sur les heures supplémentaires dans la fonction publique ? 

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Si vous le souhaitez, vous savez qu’il convient d’écrire un courrier à la commission des Lois et que votre demande sera examinée par le bureau de celle-ci, qui se réunit tous les mois. N’hésitez pas !

M. Ugo Bernalicis. Je n’y aurais peut-être pas pensé spontanément, madame la présidente, mais puisque Mme la rapporteure a tendu une perche…

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je vous indique seulement la procédure, monsieur Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Si la procédure se réduisait à une demande par courrier, ça se saurait !

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je vous ai précisé qu’il fallait que le bureau de la Commission se réunisse pour statuer sur chaque demande.

M. Ugo Bernalicis. Si les collègues qui ont déposé cet amendement demandent une mission d’information, je les soutiendrai.

La Commission rejette l’amendement.

Article 14 (art. 18, 26 et 58 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 33-3 [nouveau], 39, 78-1 et 79 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et art. 25, 26 et 69 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986) : Établissement des lignes directrices de gestion en matière de promotion et d’avancement

La Commission est saisie des amendements identiques CL252 de Mme Danièle Obono et CL477 de M. Boris Vallaud. 

M. Ugo Bernalicis. L’article 14 est l’un de ceux qui viennent restreindre le périmètre des Commission administratives paritaires (CAP). Vouloir se concentrer sur les seuls cas problématiques relève de l’usine à gaz. C’est bien parce que la CAP examine les cas dans sa globalité qu’il est possible de mieux gérer les cas problématiques, notamment pour ce qui concerne la mobilité ou l’avancement. Je crains que ces nouvelles dispositions ne contribuent à augmenter le contentieux local, avec les organisations syndicales, mais aussi auprès du juge administratif. Les services des ressources humaines risquent d’être de plus en plus déconnectés de la réalité syndicale et de celle du terrain, depuis leur tour d’ivoire où ils géreront les lignes directrices et les barèmes à appliquer. D’ailleurs, les barèmes mis en place aux prud’hommes volent progressivement en éclats, sous l’effet de la jurisprudence. Cette piste ne me semble pas pertinente.

Mme Marietta Karamanli. Par cohérence avec ce que nous avons défendu précédemment, à l’article 3, sur la fusion des comités techniques et des comités d’hygiène, ou aux articles 4 et 11, sur la réduction importante des attributions des CAP, nous proposons de supprimer l’article 14, instaurant les lignes directrices de gestion dans la fonction publique, qui va, selon nous, reconfigurer toutes les attributions des instances de dialogue social dans la fonction publique, sur des bases auxquelles nous sommes opposés.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable. Sans revenir en détail sur les dispositions que nous avons déjà évoquées, il est important de comprendre que ce sont ces lignes directrices de gestion qui constituent le cœur de la réforme. Elles détermineront les grands principes et les critères à l’aune desquels les décisions relatives à la carrière des agents seront prises par l’autorité compétente, après avis des comités sociaux des trois versants. Elles seront un objet du dialogue social, dans une perspective de clarté et de transparence. Elles offriront également une visibilité aux agents sur le déroulement de leur carrière au sein de la fonction publique. Elles seront invocables par les agents, conformément au principe défini par la jurisprudence depuis 1970. Leur opposabilité permettra de responsabiliser l’administration dans ses choix de gestion des ressources humaines et de renforcer efficacement les garanties dont disposent les agents quant à l’examen des décisions qui affecteront leur carrière.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Même avis, pour les mêmes arguments.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle examine l’amendement CL887 de la rapporteure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’amendement vise à renforcer la portée des lignes directrices de gestion établies par les autorités compétentes au sein des trois versants. Il consacre ces lignes directrices de gestion en tant que véritable outil de pilotage pluriannuel des ressources humaines. Celles-ci permettront ainsi de décliner la stratégie de management des administrations, dans une perspective transversale nécessaire afin d’anticiper efficacement les multiples évolutions auxquelles seront confrontés les services publics au cours des prochaines années.

Par cohérence, l’amendement permet également d’aligner le régime applicable à la fonction publique de l’État sur celui des fonctions publiques territoriale et hospitalière, qui prévoit l’avis préalable du comité social sur les lignes directrices de gestion édictées par l’autorité compétente.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle étudie ensuite, les amendements CL218, CL219, CL220, CL221, CL222, CL223 et CL224 de M. Jean-Louis Masson. 

M. Raphaël Schellenberger. Tous ces amendements visent à supprimer plusieurs alinéas de l’article, afin de maintenir la compétence de la commission administrative paritaire, en cas d’avancement de grade, d’échelon ou de promotion interne, dans les trois fonctions publiques.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Par cohérence avec le sens de cette réforme et les débats que nous avons déjà eus, avis défavorable.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL744 de la rapporteure.

Puis elle examine les amendements identiques CL64 de M. Éric Poulliat et CL476 de Mme Marietta Karamanli. 

M. Éric Poulliat. Par cet amendement, que je pourrais qualifier de disruptif (Sourires), nous proposons que les lignes directrices de gestion ne soient pas fixées, un peu autoritairement, malgré l’avis du CST, par l’autorité territoriale, mais qu’elles émanent d’une vision commune et partagée des élus, en passant devant l’organe délibérant de la collectivité ou de l’établissement. Ainsi, en toute transparence, l’ensemble des dirigeants et des élus seront informés et auront pu délibérer sur le sujet ; quant aux administrés, ils seront tout à fait informés de la façon dont les agents territoriaux sont gérés par l’autorité territoriale.

Mme Marietta Karamanli. Nous proposons de modifier la rédaction de l’alinéa 22, afin d’insister sur la responsabilisation des élus et la transparence, ce qui passe par un débat sur la politique des ressources humaines mais aussi par un partage des visions, dans l’intérêt des élus, de la fonction publique et de ses agents.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Si je comprends le sens de vos amendements, il me semble que leur rédaction peut poser des difficultés vis-à-vis des centres de gestion qui n’ont pas d’organe délibérant et qui seront en charge des lignes de gestion pour les communes membres. Je vous suggère de retirer vos amendements.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Les lignes directrices de gestion des ressources humaines seront rendues publiques par les instances auxquelles participent à parité des représentants de l’employeur, soit des élus de l’assemblée délibérante, et des organisations syndicales. C’est pourquoi nous proposons d’en rester à la rédaction actuelle.

M. Éric Poulliat. Les centres de gestion ne vont pas édicter les lignes directrices à la place des collectivités territoriales, puisqu’elles en restent maîtresses. Je ne vois donc pas où est l’impossibilité. Même si j’entends l’argument de M. le secrétaire d’État, dans la mesure où j’interviens au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, je maintiens l’amendement.

M. Olivier Marleix. La question de M. Poulliat était tout à fait pertinente ! Monsieur le secrétaire d’État, l’article dispose, à l’alinéa 11, que certaines promotions pourraient être subordonnées à « l’occupation préalable de certains emplois ou à l’exercice préalable de certaines fonctions correspondant à un niveau particulièrement élevé de responsabilités ou à des conditions d’exercice difficile ou comportant des missions particulières ». Qu’est-ce qui définira la difficulté des conditions d’exercice ? J’ai, par exemple, été surpris de constater qu’au ministère de l’intérieur, ce qu’on avait l’air de considérer comme les missions les plus difficiles justifiant les promotions les plus rapides, c’était d’avoir travaillé dans le couloir du secrétaire général du ministère de l’intérieur... Cela relève d’appréciations subjectives. Y aura-t-il un arrêté ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Il s’agit d’une reprise d’éléments de droit existants, pour permettre la création d’un grade à accès fonctionnel pour des personnes ayant exercé des missions particulièrement difficiles. La définition de la difficulté relèvera à la fois des lignes directrices de gestion et, le cas échéant, pour la fonction publique de l’État, d’un arrêté ministériel listant les fonctions et les métiers en question. Cela s’inscrit aussi dans le cadre du débat que nous avons rapidement eu tout à l’heure sur les durées minimale et maximale d’occupation des emplois et la fidélisation d’un certain nombre de personnels dans des territoires moins attractifs ou plus difficiles.

La Commission rejette ces amendements.

Puis elle examine l’amendement CL888 de la rapporteure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’amendement a pour objet de préciser qu’un décret en Conseil d’État définira les modalités de consultation des comités sociaux territoriaux (CST) des collectivités affiliées au centre de gestion sur les lignes directrices de gestion établies en matière de promotion interne. Il convient en effet de garantir la consultation des CST de toutes les collectivités relevant du centre de gestion pour l’établissement des listes d’aptitude relatives à la promotion interne. Leur avis sera ainsi sollicité préalablement à l’avis rendu par le CST du centre de gestion.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Avis favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL745 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 14 modifié.

Chapitre III
Discipline

Article 15 (art. 66 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, art. 89 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et art. 81 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) : Harmoniser l’échelle des sanctions entre les trois versants de la fonction publique

La Commission examine l’amendement CL253 de M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Notre amendement vise à supprimer l’article. Sous couvert d’une harmonisation des sanctions entre les trois versants de la fonction publique, vous en venez à durcir l’échelle des sanctions et à créer dans les fonctions publiques d’État et hospitalière une sanction qui n’existe que dans la fonction publique territoriale, qui peut être prise sans saisine de la CAP. En théorie, les sanctions qui ne font pas partie du premier groupe sont prises sur la base d’une saisine de la CAP. Nous ne sommes pas défavorables à une harmonisation, mais elle ne doit, en aucune façon, se faire vers le bas.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’article 15 a en effet pour objet d’harmoniser les échelles de sanctions entre les trois versants de la fonction publique. Il crée une nouvelle sanction d’exclusion temporaire de fonction de trois jours dans les fonctions publiques d’État et hospitalière, comme cela existe dans la fonction publique territoriale. Il s’agit de donner un levier supplémentaire aux encadrants de proximité, l’effet dissuasif des deux autres sanctions du premier groupe – le blâme et l’avertissement – étant assez limité, selon les témoignages que nous avons recueillis lors des auditions. Il s’agit aussi d’éviter que les employeurs publics ne prononcent des exclusions temporaires de quinze jours assorties de sursis de douze ou treize jours et n’appliquent des sanctions du deuxième groupe. Il me semble que l’article propose une meilleure gradation des sanctions, plus équilibrées pour les employeurs publics. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Mêmes avis, pour les mêmes raisons. 

M. Ugo Bernalicis. Je ne sais pas s’il s’agit d’une meilleure gradation... Ce qui est sûr, c’est que cette disposition augmente la part d’arbitraire dans les sanctions pour les fonctions publiques d’État et hospitalière. Vous traduisez cela par une responsabilisation des managers de proximité, ce dont je ne doute pas. Mais, en réalité, on augmente l’arbitraire. Pour des exclusions, il est plus sage de passer par la CAP. Ce n’est pas parce que cela se fait déjà dans la fonction publique territoriale qu’il faut l’étendre à tout le monde. Il faudrait plutôt rendre la saisine de la CAP obligatoire pour les trois versants.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle étudie l’amendement CL478 de Mme Marietta Karamanli.

Mme Marietta Karamanli. Nous ne nous opposons pas au rapprochement des tableaux des sanctions disciplinaires des trois versants, mais à l’introduction, dans la liste des sanctions du premier groupe, de l’exclusion temporaire des fonctions pour une durée maximale de trois jours pour les fonctions publiques d’État et hospitalière. Les commissions administratives paritaires ne sont pas consultées sur les sanctions relevant du premier groupe. Or l’exclusion temporaire des fonctions, qui a un impact financier sur l’agent, doit être soumise à des garanties procédurales.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Mêmes arguments. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Avis défavorable. Cette mesure est la reprise d’une disposition du projet de loi relatif à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires d’avril 2016.

La Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, elle adopte l’amendement rédactionnel CL479 de M. Boris Vallaud.

Puis elle adopte l’article 15 modifié.

Après l’article 15

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette successivement les amendements CL480 de Mme Marietta Karamanli et CL437 de M. Philippe Vigier.

Puis elle examine l’amendement CL380 de M. Philippe Vigier.

M. Yannick Favennec Becot. L’amendement vise à demander un rapport sur l’opportunité d’intégrer les primes dans le calcul des retraites des fonctionnaires. Il existe en effet de grandes disparités en matière de retraites entre les différentes administrations et les différentes fonctions publiques.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette également l’amendement CL432 de M. Philippe Vigier.

Avant l’article 16

La Commission examine l’amendement CL814 de Mme Laurianne Rossi.

Mme Laurianne Rossi. Cet amendement vise à recentrer la définition du conflit d’intérêts, entre intérêts publics et intérêts privés, sans évacuer pour autant la possibilité que plusieurs intérêts publics se heurtent à plusieurs intérêts privés. Il s’agit de tenir compte de l’interdiction du cumul des mandats, qui nécessite de revoir la définition du conflit d’intérêts figurant dans la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence dans la vie publique.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Aux termes de la loi, constitue un conflit d’intérêts toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif de ses fonctions. Votre amendement propose de supprimer de la définition du conflit d’intérêts une situation d’interférence entre plusieurs intérêts publics. Je pense toutefois que, malgré la limitation du cumul des mandats, des situations de conflits d’intérêts publics peuvent exister, entre un contrôleur et un contrôlé, par exemple. Je vous suggère de retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

   titre III

Simplifier le cadre de gestion des agents publics

Article 16 (art. 25 ter, 25 septies et 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) : Renforcer la transparence et l’équité des règles en matière de contrôle déontologique

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. L’article 16 porte sur des questions de déontologie. De très nombreux amendements ayant été déposés dessus, je vais synthétiser la position du Gouvernement, de manière à ne pas la rappeler lors de l’examen de chaque amendement.

La situation actuelle est née de la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence dans la vie publique, qui vient d’être évoquée par Mme Rossi, et de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires. La première a créé la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), une autorité administrative indépendante (AAI) ; la seconde, la Commission de déontologie de la fonction publique dans la forme qu’on lui connaît, rattachée au Premier ministre et dont les membres sont nommés par décret.

Nous avons commencé à travailler pour améliorer le cadre d’examen des situations dites à risque par la Commission de déontologie. Nous proposons ainsi plusieurs modifications importantes. La première, qui tient compte d’un premier bilan d’application de la loi de 2016, vise à circonscrire l’examen systématique des situations déontologiques aux postes qui présentent un risque avéré. Chaque année, 8 000 examens environ sont faits. Certains n’ont pas lieu d’être de manière systématique. Par exemple, il n’est pas utile d’examiner systématiquement la situation au regard de la déontologie d’un enseignant du secondaire de catégorie A qui part travailler dans le privé. S’il partait dans une situation qui posait question en matière de déontologie, rien n’empêcherait son autorité hiérarchique de saisir la Commission de déontologie.

Par ailleurs, nous voulons faire en sorte que la culture de la déontologie et la présence des référents déontologues dans l’ensemble de nos structures permettent d’encadrer et d’accompagner les cas qui ne seraient plus traités par la Commission de déontologie de la fonction publique (CDFP).

Enfin, aujourd’hui, la Commission de déontologie examine de manière systématique un certain nombre de dossiers d’agents publics, lorsqu’ils veulent sortir de la fonction publique. Nous souhaitons systématiser l’examen du retour dans la fonction publique, le risque déontologique étant présent dans un sens comme dans l’autre. Qui plus est, nous tirons les conséquences de l’article 7 : dès lors que l’on peut recruter des contractuels sur des emplois de direction, il n’est pas inutile de systématiser, pour les postes à risque, l’examen de la situation déontologique à l’entrée dans la fonction publique.

De nombreux travaux ont été menés. J’ai cité, dans mon propos liminaire, le rapport de MM. Fabien Matras et Olivier Marleix, ainsi que les propositions de loi qui ont été déposées. J’ai fait part de l’intérêt du Gouvernement pour l’amendement CL709 de M. Matras, qui propose de faire un pas supplémentaire pour renforcer le contrôle de déontologie des agents publics. Il s’agit de rapprocher la Commission de déontologie de la HATVP, avec le maintien, dans cette nouvelle autorité administrative indépendante, de deux collèges : l’un de la HATVP pour celles et ceux qui occupent des fonctions politiques et l’autre consacré à la déontologie des fonctionnaires. Le débat sur l’intérêt d’aller vers un collège unique existe depuis 2016. Le Gouvernement est prêt à voir, d’ici à la séance, sans engagement de réussite – tout le monde sait la complexité de ces questions –, si des travaux complémentaires peuvent être menés et certaines améliorations trouvées.

En l’état actuel, il nous paraît opportun d’adopter l’amendement CL709, qui permettrait également de donner à la Commission de déontologie le statut d’autorité administrative indépendante (AAI), en rejoignant la HATVP. Il y aura un travail supplémentaire à réaliser, d’ici à la séance, puisque, dès lors que la Commission de déontologie devient un collège d’une autorité administratrice indépendante, il est nécessaire de prévoir la désignation de ses membres par la loi. Le Gouvernement s’engage à travailler avec vous pour fixer, d’ici à la séance, dans la loi, sa composition.

M. Matras propose un autre amendement, qui vise à rendre publics les avis de la Commission de déontologie. Le Gouvernement y est favorable, à condition d’adopter le sousamendement de la rapporteure. Notre objectif est de systématiser la publication des avis, à deux conditions : qu’ils soient anonymes, dans la mesure où, souvent, les réserves des avis positifs sont liées à la nature même de l’entreprise ou au parcours de la personne ; qu’ils aient été suivis d’une nomination effective. Imaginons quelqu’un qui reçoit un avis défavorable, l’administration étant liée par l’avis, cette personne ne peut pas être nommée. Mais rien n’empêche un agent public de démissionner de la fonction publique pour occuper ce poste dans un secteur privé, en faisant fi de l’avis défavorable. Ce cas doit être rendu public. Lorsqu’un agent reçoit un avis favorable, avec ou sans réserves, et qu’il va occuper le poste qu’il convoitait, il faut aussi que cela soit su, en respectant les conditions d’anonymisation des données que j’ai évoquées.

En revanche, lorsqu’un agent public fait preuve de prudence ou de précaution, qu’il interroge la Commission de déontologie pour savoir si elle l’autoriserait à occuper tel ou tel poste et qu’elle lui donne un avis défavorable qu’il respecte, il n’y a pas lieu de rendre publique une telle démarche. De la même manière, si un agent public sollicite un avis, qu’il est favorable et que, pour une raison ou une autre, il ne prend pas le poste, il n’y a pas lieu de rendre publique sa démarche, qui relève de sa vie privée.

Pour résumer, le Gouvernement, en plus des dispositions que j’ai évoquées de circonscrire la saisine automatique de la Commission de déontologie aux postes à risque, mais de créer un contrôle systématique au retour ou à l’entrée, vous propose d’adopter l’amendement CL709 de M. Matras, pour faire de la Commission de déontologie une autorité administrative indépendante, en la rapprochant de la HATVP, et d’adopter la règle de publicité systématique des avis, aux conditions qu’ils soient anonymisés, pour préserver les données sensibles, et que seuls les avis suivis d’une nomination soient rendus publics. D’ici à la séance, nous vérifierons que la rédaction issue de la commission, dans le cas où vous adopteriez les amendements en l’état, s’applique bien à l’ensemble des situations de sortie de la fonction publique – M. Matras craignait que les dispositions issues du sous-amendement ne les couvrent pas intégralement. Si cela n’était pas le cas, nous corrigerions la rédaction pour la séance, de manière à couvrir parfaitement le champ.

La Commission examine l’amendement CL254 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. Monsieur le secrétaire d’État, nous ne sommes absolument pas convaincus par votre argumentation et maintenons notre amendement de suppression de l’article ! Nous refusons, en effet, d’encourager le pantouflage dans le secteur privé et de diminuer les compétences effectives de la Commission de déontologie de la fonction publique. Rappelons qu’avec cet article la saisine de la CDFP, qui prononce des avis contraignants, n’est plus le principe, mais devient l’exception, après trois étapes, pour les cas de cessation de fonction et de recrutement de personnes extérieures envisageant de travailler ou ayant travaillé dans le privé.

La Commission de déontologie voit ses cas d’auto-saisine un peu élargis, certes, mais le problème reste entier. Si elle dispose d’un délai de trois mois pour agir, comment peut-elle être informée autrement que par des fuites, provenant de la presse ou des lanceurs d’alerte ? Les déclarations d’intérêts circulent moins bien entre autorité hiérarchique de départ, d’arrivée et HATVP. Enfin, seuls certains fonctionnaires seront désormais soumis à un avis de la Commission de déontologie, lorsqu’ils créent ou reprennent une entreprise, alors que c’était le cas pour tous auparavant.

Toutes ces dispositions participent non pas à renforcer mais à amoindrir les nécessaires exigences de transparence et d’exemplarité de l’État et de ses institutions. L’article 16 du projet de loi facilite le pantouflage partiel des fonctionnaires et limite le contrôle de la Commission de déontologie, ce qui va mécaniquement faire augmenter les conflits d’intérêts. On pourrait ainsi prendre l’exemple de l’actuel secrétaire général de l’Élysée, Alexis Kohler, ou celui d’une affaire qui a commencé il y a à peu près un an, autour d’un certain Alexandre B…

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’article a pour objet non pas de diminuer les compétences, mais au contraire d’augmenter et de renforcer les pouvoirs de la Commission de déontologie. Certes, le périmètre des agents soumis directement à son contrôle est restreint : 80 % des avis de la Commission sont rendus sous forme simplifiée par son président, parce qu’ils ne posent pas de problème. Les dossiers lui seront envoyés après un premier filtrage des référents déontologues, ce qui permettra à la CDFP d’exercer un contrôle plus approfondi sur les dossiers qui lui seront soumis. Conformément aux travaux de nos collègues Fabien Matras et Olivier Marleix, l’article introduit notamment un contrôle du « rétropantouflage », soit à l’entrée dans l’administration, et non plus seulement à la sortie, ainsi que des contractuels entrant dans la fonction publique. Il offre également à la CDFP les moyens de rendre son contrôle plus efficace, en permettant, vous l’avez souligné, à son président de s’auto-saisir. Je ne vois donc rien, dans cet article, qui soit de nature à favoriser le pantouflage, comme vous le dites ; bien au contraire.

M. Ugo Bernalicis. La question est simple : Alexis Kohler aurait-il pu procéder de la même manière avec le système que vous comptez mettre en place ? Si la réponse est « non », alors nous tenons une bonne piste. Mais il existe un angle mort, que vous refusez de regarder : qu’en sera-t-il du fonctionnaire qui, ayant reçu un avis défavorable, décide néanmoins de démissionner de la fonction publique pour rejoindre une entreprise ? La déloyauté et le conflit d’intérêts sont manifestes, alors qu’il existe dans le privé des clauses qui empêchent de travailler pour le concurrent ! Vous semblez trouver normal que les fonctionnaires aillent dans le privé partager leurs compétences et leur savoir-faire – en réalité leur carnet d’adresses – comme on en voit des exemples chaque semaine dans Le Canard enchaîné ou dans Mediapart. C’est cela qui détruit les notions de République et d’intérêt général, qui vient attester l’idée que des personnes profitent, pantouflent, font des allers-retours et, au passage, se servent dans les caisses de l’État – celles, aussi, des travailleurs.

Vous nous faites croire que vous améliorez le système alors que, sous couvert de simplification, vous le rabougrissez. Nous ne sommes pas dupes ! Nous ferons des propositions plus formelles en séance.

M. Olivier Marleix. Il était urgent de faire évoluer le dispositif en matière de déontologie. Lors des auditions que nous avons menées avec Fabien Matras dans le cadre de la mission d’information, un chiffre, cité par le président de la HATVP Jean-Louis Nadal, nous a fait bondir : en plus d’un siècle, à peine une dizaine d’affaires liées à des conflits d’intérêts ont donné lieu à poursuites pour délit de pantouflage, l’infraction spécifique aux fonctionnaires. Nous pourrions en faire une lecture très optimiste quant à la situation française, mais aussi concevoir quelque inquiétude sur la largeur des mailles du filet…

Je me réjouis que les amendements de Fabien Matras, qui rejoignent les miens, aient pu convaincre le Gouvernement. Celui-ci les avait écartés lors de l’examen de la loi pour la confiance dans la vie politique, ce qui avait donné lieu à la création d’une mission d’information. Il est temps d’atterrir !

La « fusion-absorption » de la Commission de déontologie et de la HATVP me convient tout à fait. Clairement, la commission a créé un doute, peut-être injuste, sur l’existence d’un certain entre-soi : qu’elle ait été amenée à donner deux avis différents sur le cas d’Alexis Kohler, reprenant le dossier pour donner la réponse que l’on attendait d’elle, n’est pas à inscrire à son crédit… de son côté, la HATVP, dont la création n’avait pas été forcément bien accueillie, accomplit parfaitement sa mission ; elle est, sous l’autorité du président Nadal, incontestée, et son travail rigoureux est reconnu.

J’ai néanmoins une inquiétude sur la dimension quelque peu baroque du dispositif imaginé par Fabien Matras, avec un collège prévu par la loi, l’autre par décret. Il est à mon sens indispensable de conserver l’unicité de la HATVP, sous l’autorité d’un seul président, et de veiller à ne pas disperser les moyens, notamment en personnels. Prenons garde à ne pas affaiblir, à l’occasion de cette réforme, la Haute Autorité, alors qu’il s’agit de la renforcer !

J’entends avec satisfaction, monsieur le secrétaire d’État, que vous êtes d’accord pour faire évoluer le dispositif vers un seul collège. Celui-ci pourrait être élargi en fonction des nouvelles missions et ne pas se limiter aux six magistrats qui composent actuellement la HATVP.

Le dispositif prévu est si baroque que j’ai craint un instant que vous escomptiez sa censure par le Conseil constitutionnel pour manque de cohérence, mais personne n’a l’esprit assez mal placé pour imaginer une telle éventualité ! J’ai un seul souhait, que nous puissions aboutir d’ici la séance à une solution commune, qui serait approuvée à l’unanimité. C’est bien l’esprit dans lequel nous avons travaillé jusqu’ici ; les travaux de notre assemblée s’en trouveraient grandis.

M. Fabien Matras. Pour répondre à nos collègues de La France insoumise sur les cas individuels qu’elle a cités, de manière assez inélégante par ailleurs, la fusion de la HATVP et de la Commission de déontologie rendra assurément les contrôles plus efficaces. Par ailleurs, l’agent qui démissionnerait de la fonction publique après un avis défavorable prendrait le risque d’être poursuivi au pénal, et c’est bien le rôle de la déontologie que de prémunir les agents contre une telle situation. On ne peut interdire à un agent de démissionner, mais il prend cette décision à ses risques et périls.

Monsieur Marleix, nous pouvons acter ce soir la fusion avec deux collèges. Nous débattrons dans l’hémicycle de leur composition – qui doit en effet être définie par la loi – et de la question de la présidence. C’est un beau message que nous enverrions à nos concitoyens si, après l’adoption à l’unanimité de notre rapport, nous adoptions d’un même élan le mécanisme proposé par la rapporteure, le Gouvernement et moi-même. Il nous faut pour cela trouver une position commune, et c’est pourquoi nous avons intérêt à travailler ensemble.

Mme Cécile Untermaier. L’article 16 comporte deux avancées : le contrôle du rétro-pantouflage, et la fusion, sur le principe de laquelle nous sommes très favorables, puisque nous avons déposé un amendement similaire au vôtre.

J’ai toutefois quelques questions à vous poser. S’il me paraît fort sage de rétrocéder les compétences aux référents déontologues, le fait de limiter le contrôle du pantouflage et du rétro-pantouflage aux hauts fonctionnaires, dont la HATVP analyse déjà la déclaration d’intérêts et la déclaration de patrimoine, fait que nous serons en présence de deux collèges, l’un rendant des avis sur des questions qui font nécessairement appel au contenu de la déclaration d’intérêts, l’autre disposant précisément de ces déclarations. C’est la raison pour laquelle il me paraît essentiel que, s’agissant de ces 228 hauts fonctionnaires, l’analyse soit fusionnée – c’est d’ailleurs ce que recommande Jean-Louis Nadal.

La déontologie est illisible, balbutiante ; il faut en diffuser la culture. Depuis sa création, la HATVP a accompli un travail remarquable et ses agents ont fait preuve de modernité. Le moment est venu d’identifier la haute autorité comme tête de réseau de la déontologie. C’était le souhait de mon groupe en 2013, mais il était encore trop tôt, l’instance en étant à ses tout débuts. La HATVP doit désormais être chargée de gérer les conflits d’intérêts et de donner les avis sur le pantouflage et le rétro-pantouflage, elle doit aussi avoir pour rôle de diffuser la culture déontologique.

Il nous reste encore à mieux définir le métier des référents déontologue, dont les contours restent encore vagues.

Je partage le souhait évoqué par Fabien Matras. La déontologie n’est ni de droite ni de gauche. Nous devons trouver un consensus et placer ce travail sous le sceau de l’exigence.

M. Paul Molac. Avec cet article, et je le dis à l’attention de nos collègues de la France Insoumise, nous faisons un pas supplémentaire dans la bonne direction ! Comme le disent les Bretons, Tamm ha tamm e vez graet e vragoù da Yann : toute chose est bonne à prendre…

Quant au fonctionnaire qui décide de faire fi de l’avis défavorable, comment l’empêcher de démissionner et de rejoindre le privé ? Je ne vois guère de solutions, sauf à inscrire une clause de non-concurrence dans le statut de la fonction publique… je compte sur Ugo Bernalicis et son groupe pour faire preuve de créativité et nous proposer un amendement d’ici la séance !

Mme Laurence Vichnievsky. Je suis un peu déstabilisée par l’organisation de nos débats, qui, à la suite d’une déclaration du Gouvernement, prennent la forme d’une discussion générale ! Je rappelle que, sur ces sujets, notre groupe avait été très demandeur lors de l’examen de la loi pour la confiance dans la vie politique et que nous avons beaucoup travaillé sur la déontologie.

Nous défendrons un amendement de fusion, visant à regrouper les fonctions exercées par la Commission de déontologie au sein de la HATVP. Nous n’avons pas retenu l’option des deux collèges, pour deux raisons. La première, c’est qu’il s’agirait d’une juxtaposition sous l’autorité d’un même président, sans culture commune, alors que l’idée est qu’une même instance indépendante traite de l’ensemble des questions déontologiques de la vie publique, qu’il s’agisse d’élus ou de hauts fonctionnaires. La seconde tient au mode de désignation des membres, différents selon les collèges, puisque les uns seraient désignés par la loi, les autres par un décret en Conseil d’État, comme il l’est prévu dans l’amendement de Fabien Matras, ce qui me paraît difficilement imaginable.

J’en déduis que nous devons travailler ensemble ; si nous parvenons à une solution commune d’ici l’hémicycle, j’en serai ravie. Je défends l’option d’une seule et même instance – peut-être sous un nom différent et élargie à d’autres personnalités que des magistrats – car il s’agit d’une même culture.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. J’entends ceux qui souhaitent une même instance, une seule autorité, un seul collège. Le Gouvernement est ouvert à ces demandes, mais il s’agit plus d’un engagement de moyens que de résultats, car les difficultés que poserait une telle fusion sont nombreuses. Si nous parvenons à les résoudre, ce sera tant mieux ; autrement, nous aurons fait un pas important en intégrant la Commission de déontologie à la HATVP, c’est-à-dire en lui conférant le statut d’une AAI.

Le fait que les périmètres concernés ne soient pas les mêmes, y compris s’agissant des fonctionnaires, est l’un des éléments qui rendent complexe une fusion totale, et qu’il convient de regarder attentivement avant de prendre tout engagement. Certains agents publics sont concernés par la Commission de déontologie alors que leur fonction ne les assujettit pas à une obligation vis-à-vis de la HATVP, d’autres relèvent de la HATVP mais pas de la Commission de déontologie. Leur nombre total dépasse de loin celui de 228 agents.

Pour répondre à Ugo Bernalicis et relativiser certains commentaires, je dirai que si l’avis est défavorable, c’est qu’il existe un risque de prise illégale d’intérêts ou de délit d’initié ; si l’agent public prend quand même la décision de démissionner pour occuper le poste privé et que le risque est avéré, il fera l’objet d’une poursuite pénale. L’avis de la commission sera alors versé à l’instruction.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine, en discussion commune, les amendements identiques CL889 de la rapporteure et CL707 de M. Fabien Matras, ainsi que l’amendement CL764 de Mme Laurence Vichnievsky.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Mon amendement s’inscrit dans la droite ligne des travaux de Fabien Matras. Je laisse donc à notre collègue le soin de présenter le sien.

M. Fabien Matras. Il s’agit en fait d’un amendement de coordination, qui précède l’amendement portant article additionnel après l’article 16 et qui traite précisément de la fusion. Le nom que je propose, « Haute Autorité pour la transparence et la déontologie de la vie publique », est ouvert au débat.

Mme Laurence Vichnievsky. Mon amendement diffère d’un seul mot, mais qui compte. Ajouter le mot « déontologie » à la dénomination de la Haute Autorité signifie qu’il y a deux collèges ; cette différence sémantique traduit donc une différence d’approche. Pour ma part, j’ai conservé l’appellation de la HATVP, le reste de l’amendement visant à regrouper au sein de la HATVP les compétences de la Commission de déontologie et à prévoir les coordinations qui en découlent.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. J’entends votre argument, mais dans la philosophie, cette instance, qu’elle soit ou non composée de deux collèges, examinera les questions de transparence et de publicité, en même temps que celles de déontologie. Il ne m’apparaît donc pas que la dénomination que nous proposons traduise nécessairement la coexistence de deux collèges ni qu’elle esquive la possibilité d’envisager un collège unique. Je vous suggère de retirer votre amendement.

J’en profite pour donner mon sentiment sur la discussion générale qui vient d’avoir lieu sur l’article 16. Il me semble que nous pourrions envisager une réunion de travail avec les responsables de chacun des groupes pour rechercher une solution commune et aboutir éventuellement à un collège unique, moyennant une discussion de fond sur la composition de cette instance – car c’est bien là qu’est l’enjeu.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Le Gouvernement demande le retrait de l’amendement CL764 et apporte son soutien aux amendements identiques. Il s’agit d’amendements de coordination qui tiennent compte de l’adoption future d’un amendement ultérieur, un pari d’optimisme lié à la procédure !

Mme Laurence Vichnievsky. Je retire mon amendement, provisoirement.

M. Olivier Marleix. Permettez-moi d’aller dans le sens de Laurence Vichnievsky. Je n’ai pas de droit d’auteur sur la HATVP, je n’appartenais pas à la majorité qui l’a créée et je me réjouis qu’une autre majorité, à laquelle je n’appartiens pas non plus, renforce les prérogatives de cette instance. Pour autant, le mot « déontologie » pose un problème d’application car la HATVP, garante de la transparence de nos institutions, est compétente pour les élus et n’a pas à juger de la déontologie, par exemple, du Président de la République ! Moins on ajoute de mots, mieux on se porte.

L’amendement CL764 est retiré.

La Commission adopte les amendements identiques CL889 et CL707.

En conséquence, les amendements CL35 de M. Olivier Marleix, CL382 de M. Philippe Vigier, CL481 de Mme Cécile Untermaier, CL23 de M. Olivier Marleix, CL383 de M. Paul Molac, CL256 de M. Ugo Bernalicis, CL384 et CL386 de M. Paul Molac, CL482 de Mme Cécile Untermaier, CL760 de Mme Laurence Vichnievsky et CL396 de la rapporteure tombent.

La Commission est saisie de l’amendement CL756 de Mme Laurence Vichnievsky. 

Mme Laurence Vichnievsky. Cet amendement vise à rétablir la rédaction de l’article 25 ter de la loi du 13 juillet 1983, en supprimant les alinéas 2, 3 et 4 de l’article 16.

L’alinéa 3 supprime l’identification par la loi de la personne publique destinataire de la déclaration d’intérêts du fonctionnaire dont la nomination est envisagée. Dans l’état actuel du droit, il s’agit de « l’autorité investie du pouvoir de nomination », ce qui paraît logique.

Du fait de la suppression proposée, le fonctionnaire serait seulement tenu de transmettre sa déclaration d’intérêts sans autre précision quant au destinataire de cette transmission. Le texte en résultant serait ainsi privé de tout caractère normatif et donc de sens juridique. L’intelligibilité de la loi ferait défaut.

L’alinéa 4 supprime la disposition selon laquelle, une fois la nomination intervenue, l’autorité de nomination transmet la déclaration d’intérêts au supérieur hiérarchique dont dépend désormais le fonctionnaire. Cette disposition paraît, comme la précédente, relever de la logique administrative la plus élémentaire.

Selon l’étude d’impact, ces suppressions constitueraient seulement un « déclassement », qui reviendrait à faire déterminer les modalités de gestion de la déclaration d’intérêts non plus par la loi mais par le règlement. Le secrétaire d’État pourra peut-être nous expliquer les raisons de ce déclassement. Le Gouvernement se borne à invoquer « les pratiques et les difficultés rencontrées par les ministères », ce qui n’est pas de nature à éclairer le Parlement. Pour ma part, je ne peux accepter cette réduction non justifiée du domaine de la loi.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je vais laisser le ministre répondre plus précisément sur ce point. Environ 8 000 fonctionnaires sont soumis à cette obligation de transmission de leur déclaration d'intérêts. Il ne s'agit pas de supprimer cette obligation mais de renvoyer au pouvoir réglementaire le soin de préciser les modalités de sa transmission. Je vous demande de retirer cet amendement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Il s’agit de permettre une adaptation en fonction de la taille, de l’importance des effectifs concernés et des particularités des administrations. L’objectif est bien de maintenir cette déclaration.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL255 de Mme Danièle Obono.

M. Ugo Bernalicis. Nous proposons de rappeler, à l’article 25 ter de la loi du 13 juillet 1983, que la déclaration d’intérêts doit être transmise à l’autorité hiérarchique dont l’agent dépend dans l’exercice de ses nouvelles fonctions ainsi qu’à la HATVP. Sachant que cet amendement connaîtra le même sort que le précédent, je réitère la question posée par notre collègue Laurence Vichnievsky : pourquoi ce déclassement ? De quelles adaptations s’agit-il ? Quels sont, concrètement, les problèmes rencontrés par les différents ministères ?

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL381 de M. Paul Molac. 

M. Paul Molac. Cet amendement prévoit que les fonctionnaires concernés joignent systématiquement à la déclaration de situation patrimoniale une déclaration d’intérêts, indispensable pour juger de la pertinence de l’évolution de leur patrimoine.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je ne suis pas certaine que cela soit indispensable à l’appréciation de la HATVP ; les deux populations soumises à ces obligations ne sont pas exactement les mêmes et cela alourdirait le dispositif. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement CL617 de M. Éric Poulliat. 

M. Éric Poulliat. Le fonctionnaire qui occupe un emploi à temps complet peut, à sa demande, être autorisé par l'autorité hiérarchique dont il relève à accomplir un service à temps partiel pour créer ou reprendre une entreprise et à exercer, à ce titre, une activité privée lucrative. Cependant, le délai de deux ans, trois ans au maximum, paraît trop court pour évaluer la viabilité réelle d’une entreprise, les contraintes économiques n’étant véritablement estimables qu’après les deux premières années.

Je propose de porter ce délai à quatre ans, prolongeable d’un an, afin de laisser à l’agent le temps d’estimer la viabilité réelle de son entreprise et de faire un choix éclairé. Dans la mesure où les agents publics pourront être facilement remplacés par les contractuels à temps complet, dont il est prévu d’accroître le nombre, et que la philosophie de ce texte est d’encourager la porosité entre le privé et le public, je ne vois pas les raisons qui pourraient vous amener à rejeter cet amendement.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L'autorisation pour un fonctionnaire d’exercer à temps partiel pour créer ou reprendre une entreprise est de deux ans depuis la loi du 3 août 2009 relative à la mobilité et aux parcours professionnels dans la fonction publique, contre une année auparavant.

Il me semble que cette durée, prolongeable d’un an, suffit largement pour juger de la viabilité du projet d'entreprise. On ne peut installer les fonctionnaires dans une situation temporaire trop longue. Ils peuvent en outre demander une disponibilité pour convenances personnelles, certes sans rémunération, pour mener à bien leur projet. Le cadre est assez protecteur à leur endroit.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’examen de l’amendement CL758 de Mme Laurence Vichnievsky. 

Mme Laurence Vichnievsky. Le projet de loi prévoit que les emplois dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions justifient un examen spécifique de la situation du fonctionnaire nommé soient répertoriés dans une liste établie par décret en Conseil d’État. Cet amendement, de nature rédactionnelle, vise à ajouter cette précision à deux dispositions introduites par l’article 16 qui n’en faisaient pas expressément mention.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je ne vois pas d'ambiguïté sur ce point : l’alinéa 45 de cet article précise bien qu’un décret en Conseil d'État fixe la liste des emplois mentionnés au IV, c'est à dire à l'alinéa 21. Je vous demande de bien vouloir retirer cet amendement.

Mme Laurence Vichnievsky. Je ne pense pas que nous nous comprenions.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. L’alinéa 45 prévoit un décret en Conseil d’État pour l’application de l’ensemble de l’article 25 octies. Cela couvre toutes les dispositions, y compris celles que vous pointez dans votre amendement rédactionnel. C’est la raison pour laquelle nous vous suggérons de retirer votre amendement.

L’amendement est retiré.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Une série d’amendements que nous aurions dû examiner maintenant sont tombés tout à l’heure, du fait de l’adoption des amendements CL889 de la rapporteure et CL707 de M. Matras. Mais si certains de leurs auteurs souhaitent s’exprimer, nous les écoutons volontiers.

Mme Cécile Untermaier. Le projet de loi se propose de conforter la Commission de déontologie de la fonction publique, mais ne contient pas d’éléments de réflexion ni d’interrogations sur la composition même de cette commission, actuellement présidée par un conseiller d’État. Indépendamment de la valeur intrinsèque des hauts fonctionnaires qui en font partie, il est pourtant évident, s’agissant de la question majeure du pantouflage et du rétro-pantouflage, que l’on ne peut pas en rester à l’état du projet tel qu’il nous est proposé. C’est pourquoi nous souscrivons aux propositions visant à intégrer cette commission au sein de la HATVP.

M. Olivier Marleix. Permettez-moi seulement un mot sur les collèges. Il va de soi que le mode de désignation du ou des collèges doit être régi par la loi, et il le faut d’ailleurs. Il ne faudrait d’ailleurs pas que l’on en profite pour mettre subrepticement fin au mandat en cours des membres de l’actuelle HATVP.

Il est nécessaire de faire évoluer le profil de la Haute Autorité. Aujourd’hui, elle compte six magistrats, mais elle aura à connaître, demain, de cas déontologiques propres à des fonctionnaires. Sans aller jusqu’à prôner un deuxième collège, je pense qu’il faudra enrichir le collège unique de la HATVP de personnalités ayant une culture plus administrative, tels que des membres ou anciens membres du corps préfectoral, d’anciens directeurs d’administration centrale ou secrétaires généraux de ministères.

Cependant, nous devrons veiller à ce que l’on reste bien dans l’esprit d’une AAI. Régler par décret les modalités de nomination, comme le voulait d’abord Fabien Matras, était tout de même un peu un peu gênant : c’est la loi qui doit prévoir la composition de la HATVP. Quant aux autorités de nomination, elles devront désigner des personnalités qui soient indépendantes, notamment vis-à-vis du pouvoir exécutif.

M. Paul Molac. Tout d’abord, je veux me féliciter que la Commission de déontologie de la fonction publique passe « sous le patronage », si je puis dire, de la HATVP. Mes amendements visaient à calquer, dans une certaine mesure, le mode de fonctionnement de la Commission de déontologie sur celui de la Haute Autorité. Comme ils sont satisfaits, je le suis aussi !

L’amendement CL385, en particulier, visait, pour garantir l’indépendance des membres de la CDFP, à ce que le Parlement exerce pleinement son rôle dans le processus de leur nomination.

M. Fabien Matras. Lorsqu’on parle de la composition de la Commission de déontologie, il me semble impératif qu’on inscrive aussi dans la loi garanties accordées à ses membres, et en particulier le caractère irrévocable de leur mandat, qui feront que la nouvelle autorité soit vraiment une AAI.

La Commission adopte les amendements rédactionnels CL389 et CL390 de la rapporteure.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CL896 de la rapporteure, CL708 de M. Fabien Matras et CL757 de Mme Laurence Vichnievsky.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Mon amendement a pour objet de renforcer la diffusion de la culture déontologique de la fonction publique.

Il confie pour cela à la Haute Autorité issue de la fusion de la HATVP et de la CDFP une mission d'accompagnement et d'animation du réseau des référents déontologues créés par la loi du 20 avril 2016. Souvent isolés, notamment lorsqu'ils œuvrent pour le compte de petites collectivités ou établissements hospitaliers, ils doivent pouvoir bénéficier de l'expertise de la Haute Autorité. Celle-ci a d'ailleurs établi un premier guide déontologique, comprenant recommandations et bonnes pratiques, à leur intention.

Dans leur rapport d'information sur la déontologie des fonctionnaires, nos collègues Fabien Matras et Olivier Marleix proposaient pour leur part quelque chose de similaire, avec la création d'une plate-forme d'échanges entre les référents déontologues et la HATVP.

M. Fabien Matras. Il y a, d’une part, la question de l’accompagnement et de la formation des référents déontologues. C’est une piste que nous avions évoquée, Olivier Marleix et moi-même, dans notre rapport. En effet, il n’existe actuellement aucune formation qui leur soit destinée. Le premier alinéa de mon amendement a pour objet d’y remédier.

Le second alinéa prévoit de rendre publics les avis d’incompatibilité, ou de compatibilité avec réserve, mais je ne suis pas du tout opposé à la limite que le ministre a exposée tout à l’heure.

Je vais donc retirer mon amendement au profit d’un amendement de la rapporteure qui viendra un peu plus tard en discussion.

Mme Laurence Vichnievsky. Je crois que je vais faire de même, car nous avions rédigé un amendement très proche, prévoyant l’accompagnement par des référents déontologues et la publicité des avis, mais je comprends qu’un autre amendement a été déposé, précisant les conditions dans lesquelles les avis seront rendus publics. Anticipant la demande de retrait que je sens arriver, je retire dès maintenant mon amendement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Je prends bonne note du retrait des amendements de M. Matras et de Mme Vichnievsky.

Quant à l’amendement de Mme la rapporteure, j’en partage l’objectif. Promouvoir une culture de déontologie est en effet une nécessité. Mais, à ce stade, je formulerai plutôt une demande de retrait, afin de mieux retravailler la question d’ici à la séance publique. La formulation proposée nous semble en effet disjoindre assez largement les questions de déontologie et les politiques des ressources humaines des administrations concernées. Nous préférerions donc que cet amendement soit réécrit, dans le cadre des compromis qui seront trouvés sur la nouvelle Haute Autorité.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis prête à retirer mon amendement.

M. Olivier Marleix. La rapporteure a évoqué tout à l’heure, si ma mémoire est bonne, la Haute Autorité « issue de la fusion de la HATVP et de la CDFP ». Cette expression me gêne, car elle laisserait supposer que la loi crée une nouvelle Haute Autorité qui n’a rien à voir avec la précédente...

Je voudrais que le ministre nous rassure, à ce stade de nos débats, sur le fait que ni le Gouvernement ni la majorité n’ont l’intention de mettre un terme anticipé au mandat des membres du collège de l’actuelle Haute Autorité pour la transparence de la vie publique et sur le fait que, s’il y a projet de fusion, c’est bien d’une absorption de la CDFP par la HATVP qu’il s’agit – en un mot, qu’il n’y a pas de projet caché de révocation des membres de la HATVP actuelle.

M. Ugo Bernalicis. Je m’associe à la question de notre collègue Marleix, mais je voudrais aussi prolonger les questions soulevées à propos des référents déontologues. Qu’est-il prévu pour leur garantir une certaine forme d’indépendance, notamment vis-à-vis de leur supérieur hiérarchique ? Comptez-vous mettre en place une protection particulière, et laquelle ?

Mme Cécile Untermaier. La discussion avançant, l’inquiétude monte. C’est pourquoi je voudrais être rassurée sur le point de savoir si la HATVP continuera, après des débuts difficiles, de couler des jours heureux, et s’il n’est bien question eu aucune manière de modifier cette autorité indépendante que le législateur a entourée d’un niveau d’exigence élevé.

Nous ne voudrions pas, en effet, que la HATVP fasse les frais d’une absorption de la Commission de déontologie. Il est donc clair que notre groupe se rangera à l’idée d’une fusion qui soit, comme je l’ai dit, une absorption. Il ne me semble pas convenable d’imaginer deux autorités indépendantes fonctionnant en parallèle. La seule autorité indépendante est la HATVP, qui jouira à l’avenir des prérogatives qui étaient jusque-là celles de la Commission de déontologie, dans un périmètre que vous définirez.

Je crois que c’est un point de la discussion extrêmement important, sur lequel nous devons obtenir des réponses claires.

M. Fabien Matras. Je partage ces préoccupations et voudrais vous livrer quelques explications. La majorité envisage en effet une fusion entre la CDFP et la HATVP, mais en aucun cas les missions ou la composition de cette dernière ne sont remises en cause. C’est bien la Commission de déontologie qui va intégrer l’AAI qu’est aujourd’hui la HATVP. Plutôt que d’être rattachée à Matignon comme elle l’est aujourd’hui, elle gagnera à cette intégration des garanties d’indépendance.

Telle est la volonté de la majorité au nom de laquelle je parle. Le Gouvernement va répondre pour ce qui le concerne, mais, en tout cas, il ne s’agit aucunement de fusionner les deux entités pour revenir sur les compétences de la HATVP ou pour l’affaiblir, alors qu’elle fait un travail formidable, ainsi que M. Marleix l’a dit plusieurs fois. Quant aux membres actuels de la HATVP, je ne peux pas vous répondre sur ce point.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. M. Matras a dit l’essentiel. Le dispositif qui propose d’intégrer la Commission de déontologie à la HATVP pour en faire un collège de cette dernière recueille un avis favorable du Gouvernement, et adoption n’entraîne ni la fin des fonctions, ni la révocation, ni la modification de la HATVP telle qu’elle existe.

Si nos travaux, dans les quinze jours qui viennent, nous permettent d’aller plus loin, vers un seul collège, la question sera réglée de fait. Cela entraînera, en l’occurrence, des modifications. Mais si nous conservons deux collèges, le dispositif proposé par M. Matras n’aura pas de conséquences sur le périmètre, la durée des fonctions ni la composition de la HATVP.

Les amendements sont retirés.

La Commission examine ensuite l’amendement CL24 de M. Olivier Marleix.

M. Olivier Marleix. Par cet amendement, je demande la publicité des avis qui seront rendus demain par la HATVP. Je félicite le ministre pour la proposition qu’il nous a faite, et que je partage totalement. Effectivement, je pense qu’il n’y a aucune raison de rendre publics des avis qui sont donnés dans le cadre d’une espèce de rescrits, en cas de départ d’un agent.

