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N° 1955

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 22 mai 2019

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION
 

tendant à modifier le Règlement de l’Assemblée nationale (n° 1882)

 

 

 

PAR M. Sylvain WASERMAN

Député

——

 

 

 

Voir les numéros :

Assemblée nationale : 1882.

 


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SOMMAIRE

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Pages

AVANT-PROPOS...................................................... 9

I. une procédure législative au service de la clarté des débats

A. Améliorer la prévisibilité des travaux parlementaires

B. Améliorer le déroulement de la séance publique

1. Adapter les horaires de séance

2. Concentrer la discussion générale sur les grands enjeux politiques

3. Fluidifier les prises de parole lors des débats

4. Allonger le délai entre la commission et la séance publique

5. Simplifier l’examen de certains textes grâce à la procédure de législation en commission

6. Assurer la souplesse de la procédure du temps législatif programmé

C. Assurer à chaque député le droit dexprimer sa position

D. Garantir la qualité de la loi

II. Le renforcement des droits des groupes d’opposition et minoritaires et des dÉputés non-inscrits

A. l’affermissement des droits des groupes d’opposition et minoritaires

1. Une meilleure représentation au sein des organes de l’Assemblée

a. De nouveaux droits pour l’ensemble des groupes

b. De nouveaux droits pour les groupes d’opposition

2. L’approfondissement des pouvoirs de contrôle

a. De nouveaux droits au profit de l’ensemble des groupes

b. De nouveaux droits au bénéfice des groupes d’opposition et minoritaires

B. l’affirmation du rÔle des dÉputÉs non-inscrits

III. un nouvel Élan pour la dÉontologie des dÉputÉs

A. la prÉvention et le traitement des conflits d’intÉrÊts

B. les missions et les pouvoirs du dÉontologue

IV. Une assemblée ouverte au droit de pétition

Commentaire DES ARTICLES

Article 1er  (art. 8 du Règlement de lAssemblée nationale) Participation des présidents de groupe au Bureau de lAssemblée nationale

Article 2 (art. 11 du Règlement de lAssemblée nationale) Ordre de préséance des vice-présidents

Article 3 (art. 33 du Règlement de lAssemblée nationale) Représentation des députés non-inscrits au sein des commissions spéciales

Article 4 (art. 36 du Règlement de lAssemblée nationale) Suppression de lexamen préalable des pétitions par la commission des Lois

Article 5 (art. 39 du Règlement de lAssemblée nationale) Participation des groupes aux bureaux des commissions

Article 6 (art. 42 du Règlement de lAssemblée nationale) Contrôle de la présence des députés en commission en cas de déport

Article 7 (art. 48 du Règlement de lAssemblée nationale) Transmission dun programme législatif prévisionnel

Article 8 (art. 49 du Règlement de lAssemblée nationale) Organisation de la discussion des textes

Article 9 (art. 49-1 A du chapitre XI du titre Ier du Règlement [nouveau]) Contribution écrite sur les textes à lordre du jour

Article 10 (art. 50 du Règlement de lAssemblée nationale) Horaires de séance

Article 11 (art. 54 du Règlement de lAssemblée nationale) Explications de vote

Article 12 (art. 56 du Règlement de lAssemblée nationale) Prise de parole en séance publique

Article 13 (art. 58 du Règlement de lAssemblée nationale) Encadrement du recours aux rappels au Règlement et aux suspensions de séance

Article 13 bis (art. 65-1 du Règlement de lAssemblée nationale) Organisation des votes solennels

Article 14 (art. 80-1 du Règlement de lAssemblée nationale) Définition du conflit dintérêts

Article 15 (art. 80-1-1 [nouveau] du Règlement de lAssemblée nationale) Prévention des conflits dintérêts

Article 15 bis (art. 80-1-2 [nouveau] du Règlement de lAssemblée nationale) Obligations déclaratives relatives aux dons et invitations

Article 16 (art. 80-2 du Règlement de lAssemblée nationale) Statut du déontologue

Article 17 (art. 80-3 du Règlement de lAssemblée nationale) Missions du déontologue

Article 18 (art. 80-3-1 [nouveau] du Règlement de lAssemblée nationale) Modalités de saisine et dinformation du déontologue

Article 19 (art. 80-4 du Règlement de lAssemblée nationale) Pouvoir dinjonction du déontologue

Article 20 (art. 80-5 du Règlement de lAssemblée nationale) Respect du code de conduite par les représentants dintérêts

Article 20 bis (art. 80-6 [nouveau] du Règlement de lAssemblée nationale) Dispositif de lutte contre le harcèlement et les discriminations

Article 21 (art. 86 du Règlement de lAssemblée nationale) Allongement du délai entre la mise en ligne du texte adopté par la commission et son examen en séance

Article 22 (art. 87 du Règlement de lAssemblée nationale) Conditions dexercice de la saisine pour avis

Article 23 (art. 91 du Règlement de lAssemblée nationale) Révision de lorganisation de la discussion consacrée aux orateurs institutionnels, aux orateurs des groupes et aux motions de procédure

Article 24 (art. 93 du Règlement de lAssemblée nationale) Renforcement du contrôle de la recevabilité des amendements au titre de larticle 41 de la Constitution

Article 25 (art. 95 du Règlement de lAssemblée nationale) Intervention des députés sur les articles en séance publique

Article 26 (art. 98 du Règlement de lAssemblée nationale) Contrôle de la recevabilité des amendements au titre de larticle 45 de la Constitution

Article 27 (art. 100 du Règlement de lAssemblée nationale) Révision des règles de prise de parole sur les amendements

Article 27 bis (article 104 du Règlement) Coordination relative à la suppression des motions dajournement

Article 28 (Chapitre V bis du titre II du Règlement de lAssemblée nationale [nouveau]) Procédure de législation en commission

Article 29 (art. 108 du Règlement de lAssemblée nationale) Coordination des dispositions relatives aux motions de procédures examinées à compter de la deuxième lecture

Article 30 (art. 111 du Règlement de lAssemblée nationale) Composition des commissions mixtes paritaires

Article 30 bis (art. 117-2 du Règlement de lAssemblée nationale) Coordination relative à la suppression de la publication des rapports pour avis

Article 30 ter (art. 122 du Règlement de lAssemblée nationale) Réduction de la durée des motions référendaires

Article 30 quater (art. 124-1 du Règlement de lAssemblée nationale) Maintien des motions de renvoi en commission pour les propositions de loi référendaires

Article 30 quinquies (article 128 du Règlement de lAssemblée nationale) Suppression des motions d’ajournement

Article 31 (art. 132 du Règlement de lAssemblée nationale) Temps de parole des députés non-inscrits lors dune déclaration du Gouvernement

Article 32 (art. 133 du Règlement de lAssemblée nationale) Séance des questions au Gouvernement

Article 33 (art. 142 du Règlement de lAssemblée nationale) Représentation des députés non-inscrits au sein des commissions denquête

Article 34 (art. 143 du Règlement de lAssemblée nationale) Choix par le groupe dopposition ou minoritaire de sa fonction dans le cadre dune commission denquête créée à son initiative

Article 35 (art. 145 du Règlement de lAssemblée nationale) Missions dinformation sur le suivi des ordonnances prises en application de larticle 38 de la Constitution ­ Association de lopposition et des députés non-inscrits aux missions dinformation de la Conférence des Présidents

Article 36 (art. 145-7 du Règlement de lAssemblée nationale) Désignation du co-rapporteur sur la mise en application de la loi

Article 37 (art. 146-1-1 [nouveau] du Règlement de lAssemblée nationale) Contrôle de lexécution des lois de finances

Article 38 (art. 146-2 du Règlement de lAssemblée nationale) Composition du bureau du Comité dévaluation et de contrôle des politiques publiques

Article 39 (art. 147 du Règlement de lAssemblée nationale) Dématérialisation de la transmission des pétitions

Article 40 (art. 148 du Règlement de lAssemblée nationale) Conditions dexamen et de publicité des pétitions

Article 40 bis (art. 151 du Règlement de lAssemblée nationale) Coordination avec les dispositions relatives aux pétitions

Article 41 (art. 159 du Règlement de lAssemblée nationale) Contrôle de la présence des députés en séance publique en cas de déport

Article 42 Entrée en vigueur de la résolution

Comptes rendus des débats

1. Première réunion du mercredi 15 mai 2019 à 9h30 (discussion générale puis avant l’article 1er à après l’article 6 de la proposition de résolution)

2. Deuxième réunion du mercredi 15 mai 2019 à 9h30 (articles 7 à 13 de la proposition de résolution)

3. Troisième réunion du mercredi 15 mai 2019 à 21 heures (après l’article 13 à article 32 de la proposition de résolution)

4. Première réunion du mercredi 22 mai à 9 heures 30 (après l’article 32 à article 42 de la proposition de résolution)

ANNEXE n° 1

Avis de LA déontologue SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Annexe n° 2

Code de dÉontologie des dÉputÉs

Annexe n° 3

Code de conduite applicable aux reprÉsEntants dintÉrÊts

Annexe n° 4

JOURS ET HEURES de séance

Annexe n° 5

recours au temps législatif programmé

Annexe n° 6

Amendements en séance


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Mesdames, Messieurs,

« En déterminant son règlement, l’Assemblée se donne et donne à chacun de ses membres la charte de ses libertés. C’est en même temps la charte de ses devoirs » ([1]). Ainsi s’exprimait M. Michel Habib-Deloncle, rapporteur de la commission spéciale chargée de préparer le Règlement de l’Assemblée nationale en 1959.

Le temps a passé. Les contraintes, les exigences et les attentes ne sont plus les mêmes. Il demeure que la trente-cinquième révision du Règlement de l’Assemblée nationale, qui résulterait de l’adoption de la proposition de résolution déposée le 30 avril 2019 par le Président Richard Ferrand, s’inscrit pleinement dans cet objectif. Elle a l’ambition de réformer des méthodes de travail que chacun sait insatisfaisantes. Elle recherche un équilibre en renforçant les droits de l’opposition. Elle conforte le cadre déontologique dans lequel les députés exercent leur mandat. Elle aménage la procédure des pétitions pour améliorer la participation citoyenne.

Certes, des évolutions constitutionnelles auraient permis d’aller plus loin. Le cadre est contraint et, depuis 1958, le Conseil constitutionnel s’assure que les règlements des assemblées n’influent plus sur le fonctionnement des institutions en méconnaissance ou dans le silence de la Constitution : le premier alinéa de son article 61 lui en donne les moyens. Mais le Président de l’Assemblée nationale a souhaité que nous utilisions toutes les marges de manœuvre dont nous disposons sans attendre une éventuelle évolution du texte constitutionnel.

De fait, cette proposition de résolution procède à des avancées importantes en s’appuyant sur une réflexion déjà longue.

Entre les mois de novembre 2018 et mars 2019, le Président a en effet réuni, chaque mois, un groupe de travail constitué des présidents de tous les groupes politiques qui ont ainsi pu, tout au long de cette phase de concertation, faire des propositions et exprimer leurs points de vue.

Cette démarche, qui a porté ses fruits, s’est inscrite dans le prolongement de la réflexion collective engagée au début de la législature dans le cadre des sept groupes de travail transpartisans sur les réformes de l’Assemblée nationale lancés au mois de septembre 2017 ([2]).

Après avoir adressé, le 12 mars 2019, à tous les députés un courrier présentant les principales dispositions de la réforme, le Président a exposé devant chacun des groupes les grandes lignes de sa proposition.

Votre rapporteur, pour sa part, a pris attache avec l’ensemble des présidents de groupe et des présidents de commission, afin de recueillir leurs observations.

Aussi, le texte dont nous sommes saisis, qui intègre au moins une proposition émanant de chacun des groupes politiques de l’Assemblée, représente-t-il, déjà, sinon un aboutissement, du moins un équilibre.

Il en ressort quatre grands axes qui, ensemble, doivent nous permettre de rénover nos pratiques.

Le premier axe vise à rendre plus efficace la procédure législative. C’est une orientation indispensable, et assumée. Il s’agit, notamment, de rééquilibrer le rapport entre les commissions et la séance publique en conférant davantage de visibilité à ce qui se passe en amont de l’hémicycle, de recentrer les discussions sur les points essentiels et d’améliorer les délais d’examen des textes. Le temps de l’élaboration de la législation est nécessairement long, il ne saurait pour autant ignorer que le rythme de la société a changé. Le contrôle de la recevabilité des initiatives parlementaires est renforcé, une procédure dite de législation en commission est instituée, la procédure du temps législatif programmé est rénovée.

Le deuxième axe renforce les droits des groupes d’opposition et des groupes minoritaires ainsi que ceux des députés non-inscrits. Parmi les mesures les plus emblématiques prises en leur faveur figurent la modernisation des questions au Gouvernement, la représentation de tous les groupes au sein des commissions mixtes paritaires ou bien, encore, la possibilité de choisir entre le poste de président ou de rapporteur au sein des commissions d’enquête et des missions d’information de la Conférence des Présidents créées à leur initiative. Les droits des députés non-inscrits sont affermis au sein des commissions spéciales, des commissions d’enquête et des missions d’information.

Le troisième axe consiste, dans le prolongement de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique et de la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, à garantir le respect, par les députés, de leurs obligations en matière de transparence et de déontologie. À cet effet, il est proposé de renforcer le dispositif de prévention et de traitement des conflits d’intérêts et de clarifier les missions et les pouvoirs du déontologue.

Le quatrième axe répond à une demande exprimée par les Français en faveur d’une meilleure prise en compte des initiatives citoyennes. À cette fin, il est proposé de rénover la procédure du droit de pétition, afin qu’elle devienne un moyen effectif, pour les citoyens, de contribuer aux travaux de l’Assemblée nationale.

Ainsi, la présente réforme du Règlement devrait contribuer à mieux affirmer le rôle du Parlement, à améliorer le fonctionnement de l’Assemblée nationale et à renforcer sa transparence. C’est un projet. C’est une ambition.

 

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*     *

 


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I.   une procédure législative au service de la clarté des débats

La procédure législative a été modifiée par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 ([3]), qui a notamment renforcé la place et le rôle des commissions permanentes. La discussion en séance publique porte depuis sur le texte adopté par la commission, sauf exceptions (lois de finances, lois de financement de la sécurité sociale, révisions constitutionnelles). Elle s’inscrit dans un ordre du jour désormais partagé, réservant des semaines aux initiatives gouvernementales et d’autres aux initiatives parlementaires. Par cohérence, le constituant a également inscrit, à l’article 44 de la Constitution, que le droit d’amendement s’exerce en séance ou en commission selon les conditions fixées par les règlements des assemblées, dans un cadre déterminé par une loi organique.

Cette évolution s’est accompagnée d’une réflexion sur les réformes à mener pour assurer une meilleure articulation des travaux en commission et en séance publique, de manière notamment à éviter les redondances et encadrer la durée des débats.

Plusieurs avancées, dont certaines s’appuient sur la loi organique du 15 avril 2009 ([4]), ont été consécutivement rendues possibles, notamment au travers de la réforme du Règlement issue de la résolution n° 292 du 27 mai 2009, à savoir :

– la limitation de la durée des interventions en séance publique dans le cadre de la procédure « ordinaire » de l’examen des textes ;

– l’instauration du « temps législatif programmé » (TLP) qui permet de fixer la durée maximale de l’examen de l’ensemble d’un texte, tout en laissant la possibilité aux membres des différents groupes d’organiser librement leurs prises de parole dans la limite ainsi définie.

Toutefois, si ces réformes ont eu une utilité certaine, elles n’ont pas conféré au travail en commission la même visibilité que le travail en séance plénière ni permis de mieux structurer les discussions sur les textes.

Ce constat a été établi par toutes les évaluations de la réforme de 2008 réalisées depuis lors, y compris et dès 2010 par le Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Ve République qui en est à l’origine ([5]), et il est majoritairement partagé par les députés comme l’ont illustré à leur échelle les débats qui ont eu lieu en commission des Lois sur la présente proposition de résolution. Il s’accompagne, par ailleurs, de difficultés liées aux incertitudes entourant le calendrier parlementaire, malgré la transmission régulière par le Gouvernement de la liste des textes devant être examinés.

La présente proposition de résolution a pour objet de corriger certains dysfonctionnements qui font obstacle au bon accomplissement des réformes engagées depuis dix ans.

A.   Améliorer la prévisibilité des travaux parlementaires

L’article 7 de la proposition de résolution prévoit que le Gouvernement informe la Conférence des Présidents, à l’ouverture de la session puis, au plus tard, le 1er mars suivant, ou après la formation du Gouvernement, des textes et débats dont il envisage de demander l’inscription à l’ordre du jour, et de la période envisagée pour leur discussion.

Ce programme prévisionnel sur six mois, qui a figuré dans le Règlement jusqu’en 2009, doit permettre aux députés de mieux organiser leurs travaux, répondant ainsi à un besoin largement partagé sur tous les bancs.

B.   Améliorer le déroulement de la séance publique

1.   Adapter les horaires de séance

Larticle 10 modifie les horaires de la séance publique : celle-ci débuterait, désormais, le matin, à 9 heures au lieu de 9 heures 30, et s’achèverait à minuit au lieu de 1 heure.

Cette évolution, destinée à limiter la prolongation tardive des séances de nuit, doit permettre de discuter des textes dans des conditions plus « normales » et assurer la présence du plus grand nombre de députés. Elle ne prétend pas pour autant mettre un terme à la réflexion sur les jours et les horaires de séance, engagée dans le cadre des groupes de travail constitués en début de législature et qui devra se poursuivre. Mais chacun sait que le temps du Parlement est largement contraint par des normes de nature constitutionnelle, en particulier en ce qui concerne la durée de la session et l’ordre du jour dit « partagé » entre des séquences du Gouvernement et des séquences du Parlement : la perspective se situe nécessairement à l’échelle de l’année et non pas uniquement de la semaine.

2.   Concentrer la discussion générale sur les grands enjeux politiques

Larticle 8 limite les interventions lors de la discussion générale à un orateur par groupe et un député non inscrit pour une durée maximale de 5 minutes.

Le temps de parole dont disposent les rapporteurs des commissions serait, quant à lui, limité à 10 minutes, sauf décision contraire de la Conférence des Présidents, comme le précise larticle 23. Cette durée correspond à la pratique actuelle dans le cadre d’une discussion générale d’une heure et demie.

Le rôle des rapporteurs pour avis et des délégations lorsqu’elles se saisissent de textes de loi serait recentré sur le travail en commission, leur rapport étant désormais annexé à celui de la commission saisie au fond (article 21 et 22). Par conséquent, ils ne disposeraient plus d’un temps de parole spécifique lors de la discussion générale.

La Conférence des Présidents pourrait toutefois modifier les limitations de durée et de nombre d’orateurs au cours de la discussion générale, à titre exceptionnel et pour un texte déterminé.

L’article 23 réduit la durée de la défense des motions de rejet préalable à 15 minutes contre 30 actuellement, et supprime les motions de renvoi en commission. Ces motions constituent, en effet, le plus souvent, l’occasion pour les groupes d’opposition de disposer d’un temps d’intervention supplémentaire dont l’usage est éloigné de leur objet initial.

3.   Fluidifier les prises de parole lors des débats

Plusieurs dispositions ont pour objet de rationaliser les conditions d’intervention dans l’hémicycle de manière à éviter les successions de prises de parole qui n’apportent que peu d’éléments nouveaux au débat ainsi que les incidents de procédure. En particulier, il est fait en sorte que la position de chaque groupe politique, entité constitutionnelle depuis la révision du 23 juillet 2008, puisse s’exprimer avec davantage de clarté sur les textes et les amendements, afin d’être mieux identifiée par les Français.

Il est ainsi prévu :

– aux articles 11 et 25, de limiter les interventions sur les articles à un orateur par groupe et un orateur non-inscrit pour une durée maximale de deux minutes. Les explications de vote sur l’ensemble d’un texte seraient, quant à elles, maintenues à cinq minutes pour chaque orateur de groupe et un orateur non-inscrit ;

– à larticle 27, dans le cas où plusieurs amendements identiques auraient été déposés par les membres d’un même groupe, que ces derniers soient présentés par un seul orateur désigné par le président de ce groupe ;

– aux articles 12 et 25, d’inscrire la pratique actuelle qui permet à deux orateurs, et non à un seul comme le prévoit le Règlement, de répondre à l’avis du rapporteur et du Gouvernement sur un amendement ;

– à larticle 13, de mieux encadrer le recours aux rappels au Règlement en prévoyant qu’ils doivent être motivés et en précisant les conditions dans lesquelles le Président de séance pourra refuser d’y faire droit de manière à viser, notamment, l’intention de remettre manifestement en cause l’ordre du jour ;

– au même article, les suspensions de séance pouvant être obtenues de droit par un président de groupe sont limitées à deux, sauf décision contraire du Président.

Plus généralement, ce dernier pourra déroger aux limitations de durée et de nombre d’orateurs ainsi fixées, dans l’intérêt du débat.

Cette faculté du Président d’apprécier les conditions nécessaires au bon déroulement des débats a été clarifiée par la Commission à l’article 11.

4.   Allonger le délai entre la commission et la séance publique

Larticle 21 allonge de sept à dix jours le délai qui, conformément au Règlement, doit séparer, en principe, la mise en ligne du texte adopté par la commission de son examen en séance publique.

Cette disposition incitera les commissions à programmer leurs réunions plus en amont de la discussion des textes, ce qui permettra du même coup aux députés de travailler dans de meilleures conditions sur le texte adopté.

5.   Simplifier l’examen de certains textes grâce à la procédure de législation en commission

S’inspirant de la procédure dite « de législation en commission » expérimentée par le Sénat depuis 2015, puis pérennisée par une résolution du 16 janvier 2018, l’article 28 introduit une procédure semblable dans le Règlement de l’Assemblée nationale qui doit permettre d’accélérer les débats en séance publique sur des textes ou des parties de textes considérés comme plus techniques ou consensuels.

Cette proposition, qui constitue une avancée importante pour l’organisation de nos travaux, traduit par ailleurs le souhait exprimé par le Président de la République lors de son allocution devant le Congrès, le 3 juillet 2017, que les parlementaires « [puissent], dans les cas les plus simples, voter la loi en commission ».

En séance publique, les éventuels amendements présentés par les députés ne pourraient ainsi porter que sur les articles du texte non soumis à cette procédure, puis il serait procédé aux explications de vote et au vote.

La Commission a porté de 24 à 48 heures le délai dont disposent le Gouvernement, le président de la commission saisie au fond ou un président de groupe pour obtenir, suite à la décision de la Conférence des Présidents d’appliquer cette procédure ou à la mise à disposition du texte adopté par la commission, le retour à la procédure ordinaire.

6.   Assurer la souplesse de la procédure du temps législatif programmé

Larticle 8 inscrit dans le Règlement la faculté qui a été reconnue à un président de groupe de rétrocéder la moitié du temps personnel qui lui est attribué dans le cadre du temps législatif programmé à un député de son groupe.

En outre, désormais, ce dernier pourra demander un allongement du temps alloué à son seul groupe, une fois par session. Ce nouveau « droit de tirage » individuel permettra aux groupes de s’investir davantage sur certains textes en fonction de leurs priorités politiques.

La Commission a précisé que cet allongement ne pourra être cumulé avec celui dont bénéficie l’ensemble des groupes au titre de la procédure de temps législatif programmé exceptionnel existante.

Par ailleurs, la durée des explications de vote personnelles pouvant intervenir au terme des débats a été ramenée de cinq à deux minutes.

Les nouveaux droits qu’il est proposé de reconnaître à l’opposition en ce qui concerne le temps législatif programmé pourront conduire la Conférence des Présidents à s’interroger sur la durée des temps de parole alloués, dans ce cadre, aux différents groupes et en particulier sur celle des temps « allongés » et « exceptionnels » (voir infra le commentaire de l’article 8 de la proposition de résolution) qu’elle est habilitée à fixer conformément à l’article 49 du Règlement.

C.   Assurer à chaque député le droit d’exprimer sa position

En plus du droit des députés à défendre leurs amendements, qui est pleinement préservé, larticle 9 leur offre la possibilité de déposer des contributions écrites sur un amendement, un article ou l’ensemble d’un texte.

La Commission a précisé qu’il appartiendra à la Conférence des Présidents d’arrêter les conditions encadrant le dépôt de ces contributions écrites.

D.   Garantir la qualité de la loi

Deux dispositions doivent permettre d’assurer une meilleure application des articles 41 et 45 de la Constitution en révisant les procédures d’irrecevabilité actuellement prévues par le Règlement :

– larticle 24 prévoit la possibilité pour le président de la commission saisie au fond de transmettre au Président de l’Assemblée nationale une liste des propositions ou des amendements déposés en séance publique et dont il estime qu’ils ne relèvent pas du domaine de la loi ou qu’ils sont contraires à une habilitation accordée au Gouvernement sur le fondement de l’article 38 de la Constitution ;

– l’article 26 inscrit dans le Règlement la règle selon laquelle, en commission, la recevabilité est appréciée lors du dépôt de l’amendement par le président de la commission saisie au fond, tandis qu’en séance publique, cette appréciation relève du Président, après consultation éventuelle de la commission saisie au fond.

Cette évolution tire les conséquences d’un contrôle désormais accru de ces motifs d’irrecevabilité, notamment au stade de la commission, et de la reconnaissance par le Conseil constitutionnel de la conformité à la Constitution des procédures mises en œuvre, notamment en application de son article 45 ([6]).

La Commission a complété ces dispositions de manière à prévoir :

– à l’article 13 bis, la possibilité pour la Conférence des Présidents de dissocier les explications de vote de la tenue d’un vote par scrutin public sur l’ensemble d’un texte. Par conséquent, ces explications pourront avoir lieu à l’issue de l’examen des articles du texte en discussion, tandis que seul le vote par scrutin public serait reporté, par exemple à la suite de la séance hebdomadaire réservée aux questions au Gouvernement. Cette disposition, unanimement souhaitée par les différents groupes, a fait l’objet d’une annonce par la Conférence des Présidents le mardi 14 mai 2019 et a été mise en œuvre pour la première fois le mardi suivant ;

– à l’article 7, la possibilité d’organiser, lors des semaines de contrôle, un débat préalable aux réunions du Conseil européen ;

– à l’article 27 bis, la suppression des motions d’ajournement et, à l’article 30 ter, la limitation de la durée des motions référendaires à 15 minutes par coordination avec les dispositions relatives aux motions de procédure prévues aux articles 23 et 29.

II.   Le renforcement des droits des groupes d’opposition et minoritaires et des dÉputés non-inscrits

L’affirmation du rôle du Parlement passe par un renforcement des droits des groupes d’opposition et minoritaires. Ce renforcement s’exprime naturellement dans le contrôle de l’action du Gouvernement. Il est d’autant plus nécessaire lorsque les règles de la procédure législative sont corrélativement davantage encadrées.

La présente proposition de résolution retient cette orientation, dans le prolongement des réformes successives mises en œuvre notamment en 2009 et en 2014 ([7]). Elle intervient cependant dans un contexte particulier, alors que les groupes qui se sont déclarés au sein de l’Assemblée atteignent le nombre record de huit, dont cinq d’opposition et deux minoritaires.

L’attribution de ces nouvelles prérogatives s’accompagne d’une amélioration de la représentation des députés non-inscrits, qui sont aujourd’hui au nombre de dix-neuf.

A.   l’affermissement des droits des groupes d’opposition et minoritaires

L’affirmation de droits propres aux groupes d’opposition et minoritaires est une possibilité et, dans une certaine mesure, une exigence depuis 2008.

En effet, la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 a introduit dans la Constitution un article 51‑1 qui habilite les règlements des assemblées à déterminer les droits des groupes parlementaires et, dans ce cadre, à reconnaître « des droits spécifiques aux groupes d’opposition de l’assemblée intéressée ainsi qu’aux groupes minoritaires ».

En vertu de l’article 19 du Règlement de l’Assemblée nationale dans sa rédaction issue de la résolution du 27 mai 2009, les groupes d’opposition sont définis comme ceux ayant mentionné leur appartenance à l’opposition dans la déclaration politique remise à la Présidence de l’Assemblée lors de leur constitution. Ce mode déclaratif avait alors été considéré comme le plus opérant et le plus respectueux de la liberté des groupes. Les groupes minoritaires sont « ceux qui ne se sont pas déclarés d’opposition, à l’exception de celui d’entre eux qui compte l’effectif le plus élevé », ce dernier étant de fait le groupe majoritaire.

La présente réforme s’inscrit dans la lignée de celle de 2009, qui avait pour ambition de « donner enfin un statut et des droits aux groupes parlementaires, et notamment à ceux qui sont qualifiés par la Constitution de groupes d’opposition ou minoritaires » ([8]). Pour garantir une certaine stabilité des règles, il est précisé que ces droits spécifiques reconnus aux groupes d’opposition et minoritaires sont attribués sur le fondement de la situation des groupes au début de la législature puis chaque année au début de la session ordinaire.

LES PRINCIPAUX DROITS RECONNNUS AUX GROUPES D’OPPOSITION ET MINORITAIRES PAR LA RÉFORME DE 2009

– l’octroi de la présidence de la commission des Finances et de la commission chargée de vérifier et d’apurer les comptes de l’Assemblée à un député issu d’un groupe d’opposition ;

– une représentation s’efforçant de reproduire la configuration politique de l’Assemblée pour les nominations à des organismes externes, les nominations des rapporteurs budgétaires, les membres du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques et des missions d’information ;

– une représentation s’efforçant de reproduire la configuration politique de l’Assemblée et d’assurer la représentation de toutes ses composantes au sein des commissions mixtes paritaires et des bureaux des commissions permanentes, des commissions spéciales, des commissions d’enquête et des missions d’information ;

– l’octroi de la moitié des questions au Gouvernement à l’opposition ;

– l’octroi de l’inscription de droit, à la demande d’un groupe d’opposition ou minoritaire, d’un sujet d’évaluation ou de contrôle à l’ordre du jour de la semaine de contrôle ;

– l’octroi d’un « droit de tirage » aux groupes d’opposition et minoritaires pour la création d’une commission d’enquête ;

– l’octroi de la fonction de président ou de rapporteur d’une commission d’enquête créée à l’initiative d’un groupe d’opposition ou minoritaire à un député appartenant à ce groupe ;

– la présence d’un député de l’opposition au sein des missions d’information créées par les commissions permanentes comprenant deux membres ;

– la présence d’un député de l’opposition comme co-rapporteur sur la mise en application d’une loi.

Les droits de ces groupes ont été à nouveau renforcés par la résolution n° 437 du 28 novembre 2014, avec :

– l’attribution aux seuls députés membres de groupes d’opposition ou minoritaires de la fonction de rapporteur, lorsqu’il en est désigné un, sur les nominations proposées sur le fondement de l’article 13 de la Constitution ;

– la possibilité de répartir sur plusieurs journées les trois séances constitutionnellement réservées aux groupes d’opposition et minoritaires ;

– l’inclusion, à la demande des groupes d’opposition ou minoritaires, d’une contribution écrite en annexe des rapports législatifs ;

– la possibilité donnée au co-rapporteur sur la mise en application de la loi de contribuer au travail en commission et en séance dès l’examen d’un projet ou d’une proposition de loi ;

– le renforcement, surtout, du « droit de tirage » qui garantit aux groupes d’opposition et aux groupes minoritaires l’obtention d’une commission d’enquête par session ordinaire – les résolutions présentées dans ce sens étant désormais non amendables et simplement soumises à une prise d’acte par la Conférence des Présidents – et son élargissement aux missions d’information créées par la Conférence des Présidents, ces deux options étant néanmoins exclusives l’une de l’autre.

La présente proposition poursuit cette orientation.

1.   Une meilleure représentation au sein des organes de l’Assemblée

a.   De nouveaux droits pour l’ensemble des groupes

Afin de reconnaître le rôle croissant des groupes parlementaires, l’article 1er de la proposition de résolution permet à leurs présidents d’assister aux réunions du Bureau de l’Assemblée nationale, sans toutefois disposer d’un droit de vote.

L’article 5 vise à assurer la participation de l’ensemble des groupes aux bureaux des commissions permanentes.

L’article 30 prévoit que chaque groupe dispose d’au moins un siège de titulaire ou de suppléant au sein d’une commission mixte paritaire (CMP), ce qui, compte tenu de la composition actuelle de ces commissions, bénéficiera avant tout aux petits groupes.

L’article 38 prévoit que la composition du bureau du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques s’efforce de reproduire la configuration politique de l’Assemblée.

L’article 8, relatif à la procédure du temps législatif programmé (cf. supra), crée un « droit de tirage » supplémentaire permettant à un président de groupe de demander, une fois par session, un allongement exceptionnel du temps attribué à son groupe.

L’exposé sommaire de la proposition de résolution indique que, en complément de ces dispositions, l’Instruction générale du Bureau sera modifiée afin d’y inscrire la pratique de la répartition des présidences de groupes d’études et de groupes d’amitié selon la règle de la proportionnelle des groupes.

La Commission a complété l’article 30 afin de garantir le fonctionnement des CMP en y préservant la représentation du groupe majoritaire. Elle a précisé que la désignation des représentants de l’Assemblée assure que chaque groupe y dispose d’au moins un siège de titulaire ou de suppléant, sous réserve que le groupe qui dispose du plus grand nombre de sièges de titulaires conserve un siège de suppléant.

b.   De nouveaux droits pour les groupes d’opposition

Les articles 2 et 38 de la proposition de résolution posent comme règle que le premier vice-président de l’Assemblée nationale, d’une part, et le premier vice-président du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, d’autre part, appartiennent à un groupe s’étant déclaré d’opposition.

2.   L’approfondissement des pouvoirs de contrôle

a.   De nouveaux droits au profit de l’ensemble des groupes

L’article 35 étend l’objet des missions d’information créées par les commissions permanentes au suivi des ordonnances prises en application de l’article 38 de la Constitution.

L’article 37 consacre le « printemps de l’évaluation », innovation importante de la XVe législature, en permettant à la Conférence des Présidents de prévoir qu’une semaine de contrôle est consacrée à l’examen de l’exécution des lois de finances.

La Commission a modifié l’article 35 afin de préciser que la nouvelle catégorie de mission d’information qu’il prévoit s’inscrit d’abord dans le cadre de la préparation de la ratification des ordonnances prévues par l’article 38 de la Constitution. L’objectif de ces missions sera d’informer les députés dans la perspective de l’examen à venir des lois de ratification.

b.   De nouveaux droits au bénéfice des groupes d’opposition et minoritaires

L’article 30 prévoit que les questions au Gouvernement, regroupées au sein d’une séance hebdomadaire unique, comprendront au moins pour moitié des questions posées par des députés appartenant à des groupes d’opposition. La Conférence des Présidents pourrait par ailleurs prévoir un droit de réplique au Gouvernement, afin de relancer le ministre qui n’aurait pas répondu à la question posée.

Les articles 34 et 35 attribuent aux groupes d’opposition et minoritaires le droit de choisir la fonction de président ou de rapporteur au sein d’une commission d’enquête ou d’une mission d’information créée à leur initiative.

L’article 36 rend obligatoire, dès le renvoi pour examen à la commission compétente d’un projet ou d’une proposition de loi, la nomination d’un « co-rapporteur », associé aux travaux du rapporteur et chargé avec lui d’assurer le suivi de la mise en application du texte.

Les droits des groupes d’opposition et minoritaires seraient par ailleurs confortés par une modification de l’Instruction générale du Bureau, annoncée dans l’exposé sommaire de la proposition de résolution, excluant l’adoption de motions de procédure lors de leurs journées réservées. Il s’agirait ainsi de permettre la discussion complète des textes inscrits à l’ordre du jour à leur initiative.

B.   l’affirmation du rÔle des dÉputÉs non-inscrits

Sans attache avec un groupe, la condition des députés non-inscrits s’avère délicate. Prix d’une liberté de parole et de vote plus grande, leur situation se caractérise par la faiblesse de leur poids et l’inconfort d’une position solitaire.

Aussi la présente proposition de résolution vise-t-elle à reconnaître davantage la place de ces députés :

– les articles 3, 33 et 35 garantissent que les commissions spéciales comportent deux députés non-inscrits et que les commissions d’enquête et les missions d’information créées par la Conférence des Présidents en comprennent un ;

– l’article 31 garantit qu’un temps minimum d’intervention de cinq minutes soit attribué à un député non-inscrit lors d’une déclaration du Gouvernement.

La Commission a modifié l’article 3 afin de prévoir la présence d’un député non-inscrit au sein des commissions spéciales.

III.   un nouvel Élan pour la dÉontologie des dÉputÉs

La déontologie est une préoccupation constante depuis la XIIIe législature.

Ainsi, dès 2009, le Bureau de l’Assemblée nationale a adopté des règles de transparence et d’éthique applicables à l’activité des représentants d’intérêts. À la suite des réflexions sur la prévention et le traitement des conflits d’intérêts, l’Assemblée s’est également dotée, en 2011, par une décision de son Bureau ([9]), d’un code de déontologie, d’un déontologue et d’obligations déclaratives nouvelles incombant aux députés.

Puis, sous l’impulsion des lois sur la transparence de la vie publique du 11 octobre 2013, les règles relatives à la déontologie ont été inscrites dans le Règlement en 2014.

Ces règles sont regroupées au sein de cinq articles :

– l’article 80-1 détermine les compétences du Bureau de l’Assemblée en matière de déontologie, élève au niveau réglementaire l’existence d’un code de déontologie et d’un déontologue et définit la notion de conflit d’intérêts ;

– l’article 80-2 définit le statut du déontologue ;

– l’article 80-3 détermine les compétences du déontologue ;

– l’article 80-4 fixe la procédure applicable en cas de manquement par un député à ses obligations déontologiques ;

– l’article 80-5 prévoit la tenue, sous l’autorité du Bureau, d’un registre public des représentants d’intérêts, sur le contenu duquel le déontologue est habilité à faire des remarques.

Depuis, la question de la déontologie n’a cessé d’occuper les débats.

Ainsi, la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite « loi Sapin II », a renforcé la procédure relative aux représentants d’intérêts. Instaurant un répertoire national unique des représentants d’intérêts et rappelant la compétence du bureau de chaque assemblée pour déterminer les règles applicables aux représentants d’intérêts, elle donne compétence au déontologue pour connaître du respect de ces règles et décrit la procédure applicable.

Le code de déontologie a par ailleurs été enrichi, avec notamment des dispositions relatives aux obligations déclaratives en matière de dons et de voyages à l’invitation de tiers, à la suite de la décision du Bureau du 27 janvier 2016.

La loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique a complété le dispositif de prévention et de traitement des conflits d’intérêts en donnant une nouvelle définition de cette notion, en confiant au déontologue une mission de suivi de la prise en charge des frais de mandat par les assemblées, en instaurant des règles strictes quant à l’emploi comme collaborateur par les parlementaires d’un membre de leur famille ou d’un membre de la famille d’un autre parlementaire et, enfin, en précisant le droit de communication du déontologue.

La présente proposition de résolution vise à transcrire dans le Règlement ces dispositions législatives, tout en reprenant la quasi-totalité des propositions formulées par Mme Agnès Roblot-Troizier, déontologue de l’Assemblée nationale ([10]).

A.   la prÉvention et le traitement des conflits d’intÉrÊts

L’article 14 précise les conditions dans lesquelles les députés exercent leur mandat et modifie la définition du conflit d’intérêts figurant dans le Règlement, conformément à la loi pour la confiance dans la vie politique.

L’article 15 introduit plusieurs modalités de prévention et de gestion des conflits d’intérêts : la déclaration ad hoc d’intérêt, le déport et la faculté, pour le député, de s’abstenir d’exercer une fonction au sein de l’Assemblée susceptible de le placer en situation de conflit d’intérêts.

Les articles 6 et 41 prévoient, en conséquence, qu’en cas de déport d’un député, ce dernier est considéré comme étant présent en réunion de commission et en séance publique.

La Commission a modifié les articles 6 et 41 afin de renvoyer au Bureau la compétence de définir les modalités selon lesquelles un député qui s’est inscrit sur le registre public des déports est considéré comme étant présent en commission ou en séance publique. Il s’agira en particulier, pour le Bureau, d’éviter les comportements qui pourraient s’apparenter à des abus ou à des détournements de procédure.

B.   les missions et les pouvoirs du dÉontologue

L’article 16 rappelle le cadre dans lequel s’exerce le droit de communication du déontologue ainsi que les obligations auxquelles il est assujetti en matière de secret professionnel et de transmission à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) de ses déclarations de patrimoine et d’intérêts.

L’article 17 étend le champ de la mission de consultation du déontologue, aujourd’hui restreint aux règles du code de déontologie, à l’ensemble des règles destinées à prévenir et à faire cesser les conflits d’intérêts ainsi qu’au code de conduite applicable aux représentants d’intérêts. Il prévoit que le déontologue est consulté sur le régime de prise en charge des frais de mandat ainsi que sur la liste des frais éligibles et qu’il est chargé du contrôle de l’utilisation de ces frais de mandat.

L’article 18 précise les conditions dans lesquelles le déontologue peut être consulté par les députés ainsi que les modalités de son information sur les conditions d’emploi de leurs collaborateurs et sur le respect de leurs obligations fiscales.

L’article 19 inscrit dans le Règlement le pouvoir d’injonction qui a été dévolu par la loi pour la confiance dans la vie politique au déontologue en cas d’emploi comme collaborateur par un député d’un membre de sa famille ou d’un membre de la famille d’un autre parlementaire.

L’article 20 inscrit dans le Règlement les règles relatives au respect du code de conduite applicable aux représentants d’intérêts issues de la loi dite « Sapin II ». Le respect de ce code de conduite est placé sous le contrôle du déontologue, qui peut se faire communiquer toute information dans l’exercice de cette mission. Lorsqu’il constate un manquement, le déontologue saisit le Président de l’Assemblée qui peut adresser une mise en demeure au représentant d’intérêts concerné. S’il constate qu’un député, un collaborateur ou un agent des services de l’Assemblée a répondu favorablement à une sollicitation d’un représentant d’intérêts en méconnaissance des dispositions de ce code de conduite, il adresse ses observations à l’intéressé.

La Commission a :

– introduit un article 15 bis qui crée un article 80-1-2. S’inspirant des propositions formulées par Mme Agnès Roblot-Troizier, celui-ci a pour objet de préciser, dans le Règlement, les obligations déclaratives des députés relatives aux dons, avantages et voyages à l’invitation de tiers et d’en prévoir la publicité. Il organise également la possibilité pour les députés de consigner les dons qu’ils ont reçus auprès du déontologue ;

– décorrélé, à l’article 16, la durée du mandat du déontologue de celui de la législature : il s’agit d’éviter la concomitance d’un pic d’activité en début de législature avec la prise de ses fonctions par le déontologue ;

– ajouté, à l’article 17, que le Bureau définit les conditions dans lesquelles les avis rendus par le déontologue sur les règles destinées à prévenir les conflits d’intérêts, sur le code de déontologie et sur le code de conduite applicable aux représentants d’intérêts ainsi que sur le régime de prise en charge des frais de mandat et sur la liste des frais éligibles sont rendus publics ;

– transféré, de l’article 16, relatif au statut du déontologue, à l’article 18, relatif aux modalités d’exercice par le déontologue de ses fonctions, la disposition relative aux conditions dans lesquelles le déontologue peut demander communication aux députés d’un document nécessaire à l’exercice de sa mission ;

– inséré un article 20 bis qui crée un article 80-6 afin de prévoir dans le Règlement la mise en place d’un dispositif de prévention et d’accompagnement en matière de lutte contre le harcèlement, renforcé et étendu aux discriminations. Il reviendra au Bureau d’en préciser les modalités.

IV.   Une assemblée ouverte au droit de pétition

Les dispositions du Règlement fixant les règles relatives aux pétitions adressées au Président de l’Assemblée nationale ne permettent pas aux citoyens d’en faire un usage utile, alors même qu’il est largement recouru à cet outil de participation citoyenne dans la société civile.

La présente résolution propose donc de revivifier ce droit hérité de la Révolution de manière à permettre :

– la transmission des pétitions par voie électronique, qui pourront ainsi être soutenues par un nombre plus conséquent de pétitionnaires (article 39) ;

– la mise en ligne des pétitions recueillant plus de 100 000 signataires (article 40).

Les pétitions seraient alors non plus renvoyées systématiquement à la commission des Lois pour un premier examen, mais à la commission compétente au fond (article 4). Cette dernière pourrait décider de les classer ou de les examiner. Dans ce dernier cas, elle pourrait associer à ses débats les premiers signataires de la pétition et auditionner les ministres compétents.

Dans le cas d’une pétition soutenue par plus de 500 000 signataires domiciliés dans 30 départements au moins, le président de la commission saisie au fond ou le président d’un groupe pourrait proposer à la Conférence des Présidents de l’inscrire à l’ordre du jour (article 40).

À l’article 39, la Commission a confié au Bureau de l’Assemblée nationale le soin de préciser les conditions d’authentification et de domiciliation des pétitionnaires.

À l’article 40, elle a élargi la condition de domiciliation des signataires dans 30 départements au moins aux collectivités d’outre-mer.


1

 

   Commentaire DES ARTICLES

Article 1er
(art. 8 du Règlement de lAssemblée nationale)
Participation des présidents de groupe au Bureau de lAssemblée nationale

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article permet aux présidents des groupes politiques d’assister aux réunions du Bureau, sans toutefois disposer d’un droit de vote.

       Dernières modifications intervenues

L’article 8 du Règlement, relatif à la composition du Bureau de l’Assemblée, n’a pas fait l’objet de modifications depuis 1959.

       Modifications apportées par la Commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a adopté un amendement rédactionnel.

I.   Le droit en vigueur

A.   le bureau, autoritÉ dirigeante de l’assemblÉe

1.   Une autorité collégiale

Le Bureau de l’Assemblée nationale est composé, conformément à l’article 8 du Règlement, de vingt-deux membres ([11]) :

– le président de l’Assemblée nationale ;

– six vice-présidents ;

– trois questeurs ;

– douze secrétaires.

Le président est élu pour la durée de la législature, conformément à l’article 32 de la Constitution.

Les autres membres du Bureau sont désignés pour une année ([12]). L’article 10 du Règlement précise que « lélection des vice-présidents, des questeurs et des secrétaires a lieu en sefforçant de reproduire au sein du Bureau la configuration politique de lAssemblée et de respecter la parité entre les femmes et les hommes ».

a.   Une composition pluraliste

Pour l’élection des membres du Bureau, le Règlement prévoit, en son article 10, que les présidents des groupes se réunissent en vue d’établir, dans l’ordre de présentation qu’ils déterminent, la liste de leurs candidats aux diverses fonctions et que si leur nombre n’est pas supérieur à celui du nombre de sièges à pourvoir, les candidatures ainsi établies sont affichées et publiées au Journal officiel et les désignations prennent effet, sans scrutin, dès cette publication. Dans le cas contraire ([13]), il est procédé à un vote au scrutin plurinominal majoritaire.

Afin de garantir que la composition du Bureau reproduise la configuration politique de l’Assemblée, la pratique a consisté, de 1959 à 2017, à rechercher un accord entre les présidents des groupes pour répartir les candidatures aux différentes fonctions au sein du Bureau. Une clef de calcul prenant en compte les effectifs des groupes ([14]) est utilisée, qui attribue à chaque fonction un nombre de points déterminés.

Nombre de points attribuÉS À chaque fonction du Bureau

Fonction

Pondération

Nombre de postes

Nombre de points

Président

4 points

1

4

Vice-Président

2 points

6

12

Questeur

2,5 points

3

7,5

Secrétaire

1 point

12

12

TOTAL

 

22 postes

35,5 points

Source : commission des Lois.

L’usage réservait en outre, en marge du Règlement, à un député appartenant à un groupe d’opposition un siège de questeur sur trois.

Ces conventions non écrites ont permis, au cours des dernières législatures, une représentation équilibrée des différents groupes au Bureau, tout en assurant à la majorité parlementaire la majorité des voix au sein de cette instance où chaque représentant dispose d’une voix.

Cependant, en l’absence d’assise réglementaire, la répartition des fonctions au sein du Bureau par consensus entre les groupes a donné lieu à des difficultés d’application s’agissant des postes de questeurs au mois de juin 2017 ([15]), conduisant à l’absence de représentation du principal groupe d’opposition. Afin de surmonter cette difficulté la résolution n° 26 du 11 octobre 2017 a inscrit dans le Règlement les modalités de répartition des différentes fonctions au sein du Bureau.

Désormais, l’article 10 du Règlement prévoit que le Président de l’Assemblée nationale réunit les présidents des groupes en vue d’établir la répartition entre les groupes de l’ensemble des fonctions du Bureau et la liste de leurs candidats à ces fonctions. Cette répartition s’effectue à la représentation proportionnelle, selon des modalités prenant en compte l’importance des fonctions, déterminée par une valeur exprimée en points ([16]), et selon un ordre de priorité défini en fonction des effectifs respectifs des groupes ou, en cas d’égalité de ces effectifs, par tirage au sort. Un poste de questeur est, en outre, réservé à un député d’un groupe s’étant déclaré d’opposition.

En cas d’accord entre les présidents des groupes, les candidatures ainsi établies sont affichées et publiées au Journal officiel et les désignations prennent effet, sans scrutin, dès cette publication.

En l’absence d’accord, il est procédé, selon des modalités inchangées par la résolution, à une désignation par scrutin ou, pour les fonctions pour lesquelles le nombre de candidats n’est pas supérieur au nombre de sièges à pourvoir, par le même dispositif d’affichage et de publication.

La composition politique du Bureau de l’Assemblée est présentée ci-après.

composition politique actuelle du bureau de l’AssemblÉe Nationale

 

Président

Vice-présidents

Questeurs

Secrétaires

Total

Au 29/04/2019

(XVe lég.)

LaREM

1

2

2

7

12

LR

 

2

1

 

3

MODEM

 

1

 

1

2

UDI-AGIR

 

1

 

 

1

Soc

 

 

 

2

2

FI

 

 

 

1

1

GDR

 

 

 

1

1

LT

 

 

 

 

0

Source : commission des Lois.

b.   Une composition paritaire

La composition du Bureau doit par ailleurs s’efforcer de respecter la parité entre les femmes et les hommes, objectif qui a été inscrit à l’article 10 du Règlement par la résolution n° 437 du 28 novembre 2014.

Évolution de la paritÉ au sein du bureau de l’AssemblÉe Nationale

 

Président

Vice-présidents

Questeurs

Secrétaires

Total

2007-2008

(XIIIe lég.)

Hommes

1

5

2

10

18

Femmes

 

1

1

2

4

2012-2013

(XIVe lég.)

Hommes

1

3

2

9

15

Femmes

 

3

1

3

7

Au 29/04/2019

(XVe lég.)

Hommes

1

4

2

6

13

Femmes

 

2

1

6

9

Source : commission des Lois.

2.   Des attributions collectives étendues

Outre son rôle protocolaire – il revient au Bureau de représenter l’Assemblée nationale dans les manifestations extérieures – et les missions confiées à certains de ses membres pour diriger les débats en séance ([17]), veiller aux opérations de vote ([18]) ou autoriser les dépenses ([19]), le Bureau exerce une fonction dirigeante de l’Assemblée.

Il a, en effet, « tous pouvoirs pour présider aux délibérations de lassemblée et pour organiser et diriger tous les services » ([20]).

Réuni au moins une fois par mois par le président, sur un ordre du jour déterminé, le Bureau est donc l’instance dirigeante de la vie intérieure et des travaux de l’Assemblée nationale.

À cet effet, il dispose d’un pouvoir réglementaire important. Conformément à l’article 17 du Règlement, il détermine par des règlements intérieurs, qui constituent l’Instruction générale du Bureau (IGB), les modalités d’application du Règlement et arrête un règlement intérieur qui fixe l’organisation, les attributions et le fonctionnement des services. Il fixe le statut et le régime social du personnel ainsi que les rapports entre l’administration de l’Assemblée et les organisations professionnelles du personnel. Il est aussi compétent pour déterminer, sur proposition des questeurs et des présidents de groupes, le statut et les conditions d’installation matérielle des secrétariats des groupes ainsi que les droits d’accès et de circulation de leur personnel au sein du Palais, en vertu de l’article 20 du Règlement.

Le Bureau intervient également dans la procédure parlementaire. Il est chargé d’apprécier, au moment de leur dépôt, la recevabilité financière des propositions de loi et, si le président l’en saisit, des amendements en vue de la séance publique (article 89 du Règlement).

Le Bureau détient, enfin, sur le fondement de différentes dispositions constitutionnelles ou législatives, des attributions spécifiques, parmi lesquelles :

– l’autorisation des mesures judiciaires restrictives ou privatives de liberté pour les députés (article 26 de la Constitution) ;

– le contrôle de la compatibilité avec le mandat de député des fonctions ou activités exercées ou des participations détenues, sur le fondement des déclarations d’intérêts et d’activité déposées par les députés (article L.O. 151-2 du code électoral) ;

– la fixation du temps d’antenne dans le cadre de la campagne électorale, à défaut d’accord entre les présidents des groupes représentés à l’Assemblée nationale (article L. 167-1 du code électoral) ;

– les modalités de rattachement des élus aux partis et groupements politiques éligibles à la seconde fraction de l’aide publique, telles qu’elles résultent des articles 8 et 9 de la loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique ;

– la détermination, après consultation de l’organe chargé de la déontologie parlementaire, de la mise en œuvre des règles en matière de prévention et de traitement des conflits d’intérêts (article 4 quater de l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, introduit par la loi du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique).

Le Bureau exerce ses prérogatives de manière collective, en privilégiant la prise de décisions partagées.

B.   la participation des prÉsidents de groupe aux organes de l’assemblÉe

Composé d’au moins 15 membres, chaque groupe parlementaire élit en son sein un président ([21]).

L’instance qu’ils dirigent a été dotée par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 d’un statut constitutionnel : les « groupes parlementaires » sont consacrés à l’article 51-1 de la Constitution, dont la première phrase dispose que « le règlement de chaque assemblée détermine les droits des groupes parlementaires constitués en son sein ».

Leurs prérogatives dans le déroulement de la procédure législative et la tenue de la séance publique, déjà importantes, ont été renforcées dans le prolongement de cette révision constitutionnelle. Ils interviennent, par exemple, dans les modalités de mise en œuvre du temps législatif programmé ou pour l’exercice des droits de tirage qui ont été institués, notamment en matière de contrôle et d’évaluation.

Pour autant, les présidents des groupes ne participent qu’à l’un des deux organes directeurs de l’Assemblée : la Conférence des Présidents.

Ils en sont en effet membres de droit et participent, de ce fait, à l’établissement de l’ordre du jour et des mesures d’organisation qui lui sont liées.

En cas de vote au sein de la Conférence des Présidents, il est attribué à chaque président un nombre de voix égal au nombre de membres de leur groupe, déduction faite de ceux qui participent à la Conférence à un autre titre (vice-présidents, présidents de commission).

En revanche, les présidents de groupe n’assistent pas aux réunions du Bureau.

II.   la rÉforme proposÉe

Le présent article complète l’article 8 du Règlement afin de permettre aux présidents des groupes de participer aux réunions du Bureau.

Il s’agit ainsi de reconnaître leur rôle croissant dans l’organisation et le fonctionnement de l’Assemblée nationale, le Bureau traitant de questions essentielles à son fonctionnement. Concomitamment la réforme favorisera une articulation plus aisée entre le Bureau et la Conférence des Présidents.

La réforme proposée permettra donc aux présidents des groupes de faire connaître leur point de vue lors des réunions du Bureau, sans toutefois remettre en cause les équilibres politiques qui ont présidé à la composition de celui-ci, puisqu’ils ne disposeront pas d’un droit de vote.

Cette faculté leur étant attribuée intuitu personae, les présidents des groupes ne pourront être suppléés.

Cette nouvelle disposition devrait trouver à s’appliquer lorsque le Bureau de l’Assemblée nationale constitue aussi celui du Congrès du Parlement, c’est-à-dire en cas de déclaration du Président de la République (article 18 de la Constitution), de révision constitutionnelle (article 89) ou de ratification d’un traité relatif à l’adhésion d’un État à l’Union européenne (article 88-5).

À l’initiative du rapporteur, la Commission a adopté un amendement rédactionnel.

*

*     *

Article 2
(art. 11 du Règlement de lAssemblée nationale)
Ordre de préséance des vice-présidents

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article prévoit que le premier des vice-présidents de l’Assemblée appartient à un groupe s’étant déclaré d’opposition.

       Dernières modifications intervenues

L’article 11 du Règlement, qui fixe les règles relatives à l’ordre de préséance entre les vice-présidents de l’Assemblée, a été modifié pour la dernière fois par la résolution n° 151 du 26 janvier 1994, qui a supprimé la disposition selon laquelle le Bureau établit l’ordre de suppléance en cas d’absence du Président car elle ne correspondait plus à aucune réalité.

       Modifications apportées par la Commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a adopté un amendement rédactionnel.

I.   Le droit en vigueur

Au nombre de six, les vice-présidents suppléent le Président en cas d’absence.

Membre de droit du Bureau et de la Conférence des Présidents, chaque vice-président préside en outre une des six délégations qui, constituées au sein du Bureau, sont chargées de la communication et de la presse, de l’application du statut du député, des groupes d’études et des représentants d’intérêts, des activités internationales, du patrimoine artistique et culturel et, enfin, de la recevabilité financière des propositions de loi.

Aux termes des alinéas 2 et 3 de l’article 11 du Règlement, leur ordre de préséance est fonction de leur mode de désignation.

Si l’élection n’a pas donné lieu à un scrutin, c’est-à-dire en cas d’accord entre les présidents des groupes ou si le nombre de candidats n’est pas supérieur au nombre de sièges à pourvoir, la préséance découle de leur ordre de présentation sur la liste commune de candidats établie par les présidents de groupe.

Dans le cas contraire, l’ordre de préséance est déterminé par la date et le tour auquel les vice-présidents ont été élus, ou par le nombre de suffrages obtenus s’ils l’ont été au même tour, ou encore par l’âge en cas d’égalité de suffrages au même tour de scrutin.

II.   la rÉforme proposÉe

Afin d’affermir les droits des groupes qui se sont déclarés d’opposition conformément aux règles fixées par l’article 19 du Règlement, le présent article prévoit que le premier des vice-présidents dans l’ordre de préséance est un député appartenant à l’un de ces groupes, quel que soit le mode de nomination des vice-présidents, par élection ou par accord entre les groupes.

À cet effet, le 1° de l’article 2 ajoute à l’alinéa 2 de l’article 11 du Règlement, relatif aux règles de préséance lorsque l’élection des vice-présidents a lieu par scrutin, que le premier des vice-présidents est le député appartenant à un groupe d’opposition qui est le mieux classé au regard des critères définis dans ce même alinéa (date et tour de scrutin, nombre de suffrages obtenus, âge).

Le 2° du même article ajoute à l’alinéa 3 de l’article 11 du Règlement, qui définit les règles de préséance en l’absence d’élection des vice-présidents, que le premier des vice-présidents ne peut être qu’un député d’opposition.

On observera que cette disposition entérine la situation actuelle puisque, alors que les premiers vice-présidents étaient traditionnellement issus du groupe majoritaire sous les précédentes législatures, le premier vice-président est Mme Annie Genevard, qui appartient au groupe Les Républicains, principal groupe d’opposition, depuis l’élection qui a eu lieu au cours de la séance du 1er octobre 2018.

Une mesure identique est prévue, par l’article 38 de la proposition de résolution, pour le bureau du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC).

À l’initiative du rapporteur, la Commission a adopté un amendement rédactionnel.

*

*     *

Article 3
(art. 33 du Règlement de lAssemblée nationale)
Représentation des députés non-inscrits au sein des commissions spéciales

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article prévoit que les commissions spéciales comprennent deux députés non-inscrits.

       Dernières modifications intervenues

Créé par la résolution n° 146 du 23 octobre 1969, l’article 33 du Règlement, relatif au nombre de membres d’une commission spéciale, a été modifié pour la dernière fois par la résolution n° 292 du 27 mai 2009, qui a porté à 70 le nombre de ses membres.

       Modifications apportées par la Commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a adopté un amendement qui garantit la présence d’un député non-inscrit au sein des commissions spéciales.

I.   Le droit en vigueur

En 1969, le Règlement de l’Assemblée nationale avait fixé à 31 le nombre de membres des commissions spéciales et à 15 le nombre maximum de membres d’une commission spéciale appartenant à une même commission permanente, tout en leur permettant de s’adjoindre au plus 3 membres choisis parmi les députés n’appartenant à aucun groupe ([22]).

Par une résolution du 16 mai 1989 ([23]), l’effectif total d’une commission spéciale a été porté à 57 membres et le nombre maximum de membres appartenant à une même commission permanente à 28, les commissions spéciales pouvant s’adjoindre au plus 2 membres choisis parmi les députés non-inscrits.

En 2009, pour aligner l’effectif des commissions spéciales sur celui des commissions permanentes (au sein desquelles les groupes disposent désormais d’un nombre de sièges proportionnel à leur importance numérique quelle que soit la commission), l’effectif total d’une commission spéciale a été fixé à 70 membres, le nombre maximal de membres appartenant à une même commission étant porté pour sa part à 34 membres. La précision selon laquelle deux députés n’appartenant à aucun groupe peuvent s’adjoindre à cette commission a été maintenue ([24]).

II.   la rÉforme proposÉe

Le présent article prévoit de transformer la faculté aujourd’hui ouverte à deux députés non-inscrits au plus de participer à une commission spéciale en une garantie.

Il apparaît en effet que, sous les précédentes législatures, la participation de deux députés non-inscrits à une commission spéciale n’a pas été systématiquement assurée :

– sous la XIIIe législature, parmi les cinq commissions spéciales créées, deux d’entre elles comportaient deux députés non-inscrits et trois n’en comprenaient aucun ;

– sous la XIVe législature, parmi les six commissions spéciales créées, une seule d’entre elle avait deux députés non-inscrits, tandis que deux d’entre elles n’en comprenaient qu’un et que trois d’entre elles n’en comportaient aucun ;

– depuis le début de la XVe législature, les trois commissions spéciales créées comprenaient chacune un député non-inscrit.

Complément des articles 33, relatif à la composition des commissions d’enquête, et 35, relatif à la composition des missions d’information de la Conférence des Présidents, de la présente résolution, cet article vise donc à améliorer la représentation des députés non-inscrits au sein des organes de l’Assemblée nationale.

III.   Les modifications apportées par la commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a adopté un amendement qui garantit la présence d’un député non-inscrit au sein des commissions spéciales.

*

*     *

Article 4
(art. 36 du Règlement de lAssemblée nationale)
Suppression de lexamen préalable des pétitions par la commission des Lois

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article supprime le renvoi de droit à la commission des Lois des pétitions adressées au Président de l’Assemblée nationale.

Il s’agit d’une mesure de coordination, liée à la révision des modalités d’examen des pétitions prévue par les articles 39 et 40 de la proposition de résolution. Il s’agit également d’un alignement du droit sur la pratique actuelle.

Désormais, chaque commission permanente sera saisie directement des pétitions relevant de son champ de compétences.

       Dernières modifications intervenues

L’article 36 du Règlement, qui fixe le nombre et les compétences respectives des commissions permanentes, a été modifié, en dernier lieu, par la résolution n° 437 du 28 novembre 2014. Celle-ci a introduit parmi les compétences de la commission des Lois une référence aux dispositions touchant aux droits fondamentaux. ([25])

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

___

Les conditions de dépôt, d’examen et de publicité des pétitions adressées au Président de l’Assemblée nationale sont modifiées par les articles 39 et 40 de la présente proposition de résolution ([26]). La nouvelle procédure suppose que les pétitions soient examinées, en fonction de leur objet, par les différentes commissions permanentes compétentes.

Actuellement, après un premier examen de recevabilité formelle, les pétitions sont renvoyées par le Président de l’Assemblée nationale à la commission des Lois, conformément aux articles 36 et 148 du Règlement. Aucun délai réglementaire n’encadre leur traitement ([27]). La Commission désigne un rapporteur et, après avoir entendu ses conclusions, peut décider de les classer, de les renvoyer à une autre commission permanente, à un ministre ([28]), au Défenseur des droits ([29]) ou encore de les soumettre à l’Assemblée ([30]). À l’issue de la réunion, le pétitionnaire est informé du sort de sa pétition, et un Feuilleton des Pétitions est édité et mis en ligne ([31]).

À la date de publication du présent rapport et depuis le début de la législature, 36 pétitions ont ainsi été adressées à la commission des Lois. Toutes ont été examinées au cours de quatre réunions à l’occasion desquelles le rapporteur, M. Christophe Euzet, a proposé soit de les classer, soit de les renvoyer à une autre commission permanente lorsqu’elles relevaient de son domaine de compétence.

Ce bilan porte la marque du changement de pratique intervenu en 2017 : la commission des Lois fait désormais un usage systématique de la possibilité qui lui est offerte de renvoyer aux autres commissions permanentes les pétitions qui relèvent de leurs compétences.

Par conséquent, le présent article tend à aligner le droit sur la pratique en complétant la réforme des pétitions mise en œuvre par les articles 39 et 40 de la présente proposition de résolution par une suppression de la compétence particulière reconnue en la matière à la commission des Lois.

*

*     *

Article 5
(art. 39 du Règlement de lAssemblée nationale)
Participation des groupes aux bureaux des commissions

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise à assurer la participation de l’ensemble des groupes constitués à l’Assemblée nationale au sein des bureaux des commissions permanentes.

       Dernières modifications intervenues

L’article 39 du Règlement, et plus particulièrement son alinéa 2, relatif à la composition du bureau des commissions, a été modifié pour la dernière fois par la résolution n° 437 du 28 novembre 2014, afin de créer la fonction de rapporteur général de la commission des Affaires sociales.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

I.   Le droit en vigueur

Les règles relatives à la composition du bureau des commissions, qu’elles soient permanentes ou spéciales ([32]), sont fixées par l’alinéa 2 de l’article 39 du Règlement.

Ainsi, le bureau des commissions comprend, outre le président, quatre vice-présidents et quatre secrétaires.

Cette composition est issue de la résolution n° 292 du 27 mai 2009, qui a tiré les conséquences, sur la composition du bureau, de l’harmonisation des effectifs des commissions permanentes, concomitant au relèvement de leur nombre, de six à huit, rendu possible par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008.

Prévalait en effet, auparavant, la règle selon laquelle le bureau des commissions permanentes comprenait, outre le président, un vice-président et un secrétaire par fraction de 30 membres de l’effectif maximum ; le nombre des vice-présidents et des secrétaires ne pouvait être inférieur à trois.

Il en résultait une grande diversité dans la composition des bureaux. Ainsi, les commissions des Affaires étrangères, de la Défense, des Finances et des Lois, qui comprenaient chacune 72 députés, ne comptaient que trois vice-présidents et trois secrétaires, tandis que les commissions des Affaires culturelles et des Affaires économiques, qui rassemblaient chacune 144 députés, avaient six vice-présidents et six secrétaires.

Le bureau de la commission des Finances et, depuis 2014, celui de la commission des Affaires sociales comprennent, en outre, un rapporteur général.

Il est également spécifié, depuis 2009, que le président de la commission des Finances est un député appartenant à un groupe d’opposition. Cette règle s’inscrit dans le prolongement du nouvel article 51-1 inséré dans la Constitution par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 aux termes duquel le règlement de chaque assemblée reconnaît des « droits spécifiques » aux groupes d’opposition.

En application des alinéas 4 et 5 de l’article 39 du Règlement, les bureaux des commissions sont élus au scrutin secret par catégorie de fonction. Lorsque, pour chaque catégorie de fonction, le nombre des candidats n’est pas supérieur au nombre de sièges à pourvoir, il n’est pas procédé au scrutin. Si la majorité absolue n’a pas été acquise aux deux premiers tours de scrutin, la majorité relative suffit au troisième tour et, en cas d’égalité de suffrages, le plus âgé est nommé.

S’inspirant d’une règle figurant dans le Règlement pour la composition du Bureau de l’Assemblée ([33]) et, encore une fois, dans un souci de pluralisme, la résolution du 27 mai 2009 a par ailleurs ajouté à l’alinéa 2 de l’article 39 que la composition du bureau de chaque commission s’efforce de reproduire la configuration politique de l’Assemblée ([34]) et d’assurer la représentation de toutes ses composantes.

Il convient de souligner, toutefois, à ce sujet, que, en 2009, la version initiale de la proposition de résolution prévoyait que la composition du bureau de chaque commission non seulement s’efforce de reproduire la configuration politique de l’Assemblée mais encore accorde au moins un représentant à chaque groupe. Le second membre de la phrase a été supprimé lors de l’examen du texte par la commission des Lois au bénéfice de la formule, moins contraignante, selon laquelle la composition du bureau s’efforce d’assurer la représentation de toutes ses composantes.

M. Jean-Luc Warsmann, alors rapporteur de la proposition de résolution, avait souligné que la combinaison de l’objectif de représentation des groupes politiques et d’une obligation de présence d’au moins un représentant de chaque groupe dans le bureau de chaque commission « pourrait avoir pour effet, si lAssemblée comportait un certain nombre de petits groupes, daboutir à une large sur-représentation de ces petits groupes au sein des bureaux des commissions, tant au regard du principal groupe de la majorité que du principal groupe de lopposition ». L’Assemblée nationale avait donc privilégié cette autre formulation, prévue par la proposition de résolution pour le bureau des commissions mentionnées aux articles 16 et 80 du Règlement ainsi que pour le bureau des commissions d’enquête : « sefforcer de reproduire la configuration politique de lAssemblée et dassurer la représentation de chacune de ses composantes ».

Dans la pratique, on constate que, depuis que les groupes parlementaires ont dépassé le nombre de quatre, les bureaux des commissions ont eu tendance à s’élargir à d’autres membres que ceux prévus par le Règlement, sans que ces derniers disposent d’un droit de vote.

Les commissions permanentes suivent des règles différentes pour composer leur « bureau élargi ».

Ainsi, les commissions chargées des affaires culturelles, des affaires économiques, des affaires étrangères, du développement durable et des affaires sociales associent-elles l’ensemble des responsables de groupes. Cette dernière y associe également, en fonction de l’ordre du jour, les deux co-présidents de la Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS).

En revanche, si la commission de la Défense a pour pratique d’avoir un « membre associé » pour chaque groupe qui n’est pas représenté au bureau, il ne s’agit pas nécessairement des responsables de groupes.

Pour sa part, le bureau de la commission des Finances associe un député de chaque groupe qui n’y est pas représenté, sans précision sur sa fonction de responsable de groupe.

Enfin, le bureau élargi de la commission des Lois comprend des membres associés – c’est-à-dire un membre de la Commission désigné par le président de chaque groupe qui n’est pas représenté au bureau – et, depuis 2017, les responsables des groupes qui sont représentés au bureau.

composition politique du bureau Élargi de la commission des lois

 

Président

Vice-présidents

Secrétaires

Membres associés

Responsables des groupes

Total

Avril 2019

(XVe lég.)

LaREM

1

2

2

 

1

6

LR

 

1

1

 

1

3

MODEM

 

1

 

 

1

2

UDI

 

 

1

 

1

2

FI

 

 

 

1

 

1

GDR

 

 

 

1

 

1

LT

 

 

 

1

 

1

Soc.

 

 

 

1

 

1

Source : commission des Lois.

II.   la rÉforme proposÉe

Afin de consacrer dans le Règlement une pratique développée par les commissions permanentes tout en la précisant, le présent article propose de compléter le deuxième alinéa de l’article 39 en prévoyant que les groupes qui ne disposent pas de représentant au bureau d’une commission permanente peuvent désigner un de leurs membres appartenant à cette commission pour participer à ses réunions, sans que ces derniers disposent d’un droit de vote.

Il s’agit ainsi, alors que l’Assemblée nationale compte, depuis octobre 2018, huit groupes parlementaires, de garantir une meilleure association de l’ensemble des groupes à l’organisation des travaux des commissions.

Les commissions seront par ailleurs toujours libres d’associer également à leur bureau les responsables des groupes politiques.

En revanche, compte tenu de la restriction du champ d’application de cette règle aux seules commissions permanentes, elle ne s’appliquera pas aux bureaux des commissions spéciales, contrairement au reste de l’article 39 du Règlement.

*

*     *

Article 6
(art. 42 du Règlement de lAssemblée nationale)
Contrôle de la présence des députés en commission en cas de déport

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article précise qu’en cas de déport d’un député, ce dernier est considéré comme étant présent en réunion de commission.

       Dernières modifications intervenues

L’article 42 du Règlement, relatif à la présence des commissaires aux réunions des commissions, a été modifié pour la dernière fois par la résolution n° 292 du 27 mai 2009, afin de renforcer l’assiduité des députés aux réunions des commissions permanentes dont ils sont membres.

       Modifications apportées par la Commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a précisé qu’il revient au Bureau de l’Assemblée de définir les conditions dans lesquelles un député qui s’est inscrit sur le registre public des déports est considéré comme étant présent en commission.

I.   Le droit en vigueur

Le premier alinéa de l’article 42 du Règlement dispose que la présence des commissaires aux réunions des commissions est obligatoire.

Les noms des commissaires présents, ainsi que les noms de ceux qui se sont excusés, soit pour l’un des motifs prévus par l’ordonnance n° 58-1066 du 7 novembre 1958 portant loi organique autorisant exceptionnellement les parlementaires à déléguer leur droit de vote ([35]), soit en raison d’un empêchement insurmontable, ou de ceux qui ont été valablement suppléés, sont publiés au Journal officiel le lendemain de chaque réunion de commission ainsi que par voie électronique.

L’absence des députés aux réunions de commission fait l’objet d’un dispositif de sanction dont l’efficacité a été renforcée par la résolution n° 292 du 27 mai 2009.

Avant 2009, informé par le bureau de la commission, le Président de l’Assemblée constatait la démission du commissaire absent à plus du tiers des séances de la commission au cours d’une session ordinaire, ce qui entraînait une réduction d’un tiers de son indemnité de fonction jusqu’à l’ouverture de la session suivante. En pratique, cette disposition n’était pas appliquée.

Depuis 2009, au-delà de deux absences mensuelles et réserve faite des réunions de commission convoquées alors que l’Assemblée tient séance ou de la présence au même moment du député dans une autre commission permanente, chaque absence d’un commissaire à une commission convoquée, en session ordinaire, lors de la matinée du mercredi réservée aux travaux des commissions, donne lieu à une retenue de 25 % sur le montant mensuel de son indemnité de fonction. Les questeurs sont informés des absences par les présidents des commissions permanentes.

Cette règle ne s’applique pas aux membres du Bureau de l’Assemblée, à l’exception des secrétaires, aux présidents des groupes, aux députés élus dans une circonscription située hors de métropole, à l’exception de ceux qui sont élus dans une circonscription située en Europe, et lorsque l’absence est justifiée par la participation du commissaire à une réunion d’une assemblée internationale ou européenne ou d’une commission spéciale, dont il est également membre.

En revanche, aucune disposition spécifique ne vise le cas des députés qui, pour des raisons déontologiques, sont amenés à se déporter.

La Déontologue a d’ailleurs été interrogée à plusieurs reprises par des députés sur les modalités selon lesquelles ils pouvaient se « déporter ». Au sujet d’« un député membre dune commission spéciale [qui] souhaitait ne pas prendre part aux travaux sur une partie du projet de loi dont était saisie la commission car il concernait lorganisme dans lequel il travaillait », la Déontologue lui a ainsi suggéré « den informer le président de la commission spéciale ainsi que, pour les débats en séance publique, le président de séance » ([36]), au motif que la décision prise par le député devait bénéficier d’une forme de publicité et ne pas l’exposer à des sanctions pour absence d’assiduité.

II.   la rÉforme proposÉe

Le présent article complète l’article 42 du Règlement afin de prévoir une exception à la règle d’assiduité aux réunions de commission lorsqu’un député est amené à se déporter pour des raisons déontologiques.

En effet, la faculté, pour le député qui considère être en situation de conflit d’intérêts lors de l’examen d’un texte, de ne pas participer aux votes, voire aux débats, est désormais reconnue par l’article 4 quater de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires tel que modifié par la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique.

Le mécanisme du déport qui conduit « la personne concernée à ne pas prendre part au traitement dune affaire lorsquelle estime en conscience ne pas pouvoir la traiter avec objectivité ou lorsquelle estime que son impartialité serait susceptible dêtre à bon droit mise en cause par les tiers sur le fondement de la théorie des apparences » ([37]) est ainsi prévu dans l’exercice du mandat du député.

Il est laissé à la libre appréciation du député aussi bien pour les délibérations que pour le vote, en commission comme en séance.

Le député qui estime devoir ne pas participer aux travaux de l’Assemblée en informe le Bureau. Les cas de déports seront recensés, conformément à la loi pour la confiance dans la vie politique, dans un registre public, tenu sous la responsabilité du Bureau ([38]).

Aussi, le présent article prévoit que, dès lors qu’un député est inscrit sur le registre public des déports, il est considéré comme étant présent en commission.

Le 6 juin 2018 ([39]), le Sénat a introduit une disposition similaire à l’article 23 bis de son règlement qui prévoit qu’ « un sénateur dont le déport est inscrit sur le registre public (…) est également considéré comme présent en séance ou en commission au cours des travaux entrant dans le champ de ce déport ».

Une disposition « miroir » est prévue pour les absences aux séances publiques par l’article 41 de la proposition de résolution.

III.   Les modifications apportées par la commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a précisé qu’il revient au Bureau de l’Assemblée de définir les conditions dans lesquelles un député qui s’est inscrit sur le registre public des déports est considéré comme étant présent en commission.

Il s’agira en particulier, pour le Bureau, d’éviter les comportements qui pourraient s’apparenter à des détournements ou à des abus de procédure.

*

*     *

Article 7
(art. 48 du Règlement de lAssemblée nationale)
Transmission dun programme législatif prévisionnel

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article prévoit que le Gouvernement informe la Conférence des Présidents, à l’ouverture de la session puis, au plus tard, le 1er mars suivant, ou après la formation du Gouvernement, des textes et débats dont il envisage de demander l’inscription à l’ordre du jour, et de la période envisagée pour leur discussion.

       Dernières modifications intervenues

L’article 48 du Règlement fixe les conditions dans lesquelles l’ordre du jour est arrêté par l’Assemblée nationale, sur proposition de la Conférence des Présidents. Il a été modifié, notamment, par la résolution du 27 mai 2009 afin de tirer les conséquences du « partage » de l’ordre du jour, entre le Gouvernement et les assemblées, issu de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement visant à inscrire dans le Règlement la possibilité d’organiser, lors de la séance de contrôle réservée par priorité aux questions européennes, un débat préalable à la tenue d’une réunion du Conseil européen.

___

La maîtrise « partagée » de l’ordre du jour, prévue depuis 2008 par l’article 48 de la Constitution, conduit à distinguer, désormais, au sein de séquences de quatre semaines, des semaines gouvernementales et des semaines dites de l’assemblée. Ce partage a justifié, en 2009, l’introduction, à l’article 48 du Règlement de l’Assemblée nationale, d’une disposition spécifique visant à garantir que l’alternance de ces priorités ne nuise pas à la prévisibilité des travaux parlementaires.

Le deuxième alinéa de l’article 48 du Règlement prévoit ainsi que le Gouvernement informe, à titre indicatif, la Conférence des Présidents, avant l’ouverture de la session ou après sa formation, des semaines quil prévoit de réserver pour l’examen des textes et des débats dont il demandera l’inscription à l’ordre du jour.

Cette information permet d’établir le « calendrier de la session », qui s’est imposé comme le « tableau de bord » des travaux de l’Assemblée nationale, mentionnant la nature de chacune des semaines de la session ordinaire.

Pour autant, cela ne suffit pas pour que l’Assemblée puisse planifier de manière satisfaisante ses travaux. Si le Gouvernement transmet régulièrement le calendrier des textes dont il prévoit de demander l’inscription à l’ordre du jour, la lettre adressée au Président de l’Assemblée nationale par le ministre chargé des relations avec le Parlement étant consécutivement mise en ligne, la visibilité ainsi donnée aux parlementaires peut s’avérer insuffisante.

Cette difficulté, déjà soulevée, à l’été 2018, lors de l’examen du projet de loi constitutionnelle pour une démocratie plus représentative, responsable et efficace, avait conduit la commission des Lois à proposer que soit inscrite dans la Constitution l’obligation pour le Gouvernement de transmettre un calendrier prévisionnel tous les six mois, calendrier qui aurait fait l’objet d’une actualisation tous les trois mois, afin de permettre aux parlementaires de mieux préparer les sujets devant être débattus en séance publique et de programmer, le cas échéant, de manière plus cohérente leurs travaux d’évaluation et de contrôle. ([40])

S’inspirant de cette proposition, le présent article modifie la rédaction actuelle de l’article 48 du Règlement de manière à prévoir, plus explicitement, la transmission par le Gouvernement d’un calendrier prévisionnel à la Conférence des Présidents :

– à l’ouverture de la session ;

– au plus tard, le 1er mars suivant pour permettre son actualisation ;

– le cas échéant, après la formation du Gouvernement.

On observera que cette rédaction est identique à celle qui figurait à l’article 48 du Règlement de l’Assemblée nationale avant la résolution n° 292 du 27 mai 2009. Elle ne vise, de la même façon que pour la répartition des semaines à l’alinéa 2 de l’actuel article 48, que la session ordinaire ([41]).

Le retour à une rédaction centrée sur la communication du contenu de l’ordre du jour et non des seules semaines réservées par le Gouvernement constitue un signal positif en faveur d’une meilleure organisation des travaux parlementaires.

À l’initiative de Mme Mathilde Panot et de votre rapporteur, la Commission a complété ces dispositions de manière à prévoir explicitement la possibilité d’organiser, lors de la séance de contrôle réservée par priorité aux « questions européennes » conformément aux termes de l’alinéa 8 de l’actuel article 48 du Règlement, un débat préalable à la réunion du Conseil européen. Pour mémoire, si cette pratique n’est pas systématique, des débats de cette nature sont cependant régulièrement inscrits à l’ordre du jour de l’Assemblée. Le dernier en date s’est ainsi tenu le 5 mars dernier en vue du Conseil européen des 21 et 22 mars. ([42])

*

*     *

Article 8
(art. 49 du Règlement de lAssemblée nationale)
Organisation de la discussion des textes

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise à améliorer les conditions d’examen des textes en séance publique. À cette fin, il est proposé de :

– réduire la durée de la discussion générale en limitant les interventions à un orateur par groupe et un député non inscrit ;

– réviser les dispositions relatives au temps législatif programmé (TLP) pour reconnaître expressément la faculté dont dispose un président de groupe de rétrocéder la moitié du temps qui lui est attribué à un député de son groupe et lui permettre de demander un allongement du temps alloué à son seul groupe, une fois par session.

       Dernières modifications intervenues

La rédaction de l’article 49 du Règlement a été modifiée notamment par l’article 31 de la résolution n° 292 du 27 mai 2009. Celle-ci a confié à la Conférence des Présidents le soin d’organiser « la discussion des textes », et non plus seulement « la discussion générale », et, sur ce fondement, a prévu les modalités de mise en œuvre de la procédure du temps législatif programmé mentionnée par les articles 17 et suivants de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009.

       Modifications apportées par la Commission

Outre un amendement de coordination, la Commission a adopté deux amendements visant à :

– réduire de cinq à deux minutes les explications de vote personnelles pouvant intervenir au terme du TLP ;

– préciser que le nouveau droit de tirage permettant à un groupe de disposer, à son seul profit, d’un allongement exceptionnel de son temps de parole n’est pas cumulable avec l’allongement bénéficiant à l’ensemble des groupes dans le cadre du temps législatif programmé exceptionnel.

I.   le droit en vigueur

L’article 49 du Règlement de l’Assemblée nationale, dans sa rédaction actuelle, confie à la Conférence des Présidents le soin d’organiser la discussion des textes. ([43])

1.   L’organisation de la discussion générale

Sous réserve que la procédure du temps législatif programmé ne soit pas mise en œuvre, la Conférence des Présidents fixe la durée de la discussion générale.

a.   Une répartition du temps de parole à la proportionnelle corrigée

Le temps alloué à la discussion générale est réparti entre les groupes. Chacun d’eux se voit garantir un temps minimum identique. Les députés n’appartenant à aucun groupe disposent d’un temps global de parole proportionnel à leur nombre. Le temps demeurant disponible est ensuite réparti entre les groupes en proportion de leur importance numérique.

Depuis 2014, il est prévu que la Conférence des Présidents fixe la durée de la discussion générale des textes inscrits à l’ordre du jour au début de la législature. Il lui demeure possible, à titre exceptionnel, pour un texte déterminé, de retenir une durée dérogatoire, répartie selon les mêmes modalités. La durée « type » est actuellement de 1h30. Cette durée de droit commun a été prévue afin de mettre fin à une certaine dérive des discussions générales, qui tendaient à s’allonger, auparavant, de façon disproportionnée et « au coup par coup ».

Le Conseil constitutionnel a, pour sa part, rappelé que « la durée de la discussion générale ne saurait être fixée de telle manière quelle prive deffet les exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire. » ([44])

Le barème actuellement applicable, qui a récemment été modifié pour prendre en compte la création d’un huitième groupe politique, est présenté ci-après.

Temps de parole des groupes en discussion générale

Temps de base à répartir                   (en heures et minutes)

Groupes politiques

NI

 

 

 

Opposition

LaREM

MODEM

LT

LR

SOC

UDI-AGIR

FI

GDR

1:30

0:15

0:10

0:10

0:10

0:10

0:10

0:10

0:10

0:05

2:00

0:30

0:15

0:10

0:20

0:10

0:10

0:10

0:10

0:05

2:30

0:45

0:15

0:10

0:25

0:15

0:15

0:10

0:10

0:05

3:00

1:00

0:15

0:10

0:25

0:15

0:15

0:15

0:15

0:05

3:30

1:15

0:20

0:15

0:30

0:15

0:15

0:15

0:15

0:10

4:00

1:30

0:20

0:15

0:40

0:20

0:20

0:15

0:15

0:10

Source : service de la Séance.

Les inscriptions pour les prises de parole dans la discussion générale sont faites par les présidents des groupes, qui indiquent au Président de l’Assemblée l’ordre dans lequel ils souhaitent que leurs orateurs soient appelés ainsi que la durée de leurs interventions, qui ne peut être inférieure à cinq minutes. En règle générale, chaque groupe réserve une partie substantielle de son temps à un porte-parole qu’il inscrit, le plus souvent, en tête de ses intervenants.

Au vu de ces indications, le Président de l’Assemblée détermine l’ordre des interventions, de manière, le cas échéant, à permettre une alternance entre les groupes.

Ces éléments apparaissent sur la « feuille jaune », en ligne sur le site de l’Assemblée nationale.

b.   Une succession d’interventions qui éclaire insuffisamment les débats

Dans le cadre de ses travaux, le groupe de travail sur la procédure législative, l’organisation parlementaire et les droits de l’opposition a souligné que « le « déroulé » actuel de la discussion dun texte nest pas satisfaisant, notamment au regard de la physionomie des discussions générales en séance : les positionnements à légard du texte de loi semblent déjà se figer et la discussion se limite souvent à une suite de monologues qui ne laisse pas de place pour un débat authentique. En résulte – pour une plus-value assez faible en termes déclairage démocratique des députés comme des citoyens – un rallongement inutile de la phase parlementaire, retardant létape décisive de lexamen des amendements. » ([45])

2.   Le temps législatif programmé

La Conférence des Présidents peut décider de fixer non pas la durée de la discussion générale mais celle de l’examen de l’ensemble d’un texte. Elle a alors recours à la procédure dite du temps législatif programmé (TLP).

a.   Une procédure permettant d’encadrer dans le temps l’examen des textes

Le temps législatif programmé a été institué, sous la XIIIe législature, sur un triple fondement constitutionnel (l’article 44 modifié par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008), organique (les articles 17 et suivants de la loi organique du 15 avril 2009) et réglementaire (l’article 49 du Règlement, issu de la résolution du 27 mai 2009).

Le TLP avait pour objectif de « permettre au débat sur un texte de se dérouler dans de bonnes conditions et en évitant lobstruction. » ([46]) Il était également présenté comme une contrepartie à l’encadrement, par la révision constitutionnelle de 2008, de la faculté pour le Premier ministre d’engager, sur le fondement de l’alinéa 3 de l’article 49 de la Constitution, la responsabilité du Gouvernement devant l’Assemblée nationale aux lois de finances et de financement de la sécurité sociale et à un texte d’une autre nature par session.

Ses initiateurs avaient en effet pour ambition de rationaliser la conduite des débats, tout en assurant le respect de l’expression de l’ensemble des groupes. À titre d’exemple, le TLP devait permettre de limiter le recours à des dépôts massifs d’amendements, ceux-ci n’ayant plus d’incidence sur les temps de parole, ou à la multiplication des incidents de procédures visant à ralentir l’examen des textes, les interventions en découlant étant désormais susceptibles d’être décomptées du temps global alloué à l’examen du texte.

Dans le cadre de la mise en œuvre de l’ordre du jour « partagé », à la suite de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, cette procédure devait également assurer une meilleure prévision du temps d’examen en séance publique consacré à un texte de manière à permettre au Gouvernement comme à l’Assemblée de fixer, dans de bonnes conditions, l’organisation des semaines leur étant réservées.

Les alinéas 5 à 13 de l’article 49 du Règlement permettent ainsi à la Conférence des Présidents de « fixer la durée maximale de lexamen de lensemble dun texte », sauf exceptions ([47]), selon les modalités suivantes :

– un temps minimum forfaitaire est attribué à chaque groupe, ce temps étant supérieur pour les groupes d’opposition ;

– le temps supplémentaire disponible est attribué à 60 % aux groupes d’opposition et réparti entre eux en proportion de leur importance numérique, tandis que les 40 % restant sont répartis entre les autres groupes également en proportion de leur importance numérique. Le temps de parole réservé aux députés non-inscrits est, quant à lui, au moins proportionnel à leur nombre ;

– les limitations de durée prévues par le Règlement pour, notamment, la discussion générale, les motions de procédure, les interventions sur les articles ou sur les amendements ne sont plus applicables. Les interventions sont décomptées du temps imparti à chacun des groupes auxquels appartiennent les orateurs.

Cette règle s’applique à toutes les interventions des députés, y compris lorsqu’il s’agit de rappels au Règlement, dès lors que le Président considère qu’ils n’ont manifestement aucun rapport avec le déroulement de la séance, ou de demandes de suspension de séance. En sont toutefois exclues les explications de vote dites « personnelles », prévues par la loi organique du 15 avril 2009 et dont la durée a été fixée à cinq minutes, que peuvent faire les députés, à la fin de la discussion, sur l’ensemble du texte, même dans l’hypothèse où leur groupe aurait fait usage de tout le temps de parole qui lui a été imparti par la Conférence des Présidents.

La répartition du temps de parole qui en découle doit assurer « le droit dexpression de tous les groupes parlementaires, en particulier des groupes dopposition et minoritaires. » ([48]) Elle figure dans le tableau reproduit ci-après.

Plusieurs exceptions sont toutefois prévues à ce décompte en faveur du président et du rapporteur de la commission saisie au fond et, le cas échéant, des rapporteurs des commissions saisies pour avis, et des membres du Gouvernement. En outre, les présidents de groupe disposent chacun d’un temps de parole supplémentaire ([49]). Ces exceptions conduisent, en pratique, à ce que la durée d’examen des textes soit plus longue que la durée totale accordée par la Conférence des Présidents. ([50])

Par ailleurs, comme cela a été indiqué dans l’avant-propos au présent rapport, les présidents des groupes se voient reconnaître le droit :

– d’obtenir que le temps programmé ne soit pas inférieur à une durée minimale fixée par la Conférence des Présidents : on parle alors de temps législatif programmé allongé (TLPA) ;

– de solliciter, une fois par session, un allongement exceptionnel de cette durée : il s’agit du temps législatif programmé exceptionnel (TLPE).

La Conférence des Présidents a fixé la durée du TLPA et du TLPE à, respectivement, 30 et 50 heures au début de la législature en cours, des durées identiques à celles retenues sous les XIIIe et XIVe législatures ([51]).

Les présidents des groupes peuvent également s’opposer à la mise en œuvre du TLP lorsque la discussion d’un texte en première lecture intervient moins de six semaines après son dépôt ou moins de quatre semaines après sa transmission.

En application de l’article 17 de la loi organique du 15 avril 2009 et de l’article 55 du Règlement, lorsque le temps de parole d’un groupe ou, le cas échéant, des députés n’appartenant à aucun groupe, est épuisé, les amendements déposés par les députés appartenant à ce groupe ou par les députés n’appartenant à aucun groupe sont mis aux voix sans discussion.

Toutefois, les amendements déposés hors délai par le Gouvernement ou la commission au fond donnent droit, à la demande d’un président de groupe, à un délai supplémentaire. ([52])

Enfin, si la Conférence des Présidents constate que la durée maximale fixée pour l’examen d’un texte est insuffisante, elle peut décider de l’augmenter.

b.   Des résultats variables en fonction des textes examinés

L’usage du TLP s’était presque généralisé à la fin de la XIIIe législature. Cette utilisation est plus occasionnelle depuis mais le TLP n’en est pas moins régulièrement utilisé.

Il a sans doute permis de mieux maîtriser le calendrier d’examen des textes auxquels il a été appliqué. Il a également contribué à contenir, sur certains textes, le nombre d’amendements déposés. Il a enfin offert aux acteurs de certains débats, dans la limite du temps imparti, une souplesse qui a pu être appréciée.

Toutefois, dans son rapport précité, le groupe de travail sur la procédure législative a souligné les difficultés que peut poser le recours au TLP pour l’examen de certains textes. Sont pris en exemple « deux volumineux projets de loi », à savoir le projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole ([53]) et le projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique ([54]). Il est rappelé à leur propos que « tentant danticiper la longueur des débats, la Conférence des Présidents décidait de soumettre lexamen de ces deux projets au « temps législatif programmé » (retenant un barème de 50 heures par texte)… pour une durée totale dexamen qui devrait en réalité être proche de 100 heures et sans apporter de plus-value en termes de prévisibilité et de structuration des débats. En tout état de cause, il était acquis que les créneaux initialement ouverts pour lexamen de ces textes étaient manifestement insuffisants, obligeant à des ajustements de lordre du jour « au fil de leau » à défaut de décalage de lexamen dun des textes inscrits. »

Le barème du temps législatif programmé actuellement applicable est présenté ci-après.

Barème du temps législatif programmé

Temps des groupes

Groupes politiques

NI

 

 

Opposition

LaREM

MODEM

LT

LR

SOC

UDI-AGIR

FI

GDR

10:00

2:05

0:45

0:35

2:15

1:10

1:10

1:00

1:00

0:15

15:00

3:20

1:05

0:50

3:35

1:40

1:40

1:25

1:25

0:20

20:00

4:10

1:30

1:10

4:30

2:20

2:20

2:00

2:00

0:30

25:00

5:50

1:45

1:15

6:10

2:45

2:45

2:15

2:15

0:30

30:00

6:40

2:15

1:45

6:55

3:25

3:25

2:50

2:45

0:40

35:00

8:20

2:30

1:50

8:35

3:50

3:50

3:05

3:00

0:40

40:00

9:10

3:05

2:20

9:25

4:25

4:25

3:35

3:35

0:50

45:00

10:50

3:20

2:25

11:00

4:50

4:50

3:55

3:50

0:50

50:00

11:40

3:55

3:00

11:50

5:25

5:25

4:25

4:20

1:00

Source : service de la Séance.

 

II.   la réforme proposée

1.   Une discussion générale réduite à l’expression de la position des différents groupes

Le présent article propose que la discussion générale donne désormais lieu à une prise de parole par groupe ainsi que pour l’ensemble des députés n’appartenant à aucun groupe, pour une durée de cinq minutes chacune.

Par conséquent, la durée de la discussion générale serait sensiblement raccourcie, tout en permettant à chaque groupe de présenter clairement sa position sur les dispositions examinées. La Conférence des Présidents pourrait toutefois décider, à titre exceptionnel et pour un texte déterminé, de déroger à cette limitation du nombre d’orateurs, comme cela est déjà le cas pour la durée des temps de parole.

Par ailleurs, dans le cadre des journées réservées à l’examen des propositions de loi présentées par les groupes d’opposition ou minoritaires, l’orateur du groupe à l’initiative du texte inscrit à l’ordre du jour pourrait disposer d’un temps de parole de dix minutes.

L’objectif poursuivi est d’éviter « leffet tunnel créé par la succession de nombreux orateurs, et de préserver les droits de lopposition, chaque groupe disposant du même temps indépendamment de son importance numérique. » ([55])

Pour mémoire, dans le cadre de ses travaux, le groupe de travail sur la procédure législative associait à cette réforme l’instauration d’un débat d’orientation préalable en commission ou en séance publique permettant aux parlementaires de discuter en amont des projets de réforme. ([56])

2.   Des ajustements au temps législatif programmé à la demande d’un président de groupe

Le présent article apporte de nouvelles souplesses à la procédure du temps législatif programmé en prévoyant la faculté pour le président d’un groupe :

– de transférer la moitié de son temps de parole personnel à un membre de son groupe, cette pratique étant déjà admise mais en marge de toute disposition réglementaire ;

– de bénéficier d’un allongement du temps de parole alloué à son seul groupe, une fois par session, dans une limite maximale fixée par la Conférence des Présidents. Cette disposition permettrait de répondre à la demande d’un groupe sans augmenter mécaniquement le temps imparti à l’ensemble des groupes.

La Conférence des Présidents conserve toutefois la possibilité d’augmenter la durée fixée pour l’examen d’un texte de manière à permettre l’expression de l’ensemble des groupes et de respecter les exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire.

Par ailleurs, le non-décompte du temps de parole réservé aux rapporteurs pour avis est supprimé par coordination avec les dispositions prévues par l’article 23 de la proposition de résolution.

III.   les apports de la commission des lois

La Commission a adopté un amendement de coordination et deux amendements de fond visant à :

– réduire de cinq à deux minutes les explications de vote personnelles pouvant intervenir à l’issue de la discussion des articles dans le cadre du temps législatif programmé. En effet, si chaque député doit avoir la possibilité d’expliquer le sens de son vote, comme le prévoit l’article 19 de la loi organique du 15 avril 2009 ([57]), une durée de deux minutes semble suffisante pour le faire au regard des débats qui auront déjà eu lieu au cours de la discussion générale et de l’examen des articles ;

– préciser que l’allongement exceptionnel de son temps de parole dont pourra bénéficier un groupe une fois par session, à la demande de son Président, ne pourra être cumulé avec celui dont bénéficie l’ensemble des groupes au titre de la procédure de TLPE existante.

*

*     *

Article 9
(art. 49-1 A du chapitre XI du titre Ier du Règlement [nouveau])
Contribution écrite sur les textes à lordre du jour

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet de permettre aux députés de déposer des contributions écrites sur les textes inscrits à l’ordre du jour.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement précisant que les conditions de dépôt des contributions écrites sont fixées par la Conférence des Présidents.

___

En contrepartie de la régulation des temps de parole en séance publique prévue par la présente résolution, cet article permet aux députés de recourir à des contributions écrites pour exprimer leur avis sur un texte inscrit à l’ordre du jour, l’un de ses articles ou un amendement déposé. Ces contributions seraient annexées au compte rendu des débats.

La Conférence des Présidents fixerait, à ce titre, avant le début de la session ordinaire, le nombre maximal de contributions pouvant être déposées par chaque député jusqu’à la prochaine session ordinaire ([58]) et le nombre maximal de caractères par contribution.

Pour mémoire, cette disposition reprend l’une des propositions de la contribution de votre rapporteur et de Madame Marie Tamarelle-Verhaeghe, annexée au rapport du groupe de travail sur la procédure législative, l’organisation parlementaire et les droits de l’opposition. ([59])

L’objectif affiché est ainsi de permettre au député, par le biais d’une telle contribution, de « défendre un de ses propres amendements, donner son avis sur un texte (date limite : celle de dépôt des amendements) ou sur les amendements de ses collègues (date limite 24 heures avant lexamen en Séance ou commission) Cette contribution écrite serait formatée de manière précise (400 mots maximum), intégrée au cœur dune plateforme en ligne à limage dEloi en vue dalimenter la réflexion des députés pour les débats, et jointe aux comptes rendus (par analogie à une prise de parole dans un compte rendu). »

Cette « liberté nouvelle » doit répondre au fait qu’ « aujourdhui il nest ni possible dexprimer sa position au global sur un texte (sauf à être désigné par son groupe pour la discussion générale) ni de réagir au global sur les amendements déposés (sauf à être choisi dans les deux interventions possibles par le président de séance). »

La Commission a précisé qu’outre le nombre de contributions et le nombre de caractères par contribution, les conditions de dépôt de ces dernières seront fixées par la Conférence des Présidents, avant chaque session ordinaire.

*

*     *

Article 10
(art. 50 du Règlement de lAssemblée nationale)
Horaires de séance

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article modifie les horaires de la séance publique : celle-ci débuterait, désormais, le matin, à 9 heures au lieu de 9 heures 30, et s’achèverait à minuit au lieu de 1 heure.

       Dernières modifications intervenues

Les horaires de séance actuellement inscrits à l’article 50 du Règlement résultent de l’article 3 de la résolution n° 106 du 26 mars 2003 dont l’objet était notamment de faire commencer la séance publique à 9 heures 30 lorsque l’Assemblée siège en matinée.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

___

Conformément au quatrième alinéa de l’article 28 de la Constitution, « les jours et les horaires des séances sont déterminés par le règlement de chaque assemblée ».

L’article 50 du Règlement prévoit ainsi que l’Assemblée nationale se réunit chaque semaine en séance publique :

– le matin, l’après-midi et la soirée du mardi ;

– l’après-midi et la soirée du mercredi ;

– le matin, l’après-midi et la soirée du jeudi.

Ces séances se tiennent alors aux horaires suivants :

– en matinée, de 9 heures 30 à 13 heures ;

– l’après-midi, de 15 heures à 20 heures ;

– en soirée, de 21 heures 30 à 1 heure le lendemain.

Sur proposition de la Conférence des Présidents, l’Assemblée peut décider de tenir d’autres séances pour assurer, par exemple, une durée de discussion suffisante pour l’examen des textes inscrits à l’ordre du jour.

La dernière modification apportée à ces horaires résulte de la résolution du 26 mars 2003 précitée. À cette occasion, les députés avaient souhaité, en premier lieu, repousser de 9 heures à 9 heures 30 le début de la séance du matin en maintenant l’heure de sa levée à 13 heures. Il s’agissait de donner « plus de temps aux commissions concernées par le texte en discussion pour tenir leurs réunions en application de larticle 88 du Règlement ([60]). » Par ailleurs, cette disposition devait favoriser « une présence plus nombreuse des députés en début de séance. » ([61])

La réforme proposée par le présent article revient sur cette mesure en fixant à nouveau le début de séance à 9 heures. En conséquence, la réunion de la commission des Lois, par exemple, pour examiner les amendements qui ne l’auraient pas été avant le début de la séance publique, conformément à l’article 44 de la Constitution ([62]), devrait se tenir, désormais, à 8 heures 30 ou 8 heures 45.

En contrepartie, il est proposé davancer d1 heure du matin à minuit la levée des séances du soir. En cas de besoin, il pourra, comme c’est le cas actuellement, être fait application des dispositions de l’alinéa 5 de l’article 50 du Règlement, qui permettent à l’Assemblée de prolonger ses séances, soit sur proposition de la Conférence des Présidents pour un ordre du jour déterminé, soit sur proposition de la commission saisie au fond, d’un président de groupe ou du Gouvernement pour continuer le débat en cours.

Cette prolongation n’est toutefois plus admise, pour les séances du soir, depuis la résolution du 28 novembre 2014, que pour « achever une discussion en cours ». Cette précision a été introduite pour limiter une dérive alors constatée, qui se traduisait par un allongement excessif et erratique de la durée des séances de nuit.

Ce nouvel horaire de levée de la séance public s’inscrit dans la continuité de la réflexion engagée dans le cadre du groupe de travail sur la procédure législative et les droits de l’opposition dont le rapport a été présenté en juin 2018. ([63])

À l’occasion d’une consultation portant notamment sur l’organisation de la semaine parlementaire, la fréquence et la durée des séances de nuit, 6,3 % des députés y ayant participé ([64]) se sont prononcés en faveur de la suppression des séances de nuit en toutes circonstances ; près de 65 % des députés étaient favorables à ce que les séances de nuits soient réservées à des cas particuliers, comme l’examen de certains textes (projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale, projets de loi relatifs aux états de crise), ou à ce que soit maintenue la possibilité de prolonger une séance dans le seul but d’achever l’examen d’un texte.

Les travaux conduits montraient également qu’il serait délicat de supprimer les séances de nuit « dans la mesure où [cela] aurait eu pour conséquence, en 2014-2015, la suppression denviron 356 heures de temps de séance (correspondant aux 108 séances du soir sur les 314 qui ont eu lieu). Pour compenser cette perte, siéger tous les lundis matin et après-midi naurait pas suffi : 38 séances auraient alors pu être utilisées (soit 162 heures de séance), ce qui est largement insuffisant. Ce nest quen siégeant également tous les vendredis matin et après-midi que les heures perdues avec la suppression des séances de nuit auraient pu être compensées. »

Pour mémoire, les horaires de séance du Sénat ne figurent plus dans son Règlement, son article 32 se bornant à rappeler qu’il se réunit en séance publique, en principe, le mardi matin, sous réserve des réunions de groupe, et après-midi, le mercredi après-midi et le jeudi matin et après-midi. Il peut décider de siéger le soir sur proposition de la Conférence des Présidents, du Gouvernement ou de la commission saisie au fond. Toutefois, en pratique, les séances débutent le matin à 10 heures 30, sauf pour les questions orales, et l’après-midi à 14 heures 30 ou 15 heures par exception le jeudi après-midi, du fait des questions au Gouvernement.

Les pratiques des parlements étrangers

Dans son deuxième rapport, le groupe de travail sur la procédure législative, l’organisation parlementaire et les droits de l’opposition, présidé par M. Jean-Luc Warsmann et rapporté par M. Jean-Michel Clément, a présenté une synthèse de l’organisation de la semaine parlementaire dans les parlements étrangers. ([65])

► « À quelle heure commence habituellement la première séance publique de la journée dans votre assemblée ? »,

– en Allemagne, la séance du mercredi débute à 13 heures ; celles du jeudi et du vendredi commencent à 9 heures ;

– en Autriche, la séance du matin débute à 9 heures.

– en Belgique, l’article 40 du Règlement de la Chambre des représentants dispose que « Si la Chambre nen a pas décidé autrement, le début des séances du matin est fixé à 10 heures et celui des séances de laprès-midi à 14 heures. La Chambre peut décider de tenir des séances du soir » ;

au Danemark, la séance publique est ouverte à 13 heures, les mardi et mercredi, et à 10 heures, les jeudi et vendredi ;

– en Espagne, la séance du mardi débute à 15 heures pour finir à 20 heures ; les autres séances commencent à 9 heures pour finir à 14 heures ;

– en Estonie, l’article 47 du Règlement du Riigikogu mentionne trois créneaux : le mardi de 10 heures à 13 heures, le mercredi à partir de 14 heures, et le jeudi de 10 heures à 13 heures ;

– en Finlande, le Parlement siège à 14 heures le mardi et mercredi, à 16 heures le jeudi et 13 heures le vendredi. Traditionnellement, il n’y a pas de séance publique le matin ;

– en Grèce, la séance débute à 10 heures ;

– en Hongrie, les débats débutent à 13 heures le lundi et à 9 heures du mardi au jeudi ;

– en Irlande, le Parlement siège à partir de 14 heures le mardi et à partir de 10 heures et demie du mercredi au jeudi ;

– en Lituanie, la séance publique débute à 10 heures ;

– au Royaume-Uni, les débats sont ouverts à 14 heures et demie le lundi, à 11 heures et demie du mardi au mercredi, et à 9 heures et demie le vendredi ;

– enfin, en Suède, le Parlement siège à 13 heures le mardi, 9 heures le mercredi et le vendredi, et à midi le jeudi.

« Siégez-vous le soir et la nuit ? Si oui, à quelle heure lève habituellement la dernière séance ? »

– en Allemagne, la pratique concentre la séance de nuit sur le jeudi. Elle s’achève généralement vers minuit, rarement au-delà ;

– en Autriche, la séance publique étant organisée uniquement la troisième semaine de chaque mois, il n’est pas rare qu’elle déborde jusqu’à 1 heure du matin ;

– en Espagne, la séance de nuit, d’habituelle, semble devenue très rare ;

– en Estonie, sur les trois jours de séance publique (du mardi au jeudi), seule la séance du mercredi n’est pas affectée d’une heure limite. L’article 47 du Règlement du Riigikogu prévoit uniquement qu’elle commence à 14 heures et qu’elle ne doit s’achever qu’avant le début de la séance du jeudi, soit le lendemain à 10 heures. Cependant la pratique est rare, et relève souvent de l’obstruction de l’opposition ;

– en Finlande, la pratique apparaît limitée en ce domaine : la séance est levée à 22 heures, sauf en période budgétaire. ;

– en Grèce, la séance de l’après-midi, qui débute à 18 heures, s’achève en moyenne vers 23 heures et demie, et peut être levée exceptionnellement vers 1 heure du matin ;

– au Royaume-Uni, la Chambre des communes siège peu la nuit depuis le début des années 2000. Ainsi, pour la session 2014-2015, seules 12 % des séances ont dépassé 22 heures ;

– en Suède, une séance dépassant les 18 heures est considérée comme « tardive », la limite ayant été fixée à 23 heures.

*

*     *

Article 11
(art. 54 du Règlement de lAssemblée nationale)
Explications de vote

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article modifie le régime des explications de vote, en procédant à des coordinations avec les dispositions des articles 8 et 25 de la résolution.

Les explications de vote, limitées à un orateur par groupe, seraient réservées à une expression « sur l’ensemble d’un projet ou d’une proposition », dans la limite de cinq minutes chacune.

       Dernières modifications intervenues

L’article 35 de la résolution n° 292 du 27 mai 2009 a procédé à deux modifications de l’article 54 du Règlement consistant à :

– supprimer la possibilité pour le Président de retirer la parole à un orateur qui lit un discours, disposition dont il n’était pas fait usage ;

– réduire de cinq à deux minutes la durée des prises de parole pouvant être accordées par le Président à un député souhaitant répondre à un autre orateur.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement visant à préciser la rédaction de l’article 54 du Règlement : dans l’intérêt des débats, le Président de séance pourra déroger aux conditions de durée et de nombre d’orateurs, fixées par le Règlement, pour les interventions en séance publique.

__

L’article 54 du Règlement détermine les conditions dans lesquelles les députés interviennent en séance, après avoir demandé la parole au Président et l’avoir obtenue.

Il prévoit notamment que :

– les députés qui désirent intervenir s’inscrivent auprès du Président qui détermine l’ordre des interventions ;

– ce dernier peut autoriser des explications de vote, de cinq minutes chacune, à raison d’un orateur par groupe.

Par ailleurs, quand le Président juge l’Assemblée suffisamment informée, il peut inviter l’orateur à conclure. Il peut également, dans l’intérêt du débat, l’autoriser à poursuivre son intervention au-delà du temps qui lui est attribué.

