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N° 1990

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 juin 2019

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE LÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE LOI, APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, de règlement du budget et dapprobation des comptes de lannée 2018 (n° 1947),

 

PAR M. Joël GIRAUD,

Rapporteur général

Député

 

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ANNEXE N° 7
 

 

ANCIENS COMBATTANTS, mémoire ET LIENS AVEC LA NATION

 

 

 

 

 

 

Rapporteur spécial : M. Fabien Roussel

 

Député

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SOMMAIRE

Pages

synthÈse

donnÉes clefs

INTRODUCTION

I. le PROGRAMME 167 LIENS ENTRE LA NATION ET SON ARMÉE

A. Une baisse de la consommation des actions

1. L’action 1 La journée défense et citoyenneté au service de l’attractivité de la défense et de la cohésion sociale

2. L’action 2 Politique de mémoire

B. Une démarche de performance satisfaisante mais qui devrait Être Étendue À la politique de mémoire

II. LE PROGRAMME 169 reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

A. l’exécution des crÉdits en 2018

B. Les indicateurs de performance

III. LE PROGRAMME 158 INDEMNISATION DES VICTIMES DE PERSÉCUTIONS ANTISÉMITES ET DES ACTES DE BARBARIE PENDANT LA SECONDE GUERRE MONDIALE

A. exÉcution de la DÉpense

B. Les indicateurs de performance

IV. LE RAPPORT CONSTANT

A. Historique et évolution du Rapport constant

1. Les critiques adressées au système d’indexation ont conduit à sa modification en 2005

2. Le nouvel indice ITB GTI

B. LES DEMANDES DE MISE à NIVEAU PAR LES ASSOCIATIONS D’ANCIENS COMBATTANTS

C. La rÉunion de la commission tripartite et les pistes de négociation de 2019 à 2021

Travaux de la commission

Personnes auditionnées par le rapporteur spécial

sources utilisées par le rapporteur spÉcial

 

 


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   synthÈse

En 2018, le montant des crédits consommés de la mission Anciens Combattants a été 2,432 milliards d’euros en crédits de paiement (CP), en baisse de 2,8 % par rapport aux crédits consommés en 2017. Bien que le montant des crédits consommés en 2018 représente 28,6 millions de moins que les crédits adoptés en LFI pour 2018, la mission présente toutefois un taux de consommation des crédits budgétaires très élevé de 98,9 %.

La mission Anciens combattants connaît chaque année une tendance conséquente à la baisse de ses crédits, en raison de la diminution naturelle du nombre d’ayants-droit des deux plus importants dispositifs d’indemnisation que sont la pension militaire d’invalidité et la retraite du combattant. Cet effet démographique n’est que très partiellement compensé par l’augmentation de la valeur du point d’indice des pensions militaires ou de la retraite du combattant, ou bien par des mesures nouvelles en faveur des anciens combattants.

En 2018, comme chaque année, s’ajoute aux crédits budgétaires le coût des six dépenses fiscales rattachées au programme 169, coût estimé à 743 millions d’euros pour 2018, soit 30 % du total de la mission budgétaire. Ces avantages fiscaux sont considérés comme un avantage acquis par les anciens combattants, qui ne sauraient être remis en question, en raison de leur engagement physique dans l’effort de défense de la nation.

La dépense fiscale la plus importante, liée au bénéfice d’une demi-part supplémentaire pour le calcul de l’impôt sur le revenu des titulaires de la carte du combattant et de leurs veuves, représente un coût de 530 millions d’euros compte tenu de l’abaissement à 74 ans de la limite d’âge (fixée à 75 ans en 2016). Cette dépense représente 71 % des dépenses fiscales de la mission. La déduction des versements effectués en vue de la retraite mutualiste du combattant représente un coût de 42 millions d’euros.

Enfin, l’exonération pour le calcul de l’impôt sur le revenu de la retraite du combattant, des pensions militaires d’invalidité, des retraites mutualistes et de l’allocation de reconnaissances pour les anciennes formations supplétives en Algérie et leurs veuves, se monte à 170 millions d’euros.

Le programme 167 Liens entre la nation et son armée, qui représente 2 % des crédits de la mission, finance la journée défense et citoyenneté (JDC) et la politique de mémoire. Il a notamment financé en 2018 la commémoration du centenaire de la fin de la Première Guerre mondiale et l’entretien des sites et les nécropoles (26,8 millions d’euros), grâce à l’action conjointe de l’Office national des anciens combattants et des victimes de guerre et des associations.