En revanche, dans d’autres cas, il faut savoir sortir du débat sur l’anonymisation. Certes, dans mon amendement, j’ai moi-même employé le terme, en pensant à ce que fait aujourd’hui l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), qui publie, par exemple, les déclarations d’intérêts des membres du collège et même, je crois, de ses salariés. L’anonymisation ne vaut que lorsqu’il y a atteinte à la vie privée d’un tiers, notamment du conjoint d’une personne visée par la loi. Si son conjoint a des intérêts, effectivement, la personne doit le déclarer, mais sans que le grand public ait nécessairement à le savoir. Ainsi, l’ANSM n’anonymise que ce qui concerne la personne concernée « par ricochet », si je puis dire.

En revanche, monsieur le ministre, si je peux comprendre que vous ayez l’intention de conserver une anonymisation plus systématique, je trouve que cela n’a pas lieu d’être. Même l’ANSM ne le fait pas ! Pourquoi serions-nous moins-disants pour des fonctionnaires qui partent pantoufler dans le privé ? Ce petit jeu n’a, de toute façon, qu’une portée extrêmement limitée. Il n’est pas très compliqué d’aller reconstituer les parcours pour savoir qui est parti et où. Les choses se savent toujours plus ou moins.

Je crois que la transparence a une vertu. M. Bernalicis évoquait tout à l’heure le cas du fonctionnaire qui démissionnerait pour chercher à contourner l’avis de la Commission de déontologie. Très clairement, il tomberait tout de même sous le coup de la loi pénale. Il n’a donc pas intérêt à le faire ! Mais il serait encore mieux que les choses soient publiées. Monsieur le ministre, puisque vous êtes dans un état d’esprit de grande ouverture ce soir, consentez ce tout petit effort supplémentaire, afin que nous sortions de cet anonymat qui n’a vraiment aucune raison d’être, s’agissant des membres visés par la loi.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Le droit existant évoque déjà l’anonymat. Il ne s’agit donc pas de reculer par rapport à ces dispositifs qui protègent les personnes concernées. Je suis assez d’accord pour la publicité des avis de la commission, indispensable à la diffusion de sa doctrine, mais je proposerai, après l’alinéa 34, un amendement un peu plus restrictif, aux termes duquel seules les personnes qui ont effectivement rejoint un poste faisant l’objet de la consultation verront publié l’avis les concernant.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Comme Mme la rapporteure, je formulerai une demande de retrait au profit de son amendement qui, au-delà de la précision qu’elle y a apportée, est coordonné avec la rédaction de l’amendement CL709. Dans la perspective de la séance, cela nous permettra de gagner un peu de temps légistique.

Je pense que la différence entre la publication d’une déclaration d’intérêts et la publication d’un avis est assez importante. La publication d’une déclaration d’intérêts permet de rendre public le fait qu’un individu donné n’a pas de conflit d’intérêts avec le poste qu’il occupe, tandis que la publication de l’avis porte sur la possibilité de mutation ou de mobilité d’une personne d’un poste vers l’autre. Souvent, la Commission de déontologie émet des avis favorables, mais assortis de réserves qui font référence au secteur d’activité ou à la nature de l’activité d’une entreprise ou d’un établissement éventuellement rejoint.

Au-delà de la personne concernée par cette mobilité potentielle, ces avis peuvent revêtir un caractère stratégique pour le développement propre de l’entreprise considérée. Je ne mets pas sur le même plan le fait de rendre publique une déclaration d’intérêts et de rendre public un avis sur la mobilité d’une personne, ainsi que les réserves qui peuvent l’accompagner quand il est favorable.

M. Olivier Marleix. Au cours des auditions conduites avec Fabien Matras, il est apparu qu’il avait un vrai problème : celui de l’absence de suivi de avis par les secrétaires généraux des ministères. L’administration ne s’assure pas toujours, en effet, que les interdits prononcés par la Commission de déontologie sont suivis d’effet.

Il y a donc une vraie nécessité à ce que les anciens collègues ou collaborateurs d’un fonctionnaire parti dans le privé puissent demain, en tout état de cause, savoir que la personne en question s’est vu opposer une interdiction d’entrer en relation avec eux par la HATVP.

Cela étant, je retire mon amendement au profit d’une rédaction plus adéquate.

L’amendement est retiré

La Commission examine l’amendement CL257 de Mme Danièle Obono. 

M. Ugo Bernalicis. Nous proposons d’insérer, à l’alinéa 17, après le mot « privé », les mots : « tout autre emploi de la fonction publique qui pourrait induire un conflit d’intérêts par rapport à l’organisme d’origine ou celui de sa nouvelle affectation, tout État étranger, toute organisation internationale ». L’amendement a pour objectif d’intégrer les conflits d’intérêts public-public comme point de vigilance déontologique.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Il me semble que nous avons déjà conforté la notion de conflit d’intérêt « public-public ». Votre amendement me semble donc satisfait. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL682 de M. Éric Poulliat.

M. Éric Poulliat. La Commission de déontologie de la fonction publique a notamment pour rôle de prévenir la prise illégale d’intérêt dans une entreprise privée, en contrôlant la compatibilité de l’activité nouvelle d’un agent avec les fonctions administratives qu’il a exercées durant les trois dernières années précédentes au sein de la fonction publique.

L’article 25 octies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires précise à ce sujet qu’est assimilée à une entreprise privée « toute entreprise publique exerçant son activité dans un secteur concurrentiel et conformément aux règles du droit privé ».

Se pose cependant la question des entreprises publiques chargées de l’exploitation d’un monopole public. Elles ont une activité locale et territoriale, à l’occasion de laquelle elles entrent en contact avec les agents territoriaux. Il est évident que des enjeux financiers peuvent interférer, notamment pour un agent territorial qui aurait connu des problématiques de cette entreprise publique lors de ses précédentes fonctions administratives. Des situations qui heurtent le respect des règles déontologiques peuvent alors apparaître.

Nous proposons donc de supprimer le critère du « secteur concurrentiel », afin que la Commission de déontologie soit compétente pour donner un avis sur la situation de tout agent ayant exercé des fonctions administratives en partance pour une entreprise publique, et ce même lorsque celle-ci est en situation de monopole public.

Un avis défavorable reviendrait à dire qu’il ne saurait y avoir de conflit d’intérêts avec une entreprise publique en situation de monopole. Ce serait, vous en conviendrez, assez baroque.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. J’entends bien l’argumentaire développé, mais je crois que la consécration du conflit d’intérêts « public-public » couvre ces cas, de sorte que votre amendement est satisfait. À défaut d’un retrait, je serai au regret d’émettre un avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Actuellement, la Commission de déontologie exerce deux types de contrôles. D’abord un contrôle de déontologie, pour s’assurer que l’activité envisagée par l’agent ne le conduira pas à méconnaître ses obligations déontologiques de dignité, d’impartialité, d’intégrité et de laïcité. Puis un contrôle du point de vue pénal, qui vise à s’assurer que l’agent ne se retrouvera pas dans une situation de prise illégale d’intérêt.

La prise illégale d’intérêt ne peut être caractérisée que dans une entreprise privée, étant assimilée à celle-ci toute entreprise publique opérant dans un secteur concurrentiel conformément aux règles de droit privé. Pour les départs vers le secteur privé, la Commission est compétente pour tout départ dans une entreprise privée ou organisme de droit privé ; elle est également compétente pour se prononcer sur le départ dans les entreprises publiques chargées d’un monopole public.

Cependant, lorsque l’entreprise ou l’organisme n’est pas dans un secteur concurrentiel, nous considérons que la question de la prise illégale d’intérêt est inopérante. En ce cas, la Commission de déontologie reste compétente pour le contrôle déontologique, mais non pour le contrôle pénal. Ainsi, l’amendement que vous présentez est satisfait, dans la mesure où, dans le cas d’un départ vers une entreprise publique en monopole public, la Commission de déontologie est compétente pour le contrôle de déontologie, mais non pour le contrôle pénal, qui n’a pas de base établie.

C’est la raison pour laquelle je formule une demande de retrait.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL391 et CL392 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CL387 de M. Philippe Vigier. 

M. Paul Molac. Cet amendement vise à lutter contre le pantouflage, qui nuit au service public. Le départ des fonctionnaires vers le privé ne doit être autorisé qu’après dix années obligatoirement effectuées au sein de la fonction publique, sans possibilité de compensation financière pour ne pas effectuer ce nombre d’années.

Je propose ainsi d’étendre une obligation qui existe déjà pour certaines parties de la fonction publique.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cela irait contre le développement de la mobilité que nous souhaitons encourager par ce texte. La durée prévue par les textes actuels est suffisante. Avis défavorable.

M. Fabien Matras. Je pense que nous pourrons trouver un compromis sur cette question de la « pantoufle », au moment de la discussion dans l’hémicycle, sans aller jusqu’à interdire le départ des fonctionnaires.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL388 de M. Paul Molac. 

M. Paul Molac. L’objet de l’article 16 du projet de loi est de simplifier le contrôle porté par la Commission de déontologie de la fonction publique. Il prévoit cependant que l’autorité hiérarchique saisie de la demande d’un fonctionnaire qui souhaite cesser ses fonctions soumette celle-ci à l’avis préalable de la Commission de déontologie lorsque le fonctionnaire occupe un emploi dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifient.

Certains fonctionnaires sont en effet soumis à une obligation de déclaration d’intérêts. Cette obligation est justifiée en raison du niveau hiérarchique ou de la nature des fonctions qu’ils occupent. Il est donc logique que ces mêmes fonctionnaires voient leur situation étudier de manière plus formelle par la Commission de déontologie lorsqu’ils cessent définitivement ou temporairement leurs fonctions.

Le présent amendement vise à le préciser.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Ces fonctionnaires seront effectivement dans le champ du décret prévu par le présent article. Je ne crois donc pas que votre précision soit vraiment utile. Demande de retrait.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL414 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Il s’agit de porter à six ans le champ temporel d’application du contrôle opéré par la Commission de déontologie de la fonction publique ou par le déontologue référent sur les nominations à un emploi de directeur d’administration centrale ou de dirigeant d’un établissement public de l’État dont la nomination relève d’un décret en conseil des ministres ou sur les nominations à un emploi dont le niveau hiérarchique ou la nature des fonctions le justifient.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Il est toujours envisageable d’allonger à quatre, à cinq ou à dix ans le délai de contrôle, mais je ne suis pas sûre que cela soit vraiment pertinent. Il faut fixer une limite. Une durée trop longue n’est pas de nature à favoriser la mobilité entre fonction publique et secteur privé.

M. Paul Molac. Je maintiens mon amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL393, CL394 et CL395 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CL759 de Mme Laurence Vichnievsky, qui fait l’objet du sous-amendement CL899 de la rapporteure.

Mme Laurence Vichnievsky. Mon amendement vise à obliger l’administration à se conformer à tous les avis de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, dès lorsqu’ils concernent les situations individuelles prévues au II de l’article 25 octies, au lieu du seul cas mentionné au 4° du II.

La loi en vigueur, non modifiée sur ce point, limite en effet cette obligation aux seuls avis rendus dans les cas de création ou reprise d’entreprise, ou de cessation temporaire ou définitive des fonctions afin d’exercer une activité privée lucrative.

Dans un souci de cohérence, je prévoyais que l’obligation de recueil des observations de l’agent concerné avant publicité de l’avis soit étendu à l’ensemble des cas individuels mentionnés ci-dessus, c’est-à-dire ceux pour lesquels un avis conforme est requis.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je trouve votre amendement très intéressant, mais il inclut le 2° du dispositif consistant à formuler des recommandations lorsque l’administration est saisie pour l’application de cet article de situations individuelles autres que celles mentionnées. Il me semble qu’il vaut mieux s’en tenir aux 3°, 4° et 5°. Sous réserve de l’acceptation de mon sous-amendement, j’émettrai un avis favorable à l’adoption de votre amendement.

Mme Laurence Vichnievsky. J’en suis d’accord.

La Commission adopte le sous-amendement.

Puis elle adopte l’amendement ainsi sous-amendé.

La Commission examine en discussion commune les amendements CL82 de M. Patrick Hetzel et CL483 de Mme Cécile Untermaier. 

M. Raphaël Schellenberger. Nous avons déjà eu d’importants échanges à propos des points dont traite l’amendement CL82 – à la fois des précisions de M. le secrétaire d’État et des discussions avec notre collègue Marleix. Il est donc défendu.

Mme Cécile Untermaier. Il s’agit d’obliger la Commission à publier ses avis– anonymisés.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Par l’amendement CL897, je vous proposerai tout à l’heure, chers collègues, de prévoir que la Commission publie les avis rendus si le poste ayant fait l’objet du contrôle de compatibilité est effectivement pourvu. Je vous invite donc à retirer ces amendements ; à défaut, j’y serai défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. L’amendement CL897 permettra effectivement la publicité de l’avis lorsque la demande d’avis a été suivie d’une nomination. Je demande donc le retrait des amendements CL82 et CL483.

L’amendement CL483 est retiré.

La Commission rejette l’amendement CL82.

La Commission en vient à l’amendement CL872 de Mme Cécile Untermaier.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je prie Mme Untermaier de retirer cet amendement, au profit de mon amendement CL897.

L’amendement est retiré.

La Commission se saisit de l’amendement CL484 de Mme Cécile Untermaier.

Mme Cécile Untermaier. Il s’agit de rapprocher les pratiques de la Commission de déontologie de la fonction publique de celles du Conseil d’État, en rendant obligatoirement publics les avis rendus. Cela dit, comme c’est un amendement de repli par rapport au précédent, je le retire également.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CL897 de la rapporteure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cet amendement vise à rendre publics les avis rendus par la Haute Autorité au titre de ses fonctions de contrôle déontologique des agents publics, à condition que les agents ont effectivement pris le poste ayant fait l’objet du des contrôle de compatibilité. Il s’agit là d’une recommandation de longue date, qui doit permettre de diffuser la doctrine en la matière. Il complète à cette fin l’article 25 octies qui ne prévoit pour l’instant que la simple possibilité d’une publication en cas d’incompatibilité ou de compatibilité avec réserve. Cette proposition fait directement écho aux travaux de mon collègue Fabien Matras.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Le Gouvernement est favorable à cet amendement.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL85 de M. Patrick Hetzel.

M. Raphaël Schellenberger. En réalité, le dispositif que nous sommes en train d’imaginer vise à contrôler la situation du fonctionnaire au départ de la fonction publique vers le privé. On la recontrôle éventuellement à son retour dans la fonction publique, mais rien ne nous garantit que pendant qu’il exerce son activité dans le privé il ne se met pas en situation de conflit d’intérêts ni ne se comporte de manière déontologiquement discutable. Par cet amendement, nous proposons qu’un fonctionnaire qui « pantoufle » prenne rendez-vous tous les ans avec la Haute Autorité. Il s’agit de s’assurer que tout va bien.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis d’accord sur le principe, mais je vous invite à retirer cet amendement au profit de l’amendement CL36.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. L’amendement CL36 est un amendement de M. Marleix.

M. Raphaël Schellenberger. Si vous m’assurez, madame la rapporteure, que vous êtes favorable à l’amendement de mon collègue, je retire l’amendement CL85.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. On n’est jamais sûr de rien, cher collègue. C’est tout de même un sujet délicat… (Sourires.)

M. Raphaël Schellenberger. Très bien, je maintiens l’amendement CL85 !

La Commission rejette l’amendement.

Elle se saisit ensuite de l’amendement CL36 de M. Olivier Marleix, qui fait l’objet du sous-amendement CL900 de la rapporteure.

M. Olivier Marleix. L’amendement CL36 est issu des travaux menés dans le cadre de la mission que Fabien Matras et moi avons conduite. Il s’agit de faire en sorte que l’agent en disponibilité atteste une fois par an qu’il respecte bien les réserves exprimées par la Haute Autorité. Cela leur fera au moins une « piqûre de rappel ».

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Si cet amendement devait être adopté, il faudrait que le mot « commission » soit remplacé par les mots « Haute Autorité » pour tenir compte du changement de dénomination que nous avons décidé. C’est le sens du sous-amendement de coordination CL900.

M. Fabien Matras. Cher Olivier Marleix, peut-être pourrions-nous travailler d’ici à la séance à une solution plus large, qui tienne compte d’autres aménagements soumis à la discussion.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. J’approuve les propos de M. Matras. Entre l’amendement CL897, que vous venez, mesdames et messieurs les députés, d’adopter, et les amendements CL708 et CL709 de M. Matras, dont je pense que vous les adopterez aussi, c’est un nouveau cadre que vous définissez. Les dispositions tendant à édicter un régime de sanction et de contrôle mériteraient donc un travail plus approfondi et une coordination, en vue d’une solution plus large. Je vous propose donc, monsieur Marleix, de retirer votre amendement CL36.

M. Olivier Marleix. J’aurais préféré que l’on adopte l’amendement CL36, mais je veux bien, à titre exceptionnel, ce soir, être constructif. (Sourires.)

L’amendement est retiré.

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL397 et CL398 de la rapporteure.

Puis elle en vient à l’amendement CL415 de M. Paul Molac. 

M. Paul Molac. Je considère que l’exigence de dignité et d’impartialité, d’intégrité et de probité édictée à l’article 25 de la loi du 13 juillet 1983 implique que l’agent contractuel qui ne respecte pas l’avis rendu par la Commission de déontologie perde pour dix ans, et non seulement pour trois ans comme c’est le cas aujourd’hui, toute possibilité d’être recruté.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Nous pouvons en discuter, mais si cette durée de trois ans n’a pas été remise en cause par la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, c’est parce qu’elle correspond à un bon équilibre.

Je suis donc plutôt défavorable à l’amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL399 de la rapporteure.

Puis elle se saisit de l’amendement CL37 de M. Olivier Marleix. 

M. Olivier Marleix. Je propose d’édicter une sanction dont seraient passibles les fonctionnaires qui ne déféreraient pas aux injonctions de la Commission de déontologie ou de ne pas lui communiquer les informations et pièces utiles à l’exercice de sa mission.

Si l’on ne respecte pas l’avis de la Commission de déontologie, on risque de commettre une faute pénale : le délit de prise illégale d’intérêt. Cependant, si on continue à entrer allègrement en contact avec ses anciens collègues, ce n’est pas sanctionné, car ce n’est pas une prise illégale d’intérêts. Il s’agit donc de garantir l’effectivité des injonctions de la HATVP.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Vous proposez d’étendre au contrôle de la compatibilité des fonctions exercées par la Commission de déontologie les peines prévues à l’article 25 sexies de la loi du 13 juillet 1983 lorsqu’un fonctionnaire ne répond pas aux injonctions de la HATVP en matière de déclaration de patrimoine. C’est une proposition intéressante mais je crains que cela ne soit plus compatible, compte tenu de la fusion que nous avons décidée, avec les peines prévues par la loi du 11 octobre 2013. Je vous propose de retirer cet amendement et de réexaminer la question en vue de la séance.

M. Fabien Matras. Ce point est fondamental : si le fait de ne pas respecter les règles édictées n’est pas sanctionné, cela créera rapidement des difficultés. Cependant, dans le cadre de cette refonte un peu plus globale du système de déontologie à laquelle nous procédons, quelques jours de réflexion peuvent être nécessaires. Par ailleurs, vous proposez que la sanction encourue soit d’un an d’emprisonnement et 15 000 euros d’amende. Cela peut aussi mériter une discussion, que l’on veuille s’aligner sur les sanctions prévues en cas de manquement aux obligations de déclaration auprès de la HATVP – trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende – ou conserver un régime dérogatoire pour les agents de la fonction publique. Dans cette dernière hypothèse, je m’interroge : si les deux autorités fusionnent, peut-on vraiment prévoir deux sanctions différentes selon que la personne concernée appartient à une catégorie ou à l’autre. Des sanctions pénales me paraissent en tout cas indispensables.

M. Olivier Marleix. Je le retire, dès lors qu’il s’agit de trouver une rédaction pertinente.

En matière de déontologie, on a un peu trop tendance à inscrire dans la loi des obligations sans jamais les assortir de sanctions. Ainsi, les collectivités locales de plus de 10 000 habitants ont l’obligation de mettre en place une procédure de recueil des signalements effectués par des lanceurs d’alertes, mais, en l’absence de sanctions, ce ne sont que 5 % des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et 10 % des communes qui remplissent cette obligation…

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL400 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement CL485 de Mme Cécile Untermaier. 

Mme Cécile Untermaier. Aux termes du projet de loi, les prérogatives des référents déontologues seraient renforcées puisqu’ils auraient à prendre des décisions importantes pour un certain nombre de fonctionnaires. Il nous paraît donc pertinent de donner une existence normée à cette fonction. Nous proposons qu’elle soit inscrite dans les différents répertoires des métiers en vigueur dans la fonction publique. Cela permettra notamment des formations adéquates.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Nous sommes d’accord pour encadrer et mieux accompagner cette fonction nouvelle de référent déontologue, mais il ne s’agit pas forcément de fonctionnaires. Il peut s’agir de magistrats, de retraités, d’avocats, etc. Par ailleurs, la question relève du pouvoir règlementaire.

M. Ugo Bernalicis. Un premier pas serait déjà cette inscription des répertoires des métiers. Il faudrait un cadre qui permette à ces référents déontologues d’exercer leur fonction. Globalement, que prévoyez-vous ? Il faudrait déjà veiller à ce que les référents déontologues eux-mêmes remplissent leur rôle dans des conditions déontologiquement acceptables, en étant relativement indépendants de leur propre hiérarchie. Instaurez-vous cette fonction simplement pour nous faire plaisir et puis « on verra bien » ?

Mme Cécile Untermaier. C’est un vrai sujet. Le projet de loi donne vraiment une existence aux référents déontologues, qui seront les acteurs de la diffusion d’une culture déontologique. Or nous ne savons même pas qui ils sont. L’inscription dans les différents répertoires ne vise évidemment pas à en faire des fonctionnaires – nous savons bien que des magistrats, des retraités, toutes sortes de gens sont actuellement référents déontologues. Il s’agit de normer la mission qui leur sera confiée Cette proposition n’est pas seulement la mienne. La HATVP elle-même y souscrit.

M. Fabien Matras. Mme Untermaier nous demande ce que nous allons faire pour encadrer les référents déontologues. Pour ma part, je pense que la question n’est pas de les encadrer mais de les accompagner davantage. Cela peut passer par des formations, qui n’existent pas aujourd’hui, par une mise en réseau, qui n’existe pas aujourd’hui, par la possibilité pour eux d’avoir des contacts plus fréquents avec la Commission de déontologie, ce qui n’existe pas forcément.

Cela étant, le référent déontologue n’est pas là pour interdire ou autoriser un agent à exercer un emploi dans le privé, à partir, à créer une activité. C’est là le rôle du chef de service, qui doit prendre ses responsabilités. S’il ne le fait pas et qu’est commis un délit d’initié ou une prise illégale d’intérêt, le chef de service sera responsable d’avoir laissé faire.

Le déontologue intervient pour sa part en tant que conseil, en tant qu’expert qualifié ; c’est ainsi que j’envisage les choses. Ne pensons pas que la déontologie vise à interdire ou autoriser, elle vise à protéger les agents publics et à leur éviter de se placer dans une situation qui pourrait les exposer à des poursuites pénales. Il n’est pas forcément nécessaire de fixer un cadre très strict, il s’agit d’accompagner.

J’aurai ainsi également répondu à M. Bernalicis, qui avait posé deux fois la question.

M. Ugo Bernalicis. J’ignore si la comparaison est appropriée mais prenons l’exemple des départements de la conformité ou du contrôle prudentiel des banques. Pour que les opérations faites en interne soient l’objet d’un contrôle interne, deux chaînes hiérarchiques distinctes sont mises en place. Il ne s’agit pas de bloquer les opérations, il s’agit de donner un avis au supérieur hiérarchique, qui prendra sa décision. Cette organisation, cette architecture, avec une séparation, permet à ceux qui rendent des décisions de conformité ou de non-conformité de le faire avec la plus grande liberté d’analyse et d’appréciation. Ainsi, ils ne sont pas contraints par un schéma hiérarchique à remettre systématiquement des avis conformes ou non-conformes.

Comment donc entendez-vous donner un minimum d’indépendance aux référents déontologues ? L’accompagnement et la formation, c’est mieux que rien, mais cela me semble quand même un peu léger.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Les missions et le cadre dans lequel s’inscrivent ces référents déontologues sont fixés par le décret du 10 avril 2017, dont l’article 2 précise à la fois qui peuvent être ces référents et les modalités de l’exercice de leur mission.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Effectivement, ce décret fixe déjà un cadre. C’est évidemment avec la volonté d’en respecter la lettre et l’esprit que l’ensemble des ministères ont déployé les référents déontologues.

Quant à la manière dont on voit leur rôle dans les administrations, les collectivités, les établissements publics hospitaliers, je souscris à 100 % aux propos tenus par M. Matras. Leur rôle, notamment du point de vue de la culture déontologique, de la protection et du conseil, fait que ce n’est pas sur eux que pèsera la responsabilité d’un choix ou d’une nomination. Celle-ci incombe toujours au supérieur hiérarchique, en application des dispositions en vigueur et de celles que nous renforçons. Le référent déontologue ne remplit qu’une mission de conseil et d’accompagnement, même si celle-ci est importante par ailleurs.

Mme Cécile Untermaier. Si l’on parle d’accompagner les déontologues, il faut quand même savoir de quoi on parle, de qui on parle, de quelle mission on parle.

Par ailleurs, d’un point de vue réglementaire, dans la fonction publique territoriale, les référents déontologues sont inscrits dans un répertoire des métiers. Il faut que ce soit le cas pour les trois versants de la fonction publique ou pour aucun. Une mesure réglementaire s’impose pour harmoniser cela.

La Commission rejette l’amendement.

Elle se saisit ensuite de l’amendement CL83 de M. Patrick Hetzel.

M. Raphaël Schellenberger. Par cet excellent amendement, mon collègue Hetzel propose de soumettre les potentiels secrétaires généraux ou délégués généraux des autorités administratives indépendantes et des autorités publiques indépendantes aux contrôles que nous venons de mettre en place pour un certain nombre de hauts fonctionnaires. Cela me semble logique et cohérent vu les pouvoirs croissants qui sont conférés à ces structures administratives.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Il me semble que ces fonctions seront inscrites sur la liste édictée par décret en Conseil d’État, car cela relève du pouvoir réglementaire. Je demande donc le retrait de cet amendement ; à défaut, j’y serai défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL486 de Mme Cécile Untermaier.

Mme Cécile Untermaier. Cet amendement m’est inspiré par l’excellent travail mené par Fabien Matras et Olivier Marleix et par certains propos tenus dans le cadre de la mission qui leur avait été confiée, selon lesquels l’ampleur du phénomène d’aller-retour des fonctionnaires vers le privé était mal connue. La Commission de déontologie de la fonction publique pourrait élaborer chaque année un suivi statistique des allers-retours des fonctionnaires entre l’administration et le secteur privé. Les chiffres seraient rendus publics et notre information s’en trouverait améliorée.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis entièrement d’accord pour que le public dispose d’informations plus précises sur ce point. Le rapport de la future Haute Autorité devra comprendre ces éléments. Nous compléterons les missions de cette future instance en séance. Dans cette attente, je vous propose de retirer votre amendement. Vous pourrez le représenter, nous pourrons aussi examiner cela lors de notre réunion de travail.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Je m’associe à la demande de retrait, pour les raisons données par Mme la rapporteure.

J’apporterai une nuance. Le suivi des retours n’étant pas systématique, les statistiques sont pauvres et il serait utile d’aller vers plus d’informations. Cependant, d’un point de vue méthodologique, il faut prendre le temps de la construction des indicateurs et des circuits de remontée des informations ; nous n’en disposons pas forcément aujourd’hui.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’article 16 modifié.

Après l’article 16

La Commission examine en discussion commune les amendements CL207 et CL208 de M. Jean-Louis Masson et l’amendement CL488 de Mme Cécile Untermaier. 

M. Raphaël Schellenberger. Par l’amendement CL207, mon collègue Jean-Louis Masson veut assurer la publicité des décisions relatives à la déontologie des fonctionnaires.

Quant à l’amendement CL208, il est défendu.

Mme Cécile Untermaier. Cet amendement concerne la Haute autorité de la transparence et de la vie publique ; il vise à rendre publics les avis d’incompatibilité ou avis de compatibilité assortis de réserves prononcées par cette dernière.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’adoption de l’amendement CL899 satisfait ces amendements. J’en demande le retrait.

Mme Cécile Untermaier. Je ne suis pas sûre que l’amendement de la rapporteure satisfasse ces amendements.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Nous avons adopté un amendement qui rend obligatoire la publicité des avis concernant les postes qui ont été effectivement pourvus. Il me semble que c’est un bon compromis.

Les amendements sont retirés.

La Commission en vient à l’amendement CL813 de Mme Laurianne Rossi. 

Mme Laurianne Rossi. Cet amendement vise à renforcer à la fois le statut et les attributions des référents déontologues. Il répond en partie aux inquiétudes exprimées à l’instant par Cécile Untermaier et Ugo Bernalicis sur leur indépendance.

Je propose ainsi, d’une part, de reconnaître aux référents déontologues la possibilité de solliciter l’avis de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique sur une question d’ordre déontologique, cet avis demeurant bien entendu confidentiel. Par ailleurs, je propose de les faire bénéficier d’une décharge partielle de service, afin de leur permettre d’exercer en toute autonomie et indépendance leur mission de conseil, à l’instar des représentants syndicaux.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je vous propose de renvoyer cette question des dispositifs d’accompagnement des référents déontologues au groupe de travail et à la discussion dans l’hémicycle.

M. Ugo Bernalicis. La proposition de Mme Rossi accroît les capacités du référent déontologue à exercer sa mission, en lui accordant notamment une décharge partielle de temps de travail.

Pour ce qui concerne le décret de 2017, il est assez flou et il n’interdit pas que le référent déontologue fasse partie de la même chaîne hiérarchique que ceux avec lesquels il va devoir rendre un avis. Il est même précisé qu’un chef de service peut nommer déontologue une personne de son service placée sous son autorité.

Le décret de 2017 offre la possibilité de prendre comme référent déontologue quelqu’un d’extérieur à l’administration concernée, mais il n’en fait pas une doctrine. C’est ensuite une question de choix : soit on préfère avoir des avis extérieurs indépendants, fiables et offrant toutes les garanties d’impartialité ; soit on assume que ces avis puissent être délivrés en interne, avec les problématiques que j’ai soulevées tout à l’heure.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. La première partie de l’amendement me semble partiellement satisfaite par l’amendement CL708 de M. Matras que nous avons adopté.

En ce qui concerne la décharge, dans la mesure où peuvent être nommés référents déontologues des agents exerçant une activité à titre accessoire, des retraités ou des personnels extérieurs à l’administration, votre amendement n’est pas opérant pour l’ensemble des déontologues, en tout cas dans sa rédaction actuelle.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL489 de Mme Cécile Untermaier.

Mme Cécile Untermaier. Cet amendement vise à renforcer la diffusion de la culture déontologie en demandant à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique de publier annuellement une synthèse de ses avis et conseils donnés en matière déontologique.

Dans une conférence donnée à l’ENA en mars 2013, M. Jean-Marc Sauvé, alors vice-président du Conseil d’État, déclarait : « La culture déontologique n’est pas innée. Elle ne peut reposer sur la seule conscience individuelle des agents publics. » Il semble donc essentiel que les organes en charge du contrôle déontologique comme la HATVP participent à diffuser cette culture en permettant à l’administration et aux responsables publics d’avoir accès à leurs conseils.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Nous sommes d’accord sur le principe, mais je crains que, tel qu’il est rédigé, votre amendement ne s’insère mal dans la loi de 2013. Nous souhaitons néanmoins retravailler cette disposition d’ici la séance, car je partage votre souhait de voir mieux diffusée la doctrine de la Haute Autorité, et donc d’enrichir le contenu de son rapport d’activité annuel. Dans l’attente, c’est une demande de retrait.

Mme Cécile Untermaier. Nous souhaitons précisément ajouter à l’article 20 de la loi du 11 octobre 2013, qui énumère les missions de la HATVP, la diffusion de la culture déontologique. Cela me paraît d’autant plus important que nous souhaitons que la HATVP joue en la matière un véritable rôle de tête de réseau.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je ne suis pas à convaincre sur le fond : c’est une question de forme et de rédaction. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient aux amendements identiques CL66 de M. Éric Poulliat et CL487 de Mme Cécile Untermaier.

M. Éric Poulliat. Cet amendement prévoit que le bilan annuel des centres de gestion, prévu à l’article 23 de la loi du 26 janvier 1984, inclura désormais obligatoirement un point sur leur activité au titre de leur mission de référent déontologue auprès des administrations locales. Cette évolution permettra, d’une part, de mesurer l’activité des centres de gestion en matière de déontologie, et, d’autre part, de mieux diffuser la culture déontologique dans tous les territoires, en s’assurant de la cohérence globale des recommandations déontologiques d’un territoire à l’autre.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je partage l’objectif de ces amendements, qui présentent néanmoins un défaut de rédaction. Je pense que nous pourrons en rediscuter dans l’hémicycle.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Si je partage, comme la rapporteure, l’objectif de vos amendements, la manière dont ils sont formulés conduirait les centres de gestion à rendre un bilan sur les référents déontologues pour l’ensemble des collectivités du département ou de leur ressort territorial.

Je vous propose donc de les retirer pour les redéposer à l’article 23, qui concerne les compétences des centres de gestion. Cela permettra qu’ils s’appliquent aux collectivités qui sont affiliées aux centres de gestion et qui relèvent de leur compétence en matière de référents déontologues. Nous émettrons en séance un avis favorable.

Les amendements sont retirés.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL84 de M. Patrick Hetzel, CL709 de M. Fabien Matras et CL763 de Mme Laurence Vichnievsky.

M. Raphaël Schellenberger. Ayant compris que l’amendement CL709 va être adopté, je retire l’amendement CL84.

M. Fabien Matras. Je voudrais d’abord expliquer pourquoi nous proposons la mise en place de deux collèges. Cela part du constat que, globalement la HATVP est compétente pour les élus, et la Commission de déontologie pour les agents publics. Ensuite, leurs missions ne sont pas non plus les mêmes, puisque, comme le rappelait Olivier Marleix, la HATVP n’a pas pour fonction de contrôler la déontologie mais de rendre la vie publique plus transparente, la Commission de déontologie ayant, quant à elle, pour objet la déontologie et la prévention des conflits d’intérêts. Il nous a donc semblé que cela justifiait l’existence de deux collèges.

Par ailleurs, d’un point de vue déontologique, un agent public, qui n’est pas forcément un haut fonctionnaire mais qui, du fait des fonctions qu’il occupe, est fortement exposé à un risque de conflit d’intérêts, doit-il passer devant le même collège que le ministre de la fonction publique ou que les députés ?

Cela étant, je ne suis pas arc-bouté sur le fait qu’il y ait deux collèges, l’important étant que nous en discutions et que nous parvenions à une position commune dans l’hémicycle.

Mme Laurence Vichnievsky. Nous avons, pour ce qui nous concerne, écarté l’option d’un double collège, pour deux raisons que j’ai déjà évoquées. La première c’est qu’il s’agit d’une fusion a minima qui se limite en réalité à la personne du président, les deux structures étant juxtaposées au sein d’une entité unique. La seconde, c’est que la composition actuelle de la HATVP dont les membres sont élus par le Conseil d’État, la Cour de cassation et la Cour des comptes, et désignés par les présidents des deux assemblées, après avis conforme des commissions des lois, garantit l’indépendance et la neutralité de cette autorité administrative indépendante, ce qui n’est pas le cas de la CDFP, dont les membres sont nommés par décret pris sur le rapport du ministre chargé de la fonction publique.

J’ai cru comprendre que le ministre souhaitait que nous adoptions l’amendement de Fabien Matras, ce qui implique que je retire le mien. Ce n’est pas possible, car nous ne pouvons voter pour un amendement qui prévoit, dans son exposé des motifs, que la composition du collège pour la déontologie est renvoyée à un décret en Conseil d’État. S’il s’agit de retravailler cette proposition, les deux amendements doivent être retirés, sachant que la fusion est déjà actée par le vote de l’article 16.

 Mme Émilie Chalas, rapporteure. De nombreux points restent encore à débattre mais, au stade où nous en sommes, nous devons d’ores et déjà caler un certain nombre de choses pour ne pas partir dans le vague. Je donne donc un avis favorable à l’amendement CL709, tout en réitérant l’engagement de réunir un groupe de travail avant la séance pour réfléchir à la proposition d’un collège unique faite par Mme Vichnievsky, qui a retenu toute mon attention.

Il faudrait également aborder lors de cette réunion la question de la date de création de ce collège, sachant que les instances actuelles sont en cours de mandat, la question de la nomination du ou de la présidente, celle du renouvellement ou du non-renouvellement du mandat, et encore la question des sanctions, du contenu du rapport annuel, de la déclaration d’intérêts de patrimoine des contractuels et enfin de l’accompagnement des déontologues.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Comme je l’indiquais, je suis favorable à l’amendement CL709, qui pose les bases d’un compromis, en consacrant à nos yeux l’essentiel, à savoir l’accès de la Commission de déontologie au statut d’autorité administrative indépendante, puisqu’elle rejoint le giron de la HATVP.

Madame Vichnievsky, j’ai pris l’engagement d’inclure dans la loi, d’ici la séance, la composition et les modalités de désignation des membres du collège consacré à la déontologie, car cela ne doit plus dépendre d’un décret.

J’ai entendu les difficultés pouvant résulter de la fusion, notamment dans le cas de certains agents publics qui peuvent être exposés à des risques de conflit d’intérêts, sans relever de ce qu’on appelle parfois la haute fonction publique ou de certaines fonctions politiques, et pour qui se pose la question d’être soumis au même régime que les catégories relevant aujourd’hui de la compétence de la HATVP – je pense, par exemple à des agents de catégorie B, voire très rarement de catégorie C, qui se trouvent exposés à des risques de conflit d’intérêts en tant que chefs d’un service de marchés publics dans une collectivité de petite taille. Cela fait partie des difficultés que je soulignais dans mon propos liminaire sur l’article 16, et qui expliquent que je me sois d’abord engagé sur une obligation de moyens plutôt que sur une obligation de résultats.

Mme Marietta Karamanli. Malgré toutes ces explications, nous avons un problème de méthode. Compte tenu des discussions soulevées par les différents amendements, dont certains ont été retirés pour être éventuellement retravaillés d’ici la séance, l’horizon est assez flou, et il nous est difficile de travailler dans ces conditions. La rapporteure a énoncé un certain nombre de questions qu’elle souhaitait voir retravaillées, et le ministre appelle à soutenir l’amendement CL709 qui lui paraît une bonne base de travail ; nous aurions préféré que ce travail soit fait en amont. Il est compliqué en effet de retravailler pour la séance des amendements qui ont été retirés, sans savoir exactement sur quelle base se fonder. C’est une inquiétude que j’exprime, davantage qu’une critique.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Le dispositif de la majorité est rédigé et prêt. Ce dont nous discutons c’est d’une proposition, présentée aujourd’hui devant notre commission et émanant des rangs du MoDem, des Républicains et de votre propre groupe, d’installer un collège unique. Pour ma part, je ne fais qu’y faire écho. Je ne comprends donc pas vos critiques sur notre méthode, puisque nous vous entendons et que nous envisageons même une réunion de travail la semaine prochaine pour aller plus loin.

M. Raphaël Schellenberger. Nous sommes plutôt de bonne foi et avons tous envie d’avancer ensemble sur ce sujet où il n’y a plus matière à conflit.

Cependant, je rejoins Mme Karamanli, car la proposition que nous mettons sur la table ne sort pas d’un chapeau : cela fait deux ans que nous en parlons, et nous vous l’avions soumise pour la première fois lors de l’examen du premier texte de loi dont nous avons discuté, en juillet 2017. Ne réinventez donc pas l’histoire. Vous acceptez simplement de faire un pas vers une proposition que nous défendons depuis bientôt deux ans. Ce pas, vous le faites tardivement, ce qui rend compliqué techniquement d’aboutir dès ce soir à une rédaction correcte.

L’amendement CL84 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL709. L’article 16 bis est ainsi rédigé.

En conséquence, l’amendement CL763 tombe.

1.   Première réunion du vendredi 3 mai 2019 à 9 heures 30 (après l’article 16 à après l’article 22)

Lien vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.7574440_5ccbebdab2b3c.commission-des-lois--transformation-de-la-fonction-publique-suite-3-mai-2019

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, avant de reprendre nos travaux là où nous nous sommes arrêtés hier soir, je cède la parole à la rapporteure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. À la suite des discussions que nous avons eues hier sur les questions de déontologie, je voudrais signaler que notre groupe de travail se réunira mardi prochain à midi pour avancer sur des propositions autour desquelles nous pourrions éventuellement nous rejoindre.

Après l’article 16 (suite)

La Commission est saisie de l’amendement CL376 de M. Philippe Vigier.

M. Yannick Favennec Becot. Je propose de plafonner la rémunération des fonctionnaires et des agents contractuels, tous traitements, indemnités et suppléments confondus, à la hauteur de l’indemnité perçue par le Premier ministre. Les rémunérations particulièrement élevées de certains agents publics sont difficiles à justifier. Elles posent des problèmes d’équité et de cohérence avec celles des autres fonctionnaires.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Alors que nous souhaitons ouvrir la fonction publique aux meilleurs talents et faciliter les allers-retours avec le secteur privé, comment attirer ces talents si nous ne les rémunérons pas en fonction de leurs compétences et des exigences des postes concernés ? Chacun sait que l’indemnité versée au Premier ministre, qui ne constitue pas un salaire, n’est pas un référentiel pour le secteur privé – loin de là. Je propose de ne pas retenir un tel encadrement, et j’émets donc un avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CL692 de la présidente Yaël Braun-Pivet, CL753 de M. Sylvain Waserman, CL51 et CL22 de M. Olivier Marleix.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mon amendement vise à renforcer la transparence salariale dans la haute fonction publique en requérant du Gouvernement qu’il rende compte annuellement et publiquement des niveaux de rémunération pratiqués.

Le projet de loi comporte plusieurs dispositions relatives à la transparence et à l’équité du cadre de gestion des agents publics : c’est un axe fort de la réforme que vous proposez, monsieur le ministre. Lors de votre audition le 10 avril dernier, je vous ai interrogé, avec Olivier Marleix, sur l’opportunité de nouvelles mesures en faveur d’une plus grande transparence salariale dans la haute fonction publique. Vous avez répondu que vous étiez favorable à un renforcement de la transparence et je salue, une fois encore, l’engagement que vous avez pris.

L’amendement CL692, qui a le soutien de l’ensemble du groupe La République en Marche, est issu du travail collectif mené avec Fabien Matras, à la suite du rapport qu’il a rédigé avec Olivier Marleix. Nous pourrons ainsi répondre à un important enjeu démocratique : les contribuables doivent être informés des niveaux de la rémunération effectivement perçue par les agents publics. Une information sur les plus hauts niveaux de salaire, qui a déjà été demandée à plusieurs reprises, contribuera à une plus grande transparence de la vie publique et, par conséquent, à la confiance des citoyens dans leur administration. Enfin, cela permettra de mieux rendre compte des différences qui existent avec les salaires versés dans le secteur privé pour des fonctions comparables et de dissiper, sans doute, quelques fantasmes.

Les caractéristiques de cet amendement lui permettront d’être effectif et d’assurer la nécessaire protection des agents concernés. Le rapport que nous demandons concernera la totalité des éléments de la rémunération effectivement versée aux 1 % des agents le mieux rémunérés. La haute fonction publique reste aujourd’hui mal définie, mais cet échantillon de 1 % paraît représentatif. Tous les agents, titulaires et contractuels, seront concernés, dans chaque versant de la fonction publique. C’est essentiel pour avoir une analyse claire des niveaux de rémunération. Enfin, l’amendement vise à garantir le respect de la vie privée des agents. Il ne sera publié qu’un référentiel permettant d’avoir une information générale et anonymisée. On pourrait, peut-être, se montrer plus ambitieux encore, tout en gardant à l’esprit qu’une transparence absolue constitue une limite, mais je pense que cet amendement permettra de répondre aux questionnements légitimes de nos concitoyens.

M. Sylvain Waserman. Le groupe MODEM est tout à fait d’accord avec l’idée qu’il faut attirer les meilleurs talents dans la haute fonction publique, car nous avons besoin qu’elle soit performante, et avec l’exigence citoyenne de transparence. Nous nous sommes demandé en quoi elle doit consister. Avant de siéger ici, j’ai dirigé une entreprise de 300 personnes. Tous les ans, j’avais l’obligation, de par la loi, de communiquer mon propre salaire et celui des dix personnes les mieux payées, ainsi que la répartition entre les femmes et les hommes en leur sein. C’est une exigence saine qui existe dans le privé. Nous pensons que la moindre des choses est d’exiger aussi cette transparence quand il s’agit d’argent public. L’amendement CL753 vise donc à étendre à la fonction publique les obligations de transparence que nous avons adoptées pour l’ensemble des acteurs économiques.

M. Olivier Marleix. Je voudrais rectifier la rédaction de mon amendement CL51, qui est un peu moins ambitieux, dans son esprit, que celui de notre présidente. Il ne devrait concerner que les effectifs des agents publics de l’État, dans la mesure où il fait référence à un rapport communiqué au Parlement en annexe de la loi de finances. Cet amendement peut être complémentaire du CL692. Il n’y a donc pas de raison que l’un fasse tomber l’autre.

J’essaie de respecter la jurisprudence de la commission des Lois, qui n’aime pas les demandes de rapports, en me rattachant à celui relatif à l’état de la fonction publique qui est déjà remis au Parlement en annexe de la loi de finances. Ce rapport comportait jusqu’aux années 1990 un tableau présentant la répartition des emplois rémunérés « hors échelle lettre », c’est-à-dire les plus hautes rémunérations de l’État, selon les ministères et les catégories de lettres.

Ce tableau donnait une idée assez précise des effectifs concernés, dans le respect d’un certain anonymat. C’est important pour le pilotage de la dépense publique, car ces emplois représentent des enjeux financiers majeurs. La réflexion n’a peut-être pas été suffisamment poussée sur ce sujet dans le cadre de la réforme de l’État. Quand on demande au secrétaire général d’un ministère de faire des économies, il se trouve qu’il a plutôt tendance à penser aux emplois au bout de la chaîne plutôt qu’à ceux du directeur de son cabinet, du directeur adjoint et des chargés de mission. Comme ces emplois coûtent très cher, il serait utile pour le pilotage de la dépense publique d’avoir de nouveau un tel tableau en annexe au projet de loi de finances, comme ce fut le cas pendant de longues années.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Peut-on considérer que vous avez également défendu votre amendement CL22 ?

M. Olivier Marleix. Tout à fait, car c’est une autre version du même amendement. Pour ceux que cela intéresse, j’ai retrouvé la dernière publication de ce rapport, qui date de 1985. C’était assez précis et éclairant.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. C’est en effet une demande légitime de nos concitoyens : ils souhaitent y voir un peu plus clair sur cette question des rémunérations qui font l’objet de fantasmes totalement irrationnels. Il s’agirait surtout de publier des informations plutôt que de rédiger un rapport en tant que tel. Je trouve néanmoins que l’on pourrait affiner le dispositif, qui vise les 1 % des agents le mieux rémunérés dans la fonction publique. On pourrait établir une symétrie plus rigoureuse avec les données qui sont publiées sur les rémunérations les plus élevées dans le secteur privé et apporter un certain nombre de précisions selon les versants de la fonction publique. Il ne faudrait pas aboutir à des données très facilement individualisables dans les plus petites collectivités territoriales. J’émets un avis favorable à l’amendement CL692, étant entendu que nous pourrons apporter des précisions en séance, et un avis défavorable aux autres amendements en discussion commune.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Je demande le retrait des amendements CL753, CL51 rectifié et CL22 au profit de celui de la présidente de la commission des Lois. Le Gouvernement souhaite également mettre à profit la séance publique pour apporter plusieurs précisions relatives à la comparaison avec le secteur privé – les chiffres que j’ai évoqués hier devant votre Commission sont tirés d’une étude comparative de l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) dont on peut s’inspirer –, au niveau moyen des dix, quinze ou vingt plus hautes rémunérations dans chaque ministère, afin d’avoir une véritable analogie avec le privé, à la répartition entre les femmes et les hommes, ainsi qu’à l’ampleur et aux raisons de l’accès de certains agents à ce que M. Marleix appelle la rémunération « hors échelle lettre » – comme je l’ai indiqué, c’est souvent dû à un rehaussement des grilles indiciaires. Le Gouvernement est également ouvert – mais cela nécessite un travail de rédaction – à l’intégration dans ce rapport d’éléments d’analyse sur le versant hospitalier et le versant territorial, de manière à ce que la transparence des rémunérations publiques ne soit pas circonscrite à la seule fonction publique d’État.

M. Sylvain Waserman. Je retire volontiers mon amendement. L’idée d’un comparatif entre l’argent public et l’argent privé me tient à cœur et la répartition femmes-hommes me semble également indispensable en ce qui concerne ces indicateurs. Je voudrais vous remercier, car je pense que nous allons faire un pas majeur sur le plan de la transparence. Nous l’avons déjà fait dans le monde politique, et la haute fonction publique, à laquelle nous tenons, doit le faire également. Cela permettra, on l’a dit avant moi, de mettre fin à un certain nombre de fantasmes et au sensationnalisme que l’on trouve dans certains médias sur ce sujet.

M. Olivier Marleix. Je vais aussi retirer mes amendements, en demandant au ministre de s’engager à ce que celui de notre présidente soit complété, même s’il est déjà très bien rédigé, cela va de soi. (Sourires.) On peut apporter un certain nombre de précisions. Il ne faudrait pas se contenter d’une cote mal taillée, d’une analyse présentant seulement des moyennes. Nous voulons des éléments précis, notamment afin de mesurer l’impact budgétaire et sur la masse salariale de l’État et des collectivités locales.

M. Paul Molac. Je veux soutenir l’idée avancée par Olivier Marleix. Si l’on obtient un rapport fumeux, dépourvu d’éléments concrets, on va nous dire que l’on « noie le poisson » et que l’on n’est pas clair. Il y a des fantasmes. Dans ma circonscription, certains pensent que j’ai de quoi appointer un chauffeur qui m’amènerait à toutes les manifestations où je me rends, ce que le train de vie d’un député ne permet évidemment pas ! Un tableau, même s’il peut faire l’objet d’une interprétation, permettrait d’avoir des éléments factuels et clairs. Je trouve que cette idée n’est pas mauvaise. Même si un simple tableau a besoin d’explications et que l’on peut aussi fantasmer à son sujet, cela nous amènerait quand même à davantage de transparence. Si cela doit susciter un débat public, qu’il ait lieu et que les gens s’expriment. Autrement, on voit tout et, parfois, n’importe quoi.