Enfin, il est rappelé que l’orateur ne doit pas s’écarter de la question, sinon le Président l’y rappelle. S’il ne défère pas à ce rappel, de même que si un orateur parle sans en avoir obtenu l’autorisation ou prétend poursuivre son intervention après avoir été invité à conclure, le Président peut lui retirer la parole. ([66])

Le présent article apporte plusieurs précisions à l’article 54 qui sont destinées à mieux encadrer le régime des interventions en séance publique, tout en opérant des coordinations avec :

– l’article 8 de la résolution qui prévoit, à l’article 49 du Règlement, que les interventions au cours de la discussion générale sont réservées à un orateur par groupe et un député non inscrit dans la limite de cinq minutes ;

– l’article 25, qui réserve, à l’article 95 du Règlement, à un orateur par groupe et un député non-inscrit la possibilité d’intervenir sur les articles, tout en maintenant la durée de ces interventions à deux minutes.

Il est ainsi proposé, en premier lieu, de prévoir expressément que les demandes de prises de parole auprès du Président s’exercent sous réserve de ces deux règles nouvelles.

En second lieu, les explications de vote, d’une durée de cinq minutes à raison d’un orateur par groupe, ne pourront désormais porter que sur l’ensemble d’un projet ou d’une proposition de loi.

Il est toutefois précisé que, « dans lintérêt du débat, le Président peut autoriser à sexprimer un nombre dorateurs supérieur à celui fixé par le Règlement. »

L’exposé sommaire de la proposition de résolution établit clairement l’objectif recherché : « Les explications de vote sur les articles ne présentent souvent quun intérêt limité dans la mesure où elles sont redondantes avec les discussions qui ont eu lieu sur larticle et les amendements y afférents. En pratique, les députés y ont rarement recours. Cest pourquoi il est proposé de supprimer cette faculté. »

Le groupe de travail sur la procédure législative avait d’ailleurs également préconisé de revenir sur le régime des explications de vote. ([67])

La Commission a adopté un amendement visant à préciser que la faculté pour le Président de séance de déroger, dans l’intérêt des débats, aux durées et au nombre d’orateurs fixés par le Règlement porte sur l’ensemble des interventions en séance, en dehors de la discussion générale dont l’organisation relève de la Conférence des Présidents.

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*     *

Article 12
(art. 56 du Règlement de lAssemblée nationale)
Prise de parole en séance publique

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 12 tend à supprimer une disposition relative aux règles de prise de parole sur les amendements en séance publique prévue par l’article 56 du Règlement, par coordination avec des dispositions de même nature désormais inscrites à l’article 100 par l’article 27 de la proposition de résolution.

       Dernières modifications intervenues

L’article 37 de la résolution n° 292 du 27 mai 2009 a limité le droit de réponse à la Commission et au Gouvernement, lorsqu’ils sont de même avis, à un seul orateur.

     Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

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Le présent article propose de supprimer le deuxième alinéa de l’article 56 du Règlement qui était le support, jusqu’à présent, des prises de parole sur les amendements en prévoyant la faculté, pour le Président, d’autoriser un député à reprendre la parole à la suite de l’avis exprimé par la commission saisie au fond et le Gouvernement.

Prévu par le Règlement de l’Assemblée nationale dès 1959, ce droit a été encadré une première fois par la résolution du 27 mai 2009 précitée de manière à le limiter à un seul orateur en cas d’avis convergents de la Commission et du Gouvernement.

Or, dans la pratique, la parole est systématiquement donnée à au moins deux orateurs, dont un d’opinion contraire. Par conséquent, comme le souligne l’exposé sommaire de la proposition de résolution, « la rédaction actuelle du Règlement ne favorise pas lapplication, par la présidence de séance, dune règle claire concernant les prises de parole sur les amendements. »

Il est donc proposé d’une part, de supprimer cette disposition de l’article 56, qui fait doublon avec des dispositions semblables prévues à l’article 100 du Règlement, et d’autre part, de conforter la pratique actuelle en l’inscrivant à ce dernier article.

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*     *

Article 13
(art. 58 du Règlement de lAssemblée nationale)
Encadrement du recours aux rappels au Règlement
et aux suspensions de séance

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise à mieux encadrer le recours aux rappels au Règlement et aux demandes de suspension de séance pour prévenir l’usage de ces instruments à la seule fin de ralentir les débats.

       Dernières modifications intervenues

L’article 39 de la résolution n° 292 du 27 mai 2009 a modifié l’article 58 du Règlement de manière à ramener de cinq à deux minutes la durée des interventions au titre des rappels au Règlement ou des demandes de suspension de séance.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement de coordination et un amendement rédactionnel.

I.   Le droit en vigueur

1.   Les règles encadrant les demandes de rappel au Règlement

Les demandes de rappel au Règlement, qu’elles soient motivées par des « faits personnels » ou par des événements liés au déroulement de la séance, ont priorité sur la question principale et conduisent, par conséquent, à suspendre la discussion. La parole est alors accordée, pour deux minutes, au député qui l’a demandée soit sur-le-champ, soit, si un orateur a la parole, à la fin de son intervention.

L’article 58, qui prévoit cette disposition, comporte toutefois plusieurs tempéraments destinés à éviter que les rappels au Règlement ne soient détournés de leur objet principal, à savoir l’évocation de la règle supposée affectée.

Si l’intervention de l’orateur est manifestement sans rapport avec le Règlement, un fait personnel ou le déroulement de la séance, ou si elle tend à remettre en question l’ordre du jour, le Président lui retire la parole.

Il est avéré, en effet, que, « dans la pratique, les rappels au Règlement sont souvent utilisés pour évoquer un événement sans lien évident avec la discussion en cours ou pour retarder une discussion. Ils peuvent alors sapparenter à une tentative dobstruction. Il sagit dun droit des députés que les Présidents doivent gérer avec doigté. » ([68])

Les cinq textes ayant fait l’objet du plus grand nombre de rappels au Règlement au cours des XIVe et XVe législatures

Législature

Texte

Niveau de lecture

Nombre de rappels au règlement

XIVe

Projet de loi de finances rectificative pour 2012

1re

52

Projet de loi ouverture du mariage aux couples de même sexe

1re

274

Sécurisation de lemploi

1re

51

Projet de loi ouverture du mariage aux couples de même sexe

2e

53

Projet de loi avenir et justice du système de retraites

1re

46

XVe

Projet de loi immigration maîtrisée et droit dasile effectif

1re

71

Projet de loi équilibre secteur agricole et alimentaire

1re

36

Projet de loi évolution du logement, aménagement et numérique

1re

84

Projet de loi constitutionnelle démocratie plus représentative, responsable et efficace

1re

321

 

Projet de loi programmation et réforme de la justice

1re

113

Source : service de la Séance.

2.   Les demandes de suspension de la séance publique

Les demandes de suspension de séance sont, quant à elles, soumises à la décision de l’Assemblée sauf quand elles sont formulées par le Gouvernement, par le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond ou, personnellement et pour une réunion de groupe, par le président d’un groupe ou son délégué.

Or, les demandes de suspension de séance ont fortement augmenté au cours des dernières années. Le groupe de travail sur la procédure législative a établi que : « 47 heures et 30 minutes de séance ont ainsi été ʺ perdues ʺ depuis le début de la session ordinaire, soit 5 % du temps de séance. Si ce chiffre prend en compte les suspensions à lissue des questions au Gouvernement (13 h 20), un usage excessif peut être fait de cette faculté, qui est de droit à la demande dun président de groupe ou de son délégué, par exemple afin de ralentir un débat pour des motifs tactiques. Les suspensions sont aussi parfois la résultante de limpréparation des discussions, par exemple lorsque le Gouvernement ou la commission en fait usage pour rédiger et déposer un amendement ou un sous-amendement. » ([69])

les cinq textes ayant fait l’objet du plus grand nombre de demandes de suspension de séance sous la XVe législature

Législature

Texte

Niveau de lecture

Suspensions de séance

XVe

Projet de loi de finances pour 2018 (1re partie)

1re

23

Projet de loi de finances 2018 (2e partie)

1re

29

Projet de loi équilibre secteur agricole et alimentaire

1re

31

Projet de loi évolution du logement, aménagement et numérique

1re

27

Projet de loi constitutionnelle démocratie plus représentative, responsable et efficace

1re

24

Projet de loi de finances pour 2019 (2e partie)

1re

29

Source : service de la Séance.

II.   La réforme proposée

1.   L’encadrement des rappels au Règlement

Le présent article propose de mieux encadrer les rappels au Règlement afin d’éviter que le droit reconnu aux députés d’en faire usage à tout moment ne soit utilisé aux fins de ralentir les débats.

Il supprime, pour cela, à l’article 58 du Règlement, la possibilité de motiver ce rappel par « le déroulement de la séance », qui constitue une justification peu contraignante. En parallèle, un nouvel alinéa est inséré pour obliger désormais le député sollicitant la parole à se fonder explicitement sur la disposition du Règlement dont la méconnaissance supposée motive son intervention.

Par ailleurs, si l’objet du rappel au Règlement est identique à celui d’un précédent rappel, le Président pourra retirer la parole au député qui l’a sollicitée.

Enfin, le Président pourra refuser les prises de parole lorsque plusieurs demandes de rappels au Règlement, émanant de députés d’un même groupe, ont manifestement pour objet de remettre en cause l’ordre du jour.

Ces aménagements ne sauraient toutefois faire obstacle, comme le Conseil constitutionnel a eu l’occasion de l’établir, à ce qu’un député puisse invoquer une disposition du Règlement permettant de faire application de dispositions constitutionnelles. Il en va ainsi, par exemple, des dispositions relatives à la recevabilité financière d’un amendement ou d’une proposition de loi. ([70])

2.   La limitation des suspensions de séance

De manière à éviter, dans le même esprit, le recours aux suspensions de séance aux seules fins d’obstruction, le présent article limite à deux le nombre de suspensions pouvant être accordées à un président de groupe ou à son délégué par séance au cours de l’examen d’un même texte. Le Président pourra toutefois décider de déroger à cette limitation.

Ainsi, à l’occasion de l’examen d’un texte se déroulant au cours de deux séances prévues le matin et l’après-midi, un même groupe pourrait disposer de quatre suspensions, ce qui semble suffisant pour assurer sa participation avisée aux débats.

La Commission a adopté un amendement de coordination et un amendement rédactionnel.

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*     *

Article 13 bis
(art. 65-1 du Règlement de lAssemblée nationale)
Organisation des votes solennels

Introduit par la Commission

À l’initiative de votre rapporteur, la Commission a adopté un amendement, soutenu par l’ensemble des groupes, visant à introduire dans le Règlement la possibilité pour la Conférence des Présidents de dissocier les explications de vote de la tenue d’un vote par scrutin public sur l’ensemble d’un texte.

Par conséquent, les explications de vote pourront avoir lieu à l’issue de l’examen des articles du texte en discussion, tandis que seul le vote par scrutin public sera reporté à une date ultérieure qui permette la présence du plus grand nombre de députés, par exemple à la suite de la séance hebdomadaire réservée aux questions au Gouvernement.

Cette initiative fait suite à la décision de la Conférence des Présidents, le 14 mai dernier, d’appliquer cette procédure à certains textes. À cette occasion, il a été rappelé que, dans ce cas, les délégations de vote seront admises selon les mêmes règles que celles qui prévalent aujourd’hui pour les votes solennels. Une première expérimentation a d’ailleurs eu lieu le mardi 21 mai, après les questions au Gouvernement, à l’occasion du vote, en nouvelle lecture, de la proposition de loi portant création d’une Agence nationale de la cohésion des territoires.

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Article 14
(art. 80-1 du Règlement de lAssemblée nationale)
Définition du conflit dintérêts

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet de préciser les conditions dans lesquelles les députés exercent leur mandat et de modifier la définition du conflit d’intérêts figurant dans le Règlement.

       Dernières modifications intervenues

Relatif à l’élaboration et à la mise en œuvre du code de déontologie, l’article 80-1 du Règlement n’a pas été modifié depuis son introduction par la résolution n° 437 du 28 novembre 2014.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

I.   Le droit en vigueur

L’Assemblée nationale s’est dotée, en 2011, par une décision de son Bureau ([71]) prise à l’unanimité, d’un code de déontologie, d’un déontologue et de nouvelles obligations déclaratives, avant d’inscrire, en 2014, les règles de déontologie dans le Règlement.

En application du premier alinéa de l’article 80-1 du Règlement, il revient au Bureau de l’Assemblée d’établir un code de déontologie définissant les obligations déontologiques s’imposant aux députés. Ce code détermine notamment les règles en matière de prévention et de traitement des conflits d’intérêts, entendus comme « toute situation dinterférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés de nature à influencer ou paraître influencer lexercice indépendant, impartial et objectif du mandat » ([72]).

L’Assemblée nationale a en effet fait le choix d’une définition du conflit d’intérêts identique à celle qui s’applique aux responsables publics ([73]), qui se caractérise également par une proximité avec celle retenue dans le code pénal pour l’incrimination de prise illégale d’intérêt ([74]). Au contraire, le Sénat a exclu de ses règles déontologiques l’objectif de prévention d’un conflit entre intérêts publics.

S’inspirant de nombreux exemples étrangers ([75]), le code de déontologie des députés définit une série de principes qui doivent guider le comportement des membres de l’Assemblée nationale (respect de l’intérêt général, indépendance, objectivité, responsabilité, probité et exemplarité) avant de fixer leurs obligations déclaratives en matière de dons et d’avantages, de voyages à l’invitation de tiers et d’utilisation de l’indemnité représentative de frais de mandat ainsi que les règles de saisine du déontologue (cf. annexe n° 2°).

Conformément à l’alinéa 2 du même article, le Bureau veille au respect de ce code de déontologie et en contrôle la mise en œuvre. Il nomme à cet effet un déontologue.

Contrairement au Sénat qui s’est doté d’un comité de déontologie parlementaire, composé exclusivement de sénateurs et disposant d’attributions consultatives, et dont les modalités de fonctionnement sont régies par l’Instruction générale du Bureau, l’Assemblée nationale a fait le choix de solliciter une personnalité extérieure pour veiller à la prévention des conflits d’intérêts. Depuis 2017, Mme Agnès Roblot-Troizier exerce ces fonctions ([76]).

II.   la rÉforme proposÉe

Outre la reprise des dispositions relatives aux compétences du Bureau de l’Assemblée en matière d’élaboration et de contrôle de la mise en œuvre du code de déontologie – dont il est précisé qu’il définit « les principes qui doivent guider leurs actions dans lexercice de leur mandat » – le présent article propose de :

– préciser les conditions dans lesquelles les députés exercent leur mandat ;

– modifier la définition du conflit d’intérêts.

1.   Lexercice du mandat de député

Reprenant une proposition formulée par Mme Agnès Roblot-Troizier, l’alinéa 1er de l’article 14 pose le principe selon lequel « les députés exercent leur mandat au profit du seul intérêt général et en toute indépendance ».

Il s’agit ainsi de confirmer deux des principaux caractères du mandat parlementaire – général et indépendant –, qui sont étroitement liés au principe posé à l’alinéa 1er de l’article 27 de la Constitution selon lequel « tout mandat impératif est nul ».

En vertu de ce principe, l’élection n’établit pas de relation de type contractuel entre les électeurs d’une circonscription et leur élu ([77]). Le parlementaire se détermine librement dans l’exercice de son mandat. En particulier, il n’est juridiquement pas lié par les engagements qu’il aurait pu prendre avant son élection, ni par les manifestations de volonté de ses électeurs en cours de mandat.

Cette nouvelle disposition fait écho aux articles 1er et 2 du code de déontologie selon lesquels « les députés doivent agir dans le seul intérêt de la Nation et des citoyens quils représentent, à lexclusion de toute satisfaction dun intérêt privé ou de lobtention dun bénéfice financier ou matériel pour eux-mêmes ou leurs proches » et « en aucun cas, les députés ne doivent se trouver dans une situation de dépendance à légard dune personne morale ou physique qui pourrait les détourner du respect de leurs devoirs tels quénoncés dans le présent code ».

Elle complète utilement l’interdiction, posée à l’alinéa 1er de l’article 23 du Règlement, de la constitution, au sein de l’Assemblée, de groupes tendant à la défense d’intérêts particuliers, locaux ou professionnels et « entraînant pour leurs membres lacceptation dun mandat impératif ».

L’alinéa 2 de l’article 14 énonce par ailleurs que les députés veillent à prévenir ou à faire cesser immédiatement toute situation de conflits d’intérêts dans laquelle ils se trouvent ou pourraient se trouver, après consultation, le cas échéant, du déontologue.

2.   La définition du conflit dintérêts

L’alinéa 3 de l’article 14 définit le conflit d’intérêts « comme toute situation dinterférence entre un intérêt public et des intérêts privés de nature à influencer ou paraître influencer lexercice indépendant, impartial et objectif du mandat ». Il précise qu’« il ny a pas de conflit dintérêts lorsque le député tire un avantage du seul fait dappartenir à la population dans son ensemble ou à une large catégorie de personnes ».

Cette nouvelle définition du conflit d’intérêts, qui supprime la mention d’une interférence entre des intérêts publics, transcrit dans le Règlement la définition posée par l’article 3 de la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique à l’alinéa 1er de l’article 4 quater de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires.

En 2017, en effet, le choix a été fait de s’inspirer de la définition retenue par le Sénat, plus proche également de celle donnée par le Bureau en 2011 mais plus restrictive que celle adoptée par l’Assemblée en 2014 et que celle figurant à l’article 25 bis de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, laquelle se réfère bien aux situations d’interférence y compris entre des intérêts publics.

Le Gouvernement avait justifié ce choix, lors du dépôt du projet de loi pour la confiance dans la vie politique en juin 2017, par le fait que les parlementaires, « bien que représentants de lensemble de la Nation, nen restent pas moins élus dans une circonscription territoriale. Certains dentre eux sont également titulaires dun mandat local. Dans ces conditions, [opter pour] une définition en termes dinterférence entre lintérêt public, dont ils sont garants en tant quinvestis dun mandat parlementaire national, et un autre intérêt public, pourrait conduire, par exemple, un parlementaire à devoir sabstenir systématiquement lorsque serait en débat (...) un projet dont il aurait par ailleurs à connaître dans sa circonscription ou au titre de son mandat local » ([78]).

Au cours des débats la ministre de la Justice avait argumenté en ce sens en faisant notamment valoir : « Il nous semble que lexercice de leur mandat par les parlementaires relève dune logique assez différente, ce qua relevé, dans son avis, le Conseil dÉtat, indiquant que « ce choix paraît […] justifié par le souci de ne pas mettre les parlementaires exerçant d’autres responsabilités, notamment électives, les conduisant à détenir un intérêt public, par exemple local, dans l’impossibilité récurrente de participer aux travaux du Parlement » ([79]).

La nouvelle définition avait finalement été approuvée par l’Assemblée nationale contre l’avis de la commission des Lois qui s’était prononcée pour le maintien d’une définition large.

Mme Agnès Roblot-Troizier, qui a recommandé cette restriction du champ du conflit d’intérêts cette fois dans le Règlement de l’Assemblée nationale, fait valoir, dans son rapport annuel remis en janvier 2019, que sa portée doit « être relativisée au regard, dune part, de lentrée en vigueur de linterdiction du cumul des fonctions exécutives locales et des fonctions dérivées des mandats locaux avec le mandat parlementaire et, dautre part, de la suppression de la « réserve parlementaire ».

De fait, la définition apparaît plus conforme aux règles et principes déontologiques tels qu’ils sont appréhendés par le code de déontologie, dont l’article 1er dispose que les députés doivent agir dans le seul intérêt de la Nation et des citoyens qu’ils représentent, à l’exclusion de toute satisfaction d’un intérêt privé ou de l’obtention d’un bénéfice financier ou matériel pour eux-mêmes ou leurs proches. Son article 5 prévoit que les députés ont le devoir de faire connaître tout intérêt personnel qui pourrait interférer dans leur action publique et prendre toute disposition pour résoudre un tel conflit d’intérêts au profit du seul intérêt général.

L’alinéa 3 de l’article 14 précise par ailleurs qu’il n’y a pas de conflit d’intérêts lorsque le député tire un avantage du seul fait d’appartenir à la population dans son ensemble ou à une large catégorie de personnes. On observera que cette précision reprend les termes du code de conduite du Parlement européen, qui après avoir déterminé qu’« un conflit dintérêts existe lorsquun député au Parlement européen a un intérêt personnel qui pourrait influencer indûment lexercice de ses fonctions en tant que député » ajoute qu’« il ny a pas de conflit dintérêts lorsque le député tire un avantage du seul fait dappartenir à la population dans son ensemble ou à une large catégorie de personnes ».

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*     *

Article 15
(art. 80-1-1 [nouveau] du Règlement de lAssemblée nationale)
Prévention des conflits dintérêts

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article crée un article 80-1-1 dans le Règlement afin de prévenir les risques de conflit d’intérêts en introduisant plusieurs modalités de gestion de ces conflits : la déclaration d’intérêt, le déport et la faculté de s’abstenir d’exercer une fonction au sein de l’Assemblée susceptible de placer l’intéressé en situation de conflit d’intérêts.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

I.   Le droit en vigueur

Peu explicites, les règles relatives à la prévention des conflits d’intérêts figurent actuellement non dans le Règlement mais dans le code de déontologie, dont l’article 5, relatif à la probité, énonce que « les députés ont le devoir de faire connaître tout intérêt personnel qui pourrait interférer dans leur action publique et prendre toute disposition pour résoudre un tel conflit dintérêts au profit du seul intérêt général ».

Dans la pratique, le recours à des modalités de résolution des conflits d’intérêts, comme la déclaration orale d’intérêts ou le déport ([80]), demeure rare. Ainsi, par exemple, depuis le début de la XVe législature, une seule décision d’abstention d’un député a été portée à la connaissance du service de la Séance.

Dans sa rédaction issue de la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, l’article 4 quater de l’ordonnance du 17 novembre 1958 a cependant posé l’obligation, pour les parlementaires, de mettre fin ou d’éviter de se placer dans une situation de conflit d’intérêts et a invité les assemblées à formaliser les modalités de résolution des conflits d’intérêts.

ARTICLE 4 QUATER DE LORDONNANCE DU 17 NOVEMBRE 1958
RELATIVE AU FONCTIONNEMENT DES ASSEMBLÉES PARLEMENTAIRES

Chaque assemblée, après consultation de l’organe chargé de la déontologie parlementaire, détermine des règles destinées à prévenir et à faire cesser les conflits d’intérêts entre un intérêt public et des intérêts privés dans lesquels peuvent se trouver des parlementaires.

Elle précise les conditions dans lesquelles chaque député ou sénateur veille à faire cesser immédiatement ou à prévenir les situations de conflit d’intérêts dans lesquelles il se trouve ou pourrait se trouver, après avoir consulté, le cas échéant, l’organe chargé de la déontologie parlementaire à cette fin.

Elle veille à la mise en œuvre de ces règles dans les conditions déterminées par son règlement.

Elle détermine également les modalités de tenue d’un registre public recensant les cas dans lesquels un parlementaire a estimé devoir ne pas participer aux travaux du Parlement en raison d’une situation de conflit d’intérêts telle qu’elle est définie au premier alinéa.

Le registre mentionné à l’avant-dernier alinéa est publié par voie électronique, dans un standard ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé.

II.   la rÉforme proposÉe

Conformément à l’article 4 quater de l’ordonnance du 17 novembre 1958, l’article 15 introduit dans le Règlement un nouvel article 80-1-1 qui prévoit trois modalités de gestion des conflits d’intérêts.

1.   La déclaration écrite ou orale dintérêt

L’article 80-1-1 prévoit, en son alinéa 1er, que si un député estime devoir faire connaître un intérêt privé, il effectue une déclaration écrite ou orale de cet intérêt. En commission ou en séance, cette déclaration d’intérêt est mentionnée au compte rendu et, si elle est orale, elle n’est pas décomptée du temps d’intervention du député.

Distincte de la déclaration d’intérêts et d’activités qui doit être adressée par chaque député, en début de mandat, au Président de la HATVP ([81]), cette déclaration doit permettre de rappeler, lorsque cela s’avère nécessaire, l’existence d’une activité exercée en parallèle ou antérieurement ou d’un intérêt personnel en lien avec la question traitée.

Comme le souligne Mme Agnès Roblot-Troizier dans son rapport annuel présenté en janvier 2019, « en recourant à une transparence renforcée, le député peut ainsi faire valoir une expérience particulière, susceptible dapporter un éclairage sur certains aspects de la question en discussion, tout en se prémunissant contre tout soupçon davoir cherché à cacher ses intérêts. Pleinement informé, lensemble des députés peut alors décider en connaissance de cause ».

Lors de l’adoption de sa résolution relative aux obligations déontologiques et à la prévention des conflits d’intérêts des sénateurs le 6 juin 2018, le Sénat a également introduit dans son Règlement le mécanisme de la déclaration d’intérêt, qui figurait auparavant dans le guide de bonnes pratiques annexé à l’instruction générale de son Bureau. Il en a toutefois conditionné l’exercice au fait que le sénateur n’est pas dans une situation de conflit d’intérêts et a privilégié le seul caractère oral de cette déclaration.

2.   Le déport

a.   La faculté de se déporter

L’alinéa 2 de l’article 80-1-1 prévoit la faculté, pour un député qui considère être en situation de conflit d’intérêts, de ne pas participer aux travaux de l’Assemblée. Il en informe alors le Bureau.

La proposition de résolution reprend ainsi la définition du déport telle qu’elle résulte de la loi du 15 septembre 2017.

Les « travaux de l’Assemblée » ici visés peuvent concerner bien évidemment la participation, « en commission ou en séance publique, aux délibérations ou aux votes », comme l’a souligné le Conseil constitutionnel ([82]), mais également, par exemple, l’association aux travaux d’une délégation ou aux délibérations du Bureau.

L’exigence de déport relève de la libre appréciation de chaque député, en conscience, et ne concerne que le cas où un intérêt privé pourrait le placer en situation de conflit d’intérêts. Le déport ne doit pas être interprété comme conduisant à un contrôle extérieur du comportement de chaque député ou interdisant de participer aux travaux sur un sujet dont le député est familier, par exemple en raison de sa profession.

L’exigence de déport n’a en outre « ni pour objet ni pour effet de contraindre un parlementaire à ne pas participer aux travaux du Parlement » ([83]).

Le déport peut prendre plusieurs formes : l’absence pure et simple lors des débats, l’absence de prise de parole lors des débats ou encore l’absence de vote.

Il convient enfin de souligner que les articles 6 et 41 de la présente résolution prévoient qu’un député qui se déporte sera considéré comme présent, en commission comme en séance.

b.   Le registre public des déports

L’alinéa 3 de l’article 80-1-1 prévoit qu’un registre public, tenu sous la responsabilité du Bureau, recense les cas dans lesquels un député a estimé devoir se déporter.

À cet égard, il convient de souligner qu’un certain degré de souplesse semble être offert par le Conseil constitutionnel aux assemblées dans la tenue du registre public. Le Conseil a en effet précisé que ce registre recensera les cas de déport « à lissue des débats ».

Il reviendra au Bureau de mettre en place le registre des déports qui, conformément au dernier alinéa de l’article 4 quater de l’ordonnance du 17 novembre 1958, devra être publié par voie électronique, dans un standard ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé.

À la suite de l’adoption de sa résolution relative aux obligations déontologiques et à la prévention des conflits d’intérêts en 2018, le Sénat a d’ores et déjà mis en place, sur son site Internet :

– un formulaire de déclaration de déport de certains travaux du Sénat, qui précise qu’« un sénateur est libre de définir les travaux auxquels il ne souhaite pas prendre part en déterminant ces travaux par référence à un texte, à une subdivision de texte ou à un secteur dactivité. Il fixe ce déport pour la durée quil souhaite, sachant quil est libre, à tout moment, de déclarer y mettre fin ». Cette déclaration, adressée au Bureau, est rendue publique sur le site Internet du Sénat ;

– un registre des déports, qui ne recense, à ce jour, aucune déclaration.

3.   La faculté de sabstenir dexercer une fonction susceptible de placer lintéressé en situation de conflit dintérêts.

L’alinéa 4 de l’article 80-1-1 prévoit que, si un député estime que l’exercice d’une fonction au sein de l’Assemblée est susceptible de le placer en situation de conflit d’intérêts, il s’abstient de la solliciter ou de l’accepter.

Sont spécialement visées les fonctions de rapporteur d’un projet ou d’une proposition de loi.

Le Sénat a introduit une disposition similaire à l’article 91 ter de son Règlement, reprenant ainsi une règle posée dans le guide de bonnes pratiques annexé à l’instruction générale de son Bureau.

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Article 15 bis
(art. 80-1-2 [nouveau] du Règlement de lAssemblée nationale)
Obligations déclaratives relatives aux dons et invitations

Introduit par la Commission

Dans le prolongement des propositions faites par la déontologue dans son rapport de janvier 2019, la Commission a adopté, à l’initiative de votre rapporteur, un amendement qui a pour objet d’inscrire, au sein d’un nouvel article 80-1-2 du Règlement, les obligations déclaratives des députés relatives aux dons, avantages et voyages à l’invitation de tiers et de prévoir les modalités de leur publicité. La possibilité de consigner ces dons est également prévue.

Il s’agit de faire figurer dans le Règlement, et non plus seulement dans le code de déontologie, le principe de ces obligations déclaratives, la définition de leurs modalités précises relevant toujours du code de déontologie.

Ainsi, les députés doivent déclarer au déontologue :

– dans un délai d’un mois suivant sa réception, tout don, invitation à un événement sportif ou culturel ou avantage d’une valeur excédant un montant déterminé par le Bureau, dont ils ont bénéficié en lien avec leur mandat ;

– toute acceptation d’une invitation de voyage émanant d’une personne morale ou physique, dont ils ont bénéficié à raison de leur mandat. La déclaration, effectuée préalablement au voyage, doit être accompagnée d’éléments précisant le programme du voyage et ses modalités.

Il reviendra au Bureau de définir les conditions dans lesquelles ces déclarations seront rendues publiques.

Un tel dispositif déclaratif existe déjà au Sénat depuis la résolution du 6 juin 2018, avec toutefois quelques différences : les déclarations se font auprès du Bureau et les cadeaux d’usage et les invitations à des manifestations culturelles ou sportives ne sont pas soumises à une obligation déclarative.

La possibilité pour les députés de consigner les dons qu’ils ont reçus auprès du déontologue est par ailleurs inscrite dans le Règlement. Il revient au Bureau de déterminer leur affectation.

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Article 16
(art. 80-2 du Règlement de lAssemblée nationale)
Statut du déontologue

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article rappelle les obligations auxquelles est assujetti le déontologue ainsi que le cadre dans lequel s’exerce son droit de communication.

       Dernières modifications intervenues

Relatif à la désignation du déontologue et à la durée de ses fonctions, l’article 80-2 n’a pas été modifié depuis son introduction dans le Règlement par la résolution n° 437 du 28 novembre 2014.

       Modifications apportées par la Commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a décorrélé le mandat du déontologue de la durée de la législature.

I.   Le droit en vigueur

L’article 80-2 du Règlement prévoit que le déontologue de l’Assemblée nationale est une personnalité indépendante nommée par le Bureau, à la majorité des trois cinquièmes de ses membres, sur proposition du Président et avec l’accord d’au moins un président d’un groupe d’opposition.

Le déontologue exerce ses fonctions pour la durée de la législature et son mandat n’est pas renouvelable. Il ne peut en être démis qu’en cas d’incapacité ou de manquement à ses obligations, sur décision du Bureau prise à la majorité des trois cinquièmes de ses membres, sur proposition du Président et avec l’accord d’au moins un président d’un groupe d’opposition.

II.   la rÉforme proposÉe

L’article 16 complète l’article 80-2 du Règlement afin de rappeler le cadre dans lequel s’exerce le droit de communication du déontologue ainsi que les obligations auxquelles il est soumis.

Il est ainsi tout d’abord énoncé que le Bureau définit les conditions dans lesquelles le déontologue peut demander communication, aux députés, d’un document nécessaire à l’exercice de ses missions. Cette disposition vise à inscrire dans le Règlement l’article 4 septies de l’ordonnance du 17 novembre 1958 tel qu’il a été créé par la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique.

Il est ensuite fait mention de deux obligations qui s’appliquent au déontologue dans l’exercice de sa mission :

– la transmission à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique d’une déclaration de patrimoine et d’une déclaration d’intérêts le concernant. Il s’agit de la transcription de la règle posée par le 5 bis du I de l’article 11 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique ([84]) ;

– le secret professionnel, auquel le déontologue et les personnes qui l’assistent dans sa mission sont tenus et en vertu duquel ils ne peuvent faire état d’aucune information recueillie dans l’exercice de leurs fonctions. Issue de l’alinéa 3 de l’article 80-3, cette exigence contraint le déontologue au silence, tant lorsqu’il est interrogé par un député souhaitant savoir s’il s’est saisi d’une question qui ne le concerne pas personnellement que lorsqu’il est sollicité par des citoyens, des associations ou des journalistes.

III.   Les modifications apportÉes par la commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a adopté un amendement qui poursuit un double objet :

– décorréler la durée du mandat du déontologue de celle de la législature, en reportant de six mois le début et la fin de ses fonctions. Il s’agit d’éviter la concomitance d’un pic d’activité en début de législature avec la prise de ses fonctions par le déontologue ;

– transférer, en lien avec l’amendement adopté par la Commission à l’article 18, les dispositions relatives au droit de communication du déontologue.

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Article 17
(art. 80-3 du Règlement de lAssemblée nationale)
Missions du déontologue

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet d’étendre les missions du déontologue.

       Dernières modifications intervenues

L’article 80-3 n’a pas été modifié depuis son introduction dans le Règlement par la résolution n° 437 du 28 novembre 2014.

       Modifications apportées par la Commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a prévu la publicité de certains avis du déontologue.

I.   Le droit en vigueur

Relatif aux compétences du déontologue, l’article 80-3 du Règlement prévoit que :

– le Bureau consulte le déontologue pour la détermination des règles du code de déontologie en matière de prévention et de traitement des conflits d’intérêts (alinéa 1er) ;

– le déontologue peut être saisi par tout député qui souhaite, pour son cas personnel, le consulter sur le respect des règles définies dans le code de déontologie. Les demandes de consultation et les avis donnés sont confidentiels et ne peuvent être rendus publics que par le député concerné (alinéa 2) ;

– le déontologue et les personnes qui l’assistent dans sa mission sont tenus au secret professionnel et ne peuvent faire état d’aucune information recueillie dans l’exercice de leurs fonctions (alinéa 3) ;

– le déontologue remet au Président et au Bureau un rapport annuel dans lequel il présente des propositions aux fins d’améliorer le respect des règles définies dans le code de déontologie et rend compte des conditions générales d’application de ces règles sans faire état d’éléments relatifs à un cas personnel. Ce rapport est rendu public (alinéa 4).

II.   la rÉforme proposÉe

L’article 17 propose de modifier l’article 80-3 du Règlement afin de préciser les compétences du déontologue.

À cet effet, il étend tout d’abord le champ de sa mission de consultation, aujourd’hui restreint aux règles du code de déontologie, à l’ensemble des règles destinées à prévenir et à faire cesser les conflits d’intérêts, conformément à l’article 4 quater de l’ordonnance du 17 novembre 1958 tel qu’issu de l’article 3 de la loi pour la confiance dans la vie politique, ainsi qu’au code de conduite applicable aux représentants d’intérêts.

Il prévoit ensuite, conformément à l’article 4 sexies de l’ordonnance du 17 novembre 1958 tel qu’issu de l’article 20 de la loi pour la confiance dans la vie politique, que le déontologue est consulté sur le régime de prise en charge des frais de mandat ainsi que sur la liste des frais éligibles et qu’il est chargé du contrôle de l’utilisation de ces frais de mandat.

En effet, la suppression, par l’article 20 de la loi précitée, de l’indemnité représentative de frais de mandat (IRFM) des parlementaires s’est accompagnée de la mise en place d’un nouveau régime de prise en charge des frais de mandat fondé sur le principe d’un défraiement des députés « sous la forme dune prise en charge directe, dun remboursement sur présentation de justificatifs ou du versement dune avance par lassemblée dont ils sont membres, dans la limite des plafonds déterminés par le bureau ».

Conformément à l’article 4 sexies de l’ordonnance du 17 novembre 1958, il revient au bureau de l’Assemblée, après consultation du déontologue, de définir le régime de prise en charge des frais de mandat et d’arrêter la liste des frais éligibles. Le Bureau détermine également les modalités selon lesquelles le déontologue contrôle que les dépenses donnant lieu aux prises en charge directe, remboursements et avances correspondent à des frais de mandat.

L’article 17 supprime enfin l’alinéa 2 de l’article 80-3, relatif aux modalités de consultation, qui est transféré au nouvel article 80-3-1 et l’alinéa 3, relatif au secret professionnel, qui est inscrit à l’article 80-2.

III.   Les modifications apportÉes par la commission

Conformément à une proposition faite par Mme Agnès Roblot-Troizier, la Commission a, à l’initiative du rapporteur, prévu la publicité des avis du déontologue :

– sur les règles destinées à prévenir les conflits d’intérêts, sur le code de déontologie et sur le code de conduite applicable aux représentants d’intérêts ;

– sur le régime de prise en charge des frais de mandat et sur la liste des frais éligibles.

Il reviendra au Bureau de définir les conditions dans lesquelles ces avis seront rendus publics.

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Article 18
(art. 80-3-1 [nouveau] du Règlement de lAssemblée nationale)
Modalités de saisine et dinformation du déontologue

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet de créer un article 80-3-1 dans le Règlement afin de préciser les conditions dans lesquelles le déontologue peut être consulté par les députés ainsi que les modalités d’information du déontologue sur les conditions d’emploi de leurs collaborateurs et sur le respect de leurs obligations fiscales.

       Modifications apportées par la Commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a transféré de l’article 16 à l’article 18 les dispositions relatives au droit de communication du déontologue.

I.   Le droit en vigueur

1.   Modalités de saisine du déontologue et publicité de ses avis

Les modalités de saisine du déontologue sont définies par l’alinéa 2 de l’article 80-3 qui prévoit qu’il peut être saisi par tout député qui souhaite, pour son cas personnel, le consulter sur le respect des règles définies dans le code de déontologie. Les demandes de consultation et les avis donnés sont confidentiels et ne peuvent être rendus publics que par le député concerné.

Il convient à cet égard de souligner qu’à la suite de l’adoption de la loi pour la confiance dans la vie politique du 15 septembre 2017, qui prévoit la faculté, pour tout député, de consulter le déontologue sur un risque de conflit d’intérêts et sur l’éligibilité des dépenses au titre des frais de mandat, Mme Agnès Roblot-Troizier a reçu 178 consultations de députés relatives à un risque de conflit d’intérêts, en nette augmentation par rapport aux législatures précédentes. Le déontologue a également reçu 676 consultations de députés relatives aux frais de mandat, sur la période du 20 juin 2017 au 31 octobre 2018. À ces consultations par des députés se sont ajoutées les consultations à l’initiative de collaborateurs parlementaires, sur les cumuls d’activités et les risques de conflits d’intérêts, qui se sont élevées à 44.

2.   Modalités dinformation du déontologue sur les conditions demploi des collaborateurs parlementaires

Les règles relatives à l’emploi des collaborateurs parlementaires ont été inscrites par l’article 14 de la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique à l’article 8 quater de l’ordonnance du 17 novembre 1958.

Elles concernent, d’une part, l’interdiction faite à un parlementaire d’employer un membre de sa famille, sous peine de sanctions pénales et financières, et, d’autre part, l’obligation d’une déclaration en cas d’emploi d’un membre de la « famille élargie » et d’« emplois croisés » entre les parlementaires.

a.   Linterdiction absolue de recruter un membre de sa famille comme collaborateur parlementaire

Il est interdit à un député d’employer en tant que collaborateur parlementaire :

– son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin ;

– ses parents ou les parents de son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin ;

– ses enfants ou les enfants de son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin.

La violation de cette interdiction emporte la rupture de plein droit du contrat. Cette rupture ne donne lieu à aucune restitution entre les parties.

Le Bureau de l’Assemblée détermine les modalités selon lesquelles le député rembourse les sommes versées en vertu des contrats conclus en violation de cette interdiction.

Le fait, pour un député, d’employer un collaborateur en méconnaissance de cette interdiction est par ailleurs puni d’une peine de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 € d’amende.

b.   Lobligation dinformation en cas demploi dun membre de sa famille élargie ou en cas demplois croisés

Le député informe sans délai le Bureau de l’Assemblée et le déontologue du fait qu’il emploie comme collaborateur :

– son frère ou sa sœur, ou le conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin de celui-ci ou celle-ci ;

– l’enfant de son frère ou de sa sœur, ou le conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin de cet enfant ;

– son ancien conjoint, la personne ayant été liée à lui par un pacte civil de solidarité ou son ancien concubin ;

– l’enfant, le frère ou la sœur de son ancien conjoint, de la personne ayant été liée à lui par un pacte civil de solidarité ou de son ancien concubin ;

– le frère ou la sœur de son conjoint, partenaire lié par un pacte civil de solidarité ou concubin.

Lorsqu’un collaborateur parlementaire a un lien familial avec un autre parlementaire, il en informe sans délai le député dont il est le collaborateur, le Bureau de l’Assemblée et le déontologue.

3.   Transmission dune copie de lattestation fiscale au déontologue

Créé par l’article 4 de la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, l’article L.O. 136-4 du code électoral prévoit que, dans le mois suivant l’entrée en fonction d’un député, l’administration fiscale lui transmet une attestation constatant s’il a satisfait ou non aux obligations de déclaration et de paiement des impôts dont il est redevable.

Lorsque l’attestation fait état d’une non-conformité, le député est invité, dans un délai d’un mois à compter de la réception de cette invitation, à se mettre en conformité ou à contester cette appréciation. Au terme de ce délai, l’administration fiscale transmet l’attestation au Bureau de l’Assemblée nationale et l’informe également, le cas échéant, de l’existence d’une contestation.

Dans le mois suivant une décision administrative ou juridictionnelle devenue définitive faisant état d’un manquement du député à ses obligations, l’administration fiscale lui transmet une nouvelle attestation et l’invite à se mettre en conformité dans un délai d’un mois suivant la réception de cette invitation. Au terme de ce délai, l’administration fiscale transmet l’attestation au Bureau de l’Assemblée nationale.

Toute transmission d’attestation fiscale au député donne lieu à l’envoi d’une copie au déontologue.

Lorsqu’il constate une absence de mise en conformité et de contestation, le Bureau de l’Assemblée saisit le Conseil constitutionnel qui peut, en fonction de la gravité du manquement, déclarer le député inéligible à toutes les élections pour une durée maximale de trois ans et démissionnaire d’office de son mandat par la même décision.

II.   la rÉforme proposÉe

L’article 18 de la proposition de résolution insère un nouvel article 80-3-1 dans le Règlement afin de préciser les modalités d’exercice de ses missions par le déontologue.

S’agissant tout d’abord de la saisine du déontologue par tout député aux fins de consultation sur son cas personnel, l’alinéa 1er du nouvel article 80-3-1 reprend les dispositions de l’actuel alinéa 2 de l’article 80-3, en y ajoutant la possibilité de le consulter sur le respect des règles relatives au traitement et à la prévention des conflits d’intérêts et sur l’éligibilité de certaines dépenses au titre des frais de mandat.

L’alinéa 2 prévoit, comme c’est déjà le cas aujourd’hui, que les demandes de consultation et les avis donnés sont confidentiels et ne peuvent être rendus publics que par le député concerné, tout en apportant la précision selon laquelle ces demandes de consultation et ces avis ne peuvent être « communiqués ou rendus publics » que par le député concerné « dans leur intégralité ». Cette précision constitue « une garantie pour le Déontologue, dont les avis peuvent être utilisés et détournés », selon Mme Agnès Roblot-Troizier ([85]).

Pour ce qui concerne ensuite l’information du déontologue sur les conditions d’emploi des collaborateurs parlementaires, les alinéas 3 et 4 prévoient que le déontologue est informé, sans délai, par le député du fait que ce dernier emploie comme collaborateur parlementaire un membre de sa famille élargie et, dans les mêmes conditions, par le collaborateur parlementaire de son lien de famille avec un autre député que celui qui l’emploie, conformément à l’article 8 quater de l’ordonnance du 17 novembre 1958.

S’agissant enfin de la transmission par le député de l’attestation remise par l’administration fiscale, l’alinéa 5 inscrit dans le Règlement la règle posée par l’article L.O. 13-4 du code électoral selon laquelle le déontologue reçoit copie des attestations adressées par l’administration fiscale aux députés.

III.   Les modifications apportÉes par la commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a transféré de l’article 16 à l’article 18 les dispositions relatives au droit de communication du déontologue.

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Article 19
(art. 80-4 du Règlement de lAssemblée nationale)
Pouvoir dinjonction du déontologue

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet d’inscrire dans le Règlement le pouvoir d’injonction du déontologue.

       Dernières modifications intervenues

L’article 80-4 n’a pas été modifié depuis son introduction dans le Règlement par la résolution n° 437 du 28 novembre 2014.

  Modifications apportées par la Commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a inclus, conformément à la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, dans le champ du pouvoir d’injonction du déontologue, le cas où un député emploierait comme collaborateur une personne qui a un lien de famille avec un autre parlementaire d’une manière qui serait susceptible de constituer un manquement aux règles de déontologie.

I.   Le droit en vigueur

Reprenant, pour partie, les dispositions de l’article 5 de la décision du Bureau du 6 avril 2011, l’article 80-4 du Règlement organise la procédure applicable en cas de manquement par un député à ses obligations déontologiques.

Lorsqu’il constate un manquement aux règles définies dans le code de déontologie, le déontologue en informe le député concerné ainsi que le Président. Il fait au député toutes les recommandations nécessaires pour lui permettre de se conformer à ses obligations. Si le député conteste avoir manqué à ses obligations ou estime ne pas devoir suivre les recommandations du déontologue, celui-ci saisit le Président, qui saisit le Bureau afin que celui-ci statue, dans les deux mois, sur ce manquement (alinéa 1er).

Le Bureau peut entendre le député concerné. Cette audition est de droit à la demande du député (alinéa 2).

Le Bureau, lorsqu’il conclut à l’existence d’un manquement, peut rendre publiques ses conclusions, formuler toute recommandation destinée à faire cesser ce manquement et proposer ou prononcer une peine disciplinaire (alinéa 3).

Conformément à l’article 71 du Règlement, les peines disciplinaires applicables aux membres de l’Assemblée sont :

– le rappel à l’ordre ;

– le rappel à l’ordre avec inscription au procès-verbal ;

– la censure ;

– la censure avec exclusion temporaire.

En vertu de l’article 73 du Règlement, ces sanctions ont des conséquences, pour les députés, en matière financière et de participation aux travaux de l’Assemblée.

Le rappel à l’ordre avec inscription au procès-verbal emporte ainsi de droit la privation, pendant un mois, du quart de l’indemnité parlementaire allouée au député.

La censure simple emporte de droit la privation, pendant un mois, de la moitié de l’indemnité parlementaire allouée au député.

La censure avec exclusion temporaire emporte de droit la privation, pendant deux mois, de la moitié de l’indemnité parlementaire allouée au député. Elle entraîne l’interdiction de prendre part aux travaux de l’Assemblée et de reparaître dans le Palais jusqu’à l’expiration du quinzième jour de séance qui suit celui où la peine a été prononcée. Dans le cas où la censure avec exclusion temporaire est appliquée pour la deuxième fois à un député, l’exclusion s’étend à trente jours de séance.

II.   la rÉforme proposÉe

L’article 19 de la proposition de résolution modifie l’article 80-4 afin d’introduire dans le Règlement le pouvoir d’injonction qui a été reconnu au déontologue par l’article 8 quater de l’ordonnance du 17 novembre 1958 tel que créé par l’article 14 de la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique.

En effet, le IV de l’article 8 quater prévoit que lorsque le déontologue constate, de sa propre initiative ou à la suite d’un signalement, qu’un député emploie comme collaborateur un membre de sa famille élargie ou une personne qui a un lien de famille avec un autre parlementaire, d’une manière qui serait susceptible de constituer un manquement aux règles de déontologie de l’Assemblée, il peut faire usage d’un pouvoir d’injonction pour faire cesser cette situation. Il rend publique cette injonction.

Aussi, l’article 19 prévoit ce pouvoir d’injonction et la publicité de la décision lorsqu’un député emploie comme collaborateur un membre de sa famille élargie d’une manière qui serait susceptible de constituer un manquement aux règles de déontologie de l’Assemblée.

Comme l’a souligné Mme Agnès Roblot-Troizier dans son rapport annuel remis en janvier 2019, « aucun manquement à ce titre na été constaté jusquà présent, les rares défauts de déclarations constatés, liés à une connaissance imparfaite du dispositif en place, ayant pu être aisément résolus par le dialogue ».

L’article 19 précise par ailleurs que le déontologue peut constater un manquement au code de déontologie, « de sa propre initiative ou à la suite dun signalement », afin de mettre le Règlement en conformité avec la pratique.

III.   Les modifications apportÉes par la commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a inclus, conformément à la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, dans le champ du pouvoir d’injonction du déontologue, le cas, non prévu par la proposition de résolution, où un député emploie comme collaborateur une personne qui a un lien de famille avec un autre parlementaire d’une manière qui est susceptible de constituer un manquement aux règles de déontologie de l’Assemblée.

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Article 20
(art. 80-5 du Règlement de lAssemblée nationale)
Respect du code de conduite par les représentants dintérêts

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet d’inscrire dans le Règlement les règles relatives au respect du code de conduite applicable aux représentants d’intérêts issues de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique

       Dernières modifications intervenues

L’article 80-5 n’a pas été modifié depuis son introduction dans le Règlement par la résolution n° 437 du 28 novembre 2014.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

I.   Le droit en vigueur

L’émergence des représentants d’intérêts ou « lobbies » a rendu nécessaire la mise en place d’une réglementation destinée à éviter les abus et à distinguer ce qui relève de l’information des députés de ce qui caractérise des faits de corruption ou de trafic d’influences.

Au-delà des dispositions introduites dans le code pénal, les assemblées ont donc été conduites à définir des obligations déontologiques pour les représentants d’intérêts, dans une logique de responsabilisation et de transparence.

Ainsi, dès 2009, le Bureau de l’Assemblée nationale a adopté des « règles de transparence et déthique applicables à lactivité des représentants dintérêts à lAssemblée nationale » qui, modifiées en 2013, prévoyaient la mise en place d’un registre des représentants d’intérêts, avec une inscription de droit sur le registre pour tout représentant d’intérêts qui remplissait un formulaire détaillé, rendu public sur le site Internet de l’Assemblée nationale. L’inscription sur le registre valait souscription au code de bonne conduite adopté par le Bureau le 26 juin 2013 et complété, en dernier lieu, le 13 juillet 2016 (cf. annexe n° 3).

L’existence du registre public des représentants d’intérêts sous l’autorité du Bureau a été consacrée en 2014 par l’introduction, dans le Règlement, d’un article 80-5 qui prévoyait également que « le Déontologue est habilité à faire toute remarque sur les informations contenues dans le registre ». Ce registre a néanmoins été supprimé au début de la XVe législature au profit du répertoire unique, créé par la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite « loi Sapin 2 ».

Le répertoire unique, sur lequel doivent obligatoirement s’inscrire les représentants d’intérêts, qu’ils agissent au sein de l’exécutif ou au Parlement, est géré par la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Le site de l’Assemblée nationale renvoie par conséquent à celui de la Haute Autorité.

La loi « Sapin II » a introduit par ailleurs un nouvel article 4 quinquies dans l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires qui confirme la compétence du bureau de chaque assemblée pour déterminer les règles applicables aux représentants d’intérêts entrant en communication avec les membres du Parlement, les collaborateurs parlementaires et les personnels de service. Ces règles doivent être rendues publiques.

Cet article prévoit également que le déontologue « sassure du respect de ces règles par les représentants dintérêts » avant de décrire la procédure applicable. Il précise qu’il peut, à cet effet, être saisi par un membre de l’assemblée concerné ou un collaborateur parlementaire ou un agent des services et se faire communiquer toute information ou tout document nécessaire à sa mission.

S’il constate un manquement, il doit saisir le Président de l’Assemblée, qui peut alors adresser au représentant d’intérêts une mise en demeure et la rendre publique, après l’avoir mis en état de présenter ses observations ([86]).

Par ailleurs, si le déontologue constate qu’un député, un collaborateur parlementaire ou un agent des services « a répondu favorablement à une sollicitation effectuée par un représentant dintérêts en méconnaissance des règles arrêtées par le Bureau, il en avise la personne concernée et, sans les rendre publique, lui adresse des observations. »

La déontologue de l’Assemblée a déjà fait usage des nouvelles compétences qui lui ont été attribuées par l’article 4 quinquies de l’ordonnance du 17 novembre 1958. Saisie par une députée puis par le Président de l’Assemblée nationale à l’occasion de la discussion en première lecture du projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire au printemps 2018 ([87]), elle a été conduite à appeler à un renforcement des règles applicables aux représentants d’intérêts.

II.   la rÉforme proposÉe

L’article 20 a pour objet de réécrire l’article 80-5 du Règlement dont les dispositions sont devenues obsolètes à la suite de l’adoption de la loi « Sapin II ».

Conformément à la proposition faite par la déontologue dans son rapport annuel remis en 2019, la nouvelle rédaction proposée inscrit donc dans le Règlement les dispositions de l’article 4 quinquies de l’ordonnance du 17 novembre 1958 sur le fonctionnement des assemblées parlementaires, issues de la loi « Sapin II ».

Ainsi l’alinéa 1er de l’article 80-5 dispose que le déontologue s’assure du respect du code de conduite applicable aux représentants d’intérêts, établi par le Bureau. Il peut, à cet effet, être saisi par un député, un collaborateur du Président, un collaborateur d’un député ou d’un groupe parlementaire ainsi que par un agent fonctionnaire ou contractuel des services de l’Assemblée nationale. Il peut se faire communiquer toute information ou tout document nécessaire à l’exercice de cette mission.

Lorsque le déontologue constate un manquement au code de conduite applicable aux représentants d’intérêts, il saisit le Président. Ce dernier peut adresser au représentant d’intérêts concerné une mise en demeure, qui peut être rendue publique, tendant au respect des obligations auxquelles il est assujetti, après l’avoir mis en état de présenter ses observations (alinéa 2).

Lorsque le déontologue constate qu’un député, un collaborateur du Président, un collaborateur d’un député ou d’un groupe parlementaire ou un agent fonctionnaire ou contractuel des services de l’Assemblée nationale a répondu favorablement à une sollicitation effectuée par un représentant d’intérêts en méconnaissance des dispositions du code de conduite applicable aux représentants d’intérêts, il en avise la personne concernée et, sans les rendre publiques, lui adresse ses observations.

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Article 20 bis
(art. 80-6 [nouveau] du Règlement de lAssemblée nationale)
Dispositif de lutte contre le harcèlement et les discriminations

Introduit par la Commission

Consciente de la nécessité de renforcer les actions contre le harcèlement, la Commission a inscrit dans le Règlement, à l’initiative de votre rapporteur, le principe selon lequel le Bureau définit les conditions de mise en place d’un dispositif de prévention et d’accompagnement en matière de lutte contre toutes les formes de harcèlement et de discrimination.

Comme l’a constaté la déontologue dans son rapport présenté en janvier 2019, le dispositif de prévention et de lutte contre le harcèlement, mis en place en 2013, s’avère insuffisant.

Il repose sur un référent auquel les députés, leurs collaborateurs et les fonctionnaires peuvent s’adresser pour évoquer des situations de harcèlement moral ou sexuel. En outre, depuis 2017, chaque collaborateur reçoit une information sur l’existence de ce dispositif lors de la signature de son contrat de travail et des actions de formation sont menées.

Aussi le Bureau de l’Assemblée a-t-il demandé, le 7 novembre 2018, au groupe de travail sur les conditions de travail à l’Assemblée nationale et le statut des collaborateurs parlementaires d’approfondir la question de la prise en charge des risques psychosociaux et du harcèlement et de faire des propositions d’ici à l’été 2019.

Dans l’attente de ces propositions, la Commission a souhaité inscrire dans le Règlement le dispositif de prévention et d’accompagnement en matière de lutte contre toutes les formes de harcèlement, tout en l’étendant aux questions de discrimination.

ll reviendra au Bureau d’en définir les conditions de mise en œuvre, après la présentation des conclusions du groupe de travail.

Pour sa part, le Sénat a mis en place, sur décision de son Bureau, une cellule d’accueil et d’écoute des victimes de harcèlement en octobre 2018.

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Article 21
(art. 86 du Règlement de lAssemblée nationale)
Allongement du délai entre la mise en ligne du texte adopté par la commission et son examen en séance

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise à allonger de sept à dix jours le délai qui, conformément au Règlement, doit séparer, en principe, la mise en ligne du texte adopté par la commission et son examen en séance publique.

Il prévoit, par ailleurs, que l’avis des commissions saisies pour avis puisse être annexé au rapport de la commission saisie au fond.

       Dernières modifications intervenues

L’article 86 du Règlement a été modifié par l’article 48 de la résolution n° 292 du 27 mai 2009 de manière, notamment, à tirer les conséquences de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2009 qui a inscrit, à l’article 42 de la Constitution, la règle nouvelle selon laquelle, sauf exceptions ([88]), le texte discuté en séance publique est le texte adopté par la commission. Y figurent également, depuis lors, les délais minimaux qui ont été insérés dans la procédure législative (six semaines entre le dépôt du texte et le début de sa discussion ou quatre semaines après sa transmission, sauf engagement de la procédure accélérée).

« Prenant en compte lintroduction de délais dexamen minimaux dans la Constitution et à lexception de quelques cas » ([89]), il a été jugé opportun, à l’époque, de prévoir concomitamment un délai minimal entre la mise à disposition du texte de la commission et son examen en séance publique.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement rédactionnel.

I.   le droit en vigueur

1.   La nécessité de disposer suffisamment en amont du texte de la commission en vue de son examen en séance publique

L’article 86 du Règlement arrête les conditions dans lesquelles les commissions, permanentes ou spéciales, examinent les projets et propositions de loi avant leur examen en séance publique.

Il rappelle notamment, à son premier alinéa, le principe selon lequel « la désignation des rapporteurs ainsi que le dépôt, limpression et la mise à disposition de leurs rapports et des textes adoptés par les commissions doivent intervenir dans un délai tel que lAssemblée nationale soit en mesure de procéder à la discussion des projets et propositions conformément à la Constitution. »

Le texte examiné en séance étant, depuis l’entrée en vigueur de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, celui issu des travaux de la commission saisie au fond, cette règle s’applique à lui au premier chef : sa mise à disposition conditionne l’exercice du droit d’amendement en séance publique.

Un délai minimum de sept jours a donc été fixé, en première lecture, entre la mise à disposition par voie électronique du texte de la commission et le début de son examen en séance publique. Il peut toutefois être dérogé à ce délai en cas d’engagement de la procédure accélérée, lorsque le projet est relatif aux états de crise ainsi que lors de la deuxième lecture et des lectures ultérieures : dans ce cas, le texte est mis à disposition par voie électronique dans les meilleurs délais.

Le respect de ce délai de sept jours doit inciter les commissions, lorsqu’il trouve à s’appliquer, à se réunir, pour examiner les projets ou propositions de loi, deux semaines avant leur inscription en séance publique. Les députés disposent ainsi du texte adopté par la commission, au plus tard, au début de la semaine précédant la séance publique. Cette procédure est au demeurant mise en œuvre par la commission des Lois de façon quasi systématique depuis le début de la XVe législature.

Le fait qu’il ne s’applique pas en cas d’engagement de la procédure accélérée et qu’il ne fasse pas directement écho à une exigence constitutionnelle (à la différence sans doute des « meilleurs délais » qui conditionnent la clarté et la sincérité du débat parlementaire) conduit cependant à en relativiser la portée, qui est plus incitative que prescriptive.

2.   Les rapports publiés par les rapporteurs pour avis

L’article 87 du Règlement prévoit, par ailleurs, la possibilité pour les commissions permanentes de se saisir pour avis de tout ou partie d’un texte examiné au fond par la commission compétente.

Dans ce cas, les avis sont déposés, imprimés et distribués par ces dernières. Si, à défaut d’une telle publication, le rapporteur de la commission saisie pour avis peut donner son avis verbalement le jour fixé pour la discussion du texte en séance, en pratique, la présentation d’un rapport est systématique.

Certaines commissions ont des compétences proches ou complémentaires, ce qui a pu justifier le recours fréquent à la saisine pour avis. ([90]) Dans d’autres cas, c’est le large champ des dispositions présentées au sein d’un même texte qui peut conduire plusieurs commissions à se saisir pour avis, lorsque la constitution d’une commission spéciale n’a pas été retenue. ([91])

nombre de saisines pour avis sur les projets et propositions de loi

Législature

Session

Rapports pour avis déposés (tous niveaux de lecture)

sur projets

sur propositions

Total

XIVe

2011-2012

5

0

5

2012-2013

37

4

41

2013-2014

39

4

43

2014-2015

23

8

31

2015-2016

30

6

36

2016-2017

7

1

8

Total XIVe

141

23

164

XVe

2016-2017

4

0

4

2017-2018

29

2

31

2018-2019

13

5

18

Total XVe

46

7

53

Source : service de la Séance. Les rapports pour avis sur les projets de loi de finances initiales ne sont pas comptabilisés.

II.   la réforme proposée

1.   L’allongement du délai de mise à disposition du texte de la commission avant la séance publique

Le présent article propose de porter le délai minimum en vigueur de sept à dix jours de manière à inciter davantage encore les commissions à examiner les textes qui leur sont renvoyés deux semaines avant la date de leur inscription à l’ordre du jour.

L’objectif est de garantir le temps nécessaire aux députés pour déposer leurs amendements et, le cas échéant, évaluer leurs effets en vue de leur dépôt.

La portée de cet allongement doit cependant être appréciée en tenant compte des limites précédemment exposées. Son respect pourra en outre être malaisé pour certains textes, notamment ceux inscrits à l’ordre du jour des journées réservées.

2.   La transformation des rapports pour avis en annexes au rapport de la commission saisie au fond

Par coordination avec la révision des modalités d’exercice des saisines pour avis, prévue à l’article 22 de la présente résolution, il est proposé de publier les avis des commissions concernées sous la forme d’annexes au rapport de la commission saisie au fond.

La Commission a adopté un amendement rédactionnel.

*

*     *

Article 22
(art. 87 du Règlement de lAssemblée nationale)
Conditions dexercice de la saisine pour avis

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 22 de la proposition de résolution vise à préciser les conditions dans lesquelles le rapporteur pour avis participe à la réunion de la commission saisie au fond. Il supprime, par coordination avec l’article 21, la publication d’un rapport pour avis.

       Dernières modifications intervenues

L’article 87 du Règlement a été modifié par l’article 56 de la résolution n° 292 du 27 mai 2019 de manière à tirer les conséquences de l’examen en séance publique du texte adopté par la commission au fond, tel que prévu par l’article 42 de la Constitution dans sa rédaction issue de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008.

Il a notamment été prévu que la réunion de la commission saisie pour avis précède celle de la commission saisie au fond de manière à permettre l’examen par cette dernière des amendements présentés en son nom par le rapporteur pour avis, qui sont ainsi susceptibles d’être intégrés dans le texte de la commission.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

___

Le présent article a pour objet de préciser les conditions dans lesquelles le rapporteur pour avis peut participer, avec voix consultative, aux travaux de la commission saisie au fond. Il prévoit, à ce titre, qu’il peut présenter oralement l’avis de sa commission, ce qui correspond à la pratique actuelle.

Par coordination avec l’article 21 de la présente résolution qui prévoit la publication de cet avis sous la forme d’une annexe au rapport de la commission saisie au fond, les dispositions prévues à l’article 87 du Règlement, relatives à la publication du rapport pour avis, sont supprimées.

L’objectif poursuivi est d’alléger la procédure de saisine pour avis et d’améliorer la visibilité des travaux réalisés dans ce cadre en les rattachant directement au rapport de la commission saisie au fond.

*

*     *

Article 23
(art. 91 du Règlement de lAssemblée nationale)
Révision de lorganisation de la discussion consacrée
aux orateurs institutionnels, aux orateurs des groupes
et aux motions de procédure

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise à réduire la première phase de la discussion des textes, de portée générale, en prévoyant :

– la suppression du temps de parole alloué aux rapporteurs pour avis ;

– la limitation à dix minutes, au plus, sauf décision contraire de la Conférence des Présidents, de l’intervention du rapporteur de la commission saisie au fond ;

– la limitation à quinze minutes de la défense d’une motion de rejet préalable, au lieu de trente minutes actuellement ;

– la suppression de la possibilité de défendre une motion de renvoi en commission.

       Dernières modifications intervenues

L’article 91 du Règlement a été modifié par la résolution n° 292 du 27 mai 2009 de manière à tirer les conséquences de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, notamment au regard des délais minimaux de six et quatre semaines devant être respectés entre le dépôt ou la transmission d’un texte et le début de son examen en séance publique.

Par ailleurs, le régime des motions de procédure a été modifié : les anciennes « exception d’irrecevabilité » et « question préalable » ont notamment été fusionnées en une motion dite de « rejet préalable » ; la durée de la défense des deux motions restantes a été ramenée à quinze minutes à compter de la deuxième lecture.

La défense de la motion de renvoi en commission, qui intervenait auparavant au terme de la discussion générale, se tient désormais à la suite de l’intervention du Gouvernement et des rapporteurs, comme cela était déjà prévu pour la motion de rejet préalable. Toutefois, la défense des motions est reportée à la fin de la discussion générale lorsqu’elle porte sur des initiatives parlementaires défendues dans le cadre des journées réservées aux groupes d’opposition ou minoritaire en application de l’article 48, alinéa 5 de la Constitution.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

I.   Le droit en vigueur

1.   Organisation de la première phase de la discussion

L’article 91 du Règlement détermine les conditions dans lesquelles se déroule, en séance publique, la première phase de l’examen d’un projet ou d’une proposition de loi, avant l’examen des articles.

L’ouverture du débat, qui ne peut intervenir avant l’expiration d’un délai de six semaines à compter du dépôt d’un texte ou de quatre semaines à compter de sa transmission, conformément à l’article 42 de la Constitution ([92]), s’opère de la façon suivante :

– l’audition du Gouvernement qui, dans le prolongement du premier alinéa de l’article 31 de la Constitution, n’est soumise à aucune durée ([93]) ;

– la présentation, par le rapporteur, du rapport de la commission saisie au fond ([94]) et, le cas échéant, l’audition des rapporteurs pour avis et du député désigné rapporteur pour l’application de la loi ([95]). Le temps de parole attribué à chacun de ces orateurs ne peut excéder une durée fixée par la Conférence des Présidents. À titre d’exemple, si la durée totale de la discussion générale est fixée à 1h30 (ce qui constitue le cas le plus fréquent), le rapporteur de la commission au fond dispose actuellement de 10 minutes et les rapporteurs pour avis de 5 minutes ; au-delà de 2 heures de discussion générale et jusqu’à 3 heures comprises ces durées sont portées respectivement à 15 et 10 minutes, puis à 20 et 10 minutes jusqu’à 4 heures comprises, etc.

– par décision de la Conférence des Présidents, les présidents des commissions pour avis peuvent également intervenir – l’intervention des présidents des commissions au fond étant de droit – ainsi que les représentants des délégations constituées au sein de l’Assemblée, après les rapporteurs, si l’objet du texte en discussion entre dans la compétence de leur délégation. La durée de leur intervention est en pratique la même que celle des rapporteurs pour avis ; ([96]) 

 l’audition éventuelle d’un membre du Conseil économique, social et environnemental conformément à la procédure prévue par l’article 97 du Règlement, les derniers précédents remontant toutefois à la XIIIe législature ;

– la défense des éventuelles motions de procédure déposées sur le texte ;

– enfin, la discussion générale proprement dite avec les interventions des orateurs inscrits, l’auteur ou le premier signataire d’une proposition ayant alors la priorité.

À la suite de la clôture par le Président de séance de la discussion générale, la parole est en pratique redonnée au Gouvernement pour lui permettre de répondre aux différents intervenants. Elle peut également être donnée au rapporteur, avant le Gouvernement, lorsqu’il s’agit d’une proposition de loi.

Le Président annonce, ensuite, l’ouverture de la discussion des articles à examiner.

2.   Les conditions de défense des motions de procédure

Comme cela a été précédemment rappelé, les conditions de la mise en discussion des motions de procédure ont été modifiées par la résolution du 27 mai 2009 de manière à « éviter une excessive théâtralisation de la séance ». ([97])

La limitation de la durée de la défense des motions s’inscrit, il faut le rappeler, dans un mouvement continu. Un premier encadrement a été introduit dans le Règlement par la résolution n° 354 du 29 juin 1999 : la défense de chaque motion est alors fixée à une heure trente en première lecture, trente minutes en deuxième lecture et quinze minutes pour les lectures ultérieures. Dans un deuxième temps, la résolution n° 582 du 7 juin 2006 a ramené cette durée d’une heure trente à trente minutes en première lecture. Enfin, considérant qu’ « il nest pas incohérent de proposer que la durée de défense des motions de procédure soit moindre en deuxième lecture » ([98]), la résolution n° 292 du 27 mai 2009 a réduit, dans un troisième temps, de trente à quinze minutes la défense des motions à ce stade de la navette.

Les règles fixées par l’article 91 du Règlement prévoient ainsi qu’à la suite de l’intervention du Gouvernement et des rapporteurs, une seule motion de rejet préalable, dont l’objet est de faire reconnaître que le texte proposé est contraire à une ou plusieurs dispositions constitutionnelles ou de faire décider qu’il n’y a pas lieu à délibérer, peut être présentée par l’un de ses signataires pour une durée qui ne peut excéder trente minutes, sauf décision contraire de la Conférence des Présidents. Le Gouvernement puis le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond peuvent répondre. Avant le vote, la parole est donnée, pour deux minutes d’explication au lieu de cinq avant la réforme de 2009, à un orateur de chaque groupe.

L’adoption de la motion de rejet préalable entraîne le rejet du texte à l’encontre duquel elle a été soulevée. Si elle est au contraire rejetée, ce dernier peut être mis en discussion.

L’examen de la motion de renvoi en commission s’effectue dans les mêmes conditions. L’effet de l’adoption d’une telle motion est alors de suspendre le débat jusqu’à la présentation par la commission d’un nouveau rapport. Si elle est également rejetée, le passage à la discussion des articles est de droit et la discussion générale reprend avec les interventions des autres orateurs inscrits.

Comme cela a déjà été indiqué, dans le cadre de l’examen des textes inscrits au cours des journées réservées aux groupes d’opposition ou minoritaires, la défense de ces deux motions est, d’une part, limitée à quinze minutes, et d’autre part, renvoyée à la fin de la discussion générale « afin de permettre au moins aux auteurs de la proposition de présenter leur texte, même si lAssemblée décide de ne pas examiner les articles. » ([99])

nombre de motions de renvoi en commission et de motions de rejet préalable discutées en séance publique

 

 

Rejet préalable

Renvoi en commission

Législature

Session

Déposées

Adoptées

Déposées

Adoptées

XIIIe

2008-2009

12

0

5

0

2009-2010

38

0

37

0

2010-2011

61

0

40

0

2011-2012

33

0

21

0

Total XIIIe

144

0

103

0

XIVe

2011-2012

4

0

4

0

2012-2013

51

1

42

4

2013-2014

26

2

28

1

2014-2015

26

4

26

4

2015-2016

27

9

21

2

2016-2017

14

3

7

1

Total XIVe

148

19

128

12

XVe

2016-2017

7

0

7

0

2017-2018

60

8

56

11

2018-2019

42

8

34

5

Total XVe

109

16

97

16

Source : service de la Séance. Toutes les motions adoptées l’ont été lors des niches parlementaires. Pour la XIIIe législature, les chiffres sont donnés à compter de l’entrée en vigueur de la réforme du Règlement de 2009.

II.   La réforme proposée

Le présent article apporte plusieurs modifications à la première phase du débat, avant la discussion générale proprement dite dont l’organisation est par ailleurs également modifiée par l’article 8 de la proposition de résolution.

1.   La suppression du temps de parole des rapporteurs pour avis

Il est proposé, tout d’abord, de supprimer la possibilité pour le rapporteur pour avis de s’exprimer en cette qualité en séance publique parmi les orateurs institutionnels.

Cette disposition s’inscrit dans le prolongement des mesures prévues aux articles 21, 22 et 26, qui tendent à alléger la procédure de saisine pour avis en recentrant, dans ce cadre, le rôle du rapporteur sur les travaux en commission.

L’exposé des motifs de la proposition de résolution précise toutefois que cette réforme ne s’appliquerait qu’aux saisines législatives et non aux saisines pour avis budgétaires qui continueraient de s’exercer selon les règles actuellement en vigueur.

2.   La fixation du temps de parole des rapporteurs au fond

Il est proposé de prévoir, à l’article 91 du Règlement, que le temps de parole du rapporteur de la commission saisie au fond est, par principe, de 10 minutes, la Conférence des Présidents conservant la faculté d’allonger cette durée.

De fait, les durées actuellement prévues sont fonction de la durée de la discussion générale, ce qui n’a plus lieu d’être sur le fondement des dispositions prévues par l’article 8 de la proposition de résolution qui limite les interventions à un orateur par groupe.

3.   Un recours restreint aux motions de procédure

Le présent article propose, par ailleurs, de réduire de trente à quinze minutes la défense de la motion de rejet préalable et de supprimer la possibilité de déposer des motions de renvoi en commission.

Selon l’exposé des motifs, « les motions de procédure sont des occasions dexpressions redondantes, souvent éloignées de leur objectif initial. »

Depuis le début de la législature, à l’exception des motions défendues sur des textes présentés par des groupes d’opposition ou minoritaires, aucune des 166 motions déposées n’a été adoptée. Sous la XIVe législature, les 258 motions examinées ont connu le même sort.

Cette réforme est conforme à la jurisprudence du Conseil constitutionnel, ce dernier ayant considéré en 2006, à l’occasion de la deuxième réduction du temps de défense de ces motions, que le Règlement préservait « la possibilité effective, pour les députés, de contester la conformité à la Constitution des dispositions dun texte ; quenfin, la question préalable et la motion tendant à renvoyer lensemble du texte à la commission saisie au fond ne sont imposées par aucune exigence de valeur constitutionnelle ». ([100])

*

*     *

Article 24
(art. 93 du Règlement de lAssemblée nationale)
Renforcement du contrôle de la recevabilité des amendements au titre de larticle 41 de la Constitution

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet de renforcer le contrôle du respect du domaine de la loi, conformément à l’article 41 de la Constitution.

Il prévoit, en ce sens, la possibilité pour le président de la commission saisie au fond de transmettre au Président de l’Assemblée nationale une liste des propositions ou des amendements déposés en séance publique et dont il estime qu’ils ne relèvent pas du domaine de la loi ou qu’ils sont contraires à une habilitation accordée au Gouvernement sur le fondement de l’article 38 de la Constitution.

       Dernières modifications intervenues

L’article 93 du Règlement, qui prévoit les modalités actuelles de ce contrôle, a été modifié par la résolution n° 292 du 27 mai 2009 de manière à tirer les conséquences de la faculté accordée, par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, aux présidents des deux assemblées, et non plus au seul Gouvernement, de soulever l’irrecevabilité de propositions ou d’amendements qui relèveraient du domaine réglementaire.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

I.   le droit en vigueur

1.   Une irrecevabilité initialement réservée au Gouvernement pour préserver sa compétence exclusive en matière réglementaire

Rompant avec la pratique des régimes parlementaires précédents, le constituant de 1958 a souhaité assurer, d’une part, la séparation du domaine de la loi et du règlement et, d’autre part, doter le Gouvernement des moyens de prévenir d’éventuelles incursions des parlementaires dans son champ de compétence.

Le Gouvernement dispose ainsi de deux procédures auxquelles il peut recourir à cet effet :

– à tout moment de la procédure législative, l’article 41 de la Constitution lui permet de soulever d’office l’irrecevabilité de propositions ou amendements ne relevant pas du domaine de la loi ou contraires à une délégation qui lui serait accordée sur le fondement de son article 38. En cas de désaccord avec le président de l’assemblée concernée sur ce motif d’irrecevabilité ([101]), le Conseil constitutionnel peut être saisi et doit statuer dans un délai de huit jours ;

– une fois la loi promulguée, le Gouvernement peut saisir le Conseil constitutionnel pour obtenir la « délégalisation » d’une disposition adoptée par le Parlement, conformément au second alinéa de l’article 37. Il recouvre alors la faculté de la modifier, voire de l’abroger ([102]).

Le Conseil constitutionnel a, par ailleurs, apporté plusieurs précisions sur la portée de l’article 41.

Il a ainsi confirmé que cette procédure ne concernait que les « amendements déposés par les membres du Parlement » ([103]), ce qui se justifie par son objet même qui vise moins à constater une inconstitutionnalité qu’à prévenir toute intervention des parlementaires dans le domaine réglementaire.

Il en découle deux conséquences : en premier lieu, seul le Gouvernement pouvait, jusqu’à la révision constitutionnelle de 2008, soulever cette irrecevabilité ([104]) et, en second lieu, cette procédure ne pouvait être que facultative.

La portée de ce dispositif a été explicitée par la décision Blocage des prix du 30 juillet 1982 qui conclut, d’ailleurs, que « la Constitution na pas entendu frapper dinconstitutionnalité une disposition de nature réglementaire contenue dans une loi, mais a voulu, à côté du domaine réservé à la loi, reconnaître à lautorité réglementaire un domaine propre et conférer au Gouvernement, par la mise en œuvre de [procédures spécifiques] le pouvoir den assurer la protection contre déventuels empiétements de la loi. » ([105])

Dans la pratique toutefois, peu de différends ont opposé les présidents des assemblées au Gouvernement sur des irrecevabilités soulevées au titre de l’article 41 par ce dernier. On recense, depuis 1958, 45 irrecevabilités de ce type à l’Assemblée nationale et 80 au Sénat. Le Conseil constitutionnel n’a rendu que onze décisions, la dernière en 1979 ([106]).

2.   Une faculté désormais reconnue aux présidents des assemblées pour mieux garantir la qualité de la loi

Le débat sur la dégradation de la qualité de la loi a mis en cause les immixtions du Parlement dans le domaine réglementaire, qui sont accusées d’y contribuer.

Dans ce contexte, le constituant de 2008 a non seulement adapté les règles d’irrecevabilité au contexte nouveau induit par la règle selon laquelle les textes examinés en séance sont ceux qui ont été adoptés par la Commission mais aussi étendu aux présidents des assemblées la faculté de faire respecter le domaine de la loi. L’article 41 de la Constitution a été modifié en ce sens ainsi que l’article 93 du Règlement par la résolution du 27 mai 2009. Celui-ci prévoit désormais que :

 lorsque l’irrecevabilité est opposée par le Gouvernement, le Président de l’Assemblée peut, le cas échéant après avoir consulté le président de la commission des Lois ou un membre de son bureau désigné à cet effet, admettre cette irrecevabilité. Cette décision relevant de sa compétence personnelle, l’examen de la disposition concernée peut être suspendu ou réservé jusqu’à ce qu’il ait statué ;

– lorsque l’irrecevabilité est opposée par le Président de l’Assemblée, le cas échéant après les mêmes consultations, il en informe le Gouvernement. L’examen de l’amendement, de l’article ou du texte peut alors être suspendu ou réservé jusqu’à ce que ce dernier se soit prononcé. ([107])

En cas de désaccord, la discussion est suspendue et le Président de l’Assemblée saisit le Conseil constitutionnel.

Depuis son introduction, cette faculté a été davantage utilisée au Sénat. Cette évolution a été facilitée par une modification, en 2015, de son Instruction générale du Bureau qui prévoit, désormais, une procédure de « ciblage » en vertu de laquelle « la commission saisie au fond adresse au Président du Sénat une liste des propositions ou des amendements qui ne relèvent manifestement pas du domaine de la loi ou qui sont contraires à une délégation accordée en vertu de larticle 38 de la Constitution. » Depuis lors, ce motif d’irrecevabilité a ainsi été prononcé plus de 150 fois.

L’Assemblée nationale, de son côté, a également renforcé ce contrôle, dans un contexte de fort accroissement du nombre d’amendements déposés. Sont systématiquement écartées toutes les dispositions manifestement réglementaires, en particulier lorsque la modification proposée porte sur la partie réglementaire d’un code. Ce contrôle s’effectue en séance mais aussi au stade de la commission : à titre d’exemple, à l’occasion de l’examen du projet de loi de réforme de la justice ([108]), 943 amendements ont été déposés en commission des Lois parmi lesquels 16 ont été déclarés irrecevables du fait de leur caractère réglementaire.

II.   la réforme proposée

Le présent article propose d’adopter une procédure semblable à celle en vigueur au Sénat de manière à rendre plus systématique le contrôle du caractère législatif des amendements débattus dans l’hémicycle.

Il reviendrait ainsi au président de la commission au fond d’adresser au Président de l’Assemblée nationale une liste des propositions ou des amendements déposés en vue de leur examen en séance publique dont il estime qu’ils ne relèvent pas du domaine de la loi ou sont contraires à une habilitation accordée au Gouvernement. Le prononcé d’une irrecevabilité fondée sur l’article 41 de la Constitution demeurerait, bien sûr, l’apanage du Président.

Au stade de la commission, le président de celle-ci resterait seul compétent pour exercer un contrôle de la recevabilité des initiatives parlementaires.

*

*     *

Article 25
(art. 95 du Règlement de lAssemblée nationale)
Intervention des députés sur les articles en séance publique

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 25 de la proposition de résolution vise à limiter les interventions portant sur les articles d’un projet ou d’une proposition de loi à un orateur par groupe et un député n’appartenant à aucun groupe. Il complète, en ce sens, la réforme des prises de parole en séance publique prévue par ses articles 8 et 11.

       Dernières modifications intervenues

L’article 64 de la résolution n° 292 du 27 mai 2019 a réduit la durée des interventions des orateurs sur les articles de cinq à deux minutes.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement rédactionnel.

___

L’article 95 du Règlement prévoit la possibilité pour les commissions et les députés d’intervenir sur les articles d’un texte en discussion ou sur les articles nouveaux proposés par le Gouvernement ou les commissions, ces interventions ne pouvant excéder deux minutes.

La limitation du temps d’intervention des orateurs de cinq à deux minutes par la résolution de 2009 précitée, combinée à la disposition, introduite à l’article 57 du Règlement, prévoyant que la clôture de la discussion d’un article peut être prononcée dès lors que deux orateurs d’avis contraire au moins sont intervenus, devait permettre, selon le rapport de la Commission, d’ « éviter que la discussion sur larticle ne consomme un temps de séance précieux, au détriment de la discussion des amendements sur larticle. »

Or, ces dispositions n’ont pas eu les effets escomptés et les inscriptions sur les articles demeurent, trop souvent, un procédé permettant de ralentir le déroulé des débats, sinon d’y faire obstruction.

S’inscrivant dans la continuité de la réflexion engagée en 2009 pour améliorer l’examen des textes en séance, l’article 25 de la proposition de résolution propose de limiter les interventions sur les articles à un orateur par groupe, désigné par son président ou son délégué. Par ailleurs, un député n’appartenant à aucun groupe se verrait également reconnaître la possibilité de s’exprimer. Ces interventions demeureraient limitées à deux minutes, sous réserve, encore une fois, de l’appréciation du Président de séance.

La Commission a adopté un amendement rédactionnel.

*

*     *

Article 26
(art. 98 du Règlement de lAssemblée nationale)
Contrôle de la recevabilité des amendements
au titre de larticle 45 de la Constitution

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article vise, en premier lieu, à renforcer le contrôle de recevabilité exercé au titre de l’article 45 de la Constitution au stade de la commission, comme de la séance publique.

Il prévoit, en second lieu, la suppression de la possibilité pour les rapporteurs pour avis de déposer des amendements en séance, par coordination avec les dispositions prévues aux articles 21 à 23 visant à alléger la procédure de saisine pour avis. ([109])

       Dernières modifications intervenues

L’article 98 du Règlement, qui fixe les règles relatives à la recevabilité des amendements, a été modifié par la résolution n° 292 du 27 mai 2009 afin de prendre en compte les modifications apportées à l’article 45 de la Constitution par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008. Son dernier alinéa prévoit, désormais, que les amendements et les sous-amendements sont recevables à la condition de présenter un lien, même indirect, avec les dispositions examinées.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement de précision rédactionnelle.

I.   Le droit en vigueur

1.   L’exigence d’un lien entre l’amendement déposé et la disposition en discussion

Condition de la cohérence des débats parlementaires et de la qualité de la loi, l’exigence d’un lien entre les amendements déposés et les dispositions en discussion était déjà présente dans les règlements des assemblées sous la IIIe République. Dès le début de la Ve République a été inscrite à l’article 98 du Règlement de l’Assemblée nationale une disposition selon laquelle « les amendements et les sous-amendements ne sont recevables que sils sappliquent effectivement au texte quils visent ou, sagissant darticles additionnels, sils sont proposés dans le cadre du projet ou de la proposition », tandis que l’article 48 du Règlement du Sénat précisait que « les amendements ne sont recevables que sils sappliquent effectivement au texte quils visent ou, sagissant darticles additionnels, sils ne sont pas dépourvus de tout lien avec lobjet du texte en discussion ». Dans le cas contraire, ces amendements devaient être considérés comme des « cavaliers législatifs », pouvant être déclarés irrecevables pour ce motif.

La jurisprudence du Conseil constitutionnel a longtemps pris en compte de façon imparfaite les règles de recevabilité issues d’une pratique antérieure même à son existence. La notion de lien n’a été intégrée dans son contrôle qu’à compter d’une décision du 10 juillet 1985 dans laquelle le Conseil motive la conformité d’articles additionnels contestés par le fait qu’ils ne sont pas dépourvus de tout lien avec les autres dispositions du projet initial. ([110]) Ce contrôle s’est progressivement renforcé à partir du début des années 2000, sur les amendements d’origine parlementaire comme ceux du Gouvernement. Sa portée fut récapitulée dans un considérant de principe, intégrant du même coup d’autres exigences telles que le respect de la règle dite de l’entonnoir ([111]) ou du principe, dégagé peu de temps auparavant, de clarté et de sincérité du débat parlementaire, énoncé par une décision du 19 janvier 2006 ([112]) :

« Le droit damendement qui appartient aux membres du Parlement et du Gouvernement doit pouvoir sexercer pleinement au cours de la première lecture des projets et des propositions de loi par chacune des deux assemblées ; il ne saurait être limité, à ce stade de la procédure et dans le respect des exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire, que par les règles de recevabilité ainsi que par la nécessité, pour un amendement, de ne pas être dépourvu de tout lien avec lobjet du texte déposé sur le bureau de la première assemblée saisie. »

2.   Un contrôle actif du Conseil constitutionnel

Le rythme des censures de cavaliers législatifs s’est sensiblement accru à compter du tournant des années 2000. À partir de 2006, le Conseil constitutionnel soulève de plus en plus fréquemment ce moyen d’office ([113]).

Cette évolution, parfois contestée, a conduit le constituant de 2008 à vouloir clarifier l’étendue du droit d’amendement. À cette fin, le premier alinéa de l’article 45 de la Constitution a été complété par la phrase suivante : « Sans préjudice de lapplication des articles 40 et 41, tout amendement est recevable en première lecture dès lors quil présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis ». Comme le soulignait alors le rapporteur du projet de loi constitutionnelle, par ailleurs président de la commission des Lois, M. Jean-Luc Warsmann ([114]), « cette nouvelle disposition constitutionnelle [doit] avoir pour effet dinfléchir la jurisprudence relative aux « cavaliers législatifs » — telle est du moins lintention du constituant parlementaire — et donner ainsi au Parlement des occasions nouvelles, au stade de la première lecture, de compléter les textes qui seront discutés de manière plus substantielle. »

Du même coup toutefois, le constituant inscrivait dans la Constitution cette notion de lien qui n’avait, jusqu’alors, qu’une portée réglementaire. Et cette assise constitutionnelle a débouché, paradoxalement, sur un renforcement du contrôle exercé par le Conseil constitutionnel. Plusieurs exemples récents en attestent de façon emblématique : 36 articles de la loi sur l’égalité et la citoyenneté sur 224 ont été censurés pour ce motif ([115]) ; 19 articles de la loi dite « ELAN » sur 234 ont connu le même sort ([116]) ; 22 articles de la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises([117]).

3.   Un contrôle de recevabilité dont se saisissent davantage les assemblées

Les règlements des assemblées ont tiré les conséquences de cette évolution de la norme constitutionnelle. L’article 98, alinéa 5 du Règlement de l’Assemblée nationale, modifié par la résolution n° 292 du 27 mai 2009, prévoit, désormais, que les amendements et les sous-amendements sont recevables à la condition de présenter un lien, même indirect, avec les dispositions examinées. L’article 48, alinéa 3, du Règlement du Sénat, modifié par la résolution du 2 juin 2009, dispose que : « Les amendements sont recevables sils sappliquent effectivement au texte quils visent ou, en première lecture, sils présentent un lien, même indirect, avec le texte en discussion ».

Au Sénat, le rôle des commissions saisies au fond pour contrôler le respect de ces exigences est reconnu aux alinéas 8 et 9 de ce même article 48 :

– ces dernières sont compétentes pour se prononcer sur la recevabilité des amendements et des sous-amendements ;

– l’irrecevabilité est admise de droit et sans débat lorsqu’elle est affirmée par la commission au fond.

À titre d’exemple, lors de l’examen du projet de loi dit « PACTE », la présidente de la commission spéciale, Mme Catherine Fournier, a déclaré 30 amendements irrecevables pour méconnaissance de l’article 45 de la Constitution, soulignant que « le Sénat sous limpulsion de son Président et de son Bureau souhaite depuis plusieurs années appliquer avec plus de rigueur toutes les irrecevabilités, non pour brider le droit damendement mais pour améliorer la qualité de la loi et sa compréhension par les citoyens. ». ([118]) Plus de 160 amendements ont, par la suite, été déclarés irrecevables par le Président du Sénat en vue de la séance publique.

À l’Assemblée nationale, l’article 98 du Règlement se borne à indiquer que « lexistence de ce lien est appréciée par le Président. » La compétence des présidents de commission nest pas expressément mentionnée mais pouvait se revendiquer de larticle 41 qui dispose que « Le président de chaque commission organise les travaux de celle-ci », sinon de léconomie générale du Règlement voire des institutions.

Ce contrôle s’est donc renforcé dans les deux assemblées. Dans le cadre de l’examen du projet de loi ordinaire de programmation 2018-2022 et de réforme pour la Justice et du projet de loi organique relatif au renforcement de l’organisation des juridictions, 42 amendements ont ainsi été déclarés irrecevables par la Présidente de la commission des Lois, Mme Yaël Braun-Pivet, dont 25 au titre de l’article 45, sur les 981 amendements déposés. La Présidente a rappelé, à cette occasion, que « chacun de leur auteur a reçu une notification indiquant les motifs de cette irrecevabilité. » ([119])

En séance, 70 amendements ont été déclarés irrecevables pour le même motif.

Ces décisions ont constitué l’un des motifs de la saisine du Conseil constitutionnel sur ces deux textes. Les auteurs de ces saisines firent valoir « que, en commission comme en séance, plusieurs de leurs amendements ont été déclarés irrecevables en raison de leur absence de lien avec le projet de loi déposé par le Gouvernement ». Ils reprochaient à ces décisions d’irrecevabilité « davoir été prises par le président de lAssemblée nationale et par la présidente de la commission des lois, alors quils sont membres du groupe majoritaire ». En outre, ces décisions n’auraient pas toutes été « motivées » et n’étaient « pas susceptibles de recours ». Dès lors, elles présentaient, selon les requérants, un caractère « arbitraire » et portaient atteinte aux droits de l’opposition. Il en aurait résulté une méconnaissance des exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire et du droit d’amendement garanti par l’article 44 de la Constitution.

Or, le Conseil constitutionnel a rejeté le moyen soulevé en faisant valoir que :

– « il ne résulte pas des travaux parlementaires que les amendements déposés par les députés appartenant à des groupes dopposition aient fait lobjet dun traitement différent des autres amendements » puisque « des amendements du Gouvernement et de députés du groupe majoritaire ont été déclarés irrecevables, en commission et en séance, sur le même fondement » ;

– « aucune exigence constitutionnelle nimpose la motivation des décisions dirrecevabilité prononcées à ce titre par les instances parlementaires, pas davantage que lexistence dun recours au sein de lassemblée en cause. »

Par conséquent, ce contrôle exercé tant au stade de l’examen en commission qu’à celui de la séance publique ne porte atteinte ni au droit d’amendement, ni aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire. ([120])

II.   la réforme proposée

La décision précitée rendue par le Conseil constitutionnel le 21 mars 2019 a confirmé, s’il en était besoin, qu’aucune disposition expresse n’était formellement nécessaire pour fonder la compétence des présidents de commission en ce qui concerne le contrôle du respect des prescriptions de l’article 45 de la Constitution. Une telle disposition serait cependant de nature à renforcer l’autorité de leurs décisions dans un contexte où, plus que jamais, les règles de recevabilité apparaissent nécessaires pour endiguer l’augmentation du nombre d’amendements ainsi que la dégradation de la qualité de la norme législative et des conditions de son élaboration.

Tel est le sens de l’article 26 de la proposition de résolution qui inscrit, à l’article 98 du Règlement, la règle selon laquelle : « En commission, la recevabilité est appréciée lors du dépôt de lamendement par le président de la commission saisie au fond ».

Le président de l’Assemblée nationale demeure, quant à lui, compétent pour se prononcer sur ce motif d’irrecevabilité au stade de la séance publique, le cas échéant, après consultation de la commission saisie au fond.

La Commission a adopté un amendement de précision rédactionnelle.

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Article 27
(art. 100 du Règlement de lAssemblée nationale)
Révision des règles de prise de parole sur les amendements

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet de limiter les prises de parole sur des amendements identiques déposés par les membres d’un même groupe à un seul orateur désigné par son groupe.

Par ailleurs, les règles de prise de parole sur les amendements sont clarifiées, par coordination avec les dispositions prévues par l’article 12 de la proposition de résolution.

       Dernières modifications intervenues

L’article 69 de la résolution n° 292 du 27 mai 2009 a réduit de cinq à deux minutes la durée des interventions, autres que celles du Gouvernement, portant sur les amendements discutés en séance publique, par cohérence avec la réduction, dans les mêmes proportions, des interventions sur les articles.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

I.   le droit en vigueur

1.   Les prises de parole sur les amendements

Les règles relatives aux prises de parole lors de l’examen des amendements en séance publique sont actuellement prévues par :

– l’article 56 du Règlement pour les ministres, les présidents et les rapporteurs des commissions saisies pour avis qui peuvent obtenir la parole quand ils la demandent, un orateur pouvant être autorisé à leur répondre ;

– l’article 100 qui définit l’ordre de discussion des amendements et les règles de prises de parole.

Pour garantir la pluralité des expressions et la bonne information de l’Assemblée sur les enjeux des amendements en discussion, le septième alinéa de ce dernier article prévoit que, sur chaque amendement, outre l’un des auteurs, sont appelés à prendre la parole le Gouvernement, le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond, le président ou le rapporteur de la commission saisie pour avis et un orateur d’opinion contraire. Les interventions, autres que celles du Gouvernement, ne peuvent excéder deux minutes.

Dans la pratique toutefois, à l’Assemblée nationale, la présidence de séance accorde systématiquement la parole à deux orateurs dont au moins un d’avis contraire, voire davantage lorsque cela permet d’éclairer les débats.

La règle applicable au Sénat présente quelques nuances au regard de celle de l’Assemblée puisqu’elle prévoit l’expression de deux orateurs d’avis contraire et que la durée des interventions, hormis celle du Gouvernement, est de deux minutes et demie. ([121])

2.   Les règles spécifiques applicables aux amendements identiques

L’alinéa 5 de l’article 100 prévoit l’application des règles suivantes en cas d’examen d’amendements identiques en séance publique :

– les amendements déposés par le Gouvernement et la commission saisie au fond bénéficient d’une priorité dans l’ordre de discussion ;

– les députés ayant déposé des amendements identiques bénéficient tous de la faculté de les défendre dans la limite des deux minutes ;

– il est procédé à un seul vote sur l’ensemble de ces amendements.

Le groupe de travail sur la législation soulignait cependant, dans son rapport de juin 2018 précité, que « la multiplication des amendements identiques, notamment de suppression, donne lieu à de multiples prises de parole et allonge considérablement les débats sans apporter de plus-value. »

À titre d’exemple, dans le cadre de l’examen du projet de loi ordinaire de programmation 2018-2022 et de réforme pour la Justice, 650 amendements identiques ont été déposés (à partir d’un « socle » de 199 amendements distincts), sur un total de 1674 amendements déposés.

II.   la réforme proposée

1.   La clarification des règles de prise de parole

Les règles de prise de parole sur un amendement sont précisées par le présent article de manière à confirmer, « par une rédaction plus précise de larticle 100, la pratique selon laquelle sont entendus, sur chaque amendement, après lauteur, le rapporteur et le Gouvernement, deux orateurs dont au moins un dopinion contraire. » ([122])

Le Président de séance pourra ainsi faire usage de cette règle, sans contestation possible, et dans des conditions garantissant que l’Assemblée soit suffisamment éclairée sur les enjeux des dispositions examinées.

2.   La présentation d’amendements identiques limitée à un orateur par groupe

De manière à « améliorer le déroulement de la discussion en séance publique en évitant les interventions répétitives » ([123]), lorsque plusieurs membres d’un même groupe présentent des amendements identiques, la parole serait donnée à un seul orateur de ce groupe désigné par son président ou son délégué. Il serait alors procédé, comme dans la pratique actuelle, à un seul vote sur l’ensemble de ces amendements.

Cette mesure reprend, en ce sens, l’une des propositions du groupe de travail sur la procédure législative précitée. ([124])

3.   La suppression des interventions des commissions pour avis

Par coordination avec les dispositions précédemment commentées la possibilité, pour le président ou le rapporteur de la commission pour avis, d’intervenir ès qualités, en séance, sur les amendements, est supprimée.

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Article 27 bis
(article 104 du Règlement)
Coordination relative à la suppression des motions dajournement

 Introduit par la Commission 

Cet article, qui présente une coordination avec l’article 30 quinquies dont l’objet est de supprimer les motions d’ajournement pouvant être déposées lors des débats portant sur la ratification d’un traité ou d’un accord international, n’appelle pas de commentaires particuliers.

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Article 28
(Chapitre V bis du titre II du Règlement de lAssemblée nationale [nouveau])
Procédure de législation en commission

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article introduit dans le Règlement de l’Assemblée nationale un nouveau chapitre, numéroté V bis, relatif à la procédure dite de « législation en commission ».

Cette procédure a l’ambition de favoriser un rééquilibrage entre le travail en commission et la séance publique, l’exercice du droit d’amendement étant limité à cette première étape des travaux parlementaires.

L’examen en séance serait alors constitué de la discussion générale, suivie de la mise aux voix du texte adopté en commission.

       Modifications apportées par la Commission

Outre des amendements de coordination, la Commission a adopté deux amendements tendant à :

– porter de 24 à 48 heures le délai dont disposent le Gouvernement, le président de la commission saisie au fond ou un président de groupe pour obtenir le retour à la procédure ordinaire à la suite à la décision de la Conférence des Présidents d’appliquer la procédure de « législation en commission » ou de la mise à disposition du texte adopté par la commission ;

– préciser qu’il peut y avoir des explications de vote que la procédure de législation en commission s’applique à l’ensemble du texte examiné ou à une partie seulement de ses articles.

I.   Le droit en vigueur

Les assemblées parlementaires recherchent de longue date à renforcer le rôle des commissions en ce qui concerne l’adoption des textes.

1.   La procédure d’examen simplifiée

Les premières procédures d’examen simplifiées (PES) ont été introduites, au Sénat et à l’Assemblée nationale, au début des années 1990.

La procédure dexamen simplifiée est prévue, à l’Assemblée nationale, par les articles 103 à 107 du Règlement. Elle peut être engagée par la Conférence des Présidents à la demande du Président, du Gouvernement, du président de la commission saisie au fond ou du président d’un groupe.

Cette procédure repose sur :

– un examen du texte en commission selon les modalités habituelles ;

– une organisation dérogatoire de la séance publique ne prévoyant ni discussion générale, ni motion de rejet préalable, mais au cours de laquelle le droit d’amendement s’exerce normalement. En l’absence d’amendement, l’ensemble du texte est immédiatement mis aux voix ; dans le cas contraire, seuls sont appelés les articles auxquels ces amendements se rapportent.

Le Gouvernement, le président de la commission saisie au fond ou le président d’un groupe peuvent toutefois s’opposer à l’application de cette procédure en séance publique au plus tard la veille de sa discussion à 13 heures.

La procédure simplifiée a cependant toujours été contestée, l’hémicycle demeurant pour certains l’étape incontestable qu’il convient de privilégier en toutes circonstances. Dès lors, le risque que l’utilisation trop fréquente du droit d’opposition emporte sur l’organisation des débats a conduit, en pratique, à en limiter le recours, pour l’essentiel, aux projets de loi ne faisant généralement pas l’objet d’amendement, à l’instar de ceux autorisant la ratification d’un traité ou l’approbation d’un accord international, ou sur lesquels un consensus politique est acquis. Hormis ces textes les cas d’application de cette procédure ont été relativement rares : jusqu’à une date très récente il n’existait plus de précédent depuis 2006.

À l’initiative de sa présidente la commission des Lois a toutefois demandé et obtenu l’application de cette procédure pour l’examen, au mois de mars de l’année 2019, de la proposition de loi n° 1356 relative à la représentation des personnels administratifs, techniques et spécialisés au sein des conseils d’administration des services départementaux d’incendie et de secours ([125]). Consécutivement la procédure simplifiée a été appliquée, le 9 mai 2009, à plusieurs textes inscrits à l’ordre du jour de la journée réservée aux initiatives du groupe MODEM.

2.   Le renforcement du rôle des commissions dans la procédure législative par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008

Le rôle des commissions dans la procédure législative a été profondément renforcé par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 qui a prévu, notamment, que la discussion des projets et des propositions de loi porterait, désormais, en séance, sauf exception (lois de finances, lois de financement de la sécurité sociale, révisions constitutionnelles), sur le texte adopté par celles-ci.

Le travail en commission s’en est trouvé considérablement transformé avec, notamment, la présence des ministres lors de l’examen des textes et la publicité des débats.

Cette valorisation du travail des parlementaires au sein des commissions, inspirée de nombreux exemples étrangers, comme l’Italie, l’Allemagne ou encore l’Espagne, reconnaît à ces dernières une fonction déterminante dans la conception de la loi.

Les changements introduits en 2008 dans la Constitution auraient sans doute pu permettre d’avancer plus avant dans l’élaboration de procédures « simplifiées » ou « abrégées », favorisant ainsi une meilleure articulation des travaux en commission et en séance publique.

De fait, de manière à lever les réserves énoncées par le Conseil constitutionnel sur la possibilité pour les assemblées de limiter le droit d’amendement en séance publique, le constituant de 2008 a inscrit explicitement à l’article 44 de la Constitution que le droit damendement peut sexercer « en séance ou en commission selon les conditions fixées par le règlement des assemblées, dans le cadre déterminé par une loi organique. »

Toutefois, le droit dopposition à la mise en œuvre de procédures simplifiées par ailleurs toujours très contestées a été réaffirmé à larticle 16 de la loi organique du 15 avril 2009 aux termes duquel : « Les règlements des assemblées peuvent, sils instituent une procédure dexamen simplifiée dun texte et si la mise en œuvre de cette procédure ne fait pas lobjet dune opposition du Gouvernement, du président de la commission saisie au fond ou du président dun groupe, prévoir que le texte adopté par la commission saisie au fond est seul mis en discussion en séance ». ([126])

Au-delà de ce « droit de veto », il est précisé que cette procédure ne peut s’appliquer sur les projets ou propositions de loi pour lesquels la discussion en séance publique ne porte pas sur les textes adoptés en commission, à savoir les projets de lois de finances, de financement de la sécurité sociale ou de révision constitutionnelle. ([127])

Les PES sont consécutivement restées globalement inchangées.

Des adaptations nouvelles sont aujourd’hui d’autant plus attendues que les bénéfices attendus de la loi constitutionnelle de 2008, en termes de rééquilibrage entre les commissions et la séance publique, s’ils sont avérés, ne se sont pas tous vérifiés. L’élaboration du texte de la commission ne s’est pas traduite par une diminution du nombre d’amendements examinés en séance publique. Les deux phases se juxtaposent, renforçant l’impression d’une répétition, sinon d’une stratification des débats.

Dans ce contexte, le Sénat a recherché, davantage sans doute que l’Assemblée nationale, des solutions.

3.   La « législation en commission » au Sénat

À la suite de l’introduction par une résolution du 4 octobre 1990 de procédures abrégées permettant après un examen en commission d’organiser un « vote sans débat » ou de « vote après débat restreint » des amendements déposés en séance publique, qui s’apparentent à la PES en vigueur à l’Assemblée nationale, le Sénat s’est notamment doté, par une nouvelle résolution du 13 mai 2015, d’une procédure d’examen en commission (PEC). Cette dernière devait se substituer à ces deux procédures, à titre expérimental, jusqu’au 30 septembre 2017.

Si le Conseil constitutionnel a validé cette procédure au cours de laquelle le droit d’amendement s’exerce uniquement en commission, son introduction lui a permis de formuler certaines réserves d’interprétation, rappelées à l’occasion de la pérennisation de cette procédure, renommée « procédure de législation en commission », par la résolution du 16 janvier 2018. ([128])

Cette procédure présente deux différences notables avec la procédure précédemment expérimentée, à savoir :

– la possibilité de lappliquer à une partie du texte seulement, et pas uniquement à son ensemble, au nom d’un « meilleur équilibre entre les travaux en commission et en séance publique ». De « nombreux projets comportent (…) des parties très techniques » et il est par conséquent possible de se dispenser de les examiner en séance, affirme l’exposé des motifs de la proposition de résolution ([129]) ;

– la reconnaissance expresse de la faculté de présenter des amendements en séance sur les dispositions ayant fait l’objet d’un examen en commission suivant cette nouvelle procédure dans des cas limitativement reconnus par le Conseil constitutionnel, pour assurer le respect de la Constitution, opérer une coordination avec une autre disposition du texte en discussion, avec d’autres textes en cours d’examen ou avec les textes en vigueur ou procéder à la correction d’une erreur matérielle.

L’examen du texte concerné se déroule alors comme suit :

– le recours à la PEC ([130]) doit faire l’objet d’un accord entre le Président du Sénat, le président de la commission saisie au fond, les présidents de groupe et le Gouvernement, puisque chacun (à l’exception du Président du Sénat), comme le requiert la loi organique de 2009, dispose d’un droit de veto pouvant s’exercer jusqu’au vendredi de la semaine précédant l’examen en séance ([131]). La décision appartient à la Conférence des Présidents, à laquelle il revient également de fixer la date de la réunion de commission consacrée à l’examen des amendements et le délai limite pour leur dépôt ;

– les règles de publicité et de débat en séance sont applicables en commission, sous réserve des règles spécifiques à la PEC parmi lesquelles l’interdiction de présenter toute autre motion de procédure que l’exception d’irrecevabilité. Le Gouvernement peut y participer, ce qui est une spécificité au Sénat davantage qu’à l’Assemblée nationale, ainsi que l’ensemble des sénateurs, même si seuls les membres de la commission peuvent voter ;

– si le texte n’est pas adopté, il est discuté en séance selon la procédure normale ;

– si le texte est adopté par la commission, il est ensuite examiné en séance publique sans qu’aucun amendement ne puisse être déposé sous les quelques réserves précédemment rappelées. Après l’intervention du Gouvernement, des rapporteurs des commissions dans la limite de 7 minutes et, pour explication de vote, d’un représentant par groupe pour 5 minutes, ainsi que d’un sénateur non inscrit pour 3 minutes, le Président met aux voix l’ensemble du texte adopté par la commission. Ces durées sont portées respectivement à 5 minutes et deux minutes et demie en cas d’application de la procédure à une partie du texte seulement.

Cette nouvelle procédure de législation en commission a déjà été utilisée à plusieurs reprises, soit pour examiner l’ensemble d’un texte, à l’instar de l’examen du projet de loi visant à garantir la présence des parlementaires dans certains organismes extérieurs au Parlement et à simplifier les modalités de leur nomination ([132]), soit une partie seulement. À titre d’exemple, 20 articles du projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises ont fait l’objet de cette procédure. Le vote sur ces articles a ainsi été réservé jusqu’avant le vote sur l’ensemble du texte.

II.   La réforme proposée

Constituant l’une des principales évolutions envisagées par la proposition de résolution pour, d’une part, « accélérer les débats en séance publique sur des textes à faible enjeu politique » et, d’autre part, « éviter les redondances entre les travaux en commission et ceux en séance publique » ([133]), le présent article propose d’introduire une procédure de législation en commission dans un nouveau chapitre V bis au titre II du Règlement.

Cette procédure rejoint le souhait exprimé par le Président de la République lors de son allocution devant le Congrès, le 3 juillet 2017, que les parlementaires « [puissent], dans les cas les plus simples, voter la loi en commission ». ([134])

À la suite d’une large concertation, le groupe de travail parlementaire sur la procédure législative et les droits de l’opposition l’avait également retenu au nombre de ses propositions. ([135])

Elle comprendrait trois articles.

Le nouvel article 107-1 prévoit ainsi que la procédure d’examen en commission pourra être décidée par la Conférence des Présidents à la demande du Président de l’Assemblée, du président de la commission saisie au fond, du président d’un groupe ou du Gouvernement, comme cela est actuellement le cas pour la procédure d’examen simplifiée. Elle ne pourra pas s’appliquer aux projets et propositions de loi constitutionnelle ainsi qu’aux projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale. Tous les députés pourront participer aux réunions de la commission et la présence du Gouvernement sera de droit. En séance publique, les interventions seront limitées au Gouvernement, au rapporteur de la commission saisie au fond et, le cas échéant, à son président, tandis qu’un orateur par groupe pourra s’exprimer au titre des explications de vote, d’une durée de cinq minutes.

Les articles 107-2 et 107-3 précisent les règles qui s’appliqueront respectivement en commission et en séance publique dans le cadre de cette nouvelle procédure.

Le tableau présenté ci-après présente, de manière générale, les différences entre cette nouvelle procédure, la procédure d’examen simplifiée en vigueur à l’Assemblée nationale et la procédure de législation en commission mise en œuvre au Sénat.

On insistera, en particulier, sur cette différence notable entre la PES et la PEC : alors que la première admet des amendements mais pas de discussion générale ni explications de vote, la seconde repose sur l’équilibre inverse. En cela, ses chances de succès paraissent plus importantes et la légitimité qu’elle puise dans un rééquilibrage entre l’étape de la commission et celle de la séance publique, souhaité sur tous les bancs de l’Assemblée nationale, incontestable.


