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N° 1990

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 5 juin 2019

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE, SUR LE PROJET DE LOI, APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2018 (n° 1947),

PAR M. Joël Giraud

Rapporteur général,

Député

——

 

 Voir le numéro: 1947.


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SOMMAIRE

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 Pages

INTRODUCTION

FICHE 1 : LE DÉFICIT DE L’ÉTAT EN 2018

I. DES MESURES DU DÉFICIT DE LÉTAT DIVERSES

A. LA COMPTABILITÉ BUDGÉTAIRE

B. LA COMPTABILITÉ GÉNÉRALE

C. LA COMPTABILITÉ NATIONALE

II. UN DÉFICIT PUBLIC DE 2,5 % DU PIB POUR LESSENTIEL DORIGINE STRUCTURELLE

A. UN DÉFICIT PUBLIC POUR LA DEUXIÈME ANNÉE CONSÉCUTIVE SOUS LA BARRE DES 3 % DU PIB

1. Un déficit public au plus bas depuis 2006

2. Un déficit public qui diminue à rythme comparable à celui observé depuis 2009

3. Un déficit public moins élevé que prévu

4. Un déficit de lÉtat supérieur au déficit public

B. UN DÉFICIT PUBLIC ESSENTIELLEMENT D’ORIGINE STRUCTURELLE

1. Notions de déficit structurel et conjoncturel

2. Une composante structurelle estimée à 2,1 % du PIB par le projet de loi

a. Hypothèses de calcul du Gouvernement

b. Avis du Haut Conseil des finances publiques

c. Proposition du Rapporteur général

III. UN DÉFICIT BUDGÉTAIRE DE LÉTAT DE 76 MILLIARDS DEUROS, EN HAUSSE DE 8,3 MILLIARDS DEUROS

A. FORMATION DU SOLDE BUDGÉTAIRE 2018

B. ANALYSE DE LÉCART PAR RAPPORT AUX PRÉVISIONS

C. ANALYSE DEXÉCUTION À EXÉCUTION

IV. UN RÉSULTAT PATRIMONIAL NÉGATIF DE 51,9 MILLIARDS DEUROS

FICHE 2 : LES RECETTES DE L’ÉTAT EN 2018

I. LES RECETTES FISCALES DE LÉTAT

A. MONTANT GLOBAL

B. RETRAITEMENTS NÉCESSAIRES POUR UNE JUSTE ANALYSE ÉCONOMIQUE DES RECETTES FISCALES DE L’ÉTAT

C. EXAMEN GÉNÉRAL DES RECETTES FISCALES NETTES DU BUDGET GÉNÉRAL DE LÉTAT

1. Analyse dexécution à exécution

a. Une évolution spontanée qui se maintient pour la troisième année consécutive à un niveau élevé

b. De nombreuses mesures fiscales qui ont conduit à une baisse des impôts de 16 milliards d’euros

i. Les principales mesures fiscales de baisse des impôts (21 milliards d’euros)

ii. Les principales mesures fiscales de hausse des impôts (5 milliards deuros)

c. Des mesures de périmètre et de transfert importantes qui se sont quasiment neutralisées

2. Analyse par rapport à la prévision

D. EXAMEN IMPÔT PAR IMPÔT

1. La taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

a. Analyse dexécution à exécution

b. Analyse de lécart avec la prévision

2. Limpôt sur le revenu (IR)

a. Analyse dexécution à exécution

b. Analyse de lécart avec la prévision

3. Limpôt sur les sociétés (IS)

a. Analyse dexécution à exécution

b. Analyse de lécart avec la prévision

4. La taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE)

a. Analyse dexécution à exécution

b. Analyse de lécart avec la prévision

5. Les autres recettes fiscales du budget général

II. LES RECETTES NON FISCALES DE LÉTAT

A. LES DIVIDENDES ET RECETTES ASSIMILÉES

B. LES AUTRES RECETTES NON FISCALES

1. Les produits du domaine de létat

2. Les produits de la vente de biens et services

3. Les remboursements des intérêts des prêts, avances et autres immobilisations financières

4. Les amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuite

5. Les recettes diverses

FICHE 3 : LES DÉPENSES DE L’ÉTAT

I. UNE AUGMENTATION TRÈS MAÎTRISÉE DES DÉPENSES DE L’ÉTAT ENTRE 2017 ET 2018

A. L’ÉVOLUTION DES DÉPENSES PAR MISSION BUDGÉTAIRE

1. Un niveau de dépenses budgétaires en augmentation de 1,4 milliard d’euros par rapport à 2017, soit une hausse mesurée de 0,6 %

2. Un niveau de dépenses budgétaires inférieur de 921 millions d’euros à la loi de finances initiale

B. LA FAIBLE ÉVOLUTION DES DÉPENSES NETTES DE L’ÉTAT, DÉCOMPOSÉES PAR NATURE

1. L’augmentation des dépenses de personnel, des subventions pour charges de service public et d’investissement

a. L’augmentation des dépenses de personnel (+ 2 milliards d’euros)

i. La consommation d’emplois inférieure au plafond d’emplois fixé en loi de finances initiale et en augmentation par rapport à 2017 (+ 12 049 ETPT)

ii. Un schéma d’emplois en légère augmentation en 2018 (+ 206 ETP)

b. L’augmentation des subventions pour charges de service public (+ 0,6 milliard d’euros)

c. L’augmentation des dépenses d’investissement (+ 0,7 milliard d’euros)

2. La diminution des dépenses liées au fonctionnement de l’État, à la charge de la dette et d’intervention

a. La diminution des dépenses de fonctionnement de l’État (– 0,9 milliard d’euros)

b. La diminution des dépenses liées à la charge de la dette (– 0,2 milliard d’euros)

c. La diminution des dépenses d’intervention (– 0,8 milliard d’euros)

II. UN RESPECT DES NORMES DE DÉPENSES DE L’ÉTAT FIXÉES EN LOI DE FINANCES INITIALE POUR 2018

A. LE RESPECT DE LA NORME DE DÉPENSES PILOTABLES

B. LE RESPECT DE L’OBJECTIF DE DÉPENSES TOTALES DE L’ÉTAT

III. UN NIVEAU STABILISÉ DES RESTES À PAYER EN 2018

A. LE NIVEAU DES RESTES À PAYER EST STABILISÉ À MOINS DE 119 MILLIARDS D’EUROS EN 2018

B. LES CORRECTIONS APPORTÉES À LA MÉTHODE D’ÉVALUATION DES RESTES À PAYER AU SEIN DU COMPTE GÉNÉRAL DE L’ÉTAT

FICHE 4 : LES MODIFICATIONS DE CRÉDITS LIMITÉES INTERVENUES AU COURS DE L’EXERCICE 2018

I. LE NIVEAU LE PLUS FAIBLE DE MISE EN RÉSERVE DE CRÉDITS DEPUIS LA MISE EN ŒUVRE DE LA LOLF

A. L’ÉLÉVATION DU NIVEAU DE MISE EN RÉSERVE DES CRÉDITS JUSQU’À 8 % ENTRE 2015 et 2017

B. L’ABAISSEMENT DU TAUX DE MISE EN RÉSERVE DES CRÉDITS À 3 % EN 2018

II. L’ABSENCE INÉDITE DE DÉCRET D’AVANCE EN 2018 ET L’IMPACT LIMITÉ DES DÉCRETS D’ANNULATION

A. L’ABSENCE DE DÉCRET D’AVANCE EN 2018

B. LES TROIS DÉCRETS D’ANNULATION TECHNIQUES PRIS EN 2018, PRÉSENTANT DE FAIBLES NIVEAUX D’ANNULATION (30 MILLIONS D’EUROS EN AE ET 16 MILLIONS EN CP)

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE DE DÉCEMBRE 2018

A. UN NIVEAU LIMITÉ DE MOUVEMENTS DE CRÉDITS

B. LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS SUR LES MISSIONS DU BUDGET GÉNÉRAL DE L’ÉTAT

1. Les ouvertures de crédits

2. Les annulations de crédits

3. La stabilité des crédits

IV. LES MODIFICATIONS RÉGLEMENTAIRES

A. L’AUGMENTATION DES FONDS DE CONCOURS ET ATTRIBUTIONS DE PRODUITS

B. LA DIMINUTION DES REPORTS DE CRÉDITS

C. LE NIVEAU LIMITÉ DES AUTRES MOUVEMENTS RÉGLEMENTAIRES

V. LES MODIFICATIONS ENGAGÉES PAR LE PRÉSENT PROJET DE LOI DE RÈGLEMENT

A. LES ANNULATIONS PORTANT SUR LE BUDGET GÉNÉRAL

1. Les annulations d’autorisations d’engagement sur le budget général

2. Les annulations de crédits de paiement sur le budget général

B. LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS RELATIFS AUX BUDGETS ANNEXES ET AUX COMPTES SPÉCIAUX

FICHE 5 : LA DETTE DE LÉTAT

I. UNE ACCÉLÉRATION DE L’ENDETTEMENT DE L’ÉTAT CONFIRMÉE EN 2018

A. L’AUGMENTATION RAPIDE DE L’ENCOURS DE DETTE DE L’ÉTAT

1. La progression de l’encours total de dette négociable de l’État

2. L’augmentation de la part des titres de moyen et long terme dans l’encours de dette de l’État

B. LE BESOIN DE FINANCEMENT DE L’ÉTAT INFÉRIEUR AUX PRÉVISIONS

C. LES RESSOURCES DE FINANCEMENT DE L’ÉTAT

1. Le niveau très élevé d’émissions de titres à moyen et long terme

2. La poursuite de la politique de diminution de l’encours de titres à court terme

3. La confirmation de la normalisation du niveau des primes à l’émission

4. Les dépôts des correspondants, un niveau sensiblement supérieur à la prévision de la loi de finances initiale

5. Les disponibilités du Trésor, un niveau significativement supérieur à la prévision de la loi de finances initiale

II. UNE CHARGE DE LA DETTE EN DIMINUTION PAR RAPPORT À 2017, BIEN QUE SUPÉRIEURE À LA PRÉVISION DE LA LOI DE FINANCES INITIALE

A. UNE CHARGE DE LA DETTE EN DIMINUTION PAR RAPPORT À 2017

B. UNE CHARGE DE LA DETTE SUPÉRIEURE AUX PRÉVISIONS DE LA LOI DE FINANCES INITIALE

FICHE 6 : LA COMPTABILITÉ GÉNÉRALE DE L’ÉTAT

I. LE BILAN DE L’ÉTAT : UNE SITUATION NETTE PATRIMONIALE NÉGATIVE de PRÈS DE 1 300 MILLIARDS D’EUROS

A. PLUS DE 1 000 MILLIARDS D’EUROS D’ACTIF

1. Des immobilisations, en hausse, qui constituent l’essentiel de l’actif

2. Un actif circulant stable

3. Une trésorerie disponible qui augmente

B. UN PASSIF DE PRÈS DE 2 350 MILLIARDS D’EUROS

1. Un passif principalement constitué de dettes financières

2. Des dettes non financières stables

3. Des provisions pour risques et charges en légère baisse

4. Une trésorerie passive substantielle

II. LE COMPTE DE RÉSULTAT DE L’ÉTAT : UN RÉSULTAT PATRIMONIAL NÉGATIF DE 51,9 MILLIARDS D’EUROS

A. LE CYCLE DE FONCTIONNEMENT

B. LE CYCLE D’INTERVENTION

C. LE CYCLE FINANCIER

D. LES PRODUITS RÉGALIENS NETS

III. LES ENGAGEMENTS HORS BILAN

IV. LA POURSUITE DES PROGRÈS EN MATIÈRE DE CERTIFICATION DES COMPTES

TRAVAUX DE LA COMMISSION

AUDITION DE M. GÉRALD DARMANIN, MINISTRE DE L’ACTION ET DES COMPTES PUBLICS

AUDITION DE M. DIDIER MIGAUD, PRÉSIDENT DU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES ET PREMIER PRÉSIDENT DE LA COUR DES COMPTES

DISCUSSION GÉNÉRALE

EXAMEN DES ARTICLES

Article liminaire Solde structurel et solde effectif de l’ensemble des administrations publiques de l’année 2018

Après l’article liminaire

Article 1er Résultats du budget de l’année 2018

Article 2 Tableau de financement de l’année 2018

Article 3 sultat de l’exercice 2018  Affectation au bilan et approbation du bilan et de l’annexe

Article 4 Budget général  Dispositions relatives aux autorisations d’engagement et aux crédits de paiement

Après l’article 4

Article 5 Budgets annexes  Dispositions relatives aux autorisations d’engagement et aux crédits de paiement

Article 6 Comptes spéciaux  Dispositions relatives aux autorisations d’engagement, aux crédits de paiement et aux découverts autorisés. Affectation des soldes

Article 7 Ratification du décret  2018-1073 du 3 décembre 2018 relatif à la rémunération de services rendus par le ministère de la défense et par les formations musicales de la gendarmerie nationale et du décret  2018-1274 du 26 décembre 2018 relatif aux redevances des services de navigation aérienne

Après l’article 7


—  1  —

   INTRODUCTION

Le présent projet de loi de règlement est le deuxième à être examiné sous cette législature. Il a fait l’objet, comme le précédent, d’une procédure renforcée d’examen dans le cadre du « printemps de l’évaluation ».

Il est le premier à porter sur un exercice complet dont le Gouvernement et la majorité actuels sont responsables.

Le deuxième « printemps de l’évaluation »

L’Assemblée nationale a mis en place une procédure renforcée d’examen du projet de loi de règlement sous la forme d’un « printemps de l’évaluation », marqué par l’organisation de commissions d’évaluation des politiques publiques (CEPP) au cours desquelles les ministres compétents sont auditionnés et rendent compte de leur gestion.

La première édition du « printemps de l’évaluation » avait porté sur l’exercice 2017. Cette initiative avait vocation à se renouveler et à prendre de l’ampleur lors des exercices suivants.

Pour le permettre, le Gouvernement et la Cour des comptes ont accepté d’avancer leur calendrier. Le présent projet de loi de règlement a ainsi été adopté en conseil des ministres dès le 15 mai, au lieu du 23 mai l’année dernière, et la publication des notes d’analyse de l’exécution budgétaire par la Cour a été anticipée.

Toutefois, l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) n’a pas modifié son calendrier relatif à la comptabilité nationale si bien que le projet de loi et l’avis du Haut Conseil des finances publiques (HCFP) ont été élaborés avant la publication des résultats détaillés des comptes de la nation pour 2018. Pour la première fois, le HCFP a été conduit à émettre un avis actualisé pour tenir compte des chiffres de l’INSEE qui n’ont, toutefois, modifié qu’à la marge son appréciation.

Les rapporteurs spéciaux ont pu mettre à profit ce temps supplémentaire pour renforcer le contrôle qu’ils exercent sur l’exécution budgétaire. Ils ont également procédé à des évaluations portant sur des thématiques validées en début d’année par la commission des finances et qui ont donné lieu à la rédaction de quarante-cinq rapports, annexés au présent rapport général. Les travaux des rapporteurs spéciaux, dont le Rapporteur général salue la qualité, ont été présentés en commission des finances, sous le format de CEPP, du 28 mai au 6 juin.

Des propositions de résolution, issues tant des groupes parlementaires que des évaluations des rapporteurs spéciaux, sont inscrites à l’ordre du jour et doivent être discutées lors des séances publiques des 17, 18 et 19 juin prochain.

Conformément à la logique de résultat instituée par la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) ([1]), il était important de renforcer l’attention que le Parlement porte aux projets de lois de règlement. Ceux-ci comportent en effet un ensemble significatif d’informations présentées dans les documents suivants :

– cinquante-deux rapports annuels de performances (RAP) portant sur les missions du budget général, les budgets annexes, les comptes d’affectation spéciale, les comptes de concours financiers, les comptes de commerce et les comptes d’opérations monétaires ;

– deux annexes qui développent l’examen des opérations liées au budget général, ainsi qu’aux comptes spéciaux et aux budgets annexes ;

– le compte général de l’État, son rapport de présentation, le rapport sur le contrôle interne comptable de l’État et de ses organismes publics, ainsi que la balance générale des comptes de l’État.

Par ailleurs, la Cour des comptes publie un rapport sur l’exécution du budget de l’État et soixante-six notes d’analyse de l’exécution budgétaire (NEB). Elle présentera ses observations et recommandations en séance publique le 17 juin prochain, qui feront l’objet d’un débat.

Le premier exercice complet de la législature

Le présent projet de loi de règlement est le premier à porter sur un exercice complet dont la majorité parlementaire et le Gouvernement sont responsables.

Il permet de comparer les résultats d’exécution à exécution mais aussi de vérifier la qualité des prévisions fournies au Parlement au stade de l’examen de la loi de finances initiale.

De ce point de vue, le Rapporteur général adresse un double satisfecit au Gouvernement.

En premier lieu, d’exécution à exécution, le rétablissement des finances publiques se poursuit. Le déficit public diminue de 0,3 point de PIB conformément à ce que prévoyait la loi de programmation des finances publiques. Il se situe désormais à 2,5 % du produit intérieur brut (PIB) soit son niveau le plus bas depuis 2006. Ce résultat a été obtenu concomitamment à la mise en œuvre du programme de baisse des impôts voulu par la majorité et le Gouvernement, avec en particulier :

– la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF) et la création de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI) (3,2 milliards d’euros) ;

– la première étape de la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des foyers (3 milliards d’euros) ;

– et l’instauration d’un prélèvement forfaitaire unique sur les revenus du capital (PFU) (1,6 milliard d’euros).

Les dépenses des ministères ont été fortement maîtrisées, avec une augmentation limitée à 1,4 milliard d’euros par rapport à 2017, soit une hausse de 0,6 %.

En second lieu, l’exécution s’est révélée meilleure que les prévisions. Le déficit public est ainsi amélioré de 0,3 point de PIB par rapport à la prévision de la loi de finances initiale. De même, les recettes fiscales nettes sont supérieures de 8,8 milliards d’euros grâce au retour de la croissance. Le niveau des dépenses des ministères est en retrait de 921 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale. En outre, les deux normes de dépenses de l’État, la norme de dépenses pilotables et l’objectif de dépenses totales de l’État, ont été respectées avec une sous-consommation de 1,4 milliard d’euros pour la première et de 51 millions d’euros pour la seconde.

Les mouvements réglementaires ont été très réduits en 2018, avec un abaissement du taux de mise en réserve de crédits de 8 % à 3 % hors dépenses de personnel et l’absence de décret d’avance. Le Rapporteur général se félicite de ces changements de pratique de la part du Gouvernement, qui sont plus respectueux des prérogatives du Parlement.

Enfin, le Rapporteur général souligne l’évolution de la dette de l’État, qui a progressé de 70 milliards d’euros en 2018, pour s’établir à 1 756 milliards d’euros à la fin de l’année. Cela représente un niveau d’augmentation supérieur aux exercices 2015 à 2016, notamment du fait d’un niveau de déficit à financer plus élevé. Toutefois, le contexte de taux historiquement bas a permis de réduire la charge de la dette de l’État de 41,7 milliards d’euros en 2017 à 41,5 milliards d’euros en 2018. Le Rapporteur général confirme que cet environnement macroéconomique et les conditions de financement exceptionnelles ne doivent en aucun cas remettre en cause les ambitions fortes de maîtrise de l’endettement de l’État. En effet, la comptabilité générale de l’État, qui fait encore l’objet de quatre réserves substantielles dans l’acte de certification de la Cour des comptes, fait apparaître une situation nette négative de 1 295,6 milliards d’euros.

 


—  1  —

   FICHE 1 : LE DÉFICIT DE L’ÉTAT EN 2018

La loi de règlement arrête le déficit public – toutes administrations publiques confondues – et le déficit de l’État. Le premier est mesuré selon les principes de la comptabilité nationale et le second selon ceux de la comptabilité budgétaire et générale. Ces différents types de comptabilité ont des objets différents (I).

le déficit en 2018

Déficit public

(toutes administrations publiques)

Comptabilité nationale

59,5 milliards d’euros

soit 2,5 % du PIB

 

Déficit de lÉtat

Comptabilité budgétaire

76,0 milliards d’euros

Comptabilité générale

51,9 milliards d’euros

Comptabilité nationale

69,9 milliards d’euros

Soit 3,0 % du PIB

Source : INSEE et présent projet de loi de règlement.

La mesure du solde public, exprimé en pourcentage de PIB, permet d’adopter une vision intégrée de lensemble des finances publiques et de vérifier si la France respecte ses engagements européens (II).

La mesure du solde de l’État selon les principes de la comptabilité budgétaire permet d’appréhender son besoin de financement annuel (III).

La mesure du résultat patrimonial permet de déterminer la part de la variation annuelle du patrimoine de l’État qui résulte de la différence entre ses produits et ses charges comptables (IV).

I.   DES MESURES DU DÉFICIT DE LÉTAT DIVERSES

Historiquement, les lois de règlement ont d’abord porté sur la comptabilité budgétaire (A), puis la comptabilité générale (B) et, enfin, la comptabilité nationale (C).

A.   LA COMPTABILITÉ BUDGÉTAIRE

Traditionnellement, l’examen de la loi de règlement avait pour but de débattre uniquement de l’exécution du budget de l’État selon les principes d’une comptabilité budgétaire, c’est-à-dire une comptabilité de trésorerie au sein de laquelle les recettes et les dépenses sont enregistrées lors des encaissements et des décaissements. Il s’agit encore aujourd’hui de la comptabilité la plus observée et la plus commentée car elle permet de mesurer le déficit budgétaire et de vérifier le respect des autorisations parlementaires de dépenses.

La tenue d’une comptabilité budgétaire est prévue par l’article 27 de la LOLF ([2]).

Son article 28 précise que « les recettes sont prises en compte au titre du budget de lannée au cours de laquelle elles sont encaissées » et que « les dépenses sont prises en compte au titre du budget de lannée au cours de laquelle elles sont payées ». La LOLF prévoit une nomenclature des comptes du budget de l’État (budget général, budgets annexes et comptes spéciaux), une nomenclature par destination (mission, programme, action) et une nomenclature par nature (titres, catégories).

Les résultats du budget de l’État pour 2018 sont arrêtés par l’article 1er du présent projet de loi de règlement. Le déficit budgétaire forme, avec l’amortissement de la dette, le besoin de financement de l’État arrêté à l’article 2. Le suivi des autorisations de dépenses et des éventuels reports du budget général, des budgets annexes et des comptes spéciaux est assuré par les articles 4, 5 et 6.

B.   LA COMPTABILITÉ GÉNÉRALE

Depuis 2006, une comptabilité générale de l’État est annexée au projet de loi de règlement. Cette comptabilité dite « d’engagements » est tenue selon les mêmes principes qu’une comptabilité d’entreprise. Les charges et les produits sont rattachés à l’exercice durant lequel les droits et obligations sont nés, indépendamment de la date de paiement ou d’encaissement effectif.

La comptabilité générale permet d’appréhender également des produits et charges qui ne donnent pas lieu à des flux de trésorerie, et qui ne sont donc pas retracés par la comptabilité budgétaire, comme les dotations aux amortissements et aux provisions. Elle retrace aussi les opérations de nature purement patrimoniale (immobilisations, créances, dettes, etc.), qui ne sont pas décrites en loi de finances, et qui n’ont pas d’impact sur le solde public en comptabilité nationale. La comptabilité générale offre ainsi la possibilité de mesurer les variations annuelles du patrimoine de l’État.

Elle fait généralement l’objet de peu de commentaires dans le débat public, malgré l’enrichissement de l’information qu’elle a initié. Cela s’explique, notamment, par son caractère nouveau et perfectible – par ailleurs, elle fait encore l’objet de plusieurs réserves substantielles exprimées par la Cour des comptes dans l’acte de certification qui accompagne le présent projet de loi de règlement.

Les résultats des comptes de l’État pour 2018 sont arrêtés par l’article 3 du présent projet de loi de règlement.

Article 30 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances

La comptabilité générale de l’État est fondée sur le principe de la constatation des droits et obligations. Les opérations sont prises en compte au titre de l’exercice auquel elles se rattachent, indépendamment de leur date de paiement ou d’encaissement.

Les règles applicables à la comptabilité générale de l’État ne se distinguent de celles applicables aux entreprises qu’en raison des spécificités de son action.

Elles sont arrêtées après avis d’un comité de personnalités qualifiées publiques et privées dans les conditions prévues par la loi de finances. Cet avis est communiqué aux commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances et publié.

C.   LA COMPTABILITÉ NATIONALE

Enfin, depuis 2013, l’examen du projet de loi de règlement permet, sur le fondement de l’article liminaire, de porter une appréciation sur le résultat en comptabilité nationale de l’ensemble des administrations publiques, c’est-à-dire non seulement de l’État mais également des divers organismes d’administration centrale (ODAC), des administrations de sécurité sociale (ASSO) et des administrations publiques locales (APUL).

La comptabilité nationale est établie par l’INSEE et s’inscrit dans un champ d’analyse macroéconomique. Elle s’appréhende comme une représentation quantifiée du fonctionnement et des résultats d’une économie nationale. Il s’agit d’une comptabilité d’engagements établie selon les règles du Système européen de comptes nationaux et régionaux (SEC 2010) résultant du règlement (UE) n° 549/2013 du 21 mai 2013 relatif au système européen des comptes nationaux et régionaux dans l’Union européenne.

Les résultats de la comptabilité nationale sont abondamment commentés, en particulier le niveau de déficit exprimé en pourcentage du PIB qui joue un rôle essentiel dans le cadre de la surveillance des finances publiques au niveau européen. Ce sont ainsi les résultats de la comptabilité nationale qui permettent de savoir si la France respecte ou non la règle selon laquelle le déficit ne peut excéder 3 % du PIB prévue par le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (protocole n° 12).

II.   UN DÉFICIT PUBLIC DE 2,5 % DU PIB POUR LESSENTIEL DORIGINE STRUCTURELLE

L’article liminaire du présent projet de loi de règlement et d’approbation des comptes comprend un tableau de synthèse mentionnant le solde public et sa décomposition entre sa composante structurelle et sa composante conjoncturelle.

Article 8 de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012
relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques

La loi de règlement comprend un article liminaire présentant un tableau de synthèse retraçant le solde structurel et le solde effectif de l’ensemble des administrations publiques résultant de l’exécution de l’année à laquelle elle se rapporte. Le cas échéant, l’écart aux soldes prévus par la loi de finances de l’année et par la loi de programmation des finances publiques est indiqué. Il est également indiqué, dans l’exposé des motifs du projet de loi de règlement, si les hypothèses ayant permis le calcul du solde structurel sont les mêmes que celles ayant permis de le calculer pour cette même année dans le cadre de la loi de finances de l’année et dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques.

Le tableau de synthèse des soldes de l’article liminaire mentionne pour 2018 un déficit public de 2,5 % du PIB (A).

Le déficit public est essentiellement d’origine structurelle. Le déficit structurel est évalué à 2,1 % du PIB par le projet de loi. Le Rapporteur général propose de relever à 2,3 % cette estimation pour tenir compte des comptes nationaux de la Nation publiés par l’INSEE le 29 mai 2019 (B).

A.   UN DÉFICIT PUBLIC POUR LA DEUXIÈME ANNÉE CONSÉCUTIVE SOUS LA BARRE DES 3 % DU PIB

1.   Un déficit public au plus bas depuis 2006

Depuis 1975, les comptes publics de la France sont en déficit.

Le dÉficit public depuis 1974

(en % du PIB)

(en grisé, les déficits supérieurs à 3 % du PIB)

Année

1974

1975

1976

1977

1978

1979

1980

1981

1982

1983

1984

Solde

+ 0,1

– 2,9

– 1,6

– 1,1

– 1,8

– 0,5

– 0,4

– 2,4

– 2,8

– 2,5

– 2,7

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

1985

1986

1987

1988

1989

1990

1991

1992

1993

1994

1995

Solde

– 3,0

– 3,2

– 2,0

– 2,6

– 1,8

– 2,4

– 2,9

– 4,6

– 6,4

– 5,4

– 5,1

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

2004

2005

2006

Solde

– 3,9

– 3,7

– 2,4

– 1,6

– 1,3

– 1,4

– 3,2

– 4,0

– 3,6

– 3,4

– 2,4

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Année

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Solde

– 2,6

– 3,3

– 7,2

– 6,9

– 5,2

– 5,0

– 4,1

– 3,9

– 3,6

– 3,5

– 2,8

 

 

 

 

 

 

Année

2018

2019*

2020*

2021*

2022*

 

 

 

 

Solde

– 2,5

 3,1

 2,0

 1,6

 1,2

* prévision du programme de stabilité 2019.

Source : INSEE, base 2014.

Le pic historique de déficit public a été atteint en 2009 avec un déficit de 7,2 % du PIB à la suite de la crise financière de 2008. La France a connu neuf années consécutives de déficit supérieur à 3 % du PIB au titre des exercices 2008 à 2016.

L’année 2017 a marqué le retour du déficit sous la barre des 3 % du PIB, ce qui a permis à la France de sortir de la procédure de déficit excessif dont elle faisait l’objet depuis 2009.

Le déficit public s’est encore réduit de 0,3 point de PIB en 2018, passant de 2,8 % à 2,5 %, soit le niveau le plus bas depuis 2006.

2.   Un déficit public qui diminue à rythme comparable à celui observé depuis 2009

Le déficit public aura été réduit de 4,7 points de PIB en neuf ans, soit une baisse annuelle moyenne de 0,5 point. La baisse constatée sur la période 2017‑2018 a suivi la même tendance, soit 1 point en deux ans.

Le niveau de réduction du déficit public constaté pour 2018 est en outre conforme à ce que prévoyait le programme de stabilité d’avril 2018. La baisse est même plus rapide que ce prévoyait la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2018 à 2022 ([3]).

RÉduction prévue du déficit public

(en pourcentage ou en point de PIB)

Trajectoire de référence

2017

2018

Évolution

Exécution selon les comptes nationaux de l’INSEE

2,8 %

2,5 %

– 0,3 point

Programme de stabilité 2018

2,6 %

2,3 %

– 0,3 point

Loi de programmation des finances publiques 2018-2022

2,9 %

2,8 %

– 0,1 point

Source : commission des finances.

3.   Un déficit public moins élevé que prévu

La loi de finances initiale (LFI) pour 2018 ([4]) prévoyait un déficit public de 2,8 % du PIB. La loi de finances rectificative (LFR) pour 2018 ([5]) adoptée en fin d’année avait réduit la prévision de déficit public à 2,6 % du PIB.

En exécution le déficit public s’est élevé à 2,5 % du PIB, soit 0,3 point de moins que prévu en LFI et 0,1 point de moins que prévu en LFR.

De même, le déficit public est inférieur de 0,3 point à celui qui était prévu par la LPFP.

La programmation des finances publiques a été actualisée dans le nouveau programme de stabilité (PSTAB) transmis en avril 2019, le déficit public constaté (2,5 %) se trouvant à mi-chemin entre la prévision du PSTAB 2018 (2,3 %) et celle de la LPFP 2018-2022 (2,8 %).

Comparaison des hypothèses de solde public

(en % du PIB)

Année

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Loi de programmation des finances publiques 2018-2022

– 2,9

– 2,8

– 2,9

– 1,5

– 0,9

– 0,3

Programme de stabilité avril 2018

– 2,6

– 2,3

– 2,4

– 0,9

– 0,3

+ 0,3

Programme de stabilité avril 2019

– 2,8

– 2,5

– 2,3

– 2,0

– 1,6

– 1,2

Source : commission des finances.

La programmation pluriannuelle des finances publiques

Deux types de documents juridiques fixent un cadre pluriannuel pour les finances publiques et déterminent une trajectoire de réduction des déficits public et structurel.

En droit interne, les lois de programmation des finances publiques sont prévues par l’article 34 de la Constitution et « sinscrivent dans lobjectif déquilibre des comptes des administrations publiques ». À ce titre, elles déterminent les trajectoires des soldes structurels et effectifs annuels. Leur contenu est précisé par la loi organique n° 2012‑1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

En droit européen, les programmes de stabilité ont été institués par le pacte de stabilité et de croissance du 7 juillet 1997 comme outil de la surveillance multilatérale des politiques économiques. Ils sont transmis chaque année au mois d’avril à la Commission européenne.

Les données qui figurent dans le tableau ci-dessous sont à jour des comptes nationaux annuels publiés par l’INSEE le 29 mai 2019.

Évolution des finances publiques sur la période 2014 à 2018

(en milliards d’euros)

(en % du PIB)

Agrégat

2014

2015

2016

2017

2018

 

PIB

2 149,8

+ 1,0 % 
en volume

2 198,4

+ 1,1 %
en volume

2 234,1

+ 1,1 %
en volume

2 295,1

+ 2,3 %
en volume

2 353,1

+ 1,7 %
en volume

 

Recettes publiques

1 146,0

(53,3 %)

1 169,0

(53,2 %)

1 185,2

(53,1 %)

1 230,4

(53,6 %)

1 259,1

(53,5 %)

dont prélèvements obligatoires*

962,2

(44,8 %)

978,4

(44,5 %)

995,3

(44,6 %)

1 036,9

(45,2 %)

1 058,1

(45,0 %)

dont crédits d’impôt enregistrés en recettes

21,3

(1,0 %)

26,7

(1,2 %)

25,9

(1,2 %)

28,9

(1,3 %)

36,2

(1,5 %)

dont autres recettes

164,6

(7,7 %)

167,0

(7,6 %)

167,6

(7,5 %)

168,6

(7,3 %)

169,4

(7,2 %)

 

Dépenses publiques

1 230,0

(57,2 %)

1 248,7

(56,8 %)

1 264,3

(56,6 %)

1 294,0

(56,4 %)

1 318,6

(56,0 %)

dont crédits d’impôt enregistrés en dépenses

25,4

(1,2 %)

32,4

(1,5 %)

31,7

(1,4 %)

31,7

(1,4 %)

39,2

(1,7 %)

dont dépenses hors crédits d’impôt

1 204,6

(56,0 %)

1 216,3

(55,3 %)

1 232,6

(55,2 %)

1 262,3

(55,0 %)

1 279,4

(54,4 %)

 

Déficit public

83,9

(3,9 %)

79,7

(3,6 %)

79,1

(3,5 %)

63,6

(2,8 %)

59,5

(2,5 %)

 

Dette publique

2 039,9

(94,9 %)

2 101,3

(95,6 %)

2 188,5

(98,0 %)

2 258,7

(98,4 %)

2 315,3

(98,4 %)

* Les prélèvements obligatoires comprennent 2,1 milliards de ressources propres traditionnelles de l’Union européenne pour 2014, 3,1 milliards pour 2015, 3,6 milliards pour 2016, 4 milliards pour 2017 et 4,6 milliards d’euros pour 2018, lesquelles ne sont pas comptabilisées dans les recettes totales.

Source : INSEE, comptes nationaux base 2014.