M. Guillaume Gouffier-Cha. Le groupe La République en Marche est attaché à améliorer la transparence et à réaliser les avancées les plus larges et les plus visibles possibles pour nos concitoyennes et nos concitoyens. Nous rejoignons donc la position de la rapporteure et du ministre : il faut poursuivre les échanges sur ce sujet d’ici à la séance publique, notamment en ce qui concerne la répartition hommes-femmes et la comparaison entre les trois versants de la fonction publique à propos des plus hautes rémunérations.

Mme Cécile Untermaier. Nous soutenons cette démarche de transparence qui vise à mieux piloter la dépense publique. Je trouve que ces différents amendements sont en réalité très complémentaires. Celui de M. Waserman a notamment le mérite de prévoir un dispositif équivalent à celui que les entreprises doivent appliquer, et il est rédigé d’une façon extrêmement concrète : il fait référence aux dix personnes les mieux rémunérées dans chaque ministère et précise bien qu’il s’agit des rémunérations totales, y compris les avantages de toute nature. Si nous ne sommes pas exhaustifs, on nous reprochera un défaut de transparence. Je plaide donc pour que l’on prenne en considération cet amendement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Je voudrais dire à Mme Untermaier que c’est ce que nous allons faire, grâce au travail qui doit avoir lieu d’ici à la séance. M. Marleix a raison de préciser que le Gouvernement et la rapporteure ont vocation à compléter la rédaction de l’amendement CL692, sans prétendre l’améliorer, car il est déjà parfait (Sourires). Le tableau évoqué par M. Marleix était une annexe qui n’est plus publiée depuis que la loi organique relative aux lois de finance (LOLF) est appliquée. Jusque-là, cette publication concernait l’ensemble des emplois par corps, par cadres d’emploi, dans la fonction publique territoriale, et par grades. La LOLF a supprimé ce dispositif. La présentation d’un rapport annuel du Gouvernement, comme le demande l’amendement CL692, trouve plus facilement grâce à nos yeux qu’un retour à des procédures qui n’ont plus cours.

Les amendements CL753, CL51 et CL22 sont retirés.

La Commission adopte l’amendement CL692. L’article 16 ter est ainsi rédigé.

Elle examine ensuite les amendements CL752 et CL754 de M. Sylvain Waserman.

M. Sylvain Waserman. Je vais présenter ensemble les amendements CL752 et CL754 si vous le permettez. Outre les avancées majeures que nous venons d’imaginer pour la fonction publique, il paraît indispensable que les agences de l’État, les agences publiques, les autorités administratives indépendantes (AAI) et les autorités publiques indépendantes (API) répondent aussi à une exigence de transparence. Je ne sais pas si cela peut entrer dans le cadre ouvert avec l’adoption de l’amendement CL692, mais nous militons pour que toutes ces agences, au nombre de quelque deux cents, publient la rémunération totale et les avantages de toute nature de leurs présidents, de leurs directeurs généraux ou secrétaires généraux, ainsi que le montant global des rémunérations et des avantages de toute nature versé aux dix personnes les mieux rémunérées, en précisant le nombre de femmes et d’hommes parmi ces dix plus hautes rémunérations. Il ne s’agit pas d’être créatif outre mesure mais d’appliquer ce qui existe aujourd’hui dans toute entreprise.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. En ce qui concerne l’amendement CL752, je pense que les travaux prévus autour de l’amendement CL692 répondront à votre demande. S’agissant de l’amendement CL754, je précise que les rémunérations des présidents des AAI sont déjà publiques. Je demande donc le retrait de ces amendements.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Je demande le retrait de ces amendements pour des raisons identiques. Les fonctionnaires de l’État travaillant dans ces agences entreront dans le champ de l’amendement CL692. Les présidents des AAI, pour leur part, ne sont pas des fonctionnaires : ils perçoivent des indemnités, qui sont déjà publiques via les « jaunes budgétaires ». Il serait de bon ton de ne pas mélanger dans le même rapport des éléments de rémunération liés à l’occupation d’un emploi public et à celle d’une fonction publique donnant lieu à une indemnité, d’autant que la transparence est déjà assurée. Le Gouvernement donnera par ailleurs un avis favorable à d’autres amendements qui visent à encadrer la rémunération des présidents des AAI : nous répondrons à cette préoccupation par d’autres dispositions.

M. Sylvain Waserman. Dans l’attente des travaux complémentaires qui doivent avoir lieu en vue de la séance publique, je vais retirer ces deux amendements, en me réservant la liberté de les redéposer si le résultat des échanges ne permet pas d’aboutir.

Les amendements sont retirés.

La Commission examine les amendements CL80 de M. Raphaël Schellenberger et CL697 de M. Guillaume Gouffier-Cha.

M. Raphaël Schellenberger. Cet amendement prévoit que l’indemnité versée au président d’une AAI ou d’une API n’est pas cumulable avec une pension ou une retraite de la fonction publique. Il me paraît important d’adopter ce principe. Même si j’entends bien que l’on ne doit pas confondre indemnité et traitement, je crois qu’il faut s’interroger, en termes de déontologie, sur le cumul de la rémunération versée aux présidents de ces structures avec une retraite de la fonction publique – c’est quand même assez particulier.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis d’accord sur le principe, mais je vous demande de retirer votre amendement au profit de l’amendement CL697 de M. Gouffier-Cha qui répond au même objectif tout en me paraissant plus précis. Sinon, j’émettrai un avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Même avis. Sur la question de l’encadrement des rémunérations, je précise que le Gouvernement apportera son soutien à l’amendement CL697. D’ici à la séance, nous souhaitons avancer vers un dispositif d’écrêtement pour les présidents d’AAI qui bénéficieraient par ailleurs du versement d’une pension de retraite.

J’appelle l’attention des membres de la Commission sur une particularité. Certains souhaiteraient que l’on ne puisse pas – et l’amendement de M. Schellenberger aurait cet effet – cumuler la perception d’une indemnité liée à la présidence d’une AAI et celle d’une pension. Le Gouvernement est plus favorable à un système d’écrêtement. Si l’on allait vers une interdiction stricte du cumul d’une pension de retraite et d’une indemnité, je pense que cela poserait d’autres questions pour toutes celles et tous ceux qui bénéficient aujourd’hui d’un régime d’indemnité, en particulier les élus. En l’état actuel du droit, ils peuvent, quel que soit le montant de leurs indemnités, et je sais qu’elles ne sont pas souvent comparables avec celles dont nous parlons, les cumuler avec leur droit à pension. Nous préférons un dispositif d’écrêtement sur lequel nous vous proposerons de travailler.

M. Olivier Marleix. La rapporteure a estimé que l’amendement déposé par M. Gouffier-Cha était plus précis que celui de M. Schellenberger. Or ce n’est clairement pas le cas. L’amendement CL80, comme le ministre vient de le dire, interdit le cumul alors que l’amendement CL697 prévoit que la fixation ou la revalorisation de l’indemnité de fonction « tient compte » de la pension de retraite. Vous inventez une sorte de maximum vieillesse – un peu comme il existe un minimum vieillesse complétant les petites retraites – pour des retraités dont l’indemnité serait alors différenciée. Je n’y suis pas opposé, à titre personnel, mais le dispositif proposé par M. Schellenberger est peut-être plus radical et surtout je ne comprends pas bien ce que veut dire « tient compte » : cela manque un peu de précision, et les explications du ministre ne nous ont pas vraiment éclairés sur ce point. Dans quelle mesure tiendra-t-on compte de la pension de retraite ? Y aura-t-il une récupération sur succession ? (Sourires).

M. Guillaume Gouffier-Cha. Nous avons en commun de nous interroger sur cette question : comment prendre en compte le cumul entre la rémunération versée au titre de la présidence d’une AAI et la perception d’une pension de retraite, tout en gardant en tête ce que vient de dire le ministre à propos de l’impact possible sur d’autres publics, tout particulièrement les élus ? L’amendement CL697 permettrait de mettre en place un système d’écrêtement plutôt que de non-cumul, ce qui nous paraît plus efficace et plus pertinent.

M. Paul Molac. J’ai bien compris qu’il est question des fonctionnaires. Si l’on adoptait le même dispositif pour les élus, je ne suis pas sûr que l’on en trouverait très facilement. Certains d’entre eux sont en effet à la retraite, et touchent souvent des pensions peu élevées. Si on les obligeait à choisir entre leur pension et leur indemnité de maire, qui peut représenter moins de 1 000 euros par mois, ce ne serait pas tenable. Il n’y aurait plus de maires.

Mme Cécile Untermaier. Ces amendements vont tout à fait dans le bon sens, et je remercie leurs auteurs. Je trouve que l’on devrait inscrire la notion d’écrêtement dans le texte, car elle est importante. Cela pourrait concerner les pensions de retraite, mais aussi d’autres indemnités, versées par ailleurs. Ne nous focalisons pas uniquement sur les pensions. Raisonnons plutôt sur un tout, les indemnités et les pensions, en utilisant la notion d’écrêtement, que l’on connaît bien et que l’on manie déjà pour les députés – il faut aussi la revisiter.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. C’est pour les raisons évoquées par M. Molac que le Gouvernement n’est pas favorable à une interdiction stricte du cumul, mais plutôt à un écrêtement permettant d’écarter le risque qui a été évoqué pour celles et ceux qui perçoivent soit des petites pensions soit des petites indemnités. L’amendement de M. Gouffier-Cha prévoit qu’il faut tenir compte de la pension de retraite, ce qui renvoie à un décret : c’est l’idée de l’écrêtement. Si l’on peut introduire clairement, d’ici à la séance, cette notion dans l’article du projet de loi qui va prévoir le décret, nous y serons tout à fait favorables. Cela permettra d’atteindre la clarté attendue par les uns et par les autres.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Afin d’éclairer le débat et d’éviter que l’on mélange les questions, je tiens à préciser qu’il y a d’un côté les fonctionnaires, pour lesquels un dispositif assurant la transparence sera proposé en séance, et que, de l’autre côté, en ce qui concerne le cumul et l’écrêtement, il ne s’agit que des présidents des structures.

M. Sylvain Waserman. Ce que je comprends est qu’il y a aujourd’hui une exception aux règles de droit commun en matière de cumul emploi-retraite pour certaines fonctions. C’est au titre de cette exception que le Défenseur des droits, pour reprendre cet exemple cité dans la presse, peut cumuler 15 000 euros d’indemnité et 15 000 euros de retraite. C’est une exception. Pourquoi ne pas y mettre fin, tout simplement ?

M. Raphaël Schellenberger. Ce n’est pas une exception.

M. Sylvain Waserman. J’ai peut-être mal compris, mais il me semblait qu’il y avait une dérogation au droit commun en matière de cumul emploi-retraite pour certaines fonctions, notamment la participation à des activités juridictionnelles ou assimilées, ou encore à des instances consultatives ou délibératives. C’est ce que prévoit l’alinéa 3 de l’article L. 86 du code des pensions civiles et militaires de retraite.

M. Raphaël Schellenberger. Ce sont des indemnités qui sont versées en l’occurrence, et non des traitements. C’est d’ailleurs tout le problème. Est-il normal que la présidence de telles structures, qui pourrait nécessiter un niveau d’indemnisation aussi élevé, a priori, fasse l’objet d’indemnités ? Mon amendement est certes plus strict et plus ferme, ce qui peut conduire à d’autres questions, mais il y a peut-être lieu de les poser. Quand on préside une autorité administrative indépendante ou une autorité publique indépendante, doit-on percevoir un traitement ou une indemnité ? Cela me dérange qu’on finisse par tout mélanger en pensant que l’indemnité du président d’une telle structure est identique, en tout cas juridiquement, à celle versée à un élu qui est à la tête d’un exécutif local et qu’il faut donc traiter la question d’une manière un peu particulière, afin d’éviter que l’on « sucre » la retraite d’un fonctionnaire qui deviendrait maire d’une commune de 500 habitants et toucherait 400 euros d’indemnité par mois. Je suis évidemment d’accord pour l’éviter. Le problème est que l’on est en train de mélanger des sujets complètement différents. Il faudrait, à mon sens, créer un statut différent de celui des élus locaux pour des gens qui n’en sont pas. Ils doivent bénéficier d’une indépendance et d’une autonomie par rapport au pouvoir exécutif, mais ils ne sont pas des élus. Je rappelle, au passage, que les règles de cumul pour les indemnités versées aux élus, qui existent encore, malgré la fin du cumul des mandats, ne permettront jamais d’atteindre le niveau qui est celui des présidents des autorités administratives indépendantes. Le niveau d’indemnisation d’un élu reste plafonné à 1,5 fois celui d’un parlementaire – ce que je ne remets pas en cause. On n’arrive pas, et de loin, aux 15 000 euros versés au Défenseur des droits, par exemple.

La Commission rejette l’amendement CL80.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, elle adopte ensuite l’amendement CL697 de M. Guillaume Gouffier-Cha. L’article 16 quater est ainsi rédigé.

Puis elle est saisie de l’amendement CL247 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Nous proposons de lutter contre les rémunérations manifestement excessives dans les autorités administratives indépendantes (AAI) et les autorités publiques indépendantes (API), permises par l’usage abusif de recrutements sur contrats, en faisant en sorte que les personnes ainsi employées voient désormais leur rémunération – tant le salaire que les primes – limitée par la progression indiciaire et le montant des rémunérations variables prévues dans leur corps d’origine, les agents contractuels recrutés au sein des mêmes structures voyant, eux, leur rémunération limitée par celle des emplois équivalents dans la fonction publique.

Nous estimons en effet qu’un certain nombre d’autorités usent, et parfois même abusent, du cadre juridique dérogatoire au droit commun en recrutant largement sur contrat, comme le souligne le rapport de décembre 2017 de la Cour des comptes. Par exemple, en 2016, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) employait 382 contractuels et 16 fonctionnaires, soit 23 % de fonctionnaires en moins et 23 % de contractuels en plus par rapport à 2011.

Par ailleurs, l’usage de la position de « détachés sur contrat » est critiqué, car il permet une hausse exorbitante et indue des rémunérations des fonctionnaires – dont la Cour des comptes demande une meilleure justification et gestion –, qui sont excessivement plus avantageuses que dans les autres services publics.

C’est pourquoi nous proposons de limiter cette liberté contractuelle en bornant les rémunérations fixes et variables des fonctionnaires et contractuels recrutés par contrat dans ces institutions, afin que celles-ci ne soient pas des lieux de « contrats indûment dorés » avec des salaires démesurés comparés à leurs équivalents.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Bien évidemment, nous sommes tout à fait d’accord pour limiter les abus relevés par la Cour des comptes, c’est pourquoi le « jaune » budgétaire que j’ai évoqué tout à l’heure doit nous donner des informations précises sur la gestion des AAI et il nous appartient à nous, parlementaires, d’être particulièrement vigilants sur ce point.

Nous proposerons ultérieurement un amendement visant à ce qu’un décret vienne encadrer les pratiques, très variables d’une autorité à l’autre, relatives à la rémunération des membres des AAI.

Tel qu’il est rédigé, je crains que votre amendement soit difficile à appliquer. Je vous invite par conséquent à le retirer, et émettrai à défaut un avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Même avis.

Mme Danièle Obono. Mme la rapporteure pourrait-elle me préciser en quoi notre proposition serait difficile à appliquer ?

En tout état de cause, j’insiste sur le fait que notre amendement a un double enjeu : d’une part, celui de la contractualisation, d’autre part celui de la rémunération.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Nous ne souhaitons pas remettre en cause les modalités de recrutement des agents qui travaillent au sein des AAI, notamment pour qu’elles puissent continuer à recruter au moyen de détachements.

Par ailleurs, en proposant, comme vous le faites dans votre amendement, de limiter la liberté contractuelle, vous méconnaissez le principe d’indépendance des AAI, un principe qui fait justement leur spécificité. Pour ce qui est du décret, les notions d’encadrement et de référentiel auquel il se réfère permettent le maintien du principe d’indépendance.

Je maintiens donc la demande de retrait de cet amendement au profit d’autres dispositions que nous allons examiner dans un instant, notamment l’amendement CL696.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Maintenez-vous votre amendement, madame Obono ?

Mme Danièle Obono. Je le maintiens.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CL755 de M. Sylvain Waserman et CL696 de M. Guillaume Gouffier-Cha.

M. Sylvain Waserman. Parmi les exceptions aux règles de droit commun du cumul emploi-retraite prévues par l’article L. 86 du code des pensions, on trouve les activités entraînant la production d’œuvres de l’esprit, ainsi que la participation aux activités juridictionnelles ou assimilées, ou à des instances consultatives ou délibératives réunies en vertu d’un texte législatif ou réglementaire.

Nous estimons que cette exception, qui permet un cumul intégral des revenus tirés de la retraite et de ceux tirés de l’emploi, n’a pas lieu d’être, et proposons donc de la supprimer : tel est l’objet de l’amendement CL755.

M. Guillaume Gouffier-Cha. Une question s’est posée au cours des derniers mois, relative à l’encadrement des rémunérations des présidents et des cadres dirigeants au sein des autorités administratives indépendantes. Dans un rapport publié le 12 février 2018, la Cour des comptes a souligné que les rémunérations au sein de ces organismes étaient insuffisamment encadrées.

Nous inspirant des travaux de notre collègue de la commission des Finances, Stella Dupont, nous proposons avec l’amendement CL696 d’aligner le régime d’encadrement des dirigeants des AAI sur le modèle qui avait été mis en place il y a quelques années pour les établissements publics administratifs (EPA), c’est-à-dire de fixer par décret, de façon transparente, l’encadrement de ces rémunérations – une solution qui permettrait également de plafonner ces rémunérations.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis favorable à l’amendement CL696, et j’invite M. Waserman à retirer le sien.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Même avis. Les amendements CL755 et CL696 sont très proches, et ce n’est qu’en raison d’une légère différence de rédaction que notre préférence va au second et que nous demandons le retrait du premier.

M. Sylvain Waserman. Sommes-nous bien d’accord sur le fait qu’il n’est pas seulement question de la rémunération, mais bien du cumul emploi-retraite ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Si c’est nécessaire pour assurer la lisibilité de la loi, nous compléterons cette disposition en vue de la séance publique, mais je vous confirme notre intention de traiter la situation du cumul emploi-retraite.

L’amendement CL755 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL696. L’article 16 quinquies est ainsi rédigé.

Elle est saisie de l’amendement CL238 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. L’amendement CL238 a pour objet de lutter contre le cumul de responsabilités et les conflits d’intérêts au sein des conseils d’administration.

Pour cela, il est proposé deux séries de mesures. Il s’agit, d’une part, de retirer aux représentants d’intérêts des grandes entreprises le droit de siéger immédiatement dans des instances de régulation publiques qui régulent des domaines particulièrement importants, en instaurant un délai de carence de cinq ans, et de mettre ainsi fin à des pratiques de pantouflage qui permettent à des personnes ayant occupé des fonctions publiques de pouvoir bénéficier du carnet d’adresses qu’elles ont constitué et de l’utiliser dans le privé pour leur intérêt personnel ; d’autre part, d’interdire le cumul de plus de deux mandats dans les conseils d’administration de sociétés commerciales – ou un seul si la société est présente sur un marché réglementé – et d’imposer que seuls deux mandats successifs d’administrateurs deviennent légaux dans les établissements publics industriels et commerciaux ainsi que le secteur privé.

Cela répond à la fois à la nécessité d’une plus grande transparence et à celle d’encadrer des pratiques que nous estimons préjudiciables au service de l’intérêt général, car susceptibles d’être à l’origine de conflits d’intérêts.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Pour ce qui est du délai de carence de cinq ans que vous voulez instaurer avant que d’anciens représentants d’intérêts puissent siéger au sein d’une AAI, je vous rappelle que la loi prévoit déjà que les membres des AAI, mais aussi les dirigeants, transmettent leur déclaration d’intérêts à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) – cette dernière appréciant s’il existe ou non un conflit d’intérêts. Je ne crois donc pas utile de créer une telle restriction aux nominations, dont beaucoup sont d’ailleurs effectuées après avis des commissions permanentes du Parlement.

En ce qui concerne le second point, à savoir la limitation du cumul des mandats dans les sociétés commerciales, il s’agirait d’une atteinte à la liberté d’entreprendre, un principe auquel notre majorité est attachée.

La mesure que vous proposez me semble donc inutile et disproportionnée, ce qui me conduit à émettre un avis défavorable.

M. Fabien Matras. Comme l’a dit la rapporteure, une déclaration est faite auprès de la HATVP. Par ailleurs, chacun des membres des autorités administratives indépendantes a l’obligation de ne pas se retrouver en situation de conflit d’intérêts, ladite situation étant constitutive d’un délit pénal. Ce débat pourrait être intéressant dans le cadre de la fusion que nous évoquions hier : il conviendrait de déterminer comment répartir l’encadrement proposé pour les présidents ou les membres d’AAI.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL39 de M. Olivier Marleix.

M. Olivier Marleix. L’article 432-13 du code pénal définit la prise illégale d’intérêts applicable aux fonctionnaires et aux agents publics en faisant interdiction à ces personnes d’avoir un lien d’intérêt quel qu’il soit – contrat, conseil, détention d’actions ou de participations – pendant un délai de trois ans avec une entreprise au sein de laquelle elles auraient précédemment exercé une mission de contrôle ou de surveillance, ou formulé des avis ou recommandations.

En février 2007, juste avant l’élection présidentielle – un contexte propice à l’adoption de dispositions assouplissant les obligations déontologiques, peut-être parce que les parlementaires ont alors d’autres préoccupations – une disposition de la loi du 2 février 2007 de modernisation de la fonction publique est venue modifier le code pénal, ce qui est déjà suspect en soi, afin de tempérer l’application de l’article 432-13. La modification apportée consistait à préciser que, pour qu’il y ait prise d’intérêts, les personnes concernées doivent avoir « effectivement exercé » les fonctions de contrôle, de surveillance ou de conseil au sein des entreprises qui les rémunéraient pour cela. Cette restriction est source de confusion car elle signifie, par exemple, qu’un directeur général du Trésor qui ne serait pas personnellement présent au conseil d’administration de la Banque publique d’investissement (BPI), mais s’y ferait représenter, pourrait ensuite passer des contrats avec un grand fonds d’investissement sans que ce soit pour autant constitutif d’une prise illégale d’intérêts.

L’amendement CL39 vise à supprimer cet assouplissement apporté à la loi en 2007. Je précise qu’en un siècle, il n’y a eu que dix cas de mise en cause de fonctionnaires ou d’élus sur le fondement de l’article 432-13 du code pénal : on ne peut donc raisonnablement considérer qu’il définisse trop largement la notion de prise illégale d’intérêts.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Par cet amendement, vous proposez d’étendre le champ des personnes pouvant être condamnées pour prise illégale d’intérêts en supprimant la notion de fonctions « effectivement exercées ».

Je ne crois pas utile de remettre en cause l’équilibre qui avait été ainsi trouvé il y a dix ans, c’est pourquoi j’émets un avis défavorable à cet amendement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Même avis. Je précise que les juges vérifient la totalité des éléments qui leur sont soumis. Le fait que le dispositif prévu à l’article 432-13 du code pénal ne donne que rarement lieu à une procédure ne saurait donc constituer un indicateur du fait que ce dispositif est défaillant.

En tout état de cause, comme l’a dit la rapporteure, nous sommes attachés à l’équilibre trouvé en 2007, c’est pourquoi je suis moi aussi défavorable à cet amendement.

M. Olivier Marleix. Je vous invite, madame la rapporteure, à prendre connaissance des travaux parlementaires ayant conduit en 2007 à l’adoption de la disposition que je dénonce : vous constaterez qu’il n’y a pas véritablement eu de débat, et que c’est à la faveur d’un amendement adopté in extremis qu’on a cru bon de rendre service à certaines personnes en écartant pour elles le risque de prise illégale d’intérêts.

Par ailleurs, le très faible nombre de procédures engagées sur le fondement de l’article 432-13 du code pénal montre que le dispositif prévu par cet article est très insuffisant. Il n’était donc absolument pas justifié de l’affaiblir encore, comme on l’a fait il y a dix ans, en adoptant de façon subreptice une disposition permettant de considérer que, lorsque le fonctionnaire se faisait représenter lors des conseils d’administration, n’examinait pas lui-même les dossiers, ou déléguait ses attributions à un sous-directeur, la prise illégale d’intérêts n’est pas constituée.

Mme Cécile Untermaier. J’ignorais tout de cette mesure scélérate prise en 2007 et qui, comme cela ressort des explications de M. Marleix, est venue réduire de façon maladroite et inopportune le champ de la prise illégale d’intérêts. La notion de fonction « effectivement exercée » est beaucoup trop vague, et je ne vois d’ailleurs pas en quoi le fait pour un fonctionnaire d’avoir délégué certaines de ses attributions à un subalterne suffirait à exclure la qualification de prise illégale d’intérêts.

Je suis tout à fait d’accord pour considérer qu’il convient de purifier le dispositif en revenant à la rédaction antérieure à 2007. Il reviendra ensuite au juge d’apprécier si les fonctions qu’il est reproché à une personne d’avoir exercées entraient effectivement dans son champ de compétences.

Pour ma part, je soutiendrai cet amendement.

Mme Laurence Vichnievsky. Les fonctions que j’ai précédemment exercées me conduisent à soutenir la position exprimée par Olivier Marleix, car je considère que nous devons revenir à plus de lisibilité et de clarté dans la définition de la prise illégale d’intérêts, en éliminant le doute qui affecte son interprétation depuis la modification intervenue en 2007. Comme vous le savez, l’interprétation du droit pénal est stricte, ce qui justifie la nécessité de revenir à une rédaction compréhensible et évidente pour tous.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. J’entends bien la suggestion de M. Marleix consistant à ce que nous examinions les travaux parlementaires ayant conduit en 2007 à l’adoption de la modification de l’article 432-13 du code pénal.

Cela dit, je confirme que nous sommes attachés à l’équilibre trouvé à l’époque dans la double définition de la prise illégale d’intérêts et du conflit d’intérêts et je maintiens l’avis défavorable à l’amendement CL39.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement CL42 de M. Olivier Marleix.

M. Olivier Marleix. Toujours avec l’objectif de réduire, pour les personnes se rendant coupables d’une prise illégale d’intérêt, le risque d’être sanctionnées à ce titre, la loi de 2007 que j’ai évoquée précédemment a fait passer de cinq à trois ans le délai pendant lequel un fonctionnaire ne peut exercer une activité, quelle qu’elle soit – contrat, conseil, détention d’actions – dans une entreprise dont il aurait, dans l’exercice de ses fonctions, eu le contrôle ou la surveillance, sous peine de contrevenir à l’article 432-13 du code pénal. Il semble que l’on ait voulu permettre aux personnes concernées de pouvoir retourner pantoufler au plus vite, ce qui en dit long en termes de morale publique…

Je rappelle que, quand on prend une décision au nom de l’État ou d’une collectivité, on doit la prendre en pensant uniquement à l’intérêt général, et non à l’argent qu’on va gagner en allant ensuite pantoufler au sein d’une entreprise avec laquelle on a eu des liens. Je propose par conséquent de rétablir la durée de cinq ans durant laquelle il est interdit à un fonctionnaire de retourner pantoufler au sein d’une entreprise où il a précédemment exercé des fonctions de contrôle ou de surveillance en tant que fonctionnaire.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Nous avons déjà eu ce débat hier, lors de l’examen de l’article 16. Dans une société où tout s’accélère, y compris la vie des entreprises et des collectivités, la durée de trois ans me semble constituer un bon équilibre, qu’il me paraît nécessaire de préserver. J’émets donc un avis défavorable à cet amendement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Je précise que ce qui a justifié en 2007 de passer de cinq à trois ans, c’est le fait que la durée de cinq ans était la plus longue de tous les pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), la plupart d’entre eux retenant une durée d’une ou deux années, voire aucun délai.

Par ailleurs, le fait de retenir une durée trop longue pose également un problème en termes d’attractivité. Si on peut légitimement s’opposer à l’idée du pantouflage visant à gagner beaucoup d’argent, on peut également admettre qu’un certain nombre de fonctions exposées – je pense par exemple à la direction d’une administration centrale – sont rarement occupées pendant plus de trois ou quatre ans. Si on souhaite que ces fonctions au service de l’État soient occupées par des fonctionnaires du meilleur niveau, il faut donc leur permettre d’exercer ensuite dans le même secteur – celui où ils excellent – dans un délai raisonnable car, à défaut, on risque que ces postes n’attirent que des personnels en fin de carrière.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine, en discussion commune, les amendements CL786 de M. Philippe Vigier et CL242 de Mme Danièle Obono.

M. Paul Molac. La probité des fonctionnaires et la confiance des citoyens dans le service public exigent que le casier judiciaire des personnes qui souhaitent intégrer la fonction publique soit vierge de toute mention incompatible avec l’exercice de leurs futures fonctions. La probité des fonctionnaires et la confiance des citoyens dans le service public des fonctionnaires exigent également que, pour devenir fonctionnaire, une personne ait satisfait à ses obligations fiscales. L’amendement CL786 vise à rendre obligatoires ces deux conditions préalables à l’obtention du statut de fonctionnaire.

Mme Danièle Obono. Par l’amendement CL242, nous proposons de lutter contre la corruption au sein des services publics en s’opposant aux nominations à la tête des sociétés publiques de personnes condamnées pour certains délits économiques et financiers. Cet amendement fait obligation aux représentants de l’État dans les organes délibérants des entreprises publiques ou à capitaux significativement publics de s’opposer à la nomination aux fonctions de président ou de directeur général de toute personne condamnée ou mise en examen des chefs de crime ou de certains délits économiques ou financiers.

En amont du débat sur la loi de moralisation de la vie publique de 2017, le Gouvernement avait affirmé qu’il souhaitait « limiter les choses qui ne sont pas illégales, mais ne sont pas acceptables » et ainsi faire entrer la France « dans un nouveau monde, un monde de règles précises qui rétablissent la confiance dans les acteurs publics. »

La loi et les usages demeurent toutefois silencieux sur les nominations des présidents et directeurs généraux des entreprises publiques et des entreprises dans lesquelles l’État détient une participation significative. Notre amendement vise à pallier cette lacune.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Pour ce qui est de l’amendement CL786, je rappelle que le bulletin n° 1 comprend l’ensemble des condamnations d’une personne, y compris lorsqu’elle était mineure, et que son usage est strictement réservé à la justice. Quant au bulletin n° 2, il comprend un nombre suffisant de condamnations pour apprécier la probité du candidat à une fonction publique. Enfin, pour ce qui est des obligations fiscales, je crois que les obligations prévues par l’article 5 sont suffisantes.

Il me semble tout de même délicat d’être beaucoup plus exigeant avec les fonctionnaires qu’avec les élus en la matière. Je suis donc défavorable à cet amendement.

Pour ce qui est de l’amendement CL242, nous partageons tous votre souci de moralisation, mais nous ne pouvons écrire une interdiction aussi générale et absolue dans la loi et limiter de la sorte la capacité d’appréciation du représentant de l’État dans les sociétés publiques.

En outre, vous ne précisez pas les modalités d’information, pour le représentant de l’État, de la commission de ces crimes ou délits de la part de la personne dont la nomination est envisagée. Je suis donc également défavorable à cet amendement.

La Commission rejette successivement les amendements

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL241 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. Par cet amendement, nous proposons de réformer le statut des fonctionnaires pour une meilleure neutralité de la fonction publique.

Cet amendement pose ainsi pour principe que lorsqu’un fonctionnaire a signé un engagement de servir – durant dix années pour les élèves de l’École normale supérieure ou de l’École nationale d’administration, ou pendant une durée égale au triple de sa formation dans la limite de cinq ans pour la fonction publique hospitalière –, il ne puisse être effectué une mobilité ou une disponibilité dans le secteur privé lucratif durant cette même période d’engagement à servir. Si un fonctionnaire souhaite travailler dans le secteur privé avant la fin de son engagement de servir, il devra ainsi démissionner, perdre sa qualité de fonctionnaire, et le cas échéant rembourser tout ou partie de sa formation.

Les fonctionnaires ne doivent en aucun cas pouvoir « pantoufler » dans le privé lucratif, que ce soit dans le cadre de la mobilité statutaire ou dans le cadre d’une demande de disponibilité, avant d’avoir complété leur engagement de servir l’État.

Je précise que, pour mettre fin aux pantouflages en cours, l’interdiction d’autorisation d’une mise en disponibilité dans le secteur privé pour ces fonctionnaires doit être effective dès le lendemain de la promulgation de la loi.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Aujourd’hui, le fonctionnaire soumis à une obligation de servir – par exemple durant dix ans pour l’ENA, comme vous l’avez dit, et durant huit ans pour les ingénieurs des mines – peut quitter provisoirement la fonction publique au bout de quatre ans.

S’il ne revient pas ensuite accomplir la période d’engagement qui lui reste, il devra payer la fameuse « pantoufle », c’est-à-dire les frais de scolarité. Je ne vois pas de raison de remettre en cause ces dispositions alors que nous voulons faciliter, tout en les contrôlant, les allers et retours entre le public et le privé.

Je suis donc défavorable à cet amendement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Je précise qu’un décret a été signé le 27 mars dernier, qui limite à cinq ans la disponibilité et oblige un fonctionnaire de retour de disponibilité à effectuer au minimum dix-huit mois dans son administration d’origine – après les quatre premières années évoquées par la rapporteure – avant de pouvoir solliciter une éventuelle nouvelle disponibilité.

Comme vous le voyez, nous avons encore renforcé l’encadrement dont bénéficiait déjà le dispositif. Je suis donc également défavorable à cet amendement.

M. Fabien Matras. La majorité n’est pas favorable au fait d’interdire à un agent public de quitter la fonction publique ou de bénéficier d’une mobilité, même dans le délai qui le soumettrait au paiement de la pantoufle. En revanche, Olivier Marleix et moi-même avions précédemment mis l’accent, dans notre rapport d’information de janvier 2018 sur la déontologie des fonctionnaires et l’encadrement des conflits d’intérêts, sur le fait qu’à l’heure actuelle, la pantoufle n’est pas systématiquement payée, ce qui constitue un vrai problème. Nous entendons y remédier en séance et, si le groupe La France insoumise est d’accord, je propose que nous travaillions ensemble à la mise au point d’une solution sur ce point.

Mme Danièle Obono. Nous sommes ouverts à la discussion, mais je voudrais cependant apporter une précision au sujet de notre amendement : il ne s’agit pas tant d’interdire que d’obliger à faire un choix entre le secteur public et le secteur privé. Il nous semble que, durant le laps de temps où le fonctionnaire s’engage à servir, ce choix doit devenir définitif afin que la personne concernée respecte son engagement à l’égard de la puissance publique. Pour nous, c’est du bon sens que de considérer que lorsqu’on prend un engagement, on doit le tenir jusqu’au bout, a fortiori quand il s’agit du service public.

La Commission rejette l’amendement.

Elle se saisit ensuite de l’amendement CL573 de M. Pascal Brindeau.

M. Pascal Brindeau. Je propose d’encadrer le recours à la disponibilité pour convenances personnelles. La disponibilité est parfois d’office, parfois de droit, parfois subordonnée à l’intérêt du service, et vous pourrez peut-être m’opposer ce fait pour rejeter ma proposition, mais il s’agirait de ne pas accorder aux agents publics de mise en disponibilité d’une durée inférieure à une année. Dans les collectivités territoriales, pour toutes sortes de raisons – projets associatifs, projets purement personnels… –, certains agents demandent à être placés trois mois en disponibilité, puis ils demandent plusieurs fois le renouvellement de ce placement en disponibilité, jusqu’à un an. Cela ne permet pas à l’employeur d’organiser dans de bonnes conditions leur remplacement, puisqu’un agent doit pouvoir, au terme d’une absence d’une durée inférieure à un an, retrouver le poste précis qu’il occupait. En revanche, si l’agent est absent plus d’un an, il est possible de lui donner un autre poste à son retour.

Voilà qui est plus souple du point de vue de la gestion des ressources humaines par la collectivité.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Comme vous l’avez pressenti, cher collègue, je suis défavorable à cet amendement. Nous voulons fluidifier les parcours et je ne crois pas que les mises en disponibilité désorganisent à ce point les services. Cela fonctionne bien.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Je suis également défavorable à cet amendement.

Finalement, le dispositif est assez proche de celui du congé sans solde du secteur privé, et nous ne voulons pas prévoir des durées différentes selon que l’on travaille dans le privé ou le public. Par ailleurs, la mise en disponibilité pour convenances personnelles peut procéder de considérations extrêmement variées : un projet professionnel, un problème personnel ou familial, parfois la nécessité, après la naissance d’un enfant, d’attendre qu’un mode de garde soit accessible, qu’une place se libère en crèche ou qu’une assistante maternelle soit disponible. Voilà pourquoi nous ne souhaitons pas imposer une durée minimale d’un an.

M. Pascal Brindeau. Je comprends ces arguments, mais il s’agit parfois pour l’agent de pouvoir faire un choix sans en assumer les risques. Il se dit : « Si cela ne marche pas, je pourrai toujours réintégrer ma collectivité, et si je reviens au bout de moins d’un an je peux même retrouver mon poste ! » Cette facilité ne me paraît pas une solution très équilibrée qui ménagerait à la fois l’intérêt de l’agent et celui de l’employeur.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL782 de M. Yannick Favennec Becot.

M. Yannick Favennec Becot. Cet amendement vise à ce que les fonctionnaires amenés à exercer des fonctions électives au sein d’un exécutif local ou dans le cadre d’un mandat national ou européen ne puissent demander, pour conserver leurs droits à la retraite et à l’avancement dans leur corps d’origine, à être placés en détachement. C’est une question d’équité.

Il s’agit d’éviter une forme de démocratie à deux vitesses : d’un côté, ceux qui viennent du privé ; de l’autre, ceux qui sont issus de la fonction publique. C’est en outre une demande que j’ai entendue de nombreuses fois dans le cadre du grand débat national, dans les réunions auxquelles j’ai pu participer dans ma circonscription. Cette disposition permettrait d’envoyer un message positif à nos concitoyens, qui attendent de leurs élus non seulement la transparence mais aussi le respect d’une certaine déontologie. Tel est l’esprit de cet amendement et des trois amendements suivants.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’indépendance des membres du Parlement à l’égard du Gouvernement s’oppose à ce que les fonctionnaires élus bénéficient d’un avancement au choix pendant leur mandat ou d’une reconstitution de leur carrière à l’issue de leur mandat. Certes, un fonctionnaire peut être placé en position de détachement pendant la durée de son mandat, situation plus avantageuse que celle d’élus issus du secteur privé, mais cette différence s’explique par le fait que le fonctionnaire continuer à servir la collectivité lorsqu’il est élu. Je ne vois pas de raison de mettre fin à cette situation.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Même avis que Mme la rapporteure. Nous ne souhaitons pas remettre en cause l’équilibre auquel nous sommes parvenus, notamment par des modifications intervenues assez récemment, et le traitement différencié des parlementaires en matière de disponibilité ou de détachement.

M. Olivier Marleix. Je soutiens l’amendement de M. Favennec Becot. Dans la pratique, chaque fois qu’un fonctionnaire devenu personnalité politique fait le choix du détachement pour continuer à bénéficier d’un avancement dans son corps d’origine, cela fait scandale. Je ne vous citerai pas les noms de tous ceux qui sont concernés, mais un ami proche, pour qui j’ai beaucoup d’estime, et qui a passé assez peu de temps dans un grand corps, s’est conformé à cette nouvelle pratique qui consiste à opter pour la disponibilité pendant l’exercice de son mandat. Plus aucun élu de premier plan ne se risquerait à faire autrement. Plutôt que de laisser certains courir le risque d’être rattrapés un jour par ce genre de problème, il serait beaucoup plus sain d’imposer que ce soit la règle.

Peut-être faudrait-il être plus précis et arrêter des seuils mais nous ne parlons que de fonctionnaires dont l’engagement politique devient un jour une activité à temps plein. La solution proposée par M. Favennec Becot me paraît très sage, et elle correspond déjà à la pratique imposée par la pression de l’opinion. Mettons donc la loi en conformité avec les attentes et avec la pratique.

Mme Cécile Untermaier. Je croyais que la règle était déjà telle que M. Favennec Becot voudrait qu’elle soit. Nous nous sommes battus au cours du précédent quinquennat pour que les fonctionnaires élus au Parlement soient non plus en détachement mais en disponibilité. Il faut que cette règle s’impose à tout le monde politique. Ce serait un signal important, et ce n’est pas demander un grand sacrifice.

Nous sommes donc très favorables à la disposition proposée.

M. Yannick Favennec Becot. M. Marleix jugeait pertinent d’arrêter un seuil. Pour ma part, je pense à un seuil de 20 000 habitants.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. J’invite à la prudence, et je confirme que le Gouvernement est défavorable à cet amendement.

Certes, la question peut être posée, nous avons toujours un objectif de moralisation, mais, indépendamment du fond, les seuils proposés ne semblent pas pertinents. Ainsi, les fonctionnaires ne pourraient demander à être placés en détachement pour exercer un mandat de maire, sans précision. Il faudrait un seuil… mais, quand bien même nous retiendrons celui d’une population de 20 000 habitants, l’indemnité maximale se situe autour de 3 000 ou 3 500 euros, et qu’elle ne permet pas de cotiser à la sécurité sociale, ni à un régime de retraite général, ni pour l’allocation de retour à l’emploi (ARE).

Le 25 avril dernier, le Président de la République a pris l’engagement de travailler rapidement et avant les municipales sur un statut de l’élu. Je suis convaincu qu’une disposition comme celle que vous proposez s’inscrirait plus facilement dans ce débat. Nous savons par ailleurs qu’il est assez rare que des élus fassent voter par leur conseil municipal une indemnité égale à 100 % du montant maximal – ils ne veulent pas s’exposer à la vindicte populaire.

À ce stade, nous sommes favorables au maintien des équilibres auxquels nous sommes parvenus, notamment aux termes de la loi du 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires, avec une différence entre les parlementaires et les autres élus. Si cette question doit être abordée, ce doit vraiment être en lien avec l’engagement présidentiel sur le statut de l’élu, notamment la protection sociale de celles et ceux qui exercent des mandats locaux et qui, au contraire des parlementaires, ne bénéficient pas d’un système de protection sociale.

M. Yannick Favennec Becot. Monsieur le secrétaire d’État, le statut de l’élu, c’est un peu l’Arlésienne. Alors qu’on en parle depuis des années, quelle que soit la majorité en place, on ne voit jamais rien venir. J’ai bien entendu les propos du Président de la République, mais, comme saint Thomas, je ne crois que ce que je vois.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient aux amendements CL583, CL783 et CL784 de M. Yannick Favennec Becot.

M. Yannick Favennec Becot. Par l’amendement CL583, je propose que les fonctionnaires démissionnent de la fonction publique lorsqu’ils sont amenés à exercer des fonctions électives au sein d’un exécutif local ou dans le cadre d’un mandat national ou européen, et qu’ils ne puissent demander à être placés en détachement, ni être mis en disponibilité. Il existe une jurisprudence en la matière : le ministre Bruno Le Maire l’a fait.

L’amendement CL783, pour sa part, impose cette démission aux seuls fonctionnaires des catégories A et B.

Enfin, l’amendement CL784 dispose que les fonctionnaires appelés à exercer des fonctions ministérielles sont d’office placés en disponibilité le temps de leurs fonctions au sein du gouvernement. Pendant cette période, leurs droits à la retraite et à l’avancement ne sont pas pris en compte. Ils réintègrent leur corps d’origine lorsqu’ils quittent le Gouvernement. Cet amendement prévoit par ailleurs le placement d’office en disponibilité des fonctionnaires de catégorie C lorsqu’ils sont amenés à exercer des fonctions au sein de l’exécutif d’un exécutif local, ou d’un mandat national ou européen ; pendant cette période, leurs droits à la retraite et à l’avancement ne sont pas pris en compte mais ils réintègrent leur corps d’origine, lorsqu’ils quittent ces fonctions ou cessent d’exercer ces mandats.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Pour les raisons déjà indiquées, je suis défavorable à ces amendements.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Même avis.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle étudie ensuite l’amendement CL787 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Afin de prévenir les conflits d’intérêts, je propose d’imposer aux personnes nommées par le Président de la République à des fonctions d’intérêt général l’obligation de remettre une déclaration d’intérêts aux commissions permanentes des assemblées chargées de les auditionner. Cela permettrait tout simplement à celles-ci d’être pleinement éclairées au moment de donner leur avis.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. C’est le rôle de la HATVP que de recueillir de telles déclarations. En outre, les réponses aux questionnaires que nous envoyons aux personnes sur la nomination desquelles nous devons nous prononcer sont publiques, de même que leurs auditions. Cet amendement soulevant donc un « non-sujet », j’y suis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL237 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. Cet amendement, qui va un peu dans le même sens que celui que nous venons d’examiner, est inspiré d’une proposition de loi déposée par la sénatrice Marie-Noëlle Lienemann pour lutter contre les conflits d’intérêts dans l’exercice de hautes responsabilités d’intérêt général, par exemple les emplois à la décision du Président de la République. C’est aussi un thème tout à fait d’actualité.

Nous proposons que les personnes concernées soient dans l’obligation de déposer une déclaration faisant apparaître les intérêts détenus à la date de leur nomination et dans les cinq années précédant cette date, ainsi que la liste des activités professionnelles ou d’intérêt général, même non rémunérées, qu’elles envisagent de conserver. Nous proposons aussi de leur interdire de détenir des intérêts dans une société qu’elles seraient chargées de contrôler dans le cadre de la nomination. Elles ne devraient pas non plus exercer ni avoir exercé, au cours des cinq années précédentes, des fonctions de direction au sein d’une société qu’elles seraient chargées de contrôler. Il leur serait également interdit, dans les trois années suivant la cessation de leurs fonctions, de participer aux délibérations d’une société qu’elles auraient contrôlées.

Le droit en vigueur comporte des « trous dans la raquette », qui ont pu susciter un émoi compréhensible. Nous proposons d’y remédier et d’assurer une plus grande transparence jusqu’aux plus hautes fonctions de l’État.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Toutes les personnes que vous citez figurent d’ores et déjà parmi celles énumérées dans le décret prévu à l’article 25 ter de la loi du 13 juillet 1983, introduit dans celle-ci par la loi 20 avril 2016 relative à la déontologie et aux droits et obligations des fonctionnaires – cela concerne 8 000 personnes. Je vous prie donc de retirer cet amendement, satisfait ; à défaut, j’y serai défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle en vient à l’amendement CL41 de M. Olivier Marleix.

M. Olivier Marleix. Le sujet n’est pas sans lien avec la mission que Fabien Matras et moi-même avons conduite. Un certain nombre de professeurs de droit que nous avons auditionnés nous ont fait remarquer que l’application de la loi « Sapin II » a donné lieu assez rapidement à des dérives.

Nous avions essayé de définir ce qu’était un représentant d’intérêts, un lobbyiste. Nous hésitions. Fallait-il viser ceux dont l’« activité principale ou régulière » d’influer sur la décision publique en entrant en communication avec l’administration ? Ou fallait-il viser ceux dont c’est l’activité « principale ou accessoire » ? Le qualificatif « régulière » avait été retenu. N’étaient censées sortir du champ des règles applicables aux représentants d’intérêts ainsi définis que très peu d’exceptions – dont les associations d’élus faisaient partie.

Las ! Le décret pris le 9 mai 2017 a en réalité permis de faire sortir tout un tas de personnes du champ d’application de la loi et de leur permettre d’exercer des activités de lobbying à temps partiel. Dès lors que l’activité n’a pas un caractère régulier, c’est-à-dire si vous ne vous y livrez que trois ou quatre fois par an, ou moins de la moitié de votre temps, vous avez le droit de faire du lobbying, d’influer sur l’administration, sans que l’on puisse vous opposer les dispositions de la loi « Sapin II », notamment les obligations relatives au répertoire des représentants d’intérêt.

Ce n’était évidemment pas l’intention du législateur et ce lobbying pose aujourd’hui problème. Lorsque je présidais la commission d’enquête sur les décisions de l’État en matière de politique industrielle, les représentants d’une grande banque d’affaires m’ont dit que, même s’ils avaient des contacts avec les pouvoirs publics, ils ne faisaient cela qu’à temps partiel, moyennant quoi ces obligations relatives à la transparence de la vie publique ne les concernaient pas.

Il nous faut rédiger plus explicitement ces dispositions. Un représentant d’intérêts, c’est une personne qui se livre à cette activité à titre principal ou accessoire ; même si elle ne le fait que quelques fois dans l’année, elle doit être soumise aux obligations édictées par la loi « Sapin II ». Tel est le sens de cet amendement.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. La définition retenue à l’article 18-2 de la loi du 11 octobre 2013 est suffisamment large et englobante. Le répertoire des représentants d’intérêts tenu par la HATVP comprend aujourd’hui plus de 1 300 organismes représentants d’intérêts. Il me semble que nous pouvons nous en satisfaire.

Je suis défavorable à cet amendement.

Mme Laurence Vichnievsky. Je soutiens encore une fois l’amendement de mon collègue Marleix. Cette limitation n’est pas compréhensible. Même si vous ne rencontrez les pouvoirs publics que deux ou trois par an, votre influence peut être très forte. Sylvain Waserman me faisait observer qu’on limite évidemment le nombre de contacts que l’on peut avoir avec les personnes que l’on doit influencer, et l’influence n’est pas proportionnelle au nombre de rencontres avec un décideur.

Les dispositions en vigueur posent problème. Nous devrions les rédiger autrement, de manière à englober des situations de conflit d’intérêts évidentes.

M. Olivier Marleix. C’est vraiment un sujet important. La loi « Sapin II » honore l’Assemblée nationale. À l’époque, la question avait donné lieu à un assez long débat juridique. Nous avons passé une journée entière – Mme Untermaier était présente – à définir la notion de représentant d’intérêts.

Le législateur prend soin de préciser de manière très stricte qui il entend exonérer des obligations édictées – ce sont notamment les associations d’élus, les associations à but cultuel, les organisations syndicales – et, subrepticement, à la faveur d’une formulation un peu ambiguë, un décret… Soyons clairs : la banque d’affaires qui veut influer pour obtenir du Gouvernement une décision de vente d’une grande entreprise dans le cadre d’une fusion-acquisition d’un montant quelques dizaines de milliards d’euros peut faire son lobbying sans être soumise à aucune obligation déclarative ! Ce n’est pas tenable.