Comparatif des règles relatives aux procédures simplifiées au Sénat et à l’Assemblée nationale

 

Procédure d’examen simplifiée

Assemblée nationale

Procédure de législation en commission

Sénat

Procédure dexamen en commission proposée par le présent article

Assemblée nationale

Procédure pouvant s’appliquer à tout ou partie d’un texte

NON

OUI

OUI

Droit d’opposition du président de la commission, du président d’un groupe et du Gouvernement

OUI, jusqu’à la veille de la discussion en séance publique à 13 heures

OUI, le vendredi précédant la séance publique, le cas échéant sur une partie des articles seulement

OUI, au plus tard 24 heures après la décision de la Conférence des Présidents ou de la mise à disposition du texte de la commission, le cas échéant sur une partie des articles seulement

Possibilité de défendre des motions de procédure

NON

OUI, uniquement au titre de l’exception d’irrecevabilité en commission ou en séance

OUI, uniquement pour les motions de rejet préalable en commission ou en séance

Discussion générale

NON

OUI, limitée à une intervention du Gouvernement, du rapporteur de la commission saisie au fond et, le cas échéant, de son président

OUI, limitée à une intervention du Gouvernement, du rapporteur de la commission saisie au fond et, le cas échéant, de son président

Possibilité de défendre des amendements en séance

OUI

NON, sauf cas exceptionnels de recevabilité (1) appréciés par la commission au fond

NON, sauf cas exceptionnels de recevabilité ([136]) appréciés par le Président de l’Assemblée nationale, le cas échéant, après consultation de la commission au fond

Explications de vote

NON

OUI, limitées à un orateur par groupe et un sénateur non inscrit

OUI, limitées à un orateur par groupe et un député non inscrit

La Commission a précisé la rédaction de cet article par l’adoption de plusieurs amendements, visant notamment à :

– autoriser le dépôt d’amendements en séance publique pour les seuls articles auxquels la procédure de législation en commission ne s’applique pas ;

– garantir qu’il soit procédé à des explications de vote que cette procédure porte sur l’ensemble du texte examiné ou une partie seulement de ses articles ;

Par ailleurs, le délai de 24 heures laissé au Gouvernement, au président de la commission saisie au fond ou au président d’un groupe pour faire opposition à l’application de cette procédure, à la suite de la décision initiale de la Conférence des Présidents ou après la mise à disposition du texte adopté par la Commission, a été porté à 48 heures pour permettre à chacun de pouvoir exercer ce droit de veto. ([137])

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*     *

Article 29
(art. 108 du Règlement de lAssemblée nationale)
Coordination des dispositions relatives aux motions de procédures examinées à compter de la deuxième lecture

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article assure la coordination entre les dispositions relatives aux motions de procédure en première lecture, réformées par l’article 23 de la proposition de résolution, et celles applicables à compter de la deuxième lecture.

La défense de la motion de rejet préalable étant limitée à quinze minutes au lieu de trente en première lecture, il est ainsi prévu de la limiter à dix minutes en deuxième lecture et à cinq minutes pour les lectures suivantes.

Par ailleurs, la référence à la motion de renvoi en commission, supprimée en première lecture, l’est également, par cohérence, pour les autres lectures.

       Dernières modifications intervenues

L’article 75 de la résolution n° 292 du 27 mai 2009 a ramené la durée de la défense des motions de procédure de trente à quinze minutes en deuxième lecture. La durée de cette intervention en lecture définitive a, quant à elle, été maintenue à quinze minutes.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté un amendement rédactionnel.

 

*

*     *

Article 30
(art. 111 du Règlement de lAssemblée nationale)
Composition des commissions mixtes paritaires

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet de préciser qu’au sein d’une commission mixte paritaire chaque groupe dispose d’au moins un siège de titulaire ou de suppléant.

       Dernières modifications intervenues

L’article 111 du Règlement, relatif à la composition des commissions mixtes paritaires, a été modifié pour la dernière fois par la résolution n° 292 du 27 mai 2009, afin de préciser les modalités de désignation de leurs membres.

       Modifications apportées par la Commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a précisé que la nouvelle règle d’attribution des sièges de suppléants s’applique sous réserve que le groupe qui dispose du plus grand nombre de sièges de titulaires conserve un siège de suppléant.

I.   Le droit en vigueur

La commission mixte paritaire (CMP) est le mécanisme de conciliation par lequel les députés et les sénateurs peuvent aboutir à un compromis quand leurs assemblées ne se sont pas mises d’accord sur un texte de loi.

LA COMMISSION MIXTE PARITAIRE : INSTANCE DE CONCILIATION OU PRÉALABLE NÉCESSAIRE AU DERNIER MOT ?

Instrument du bicamérisme rationalisé prévu par le second alinéa de l’article 45 de la Constitution, la commission mixte paritaire a pour objet d’éviter que la navette ne se prolonge à l’excès.

Elle peut être convoquée par le Premier ministre ou, depuis la révision de juillet 2008 ([138]), pour les seules propositions de loi, par les présidents des assemblées, qui doivent cependant agir conjointement.

Le choix du moment pour recourir à ce mécanisme de conciliation est libre :

– la convocation de la CMP peut intervenir après une seule lecture dans chacune des assemblées si le Gouvernement a engagé la procédure accélérée sans que les conférences des Présidents ne s’y soient conjointement opposées – autre aménagement introduit par la dernière révision constitutionnelle ([139]) ;

– dans le cas contraire, elle peut intervenir à partir de deux lectures, à tout moment.

La CMP a pour mission de parvenir à un texte de compromis susceptible d’être adopté non seulement par ses membres mais ensuite par l’Assemblée nationale et le Sénat. Cela peut justifier qu’une solution supposée de compromis ne soit pas mise aux voix ([140]).

Elle est chargée d’élaborer un « texte sur les dispositions restant en discussion ». Cette expression a été définie par le Conseil constitutionnel comme celles des dispositions qui n’ont pas été adoptées dans les mêmes termes par l’une et l’autre des deux assemblées ([141]). Cette interprétation conduit à saisir la CMP de l’ensemble d’un texte dans le cas où celui-ci a été rejeté par l’une ou l’autre des assemblées, alors même que certaines dispositions avaient pu être votées à l’identique à un stade antérieur de la procédure. Elle exclut la possibilité pour les CMP d’introduire des dispositions nouvelles ([142]) ou de revenir sur des articles conformes, sinon à des fins de coordination.

Le Conseil constitutionnel a confirmé que « Lorsque la commission ne saccorde ni sur la rédaction, ni sur la suppression dune des dispositions restant en discussion (…) son échec peut être alors constaté pour lensemble des dispositions restant en discussion » ([143]).

Lorsque la CMP parvient à l’élaboration d’un texte, ce dernier n’est pas automatiquement soumis aux assemblées. Le Gouvernement demeure libre d’en décider ([144]) et de choisir l’ordre dans lequel les deux assemblées en seront saisies. Pour éviter que l’accord trouvé ne soit remis en cause, le troisième alinéa de l’article 45 limite le droit d’amendement sur le texte issu de la CMP en subordonnant l’exercice de celui-ci par les parlementaires à l’accord préalable du Gouvernement.

Lorsque la CMP échoue ou que ses conclusions ne sont finalement pas adoptées, la navette reprend son cours, le cas échéant avec une procédure du dernier mot.

Sur les 1 330 commissions mixtes paritaires qui ont eu lieu depuis 1958, 923 ont abouti à un accord, 410 à un désaccord, la part des CMP conclusives devenant minoritaire dès lors que la majorité politique n’est pas la même au sein des deux assemblées.

ÉVOLUTION DES CMP DEPUIS 1958

Législature

CMP

Accord

Désaccord

I re

13

11

2

II e

49

38

11

III e

13

11

2

IV e

74

66

8

V e

108

104

4

VI e

62

61

1

VII e

202

65

137

VIII e

47

47

0

IX e

162

86

76

X e

95

93

2

XI e

102

34

68

XII e

86

86

0

XIII e

113

100

13

XIV e

156

94

62

XV e

48

24

24

Total

1 330

923

410

Source : service de la Séance.

Il appartient aux règlements des assemblées de fixer les règles relatives à la composition des CMP et à la désignation de leurs membres ([145]). Les assemblées les ont donc arrêtées d’un commun accord et transcrites dans leurs règlements.

Ainsi, la composition des CMP est demeurée inchangée depuis le début de la Ve République. Elle comprend sept députés et sept sénateurs titulaires ainsi que sept députés et sept sénateurs suppléants, ces derniers n’étant appelés à voter que dans la mesure nécessaire au maintien de la parité entre les deux assemblées ([146]).

Les modalités de désignation des membres de la CMP varient selon l’assemblée d’origine.

Au Sénat, il est tenu compte du principe de la représentation proportionnelle des groupes ([147]). Les commissions mixtes paritaires comprennent donc :

– 3 sénateurs titulaires membres du groupe LR ;

– 2 sénateurs titulaires membres du groupe SOC ;

– 1 sénateur titulaire membre du groupe UC ;

– 1 sénateur titulaire membre du groupe LaREM.

La répartition des sièges de suppléants se fait de la manière suivante : 3 pour le groupe LR, 1 pour le groupe CRCE, 1 pour le groupe UC, 1 pour le groupe SOC et 1 pour le groupe RDSE.

Une liste de candidats est établie par la commission compétente après consultation des présidents des groupes politiques. Le président de la commission transmet cette liste au Président du Sénat, qui la fait afficher et donne avis de cet affichage en séance publique ([148]). À l’expiration du délai d’une heure, la désignation du ou des candidats est ratifiée, à moins qu’il n’y ait opposition d’au moins trente sénateurs. Si l’opposition est prise en compte par le Sénat après un débat au cours duquel sont entendus l’un des signataires de l’opposition et un orateur d’opinion contraire, il est procédé à la désignation des candidats par un vote au scrutin plurinominal en assemblée plénière.

À l’Assemblée nationale, la désignation des membres de la commission mixte paritaire s’efforce de reproduire la configuration politique de celle-ci et d’assurer la représentation de toutes ses composantes ([149]). Issue de la résolution n° 292 du 27 mai 2009, cette disposition a pour objet de garantir les droits des groupes d’opposition et minoritaires, dans le prolongement de l’article 51‑1 de la Constitution issu de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008.

Sous la présente législature, conformément à la décision de la Conférence des Présidents du 23 octobre 2018, les commissions mixtes paritaires comprennent :

– 4 députés titulaires membres du groupe LaREM ;

– 2 députés titulaires membres du groupe LR ;

– 1 député titulaire membre du groupe MODEM.

La répartition des sièges de suppléants se fait, en alternance, de la manière suivante :

– 4 pour le groupe LaREM, 1 pour le groupe SOC, 1 pour le groupe UDI-AGIR et 1 pour le groupe FI ;

– 3 pour le groupe LaREM, 1 pour le groupe SOC, 1 pour le groupe UDI-AGIR, 1 pour le groupe GDR et 1 pour le groupe LT.

Chaque président de groupe fait parvenir à la Présidence la liste de ses candidats par catégorie dans le délai fixé par le Président de l’Assemblée ([150]). Les candidatures sont affichées à l’expiration du délai imparti. Si le nombre de candidats n’est pas supérieur au nombre de sièges à pourvoir, la nomination prend effet dès cet affichage. Dans le cas contraire, un scrutin public est organisé ([151]).

II.   la rÉforme proposÉe

Le présent article modifie le troisième alinéa de l’article 111 du Règlement. Il substitue à la précision selon laquelle la désignation des représentants de l’Assemblée dans les commissions mixtes paritaires s’efforce d’assurer la représentation de toutes ses composantes une exigence de présence d’au moins un représentant par groupe, titulaire ou suppléant.

Une disposition identique figurait dans la version initiale de la résolution n° 292 du 27 mai 2009, mais avait été retirée, par la commission des Lois, au profit de la précision relative à la représentation de toutes les composantes de l’Assemblée. M. Jean-Luc Warsmann, alors rapporteur, avait considéré que la nouvelle rédaction proposée « permettrait déviter les écueils pouvant être liés à un trop grand nombre de petits groupes ».

Le nombre de groupes est passé de quatre en 2009 à huit aujourd’hui. Les groupes FI, GDR et LT ne disposent d’un siège de suppléant qu’une fois sur deux.

Alors que la composition d’une commission mixte paritaire peut être décisive pour l’issue de la procédure paritaire – en particulier lorsque les deux assemblées sont d’orientations opposées –, il est donc proposé de mettre en œuvre le principe dégagé par MM. Pierre Avril, Jean Gicquel et Jean-Éric Gicquel dans leur ouvrage de droit parlementaire ([152]) selon lequel « la composition des CMP reflète les rapports des forces politiques entre les deux assemblées, la présence de suppléants, sans voix délibérative, permettant dassurer la représentation des groupes qui nauraient pas de titulaires ».

Les sièges de suppléants supplémentaires ainsi reconnus aux groupes d’opposition et minoritaires devraient s’imputer, à court terme, sur le nombre de ceux qui sont actuellement détenus par le groupe majoritaire.

III.   Les modifications apportÉes par la commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a précisé que la nouvelle règle d’attribution des sièges de suppléants s’applique sous réserve que le groupe qui dispose du plus grand nombre de sièges de titulaires conserve un siège de suppléant.

Il s’agit ainsi de préserver la représentation du groupe majoritaire au sein des commissions mixtes paritaires.

*

*     *

Article 30 bis
(art. 117-2 du Règlement de lAssemblée nationale)
Coordination relative à la suppression de la publication des rapports pour avis

Introduit par la Commission

Le présent article tire les conséquences du remplacement des rapports des rapporteurs pour avis par des annexes au rapport de la commission saisie au fond, tel que prévu par l’article 21 de la résolution. Il supprime, à ce titre, les dispositions relatives à la publication de ces rapports prévues par le dernier alinéa de l’article 117‑2 du Règlement.

*

*     *

Article 30 ter
(art. 122 du Règlement de lAssemblée nationale)
Réduction de la durée des motions référendaires

Introduit par la Commission

Le présent article réduit de 30 à 15 minutes la défense des motions référendaires par cohérence avec la diminution, dans les mêmes proportions, de la défense des motions de rejet préalable prévue par l’article 23 de la résolution.

Pour mémoire, ces motions, qui portent spécifiquement sur des projets de loi référendaires, mentionnés à l’article 11, alinéa 1er de la Constitution, requièrent la signature d’un dixième au moins des membres de l’Assemblée. Elles ne sont appelées en séance publique que si la présence effective des signataires est constatée. Seuls peuvent alors intervenir dans la discussion l’un des signataires pour une durée qui ne peut excéder trente minutes, le Gouvernement et le président ou le rapporteur de la commission saisie au fond. Avant le vote, la parole est accordée, pour deux minutes, à un orateur de chaque groupe.

L’adoption de la motion suspend la discussion du projet de loi et celle-ci est alors immédiatement renvoyée au Sénat avec le texte auquel elle se rapporte. Si le Sénat ne l’adopte pas dans un délai de trente jours, la discussion reprend à l’Assemblée nationale au point où elle avait été interrompue et aucune autre motion n’est alors recevable. Cette procédure est identique si la motion est d’abord adoptée au Sénat, l’Assemblée devant se prononcer dans les mêmes conditions.

Le tableau suivant recense les recours à cette motion sous la Ve République.

Recours aux motions référendaires sous la ve république

Législature

Auteur

Objet du texte

Discussion An

Décision

7

Sénat

Projet de loi Enseignement privé (n° 2051)

06/07/1984

rejet

7

51 membres RPR

Projet de Loi électorale (n° 2601)

24/04/1985

rejet

7

Sénat

Projet de Loi électorale (n° 2806)

20/06/1985

rejet

11

Sénat

Projet de loi Nationalité (n° 597)

18/12/1997

rejet

12

Sénat

Projet de loi Énergie (n° 3201)*

 -

-

13

88 membres du groupe SRC

Ratification traité de Lisbonne (n° 690)

06/02/2008

rejet

13

71 membres du groupe SRC

Organismes génétiquement modifiés (n° 891)

20/05/2008

rejet

13

66 membres du groupe SRC

Application art 34-1, 39 et 44 de la Constitution (n° 1314)

13/01/2009

rejet

13

103 membres du groupe SRC

La Poste et les activités postales (n° 2209)

12/01/2010

rejet

13

68 membres du groupe SRC

Loi de finances rectificative pour 2012 (n° 4332)

14/02/2012

rejet

14

60 membres du groupe UMP

Ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe (n° 344)

30/01/2013

rejet

14

Sénat

Délimitation des régions

 (n° 636, Sénat 2013-2014)

02/07/2014

rejet

* Cette motion na pas été adoptée par le Sénat et la discussion sest donc poursuivie.

Source : service de la Séance.

*

*     *

Article 30 quater
(art. 124-1 du Règlement de lAssemblée nationale)
Maintien des motions de renvoi en commission pour les propositions de loi référendaires

Introduit par la Commission

Cet article vise à maintenir la faculté de défendre une motion de renvoi en commission pour les seules propositions de loi présentées en application de l’article 11 de la Constitution, conformément à la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

En effet, ce dernier a censuré, dans sa décision n° 2014-705 DC du 11 décembre 2014 ([153]), une disposition supprimant le recours à cette motion dans ce cas spécifique au motif que :

– dans le cadre d’une proposition de loi présentée en application du troisième alinéa de l’article 11 de la Constitution, cette dernière conditionne la possibilité d’organiser un référendum à l’absence d’examen de ce texte par le Parlement ;

– or, la motion de renvoi en commission adoptée permet d’éviter à l’Assemblée un « examen du texte », même si la proposition a été inscrite à l’ordre du jour.

Par conséquent, le Conseil constitutionnel a considéré que sa suppression constituerait « une restriction dune ampleur telle » qu’elle méconnaît la portée de l’article 11. Votre rapporteur a donc proposé de réintroduire la possibilité de recourir à la motion de renvoi en commission pour les seules propositions de loi référendaires.

*

*     *

Article 30 quinquies
(article 128 du Règlement de lAssemblée nationale)
Suppression des motions d’ajournement

Introduit par la Commission

Introduit à l’initiative de votre rapporteur, le présent article vise à supprimer les motions d’ajournement, comme le sont les motions de renvoi en commission par l’article 23 de la résolution.

Les motions d’ajournement permettent de différer l’autorisation de ratification d’un traité ou d’approbation d’un accord international : elles sont appelées après la clôture de la discussion générale et leur adoption entraîne les mêmes conséquences que celle d’une motion de renvoi en commission. Leur nature est cependant différente puisqu’elles portent sur des textes qui ne peuvent faire l’objet d’amendements, hormis des amendements de suppression, et contestent moins le travail de la commission que le résultat de la négociation conduite par l’Exécutif, auquel elles s’adressent au premier chef.

Pour mémoire, deux motions d’ajournement ont été défendues sous la présente législature. ([154])

*

*     *

Article 31
(art. 132 du Règlement de lAssemblée nationale)
Temps de parole des députés non-inscrits
lors dune déclaration du Gouvernement

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet de garantir un temps minimum d’intervention de cinq minutes à un député non-inscrit lors d’un débat faisant suite à une déclaration du Gouvernement.

       Dernières modifications intervenues

L’article 132 du Règlement a été modifié pour la dernière fois par la résolution n° 292 du 27 mai 2009, afin de tirer les conséquences de l’introduction de l’article 50-1, relatif aux déclarations du Gouvernement, dans la Constitution.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

I.   Le droit existant

L’article 132 du Règlement prévoit que le Gouvernement peut faire devant l’Assemblée nationale des déclarations, suivies ou non d’un débat, et précise leurs conditions d’organisation.

En application de son premier alinéa, qui fait écho à l’article 50-1 introduit dans la Constitution en 2008, le Gouvernement peut, de sa propre initiative ou à la demande d’un groupe parlementaire, faire, sur un sujet déterminé, une déclaration qui donne lieu à débat. Les deuxième à quatrième alinéas prévoient les conditions d’organisation du débat ([155]). Les cinquième et sixième alinéas prévoient l’hypothèse d’une déclaration du Gouvernement avec débat et donnant lieu à un vote ([156]).

Le septième alinéa, antérieur à la révision constitutionnelle de 2008, envisage le cas où le Gouvernement demanderait à faire devant l’Assemblée une déclaration sans débat ([157]).

La Conférence des Présidents est chargée de l’organisation du débat ci-dessus mentionné : elle fixe le temps global attribué aux groupes et, le cas échéant, aux députés n’appartenant à aucun groupe. Les groupes d’opposition disposent de la moitié du temps de parole ; le temps est ensuite réparti entre les groupes d’opposition d’une part et les autres groupes d’autre part en proportion de leur importance numérique. Chaque groupe dispose d’un temps minimum de dix minutes. Ces dispositions sont particulièrement favorables aux groupes d’opposition.

Dans la pratique, il est déjà tenu compte des députés non-inscrits dans la répartition des temps de parole lors du débat qui suit une déclaration du Gouvernement, comme le montre l’exemple exposé ci-après.

rÉpartition du temps de parole
lors du dÉbat relatif au grand dÉbat national du 9 avril 2019

Intervenant

Durée

LaREM

1h20’

LR

55’

MODEM

15’

SOC

15’

UDI-AGIR

15’

FI

15’

GDR

15’

LT

15’

Un député non inscrit

5’

 

3h50’

Source : service de la Séance.

Les conditions dans lesquelles les orateurs interviennent sont les suivantes ([158]). Les inscriptions de parole sont faites par les présidents des groupes, qui indiquent au Président de l’Assemblée l’ordre dans lequel ils souhaitent que les orateurs soient appelés et la durée de leurs interventions, qui ne peut être inférieure à cinq minutes. Il revient au Président de déterminer l’ordre dans lequel les orateurs interviennent.

Il convient à cet égard de souligner que, le 23 janvier 2018, la Conférence des Présidents a revu la procédure d’attribution des temps de parole des non-inscrits s’agissant des débats et des discussions générales des textes. Le principe du « premier arrivé, premier servi » a été remplacé par le système dit du « tourniquet », qui s’applique déjà pour déterminer l’ordre de passage des groupes : en vertu de ce dispositif, si plusieurs députés non-inscrits se manifestent en vue de s’exprimer, celui situé le plus haut dans le tourniquet sera prioritaire sur les autres. Le nom du député non-inscrit change donc à chaque discussion.

Le débat est clos par le Premier ministre ou un membre du Gouvernement, qui prend la parole le dernier pour répondre aux orateurs.

II.   la rÉforme proposÉe

Le présent article a pour objet de compléter le deuxième alinéa de l’article 132 du Règlement, relatif à la répartition du temps de parole des orateurs, afin de préciser qu’un temps minimum de cinq minutes est attribué à un député n’appartenant à aucun groupe.

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*     *

Article 32
(art. 133 du Règlement de lAssemblée nationale)
Séance des questions au Gouvernement

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article prévoit la tenue d’une séance hebdomadaire de questions au Gouvernement et qu’au moins la moitié des questions soit posée par des députés appartenant à des groupes d’opposition.

       Dernières modifications intervenues

Introduit dans le Règlement par la résolution n° 151 du 26 janvier 1994, l’article 133 a été modifié pour la dernière fois par la résolution n° 292 du 27 mai 2009 afin, principalement, de tirer les conséquences de l’introduction à l’article 48 de la Constitution, par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, de séances de questions au Gouvernement pendant les sessions extraordinaires, et de reconnaître des droits spécifiques aux groupes d’opposition ou minoritaires ainsi qu’aux non-inscrits.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

I.   Le droit en vigueur

Instaurées le 12 juin 1974 par une décision de la Conférence des Présidents, qui faisait suite au message au Parlement adressé par le Président de la République M. Valéry Giscard d’Estaing le 30 mai 1974 ([159]), les questions au Gouvernement sont une procédure sans vote, dont le caractère est individuel et qui permet l’information des députés sur des sujets ponctuels et des points d’actualité sans mise en jeu de la responsabilité politique du Gouvernement.

Constituant la forme la plus directe et la plus immédiate de contrôle de l’action du Gouvernement, elles sont consacrées à l’article 48 de la Constitution dont l’alinéa 6 dispose, dans sa rédaction issue de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, qu’« une séance par semaine au moins, y compris pendant les sessions extraordinaires (…), est réservée par priorité aux questions des membres du Parlement et aux réponses du Gouvernement ». Le Conseil constitutionnel est vigilant quant au respect de ce droit. Il a ainsi jugé qu’« un projet ou une proposition de loi qui serait adopté au cours dune semaine dont lordre du jour avait été établi en méconnaissance du dernier alinéa de larticle 48 de la Constitution serait adopté selon une procédure contraire à la Constitution ([160]) ».

Initialement mise en œuvre en marge du Règlement, la procédure des questions au Gouvernement faisait, à l’origine, l’objet d’une séance d’1 heure par semaine, portée à 1 heure 45 en 1986, puis à 1 heure 50 en 1988 avant d’être ramenée à 1 heure 30 en 1993. Depuis l’instauration d’une session parlementaire unique en 1995, deux séances d’une heure leur sont consacrées, les mardi et mercredi après-midi, durant la session ordinaire. En outre, depuis la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, une séance d’une heure par semaine a lieu durant les sessions extraordinaires, soit le minimum prévu par la Constitution.

L’organisation des séances de questions au Gouvernement a été modifiée en 2009 : le temps consacré à chaque question, réponse du ministre comprise, est passé de 5 à 4 minutes, à raison de 2 minutes pour la question et 2 minutes pour la réponse, sauf si le Premier ministre répond. Cette réduction a permis de poser 15 questions par séance au lieu de 12.

La résolution du 27 mai 2009 a réintroduit, au deuxième alinéa de l’article 133 du Règlement, la règle en vigueur jusqu’en 1981 selon laquelle les questions sont réparties à égalité entre la majorité et l’opposition. La parité entre la majorité et l’opposition est réalisée sur deux séances, à raison de 15 pour la majorité et 15 pour l’opposition.

En application des troisième et quatrième alinéas du même article, chaque groupe pose au moins une question et la première question est attribuée de droit à un groupe d’opposition ou minoritaire ou à un député n’appartenant à aucun groupe.

Enfin, le cinquième alinéa du même article renvoie à la Conférence des Présidents le soin de fixer les conditions dans lesquelles les députés non-inscrits peuvent poser des questions. Jusqu’en septembre 2017, les députés non-inscrits pouvaient poser une question toutes les huit séances, puis ils ont obtenu le droit de poser une question toutes les quatre séances ([161]) avant de se voir attribuer, depuis 2018, une question toutes les six séances ([162]).

Jusqu’en janvier 2018, le premier d’entre eux à s’être manifesté auprès des services de l’Assemblée avait le droit d’interroger l’exécutif. Depuis la décision de la Conférence des Présidents du 23 janvier 2018, la règle dite du « tourniquet » s’applique pour déterminer lequel d’entre eux peut s’exprimer : si plusieurs députés d’entre eux se manifestent pour poser une question, c’est l’élu situé le plus haut dans le tourniquet qui est prioritaire sur les autres.

En séance, le président appelle les questions selon un ordre qui fait alterner, autant que faire se peut, une question émanant d’un groupe majoritaire et une question posée par un groupe d’opposition.

En application de l’article 15 de l’Instruction générale du Bureau, les questions au Gouvernement « ont un caractère spontané ; elles ne sont ni déposées, ni notifiées, ni préalablement publiées ». Depuis l’organisation mise en place par le Président Séguin, leur contenu n’est, en principe, pas communiqué au Gouvernement, seuls les noms des auteurs lui sont transmis une heure avant l’ouverture de la séance. Le contenu des questions est libre : seules les injures et menaces sont interdites.

Depuis le début de la XVe législature et jusqu’au 31 mars 2019, 120 séances ont été consacrées aux questions au Gouvernement au cours desquelles 1 825 questions ont été posées.

les questions au gouvernement

 

Session 2018-2019

XVe législature

Nombre de séances

42

120

Nombre de questions

637

1 825

La République en marche

216

684

Les Républicains

105

301

Mouvement démocrate et apparentés

63

179

UDI, Agir et indépendants

63

179

Socialistes et apparentés

63

181

La France insoumise

42

120

Gauche démocrate et républicaine

42

120

Libertés et territoires

36

36

Députés non-inscrits

7

25

Source : service de la Séance.

Comme le montre le tableau ci-dessous, le principe posé au deuxième alinéa de l’article 133 du Règlement d’une répartition des questions à égalité entre la majorité et l’opposition appréciée sur deux séances est bien respecté, les groupes n’ayant pas déclaré appartenir à l’opposition étant, à compter du 23 octobre 2018, La République en marche, le Mouvement démocrate et apparentés et Libertés et territoires.


Questions attribuées par groupe
sur deux séances de questions au Gouvernement

Groupes

Session 2017-2018

Session 2018-2019

(depuis le 23 octobre 2018)

La République en marche

12

10

Les Républicains

5

5

Mouvement démocrate et apparentés

3

3

UDI, Agir et indépendants

3

3

Socialistes et apparentés

3

3

La France insoumise

2

2

Gauche démocrate et républicaine

2

2

Libertés et territoires

2

Total

30

30

Source : service de la Séance.

II.   la rÉforme proposÉe

Le présent article a pour objet de modifier les conditions d’organisation des questions au Gouvernement.

En effet, bien que le caractère spontané des questions et la présence de l’ensemble des membres du Gouvernement assurent une large audience à ces séances qui constituent un temps fort de la semaine parlementaire, cette procédure fait l’objet de critiques récurrentes.

Souvent réduite à un « exercice convenu » ([163]) ou à un simple « exercice de style » ([164]), elles font tout à la fois l’objet de reproches quant :

– au côté théâtral et au brouhaha général de ces séances, « qui ne donnent pas toujours la meilleure image de lAssemblée » comme l’avait souligné M. Jean-Luc Warsmann à l’occasion des débats sur la résolution n° 292 du 27 mai 2009 dont il était le rapporteur ([165]) ;

– à la répartition des questions entre les groupes ;

– à leur caractère tantôt répétitif, tantôt « téléphoné » ;

– et, enfin, à la dimension parfois décevante des réponses apportées par le Gouvernement. Ainsi que l’ont souligné MM. Claude Bartolone et Michel Winock, « la brièveté de lexercice permet (…) aux ministres interrogés de faire diversion et de « meubler » ces quelques minutes sans apporter de réponse précise à la question posée » ([166]).

Afin de remédier à ces critiques, l’article 32 de la proposition de résolution revient sur la possibilité pour la Conférence des Présidents de fixer « la ou les séances hebdomadaires » consacrées aux questions des députés et aux réponses du Gouvernement : sa compétence est restreinte, il ne lui sera plus permis d’organiser qu’une seule séance de questions par semaine, soit le minimum imposé par la Constitution. La règle selon laquelle au moins la moitié des questions est posée par des députés appartenant à des groupes d’opposition est conservée.

La réduction de deux à une du nombre de séances consacrées chaque semaine de session ordinaire aux questions au Gouvernement ne devrait pas s’accompagner d’un affaiblissement des moyens d’information et de contrôle des députés mais, bien au contraire, de leur renforcement.

L’exposé des motifs de la proposition de résolution indique en effet que la Conférence des Présidents pourrait « choisir le jour le plus approprié pour organiser la séance hebdomadaire de questions » et « en fixer la durée à deux heures », avant d’ajouter que « la mise en œuvre dun droit de réplique dans le temps imparti de deux minutes permettrait de dynamiser les échanges ».

Le regroupement des questions au Gouvernement sur une seule séance de deux heures devrait permettre, en mettant notamment en évidence le caractère parfois trop répétitif de certaines questions, d’éviter que ces séances ne se réduisent à de vains affrontements sur des sujets abordés de façon superficielle,.

L’instauration d’un droit de réplique s’inscrit quant à elle dans le sens d’un renforcement des moyens de contrôle du Parlement : ce droit favoriserait le dialogue entre les députés et le Gouvernement et pourrait apporter plus de dynamisme aux séances.

Déjà proposé en 2008 par le Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Ve République présidé par M. Édouard Balladur, qui mettait en évidence la nécessité que « la réplique et la relance des questions soient possibles », et en 2015 par le groupe de travail sur l’avenir des institutions présidé par MM. Claude Bartolone et Michel Winock, qui soulignait qu’« un « droit de réplique » (…) pourrait permettre de rendre de la vigueur à ce qui avait été conçu en 1995 », le droit de réplique existe depuis longtemps dans de nombreux parlements étrangers – par exemple au Québec. Si le Sénat a prévu la possibilité d’une telle réplique dans le cadre des questions au Gouvernement lors de la réforme de son Règlement de 2015 ([167]), l’Assemblée nationale en a, jusqu’à présent, réservé l’usage aux seules questions orales sans débat.

Outre l’instauration d’une séance hebdomadaire unique de questions au Gouvernement, qui pourrait durer deux heures et ouvrir un droit de réplique, l’article 32 prévoit la possibilité de revoir à la hausse le nombre de questions posées par l’opposition, qui devraient représenter non plus la moitié mais au moins la moitié des questions prévues.

Comme l’énonce l’exposé des motifs de la proposition de résolution, « la Conférence des Présidents pourra accroître le nombre de questions posées par les groupes dopposition, de manière que chacun deux bénéficie, chaque semaine, dune augmentation de lordre de la moitié du nombre de ses questions par rapport à la situation actuelle ».

Enfin, afin de réduire la différence de traitement aujourd’hui applicable au Premier ministre, la Conférence des Présidents pourrait prévoir, en accord avec ce dernier, une limitation de son temps d’intervention. Cette dernière pourrait, par exemple, être fixée à 4 minutes par réponse, sauf autorisation expresse de la présidence de séance.

*

*     *

Article 33
(art. 142 du Règlement de lAssemblée nationale)
Représentation des députés non-inscrits au sein des commissions denquête

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article prévoit la présence d’un député non-inscrit dans les commissions d’enquête.

       Dernières modifications intervenues

Relatif à la composition des commissions d’enquête, l’article 142 du Règlement, dont les dispositions figuraient initialement à l’article 139 puis, de 1977 à 2009, à l’article 140, résulte de la résolution n° 292 du 27 mai 2009.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

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En application de l’article 142 du Règlement, les commissions d’enquête ne peuvent comprendre plus de 30 députés, désignés selon les règles de nomination à la représentation proportionnelle des groupes.

Ne peuvent en outre être désignés comme membres d’une commission d’enquête les députés ayant fait l’objet d’une sanction pénale ou disciplinaire pour manquement à l’obligation du secret à l’occasion des travaux non publics d’une commission constituée au cours de la même législature.

Les députés non-inscrits ne peuvent participer à une commission d’enquête, alors qu’il s’agit d’un outil fondamental de contrôle et d’évaluation pour le Parlement.

Aussi, le présent article propose-t-il de remédier à cette situation, en prévoyant que les membres d’une commission d’enquête sont désignés à la représentation proportionnelle des groupes et que ces commissions comprennent également un député n’appartenant à aucun groupe.

Il s’agit ainsi, en complément des dispositions prévues aux articles 3 et 33 de la proposition de résolution relatives, respectivement, à la composition des commissions spéciales et des missions d’information de la Conférence des Présidents, d’améliorer la représentation des députés non-inscrits au sein des organes de l’Assemblée nationale.

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*     *

Article 34
(art. 143 du Règlement de lAssemblée nationale)
Choix par le groupe dopposition ou minoritaire de sa fonction dans le cadre dune commission denquête créée à son initiative

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article prévoit que les groupes d’opposition ou minoritaires pourront choisir la fonction – président ou rapporteur – qu’ils exerceront dans le cadre d’une commission d’enquête dont ils sont à l’origine.

       Dernières modifications intervenues

L’article 143 du Règlement, où les dispositions relatives à la composition du bureau des commissions d’enquête qui figuraient auparavant à l’article 140-1 ont été introduites par la résolution n° 106 du 26 mars 2003, résulte de la résolution n° 292 du 27 mai 2009.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

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Les commissions d’enquête, dont l’existence a été inscrite en 2008 à l’article 51-2 de la Constitution, sont un instrument important du contrôle parlementaire. Elles sont formées, selon les termes de l’article 6 de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958, pour recueillir des éléments d’information soit sur des faits déterminés, soit sur la gestion des services publics ou des entreprises nationales.

Il ne peut être créé de commission d’enquête sur des faits ayant donné lieu à des poursuites judiciaires et aussi longtemps que ces poursuites sont en cours. Si une commission d’enquête a déjà été créée, sa mission prend fin dès l’ouverture d’une information judiciaire relative aux faits sur lesquels elle est chargée d’enquêter. Ce principe, également rappelé par l’ordonnance du 17 novembre 1958, a été considéré par le Conseil constitutionnel comme inhérent à la séparation des pouvoirs ([168]).

En application du deuxième alinéa de l’article 143 du Règlement, la fonction de président ou de rapporteur d’une commission d’enquête revient de droit à un député appartenant à un groupe d’opposition. Le troisième alinéa précise que, lorsque la commission d’enquête est créée sur le fondement du « droit de tirage » à l’initiative d’un groupe d’opposition ou minoritaire – comme c’est possible une fois par session ordinaire depuis 2009 ([169]) –, la fonction de président ou de rapporteur revient de droit à un membre du groupe qui en est à l’origine.

Cependant, dans tous les cas, la majorité choisit la fonction qu’elle préfère exercer, généralement celle de rapporteur. Celui-ci dispose en effet de prérogatives propres, qui ne peuvent être ni déléguées à un tiers ni limitées par la commission : contrôles sur pièces et sur place, obtention de tous les renseignements de nature à faciliter sa mission, habilitation à se faire communiquer tout document de service à l’exception de ceux revêtant un caractère secret, concernant la défense nationale, les affaires étrangères, la sécurité intérieure ou extérieure de l’État, et sous réserve bien sûr du respect de la séparation de l’autorité judiciaire et des autres pouvoirs.

Ces prérogatives s’articulent cependant avec celles du président, dont certaines lui sont propres également (convoquer la commission, diriger ses délibérations, requérir un huissier ou la force publique, requérir des poursuites…), et de la commission elle-même qui, in fine, est appelée à adopter le rapport, à l’amender ou à le rejeter.

Depuis le début de la XVe législature, parmi les onze commissions d’enquête créées, dont neuf l’ont été à l’initiative d’un groupe d’opposition, seules quatre d’entre elles ont été dotées d’un rapporteur issu d’un groupe d’opposition.


COMMISSIONS DENQUÊTE CRÉÉES DEPUIS LE DÉBUT DE LA XVE LÉGISLATURE

Date de création

Groupe

Objet

Rapporteur

31/10/2017

LR

Décisions de l’État en matière de politique industrielle, au regard des fusions d’entreprises intervenues récemment, notamment dans les cas d’Alstom, d’Alcatel et de STX, ainsi que les moyens susceptibles de protéger nos fleurons industriels nationaux dans un contexte commercial mondialisé

LaREM

23/01/2018

GDR

Maladies et pathologies professionnelles dans l’industrie (risques chimiques, psychosociaux ou physiques) et les moyens à déployer pour leur élimination

GDR

31/01/2018

LaREM

Sûreté et sécurité des installations nucléaires

LaREM

20/02/2018

SOC

Enseignements de l’affaire Lactalis et étudier à cet effet les dysfonctionnements des systèmes de contrôle et d’information, de la production à la distribution, et l’effectivité des décisions publiques

LaREM

13/03/2018

UDI-AGIR

Égal accès aux soins des Français sur l’ensemble du territoire et sur l’efficacité des politiques publiques mises en œuvre pour lutter contre la désertification médicale en milieux rural et urbain

UDI-AGIR

27/03/2018

FI

Alimentation industrielle : qualité nutritionnelle, rôle dans l’émergence de pathologies chroniques, impact social et environnemental de sa provenance

LaREM

11/12/2018

FI

Lutte contre les groupuscules d’extrême droite en France

LaREM

05/02/2019

UDI-AGIR

Situation, missions et moyens des forces de sécurité, qu’il s’agisse de la police nationale, de la gendarmerie ou de la police municipale

UDI-AGIR

19/02/2019

LR

Impact économique, industriel et environnemental des énergies renouvelables, transparence des financements et acceptabilité sociale des politiques de transition énergétique

LaREM

05/03/2019

GDR

Inclusion des élèves handicapés dans l’école et l’université de la République, quatorze ans après la loi du 11 février 2005

GDR

26/03/2019

LaREM

Situation et pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs

LaREM

Source : service de la Séance.

Aussi, l’article 34 de la proposition de résolution prévoit-il expressément d’attribuer aux groupes d’opposition et minoritaires le droit de choisir la fonction de président ou de rapporteur au sein des commissions d’enquête créées à leur initiative.

Cette inversion de la logique qui prévaut actuellement renforce significativement le pouvoir d’investigation des groupes d’opposition et minoritaires. L’avancée qu’elle représente est en outre également prévue à l’article 35 de la proposition de résolution pour les missions d’information créées par la Conférence des Présidents.

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*     *

Article 35
(art. 145 du Règlement de lAssemblée nationale)
Missions dinformation sur le suivi des ordonnances prises en application de larticle 38 de la Constitution ­
Association de lopposition et des députés non-inscrits aux missions dinformation de la Conférence des Présidents

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article poursuit deux buts distincts :

– étendre l’objet des missions d’information créées par les commissions permanentes au suivi des ordonnances prises en application de l’article 38 de la Constitution ;

– mieux associer les députés non-inscrits et les groupes d’opposition ou minoritaires aux missions d’information instaurées par la Conférence des Présidents.

       Dernières modifications intervenues

L’article 145 du Règlement, relatif aux missions d’information, a été modifié pour la dernière fois par la résolution n° 437 du 28 novembre 2014 afin, notamment, d’étendre le « droit de tirage » dont disposent les groupes d’opposition et les groupes minoritaires en matière de commissions d’enquête à la création d’une mission d’information de la Conférence des Présidents.

       Modifications apportées par la Commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a précisé que l’objet des missions d’information créées par les commissions permanentes pouvait être étendu, non pas au suivi des ordonnances prévues par l’article 38 de la Constitution, mais à la préparation de leur ratification.

I.   les missions d’information crÉÉes par les commissions permanentes

A.   Le droit en vigueur

En application de l’alinéa 2 de l’article 145 du Règlement, les commissions permanentes peuvent confier à plusieurs de leurs membres une mission d’information temporaire portant, notamment, sur les conditions d’application d’une législation. Ces missions d’information peuvent être communes à plusieurs commissions.

Introduit par la résolution n° 288 du 18 mai 1990, cet alinéa a été déclaré conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 6 juin 1990 « dès lors que lintervention dune « mission d’information » revêt un caractère temporaire et se limite à un simple rôle dinformation contribuant à permettre à lAssemblée nationale dexercer pendant les sessions ordinaires et extraordinaires son contrôle sur la politique du Gouvernement dans les conditions prévues par la Constitution » ([170]).

L’objet de ces missions d’information est divers. Ainsi, parmi les quinze missions d’information créées depuis le début de la XVe législature par la commission des Lois, dont trois sont communes avec d’autres commissions permanentes :

– certaines ont pour but de dresser un bilan sur un sujet spécifique afin de proposer des évolutions qui peuvent notamment être de nature législative, comme la mission d’information en cours sur l’aide juridictionnelle ;

– d’autres s’inscrivent plus nettement dans une perspective législative comme la mission d’information commune sur la préparation d’une nouvelle étape de la décentralisation en faveur du développement des territoires.

Trois d’entre elles ont porté ou portent plus particulièrement sur les conditions d’application d’une législation, comme la mission d’information sur l’application de la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France ou la mission d’information, en cours, sur l’évaluation de l’impact de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 relative à la nouvelle organisation territoriale de la République (loi NOTRe).

La participation de l’opposition aux travaux des missions d’information a été renforcée en 2009, à la suite de l’introduction au sein de l’article 145, par la résolution n° 292 du 27 mai 2009, d’un alinéa 3 qui, consacrant la pratique, prévoit qu’une mission composée de deux membres doit comprendre un député appartenant à un groupe d’opposition tandis qu’une mission composée de plus de deux membres doit s’efforcer de reproduire la configuration politique de l’Assemblée.

Par ailleurs, les rapports de ces missions d’information sont susceptibles de donner lieu, comme ceux de toutes les missions d’information, à des débats en séance ou à des séances de questions, en application de l’alinéa 8 de l’article 145.

B.   la rÉforme proposÉe

Le 1° de l’article 35 de la proposition de résolution a pour objet de compléter l’alinéa 2 de l’article 145 du Règlement afin d’ajouter, parmi les objets possibles des missions d’information, le suivi de la rédaction des ordonnances prises en application de l’article 38 de la Constitution.

Ce suivi est d’autant plus légitime que les habilitations reconnues au Gouvernement à prendre des mesures relevant du domaine de la loi se multiplient et interviennent dans des secteurs variés. Ainsi, le nombre moyen d’ordonnances est passé de 36 par an sur la période 2008-2012 à près de 58 par an sur la période 2013-2017. Le nombre moyen d’articles contenus dans ces ordonnances est passé sur la même période de près de 556 à plus de 1 173 et le nombre moyen de mots de 192 145 à 321 534.

Certains projets de loi sont entièrement consacrés à de telles habilitations, tandis que ces dernières sont aussi parfois prévues par des articles de textes dont l’objet est plus large. Ainsi, la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice ne contient pas moins de six articles habilitant le Gouvernement à prendre des mesures relevant du domaine de la loi.

Sous quelque forme que ce soit, le recours à ces ordonnances conduit à un dessaisissement temporaire du Parlement, dans l’attente de leur ratification. En effet, en application de l’article 38 de la Constitution, ces ordonnances, prises en Conseil des ministres après avis du Conseil d’État, entrent en vigueur dès leur publication mais deviennent caduques si le projet de loi de ratification n’est pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par la loi d’habilitation ; elles ne peuvent être ratifiées que de manière expresse.

Le besoin d’un suivi, qui n’a pas pour objet de peser sur le contenu des ordonnances mais d’assurer l’information du Parlement dans la perspective d’une ratification ultérieure, est réel. En témoigne le fait que, en marge du Règlement, se développe, au sein de certaines commissions permanentes, la pratique de « groupes de contact » qui ont vocation à suivre l’élaboration d’ordonnances prises en application de l’article 38 de la Constitution.

Ainsi, conformément à une décision de son bureau, la commission des Lois a-t-elle entériné, le 12 mars 2019, la création d’un « groupe de contact » chargé de suivre les travaux du Gouvernement pour modifier les dispositions relatives à la justice pénale des mineurs sur le fondement de l’habilitation à légiférer par ordonnance prévue par l’article 93 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice. Ce groupe de contact est composé de sept députés : un député par groupe, le groupe La France Insoumise n’ayant pas souhaité s’y associer.

C.   les modifications apportÉes par la commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a précisé que l’objet des missions d’information créées par les commissions permanentes pouvait être étendu, non pas au suivi des ordonnances prévues par l’article 38 de la Constitution, mais à la préparation de leur ratification.

Leur objectif sera d’informer les députés dans la perspective de l’examen des lois de ratification de ces ordonnances.

II.   les missions d’information crÉÉes par la confÉrence des prÉsidents

A.   Le droit en vigueur

Les missions d’information constituent une alternative aux commissions d’enquête : elles peuvent être dotées de prérogatives proches tout en étant plus souples dans leurs conditions de création et d’organisation ([171]). Afin de conférer néanmoins à ces organes une solennité qui peut être recherchée et de consacrer la possible transversalité de leur objet, le président de l’Assemblée nationale M. Jean-Louis Debré a souhaité, il y a quinze ans ([172]), que de telles missions puissent être créées par la Conférence des Présidents.

Les rapports des missions d’information créées par la Conférence des Présidents peuvent donner lieu à un débat sans vote en séance publique.

Introduit par la résolution précitée, le nouvel alinéa 4 de l’article 145 du Règlement a été déclaré conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel dès lors que la mission d’information « revêt un caractère temporaire et se limite à un simple rôle dinformation » ([173]), comme le requiert une jurisprudence constante depuis 1990.

Les règles de composition de ces missions d’information ont été précisées en 2009. Consacrant une pratique récente, la résolution n° 292 du 27 mai 2009 a en effet prévu que les missions d’information créées par la Conférence des Présidents devaient obéir à une composition pluraliste, à l’instar des commissions d’enquête.

Deux nouvelles règles ont donc été posées :

– le bureau de ces missions d’information est composé d’un président, de trois vice-présidents et de trois secrétaires, et doit s’efforcer non seulement de reproduire la configuration politique de l’Assemblée mais également d’assurer la représentation de toutes ses composantes ;

– la fonction de président ou de rapporteur revient de droit à un député appartenant à un groupe d’opposition, si ces fonctions ne sont pas exercées par la même personne.

Depuis le début de la XVe législature, la Conférence des Présidents a créé six missions d’information, dont une à l’initiative du groupe MODEM (et dont le rapporteur est issu du MODEM).

missions d’INFORMATION CRÉÉes par la confÉrence des prÉsidents

dePUIS LE DÉBUT DE LA XVE LÉGISLATURE

Date création

Initiative

Objet

Rapporteur

01/08/2017

Président

Avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie

LR puis LaREM

14/11/2017

Président

Gestion des événements climatiques majeurs dans les zones littorales de l’hexagone et des outre-mer

LaREM

21/11/2017

Président

Suivi des négociations liées au Brexit et avenir des relations de l’Union européenne et de la France avec le Royaume-Uni

LaREM

12/06/2018

Président

Révision de la loi relative à la bioéthique

LaREM

26/06/2018

MODEM

Freins à la transition énergétique

MODEM

05/03/2019

Président

Aide sociale à l’enfance

LaREM

Source : service de la Séance.

Le droit de tirage dont les groupes d’opposition et les groupes minoritaires disposent pour créer des missions d’information a été étendu, en 2014, de façon alternative, aux missions d’information de la Conférence des Présidents.

B.   la rÉforme proposÉe

L’article 35 de la proposition de résolution a pour objectif de mieux associer l’opposition et les députés non-inscrits aux missions d’information de la Conférence des présidents.

À cet effet, son 2° prévoit tout d’abord d’ajouter à l’alinéa 4 de l’article 145 du Règlement que ces missions d’information comprennent un député n’appartenant à aucun groupe.

Cette mesure répond à la volonté de conforter la place des députés non-inscrits au sein des organes de l’Assemblée nationale, à l’instar de ce qui est prévu pour les commissions spéciales ([174]) et pour les commissions d’enquête ([175]).

Son 3° prévoit ensuite, à l’instar de ce qui est proposé à l’article 34 pour les commissions d’enquête, que les groupes d’opposition ou minoritaires pourront choisir la fonction – président ou rapporteur – qu’ils exerceront dans le cadre d’une mission d’information créée par la Conférence des présidents dont ils sont à l’origine.

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Article 36
(art. 145-7 du Règlement de lAssemblée nationale)
Désignation du co-rapporteur sur la mise en application de la loi

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet de rendre obligatoire, dès le renvoi à une commission permanente d’un projet ou d’une proposition de loi, la nomination d’un co-rapporteur d’application.

       Dernières modifications intervenues

L’article 145-7 du Règlement, relatif au suivi de la mise en œuvre des lois, a été modifié pour la dernière fois par la résolution n° 437 du 28 novembre 2014, afin de prévoir notamment la possibilité, pour la commission saisie d’un projet ou d’une proposition de loi, de désigner, dès le début de son examen, un rapporteur d’application issu de l’opposition.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

I.   Le droit en vigueur

Mise en place au début des années 1990 par la commission des Finances pour suivre la mise en œuvre des dispositions fiscales contenues dans les lois de finances, la pratique du suivi de l’application des lois a été généralisée par la résolution n° 256 du 12 février 2004. Celle-ci a prévu que le rapporteur d’une loi dont la mise en œuvre nécessite la publication de textes de nature réglementaire ou, à défaut, un autre député désigné par la commission présente, six mois après son entrée en vigueur, un rapport sur la mise en application de celle-ci, et que ce contrôle se répète, si nécessaire, à l’issue d’un nouveau délai de six mois.

Un rapport d’évaluation sur l’impact de la loi est par ailleurs prévu par l’alinéa 3 de l’article 145-7 à l’issue d’un délai de trois ans.

En 2009 a été consacrée la règle, mise en œuvre par la commission des Lois dès 2007, selon laquelle le rapport sur la mise en application d’une loi est systématiquement conduit par deux députés, dont l’un appartient à un groupe d’opposition, le droit pour le député qui a été le rapporteur de la loi d’être l’un des rapporteurs d’application étant par ailleurs maintenu (alinéa 1er de l’article 145-7 du Règlement).

Tant en 2004 qu’en 2009, le Conseil constitutionnel a déclaré ces dispositions conformes à la Constitution sous réserve que « les missions de suivi (…) revêtent un caractère temporaire et se limitent à un simple rôle dinformation contribuant à permettre à lAssemblée nationale dexercer son contrôle sur laction du Gouvernement, dans les conditions prévues par la Constitution » ([176]).

En 2014, afin d’affermir les droits de l’opposition, a été ouverte aux commissions la faculté de désigner le co-rapporteur du groupe d’opposition qui est chargé, à l’issue du délai de six mois suivant l’entrée en vigueur de la loi, de présenter un rapport sur sa mise en application (alinéa 2) dès le renvoi à son examen du projet ou de la proposition de loi ([177]).

Dans les faits la pratique varie selon les commissions. Certaines ne nomment pas de rapporteur d’application. D’autres nomment un rapporteur d’application après voire bien après le renvoi du texte en commission, y compris après la promulgation de la loi. Pour sa part, la commission des Lois procède fréquemment à la nomination du co-rapporteur dès le début de ses travaux.

De fait, outre le suivi de la loi, une telle désignation permet de mieux identifier l’un des principaux orateurs de l’opposition, qui assiste aux auditions, est un interlocuteur pour le rapporteur et fait usage, s’il le souhaite, des deux pouvoirs spécifiques qui lui ont été reconnus en 2014 :

– le droit, en première lecture, de faire figurer une contribution écrite dans le rapport de la commission ;

– le droit de s’exprimer en séance, avant la discussion générale (après le rapporteur au fond et, le cas échéant, les rapporteurs pour avis), en application de l’article 91 du Règlement.

Ainsi, depuis le début de la XVe législature, la commission des Lois a nommé des rapporteurs d’application sur 20 textes. 7 ont demandé l’insertion d’une contribution écrite dans le rapport. Le choix des rapporteurs d’application est fait en s’efforçant de reproduire la configuration politique de l’Assemblée.

II.   la rÉforme proposÉe

Le présent article modifie l’alinéa 2 de l’article 145-7 du Règlement afin de rendre obligatoire, dès le renvoi pour examen par la commission d’un projet ou d’une proposition de loi, la nomination du « co‑rapporteur d’application » appartenant à un groupe d’opposition.

Cette évolution, outre qu’elle permettra d’harmoniser les pratiques des commissions, donnera plein effet aux droits reconnus aux rapporteurs d’application en matière de contribution écrite et d’expression en séance publique. Ce faisant elle associera davantage les groupes d’opposition à l’élaboration de la loi dont ils sont ensuite chargés de contrôler l’exécution réglementaire.

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*     *

Article 37
(art. 146-1-1 [nouveau] du Règlement de lAssemblée nationale)
Contrôle de lexécution des lois de finances

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article consacre la faculté offerte à la Conférence des Présidents de décider qu’une semaine de contrôle sera consacrée prioritairement au contrôle de l’exécution des lois de finances et d’inscrire à l’ordre du jour de cette semaine des propositions de résolution portant sur l’exécution des lois de finances.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

I.   le droit en vigueur

Afin de revaloriser l’examen de la loi de règlement – qui se déroulait dans l’indifférence générale au cours d’une ou de deux séances publiques – et de procéder à un rééquilibrage de l’intérêt et du temps consacrés, chaque année, à l’examen de la loi de finances initiale au profit du contrôle de l’exécution budgétaire, un processus innovant a été instauré au mois de juin 2018 : le « printemps de l’évaluation ».

Mise en place à l’initiative de la commission des Finances, cette procédure s’inspire des propositions formulées par les groupes de travail créés à l’automne 2017 afin de réformer l’Assemblée nationale.

LES PROPOSITIONS DES GROUPES DE TRAVAIL DE LASSEMBLÉE NATIONALE POUR REVALORISER LEXAMEN DE LA LOI DE RÈGLEMENT

Le groupe sur le contrôle et l’évaluation a mis en évidence la nécessité de « revaloriser la loi de règlement en augmentant le temps consacré à son examen, en contrepartie dune réduction du temps passé à discuter en séance publique le projet de loi de finances de lannée ». Pour donner un véritable impact à cet examen, il a jugé « pertinent que, dans la foulée des constats précis dressés à propos de telle ou telle politique publique, des résolutions, assorties le cas échéant dinjonctions, tirent les conséquences de tel ou tel résultat insatisfaisant en invitant le ministre responsable à redresser la situation » ([178]).

Le groupe sur la procédure législative a invité à rééquilibrer « le débat sur le budget, aujourdhui excessivement concentré sur la prévision et lautorisation, en faveur du contrôle et de lévaluation de son exécution » en distinguant, de manière symbolique, un « automne de lautorisation » d’un « printemps de lévaluation » ([179]).

Inauguré à l’occasion de l’examen de la loi de règlement pour 2017, ce « printemps de l’évaluation » a pris la forme d’une évaluation par la commission des Finances de plusieurs politiques publiques, suivie de leur examen lors d’une semaine de contrôle en séance publique.

1.   L’examen en commission

La commission des Finances a organisé, du 30 mai au 7 juin 2018, 18 réunions, pour une durée de 34 heures 30, au cours desquelles les 45 rapporteurs spéciaux ont procédé, en présence des ministres concernés, à l’évaluation de politiques sectorielles.

Les autres commissions permanentes ont été associées à cet exercice :

– le président de la commission des Finances a informé ses collègues présidents de commissions permanentes de l’ordre du jour et de la finalité de ces réunions et leur a communiqué, ainsi qu’aux présidents des groupes, les 52 rapports annuels de performance joints au projet de loi de règlement ainsi que les 66 notes d’exécution budgétaire établies par la Cour des comptes ;

– les rapporteurs pour avis ont été invités à participer à ces réunions, au cours desquelles un temps de parole leur a été réservé.

Inspirées de la procédure des commissions élargies, ces commissions d’évaluation des politiques publiques n’ont pas donné lieu à des votes mais ont permis d’approfondir la mission de contrôle dévolue au Parlement. Orientées sur des thèmes précis comme « l’aide publique au développement au Mali » ou « l’offre culturelle en milieu rural, l’exemple du Limousin », les évaluations ont donné lieu à la rédaction de rapports établis par les rapporteurs spéciaux et annexés au rapport général sur le projet de loi de règlement.

Aboutissement de ces travaux, des propositions de résolution ont été déposées en application de l’article 34-1 de la Constitution par plusieurs rapporteurs spéciaux et groupes politiques pour être discutées en séance.

2.   L’examen en séance publique

La Conférence des Présidents a décidé que la semaine de contrôle du 18 juin 2018 serait consacrée à l’évaluation des politiques publiques et à l’examen de la loi de règlement.

Cette semaine a débuté avec l’intervention du Premier président de la Cour des comptes, suivie d’un débat sur l’exécution du budget de 2017.

Le reste de l’ordre du jour du lundi, celui du mardi et celui du mercredi après-midi ont été principalement consacrés à l’examen de propositions de résolution déposées en application de l’article 34-1 de la Constitution et inscrites à la demande des groupes politiques ou retenues par le bureau de la commission des Finances.

Parmi les cinq résolutions proposées par les groupes – dont deux ont été présentées par des rapporteurs spéciaux sur les crédits dont ils avaient la charge ([180]) – l’une d’entre elles, issue du groupe MODEM et défendue par M. Jean-Paul Mattei, a été adoptée.

Par ailleurs, les cinq résolutions issues des travaux de la commission des Finances ont été adoptées ([181]).

Enfin, cette semaine consacrée à l’évaluation des politiques publiques et à l’examen de la loi de règlement s’est achevée par la séance consacrée, le mercredi soir, à l’examen du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2017.

II.   la rÉforme proposÉe

Alors que la deuxième édition du printemps de l’évaluation vient d’être lancée par le président de la commission des Finances, M. Eric Woerth, le 5 février 2019, avec la volonté de lui donner une plus grande ampleur ([182]), l’article 37 de la proposition de résolution a pour objet de consacrer dans le Règlement cette procédure innovante.

Le présent article prévoit, en effet, d’insérer, dans le chapitre VI du titre III du Règlement relatif au contrôle budgétaire, un nouvel article 146-1-1 qui confirme l’organisation du printemps de l’évaluation.

L’alinéa 1er prévoit que la Conférence des Présidents peut décider qu’une semaine de contrôle est consacrée prioritairement au contrôle de l’exécution des lois de finances.

L’alinéa 2 précise qu’elle peut inscrire à l’ordre du jour de cette semaine des propositions de résolution déposées en application de l’article 34-1 de la Constitution et portant sur l’exécution des lois de finances.

Ce printemps de l’évaluation peut avoir pour corollaire une diminution du temps consacré, à l’automne, à l’examen de la loi de finances initiale.

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Article 38
(art. 146-2 du Règlement de lAssemblée nationale)
Composition du bureau
du Comité dévaluation et de contrôle des politiques publiques

Adopté par la Commission sans modification

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article prévoit que le premier des vice-présidents du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC) dans l’ordre de préséance appartient à un groupe d’opposition et que la composition de son bureau s’efforce de reproduire la configuration politique de l’Assemblée.

       Dernières modifications intervenues

Le Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques a été créé par la résolution n° 292 du 27 mai 2009. L’article 146-2 du Règlement, qu’elle a introduit, a été modifié en 2014 pour faire évoluer sa composition ainsi que celle de son bureau et préciser que ses membres sont nommés au début de la législature et pour la durée de celle-ci.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté cet article sans modification.

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Créé par la résolution du 27 mai 2009, le Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques est un organe propre à l’Assemblée nationale chargé de réaliser des travaux d’évaluation portant sur des politiques publiques dont le champ dépasse le domaine de compétence d’une seule commission permanente.

Il s’agissait alors de mettre en place un organe dédié à ces évaluations, en capacité de mesurer ex post les effets des politiques publiques par rapport aux objectifs initialement fixés. L’intérêt des études d’impact et de la semaine de contrôle, institués au même moment, s’en trouvait renforcé.

En application de l’alinéa 4 de l’article 146-2 du Règlement, son bureau est composé, depuis 2014 ([183]), de neuf membres :

– le Président de l’Assemblée nationale, qui le préside ;

– quatre vice-présidents, dont l’un au moins appartient à un groupe d’opposition ;

– quatre secrétaires.

À l’origine, une disposition relative à l’ordre de préséance des vice-présidents avait été introduite dans le règlement intérieur du Comité. Elle n’a toutefois jamais trouvé à s’appliquer.

Aussi, afin de renforcer la participation du Comité à la fonction de contrôle et d’évaluation, l’article 38 de la proposition de résolution prévoit, à l’instar de ce qui est proposé pour le Bureau de l’Assemblée à l’article 1er, que le premier des vice-présidents du CEC dans l’ordre de préséance appartient à un groupe d’opposition.

L’article 38 ajoute par ailleurs que la composition du bureau du Comité s’efforce de reproduire la configuration politique de l’Assemblée nationale, comme cela est prévu pour de nombreux organes de l’Assemblée ([184]).

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Article 39
(art. 147 du Règlement de lAssemblée nationale)
Dématérialisation de la transmission des pétitions

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article a pour objet d’organiser la transmission des pétitions au Président de l’Assemblée nationale par voie dématérialisée.

En effet, la rédaction de l’article 147 du Règlement, qui fixe les conditions de leur dépôt, implique que ces dernières soient transmises en format papier. Par ailleurs, toute pétition doit indiquer la demeure du pétitionnaire et être revêtue de sa signature.

En application de la réforme proposée, les pétitions devront désormais être transmises par voie électronique et devront comporter, outre leur signature, les adresses électroniques et postales de leurs auteurs.

       Modifications apportées par la Commission

Outre un amendement de précision, la Commission a adopté un amendement pour renvoyer les conditions d’authentification des pétitionnaires à une décision du Bureau de l’Assemblée nationale.

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Article 40
(art. 148 du Règlement de lAssemblée nationale)
Conditions dexamen et de publicité des pétitions

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article tend à réviser la procédure d’examen et de publicité des pétitions adressées au Président de l’Assemblée nationale.

       Dernières modifications intervenues

La procédure des pétitions a été modifiée par les résolutions n° 146 du 23 octobre 1969 et n° 199 du 17 décembre 1969. Ces dernières ont notamment apporté des précisions sur les modalités du débat pouvant être organisé sur le thème soulevé par la pétition et les suites devant être données, le cas échéant, à la transmission d’une pétition au ministre compétent.

       Modifications apportées par la Commission

La Commission a adopté deux amendements visant à :

– étendre aux collectivités d’outre-mer les conditions de domiciliation des pétitionnaires, prévues pour apprécier la recevabilité des pétitions ;

– renvoyer la définition de ces conditions de domiciliation à une décision du Bureau de l’Assemblée nationale.

I.   Un droit de pétition auprès des assemblées parlementaires en désuétude

1.   Le droit de pétition, un héritage révolutionnaire

De manière schématique, « il est possible de distinguer deux types de pétitions. Celles nombreuses, qui portent sur la situation personnelle du pétitionnaire, et les autres, dont limportance varie en fonction des périodes, portant sur un sujet politique et visant la satisfaction de lintérêt général. » ([185])

Issu de la pratique des doléances de l’Ancien régime, le droit de pétition prend un essor particulier sous la Révolution française ([186]). Des délégués de pétitions pouvaient ainsi régulièrement s’exprimer à l’Assemblée nationale ou à la Convention. Aboli par le régime napoléonien, le droit de pétition a revu le jour sous les monarchies constitutionnelles, avec la création d’une commission parlementaire ad hoc – la commission des pétitions – chargée de filtrer les pétitions éligibles à l’examen du Parlement. Ce droit, alors considéré comme un correctif au suffrage censitaire, tombe progressivement en désuétude avec l’instauration de la République et du suffrage universel masculin. Par ailleurs, le contenu des pétitions perd progressivement sa dimension politique pour se recentrer sur l’évocation de situations individuelles, notamment lorsque les voies de recours juridictionnelles sont épuisées.

Ce droit reste actuellement peu utilisé alors même que la possibilité d’y recourir a été étendue auprès de divers organes extraparlementaires à l’instar :

– du défenseur des droits ([187]), qui peut être saisi d’une pétition transmise par une commission parlementaire ([188]) ;

– des collectivités territoriales, depuis la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, qui peuvent être saisies, par voie de pétition, d’une demande d’inscription à leur ordre du jour d’un sujet relevant de leur compétence (article 72-1 de la Constitution). Cette faculté, du fait des règles l’encadrant, est toutefois rarement mise en œuvre ([189]) ;

– du Conseil économique, social et environnemental, sur le fondement de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 qui entendait favoriser la participation des citoyens au débat public. Le seuil de 500 000 signatures à atteindre pour garantir la recevabilité de la pétition devait permettre, dans le même temps, de recentrer cet outil sur des questions d’intérêt général. Cette procédure n’a cependant jamais été utilisée avec succès.

Le renouvellement de cet outil démocratique s’est donc concentré jusqu’à présent sur d’autres institutions que le Parlement, sans toutefois que son recours, dans le cadre institutionnel ainsi rappelé, ne conduisent aux résultats escomptés.

2.   L’exercice du droit de pétition devant les assemblées parlementaires

Le droit de pétition devant les assemblées parlementaires est prévu par l’article 4 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 ([190]) et par les règlements des assemblées. Les règles encadrant son exercice sont minimales, conformément à une tradition constante consistant à lui reconnaître le statut d’un droit naturel pouvant être exercé par tous, et non d’un droit politique soumis à des conditions de nationalité ou de majorité par exemple.

Les pétitions adressées aux Présidents des assemblées peuvent ainsi être individuelles ou collectives, émettre une suggestion ou une réclamation.

À l’Assemblée nationale, ces pétitions sont recevables dès lors qu’elles remplissent certaines formalités de forme : elles doivent être adressées au Président et comporter l’adresse et la signature du pétitionnaire. Elles ne sont soumises à aucune condition de nationalité, de résidence ou d’âge de leur auteur ni à aucune condition tenant à leur objet ou au nombre de signataires. La majorité d’entre elles porte toutefois sur le vote, la modification ou l’abrogation de lois, l’organisation de débats sur des sujets d’actualité ou encore l’intervention du Président de l’Assemblée nationale auprès de personnalités ou d’institutions politiques françaises ou étrangères, afin de résoudre une difficulté ou de faire évoluer une situation.

Comme cela a été précédemment rappelé ([191]), ces dernières sont renvoyées à la commission des Lois, compétente à l’Assemblée nationale en application de l’article 36 de son Règlement. Le rapporteur qu’elle désigne propose à la Commission, après examen, de les classer, de les renvoyer à une autre commission ou à un ministre, ou de les soumettre à l’Assemblée nationale.

3.   Un droit peu utilisé aux effets limités

Le nombre de pétitions soumises à l’Assemblée nationale est en baisse constante, une quinzaine d’entre elles étant traitées par la commission des Lois par session.

Cinquante-deux pétitions ont ainsi été examinées par la commission des Lois de l’Assemblée nationale sous la XIVe législature.

Source : commission des Lois.

Sous la présente législature, 36 pétitions ont été déposées, à la date de publication de ce rapport. Toutes ont fait l’objet d’un examen par la commission des lois, qui s’est réunie à cet effet à quatre reprises, décidant d’en classer 23 et d’en renvoyer 13 à une autre commission (cet examen par une autre commission conduisant lui-même en général au classement).

Cette évolution a plusieurs explications, dont principalement : l’essor des plateformes de recueil de signatures en ligne dont les pétitions ne sont pas recevables formellement par l’Assemblée nationale ; la sollicitation directe des parlementaires ; le développement des modes alternatifs de règlement des litiges (notamment en recourant au Défenseur des droits) ; l’absence de visibilité médiatique et les délais de recueil des signatures, puis de traitement des pétitions qui peuvent les priver d’effet utile.

Toutefois, le renforcement de la participation citoyenne à la vie politique est nécessaire pour consolider le fonctionnement de nos institutions démocratiques et répondre au souhait exprimé en ce sens par nombre des citoyens. Les consultations citoyennes s’inscrivent dans ce cadre et la commission des Lois y participe : elle a ainsi initié une consultation sur les contenus haineux ou injurieux en ligne sur Internet en amont de l’examen d’une proposition de loi ayant cet objet qui a été inscrite à l’ordre du jour à la fin du mois de mai.

La réforme du droit de pétition proposé par le présent article s’inscrit également dans une réflexion d’ensemble sur les outils à même d’assurer cette évolution.

II.   un droit de pétition modernisé

1.   La proposition du groupe de travail parlementaire sur la démocratie numérique et les nouvelles formes de participation citoyenne

Alors que de nombreux pays reconnaissent actuellement un droit de pétition en ligne, comme l’Allemagne, la Belgique, le Danemark ou le Royaume-Uni, le groupe de travail sur la démocratie numérique et les nouvelles formes de participation citoyenne à l’Assemblée nationale ([192]) a souligné la nécessité de renouveler profondément les modalités d’exercice de ce droit devant les assemblées parlementaires. ([193])

Le droit de pétition constitue, en effet, l’une des principales modalités de participation des citoyens à la vie politique et s’est renforcé dans le cadre des nouveaux usages numériques. ([194])

À ce titre, en conclusion de ses travaux, ce groupe de travail a proposé, outre la reconnaissance formelle de ce droit dans la Constitution, de prévoir que :

– la signature des pétitions puisse être organisée de manière physique ou numérique, sous certaines garanties ; ([195])

– après examen par une commission ou une délégation permettant de s’assurer de sa recevabilité ([196]), une pétition atteignant un certain nombre de signataires puisse faire l’objet d’un rapport de présentation par la commission compétente et d’un débat en commission ou en séance publique.

2.   Les dispositions proposées

S’inspirant de ces préconisations, le présent article prévoit, en premier lieu, de garantir une meilleure prise en compte des pétitions recueillant un nombre élevé de signatures.

Une mise en ligne systématique des pétitions signées par 100 000 pétitionnaires est ainsi proposée afin de mieux assurer leur publicité. Aucune signature ne pourra être ajoutée, ni retirée après enregistrement.

Par ailleurs, sur proposition du président de la commission compétente ou d’un président de groupe, un débat sur une pétition signée par plus de 500 000 citoyens domiciliés dans 30 départements au moins pourra être inscrit à lordre du jour par la Conférence des Présidents.

En second lieu, le présent article révise la procédure d’examen des pétitions de manière à prévoir que la commission compétente sur le sujet abordé par la pétition pourra décider, sur proposition de son rapporteur, soit de la classer, soit de l’examiner directement. Cette disposition constitue en cela une coordination avec l’article 4 de la proposition de résolution qui supprime la compétence spécifique reconnue à la commission des Lois pour traiter de l’ensemble des pétitions.

Si la commission décide de l’examiner au fond, un rapport sera publié contenant le texte de la pétition et le compte rendu des débats en commission, auxquels auront pu être associés, le cas échéant, les premiers signataires de la pétition. La possibilité d’auditionner les ministres compétents est également expressément mentionnée, bien que cela soit déjà possible en application de l’alinéa 2 de l’article 45 du Règlement.

3.   Les apports de la Commission

La Commission a apporté deux précisions sur les conditions de domiciliation des pétitionnaires :

– la condition de répartition géographique des pétitionnaires sur 30 départements au moins a été étendue aux collectivités d’outre-mer ;

– la fixation des conditions de domiciliation et notamment, la répartition minimale par département et collectivité d’outre-mer a été renvoyée à une décision du Bureau.

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Article 40 bis
(art. 151 du Règlement de lAssemblée nationale)
Coordination avec les dispositions relatives aux pétitions

Introduit par la Commission

Cet article de coordination supprime la mention relative au cas d’un député ayant déposé une pétition. En effet, cette pratique est inusitée, les députés disposant d’autres moyens d’intervention plus appropriés.

Toutefois, le député qui demandera l’inscription d’une pétition à l’ordre du jour de l’Assemblée continuera de disposer d’une prise de parole spécifique dans le cadre de l’éventuel débat en séance publique.

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Article 41
(art. 159 du Règlement de lAssemblée nationale)
Contrôle de la présence des députés en séance publique en cas de déport

Adopté par la Commission avec modifications

       Résumé du dispositif et effets principaux

Le présent article précise qu’un député inscrit sur le registre public des déports est considéré comme étant présent en séance publique.

       Dernières modifications intervenues

Issu de la résolution n° 292 du 27 mai 2009, l’article 159 du Règlement, relatif aux sanctions financières en cas d’absence des députés, reprend les dispositions qui, inscrites à l’article 162, avaient été modifiées par la résolution n° 151 du 26 janvier 1994, afin de supprimer la limitation du nombre de jours, par session ordinaire, pour lesquels les députés peuvent être excusés et de confier au Président le soin d’accorder les excuses.

       Modifications apportées par la Commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a précisé qu’il revient au Bureau de définir les conditions dans lesquelles un député qui s’est inscrit sur le registre public des déports est considéré comme étant présent en séance publique.

I.   Le droit en vigueur

L’article 159 du Règlement définit les règles selon lesquelles des sanctions financières – prenant la forme de retenues sur l’indemnité parlementaire – peuvent être infligées aux députés qui ne prennent pas régulièrement part aux travaux de l’Assemblée nationale.

La sanction intervient lorsqu’un député a participé à moins des deux tiers des scrutins publics intervenus pendant une session. Elle est aggravée s’il a pris part à moins de la moitié de ces scrutins.

Il est toutefois tenu compte :

– des cas où une délégation de vote eût été possible ou a été donnée dans le respect de l’ordonnance portant loi organique relative à ces délégations ;

– des votes sur les motions de censure car il ne saurait être question de pénaliser les députés qui, soutenant le Gouvernement, n’y participent pas ;

– et, enfin, des congés accordés par le Président. Les députés peuvent en effet s’excuser de ne pouvoir assister à une séance déterminée ; ces demandes doivent faire l’objet d’une déclaration écrite, motivée et adressée au Président.

II.   la rÉforme proposÉe

Disposition miroir de celle qui est prévue, au stade de la commission, par l’article 6 de la proposition de résolution, le présent article complète l’article 159 du Règlement afin de prévoir qu’un député inscrit sur le registre public des déports est considéré comme étant présent en séance publique et ne peut donc se voir sanctionné.

Le 6 juin 2018 ([197]), le Sénat a introduit une disposition similaire à l’article 23 bis de son Règlement qui prévoit qu’ « un sénateur dont le déport est inscrit sur le registre public [des déports] (…) est également considéré comme présent en séance (…) au cours des travaux entrant dans le champ de ce déport ».

III.   Les modifications apportées par la commission

À l’initiative du rapporteur, la Commission a précisé qu’il revient au Bureau de l’Assemblée de définir les conditions dans lesquelles un député qui s’est inscrit sur le registre public des déports est considéré comme étant présent en séance publique.

Il s’agira en particulier, pour le Bureau, de prévenir des comportements qui pourraient s’apparenter à des détournements ou à des abus de procédure.

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Article 42
Entrée en vigueur de la résolution

Adopté par la Commission sans modification

L’article 42 de la proposition de résolution fixe au 1er septembre 2019 la date d’entrée en vigueur de ses dispositions.

 


1

 

   Comptes rendus des débats

Lors de ses réunions des mercredis 15 et 22 mai 2019, la Commission examine la proposition de résolution tendant à modifier le Règlement de l’Assemblée nationale.

1.   Première réunion du mercredi 15 mai 2019 à 9h30 (discussion générale puis avant l’article 1er à après l’article 6 de la proposition de résolution)

Lien vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.7622064_5cdbbf0dae770.commission-des-lois--modification-du-reglement-de-l-assemblee-nationale--15-mai-2019

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour examiner la proposition de résolution tendant à modifier le Règlement de l’Assemblée nationale, qui est présentée par le président Richard Ferrand. Ce texte s’inscrit dans le prolongement des travaux que celui-ci a menés avec les présidents de groupe depuis plus de six mois et de la réflexion amorcée auparavant par les groupes de travail pluralistes mis en place à l’initiative de son prédécesseur, François de Rugy.

Je vous rappelle que le Règlement, qui a déjà été réformé à plus de trente reprises sous la Ve République, est notre règle commune et que ses modifications sont soumises à l’appréciation du Conseil constitutionnel. À texte particulier, rapporteur particulier, puisqu’il s’agit de M. Sylvain Waserman, vice-président de l’Assemblée nationale et membre du groupe Mouvement Démocrate et apparentés (MODEM), à qui je cède la parole sans plus tarder.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Issue d’une réflexion entamée dans le cadre des groupes de travail créés par François de Rugy, qui s’est poursuivie par la consultation des différents présidents de groupe ainsi que d’anciens présidents de l’Assemblée nationale par le président Richard Ferrand, la proposition de résolution qui nous est soumise reflète un équilibre. D’un côté, elle tend à améliorer l’efficacité et, à certains égards, la clarté de nos travaux ; cette efficacité est nécessaire, car le nombre d’amendements augmente et nos discussions doivent être plus fluides mais, j’espère vous le montrer, elle n’est antinomique ni avec la qualité des débats ni avec la précision et la clarté de l’expression des différents groupes politiques. De l’autre, la proposition de résolution vise à accorder des droits nouveaux – que je crois forts, d’un point de vue démocratique – à l’opposition, qui pourrait penser que la recherche de l’efficacité est un moyen de diminuer son temps de parole.

Il est ainsi proposé que le rapporteur d’une commission d’enquête – qui dispose de certaines prérogatives, notamment le contrôle sur pièces et sur place – ou d’une mission d’information créée par la Conférence des Présidents puisse être issu d’un groupe d’opposition ; que les questions au Gouvernement soient organisées de manière plus dynamique et réservant davantage de place à l’opposition ; que la première vice-présidence de l’Assemblée nationale et celle du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC) soient attribuées à l’opposition ; que les propositions de loi déposées dans le cadre des journées réservées puissent être discutées sans qu’une motion de procédure soit adoptée de manière systématique. Ces avancées majeures participent de l’équilibre de la proposition de résolution.

Par ailleurs, beaucoup d’entre nous s’accordent sur la nécessité de revivifier cet acquis de la Révolution française qu’est le droit de pétition, afin que la voix citoyenne puisse mieux s’exprimer dans notre enceinte.

Enfin, le texte comporte des dispositions relatives à la déontologie et à l’éthique qui tendent, d’une part, à traduire dans notre Règlement la loi dite « Sapin II » et la loi pour la confiance dans la vie politique et, d’autre part, à clarifier les prérogatives de la déontologue. Je défendrai un certain nombre d’amendements pour aller un peu plus loin que la proposition du président Ferrand dans ce domaine.

Mon rôle, en tant que rapporteur, est d’essayer de vous convaincre que le texte a atteint un point d’équilibre. Peut-être faudra-t-il procéder à quelques ajustements au cours de nos débats, en commission et en séance publique, mais il est dans notre intérêt commun de préserver cet équilibre, auquel contribue tant la majorité, qui consent à réduire le nombre de ses questions au Gouvernement et à donner plus de place à l’opposition, que l’opposition, à qui il est demandé d’accepter que nos débats soient plus fluides et plus efficaces. En tout cas, je m’efforcerai de vous convaincre que ces limitations sont, non pas impératives, mais indicatives et qu’elles rendront nos travaux plus clairs pour nos concitoyens.

Encore une fois, certains points devront probablement être retravaillés – je pense notamment à la gestion du temps –, mais nous avons pour enjeu commun la construction et l’identification de ce point d’équilibre, tant il est vrai que la logique démocratique veut qu’un jour, l’opposition devienne majorité, et inversement.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Nous allons maintenant entendre les orateurs des groupes.

M. Bruno Questel. Cette proposition de résolution est le résultat de dix-huit mois de travail et je tiens à souligner, au nom du groupe La République en Marche, qu’au cours des six derniers mois le président de l’Assemblée nationale a souhaité consulter l’ensemble des groupes parlementaires pour aboutir à un texte équilibré.

Celui-ci comporte quatre axes forts. Il a en effet pour objet d’améliorer l’ensemble de la procédure législative, d’approfondir les droits de l’opposition et des députés non-inscrits, de refonder le droit de pétition pour lui donner davantage de sens et, enfin, de structurer le rôle de la déontologue.

En matière législative, l’une des dispositions les plus importantes est celle qui vise à instaurer – après le Sénat, qui nous a précédés en ce domaine – une procédure d’adoption des textes en commission, qui contribuera, comme la révision des conditions d’exercice de la saisine pour avis, à alléger la procédure. Il nous est par ailleurs proposé d’améliorer les fondements et les contours des règles constitutionnelles relatives au droit d’amendement, notamment en matière de recevabilité, de réduire la durée de la défense d’une motion de rejet préalable et de supprimer la motion de renvoi en commission. Cette disposition, qui résulte du constat qu’aucune motion de ce type n’a été adoptée depuis des lustres, a pour corollaire l’ensemble des droits supplémentaires accordés aux groupes de l’opposition. Enfin, il nous est proposé d’aménager la procédure du temps législatif programmé.

S’agissant des droits de l’opposition et des groupes minoritaires, une place prépondérante – et cela ne doit pas être écarté d’un revers de main par nos collègues – leur sera désormais accordée dans le cadre des commissions d’enquête et des missions d’information.

M. Guillaume Larrivé. La commission « Benalla » nous a montré à quel point cela fonctionnait bien !

M. Bruno Questel. On peut toujours réécrire l’histoire, mon cher collègue. Je mesure là votre souhait de participer d’une manière constructive et positive à nos travaux...

M. Philippe Gosselin. Il est vrai qu’en tant que rapporteur, il a été un peu muselé !

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je vous en prie, mes chers collègues, laissez M. Questel s’exprimer.

M. Bruno Questel. En tout cas, il vous sera difficile de nous convaincre que vous êtes contre la modification de l’organisation des questions au Gouvernement. En effet, par cette mesure, la majorité témoigne de sa volonté de permettre, chaque semaine, à l’opposition d’interpeller, comme bon lui semble, l’exécutif sur l’ensemble des politiques publiques. L’amélioration de la représentation des groupes au Bureau de l’Assemblée nationale et au sein des commissions mixtes paritaires mérite également d’être soulignée, ainsi que celle des non-inscrits dans plusieurs organes de l’Assemblée.

En ce qui concerne la rénovation du droit de pétition, le texte tend à créer un véritable outil de participation citoyenne à l’élaboration de la loi et à répondre ainsi, sans atermoiement aucun, à une réelle demande que la population a exprimée au cours des six derniers mois.

Enfin, les articles 16 à 20 visent à renforcer le rôle du déontologue. Il nous faut, là encore, être irréprochables, qu’il s’agisse de nos comportements ou des règles que nous édictons, afin de montrer à celles et ceux qui, par leurs suffrages, nous ont désignés pour les représenter au sein de cette belle maison que nous n’avons peur de rien.

M. Philippe Gosselin. Quelques mots, tout d’abord, pour préciser que le groupe Les Républicains a bien entendu à cœur, à l’instar, me semble-t-il, de tous les autres groupes, d’améliorer la procédure parlementaire. Chacun peut en effet constater que nos méthodes de travail ne sont pas toujours satisfaisantes, que nous rencontrons des difficultés d’organisation et qu’il peut être fait usage, mais c’est assez rare, de quelques techniques d’obstruction. Cependant, le Règlement actuel n’est peut-être pas utilisé comme il pourrait l’être, notamment par les présidents de séance, qui ont à leur disposition un certain nombre de moyens qu’ils n’utilisent plus. Ils ont ainsi la possibilité d’interrompre les inscriptions sur les articles ou de refuser des suspensions de séance répétées.

Néanmoins, nous partageons le souci de mieux faire, dans l’intérêt général. Aussi regardons-nous d’un œil tout à fait favorable cette proposition de modification du Règlement. À cet égard, je donne volontiers acte au rapporteur de sa volonté de bien faire ; il n’est évidemment pas en cause, non plus que M. Ferrand puisque nous avons la chance d’avoir désormais un président – et cela contraste avec des périodes récentes – qui semble défendre les droits du Parlement et des parlementaires.

Cela dit, on justifie la réforme qui nous est proposée par l’inflation des amendements et le foisonnement, pour le dire ainsi, de l’expression parlementaire. Or, notons que cette évolution s’explique d’abord par l’augmentation du nombre des groupes parlementaires qui, faut-il le rappeler, n’ont jamais été aussi nombreux. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons que soit relevé le nombre minimum de députés requis pour constituer un groupe. Nous éviterions ainsi une inflation législative tous azimuts. Je sais que cette position n’est pas forcément partagée par d’autres, mais mon propos vise surtout les groupes que je qualifierai de « techniques », puisqu’ils sont composés de députés qui se rassemblent sur la base d’affinités plus conjoncturelles que politiques, au détriment, du reste, des autres groupes, de la majorité comme de l’opposition, qui voient leurs moyens diminuer à due proportion.

Cependant, nous pouvons nous retrouver sur un certain nombre de sujets. Ainsi, nous estimons que la procédure de la législation en commission ne soulève pas de problème particulier. Ces dernières semaines, les textes relatifs à la Polynésie française et aux sapeurs-pompiers auraient pu être examinés selon cette procédure sans que nous trahissions la représentation nationale ou les citoyens français, puisqu’ils ont été adoptés à l’unanimité. Il en va de même pour la suppression des explications de vote sur les articles. Quant aux motions de procédure, nous proposerons que leur défense soit limitée à quinze minutes, et non à dix minutes comme proposé dans le texte.

En revanche, il y a des lignes jaunes que nous ne pouvons pas franchir. Je pense à la suppression de la motion de renvoi en commission, à la limitation de la discussion générale à l’intervention d’un orateur par groupe – pour une durée de cinq minutes, sans tenir compte du poids de chaque groupe –, à la restriction à un seul orateur par groupe des interventions sur les articles et sur les amendements identiques… Bref, nous avons le sentiment que le droit pour le parlementaire de s’exprimer, droit qui est individuel – chacun d’entre nous représente la Nation et doit pouvoir s’exprimer au nom de celle-ci – est, sinon muselé, du moins largement limité. Or, comme nous craignons – et c’est ma conclusion – que la révision constitutionnelle n’en remette une deuxième couche, vous comprendrez qu’à ce stade de nos débats, nous soyons réservés, c’est peu de le dire… face à cette réforme.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Tout d’abord, je tiens à saluer le travail effectué, à l’initiative du président de l’Assemblée nationale, par l’ensemble des présidents de groupe. Le moment est en effet opportun, me semble-t-il – nous sommes tous d’accord, je crois, sur ce point – pour moderniser notre Règlement. Je veux également remercier le rapporteur, Sylvain Waserman, pour la qualité de ses travaux et celle de nos échanges.

L’inflation législative n’est pas propre à cette législature, mais elle croît de façon exponentielle depuis de nombreuses années. Or, si tout le monde s’accorde à reconnaître qu’il faut moins et mieux légiférer, force est d’admettre qu’il est difficile d’y parvenir. Ainsi, le nombre de jours de séance a augmenté de 20 % et celui des heures de séance de 33 % par rapport à la précédente législature.

Le temps d’examen des textes est également un réel problème. Il est bien évidemment essentiel pour la démocratie que les parlementaires puissent s’exprimer et défendre leur position ; il ne s’agit donc pas de les museler. Mais est-il vraiment utile que plusieurs orateurs appartenant au même groupe défendent la même position ? La multiplication des prises de parole – sur les motions de procédure, dans la discussion générale, sur les amendements, dans les explications de vote sur un article ou sur l’ensemble d’un texte – nuit à la lisibilité de nos débats pour nos concitoyens : les interventions répétitives lassent les députés eux-mêmes et ceux qui suivent nos discussions.

Je tiens à insister sur un point particulièrement important pour le groupe MODEM : je veux parler de l’heure tardive à laquelle nous votons parfois les textes examinés. Comment expliquer aux Français que l’on peut travailler efficacement et correctement à deux heures du matin ? Surtout, cette pratique a un effet délétère sur la confiance qu’ils nous portent car, dans le climat de suspicion actuel, ils croient que nous votons ainsi des textes « en cachette » pour faire passer des dispositions qui les désavantagent.

J’ajoute que nous manquons souvent de temps pour pouvoir travailler correctement. Ainsi, il est fréquent que le rapport de la commission – qui a un réel intérêt si l’on veut pouvoir bien travailler – ne soit pas accessible avant l’expiration du délai de dépôt des amendements en séance publique ou qu’il le soit très peu de temps avant. Il représente pourtant un travail important pour les rapporteurs et les administrateurs, à qui nous demandons beaucoup.

L’organisation de nos travaux pèse également sur les conditions de travail des fonctionnaires de l’Assemblée, des collaborateurs parlementaires et des chargés d’études des groupes. Je suis, pour ma part, choquée qu’on leur demande de travailler la nuit et le week-end. En outre, presque tous les textes sont examinés en procédure accélérée, ce qui permet de s’exonérer du délai de six semaines prévu par la Constitution et le Règlement entre le dépôt d’un texte et son examen.

Il nous faut donc repenser notre mode de fonctionnement. Nous produisons beaucoup, trop, et la qualité de nos travaux, donc l’efficacité de nos lois, en pâtit. C’est pourquoi le groupe MODEM souscrit aux quatre objectifs de cette proposition de résolution. Nous devons en effet rationaliser le travail parlementaire et fluidifier les débats, tout en renforçant les droits des oppositions et en favorisant l’expression citoyenne et la rigueur de notre déontologie. Les débats parlementaires doivent devenir plus transparents ; il y va du rétablissement du lien de confiance avec nos concitoyens. Les événements que traverse notre pays depuis plusieurs mois nous montrent combien il est urgent d’agir en ce sens.

C’est pourquoi nous estimons nécessaire de supprimer les séances de nuit et, en contrepartie, de permettre aux membres de l’Assemblée nationale de siéger le lundi et le vendredi après-midi. Les séances publiques se tiendraient ainsi de neuf heures à treize heures, puis de quatorze heures à vingt heures, avec une prolongation possible jusqu’à vingt et une heures trente – nous y reviendrons lors de l’examen des amendements.

Nous proposons également un contrôle strict du nombre des amendements grâce à une application plus poussée des articles 40, 41 et 45 de la Constitution, une limitation du nombre des orateurs inscrits sur les articles, l’introduction d’une procédure de législation en commission – à laquelle un dixième des membres de l’Assemblée nationale pourraient s’opposer – ou encore l’obligation d’organiser les scrutins solennels après la séance hebdomadaire consacrée aux questions au Gouvernement.

En conclusion, il nous faudra trouver un point d’équilibre entre la rationalisation du travail parlementaire et la nécessaire garantie du droit d’expression des députés, afin d’améliorer la qualité des lois et de mieux associer nos concitoyens à leur fabrication.

M. Michel Zumkeller. Le groupe UDI, Agir et Indépendants tient tout d’abord à saluer la méthode consistant à associer les présidents de groupe à l’élaboration de la réforme. Elle a en effet permis à notre président, Jean-Christophe Lagarde, de défendre certaines de nos idées. Je pense, par exemple, à la proposition de créer des missions chargées de suivre la rédaction des ordonnances ou de rédiger des contributions écrites afin de compenser la réduction du temps d’expression orale. Par ailleurs, nous approuvons l’organisation d’une seule séance de questions au Gouvernement, plus dense, durant laquelle les députés auraient la possibilité de répondre aux ministres interrogés, ainsi que la proposition – qui avait été émise par Jean-Luc Warsmann lorsqu’il présidait la commission des Lois – de voter certains textes en commission.

Cependant, nous avons déposé quelques amendements car il nous semble que, sous certains aspects, le texte peut encore être amélioré. En outre, nous nous opposons à la limitation à cinq minutes des interventions dans la discussion générale ; nous proposerons donc d’allonger ce temps de parole.

Monsieur le rapporteur, vous avez évoqué l’équilibre du texte ; je crois que tout est là. Il nous faut parvenir à un équilibre entre, d’un côté, une Assemblée qui travaille et qui est active – car nos compatriotes nous regardent – et, de l’autre, la possibilité pour tous les groupes, notamment ceux de l’opposition, de s’exprimer. De fait, notre assemblée est devenue trop bavarde, si bien qu’elle n’est pas comprise et ne fait pas correctement son travail. Nous devons remédier à cette situation sans pour autant réduire les droits de l’opposition, car chacun doit pouvoir s’exprimer.

Nous ferons des propositions à ce sujet. Il nous paraît notamment nécessaire d’augmenter le nombre des journées réservées, et ce pour une raison simple : lorsqu’une proposition de loi est adoptée – c’est rare, mais cela arrive –, elle est ensuite examinée au Sénat mais, lorsqu’elle revient devant l’Assemblée, le groupe qui l’a déposée ne peut plus la défendre car il a déjà utilisé sa « niche ». C’est une incohérence sur laquelle nous devrions pouvoir revenir.

Par ailleurs, il convient de renforcer la capacité d’initiative et de contrôle de l’Assemblée. Nous estimons également que les votes solennels devraient être systématiquement organisés le mardi, après les questions au Gouvernement, car lorsque les textes sont votés, et c’est trop souvent le cas, en séance de nuit, peu de députés participent au scrutin et nous donnons le sentiment que nous ne travaillons pas, ce qui est faux. Nous pourrions donc, comme cela se fait au Parlement européen, réserver une partie de la séance du mardi après-midi au vote solennel de trois ou quatre textes. Ce n’est pas difficile à organiser et ce serait efficace.

En conclusion, nous sommes très ouverts à la discussion. Ce texte peut nous permettre d’avancer, mais s’il ne devait être voté que par les deux groupes de la majorité, nous aurions manqué une occasion. La majorité doit se montrer également ouverte aux amendements des groupes de l’opposition – ce n’est pas une menace. Ce texte est un enjeu commun. Travaillons donc ensemble !

M. David Habib. Madame la présidente, vous avez eu l’honnêteté d’indiquer que le Règlement avait été révisé plus de trente fois depuis 1958. Permettez-moi de rappeler que la dernière modification en date, celle de 2014, avait fait consensus, le président Bartolone ayant souhaité, en annonçant cette réforme, que l’ensemble des groupes puissent se retrouver dans le texte adopté. De fait, que ce soit en matière d’évaluation et de contrôle ou de rationalisation de l’action parlementaire, ce consensus avait été construit. Nous aurions souhaité que la proposition de résolution qui nous est soumise fasse également l’unanimité, car c’est, me semble-t-il, le préalable nécessaire à toute réforme du Règlement. Je ne veux pas mettre en cause le président de l’Assemblée nationale, qui a fait le nécessaire pour que chaque groupe soit informé et entendu autant que possible, mais je constate que le préalable de votre démarche ne permettait pas d’aboutir à un consensus.

Cette proposition de résolution est en effet prise « en sandwich » entre deux projets de révision constitutionnelle : l’une a avorté, l’autre est à venir. Or, vous vous apprêtez à aborder celle-ci en vous étant préalablement dotés d’instruments réglementaires qui vous permettront de contingenter l’expression des oppositions. On peut d’ailleurs s’étonner de la chronologie de ces différentes réformes. Il aurait été en effet logique d’examiner cette proposition de résolution après la révision constitutionnelle, une fois la nouvelle architecture institutionnelle adoptée. Or, il n’en est rien. Cela crée une situation très particulière, car nous discutons de ce texte en ayant en tête votre volonté de limiter l’expression de l’opposition.

M. le rapporteur, qui a fait un excellent travail d’écoute, a indiqué que l’objectif était de remédier aux défaillances de la procédure législative. Or, ces défaillances sont tout autant le fait du Parlement que du Gouvernement – mais vous ne faites rien pour limiter celles de l’exécutif. Et, au sein du Parlement, les députés de la majorité en sont tout autant responsables que ceux de l’opposition. En effet, l’augmentation exponentielle du nombre des amendements est davantage due aux deux groupes majoritaires qu’à ceux de l’opposition. Quant au délai qui sépare la présentation d’un projet de loi au conseil des ministres de la promulgation de la loi, M. Marleix a indiqué, dans un excellent rapport, qu’il est moins long en France qu’en Allemagne.

Certes, quelques-unes des mesures proposées sont souhaitables et, tout au long de la discussion, nous saluerons avec honnêteté ces avancées. Mais d’autres sont inacceptables. Je souscris, à cet égard, aux propos de M. Gosselin. Le contingentement de la parole va à l’encontre de ce que tout Parlement doit être, c’est-à-dire un lieu de débat et non uniquement un lieu de décision. Des idées différentes doivent pouvoir s’exprimer à l’Assemblée nationale.

À ce propos, vous avez fait le choix de privilégier les groupes. La Constitution proscrit le mandat impératif, et chacun d’entre nous doit pouvoir exprimer un avis contraire à celui de son groupe, car il nous arrive à tous d’être en désaccord avec celui-ci. Ainsi, pour ma part, inspiré par la situation et l’histoire de mon territoire, je n’avais pas voté, contrairement à mon groupe, le texte visant à interdire l’extraction de gaz et de pétrole. Or, si le dispositif que vous proposez avait été en vigueur, je n’aurais pas pu m’exprimer ! Chacun d’entre vous, j’en suis convaincu, pourrait se trouver dans une situation analogue.

En conclusion, madame la présidente, nous participerons à ces travaux avec bienveillance, mais nous souhaitions exprimer, à ce stade de la discussion, nos très vives inquiétudes !

M. Ugo Bernalicis. Cette réforme, certains des orateurs précédents l’ont dit très justement, intervient entre une révision constitutionnelle qui n’a pas abouti et une révision constitutionnelle à venir. Or, on voit bien que son axe central est la réduction du temps de parole des parlementaires, moyennant quelques mesures qui peuvent globalement faire consensus. De fait, proposer que les présidents de groupe participent aux réunions du Bureau de l’Assemblée, cela ne mange pas de pain, surtout s’ils n’ont pas le droit de voter. Actuellement, des représentants de chaque groupe sont membres des bureaux des commissions mais, comme ils n’ont pas le droit de voter, certains d’entre eux finissent par ne plus assister aux réunions tant leur présence leur semble inutile. Mais, c’est vrai, vu de l’extérieur, cela fait bien : cela fait collégial, transparent…

Parmi les mesures visant à accorder des droits supplémentaires à l’opposition, quelles sont celles qui ne sont pas purement cosmétiques ou qui ne se contentent pas de nous donner un accès un peu plus large à une information que nous devrions déjà avoir ? Je me le demande. En ce qui concerne les commissions d’enquête parlementaire, par exemple, on nous présente comme une avancée le fait qu’un groupe d’opposition pourra choisir plus facilement sa fonction : président ou rapporteur. C’est intéressant, certes, mais le fond du problème n’est pas là. La véritable question, c’est celle du nombre de commissions d’enquête que l’on peut créer pendant une session. Actuellement, une fois qu’un groupe d’opposition a exercé son droit de tirage – avant le mois de décembre, car il faut que les travaux de la commission se terminent avant la fin de la session –, il ne peut plus, si un événement politique majeur concernant la majorité survient au mois de mars, exercer son rôle constitutionnel de contrôle de l’action du Gouvernement, quand bien même l’ensemble des groupes d’opposition seraient d’accord. On pourrait accorder de véritables contre-pouvoirs aux groupes d’opposition, mais ils ne figurent pas dans cette proposition de résolution.

S’agissant des questions au Gouvernement, des députés comme moi, qui apprécient les joutes verbales, pourraient se réjouir de pouvoir intervenir à nouveau après la réponse du ministre. Mais nous ne sommes pas tous faits du même bois : certains souhaitent simplement poser leur question et obtenir une réponse, sans forcément répliquer au Gouvernement. Du reste, on peut s’interroger sur la manière dont vous avez conçu ce droit nouveau accordé à l’opposition. En effet, actuellement, les questions au Gouvernement ont lieu le mardi et le mercredi : ce peut être deux jours de supplice, si deux sujets médiatiques sortent ces jours-là. En revanche, si l’on concentre l’exercice sur une journée, les journalistes ne pourront pas traiter trente questions de manière égale, de sorte qu’on réduit la possibilité de faire émerger des sujets. Ensuite, vous diminuez le nombre des questions posées par la majorité. Il est vrai qu’il est difficile pour ses députés d’interroger le Gouvernement sous la Ve République. Quelle question lui poser, sinon celle qu’il vous a soufflée de manière à pouvoir dérouler son plan de communication sur la réforme du moment ?

M. Rémy Rebeyrotte. C’est insupportable !

M. Ugo Bernalicis. Je comprends : à votre place, je ferais sans doute la même chose. En somme, les questions au Gouvernement ne permettent pas d’exercer un contrôle, au sens constitutionnel, de l’action du Gouvernement. C’est une fenêtre de tir médiatique, qui permet soit de défendre, soit de combattre une réforme. C’est pourquoi j’estime que les limiter à une seule séance est un recul.

Enfin, l’article 38 de la proposition de résolution prévoit que le premier des vice-présidents du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques dans l’ordre de préséance appartiendra obligatoirement à un groupe d’opposition. Mais est-ce bien l’enjeu majeur de l’évaluation et du contrôle des politiques publiques ? Le principal problème de ce comité, c’est qu’il ne compte que cinq administrateurs, qu’il n’a pas les pouvoirs d’une commission d’enquête et ne peut donc même pas procéder à des contrôles sur place. Quant au « printemps de l’évaluation », il permet de réduire le temps d’examen du projet de loi de finances, qui concentre les véritables décisions.

Je ne vois donc pas comment, en l’état actuel des choses, on pourrait se féliciter des droits nouveaux accordés aux oppositions. Mais je ne doute pas que la majorité nous éclairera au cours des débats.

M. Stéphane Peu. Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine (GDR) souscrit à l’objectif de moderniser, perfectionner, démocratiser, adapter le mode de fonctionnement de l’Assemblée nationale. Nous nous sommes, du reste, d’emblée déclarés disponibles pour y réfléchir. Mais, sans nier les avancées intéressantes que comporte le texte, nous constatons qu’un point majeur suscite l’hostilité de l’ensemble des groupes d’opposition : la réduction du temps et des modalités du débat parlementaire et la prééminence reconnue aux groupes sur la liberté individuelle de chaque député. Du reste, cet aspect de la réforme n’est pas sans soulever un problème constitutionnel, car chaque député, s’il s’affilie à un groupe, représente avant tout la Nation et rend des comptes au peuple qui l’a élu et non à son groupe. Cela nous paraît donc extrêmement grave. Quant aux autres mesures visant à limiter le débat parlementaire, Philippe Gosselin les a énumérées ; je n’y reviens donc pas.

Je connais la fascination de la majorité pour le fonctionnement du secteur privé, mais le Parlement, ce n’est pas un conseil d’administration, ce n’est pas seulement un endroit où on prend des décisions d’application immédiate ; comme l’indique l’étymologie du mot, c’est avant tout un lieu où on se parle, où on débat – c’est le lieu de la controverse politique.

J’ajoute que, du point de vue du fonctionnement de la démocratie dans notre pays, si on veut que l’opinion publique s’imprègne des questions débattues, que les citoyens se saisissent du débat parlementaire et se réapproprient les enjeux politiques et démocratiques, si on veut, en somme, que le débat soit éclairé par l’expression de l’opinion des uns et des autres, il faut, que vous le vouliez ou non, laisser du temps pour la discussion au Parlement.

À l’ère des réseaux sociaux et de l’accélération du temps médiatique, on a l’impression que tout doit aller plus vite, mais ce n’est pas vrai. Comme le disait précédemment un de nos collègues, en dépit de tout ce que l’on entend, nous avons beaucoup moins de temps pour le débat parlementaire en France qu’il n’y en a en Allemagne, par exemple. Cela pose une question démocratique, car il ne faut pas seulement envisager la chose sous l’angle de l’efficacité : l’enjeu est de savoir comment on fait vivre la démocratie dans notre pays, comment on permet aux citoyens de s’emparer des sujets. Pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, pour les députés communistes, c’est un point fondamental, sur lequel on ne saurait transiger.

Nous proposerons bien évidemment des amendements pour améliorer le texte : nous nous inscrivons de manière constructive dans ce débat, car nous avons tous intérêt à améliorer le fonctionnement de notre assemblée. Attention, toutefois : comme l’a dit David Habib, il n’est pas imaginable de réformer l’Assemblée en s’appuyant seulement sur le fait majoritaire. Il ne peut y avoir de réforme de l’Assemblée et de son fonctionnement que par la recherche du consensus. Si cela doit prendre du temps, prenons-en. Il ne s’agit pas là d’une loi : il est question du fonctionnement même de l’Assemblée. Comme le disait le rapporteur dans son propos introductif, la majorité d’aujourd’hui peut être la minorité de demain. La question n’est donc pas de savoir comment se fabriquer un confort pour les trois années de législature restantes : l’enjeu est d’accroître la respectabilité de cette assemblée, de la moderniser et de lui donner un peu plus de poids et de capacité d’animation de la vie démocratique de notre pays. Sans consensus, il ne peut pas y avoir de réforme respectable de l’Assemblée.

Mme Sylvia Pinel. La réforme du Règlement de l’Assemblée nationale est une nécessité, nous en convenons ; la crise que nous traversons le rappelle d’ailleurs de façon criante. Nos concitoyens ne se retrouvent plus dans les lois que nous adoptons, qui leur paraissent souvent éloignées de leur réalité quotidienne et peu claires. De plus, l’image que notre assemblée renvoie à nos concitoyens est en décalage avec la réalité de notre engagement au service de l’intérêt général : un hémicycle quasi désert lors des questions orales sans débat, des débats extrêmement longs, un déséquilibre entre les interventions de la majorité et celles des minorités et des oppositions, ou encore des députés non inscrits qui peinent à peser dans les débats.

Tout cela pose la question de l’efficacité de notre démocratie et de la pérennité d’un modèle qui apparaît largement inadapté. Il est donc essentiel que nous renforcions la qualité de notre travail, que nos débats s’appuient sur la volonté d’améliorer les textes de loi et non sur une logique visant à « faire du chiffre » pour monter dans les classements de certains sites internet. Il faut redonner du poids à la démocratie représentative en la rénovant : c’est tout l’enjeu, de notre point de vue, de la réforme du Règlement de notre assemblée. Je me réjouis que les réunions du groupe de travail créé par le président de l’Assemblée, qui rassemblait les différents groupes politiques, aient débouché sur un texte que le groupe Libertés et Territoires considère comme équilibré. Je veux ici saluer la méthode retenue. Ce texte fait avancer les droits des groupes d’opposition et minoritaires et donne donc du sens à la démocratie représentative, tout en associant davantage – et mieux – nos concitoyens à la fabrique de la loi. Il va donc, selon nous, dans la bonne direction. Toutefois, certaines de ses dispositions méritent d’être supprimées, précisées ou rectifiées. C’est la raison pour laquelle nous avons déposé une quinzaine d’amendements, dans un souci d’amélioration de notre Règlement et dans un état d’esprit constructif.

Parmi les dispositions à supprimer, il y a celle qui est relative à la limitation du nombre de suspensions de séance. Les suspensions de séance justifiées ont pour objectif non pas de faire de l’obstruction, mais au contraire de permettre l’examen des textes dans de meilleures conditions. Elles peuvent constituer des respirations dans nos débats, lesquels sont parfois houleux. Elles sont également un moyen de se concerter pour parvenir ensemble à une solution plus consensuelle.

Parmi les dispositions à préciser, nous pensons nécessaire d’encadrer le nouveau dispositif des contributions écrites, à l’image de ce qui a été mis en place pour les questions écrites ou de ce qui existe au Parlement européen.

Parmi les dispositions à rectifier et qui sont pour nous des points durs, rencontrant notre franche hostilité, il y a celle qui est relative à l’harmonisation du temps de parole dans les discussions générales. Si nous nous réjouissons que tous les groupes parlementaires disposent du même temps de parole, celui-ci ne doit pas pour autant être ramené à un orateur pour cinq minutes. Certains textes nécessitent un temps plus long au regard de leur importance ou de leur volume. Qui plus est, il me semble curieux qu’on refuse le pluralisme, l’expression d’une opinion différenciée, pourtant nécessaires au débat parlementaire : c’est justement cela qui permet d’enrichir et de nourrir la réflexion collective.

C’est dans cet état d’esprit que nous proposerons un certain nombre d’amendements. Nous souhaitons, monsieur le rapporteur, que nos débats en commission nous permettent d’aller plus loin et de faire mieux pour renforcer l’efficacité de nos travaux.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Nous avons fini d’entendre les porte-parole des groupes. Je vais maintenant donner la parole à quelques orateurs, pour deux minutes chacun.

Mme Emmanuelle Ménard. Eh bien voilà, nous sommes déjà dans le vif du sujet : deux minutes pour les députés non-inscrits…

Cela ne vous étonnera pas : je parlerai, en effet, des droits des non-inscrits, ce qui aurait mérité bien plus que ces deux minutes. Vous avez évoqué tout à l’heure la méthode, monsieur le rapporteur ? Celle-ci a consisté à consulter les présidents de groupe. Tout est dit : tout est fait pour les groupes, rien pour les non-inscrits. Or je revendique une liberté individuelle en tant que députée. Les députés non-inscrits sont des élus comme les autres.

En fait, nous avons un peu le sentiment d’être les « gilets jaunes » de l’Assemblée nationale, des oubliés, des laissés-pour-compte : peu de questions au Gouvernement, une méthode d’attribution du temps de parole dans les discussions générales qui obéit à la règle du tourniquet, en se fondant sur l’ordre alphabétique... À cet égard, je tiens à préciser, pour ceux qui ne le sauraient pas, que ce n’est pas ainsi que l’on procédait au début de la législature, et que ce nouveau mode d’attribution a été adopté de façon unilatérale, sans consultation des intéressés. 

Le temps législatif programmé est une catastrophe pour les députés non-inscrits. Le dernier exemple en date en est la discussion du projet de loi relatif à la fonction publique : cinquante minutes de temps de parole pour quatorze députés non inscrits. Vous imaginez ce que cela donne !