4.   Un déficit de l’État supérieur au déficit public

La concentration du déficit public sur l’État s’est accentuée ces dernières années sous l’effet de deux tendances.

En premier lieu, les allégements de cotisations sociales décidées dans le cadre de politiques publiques de soutien à l’emploi sont compensés à la sécurité sociale par l’État. Ainsi, le solde des ASSO est passé d’un déficit de 23,9 milliards d’euros en 2010 à un excédent de 10,8 milliards en 2018 soit une amélioration de près de 35 milliards d’euros.

En second lieu, les APUL connaissent également depuis 2016 un excédent, grâce à un important ralentissement de leurs dépenses.

Le déficit de l’État est depuis deux ans supérieur au déficit public.

Décomposition du solde public par sous-secteur d’administration

depuis 2007

(en milliards d’euros)

Année

solde public

 

État

ODAC

APUL

ASSO

2007

– 51,2

– 40,0

– 7,1

– 8,1

4,1

2008

– 65,0

– 66,2

– 2,7

– 10,0

13,9

2009

– 138,9

– 116,1

– 1,3

– 6,3

– 15,2

2010

– 137,4

– 122,9

11,3

– 2,0

– 23,9

2011

– 106,1

– 92,4

– 0,2

– 0,8

– 12,7

2012

– 104,0

– 85,1

– 2,6

– 3,7

– 12,7

2013

– 86,5

– 70,2

1,3

– 8,5

– 9,1

2014

– 83,9

– 74,7

2,6

– 4,8

– 7,4

2015

– 79,7

– 73,3

– 2,5

– 0,1

– 3,8

2016

– 79,1

– 73,8

– 6,2

+ 3,0

– 2,2

2017

– 63,6

 

– 70,5

– 4,4

+ 1,6

+ 5,3

2018

– 59,5

 

– 69,9

– 2,7

+ 2,3

+ 10,8

Source : INSEE, comptes nationaux base 2014.

Le Rapporteur général souligne à nouveau que l’importance du déficit de l’État s’explique en grande partie par les compensations que celui-ci verse aux collectivités territoriales (15,7 milliards d’euros au titre des dégrèvements d’impôts locaux) et aux ASSO (près de 32 milliards d’euros au titre des allégements généraux de cotisations sociales).

Dans son rapport sur le budget de l’État en 2018, la Cour des comptes a d’ailleurs relevé qu’« une réduction rapide du déficit du budget de lÉtat ne saurait faire léconomie dun réexamen du partage actuel des recettes et des charges entre lÉtat et les autres administrations publiques » ([6]).

B.   UN DÉFICIT PUBLIC ESSENTIELLEMENT D’ORIGINE STRUCTURELLE

1.   Notions de déficit structurel et conjoncturel

Le déficit structurel est le déficit corrigé des effets du cycle économique. Le déficit conjoncturel est le déficit lié à la conjoncture.

Autrement dit, le déficit comprend deux composantes : l’une liée à la conjoncture et l’autre indépendante de la conjoncture. La réduction de la composante structurelle est prioritaire, dès lors que la composante conjoncturelle est censée se résorber d’elle-même en période de reprise de la conjoncture.

C’est la raison pour laquelle l’objectif déquilibre des comptes publics du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire (TSCG) est défini en termes de déficit structurel. L’article 3 du TSCG précise que cet objectif est atteint lorsque le solde structurel des administrations publiques est inférieur à 0,5 point de PIB pour les États membres dont la dette dépasse 60 % du PIB, et à 1 point de PIB pour les autres États membres.

Cette règle est mise en œuvre dans le cadre du volet préventif du pacte de stabilité et de croissance (PSC) ([7]). Ce volet préventif prévoit ainsi que les États membres doivent déterminer un objectif de moyen terme (OMT), défini en termes de solde structurel, compris entre – 0,5 point de PIB et l’excédent. Ils doivent également définir une trajectoire dajustement structurel minimal en vue d’atteindre l’OMT, étant précisé que le solde structurel doit converger vers l’OMT retenu d’au moins 0,5 point de PIB par an (et de plus de 0,5 point par an lorsque l’État membre possède une dette publique supérieure à 60 % du PIB).

Les modalités de calcul des différentes composantes du déficit sont complexes mais dépendent essentiellement de la notion décart de production, c’est-à-dire de la différence entre la production effective et la production potentielle.

Méthode de calcul des composantes structurelle et conjoncturelle du déficit public

Le calcul de la composante conjoncturelle et structurelle du déficit public fait intervenir les notions de croissance potentielle, de PIB potentiel et d’écart de production.

L’écart de production est égal à la différence entre le PIB effectif – qui est mesuré en comptabilité nationale – et le PIB potentiel.

Le PIB potentiel est une notion non observable en finances publiques ni en comptabilité nationale. Il s’agit d’une notion macroéconomique sujette à diverses mesures et interprétations. Il peut être défini « comme le niveau maximum de production que peut atteindre une économie sans quapparaissent de tensions sur les facteurs de production qui se traduisent par des poussées inflationnistes » (1).

Les hypothèses d’écart de production permettent de calculer précisément la composante conjoncturelle et la composante structurelle du déficit selon des modalités complexes définies dans l’annexe 2 du rapport annexé à la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

Une méthode simplifiée de calcul − appelée « règle du pouce » − consiste à considérer qu’en pratique, le solde conjoncturel est proche de la moitié de lécart de production. Ceci s’explique par le fait que les postes sensibles à la conjoncture représentent, dans notre pays, près de la moitié du PIB et que l’élasticité des prélèvements obligatoires à la croissance du PIB est, en moyenne, de l’ordre de 1.

Le déficit structurel est ensuite calculé comme la différence entre le déficit effectif et le déficit conjoncturel corrigé des mesures ponctuelles et temporaires.

Concrètement, plus l’écart de production est creusé, plus la composante conjoncturelle du déficit est importante. Un écart de production négatif surestimé conduit à surestimer la composante conjoncturelle du déficit et à sous-estimer sa composante structurelle.

L’écart de production évolue chaque année à hauteur de la différence entre la croissance effective et l’hypothèse de croissance potentielle définie, au même titre que le PIB potentiel, comme la croissance maximale au-delà de laquelle apparaissent des tensions inflationnistes.

Par voie de conséquence, une surestimation de la croissance potentielle aboutit à creuser lécart de production et à minorer le déficit structurel, et donc à minorer l’effort à accomplir pour respecter la règle d’équilibre des comptes du TSCG.

() Banque de France (lien).

2.   Une composante structurelle estimée à 2,1 % du PIB par le projet de loi

La composante structurelle représente désormais la quasi-totalité du déficit public.

a.   Hypothèses de calcul du Gouvernement

Décomposition du solde public pour 2018

(en points de PIB)

Solde public

– 2,5

Solde structurel

– 2,1

Solde conjoncturel

– 0,2

Mesures ponctuelles et temporaires

– 0,2

Source : article liminaire du présent projet de loi de règlement.

Les hypothèses de calcul ont été actualisées à loccasion du dernier programme de stabilité. Toutefois, le Gouvernement n’a pas pu tenir compte des comptes nationaux de la Nation publiés par l’INSEE le 29 mai.

Les hypothèses initiales ont été fixées dans la LPFP pour les années 2018 à 2022.

HypothÈses initiales dÉcart de production, de croissance effective
et de croissance potentielle

(en % dévolution annuelle, sauf précision contraire)

Année

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Croissance en volume du PIB

1,1

1,7

1,7

1,7

1,7

1,7

1,8

Croissance potentielle

1,2

1,25

1,25

1,25

1,25

1,30

1,35

Écart de production en % du PIB

– 1,5

– 1,1

– 0,7

– 0,2

+ 0,2

+ 0,6

+ 1,1

Source : rapport annexé à la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

Ces hypothèses avaient été jugées « réalistes » par le HCFP dans son avis portant sur le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 ([8]).

Les hypothèses du Gouvernement ont ensuite été révisées à l’occasion du dernier PSTAB pour tenir compte :

– de la croissance effective constatée en 2017 qui s’est révélée meilleure que prévu, d’une part ;

– et de la révision à la baisse des prévisions de croissance pour 2019 à 2022, d’autre part.

HypothÈses d’Écart de production, de croissance effective
et de croissance potentielle

(en % d’évolution annuelle, sauf précision contraire)

Année

2017

2018

2019

2020

2021

2022

Croissance en volume du PIB

2,2

1,6

1,4

1,4

1,4

1,4

Croissance potentielle

1,25

1,25

1,25

1,25

1,3

1,35

Écart de production en % du PIB

– 0,6

– 0,3

– 0,1

0,0

0,1

0,1

Source : programme de stabilité d’avril 2019.

Ainsi, selon les hypothèses révisées du Gouvernement, l’écart de production pour 2018 ressortait dans le présent projet de loi à – 0,3 % du PIB si bien que le déficit conjoncturel se limitait à 0,2 point de PIB (soit environ l’inverse de la moitié de l’écart de production). Par déduction, le déficit structurel – après prise en compte des mesures exceptionnelles et temporaires – était estimé à 2,1 % du PIB.

b.   Avis du Haut Conseil des finances publiques

Le HCFP a pour mission de se prononcer sur le respect des objectifs pluriannuels de solde structurel. Pour ce faire, il doit prendre pour référence la dernière LPFP. Autrement dit, son avis est fondé sur les hypothèses de croissance potentielle de la LPFP 2018-2022.

Dans son avis n° HCFP-2019-2 du 15 mai 2019 relatif au solde structurel des administrations publiques présenté dans le projet de loi de règlement de 2018 ([9]), le Haut Conseil a indiqué que le calcul du déficit structurel était conforme à la LPFP 2018-2022.

Son avis actualisé du 4 juin 2019 – pour tenir compte des chiffres de l’INSEE – ne l’a pas conduit à modifier cette appréciation. Il a relevé que le déficit structurel estimé pour 2018 était en tout état de cause « proche » de celui figurant dans la loi de programmation de janvier 2018 et qu’il n’y avait donc pas lieu de déclencher le mécanisme de correction prévu par l’article 23 de la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques ([10]).

Toutefois, le HCFP a également souligné que le solde structurel « reste très éloigné de l’objectif de moyen terme (– 0,4 point de PIB) » défini dans la loi de programmation des finances publiques.

Loi organique  2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation
et à la gouvernance des finances publiques (extraits)

I. ― En vue du dépôt du projet de loi de règlement, le Haut Conseil des finances publiques rend un avis identifiant, le cas échéant, les écarts importants, au sens du II, que fait apparaître la comparaison des résultats de l’exécution de l’année écoulée avec les orientations pluriannuelles de solde structurel définies dans la loi de programmation des finances publiques. Cette comparaison est effectuée en retenant la trajectoire de produit intérieur brut potentiel figurant dans le rapport annexé à cette même loi.

Cet avis est rendu public par le Haut Conseil des finances publiques et joint au projet de loi de règlement. Il tient compte, le cas échéant, des circonstances exceptionnelles définies à l’article 3 du traité, signé le 2 mars 2012, précité, de nature à justifier les écarts constatés.

Lorsque l’avis du Haut Conseil identifie de tels écarts, le Gouvernement expose les raisons de ces écarts lors de l’examen du projet de loi de règlement par chaque assemblée. Il présente les mesures de correction envisagées dans le rapport mentionné à l’article 48 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 précitée.

II. ― Un écart est considéré comme important au regard des orientations pluriannuelles de solde structurel de l’ensemble des administrations publiques définies par la loi de programmation des finances publiques lorsqu’il représente au moins 0,5 % du produit intérieur brut sur une année donnée ou au moins 0,25 % du produit intérieur brut par an en moyenne sur deux années consécutives.

c.   Proposition du Rapporteur général

Le présent projet de loi de règlement, adopté en conseil des ministres le 15 mai dernier, n’a pas pu tenir compte des résultats des comptes nationaux publiés par l’INSEE le 29 mai. Ceux-ci ont légèrement révisé à la hausse croissance pour 2017 (2,3 % au lieu de 2,2 %) et pour 2018 (1,7 % au lieu de 1,6 %). Il s’ensuit que l’écart de production pour 2018 doit être revu à la hausse de 0,2 point de PIB, passant de – 0,3 à – 0,1 point de PIB.

Mise à jour des hypothèses de calcul des composantes du solde public
pour 2018

 

Hypothèses

du projet de loi

Hypothèses

de l’amendement

du Rapporteur général

Écart

Année

2017

2018

2017

2018

2017

2018

Croissance effective

2,2

1,6

2,3

1,7

+ 0,1

+ 0,1

Croissance potentielle

1,25

1,25

1,25

1,25

Écart de production

– 0,6

– 0,3

– 0,5

– 0,1

+ 0,1

+ 0,2

Source : réponses du Gouvernement au questionnaire du Rapporteur général.

 

Par conséquent, le Rapporteur général propose de modifier l’estimation du des composantes du déficit public et de porter le déficit structurel à 2,3 % au lieu de 2,1 %.

III.   UN DÉFICIT BUDGÉTAIRE DE LÉTAT DE 76 MILLIARDS DEUROS, EN HAUSSE DE 8,3 MILLIARDS DEUROS

Le déficit budgétaire de l’État repart à la hausse en 2018 alors qu’il était en baisse constante depuis 2009.

Le déficit budgétaire de l’État depuis 2009

(en milliards d’euros)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

– 138,0

– 113,8*

– 90,7

– 87,2

– 74,9

– 73,6*

– 70,5

– 69,1

– 67,7

– 76,0

* hors programmes d’investissements d’avenir (PIA).

Source : lois de règlement de 2009 à 2017, présent projet de loi de règlement.

A.   FORMATION DU SOLDE BUDGÉTAIRE 2018

Avec 76 milliards d’euros, le déficit budgétaire reste encore, en 2018, à un niveau élevé.

La formation du déficit budgétaire résulte :

– de dépenses nettes du budget général qui se sont élevées à 386,2 milliards d’euros, en y incluant les prélèvements sur recettes (voir fiche Dépenses de lÉtat) ;

– de recettes nettes du budget général qui ressortent à 309,2 milliards d’euros (voir fiche Recettes de lÉtat) ;

– et du solde des budgets annexes et comptes spéciaux qui s’établit à 0,9 milliard d’euros.

Formation du solde budgétaire de l’État en 2018

(en milliards d’euros)

I. Dépenses du budget général

386,2

II. Recettes du budget général

309,2

Dépenses du budget général

325,2

Recettes fiscales nettes

295,3

Prélèvement sur recettes au profit de lUnion européenne

20,6

Recettes non fiscales

13,9

Prélèvement sur recettes au profit des collectivités territoriales

40,3

III. Solde des budgets annexes et comptes spéciaux

+ 0,9

Déficit (I  II  III)

76,0

Source : présent projet de loi de règlement.

La présentation du budget est toutefois altérée par l’enregistrement de 1,4 milliard d’euros de recettes de droits de mutation sur l’exercice 2018 alors qu’elles ont été encaissées en 2017.

Formation du solde budgétaire de l’État en 2018 retraitÉe
de la comptabilisatIon des droits d’enregistrement

(en milliards d’euros)

I. Dépenses du budget général

386,2

II. Recettes du budget général

307,8

Dépenses du budget général

325,2

Recettes fiscales nettes

293,9

Prélèvement sur recettes au profit de lUnion européenne

20,6

Recettes non fiscales

13,9

Prélèvement sur recettes au profit des collectivités territoriales

40,3

III. Solde des budgets annexes et comptes spéciaux

+ 0,9

Déficit (I  II  III)

77,4

Source : d’après le présent projet de loi de règlement et les réponses du Gouvernement au questionnaire du Rapporteur général.

B.   ANALYSE DE LÉCART PAR RAPPORT AUX PRÉVISIONS

Le déficit budgétaire de l’État est moins élevé que celui qui avait été prévu par la LFI et la LFR.

Écart du déficit budgétaire de l’état en 2018 par rapport aux prévisions

(en milliards d’euros)

Exécution 2018

 

 

LFI

2018

LFR

2018

 

 

Écart exécution /

LFI 2018

Écart exécution /

LFR 2018

76,0

85,7

80,0

– 9,7

– 4,0

Source : différentes lois de finances de 2018 et présent projet de loi de règlement.

Le déficit budgétaire prévu en loi de finances initiale pour 2018 était de 85,7 milliards d’euros. Le déficit est moins élevé de 9,7 milliards deuros.

passage du solde LFI 2018 au solde constaté en 2018

(en milliards d’euros)

 

LFI

Variation

LR

 

LFI

Variation

LR

Dépenses du budget général (I)

386,5

 0,3

386,2

Recettes du budget général (II)

299,8

+ 9,5

309,3

Dépenses nettes du budget général (hors PSR)

326,2

 1,0

325,2

Recettes fiscales nettes

286,6

+ 8,8

295,4

Prélèvement sur recettes au profit de lUnion européenne

19,9

+ 0,7

20,6

Recettes non fiscales

13,2

+ 0,7

13,9

Prélèvement sur recettes au profit des collectivités territoriales

40,3

0,0

40,3

Soldes des budgets annexes et comptes spéciaux (III)

+ 1,0

 0,1

+ 0,9

Déficit à financer

(I − II  III)

85,7

 9,7

76,0

Source : loi de finances initiale pour 2018 et présent projet de loi de règlement.

Les recettes sont supérieures aux prévisions à hauteur de 9,5 milliards d’euros. Les recettes fiscales ont été sous-estimées de 8,8 milliards d’euros et les recettes non fiscales de 0,7 milliard d’euros en LFI.

Les dépenses sont inférieures de 0,3 milliard d’euros à la prévision de la LFI en dépit d’une sur-exécution du prélèvement sur recettes au profit de l’Union européenne de 0,7 milliard d’euros.

C.   ANALYSE DEXÉCUTION À EXÉCUTION

Le déficit public augmente sous l’effet conjugué :

– d’une hausse du prélèvement sur recettes en faveur de l’Union européenne qui s’explique par le fait que l’Union européenne est entrée dans les dernières années de l’actuel cadre financier pluriannuel couvrant la période 2014–2020 ;

– et d’un retour à un solde proche de l’équilibre des comptes spéciaux.

passage du solde 2017 au solde 2018

(en milliards d’euros)

 

2017

Variation

2018

 

2017

Variation

2018

Dépenses

du budget général (I)

382,8

+ 3,4

386,2

Recettes

du budget général (II)

309,5

 0,2

309,3

Dépenses nettes du budget général (hors PSR)

322,6

+ 2,6

325,2

Recettes fiscales nettes

295,6

 0,2

295,4

Prélèvement sur recettes au profit de lUnion européenne

16,4

+ 4,2

20,6

Recettes non fiscales

13,8

+ 0,1

13,9

Prélèvement sur recettes au profit des collectivités territoriales

43,8

 3,5

40,3

Soldes des budgets annexes et des comptes spéciaux (III)

+ 5,5

 4,6

+ 0,9

Déficit à financer

(I − II  III)

67,7

+ 8,3

76,0

Source : loi de règlement pour 2017 et présent projet de loi de règlement.

IV.   UN RÉSULTAT PATRIMONIAL NÉGATIF DE 51,9 MILLIARDS DEUROS

La comptabilité générale de l’État est analysée de façon plus détaillée dans la fiche 8 du présent rapport. Seul est rappelé ici le résultat patrimonial, c’est-à-dire la différence entre les produits et les charges.

Le résultat patrimonial 2018 s’établit à – 51,9 milliards d’euros, en amélioration de 9,2 milliards d’euros par rapport à 2017.

Le résultat de l’État

(en milliards d’euros)

Poste

Exercice 2018

Exercice 2017

Variation

 

Cycle

de fonctionnement

Charges (a)

266,0

268,8

– 2,8

Produits (b)

77,1

73,1

– 4,0

Charges nettes (I =a-b)

188,9

195,7

 6,8

 

Cycle

dintervention

Charges (a)

193,1

190,5

– 2,6

Produits (b)

38,4

39,0

– 0,7

Charges nettes (II = a-b)

154,7

151,4

+ 3,3

 

Cycle

Financier

Charges (a)

57,3

51,7

+ 5,6

Produits (b)

34,8

35,0

– 0,3

Charges nettes (III = a-b)

22,5

16,7

+ 5,8

 

Total des charges nettes (A = I + II + III)

366,1

363,8

 2,3

 

Produits régaliens nets (B)

314,3

302,8

+ 11,5

 

Résultat (B-A)

 51,9

 61,1

+ 9,2

Source : rapport de présentation 2018 annexé au présent projet de loi de règlement.

Le résultat d’ensemble de la comptabilité générale doit être appréhendé avec précaution. Dans l’acte de certification des comptes de l’État (lien), la Cour des comptes a formulé quatre réserves substantielles et a rappelé que plusieurs demandes de modification n’avaient pas été acceptées par l’administration. Si elles avaient été acceptées, le solde des opérations de l’exercice aurait été dégradé de 6,4 milliards d’euros par rapport au résultat arrêté.

*

*     *

 


—  1  —

   FICHE 2 : LES RECETTES DE L’ÉTAT EN 2018

Les recettes nettes du budget général de l’État, hors fonds de concours, se sont élevées à 309,3 milliards deuros en 2018, soit, en apparence, un niveau quasiment stable par rapport à 2017. Elles sont, en réalité, en baisse de 3 milliards d’euros si l’on tient compte d’une erreur de rattachement d’une fraction des droits de mutation encaissée en 2017 et comptabilisée en 2018 à la suite d’un dysfonctionnement administratif et informatique.

Elles sont nettement supérieures aux prévisions de la loi de finances initiale (LFI) ([11]) et, dans une moindre mesure, à celles de la loi de finances rectificative (LFR) de fin d’année ([12]).

Recettes nettes du budget général de l’État en 2018
par rapport à 2017 et aux prévisions des lois de finances pour 2018

(en milliards d’euros)

Recettes du budget général de lÉtat

hors fonds de concours

Exécution

2018

Écart

par rapport

à 2017

Écart

par rapport

aux prévisions

LFI 2018

LFR 2018 

Total

309,3

(307,9)*

 0,1

(– 3,0)*

+ 9,5

+ 2,4

dont impôt sur le revenu (IR)

73,0

=

+ 0,4

– 0,1

dont impôt sur les sociétés (IS)

27,4

– 8,3

+ 1,5

+ 1,7

dont taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

156,7

+ 4,3

+ 2,1

– 0,3

dont taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE)

13,7

+ 2,6

+ 0,1

– 0,2

dont autres recettes fiscales

24,6

(23,2)*

+ 1,2

(– 1,6)*

+ 4,5

+ 0,9

Sous-total recettes fiscales nettes

295,4

(294,0)*

 0,2

(– 3,0)*

+ 8,8

+ 2,1

dont recettes non fiscales

13,9

+ 0,1

+ 0,7

+ 0,3

* corrigé de l’erreur d’imputation des droits de mutation.

Source : présent projet de loi de règlement et lois de finances relatives à l’année 2018.

Ces recettes se décomposent en recettes fiscales (I) et en recettes non fiscales (II).

I.   LES RECETTES FISCALES DE LÉTAT

Avec 295,4 milliards deuros, ou 294 milliards d’euros en tenant compte de l’erreur d’imputation des droits de mutation, les recettes fiscales nettes constituent la majeure partie des recettes du budget général de l’État.

A.   MONTANT GLOBAL

Recettes fiscales nettes du budget général de l’État depuis 2008

(en milliards d’euros)

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

260,0

214,3

237,0*

255,0

268,4

284,0

274,3

280,1

284,1

295,6

295,4

* Le montant de l’année 2010 n’inclut pas le rendement de 16,6 milliards d’euros des impôts locaux affectés transitoirement à l’État cette année-là.

Source : commission des finances.

Les recettes sont dites « nettes » car elles sont présentées après déduction des remboursements et dégrèvements afférents aux différents impôts affectés au budget de l’État. Ces remboursements et dégrèvements font l’objet d’une mission spécifique du budget général ([13]).

Remboursements et dégrèvements

En 2018, le montant des recettes fiscales brutes du budget général a été de 421,1 milliards deuros. Les remboursements et dégrèvements se sont élevés à 125,7 milliards deuros, si bien que les recettes fiscales nettes du budget général se sont établies à 295,4 milliards d’euros.

L’État procède à des remboursements et dégrèvements d’impôts pour diverses raisons : les régularisations de trop-versés lorsqu’un contribuable a payé plus d’acomptes que l’impôt réellement dû ; le droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) qui place certaines entreprises en situation créditrice vis-à-vis de l’État lorsque le montant de la TVA collectée est inférieur au montant de la TVA déductible ; les crédits d’impôt lorsque ceux-ci dépassent le montant de l’impôt dû ; ou encore les corrections d’erreurs à la suite d’une réclamation ou d’un contentieux.

Les remboursements et dégrèvements inertevenus en 2018 se décomposent ainsi :

– 70,2 milliards au titre de la mécanique de certains impôts, dont 52,5 milliards d’euros au titre des crédits de TVA et 17,4 milliards d’euros de remboursements d’excédents d’impôt sur les sociétés ;

– 21,9 milliards d’euros au titre de soutien à des politiques publiques via des remboursements ou des crédits d’impôt qui excédent l’impôt dû ;

– 17,9 milliards d’euros au titre de la gestion des impôts (corrections d’erreurs, décisions de justice, remboursements par application des conventions fiscales internationales), dont 3,7 milliards d’euros au titre des derniers remboursements de la taxe de 3 % sur les montants distribués ;

– et 15,7 milliards d’euros de remboursements et dégrèvements d’impôts locaux.

B.   RETRAITEMENTS NÉCESSAIRES POUR UNE JUSTE ANALYSE ÉCONOMIQUE DES RECETTES FISCALES DE L’ÉTAT

Les recettes fiscales nettes du seul budget général ne rendent pas compte du montant total des recettes fiscales nettes affectées à l’État.

Certes, le montant de 295,4 milliards d’euros est celui qui figure dans le tableau d’équilibre des ressources et des dépenses et à l’article 1er du présent projet de loi de règlement. Mais, sur un plan économique, cette présentation budgétaire est incomplète, le montant des recettes fiscales nettes perçues par l’État étant en réalité plus important.

Deux raisons expliquent cette différence entre la présentation retenue par les documents budgétaires et la réalité économique.

En premier lieu, la présentation budgétaire habituelle déduit du montant brut des recettes fiscales de l’État les dégrèvements et remboursements des impôts locaux. Comme chaque année, la Cour des comptes a critiqué cette présentation et recommandé que les remboursements et dégrèvements d’impôts locaux ne soient plus déduits des recettes fiscales brutes de l’État ([14]). En effet, ceux-ci n’ont rien à voir avec la mécanique des impôts d’État : il n’est donc pas logique de les soustraire du rendement brut des impôts d’État. Selon la Cour des comptes, les dégrèvements et remboursements des impôts locaux devraient figurer en dépenses.

Cette observation de la Cour des comptes est d’autant plus pertinente que les dégrèvements des impôts locaux ont eu tendance à croître ces dernières années sous l’effet de plusieurs réformes. Cette tendance se poursuit avec la montée en puissance du dégrèvement sur la taxe d’habitation sur les résidences principales résultant de sa suppression par étapes pour 80 % des ménages.

En 2018, les remboursements et dégrèvements d’impôts locaux pris en charge par l’État ont été de 15,7 milliards deuros au lieu de 12,7 milliards d’euros en 2017.

En second lieu, la présentation budgétaire mise en avant par le Gouvernement dans l’exposé des motifs du présent projet de loi de règlement, en page 28, ne tient pas compte des recettes fiscales affectées en tout ou partie à différents budgets annexes et comptes spéciaux de l’État. Cette fraction de la fiscalité est donc souvent omise dans l’analyse politique et économique des comptes de l’État. Cette omission se justifie moins aujourd’hui compte tenu de l’importance que prennent certains de ces impôts, en particulier la fiscalité écologique affectée au compte d’affectation spéciale (CAS) Transition énergétique.

Ainsi, le rendement de la fiscalité affectée aux budgets annexes et comptes spéciaux de la comptabilité budgétaire de l’État s’est élevé à 10,5 milliards deuros en 2018 ([15]), ce qui n’est pas négligeable, au lieu de 9,4 milliards d’euros en 2017.

Impôts affectÉs À des budgets annexes et comptes spÉciaux de l’État

(en millions d’euros)

Budget annexe (BA)

Compte daffectation spéciale (CAS)

Impôt affecté

Rendement 2018

BA

Contrôle et exploitation aériens

Taxe de l’aviation civile

472

Frais d’assiette et recouvrement sur taxes perçues pour le

compte de tiers

7

CAS

Aides à lacquisition de véhicules propres

Produit de la taxe additionnelle à la taxe sur les certificats d’immatriculation des véhicules

559

CAS

Développement agricole et rural

Taxe sur le chiffre d’affaires des exploitations agricoles

136

CAS

Financement des aides aux collectivités pour lélectrification rurale

Contribution des gestionnaires de réseaux publics de distribution

377

CAS

Financement national du développement et de la modernisation de lapprentissage

Fraction du quota de la taxe d’apprentissage

1 704

CAS

Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs

Contribution de solidarité territoriale

56

Taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires

452

Fraction de la taxe d’aménagement du territoire

141

CAS

Transition énergétique

Fraction de la taxe intérieure sur les produits énergétiques

6 589

Fraction de la taxe intérieure sur les houilles, les lignites et les cokes

1

Total

10 494

Source : données extraites des rapports annuels de performances.

Au total, si l’on réintègre les recettes affectées aux budgets annexes et comptes spéciaux (10,5 milliards d’euros) ainsi que les dégrèvements et remboursements d’impôts locaux (15,7 milliards d’euros), le montant réel des recettes fiscales nettes de l’État ne serait donc pas de 295,4 milliards d’euros mais de 321,6 milliards deuros.

Le montant consolidé des recettes fiscales affectées à lÉtat ne figure pourtant dans un aucun document budgétaire. Il serait possible daméliorer linformation du Parlement en lindiquant plus explicitement.

Une juste analyse des recettes nécessite également cette année de tenir compte de l’erreur d’imputation des droits de mutation.

La comptabilisation budgétaire des droits d’enregistrement encaissés en 2017 n’a pas pu être totalement imputée à leur bénéficiaire en raison d’un dysfonctionnement informatique.

Les recettes de l’État pour 2017 sont ainsi minorées de 1,4 milliard d’euros par rapport au montant réellement encaissé. La comptabilisation de ces recettes est décalée à 2018, alors qu’elles auraient dû normalement figurer dans l’exercice 2017 en application des principes de la comptabilité budgétaire.

Ce faisant, le montant total des recettes fiscales de l’État – déterminé en application des retraitements récurrents présentés précédemment relatifs aux dégrèvements d’impôts locaux et à la fiscalité non affectée au budget général – est de 320,2 milliards deuros.

Poids des impôts d’État dans l’ensemble de la fiscalité et des prélèvements obligatoires : près de la moitié de la fiscalité globale
et près d’un tiers des prélèvements obligatoires

Les impôts, toutes administrations publiques confondues, ont représenté 681,2 milliards d’euros en 2018 selon les chiffres détaillés des comptes nationaux annuels publiés par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) le 29 mai 2019.

L’INSEE a mesuré la fiscalité d’État en 2018 à 314,5 milliards d’euros selon les principes de la comptabilité nationale (1), soit 46 % de la fiscalité globale au lieu de 48 % l’année dernière.

Les impôts affectés aux administrations publiques locales représentent, quant à eux, un rendement de 150,8 milliards d’euros en comptabilité nationale, soit 22 % de l’ensemble de la fiscalité. Les impôts affectés aux administrations de sécurité sociale ont eu un rendement de 199,5 milliards d’euros, soit 29 % de l’ensemble de la fiscalité. Les autres impôts ont été affectés à divers organismes d’administration centrale (ODAC) pour 11,8 milliards d’euros et à l’Union européenne pour 4,6 milliards d’euros.

Les cotisations sociales sont de 376,9 milliards d’euros en 2018, ce qui porte le montant total des prélèvements obligatoires à 1 058,1 milliards d’euros. La fiscalité d’État représente 30 % de l’ensemble des prélèvements obligatoires.

(1) Les principes de la comptabilité nationale diffèrent de ceux de la comptabilité budgétaire, puisque les recettes sont enregistrées en droits constatés et non lors de l’encaissement effectif. Ceci explique la différence entre les données de l’INSEE et ceux résultant de la comptabilité budgétaire. Les données de l’INSEE sont plus proches du montant consolidé des recettes fiscales de l’État – calculés précédemment selon les bases de la comptabilité budgétaire à 320,1 milliards d’euros – que de celui afférent au seul budget général (295,4 milliards d’euros).

La présentation des recettes fiscales de l’État de l’année 2018 est plus fidèle à la réalité économique une fois ces divers retraitements opérés. De même, les droits de succession et de donation – qui constituent par ordre d’importance le cinquième impôt de l’État et dont le produit dépasse cette année celui de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) affectée au budget général – mériteraient d’être mentionnés dans les tableaux de synthèse produits par le Gouvernement compte tenu du dynamisme important de leur rendement.

Le tableau qui suit propose, en conséquence, une présentation alternative des recettes fiscales de l’État pour 2018. Il mentionne également le produit global des autres taxes intérieures sur la consommation d’énergie, hors carburant.

Les recettes fiscales de l’État en 2018
présentation commission des finances

(en milliards d’euros)

Taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

156,7

Impôt sur le revenu (IR)

73,0

Impôt sur les sociétés (IS)

27,4

Taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) (1)

20,3

Droits de succession et de donation (2)

14,8

Autres taxes intérieures de consommation sur les énergies (électricité, gaz, charbon) (3)

10,0

« Autres recettes fiscales » (4)

17,9

Total

320,1 (5)

(1) Part du budget général (13,7 milliards d’euros) et du compte d’affectation spéciale Transition énergétique (6,6 milliards d’euros).

(2) Rendement 2018 de 16,2 milliards d’euros minoré de 1,4 milliard d’euros enregistrés en 2018, malgré leur encaissement effectif en 2017, dans le budget général de l’État à la suite d’un dysfonctionnement informatique.

(3) Taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) ; taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel (TICGN) ; taxe intérieure de consommation sur les houilles, lignites et coke (TICC).

(4) Catégorie propre à ce tableau et qui ne recouvre pas le même périmètre que celui des tableaux de synthèse du Gouvernement figurant dans l’exposé des motifs, page 28, du présent projet de loi de règlement.

(5) Montant des recettes fiscales nettes de l’État comprenant le montant des recettes fiscales nettes du budget général majoré des dégrèvements et remboursements d’impôts locaux, le montant des recettes fiscales nettes des budgets annexes et comptes spéciaux, et le montant des droits d’enregistrement revenant à l’État dont la comptabilisation a été omise.

Source : commission des finances d’après le présent projet de loi de règlement et les réponses du Gouvernement au questionnaire du Rapporteur général.

Dans l’analyse qui suit, et pour plus de clarté, la présentation budgétaire habituelle est retenue. Ponctuellement, et de manière explicite, cette présentation sera replacée dans le contexte économique du montant réel des recettes fiscales nettes de l’État.