 

En outre ce programme porte les crédits de la journée défense citoyenneté (JDC) pour 13,5 millions d’euros. Cette journée réunit les jeunes citoyens recensés : 770 245 en 2018, afin de sensibiliser ceux-ci au rôle de l’armée, tout en repérant les situations d’échec scolaire.

Le programme 169 Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant a pour mission de gérer et verser les droits des anciens combattants et les prestations auxquelles ils ont droit. Cœur de la mission budgétaire, il retrace l’ensemble des actions et interventions réalisées au profit du monde combattant, des victimes de guerre et d’actes de terrorisme, destinées à manifester la reconnaissance de la Nation à leur égard.

Avec 2,3 milliards d’euros, soit 94 % des crédits de la mission consommés en 2018, ce programme réunit les crédits de la dette viagère pour 1,8 milliard d’euros, les droits liés aux pensions militaires d’invalidité : 1,07 milliard d’euros, la subvention au titre des actions de solidarité de l’Office national des anciens combattants et des victimes de guerre : 26,4 millions d’euros, et les actions en faveur des rapatriés 19,4 millions d’euros, seule action en augmentation du programme. À noter qu’un arrêté du 5 novembre 2018 a revalorisé rétroactivement la valeur du point PMI à 14,45 euros au 1er avril 2017. Le Rapporteur souligne que d’après la Cour des comptes, l’évolution démographique a conduit à une baisse des dépenses, et donc à des économies de 82,1 millions d’euros sur ce programme en 2018.

Enfin, le programme 158 Indemnisation des victimes de persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la seconde guerre mondiale relève du Premier ministre. Les 95,9 millions d’euros consommés en 2018 par les trois dispositifs d’indemnisation au profit des victimes et des orphelins de la seconde guerre mondiale représentent 3,8 % des crédits de la mission en 2018. Les décisions sont prises par le Premier ministre et le paiement des indemnisations par l’Onac-vg.

Le rapport constant

Le rapporteur spécial a choisi comme thème d’évaluation le rapport constant. Ces termes désignent le mode de calcul de la valeur du point d’indice pour la retraite du combattant et les pensions militaires d’invalidité. L’objectif visé est que les pensions militaires d’invalidité et la retraite du combattant bénéficient des mêmes augmentations, et aux mêmes dates, que les traitements bruts d’activité des fonctionnaires, qu’elles prennent la forme d’une augmentation de la valeur du point fonction publique ou celle de l’attribution générale de points.

L’article L. 125-2 du code des pensions civiles et militaires, créé par l’ordonnance n° 2015-1781 du 28 décembre 2015 dispose qu’« à chaque taux d’invalidité, ainsi qu’aux majorations et allocations, correspond un indice exprimé en points ». Le montant annuel de la pension est égal au produit du nombre de points d’indice par la valeur du point de pension.

Le monde combattant et ses associations avaient fait, en 2005, le choix de confirmer la valeur du point de pension en fonction de l’indice de la fonction publique, afin d’arriver au rapport constant entre l’évolution des pensions et le coût de la vie.

Ce dispositif instauré en 2005 a été depuis critiqué par les associations d’anciens combattants pour sa complexité et son caractère rétroactif, mais surtout à cause des choix politiques qui ont gelé le point d’indice de la fonction publique, pénalisant ainsi le monde combattant. Le Parlement a donc modifié le dispositif afin d’utiliser, à compter de 2010, un nouvel indice : l’indice de traitement brut – grille indiciaire (ITB-GI).

Compte tenu de l’augmentation de la valeur de ce nouveau point d’indice de la fonction publique et de la mise en œuvre du Protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » qui revalorise les grilles indiciaires, le « rapport constant » a permis une revalorisation sensible de la valeur du point PMI mais sans rattraper les retards des années antérieures. Ce point était de 14,04 euros au 1er janvier 2016, elle est passée à 14,50 euros en 2019. S’il avait été indexé sur l’évolution du coût de la vie depuis 2015, la valeur de ce point serait aujourd’hui de 15,20 euros.

À la demande du rapporteur, le ministère a indiqué que le rattrapage couterait environ 88 millions d’euros.