Nous ne participons pas à la Conférence des Présidents, évidemment. Il s’agit, comme son nom l’indique, d’une conférence des « Présidents », or les non-inscrits n’en ont pas. Cela peut vous paraître logique, mais la conséquence en est pour nous un déficit d’information chronique : en tant que députés non-inscrits, nous n’avons pas droit à l’information. J’ai eu l’occasion de le dire à plusieurs reprises aux présidents de séance : vous décidez entre présidents de groupe et vous oubliez systématiquement d’informer les députés non-inscrits. Il nous est également impossible de participer aux commissions d’enquête. De la même manière, jamais un député non-inscrit ne fait partie d’une commission mixte paritaire.

En tant que « gilet jaune » de l’Assemblée nationale, je ferai mienne une des revendications que j’ai le plus entendue durant ces quelques mois de grand débat : il me paraît nécessaire de fixer un nombre minimum de députés présents pour l’adoption d’un texte. J’ai déposé un amendement en ce sens. Je propose, pour ma part, 50 % des députés présents ou représentés.

Par ailleurs, je regrette que l’organisation générale de l’Assemblée nationale n’ait pas été remise à plat : comment faire, quand on est député non-inscrit et qu’on veut accomplir sérieusement son travail, pour être en même temps en circonscription, en commission et dans l’hémicycle ? J’avais proposé au président Richard Ferrand des temps bien distincts pour chaque mission. L’idée n’a pas été retenue. C’est dommage : cela aurait eu le mérite de la transparence pour nos concitoyens. Il me semble que c’est une exigence citoyenne à laquelle il n’est pas du tout répondu.

Finissons-en avec les textes votés à deux heures, voire à six heures du matin. Dernier exemple en date : le projet de loi sur Notre-Dame de Paris a été adopté à deux heures du matin la semaine dernière.

Je conclus en résumant mon propos, car j’ai déjà largement dépassé mon temps de parole. Vous avez parlé de consensus ? N’oubliez pas les non-inscrits dans ce consensus !

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Vous voyez bien, madame Ménard, que nous vous laissons vous exprimer en tant que députée non-inscrite. Cela n’a d’ailleurs rien d’exceptionnel dans cette commission, vous le savez.

M. Olivier Marleix. Je trouve insupportable d’entendre répéter ici, en commission des Lois, que les députés auraient quelque responsabilité que ce soit dans l’inflation législative, ce  qui justifierait une sorte de nouveau mouvement de rationalisation du parlementarisme, après celui que nous avons connu en 1958. L’inflation législative est d’initiative gouvernementale. Hier soir, par exemple, nous avons passé quatre heures à débattre et nous avons adopté vingt pages de projet de loi totalement inutiles, qui ne changeront rien à la vie de personne, et ce pour la seule raison que le Gouvernement l’a proposé. Gardons à l’esprit cette réalité.

Pour nous, la ligne rouge est la disparition de l’expression individuelle des députés : un seul orateur par groupe dans les discussions générales, pour les articles et les amendements. En somme, on ne veut plus voir qu’une seule tête, c’est la caporalisation, comme si nous étions dans un régime construit autour du mandat impératif. J’ai été heureux d’entendre des collègues communistes rappeler que tel n’est pas le cas, que nous ne sommes pas dans un régime stalinien. Nous ne sommes pas tous interchangeables. Notre système est représentatif et prévoit un vote personnel. L’article 27 de la Constitution le rappelle : « Le droit de vote des membres du Parlement est personnel. » Dans la mesure où le droit de vote est personnel, je ne vois pas comment on pourrait ne pas avoir aussi un droit d’expression personnel, individuel. Prétendre le contraire me paraît totalement aberrant. Je regrette au passage, madame la présidente, qu’il n’y ait pas eu d’auditions devant la commission des Lois pour débattre de ce sujet avec – entre autres – des constitutionnalistes.

Au total, le système serait totalement baroque : on aurait des membres du Conseil d’État qui, en assemblée générale, pourraient s’exprimer autant qu’ils le souhaitent sur les projets de loi, tandis que les membres de l’Assemblée nationale ne pourraient plus s’exprimer individuellement. Vous rendez-vous compte du système dans lequel vous nous faites basculer ? On en revient au sénatus-consulte de l’an X, autrement dit la Constitution de Napoléon, avec une chambre qui débat la loi mais ne la vote pas et l’autre qui la vote mais n’en débat pas.

M. Paul Molac. Eh oui, ça, c’était la dictature napoléonienne !

M. Olivier Marleix. Ce système est totalement baroque ! Priver les parlementaires de leur droit d’expression me paraît absolument impossible.

M. Raphaël Schellenberger. Cette discussion est importante car elle révèle la conception que vous avez de notre système démocratique. Les propositions que vous formulez dans cette réforme du Règlement tendent à casser le système délibératif qui est le nôtre, comme le disait à l’instant Olivier Marleix.

On est en train de passer de droits individuels pour les députés à des droits collectifs, alors que notre légitimité de parlementaires est construite individuellement, par notre élection au suffrage uninominal direct.

On est en train de passer d’une procédure orale, dans laquelle le débat, l’échange, la délibération construisent la prise de décision, à une procédure écrite. En gros, et même si ce glissement de notre système juridique n’est pas nouveau, vous nous faites passer d’un système continental, latin, à un système à l’anglo-saxonne, dans lequel les contributions écrites vont devenir la règle. D’ailleurs, je le signale au passage, ces contributions écrites ne feront qu’accentuer les défauts de notre système. En effet, si l’objectif est de lutter contre les outils d’analyse statistique de l’activité des parlementaires, la solution retenue est particulièrement absurde, car nous allons tous déposer un nombre invraisemblable de contributions écrites, que rédigeront nos collaborateurs – parfois même, certaines auront été transmises toutes prêtes à certains députés –, dans le seul but de faire du chiffre, de façon mécanique, puisque, en définitive, cela n’emportera que peu de conséquences.

Ces registres de contributions écrites ne rendront absolument pas compréhensible la discussion autour du texte. Or, je le rappelle, en France, dans notre système institutionnel – tout au moins tel que nous le concevons –, la discussion du texte est d’abord orale, c’est un débat. Il est anachronique, au XXIe siècle, à l’ère des réseaux sociaux, alors que chacun de nous extrait les vidéos de ses interventions en séance ou en commission pour les partager et les faire connaître, de basculer dans un système écrit. C’est un recul ; nous nous plaçons à contretemps de la société, qui est de plus en plus orale.

M. Philippe Gosselin. Eh oui : personne ne lit régulièrement le Journal officiel !

M. Arnaud Viala. Je voudrais souligner, dans la continuité de ce que vient de dire Raphaël Schellenberger, que cette méthode de la représentation par groupe et de la contribution écrite a été inaugurée par le président de Rugy dans les ateliers de rénovation de l’Assemblée nationale. J’ai participé à l’un d’entre eux, au nom de mon groupe, et j’ai pu en observer tous les écueils. Tous les participants physiquement présents n’étaient pas habilités à s’exprimer sur l’ensemble des sujets. En plus de cette diminution du nombre d’orateurs, une date butoir était fixée pour le dépôt des contributions écrites. Comme le délai était souvent difficile à respecter, la plupart d’entre elles ont été passées sous silence dans les comptes rendus définitifs des travaux.

Cela me conduit à mon premier point. Si l’on muselle le droit d’expression individuel du parlementaire, je vous prédis quelque chose de tout simple : certains des groupes qui sont en mesure de se subdiviser vont le faire. On va donc assister à une inflation totalement déraisonnable du nombre de groupes, ce qui aura pour effet d’alourdir considérablement le fonctionnement du Parlement. J’en suis certain, parce que nous serons un certain nombre à faire en sorte que cela se produise.

Mon deuxième point, qui a déjà été abordé par certains orateurs, consiste à observer que rien, dans ce qui nous est proposé, ne traite de la question de la gestion générale du temps parlementaire, notamment du lien avec le Gouvernement. Pour prendre un exemple tout à fait actuel, hier soir, ceux d’entre nous qui étaient présents devaient être tout à la fois dans l’hémicycle, pour un texte important – la réforme de la fonction publique –, et en commission du Développement durable, saisie au fond sur le projet de loi d’orientation des mobilités. Qui a le don d’ubiquité ? Personne.

M. Bruno Questel. Si : Jean-Luc Mélenchon !

M. Arnaud Viala. Nous étions donc un certain nombre à circuler dans les couloirs pour essayer de faire tout – et finalement rien, puisque nous ne pouvions pas être à deux endroits à la fois. Or cette situation n’est pas le fait des parlementaires, et ce n’est sûrement pas la modification du Règlement sur laquelle nous travaillons ce matin qui y changera quoi que ce soit.

Enfin, je voudrais simplement dire à nos collègues de la majorité que le Parlement n’est pas et ne doit pas être une entreprise. Si on adopte la pointeuse, avec des horaires de travail réguliers, du lundi au vendredi…

M. Bruno Questel. Caricature !

M. Arnaud Viala. Ce n’est pas moi qui caricature : comme vous, j’ai sous les yeux le document qui nous a été transmis par le président de l’Assemblée nationale. Lisez-le donc !

M. Paul Molac. Je dirai à mes collègues du groupe Les Républicains que la volonté d’hégémonie n’est jamais bonne et qu’il faut savoir écouter, y compris les expressions dissidentes. On ne peut pas à la fois défendre la diversité, la vouloir pour chaque député, et dire qu’il y a trop de groupes à l’Assemblée.

M. Arnaud Viala. Avec cette réforme, il y en aura encore plus !

M. Paul Molac. Je leur rappelle également que, lorsque le nombre de députés requis pour former un groupe était plus élevé, il y avait davantage de groupes « techniques ». Je me souviens ainsi d’un groupe qui rassemblait des communistes, des écologistes et des radicaux. Je ne suis pas sûr que ce soit forcément mieux.

Par ailleurs, et pour dire les choses clairement, le groupe Libertés et Territoires est le seul ici à affirmer certaines idées. Qui, en effet, défend une France fédérale dans une Europe fédérale ? Qui est aux antipodes du souverainisme et du nationalisme ? C’est bien nous. Cette voix dissidente est la mienne ; je la revendique, non seulement ici, mais aussi en tant que minoritaire dans la République – car je n’ai pas la même conception de celle-ci que Les Républicains, par exemple : c’est très clair. Je n’ai pas non plus la même conception de l’État et de la Nation. Ce sont des idées que nous défendons au sein du groupe Libertés et Territoires, et je crois qu’effectivement c’est assez décapant, dans une France habituée non pas à la diversité mais à l’unicité, non pas à être « Unie dans la diversité » – comme le veut la devise européenne –, mais à être unie dans l’unicité. À cet égard, je serai toujours un citoyen français de nationalité bretonne (Murmures), parce que, pour moi, la Nation préexiste à l’État, et non l’inverse. Cette idée me paraît non seulement très importante, mais aussi respectueuse à la fois des citoyens et des peuples qui composent la République.

M. Erwan Balanant. Avec la question de la réforme de l’Assemblée nationale, nous tenons un sujet particulièrement important. Comme vous l’avez dit, madame la présidente, il y va de notre vie en commun. Beaucoup de choses extrêmement intéressantes ont été dites, de tous les côtés. Il a été fait référence à des éléments qui tiennent à ce que doit être le Parlement, à savoir, effectivement, le lieu du débat ; mais cela ne peut pas être un lieu sans règles. Or, tout en gardant une assise pérenne, les règles doivent évoluer au regard d’un certain nombre de choses, notamment la situation politique.

Oui, le Parlement est un lieu de débat. Toutefois – et là, je vais être un peu provocateur –, il ne doit pas être le lieu du bla-bla.

M. Arnaud Viala. Cela vous va bien de dire ça ! (Sourires.)

M. Erwan Balanant. Attendez, monsieur Viala : vous allez voir que je vais dans votre sens.

Parfois, si nous n’avons pas de règles précises, il est compliqué d’avoir un débat serein, de nature à susciter le respect des citoyens, comme l’a dit M. Peu.

Je ne prendrai qu’un seul exemple, qui guidera peut-être notre réflexion : lors de l’examen du projet de loi relatif à l’asile et à l’immigration, il y a eu jusqu’à 80 inscrits sur un article – et cela, au bout d’un moment, pour répéter la même chose, aussi bien du côté de la majorité que de l’opposition. C’était une sorte de ping-pong verbal, un échange sans queue ni tête. Si nous gagnions du temps en nous évitant ces débats assez inutiles, nous aurions davantage de temps utile pour le travail sur nos amendements, qui est, pour le coup, l’essentiel dans les débats parlementaires : les amendements et leur défense sont l’essence du parlementarisme. C’est cela que nous devons préserver, parce que c’est ainsi que nous élaborons la loi, que nous fixons la norme et, ce faisant, que nous construisons notre vivre ensemble.

M. André Chassaigne. Un peu à l’opposé de l’intervenant précédent, je voulais insister sur un point : je pense que cette réforme du Règlement va aboutir à ce que je pourrais appeler un rétrécissement de la fonction parlementaire. En effet, ce qu’il y a derrière tout cela, on le voit bien dans les différentes propositions qui sont faites afin de limiter le temps de parole, c’est avant tout l’idée selon laquelle un député est ici pour « fabriquer » la loi. Ce serait, en quelque sorte, un travail de mécano : d’abord on fabriquerait la loi, puis on la contrôlerait. Or je pense que la fonction parlementaire va bien au-delà.

Considérons l’histoire de notre pays : les grands discours n’étaient pas liés spécialement à la fabrication d’une loi. Pensons aux discours de Victor Hugo, de Clemenceau, de Jean Jaurès : ce sont aussi des interventions qui mettent en perspective l’histoire de notre pays. Prenons un exemple concret, celui du débat que nous avons sur la fonction publique. Certes, il se déroule dans le cadre du temps législatif programmé, mais si cela n’avait pas été le cas, il est bien évident que ce n’est pas en cinq minutes que l’on aurait pu rappeler l’histoire de la fonction publique, parler de l’intérêt général, des grandes valeurs et des grandes notions qui sont liées à la fonction publique… De tels sujets exigent, je crois, de prononcer des discours qui mettent en perspective le travail législatif : il ne peut s’agir de simples interventions portant sur la fabrication de la loi.

Tel est le message que je voulais faire passer : je pense que ce que vous êtes en train de faire est gravissime. C’est un rétrécissement ; on rapetisse notre rôle. Au regard de l’histoire, c’est un contresens.

Mme Marietta Karamanli. Il est vrai que ce projet de réforme du Règlement de l’Assemblée nationale comporte des novations, telles que l’adoption des textes en commission et l’extension du droit de pétition ; mais, parallèlement, il comporte aussi beaucoup de propositions qui visent à contraindre et limiter certaines initiatives parlementaires. Un certain nombre de dispositions s’ajoutent à un dispositif constitutionnel qui est déjà de nature orthopédique, qui contraint les débats parlementaires. La Constitution est en effet très favorable à l’exécutif. De surcroît – j’ose le dire –, vu la façon dont on l’applique, le risque existe d’affaiblir le caractère pluraliste des discussions. Plusieurs collègues ont insisté sur ce point. Faire comme si les députés n’étaient plus que des membres d’un groupe, forcément d’accord les uns avec les autres, va à l’encontre du refus du mandat impératif – cela aussi a été rappelé. De même, il n’est pas souhaitable de restreindre le pluralisme des arguments, alors même que, dans un monde où les questions sont autant politiques que techniques, l’expression de points de vue différents permet de mieux identifier les enjeux. Il me paraît essentiel que notre Assemblée nationale ne devienne pas une simple chambre d’enregistrement.

Pour conclure, je pense que le débat public, qui repose sur la possibilité de faire entendre la contradiction, permet de faire émerger des idées et des arguments. Il garantit également l’appropriation collective des textes. Cela aussi me paraît essentiel. À plusieurs, on est plus intelligent que tout seul. Nier ces principes et ces évidences risque de nous conduire à réduire l’espace public et la contradiction, laquelle est nécessaire dans une démocratie. Je voulais vraiment que nous soyons tous attentifs, opposition et majorité, à ces éléments qui définissent notre démocratie.

M. Sacha Houlié. Je ne voudrais pas que nous occultions le constat qui préexistait à cette réforme du Règlement, à savoir une « inorganisation » qui nous mène à notre propre paralysie, soit du fait d’une certaine inefficacité, soit du fait de règles qui n’étaient pas appliquées ou, au contraire, l’étaient d’une manière trop stricte.

Le texte qui nous est présenté reprend ce que nous avions prévu dans le cadre de la révision constitutionnelle, en ce qui concerne le droit d’amendement, le printemps de l’évaluation ou encore le calendrier prévisionnel de nos travaux. C’est un gage de cohérence. Nous nous étions mis d’accord pour considérer que ce qui avait été construit en commission au mois de juillet 2018 représentait une amélioration sur un certain nombre de points, y compris le toilettage de notre calendrier, avec la refonte des questions au Gouvernement. Je m’interroge donc face à l’ingratitude que j’observe.

Le texte a été dégradé, en termes de niveau normatif, puisqu’on passe d’un projet de révision constitutionnelle à une proposition de résolution modifiant le Règlement. Autrement dit, ce qui ne fonctionnera pas pourra être revu assez facilement par les députés eux-mêmes. En outre, le dispositif a été considérablement enrichi : la motion de renvoi en commission ne sera plus opposable aux groupes minoritaires ou d’opposition dans le cadre de leurs journées réservées, la visibilité des explications de vote sera améliorée puisqu’elles auront lieu le mardi, les contributions écrites garantiront l’expression de chaque point de vue personnel – ce qui est le contraire du mandat impératif, dont il a beaucoup été question. Je ne reviendrai pas sur ce qui a été dit concernant l’augmentation des pouvoirs des groupes d’opposition ou minoritaires au sein des commissions d’enquête et des missions d’information, ou encore la présence des présidents de groupe au Bureau de l’Assemblée nationale.

Je ne voudrais pas que l’ingratitude que j’évoquais suscite des aigreurs dans les rangs de la majorité. Celle-ci a voulu tendre la main à l’opposition, pour que nous co-construisions le Règlement, pour faire en sorte que chacun y trouve son compte. Qu’on ne vienne pas nous dire, au prétexte que nous sommes majoritaires, qu’il n’y a pas d’intérêt à trouver un terrain d’entente pour réviser le Règlement de manière à ce que chacun reparte d’ici, sinon content, au moins satisfait des avancées qu’il a obtenues.

M. Sébastien Huyghe. Cette modification du Règlement comporte certes quelques avancées, mais les dispositions visant à limiter le temps de parole individuel des parlementaires vont à l’encontre du principe constitutionnel selon lequel « tout mandat impératif est nul ». Cette réforme fait avant tout la part belle aux groupes, en oubliant le mode de scrutin qui est le nôtre, à savoir un scrutin uninominal. En définitive, cette logique préfigure ce que la majorité veut mettre en place à terme, à savoir un scrutin proportionnel intégral, dans lequel les individualités que constituent les députés disparaîtraient, au profit exclusif des groupes.

Vous nous dites que cette réforme a pour but d’éviter les débordements, l’obstruction et le dérapage du temps de parole. Or, dans la version actuelle du Règlement, un certain nombre de dispositions, qui avaient été mises en place au fil du temps, permettent d’ores et déjà de limiter l’obstruction parlementaire, notamment le système du temps législatif programmé, que vous n’utilisez presque jamais, malheureusement. Tout en respectant les groupes, il permet à chaque député de s’exprimer individuellement, qui plus est en évitant que l’on tombe dans l’obstruction.

Pour conclure, par un certain nombre de pratiques et par des réformes comme celle-ci, vous faites glisser, sans le dire, notre régime parlementaire vers un régime de type présidentiel.

M. Alain Tourret. Je voudrais faire quelques observations.

Toutes les réformes dont j’ai eu à connaître depuis 1997, date de ma première élection à l’Assemblée nationale, sont allées dans le sens d’un renforcement du pouvoir de l’exécutif ; toutes se sont appuyées sur un renforcement progressif des groupes, au détriment des individus. L’individu gêne, il empêche de mettre « de l’huile dans les rouages » : du point de vue de l’exécutif, il bloque la situation.

En ce qui concerne l’importance des groupes, j’ai entendu la position de M. Jacob, en particulier. Celui-ci disait que, pour lui, il devrait y avoir deux groupes à l’Assemblée nationale – celui de la majorité et celui de l’opposition – et qu’un nombre supérieur entraînait des discussions mettant à mal la position de l’exécutif.

Pour avoir siégé successivement dans de petits groupes et dans un grand groupe, je considère quant à moi que le sel de la vie réside dans les premiers et non dans les seconds. Je regrette de le dire, mais c’est la conclusion de mon expérience personnelle. J’aime beaucoup le grand groupe auquel j’appartiens, mais je considère qu’il existait une liberté bien plus grande dans les petits groupes auxquels j’appartenais durant deux législatures différentes.

Que cherchons-nous à faire ? À améliorer la démocratie. Or, améliorer la démocratie, c’est obligatoirement faire en sorte de contrôler et sanctionner le pouvoir exécutif. Celui-ci est tellement plus fort que le pouvoir législatif que tout ce qui sera fait pour renforcer le Parlement ira dans le sens d’un surcroît de démocratie.

En ce qui concerne notre fonctionnement lui-même, pour avoir été l’avocat d’entreprises et de syndicats, je n’arrive pas à comprendre que nous continuions à siéger la nuit. Comment pouvons-nous tenir des séances après minuit ? C’est inconcevable. La loi est mal faite, madame la présidente ! Les juristes, dont je suis, considèrent que la loi est mal écrite. Dans le cadre de la réforme de la prescription que j’ai initiée, nous avons révisé des textes datant de 1808. Eh bien, ils étaient magnifiques. Le texte du code civil de Bonaparte est splendide. À l’époque, des juristes de très grande qualité assistaient systématiquement le pouvoir législatif pour faire en sorte d’avoir une belle écriture législative. Nous nous écartons de cette belle écriture législative, et c’est bien dommage !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Merci à toutes et à tous pour ces nombreuses contributions. Sans anticiper le débat que nous aurons sur chacun ou presque de ces thèmes dans le cadre de l’examen des amendements, je voudrais apporter quelques réponses.

Monsieur Questel, vous soulignez un point important, que j’avais effectivement omis de mentionner dans mon propos introductif, concernant la procédure d’adoption en commission – idée qui a vraiment du sens. Je tiens également à dire que cette nouvelle procédure, qui existe déjà au Sénat, repose sur le principe d’un droit de veto : n’importe quel groupe qui souhaitera s’y opposer pourra le faire. Cette procédure préjuge donc de l’existence d’un consensus et relève davantage de l’organisation du travail et de la valorisation du travail en commission que d’une décision impérative. Elle s’applique sur un texte ou sur une partie d’un texte. S’agissant des sujets un peu techniques du projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises (PACTE), par exemple, il y aurait peut-être eu un consensus pour que certains d’entre eux soient traités davantage en commission, sans pour autant déposséder l’hémicycle de son importance, évidemment.

Monsieur Gosselin, je vous remercie pour la position claire que vous avez exprimée. Vous avez parlé de « lignes jaunes » et non pas de « lignes rouges » : cela me paraît être un bon signe.

Vous avez été nombreux à soulever la question de l’endroit où il convient de placer le curseur entre, d’un côté, l’individu, et, de l’autre, le groupe. C’est une question centrale, sur laquelle nous n’avons pas tous la même opinion. L’opposition elle-même n’est pas unanime sur ce point, d’ailleurs. Il n’y a donc pas forcément un clivage entre la majorité et l’opposition. Certains groupes d’opposition sont, par exemple, favorables à ce qu’on remonte la barre pour la création des groupes, alors que d’autres considèrent que c’est dans la diversité des petits groupes que vit la démocratie – c’était le sens du plaidoyer de M. Tourret. Le sujet va donc être central dans nos débats.

La proposition qui est faite dans le texte est effectivement de bouger le curseur. Je considère qu’il y va de la clarté de la parole pour les citoyens. Actuellement, quand il y a un foisonnement d’expressions sur un article, cela est certes dynamisant, je n’en doute pas, mais personne n’est capable de dire clairement quelle est la position de tel ou tel groupe. Le choix qui est fait – certains pensent que c’est bien, d’autres non – est celui de la clarté de la parole des groupes, que ce soit dans la discussion générale ou sur les articles. Cela permettra à chaque citoyen de connaître précisément la position de chaque groupe politique sur chaque thématique en débat.

Je tiens à préciser, car j’ai eu parfois l’impression qu’on l’oubliait, qu’en aucun cas, bien entendu, ne sera brimée la parole individuelle du député sur ses amendements. Or l’amendement est véritablement l’expression de son opinion. Il a été fait référence, notamment, à la loi sur les hydrocarbures. Vous estimiez, monsieur Habib, que vous aviez une position différente de celle de votre groupe sur le texte. Or je me souviens que vous aviez défendu des amendements sur le sujet : votre parole s’était donc fait entendre à cette occasion.

La question de l’équilibre est importante ; nous aurons l’occasion d’en débattre. Je rappelle cependant que, non seulement le droit d’amendement est garanti par la Constitution, mais que la possibilité de défendre ses amendements dans l’hémicycle est pleinement maintenue dans la proposition de résolution.

Madame Jacquier-Laforge, vous avez parlé de la gestion de notre temps. C’est une véritable question. Pour avoir échangé avec certains d’entre vous, je sais qu’il y a beaucoup d’insatisfaction à cet égard. Ce sentiment est même à peu près unanime. La difficulté tient au fait que cette gestion relève d’une logique d’organisation annuelle et qu’une grande partie du temps en question est régie par la Constitution, l’autre relevant du Règlement. Là aussi, nous aurons l’occasion d’en débattre. Nous allons essayer de concilier ces deux exigences. Pour dire les choses très clairement, dans le cadre des groupes de travail dits « de Rugy », durant la première partie de la législature, la créativité était possible parce que nous ne raisonnions pas à Constitution identique. Ici, nous ne nous intéressons qu’à un petit aspect de la gestion du temps, celui qui relève du Règlement. Quoi qu’il en soit, j’espère que nos travaux, entre la commission et l’hémicycle, nous permettront de progresser sur le sujet.

Les votes en cachette à trois heures du matin sont un véritable problème. Les Français ne comprennent pas que nous adoptions des textes, par exemple celui sur Notre-Dame, à deux heures du matin, par 32 voix contre 16. Non seulement c’est incompréhensible pour les gens, mais cela nuit à notre image collective – car, pour de telles choses, tous les députés sont mis « dans le même sac », évidemment. Je vous soumettrai un amendement, issu d’une proposition que le président Ferrand a formulée hier en Conférence des Présidents, non pas d’ailleurs de son propre chef, mais à la suite des échanges qu’il a eus avec tous les groupes politiques. L’objectif est de regrouper l’ensemble des votes sur les textes le mardi, après les questions aux Gouvernement – elles-mêmes désormais rassemblées en une seule séance. Ainsi, au journal télévisé du soir, on annoncera certes que les députés ont débattu toute la nuit, mais que, le jour du vote, ils ont, par exemple, adopté le texte par 223 voix contre 128, parce le vote aura eu lieu pendant la journée, à une heure décente, à un moment où nous sommes naturellement plus nombreux dans l’hémicycle. Cet amendement, je le répète, n’est pas une initiative personnelle de ma part : il résulte d’un certain consensus, comme l’atteste la réunion de la Conférence des Présidents qui s’est tenue hier.

Monsieur Habib, vous avez évoqué le consensus et la méthode Bartolone, si je puis dire. Je suis évidemment allé voir M. Bartolone pour connaître ses secrets. Il me les a révélés mais je ne vais pas les divulguer aujourd’hui. En tout cas, c’est une source d’inspiration. Comme le disait très justement M. Houlié, l’idée est de tendre la main et d’essayer de trouver au moins une majorité plus large, à défaut d’un consensus.

Nos travaux du jour peuvent servir à dresser un état des lieux des différentes positions et à identifier des thématiques pour parvenir à un arbitrage d’ici à la séance publique. Si nous envisageons de trouver des points d’équilibre, il nous faut dépasser les positions amendement par amendement. À la fin de la journée, nous devrons avoir déterminé les points permettant de dégager de grandes lignes pour fédérer différents groupes, le plus largement possible, et en débattre pleinement dans l’hémicycle.

Sur l’absence de délai de dépôt opposable aux amendements du Gouvernement, je vous rejoins, monsieur Habib. Mais nous ne trouverons pas la solution dans notre Règlement qui, à cet égard, ne peut pas contraindre le Gouvernement. En revanche, le président de l’Assemblée nationale m’a autorisé à vous informer qu’il échange actuellement avec le président du Sénat sur un texte de nature organique qui permettrait d’appliquer les mêmes règles de dépôt à tous les acteurs du débat parlementaire. Cela supposera un accord entre l’Assemblée nationale et le Sénat. Il faut aussi garder la possibilité d’amendements de compromis. Mais il est temps de sortir d’une pratique qui existe depuis des décennies : le Gouvernement arrive au dernier moment avec des amendements qui n’ont rien à voir avec le sujet et les impose aux parlementaires qui n’ont pas le recul et les moyens d’avoir un véritable débat démocratique sur ces textes.

Monsieur Bernalicis, je suis déçu de vous entendre dire qu’il n’y a pas de nouveaux droits pour l’opposition. Je comprends votre position mais je crois qu’il faut, comme l’a fait M. Peu, reconnaître de véritables progrès en la matière. Vous dites que rapporteur ou président, cela n’a pas d’importance. Bien sûr que si ! Le rapporteur a des prérogatives de contrôle sur pièces et sur place que n’a pas le président. Ce n’est pas un hasard si toutes les majorités, depuis des lustres, gardent le poste de rapporteur. Je comprends que certains points du texte peuvent heurter et nécessitent d’être retravaillés pour rapprocher les positions. Mais si les progrès ne sont pas reconnus, nous n’avancerons pas vers cet équilibre dont nous avons longuement parlé.

Madame Pinel, nous aurons l’occasion de revenir sur les points que vous avez évoqués. À mon avis, M. Ferrand n’est pas guidé dans son écriture par une fascination pour le secteur privé. Cela étant, nous ne devons pas avoir peur de parler de l’efficacité de nos débats et du processus parlementaire.

Madame Ménard, reconnaissez que le texte représente un progrès pour les non-inscrits : il leur accorde une place de droit dans les commissions spéciales et dans les commissions d’enquête, et un temps égalitaire dans les discussions générales. Si les non-inscrits considèrent que ce texte ne leur accorde pas plus de place, qu’ils nous demandent de renoncer à ces mesures ! Vous avez la volonté de faire progresser les droits des non-inscrits mais il y a une limite. Le groupe politique a un sens et une existence dans la Constitution et dans notre Règlement. Quand on choisit d’être non-inscrit, on fait un choix qu’il faut assumer, et accepter de ne pas avoir les mêmes prérogatives qu’un groupe politique. Il faut néanmoins reconnaître que ce texte représente un progrès pour les non-inscrits, alors que le président n’a pas subi une forte pression de l’ensemble des groupes politiques pour aller dans ce sens. Il a tenu à faire progresser les droits des non-inscrits et il est important d’en prendre acte.

Monsieur Schellenberger, j’ai entendu votre désaccord sur l’écrit. Ce nouveau droit est optionnel et il faut faire confiance aux députés. L’écrit sera au nom du député et figurera au Journal officiel. Je ne crois pas que le député fera n’importe quoi, des copiés-collés aberrants sans même les relire. En tout cas, cela relèvera de sa responsabilité et de sa liberté. Faisons confiance et n’ayons pas peur des nouvelles possibilités et des nouveaux droits offerts.

Bien entendu, je n’ignore pas la place de l’expression orale. Comme vous le disiez avec justesse en citant Jaurès et Hugo, monsieur Chassaigne, les grands discours sont fondateurs. Pour que tout le monde l’ait bien à l’esprit, je rappelle que le temps de parole et d’expression relève de la Conférence des Présidents. Le président Ferrand a choisi d’avancer à visage découvert en disant clairement que son objectif était de limiter les prises de parole dans les discussions générales à cinq minutes par groupe et je n’ignore pas qu’il s’agit d’un sujet de crispation. Néanmoins, la Conférence des Présidents aura tout loisir d’opter pour dix minutes en cas de discussion d’un texte majeur.

Monsieur Huyghe, je suis très en phase avec votre position sur le temps législatif programmé. Cet outil permet une extrême liberté. Il donne la responsabilité à chacun et à chaque groupe de gérer cette liberté. Il y a une certaine ivresse dans cette liberté. On peut passer un quart d’heure, trente minutes sur une discussion générale quand on est en temps législatif programmé. À mon avis – qui semble partagé par le président Ferrand et de nombreux députés –, le temps législatif programmé doit retrouver une place plus importante que celle qui lui est actuellement dévolue. Faut-il opter pour trente heures ou cinquante heures ? La décision relève des prérogatives de la Conférence des Présidents et la bonne durée doit être adaptée à chaque texte. Quoi qu’il en soit, le temps législatif programmé est une façon mûre de gérer démocratiquement son temps, à la fois en tant qu’individu et en tant que groupe.

Avant l’article 1er

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL247 de M. Stéphane Peu et CL85 de Mme Cécile Untermaier.

M. Stéphane Peu. Pour être efficace, une réforme du fonctionnement de notre assemblée doit être consensuelle. C’est ce que j’ai dit tout à l’heure, comme d’autres collègues. Cet amendement propose que toute modification du Règlement soit approuvée par la majorité des groupes constitués. À défaut d’être consensuelle, la réforme réunirait au moins la majorité des groupes.

M. David Habib. L’amendement du groupe Socialistes et apparentés vise à renforcer les droits des groupes d’opposition dans le cadre des réformes du Règlement. Puisqu’il s’agit de la règle commune, nous proposons de confier le rapport sur les propositions de résolution à un représentant de l’opposition.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je suis défavorable à ces deux amendements.

En vertu du caractère individuel du vote, chacun peut décider, en son âme et conscience, d’approuver ou non une proposition de résolution. Je suis donc très défavorable à l’idée, défendue par M. Peu, de donner ce pouvoir à la majorité des groupes constitués. Quelle majorité, d’ailleurs ? Gardons le vote individuel qui répond à un principe constitutionnel très fort.

S’agissant du rapporteur, il faut une réflexion générique. Le système actuel est construit avec des rapporteurs de la majorité. Pour changer ce système, il faudrait refondre nos pratiques démocratiques et faire un travail que ni notre majorité ni les précédentes n’ont mené à terme.

La Commission rejette successivement les amendements.

Article 1er (art. 8 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Participation des présidents de groupe au Bureau de l’Assemblée nationale

La Commission est saisie des amendements identiques CL49 de M. Philippe Gosselin et CL200 de M. Éric Diard.

M. Philippe Gosselin. Nous proposons de supprimer cet article qui autorise les présidents de groupe à participer aux réunions du Bureau, sans avoir de droit de vote. Je ne suis pas « vent debout » contre cette mesure qui part de bons sentiments – chacun peut souhaiter que tous les groupes puissent participer largement – mais je pense qu’elle va entraîner un alourdissement du fonctionnement de la présidence. Les présidents de groupe n’auront certes pas de droit de vote mais ils auront un droit de parole et le Bureau risque d’être compliqué à gérer. Il faut penser à l’expression individuelle des parlementaires mais aussi au fonctionnement de l’institution. Je m’y oppose pour des raisons pragmatiques et non pas par principe.

M. Éric Diard. Je ne vois pas l’utilité de permettre aux présidents de groupes de participer aux réunions du Bureau de l’Assemblée nationale, sans qu’ils aient de droit de vote. En outre, le risque est de dénaturer le fonctionnement du Bureau car cela revient à faire entrer les groupes parlementaires, en tant qu’entités, dans le fonctionnement interne de l’Assemblée. Les présidents de groupe participent déjà à un organe consacré par le Règlement : la Conférence des Présidents. Pourquoi autoriser les présidents de groupe à participer aux réunions du Bureau sans autoriser, en contrepartie, tous les membres du Bureau à participer aux réunions de la Conférence des Présidents ? Affichons la couleur, la seule raison est d’assurer une prédominance de la logique de groupe politique – et du groupe majoritaire face aux groupes d’opposition –, ce qui est contraire à une logique de consensus.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Avant d’occuper ses fonctions actuelles, le président Richard Ferrand était président de groupe. À maintes reprises, il avait affirmé la nécessité d’articuler les décisions entre les groupes politiques et le Bureau. En pratique, nous constatons qu’il faut synchroniser les délibérations car il y a une interaction forte entre les décisions du Bureau et la vie des groupes politiques. La solution retenue est intéressante : les présidents de groupe ne pourront pas voter pour ne pas dénaturer l’expression personnelle des membres mais ils pourront assister au Bureau intuitu personae. Les vice-présidents font partie de la Conférence des Présidents et c’est une bonne chose car il est important d’avoir compris la dynamique des groupes politiques avant les débats. Ce parallélisme, en quelque sorte, existe.

M. Michel Zumkeller. Nous partageons l’avis du rapporteur, il ne faut pas tout mélanger. La Conférence des Présidents et les réunions du Bureau sont deux choses différentes. De toute façon, si les présidents de groupe ne sont pas en réunion de Bureau, le président de l’Assemblée va les associer aux décisions. Autant qu’ils participent à la réunion du Bureau et qu’ils décident tous ensemble. Nous sommes d’accord sur le fait qu’ils ne doivent pas voter mais leur participation représente un gain de temps pour tout le monde. Au groupe UDI, Agir et Indépendants, nous sommes très favorables à la participation des présidents de groupe aux réunions du Bureau.

M. Raphaël Schellenberger. Je ne conteste pas le fait que cette proposition soit formulée dans un esprit d’efficacité et de rationalité du travail à l’Assemblée nationale. En revanche, sous couvert d’efficacité et de rationalité, elle vient introduire une confusion entre l’activité de notre institution et son fonctionnement. Si notre institution a une activité politique, son fonctionnement peut se situer au-dessus de l’actualité. C’est bien pour cela qu’il existe deux entités : le Bureau de l’Assemblée s’occupe du fonctionnement de l’institution ; la Conférence des Présidents se charge de la gestion de l’agenda.

Cette proposition nous conduit à nous interroger sur le maintien de deux structures différentes. Ce changement nous permettrait de gagner en coordination mais il introduirait une forme de confusion des rôles.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Nous parviendrons à surmonter ce risque. Le Bureau n’est pas une chambre d’enregistrement. C’est un lieu où se construisent et où se prennent des décisions. Certaines de ces décisions ne sont pas celles que l’on aurait pu anticiper. Le regard des présidents de groupes peut aider à la construction d’une décision et ajouter à sa valeur. Je maintiens mon avis défavorable.

M. Bruno Questel. Je pense que le président Chassaigne sera d’accord avec moi et approuvera cette proposition. C’est une possibilité offerte à tous les présidents de groupe. Elle leur permettra d’être dans l’instance qui décide du fonctionnement de la « machine » Assemblée nationale, en dehors des contingences partisanes. Ils pourront ainsi co-construire, avec leurs collègues du Bureau, les grandes orientations du fonctionnement de notre assemblée.

M. André Chassaigne. Cette présence peut effectivement être pertinente dans la mesure où les petits groupes n’ont qu’un seul représentant au Bureau. Si ce représentant du groupe est absent lors de la réunion, on est complètement déconnecté des décisions prises. C’est une bonne chose de pouvoir participer sans voter, au moins pour être informé et éventuellement s’exprimer.

La Commission rejette les amendements.

Elle en vient à l’amendement CL139 de Mme Mathilde Panot.

M. Ugo Bernalicis. Par cet amendement, nous proposons d’établir la parité femmes-hommes au Bureau de l’Assemblée nationale.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. C’est difficile à dire mais je suis obligé d’émettre un avis défavorable à cet amendement.

Nous avons tous la ferme conviction que nous devons faire des progrès en matière de parité mais le Bureau étant constitué par consensus, la stricte parité peut être délicate à instaurer. La répartition se fait notamment en fonction du poids des groupes : le groupe majoritaire exprime ses choix en premier et, s’il est peu paritaire, c’est avec les groupes minoritaires ou d’opposition que la parité devrait s’établir, ce qui contraindrait leurs choix. Imaginons que le groupe La France insoumise désigne une personne, on pourrait la refuser au motif qu’il ne s’agit pas d’une femme ?

Mme Marie-Pierre Rixain, présidente de la délégation aux droits des femmes, travaille sur ces sujets et j’ai regardé avec elle ce qu’il serait possible de modifier dans les règles – assez complexes – de nomination au Bureau. C’est compliqué. Sur le fond, je soutiens totalement votre idée mais je suis opposé à la manière dont vous proposez de la matérialiser.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Le Règlement indique déjà qu’il faut tendre vers la parité. À ma connaissance, ce n’est pas mentionné pour les bureaux des commissions. Il serait intéressant qu’ils puissent aussi tendre vers la parité.

M. Ugo Bernalicis. Pour résoudre le problème, on pourrait faire en sorte que chaque groupe ait au moins deux représentants au Bureau. Ce serait l’inflation et le Bureau changerait de taille, j’en conviens. Comme le champ de la réflexion n’est pas complètement fermé, je vous livre néanmoins cette proposition.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Le sujet n’est pas épuisé, mais votre amendement ne peut pas être la solution.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL296 du rapporteur.

Elle examine l’amendement CL118 de Mme Emmanuelle Ménard.

Mme Emmanuelle Ménard. Pour une question d’équité et d’accès à l’information, je souhaiterais que les non-inscrits soient représentés au Bureau par l’un de leurs membres.

Monsieur le rapporteur, vous avez dit que les non-inscrits n’avaient pas les mêmes droits que les autres parce qu’ils avaient choisi de ne pas appartenir à un groupe. Or le statut de non-inscrit n’est pas toujours un choix.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. C’est bien noté. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 1er modifié.

Après l’article 1er

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL140 de M. Ugo Bernalicis et CL79 de Mme Cécile Untermaier.

M. Ugo Bernalicis. Cet amendement avait déjà été déposé lors de la précédente révision du Règlement. Nous proposons d’attribuer la moitié des postes de vice-président, de questeur et de secrétaire aux députés membres de groupes d’opposition et minoritaires afin de leur donner une plus grande reconnaissance. Nous voudrions que ces postes ne soient pas l’apanage de quelques groupes.

Mme Marietta Karamanli. En substance, le Règlement de l’Assemblée nationale dit que la composition du Bureau « s’efforce » d’être représentative. Garantir cette représentativité est compliqué mais, pour notre part, nous considérons que l’effort n’est pas suffisant. C’est pourquoi nous proposons de remplacer la formulation « a lieu en s’efforçant de reproduire au sein du Bureau la configuration politique de l’Assemblée et de respecter… » par « reproduit au sein du Bureau la configuration politique de l’Assemblée nationale en assurant la représentation de tous les groupes et respecte… ». On ne se contente pas de s’efforcer, on va plus loin. À partir du constat que nous faisons sur la répartition des postes, nous pensons que la rédaction du Règlement doit être plus claire.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je suis défavorable à ces deux amendements.

S’agissant de votre amendement, monsieur Bernalicis, je pense qu’il faut respecter le fait majoritaire dans une démocratie. Je ne suis pas pour que l’on inverse l’ordre et que la majorité soit minoritaire dans la prise de décisions qui concernent la vie de l’Assemblée.

Madame Karamanli, malgré toute la sympathie que j’ai pour votre proposition – remplacer le verbe « s’efforcer » par un objectif de résultat –, je pense qu’elle n’est pas plus applicable que celle sur la parité dont nous venons de discuter. Une grande refonte de la gouvernance serait nécessaire mais ce n’est pas l’objet de ce texte. Techniquement, on ne peut pas valider un amendement comme le vôtre.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je repense à la proposition d’Élodie Jacquier-Laforge sur la parité dans les bureaux des commissions. Encore faudrait-il que chaque groupe politique désigne des femmes dans toutes les commissions. En commission des Lois, certains groupes ne sont pas mixtes et, de facto, ils ne peuvent pas désigner de femmes au sein du bureau, ce qui est bien dommage. Vous avez compris de quel groupe je parlais ! (Sourires.)

M. Raphaël Schellenberger. La parité est un vrai sujet. Je sens la pique visant le groupe Les Républicains qui, à la commission des Lois, n’est pas très mixte, voire pas du tout. Nous tenons à cette discussion nécessaire et importante sur la parité et il ne faudrait pas caricaturer les positions de notre groupe. Dans le détail de notre façon de travailler, nous sommes souvent très loin de la caricature que l’on cherche à nous opposer.

Cela étant dit, il ne faudrait pas chercher à calquer, dans le mode de fonctionnement de notre assemblée, des règles déconnectées de sa constitution. Pour l’heure, les 577 députés sont élus au scrutin uninominal majoritaire à deux tours, dans des circonscriptions. Les partis politiques doivent respecter des règles de parité en matière de candidatures. Certains pourront dénoncer des jeux qui consistent à mettre tel candidat ici et tel autre candidat ailleurs. Néanmoins, le choix de la désignation du représentant revient aux électeurs et non pas à un parti politique. N’oublions pas que la composition de notre assemblée est issue de l’élection uninominale dans les territoires. Pour le moment, elle n’est pas issue de listes. Pour notre part, nous serons toujours opposés à ce que la composition de l’Assemblée nationale soit issue de listes, nous souhaitons maintenir l’ancrage des députés dans les territoires.

M. Éric Diard. Les maîtres-mots doivent être liberté et indépendance pour le député. Certes, en commission des Lois, il n’y a pas de parité pour le groupe Les Républicains. Mais pouvez-vous imaginer que, au sein de notre groupe, nous disions aux femmes de quitter la commission des Affaires culturelles, la commission des Affaires sociales (Exclamations et rires) et la commission des Affaires étrangères – car nous avons des femmes aux affaires étrangères – pour aller en commission des Lois ? Il y a une liberté. Si elles veulent aller à la commission des Affaires étrangères et pas à la commission des Lois, c’est comme ça.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je ne pensais pas relancer le débat à ce point ! (Sourires.)

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Alors là, j’avoue que je suis « scotchée » ! C’est vrai, laissons les femmes aux affaires sociales et aux affaires culturelles et laissons les hommes à la commission des Lois qui travaille de façon sérieuse !

M. Éric Diard. Et la liberté ?

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Je ne pense pas que ce soit une question de liberté. Je pense que c’est lié à la culture et aux représentations sociales qui ont cours à l’Assemblée nationale comme ailleurs en France, et auxquelles il faut mettre un terme.

L’article 1er de la Constitution précise que « la loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives ». Cher collègue, il y a quand même une obligation de parité et nous pourrions nous enorgueillir de la faire respecter.

M. Éric Diard. Je n’ai pas dit l’inverse !

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Le but envisagé est d’obtenir la parité au sein des groupes et au sein des différentes instances. Même si un groupe n’a pas de femmes, il faut qu’il y ait, à la fin des fins, un équilibre entre les hommes et les femmes au Bureau.

La Commission rejette successivement les amendements.

Article 2 (art. 11 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Ordre de préséance des vice-présidents

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL298 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 2 modifié.

Après l’article 2

La Commission est saisie de l’amendement CL141 de M. Ugo Bernalicis.

M. Ugo Bernalicis. Cet amendement propose de mettre en place une halte-garderie et une crèche pour accueillir les enfants des personnes travaillant à l’Assemblée nationale. Nous l’avions déjà déposé lors de la réforme de 2017. Entre-temps, les choses ont évolué puisque le premier questeur indique que de telles structures vont être créées.

Au passage, je voudrais vous alerter sur une problématique particulière. L’objectif n’est pas forcément d’avoir une crèche, en tant que telle, à l’Assemblée nationale. Nous voulons que ceux qui travaillent à l’Assemblée nationale – députés, collaborateurs, fonctionnaires – aient une solution pour faire garder leurs enfants. Nombre d’administrations et d’entreprises ont passé des conventions avec des mairies ou des intercommunalités pour que le lieu de garde soit près du domicile des parents, et pas forcément de leur lieu de travail. Sinon, seuls ceux qui habitent à Paris vont pouvoir se poser la question de bénéficier de la crèche de l’Assemblée nationale.

La problématique n’est pas vraiment celle-là, surtout quand l’un des parents travaille à Paris et l’autre en région parisienne. Imaginez le détour que doit faire le parent qui ne travaille pas à Paris le jour où il doit venir récupérer l’enfant ! L’idée est donc d’offrir un service par le biais de conventions diverses et variées, en partant des besoins des gens qui sont à l’Assemblée nationale.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Avis défavorable car, tel que rédigé, votre amendement implique que le Bureau de l’Assemblée nationale définirait le Règlement intérieur de la crèche, ce qui n’est pas possible.

Une enquête récemment effectuée par les questeurs a suscité trente et une réponses : dix-neuf demandes d’accueil régulier toute la semaine, trois demandes d’accueil régulier certains jours, neuf demandes d’accueil en cas d’urgence. Plutôt que de construire une crèche dans les locaux de l’Assemblée nationale, le collège des questeurs a décidé d’attribuer des places dans des crèches aux alentours. Cette solution me paraît très positive. Les règles d’attribution seront discutées en collège des questeurs demain, 16 mai. Votre amendement est donc quasiment satisfait.

M. Erwan Balanant. Je voudrais rebondir sur les horaires de nuit, un sujet qui intéresse particulièrement les membres du groupe du Mouvement Démocrate et apparentés, et qui est en corrélation évidente avec le précédent.

Imaginez une halte-garderie ou une crèche à l’Assemblée nationale où nous irions récupérer un enfant quand nous finissons, par exemple, à deux heures du matin ! Les gens qui ont cette idée-là n’ont pas dû garder souvent leurs enfants : à deux heures du matin, on ne va pas réveiller son enfant pour le ramener chez soi… Si nous voulons que les députés et les administrateurs soient à l’image des Français, certains seront parents. Être parent et député, ça doit être possible. D’ailleurs, des bébés de député sont nés durant cette législature, ce dont je me réjouis.

Pour avancer sur cette question de l’articulation entre la vie professionnelle et la vie familiale, nous devons aller vers la suppression définitive des séances de nuit.

M. Ugo Bernalicis. Je vais retirer l’amendement mais je voudrais vous alerter sur certaines problématiques. L’un de mes attachés parlementaires, qui ne vit pas à Paris, a des enfants en bas âge. Lors de l’enquête des questeurs, il n’a pas répondu qu’il avait besoin d’une place en crèche à l’Assemblée nationale. Vu les horaires que nous faisons, en plus… En revanche, il aimerait avoir une place en crèche ou en halte-garderie à proximité de son domicile. On peut alors s’interroger sur la capacité de l’Assemblée à passer une convention avec sa commune ou les crèches de sa commune. Cela demande un recensement. Même si cela tombe un peu comme un « cheveu sur la soupe », je voulais lancer ce signal car je pense que nous pouvons progresser dans ce domaine.

Mme Emmanuelle Ménard. Je vous avoue que je suis un peu choquée par les propos de mon collègue. Si l’Assemblée nationale peut passer des conventions avec certaines collectivités pour que les collaborateurs ou les députés puissent avoir des places privilégiées dans les crèches, cela s’appelle un passe-droit.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL50 de M. Philippe Gosselin.

M. Raphaël Schellenberger. C’est vraisemblablement l’une des dernières fois où nous aurons autant de liberté dans nos expressions, alors nous en profitons ! (Exclamations.)

Nous proposons de porter à 5 % des élus de l’Assemblée nationale – c’est-à-dire vingt-neuf députés au lieu de quinze actuellement – la limite minimale pour constituer un groupe.

D’aucuns estiment que ce serait contraire aux droits individuels des députés. C’est l’inverse ! Individuellement, nous sommes tous des représentants de la Nation mais, collectivement, nous essayons de construire une vision globale de notre société. C’est le principe du groupe politique. Nous assistons actuellement à une espèce d’éclatement du débat public, de la construction de notre société. Plutôt que de chercher le plus petit dénominateur commun et de multiplier les groupes de dix-neuf personnes, nous devrions travailler, réfléchir et discuter ensemble pour essayer de construire une vision commune de la société.

Cela ne veut pas dire que tous les membres d’un groupe doivent toujours penser de la même façon. Cela ne veut pas dire qu’il ne peut pas y avoir de liberté d’expression individuelle au sein d’un groupe. D’ailleurs, c’est l’usage depuis longtemps au sein du groupe Les Républicains. Chacun y dispose de son droit individuel d’intervention, d’amendement, de désaccord avec la ligne qui serait celle du groupe. Néanmoins, il doit y avoir un travail de construction commune d’une vision de la société. Cela me semble d’autant plus important à un moment où notre société émiettée semble avoir toujours plus de mal à chercher du sens commun.

L’amendement tend aussi à poser des règles plus claires, plus efficaces de fonctionnement de notre assemblée. Lorsque chacun des huit groupes a eu dix minutes de temps de parole dans la discussion générale, on perd la représentation du poids des différents groupes à chaque étape du travail parlementaire.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Vous soulevez un vrai problème. Notre Règlement ne résiste pas à ce que j’appelle parfois, à tort, une « balkanisation » des groupes politiques. Les limites ne sont pas atteintes mais si quatre nouveaux groupes politiques se constituaient, le système exploserait et toute la gouvernance devrait être repensée.

Ce genre de réforme nécessiterait un consensus qui n’existe pas actuellement. À l’occasion de cette proposition de résolution, il n’y a pas eu de réflexion sur la taille des groupes. Une éventuelle réforme ne pourrait d’ailleurs s’appliquer qu’à la prochaine législature. Le sujet est ouvert. J’émets évidemment un avis défavorable car il n’y a eu ni les concertations ni le recul nécessaires pour l’adopter.

M. André Chassaigne. Il y a dans ce pays des sensibilités politiques qui ont beaucoup de difficulté à obtenir des élus, dans la mesure où nous avons un scrutin uninominal à deux tours. Je crois beaucoup à l’existence des partis politiques et je pense qu’il est très important qu’ils puissent avoir une expression dans le cadre de la représentation nationale ; d’où la nécessité de maintenir des groupes qui peuvent se constituer d’une manière raisonnable, comme aujourd’hui, à partir de quinze députés. Sinon, on va complètement écraser la diversité des expressions politiques en limitant la présence au sein de l’Assemblée nationale aux grandes organisations politiques ou à des mouvements.

Mme Emmanuelle Ménard. Je voudrais vous alerter sur un point. L’adoption de cet amendement entraînerait une multiplication des députés non-inscrits – pardon de revenir encore sur ma cause, mais je suis la seule à la défendre ici et j’y tiens.

Vous avez parlé, monsieur le rapporteur, du droit constitutionnel de déposer et de défendre des amendements. Dans le cadre du temps législatif programmé (TLP), les députés non-inscrits n’ont pas la liberté de défendre leurs amendements. Le temps de parole qui leur est accordé est tellement réduit qu’il est très vite épuisé et on leur demande de rester pendant tout l’examen du texte pour que leurs amendements ne tombent pas – si on n’est pas là, l’amendement est considéré comme non défendu. Je le dis car cela m’est arrivé plusieurs fois, notamment avec les projets de loi « EGALIM » et « ELAN ». Il est très frustrant de « se taper » toutes les séances de nuit – pardon pour la trivialité de cette expression – uniquement pour être là, c’est-à-dire sans avoir le droit de parler. Je voudrais vraiment que l’on aborde ce problème car il est récurrent – cela va recommencer avec le texte sur la fonction publique. C’est une vraie gymnastique pour les députés non-inscrits que d’essayer de grappiller quelques minutes de-ci, de-là, soit par le biais des rappels au Règlement, ce qui n’est pas du tout une solution, vous me l’accorderez, soit parce que le Gouvernement dépose des amendements hors délai.

M. Paul Molac. J’ai un peu l’impression que nos amis du groupe Les Républicains voudraient, finalement, être le seul groupe d’opposition. Il y aurait la majorité d’une part, l’opposition Les Républicains d’autre part, et les autres n’auraient plus droit à la parole. Or ce n’est pas comme ça que ça se passe : la pluralité existe. Ce qui nous est proposé serait peut-être une mauvaise idée. On nous dit que la situation n’est pas assez claire, que les groupes ne sont pas assez constitués. Mais que se passerait-il ? Il y aurait des groupes techniques et la clarté des groupes politiques serait encore plus diluée. Je pense que l’on a réussi à trouver un équilibre, qui me semble bon. Si on pouvait le préserver, je n’en serais que plus satisfait.

M. Bruno Questel. Nos collègues des Républicains ont oublié, me semble-t-il, un paramètre dans leur réflexion. Les dispositions qu’ils proposent ne s’appliqueraient qu’à la prochaine législature. Or il y aurait 30 % de députés en moins…

M. Philippe Gosselin. Ça, c’est à voir !

M. Bruno Questel. Vous allez à l’inverse de l’objectif recherché : comme l’a dit Paul Molac, il y aurait une forme de concentration au sein d’un seul groupe de l’opposition, ce qui serait dommageable pour le débat public.

Dans une vie antérieure, il y a vingt-six ans, j’étais secrétaire général du groupe des non-inscrits de cette maison : ils avaient, dans leur ensemble, constitué un groupe technique avec des gens de la majorité et de l’opposition qui travaillaient très bien. Chacun trouvait sa place. Un dispositif juridique existe.

M. Michel Zumkeller. Je voudrais renchérir sur ce qu’a dit, entre autres, Paul Molac. Il a été question d’équilibre au début de notre discussion. Or nous avons là un sujet d’équilibre. Je crois qu’il est important que diverses expressions puissent exister. À un moment où nos concitoyens sont quand même très détachés de la politique, si l’on recentre les groupes sur une ou deux opinions ou écoles de pensée, je ne suis pas sûr que l’on servira la démocratie et que cela aidera au bon fonctionnement de cette Assemblée. Il est incohérent de nous dire que les groupes sont « techniques » et de vouloir réaugmenter le nombre minimal de membres – ils seront plus techniques encore. Tout cela n’a donc pas beaucoup de sens, et je crois qu’il faut en rester là. Le passage à quinze membres date de 2008, à la suite de la révision constitutionnelle voulue par Nicolas Sarkozy. Il y a aussi un moment où il faut avoir de la cohérence en politique : ce qui était bien en 2008, on peut penser que ça l’est encore. S’il y a huit groupes, tant mieux. Au moins on peut s’exprimer, et que huit groupes s’expriment ne me choque pas personnellement.

M. Pierre-Henri Dumont. Cette question est extrêmement importante. C’est en réalité la clef d’entrée de la réforme du Règlement. Si on le réforme, c’est parce que nous trouvons tous que les débats traînent en longueur, que les discussions générales sont parfois un peu trop longues, que des amendements sont déposés à répétition et que, de façon plus générale, la conduite des débats pourrait être plus efficace. Si c’est le cas, c’est parce que beaucoup de groupes se sont créés et qu’ils sont petits sur le plan numérique. Ce sont de petits groupes dans lesquels on distingue parfois assez mal soit ce qui les unit, soit ce qui les différencie d’autres groupes.

Selon nous, la première chose à faire, si vous voulez avoir plus d’efficacité dans la conduite des débats, si vous voulez qu’ils soient plus clairs et si vous désirez également réduire leur durée pour passer, peut-être, plus de temps sur des sujets extrêmement importants qui le mériteraient, au lieu d’être examinés à la va-vite à la fin, quand tout le monde est fatigué, c’est d’augmenter la taille des groupes pour réduire leur nombre. Cela ne revient pas à choisir quelle est la véritable opposition, comme le fait en ce moment la majorité, qui choisit elle-même, dans le cadre de la campagne pour les élections européennes, quelle est son opposition, qui sont ses véritables opposants. (Exclamations.)

Par ailleurs, le type de réforme du Règlement qui nous est proposé vise, à terme, à ôter des droits individuels à des députés élus sur leur nom, pour privilégier la logique de groupe. En fin de compte, on est en train de détourner ce qui est le cœur de cette Assemblée : nous sommes les représentants de nos concitoyens dans nos circonscriptions et nos territoires – c’est ce que nous pensons au sein du groupe Les Républicains. En substituant à cette logique individuelle une logique de groupe, on risque de perdre ce qui fait le sel de cette Assemblée et la représentation concrète de nos territoires. Si on se base sur une logique de groupe, et non plus individuelle, une multiplication des sous-groupes pourrait se produire. Si vous accordez dix minutes à chaque groupe dans la discussion générale, pourquoi un groupe largement majoritaire au sein de l’opposition mais non représenté proportionnellement ne créerait pas des petits groupes techniques ?

M. André Chassaigne. C’est la voie bolchevique ! (Sourire.).

M. Raphaël Schellenberger. Je voudrais rebondir sur ce qui vient d’être dit. Le problème, selon le rapporteur, serait que la réflexion n’est pas encore suffisamment aboutie. Très bien, mais nous considérons que cet amendement est le corollaire du glissement du pouvoir individuel vers le pouvoir du groupe que vous êtes en train d’organiser. Si on ne fige pas les règles concernant les groupes, qui seront plus importantes encore dans la réforme à venir du Règlement, il y aura des utilisations abusives – et vous ne pourrez pas dire que vous n’avez pas été prévenus. Un groupe comptant cent députés pourrait former demain cinq groupes. On aura ainsi « archipélisé » le débat parlementaire pour essayer de corriger une représentativité politique effacée par votre réforme du Règlement, et l’on n’aura en rien amélioré la qualité de nos débats.

Permettez-moi, enfin, de poser une question. Quand on appartient à un groupe de quinze députés, on n’est que deux par commission – même quand on est excellent… Je pense à nos pauvres collègues des petits groupes qui sont membres de la commission des Lois : ils ont à couvrir chacun la moitié de l’ordre du jour de l’Assemblée nationale, en nombre de textes. Ce ne sont quand même pas des conditions dans lesquelles on puisse faire du bon travail.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je constate pour ma part que les membres des petits groupes sont extrêmement assidus en commission des Lois et au sein de son bureau. Même quand ils n’ont que deux membres, je les vois systématiquement.

M. David Habib. Je voudrais revenir sur ce que j’ai dit au début de cette réunion. Dans la mesure où on a inversé le calendrier – on examine le Règlement avant de connaître le contenu de la réforme constitutionnelle –, on aboutit à ce type de débat, pour le moins surréaliste. Qu’il y ait un débat sur les groupes, leur taille, leur composition, leur fonctionnement, c’est légitime, mais encore faudrait-il savoir combien de députés siégeront demain. M. Questel voit dans une boule de cristal, mais l’expérience devrait l’inspirer – surtout que nous savons maintenant qu’il a animé le groupe des non-inscrits il y a vingt-six ans ! (Sourires). Il peut y avoir sinon une affaire Benalla tous les ans, du moins une difficulté pour le Gouvernement tous les ans.

Nous avons fait le choix, au groupe socialiste, de ne pas nous attacher à cette question des seuils, parce que nous ne savons pas ce que sera, demain, le périmètre de l’Assemblée. Au-delà des débats, légitimes et importants, sur la reconnaissance de la pluralité des opinions, il y a un préalable, me semble-t-il, qui est de ne pas aborder la question des seuils en l’absence d’éléments objectifs et définitifs sur le nombre de députés qui seront élus demain.

M. Philippe Gosselin. Je voudrais ajouter quelques mots en complément – car le débat a eu lieu. Nous ne faisons pas un point de blocage de ce pourcentage, vous l’avez bien compris. C’est plutôt un appel que nous lançons, et l’on voit bien qu’il est entendu : il y a du débat. Ce que nous voulons mettre en avant est le fait qu’un certain nombre de nos débats sont lourds parce qu’il y a, notamment, une multiplication du nombre de groupes. En ce qui concerne les explications de vote et le dépôt d’amendements, on a considérablement alourdi les choses. Sur le fond, cela ne me gêne pas, mais il faut avoir conscience qu’une partie des statistiques que la majorité et le président Ferrand nous présentent, et je le dis sans polémiquer, traduisent un effet mécanique qui est dû à l’augmentation des groupes. Plus on en aura, plus la durée des débats sera longue, même avec un Règlement modifié.

On met peut-être « la charrue avant les bœufs », c’est vrai : on est en train de modifier le Règlement de l’Assemblée avant même de réviser la Constitution. Nous ne savons pas combien nous serons, ni quelle sera la part de proportionnelle, et je rappelle qu’un des souhaits qui ont été exprimés est d’augmenter le nombre des commissions permanentes. Or vous voyez bien que s’il y a douze commissions permanentes et des groupes politiques de quinze membres, il n’y aura plus deux députés par commission, ce qui n’est déjà pas simple pour s’organiser, mais un ou un et demi. Je souhaite bon courage aux groupes en question ! On donne le sentiment d’organiser le travail parlementaire, mais c’est un écran de fumée.

Il n’y a pas de blocage de notre part sur ce sujet, je le répète, mais je crois, et c’est pourquoi nous voulions une déconnexion avec la présente législature – nous n’avons personne dans le collimateur, chaque groupe est légitime, je le dis pour Paul Molac comme pour le président Vigier –, que des alliances posent parfois question parce qu’elles sont plus techniques que politiques, ce qui n’est sans doute pas l’esprit premier du Règlement. Mais ce n’est pas grave : vous n’étiez pas concernés, il s’agit de la législature suivante. Au-delà du rejet, plus que vraisemblable, de cet amendement, car je ne me fais pas d’illusions, la question de l’équilibre démocratique, de la représentation des sensibilités et de l’efficacité du travail parlementaire mérite vraiment d’être posée.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je ne veux pas relancer le débat, mais j’ai une précision importante à apporter à Mme Ménard. Si je me suis mal exprimé ou si j’ai commis une erreur, je voudrais corriger mon propos. Il n’y a pas de droit constitutionnel à défendre un amendement dans l’hémicycle. Par ailleurs, le TLP n’est pas une question liée aux non-inscrits : si un groupe a épuisé tout son temps de parole, ses amendements sont mis aux voix sans avoir été présentés et débattus.

Mme Emmanuelle Ménard. Cela arrive rarement.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Peu importe : constitutionnellement, ce n’est pas une spécificité. La Constitution dit que le droit d’amendement s’exerce en commission ou dans l’hémicycle selon des conditions définies par une loi organique et par le Règlement. Cela veut dire que même le droit d’amendement dans l’hémicycle n’est pas une garantie constitutionnelle : il s’exerce selon des conditions définies par une loi organique et par le Règlement. Il n’y a pas de droit constitutionnel à défendre un amendement dans l’hémicycle et il n’y a pas de traitement particulier des non-inscrits. Je tenais à le préciser pour la clarté des débats.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL67 de Mme Marietta Karamanli.

Mme Laurence Dumont. Merci de m’accueillir dans votre Commission, que j’ai fréquentée à une époque. Maintenant, comme toutes les femmes, je suis à la commission des Affaires étrangères. (Rires et applaudissements).

L’amendement CL67 vise à combler une lacune, relative à la définition des groupes d’opposition. Vous savez que la révision constitutionnelle de 2008 a consacré des droits spécifiques pour les groupes d’opposition mais il n’existe pas de définition de cette notion, ce qui fait qu’elle a parfois été un peu détournée. La présidence de la commission des Finances, par exemple, revient aujourd’hui de droit à un membre de l’opposition.

Nous proposons de définir les groupes minoritaires comme étant ceux qui ont soit voté la confiance soit voté le projet de loi de finances (PLF) et le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) lors d’une même session. Cela permettra de faire un distinguo entre les groupes minoritaires et ceux d’opposition, auxquels des droits sont reconnus par la Constitution.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je comprends votre intention, mais je vais émettre un avis défavorable. Il y a un principe de liberté de constitution des groupes, et une pratique s’est établie. Aujourd’hui, un groupe est minoritaire par déduction : sont considérés comme minoritaires les groupes qui ne se sont pas déclarés d’opposition et qui ne sont pas le groupe majoritaire. Je pense que votre amendement ne changerait pas la configuration que nous connaissons aujourd’hui, et la corrélation avec les votes que vous suggérez ne me paraît pas une solution opérante. Il me semble donc préférable d’en rester à la situation actuelle.

M. Sébastien Huyghe. On peut discuter de la lettre de l’amendement, mais cette question est fondamentale, en effet. Puisqu’il faut désormais se réclamer soit de la majorité soit de l’opposition, il y a un problème. Il existe un groupe dont le président est entré au Gouvernement, mais ce groupe est toujours considéré comme d’opposition. Cela veut dire qu’il prend du temps de parole à l’opposition, parmi ce qui lui est dévolu, alors que celui qui présidait aux destinées de ce groupe est entré au Gouvernement et, de fait, dans la majorité. On peut considérer que ses anciens collègues l’ont suivi dans la majorité – en tout cas une grande partie d’entre eux. Il faut se poser la question de la définition des groupes d’opposition et des groupes minoritaires au sein de la majorité, car on prive de facto l’opposition d’une partie de son temps de parole.

M. Raphaël Schellenberger. Je ne veux pas rouvrir des plaies cicatrisées, mais ce sujet n’est pas complètement anecdotique : jamais, dans l’histoire de la Ve République, il n’a fallu autant de temps pour composer le Bureau de l’Assemblée nationale qu’au début de cette législature. C’est parce qu’il y a eu un dévoiement des règles de notre Assemblée. Cette question est donc essentielle, et je trouve que l’amendement est très intéressant, d’autant qu’on assiste à une multiplication des groupes. Quand il y en a moins et que chacun a un positionnement clair, ce qui n’empêche pas des nuances et des subtilités selon les textes examinés, ou en interne, dans le fonctionnement des groupes, c’est une chose, mais quand il y a une « archipélisation » de la vie parlementaire, il faut être en mesure d’avoir des clefs de lecture pour dire comment vont fonctionner nos outils internes. C’est quand même à notre Règlement de définir qui pourra prétendre au poste de questeur revenant à l’opposition et au premier poste de vice-président qui reviendra, demain, à l’opposition – on oublie de rappeler au passage que c’est une élue de l’opposition qui occupe ce poste parce que notre Assemblée a collectivement considéré qu’elle était la plus à même de le faire. (Exclamations.) Si on ne peut pas se donner des règles pour accompagner la création d’un soi-disant droit nouveau, alors il sera inopérant.

M. David Habib. La dernière intervention et celle de M. Huyghe ont permis d’apporter un plein éclairage sur l’amendement présenté par Mme Dumont. Nous sommes aujourd’hui dans un autre cas de figure que par le passé. Vous avez décidé, et c’est un aspect qui a été salué par tout le monde, de confier à des membres de l’opposition des responsabilités importantes dans le fonctionnement de notre Assemblée. Ce qui est à craindre, car chaque disposition amène immédiatement à un contournement, est une usurpation du statut de groupe minoritaire. En précisant des conditions objectives – le vote ou non de la confiance, celui des deux textes financiers –, on établira la réalité des positions à l’intérieur de l’hémicycle et on évitera pour l’avenir, monsieur le rapporteur, madame la présidente, des débats qui sont à l’origine de bien des difficultés dans notre vie parlementaire. On a besoin de cette clarification. C’est vous-mêmes qui la demandez en modifiant le Règlement dans le sens que je viens d’évoquer. Je vous interpelle au regard des responsabilités qui sont aujourd’hui les vôtres, au regard du statut qui pourrait être le vôtre demain et au regard de la responsabilité que nous avons quant au fonctionnement de notre Assemblée sous cette législature : je vous demande de ne pas avoir une position partisane, mais d’accueillir la proposition de Mme Dumont avec le respect dû à quelque chose qui est réellement important pour notre Assemblée.

M. Erwan Balanant. Il y a des choses assez intéressantes dans ce que vient de dire M. Habib, mais j’aimerais aussi que l’on sorte de l’idée d’une opposition, d’une minorité permanente. On peut parfaitement imaginer un Parlement où des groupes sont en accord avec une politique gouvernementale pendant une période de la législature, mais pas à une autre période.

M. Philippe Gosselin. Ce n’est pas la même chose !

M. Erwan Balanant. Certes, mais cela joue sur l’équilibre. M. Huyghe a évoqué un exemple intéressant qui est celui du groupe UDI, Agir et Indépendants. Il faut que nous trouvions et c’est toute la difficulté – l’amendement est peut-être une piste – une solution pour avoir de la souplesse et, éventuellement, des évolutions en cours de mandat. C’est aussi ce qu’attendent les Français : ne pas avoir toujours une opposition et une majorité dans cet hémicycle.

M. Paul Molac. Je crois qu’il y a en fait deux visions qui s’opposent. Il y a une vision binaire selon laquelle on est dans l’opposition ou dans la majorité, et une autre, qui m’avait plu chez Emmanuel Macron, au départ en tout cas : c’était que l’on vote en son âme et conscience et qu’il peut y avoir des circonstances dans lesquelles on va soutenir le Gouvernement et d’autres cas où on ne va pas le soutenir. Quand j’ai été élu, au premier tour, et que je suis arrivé ici, les journalistes me sont tombés dessus en me disant : « vous venez d’être élu dans cette nouvelle majorité et vous allez donc faire tout ce que M. Macron veut ». Je les ai regardés, un peu interloqué car ce n’était pas comme cela que je voyais les choses. Quand une mesure est bonne, je la vote, et quand elle n’est pas bonne, je ne la vote pas, et puis c’est tout.

M. Bruno Questel. Je voudrais juste dire, à titre personnel, que je comprends la logique et la philosophie de cet amendement, mais que j’ai un petit doute sur son caractère opératoire. Si je reviens sur ce qu’a dit notre collègue Schellenberger, on élit le Président de l’Assemblée lors de la première séance, puis le collège des questeurs, etc. Or, par définition, il n’y a pas encore eu de vote de confiance, de vote sur les lois de finances et de financement de la sécurité sociale ou de vote d’une motion de censure. L’amendement est donc inopérant par rapport aux problématiques qui ont été soulevées. Même si je peux comprendre l’idée de marquer ou de flécher les groupes en fonction de leur appartenance à la majorité ou à la minorité, ce que vous proposez est inopérant.

M. Pierre-Henri Dumont. Une fois de plus, on passe d’une logique individuelle à une logique de groupe dans le nouveau Règlement que vous nous proposez. En se basant sur cette logique, imaginez qu’il y ait un groupe qui soit un coup dedans et un coup dehors, quand cela l’arrange : cela ne peut pas fonctionner. Si l’on passe à une logique de groupe, il faut que l’on sache parfaitement et à n’importe quel moment si un groupe est dans la majorité ou dans l’opposition, puisque certains postes sont dévolus à des membres de la majorité ou de l’opposition, c’est-à-dire appartenant à des groupes considérés comme tels. À partir de ce moment-là, on ne peut pas avoir un groupe qui se dise dehors et dedans à la fois.

Je rappelle simplement qu’au début de cette législature, comme il y avait cette ambiguïté sur ce qu’était l’opposition, c’est la majorité qui a choisi, à la place des minorités, qui devait être questeur. Le premier vote sur les questeurs, qui a bloqué l’ensemble du fonctionnement de l’Assemblée et du Bureau, a vu la majorité choisir son opposition. Dans tous les parlements et dans tous les organismes locaux de délibération, celui qui vote le budget est dans la majorité et celui qui ne le vote pas est dans l’opposition. C’est extrêmement simple, et je pense que le dispositif présenté par nos collègues socialistes est parfaitement pertinent. Cela permettrait d’avoir une vision claire, sans empêcher, lorsque l’on est membre d’un groupe d’opposition, de voter parfois des textes de la majorité ni, au contraire, quand on est dans la majorité, de décider individuellement de voter parfois contre des textes parce que l’on considère qu’ils vont à l’encontre des intérêts des électeurs que l’on représente ou de ses convictions personnelles. L’un n’empêche pas l’autre. Mais je pense sincèrement que l’on doit avoir une définition extrêmement claire de qui est dans la majorité et qui est dans l’opposition. La situation que l’on a vécue et qui continue à exister, comme Raphaël Schellenberger l’a dit, avec un ministre qui était le président d’un groupe dit d’opposition, ne peut pas aller.

M. Philippe Gosselin. Quelques mots seulement, car beaucoup a déjà été dit.

On peut se reconnaître dans une politique à un moment donné, dans une politique sectorielle, sans être pour autant membre de la majorité. Cela nous est arrivé, à nous aussi, bien évidemment, de voter des textes avec la majorité – et je ne me suis jamais pincé le nez en le faisant – parce que nous trouvions que c’était juste, que c’était bon, que c’était dans l’intérêt collectif du pays. Cela ne détermine pas, néanmoins, un positionnement dans la majorité ou dans l’opposition.

Les constitutionnalistes, les fiscalistes, les observateurs de la vie politique reconnaissent depuis quelques décennies qu’il y a deux critères pour être membre de la majorité ou de l’opposition : c’est le vote de la confiance, bien sûr, et le vote du budget. Tout le monde le sait. Ce sont les deux critères indiscutables et non discutés – d’ailleurs, vos hochements de tête sont approbateurs. Les critères proposés par Laurence Dumont sont simples et efficaces.

Il ne s’agit pas d’être binaire : nous ne sommes pas pour ou contre en permanence, de façon dogmatique. Encore une fois, on peut se retrouver sur certains sujets, mais je crois que vouloir nier les oppositions est plutôt contraire au caractère démocratique de la vie politique. Ce n’est pas honteux d’être dans l’opposition. Celle d’un jour peut être la majorité du lendemain. Ne pas reconnaître les oppositions, c’est entrer dans un processus de confusion qui me paraît contraire à l’esprit démocratique.

À partir du moment où un certain nombre de fonctions sont fléchées, comme c’est le cas avec la première vice-présidence de l’Assemblée nationale, de la présidence de la commission des Finances et d’autres instances encore, et où des temps de parole découlent du fléchage, il me semble important de se déterminer de façon claire et nette. Ce n’est pas honteux, je le répète. Les deux critères proposés par Laurence Dumont sont, honnêtement, très clairs et sans ambiguïté.

Mme Laurence Dumont. Si j’ai bien compris, La République en Marche nous explique depuis maintenant deux ans que la gauche et la droite sont dépassées et, finalement, qu’il n’y a plus de majorité ni d’opposition. Le clivage entre gauche et droite n’existerait plus, ne serait plus pertinent, et le clivage majorité-opposition non plus. J’avoue que je ne me reconnais plus tellement dans ces débats-là.

Je voudrais simplement, monsieur le rapporteur, avoir votre réponse à une question, car je n’ai pas bien compris vos propos. Donnez-moi un seul argument contraire à cet amendement et dites-moi si, de votre point de vue, on peut être député de l’opposition en ayant voté la confiance ou en ayant voté le budget et le PLFSS. Oui ou non ?

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je dirai juste un mot. Il y a eu les mêmes débats en 2009 lors de la dernière réforme du Règlement, pilotée par la majorité de l’époque. Un point d’équilibre a été trouvé. Il peut effectivement être remis en cause par la parole politique – qui va être pour ou contre, qui va voter pour ou contre tel ou tel budget. Je pense que cet équilibre, que nous avons aujourd’hui, n’est pas entièrement satisfaisant – je vous rejoins – parce qu’il y a des limites ou des questions nouvelles : tel groupe vient de se constituer, il est dans la majorité, mais il peut voter contre… Cela crée des situations nouvelles. Pour autant, soyons clairs : il y a une reconnaissance du fait majoritaire – de qui est dans la majorité et de qui est dans l’opposition. Cette notion existe, et elle se manifeste d’ailleurs lors de chaque débat, puisqu’il y a des temps de parole qui sont ainsi définis. Je crois que l’on a un équilibre qui a fait ses preuves et qu’il ne faut pas le bouleverser au motif qu’il y a une question, à un moment, sur un groupe en particulier.

En ce qui concerne la majorité, l’opposition et les groupes minoritaires, je rappelle que le Règlement prévoit que l’on se « déclare » d’opposition. Il y a donc une liberté des groupes de se constituer et de déclarer qu’ils sont dans l’opposition ; si un groupe fait le choix de ne pas exercer cette option et de ne pas se déclarer d’opposition, il peut-être, de fait, minoritaire dans la majorité. Si l’on touche à cela, on touche aussi aux équilibres qui se sont construits et à la liberté de se déclarer ou non d’opposition. On ne peut pas forcer un groupe qui ne le demande pas à être dans l’opposition ? Cela poserait un réel problème démocratique ?

M. Raphaël Schellenberger. Ce n’est pas ce que prévoit l’amendement !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Mais si ! Aujourd’hui, un groupe minoritaire est un groupe qui ne s’est pas déclaré d’opposition. Il y a cette liberté du groupe qui se déclare lui-même ou non d’opposition. Je crois que toucher à cet équilibre qui s’est constitué au cours des dernières années, pour des raisons peut-être conjoncturelles, ne serait pas une bonne chose. Que la réflexion doive se poursuivre sur ce sujet, soit, mais je maintiens mon avis défavorable. Nous avons atteint un équilibre compliqué, et j’attire l’attention de tout le monde sur le problème que poserait le fait de dire à un groupe qui ne se déclare pas d’opposition : « Mais si, tu vas l’être. »

M. Raphaël Schellenberger. Ce n’est pas la question. L’amendement ne concerne pas le fait d’être dans l’opposition, mais d’être minoritaire.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. J’ai bien compris. Quand il se constitue, un groupe peut aujourd’hui se déclarer d’opposition. Encore une fois, c’est sa liberté, et si on la remettait en cause, il y aurait un vrai problème démocratique.

On pourrait en débattre à l’infini. Un équilibre s’est constitué depuis 2008. Qu’il faille réfléchir, soit, mais cela pose des questions démocratiques fortes. Cela signifie en pratique que l’on pourrait dire : « Vous avez déclaré en vous constituant que vous n’êtes pas d’opposition, vous n’avez pas choisi d’être classé dans l’opposition, mais je vous classe quand même dans l’opposition, c’est moi qui décide. »

M. Philippe Gosselin. Mais ce n’est pas vous qui le décideriez ! Il s’agit de constatations de fait.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. J’ai bien compris. Mais, encore une fois, quand un groupe se constitue aujourd’hui, il se déclare ou non d’opposition. Il y a cette liberté-là, et cela poserait de vraies questions démocratiques que de dire que l’on décide à la place du groupe. Compte tenu de cet équilibre, je suis défavorable à l’amendement, et je pense qu’il est plus sage d’en rester là.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Il y a encore différentes demandes de prise de parole. Je sais que ce sont des sujets fondamentaux, mais il y a déjà eu un peu plus de dix interventions et il va falloir avancer : nous avons étudié treize amendements seulement depuis le début de la matinée et il nous en reste encore 313 !

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Je voudrais simplement indiquer qu’au Sénat, par exemple, il est prévu que « dans les sept jours suivant sa création, ainsi qu’au début de chaque session ordinaire, un groupe se déclare à la Présidence du Sénat comme groupe d’opposition ou comme groupe minoritaire au sens de l’article 51-1 de la Constitution. Il peut reprendre ou modifier cette déclaration à tout moment ». S’il y a un sujet, je pense qu’il faut que l’on en reparle, effectivement, et que l’on trouve une solution qui puisse convenir à l’ensemble des groupes, mais je crois que ce qui existe au Sénat est assez équilibré.

M. Rémy Rebeyrotte. J’ai le sentiment que nous sommes incorrigibles. Comme l’a dit M. Gosselin, on définit politiquement la logique de majorité et d’opposition au sein des conseils municipaux selon les votes pour l’élection du maire, la composition du bureau municipal, et ensuite le vote du budget. Par ailleurs, il y a des évolutions possibles au cours d’un mandat. La logique du groupe, notamment en sociologie, est une logique d’appartenance, de sentiment d’appartenance. Il peut y avoir des personnes qui, à un moment, souhaitent évoluer, constituer un groupe ou en quitter un pour en rejoindre un autre. Il ne faut pas introduire de la rigidité dans ce domaine, alors que chacun se déclare aujourd’hui comme il l’entend : un groupe peut déclarer qu’il est d’opposition ou minoritaire. En cette matière, je trouve que la souplesse ne pose aucun problème. On ne doit pas instaurer de la rigidité là où nous n’avons aucun intérêt, ni les uns ni les autres, à en créer.

Mme Laurence Dumont. Vous dites, monsieur le rapporteur, qu’il y a une liberté de se reconnaître comme étant de l’opposition ; d’accord, mais la définition de l’opposition n’existe pas. La Constitution prévoit la possibilité de donner des droits spécifiques aux groupes d’opposition, mais celle-ci n’a pas de définition. Vous reconnaîtrez quand même qu’il y a un petit sujet. Je maintiens donc ma question, à laquelle vous n’avez pas répondu, car je veux que ce soit très clair pour ceux qui consulteront nos travaux : vous considérez que l’on peut se dire de l’opposition en ayant voté la confiance, le budget et le PLFSS tous les ans ? C’est absurde. Vous avez l’occasion de corriger cette absurdité assez facilement et assez simplement. Faisons-le. Il y a une liberté mais pas de définition en face.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je demande à ceux qui se sont déjà exprimés d’être extrêmement brefs, sans quoi nous n’y arriverons pas.

M. Sébastien Huyghe. Il y a, dans le fonctionnement actuel, un problème de démocratie et de respect de la démocratie. On a donné un certain nombre de droits aux groupes de l’opposition – il y a, par exemple, autant de questions au Gouvernement dévolues à l’opposition qu’à la majorité. À partir du moment où un groupe utilise du temps de parole accordé à l’opposition pour dire du bien du Gouvernement et de la majorité, cela veut dire que l’on enlève à l’opposition un temps de parole au profit de la majorité. C’est un détournement de la part d’un groupe qui s’est déclaré d’opposition mais qui, dans les faits, est dans la majorité. Cela pose un vrai problème démocratique car cela prive les véritables oppositions d’un temps de parole.

M. Philippe Gosselin. Je n’en suis pas à réclamer la reconnaissance de l’opposition, non pas de Sa Majesté, comme au Royaume-Uni, mais de M. le Président de la République… Et c’est pareil au Bundestag, même si c’est formulé autrement, notamment compte tenu des alliances.

Oui à la souplesse, et j’entends bien ce qu’a dit Rémy Rebeyrotte, et oui au changement – un groupe peut toujours changer –, mais dès lors que l’on reconnaît des droits spécifiques à l’opposition, droits que cette proposition de résolution veut renforcer dont acte –, il est important de définir ce qu’est l’opposition. Notre collègue Laurence Dumont a parfaitement raison : on ne peut pas reconnaître des droits à un groupement qui n’est pas défini. Ces droits pourraient se traduire par une forme de détournement. Je ne fais pas référence à des situations actuelles, je ne veux pas polémiquer, mais quand on se déclare ou non dans l’opposition on prend ou non du temps à l’opposition qui est, elle, réellement dans le débat démocratique. Peut-être cet amendement n’apporte-t-il pas la réponse, même si les critères proposés me paraissent très clairs et très simples, mais il y a en tout cas un vrai sujet, que vous ne pouvez pas éluder.

M. Raphaël Schellenberger. Je rejoins ce que viennent de dire mes deux collègues au sujet de la démocratie, car ce n’est pas pour rien qu’un des trois postes de questeurs revient à l’opposition. C’est aussi une façon d’être transparent dans notre mode de fonctionnement. Si l’on a confiance dans l’opposition et dans sa capacité d’être plus critique et plus vigilante qu’on ne l’attend des députés de la majorité, il faut mettre en avant les droits de l’opposition et s’assurer que les élus qui exercent ces droits sont effectivement des élus d’opposition.

Ensuite, monsieur le rapporteur, vous considérez que notre discussion n’est alimentée que par un problème conjoncturel. C’est en partie vrai, du fait des bouleversements politiques de 2017. Mais les propositions de modification que vous avancez tendent à rendre structurelles ces questions car, à partir du moment où on donnera plus de place aux groupes, il faudra mieux les définir. Sur la question du nombre de leurs membres, nous avions formulé une proposition. Quant à leur qualification comme groupe d’opposition, c’est aussi une question centrale de la réforme du Règlement.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Si chaque groupe compte un représentant qui se consacre à ce texte, je pense que nous pouvons former ensemble un petit groupe de travail sur le sujet, pour voir, d’ici à l’examen dans l’hémicycle, si quelque chose peut évoluer, notamment eu égard au respect de la liberté d’un groupe de déclarer ou non appartenir à l’opposition. Soit vous retirez votre amendement et nous organisons une réunion de travail, soit vous le maintenez, mais je maintiens alors mon avis défavorable.

Mme Marietta Karamanli. Je rappelle que cet amendement a été déjà présenté dans le cadre de nos discussions sur la révision constitutionnelle. Il a donné lieu à un débat très intéressant, où plusieurs groupes se sont retrouvés sur la nécessité de définir ce qu’est l’opposition.

Je ne retire pas notre amendement, qui ouvre un débat et peut finalement permettre à chacun de se positionner. Mais il ne faut pas que cela nous enlève la possibilité de travailler la question jusqu’à la séance publique, car nous devons sortir par le haut de cette situation impossible. Ce que nous avons connu en début de cette législature ne doit pas se reproduire, quel que soit le groupe concerné !

M. Arnaud Viala. Cette question est d’autant plus essentielle que vous défendez une modification du Règlement donnant plus de place aux groupes. Or comment peut-on être dans un groupe d’opposition et voter l’intégralité des textes importants d’une année parlementaire ?

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CL186 de M. Paul Molac et CL23 de M. Michel Zumkeller.

M. Paul Molac. Notre amendement vise à renforcer les droits des groupes d’opposition en leur réservant le poste de rapporteur lorsqu’une commission permanente est saisie pour avis, préalablement à une nomination.

M. Michel Zumkeller. Cela se pratique déjà dans certaines commissions, mais il me semble important d’inscrire dans les textes que ce rapporteur désigné à l’occasion des nominations sur le fondement de l’article 13 de la Constitution est issu de l’opposition. La même observation vaut pour mon amendement, à venir, qui consacre l’envoi d’un questionnaire à la personnalité dont la nomination est envisagée.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Avis défavorable au premier amendement. Tout notre équilibre démocratique est construit sur le fait que les rapporteurs des textes appartiennent à la majorité. On ne peut donc modifier cet équilibre sans aller vers une refonte complète. On ne peut pas passer ainsi de la Ve à la VIe République au détour d’une modification du Règlement… Boutade mise à part, l’adoption de cet amendement changerait profondément toutes nos méthodes de travail et d’organisation. Or ce n’est pas l’objet du texte que nous examinons.

Quant à votre amendement, M. Zumkeller, l’envoi du questionnaire doit rester une pratique de la commission, mais la question ne relève pas du Règlement. Je propose donc de laisser les choses en l’état.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je remercie M. Zumkeller pour son hommage à la commission des Lois !

La Commission rejette successivement les deux amendements.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette successivement les amendements CL191 de M. Michel Zumkeller et CL187 de M. Paul Molac.

Article 3 (art. 33 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Représentation des députés non-inscrits au sein des commissions spéciales

La Commission examine l’amendement CL51 de M. Philippe Gosselin.

M. Philippe Gosselin. Notre amendement tend à supprimer cet article, sans pour autant que nous soyons totalement contre lui. Nous voulons simplement mettre en avant le respect des non-inscrits, qui sont des députés de la Nation comme tous les autres. Je ne saurais revendiquer un droit de parole pour chacun et en priver les non-inscrits.

Cela étant, l’organisation des parlements est telle que les groupes ont forcément un peu plus de poids et de moyens, ce qui ne me paraît pas illégitime. Même si je ne cherche pas à « collectiviser » le fonctionnement de l’Assemblée nationale, je crains que cette disposition, comme celle qui a été votée tout à l’heure s’agissant du Bureau de l’Assemblée, ne débouche, à force d’élargir le cercle, à un alourdissement du fonctionnement.

On veut dégager du temps en nous privant éventuellement d’un peu, voire beaucoup, de temps de parole, qui serait donné à d’autres ? Fort bien, mais, en réalité, on risque d’alourdir le fonctionnement et d’aller ainsi à l’encontre du but recherché. C’est ce que nous voulons mettre en avant dans le débat et dans la discussion.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Avis défavorable. Permettez-moi quelques mots sur la situation actuelle des non-inscrits. Je ne sais pas si tout le monde le sait mais c’est aujourd’hui, dans le cas qui nous intéresse, la majorité qui définit le nombre des non-inscrits et qui les choisit – même si elle use rarement de cette dernière possibilité.

Je proposerai pour ma part, dans un instant, par l’amendement CL330, d’instituer un véritable droit, mais qui bénéficierait à chaque fois à un seul non-inscrit : ne dit-on pas qu’un tiens vaut mieux que deux « tu l’auras » ? A plus forte raison si c’est « tu l’auras peut-être et c’est moi qui choisis… », car actuellement la décision n’appartient pas aux non-inscrits. Le bon équilibre consisterait à établir un droit clair ; c’est à leur avantage. C’est ce que propose cet article, qui a fait l’objet d’une concertation.

M. Philippe Gosselin. Je maintiens mon amendement, mais je voterai sans état d’âme en faveur du vôtre, monsieur le rapporteur.

Mme Emmanuelle Ménard. Personne ne conteste qu’un groupe politique comme le groupe des Républicains, qui compte cent députés, ait plus de prérogatives qu’un député non-inscrit, mais de là à ce que les non inscrits soient exclus systématiquement… Il faudrait trouver un juste milieu. Les députés non-inscrits représentent, par définition, des sensibilités qui ne sont représentées nulle part ailleurs ni dans aucun groupe existant. Il me semble de bon aloi, pour cette raison même, de leur réserver quelques places.

M. Erwan Balanant. Je suis entièrement d’accord sur ce point, chose assez rare, avec Mme Ménard. Si nous ne partageons pas la même idéologie politique, je suis entièrement d’accord avec elle pour faire respecter les droits des députés non-inscrits. Car il y en a qui travaillent – parfois plus que certains députés inscrits dans un groupe !

Or, dans le cadre du temps législatif programmé, le temps de parole est décompté de telle sorte qu’un député ou une députée qui a travaillé un texte en profondeur peut se retrouver dans l’impossibilité de s’exprimer. Je ne trouve pas cela normal. Il faut donner un statut aux non-inscrits, même si celui-ci offre moins de droits et de possibilités qu’aux députés appartenant à un groupe.

La Commission rejette l’amendement CL51.

Elle adopte l’amendement CL330 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 3 modifié.

Après l’article 3

La Commission examine l’amendement CL168 de Mme Cécile Untermaier. 

Mme Cécile Untermaier. Nous constatons que les commissions spéciales ne disposent pas de rapporteurs d’application. Nous formulerons d’autres propositions au sujet des rapporteurs d’application, mais, à ce stade, nous proposons d’introduire une disposition qui fasse bénéficier les travaux de ces commissions des compétences dévolues dès le début de la procédure aux co-rapporteurs d’application.

Je reviendrai, dans la discussion d’autres amendements, sur la participation d’un député membre de la commission des Affaires européennes et sur le rôle du co-rapporteur que nous souhaitons mettre en place.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Il se trouve que les travaux d’une commission spéciale s’achèvent avec l’adoption de la loi pour laquelle elle a été constituée, ce qui exclut les travaux ultérieurs d’un rapporteur d’application. Avis défavorable, donc, mais c’est un vrai sujet.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Pour votre information, dans le cas de la de la loi sur la prostitution, pour laquelle une commission spéciale avait été constituée, j’ai eu un entretien avec la délégation aux droits des femmes et c’est elle qui fera le travail d’évaluation et d’application de la loi. Il est donc possible de travailler aujourd’hui en bonne intelligence. Quand nous pouvons le faire, nous le faisons.

Mme Cécile Untermaier. Certes, mais les commissions spéciales traitent généralement de textes importants ; j’ai en mémoire la loi « Macron » que nous avions examinée en commission spéciale. Son rapporteur est maintenant le président de l’Assemblée nationale. Si la commission spéciale disparaît, son rapporteur reste ! C’est pourquoi il me semble qu’un rapporteur d’application pourrait rester lui aussi, et ce d’autant plus que ce sont souvent des textes complexes, qui ressortissent du champ de compétence de plusieurs commissions et qui appellent un suivi, sur le plan réglementaire comme sur celui de l’exécution. La pratique que vous avez mise en place, madame la présidente, doit trouver sa place dans le Règlement.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. La loi à laquelle vous faites référence a précisément été évaluée par une mission de suivi regroupant des membres de diverses commissions. Vous en faisiez d’ailleurs partie. Tant que l’on peut assurer ce suivi, on le fait, mais il paraît compliqué de changer le Règlement sur ce point.

La Commission rejette l’amendement.

Article 4 (art. 36 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Suppression de l’examen préalable des pétitions par la commission des Lois

La Commission examine, en discussion commune, l’amendement CL24 de M. Michel Zumkeller et l’amendement CL134 de M. Yannick Favennec Becot.

M. Michel Zumkeller. Il s’agit d’instaurer une commission des Affaires européennes de plein droit. Ce sujet a déjà été évoqué lors de la révision constitutionnelle de 2008, puisque le nombre de commissions est fixé par la Constitution.

S’il n’est donc pas possible d’en créer une supplémentaire, il nous semble important d’avoir néanmoins une commission des Affaires européennes de plein exercice, et c’est pourquoi je propose de faire ce qu’a fait le Sénat, c’est-à-dire de regrouper affaires étrangères et défense dans une seule commission. Cela accroîtrait d’ailleurs la cohérence entre nos deux assemblées, cohérence que vous appeliez de vos vœux, monsieur le rapporteur, lorsque nous avons évoqué la question des délais. Ce parallélisme des commissions me semble même plus important que la question des délais.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. J’observerai que le président Ferrand a choisi de ne pas mener de concertation sur ce point avec les présidents de commission et de ne pas mettre le sujet sur la table. Au vu des amendements déposés, j’ai abordé la question avec lui et puis vous dire qu’il y consacrera un groupe de travail, qui sera lancé d’ici la fin de la législature. Nous n’allons donc pas prendre une telle décision en catimini, sans concertation préalable avec les présidents de commission, actuels ou passés.

À défaut de retrait, je me verrai au regret d’émettre un avis défavorable sur tous les amendements tendant à des fusions de commissions ou à un changement de leur périmètre. Il n’agit pas de botter en touche, mais il serait inconvenant d’en décider entre nous sans avoir mené de concertation. Ce fourmillement d’idées est très intéressant et alimentera le débat, mais ce n’est pas l’objet de ce texte.

Mme Marietta Karamanli. Nous ne l’avons pas redéposé cette fois, mais nous avions défendu un amendement en ce sens sous la précédente législature. Le débat nécessaire a donc déjà eu lieu. Pourquoi ne pas modifier le Règlement sans attendre une révision de la Constitution ?

Plus des trois cinquièmes des textes sont aujourd’hui du droit européen. Le Président de la République a annoncé qu’il ferait des sujets européens une priorité. Je ne comprends donc pas que nous n’abordions pas la question dans le cadre de la réforme du Règlement. Ne la renvoyons pas à un groupe de travail : saisissons l’occasion maintenant, tant que l’Europe peut encore fonctionner !

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle aborde l’amendement CL105 de M. Philippe Dunoyer. 

M. Michel Zumkeller. Nos collègues ultramarins, avec qui j’ai signé cet amendement, reconnaissent que la délégation aux outre-mer occupe une place importante dans le fonctionnement de notre assemblée, mais souhaiteraient conférer à cette délégation des pouvoirs et des moyens supplémentaires, en l’érigeant en commission. A défaut, on pourrait au moins renforcer les délégations existantes.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je suis au regret de recommander le retrait de cet amendement et, à défaut, d’émettre un avis défavorable, le président Ferrand envisageant une réflexion sur la question, importante, des périmètres des commissions.

M. David Habib. Je suis d’accord avec ce que vient de dire le vice-président Waserman. Après ce qu’il s’est passé dimanche en Nouvelle-Calédonie, nous sommes tous extrêmement attentifs à ce qui se passe outre-mer. Nous en avons d’ailleurs parlé hier ensemble, madame la présidente. Je comprends donc la réponse qui est faite, mais je souhaite que l’on ne se montre pas avare, notamment de moyens, et que l’on accompagne mieux nos collègues d’outre-mer qu’on ne le fait, me semble-t-il, aujourd’hui.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je rappelle que l’outre-mer est une compétence de la commission des Lois, et la nomenclature des textes que nous avons examinés dans ce domaine depuis le début de la législature montre que nous sommes extrêmement mobilisés sur ces questions – et extrêmement intéressés. Il ne serait pas bon qu’elles relèvent d’une commission permanente spécialisée.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL92 de M. Raphaël Schellenberger.

M. Raphaël Schellenberger. Cet amendement tend à faire glisser le droit commercial de la compétence de notre commission vers celle de la commission des Affaires économiques. Vous allez me dire qu’il est curieux de proposer un tel dessaisissement, mais cela me semble être un acte de cohérence.

Si je comprends que le droit commercial ait été inscrit, il y a un certain temps, dans les compétences de la commission des Lois, je pense que la conception du droit commercial a beaucoup changé depuis cette époque et qu’il n’est plus l’un des éléments essentiels de la construction du pouvoir en France. Si notre commission est compétente pour les questions régaliennes et celles liées à l’équilibre des pouvoirs, la commission des Affaires économiques abordera le droit commercial avec plus de pertinence, dans le sillage du travail qu’elle mène tout au long de l’année.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Avis défavorable, mais votre réflexion alimentera effectivement la réflexion sur le périmètre de des commissions.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 4 sans modification.

Après l’article 4

La Commission examine l’amendement CL133 de M. Yannick Favennec Becot. 

M. Paul Molac. Les auteurs de cet amendement souhaitent que chaque groupe politique puisse pleinement travailler en commission et, pour ce faire, dispose dans chaque commission permanente d’un député suppléant, qui disposera des mêmes droits qu’un député titulaire lorsqu’aucun titulaire de son groupe ne pourra être présent. Il s’agit d’assurer la continuité du travail législatif en commission, ainsi que son efficacité.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Avis défavorable. Chacun mesure les conséquences que cela pourrait avoir.

La Commission rejette l’amendement.

Article 5 (art. 39 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Participation des groupes aux bureaux des commissions

La Commission adopte l’article 5 sans modification.

Après l’article 5

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement CL25 de M. Michel Zumkeller.

Elle examine l’amendement CL26 de M. Michel Zumkeller.

M. Michel Zumkeller. Il s’agit d’inscrire dans notre Règlement quelque chose qui semble une évidence : l’impossibilité pour une commission de tenir des réunions lorsqu’un texte dont elle est saisie au fond ou pour avis est examiné en séance publique. Cela n’arrive pas souvent, mais cela arrive parfois. Il est déjà très difficile de se multiplier, mais, dans des cas comme celui-là, cela devient presque impossible !

M. Raphaël Schellenberger. Il a raison !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Avis défavorable. Nous avons déjà des réunions « sanctuarisées » le mercredi matin. Je pense qu’il faut conserver une certaine souplesse. En fait, la seule bonne solution serait de voter le droit d’ubiquité, mais je crois que nous n’en avons pas la possibilité… (Sourires.)

À travers cet amendement, vous posez la question fondamentale de l’organisation du temps de travail et de la simultanéité des réunions. Mais, à ce stade, l’adopter ne ferait qu’ajouter des contraintes aux contraintes. Nous savons qu’il va nous falloir, un jour, changer de modèle de gestion du temps, et que cela aura des implications constitutionnelles. On ne saurait donc aborder la question par ce biais-là.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. La commission des Lois, qui est particulièrement concernée par ces questions, s’efforce de ne jamais placer ses membres dans cette situation, en particulier lorsqu’elle est saisie au fond du texte examiné dans l’hémicycle. C’est parfois difficilement évitable, en revanche, dans le cas d’une saisine pour avis.

M. Raphaël Schellenberger. Ce débat est intéressant et important. On dit qu’on travaille mal, mais la vérité, c’est qu’on travaille trop : trop d’amendements, trop de discussions, trop de textes… C’est pourquoi nous essayons de dégager du temps pour être plus efficaces.

Avant de nous interdire à nous-mêmes de déposer des amendements portant article additionnel en matière réglementaire, faisons d’abord en sorte que certains textes ne soient pas présentés au Parlement alors qu’ils n’ont pas vocation à l’être ! Ainsi, le projet de loi sur la fonction publique qui est en cours de discussion dans l’hémicycle comporte des dispositions tendant à modifier de simples décrets…

Je suis d’accord, monsieur le rapporteur, pour dire qu’il ne faut pas regarder le problème de l’encombrement de notre ordre du jour par le petit bout de la lorgnette. Mais alors, attaquons-le par le grand bout : agissons sur les contraintes de fonctionnement de notre assemblée et si cela ralentit l’examen des textes, tant pis !

Car il n’y a pas – il n’y a jamais – d’urgence à voter une loi ! Au pire, l’urgence peut être déclarée par le Gouvernement. Ralentissons donc la discussion de la loi quand c’est nécessaire, et je trouve particulièrement pertinente, de ce point de vue, la proposition de M. Zumkeller.

Mme Danièle Obono. Pour des raisons différentes des siennes, je souscris à l’analyse de notre collègue. C’est vraiment par le petit bout de la lorgnette que nous abordons la question de l’encombrement de l’ordre du jour. La véritable raison en est que c’est le Gouvernement qui détermine notre ordre du jour et, partant, le niveau d’intensité de nos travaux. C’est lui qui décide de faire passer tant de textes par session, voire par semestre, lui aussi qui décide de la nature des textes et de leur rythme d’examen.

Examiner des textes en procédure accélérée signifie effectivement qu’une pression est mise sur le Parlement. Nous sommes pris dans le carcan d’un fonctionnement institutionnel où chacun se débat à qui mieux mieux. La logique suivie repose sur l’idée que le travail parlementaire doit se faire vite. Or, vitesse ne signifie pas nécessairement efficacité, bien au contraire. Le retard dans l’examen des textes est souvent dû au fait qu’en faisant vite, on fait mal et, en fin de compte, on perd du temps.

Tout le problème est celui du carcan institutionnel, et il est hallucinant de se dire qu’on ne peut rien y faire, à part essayer de poser quelques sparadraps ! Tout à l’heure, avec quelques collègues, je participais à une réunion de l’Assemblée parlementaire franco-allemande. Sur la question du Règlement intérieur, l’un des points les plus saisissants était la différence, que nous constations, entre une assemblée qui maîtrise son ordre du jour, à savoir le Bundestag, et la nôtre ! Nos collègues allemands, en effet, peuvent développer une vision de long terme, alors que nous sommes dans l’incapacité de leur dire ce que nous aurons à notre agenda dans les prochains mois… Cela donne une image cruelle de notre Parlement.

M. Paul Molac. On ne peut pas comparer la France à l’Allemagne. Celle-ci est un État fédéral dans lequel les Länder ont à la fois la capacité réglementaire et une capacité à faire la loi, de sorte que celles examinées au Bundestag sont, forcément, moins nombreuses et que nos homologues allemands peuvent effectivement se permettre de siéger deux fois moins que nous.

M. Michel Zumkeller. Je trouve paradoxal de s’entendre à chaque fois répondre que l’on va « travailler » sur le sujet. Avec ma petite expérience de cette maison – dix-sept ans tout de même –, je préférerais que, pour une fois, on annonce qu’on « va instaurer » une règle posant une impossibilité. Une fois cette norme instaurée, en effet, nous devrons bien nous organiser en fonction d’elle. Cessons de dire : « on verra », « on en reparlera »… Nous ne serons plus élus ni les uns ni les autres, que la situation, je le crains, n’aura pas changé.

M. Sacha Houlié. Je crois qu’il ne faut pas ajouter des normes aux normes.

Vous avez souligné, madame la présidente, la pratique qui est déjà celle de notre Commission. Quant aux inconvénients relatifs à l’imprévisibilité de nos travaux, l’article 7 du texte que nous examinons prévoit précisément la communication d’un calendrier prévisionnel, qui nous permettra de mieux nous organiser, en sachant ce qui viendra en commission et en séance, et à quel moment. Nous serons ainsi mieux à même d’éviter les réunions parallèles.

Mme Cécile Untermaier. Nous voterons cet amendement. Comme vous l’avez dit, madame la présidente, la pratique de la commission des Lois est bonne, mais la révision du Règlement a précisément pour but d’assurer que les bonnes pratiques perdurent.

Adopter cet amendement peut être un moyen d’afficher notre volonté de renforcer la qualité du travail en commission comme en séance, et ce qui vient d’être dit sur la prévisibilité de l’agenda ne fait que conforter, à mes yeux, l’intérêt de cette démarche. Je ne vois donc vraiment pas pourquoi on pourrait voter contre.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. On ne peut pas changer l’organisation du travail en commission par ce biais. Je comprends votre positon, mais ce serait nier la méthode retenue par le président Ferrand que de trancher cette question ici et maintenant, sans concertation préalable.

M. Michel Zumkeller. Ce n’est pas Richard Ferrand qui examine ce texte !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. La Commission est certes souveraine, et votera d’ailleurs souverainement, mais j’estime qu’on ne peut pas, d’un point de vue organisationnel, prendre le sujet par ce biais-là. Cela ne fonctionnera pas.

Les groupes de travail ne sont pas une façon de « botter en touche », qu’il s’agisse de ceux que nous allons mettre en place d’ici l’examen en séance, ou de ceux qui conduiront une réflexion à plus long terme sur des sujets non traités dans l’épure du présent texte et nécessitant davantage de concertation.

Madame Obono, le Gouvernement fournit désormais systématiquement un agenda à trois mois, mais vous avez raison d’observer que certains sujets sont d’ordre constitutionnel, et devront donc être traités dans le cadre d’une révision constitutionnelle.

La Commission rejette l’amendement.

Article 6 (art. 42 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Contrôle de la présence des députés en commission en cas de déport

La Commission examine l’amendement CL331 du rapporteur.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Il s’agit de préciser qu’il revient au Bureau de définir les conditions dans lesquelles un député inscrit sur le registre des déports est considéré comme étant présent en commission.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 6 modifié.

Après l’article 6

La Commission examine l’amendement CL188 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Cet amendement vise à généraliser la pratique suivie par la commission des Lois depuis 2017 en prévoyant une publicité sur les réunions et le nom des personnes auditionnées avant leur nomination, afin d’exercer un contrôle qui peut être déterminant pour l’orientation du débat parlementaire.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Avis défavorable. Siégeant depuis le début de la législature dans une autre commission que la vôtre, je suis admiratif de ses pratiques si avancées, que je découvre, mais je suis d’avis de laisser aux commissions leur liberté d’organisation.

M. Philippe Gosselin. Eh oui, notre commission est un vrai laboratoire !

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL116 de Mme Emmanuelle Ménard. 

Mme Emmanuelle Ménard. Cet amendement reprend celui que j’avais déposé en début de discussion, au sujet de la constitution du Bureau. Je veux seulement préciser qu’il ne s’agit pas du tout d’obtenir des prérogatives, mais plutôt de résoudre un déficit chronique d’information. Nous autres, députés non-inscrits, ne sommes jamais au courant de rien, car toutes les décisions se prennent au niveau des groupes, et les groupes ne pensent malheureusement pas à nous en informer.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Avis défavorable. Cela dit, je vais examiner cette question. Il me semble que le site Internet de l’Assemblée remplit cette fonction, mais c’est à vérifier. 

La Commission rejette l’amendement.

2.   Deuxième réunion du mercredi 15 mai 2019 à 9h30 (articles 7 à 13 de la proposition de résolution)

Lien vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.7629455_5cdc206159d4d.commission-des-lois--modification-du-reglement-de-l-assemblee-nationale-suite-15-mai-2019

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Nous poursuivons cet après-midi l’examen de la proposition de résolution tendant à modifier le Règlement de l’Assemblée nationale.