Vous ne pouvez, madame la rapporteure, balayer le problème d’un revers de main. Nombre de spécialistes de ces sujets s’intéressent à la question. D’ici à la séance, je redéposerai cet amendement, parce qu’il faut vraiment y revenir, c’est trop important.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Chers collègues, il ne s’agit pas de balayer le problème d’un revers de main, mais, tel que votre amendement est rédigé, non seulement il s’appliquerait à l’exemple de lobbying bancaire que vous décrivez mais il suffirait de s’être une fois dans sa vie livré à cette activité pour être considéré comme lobbyiste toute sa vie. Je crains donc que l’amendement ne soit inopérant.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL239 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Nous proposons de lutter contre les conflits d’intérêts et les pratiques de pantouflage en interdisant aux anciens fonctionnaires ou agents publics de devenir représentants d’intérêts auprès d’institutions pour lesquelles ils ont travaillé et imposant un délai de cinq ans avant que l’exercice, dans le secteur privé, d’activités de conseil entretenant un lien direct ou indirect avec les missions de service public de leurs anciennes fonctions ne leur soit possible. Il me semble impensable que la loi puisse autoriser de telles pratiques de lobbying en tant que représentant d’intérêts privés auprès d’institutions au sein desquelles on a travaillé. Si la loi valide l’existence même d’une telle pratique, cela signifie que des intérêts privés peuvent recruter des agents bien introduits et connaissant le fonctionnement de l’institution. Cela pourrait aussi laisser penser que tout fonctionnaire peut envisager un futur passage vers le privé en tant que lobbyiste auprès de l’institution pour laquelle il travaille.

Pour prévenir les situations de conflit d’intérêts et garantir l’engagement du fonctionnaire au service de l’intérêt général, il faut encadrer de tels départs vers le secteur privé.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Nous avons déjà largement abordé ce sujet lors de l’examen de l’article 16 lui-même. Je ne suis pas favorable à l’édiction d’interdictions aussi générales. Les situations s’apprécient au cas par cas. Je suis donc défavorable à cet amendement.

Mme Danièle Obono. Excusez-moi, madame la rapporteure, mais je ne propose pas d’édicter une interdiction générale. L’amendement est assez précis et relève du bon sens : il faut passer par un petit « sas de décompression » avant de représenter des intérêts privés auprès de l’institution pour laquelle on travaille… Cela ne me semble pas si vague et, en l’occurrence, l’argument que vous avancez pour rejeter cet amendement me paraît un peu hors de propos. Nous en rediscuterons en séance.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL788 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. De nombreuses législations visent à prévenir les conflits d’intérêts dans des situations spécifiques, par exemple celles de membre de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI), de gouverneur ou sous-gouverneur de la Banque de France, de membre de la Commission de régulation de l’énergie ou de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires. Avec la loi du 11 octobre 2013, des dispositions plus générales concernent les élus.

Le projet de loi soumis à notre examen concerne les fonctionnaires. Il nous semble nécessaire qu’un cadre plus général visant à prévenir les conflits d’intérêts s’applique à l’ensemble des postes sur lesquels le pouvoir de nomination du président de la République s’exerce, après avis public, en application de l’article 13 de la Constitution, de la commission permanente compétente de chaque assemblée.

M’inspirant du modèle retenu pour les membres de la HADOPI, je propose d’interdire la nomination par le Président de la République à des fonctions d’intérêt général de personnes qui, pendant les trois ans précédant leur nomination, auraient exercé une activité privée en lien avec ce rôle d’intérêt général.

Le II applique à ces fonctions l’interdiction déjà faite aux membres d’exécutifs et aux fonctionnaires d’avoir pendant les trois années qui suivent la cessation de leurs fonctions des intérêts privés dans des entreprises avec lesquelles ils ont eu un lien lorsqu’ils étaient en fonction.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Tout cela est déjà prévu. Les personnes que vous évoquiez entrent dans le champ de l’article 25 ter de la loi du 13 juillet 1983 et transmettent leurs déclarations d’intérêts et de patrimoine à la HATVP. Je ne suis pas favorable à ce que l’on y ajoute une interdiction aussi générale que celle que vous proposez.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CL785 de M. Philippe Vigier, CL751 de M. Sylvain Waserman et CL40 de M. Olivier Marleix.

M. Yannick Favennec Becot. L’amendement CL785 porte sur un sujet que nous avons déjà abordé au cours de nos débats. Nous y reviendrons très certainement en séance publique et je le considère comme défendu, madame la présidente.

M. Sylvain Waserman. Nous avons déjà vu que la solution était soit l’écrêtement de la rémunération, soit le droit commun pour le cumul emploi-retraite. Privilégierez-vous l’écrêtement, monsieur le secrétaire d’État ?

Rappelons qu’aujourd’hui le droit commun s’applique sauf pour les activités intellectuelles relevant du code de la propriété intellectuelle, les artistes et le fameux 3° du I de l’article L. 86 du code des pensions civiles et militaires, soit la « participation aux activités juridictionnelles ou assimilées, ou à des instances consultatives ou délibératives réunies en vertu d'un texte législatif ou réglementaire ». Nous nous interrogeons sur la pertinence de conserver cette exception au droit commun dans le texte.

M. Olivier Marleix. Je dois dire que je ne comprends pas les raisons pour lesquelles mon amendement a été mis en discussion commune avec ces deux autres amendements relatifs au cumul emploi-retraite, car il concerne non pas les retraités mais des fonctionnaires très actifs. Subrepticement, comme c’est souvent le cas pour les arrangements avec la déontologie ménagés pour la haute fonction publique de notre pays, on a introduit dans une loi relative à la réforme de l’apprentissage et à la formation professionnelle une disposition qui permet, de manière tout à fait étonnante, à des hauts fonctionnaires qui partent pantoufler dans le privé de bénéficier d’avantages équivalents à ceux qui sont octroyés aux fonctionnaires en détachement, autrement dit de continuer à profiter des avancements. Autrement dit, un inspecteur des finances peut travailler dans une banque d’affaires ou un conseiller d’État dans un cabinet d’avocat d’affaires comme s’il était en détachement alors qu’il est en disponibilité.

Je suis surpris que cette disposition n’ait pas été considérée comme un cavalier lors de l’examen du projet de loi. Le Conseil d’État y avait été, dans son avis, tout à fait défavorable.

Il serait sage de revenir sur cette mesure, dont personne ne s’est encore aperçu si ce n’est ceux qu’elles intéressent, avant qu’elle fasse davantage scandale dans notre pays.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Pour les deux premiers amendements, mes arguments seront les mêmes que ceux que j’ai développés précédemment : avis défavorable.

S’agissant de votre amendement, monsieur Marleix, j’aurais tendance à dire que cette disposition contribue à une plus grande fluidité des parcours entre public et privé, mais j’imagine que M. le secrétaire d’État a une réponse plus complète à vous fournir.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Monsieur Waserman, j’ai indiqué tout à l’heure que nous étions favorables à un dispositif d’écrêtement. La nécessité de permettre le cumul, même de façon limitée, implique de conserver la dérogation. Il faut donc que cette exception puisse être maintenue. Nous travaillerons sur ce sujet ensemble.

Monsieur Marleix, je veux bien que l’on dise que certaines dispositions sont votées au Parlement subrepticement, mais, en l’occurrence, la mesure que vous visez figurait dans le projet de loi initial déposé par la ministre Muriel Pénicaud. Les commissions qui ont examiné le texte ont donc eu tout loisir de se pencher dessus. Il ne s’agit pas d’un ajout auquel le Gouvernement aurait procédé en catimini au beau milieu de la nuit.

Cette loi, promulguée le 5 septembre 2018, portait sur la liberté de choisir son avenir professionnel ; cette disposition sur les mobilités y avait donc toute sa place. Elle a donné lieu à un décret d’application, publié le 27 mars dernier, dans lequel la période de disponibilité a été ramenée de dix à cinq ans.

Pourquoi proposons-nous pendant cette durée d’aligner le dispositif de la disponibilité sur celui du détachement ?

Il y a d’abord un intérêt en termes de mobilité. Nous constatons que les agents publics qui font droit à une demande de disponibilité pour convenances personnelles pour aller vivre une aventure professionnelle dans le secteur privé ne reviennent pas ou dans des proportions très réduites dans la fonction publique, du fait notamment de l’écart salarial. Le fait de bénéficier d’un avancement de carrière, comme pour le détachement, pendant une durée de cinq ans constitue un argument supplémentaire pour favoriser leur retour et mettre à profit l’expérience qu’ils auront acquise, au service de la fonction publique.

Outre la réduction de dix ans à cinq ans, nous avons posé la règle selon laquelle le renouvellement de la disponibilité ne pourra intervenir qu’après un retour effectif de dix-huit mois dans l’administration d’origine.

Enfin, le régime de disponibilité peut être lié à l’exercice professionnel dans le secteur privé. Dans ce cas, nous avons prévu que lorsque c’est possible, les responsabilités exercées dans le secteur privé soient prises en compte dans le parcours professionnel des agents publics pour l’accès au grade et la mobilité fonctionnelle.

Il peut aussi être lié à d’autres motifs. J’en citerai deux en particulier : le congé parental après l’arrivée d’un enfant ; la mutation contrainte du conjoint. Dans ce dernier cas, le fonctionnaire qui a suivi son conjoint ne trouve pas forcément de poste public vacant. Il se met alors en disponibilité, soit qu’il cesse de travailler, soit qu’il trouve un poste dans le privé.

Il y a donc deux raisons principales qui motivent cette disposition : inciter les agents à revenir dans le secteur public pour bénéficier de leur expérience ; garantir les droits à déroulement de carrière à ceux qui ont demandé un congé pour convenances personnelles afin de concilier vie professionnelle et vie personnelle.

M. Sylvain Waserman. La suppression de l’exception n’empêcherait nullement de cumuler deux fonctions. La seule question est de savoir si le cumul permet d’additionner l’ensemble des deux revenus ou si ce sont les règles de droit commun qui s’imposent. À quel titre devrions-nous conserver une exception pour ces activités particulières ? Tout le monde, je le rappelle, a le droit de travailler en étant retraité, il y a simplement un mécanisme de droit commun qui limite le montant de la pension de retraite grâce à un écrêtement modulé en fonction des revenus supplémentaires.

M. Olivier Marleix. J’entends bien, monsieur le secrétaire d’État, que la disposition que j’évoquais a fait l’objet d’un arbitrage en haut lieu, qu’elle procède d’un choix politique assumé et qu’elle n’a pas été introduite subrepticement dans la loi. Je ne comprends d’ailleurs pas pourquoi elle n’a pas été plutôt inscrite dans un texte relatif à la fonction publique, dont les articles 108 à 110 visent clairement les mobilités professionnelles vers le privé. Donner les avantages du détachement au fonctionnaire qui va pantoufler, je trouve cela pour le moins baroque et audacieux. Une personne après dix ans passés dans le secteur privé où elle aura gagné beaucoup d’argent pourra revenir dans son corps d’origine et bénéficier d’une promotion comme conseiller d’État ou inspecteur général des finances. Cela posera un jour ou l’autre des problèmes en matière de morale publique et de déontologie.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Monsieur Waserman, j’entends vos arguments, mais nous avons besoin de cette exception. Nous allons approfondir la question.

Je rappelle, monsieur Marleix, que la durée de la disponibilité a été réduite à cinq ans. Par ailleurs, il n’existe en droit que deux motifs de disponibilité : pour créer une entreprise ; pour convenances personnelles, ce qui recouvre tant les raisons familiales que l’emploi dans une entreprise privée.

L’amendement CL751 est retiré

La Commission rejette successivement les amendements CL785 et CL40.

Elle examine ensuite l’amendement CL240 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. Nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur les mesures mises en œuvre pour obtenir le remboursement du montant des traitements et indemnités perçues lors de leur scolarité par les anciens élèves de l’École normale supérieure, l’École nationale d’administration et l’École polytechnique bénéficiant d’une mise en disponibilité et n’ayant pas respecté leur engagement de rester au service de l’État pendant la durée minimale prévue par décret.

Nous savons que, par choix politique, vous refusez systématiquement tous les rapports demandés par l’opposition et que vous choisissez ceux qui vous conviennent le mieux mais il serait important d’évaluer ce type de pratiques. Elles mettent en cause le sens de l’engagement des élèves des grandes écoles, ce qui pose problème y compris en termes de finances publiques. Cela serait fort utile dans le débat actuel.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable. Je vous renvoie à l’excellent rapport sur la haute fonction publique de notre collègue sénateur Pierre-Yves Collombat.

Mme Danièle Obono. Je ne doute pas de l’excellence du rapport de notre collègue, mais nous formulons des demandes précises et nous n’avons pas trouvé d’informations dans la littérature existante. Nous reviendrons certainement sur ce sujet lors de l’examen du texte en séance publique.

La Commission rejette l’amendement.

Article 17 : Habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance afin de simplifier et moderniser diverses dispositions relatives à la protection sociale des agents publics

La Commission examine les amendements identiques CL121 de M. Stéphane Peu, CL258 de M. Ugo Bernalicis, CL493 de Mme Marietta Karamanli et CL 565 de M. Pascal Brindeau.

M. Stéphane Peu. Nous nous opposons au recours aux ordonnances s’agissant de sujets aussi sensibles pour le fonctionnement de notre fonction publique que la protection sociale complémentaire, les mi-temps thérapeutiques, les règles applicables à l’aptitude physique lors d’un recrutement. Il nous semble nécessaire que l’Assemblée nationale puisse en débattre.

Mme Danièle Obono. Le recours aux ordonnances pour réformer la couverture complémentaire des agents publics est totalement inopportun. La réforme des institutions médicales et des droits en matière de santé dans la fonction publique nécessite débats et concertations au Parlement.

Mme Marietta Karamanli. Nous nous opposons au recours aux ordonnances pour des questions essentielles qui touchent à la protection sociale complémentaire, à la santé, comme dans le présent article, ou encore à la négociation locale – article 5 – et à la formation – article 22. Dans la perspective de la réforme de notre Règlement et de la réforme constitutionnelle, il faut réaffirmer le rôle des parlementaires dans le débat démocratique.

M. Pascal Brindeau. Nous regrettons que des questions aussi importantes que la protection sociale complémentaire, la médecine préventive ou le reclassement ne puissent faire l’objet d’un débat parlementaire. Nous nous interrogeons sur la méthode retenue par le Gouvernement. Ce sont des questions auxquelles beaucoup d’études et de réflexions sont consacrées, y compris dans des rapports parlementaires. En outre, nous nous étonnons que tout au long de la phase de concertation qui a duré près d’un an et demi, le parcours professionnel des agents publics n’ait pas été pris en compte dans son intégralité dans les différents versants de la fonction publique. Il faudrait savoir pourquoi.

Par ailleurs, certaines ordonnances seront prises dans un délai de douze mois ; d’autres dans un délai de quinze mois. Or pour le sixième alinéa, aucun délai n’est prévu. J’aimerais savoir pourquoi.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’article 17 a pour objet d’habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance dans le domaine de la protection sociale complémentaire, des instances médicales et de la médecine agréée, du temps partiel thérapeutique et du congé pour maternité ou adoption.

Le champ de l’habilitation est certes vaste mais il est suffisamment précis. Le Conseil d’État n’a rien trouvé à redire à ce titre. Beaucoup de ces sujets ont été très largement balisés dans des rapports récents émanant de différentes inspections mais aussi dans le rapport de notre collègue Marie-Pierre Rixain consacré au congé maternité. Dans d’autre cas, le Gouvernement a diligenté des missions pour élaborer des diagnostics.

Tout cela justifie pleinement le recours aux ordonnances. Avis défavorable à ces amendements de suppression.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Tant la protection sociale complémentaire que la médecine et la santé au travail sont des sujets importants. La concertation ouverte il y a plus d’un an s’est d’abord concentrée sur les quatre thèmes fixés par le Premier ministre à l’issue du Comité interministériel de la transformation publique (CITP) du 1er février 2018. Ils ne prenaient pas en compte ces éléments mais cela ne nous a pas empêchés de travailler sur l’intégralité des parcours d’agents. Nous avons publié plusieurs décrets : sur le congé d’invalidité temporaire imputable au service pour permettre de mieux accompagner les agents ayant subi un accident du travail ; sur les périodes préparatoires au reclassement pour favoriser le maintien dans l’emploi de personnels déclarés inaptes. Par ailleurs, nous avons travaillé sur d’autres cheminements professionnels de l’ensemble des agents publics.

Avec Gérald Darmanin, nous avons demandé aux trois inspections générales de rédiger un rapport sur la protection sociale complémentaire. Il s’agissait de faire un état des lieux exhaustif de l’ensemble des situations, qui sont extrêmement hétérogènes. D’un versant à l’autre comme entre employeurs d’un même versant ou au sein d’un même employeur, il existe des différences. Nous avons aussi demandé que le rapport traite des écueils ou problèmes juridiques qui peuvent se présenter. Si nous allons vers un principe de participation obligatoire, il faut savoir si cela relèverait toujours de l’action sociale ou plutôt de la politique salariale, avec les effets que cela implique en termes de fiscalisation – le débat s’est posé dans le secteur privé. Nous avons souhaité également que soient étudiées les différentes possibilités : contrat groupe, contrat individuel, abondement labellisation. Le rapport nous sera remis prochainement et j’ai pris l’engagement qu’il serait transmis aux employeurs publics et aux partenaires sociaux ainsi qu’au Parlement.

Sur la question de la santé au travail, indépendamment de ce que j’ai déjà évoqué – j’aurais pu ajouter les dispositions de la loi du 5 septembre 2018 sur le handicap –, nous avons demandé à Charlotte Lecocq, députée du Nord qui a travaillé sur la santé au travail dans le secteur privé, d’élargir sa réflexion au secteur public pour formuler des propositions sur la prévention des risques psychosociaux, la capacité des employeurs publics à se doter de médecins de prévention – nous savons qu’il s’agit d’un important enjeu aujourd’hui –, la réforme des instances médicales et celle des outils permettant le reclassement et l’accompagnement des agents.

Si nous avons choisi de recourir aux ordonnances, c’est parce que nous avons besoin d’un temps de concertation supplémentaire. Nous savons les uns et les autres que les textes de loi sur la fonction publique ne sont pas fréquents. C’est une façon d’avancer sur ces sujets, de donner suite à un débat sans attendre un nouveau projet de loi.

S’il y a des délais différents pour les ordonnances, c’est pour une raison simple. C’est une demande qui a été formulée tant par les employeurs publics que par les organisations syndicales. Nous avons fixé ensemble les délais qui nous semblaient les plus opportuns, thème par thème. Pour le dialogue social, tout comme pour la protection sociale, le délai est plus long, compte tenu des impacts financiers, alors que pour d’autres habilitations, nous pourrons aller plus vite.

Enfin, j’ai indiqué hier que je souhaitais travailler sur les ordonnances non seulement avec les partenaires sociaux mais aussi avec les parlementaires de manière qu’il y ait une association qui aille plus loin que la simple ratification par le Parlement. Je sais pertinemment le sentiment de dépossession qu’entraîne chez les parlementaires le recours aux ordonnances. J’ai pu l’éprouver moi-même lors des deux quinquennats précédents, particulièrement lorsque j’étais dans la majorité – 280 ordonnances ont été alors publiées.

Il est nécessaire de donner du temps supplémentaire à la concertation puis de lui conférer une traduction législative.

Mme Marietta Karamanli. Monsieur le secrétaire d’État, nous avons écouté avec attention les arguments que vous avez avancés. Vous évoquez votre volonté de donner plus de temps à la concertation. Mais qu’en est-il des parlementaires de l’opposition ? Ils ne sont jamais associés. La concertation serait-elle donc menée uniquement au sein de la majorité ? Vous discutez bien avec les syndicats qui ne sont pas d’accord avec vous, pourquoi ne pas faire de même avec les parlementaires qui ne sont pas de votre bord ?

M. Pascal Brindeau. Monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous me répondre au sujet de l’alinéa 6 ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Monsieur Brindeau, les ordonnances visées au sixième alinéa, qui correspond au 5° du I, seront prises dans un délai de douze mois comme l’indique le II du même article : « Les ordonnances prévues aux 3°, 4° et 5° du I sont prises dans un délai de douze mois à compter de la publication de la présente loi. »

M. Stéphane Peu. Monsieur le secrétaire d’État, vous avez dit qu’il y aurait une consultation des parlementaires pour rédiger les ordonnances. À la suite de Marietta Karamanli, je vous demande lesquels.

Par ailleurs, conditionnez-vous la rédaction de ces ordonnances à un accord des organisations syndicales et un consensus sur leur contenu ? Ou est-ce comme pour la loi une simple consultation ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Tant Mme Karamanli que M. Peu ont posé la question de l’association des parlementaires. Je trouve que la mise en place d’un conseil de la réforme pour suivre la loi du 10 août 2018 pour un État au service d’une société de confiance (ESSOC) a été une bonne chose. Je suis ouvert à une association avec l’ensemble des parlementaires, qu’ils appartiennent à la majorité ou à l’opposition.

Il s’agira, monsieur Peu, de concertation et de consultation. Nous n’avons pas retenu la logique des accords majoritaires qui prévalaient pour les Accords de Bercy. Elle s’appliquera toutefois pour la conclusion du protocole d’accord sur l’égalité femmes-hommes que nous évoquerons tout à l’heure.

La Commission rejette les amendements.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL401 et CL402 de la rapporteure.

Puis elle est saisie de l’amendement CL403 de la rapporteure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Il s’agit également d’un amendement rédactionnel.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Il ne s’agit pas d’un simple amendement rédactionnel, à notre sens. La suppression des mots « et de médecine préventive » exclurait la possibilité de mutualisation des services de prévention, propre à la fonction publique d’État, avec ceux de la médecine préventive de la fonction publique territoriale. Les deux occurrences « médecine de prévention » et « médecine préventive » ont leur raison d’être : l’une relève de la FPE, l’autre de la FPT.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. En ce cas, je retire mon amendement.

L’amendement CL403 est retiré.

La Commission en vient à l’examen de l’amendement CL490 de M. Boris Vallaud.

Mme Marietta Karamanli. Par cet amendement, nous souhaitons préciser le contenu de l’ordonnance relative aux services de médecine de prévention et de médecine préventive, afin qu’elle garantisse l’amélioration et l’effectivité de la prise en charge de tous les agents en matière de médecine préventive.

Actuellement, la France ne compte que 4 900 médecins du travail pour assurer l’ensemble de la prise en charge des salariés du secteur privé et des agents publics et l’on peine à en recruter, du fait du manque d’attractivité de ce métier. Cet amendement vise donc à modifier la rédaction de l’alinéa 3 et à préciser qu’il faut « améliorer et rendre effective la prise en charge de tous les agents publics ». Cela doit passer par une politique volontariste de recrutement.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Nous partageons votre souhait d’une meilleure prise en charge des agents publics, mais la rédaction que vous proposez aurait pour effet de restreindre le champ de l’ordonnance. Je vous invite donc à retirer votre amendement.

Mme Marietta Karamanli. Nous améliorerons cette rédaction !

L’amendement CL490 est retiré.

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL404 et CL405 de la rapporteure.

Elle en vient à l’examen de l’amendement CL491 de Mme Marietta Karamanli.

Mme Marietta Karamanli. Cet amendement vise à préciser que l’ordonnance qui étendra les possibilités de recours au temps partiel pour raison thérapeutique pourra permettre l’octroi de ce dernier sans condition d’arrêt maladie préalable.

Cette possibilité a déjà été donnée aux assurés du régime général par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019. Il s’agit de l’étendre.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. C’est effectivement une bonne idée et l’étude d’impact du projet de loi fait bien référence au PLFSS : cette extension sera donc prévue par l’ordonnance. Votre amendement étant satisfait, je vous invite à le retirer.

Mme Marietta Karamanli. Puisque je n’ai pas vu l’ordonnance, je le maintiens.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL406 et CL407 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 17 modifié.

La réunion, suspendue à onze heures quarante, est reprise à onze heures cinquante.

Après l’article 17

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL599 de M. Stéphane Mazars et CL777 de M. Sacha Houlié.

M. Sacha Houlié. Mon amendement est complémentaire de celui que j’ai présenté hier, et un peu plus ambitieux, puisque son objectif est que les collectivités territoriales prennent davantage en compte, dans leurs délibérations, les politiques de prévention, de santé et de protection sociale. Il propose d’intégrer à la section d’investissement du budget des collectivités les dépenses qu’elles engagent au titre de la prévention, de la santé et de la protection sociale des agents.

Parce que l’article 40 de la Constitution ne nous permet pas de proposer l’application immédiate de cette mesure, nous demandons, dans un premier temps, que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur les effets économiques qu’elle aurait.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Plusieurs d’entre vous ont soulevé cette question et nous avons également été sollicités par quelques employeurs publics territoriaux, qui demandent à faire sortir des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales, dont chacun sait qu’elles sont très strictement encadrées, les dépenses en matière de santé. Je crois que c'est avant tout aux collectivités de faire les bons choix en la matière et d’assumer ainsi leurs responsabilités vis-à-vis de leurs personnels. Mais vous pouvez fort bien, en tant que parlementaires, vous saisir de cette question sans demander un rapport au Gouvernement. Avis défavorable

M. Sacha Houlié. J’aimerais que l’on travaille sur cette question, mais l’article 40 nous en empêche. Je retire néanmoins mon amendement.

Les amendements sont retirés.

La Commission examine l’amendement CL789 de M. Philippe Vigier.

M. Paul Molac. Cet amendement concerne le jour de carence. Le rapport Bérard-Oustric-Seiller relatif aux arrêts de travail a été rendu au Premier ministre le 20 février. L’une de ses recommandations phares est d’instaurer une égalité de traitement entre la fonction publique et les employeurs privés quant à l’application du jour de carence : un jour pour tous, non compensable par les institutions de prévoyance.

Aujourd’hui, les fonctionnaires sont finalement moins bien traités que les salariés du privé, puisqu’on estime que le jour de carence ne s’applique qu’à 20 % de ces derniers. Pour les 80 % restants, il est directement couvert par l’entreprise. Les fonctionnaires se voient donc appliquer des conditions plus difficiles que dans le privé. L’article 40, encore une fois, nous oblige à demander un rapport sur la question.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

Article 18 (art. 7-1 et 136 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale) : Harmoniser le temps de travail dans la fonction publique territoriale

La Commission est saisie des amendements identiques CL118 de M. Stéphane Peu, CL259 de M. Ugo Bernalicis et CL566 de M. Pascal Brindeau.

M. Stéphane Peu. C’est tout de même un beau hasard que Le Figaro, dont l’estime pour la fonction publique est bien connue, ait publié, la veille de la présentation de ce projet de loi en conseil des ministres, un rapport de l’Inspection générale des finances (IGF) sur le temps de travail des fonctionnaires. En réalité, personne n’est dupe et tout le monde sait bien que ce calendrier ne doit rien au hasard.

Le rapport de l’IGF a immédiatement été contesté, aussi bien pour sa méthodologie que pour les conclusions rapides qu’il proposait. Un rapport de la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (DARES) sur le temps de travail des fonctionnaires – qui exclut les enseignants, parce que leur temps de travail obéit à des modes de calcul particuliers – montre que les fonctionnaires travaillent, en moyenne, 1 637 heures par an à temps complet, ce qui est supérieur à la durée légale, fixée à 1 607 heures.

Avec cet article, vous voulez imposer aux collectivités locales de revenir sur des accords qu’elles ont conclus en matière de temps de travail.

Premièrement, cela remet en cause le principe de l’autonomie de gestion des collectivités locales. Deuxièmement, si l’on entre un peu dans le détail de ces accords locaux, on s’aperçoit qu’ils ont souvent été dictés par les nécessités de l’organisation du service ou par la prise en compte de la pénibilité du travail, notamment pour certains agents de catégorie C. Nous sommes donc farouchement opposés à la remise en cause de ces accords. Enfin, votre focalisation sur le temps de travail des fonctionnaires est une manière de les jeter en pâture à l’opinion et de décrier, encore un peu plus, la fonction publique. Malgré toutes ces campagnes de dénigrement, un sondage paru ce matin montre qu’elle reste très largement reconnue et appréciée par nos concitoyens.

Pour toutes ces raisons, nous demandons, par l’amendement CL118, la suppression de cet article.

Mme Danièle Obono. Notre amendement CL259 vise également à supprimer l’article 18. Celui-ci s’inscrit dans une stratégie globale du Gouvernement pour augmenter le temps de travail, comme les récentes déclarations du Président de la République l’ont confirmé. Celui-ci ne cesse en effet de répéter que les Françaises et les Français travaillent moins que leurs voisins, ce qui n’est pas vrai.

Les Françaises et les Français travaillent déjà beaucoup et produisent énormément de richesses, dans le secteur privé, mais aussi dans le service public, qui constitue un pan essentiel de l’économie, par les services et les activités productives qui y sont rattachés. Si l’on veut avoir une vraie réflexion sur la question du temps de travail, il faut commencer par prendre en compte, y compris dans la fonction publique, le problème des dérogations abusives, de la surcharge de travail qui est parfois imposée aux travailleurs et de la souffrance au travail.

Cela vaudrait mieux que vos tentatives de remise en cause du travail et de l’engagement des fonctionnaires. Sous couvert d’harmoniser la durée de travail dans la fonction publique territoriale en supprimant les régimes dérogatoires antérieurs à la loi de 2001, vous cherchez en réalité à supprimer des équivalents temps plein annuels travaillés (ETPT) dans la fonction publique. C’est pourquoi nous demandons la suppression de cet article.

M. Pascal Brindeau. L’amendement CL566 vise également à supprimer l’article 18.

De deux choses l’une : ou bien le Gouvernement considère qu’il faut que les collectivités territoriales soient soumises à la règle des 1 607 heures, auquel cas il doit prendre ses responsabilités et imposer cette règle en l’inscrivant dans le marbre de la loi ; ou bien il laisse la liberté aux collectivités territoriales de déroger à cette règle, soit parce que des accords ont été conclus avant 2001, soit parce que des sujétions particulières commandent une organisation du travail différente.

La solution que vous avez choisie, qui consiste à imposer aux collectivités la renégociation des accords déjà signés et, qui plus est, dans l’année suivant le renouvellement électoral, semble difficile à envisager du point de vue du dialogue social. Que les élections entraînent un changement de majorité ou qu’elles reconduisent l’équipe sortante, dans les deux cas, il sera très difficile d’engager aussitôt, avec les organisations syndicales, une concertation sur un sujet aussi polémique.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je ne vais pas me lancer dans une discussion sur les méthodes de travail et de calcul de l’Inspection générale des finances et de la Cour des comptes.

Dans la fonction publique territoriale, la règle des 1 607 heures s'applique sur la base de l'article 1er du décret du 12 juillet 2001, pris en application de l'article 7-1 de la loi du 26 janvier 1984, relatif à l'aménagement et à la réduction du temps de travail dans la fonction publique territoriale.

L'article 7-1 précise ainsi que « les règles relatives à la définition, à la durée et à l'aménagement du temps de travail des agents des collectivités territoriales et des établissements publics mentionnés au premier alinéa de l'article 2 sont fixées par la collectivité ou l'établissement, dans les limites applicables aux agents de l’État, en tenant compte de la spécificité des missions exercées par ces collectivités ou établissements. »

Pour ne pas méconnaître le principe de libre administration des collectivités territoriales, les règles relatives au temps de travail sont fixées par délibération des collectivités, dans les limites applicables à la fonction publique de l’État.

Par dérogation aux règles de droit commun, le même article 7-1 de la loi du 26 janvier 1984 prévoit néanmoins la possibilité de maintenir des régimes de travail inférieurs à la durée légale, à la double condition qu'ils aient été mis en place antérieurement à l'entrée en vigueur de la loi du 3 janvier 2001 relative à la résorption de l'emploi précaire et à la modernisation du recrutement dans la fonction publique territoriale, et que cette dérogation ait été formalisée par une décision expresse de l'organe délibérant de la collectivité, après avis du comité technique.

Il ne s'agit donc pas de nier la pénibilité, les horaires atypiques ou la libre administration des collectivités locales, mais simplement de faire appliquer la loi. Les Français, en effet, ne comprennent pas les différences de traitement injustifiées. Mon avis est donc défavorable sur ces trois amendements.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Je suis également défavorable à ces amendements, pour les raisons que je vais exposer.

Premièrement, la loi sur la réduction du temps de travail a autorisé, par son article 7-1, les collectivités ayant conclu des protocoles d’accord avant 2001 à les maintenir en vigueur avec une durée inférieure à 1 607 heures tant qu’ils ne seraient pas révisés. Les chambres régionales des comptes, dans les examens des comptes des collectivités auxquels elles procèdent régulièrement, pointent cette disposition et soulignent que certaines collectivités ont un temps de travail inférieur à 1 607 heures. De très nombreuses collectivités ont pris les devants et renégocié leurs protocoles pour revenir à 1 607 heures, mais d’autres ne l’ont pas fait. Nous proposons, par la loi, d’amener toutes les collectivités à délibérer sur ce sujet dans un délai d’un an à compter, non pas de la promulgation de la loi, mais du renouvellement de l’assemblée délibérante. Nous partons du principe que le travail pourra être engagé entre la promulgation du texte et le renouvellement de l’assemblée délibérante mais que ce dossier, qui est assez engageant, est plutôt un dossier de début de mandat. Nous veillerons, dans ce cadre, à ce que l’ensemble des sujétions particulières que M. Stéphane Peu a évoquées – le travail fractionné, le travail le week-end ou de nuit – soit pris en compte. Nous ne prétendons pas imposer 1 607 heures à tout le monde de manière brutale : comme dans le secteur privé, il sera tenu compte des sujétions propres à certains emplois.

Deuxièmement, certains d’entre vous ont évoqué le rapport de l’IGF sur le temps de travail qui porte, je le rappelle, sur la fonction publique d’État, alors que l’article 18 concerne la fonction publique territoriale. Ce rapport écarte de son analyse les personnels qui ont un rythme ou un temps de travail particuliers, qu’il s’agisse des personnels en uniforme ou des enseignants : au total il porte sur 1,1 million des 2,3 millions d’agents que compte l’État. Sur ce 1,1 million, 330 000 ne travaillent pas 1 607 heures : 190 000 d’entre eux se trouvent dans cette situation parce qu’ils sont soumis à des sujétions particulières que nous ne remettons pas en cause, mais 120 000 autres agents sont dans cette situation pour des raisons qui s’expliquent moins, voire pas du tout. Le Gouvernement est évidemment prêt à faire appliquer la loi dans ses propres services, comme il demande qu’elle soit appliquée dans les collectivités territoriales. C’est la raison pour laquelle nous avons choisi cette méthode.

J’ajoute que, parallèlement à ce projet de loi, nous aurons l’occasion d’ici l’année prochaine, dans le cadre réglementaire – parce que cela relève du règlement – de proposer aux représentants des employeurs et aux organisations syndicales un projet de décret pour harmoniser les autorisations spéciales d’absence en raison d’un mariage, du décès d’un proche ou de l’arrivée d’un enfant. Aujourd’hui, les règles sont extrêmement différentes d’un employeur à l’autre et nous pensons que ce serait une mesure d’équité et d’égalité que de fixer le nombre de jours d’absence spéciale auquel un agent public peut prétendre à l’occasion d’un événement familial. Avis défavorable.

M. Olivier Marleix. Je dois dire que le décalage entre la nature de nos débats et la question que nous devrions réellement affronter me fait un peu sourire. J’ai l’impression, tel Hibernatus, de me réveiller après vingt ans de sommeil : et, vingt ans après, la seule ambition de M. Gérald Darmanin, c’est de faire appliquer la loi « Aubry ». C’est assez stupéfiant ! Sans doute est-ce la conséquence de quelque tropisme lillois, mais ce n’est pas du tout ce qui devrait nous préoccuper… L’urgence, c’est de réduire la dépense publique en travaillant plus. Certaines collectivités locales, certains départements sont déjà revenus à un temps de travail de trente-neuf heures dans la fonction publique. On a connu des époques où le recours aux heures supplémentaires était massif et où le temps de travail pouvait aller bien au-delà de trente-cinq heures. Débattre aujourd’hui de l’application de la loi Aubry est parfaitement ubuesque.

Avec cet article, vous faites des rodomontades, vous montrez du doigt les collectivités locales – plus que l’État, d’ailleurs – pour donner l’impression que vous êtes des réformateurs mais, en réalité, vous ne réformez rien. Vous avez renoncé à réformer réellement la fonction publique, vous avez renoncé à trouver des moyens de faire travailler davantage les agents publics. Cela doit évidemment se faire dans le dialogue social en imaginant des contreparties, comme l’amélioration de la couverture des complémentaires de santé, qui est une vraie question pour les catégories C. Mais vous ne réformez rien, ni au niveau des collectivités locales, ni au niveau de l’État.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Monsieur Marleix, votre famille politique et vous-même souhaitez faire travailler les fonctionnaires trente-neuf heures. La question que je souhaite vous poser est la suivante : voulez-vous les faire travailler trente-neuf heures payées trente-cinq ou trente-neuf heures payées trente-neuf ?

M. Olivier Marleix. Ce que nous proposons, c’est le retour aux trente-neuf heures dans le cadre du dialogue social. Il faut qu’il y ait une concertation et que l’on propose des contreparties. Mais ne faisons pas croire aux Français que notre objectif est de faire appliquer les trente-cinq heures. Vous ne vous rendez pas compte du décalage entre ce débat et la réalité ! Vous êtes censé, monsieur le secrétaire d’État, faire partie d’un gouvernement libéral et réformateur mais, sur ce sujet, vous ne l’êtes pas. À titre personnel, en tout cas, vous restez un parfait socialiste – et je le dis avec beaucoup de respect. Cette position idéologique me surprend davantage de la part de M. Gérald Darmanin.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Tropisme lillois pour tropisme lillois, « quand c’est flou, c’est qu’il y a un loup »… (Sourires.)

La Commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l’amendement rédactionnel CL408 de la rapporteure.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CL567 de M. Pascal Brindeau et CL590 de M. Yannick Favennec Becot, ainsi que les amendements identiques CL67 de M. Éric Poulliat et CL494 de Mme Marietta Karamanli.

M. Pascal Brindeau. L’amendement CL567 vise à accorder un délai plus long aux collectivités locales pour renégocier les accords sur le temps de travail : nous proposons de leur laisser deux ans à compter du renouvellement général des assemblées délibérantes. Ce délai paraît plus sain du point de vue du dialogue social. Vous nous avez dit, monsieur le secrétaire d’État, que les collectivités pourront mettre à profit le temps qui s’écoulera entre la promulgation de la loi et les élections municipales pour commencer à travailler sur cette question. Cette approche me paraît très théorique : vous savez très bien, pour avoir été un élu local, que plus on s’approche de l’échéance municipale, moins on est tenté d’ouvrir des dossiers explosifs, particulièrement avec les partenaires sociaux.

M. Yannick Favennec Becot. Dans le même esprit que l’amendement précédent, notre amendement CL590 propose de fixer ce délai à dix-huit mois. C’est une mesure de prudence vis-à-vis des nouvelles équipes qui arriveront l’année prochaine dans les mairies : ce délai d’un an risque d’être trop court et de les mettre dans une situation difficile.

M. Éric Poulliat. Comme cela a déjà été dit, le délai d’un an accordé aux collectivités en vue de l’harmonisation du temps de travail à 1 607 heures paraît trop court pour permettre aux nouvelles équipes élues de négocier dans de bonnes conditions de nouveaux accords en matière de temps de travail. De plus, les nouveaux régimes de temps de travail, qui seront susceptibles d’avoir un impact budgétaire et comptable, ne peuvent pas entrer en application à n’importe quelle date de l’année.

C’est pourquoi l’amendement CL67 prévoit, d’une part d’allonger à dix-huit mois le délai laissé aux collectivités après les renouvellements généraux de leurs assemblées pour définir de nouvelles règles relatives au temps de travail, d’autre part de différer l’application de ces nouvelles règles, dans tous les cas, au 1er janvier qui suivra leur adoption, afin d’aligner les calendriers budgétaires avec le dialogue social.

Mme Marietta Karamanli. Mon analyse est exactement la même que celle de M. Éric Poulliat : un délai plus long introduirait un peu de souplesse. Les collectivités qui seront prêtes pourront appliquer les nouveaux accords dès le 1er janvier 2021, mais un délai supplémentaire de six mois pourra, dans certains cas, faciliter la discussion et la préparation de cette mesure. Tel est l’objet de l’amendement CL494.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. À ce stade, je souhaite que l’on en reste à la rédaction du texte. Avis défavorable sur les trois amendements.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Même avis. Je précise qu’entre la promulgation de la loi et le renouvellement, plusieurs mois s’écouleront, qui pourront être consacrés à la préparation de cette mesure. Et l’année qui suivra l’élection nous semble être un délai suffisant.

M. Pascal Brindeau. Et si les collectivités ne délibèrent pas dans l’année qui suit, que se passera-t-il ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Elles seront dans l’illégalité.

La Commission rejette successivement les amendements.

En conséquence, les amendements identiques CL68 de M. Eric Poulliat et CL868 de Mme Marietta Karamanli tombent.

La Commission examine l’amendement CL772 de M. Denis Masséglia.

Mme Danielle Brulebois. L'obligation de renégocier les accords locaux sur le temps de travail conclus antérieurement à l’adoption de la norme des 1 607 heures annuelles dans l’année qui suit le renouvellement des exécutifs fait l’impasse sur les raisons qui ont prévalu à la négociation de tels accords. Je songe à la pénibilité et aux sujétions particulières de certains emplois dans les collectivités et établissements publics locaux, tels que les services départementaux d’incendie et de secours (SDIS), les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) ou les services ouverts en continu, y compris la nuit et le week-end. Je songe également aux faibles marges de manœuvre financières et statutaires pour compenser la disponibilité et la souplesse en cas d’aléa, d’urgence ou d’événement exceptionnel.

Le temps de travail doit être réduit en tenant compte de la pénibilité pour préserver la santé des agents, comme c’est fort heureusement le cas depuis 2002 dans la fonction publique hospitalière. Cet amendement prévoit d’appliquer la définition du temps de travail qui figure dans le code du travail, à savoir trente-cinq heures par semaine, et de le réduire en cas de pénibilité et d’horaires atypiques.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cet amendement me semble trop prescriptif. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 18 modifié.

Après l’article 18

La Commission examine l'amendement 283 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Par cet amendement, issu d'une sollicitation de la CGT, nous proposons de mettre fin à l’inégalité de traitement constatée entre les agents des différents versants de la fonction publique et de mettre la France en conformité avec la charte européenne des droits sociaux en matière de droit à la grève.

Il s’agit de réinstaurer dans la fonction publique de l’État, les dispositions de l’article 2 de la loi du 19 octobre 1982, introduisant la possibilité de grève de courte durée au cours de la journée. Cette mesure permettrait en outre une meilleure ouverture des services publics aux usagers.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Nous ne partageons pas du tout ce souhait d'instaurer le droit de grève de courte durée dans la fonction publique d'État. Avis défavorable.

Mme Danièle Obono. Nous aurons la discussion en séance mais vous n'avez rien dit, madame la rapporteure. Nous vous relancerons sur le sujet en séance mais votre réponse est assez lamentable : défavorable parce que vous n’êtes pas d'accord et puis c'est tout. Les syndicats apprécieront. Ils ont déjà vu à quel point vous avez poussé au dialogue à l’occasion de la préparation de ce projet de loi.

La Commission rejette l'amendement.

Elle en vient à l’amendement CL495 de M. Boris Vallaud.

Mme Marietta Karamanli. Nous sommes partis du constat que de nombreux agents demandaient la possibilité de faire du télétravail. Cet amendement tend à permettre aux employeurs publics d'autoriser l'agent qui en fait la demande à effectuer une période ponctuelle de télétravail, après accord du chef de service. En l’état actuel de la réglementation, les employeurs ne peuvent pas répondre à ces demandes : on ne prend en compte que le télétravail effectué de manière régulière et durable. Si nous voulons accompagner la transformation et la modernisation des services, nous devons faciliter le télétravail ponctuel qui est compatible avec certaines missions.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Nous avons déjà largement débattu de ce sujet hier. Nous avons adopté un amendement sur le télétravail qui renvoie aux comités sociaux. En ce qui concerne le droit à la déconnexion, nous avons renvoyé à la séance pour avoir un dispositif qui maintienne les règles des services publics régaliens, notamment en matière de sécurité. Je demande le retrait de votre amendement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. La référence de l'amendement est la loi du 12 mars 2012 sur le télétravail effectué de manière régulière ou ponctuelle. Depuis 2017, la règle s'applique de manière inversée : l'accès au télétravail est de droit et il revient à l'employeur, public ou privé, de démontrer qu’il pose une difficulté. Les règles que nous imposons, y compris à nos propres services, font que votre demande est satisfaite depuis 2017, au moment où nous avons en quelque sorte inversé la charge de la preuve, s’agissant de l'intérêt d'avoir recours ou non au télétravail. En outre, nombre d'administrations proposent actuellement des dispositifs de télétravail et des jours flottants, ce qui caractérise la nature relativement irrégulière de la répartition, la seule limite étant la continuité du service et l'organisation qui préside à celle-ci.

Mme Marietta Karamanli. J'entends bien les explications de M. le secrétaire d’État mais il semble y avoir une différence entre la théorie et la pratique. Le sujet est revenu à plusieurs reprises lors des auditions. Je veux bien vous croire, monsieur le secrétaire d’État, mais la loi rencontre apparemment des difficultés d’application. Je vais donc maintenir mon amendement et nous reviendrons sur le sujet en séance pour le tirer au clair.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle passe à l’amendement CL285 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Danièle Obono. Par cet amendement, issu d'une sollicitation de la CGT, nous proposons de limiter l’interdiction du droit de grève, un droit constitutionnel.

Pour la majorité et même le secrétaire d’État, il semble que droit de grève ne soit qu’un inconvénient de plus dans la grande marche de la libération de toutes les énergies possibles. Néanmoins, nous pensons qu’il faudrait revoir les règles appliquées aux agents de l’administration pénitentiaire. Ces agents ont récemment exprimé des revendications, y compris sur un mode qui peut sembler très frontal et virulent. Une révision de la limitation du droit de grève pourrait permettre d’améliorer ces modes de revendication.

Tel est le sens de cet amendement sur lequel je suppose que la rapporteure n'aura absolument pas d'avis. Elle n’a d’avis sur rien et elle ne fait qu'exécuter ce qu'on lui demande.

M. Jean-François Eliaou. Oh !

Mme Danièle Obono. Nous le représenterons en séance afin d’interpeller au moins l'opinion publique à défaut d’avoir un avis de la majorité qui, de toute évidence, n’en a sur rien du tout.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Nous ne souhaitons pas revenir sur le champ du droit de grève et il n'a jusqu'alors pas été question de sujets sectoriels dans ce texte. Avis défavorable.

Mme Danièle Obono. Et le secrétaire d’État ?

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Il n'est pas obligé de donner un avis sur chaque amendement, comme vous avez pu le constater depuis deux jours.

Mme Danièle Obono. Il n’a pas d’avis sur la question ?

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Cela ne veut pas dire qu'il n'a pas d'avis, madame Obono. N'interprétez pas les pensées des uns et des autres, contentez-vous des vôtres…

La Commission rejette l'amendement.

Article 19 (art. 12-4, 14 et 18-2 [nouveau] de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale) : Fusion de centres de gestion et rapport annuel du centre national de la fonction publique territoriale au Parlement

La Commission examine les amendements identiques CL109 de M. Stéphane Peu et CL260 de M. Ugo Bernalicis.

M. Stéphane Peu. En présentant cet amendement de suppression de l’article 19, je voudrais insister sur deux aspects qui nous préoccupent.

Après la conférence de presse du Président de la République, nous avions compris que l'heure était venue de lier l'avenir de la fonction publique à une plus grande proximité avec les territoires. La possibilité de fusion des centres départementaux de gestion à une échelle régionale est, à l'évidence, une mesure tout à fait contraire au principe de proximité. Dans certains cas, cela peut aboutir à un fort éloignement des centres de gestion et donc à une réduction des possibilités de formation pour certains fonctionnaires. Cet article nous semble aller à l’encontre de la proximité tant vantée ces derniers temps.

En outre, ces fusions ne se font pas obligatoirement à moyens constants. Au contraire, on sent une logique budgétaire de réduction des moyens.

Pour au moins ces deux raisons – accroissement de l’éloignement et réduction des moyens –, nous proposons la suppression de cet article.

Mme Danièle Obono. Cet article permet aux centres de gestion départementaux volontaires et situés dans la même région de fusionner, créant ainsi un centre interdépartemental de gestion qui se substituerait à eux.

Sur la base du volontariat mais sans garantie pour les usagers et les employés, le Gouvernement souhaite une nouvelle fois utiliser la recette miracle des synergies et autres formules vides de sens et surtout de vision politique, pour diminuer les emplois publics sans garantie d’amélioration du service public.

Étant donné la taille des régions actuelles, ces centres interdépartementaux pourraient avoir à traiter une surface géographique immense. Cet article ne correspond pas à la réalité du terrain auquel vous prétendez être si fortement attachés.

Pour toutes ces raisons, nous proposons sa suppression.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. La mutualisation des missions des centres de gestion se fait de façon assez hétérogène sur le territoire. Or là où ils ont mutualisé leurs missions, ils sont désormais capables de développer des expertises pointues dans certains domaines et d'offrir ainsi des services de plus grande qualité aux collectivités et à leurs agents.

Il s'agit d'aller plus loin que la simple mutualisation en rendant possible – et non pas obligatoire – la fusion, selon le modèle éprouvé des centres interdépartementaux de la région Île-de-France.

L'introduction dans la loi de cette faculté nouvelle est donc de nature à encourager les centres à s'inscrire dans une dynamique de rapprochement plus grande.

Cette proposition figurait dans le rapport sur la formation et la gestion des carrières des agents des collectivités territoriales, remis par nos collègues Jacques Savatier, député de la Vienne, et Arnaud de Belenet, sénateur de Seine-et-Marne, au Premier ministre, le 12 février dernier.

Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. J'ajoute que l’une des premières applications de cette fusion sur la base du volontariat – la rapporteure a eu raison d’y insister –, concernera le rapprochement des deux centres de gestion du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, dans le cadre de la mise en place de la nouvelle collectivité d'Alsace.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle examine l’amendement CL69 de M. Éric Poulliat.

M. Éric Poulliat. L'article 19 inscrit dans la loi l’obligation pour le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) de remettre au Parlement un rapport annuel sur son activité et sur l’utilisation de ses ressources. La délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation propose que ce rapport consacre des développements spécifiques aux formations dispensées en formation initiale et continue, et en matière de déontologie.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. C’est une excellente proposition. Avis favorable.

La Commission adopte l'amendement.

Elle en vient à l’amendement CL892 de la rapporteure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cet amendement vise à encourager la coordination au niveau régional des centres de gestion.

Pour l’exercice de leurs missions organisées à un niveau au moins régional, les centres de gestion élaborent actuellement une charte qui désigne le centre chargé de la coordination et qui détermine les modalités d'exercice des missions gérées en commun.