  

   donnÉes clefs

CrÉdits de paiement des programmes 167 et 169, 2015 / 2019

(en millions d’euros)

 

 

RÉpartition de la DÉPENSE
(par programme)

(en millions d’euros)

 


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   INTRODUCTION

La mission Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation se compose de trois programmes. Le programme 167 Liens entre la nation et son armée, qui représente 1 % des crédits de la mission, finance la journée défense et citoyenneté (JDC) et la politique de mémoire. Le programme 169 Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant, qui concentre 95 % des crédits de la mission, porte les crédits des actions et interventions à destination du monde combattant, des victimes de guerre et d’actes de terrorisme. Le programme 158 Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbarie pendant la Seconde Guerre mondiale, qui regroupe 4 % des crédits de la mission, rassemble trois dispositifs d’indemnisation.

En 2018, le montant des crédits consommés a été de 2,432 milliards deuros en autorisations dengagement (AE) et 2,432 milliards deuros en crédits de paiement (CP), en baisse de 2,8 % en AE et en CP par rapport aux crédits consommés en 2017. Le taux de consommation des crédits budgétaires est très élevé (98,9 %).

La mission qui représente 0,8 % du budget de l’État, exprime l’effort de solidarité de la nation au profit du monde combattant. Le monde combattant, qui compte 2,4 millions de ressortissants, rassemble tous ceux qui, anciens combattants des guerres ou d’opérations extérieures, militaires, victimes civiles d’actes de guerre ou de terrorisme, peuvent de prévaloir du bénéfice du code des pensions militaires d’invalidité ou de victimes de guerre, ainsi que les associations et fondations qui œuvrent pour la mémoire des conflits des XXe et XXIe siècles.

La mission reproduit chaque année une tendance à la baisse de ses crédits, en raison de la diminution naturelle du nombre dayants droit des deux plus importants dispositifs d’indemnisation : la pension d’invalidité et la retraite du combattant. Cet effet démographique n’est que partiellement compensé par l’augmentation de la valeur du point d’indice ou par des mesures nouvelles.

En 2018 sajoute aux crédits budgétaires le coût des six dépenses fiscales rattachées au programme 169, coût estimé à 743 millions deuros pour 2018, soit 30 % du total de la mission budgétaire. La dépense fiscale liée au bénéfice dune demi–part supplémentaire pour le calcul de limpôt sur le revenu des titulaires de la carte du combattant et leurs veuves représente un coût de 530 millions d’euros, compte tenu de l’abaissement à 74 ans de la limite d’âge (qui était fixée à 75 ans en 2016). Cette dépense représente 71 % des dépenses fiscales de la mission. La déduction des versements effectués en vue de la retraite mutualiste du combattant représente un coût de 42 millions deuros.

Enfin, lexonération pour le calcul de l’impôt sur le revenu de la retraite du combattant, des pensions militaires dinvalidité, des retraites mutualistes et de lallocation de reconnaissance pour les anciennes formations supplétives en Algérie et leurs veuves, se monte à 170 millions deuros.

Le montant des crédits budgétaires de la mission consommés en 2018, majoré des dépenses fiscales, s’élève en tout à 3 175 millions d’euros. Dans la note d’exécution budgétaire pour 2018, la Cour des comptes relève que l’exécution de la mission Anciens Combattants ne soulève pas de difficultés budgétaires, et que le niveau d’annulation des crédits est très faible.

Le rapporteur spécial considère que les marges de manœuvre (entre 70 et 80 millions d’euros) dégagées chaque année par lévolution démographique des ressortissants doivent permettre de mieux répondre aux demandes du monde combattant et des parlementaires. En 2018, cette marge de manœuvre aurait été de 85 millions selon la Cour des comptes.

Le tableau ci-dessous récapitule les crédits de paiement votés en LFI et les crédits consommés en 2018.

Récapitulation des crédits de paiement par programme et action

(en euros)

 

Crédits de paiement

Numéro et intitulé du programme ou de l’action

 Prévision LFI y.c. FDC et ADP Consommation

2017

2018

167.– Liens entre la Nation et son armée

38 355 167

35 041 672

42 734 817

40 355 064

01.– Journée défense et citoyenneté

15 710 000

13 729 582

14 624 062

13 506 926

02.– Politique de mémoire

22 645 167

21 312 090

28 110 755

26 848 138

169.– Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

 

2 398 608 642

2 374 314 612

2 317 904 662

2 296 562 591

01.– Administration de la rente viagère

1 889 350 000

1 875 408 503

1 817 743 717

18 077 888 960

02.– Gestion des droits liés aux pensions militaires d’invalidité

143 930 000

138 863 730

136 230 000

132 233 179

03.– Solidarité

348 058 642

341 188 589

346 360 945

337 140 452

07.– Actions en faveur des rapatriés

17 270 000

18 853 790

17 570 000

19 400 000

158.– Indemnisation des victimes des persécutions antisémites et des actes de barbaries pendant la seconde guerre mondiale

100 800 472

94 015 367

100 792 182

95 899 426

01.– Indemnisation des orphelins de la déportation et des victimes de spoliations du fait des législations antisémites en vigueur pendant l’Occupation

46 444 098

42 332 303

46 408 864

44 809 058

02.– Indemnisation des victimes d’actes de barbarie durant la seconde guerre mondiale

54 356 374

51 683 064

54 383 318

51 090 368

Source : rapport annuel de performances 2018.