Article 7 (art. 48 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Transmission d’un programme législatif prévisionnel

La Commission examine l’amendement CL143 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Nous proposons qu’une nouvelle séance par mois soit réservée aux propositions de loi présentées par les groupes d’opposition et les groupes minoritaires, afin de leur accorder une plus grande reconnaissance. Le Gouvernement et sa majorité auraient au moins deux semaines et trois jours par mois pour examiner leurs textes. L’initiative législative appartient essentiellement au Gouvernement, alors que c’est au Parlement de faire la loi.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Avis défavorable. Nous allons, dans cette proposition de résolution, faire évoluer les journées réservées aux groupes d’opposition. Plutôt que de les multiplier, il me semble plus intéressant de permettre, selon une nouvelle procédure, qu’elles puissent être véritablement débattues en supprimant le recours systématique aux motions de procédure.

Mme Danièle Obono. Il ne s’agit pas de multiplier les niches. Il est plus que frustrant que si peu de temps soit accordé aux propositions des parlementaires. La question des motions relève d’un autre débat et n’est qu’une échappatoire. Pour que chacun se sente faire partie du Parlement, il est important que l’initiative législative soit élargie. Nous vous soumettrons de nouveau cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL293 de Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. 

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. L’amendement fait suite aux travaux menés dans le cadre des groupes de travail mis en place par M. François de Rugy sur le travail législatif et les droits de l’opposition. Parmi les propositions retenues lors de l’examen du projet de loi constitutionnelle figurait celle d’un calendrier prévisionnel à six mois, précisé et actualisé à trois mois. Bien souvent, le calendrier ne se précise que quelques semaines avant l’examen en séance publique du projet de loi. C’est pourquoi je vous suggère ce nouveau calendrier, qui rendra nos travaux plus prévisibles et permettra de mieux nous concerter en amont des textes. Avoir le temps de travailler, c’est travailler mieux et écrire une loi de meilleure qualité.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. J’ai beaucoup de sympathie pour cet amendement, pour avoir travaillé avec vous, madame la députée, sur ce sujet, dans le groupe de travail. Néanmoins, à ce moment‑là, nous étions dans une logique d’évolution de la Constitution. Depuis, la pratique du Gouvernement a changé : nous avons, tous les trois mois, un planning des textes à venir. Marc Fesneau, le ministre chargé des relations avec le Parlement, nous communique, en Conférence des Présidents, la liste des textes dont le gouvernement envisage l’examen dans les trois mois, qui est publiée dans la foulée sur le site de l’Assemblée. Votre amendement pourrait faire courir un risque constitutionnel, dans la mesure où nous ne pouvons pas intimer au Gouvernement quelque ordre que ce soit. Au contraire, la rédaction de l’article 7 reprend exactement la rédaction qui était en vigueur dans notre Règlement jusqu’en 2009, laquelle implique une planification à six mois.

M. Raphaël Schellenberger. Monsieur le rapporteur, ce n’est pas parce que la pratique du Gouvernement s’est améliorée que nous ne devons pas rester vigilants ni fixer des règles, quand bien même elles ne feraient que conforter une pratique existante. Si nous considérons que, pour bien travailler, il nous faut connaître les textes au moins trois mois à l’avance, ce n’est pas parce que le Gouvernement veut bien nous les donner aujourd’hui, que nous devons nous interdire de l’inscrire dans le Règlement. Nous devons être plus exigeants sur les conditions dans lesquelles les textes et les études préalables nous sont communiqués : travailler systématiquement dans l’urgence ne nous permet pas de mener un travail législatif de fond.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. L’article 7 de la proposition de résolution est le suivant : « Le troisième alinéa de l’article 48 du Règlement est ainsi rédigé : ‘À l’ouverture de la session, puis, au plus tard, le 1er mars suivant, ou après la formation du Gouvernement, celui-ci informe la Conférence des affaires dont il prévoit de demander l’inscription à l’ordre du jour de l’Assemblée et de la période envisagée pour leur discussion.’ » Nous sommes certains de la validité constitutionnelle de l’article, puisqu’il reprend la rédaction qui était en vigueur jusqu’en 2009.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Sur le fond, nous sommes tous d’accord pour dire que plus nos travaux seront prévisibles, mieux ils seront menés. Nous devons d’ailleurs réfléchir au délai entre le dépôt d’un texte et son examen, notamment en cas de procédure accélérée. Les six semaines minimales de délai sont nécessaires au bon fonctionnement de notre assemblée.

Par ailleurs, monsieur le rapporteur, il y a cette expression curieuse de « Conférence des affaires »…

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Le mot « Conférence » désigne la Conférence des Présidents, et « des affaires » est le complément de « demander l’inscription ».

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. La proposition faite à six mois est peu précise. Ce que je demande, c’est que l’Assemblée dispose d’éléments plus précis permettant un travail de fond et de qualité. J’entends bien la réserve constitutionnelle faite par le rapporteur, et je veux bien retravailler mon amendement. Néanmoins, pour prendre un exemple, nous n’avons reçu des éléments suffisamment précis pour travailler sur la loi santé que trois semaines avant son examen, ce qui ne nous a pas permis de mener des travaux collectifs comme nous l’aurions souhaité. Le calendrier représentant un enjeu très fort, j’espère que nous pourrons revenir dessus ensemble.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL98 de M. Christophe Euzet.

M. Christophe Euzet. L’article 7 représente un progrès considérable dans l’entreprise d’amélioration de la qualité de nos travaux à droit constitutionnel constant. Il va nous permettre de constituer des ateliers ou encore des missions d’information, sur la base des informations dont nous disposerons, à condition que l’ensemble des députés soient informés du programme du Gouvernement.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je suis très heureux de vous dire que votre amendement est pleinement satisfait. J’ai vérifié moi‑même – et cela répond à la question de Mme Ménard : il suffit, sur la page d’accueil du site de l’Assemblée, de cliquer sur l’onglet « Les députés », puis sur « La Conférence des Présidents », pour trouver tous les comptes rendus et les ordres du jour. La procédure est la même pour le Bureau. C’est super utile !

M. Pierre-Henri Dumont. C’est super fastidieux surtout !

M. Arnaud Viala. Monsieur le rapporteur, nous pouvons bien aller chercher l’information, à supposer qu’elle soit stable…

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Elle est stable !

M. Arnaud Viala. Ce n’est pas vrai, puisque, de réunion en réunion, la Conférence des Présidents modifie l’ordre du jour prévu à la réunion précédente.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. C’est mis à jour tous les mardis à onze heures !

M. Arnaud Viala. Je veux bien me prêter à l’exercice ! Mais je suis certain que, ce mardi, des modifications ont été apportées à l’ordre du jour fixé mardi dernier. Cela reste très approximatif.

La loi Pacte, par exemple, devait être examinée au tout début du mois de septembre, et nous n’en avions aucun élément au mois d’août. Même la rapporteure de la majorité s’arrachait les cheveux ! C’est un vrai sujet.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je vous rejoins : c’est un vrai sujet. Même si le délai de six semaines n’est, malheureusement, pas forcément respecté, dans cette proposition de résolution, nous ne pouvons l’exiger du Gouvernement. La vraie réponse à votre question est constitutionnelle.

M. Arnaud Viala. Prévoyez-vous de modifier le délai de dépôt des amendements ? Cette semaine, les délais de dépôt étaient intenables et délirants, de la veille pour le lendemain ! C’était un travail impossible pour les collaborateurs ! D’ailleurs, très peu d’amendements ont été cosignés pour la simple raison que nous n’avons pas pu donner les amendements à nos collègues. Cela appauvrit le débat, puisqu’en l’absence du signataire, personne ne peut défendre l’amendement.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. S’agissant de ce texte, le délai de dépôt des amendements en Commission était tout à fait habituel : samedi, à dix‑sept heures.

M. Christophe Euzet. Si les informations sont déjà accessibles, mon amendement étant satisfait, je le retire.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL248 de M. Stéphane Peu.

M. Stéphane Peu. Nous avons souvent parlé des missions du Parlement : faire la loi, mais aussi contrôler l’action de l’exécutif et du Gouvernement. Tout le monde s’accorde à dire que nos capacités de contrôle doivent être renforcées. C’est pourquoi nous proposons de ne pas circonscrire les séances de contrôle aux seuls rapports produits par l’Assemblée nationale, mais de pouvoir débattre de tous les aspects qui ont trait au contrôle de l’action du Gouvernement. Nous proposons également que des personnalités extérieures soient invitées, comme cela se faisait précédemment, afin d’étendre les missions de contrôle.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Les deux volets de l’amendement sont satisfaits. Des personnalités extérieures ont pu participer à des débats depuis la XIIIe législature et leurs auditions bénéficient des mêmes conditions de publicité que les débats dans l’hémicycle. Pour ce qui est des sujets d’actualité, ils peuvent déjà être évoqués à l’occasion d’une séance de questions adressées à un ministre.

M. Philippe Gosselin. Les possibilités d’auditions extérieures sont très encadrées. Il me semble que cet amendement va plus loin sur les séances de contrôle, bien au‑delà de l’audition de telle ou telle personnalité, comme cela se fait. En adoptant l’amendement, nous tirerions toutes les conséquences de l’article 24 de la Constitution, qui nous confie trois missions : voter la loi, évaluer les politiques publiques et contrôler l’action du Gouvernement. À l’heure où l’on évoque un renforcement des pouvoirs du Parlement, notamment de ses actions de contrôle et d’évaluation, nous aurions intérêt à adopter cet amendement, qui ne comporte pas de piège. Il nous donnerait plus de poids collectivement.

M. Stéphane Peu. Aujourd’hui, les conditions pour avoir un rapport sont très encadrées et contingentées selon les groupes. Il s’agit que l’exercice de contrôle puisse se faire à toute occasion et sur tout sujet ayant trait au contrôle de l’exécutif.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je comprends votre intention et vous propose de retravailler ensemble à la rédaction de votre amendement avant l’examen en séance.

L’amendement est retiré.

Puis la Commission examine l’amendement CL249 de M. Stéphane Peu.

M. Stéphane Peu. L’amendement vise à porter à six le nombre de séances minimales consacrées à un ordre du jour arrêté par les groupes d’opposition ou les groupes minoritaires. Il s’agit de donner plus de pouvoir au Parlement dans la détermination de son ordre du jour, tout en renforçant les droits et les initiatives de l’opposition et des groupes minoritaires.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je vous ferai la même réponse qu’à Mme Obono : il n’est pas souhaitable de réserver de nouvelles séances avant d’avoir mis en œuvre la nouvelle formule.

M. Raphaël Schellenberger. Monsieur le rapporteur, vous faites un raccourci un peu rapide. Cette proposition est intéressante. Cela permettrait de travailler sur des propositions de loi plus complexes, alors qu’actuellement, avec trois séances, on ne peut déposer que des petits textes, même si les renvois systématiques par la majorité nous permettent d’en examiner plusieurs. Si un jour un groupe d’opposition voulait proposer une vraie réflexion législative structurée,…

M. Bruno Questel. On n’attend que ça !

M. Philippe Gosselin. Eh bien, ne nous renvoyez pas en commission !

M. Raphaël Schellenberger. Si nous voulons que les idées des groupes d’opposition soient mieux discutées, les propositions de loi doivent être plus complexes, pour qu’il soit possible de déposer plus d’amendements et de les discuter plus longuement, sans prendre le risque de devoir reprendre la discussion un an plus tard.

M. Philippe Gosselin. Nous aurions intérêt à laisser un peu plus de longueur à la laisse de la niche parlementaire : les six séances m’iraient bien ! Nous revenons à un point dont nous avons débattu ce matin : la définition du groupe d’opposition et du groupe minoritaire. Dès lors que des droits nouveaux sont offerts aux oppositions, il faut bien les définir.

M. Julien Aubert. Un Parlement qui réclame d’avoir six fois dans l’année le droit de décider de son emploi du temps n’est pas un Parlement insoumis, mais un Parlement qui essaie d’exister. Par ailleurs, monsieur le rapporteur, toute la philosophie de la révision du Règlement, c’est de libérer du temps. Ce temps que nous gagnons, en éliminant des phases inutiles dans la discussion, nous pourrions le récupérer ainsi, d’autant que nos concitoyens y font très attention. Quand ils voient un texte inscrit à l’ordre du jour, ils ont l’impression que nous servons à quelque chose. Cela nous permet d’exister par rapport au Gouvernement. Enfin, pour avoir fait l’expérience d’une proposition de loi qui avait commencé à être examinée en juin et qui a fini de l’être en octobre, je sais qu’une plus grande fréquence de séances consacrées aux groupes d’opposition faciliterait le suivi des débats. Dès lors que le nombre de groupes n’est pas limité, nous avons tout intérêt de prévoir dans le règlement un nombre important de séances, les groupes d’opposition et minoritaires risquant de ne pas souvent décider de l’ordre du jour. Ce sera un peu comme la comète de Halley…

M. Stéphane Peu. Dans les discussions qui ont eu lieu avec les différents groupes, en amont de l’examen en commission, un sujet a beaucoup énervé les oppositions et les groupes minoritaires, ce sont les motions de renvoi et de rejet déposées systématiquement par la majorité sur les textes présentés dans les niches. Il devrait être mis un terme à cette pratique, ce qui empêchera l’obstruction. Néanmoins, il faut prendre garde qu’en ne se donnant pas le temps, ce que l’on va gagner avec la fin des motions conduise à une impossibilité de débattre, compte tenu du temps contraint des trois séances. Si on discutait convenablement des propositions de loi déposées par les uns et les autres, les trois séances ne pourraient suffire.

M. Paul Molac. En fait, l’amendement pose cette question : qui est à l’initiative de la loi ?

M. Julien Aubert. La Commission européenne !

M. Paul Molac. C’est le pouvoir exécutif, pour 90 % des lois au moins… Nous les discutons, les amendons, les faisons grandir, en général, puis les votons. Pour anecdote, sur les quelque cinquante propositions de loi déposées au Parlement sur les langues régionales, trois ont été discutées, dont deux sous l’ancienne législature – j’étais à l’origine de l’une, le groupe socialiste de l’autre. Cela illustre bien l’écart entre le centre et la périphérie. En général, ce qui intéresse le centre, l’administration et le Gouvernement se retrouvera dans la loi ; mais ce qui intéresse nos périphéries, il sera un peu plus compliqué de l’y intégrer. Est‑ce la bonne réponse de passer de trois à six séances de niches ? Honnêtement, je n’en sais rien. C’est un vrai problème, mais je ne suis pas sûr d’avoir de vraies réponses.

M. Bruno Questel. Mes chers collègues, je voudrais vous renvoyer au deuxième paragraphe de la page 13 de la proposition de résolution : « Les droits des groupes d’opposition et minoritaires seraient par ailleurs confortés par une modification de l’Instruction générale du Bureau excluant l’adoption de motions de procédure lors de leurs journées réservées (« niches parlementaires »). Une telle réforme permettra ainsi la discussion complète des textes inscrits à l’ordre du jour à leur initiative. »

Mme Danièle Obono. On sait lire ! Ça ne répond à rien du tout !

M. Bruno Questel. Votre amendement n’a donc plus aucun objet !

M. Stéphane Peu. Au contraire !

M. Pierre-Henri Dumont. Les propositions de loi des groupes minoritaires et d’opposition n’étant plus renvoyées en commission ni rejetées, nous prendrons plus de temps pour les discuter. Aussi, pour refuser une proposition de loi, devrez-vous la rejeter article par article, ce qui, mécaniquement, laissera moins de temps pour examiner les textes dans la journée. C’est pourquoi il est nécessaire de doubler le nombre de séances des niches. Soit dit entre nous, en semaine de contrôle, le jeudi, il n’y a pas beaucoup de monde en séance, et le vendredi nous sommes tous en circonscription. Cela ne coûterait rien de décider que, le vendredi, nous continuerions d’examiner des propositions de loi qui nous tiennent à cœur. Cela ne bouleverse en rien l’ordre du jour de l’Assemblée nationale de réserver le jeudi et le vendredi aux niches, pendant les semaines de contrôle.

M. Christophe Euzet. Votre préoccupation est légitime. Mais il n’est pas possible de réclamer la suppression des motions et de se plaindre qu’on discute les propositions de loi... Je vous renvoie à la Constitution, laquelle dispose, à son article 48 : « Un jour de séance par mois est réservé à un ordre du jour arrêté par chaque assemblée à l’initiative des groupes d’opposition de l’assemblée intéressée ainsi qu’à celle des groupes minoritaires. » Je ne m’oppose pas par principe au doublement des séances de niches, mais cela ne peut pas relever du Règlement de l’Assemblée nationale.

M. Pierre-Henri Dumont. Vous pouvez changer la Constitution !

M. Stéphane Peu. Monsieur Questel, notre amendement vient compléter utilement la suppression des motions, qui est une bonne chose – je le répète. Pour aller au bout de votre idée, il faudrait nous donner les moyens, dès lors qu’il n’y a plus d’obstruction, de mener un vrai débat.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Il n’y a pas de différences, de ce point de vue, entre groupe minoritaire et groupe d’opposition. Par ailleurs, aujourd’hui, neuf jours par an sont consacrés aux niches : trois pour les LR, deux pour le MODEM et un pour chacun des autres groupes. M. Dumont a tout dit, en parlant de temps suffisant pour débattre. Notre proposition de résolution permet un réel progrès. Laissons vivre les niches dans leur nouvelle formule. Nous aurons des moments parlementaires plus forts, même si le fait majoritaire s’exprimera par le vote.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL142 de Mme Mathilde Panot, qui fait l’objet du sousamendement CL315 du rapporteur.

Mme Danièle Obono. Nous proposons de renforcer le pouvoir de contrôle de l’Assemblée, en cohérence avec le rôle qu’est censé jouer le Parlement dans la législation européenne.

Aujourd’hui, l’essentiel de notre législation correspond à l’application de directives, alors que le Parlement n’a pas systématiquement l’opportunité de discuter des orientations du Conseil européen. Pour rendre l’Europe plus concrète, il est important que le Parlement se saisisse plus directement de telles questions. C’est pourquoi nous proposons que chaque réunion du Conseil européen fasse l’objet d’un débat préalable devant l’Assemblée nationale. L’article 15 du Traité sur l’Union européenne dispose que : « Le Conseil européen donne à l’Union les impulsions nécessaires à son développement et en définit les orientations et les priorités politiques générales. » Il nous semble que le Parlement doit pouvoir jouer un rôle majeur dans ces questions, comme le prévoit l’article 88‑4 de la Constitution. Cela rapprocherait l’Europe de la représentation nationale – nous sommes encore censés être souverains – et des citoyens, auxquels nous pourrions rendre des comptes plus directement, en nous référant moins à Bruxelles, où tout se ferait.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Madame Obono, je partage votre préoccupation : il est important que notre Parlement se saisisse des sujets européens et que nous les débattions. S’il me semble qu’il ne faut pas dessaisir la Conférence des Présidents de sa capacité de décision, en imposant l’organisation d’un débat, il est important toutefois de l’affirmer. Mon sous-amendement permettrait d’assouplir un peu votre rédaction.

M. Julien Aubert. Le Conseil européen, c’est le conseil des chefs d’État et de gouvernement. Or, dans la mesure où le chef de l’État français n’est pas responsable devant le Parlement, je me demande s’il est possible, d’un point de vue constitutionnel, que l’Assemblée nationale débatte de sa position. En revanche, il serait possible de débattre de la position du Conseil des ministres européens.

Par ailleurs, lorsque nous avons créé la session unique, l’engagement pris à l’époque était que le Parlement siégerait cent vingt jours par an, soit du mardi au jeudi. Moralité : nous siégeons désormais du lundi au vendredi, et parfois le samedi ! Si nous voulons respecter la Constitution, toute la Constitution et rien que la Constitution, revenons à l’esprit de la session unique voulu par Philippe Séguin.

Mme Danièle Obono. Même si j’aurais aimé une garantie, adopter notre amendement sous-amendé sera un signal positif.

Alors que nous nous demandons comment rapprocher les institutions des citoyens, il nous semble fondamental que le Parlement puisse avoir un débat sur les directions prises par le Conseil européen – compléter l’amendement avec le Conseil des ministres alourdirait sans doute trop notre calendrier –, sans que nous ne déterminions, bien entendu, les choix du Président de la République. Le Parlement pourra exprimer un point de vue sur des questions qui s’imposeront, de toute façon, à lui, puisque nous transposerons les directives dans notre droit.

M. Bruno Questel. Nous sommes favorables à l’amendement, dans les conditions définies par M. le rapporteur.

Mme Cécile Untermaier. Monsieur le rapporteur, comment peut-on imaginer ce dispositif au regard des dispositions de l’article 48 de la Constitution relatif à l’agenda de chaque assemblée ? Sans prétendre être la garante de la Constitution, je m’interroge…

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Ce débat sera organisé pendant la semaine de contrôle. Nous n’intimons aucun ordre à qui que ce soit. Nous inscrivons la possibilité de nous saisir pendant nos semaines de contrôle, sur décision de la Conférence des Présidents, qui est souveraine, de ce sujet européen, plus régulièrement.

M. Pierre-Henri Dumont. Que fait-on dans le cas où un Conseil européen est convoqué en urgence, comme cela a été le cas sur le Brexit, et que nous ne sommes pas en semaine de contrôle ?

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Le débat est possible ; il n’est pas obligatoire.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. La Conférence des Présidents se réunissant toutes les semaines, elle peut tout à fait organiser ce type de débat, et l’a déjà fait.

La Commission adopte le sousamendement CL315.

Puis elle adopte l’amendement CL142 sous-amendé.

La Commission adopte l’article 7 modifié.

Après l’article 7

La Commission examine l’amendement CL294 de Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. 

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. L’amendement s’inscrit dans la suite des travaux menés, avec M. Waserman, dans le cadre des groupes de travail mis en place par M. François de Rugy. Grâce au calendrier prévisionnel, nous connaîtrons l’intention de légiférer du Gouvernement six mois à l’avance. Néanmoins, les commissions font état des difficultés à examiner les textes, même quand le délai constitutionnel de six semaines est respecté. La qualité du débat législatif en souffre : les positions politiciennes prévalent sur les convergences de fond. Lorsque le débat parlementaire fait suite à des travaux, comme des missions d’information et d’évaluation – cela a été le cas pour le projet de révision de la loi de bioéthique, par exemple, qui n’a pas encore été soumis à l’Assemblée –, l’expérience montre qu’il est plus apaisé et présente des possibilités de consensus.

C’est pourquoi je vous propose que les commissions concernées mènent une mission d’évaluation préalable. Cela permettra d’impliquer tous les groupes ; de spécialiser des parlementaires sur les matières traitées ; d’écarter des idées moins pertinentes ; de permettre une convergence sur une grande partie des questions considérées d’un point de vue technique ; et de nous concentrer sur les seuls points d’affrontement politique. Le débat y gagnerait en qualité.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. C’est un axe de travail important. Ce qui me gêne, c’est la systématisation de la mission d’information. Aujourd’hui, c’est le travail du rapporteur de procéder à cette évaluation de la loi. Dans un monde idéal, le Gouvernement nous ferait part de son intention de légiférer six mois auparavant et nous aurions le temps de lancer une mission. En réalité, le délai de présentation des textes est trop court pour que votre proposition soit opérante. Avis défavorable.

M. Raphaël Schellenberger. L’idée est intéressante, malgré une mécanique un peu lourde. Cela nous permettrait de ralentir considérablement le rythme de notre production législative, ce qui serait plutôt une bonne chose. Cela obligerait le Gouvernement, qui est à l’initiative, à réfléchir à deux fois, avant de vouloir procéder par la loi. Nombre de ses articles ne relèvent pas du domaine législatif, mais du domaine règlementaire. Cela repositionnerait chacun dans son rôle et diminuerait vraisemblablement le nombre de discussions sur la recevabilité de certains de nos amendements jugés réglementaires, alors même qu’ils ont été déposés sur un article d’ordre réglementaire. Les initiatives tendant à ralentir le processus législatif sont bonnes. Une autre piste serait de limiter considérablement le recours à la procédure accélérée.

M. Julien Aubert. L’idée est intéressante, même s’il existe un risque de doublon avec le rôle du rapporteur. Cela vient aussi ajouter une mission à toutes celles que nous menons simultanément et fait courir le risque que les deux rapporteurs se retrouvent seuls à travailler. Parfois, nous n’avons le texte du projet de loi que soixante‑douze voire quarante‑huit heures avant son examen, pour des raisons obscures et variées. Je crains que, six mois avant, on ne dispose que d’indications, ce qui ne nous permettra pas d’évaluer réellement. Le seul point positif, c’est que cela nous permettrait de simplifier le droit et de nettoyer au fur et à mesure l’empilement des règles et des normes qui viennent embrouiller la compréhension du citoyen.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. L’amendement va dans le sens de l’amélioration de la qualité de notre travail. Je me demande tout de même s’il n’y aurait pas un risque de redondance avec les missions d’information conduites par la commission des Lois. C’est un moment où nous pouvons travailler avec les fonctionnaires de l’Assemblée, qui disposent d’une compétence et d’une expertise dont nous avons du mal à nous prévaloir seuls.

M. Philippe Gosselin. Quel éloge !

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Malgré les capacités de nos équipes, nous ne pouvons pas toujours mener un travail d’une telle qualité, d’autant que se pose aussi la question de l’accès à certaines informations et aux contacts nécessaires dans les administrations. Soit dit en passant : aucune mission d’information n’a été conduite jusqu’à présent par le MODEM à la commission des Lois. Cela s’explique sans doute par son statut de groupe minoritaire, l’un des rapporteurs de la mission appartenant à la majorité, l’autre à l’opposition.

M. Philippe Gosselin. Cette idée d’une évaluation préalable est assez intéressante sur le fond mais, dans la forme, cette proposition risque en réalité d’alourdir la procédure. Sans doute vaudrait-il mieux intégrer systématiquement ce travail d’évaluation dans les missions du rapporteur, sous réserve qu’il ait le temps nécessaire. D’ailleurs, pour l’avoir été moi-même sous la législature précédente, il me semble que chaque rapporteur procède peu ou prou à ce type de travail sur le droit existant, et cela fait également partie de l’étude d’impact.

Je pense qu’il s’agit donc plutôt de rendre ce travail d’évaluation plus visible, de le valoriser davantage, comme il faudrait valoriser davantage, en aval, le travail d’évaluation sur l’application des textes votés, lesquels, depuis deux ans, n’ont guère fait l’objet de beaucoup de travaux.

M. Bruno Questel. Malgré la pertinence de la proposition formulée, sa mise en œuvre concrète me paraît très complexe. Peut-être pourrait-on plutôt réfléchir à anticiper la nomination des rapporteurs. Cela serait une manière de répondre à cet amendement, que notre groupe ne soutiendra pas.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. On peut en effet travailler sur la date de nomination des rapporteurs, et il nous arrive d’ailleurs parfois de désigner un rapporteur sous réserve du dépôt d’un texte, ce qui nous permet d’anticiper et de lui permettre d’amorcer son travail.

Quant à l’évaluation des lois votées, monsieur Gosselin, nous avons procédé à plusieurs missions d’évaluation, notamment sur la « loi Macron », et nous évaluerons prochainement, à votre demande et à celle de Mme Vichnievsky, la loi relative aux actions de groupe.

Enfin, une mission reproduisant la configuration politique de l’Assemblée doit comporter dix-neuf membres, ce qui est long et compliqué à mettre en place. C’est un processus qui me paraît donc d’une lourdeur excessive.

En revanche, je rejoins mes collègues sur la nécessité que le rapporteur évalue l’état du droit en vigueur, et c’est sans doute un point sur lequel nous devrons attirer l’attention des rapporteurs, au moment de leur nomination.

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. Mon amendement propose l’idée d’une mission préalable, c’est-à-dire en amont du travail effectué par le rapporteur car, à ce moment-là, le temps est compté et n’est pas suffisant pour que les députés effectuent ce travail de fond. Nous devons donc collectivement anticiper davantage, pour procéder à ces évaluations, qui sont d’autant plus importantes qu’avec les missions de contrôle elles sont une des tâches de notre assemblée qui méritent une attention toute particulière.

J’ai néanmoins entendu vos arguments sur la lourdeur d’une procédure qui serait systématisée, et je vais donc retirer mon amendement. Néanmoins j’aimerais que nous en reparlions car il y va de la qualité du travail législatif.

L’amendement CL294 est retiré.

Article 8 (art. 49 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Organisation de la discussion des textes

La Commission examine l’amendement CL219 de M. Stéphane Peu. 

M. Stéphane Peu. Nous souhaitons la suppression de l’article 8 car, au travers de toute une série de dispositifs, il réduit notre temps de parole en hémicycle. Or réduire la parole, et donc le débat d’idées et les échanges, nous paraît absolument contraire à ce qu’est la fonction du Parlement. Sans revenir sur les arguments que j’ai développés ce matin lors de la discussion générale, j’ajoute qu’on ne peut réduire à une prise de parole par groupe la possibilité pour les députés de s’exprimer, chacun d’entre nous comptant pour un dans l’hémicycle.

Le temps laissé au débat ici, au Parlement, est un temps nécessaire pour que la société s’approprie les enjeux dont nous discutons, et tout ce qui accélère et limite les débats limite du même coup la démocratie. Nous sommes donc farouchement hostiles aux dispositions de l’article 8.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Nous abordons ici une des propositions centrales de ce texte, qui est parfaitement assumée.

Aujourd’hui, la discussion générale s’apparente à une forme de tunnel, dont nous proposons de sortir en limitant la prise de parole à cinq minutes par groupe. Pour autant, cette règle n’aura rien d’intangible, puisque la Conférence des Présidents pourra augmenter la durée de la discussion générale sur certains textes, si elle l’estime nécessaire.

Le président Ferrand a souhaité avancer « à visage découvert ». Son intention est bien de limiter par défaut les prises de parole à cinq minutes, l’idée étant de raccourcir un tunnel d’interventions, à notre sens trop long.

J’ajoute qu’il existe de multiples possibilités de s’exprimer sur un texte, et je ne voudrais pas qu’on résume nos propositions à la seule recherche de l’efficacité. Il s’agit d’un choix de Richard Ferrand, qui a pour objectif de fluidifier les débats et d’en arriver plus rapidement à l’expression de chacun au travers de la défense de ses amendements. Avis défavorable.

M. Arnaud Viala. Nous passons d’un extrême à l’autre ! Je souscris à l’idée, pour le déplorer, moi aussi, régulièrement, que la discussion générale, dans sa forme actuelle est un tunnel interminable qui ne sert qu’à réitérer de manière différente la même idée. Mais passer de discussions qui peuvent actuellement durer deux ou trois heures à une discussion générale qui serait pliée en un peu plus d’une demi-heure, avec un seul orateur par groupe, ne me paraît pas admissible, d’autant que les députés qui n’auront pas eu la chance d’être choisis comme orateur par leur groupe n’auront plus la possibilité de s’exprimer individuellement pour développer des idées de portée générale.

La pédagogie étant l’art de la répétition, je répète ce que j’ai dit ce matin : avec une organisation des débats comme celle que vous proposez, vous allez inciter les députés à multiplier les groupes, car ils n’auront pas d’autre moyen de faire valoir leur droit individuel à la prise de parole.

On peut certes déplorer la répétition, mais il est indéniable qu’elle enrichit parfois le travail législatif, grâce à la réflexion qu’elle suscite. Vouloir réduire la parole de manière aussi drastique que vous le faites est donc dangereux.

M. David Habib. Chacun doit savoir qu’en Conférence des Présidents, c’est le président du groupe majoritaire qui décide de la durée de la discussion générale sur un texte. Penser un seul instant que l’on puisse modifier ce temps de parole en fonction des textes pour permettre aux groupes d’opposition de s’exprimer est un leurre : au nom de l’efficacité politique, le président Legendre demandera, chaque fois, que ce temps de parole soit le plus réduit possible.

Les tunnels dont vous parlez se résument à une heure et demie – je rappelle que nous sommes élus pour cinq ans –, alors que nous traitons parfois de sujets essentiels : la fonction publique actuellement, la mobilité très prochainement, puis les retraites… Mon collègue Vincent Bru, élu comme moi dans les Pyrénées-Atlantiques, ne me démentira pas : si nous devions aborder, dans le département, la question de la mobilité, dont personne ne s’est jamais occupé, il nous faudrait entre deux et trois semaines ; ici nous n’avons qu’une heure et demie à partager entre 577 députés. Par ailleurs, limiter la parole à un seul orateur par groupe pose la question de l’expression pluraliste des différentes positions. Or un groupe n’est pas un bloc monolithique. J’ajoute que cette disposition n’est pas la seule que vous proposez pour réduire le temps de parole, et c’est le cumul de l’ensemble de ces dispositions avec lequel nous ne sommes pas d’accord.

J’ai appelé Claude Bartolone au téléphone. Il m’a dit vous avoir avertie, madame la présidente, que la majorité prenait pour elle-même un risque énorme en contingentant le temps de parole, car c’est oublier que, quand l’opposition ne pourra plus s’exprimer à l’Assemblée, elle s’exprimera ailleurs et que, quand les députés de la majorité n’auront plus le droit de s’exprimer, ils se transformeront en frondeurs…

M. Bruno Questel. Ça sent le vécu !

Mme Danièle Obono. Depuis deux ans, la majorité considère qu’on parle trop au Parlement et qu’il faut être plus efficace, ce qui, en langage macronien, signifie réduire nos discussions à la portion congrue.

Or, pour chaque député, l’expression individuelle est un droit, car nous ne sommes pas uniquement membres d’un groupe ou d’un parti mais les représentants, à titre individuel, des Français qui nous ont élus.

Par ailleurs, la politique est l’art de la répétition. On peut dire la même chose à des moments différents, avec une résonance différente, et le débat contribue à faire émerger de nouvelles manières de voir, ce qui est l’essence même du travail parlementaire qui permet à chaque sensibilité de s’exprimer.

Si cette proposition suscite autant d’oppositions, c’est qu’à mon sens, elle révèle une vision comptable et boutiquière du travail législatif. J’ajoute que ce n’est pas parce que l’on dispose de cinq minutes qu’on les utilisera systématiquement, si deux minutes suffisent. En revanche, si les cinq minutes sont nécessaires, nous devons disposer de cette liberté, a fortiori lorsque nous n’avons pratiquement plus aucun pouvoir de décision.

Comme le disait David Habib, museler les députés affaiblit encore davantage leur représentativité et risque de déplacer les débats ailleurs, dans des conditions qui ne représenteront pas nécessairement un progrès pour la démocratie.

M. Philippe Gosselin. Cinq minutes, c’est en effet trop court, et un petit tunnel d’une heure trente ne me paraît pas si terrible pour une discussion de quelques dizaines d’heures. D’autre part, cette forfaitisation du temps de parole qui se veut égalitaire rompt en réalité l’équilibre des forces en présence – cela vaut pour la majorité, que je tiens à défendre en tant que partisan du fait majoritaire.

Je trouve problématique de couper les têtes qui dépassent, au prétexte que chaque groupe doit se limiter à cinq minutes pour gagner du temps. Qui plus est, il est dangereux, ou à tout le moins délicat, de confier à la Conférence des Présidents la possibilité d’élargir le temps de parole. On sait très bien que cette instance est aux mains de la majorité, qui fait ce qu’elle veut, et c’est normal.

Enfin cette réduction du temps de parole, si elle ne pose pas de problème pour les textes consensuels, me paraît difficilement envisageable lorsqu’il s’agit, par exemple, d’aborder la révision de la Constitution, ou la réforme des retraites. Il y a des lignes jaunes à ne pas franchir, surtout lorsqu’elles s’ajoutent à d’autres. Ne pas en tenir compte, c’est risquer de déraper.

M. Julien Aubert. Nous sommes en train d’illustrer parfaitement ce que vous appelez un tunnel, mais qui permet en même temps le développement d’arguments solides dont on peut mesurer le poids respectif.

Cela étant, je vous rejoins sur le fait qu’il n’y a rien de plus horrible que ces séances où vous déclamez votre texte devant un hémicycle vide. Cela a un intérêt politique, mais cela n’a aucun sens dans le processus législatif. Ce n’est néanmoins pas une raison pour passer d’un extrême à l’autre. Je sais que vous songez à instaurer une dose de proportionnelle dans les prochains scrutins, avec le risque de voir le nombre de groupes se multiplier. Or, si le temps de parole est limité à un seul orateur par groupe, les grands groupes n’auront pas d’autres solutions que de se diviser pour donner voix à la pluralité.

J’ajoute que vous créez une inégalité entre les parlementaires car, plus le groupe auquel on appartient est important, moins on aura la capacité de se faire entendre. Je ne comprends donc pas pourquoi le temps de parole ne serait pas proportionnel à la taille des groupes, ce qui garantirait que chaque député y a bien sa place et qu’il ne s’y est pas inscrit par calcul politique. Il me semble que c’est une solution qui constituerait un bon équilibre entre la situation actuelle et ce que vous proposez.

M. Stéphane Peu. Le temps de parole autorisé dans l’hémicycle n’est pas nécessairement le temps utilisé. Lors de la discussion sur les modalités de désignation des cinq députés supplémentaires au Parlement européen qui siègeront après le Brexit, pas un seul des orateurs ayant pris part à la discussion générale n’a utilisé la totalité de son temps – à part peut-être Paul Molac… – et ce n’est pas le seul exemple que je pourrais vous citer. Il ne s’agit donc pas de protéger une forme d’incontinence verbale ou d’usage abusif de la parole chez les députés mais de défendre la démocratie.

Nous nous sommes accordés sur le fait qu’il ne pouvait pas y avoir de bonne réforme des règles de notre assemblée qui ne soit pas consensuelle ou qui procède uniquement de la majorité. Ce serait pourtant le cas si ces dispositions devaient être adoptées, et cela entacherait la légitimité de la réforme.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Le groupe MODEM est attaché au pluralisme, mais il ne faut pas confondre discussion générale et débat. La discussion générale n’est qu’une succession d’interventions de qualité inégale et d’un intérêt tout relatif pour le dynamisme de nos échanges, même si elle permet aux différents groupes de s’exprimer. En commission des Lois, les interventions dans la discussion générale sont limitées à deux minutes, ce qui est largement suffisant pour exprimer ses idées forces. Non seulement des interventions courtes et percutantes ne font aucun mal au pluralisme mais elles sont plus efficaces auprès de nos concitoyens qui suivent les débats.

M. Stéphane Peu. Dans ce cas, on peut aussi twitter au lieu de débattre !

M. Sacha Houlié. Je voudrais d’abord rappeler que la discussion générale en séance vient après la discussion générale en commission, laquelle peut être très longue. Il me semble ensuite que sa seule utilité pour les députés, c’est d’en extraire les capsules vidéos dont nous avons parlé ce matin, à l’attention de l’extérieur.

Par ailleurs, non seulement il s’agit d’un tunnel, comme s’accordent à le dire la majorité et l’opposition, mais son intérêt est d’autant plus limité qu’elle se déroule souvent en soirée, devant un hémicycle quasi vide.

Réduire le temps des interventions n’obèrera en rien la possibilité qu’ont les groupes d’exprimer leur position générale sur le texte – celle qu’ils reprendront lors des explications de vote, d’autant que les débats sur le corps du texte pourront durer, puisque chacun peut prendre la parole pour défendre ses amendements.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CL69 de M. David Habib, CL144 de Mme Mathilde Panot, CL220 de M. Stéphane Peu, CL52 et CL53 de M. Philippe Gosselin et CL130 de Mme Sylvia Pinel.

M. David Habib. L’article 8 contingente les débats, en échange de quelques concessions. Nous avons ainsi pris acte de votre souhait d’autoriser, une fois par session, les présidents de groupe à demander et à obtenir une augmentation de leur temps de parole dans le cadre du temps législatif programmé. C’est pour ne pas perdre cette possibilité que nous ne souhaitons pas supprimer l’article mais seulement le modifier pour supprimer la limitation du temps de parole.

J’y insiste, sachant que, si tous les députés de l’opposition décidaient de se fédérer par groupe de quinze, nous obtiendrons entre seize et dix-sept groupes, ce qui laisse entrevoir ce que serait notre capacité de nuisance. Plutôt que d’en arriver là, il serait donc judicieux que la majorité écoute nos propositions et envisage de laisser les parlementaires continuer à s’exprimer.

Mme Danièle Obono. Par cet amendement, nous nous opposons à la généralisation du temps législatif programmé, qui limite les possibilités d’intervention et de débat. On peut en effet exprimer une idée en deux minutes ou en cinq minutes, en cent quarante ou en deux cent quatre-vingts caractères mais, n’en déplaise à certains parlementaires de la majorité, nous ne siégeons pas ici pour faire de la politique à coup de slogans ; nous sommes ici pour débattre, ce qui nécessite de développer une argumentation et de prendre le temps, parfois, de rentrer dans les détails. À une époque où l’on communique par tweets, il est important qu’au sein de notre institution, on prenne le temps d’élaborer sa pensée. Revenir sur cette liberté serait une régression.

M. Stéphane Peu. L’amendement CL220 est défendu.

M. Philippe Gosselin. La discussion générale est une introduction au débat ; elle sert à « planter le décor ». Cela mérite donc que chaque groupe dispose d’un temps de parole qui ne soit pas trop réduit et, à cet égard, les cinq minutes attribuées à chacun de façon égalitaire ne me paraissent pas une bonne solution.

Certes, il est un peu problématique de s’exprimer devant un hémicycle vide, mais je rappelle que nous sommes en 2019 et que, lorsque nous nous exprimons, ce n’est pas uniquement à l’intention du collègue compatissant qui a bien voulu rester nous écouter pour nous applaudir. Depuis la tribune, nous nous adressons également à nos concitoyens et à la nation. Il ne s’agit pas d’être emphatique car, si personne ne nous regarde vraiment, il y a toujours un journaliste qui reprend une expression ou propose une synthèse de nos propos ; il y a aussi ce que nous mettons sur les réseaux – manière de faire parfaitement respectable dans le monde de communication et d’images dans lequel nous vivons et qui ne se limite pas au Journal officiel, auquel on veut nous renvoyer via des contributions. Je n’ai rien contre les contributions, j’en fais régulièrement pour des rapports, mais il y a des moments où on a envie d’être un peu plus direct, un peu plus percutant.

Je n’ai pas non plus de difficulté dans l’absolu à limiter la longueur du tunnel, mais entre le trop et le pas assez, monsieur le rapporteur, le mouvement de balancier n’est pas parfaitement stabilisé, et il serait dommage que nous n’arrivions pas à nous entendre sur cette réforme du Règlement, pour quelques minutes. Si Paris valait bien une messe, le Règlement vaut bien quelques minutes supplémentaires…

M. Paul Molac. L’amendement CL130 propose que la Conférence des Présidents puisse faire passer le temps de parole de chaque groupe de cinq à dix minutes, de manière à ce que puissent s’exprimer des opinions dissidentes.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Nous avons le choix entre le temps législatif programmé, qui offre une liberté absolue – on peut utiliser le temps qu’on veut dans la discussion générale – dans une durée contrainte, et une procédure ordinaire qui comporte certaines contraintes – celle notamment que nous voulons resserrer en favorisant une brève expression du groupe dans la discussion générale – mais où le droit d’amender procure à chaque député, sauf dans certains cas, un temps de parole illimité, c’est-à-dire deux minutes par amendement déposé.

Je suis pour ma part favorable au temps législatif programmé, auquel il faudrait revenir, comme cela se faisait assez systématiquement sous l’avant-dernière législature et à la fin de la précédente. C’est dans cette perspective que nous proposons qu’il soit assorti de nouveaux droits, conformément à ce qui était demandé. Reste ensuite le temps global dévolu à chaque texte dans ce cadre, mais cela relève de la Conférence des Présidents.

Quant à la question de l’égalité entre les groupes, je ferai remarquer qu’aujourd’hui, dans la plupart des cas, qu’un groupe se compose de cent députés ou de quinze, il dispose des mêmes dix minutes en discussion générale, à deux réserves près puisque le groupe majoritaire dispose de quinze minutes et les non-inscrits de cinq minutes.

M. Raphaël Schellenberger. La situation actuelle n’est pas forcément idéale. Par ailleurs, dans le temps imparti à la majorité, il me semble qu’il faut aussi inclure le temps de parole du rapporteur qui, lui, intervient librement et aussi longtemps qu’il le souhaite, sans parler du temps du Gouvernement.

Enfin, nos échanges démontrent soit que cette réforme n’a pas été assez réfléchie ni assez travaillée, soit qu’elle procède d’intentions cachées que nous avons l’intention de dénoncer avec fermeté.

En mettant les groupes parlementaires au centre du jeu, sans avoir précisément défini à quoi ils correspondaient, vous déstabilisez notre fonctionnement. Voulez-vous en effet voir notre assemblée se transformer en un archipel de petits groupes nés de la volonté de chacun d’entre nous de retrouver un espace d’expression le plus adapté à sa sensibilité politique ? Ou préférez-vous des groupes plus larges, structurés autour de compromis, mais dans lesquels il est nécessaire que chaque membre puisse exprimer les nuances de sa position, y compris dans une discussion générale ?

Parce que vous aurez beau vanter le temps de parole associé à la défense des amendements, ceux-ci ne permettent d’aborder le texte que par le petit bout de la lorgnette, alors que la discussion générale permet de poser le cadre, de dessiner une perspective et de défendre une vision d’ensemble.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Merci monsieur Schellenberger, vous n’avez pas dépassé les deux minutes autorisées, et je crois que nous avons compris votre position.

M. Raphaël Schellenberger. Quant à choisir entre temps législatif programmé et procédure ordinaire, encore faudrait-il que nous ne débattions pas systématiquement des textes en procédure accélérée. Je crois que c’est un fait qui mérite d’être pris en compte dans la réforme de notre règlement.

Mme George Pau-Langevin. Il ressort de nos discussions une opinion très négative du rôle des parlementaires. Or notre rôle est de nous emparer d’un texte de loi, de l’étudier, de se forger une opinion, puis d’exprimer cette dernière, et je voudrais insister à mon tour sur le fait qu’il n’y a aucun rapport entre le fait d’exposer une opinion au cours d’une discussion générale et le fait d’intervenir sur un point particulier à l’occasion de la défense d’un amendement. Si vous considérez que tout cela n’est que du blabla et qu’il faut nous réduire au silence, à quoi servons-nous ? Et comment s’étonner que nos concitoyens ne croient plus en notre action ?

Il semble qu’à vos yeux un parlementaire ne soit qu’un robot fait pour lever le doigt et voter et que, s’il a des choses à dire, il doive aller les dire sur BFM TV ou ailleurs. C’est un contresens absolu sur ce que l’on attend de nous. Par ailleurs, pour siéger depuis dix ans dans cette assemblée, je peux concéder que tous les débats n’ont pas le même intérêt, mais certaines interventions sont de haute tenue et très intéressantes. Ce n’est donc pas à nous d’aller expliquer que nous disons des choses sans intérêt.

Mme Cécile Untermaier. Je souscris complètement à ce qui vient d’être dit. Lorsqu’on aura muselé le Parlement, on regrettera de ne plus avoir un Parlement bavard, mais on ne pourra pas revenir en arrière.

Vous proposez des avancées avec lesquelles je suis d’accord, notamment la suppression de la motion de renvoi en commission, mais doit-on aller aussi loin que vous le faites ? Il me semble que nous devons revenir à une position plus équilibrée, assise sur le principe que, lorsqu’un député parle, c’est pour dire des choses intéressantes. Or le message que vous semblez porter est que la parole d’un débuté est ennuyeuse et qu’il faut nécessairement la canaliser.

La conséquence de votre réforme est que nous allons multiplier les amendements individuels, au lieu de privilégier les amendements de groupe comme nous le faisions. Il suffira d’un léger changement d’un amendement à l’autre pour que chacun puisse prendre la parole à son tour pour ses deux minutes. Car ces prises de parole sont ce que l’on attend de nous. C’est le cœur de notre fonction et, lorsque nous ne le faisons pas, on nous le reproche dans nos circonscriptions, a fortiori maintenant qu’avec la suppression du cumul des mandats nous sommes censés avoir davantage de temps pour étudier les textes, consulter et exprimer ensuite notre avis. Nous devons réfléchir à la manière de fluidifier les débats sans pour autant nous réduire au silence.

Mme Danièle Obono. Monsieur le rapporteur, vous êtes en train de nous expliquer que vous allez généraliser le temps législatif programmé, qui jusqu’alors était l’exception. En somme, nous ne faisons que discuter de la longueur de la corde avec laquelle nous allons nous faire étrangler.

Cette obsession de réduire au maximum notre temps de parole est très révélatrice de votre vision du Parlement, dont les membres, selon vous, sont là pour voter mais pas pour parler. Or parler, c’est débattre et convaincre, ce qui est le sens de notre fonction.

Pendant plusieurs mois, la majorité a célébré le Grand débat. Or, au cours de ce Grand débat – et c’est sans doute révélateur de l’idée que vous vous faites du débat démocratique –, nous avons vu le Président de la République parler en long, en large et en travers, quatre, cinq, six, voire sept heures durant, sans même que ses interlocuteurs aient la possibilité de lui répondre. En vérité, on atteignait là à vos yeux le pinacle du débat démocratique. La mise en regard de cette parole jupitérienne toute puissante avec la manière dont vous considérez l’Assemblée nationale, composée de députés godillots qui votent en cadence, tandis que le débat parlementaire est réduit à sa portion congrue, montre bien quelle est votre conception de la démocratie. C’est très grave.

La Commission rejette successivement les amendements.

Puis elle est saisie de l’amendement CL253 de M. Stéphane Peu.

M. Stéphane Peu. Nous allons nous retrouver dans cette situation paradoxale où le dispositif qui va nous permettre d’avoir l’espace de débattre sera le temps législatif programmé qui, initialement, était conçu pour l’inverse : c’est vous dire l’évolution inquiétante que nous connaissons !

 Puisque le temps législatif programmé va devenir la planche de salut de l’opposition et des groupes minoritaires, nous proposons que la possibilité de le déclencher ne revienne pas au seul président de l’Assemblée nationale, mais qu’elle soit également offerte aux présidents de groupe.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Même si, personnellement, je trouve le temps législatif programmé intéressant, je n’annonce rien du tout, puisque c’est la Conférence des Présidents qui en définit l’usage. Ce que j’entends cependant, c’est que vous jugez également que c’est un outil intéressant pour les libertés qu’il offre, a fortiori s’il y a des contraintes nouvelles dans l’organisation de la procédure ordinaire.

Je pense par ailleurs qu’il ne faut pas dessaisir la Conférence des Présidents. Certes, le fait majoritaire intervient dans ses décisions, mais ceux qui y ont assisté savent que ces décisions n’ont rien d’autoritaire et qu’elles sont prises en concertation entre les présidents des groupes politiques.

Pour en revenir au temps législatif programmé, c’est donc à la Conférence des Présidents d’en faire le choix, et je ne peux parler à sa place, même si j’y suis favorable pour la prévisibilité et la liberté qu’il procure aux députés, grâce notamment au droit de tirage supplémentaire qu’a proposé le président Ferrand, reprenant une idée du groupe socialiste.

Et puis, même si Mme Obono n’est plus là, je voudrais dire que je ne peux pas être d’accord avec elle quand elle voit, dans la logique d’efficacité du TLP, un manque de respect de notre part – et singulièrement de la mienne – pour la parole parlementaire. J’ai au contraire un profond respect pour la parole parlementaire et je rappelle que, de facto, chaque amendement donne un droit de parole de deux minutes qui n’est pas remis en cause.

Le nombre d’amendements déposés est passé de 75 000 durant la XIIIe législature à, sans doute, 150 000 pour la mandature actuelle. Sur la base de deux minutes par amendement, le temps cumulé correspondant au droit de parole effectif individuel est aujourd’hui de 300 000 minutes, soit 5 000 heures ! Il ne faut donc pas caricaturer les choses…

M. Philippe Gosselin. Tous les amendements ne sont pas défendus !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. C’est la liberté du député d’être présent ou non pour défendre ses amendements…

J’insiste sur le fait qu’il n’y a pas d’annonce sur le TLP, mais simplement un droit de tirage supplémentaire donné dans le prolongement d’une proposition socialiste, dont le président Ferrand s’est fait l’écho. Pour ma part, je ne pense pas qu’il faille contraindre la Conférence des Présidents, qui doit continuer à gérer l’organisation des débats.

Je suis donc défavorable à cet amendement, en dépit de toute la sympathie que je peux avoir pour le TLP.

Mme Mathilde Panot. Le nombre d’amendements des précédentes législatures semble constituer votre argument préféré quand il s’agit de défendre l’efficacité des débats parlementaires. Or, si vous tenez à vous référer au passé, je rappelle qu’autrefois la limitation du temps de parole à deux minutes n’existait pas, et qu’on restreint donc peu à peu les possibilités de prise de parole dans l’hémicycle.

Pour ma part, je pense que l’efficacité que vous invoquez comporte en fait des aspects très négatifs. Je pense par exemple au texte sur l’aide sociale à l’enfance que nous avons examiné la semaine dernière, sur lequel nous avions travaillé avec des associations et qui faisait consensus dans toute l’Assemblée. Quand nous avons abordé l’article 1er de ce texte, qui en constituait le cœur, nous n’avons pas pu nous exprimer sur l’amendement le plus important, puisque les prises de parole étaient limitées à une personne par groupe, alors que les associations avaient demandé à ce que l’on vote contre cet article, dénaturé par rapport au texte initial.

Ainsi, en recherchant l’efficacité à tout prix, on finit par perdre en efficacité. Ce n’est pas de cette manière que nous aurons des débats plus intelligibles et plus intelligents, qui nous permettront de mieux faire la loi : au contraire, avec ce qui est ici proposé, nous allons dépolitiser la fonction du député et en arriver à un temps de parole extrêmement restreint, ce qui est regrettable. Pour ma part, je suis donc tout à fait d’accord avec ce qu’a dit ma collègue Danièle Obono à ce sujet il y a quelques instants.

M. David Habib. À titre tout à fait personnel, je considère que le TLP, c’est l’inverse de la démocratie parlementaire, de nos traditions parlementaires et de tout ce qui fait la richesse de nos groupes et de nos territoires, c’est-à-dire de notre capacité à changer d’avis, à nous écouter mutuellement, à nous enrichir de ce qui peut être dit par des femmes et des hommes ayant la même légitimité que nous, et pour lesquels nous devons avoir le même respect que celui que nous portons aux membres de notre groupe.

Le TLP n’est rien d’autre que l’addition de monologues chronométrés, et le seul à en tirer avantage est le président de séance, qui a tout loisir durant les débats de s’occuper de sa circonscription en échangeant des SMS, car il peut être assuré qu’il ne sera pas dérangé !

Le problème, c’est que vous avez décidé d’en faire la règle, et que vous allez ainsi anéantir le débat parlementaire – ce qui est finalement assez cohérent, puisque vous créez en même temps, avec la proportionnelle, un lien d’embrigadement entre les députés et le parti politique auquel ils appartiennent. Les députés vont être élus parce qu’ils auront plu à un dirigeant de parti, et ils s’exprimeront ensuite au sein de l’Assemblée non pas parce qu’ils disposeront pour cela d’une légitimité électorale, mais parce que le groupe leur aura concédé la possibilité, dans le cadre d’un TLP, de s’exprimer. Pour moi, un tel système, ce n’est pas la France, ce n’est pas notre démocratie : toute notre histoire est contraire à cela !

Monsieur le rapporteur, vous étiez présent avec moi lors des réunions qui ont eu lieu à l’initiative du président Ferrand. J’avais alors senti chez lui, lorsque nous avons évoqué la proposition qui émanait d’André Chassaigne, qu’il n’excluait pas de rouvrir le débat en séance sur le sujet dont nous discutons actuellement, à savoir la possibilité de concéder à chaque président de groupe de demander de droit la mise en œuvre du TLP.

M. Stéphane Peu. J’ai conscience de ce que ma démarche peut avoir d’audacieux, mais je relève un point de convergence entre les propos du rapporteur et ceux de M. Habib. Ce que j’ai dit tout à l’heure ne constituait pas une approbation sans réserve du temps législatif programmé : j’ai pris soin de dire, lors de la défense de mon amendement de repli, que nous allons paradoxalement nous retrouver dans une situation où le temps législatif programmé va constituer le cadre dans lequel les groupes minoritaires et d’opposition auront plus de temps pour s’exprimer. Si je ne prétendais pas amoindrir le rôle de la Conférence des Présidents, il faut cependant être lucide : aujourd’hui, la décision de recourir au temps législatif programmé se prend dans le cadre de la Conférence des Présidents, sur proposition du président, et dépend étroitement, si ce n’est exclusivement, du souhait du président et de sa majorité.

M. Bruno Questel. C’est le fait majoritaire cher à M. Gosselin !

M. Stéphane Peu. Mon amendement vise donc à ouvrir le droit aux oppositions et aux groupes minoritaires de proposer à la Conférence des Présidents – il ne s’agit pas de nier les prérogatives de cette instance – de mettre en œuvre le recours au TLP sur un texte. J’insiste sur ce point : mon amendement de repli n’a pas pour objet de vanter les mérites du TLP ni de nier le rôle de la Conférence des Présidents, mais simplement d’ouvrir des droits aux oppositions et aux groupes minoritaires.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement de coordination CL297 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CL221 de M. Stéphane Peu.

M. Stéphane Peu. L’amendement CL221 est également un amendement de repli. La possibilité offerte aux présidents de groupe de céder la moitié de leur temps personnel à un seul membre de leur groupe pour la durée de la lecture d’un texte étant trop contraignante, nous proposons que cette possibilité soit ouverte à chaque séance, pour des raisons de disponibilité, mais aussi d’intérêt.

Par exemple, au sujet du texte sur la fonction publique, Marie-George Buffet m’a fait savoir qu’elle aimerait intervenir sur un article qui l’intéresse particulièrement parce qu’il porte sur le secteur sportif : pour que ce soit possible, il faudrait pouvoir lui rétrocéder la parole pour une séance, et non pour l’ensemble du texte.

C’est un modeste amendement de repli que je vous propose, mais il me semble qu’il pourrait améliorer la possibilité pour les groupes de s’exprimer.

Mme Mathilde Panot. C’est une proposition de bon sens !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Si le président de groupe dispose d’une heure de temps de parole, c’est parce qu’on considère qu’il a un statut particulier, et qu’il utilise son temps de parole pour représenter son groupe.

Depuis quelque temps, on estime que la moitié de ce temps peut être cédée à une autre personne. Cela a été le cas dans le cadre de l’examen de la loi sur le logement, où cela faisait sens pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine de décider que M. Peu pouvait se voir attribuer la moitié de l’heure du président, étant le champion de son groupe sur la thématique du logement.

Si on institutionnalise cet usage pour une séance, on fait de l’heure du président un temps banalisé, et ce n’est plus vraiment l’heure du président !

La première avancée du texte réside dans le fait d’institutionnaliser la possibilité de céder la moitié de ce temps pour toute la durée de la lecture d’un texte, mais je pense qu’il faut en rester là, c’est pourquoi je suis plutôt défavorable à l’amendement CL221, qui me semble banaliser le temps du président, qui n’est pas un temps comme les autres, mais lié à son statut.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie, en discussion commune, des amendements CL84 de Mme Cécile Untermaier et CL89 de M. David Habib.

Mme George Pau-Langevin. Comme vous l’aurez compris, le groupe Socialistes et apparentés estime que le temps législatif programmé n’est pas le cadre idéal pour débattre. C’est pourquoi nous proposons qu’une fois par session, un président de groupe puisse faire obstacle à sa mise en œuvre. Cette proposition modeste vise à affirmer le principe selon lequel nous avons la possibilité de peser, même si ce n’est que de façon limitée, sur l’organisation des débats. Tel est l’objet de l’amendement CL84.

L’amendement CL89 a le même objet, si ce n’est qu’il vise à offrir la même possibilité non pas à un président de groupe, mais à la moitié des présidents de groupe, qui s’associeraient donc afin de faire échec au temps législatif programmé.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Nous avons examiné un amendement proposant un droit de tirage systématique pour le TLP, et un autre proposant un droit de blocage systématique. Si on acceptait ces deux amendements, il y aurait donc huit droits de tirage et huit droits de blocage, puisqu’il y a actuellement huit groupes à l’Assemblée !

Pour ma part, je considère qu’il ne faut pas dessaisir la Conférence des Présidents. Votre argument, selon lequel le fait de confier une voix particulière au groupe majoritaire pour l’organisation des débats équivaut à lui confier la gouvernance de ces débats, ce que vous estimez contestable, n’est en fait que l’expression démocratique du fait majoritaire. Certains sont farouchement opposés au TLP tandis que d’autres sont farouchement pour, puisque dans le même quart d’heure nous examinons un amendement en faveur d’un droit de tirage et un autre en faveur d’un droit de blocage ! Je le répète, si nous adoptions ces deux amendements, cela ferait seize dérogations à l’application normale du TLP ! Je propose donc de laisser la Conférence des Présidents souveraine dans sa décision, d’autant que, comme chacun le sait, elle permet habituellement une prise en compte du dialogue entre les groupes – c’est en tout cas l’usage qui prévaut sous la présidence de M. Ferrand.

M. David Habib. Monsieur le rapporteur, nous vous avons dit ce que nous pensions du temps programmé, et notre proposition est tout à fait cohérente avec cette position. De son côté, M. Peu vous a dit qu’il n’était pas favorable au temps programmé mais que, faute de pouvoir disposer d’un autre « véhicule », il suggérait une démocratisation du TLP. Ne nous faites donc pas dire que le TLP correspond à ce que nous voulons : nous n’y sommes pas favorables ! Pour ce qui est du système actuel, il me semble que la majorité dispose, via la Conférence des Présidents, d’un droit exorbitant d’organisation des débats, alors que nous avons tous la même légitimité : vous avez beau être majoritaires, vous n’êtes pas plus légitimes que moi ici !

M. Philippe Gosselin. La question du pouvoir de la Conférence des Présidents est très intéressante, et elle se posera à l’occasion de l’examen d’autres articles de ce texte. Quelques principes sont affirmés ou modifiés, mais en laissant assez régulièrement la possibilité à la Conférence des Présidents d’y déroger. En réalité, même si je m’inscris bien dans l’esprit de la Ve République et si je reconnais et défends le fait majoritaire, il me semble qu’on donne trop de pouvoir à la Conférence des Présidents, qui est en réalité la Conférence de la majorité.

Si le temps programmé est intéressant dans le cadre de certains débats, car il peut procurer une certaine liberté aux groupes en leur permettant de s’organiser – ce ne sera pas toujours simple, mais avec le temps nous apprendrons à apprivoiser cette formule –, dans d’autres, il sera inutile : nous devons donc savoir faire preuve de souplesse. Pour ma part, je n’ai pas d’obstacle idéologique, et j’estime que nous ne devons pas laisser la Conférence des Présidents disposer d’un droit d’arbitrage suprême qui serait toujours défavorable à l’opposition. C’est une crainte qui me paraît fondée, car le risque d’une Conférence des Présidents disposant de pouvoirs excessifs apparaît au détour de plusieurs articles.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle examine l’amendement CL223 de M. Stéphane Peu.

M. Stéphane Peu. Le TLP, qui est une procédure de rationalisation, peut empêcher les groupes aux plus petits effectifs de s’exprimer tout au long de l’examen d’un texte et de pouvoir prendre la parole sur la totalité de leurs amendements. Le second droit de tirage offert aux présidents de groupes peut s’avérer insuffisant sur le temps d’une session. Cet amendement propose donc que ce second droit de tirage, qui ouvre du temps supplémentaire au seul groupe demandeur, soit porté à trois par session.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Il existe aujourd’hui deux possibilités d’augmenter le temps : soit on attribue du temps exceptionnel, soit on décide d’un temps de discussion supplémentaire sans recourir au droit de tirage des groupes. Si on y ajoute le nouveau droit de tirage prévu par la présente résolution et qu’on multiplie le tout par huit – le nombre de groupes à l’Assemblée –, on arrive à des résultats aberrants. Il me semble que prévoir un droit de tirage sur le temps exceptionnel et un autre sur le temps du groupe est suffisant, et que nous devons veiller à ce que le droit de tirage exceptionnel ne devienne pas la norme. Je rappelle qu’en l’état actuel des choses, nous avons un droit de tirage à cinquante heures, plus le nouveau droit de tirage, pour un groupe.

Mme Mathilde Panot. Oui, pour un groupe, le seul qui en fait la demande !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. En tout, cela ferait seize droits de tirage potentiels, et si on les multipliait par trois, cela ferait quarante-huit droits de tirages ! Doubler le droit de tirage en faisant droit à la proposition socialiste d’en ajouter un me paraît suffisant, c’est pourquoi je suis défavorable à cet amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement CL222 de M. Stéphane Peu.

M. Stéphane Peu. Cet amendement propose que le temps supplémentaire offert au groupe demandeur puisse être étendu aux groupes – hormis les groupes majoritaires de la majorité et de l’opposition – qui le demandent.

Je rappelle que nous avons vécu l’impossibilité pour notre groupe de défendre l’ensemble des amendements que nous avions déposés, notamment dans le cadre de la loi ELAN.

M. Bruno Questel. Le ministre avait déposé de nombreux amendements gouvernementaux pour vous redonner du temps de parole !

M. Stéphane Peu. Effectivement, nous avons réussi à passer des accords techniques avec le Gouvernement afin de récupérer un peu de temps de parole. Cela dit, alors qu’aucun des amendements déposés par notre groupe dans le cadre de la loi ELAN n’était un amendement d’obstruction, 25 % n’ont pu être défendus faute de temps de parole pour le faire – ce que nous avons vécu douloureusement car nous avions mené sur ce texte un travail long et minutieux. Un tel épisode ne doit pas se reproduire, c’est pourquoi nous proposons aujourd’hui l’amendement CL222.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Même avis que celui exposé précédemment.

M. Bruno Questel. Je confirme que le groupe de la Gauche démocrate et républicaine n’a pas pu défendre tous ses amendements dans le cadre de l’examen de loi ELAN. Cependant, je rappelle que le ministre Jacques Mézard a, à de nombreuses reprises, déposé des amendements du Gouvernement à seule fin de vous permettre de vous exprimer.

M. Philippe Gosselin. Ce qui a été dit au sujet du ministre est rigoureusement exact, et je salue son attitude. Cela dit, si on ne peut que se féliciter que quelques artifices gouvernementaux aient permis de donner un peu de temps de parole supplémentaire au groupe de la Gauche démocrate et républicaine, cela montre bien qu’il y avait un problème ! Je le dis d’autant plus volontiers que la rédaction de cet amendement fait référence au « groupe majoritaire d’opposition », et que le groupe Les Républicains ne serait donc pas concerné : il ne me paraît pas incongru de prévoir, dans des conditions très limitatives, qu’un groupe puisse bénéficier d’une petite session de rattrapage. Notre groupe est donc très favorable à cet amendement.

Mme Mathilde Panot. Je rappelle que nous sommes en train de débattre d’une réforme du Règlement. Comme l’a expliqué M. Peu, il est tout à fait anormal qu’un groupe d’opposition qui a beaucoup travaillé sur un texte se trouve bloqué dans son expression parce qu’il ne dispose plus de temps de parole. Certes, des arrangements ont été conclus avec le ministre, mais il n’est pas possible que l’expression des groupes dépende du bon vouloir d’un ministre en séance ! Pour ma part, je considère donc que les amendements actuellement défendus par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine sont extrêmement importants, en ce qu’ils garantiraient le droit d’expression des groupes d’opposition.

M. Stéphane Peu. Je ne voudrais surtout pas que l’on puisse imaginer le moindre reproche de ma part à l’encontre de M. Mézard. Pour tout vous dire, c’est un ministre que je regrette car, depuis le début de la présente législature, la loi ELAN est le texte dans le cadre duquel nous avons eu le plus d’amendements négociés, et parfois acceptés. Ces amendements sont venus améliorer la loi, ce qui permet à l’actuel ministre du logement de faire des conférences de presse au cours desquelles il affirme sa volonté de montrer la plus grande fermeté à l’égard des marchands de sommeil – oubliant de dire ce que la loi doit aux amendements issus de nos rangs.

Si je conserve donc un très bon souvenir de notre travail avec Jacques Mézard, cela n’enlève rien à la validité de nos arguments. Quand vous travaillez minutieusement sur une loi, que vous procédez à d’innombrables auditions et rédigez avec soin de nombreux amendements, et qu’en dépit de la bienveillance du ministre vous vous trouvez dans l’impossibilité de défendre vos amendements, ce n’est rien d’autre qu’un déni de démocratie.

M. Guillaume Vuilletet. Je me souviens très bien des débats auxquels a donné lieu l’examen de la loi ELAN, qui ont montré une volonté commune du Gouvernement, de la majorité et des oppositions de lutter contre les marchands de sommeil. Nous avons tous bien travaillé ensemble, et je pense que personne n’a été floué.

Cela dit, je me rappelle aussi que la question de l’utilisation du temps du président Chassaigne s’était posée dans le cadre de ce débat, et qu’il avait même été envisagé pour cela de recourir à un aménagement technique, finalement abandonné. Dans l’équilibre que nous trouvons maintenant, le fait d’affirmer que le temps du président de groupe peut être délégué au champion d’un groupe sur un thème donné me paraît trouver une justification particulière.

M. Stéphane Peu. En l’occurrence, cela n’aurait pas suffi !

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine les amendements CL338 et CL316 du rapporteur, ainsi que CL29 de M. Michel Zumkeller, qui font l’objet d’une présentation commune.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Dans sa rédaction actuelle, le Règlement prévoit qu’un président de groupe peut obtenir de droit un allongement exceptionnel de la durée du temps législatif programmé (TLPE) dans une limite maximale fixée par la Conférence des Présidents. Cet allongement bénéficie alors à l’ensemble des groupes.

La réforme proposée introduit un droit supplémentaire pour les présidents de groupe d’obtenir un allongement exceptionnel de cette durée pour leur seul groupe. Il est toutefois nécessaire de préciser que cet allongement ne pourra être cumulé avec celui dont bénéficie l’ensemble des groupes au titre de la procédure de TLPE existante.

M. Philippe Gosselin. Ce n’est pas fromage et dessert !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Cela peut paraître évident, mais il me semble qu’il vaut mieux le préciser afin que ce soit bien clair pour tout le monde. Tel est l’objet de l’amendement CL338.

Quant à l’amendement CL316, il vise à réduire de cinq à deux minutes les explications de vote personnelles pouvant intervenir à l’issue de la discussion des articles dans le cadre du temps législatif programmé.

M. Philippe Gosselin. Le rapporteur a repris la proposition que nous avions formulée, consistant à limiter les explications de vote à deux minutes. Comme vous le voyez, nous ne sommes pas arc-boutés sur le chronomètre et notre position ne se résume pas à rallonger à tout prix la durée des débats. Si nous souhaitons éviter que la discussion générale se trouve totalement escamotée à force d’être réduite, nous sommes très ouverts et allons jusqu’à considérer qu’après plusieurs heures de débat, une explication de vote peut se faire en deux minutes.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je précise que la proposition que nous formulons dans le cadre de l’amendement CL316 ne concerne que les explications de vote personnelles intervenant dans le cadre d’un recours au TLP.

M. Pierre Morel-À-L’Huissier. Je retire l’amendement CL29.

L’amendement CL29 est retiré.

La Commission adopte successivement les amendements CL338 et CL316.

Puis elle adopte l’article 8 modifié.

Article 9 (art. 49-1 A [nouveau] du chapitre XI du titre Ier du Règlement de l’Assemblée nationale) : Contribution écrite sur les textes à l’ordre du jour

La Commission est saisie des amendements identiques CL54 de M. Philippe Gosselin, CL86 de M. David Habib et CL224 de M. Stéphane Peu.

M. Philippe Gosselin. Si nous sommes sensibles au droit nouveau que pourrait constituer la possibilité donnée aux députés de déposer une contribution écrite qui serait publiée au Journal officiel, chacun sait que la lecture de ce document est assez austère, et le fait que le nombre de ses pages ait connu une très forte augmentation en 2018 ne va pas contribuer à rendre sa lecture plus attractive – même si, comme le dit l’adage, nul n’est censé ignorer la loi.

Le dépôt d’une contribution écrite ne saurait, en aucun cas, apparaître comme la contrepartie de la diminution d’un temps de parole. Qu’il puisse s’agir d’un droit nouveau accordé aux députés, pourquoi pas ? Le fait de graver dans le marbre une réflexion ou une proposition peut effectivement présenter un intérêt. Cela dit, cet écrit ne contribue pas au débat parlementaire, qui se fait en direct, par l’échange d’arguments dans le cadre d’une discussion où l’on se répond les uns aux autres.

Puisqu’en l’état actuel des choses, on nous présente cette contribution écrite comme une compensation à la limitation du temps de parole, il nous semble préférable de refuser ce qui ressemble fort à un strapontin. Tel est l’objet de l’amendement CL54, visant à supprimer l’article 9.

Mme Cécile Untermaier. Sans doute M. le rapporteur, dont je connais le souci de transparence, pourra-t-il nous le dire, mais nous ne savons pas d’où vient cette proposition ni si elle est censée répondre à une demande.

La contribution écrite qui est proposée constitue à nos yeux un procédé très artificiel. Au demeurant, rien ne garantit qu’elle aura été écrite par le député qui en sera le signataire, et on peut penser qu’il sera fréquemment fait appel à des experts. Du point de vue de l’éthique politique, cela me gêne beaucoup d’introduire une contribution écrite dont le député signataire n’est peut-être pas le véritable auteur – alors que dans le cadre d’un débat oral, un député fait siennes les paroles qu’il prononce, même si son intervention a été préparée à l’aide de collaborateurs.

Pour ma part, je préfère largement conserver du temps de débat plutôt que d’accepter la compensation qui nous est ici proposée. Tel est l’objet de l’amendement CL86.

M. Stéphane Peu. Avoir la possibilité de déposer une contribution écrite n’a rien à voir avec l’endroit où nous nous exprimons habituellement, à savoir le Parlement. N’y voyant qu’un pis-aller technocratique, nous refusons cette proposition et proposons donc de supprimer l’article 9. Tel est l’objet de notre amendement CL224.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je vais commencer par répondre en toute transparence à la question de Mme Untermaier. Cette proposition émane du groupe de travail voulu par François de Rugy, présidé par Jean-Luc Warsmann et rapporté par Jean-Michel Clément. Je dois préciser que j’ai découvert par hasard qu’il s’agissait initialement d’une idée défendue de longue date par Jean-Christophe Lagarde.

Il ne faut pas idéaliser la situation actuelle : aujourd’hui, le Règlement ne permet pas à un député de prendre la parole à n’importe quel moment. Le président de séance donne la parole à deux députés, puis met fin à la discussion alors que beaucoup d’autres voudraient sans doute intervenir – et même dans le cadre de la discussion générale, tous les députés n’ont pas la possibilité de s’exprimer en dix minutes.

Cette proposition ouvre un droit supplémentaire, mais il ne s’agit en aucun cas d’une obligation. Les députés n’auront pas non plus vocation à utiliser ce droit nouveau dans n’importe quelles conditions.

J’ai beaucoup entendu dire que les contributions pourraient être rédigées par des collaborateurs. Cela pourra être le cas, mais je pense que quand un député apposera son nom sur une contribution, il ne le fera pas à la légère…

M. Philippe Gosselin. Il engage sa signature !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Pour ma part, je fais confiance aux députés pour utiliser cette possibilité comme ils le jugeront utile. Certes, ce n’est pas la même chose qu’une prise de parole : ce nouveau droit proposé par le groupe de travail « Warsmann-Clément » n’est pas conçu comme une compensation strictement mathématique.

J’ai déposé un amendement, que nous allons examiner prochainement, visant à affirmer que la Conférence des Présidents fixera un cadre aux conditions d’exercice de ce nouveau droit – combien de contributions, combien de mots, selon quelles modalités, etc. – afin qu’on ne puisse pas faire n’importe quoi.

Mme Cécile Untermaier. C’est une usine à gaz !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Nombre de parlements recourent déjà à cette possibilité et, même si notre culture parlementaire est indéniablement orale, il me semble que ce droit nouveau recourant à la forme écrite peut être utile. Faisons-nous confiance dans l’utilisation de ce droit dont l’idée est bien antérieure à la présente proposition de résolution.

M. Philippe Gosselin. Très bien, mais ça ne peut pas être une compensation !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je comprends tout à fait votre point de vue.

Mme Cécile Untermaier. Les porteurs du projet n’ont pas nécessairement raison, et vous ne pourrez éviter, compte tenu de la concomitance entre la réduction du temps de parole et l’apparition de cette nouvelle possibilité, que celle-ci soit vue comme une compensation. On a quand même l’impression d’entendre crier haro sur le député qui parle : avec cette proposition, on veut surtout qu’il se taise et se contente d’envoyer son papier au Journal officiel !

Pour ma part, je ne trouve pas cela normal : nous devons conserver la possibilité de dire ce que nous pensons et nous sommes tous suffisamment habiles pour trouver le moyen de le faire à un moment où un autre, que ce soit en séance publique ou en commission : nous n’avons donc pas besoin de cet artifice supplémentaire.

Certains députés vont avoir à cœur de rédiger des contributions écrites, ne serait-ce qu’en raison du fait qu’elles vont être comptabilisées par des sites tels que NosDeputes.fr., par exemple, mais je ne suis vraiment pas convaincue de l’utilité d’un tel dispositif qui me paraît être une véritable usine à gaz, et va contribuer à polluer le fonctionnement de l’Assemblée nationale, qui devrait rester le lieu où l’on peut exprimer librement son opinion.

Nous avons déjà la possibilité de nous exprimer dans le cadre des missions et des rapports, et de lire ce que nos collègues ont écrit, c’est pourquoi je répète que nous sommes défavorables à cette proposition.

M. Guillaume Vuilletet. Pour ce qui est de la discussion générale, ce sont surtout les groupes majoritaires qui devraient se plaindre, puisque la réforme proposée va avoir pour effet de les limiter plus que les autres. Quoi qu’en disent certains membres de l’opposition, il apparaît clairement, à la lecture de l’exposé des motifs, que la contribution écrite constitue un droit nouveau, complémentaire de ce qui existe déjà.

Au demeurant, il est faux d’affirmer que la contribution écrite constitue un mode d’expression manquant de solennité, car un texte annexé au Journal officiel n’est pas dénué de cette qualité : en tout état de cause, il est bien plus solennel que ne sauraient l’être les tweets et les posts que rédigent de nos jours les députés quand ils souhaitent s’exprimer par écrit.

Enfin, pour répondre à la critique selon laquelle les contributions écrites pourront être rédigées par d’autres personnes que les députés eux-mêmes, je me permets d’émettre un doute sur le fait que tous les collègues ici présents rédigent toujours eux-mêmes leurs interventions en séance ou en commission.

M. Philippe Gosselin. Ce n’est pas la question !

M. Guillaume Vuilletet. Pour moi, l’essentiel est que cette contribution soit signée, ce qui équivaut à ce qu’elle soit revendiquée par son auteur. Je suis persuadé que, contrairement à ce qu’affirment certains, ce nouveau droit permettra à nombre de députés d’approfondir leur expression de manière significative.

Mme Mathilde Panot. La question qui se trouve ici est celle du bien-fondé du débat démocratique : en d’autres termes, à quoi sert-il que nous soyons présents dans l’hémicycle, et veut-on nous faire croire que nous parlons juste pour le plaisir de parler ? En tout cas, tout semble fait pour nous empêcher de prendre la parole en séance publique, qu’il s’agisse de la possibilité de légiférer en commission, de la restriction du temps de parole ou, maintenant, de cette possibilité de rédiger une contribution écrite, présentée comme un droit nouveau mais ressemblant plutôt à une inutile usine à gaz.

Je le répète, quand nous prenons la parole dans l’hémicycle, cela prend une signification et une importance particulière…

M. Bruno Questel. Ça, c’est ce qu’on croit !

Mme Mathilde Panot. Je ne pense pas qu’on parle juste pour parler, et je n’estime pas souhaitable qu’une partie des débats se fasse en commission, où tous les députés ne peuvent être présents, et encore moins au Journal officiel, où le fait de déposer une contribution écrite ne saurait s’apparenter à la prise de parole au cours d’un débat. La proposition portant sur ce dernier point me semble poser un énorme problème en termes de débat démocratique.

M. Pierre Morel-À-L’Huissier. Pour ma part, au terme de dix-sept ans d’expérience à l’Assemblée, j’estime que cette proposition – qui reprend une idée que Jean-Luc Warsmann, qui disposait d’une certaine autorité au sein de cette commission, m’avait très clairement exposée il y a deux ou trois ans – constitue plutôt une bonne avancée, en ce qu’elle peut permettre à des députés n’ayant pas eu l’occasion de prendre la parole au cours d’un débat de s’exprimer quand même.

Par ailleurs, pour ce qui est de l’expression au cours des débats en séance publique, chacun sait que certains parlementaires ne prennent parfois la parole que dans l’intention de faire tourner leur compteur sur certains sites…

M. Bruno Questel. Je vais vous faire un aveu : il y a quelques mois, j’ai fait partie d’un groupe de députés – membres de cette commission, et avocats pour la plupart – qui se sont tous inscrits pour prendre la parole sur un article et prolonger ainsi les débats jusqu’à la levée de séance, simplement parce que nous étions minoritaires.

Par ailleurs, je veux dire à Mme Panot que le nouveau droit dont nous débattons actuellement n’a rien à voir avec le fait de pouvoir légiférer en commission : comme cela a été dit, la contribution écrite est une idée que Jean-Luc Warsmann défendait déjà il y a plusieurs années, et il n’est donc pas justifié de le mettre en corrélation avec la rationalisation du temps de parole.

Je rappelle également que la législation en commission est encadrée, et peut faire l’objet d’un veto de la part des présidents de groupe : il ne s’agit donc, en aucun cas, de la rendre applicable à l’ensemble des textes. À mon sens, elle aura surtout vocation à s’appliquer à des dispositions extrêmement techniques ne nécessitant pas d’être débattues en hémicycle, où elles donneraient lieu à une consommation de temps de parole inutile, en l’absence d’un débat de fond susceptible d’intéresser les citoyens, les usagers, les contribuables ou les électeurs.

Il nous appartient de nous saisir de ce droit nouveau et libre : nos successeurs pourront toujours supprimer le dispositif de la contribution écrite si, à l’usage, celui-ci se révélait être un échec.

Enfin, je rappelle qu’à chaque fois qu’un député prend la parole, un huissier récupère auprès de lui le texte de son intervention afin de le transmettre au service du compte rendu.

M. Philippe Gosselin. La plupart des interventions sont spontanées et se font donc sans l’appui d’aucun texte : seules celles portant sur des aspects très techniques, ou auxquelles on entend donner une solennité particulière, sont préparées et donnent lieu à la rédaction d’un écrit.

M. Bruno Questel. Tout le monde n’a pas votre talent, monsieur Gosselin !

M. Philippe Gosselin. Je veux bien considérer que la présente proposition représente un droit nouveau, et constitue à ce titre une avancée dont chacun fera ce qu’il voudra. Cela dit, une fois de plus, il reviendra à la Conférence des Présidents de cadrer les conditions d’exercice de ce nouveau droit – avec toutes ses nouvelles attributions, elle va finir par avoir énormément de travail et va devoir se réunir beaucoup plus souvent qu’elle ne le fait actuellement – et celle-ci disposera donc de la capacité à restreindre le nouveau droit d’expression : compte tenu de sa composition, c’est la majorité qui, de fait, détiendra ce pouvoir.

Par ailleurs, je persiste à penser que la contribution écrite est accordée aux députés comme « un os à ronger », en contrepartie du fait qu’ils vont perdre du temps de parole. Sans vouloir passer pour un cuistre, je rappelle que le mot « parlement » tire son étymologie du latin liturgique parabolare qui, par l’intermédiaire du latin médiéval, a donné les verbes « parler » et « palabrer ». De ce point de vue, il est inconcevable de remplacer du temps de parole par une procédure écrite.

Je le répète, je suis tout disposé à accepter ce droit nouveau, mais à condition qu’on desserre l’étau que certains cherchent à mettre sur le temps de parole en débat.

M. David Habib. Je vais m’inscrire en faux par rapport à ce qui a été dit précédemment. Ne soyons pas naïfs : c’est bien parce qu’on réduit la possibilité de nous exprimer dans le cadre de la discussion générale, et parce qu’on nous interdit d’avoir plusieurs orateurs sur un article, qu’on nous accorde aujourd’hui une contrepartie.

M. Philippe Gosselin. Bien sûr, c’est un ensemble !

M. David Habib. Je ne peux pas laisser dire que La République en Marche a concédé un droit nouveau à l’opposition, car ce n’est pas dans son ADN, et ça ne serait pas la vérité ! (Protestations parmi les députés du groupe La République en Marche.)

Pour moi, il est clair que tout cela a essentiellement un objectif : permettre à M. le rapporteur et éventuellement à Mme la présidente d’aller déclarer dans les médias qu’ils ont fait une concession à l’opposition. Dans les faits, on sait bien comment les choses vont se passer, et je vous invite à songer un instant à ce que vont pouvoir penser nos administrés quand ils constateront que leur député n’a pas produit de contribution écrite sur tel ou tel sujet : à mon avis, ils en déduiront rapidement que celui-ci n’était pas intéressé. Ce que certains considèrent aujourd’hui comme une avancée sera donc en fait un motif supplémentaire de mise en cause de la fonction parlementaire.

Ce qui compte et ce qui a du sens en politique, c’est la parole, qui est à la fois fondatrice et légitimante. Et croyez-moi, mes chers collègues, vous prenez un grave risque à chercher à la contingenter !

La Commission rejette les amendements identiques CL54, CL86 et CL224.

La Commission examine l’amendement CL125 de Mme Sylvia Pinel.

M. Jean-Félix Acquaviva. Cet amendement vise à encadrer le mécanisme de contribution écrite sur le modèle des règles qui régissent le dépôt des questions écrites et des dispositions prévues par le Règlement intérieur du Parlement européen. L’objectif est de renforcer l’utilité du dispositif de sorte qu’il permette d’apporter des points de vue pertinents, surtout aux députés n’ayant pas eu la possibilité de prendre la parole pendant le débat. Grâce à cette mesure d’encadrement, les contributions écrites ne seront pas détournées pour faire du chiffre, dans l’esprit de la proposition qui est faite d’ouvrir ce nouveau droit.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Votre amendement revient à restreindre cette liberté dont seuls ceux qui n’ont pas pris la parole dans l’hémicycle pourraient faire usage. J’y suis donc opposé par principe. En revanche, vous avez raison : il faut encadrer les règles du jeu et c’est à la Conférence des Présidents qu’il appartient de le faire en ce qui concerne le nombre et le format des contributions, leur nombre de mots et leurs modalités.

Dans la mesure où il n’était pas possible de sous-amender votre amendement, j’ai moi-même déposé un amendement visant précisément à encadrer le mécanisme. Cependant, il ne me semble pas opportun de le faire dans le Règlement ; mieux vaut renvoyer à une décision de la Conférence des Présidents. Je vous propose donc de retirer l’amendement ; à défaut, avis défavorable.

M. Bruno Questel. Oui, il faut davantage de souplesse !

M. Philippe Gosselin. Cet amendement met noir sur blanc ce que je disais à l’instant en souriant : les sites comme NosDeputes.fr ne manqueront pas de relever que tel ou tel député n’a pas déposé assez de contributions écrites. L’amendement explicite ces risques de détournement. Nous nous fixerons comme objectif de présenter tel nombre de contributions, qui seront écrites par nos collaborateurs ; cette inflation n’aura guère d’intérêt. L’amendement met en lumière l’ambiguïté de ce nouveau – l’est-il vraiment ? – droit dont on entrevoit d’emblée les dérives. À peine accordé, on le limite déjà s’agissant de la quantité des contributions et le nombre de mots. Qu’est-ce que cela signifie ? Au fond, on se contentera de relever le nombre de contributions déposées et de les publier sur nos sites internet pour avoir la paix face à nos électeurs… L’amendement fait apparaître davantage encore que précédemment les limites de ce mécanisme.

M. Guillaume Vuilletet. Ce n’est pas la contribution écrite qui crée les limites liées aux sites tels que NosDeputes.fr. La perversité de ce système existe déjà.

M. Philippe Gosselin. On l’amplifie !

M. Guillaume Vuilletet. Non, au contraire : nous favorisons la concision en encadrant le temps de parole et les contributions écrites afin d’aller à l’essentiel plutôt que d’encourager l’inflation constante liée aux effets statistiques.

M. Jean-Félix Acquaviva. Permettez-moi de revenir sur la question de la restriction des libertés. En quoi cet amendement restreindrait-il la liberté des parlementaires dès lors que les contributions écrites ne seraient autorisées qu’aux députés n’ayant pas fait usage, pour telle ou telle raison, de leur droit d’expression et d’argumentation en séance, dont le point de vue ne figurerait donc pas au compte rendu intégral de la séance ? Au contraire : les députés ne s’étant pas exprimés auront le droit d’argumenter sur le fond, de manière plus réfléchie. La contribution écrite ciblerait donc les arguments de fond ; elle serait encadrée pour éviter les risques de détournement qui ont été évoqués et pour ne conserver que la quintessence de ce droit.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL317 du rapporteur.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je l’ai déjà défendu.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 9 modifié.

Article 10 (art. 50 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Horaires de séance

La Commission est saisie, en présentation commune, des amendements CL255 de Mme Élodie Jacquier-Laforge, CL30 de M. Michel Zumkeller et CL132 de Mme Sylvia Pinel.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Cet amendement porte sur l’organisation de notre temps de travail. Comme on l’a déjà indiqué lors de la discussion générale, le nombre de jours et d’heures consacrés à l’examen des textes a considérablement augmenté. C’est pourquoi le groupe MODEM vous propose de réorganiser ce temps comme suit : les séances publiques auraient lieu l’après-midi du lundi, du mardi et du mercredi, ainsi que le matin et l’après-midi du jeudi et, éventuellement, le vendredi. Nous proposons également de modifier les horaires de séance : la séance du matin durerait de neuf heures à treize heures, celle de l’après-midi de quatorze heures à vingt heures. Ces règles seraient assouplies lors des périodes d’examen du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la sécurité sociale, avec la possibilité de séances de nuit entre vingt-et-une heures trente et une heure du matin. Nous proposons également une autre mesure de souplesse afin que la séance de l’après-midi puisse, le cas échéant, être prolongée au-delà de vingt heures, jusqu’à vingt-et-une heures trente.

En conséquence, nous proposons la suppression des séances de nuit, pour la raison suivante : le fait de soumettre des amendements voire des textes importants au vote nuitamment, parfois très tard, nuit à l’accessibilité des débats tout à la fois pour nos concitoyens mais aussi pour la presse qui suit nos travaux. En outre, cette organisation oblige les collaborateurs de députés et les personnels de l’Assemblée à travailler la nuit. Je m’arrête là pour respecter mon temps de parole, car j’y suis attachée, mais le débat est ouvert.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Cet amendement, comme tous les suivants qui portent sur la question du temps, présente une difficulté et m’incite à vous faire une proposition. Nous avons consacré une part importante des travaux préliminaires à envisager la réorganisation de nos travaux à l’échelle de la semaine et de l’année, notamment pour libérer davantage de temps en circonscription. Cette réflexion a abouti à des amendements, y compris au projet de révision constitutionnelle, qui permettaient de retrouver une certaine maîtrise de notre temps. Nous réaffirmions par exemple cette maîtrise du temps dans la Constitution, donnant ainsi de nouveaux droits au Parlement en la matière.

La difficulté tient au fait que cet exercice est complexe en l’état actuel de la Constitution. Si elle ne s’inscrivait pas dans le cadre d’une réflexion sur le volume de travail annuel, la suppression des séances de nuit serait problématique. Plusieurs amendements ont été déposés afin de commencer les séances du matin à neuf heures trente plutôt qu’à neuf heures, de lever les séances de nuit à minuit et, plus globalement, de supprimer les séances de nuit ou de n’en conserver qu’une seule par semaine. Nous avons fait des simulations à partir de ces propositions, et plusieurs scénarios semblent pouvoir donner lieu à un consensus. Hélas, nous n’avons pas eu le temps d’y réfléchir davantage, le délai de dépôt des amendements à ce texte ayant couru jusqu’à samedi dernier. Je vous propose donc d’organiser la semaine prochaine une session de travail d’au moins deux heures avec un représentant de chaque groupe politique et tous les parlementaires intéressés afin d’étudier les différents scénarios compilés lorsque nous avons étudié vos amendements. De nouvelles simulations ont d’ailleurs déjà été faites depuis le dépôt de vos amendements.

En toute franchise, je crains que la suppression des séances de nuit sans la réforme constitutionnelle ne soit vouée à l’échec. En même temps, vous m’avez convaincu : les scénarios que vous proposez – allonger la séance de l’après-midi jusqu’à vingt heures trente, ne tenir qu’une seule séance de nuit par semaine – s’écartent de deux ou trois heures environ du volume hebdomadaire actuel.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Ils sont même à temps constant.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Malheureusement, nous n’avons pas eu le temps de les étudier de manière plus approfondie. Ma proposition est donc claire : passons deux heures ensemble d’ici à l’examen en séance pour évaluer les scénarios de sorte que chacun se forge son opinion et qu’un consensus se dégage éventuellement. Très nombreux sont les députés qui estiment que les conditions actuelles de travail de nuit sont absurdes, dans la majorité comme dans l’opposition. Cela étant, nous avons tous le sens des responsabilités : si nous supprimons les séances de nuit, il faut trouver des solutions opérantes. Encore une fois, je propose donc une réunion de deux heures la semaine prochaine, chiffres à l’appui, pour établir si un scénario se dégage ou non sans révision de la Constitution. Je ne peux pas dire si nous aboutirons mais, à ce stade, nous ne nous sommes pas donné la chance de tester l’amendement à fond, et cela n’avait pas non plus été fait lors des travaux préparatoires effectués pendant la présidence de M. de Rugy. À l’époque, de surcroît, nous raisonnions dans l’hypothèse d’une révision de la Constitution qui nous aurait redonné la maîtrise de notre temps.

Je propose donc à titre personnel – mais vous disposerez – un travail intergroupes pour examiner les tableaux Excel que vous avez réalisés et étudier les différents scénarios possibles. Il est indispensable de changer radicalement nos méthodes de travail mais j’ignore si cela est possible sans changer la Constitution ; ce sera l’occasion de le vérifier.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Nous vous remercions pour cette proposition, monsieur le rapporteur. Je constate que tout le monde y est favorable.

Je laisse le soin à M. le rapporteur d’organiser ces travaux auxquels je serai ravie de participer. En attendant cette réunion, pouvons-nous donc considérer que tous les amendements relatifs au temps de travail sont retirés ?

M. Philippe Gosselin. Permettez-moi juste quelques mots sur ce sujet totalement transpartisan. La proposition du rapporteur me convient très bien. J’ignore néanmoins si une remise à plat est possible étant donné le nombre très excessif des séances de nuit. Qu’il y en ait une par semaine, pourquoi pas, mais l’exception a tendance à devenir la règle, comme l’illustre le cas des sessions extraordinaires, systématiquement prévues en juillet et en septembre – et cette tendance n’est pas nouvelle.

En outre, prenons garde à bien tenir compte des rythmes des députés provinciaux, qui ont des temps de transport plus long que les Franciliens.

M. Bruno Questel. Et le temps passé en circonscription !

M. Philippe Gosselin. En effet, le temps en circonscription est toujours important. Si la séance publique commençait par exemple le lundi à quatorze heures, comme cela vient d’être proposé, bon nombre d’entre nous devraient quitter leur circonscription dès le lundi matin, supprimant ainsi la possibilité d’organiser des réunions sur place pour recevoir nos concitoyens, comme le font de nombreux députés. Je suis conscient d’enfoncer des portes ouvertes mais il me semble important de le rappeler.

Mme Hélène Zannier. Ce sera précisément l’objet du débat !

M. Philippe Gosselin. Certes, mais il importe de fixer clairement certains cadres pour lever toute ambiguïté. Le temps passé sur le terrain est important.

Mme Cécile Untermaier. Nous ne sommes tout de même pas seuls dans cette affaire : l’exécutif nous presse fortement par une avalanche de textes qui nous contraint à travailler selon des horaires impossibles. Les successions de trois ou quatre séances de nuit hebdomadaires placent les députés dans des situations très difficiles. Interrogeons l’exécutif sur ces questions.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je vous propose de passer au vote sur l’article non modifié, étant entendu que le rapporteur a donné son engagement formel de nous réunir la semaine prochaine pour étudier cette question. Une date vous sera proposée en début de séance ce soir.

Les amendements sont retirés.

La Commission adopte l’article 10 sans modification.

Article 11 (art. 54 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Explications de vote

La Commission examine les amendements identiques CL75 de Mme Cécile Untermaier et CL225 de M. Stéphane Peu.

Mme Cécile Untermaier. Dans le même esprit que notre amendement précédent, cet amendement porte sur la limitation du temps d’expression sur les articles, qui nous pose d’autant plus problème qu’elle intervient après la réduction de la discussion générale. Je n’ai pas le sentiment que les inscriptions d’orateurs sur les articles soient excessives. J’en veux pour preuve l’examen d’un texte important comme le projet de loi relatif à la fonction publique : les inscriptions sur les articles ont été peu nombreuses, sans doute parce que dans le cadre du système de temps partagé, ceux qui le souhaitaient – c’était le cas de notre groupe – s’étaient exprimés pendant la discussion générale.

Le Règlement actuel prévoit que les députés peuvent s’inscrire pour intervenir sur les articles d’un texte sans limitation du nombre d’interventions. La proposition de résolution vise, quant à elle, à réduire ces interventions à un orateur par groupe, qu’il appartiendrait aux président de groupe ou à son représentant de désigner. Les explications de vote sur les articles seraient supprimées.

La suppression des explications de vote sur les articles ne présente pas selon nous de difficulté si elle permet de fluidifier le débat. En revanche, enlever aux députés, qui sont élus pour s’exprimer sur les textes, la liberté de s’inscrire sur les articles – a fortiori lorsqu’ils n’ont pas pu prendre la parole pendant la discussion générale – risque de poser problème. On peut en effet craindre que la limitation de la discussion générale ne se traduise par une hausse des inscriptions sur les articles et je comprends que vous bloquiez en quelque sorte toutes les arrivées d’air, mais cela donne le sentiment que vous cumulez les mesures à tous les stades du débat à tel point qu’in fine, le Parlement ne parlera plus beaucoup.

M. Stéphane Peu. Cet amendement, identique, vise à supprimer l’article. Comme nous allons le constater au fil de son examen, cette proposition de résolution va réduire fortement, par petites touches, la possibilité et le temps du débat parlementaire. En outre, elle va renforcer considérablement la prégnance des groupes au détriment de l’expression individuelle des députés, ce qui pose un problème constitutionnel. La Constitution ne prévoit pas que l’on élit un député membre de tel ou tel groupe…

M. Philippe Gosselin. Non, nous sommes députés de la nation !

M. Stéphane Peu. Elle prévoit en effet que soit élu un homme ou une femme ayant reçu les suffrages de ses concitoyens dans une circonscription et qui, de ce fait, devient député de la nation. Il nous paraît irrecevable de limiter à ce point la possibilité pour chaque député de s’exprimer sur les articles en complément des interventions prononcées au nom de leur groupe. C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’article.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Avis défavorable. Cet article est un élément constitutif du texte. Nous réorganisons la structure de la séance publique : l’article conserve le cadre général et la durée des explications de vote sur l’ensemble d’un texte, qui est de cinq minutes, et nous renvoyons les règles relatives aux inscriptions sur les articles à un autre article du Règlement.

M. Stéphane Peu. Par groupe !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Oui, comme c’est déjà le cas : nous n’apportons à la règle aucune modification qui aurait pour but de privilégier le groupe par rapport à l’individu au titre des explications de vote. Avis défavorable.

M. Philippe Gosselin. Cette procédure de l’inscription sur les articles ne donne pas lieu à des abus – peut-être est-ce par méconnaissance de la part de certains de nos collègues. En tout état de cause, je n’ai pas constaté, au cours des derniers mois, une inflation telle qu’elle nécessite cette réduction. Le temps de parole sera déjà réduit par différents moyens. Il arrive que des députés ne déposent pas d’amendements sur telle ou telle partie du texte – ce qui n’en fait pas de mauvais députés – car il n’y a pas toujours nécessité ou matière à en déposer, et qu’ils souhaitent néanmoins expliquer leur vote. Il y va de la transparence vis-à-vis des électeurs et de la représentation de celles et ceux qui nous ont fait confiance. Nous assumons les positions que nous prenons. Encore faut-il pouvoir les exprimer ! Sur ce point comme sur d’autres, vous allez trop loin. Ces amendements nous offrent la possibilité de limiter ces excès.

M. David Habib. En privé, bon nombre d’entre vous nous disent que c’est le cumul des modifications qui pourrait poser problème. C’est aussi ce que nous disons depuis ce matin. Les députés du groupe La République en Marche sont conscients, comme nous, qu’un risque pèse sur l’organisation des débats.

En ce qui me concerne, monsieur le rapporteur, je souhaite que nous profitions des dix jours qui nous séparent de l’examen en séance pour que vous révisiez votre position sur ce point. Autant j’ai compris votre position de principe sur la discussion générale, autant en l’occurrence, il y va de la liberté de chaque député face à ses électeurs et face à l’institution. Nous devons conserver cette libre expression sur les articles qui, je le rappelle, est limitée à deux minutes par orateur.

Le président Ferrand a raison de chercher à recueillir le plus large assentiment possible. Le groupe socialiste fera de ce sujet un point essentiel du débat qui s’ouvrira en séance. Nous ne pouvons pas accepter la modification d’un droit qui doit être rappelé par la majorité, à savoir la possibilité pour chaque député, hors du cadre de son groupe, d’exprimer une position et de faire valoir ses convictions.

M. Bruno Questel. Nous débattons de l’inscription sur un article et non de la capacité qu’ont les députés d’agir juridiquement en se faisant force de proposition législative – la limitation de cette capacité et de ses fondements pourrait être remise en cause par le juge constitutionnel si elle existait mais ce n’est pas le cas. Recadrons le débat : il ne s’agit que de l’inscription aux articles.

M. Philippe Gosselin. Lorsqu’un article concerne Aéroports de Paris ou la Française des Jeux, il a tout de même son importance !

M. Paul Molac. Si la discussion générale se limite à l’intervention en cinq minutes d’un orateur par groupe, les deux minutes accordées aux députés sur les articles leur permettent éventuellement d’exprimer des opinions divergentes. De surcroît, ces interventions sont beaucoup moins chronophages que les interminables discussions générales, car elles ne sont pas longues. Je doute que l’on gagne beaucoup de temps par cette mesure ; en revanche, elle suscitera de la frustration chez un grand nombre de députés.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Nous aurons de nouveau cette discussion concernant les interventions sur les articles lors de l’examen des articles 23 à 25 car nous avons réorganisé le texte – raison pour laquelle ma réponse sur ces amendements fut assez courte.

La Commission rejette ces amendements.

Elle examine l’amendement CL145 de M. Ugo Bernalicis.

Mme Mathilde Panot. Cet amendement de suppression partielle va dans le sens des amendements que viennent de défendre mes collègues socialistes et communistes. Nous refusons en effet la limitation du droit d’expression des représentants du peuple sur les articles, dont certains sont extrêmement importants.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Même avis qu’aux amendements précédents.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie, en présentation commune, des amendements CL318 du rapporteur et CL55 de M. Philippe Gosselin.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. L’amendement de coordination CL318 vise à préciser et clarifier les conditions dans lesquelles le président de séance peut prendre la liberté, au regard des circonstances et dans l’intérêt du débat, de déroger à la durée des interventions et au nombre d’orateurs. En l’état actuel, le Règlement n’est ni simple ni homogène sur ce point. Nous proposons donc de réaffirmer que le président de séance peut, dans l’intérêt des débats, allonger les temps d’intervention définis par le Règlement.

M. David Habib. C’est une excellente initiative mais au fond, vous déposez cet amendement pour avoir la paix avec le groupe majoritaire, car c’est souvent avec lui que se pose le problème, n’est-ce pas, monsieur le vice-président ?

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Ne surinterprétez pas ma pensée, monsieur Habib. (Sourires.)

M. Philippe Gosselin. Je défends l’amendement CL55 qui vise, dans le même esprit, à limiter le temps d’explication.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je ne souhaite pas trop limiter ce temps d’explication et vous suggère de retirer l’amendement. Vous proposez en effet de ramener de cinq à deux minutes les explications de vote dans tous les cas. Néanmoins, si l’amendement fait consensus, je ne me ferai pas plus royaliste que le roi sur ce sujet important.

M. Philippe Gosselin. Puisque nous en avions déjà parlé et pour ne pas allonger les débats, j’ai défendu brièvement cet amendement mais il est peut-être utile que je prenne plus de temps.

Il me semble que nous pouvons, sans prendre de risque particulier, faire en sorte qu’à l’issue de débats prolongés où chacun s’est exprimé, les explications de vote tiennent en deux minutes. Ce temps n’est pas si court : c’est celui des questions au Gouvernement et il permet de dire un certain nombre de choses. Je propose cette mesure avec d’autant plus de bonne foi qu’il me semble que les cinq minutes accordées pour la discussion générale, qui permet de « planter le décor », sont trop courtes. En ce qui concerne les explications de vote, en revanche, nous pouvons, sans porter préjudice à la démocratie et à la liberté d’expression, gagner de précieuses minutes et éviter les explications alambiquées et redondantes auxquelles nous assistons parfois. Dès lors que les débats ont été clairs et que les positions des groupes sont établies sans équivoque, deux minutes suffisent sans problème à expliquer un vote. Tel est l’objet de l’amendement.

Mme Cécile Untermaier. Nous partageons ce point de vue. Vous le voyez, nous ne sommes pas opposés à la réduction du temps de parole dès lors qu’elle est proposée à propos.

M. Philippe Gosselin. Au bon moment et au bon endroit !

M. David Habib. Je trouverais tout de même étrange que l’on se précipite sur une proposition – légitime et intelligente – de l’opposition pour réduire le temps de parole sans prendre le temps d’examiner les propositions de revalorisation qui ont été formulées. Je suggère à M. Gosselin de prier le rapporteur de réserver un traitement parallèle et concomitant aux deux demandes.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. C’est précisément le sens de ma demande de retrait de l’amendement en vue des discussions que nous aurons.

M. Philippe Gosselin. Compte tenu de la proposition que vient de formuler clairement le rapporteur, nous participerons bien volontiers au prolongement du débat. Je retire mon amendement.

L’amendement CL55 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL318.

En conséquence, l’amendement CL182 de Mme Géraldine Bannier tombe.

Puis elle adopte l’article 11 modifié.

Article 12 (art. 56 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Prise de parole en séance publique

La Commission examine les amendements identiques CL56 de M. Philippe Gosselin, CL76 de Mme Cécile Untermaier et CL146 de Mme Danièle Obono.

M. Philippe Gosselin. Comment considérer que les députés sont libres de déposer des amendements s’ils n’ont pas la possibilité de les défendre ? Un vrai débat est nécessaire. Le Parlement n’est pas au cœur de la démocratie si le temps de parole est à ce point limité.

Mme George Pau-Langevin. Dans la même logique, nous nous opposons à ce que le temps d’expression sur les amendements soit limité à ce point. Il arrive qu’un amendement précis serve à poser un problème de fond majeur sur lequel les échanges peuvent être vifs et longs. La limitation du temps d’expression sur les amendements ne contribue pas à créer les conditions d’un débat de bonne qualité.

Mme Mathilde Panot. Nous défendons l’amendement CL146, identique aux précédents. L’ensemble des mesures de restriction du temps de parole des députés ne fait pas honneur au Parlement.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Il y a là une méprise que je souhaite dissiper. Nous déplaçons à l’article 100, plus adapté, l’organisation du temps de débat sur les amendements – présentation, avis du rapporteur et du Gouvernement, et réponse à ces avis. En l’état actuel des choses, le Règlement ne prévoit qu’une seule prise de parole en réponse aux avis du rapporteur et du Gouvernement, mais la pratique consiste à accorder la parole deux fois. En réalité, nous codifions donc la pratique en vigueur, à savoir deux prises de parole, au lieu d’une seule, en transférant cette disposition mal placée dans la partie du texte qui concerne la défense des amendements.

Encore une fois, le texte actuel ne prévoit qu’une prise de parole suite aux avis de la commission et du Gouvernement, mais notre pratique veut que la parole soit donnée deux fois. Nous mettons donc le Règlement en accord avec la pratique. Il ne s’agit pas du tout de comprimer le temps accordé, bien au contraire. De ce fait, je suggère le retrait des amendements.

Les amendements sont retirés.

La Commission adopte l’article 12 sans modification.

Article 13 (art. 58 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Encadrement du recours aux rappels au Règlement et aux suspensions de séance

La Commission examine les amendements identiques CL57 de M. Philippe Gosselin, CL126 de Mme Sylvia Pinel et CL147 de M. Ugo Bernalicis.

M. Philippe Gosselin. L’amendement CL57 porte sur un sujet lourd qui a trait à la police des débats au sens large.

Le Règlement actuel permet au président de séance de gérer correctement les débats. Malheureusement, il n’est pas utilisé comme il le faudrait. Il est déjà tout à fait loisible au président de séance de limiter les rappels au Règlement dilatoires, et de limiter les demandes répétées de suspension de séance en décidant que la suspension, qui est de droit, ne dure qu’une minute sur place – dans ces conditions, les demandes cesseront naturellement. Tout cela est facile à faire et certains présidents de séance le font d’ailleurs très bien.

Il faut laisser ouverte la possibilité non pas d’instrumentaliser la séance, mais de jouer une partie – non au sens premier du terme « jeu » mais au sens d’une interaction. Une altercation peut entraîner une demande de suspension de séance, de même qu’un rappel au Règlement peut être une manière authentique d’évoquer le déroulement des débats. Les prétextes existent certes et nul ne le nie. Aujourd’hui, cependant, lorsque les suspensions de séance et les rappels au Règlement se multiplient, c’est qu’il existe un réel problème, une tension, un désaccord.

M. Bruno Questel. Sur le texte, et uniquement sur le texte !

M. Philippe Gosselin. Sans doute faites-vous allusion à des événements survenus en juillet 2018 : heureusement que nous avions alors cette possibilité d’intervention ! Sans elle, la commission d’enquête n’aurait pas été créée et nous n’aurions pas obtenu de réponse à nos questions.

M. Bruno Questel. Vous avez sauvé la République !

M. Philippe Gosselin. Nous parlons d’un droit substantiel qui relève des pouvoirs de l’opposition. Je vous le dis en toute sincérité : il s’agit d’une ligne rouge qui ne peut pas être franchie. Autrement, ce serait de la manipulation ; je n’ose y croire.

M. Paul Molac. Nous sommes bien conscients que les débats sont longs et qu’il faut en réduire la durée. Cependant, les suspensions de séance n’ont au fond posé problème qu’en juillet dernier ; autrement, il n’y a pas d’abus. De même, les rappels au Règlement sont souvent demandés une première fois puis, éventuellement, une deuxième avant que tout se calme. Je suis élu depuis sept ans : je n’ai constaté de problème qu’en juillet dernier. Je ne suis donc pas certain qu’il faille modifier ces dispositions.

Rappelons en outre que c’est parfois la majorité elle-même qui a besoin d’une suspension de séance parce qu’elle est minoritaire en début de séance, à vingt-et-une heures trente par exemple, et qu’elle est bien heureuse de pouvoir demander une suspension en attendant que ses rangs grossissent. J’ai connu cette situation sous la précédente législature à l’occasion du vote sur la réunification de la Bretagne : les députés bretons étaient majoritaires dans l’hémicycle, mais une suspension de séance a été demandée précisément à ce moment-là. En clair, il ne s’agit pas à mon sens d’un problème qui allongerait le temps des débats.