Il est proposé de remplacer cette charte par un schéma régional ou interrégional de coordination, de mutualisation et de spécialisation.

Cette proposition, issue du rapport d'information du Sénat de juin 2018 sur les enjeux de l'évolution de la fonction publique territoriale, renforce, tout en ne modifiant pas la structure actuelle du réseau des centres de gestion, la collaboration entre les centres de gestion d'un même ressort territorial.

Ainsi, ce schéma précisera quelles sont les missions exercées par le centre coordonnateur pour le compte des autres centres et les missions exercées par un ou plusieurs centres pour le compte des autres. Il définira également les moyens mis en commun pour l'exercice des missions régionalisées.

Cette proposition permet, tout en conservant la proximité des territoires, de soutenir le mouvement de mutualisation et de spécialisation des expertises et la qualité des prestations des centres de gestion.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Je suis favorable à cet amendement ainsi qu’aux amendements CL890 et CL891 de la rapporteure. En application des propositions du rapport Savatier-Belenet, ils contribuent à mieux structurer les centres de gestion au niveau régional et à les mettre dans une relation contractualisée ou conventionnelle avec les délégations régionales du CNFPT. De cette façon, ils favorisent la création de trois têtes de pont matière fonction publique : l'agence régionale de santé (ARS) pour la fonction publique hospitalière, des plateformes régionales de ressources humaines pour l'État, et le binôme CNFPT-centres de gestion à l'échelle de chaque région.

M. Pascal Brindeau. Mon intervention va apparaître un peu comme une discussion générale sur le sujet du CNFPT et des centres de gestion. Si je comprends la logique de mutualisation et de regroupement des centres de gestion, je trouve que c'est presque un acte manqué. Le projet pourrait être plus ambitieux en matière de rapprochement. Les missions du CNFPT et des centres de gestion peuvent se chevaucher. Dans un rapport, l’Inspection générale des finances avait envisagé la fusion en un même établissement public. C’était une hypothèse parmi d'autres pour éviter que certaines de ces missions soient parfois presque concurrentielles. Il est faux d'imaginer que le CNFPT ne s’occupe que de formation et les centres de gestion seulement de la gestion des carrières des fonctionnaires publics territoriaux. Certaines missions sont communes. Elles ont parfois été retissées un peu dans un texte de 2017.

Je n’ai pas eu le temps de rédiger des amendements sur le sujet avant l’examen en Commission mais je le ferai sans doute pour la séance. Il est important que nous ayons un débat sur cette logique de mutualisation et sur la création éventuelle d’un grand établissement public unique pour gérer la totalité du parcours professionnel des agents publics territoriaux.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. En prévoyant une convention de répartition des compétences et l'articulation des compléments entre le CNFPT et les centres de gestion, région par région, l’amendement CL891 de la rapporteure contribue à l’atteinte de votre objectif. Il permet une adaptation au niveau de chaque région, en fonction de la taille et des problématiques d'emploi des territoires.

Quant au rapport de l’Inspection générale des finances, il écarte le principe de la fusion en tant que telle, pour des raisons de coût et d’organisation. En caricaturant un peu, les cendres de gestion, au niveau départemental, ressemblent à un syndicat d'élus administrant un service à destination des collectivités, alors que le CNFPT est organisé de manière paritaire avec un établissement public national. La fusion de deux modèles aussi différents serait à la fois longue, complexe et coûteuse. Le mieux risque d’être l'ennemi du bien. La clarification région par région, proposée par l’amendement CL891, nous paraît plus opportune.

La Commission adopte l'amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL890 de la rapporteure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Toujours dans la même logique de régionalisation, cet amendement vise à introduire l'obligation pour le centre de gestion coordonnateur à un niveau au moins régional de conventionner avec le CNFPT, afin d'articuler leurs actions territoriales.

Sont plus particulièrement visés par ces conventions : le domaine de l'organisation des concours et des examens professionnels mis en œuvre par les centres de gestion pour les catégories A, B et C et par le CNFPT pour la catégorie « A+ » ; la prise en charge des fonctionnaires momentanément privés d'emploi ; le reclassement des fonctionnaires devenus inaptes ; le domaine relatif à l'emploi territorial.

La Commission adopte l'amendement.

Puis elle examine l’amendement CL891 de la rapporteure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Toujours selon la même logique, cet amendement vise à compléter la liste des missions qui peuvent être confiées aux centres de gestion au niveau régional.

Cet élargissement correspond à des missions qui peuvent être exercées à un niveau régional car faisant appel à une expertise assez pointue et qui ne nécessite pas une proximité départementale.

On y trouve notamment, nous en avons longuement parlé, une mission d'appui aux référents déontologues.

La Commission adopte l'amendement.

Puis elle examine l’amendement CL791 de M. Philippe Vigier.

M. Yannick Favennec Becot. Un centre de gestion de département, c’est un centre de ressources essentiel pour les collectivités. Permettre sa fusion avec un centre de gestion d'un département limitrophe ou en un centre interdépartemental unique compétent sur les territoires des centres de gestion auxquels il se substitue, revient à isoler davantage les collectivités et à fragiliser la fonction publique territoriale. Le caractère volontaire de cette fusion ne change rien au risque qui existe pour les collectivités territoriales et pour la fonction publique territoriale. Pour nous, membres du groupe Libertés et Territoires, la proximité est source d'efficacité. C'est pourquoi nous proposons la suppression de cette mesure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. La fusion n'est jamais une obligation mais elle me semble indispensable pour disposer d'expertises plus pointues et rendre ainsi un meilleur service aux collectivités, notamment aux plus petites. C'est tout le sens de cet article et de ce que nous venons d'adopter. Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL409 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 19 modifié.

Article 20 (art. 4, 6, 19 et 79 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) : Simplification de certaines mesures relatives à la gestion des emplois de la fonction publique hospitalière

La Commission est saisie de l'amendement CL261 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. C’est un amendement de suppression car nous nous opposons à la mise en concurrence des hôpitaux à travers une contractualisation et une gestion déconcentrée des fonctionnaires hospitaliers.

Cet article 20 prévoit la possibilité de recruter par contrat pour les emplois supérieurs hospitaliers, qui n’ont pas obligation d’être organisés en corps, ce qui ouvre la voie à la fin de l’École des hautes études en santé publique (EHESP) pour que les emplois supérieurs hospitaliers soient occupés par des contractuels chasseurs de coûts.

Il prévoit aussi la déconcentration de la gestion des corps et emplois autres que ceux des personnels de direction et des directeurs et directrices de soin, permettant au gestionnaire d’un établissement de recruter et gérer les praticiens hospitaliers de manière très libre car même les mutations n’auront plus besoin de passer par le niveau central, avec le risque inhérent de ne plus avoir une bonne répartition sur le territoire selon les besoins.

Nous estimons qu’une gestion nationale est une garantie d’égalité et de bonne affectation sur le territoire national. Cette gestion de plus en plus liée aux établissements met en concurrence les établissements de santé et ne garantit pas une bonne allocation sur le territoire national, alors qu’il existe des difficultés de recrutement dans des déserts médicaux et que le secteur hospitalier est mobilisé depuis plusieurs mois sur ces difficultés que vous allez accentuer avec cet article.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Nous avons déjà longuement débattu de la contractualisation lors de l’examen de l'article 7.

Il s'agit ici d'en assurer la bonne application dans la fonction publique hospitalière. Ce sont ainsi 81 emplois, actuellement dévolus à des directeurs d'hôpital, qui seraient ouverts à des contractuels, portant le total des postes ouverts à 365 emplois.

Pour ce qui concerne le deuxième point, il s'agit de déconcentrer, dans un souci de simplification, certains actes de gestion des emplois de direction du centre national de gestion vers les établissements eux-mêmes.

La gestion des carrières de près de 5 000 directeurs nécessite en effet la production massive, chaque année, de décisions individuelles ou collectives par le centre national de gestion.

Il n'apparaît pas pertinent que des décisions sans véritable incidence sur la carrière des agents soient centralisées au niveau national.

Je ne vois donc là rien qui soit de nature à renforcer la concurrence entre les établissements de santé.

Avis défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l’article 20 sans modification.

Après l’article 20

La Commission est saisie des amendements CL310 et CL311 de M. Sacha Houlié.

M. Sacha Houlié. L’amendement CL311 a pour objet d’élargir la faculté ouverte aux centres hospitaliers universitaires de créer des filiales pour assurer des prestations de service qui ne sont pas les missions premières du service public hospitalier, par le biais de services publics industriels et commerciaux.

L’amendement CL310 précise le cadre d’exercice des services industriels et commerciaux pour les établissements publics de santé, en leur offrant la possibilité de recruter des personnels avec des contrats de droit privé.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Dans ce texte, nous évitons les dispositions sectorielles. L’amendement CL311 ne me semble pas être le meilleur véhicule législatif pour parler de ce sujet.

S’agissant de l’amendement CL310, les établissements de santé qui ont le statut d’établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) peuvent déjà recruter selon les dispositions du code du travail.

C’est pourquoi je demande le retrait de ces amendements. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Même avis. Ce débat a eu lieu pendant la préparation ou l'examen de la loi santé. La conclusion avait à peu près la même que celle que la rapporteure propose.

M. Sacha Houlié. Je vais les retirer mais je tiens à apporter une précision. Il y a plusieurs établissements publics administratifs, notamment l'Agence de la biomédecine, l'Établissement français du sang (EFS) et l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES). En leur qualité d’établissements publics administratifs, ils peuvent recruter sous des statuts de droit privé. C’était une manière d’élargir cette possibilité.

Les amendements sont retirés.

La Commission examine l’amendement CL312 de M. Sacha Houlié.

M. Sacha Houlié. Cet amendement tend à rendre efficace le contrôle qui s’exerce pour vérifier que les fonctionnaires hospitaliers respectent l'interdiction du cumul d'activités. Pour compléter leurs revenus, certains agents dont les revenus sont modestes, notamment quand ils ont des emplois à temps partiel subi, cherchent une autre activité, ce qui est interdit. Les établissements de santé ont des difficultés à exercer un contrôle effectif. Il est proposé qu’ils puissent demander des données à l’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) pour éviter l'embauche de personnels qui ont déjà un emploi et ainsi mieux protéger leurs patients.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Ce sujet nous préoccupe tous mais, lors de l'examen du projet de loi relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé, il y a quelques semaines, notre assemblée a déjà rejeté cette proposition qui soulève de nombreuses difficultés. Demande de retrait ou avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Même avis. La proposition de M. Houlié fait écho à des réflexions menées notamment par le directeur général de l'Assistance publique Hôpitaux de Paris. L’objectif de détection des cas de fraude peut être partagé mais l’accès aux fichiers de l'URSSAF, tel que vous le proposez, nous pose des difficultés de méthode ou de traitement de données.

La Commission rejette l’amendement.

   titre Iv

   FAVORISER LA MOBILITé et accompagner les transitions professionnelles des agents publics

Chapitre Ier
Formation, mobilité

Avant l’article 21

La Commission examine l’amendement CL25 de M. Olivier Marleix.

M. Olivier Marleix. Parmi les réformes que vous ne faites pas, monsieur le secrétaire d’État, figure la fusion des corps. Vous prétendez simplifier la gestion de la fonction publique mais elle restera compliquée du fait de la multiplicité des quelque cinq cents corps qui composent les trois versants, véritables freins à une mobilité qui serait plus naturelle si le nombre de corps était réduit.

L’amendement CL25 vise à ouvrir le débat ; il est issu de propositions figurant dans le Livre blanc sur l’avenir de la fonction publique rédigé par Jean-Ludovic Silicani et remis à Éric Woerth. L’idée est d’enclencher une réforme systémique – pour reprendre un terme que le Gouvernement aime employer – de la fonction publique en créant notamment des corps transversaux qui permettraient aux agents de passer plus facilement d’un versant à l’autre. En effet, votre projet de loi est paradoxal : intégrer la fonction publique de l’État sera plus facile pour un employé du secteur privé que pour un agent de la fonction publique territoriale. Cet amendement vous invite à mener une réforme plus ambitieuse.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis très sensible à l’objectif de cette proposition. J’espère que cette question sera abordée dans le cadre des travaux de la mission Thiriez, annoncée par le Président de la République, non seulement s’agissant de la haute fonction publique mais aussi sur le plan statutaire. Sur le fond, nos positions sont proches, monsieur Marleix, ce qui me semble être plutôt une bonne chose. J’émets naturellement un avis défavorable à l’amendement en l’état, mais la question doit être posée.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL568 de M. Pascal Brindeau.

M. Pascal Brindeau. Cet amendement invite à envisager la fonction publique de manière globale sans se cantonner aux cinq chapitres du projet de loi, dont les contours ont été définis préalablement. Il vise – c’est une proposition parmi d’autres – à rendre obligatoire la tenue d’un entretien à mi-carrière pour évaluer les souhaits, les perspectives et les besoins de formation – voire de conversion – de l’ensemble des agents et pour envisager la deuxième partie de leur carrière. Il s’agit de tenir compte de la gestion des âges de la vie dans la fonction publique et de donner aux agents des trois versants la possibilité de se projeter vers son parcours professionnel dans son ensemble. La linéarité des carrières qui prévalait encore il y a quelques années a presque disparu et n’existera évidemment plus dans les années à venir.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cette proposition est très intéressante mais elle est de portée réglementaire. Je vous propose de retirer l’amendement ; à défaut, avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. La proposition peut être partagée mais, au-delà de son caractère réglementaire, j’ai une difficulté avec la fixation de l’entretien en question à l’âge de quarante-cinq ans, car ce n’est pas forcément l’âge de la vie le plus approprié selon les carrières. Deux dispositions sont susceptibles d’atteindre votre objectif : la première consiste à supprimer la notation et à généraliser l’entretien annuel d’évaluation professionnelle. La seconde est liée à une habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance ; je pressens donc les critiques dont elle pourra faire l’objet. Quoi qu’il en soit, nous avons intégré à la concertation syndicale la définition de modalités d’accès particulières à un droit à la formation renforcé – un plan investissement compétences (PIC) pour la fonction publique, en quelque sorte, même si l’analogie n’est pas adaptée – à l’intention des agents qui ont reçu la formation initiale la plus faible et qui sont les plus exposés au risque de reclassement, des agents en situation de handicap qui connaissent des difficultés particulières de maintien dans l’emploi, et des agents occupant des postes à usure professionnelle liés à la notion de pénibilité. Le fait que ces trois paramètres fassent partie du champ de la négociation nous permettra de les intégrer dans l’ordonnance avec davantage de souplesse qu’un entretien unique en milieu de carrière tel que vous le proposez. Je vous demande donc de retirer l’amendement à la faveur de ces explications.

M. Pascal Brindeau. J’entends cet argumentaire et je retire l’amendement. Je précise simplement que l’entretien annuel d’évaluation ne saurait être confondu avec un ou plusieurs entretiens de la sorte, quel que soit l’âge retenu. L’entretien que je propose, en effet, doit être consacré à la question de l’évolution du parcours professionnel, au reclassement le cas échéant voire au changement de service, de direction ou de versant. À mon sens, cet entretien doit naturellement se faire avec le supérieur hiérarchique direct et la direction des ressources humaines, mais aussi avec un référent extérieur capable de porter un regard objectif sur les souhaits de chaque agent.

L’amendement est retiré.

Article 21 (art. 22 quater de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, art. 2-1 de la loi n° 84–594 du 12 juillet 1984 relative à la formation des agents de la fonction publique territoriale et complétant la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et art. L. 6323–3 du code du travail) : Garantir la portabilité des droits liés au compte personnel de formation en cas de mobilité entre les secteurs publics et privé

La Commission examine l’amendement CL262 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Cet amendement vise à supprimer l’article car nous nous opposons à la portabilité et à la monétisation des droits acquis. Ces mesures favoriseraient leur départ vers le secteur privé et une forme de régression de leur droit à la formation. La monétisation constitue selon nous un appel majeur au secteur marchand. Les salariés y seront perdants : alors qu’une heure de formation coûte entre 35 et 40 euros selon les syndicats, le Gouvernement la valorise à 15 euros. Autrement dit, les salariés en paieraient forcément une partie de leur poche.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cet article vise tout simplement à tirer les conséquences de la monétisation des droits à la formation instaurée pour les salariés par la loi du 5 septembre 2018. Pour ce faire, il ouvre la possibilité pour les agents publics de convertir en heures des droits précédemment acquis en euros au titre d’une activité privée et supprime les références aux différents rythmes d’alimentation et plafonds du compte personnel de formation (CPF), renvoyant ses modalités d’application à un décret en Conseil d’État. Je ne vois là aucun recul des droits des agents publics. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL540 de Mme Catherine Fabre.

Mme Catherine Fabre. Cet amendement vise à mettre le CPF à la main de la personne concernée afin qu’elle puisse faire valoir ses droits sans solliciter son employeur pour y accéder, y compris dans la fonction publique. Cela ne peut se faire qu’à la condition que la continuité du service fourni par l’administration soit assurée.

L’amendement obéit au principe fondamental, selon moi, de l’autonomie de l’individu en matière d’utilisation de ces droits et du CPF. Il me semble nécessaire de le conserver pour les agents publics afin d’aboutir au système le plus intégré qui soit et à des droits à la formation similaires quel que soit le statut des personnes concernées.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je comprends vos arguments mais, dans la fonction publique, la formation s’effectue pendant le temps de service, contrairement au secteur privé. Il est donc indispensable de recueillir l’avis préalable de l’autorité hiérarchique. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Demande de retrait, pour les mêmes motifs. J’ajoute que les modalités de financement de la formation continue dans les trois versants de la fonction publique sont très différentes des modalités qui prévalent dans le secteur privé. Il n’existe pas de dispositif de mutualisation des fonds pour permettre à un agent public de demander un financement sans avoir à se préoccuper des moyens et des capacités de son employeur, en particulier les collectivités de petite taille. Je vous sais très attachée à ce que les agents publics, comme les salariés du secteur privé, puissent avoir accès sans frein et sans distinction à l’usage de leur CPF, mais il existe des employeurs publics de tailles différentes qui doivent eux-mêmes assurer le financement des formations tout en respectant un pilotage budgétaire dans le respect des enveloppes dont ils disposent. Vous présenterez dans un instant un autre amendement qui vise à faciliter l’accès à la formation et à tenir compte du CPF, qui me semble plus efficace que celui-ci, trop périlleux pour les employeurs publics de petite taille.

Mme Catherine Fabre. Soit. A ce stade, je retire l’amendement tout en espérant que le débat sur la mutualisation des fonds sera ouvert.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL410 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CL545 de Mme Catherine Fabre.

Mme Catherine Fabre. Cet amendement, auquel M. le secrétaire d’État a fait référence à l’instant, vise à assurer l’information claire et explicite des agents publics concernant l’existence de leur CPF et la manière de l’activer et de l’utiliser. En effet, 87 % des salariés ne connaissent même pas l’existence de ce compte. De ce fait, le droit individuel à la formation est théorique et peu concret. Je propose donc que comme dans le secteur privé, cette information soit assurée lors de l’entretien annuel. Par parallélisme des formes avec le code du travail, je propose également que cette disposition soit précisée dans la loi.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 21 modifié.

Article 22 : Habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance pour réformer la formation des agents publics

La Commission est saisie de l’amendement CL569 de M. Pascal Brindeau.

M. Pascal Brindeau. Cet amendement vise à supprimer l’article, dont l’objet est d’habiliter le Gouvernement à recourir aux ordonnances afin de légiférer sur la question de la formation, qui est centrale pour la fonction publique. Le 1° de l’article vise notamment à « organiser le rapprochement et modifier le financement des établissements publics et services qui concourent à la formation des agents publics ». Je traduis : il s’agit du Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) et des centres de gestion, évoqués au débat précédent. Ces questions doivent faire l’objet d’un débat parlementaire approfondi plutôt que d’être renvoyées à des ordonnances dont, de surcroît, le délai de ratification est de trois mois.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cette habilitation est très importante pour notre majorité. Il s’agit de développer une synergie entre les écoles qui concourent à la formation des cadres des trois versants – l’ENA, l’Institut national des études territoriales (INET) et l’École des hautes études de la santé publique (EHESP) – et de renforcer ainsi une culture commune de l’encadrement au sein de la fonction publique.

Il s’agit également d’éviter les freins au changement que peut constituer la méconnaissance des différents environnements administratifs, mais aussi de faciliter les mobilités géographiques et fonctionnelles afin de diversifier les parcours professionnels et les mobilités entre les trois versants – j’y suis personnellement très attachée.

Il s’agit enfin de favoriser l’évolution professionnelle des agents les plus fragiles en leur permettant d’accéder plus facilement aux qualifications.

Le champ de l’habilitation est certes vaste, mais il est assez précis et incontournable. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Même avis.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL832 de M. Alain Perea.

M. Alain Perea. J’ai bien compris que cet article était très important pour notre majorité, et n’ai donc pas osé proposer sa suppression. Néanmoins, le CNFPT, au-delà de sa mission de formation, est la seule école du service public territorial. On a trop souvent tendance à confondre la fonction publique et le service public, comme le montrent bon nombre des débats que nous avons depuis deux jours. Alors que l’on s’interroge constamment sur le service public local et territorial qu’il faut rendre, je souhaite que les députés soient beaucoup plus étroitement associés à la réforme de cette grande école qu’est le CNFPT, pour un service public local de qualité qui produira des effets sur la gestion des ressources humaines.

L’amendement ne vise donc pas à supprimer l’article mais à prévoir un rapport pour que nous définissions ensuite ensemble le service public local que nous souhaitons et les écoles que nous voulons établir à ces fins.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Nous disposons d’un nombre suffisant de rapports sur ce sujet, notamment de la part de nos collègues sénateurs. En outre, nous recevrons bientôt celui de la mission Thiriez à laquelle le Président de la République s’est engagé à ce que les parlementaires soient associés. À ce stade, cela me semble suffire ; il est temps de passer à l’action, comme l’a rappelé le Président de la République dans son intervention de la semaine dernière. Demande de retrait ou avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL833 de M. Alain Perea.

M. Alain Perea. L’idée consistant à englober les trois écoles peut s’entendre, mais pourquoi ne demander un rapport qu’au CNFPT et non aux deux autres écoles ? L’amendement vise à étendre à la fonction publique d’État et à la fonction publique territoriale les demandes qui seront faites au CNFPT dans l’ordonnance.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable : la fonction publique territoriale relève du champ de l’habilitation relative à la transformation de la formation, dont il est important qu’elle puisse être conçue et débattue dans les instances ad hoc afin que la formation soit également réformée dans ce versant de la fonction publique.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. En effet, l’ordonnance concernera les trois versants, tant en ce qui concerne la formation que le recrutement et la gestion des carrières. D’autre part, une disposition est prévue pour demander un rapport au CNFPT sur l’utilisation de ses fonds et de ses moyens. S’agissant des écoles de formation de la fonction publique d’État comme l’ENA, l’École polytechnique, les écoles nationales des douanes et d’autres – il en existe une quinzaine –, la mesure est déjà en vigueur puisque le projet de loi de finances contient systématiquement des « jaunes » budgétaires qui présentent ces rapports financiers. Il s’agit donc d’une disposition qui vise à placer l’INET au même niveau d’exigence que les autres écoles, et non à lui demander quelque chose qui ne serait pas demandé aux autres.

L’amendement est retiré.

La Commission se saisit des amendements CL792 et CL793 de M. Philippe Vigier.

M. Yannick Favennec Becot. L’amendement CL792 vise à ajouter le renforcement de la formation des agents à l’utilisation du numérique comme levier de transformation des administrations, pour répondre tout à la fois aux enjeux de l’ouverture des données publiques et de l’accès aux services publics, mais aussi à ceux de la protection des données personnelles suite à l’entrée en vigueur du Règlement européen sur la protection des données (RGPD).

Quant à l’amendement CL793, il vise à ajouter le renforcement de la formation des agents à la maîtrise d’une langue étrangère, cette compétence devenant de plus en plus essentielle dans un environnement mondialisé, notamment européen.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Cette proposition ne relève pas du domaine législatif. Les pistes sont intéressantes, mais si la loi recensait tous les thèmes de formation des écoles, elle contiendrait une liste un peu longue. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

M. Yannick Favennec Becot. M. le secrétaire d’État m’a convaincu ; je retire les amendements.

Les amendements sont retirés.

La Commission adopte l’article 22 sans modification.

Après l’article 22

La Commission examine l’amendement CL609 de Mme Danielle Brulebois.

Mme Danielle Brulebois. Je présente, en même temps que mon amendement CL609, les amendements CL605, CL606, CL607 et CL610, car tous les cinq visent à favoriser le développement de l’apprentissage dans la fonction publique.

À l’heure où l’apprentissage est au cœur de nos préoccupations et où le Gouvernement en a fait une priorité en relançant la mobilisation générale, il faut que l’État et les collectivités locales soient exemplaires en matière d’accompagnement des jeunes vers la vie active. En effet, comme le montrent de nombreux rapports, la fonction publique peine à s’engager dans la voie de l’apprentissage. En 2017-2018, il n’y avait que 9 480 apprentis dans la fonction publique de l’État, alors que l’objectif visé en 2012 était déjà de 10 000. Il s’agit pourtant d’un éventail de métiers important qui couvre tous les secteurs d’activité, sachant que la mission de service public existe dans tous les domaines.

Nous sommes tous souvent sollicités par des jeunes qui ne trouvent pas de maîtres de stage. Il est important de lever les freins existants afin de développer l’apprentissage dans la fonction publique. C’est pourquoi l’amendement CL609 vise à encourager les jeunes à s’engager dans la voie de l’apprentissage dans la fonction publique en tenant compte de l’ancienneté qu’ils ont acquise lors de leur formation en alternance, comme c’est le cas dans le secteur privé où l’ancienneté est prise en compte lors d’une embauche au terme de la période d’apprentissage.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. La loi « égalité et citoyenneté » a déjà prévu la possibilité pour les apprentis de se porter candidats aux troisièmes concours. Il est en effet opportun de soulever la question et j’espère que les travaux à venir faciliteront l’accès des apprentis aux concours. Je vous propose donc de retirer l’amendement ; à défaut, avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. L’amendement CL610 est satisfait par le droit existant. D’autre part, la proposition qu’elle fait pose problème car de façon générale, la règle veut que les services pris en compte pour ouvrir l’accès à un concours interne soient effectués dans le cadre de contrats de droit public ; or les contrats d’apprentissage sont de droit privé.

Nous travaillons sur plusieurs mesures concernant les règles d’accès à la fonction publique et au titulariat que j’ai évoquées hier. Nous souhaitons mettre en place des concours spécifiques pour les personnes formées en apprentissage afin de valoriser leur expérience professionnelle sans les renvoyer vers les concours externes, où le premier groupe d’épreuves a souvent un caractère académique. D’autre part, nous devons nous pencher sur le financement de l’apprentissage dans la fonction publique : la réforme menée dans le secteur privé avec la création d’un organisme national, France Compétences, nous oblige en quelque sorte à repenser les modalités de financement de l’apprentissage.

Je vous propose donc de retirer vos amendements tout en prenant l’engagement d’y travailler. Nous ferons tout ce que nous pourrons d’ici à la séance ; de même, tout ce qui relève du domaine réglementaire sera fait, car je partage votre attachement au recrutement et à la formation d’apprentis. Je suis moi-même un apprenti de la fonction publique, même si je ne suis pas devenu titulaire dans la foulée…

Mme Danielle Brulebois. Je consens à retravailler mes amendements. La question de l’apprentissage est très importante. Certaines collectivités ne recrutent que très peu d’apprentis alors que de petites entreprises privées n’employant qu’un ou deux salariés se donnent le mal d’embaucher des jeunes en apprentissage. Les freins doivent être levés.

Autre frein : les collectivités ne pourront pas embaucher car il faudra, à l’issue de leur formation, que les apprentis passent un concours de la fonction publique. Il faut créer des voies spécifiques d’apprentissage pour les étudiants.

Enfin, si l’on veut atteindre les objectifs fixés par le Gouvernement et la majorité, il est indispensable de développer l’apprentissage dans la fonction publique, car ces métiers de proximité concernent tous les domaines. Les jeunes pourraient ainsi se former et s’engager dans la voie de l’apprentissage.

L’amendement est retiré.

Les amendements CL605, CL606, CL607 et CL610 de Mme Danielle Brulebois sont également retirés.

 

1.   Seconde réunion du vendredi 3 mai 2019 à à 15 heures (après l’article 22 à article 36)

Lien vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.7576458_5ccc382cab0ea.commission-des-lois--transformation-de-la-fonction-publique-suite-3-mai-2019

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, nous reprenons l’examen du projet de loi de transformation de la fonction publique.

Après l’article 22 (Suite)

La Commission examine l’amendement CL50 de M. Olivier Marleix.

M. Olivier Marleix. En le déposant, je craignais que cet amendement ne soit trop audacieux, mais je me réjouis d’avoir été dépassé par le Président de la République. Il propose en effet une réforme de l’accès aux grands corps : Conseil d’État, Cour des comptes, Inspection générale des finances (IGF). Celui-ci se ferait après cinq années de service public dans d’autres administrations et non plus directement à la sortie de l’ENA. Nous constatons en effet que le service de l’État, mission noble qui devrait suffire à motiver des jeunes élèves sortant de cette école nationale d’administration, ne suffit plus à leur bonheur, et qu’une fois la palme décrochée, ils s’empressent d’avoir une autre ambition et de quitter ces grands corps au plus vite.

Cela n’est pas plus satisfaisant dans le principe que sur le plan fonctionnel. Lors des auditions réalisées avec Fabien Matras, Mme Marie-Christine Lepetit, cheffe du service de l’Inspection générale des finances, a indiqué que 30 % des membres de l’IGF partaient pantoufler, parfois alors qu’ils étaient très jeunes. À tel point que ce service est aujourd’hui contraint à embaucher des stagiaires de Sciences Po pour rédiger des rapports ! C’est pour le moins consternant.

Avec cet amendement, les candidats devront faire preuve de leur attachement à l’administration avant de pouvoir postuler aux plus nobles services de l’État.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je partage la philosophie de cet amendement, mais il me semble plus sage d’attendre la fin des travaux de M. Frédéric Thiriez, à qui le Président de la République a confié une mission la semaine dernière.

Je demande donc le retrait de cet amendement, faute de quoi l’avis sera défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’action et des comptes publics. Je demande aussi le retrait de cet amendement dont la proposition est précoce au regard des travaux en cours de M. Frédéric Thiriez et de la réforme de la fonction publique.

Cette réforme, voulue par le Président de la République, poursuit en effet plusieurs objectifs. Il s’agit d’abord de modifier les règles de recrutement dans les écoles formant à la haute fonction publique puis de modifier les règles de recrutement et d’affectation à la sortie de ces écoles, et enfin de revoir le déroulement des carrières, ce qui renvoie à la gestion des corps. À cet égard, je ne suis pas sûr que les cinq ans que vous proposez soient suffisants.

Le recrutement dans ces écoles et sa diversité passe par des moyens autres que législatifs, je pense notamment aux IPAG (Instituts de préparation à l’administration générale) et à la préparation en CPI (Classes préparatoires intégrées). Il importe par ailleurs de faire en sorte que celles et ceux qui ont vocation à intégrer les grands corps que sont le Conseil d’État, la Cour des comptes ou l’IGF aient, au préalable, effectué une période de service « opérationnel » ou sur le « terrain », même si nous savons que cette expression n’est pas nécessairement la bonne.

Il faut encore noter que, depuis le mois de septembre dernier, nous avons mis en place le dispositif « ENA + 2 », qui propose aux élèves de l’ENA sortis depuis deux ans un classement leur permettant d’accéder aux grands corps, et de vivre une mobilité obligatoire dans des postes prioritaires en administration centrale ou en service déconcentré, pour lesquels nous veillons à ce qu’au moins la moitié soit effectuée dans des services déconcentrés hors Île-de-France.

Eu égard à ces dispositifs s’agissant du recrutement dans les grands corps, il est plus sage d’attendre la fin des travaux de M. Frédéric Thiriez. Par ailleurs, l’ordonnance prévoit la réforme de l’appareil de formation, y compris pour la haute fonction publique, et pourra donc porter ces propositions relatives à la sortie des grandes écoles, dont l’ENA, si celle-ci devait subsister comme telle.

M. Olivier Marleix. J’ai noté les ambitions du Président de la République dans ce domaine, et qu’il avait confié une mission à M. Frédéric Thiriez. Je m’interroge : si l’on peut concevoir la suppression de l’ENA, celle du Conseil d’État, de la Cour des comptes ou de l’IGF ne paraît pas envisageable. En tout état de cause, pouvez-vous préciser le calendrier dans lequel s’inscrit cette réforme et quel sera son véhicule législatif ?

Puisque vous aimez tant les ordonnances, le présent texte comportant pas moins de huit habilitations, pourquoi ne pas en prévoir une de plus pour, le cas échéant, porter ces réformes dans leur volet législatif ? Quel sera le vecteur des annonces du Président de la République ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Le vecteur est l’ordonnance prévue à l’article 22 du projet de loi. Nous aurons quatre ordonnances à partir des huit champs d’habilitation. Quant au calendrier, il a été fixé par le Premier ministre en début de semaine : il s’étend sur six mois, la remise du rapport de M. Thiriez étant attendue au mois de novembre prochain.

M. Olivier Marleix. Je retire cet amendement, quitte à reprendre la discussion avec le ministre à l’occasion de la séance publique.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL893 de la rapporteure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Ce sujet me tient particulièrement à cœur ; je l’ai déjà défendu cette dernière année devant le groupe de travail « Fonction publique » du groupe de la majorité, mais aussi dans mes rapports pour avis. Il s’agit d’inclure dans le droit à formation des fonctionnaires une formation à l’encadrement à tous les niveaux : A, B et C. Celle-ci est indispensable pour développer une culture de management dans nos administrations lorsque les personnels concernés n’ont pas connu cette expérience avant leur prise de poste.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. L’idée que tout agent public accédant à un poste d’encadrement soit formé au préalable est séduisante. À droit constant, il existe une priorité pour permettre cet accès à la formation, mais il n’est pas inutile de le rappeler. Je m’en remettrai donc à la sagesse de la Commission.

La Commission adopte l’amendement. L’article 22 bis est ainsi rédigé.

Puis elle étudie l’amendement CL766 de M. Jean-Pierre Cubertafon.

Mme Laurence Vichnievsky. C’est avec force que je soutiendrai cet amendement, même si je ne suis pas une adepte des rapports, dont on sait qu’ils ne sont pas toujours suivis d’effet. Je ne reprendrai pas tous les arguments fort bien défendus par notre collègue, Mme Brulebois, mais comme elle je suis ardemment en faveur de l’apprentissage, et je crois que la fonction publique doit donner l’exemple.

J’ai bien entendu les directions dans lesquelles le Gouvernement allait travailler à cet égard. Cet amendement est en quelque sorte d’appel puisqu’il prévoit le dépôt au Parlement d’un rapport du Gouvernement destiné à expliquer pourquoi la fonction publique ne recrute pas d’apprentis. Certes, le statut des apprentis relève du droit privé. Mais ce rapport pourrait proposer un certain nombre de mesures de nature à favoriser l’embauche d’apprentis au sein de la fonction publique.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. C’est effectivement un sujet important que celui de l’apprentissage au sein de la fonction publique. Lors de l’examen des articles du projet de loi de finances pour 2019 portant sur la répartition des enveloppes consacrées à l’apprentissage dans les différents ministères, le ministre du Budget M. Darmanin s’est engagé à une vigilance particulière à ce sujet.

Par ailleurs, un certain nombre de dispositifs propres à faciliter l’apprentissage, dans la fonction publique territoriale notamment, sont prévus. De son côté, l’ordonnance renvoyant aux questions de formation rappellera les modalités d’accès à la fonction publique pour les apprentis.

Vous le voyez, nous travaillons sur le sujet. Vous présentez un bel amendement d’appel réitérant l’importance de cette filière d’accès à la fonction publique, ce dont je vous remercie. Toutefois, mon avis est défavorable à une nouvelle demande de rapport.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. J’ai déjà eu l’occasion d’exposer ce que nous voulions faire pour développer l’apprentissage dans la fonction publique, et le Gouvernement est prêt à en rendre compte devant l’Assemblée nationale. Connaissant la jurisprudence de la commission des Lois sur les rapports, je n’oserai pas donner un avis favorable à cet amendement, mais un avis de sagesse.

La Commission adopte l’amendement. L’article 22 ter est ainsi rédigé.

Elle examine ensuite l’amendement CL831 de M. Alain Perea.

M. Alain Perea. Monsieur le ministre m’ayant déjà répondu, je retire cet amendement.

L’amendement est retiré.

Article 23 (art. 42 et 46 de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État) : Diminuer le coût pour les employeurs territoriaux et hospitalier de l’accueil d’un fonctionnaire de la fonction publique de l’État

La Commission examine l’amendement CL263 de M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Par cet amendement, nous nous opposons à la diminution du coût de la contribution patronale, ou employeur, au compte d’affectation spéciale pour les retraites des agents de l’État, quand ceux-ci sont des fonctionnaires d’État mis à disposition dans la fonction publique territoriale ou hospitalière. Cela nous conduit à proposer la suppression des alinéas 2 à 10 de l’article 23.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’étude d’impact répond aux questions soulevées par votre exposé sommaire puisqu’il est indiqué que cette mesure impliquera un impact financier négatif pour le budget de l’État, qui est évalué à 103 millions d’euros par an. Cette mesure met les fonctionnaires des trois versants de la fonction publique sur un pied d’égalité en matière de mobilité entre ces versants, ce qui leur offre davantage de perspectives.

Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL624 et CL623 de la rapporteure.

La Commission examine l’amendement CL71 de M. Éric Poulliat.

M. Éric Poulliat. Le présent amendement a pour objet de demander au Gouvernement de dresser, à l’attention du Parlement, un panorama de la politique mise en œuvre pour encourager les mobilités. Actuellement, celles-ci ne se pratiquent ni avec la même fréquence ni avec les mêmes possibilités d’accès à des postes de responsabilité selon le sens de la mobilité.

La délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation a jugé utile de formuler cette proposition, notamment pour faire la lumière sur les causes de blocage aux mobilités entre les versants de la fonction publique afin d’y apporter les remèdes nécessaires.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Sur le principe, vous connaissez la position de la commission des Lois sur les demandes de rapports. En outre, sur le fond, votre amendement est satisfait par le rapport annuel sur la fonction publique qui traite du sujet des mobilités, je vous renvoie donc à cette publication.

Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Ma réponse est la même. Ce rapport dresse l’état des mobilités et trace aussi les voies de réforme pour l’améliorer.

Cet amendement est donc satisfait, c’est pourquoi j’en demande le retrait. Toutefois, si la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation souhaite qu’à la prochaine parution du rapport je vienne le présenter devant elle, c’est très volontiers que je le ferai.

M. Éric Poulliat. Au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, j’accepte avec bienveillance la proposition du ministre. Je retire donc cet amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’examen de l’amendement CL499 de M. Boris Vallaud.

Mme George Pau-Langevin. Cet amendement demande le dépôt d’un rapport évaluant l’impact de l’article 23 sur la mobilité des fonctionnaires de l’État.

Pour rappel, cet article abaisse le taux de la contribution employeur acquittée par les employeurs territoriaux et hospitaliers au compte d’affectation spéciale (CAS) « Pensions » à 30,65 % en cas de mise à disposition ou de détachement de fonctionnaires de l’État vers ses deux versants.

Si cette disposition est à soutenir, elle aura néanmoins un impact financier négatif sur le budget de l’État. Il ne faudrait donc pas que cet impact finisse par être à la charge des fonctionnaires, par le biais d’une augmentation de leurs cotisations retraite. Le rapport demandé portera également sur ce point.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Les réponses aux questions parfaitement légitimes que vous posez se trouvent à la page 244 de l’étude d’impact jointe au projet de loi, où il est indiqué que cette mesure aura « un impact financier pour le budget de l’État évalué à 103 millions d’euros par an ».

Avis défavorable.

M. Ugo Bernalicis. Cette mesure coûtera donc 103 millions d’euros et l’État la prendra en charge. En l’état, aucune modification des cotisations n’est prévue. Je crois surtout qu’on bouche un trou par un autre trou. Est-ce là le frein majeur empêchant les fonctionnaires de l’État de rejoindre la fonction publique territoriale ? J’avoue en douter, et il me semble beaucoup plus facile de passer de la fonction publique de l’État à la fonction publique territoriale que le contraire.

Mme George Pau-Langevin. Si un montant de dépense est prévu pour financer cette possibilité, il est intéressant de vérifier a posteriori s’il a été atteint ou dépassé.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 23 modifié.

Après l’article 23

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL501 de M. Boris Vallaud et CL60 de M. Éric Poulliat.

Mme George Pau-Langevin. Cet amendement vise à permettre à un lauréat d’un concours ou d’un examen professionnel de la fonction publique, inscrit sur liste d’aptitude pour un certain délai, de bénéficier d’une suspension de ce dernier le temps de la durée de son détachement.

Pour rappel, les lauréats d’un concours ou d’un examen professionnel de la fonction publique sont inscrits sur une liste d’aptitude, en vue d’être recrutés par un employeur public. Cette inscription est valable deux ans, renouvelable deux fois pour une année. Au terme de quatre années d’inscription sur liste d’aptitude, le lauréat n’ayant pas été nommé dans son nouveau cadre d’emplois perd le bénéfice de son concours ou de son examen professionnel.

Dans certains cas, la loi a permis de suspendre ce délai : par exemple en cas de congé de maternité ou d’exercice d’un mandat local.

En revanche, cette suspension n’est pas accessible pour les agents en détachement, au sein ou en dehors de leur administration d’origine. Ils doivent en effet impérativement, dans le délai maximum de quatre ans, mettre un terme à leurs missions.

C’est pourquoi nous proposons d’ouvrir la possibilité pour l’agent d’honorer son détachement jusqu’à son terme sans que cela remette en cause la validité de son aptitude à être nommé après le concours.

M. Éric Poulliat. L’idée qui préside à cet amendement est que les intéressés puissent bénéficier des quatre ans d’inscription sur la liste d’aptitude après le concours, mais dans le cadre très précis du contrat de projet.

En effet, la loi ne prévoit pas que ce contrat conduise à l’intégration dans la fonction publique – CDI, titularisation directe. Or certains agents qui souhaiteront aller jusqu’au bout de ce projet dans lequel ils se sont investis pourront avoir comme objectif, in fine, d’intégrer la fonction publique. Puisque la volonté du ministre est que le statut comme le concours soient respectés, la voie consacrée demeurera le concours, celui qui l’aura réussi aura peut-être encore cinq ans de contrat de projet devant lui, et voudra aller au terme de celui-ci. Il perdra alors le bénéfice du concours avant même d’avoir achevé son contrat de projet.

Cela me paraissant compliqué, je souhaiterais intégrer le contrat de projet dans la liste des suspensions possibles. Je rappelle que, dans la FPT, il faut chercher un emploi et se porter candidat, et donc vérifier quelles sont les collectivités qui embauchent. Or il ne pourra s’agir de la collectivité d’origine puisqu’elle avait proposé un contrat de projet faute d’emploi permanent à pourvoir.

Ce temps du recrutement sera donc nécessaire. Le délai de quatre ans est prévu pour cela. C’est pourquoi il a semblé intéressant à la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation que cette suspension dure le temps du contrat de projet qui peut s’étendre jusqu’à six ans.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Lors des auditions préparatoires à nos travaux, ce sujet a été évoqué à plusieurs reprises, et cette demande m’a été adressée par certains acteurs.

Après réflexion, je n’ai pas choisi de la reprendre, car la durée de validité de la liste d’aptitude est déjà de quatre ans, ce qui est considérable et me paraît suffisant. Je n’ai pas entendu d’arguments suffisamment convaincants pour procéder à une dérogation en faveur des personnes en détachement. Dans la fonction publique territoriale, parce qu’il faut précisément aller chercher son emploi, passer un concours constitue un acte positif. Ceux qui le réussissent ont quatre ans pour se positionner clairement. On ne peut pas courir deux lièvres à la fois.

Pour ces raisons, l’avis est défavorable aux deux amendements.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. J’entends le principe de la demande. Nous avons d’ailleurs accepté cette suspension pour les congés de maternité, considérant qu’il s’agissait d’une situation devant être prise en compte.

Nous rencontrons une difficulté due aux modalités du concours, non pas pour le lauréat inscrit sur la liste d’aptitude, mais pour ceux qui souhaiteraient passer le concours après. Le rythme d’organisation des concours de la fonction publique territoriale et le volume des postes ouverts – je devrais en fait parler de grades – à des lauréats susceptibles de postuler dépendent en effet de la capacité à évaluer quelle mobilisation a été faite de la liste des concours précédents.

Si nous disposons de listes d’aptitude alimentées par concours, mais dont les membres peuvent multiplier les suspensions de la durée de validité de la liste d’aptitude, la capacité à évaluer le nombre des inscrits sur cette liste en est affectée, ce qui perturbe le rythme et le volume des nouveaux concours, et rend difficile leur organisation.

Voilà les raisons pour lesquelles nous sommes très réservés quant à la mesure que proposent ces amendements.

M. Éric Poulliat. J’entends les arguments de la rapporteure et du ministre, mais si nous voulons faire du contrat de projet une réussite, nous devons faire en sorte que les intéressés puissent aller jusqu’au bout de leur démarche. S’ils réussissent un concours et que, faute d’autre solution, ils décident de mettre fin à leur contrat de projet pour intégrer la fonction publique territoriale, cela ne manquera pas de créer des difficultés aux employeurs territoriaux.

Ne serait-il pas possible d’envisager au moins une durée minimale de suspension pour ce type très précis de contrats ? Je comprends que six ans de suspension seraient beaucoup trop longs pour la gestion prévisionnelle des concours, mais une durée de deux ou trois ans permettrait de se prémunir contre des ruptures de contrats de projet trop fréquentes.

M. Ugo Bernalicis. Pour ma part, je ne partage pas le principe du CDD de projet de contrat. Toutefois, la durée pendant laquelle on figure sur la liste d’aptitude pose un problème. Monsieur le ministre disposez-vous de chiffres actualisés du nombre de « reçus collés », ces personnes reçues au concours, notamment pour les attachés territoriaux, mais qui ne trouvent pas d’emploi ? Ils se voient parfois proposer par des collectivités des CDD, des postes de chargé de mission, renouvelés plusieurs fois mais pas des postes de titulaires, et ils finissent par perdre le bénéfice de leur concours. Ne craignez-vous pas qu’en ouvrant la porte aux contractuels, le message que vous adressez aux uns et aux autres soit finalement : « Ne passez pas le concours. Cela ne sert à rien, vous allez galérer pendant une année de stage, alors que vous serez plus vite recrutés en CDI avec un statut de contractuel. » ?

Mme George Pau-Langevin. Je comprends que l’on demande à celui qui a réussi le concours de se rendre rapidement disponible pour l’administration. Mais, à l’inverse, quelqu’un peut très bien avoir été reçu au concours et ne jamais être recruté, particulièrement dans la fonction publique territoriale. Par conséquent, si cette personne bénéficie d’un CDD de trois ans dans une administration quelconque et qu’elle abandonne son contrat pour pouvoir intégrer la fonction publique territoriale, elle peut très bien ne rien avoir ensuite.

Il me semble qu’il y a là un sujet à creuser, car le nombre de personnes reçues au concours qui n’ont jamais été recrutées ou qui ont du mal à l’être n’est pas négligeable. Aussi, leur demander de rompre leur CDD pour tenter de trouver un emploi de fonctionnaire est délicat.

M. Olivier Marleix. Je suis très sensible au cas particuliers qu’évoque M. Poulliat et à cette injustice dont sont victimes les lauréats des concours qui rament pour trouver un emploi. Cela est souvent dû à leur manque d’expérience professionnelle alors qu’ils se trouvent en concurrence avec des contractuels, phénomène qui ne pourra qu’augmenter car sur le marché du travail on préfère toujours les insiders aux outsiders. Utiliser le contrat de projet comme possibilité d’attente pour les intéressés de trouver cette première expérience et geler la durée du contrat me paraît donc une très bonne idée.

Il serait d’ailleurs utile de disposer de statistiques portant sur ce sujet. Je rencontre beaucoup de jeunes lauréats en panique et qui ne trouvent rien au cours des deux premières années suivant le concours. Tout le monde parvient-il ensuite à se caser ? Avez-vous des chiffres à nous communiquer en la matière ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. En ce qui concerne l’ouverture aux contractuels des emplois de catégorie A, nous ne changeons pas les choses. L’ouverture est déjà générale : il est autorisé de recourir à des contrats pour pourvoir des emplois permanents – ce sont les fameux contrats de deux fois trois ans. Nous créons ici une nouvelle forme de contrat mais, en termes d’ampleur et d’ouverture, les choses ne changent pas.

Je n’ai pas en tête les statistiques exactes concernant les reçus collés, dans la mesure où, comme on le sait, d’un cadre d’emplois à l’autre, la situation peut être extrêmement différente. Quoi qu’il en soit, les difficultés que rencontrent ces lauréats viennent plutôt souligner les problèmes que posent les dispositifs d’allongement ou de suspension de la durée de validité des listes d’aptitude. En effet, ces dispositifs perturbent la capacité des administrations à calibrer le rythme et le volume d’ouverture des concours, puisque ceux-ci sont définis en fonction de la mobilisation de la liste d’aptitude établie à l’issue des concours précédents. Il y a donc une forme de dilemme.

Je comprends évidemment le souhait de M. Poulliat, de même que je comprends que les lauréats d’un concours, inscrits sur liste d’aptitude et qui trouvent un CDD de trois ans ou un contrat de projet de un à cinq ans, souhaitent garder le bénéfice de leur concours. Toutefois, cela viendrait perturber les efforts que nous entendons faire par ailleurs pour réduire le phénomène des reçus collés, cadre d’emplois par cadre d’emplois. C’est la raison pour laquelle je suis prudent sur le sujet. Quoi qu’il en soit, je veillerai à vous fournir plus de détails sur la question des reçus collés, en distinguant selon le cadre d’emplois.

Mme George Pau-Langevin. Le sujet mériterait en tout cas de faire l’objet d’une étude approfondie : il est extrêmement frustrant en effet pou un jeune qui réussit un concours, comme celui d’attaché territorial, de n’avoir aucune proposition d’emploi. Il faut donc dresser un bilan et voir comment on pourrait faire en sorte que ces concours apparaissent véritablement comme une voie d’accès à l’emploi, au lieu de donner l’impression, comme c’est parfois le cas, qu’il s’agit de sortes de pochettes-surprises dont on ne sait pas ce qu’elles réservent aux lauréats.