I.   le PROGRAMME 167 LIENS ENTRE LA NATION ET SON ARMÉE

Ce programme, qui s’élève à 42,7 millions d’euros votés en LFI pour 2018, supérieur de 11 % aux crédits votés pour 2017, porte la politique concourant à l’esprit de défense nationale pour soutenir le lien entre la nation et son armée, au travers notamment de la politique de mémoire des grands conflits du XXIe siècle et de l’organisation de la « Journée défense et citoyenneté ».

A.   Une baisse de la consommation des actions

Avec 40 millions d’euros de crédits consommés en 2018, l’exécution des crédits est inférieure de 5,5 % aux crédits votés en LFI.

1.   L’action 1 La journée défense et citoyenneté au service de l’attractivité de la défense et de la cohésion sociale

L’exécution 2018 de l’action 1 programme 167 est marquée par une diminution des crédits consommés, soit 13,5 millions d’euros, contre 14,6 prévus en LFI. Cette sous-consommation résulte d’un rythme de paiement plus lent des dépenses d’alimentation et d’un moindre nombre de jeunes convoqués à la JDC que le total anticipé (770 245 participants effectifs).

La JDC a permis de détecter 89 288 jeunes en difficulté de lecture et 32 732 jeunes en situation de décrochage scolaire, soit 11,6 % et 4,25 % du nombre de jeunes reçus. Les décrocheurs scolaires ont bénéficié d’un entretien de guidage, tandis que les jeunes en difficulté de lecture ont été adressés à des partenaires du système éducatif pour être pris en charge. Enfin l’ouverture au public du site « majdc.fr » a été effectuée au 1er janvier 2018 pour faciliter les démarches d’inscription des jeunes.

Le coût moyen par participant est stabilisé aux alentours de 135 euros depuis 2016, la cible étant de rester inférieur à 140 euros.

2.   L’action 2 Politique de mémoire

La politique de mémoire, mise en œuvre par la direction du patrimoine et des archives, (DPMA) a été marquée par la fin du cycle de commémoration entamé en 2014, avec le 75e anniversaire de la création du Conseil de la résistance, de l’arrestation de Jean Moulin et de la libération de la Corse, la valorisation des lieux de mémoire, la restauration de 24 nécropoles et carrés communaux et le musée de la Résistance de Champigny-sur-Marne.

Le rapporteur spécial souligne toutefois la sous-exécution des dépenses prévues en LFI. Celles-ci qui étaient de 28,1 millions d’euros, n’ont été consommées qu’à concurrence de 26,8 millions d’euros (– 4,6 %). Cette consommation a été toutefois largement supérieure (5 millions) à celle de 2017, soit + 25 %, en raison de la prolongation du cycle commémoratif tout au long de l’année 2018.

S’il regrette cette sous-consommation, le rapporteur spécial approuve la prolongation des commémorations, car l’action mémorielle doit participer à la lutte contre la montée de l’obscurantisme, de l’antisémitisme, du racisme, la banalisation des signes nazis et la haine de l’autre. La mise en perspective des sacrifices humains de la part de ceux qui ont combattu pour la liberté et contre les idées de haine, est déterminante. C’est pourquoi le Rapporteur propose que chaque collégien et lycéen puisse visiter au moins une fois un des lieux de mémoire liés à la résistance ou aux crimes nazis.

Évolution des crédits budgétaires consacrés aux dispositifs de la politique publique de mémoire depuis sept ans
(en CP exécutés et en millions d’euros)

Source : données Farandole.

Cette politique publique comprend de nombreux dispositifs qui peuvent être regroupés en six catégories : manifestations commémoratives, actions pédagogiques, projets mémoriels, lieux de mémoire en France et à l’étranger, tourisme de mémoire et subventions (GIP essentiellement). La direction des patrimoines, de la mémoire et des archives (DPMA) s’est appuyée dans sa mission sur l’ONACVG, Office national des anciens combattants qui a principalement la charge du tourisme de mémoire (12,43 millions d’euros en 2018), le GIP en charge de la commémoration de la Grande guerre (8 millions d’euros en 2018) et sur les postes diplomatiques concernés (2 millions d’euros en 2018).