Mme Mathilde Panot. L’amendement CL147 vise également à supprimer l’article. J’ajouterai aux arguments de nos collègues que selon moi, les rappels au Règlement et suspensions de séance n’ont pas posé problème lors de l’affaire Benalla ; au contraire, ils ont permis la création de la commission d’enquête – certes avortée – sur le scandale en cours à l’époque. Autrement, aucun abus n’a été commis. De ce fait, cet article est tout sauf nécessaire.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Nous abordons l’un des points constitutifs de la proposition de résolution, qui consiste à rappeler deux choses. D’une part, les rappels au Règlement doivent être fondés – sur le déroulement des débats ou sur un fait personnel, par exemple – et non détournés de leur objet. Il est vrai que les prérogatives actuelles du président de séance lui permettent de juger qu’il y a obstruction et de les faire cesser. Il peut aussi les accorder, dans l’intérêt du débat. Plus fondamentalement, nul ne pense que ces dispositions permettraient de résoudre une situation telle que celle de juillet dernier. La voix parlementaire est un fleuve qui ne saurait être contenu avec un seau et une pelle.

Il faut rationaliser ces points et imposer plus de clarté : les rappels au Règlement doivent être authentiques. Ils ont tout de même pour objet de faire observer que les règles de la maison ne sont pas respectées : c’est un message fort ! Ils doivent reprendre leur sens. Il en va de même pour les suspensions de séance : les abus sont rares et la surenchère inexistante. Nous voulons simplement recentrer ces deux outils sur leur raison d’être, ni plus ni moins. N’ayons aucune illusion : la situation de juillet dernier, par exemple, ne pouvait évidemment pas être résolue par ces mécanismes. Il me semble normal de préciser que les rappels au Règlement concernent la conduite des débats et qu’ils doivent être circonstanciés. Il n’y a aucune intention cachée de notre part, mais simplement la volonté de recentrer les outils sur ce qu’ils doivent être.

Mme George Pau-Langevin. Il arrive que surviennent dans les débats des moments de tension voire de crise. Le rappel au Règlement et la demande de suspension sont souvent des manières de protester contre quelque chose d’inacceptable. La plupart du temps, ni les rappels ni les suspensions ne sont demandés par plaisir. Je citerai par exemple les débats sur la loi de refondation de l’école : pendant une suspension, une partie des députés s’étaient mis d’accord sur une version du texte qu’il a ensuite fallu voter sans possibilité d’expression en séance. Plusieurs rappels au Règlement très vifs ont été nécessaires pour qu’il soit enfin admis que le texte avait été mal voté.

En clair, ce n’est pas en supprimant les moyens de résoudre des crises que vous supprimerez les crises elles-mêmes. Au contraire, ces outils sont entrés dans les habitudes de l’Assemblée et sont finalement assez utiles pour résoudre des conflits. Leur suppression ne favoriserait pas l’amélioration de nos travaux.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je vous rejoins : c’est au président de séance qu’il appartient de gérer les crises en respectant le débat. Il a la latitude nécessaire pour le faire en adaptant les règles existantes. La pratique de la présidence de séance, nonobstant le style de chaque président, consiste globalement à veiller à ce que le débat se déroule dans de bonnes conditions.

Nous rationalisons ces outils qui doivent être utilisés pour ce qu’ils sont. Aucune disposition du Règlement ne suffit à gérer une crise ; c’est au président de séance qu’il appartient d’apprécier la situation et d’accorder les marges d’expression nécessaires pour que le débat puisse vivre.

M. Philippe Gosselin. Qui peut le plus peut le moins ! Ce n’est pas parce que les possibilités accordées sont importantes que le président de séance peut laisser filer le débat ! L’article 13 va très loin : limitation du rappel au Règlement, suppression des rappels concernant l’organisation des débats, qui pose pourtant problème, refus très contraignant des demandes de rappels portant sur des faits déjà évoqués – mais après combien de temps : dix, quinze, trente minutes ? – et limitation à deux du nombre de suspensions autorisées par groupe ! Il existe pourtant des moments de tension véritable. Personne ne demande une suspension par plaisir ou sans raison, par exemple lorsque les débats sont fluides et sereins, et même s’ils sont plus vifs ; nous ne sommes ni des amateurs ni des bleus !

Il s’agit d’outils de régulation des tensions. Leur suppression nous ferait passer à côté de quelque chose d’important. Réduction du temps de parole en discussion générale et en commission, limitation des suspensions de séance et des rappels au Règlement : lorsque l’on met tout bout à bout, cela fait beaucoup ! En considérant chaque mesure isolément, on pourrait se dire que deux suspensions de séance suffisent et qu’il est exagéré d’en demander davantage. Non : je suis député depuis douze ans et, par expérience, je sais qu’il est utile de demander trois ou quatre suspensions sur certains textes. Cela fait partie de la vie du Parlement. Pourquoi vouloir ainsi nous aseptiser, nous ôter toute saveur, tout goût, nous imposer un ton monocorde ? Le débat existe. Nul ne s’en est déjà pris physiquement à ses collègues. Nous sommes de grands garçons et de grandes filles, et nous pouvons nous exprimer. Une suspension de séance n’est pas la fin du monde. C’est du talent du président ou de la présidente de séance que dépend ensuite le bon déroulement des travaux.

La Commission rejette ces amendements.

Elle en vient à l’amendement CL70 de M. David Habib.

M. David Habib. Je n’ai pas compris pourquoi cet amendement n’était pas présenté en même temps que les précédents...

M. Philippe Gosselin. Vous avez de la chance : ce n’est pas un amendement identique et vous pouvez donc le défendre ! (Sourires.)

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je précise, pour répondre à votre question, monsieur Habib, que les amendements de suppression d’un article ne sont jamais mis en discussion commune avec d’autres amendements. C’est la raison pour laquelle votre amendement a été dissocié des précédents.

M. David Habib. Il me faudrait encore deux ou trois mandats pour tout apprendre de la procédure…

En tout état de cause, j’ai le souvenir, lorsque j’exerçais la présidence de séance comme le fait désormais le rapporteur, d’avoir présidé les débats relatifs à la « loi Macron » et aux deux articles de la loi sur le travail. De vous à moi, c’est le groupe majoritaire qui bénéficie le plus des suspensions de séance pour faire adopter la loi. Je crains tout contingentement en la matière. Vous commettez une erreur en limitant le droit à la suspension de séance car il permet souvent, comme l’a indiqué Mme Pau-Langevin, de calmer les débats et de rationaliser les échanges.

S’agissant du rappel au Règlement, le rapporteur l’a dit : cet outil ne permet pas à lui seul d’empêcher l’Assemblée de fonctionner et son interdiction n’aurait pas évité l’affaire Benalla.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Nous ne l’interdisons pas !

M. David Habib. C’est vous-mêmes qui nous avez dit « Venez me chercher ». Nous l’avons fait. Je rappelle simplement le contexte dans lequel l’affaire s’est produite.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Nous n’avons rien dit…

M. David Habib. Ce n’est pas vous, donc c’est lui ! Quoi qu’il en soit, je vous dis quant à moi ceci : si une situation similaire se reproduisait, nous trouverions dans le Règlement d’autres possibilités d’intervenir et de faire valoir notre vision de la démocratie.

M. Philippe Gosselin. Oui, il faut un exutoire !

M. David Habib. Je regrette que nous aboutissions à cette situation où, après avoir parlé de loi de convenance et de circonstance, vous nous proposez une réforme de circonstance, précisément, sans doute parce que l’on vous a demandé, à l’Élysée ou ailleurs, de tirer les conséquences de la faillite de la majorité en juillet dernier.

M. Bruno Questel. Ce temps-là est fini !

M. David Habib. M. Questel dira ce qu’il veut ; il est en partie mandaté pour cela, mais il s’agissait bien d’une faillite et ce que vous nous proposez vous a été demandé !

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Quel est votre avis sur l’amendement, monsieur le rapporteur ?

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Même avis que pour les précédents.

M. Guillaume Vuilletet. Ce qui permettra à l’avenir de parler d’une affaire quelle qu’elle soit, monsieur Habib, c’est le fait que l’opposition aura le droit de poser vingt-deux questions contre huit seulement pour la majorité. Voilà l’équilibre global ! Il ne sera plus nécessaire de recourir à des artifices parfois utilisés, quoi qu’on en dise.

M. Philippe Gosselin. Chacun se concentre sur l’affaire Benalla mais je ne comptais même pas l’évoquer tout à l’heure.

M. Bruno Questel. C’est vous qui la citez constamment !

M. Philippe Gosselin. Au contraire, c’est vous qui l’avez évoquée.

M. Bruno Questel. Non, jamais !

M. Philippe Gosselin. Je n’ai pas donné de noms, mais peu importe ; je ne cherche aucune polémique. Le débat est serein, monsieur Questel ; il n’est nul besoin de le faire déraper. Laissons de côté l’affaire Benalla, si vous le voulez bien, car elle ne nous préoccupe pas aujourd’hui. Elle vous a ennuyé l’an dernier mais ce n’est pas le sujet. Le sujet est le suivant : depuis des années, hormis cette affaire ou éventuellement une autre, ni les rappels au Règlement ni les suspensions de séance ne posent problème. Les uns et les autres sont des exutoires, des outils de gestion des crises et des tensions légitimes dans le débat démocratique. À l’évidence, vous allez supprimer une boîte à outils complète permettant aux parlementaires – sans doute les oppositions davantage que les majorités, j’en conviens, mais la démocratie, c’est aussi le respect des droits de l’opposition – de travailler. Dès lors que le rappel au Règlement est très encadré et que chaque groupe n’aura droit qu’à deux suspensions de séance, les groupes se trouveront contraints et sous contrôle. Dans ces conditions, l’expression ne peut être libre.

Mme Cécile Untermaier. Nous n’avons pas intérêt à trop corseter les choses dans le Règlement. Comme nous l’avons fait à l’occasion de nombreux projets de loi examinés par cette commission, nous faisons au fond confiance à la présidence de séance pour organiser au mieux les débats, ce qu’elle fait très bien. Il me semble inutile d’ajouter des éléments de complexité à un Règlement déjà très complexe. C’est pourquoi l’alinéa 14 de l’article 13 pourrait être supprimé sans dommage.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte successivement l’amendement de coordination CL300 et l’amendement rédactionnel CL301 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CL31 de M. Michel Zumkeller.

Mme Maina Sage. Cet amendement, qui est une forme de pis-aller, vise à limiter la portée de l’article 13 en permettant à chaque groupe de faire un minimum de rappels au Règlement. Le texte proposé pourrait en effet conduire à la suppression de ce droit pour certains groupes puisqu’il serait désormais interdit de faire un rappel au Règlement sur un sujet qui a déjà donné lieu à un précédent rappel. Selon nous, il faut au minimum garantir à chaque groupe la possibilité de faire un rappel au Règlement.

Encore une fois, je précise que cet amendement est un pis-aller car globalement, je partage le point de vue des précédents intervenants sur cet article : le rappel au Règlement est un outil qui permet de désamorcer les tensions en cours de séance. Le bilan de son utilisation ne ferait sans doute apparaître aucun abus. Certes, une affaire exceptionnelle s’est produite l’an dernier, mais cet outil m’a semblé malgré tout nécessaire pour faire avancer nos positions. En l’absence d’autres outils à la disposition de l’opposition, il faut maintenir la faculté de faire un rappel au Règlement.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je pourrais accepter cet amendement mais, à mon sens, il ne ferait pas consensus. Au perchoir, la difficulté tient au fait que l’on ignore ce que l’orateur à qui la parole est donnée s’apprête à dire. Je comprends votre proposition, madame Sage, mais rien ne sert de dupliquer les rappels sur un même sujet.

M. David Habib. Les hésitations du rapporteur sont liées à sa volonté de rechercher la meilleure des solutions sur le plan intellectuel, et je lui en sais gré. Néanmoins, en cas d’incident, le président de séance ne pourra pas céder. Une fois que l’orateur d’un groupe se sera exprimé, qui peut imaginer un seul instant, si l’incident est manifeste et important, que le président empêche les autres groupes de faire part de leurs souhaits dans un autre rappel au Règlement ? Autant organiser le mécanisme. Vous nous demandez une semaine pour rédiger la meilleure proposition possible et je le comprends, mais ne refusez pas ce que nous propose Mme Sage car c’est, comme elle l’a dit, ce qui doit être accepté a minima. Quoi qu’il arrive, le président de séance ne pourra pas faire moins.

Mme Maina Sage. En réponse au rapporteur je ne vois pas, dans les conditions actuelles, comment le président de groupe peut lui aussi anticiper la teneur des rappels au Règlement ; le même raisonnement s’applique. A minima cette disposition permettrait à chaque groupe d’entendre l’argument et de respecter la règle si elle était adoptée.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. L’idée est intéressante mais elle présente des écueils. Je vous propose de retirer l’amendement pour que, d’ici à la séance, nous nous penchions ensemble sur le sujet à tête reposée afin de trouver la solution la plus opérante.

L’amendement est retiré.

La Commission examine, en présentation commune, les amendements CL128 et CL129 de Mme Sylvia Pinel.

M. Paul Molac. L’amendement CL128 vise à supprimer l’alinéa 12 afin d’assurer le droit de réunion entre parlementaires. L’amendement CL129 vise à supprimer l’alinéa 14 qui prévoit que les présidents de groupe ou leurs représentants ne peuvent demander que deux suspensions de séance.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Avis défavorable pour les raisons que j’ai déjà exposées.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle adopte l’article 13 modifié.

3.   Troisième réunion du mercredi 15 mai 2019 à 21 heures (après l’article 13 à article 32 de la proposition de résolution)

Lien vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.7633353_5cdc6090d487e.commission-des-lois--modification-du-reglement-de-l-assemblee-nationale-15-mai-2019

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, nous allons poursuivre l’examen de la proposition de résolution tendant à modifier le Règlement de l’Assemblée nationale.

Après l’article 13

La Commission examine, en discussion commune, l’amendement CL329 du rapporteur et l’amendement CL17 de M. Matthieu Orphelin.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. L’amendement CL329 fait écho à une annonce du président de l’Assemblée nationale, M. Richard Ferrand, qui a dit vouloir regrouper l’ensemble des votes le mardi après-midi, après la séance des questions au Gouvernement. Plusieurs présidents de groupe considérant que c’est une très bonne idée le président de l’Assemblée m’a demandé d’y réfléchir et de faire une proposition. Cet amendement supprime donc les verrous qui, dans le Règlement, s’opposaient à cette avancée, tout en préservant l’autorité de la Conférence des Présidents.

M. Matthieu Orphelin. L’amendement CL17 va dans le même sens que celui du rapporteur.

Lorsque nous avons voté la privatisation d’Aéroports de Paris (ADP), qui constituait l’un des 200 articles de la loi relative à la croissance et à la transformation des entreprises (PACTE), nos concitoyens n’ont pas compris qu’il y ait si peu de monde en séance. Par cet amendement, nous proposons que, sur un nombre restreint d’articles stratégiques, une fois par groupe et par session, la date et l’heure du vote soient annoncées à l’avance, ce qui permettrait que les députés puissent être présents en nombre.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je vous invite à retirer cet amendement au profit de l’amendement CL329.

M. Matthieu Orphelin. Il est vrai que les deux amendements vont dans le même sens, mais l’amendement CL329 concerne le vote sur l’ensemble des textes de loi, tandis que le mien concerne le vote sur des articles. Je le retire, mais j’y reviendrai peut-être en séance.

L’amendement CL17 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL329 à l’unanimité. L’article 13 bis est ainsi rédigé.

Elle en vient à l’examen de l’amendement CL127 de Mme Sylvia Pinel.

M. Paul Molac. Je crois que mon amendement est désormais satisfait et je vais donc le retirer. J’aimerais néanmoins dire un mot de l’amendement de M. Matthieu Orphelin, qui me semble avoir une certaine raison d’être. Il est vrai que les gens comprennent mal que l’on procède à des votes importants à quatre heures du matin, quand il n’y a plus que soixante-dix députés dans l’hémicycle – ce qui, du reste, n’est déjà pas si mal, compte tenu de la durée de nos débats. Médiatiquement parlant, il serait préférable que l’ensemble des députés prennent part aux scrutins. Cela aurait aussi le mérite de nous préserver de ce que j’appellerais les « effets de rideau », ces épisodes où les membres d’un groupe arrivent au dernier moment pour tenter d’emporter la décision.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Monsieur Orphelin, je vous propose de voir avec le rapporteur s’il est possible d’avancer sur cette question.

L’amendement est retiré.

Avant l’article 14

La Commission examine les amendements CL12 et CL13 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Tout à l’heure, le rapporteur et moi-même défendrons des amendements relatifs aux cadeaux et aux voyages susceptibles d’être offerts aux députés. Mes deux amendements CL12 et CL13 prévoient des sanctions, dans les cas où des députés ne respecteraient pas l’obligation d’informer le déontologue de ces présents.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Au-delà de mon désaccord sur le fond, ces amendements me semblent poser un problème rédactionnel. Avis défavorable.

Les amendements CL12 et CL13 sont retirés.

Article 14 (art. 80-1 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Définition du conflit d’intérêts

La Commission examine l’amendement CL264 de M. Erwan Balanant.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Par cet amendement, nous proposons de fixer à un mois le délai de réponse du déontologue, lorsqu’il est saisi par un député pour une question de conflit d’intérêts, supposé ou établi. En effet, il ne faudrait pas que la consultation du déontologue ait pour conséquence de ralentir l’activité parlementaire. Aujourd’hui, le déontologue n’est tenu par aucun délai explicite et il peut lui arriver de rendre des avis assez tardivement. Cela pose la question de sa charge de travail, qui est sans doute trop lourde, mais aussi de son rythme de travail, puisqu’il est actuellement à temps partiel.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Il me semble intéressant de rappeler quelques chiffres : entre juin 2017 et octobre 2018, la déontologue a reçu 1 467 sollicitations, soit 86 par mois en moyenne, émanant de 463 des 577 députés, avec un pic en début de législature. J’ai discuté avec la déontologue de cette question du délai de réponse. Elle m’a dit que sur les sujets vraiment urgents, notamment les risques de conflits d’intérêts, elle répond en moins d’un mois. C’est effectivement un problème de moyens qui explique la longueur de ces délais, et ce n’est pas une modification du Règlement qui réglera le problème. En fixant un délai, nous risquons seulement de compliquer la tâche de la déontologue. Trouvons plutôt le moyen d’ajuster ses ressources.

Nous suivrons la proposition qu’elle nous a faite de décaler de six mois le début du mandat du déontologue par rapport à celui de la législature, afin que ce soit un déontologue aguerri qui gère le pic d’activité de début de mandat. Nous préférons optimiser l’organisation de cette manière, plutôt qu’imposer un délai qui sera difficile à garantir. Je répète qu’à l’heure actuelle, les cas vraiment urgents, qui nécessitent une réaction rapide du député, sont toujours traités en moins d’un mois.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Je vais retirer mon amendement, mais je crois que nous devons effectivement prêter attention aux moyens mis à la disposition du déontologue, afin d’assurer la fluidité de son action.

L’amendement CL264 est retiré.

La Commission adopte l’article 14 sans modification.

Article 15 (art. 80-1-1 [nouveau] du Règlement de l’Assemblée nationale) : Prévention des conflits d’intérêts

La Commission adopte l’article 15 sans modification.

Après l’article 15

La Commission examine l’amendement CL333 du rapporteur.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Le projet du président Ferrand, avec ce texte, était de transposer dans notre Règlement la loi « Sapin II » et la loi pour la confiance dans la vie politique, sans refaire le débat qui a conduit au vote de ces lois, et en prenant appui sur le rapport de la déontologue. Ce rapport, qui a paru à la fin de l’année dernière, contenait un certain nombre de préconisations, qui ont été incluses dans la proposition de résolution. Sur cette proposition, la déontologue a de nouveau formulé un avis et fait de nouvelles préconisations, qui ont suscité des débats, auxquels j’ai pris part en tant que président de la délégation chargée des représentants d’intérêts et des groupes d’études.

Sur la question des dons, des avantages et des voyages il faut définir le bon niveau de norme. Par exemple, il serait absurde d’inscrire dans le Règlement que la valeur des cadeaux ne peut pas excéder 150 euros. Il est difficile de fixer des règles. On a aujourd’hui une obligation déclarative, mais peut-être ira-t-on un jour jusqu’à l’interdiction ? Si tel est le cas, il faudra déposer une nouvelle proposition de résolution.

Le président Ferrand et moi-même avons fait le choix de suivre la recommandation de la déontologue, notamment au sujet de la publicité des déclarations. Chacun sait qu’il s’agit d’un sujet sensible. Fallait-il aller au bout de la transparence et rendre publiques ces informations ? Le président l’a proposé et je l’ai traduit dans un amendement, dont l’adoption permettrait de consolider notre texte.

M. Matthieu Orphelin. J’ai déposé un amendement assez similaire à celui du rapporteur, l’amendement CL16, qui a été placé après l’article 17. Il en reprend les deux points essentiels : premièrement, l’obligation faite au député de déclarer au déontologue tout don, invitation à un événement sportif ou culturel ou avantage dont il a bénéficié et, deuxièmement, le principe de la publicité de ces dons. C’est donc bien volontiers, et en félicitant le rapporteur pour son travail, que je retirerai, le moment venu, mon amendement CL16.

Mme Cécile Untermaier. Je suis un peu surprise car je pensais que tout le monde refusait ce genre de cadeaux. Pouvez-vous, monsieur le rapporteur, nous donner une idée du nombre de cas de ce genre qui ont été soumis au déontologue ?

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je ne dispose pas de données chiffrées, mais l’obligation de publication que nous introduisons dans ce texte nous en fournira bientôt. L’amendement précise que « le Bureau définit les conditions dans lesquelles ces déclarations sont rendues publiques ». Cela signifie que le Bureau devra déterminer à quel moment, sous quelle forme et selon quelles modalités la publication devra être faite. Ce sont des questions difficiles, pour lesquelles il n’y a pas de réponse évidente.

La Commission adopte l’amendement. L’article 15 bis est ainsi rédigé.

Puis elle examine l’amendement CL11 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Par cet amendement, nous proposons que, chaque trimestre, les députés rendent publique la liste des rendez-vous qu’ils ont eus avec des représentants d’intérêts privés. Nous avons besoin d’échanger avec eux pour construire la loi, car cela vaut mieux que de le faire seul dans son bureau, mais il faut absolument éviter les dérives, qui ont été révélées par certaines affaires, et mettre fin aux fantasmes qui entourent les relations des députés avec les lobbies.

L’idée est de s’inspirer de la mesure qui a été votée récemment au Parlement européen, à quatre voix près, et d’obliger les députés à publier chaque trimestre la liste des lobbies qu’ils ont rencontrés, en précisant éventuellement les thèmes qui ont été abordés et le lien que ces lobbies peuvent avoir avec des textes de loi en discussion ou en préparation.

Durant le grand débat national, lorsqu’ils se sont exprimés au sujet de la vie démocratique, nos concitoyens ont demandé, entre autres choses, une meilleure régulation des relations entre les élus et les lobbies. Cet amendement peut y contribuer.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Vous posez une question qui est tout à fait d’actualité, puisque l’Assemblée nationale organise, aujourd’hui et demain, deux journées d’études consacrées au thème du lobbying. Je vous invite d’ailleurs à venir assister demain, en salle Colbert, aux tables rondes qui réuniront de nombreux universitaires.

La question que vous soulevez est importante, mais je suis défavorable à votre amendement, et je veux expliquer clairement pourquoi. À titre personnel, je rends publiques toutes mes rencontres avec des représentants d’intérêts, mais je crois que cela doit être une démarche individuelle. Qui dit obligation, dit sanction. Imaginons que le Bureau décide de sanctionner un député socialiste, parce qu’il estime qu’il n’a pas été totalement transparent sur ses rendez-vous : pour moi, ce serait un vrai problème démocratique et une forme de remise en cause de la liberté du député. Je serais mal à l’aise avec l’idée que l’instance pilotée par la majorité puisse sanctionner d’autres députés sur la base, par exemple, d’informations glanées sur Facebook. Il me semble qu’un tel mode d’action est trop frontal et remet en cause la liberté des députés.

Je suis tout à fait favorable à ce que la déclaration devienne une pratique politique, mais je ne suis pas du tout favorable à ce qu’elle devienne une obligation. En effet, je crois que l’on ne mesure pas l’impact qu’une telle mesure aurait sur la vie démocratique : avec des pouvoirs de contrôle aussi importants, le Bureau deviendrait en quelque sorte « l’œil de Moscou ». Or je ne pense pas qu’il doive se prononcer sur le rendez-vous que M. Schellenberger a eu lundi dernier avec tel représentant d’intérêts. Je suis favorable à cette pratique, mais défavorable à ce qu’elle devienne une obligation.

M. Raphaël Schellenberger. Je vous rassure : je n’ai eu aucun rendez-vous lundi dernier. En revanche, monsieur le rapporteur, j’ai bien noté que vous aviez pris le train à Strasbourg avec un chef d’entreprise de la région que je connais bien, et cela m’interpelle. (Sourires.) Trêve de plaisanterie. Ce qui est en jeu ici, c’est notre conception du système parlementaire et il me semble important que nous nous attardions un moment sur cette question. Au cours des dernières années, un mouvement en faveur de la transparence a pris de l’ampleur, ce qui n’est pas gênant, mais ce que l’on nous propose aujourd’hui, ce n’est plus de la transparence : c’est le basculement dans un autre système parlementaire.

Notre système parlementaire est l’héritier de la démocratie grecque et du droit romain, qui considèrent que l’intérêt général naît de la délibération, c’est-à-dire du temps que nous passons à échanger nos points de vue en public, de vive voix, dans l’hémicycle. Or les propositions qui nous sont faites sont de nature à nous faire passer insensiblement dans un système à l’anglo-saxonne, où l’intérêt général n’est pas construit de la même façon, puisqu’il naît de la rencontre des intérêts particuliers. Cette discussion peut paraître un peu stratosphérique et éloignée de notre débat sur les déjeuners des députés, mais il me semble extrêmement important de réfléchir à la manière dont on construit l’intérêt général.

Je ne suis pas contre la transparence, mais prenons garde, car je n’aimerais pas que notre système devienne un système à l’anglo-saxonne. Je n’aimerais pas que l’on construise l’intérêt général sur la base de la rencontre des intérêts particuliers. Je suis attaché à notre système latin et continental, dans lequel on considère que l’intérêt général naît d’abord de nos discussions.

Mme Cécile Untermaier. Je souhaite remercier le président Ferrand et le rapporteur d’avoir mis l’accent sur la déontologie et les lobbies et d’introduire ces notions dans notre Règlement.

S’agissant des lobbies, mon ami Christophe Sirugue avait fait adopter le principe de l’inscription annuelle sur un registre. C’était une bonne chose, mais cette mesure ne paraît plus suffisante. Il faut pouvoir repérer les textes sur lesquels les lobbies sont intervenus et ont pesé. Or, le Règlement ne le permet pas à l’heure actuelle.

L’Assemblée nationale doit faire ce travail de réforme, mais les députés doivent également se forger une culture déontologique et s’habituer à dire, en toute transparence, que telle proposition leur a été soufflée par un lobby. Depuis 2012, j’ai pris l’habitude de dire d’où me viennent les amendements que je dépose, lorsque ce n’est pas moi qui les ai écrits. Dans les lois relatives à la justice, par exemple, il m’est arrivé de défendre des amendements qui m’avaient été suggérés par le Conseil national des barreaux. Lorsque tel est le cas, je le dis en toute transparence et je pense que cela devrait devenir une habitude pour tous. Parce que ce point me paraît crucial, nous déposerons des amendements sur ce sujet en vue de la séance.

M. Matthieu Orphelin. Je me félicite que nous ayons eu ce débat et je voudrais revenir rapidement sur quelques points. Premièrement, il y a aujourd’hui, chez nos concitoyens, une vraie défiance vis-à-vis des politiques et la relation aux lobbies en est une composante importante. Nos concitoyens ont le sentiment d’être manipulés par les lobbies et il faut tenir compte de ce sentiment, qu’il soit justifié ou non.

S’agissant, deuxièmement, de l’opportunité de créer une obligation de publication, je suis de l’avis du rapporteur. Le Parlement européen a fait le choix de l’obligation, mais nous pouvons en faire un autre. Quelques dizaines de députés pratiquent déjà la transparence de manière volontaire et leur nombre pourrait grandir.

La loi Sapin II a introduit quelques obligations relatives aux lobbies, mais elles sont très limitées et ne permettent pas de savoir, par exemple, sur quel texte de loi ils sont intervenus. Certains lobbies ont par ailleurs des pratiques inadmissibles, comme le fichage de personnalités, que le travail des journalistes a permis de révéler la semaine dernière et dont certains d’entre vous ont été les victimes. Il faut combattre ces pratiques.

Enfin, la question de l’origine des amendements est effectivement une question essentielle, sur laquelle nous pourrions proposer des avancées. Le débat étant désormais ouvert sur toutes ces questions, je retire mon amendement.

M. Bruno Questel. C’est une très bonne chose !

L’amendement est retiré.

Article 16 (art. 80-2 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Statut du déontologue

La Commission examine l’amendement CL334 du rapporteur.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. J’ai déjà évoqué cet amendement, qui vise à décorréler la durée du mandat du déontologue de celui de la législature.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 16 modifié.

Article 17 (art. 80-3 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Missions du déontologue

La Commission examine l’amendement CL335 du rapporteur.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Cet amendement a pour objet de préciser qu’il revient au Bureau de définir les conditions dans lesquelles les avis du déontologue sont rendus publics. Un grand nombre de points restent à préciser. Quel type d’avis le Bureau demandera-t-il à la déontologue ? Dans quel but ? S’agira-t-il d’avis individuels ? Quand la publication devra-t-elle avoir lieu ? Il faut que le Bureau assume son rôle, en précisant les conditions de cette publication.

Mme Cécile Untermaier. Je me demande si c’est bien au Bureau de définir tout cela. Ne serait-ce pas plutôt le rôle d’une instance autonome ? Je pense en tout cas que la journée d’études de demain donnera des éléments de réponse.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Le principe de l’autodécision, c’est-à-dire le fait que nous prenions des décisions qui nous concernent directement, suscite des débats. Des propositions intéressantes ont été faites, comme celle de demander l’avis d’une instance extérieure. Toutes les idées sont les bienvenues et il sera effectivement question de tout cela demain.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 17 modifié.

Après l’article 17

La Commission est saisie de l’amendement CL16 de M. Matthieu Orphelin.

M. Matthieu Orphelin. Comme je l’ai indiqué tout à l’heure, je retire cet amendement.

L’amendement CL16 est retiré.

Article 18 (art. 80-3-1 [nouveau] du Règlement de l’Assemblée nationale) : Modalités de saisine et d’information du déontologue

La Commission est saisie de l’amendement CL339 du rapporteur.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Cet amendement vise à transférer à l’article 18 une disposition relative au déontologue, qui figurait à l’article 16.

La Commission adopte l’amendement CL339.

L’amendement CL254 de M. Erwan Balanant est retiré.

La Commission adopte les amendements rédactionnels CL302, CL303 et CL304 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 18 modifié.

Article 19 (art. 80-4 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Pouvoir d’injonction du déontologue

La Commission adopte l’amendement CL305 du rapporteur, qui corrige une erreur matérielle.

Puis elle adopte l’article 19 modifié.

Article 20 (art. 80-5 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Respect du code de conduite par les représentants d’intérêts

La Commission adopte l’article 20 sans modification.

Après l’article 20

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL340 du rapporteur, CL10 et CL66 de M. Matthieu Orphelin, ainsi que les amendements identiques CL47 de M. Matthieu Orphelin et CL164 de Mme Cécile Untermaier.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. De très nombreux amendements ont été déposés sur la question du harcèlement, qui ont eu le mérite de nourrir notre réflexion. Il nous a semblé que certains d’entre eux faisaient des propositions trop précises sur le type de dispositif à mettre en œuvre – je songe, par exemple, à l’idée de créer une « hotline ».

Nous avons fait le choix, en accord avec le président Ferrand, d’affirmer que l’Assemblée nationale, en tant qu’institution, a une responsabilité en la matière. Nous avons donc choisi la rédaction suivante : « Le Bureau définit les conditions de mise en place d’un dispositif de prévention et d’accompagnement, en matière de lutte contre toutes les formes de harcèlement et de discrimination. » Ce faisant, nous avons un peu élargi le sujet, tout en réaffirmant la responsabilité du Bureau.

En écartant les rédactions qui nous ont été proposées, nous n’avons pas voulu nous montrer discourtois, mais il nous a paru important de ne pas inscrire dans le Règlement des dispositions qui sont appelées à évoluer. Par cette rédaction, nous affirmons clairement l’obligation de créer un dispositif de prévention et d’accompagnement contre toutes les formes de harcèlement. Nous avons choisi une formulation large, qui englobe notamment le harcèlement sexuel et moral. C’est déjà, en soi, une étape importante, puisque ces questions ne figuraient pas dans le Règlement. Nos débats ont davantage porté, vous l’avez compris, sur la forme que sur le fond. Toutes les organisations doivent prendre ce sujet à bras-le-corps et la nôtre n’y échappe pas.

Je répète que l’amendement CL340 n’entend pas écraser les autres propositions qui ont été faites, puisqu’il s’en est nourri. Je vous invite donc à retirer vos amendements au profit de celui-ci.

M. Matthieu Orphelin. Nous avons effectivement effectué un travail collectif très important sur ce sujet et je suis heureux qu’il aboutisse aujourd’hui. Je tiens à saluer le collectif « Chair collaboratrice », qui a révélé l’ampleur des violences sexistes et sexuelles à l’Assemblée nationale. Elle a lancé une enquête, à laquelle 125 femmes ont répondu : une collaboratrice sur deux affirme avoir été victime de blagues sexistes, une sur trois d’injures sexistes ou d’attitudes insistantes et gênantes, et une sur cinq d’une agression sexuelle. Il faut que nous apportions une réponse politique forte, car ce type de comportement ne peut plus être toléré à l’Assemblée nationale.

Tel est l’objet de mes amendements CL10 et CL66, ainsi que de l’amendement CL47. Ils sont le fruit d’un travail mené par des parlementaires des huit groupes politiques et de députés non-inscrits. Je les retire bien volontiers, au profit de l’amendement du rapporteur, en félicitant tous ceux qui y ont travaillé.

Les amendements CL10 et CL66 sont retirés.

Mme Cécile Untermaier. L’amendement CL164 reprend une proposition formulée par le collectif « Chair collaboratrice ». D’autres institutions, comme le Parlement européen ou le Sénat, ont déjà créé des organes de lutte contre le harcèlement. Nous devons, à notre tour, garantir l’exemplarité de notre institution en instaurant le système de lutte contre le harcèlement le plus efficace possible. Nous retirons notre amendement, au profit de celui du rapporteur.

Les amendements CL47 et CL164 sont retirés.

La Commission adopte l’amendement CL340. L’article 20 bis est ainsi rédigé.

Article 21 (art. 86 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Allongement du délai entre la mise en ligne du texte adopté par la commission et son examen en séance

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL306 du rapporteur.

Elle examine ensuite l’amendement CL95 de M. Raphaël Schellenberger.

M. Raphaël Schellenberger. Nous avons déjà eu des échanges sur le temps législatif, le rythme et la vitesse de nos travaux. Cet amendement vise à porter de dix à quatorze le nombre de jours séparant l’examen d’un texte en commission de son examen en séance publique. Ce délai de deux semaines nous laisserait le temps de retravailler nos amendements en vue de la séance, ce qui est souvent nécessaire.

Depuis le début de l’examen de ce texte, j’ai entendu à deux reprises, au moins, qu’il allait falloir créer de nouveaux groupes de travail pour réfléchir à certains points essentiels, alors que cela fait dix-huit mois que nous réfléchissons à l’évolution de notre institution.

M. Bruno Questel. Nous n’avons pas dit cela !

M. Raphaël Schellenberger. Cela confirme que le débat en commission peut susciter de nouvelles réflexions. Il paraît donc important que nous nous laissions du temps entre l’examen d’un texte en commission et en séance publique.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Monsieur Schellenberger, nous ne créons pas des groupes de travail pour ouvrir de toutes nouvelles pistes de réflexion. Reconnaissez au moins que nous avons procédé avec une certaine logique !

M. Raphaël Schellenberger. Il n’y avait aucun jugement de valeur de ma part !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Quels sont les sujets sur lesquels nous voulons approfondir notre réflexion ? Le temps parlementaire, les notions de groupe « minoritaire » et d’opposition, et la thématique de la parité dans le bureau des commissions. Ce sont les trois sujets un peu sensibles que nous voulons creuser d’ici l’examen du texte en séance publique. Je vous ai également indiqué que le président Richard Ferrand a décidé de lancer des travaux communs à l’Assemblée nationale et au Sénat en vue de rédiger une loi organique encadrant le droit d’amendement du Gouvernement. Je ne peux pas vous laisser dire que nous multiplions les groupes de travail tous azimuts : notre projet est très ciblé.

J’en viens au fond de votre amendement. Nous avons décidé d’allonger le délai entre l’examen d’un texte en commission et son examen en séance de sept à dix jours et vous proposez de l’étendre à quatorze jours. Le délai que nous proposons sera déjà une réelle avancée, si nous nous y tenons. Nous verrons, à l’usage, s’il convient de l’allonger encore. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL94 de M. Raphaël Schellenberger.

M. Raphaël Schellenberger. Cet amendement a pour objet de supprimer la dérogation actuellement octroyée au Gouvernement, s’agissant du délai de dépôt des amendements.

Depuis le début de ce quinquennat, un phénomène assez insupportable a tendance à se généraliser : le Gouvernement dépose au dernier moment des amendements qui ont un impact majeur sur le texte en discussion. Que le Gouvernement bénéficie d’une certaine souplesse, pourquoi pas ? Mais cela ne devrait concerner que des amendements techniques ou de détail. Or, depuis deux ans, il n’est pas rare que le Gouvernement dépose, en cours de discussion, des amendements qui modifient très profondément l’équilibre d’un texte. L’amendement CL94 vise à mettre fin à ce genre de pratique.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je viens de vous indiquer qu’un groupe de travail s’est constitué avec le Sénat pour mieux encadrer le droit d’amendement du Gouvernement. Je vous invite donc à retirer votre amendement, d’autant plus qu’il est anticonstitutionnel.

M. Philippe Gosselin. Vous avez raison, Monsieur le rapporteur, de noter que cet amendement est peut-être anticonstitutionnel. Au passage, cela prouve qu’il aurait été préférable de réviser la Constitution avant de modifier le Règlement de l’Assemblée nationale, qui n’est qu’un texte d’application. Il y a effectivement un risque d’inconstitutionnalité, même si chacun sait que le Conseil constitutionnel peut parfois nous surprendre… Il n’en reste pas moins que ce mode de fonctionnement est assez fâcheux. On se rappelle, par exemple, la manière dont la décision de modifier l’ordonnance sur la justice des mineurs a été annoncée. Et les exemples ne manquent pas d’amendements gouvernementaux déposés au dernier moment qui ont totalement modifié l’esprit d’un texte. Le problème soulevé par mon collègue est sérieux. Son amendement est un amendement d’appel et nous attendons de voir ce qu’il sortira des groupes de travail que vous annoncez.

M. Raphaël Schellenberger. Je vais retirer mon amendement, mais cette discussion, comme celle que nous avons eue en début de séance, montre bien que nos débats sont un moyen d’améliorer la loi. Réduire le temps de la discussion n’est donc pas une bonne chose pour la qualité de la loi.

Je retire cet amendement, mais je ne m’interdirai pas de le redéposer en séance, en fonction des conclusions des groupes de travail.

L’amendement CL94 est retiré.

M. Christophe Euzet. Je veux vous rassurer, cher collègue : il n’est pas question de réduire le temps de discussion en commission, au contraire ! L’objectif de la réforme est de raccourcir les délais d’examen en séance publique et de prendre le temps de la discussion en amont. En réalité, nous allons exactement dans le même sens.

La Commission examine l’amendement CL166 de Mme Cécile Untermaier.

Mme Cécile Untermaier. Je m’étonne un peu que cet amendement ait été placé ici, mais je vais tout de même le défendre. Il concerne la fabrique de la loi et je dois vous dire qu’il est assez complexe.

Vous savez qu’il existe, depuis une dizaine d’années, un co-rapporteur d’application. Il a pour mission de vérifier l’application de la loi dans les six mois qui suivent sa promulgation. En 2014, nous avons fait en sorte que le rapporteur d’application puisse être désigné dès le début de l’examen du texte, c’est-à-dire en même temps que le rapporteur.

L’article 36 de la proposition de résolution rend désormais obligatoire la nomination d’un co-rapporteur d’application, alors que ce n’était jusqu’ici qu’une possibilité. Dans le même esprit, nous proposons que le co-rapporteur n’ait plus seulement la possibilité, mais bel et bien l’obligation d’examiner l’étude d’impact qui accompagne tout projet de loi. Nous disposerons ainsi d’un travail en amont, indépendant du travail du rapporteur.

L’étude d’impact est actuellement disponible sur le site de l’Assemblée nationale et les citoyens ont la possibilité d’émettre un avis sur elle. Nous proposons que le co-rapporteur d’application tienne également compte des contributions citoyennes qui peuvent d’ores et déjà être déposées sur le site de l’Assemblée nationale. Ce dispositif me semble intéressant, car le co-rapporteur d’application travaillerait à la fois en amont et en aval de l’examen du texte.

Le co-rapporteur travaillerait également avec un député de la commission des Affaires européennes, appartenant comme lui à l’opposition, pour déterminer ce qui, dans l’étude d’impact, est conforme au droit européen actuel ou à venir.

Ces dispositions sont déjà permises par le Règlement de l’Assemblée nationale, mais il s’agit, par cet amendement, de leur donner tout leur sens, au service de la fabrique de la loi.

Mon exposé a pu vous paraître un peu complexe, mais je vous propose que nous travaillions ensemble sur cette disposition, car elle va vraiment dans le sens de votre réforme. Dans la mesure où vous rendez obligatoire la désignation d’un co-rapporteur d’application, il me semble indispensable de préciser que son travail portera essentiellement sur l’étude d’impact, en lien avec un député de la commission des Affaires européennes.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Si nous voulons retravailler votre amendement d’ici la séance, il me semble nécessaire de réfléchir au rôle qu’aurait ce co-rapporteur, dans la mesure où plusieurs des membres de notre commission sont déjà membres de la commission des Affaires européennes et ont déjà vocation à vérifier l’adéquation de nos lois avec le droit européen. Pour l’heure, mon avis est défavorable et je ne sais pas si nous aurons le temps, dans la semaine qui vient, de préciser les choses. Il me semble que cette question aurait toute sa place dans une réflexion sur le rôle des commissions, en tout cas il faudrait y associer la présidente de la commission des Affaires européennes, Mme Sabine Thillaye.

Mme Cécile Untermaier. Il serait dommage que vous n’alliez pas au bout de votre logique. Cela fait très longtemps que nous disons que les études d’impact présentées par le Gouvernement sont insuffisantes. Il faut que le Gouvernement nous fournisse une étude d’impact qui prenne en compte tous les items qui sont déjà consignés dans le Règlement de l’Assemblée nationale, notamment celui qui concerne l’Europe, et dont on ne tient jamais compte. Il importe de vérifier l’adéquation entre le droit européen actuel, celui à venir, et les textes dont nous allons débattre. C’est une exigence, un gage de qualité de la fabrication de la loi.

Je retire mon amendement, sous réserve que l’on poursuive la réflexion sur cette question.

L’amendement CL166 est retiré.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je propose que vous parliez de tout cela avec Mme Thillaye. Compte tenu de la complexité du sujet, je doute que l’on trouve une solution dans la semaine, mais je suis prêt à échanger avec vous sur cette question.

La Commission adopte l’article 21 modifié.

Article 22 (art. 87 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Conditions d’exercice de la saisine pour avis

La Commission examine l’amendement CL152 de Mme Danièle Obono.

Mme Danièle Obono. Cet amendement vise à supprimer l’article 22. En effet, nous nous opposons à l’allégement de la procédure de saisine pour avis, alors même qu’elle permet aux commissions compétentes d’éclairer le choix des députés et de garantir le principe de clarté et de sincérité des débats parlementaires, notamment sur des textes concernant des domaines de compétences transversaux ou sur des sujets complexes.

L’article 22 prévoit la possibilité, pour le rapporteur de la commission saisie pour avis, de présenter oralement l’avis de sa commission devant la commission saisie en fond. Il supprime le dernier alinéa de l’article 87, qui dispose que « les avis sont déposés, imprimés et distribués » et que la commission qui a décidé de donner son avis peut « toujours le donner verbalement au jour fixé pour la discussion du texte ».

La saisine pour avis relève de l’initiative des commissions permanentes : elles expriment, à travers les amendements qu’elles déposent, le vote collectif des députés qui les composent. Sur des sujets transversaux, il est utile de bénéficier d’un panel de points de vue variés. Si votre article est adopté, les députés qui n’auront pas pu prendre part aux réunions de la commission saisie au fond ignoreront la nature des amendements déposés. Votre projet vise seulement à limiter le temps du débat pour accélérer le rythme du travail parlementaire, ce qui restreint la capacité d’expression des députés. C’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de cet article.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. J’ai fait le point avec l’ensemble des présidents de commission au sujet des saisines pour avis. Ils ne s’opposent pas aux changements proposés qui procèdent d’un choix rationnel. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 22 sans modification.

Après l’article 22

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL88 de M. David Habib et CL82 de Mme Cécile Untermaier.

Mme Cécile Untermaier. Mon amendement CL82 porte encore sur un sujet aride : l’étude d’impact.

Dans le cadre des travaux menés sous l’égide de Claude Bartolone, nous avions mis en avant la nécessité de décorréler l’étude d’impact du projet de loi. Il nous semble essentiel de créer une nouvelle phase du débat entre le dépôt du projet de loi et son examen en commission afin d’étudier ce document censé fonder les décisions du Gouvernement, auquel aucune étape du processus législatif n’est aujourd’hui consacrée. Chaque groupe disposerait d’un temps de parole pour exprimer sa position sur la qualité de l’étude d’impact et pourrait vérifier, comme le précise le Règlement, qu’elle expose avec précision l’articulation avec le droit européen, les charges qui découlent du texte pour les administrations et bien d’autres éléments. Cela permettrait d’avancer dans la discussion du projet de loi lui-même.

Le rapporteur d’application aurait désormais l’obligation de travailler sur l’étude d’impact et de faire part des résultats de son analyse.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. À mon sens, ces débats, fondamentaux, sur l’étude d’impact doivent avoir lieu en commission et non en séance publique comme votre amendement le propose. À la commission des Affaires étrangères, j’ai pu voir comment la présidente avait réussi, en bataillant, à obtenir un nouveau cahier des charges.

De manière générale, il ne faut pas surréglementer la façon dont les commissions travaillent. Nous nous demandons jusqu’où va le domaine de la loi et nous devons nous demander de la même manière jusqu’où va le domaine du Règlement. Je suis partisan d’une grande liberté pour les commissions et pour leurs présidents et présidentes qui doivent pouvoir exprimer leur talent.

Mme Cécile Untermaier. Je ne suis pas favorable non plus à la surréglementation et je fais toute confiance aux présidents et présidentes de commission. Mais depuis des années, nous constatons que les études d’impact sont insuffisantes, quels que soient les gouvernements qui les présentent. Cette piètre qualité nuit à la réflexion que nous pouvons avoir sur le texte lui-même et sur sa pertinence. Nous disons que nous traitons de trop de lois mais c’est souvent parce que nous ne pouvons en mesurer le bien-fondé. Nous sommes dans notre rôle en exigeant du Gouvernement qu’il nous transmette les éléments nécessaires pour apprécier l’impact d’une loi. L’examen approfondi de ces documents n’a pas à dépendre du bon vouloir des présidents de commission. Ce doit être une étape préalable avant l’examen de tout projet de loi.

M. Philippe Gosselin. Les uns et les autres, nous avons tous constaté, quels que soient les gouvernements, l’indigence des études d’impact qui se contentent d’aligner deux ou trois banalités assorties de quelques chiffres, éléments qui orientent la réflexion et qui lui nuisent.

Au-delà du temps que nous pourrions consacrer à les analyser plus en profondeur, se pose la question de la capacité du Parlement à mener une contre-expertise. Pourquoi ne pourrait-il pas consulter des institutions comme la Cour des comptes ou l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) ou même avoir recours à des cabinets extérieurs ?

Si nous ne pouvons achever ce chantier avec la réforme en cours du Règlement, il faudra le poursuivre. On ne peut dignement légiférer avec des éléments aussi insuffisants que ceux qui figurent trop souvent dans les études d’impact et je ne parle pas seulement de la période actuelle.

M. André Chassaigne. La mauvaise qualité des études d’impact est de notoriété publique. Les conseillers d’État soulignent volontiers qu’elles sont très insuffisantes. Elles reposent souvent sur un travail superficiel qui ne tire pas toutes les conséquences de la mise en œuvre des dispositions proposées dans le projet de loi au point que certaines lois ne peuvent être appliquées, faute d’avoir fait l’objet d’une étude d’impact suffisamment approfondie.

Cela vient aussi de l’accélération du rythme législatif. Les ministres se montrent impatients et les projets de loi arrivent trop rapidement en discussion.

Un autre problème se pose : la multiplication d’amendements déposés en cours de débat par le Gouvernement. Par définition, ils ne font pas l’objet d’études d’impact alors que certains introduisent des changements fondamentaux. Nous l’avons vu lors de la réforme ferroviaire.

M. David Habib. Comme vous le savez, je suis le seul de mon groupe à n’avoir pas voté le texte qui a mis fin à la recherche ainsi qu’à l’exploitation des hydrocarbures. Son étude d’impact prévoyait comme conséquence moins de 300 suppressions d’emploi. Or les salariés qui travaillent dans l’industrie pétrochimique sont au nombre de 10 000 sur le seul bassin de Lacq, dans ma circonscription, et de 20 000 dans l’ensemble du Béarn. Le préfet de l’époque lui-même avait considéré que cette étude d’impact était une honte pour notre territoire. Lorsque j’avais évoqué ces enjeux avec les ministres concernés, Nicolas Hulot le premier a reconnu qu’une faute avait été commise. Et il m’avait dit – il venait juste d’arriver aux responsabilités – qu’il fallait changer ces pratiques. J’ai eu l’occasion ensuite de rencontrer la personne qui a rédigé l’étude d’impact : elle a reconnu qu’elle avait oublié l’existence du bassin de Lacq.

Notre amendement CL88 vise à créer un temps de débat afin que nous puissions tous partager les informations de façon objective avant d’examiner le texte de loi. Ce n’est pas alourdir la procédure parlementaire que de vouloir éviter que soient commises des erreurs manifestes aux conséquences locales ou nationales.

Si vous êtes vraiment animés du désir de parvenir à une convergence, vous pourriez accepter cet amendement.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. En tant que présidente de cette commission, j’ai envie de vous dire : « Chiche ! ». Chaque commission est libre de ménager un tel temps de débat. Nous pourrions très bien décider lors des réunions du bureau quels sont les textes dont il serait utile d’étudier au préalable l’étude d’impact. Nous avons bien vu que les pratiques de la commission des Lois pouvaient être pertinentes. Tentons ! Rien ne sert de tout détailler dans notre Règlement.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je suis défavorable aux deux amendements : au CL88, parce qu’il impose à la commission d’organiser un débat « dans les plus brefs délais » ; au CL82, parce qu’il prévoit un tel débat en séance publique. Je le répète, nous devons laisser la liberté aux commissions d’organiser ces débats.

M. David Habib. Monsieur le rapporteur, nous sommes tout prêts à accepter des sous-amendements. M. Chassaigne évoquait la possibilité que la Conférence des Présidents choisisse les textes donnant lieu à un examen de l’étude d’impact.

M. Bruno Questel. Je comprends vos objectifs mais au niveau pratique, je ne vois pas en quoi examiner l’étude d’impact avant le projet de loi nous permettrait de déceler des erreurs comme celles qu’a soulignées notre collègue David Habib.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle examine ensuite, en discussion commune, les amendements CL97 de M. Raphaël Schellenberger, CL153 de Mme Danièle Obono et CL154 de M. Ugo Bernalicis.

M. Raphaël Schellenberger. À travers le projet de réforme constitutionnelle et cette proposition de résolution se fait jour la volonté de réaffirmer l’importance des articles 40 et 41 qui portent sur la non-recevabilité des amendements ayant un impact sur les ressources publiques ou relevant du domaine réglementaire. Nous n’avons pas d’opposition de principe à ces articles. En revanche, il nous paraît nécessaire de réfléchir à leur application.

Aujourd’hui, l’application de l’article 40 est le fait du président de la commission des Finances qui seul, avec les administrateurs, met en place une jurisprudence. Nous avons vu que sur certains sujets, elle se distinguait de celle du Sénat, ce qui en soi n’est pas choquant mais qui alimente l’incompréhension. Une forme de contestation de l’irrecevabilité financière de certains de nos amendements est apparue au fil de l’examen des textes.

Dans cet amendement, dont la rédaction est un peu lourde, j’en ai bien conscience, nous proposons de créer une commission composée de membres de la commission des Finances nommés en respectant la composition politique de notre Assemblée qui apprécierait l’irrecevabilité. Une fois la jurisprudence établie, son fonctionnement deviendrait plus routinier et donc plus rapide. J’imagine qu’aujourd’hui cela ne prend pas énormément de temps au président de la commission des Finances de se prononcer sur la recevabilité de certains amendements.

Mme Danièle Obono. Par l’amendement CL153, nous proposons de créer une procédure contradictoire portant sur les modifications ou irrecevabilités prononcées sur les amendements. À plusieurs reprises, il nous est arrivé ne pas comprendre les raisons pour lesquelles tel ou tel amendement avait été déclaré irrecevable. La possibilité d’avoir un recours existe dans de très nombreuses administrations locales et sociales. Pouvoir échanger sur les choix d’irrecevabilité nous permettrait d’améliorer le travail législatif et faciliterait le travail des collaborateurs.

Je rappelle qu’en 2014, un certain François de Rugy avait déposé un amendement similaire…

Quant à l’amendement CL154, il tend à créer une commission d’appel qui assurerait une voie de recours contre des décisions de modification ou d’irrecevabilité.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Il faudrait intégrer dans nos réflexions sur l’irrecevabilité l’article 45 qui dispose que tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis.

Le Conseil constitutionnel a validé avec force la façon dont nous gérons ces irrecevabilités. Il a clairement établi que la méthode que nous suivons ne pose aucun problème constitutionnel et qu’elle est respectueuse des droits de l’opposition.

Sur l’irrecevabilité au titre de l’article 40, j’ai fait le point avec Éric Woerth qui m’a précisé que le filtrage constituait une charge de travail importante. Aucun doute ne saurait être émis quant à la procédure qu’il suit et aux résultats qu’il obtient.

Mon avis est défavorable sur ces amendements. La collégialité et le recours amendement par amendement sont des idées séduisantes mais elles ne sont pas opérantes.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. J’ajouterai que depuis juin 2018, la commission des Lois adresse des notifications individuelles aux députés dont des amendements ont été déclarés irrecevables pour leur en expliquer les raisons. Nous avons essayé de répondre à vos demandes, madame Obono, puisque vous aviez à plusieurs reprises formulé des réclamations.

M. André Chassaigne. Même si le Conseil constitutionnel a validé cette méthode, rien n’empêche de l’améliorer d’autant que j’ai la preuve qu’elle n’est pas si efficace que cela. J’ai un exemple très précis : les mêmes amendements en loi de finances ont été déclarés recevables une année et irrecevables l’année suivante. Je peux vous les fournir.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Bien volontiers.

M. André Chassaigne. J’ai déposé un amendement à l’article 24 qui ne va pas jusqu’à proposer une commission pour statuer sur l’irrecevabilité mais qui prévoit que le président de la commission puisse être assisté d’un député de l’opposition et d’un député de la majorité qui donnent leur point de vue sur l’irrecevabilité afin de garantir le pluralisme.

Mme Danièle Obono. Madame la présidente, les notifications que vous évoquez ne précisent nullement les motifs pour lesquels tel ou tel amendement a été déclaré irrecevable. L’appréciation de la recevabilité d’un amendement repose sur un choix politique. Il faut prendre en compte le fait qu’il ne s’agit pas d’une application neutre d’un article de la Constitution. Nous avons pu le voir dernièrement.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Ce n’est pas un choix politique. M. Woerth appartient à un groupe de l’opposition et quand il statue sur la recevabilité en tant que président de la commission des Finances, il ne prête pas attention au fait qu’un amendement a été déposé par des membres de La France insoumise ou un autre groupe pour prendre sa décision.

Je n’ai jamais entendu quiconque se plaindre de n’avoir pas reçu de réponses à ses questions. Le dialogue est toujours possible. Ces méthodes fonctionnent bien, elles ont été validées. Il n’y a aucune volonté de favoriser tel ou tel groupe.

Je maintiens mon avis défavorable et je répète qu’il ne faut surtout pas politiser ce sujet, qui est de nature technique : il s’agit uniquement de se prononcer sur la conformité à la Constitution.

La commission rejette successivement les amendements.

Article 23 (art. 91 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Révision de l’organisation de la discussion consacrée aux orateurs institutionnels, aux orateurs des groupes et aux motions de procédure

La Commission est saisie des amendements identiques CL155 de Mme Mathilde Panot et CL229 de M. Stéphane Peu.

Mme Danièle Obono. Nous nous opposons à cet article qui vise à réduire les prises de parole en séance publique et les défenses de motion : suppression du temps de parole des rapporteurs pour avis, limitation à dix minutes, sauf décision contraire de la Conférence des Présidents, de l’intervention du rapporteur de la commission saisie au fond, limitation à quinze minutes de la défense d’une motion de rejet préalable, suppression de la possibilité de défendre une motion de renvoi en commission…

Tout cela constitue une limitation inacceptable du travail parlementaire. Ces mesures conduiraient à une restriction radicale du temps d’expression des députés, bref à une remise en cause du fondement même de notre Assemblée qui est d’être un lieu de débat et non pas une chambre d’enregistrement.

M. André Chassaigne. Avec cet article 23, vous y allez vraiment avec la grosse cisaille de chantier !

Pourquoi supprimer le temps de parole alloué au rapporteur pour avis ? Je considère que le regard et l’analyse d’un rapporteur d’une autre commission que celle qui est saisie au fond présente un grand intérêt.

Pourquoi limiter à dix minutes l’intervention du rapporteur de la commission saisie au fond ? Certains textes de loi exigeraient bien plus.

Pourquoi limiter à quinze minutes la défense d’une motion de rejet préalable ? Il n’y a pas si longtemps, quand j’ai été élu député en 2002, c’était une heure trente qui nous était impartie. Certes, il fallait les tenir, mais de là à nous laisser six fois moins de temps pour décortiquer un texte !

Pourquoi supprimer la motion de renvoi en commission ? Avec l’expérience d’ancien que j’ai, je peux vous fournir des exemples de textes renvoyés en commission. Ils sont rares mais ils existent. Citons notamment une motion que j’avais défendue sur le projet de loi relatif aux organismes génétiquement modifiés (OGM). Adoptée à une voix près, elle avait donné lieu à un réexamen épique en commission.

Emparons-nous donc des cisailles de chantier pour supprimer l’article 23 !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Lorsque la commission saisie au fond aura achevé l’examen d’un texte, c’est son rapporteur qui le défendra en séance publique. Je peux comprendre que certains soient frustrés à l’idée de ne pouvoir suivre dans l’hémicycle les travaux de la commission saisie pour avis, mais les présidents de commission avec qui j’ai échangé ont accepté cet équilibre, qui est dans la logique de la proposition de résolution.

Les dix minutes de temps de parole pour le rapporteur de la commission saisie au fond ne sont rien d’autre que la pratique actuelle. Le président peut toujours décider d’allonger ce temps de parole, le cas échéant.

Quant à la motion de rejet, elle doit d’abord servir à soulever la question de la constitutionnalité d’un texte. En quinze minutes, il me semble que le point peut être fait sur cette question.

M. Philippe Gosselin. Avec cet article 23, c’est carrément « massacre à la tronçonneuse »… Il faut relier les dispositions concernant les rapporteurs pour avis à celles de l’article 22 : ils deviendront les muets du sérail à double titre puisqu’ils n’auront plus la parole dans l’hémicycle et que leurs avis ne seront plus publiés. Nous franchissons là une limite inacceptable !

Il est censé y avoir un travail de coécriture entre différentes commissions qui s’intéressent à un même texte, ce que je trouve plutôt enrichissant. Nous le voyons bien lors du débat budgétaire, pour lequel des mesures spécifiques sont prévues, dont je prends acte.

M. Bruno Questel. Le rapport pour avis sera annexé au rapport de la commission saisie au fond !

M. Philippe Gosselin. Ça va bien les annexes ! Le fait est qu’il n’y aura plus de débat, ce qui est, évidemment, dramatique.

Je reviendrai à travers des amendements de mon groupe sur les motions de rejet préalable et de renvoi en commission. La limitation à quinze minutes pourrait me convenir à condition que les deux motions de procédure soient maintenues car elles ont chacune leur intérêt.

Je vous invite, mes chers collègues, à bien réfléchir au rôle des rapporteurs pour avis. Voter cet article 23, ce serait saper la complémentarité du travail des commissions, la pluridisciplinarité, la possibilité d’avoir des regards croisés sur un même sujet.

M. David Habib. Au nom du groupe socialiste, je veux m’associer à ces amendements. Ce cumul de mesures aboutit à quelque chose d’à la fois spectaculaire et profondément ridicule.

Quand on s’étonne de la suppression des motions de renvoi en commission, on nous répond qu’elles n’aboutissent pas. Avec le même raisonnement, on pourrait tout aussi bien supprimer les amendements de l’opposition puisqu’aucun n’est adopté ou presque.

Si le seul enseignement que vous avez tiré de votre expérience depuis deux ans à l’Assemblée nationale, c’est qu’il faut tout supprimer, les Français trouveront d’autres moyens de débattre. Or nous avons tous le souci de voir le rôle du Parlement consacré.

Je vous demande, monsieur le rapporteur – car je vous sais motivé par la recherche de l’intérêt général – de modifier cette proposition de résolution. Vous avez quinze jours pour le faire : nous ne pouvons examiner en séance publique un texte aussi inepte, permettez-moi de le dire.

La Commission rejette les amendements.

Elle est saisie de l’amendement CL167 de Mme Cécile Untermaier.

Mme Cécile Untermaier. Cet amendement de coordination, qui s’articule avec les amendements que j’ai déjà présentés, vise à donner la possibilité au co-rapporteur de la commission des affaires européennes d’intervenir en séance publique.

Je sens bien que cette volonté de donner de la cohérence au travail mené dans diverses commissions et de travailler au fond sur les textes, avec une certaine aridité et une certaine exigence, ne vous intéresse pas vraiment. Tout le temps que vous aurez gagné avec vos grignotages servira à dégager un boulevard qui permettra au Gouvernement de présenter encore plus de textes. Il me semble que ce temps, nous pourrions plutôt l’utiliser à réfléchir sur les textes et à contraindre le Gouvernement à accompagner ses projets de loi d’outils à même de nous éclairer.

Cela dit, je retire cet amendement. Nous travaillerons, je l’espère à brève échéance, sur ces questions qui me tiennent vraiment à cœur. Au-delà du rythme législatif, il faut aussi prêter attention à la fabrique de la loi.

L’amendement est retiré.

La Commission en vient à l’amendement CL74 de Mme Cécile Untermaier.

M. David Habib. Madame la présidente, savez-vous quel ministre, sous l’ancienne législature, a consommé le plus de temps de parole ? Trois fois plus que les autres ministres ? Eh bien, c’était Emmanuel Macron, qui ralentissait les débats. Peut-être a-t-il vécu difficilement ces moments et vous a-t-il demandé de réduire le temps de parole de celui qui pourrait lui succéder ? C’est une erreur monumentale. Nous souhaitons que les dispositions qui sont prévues en ce qui concerne les motions de procédure soient supprimées.

Je comprendrais tout à fait en revanche qu’en deuxième lecture, on modifie les règles liées aux motions. La question de la constitutionnalité ne se pose plus car on peut considérer qu’elle a été réglée par la première lecture. La question du renvoi en commission devrait ne pas avoir à se poser non plus.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Il est nécessaire, monsieur Habib, de conserver la motion de rejet préalable : le texte n’est pas forcément le même qu’en première lecture et la question de sa conformité avec la Constitution se pose à nouveau.

Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement CL256 de Mme Élodie Jacquier-Laforge

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Cet amendement s’articule avec l’amendement CL257 que je défendrai en même temps.

Nous proposons de réduire à dix minutes le temps imparti pour la présentation des motions de procédure tout en conservant, en contrepartie, la motion de renvoi en commission en première lecture. Le temps ainsi dégagé participerait aux efforts effectués pour supprimer les séances de nuit, antidémocratiques à mon sens.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je salue votre volonté de trouver un équilibre. Je vous propose d’en rester à la logique de la proposition de résolution et de le retirer en vue de l’examen en séance publique.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Je suis prête à le retirer mais je considère qu’il faut maintenir la possibilité de défendre des motions de renvoi en commission en première lecture car elles ont un sens à ce stade du débat. Nous sommes très déterminés à le défendre par la suite.

M. Bruno Questel. Je suggère que nous intégrions toutes les considérations sur les horaires et le nombre de séances dans la réflexion que nous allons mener sur l’organisation hebdomadaire des séances.

M. Philippe Gosselin. Je souscris à la proposition de notre collègue, à condition que cette synthèse ne conduise pas à réduire les temps de parole pour faire rentrer ce qui ne devrait pas rentrer. Mettre des cercles dans des carrés ou l’inverse, ce n’est pas facile.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je propose que notre petit groupe de travail se réunisse mardi pour en discuter.

L’amendement est retiré.

La Commission examine, en discussion commune, les amendements CL58 et CL59 de M. Philippe Gosselin et l’amendement CL257 de Mme Élodie Jacquier-Laforgue.

M. Philippe Gosselin. La motion de renvoi en commission nous paraît tout aussi importante que la motion de rejet préalable et nous voulons qu’elle soit maintenue, mais nous sommes prêts à accepter que le temps imparti ne soit plus que de quinze minutes pour les défendre.

Cela dit, j’accepte de retirer mes amendements.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. J’ai déjà défendu mon amendement que je retire également.

Les amendements sont retirés.

La Commission en vient à l’amendement CL68 de Mme Cécile Untermaier.

Mme Cécile Untermaier. Nous souhaitons ajouter l’alinéa suivant : « Les motions mentionnées au présent article sont attribuées dans le cadre d’une procédure transparente. En cas de tirage au sort, les groupes sont représentés. ».

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Cette procédure d’attribution des motions repose actuellement sur un tirage au sort parmi les 577 députés. Elle est donc totalement transparente.

Mme Cécile Untermaier. Oui mais les groupes ne sont pas représentés.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Nous pouvons faire pleine confiance aux fonctionnaires de l’Assemblée nationale et à leur déontologie.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 23 sans modification.

Article 24 (art. 93 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Renforcement du contrôle de la recevabilité des amendements au titre de l’article 41 de la Constitution

La Commission examine les amendements identiques CL77 de Mme Cécile Untermaier, CL156 de M. Ugo Bernalicis et CL230 de M. Stéphane Peu.

M. David Habib. L’article 24 instaure un mécanisme de filtrage a priori des amendements qui ne relèveraient pas du domaine de la loi. De façon empirique, nous savons que nous ne rencontrons pas de difficultés majeures en la matière. C’est davantage le Gouvernement qui fait ce genre de confusions que les parlementaires qui, quel que soit leur groupe, sont particulièrement vigilants.

Nous proposons donc de supprimer cet article.

Mme Danièle Obono. Cet article prévoit que, sur chaque texte, le président de la commission saisie au fond adressera au Président de l’Assemblée une liste des amendements, y compris gouvernementaux, dont il estime qu’ils ne relèvent manifestement pas du domaine de la loi ou qu’ils sont dénués de portée normative.

Se prononcer sur la recevabilité ne relève pas de simples considérations techniques. Il s’agit d’un choix politique, comme cet article le montre très clairement. Nous demandons sa suppression car il limite le droit d’amendement et renforce l’arbitraire du contrôle de recevabilité exercé par la Présidence et les présidents de commission.

M. André Chassaigne. Cet article veut régler la question des lois trop bavardes en écartant les amendements qui ne relèveraient pas du domaine législatif. Mais ce qu’il faut bien comprendre, c’est que déposer un amendement, même en sachant qu’on nous opposera qu’il appartient au domaine réglementaire, nous permet de susciter un débat et de faire remonter des attentes réelles. Cette procédure porterait un coup au débat législatif car elle l’appauvrirait.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. L’article 41, qui dit en substance que la loi doit s’occuper de la loi, a été conçu pour protéger l’exécutif d’une intrusion du Parlement dans le domaine réglementaire. En réalité, cette exigence constitutionnelle est peu appliquée.

C’est aussi le cas de l’article 45, qui prévoit que tout amendement est recevable en première lecture, dès lors qu’il présente un lien, même indirect, avec le texte. Ce laxisme nous a d’ailleurs valu un rappel à l’ordre de la part du Conseil constitutionnel. Du reste, les cavaliers, de plus en plus souvent sanctionnés par le Conseil constitutionnel, auraient pu être filtrés et déclarés irrecevables au titre de l’article 45.

Ce dont il est question ici, monsieur Chassaigne, c’est de qualité légistique. Lorsque l’on dit que la loi est trop bavarde, c’est souvent qu’elle empiète sur le domaine réglementaire. Nous proposons ici un mécanisme permettant de respecter avec plus de rigueur les principes constitutionnels ; ne le rejetez pas au motif qu’il vous priverait de débat.

Mme Cécile Untermaier. Je ferai remarquer que, sur l’article 41, le Conseil constitutionnel n’a jamais censuré un texte – mais vous me répondrez, fort légitimement, que ce n’est pas une raison.

Je pense comme vous que l’exigence de lisibilité, de clarté et d’intelligibilité de la loi nous oblige à écarter ce qui est du domaine réglementaire. C’est bien ce que nous faisons lorsque nous retirons un amendement après que le Gouvernement a jugé qu’il était d’ordre réglementaire. La loi est protégée puisque l’amendement finit toujours par être écarté en séance.

M. Raphaël Schellenberger. Je suis aussi très attaché à ce que la loi n’empiète pas sur le règlement. Mais votre logique, monsieur le rapporteur, est parfaitement incomplète, dans la mesure où vous faites peser cette obligation sur le seul droit d’amendement.

Un projet ou une proposition de loi qui empiète sur le domaine réglementaire passera au travers des filtres. L’inflation législative n’est pas causée par l’adoption d’une masse colossale d’amendements réglementaires ; elle est due aux textes d’ordre réglementaire que le Gouvernement soumet à notre délibération. Vous apportez une réponse, mais elle concerne un facteur mineur de l’inflation législative. Votre mécanisme fait peser l’obligation de respecter la séparation entre le domaine de la loi et celui du règlement – au demeurant assez floue – sur les seuls députés. C’est la raison pour laquelle il ne peut être accepté en l’état.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle examine, en discussion commune, les amendements CL96 de M. Raphaël Schellenberger et CL231 de M. Stéphane Peu.

M. Raphaël Schellenberger. Cet amendement vise à créer une commission dont l’objet serait de s’exprimer sur la recevabilité au titre de l’article 41. Cette collégialité semble d’autant plus intéressante que ce contrôle, par nature, est moins technique que le contrôle au titre de l’article 40. Autant la recevabilité financière est affaire de mathématiques – il s’agit de savoir si l’amendement crée une charge –, autant la recevabilité réglementaire peut donner lieu à des discussions plus subtiles.

Je soumets à votre réflexion un autre élément. Si un texte ou un article est déjà d’ordre réglementaire, l’application stricte du contrôle des amendements au titre de l’article 41 reviendra à empêcher le législateur de modifier un article. Le mécanisme que je vous propose est peut-être trop lourd et mal adapté, mais nous devons réfléchir à la façon d’organiser ce contrôle de recevabilité.

M. André Chassaigne. Monsieur le rapporteur, vous avez répondu que l’appréciation de la recevabilité était technique, ce qui sous-entend que ce sont les administrateurs de la commission qui ont le pouvoir d’instruire. Je crois, au contraire, que le politique doit conserver un regard sur ces questions. Pouvez-vous me dire pourquoi un même amendement est déclaré irrecevable une année, puis recevable l’année suivante ? La mécanique a-t-elle été grippée, et pour quelles raisons ?

Cet amendement vise à associer à la délibération un député membre de la majorité et un député membre de l’opposition, non pour en faire une question politique, mais pour qu’ils puissent porter leur regard sur ce contrôle.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Ce n’est pas une décision qui est prise uniquement par les administrateurs : ils sélectionnent les amendements qui pourraient être déclarés irrecevables, puis ils me les soumettent.

M. André Chassaigne. Vous me donnez raison !

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Nous prenons le temps de les examiner un par un, et nous en discutons. Il s’agit d’une décision de la présidence, elle n’est pas politique.

M. André Chassaigne. Pourquoi varie-t-elle dans le temps sur un même amendement ?

M. Sylvain Waserman, rapporteur. J’ai expliqué à Mme Obono que nous ne procédions pas selon une logique politique ; cela ne signifie pas pour autant que ce n’est pas un élu qui tranche. C’est bien le président de la commission des Finances, en commission et en séance publique, qui tranche sur la recevabilité au titre de l’article 40 et, dans ce mécanisme, le président de la commission saisie au fond et le président de l’Assemblée pour la séance publique.

La discussion que j’ai eue avec M. Woerth sur ce sujet est très éclairante. Le président de la commission des Finances m’a parlé de ses échanges avec les administrateurs sur les cas complexes et d’une règle qu’il applique en dernier ressort : en cas de doute trop important, l’amendement est déclaré recevable.

Je pense que le traitement est de bonne qualité et qu’il y a peu de réclamations qui n’aient reçu d’explication. Nous devons faire confiance aux présidents des commissions. Nous devons en tout cas trouver une solution, car il s’agit d’une exigence constitutionnelle.

M. André Chassaigne. Pourquoi cela vous gêne-t-il qu’une autre personne entre dans le processus ?

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Cela n’a rien à voir avec une gêne quelconque, monsieur Chassaigne.

M. Philippe Gosselin. Madame la présidente, personne ne vous accuse de partialité et le président Chassaigne, lorsqu’il évoque ce cas, n’établit pas de rapport avec la majorité actuelle. Mais imaginons une autre majorité, avec des députés moins attachés à l’impartialité et à l’égalité entre parlementaires : les procédures pourraient être très partiales.

Nous ne vous faisons pas de procès, pas plus qu’aux autres présidents de commission. Mais pourquoi refuser d’inscrire dans le Règlement cette forme de protection, l’assurance que le contrôle est effectué « au-dessus de la mêlée ? Il n’y a pas grand risque à le faire : en réalité, si quelques questions peuvent parfois se poser, la très grande majorité des amendements ne posent pas de difficultés particulières.

Il y a là une sorte de faux débat : nous nous arc-boutons, alors que nous pourrions parvenir à un mécanisme simple, qui ne serait pas sujet à caution.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. C’est vrai, l’immense majorité des amendements déposés sont recevables. Mais dans la pratique, lorsque la date limite pour le dépôt est fixée le lundi, à midi, pour un examen en commission le mercredi, où trouver le temps de convoquer une commission de dix députés, afin qu’elle puisse statuer sur la recevabilité des amendements ? Le dispositif prévu par M. Schellenberger ne fonctionne pas !

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Voici comment les choses se passent concrètement : je suis à l’Assemblée, les administrateurs viennent me voir, me soumettent les amendements... M. Gosselin l’a rappelé, il n’y a pas un exemple de suspicion quant à notre impartialité : sur la réforme de la justice, nous avons déclaré irrecevables des amendements aussi bien de l’opposition, de la majorité que du Gouvernement. Le Conseil constitutionnel est à cet égard très rigoureux et a validé les procédures que nous avons mises en place. Si l’on veut travailler correctement dans une assemblée, on ne peut jeter la suspicion sur chacune des décisions qui y sont prises.

M. André Chassaigne. C’est le verrou !

M. Christophe Euzet. Lorsqu’un système donne à peu près satisfaction, il ne faut pas s’évertuer à le changer.

Monsieur Schellenberger, il ne faut pas s’émouvoir de ce que des projets de loi contiennent des dispositions réglementaires. Le fait que le législatif charrie des dispositions réglementaires étend notre domaine de compétence. L’exécutif a la faculté de demander la délégalisation des dispositions réglementaires contenues dans la loi, et il ne manque pas de le faire lorsqu’il en a l’occasion. Si cela ne nous donne pas la possibilité d’amender, cela ne doit pas nous priver de la faculté d’examiner et de délibérer sur les dispositions réglementaires contenues dans les textes de loi. Mieux vaut éviter de bouger les choses sur ce point.

La Commission rejette successivement les amendements.

Elle est saisie de l’amendement CL34 de M. Michel Zumkeller. 

Mme Maina Sage. Nous proposons que l’auteur d’un amendement frappé d’irrecevabilité au titre de l’article 41 puisse demander une explication écrite.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Dans la pratique, cet amendement est satisfait : je ne connais personne qui se soit plaint de n’avoir pu obtenir d’explication sur l’irrecevabilité de son amendement. Par ailleurs, prévoir un reporting systématique me paraît disproportionné. Avis défavorable.

M. Raphaël Schellenberger. Madame la présidente, je n’ai aucun soupçon quant à votre travail et à celui des administrateurs de la commission des Lois.

Que vous souhaitiez accentuer le contrôle de recevabilité au titre de l’article 41 ne me dérange pas. Pour autant, il ne me semble pas souhaitable d’en calquer le fonctionnement sur celui du contrôle de recevabilité financière, car la nature du contrôle n’est pas la même et son automaticité pas évidente.

Il y a, sur la recevabilité au titre de l’article 41, une appréciation d’opportunité. La façon dont vous procédez à ce contrôle ne suffira sans doute plus lorsque l’on vous demandera d’examiner davantage d’amendements. Nous n’interrogeons pas votre pratique actuelle, mais ce qui vous sera demandé demain.

Votre explication, monsieur Euzet, me dérange quelque peu. Vous avez dit en substance que c’était bien que le législateur intervienne dans le domaine réglementaire, mais qu’il ne pouvait pas déposer d’amendements d’ordre réglementaire : il y a donc bien un problème ! Si nous voulons améliorer la qualité de nos travaux, il faut le résoudre.

Mme Maina Sage. Notre amendement ne vise pas à rendre ce droit automatique : l’explication écrite n’est fournie qu’à la demande de l’auteur de l’amendement. Il est vrai que la dernière décision du Conseil constitutionnel, qui précise que l’irrecevabilité n’a pas à être justifiée, est assez inquiétante. À cet égard, le Règlement pourrait permettre à chaque député de savoir pourquoi son amendement a été frappé d’irrecevabilité.

Nous sommes en train de parler de la raison même de notre présence ici : faire le droit, en débattre, l’enrichir, le modifier. Vous touchez au droit d’amender, un des droits fondamentaux du parlementaire. Je regrette que vous rejetiez nos propositions constructives, qui visent à instiller de la transparence dans les décisions. Vous ne voulez pas qu’une autre personne délibère avec le président de la commission ; acceptez au moins que celui-ci puisse avoir à fournir une explication écrite.

Mme Danièle Obono. Si nous discutons du contrôle de recevabilité, c’est bien qu’un article vise à le renforcer ? Ce n’est pas nous qui avons inventé cette proposition de résolution ! Vous parlez de suspicion, mais la suspicion n’est-elle pas au fondement du Parlement, qui exerce une suspicion permanente à l’égard de l’exécutif ? (Exclamations.) Relisez vos classiques sur l’équilibre des pouvoirs ! Il existe une suspicion permanente à l’égard de l’exécutif, qui ne doit pas outrepasser ses prérogatives : c’est une question d’équilibre.

M. Philippe Gosselin. C’était plutôt l’inverse sous la IIIe et la IVe République ! Relisez Montesquieu !

M. Rémy Rebeyrotte. Et ne le confondez pas avec Robespierre !

Mme Danièle Obono. Nous devrions monter un club de lecture parlementaire sur ce sujet ! La question n’est pas de mettre en cause les individus et leur probité, mais bien de contrôler l’autre pouvoir.

Assumons la nature du système, l’équilibre des pouvoirs ! Si nous estimons que tout le monde fait bien ce qu’il a à faire, alors nous n’avons rien à faire ici, et certainement pas à exercer notre mission de contrôle de l’action du Gouvernement.

S’il n’y a pas une application mécanique des textes, c’est que l’esprit compte, tout autant que la lettre. Selon l’appréciation d’une personne, un amendement sera considéré recevable, un autre sera jugé hors des lignes. C’est naturel, il faut l’assumer ! Équilibrer cette décision grâce à la participation d’un tiers participe à l’amélioration du débat politique – au sens où il donne lieu à un échange de points de vue. Ce n’est pas quelque chose de mal, dont il faudrait s’excuser.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 24.

Article 25 (art. 95 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Intervention des députés sur les articles en séance publique

La Commission est saisie des amendements identiques CL60 de M. Philippe Gosselin, CL72 de M. David Habib, CL157 de Mme Danièle Obono et CL232 de M. Stéphane Peu.

M. Philippe Gosselin. Nous sommes très enthousiastes à l’idée de défendre ces amendements de suppression ; il y a là comme les derniers soubresauts d’un mourant ! Par touches successives et somme toute subtiles, vous cherchez à assommer l’opposition.

Les interventions sur l’article permettent aujourd’hui aux orateurs, parfois d’un même groupe, d’exprimer leurs sensibilités différentes, de pointer un sujet particulier, et d’accroître aussi, il faut le dire, leur visibilité, dans un monde de communication et d’images.

Désormais, il n’y aura qu’un orateur par groupe inscrit à l’article. Cela nie la singularité de l’élection, qui fait de chaque député un représentant de la Nation : d’une certaine façon, vous muselez la représentation nationale. En outre, vous placez les présidents de groupe au cœur du dispositif, puisqu’il leur reviendra de désigner les orateurs.

C’est une négation complète de l’expression individuelle du parlementaire, qui s’ajoute à l’impossibilité de s’exprimer sur les amendements identiques, à la suppression d’autres facultés de prise de parole pendant les débats. Encore une fois, ce n’est pas la publication des contributions au Journal officiel – qui nie d’ailleurs le caractère contradictoire du débat parlementaire – qui pourra se substituer à ces procédures.

Je le répète avec force et peut-être véhémence : l’article 25 constitue un casus belli. Nous ne pouvons pas l’accepter.

M. David Habib. Il y va de l’essence même du débat parlementaire. Je l’ai dit, monsieur le rapporteur, nous trouverons la réplique, car il est dans la nature humaine de répondre, et nous le ferons avant l’examen de la révision constitutionnelle. Ce texte se trouve pris en sandwich entre deux réformes constitutionnelles – une avortée, une annoncée. Eh bien, nous trouverons la solution, avant. Ce que vous faites n’est pas sain.

La responsabilité des députés, c’est de s’exprimer. Pardonnez-moi de le dire ainsi, mais je suis député béarnais, avant d’être député socialiste. Je ne dois ma légitimité, mon élection, qu’à mes électeurs ; c’est à eux que je dois rendre compte de mes positions, pas à un président de groupe. Vous instituez une tutelle assez inacceptable sur les membres de l’Assemblée.

Nous l’avons dit plus tôt dans la journée, il peut y avoir des différences entre les députés ; vous devez admettre que, dans un même groupe, ces différences coexistent. Nous trouverons les solutions pour contourner une procédure qui relève d’une vision assez moyenâgeuse de la vie publique.

Mme Danièle Obono. Cet article prévoit que les interventions sur les articles d’un texte seront limitées à deux minutes et à un seul orateur par groupe, désigné par le président ou son délégué, plus un député pour les non-inscrits. Il s’agit là de limiter le temps d’expression des députés, donc l’exercice même du mandat. Cela nuit au débat, et au Parlement dans son ensemble. Dans votre vision, ce dernier « parlemente » trop et doit être réduit à la portion congrue. Cela le rendra encore plus désincarné et dépolitisé, pas simplement du point de vue des personnes censées l’animer, mais aussi du point de vue des citoyens. Vous nous expliquerez sûrement qu’il s’agit de rendre les débats plus efficaces et plus fluides ; autant les paralyser et les asphyxier totalement avant même qu’ils ne débutent !

Cet article, plus que tout autre, révèle la logique de ce texte. S’il devait être adopté, sachez que la parole parlementaire s’imposera de toutes les façons. Sera-ce contre vous, ou dans une bonne intelligence ? Pour le coup, la suspicion n’est même plus de mise : il est clair que vous faites systématiquement le choix de nous dresser contre vous, de tordre le bras des parlementaires. Vous en assumerez donc les conséquences.

M. André Chassaigne. Les présidents de groupe seront à la fois gendarme et sélectionneur. Ce sera facile dans le cas d’un petit groupe comme le mien, sans doute beaucoup plus compliqué pour les groupes plus importants.

La France est riche de ses divers territoires, de ses sensibilités, de ses cultures locales : le regard que posera un député de la métropole ne sera pas le même que celui d’un député d’outre-mer. En s’exprimant sur l’article, le député ne donne pas seulement son analyse, il fait remonter des témoignages, apporte du concret, inspiré des échanges qu’il a dans sa circonscription. Cette limitation coupera court à cela, et c’est à un travail hors sol, détaché des réalités du terrain, que s’adonneront les députés. C’est gravissime !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. C’est un débat que nous avons eu longuement. Je comprends, monsieur Habib, que vous vous sentiez plus Béarnais que socialiste ; mais convenez que c’est bien le président du groupe politique qui désigne l’orateur pour la discussion générale, ou le rapporteur sur un texte !

Je suis sincèrement convaincu qu’une expression claire sur l’article au nom d’un groupe politique est préférable au foisonnement d’expressions individuelles. Je respecte votre position : certes, il faut tenir compte de l’individualité du parlementaire, qui exerce pleinement sa liberté d’amender et ce faisant, sa différence au sein du groupe. Mais il est plus utile et plus lisible pour le citoyen de connaître la position de tel ou tel groupe sur l’article.

Ces positions – parole individuelle illimitée ou parole claire du groupe – sont irréconciliables. Le choix que le président Ferrand fait dans cette proposition de résolution, c’est que la position des groupes politiques doit être exprimée, de façon claire, sur chaque sujet. Personnellement, j’adhère à cette approche. Aucune vue claire ne peut se dégager lorsque quarante orateurs différents sont inscrits à l’article.

M. Philippe Gosselin. Il est incroyable d’entendre dire cela par un président de séance !

M. Christophe Euzet. Je comprends le souci de défendre le droit individuel d’amendement. Mais c’est oublier un peu vite que c’est le président du groupe qui distribue les rapports, qui désigne l’orateur dans la discussion générale. On en oublierait presque que nous avons été investis par un groupe politique qui nous a donné la possibilité de candidater et d’être présent dans cet hémicycle.

M. Philippe Gosselin. Chez nous, ça ne se passe pas comme ça !

M. Christophe Euzet. Encore une fois, vous confondez, dans le dispositif qui vous est proposé, la commission et la séance. Il n’est pas question de revenir sur les débats en commission, là où se fait réellement le travail. Certains sont plus habitués que nous à siéger sur les bancs de l’hémicycle, mais je vous le dirai de façon très crue : ces soirées en séance publique sont soporifiques ! Chacun, dans son silo, vient débiter son discours avec l’espoir de récupérer la vidéo pour la mettre sur son site internet, sans même écouter ce que disent les collègues.

C’est une succession de monologues, personne ne discute avec personne. Les débats gagneraient, et c’est l’objet de cette proposition, à être concentrés, de façon à retrouver la vigueur et l’intérêt pour les citoyens qu’ils ont complètement perdus.

Mme Cécile Untermaier. Il est scandaleux de parler ainsi des députés !

M. Raphaël Schellenberger. Ces propos nous confortent dans l’idée que cet article va à l’opposé des besoins de la démocratie parlementaire et l’intervention du rapporteur me convainc que ce que l’on suspectait au début de la discussion est désormais avéré. Vous assumez en fait totalement la transformation de l’équilibre entre les droits individuels du député et la caporalisation par les groupes politiques. Cela nous est tout simplement insupportable !

Il y a d’abord eu un discours selon lequel les groupes ne devaient pas être trop nombreux, mais le plus cohérent possible, que chacun y aurait sa place pour s’exprimer. Maintenant, le rapporteur nous explique que la position du groupe doit être claire, unanime, et qu’il ne peut y avoir qu’une intervention à l’article car il n’y a pas de raison qu’il y ait des nuances.

C’est tout de même invraisemblable ! Ce peut donc être le bazar dans un groupe tout au long de l’année, en fonction des différents textes, tant que n’est exprimée, sur les articles, qu’une seule position.

Il est évident que vous voulez faire taire le débat parlementaire. Dans une discussion sur l’article, on ne dit pas la même chose que dans une discussion générale : ainsi, un député peut être amené à déposer plusieurs amendements sur un article long de plusieurs pages ; il est important qu’il intervienne au début de l’examen de l’article pour expliquer la cohérence entre ses différents amendements.

M. Philippe Gosselin. Nous sommes en train de transformer l’hémicycle en chambre d’enregistrement, mais d’enregistrement des silences ! Je vois dans cet article une tendance à la caporalisation, une forme d’allégeance au groupe.

Cette égalité de traitement apparente est en réalité une forme d’égalitarisme. Un groupe de 17 députés arrivera à s’accommoder d’une désignation, par son chef bien aimé, du député qui pourra parler. Mais quid d’un groupe de 101 députés, comme le groupe Les Républicains ? Sous une apparence d’égalité de temps de parole, ce sont en fait les petits groupes qui seront favorisés. Vous voyez bien que cela ne fonctionne pas, que c’est vicié.

Effectivement, nos approches sont très différentes. Je sais que je vais vous faire crier, mais bon nombre d’entre vous doivent peut-être leur élection à la force du groupe, non pas à leurs capacités individuelles – bien réelles néanmoins. (Exclamations.)

M. Bruno Questel. C’est nul !

M. Philippe Gosselin. Je ne fais pas de procès en incompétence ou en qualité intellectuelle, ce n’est pas le sujet. Je constate simplement que vous avez été amenés là par une avalanche politique, c’est un fait. Par conséquent, vous ne ressentez pas, comme certains d’entre nous, le poids d’une campagne individuelle de terrain. (Mêmes mouvements.)

Cette approche collective n’est pas la nôtre. Le processus de désignation, votre allégeance au groupe, une forme de caporalisation : ce n’est pas notre mode de fonctionnement.

M. Rémy Rebeyrotte. N’êtes-vous pas issu d’un parti avec un chef ?

M. André Chassaigne. Ne nous bagarrons pas : nous avons tous été désignés par une organisation politique ou par un mouvement !

Mais, c’est une question constitutionnelle : nous n’avons pas de mandat impératif. Il peut y avoir deux composantes dans un groupe, c’est le cas du mien, et, c’est plus rare, des approches différentes. Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine était majoritairement favorable au projet de loi sur le mariage pour tous, mais certains députés communistes ou d’outre-mer ont exprimé, lors de la discussion sur les articles, des points de vue différents.

Faire la loi ne se résume pas à un acte mécanique, qui consiste à appuyer sur un bouton ; il s’agit aussi de faire sentir, au travers de nos interventions, la respiration du pays. La fonction de député va au-delà du simple vote de la loi : nous sommes là pour montrer ce qui se passe, nous représentons la Nation, riche de ses diversités.

Mme Maina Sage. Cet article pousse à l’extrême la volonté de réduire les interventions. J’espère que, d’ici à la séance, nous pourrons trouver une solution intermédiaire, peut-être un nombre d’interventions proportionnel à la taille des groupes. Bien sûr, une quarantaine d’interventions pour un article, cela peut sembler excessif, mais de là à passer à un orateur par groupe, c’est aller trop loin et manquer de réalisme.

Mme Cécile Untermaier. Monsieur le rapporteur, je sais que vous voulez trouver des terrains d’entente. Sur cet article, on sent une résistance très forte. Au nom du groupe Socialistes et apparentés, je vous demande instamment d’en faire état auprès de Richard Ferrand, dont je sais qu’il n’entend pas non plus bouleverser les pratiques au sein de l’hémicycle. Ce ressenti, on l’a entendu avec les interventions d’André Chassaigne ou de Philippe Gosselin, est très important.

Mme Danièle Obono. Monsieur le rapporteur, vous semblez penser sincèrement, avec le président Ferrand et les députés de La République en Marche, qu’un orateur par groupe suffit. Je ne comprends pas pourquoi vous considérez que le fonctionnement qui convient à votre groupe et à sa dynamique devrait s’appliquer à tous.

Ce n’est pas simplement une question de taille. Il y a dix-sept députés inscrits au groupe de La France insoumise, et autant de diversités et d’appréciations – ce qui en fait la richesse. Nous pensons qu’elles ont vocation à s’exprimer et à être entendues, aussi bien en commission qu’en séance publique.

Peut-être certains trouvent-ils les débats dans l’hémicycle trop longs et soporifiques ; quel que soit le temps de parole accordé aux orateurs, tout le monde zappe car l’attention ne peut être maintenue jusqu’à une heure du matin. Sans doute faut-il repenser l’organisation de l’ordre du jour.

Pour autant, même lorsque l’on a des désaccords, le débat en séance a un sens : il permet par exemple aux députés qui ne siègent pas dans la commission saisie au fond de s’exprimer. Qu’une personne parle pour 300 autres, c’est un fonctionnement qui vous convient peut-être, mais il n’y a aucune raison de l’imposer aux autres ! Concrètement, cela va réduire le débat parlementaire, et c’est le problème fondamental.

La Commission rejette les amendements de suppression.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL307 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement CL35 de M. Michel Zumkeller. 

Mme Maina Sage. La réserve ou la priorité d’un article ou d’un amendement doit être sollicitée et annoncée au plus tard au début de la séance précédente.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Déroger à l’ordre de la discussion du texte permet de mieux organiser les débats, sur des sujets compliqués. C’est un outil utile et cette restriction ne bénéficierait pas à la qualité du débat. On perdrait une marge d’appréciation utile. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Les amendements CL262 de Mme Élodie Jacquier-Laforge et CL106 de M. Christophe Euzet sont retirés.

La Commission adopte l’article 25 sans modification.

Article 26 (art. 98 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Contrôle de la recevabilité des amendements au titre de l’article 45 de la Constitution

La Commission examine les amendements identiques CL158 de M. Ugo Bernalicis et CL233 de M. Stéphane Peu.

Mme Danièle Obono. Nous demandons la suppression de cet article qui réduit la place accordée aux commissions saisies pour avis, alors même que ces saisines pour avis ont pour but d’éclairer le choix des députés. Elles garantissent la clarté et la sincérité des débats et permettent d’avoir plusieurs points de vue différents. À notre avis, cela permet que le débat soit plus riche, grâce à des analyses contradictoires. Nous proposons donc de supprimer l’article 26.

M. André Chassaigne. Notre amendement est dans la continuité de nos amendements précédents. On peut craindre que la procédure prévue à cet article soit appliquée d’une main trop lourde. Je pense qu’il faut des garde-fous, car on ne sait pas de quoi sera fait l’avenir.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Le garde-fou existe : c’est le Conseil constitutionnel. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, j’ai le même avis, c’est-à-dire un avis défavorable.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle examine l’amendement CL78 de Mme Cécile Untermaier. 

Mme Cécile Untermaier. Il s’agit des cavaliers législatifs, c’est-à-dire des amendements n’ayant pas de lien avec le texte examiné. Nous rappelons qu’il est extrêmement délicat, quelquefois, d’apprécier le caractère direct ou indirect de ce lien. Comme vous le disiez très justement, monsieur le rapporteur, le garde-fou, c’est le Conseil constitutionnel. Si d’aventure le cavalier passe le stade de la commission et de la séance publique sans être écarté par le Gouvernement et par la majorité, le Conseil constitutionnel fera son office. Je pense donc que ce n’est pas la peine d’en rajouter. Laissons vivre le débat au Parlement.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Avis défavorable.

M. Philippe Gosselin. La jurisprudence du Conseil constitutionnel est en effet assez claire. J’appelle cependant l’attention de la commission sur le fait que cet article va un peu au-delà de l’article 45 relatif à l’irrecevabilité. Nous continuons d’être aux prises avec une restriction imposée aux commissions saisies pour avis. Non seulement il n’y a pour elles ni droit de publication ni droit de présentation, mais il n’y a plus de droit d’amendement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine les amendements CL235 et CL234 de M. Stéphane Peu.

M. André Chassaigne. Ces amendements se situent dans la continuité des amendements précédents, dictés par le souci de garantir un contrôle pluraliste capable d’objectiver les décisions.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement, les amendements.

Elle adopte l’amendement rédactionnel CL308 du rapporteur.

Puis elle examine l’amendement CL37 de M. Michel Zumkeller.

Mme Maina Sage. Cet amendement de monsieur Zumkeller propose de soumettre ces questions d’irrecevabilité à la Conférence des Présidents.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. C’est exactement le même sujet. Nous proposons d’en rester au mode de fonctionnement actuel.

La Commission rejette l’amendement.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, elle rejette l’amendement CL36 de M. Michel Zumkeller.

Puis elle adopte l’article 26 modifié.

Après l’article 26

La Commission examine l’amendement CL83 de Mme Cécile Untermaier.

Mme Cécile Untermaier. Il s’agit simplement de permettre à l’opposition d’obtenir une évaluation « flash » d’un amendement. Cette procédure est prévue par le Règlement, mais elle est réservée à la majorité. Il nous semble extrêmement important que l’opposition puisse y recourir.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Vous voulez pousser un cran plus loin une procédure peu utilisée. Cela ne me semble guère opérant. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL250 de M. Stéphane Peu.

M. André Chassaigne. Nous tentons, par notre amendement, d’apporter une réponse à la question des amendements déposés hors délai par le Gouvernement. On sait très bien que ces amendements n’ont pas le temps d’être expertisés. Nous parlions tout à l’heure des études d’impact, mais elles ne sont qu’un élément parmi d’autres.

Ces amendements déposés hors délai par le Gouvernement remettent en cause le travail fourni par les députés, notamment lorsqu’ils font tomber tous les amendements qui étaient déposés sur un article, voire un article complet. C’est donc une pratique qui porte atteinte aux droits du Parlement.

Il ne s’agit pas pour nous de l’interdire totalement, mais de trouver un équilibre ; nous proposons ainsi que le dépôt hors délai des amendements soit soumis à l’accord de la commission concernée, dans le respect du pluralisme.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je pense qu’il faut, pour résoudre ce problème, en passer par la loi organique. Nous avons eu cette discussion à plusieurs reprises, et je vous rappelle que le président Ferrand a entamé, avec le président du Sénat, une démarche volontaire et courageuse pour essayer de modifier la loi organique en question.

M. Philippe Gosselin. Qu’en termes choisis ces choses-là sont dites !

La Commission rejette l’amendement.

Article 27 (art. 100 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Révision des règles de prise de parole sur les amendements

La Commission examine les amendements identiques CL73 de M. David Habib et CL236 de M. Stéphane Peu.

M. David Habib. Nous proposons de supprimer cet article qui participe de la même philosophie que les précédents : réduire l’expression des députés. Nous allons entendre vos arguments et chacun des vingt-neuf députés socialistes aura dans l’hémicycle, peut-être pour la dernière fois, la possibilité de s’exprimer…

M. André Chassaigne. Nous demandons aussi la suppression de cet article. J’en profite pour demander une précision sémantique, car je vois bien l’ouverture que vient de pratiquer mon collègue socialiste. Il y a là un « fenestrou », du nom qu’on donne en Auvergne aux petites fenêtres sous les toits. Notre collègue semble penser que ce « fenestrou » permettra à tous les membres d’un groupe de présenter des amendements.

Ma question est la suivante : qu’entend-on par « amendements identiques » ? Si l’on change simplement un mot, l’amendement ne sera-t-il plus identique ? Ou est-ce seulement le contenu de l’amendement qui compte ? Le travail de tri sera colossal et ne fera que rallonger les débats au lieu de les raccourcir.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Avis défavorable. La présentation d’amendements identiques est un élément de redondance qui, à notre sens, n’enrichit pas le débat.

Dans cette proposition de résolution, nous avons modifié et clarifié ce point, de sorte que le président de séance, dans l’intérêt des débats – par exemple lorsqu’il s’agit d’articles phares – ait la possibilité de déroger à la règle. Celle-ci ne sera donc pas un carcan empêchant – je prends cet exemple au hasard – d’entendre des amendements semblables sur la privatisation d’un aéroport.

Avec une grande justesse, le président Ferrand parle d’un cadre et non d’un carcan. En l’espèce, le président de séance pourra évidemment ajuster le nombre de prises de parole, sans revenir pour autant à la situation actuelle de liberté totale. Son rôle se trouve ainsi réaffirmé de façon plus claire qu’il ne l’est aujourd’hui.

M. André Chassaigne. Mais qu’est-ce qu’un amendement « identique » ?

M. Sylvain Waserman, rapporteur. J’entends bien que notre créativité naturelle inventera des concepts d’amendements presque identiques ou quasi identiques, mais vous comprenez l’esprit qui nous anime. Si des amendements disent la même chose, mais d’une façon différente, ce ne seront pas des amendements identiques ; ils seront soumis à discussion commune. L’idée n’est pas, de toute façon, de gagner un certain nombre de minutes en concentrant toute la discussion sur un seul amendement…

La liberté de déposer des amendements existe. Elle implique que l’on puisse changer trois mots d’un amendement pour en faire un amendement différent. Au surplus, il y a, en pratique, un temps de parole illimité pour chaque député, puisqu’il peut défendre chacun de ses amendements et que leur nombre est illimité… Celui qui a envie de parler 1 500 minutes peut déposer 750 amendements et parler deux minutes par amendement !

Ce que nous cherchons, c’est une logique de clarté et de rationalisation du temps. Dès lors qu’il y a un droit de parole illimité dans l’hémicycle, le cadre que nous proposons ne vise pas à limiter ce droit, qui est constitutionnel. Mais il faut aussi faire confiance à la logique retenue, qu’il s’agisse de la très grande liberté qu’offre le temps législatif programmé ou le choix d’un cadre plus structuré qui conserve de toute façon cette très grande liberté de dépôt d’amendements.

M. Raphaël Schellenberger. Nous partons d’un double constat, celui d’une inflation des amendements et d’une inflation du temps consacré aux discussions. La raison en est double : la multiplication du nombre de groupes et la mauvaise gestion des outils d’analyse quantitative de notre travail. Or, à ce phénomène, vous répondez par des solutions qui entretiendront la tentation de multiplier davantage encore le nombre de groupes et le nombre des amendements.

Alors que nous étions tous d’accord sur le constat et sur la nécessité de travailler sérieusement pour remédier à cette situation, les propositions que vous faites sont malheureusement déconnectées, non pas seulement de notre conception du travail parlementaire, mais de la conception française du travail parlementaire, et vous allez produire les effets exactement inverses de ceux recherchés. Ce que vous êtes en train de faire est dangereux et risque non pas d’améliorer, mais de dégrader la qualité de notre travail, sans traiter aucun des maux qui sont à l’origine de nos problèmes.

M. David Habib. Avec le président Chassaigne, nous avons connu l’examen de textes de loi tels que la privatisation partielle, ou l’ouverture du capital, de La Poste. Les uns après les autres, nous citions tous les bureaux de poste de nos circonscriptions. C’était pitoyable. Le spectacle qui était donné était pitoyable, et nous avons fait la même chose, d’ailleurs, sur d’autres textes, moi le premier.

Aujourd’hui, nous avons banni de notre Assemblée ce type de pratiques, en limitant l’expression des parlementaires sur les articles et dans la discussion générale. Je crains que ce que vous proposez aujourd’hui conduise à subdiviser encore les groupes politiques et à multiplier les amendements, ce qui favorisera le retour à des comportements qui ne sont pas, à mon avis, ceux qu’attendent de nous nos concitoyens.

M. Bruno Questel. Je voudrais abonder dans le sens du rapporteur. Nous devons appréhender de façon globale la réforme proposée, et non segmenter la critique que l’on peut en faire.

Nous devons aussi nous interroger sur notre image vis-à-vis des citoyens, usagers, contribuables, électeurs qui nous regardent à la télévision. Je ne suis pas persuadé que tous nos débats soient très positifs pour l’image collective de l’Assemblée. Certains sont répétitifs du fait de la défense d’amendements identiques ou quasi identiques. Je voudrais que nous essayions de progresser, dans une logique d’écoute et de compréhension d’ensemble de la réforme.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle examine l’amendement CL61 de M. Philippe Gosselin.

M. Philippe Gosselin. Je crois que nous sommes en train de rentrer dans le vif du sujet. Vous allez voir que le député va devenir le boute-en-train de la démocratie : il va déposer des amendements mais d’autres vont les défendre. Cela prive, en réalité, le parlementaire de son droit d’expression. Et puis, si on ne définit pas ce qu’est un amendement identique – je reviens à la question du président Chassaigne – le contournement de la règle sera très facile, en réveillant le Monsieur Jourdain qui sommeille en nous : « Marquise belle d’amour mourir me font… » et autres variations purement formelles. Il serait beaucoup plus sage d’en rester à ce qui existe aujourd’hui, c’est-à-dire à la possibilité de s’exprimer sur les amendements. Nous avons encore un peu de temps pour réfléchir et parvenir, d’ici à la séance publique, à une solution équilibrée. Au départ, je pensais que la disposition proposée était une façon de museler les oppositions. En réalité, je me rends compte que c’est seulement une formalité quelque peu ridicule et enfantine, qui peut être contournée et le sera sans doute. Restons-en donc à ce qui se fait aujourd’hui, d’autant que la sagacité avec laquelle le président de séance exerce la police des débats permet de pallier les débordements.

Tel est l’objet de notre amendement CL61.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Avis défavorable. Pour ma part, j’accepte toujours le débat. Au moins les positions sont-elles claires et clairement exprimées.

M. Raphaël Schellenberger. Monsieur le rapporteur, vous avez opposé à nos critiques le dispositif du temps législatif programmé, en le présentant comme le summum de la liberté… C’est invraisemblable ! Si l’on en revient, en effet, à la genèse du temps législatif programmé, dont la mouvance dont je suis issu porte la responsabilité, force est de reconnaître que le but était bien de réduire le temps consacré à l’étude d’un texte. Et aujourd’hui, ce dispositif mis en place pour réduire le temps consacré à l’étude d’un texte devient le dernier espoir de disposer encore d’un espace de liberté. L’outil de la répression est aujourd’hui présenté comme celui de la liberté !

M. André Chassaigne. Madame la présidente, chers collègues, je voulais intervenir avec une forme de solennité, pour vous féliciter, monsieur le rapporteur, car je pense que vous serez inscrit, à la suite de ce débat, au livre Guinness des records pour ce travail en commission au cours duquel tous les amendements auront été rejetés. Vous faites ainsi la démonstration de la conception que certains ont aujourd’hui du travail parlementaire. Pour nous, le breuvage est un peu amer.

Le constat que nous faisons depuis plusieurs mois se vérifie encore une fois aujourd’hui. C’est triste.

M. Thibault Bazin. Nous traversons une crise de confiance, à laquelle on ne peut pas répondre simplement par une recherche d’efficacité. Quand on est élu, on est la voix de la Nation, et si, demain, on n’a plus le droit de s’exprimer, d’amender ou, en tout cas, de s’exprimer sur les amendements, cette réduction du rôle des parlementaires signifiera la réduction de la capacité de nos concitoyens à voir leurs opinions portées par eux.

Si plusieurs voix s’expriment dans la même direction, peut-être est-ce le signe qu’il faut les prendre en considération ? Quant à la recherche d’efficacité, vous savez qu’il faut parfois prendre du temps pour faire de bonnes lois, savoir écouter les positions des uns et des autres, même quand il y a des amendements identiques. On a pu voir, ces derniers mois, que des corrections ont été apportées parce que deux groupes différents défendaient des amendements identiques, mais avec un regard différent. Leurs prises de parole ont fait basculer les points de vue, ce qui a permis d’améliorer la loi. Je crois donc qu’il faut conserver les dispositions actuelles.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL259 de Mme Élodie Jacquier-Laforge.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Nous souscrivons pleinement à la rationalisation de l’organisation des prises de parole, qui consiste à n’entendre sur chaque amendement que deux orateurs, dont un s’exprimant dans le sens du rejet.

Nous souhaitons toutefois que soit maintenue au président de séance, en fonction de l’évolution du débat, la possibilité de donner la parole à des orateurs supplémentaires. Car si, sur certains amendements, la discussion est parfois très répétitive, il peut y avoir une réelle nécessité, sur d’autres amendements, de permettre au président de séance de laisser plus de temps au débat.

Monsieur le président Chassaigne, je me permets de vous faire remarquer que certains amendements des membres des différents groupes ont été satisfaits, parfois indirectement, par l’adoption d’amendements du rapporteur.

Enfin, j’observe qu’il est minuit pile. Au nom du groupe MODEM, qui plaide pour la fin des séances de nuit, je vous prie, madame la présidente, d’anticiper sur les horaires proposés dans la réforme, en suspendant nos travaux à la fin de l’examen du présent article.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je pourrais accepter cet amendement, sans que ce soit une pure réaction aux propos du président Chassaigne, mais il est déjà pleinement satisfait par l’article 11. Si je suivais une approche un peu démagogique, je pourrais rendre un avis favorable, même si la dernière mouture de la résolution redonne déjà clairement au président de séance la possibilité de consentir des dérogations dans l’intérêt du débat. Ce serait cependant artificiel. Ce qui n’est pas expressément prévu par le Règlement pourrait en effet passer pour avoir moins de force que ce qui est expressément mentionné. C’est pourquoi nous avons préféré rédiger plutôt un chapeau qui évite de répéter à chaque fois les choses.

Quant au prix que vous m’avez décerné, monsieur Chassaigne, et dont je ne prends nullement ombrage, je voudrais attirer votre attention sur un point. La démarche du président Ferrand a consisté à rechercher un point d’équilibre. Les modifications relatives au temps législatif programmé (TLP) et aux modalités des droits de tirage sur le TLP émanent du groupe socialiste ; celles relatives à la taille des groupes ont été retirées à la demande de votre groupe ; et je pourrais citer le point qu’a soulevé M. Lagarde cet après-midi. Il ne faut donc pas nous faire de mauvais procès.

La proposition de résolution que nous examinons n’est pas, à la différence d’un projet de loi du Gouvernement, une proposition venue du dehors. C’est le fruit d’un travail collectif, réalisé en vue d’arriver à un juste équilibre. Plutôt qu’une base de négociation, c’en est le résultat. Qu’on conteste ce point d’équilibre, soit. Mais on ne saurait soutenir que je dis systématiquement non à tout, alors que les propositions des uns et des autres sont déjà intégrées dans le texte initial. C’est un procès que je trouve un peu injuste.

M. André Chassaigne. Alors notre réunion de commission est inutile !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Pas du tout ! Pouvez-vous seulement penser, de bonne foi, qu’elle n’a pas permis aux différents groupes d’exposer des lignes et des positions claires, dont on voit d’ailleurs les limites ? Ce n’est pas au nombre d’amendements retenus que l’on doit juger si l’équilibre a été atteint. Notre débat aura au moins l’intérêt de faire la clarté sur les positions des uns et des autres.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Je remercie le rapporteur pour ses explications. Les débats en commission ont en effet aussi pour but d’éclairer l’interprétation du Règlement qui est faite par la suite. Je suis donc prête à retirer mon amendement.