M. Éric Poulliat. Je voudrais faire une dernière observation, en précisant qu’elle n’est pas fondée sur des éléments scientifiques : il me semble que la question des reçus collés s’appréhende de manière très différente selon que l’on considère les concours internes et les concours externes. Je pense – mais ce serait à vérifier – que les concours internes suscitent davantage de reçus collés car se pose alors la question de la mobilité. Les lauréats des concours externes sont plus enclins, quant à eux, à la mobilité et arrivent donc plus facilement à trouver un poste avant la fin de la durée impartie. Quoi qu’il en soit, je remercie M. le ministre d’avoir proposé de nous fournir davantage d’informations sur le sujet.

La Commission rejette successivement les amendements.

Article 24 (art. 36 bis [nouveau] de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État) : Évolution des règles d’affectation en position normale d’activité

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL850 et CL625 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 24 modifié.

Article 25 (art. 6 ter de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, art. 3-5 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et art. 9-6 [nouveau] de la loi n° 86–33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) : Extension de la portabilité du CDI en inter-versants

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL626, CL628, CL627 et CL630 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement CL796 de M. Philippe Vigier.

M. Yannick Favennec Becot. Il s’agit d’assurer à un agent contractuel qui est lié par un contrat à durée indéterminée à un établissement de la fonction publique hospitalière la portabilité de son contrat, sauf accord de sa part pour un contrat à durée déterminée, en cas de proposition d’un nouveau contrat dans un autre établissement. Le fait de proposer à un agent d’exercer des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique dans un autre établissement de la fonction publique ne doit pas le conduire de nouveau dans la précarité.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Le présent article représente déjà une réelle avancée pour les agents concernés. Du reste, le fait de rendre obligatoire la portabilité pourrait avoir des effets pervers : l’employeur pourrait renoncer à embaucher un contractuel ayant déjà un CDI si les conditions sont trop contraignantes et qu’elles ne correspondent pas à ses besoins. Je crains donc que l’agent ne se retrouve bloqué : la disposition pourrait avoir un effet pervers. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL264 de Mme Danièle Obono.

M. Ugo Bernalicis. Cet amendement poursuit le même objectif que l’amendement CL796 ; les deux auraient d’ailleurs pu faire l’objet d’une discussion commune. Il s’agit de faire en sorte qu’une personne soit forcément reprise en CDI si elle le demande. À cet égard, non, madame la rapporteure, je ne crois pas que le fait de permettre à quelqu’un de garder un contrat non précaire ait des effets pervers. C’est avoir un drôle d’état d’esprit que de se dire qu’une personne en CDI est bloquée parce qu’elle doit refuser une situation de précarité. Je ne vois pas bien où vous voulez en venir car je pensais que vous étiez pro-contractuels et que vous vouliez favoriser la portabilité. Finalement, non : cette dernière a une limite, celle de la flexibilité à laquelle vous voulez soumettre les agents publics dans leur globalité – car tel est bien votre état d’esprit.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Même argument et même avis que précédemment.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 25 modifié.

Article 26 (art. 150 de la loi n° 2008‑1425 du 27 décembre 2008 de finances pour 2009 et art. 244 [abrogé] de la loi n° 2018‑1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019) : Rupture conventionnelle pour les agents publics et droit à l’allocation de retour à l’emploi

La Commission examine les amendements identiques CL122 de M. Stéphane Peu et CL266 de Mme Danièle Obono.

M. Stéphane Peu. Nous proposons de supprimer l’article 26 qui permet d’étendre les possibilités de rupture conventionnelle, y compris pour les CDI, dans les trois versants de la fonction publique.

M. Ugo Bernalicis. Avec cet article, on voit la volonté de mettre en œuvre la start-up nation : il s’agit de gérer l’État et les collectivités comme des entreprises privées, avec des ruptures conventionnelles, ou encore des « détachements d’office » – quelle belle expression, quelle invention extraordinaire !

Vous venez nous expliquer que quelqu’un qui est en CDI devrait éviter de se retrouver bloqué pour pouvoir accéder à un CDD. On était plutôt, jusqu’à présent, dans une culture marquée par le principe de non-régression ; on voit que vous privilégiez maintenant la flexibilité à outrance, qui conduit, en définitive, à beaucoup plus de précarité et beaucoup moins de stabilité pour les agents publics. Les ruptures conventionnelles ne seront que peu utilisées. Même s’il ne s’agit ici que d’une expérimentation, on voit bien, une fois encore, quel est votre objectif à terme : un certain nombre de collectivités territoriales pourraient être contraintes d’avoir recours à des ruptures conventionnelles, étant donné la politique « austéritaire » que vous leur infligez, avec des demandes de diminution de leurs dotations – car vous parlez de stagnation mais, du fait de l’inflation, à euros constants, c’est plutôt une baisse des dotations que vous leur infligez.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Ces amendements visent à supprimer purement et simplement ce qui constitue l’un des articles essentiels du projet de loi. Vous comprendrez que je ne puisse y être favorable.

Les outils statuaires actuels ne permettent pas d’inciter suffisamment les agents qui le souhaitent à quitter la fonction publique. Ils ne sont pas non plus de nature à les accompagner dans leur projet de mobilité ou de reconversion. La rupture conventionnelle pourra représenter, pour ces agents, une option intéressante. Cela dit, je suis très sensible aux arguments en faveur d’un meilleur encadrement de la rupture conventionnelle, afin de vérifier qu’elle respecte bien la liberté des deux parties. Tel est l’objectif de mon amendement CL869, auquel je vous renvoie. Le groupe La République en Marche a d’ailleurs déposé un amendement identique.

La Commission rejette ces amendements.

Elle examine ensuite les amendements identiques CL869 de la rapporteure et CL694 de M. Guillaume Gouffier-Cha.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Comme je le disais à l’instant, l’amendement CL869 vise à préciser et à encadrer l’article 26, relatif à la rupture conventionnelle. Il s’agit de proposer une définition de la notion, à savoir le fait de « convenir en commun des conditions de la cessation définitive des fonctions ». L’amendement vise également à affirmer le principe selon lequel la rupture conventionnelle ne peut être imposée par l’une ou l’autre des parties. Il vise, enfin, à inscrire le principe d’un montant minimum de l’indemnité spécifique de rupture conventionnelle et le principe de l’homologation du dispositif.

M. Guillaume Gouffier-Cha. La rupture conventionnelle ne constitue pas du tout une régression : il s’agit d’un outil dans la vie professionnelle, qui présente une réelle utilité lorsqu’il est bien encadré et correctement utilisé. Il est attendu, comme le prouvent les témoignages que l’on recueille sur le terrain. À travers ces amendements identiques, le groupe La République en Marche propose de définir clairement et de bien encadrer la rupture conventionnelle, comme c’est déjà le cas dans le code du travail.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Le Gouvernement envisageait d’intégrer les dispositions qui sont proposées ici dans le décret d’application, mais il peut être utile, voire plus lisible, de les inscrire dans la loi. Sagesse.

Je rappelle au passage que le fait de procéder à une convergence avec le secteur privé en permettant aux agents du secteur public – qu’ils soient contractuels ou titulaires – de bénéficier d’une rupture conventionnelle est assez novateur.

La Commission adopte ces amendements.

En conséquence, l’amendement CL570 de M. Pascal Brindeau tombe.

La Commission adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL631 de la rapporteure.

Elle examine, en présentation commune, les amendements CL826 et CL827 de M. Alain Perea.

M. Alain Perea. Je considère moi aussi que l’expérimentation de la rupture conventionnelle est vraiment attendue sur le terrain. Toutefois, il me semble que la durée prévue pour la période pendant laquelle on doit rembourser l’indemnité perçue si on souhaite revenir dans son corps d’origine, voire dans la collectivité où l’on exerçait, est beaucoup trop courte : trois ans, ce n’est pas assez, notamment au regard des opportunités politiques dont certaines personnes pourraient profiter. Certains risquent ainsi de partir puis revenir, au gré des alternances politiques, ce qui n’est pas du tout en phase avec les valeurs qui sont les nôtres, notamment le principe de continuité du service public. Je propose donc de porter la durée à neuf ans – c’est l’objectif de l’amendement CL826 – ou, si cela paraît trop long, à six ans – avec l’amendement CL827 –, l’idée étant de viser une durée correspondant au minimum à celle de certains mandats électifs.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je comprends le principe mais n’accéderai pas à cette demande. En effet, la rupture conventionnelle a pour résultat qu’on se trouve radié des cadres. Autrement dit, on ne la pratique qu’une seule fois, à moins de réussir de nouveau un concours puis de bénéficier encore une fois du dispositif. Il va donc y avoir un départ, éventuellement un retour trois ans après, et puis c’est tout : en cas de nouveau départ, l’agent public ne pourra, par la suite, être que contractuel, car la rupture conventionnelle défait le statut de fonctionnaire. Avis défavorable.

M. Alain Perea. Je ne remets pas du tout en cause l’idée d’un retour possible : mes amendements portent seulement sur la durée de la période pendant laquelle on l’autorise. S’il n’y a aucun intérêt pour l’agent à revenir, pourquoi avoir prévu cette possibilité ? Je pense que trois ans, c’est trop court. D’ailleurs, on voit bien qu’on s’oriente vers davantage de contractualisation – ce à quoi je suis favorable. L’agent partira et pourra revenir en étant contractuel, puisqu’il aura acquis une certaine expérience. Soit : restons-en à trois ans !

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL632 de la rapporteure.

La Commission examine l’amendement CL797 de M. Philippe Vigier.

M. Paul Molac. L’objectif de cet amendement est de permettre aussi la mobilité à l’intérieur de la fonction publique : M. Vigier propose que le remboursement de l’indemnité de rupture conventionnelle ne puisse être exigé que si le fonctionnaire réintègre un poste similaire au sein de la fonction publique de l’État. S’il passe dans un autre corps, le remboursement ne serait plus nécessaire.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je trouve moi aussi que la disposition actuelle est particulièrement stricte pour les fonctionnaires de la fonction publique d’État, puisqu’un fonctionnaire qui signe une rupture conventionnelle avec l’État se voit interdire, à moins de rembourser l’indemnité, de travailler de nouveau dans les trois ans qui suivent pour toute la fonction publique de l’État. S’agissant de la fonction publique hospitalière (FPH), la limitation s’applique seulement à l’établissement avec lequel le fonctionnaire a signé une rupture conventionnelle ; s’agissant de la FPT, elle vaut uniquement pour la collectivité ou l’établissement public de coopération intercommunale de rattachement. Néanmoins, je ne suis pas certaine que le terme « similaire », que vous proposez, soit suffisamment précis juridiquement. Je ne peux donc pas être favorable à cet amendement en l’état.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL633 de la rapporteure.

La Commission examine l’amendement CL798 de M. Philippe Vigier.

M. Yannick Favennec Becot. Le délai de deux ans prévu pour le remboursement des sommes perçues au titre de l’indemnité de rupture conventionnelle paraît trop court. Il semble important de ne pas mettre en difficulté le fonctionnaire qui réintègre la fonction publique de l’État après une rupture conventionnelle.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cette durée me paraît suffisante, dès lors que l’on prévoit par ailleurs la possibilité de réintégrer gratuitement la fonction publique pendant trois ans. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels CL634, CL635, CL636, CL637, CL638, CL639 et CL640 de la rapporteure.

La Commission est saisie de l’amendement CL799 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Les modalités de calcul de l’indemnité semblent absentes du contenu du futur décret en conseil d’État. Nous souhaitons qu’elles y figurent.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis tout à fait d’accord, mais votre amendement est satisfait par l’amendement CL869, adopté précédemment. Je demande donc le retrait de cet amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL500 de Mme Marietta Karamanli.

Mme George Pau-Langevin. Cet amendement vise à instaurer à mi-chemin une évaluation de l’expérimentation de la rupture conventionnelle pour les fonctionnaires, soit au bout de trois ans, et non pas seulement un an avant son terme, soit au bout de cinq ans.

L’introduction de la rupture conventionnelle dans la fonction publique soulève de nombreuses questions. La première d’entre elles est que le fonctionnaire n’est pas, au sens propre du terme, dans une situation contractuelle avec l’État. Par ailleurs, quelles seront, dans la pratique, les marges de manœuvre des employeurs et des agents publics en matière de rupture conventionnelle ? Toutes ces questions méritent des réponses qui ne peuvent attendre une évaluation fin 2024-début 2025.

Mme Émilie Chalas. Je ne crois pas à une expérimentation de l’expérimentation : nous en resterons à cinq ans. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Ensuite de quoi elle adopte l’amendement rédactionnel CL641 de la rapporteure.

La Commission est saisie de l’amendement CL771 de la rapporteure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Il s’agit d’un amendement de coordination avec une disposition de la loi pour la croissance et la transformation des entreprises (PACTE).

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL642 de la rapporteure.

La Commission examine l’amendement CL847 du Gouvernement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Cet amendement vise à assurer l’équité de traitement entre les agents contractuels en CDI, selon que leur employeur assure l’indemnisation du chômage en auto-assurance ou qu’il a adhéré au régime d’assurance chômage. Sont visées les deux situations suivantes : d’une part, l’agent en CDI qui sollicite le bénéfice d’une indemnité de départ volontaire à la suite de la suppression de son emploi dans le cas d’une restructuration et, d’autre part, celui qui bénéficie d’une rupture conventionnelle, au sens des dispositions statutaires qui lui sont applicables. Il s’agit à la fois de coordination et de recherche d’équité.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 26 modifié.

Après l’article 26

La Commission examine l’amendement CL855 du Gouvernement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. L’amendement vise à transposer les dispositions en matière de rupture conventionnelle à la Caisse des dépôts et consignations pour qu’elles soient applicables à la fois aux agents de droit privé et aux salariés sous statut de la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines. Il s’agit également de prévoir que l’instance unique du personnel de la Caisse des dépôts tient lieu de comité social et économique et qu’il peut être consulté dans les mêmes conditions.

L’amendement comporte des mesures d’adaptation tenant compte des spécificités des régimes dont relèvent les personnels publics et ceux de la Caisse autonome nationale de sécurité sociale des mines.

Enfin, il vise à préciser les conséquences de l’acceptation par la Caisse des dépôts des candidatures au départ d’agents publics et de la Caisse autonome, en spécifiant que cette acceptation emporte la radiation des cadres.

Il s’agit donc de transposer les dispositions de la rupture conventionnelle à la Caisse des dépôts, en tenant compte de son caractère un peu hybride, aussi bien eu égard à l’origine de ses agents qu’à la nature du droit encadrant leur relation avec l’établissement.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement. L’article 26 bis est ainsi rédigé.

Chapitre II
Sécuriser les transitions professionnelles
en cas de restructuration

Article 27 (art. 62 bis [nouveau] de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État et art. 93 de la loi n° 86–33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) : Création d’un dispositif d’accompagnement des agents de la fonction publique de l’État et de la fonction publique hospitalière dont l’emploi est supprimé dans le cadre d’une restructuration

La Commission examine les amendements identiques CL111 de M. Stéphane Peu et CL267 de M. Ugo Bernalicis.

M. Stéphane Peu. L’amendement CL111 est défendu.

M. Ugo Bernalicis. Après la rupture conventionnelle, il vous fallait évidemment l’équivalent des plans sociaux : cela parachève l’édifice. Ainsi, vous avez tous les outils à votre disposition pour vous débarrasser le plus possible des agents titulaires ou contractuels de la fonction publique. On savait que c’était votre objectif, mais de là à y mettre autant d’ardeur et de zèle, de là à doter d’un si grand nombre d’outils les employeurs publics pour leur permettre de le faire… Cela me paraît assez extraordinaire.

Nous avons donc déposé un amendement de suppression : l’une des garanties qu’offre le statut de fonctionnaire tient justement au fait que, lorsque le poste est supprimé, l’administration est obligée de lui en retrouver un ailleurs. C’est aussi cela qui fait la force et la vertu de ce statut. Nous nous opposons fermement à votre logique, et donc à cet article.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable. Sur le fond, et même si je sais que vous vous êtes également opposés aux articles précédents, je suis assez surprise que vous vouliez la suppression d’un dispositif qui profite aux fonctionnaires. En l’occurrence, l’article 27 permet d’accompagner le fonctionnaire dont l’emploi est supprimé vers une nouvelle affectation correspondant à son grade, dans un autre corps ou dans un cadre d’emplois de niveau au moins équivalent ou, à sa demande, dans le secteur privé.

Les dispositifs proposés sont particulièrement intéressants, puisqu’ils permettent un accompagnement global, là où les dispositifs actuels sont trop souvent épars et sans véritable logique d’ensemble : l’accompagnement personnalisé dans l’élaboration et la mise en œuvre d’un projet professionnel et l’accès prioritaire à des actions de formation ; le congé de transition professionnelle, dans sa nouvelle version, qui permet au fonctionnaire, avec l’accord de son employeur, de suivre les actions de formation longues nécessaires à l’exercice d’un nouveau métier auprès d’un employeur public ou privé. L’article permet, par ailleurs, de nouvelles priorités de mutation pour les fonctionnaires dont l’emploi est supprimé.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Je souhaite dire l’attachement du Gouvernement à l’article 27, et ce pour des raisons évidentes.

L’article 27 s’appuie – notamment – sur un constat qui n’a d’ailleurs pas été fait par le Gouvernement : il émane du Conseil d’État. Celui-ci, dans une décision d’octobre 2017, a constaté la carence en matière de textes d’application réglementaire au sujet du droit au reclassement, pourtant considéré par tous comme garanti par le statut. C’est la raison pour laquelle nous nous attachons à formaliser un droit au reclassement qui soit réel. Cela passe par le rappel – même si cela peut paraître évident, il est bon de l’écrire – du fait que, lorsqu’un poste est supprimé, quelle qu’en soit la raison – elle peut être d’ordre budgétaire, liée à l’évolution du périmètre d’une politique publique ou des périmètres territoriaux, ou encore à la révision d’une politique publique –, la priorité est de reclasser le fonctionnaire dans son service et dans le département où se situe sa résidence administrative.

Une deuxième disposition vise à faciliter les mobilités géographiques, de manière à ce que les fonctionnaires soient mieux accompagnés. Cela n’apparaît pas dans le texte de loi, puisque c’est d’ordre réglementaire, mais, depuis le 1er janvier, avec Gérald Darmanin, nous avons relevé le plafond de la prime de restructuration de service. Le montant maximal de cette prime, versée sur justificatif de dépenses afin d’accompagner la mobilité géographique, était fixé à 15 000 euros ; nous l’avons porté à 30 000 euros. Nous avons aussi porté la part supplémentaire, en cas de présence d’un conjoint, à 7 000 euros, ce qui représente un quasi-doublement.

Enfin, nous créons, avec le texte, une troisième possibilité de reclassement : nous garantissons à un agent public fonctionnaire installé dans un territoire qu’il bénéficiera d’un reclassement dans son bassin de vie. C’est la raison pour laquelle nous mettons en place un congé de transition professionnelle. En effet, le maintien dans un territoire peut impliquer la nécessité de devoir changer de ministère employeur. Le congé de transition professionnelle aura une durée maximum de douze mois, avec une rémunération maintenue à 100 %, tous éléments de rémunération compris, et la garantie, lors de l’arrivée dans un autre ministère, du maintien de cette rémunération. Cela nécessite une deuxième disposition, qui est une forme de droit de préemption que l’on donne aux préfets de région pour s’assurer que les ministères non restructurés jouent le jeu du reclassement des agents venant de ministères qui l’ont été, en leur offrant des emplois vacants plutôt que de les réserver à leurs propres agents.

C’est la seule méthode qui marche pour garantir à un agent public qu’il peut rester dans son bassin de vie, avec comme condition une évolution professionnelle, celle-ci étant par ailleurs prise en charge par son administration. Il s’agit donc vraiment, pour nous, d’un outil permettant de faire en sorte que l’État, comme employeur, soit enfin au rendez-vous de la qualité de l’accompagnement de ceux de ses agents dont le poste est restructuré.

Par ailleurs, nous avons créé, en interne aux services de l’État, une agence de mobilité et de reclassement, destinée à accompagner les agents, notamment en prenant en charge un certain nombre de bilans de compétences et de formations dans un cadre interministériel et non pas dans un tête-à-tête ou un huis clos réducteur entre l’agent et son ministère employeur. L’objectif est également de se préoccuper de la situation des conjoints car, on le sait, la capacité de mobilité du conjoint est parfois essentielle au reclassement de l’agent.

Enfin, pour financer l’ensemble de ces mesures, nous avons créé, dans le PLF pour 2019, le fonds d’accompagnement interministériel ressources humaines, doté de 50 millions d’euros, qui viendra en cofinancement des plans d’accompagnement mis en place par les différents ministères.

M. Ugo Bernalicis. Je veux bien que vous égreniez les mesures techniques prévues par cet article, dont certaines pourraient retenir mon attention – d’autres moins –, mais la véritable question, monsieur le ministre, est la suivante : quels services de l’État prévoyez-vous de supprimer – car c’est à cela que va servir cet article –, ce qui entraînera des restructurations puis des reclassements, soit dans le privé soit dans d’autres ministères ? Pouvez-vous nous éclairer sur ce point ? Cela fait deux ans que nous cherchons à savoir dans quels ministères, dans quels services auront lieu les 55 000 suppressions de poste – peut-être un peu moins depuis les annonces du Président de la République – que vous prévoyez. J’ai vu que Météo-France était une cible, de même que d’autres établissements publics divers et variés ; mais, dans les ministères, quels postes seront concernés ? Ceux qui touchent à la comptabilité ? Ou bien encore, entendez-vous aller plus loin en ce qui concerne les cartes grises ? Y aura-t-il un plan Préfectures nouvelle génération 2.0 ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Un certain nombre d’annonces de restructuration ont déjà été faites – je pense notamment aux directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) et à la direction générale des entreprises. Cela dit, j’ignorais que vous attendiez avec autant d’impatience une liste de suppressions d’emploi.

M. Ugo Bernalicis. C’est pour aider à la mobilisation, ni plus ni moins… Je prépare la manifestation du 9 mai !

La Commission rejette ces amendements.

Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels CL643, CL644, CL852 et CL645 de la rapporteure.

Elle examine l’amendement CL503 de M. Boris Vallaud.

Mme George Pau-Langevin. Nous souhaitons que les organisations représentatives soient associées au suivi des dispositifs d’accompagnement en cas de restructuration dans le cadre des comités sociaux d’administration ou d’établissement. Nous ne sommes pas favorables au processus de restructuration en lui-même mais, à partir du moment où il a lieu, il nous semble important que les organisations représentatives y soient associées. Avec cet amendement, les comités sociaux seront directement associés à l’ensemble des dispositifs d’accompagnement, comme cela a déjà pu se faire, notamment à La Poste et à France Télécom.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Il me semble que votre amendement est satisfait, puisque le texte dispose que le comité social d’établissement est consulté sur le dispositif d’accompagnement. Ce même comité est ensuite informé de la mise en œuvre de l’ensemble du dispositif d’accompagnement. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte successivement les amendements rédactionnels CL646, CL647, CL851, CL648, CL649 et CL650 de la rapporteure.

La Commission adopte l’article 27 modifié.

Article 28 (art. 14 quater [nouveau] de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) : Création d’un mécanisme de détachement automatique pour les fonctionnaires concernés par l’externalisation de leur activité

La Commission est saisie des amendements identiques CL268 de M. Ugo Bernalici et CL507 de M. Boris Vallaud.

M. Ugo Bernalicis. Par cet amendement de suppression de l’article 28, nous nous opposons à ce que soit facilitée la privatisation de services publics par l’instauration d’un cadre juridique préparant et ancrant la transition des agents publics dans le privé.

L’État a créé une start-up ; vous êtes dans cette nouvelle logique et ce n’est pas moi qui le dit mais le titre des Échos : L’État lance sa start-up. Non, l’État n’est pas une entreprise privée, ne fonctionne pas comme un entreprise, car l’État, les fonctionnaires poursuivent l’intérêt général. Nous allons finir par douter que ce soit aussi votre objectif, même si personnellement je n’ai plus aucun doute à ce sujet.

Mme George Pau-Langevin. Nous demandons la suppression de l’article 28 car nous ne sommes pas d’accord avec l’idée qu’un fonctionnaire puisse être détaché d’office dans le privé en cas d’externalisation de son service ou de ses missions, dans le cadre d’un CDI. Un fonctionnaire doit avoir la possibilité de refuser ou non d’être détaché auprès d’une personne morale de droit privé en cas d’externalisation de son emploi.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je ne suis pas favorable à la suppression de cet article qui crée un mécanisme de détachement automatique pour les fonctionnaires concernés par l’externalisation de leur activité visant à faciliter les opérations de transfert d’activités vers une personne morale de droit privé ou de droit public gérant un service public industriel et commercial (SPIC). Cet article apporte en effet une vraie souplesse aux employeurs publics tout en l’accompagnant de réelles garanties pour les fonctionnaires : le salaire est équivalent, le temps passé est considéré comme du service effectif dans le corps, le fonctionnaire est réintégré de plein droit s’il est licencié et il peut réintégrer l’administration avec un préavis de trois mois. L’encadrement de la disposition me semble donc suffisant.

M. Ugo Bernalicis. J’ai peut-être manqué quelque chose mais je n’ai pas vu l’article qui prévoit qu’un service privé puisse être rendu public et que l’on intègre alors automatiquement dans la fonction publique les personnes qui le composent. Il aurait pu y avoir en effet un pendant à votre mesure : l’État renonce à certains services mais le périmètre de l’État et des services publics peut s’étendre à des services aujourd’hui privés dont on intègrerait alors le personnel à la fonction publique. Mais votre objectif n’est que de privatiser, de réduire le périmètre des services publics, avec un dogmatisme dont même vos prédécesseurs n’osaient pas faire preuve.

Dans la réalité du détachement d’office, soit la personne acceptera le CDI soit elle sera mutée à quarante ou cinquante kilomètres. L’opportunité de garder son statut de fonctionnaire va lui passer sous le nez, elle sera plus ou moins directement contrainte d’accepter des conditions plus précaires.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je ne peux pas vous laisser dire que son statut sera plus précaire, puisque le salaire sera équivalent, le temps passé considéré comme du service effectif dans le corps, le fonctionnaire sera réintégré de plein droit s’il est licencié et il pourra réintégrer l’administration avec un préavis de trois mois. Que le détachement ne vous convienne pas, c’est une chose, mais en tout cas le fonctionnaire ne perd pas de garanties.

Mme George Pau-Langevin. Nous avons connu des précédents dramatiques : souvenez-vous de ce qui s’est passé à France Télécom. Il est extrêmement stressant pour quelqu’un qui s’était engagé dans la fonction publique et qui bénéficiait d’un certain nombre de garanties de se retrouver détaché d’office dans le privé. Combien de suicides en ont résulté à France Télécom ? Je ne comprends pas que l’on puisse agir aussi légèrement, en disant : « Il n’y a pas de problème ; circulez, il n’y a rien à voir. »

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Il faut comparer ce qui est comparable. Dans le cas de France Télécom, il s’agissait d’agents publics dont la structure était passée sous statut privé et qui n’avaient le choix qu’entre rester agents publics dans une structure privée avec un régime d’extinction du statut, ce qui n’est pas ce que nous proposons, ou rejoindre le statut privé de l’entreprise, d’abord France Télécom puis Orange. Les faits dramatiques que vous évoquez ne sont pas liés à la question du statut des agents mais au management. Je trouve indécent de laisser entendre que le détachement d’office pourrait être cause de suicide.

Mme George Pau-Langevin. Je trouve incroyable que vous traitiez d’indécente cette préoccupation pour la sécurité des agents. Pourquoi ne leur laisse-t-on aucun choix ? L’agent est envoyé d’office dans le privé et, s’il est licencié dans le privé, on pourra lui retrouver une place dans l’administration : pourquoi ne pas le faire dès le départ ? Il ne faut pas être aussi sûr de soi dans un domaine qui concerne l’humain.

M. Philippe Latombe. Vous ne citez pas l’exemple de l’ANPE, Pôle emploi, où cela ne s’est pas trop mal passé. Comme le secrétaire d’État l’a indiqué, c’est une question de management et pas seulement de statut. Le mode de management à France Télécom a fait l’objet de procédures judiciaires et a été clairement mis en cause.

M. Ugo Bernalicis. J’apprécie la démonstration du secrétaire d’État, qui vient de nous prouver par A plus B que le management privé n’est pas vertueux en soi, que ce n’est pas la panacée, et que la gestion d’un ex-service public par le privé est dans bien des cas pitoyable et préjudiciable à la fois aux agents et aux usagers devenus clients.

Pôle emploi a vécu des moments douloureux en matière de gestion interne et je ne crois pas que ce soit le meilleur exemple à citer. La convention de gestion entre l’État et Pôle emploi n’est d’ailleurs pas très glorieuse, pas plus que celle pour les CAF. La responsabilité est partagée entre l’État et le management local en raison d’une approche managériale inspirée du privé qui ne poursuit pas le seul intérêt général et se fonde sur des indicateurs de performance à tous les niveaux dans la logique du New Public Management. Nous vous mettons en garde, ce n’est pas du tout ce qu’il faut faire : vous êtes en train de détricoter l’État et les services publics, et cela va générer bien plus de tensions et de précarité dans la société. Vous ne voulez pas nous entendre. Dont acte. Je pense que la mobilisation se fera dans la rue ; peut-être recevrez-vous davantage le message…

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Je tiens à rassurer Mme Pau-Langevin. Il y a un droit d’option. Les agents en détachement restent fonctionnaires, gardent le statut. Je vous donne un exemple. Une commune choisit d’externaliser un service de cantine scolaire et de le confier à un opérateur en délégation de service public (DSP) – cela se produit dans de nombreuses communes, quelle que soit leur couleur politique. Aujourd’hui, si le restaurant scolaire compte des agents contractuels de droit public, ceux-ci sont obligés de rejoindre l’opérateur privé. Les agents titulaires de la fonction publique peuvent quant à eux refuser, ce qui signifie que la commune garde des cuisiniers alors qu’elle n’a plus de cuisines à gérer, ce qui pose un problème de gestion. Le texte propose un détachement d’office mais le cuisinier réintègrera le service public à la fin de la DSP ou, s’il candidate, comme les fonctionnaires en conditions normales d’activité, sur un emploi public et est recruté, il réintègrera le service public en bénéficiant du même déroulement de carrière que s’il avait passé dans la fonction publique les années passées dans le privé. C’est mieux qu’un droit d’option puisque c’est une possibilité de retour sans préjudice de carrière.

Mme George Pau-Langevin. Dans cet exemple, la commune a supprimé sa cantine et donc affecté son cuisinier à une entreprise privée. Si cela ne se passe pas bien dans l’entreprise privée, vous dites que le cuisinier peut revenir mais où va-t-il revenir puisque vous avez supprimé la cantine ? Vous n’avez fait que déplacer le problème dans le temps.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Si cela se passe mal avec son employeur, l’agent sera dans une procédure de contrôle par les prud’hommes ou l’inspection du travail. Ce choix politique d’externalisation, qu’on le partage ou non, est un choix qui relève de la libre administration des collectivités. Votre raisonnement s’appliquerait aussi aux contractuels mais l’amendement que vous avez déposé ne montre pas que vous vous souciez d’eux.

La Commission rejette ces amendements.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CL802 de M. Paul Molac et CL505 de Mme Marietta Karamanli.

M. Paul Molac. Nous contestons que les agents puissent être détachés d’office. Les personnes à France Télécom avaient le choix entre garder le statut de fonctionnaire ou passer sous droit privé. Même avec les garde-fous prévus, le détachement d’office nous gêne.

Mme George Pau-Langevin. Notre amendement de repli vise à empêcher le détachement d’office d’un fonctionnaire auprès d’une personne morale de droit privé en cas d’externalisation de son service ou de sa mission. Avec l’amendement CL505, le détachement ne sera possible qu’à la demande du fonctionnaire concerné ou au moins avec son accord. Les députés socialistes s’opposent à ce que l’on puisse contraindre un fonctionnaire à être détaché d’office dans le privé en cas d’externalisation de son service ou de ses missions. Il doit avoir la possibilité de refuser ou non d’être détaché.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable. Si on retire le caractère d’office de ces détachements, on retombe dans la disposition légale de détachement simple qui existe aujourd’hui.

M. Ugo Bernalicis. Merci de rappeler que le détachement simple est possible dans le droit actuel. Vous voulez y ajouter un élément de coercition qui n’existait pas jusqu’à présent, tout en nous parlant de liberté, de libre-arbitre, de souplesse… La souplesse pour permettre à l’employeur public de se séparer plus rapidement d’un fonctionnaire ! Si c’est un fonctionnaire territorial, cela retombera sur les bras du centre de gestion, la personne sera en souffrance, on ne lui proposera pas de reconversion, de formation, et cela finira en arrêt maladie. C’est ça, l’objectif ? Cela complète la disposition sur le petit pécule pour que les fonctionnaires partent. Je n’ai pas le sentiment que ce soit une forme de management moderne.

Mme George Pau-Langevin. Supprimer « d’office » relève de l’équité. Si le cuisinier de la cantine, dans l’exemple du secrétaire d’État, se voit donner le choix, on peut penser qu’il sera content de continuer à travailler dans sa cantine, dans la plupart des cas. Ce qui est gênant, c’est la contrainte. Ce n’est pas dans l’esprit du statut des fonctionnaires que de les affecter d’office sur un poste.

La Commission rejette successivement les deux amendements.

Elle examine ensuite l’amendement CL804 de M. Paul Molac.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Cet amendement complète à nos yeux le dispositif. Le texte prévoit que, si un agent public fait l’objet d’un détachement d’office, sa rémunération est garantie au même montant que celle qu’il percevait dans l’établissement public. M. Molac propose que, si cet agent arrive dans une société privée au sein de laquelle le poste qu’il occupe est normalement mieux payé que dans le public, une logique d’égalité salariale s’applique. Le Gouvernement est favorable à cette protection supplémentaire pour l’agent public.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL506 de M. Boris Vallaud.

Mme George Pau-Langevin. Il s’agit de permettre aux fonctionnaires détachés d’office en cas d’externalisation de demander la fin de leur détachement pour pouvoir réintégrer leur corps ou cadre d’emplois d’origine. L’article 28 permet d’obtenir la fin du détachement sans certitude de pouvoir réintégrer son corps ou cadre d’emplois d’origine. Un fonctionnaire doit avoir la possibilité de refuser ou non d’être détaché en cas d’externalisation de son emploi. Le contraindre au détachement revient à nier les principes fondamentaux sur lesquels repose notre fonction publique.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Votre amendement me semble satisfait par la rédaction actuelle. Je vous en demande donc le retrait ou à défaut j’émettrai un avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels CL651, CL652 et CL653 de la rapporteure.

Ensuite de quoi, la Commission est saisie de l’amendement CL863 du Gouvernement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Il s’agit d’une coordination du détachement d’office pour les agents mis à disposition d’une entreprise.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 28 modifié.

Après l’article 28

La Commission est saisie de l’amendement CL232 de Mme Danièle Obono.

M. Ugo Bernalicis. Cet amendement prévoit que les usagers du service public ont droit à ce que leurs demandes soient traitées de manière non automatisée et qu’au moins un agent public porte une appréciation sur leurs dossiers et leurs demandes, que les usagers aient le droit d’avoir accès dans le cadre de leurs démarches à un agent public, que cela soit à un guichet ou par téléphone. Nous proposons que le service public Allô Service Public, avec le numéro 3939, ne puisse induire de frais supplémentaires, autres que le coût de l’appel lui-même – nous avons prévu de compenser les pertes de recettes pour l’État mais je suis sûr que le ministre de l’Action et des Comptes publics trouvera les ressources nécessaires. J’ai envie de dire que c’est un amendement d’inspiration maintenant « jupitérienne » puisque le Président de la République s’est récemment converti à ces notions d’accueil du public et de services publics de proximité. Je ne doute donc pas qu’au moins le secrétaire d’État y donnera un avis favorable.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Il me semble que ces mesures relèvent davantage du code des relations entre le public et l’administration ou de la loi « Informatique et Libertés » que d’un texte sur la fonction publique qui concerne davantage le statut et les modalités d’organisation. En outre, cet amendement est en partie satisfait par l’article 10 de la loi « Informatique et Libertés » : « Aucune décision produisant des effets juridiques à l’égard d’une personne ou l’affectant de manière significative ne peut être prise sur le seul fondement d’un traitement automatisé de données à caractère personnel », sauf exceptions limitativement énumérées. Avis défavorable.

M. Ugo Bernalicis. Le projet de loi relatif à la justice va donc être concerné. Le Conseil constitutionnel a d’ailleurs beaucoup censuré.

Dans l’exposé des motifs du projet, vous écrivez : « La recherche de nouvelles capacités d’innovation et de réactivité dans les organisations de travail apparaît indispensable pour améliorer la qualité du service public et garantir sa présence au plus près du territoire. » Cet amendement s’inscrit pleinement dans cette logique.

La Commission rejette l’amendement.

   titre V

   renforcer l’égalité professionnelle

Chapitre Ier
Égalité professionnelle et prévention des discriminations

Article 29 (art. 6 quater A et 6 septies [nouveau] de la loi n° 83 – 634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, art. 26 –2 [nouveau] de la loi n° 84 –53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et art. 51 [abrogé] de la loi n° 2012 –347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique) : Obligation de plans d’action « égalité professionnelle » au sein des employeurs publics d’ici à 2020

La Commission est saisie de l’amendement CL97 de Mme Laurence Gayte.

Mme Marie-Pierre Rixain, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. La systématisation du dispositif de signalement des actes de violence, de harcèlement ou d’agissements sexistes et sexuels est une avancée majeure du projet de loi. Pourtant, dans les auditions menées par notre rapporteure Laurence Gayte au nom de la délégation aux droits des femmes, trop souvent encore les agents nous ont fait part de leurs interrogations et de la difficulté à trouver un référent à même de les accompagner dans le déploiement des mesures de lutte et de prévention.

Je sais, monsieur le secrétaire d’État, que beaucoup a été fait en la matière au sein de la fonction publique de l’État, avec la désignation de référents sur ces questions. Cet amendement de la délégation propose justement de systématiser et de généraliser cette pratique, qui ne doit pas rester soumise à l’engagement de chaque responsable : chaque structure publique doit en effet se doter d’un référent.

Cette personne aura pour mission d’animer un réseau, de faire vivre les initiatives, voire de porter, en lien avec les services des ressources humaines, des formations spécifiques en matière de prévention de ces violences.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je demande un retrait de cet amendement car il me semble qu’en termes d’obligations, l’important était de mettre en place un dispositif efficace de signalement des actes de violence, de harcèlement moral ou sexuel ou d’agissements sexistes. C’est ce que fait ce projet de loi, qui précise d’ailleurs, à l’alinéa 3 de l’article 29, que le rôle de ce dispositif est également d’orienter les victimes.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. La loi impose le dispositif de signalement automatique et les décrets d’application, qui ont notamment à définir les compétences des instances, prévoiront la généralisation et donc l’obligation de nommer un référent en matière de prévention. Il sera possible en outre de mutualiser le référent dans la fonction publique territoriale pour les plus petites structures. L’objectif de l’amendement de la délégation sera donc satisfait par les décrets d’application.

L’amendement est retiré.

La Commission examine ensuite l’amendement CL509 de M. Boris Vallaud.

Mme George Pau-Langevin. L’article 29 met en place un dispositif de signalement pour les agents qui s’estiment victimes d’un acte de violence, de harcèlement moral ou sexuel, ou d’agissements sexistes, ce qui est très bien. Nous proposons d’ouvrir le dispositif de signalement non seulement aux victimes mais aussi aux témoins de ces actes car parfois les victimes ont plus de mal à parler.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis favorable à cet amendement. Il ne faut pas négliger l’importance des témoins s’agissant de tels actes. Il importe donc de reconnaître leur rôle au sein du dispositif de signalement. D’ailleurs, dans le guide pratique et juridique édité par le ministère du travail pour le secteur privé, on mentionne bien l’importance du témoin dans les dispositifs de signalement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Avis favorable également. Il me semble que l’amendement a été modifié entre son dépôt initial et sa publication car nous avions prévu un sous-amendement. Nous souhaitons en effet intégrer des modifications rédactionnelles pour parler des « agents liés à un acte de violence sexuelle » et préciser « sur le lieu de travail ». Je propose d’adopter cet amendement, mais ne soyez pas surprise, madame Pau-Langevin, si le Gouvernement présente en séance un amendement rédactionnel.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL508 de Mme Marietta Karamanli.

Mme George Pau-Langevin. Nous proposons, dans le même cas, une possibilité pour les victimes de prendre part à la procédure disciplinaire comme intervenants volontaires, avec la possibilité d’être assistées, ce qui permettrait un débat contradictoire.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Demande de retrait ou avis défavorable. Cela induit une confusion entre deux procédures distinctes, la procédure pénale et la procédure disciplinaire. La procédure disciplinaire ne reconnaît que deux parties : l’administration et son agent public. Attention aux effets de bord : si on le fait pour le harcèlement, cela peut créer un précédent pour d’autres procédures. Je crois que le disciplinaire doit rester séparé du judiciaire.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Même avis. Dans le cadre d’une procédure disciplinaire, une victime ne peut intervenir qu’en qualité de témoin et non comme intervenant volontaire.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL98 de Mme Laurence Gayte.

Mme Marie-Pierre Rixain, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Pour que le dispositif de signalement soit réellement efficace, il convient de s’assurer qu’il respectera bien quatre critères. Il doit respecter un impératif de confidentialité dans le recueil des appels et des témoignages, un enjeu d’accessibilité – la plateforme numérique est un outil précieux mais elle ne doit pas être le seul recours –, une exigence de formation des personnes qui répondront aux signalements – accueillir un témoignage suppose expertise et expérience –, enfin un délai de traitement suffisamment rapide pour que la victime puisse être protégée, au moins par des mesures conservatoires, et que les auteurs soient poursuivis. Ces quatre critères seront déterminants pour la crédibilité du dispositif. La délégation aux droits des femmes recommande donc que la loi les consacre, charge au décret d’en préciser les modalités opérationnelles.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. J’ai pris connaissance des amendements CL98 et CL94. Je demande le retrait de l’amendement CL98 car, si je suis d’accord avec la première partie sur les modalités d’application du dispositif de signalement, la seconde partie me paraît moins pertinente. En outre les amendements CL94 et CL98 sont incompatibles.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Même avis. Le Gouvernement demande le retrait de l’amendement CL98, notamment en raison de l’exigence de rapidité, peu compatible avec le cas par cas sur les questions de formation. On sait en effet que, d’un territoire à l’autre et d’un établissement public à l’autre, les possibilités de formation, les viviers de référents, sont très différents. En outre, il y a aussi sur ces questions une forme d’engagement personnel, parfois de militantisme, qui se traduit par une grande compétence sur un dossier sans que ce soit forcément certifié par un diplôme ou un titre. Il faut donc regarder ensemble comment assurer une certaine souplesse.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL94 de Mme Laurence Gayte.

Mme Marie-Pierre Rixain, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. La mutualisation des dispositifs de signalement apparaît comme une nécessité pour les plus petites structures qui ne sauraient prendre en charge une structure dédiée. Par ailleurs, même pour des structures de taille plus importante, la mutualisation peut être une réponse pertinente, surtout lorsque les personnes mises en cause sont à la tête de l’administration concernée. Le projet de loi n’écarte pas cette possibilité mais il nous a semblé, à la délégation aux droits des femmes, qu’il fallait la mettre mieux et plus clairement en avant.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, l’amendement est adopté.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL571 de M. Pascal Brindeau, CL93 de Mme Laurence Gayte, CL510 de Mme Marietta Karamanli, ainsi que les deux amendements identiques CL166 de M. Matthieu Orphelin et CL805 de M. Paul Molac.

M. Pascal Brindeau. Il s’agit de supprimer le seuil de 20 000 habitants pour les collectivités territoriales et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) en ce qui concerne l’obligation de mettre en place un plan d’action pluriannuel relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Nous considérons que, si cette action en faveur de l’égalité professionnelle est une cause nationale et générale, la taille des collectivités n’est pas en jeu ici. On comprend évidemment que les plans d’action qui seront prévus par les uns et les autres seront de toute façon à la mesure des capacités des collectivités.

Mme Marie-Pierre Rixain, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. J’ai bien entendu le secrétaire d’État nous indiquer que le champ d’application du plan d’action est le résultat d’un accord entre syndicats et employeurs. Et je me réjouis de l’abaissement du seuil de 40 000 à 20 000 habitants.

Pour autant, nous pourrions aller plus loin et retenir non pas le nombre d’habitants, mais le nombre d’agents. L’amendement CL93 propose de retenir un seuil de cinquante agents, identique à celui existant dans le secteur privé.

Mme George Pau-Langevin. L’amendement CL510 élargit le périmètre des collectivités et EPCI qui devront élaborer et mettre en œuvre un plan d’action pluriannuel en matière d’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Actuellement, l’article 29 impose aux collectivités et EPCI de plus de 20 000 habitants d’instaurer un tel plan. Notre amendement abaisse le seuil à 15 000, pour trois ans renouvelables.

M. Matthieu Orphelin. L’égalité hommes-femmes est une grande cause du quinquennat. L’article 29 prévoit la mise en œuvre de plans d’action pluriannuels pour les collectivités de plus de 20 000 habitants. Autant il nous paraît important de préserver les plus petites communes de cette obligation – plus de 31 000 communes ont moins de dix agents –, autant le seuil de plus de 20 000 habitants paraît trop élevé. L’amendement CL166 propose de le ramener à 10 000 pour que ces plans d’action puissent concerner un large pourcentage des agents des fonctions publiques.

M. Paul Molac. Je n’ai pas de certitudes en la matière, sauf celle que le seuil de 20 000 habitants est trop élevé. Dans les toutes petites communes, en général, DGS et secrétaire sont des femmes et ceux qui s’occupent des espaces verts sont des hommes. L’amendement CL805 propose de passer à 10 000 habitants. C’est peut-être trop peu, mais le seuil de 20 000 est trop élevé…

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je comprends l’enjeu, partagé par différents groupes de la Commission, mais ce seuil est le résultat de l’accord relatif à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes dans la fonction publique signé par les représentants syndicaux. Je souhaiterais avoir l’opinion du secrétaire d’État sur ces amendements.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Le protocole d’accord a été négocié et signé le 30 novembre 2018. Dans sa version initiale, il obligeait les collectivités de plus de 40 000 habitants à mettre en place un plan d’action. C’est ce sur quoi tous les employeurs publics, et notamment les employeurs territoriaux par la voix de leurs associations généralistes, s’étaient entendus avec les organisations syndicales. L’accord a été signé par sept des neuf organisations syndicales.

Lors de la phase de concertation officielle – réunion du Conseil commun de la fonction publique et du Conseil supérieur –, un accord plus ambitieux a été trouvé en séance et le seuil abaissé à 20 000 habitants. L’ensemble des employeurs, considérant l’effort de passage de 40 000 à 20 000 habitants comme important, souhaite rester à ce seuil. Je tiens pour ma part à défendre l’équilibre de l’accord.

Pour autant, j’apporterai une précision importante : l’intégralité des dispositions de l’accord – et donc du projet de loi et des décrets d’application – qui concerne l’égalité entre les femmes et les hommes s’applique à toutes collectivités territoriales, qu’elles aient un, cinq ou dix agents, un, cinq ou dix mille habitants. La seule obligation qui dépend de ce seuil de 20 000 habitants est la formalisation des actions au sein d’un plan d’action dont la non-élaboration entraînera une sanction.

Par contre, la neutralisation du congé parental sur le déroulement de la carrière, l’obligation nouvelle de répartition équilibrée des avancements et des promotions au choix en fonction de la répartition femmes-hommes des cadres d’emplois concernés – pour ne prendre que ces exemples – s’appliqueront à toutes les collectivités, quelle que soit leur taille, même si elles n’ont pas l’obligation de formaliser un plan d’action.

Au début de la discussion, nous avons en outre précisé qu’indépendamment de leur taille, toutes les collectivités de plus de cinquante habitants, qui ont l’obligation de mettre en place une instance de dialogue social, devront se pencher sur l’égalité professionnelle, indépendamment de la formalisation d’un plan. En effet, les comités sociaux d’établissement, d’administration ou territoriaux sont obligatoirement compétents sur l’égalité professionnelle femmes-hommes.

Cela satisfait une partie des amendements déposés. Je solliciterai donc leur retrait. À défaut, mon avis sera défavorable, par respect du principe arrêté en négociation et au vu des explications que je viens de fournir.

M. Paul Molac. Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie pour vos explications. Je suis très attaché au dialogue social. Il est important de tenir compte de l’avis des partenaires sociaux et corps intermédiaires. Je retire donc mon amendement.

M. Matthieu Orphelin. Je retire également le mien.

Mme Marie-Pierre Rixain, présidente de la délégation aux droits des femmes. Au vu des explications de M. le secrétaire d’État, nous retirons aussi notre amendement.

Les amendements CL93, CL166 et CL805 sont retirés.

La Commission rejette successivement les amendements CL571 et CL510.

Elle adopte ensuite les amendements rédactionnels CL654 et CL704 de la rapporteure.

Elle en vient à l’amendement CL87 de Mme Laurence Gayte.

Mme Marie-Pierre Rixain, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Le présent amendement de la délégation reprend pour l’essentiel les éléments qui figuraient dans l’avant-projet de loi et que le Conseil d’État a considéré relever du champ réglementaire.

Il nous semble déterminant que la loi soit plus précise dans la définition du champ du plan d’action : nous devons expressément inscrire des obligations d’agir pour évaluer, prévenir et traiter les écarts de rémunération, pour garantir un égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités, pour favoriser l’articulation entre vie privée et vie professionnelle et pour lutter contre les violences et les discriminations.

À l’instar de ce qui existe dans le secteur privé, les fonctions publiques doivent être exemplaires en la matière, s’engager concrètement et rendre compte de l’atteinte de ces objectifs.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis favorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Également favorable.

La Commission adopte l’amendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CL88 de Mme Laurence Gayte et CL761 de Mme Laurence Vichnievsky.

Mme Marie-Pierre Rixain, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Le rapport de situation comparée (RSC) comprend certes déjà beaucoup de données, mais elles sont présentées et exploitées de façon très disparate. La délégation souhaite assurer une meilleure coordination de ces éléments. L’amendement CL88 propose deux ajouts : en plus des informations existantes, le premier vise à ce que les administrations regroupent ces données dans cinq indicateurs synthétiques. Ils pourraient être établis selon une méthodologie proche de celle existant pour le secteur privé, en tenant compte des spécificités du secteur public. Ces indicateurs permettraient d’établir des comparaisons entre les différentes fonctions publiques et de disposer d’éléments de comparaison avec le secteur privé.

Le second ajout permettra d’enrichir les échanges avec les partenaires sociaux : le RSC devra faire un point annuel sur la mise en œuvre du plan d’action.