Il est prévu de mettre fin, en 2019, à la mission du centenaire de la Première Guerre.


B.   Une démarche de performance satisfaisante mais qui devrait Être Étendue À la politique de mémoire

Deux indicateurs évaluent la performance du programme 167 mais ne concernent que l’action 1.

Le premier indicateur, qui mesure le taux de satisfaction des usagers de la JDC en 2018 affiche avec 88,2 % de satisfaction des résultats supérieurs à la prévision pour 2017. La mesure de l’impact de la JDC sur l’image de la défense et de son armée progresse également légèrement à 95,7 %. Parmi les participants, près d’un jeune sur quatre a manifesté son intérêt pour les métiers de la défense, cependant le nombre de demandes de contact adressées aux armées (261 738) a légèrement baissé au regard de 2017.

S’agissant du second indicateur, qui mesure le coût par participant de la JDC, le résultat de l’exécution 2018 (135 euros) reste stable. Celui-ci varie en fonction des dépenses de personnel (pour 80 %), et de la logistique nécessaire au nombre de jeunes français convoqués, fonction elle-même de la classe d’âge appelée.

Le rapporteur spécial souhaiterait, par ailleurs, obtenir des précisions de la ministre sur les projets du gouvernement concernant le service militaire en 2020.

En ce qui concerne la politique de mémoire, la montée des actes de racisme et d’antisémitisme, l’outrage à l’encontre de résistants et de déportés comme Simone Veil, la banalisation des emblèmes nazis doivent nous inciter à développer nos efforts de vigilance.

 Le rapporteur spécial propose que la politique de mémoire soit dotée d’un indicateur tendant à prévoir la visite de tout enfant français d’âge scolaire au moins une fois sur un site ou une nécropole au cours de sa scolarité.


II.   LE PROGRAMME 169 reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant

Le programme 169 est quasi exclusivement constitué de dépenses d’intervention qui représentent plus de 91 % de la mission (2,296 milliards d’euros). Celles-ci sont très majoritairement destinées à financer des dépenses de « guichet », prévues par les dispositions législatives et réglementaires du Code des Pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre. Parmi celles-ci, on trouve principalement trois dépenses : les pensions militaires d’invalidité (1,069 milliard d’euros), la retraite du combattant (738 millions d’euros) et la gestion des droits liés aux pensions militaires d’invalidité (132 millions d’euros).

Ce programme porte également la subvention de l’Institution nationale des Invalides (INI), soit 12,89 millions d’euros en 2018. Le rapporteur spécial s’est rendu le 21 mars 2018 à l’INI, ou il a pu apprécier le dévouement des personnels et l’activité du Centre. Il s’inquiète de la baisse du nombre des personnels, qui pourrait à terme compromettre la garantie d’un accueil de qualité offert aux pensionnaires.

A.   l’exécution des crÉdits en 2018

En 2018, le nombre de pensionnés était de 155 824, soit 72 % des bénéficiaires d’après les données fournies par le service des retraites de l’État (SRE), les 28 % restant percevant une PMI à titre d’ayant-cause.

Le dispositif a fait l’objet de deux revalorisations en 2018 :

 la revalorisation générale par l’arrêté du 9 novembre 2018, qui opère une augmentation du point PMI de 0,05 euro. Cette revalorisation comprend, depuis 2017, une rétroactivité en deux phases : 0,02 euro à compter du 1er janvier 2017 puis 0,03 euro supplémentaire à compter du 1er avril 2017 ;

 la revalorisation spécifique en mesure nouvelle harmonisant l’indexation de la PMI pour les ayants droit, indépendamment de la date de radiation des contrôles, avant ou après le 3 août 1962. Selon les données du SRE, cette réévaluation a concerné 5 286 pensions (moins de 3 % des bénéficiaires) pour 3,4 millions d’euros en 2018.

Répartition des crédits de paiement en fonction des catégories de prestations

Source : rapport annuel de performances 2018.

L’action 3-34 (action sociale en faveur du monde combattant), regroupe les prestations versées par l’ONACVG en contrepartie de la subvention de 26,4 millions d’euros versée par le ministère des armées, a permis une hausse des interventions de 53 900 en 2017 à 55 600 en 2018, dont 21 848 interventions en faveur des veuves en 2018 (12 millions d’euros), contre 20 235 veuves en 2017, 795 secours aux harkis, 2 584 interventions auprès des anciens combattants en Opex, et 129 interventions en faveur des victimes d’attentats.