C.   EXAMEN GÉNÉRAL DES RECETTES FISCALES NETTES DU BUDGET GÉNÉRAL DE LÉTAT

Les recettes fiscales nettes du budget général de l’État sont analysées par rapport à l’exécution constatée en 2017 (1) ainsi que par rapport aux prévisions de la LFI et de la LFR afférente à l’année 2018 (2).

Les dépenses fiscales

Les dépenses fiscales sont des dispositions législatives ou réglementaires dont la mise en œuvre entraîne pour l’État une perte de recettes et pour les contribuables un allégement de leur fiscalité.

Les dépenses fiscales relatives à l’année 2018 ont été évaluées dans les annexes aux projets de lois de finances pour 2018 et 2019. Elles seront définitivement évaluées à l’occasion de la présentation du projet de loi de finances pour 2020. Les annexes du présent projet de loi de règlement pour 2018 ne présentent aucune information nouvelle sur l’évaluation des dépenses fiscales.

En 2018, selon la dernière évaluation disponible, les 474 dépenses fiscales recensées se sont élevées à 100,2 milliards d’euros, en hausse de 6,8 milliards d’euros par rapport à 2017.

1.   Analyse d’exécution à exécution

Les recettes fiscales nettes du budget général de l’État diminuent de 0,2 milliard d’euros par rapport à 2017, passant de 295,6 milliards d’euros à 295,4 milliards d’euros. Corrigées de l’erreur d’imputation relative aux droits de mutation, les recettes baissent de 3 milliards d’euros, passant de 297 milliards d’euros à 294 milliards d’euros.

Évolution des recettes fiscales nettes du budget général de l’État, corrigÉe de l’erreur d’imputation des droits de mutation

(en milliards d’euros)

Exécution

2017

Évolution

spontanée

Mesures fiscales

Mesures
de périmètre

Exécution

2018

Antérieures

Nouvelles

et de transfert

297,0

+ 13,5

– 7,4

– 9,6

– 0,5

294,0

– 16,0

Source : Cour des comptes, Note danalyse de lexécution budgétaire 2018 : recettes fiscales de lÉtat, mai 2019.

L’évolution de ces recettes aurait dû être de 13,5 milliards en l’absence de mesures (a).

Lévolution spontanée

L’évolution spontanée du rendement d’un impôt correspond à l’évolution de son rendement à législation constante. Elle est liée aux variations démographiques et économiques. Il s’agit donc de l’évolution du rendement de l’impôt qui aurait été constatée si aucune mesure législative n’était intervenue au cours de l’année considérée.

Par exemple, si du fait de l’augmentation de la population et des revenus d’une année sur l’autre l’évolution spontanée d’un impôt est de 2 %, le rendement de celui-ci passera de 100 à 102 sans qu’un changement de législation ait été nécessaire.

Cette évolution spontanée a été entièrement annulée par les mesures fiscales qui ont représenté 16 milliards d’euros de baisse (b).

Les mesures fiscales

Les mesures fiscales sont des changements de législation qui entraînent des baisses ou des hausses du rendement des impôts. Il peut s’agir de mesures dites « antérieures » si elles ont été adoptées avant la loi de finances initiale mais qui produisent néanmoins des effets au cours de l’année afférente à cette loi de finances. Il peut encore s’agir de mesures dites « nouvelles » si elles ont été adoptées lors de l’examen ou après l’examen de la loi de finances de l’année. Les mesures fiscales ont pour effet de modifier la charge fiscale des contribuables.

L’examen du rendement des mesures fiscales permet de mesurer l’impact des réformes décidées par le Parlement.

Par exemple, si du fait des mesures fiscales le rendement d’un impôt augmente de 3 et que celui-ci bénéficie par ailleurs d’une évolution spontanée de 2 %, son rendement passera de 100 à 105. L’impact des mesures fiscales dans la hausse n’est alors que de 3 sur 5.

Les mesures de périmètre et de transfert ont fait perdre 0,5 milliard d’euros au budget général de l’État (c).

Les mesures de périmètre et de transfert

Les mesures dites de « périmètre » ou de « transfert » peuvent modifier la fraction du produit d’un impôt affecté à l’État lorsque la répartition de ce produit entre plusieurs administrations publiques est modifiée en cours d’année. Les mesures de périmètre ou de transfert ne modifient pas la charge fiscale des contribuables.

Par exemple, pour un impôt dont le rendement est de 100, si la fraction revenant à l’État passe de 90 % à 95 % (le solde revenant à une autre administration), ce dernier bénéficie d’un produit de 95 au lieu de 90, soit une hausse de 5. Inversement, l’autre administration subit une baisse de 5. Le montant payé par le contribuable n’est pas affecté par les mesures de périmètre et de transfert.

a.   Une évolution spontanée qui se maintient pour la troisième année consécutive à un niveau élevé

L’évolution spontanée a été en 2018 très nettement supérieure à celle de l’activité économique. Avec 13,5 milliards d’euros, celle-ci est, en effet, de 4,5 % alors que le PIB a progressé en valeur de 2,5 % (1,6 % de croissance économique et 0,9 % d’évolution des prix, dit « déflateur du PIB »).

Il s’ensuit que l’élasticité des recettes fiscales du budget général de l’État ressort en 2018 à 1,8 (soit 4,5/2,5).

Notion d’élasticité

L’élasticité du rendement d’un impôt est égale au rapport entre le taux d’évolution spontanée et le taux de croissance du PIB en valeur. Lorsque le rendement d’un impôt évolue dans les mêmes proportions que le PIB en valeur, son élasticité est égale à l’unité.

Par exemple, si la croissance du PIB est de 1 % et que l’élasticité est de 1, alors l’évolution spontanée de l’impôt est de 1 %. En revanche, si l’élasticité est de – 0,5, l’évolution spontanée est de – 0,5 % bien que le PIB ait crû en valeur de 1 %.

La structure de notre législation fiscale fait qu’en période de faible croissance l’élasticité a tendance à être faible voire négative, tandis qu’en période de reprise l’élasticité est supérieure à l’unité. En effet, l’impôt sur le revenu est progressif et l’impôt sur les sociétés a pour assiette le bénéfice fiscal. Il s’ensuit que le rendement de ces impôts diminue ou progresse proportionnellement davantage que l’évolution des revenus et de l’activité économique.

Il s’agit de la troisième année consécutive durant laquelle l’élasticité des recettes fiscales est supérieure à l’unité.

élasticité des recettes fiscales nettes du budget général de l’état
sur la période 2008-2018

(en milliards d’euros)

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

+ 1,0

+ 4,5

+ 1,6

+ 1,6

– 0,2

– 0,6

– 0,4

+ 0,9

+ 1,2

+1,8

+1,8

Source : Cour des comptes.

En revanche, les recettes du service de traitement des déclarations rectificatives (STDR) continuent de ralentir et passent, pour la première fois, sous la barre du milliard d’euros toutes administrations publiques confondues.

Encaissements du STDR depuis 2014 (toutes administrations confondues)

(en millions d’euros)

Nature de l’impôt

2014

2015

2016

2017

2018

Total

En %

Droits de mutation à titre gratuit

473

536

391

273

173

1 673

20

Impôt de solidarité sur la fortune

900

848

535

398

219

2 681

31

Impôt sur le revenu

296

671

831

404

342

2 202

27

Prélèvements sociaux

127

301

388

178

145

994

12

Amendes

118

298

331

59

51

806

9

Divers (taxe sur les métaux, TVA…)

0,2

0,2

3

8

3,4

0

Total

1 914

2 654

2 476

1 315

938

9 297

100

Source : Cour des comptes.

b.   De nombreuses mesures fiscales qui ont conduit à une baisse des impôts de 16 milliards d’euros

Les mesures fiscales ont permis une baisse nette de la fiscalité de 16 milliards en 2018, qui se décompose en 21 milliards de mesures de baisse et 5 milliards de mesures de hausse.

i.   Les principales mesures fiscales de baisse des impôts (21 milliards d’euros)

Un tiers des mesures de baisse, soit 7,1 milliards d’euros, résulte des suites du contentieux de la taxe sur les dividendes. L’extinction de contributions exceptionnelles sur l’impôt sur les sociétés (IS) a mécaniquement entraîné une baisse de 4,8 milliards d’euros de la fiscalité des entreprises en 2018 par rapport à 2017. L’annulation de la taxe sur les dividendes fait, par ailleurs, baisser la fiscalité des entreprises de 1,8 milliard d’euros. De même, le contrecoup de la réforme du régime des acomptes, décidée pour compenser en 2017 une partie de l’effet de l’annulation de la taxe sur les dividendes, entraîne une baisse de 0,5 milliard d’euros en 2018.

L’extinction la surtaxe d’IS pour compenser l’annulation
de la taxe à 3 % sur les dividendes

La contribution additionnelle à limpôt sur les sociétés (IS) au titre des montants distribués a été créée par larticle 6 de la deuxième loi de finances rectificative pour 2012 (1).

Par une décision du 6 octobre 2017, le Conseil constitutionnel a annulé la contribution de 3 % sur les revenus distribués (2), entraînant une perte de recettes en année pleine de 1,8 milliard d’euros à compter de 2018. Il convenait en outre de rembourser les prélèvements intervenus à ce titre jusqu’en 2017 pour une dizaine de milliards d’euros.

Pour compenser cette annulation, la première loi de finances rectificative pour 2017 (3) a institué deux contributions exceptionnelles sur l’impôt sur les sociétés dû en 2017 par les plus grandes entreprises. Elles devaient entraîner un gain budgétaire de 4,8 milliards d’euros dès 2017.

L’extinction de ces contributions exceptionnelles en 2018 entraîne une baisse mécanique des prélèvements obligatoires de 4,8 milliards d’euros par rapport à 2017.

(1) Loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012.

(2) Conseil constitutionnel, décision  2017-660 QPC du 6 octobre 2017, Société de participations financière [Contribution de 3 % sur les montants distribués] (lien).

(3) Loi n° 2017-1640 du 1er décembre 2017 de finances rectificative pour 2017.

Les deux autres tiers des mesures de baisse, soit 13,9 milliards d’euros, sont indépendantes des suites de l’annulation de la taxe sur les dividendes.

Certaines mesures ont été décidées avant le début de la présente législature. Il s’agit principalement de :

– la montée en charge du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), dont le taux est passé de 6 à 7 % au titre des salaires versés en 2017 (3,5 milliards d’euros) ;

– la diminution du taux de l’IS (1,2 milliard d’euros) ;

– l’universalisation du crédit d’impôt au titre de l’emploi d’un salarié à domicile (un milliard d’euros).

Mais l’essentiel des mesures de baisse résultent de la mise en œuvre du programme fiscal de la majorité, avec par ordre d’importance :

– la suppression de l’ISF et la création de l’IFI (3,2 milliards d’euros) ;

– la première étape de la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des foyers (3 milliards d’euros) ;

– et l’instauration d’un PFU sur les revenus du capital (1,6 milliard d’euros).

ii.   Les principales mesures fiscales de hausse des impôts (5 milliards d’euros)

Les mesures de hausse concernent pour l’essentiel la fiscalité énergétique (4,1 milliards d’euros) avec la mise en œuvre :

– de la trajectoire carbone (3,1 milliards d’euros) ;

– et de la convergence de la taxation du gazole sur celle de l’essence (un milliard d’euros).

Pour le surplus, le montant global des mesures de hausse s’explique par la hausse de la TVA dans le secteur du logement et de la construction (0,8 milliard d’euros).

c.   Des mesures de périmètre et de transfert importantes qui se sont quasiment neutralisées

L’exercice 2018 est marqué par trois importantes mesures de périmètre et de transfert qui se sont toutefois en grande partie neutralisées :

– le transfert d’une fraction de la TVA au profit des régions en remplacement de la dotation globale de fonctionnement (DGF) (– 4,2 milliards d’euros) ;

–la réaffectation à l’État de certains prélèvements sociaux (+ 2,8 milliards d’euros) ;

– et les habituels ajustements du transfert de TVA aux administrations de sécurité sociale au titre de la compensation de diverses exonérations (+ 1,7 milliard d’euros).

En net, ces mesures n’ont réduit les recettes fiscales du budget général de l’État que de 0,5 milliard d’euros.

2.   Analyse par rapport à la prévision

Les recettes fiscales nettes du budget général sont nettement supérieures aux prévisions (+ 8,8 milliards d’euros par rapport à la LFI et + 2,1 milliards d’euros par rapport à la LFR).

Écart des recettes fiscales nettes du budget général 2018
par rapport aux prévisions

(en milliards d’euros)

Exécution 2018

 

 

LFI 2018

LFR 2018

 

Écart exécution / LFI

Écart exécution / LFR

295,4

286,6

293,3

+ 8,8

+ 2,1

Source : différentes lois de finances relatives à l’année 2018 et présent projet de loi de règlement.

L’écart de 8,8 milliards d’euros par rapport à la prévision de la loi de finances initiale s’explique par le fait que la base 2017 et l’évolution spontanée se sont révélées meilleures que prévu, pour respectivement 4,3 et 4,8 milliards d’euros. En effet, la croissance économique pour 2017 a été mesurée à 2,2 % en volume alors qu’elle était prévue à 1,7 % lors de la présentation du projet de loi de finances (PLF) pour 2018. Il en a résulté une sous-estimation de la dynamique des recettes tant pour 2017 que pour 2018.

En revanche, l’impact budgétaire des mesures a été correctement évalué, puisque l’écart entre la prévision et l’exécution se limite à 0,3 milliard d’euros.

Décomposition de l’écart entre la prévision de recettes fiscales
de la LFI 2018 et de l’exécution

(en milliards d’euros)

Hypothèses

Base 2017

Évolution spontanée

Mesures fiscales,
de périmètre
et de transfert

Effet
de l’erreur
de rattachement des droits
de mutation

Total

Prévision

291,3

+ 8,7

– 16,2

+ 2,8

286,6

Exécution

295,6

+ 13,5

– 16,5

+ 2,8

295,4

Écart

+ 4,3

+4,8

– 0,3

0,0

+ 8,8

Source : d’après Cour des comptes.

D.   EXAMEN IMPÔT PAR IMPÔT

Les quatre principaux impôts (TVA, IR, IS, TICPE) représentent à eux seuls un rendement net de 270,8 milliards d’euros, soit 92 % des recettes fiscales nettes du budget général de l’État.

Ces différents impôts sont présentés par ordre d’importance sur le plan du rendement budgétaire. Comme précédemment pour l’ensemble des recettes fiscales, le rendement de chaque impôt pour 2018 est analysé par rapport à l’exécution constatée en 2017 ainsi que par rapport aux prévisions des lois de finances relatives à l’année 2018.

1.   La taxe sur la valeur ajoutée (TVA)

La TVA est un impôt d’État partagé avec la sécurité sociale. Elle joue à ce titre un rôle de variable d’ajustement dans les transferts entre l’État et la sécurité sociale. Pour la première fois en 2018, elle a également été partagée avec les régions ([16]).

Rendement net de la TVA depuis 2010

(en milliards d’euros)

Année

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Part État

127,3

131,9

133,4

136,3

138,3

141,8

144,4

152,4

156,7

Part sécurité sociale

8,5

10,1

10,6

9,2

12,7

11,8

11,2

11,5

10,3

Part Région

4,2

Total

135,9

142,0

144,0

145,5

151,0

153,6

155,6

163,9

171,2

Source : Conseil des prélèvements obligatoires et données de la commission des finances.

a.   Analyse d’exécution à exécution

Les recettes de TVA affectées à l’État sont en hausse de 4,3 milliards d’euros par rapport à 2017, malgré l’affectation d’une fraction de son produit pour la première fois aux régions.

Des recettes nettes de TVA 2017 aux recettes nettes de tva 2018 (part État)

(en milliards d’euros)

Exécution

2017

Évolution

spontanée

Mesures

fiscales

Mesures

de périmètre

Exécution

2018

Antérieures

Nouvelles

et de transfert

152,4

+ 5,5

0

1,3

– 2,4

156,7

+ 1,3

Source : Cour des comptes, Note danalyse de lexécution budgétaire 2018 : recettes fiscales de lÉtat, mai 2019.

La hausse des recettes de la TVA de l’État s’explique pour trois raisons.

En premier lieu, l’évolution spontanée de la TVA a été élevée. Elle est mesurée à 5,5 milliards d’euros soit 3,6 %. L’élasticité à la croissance ressort à 1,5. Selon la Cour des comptes, la croissance de l’assiette se limite pourtant à 3,1 % si bien qu’« il subsiste une part inexpliquée dans lévolution de la TVA ».

En deuxième lieu, le relèvement du taux de TVA, de 5,5 % à 10 %, applicable à certaines opérations dans le secteur du logement et de la construction a eu un impact favorable de 0,8 milliard d’euros sur les recettes.

À cela s’ajoute, en troisième lieu, le gain lié à l’augmentation de l’assiette entraînée par la mise en œuvre de la trajectoire carbone (0,3 milliard d’euros).

L’évolution spontanée et les mesures fiscales de hausse ont largement compensé l’impact négatif des mesures de transfert (– 2,4 milliards d’euros) qui résulte du transfert aux régions d’une fraction de TVA de 4,2 milliards d’euros, d’une part, et de l’ajustement en faveur de l’État de la compensation revenant aux administrations de sécurité sociale, d’autre part (+ 1,7 milliard d’euros).

b.   Analyse de l’écart avec la prévision

Le rendement de la TVA avait été sous-estimé par la LFI de 2,1 milliards d’euros. En revanche, l’évaluation de la LFR s’est révélée très proche de l’exécution constatée.

Écart des recettes nettes de TVA 2018 par rapport aux prévisions

(en milliards d’euros)

Exécution 2018

 

 

LFI 2018

LFR 2018

 

Écart exécution / LFI

Écart exécution / LFR

156,7

154,6

157,0

+ 2,1

– 0,3

Source : différentes lois de finances relatives à l’année 2018 et présent projet de loi de règlement.

La sous-estimation par rapport à la LFI s’explique principalement par le fait que l’évolution spontanée s’est révélée plus forte qu’anticipé.

2.   L’impôt sur le revenu (IR)

Contrairement à la TVA ou à la TICPE, l’IR est affecté intégralement à l’État. Son rendement a contribué à hauteur de près de 25 % aux recettes fiscales nettes du budget général. Il a augmenté de 18 milliards d’euros en une décennie.

Rendement net de l’IR depuis 2009

(en milliards d’euros)

Année

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Rendement net

55,1

55,1

58,5

59,5

67,0

69,2

69,3

71,8

73,0

73,0

Source : lois de règlement et présent projet de loi de règlement.

a.   Analyse d’exécution à exécution

Le rendement de l’IR est stable à 73 milliards d’euros. L’évolution spontanée a été entièrement annulée par les mesures fiscales.

Des recettes nettes d’IR 2017 aux recettes nettes d’IR 2018

(en milliards d’euros)

Exécution

2017

Évolution

spontanée

Mesures

législatives

Mesures
de périmètre

Exécution

2018

Antérieures

Nouvelles

et de transfert

73

3,2

– 1,4

– 1,8

0,0

73

– 3,2

Source : Cour des comptes, Note danalyse de lexécution budgétaire 2017 : recettes fiscales de lÉtat, mai 2018.

Pourtant, l’évolution spontanée a été particulièrement importante. Avec 3,2 milliards d’euros, elle ressort à 4,4 %, soit une élasticité de 1,8.

Mais les mesures fiscales ont permis de stabiliser le rendement de l’IR, avec principalement la mise en œuvre du PFU (1,6 milliard d’euros) et de l’universalisation du crédit d’impôt pour l’emploi d’un salarié à domicile (un milliard d’euros).

Aucune mesure de périmètre ou de transfert n’est à signaler, l’IR étant affecté en totalité à l’État.

b.   Analyse de l’écart avec la prévision

Le rendement de l’IR est assez proche des prévisions tant de la LFI que de la LFR.

Écart des recettes nettes de TVA 2018 par rapport aux prévisions

(en milliards d’euros)

Exécution 2018

 

 

LFI 2018

LFR 2018

 

Écart exécution / LFI

Écart exécution / LFR

73,0

72,6

73,1

+ 0,4

– 0,1

Source : différentes lois de finances relatives à l’année 2018 et présent projet de loi de règlement.

L’écart par rapport à la LFI (+ 0,4 milliard d’euros) s’explique en grande partie par le fait que le PFU a rapporté plus que prévu (+ 0,6 milliard d’euros).

3.   L’impôt sur les sociétés (IS)

Le rendement de l’IS a représenté moins de 9 % des recettes fiscales nettes du budget général de l’État. Il a diminué de plus de moitié en dix ans.

Rendement net de l’IS depuis 2009

(en milliards d’euros)

Année

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Rendement net

55,1

51,4

53,0

41,3

47,2

35,3

33,5

30,0

35,7

27,4

Source : lois de règlement et présent projet de loi de règlement.

L’effondrement du rendement de l’IS en tendance longue s’explique principalement par le CICE. Hors CICE, le rendement de l’IS est stable depuis 2013.

Rendement net de lIS depuis 2013

(en milliards d’euros)

Année

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Rendement hors CICE

47,2

41,5

45,2

41,9

50,5

46,5

Coût budgétaire CICE (restitutions et imputations sur l’IS)

0,0

6,2

11,7

11,9

14,8

19,1

Rendement après CICE

47,2

35,3

33,5

30,0

35,7

27,4

Source : données extraites des lois de règlement, du présent projet de loi de règlement et des réponses au questionnaire du Rapporteur général.

a.   Analyse d’exécution à exécution

Le rendement net de l’IS diminue fortement en 2018 (– 8,3 milliards d’euros) pour s’établir à 27,4 milliards d’euros.

Des recettes nettes d’IS 2017 aux recettes nettes d’IS 2018

(en milliards d’euros)

Exécution

2017

Évolution

spontanée

Mesures
fiscales

Mesures
de périmètre

Exécution

2018

Antérieures

Nouvelles

et de transfert

35,7

2,3

– 5,6

– 5,0

0,0

27,4

– 10,6

Source : Cour des comptes, Note danalyse de lexécution budgétaire 2018 : recettes fiscales de lÉtat, mai 2019.

Cela s’explique principalement par l’extinction des contributions exceptionnelles décidées en 2017 (– 4,8 milliards d’euros). Avec les effets d’assiette liés à l’augmentation de la fiscalité énergétique (– 0,2 milliard d’euros), l’ensemble des mesures nouvelles entraînent une baisse de 5 milliards d’euros. À cela s’ajoutent les mesures antérieures (– 5,6 milliards d’euros) relatives principalement au CICE et à la baisse du taux de l’IS.

La baisse du rendement de l’IS ne doit pas dissimuler le fait que son évolution spontanée a été élevée (6,4 %) et a permis un rendement supplémentaire de 2,3 milliards deuros. Elle traduit directement les effets du redémarrage économique constaté en 2017.

Aucune mesure de périmètre ou de transfert n’est à signaler, l’IS étant affecté en totalité à l’État.

b.   Analyse de l’écart avec la prévision

Le rendement de l’IS a été sous-estimé en LFI et en LFR, les effets de la reprise économique sur le résultat fiscal des entreprises ayant été mal appréhendés.

Écart des recettes nettes d’IS 2018 par rapport aux prévisions

(en milliards d’euros)

Exécution 2018

 

 

LFI 2018

LFR 2018

 

Écart exécution / LFI

Écart exécution / LFR

27,4

25,9

25,7

+ 1,5

+ 1,7

Source : différentes lois de finances relatives à l’année 2018 et présent projet de loi de règlement.

4.   La taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE)

Le produit de la TICPE est partagé entre l’État et divers affectataires, dont les collectivités territoriales. Ces affectations permettent essentiellement de compenser des transferts de compétence.

Affectation de la TICPE 2017-2019

(en millions d’euros)

Année

2017

exécution

2018

exécution

2019

Prévision

État budget général

11 114

13 378

ND

État Cas Transition énergétique

6 120

6 589

ND

Sous-total État

17 234

19 967

ND

Départements

6 784

6 717

6 513

Régions (hors part Grenelle)

4 957

4 982

4 972

Régions part Grenelle

619

604

584

Sous-total collectivités territoriales

12 462

12 403

12 169

AFITF

1 124

1 028

1 206

Total

30 820

33 398

ND

Source : réponse du Gouvernement au questionnaire du Rapporteur général.

La part de TICPE affectée à l’État avoisine désormais les 20 milliards d’euros, mais seulement 13,4 milliards sont affectés au budget général, soit moins de 5 % des recettes nettes du budget général de l’État.

a.   Analyse d’exécution à exécution

Le montant de la part du produit de TICPE revenant au budget général de l’État augmente de 2,6 milliards d’euros par rapport à 2017 en raison des mesures fiscales en lien avec la trajectoire carbone et de la convergence de la fiscalité du gazole sur celle de l’essence. L’évolution spontanée, en revanche, a été modérée (0,1 milliard d’euros).

Des recettes nettes de TICPE 2017 aux recettes nettes de TICPE 2018

(en milliards d’euros)

Exécution

2017

Évolution

spontanée

Mesures

fiscales

Mesures
de périmètre

Exécution

2018

Antérieures

Nouvelles

et de transfert

11,1

0,1

0

3,1

– 0,6

13,7

3,1

Source : Cour des comptes, Note danalyse de lexécution budgétaire 2018 : recettes fiscales de lÉtat, mai 2019.

b.   Analyse de lécart avec la prévision

Le produit de la TICPE affecté au budget général de l’État en 2018 a été correctement estimé en LFI et dans une moindre mesure en LFR.

Écart des recettes nettes de TICPE 2018 par rapport aux prévisions

(en milliards d’euros)

Exécution 2018

 

 

LFI 2018

LFR 2018

 

Écart exécution / LFI

Écart exécution / LFR

13,7

13,6

13,9

+ 0,1

– 0,2

Source : différentes lois de finances relatives à l’année 2018 et présent projet de loi de règlement.

5.   Les autres recettes fiscales du budget général

Le rendement des autres recettes fiscales du budget général est évalué à 24,6 milliards deuros dans l’exposé des motifs, dans le tableau en page 28, du présent projet de loi de règlement.

Pour les raisons indiquées précédemment, une juste analyse économique devrait conduire à réintégrer dans ce montant les dégrèvements et remboursements d’impôts locaux qui ont été de 15,7 milliards d’euros en 2018.

Après cette réintégration, les autres recettes fiscales nettes du budget général ressortent à 40,3 milliards deuros.

Les droits de succession et de donation représentent à eux seuls plus d’un tiers de ce montant, avec un rendement de 16,2 milliards d’euros (14,8 milliards d’euros si l’on corrige l’erreur d’imputation) qui se répartissent en 2,7 milliards d’euros pour les droits de donation et 13,5 milliards d’euros pour les droits de succession. Ils constituent un même impôt faisant l’objet de dispositions spéciales uniquement pour leur liquidation.

Leur rendement global en hausse de plus de 60 % depuis 2012.

Rendement des droits de succession et de donation

(en milliards d’euros)

Année

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Droits de succession

7,7

8,5

8,9

10,6

10,7

11,9*

NC

Droits de donation

1,4

1,1

1,5

1,7

1,8

2,5*

NC

Total

9,1

9,6

10,4

12,3

12,5

14,3*

14,8*

* corrigé d’une erreur d’imputation de 1,4 milliard d’euros enregistrés en 2018, malgré leur encaissement effectif en 2017, dans le budget général de l’État à la suite d’un dysfonctionnement informatique.

Source : projets de loi de finances, annexe Évaluations des voies et moyens, tome 1, et lois de règlement.

Par ordre d’importance vient ensuite la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (TICFE) pour un rendement de 7,7 milliards d’euros, et les autres taxes intérieures à 2,3 milliards tout comme les produits des jeux exploités par la Française des jeux.

À noter que le rendement de l’IFI s’est élevé à 1,2 milliard d’euros.

II.   LES RECETTES NON FISCALES DE LÉTAT

Avec 13,9 milliards d’euros, les recettes non fiscales constituent une part non négligeable des recettes nettes du budget général de l’État (près de 5 %). Elles sont stables par rapport à 2017 (+ 0,1 milliard d’euros) et sont supérieures de 0,7 milliard d’euros à la prévision de la LFI.

Recettes non fiscales du budget général de l’État en 2018 par rapport à 2017 et aux prévisions des lois de finances pour 2018

(en milliards d’euros)

Recettes non fiscales du budget général de lÉtat

Exécution

2018

Écart

par rapport

à 2017

Écart

par rapport

à la LFI

Total

13,9

+ 0,1

+ 0,7

Dividendes et recettes assimilées

5,6

+ 0,2

+ 0,5

Produits du domaine de l’État

2,3

=

– 0,1

Produits de la vente de biens et services

1,5

+ 0,4

+ 0,4

Remboursement des intérêts des prêts, avances et autres immobilisations financières

0,5

+ 0,1

=

Amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuite

1,5

– 0,4

– 0,1

Divers

2,5

– 0,1

– 0,1

Source : présent projet de loi de règlement et lois de finances pour 2018.

A.   LES DIVIDENDES ET RECETTES ASSIMILÉES

Les dividendes et recettes assimilées représentent plus du tiers des recettes non fiscales du budget général de l’État avec 5,6 milliards d’euros en 2018.

Les dividendes sont affectés au budget général de l’État. En revanche, les opérations patrimoniales – c’est-à-dire essentiellement les ventes et les achats de titres, ainsi que l’affectation des produits de cession – relèvent du compte d’affectation spéciale Participations financières de lÉtat.

Le dividende versé par la Banque de France (2,2 milliards d’euros) et celui versé par la Caisse des dépôts et consignations (un milliard d’euros) constituent les deux principales ressources de la catégorie.

Les entreprises non financières ont versé 1,9 milliard d’euros de dividendes, dont 419 millions pour ENGIE, 319 millions pour EDF et 249 millions d’euros pour Orange.

S’agissant d’EDF, le montant versé correspond à un acompte sur les dividendes au titre des résultats de 2018. Il explique l’amélioration des recettes encaissées en provenance des entreprises non financières, après plusieurs années de baisse.

B.   LES AUTRES RECETTES NON FISCALES

1.   Les produits du domaine de l’état

Les produits du domaine de l’État se sont élevés à 2,3 milliards d’euros, comme en 2017 Ils comprennent principalement des loyers budgétaires payés par les administrations ainsi que le produit des redevances d’usage des fréquences radioélectriques (près d’un milliard d’euros pour chacun de ces postes budgétaires).

2.   Les produits de la vente de biens et services

Les produits de la vente de biens et services ont progressé de 0,4 milliard d’euros en 2018, pour s’établir à 1,5 milliard d’euros au lieu de 1,1 milliard d’euros en 2017. Il s’agit principalement des frais d’assiette et de recouvrement des impôts et taxes recouvrés par l’État pour le compte d’autres personnes morales, au premier rang desquelles figurent les collectivités territoriales.

3.   Les remboursements des intérêts des prêts, avances et autres immobilisations financières

Les remboursements des intérêts des prêts, avances et autres immobilisations financières se sont élevés à 0,5 milliard d’euros soit une quasi-stabilité. Il s’agit principalement des intérêts des prêts à des banques et des États étrangers.

4.   Les amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuite

Les amendes, sanctions, pénalités et frais de poursuite affectés au budget général de l’État se sont élevés à 1,5 milliard d’euros en 2018, soit une baisse de 0,4 milliard d’euros par rapport à 2017 qui s’explique principalement par le fait que l’exercice précédent avait été marqué par d’importantes amendes de l’autorité de la concurrence.

Les amendes des radars routiers ne sont pas affectées en totalité au budget général, une partie revenant au CAS Contrôle de la circulation et du stationnement routiers. En 2018, ce CAS a reçu 1,46 milliard d’euros, soit 84 % du produit total des amendes issues de la circulation et du stationnement routiers. Il prend en charge des dépenses afférentes à la politique de sécurité routière et contribue au désendettement de l’État.

5.   Les recettes diverses

Les recettes diverses sont stables puisqu’elles ressortent à 2,5 milliards d’euros en 2018 au lieu de 2,6 milliards d’euros en 2017.

*

*     *

 


—  1  —

   FICHE 3 : LES DÉPENSES DE L’ÉTAT

Les dépenses de l’État ont été particulièrement maîtrisées en 2018. Elles progressent très faiblement à hauteur de 0,6 % par rapport à 2017. Elles respectent également les deux normes de dépenses mises en place sur le périmètre de l’État.

I.   UNE AUGMENTATION TRÈS MAÎTRISÉE DES DÉPENSES DE L’ÉTAT ENTRE 2017 ET 2018

A.   L’ÉVOLUTION DES DÉPENSES PAR MISSION BUDGÉTAIRE

1.   Un niveau de dépenses budgétaires en augmentation de 1,4 milliard d’euros par rapport à 2017, soit une hausse mesurée de 0,6 %

À périmètre constant, l’exécution 2018 ressort en augmentation de 1,4 milliard d’euros en valeur par rapport à 2017, soit une hausse de 0,6 %. Cela représente une augmentation nette très limitée, qui résulte d’une ouverture de crédits en loi de finances initiale pour 2018 supérieure de 2,3 milliards d’euros à l’exécution 2017, et d’une sous-exécution de 921 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale.