Mme Laurence Vichnievsky. Notre proposition est similaire à celle de Mme Rixain s’agissant des indicateurs à l’alinéa 8. En complément, à l’alinéa 10, nous proposons qu’une sanction puisse intervenir non seulement en l’absence d’élaboration du plan d’action, mais aussi en l’absence de résultats dans la mise en œuvre de ce plan. Cela s’apparentera à une obligation de résultat. Il ne suffit pas d’élaborer un plan, encore faut-il aussi obtenir des résultats.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis favorable à l’amendement CL88 de la délégation et demanderais donc à Mme Vichnievsky de bien vouloir retirer l’amendement CL761. Le premier point soulevé par ce dernier amendement est satisfait par celui de la délégation, mais l’obligation de résultat ne fait pas partie de l’accord signé. Je laisserai le secrétaire d’État répondre sur ce point.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Je suis également favorable à l’amendement de la délégation et demanderais donc à Mme Vichnievsky de bien vouloir retirer le sien.

Une telle disposition avait été écartée au moment de la conclusion de l’accord. En outre, la nouveauté et le niveau d’ambition fixé aux différents partenaires nécessitent un peu de temps avant l’application d’une règle si sévère. Enfin, certaines dispositions prévues par le projet de loi feront l’objet d’une obligation de mise en œuvre automatique : ainsi, la répartition des avancements au choix devra être équilibrée par rapport à la répartition femmes-hommes des corps et cadres d’emplois concernés. Le contrôle de légalité fera son office en la matière et cette disposition sera opposable à celles et ceux qui voudraient se retourner contre une décision ne respectant pas ce principe issu de l’accord. Il me semble un peu sévère de prévoir automatiquement une obligation de résultat assortie de sanction.

Mme Laurence Vichnievsky. Je remercie le secrétaire d’État pour ses explications. Je suis satisfaite de l’adoption de la première partie de notre amendement et veux bien admettre que nous étions un peu ambitieux pour la seconde. Je retire donc l’amendement.

L’amendement CL761 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL88.

Elle en vient à l’amendement CL92 de Mme Laurence Gayte.

Mme Marie-Pierre Rixain, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Cet amendement est issu de la recommandation n° 4 du rapport de notre collègue Laurence Gayte, membre de la délégation aux droits des femmes. La délégation propose d’inscrire dans la loi le principe de publicité du rapport de situation comparée, consacrant une pratique existant déjà dans nombre d’administrations.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis favorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Je m’en remettrai à la sagesse de la Commission.

La Commission adopte l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL270 de M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Cet amendement propose que les sanctions liées au non-respect du plan ne concernent que l’autorité hiérarchique qui en est en charge, et non le reste des agents. Il ne faudrait pas que les agents soient doublement victimes de la non-mise en œuvre d’un plan d’action…

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable, au vu des arguments précédemment développés par le secrétaire d’État.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL806 de M. Yannick Favennec Becot.

M. Yannick Favennec Becot. Cet amendement vise à ce que soit non seulement sanctionnée l’absence d’élaboration de plan d’action, mais également son absence de mise en œuvre.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable, au vu des arguments précédemment développés par le secrétaire d’État.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient aux amendements identiques CL90 de Mme Laurence Gayte, CL511 de M. Boris Vallaud et CL572 de M. Pascal Brindeau.

Mme Marie-Pierre Rixain, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Si vous le permettez, madame la présidente, je défendrai les amendements CL90 et CL91 en même temps, car ils procèdent d’une même logique, même si l’amendement CL91 est placé ultérieurement.

La délégation a souhaité renforcer le dispositif de sanction relatif au plan d’action en distinguant deux situations. L’absence d’élaboration du plan d’action relève d’un constat de fait ; elle témoigne d’une volonté de la structure de ne pas traiter les enjeux relatifs à l’égalité professionnelle. Nous considérons qu’un tel comportement doit être sanctionné de façon systématique. C’est l’objet de l’amendement CL90.

En revanche, nous proposons d’instaurer un dialogue constructif entre la structure et son organe de contrôle dans la définition des objectifs, la mise en œuvre et le suivi du plan d’action. La logique existant pour le privé nous semble ici encore pouvoir être reprise. L’amendement CL 91 propose cette souplesse et cet examen qualitatif.

Ces deux amendements vont donc de pair, l’un en créant une sanction automatique liée à une situation de fait, l’autre étant dans une approche plus qualitative et inscrite dans une logique de dialogue.

Mme George Pau-Langevin. L’amendement CL511 rend obligatoire la pénalité financière dont devront s’acquitter les employeurs publics concernés par l’obligation de mettre en place un plan d’action pluriannuel, s’ils n’ont pas élaboré un tel plan.

Actuellement, l’article 29 fixe une pénalité dont le montant ne pourra pas excéder 1 % de la rémunération brute annuelle globale de l’ensemble des personnels. L’amendement relève le plafond à 2 %. En outre, nous proposons de rendre la pénalité automatique.

M. Pascal Brindeau. L’absence d’élaboration d’un plan d’action dénote une volonté de ne pas mettre en place un tel plan. La sanction doit donc être automatique. Sinon, nous risquons d’instaurer un système différencié entre organismes ou collectivités selon que l’organe de contrôle considère que l’absence de plan est un oubli plutôt qu’une absence de volonté de se conformer à la loi. C’est ce que propose l’amendement CL572.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Il faut plutôt susciter l’adhésion des employeurs publics sur le sujet. Je ne suis pas sûre que la coercition soit le meilleur moyen de l’atteindre. Le contrôle de légalité va se charger du contrôle. Il sait le faire et, si les délais sont un peu dépassés, il peut aussi faire preuve d’un minimum de souplesse. Il me semble important de rester sur le texte de l’accord.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Même avis pour les raisons évoquées précédemment.

M. Pascal Brindeau. Madame la rapporteure, vous faites état d’une capacité d’appréciation du contrôle de légalité sur un délai. Ce n’est pas ce que dit l’article, puisqu’il vise l’absence et non le retard dans l’élaboration. Si vous considérez qu’un peu de souplesse est nécessaire pour appliquer la sanction en cas de retard, il faut le viser expressément, et non l’absence qui, elle, doit faire l’objet d’une sanction. En l’état actuel du projet de loi, l’absence de plan peut ne pas être sanctionnée.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. C’est bien cela, l’absence peut ne pas être sanctionnée. Dans le cadre du contrôle de légalité, dans la pratique, nous le savons tous, on discute sur le terrain et dans les préfectures…

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Effectivement, la sanction n’est pas automatique s’agissant de la mise en place du plan. À l’inverse, les éléments de l’accord qui ont un caractère prescriptif – la répartition équilibrée des avancements et des promotions au choix, par exemple – seront mis en œuvre sans délai, sous le contrôle de légalité classique, puisqu’ils seront issus de délibérations ou d’actes réglementaires adoptés en matière de gestion des ressources humaines (GRH).

La Commission rejette ces amendements.

Elle en vient à l’examen, en discussion commune, des amendements CL807 de M. Yannick Favennec Becot, CL848 de M. Boris Vallaud et CL91 de Mme Laurence Gayte.

M. Yannick Favennec Becot. Les sanctions financières prévues par l’article 29 en cas d’absence d’élaboration du plan d’action ne sont pas suffisamment incitatives et pourraient entraîner l’État et ses établissements publics administratifs, les collectivités territoriales et les établissements publics soumis à cette mesure à intégrer dans leur budget les coûts liés à ce non-respect. L’amendement vise donc à relever le niveau des sanctions financières, afin de laisser au juge administratif le soin de déterminer le montant adéquat, notamment en regard du non-respect répété dans le temps de cette obligation par les administrations concernées.

Mme George Pau-Langevin. L’amendement CL848 est défendu.

Mme Marie-Pierre Rixain, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. J’ai défendu l’amendement CL91 en même temps que le CL90, précédemment.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Même si je comprends tout à fait vos craintes, à ce stade, il est plus important d’envoyer un signal positif aux acteurs plutôt que d’imposer des dispositions par la coercition. En outre, cet article est issu de l’accord. Mon avis sera donc défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Également défavorable. J’ajouterai que ce 1 % de la masse salariale est le pourcentage qui sera appliqué dans le secteur privé. Nous avons la volonté d’homogénéiser les dispositions entre les secteurs public et privé.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle passe à l’amendement CL89 de Mme Laurence Gayte.

Mme Marie-Pierre Rixain présidente de la délégation aux droits des femmes. Cet amendement de la délégation aux droits des femmes vise à ce que la méthodologie d’élaboration des indicateurs soit commune à toutes les administrations, faute de quoi les éléments publiés seront impossibles à comparer et ne donneront pas une image fidèle de la réalité.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Un avis un petit peu favorable…

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Je vous demanderais de bien vouloir retirer votre amendement, satisfait par l’adoption de l’amendement CL88 également relatif aux indicateurs.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL269 de M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Nous proposons d’imposer la parité femmes-hommes pour les personnalités qualifiées nommées en raison de leurs compétences, expériences ou connaissances dans les conseils d’administration, les conseils de surveillance ou les organes équivalents des établissements publics.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Le rapport du contrôle général économique et financier (CGEFI) de 2017 a réalisé un état des lieux de l’application des règles de parité dans les conseils d’administration et les conseils de surveillance des établissements publics. Il fait le constat d’une amélioration dans l’ensemble : sur les 206 établissements relevant du champ du CGEFI, des progrès ont été réalisés depuis les enquêtes de 2010 et 2012 : de 18 % en 2010, le taux de féminisation globale oscille entre 23 % et 48 % selon la catégorie d’organismes observés en 2016, même s’il existe de fortes disparités entre les secteurs d’activité, les types d’établissements et les catégories de membres du conseil d’administration – représentants de l’État, personnalités qualifiées, administrateurs, représentants des salariés.

En outre, le taux de 50 % que vous prévoyez dans votre amendement me paraît particulièrement peu souple. J’y suis donc défavorable.

M. Ugo Bernalicis. Notre amendement indique 50 % et prévoit que l’écart entre le nombre de femmes et le nombre d’hommes ne peut être supérieur à un, il y a donc une petite marge de manœuvre. En outre, nous visons uniquement les personnalités qualifiées, pas l’intégralité du conseil d’administration. Effectivement, dans ce dernier cas, il serait plus complexe d’arriver exactement à 50 %, compte tenu des différents collèges.

Certes, cela progresse, mais vous êtes toujours dans une stratégie de petits pas… C’est dommage, surtout s’agissant de personnes souvent désignées.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 29 modifié.

Article 30 (art. 6 quater de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires) : Extension et renforcement du dispositif de nominations équilibrées sur les emplois de direction

La Commission examine l’amendement CL95 de Mme Laurence Gayte.

Mme Marie-Pierre Rixain, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Cet amendement de la délégation vise à élargir le champ d’application du dispositif de nominations équilibrées entre les femmes et les hommes. Nous avons souvent entendu que le dispositif avait atteint une sorte de palier, faute d’un vivier suffisant de candidates. Nous proposons d’agir en amont en élargissant les postes devant faire l’objet de nominations équilibrées.

Ce point nous paraît particulièrement important dans les établissements publics ; il ne faudrait pas limiter le champ de la mesure aux seuls postes faisant l’objet d’une nomination en Conseil des ministres, sinon le dispositif perdrait vraiment de sa pertinence.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Le projet de loi représente déjà une belle avancée. Je ne nie pas l’intérêt et la nécessité de constituer des viviers, mais je préférerais que nous nous en tenions au texte de l’accord professionnel. Je vous demanderais de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, mon avis sera défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. J’ajoute que la notion d’emplois supérieurs n’est juridiquement pas clairement définie, comme c’est le cas pour les emplois de direction. Cela pose une difficulté d’appréciation de l’amendement.

En outre, élargir le dispositif de nominations équilibrées à l’ensemble des emplois dits supérieurs présente un risque pour l’accès des femmes aux emplois de direction et aux plus hautes responsabilités : si le taux de 40 % est apprécié de manière globale par département ministériel ou par collectivité, et non par niveau d’emploi, pour l’atteindre, certaines administrations risquent de déployer leurs efforts sur les emplois supérieurs – plus nombreux et déjà plus accessibles aux femmes – plutôt que sur les emplois de direction – moins nombreux mais porteurs de plus de responsabilités. C’est pourquoi je vous demanderais de bien vouloir retirer votre amendement. À défaut, mon avis sera défavorable.

Mme Marie-Pierre Rixain, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. J’entends les arguments de M. le secrétaire d’État, notamment sur un plan rédactionnel. Nous allons réfléchir – peut-être avec vous – sur les possibilités d’aller un peu plus loin sur ce point.

L’amendement est retiré.

La Commission passe à l’amendement CL271 de M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Nous proposons d’étendre le champ des nominations au-delà des postes de direction, aux postes de sous-direction et de chefs et cheffes de bureau ou équivalents. Cela répondra aux préoccupations du secrétaire d’État.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Il s’agit du même sujet. Mon avis est toujours défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Les emplois de sous-directeurs sont déjà concernés par le décret qui fixe les modalités de nominations équilibrées dans l’encadrement supérieur de la fonction publique. Votre amendement est donc en partie satisfait.

La notion de chef de bureau n’est pas définie juridiquement. Je ne peux donc être favorable à votre amendement.

Je le répète, nous ne l’avons sans doute pas suffisamment souligné : pour atteindre 40 % de femmes dans les emplois de direction partout, il faut que les autorités qui nomment puissent piocher dans un vivier suffisamment large. C’est ce qui nous a amenés à modifier les règles de répartition des avancements au choix, afin de tenir compte de la répartition femmes-hommes dans les différents corps ou cadres d’emplois : un accès équilibré à l’avancement et aux promotions au choix est aussi la garantie de disposer d’un vivier équilibré pour la nomination dans les emplois de direction.

M. Ugo Bernalicis. Il est dommage que l’on ne puisse pas définir cette notion… Elle est d’ailleurs en partie définie car la fonction de chef de bureau en préfecture ou en administration centrale entraîne certaines incompatibilités lors des élections. Elle a donc bien une réalité juridique. Je suis ouvert à ce que l’on réfléchisse ensemble à une définition plus solide du concept, si c’est le seul problème qui se pose.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Chef de bureau n’est pas un statut d’emploi. Les incompatibilités que vous évoquez ne sont pas liées au titre mais à la délégation de signature et à l’exercice d’une autorité ou d’une puissance administrative.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite les amendements rédactionnels CL655 et CL656 de la rapporteure.

La Commission examine l’amendement CL512 de Mme Marietta Karamanli.

Mme George Pau-Langevin. Par cet amendement, nous proposons d’établir une nouvelle trajectoire de montée en charge de la proportion minimale de personnes de chaque sexe « primo-nommées » dans les emplois de direction de la fonction publique. Sous le précédent quinquennat, cette proportion avait été fixée à 20 % en 2013, puis à 40 % en 2017. Or, le projet de loi ne prévoit pas de nouvelle trajectoire. Cet amendement tend donc à fixer cette proportion à 45 % en 2022 et à 50 % en 2025, afin d’atteindre véritablement la parité.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Tout d’abord, une proportion de 50 % n’est pas un minimum, c’est un absolu. La proportion minimale actuelle, qui est de 40 %, doit donc être maintenue et appliquée au flux entrant. Elle permet, par ailleurs, de conserver un minimum de souplesse dans le recrutement. Avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. La trajectoire évoquée par Mme Pau-Langevin a été arrêtée par la loi du 12 mars 2012, dite « loi Sauvadet ». Actuellement, la proportion est de 36 %, dans les trois versants confondus, alors que l’objectif est de 40 %. Il reste donc du chemin à parcourir.

Nous avons fait le choix, non pas d’augmenter la proportion requise – car il est communément admis qu’à 40 %, l’équilibre est atteint –, mais d’élargir le vivier. Ainsi, pour la fonction publique d’État, le nombre de postes concernés augmentera de presque 25 %. S’ajoute à cette mesure celle que j’ai évoquée à propos des avancements et promotions au choix pour accéder à l’encadrement.

Avis défavorable donc, car nous avons opté pour une méthode différente de celle que vous proposez pour aboutir à la féminisation des emplois de direction.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels CL657, CL658, CL659 et CL660, tous de la rapporteure.

Puis elle est saisie de l’amendement CL513 de M. Boris Vallaud.

Mme George Pau-Langevin. Cet amendement tend à renforcer les pénalités financières dues par les employeurs publics en cas de non-respect de la proportion minimale de personnes de chaque sexe « primo-nommées » dans les emplois de direction de la fonction publique. Sous le précédent quinquennat, de 30 000 euros par unité manquante pour atteindre la proportion minimale en 2013, la pénalité financière a été portée à 90 000 euros en 2017. Or, le projet de loi ne prévoit pas de nouvelle trajectoire de montée en charge de ce dispositif de sanction. Nous proposons donc de fixer le montant de cette pénalité à 120 000 euros en 2022 et à 150 000 en 2025.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Les sanctions prononcées aujourd’hui sont déjà conséquentes puisqu’en 2017, seule la fonction publique hospitalière a atteint le taux de 40 % de primo-nominations de personnes de chaque sexe. Au sein des fonctions publiques d’État et territoriale, les taux de primo-nominations féminines sont respectivement de 36 % et de 34  %.

Au sein de l’État, six des onze départements ministériels n’ont pas atteint l’objectif légal de primo-nominations en 2017. Le montant total de la pénalité financière due au titre de l’année 2017 est ainsi de 2 340 000 euros et correspond à 26 unités manquantes.

Dans la fonction publique territoriale, 17 des 41 collectivités territoriales ou EPCI ayant achevé ou accompli un cycle complet de nominations, soit 41 % d’entre elles, n’ont pas atteint l’objectif annuel de primo-nominations. Le montant total de la pénalité financière due par ces employeurs territoriaux s’élève à 2 160 000 euros.

Le chemin est donc encore long : le changement culturel n’est pas encore achevé. Il convient donc de maintenir les sanctions, mais il n’est pas forcément nécessaire de les augmenter.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Au début de l’année 2019, nous avons pu, au titre de l’exercice 2018, consolidé les dispositifs de recouvrement des pénalités. De fait, plus les objectifs sont difficiles à atteindre, plus les pénalités sont élevées. Or, lorsqu’elles étaient faibles, tout n’avait pas été mis en œuvre pour assurer leur recouvrement. Pour la première fois cette année, l’intégralité des sommes dues ont donc été recouvrées, au niveau tant de la fonction publique territoriale que de la fonction publique de l’État. Je le dis en connaissance de cause, puisque le bloc constitué par les deux ministères, de l’économie et des finances, d’une part, et de l’action et des comptes publics, d’autre part, est le premier contributeur au sein de la fonction publique de l’État.

J’ajoute que Gérald Darmanin et moi-même avons créé, par une circulaire en date du mois de février dernier, le Fonds d’intervention pour l’égalité femmes-hommes dans la fonction publique d’État, dont nous avons précisé qu’il serait notamment – faute de quoi, les fonds ne seraient pas suffisants – alimenté par les pénalités acquittées par les employeurs, lesquelles étaient jusqu’à présent versées au budget général de l’État.

Mme George Pau-Langevin. Il faut au moins maintenir le niveau des sanctions, car le changement ne se fait pas spontanément.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. C’est ce que nous faisons.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte les amendements rédactionnels CL661 et CL662, tous deux de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement CL96 de Mme Laurence Gayte.

Mme Marie-Pierre Rixain, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Cet amendement est issu de la recommandation n° 11 du rapport de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes.

Le Gouvernement a créé, au début de l’année, le Fonds pour l’égalité professionnelle, rattaché au Programme 148 du projet de loi de finances. Il finance des mesures de formation et de prévention en faveur de cette égalité et il est abondé, en partie, par les pénalités versées par les structures qui ne respectent pas les règles en matière de nominations équilibrées. Toutefois, les règles de recevabilité et les dispositions de la Loi organique relative aux lois de finances (LOLF) ne permettant pas d’affecter les pénalités à ce fonds et d’en flécher les dépenses, nous proposons d’assurer un suivi attentif de l’utilisation de ces crédits lors de l’examen de chaque PLF en complétant le document de politique transversale sur l’égalité entre les femmes et les hommes.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Il me semble que votre préoccupation est largement prise en compte, dans la mesure où la liste des actions conduites par le Fonds d’intervention pour l’égalité professionnelle sera présentée par la Direction générale de l’administration et de la fonction publique (DGAFP) devant le Conseil commun de la fonction publique (CCFP). Je vous suggère donc de retirer l’amendement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. J’ajoute que, si Mme la présidente de la délégation le souhaite, la présentation qui sera faite de cette liste par la DGAFP devant la formation spécialisée dans l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes du CCFP pourra lui être communiquée. Par ailleurs, le Programme 148, « Fonction publique », du PLF, auquel est rattaché le Fonds d’intervention, permettra également d’assurer le suivi demandé. Je suggère donc à Mme Rixain de retirer l’amendement.

Mme Marie-Pierre Rixain, présidente de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes. Je remercie M. le secrétaire d’État pour l’attention qu’il porte à l’Assemblée nationale et à son information, et je retire donc l’amendement CL96 au nom de Mme Gayte.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’article 30 modifié.

Article 31 (art. 16 ter et 16 quater [nouveaux] de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, art. 20 bis, 26 bis et 58 bis [abrogés] de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, art. 42 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, art. 30-1 [abrogé] et 35 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière et art. 55 [abrogé] de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique) : Sécurisation des règles de composition équilibrée et de présidence alternée pour les jurys et comités de sélection

La Commission est saisie de l’amendement CL514 de Mme Marietta Karamanli.

Mme George Pau-Langevin. L’article 31 tend à fixer à 40 % la proportion minimale de personnes de chaque sexe au sein des jurys et instances de sélection constitués pour le recrutement ou l’avancement des fonctionnaires. Par cet amendement, nous proposons de porter cette proportion à 45 % en 2022 et à 50 % en 2025.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que celles évoquées à l’amendement CL512.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL272 de Mme Danièle Obono.

M. Ugo Bernalicis. Il s’agit de supprimer l’alinéa 4 de l’article 31, qui vise à autoriser les dérogations au principe de renforcement de la parité dans les jurys de concours. En effet, je ne comprends pas la raison d’être de telles dérogations. Mais peut-être allez-vous éclairer ma lanterne.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. C’est une bonne question… Je laisse à M. le secrétaire d’État le soin de vous répondre.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Ces dérogations s’expliquent par le fait que certains corps ne sont absolument pas féminisés – le cas est plus fréquent que celui de corps qui ne sont pas masculinisés, mais ces derniers existent également. Or, nous devons composer des jurys permanents, qui se réunissent pendant plusieurs jours, dans la mesure où les candidats doivent être examinés par un même jury. Des dérogations au principe sont donc parfois nécessaires pour permettre leur constitution. Néanmoins, je puis vous assurer qu’elles ne sont valables que pendant deux ans, le temps que nous puissions former les personnes concernées, et que nous avons donné pour consigne d’y recourir le moins souvent possible.

J’ajoute que nous menons des actions de formation et de sensibilisation de l’ensemble des membres des jurys à la lutte contre les discriminations, quelle qu’en soit la forme, de façon qu’ils soient le plus objectifs possible.

M. Ugo Bernalicis. Pourriez-vous nous indiquer quels sont les concours qui posent problème ? Par ailleurs, le délai de deux ans ne figure pas dans le texte. S’agit-il de justifier le caractère « exceptionnel » de la dérogation et d’éviter ainsi la censure du juge administratif ? Pourquoi pas un an ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Le délai de deux ans est suffisamment bref. La dérogation a un caractère exceptionnel pour les raisons que vous avez évoquées et permet à un même jury d’officier lors de plusieurs sessions d’un concours. Quels sont les jurys concernés ? Ceux des concours d’Agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles (ATSEM), que nous avons beaucoup de mal à masculiniser, et ceux des concours de sapeurs-pompiers professionnels, que nous avons beaucoup de mal à féminiser, en dépit de la féminisation croissante de la profession. Mais, je le répète, les services doivent faire en sorte de contourner cette difficulté : les dérogations doivent demeurer l’exception.

M. Ugo Bernalicis. Ne serait-il pas sage de préciser dans le texte, d’ici à la séance publique, le délai durant lequel ces dérogations sont possibles ?

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Le décret le prévoira.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’amendement rédactionnel CL663 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 31 modifié.

Article 32 (art. 115 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 et art. 88 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale) : Inapplication du jour de carence pour les congés maladie liés à la grossesse et maintien des primes de la fonction publique territoriale en cas de congé maternité

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL664 de la rapporteure.

Elle examine ensuite l’amendement CL288 de Mme Danièle Obono.

M. Ugo Bernalicis. Cet amendement vise à encadrer le pouvoir réglementaire d’organisation du service dans le but de garantir l’égalité entre les genres, dont le principe est inscrit dans le Préambule de 1946.

Si les modes de calcul de l’absentéisme sont très divers, aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé, la plupart d’entre eux établissent une distinction entre les absences dites compressibles et les absences dites incompressibles. Les secondes sont celles sur lesquelles la gestion des ressources humaines de l’employeur ne peut et ne doit avoir aucun effet. C’est le cas notamment des cinq semaines de congés payés fixées par la loi ou des congés pour formation ou pour raison syndicale. Ces absences constituent ce que l’on peut appeler un taux d’absence ou d’absentéisme normal. Les absences compressibles, quant à elles, sont des absences, justifiées ou non, sur lesquelles l’employeur peut, par sa gestion des ressources humaines, avoir une influence. Or, les congés pour charge parentale et les congés de maternité sont parfois considérés comme des absences qu’il est possible et souhaitable de réduire. La durée de ce type de congé étant fixée par la loi, la seule manière de réduire ces absences est de limiter l’embauche des personnes potentiellement susceptibles d’y avoir recours : les personnes enceintes ou en âge de l’être. Cette pratique pose bien entendu problème. C’est pourquoi nous proposons de la proscrire.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je veux, en préambule, saluer l’article 32, qui tend à exonérer du jour de carence les congés maladie liés à une grossesse, car c’est une mesure que j’ai défendue dans mes rapports successifs depuis 2017. Au-delà du symbole, elle permet de combler une inégalité naturelle.

L’amendement soulève un véritable problème, mais sa rédaction, qui s’inscrit dans un article principiel sur les droits à congé, ne me paraît pas satisfaisante. Au demeurant, cette question relève, me semble-t-il, du domaine réglementaire. En outre, le IV, qui vise l’ensemble des salariées et pas uniquement les fonctionnaires, n’a pas lieu d’être dans ce projet de loi. Je demande donc à M. Bernalicis de bien vouloir retirer l’amendement ; à défaut, avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Avis défavorable, pour les mêmes raisons que la rapporteure. Le IV de l’amendement nous semble être, en effet, un cavalier législatif puisqu’il tend à modifier des articles généraux du code du travail, qui s’applique au secteur privé.

M. Ugo Bernalicis. Dont acte, s’agissant du IV. Pour le reste, il s’agit, c’est vrai, de poser le principe selon lequel les absences pour congé de maternité sont forcément considérées comme incompressibles. On m’a informé que certaines collectivités territoriales prenaient en compte, dans leur mode de calcul des absences compressibles, les congés maternité, de sorte que les femmes enceintes ou en âge de l’être se retrouvent sur le carreau. C’est un véritable problème. Cependant, si la question relève du domaine réglementaire, peut-être pouvez-vous, monsieur le secrétaire d’État, vous engager à nous proposer une nouvelle rédaction ?

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle est saisie de l’amendement CL273 de M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Par cet amendement, nous proposons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport qui dresse le bilan de l’instauration du jour de carence dans la fonction publique. On sait que celui-ci a suscité un vaste débat et fait l’objet de mesures contraires de la part des majorités successives. Toujours est-il qu’il n’a pas d’impact sur le taux d’absentéisme dans la fonction publique et qu’il est même à l’origine, selon plusieurs rapports, de l’allongement des arrêts maladie. Le seul impact dont on est certain, c’est qu’il prive les personnes malades d’un jour de salaire. Du reste, sa suppression n’avait pas entraîné une multiplication des arrêts maladie.

Nous proposons donc que cette mesure fasse l’objet d’une étude. Sans doute l’Inspection générale des finances appréciera-t-elle de se pencher sur ce problème plutôt que d’essayer de prouver – si l’on en croit, du moins, la lecture que les ministres font de ses rapports – que les fonctionnaires ne travaillent pas suffisamment.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 32 modifié.

Article 33 (art. 51, 54, 54-1 [nouveau] et 58 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, art. 72, 75, 75-1 [nouveau] et 79 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, art. 64, 64-1 [nouveau] et 69 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) : Maintien des droits à l’avancement/promotion en cas de congé parental et de disponibilité de droit pour élever un enfant - Égal accès des femmes et des hommes dans les procédures d’avancement

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL665 et CL666, tous deux de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CL274 de Mme Danièle Obono.

M. Ugo Bernalicis. Par cet amendement, nous proposons que le plan d’action prévu par la loi de 1983 portant statut de la fonction publique précise les actions mises en œuvre pour garantir l’égal accès des femmes et des hommes aux promotions.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cet amendement est satisfait par l’adoption à l’article 29 de l’amendement CL77 de la délégation aux droits des femmes. Demande de retrait.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL99 de Mme Laurence Gayte.

Mme Laurence Gayte. Le présent amendement vise à consacrer la publicité des tableaux d’avancement et des informations sur la part relative des femmes et des hommes dans les « promouvables » et les promus. Cette pratique semble déjà très largement appliquée, mais il nous semble utile de la généraliser et de la systématiser.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cet amendement me semble satisfait. Demande de retrait.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. L’amendement est en effet satisfait par l’article 33 du projet de loi, qui tient compte de la recommandation n° 28 du rapport de la délégation aux droits des femmes. Par ailleurs, je rappelle que la procédure de publication des tableaux d’avancement est déjà prévue par chacune des lois statutaires : à l’article 28 de la loi de 1984 pour la fonction publique d’État et à l’article 101 de la loi de 1986 pour la fonction publique hospitalière.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL667, CL669 et CL670, l’amendement de correction d’une référence erronée CL849 et les amendements rédactionnels CL671 et CL672, tous de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 33 modifié.

Après l’article 33

La Commission est saisie de l’amendement CL300 de M. Didier Baichère.

M. Didier Baichère. Il s’agit de consacrer à l’égalité des chances un chapitre du projet de loi, qui regrouperait l’ensemble des dispositions favorables à une fonction publique représentative de la société dans toute sa diversité. La cohésion sociale et républicaine l’exige. En effet, le secteur public reproduit, dans le recrutement par contrat comme par concours, des formes multiples de discrimination que le rapport L’Horty a soulignées dès 2015. Or, la fonction publique se doit d’être exemplaire en matière de non-discrimination à l’embauche et, plus encore, en matière d’inclusion économique des personnes issues des quartiers populaires, notamment celles qui résident dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville et dans les zones de revitalisation rurale. L’État ne saurait en effet exiger des entreprises qu’elles soient exemplaires et engagées dans ce combat si lui-même n’est pas exemplaire et, surtout, s’il n’affiche pas sa volonté dans ce domaine.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Certains dispositifs, qui se situent hors du cadre de ce projet de loi, incitent à la diversité. Je pense, par exemple, à la mission que le Président de la République a confiée à Frédéric Thiriez, qui doit se pencher sur les questions de l’accès aux concours et de l’entrée dans la fonction publique. Par ailleurs, les dispositions que vous proposerez sont plutôt d’ordre réglementaire. Je ne suis donc pas certaine qu’il soit nécessaire de consacrer à ces mesures un chapitre entier du texte. Avis défavorable, donc.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Mme la rapporteure a souligné avec raison que nombre des dispositions que vous proposerez sont de nature réglementaire et ne trouvent pas leur place dans un projet de loi. J’ajoute que les gouvernements ont légiféré en matière de lutte contre les discriminations et d’égalité des chances en interdisant, dès 2001, toute discrimination dans la fonction publique et en adoptant des dispositifs en faveur de l’égalité des chances. Nous avons complété ces dispositifs, notamment par les programmes PRAB (Préparation aux concours de catégorie A et B) et PACTE (Parcours d'accès aux carrières de la fonction publique territoriale, hospitalière et d'État) ou par la promotion du label « Diversité » qu’ont obtenu plus de la moitié des ministères, lesquels sont presque aussi nombreux à avoir également obtenu la labellisation « Égalité » relative à l’égalité femmes-hommes.

En outre, en 2017, la loi « Égalité et citoyenneté » a créé un rapport biennal sur la lutte contre les discriminations et la prise en compte de la diversité de la société française dans la fonction publique de l’État. Ce rapport, qui sera rendu public dans les prochaines semaines, fera l’objet d’un débat et sera sans doute l’occasion de commenter les mesures que nous prenons en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes et de l’inclusion des personnes en situation de handicap.

Par ailleurs, dans le cadre de la concertation sur l’organisation des concours et l’accès à la fonction publique, je souhaite – mais cela ne relève pas de la loi – que nous puissions développer les modalités de préparation aux concours. J’estime en effet, à titre personnel, que rien n’est pire que d’organiser sans cesse des concours spécifiques : il est préférable de les adapter – j’ai évoqué tout à l’heure l’apprentissage à propos des filières spécialisées. Ainsi, pour ce qui est des quartiers prioritaires au titre de la politique de la ville ou des ZRR, je crois plus utile et pertinent – et peut-être aussi plus républicain – d’aider les candidats à réussir le concours que d’inventer des concours différenciés. Il convient, à cet effet, de développer des classes préparatoires intégrées. Ma préférence irait à des classes relevant des Instituts professionnels d’administration générale (IPAG), qui présentent l’avantage d’offrir aux stagiaires la possibilité, en cas d’échec aux concours, d’être titulaires d’un diplôme qualifiant.

Je serai donc amené à donner un avis le plus souvent défavorable aux amendements que vous allez défendre. Non pas parce que je n’en partage pas l’objectif, mais parce qu’ils relèvent du domaine réglementaire ou parce que nous avons fait le choix de développer d’autres outils et d’autres procédures que ceux que vous proposez pour favoriser la diversité.

Mme George Pau-Langevin. Le problème soulevé par M. Baichère est très important. Sans doute nombre des mesures qu’il propose relèvent-elles du domaine réglementaire, mais il serait très positif que la loi affirme le principe selon lequel la diversité de la fonction publique est un atout. Beaucoup de procédures existent déjà dans ce domaine, notamment les Conventions éducation prioritaire de Sciences Po, qui ont indiscutablement permis à cet institut de diversifier le recrutement de ses étudiants. Mais l’École nationale d’administration (ENA), par exemple, n’a pas beaucoup bougé et, dans le cadre de la réflexion en cours sur l’avenir de cette école, il serait très important que l’objectif de diversité soit affirmé dans le cadre du recrutement de ses élèves.

M. Didier Baichère. Au moment où l’on parle beaucoup de la représentativité de la fonction publique, le fait de consacrer un chapitre du projet de loi de transformation de la fonction publique à cette question aurait valeur de symbole. Une telle mesure me paraît d’autant plus opportune que le Président de la République a, récemment encore, insisté sur cette problématique. Je maintiens donc l’amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL228 de Mme Danièle Obono.

M. Ugo Bernalicis. Cet amendement relève du même état d’esprit que l’amendement précédent, puisqu’il tend à préciser que « les concours s’attachent, dans leurs modalités d’information, d’accès et de recrutement, à ce que les recrutements reflètent la diversité sociologique de la société ».

J’ai voté en faveur de l’amendement CL300, mais son exposé sommaire me paraît problématique. Comme M. le secrétaire d’État, je préfère que tout le monde puisse réussir le concours. Certains élèves ayant bénéficié des conventions éducation prioritaire de Sciences Po ont en effet témoigné du fait que, n’étant pas issus de la filière « concours », ils n’étaient pas considérés comme les autres étudiants. Le problème ne se pose pas, en tout cas pas de la même manière, dans les Instituts régionaux d’administration (IRA), puisque tout le monde passe le même concours, même si certains étudiants viennent de la Classe préparatoire intégrée (CPI). À ce propos, il me semble que ces classes ne devraient pas forcément être intégrées à l’établissement concerné. Il serait préférable qu’elles soient gérées par des IPAG, éventuellement, en tout cas qu’elles soient mieux réparties sur le territoire. De fait, certains membres du jury du concours sont également membres du conseil d’administration de l’IRA et veulent pouvoir se prévaloir, par une sorte de prophétie auto-réalisatrice, qu’un nombre important d’élèves des CPI réussissent le concours.

Il faut que tout le monde puisse avoir accès au concours et le réussir. On sait que ce qui est en jeu, ce sont davantage les codes culturels que les connaissances et les savoirs. Il faut donc réfléchir au concours lui-même, à ce qu’il valorise et dévalorise, à ce que l’on attend des candidats. C’est pourquoi il importe également de diversifier la composition sociologique des jurys eux-mêmes. Nous serons au point lorsque l’ENA, ou son équivalent futur, comptera parmi ses élèves 30 % d’enfants d’employés ou d’ouvriers.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je suis à 90 % d’accord avec vous, monsieur Bernalicis. Je ne sais pas si nous devons, l’un et l’autre, nous en inquiéter… En tout cas, je partage évidemment votre objectif et je ne peux que vous renvoyer à la réflexion menée par la mission Thiriez. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement ; à défaut avis défavorable.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Le principe que vous défendez peut susciter l’adhésion, mais l’inscrire dans la loi et, ce faisant, lui conférer un caractère prescriptif me semble contradictoire avec l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, selon lequel tous les citoyens sont admissibles aux emplois publics selon leur capacité « et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents ».

Mme George Pau-Langevin. C’est un vieux débat !

M. Ugo Bernalicis. Nous gagnerions tous à inscrire ce principe dans la loi. L’amendement ne va pas très loin : il ne définit ni obligations précises, ni coercitions ou sanctions particulières. Un tel principe fixerait un cadre à la réflexion de ceux qui sont actuellement chargés de missions sur ce sujet ou qui travailleront sur les textes à venir. Je rappelle que nous examinons un projet de loi que vous avez vous-même intitulé « transformation de la fonction publique » : il serait dommage que nous n’y inscrivions pas au moins ce principe. À l’argument que M. le secrétaire d’État tire de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme, je répondrai que ce principe ne s’est pas opposé au développement de la parité et de la féminisation de certains corps, qui sont admises par le Conseil constitutionnel, lequel, je crois, s’est lui-même également un peu féminisé…

M. Olivier Dussopt, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Action et des Comptes publics. Tout ce qui a été fait en matière de parité et de féminisation n’a jamais entraîné une modification des modalités d’organisation ou de répartition des résultats des concours. Les processus de nomination ne relèvent pas du concours.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL473 de Mme Christine Pires Beaune. 

Mme George Pau-Langevin. L’amendement vise à ouvrir certains concours de la fonction publique territoriale aux candidats justifiant d’une certification professionnelle enregistrée au répertoire national des certifications professionnelles. Aujourd'hui, les concours sont ouverts aux candidats justifiant de certains diplômes ou de l'accomplissement de certaines études. Or le concours sur qualification professionnelle est une réponse aux problèmes de recrutement rencontrés par les collectivités, puisque cela permettrait d’élargir les viviers de recrutement. Très souvent, la fonction publique est une solution pour les gens qui ne sont pas issus de milieux aisés. Reprocher le manque de diversité sociale dans la fonction publique n’est pas une manière de ne pas reconnaître qu’elle représente une ouverture pour beaucoup de gens modestes.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. La question de l’attractivité des concours fait déjà partie des dispositions de l’article 22 sur les habilitations relatives à la formation à prendre par ordonnance. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL303 de M. Didier Baichère.

M. Didier Baichère. L’amendement vise à ce que la puissance publique ait une connaissance précise du nombre d’agents contractuels issus des quartiers de politique de la ville (QPV) et des zones de revitalisation rurale (ZRR), afin de pouvoir appliquer une politique d’égalité des chances volontariste pour ouvrir ses recrutements à ces territoires.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’amendement est un peu flou dans sa rédaction. Avis défavorable à ce stade.

La Commission rejette l’amendement.

Elle passe ensuite à l’examen de l’amendement CL304 de M. Didier Baichère.

M. Didier Baichère. L’amendement vise à créer une obligation d’affichage des critères légaux de nondiscrimination dans les lieux recevant des candidats au recrutement dans la fonction publique par voie de concours ou contractuelle.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cela relève du niveau réglementaire. Avis défavorable.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL307 de M. Didier Baichère.

M. Didier Baichère. L’amendement vise à aligner l’administration sur les exigences du secteur privé en matière de recrutements non discriminants et innovants. La formation de l’encadrement est un préalable indispensable pour mener à bien une politique d’égalité des chances volontariste dans l’ensemble de nos territoires.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Le contenu des formations managériales doit relever du niveau réglementaire. En revanche, nous avons adopté un amendement sur la formation au management pour tous les agents publics qui prennent leur fonction de manager pour la première fois. Les enjeux de la lutte contre la discrimination devront être étudiés dans ce cadre. Demande de retrait.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Même avis, pour le même argument. Depuis plusieurs années, de manière systématique, les membres des jurys de concours des trois versants sont formés à la lutte contre les discriminations et au recrutement fondé sur les seules aptitudes et capacités. Dans le schéma directeur de la formation professionnelle des agents de l’État pour la période 20182020, nous avons prévu des modules de développement et de diffusion d’une culture commune à l’ensemble des managers autour des pratiques managériales d’égalité et de promotion de la diversité. Ce n’est pas ce qui est le plus simple à mettre en œuvre, dans la mesure où cela nécessite qu’un maximum de gens passent par cette formation et y soient sensibilisés, avant que cela ne se diffuse. Nous travaillons notamment avec l’IRA de Nantes autour de cette formation et de la diffusion de ces valeurs, avec des formateurs de formateurs. Aujourd’hui, environ 30 000 managers ont été formés sur ces questions dans le cadre du schéma directeur que je viens d’évoquer. Comme vous le voyez, nous partageons vos préoccupations. Demande de retrait.

M. Didier Baichère. Je ne doute pas que le Gouvernement se préoccupe de ce sujet. Mais si nous avons adopté un amendement relatif à la formation des managers, peut-être pouvons-nous le préciser dans le sens de la lutte contre la discrimination, ou amender, en tout état de cause, sur ce sujet spécifique ? Pourquoi l’un serait-il plus réglementaire que l’autre ? Si nous avons adopté le premier, nous devrions pouvoir adopter celui-ci.

M. Ugo Bernalicis. Monsieur le secrétaire d’État, 30 000 managers sur combien ? Et combien ne passeront jamais par la formation parce qu’ils ne la demanderont pas ou que leur chef de service ne leur permettra pas d’y aller ? Cet amendement permettait de formaliser une obligation, ce qui me semble aussi important que la formation initiale.

Mme George Pau-Langevin. C’est très important de former les cadres au management. Mais si vous précisez que cette formation est nécessaire, vous pouvez également préciser qu’il est obligatoire de les former à la lutte contre les discriminations. De nombreux comportements inappropriés viennent de ce que les gens ne sont pas formés à ces sujets. Il me semble que ce serait un progrès pour toute l’administration de systématiser la formation à la lutte contre les discriminations.

M. Didier Baichère. Peut-être pouvons-nous essayer de trouver, d’ici à la séance, une manière de montrer l’engagement très fort de la majorité, dont je ne doute pas et que nous devons formaliser ? Je suis ouvert à vos propositions.

La Commission rejette l’amendement.

Elle étudie l’amendement CL301 de M. Didier Baichère.

M. Didier Baichère. L’amendement vise à affirmer l’obligation d’élaborer un rapport de situation comparée annuel sur les enjeux de la diversité sociale au sein de l’administration, dans la continuité de la « loi Sauvadet » de 2012, ainsi que de la loi de 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté. Ce rapport sera annexé au bilan social de chacune des trois fonctions publiques.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Cette question pourra être intégrée, par décret, au rapport annuel unique sur les ressources humaines que nous avons voté au début du texte. Demande de retrait.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. L’article 158 de la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté crée l’obligation pour le Gouvernement de publier un rapport biennal sur la lutte contre les discriminations et la prise en compte de la diversité de la société dans les trois fonctions publiques. Le premier rapport, qui contient une contribution du Défenseur des droits, est actuellement soumis aux membres du Conseil commun de la fonction publique. Dès que la concertation sera achevée, il sera rendu public. Le rapport précise notamment les données relatives à la mise en œuvre des dispositifs d’insertion professionnelle dans la fonction publique des publics les plus éloignés de l’emploi, issus des QPV, des ZRR et des REP+, et concerne les stages de troisième, le parcours d’accès aux carrières de la fonction publique territoriale, hospitalière et d’État (PACTE), les classes préparatoires intégrées et le contrat de préparation aux concours de catégorie A et B (dispositif PRAB). Ce document très fourni répond à vos objectifs. Mais la densité des informations nous a contraints à rester modestes et à n’en proposer qu’une version biannuelle. Demande de retrait.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL306 de M. Didier Baichère.

M. Didier Baichère. L’amendement vise à ce que le ministre chargé de la fonction publique présente chaque année devant le Parlement un rapport de situation comparée sur les enjeux de la diversité sociale. Nous avons accompli des progrès en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes, parce que les obligations légales ont augmenté et que des rapports ont été faits. Il me semble donc important que le ministre s’engage à faire cette présentation devant le Parlement.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Je vais laisser le secrétaire d’État répondre, puisque vous réclamez un engagement du Gouvernement. Votre premier point pourrait être satisfait par le rapport annuel sur les ressources humaines dans la fonction publique. Quant au second, il rejoint l’objet de la mission confiée à M. Thiriez. Demande de retrait.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Je me tiens, bien évidemment, à la disposition du Parlement, comme tous les membres du Gouvernement. En revanche, ni Gouvernement, ni moi-même ne pouvons déterminer quels sont les rapports qui font l’objet d’une présentation obligatoire devant votre assemblée. Je ne peux pas prendre cet engagement à votre place… Demande de retrait.

La Commission rejette l’amendement.

Chapitre II
Favoriser l’égalité professionnelle pour les travailleurs en situation de handicap

Article 34 (art. 6 sexies de la loi n° 83–634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, art. 27 de la loi n° 84–16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, art. 35 de la loi n° 84–53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, art. 27 de la loi n° 86–33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière) : Développement du parcours professionnel des personnes en situation de handicap et amélioration de la prise en compte des aménagements nécessaires lors du déroulement des concours et examens

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL673 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 34 modifié.

Article 35 : Introduction à titre expérimental d’un mécanisme dérogatoire de détachement pour les personnes en situation de handicap

La Commission adopte l’amendement de coordination CL674 de la rapporteure.

Puis elle examine l’amendement CL515 de M. Boris Vallaud.

Mme George Pau-Langevin. L’article 35 instaure l’expérimentation, du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2025, d’une voie dérogatoire de promotion interne pour les fonctionnaires en situation de handicap. Concrètement, les fonctionnaires en situation de handicap pourront accéder à un corps de niveau supérieur ou de catégorie supérieure par la voie du détachement, sous réserve d’avoir accompli préalablement une certaine durée de services publics. Ce détachement pourra être renouvelé et, à son issue, le fonctionnaire pourra être intégré dans le corps concerné. Notre groupe est favorable à cette expérimentation, mais il considère qu'il est important d'en avancer l'évaluation, afin d'ajuster l'expérimentation si nécessaire.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Nous avons déjà abordé ce sujet dans l’article 26. Je suis défavorable au mécanisme de la double évaluation.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte ensuite l’article 35 modifié.

Après l’article 35

La Commission examine l’amendement CL284 de M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Même si je ne suis pas certain que notre dispositif soit suffisamment robuste pour être applicable, l’idée est de rendre obligatoire l’emploi de 6 % de travailleurs et de travailleuses en situation de handicap dans chaque catégorie. Très souvent, les personnes en situation de handicap tendent à se concentrer dans les emplois de catégorie C. Notre amendement vise à éviter tout effet de plafond de verre.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. De fait, votre dispositif n’est pas tout à fait opérationnel. Sur le fond, je ne retiendrai pas votre option. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL553 de Mme Jennifer de Temmerman.

M. Guillaume Vuilletet. L’amendement est défendu.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Demande de retrait.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Cet amendement, relatif aux aptitudes physiques requises pour l’examen d’entrée dans la fonction publique, est important. L’actualité nous a permis de pointer quelques difficultés. Tout le monde peut entendre que des conditions d’aptitudes physiques soient requises pour l’exercice de telle ou telle fonction. Mais nous savons aussi que, souvent, en plus des tests physiques, il est renvoyé à une nomenclature purement administrative qui définit l’état général physique d’un candidat en fonction de six critères. La présence de certaines pathologies chroniques dans cette nomenclature, comme le diabète de type 1, est systématiquement éliminatoire. Par exemple, si vous êtes atteint d’un diabète de type 1, vous ne pouvez pas intégrer le corps des sapeurs-pompiers, au prétexte que ce diabète peut provoquer une hypoglycémie ou une fatigue générale, incompatibles avec l’exercice. Cela est d’autant plus étonnant qu’un sapeurpompier professionnel diagnostiqué diabétique de type 1 n’est pas radié des cadres, ni déclaré inapte.

Comme je l’ai déjà évoqué, nous menons une réflexion sur les modalités d’accès aux concours et leur organisation. En plus de modifications purement réglementaires, nous souhaitons aussi modifier ces critères, pour faire en sorte que des pathologies, dont on sait pertinemment qu’elles ne sont pas incapacitantes, ne soient plus des freins. Cela renvoie à une autre nécessité – c’est d’ailleurs le sens de la mission confiée à Charlotte Lecocq : si l’on veut que des personnes souffrant d’une pathologie chronique qui n’est pas incapacitante travaillent dans la fonction publique, sans craindre que leur état évolue négativement et les rende inaptes, les employeurs publics doivent garantir à leurs agents une médecine de prévention et un suivi médical. Les deux sujets sont, à notre sens, liés. Je vous suggère de retirer votre amendement, qui relève du réglementaire.

L’amendement est retiré.

L’amendement CL556 de Mme Jennifer de Temmerman est également retiré.

Article 36 : Entrées en vigueur différées

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL746 de la rapporteure.

Puis elle étudie l’amendement CL873 du Gouvernement.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. C’est un amendement de coordination, relatif aux conditions d’entrée en vigueur du texte.

Suivant l’avis favorable de la rapporteure, la Commission adopte l’amendement.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette ensuite l’amendement CL808 de M. Paul Molac.

Puis elle examine l’amendement CL895 de la rapporteure.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. L’amendement vise à compléter la liste des missions confiées aux centres de gestion au niveau régional.

En l’état du droit, les missions gérées en commun par les centres de gestion à un niveau au moins régional sont au nombre de six. Pour permettre le renforcement du rôle joué par les centres de gestion coordonnateurs, ainsi que les mutualisations de services à un niveau au moins régional, il est proposé d’élargir le champ des missions en y ajoutant les six missions suivantes : la publicité des créations et des vacances d’emploi également pour les catégories C ; la mission définie au I de l’article 23 ; la publicité des listes d’aptitude établies en application des articles 39 et 44 ; l’aide aux fonctionnaires à la recherche d’un emploi après une période de disponibilité ; une assistance juridique statutaire, y compris pour la fonction de référent déontologue prévue à l’article 28 bis de la loi 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ; une assistance à la fiabilisation des comptes de droits en matière de retraite. L’ensemble de cet élargissement correspond à des missions qui peuvent être exercées à un niveau régional, étant donné qu’elles font appel à une expertise assez pointue et qu’elles ne nécessitent pas une proximité départementale.