À propos de l’action de l’Institution nationale des Invalides, le Rapporteur spécial a pu apprécier sur place combien les missions de cet établissement placé directement sous l’autorité du Président de la République, dépassent la seule prise en charge des blessés de guerre et du grand handicap.

Ouverte sur le monde hospitalier, l’INI réalise par exemple des prouesses technologiques grâce à son Centre d’études et de recherches sur l’appareillage des handicapés, qui est basé à Créteil. Ces innovations au rayonnement international, bénéficient aux ressortissants du ministère des armées, bien sûr, mais aussi à de très nombreux civils, en France comme à l’étranger. Et ce n’est là qu’un des aspects de l’activité de l’INI, qui abrite aussi, à Woippy, dans l’Est, le seul établissement en France capable de délivrer l’agrément de l’Union européenne pour les fauteuils roulants ou pour réaliser des essais de prothèses internes.

Dans un tel contexte, l’objectif d’une réduction des effectifs de 420 à 400 d’ici 2021, qui a été fixé à la suite d’un audit de 2013 réalisé conjointement par le contrôle général des armées, l’Inspection générale des finances et l’Inspection générale des affaires sociales, est aujourd’hui contestable. Il l’est d’autant plus que l’équilibre budgétaire, visé par l’audit de 2013 et pris en compte dans le Contrat d’objectifs et de performances, a déjà été atteint en 2018, avec un effectif de 421 postes.

Au vu du projet construit par la nouvelle direction, il ne sera pas possible de descendre en dessous du seuil de 410 emplois sans remettre en cause la qualité des soins pratiqués.

C’est pourquoi, au regard des efforts déjà effectués sur les précédents exercices budgétaires dont celui de 2018, que j’ai pu constater lors de ma visite, je souhaiterais savoir si Mme la ministre accepterait de revoir les objectifs de baisse d’effectifs fixés en 2013.

L’action 7 en faveur des rapatriés a été marquée par la revalorisation de 100 euros de l’allocation de reconnaissance et de l’allocation viagère, ainsi que par une majoration de 46 euros à compter du 1er octobre 2018, pour un montant 19,4 millions d’euros en 2018 (17,5 millions d’euros en LFI) en raison de la hausse du nombre d’allocataires. Ces aides financent des aides à la formation, des aides aux veuves de plus de soixante ans dont le revenu n’excède pas l’allocation aux vieux travailleurs salariés, ainsi que des secours exceptionnels en désendettement.


B.   Les indicateurs de performance

Ceux-ci mesurent la liquidation des dossiers avec la meilleure qualité et la meilleure efficacité possible, par une mesure du délai moyen de flux des dossiers. Ce délai est passé de 260 jours en 2017 à 220 jours en 2018, et le stock d’instances s’est réduit de 11 522 au 31 décembre 2017 à 8 789 au 31 décembre 2018.

III.   LE PROGRAMME 158 INDEMNISATION DES VICTIMES DE PERSÉCUTIONS ANTISÉMITES ET DES ACTES DE BARBARIE PENDANT LA SECONDE GUERRE MONDIALE

Le programme 158 est placé sous la responsabilité du Premier ministre. Il comprend deux actions regroupant trois dispositifs d’indemnisation : celui des victimes de spoliation du fait de législations antisémites, celui des orphelins dont les parents ont été victimes de persécutions antisémites et celui des orphelins dont les parents ont été victimes des actes de barbarie.

A.   exÉcution de la DÉpense

Entre 2017 et 2018, les crédits consommés du programme ont augmenté de 94 millions d’euros à 95,89 millions d’euros en légère sous‑exécution par rapport aux 100 millions d’euros de crédits votés en LFI.

L’instruction des demandes est réalisée par l’ONACVG ou par la Commission pour l’indemnisation des victimes de spoliation.

B.   Les indicateurs de performance

Les indicateurs de performance mesurent l’amélioration des délais de paiement des dossiers d’indemnisation des victimes de spoliation après émission de recommandation favorable. Avec plus de 460 bénéficiaires indemnisés par an, le délai de paiement est stable depuis 2016 à 4,5 mois pour les résidents français et à 5,5 mois pour les résidents étrangers.