J’espère surtout que ma proposition de clore nos débats de ce soir a retenu toute votre attention, madame la présidente… (Sourires.)

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL184 de Mme Géraldine Bannier.

Mme Géraldine Bannier. Par cet amendement, je propose que les interventions sur les amendements passent de deux minutes à une minute. Loin de moi l’idée d’un « massacre à la tronçonneuse » du temps de parole, ou d’un non-respect de l’expression d’idées différentes des miennes. J’ai toujours respecté la parole de tout le monde.

Mais je suis très sensible au décrochage de nos concitoyens par rapport à la parole politique. J’ai eu, pendant des années, des collégiens devant moi, et j’ai constaté que la capacité d’attention n’est plus la même qu’autrefois. Il est parfois compliqué, pour nos concitoyens, de suivre les débats à l’Assemblée. Ceux qui essayent de me suivre depuis mon élection me disent toujours : « Mais comment fais-tu pour tenir ? Comment fais-tu, dans ce bla-bla permanent ? »

J’y suis sensible, et j’ai donc déposé cet amendement afin d’inciter mes collègues à être le plus bref et le plus concis possible. Je pense que nous y gagnerons tous.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je serais tenté d’accepter votre amendement pour faire plaisir au président Chassaigne. J’émets cependant un avis défavorable, car le saut culturel par rapport à notre histoire parlementaire serait trop fort et, partant, déraisonnable.

M. Thibault Bazin. On a connu le Mouvement Démocrate un peu plus démocratique ! Au demeurant, cette pratique a cours dans certaines commissions, je pense en particulier à celle des affaires sociales pour l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). Je puis vous dire que, sur des sujets complexes et demandant un peu de technicité, il est déjà difficile de tenir en deux minutes sans verser dans le slogan. Si l’on veut aller au fond des choses, étudier sérieusement les sujets concrets qui touchent nos concitoyens, une minute ne suffit pas ; deux minutes sont un minimum.

M. Raphaël Schellenberger. J’abonde dans le sens de mon collègue Bazin. Ce n’est pourtant pas nous qui avons théorisé l’idée que nos raisonnements étaient trop complexes et subtils pour être compris…

Monsieur le rapporteur, vous nous avez dit que nous avions la chance d’examiner une réforme dont nous nous sommes autosaisis, et non d’une initiative gouvernementale. Or, quand je regarde l’agenda de notre Assemblée et que j’y vois la réforme constitutionnelle annoncée pour la session extraordinaire d’automne, je me prends à douter, et plus encore quand je lis, ici et là, que certains voudraient précipiter la chose et commencer dès cet été. Je commence même à penser que la précipitation observée dans la réforme du Règlement n’est pas uniquement le fait du législateur…

Enfin, l’explication que vous donnez de la façon dont vous avez construit ce que vous appelez un consensus me hérisse le poil. Si vous pensez que, parce que vous avez satisfait à telle ou telle demande des socialistes sur le temps législatif programmé ou des communistes – pas forcément de leur président, d’ailleurs – sur la taille des groupes, l’ensemble sera accepté par tout le monde, vous vous trompez, car vous ne voulez tout simplement pas voir que la réforme est en réalité inacceptable.

M. Philippe Gosselin. Il est arrivé sous votre présidence, madame la présidente –mais j’ai eu aussi l’honneur de présider quelques séances sur la révision de la Constitution –, que, d’un commun accord, parce qu’il y avait une accumulation d’amendements assez proches et que l’état d’esprit était plutôt à la détente, que les temps de parole soient ramenés à une minute sans aucune difficulté. Conservons cette souplesse, cette possibilité d’en décider d’un commun accord. Il y a déjà suffisamment de sujets de fâcherie. Voilà mon point de vue, exprimé en trente-deux secondes ! (Sourires.)

M. Paul Molac. Je suis d’accord avec le rapporteur. Il y a eu des discussions et je crois que la démocratie, c’est le compromis. Dans un compromis, on n’est jamais totalement satisfait. Mais mieux vaut un mauvais compromis qu’une bonne querelle. C’est en tout cas ainsi que cela fonctionne en Bretagne, et c’est ce qui explique que, quelquefois, j’arrive à être d’accord avec Marc Le Fur ! (Sourires.)

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL183 de Mme Géraldine Bannier.

Mme Géraldine Bannier. Il s’agit de proposer une expérimentation, avec l’accord des présidents de groupe, sur le passage de deux minutes à une minute. Le but n’est pas d’accélérer le temps législatif, mais d’achever nos travaux un peu plus tôt afin de mieux travailler sur le terrain. Être clair et concis est une façon de s’améliorer et de se réconcilier avec ses concitoyens.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’article 27 sans modification.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je vais vous décevoir, madame Jacquier-Laforge, mais nous allons poursuivre nos débats jusqu’à une heure du matin, comme nous en avons encore l’habitude.

M. Philippe Gosselin. Comment se présente la suite de nos travaux, madame la présidente ?

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Demain et vendredi, nous serons dans l’hémicycle, où nous examinerons le projet de loi relatif à la fonction publique. Nous disposerons d’un créneau en commission mercredi prochain, le matin et, le cas échéant, l’après-midi. Je souhaite cependant que nous avancions ce soir dans l’examen de la proposition de résolution, de façon à pouvoir mettre en ligne rapidement le plus grand nombre d’articles possible dans le texte issu de nos votes, afin que chacun puisse travailler sur une version consolidée.

Après l’article 27

La Commission examine l’amendement CL189 de M. Paul Molac.

M. Paul Molac. Mon amendement vise à supprimer une pratique qui est pratiquement tombée en désuétude mais que je trouve parfaitement détestable, à savoir celle de la seconde délibération.

Avec cette pratique, lorsque le Parlement gagne, si j’ose dire, un « duel » avec le Gouvernement – parfois à deux, trois ou quatre heures du matin –, le ministre qui représente celui-ci demande une deuxième délibération en fin d’examen du texte, lorsque les députés qui ont été en première ligne pour défendre un amendement ne sont plus forcément là. Je pense que ce n’est pas sain pour les débats. Ce qui est voté est voté !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Cette faculté est certes peu utilisée, mais, quand elle l’est, elle se révèle fort utile, notamment pour corriger des erreurs matérielles ou pour tenir compte de solutions de compromis trouvés à la dernière minute. Avis défavorable.

M. Philippe Gosselin. Une fois n’est pas coutume, je rejoins le bloc de l’exécutif et de la majorité. Il me paraît assez logique, ou en tout cas cohérent, que le Gouvernement s’assure de la cohérence d’un texte, en évitant que sa rédaction ne soit le fruit d’une coalition hétéroclite, formée à un instant donné, parce que le déjeuner ou le dîner de certains membres de la majorité s’est prolongé, fournissant l’occasion à d’autres de faire un « coup » politique.

M. David Habib. Je partage totalement cette analyse. Notre objectif est de voter des textes, non de faire des « coups ». Comme l’a dit le rapporteur, cette deuxième délibération est utilisée, la plupart du temps, pour corriger des erreurs commises au cours de l’examen du texte. Mon intervention, comme celle de M. Gosselin, montre que nous n’avons pas la volonté de réduire les prérogatives du Gouvernement. Espérons que vous nous prouverez que vous n’avez pas celle de réduire les prérogatives et libertés de l’opposition…

La Commission rejette l’amendement.

L’amendement CL38 de M. Michel Zumkeller est retiré.

La Commission adopte l’amendement de cohérence CL319 du rapporteur. L’article 27 bis est ainsi rédigé.

Article 28 (Chapitre V bis du titre II du Règlement de l’Assemblée nationale [nouveau]) : Procédure de législation en commission

La Commission examine l’amendement CL102 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. Ce nouvel article prévoit que le droit d’amendement du Gouvernement et des députés, sur tout ou partie d’un projet ou d’une proposition de loi, pourra s’exercer uniquement en commission, tandis que la séance publique sera limitée aux explications de vote et au vote sur les dispositions, examinées seulement en commission.

Cet article représente un recul important du droit d’amendement des députés. En effet, un député est membre d’une commission permanente et il est tenu d’assister aux réunions de cette commission. Or il peut, comme c’est mon cas, être passionné par les activités d’une autre commission, comme celle des lois, où je viens vous rendre visite de temps en temps. Un député qui s’intéresse ainsi à un texte du ressort d’une autre commission pourra se trouver, du fait de son obligation de présence dans sa commission d’appartenance, empêché d’assister à la commission qui examinera ce texte.

Si cet article était adopté, il n’aurait alors plus aucune possibilité d’amender ce texte, ce qui n’est pas envisageable.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Cette procédure représente à mes yeux une avancée. Je vous rappelle que le Sénat l’a expérimentée et mise en œuvre. Nous ne sommes donc pas en terrain inconnu. J’ajoute qu’il faut l’unanimité des groupes politiques pour la mettre en place, puisque n’importe quel président de groupe dispose d’un droit de veto, au début de la procédure et à la fin ; il peut en effet s’y opposer au début de la procédure, ou signifier in fine son opposition au résultat.

Ainsi, nous disposons de tous les garde-fous pour n’utiliser cette procédure que lorsqu’il y a un consensus réel. En outre, il est possible de faire une ingénierie un peu plus fine pour n’examiner dans le cadre de cette procédure qu’une partie d’un texte. Je vous demande donc de considérer que c’est une avancée. Sa mise en œuvre ne se fera jamais contre un groupe d’opposition, puisqu’il existe un droit de veto.

M. Bruno Questel. Tout député, je le souligne à l’intention de M. Bazin, gardera la possibilité de venir assister aux travaux et de défendre ses amendements, comme le prévoit l’alinéa 10.

Mme Cécile Untermaier. Effectivement, nous sommes en face d’une avancée importante, assortie d’un garde-fou de haute sécurité, à savoir un droit de veto reconnu à chaque président de groupe. Vous voyez que nous sommes capables de reconnaître les bonnes orientations, dès lors que les garanties sont là !

M. Thibault Bazin. Je vais être constructif et retirer cet amendement.

L’amendement est retiré.

La Commission examine l’amendement CL263 de Mme Élodie Jacquier-Laforge.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Je propose d’étendre le droit d’opposition à la procédure de législation en commission à un dixième des membres de l’Assemblée.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. La mise en œuvre serait par trop complexe. Il faut savoir aussi que ce droit d’opposition devra s’exercer dans un délai assez court, pour ménager la possibilité d’en revenir à la procédure ordinaire. L’expérience du Sénat, où avait été retenu un délai de 24 heures, montre que celui-ci est trop court, et c’est pourquoi nous avons proposé 48 heures. Étendre le droit d’opposition à un dixième des députés me semble en tout cas peu opportun.

M. Raphaël Schellenberger. Je voudrais mettre le doigt sur une incohérence propre à la majorité. Alors que toute sa réforme est fondée sur le caractère assez monolithique de son groupe principal, nous examinons un amendement, issu de l’autre groupe de la majorité, mettant en garde contre le risque qu’il y ait des députés en désaccord avec leurs présidents de groupe, et qu’ils arrivent à être assez nombreux pour représenter un dixième des députés, soit plus que ce qu’il faut pour constituer un groupe politique…

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Sans doute n’avez-vous pas compris l’intention qui préside à cet amendement. Le but est d’arriver à un équilibre, ce qui prouve que la discussion est importante. Il ne s’agit pas de constituer des blocs monolithiques, mais de laisser le jeu nécessaire pour arriver à ce point d’équilibre.

Le texte qui nous est présenté doit connaître encore des évolutions. Il faut arriver à un texte qui soit écrit de telle sorte que le droit de parole soit respecté, mais en réduisant le temps de la discussion. Cela ne veut pas dire que l’on ne maintient pas le débat en séance publique.

M. Philippe Gosselin. Qu’un président de groupe puisse s’opposer en amont et en aval à la législation en commission me paraît plutôt équilibré. On peut tout à fait s’inspirer de ce qui se fait au Sénat, qui n’a pas la réputation d’être vent debout contre toute réforme.

Peut-être faudrait-il réfléchir, cela dit, à compléter de façon pragmatique le futur article 107-2 du Règlement qui dispose que tous les députés peuvent participer à la réunion de la commission. Comme le disait notre collègue Bazin, nous sommes obligés, le mercredi matin, d’être présents dans notre propre commission. On pourrait donc considérer qu’un député présent dans une autre commission que la sienne le jour où cette commission met en œuvre la procédure de législation en commission verrait reconnaître sa présence comme excusant son absence dans sa commission d’appartenance. Il n’aurait plus, dès lors, à arbitrer entre l’une et l’autre commission, dans la mesure où il accomplit son travail de législateur. Faut-il l’écrire dans le Règlement ? Si c’est le cas, je déposerai un amendement en séance sur ce sujet.

M. Paul Molac. Les usages de cette maison font qu’il m’est assez couramment arrivé de ne pas venir en commission des Lois parce que j’avais d’autres choses à défendre en commission des Affaires culturelles ou en commission des Affaires économiques, et on ne m’a jamais rien dit.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Si l’excuse de votre absence est que vous êtes retenu dans une autre commission, votre absence ne compte pas comme un manquement à votre obligation de présence du mercredi et n’est pas sanctionnée financièrement. En revanche, si vous ne prévenez pas, c’est bel et bien une absence…

M. Paul Molac. Lorsque je vais siéger dans une autre commission, j’ajoute simplement mon nom à la feuille d’émargement et je signe. Personne ne m’a jamais embêté pour cela.

M. Philippe Gosselin. L’objectif est, justement, qu’il n’y ait aucune ambiguïté.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. On me dit que le cas est prévu à l’article 42, alinéa 3 du Règlement actuel.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine, en discussion commune, les amendements CL320 du rapporteur et CL237 de M. Stéphane Peu.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. J’aurais aimé sous-amender l’amendement de M. Peu, mais on m’a expliqué que, techniquement, ce n’était pas possible, comme quoi certaines règles m’échappent encore… Quoi qu’il en soit, avec mon amendement CL320, il s’agit de porter de vingt-quatre à quarante-huit heures le délai dont il est question.

L’amendement CL237 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL320.

Elle adopte l’amendement de précision CL314 du rapporteur.

L’amendement CL238 de M. Stéphane Peu est retiré.

La Commission en vient aux amendements CL103 et CL104 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. S’il est décidé de manière consensuelle, sans qu’aucun président de groupe y ait mis son veto, qu’un texte ne sera étudié qu’en commission, il ne sera pas possible de l’amender en séance. Par conséquent, il conviendrait que les députés qui ne sont pas membres de la commission saisie mais assistent aux travaux de celle-ci puissent voter.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je ne peux qu’être défavorable – vous le savez, cher collègue – à un amendement susceptible de bouleverser complètement les équilibres politiques.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. La composition de chaque commission est représentative de celle de l’Assemblée. Les groupes y sont représentés proportionnellement au nombre total de leurs membres. Votre amendement tendrait à rompre l’équilibre politique de notre assemblée.

M. Jean-Charles Colas-Roy. La question me paraît intéressante. Un collègue peut être privé de la possibilité de voter l’amendement qu’il a lui-même défendu. Il faudrait donc rendre plus fluide le passage d’une commission à l’autre ou trouver un autre système pour résoudre ce problème qui n’est pas tout à fait négligeable.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Malheureusement, cher collègue, si vous changez de commission, cela doit être publié au Journal officiel. Cela ne se fait pas d’un claquement de doigts…

M. Jean-Charles Colas-Roy. Bien sûr, mais réfléchissons quand même à cette question.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL104 de M. Thibault Bazin.

M. Thibault Bazin. Madame la présidente, il ne s’agit pas de modifier l’équilibre politique. Il s’agit de permettre à celui qui dépose un amendement – pas à la terre entière ni même à tout l’hémicycle – de venir participer à son vote.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Avis défavorable, cher collègue.

M. Bruno Questel. Cher collègue Bazin, votre amendement tendrait à rompre l’égalité entre les députés. Cette modification serait censurée par le Conseil constitutionnel.

M. Paul Molac. Pour conserver les équilibres politiques, les votes en commission pourraient être pondérés en fonction de l’effectif des groupes.

M. Philippe Gosselin. Cela pose une vraie question, relativement insoluble. Celui qui vient défendre son amendement dans une autre commission que celle à laquelle il appartient parce qu’il s’intéresse au texte ne peut même pas voter son propre amendement… Je ne sais pas comment résoudre cette question.

Je ne suis cependant pas sûr qu’il y aille de l’égalité entre les députés. Un député vient défendre un amendement déposé, d’autres qui en ont eux-mêmes déposé ne viennent pas… À situation différente, régime différent : la jurisprudence du Conseil constitutionnel est plutôt constante sur ce point.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL239 de M. Stéphane Peu.

M. André Chassaigne. Si des questions doivent être tranchées en commission, il convient qu’il ne se tienne pas de séance publique en même temps. C’est l’objet de mon amendement CL239

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Il faudra effectivement y veiller avec une grande attention. Cela dit, il ne s’agit pas d’interdire toute concomitance. Les commissions devront être attentives à la question. Si une séance publique « ne peut » se tenir en même temps, ce sera une source de complexité juridique infinie. Qu’en sera-t-il en cas de chevauchement partiel ?

M. Raphaël Schellenberger. J’entends : techniquement, cela peut paraître compliqué, mais, en réalité, nos réunions du mercredi matin ne sont que très rarement concomitantes d’une séance publique. Le surcroît de vigilance demandé est minime au regard de l’amélioration permise du point de vue du principe. L’amendement est donc intéressant. Il s’agit de considérer que les procédures simplifiées se déroulent le mercredi matin.

M. Philippe Gosselin. Une fois de plus, c’est une vraie question qui est soulevée, encore une fois liée à la concomitance des travaux. Il me paraîtrait effectivement bon, si nous voulons permettre à chaque commissaire de faire correctement son travail, de le dispenser de galoper de la salle de la commission à l’hémicycle. Privé du don d’ubiquité, il ne peut être au four et au moulin. Et, même en législation en commission, l’examen d’un texte peut nécessiter quelques heures et, commencé le mercredi matin, se poursuivre l’après-midi. Je ne vois pas comment nous allons faire. C’est une vraie question d’organisation, même si elle ne relève pas forcément du Règlement.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Il faudra y être extrêmement attentif, en effet.

La Commission rejette l’amendement.

Elle adopte successivement, les amendements rédactionnels CL341, CL311 et CL313 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 28 modifié.

Article 29 (art. 108 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Coordination des dispositions relatives aux motions de procédures examinées à compter de la deuxième lecture

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette les amendements identiques CL71 de M. David Habib et CL240 de M. Stéphane Peu.

L’amendement CL258 de Mme Élodie Jacquier-Laforge est retiré.

La Commission adopte l’amendement rédactionnel CL312 du rapporteur.

M. Philippe Gosselin. Voici un signe de bonne volonté et de bonne foi : je n’ai pour ma part pas de difficultés à reconnaître une disposition pertinente, comme cet article 29. Lorsque l’on examine un texte en deuxième lecture ou en lecture définitive, il a déjà été l’objet de longs débats. Il ne nous pose donc aucune difficulté de réduire à dix puis à cinq minutes le temps de parole pour défendre une motion. En revanche, en amont, cela ne peut pas se passer de la même manière.

La Commission adopte l’article 29 modifié.

Article 30 (art. 111 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Composition des commissions mixtes paritaires

La commission se saisit de l’amendement CL62 de M. Philippe Gosselin.

M. Philippe Gosselin. Cet amendement de suppression ne procède pas d’un quelconque dogmatisme. Nous craignons une forme d’engorgement des commissions mixtes paritaires (CMP), et des différences de statuts entre ceux qui votent et ceux qui ne votent pas, ceux qui parlent et ceux qui ne parlent pas.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je vois ce que vous voulez dire, cher collègue, et j’ai d’ailleurs déposé un amendement de précision pour mettre un garde-fou. Certes, si le nombre de groupes augmente de cinq ou dix, il ne résistera pas, mais alors, beaucoup de choses, dans notre Règlement, ne tiendront pas.

En CMP, le groupe majoritaire libérera au plus deux sièges de suppléants, et n’en conservera plus que deux dans le cadre actuel, mais cela ne pourra pas aller plus loin. Il n’est pas envisageable de fragiliser le fait majoritaire, sur lequel repose le fonctionnement de notre Parlement.

La question s’est toujours posée – je me rappelle les propos du président Lagarde… – et nous pensons permettre une réelle avancée. Nous verrons si les choses deviennent un jour plus complexes.

M. Philippe Gosselin. Je ne suis pas opposé par principe à ce qui est proposé, je mets simplement en garde contre certains risques. Il me paraît normal que la majorité reste la majorité en CMP. L’introduction d’une part de scrutin proportionnel lors des élections législatives pourra cependant favoriser un certain émiettement et des groupes politiques plus nombreux.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Comme les conclusions de la CMP doivent ensuite être approuvées par la majorité dans l’hémicycle, il n’aurait effectivement aucun sens que le fait majoritaire n’ait plus cours en CMP.

M. Raphaël Schellenberger. Cela me paraît tout de même risqué. Si, en plus, le Sénat ne désigne pas ses délégués en CMP de la même manière que nous, cela introduit une distorsion qui ne me paraît pas forcément appropriée.

Je suis d’accord avec Philippe Gosselin : le fait majoritaire ne nous pose pas problème, mais, sitôt la réforme du Règlement adoptée, la modification que vous proposez nous exposera à des difficultés si les groupes se multiplient.

Mme Maina Sage. Le groupe auquel j’appartiens n’a jamais eu de titulaire en CMP. Étant donné l’enjeu des discussions en CMP, je trouve quand même dommage que tous les groupes n’y soient pas représentés parmi les membres titulaires. En outre, on peut préserver l’équilibre politique et le fait majoritaire en donnant à chaque membre de la CMP un nombre de voix égal au nombre de membres de son groupe – c’est l’objet de l’amendement CL20 qu’avait déposé M. Lagarde, et que nous redéposerons en vue de la séance. C’est déjà ainsi que nous agissons en Conférence des Présidents. Cela permet à la fois la représentation de tous les groupes et le respect des équilibres politiques.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL332 du rapporteur.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Il s’agit du garde-fou que j’évoquais tout à l’heure.

M. Raphaël Schellenberger. Nous introduisons une contradiction invraisemblable : « Il faut que chaque groupe ait un représentant suppléant ou titulaire mais… cela peut ne pas arriver ! »

M. Sylvain Waserman. On donne des places de suppléant, jusqu’au moment où on ne peut plus parce que cela bouleverse le fait majoritaire. Si un nouveau groupe se crée, l’un de ses membres pourra siéger en CMP. Si quinze groupes se créent, ce ne sera pas possible. C’est un garde-fou, juridiquement solide, qui offre une garantie incontournable.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. La CMP étant un organe bicaméral, nous devons aussi tenir compte des règles de l’autre assemblée et de l’équilibre qui doit en résulter.

M. Philippe Gosselin. Vous avez raison de dire « bicaméral ». La CMP est bicamérale, pas réellement « paritaire », et, compte tenu du fait que le Sénat, avec seulement 348 membres, est représenté en CMP par le même nombre de membres que l’Assemblée, son poids relatif est presque double.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 30 modifié.

Après l’article 30

La Commission adopte l’amendement de coordination CL321 du rapporteur. L’article 30 bis est ainsi rédigé.

Puis elle se saisit de l’amendement CL322 du rapporteur.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Il s’agit, dans un souci de cohérence avec la diminution du temps imparti à la défense des autres motions, de réduire le temps de parole accordé pour la défense d’une motion référendaire, même s’il y est très rarement recouru.

La Commission adopte l’amendement. L’article 30 ter est ainsi rédigé.

Elle en vient à l’amendement CL323 du rapporteur.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Il s’agit d’une coordination nécessaire, compte tenu d’une décision rendue par le Conseil constitutionnel en 2014. Cela concerne les propositions de loi présentées en application de l’article 11 de la Constitution.

La Commission adopte l’amendement. L’article 30 quater est ainsi rédigé.

Puis elle se saisit de l’amendement CL324 du rapporteur.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Cet amendement de coordination vise à supprimer les motions d’ajournement.

La Commission adopte l’amendement. L’article 30 quinquies est ainsi rédigé.

Article 31 (art. 132 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Temps de parole des députés non-inscrits lors d’une déclaration du Gouvernement

La Commission adopte l’article 31 sans modification.

Article 32 (art. 133 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Séance des questions au Gouvernement

La Commission examine l’amendement CL241 de M. Stéphane Peu.

M. André Chassaigne. Dans un premier temps, lors des échanges que nous avons eus lors de nos réunions préalables, j’étais plutôt favorable à ce qui est proposé. Après réflexion, nous pensons que ce n’est pas une bonne solution. Le Règlement en vigueur n’empêche pas que l’on décide de ne tenir qu’une seule séance hebdomadaire. En revanche, si nous inscrivons dans le Règlement qu’il n’y a qu’une seule séance, il ne sera plus possible d’en faire deux, à moins d’une nouvelle révision du Règlement.

Par ailleurs, l’article en question ne fixe pas de durée. S’il n’y a qu’une séance, qui nous dit qu’elle durera bien deux heures ou deux heures et demie ? Nous n’avons aucun doute sur le fait qu’il en sera ainsi avec l’actuelle présidence, mais qu’en sera-t-il à l’avenir, avec une autre majorité ?

Par ailleurs, il y a une forme de fidélité des personnes qui regardent ces questions au Gouvernement tous les mardis et mercredis, notamment les personnes âgées. Je crains que le passage à une seule séance n’entraîne une lassitude, si ce sont des séances avec des formes d’allers-retours ou de va-et-vient, et pas seulement pour ceux qui regardent la séance.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je comprends votre point de vue, cher collègue, même si ce n’est pas le mien.

Cela étant, remarque technique, c’est aujourd’hui la Conférence des Présidents qui fixe le nombre de questions. De ce point de vue, la révision du Règlement est neutre. La dernière Conférence des Présidents aurait pu décider d’un changement du nombre de questions.

M. André Chassaigne. J’évoquais la durée des questions, non leur nombre.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Certes, mais les deux sont liés. La durée des questions au Gouvernement, leur nombre, l’équilibre entre opposition et majorité dépendent de la Conférence des Présidents ; c’était le cas hier, ce sera le cas demain. Je suis donc défavorable à cet amendement – et favorable à ce que les questions au Gouvernement se tiennent sur une seule journée de la semaine.

M. David Habib. C’est un sujet délicat, et n’oublions pas l’éventuelle lassitude des membres du Gouvernement, dont le rôle n’est pas de passer tout leur temps à l’Assemblée nationale. Je souhaite qu’ils puissent travailler un peu dans leur bureau – et, dès qu’il fait beau, je les vois aussi tous les vendredis dans mon département, il est vrai très touristique. Il faudrait tout de même qu’ils soient à leur ministère quelques jours par semaine pour y travailler. Voilà qui plaide plutôt en faveur de l’idée d’une seule séance de questions au Gouvernement.

Cependant, le précédent président de l’Assemblée nationale a évoqué cette lassitude dont parlait à l’instant M. Chassaigne. Notre démarche s’inscrit dans une stratégie collective de valorisation du rôle du Parlement et de l’action gouvernementale. Réfléchissons donc. Je ne suis pas certain que cette réforme atteigne son but.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL260 de Mme Élodie Jacquier-Laforge. 

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Je propose d’inscrire dans le Règlement le nombre de questions posées lors de la séance hebdomadaire de questions au Gouvernement. Il devrait être de vingt, contre quinze aujourd’hui. Cela permettrait largement à chaque groupe de s’exprimer. Par ailleurs, il ne me semble pas raisonnable de limiter trop fortement la capacité de parole de la majorité : chaque député, qu’il soit de l’opposition ou de la majorité, doit pouvoir s’exprimer tout au long de son mandat.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. C’est, à mon sens, en Conférence des Présidents que ce sujet doit être traité, chère collègue. Il ne s’agit pas de graver dans le marbre du Règlement quelque chose qui relève de la Conférence des Présidents. Le seul garde-fou prévu par le Règlement est que la moitié au moins des questions doit être réservée à l’opposition, parce que c’est une règle qui participe d’un équilibre général. Il appartient à la Conférence des Présidents de régler la question dans le détail.

M. André Chassaigne. Monsieur le rapporteur, vos propos sont contradictoires. Vous avez raison : c’est la Conférence des Présidents qui décide du nombre de questions. Cependant, c’est également vrai du nombre de séances de questions au Gouvernement ! Elle peut parfaitement décider, aujourd’hui, qu’il n’y aura de questions au Gouvernement qu’une fois par semaine.

M. Raphaël Schellenberger. Le président Chassaigne a raison. Cet article 32 précise que ce sont « au moins » la moitié des questions qui sont posées par des députés membres de groupe de l’opposition ; cela ne pose pas problème. Il supprime en revanche la possibilité d’avoir plusieurs séances de questions au Gouvernement – jusqu’à présent, nous pouvons en avoir deux ou même trois. Supprimer une possibilité est étrange alors que, jusqu’à présent, l’idée était plutôt qu’il ne fallait pas surréglementer, régler trop de questions par le Règlement.

Surtout, essayons d’imaginer à quoi ressemblera une semaine de travail parlementaire. S’il n’y a plus qu’une seule séance de questions au Gouvernement, le mardi, et qu’elle compte vingt ou vingt-cinq questions, elle durera à peu près jusqu’à 17 heures – chaque question ne durera pas simplement quatre minutes, surtout s’il y a un droit de réplique, cela durera forcément cinq minutes. Ensuite, il y aura un vote solennel, puisque nous voulons que les votes solennels aient lieu lorsque les présents sont nombreux. À 19 heures, il sera tout juste temps de prendre le train pour rentrer en circonscription.

M. Rémy Rebeyrotte. Pas le mardi, tout de même !

M. Raphaël Schellenberger. Il y aura encore des réunions de commission obligatoires le mercredi matin, effectivement, mais, le mercredi à midi, il sera temps de prendre le train pour rentrer en circonscription. Finalement, alors que nous trouvions déplorable que l’hémicycle soit si vide le mercredi après-midi, il sera encore plus vide. Se tiendront effectivement des discussions qui ne seront pas moins techniques qu’auparavant mais auxquelles l’affluence sera moindre puisqu’elles ne seront pas immédiatement précédées par les questions au Gouvernement.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL172 de M. Christophe Euzet.

M. Christophe Euzet. J’ai conscience du fait que l’amendement va peut-être au-delà du degré de précision attendu du Règlement, mais il s’agit de faire avancer la réflexion. Je suggère des répliques et contre-répliques au cours des questions au Gouvernement. Je propose aussi que cinq questions soient posées par les députés de la majorité et quinze par les députés de l’opposition, chacun ayant deux minutes pour poser sa question, le Gouvernement disposant de deux minutes pour répondre, l’auteur de la question pouvant répliquer pendant une minute, et le Gouvernement répondre à sa réplique pendant une minute. L’objectif est de revivifier les questions au Gouvernement. Si elles suivent ce format, elles dureront exactement deux heures.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Encore une fois, nous abordons une question qui relève de la Conférence des Présidents. Les propos tenus tout à l’heure par le président Chassaigne étaient pertinents, mais jusqu’à quel degré de précision faut-il aller dans le Règlement ?

L’amendement est retiré.

La Commission se saisit de l’amendement CL63 de M. Philippe Gosselin.

M. Philippe Gosselin. Il s’agit du droit de réplique.

Le Règlement en vigueur permet tout à fait à la Conférence des Présidents, parfaitement légitime pour le faire, de fixer le nombre de séances de questions au Gouvernement. Elle pourrait disposer qu’il n’y en a habituellement qu’une, tout en conservant la possibilité, certaines semaines, si elle juge que c’est nécessaire, de décider qu’il y en aura deux. Nous pourrions éviter de graver le nombre de séances de questions au Gouvernement dans le marbre du Règlement.

Une grande partie de la majorité évoquait l’insoutenable « tunnel » de ces discussions générales qui durent une heure et demie. Or, voici que nous subirons un tunnel de deux heures, et je ne parle pas du risque de dépassement de ce temps : actuellement, les questions au Gouvernement durent plutôt une heure et quart qu’une heure ; avec les réponses, que je ne conteste pas, du Premier ministre, elles dureront demain plutôt deux heures et quart que deux heures. Ce long tunnel risque d’être pire que celui des discussions générales ! J’exprime là non une opposition mais une interrogation pragmatique. Si nous nous en tenions à la lettre actuelle, la présidence actuelle pourrait tout à fait expérimenter le dispositif envisagé jusqu’à la fin de la législature ou sur une période plus courte – une session ordinaire ou six mois – et vérifier s’il nous expose à cet « effet tunnel » sur le risque duquel j’appelle votre attention. Qu’il n’y ait pas d’ambiguïté : c’est une interrogation, pas une opposition de principe de mon groupe.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Avis défavorable, mais je comprends le propos développé par M. Gosselin. Je réexaminerai cela d’ici à l’examen en séance. Mon point de vue est clair : il ne faut pas « charger » le Règlement en y ajoutant des dispositions jusqu’à présent arrêtées par la Conférence des Présidents. Il faut regarder s’il y a des effets de bord.

Mme Cécile Untermaier. Je souscris à la nécessité d’une approche pragmatique. Il ne faut pas alourdir le Règlement. Nous pourrions nous en tenir à sa lettre actuelle, mais la mention de « séances hebdomadaires » au pluriel n’impose-t-elle pas d’en tenir plusieurs ? Il faut travailler sur ce sujet pour trouver une formulation qui permette les deux possibilités.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine les amendements CL40 et CL39 de M. Michel Zumkeller.

Mme Maina Sage. L’amendement CL40 vise à instaurer un roulement entre les groupes pour les premières questions posées. Il s’agit de faire en sorte que chaque groupe puisse poser une question dès le début de la séance. Il arrive parfois que certains petits groupes ne puissent poser que la douzième ou la quinzième question. Ce n’est pas très juste. L’amendement CL39 vise quant à lui à permettre qu’une partie des deux minutes allouée à chaque question comprenne une réplique à la réponse du Gouvernement.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Dans le cadre du Règlement, nous n’avons pas besoin d’organiser le déroulement de la séance avec ce degré de précision. Je suis donc défavorable à ces amendements.

La Commission rejette successivement les amendements.

Puis elle adopte l’article 32 sans modification.

4.   Première réunion du mercredi 22 mai à 9 heures 30 (après l’article 32 à article 42 de la proposition de résolution)

Lien vidéo :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.7678646_5ce4f907caaf6.commission-des-lois--modification-du-reglement-de-l-assemblee-nationale-suite-22-mai-2019

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Mes chers collègues, nous nous retrouvons ce matin pour achever l’examen de la proposition de résolution tendant à modifier le Règlement de notre assemblée. Après les trois réunions de mercredi dernier, il nous reste quarante-sept amendements à examiner. Nous en étions aux amendements portant articles additionnels après l’article 32.

Après l’article 32

La Commission examine l’amendement CL135 de Mme Sylvia Pinel.

M. Paul Molac. Nous proposons que les séances de questions orales sans débat ne se déroulent plus dans l’hémicycle. Ces questions sont importantes car elles permettent d’aborder des réalités locales, mais nous devons trouver un autre lieu symbolique pour les poser car elles ne nécessitent pas que nos débats dans l’hémicycle soient coupés par ces séances qui ne réunissent que les quelques auteurs des questions devant peu – voire pas – de public. Nous pourrions trouver un autre lieu pour les traiter, ce qui nous permettrait d’avancer dans la fabrication de la loi.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. L’interdiction de tenir les questions orales sans débat dans l’hémicycle suscite des débats pertinents sur le fond. Il y a ceux qui sont pour, ceux qui sont contre, ceux qui proposent un meilleur endroit pour les poser. Mais, quel que soit son intérêt sur le fond, je considère que le sujet n’a pas sa place dans le Règlement. Avis défavorable.

M. Paul Molac. Certains collègues ne sont pas favorables à cette interdiction pour des raisons symboliques et nous avons déposé cet amendement pour que nous y réfléchissions ensemble. Nous pouvons certainement trouver un autre lieu que l’hémicycle, qui soit symbolique néanmoins et qui permette de garder la solennité de ces questions.

M. Philippe Gosselin. Nous pouvons certes y réfléchir. Toutefois, s’il m’arrive d’entendre des remarques acerbes sur le nombre de parlementaires présents lors d’un vote à telle ou telle heure, je n’ai jamais été interpellé dans ma circonscription sur le peu d’affluence aux questions orales sans débat. Sans vouloir nous dévaloriser, je pense que peu de nos concitoyens, hélas, connaissent ces questions orales sans débat. Je ne suis donc pas sûr que ce soit un sujet fondamental. Interrogeons-nous peut-être sur la façon de tenir ces séances car il ne faut pas négliger la symbolique.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie de l’amendement CL80 de Mme Cécile Untermaier.

Mme Cécile Untermaier. Il s’agit de renforcer les droits des groupes de l’opposition. Il est proposé de porter leur droit de tirage sur les commissions d’enquête d’un à deux par session ordinaire. Cette possibilité – ce ne serait pas une obligation – renforcerait de manière substantielle les droits spécifiques de l’opposition. Nous pourrions d’ailleurs avoir la même réflexion sur les missions d’information.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Un droit de tirage en plus pour les groupes minoritaires ou d’opposition se traduirait par sept occurrences supplémentaires. J’y suis défavorable. Les commissions d’enquête donnent lieu à une avancée majeure : le groupe qui fait la demande pourra choisir d’avoir le poste de rapporteur. Je préfère ce changement qualitatif à une augmentation quantitative. On peut rêver des deux, mais il est plus raisonnable d’en rester là.

M. David Habib. Monsieur le rapporteur, on peut trouver son bonheur à la fois dans le quantitatif et le qualitatif ! En l’occurrence, vous allez être confrontés à une difficulté majeure jusqu’à la fin de cette législature : en contingentant la parole, vous allez devoir occuper – je sais que le verbe va choquer – votre majorité et le Parlement.

Vous avez choisi de privilégier les interventions écrites annexées au Journal officiel, de limiter la prise de parole sur les articles et sur les amendements. Il faut donner aux députés matière à engager leur responsabilité. C’est vraisemblablement vers l’évaluation et le contrôle de l’action gouvernementale que la fonction de parlementaire va se réorienter.

J’enregistre la proposition de Mme Untermaier comme une possibilité pour le Parlement de répondre aux choix que vous avez initiés et que je n’approuve pas. Il y a une contradiction à limiter l’expression tout en refusant d’augmenter les possibilités de contrôle, notamment de la part des élus de la majorité. Je ne pense pas tellement aux élus de l’opposition : nous trouverons toujours les moyens de vous critiquer d’autant plus que, d’une façon générale, vous nous en donnez la matière. Mais vous, vous aurez des difficultés.

Monsieur le rapporteur, je vous suggère donc d’examiner la proposition de Mme Untermaier avec intérêt.

M. Michel Zumkeller. Nous défendons aussi l’idée de donner au Parlement la possibilité de faire plus de commissions d’enquête. Comme mon collègue Habib l’a très bien dit, cette idée s’inscrit dans la logique du présent texte. Vous ne pouvez pas modifier les temps de parole – ce qui n’est pas choquant pour un habitué des débats – sans donner aux groupes – particulièrement à ceux de l’opposition – plus de droits de tirage sur les commissions d’enquête. Nous constatons d’ailleurs que vous êtes obligés de céder et d’en rajouter quand émergent des sujets vraiment importants.

Prévoyons un peu plus de temps pour les commissions d’enquête. Nous sentons bien que nous n’arrivons pas à exercer cette mission de contrôle dévolue au Parlement. Nous sentons bien que c’est là que ça pêche. En quoi serait-il embêtant de créer des commissions d’enquête supplémentaires ? Nous pouvons en revoir le fonctionnement, prévoir moins de membres, etc. Mais permettez aux députés, principalement à ceux de l’opposition, de créer davantage de commissions d’enquête car nous vivons dans un monde où de plus en plus de sujets s’y prêtent. Pour notre part, au groupe UDI, Agir et Indépendants, nous sommes très favorables à l’augmentation du nombre de commissions d’enquête.

M. Ugo Bernalicis. Finalement, les parlementaires n’exercent peut-être plus leur mission de contrôle de l’action du Gouvernement que par le biais des commissions d’enquête. Les questions au Gouvernement ressemblent davantage à un moment d’exposition qu’à un moment de contrôle. Les questions orales sans débat ressemblent plus à un moment d’exposition micro-locale qu’à un moment de contrôle. Les semaines de contrôle ressemblent plus aux questions au Gouvernement, qui ne sont pas non plus des moments de contrôle. En définitive, il ne reste plus grand-chose pour vraiment contrôler l’action du Gouvernement et l’exécutif.

Même les missions d’information, parce qu’elles n’ont pas les pouvoirs d’enquête, ne permettent pas d’aller jusqu’au bout de la démarche. Dans nos missions, nous dépendons systématiquement des documents donnés par l’exécutif, que nous sommes obligés de prendre pour argent comptant. Lors des commissions d’enquête, nous pouvons avoir affaire à des gens qui parjurent mais, au moins, nous avons un dispositif. De nos débats devrait peut-être émerger l’idée de donner les pouvoirs d’enquête à toutes les missions d’information. Ce serait déjà une belle avancée pour tout le monde.

Sur les droits de tirage, nous pourrions préciser qu’il y en aurait deux par session mais un seul par semestre pour des questions de moyens : les commissions d’enquêtes mobilisent des députés et des administrateurs. Quoi qu’il en soit, s’il y a quelque chose à faire pour renforcer les droits de l’opposition, c’est bien cette augmentation des droits de tirage sur les commissions d’enquête. Le débat sur les postes de président et de rapporteur peut sembler très important en interne et vous pouvez considérer, monsieur le rapporteur, que vous accordez une amélioration qualitative aux groupes de l’opposition. Vu de l’extérieur, c’est aussi important que les questions orales sans débat. Voilà la réalité. Les avancées majeures seront liées à la capacité à faire des enquêtes.

M. Sacha Houlié. Depuis le début de cette législature, les oppositions ont trouvé un moyen de contourner les règles du règlement : la multiplication des groupes provoque une multiplication des droits de tirage sur les commissions d’enquête.

M. Raphaël Schellenberger. Où étiez-vous la semaine dernière ?

M. Sacha Houlié. J’étais ici la semaine dernière, monsieur Schellenberger, ce qui ne vous autorise pas à m’invectiver. Il y a plus longtemps, j’étais au Bureau de l’Assemblée nationale ou à la Conférence des Présidents. J’y ai observé que tous les groupes ne font pas usage de leurs droits de tirage, ce qui tendrait à montrer que le nombre de commissions d’enquête, limité à une par session ordinaire ou par session extraordinaire, est suffisant. Quand elles portent sur des sujets sensibles, les commissions d’enquête font d’ailleurs l’objet d’un consensus au sein de la commission des Lois. Il n’est donc pas utile d’en augmenter artificiellement le nombre.

La majorité a consenti des avancées pour trouver un équilibre qui nous permettrait d’adopter la réforme du Règlement de façon concertée. Si ces avancées sont jugées insuffisantes, notamment en ce qui concerne la désignation des rapporteurs et présidents de commissions d’enquête, peut-être faut-il y renoncer ? S’il n’y a aucune reconnaissance de ces avancées, peut-être pouvons-nous en faire l’économie. (Exclamations.)

M. Philippe Gosselin. Vous sortez le bâton !

M. Sacha Houlié. Vous êtes bien susceptible !

M. Philippe Gosselin. Non, mais je n’aime pas être pris pour un idiot !

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. S’il vous plaît…

M. Philippe Gosselin. Cela se passait bien et il nous allume !

M. Raphaël Schellenberger. Mercredi dernier, nous avons terminé la troisième réunion à une heure du matin sans finir l’examen du texte. J’ai cru comprendre que, depuis, des discussions ont eu lieu sur les points de blocage identifiés. Lorsque nous avons repris les discussions ce matin, nous pensions travailler dans de meilleures conditions qu’à la fin de notre dernière réunion. Et d’emblée, l’un des orateurs du groupe La République en Marche nous dit que nous devons dire merci en nous prosternant devant la majorité si nous voulons obtenir quelque chose. Stop !

En plus, Ugo Bernalicis, que l’on ne peut pas soupçonner de faire partie d’une opposition particulièrement consensuelle, proposait des ouvertures : lisez les amendements de son groupe. Le débat sur le droit de tirage est intéressant. Que ce droit soit ou non utilisé, là n’est pas la question. Y a-t-il trop de groupes ou non ? Nous en avons parlé la semaine dernière. Vous avez écarté nos propositions, mesdames et messieurs les membres de la majorité. Ne venez pas nous reprocher qu’il y ait trop de groupes parlementaires alors que vous avez refusé d’en débattre la semaine dernière.

Pour en revenir à l’amendement, qui prévoit deux droits de tirage par groupe et par session, je pense qu’il faut être raisonnable. Quand on sait comment fonctionne l’Assemblée, cela semble compliqué. En revanche, la proposition de M. Bernalicis me semble plutôt intéressante : si soixante députés le souhaitent, il sera possible de créer une commission d’enquête supplémentaire. C’est une proposition d’équilibre et de bon sens, ce qui est rare de la part du groupe de La France insoumise. Pour une fois que c’est le cas, on peut le souligner.

M. Philippe Gosselin. J’aimerais répondre à l’interpellation de notre collègue de la majorité et lui rappeler quelques éléments de bon sens et d’apaisement.

La semaine dernière, nous avons fait preuve de compréhension. On peut ne pas partager certaines positions, mais il me semble que le président de l’Assemblée nationale souhaite aboutir à un texte approuvé par le plus grand nombre possible de groupes politiques. Des réunions se déroulent à l’étage, entre le président de l’Assemblée et les présidents de groupe. Il y en a eu une ce matin dont les membres de la majorité doivent être parfaitement au courant, sinon je les invite à se renseigner. Il ne faudrait pas que ces réunions soient gâchées par des interpellations intempestives et des petits chiffons rouges agités. Qu’il y ait de la concurrence entre membres de la majorité, au sein de cette commission, c’est une chose. Que certains veuillent se positionner pour d’autres fonctions, c’est une chose. Mais je vous invite à un peu plus de sérénité.

S’agissant de l’amendement de M. Bernalicis, je trouve la proposition assez intéressante. Le nombre choisi rappelle la saisine par soixante députés ou sénateurs du Conseil constitutionnel. C’est un chiffre qui correspond en gros à 10 % des effectifs de l’Assemblée nationale. Cela me paraît assez cohérent. Cette proposition assez équilibrée pourrait nous permettre d’avancer. En tout cas, elle a le mérite d’exister et d’être constructive, ce que je souhaite rappeler à tous les membres de cette commission.

Mme Emmanuelle Ménard. Pour ma part, je suis plutôt favorable à l’augmentation du nombre de droits de tirage sur les commissions d’enquête. Que ces droits soient utilisés ou pas, ce n’est pas le problème. Les groupes en décideront.

Je voudrais aussi faire un point d’ordre. Nous apprenons par hasard, madame Lorho et moi-même, que des discussions se déroulent parallèlement aux travaux de la commission des Lois. Non seulement les députés non-inscrits ne sont pas associés à ces discussions, mais ils n’en sont même pas informés. Serait-il possible, monsieur le rapporteur, de nous faire un point sur l’état d’avancement de ces discussions ? Sur quoi portent-elles ? Que se passe-t-il dans ces réunions parallèles auxquelles les députés non-inscrits ne sont pas invités ?

J’ai l’impression de dire et de rabâcher toujours à la même chose : les non-inscrits sont des députés élus comme les autres ; nous ne sommes pas des sous-députés. Faites appel à M. Lassalle, il viendra vous le chanter ici. C’est toujours la même chose. Vendredi soir dans l’hémicycle, j’ai appris par hasard que Mme la présidente avait décidé, d’un commun accord avec les groupes, que la séance se terminerait à minuit. Évidemment, les députés non-inscrits n’avaient pas été mis au courant. Pourrions-nous avoir un minimum d’information ?

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Pour ce qui concerne la commission des Lois je vais vous informer. La semaine dernière, j’ai annoncé que nous aurions un moment d’échange avec un représentant par groupe à la suite de notre réunion. Je viens d’en discuter avec le rapporteur. Madame Ménard et Madame Lorho, vous êtes les bienvenues si vous souhaitez vous associer à cet échange au nom des députés non-inscrits. Il faudra choisir entre vous deux car c’est un représentant par groupe.

Mes chers collègues, je vous invite à garder la sérénité des débats que nous avions eue la semaine dernière.

M. Philippe Gosselin. Adressez-vous à la majorité !

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je pense que les torts sont partagés. Cette proposition de résolution sur le Règlement est une affaire très importante et c’est notre affaire à tous. Nous avons encore quarante-deux amendements à examiner. J’aimerais qu’ils le soient dans l’écoute et le dialogue.

M. Paul Molac. Madame Ménard, ces discussions informelles entre différents groupes et le président de l’Assemblée sont courantes. S’il s’agit de réunions plus institutionnalisées, c’est un peu différent. Mais on ne va pas être choqué d’apprendre qu’un président de groupe discute avec le président de l’Assemblée.

Pour le reste, je ne comprends pas bien les réticences de la majorité à l’égard de ces amendements. Que peut-on craindre ? Les sujets pourront certes être polémiques. Faut-il les mettre sous le boisseau et ne pas en discuter ? Faut-il créer une commission d’enquête et en débattre publiquement ? Certaines affaires sont réglées par le juge et non pas par nous. Est-il sain d’en débattre ?

Prenons le cas des tirs de lanceurs de balles de défense qui ont fait beaucoup de victimes. Dans certains cas, il semble que les tirs n’étaient pas justifiés. Le juge va très probablement nous rappeler qu’il faudrait des règles claires pour que ces armes ne soient pas utilisées à tort et à travers. Je pense que nous aurions été tout à fait dans notre rôle si nous avions pu créer une commission d’enquête à ce sujet. Nous aurions eu à analyser la manière dont la violence est utilisée dans les manifestations. Il ne faut pas être naïf : certains manifestants ne sont pas du tout gentils. Mais la force publique doit aussi être proportionnée.

Pour résumer, je pense qu’il serait positif d’augmenter les droits de tirage sur les commissions d’enquête.

M. Bruno Questel. Il nous reste plus de quarante amendements à étudier et je voudrais appeler chacun à revenir à une forme de sérénité collective et non dissimulée. (Protestations.) J’ai dit chacun, vous n’étiez donc pas les seuls visés par ma remarque.

M. Philippe Gosselin. Quand on nous allume…

M. Bruno Questel. Nous avons compris le message, monsieur Gosselin. Nous avons compris combien vous étiez sensible, surtout le matin, et susceptible.

M. Philippe Gosselin. Et voilà, il remet cent balles dans la machine ! C’est affligeant !

M. Bruno Questel. Mais oui, vous êtes les seuls à faire les choses comme il faut !

Pour en revenir aux non-inscrits et aux propos de Mme Ménard, je signale que c’est la première fois que, dans une proposition de modification du Règlement de l’Assemblée, autant d’améliorations du statut des non-inscrits sont apportées. De nombreux amendements, notamment de M. Gosselin, visent à supprimer les dispositions que nous proposons pour améliorer vos conditions de travail. Je vous invite à vous y opposer.

M. Erwan Balanant. Madame Ménard, je voudrais vous rassurer. Le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés fait partie de la majorité. Or nous ne savions pas qu’il y avait une réunion en ce moment même. Il est tout à fait normal que les présidents se voient. Il est parfois normal que nous n’en soyons pas informés ou que nous ne l’apprenions qu’après la réunion : pour préserver la sérénité de leurs débats, il peut être intéressant qu’ils se voient de façon un peu confidentielle.

Comme l’atmosphère est un peu tendue, nous pourrions peut-être faire une petite pause pour que nous puissions nous mettre d’accord sur un modus operandi et avancer ensuite sereinement. (Protestations.) Si ce n’est pas nécessaire, continuons, mais nous devons travailler sereinement sur ce sujet très important. C’est de notre vivre ensemble dont il s’agit.

Mme Cécile Untermaier. Notre amendement, qui semble susciter un réel intérêt, est dénué d’esprit partisan, car il répond à un vrai besoin.

J’aimerais faire une remarque à propos de la réunion des présidents de groupe qui se tient au même moment que nos travaux. Quelle est l’utilité de nos travaux si des décisions et des orientations sont prises au plus haut niveau ? À tout le moins, on aurait pu attendre que la commission des Lois ait fini son travail avant de rassembler les présidents de groupe. J’ajoute que la transparence est importante pour le calme des débats.

J’en reviens à notre amendement. Nous demandons un deuxième droit de tirage parce que, depuis des années, nous constatons que le contrôle du Gouvernement par l’Assemblée ne fonctionne pas. Avec le « printemps de l’évaluation », vous avez tenté d’y remédier. Je ne critique pas cette initiative mais nous voyons qu’elle ne donne pas les résultats attendus. C’est en collant à l’actualité, avec des commissions d’enquête qui intéressent les citoyens, que nous arriverons à faire de l’Assemblée nationale, ce que l’on appelle le cœur battant de la démocratie. Ce n’est pas avec le « printemps de l’évaluation » et les questions orales sans débat que nous allons ressusciter l’intérêt de nos concitoyens pour la politique.

Après réflexion et en sachant le coût que ça peut représenter, nous avons considéré qu’il fallait ajouter des commissions d’enquête, qui sont un élément très intéressant, attendu et vivant de la démocratie.

S’agissant des moyens, voyons s’il n’est pas possible de rééquilibrer le budget global de l’État au bénéfice de l’Assemblée nationale pour qu’elle ait des administrateurs prélevés sur l’effectif des fonctionnaires. Rappelons au passage le débat sur les contractuels dans la fonction publique. Nous avons là un combat à mener qui dépasse le seul aspect du Règlement. Dans les commissions d’enquête, il est essentiel que les députés soient épaulés par des experts. Les groupes de l’opposition ont une vraie difficulté à fonctionner sans moyens. Nous devons revendiquer des moyens. Le budget global de l’État peut très bien, par un équilibre juste, atténuer la pression de l’exécutif et faire en sorte que le législatif puisse avoir les moyens de faire des travaux de qualité.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Pour ma part, je considère que le nombre de droits de tirage sur les commissions d’enquête est satisfaisant. Nous devons fixer des priorités car le mieux est parfois l’ennemi du bien. Je vous entends, madame Untermaier : nos moyens sont, somme toute, limités ; les fonctionnaires de l’Assemblée nationale sont dévoués et sollicités. Compte tenu de l’actualité foisonnante, il peut être insatisfaisant de n’avoir qu’un droit de tirage par groupe, mais nous devons plutôt chercher à définir des axes et des priorités. Nous ne voterons pas pour cet amendement.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Monsieur Habib, vous avez dit des choses très intéressantes sur le temps consacré à l’évaluation. Vos propos rejoignent les échanges que nous avons, notamment avec Marie Tamarelle-Verhaeghe, vice-présidente du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC), sur la nécessité de renouveler cette logique d’évaluation.

Les groupes d’opposition considèrent qu’un droit de tirage supplémentaire représenterait du temps de contrôle et d’évaluation en plus, ce que je comprends. Nous voulons établir un rapport sur tout ce qui se fait à l’Assemblée nationale en matière d’évaluation, que ce soit par le biais des commissions d’enquête ou des travaux de la commission des Lois et des autres commissions. Nous sommes tous conscients qu’il faut redonner un niveau de priorité important à l’évaluation et au contrôle. Nous sommes tous acquis à cette cause.

Pour ma part, je reste défavorable à la multiplication du nombre des commissions d’enquête. Quand les droits de tirage ont été créés, il devait y avoir quatre ou cinq groupes. Avec les huit groupes actuels, nous aurions quatorze commissions d’enquête par an ! Même si nous avons des ressources, ces volumes seraient difficiles à intégrer dans l’agenda parlementaire. Cependant, nous proposons une avancée majeure qui est certes qualitative et non pas quantitative. On peut rêver qu’elle soit les deux à la fois. Il est plus raisonnable d’ancrer cette évolution majeure et de l’évaluer au cours de l’année prochaine.

Madame Ménard, je respecte le combat que vous menez pour la défense des non-inscrits. Cependant, quand vous évoquez une espèce de réunion secrète à laquelle assisteraient quelques grands chefs, je me dois de démythifier votre vision des choses. J’ai longuement fait le point avec le président Ferrand qui, comme moi, fait en sorte que se poursuive la discussion entre la Commission et l’hémicycle, mais je peux vous assurer que cela ne donne lieu à aucune réunion secrète à laquelle prendraient part les présidents de groupe – chacun d’entre vous peut d’ailleurs en obtenir confirmation auprès de son propre président… En tout état de cause, le président Ferrand fait une place importante au dialogue dans son agenda, comme il l’a déjà fait dans le cadre de l’élaboration de cette résolution, et j’y vois une très bonne chose, qui nous concerne tous.

Sur le fond, le concept d’équilibre me paraît fondamental. Cet équilibre est fragile, comme le montrent certaines interventions marquées par la passion, et le restera jusqu’au dernier moment, pour la majorité comme pour l’opposition. J’estime pour ma part que nous avons une responsabilité collective forte, consistant à devoir identifier, défendre et porter cet équilibre.

Je le répète, cet équilibre restera fragile jusqu’au terme de l’examen du texte, car tout peut arriver, et nous avons le devoir collectif de faire preuve de sérénité pour aller jusqu’au bout de l’exercice.

M. Philippe Gosselin. Je me félicite de constater que la température redescend un peu. Il est évident que nous devons nous écouter et, pour cela, il vaut mieux éviter de nous exciter mutuellement à peine nos débats entamés. Puisque l’heure est à l’apaisement, nous allons pouvoir nous concentrer à nouveau sur la recherche de l’équilibre instable évoqué à l’instant par M. le rapporteur.

C’est justement parce que la tâche est compliquée que les groupes doivent se parler entre eux. Les propos que j’ai tenus précédemment n’avaient nullement pour objet d’évoquer à mi-mot je ne sais quel complot ou quelle réunion secrète. Oui, nous nous parlons, ce qui m’a conduit à rencontrer des orateurs des groupes. Oui, des échanges ont lieu entre le président de l’Assemblée et les présidents de groupe. Je ne vois pas qui peut sincèrement s’en étonner : il est bien normal que, sur un tel sujet, le président de l’Assemblée rencontre les présidents de groupe – comme il le fait régulièrement, d’ailleurs, sur d’autres sujets.

Je donne acte au rapporteur des vrais efforts qu’il accomplit pour rapprocher des positions parfois très divergentes et, au nom du groupe Les Républicains, je réaffirme avec force que nous continuerons – en dépit des éclats qui peuvent survenir, et qui pourraient être évités si les uns et les autres s’abstenaient de toute provocation – à nous efforcer, comme nous le faisons depuis la semaine dernière, de faire aboutir ce texte.

Pour conclure, je ne peux que répéter que nous sommes animés par la volonté d’apaisement et de recherche de l’intérêt collectif évoquée il y a quelques instants par M. le rapporteur.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Je prends bonne note des engagements pris de part et d’autre…

M. Philippe Gosselin. De part et d’autre, effectivement !

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. … et j’espère que nous allons maintenant pouvoir nous écouter et dialoguer, afin de parvenir à l’équilibre que nous recherchons tous.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement CL138 de M. Ugo Bernalicis.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Pouvons-nous considérer que votre amendement est défendu, monsieur Bernalicis ?

M. Ugo Bernalicis. Pas vraiment, madame la présidente : je sais gré au groupe Les Républicains de l’avoir défendu, mais je souhaite tout de même le défendre moi-même ! (Sourires.)

Aujourd’hui, chacun des groupes a souvent fait usage de son droit de tirage avant la fin du mois de décembre : en effet, les travaux d’une commission d’enquête durant généralement quatre ou cinq mois, il est nécessaire que celle-ci démarre en début d’année si l’on souhaite qu’elle publie son rapport avant la fin de la session. De ce fait, quasiment aucun groupe ne conserve de droit de tirage au-delà du 1er janvier. Si un événement majeur survient, qui justifierait l’ouverture d’une commission d’enquête, personne n’est donc en mesure de faire valoir son droit de tirage pour la demander.

Par ailleurs, en l’état actuel des choses, même si tous les groupes d’opposition sont d’accord pour demander la constitution d’une commission d’enquête, la majorité a le pouvoir de s’y opposer, disposant par définition d’une capacité de blocage. Il me semble qu’il serait intéressant, pour ne pas dire progressiste, de faire en sorte que l’opposition dispose d’un droit de tirage qui lui serait accordé de plein droit, sur demande de soixante députés d’au moins deux groupes signataires d’une même proposition de résolution demandant la création d’une commission d’enquête – ce seuil de soixante députés étant celui retenu par le Conseil constitutionnel. J’y vois un élément de nature à permettre un contrôle efficace de l’exécutif par le Parlement, dans le cadre du principe de séparation des pouvoirs indissociable de celui de démocratie. De cette manière, les oppositions seraient en mesure de réagir à un événement majeur justifiant la constitution d’une commission d’enquête transpartisane et créée dans l’intérêt général.

Je donnerai un seul exemple montrant l’intérêt de notre proposition. Aujourd’hui, alors que les suicides dans la police nationale constituent une problématique intéressant de nombreux groupes d’opposition, la majorité refuse la constitution d’une commission d’enquête, arguant du fait qu’il existe déjà des missions d’information sur la police en général, ainsi que d’autres mesures d’investigation entreprises à la demande du ministre. De ce fait, on ne peut avancer sur le sujet. Il me semble dommage que, lorsqu’il existe un accord très large au sein de notre assemblée pour demander une commission d’enquête sur un sujet donné, il soit impossible de mobiliser une commission d’enquête transpartisane.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Afin que ce soit bien clair pour tout le monde, je rappelle que, dès lors que les conditions de recevabilité requises sont réunies, la majorité ne peut pas bloquer une commission d’enquête demandée dans le cadre du droit de tirage. Pour l’ensemble des raisons que j’ai exposées précédemment, je suis défavorable à cet amendement.

M. Éric Diard. Pour ma part, je trouve cette proposition judicieuse. L’année dernière, après les manifestations du 1er mai, lors desquelles les Black Blocks ont tout cassé, j’ai demandé à notre président de groupe, Christian Jacob, si nous ne pouvions pas obtenir une commission d’enquête sur les événements – il ne s’agissait pas de l’affaire de la Contrescarpe, puisque nous n’étions pas au courant à l’époque. Il m’a répondu que c’était impossible, notre groupe ayant, comme tous les groupes d’opposition, déjà fait usage de son droit de tirage…

J’entends bien, monsieur le rapporteur, qu’accorder un droit de tirage ouvrant potentiellement droit à la création de quatorze commissions d’enquête pourrait se révéler un peu lourd en termes de gestion, mais l’exemple que je viens de citer montre qu’il serait judicieux et bon pour la démocratie que les groupes d’opposition puissent se rassembler pour demander, à titre exceptionnel et lorsque survient un événement le justifiant, la création d’une commission d’enquête.

Mme Danièle Obono. Je regrette la réponse faite par le rapporteur, ainsi que son avis défavorable. C’est d’autant plus incompréhensible que cette majorité a beaucoup insisté, au départ, sur sa volonté de renforcer le pouvoir d’évaluation et de contrôle du Parlement. Il nous est d’ailleurs souvent répondu, quand nous formulons des demandes de rapport sur tel ou tel sujet, que le Parlement dispose des moyens de diligenter lui-même des enquêtes. Dans les faits, comme l’a souligné tout à l’heure notre collègue Untermaier, il apparaît que nous sommes très limités en termes de moyens, notamment vis-à-vis de l’administration.

La commission d’enquête donne une légitimité assez forte qui, d’une certaine manière, contraint ceux qu’elle vise à rendre des comptes, et c’est à ce titre l’outil le plus efficace. Cependant, en l’état actuel des choses, la constitution d’une commission – sauf en ce qui concerne les commissions d’enquête – ne se fait qu’en fonction du bon vouloir de la majorité…

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Mais non !

Mme Danièle Obono. …et, si vous trouvez révolutionnaire la possibilité désormais accordée à l’opposition de désigner le président et le rapporteur de certaines commissions, il n’en est rien en réalité, puisque c’est vous qui choisissez quelles missions d’information ont lieu d’être ou non.

Dans ces conditions, le contrôle exercé par le Parlement reste cadenassé par la majorité et, contrairement à ce que vous affirmez souhaiter, le pouvoir d’évaluation et de contrôle du Parlement ne se trouve en rien renforcé. Sans doute vos discours sur la nécessité d’améliorer les choses dans ce domaine seraient-ils plus crédibles s’ils trouvaient une traduction concrète, par la mise en place d’outils mis à la disposition de l’ensemble des parlementaires, et pas seulement de ceux de la majorité.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. C’est un fait, pour ce qui est des commissions, les missions sont votées à la majorité, selon le principe du fait majoritaire propre à tout système démocratique.

Mme Danièle Obono. J’ai bien dit : « sauf en ce qui concerne les commissions d’enquête » !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. C’est l’un des principes essentiels de la démocratie représentative que les votes se fassent selon le fait majoritaire.

Cela dit, je rappelle que, si une majorité de députés décidait, en des circonstances exceptionnelles, d’instituer une commission d’enquête, elle pourrait le faire dans l’hémicycle. Je maintiens donc mon avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Article 33 (art. 142 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Représentation des députés non-inscrits au sein des commissions d’enquête

La Commission examine l’amendement CL64 de M. Philippe Gosselin.

M. Philippe Gosselin. En réponse à notre collègue Questel, qui a affirmé que Les Républicains n’avaient que faire des non-inscrits…

M. Bruno Questel. Ce n’est pas ce que j’ai dit !

M. Philippe Gosselin. … l’amendement CL64 vient confirmer que, si nous avons du respect pour nos collègues non-inscrits, ce respect ne doit pas conduire à leur céder sur tous les points.

Après cette introduction en forme de boutade, je veux dire que, si les groupes ont droit à un certain nombre de moyens prévus par des chartes, avec des dispositions spécifiques relatives aux groupes d’opposition et à leurs responsabilités, la présence de non-inscrits au sein de certains dispositifs pose quelques questions en termes de fonctionnement, sans que cette présence aille jusqu’à représenter un risque sur le plan de la démocratie. Cela me conduit à considérer que, s’il faut prévoir des dispositions particulières pour les non-inscrits, celles-ci ne sauraient comprendre la présence obligatoire d’un député non inscrit au sein de chaque commission d’enquête, comme le prévoit un alinéa de l’article 33.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je vais rassurer tout de suite Mme Ménard en disant que je suis défavorable à cet amendement…

Lors de mes échanges avec le président, auteur du texte dont nous débattons, j’ai eu l’occasion de lui demander quelle intention il poursuivait avec les mesures visant à donner des droits aux non-inscrits. Il m’a clairement répondu que la garantie d’une représentation plus systématique des non-inscrits au sein de certaines instances constituait à ses yeux un enjeu démocratique – et, en tant que rapporteur, j’ai été convaincu par les arguments qu’il invoquait à l’appui de sa position.

Si je comprends que les non-inscrits souhaitent obtenir plus que ce qu’ils ont actuellement – ils ne participent pas à la Conférence des Présidents, ils ne constituent pas un groupe, etc. –, je suis aussi très attaché à l’existence des groupes politiques et au sens qu’a chacun de ces groupes. Je suis donc défavorable à cet amendement en ce qu’il est contraire à l’esprit du groupe, lequel n’empêche pas de reconnaître que les non-inscrits ont des droits, qu’il convient de systématiser plutôt que de les rendre optionnels, c’est-à-dire effectifs seulement en fonction du bon vouloir de la majorité, quelle qu’elle soit. J’insiste sur ce point : rendre systématiques les droits des non-inscrits est un progrès.

Je conclurai en vous disant, madame Ménard, que si je comprends votre volonté d’aller plus loin, aujourd’hui il faut vraiment prendre acte du fait que les droits des non-inscrits bénéficient d’un progrès lorsqu’on rend ceux-ci systématiques alors qu’ils n’étaient jusqu’alors que des potentialités soumises au bon vouloir d’une majorité.

Mme Emmanuelle Ménard. Je ne nie pas que ce texte contienne des progrès pour les non-inscrits – fort heureusement, car en la matière nous partons de très loin ! J’aimerais beaucoup que M. Gosselin m’explique en quoi la présence d’un député non inscrit au sein d’une commission d’enquête peut constituer un problème, mais nous aurons sans doute l’occasion d’en discuter.

Quand les candidats ont fait campagne, au printemps 2017, pour devenir députés de la Nation, les Français qui ont voté pour eux ont choisi une personnalité, mais pas un groupe, puisqu’ils ne savaient pas si la personne qu’ils souhaitaient élire allait pouvoir rejoindre un groupe. (Interruptions.) Non, ils ne le savaient pas ! En ce qui me concerne, les gens supposaient que je serais dans l’opposition, mais ils ne savaient pas si je me trouverais au sein d’un groupe, et encore moins de quels droits je pourrais disposer.

C’est un fait, les groupes politiques sont actuellement dotés à l’Assemblée d’un poids particulier, dont les électeurs ne sont même pas informés. Pour ma part, si je me bagarre pour la défense des droits des non-inscrits, c’est que je ne me considère pas comme une sous-députée. Je fais le même travail que beaucoup d’entre vous, je suis présente autant que vous, je travaille mes dossiers comme tout le monde et je me vois comme une députée de la Nation, mais aussi comme une représentante de ma circonscription. À ce titre, je suis d’ailleurs très attachée au temps que le député devrait pouvoir aussi passer en circonscription, car j’estime que c’est le lieu où il se nourrit du réel, ce qui lui permet ensuite de prendre position et de bâtir ses interventions, que ce soit dans l’hémicycle ou en commission. En tout état de cause, je ne vois pas pourquoi je devrais avoir moins de droits qu’un autre député dans le cadre des missions et des commissions, sous prétexte que je n’appartiens pas à un groupe politique.

M. Raphaël Schellenberger. Je ne remets pas en cause la quantité de travail produite par les non-inscrits et, à mon sens, ce n’est pas vraiment la question qui nous intéresse.

Ce texte soulève une question essentielle, consistant à savoir ce qu’est un groupe politique, et de quelle manière il convient d’équilibrer les droits et devoirs respectifs des groupes et des non-inscrits. Alors que la semaine dernière, nous avons été nombreux à considérer que cette nouvelle version du Règlement conférait un poids trop important aux groupes politiques, nous avons aujourd’hui le sentiment que les différentes dispositions relatives aux non-inscrits dans ce texte sont l’expression de la volonté de faire des non-inscrits une forme de groupe politique.

Il semble qu’il ne s’agisse pas seulement d’éluder les propositions visant à exiger un nombre de députés plus important pour former un groupe – afin de réduire le nombre de groupes –, mais d’aller encore plus loin en cherchant, à l’inverse, de quelle manière on pourrait former un groupe avec encore moins de députés. Ce faisant, on ne fait rien d’autre que d’offrir un groupe, ou un semblant de groupe, à un ensemble de députés situés à l’extrême-droite et qui, à l’issue des dernières élections législatives, n’étaient pas assez nombreux pour constituer un groupe. Une telle volonté correspond à celle, actuellement exprimée par la majorité dans le cadre de la campagne des élections européennes, de pouvoir choisir elle-même son opposition.

M. Arnaud Viala. Le sens de cet amendement n’est pas de porter un jugement ni de minimiser l’importance de certains députés – en l’occurrence, ceux qui ne font pas partie d’un groupe – au sein de l’Assemblée. Cela dit, à mesure que nos travaux avancent, il apparaît de plus en plus clairement que, pour que notre assemblée fonctionne bien, il est nécessaire que les députés soient réunis au sein de groupes politiques et que l’on tienne compte de leur représentativité – à défaut, on perd tout lien avec l’expression démocratique qui se fait au moment des élections législatives.

Je considère pour ma part que nous faisons face à deux problèmes. Premièrement, si nous associons – comme Mme la présidente a indiqué vouloir le faire pour la réunion qui va suivre – des députés non-inscrits aux réunions des représentants des groupes, le problème ne sera plus d’avoir des non-inscrits dont l’importance serait minorée, mais d’avoir, inversement, des députés faisant partie d’un groupe et qui se trouveraient lésés, puisque tout leur groupe se trouverait représenté par un seul député quand chaque député non-inscrit serait représenté par lui-même !

Deuxièmement, les députés non-inscrits étant souvent issus d’horizons divers, je ne vois pas comment ils pourraient convenir qu’un des leurs va les représenter au sein de réunions ou d’instances ayant pour objet de définir une ligne de conduite en vue du déroulement ultérieur des débats. Cela reflète bien la contradiction qui existe entre le fait que nous soyons tous élus individuellement au suffrage universel – pour le moment, au scrutin majoritaire – et le fait que le fonctionnement d’une assemblée comprenant 577 membres exige tout de même une prise en compte des appartenances politiques. Je crains que, si on met le doigt dans l’engrenage, les députés non-inscrits ne tardent pas à se plaindre qu’ils ne sont pas représentés par celui qui est censé le faire au sein de telle ou telle instance et que, dès lors, ils exigent d’être tous présents individuellement. Si c’était le cas, nous n’en sortirions plus !

M. Bruno Questel. En 1993, j’ai travaillé à l’Assemblée pour un groupe parlementaire présidé par Jean Royer, ancien maire de Tours, qui a siégé en tant que non-inscrit de 1958 à 1997 – c’était pour lui une ligne intangible. J’espère qu’ils n’y verront pas une attaque personnelle de ma part, mais je suis un peu étonné par les arguments invoqués par nos collègues du groupe Les Républicains…

M. Philippe Gosselin. Ce n’est pas notre style !

M. Bruno Questel. Il me semble en effet important de souligner que les députés non-inscrits désigneront comme ils le souhaiteront celui ou celle qui les représentera…

M. Arnaud Viala. Ils constituent donc un groupe ?

M. Bruno Questel. Au Sénat, les non-inscrits réunis en association désignent entre eux le représentant de cette association. Puisque vous faites souvent référence au Sénat, vous seriez bien avisés de vous inspirer de ce qui fonctionne bien au sein de la chambre haute. Que cela nous plaise ou non, les députés non-inscrits représentent un certain idéal ; ils doivent disposer des mêmes droits que nous et exercer leur mandat dans les mêmes conditions que nous. Pour cela, nous devons aller pleinement dans le sens des dispositions proposées par Richard Ferrand dans cette proposition de résolution, qui représente pour les non-inscrits une avancée significative et inédite en termes de capacité à agir et à exercer leur mandat au même titre que les autres députés.

M. Fabien Di Filippo. Nous ne devons pas perdre de vue qu’avec les changements qui s’annoncent, le nombre de non-inscrits va devenir dramatiquement bas, du fait des circonscriptions doubles et de l’introduction de la proportionnelle. Ainsi, nous allons donner énormément de droits à des députés qui n’auront même pas la possibilité d’être présents au sein de toutes les instances où il leur sera offert de siéger, ce qui est à mon sens un vrai problème.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 33 sans modification.

Article 34 (art. 143 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Choix par le groupe d’opposition ou minoritaire de sa fonction dans le cadre d’une commission d’enquête créée à son initiative

La Commission est saisie de l’amendement CL285 de M. Guillaume Vuilletet.

M. Guillaume Vuilletet. Mes chers collègues, je me félicite que nos débats se poursuivent sur une tonalité plus apaisée que celle ayant marqué le début de la présente réunion, et je m’en voudrais de troubler cette sérénité retrouvée.

Je tiens cependant à souligner que l’équilibre trouvé aujourd’hui ne l’a été qu’au prix d’un effort consenti afin de donner davantage de droits aux oppositions et aux non-inscrits – un effort qui n’est pas reconnu par tous à sa juste valeur, puisque notre collègue Obono affirmait tout à l’heure que le pouvoir donné à l’opposition de désigner le président et le rapporteur de certaines commissions ne constituait pas une grande avancée.

L’amendement CL285 a évidemment été déposé avant que nous n’ayons la présente discussion et, pour ma part, je prends acte de la volonté de chacun de parvenir à l’équilibre recherché – nous y travaillons en divers endroits – mais j’estime également qu’il convient de prendre en compte les efforts faits par la majorité et par le président afin que le débat démocratique au sein de notre assemblée soit vivant et respectueux de la diversité des opinions. À cet égard, il me semble étonnant de plaider en faveur du droit individuel des députés à pouvoir s’exprimer, tout en n’étant pas attaché à ce que la parole des non-inscrits soit prise en compte.

Cet amendement est un amendement d’appel ayant pour objet d’inciter chacun à respecter le résultat de la longue discussion ayant eu lieu entre les groupes et le président. En attendant la séance publique, je le retire.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL34 sans modification.

Article 35 (art. 145 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Missions d’information sur le suivi des ordonnances prises en application de l’article 38 de la Constitution - Association de l’opposition et des députés non-inscrits aux missions d’information de la Conférence des présidents

La Commission examine les amendements CL261 de Mme Élodie Jacquier-Laforge et CL336 du rapporteur.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. L’amendement CL261 vise à vous alerter sur un risque constitutionnel.

Comme vous le savez, l’article 38 de la Constitution prévoit que le Gouvernement puisse demander au Parlement l’autorisation de prendre, de manière temporaire, des mesures relevant normalement du domaine de la loi. Nous vous proposons donc de supprimer l’alinéa 2 de l’article 35, qui prévoit la possibilité de mettre en place une mission temporaire d’information qui aurait pour objet de suivre la rédaction des ordonnances prises en application de l’article 38 de la Constitution.

D’une part, nous estimons qu’une telle disposition n’est pas conforme à l’esprit de la Constitution et qu’elle expose donc le texte à un risque de censure du Conseil constitutionnel qui, comme vous le savez, sera automatiquement saisi du texte voté en séance. D’autre part, nous considérons que le fait d’assortir le droit de légiférer par ordonnances d’une mission de suivi risque d’avoir pour conséquence de priver cette procédure de son principal intérêt, à savoir la rapidité. Enfin, je rappelle que le Parlement peut exercer son droit d’amendement lors de l’examen des projets de loi d’habilitation et de ratification.

Pour toutes ces raisons, nous vous proposons de supprimer l’alinéa 2 de l’article 35.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Vous avez eu raison, madame Jacquier-Laforge, de souligner que le texte comportait une ambiguïté à l’alinéa 2 de l’article 35. Pour y remédier, j’ai, pour ma part, proposé un amendement CL336 visant à bien clarifier les choses. En aucun cas, la volonté du législateur ne serait d’empiéter sur les prérogatives de l’exécutif, en l’occurrence sur sa capacité à légiférer par ordonnances.

En revanche, il me paraît important d’être en mesure de préparer l’étape suivante, celle de la ratification des ordonnances : c’est l’objet de mon amendement, qui prévoit la mise en place d’un groupe de travail à cette fin. Pour cela, il est proposé de substituer, à l’alinéa 2, aux mots : « le suivi de la rédaction », les mots : « la préparation de la ratification ».

Je vous invite par conséquent à retirer votre amendement au profit du mien, dont la rédaction me paraît plus satisfaisante tout en remédiant au problème que vous soulevez.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. La précision apportée par l’amendement de M. le rapporteur me paraît effectivement suffisante. Je retire donc mon amendement au profit du sien.

Mme Cécile Untermaier. Je ne voudrais pas que ce dispositif encourage le Gouvernement à légiférer par ordonnances au motif que les députés sont toujours actifs. Il s’agit bien d’un dessaisissement du Parlement, et ce n’est pas une mission qui pourra combler l’absence de débats qui en découle.

Dans ce domaine, j’ai une expérience du fait de ma participation à la mission de suivi des ordonnances sur la justice des mineurs. Le groupe de travail constitué à la Chancellerie présente un intérêt mais ne supplée pas, de toute évidence, aux débats parlementaires.

L’Assemblée reste bien dans son rôle, qui est de ratifier, si une mission qui porte sur la préparation de la ratification est créée et assortie des moyens correspondants. Mais encore une fois, cela ne doit pas être perçu comme un encouragement à recourir aux ordonnances.

M. David Habib. Je voterai cet amendement car il a une vertu : mettre « sous tutelle » l’administration et le cabinet du ministre. Durant le temps de rédaction des ordonnances, il est absolument nécessaire que le Parlement contrôle l’action de l’État. Cette mission d’information n’a pas cette ambition, mais elle aura ce pouvoir d’observation qui manque aujourd’hui.

Cherchant le moyen d’apaiser la rancœur de l’Assemblée après l’annonce surprise que le Gouvernement allait solliciter une habilitation à réformer l’ordonnance de 1945, la ministre de la Justice a proposé un dispositif qui permettait de faire participer pour la première fois les députés à un groupe de travail, concomitamment à l’élaboration des ordonnances. Cet amendement a un mérite, celui d’offrir désormais un cadre qui permet aux députés de travailler.

Enfin, monsieur le rapporteur, vous venez d’arriver à l’Assemblée ; il vous faudra constater qu’au sein d’un même groupe, deux positions peuvent coexister. Cela ne manquera sans doute pas de vous surprendre, mais vous amènera, je l’espère, à examiner de façon différente nos propositions.

M. Michel Zumkeller. Le groupe UDI, Agir et Indépendants était attaché à l’idée que les missions d’information portent sur l’élaboration des ordonnances, considérant qu’il était important que les députés y participent autrement qu’en présentant des amendements au texte de ratification. Qu’ils puissent en discuter constituait à nos yeux une avancée, souhaitée, d’ailleurs, par les groupes de travail. Nous aurions donc voté contre l’amendement CL261. Nous voterons pour l’amendement du rapporteur, tout en craignant que la préparation de la ratification demeure, tout compte fait, très théorique.

Mme Cécile Untermaier. Au nom du groupe Socialistes et apparentés, je voterai l’amendement du rapporteur, avec cette précaution, toutefois : il ne faudrait pas qu’une mission d’information dont l’objet serait de préparer la ratification d’ordonnances soit un entre-deux qui encourage le Gouvernement à user de cette voie pour légiférer. Quel que soit le dispositif mis en place, le recours aux ordonnances constitue un dessaisissement du Parlement. Chacun assume ses responsabilités : l’Assemblée nationale lorsqu’il s’agit d’examiner un projet de loi ; le Gouvernement lorsqu’il s’agit de rédiger des ordonnances.

M. Christophe Euzet. Je me réjouis du consensus qui se fait jour autour de l’amendement CL336, dont la rédaction suscite moins de réserves que la rédaction initiale. Contrairement à Cécile Untermaier, je ne pense pas que cette disposition soit de nature à inciter le Gouvernement à recourir aux ordonnances. En revanche, nous changerons notre façon d’aborder les ordonnances, ce dont nous pouvons nous féliciter.

M. Philippe Gosselin. Dans tous les cas, cette légère amodiation ne peut aller à l’encontre de l’article 38 de la Constitution, qui demeure le texte fondamental. Si nous combattons régulièrement le dessaisissement du Parlement que constitue le recours aux ordonnances, chacun prend ses responsabilités et l’article 38 conserve sa raison d’être. Sur certains sujets, comme la justice des mineurs, une préparation en coproduction peut s’entendre.

M. Raphaël Schellenberger. Je partage les propos de Cécile Untermaier. Nous ne sommes pas en train de réécrire la Constitution et de donner un pouvoir supplémentaire au Parlement ; nous continuons d’acter qu’une ordonnance n’est rien d’autre qu’un dessaisissement du Parlement. D’ailleurs, la rédaction proposée par le rapporteur est plus honnête : la mission d’information interviendra une fois les ordonnances rédigées ; la préparation de la ratification ne changera rien à leur contenu. Elle apportera un éclairage supplémentaire mais ne donnera pas au Parlement davantage de marge de manœuvre.

Cet article n’est pas inintéressant, mais il ne constitue pas une rupture ou une innovation particulière dans le droit parlementaire.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Rappelons que la réforme du Règlement n’a pas pour objet de réviser la Constitution…

L’amendement CL261 est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL336.

Puis elle examine l’amendement CL42 de M. Michel Zumkeller.

M. Michel Zumkeller. Entre la ratification des ordonnances et la publication des décrets d’application, il y a comme un trou noir. Notre amendement prévoit que la mission d’information peut porter sur le suivi de la rédaction des décrets d’application. En effet, les différences d’appréciation sont parfois telles que le sens même de la loi peut s’en trouver changé !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Les rapporteurs sur l’application de la loi sont déjà chargés du suivi de sa mise en œuvre, mais cet amendement nous emmène un cran plus loin et donne l’impression que l’Assemblée pourrait empiéter sur le domaine de l’exécutif. Chacun doit rester « dans son couloir », pour reprendre l’analogie. Avis défavorable.

M. Philippe Gosselin. Cette proposition va un peu trop loin dans la coproduction. Pourtant, elle est intéressante car elle met l’accent sur le suivi des textes, de leur application et même de leur entrée en vigueur, car il arrive que les textes d’application soient contra legem, voire inexistants. Elle soulève en creux la question des moyens, notamment en personnels, donnés aux co-rapporteurs d’application et interroge la façon dont les commissions assurent le suivi des textes.

Je sais la présidente de notre commission sensible à cette question. On ne pourra pas accentuer le rôle d’évaluation et de contrôle du Parlement sans avoir davantage de moyens pour l’analyse et l’expertise. Ce n’est pas au Règlement de le prévoir ; les présidents des commissions doivent se battre pour obtenir ces moyens, car c’est l’essence même de notre mission.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. La commission des Lois s’assure que les textes sur lesquels elle a été saisie ont bien fait l’objet des décrets d’application nécessaires. Mais les commissions doivent rester libres de leurs choix, et rien ne les empêche de mettre en place des actions plus pertinentes – sous réserve, toutefois, des moyens humains, très limités, mis à leur disposition.

M. Sacha Houlié. Lors de l’examen du projet de loi de révision constitutionnelle, nous étions parvenus avec le groupe UDI, Agir et indépendants, à rédiger un amendement qui prévoyait qu’après la promulgation d’une loi le ministre était convoqué par la commission saisie au fond afin de rendre compte des travaux entrepris pour son application. Cette disposition est probablement de rang constitutionnel et ne saurait être adoptée dans une réforme du Règlement.

Cela n’occulte en rien l’intérêt de cette proposition, qui appartient culturellement à la majorité puisqu’inspirée des travaux de suivi de l’application de la loi « Macron », en 2015.

Mme Isabelle Florennes. Madame la présidente, il serait bon que l’ensemble des membres de la Commission soient informés de ce travail de suivi, fort intéressant.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. J’ai demandé que soit établi un tableau des lois adoptées depuis le début de la législature, ainsi que de leurs décrets d’application. Il s’agissait de vérifier l’assertion selon laquelle les décrets d’application ne sont pas toujours publiés, ou très tardivement. Ce tableau, qui vous sera communiqué, démontre l’exact inverse : dans 95 % des cas, les décrets d’application sont pris dans les temps.

Mme Isabelle Florennes. Cela pourrait faire l’objet d’une information des commissaires, régulièrement saisis de cette question par leurs électeurs. C’est d’ailleurs un travail que toutes les commissions devraient mener.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Ces informations pourraient être publiées sur le site internet de l’Assemblée nationale, comme c’est le cas sur celui du Sénat, où l’état d’application de la loi apparaît dans le dossier qui lui est consacré.

Mme Cécile Untermaier. Il me semble cependant que nos moyens doivent aller prioritairement à l’examen des projets de loi et au suivi de l’application des lois. Le Règlement prévoit déjà que deux co-rapporteurs présentent un rapport sur l’application de la loi à l’issue d’un délai de six mois suivant son entrée en vigueur, mais il s’agit d’un droit « mou », qui ne prévoit aucune obligation. Il faut, comme vous l’avez fait pour les non-inscrits, donner du corps au Règlement sur ce point. Cela devrait répondre aux préoccupations exprimées par les députés du groupe Mouvement Démocrate et apparentés.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. C’est précisément l’objet de l’article 36, qui vise à remplacer les mots « peut être » par le mot « est ».

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL43 de M. Michel Zumkeller.

M. Michel Zumkeller. Dans la pratique, les groupes d’opposition et minoritaires se voient confier par la plupart des commissions un droit de tirage pour les missions d’information. Il s’agit de le prévoir dans le Règlement.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Très attachés à la liberté des commissions, nous considérons qu’il ne faut pas figer leur fonctionnement. Fidèles à cette philosophie, la seule règle que nous avons prévu de graver dans le marbre est que la représentation des groupes dans les bureaux des commissions s’efforce de respecter non seulement la pluralité mais également l’objectif de parité. En conséquence, avis défavorable.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Il convient de respecter la pluralité dans les bureaux des commissions et de tendre vers la parité, comme c’est le cas pour le Bureau de l’Assemblée. Pourtant, cela peut s’avérer difficile compte tenu de la composition de certains groupes.

Madame la présidente, pouvez-vous nous indiquer la façon dont les missions d’information sont attribuées ?

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Nous avons aussi établi un tableau de suivi des missions d’information créées par la commission des Lois.

Comme vous le savez, le bureau de la Commission, qui se réunit tous les mois, comporte un membre et un porte-parole de chaque groupe, le dernier arrivé étant Paul Molac, pour le groupe Libertés et Territoires. Chaque groupe peut demander la création d’une mission d’information, ce que tous n’ont pas encore fait.

Pour le poste de co-rapporteur d’une mission d’information demandée par le groupe majoritaire, un tourniquet est organisé, avec une prépondérance donnée au groupe d’opposition le plus important, Les Républicains. Nous tentons de préserver les droits de chaque groupe. À ce jour, deux groupes n’ont pas encore eu de co-rapporteur : celui de La France insoumise, qui n’est pas demandeur, et celui de la Gauche démocrate et républicaine, qui n’a pas encore manifesté son intérêt. Le groupe Socialistes et apparentés a mené plusieurs missions d’information – en la personne de Cécile Untermaier – sur la justice des mineurs et sur l’évaluation de la loi « Macron » ; pour sa part, le groupe UDI, Agir et indépendants a conduit trois ou quatre missions d’information. Nous procédons de façon consensuelle et en bonne intelligence : l’intérêt de la mission, quant à son objet et au programme législatif, prime sur celui du groupe émetteur de la demande.

M. Philippe Gosselin. Le rapporteur a raison, il faut un cadre général pour le fonctionnement des commissions, mais chacune doit conserver son autonomie.

Il est important que les bureaux soient représentatifs des diverses sensibilités. S’agissant de la parité, leur composition doit être équilibrée dans la théorie ; mais dans la pratique, comment le rapporteur envisage-t-il les choses ? Dans la mesure où chaque groupe désigne ses représentants, il faudrait que l’ensemble des groupes s’accordent pour parvenir à une parité effective. Je m’interroge donc sur les modalités.

M. Arnaud Viala. Je pense aussi que les commissions doivent conserver leurs prérogatives en matière d’organisation des travaux.

Nous sommes également attachés à l’objectif de parité. Lors de l’examen en séance publique du projet de loi de réforme de la fonction publique, nous avons eu à discuter des nominations aux postes à responsabilité des collectivités territoriales ; nous sommes convenus que l’objectif de parité n’était pas atteignable dans les collectivités de moins de 40 000 habitants. Dans un effectif aussi restreint qu’un bureau de commission, composé de membres issus de chacun des groupes, il me semble difficile d’accéder à cet idéal, à moins d’imposer à tel groupe de désigner une femme au motif que tel autre a désigné un homme…

M. Sylvain Waserman. Nous avons eu ce débat s’agissant du Bureau de l’Assemblée nationale. Sans changer les règles de gouvernance élaborées au fil des décennies, il n’y a pas moyen de garantir la parité. Il convient donc d’adopter la même rédaction que pour la composition du Bureau et la formule « s’efforce de ». Ce n’est pas satisfaisant lorsque l’on souhaite que la parité se traduise dans les faits et pas seulement dans les intentions. Mais imposer un objectif de résultat serait nier le droit d’un groupe à désigner lui-même son représentant, puisque l’on conditionnerait cette désignation au choix du genre souhaité.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine l’amendement CL65 de M. Philippe Gosselin.

M. Philippe Gosselin. Encore une fois, nous n’avons rien contre nos collègues non-inscrits… Cet amendement vise à supprimer la présence d’un non-inscrit dans les missions d’information créées par la Conférence des Présidents.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, je continuerai de défendre la présence des non-inscrits – dans le respect de l’équilibre préconisé par le texte. Avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL87 de M. David Habib.

Mme Cécile Untermaier. Il s’agit de dissocier le droit de tirage en matière de création de commission d’enquête et de création de mission d’information, en prévoyant que les groupes d’opposition peuvent obtenir la création de deux missions d’information.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Elle adopte l’article 35 modifié.

Article 36 (art. 145-7 du Règlement de l’Assemblée nationale) : désignation du co-rapporteur sur la mise en application de la loi

La Commission est saisie de l’amendement CL165 de Mme Cécile Untermaier.

Mme Cécile Untermaier. Cet amendement prévoit qu’un député de la commission des Affaires européennes membre de l’opposition est désigné en même temps que le co-rapporteur sur l’application de la loi.

Cela permettrait d’enrichir les débats et de placer l’opposition dans une position de co-construction avec la majorité. Le nombre d’amendements déposés en séance s’en trouverait allégé, conformément aux souhaits de la majorité actuelle. Cela constituerait une avancée importante, à l’image de ce qui se pratique déjà dans certains parlements de l’Union européenne. On pourrait imaginer une mise en commun des administrateurs et des règles de déontologie qui permettraient de privilégier le dialogue, plutôt que la concurrence.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Prévoir un co-rapporteur d’application issu d’un groupe opposé à celui du rapporteur est une avancée.

Mon avis sur cet amendement est défavorable, car la désignation d’un député de l’opposition issu de la commission des Affaires européennes viendrait interférer avec la présence d’un ou des référents de la commission des Affaires européennes qui sont présents dans chaque commission.

Concernant l’étude d’impact, le co-rapporteur sera nommé très en amont, ce qui permettra de faire l’articulation avec le droit européen en vigueur.

M. Philippe Gosselin. L’institutionnalisation du co-rapporteur d’application nous convient très bien. Au-delà de la question de la place qui doit revenir à la commission des Affaires européennes, je voudrais insister sur les moyens. Le co-rapporteur est, par définition, un représentant de l’opposition ou des oppositions, et son existence correspond à un droit important. Il est très bien de l’institutionnaliser, mais à condition que l’on ne se heurte pas au problème des moyens disponibles pour créer telle ou telle mission à un moment donné.

Le Parlement légifère en restant dans l’épure de la Ve République : la loi est désormais un domaine d’exception, et je ne remets pas en cause nos institutions. Si l’on veut appliquer l’article 24 de la Constitution en nous faisant travailler davantage sur l’évaluation et le contrôle, il faut que le Parlement en ait les moyens. La question des moyens des co-rapporteurs d’application n’est qu’un petit bout de la chaîne, mais elle est primordiale. Il faut insister avec force sur ce point et se bagarrer pour que chaque commission puisse avoir les moyens de fonctionner, étant entendu que cela se joue à un ou deux postes près et que des réorganisations internes sont peut-être possibles.

Mme Cécile Untermaier. Je ne voudrais pas qu’il y ait de confusion. Mon amendement a pour objet d’instaurer un co-rapporteur, un « shadow rapporteur », au côté du rapporteur de la majorité.

On peut imaginer une solution de repli, mais il faut au moins qu’un co-rapporteur d’application soit nommé au moment où le rapporteur est désigné, avec l’obligation de travailler sur l’étude d’impact. Nous devons sortir du droit mou de notre Règlement. Le rapporteur d’application, l’opposition et la majorité doivent savoir où l’on va et comment on travaille.

J’ajoute que nous pourrons répondre à la question des moyens en créant une obligation. Ce n’est pas un luxe, pour une assemblée telle que la nôtre, que de faire en sorte que le co-rapporteur d’application puisse travailler en amont du texte sur l’étude d’impact et en aval sur l’application. Le contrôle est une préoccupation majeure pour tous, y compris le Président de la République, qui s’est exprimé publiquement sur ce sujet.

Je souhaite vraiment que l’on puisse consacrer une avancée dans ce domaine. Tous les textes ne nécessitent sans doute pas qu’un co-rapporteur d’application soit nommé, mais c’est à l’opposition de l’apprécier.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 36 sans modification.

Après l’article 36

La Commission examine l’amendement CL32 de M. Michel Zumkeller.

M. Michel Zumkeller. Notre amendement tend à améliorer le dialogue entre le rapporteur et les représentants des groupes lors de l’élaboration de la loi. Il serait utile d’associer ces derniers dans le cadre d’une simple réunion préalable qui permettrait peut-être d’éviter des débats un peu trop pesants par la suite. Le rapporteur auditionne de toute façon beaucoup de personnes. Ce n’est pas une question de temps : on peut très bien ajouter une réunion avec un représentant de chaque groupe, ce qui permettrait d’évacuer certains sujets. Nous sommes persuadés qu’une telle solution va vous plaire, monsieur le rapporteur, car c’est très exactement ce que vous avez fait pour cette proposition de résolution. Pourquoi ne serait-ce pas bon pour les autres textes ?

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Cela relève des bonnes pratiques, selon moi. On irait trop loin si l’on conditionnait l’examen d’un texte à la tenue d’une réunion avec les présidents de groupe. Faisons confiance à nos rapporteurs. À eux de gérer cette question comme ils l’entendent. Il faut être conscient que votre amendement aurait un impact important : on pourrait refuser d’examiner un texte au motif que le rapporteur n’a pas organisé une rencontre avec les présidents de groupe. J’émets un avis défavorable malgré toute la sympathie que j’éprouve pour la très bonne pratique que vous défendez.

La Commission rejette l’amendement.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL81 de Mme Cécile Untermaier.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. C’est le même sujet que celui évoqué par l’amendement CL165. J’émets un avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CL44 de M. Michel Zumkeller.

M. Michel Zumkeller. Nous proposons d’inscrire dans notre Règlement une pratique qui existe déjà : on adopterait une règle garantissant une rotation entre les différents groupes d’opposition pour l’attribution des fonctions de co-rapporteur d’application ou d’évaluation.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Nous avons déjà débattu de cette question. Je pense que l’on peut faire confiance au fonctionnement interne des commissions pour veiller à l’équité dans ce domaine. J’émets un avis défavorable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient aux amendements CL195, CL196, CL197 et CL198 de M. Jean-Noël Barrot.

M. Jean-Noël Barrot. Cette série d’amendements trouve son origine dans mon expérience de parlementaire, encore jeune – je suis député depuis deux ans – et dans les échanges que j’ai eus non seulement au sein du groupe Mouvement Démocrate mais aussi avec d’autres collègues qui viennent de tous les bancs.

Le premier constat est que nos concitoyens attendent de nous que nous soyons des vigies de l’action publique, c’est-à-dire que nous exercions pleinement nos prérogatives en matière de contrôle et d’évaluation. Jacline Mouraud se demande ce que nous faisons du « pognon », mais il y a aussi l’exaspération d’un certain nombre de nos concitoyens qui ne voient pas assez rapidement la mise en application des lois. Nous avons des instruments, notamment les rapports d’application, mais nous pourrions aller plus loin en procédant à une vérification « au dernier kilomètre », jusque dans les territoires.

Le deuxième constat est que nous avons adopté des mesures attendues par nos concitoyens, comme le non-cumul des mandats et la fin de la réserve parlementaire, qui sont saines pour notre démocratie mais qui s’accompagnent d’un risque d’effritement de notre ancrage local, de nos relations avec les élus et le corps préfectoral.

Compte tenu de ces constats, mes amendements tendent à créer une nouvelle faculté : nous pourrions solliciter les moyens de notre assemblée, dans la mesure de leur disponibilité, pour contrôler dans nos circonscriptions l’application de la loi, une fois qu’elle a été adoptée. Il ne s’agit pas d’empiéter sur le travail des rapporteurs d’application. Cette faculté nouvelle ne pourrait être utilisée par un député qu’après la remise du rapport d’application, et elle serait restreinte aux textes examinés par la commission dont le député fait partie et adoptés pendant la législature en cours.

La question d’un droit de tirage se pose naturellement. Si tous les députés se mettaient à exercer tous les jours cette compétence nouvelle, afin d’examiner l’application d’une loi dans leur circonscription avec le soutien d’un administrateur de l’Assemblée, la situation serait impossible à gérer pour notre institution. Mes amendements prévoient donc plusieurs possibilités allant d’un droit de tirage pour chaque député une fois par session ordinaire – c’est l’hypothèse la plus large – à un droit de tirage pour chaque groupe une fois par session ordinaire – c’est l’hypothèse la plus restrictive – en passant par une possibilité intermédiaire qui serait un droit de tirage par groupe et par commission une fois par session ordinaire.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Il y a deux questions différentes. La première est le droit nouveau – c’est l’expression que vous avez utilisée…

M. Jean-Noël Barrot. Non, j’ai parlé de faculté.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. … qui permettrait aux députés d’aller contrôler la façon dont les lois votées à Paris sont mises en œuvre sur le terrain. Un tel pouvoir est déjà prévu par une loi organique pour certains rapporteurs, notamment dans le cadre du budget. Par parallélisme des formes, le nouveau droit que vous proposez ne pourrait être reconnu que par une loi organique. Je pense que nous sommes très majoritairement d’accord avec l’idée qu’un des rôles du député est d’aller voir dans son territoire quelle est l’effectivité des lois votées à Paris. On le fait déjà un peu d’une façon empirique, mais sans avoir les pouvoirs que vous suggérez et il faudrait, je le répète, passer par une loi organique pour aller plus loin.

Vous demandez aussi, et surtout, des moyens spécifiques qui seraient à la disposition des groupes ou des parlementaires pour réaliser ce type de travail. Je ne suis pas favorable à ce que l’on ancre un tel principe dans le Règlement. En effet, ce n’est pas le bon cadre pour consacrer des moyens à telle ou telle activité. L’Assemblée en décide souverainement. Rien ne l’empêche de prévoir spécifiquement des moyens pour une mission ou pour un sujet, par exemple dans le cadre d’une commission d’enquête ou d’une mission d’information.

Nous sommes actuellement au milieu du gué. On pourrait créer, dans le cadre d’une loi organique, un droit supplémentaire qui permettrait de contrôler l’application des lois « au dernier kilomètre » et qui vaudrait à l’égard des services déconcentrés de l’État, d’une manière officielle. On pourrait ainsi se rendre dans une direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement pour voir si une circulaire ou un décret est bien appliqué par les fonctionnaires. En ce qui concerne les moyens, beaucoup de choses se passent déjà à l’Assemblée, notamment dans le cadre du « printemps de l’évaluation » auquel nombre d’entre nous ont participé.

Je vais émettre, à regret, un avis défavorable. Vous posez une vraie question, mais la solution que vous proposez ne me paraît pas la bonne. C’est plutôt dans une loi organique qu’il faudrait prévoir un nouveau droit. Nous pourrons faire ce choix dans le cadre de la révision constitutionnelle, à la faveur d’un dialogue avec le Sénat. Par ailleurs, certaines mesures peuvent se rattacher à la logique des comités d’évaluation : il faut une vision d’ensemble des actions d’évaluation des politiques publiques, y compris en ce qui concerne leur mise en œuvre. Je ne vois pas de solution idéale au-delà de ces deux points.

La position que je viens d’exprimer vaut pour l’ensemble des amendements déposés sur ce sujet.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. Je voudrais saluer les travaux de Jean-Noël Barrot, la constance de son implication dans ce domaine et sa participation au printemps de l’évaluation.

L’évaluation des politiques publiques est une des trois missions constitutionnelles des parlementaires. Les propositions de notre collègue permettront de nous donner un cadre en la matière. On peut se rendre dans une prison, de droit, mais il est plus difficile de demander à voir le directeur départemental des territoires ou le directeur départemental de la protection des populations au sein d’une préfecture. Même si la Constitution nous confie la mission d’évaluer les politiques publiques, il nous manque une légitimité vis-à-vis de l’administration ainsi que des moyens. Mes collaborateurs en circonscription sont de qualité, mais ils ne sont pas à même de m’accompagner pour aller voir la DDT ou d’autres organismes.

Ces propositions nous permettront d’avancer en renforçant les pouvoirs des parlementaires. Il serait très positif de se doter de cette possibilité nouvelle et de bénéficier du soutien des administrateurs de l’Assemblée.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. L’exemple que vous avez cité, celui des prisons, est une disposition de niveau législatif. Une loi autorise les députés à visiter les lieux d’incarcération. Comme l’a dit le rapporteur, le Règlement n’est vraiment pas le bon niveau normatif.

M. Marc Le Fur. L’idée sous-jacente me paraît objectivement excellente. Il reste à savoir quelle doit être sa traduction.

Nous subissons les conséquences des décisions, à mon avis funestes, car elles nous ont éloignés du terrain, que nous avons prises au début de cette législature, comme la disparition de la réserve parlementaire. Elles font que les administrations nous traitent avec le plus grand mépris, alors que ce n’était pas le cas il y a quelques législatures. Des réflexes élémentaires à notre égard ont disparu.

L’idée qui nous est proposée est bonne et doit être retenue. C’est un moyen de donner un tour un peu concret à notre mission de contrôle. Il n’est pas inutile d’aller voir les administrations sur le terrain, mais cela implique de ne pas se limiter à nos circonscriptions. Dans la mienne, il n’y a pas d’administrations compétentes : elles sont implantées dans le chef-lieu du département, dans celui de la région ou dans les ministères, qui sont amenés à traiter directement certaines affaires.

L’exemple que nous avons en tête est celui des prisons. Nous ne pouvons officiellement entrer dans aucune autre administration. Par exemple, on ne peut pas se rendre dans une école publique si on n’y est pas invité. On l’est, naturellement, mais ce n’est qu’une invitation : nous n’avons de position particulière par rapport à d’autres citoyens français.

Je suis d’accord avec Jean-Noël Barrot : il faut creuser cette question, sans quoi nous allons devenir des gestionnaires de l’abstraction alors que notre vocation est d’être très concret. Pour cela, nous devons avoir les moyens d’assurer un contrôle lui aussi très concret.

Merci, madame la présidente, de m’avoir permis de m’exprimer dans cette commission.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Vous êtes toujours le bienvenu, monsieur le président Le Fur.

M. Philippe Gosselin. Cette série d’amendements pose la question importante de l’évaluation des politiques publiques et du rôle que chaque parlementaire peut avoir. Comme Marc Le Fur vient de l’indiquer, je crois qu’il faut avoir une vision qui aille au-delà de nos circonscriptions. Certaines d’entre elles sont un peu des déserts administratifs : on n’y trouve pas de sous-préfecture ou de service de l’État en tant que tel. Je n’en fais le reproche à personne : c’est ainsi, et il faut donc élargir un peu l’angle.

Comme le souligne l’exposé sommaire des amendements, la question sous-jacente est celle de l’ancrage territorial. Il y a peut-être un malaise chez un certain nombre de parlementaires, qui sentent bien qu’ils ont besoin d’être davantage présents sur le territoire – cela ne fait aucun doute.

La question des circonscriptions conduit à s’interroger sur les conséquences de la représentation proportionnelle. Par définition, les députés qui seront élus dans le cadre d’une liste nationale n’auront plus de circonscription – mais nous verrons bien la proposition qui nous sera faite, puisque toute la révision constitutionnelle est remise à plat. Qu’en sera-t-il pour ces députés ? Il pourrait y avoir un statut de député territorial et un autre, différent, de député élu au scrutin proportionnel. On voit bien que cette question apparaît en filigrane.

M. Bruno Questel. Je voudrais rappeler que l’on peut cumuler un mandat local et un mandat parlementaire. J’invite chacun à s’investir pleinement dans les futures campagnes électorales au niveau départemental et régional.

M. Philippe Gosselin. Nous le faisons !

M. Bruno Questel. Je comprends tout à fait l’esprit dans lequel ces amendements nous sont proposés. Il s’agit d’être complètement en mesure d’exercer un contrôle de l’application de la loi dans nos circonscriptions. Néanmoins, certaines d’entre elles sont totalement dépourvues de services de l’État. À titre personnel, je propose que cette question soit traitée dans le cadre de la réflexion collective qui doit avoir lieu, dans les semaines ou les mois à venir, à l’échelle des groupes, sur la manière dont pourrait fonctionner une Assemblée nationale dont le nombre de députés serait réduit et qui serait en partie élue au scrutin proportionnel. Même si ces amendements ne manquent pas de pertinence, je crois qu’il faut réfléchir plus globalement et de la façon la plus œcuménique possible sur ce sujet qui a son importance, mais qui me paraît un peu décalé dans le cadre actuel.

M. Erwan Balanant. Tout le monde le dit : c’est une question importante. Elle pourrait certes mériter d’autres avancées, dans d’autres cadres, notamment au niveau législatif, mais je pense qu’on peut déjà acter quelque chose. Comme le disait ma grand-mère, un tiens vaut mieux que deux tu l’auras. Si nous avançons maintenant grâce à la très bonne proposition de Jean-Noël Barrot, nous aurons ensuite toute latitude pour continuer la réflexion sur ce sujet auquel s’intéressent non seulement notre collègue et le groupe MODEM, mais aussi tous les autres groupes. Il s’agit de savoir comment nous suivons la mise en œuvre concrète de la loi dans nos territoires. Cela permet de voir, parfois, comment il faudrait la faire évoluer : elle n’est pas gravée dans le marbre ad vitam aeternam. Je pense que nous devons avancer en adoptant la proposition qui nous est faite, quitte à aller plus loin par la suite. Il me semble qu’il y a notamment un lien à établir avec le calendrier parlementaire : on peut imaginer des temps où les députés se consacrent à une mission d’évaluation, qui peut durer plus d’une journée.

Mme Cécile Untermaier. Je trouve que ces amendements sont extrêmement intéressants sur le fond. Ils permettent, pour la première fois, de se poser la question du rôle local du député. Le Règlement fait totalement l’impasse sur le travail réalisé en circonscription ou ailleurs, en région par exemple.

J’ai bien compris que la loi organique serait le bon véhicule et je suis favorable à ce qu’un groupe de travail se saisisse de ces questions qui sont tout à fait majeures. Il me semble qu’il faut aussi travailler sur le rôle local du député en ce qui concerne la préparation des textes, notamment à propos de l’étude d’impact. Il faut rapprocher l’Assemblée nationale du terrain. Cela représente un vaste chantier.

Je pense qu’il faut trouver le moyen d’évoquer cette question dans le cadre du Règlement. Doit-on le faire en adoptant ces amendements ? Il faut, en tout cas, parvenir à introduire dans le Règlement la question du travail réalisé au niveau local, tant pour l’évaluation d’un projet de loi que pour celle de son application.

Pour ce qui est de la réserve parlementaire, je ne me suis jamais sentie visée par les accusations de clientélisme : j’avais mis en place des jurys citoyens. Le Fonds pour le développement de la vie associative (FDVA), qui a remplacé la réserve parlementaire, est très opaque. Les dates des réunions sont connues très tardivement et on ne sait pas quel est le sort réservé aux dossiers. Nous devons tirer les conclusions de ce dispositif, qui n’est pas meilleur que l’ancienne réserve parlementaire – il est même beaucoup moins bon, et je le dis sans esprit polémique. Une mission de contrôle sur le fonctionnement du FDVA nous éclairerait beaucoup.

En ce qui concerne les amendements, nous voterons pour que le rôle local du député soit enfin inscrit dans notre Règlement.

M. Didier Paris. Je pense que nous partageons tous l’objectif de notre collègue Jean-Noël Barrot, qui est de suivre l’application des lois dans nos territoires. L’évaluation est, en effet, un des rôles essentiels qui nous reviennent. Néanmoins, je suis d’accord avec l’idée que l’approche proposée n’est pas nécessairement la meilleure.