Ces dispositions entreront en vigueur à compter du prochain renouvellement général des conseils municipaux.

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Avis favorable. C’est une forme de coordination et de mise en cohérence avec un amendement précédemment adopté sur les missions des centres de gestion.

La Commission adopte l’amendement.

Elle adopte successivement les amendements CL894 et CL675 de la rapporteure.

Puis elle adopte l’article 36 modifié.

Après l’article 36

La Commission examine l’amendement CL229 de M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Nous demandons qu’un rapport soit joint en annexe, précisant la liste des ministères dans lesquels il ne pourrait y avoir de suppressions d’emplois jusqu’en 2022 : ministère de l’éducation nationale et ses services déconcentrés ; ministère de l’écologie et ses services déconcentrés ; ministère de l’économie, de l’action et des comptes publics ; ministère du travail et Pôle emploi ; la police et la gendarmerie ; l’administration territoriale ; ou encore les services de santé. Nous espérons savoir ainsi dans quels ministères et dans quels services le Gouvernement souhaite réduire le nombre de fonctionnaires.

Mme Émilie Chalas, rapporteure. Avis défavorable à cette proposition de rapport annexé dont la première phrase est : « Le Gouvernement a enfin décidé d’agir de manière conforme à l’intérêt général. »

La Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, elle rejette l’amendement CL346 de M. Philippe Vigier.

Puis elle adopte l’ensemble du projet de loi modifié.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Monsieur le secrétaire d’État, madame la rapporteure, chers collègues, je vous remercie pour votre présence. Nous avons débattu durant plus de dix-huit heures !

M. Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des Comptes publics. Madame la présidente, je vous remercie, ainsi que l’ensemble des commissaires aux lois. Si nous avons parfois affiché quelques désaccords, cela l’a été de manière courtoise, argumentée et détaillée aussi souvent que possible, dans un climat que vous avez su garder serein et agréable. Je souhaite également remercier l’ensemble des services du secrétariat de la commission des Lois pour leur assistance précieuse, et leur dire le plaisir que j’ai eu à les retrouver.

*

*     *

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République vous demande d'adopter le projet de loi de transformation de la fonction publique (n° 1802) dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.


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   Personnes entendues

   M. Jean-Louis Nadal, président 

   Mme Elodie Cuerq, cheffe du pôle Communication et relations institutionnelles

   M. Sébastien Ellie, chef du pôle Juridiques et études

   M. Thierry Le Goff, directeur général

   M. Florian Blazy, directeur, adjoint au directeur général

   M. Nicolas de Saussure, chef du service du pilotage des politiques de ressources humaines

   Monsieur Stéphane Lagier, sous-directeur de l’encadrement, des statuts et des rémunérations

   M. Xavier Maire, sous-directeur de la synthèse statutaire, de la gouvernance et des partenariats

   Mme Caroline Lemasson-Gerner, adjointe au chef du bureau du statut général, de la diffusion du droit et du dialogue social

   Mme Cécile Lombard, sous-directrice des compétences et des parcours professionnels

   Mme Julia Di Ciccio, cheffe de bureau du statut général, de la diffusion du droit et du dialogue social

   Mme Maeleen Ferreira-Daniel, adjointe à la cheffe de bureau du statut général, de la diffusion du droit et du dialogue social

   M. Bruno Delsol, directeur général

   M. Mathias Albertone, sous-directeur des ressources humaines du système de santé 

   Mme Maud Soulier, adjointe au sous-directeur des ressources humaines du système de santé


   M. Martin Hirsch, directeur général 

   M. Sylvain Ducroz, directeur des ressources humaines

   M. François Deluga, président

   M. David Rey, conseiller 

   M. Roland Peylet, président

   M. Florian Blazy, directeur, adjoint au directeur général de l’administration et de la fonction publique

   Mme Fayrouze Dahou, secrétaire de la commission, bureau du statut général, de la diffusion du droit et du dialogue social (DGAFP)

   Mme Caroline Lemasson-Gerner, adjointe à la cheffe de bureau du statut général, de la diffusion du droit et du dialogue social (DGAFP)

   Mme Tessa Tournette, chargée d’études au sein du bureau du statut général, de la diffusion du droit et du dialogue social (DGAFP)

   Mme Julia Di Ciccio, cheffe de bureau du statut général, de la diffusion du droit et du dialogue social (DGAFP)

   M. Patrick Gérard, directeur 

   M. Michel Hiriart, président

   M. Thierry Sénamaud, directeur

   Mme Cindy Laborie, responsable des affaires juridiques 

   Mme Marie Houssel, responsable du pôle ressources humaines

   Mme Amélie Roux, adjointe à la responsable du pôle ressources humaines

   M. Benoit Serre, vice-président national

   Mme Irène Gazel, directrice générale des services adjointe - Ressources humaines et action sociale de l’Université Lumière - Lyon

   Mme Anaïs Coulon, cheffe de projets

   M. Philippe Laurent, président

   M. Jean-Robert Massimi, directeur général

   Mme Véronique Robitaillie, directrice

   Mme Marie-Claude Jarrot, présidente de l’Association des Maires de Saône-et-Loire, maire de Montceau-les-Mines

   M. Didier Ostré, directeur général adjoint

   Mme Stéphanie Colas, conseillère fonction publique territoriale

   Mme Charlotte de Fontaines, chargée des relations avec le Parlement

   M. Olivier Richefou, président du département de la Mayenne

   M. Jérôme Briend, conseiller fonction publique

   Mme Ann-Gaëlle Werner-Bernard, conseillère relations avec le Parlement

   M. Christophe Bouillon, président

       M. Matthieu Vasseur, chargé de mission

   Mme Muriel Sauvegrain, vice-présidente en charge des ressources humaines à Orléans et Orléans Métropole

   M. Ludovic Grousset, directeur de la cohésion territoriale

   Mme Eloïse Foucault, conseillère ressources

   M. Étienne Blanc, 1er vice-président d’Auvergne-Rhône-Alpes et président de la commission Finance-RH 

   M. Jean Grosset

   M. Michel Badré

   M. Sacha Dias

   M. Antoine Durand, directeur des ressources humaines de Rouen

   Mme Sarah Deslandes, directrice générale adjointe du centre interdépartemental de gestion petite couronne

   M. Frédéric Jalier, directeur général adjoint de Pantin

   Mme Agnès Verdier-Molinié, directrice

   M. Samuel-Frédéric Servière, expert

   Mme Emmanuelle Dussart, présidente

   M. Alexandre Mora, président

   M. Pierre-Marc Dufraisse, secrétaire général

   M. Fabien Tastet, directeur général des services de Grand Paris Sud Est Avenir

   M. Amaury Brandalise, directeur au Service départemental d’incendie et de secours 33

   Mme Emmanuelle Lointier, présidente

   M. Vincent Bimbard, vice-président 


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   Mme Emmanuelle Quillet, directrice générale

   M. Bertrand Longuet, directeur général adjoint

   M. Serge Brichet, président

   M. Didier Quercioli, secrétaire général

   Mme Laurence Tribillac, directrice influence et métiers

   Mme Angéline Séguy, responsable du pôle influence et veille

   M. Damien Zaversnik, président

   Mme Siham Soulaimani, secrétaire générale

       M. Nicolas Notin, en charge du plaidoyer

   Mme Nathalie Pilhes, présidente

   Mme Agnes Arcier, présidente d’honneur et fondatrice de l'association

   Mme Francoise Belet, membre associée

   Mme Mireille Faugère, membre associée

   M. Stéphane Pintre, président national

   M. Patrice Girot, premier vice-président national

   M. Emmanuel Gros, vice-président national


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   M. Bruno Collignon, président, président de la Fédération autonome de la fonction publique territoriale (FA-FPT)

   Mme Charruyer Caroline, secrétaire générale adjointe, vice-présidente de la FA-FPT

   M. Pascal Kessler, secrétaire général de la FA-FPT

   M. Amar Ammour, secrétaire général de la Fédération autonome de la fonction publique d’État (FA-FPE)

   M. Éric Labourdette, secrétaire général de la Fédération autonome de la fonction publique hospitalière (FA-FPH)

   Mme Nathalie Makarski, présidente de la fédération des services publics

   M. Loic Fanouillere, vice-président de la fédération des services publics

   M. Jean-Marc Canon

   Mme Dominique Duhamel

   Mme Sylvie Guinand

   Mme Sylvie Pons

   Mme Mylène Jacquot, secrétaire générale

   M. Bruno Lamy

   Mme Claire Le Calonnec

   Mme Cécilia Rapine

   M. Pierre Marie Rochard

   Mme Bernadette Groison, secrétaire générale

   M. Bruno Leveder, secrétaire national

   M. Didier Bourgoin, secrétaire national

   M. Xavier Marand, secrétaire national 


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   M. Roland Berthilier, président

   M. Anthony Aly, conseiller du président chargé des relations institutionnelles et de l’influence

   Mme Gaëlle Martinez, déléguée générale

   Mme Evelyne Barussaud-Ngo, déléguée adjointe

   M. Thierry Iva, secrétaire fédéral, branche État

   M. Didier Birig, secrétaire fédéral, branche santé

   M. Didier Pirot, secrétaire fédéral, branche territoriale

   M. Luc Farré, secrétaire général

   Mme Annick Fayard, secrétaire nationale 


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   déplacements

   Préfecture de l’Hérault : M. Pierre Pouëssel, préfet de l'Hérault, M. Pascal Otheguy, secrétaire général de la préfecture, M. Didier Carponcin, directeur départemental de la cohésion sociale, Mme Caroline Medous, directrice départementale de la protection des populations et M. Nicolas Tinie, directeur des ressources humaines et des moyens de la préfecture

   Centre hospitalier de Montpellier : M. Thomas Le Ludec, directeur général du Centre hospitalier universitaire de Montpellier, M. Guillaume du Chaffaut, directeur général adjoint

   Mairie de Montpellier : M. Philippe Saurel, maire de Montpellier, président de Montpellier Méditerranée Métropole

   Table ronde avec des représentants syndicaux de la fonction publique territoriale

   Table ronde avec des agents publics de la préfecture et des représentants syndicaux des directions départementales interministérielles

   Centre hospitalier universitaire (CHU) de Grenoble Alpes : M. Sébastien Vial, directeur général adjoint, M. François Verdun, directeur des ressources humaines, Mme Marie Nalet, directrice déléguée de pôle, M Edouard Douheret, directeur des services économiques et logistiques

   Préfecture de l’Isère : M. Lionel Beffre, préfet de l’Isère, table ronde avec des agents des trois fonctions publiques

   Conseil départemental : M. Jean-Pierre Barbier, président

   Table ronde avec des agents publics des trois fonctions publiques

   Table ronde avec des représentants syndicaux des trois fonctions publiques

   Table ronde avec des élus locaux

   Préfecture du Pas de Calais : M. Fabien Sudry, préfet et M. Jean-François Raffy, sous-préfet

   Centre hospitalier de Lens : M. Edmond Mackowiak, directeur et M. Thierry Daubresse, président du Conseil de surveillance


([1]) Conseil constitutionnel, décision n° 77-83 du 20 juillet 1977 et décision QPC n° 2010-91 du 28 janvier 2011.

([2]) Conseil d’État, 9 juillet 1986, Syndicat des commissaires de police et des hauts fonctionnaires de la police nationale.

([3]) Conseil supérieur de la fonction publique de l’État (CSFPE) créé par l’article 13 de la loi n° 84-16 du 11 janvier1984 ; Conseil supérieur de la fonction publique territoriale (CSFPT) créé par l’article 8 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ; Conseil supérieur de la fonction publique hospitalière (CSFPH) créé par l’article 11 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986.

([4]) Représentant l’ensemble des trois versants, le Conseil commun de la fonction publique a été créé par la loi n° 2010-751 du 5 juillet 2010.

([5]) Dans la fonction publique de l’État, les CAP sont organisées à l’échelle nationale ou déconcentrée par corps de fonctionnaires. Dans les fonctions publiques territoriale et hospitalière, les CAP sont organisées par catégories de fonctionnaires, à l’échelle de chaque collectivité et établissement.

([6]) Ils font suite aux comités d’hygiène et de sécurité mis en place par les lois statutaires des 11 janvier et 26 janvier 1984 et du 9 janvier 1986.

([7]) Le Directeur général de l’administration et de la fonction publique, le Directeur général des collectivités locales, le Directeur général de l’organisation des soins, le Directeur du budget, un membre du Conseil d’État et un membre de la Cour des comptes.

([8]) L’article 6 du décret n° 2012-148 du 30 janvier 2012 précise que le mandat des représentants des employeurs territoriaux expire en même temps que leur mandat ou fonction au sein du CSFPT.

([9]) Elles se distinguent selon l’objet des consultations requises : examen des projets de texte, examen des questions relatives à l’emploi public et à la politique des retraites, des rémunérations et des pensions, examen des questions relatives à l’égalité, à la mobilité et aux parcours professionnels, examen des questions d’hygiène, de santé et de sécurité et examen des questions relatives au fonctionnement et à l’organisation des services publics.

([10]) La compétence du CCFP s’exerçait initialement sur les projets de texte dont l’objet était commun aux trois versants.

([11]) Cependant, contrairement au CSFPE et au CSFPH, le CSFPT n’examine pas les recours en matière disciplinaire.

([12]) L’article 6 du décret n° 84-346 du 10 mai 1984 précise que les représentants des collectivités territoriales sont élus parmi les membres des conseils municipaux, départementaux et régionaux répartis en quatre catégories (deux pour les communes, une pour les départements et une pour les régions).

([13]) Entre 2015 et 2017, le CCFP s’est réuni en moyenne 9 fois par an. Sur la même période, le nombre de réunions du CSFPE s’élève à 10 par an, contre respectivement 22 et 66 réunions annuelles du CSFPH et CSFPT.

([14]) Le ministre chargé de la fonction publique préside le CCFP et le CSFPE.

([15]) Les comités techniques sont régis par l’article 15 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant statut général de la fonction publique de l’État, les articles 32 et 33 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant statut général de la fonction publique territoriale et les articles L. 315-13 du code de l’action sociale et des familles et L. 1432-11 et 6144-4 du code de la santé publique relatifs à la fonction publique hospitalière.

([16]) Pour les collectivités et établissements de moins de 50 agents, le comité technique est placé auprès du centre de gestion compétent.

([17]) 1 228 dans les administrations de l’État, 4 572 dans les collectivités territoriales et 2 373 dans la fonction publique hospitalière. Ce recensement inclut les comités techniques facultatifs (comités techniques de réseau, spéciaux et communs à plusieurs départements ministériels).

([18]) L’article 23 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifié par la loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 détermine un ensemble de garanties protégeant les fonctionnaires dans l’exercice de leurs activités syndicales.

([19]) Les dirigeants de l’autorité administrative dont le directeur des ressources humaines siègent au comité technique, avec voix consultatives non délibératives.

([20]) Au scrutin de liste à la représentation proportionnelle à la plus forte moyenne.

([21]) Conseil d’État, 17 novembre 1986, Syndicat départemental CFDT-PTT des Hauts-de-Seine.

([22]) Article 10 du décret n° 2011-184 du 15 février 2011 relatif aux comités techniques dans les administrations et les établissements publics de l’État, article 1er du décret n° 1985-565 du 30 mai 1985 relatif aux comités techniques des collectivités territoriales et de leurs établissements publics et article R. 6144-42 du code de la santé publique.

([23]) Article 34 du décret n° 2011-184 du 15 février 2011 relatif aux comités techniques dans les administrations et les établissements publics de l’État.

([24]) Article R. 6144-40 du code de la santé publique.

([25]) Article 36 du décret n° 2011-184 du 15 février 2011 relatif aux comités techniques dans les administrations et les établissements publics de l’État.

([26]) L’alinéa 10 de l’article 36 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 prévoit que « [l]'autorité territoriale présente au moins tous les deux ans au comité technique un rapport sur l'état de la collectivité, de l'établissement ou du service auprès duquel il a été créé. Ce rapport indique les moyens budgétaires et en personnel dont dispose cette collectivité, cet établissement ou ce service. Il dresse notamment le bilan des recrutements et des avancements, des actions de formation, des demandes de travail à temps partiel. Il rend compte des conditions dans lesquelles la collectivité ou l'établissement respecte ses obligations en matière de droit syndical. Il présente des données relatives aux cas et conditions de recrutement, d'emploi et d'accès à la formation des agents contractuels. La présentation de ce rapport donne lieu à un débat. »

([27]) Conseil d’État, 26 octobre 2011, Syndicat départemental CFDT Interco Moselle.

([28]) Conseil d’État, 23 décembre 2011, Danthony.

([29]) Ils sont régis par l’article 16 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant statut général de la fonction publique de l’État, l’article 33-1 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant statut général de la fonction publique territoriale et, pour la fonction publique hospitalière, par les articles L. 4611-1 à L. 4614-16 du code du travail.

([30]) Cette réforme correspond à la transposition des accords du 20 novembre 2009 sur la santé et la sécurité au travail dans la fonction publique.

([31]) Article 10 du décret n° 2011-184 du 15 février 2011 relatif aux comités techniques dans les administrations et les établissements publics de l’État, article 1er du décret n° 1985-565 du 30 mai 1985 relatif aux comités techniques des collectivités territoriales et de leurs établissements publics et article R. 6144-42 du code de la santé publique.

([32]) 2 054 dans les administrations de l’État, environ 4 800 dans les collectivités territoriales et 2 200 dans la fonction publique hospitalière. Cette estimation inclut les instances obligatoires et facultatives.

([33]) Ces membres représentent l’ensemble du personnel (titulaires et non-titulaires).

([34]) Article 39 du décret n° 1982-453 du 28 mai 1982 relatif à l’hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu’à la prévention médicale dans la fonction publique, article 28 du décret n° 1985-603 du 10 juin 1985 relatif à l’hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu’à la prévention médicale dans la fonction publique territoriale et article R. 4615-9 du code du travail.

([35]) Article 55 du décret n° 1982-453 du 28 mai 1982 relatif à l’hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu’à la prévention médicale dans la fonction publique, article 42 du décret n° 1985-603 du 10 juin 1985 relatif à l’hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu’à la prévention médicale dans la fonction publique territoriale et article L. 4613-14 du code du travail.

([36]) Cour de cassation, chambre sociale, 28 mars 2018, CH de Chartres, n° 16-29.106 et 14 décembre 2011, CHSCT central AP-HP, n° 10-20.378.

([37]) Conseil d’État, 2 juillet 2014, Association autonome des parents d’élèves de l’école Émile Glay.

([38]) Le comité social et économique comporte plusieurs sous-commissions spécialisées au sein des entreprises de plus de 300 salariés.

([39]) « Comité social d’administration » dans la fonction publique de l’État, « comité social territorial » dans la fonction publique territoriale et « comité social d’établissement » dans la fonction publique hospitalière.

([40]) Telles que la gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois, des compétences et des parcours professionnels, le recrutement, la formation, l’égalité professionnelle et le handicap.

([41]) L’étude d’impact mentionne notamment l’information du comité social sur les incidences des principales décisions à caractère budgétaire et sur la mise en œuvre du service civique (p. 43).

([42]) Article 9 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983.

([43]) Ce seuil est identique à celui fixé par l’article L. 2315-36 du code du travail au-delà duquel les entreprises doivent instituer une commission santé, sécurité et conditions de travail au sein de leur comité social et économique.

([44]) Institués pour une raison géographique (emplacement particulier de locaux) ou lorsqu’un risque professionnel le justifie.

([45]) Dans cette hypothèse, le comité social sera consulté en lieu et place de la FSSCT.

([46]) Seuls les suppléants à la FSSCT seront désignés par les organisations syndicales représentées au comité social. Pour les FSSCT instituées pour des raisons géographiques, leurs membres seront désignés par extrapolation des résultats électoraux relatifs au comité social ou par consultation du personnel.

([47]) Les comités techniques et CHSCT pourront également être réunis afin d’examiner conjointement des questions relevant de leurs attributions communes.

([48]) Par symétrie avec les CAP, des commissions consultatives paritaires (CCP) sont organisées pour connaître des questions individuelles propres aux agents contractuels. Les CCP sont régies par le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 dans la fonction publique de l’État, par les décrets n° 88-145 du 15 février 1988 et n° 2016-1858 du 23 décembre 2016 dans la fonction publique territoriale et par le décret n° 91-155 du 6 février 1991 dans la fonction publique hospitalière.

([49]) Le mandat des membres des CAP est de 4 ans renouvelables.

([50]) Article 6 du décret n° 82-451 du 28 mai 1982, article 2 du décret n° 89-229 du 17 avril 1989 et article 3 du décret n° 91-790 du 14 août 1991.

([51]) Article 14 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984.

([52]) Article 3 du décret n° 82-451 du 28 mai 1982.

([53]) Article 2 du décret n° 89-229 du 17 avril 1989.

([54]) Article 2 du décret n° 2003-655 du 18 juillet 2003.

([55]) Article 25 du décret n° 82-451 du 28 mai 1982, article 30 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et article 21 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986.

([56]) Article 26 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, article 39 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et article 35 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986.

([57]) Article 58 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, articles 78 à 80 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et articles 66 à 69 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986.

([58]) Articles 45 et 48 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, articles 64 et 67 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et article 51 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986.

([59]) Articles 51 et 52 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, articles 61 et 62 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et article 62 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986.

([60]) Articles 60 et 62 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 et article 52 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984.

([61]) Articles 82 à 84 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et articles 72 à 76 de la loi n° 84-53 du 9 janvier 1986.

([62]) Article 55 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, article 76 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et article 65 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986.

([63]) Conseil d’État, 17 avril 1970, CGT.

([64]) Cour administrative d’appel de Lyon, 20 septembre 2016.

([65]) Conseil d’État, 1er avril 1998, Iguacel et Comets.

([66]) Conseil d’État, 27 avril 1951, Mélamède.

([67]) Conseil d’État, 10 septembre 2007, Syndicat CFDT du ministère des affaires étrangères.

([68]) Conseil d’État, 10 décembre 1971, Ministère de l’économie et des finances.

([69]) La réforme des attributions des compétences des CAP entrera en vigueur à partir de 2020. La modification de leur architecture sera effective en 2022, à l’occasion du prochain renouvellement général des instances consultatives dans la fonction publique.

([70]) Cette évolution législative permet de surmonter le principe général du droit dégagé par la jurisprudence administrative selon lequel un agent public ne peut siéger dans une formation qui lui permettrait d’apprécier la manière de servir d’un agent d’un grade hiérarchiquement supérieur au sien (Conseil d’État, 20 mars 1985, Association nationale des infirmières générales et autres).

([71]) Par exemple, les décisions relatives aux titularisations relèvent du niveau législatif dans la fonction publique territoriale (articles 30 et 46 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984) alors qu’elles sont régies par le décret n° 1982-451 du 28 mai 1982 dans la fonction publique de l’État. Le présent article prévoit qu’un décret en Conseil d’État déterminera les autres décisions pour lesquelles la sollicitation de l’avis préalable des CAP demeurera obligatoire dans chacun des versants.

([72]) Étude d’impact, p. 63.

([73]) Incluant les licenciements pour insuffisance professionnelle.

([74]) Ou des notes attribuées aux fonctionnaires.

([75]) Par coordination, le présent article supprime l’avis préalable des CAP en ce qui concerne les décisions relatives aux cessations de mise à disposition des fonctionnaires ainsi qu’aux répartitions et transferts de fonctionnaires entre les communes et les établissements publics de coopérations intercommunale.

([76]) Le présent article supprime également la compétence de recours des conseils supérieurs de la fonction publique de l’État et de la fonction publique hospitalière sur ces matières.

([77]) Sauf si des élections générales ont lieu avant l’expiration de ce délai.

([78]) Seules peuvent participer aux négociations les organisations syndicales disposant d'au moins un siège dans les organismes consultatifs au sein desquels s'exerce la participation des fonctionnaires.

([79]) Conseil d’État, 27 octobre 1989, Syndicat national des ingénieurs des études de l’exploitation de l’aviation civile.

([80]) Conseil d’État, 22 mai 2013, Fédération Interco CFDT et autres.

([81]) Conseil d’État, 19 juin 2006, Syndicat national unifié des impôts.

([82]) Conseil d’État, 6 novembre 1998, Alcamo.

([83]) Conseil d’État, 1er octobre 2013, Fédération Interco CFDT et autres.

([84]) L’étude d’impact mentionne notamment le nombre de 16 accords de niveau ministériel conclus entre juillet 2010 et juillet 2014 en ce qui concerne la fonction publique de l’État.

([85]) Jacques Fournier, Le dialogue social dans la fonction publique : livre blanc, 2002.

([86]) Jean-Ludovic Silicani, Livre blanc sur l’avenir de la fonction publique : faire des services publics et de la fonction publique des atouts pour la France, avril 2008.

([87]) Conseil constitutionnel, décision n° 89-260 DC du 28 juillet 1989.

([88]) Conseil constitutionnel, décision n° 85-204 DC du 16 janvier 1986 et décision n° 91-293 du 23 juillet 1991.

([89]) Conseil constitutionnel, décision n° 2012-656 DC du 24 octobre 2012.

([90]) L’article 3 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 fixe un principe général selon lequel les emplois permanents sont occupés par des fonctionnaires, sauf dérogation prévue par la loi. Les lois statutaires relatives aux trois versants admettent notamment la possibilité de recruter des agents contractuels pour occuper des emplois permanents en cas d’absence de corps de fonctionnaires susceptibles d’exercer les fonctions concernées ou en cas de besoins temporaires (remplacement momentané de fonctionnaires). Pour les emplois de catégorie A, le recrutement contractuel est également possible lorsque la nature des fonctions ou les besoins du service le justifient.

([91]) Article 61 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, article 41 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et article 34 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986.

([92]) Conseil d’État, 14 mars 1997, Département des Alpes maritimes.

([93]) Conseil d’État, 12 juin 1996, Communauté de communes du pays de Laval.

([94]) Cour administrative d’appel de Marseille, 3 juin 2008.

([95]) Article 25 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984.

([96]) Conseil constitutionnel, décision n° 2010-94 QPC M. Robert C. du 28 janvier 2011.

([97]) Conseil d’État, 30 septembre 2015, Communauté d’agglomération Côte Basque Adour.

([98]) Conseil d’État, Commune de Sainte Marie, 19 mai 1989.

([99]) Conseil d’État, 17 juin 1988, Bady.

([100]) Conseil d’État, 2 juin 1982, Mme Georgescu.

([101]) Conseil d’État, 28 mai 1954, Barel.

([102]) Actuellement, les agents contractuels représentent 18 % des effectifs de la fonction publique, soit environ 1 000 000 de personnes sur les 5,4 millions d’agents répartis entre les trois versants.

([103]) Conseil d’État, 1er octobre 1954, Guille, conclusions du commissaire du Gouvernement Laurent.

([104]) Conseil d’État, 13 mars 1953, Teissier, conclusions du commissaire du Gouvernement Donnedieu de Vabres.

([105]) Tels que les emplois de chefs de service et de sous-directeurs pour lesquels le décret n° 2012-32 du 9 janvier 2012 précise qu’ils ne peuvent être pourvus que par des fonctionnaires.

([106]) Étude d’impact, p. 89.

([107]) Conseil d’État, 27 mars 1995, Cospérac.

([108]) Ainsi que, lorsque l’emploi est créé, les fonctions de directeur général adjoint des services.

([109]) Leur liste figure à l’article 2 du décret n° 88-545 du 6 mai 1988.

([110]) Cour administrative d’appel de Bordeaux, 23 décembre 2013.

([111]) Étude d’impact, p. 89.

([112]) Étude d’impact, p. 89.

([113]) Les 70 emplois de directeur technique national auprès des fédérations sportives visés à l’article L. 131-12 du code du sport peuvent aujourd’hui être pourvus par des recrutements sous contrat.

([114]) Incluant les emplois de direction au sein des établissements publics.

([115]) Étude d’impact, p. 93.

([116]) Tels que les emplois de chef de service, de sous-directeur, d’expert de haut-niveau, de directeur de projet et de directeurs des administrations territoriales de l’État.

([117]) Tels que les emplois de consul général ou de direction du réseau de la direction générale des finances publiques.

([118]) Soit 80 000 habitants pour les directeurs généraux des services et directeurs généraux des services techniques des communes et EPCI à fiscalité propre et 150 000 habitants pour les directeurs généraux adjoints des communes et EPCI à fiscalité propre.

([119]) Contre 1 522 actuellement.

([120]) Étude d’impact, p. 93.

([121]) Contre 284 actuellement.

([122]) Étude d’impact, p. 93.

([123]) Article 6 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, article 3-3 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et article 9 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986.

([124]) Voir les commentaires des articles 9 et 10 du projet de loi.

([125]) Conseil d’État, 26 mars 2003, Syndicat national CGT de l’INSEE.

([126]) Contrairement aux agents contractuels, les vacataires du service public ne disposent pas de droit à la formation, de congés, de compléments de rémunération ni de la possibilité de travailler à temps partiel. La succession de vacations sur une période longue ne donne aucun droit à une requalification en contrat à durée déterminée ou indéterminée (Cour administrative d’appel de Versailles, 22 juin 2006) sauf si les tâches effectuées correspondent à un emploi à plein temps (Cour administrative d’appel de Paris, 10 décembre 2009).

([127]) Conseil d’État, 2 décembre 1985, Butel.

([128]) Conseil d’État, 8 juillet 1972, Duforest.

([129]) Article 51 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986, article 43 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 et article 47 du décret n° 91-155 du 6 février 1991.

([130]) Conseil d’État, 11 janvier 1985, Simon.

([131]) Contrairement aux règles prévues par l’article L. 1243-8 du code du travail qui prévoient le versement d’une indemnité de fin de contrat aux salariés dont le CDD n’est pas renouvelé, afin de compenser la précarité de leur situation.

([132]) Article R. 6152-418 du code de la santé publique.

([133]) Article 45 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986, article 38-1 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 et article 41 du décret n° 91-155 du 6 février 1991.

([134]) Tribunal administratif de Paris, 27 janvier 2011, Blache.

([135]) Cour administrative d’appel de Lyon, 7 juillet 2015.

([136]) Conseil d’État, 5 novembre 1986, Commune de Blanquefort.

([137]) Article L. 1242-8-1.

([138]) L’article L. 1243-5 précise que ce délai est au moins égal à deux mois lorsque ce contrat prend fin avec la réalisation de l’objet pour lequel il a été conclu.

([139]) La durée minimale d’un an se justifie par la nécessité d’éviter la multiplication de contrats courts d’une durée de quelques mois, à l’image du contrat d’activité de l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP) mis en place par la loi n° 2009-179 du 17 février 2009 puis supprimé par la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 en raison des difficultés afférentes à la gestion de ces contrats.

([140]) Sous réserve de ne pas excéder une durée totale de six ans.

([141]) Étude d’impact, pp. 96 à 102.

([142]) La non-comptabilisation de la durée du contrat de projet dans le calcul des six ans de services requis afin d’obtenir un contrat à durée indéterminée est explicitement prévue par l’alinéa 26 du présent article pour le versant territorial.

([143]) Soit 397 125 agents selon le rapport annuel 2018 sur l’état de la fonction publique.

([144]) Le recrutement d’agents contractuels afin de satisfaire des besoins non-permanents est rendu possible par l’article 6 sexies en cas d’accroissement temporaire ou saisonnier de l’activité.

([145]) Cette condition est strictement appréciée par la jurisprudence administrative (Conseil d’État, 5 juillet 1989, Syndicat national des affaires culturelles FO).

([146]) L’article 16 de la loi n° 2017-55 du 20 janvier 2017 a unifié le droit applicable aux autorités administratives et publiques indépendantes en consacrant explicitement leur liberté de recrutement d’agents titulaires ou contractuels.

([147]) Conseil d’État, 13 février 2013, Ministère des affaires étrangères c. Djukic.

([148]) Conseil d’État, 7 mai 2012, Syndicat des personnels de l’administration de la justice et de la légion d’honneur.

([149]) À l’exception des représentations diplomatiques où les emplois de toutes catégories sont concernés.

([150]) Conseil d’État, 20 mars 1996, Office public d’HLM de la Communauté urbaine du Mans.

([151]) L’administration ne peut donc pas recruter des agents titulaires pour occuper ces emplois.

([152]) Conseil d’État, 26 mars 2012, Syndicat national des inspecteurs en santé publique vétérinaire.

([153]) Titulaires ou non-titulaires occupant des emplois permanents de toute catégorie (A, B ou C).

([154]) Le contrat peut être prorogé pour une durée supplémentaire d’un an, soit une durée maximale potentielle de deux ans.

([155]) Il s’agit du Centre national de la recherche scientifique (CNRS), de l’Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux (IFSTTAR), de l’Institut national d’études démographiques (INED), de l’Institut national de recherche agronomique (INRA), de l’Institut national de recherche en informatique et en automatique (INRIA), de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM), de l’Institut de recherche pour le développement (IRD) et de l’Institut national de recherche en sciences et technologies pour l’environnement et l’agriculture (IRSTEA).

([156]) 2° de l’article 4 de la loi du 11 janvier 1984.

([157]) À l’issue du délai prévu par la procédure de publicité des vacances de postes mentionnée à l’article 61 de la loi du 11 janvier 1984.

([158]) Étude d’impact, p. 116.

([159]) 2° de l’article 3 de la loi du 11 janvier 1984.

([160]) Soit 356 806 agents selon le rapport annuel 2018 sur l’état de la fonction publique.

([161]) L’article 3 de la loi du 26 janvier 1984 rend également possible le recrutement d’agents contractuels afin de satisfaire des besoins non-permanents en cas d’accroissement temporaire ou saisonnier de l’activité.

([162]) Titulaires ou non-titulaires occupant un emploi permanent.

([163]) La terminologie « cadre d’emplois » utilisée dans la fonction publique territoriale correspond aux « corps de fonctionnaires » présents dans la fonction publique de l’État.

([164]) L’inexistence d’un cadre d’emplois s’entend au moment où l’emploi est créé par la collectivité, indépendamment de la création ultérieure d’un cadre d’emploi correspondant aux fonctions recherchées (Conseil d’État, 27 février 1995, Préfet de l’Essonne). En revanche, une collectivité territoriale ne peut recruter par contrat un analyste programmeur alors qu’existe un cadre d’emploi d’attaché territorial – qualification informatique (Tribunal administratif de Paris, 8 février 1990).

([165]) Cour administrative d’appel de Marseille, 20 mars 2001.

([166]) Cour administrative d’appel de Nancy, 16 novembre 2006.

([167]) Étude d’impact, p. 123.

([168]) Article 104 de la loi du 26 janvier 1984.

([169]) 4° de l’article 3-3 de la loi du 26 janvier 1984.

([170]) Ces recrutements ne sont aujourd’hui autorisés que pour les communes de moins de 1 000 habitants.

([171]) Cependant, un décret en Conseil d’État précisera les conditions d’application de l’ouverture du recrutement de fonctionnaires à temps complet inférieur à 50 % de la durée légale du travail notamment en ce qui concerne les dérogations applicables à certains emplois.

([172]) Tels que les droits à congés et à la formation, les compléments de rémunération ou le reclassement.

([173]) Cour administrative d’appel de Bordeaux, 5 février 2004 et Cour administrative d’appel de Lyon, 19 octobre 2010.

([174]) Conseil d’État, 28 novembre 2003, APHP c. Poilleux.

([175]) Tribunal administratif de Châlons en champagne, 13 août 2014.

([176]) Aujourd’hui réservé aux seuls emplois de catégorie A.

([177]) En outre, contrairement à l’article 9 du projet de loi, cet article n’étend pas la faculté de recrutement contractuel aux emplois qui ne nécessitent pas une formation statutaire donnant lieu à titularisation dans un corps de fonctionnaires.

([178]) La loi n° 2009-972 du 3 août 2009 a réduit les entraves à la mobilité au sein de la fonction publique, en favorisant notamment le droit à l’intégration et l’intégration directe des corps et cadres d’emplois.

([179]) Conseil d’État, 9 novembre 1937, Coumert.

([180]) Cour administrative d’appel de Nantes, 27 mars 2014.

([181]) Conseil d’État, 14 septembre 1979, Brunaud.

([182]) Conseil d’État, 19 juillet 1991, Paloux.

([183]) Conseil d’État, 18 mars 1996, Biard.

([184]) Conseil d’État, 5 avril 1991, Imbert-Quaretta.

([185]) Conseil d’État, 19 juillet 1991, Paloux.

([186]) Conseil d’État, 18 novembre 2005, Baux.

([187]) Le concubinage n’est pas inclus dans ce critère prioritaire (Conseil d’État, 25 novembre 1994, Poulain).

([188]) Conseil d’État, 16 octobre 1953, Thill. Si le refus est illégal, l’administration engage sa responsabilité (Cour administrative d’appel de Nancy, 17 octobre 1991).

([189]) Conseil d’État, 13 octobre 2006, La Poste.

([190]) Le dernier alinéa de l’article 60 de la loi du 11 janvier 1984 précise que le recours à un tel barème constitue une mesure préparatoire et ne se substitue pas à l'examen de la situation individuelle des agents.

([191]) Définis par des lignes directrices.

([192]) Conseil d’État, 5 janvier 1979, Struss.

([193]) Conseil d’État, 21 juillet 1970, Gille.

([194]) Il ne concerne pas les versants territorial et hospitalier qui relèvent d’une pluralité d’employeurs, à la différence de la fonction publique de l’État.

([195]) Article 4 du projet de loi.

([196]) Dans des conditions prévues par décret en Conseil d’État.

([197]) Article 14 du projet de loi.

([198]) Article 3 du projet de loi.

([199]) Conseil d’État, 7 mars 2012, Chatillon.

([200]) Conseil d’État, 23 novembre 1962, Camara.

([201]) Conseil d’État, 13 mars 1987, Bauhain.

([202]) Conseil d’État, 28 mai 1986, Baruch.

([203]) Une note de zéro serait synonyme d’insuffisance professionnelle.

([204]) Tribunal administratif de Nantes, 29 décembre 2000.

([205]) Conseil d’État, 28 mai 1999, Lorant.

([206]) Conseil d’État, 24 novembre 1989, Hernandez.

([207]) Conseil d’État, 20 mars 1987, Feugnet.

([208]) Article 1-4 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 pour les agents contractuels relevant de la fonction publique de l’État et article 1-3 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 pour les agents contractuels territoriaux.

([209]) À l’instar du corps des enseignants-chercheurs au sein duquel la méthode de l’évaluation par les pairs est utilisée.

([210]) Soit plus d’un tiers des fonctionnaires de l’État.

([211]) Article 76 de la loi du 26 janvier 1984. L’article 65 de la loi du 9 janvier 1986 prévoit une disposition identique dans la fonction publique hospitalière selon laquelle les notes et appréciations sont portées à la connaissance des commissions administratives paritaires.

([212]) Article 65 de la loi du 9 janvier 1986.

([213]) Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, 12 mai 2014.

([214]) Cour administrative d’appel de Nancy, 17 avril 2018.

([215]) Étude d’impact, p. 140.

([216]) Le montant annuel total de leur rémunération s’élève à environ 22 milliards d’euros.

([217]) Conseil d’État, 23 avril 1982, Ville de Toulouse.

([218]) Conseil d’État, 28 juillet 1995, Préfet du Val-d’Oise.

([219]) Conseil d’État, 24 juin 2005, Ministère de l’équipement.

([220]) Article 26 de la loi du 11 janvier 1984, article 39 de la loi du 26 janvier 1984 et article 58 de la loi du 9 janvier 1986.

([221]) Article 58 de la loi du 11 janvier 1984, article 79 de la loi du 26 janvier 1984 et article 69 de la loi du 9 janvier 1986.

([222]) Conseil d’État, 10 décembre 1971, Ministère de l’Économie et des Finances.

([223]) Voir le commentaire de l’article 4 du projet de loi.

([224]) La rédaction de l’article 14 du projet de loi ne mentionne l’avis du comité social qu’au sein des versants territorial et hospitalier.

([225]) Dans le respect des critères prioritaires de mutation visés à l’article 11 du projet de loi.

([226]) Au sein du versant territorial, les centres de gestion recueilleront préalablement l’avis des comités sociaux territoriaux de collectivités et des d’établissements qui leur sont affiliés, avant que leur propre comité social ne rende son avis.

([227]) Conseil d’État, 11 décembre 1970, Crédit foncier de France.

([228])  Cour administrative d’appel de Paris, 21 décembre 2006, n° 04PA01977.

([229])  Cour administrative d’appel de Marseille, 25 septembre 2018, n° 17MA00554.

([230])  Cour administrative d’appel de Nantes, 16 juillet 2018, n° 16NT03789.

([231])  Cour administrative d’appel de Marseille, 3 juillet 2018, n° 17MA03022.

([232])  Article 19 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983.

([233]) Cour administrative de Douai, 30 novembre 2004, n° 02DA00340.

([234]) Articles 2 et 32 de la loi du 13 juillet 1983.

([235]) Article L. 6152-4 du code de la santé publique.

([236]) Article 25 nonies de la loi du 13 juillet 1983.

([237]) Article 11 de la loi du 20 avril 2016.

([238]) Articles L. 531-1 à L. 531-16 du code de la recherche.

([239]) Article 25 octies.

([240]) Article 6 du décret n° 2017-105 du 27 janvier 2017 relatif à l'exercice d'activités privées par des agents publics et certains agents contractuels de droit privé ayant cessé leurs fonctions, aux cumuls d'activités et à la commission de déontologie de la fonction publique.

([241]) Article 25 octies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

([242]) Article 28 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

([243]) Article 34 du décret n° 2017-105.

([244]) Rapport d’information n° 611 du 31 janvier 2018 sur la déontologie des fonctionnaires et l’encadrement des conflits d’intérêt.

([245])  https://www.hatvp.fr/wordpress/wp-content/uploads/2016/02/Rapport-Commission-Sauve.pdf

([246])  https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/2018-02/20180212-AAPI.pdf

([247]) Article 22 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.

([248]) Décret n° 2007-1373 du 19 décembre 2007.

([249]) Décret n° 2011-1474 du 8 novembre 2011.

([250]) Article 44 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière. 

([251]) Rapport d’évaluation de l'organisation et du fonctionnement des instances médicales de la fonction publique, mars 2017.

https://www.modernisation.gouv.fr/sites/default/files/epp/rapport_evaluation_de_organisation_et_fonctionnement_instances_medicales_fonction_publique.pdf

([252]) Rendre effectif le congé maternité pour toutes les femmes, juillet 2018.  https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/rapport_rendre_effectif_le_conge_de_maternite_pour_toutes_les_femmes.pdf

([253]) Loi n° 2004-626 du 30 juin 2004 relative à la solidarité pour l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées. Elle prend la forme d’une journée supplémentaire de travail non rémunérée pour les salariés et d’une contribution de la part des employeurs.

([254]) Rapport sur le temps de travail dans la fonction publique, établi par M. Philippe Laurent, président du conseil supérieur de la fonction publique territoriale, mai 2016.

([255]) Les finances publiques locales, octobre 2016.

([256]) Les lois du 26 janvier 1984 et du 12 juillet 1984 avaient prévus la mise en place d’un modèle plus complexe comprenant, d’une part, un centre de gestion national avec des centres régionaux et départementaux, d’autre part, un centre de formation national et des centres de formation régionaux.

([257]) Articles 17 et 18 de la loi du 26 janvier 1984.

([258]) Article 18-1 de la loi du 26 janvier 1984.

([259]) Article 18-2 de la même loi.

([260]) Article 19 de la même loi.

([261]) https://www.economie.gouv.fr/remise-rapport-parlementaire-formation-gestion-carrieres-agents-collectivites-territoriales

([262]) Article 2 du décret n° 2007-704 du 4 mai 2007 relatif à l'organisation et au fonctionnement du Centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière et modifiant le code de la santé publique.

([263]) Idem.

([264]) Il s’agit des administrations de l‘État et de ses établissements publics, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, des établissements de santé et médico–sociaux, des groupements d‘intérêt public, des organismes contribuant à la mise en œuvre d’une politique de l’État, des collectivités territoriales ou de leurs établissements publics administratifs, pour l’exercice des seules missions de service public confiées à ces organismes, des organisations internationales intergouvernementales, d’une institution de l’Union européenne, d’un État étranger.

([265]) Il peut en effet être dérogé à cette règle lorsque le fonctionnaire est mis à disposition auprès de certaines institutions (administration ou établissement public administratif de l’État, groupement d’intérêt public, organisation internationale intergouvernementale, institution ou organe de l’Union européenne, État étranger, administration d’une collectivité publique ou organisme public relevant de cet État ou auprès d’un État fédéré).

([266]) Sauf dans le cas où le détachement a été prononcé dans une administration ou un organisme implanté sur le territoire d’un État étranger ou auprès d’organismes internationaux ou pour exercer une fonction publique élective.

([267])  Étude d‘impact, p. 244.

([268]) Ibid.

([269]) Le licenciement peut intervenir dans les trois fonctions publiques en cas d’insuffisance professionnelle, de trois refus successifs de poste correspondant au grade après une disponibilité, de refus, sans motif valable lié à l’état de santé, de poste(s) proposé(s) après un congé de maladie ordinaire, de longue maladie ou de longue durée, d’inaptitude physique définitive à l’exercice des fonctions si le fonctionnaire n’a pas droit à une pension de retraite pour invalidité. En outre, dans la fonction publique territoriale, le licenciement peut également intervenir en cas d’absence d’emploi vacant correspondant au grade de l’agent à l’issue d’un détachement sur un emploi fonctionnel, après deux refus d’offre d’emploi par un fonctionnaire pris en charge par le CNFPT ou un centre de gestion après suppression de son poste à la suite d’une délégation de service et de son refus d’être détaché auprès du bénéficiaire de cette délégation, après trois refus d’offre d’emploi par un fonctionnaire pris en charge par le CNFPT ou un centre de gestion pour un autre motif.

([270]) Conseil d’État, avis n° 397088 du 21 mars 2019 sur un projet de loi de transformation de la fonction publique.

([271]) Étude d’impact sur le présent projet de loi, p. 264.

([272]) Avec certaines différences entre les trois versants de la fonction publique.

([273]) https://www.fonction-publique.gouv.fr/files/files/publications/coll_outils_de_la_GRH/CMC-6.pdf

([274]) Article 34 de la loi n° 84–16 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État, article 57 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et article 41 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.

([275]) Décret n° 2008-366 du 17 avril 2008 instituant une prime de restructuration de service et une allocation d’aide à la mobilité du conjoint.

([276]) Décret n° 2008-368 du 17 avril 2008 instituant une indemnité de départ volontaire.

([277]) Décret n° 2008-367 du 17 avril 2008 instituant un complément indemnitaire en faveur de certains fonctionnaires de l’État à l’occasion d’opérations de restructuration.

([278]) Étude d’impact, pp. 274 et 275.

([279]) Cet article dispose que les affectations prononcées doivent tenir compte des demandes formulées par les intéressés et de leur situation de famille. Priorité est donnée aux fonctionnaires séparés de leur conjoint pour des raisons professionnelles, aux fonctionnaires séparés pour des raisons professionnelles du partenaire avec lequel ils sont liés par un pacte civil de solidarité lorsqu’ils produisent la preuve qu’ils se soumettent à l’obligation d’imposition commune prévue par le code général des impôts, aux fonctionnaires handicapés et aux fonctionnaires qui exercent leurs fonctions dans un quartier urbain où se posent des problèmes sociaux et de sécurité particulièrement difficiles, ainsi qu’aux fonctionnaires qui justifient du centre de leurs intérêts matériels et moraux dans une des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution ainsi qu’en Nouvelle-Calédonie.

([280]) Pour rappel, actuellement la mise à disposition n ‘est possible qu’auprès : des administrations de l’État et de ses établissements publics, des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, des établissements hospitaliers ou médico–sociaux, des groupements d’intérêt public, des organismes contribuant à la mise en œuvre d’une politique publique pour l’exercice des seules missions de service public confiées à ces organismes, des organisations internationales intergouvernementales, des institutions de l’Union européenne, d’un État étranger.

([281]) Cet article dispose que, dans la mesure compatible avec les nécessités du service, l’autorité investie du pouvoir de nomination fait bénéficier par priorité du changement d’établissement, du détachement, de l’intégration directe ou, le cas échéant, de la mise à disposition, les fonctionnaires séparés de leur conjoint pour des raisons professionnelles, les fonctionnaires séparés pour des raisons professionnelles du partenaire avec lequel ils sont liés par un pacte civil de solidarité et les fonctionnaires handicapés.

([282]) Loi n° 2001397 du 9 mai 2001 relative à l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes.

([283]) Loi n° 2012–347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique.

([284]) Loi n° 2012–347 du 12 mars 2012 relative à l’accès à l’emploi titulaire et à l’amélioration des conditions d’emploi des agents contractuels dans la fonction publique, à la lutte contre les discriminations et portant diverses dispositions relatives à la fonction publique.

([285]) Exemple extrait de la circulaire du 11 avril 2016 : Au sein du ministère de l’éducation nationale, l’agent A a été nommé sous–directeur pour trois ans. A l’issue de ces trois années, son détachement dans le même emploi est renouvelé pour trois ans (la durée maximale de l’occupation d’un même emploi de sous–directeur est de six ans). Ce renouvellement n’entre pas dans le champ de la primo–nomination.

([286]) Exemple extrait de la circulaire du 11 avril 2016 : Au sein du ministère de l’écologie, l’agent A était sous-directeur. Il est nommé chef de service. Les emplois de sous-directeur et de chef de service relèvent du même type d’emploi de la fonction publique de l’État. Ce renouvellement n’entre pas dans le champ de la primo–nomination.

([287]) Toutefois, lorsqu’au titre d’une même année civile, l’autorité territoriale n’a pas procédé à des nominations dans au moins cinq emplois soumis à cette obligation, cette dernière s’apprécie sur un cycle de cinq nominations successives.

([288]) ou au titre de l’année au cours de laquelle se clôt le cycle de nominations pour la fonction publique territoriale.

([289]) Bilan de la mise en œuvre du dispositif des nominations équilibrées au cours de l’année 2017, DGAFP.

([290]) https://www.fonction-publique.gouv.fr/ecarts-de-remunerations-entre-femmes-et-hommes-dans-la-fonction-publique-sous-prisme-des-inegalites).

([291]) Conseil d’État, avis n° 397088 du 21 mars 2019 sur un projet de loi de transformation de la fonction publique.

([292]) Cette disposition s’appliquera aux entretiens professionnels conduits au titre de l’année 2020.