La comparaison entre l’exécution 2017 et l’exécution 2018 traduit les choix forts et structurants du Gouvernement en matière de dépenses de l’État. L’exercice 2018 illustre la volonté du Gouvernement et de la majorité parlementaire pour ce premier exercice budgétaire de la mandature de définir des orientations claires entre les différentes missions budgétaires de l’État. Ainsi, les crédits de certaines missions budgétaires font l’objet d’augmentations sensibles, tandis que les crédits d’autres missions font l’objet de diminutions significatives.

comparaison des crÉdits initiaux, ouverts et consommÉs

(en millions d’euros)

Missions

Exécution 2017

format 2017

Exécution 2017

format 2018

LFI 2018

Exécution 2018

format 2018

Écart exécution 2018 et LFI 2018

Écart exécution 2017 et 2018 format 2018

Écart exécution 2017 et 2018

format 2018 (pourcentage)

Action et transformation publiques

20

2

– 18

2

Action extérieure de l’État

2 675

2 674

2 863

2 794

– 69

120

4,5 %

Administration générale et territoriale de l’État

2 374

2 377

2 147

2 180

33

– 197

– 8,3 %

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

4 368

4 008

3 184

3 191

7

– 817

– 20,4 %

Aide publique au développement

2 472

2 477

2 680

2 617

– 63

140

5,7 %

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

2 503

2 505

2 461

2 432

– 29

– 73

– 2,9 %

Cohésion des territoires

18 323

18 319

17 219

17 358

139

– 961

– 5,2 %

Conseil et contrôle de l’État

502

502

521

521

0

19

3,8 %

Culture

2 618

2 617

2 724

2 692

– 32

75

2,9 %

Défense

33 253

33 255

34 201

34 252

51

997

3,0 %

Direction de l’action du Gouvernement

1 242

1 254

1 381

1 269

– 112

15

1,2 %

Écologie, développement et mobilité durables

9 256

9 722

10 387

10 389

2

667

6,9 %

Économie

1 712

1 724

1 624

1 557

– 67

– 167

– 9,7 %

Engagements financiers de l’État

642

642

580

580

0

– 62

– 9,7 %

Enseignement scolaire

50 382

50 379

51 485

51 652

167

1 273

2,5 %

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

8 156

8 140

8 150

8 014

– 136

– 126

– 1,5 %

Immigration, asile et intégration

1 415

1 415

1 381

1 449

68

34

2,4 %

Justice

6 676

6 542

6 978

6 896

– 82

354

5,4 %

Médias, livre et industries culturelles

548

548

555

547

– 8

– 1

– 0,2 %

Outre-mer

1 952

1 952

2 018

1 966

– 52

14

0,7 %

Pouvoirs publics

991

991

992

992

0

1

0,1 %

Recherche et enseignement supérieur

26 577

26 579

27 404

27 254

– 150

675

2,5 %

Régimes sociaux et de retraite

6 330

6 330

6 332

6 448

116

118

1,9 %

Relations avec les collectivités territoriales

3 389

3 305

3 662

3 572

– 90

267

8,1 %

Santé

1 231

1 207

1 376

1 338

– 38

131

10,9 %

Sécurités

12 949

12 939

13 318

13 266

– 52

327

2,5 %

Solidarité, insertion et égalité des chances

18 806

18 842

19 444

19 639

195

797

4,2 %

Sport, jeunesse et vie associative

762

833

959

936

– 23

103

12,4 %

Travail et emploi

15 386

16 800

15 173

14 477

– 696

– 2 323

– 13,8 %

Total

237 490

238 878

241 199

240 278

 921

1 400

0,6 %

N.B. : missions du budget général, hors remboursements et dégrèvements, hors dette et pensions, hors fonds de concours et attributions de produits, hors recapitalisation d’Areva en 2017.

Source : exposé général des motifs du présent projet de loi de règlement.

Les principales augmentations par rapport à 2017 relèvent des missions :

– Enseignement scolaire (+ 1 273 millions d’euros), principalement du fait d’une augmentation des crédits des programmes Enseignement scolaire public du premier degré et Enseignement scolaire public du second degré, au titre d’une progression des dépenses de personnel ;

– Défense (+ 997 millions d’euros), principalement du fait d’une augmentation des crédits des programmes Préparation et emploi des forces et Soutien de la politique de la défense, notamment au titre de la prise en compte du surcoût des opérations extérieures (OPEX) et des missions intérieures (MISSINT) à hauteur de 250 millions d’euros supplémentaires dès la loi de finances initiale ;

– Solidarité, insertion et égalité des chances (+ 797 millions d’euros), principalement du fait des programmes Inclusion sociale et protection des personnes et Handicap et dépendance, notamment au titre, d’une part, d’une amélioration de la sincérité budgétaire et, d’autre part, des revalorisations des prestations de prime d’activité et de l’allocation aux adultes handicapés ;

 Recherche et enseignement supérieur (+ 675 millions d’euros), principalement du fait des programmes Formations supérieures et recherche universitaire, Recherches scientifiques et technologiques pluridisciplinaires et Recherche spatiale, afin notamment de répondre à la dynamique de la démographie étudiante, de renforcer les moyens des universités, d’accroître le financement des appels à projets de l’Agence nationale de la recherche (ANR) et de couvrir les engagements internationaux de la France par exemple à destination de l’agence spatiale européenne (ESA) ;

 Écologie, développement et mobilité durables (+ 667 millions d’euros), principalement du fait des programmes Infrastructures et services de transports, Prévention des risques et Service public de l’énergie, notamment au titre de la budgétisation du financement de l’ADEME, d’une augmentation des charges de service public de l’énergie et de dépenses d’investissement notamment sur des infrastructures routières, soit au titre de l’entretien lourd, soit au titre du développement de nouvelles infrastructures.

À l’inverse, certaines missions présentent un niveau d’exécution en recul par rapport à 2017, il s’agit des missions :

 Travail et emploi (– 2 323 millions d’euros), principalement du fait des programmes Accès et retour à l’emploi et Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi, notamment au titre de la fin de l’aide en faveur de l’embauche PME et de la réduction du nombre de contrats aidés ;

– Cohésion des territoires (– 961 millions d’euros), principalement du fait du programme Aide à l’accès au logement, au titre de la baisse de l’aide personnalisée au logement consécutive à la réduction de loyer de solidarité ;

– Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales (– 817 millions d’euros), principalement du fait des programmes Compétitivité et durabilité de l’agriculture, de l’agroalimentaire, de la forêt, de la pêche et de l’aquaculture, Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation, au titre d’une diminution des refus d’apurement liés aux aides communautaires et de l’absence de crise sanitaire majeure nouvelle.

2.   Un niveau de dépenses budgétaires inférieur de 921 millions d’euros à la loi de finances initiale

En 2018, les crédits des ministères sont sous-exécutés à hauteur de 921 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale. Ce résultat global recouvre des dépassements de dépenses sur certaines missions et des sous-consommations sur d’autres missions.

Les principaux dépassements par rapport à la loi de finances initiale relèvent des missions Solidarité, insertion et égalité des chances (+ 195 millions d’euros), Enseignement scolaire (+ 167 millions d’euros), Régimes sociaux et de retraite (+ 116 millions d’euros) et Cohésion des territoires (+ 139 millions d’euros).

À l’inverse, certaines missions présentent un niveau d’exécution en recul par rapport à la loi de finances initiale, il s’agit des missions Travail et emploi
(– 696 millions d’euros), Recherche et enseignement supérieur (– 150 millions d’euros), Gestion des finances publiques et des ressources humaines
(– 136 millions d’euros), Direction de l’action du Gouvernement (– 112 millions d’euros).

Les sur-exécutions et sous-exécutions sont analysées en détail et explicitées par les rapporteurs spéciaux, dans leur rapport produit dans le cadre du « Printemps de l’évaluation ».

B.   LA FAIBLE ÉVOLUTION DES DÉPENSES NETTES DE L’ÉTAT, DÉCOMPOSÉES PAR NATURE

Les dépenses nettes de l’État (hors fonds de concours et attributions de produits) sont en augmentation de 1,1 milliard d’euros par rapport à 2017, s’établissant à 325,2 milliards d’euros. La décomposition des dépenses nettes de l’État fait apparaître des évolutions contrastées selon la nature des dépenses. La principale augmentation des dépenses nettes résulte des dépenses de personnel.

dÉpenses nettes du budget gÉnÉral de l’État en 2018
par rapport À 2017 et aux prÉvisions des lois de finances pour 2018

(en milliards d’euros)

Dépenses du budget général de lÉtat

Exécution

2017

(format 2018)

Exécution

2018

Écart

par rapport

à 2017

Pourcentage par nature de dépenses

Exécution 2018

Pouvoirs publics

1,0

1,0

0

0 %

Personnel

127,6

129,6

2,0

39 %

Fonctionnement de l’État

26,1

25,2

– 0,9

8 %

Subventions pour charges de service public

28,3

28,9

0,6

9 %

Charge de la dette

41,7

41,5

– 0,2

13 %

Investissement

11,1

11,8

0,7

4 %

Intervention

91,0

90,2

– 0,8

27 %

Opérations financières

1,5

1,5

0

0 %

Dépenses nettes

328,3

329,7

1,5

100 %

Fonds de concours et attributions de produits

4,1

4,5

0,4

Dépenses nettes, hors fonds de concours et attributions de produits

324,2

325,2

1,1

Source : commission des finances, données issues du rapport de la Cour des comptes, Le budget de l’État en 2018, mai 2019.

1.   L’augmentation des dépenses de personnel, des subventions pour charges de service public et d’investissement

a.   L’augmentation des dépenses de personnel (+ 2 milliards d’euros)

Les dépenses de personnel du budget général de l’État, nettes des rattachements de fonds de concours et des attributions de produits, s’élèvent à 129,2 milliards d’euros en 2018, soit un niveau en augmentation de 1,6 % par rapport à 2017 (127,2 milliards d’euros) ([17]). Les dépenses de rémunération représentent 86,9 milliards d’euros et les contributions de l’État employeur au compte d’affectation spéciale (CAS) Pensions 42,35 milliards d’euros.

Hors contributions au CAS Pensions, les dépenses de personnel ont progressé de 1,9 %, soit une évolution en net retrait par rapport à la dynamique de 2017 (+ 3,7 %). Cela résulte notamment du report d’un an du protocole Parcours professionnels, carrières et rémunérations (PPCR), de la stabilité du point d’indice de la fonction publique et de la baisse du schéma d’emplois.

Par ailleurs, les dépenses de personnel sont inférieures de 416 millions d’euros aux crédits autorisés en loi de finances initiale, principalement du fait d’une sous-exécution des dépenses par le ministère des armées à hauteur de 214 millions d’euros. En revanche, le ministère de l’éducation nationale présente une sur-exécution à hauteur de 118 millions d’euros.

Le plafond d’emplois fixé en loi de finances initiale a également été sous-exécuté en 2018.

i.   La consommation d’emplois inférieure au plafond d’emplois fixé en loi de finances initiale et en augmentation par rapport à 2017 (+ 12 049 ETPT)

Le plafond d’autorisation d’emplois a été fixé à 1 949 528 équivalents temps plein travaillé (ETPT) au titre de l’exercice 2018. L’exécution du plafond des autorisations d’emplois s’est établie à 1 923 241 ETPT, soit un niveau inférieur de 26 287 ETPT au plafond (écart de 1,3 %). Toutefois, cela représente un niveau en augmentation de 12 049 ETPT par rapport à la consommation 2017.

La distinction entre les ETP et les ETPT

Les équivalents temps plein (ETP) correspondent aux effectifs physiques pondérés de la quotité de travail mais ne tiennent pas compte de la durée d’emploi (un agent dont la quotité de travail est de 80 % correspond à 0,8 ETP ; qu’il ait travaillé 8 ou 12 mois dans l’année).

Les équivalents temps plein travaillés (ETPT) correspondent aux effectifs physiques pondérés de la quotité de travail des agents en année pleine.

Les consommations d’emplois, de même que l’autorisation du Parlement au moment de la loi de finances initiale, sont exprimées en ETPT. À l’inverse, les schémas d’emplois sont définis en ETP, afin de déterminer les créations ou les suppressions d’emplois correspondant au solde entre les entrées et les sorties d’agents.

consommation d’emplois par minISTÈre en 2018

(en équivalents temps plein travaillés - ETPT)

Ministères

Consommation des emplois 2017

Plafond
des autorisations d’emplois prévu en 2018
(LFI + LFR)

Transferts en gestion 2018

Consommation des emplois 2018

Consommation par rapport au plafond prévu en LFR 2018, après transferts

Consommation 2018/2017

Action et comptes publics

125 367

125 064

71

123 484

– 1 651

– 1 883

Agriculture et alimentation

30 844

30 362

4

30 327

– 39

– 517

Armées

267 263

271 253

2

268 195

– 3 060

932

Cohésion des territoires

311

573

– 265

300

– 8

– 11

Culture

10 934

11 084

– 16

10 922

– 146

– 12

Économie et finances

12 962

12 944

– 2

12 751

– 191

– 211

Éducation nationale

990 687

1 018 255

35

1 004 436

– 13 854

13 749

Enseignement supérieur, recherche et innovation

7 161

7 354

0

7 317

– 37

156

Europe et affaires étrangères

13 628

13 459

0

13 437

– 22

– 191

Intérieur

281 918

286 845

– 98

281 824

– 4 923

– 94

Justice

82 204

84 770

43

83 552

– 1 261

1 348

Outre-mer

5 477

5 525

0

5 474

– 51

– 3

Services du Premier ministre

10 958

11 443

– 59

11 135

– 249

177

Solidarités et santé

10 070

9 938

28

9 858

– 108

– 212

Transition écologique et solidaire

41 088

40 328

242

40 250

– 320

– 838

Travail

9 233

9 091

12

8 977

– 126

– 256

Total budget général

1 900 105

1 938 288

– 3

1 912 239

– 26 046

12 134

Pilotage et ressources humaines

653

704

0

579

– 125

– 74

Soutien aux prestations de l’aviation civile

10 434

10 536

0

10 423

– 113

– 11

Totaux budgets annexes

11 087

11 240

0

11 002

– 238

– 85

Total général

1 911 192

1 949 528

 3

1 923 241

– 26 284

12 049

Source : présent projet de loi de règlement.

L’exercice 2018 illustre une diminution de la progression de la consommation des emplois au niveau de l’État. L’augmentation de 12 049 ETPT est presque deux fois moindre que celle ayant été constatée en 2017 (+ 22 773 ETPT).

ÉVOLUTION DE LA CONSOMMATION D’EMPLOIS
PAR RAPPORT À L’EXERCICE PRÉCÉDENT

(en ETPT)

Source : projets de lois de règlement successifs.

Pour rappel, l’article 11 de la LPFP prévoit que le plafond des autorisations d’emplois de l’État prévu en loi de finances initiale « ne peut excéder de plus de 1 % la consommation d'emplois constatée dans la dernière loi de règlement, corrigée de l'incidence des schémas d'emplois, des mesures de transfert et des mesures de périmètre intervenus ou prévus » ([18]). Cela vise à renforcer la portée des plafonds d’autorisation d’emplois votés en loi de finances initiale. En 2018, la consommation d’emplois présente un écart de 1,3 % par rapport au plafond des autorisations d’emplois pour l’État. Le Gouvernement précise que treize ministères sur quinze ont un taux de vacance sous plafond inférieur à 1,5 % en 2018, contre sept en 2017.

ii.   Un schéma d’emplois en légère augmentation en 2018 (+ 206 ETP)

Par ailleurs, la loi de finances pour 2018 prévoyait une baisse des effectifs de l’État, avec un schéma d’emplois négatif à hauteur de – 324 équivalents temps plein (ETP) sur le périmètre du budget général et des budgets annexes. En 2018, l’exécution du schéma d’emplois ressort en légère augmentation à 206 ETP.

Les décalages dans la comptabilisation entre ETP et ETPT

Il existe des décalages dans la comptabilisation des créations d’emploi en ETP et leur concrétisation en ETPT.

Ainsi, la comptabilisation en ETP révèle le solde entre les entrées et les sorties d’agents au cours d’un exercice.

Exemple : en cas de 70 départs à la retraite au cours d’une année N, qui voit également l’arrivée de 100 agents : le solde s’établit à + 30 ETP.

La comptabilisation en ETPT calcule les créations de poste au prorata de la quotité de travail des agents et de la période d’activité sur l’année. Ainsi, les recrutements d’agents à temps plein réalisés le 1er juillet comptent pour seulement 0,5 ETPT.

Exemple : en cas de 70 départs à la retraite d’agents à temps plein au cours d’une année N, le 1er juillet, et de l’arrivée de 100 agents à temps plein à la même date : le résultat est de + 15 ETPT (– 35 ETPT et + 50 ETPT).

Les deux méthodes de comptabilisation des emplois sont complémentaires, l’une présente une approche en termes de flux (ETP) et l’autre une approche en termes de stock (ETPT). Cette distinction sert donc à apprécier plus finement les conséquences des recrutements et leur traduction dans les données.

Le schéma d’emplois réalisé en 2018 traduit une quasi-stabilité des effectifs de l’État, après trois exercices d’augmentation des effectifs (+ 32 478 ETP entre 2015 et 2017).

schÉma d’emplois rÉAlisÉS

(en ETP)

Source : projets de lois de règlement successifs.

Les principales diminutions d’effectifs au titre du schéma d’emplois relèvent des ministères de l’action et des comptes publics (– 1 902 ETP), de la transition écologique (– 801 ETP), des solidarités et de la santé (– 274 ETP), du travail (– 223 ETP) et de l’économie et des finances (– 206 ETP). À l’inverse, les ministères bénéficiant d’une augmentation de leurs effectifs sont les ministères de l’intérieur (+ 1 452 ETP), de la justice (+ 1 136 ETP), de l’éducation nationale (+ 839 ETP) et des armées (+ 346 ETP), considérés comme prioritaires par le Gouvernement et la majorité parlementaire. Cela illustre les choix structurants exprimés en début de mandature.

schémas d’emplois

(en ETP)

Ministères

Schémas d’emplois réalisés en 2017

Schémas d’emplois prévus en LFI 2018

Schémas d’emplois réalisés en 2018

Action et comptes publics

– 1 448

– 1 450

– 1 902

Agriculture et alimentation

– 19

– 130

– 131

Armées

760

518

346

Cohésion des territoires

– 10

– 15

– 18

Culture

3

– 110

– 110

Économie et finance

– 153

– 198

– 206

Éducation nationale

9 665

0

839

Enseignement supérieur, recherche et innovation

170

0

139

Europe et affaires étrangères

– 47

– 100

– 108

Intérieur

1 749

1 420

1 452

Justice

1 841

1 000

1 136

Outre-mer

176

20

– 3

Services du Premier ministre

242

75

111

Solidarités et santé

– 188

– 258

– 274

Transition écologique et solidaire

– 722

– 828

– 801

Travail

– 263

– 239

– 223

Total budget général

11 756

 295

247

Pilotage et ressources humaines

0

– 29

– 41

Soutien aux prestations de l’aviation civile

– 68

0

0

Total budget annexe

 68

 29

 41

Total général

11 688

 324

206

Source : présent projet de loi de règlement.

b.   L’augmentation des subventions pour charges de service public (+ 0,6 milliard d’euros)

Comme l’indique la Cour des comptes, la hausse des subventions pour charges de service public (+ 0,6 milliard d’euros) résulte notamment de l’augmentation de la masse salariale des opérateurs de l’État, dont 0,2 milliard issus de la mission Recherche et enseignement supérieur au titre des universités.

La Cour souligne la disponibilité tardive des données d’exécution des opérateurs, qui ne sont publiées avant l’adoption de la loi de règlement. Le Rapporteur général s’associe aux critiques de la Cour concernant les lacunes des systèmes d’information des opérateurs de l’État. Il souhaiterait également que les crédits de personnel des opérateurs soient comptabilisés comme tels dans le budget général de l’État et non en tant que subvention pour charges de service public.

c.   L’augmentation des dépenses d’investissement (+ 0,7 milliard d’euros)

Les dépenses d’investissement progressent de 0,7 milliard d’euros par rapport à 2017. Cela résulte notamment de la mission Défense (+ 0,5 milliard d’euros), qui représente 76 % des dépenses d’investissement de l’État en 2018.

La mission Écologie, développement et mobilité durables présente également une hausse de 0,4 milliard d’euros des dépenses d’investissement au titre des dépenses d’entretien et de régénération du réseau routier.

2.   La diminution des dépenses liées au fonctionnement de l’État, à la charge de la dette et d’intervention

a.   La diminution des dépenses de fonctionnement de l’État (– 0,9 milliard d’euros)

Les dépenses de fonctionnement baissent de 0,9 milliard d’euros par rapport à 2017. Cela résulte notamment de la baisse des dépenses de la mission Administration générale et territoriale de l’État, du fait de l’organisation des élections présidentielles et législatives en 2017, et de la baisse des refus d’apurement communautaire sur la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales.

b.   La diminution des dépenses liées à la charge de la dette (– 0,2 milliard d’euros)

Entre 2017 et 2018, la dette de l’État a progressé de 70 milliards d’euros, tandis que la charge de la dette et de la trésorerie de l’État a diminué de 0,2 milliard d’euros. Cela illustre la singularité du contexte macroéconomique et financier actuel, qui présente des taux d’intérêt historiquement bas.

Hormis l’exercice 2017, la charge de la dette a tendance à diminuer depuis l’exercice 2012.

comparaison prÉVISION ET EXÉCUTION de la charge de la dette
et de la trÉSORERIE DE L’ÉTAT

(en milliards d’euros)

 

Exercice

2012

Exercice

2013

Exercice

2014

Exercice

2015

Exercice

2016

Exercice

2017

Exercice

2018

Exécution

46,3

44,9

43,2

42,1

41,5

41,7

41,5

Écart

– 1,4

– 1,7

– 1,1

– 0,6

+ 0,2

– 0,2

N.B. : hors swaps.

Source : lois de finances initiales et lois de règlement, projet de loi de règlement pour 2018.

Toutefois, cette situation exceptionnelle devrait disparaître progressivement à mesure que la politique monétaire de la Banque centrale européenne (BCE) se normalise. Ainsi, la diminution de la charge de la dette est désormais moindre qu’elle ne fut au cours des exercices 2013 à 2015.

Comme le remarque la Cour des comptes, « la forte croissance de la dette de l’État depuis la crise de 2008 (91 %) l’expose à un accroissement très significatif de sa charge financière dans l’hypothèse d’une remontée des taux » ([19]). Pour rappel, l’Agence France Trésor (AFT) estime qu’une hausse de 1 % sur l’ensemble de la courbe des taux conduirait à augmenter le service de la dette en comptabilité nationale de 2 milliards d’euros la première année, 4,7 milliards d’euros la deuxième année et 18,8 milliards d’euros au bout de dix ans.

c.   La diminution des dépenses d’intervention (– 0,8 milliard d’euros)

Les dépenses d’intervention sont en diminution de 0,8 milliard d’euros par rapport à 2017. Cela résulte essentiellement de la baisse des dépenses liées aux contrats aidés, à l’allocation spécifique de solidarité et de celle liée aux aides au logement. Selon les annexes budgétaires, environ 130 700 prescriptions de contrats aidés ont in fine été réalisées par l’État en 2018, soit un niveau en net recul par rapport à 2017 (292 000 contrats aidés).

ÉVOLUTION DU NOMBRE DE CONTRATS AIDÉS

(en nombre d’emplois)

Catégorie de contrat

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Contrats d'accompagnement dans l'emploi

260 071

413 254

418 058

440 000

404 000

311 686

289 234

304 393

226 000

Contrat initiative emploi

58 253

115 515

56 185

70 000

51 000

49 564

91 895

80 323

29 000

Contrats d'avenir

99 246

Emplois d'avenir

92 000

99 622

82 829

75 891

37 000

Parcours Emploi Compétences

130 700

Total

417 570

528 769

474 243

510 000

547 000

460 872

463 958

460 607

292 000

130 700

Source : annexes Travail et emploi aux projets de loi de règlement.

II.   UN RESPECT DES NORMES DE DÉPENSES DE L’ÉTAT FIXÉES EN LOI DE FINANCES INITIALE POUR 2018

L’exercice 2018 est marqué par la mise en œuvre des deux nouvelles normes de dépenses applicables à l’État, prévues à l’article 9 de la LPFP ([20]). Celles-ci visent à distinguer clairement le périmètre des dépenses à la main du gestionnaire et le champ retraçant une vision exhaustive des dépenses de l’État. Ainsi, il a été prévu :

– une norme de dépenses pilotables de lÉtat : cet agrégat inclut les dépenses du budget général hors les missions Remboursements et dégrèvements et Investissements d’avenir, hors la charge de la dette et hors les contributions au CAS Pensions, les plafonds des taxes affectées à des tiers autres que les collectivités territoriales et la sécurité sociale, les budgets annexes hors contributions au CAS Pensions, les dépenses des CAS hors Pensions, Participations financières de l’État et hors programmes de désendettement, ou portant à titre principal sur des contributions aux collectivités territoriales ou des engagements financiers, et le compte de concours financiers Avances à l’audiovisuel public ;

– et un objectif de dépenses totales de lÉtat (ODETE) : cet agrégat inclut, outre l’agrégat précédent, les dépenses d’investissements d’avenir et la charge de la dette, les prélèvements sur recettes à destination de l’Union européenne et des collectivités territoriales, ainsi que la fraction de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) affectée aux régions, au département de Mayotte et aux collectivités territoriales de Corse, de Martinique et de Guyane, le CAS Pensions et les programmes des comptes spéciaux portant à titre principal des contributions aux collectivités territoriales ou des engagements financiers.

A.   LE RESPECT DE LA NORME DE DÉPENSES PILOTABLES

En 2018, la norme de dépenses pilotables a été respectée avec une sous-exécution de 1,4 milliard d’euros, s’établissant à 256,5 milliards d’euros au lieu de 257,9 milliards d’euros prévus en loi de finances initiale.

exÉCUTION 2018 DE LA NORME DE DÉPENSES PILOTABLES
PAR RAPPORT AUX PRÉVISIONS EN lFI

(en millions d’euros, hors fonds de concours et attributions de produits)

Catégories de dépenses

LFI 2018

(A)

Exécution 2018

(B)

Écart

(C = A  B)

Crédits budgétaires nous norme

241 342

240 268

 1 074

Dépenses de personnel hors CAS Pensions

86 970

86 910

– 61

Mission Défense

11 936

11 823

 114

Mission Enseignement scolaire

46 372

46 537

+ 165

Autres missions

28 662

28 550

 112

Autres dépenses hors dette

154 372

153 359

– 1 013

Mission Défense

22 265

22 430

+ 165

Autres missions

132 107

130 929

 1 178

Taxes et recettes affectées

9 080

9 080

Comptes spéciaux sous norme

11 260

10 983

– 277

Budgets annexes sous norme

2 024

2 005

– 20

Retraitement des flux internes au budget de l’État

– 5 815

– 5 815

Norme de dépenses pilotables

257 891

256 521

 1 370

Source : présent projet de loi de règlement.

Les dépenses de personnel ont été sous-exécutées au niveau de l’État, en partie du fait d’une sous-consommation de la mission Défense et malgré une surconsommation de la mission Enseignement scolaire.

Les autres dépenses du budget général (hors dette) ont été sous-exécutées à hauteur d’un milliard d’euros, malgré une surconsommation de la mission Défense, en lien avec les surcoûts OPEX et MISSINT.

B.   LE RESPECT DE L’OBJECTIF DE DÉPENSES TOTALES DE L’ÉTAT

L’ODETE a été respecté au cours de l’exercice 2018, s’établissant à 425,36 milliards d’euros au lieu de 425,42 millions d’euros prévu en loi de finances initiale.

exÉCUTION 2018 DE l’objectif de dÉpenses totales de l’État
PAR RAPPORT AUX PRÉVISIONS EN lFI

(en millions d’euros, hors fonds de concours et attributions de produits)

Catégories de dépenses

LFI 2018

(A)

Exécution 2018

(B)

Écart

(C = A  B)

Norme de dépenses pilotables

257 891

256 521

 1 370

Investissements d’avenir

1 080

1 113

+ 34

Charge de la dette

41 197

41 541

+ 344

CAS Pensions hors P743

56 548

56 661

+ 113

Prélèvements sur recettes

64 380

65 170

+ 790

Union européenne

19 912

20 645

+ 733

Collectivités territoriales

44 468

44 525

+ 57

Comptes spéciaux inclus dans l’objectif

4 319

4 357

+ 39

Comptes spéciaux portant des dépenses aux collectivités territoriales

2 509

2 729

+ 220

Autres dépenses de comptes d’affectation spéciale

1 809

1 628

– 181

Objectif de dépenses totales de l’État

425 415

425 363

 51

Source : présent projet de loi de règlement.

Le respect de l’ODETE bénéficie en premier lieu de la sous-exécution de la norme de dépenses pilotables. En effet, les dépenses de l’ODETE ont quasiment toutes été supérieures aux prévisions, à l’exception de la catégorie « Autres dépenses de comptes d’affectation spéciale ».

Les prélèvements sur recettes (+ 790 millions d’euros), la charge de la dette (+ 344 millions d’euros, du fait d’un surcoût sur les titres indexés en raison d’une inflation supérieure aux anticipations) et les comptes spéciaux portant des dépenses aux collectivités territoriales (+ 220 millions d’euros) représentent les trois dépassements les plus importants par rapport à la loi de finances initiale parmi les dépenses non pilotables.

III.   UN NIVEAU STABILISÉ DES RESTES À PAYER EN 2018

Le niveau des restes à payer tend à se stabiliser au cours de l’exercice 2018 par rapport à 2017. Pour rappel, les restes à payer désignent la différence entre les autorisations d’engagement et les crédits de paiement. Cependant, il convient de souligner qu’une nouvelle méthode de comptabilisation a été retenue cette année dans le compte général de l’État, qui ne permet plus de faire une comparaison sur moyenne période et n’est plus cohérente avec la présentation retenue dans l’exposé général des motifs du présent projet de loi.

A.   LE NIVEAU DES RESTES À PAYER EST STABILISÉ À MOINS DE 119 MILLIARDS D’EUROS EN 2018

Le niveau des restes à payer avait été particulièrement dynamique entre 2014 et 2017, avec une augmentation de 26,1 milliards d’euros représentant une hausse de 28 %. Toutefois, le niveau des restes à payer tend à se stabiliser entre 2017 et 2018 selon l’exposé général des motifs du présent projet de loi, avec une progression limitée à 0,4 milliard d’euros.

Évolution des restes À payer

(en milliards d’euros)

Source : compte général de l’État pour les années 2010 à 2017 et présent projet de loi de règlement pour l’année 2018.

Toutefois, ce résultat n’a pas permis le respect de l’article 17 de la LPFP pour les années 2018 à 2022, qui prévoit un plafonnement du niveau des restes à payer, précisant que leur montant « ne peut excéder, pour chacune des années 2018 à 2022, le niveau atteint fin 2017 » ([21]). Dans l’exposé général des motifs, le Gouvernement indique que l’objectif n’a pas pu être atteint en 2018, compte tenu du lancement d’opérations d’ampleur telles que les programmes d’investissements d’avenir (PIA). Néanmoins, le Gouvernement s’engage à ce que « la poursuite des efforts de sincérisation de la budgétisation permettra pour les prochaines années de porter les restes à payer en dessous du niveau de référence fixé par la loi ».

L’exposé général des motifs du présent projet de loi précise que les hausses des restes à payer se concentrent sur les trois missions suivantes :

– Investissements d’avenir (+ 2,9 milliards d’euros par rapport à 2017), en raison de la mise en œuvre du PIA 3 ;

– Défense (+ 1,4 milliard d’euros par rapport à 2017), du fait du programme Équipement des forces en raison du lancement d’opérations d’armement en matière de missiles et d’aviation de chasse, ainsi que la commande d’avions de transport et d’un sous-marin nucléaire d’attaque ;

– Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés (+ 1,7 milliard d’euros par rapport à 2017), du fait de la création du programme Prêt de l’État à la société concessionnaire CDG-Express.

Le Rapporteur général souligne que l’article 8 de la loi de programmation militaire ([22]) ne facilitera pas le respect de la LPFP, dans la mesure où il exonère la mission Défense du champ d’application de l’article 17 de la LPFP.

B.   LES CORRECTIONS APPORTÉES À LA MÉTHODE D’ÉVALUATION DES RESTES À PAYER AU SEIN DU COMPTE GÉNÉRAL DE L’ÉTAT

Le compte général de l’État 2018 indique que la méthode d’évaluation des restes à payer a fait l’objet de deux corrections en 2018. L’application de ces corrections aux données de l’exercice 2017 a eu pour effet de minorer de 52,8 milliards d’euros le niveau des restes à payer.

La première correction porte sur le périmètre des restes à payer pris en compte pour l’évaluation. « Seuls les restes à payer relatifs à des natures d’engagements non présentées par ailleurs dans le compte général de l’État sont désormais pris en compte afin de ne plus présenter de façon redondante certains engagements. » ([23]) Cela a entraîné le reclassement des prêts donnés à l’Agence française de développement (AFD) et les engagements relatifs au PIA 3 et l’exclusion des restes à payer relatifs aux dépenses d’intervention, aux dépenses d’opérations financières et aux contrats de partenariat public-privé.

La seconde correction porte sur la prise en compte de nouveaux retraitements appliqués aux restes à payer, tels que la réintégration des avances versées dans le montant des engagements et l’exclusion des opérations ayant donné lieu à la comptabilisation d’une dette fournisseur.

Au total, les restes à payer se limitent aux dépenses de fonctionnement hors mission Investissements d’avenir et aux dépenses d’investissement hors contrats de partenariat public-privé.

Compte tenu de ces corrections, les restes à payer s’élèvent à 62,9 milliards d’euros au titre du budget général et à 434 millions d’euros au titre des comptes spéciaux, soit un total de 63,4 milliards d’euros à la fin de l’année 2018. À la fin de l’année 2017, les restes à payer s’élevaient à 60,5 milliards d’euros au titre du budget général et à 517 millions d’euros, soit un total de 61 milliards d’euros. Cela représente une augmentation de 2,4 milliards d’euros entre 2017 et 2018.

Le Rapporteur général ne peut que regretter l’absence d’uniformisation dans la présentation du niveau des restes à payer entre le projet de loi de règlement et le compte général de l’État. Cette double présentation nuit à la transparence et à la clarté des informations transmises au Parlement.

Selon la présentation retenue par le compte général de l’État, la mission Investissements d’avenir ne comporte pas de reste à payer, tandis que les restes à payer de la mission Défense augmentent de 2,1 milliards d’euros et ceux de la mission Sécurités progressent de 615 millions d’euros.

*

*     *

 


—  1  —

FICHE 4 : LES MODIFICATIONS DE CRÉDITS LIMITÉES INTERVENUES AU COURS DE L’EXERCICE 2018

L’exercice 2018 a donné lieu à un très faible niveau de mouvements de crédits en cours de gestion, compte tenu de la volonté du Gouvernement de renforcer la sincérité de la budgétisation initiale, de limiter le niveau de mise en réserve de crédits et de ne pas avoir recours au décret d’avance.

Le Rapporteur général se félicite de cette gestion assainie, qui respecte pleinement l’autorisation budgétaire et, par conséquent, les prérogatives du Parlement.

Ainsi, l’exercice budgétaire 2018 a seulement été marqué par trois décrets d’annulation pour un montant global limité et une loi de finances rectificative de fin d’année. Toutefois, les crédits budgétaires sont revalorisés à hauteur des reports issus de l’exercice précédent et des fonds de concours et attributions de produits.

Au total, les dépenses nettes du budget général s’élèvent à 325,2 milliards d’euros (hors mission Remboursements et dégrèvements et hors fonds de concours et attributions de produits), soit un niveau en baisse de 1,1 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale (326,3 milliards d’euros).

mouvements affectant le plafond de crÉdits du budget gÉnÉral

(en millions d’euros)

N.B. : hors mission Remboursements et dégrèvements et hors fonds de concours et attributions de produits.

Il est à noter que l’article 1er du présent projet de loi affiche un montant de fonds de concours de 4 508 millions d’euros, tandis que l’annexe 1 et l’exposé général des motifs affichent un montant de fonds de concours de 4 493 millions d’euros. Cette différence de 16 millions d’euros résulte de la prise en compte des annulations de crédits en 2018 via des décrets d’annulation à caractère technique. Ainsi, la présentation des dépenses nettes peut s’établir à 325,214 milliards d’euros (article 1er) ou à 325,229 milliards d’euros (exposé général des motifs ou annexe 1), selon que l’on retienne ou non ces annulations de crédits.