IV.   LE RAPPORT CONSTANT

A.   Historique et évolution du Rapport constant

L’article L. 125-2 du Code des pensions civiles et militaires, créé par l’ordonnance n° 2015-1781 du 28 décembre 2015 dispose qu’« à chaque taux dinvalidité, ainsi quaux majorations et allocations, correspond un indice exprimé en points ». Le montant annuel de la pension est égal au produit du nombre de points d’indice par la valeur du point de pension.

La valeur du point de pension est fixée en fonction de l’indice d’ensemble des traitements bruts de la fonction publique de l’État tel qu’il est défini par le ministre chargé de la fonction publique et publié par l’Institut national de la statistique et des études économiques.

À titre liminaire, il convient de rappeler que la valeur du point de pension dit « point PMI » est au cœur des mécanismes de soutien du monde combattant.

Ainsi, à titre d’illustration :

 le montant de la pension militaire dinvalidité (206 676 bénéficiaires au 31 décembre 2018) repose sur un indice exprimé en points PMI, et résulte du pourcentage dinvalidité multiplié par la valeur du point PMI ;

 le montant de la retraite du combattant (940 071 bénéficiaires au 31 décembre 2018) repose sur un nombre de points PMI (52) fixé par décret, multiplié par la valeur du point PMI.

Le rapport constant est désormais établi entre les pensions et les traitements bruts de la fonction publique de l’État Le monde combattant et ses associations ont fait, en 2005, le choix de confirmer la valeur du point de pension en fonction de l’indice de la fonction publique, afin d’arriver au rapport constant entre l’évolution des pensions et le coût de la vie. Le dispositif instauré en 2005 a été depuis critiqué par les associations d’anciens combattants pour sa complexité et son caractère rétroactif, mais surtout à cause des choix politiques qui ont gelé le point d’indice de la fonction publique, pénalisant ainsi le monde combattant.

1.   Les critiques adressées au système d’indexation ont conduit à sa modification en 2005

Le dispositif antérieur à 2005 était critiqué par les associations d’anciens combattants pour sa complexité et son caractère rétroactif, et surtout à cause des choix politiques qui ont gelé le point d’indice de la fonction publique, pénalisant ainsi le monde combattant.

Il prévoyait que les pensions militaires d’invalidité bénéficient des mêmes augmentations, et aux mêmes dates, que les traitements bruts d’activité des fonctionnaires.

De plus, un système de garantie annuelle était instauré sur la base de l’évolution d’une année sur l’autre des traitements bruts calculés par l’INSEE au travers d’un indice incluant les traitements de base, les indemnités de résidence et les suppléments familiaux de traitement d’un échantillon de 300 fonctionnaires. Ce système devait assurer la prise en compte de la moyenne des mesures catégorielles dont avaient bénéficié les fonctionnaires de toutes catégories.

Chaque année, une commission tripartite devait se réunir pour prendre connaissance des calculs de l’évolution du traitement brut moyen effectués par l’INSEE, avant que le taux d’évolution soit automatiquement appliqué aux pensions et à la retraite du combattant ([1]).

Le caractère complexe de ce système a été vivement critiqué par les associations.

2.   Le nouvel indice ITB GTI

Prenant acte de la complexité et du manque évident de lisibilité du dispositif, le Parlement a adopté lors des débats parlementaires relatifs au PLF 2005 un amendement présenté par le Gouvernement ([2]) tendant à mettre fin à la rétroactivité de la prise en compte de l’écart entre les évolutions moyennes de la valeur du point PMI et de celles de l’indice d’ensemble des traitements de la fonction publique (brut). L’ajustement du point de pension a été dès lors directement lié à l’évolution de l'indice d'ensemble des traitements bruts de la fonction publique, remplacé dans la nomenclature de l’INSEE par l’indice de traitement brut – grille indiciaire (ITB-GI) à compter de 2010.

Ce nouvel indice est calculé par la DGAFP (direction générale de l’administration et de la fonction publique) à partir du système d’information sur les agents du service public (SIASP) de l’INSEE, et publié tous les trimestres. L’ITB-GI évolue sous trois effets :

– la valeur du point de la fonction publique ;

– l’indice minimum de la fonction publique ;

– les mesures catégorielles qui modifient la grille indiciaire.

Compte tenu de l’augmentation de la valeur du point d’indice de la fonction publique et de la mise en œuvre du Protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » qui revalorise les grilles indiciaires, le « rapport constant » a permis une revalorisation sensible, mais insuffisante, de la valeur du point PMI. Ce point était de 14,04 euros au 1er janvier 2016, il est passé à 14,50 euros en 2019.