Tout d’abord, la méthode envisagée paraît intéressante, mais elle pourrait aussi être rigide : ce droit de tirage correspondrait assez peu à la réalité territoriale que nous vivons tous les jours.

Par ailleurs, il y a déjà des rapporteurs d’application, des missions d’information existent et la loi a fixé des règles qui permettent d’intervenir dans certains domaines spécifiques, comme les maisons d’arrêt ou les centres psychiatriques. Je ne suis pas sûr qu’il soit nécessaire de généraliser ce dispositif.

Je ne suis pas certain non plus que cela permettrait un meilleur ancrage territorial des parlementaires. Si c’était le cas, ce serait d’ailleurs assez grave. Notre travail de député ne réside pas dans notre capacité à aller « emmerder » telle ou telle administration, si vous voulez bien me pardonner cette expression : il fait plutôt appel à la concertation, à des projets et à la discussion avec différents acteurs, qui ne doit surtout pas avoir lieu dans les conditions dont nous parlons. C’est peut-être l’ancien membre du corps préfectoral qui s’exprime, mais je sais à quel point la création d’outils ou de projets publics est parfois délicate et qu’elle peut aller assez mal avec ce type de dispositions.

Je rejoins ceux qui pensent que c’est un bon sujet de réflexion ou de discussion, mais pas dans ces conditions-là. Il faut veiller à conserver les bornes qui s’imposent, y compris sur le plan constitutionnel pour ce qui est de la logique territoriale.

Mme Maina Sage. Sur le fond, nous soutiendrons ces amendements visant à accorder aux députés des moyens supplémentaires dans le cadre de leur mission de contrôle. Sur la forme, il y a peut-être des points à revoir, éventuellement d’ici à la séance, mais il nous paraît vraiment de bon aloi de permettre à tous les députés, y compris en dehors d’une mission ou d’un rapport spécifique, de bénéficier de moyens complémentaires en vue de réaliser une évaluation, dans un ordre qu’il nous revient d’établir.

M. Paul Molac. Je soutiens ces amendements. J’ai toujours pensé que le rôle du parlementaire était d’être attentif à ce qui se passe dans son territoire et d’en informer le Gouvernement et l’administration. Cela influe, par ailleurs, sur la vision de la loi que l’on peut avoir et sur la possibilité d’adopter des lois en adéquation avec le terrain. Sans ce type d’aller-retour, je considère que je ne pourrais pas légiférer comme il faut. On doit garder « les pieds dans la glaise » si l’on veut adopter de bonnes lois.

M. Jean-Noël Barrot. En ce qui concerne le bon niveau normatif, je veux rassurer nos collègues réticents. Ces amendements ne tendent pas à créer un droit nouveau et ils ne posent absolument aucun problème sur ce plan. Ils permettront tout simplement à notre collègue Vincent Bru, par exemple, de demander à notre présidente son accord pour avoir à sa disposition un administrateur de la Commission, le temps d’une journée – mais on peut discuter des modalités –, afin d’aller vérifier si la loi est correctement appliquée dans sa circonscription.

Je n’ai pas, en la matière, d’exemple précis de texte qui aurait été adopté par notre commission, mais on peut penser à une réforme du permis de conduire : avec l’administrateur qui serait détaché auprès de lui, Vincent Bru prendrait contact avec des associations d’usagers et des auto-écoles et il demanderait un rendez-vous à la préfecture, qui n’aurait aucune obligation de lui répondre favorablement. Il conduirait ses entretiens et produirait ensuite une note qui serait présentée à notre commission dans les conditions que notre présidente déciderait.

Ce dispositif permettrait d’établir un lien entre le terrain et les décisions que nous prenons ici. Nous pouvons rester sourds aux appels des Français, qui veulent plus de proximité et d’effectivité dans l’application de la loi, mais nous pouvons également dire clairement, avec cette réforme du Règlement, que nous comptons bien faire des parlementaires des vigies de l’application de la loi « au dernier kilomètre », dans les meilleures conditions.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. L’amendement CL195 se traduirait par 577 droits de tirage… Ce n’est pas possible, il faut être raisonnable !

M. Jean-Noël Barrot. Je le retire volontiers au profit des trois autres.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. L’amendement CL197 tend, pour sa part, à donner le pouvoir de décision à un président de commission…

M. Jean-Noël Barrot. Permettez-moi de préciser mes propositions. Nous pouvons d’ores et déjà mettre de côté la version dans laquelle chaque député aurait un droit de tirage une fois par an. Il faudrait tout de même s’assurer auprès du président de commission de la disponibilité d’administrateurs avant de l’exercer, mais 577 droits de tirage par an, c’est évidemment trop lourd, je retire donc cet amendement.

Trois autres solutions sont donc proposées. Deux d’entre elles prévoient un droit de tirage par groupe et par an ; dans l’une, le pouvoir de désignation revient au Président de l’Assemblée nationale, c’est l’amendement CL198, et dans l’autre, ce pouvoir revient aux présidents de groupe, c’est l’amendement CL196.

Une version intermédiaire prévoit que les présidents des commissions permanentes donnent un droit de tirage chaque année à un représentant par groupe. En multipliant le nombre de commissions par le nombre de groupes, nous arrivons à 64 droits de tirage par an. C’est la solution intermédiaire entre huit droits de tirage par an – un par groupe – et 577.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Aujourd’hui, une commission permanente – et non pas son seul président – peut créer une mission d’information, mais sa composition doit respecter le pluralisme politique. Avec vos propositions, nous passerions d’une logique dans laquelle une commission peut se saisir d’un sujet et créer une mission reflétant la diversité des opinions politiques à une décision individuelle donnant lieu à un rapport individuel. C’est une difficulté.

Nous sommes tous sensibles à ces questions, mais je pense que les solutions proposées ne sont pas les bonnes. Une autre voie est peut-être possible, mais je ne la vois pas dans ces amendements. Malgré l’intérêt de la démarche, il ne me paraît pas possible, pragmatiquement, de la mettre en œuvre.

M. Bruno Questel. L’amendement CL196 me pose un problème de proportionnalité. Un député par groupe, voilà qui désavantage cruellement le groupe majoritaire, quel qu’il soit. Sur le fond, cela me gêne.

M. Jean-Noël Barrot. La même règle prévaut pour les commissions d’enquête !

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Il faut trouver les bons moyens. Pour les rapports budgétaires de la commission des Finances, ou lorsque les autres commissions nomment un rapporteur pour avis sur le budget, ils sont accompagnés par un administrateur dans leurs travaux et lors des déplacements. Rien n’interdit de consacrer une partie de ces rapports au contrôle de la mise en œuvre des textes récemment adoptés. Ce pourrait être une bonne pratique.

Beaucoup de choses doivent figurer dans le Règlement et être gravées dans le marbre, car elles sont fondamentales et touchent aux droits des oppositions et à l’organisation de notre vie collective. Mais il existe d’ores et déjà beaucoup de possibilités d’action, et nous ne les utilisons pas assez, par manque de moyens ou de volonté de notre part. À nous de nous emparer de toutes les possibilités d’action qui existent dans le cadre de notre mandat.

L’amendement CL195 est retiré.

La Commission rejette successivement les amendements CL196, CL197 et CL198.

Elle est saisie de l’amendement CL45 de M. Olivier Becht.

M. Michel Zumkeller. Cet amendement concerne les lois de finances. Nous souhaitons inscrire dans le Règlement que, dans chaque commission permanente, tous les groupes disposent au moins d’un rapporteur pour avis.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Cela ne relève pas, selon moi, du Règlement, mais des règles propres à chaque commission.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. La pratique de la commission des Lois en la matière est d’attribuer les rapports pour avis proportionnellement à l’importance de chaque groupe politique, et nous essayons également de « coller » aux affinités des uns et des autres. Par exemple, nous avons confié un rapport pour avis sur l’outre-mer au groupe GDR en début de législature.

M. Philippe Gosselin. Je souris, car notre collègue a bien fait de préciser, dans l’exposé sommaire, que son amendement concernait les lois de finances. Nous savons, suite à l’adoption des articles précédents, que les rapporteurs pour avis hors des lois de finances seront les muets du sérail, puisque leur rapport ne sera plus publié et qu’ils n’interviendront plus dans la discussion générale...

La précision qui est proposée est importante et intéressante, et je la soutiens bien volontiers.

Mme Marietta Karamanli. Cette proposition va dans le bon sens, en effet. Ce n’est peut-être pas au Règlement de le prévoir, mais il serait utile qu’il y ait une harmonisation du « tourniquet » qui fonctionne dans chaque commission. Les règles ne sont pas les mêmes d’une commission à une autre, et il n’est pas normal de traiter différemment les députés de l’opposition et de la majorité au sein des différentes commissions.

En début de législature, nous avons mené un travail sur l’Europe, et les présidents de groupe s’étaient rencontrés à ce sujet. À l’occasion de cette réforme du Règlement, il est essentiel d’harmoniser la répartition des rapports et les pratiques entourant la nomination de co-rapporteurs, afin que l’opposition puisse être correctement représentée, en fonction de son poids dans l’hémicycle. Ce travail doit être fait de manière très transparente.

La Commission rejette l’amendement.

Article 37 (art. 146-1-1 [nouveau] du Règlement de l’Assemblée nationale) : Contrôle de l’exécution des lois de finances

La Commission adopte l’article 37 sans modification.

Article 38 (art. 146-2 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Composition du bureau du Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques

La Commission adopte l’article 38 sans modification.

Après l’article 38

La Commission est saisie de l’amendement CL289 de Mme Olga Givernet.

Mme Olga Givernet. L’article 38 porte sur le Comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC). Celui-ci est présidé par le Président de l’Assemblée nationale, mais son bureau, qui compte plusieurs vice-présidents et secrétaires, n’a pas été réuni depuis le début de la législature. Nous souhaitons lui confier la responsabilité de définir le programme des travaux dans l’année, afin qu’il se réunisse au moins une fois par an.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Nous avons fait un long point avec le président Ferrand sur l’activité du CEC, à la suite de la présentation de l’ensemble des amendements. Rappelons que le CEC s’est tout de même réuni, notamment pour des tables rondes, avec des experts.

Si l’on étudie l’ensemble des amendements consacrés au CEC, deux sujets semblent particulièrement importants.

En premier lieu, il n’existe pas de vision consolidée globale des activités de l’Assemblée nationale en matière d’évaluation, ce qui pose problème. La commission des Finances agit beaucoup en la matière, la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) lui donnant mandat de vérifier l’exécution des missions budgétaires et d’évaluer l’efficacité des deniers publics utilisés. Chaque commission permanente mène sa propre action d’évaluation, le CEC également, de sorte que l’évaluation est morcelée et qu’il n’en existe pas de vision consolidée.

Une autre proposition qui a été émise est que le CEC suggère des programmes d’action clairs pour les semaines d’évaluation. Après cet échange assez long avec le président Ferrand, je pense que, pour nombre d’amendements, il n’y a pas besoin du Règlement pour renforcer l’action du CEC. Ce qu’il faut, c’est une impulsion. Je crois que le président Ferrand a pris plusieurs initiatives en la matière, et qu’il a entendu votre appel à passer à l’étape suivante sur les deux points que j’ai soulevés.

Mon avis est donc défavorable à ces amendements, pour deux raisons. S’agissant spécialement de l’amendement CL289, ce n’est pas au bureau du CEC, mais au CEC dans son ensemble de proposer le programme de travail.

Au-delà, la bonne solution me semble celle proposée par le président Ferrand : organiser dans les semaines ou les mois qui viennent une réunion formelle du CEC pour traiter les deux questions évoquées. Comment obtenir une vision globale consolidée de l’ensemble de l’activité de l’Assemblée ? C’est un manque criant, car il n’existe pas de parole forte sur l’ensemble de nos activités d’évaluation, alors que nous en avons beaucoup. Peut-être certains aspects sont-ils insatisfaisants, mais l’évaluation est performante sur d’autres. Le CEC, en outre, a vocation à proposer à la Conférence des Présidents des ordres du jour dans le cadre du « printemps de l’évaluation », ainsi que des thématiques d’évaluation.

Je vous propose de retirer ces amendements, car l’engagement du Président de l’Assemblée nationale répond pleinement à vos demandes, et le Règlement n’est pas le texte adéquat pour appuyer cette dynamique.

Mme Olga Givernet. Permettez-moi de rectifier un certain nombre de points. Effectivement, avec Marie Tamarelle-Verhaeghe, qui est comme moi vice-présidente du CEC, nous avons fait part de nos recommandations au Président de l’Assemblée nationale. Nous sommes au regret de constater qu’il n’a pu nous recevoir jusqu’à présent, et qu’il nous propose de le faire à une date postérieure à la réforme de notre Règlement.

Il est important de corriger, dans le Règlement lui-même, certains dysfonctionnements. Il est regrettable que le bureau du CEC ne se réunisse pas, et que nous ne puissions y échanger sur le calendrier avant de le présenter au Comité. S’agissant d’un amendement d’appel, j’accepte de le retirer, mais je maintiens les autres amendements consacrés au CEC.

L’amendement est retiré.

La Commission est saisie des amendements CL291, CL292 et CL290 de Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe.

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. J’aimerais savoir, sur l’ensemble des députés présents ici, combien connaissent le CEC ? Je ne suis pas sûr qu’ils soient nombreux… Or c’est un outil d’un incontestable intérêt qui a été mis à la disposition de l’Assemblée pour exercer la mission d’évaluation et de contrôle dont nous avons tous unanimement constaté l’importance, et que l’Assemblée éprouve de grandes difficultés à remplir. C’est une mission en souffrance, et Mme Givernet et moi pensons que le CEC permettrait de contribuer à la promotion de l’évaluation et du contrôle au sein de l’Assemblée.

Les missions attribuées au CEC étaient assez ambitieuses, il devait être la « tour de contrôle » de l’évaluation. Aujourd’hui, il s’avère, contrairement à ce qui est inscrit dans le Règlement, que ce Comité est incapable d’assurer son rôle d’évaluation des amendements et des études d’impact, qu’il ne peut pas proposer de sujets pour la semaine de contrôle, et que son bureau ne se réunit jamais.

Il y a donc un réel problème, sur lequel nous appelons votre attention car il serait dommage de passer à côté. Nous avons proposé cinq amendements. Certains méritent d’être rediscutés, mais si nous les adoptions, ils permettraient au CEC de jouer son rôle de « tour de contrôle ». Chaque commission est responsable de l’évaluation dans son champ de compétence, mais nous n’avons pas de vision d’ensemble des activités d’évaluation au sein de l’Assemblée nationale. Il faudrait à tout le moins permettre que le bureau du CEC se réunisse, afin de faciliter l’organisation de ses travaux.

L’amendement CL291 fait suite à une obligation inscrite dans le Règlement. Actuellement, la seule activité du CEC est de publier des rapports d’évaluation de politiques transversales. Le Règlement prévoit que le Gouvernement est obligé de répondre aux rapports du CEC dans les trois mois qui suivent leur publication, soit lors de la semaine d’évaluation et de contrôle, soit par un rapport écrit, soit lors d’une rencontre du Gouvernement avec le Comité. Dans les faits, cela ne se produit quasiment pas. L’amendement prévoit la possibilité que le CEC entende le Gouvernement quand réponse n’a pas été donnée. Après réflexion, cet amendement n’est pas réalisable dans le cadre actuel, car le CEC n’est pas une commission, nous devons y retravailler et je le retire donc.

L’amendement CL292 prévoit la réunion formelle du bureau du CEC pour permettre de formuler des propositions lors de la semaine de contrôle.

Enfin, l’amendement CL290 prévoit la remise d’un rapport annuel sur l’activité d’évaluation au sein de l’Assemblée nationale. Cette possibilité, qui sera rediscutée avec le Président de l’Assemblée nationale, ne pourra se concrétiser si elle n’est pas inscrite dans le Règlement de l’Assemblée nationale.

Afin de permettre d’en rediscuter, je retire les amendements CL291 et CL292, et je laisse à votre appréciation l’amendement CL290.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Pour les raisons que j’ai évoquées, j’émets un avis défavorable. Vous soulevez de réelles questions, mais je pense que le président Ferrand, qui préside le CEC, répondra pleinement à vos attentes. Je suis personnellement opposé au fait de graver ces dispositions dans le marbre du Règlement, alors que rien ne nous empêche de faire tout cela dès aujourd’hui. Sur le fond, nous sommes favorables à l’approche, mais ne souhaitons pas l’inscrire ans le Règlement.

M. Bruno Questel. Il n’est pas opportun d’inscrire dans le Règlement des règles sur la pratique d’un comité, quel qu’il soit, qui imposeraient au président de celui-ci ou à ses membres un mode opératoire figé. Il faut examiner avec le président Ferrand les façons de faire évoluer les pratiques de fonctionnement, sans inscrire dans le Règlement des règles qui pourraient s’avérer pénalisantes ou trop rigides. Je vous demande de retirer vos amendements, à défaut les députés du groupe La République en Marche voteront contre.

M. Philippe Gosselin. Je connais bien le CEC pour y avoir siégé lors de la législature précédente, et le fait est que l’on s’y ennuie un peu. Il n’y a pas de moyens, il est difficile de faire connaître ce qui s’y fait.

Pourtant, des travaux d’évaluation intéressants y sont menés. C’est très frustrant, ce n’est pas valorisant, on y passe des heures, totalement invisible, en se privant parfois pour cela d’interventions en séance ou en commission.

L’évaluation pose un vrai problème, qu’il faut réexaminer en fonction de la répartition nouvelle souhaitée par la majorité et d’autres groupes politiques. Cela montre qu’il aurait mieux valu réviser la Constitution avant le Règlement, mais je sais que cette remarque va susciter des commentaires désapprobateurs.

Je n’insiste pas, mais l’évaluation pose un problème que le Règlement ne permettra peut-être pas de régler.

M. Erwan Balanant. Je suis d’accord avec une partie des propos de M. Gosselin, et si l’on se plonge un peu dans notre Règlement, on trouve un grand nombre d’outils d’évaluation, notamment à l’article 145-7. J’avais découvert, en lisant le Règlement à mon arrivée, l’alinéa 3 de cet article qui prévoit de manière presque obligatoire l’évaluation des lois trois ans après leur entrée en vigueur. Pourtant, ce n’est presque jamais fait

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Vous exagérez !

M. Erwan Balanant. On ne le fait pas assez, madame la présidente. Mais votre travail de suivi des textes est remarquable, ainsi que les tableaux que vous réalisez.

Il faudra que nous réfléchissions profondément sur l’évaluation, c’est un sujet sur lequel nous devons nous pencher car c’est une vraie demande de nos concitoyens. Combien de fois nous dit-on, sur le terrain, qu’il faudrait une loi sur un sujet alors qu’il en existe déjà une ? Et, inversement, combien de fois nous demande-t-on pourquoi un texte existant n’est pas appliqué ? Essayons de mener un travail de fond sur ces sujets.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Avant la loi relative à l’asile et à l’immigration, nous avons réalisé une évaluation de la précédente loi sur l’immigration, conduite par Jean-Michel Clément et Guillaume Larrivé. Des travaux d’évaluation de la loi sur les actions de groupe vont être menés par Laurence Vichnievsky et Philippe Gosselin C’est donc possible à droit constant, sans modifier le Règlement.

Mme Cécile Untermaier. Je trouve que ces amendements sont bons, car ils mettent la lumière sur un dispositif qui ne fonctionne pas. Tout le monde parle du CEC, c’est notre alibi pour prétendre que l’Assemblée nationale exerce sa mission de contrôle et d’évaluation, mais à vous entendre, nous constatons que les choses ne fonctionnent pas, et je vous remercie de nous permettre de sortir de l’hypocrisie.

Il faut être clair, on ne peut pas dire d’un côté que le rôle d’un député, c’est le contrôle, et laisser perdurer des dispositifs qui ne fonctionnent pas, il en va de notre responsabilité. Je n’ai pas la chance de faire partie de ce Comité d’évaluation et de contrôle, peut-être faut-il que je m’en félicite ? Le « printemps de l’évaluation » arrive, nous souhaitons mettre en avant le rapporteur d’application, il me semble que le contrôle doit être organisé. Le Règlement est aussi là pour donner de la lisibilité à tout ce travail, et le CEC doit être un des maillons qui soutiennent ce travail. En l’état, nous soutenons ces amendements.

Les amendements CL291 et CL292 sont retirés.

La Commission rejette l’amendement CL290.

Elle est ensuite saisie de l’amendement CL288 de Mme Olga Givernet.

Mme Olga Givernet. Cet amendement soulève un vrai dysfonctionnement de notre Règlement, et les propos précédents du rapporteur n’y apportent pas de réponse.

Lorsque le CEC publie un rapport, un rapport de suivi peut être réalisé sur la mise en œuvre de ses conclusions. Aujourd’hui, ces rapports de suivi sont lancés de manière automatique six mois après la publication du rapport initial alors que, politiquement, le calendrier peut ne pas être favorable. C’est une vraie question politique. Les conclusions du CEC soumettent des préconisations au Gouvernement, et il lui faut parfois plus de six mois pour les mettre en œuvre.

Ces rapports de suivi rendus six mois plus tard peuvent donc poser problème, d’autant qu’ils entrent dans le droit de tirage des groupes : ces derniers n’ont donc pas le choix du sujet qu’ils vont traiter.

Par ailleurs, je voudrais dire à Mme Untermaier que c’est tout de même une chance que de faire partie du CEC : les sujets des rapports sont passionnants, car ils sont transversaux et ne pourraient pas être traités par l’une ou l’autre des commissions permanentes. Je souhaite que l’on leur donne plus de reconnaissance, et que l’on facilite leur suivi.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je suis tiraillé entre deux points de vue. D’un côté, si aucun groupe ne le demande, c’est que le rapport de suivi n’a pas d’intérêt : donc, pourquoi prévoir automatiquement ce rapport ? D’un autre côté, un rapporteur est nommé au départ, et nous sommes en train de placer sur son chemin critique l’accord d’un groupe politique. Cela n’existe nulle part dans le Règlement : jamais, une fois qu’un rapporteur est nommé, on ne place l’accord d’un groupe politique sur le chemin critique de son rapport.

Mme Olga Givernet. Il s’agit d’un autre rapport !

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Mais je veux dire que nous sommes en train de placer un jalon qui impose l’accord d’un groupe politique. Je ne sais pas si ce problème est réel ou théorique. Je vous propose d’y réfléchir à tête reposée : proposez à nouveau le même amendement dans l’hémicycle, et je vous donnerai une réponse claire.

Je suis mal à l’aise avec l’idée de placer sur le chemin critique d’un rapporteur la validation d’un groupe politique qui, à mon sens, n’a pas d’équivalent dans le Règlement. Cela dit, je comprends bien qu’il ne soit pas utile de faire un rapport si personne n’en veut.

Mme Olga Givernet. Je me permets de préciser le processus : le rapport est réalisé et rendu par le rapporteur, et il est possible qu’un rapport de suivi soit demandé, par le rapporteur ou toute autre personne. J’ai personnellement travaillé sur le suivi d’un rapport initial dont je n’étais pas l’auteure. C’est un nouveau rapport, qui s’inscrit dans la continuité du premier. Il est plus léger, mais il est considéré comme un rapport à plein titre, et vient réduire le droit de tirage des groupes. Il m’apparaît donc important que le groupe puisse valider le sujet du rapport de suivi.

M. Bruno Questel. Si l’on peut comprendre le fond, mon interrogation porte sur l’opportunité de placer un président de groupe en position de demander un rapport de suivi sur le fonctionnement d’un comité d’évaluation…

Mme Marie Tamarelle-Verhaeghe. Non, ce n’est pas cela…

M. Bruno Questel. C’est ce que l’on comprend de l’exposé sommaire.

Mme Olga Givernet. Je retire l’amendement afin d’apporter les explications demandées, et je le déposerai à nouveau en vue de la séance publique.

L’amendement est retiré.

Article 39 (art. 147 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Dématérialisation de la transmission des pétitions

La Commission adopte l’amendement de précision CL310 du rapporteur.

Elle en vient à l’amendement CL325 du rapporteur.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Nous souhaitons que le Bureau de l’Assemblée précise les conditions d’authentification des pétitionnaires plutôt que de les inscrire dans le Règlement, ce qui serait trop compliqué et trop rigide.

La Commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article 39 modifié.

Article 40 (art. 148 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Conditions d’examen et de publicité des pétitions

La Commission est saisie de l’amendement CL124 de Mme Sylvia Pinel.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Je suis défavorable à l’amendement, car je suis partisan, contrairement à ce qui est proposé, de maintenir le seuil à 100 000 signataires pour qu’une pétition soit mise en ligne sur le site de l’Assemblée nationale. Nous sommes conscients que c’est un seuil assez bas, mais cela n’entraîne pas une charge de travail considérable.

La Commission rejette l’amendement.

Elle examine ensuite l’amendement CL123 de Mme Sylvia Pinel.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Nous avons renvoyé à une décision du Bureau pour toutes les conditions de recevabilité des pétitions. Nous pourrions débattre de nombreux points pendant de longues heures, mais nous avons préféré renvoyer ces mesures à une décision du Bureau.

La Commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CL131 de Mme Sylvia Pinel.

M. Paul Molac. Il s’agit d’exiger que les signataires des pétitions soient inscrits sur les listes électorales.

Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’amendement de coordination CL328 du rapporteur.

Elle en vient à l’amendement CL101 de M. Christophe Euzet.

M. Christophe Euzet. Le droit actuel des pétitions n’est pas plus satisfaisant que le traitement que nous leur réservons. Tout le monde salue donc les modifications prévues en la matière par le présent texte.

Pour ma part, je voulais appeler votre attention sur le fait que nous ouvrons à 1,05 % des électeurs de notre pays la possibilité de saisir l’Assemblée nationale d’un texte présenté dans l’hémicycle. Nous devons veiller à ce que le système ne soit pas dévoyé et nous assurer que les pétitions soient représentatives, qu’elles ne relèvent pas de préoccupations géographiquement situées.

Il est prévu que la pétition devra être signée par plus de 500 000 citoyens domiciliés dans 30 départements au moins. Je propose d’ajouter une condition : aucun des départements en question ne devra comptabiliser plus de 10 % de l’ensemble des signataires.

Le système est inspiré de ce qui existe en matière de parrainage pour l’élection présidentielle.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. C’est un garde-fou indispensable et c’est précisément la raison pour laquelle nous l’avons renvoyé à une décision du Bureau. Les modalités, notamment la répartition des signataires entre ces trente départements, sont importantes. Il ne faudrait pas qu’il y ait seulement vingt-neuf personnes dans vingt-neuf départements…

Votre proposition est tout à fait pertinente mais ne l’inscrivons pas dans le Règlement. Le taux de 10 % sera peut-être trop rédhibitoire. Laissons le Bureau décider des modalités, dont il rendra compte, pour affiner les conditions d’éligibilité.

M. Philippe Gosselin. Ce droit de pétition est très important. Monsieur le rapporteur, j’approuve souvent votre sagesse quand vous ne voulez pas graver certaines dispositions dans le marbre pour que les commissions puissent avoir de la souplesse. En l’occurrence, je crois que notre collègue Christophe Euzet a raison : il faut que les conditions soient claires et précises pour que nos concitoyens connaissent précisément les modalités de pétition. Il ne faut pas qu’il y ait des risques d’interprétation – je le dis sans faire de mauvais procès à qui que ce soit. La transposition assez carrée de ce qui existe en matière de parrainages peut éviter des dérapages. Je crois que nous devons apporter notre soutien à cet amendement.

M. Raphaël Schellenberger. L’article prévoit déjà un degré minimum de dispersion géographique, sans quoi il serait possible de recueillir 100 000 signatures dans une seule grande ville.

La proposition de M. Euzet me semble néanmoins excessive. Il peut être contre-productif d’entrer dans le détail de la répartition. C’est peut-être accessoire, mais je suis assez surpris des termes employés dans l’exposé sommaire, où il est question de « pétitions identitaires locales ». La formule peut véhiculer une forme de mépris à l’égard de mobilisations qui pourraient avoir lieu localement. Je ne suis pas sûr que ce soit approprié au sujet.

Quoi qu’il en soit, nous ne pouvons pas négliger le fait que certains sujets peuvent concerner davantage certains territoires que d’autres, que certaines problématiques peuvent naître davantage d’un territoire que d’un autre. Je pense à un exemple concret, celui de StocaMine dans ma circonscription. Il est normal que les personnes qui vivent près de ce seul site de stockage souterrain de déchets ultimes dans une mine soient potentiellement plus mobilisées que les habitants d’autres territoires.

Le taux maximum de 10 % est très strict. Il faut évidemment s’assurer d’une répartition des signatures sur l’ensemble du territoire puisqu’il s’agit de sujets nationaux. De là à empêcher un minimum de concentration dans un territoire, cela me semble contre-productif.

M. Paul Molac. En ce qui me concerne, c’est le nombre de trente départements qui m’étonne. Certaines décisions prises dans cette assemblée n’ont parfois des conséquences que sur un ou deux départements. Prenons la carte des régions. C’est ce Parlement qui a décidé de supprimer l’Alsace. À l’époque, je m’étais élevé contre cette suppression.

En Bretagne, dans le département de Loire-Atlantique, une association a réussi à recueillir 110 000 signatures pour faire un référendum. Avec ce type de garde-fous, les habitants de Loire-Atlantique n’auraient même pas le droit de dire qu’ils veulent un référendum pour décider de rejoindre ou non la région Bretagne. C’est leur région d’origine puisque la Loire-Atlantique a été bretonne pendant plus de mille ans. Peut-être que pour vous ce n’est pas important, mais ça l’est pour moi et pour beaucoup de Bretons.

Le Parlement prend des décisions qui ont des répercussions sur la représentation mentale que nous avons de notre région et de ce que nous sommes. Je pense qu’on a le droit de demander un référendum sur ce genre de sujet. On touche alors à quelque chose qui pose problème : la reconnaissance des peuples qui composent la République.

Mme Élodie Jacquier-Laforge. J’aimerais avoir des précisions. Le rapporteur nous dit que le Bureau est le bon niveau de décision. Comment cela se formalise-t-il ? Je pense que la diffusion des décisions du Bureau pourrait être un peu plus systématique…

M. Bruno Questel. Je suis un peu embêté par ce seuil de 10 % qui empêcherait un citoyen du territoire concerné de signer. Il faut aussi veiller à ce que la représentation nationale dans son ensemble puisse se saisir de tel ou tel sujet micro-local qui aurait une importance. Je demande à mon collègue Euzet de retirer son amendement qui m’apparaît inopérant par rapport à la philosophie globale de la proposition de Richard Ferrand sur la modification du régime des pétitions.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Effectivement, la rédaction de l’amendement est réductrice sur ce point. On ne peut pas dire que s’il y avait 11 % de signataires dans un département, la pétition serait impossible. Je vous invite à bien intérioriser un fait : nous ne changeons pas le Règlement souvent car cela nécessite tout un travail de concertation. On ne va pas recommencer tout ce que nous sommes en train de faire si nous nous rendons compte que le taux de 10 % devrait être ramené à 5 % parce qu’il n’y a pas assez de pétitions.

Sur la publicité, point évoqué par M. Gosselin et Mme Jacquier-Laforge, je vous rappelle que toutes les décisions sont sur le site de l’Assemblée nationale. C’est peut-être un peu difficile à trouver : sur la page d’accueil, il faut cliquer successivement sur « Les députés », puis « Le Bureau » ou « La Conférence des Présidents », où sont répertoriées toutes les décisions.

En revanche, nous n’allons pas demander aux citoyens d’aller trouver les conditions d’application dans un sous-menu. Nous en sommes bien d’accord. Puisque toutes les pétitions seront publiées sur le site, nous devrons expliquer toutes ces conditions de manière simple et claire aux citoyens – peu importe que ce soit du niveau du Bureau –, en les faisant évoluer s’il y a lieu.

Quand le président Ferrand a écrit ce texte, c’était avec l’intention de revivifier le principe de pétitions. Dans cette salle, personne ne peut être sûr de la façon dont vont se comporter nos concitoyens. Se saisiront-ils de cette possibilité ? Les seuils seront-ils trop hauts ou trop bas ? On peut intellectualiser un seuil à 10 %, à 15 % ou à 5 %. En réalité, personne ne sait quel en sera l’impact réel.

Le but est bien de faire revivre cette procédure. Nous aurons collectivement progressé le jour où, à partir d’une pétition de 600 000 signataires, la Conférence des Présidents organisera un débat dans l’hémicycle, où celui-ci suscitera le dépôt d’une proposition de loi dans une niche, et où nous adopterons le texte directement inspiré de cette parole citoyenne.

Voilà l’objectif. Je vous invite vraiment à ne pas graver ces seuils dans le marbre parce que nous devons garder une flexibilité. Notre but est de faire vivre ces pétitions. Si une formule mathématique nous permettait d’anticiper le volume de pétitions à partir des seuils, je serais d’accord pour les inscrire. Puisque ce n’est pas le cas, gardons cette flexibilité. En revanche, notre institution doit fixer les règles du jeu de manière transparente et claire.

M. Philippe Gosselin. C’est le type même de débat que nos échanges permettent d’éclairer. Je reviens donc sur ma position : il me semblait important que les règles soient claires, mais je réalise que ces 10 % peuvent apporter des complications et empêcher un débat d’avoir lieu, quand bien même il serait davantage circonscrit à un territoire.

M. Aurélien Pradié. Nos débats montrent à quel point il ne faut pas laisser de latitude au Bureau ; c’est à la commission qu’il revient d’arbitrer. Les modalités qui encadrent le droit de pétition sont consubstantielles de l’exercice même du droit de pétition.

Je n’ai pas de religion sur les modalités, mais je suis certain d’une chose : il ne faut pas laisser au Bureau ce qui est bien plus qu’une appréciation. Dans notre droit, tous les dispositifs liés au droit de pétition ou de consultation des citoyens régulent à la fois les sujets et les modalités de la représentation. Ce sont deux éléments qui ne relèvent pas de l’administration de la démarche, mais de sa réalisation. Ce n’est pas une contingence, c’est consubstantiel. Il doit en être décidé dans le cadre d’un débat parlementaire, non au sein du Bureau.

M. Christophe Euzet. Dans la perspective de l’examen en séance publique, je retire mon amendement. Je veux néanmoins insister sur le fait que la représentativité est indispensable dans l’exercice du droit de pétition.

Je veux dire à M. Schellenberger que je prends bonne note de son cours de droit sur les intérêts locaux. Mais parvenir à voir dans mon propos quoi que ce soit qui aille contre les intérêts locaux relève de la prestidigitation. La règle des 10 % permet justement aux petites circonscriptions qui ne disposeraient pas de la faculté de mobiliser 500 000 personnes de chercher des renforts ailleurs. Ainsi, elles ne se retrouveront pas dans une position de distorsion avec les circonscriptions plus grandes qui n’ont pas besoin de faire appel à des électeurs extérieurs.

Je continue d’appeler l’attention du rapporteur sur la nécessité de trouver une modalité d’organisation qui permette d’éviter des pétitions géographiquement centrées, quand bien même certains textes de loi auraient pour seul objet une région spécifique.

L’amendement est retiré.

La Commission adopte l’amendement CL327 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 40 modifié.

Après l’article 40

La Commission adopte l’amendement de coordination CL309 du rapporteur. L’article 40 bis est ainsi rédigé.

Puis elle examine l’amendement CL46 de M. Michel Zumkeller.

M. Michel Zumkeller. Cet amendement vise à développer l’intérêt de l’Assemblée pour les sujets européens. Il permet à chaque président de groupe de faire inscrire au moins une fois par session une proposition de résolution européenne à l’ordre du jour.

M. Sylvain Waserman, rapporteur. Nous avons déjà adopté un amendement de M. Peu qui prévoit que, pendant les semaines de contrôle, des débats préalables aux réunions du Conseil européen peuvent être organisés. Je ne pense pas qu’il faille rigidifier davantage l’ordre du jour.

La Commission rejette l’amendement.

Article 41 (art. 159 du Règlement de l’Assemblée nationale) : Contrôle de la présence des députés en séance publique en cas de déport

La Commission adopte l’amendement de précision CL337 du rapporteur.

Puis elle adopte l’article 41 modifié.

Article 42 : Entrée en vigueur de la résolution

La Commission adopte l’article 42 sans modification.

Puis elle adopte l’ensemble de la proposition de résolution modifiée.

Mme la présidente Yaël Braun-Pivet. Nous avons consacré treize heures trente à l’examen de cette proposition de résolution modifiant le Règlement de l’Assemblée nationale. Nous avons adopté 45 amendements. Le texte sera examiné en séance publique à partir de lundi prochain, 27 mai, à seize heures. Je vous signale que le délai de dépôt des amendements a été repoussé de 24 heures : il est désormais fixé à vendredi, 24 mai, dix-sept heures.

*

*     *

 En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République vous demande d’adopter la proposition de résolution tendant à modifier le règlement de l’Assemblée nationale (n° 1882) dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

 


1

 

   ANNEXE n° 1

Avis de LA déontologue SUR LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION

 

L’article 4 quater de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires, dont la nouvelle rédaction résulte de l’article 3 de la loi n° 2017-1339 du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, dispose que :

« Chaque assemblée, après consultation de l’organe chargé de la déontologie parlementaire, détermine des règles destinées à prévenir et à faire cesser les conflits d’intérêts entre un intérêt public et des intérêts privés dans lesquels peuvent se trouver des parlementaires.

Elle précise les conditions dans lesquelles chaque député ou sénateur veille à faire cesser immédiatement ou à prévenir les situations de conflit d’intérêts dans lesquelles il se trouve ou pourrait se trouver, après avoir consulté, le cas échéant, l’organe chargé de la déontologie parlementaire à cette fin.

Elle veille à la mise en œuvre de ces règles dans les conditions déterminées par son règlement.

Elle détermine également les modalités de tenue d'un registre public recensant les cas dans lesquels un parlementaire a estimé devoir ne pas participer aux travaux du Parlement en raison d'une situation de conflit d'intérêts telle qu'elle est définie au premier alinéa.

Le registre mentionné à l'avant-dernier alinéa est publié par voie électronique, dans un standard ouvert, aisément réutilisable et exploitable par un système de traitement automatisé ».

La nouvelle rédaction de l’article 4 quater de l’ordonnance renvoie désormais aux assemblées, et non plus au Bureau, le soin de définir les règles destinées à prévenir et à faire cesser les conflits d’intérêts de leurs membres et les charge de veiller à leur mise en œuvre, dans les conditions déterminées par leur règlement. Elle maintient par ailleurs l’obligation de consulter « l’organe chargé de la déontologie parlementaire » sur ces règles.

En application de ces dispositions, le Président de l’Assemblée nationale, auteur d’une proposition de résolution tendant à modifier le Règlement de l’Assemblée nationale, a saisi la Déontologue de l’Assemblée nationale le 15 avril 2019, afin de connaître son avis sur la partie de ce texte relative aux règles destinées à prévenir et à faire cesser les conflits d’intérêts. Cette proposition de résolution sera examinée par la commission des Lois le 15 mai et en séance publique le 27 mai 2019.

À titre liminaire, il convient de préciser que le respect tant des règles de fond prévues par l’article 4 quater de l’ordonnance du 17 novembre 1958 que des règles de forme, comme la consultation de l’organe chargé de la déontologie parlementaire, s’imposent aux assemblées lorsqu’elles modifient leur règlement.

Dans sa décision n° 2018-767 DC du 5 juillet 2018 relative à la résolution relative aux obligations déontologiques et à la prévention des conflits d'intérêts des sénateurs qui modifiait le Règlement du Sénat, le Conseil constitutionnel a rappelé en effet que les dispositions de l’article 4 quater de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 faisaient partie des normes de référence de son contrôle lorsqu’il examine les règlements des assemblées :

« En raison des exigences propres à la hiérarchie des normes juridiques dans l’ordre interne, la conformité à la Constitution des règlements des assemblées parlementaires doit s'apprécier au regard tant de la Constitution elle-même que des lois organiques prévues par celle-ci ainsi que des mesures législatives prises pour son application. Entrent notamment dans cette dernière catégorie l’ordonnance du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires ainsi que les modifications qui lui ont été apportées. Ces textes législatifs ne s'imposent à une assemblée parlementaire, lorsqu’elle modifie ou complète son règlement, qu’autant qu’ils sont conformes à la Constitution. »

Le Conseil constitutionnel fait d’ailleurs référence, dans les visas de sa décision, à l’avis rendu par le Comité de déontologie parlementaire du Sénat sur la proposition de résolution qui lui était soumise.

Afin de donner sa pleine portée à la consultation préalable obligatoire de la Déontologue, il semble nécessaire que son avis fasse l’objet d’une publicité auprès de l’ensemble des députés appelés à adopter la proposition de résolution le 27 mai prochain.

À cet égard, il convient de souligner que l’avis du Comité de déontologie parlementaire du Sénat du 3 avril 2018 sur la proposition de résolution du président du Sénat relative aux obligations déontologiques et à la prévention des conflits d’intérêts des sénateurs a été publié en annexe du rapport du président de la commission des Lois, rapporteur du projet.

***

Le présent avis porte sur les dispositions de la proposition de résolution relatives aux modalités de prévention et de traitement des conflits d’intérêts et aux missions attribuées au Déontologue de l’Assemblée nationale.


1) L’inscription des modalités de prévention et de résolution des conflits d’intérêts

Afin de prendre en compte les apports de la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, la proposition de résolution prévoit d’adapter la définition du conflit d’intérêts pour les députés et de consacrer, dans le Règlement de l’Assemblée nationale, de nouveaux mécanismes de prévention et de gestion de ce conflit (déclaration écrite ou orale d’intérêts, faculté de déport lors de l’examen d’un texte et possibilité d’absention de solliciter ou d’accepter une fonction liée au travail parlementaire en cas de risque de conflit d’intérêts).

Ces modifications reprennent des propositions formulées par la Déontologue pour assurer la mise en œuvre de la loi pour la confiance dans la vie politique dans son rapport remis, le 15 mai 2018, au Président François de Rugy[198], puis dans son rapport public présenté au Bureau le 30 janvier dernier. Elle ne peut que se réjouir que ses travaux aient pu servir de base à la préparation de la proposition de résolution.

La rédaction de cette dernière appelle toutefois de sa part quelques remarques et des suggestions de compléments.

a-     Préciser les modalités de l’usage par les députés des moyens de prévention et de gestion des conflits d’intérêts

L’article 15 de la proposition de résolution introduit un nouvel article 80-1-1 dans le Règlement de l’Assemblée nationale énonçant divers moyens de prévention et de gestion des conflits d’intérêts.

Le premier moyen est prévu par le premier alinéa du nouvel article 80-1-1. Il consiste, pour le député qui estime devoir faire connaître un intérêt privé, à le déclarer oralement ou par écrit. Il est précisé que « Cette déclaration est mentionnée au compte rendu et, si elle est orale, n’est pas décomptée du temps de l’intervention ».

Dans la mesure où une déclaration orale peut s’avérer nécessaire y compris dans des réunions qui ne donnent pas lieu à compte rendu et afin d’écarter une interprétation restrictive du champ d’application de cette disposition, il conviendrait d’adapter la rédaction de la deuxième phrase du premier alinéa du nouvel article 80-1-1 (article 15 de la proposition de résolution). La rédaction suivante pourrait être retenue :

« Cette déclaration est, le cas échéant, mentionnée au compte rendu et, si elle est orale, n’est pas décomptée du temps de l’intervention ».

 

Le second moyen consiste, pour un député placé en situation de conflit d’intérêts, à se « déporter », c’est-à-dire à décider de ne pas participer aux travaux de l’Assemblée nationale. Le second alinéa du nouvel article 80-1-1 précise que le député ayant eu recours à cette modalité « en informe le Bureau ».

Sans qu’elles aient à figurer dans le Règlement de l’Assemblée nationale, les modalités pratiques de cette information devront être précisées dans une décision ultérieure du Bureau. Il importe en effet de prévoir des modalités à la fois simples et souples permettant aux députés de se « déporter » à tout moment en fonction de la tournure que prend une discussion s’inscrivant dans le cadre des travaux de l’Assemblée nationale.

b-     Inscrire et préciser les obligations déclaratives relatives aux dons, avantages et voyages à l’invitation de tiers dans le Règlement

La nouvelle rédaction de l’article 4 quater de l’ordonnance du 17 novembre 1958 impose désormais à chaque assemblée de déterminer, dans son Règlement, les règles destinées à prévenir et à faire cesser les conflits d’intérêts. Cette rédaction conduit logiquement à mentionner dans le Règlement les obligations déclaratives relatives aux dons, avantages et voyages à l’invitation de tiers, dès lors qu’elles contribuent à la prévention des conflits d’intérêts. Le dispositif devrait ainsi gagner en cohérence et en lisibilité dans la mesure où le nouveau Règlement énoncerait l’ensemble des moyens permettant de lutter contre les conflits d’intérêts. Le Sénat a d’ailleurs retenu cette logique (article 91 quinquies du Règlement du Sénat).

Le seuil de déclaration des dons ne serait toutefois pas fixé par le Règlement mais par une décision du Bureau afin de garder une souplesse d’adaptation.

Ce « rehaussement » des obligations déclaratives au niveau réglementaire pourrait s’accompagner de certaines précisions quant à leur portée.

Les dispositions relatives aux déclarations des cadeaux et invitations précisent, en effet, que l’obligation porte sur ceux qui sont effectués « en lien avec le mandat de député ». Par symétrie et pour plus de clarté, il conviendrait de spécifier que l’obligation de déclarer les voyages à l’invitation de tiers concerne ceux dont le député a bénéficié à raison de son mandat.

En outre, il conviendrait de préciser que la déclaration de don doit être faite dans le mois suivant sa réception.

Ces modifications pourraient être introduites dans le Règlement par l’ajout d’un article 80-1-2 (ajout d’un nouvel article 15 bis à la proposition de résolution) ainsi rédigé : 

 


« Les députés sont tenus de déclarer au Déontologue :

dans un délai d’un mois suivant sa réception, tout don, invitation à un événement sportif ou culturel ou avantage d’une valeur excédant un montant déterminé par le Bureau, dont ils ont bénéficié en lien avec leur mandat ;

toute acceptation d’une invitation de voyage émanant d’une personne morale ou physique, dont ils ont bénéficié à raison de leur mandat. La déclaration, effectuée préalablement au voyage, doit être accompagnée d’éléments précisant le programme du voyage et ses modalités de financement. »

c-     Introduire la publicité des déclarations de dons et de voyages à l’invitation de tiers

Il semble nécessaire à la Déontologue de prévoir la publicité des déclarations de dons et de voyages financés par les tiers sur le site Internet de l’Assemblée nationale.

Une telle publicité est en effet de nature à permettre aux députés de se prémunir contre d’éventuelles critiques sur leurs activités parlementaires. Elle présente l’avantage de responsabiliser les auteurs de cadeaux et d’invitations, dont la démarche auprès des députés sera rendue publique. Elle aura en outre pour effet de conduire les députés à s’interroger plus profondément sur la pertinence de l’acceptation du cadeau ou de l’invitation. Elle répond enfin à un objectif de transparence en permettant aux citoyens d’être assurés que les avantages reçus ne constituent pas un moyen de pression susceptible de détourner les députés de la poursuite de l’intérêt général.

La publicité viendrait renforcer un dispositif actuellement très en retrait par rapport à d’autres parlements qui prévoient, dans la majorité des cas, des interdictions d’accepter des cadeaux au-delà d’un certain montant (dons supérieurs à 150 € au Parlement européen) ou en raison de la qualité du donateur (dons d’entreprises en Allemagne) ou de la nature du don (« cadeau susceptible d’influencer le député dans l’exercice de sa charge » au Canada). Dans nombre de parlements, un dispositif de déclaration des cadeaux qui dépassent une certaine valeur est en place et il est le plus souvent assorti d’une publicité sur le site Internet de la chambre.

En France, le Sénat a également fait le choix de la publicité des invitations à des déplacements depuis 2014 et, plus récemment, des cadeaux reçus par les sénateurs dans le cadre de leur mandat, à la suite de l’adoption le 6 juin 2018 de la proposition de résolution de réforme du Règlement relative aux obligations déontologiques et à la prévention des conflits d’intérêts des sénateurs.

Le Bureau pourrrait décider selon quelle périodicité cette publicité interviendrait. Il conviendrait, s’agissant des voyages, que la publicité intervienne après leur réalisation pour des raisons de sécurité, tout en maintenant leur déclaration préalable auprès du Déontologue.

À la suite de la rédaction proposée supra sur les obligations déclaratives incombant aux députés, pourrait être ajouté au nouvel article 80-1-2 un alinéa ainsi rédigé :

« Ces déclarations sont rendues publiques sur le site Internet de l’Assemblée nationale. »

d-     Prévoir la possibilité de consigner les dons reçus par les députés

Il serait également utile de prévoir, dans le Règlement, une disposition permettant aux députés qui le souhaitent de consigner les cadeaux qu’ils ont reçus auprès du Déontologue afin de formaliser une pratique et de clarifier les règles. Dans certains cas en effet, les députés se sentent obligés d’accepter des cadeaux d’ordre protocolaire, mais ne souhaitent pas les conserver.

Comme son prédécesseur, la Déontologue a accepté de consigner certains cadeaux dans son coffre fort. Il peut être relevé que la possibilité de consigner des cadeaux existe dans d’autres parlements.

Outre la consécration de cette possibilité dans le Règlement, il reviendrait ensuite au Bureau d’en déterminer l’affectation (vente au enchères ou stockage dans une salle de l’Assemblée par exemple).

Cette suggestion pourrait figurer dans le Règlement sous la forme d’un dernier alinéa au nouvel article 80-1-2 dont la rédaction serait la suivante :

« Les députés qui le souhaitent peuvent consigner les dons reçus auprès du Déontologue. Le Bureau de l’Assemblée nationale détermine leur affectation. »

2) L’inscription de l’ensemble des missions attribuées au Déontologue pour en assurer la lisibilité

La proposition de résolution vise également à prendre en compte l’évolution du rôle du Déontologue de l’Assemblée nationale. La loi du 15 septembre 2017 a en effet considérablement élargi le rôle de « l’organe chargé de la déontologie parlementaire » (contrôle de l’utilisation des frais de mandat, encadrement des emplois de collaborateurs parlementaires, contrôle des représentants d’intérêts). Il importe que l’ensemble de ces missions soient récapitulées dans le Règlement dans un souci de lisibilité du droit.

Les articles 16 à 20 de la proposition reprennent les propositions formulées par la Déontologue sur ce point et n’appellent pas d’observations particulières de sa part. Deux mesures pourraient utilement compléter les dispositions prévues pour préciser le statut et le rôle du Déontologue de l’Assemblée nationale.


a-     Déconnecter la durée du mandat du Déontologue de la durée de la législature

La coïncidence de la durée du mandat du Déontologue avec la durée de la législature conduit à une période de « vide déontologique » entre la fin du mandat du Déontologue et la nomination de son successeur par le nouveau Bureau de l’Assemblée nationale. Ce vide est problématique pour tous les députés, mais plus particulièrement pour les députés nouvellement élus.

Il parait donc indispensable que le mandat du Déontologue soit déconnecté de la législature afin d’assurer la présence de l’institution au moment du renouvellement de l’Assemblée nationale.

Il s’agirait de substituer à la première phrase de l’actuel alinéa 2 de l’article 80-2 du Règlement de l’Assemblée nationale, aux termes de laquelle « Il exerce ses fonctions pour la durée de la législature et son mandat n’est pas renouvelable », la rédaction suivante :

« Le Déontologue est nommé six mois après le renouvellement de l’Assemblée nationale pour une durée maximale cinq ans. Son mandat n’est pas renouvelable. ».

Sans modifier la durée du mandat du Déontologue qui resterait, par principe en l’absence de dissolution, de cinq ans, cette rédaction permettrait de faire en sorte que les députés nouvellement élus puissent bénéficier des conseils du Déontologue dès leur arrivée, tout en garantissant au Président de l’Assemblée nationale et au Bureau la possibilité de choisir le nouveau Déontologue à brève échéance. Ainsi, la nomination d’un nouveau Déontologue serait, comme aujourd’hui, déclenchée par les élections législatives mais, à l’avenir, décalée par rapport à celles-ci.

b-     Prévoir la publicité des avis relatifs à l’évolution de la réglementation

Dans le prolongement des dispositions adoptées lors du vote de la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique, la proposition de résolution prévoit d’inscrire dans le Règlement le principe de consultation du Déontologue sur les règles déontologiques applicables aux députés et aux représentants d’intérêts, les règles destinées à prévenir et à faire cesser les conflits d’intérêts ainsi que sur le régime de prise en charge des frais de mandat.

Rien n’est prévu quant au caractère public ou confidentiel des avis rendus dans ce cadre. Or ces avis intéressent l’ensemble des députés.

En outre, la consultation du Déontologue s’agissant tant de la détermination des « règles destinées à prévenir et à faire cesser les conflits d’intérêts » (article 4 quater de l’ordonnance précitée) que de la définition du « régime de prise en charge des frais de mandat », de « la liste des frais éligibles » et des modalités de contrôle de ces frais (article 4 sexies de l’ordonnance précitée) s’impose en vertu de la loi.

En conséquence, les avis de la Déontologue s’inscrivent dans un processus décisionnel prévu par la loi, ce qui justifierait d’en prévoir une publicité de principe. Toutefois, le Bureau pourrait décider ponctuellement de ne pas rendre public un avis du Déontologue. À cet égard, il peut être relevé que le Règlement du Sénat prévoit, « sauf décision contraire du Bureau », la publicité des avis de son Comité de déontologie « selon des modalités excluant le risque d’identification des personnes qui y sont mentionnées » (article 91 septies, alinéa 6 du Règlement du Sénat).

S’inspirant de ces dispositions, l’article 80-3 du Règlement, tel que modifié par l’article 17 de la proposition de résolution, pourrait être complété par un alinéa 3 ainsi rédigé :

« Sauf décision contraire du Bureau, le Déontologue assure la publication des avis rendus en application du premier alinéa et de la première phrase du deuxième alinéa du présent article ».

***

 

En conclusion, la Déontologue est très favorable à la réforme proposée et espère que les débats permettront de l’enrichir en considération de cet avis.

La modification du Règlement de l’Assemblée nationale rend nécessaire l’actualisation du code de déontologie des députés et du code applicable aux représentants d’intérêts, dont l’élaboration relève de la compétence du Bureau. La Déontologue espère que ces modifications interviendront rapidement.

L’ensemble de ces réformes permettra ainsi de renforcer le dispositif de lutte contre les conflits d’intérêts et d’assurer la pleine application de la loi pour la confiance dans la vie politique.

 

 


1

 

   Annexe n° 2

Code de dÉontologie des dÉputÉs

Considérant que le respect des actes du pouvoir législatif est un objectif énoncé par la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ; que selon l’article III de la Déclaration : « Le principe de toute Souveraineté réside essentiellement dans la Nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d’autorité qui n’en émane expressément. » ; que selon l’article VI : « La loi est l’expression de la volonté générale. Tous les citoyens ont droit de concourir personnellement, ou par leurs représentants, à sa formation. » ;

Considérant que l’article 3 de la Constitution dispose que : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum. » ; qu’aux termes de l’article 24 : « Le Parlement vote la loi. Il contrôle l’action du Gouvernement. Il évalue les politiques publiques. » ; que selon l’article 26 : « Aucun membre du Parlement ne peut être poursuivi, recherché, arrêté, détenu ou jugé à l’occasion des opinions ou votes émis par lui dans l’exercice de ses fonctions. » ; que l’article 27 dispose que : « Tout mandat impératif est nul. » ;

Considérant qu’en toutes circonstances, les députés doivent faire prévaloir les intérêts publics dont ils ont la charge et que le respect de ce principe est l’une des conditions essentielles de la confiance des citoyens dans l’action de leurs représentants à l’Assemblée nationale ;

Qu’en conséquence, les députés ont le devoir de respecter les principes énoncés dans le présent code.

Article 1er

Intérêt général

Les députés doivent agir dans le seul intérêt de la Nation et des citoyens qu’ils représentent, à l’exclusion de toute satisfaction d’un intérêt privé ou de l’obtention d’un bénéfice financier ou matériel pour eux-mêmes ou leurs proches.

Ils s’abstiennent d’utiliser les locaux ou les moyens de l’Assemblée nationale pour promouvoir des intérêts privés.

Article 2

Indépendance

En aucun cas, les députés ne doivent se trouver dans une situation de dépendance à l’égard d’une personne morale ou physique qui pourrait les détourner du respect de leurs devoirs tels qu’énoncés dans le présent code.

Article 3

Objectivité

Les députés ne peuvent intervenir dans une situation personnelle qu’en considération des seuls droits et mérites de la personne.

Article 4

Responsabilité

Les députés doivent rendre compte de leurs décisions et de leurs actions aux citoyens qu’ils représentent.

À cette fin, les députés doivent agir de manière transparente dans l’exercice de leur mandat.

Article 5

Probité

Les députés ont le devoir de faire connaître tout intérêt personnel qui pourrait interférer dans leur action publique et prendre toute disposition pour résoudre un tel conflit d’intérêts au profit du seul intérêt général.

Article 6

Exemplarité

Dans l’exercice de son mandat, chaque député doit se conformer aux principes énoncés dans le présent code et les promouvoir. Tout manquement au code de déontologie peut être sanctionné dans les conditions prévues à l’article 80-4 du Règlement de l’Assemblée nationale.

Article 7

Obligations déclaratives

1°) Déclarations de dons et avantages : les députés doivent déclarer au déontologue de l’Assemblée nationale tout don, invitation à un événement sportif ou culturel ou avantage d’une valeur qu’ils estiment supérieure à 150 euros dont ils ont bénéficié en lien avec leur mandat.

2°) Déclarations de voyage à l’invitation de tiers : les députés doivent déclarer au déontologue de l’Assemblée nationale toute acceptation d’une invitation de voyage émanant d’une personne morale ou physique. La déclaration, effectuée préalablement au voyage, doit être accompagnée d’éléments précisant le programme du voyage et ses modalités de financement.

3°) Déclarations afférentes à l’utilisation de l’indemnité représentative de frais de mandat : ainsi qu’il est dit à l’article 32 bis de l’Instruction générale du Bureau, le député adresse au Bureau, avant le 31 janvier suivant chaque année civile de mandat, une déclaration sur l’honneur attestant qu’il a utilisé l’indemnité représentative de frais de mandat, au cours de ladite année, conformément aux règles définies par le Bureau. Le Président peut, après avis du Bureau, saisir le déontologue de l’Assemblée nationale d’une demande d’éclaircissements concernant l’utilisation par un député de son indemnité représentative de frais de mandat, avec pour mission de lui en faire rapport. Saisi par le Président, le Bureau statue sur la situation du député au vu de ce rapport et prend les mesures appropriées.

Article 8

Respect du code de déontologie

Ainsi qu’il est dit à l’article 80-3 du Règlement de l’Assemblée nationale, le déontologue de l’Assemblée nationale peut être saisi par tout député qui souhaite, pour son cas personnel, le consulter sur le respect des principes énoncés dans le code de déontologie. Les demandes de consultation et les avis donnés sont confidentiels et ne peuvent être rendus publics que par le député concerné.

Le déontologue peut également être saisi par tout fonctionnaire des services de l’Assemblée nationale ou collaborateur parlementaire qui souhaite, pour son cas personnel, le consulter sur une question d’ordre déontologique en lien avec ses fonctions. Les demandes de consultation et les avis sont confidentiels.


1

 

   Annexe n° 3

Code de conduite applicable aux reprÉsEntants d’intÉrÊts

1. Les représentants d’intérêts se conforment aux obligations déclaratives prévues par le Bureau et acceptent de rendre publiques les informations contenues dans leur déclaration. Ils doivent ultérieurement transmettre au Bureau tout élément de nature à modifier ou compléter ces informations.

2. Dans leurs contacts avec les députés, les représentants d’intérêts doivent indiquer leur identité, l’organisme pour lequel ils travaillent et les intérêts qu’ils représentent. Lors d’une rencontre avec un député, les sociétés de conseil doivent informer de façon claire le député du nom du client qu’elles représentent lors de ce rendez-vous ; elles doivent être en mesure de produire tout document permettant au député de connaître la nature du mandat confié par leur client.

3. Les représentants d’intérêts se conforment aux règles d’accès et de circulation dans les locaux de l’Assemblée nationale. Ils sont tenus d’y porter leur badge en évidence Ils n’ont accès à ces locaux que dans le cadre de la mission ponctuelle qui les amène à l’Assemblée : ils ne peuvent en aucun cas avoir accès à d’autres locaux que ceux concernés par les motifs donnés à l’accueil pour obtenir leur badge d’accès.

4. Il leur est interdit de céder à titre onéreux, ou contre toute forme de contrepartie, des documents parlementaires ainsi que tout autre document de l’Assemblée nationale.

5. Il leur est interdit d’utiliser du papier à en-tête ou le logo de l’Assemblée nationale et d’utiliser l’adjectif « parlementaire » pour qualifier des événements qu’ils organisent ou des structures qu’ils créent.

6. Les représentants d’intérêts doivent s’abstenir de toute démarche en vue d’obtenir des informations ou des décisions par des moyens frauduleux.

7. Les informations apportées aux députés par les représentants d’intérêts doivent être ouvertes sans discrimination à tous les députés quelle que soit leur appartenance politique.

8. Ces informations ne doivent pas comporter d’éléments volontairement inexacts destinés à induire les députés en erreur.

9. Toute démarche publicitaire ou commerciale est strictement interdite aux représentants d’intérêts dans les locaux de l’Assemblée nationale ; il leur est également interdit d’utiliser les locaux de l’Assemblée nationale pour des événements liés à la promotion d’intérêts.

10. Les représentants d’intérêts doivent faire figurer clairement les noms des entités finançant les manifestations ou les structures auxquelles participent les parlementaires ; ils doivent informer systématiquement les parlementaires du coût des invitations qui leur sont adressés afin de leur permettre de se conformer aux obligations déclaratives prévues dans le code de déontologie des députés.

11. Les représentants d’intérêts ne peuvent se prévaloir, vis-à-vis de tiers, à des fins commerciales ou publicitaires, de leur présence sur la liste fixée par le Bureau. Ils ne présentent pas, dans leurs relations avec l’Assemblée nationale ou des tiers, l’inscription sur le registre des représentants d’intérêts comme une reconnaissance officielle ou un lien quelconque avec l’Assemblée nationale de nature à induire leurs interlocuteurs en erreur.

12. Les prises de parole dans les colloques organisés au sein de l’Assemblée nationale par les représentants d’intérêts inscrits sur le registre, ou toute autre entité extérieure à l’Assemblée nationale, ne peuvent en aucune façon dépendre d’une participation financière, sous quelque forme que ce soit.

13. Le non-respect du code de conduite par ceux qui s’enregistrent ou par leurs représentants peut conduire le Bureau, après instruction, à la suspension ou la radiation du registre ; cette décision peut être publiée sur le site internet.


1

 

   Annexe n° 4

JOURS ET HEURES de séance

jours et heures de séance publique depuis la XIIIe législature

 

Législature

Session

 

Jours de

séance

 

Séances

 

Heures de séance

XIIIe

S.O. 2006-2007

2

2

5 h 15

S.E.2006-2007

21

40

165 h 45

S.O. 2007-2008

96

210

784 h 15

S.E. 2007-2008

16

36

135 h 35

S.O. 2008-2009

131

287

1 127 h 40

S.E. 2008-2009

23

50

190 h

S.O. 2009-2010

114

240

931 h 40

S.E. 2009-2010

18

41

166 h 50

S.O. 2010-2011

112

230

875 h 45

S.E. 2010-2011

13

27

95 h

S.O. 2011-2012

78

147

559 h 35

Total XIIIe

624

1 310

5 037 h 20

XIVe

S.O. 2011-2012

2

2

2 h 30

S.E. 2011-2012

16

28

131 h 10

S.O. 2012-2013

132

290

1 195 h 55

S.E. 2012-2013

23

47

186 h 45

S.O. 2013-2014

120

256

1 002 h 35

S.E. 2013-2014

22

42

179 h 15

S.O. 2014-2015

131

275

1 047 h 00

S.E. 2014-2015

19

39

144 h 55

S.O. 2015-2016

117

232

856 h 05

S.E. 2015-2016

15

24

78 h

S.O. 2016-2017

67

123

468 h 30

Total XIVe

664

1 358

5 292 h 40

 

 

XVe

 

S.O. 2016-2017

2

2

11 h 50

S.E. 2016-2017

23

41

167 h 40

S.O. 2017-2018

130

289

1 164 h 15

S.E. 2017-2018

31

67

263 h 55

S.O. 2018-2019

96

214

890 h 15

Total XVe

282

613

2 497 h 55

Source : service de la Séance.

 

 


jours exceptionnels siégés depuis la XIIIe législature

Législature

Session

Lundi

Vendredi

Samedi

Dimanche

Total

XIIIe

SE 2006-2007

3

1

0

0

4

SO 2007-2008

7

4

0

0

11

SE 2007-2008

2

0

0

0

2

SO 2008-2009

25

6

1

0

32

SE 2008-2009

4

3

0

0

7

SO 2009-2010

9

12

1

0

22

SE 2009-2010

3

2

0

0

5

SO 2010-2011

11

4

0

0

15

SE 2010-2011

2

1

0

0

3

SO 2011-2012

14

5

0

0

19

Total XIIIe

80

38

2

0

120

XIVe

SE 2011-2012

2

0

0

0

2

SO 2012-2013

19

13

2

1

35

SE 2012-2013

2

2

0

0

4

SO 2013-2014

15

13

0

0

28

SE 2013-2014

3

1

0

0

4

SO 2014-2015

18

16

1

0

35

SE 2014-2015

3

1

0

0

4

SO 2015-2016

13

8

0

0

21

SE 2015-2016

3

1

0

0

4

SO 2016-2017

7

5

0

0

12

Total XIVe

85

60

3

1

149

XVe

SE 2016-2017

3

1

0

0

4

SO 2017-2018

16

13

4

3

36

SE 2017-2018

4

4

1

1

10

SO 2018-2019

15

12

0

0

27

Total XVe

38

30

5

4

77

Source : service de la Séance.


séances levées après 1 heure du matin depuis la XIIIe législature

Législature

Session

Levée jusquà 1 h (1h inclus)

Levée entre 1 h 01 et 2 h

Levée entre 2 h 01 et 3 h

Levée entre 3 h 01 et 4 h

Levée après 4 h 01

Total après 1 heure

Total séances de nuit

XIIIe

SE 2006-2007

7

3

1

1

1

6

13

SO 2007-2008

31

21

6

1

1

29

60

SE 2007-2008

9

6

0

0

0

6

15

SO 2008-2009

52

37

10

1

2

50

102

SE 2008-2009

10

5

0

0

0

5

15

SO 2009-2010

46

25

5

1

0

31

77

SE 2009-2010

10

3

1

0

1

5

15

SO 2010-2011

51

17

3

1

2

23

74

SE 2010-2011

4

4

0

0

0

4

8

SO 2011-2012

26

21

3

0

0

24

50

Total XIIIe

246

142

29

5

7

183

429

XIVe

SE 2011-2012

2

4

2

2

1

9

11

SO 2012-2013

44

38

12

7

5

62

106

SE 2012-2013

8

7

1

1

0

9

17

SO 2013-2014

49

26

7

1

3

37

86

SE 2013-2014

7

6

2

0

1

9

16

SO 2014-2015

59

27

4

1

2

34

93

SE 2014-2015

11

4

0

0

0

4

15

SO 2015-2016

52

20

2

0

0

22

74

SE 2015-2016

5

1

0

0

1

2

7

SO 2016-2017

21

13

0

0

0

13

34

Total XIVe

258

146

30

12

13

201

459

XVe

SO 2016-2017

1

0

0

0

0

0

1

SE 2016-2017

6

5

0

1

0

6

12

SO 2017-2018

56

37

4

4

0

45

101

SE 2017-2018

15

9

0

0

1

10

25

SO 2018-2019

31

33

4

5

5

47

78

Total XVe

109

84

8

10

6

108

217

Source : service de la Séance.


1

 

   Annexe n° 5

recours au temps législatif programmé

(TLP)

 

Législature

Titre

Niveau de lecture

Temps groupes
(hors Présidents)

Groupes ayant épuisé leur temps de parole

XIIIe

PPL Repos dominical et dérogations

1re

50 h

SRC

PJL Orientation et formation professionnelle tout au long de la vie

1re

30 h

 

PJL Ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux dargent et de hasard en ligne

1re

30 h

 

PJL Délimitation des circonscriptions pour lélection des députés

1re

30 h

 

2e

30 h

 

PJL Tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle et portant diverses dispositions de procédure pénale

1re

25 h

 

PJL Grand Paris

1re

25 h

 

PJL La Poste et activités postales

1re

30 h

SRC

PJL Concomitance des renouvellements des conseils généraux et territoriaux

1re

30 h

SRC

PJL Loi dorientation pour la performance de la sécurité intérieure

1re

30 h

 

2e

20 h

 

PJL Réforme du crédit à la consommation

1re

20 h

 

PJL Réseaux consulaires

1re

20 h

 

PJL Rénovation du dialogue social dans la fonction publique

1re

15 h

 

PJL Engagement national pour lenvironnement (Grenelle 2)

1re

30 h

 

PJL Réforme des collectivités territoriales

1re

50 h

 

2e

15 h

 

PJL Nouvelle organisation du marché de lélectricité

1re

20 h

 

PJL Modernisation de lagriculture et de la pêche

1re

24 h 20

 

PJL Réforme des retraites

1re

50 h

SRC, GDR

PJL Immigration, intégration et nationalité

1re

30 h

SRC, GDR

2e

15 h

SRC

PJL Gestion de la dette sociale

1re

10 h

 

PJL Relatif à la garde à vue

1re

30 h

 

2e

15 h

 

PJL Relatif à la bioéthique

1re

30 h

 

2e

15 h

 

PJL Droits et protection des personnes faisant lobjet de soins psychiatriques et modalités de leur prise en charge

1re

20 h

 

2e

10 h

 

PJL Sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs

1re

30 h

 

PJL Renforçant les droits, la protection et linformation des consommateurs

1re

25 h

 

PJL Loi de programmation relative à lexécution des peines

1re

30 h

 

Total XIIIe : 24 projets de loi, 1 proposition de loi (32 textes adoptés)

XIVe

PJL Mariage ouvert aux couples de même sexe

2e

25 h

UMP

PJL  Relatif à lenseignement supérieur et à la recherche

1re

30 h

 

PJL Relatif à la consommation

1re

30 h

 

2e

15 h

 

PJL Modernisation de laction publique territoriale et à laffirmation des métropoles

1re

30 h

 

2e

15 h

GDR

PJL Accès au logement et un urbanisme rénové

1re

30 h

 

2e

15 h

 

PJL Avenir pour lagriculture, lalimentation et la forêt

1re

30 h

 

2e

15 h

 

PJL Relatif à la formation professionnelle, à lemploi et à la démocratie sociale

1re

20 h

 

PJL Relatif à lartisanat, au commerce et aux très petites entreprises

1re

20 h

 

PJL Relatif à la prévention de la récidive et à lindividualisation des peines

1re

30 h

 

PJL Relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral

1re

30 h

 

2e

15 h

UMP

NL

7 h 30

UMP, RRDP

PJL Renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme

1re

15 h

 

PJL relatif à la transition énergétique pour la croissance verte

1re

30 h

UMP

NL

15 h

 

PJL Croissance et activité

1ère

50 h

SRC, UMP, GDR

Total XIVe : 13 projets de loi en TLP (20 textes adoptés)

XVe

Équilibre dans le secteur agricole et alimentaire

1re

50 h

 

NL

25 h

 

Évolution du logement, de laménagement et du numérique

1re

50 h

GDR

Liberté de choisir son avenir professionnel

1re

30 h

 

NL

15 h

 

Croissance et transformation des entreprises

 

1re

40 h

 

NL

20 h

 

Total XVe : 4 projets de loi en TLP (7 textes adoptés)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Source : service de la Séance.


1

 

   Annexe n° 6

Amendements en séance

amendements déposés et adoptés depuis la XIIIe législature

 

Législature

Session

Déposés

Adoptés

XIIe

2001-2002

660

169

2002-2003

35 393

3 266

2003-2004

27 073

4 186

2004-2005

26 471

3 059

2005-2006

10 196

3 317

2006-2007

144 014

3 116

Total XIIe

243 807

17 113

XIIIe

2006-2007

1 517

425

2007-2008

13 778

2 598

2008-2009

19 704

3 351

2009-2010

23 776

2 362

2010-2011

10 147

2 314

2011-2012

6 987

2 017

Total XIIIe

75 909

13 067

XIVe

2011-2012

1 485

232

2012-2013

32 645

3 443

2013-2014

21 051

3 975

2014-2015

25 888

4 742

2015-2016

23 256

4 294

2016-2017

8 338

2 150

Total XIVe

112 663

18 836

XVe

2016-2017

2 483

215

2017-2018

29 549

3 120

2018-2019 *

20 068

2 421

Total XVe

52 100

5 756

* A la date de publication du présent rapport.

Source : service de la Séance.

amendements non soutenus

 

Législature

Session

Amendements non soutenus

XIVe

2011-2012

237

2012-2013

8 905

2013-2014

4 984

2014-2015

6 849

2015-2016

3 324

2016-2017

1 528

Total XIVe

25 827

XVe

2016-2017

205

2017-2018

4 772

2018-2019*

3 736

Total XVe

8 713

* A la date de publication du présent rapport.

Source : service de la Séance.


([1]) Rapport n° 91 fait au nom de la commission spéciale du règlement chargée de préparer et de soumettre à l’Assemblée nationale un projet de Règlement définitif et présenté par M. Michel Habib-Deloncle, Assemblée nationale, Première législature, 26 mai 1959.

([2]) Ces groupes de travail avaient pour thèmes : le statut des députés et leurs moyens de travail ; les conditions de travail à l’Assemblée nationale et le statut des collaborateurs parlementaires ; la procédure législative, l’organisation parlementaire et les droits de l’opposition ; les moyens de contrôle et d’évaluation ; le développement durable dans la gestion et le fonctionnement de l’Assemblée nationale ; la démocratie numérique et les nouvelles formes de participation citoyenne ; l’ouverture de l’Assemblée nationale à la société et son rayonnement scientifique et culturel.

([3]) Loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République.

([4]) Loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.

([5]) « La réforme institutionnelle deux ans après » (17 mai 2010).

([6]) Décision n° 2019-778 DC du 21 mars 2019.

([7]) Résolution précitée n° 292 du 27 mai 2009 et résolution n° 437 du 28 novembre 2014.

([8]) Rapport n° 1630 fait au nom de la commission des Lois sur la proposition de résolution n° 1546 de M. Bernard Accoyer tenant à modifier le Règlement de l’Assemblée nationale et présenté par M. Jean‑Luc Warsmann, Assemblée nationale, XIIIe législature, 30 avril 2009.

([9]) Décision du 6 avril 2011.

([10]) Un nouvel élan pour la déontologie parlementaire, rapport remis au Président et au Bureau de l’Assemblée nationale les 14 et 30 janvier 2019.

([11]) Le Bureau du Sénat comprend, depuis 2009, vingt-six membres : le président, huit vice-présidents, trois questeurs et quatorze secrétaires.

([12]) Ces nominations ont lieu au cours de la séance qui suit l’élection du Président, puis sont renouvelées à chaque ouverture de session ordinaire, à l’exception de celle précédant le renouvellement de l’Assemblée.

([13]) Cette situation pouvait résulter soit de l’absence d’accord entre les présidents des groupes, soit du dépôt d’autres candidatures en plus de celles arrêtées par ces derniers.

([14]) Les députés non-inscrits ne sont pas pris en compte dans le calcul pour la répartition des sièges. Cet usage ne fait cependant pas obstacle à ce qu’un groupe inclue un non-inscrit dans la liste des candidats aux sièges qui lui reviennent, après accord des présidents des groupes, comme ce fut le cas en 1971 ou en 1988.

([15]) Voir le compte rendu de la séance publique du mercredi 28 juin 2017 : http://www.assemblee-nationale.fr/15/cri/2016-2017/20170125.asp.

([16]) L’ensemble des postes représente toujours 35,5 points.

([17]) Président ou vice-présidents.

([18]) Secrétaires.

([19]) Questeurs.

([20]) Article 14 du Règlement.

([21]) La possibilité pour un groupe de se doter d’une présidence paritaire a été déclarée contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2013-664 DC du 28 février 2013.

([22]) Dans la réforme du Règlement du 23 octobre 1969, il avait été prévu que le Président de l’Assemblée puisse décider de porter à 41 membres l’effectif des commissions spéciales, mais cette disposition avait été déclarée inconstitutionnelle car elle aboutissait à déléguer sans habilitation au Président de l’Assemblée une compétence qui n’appartient qu’à l’Assemblée elle-même (Conseil constitutionnel, décision n° 69-37 DC du 20 novembre 1969, Résolution modifiant et complétant le règlement de l’Assemblée nationale).

([23]) M. Michel Sapin, rapporteur de la proposition de résolution, voyait dans cette modification la possibilité « de supprimer cet obstacle de forme à la constitution de commissions spéciales » (J.O. Débats Assemblée nationale, 16 mai 1989, page 888).

([24]) Résolution n° 292 du 27 mai 2009.

([25]) M. Jean-Jacques Urvoas, alors président de la commission des Lois et rapporteur de cette proposition de résolution, considérait, dans son rapport n° 2381 du 20 novembre 2014, que « la notion de ʺ droits fondamentaux ʺ, en particulier, permet de mieux appréhender certaines problématiques nouvelles, pour lesquelles les droits en jeu sont opposables moins à la puissance publique – à la différence des libertés publiques traditionnelles – quà des personnes privées. »

([26]) Se reporter aux commentaires de ces articles pour une présentation plus détaillée du droit de pétition.

([27]) La pratique est différente au Sénat : le quatrième alinéa de l’article 88 du Règlement du Sénat prévoit que « les pétitions sur lesquelles la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et dadministration générale na pas statué deviennent caduques de plein droit à louverture de la session ordinaire qui suit celle au cours de laquelle elles ont été déposées. » Cette procédure de caducité a trouvé à s’appliquer une fois, au cours de la session 2011-2012.

([28]) Lorsqu’une pétition a été transmise au ministre et que celui-ci n’y a pas répondu dans un délai de trois mois, la commission permanente de l’Assemblée nationale qui en est saisie (il peut s’agir, à ce stade, de la commission des lois ou d’une autre commission permanente) peut décider de soumettre la pétition à l’Assemblée.

([29]) En application de l’article 7 de la loi organique n° 2011-333 du 29 mars 2011.

([30]) Dans ce cas, le Règlement prévoit la possibilité pour les députés et le Gouvernement d’intervenir sur les pétitions ainsi soumises à l’Assemblée. Après l’audition du dernier orateur, le Président passe à la suite de l’ordre du jour.

([31]) L’article 5 de l’Instruction générale du bureau prévoit en effet que le service des affaires juridique établit d’une part, un rôle général des pétitions, contenant pour chacune un numéro d’ordre, le nom et la demeure du pétitionnaire, l’indication sommaire de l’objet de sa demande et, s’il y a lieu, le nom du député qui l’a déposée, et d’autre part, un feuilleton des pétitions lequel, imprimé et distribué périodiquement, mentionne le nom et le domicile des pétitionnaires, l’indication sommaire de l’objet des pétitions, le numéro d’ordre, les noms des rapporteurs de la commission des Lois et, s’il y a lieu, de la commission permanente saisie par celle-ci, les décisions adoptées par les commissions avec le résumé succinct des motifs et les réponses faites par les ministres auxquels des pétitions ont été renvoyées.

([32]) L’article 34-1 du Règlement, relatif au bureau des commissions spéciales, renvoie expressément, pour sa composition, à l’article 39.

([33]) L’article 10, alinéa 2 du Règlement précise notamment que « Lélection des vice-présidents, des questeurs et des secrétaires a lieu en sefforçant de reproduire au sien du Bureau la configuration politique de lAssemblée ».

([34]) Il s’agit en effet d’un objectif, la rédaction « sefforce de reproduire » permettant de disposer d’une certaine marge d’appréciation par rapport à une composition du bureau qui serait strictement à la proportionnelle des groupes. M. Jean-Philippe Lecat, rapporteur de la réforme du Règlement d’octobre 1969, avait, en réponse à un amendement de M. Pierre Lagorce et plusieurs de ses collègues proposant une telle règle pour la composition du bureau des commissions permanentes, souligné que « les mots « en sefforçant de reproduire » et le mode de scrutin prouvent quil sagit dune amodiation par convenance du système majoritaire, mais non pas de son abandon. » (J.O. Débats Assemblée nationale, 23 octobre 1969, page 2868).

([35]) Ces motifs sont les suivants :

– maladie, accident ou événement familial grave empêchant le parlementaire de se déplacer ;

– mission temporaire confiée par le Gouvernement ;

– service militaire accompli en temps de paix ou en temps de guerre ;

– participation aux travaux des assemblées internationales en vertu d’une désignation faite par l’Assemblée nationale ou le Sénat ;

– en cas de session extraordinaire, absence de la métropole ;

– cas de force majeure appréciés par décision des bureaux des assemblées.

Il ne peut y avoir de délégation lors d’un scrutin destiné à recueillir l’avis de la commission permanente compétente de chaque assemblée sur une proposition de nomination selon la procédure prévue au cinquième alinéa de l’article 13 de la Constitution.

([36]) Mme Agnès Roblot-Troizier, Un nouvel élan pour la déontologie parlementaire, rapport remis au Président et au Bureau de l’Assemblée nationale les 14 et 30 janvier 2019.

([37]) Pour une nouvelle déontologie de la vie publique, rapport de la Commission de réflexion pour la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique, janvier 2011, p. 71.

([38]) Le registre public des déports est introduit dans le Règlement par l’article 15 de la proposition de résolution.

([39]) Sénat, résolution n° 117 relative aux obligations déontologiques et à la prévention des conflits d’intérêts des sénateurs adoptée le 6 juin 2018.

([40]) Se reporter au commentaire de l’article additionnel après l’article 7 présenté dans le rapport n° 1137 sur le projet de loi constitutionnelle n° 911 pour une démocratie plus représentative, responsable et efficace de M. Richard Ferrand, Mme Yaël Braun-Pivet et M. Marc Fesneau. http://www.assemblee-nationale.fr/15/rapports/r1137-t1.asp

([41]) En effet, lors des sessions extraordinaires, ouvertes et closes par décret du Président de la République, le Parlement est réuni, selon les termes de l’article 29 de la Constitution, « sur un ordre du jour déterminé ».

([42]) http://www.assemblee-nationale.fr/15/cri/2018-2019/20190164.asp#P1633878  

([43]) Pour mémoire, précédemment à la résolution n° 292 du 27 mai 2009, cette organisation ne portait que sur la discussion générale. L’introduction de la procédure du temps législatif programmé a conduit à étendre le champ des décisions pouvant être prises par la Conférence.

([44]) Décisions n° 2009-581 DC du 25 juin 2009 et n° 2014-705 DC du 11 décembre 2014.

([45]) Deuxième rapport, Pour une nouvelle Assemblée nationale, Les rendez-vous des réformes 2017-2022, juin 2018, http://www2.assemblee-nationale.fr/static/reforme-an/procedure/Rapport-2-GT3-procedure.pdf

([46]) Rapport n° 1630 du 30 avril 2009 sur la proposition de résolution n° 1546 tendant à modifier le Règlement de l’Assemblée nationale de M. Jean-Luc Warsmann.

([47]) Cette procédure ne peut être appliquée aux révisions constitutionnelles (article 118 du Règlement), aux projets de loi de finances (article 119) et aux projets de loi de financement de la sécurité sociale (article 121-1).

([48]) Conformément à l’article 18 de la loi organique du 15 avril 2009 précitée.

([49]) Pour une durée d’une heure, portée à deux heures si le temps global d’examen du texte est supérieur à 40 heures.

([50]) En moyenne, le temps de parole du Gouvernement et des commissions représentent entre 25 % et 50 % du temps de discussion des textes.

([51]) Selon le rapport du 30 avril 2009 précité, ces deux facultés se justifiaient par le fait qu’«ainsi encadré par une durée minimale dune part, et maximale dautre part, le temps législatif programmé pourrait plus aisément recueillir lassentiment de tous les groupes, chaque groupe étant susceptible, par la voix de son président, de faire respecter la durée minimale et, dans certain cas, dobtenir une durée maximale. » 

([52]) L’article 17 de la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution prévoit en effet que « Les règlements des assemblées peuvent, sils instituent une procédure impartissant des délais pour lexamen dun texte en séance, déterminer les conditions dans lesquelles les amendements déposés par les membres du Parlement peuvent être mis aux voix sans discussion. Lorsquun amendement est déposé par le Gouvernement ou par la commission après la forclusion du délai de dépôt des amendements des membres du Parlement, les règlements des assemblées, sils instituent une procédure impartissant des délais pour lexamen dun texte, doivent prévoir daccorder un temps supplémentaire de discussion, à la demande dun président de groupe, aux membres du Parlement. »               

([53]) Devenu la loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.

([54]) Devenu la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi « ELAN ».

([55]) Exposé sommaire de la présente proposition de résolution.

([56]) Proposition 9 du rapport précité.

([57]) Loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.

([58]) Cette limitation s’appliquerait ainsi aux contributions qu’un député pourrait déposer au cours des sessions extraordinaires.

([59]) Deuxième rapport, Pour une nouvelle Assemblée nationale, Les rendez-vous des réformes 2017-2022, juin 2018, http://www2.assemblee-nationale.fr/static/reforme-an/procedure/Rapport-2-GT3-procedure.pdf

([60]) L’article 88 du Règlement prévoit que « postérieurement à la réunion tenue en application de larticle 86, la commission saisie au fond dun projet ou dune proposition de loi peut tenir, jusquau début de la séance à laquelle la discussion du texte est inscrite, une ou plusieurs réunions pour examiner les amendements déposés dans lintervalle. »

([61]) Rapport n° 698 du 18 mars 2003 de M. Pascal Clément sur la proposition de résolution tendant à compléter le Règlement de l’Assemblée nationale et à modifier ses articles 14, 50, 65, 91, 104 et 128.

([62]) Cet article prévoit en effet que «quaprès louverture du débat [en séance publique], le Gouvernement peut sopposer à lexamen de tout amendement qui na pas été antérieurement soumis à la commission. »

([63]) Deuxième rapport, Pour une nouvelle Assemblée nationale, Les rendez-vous des réformes 2017-2022, juin 2018, http://www2.assemblee-nationale.fr/static/reforme-an/procedure/Rapport-2-GT3-procedure.pdf

([64]) Environ 30 % des effectifs.

([65]) Rapport précité.

([66]) Ses paroles peuvent alors ne pas figurer au procès-verbal, et ce, sans préjudice de l’application des peines disciplinaires prévues à ce titre par le Règlement.

([67]) Deuxième rapport, Pour une nouvelle Assemblée nationale, Les rendez-vous des réformes 2017-2022, juin 2018, http://www2.assemblee-nationale.fr/static/reforme-an/procedure/Rapport-2-GT3-procedure.pdf

([68]) Fiche de synthèse n° 29 relative au Règlement de l’Assemblée nationale. http://www2.assemblee-nationale.fr/decouvrir-l-assemblee/role-et-pouvoirs-de-l-assemblee-nationale/l-organisation-des-travaux-de-l-assemblee-nationale/le-reglement-de-l-assemblee-nationale

([69]) Deuxième rapport, Pour une nouvelle Assemblée nationale, Les rendez-vous des réformes 2017-2022, juin 2018, http://www2.assemblee-nationale.fr/static/reforme-an/procedure/Rapport-2-GT3-procedure.pdf

([70]) Le Conseil constitutionnel a ainsi été conduit à censurer une disposition du Règlement du Sénat qui excluait toute possibilité de demander un rappel au Règlement dans un débat comportant une limitation du nombre des orateurs admis à s’exprimer, « considérant que si cette procédure peut faire lobjet daménagements en fonction de la nature et du déroulement des débats, les sénateurs ne peuvent être privés de toute possibilité dinvoquer les dispositions du règlement afin de demander lapplication de dispositions constitutionnelles ; que la règle précitée interdirait en particulier à tout sénateur dinvoquer larticle 45 du règlement, qui lui permet dopposer une exception dirrecevabilité en demandant la mise en application de larticle 40 de la Constitution » (Décision n° 94‑339 DC du 31 mai 1994). Cette réserve a été rappelée dans le cadre de la décision n° 2009-581 DC du 25 juin 2009 sur la résolution du 27 mai 2009.

([71]) Décision du 6 avril 2011.

([72]) Cette définition diffère légèrement de celle qui était envisagée par l’article 4 de la décision du Bureau du 6 avril 2011, notamment en ce que cette dernière ne faisait pas référence aux conflits entre deux intérêts publics : la situation de conflit d’intérêts y était « entendue comme une situation dinterférence entre les devoirs du député et un intérêt privé qui, par sa nature et son intensité, peut raisonnablement être regardé comme pouvant influencer ou paraître influencer lexercice de ses fonctions parlementaires ».

([73]) L’article 2 de la loi n° 2013-907 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique définit le conflit d’intérêts comme toute situation d’interférence entre un intérêt public et des intérêts publics ou privés qui est de nature à influencer ou à paraître influencer l’exercice indépendant, impartial et objectif d’une fonction.

([74]) L’article 432 12 du code pénal vise « le fait, par une personne dépositaire de lautorité publique ou chargée dune mission de service public ou par une personne investie dun mandat électif public, de prendre, recevoir ou conserver, directement ou indirectement, un intérêt quelconque dans une entreprise ou dans une opération dont elle a, au moment de lacte, en tout ou partie, la charge dassurer la surveillance, ladministration, la liquidation ou le paiement ».

([75]) En particulier ceux des États-Unis, du Canada, du Royaume-Uni et de l’Espagne.

([76]) Ont précédemment occupé la fonction M. Jean Gicquel (2011-2012), Mme Noëlle Lenoir (2012-2014) et M. Ferdinand Mélin-Soucramanien (2014-2017).

([77]) Le Conseil constitutionnel a ainsi rappelé que, « comme tous les autres députés et les sénateurs, les députés représentant les Français établis hors de France représenteront au Parlement la Nation tout entière et non la population de leur circonscription délection » (décision n° 2009-573 DC du 8 janvier 2009).

([78]) Étude d’impact jointe au projet de loi rétablissant la confiance dans l’action publique.

([79]) Assemblée nationale, Journal officiel, compte-rendu intégral, 1ère séance du mardi 25 juillet 2017, session extraordinaire de 2016-2017, p. 1877.

([80]) Le déport permet au parlementaire, estimant être en situation de conflit d’intérêts, de s’abstenir de prendre position au cours d’une discussion ou lors d’un vote.

([81]) En application de l’article L.O. 135-1 du code électoral, modifié par la loi organique n° 2013-906 du 11 octobre 2013 relative à la transparence de la vie publique.

([82]) Conseil constitutionnel, décision n° 2017-752 DC du 8 septembre 2017 sur la loi pour la confiance dans la vie politique.

([83]) Conseil constitutionnel, décision n° 2017-752 DC du 8 septembre 2017 sur la loi pour la confiance dans la vie politique.

([84]) Cette disposition a été introduite par la loi du 15 septembre 2017 pour la confiance dans la vie politique.

([85]) Mme Agnès Roblot-Troizier, Un nouvel élan pour la déontologie parlementaire, rapport remis au Président et au Bureau de l’Assemblée nationale les 14 et 30 janvier 2019.

([86]) La loi « Sapin II » avait prévu également prévu de punir d’un an de prison et de 15 000 euros d’amende le fait pour un représentant d’intérêts, mis en demeure de respecter les règles déterminées par le bureau de cette assemblée, de méconnaître à nouveau, dans les trois années suivantes, la même obligation, mais cette disposition a été censurée par le Conseil constitutionnel au nom du principe de la légalité des délits et des peines (décision n° 2016-741 DC du 8 décembre 2016, Loi relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique).

([87]) Il s’agissait de savoir si l’article 6 du code de conduite des représentants d’intérêts selon lequel ces derniers « doivent sabstenir de toute démarche en vue dobtenir des informations ou des décisions par des moyens frauduleux » avait été méconnu, de même que l’article 8 selon lequel les informations apportées aux députés « ne doivent pas comporter déléments volontairement inexacts destinés à induire les députés en erreur ».

([88]) Cette procédure ne s’applique pas aux projets de loi de finances et projets de loi de financement de la sécurité sociale ainsi qu’aux projets de révision constitutionnelle.

([89]) Commentaire de la décision n° 2009-581 DC du 25 juin 2009 relative à la résolution précitée.

([90]) C’est notamment le cas de la commission des Affaires économiques et de celle du Développement durable et de l’aménagement du territoire.

([91]) À titre d’exemple, le projet de loi n° 846 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, examiné au fond par la commission des Affaires économiques, a fait l’objet d’une saisine pour avis de la commission du Développement durable et de l’aménagement du territoire, de la commission des Lois, de la commission des Affaires culturelles et de la délégation aux collectivités territoriales.

([92]) Ces délais ne s’appliquent pas aux projets de loi de finances ou de financement de la sécurité sociale et aux projets relatifs aux états de crise ainsi qu’en cas d’engagement de la procédure accélérée.

([93]) « Les membres du Gouvernement ont accès aux deux assemblées. Ils sont entendus quand ils le demandent. »

([94]) Celui-ci intervient toutefois en premier dans la discussion générale lorsqu’il s’agit d’une proposition de loi déposée en première lecture sur le Bureau de l’Assemblée nationale. Son intervention est alors suivie de celle du Gouvernement puis, le cas échéant, des autres rapporteurs.

([95]) En application de l’article 145-7, alinéa 2.

([96]) À titre d’exemple, se reporter à l’organisation de la discussion générale du projet de loi n° 1393 portant création d’une Agence nationale de la cohésion des territoires au cours de laquelle est intervenu, dans les conditions ainsi décrites, le rapporteur pour avis de la délégation aux collectivités territoriales.

([97]) Rapport n° 1630 du 30 avril 2009 présenté par M. Jean-Luc Warsmann sur la proposition de résolution n° 1546 tendant à modifier le Règlement de l’Assemblée nationale.

([98]) Idem.

([99]) Rapport précité.

([100]) Décision n° 2006-537 DC du 22 juin 2006. Cette décision confirme les décisions antérieures n° 2003-470 DC du 9 avril 2003 et n° 90-278 DC du 7 novembre 1990.

([101]) À ce titre, alors que l’irrecevabilité fondée sur ce motif peut être soulevée par tous les membres du Gouvernement, la décision du président de l’assemblée concernée est personnelle, ce qui justifie, s’il ne préside pas la séance, que celle-ci soit suspendue afin de le consulter.

([102]) Environ cinq décisions sont rendues chaque année sur ce fondement. La dernière remonte au 22 novembre 2018 (2018-277 L).

([103]) Décision n° 61-1 du 14 septembre 1961.

([104]) Sans que celui-ci ait à exposer au cours d’un débat préalable les raisons de nature à déterminer son appréciation, conformément à la décision n°95-356 DC du 8 novembre 1995.

([105]) Décision n° 82-143 DC du 30 juillet 1982, Loi sur les prix et les revenus. Cette décision demeure la décision de référence, nonobstant les évolutions, au demeurant restées sans suite, apportées par la décision n° 2005-512 DC du 21 avril 2005, loi d’orientation et de programmation pour l’avenir de l’école. Dans un contexte de stigmatisation des empiétements législatifs sur le domaine réglementaire celle-ci entendait permettre au Gouvernement de modifier par décret les dispositions concernées sans demander leur déclassement dès lors qu’elles auraient été préalablement identifiées comme telles par le Conseil constitutionnel dans le cadre d’un contentieux initié sur le fondement de l’article 61 de la Constitution.

([106]) Décision n° 79-11 FNR du 23 mai 1979.

([107]) L’introduction du caractère facultatif de la réserve ou de la suspension de la mesure avait pour objet de « rendre plus aisée et plus fréquente lirrecevabilité opposée sur le fondement de larticle 41 de la Constitution. » selon le rapport n° 1630 du 30 avril 2009 sur la proposition de résolution n° 1546 tendant à modifier le Règlement de l’Assemblée nationale de M. Jean-Luc Warsmann.

([108]) Devenu la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.

([109]) La portée de cette disposition doit être relativisée puisqu’elle correspond largement à la pratique actuelle. Le rapporteur pour avis présente des amendements à la commission dont il est issu, qui peut les adopter. Ils sont alors renvoyés pour examen à la commission au fond. Si celle-ci les adopte, ils sont alors intégrés au texte de cette dernière qui est examiné en séance. S’ils sont rejetés, le rapporteur de la commission a la possibilité de les défendre à nouveau en séance, en son nom propre.

([110]) Décision n° 85-191 DC du 10 juillet 1985 selon laquelle « ont été adoptés selon une procédure conforme à la Constitution les articles contestés, qui ne sont pas dépourvus de tout lien avec les autres dispositions de la loi ».

([111]) Le principe dit « de l’entonnoir », longtemps ignoré, a été reconnu par le Conseil constitutionnel à partir de la commission mixte paritaire à la fin des années 1990 puis dès la deuxième lecture à compter de 2006. En vertu de ce principe, au cours de la navette, le débat ne doit plus porter que sur les dispositions sur lesquelles un accord n’est pas déjà intervenu.

([112]) Décision n° 2005-532 DC du 19 janvier 2006, cons. 25.

([113]) Depuis sa décision n° 2006-535 DC du 30 mars 2006.

([114]) La place du Conseil constitutionnel dans les institutions de la Ve République, Cahiers du Conseil constitutionnel, 3 novembre 2009.

([115]) Loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté.

([116]) Loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique.

([117]) Loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et à la transformation des entreprises.

([118]) Compte-rendu de la réunion de la commission spéciale du 16 janvier 2019. La liste des amendements concernés avait alors été distribuée aux sénateurs membres de la commission et ces derniers ont été appelés à se prononcer sur chacun d’entre eux. Les auteurs des amendements ont pu à cette occasion formuler leurs objections.

([119]) Compte-rendu de la réunion de commission du 7 novembre 2018 http://www.assemblee-nationale.fr/ceresian/cr_redirect.asp?IdCR=CRCANR5L15S2019PO59051N015

([120]) Décision n° 2019-778 DC du 21 mars 2019.

([121]) Article 38 du Règlement du Sénat.

([122]) Exposé sommaire de la proposition de résolution.

([123]) Idem.

([124]) Proposition n° 13 du deuxième rapport, Pour une nouvelle Assemblée nationale, Les rendez-vous des réformes 2017-2022, juin 2018, http://www2.assemblee-nationale.fr/static/reforme-an/procedure/Rapport-2-GT3-procedure.pdf

([125]) Devenue la loi n° 2019-286 du 8 avril 2009 relative à la représentation des personnels administratifs, techniques et spécialisés au sein des conseils d’administration des services départementaux d’incendie et de secours.

([126]) Loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.

([127]) Décision n° 2015-712 DC.

([128]) Décision n° 2017-757 DC du 16 janvier 2018.

([129]) Proposition de résolution n° 98 visant à pérenniser et adapter la procédure de législation en commission, 2017-2018.

([130]) Dont sont exclus les projets de révision constitutionnelle, les projets de loi de finances et les projets de loi de financement de la sécurité sociale.

([131]) La procédure d’examen en commission mise en œuvre en 2015 prévoyait quant à elle que ce droit de veto pouvait être exercé dans un délai de trois jours après la publication du texte de la commission.

([132]) Devenu la loi n° 2018-699 du 3 août 2018.

([133]) Exposé sommaire de la proposition de résolution.

([134]) Cette disposition prévue par l’article 4 du projet de loi constitutionnelle n° 911 pour une démocratie plus représentative, responsable et efficace est commentée dans le rapport n° 1137 du 4 juillet 2018 des rapporteurs M. Richard Ferrand, Mme Yaël Braun-Pivet et M. Marc Fesneau http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/rapports/r1137.pdf

([135]) Proposition n°10 du deuxième rapport, Pour une nouvelle Assemblée nationale, Les rendez-vous des réformes 2017-2022, juin 2018, http://www2.assemblee-nationale.fr/static/reforme-an/procedure/Rapport-2-GT3-procedure.pdf

([136]) Ces exceptions concernent les amendements permettant d’assurer le respect de la Constitution, d’opérer une coordination avec une autre disposition du texte en discussion, d’autres textes en cours d’examen ou les textes en vigueur ou de corriger une erreur matérielle.

([137]) Loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l’application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution.

([138]) Article 20 de la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République.

([139]) Il ne s’agit que d’une faculté. Lorsque la procédure accélérée a été engagée la commission mixte peut être réunie, par exemple, après deux lectures dans une assemblée et une seule dans l’autre (Conseil constitutionnel, décision n° 2008-564 DC, 19 juin 2008, Loi relative aux organismes génétiquement modifiés).

([140]) Voir le rapport n° 121 déposé le 1er août 2017 au nom de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion du projet de loi organique pour la confiance dans la vie politique ainsi que la décision du Conseil constitutionnel n° 2017-753 DC du 8 septembre 2017.

([141]) Décision n° 76-74 DC du 28 décembre 1976.

([142]) Décision n° 2004-501 DC du 5 août 2004.

([143]) Conseil constitutionnel, décision n° 2001-454 DC du 17 janvier 2002, Loi relative à la Corse.

([144]) En ne soumettant pas son texte aux assemblées, le Gouvernement se priverait toutefois de la possibilité de mettre en œuvre, par la suite, la procédure du « dernier mot ».

([145]) Conseil constitutionnel, décision n° 68-36 DC du 6 juin 1968, Résolution tendant à modifier les articles 7, 9, alinéa 9, 10, 12 et 86, alinéa 3 du règlement du Sénat.

([146]) Alinéas 1er et 2 de l’article 111 du Règlement de l’Assemblée nationale et alinéas 1er et 5 de l’article 12 du Règlement du Sénat.

([147]) Alinéa 1er de l’article 9 du Règlement du Sénat.

([148]) Alinéa 3 de l’article 12 du Règlement du Sénat.

([149]) Alinéa 3 de l’article 111 du Règlement de l’Assemblée nationale.

([150]) Alinéa 4 de l’article 111 du Règlement de l’Assemblée nationale.

([151]) Alinéa 5 de l’article 111 du Règlement de l’Assemblée nationale.

([152]) Pierre Avril, Jean Gicquel et Jean-Éric Gicquel, Droit parlementaire, LGDJ, 5e édition, 2014.

([153]) Décision n° 2014-705 du 11 décembre 2014, Résolution tendant à modifier le règlement de l’Assemblée nationale.

([154]) À savoir, une motion portant sur le projet de prévention de l’érosion de la base d’imposition et du transfert des bénéfices défendue par M. Jean-Luc Mélenchon le 5 juillet 2018 et une motion portant sur le projet de convention fiscale avec le Luxembourg défendue par le même orateur le 14 février 2019.

([155]) Les conditions d’organisation du débat sur une déclaration faite par le Gouvernement en application des articles 72-4 ou 73 de la Constitution (article 125 du Règlement), du débat sur le programme ou sur une déclaration de politique générale du Gouvernement (article 152 du Règlement) et du débat sur une motion de censure (article 154 du Règlement) sont, par l’effet des renvois, celles prévues au présent article du Règlement.

([156]) Dans ce cas, la Conférence des Présidents peut autoriser des explications de vote, après la clôture du débat, à raison d’un orateur de chaque groupe, pour une durée de cinq minutes. La mise aux voix de la déclaration du Gouvernement est faite par le Président de séance. Elle prend la forme d’un scrutin public.

([157]) Dans ce cas, le Président peut autoriser un seul orateur par groupe à lui répondre. Aucun vote ne peut avoir lieu.

([158]) Il s’agit de celles prévues à l’article 49 du Règlement pour la discussion générale des textes.

([159]) La formule proposée par le Président de la République consistait à réserver chaque mercredi, au début de la séance de l’après-midi, une heure, partagée à égalité entre la majorité et l’opposition, à des questions auxquelles le chef de l’État indiquait qu’il demanderait au Premier ministre et à l’ensemble des ministres de répondre personnellement et directement.

([160]) Conseil constitutionnel, décision n° 2012-654 DC, 9 août 2012, Loi de finances rectificative pour 2012.

([161]) Décision de la Conférence des présidents du 26 septembre 2017.

([162]) Décision de la Conférence des présidents du 23 octobre 2018.

([163]) Une Ve République plus démocratique, Comité de réflexion et de proposition sur la modernisation et le rééquilibrage des institutions de la Ve République présidé par M. Édouard Balladur, La Documentation française, 2007.

([164]) Refaire la démocratie, rapport n° 3100 du groupe de travail sur l’avenir des institutions présenté par MM. Claude Bartolone et Michel Winock, octobre 2015, Assemblée nationale, XIVe législature.

([165]) Assemblée nationale, Journal officiel, compte-rendu intégral, 3e séance du jeudi 14 mai 2009, session ordinaire de 2008-2009, 244e séance, p. 4407.

([166]) Refaire la démocratie, rapport n° 3100 du groupe de travail sur l’avenir des institutions présenté par MM. Claude Bartolone et Michel Winock, octobre 2015, Assemblée nationale, XIVe législature.

([167]) Résolution du 13 mai 2015.

([168]) Décision n° 2009-582 DC du 25 juin 2009, résolution modifiant le Règlement du Sénat, cons. 5.

([169]) Ce droit de tirage a été instauré à l’article 141 du Règlement par la résolution n° 292 du 27 mai 2009 et réformé par la résolution n° 437 du 28 novembre 2014.

([170]) Conseil constitutionnel, décision n° 90-275 DC du 6 juin 1990, Résolution modifiant l’article 145 du Règlement de l’Assemblée nationale.

([171]) Il n’y a en particulier pas de limitation en termes d’effectif et de durée.

([172]) Résolution n° 106 du 26 mars 2003.

([173]) Conseil constitutionnel, décision n° 2003-470 DC du 9 avril 2003, Résolution modifiant le règlement de l’Assemblée nationale.

([174]) Cf. commentaire de l’article 3.

([175]) Cf. commentaire de l’article 33.

([176]) Conseil constitutionnel, décisions n° 2004-493 DC, 26 février 2004 et n° 2009-582 DC du 25 juin 2009.

([177]) La résolution n° 437 du 28 novembre 2014 a également prévu la présentation, à l’issue d’un délai de trois ans suivant l’entrée en vigueur d’une loi, par deux députés, dont l’un appartient à un groupe d’opposition, à la commission compétente d’un rapport d’évaluation sur l’impact de cette loi. Ce rapport fait notamment état des conséquences juridiques, économiques, financières, sociales et environnementales de la loi, le cas échéant au regard des critères d’évaluation définis dans l’étude d’impact préalable, ainsi que des éventuelles difficultés rencontrées lors de la mise en œuvre de ladite loi. La liste des lois faisant l’objet de ces rapports d’évaluation est arrêtée chaque année par le bureau de la commission compétente. (alinéa 3 de l’article 145-7).

([178]) Première conférence des réformes, propositions des groupes de travail, décembre 2017, p. 223-224.

([179]) Ibid., p. 144.

([180]) Celle de M. Jean-Paul Mattei, pour le groupe MODEM, pour un usage plus proportionné et pertinent de la décote applicable aux cessions de biens et actifs immobiliers du domaine privé de l’État et celle de M. Patrick Hetzel, pour le groupe Les Républicains, visant à pérenniser les moyens nécessaires à la participation du ministère de la justice à l’effort national de lutte contre le terrorisme.

([181]) Ces cinq résolutions portent respectivement sur le suivi et le pilotage de la production de logements sociaux, la lutte contre la pollution du transport maritime et la promotion des carburants marins alternatifs, le renforcement des moyens du pilotage de la recherche publique, la révision générale des taxes à faible rendement et les certificats d’économie d’énergie.

([182]) Chaque rapporteur spécial est ainsi invité à présenter une proposition de résolution.

([183]) La résolution du 28 novembre 2014 a modifié la composition du Comité et en a tiré les conséquences sur la composition de son bureau en supprimant les présidents de groupe.

([184])  C’est notamment le cas pour le bureau de l’Assemblée (article 10), le bureau des commissions permanentes (article 39) et celui des commissions d’enquête (article 143), les missions d’information (article 145) ou encore la désignation des rapporteurs spéciaux et pour avis (article 146).

([185]) « Le droit de pétition : mutations dun instrument démocratique », Perrine Preuvot, Jurisdoctoria n° 4, 2010.

([186]) Pour mémoire, l’article 32 de la Constitution du 24 juin 1793 prévoyait que « le droit de présenter des pétitions aux dépositaires de lautorité publique ne peut, en aucun cas, être interdit, suspendu ou limité. »

([187]) Anciennement dénommé « médiateur de la République ».

([188]) Loi du 3 janvier 1973.

([189]) Se reporter à la Communication de la mission flash « Démocratie locale et participation citoyenne » de la commission des Lois, février 2019

([190]) L’article 4 de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires renvoie au règlement des assemblées les conditions d’exercice de ce droit. Il interdit également d’apporter des pétitions à la barre des deux assemblées et fixe les sanctions applicables en cas d’infraction à cette règle, traduisant en cela l’héritage de dispositions héritées de la Restauration.

([191]) Voir le commentaire de l’article 5 de la présente proposition de résolution.

([192]) Assemblée nationale, Première conférence des réformes : propositions des groupes de travail, Pour une nouvelle Assemblée nationale. Les rendez-vous des réformes 2017-2022, décembre 2017.

([193]) Deuxième rapport, Pour une nouvelle Assemblée nationale, Les rendez-vous des réformes 2017-2022, juin 2018, http://www2.assemblee-nationale.fr/static/reforme-an/procedure/Rapport-2-GT3-procedure.pdf

([194]) Dans un sondage réalisé par l’Observatoire de la démocratie de janvier 2018, 64 % du panel de personnes interrogées déclaraient avoir signé une pétition en ligne et 58 % sur papier, soit un pourcentage bien plus important que ceux recueillis par d’autres formes de participation politique. Par ailleurs, la possibilité d’« obliger les élus à débattre dun sujet ou à étudier une proposition de loi si une pétition a recueilli un nombre très important de signatures » arrive en tête des réformes attendues, 77 % des Français jugeant une telle réforme « utile à la démocratie » et même 71 % « importante pour eux-mêmes ».

([195]) Cette disposition est prévue par l’article 39 précédemment commenté. Pour mémoire, la loi organique n° 2013-1114 du 6 décembre 2013 portant application de l’article 11 de la Constitution prévoit d’ores et déjà que le recueil des soutiens à une proposition de loi est effectué par voie électronique en se connectant à un site internet ou en se rendant dans un « point d’accès » mis à disposition des électeurs dans la commune la plus peuplée de chaque canton et dans les consulats.

([196]) À titre d’exemple, la Chambre des communes britanniques vérifie que le Parlement ou le Gouvernement sont compétents au titre du sujet soulevé par les pétitionnaires.

([197]) Sénat, résolution n° 117 relative aux obligations déontologiques et à la prévention des conflits d’intérêts des sénateurs adoptée le 6 juin 2018.

([198]) Propositions d’adaptation des dispositions de prévention et de lutte contre les conflits d’intérêts, Rapport de la Déontologue de l’Assemblée nationale, A. Roblot-Troizier, du 15 mai 2018.