Source : commission des finances.

I.   LE NIVEAU LE PLUS FAIBLE DE MISE EN RÉSERVE DE CRÉDITS DEPUIS LA MISE EN ŒUVRE DE LA LOLF

La réserve de précaution est un dispositif prévu et encadré au III de l’article 14 et au 4° bis de l’article 51 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) ([24]). Elle consiste à rendre indisponibles des crédits pour les responsables de programme. On parle de « gel » de crédits, voire de « surgel » de crédits lors de mises en réserve intervenues en cours de gestion.

La réserve de précaution répond à une double logique :

– une logique d’« auto-assurance » destinée à responsabiliser les gestionnaires en cas d’aléas de gestion ;

– et une logique de modération du rythme de consommation des crédits.

A.   L’ÉLÉVATION DU NIVEAU DE MISE EN RÉSERVE DES CRÉDITS JUSQU’À 8 % ENTRE 2015 et 2017

Le taux de mise en réserve initiale des crédits a été progressivement accru entre 2012 et 2017. La loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 ([25]) prévoyait, pour chaque programme, un taux de mise en réserve d’au moins 0,5 % sur les crédits ouverts pour les dépenses de personnel et d’au moins 5 % sur les crédits ouverts pour les autres dépenses. Dès le projet de loi de finances pour 2013, le Gouvernement a appliqué un taux de mise en réserve relevé à 6 % pour les crédits autres que de personnel.

L’article 12 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 ([26]) prévoit que, désormais, le montant de la mise en réserve initiale des crédits de la loi de finances initiale ne peut être inférieur à 0,5 % pour les dépenses de personnel et à 6 % pour les autres dépenses en moyenne sur l’ensemble des programmes du budget général de l’État dotés de crédits limitatifs.

Depuis 2015, le Gouvernement a décidé d’appliquer un taux de mise en réserve initiale de 8 % pour les crédits autres que de personnel, soit le niveau historiquement le plus élevé. En 2016 et en 2017, le Gouvernement avait décidé de procéder au gel des reports de crédits sur le budget général, hors les dépenses de personnel. Ainsi, la mise en réserve de crédits a atteint des niveaux historiques en 2016 et en 2017.

La Cour des comptes a critiqué cette pratique, considérant que la réserve « a été détournée de son objectif au profit de la couverture, en exécution, de sous-budgétisations » ([27]).

B.   L’ABAISSEMENT DU TAUX DE MISE EN RÉSERVE DES CRÉDITS À 3 % EN 2018

L’actuel Gouvernement a souhaité « rendre à la réserve de précaution sa vocation première qui est de faire face aux seuls aléas de gestion » ([28]) et rompre avec la pratique des sous-budgétisations initiales qui justifiaient des redéploiements importants en gestion à partir des crédits mis en réserve.

Ainsi, il a abaissé le taux de mise en réserve des crédits de 8 % en 2017 à 3 % en 2018, pour les crédits autres que de personnel.

Le Rapporteur général se félicite d’une utilisation de la mise en réserve de crédits de nouveau conforme à l’esprit de la LOLF. Celle-ci renforce la portée de l’autorisation parlementaire et la responsabilisation des gestionnaires. Par ailleurs, aucun dégel de la réserve de précaution n’a été mis en œuvre au cours du premier semestre 2018.

Évolution de l’utilisation de la réserve de précaution

(en milliards d’euros et en crédits de paiement, hors crédits de personnel)

Réserve

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Réserve initiale* [A]

5 001

6 229

5 926

6 909

8 382

9 332

9 836

3 912

« Surgels » [B] (y compris fin gestion)

469

1 565

2 054

1 792

2 132

5 199

4 505

678

Réserve après « surgels » [C] = [A] + [B]

5 470

7 793

7 979

8 701

10 515

14 531

14 341

4 590

Dégels : crédits rendus disponibles [D] (y compris fin de gestion)

3 708

4 461

4 767

4 317

6 491

8 680

10 139

2 250

Crédits conservés en réserve ou définitivement annulés

[E] = [C] - [D]

1 762

3 332

3 212

4 384

4 024

5 850

4 202

2 341

Pourcentage de mobilisation de la réserve de précaution [D] / [C]

68 %

57 %

60 %

50 %

62 %

60 %

71 %

49 %

* La réserve initiale correspond à la réserve théorique, déduction faite des dégels systématiques de début de gestion.

Source : Gouvernement.

La réserve de précaution a été mobilisée à hauteur de 2,25 milliards d’euros, soit 49 % de la mise en réserve totale de crédits au cours de l’exercice.

II.   L’ABSENCE INÉDITE DE DÉCRET D’AVANCE EN 2018 ET L’IMPACT LIMITÉ DES DÉCRETS D’ANNULATION

Pour la première fois depuis 1985, le Gouvernement n’a pas pris de décret d’avance au cours de l’exercice 2018. Cela illustre le caractère rigoureux et sincère de la prévision budgétaire, ainsi que le caractère sain de la gestion en cours d’exercice. Le Rapporteur général ne peut que se féliciter de cette pratique, qui apparaît plus respectueuse des prérogatives du Parlement. Par ailleurs, les décrets d’annulation ont procédé à un niveau faible d’annulations de crédits en cours de gestion.

A.   L’ABSENCE DE DÉCRET D’AVANCE EN 2018

Aux termes de l’article 13 de la LOLF, les décrets d’avance constituent un instrument de régulation budgétaire visant à ouvrir des crédits supplémentaires en cours d’exercice, sous quatre conditions :

– le respect de l’équilibre budgétaire, c’est-à-dire que les ouvertures de crédits doivent être compensées à due concurrence par des annulations ;

– le respect du plafond d’ouverture de crédits prévu à l’article 13 de la LOLF (jusqu’à 1 % des crédits ouverts par la loi de finances de l’année) ;

– le respect du plafond d’annulation de crédits prévu à l’article 14 de la LOLF (jusqu’à 1,5 % des crédits ouverts par les lois de finances afférentes à l’année en cours) ;

– et le caractère d’urgence des actions pour lesquelles des dépenses supplémentaires sont proposées.

En 2018, le Gouvernement n’a pris aucun décret d’avance, conformément aux engagements du ministre de l’action et des comptes publics ([29]). Cette absence de décret d’avance au cours d’un exercice budgétaire est inédite depuis 1985. En outre, elle intervient après l’exercice 2017, qui a présenté le niveau le plus élevé de mouvements de crédits issus de décrets d’avance.

mouvements de crédits issus de décrets d’avance

(en milliards d’euros)

Source : commission des finances.

Le Gouvernement a souhaité procéder aux ajustements de crédits en cours d’exercice exclusivement par le truchement de la loi de finances rectificative de fin d’année.

B.   LES TROIS DÉCRETS D’ANNULATION TECHNIQUES PRIS EN 2018, PRÉSENTANT DE FAIBLES NIVEAUX D’ANNULATION (30 MILLIONS D’EUROS EN AE ET 16 MILLIONS EN CP)

En 2018, le Gouvernement a pris trois décrets d’annulation technique de crédits, le 31 janvier ([30]), le 3 août ([31]) et le 13 décembre ([32]), pour un montant total de 30 millions d’euros en AE et 16 millions d’euros en CP. Cela représente un faible niveau d’annulations par décret au titre des articles 14 et 17 de la LOLF, par rapport à une moyenne d’annulation de 174 millions d’euros en AE et 156 millions d’euros en CP sur la période 2012-2018.

annulations de crédits issues de décrets d’annulation

(en millions d’euros)

Source : commission des finances.

Les annulations, à caractère technique, ont été réalisées à la demande des ministères concernés et ont été destinées à permettre le remboursement de tiers de trop-perçus sur fonds de concours. Les annulations ont porté à 78 % sur la mission Écologie, développement et mobilité durables.

annulations prévues par les décrets d’annulation par Mission

(en millions d’euros)

Intitulé de la mission

Autorisations d’engagement

Crédits
de paiement

Pourcentage
des annulations (CP)

Administration générale et territoriale de l'État

34

34

0,0 %

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

124 195

124 195

0,8 %

Cohésion des territoires

98 463

98 463

0,6 %

Culture

1 287 584

1 025 091

6,2 %

Défense

257 432

257 432

1,6 %

Écologie, développement et mobilité durables

23 244 252

12 866 450

78,1 %

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

478

478

0,0 %

Immigration, asile et intégration

615 616

615 616

3,7 %

Recherche et enseignement supérieur

3 556 190

701 430

4,3 %

Sécurités

51 393

51 393

0,3 %

Solidarité, insertion et égalité des chances

22 070

22 070

0,1 %

Sport, jeunesse et vie associative

37 852

0,0 %

Travail et emploi

715 682

715 682

4,3 %

Total

30 011 241

16 478 300

100 %

Source : commission des finances.

III.   LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR LA LOI DE FINANCES RECTIFICATIVE DE DÉCEMBRE 2018

En l’absence de décret d’avance, la loi de finances rectificative de 2018 a été déposée dès le 7 novembre, afin de garantir les bonnes conditions de la fin de gestion, notamment le financement des payes du mois de décembre dans les ministères présentant des insuffisances de crédits de personnel. Ainsi, la loi de finances rectificative de fin d’année a été promulguée dès le 10 décembre et a porté l’ensemble du schéma de fin de gestion ([33]). Elle a également présenté la particularité de ne comporter que des dispositions budgétaires relatives à l’année en cours et aucune disposition fiscale. Cela a permis de recentrer ce texte sur son objet initial, conformément à l’esprit de la LOLF. Le Rapporteur général salue cette évolution de la pratique, qui permet de clarifier la distinction entre la loi de finances de l’année et la loi de finances rectificative.

A.   UN NIVEAU LIMITÉ DE MOUVEMENTS DE CRÉDITS

Elle a procédé à un niveau relativement limité de mouvements de crédits à hauteur de 2,1 milliards d’euros tant en ouvertures qu’en annulations de CP, hors la mission Remboursements et dégrèvements. Cela représente un niveau plus faible que la moyenne établie à 2,9 milliards d’euros d’ouvertures et 2,7 milliards d’euros d’annulations de CP sur la période 2007-2017. Par ailleurs, elle a procédé à un niveau minime d’ouvertures nettes de crédits, établi à 80 millions d’euros en CP.

OUVERTURES ET ANNULATIONS DE CRÉDITS sur le budget gÉnÉral
EN LFR de fin d’annÉe

(en millions d’euros, en crédits de paiement)

Mouvements

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Ouvertures

1 421

1 084

5 272

3 373

849

3 581

791

1 712

4 785

5 595

3 439

2 130

Annulations

− 1 422

− 1 013

− 6 510

− 3 666

− 1 478

− 2 083

− 4 738

− 2 733

− 2 644

− 3 219

– 85

– 2 050

Écart plafonds PLFR/LFI

 1

71

 1 238

 293

 629

1 498

 3 947

− 1 021

2 141

2 376

3 353

80

N.B. : hors mission Remboursements et dégrèvements.

Source : lois de finances rectificatives (LFR) de fin d’année pour les années 2007 à 2018.

La loi de finances rectificative a procédé aux divers mouvements de crédits, retracés dans le tableau suivant.

ouvertures et annulations des autorisations d’engagement

(en millions d’euros)

Autorisations d’engagement

Loi de finances initiale n° 20171837 du 30 décembre 2017

Loi de finances rectificative
 2018-1104 du 10 décembre 2018

Total des lois de finances

Ouver-tures

Annula-tions

Total net

Budget général

 

 

 

 

 

Dépenses brutes

450 240

7 686

1 887

5 799

456 039

À déduire : Remboursements et dégrèvements dimpôts

119 967

4 648

4 648

124 615

Dépenses nettes

330 273

3 038

1 887

1 151

331 424

Fonds de concours

3 216

250

250

3 466

Total des dépenses du budget général y compris fonds de concours

333 489

3 288

1 887

1 401

334 890

Budgets annexes

 

 

 

 

 

Total des dépenses des budgets annexes y compris fonds de concours

2 372

16

33

 17

2 355

Comptes spéciaux

 

 

 

 

 

Comptes d’affectation spéciale

75 505

134

594

– 460

75 045

Comptes de concours financiers

131 051

775

– 775

130 276

Total des dépenses des comptes spéciaux

206 556

134

1 369

 1 235

205 321

Total général des autorisations dengagement

542 417

3 438

3 289

149

542 566

ouvertures et annulations des crÉdits de paiement

(en millions d’euros)

Crédits de paiement

Loi de finances initiale n° 20171837 du 30 décembre 2017

Loi de finances rectificative
 2018-1104 du 10 décembre 2018

Total des lois de finances

Ouver-tures

Annula-tions

Total net

Budget général

 

 

 

 

 

Dépenses brutes

446 248

6 778

2 050

4 728

450 976

À déduire : Remboursements et dégrèvements dimpôts

119 967

4 648

4 648

124 615

Dépenses nettes

326 281

2 130

2 050

80

326 361

Fonds de concours

3 332

250

250

3 582

Total des dépenses du budget général y compris fonds de concours

329 613

2 380

2 050

330

329 943

Budgets annexes

 

 

 

 

 

Total des dépenses des budgets annexes y compris fonds de concours

2 362

16

32

 16

2 346

Comptes spéciaux

 

 

 

 

 

Comptes d’affectation spéciale

75 581

132

633

– 501

75 080

Comptes de concours financiers

129 392

492

– 492

128 900

Comptes de commerce (solde)

– 45

– 45

Comptes d’opérations monétaires (solde)

– 62

– 62

Total des dépenses des comptes spéciaux

204 866

132

1 125

 993

203 873

Total général des crédits de paiement

536 841

2 528

3 207

 679

536 162

Source : présent projet de loi de règlement.

B.   LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS SUR LES MISSIONS DU BUDGET GÉNÉRAL DE L’ÉTAT

1.   Les ouvertures de crédits

La loi de finances rectificative a procédé à des ouvertures nettes en CP sur neuf missions du budget général (Investissements d’avenir, Immigration, asile et intégration, Relations avec les collectivités territoriales, Outre-mer, Régimes sociaux et de retraite, Cohésion des territoires, Enseignement scolaire, Solidarité, insertion et égalité des chances, Engagements financiers de l’État).

Les ouvertures de crédits ont principalement porté sur les missions suivantes :

– Engagements financiers de l’État, une augmentation de la charge de la dette de 453 millions d’euros ;

– Solidarité, insertion et égalité des chances (+ 248 millions d’euros), notamment au titre des dépenses relatives à la prime d’activité ;

– Enseignement scolaire (+ 147 millions d’euros), au titre des dépenses de personnel.

Les annulations de crédits ont principalement porté sur les missions :

– Travail et emploi (– 492 millions d’euros), au titre d’une prévision plus favorable qu’en loi de finances initiale s’agissant du Fonds d’inclusion dans l’emploi (FIE) qui finance les dépenses relatives aux contrats aidés et à l’insertion par l’activité économique, d’une sous-exécution relative aux allocations pour les demandeurs d’emploi du fait de l’amélioration de la conjoncture économique et d’une sous-exécution relative au dispositif de l’aide embauche PME ;

– Recherche et enseignement supérieur (– 204 millions d’euros), portant sur des crédits mis en réserve, qui correspondent notamment à des crédits qui n’ont pas fait l’objet de notifications aux opérateurs ;

– Écologie, développement et mobilités durables (– 115 millions d’euros), portant sur des crédits mis en réserve.

2.   Les annulations de crédits

Celles-ci ont été compensées par des annulations nettes en CP sur dix-huit missions (Travail et emploi, Recherche et enseignement supérieur, Écologie, développement et mobilité durables, Gestion des finances publiques et des ressources humaines, Justice, Action extérieure de l’État, Économie, Sécurités, Aide publique au développement, Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, Administration générale et territoriale de l’État, Anciens combattants, mémoire, et liens avec la Nation, Culture, Direction de l’action du Gouvernement, Sport, jeunesse et vie associative, Médias, livre et industries culturelles, Santé et Conseil et contrôle de l’État).

3.   La stabilité des crédits

Quatre missions du budget général ont conservé un niveau stable de crédits (Action et transformation publiques, Crédits non répartis, Défense et Pouvoirs publics).

La loi de finances rectificative de décembre 2018 a notamment procédé à deux mouvements de crédits parallèles sur la mission Défense, pour des montants identiques en ouvertures et en annulations :

– une ouverture de 404 millions d’euros au titre du programme Préparation et emploi des forces, afin de financer les surcoûts des opérations extérieures (OPEX) et des missions intérieures (MISSINT) ;

 et une annulation de 404 millions d’euros répartie sur plusieurs programmes de la mission, dont 319 millions d’euros sur le programme Équipement des forces.

Ainsi, la loi de finances rectificative a financé les surcoûts des OPEX et des MISSINT exclusivement sur la mission Défense.

Le tableau suivant permet de faire le bilan des différents mouvements de crédits par mission, en comparant le niveau de dépenses effectivement constatées par mission, au niveau de crédits adops en loi de finances initiale et effectivement ouverts. Chaque mission budgétaire fait l’objet d’un traitement spécifique dans les commentaires de rapports annuels de performances rédigés par les rapporteurs spéciaux.

 

 

 


comparaison des crÉdits initiaux, ouverts et consommÉs

(en euros)

Missions

Loi de finances initiale

(LFI)

Total des CP ouverts

Dépenses constatées

Écarts LFI/CP ouverts

Écarts LFI/dépenses constatées

valeur

 

valeur

 

Action et transformation publiques

20 000 000

20 000 000

1 844 468

0%

– 18 155 532

– 91%

Action extérieure de l’État

3 000 856 771

2 999 020 185

2 963 387 268

– 1 836 586

0%

– 37 469 503

– 1%

Administration générale et territoriale de l’État

2 756 881 271

2 884 135 676

2 821 617 457

127 254 405

4 %

64 736 186

2%

Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales

3 429 163 774

3 542 990 517

3 442 254 534

113 826 743

3%

13 090 760

0%

Aide publique au développement

2 700 515 532

2 730 157 255

2 632 804 604

29 641 723

1 %

– 67 710 928

– 3%

Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

2 461 147 844

2 441 890 448

2 432 817 082

– 19 257 396

– 1%

– 28 330 762

– 1%

Cohésion des territoires

17 227 136 044

18 035 006 613

17 825 968 724

807 870 569

4 %

598 832 680

3%

Conseil et contrôle de l’État

664 432 166

690 430 572

665 041 281

25 998 406

4 %

609 115

0 %

Crédits non répartis

124 000 000

10 651 620

– 113 348 380

– 1 064%

– 124 000 000

– 100%

Culture

2 937 085 143

2 937 435 864

2 912 996 780

350 721

0 %

– 24 088 363

– 1%

Défense

42 551 475 547

43 405 144 672

43 286 557 872

853 669 125

2 %

735 082 325

2%

Direction de l’action du Gouvernement

1 480 444 271

1 452 654 686

1 386 333 291

– 27 789 585

– 2%

– 94 110 980

– 6%

Écologie, développement et mobilité durables

11 309 179 384

13 779 223 572

13 517 423 803

2 470 044 188

18 %

2 208 244 419

20%

Économie

1 865 311 565

1 858 928 870

1 812 103 294

– 6 382 695

0%

– 53 208 271

– 3%

Engagements financiers de l’État

41 776 800 514

42 287 485 685

42 119 295 393

510 685 171

1 %

342 494 879

1%

Enseignement scolaire

71 558 288 634

71 874 302 561

71 661 103 531

316 013 927

0%

102 814 897

0%

Gestion des finances publiques et des ressources humaines

10 859 090 595

10 855 376 670

10 761 923 263

– 3 713 925

0%

– 97 167 332

– 1%

Immigration, asile et intégration

1 380 785 287

1 601 500 979

1 554 919 649

220 715 692

14 %

174 134 362

13%

Investissements d’avenir

1 079 500 000

1 113 000 000

1 113 000 000

33 500 000

3 %

33 500 000

3%

Justice

8 722 113 000

8 687 585 748

8 605 886 102

– 34 527 252

0%

– 116 226 898

– 1%

Médias, livre et industries culturelles

554 613 604

556 189 861

547 398 276

1 576 257

0 %

– 7 215 328

– 1%

Outre-mer

2 066 674 758

2 290 805 537

2 113 521 146

224 130 779

10 %

46 846 388

2%

Pouvoirs publics

991 742 491

991 742 491

991 742 491

0%

0%

Recherche et enseignement supérieur

27 668 964 921

27 640 296 593

27 578 629 027

– 28 668 328

0%

– 90 335 894

0%

Régimes sociaux et de retraite

6 332 220 443

6 447 953 082

6 447 953 082

115 732 639

2%

115 732 639

2%

Relations avec les collectivités territoriales

3 661 750 994

3 829 082 936

3 571 858 637

167 331 942

4 %

– 89 892 357

– 2%

Remboursements et dégrèvements

119 967 474 000

124 615 078 000

125 727 052 623

4 647 604 000

4 %

5 759 578 623

5%

Santé

1 375 861 825

1 375 340 541

1 337 776 879

– 521 284

0%

– 38 084 946

– 3%

Sécurités

19 752 902 674

19 912 223 078

19 884 464 274

159 320 404

1 %

131 561 600

1%

Solidarité, insertion et égalité des chances

19 650 668 589

19 913 893 438

19 846 628 537

263 224 849

1 %

195 959 948

1%

Sport, jeunesse et vie associative

959 091 401

948 980 832

935 993 352

– 10 110 569

– 1%

– 23 098 049

– 2%

Travail et emploi

15 361 558 729

15 503 609 637

14 948 736 485

142 050 908

1 %

– 412 822 244

– 3%

Total

446 247 731 771

457 232 118 219

455 449 033 205

10 984 386 448

2 %

9 201 301 434

2%

Source : annexe au présent projet de loi de règlement, développement des crédits ouverts et des dépenses constatées au budget général.

 


—  1  —

IV.   LES MODIFICATIONS RÉGLEMENTAIRES

Les autorisations d’engagement et les crédits de paiement adoptés en loi de finances initiale ont fait l’objet de modifications par voie réglementaire, via les reports de crédits d’un exercice à l’autre, les décrets de transfert, de virement, de répartition et l’affectation de fonds de concours ou l’attribution de produits. Les deux tableaux suivants présentent une vision exhaustive de l’ensemble de ces modifications réglementaires intervenues au cours de l’exercice 2018.

 

 

 


Modifications apportées aux lois de finances initiale et rectificative
par les mesures réglementaires et le projet de loi de rÈglement

(en millions d’euros)

AUTORISATIONS D’ENGAGEMENT

Budget ou compte

Prévisions des lois de finances initiale et rectificative

Reports de la gestion précédente

Virements

Transferts

Répartitions

Fonds de concours et attribu-tions de produits

Modifica-tions de crédits liées à des
plus–values de recettes

Crédits ouverts

Reports à la gestion suivante

Situation avant l’interven-tion
du projet de loi de règlement

Projet de loi de règlement

Ouvertures

Annulations

Ouvertures

Annulations

Ouvertures

Annulations

Consommation

Ajustements de crédits

Ouvertures

Annulations

BUDGET GÉNÉRAL

Dépenses brutes

456 039

23 236

320

– 320

304

– 304

113

– 113

4 612

483 887

– 21 550

462 337

456 834

1 372

– 6 875

À déduire : Remboursements et dégrèvements
dimpôts

124 615

124 615

124 615

125 727

1 372

 260

Total des dépenses du budget général

331 424

23 236

320

 320

304

 304

113

 113

4 612

359 272

 21 550

337 722

331 107

 6 615

BUDGETS ANNEXES

Total des dépenses des budgets annexes

2 298

57

48

2 403

 49

2 354

2 328

 26

COMPTES SPÉCIAUX

Comptes d’affectation spéciale

75 045

5 768

15

432

81 260

– 4 173

77 087

74 422

– 2 665

Comptes de concours financiers

130 276

3

130 279

– 110

130 169

124 312

– 5 857

Total des dépenses des comptes spéciaux

205 321

5 771

 

 

15

432

211 539

 4 283

207 256

198 734

 8 522

Total général des autorisations d’engagement

539 043

29 064

320

 320

304

 304

113

 113

4 675

432

573 214

 25 882

547 332

532 169

 15 163


CRÉDITS DE PAIEMENT

Budget ou compte

Prévisions des lois de finances initiale et rectificative

Reports de la gestion précédente

Virements

Transferts

Répartitions

Fonds de concours et attribu-tions des produits

Modifica-tions de crédits liées
à des
plus–values de recettes

Crédits ouverts

Reports à la gestion suivante

Situation avant l’intervention du projet de loi de règlement

Projet de loi de règlement

Ouvertures

Annulations

Ouvertures

Annulations

Ouvertures

Annulations

Consommation

Ajustements de crédits

Ouvertures

Annulations

BUDGET GÉNÉRAL

Dépenses brutes

450 975

1 764

205

– 205

310

– 310

113

– 113

4 493

457 232

– 2 018

455 214

455 449

1 371

– 1 137

À déduire : Remboursements et dégrèvements d’impôts

124 615

124 615

 

124 615

125 727

1 371

 259

Total des dépenses du budget général

326 361

1 764

205

 205

310

 310

113

 113

4 493

332 617

 2 018

330 599

329 722

 878

BUDGETS ANNEXES

Total des dépenses des budgets annexes

2 288

23

48

2 359

 12

2 347

2 321

 26

COMPTES SPÉCIAUX

Comptes d’affectation spéciale

75 080

6 369

15

432

81 896

– 4 882

77 014

74 445

– 2 570

Comptes de concours financiers

128 900

3

128 903

– 135

128 768

124 104

– 4 664

Comptes de commerce (solde)

– 45

– 45

– 45

19

Comptes d’opérations monétaires (solde)

– 62

– 62

– 62

– 59

Total des dépenses des comptes spéciaux

203 873

6 372

15

432

210 692

 5 017

205 675

198 509

 7 234

Total général des crédits de paiement

532 522

8 159

205

 205

310

 310

113

 113

4 556

432

545 668

 7 047

538 621

530 552

 8 138

Source : présent projet de loi de règlement

 


—  1  —

A.   L’AUGMENTATION DES FONDS DE CONCOURS ET ATTRIBUTIONS DE PRODUITS

Les crédits adoptés en loi de finances initiale sont rehaussés en cours de gestion par les fonds de concours et attributions de produits. Ces derniers se sont élevés à 4,5 milliards deuros en CP pour le budget général au titre de l’exercice 2018. Cela représente un niveau supérieur à la prévision de la loi de finances initiale (3,3 milliards d’euros) et à l’exécution de 2017 (4,1 milliards d’euros). L’augmentation résulte essentiellement des fonds de concours (3,6 milliards d’euros), tandis que les attributions de produits sont stables (un milliard d’euros) par rapport à l’exercice précédent. La Cour des comptes relève que « les lacunes dans le suivi de ces crédits sont porteuses de risques, notamment sur le respect de la conformité de l’emploi des fonds à l’intention de la partie versante ou encore en matière de régularité des reports de crédits » ([34]). La Cour critique également le fait que les fonds de concours et attributions de produits brouillent la lisibilité des dépenses de l’État.

Les principales missions bénéficiaires de ces abondements sont les suivantes :

– Écologie, développement et mobilité durables, avec 1,9 milliard d’euros en AE et 2,2 milliards d’euros en CP, principalement au titre du programme Infrastructures et services de transports, en provenance de l’Agence de financement des infrastructures de transports de France (AFITF) ;

– Cohésion des territoires, avec 851 millions d’euros en AE et 465 millions d’euros en CP, principalement en provenance du Fonds national des aides à la pierre (FNAP) sur le programme Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat ;

– Défense, avec 784 millions d’euros en AE et en CP, notamment au titre du programme Préparation et emploi des forces, en lien avec le remboursement des soins assurés par le service de santé des armées, des recettes provenant de la rémunération de certains services rendus par le ministère de la défense dans le cadre de sa mission en métropole, les produits des cessions de biens mobiliers ;

– Travail et emploi, avec 291 millions d’euros en AE et en CP, principalement au titre du programme Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi, via l’apport du Fonds de sécurisation des parcours professionnels pour un montant de 250 millions d’euros en AE et en CP ;

– Sécurités, avec 205 millions d’euros en AE et en CP, au titre du programme Gendarmerie nationale, du fait du remboursement des effectifs mis à disposition d’organismes extérieurs qui ne participent pas directement à la performance du programme (essentiellement EDF, Banque de France, SNCF et CEA), de la rémunération de prestations (EDF, Banque de France), au titre du programme Police nationale, notamment du fait de la participation de l’Union européenne au fonctionnement de la police nationale, de la participation des partenaires publics et privés aux actions de formation et de lutte contre l’insécurité et de la participation au financement de divers travaux d’équipement.

B.   LA DIMINUTION DES REPORTS DE CRÉDITS

Prévus à l’article 15 de la LOLF, les reports de crédits constituent un assouplissement au principe d’annualité qui symbolise le cadre temporel de l’autorisation parlementaire. Ils sont strictement encadrés et soumis à un double plafonnement :

 « les crédits inscrits sur le titre des dépenses de personnel du programme bénéficiant du report peuvent être majorés dans la limite de 3 % des crédits initiaux inscrits sur le même titre du programme à partir duquel les crédits sont reportés ;

 « les crédits inscrits sur les autres titres du programme bénéficiant du report peuvent être majorés dans la limite globale de 3 % de lensemble des crédits initiaux sur les mêmes titres du programme à partir duquel les crédits sont reportés. »

Toutefois, une loi de finances peut déroger à ce deuxième plafond. La loi de finances pour 2018 avait prévu cette dérogation pour 15 programmes, soit un nombre deux fois moindre que celui prévu en loi de finances pour 2017 (29 programmes).

Les reports entrant de 2016 vers 2017 avaient atteint un niveau historiquement élevé, tant au niveau du budget général que des comptes spéciaux, avec un total de 10,6 milliards deuros. Depuis deux exercices, le Gouvernement a pour ambition de réduire le niveau des reports de crédits, qui est passé de 8,1 milliards d’euros de reports de crédits de 2017 vers 2018 à 7 milliards d’euros de reports de crédits de 2018 vers 2019.

Évolution des reports de CrÉdits de paiement

(en millions d’euros)

Source : projets de lois de règlement.

Le niveau des reports de crédits sur les budgets annexes reste marginal à 12 millions d’euros vers l’exercice 2019, après 23 millions d’euros de reports sur l’exercice 2018.

Selon le Gouvernement, ce niveau bas de reports de crédits « confirme les effets vertueux de la sincérisation de la budgétisation » ([35]). Le Rapporteur général ne peut que se féliciter de la poursuite de la réduction des reports de crédits, qui garantit la soutenabilité budgétaire de lÉtat.

C.   LE NIVEAU LIMITÉ DES AUTRES MOUVEMENTS RÉGLEMENTAIRES

Les virements, prévus à l’article 12 de la LOLF, permettent de modifier la répartition des crédits entre programmes d’un même ministère, dans la limite de 2 % des crédits ouverts par la loi de finances de l’année pour chacun des programmes concernés. En 2018, ils restent très marginaux et s’établissent à 205 millions d’euros en CP.

Les transferts, prévus au même article de la loi organique, permettent de modifier la répartition des crédits entre programmes de ministères distincts, dans la mesure où l’emploi des crédits correspond à des actions du programme d’origine. Ils représentent par définition une altération moins profonde de l’autorisation parlementaire. En 2018, ils s’élèvent à 310 millions d’euros en CP, soit un niveau en forte baisse par rapport à 2017 (1,2 milliard d’euros).

Les répartitions des crédits globaux, définies aux articles 7 et 11 de la LOLF, constituent des autorisations de dépenses dont la destination n’est pas connue au moment du vote de la loi de finances initiale. L’objet de ces crédits globaux est limité à deux catégories de dépenses par la loi organique : les dépenses accidentelles ou imprévisibles et les mesures générales en matière de rémunérations. Ces deux catégories de dépenses sont regroupées au sein de la mission Crédits non répartis. Le niveau d’annulations de crédits et d’ouvertures vers d’autres missions du budget général s’est élevé à 113 millions d’euros en CP en 2018, soit un niveau en progression par rapport à 2017 (17 millions d’euros).

V.   LES MODIFICATIONS ENGAGÉES PAR LE PRÉSENT PROJET DE LOI DE RÈGLEMENT

En vertu du 2° du IV de l’article 37 de la LOLF, le présent projet de loi de règlement ouvre pour chaque programme « les crédits nécessaires pour régulariser les dépassements constatés résultant de circonstances de force majeure dûment justifiées et procède à lannulation des crédits nayant été ni consommés ni reportés ».

A.   LES ANNULATIONS PORTANT SUR LE BUDGET GÉNÉRAL

L’article 4 du présent projet de loi de règlement arrête les montants consommés d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement du budget général au titre de l’année 2018 et procède aux ajustements nécessaires.

1.   Les annulations d’autorisations d’engagement sur le budget général

En AE, le présent projet de loi de règlement prévoit l’annulation de 6,6 milliards d’euros (hors la mission Remboursements et dégrèvements), répartis entre l’annulation :

– de 2,4 milliards d’euros sur la mission Travail et emploi, au titre principalement du programme Accès et retour à l’emploi ;

– de 1,2 milliard d’euros sur la mission Défense, principalement au titre du programme Préparation et emploi des forces ;

– de 530 millions d’euros sur la mission Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales, principalement au titre du programme Compétitivité et durabilité de l’agriculture, de l’agroalimentaire, de la forêt, de la pêche et de l’aquaculture ;

– de 455 millions d’euros sur la mission Cohésion des territoires, principalement au titre du programme Urbanisme, territoires et amélioration de l’habitat ;

– de 430 millions d’euros sur la mission Engagements financiers de l’État essentiellement au titre du programme Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque à hauteur de 262 millions d’euros ;

– et de 311 millions d’euros sur la mission Crédits non répartis, au titre des dépenses accidentelles et imprévisibles.

Cela représente un niveau d’annulations en AE supérieur à la moyenne établie à 5,3 milliards d’euros au cours de la période 2012-2017.

annulations d’autorisations d’engagement en loi de règlement

(en euros)

Source : lois de règlement et présent projet de loi de règlement.

2.   Les annulations de crédits de paiement sur le budget général

En CP, le présent projet de loi de règlement prévoit l’annulation nette de 877 millions deuros (hors la mission Remboursements et dégrèvements), répartis entre l’annulation :

– de 168 millions d’euros sur la mission Engagements financiers de lÉtat, principalement au titre de la Charge de la dette et trésorerie de lÉtat ;

– de 103 millions d’euros sur la mission Relations avec les collectivités territoriales, principalement au titre du programme Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements ;

– et de 102 millions sur la mission Défense, au titre du programme Soutien de la politique de la défense.

Ce niveau d’annulations en CP est plus élevé que la moyenne des annulations établie à 492 millions d’euros sur la période 2012-2017.

annulations de crédits de paiement en loi de règlement

(en euros)

Source : lois de règlement et présent projet de loi de règlement.