Le dispositif actuel, basé sur le nouvel indice ITB-GI, aboutit à l’évolution décrite dans le tableau ci –dessous, avec un différentiel par rapport l’inflation de l’ordre de 5 % entre 2005 et 2018.

Titre Différentiel entre la valeur du point et l’inflation

 

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Évolution point réelle (€)

12,9

13,2

13,4

13,6

13,7

13,9

13,9

13,9

13,9

14

14

14,1

14,4

14,5

Taux Inflation année N-1 (%)

 

1,9

1,6

1,5

2,8

0,1

1,5

2,1

2

0,9

0,5

0

0,2

1,0

Projection point inflation (€)

12,9

13,1

13,4

13,6

13,9

13,9

14,2

14,4

14,7

14,9

14,9

14,9

15,00

15,2

Source : ministère des armées.

Une indexation sur l’évolution du coût de la vie depuis 2015 aurait donné une valeur du point PMI de 15,20 euros, réclamé par les associations.

B.   LES DEMANDES DE MISE à NIVEAU PAR LES ASSOCIATIONS D’ANCIENS COMBATTANTS

Les associations critiquent l’écart résiduel actuel et demandent une mise à niveau. Le ministère estime que le mode actuel du nouvel indice est plus réactif et n’est pas intrinsèquement défavorable aux anciens combattants. Par exemple, l’évolution de l’ITB-GI de 2015 à 2017 a été plus importante que l’inflation :

 

 

2015

2016

2017

Inflation année n

0 %

0,20 %

1 %

Rapport constant

0,21 %

0,86 %

2,34 %

Source : Ministère des armées

Selon le ministère des armées, un éventuel rattrapage à compter de 2005 aurait un impact budgétaire de 88 millions d’euros (dont 52 millions d’euros pour la PMI et 36 millions d’euros pour la retraite du combattant). L’équilibre actuel compte tenu du poids des dépenses fiscales dans la mission Anciens combattants serait, selon le ministère, satisfaisant pour toutes les parties.

C.   La rÉunion de la commission tripartite et les pistes de négociation de 2019 à 2021

Cette demande des anciens combattants pourrait être évoquée par la prochaine commission tripartite qui a été acceptée par la Secrétaire d’État lors de la clôture des travaux menés en 2018 par les groupes de travail. La commission « pourrait être installée en 2021 » afin d’évaluer, en particulier, l’impact du PPCR sur l’évolution du point PMI.

Le rapporteur spécial suggère que la prochaine commission tripartite examine l’impact positif de l’accord sur les parcours professionnels, les carrières et les revalorisations (PPCR) sur le rapport constant et tienne compte des demandes des associations.

Le rapporteur spécial remarque que le coût de la mise à niveau du rapport constant pourrait être couvert par les économies générées chaque année par la baisse démographique des anciens combattants, qui peuvent être évaluées à plus de 80 millions d’euros.

 

Recommandation : Réunir la commission tripartite en 2019 afin de faire le point sur les pistes de mise à niveau du rapport constant.

 

 

 


—  1  —

   Travaux de la commission

Lors de sa réunion de 21 heures, le lundi 3 juin 2019, la commission des finances, réunie en commission dévaluation des politiques publiques, a entendu Mme Florence Parly, ministre des armées, et Mme Geneviève Darrieussecq, secrétaire d’État auprès de la ministre des armées.

 

Le compte rendu et la vidéo de cette réunion sont disponibles sur le site de l’Assemblée nationale.

 

 

 

 


—  1  —

   Personnes auditionnées par le rapporteur spécial

 

Secrétariat général pour l’Administration :

 M. Jean-Paul Bodin, secrétaire général ;

– Colonel Franck Mollard, chef de cabinet ;

– M. Alexandre Coyo, chargé de mission.

 

Hôtel des Invalides :

 M. le médecin général inspecteur Michel Guisset, directeur de l’Institution nationale des Invalides ;

– M. le commissaire en chef de première classe Philippe Havil, adjoint au directeur.


   sources utilisées par le rapporteur spÉcial

 

Cour des comptes, note d’analyse de l’exécution budgétaire 2018 sur la mission Anciens combattants, mai 2019.

Politique de reconnaissance et de réparation en faveur du monde combattant 2018-2022 : rapport des groupes de travail, mai 2018.

 

 


([1])  Rapport Sénat 1989-1990 Commission des affaires sociales, n° 63, examen du PLF 1990, annexe au procès-verbal de la séance du 21 novembre 1989.

([2])  Amendement n° 150 rectifié, devenu article 117 de la LFI 2005, Assemblée nationale, séance publique du 18 novembre 2004.