B.   LES MOUVEMENTS DE CRÉDITS RELATIFS AUX BUDGETS ANNEXES ET AUX COMPTES SPÉCIAUX

Les articles 5 et 6 du présent projet de loi de règlement arrêtent les montants consommés d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement des budgets annexes et des comptes spéciaux au titre de l’année 2018 et procèdent aux ajustements nécessaires.

MOUVEments de crédits sur les budgets annexes et les comptes spéciaux 

(en millions d’euros)

Budget ou compte

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Ouvertures

Annulations non engagées et non reportées

Ouvertures

Annulations de crédits non consommés et non reportés

Budget annexe Contrôle et exploitation aériens 

10,5

14,4

Budget annexe Publications officielles et information administrative

17,0

11,8

Comptes d’affectation spéciale

2 665,4

2 570,5

Comptes de concours financiers

5 857,5

4 663,6

Source : présent projet de loi de règlement.

Ces mouvements sont analysés dans le détail par les différents rapporteurs spéciaux compétents.

Par ailleurs, l’article 6 du présent projet de loi de règlement majore le découvert du compte d’opérations monétaires de 20 milliards d’euros au titre des opérations avec le Fonds monétaire international.

Enfin, le même article arrête le solde des comptes spéciaux reportés sur l’exercice suivant et indique ceux qui ne sont pas reportés sur l’exercice 2019. Il s’agit du :

– solde débiteur de 15 millions d’euros du compte de concours financiers Prêts à des États étrangers ;

– solde créditeur de 64 millions d’euros du compte d’opérations monétaires Émissions des monnaies métalliques ;

– et du solde débiteur de 4,5 millions d’euros du compte d’opérations monétaires Pertes et bénéfices de change.

*

*     *

 

 

 

 


—  1  —

   FICHE 5 : LA DETTE DE LÉTAT

L’encours de dette de l’État en valeur actualisée ([36]) s’établit à 1 756 milliards d’euros à la fin de l’année 2018, au lieu de 1 686 milliards d’euros à la fin de l’année 2017. Par conséquent, l’encours de la dette négociable de l’État a progressé de 70 milliards d’euros en 2018 par rapport à la fin de l’exercice 2017. Cela représente un niveau d’augmentation supérieur aux exercices 2015 à 2016, notamment du fait d’un niveau de déficit à financer plus élevé.

Néanmoins, les taux historiquement bas permettent à l’État de poursuivre son endettement, tout en bénéficiant d’une réduction de la charge de sa dette à 41,5 milliards d’euros en 2018, au lieu de 41,7 milliards d’euros en 2017. Selon le Rapporteur général, cet environnement macroéconomique et les conditions de financement exceptionnelles ne doivent en aucun cas remettre en cause les ambitions fortes de maîtrise de l’endettement de l’État.

I.   UNE ACCÉLÉRATION DE L’ENDETTEMENT DE L’ÉTAT CONFIRMÉE EN 2018

A.   L’AUGMENTATION RAPIDE DE L’ENCOURS DE DETTE DE L’ÉTAT

1.   La progression de l’encours total de dette négociable de l’État

L’encours de dette négociable de l’État ([37]) poursuit sa progression, avec une augmentation de 70 milliards d’euros en 2018, après une hausse de 65 milliards d’euros en 2017. Ces niveaux d’augmentation sont supérieurs à ceux constatés en 2015 (+ 48 milliards d’euros) et en 2016 (+ 45 milliards d’euros), qui représentaient deux exercices de ralentissement de l’endettement de l’État.

Évolution de l’encours de la dette nÉgociable de l’État

(en valeur actualisée, en milliards d’euros)

Source : rapports annuels de performances Engagements financiers de l’État, annexés aux projets de lois de règlement.

L’accélération de l’augmentation de l’encours de la dette négociable de l’État est cohérente avec la hausse du déficit budgétaire de l’État entre 2017 (67,7 milliards d’euros) et 2018 (76 milliards d’euros).

2.   L’augmentation de la part des titres de moyen et long terme dans l’encours de dette de l’État

La composition de la dette négociable de l’État poursuit son évolution avec une augmentation de la part des titres à moyen et long terme (OAT) et une diminution de la proportion de titres à court terme (BTF) ([38]). Les titres de court terme ne représentent plus que 6 % de l’encours de dette de l’État tandis que les titres de moyen et long terme représentent 94 %.

composition de la dette nÉgociable

(en millions d’euros)

Encours

Fin 2017

Fin 2018

Évolution 2017/2018

Part de l’encours

Ensemble de la dette-valeur actualisée

1 686 112

1 756 400

4,2 %

100 %

dont titres indexés

201 742

219 584

8,8 %

13 %

Obligations assimilables du Trésor – OAT

1 559 639

1 643 500

5,4 %

94 %

Bons du Trésor à taux fixe – BTF

126 473

112 900

– 10,7 %

6 %

Source : rapport annuel de performances Engagements financiers de l’État pour 2018.

Cette transformation de la composition de la dette de l’État est mise en œuvre depuis plusieurs années par l’Agence France Trésor (AFT), afin de sécuriser le refinancement de la dette via deux mécanismes :

– en limitant l’exposition de la dette à une remontée des taux sur les titres à court terme ;

– et en profitant de l’environnement actuel de financement avec des taux exceptionnellement bas pour les titres à moyen et long terme.

Ainsi, la durée de vie de la dette négociable de l’État s’allonge, s’élevant à 7 ans et 346 jours au 31 mars 2019, au lieu de 7 ans et 47 jours à la fin de l’année 2015.

Par ailleurs, la dette de l’État est exposée à hauteur de 13 % aux évolutions du taux d’inflation à travers les titres indexés sur l’indice des prix à la consommation en France (OATi) ou sur l’indice des prix de la zone euro (OAT€i). Cela explique les variations de la charge de la dette du fait d’une évolution du taux d’inflation en France ou au sein de la zone euro. En effet, les fluctuations de l’inflation se répercutent sur la totalité de l’encours de titres indexés, à l’inverse des évolutions de taux qui affectent uniquement les émissions de titres. Compte tenu d’un encours de titres indexés de l’ordre de 220 milliards d’euros, une variation de l’inflation de 0,1 % se traduit par une variation de la charge d’indexation de 220 millions d’euros.

B.   LE BESOIN DE FINANCEMENT DE L’ÉTAT INFÉRIEUR AUX PRÉVISIONS

Le besoin de financement de l’État s’est établi à 191,9 milliards d’euros, en retrait de 10,7 milliards d’euros par rapport à la loi de finances initiale. Cela résulte notamment d’un déficit budgétaire à 76 milliards d’euros, inférieur de 9,7 milliards d’euros au niveau prévu en loi de finances initiale.

tableau de financement au titre des annÉes 2016 À 2018

(en milliards d’euros)

 

Exécution

2016

Exécution

2017

LFI

2018

LFR

2018

Exécution

2018

Écart LFI /

Exécution

Besoin de financement

194,1

183,1

202,6

197,2

191,9

 10,7

Amortissement de titres d’État à moyen et long terme

124,9

115,2

116,6

116,6

116,6

0

Amortissement de dettes reprises par l’État

Déficit à financer (*)

69,1

67,7

85,7

80,0

76,0

– 9,7

Autres besoins de financement

0,1

0,2

0,3

0,6

– 0,6

– 0,9

Ressources de financement

194,1

183,1

202,6

197,2

191,9

 10,7

Émissions à moyen et long terme (OAT et BTAN) nettes des rachats

187,0

185,0

195,0

195,0

195,0

0

Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement

1,0

1,0

– 1,0

Variation des BTF (+ si augmentation de l’encours ;
– sinon)

– 18,7

– 7,5

– 10,0

– 13,6

– 13,6

Variation des dépôts des correspondants (+ si augmentation de l’encours ;
– sinon)

+ 1,6

+ 4,7

+ 1,0

+ 4,5

+ 9,8

+ 8,8

Variation des disponibilités
(+ si diminution ; – sinon) (1)

+ 4,6

– 9,2

+ 2,1

– 1,7

– 11,1

– 13,2

Autres ressources de trésorerie

19,7

10,0

3,5

8,4

11,8

8,3

(*) Hors dépenses affectées au programme d’investissements d’avenir (PIA).

(1) Un signe + indique une contribution des disponibilités du Trésor au financement de l’État.

Source : rapport annuel de performances Engagements financiers de l’État pour 2018.

Toutefois, le besoin de financement de l’État est maintenu à un niveau élevé par rapport aux exercices précédents, en raison des amortissements de titres d’État.

NIVEAU Du BESOIN de financement de l’État

(en milliards d’euros)

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

104,9

164,0

246,2

236,9

188,6

188,6

185,5

179,1

189,1

194,1

183,1

191,9

Source : rapports annuels de performances Engagements financiers de l’État.

Le besoin de financement est significativement supérieur aux niveaux d’avant-crise. Ainsi, la Cour des comptes a relevé que le besoin de financement de l’État s’élevait en moyenne à 109 milliards d’euros entre 2001 et 2007 ([39]).

C.   LES RESSOURCES DE FINANCEMENT DE L’ÉTAT

Le besoin de financement de l’État est assuré par diverses ressources, dont principalement les émissions de titres à moyen et long terme.

1.   Le niveau très élevé d’émissions de titres à moyen et long terme

Les émissions de titre à moyen et long terme se sont élevées à 225 milliards d’euros, soit un niveau très élevé en comparaison avec les exercices précédents. Ce niveau d’émissions a permis à l’État de racheter 30 milliards d’euros de dette arrivant à échéance en 2019 et 2020.

Les émissions de titres à moyen et long terme

(en milliards d’euros)

Année

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Émissions brutes de titres à moyen et long terme

132

178,6

210,7

207,8

201,5

192

203,1

220

214

213,1

225

Rachats de titres

3,4

13,6

22,7

23,8

23,5

23

31,1

33

27

28,1

30

Émissions nettes de titres à moyen et long terme

128,5

164,9

187,6

183,4

177,9

169

172

187

187

185,0

195

N.B. : les arrondis peuvent entraîner un décalage pour certains résultats.

Source : lois de règlement successives et présent projet de loi de règlement.

Ainsi, les émissions de titres nettes des rachats se sont établies à 195,0 milliards d’euros, un niveau conforme à la loi de finances initiale et en hausse de 10 milliards d’euros par rapport à l’exercice 2017.

2.   La poursuite de la politique de diminution de l’encours de titres à court terme

Conformément à la politique de sécurisation de la dette de l’État menée par l’AFT, l’encours des titres à court terme (BTF) a été réduit à hauteur de 13,6 milliards d’euros, après une diminution de 7,5 milliards d’euros en 2017.

Ce niveau de réduction de l’encours des BTF se rapproche des montants atteints en 2015 (– 22,6 milliards d’euros) et en 2016 (– 18,7 milliards d’euros).

3.   La confirmation de la normalisation du niveau des primes à l’émission

En 2018, les primes à l’émission nettes des décotes se sont établies à 11,3 milliards d’euros, après 10,5 milliards d’euros en 2017. Ces niveaux de primes à l’émission nettes des décotes marquent un retour à la normale par rapport aux niveaux atteints en 2015 (22,7 milliards d’euros) et en 2016 (20,8 milliards d’euros).

Les primes et décotes à l’émission

Les émissions de titres donnent lieu à l’existence de primes ou décotes, lorsque le taux facial de l’obligation (taux de coupon) diffère du taux issu de l’adjudication.

Ainsi, les souscripteurs versent une prime si le taux facial est supérieur au taux d’adjudication, à l’inverse ils bénéficient d’une décote si le taux facial est inférieur au taux d’adjudication.

Exemple : taux facial de l’obligation (3 %), taux issu de l’adjudication (1 %). Dans ce cas, l’émission du titre donnera lieu au versement d’une prime par les souscripteurs.

Le niveau des primes et décotes est calculé selon les méthodes actuarielles, afin de garantir, sur la durée de vie du titre, un niveau identique entre les versements issus du taux d’adjudication et le taux facial.

L’existence de primes lors de l’émission de titres a été fréquente au cours des derniers exercices du fait de taux d’intérêt historiquement bas, générant de façon mécanique un niveau élevé de primes à l’émission. Elle résulte aussi de l’émission de titres dites sur souches anciennes, c’est-à-dire avec des caractéristiques comparables à des titres déjà émis. Or, les titres déjà émis présentent des taux d’intérêt supérieurs aux taux de marché exceptionnellement bas, constatés au cours des trois derniers exercices.

Les primes à l’émission représentent des ressources de trésorerie de l’État, qui sont mobilisées pour le rachat de titres à court terme et par conséquent pour la diminution de leur encours.

En 2017 et en 2018, les primes à l’émission retrouvent un niveau semblable aux exercices antérieurs entre 2010 et 2014.

Évolution du NIVEAU DES PRIMES À L’ÉMISSION NETTES DES DÉCOTES

(en milliards d’euros)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

4,4

8,2

2,5

9,2

6,0

7,4

22,7

20,8

10,5

11,3

Source : Gouvernement.

La Cour des comptes indique que le volume d’émissions de titres sur des souches anciennes s’est élevé à 54,3 milliards d’euros en 2018, au lieu de 32,8 milliards d’euros en 2017. Cela a généré l’augmentation du niveau des primes à l’émission (effet volume), indépendamment de la réduction de l’écart de taux entre le taux de coupon attaché aux taux émis et le taux de marché, qui s’est établi à 1,41 % en 2018, au lieu de 2,16 % en 2017 (effet taux).

Le traitement comptable des primes à l’émission

Les primes à l’émission représentent une ressource de trésorerie pour l’État, au sens de l’article 2 de la loi organique relative aux lois de finances (1).

Au sens de la comptabilité générale et de la comptabilité nationale « maastrichtienne », les primes et décotes à l’émission sont amorties de façon étalée sur toute la durée de vie du titre, la charge financière correspond dès lors au taux d’intérêt issu de l’adjudication.

En revanche, la charge financière en comptabilité budgétaire correspond aux décaissements liés aux intérêts servis, conformément au taux de coupon.

Ainsi, les primes et décotes à l’émission contribuent à alléger de 7,3 milliards d’euros la charge de la dette en 2018, au sens de la comptabilité maastrichtienne.

(1)    Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

4.   Les dépôts des correspondants, un niveau sensiblement supérieur à la prévision de la loi de finances initiale

Les fonds déposés par les correspondants au Trésor sont supérieurs de 8,8 milliards d’euros aux prévisions de la loi de finances initiale, s’établissant à 9,8 milliards d’euros au lieu d’un milliard d’euros.

Dans les réponses transmises au Rapporteur général, le Gouvernement indique qu’il n’est généralement pas possible d’anticiper les variations des dépôts des correspondants. L’échantillon, qui comprend l’ensemble des collectivités territoriales et des établissements publics, est en effet très large et les évolutions individuelles sont difficiles à prévoir.

Dès lors, les dépôts des correspondants sont conventionnellement positionnés en valeur nulle en loi de finances initiale, sauf à ce que l’AFT dispose au moment de la préparation du projet de loi de finances d’informations sur des mesures affectant le périmètre des déposants au Trésor. En 2018, la hausse anticipée correspondait au rapatriement de la trésorerie d’établissements publics, qui dérogeaient jusqu’alors au principe de centralisation des dépôts au Trésor.

À fin 2018, les fonds déposés au Trésor par les correspondants ont augmenté de 9,8 milliards d’euros par rapport à fin 2017, contre une hausse d’un milliard d’euros anticipée en loi de finances initiale. Cette augmentation résulte notamment de la trésorerie déposée par les collectivités territoriales (+ 3,8 milliards d’euros), par les banques centrales de la zone franc (+ 3,2 milliards d’euros) et par les établissements publics nationaux (+ 2,3 milliards d’euros).

5.   Les disponibilités du Trésor, un niveau significativement supérieur à la prévision de la loi de finances initiale

Les disponibilités du Trésor sont supérieures de 13,2 milliards d’euros aux prévisions de la loi de finances initiale, augmentant de 11,1 milliards d’euros au lieu d’une baisse anticipée de 2,1 milliards d’euros. Pour rappel, une contribution négative des disponibilités au sein des ressources de financement correspond à une hausse de la trésorerie disponible en fin d’année.

Selon les éléments transmis au Rapporteur général, les mouvements de trésorerie des correspondants étant incertains, jusqu’aux derniers jours de l’année, l’État ne prend pas le risque d’ajuster immédiatement à la baisse ses émissions de dette, donc sa trésorerie disponible, en cas de hausse des dépôts des correspondants, car ces hausses sont parfois temporaires.

II.   UNE CHARGE DE LA DETTE EN DIMINUTION PAR RAPPORT À 2017, BIEN QUE SUPÉRIEURE À LA PRÉVISION DE LA LOI DE FINANCES INITIALE

La charge de la dette de l’État s’élève à 41,5 milliards d’euros en 2018, en recul de 0,2 milliard d’euros par rapport à 2017. Cela illustre les conditions de financement toujours exceptionnelles de l’État, dont l’encours de dette continue de progresser avec une charge de la dette qui diminue concomitamment.

Toutefois, la charge de la dette est supérieure à la prévision de la loi de finances initiale, en raison d’un taux d’inflation en France et au sein de la zone euro supérieur aux anticipations.

A.   UNE CHARGE DE LA DETTE EN DIMINUTION PAR RAPPORT À 2017

En 2018, la charge de la dette et de la trésorerie de l’État s’établit à 41,5 milliards d’euros, au lieu de 41,7 milliards d’euros en 2017.

Cela représente une baisse de la charge de la dette de 4,8 milliards d’euros entre 2012 et 2018, pour une augmentation de l’encours de la dette de l’État de 370 milliards d’euros sur la même période.

Évolution de la charge de la dette et de la trÉsorerie de l’État

(en milliards d’euros)

Source : lois de règlement et présent projet de loi de règlement.

La diminution de la charge de la dette et de la trésorerie de l’État résulte des facteurs haussiers et baissiers suivants :

– un effet volume défavorable (impact de + 0,8 milliard d’euros), lié à l’augmentation de l’encours de dette à moyen et long terme ;

– un effet taux favorable (impact de – 2 milliards d’euros), entièrement imputable à la dette de moyen-long terme ;

– un effet inflation défavorable (impact de + 1 milliard d’euros), imputable au rebond de l’inflation en 2018 ;

– les émissions de l’année produisent une variation de – 0,1 milliard d’euros (charge nette quasi nulle en 2018).

B.   UNE CHARGE DE LA DETTE SUPÉRIEURE AUX PRÉVISIONS DE LA LOI DE FINANCES INITIALE

Néanmoins, la charge de la dette et de la trésorerie de l’État ressort en augmentation de 0,3 milliard d’euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2018.

comparaison prÉVISION ET EXÉCUTION de la charge de la dette
et de la trÉSORERIE DE L’ÉTAT

(en milliards d’euros)

 

Exercice

2012

Exercice

2013

Exercice

2014

Exercice

2015

Exercice

2016

Exercice

2017

Exercice 2018

Prévision LFI

48,8

46,9

46,7

44,3

44,5

41,5

41,2

Exécution

46,3

44,9

43,2

42,1

41,5

41,7

41,5

Écart

– 2,5

– 2,0

– 3,5

– 2,2

– 3,0

+ 0,2

+ 0,3

N.B. : hors swaps.

Source : lois de finances initiales, lois de règlement et présent projet de loi de règlement.

Le niveau de la charge de la dette et de la trésorerie de l’État supérieur aux prévisions résulte des facteurs contraires suivants :

– une inflation plus forte qu’anticipé (1,6 % en France et en zone euro, au lieu de prévisions à 1 % en France et 1,2 % en zone euro), soit un surcoût de 0,9 milliard d’euros, en raison des titres de dette dont le taux d’intérêt est indexé sur l’inflation ;

– un maintien à un niveau très bas des taux d’intérêt à court terme, avec une hypothèse de redressement jusqu’à – 0,10 % fin 2018 en loi de finances initiale, contre un taux à l’émission maintenu à – 0,60 % en moyenne sur l’année, soit une diminution de la charge de la dette de 0,5 milliard d’euros ;

– et une dépense nette résultant des placements de trésorerie à taux négatifs supérieure de 0,1 milliard d’euros aux prévisions.

*

*     *

 

 

 


—  1  —

   FICHE 6 : LA COMPTABILITÉ GÉNÉRALE DE L’ÉTAT

Le projet de loi de règlement est accompagné du compte général de l’État prévu à l’article 54 de la LOLF. Le compte général de l’État comporte un bilan, un compte de résultat, un tableau des flux de trésorerie et une annexe. Il se rapproche en cela de la comptabilité d’une entreprise et ne s’en distingue qu’à raison des spécificités de l’action de l’État.

L’article 3 du présent projet de loi de règlement a pour objet d’approuver le compte de résultat de l’exercice 2018, d’affecter ce résultat comptable au bilan, d’arrêter ledit bilan, puis d’approuver l’annexe du compte général de l’État.

La comptabilité générale permet ainsi de rendre compte de l’ensemble de la situation financière et patrimoniale de l’État (I) et des résultats de l’exercice (II).

Elle a aussi pour fonction de retracer les engagements hors bilan de l’État, notamment ceux résultant des engagements de retraite et des garanties octroyées à des entités publiques ou privées (III).

Afin de s’assurer de la fiabilité des informations comptables, le législateur organique (5° de l’article 58 de la LOLF) a confié à la Cour des comptes la mission de certifier les comptes de l’État (IV).

La comptabilité générale de l’État, dix ans après : une nouvelle étape à engager

La Cour des comptes a rendu public, le 22 février 2016, un rapport sur la comptabilité générale de l’État. Ce rapport dresse un bilan de la mise en œuvre de cette nouvelle comptabilité. Il en détaille les apports et les limites.

Au titre des apports, la Cour des comptes a souligné que la comptabilité générale avait permis une meilleure transparence et connaissance du patrimoine de l’État ainsi qu’une modernisation des services financiers en favorisant des travaux communs entre les différents gestionnaires.

Au titre des limites, la Cour des comptes a constaté que la comptabilité générale n’avait pas encore trouvé sa place dans le débat public. Elle est largement concurrencée sur ce terrain par la comptabilité nationale dont le champ est plus large et dont les résultats servent directement au suivi du respect des engagements européens de la France : « Tandis que la tenue de la comptabilité générale se développait, la comptabilité nationale a connu une extension sans précédent de son audience (… ) le solde des administrations publiques en comptabilité nationale est devenu lun des principaux enjeux des lois de finances. »

Toujours au titre des limites, la Cour des comptes a relevé que la comptabilité générale était peu utilisée par les gestionnaires publics. De ce fait, elle a peu fait évoluer les pratiques administratives. En outre, la fiabilité des comptes est encore insuffisante dans certains domaines importants (immobilisations financières, stocks, créances sur redevables).

La Cour des comptes a formulé une série de recommandations en vue d’améliorer les conditions d’établissement de la comptabilité générale, d’une part, et d’accroître son utilisation par les gestionnaires, d’autre part.

I.   LE BILAN DE L’ÉTAT : UNE SITUATION NETTE PATRIMONIALE NÉGATIVE de PRÈS DE 1 300 MILLIARDS D’EUROS

Comptablement, la situation nette de l’État est négative à hauteur de 1 295,6 milliards deuros au 31 décembre 2018 au lieu de 1 261,9 milliards d’euros au 31 décembre 2017. Elle s’est ainsi dégradée de 33,7 milliards d’euros, ce qui s’explique par le résultat patrimonial (– 51,9 milliards d’euros), lequel a été partiellement compensé par une hausse de la valorisation des immobilisations (+ 27,9 milliards d’euros).

La situation nette de l’État n’est toutefois pas comparable à celle d’une entreprise, puisqu’il ne dispose pas, à l’actif, de capital social ou d’équivalent. En outre, l’État dispose d’un actif incorporel particulier, qui n’est pas valorisé dans ses comptes : sa souveraineté et sa capacité à lever l’impôt. Enfin, il comptabilise des charges qui pourraient être considérées comme des investissements pour la collectivité, comme les dépenses de recherche et d’enseignement supérieur.

La situation nette patrimoniale est égale à la différence entre l’actif de l’État, évalué à 1 051,9 milliards d’euros, et son passif, évalué à 2 347,5 milliards d’euros au 31 décembre 2018.

Situation nette patrimoniale de l’état au 31 décembre 2018

(en milliards d’euros, arrondis au dixième)

Actif (I)

1 051,9

Passif (II)

2 347,5

Situation nette patrimoniale (III = I  II)

 1 295,6

Source : compte général de l’État.

A.   PLUS DE 1 000 MILLIARDS D’EUROS D’ACTIF

L’actif de l’État dépasse les 1 000 milliards d’euros, alors qu’il était évalué aux environs de 500 milliards d’euros dans la première édition de la comptabilité générale en 2006. Entre-temps, la connaissance du patrimoine de l’État a été améliorée et enrichie, notamment par la valorisation des infrastructures.

Les changements de périmètre et de méthodes d’évaluation, ainsi que les réserves de la Cour des comptes sur certains postes de l’actif, rendent peu pertinentes les comparaisons avec les années précédentes.

Ce patrimoine, très varié, comprend principalement des participations et des infrastructures.

Principaux actifs de l’État au 31 décembre 2018

Catégorie dactifs

Valeur nette
(en milliards deuros, arrondis au dixième)

Participations et créances rattachées*

345,8

Concessions autoroutières

160,3

Infrastructures routières non concédées

135,1

Créances sur redevables

69,4

Parc immobilier

50,3

Concessions hydrauliques

47,5

Matériel militaire*

39,0

Fonds bancaires et fonds en caisse

31,5

Stocks*

28,9

Prêts et avances

17,9

Actifs des fonds sans personnalité juridique

11,2

Spectre hertzien

9,8

* Ces éléments d’actif font l’objet d’une réserve de certification par la Cour des comptes.

Source : Cour des comptes.

Comme pour un bilan d’entreprise, l’actif de l’État est ventilé en immobilisations, actif circulant (stocks et créances) et trésorerie.

Actif de l’État

Catégorie dactifs

Au 31 décembre 2018

(valeur nette en milliards deuros arrondis au dixième)

Au 31 décembre 2017

(valeur nette en milliards deuros arrondis au dixième)

Immobilisations

879,9

851,1

Actif circulant

126,8

127,0

Trésorerie active

46,0

33,2

Compte de régularisation

0,2

1,3

Total

1 051,9

1 012,6

1.   Des immobilisations, en hausse, qui constituent l’essentiel de l’actif

Les immobilisations de l’État sont évaluées à la clôture de l’exercice à 879,9 milliards d’euros au lieu de 851,1 milliards l’an dernier. Cette hausse de près de 28 milliards d’euros s’explique notamment par la hausse importante de l’indice des coûts de construction utilisé pour réévaluer les infrastructures routières et hydrauliques à fin 2018.

2.   Un actif circulant stable

L’actif circulant hors trésorerie est évalué à 126,8 milliards d’euros au 31 décembre 2018, soit un niveau quasi identique à celui enregistré au 31 décembre 2017 (127 milliards).

Les créances sur les redevables constituent plus de la moitié de l’actif circulant (69,4 milliards d’euros). Il s’agit d’impôts ou d’amendes dus en 2018 mais qui n’avaient pas encore fait l’objet d’un paiement au 31 décembre.

Les stocks représentent environ un quart de l’actif circulant (28,9 milliards d’euros).

3.   Une trésorerie disponible qui augmente

La trésorerie disponible au 31 décembre 2018 s’élève à 46 milliards d’euros au lieu de 33,2 milliards d’euros au 31 décembre 2017.

B.   UN PASSIF DE PRÈS DE 2 350 MILLIARDS D’EUROS

Passif de l’État

Catégorie de passifs

Au 31 décembre 2018

(valeur nette en milliards deuros arrondis au dixième)

Au 31 décembre 2017

(valeur nette en milliards deuros arrondis au dixième)

Dettes financières

1 780,7

1 710,7

Dettes non financières

245,2

244,8

Provisions pour risques et charges

146,0

150,4

Autres passifs

36,2

39,5

Trésorerie passive

116,9

107,9

Comptes régularisation

22,5

22,2

Total

2 347,5

2 274,6

1.   Un passif principalement constitué de dettes financières

Le passif de l’État se caractérise par l’importance des dettes financières (1 780,7 milliards d’euros au 31 décembre 2018 en hausse de 70,0 milliards d’euros). Ceci illustre limportance, sur longue période, du besoin de financement de lÉtat.

La proportion de la dette à moyen et long terme (maturité de deux à cinquante ans) tend à augmenter, tandis que les dettes à court terme (maturité inférieure à un an) diminuent. De ce fait, la durée de vie moyenne de l’ensemble de la dette négociable de l’État est en augmentation et s’établit désormais à 7 ans et 336 jours au lieu de 7 ans et 226 jours au 31 décembre 2017.

Les dettes financiÈres de l’État

(en milliards d’euros, arrondis au dixième)

Catégorie de dettes financières

31 décembre 2018

31 décembre 2017

Variation 2018/2017

Titres négociables à moyen et long terme*

1 660,5

1 576,8

+ 83,7

Titres négociables à court terme*

113,1

126,7

– 13,6

Total

1 773,6

1 703,5

+ 70,1

* Les montants mentionnés sont légèrement supérieurs à ceux de la comptabilité budgétaire car ils intègrent, en comptabilité générale, les intérêts courus et assimilés.

Source : note 11 du rapport de présentation 2018 annexé au présent projet de loi de règlement.

Le rapport de présentation du compte général de l’État mentionne que trente-deux adjudications de titres à long et moyen terme ont été réalisées sur l’exercice 2018 et que leur taux moyen a diminué pour s’établir à 0,53 % au lieu de 0,65 % en 2017.

Les taux à court terme sont négatifs pour le troisième exercice consécutif et ont encore baissé. Ils sont ressortis à – 0,60 % en moyenne en 2018, au lieu de
– 0,62 % en 2017.

2.   Des dettes non financières stables

Les dettes non financières, hors trésorerie, sont de 245,2 milliards d’euros au 31 décembre 2018 au lieu de 244,8 milliards d’euros au 31 décembre 2017, soit une quasi-stabilité.

3.   Des provisions pour risques et charges en légère baisse

Les provisions pour risques et charges diminuent de 4,14 milliards d’euros pour s’établir à 146 milliards d’euros. La baisse s’explique en grande partie par le contrecoup de la décision du Conseil constitutionnel du 6 octobre 2017 ayant annulé la taxe de 3 % sur les montants des revenus distribués. La majeure partie des remboursements a été sollicitée en 2017, ce qui avait provoqué une hausse sur l’exercice 2017 des demandes 2017.

4.   Une trésorerie passive substantielle

La trésorerie passive correspond aux dépôts des correspondants du Trésor et assimilés. Elle est de 116,9 milliards d’euros au 31 décembre 2018, en hausse de 9,8 milliards d’euros.

II.   LE COMPTE DE RÉSULTAT DE L’ÉTAT : UN RÉSULTAT PATRIMONIAL NÉGATIF DE 51,9 MILLIARDS D’EUROS

Le résultat patrimonial 2018 s’établit à – 51,9 milliards d’euros, en amélioration de 9,2 milliards d’euros par rapport à 2017 en raison de l’augmentation des produits régaliens stimulés par la reprise de l’activité économique (+ 11,5 milliards d’euros), et ce malgré une hausse des charges nettes (+ 2,3 milliards d’euros).

FORMATION du résultat de l’État en 2018

(en milliards d’euros)

Poste

Exercice 2018

Exercice 2017

Variation

 

Cycle

de fonctionnement

Charges (a)

266,0

268,8

– 2,8

Produits (b)

77,1

73,1

– 4,0

Charges nettes (I =a-b)

188,9

195,7

 6,8

 

Cycle

dintervention

Charges (a)

193,1

190,5

– 2,6

Produits (b)

38,4

39,0

– 0,7

Charges nettes (II = a-b)

154,7

151,4

+ 3,3

 

Cycle

Financier

Charges (a)

57,3

51,7

+ 5,6

Produits (b)

34,8

35,0

– 0,3

Charges nettes (III = a-b)

22,5

16,7

+ 5,8

 

Total des charges nettes (A = I + II + III)

366,1

363,8

 2,3

 

Produits régaliens nets (B)

314,3

302,8

+ 11,5

 

Résultat (B-A)

 51,9

 61,1

+ 9,2

Source : rapport de présentation 2018 annexé au présent projet de loi de règlement.

A.   LE CYCLE DE FONCTIONNEMENT

Le cycle de fonctionnement s’est amélioré de près de 7 milliards d’euros en 2018. Il comprend essentiellement les charges de personnel (145,9 milliards d’euros), lesquelles constituent le premier poste du compte de résultat de l’État. Elles progressent de 2,7 milliards d’euros par rapport à 2017.

B.   LE CYCLE D’INTERVENTION

Les charges nettes d’intervention progressent légèrement en 2018 (+ 3,3 milliards d’euros).

C.   LE CYCLE FINANCIER

Le cycle financier comprend essentiellement le paiement des intérêts de la dette (39,1 milliards), lesquels sont en baisse par rapport à 2017 (40 milliards d’euros).

D.   LES PRODUITS RÉGALIENS NETS

Les produits régaliens nets sont la somme des produits fiscaux nets et des amendes et pénalités, sous déduction des ressources propres du budget de l’Union européenne. Ils sont en forte hausse en 2018. Une forte élasticité des impôts à la croissance et la reprise économique expliquent ce résultat.

Les produits régaliens nets

(en milliards d’euros, arrondis au dixième)

Catégorie de produits

31 décembre 2018

31 décembre 2017

Variation 2018/2017

Produits fiscaux nets

325,4

310,7

+ 14,7

Amendes, prélèvements divers et autres pénalités

9,5

8,5

+ 1,0

Ressources propres du budget de l’Union européenne

– 20,6

– 16,4

– 4,3

Total

314,3

302,8

+ 11,5

  Source : rapport de présentation 2018 annexé au présent projet de loi de règlement.

III.   LES ENGAGEMENTS HORS BILAN

Les engagements hors bilan de l’État sont constitués de l’ensemble des obligations potentielles qui, sans réunir les critères d’inscription au bilan, s’imposent à l’État et sont susceptibles d’avoir un impact significatif sur sa situation financière.

Ils s’élèvent à environ 4 000 milliards d’euros. Les engagements hors bilan relatifs aux retraites en représentent environ la moitié et sont en baisse  en raison d’une variation est du taux d’actualisation retenu (– 0,30 % en 2018 au lieu de – 0,55 % en 2017).

Les garanties dues au titre des livrets d’épargne réglementés correspondent au montant des dépôts et portent sur 435 milliards d’euros.

Les principaux engagements hors bilan de l’État

(en milliards d’euros)

Poste

Exercice 2018

Exercice 2017

Engagements de retraites

2 080,4

2 212,3

Livrets d’épargne réglementés

434,8

420,2

Mission de régulateur économique et social – régimes sociaux de retraite

376,2

377,7

Dette garantie par l’État

210,4

207,1

Source : rapport de présentation 2018 annexé au présent projet de loi de règlement.

À noter que le montant des déficits reportables représente, au 31 décembre 2018, 240 milliards d’euros pour l’impôt sur les sociétés, soit une moindre imposition potentielle de 80 milliards d’euros. Ces montants sont inscrits au hors-bilan car il ne s’agit pas d’une dette certaine : il est en effet loisible au législateur de réduire voire de supprimer les possibilités de report des déficits fiscaux acquis au cours des années précédentes.

IV.   LA POURSUITE DES PROGRÈS EN MATIÈRE DE CERTIFICATION DES COMPTES

Depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, l’article 47‑2 de la Constitution dispose que « les comptes des administrations publiques sont réguliers et sincères » et qu’« ils donnent une image fidèle du résultat de leur gestion, de leur patrimoine et de leur situation financière ». Le troisième alinéa de l’article 27 de la LOLF prévoit que « les comptes de lÉtat doivent être réguliers, sincères et donner une image fidèle de son patrimoine et de sa situation financière ».

Le législateur organique a ainsi confié à la Cour des comptes la mission de certifier la régularité, la sincérité et la fidélité des comptes de l’État.

Depuis l’entrée en vigueur de la LOLF en 2006, les comptes de l’État ont été systématiquement certifiés, même si cette certification a toujours été assortie de réserves. Des progrès significatifs ont été régulièrement réalisés et la tenue de la comptabilité générale en droits constatés s’est progressivement améliorée, ce qui a permis, en dix ans, la levée de quatorze réserves.

En 2018, les comptes de l’État sont certifiés réguliers et sincères, sous quatre réserves substantielles comme en 2016 et 2015. Le Rapporteur général salue la mobilisation et le travail de l’administration qui ont permis d’atteindre ce résultat.

Les réserves substantielles de la Cour des comptes portent comme l’an dernier sur :

– les limites générales dans l’étendue des vérifications ;

– les anomalies relatives aux stocks militaires et aux immobilisations corporelles ;

– les anomalies relatives aux immobilisations financières ;

– les anomalies relatives aux charges et aux produits régaliens.

La Cour des comptes a, en outre, levé quatorze parties de réserves au sein des réserves substantielles.

Toutefois, si toutes les demandes de la Cour des comptes avaient été prises en compte, la situation nette de l’État aurait été dégradée de 6,4 milliards deuros par rapport à la situation nette présentée dans les comptes arrêtés pour 2018.

Évolution du nombre de réserves depuis 2006

Exercice

2006

2007

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Nombre de réserves

13

12

9

7

5

4

Source : Cour des comptes.

*

*     *

 

 

 


—  1  —

   TRAVAUX DE LA COMMISSION

   AUDITION DE M. GÉRALD DARMANIN, MINISTRE DE L’ACTION ET DES COMPTES PUBLICS

Lors de sa réunion du 15 mai 2019, la commission a auditionné M. Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics sur le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2018.

M. le président Éric Woerth. Cette année, nous commençons à peu près une semaine plus tôt que l’année dernière l’examen du projet de loi de règlement. Cela offre un temps supplémentaire très précieux au Rapporteur général, à ses services et aux rapporteurs spéciaux pour préparer leurs travaux. J’en remercie le Gouvernement.

Mercredi 22 mai prochain, le Premier président de la Cour des comptes, Didier Migaud, également président du Haut Conseil des finances publiques, présentera l’avis du Haut Conseil relatif au solde structurel des administrations publiques présenté dans le projet de loi de règlement, ainsi que le rapport de la Cour relatif aux résultats de la gestion budgétaire de l’exercice 2018 et sur la certification des comptes de l’État.

Ce sera ensuite, du mardi 28 mai au jeudi 6 juin, le temps du deuxième « printemps de l’évaluation » des politiques publiques, qui commencera par les commissions d’évaluation des politiques publiques, dont la forme pourra être légèrement différente de l’an dernier, mais dont l’esprit reste le même. L’exercice requiert évidemment une présence active des membres de la commission des finances mais aussi des membres des commissions concernées – j’ai écrit à tous les présidents de commission à ce propos.

Le 5 juin, nous examinerons en commission les articles du projet de loi de règlement. Entre le lundi 17 et le mercredi 19 juin, en séance publique, nous entendrons le Premier président de la Cour des comptes ; suivront débats, questions et adoption de résolutions, avant que nous ne concluions par l’examen du projet de loi de règlement que M. Darmanin nous présente maintenant, à la suite du Conseil des ministres de ce matin.

M. Gérald Darmanin, ministre de laction et des comptes publics. En effet, j’ai présenté ce matin en Conseil des ministres le projet de loi de règlement qui sera soumis à l’approbation de l’Assemblée et du Sénat dans les prochaines semaines. Avant de me présenter cet après-midi devant la haute assemblée, j’ai plaisir à vous retrouver pour évoquer ces résultats définitifs de l’État qui, avec ces rapports annuels de performances que nous vous avons transmis le plus en amont possible, serviront de base à la deuxième édition – vous l’avez dit, monsieur le président – du printemps de l’évaluation, dont j’ai pu prendre connaissance du programme, extrêmement ambitieux. Vous avez bien voulu souligner le fait que nous avons avancé notre calendrier pour permettre aux parlementaires de travailler le plus en amont possible. Je tiens là une promesse faite devant votre commission l’année dernière. Je crois que c’est une bonne chose effectivement que d’avoir ces quinze jours d’avance pour que chacun, singulièrement le Rapporteur général et ses services, puisse travailler dans de bonnes conditions.

La mise à disposition de la base de données « Chorus » permettra d’accompagner le renforcement de votre rôle d’évaluation des politiques publiques, tout spécifiquement dans sa dimension budgétaire et financière ; je m’y étais engagé. De la même manière, j’ai souhaité que soit mise à la disposition du grand public, en open data, pour la première fois un grand nombre de données détaillées de comptabilité générale. Cet effort de transparence s’ajoute ainsi à notre effort de sincérité de ces deux dernières années, aussi bien du point de vue de la budgétisation initiale que de notre endettement.

D’autres améliorations sont encore possibles à l’avenir. Je crois notamment qu’il serait opportun que la loi de règlement puisse également tenir compte des résultats de nos comptes sociaux. Je sais qu’il s’agit là d’une proposition que Didier Migaud à laquelle vous êtes naturellement sensible, monsieur le président – le ministre des comptes publics que je suis l’est aussi.

Même partiels, c’est-à-dire ne concernant que l’État, ces résultats concrets démontrent la crédibilité de la stratégie du Gouvernement et de la majorité parlementaire pour redresser nos comptes publics. En 2018, le déficit des administrations publiques s’élève ainsi à 2,5 % du produit intérieur brut (PIB), alors qu’en loi de finances l’objectif était de 2,8 % ; c’est la première fois depuis dix ans que notre pays parvient à contenir son déficit public sous le seuil de 3 % du PIB. Autre motif de satisfaction et de fierté : un déficit de 2,5 % en 2018, qui intègre celui du système ferroviaire – la Cour des Comptes l’a évoqué ce matin. C’est la preuve que les engagements du Gouvernement ont été tenus, et même au-delà.

Si les engagements ont été tenus, c’est d’abord grâce aux chantiers de transformation de l’action publique qui nous ont permis de mieux maîtriser la dépense publique. En 2018, pour la première fois depuis des décennies, celle-ci a décru en volume. Le ratio des dépenses publiques hors crédits d’impôt rapportées au PIB est ainsi passé de 55 % à 54,4 %. Cela rend d’autant plus crédible l’objectif d’une baisse de 3 points de ce ratio d’ici à la fin du quinquennat, que se sont fixés le Président de la République et la majorité parlementaire.

S’agissant précisément du budget général de l’État, vous me permettrez d’ajouter que nous sommes parvenus à respecter nos objectifs en dépit de mauvaises nouvelles sur lesquelles le Gouvernement n’a pas de prise. Je pense ici à la charge de la dette ainsi qu’au prélèvement au profit de l’Union européenne qui, par le passé, permettaient à nos gouvernements – y compris le nôtre en 2017, lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités – de tenir peu ou prou leurs objectifs grâce à de bonnes nouvelles sur ces deux postes de dépenses. L’an passé, malgré une révision à la hausse en cours d’année de la charge de la dette comme de notre contribution au budget européen, le Gouvernement a strictement tenu l’objectif de dépenses qu’il s’était fixé en loi de finances initiale sur les dépenses totales de l’État, soit 425,4 milliards d’euros. Ce résultat n’a pu être obtenu que grâce aux efforts déployés par le Gouvernement, singulièrement par mon cabinet et mes services, sur la dépense dite « pilotable ». De fait, le Gouvernement fait mieux encore que les prévisions formulées à l’occasion du projet de loi de finances rectificative soumis à votre Assemblée au mois de novembre dernier puisque la dépense est inférieure non pas de 600 millions d’euros à la cible fixée en loi de finances initiale mais bien de 1,4 milliard d’euros. Vos questions, mesdames et messieurs les députés, me permettront sans doute de détailler cette moindre consommation des crédits.

J’ajoute que cette maîtrise de la dépense publique ne se limite pas à la dépense de l’État, mais également à la sphère sociale, puisque l’objectif national de dépenses d’assurance maladie a été respecté pour la neuvième année consécutive, ce qui a permis le redéploiement de 300 millions d’euros en faveur de l’hôpital – cela a désendetté les hôpitaux publics. De la même manière, la contractualisation financière avec les plus grandes collectivités, dont beaucoup, ici, prétendaient qu’elle n’était pas constitutionnelle ni ne serait respectée, ce qui donnerait à la Commission européenne matière à reproches, a fonctionné, et même très bien, puisque les dépenses de fonctionnement de celles-ci ont diminué de 0,2 %, bien en deçà de l’objectif fixé par le pacte de Cahors et sans aucune baisse des dotations aux collectivités locales – cela change des méthodes des dernières années. Le Gouvernement aura d’ailleurs l’occasion de dresser le bilan de l’application des dispositifs de maîtrise des dépenses locales pour l’année 2018 avant le débat d’orientation des finances publiques tandis qu’un second bilan développera bien les résultats obtenus par catégorie de collectivités avant l’examen du projet de loi de finances pour l’année 2020.

Si nos engagements ont été tenus, c’est aussi grâce une budgétisation prudente, sincère et plus respectueuse de l’autorisation parlementaire que par le passé. L’année 2018 a ainsi fait l’objet d’une gestion budgétaire moins heurtée que les précédentes, avec un faible taux de mise en réserve des crédits – 3 % contre 8 % les années précédentes, 4 milliards deuros au lieu de 10 milliards deuros les années précédentes – et l’absence de décret d’avance en fin d’année. Je crois, monsieur le président de la commission des finances, que, depuis votre première élection à l’Assemblée nationale, vous n’avez pas connu une année budgétaire sans décret d’avance – cela inclut les années où vous étiez membre du Gouvernement… C’est bien la première fois que cela arrive : promesse a été tenue – et est toujours tenue à cette date de l’année 2019 – de ne pas présenter de décret d’avance. Je rappelle que je n’ai procédé au dégel d’aucun crédit, à l’exception de ceux de la Cour des comptes. Cela montre que nous nous en tenons à notre démarche de sincérisation et de responsabilité budgétaires.

Pourquoi pas de décrets d’avance ? Parce que, désormais, aidés par les rapports de la Cour des comptes, les rapports des parlementaires et les évaluations de nos propres services, nous mettons les crédits nécessaires en face des dépenses que nous savons certaines. Nous ne sous-budgétisons pas et nous demandons ce qui est nécessaire, à l’euro près – si tant est que ce soit possible pour des budgets si importants –, au fonctionnement du service public.

Ainsi, pour la première fois depuis l’entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances, l’intégralité des ouvertures et des annulations sur le budget général a été décidée par le Parlement et uniquement par le Parlement, que ce soit dans le cadre du projet de loi de finances initiale ou dans celui du projet de loi de finances rectificative. De la même manière, je le répète, aucun dégel de crédit n’a été rendu nécessaire au cours de ce premier semestre.

J’ajoute, pour répondre à une interrogation que je sais bien légitime de votre commission et de votre président, avec qui j’ai évoqué l’erreur d’imputation des droits de mutations aux collectivités locales, que le plan d’action mis en œuvre pour éviter que celle-ci ne se reproduise a permis de réduire, au 31 décembre 2018, le solde du « compte de tiers » en matière de droits de mutation au niveau constaté à la fin de l’année 2016, soit son niveau résiduel. La direction générale des finances publiques (DGFiP) a par ailleurs, à ma demande – à la suite, notamment, de l’interpellation de M. le président de la commission des finances –, fait évoluer son système d’information afin de disposer, à la fin de chaque semestre, d’un suivi quotidien du compte de tiers, qui est à la disposition de M. le président de la commission des finances, et de simplifier la liquidation des droits de mutation. Cette erreur ne pourra donc pas se reproduire.

J’en viens à présent aux recettes de l’État, dont vous conviendrez aussi qu’elles sont conformes à nos prévisions. Elles sont même supérieures de 8,8 milliards d’euros à ce que nous avions prévu en loi de finances, et ce malgré les grèves de la SNCF et le mouvement dit des « gilets jaunes ». J’y vois là le signe de la solidité de notre économie, puisque ce dynamisme s’explique pour moitié par l’impôt sur les sociétés et pour moitié par la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Je me tiens à votre disposition, mesdames et messieurs les députés, pour détailler cela recette par recette.

Enfin – et logiquement, compte tenu des bons résultats obtenus tant en dépenses qu’en recettes –, le déficit budgétaire de l’État s’établit à 76 milliards d’euros, en amélioration de 10 milliards d’euros par rapport à celui prévu par la loi de finances rectificative présentée au mois novembre dernier. Ce résultat doit notamment être mis en regard des efforts budgétaires majeurs auxquels le Gouvernement et la majorité parlementaire ont consenti. Je pense bien entendu à l’augmentation substantielle des crédits de la mission Défense, pour 1,7 milliard d’euros par an, conformément à la loi de programmation militaire, mais également aux fortes consommations de crédits liées à la transition écologique, notamment le chèque énergie et la prime à la conversion.

Concrètement, pour la première fois depuis plus de dix ans, nous avons réussi à la fois à baisser les prélèvements obligatoires, de 0,2 point de PIB, soit 4 milliards d’euros, à baisser les dépenses publiques, de 0,6 point de PIB, soit 12 milliards d’euros, à baisser le déficit public, de 0,3 point, soit 6 milliards d’euros, et à stabiliser notre endettement à 98,4 % du PIB. Cela signifie que le cercle vertueux consistant à baisser les dépenses pour réduire les impôts et les taxes qui pèsent sur les Français est enclenché, qu’il a fonctionné l’année dernière et qu’il doit fonctionner cette année et – je le dis notamment au Rapporteur général – l’année prochaine, dans la construction de notre loi de finances pour l’année 2020. Vous me permettrez également de remarquer que la situation patrimoniale de l’État s’améliore nettement ; je sais que M. le Rapporteur général s’intéresse à ces questions. Le résultat patrimonial atteint même son meilleur niveau depuis 2008 : – 51,9 milliards d’euros contre
– 61,1 milliards en 2007, en raison notamment de l’augmentation de la valeur de l’actif immobilisé de l’État ainsi que de l’apurement de dettes contractées au cours des exercices précédents.

Ainsi, si je puis me permettre, monsieur le président, ces résultats sont en tous points contraires à ceux que vous annonciez à l’occasion de mon audition devant votre commission le 20 février dernier. Vous indiquiez en effet que les dépenses publiques « augmentent », que le déficit « stagne » et que la charge de la dette serait « en augmentation ». Les dépenses publiques en 2018 – la loi de règlement et la Cour des comptes l’évoquent – ont baissé, le déficit également et la dette est stabilisée ; la charge de la dette a même baissé. Certains se rappellent peut-être la discussion que j’avais eue avec M. Jacob dans l’hémicycle, à une heure assez tardive. Ils sont la preuve vivante que l’assainissement de nos comptes publics est une priorité du Gouvernement comme de la majorité, et je sais que c’est aussi votre priorité, monsieur le président. Il est sûr que ces premiers résultats sont très encourageants, mais le quinquennat n’est pas terminé et il nous faut continuer.

Les résultats obtenus en 2018 sont le fruit du sérieux budgétaire et d’une politique économique qui donne des résultats en matière de croissance et d’emplois, fondée sur la baisse des impôts, pour les consommateurs comme pour les entreprises. Nous devons capitaliser sur ceux-ci pour financer les baisses supplémentaires d’impôts annoncées par le Président de la République – notamment 5 milliards d’euros d’impôt sur le revenu –, dont les Français ont besoin, sans pour autant alourdir la charge de notre endettement, qui n’est autre qu’un impôt différé ; c’est notre préoccupation commune avec le ministre de l’économie et des finances. Ce cap, cette trajectoire sont l’expression d’une volonté que ce débat nous donne l’occasion de réaffirmer devant vous aujourd’hui. Nous allons constater les résultats de 2018 pour mieux préparer l’été budgétaire et la discussion, à l’automne, du projet de loi de finances pour 2020. Il est sûr que la baisse de la dépense publique est un effort quotidien ; je m’y emploie quotidiennement.

M. le président Éric Woerth. Merci beaucoup, monsieur le ministre, mais permettez-moi une réaction « à chaud ». Je confirme ce que j’avais dit : les déficits augmentent, les dépenses augmentent et la dette de l’État augmente.

En 2018, le déficit de l’État se creuse de 8,3 milliards d’euros ; son montant est supérieur de 12 % à ce qu’il était l’année précédente. Certes, objectivement, c’est mieux que ce que vous aviez prévu – vous aviez prévu à peu près deux fois plus –, mais c’est quand même moins bien que l’exécution précédente. C’est d’ailleurs assez conforme avec la trajectoire présentée dans le programme de stabilité, qui ne prévoit pas d’effort particulier concernant l’État ; l’effort porte sur les comptes des administrations de sécurité sociale et les collectivités locales, et compense l’augmentation du déficit de de l’État.

S’il y a une bonne nouvelle par rapport aux prévisions, elle est due à un « effet base » en 2017, à l’augmentation des recettes fiscales en 2017, aux droits de mutation – nous avions bien noté que ce qui avait causé une erreur avait été corrigé, dont acte, bravo à l’administration de l’avoir fait et à vous-même qui avez permis que ce soit fait rapidement – et à une progression spontanée plus rapide des recettes fiscales. Je note d’ailleurs une forme de sous-estimation, depuis deux ans, de l’élasticité de la recette à la croissance. À quoi est-ce dû ? Cela tient-il à la méthode de calcul ? Nous constatons une surréaction des recettes fiscales à la croissance. Tant mieux du point de vue des recettes mais il y va aussi des prévisions et de leur sincérité, à laquelle je vous sais attaché. Quant à la dette de l’État, elle augmente parce qu’il faut bien financer ce qui doit l’être.

Quant aux recettes fiscales, elles sont à peu près stables par rapport à 2017. D’un côté, nous constatons une progression spontanée des recettes. De l’autre, le Gouvernement, au fil du temps, a fait voter des baisses de fiscalité.

La dépense augmente de 2,6 milliards d’euros en 2018, essentiellement à cause des problèmes de personnel. La masse salariale représente 2 milliards d’euros, sur un total – compte d’affectation spéciale (CAS) Pensions compris – de 130 milliards d’euros de dépenses de personnel. J’ai cru comprendre que le Président de la République abandonnait l’objectif d’une réduction de 120 000 du nombre de fonctionnaires. L’article 10 de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 prévoit tout de même une réduction de 50 000 de ce nombre pour le périmètre de l’État. Le Gouvernement le respectera‑t-il ? La masse salariale est l’un des paramètres-clefs pour la maîtrise des dépenses publiques. Certes, celles-ci sont mieux maîtrisées que par le passé mais le problème est qu’il nous faut changer de rythme et aller beaucoup plus vite.

En réalité, la France est le mauvais élève de l’Europe, et, en France, l’État est plus mauvais élève que les collectivités territoriales et que la sécurité sociale – même si on peut s’interroger sur la sécurité sociale en 2019. L’État, ce sont 33 % de la dépense publique et 120 % du déficit. Il y a là quelque chose à faire, car c’est la clef de la résolution de cette question lancinante de nos finances publiques. Les recettes couvrent neuf mois de dépenses de l’État. Il faut agir autrement.

La Cour des comptes considère que la démarche de maîtrise des dépenses fiscales est en déshérence. Partagez-vous cette idée, monsieur le ministre ? Depuis le rapport rendu par l’Inspection générale des finances en 2011, peu de choses ont changé. Le sujet est cependant revenu sur le devant de l’actualité à la suite du grand débat national. Le Gouvernement a-t-il l’intention de renouer avec cette démarche ?

J’ai le sentiment que le Gouvernement « surfe » sur la dette, ce qui est assez dangereux. Les vagues peuvent rapidement emporter le surfeur. Vous semblez considérer que la charge de la dette est vouée à diminuer tranquillement grâce aux taux d’intérêt, mais il n’en est pas vraiment ainsi.

Selon que l’on est dans la majorité ou dans l’opposition, on peut trouver le verre à moitié plein ou à moitié vide, mais il est tout de même des faits qui ne plaident pas en faveur des trajectoires et du projet de loi de règlement que vous présentez.

M. le ministre. Merci, monsieur le président, pour vos questions, très claires, auxquelles je peux répondre tout de suite. Je me doutais que, malgré les bonnes nouvelles et votre honnêteté intellectuelle, vous souhaiteriez, c’est bien normal, mettre l’accent sur les quelques points noirs que présente la peau d’un visage tout de même très nettoyé… Je vais continuer à essayer de vous convaincre, sans revenir sur le constat, car le projet de loi de règlement le montre très bien : le déficit baisse et la dépense publique aussi, même si nous partageons une même inquiétude à propos de la dette, nonobstant sa sincérisation avec la dette de la SNCF.

Je ne partage pas votre opinion selon laquelle l’augmentation de 6 milliards d’euros des dépenses de l’État est essentiellement due aux dépenses de personnel. Il y a déjà 1,7 milliard d’euros d’augmentation pour les armées. En fait, si nous considérons les augmentations de crédits arrêtées, il ne reste que moins de 1 milliard d’euros sur lesquels nous pouvons discuter. Vous dites que ce sont les dépenses de personnel. Vous avez raison de dire qu’en 2017 elles ont été très dynamiques. Je rappelle les mesures prises sous la présidence de M. Hollande, notamment l’augmentation du point d’indice, par deux fois, pour les collectivités locales et pour l’État, de 0,6 %, la mise en place du protocole « parcours professionnels, carrières, rémunération » (PPCR), l’absence de jour de carence. En 2018, nous avons, en loi de finances, fait tout le contraire, pour freiner la progression de la masse salariale : mise en place de ce jour de carence, report du PPCR et non-augmentation du point d’indice.

Quant à la réduction du nombre de fonctionnaires et à la discussion que peut susciter l’article 10 de la loi de programmation, cette programmation ne jouait pas pour 2018 et pour 2019. Chacun sait – pour avoir été ministre de la fonction publique et des comptes publics vous le savez – que si vous arrêtez de recruter des agents publics, en ne remplaçant pas un départ à la retraite sur cinq, cela ne joue pas pendant les premières années sur le plan budgétaire. On ne peut pas se séparer d’agents publics ; par nature, ils ont un statut. La question est plutôt celle de la masse salariale, dont l’augmentation est difficile à freiner. Chaque élu local voit très bien l’effet du glissement vieillesse technicité sur le budget de sa commune.

La question des 120 000 – 70 000 du côté des collectivités, 50 000 pour l’État – est une autre question. Nous parviendrons à l’objectif de 70 000 grâce à la contractualisation financière, sans baisse des dotations aux collectivités locales, voire avec des augmentations pour certaines d’entre elles. Quant aux 50 000, nous travaillons à documenter cela. Le Président de la République a dit qu’il ne voulait pas que ce soit un objectif en soi : ce doit être la conséquence de la transformation. Si nous parvenons aux 120 000 en 2023 plutôt qu’en 2022, parce que c’est alors que telle belle transformation d’une administration – j’y œuvre dans mon ministère, mes collègues en font de même dans les leurs – aura été menée à son terme, il ne faut pas s’arc-bouter sur le chiffre de 120 000, mais c’est toujours l’objectif du Gouvernement. Le Premier ministre, après un travail avec le Gouvernement, produira une documentation et dira ce qu’il en est de la traduction budgétaire.

Vous disiez, monsieur le président, que le déficit de l’État représentait 120 % du déficit, et les dépenses de l’État 30 % de la dépense. Je ne partage pas cette opinion. L’État est très vertueux, depuis longtemps, même s’il doit continuer à faire des réformes et de continuer à limiter son train de vie. Vous l’avez dit vous-même, monsieur le président : 30 % des dépenses sont le fait de l’État ; 50 % sont le fait des administrations de sécurité sociale, du social en général ; 20 % sont le fait des collectivités locales. Cependant, l’État assume toutes les charges pour lui : il transfère 10 milliards d’euros de TVA à la sécurité sociale, il compense 16 milliards d’euros de dégrèvements d’impôts locaux aux collectivités ; il subit toutes les baisses d’impôts décidées – tandis que c’est la sécurité sociale qui a bénéficié des recettes supplémentaires de contribution sociale généralisée (CSG) engrangées en 2018.

L’État fait des efforts très importants, et les crédits augmentent en effet de 2,7 milliards d’euros en 2018, et de 2 à 5 milliards d’euros chaque année selon les gouvernements, tandis que les dépenses des administrations sociales augmentent de 10 à 12 milliards d’euros par an. Il faut donc comparer ce qui est comparable.

Je ne partage donc pas votre opinion selon laquelle l’État est un mauvais élève, monsieur le président. Il essaye d’être meilleur élève, et doit continuer à faire des efforts, bien sûr, mais, si le déficit du budget de l’État augmente, c’est que celui-ci prend à sa charge les baisses d’impôts, non seulement la baisse des impôts dont il perçoit les recettes mais aussi la baisse des prélèvements dont bénéficient d’autres.

Que dit la Cour des comptes ? Je n’ai pas eu l’occasion de lire ce qu’elle écrit in extenso, mais je partage en très grande partie ce qu’elle exprime.

Je me suis toujours dit que la France n’était pas vraiment un pays libéral. Le patronat n’est pas tout à fait libéral, et ceux qui se disent libéraux ne le sont pas tout à fait non plus, si j’en crois certains débats parlementaires.

Les crédits et réductions d’impôts, au profit des particuliers ou des entreprises, représentent à peu près 100 milliards d’euros, et il existe 474 niches fiscales. Elles ont toutes leur intérêt, elles ont toutes, comme dirait Brassens, leur petit mérite. Cependant, si nous supprimions l’intégralité des niches fiscales dont bénéficient les entreprises – hypothèse absurde, nous ne le ferons pas –, nous pourrions abaisser le taux de l’impôt sur les sociétés à moins de 15 %. Simplement, depuis très longtemps, nous faisons un peu, quels que soient les gouvernements, de l’« idéologie fiscale ». Voulant corriger des inégalités par la fiscalité, nous avons prélevé des impôts très élevés, et, comme ils étaient peu acceptables, pour les entreprises comme pour les particuliers, nous avons multiplié les niches – comme s’il fallait faire des trous dans un gruyère trop dense. Et que voyons-nous maintenant ? Il faut continuer à supprimer des impôts mais on veut garder les niches. Comme dirait Coluche, on veut moins de gruyère, tout en gardant les trous. Cela a constitué une large part de nos discussions lors de la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Rappelez-vous : vous étiez nombreux à vouloir conserver les réductions d’impôts pour l’investissement dans les petites et moyennes entreprises (PME), le dispositif dit ISF-PME, parfois même des membres de la majorité !

Ce débat à propos des niches fiscales ne tient pas qu’à des questions de lisibilité, de manque de clarté, à des errements – mais je laisse les magistrats de la Cour des comptes faire leurs remarques. Les niches signifient – c’est un choix politique – que nous considérons que les acteurs économiques ne sont pas assez libres pour faire eux-mêmes leurs choix d’investissement ou de consommation puisque nous partons du principe qu’il faut les orienter. Peut-être le faut-il, et c’est une discussion économique très intéressante, peut-être l’homme économique n’est-il pas libre et ne prend-il pas de bonnes décisions. Avec 100 milliards d’euros, nous n’en arrivons pas moins à un montant très important, supérieur au produit de l’impôt sur le revenu, qui est de 73 milliards d’euros. Cela pose des questions… Je suis un peu seul à penser ainsi, monsieur le président, il faut bien l’avouer, mais je l’ai toujours pensé avec constance – et avec Joël Giraud… Même si les niches fiscales ont leur intérêt, elles ne sont malheureusement que la conséquence d’un impôt très élevé. Si nous baissons très fortement l’impôt, des niches méritent d’être réduites, voire supprimées – puisque vous m’interrogez personnellement, je vous réponds.

Quant à la charge de la dette, j’ai eu un échange très vif avec le président du groupe auquel vous appartenez, monsieur le président de la commission des finances. Il m’a traité de menteur dans l’hémicycle, alors qu’il s’était manifestement trompé. Ce n’est pas très grave, cela peut arriver. Ce qui m’a plus choqué, c’est qu’une fois que je le lui ai démontré, il ne s’est pas excusé, mais c’est un autre problème…

Effectivement, la charge de la dette diminue, parce que les taux d’intérêt ne sont pas ce que nous attendions. Nous le constatons. La dette s’est stabilisée, la Cour des comptes le dit, nous regrettons évidemment qu’elle ne diminue pas et qu’elle soit beaucoup trop élevée. La baisse de la charge de la dette doit-elle nous empêcher de faire des efforts ? Je ne le pense pas. Selon certaines tribunes très intéressantes que j’ai lues, il faudrait profiter de la faiblesse des taux pour continuer à emprunter et dépenser. Tout d’abord, cela n’est que très provisoire et, à chaque fois, cela veut dire s’endetter pour sept ou huit ans, risquer de porter la dette à un niveau insupportable, exposer le gouvernement qui nous succédera ou le suivant au risque de devoir augmenter les impôts et étrangler notre économie. Je remarque que la charge de la dette baisse. C’est le fait, d’une part, de la politique monétaire menée en Europe et ailleurs et, d’autre part, de l’action des fonctionnaires de l’Agence France Trésor et de Bercy, qui travaillent très bien – saluons leur action. Cette situation ne doit pas nous empêcher de voir le problème. Il faut profiter de cette charge de la dette en baisse non pour augmenter de nouveau notre dette mais pour faire des efforts sur nos dépenses et, pour les générations futures, rembourser notre dette.

M. le président Éric Woerth. Nous n’avons pas le temps d’un débat, monsieur le ministre. J’ai bien entendu que l’État, avec 30 % de la dépense et 120 % du déficit, était une sorte de lieu de convergence de dépenses et de recettes, mais c’est le choix politique de l’État, non celui des autres administrations publiques. Quant à la dette, si les taux sont très faibles, elle n’en est pas moins élevée, et vous avez raison de considérer qu’il faut être extrêmement prudent.

M. Joël Giraud, Rapporteur général. Nous avons effectivement, monsieur le ministre, un certain nombre de motifs de satisfaction.

Le déficit est très nettement inférieur à la prévision de la loi de finances, qu’il s’agisse du solde des administrations publiques en général ou du déficit de l’État. Nous pouvons quand même nous en satisfaire. Les comptes publics se rétablissent progressivement, comme l’a rappelé dans son avis le Haut Conseil des finances publiques. Le déficit structurel se situe à un niveau conforme à celui prévu en loi de programmation des finances publiques. Si cette tendance se poursuit, le projet de loi de finances pour l’année 2020 sera le meilleur en termes de solde public depuis plus de vingt ans. Ce sont là des éléments qui me semblent relativement objectifs, au-delà des querelles que la notion de déficit et ses interprétations peuvent susciter.

Je note aussi une amélioration en matière de sincérité budgétaire, conformément à nos souhaits initiaux. La Cour des comptes avait eu des mots très durs sur les « éléments d’insincérité » de l’exercice 2017 – dans le langage de la Cour, c’est un jugement extrêmement peu amène. Aujourd’hui, les objectifs de dépenses ont été respectés, il n’y a pas eu de décret d’avance en cours d’année, les mises en réserve de crédits ont été abaissées de 8 % à 3 %. En tant que Rapporteur général, je ne peux que me féliciter qu’on ait mis fin à un certain nombre de pratiques et que l’on soit passé à celles qui ont actuellement cours.

Depuis que je suis Rapporteur général, je souligne dans mes rapports que l’État porte l’essentiel du déficit public. C’est encore plus net cette année, effectivement, puisque le déficit de l’État est désormais supérieur au déficit public. Cela résulte du fait qu’il supporte seul, pour l’essentiel, les baisses de prélèvements obligatoires. Ne serait-il pas judicieux de revoir la répartition des prélèvements obligatoires entre l’État et les autres catégories d’administrations publiques ? Vous avez en particulier cité tout à l’heure, monsieur le ministre, la sécurité sociale. Pouvez-vous nous indiquer quelle proportion du déficit de l’État est due aux dégrèvements d’impôts locaux et aux compensations versées aux organismes de sécurité sociale en contrepartie des allégements de cotisations ? Cela nous permettrait de mieux appréhender ces deux notions de déficit public et de déficit de l’État.

Dans un autre registre, vous avez cité tout à l’heure la problématique des droits de mutation, avec l’erreur d’imputation des droits encaissés en 2017 et comptabilisés en 2018. J’aimerais connaître précisément le rendement des droits de succession et des droits de donation corrigés de cette erreur. Et sera-t-il possible, au cours des prochaines années, d’intégrer ces informations dans le tableau de synthèse présenté dans l’exposé général des motifs du projet de loi ? Il me semble que le rendement cumulé des droits de succession et de donation est désormais supérieur à celui de la taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques affectée à l’État ; l’enjeu est donc important.

Quant aux dépenses, les objectifs ont été tenus, les normes de dépense de l’État ont été respectées. C’est un motif de satisfaction, mais il reste toujours des marges de progrès, soit en termes de budgétisation des dépenses de l’État, soit dans la gestion des crédits qui sont mis en réserve à titre de précaution. Je pense par exemple à la dotation pour dépenses accidentelles et imprévisibles. Il me semble qu’elle pourrait être d’un montant plus élevé. À la lumière de votre premier exercice budgétaire complet, quelles pistes d’amélioration de la gestion des dépenses de l’État identifiez-vous ?

Mme Bénédicte Peyrol. Monsieur le ministre, vous êtes déjà venu nous parler des résultats de l’exercice 2018 il y a trois mois. Aujourd’hui, le leitmotiv est le même : sérieux et sincérité budgétaire caractérisent votre gestion du budget de l’État, même si, selon que l’on appartient à la majorité ou à l’opposition, on pourra retenir des termes différents
– avec plus ou moins de sincérité, c’est le cas de le dire.

Les efforts dans l’exécution des dépenses transparaissent clairement dans les documents que vous nous avez transmis. Vous avez évoqué le déficit budgétaire, moindre que prévu, même si nous avons bien noté les remarques de M. le président à propos de l’évolution entre 2017 et 2018. Cette loi de règlement illustre également les politiques fortes que nous menons, qu’il s’agisse de l’accompagnement de la transition écologique, avec des crédits en hausse de 18 %, le chèque énergie et la prime à la conversion, du transport, avec une augmentation des investissements pour les routes, ou encore de l’emploi et du logement, avec des réformes structurelles majeures dès le début du quinquennat.

Dans la perspective du printemps de l’évaluation, quel bilan faites-vous des efforts de pilotage budgétaire fournis depuis 2018 ? Avez-vous identifié, de ce point de vue, des améliorations pour certaines missions ? D’autres justifient-elles encore des efforts majeurs ? Le CAS Transition énergétique inspire souvent des critiques à la Cour des comptes – ce fut notamment le cas dans le rapport qu’elle a adressé à la commission des finances du Sénat en 2018. De même, la Cour critique sévèrement le recours aux fonds sans personnalité juridique. Comment y répondez-vous ? Faut-il imaginer une rebudgétisation de ces fonds ? Le cas échéant, sous quelle forme ? Pouvez-vous éclairer la commission des finances pour qu’elle y réfléchisse avec vous ?

Mme Véronique Louwagie. Il me paraît intéressant de resituer la France dans la zone euro. De 2017 à 2018, dette et déficit publics se sont réduits dans la zone euro. S’élevant à 87,1 % du PIB à la fin de l’année 2017, la dette a été ramenée à 85,1 %, le déficit de 1 % à 0,5 % du PIB.

Force est de constater que la France est un mauvais élève. Elle compte parmi les quatorze États dont la dette est supérieure à 60 % du PIB – le ratio autorisé par les traités ; atteignant 98,4 % du PIB, la dette française pèse lourd.

Quant aux prélèvements obligatoires, dont vous évoquez la baisse en 2018, ils avaient considérablement augmenté en 2017. De ce point de vue, la France se hissait, selon Eurostat et l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), sur les premières marches du podium. Par ailleurs, selon le programme de stabilité, les prélèvements obligatoires seront encore de 44,8 % du PIB en 2022. En valeur absolue, ils auront augmenté de plus de 110 milliards d’euros.

Alors que la croissance du PIB va retomber à 1,4 %, nous ne pouvons que regretter que les années où elle était plus forte, atteignant 1,7 %, n’aient pas été mises à profit pour fournir les efforts nécessaires et réduire des dépenses publiques excessives.

Ma question portera sur le mouvement des « gilets jaunes ». Comment évaluez-vous son impact sur les recettes de l’État ?

M. Jean-Louis Bourlanges. En effet, monsieur le ministre, nous pouvons être satisfaits de l’évolution des finances de l’État au cours de l’année écoulée. C’est la résistance de la croissance française à un ralentissement international assez préoccupant qui a permis de contenir le déficit public dans certaines limites. Nous « tenons le coup » !

Ce qui me frappe, c’est que cette résistance est due à ce qu’on appelle parfois une politique de l’offre. Pour ma part, j’appellerai cela une dynamique de caractère barriste.

L’investissement des entreprises, favorisé notamment par une situation financière très favorable, est soutenu. La consommation des ménages, pour sa part, s’est plutôt tassée ; cela pose des problèmes sociaux, mais c’est quand même intéressant d’un point de vue économique. L’amélioration des exportations a été une composante essentielle, alors que les politiques de relance tendent plutôt à accentuer le déficit commercial. Vous avez rappelé nos beaux succès, pour ce qui est des matériels de transport – les commandes d’avions et, je suppose, d’armement – et des produits agricoles. Nous nous trouvons vraiment dans une configuration vertueuse.

Cependant, n’avons-nous pas changé de logiciel depuis quelques mois ? Ne sommes-nous pas, certes partiellement – je vois très bien les éléments de continuité que maintient le Président de la République –, passés d’un logiciel barriste à un logiciel keynésien ? Je me demande par conséquent dans quelle configuration nous nous trouverons demain. La réduction du déficit risque d’être remise en cause, et la balance commerciale dégradée. En cette année vertueuse, n’avez-vous pas, monsieur le ministre, entamé le chant du cygne de la politique de l’offre ? J’espère que vous me répondrez : « Non ! »…

Quant aux niches fiscales, il faut faire une distinction très importante entre celles attachées à l’impôt sur le revenu et les autres. Proportionnelles à l’impôt acquitté, les niches fiscales de l’impôt sur le revenu ne bénéficient pas également à tous leurs bénéficiaires. D’autre part, à moins que l’on ne recoure aux crédits d’impôt – une usine à gaz –, ceux qui ne paient pas l’impôt sur le revenu en sont tous exclus.

En revanche, certaines niches fiscales de l’impôt sur les sociétés doivent être « sacrées » – je le dis parce que je ne suis pas tout à fait d’accord avec le Rapporteur général. Le crédit d’impôt recherche (CIR) est l’élément central d’une politique industrielle. L’outil de la politique industrielle d’avenir, c’est le CIR. Je crois qu’il nous faut bien méditer les différences de nature entre crédits d’impôt.

Mme Valérie Rabault. Nous n’allons pas revenir sur toute la politique économique et budgétaire du Gouvernement car l’objectif d’une loi de règlement est de savoir si la loi de finances a été correctement exécutée ou non.

Je m’attacherai d’abord aux emplois. Par rapport au plafond annoncé, nous constatons à la page 54 de votre exposé général que 26 000 postes n’ont pas été pourvus. Pour moitié, il s’agit de postes de l’éducation nationale, le reste se répartissant entre la justice, la police et la gendarmerie. Pouvez-vous nous en dire plus car les effectifs concernés sont importants ?

Autre point qui m’inquiète : vous avez annulé pour près de 7 milliards d’autorisations d’engagement comme nous le montre la page 82. Pour la mission Défense, ces annulations portent sur 1,2 milliard d’euros – vous pouvez donc difficilement dire que vous augmentez ce budget –, pour la mission Sécurités, sur 79 millions d’euros et sur 72 millions pour la mission Outre-mer, laquelle subit une annulation du même montant de ses crédits. N’y a-t-il pas une certaine hypocrisie à mettre en avant le fait que vous n’avez pas eu recours aux décrets d’avance quand vous procédez à une série d’annulations d’autorisations d’engagement et de crédits de paiement, détaillés de la page 80 à la page 86, dans des proportions supérieures à celles des années précédentes ? N’est-ce pas une forme de pilotage caché qui permettrait de couper des dépenses sans le dire ?

Par ailleurs, le déficit de l’État augmente. Vous avez raison de souligner que l’État procède à de nombreuses compensations au profit de la sécurité sociale et des collectivités locales. Précisons toutefois que vous avez fait voter à votre majorité le fait que les nouveaux allégements de cotisations sociales ne seraient plus compensés par l’État à la sécurité sociale, ce qui entraînera une dégradation de ses soldes. Il importe de noter également que vous avez été aidés par les taux d’intérêt qui expliquent la majeure partie de la baisse du déficit public par rapport à vos prévisions initiales, à mettre en regard avec l’apparition de hausses ici et là.

 

M. Éric Coquerel. Avec cette loi de règlement, nous disposons du premier bilan d’une année pleine et entière à imputer à l’action de votre gouvernement puisque l’année 2017 était partagée entre deux quinquennats. La lecture de l’exposé général pourrait laisser croire que 2018 a été une grande année pour la France, ce dont les Français, apparemment, ne se sont pas vraiment rendu compte. Les titres des différentes parties, pleins d’autosatisfaction, montrent qu’au moins, le Gouvernement est content de lui-même.

Nous avons des désaccords avec la plupart des groupes sur la politique que mène la majorité et j’aimerais croire que nous assistons à un chant du cygne de la politique de l’offre, compte tenu de ce qu’elle a coûté à notre pays et aux différents pays européens.

Votre petite musique, depuis le lancement du Grand débat, est qu’une baisse des dépenses publiques et des impôts est nécessaire. Le fait est qu’en 2018, il y a bien eu une baisse des dépenses publiques, de 1,8 %, si l’on tient compte de l’inflation et de l’augmentation de 0,3 % de la population entre 2017 et 2018. Nous contestons cette orientation car nous ne cessons de rappeler que les dépenses publiques non seulement sont utiles mais constituent des recettes pour le produit intérieur brut. Elles permettent de passer des caps difficiles quand l’économie de marché est atteinte par une crise. Or le revirement économique que l’on constate au niveau international nous laisse craindre la survenue d’une nouvelle crise. En outre, cette baisse a des impacts durables. Je ne sais pas si mes collègues le savent mais en dix ans, le ministère de l’écologie, qui devrait être sanctuarisé, compte tenu de l’importance de la transition écologique, a enregistré une baisse de ses effectifs de 24 000 personnes.

Dans le même temps, le déficit budgétaire a augmenté. Cette hausse est due à une baisse des prélèvements obligatoires, qui a bénéficié aux plus favorisés de nos concitoyens : suppression de l’ISF, création de l’impôt sur la fortune immobilière, instauration de la flat tax qui a coûté 300 millions d’euros de plus que prévu du fait de l’effet d’aubaine du transfert de revenus – honoraires, salaires – sur les dividendes, augmentation de 3,5 milliards d’euros du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, diminution du taux de l’impôt sur les sociétés et suppression de la taxe à 3 % sur les dividendes. Cette politique de baisse de recettes au profit des plus riches affaiblit l’État.

L’une des preuves qu’elle ne fonctionne pas est la diminution de la charge de la dette. Elle est liée à la baisse des taux d’intérêt mais aussi au fait que le mouvement des « gilets jaunes » vous a obligés à mettre 10 milliards de plus dans la consommation populaire – sous des formes que nous contestons –, ce qui explique les bons résultats de la France au premier trimestre 2019 par rapport à ses voisins européens. Cela montre que l’on peut faire une politique de relance de la consommation populaire sans que la charge de la dette en soit alourdie.

M. Jean-Paul Dufrègne. Monsieur le ministre, avec ce projet de loi de règlement et ce bel exercice d’autosatisfaction, nous soldons aujourd’hui définitivement le premier budget de ce quinquennat, ce funeste budget qui aura mis le feu aux poudres, organisant un transfert inédit de richesses de ceux qui avaient déjà peu vers ceux qui avaient déjà beaucoup.

En réalité, la seule question qui compte est la suivante : ce budget a-t-il permis d’améliorer la vie de la grande majorité des Français ? La réponse est malheureusement « non ».

La suppression de l’ISF a été le péché originel de ce quinquennat. Avec le Grand débat, vous disposiez d’une occasion de plus de tirer enfin les leçons de cette erreur politique. Nos concitoyens vous ont demandé plus de justice sociale et fiscale mais vous vous obstinez à rester sourds à ces attentes légitimes, défendant la suppression de l’ISF, tel un totem, et préférant à une baisse globale de la CSG ou de la TVA une baisse de l’impôt sur le revenu aux contours pour l’instant extrêmement flous. Qui en bénéficiera ? Les plus aisés, ceux qui sont imposés au taux marginal mais pour tous ceux qui ne s’acquittent pas de l’impôt sur le revenu, que prévoyez-vous ? A priori, rien et c’est bien ce qui nous inquiète, monsieur le ministre.

Mes questions visent à connaître le coût de vos mesures fiscales. À combien se chiffrent la suppression de l’ISF pour l’année 2018 et la mise en place de la fiscalité à taux unique sur les revenus du capital ? Dans la perspective du Printemps de l’évaluation, pourriez-vous nous indiquer le nombre de bénéficiaires de ces deux mesures, leurs profils ainsi que le gain fiscal obtenu ?

M. Charles de Courson. Monsieur le ministre, il y a deux points positifs dans cette loi de règlement.

Premièrement, vous avez tenu l’enveloppe des dépenses dans le cadre des autorisations budgétaires. Simplement, nous pouvons nous inquiéter de l’évolution des dépenses de personnel. Les effectifs de 2018 sont en effet exactement égaux à ceux de 2017 alors que la masse salariale augmente de 2 %. Il y a donc un problème puisque vous vous êtes fixé un objectif de réduction des effectifs de l’État de 50 000 sur cinq ans.

Deuxièmement, vous avez reçu 8,8 milliards d’euros de recettes supplémentaires – un petit peu moins si on retire le 1,4 milliard correspondant aux droits de mutation. Cela vous tombe du ciel : on ne peut pas dire que ce soit le résultat de votre action, c’est plutôt le fruit d’une conjoncture internationale favorable. Mais tant mieux car l’augmentation du déficit aurait été plus importante que les 78 milliards que nous constatons – j’ajoute les 2,8 milliards liés au rattachement erroné des droits de mutation.

Les recettes fiscales ont connu une baisse de 13,5 milliards mais elles ont aussi été augmentées de 5 milliards, du fait notamment de la fiscalité énergétique et de la TVA, ce qui fixe le solde à 8,5 milliards. En l’absence de mesures fiscales, nous aurions tout juste maintenu le déficit du budget de l’État puisque son augmentation est de 8,3 milliards.

La Cour des comptes – je partage son sentiment et j’aimerais avoir le vôtre – dit que « l’État n’est pas à même de réduire ses propres dépenses à due concurrence des baisses de prélèvements opérées sur l’ensemble des administrations publiques ». Le problème est en effet que vous n’avez pas le courage de réduire la dépense pour diminuer la recette. La loi de règlement le montre une nouvelle fois.

Quant aux dépenses fiscales, elles ont augmenté pour 6,7 % pour s’établir à 100,2 milliards, soit une progression de 6,8 milliards d’euros. La Cour des comptes, dont je partage encore le diagnostic, estime que « les dispositifs de plafonnement des dépenses fiscales sont aujourd’hui inopérants » – ne faudrait-il pas les durcir, monsieur le ministre ? – et conclut que « l’action menée pour évaluer et réduire les conséquences des dépenses fiscales doit être relancée ».

Dernier point : la Cour des comptes dénonce l’abandon des grands principes d’unité et d’universalité budgétaires et de non-affectation des recettes aux dépenses. Êtes-vous favorable à la solution qu’elle préconise, à savoir la rebudgétisation du Fonds pour l’innovation et l’industrie (FII) ? Plus largement, comptez-vous effectuer une revue de l’ensemble des fonds sans personnalité juridique contrôlés par l’État ?

M. Laurent Saint-Martin. J’aimerais revenir sur la sous-exécution des crédits tant en autorisations d’engagements qu’en crédits de paiement. Ma double question, qui porte sur le fond et la forme, fera écho aux interrogations de ma collègue Bénédicte Peyrol.

Le Printemps de l’évaluation arrive et j’aimerais avoir votre avis, monsieur le ministre, sur la pertinence qu’il y a à proposer des ajustements de la dépense en volume pour la prochaine autorisation parlementaire, celle de l’année n +1, autrement dit le projet de loi de finances pour 2020. Verriez-vous d’un œil favorable une proposition de résolution ou un autre texte allant en ce sens ?

Comme vous le savez, avec le Rapporteur général et le président Woerth, nous menons une mission d’information sur la loi organique relative aux lois de finances et la sous-exécution est un motif d’interrogation. Vous paraît-il souhaitable d’envisager une plus grande souplesse de la gestion infra-annuelle des enveloppes de crédits avec pour contrepartie un contrôle plus aigu exercé par la commission des finances ? Pensez-vous qu’il en résulterait un meilleur pilotage ?

Mme Marie-Christine Dalloz. Monsieur le ministre, qu’il y ait eu une amélioration de 9,7 milliards d’euros, nous pouvons vous le concéder. Toutefois, le fait qu’il y ait eu 8,8 milliards de recettes supplémentaires atténue nettement cet effet d’annonce.

En 2018, le déficit budgétaire est de 76 milliards d’euros alors qu’en 2017, il était de 67,7 milliards d’euros : je n’appelle pas cela une amélioration d’autant qu’il y a eu ces recettes supplémentaires et que la dette a augmenté de façon inquiétante.

J’aimerais avoir une précision. À la page 19, dans le tableau intitulé « Bilan 2018 », on note une très forte progression des immobilisations incorporelles et corporelles ainsi que des immobilisations financières, qui représente près de 28 milliards d’euros au total. Pourriez-vous nous donner des précisions à ce sujet ? Cette évolution a son importance car elle explique que le solde net entre l’actif et le passif s’améliore alors même que la dette et les intérêts continuent d’augmenter.

Mme Christine Pires Beaune. Je reviendrai d’abord sur la masse salariale. Il y a eu une diminution globale des effectifs, légère, de l’ordre de 1 000 postes, avec des suppressions pour certains ministères et des créations pour d’autres. Il y a quelques mois, je vous avais demandé si vous disposiez d’une ventilation par département de ces évolutions sur plusieurs années et votre cabinet m’avait répondu que les informations n’étaient pas disponibles. Pourriez-vous nous les fournir pour la seule année 2018 ?

S’agissant des collectivités, je remarque que la mission Relations avec les collectivités territoriales subit 131 millions d’euros d’annulations en autorisations d’engagement et 103 millions en crédits de paiement. Cela me choque car, en fin d’année, lorsque les collectivités font des demandes de versements de crédits au titre, par exemple, de la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), les préfectures n’ont plus d’argent car il n’y a plus de délégations de crédits. Vous ne pouvez prétendre que les annulations sont justifiées par des non-consommations de crédits.

Enfin, j’aimerais avoir des précisions sur le FII, censé être financé par la privatisation d’Aéroports de Paris. La Cour des comptes évoque dans son rapport une « mécanique budgétaire complexe et injustifiée ». Elle suggère de prévoir une ligne budgétaire de 250 millions d’euros qui serait affectée à l’innovation, solution même qu’avait préconisée la présidente de notre groupe lors du débat sur la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises.

M. Xavier Roseren. Depuis 2017, le Gouvernement et la majorité ont voulu renforcer l’évaluation des dispositifs fiscaux afin d’en apprécier l’efficacité. La commission des finances a d’ailleurs fait sien cet objectif en mettant en place le Printemps de l’évaluation.

C’est dans cette optique qu’avec ma collègue Olivia Gregoire, nous portons une attention particulière aux dépenses fiscales relevant de notre rapport spécial relatif à la mission Économie. La note sur l’exécution budgétaire de la Cour des comptes souligne que sur les soixante-dix-sept dépenses fiscales de cette mission, qui représentent plus de 28 milliards d’euros en 2018, vingt-sept ne sont pas évaluées, soit un tiers d’entre elles. L’exécution des crédits de cette mission suscite par ailleurs des interrogations puisque l’écart entre la prévision et l’exécution est de 7 % alors qu’il est de 0,4 % pour les 500 mesures fiscales de la loi de finances initiale de 2018.

Monsieur le ministre, je souhaiterais connaître votre sentiment à ce sujet et savoir quels outils vous allez mettre en place pour opérer une évaluation plus performante des dépenses fiscales.

M. Mjid El Guerrab. En octobre 2018, vous avez annoncé que le Gouvernement allait supprimer la CSG sur les revenus du capital des contribuables affiliés à un régime de sécurité sociale de l’Union européenne. À compter de 2020, le barème progressif s’appliquera automatiquement aux revenus français de ces non-résidents. C’est une première victoire pour les Français résidant à l’étranger. Cependant, les Français résidant hors de l’Union européenne ne sont pas concernés par cette exonération.

Après une vingtaine de réunions organisées dans le cadre du Grand débat, je peux vous dire que c’est un sujet sur lequel les participants sont revenus de manière récurrente. Dans ma circonscription, qui se trouve en dehors de l’Union européenne, nos concitoyens ne comprennent pas pourquoi ils doivent payer cet impôt qu’ils estiment injuste puisqu’ils ne bénéficient pas de la protection sociale française. Pensez-vous revenir sur cette injustice ?

M. Fabrice Le Vigoureux. Monsieur le ministre, comme cela fait longtemps que nous n’avons pas évoqué avec vous la question du prélèvement à la source – je sens que cela vous manque… Permettez-moi donc de vous poser une question sur cette réforme majeure qui recueille l’adhésion d’une très grande majorité de contribuables et qui s’est remarquablement bien passée. Avez-vous eu un retour d’expérience sur les moyens humains mobilisés, notamment à la DGFiP ? À combien évaluez-vous les économies générées ?

Mme Catherine Osson. En 2018, les documents prévisionnels de gestion de la mission Enseignement scolaire ont établi dès le début de l’année qu’il serait nécessaire de dégeler l’intégralité de la réserve de précaution du titre 2 pour couvrir les besoins pourtant clairement identifiés avant même le vote de la loi de finances initiale. Il y a là un problème récurrent de pilotage de la masse salariale dont l’ensemble des acteurs a pourtant pleinement conscience. Comme l’année dernière, des crédits supplémentaires ont été ouverts en loi de finances rectificative pour pouvoir financer les payes de décembre.

Cela signifie concrètement que l’année où il y aurait un aléa qui exigerait une forte solidarité interministérielle en cours d’exercice, comme l’engagement des troupes françaises sur de nouveaux théâtres d’opérations, nos 881 000 enseignants se verraient amputer d’environ deux jours de rémunération sur leur paye de décembre. Les payes des enseignants, dont la rémunération est déjà inférieure à la moyenne des pays de l’OCDE, ne sauraient constituer une variable d’ajustement alors que l’heure est à la valorisation et à la reconnaissance de la profession. Se pose donc la question de la correcte budgétisation des besoins de l’enseignement scolaire lors de la préparation du projet de loi de finances (PLF).

Monsieur le ministre, je souhaite vivement qu’une attention particulière soit portée à la mission Enseignement scolaire lors de la préparation du prochain PLF afin que les dépenses de personnel récurrentes clairement identifiées et anticipées par le ministère de l’éducation nationale soient budgétées avec exactitude.

Permettez-moi également, monsieur le ministre, sous l’aimable pression de mes collègues, de vous féliciter pour le titre de champion de France de bandas remporté par Tourcoing ce week-end.

M. le président Éric Woerth. J’aimerais ajouter une question à laquelle vous répondrez peut-être une autre fois, monsieur le ministre : comment ont été consommés les crédits du Fonds pour la transformation de l’action publique (FTAP) ? Quelles économies peut-on en attendre ?

M. le ministre. Monsieur le président, j’espère pouvoir répondre à toutes les questions qui m’ont été posées. Si ce n’est pas le cas, j’apporterai des compléments par écrit.

Monsieur le Rapporteur général, je vous remercie de vos encouragements. Nous les copartageons.

Le montant global des recettes liées aux successions et donations s’élève à 16,2 milliards d’euros. L’erreur d’imputation – autrement dit, les sommes perdus dans les tuyaux de la DGFiP – représente, quant à elle, 1,4 milliard d’euros. Il reste 200 millions d’euros sur le compte, qui correspondent, si j’ose dire, au frictionnel de fin d’année.

Nous intégrerons pour la prochaine fois les informations que vous nous demandez dans le tableau de synthèse afin que vous puissiez exercer au mieux votre contrôle.

S’agissant des pistes d’amélioration possibles dans la gestion des crédits de l’État, j’en vois plusieurs. Permettez-moi toutefois d’insister sur les difficultés que rencontre en ce moment le ministre des comptes publics sur les dépenses du titre 2 de certains ministères, plus particulièrement celles de l’éducation nationale et de l’intérieur qui sont chroniquement en augmentation malgré un effort important de « sincérisation ». Depuis notre arrivée, nous avons dû mettre 2 milliards de plus pour le ministère de l’éducation nationale et 600 millions de plus pour le ministère de l’intérieur et nous avons encore des discussions avec les ministres concernés. Cela montre qu’il existe des difficultés manifestes de suivi de ces dépenses. Nous avons pris des mesures en conséquence et avons décidé notamment de changer les directeurs en charge de ces sujets. L’Assemblée nationale pourrait s’intéresser utilement aux mauvais calculs de ces masses salariales qui démontrent un défaut d’organisation des ministères, d’autant que ces dérives sont ensuite financées sur le budget général parce qu’il faut bien trouver de l’argent pour payer les professeurs ou les policiers. Reste la solution de jouer sur les concours, qui est sans doute la façon la moins intelligente de piloter une masse salariale. Ces dépenses du titre 2 sont l’enjeu le plus important pour le ministre des comptes publics dans son travail de sincérisation, même s’il y a aussi le financement des opérations extérieures.

Des nombreux sujets évoqués par Mme Peyrol, je retiendrai plus particulièrement la rebudgétisation des fonds sans personnalité juridique. Vous connaissez mon avis sur les niches fiscales tant des particuliers que des entreprises et je vais être tout aussi clair au sujet des affectations : leur multiplication est une mauvaise chose tout comme la multiplication des agences, qui introduit de la complexité dans le suivi des finances publiques. Je constate toutefois qu’en la matière, il y a beaucoup de croyants et peu de pratiquants puisque chaque nouvel impôt appelle un débat sur son affectation. Ces dernières semaines, nous avons eu des discussions sur l’écologie qui me paraissent contradictoires avec ce que vous prônez. Vous êtes parfois les premiers à demander des affectations parce que l’impôt a une dimension manifestement pédagogique. Toutefois, si l’on affecte ce qui relève de l’écologie à l’écologie, de la culture à la culture, du sport au sport, il n’y aura plus d’argent pour faire face aux dépenses de l’éducation nationale, de l’armée ou de l’intérieur. Je ne crois pas que l’écologie gagnerait à cette logique des affectations.

Certains demandent une compensation pour le CAS Radars du fait qu’il y a eu moins d’amendes à cause des dégradations de radars. La logique de l’affectation consisteraitelle à réclamer la liberté quand il y a de d’argent et à demander une compensation de l’État quand il n’y en a plus ? De manière générale, je suis très défavorable aux affectations, même si l’on peut comprendre qu’il y ait ici ou là une ou deux exceptions. J’aimerais que le Parlement puisse nous aider, quel que soit le bord politique des députés.

S’agissant du FII, je lirai avec intérêt le rapport de la Cour des comptes. Je soulignerai toutefois qu’il a une spécificité par rapport aux autres fonds : placé auprès du Trésor, il est intégré dans les comptes publics et donc dans le calcul du déficit et de la dette, ce qui est une vertu – mais je ne sais pas si la Cour des comptes l’a prise en compte.

Je ne vais toutefois pas me contredire : je suis opposé à toute logique qui irait à l’encontre des principes d’unité et d’universalité du budget, ne serait-ce que parce que, mesdames, messieurs les députés, vous devez pouvoir le contrôler. La loi de programmation des finances publiques prévoit d’ailleurs la fin d’une partie des affectations et je vous encourage, madame Peyrol, à conforter ce processus en contraignant le Gouvernement à les limiter.

Madame Louwagie, je sais qu’une mission d’information de votre assemblée a été mise en place pour évaluer la répercussion du mouvement des « gilets jaunes » sur l’économie française. D’après les informations dont je dispose, je peux vous dire que nous estimons son incidence à 0,2 point de PIB, soit 4 milliards d’euros. Le chômage partiel de 70 000 personnes a engendré 38 millions d’euros de coût pour l’assurance chômage et les frais pour les assurances sont évalués à plus de 200 millions d’euros. En outre, on peut imaginer que nos recettes auraient été plus importantes s’il n’y avait pas eu ce mouvement à la fin de l’année dernière.

M. Bourlanges s’est interrogé sur l’avenir de la politique de l’offre. Il a comparé Édouard Philippe à Raymond Barre – je pense que c’était d’un point de vue intellectuel et non pas physique… – et il s’est demandé si nous ne devenions pas keynésiens.

Le Président de la République a annoncé des mesures à hauteur de 17 milliards d’euros. Cela représente en dépenses supplémentaires pour le budget un peu plus de 2 milliards au titre de l’extension de la prime d’activité et 1,4 milliard au titre de la réindexation des retraites de moins de 2 000 euros. Tout le reste relève de la baisse d’impôt ou de la non-imposition. S’il y a une relance par la demande, c’est donc une relance par la baisse d’impôt, ce qui n’est pas tout à fait une relance keynésienne.

Nous avons fait le choix de baisses d’impôt drastiques, en continuité avec le programme du Président de la République. Lors des deux premières années du quinquennat, elles ont davantage concerné les entreprises, à l’exception de la réforme de la taxe d’habitation. Les annonces récentes concernent davantage les particuliers : renonciation à la taxe carbone, défiscalisation des heures supplémentaires, prime « Macron », baisse de l’impôt sur le revenu. Les politiques keynésiennes mises en place principalement par des gouvernements de gauche ont surtout reposé sur une augmentation de la dépense publique – augmentation de prestations, hausse du SMIC. Je ne crois pas du tout que notre politique tourne le dos à l’offre. Bien au contraire puisque nous ne sommes revenus ni sur la suppression de l’ISF, ni sur la mise en place du prélèvement forfaitaire unique (PFU), ni sur la baisse de l’impôt sur les sociétés, au grand dam d’Éric Coquerel.

Je ne reviendrai que brièvement sur la question des niches. La moitié des 14 milliards d’euros qu’elles coûtent pour les particuliers redevables de l’impôt sur le revenu bénéficient au dernier décile, soit les Français les plus riches ou les moins pauvres. Elles ne sont donc pas justes du point de vue de la redistribution fiscale telle que nous la concevons.

Les niches fiscales pour les entreprises ne se réduisent pas au CIR. Le taux réduit de TVA pour la restauration est une niche fiscale, par exemple.

M. Jean-Louis Bourlanges. Il faut préserver le CIR !

M. le ministre. Le Président de la République a précisé qu’on n’y toucherait pas et telle est la position du Gouvernement. M. le ministre de l’économie et des finances aura l’occasion de le redire. Je sais que le Rapporteur général est d’un avis différent et je respecte sa persévérance et sa conviction.

Je ne suis pas du tout d’accord avec les calculs de Mme Rabault. D’abord, il faut souligner que les annulations d’autorisations d’engagement touchent des crédits qui n’ont pas été consommés alors que les décrets d’avance constituent une coupe : c’est une grande différence. Quand Mme Rabault était rapporteure générale, en 2016, elle a non seulement accepté deux décrets d’avance mais le Gouvernement qu’elle soutenait a procédé à 9 milliards d’annulations d’autorisations d’engagement, soit 2 milliards de plus que les annulations auxquelles nous procédons !

Madame Pires Beaune, nous avons pensé à vous : j’ai à vous remettre une note qui retrace par département la proportion d’équivalents temps plein d’agents publics pour mille habitants en décembre 2018. Pour l’heure, je ne peux pas vous fournir les chiffres que vous demandez car les ministères ne me les ont pas transmis. J’essaierai d’améliorer ces informations.

 

Vous déplorez le fait que l’année dernière, des crédits DETR n’aient pas été octroyés par les préfectures. À ma connaissance, c’est tout à fait faux. Pour la première fois depuis longtemps, il n’y a pas eu de pilotage en cours d’année. Nous y avons tout particulièrement veillé. J’ai même fait rajouter 30 millions d’euros de crédits à la demande du Rapporteur général pour permettre l’achèvement de certains projets. Vous ne nous faites pas le bon procès, à mon avis.

J’en viens aux taux d’intérêt et à la charge de la dette. M. de Courson affirme que les recettes supplémentaires sont tombées du ciel et que nous n’y sommes pour rien. Comme chacun sait, 2018 a été une année particulièrement calme : élections générales en Italie, Brexit, tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine, mouvement des « gilets jaunes », grèves à la SNCF. C’est bien la raison pour laquelle M. de Courson s’est employé à prédire que la croissance allait s’effondrer.

Pour ma part, j’estime que ces recettes supplémentaires sont dues en partie à la politique économique du Gouvernement, qui produit des richesses. Désormais, la France est considérée comme un pays susceptible d’attirer les investissements étrangers. Elle a une croissance qui n’est pas la plus extraordinaire qu’elle ait connue mais qui est supérieure au taux moyen de la zone euro. Certains d’entre vous affirment que le niveau des taux d’intérêt nous a aidés mais il n’est que le reflet du jugement que les prêteurs portent sur notre capacité à les rembourser. En Italie, le gouvernement, qui compte certains de vos amis, monsieur Coquerel…

M. Éric Coquerel. Je ne peux vous laisser dire une chose pareille !

M. le ministre. ... emprunte à 2,8 % alors que nous empruntons à 0,4 %. C’est la preuve que notre politique économique est jugée un peu meilleure que celle de certains de nos voisins. C’est la raison pour laquelle nous devons continuer à tenir les comptes publics pour mener la politique que nous voulons.

Monsieur Dufrègne, je ne dispose pas des informations sur les profils des contribuables concernés par la suppression de l’ISF et l’instauration du PFU ainsi que sur les montants en jeu mais je m’engage à vous les fournir avant l’examen du prochain projet de loi de finances.

Monsieur Saint-Martin, vous le savez, je suis tout à fait favorable à ce que la commission des finances puisse exercer davantage de contrôle en laissant plus de souplesse aux gestionnaires dans le cadre de l’autorisation votée par le Parlement. Nous préférons les sous-exécutions aux dépassements. Parfois, il faut constater que les prévisions étaient suffisantes et annuler le reste des crédits.

M. de Courson est parti parce que ma réponse ne lui a pas plu, et c’est bien dommage car j’aurais répondu à d’autres de ses questions.

Madame Osson, je suis d’accord avec vous : il faut poursuivre la « sincérisation » des crédits du ministère de l’éducation nationale. Il n’y a pas de dégels particuliers à faire. Il suffit que le ministère de l’éducation nationale et les rapporteurs en charge de son budget nous demandent d’inscrire de façon sincère les crédits correspondant au titre 2 et les professeurs seront dûment rémunérés. Nous examinerons avec attention cette question avec vous.

Madame Dalloz, je dois vous avouer n’avoir pas très compris votre démonstration. Les recettes supplémentaires dont vous parlez ne constituent pas une augmentation par rapport à l’année 2017 mais par rapport aux prévisions du projet de loi de finances rectificative. Nous pensons qu’elles sont liées à des rentrées un peu plus importantes que celles que nous prévoyions, notamment en termes d’impôts sur les sociétés et de TVA. À la fin de l’année dernière, nous pensions, comme à la fin de l’année 2017, que nous n’aurions pas autant de recettes l’année suivante. Je ne vais pas reprendre le débat que j’ai eu avec le président de la commission mais je considère que nous sommes au rendez-vous de la sincérité.

Je vous remercie, monsieur Le Vigoureux, d’avoir souligné que la réforme s’était bien déroulée. Cela est à mettre sur le compte du travail du Parlement et des agents de la DGFiP. Plus de 400 personnes s’y sont consacrées plus particulièrement au sein de cette direction et tous les agents des finances publiques ont contribué à l’expliquer et à la mettre en œuvre. J’aurai l’occasion de faire une évaluation. Je ne connais pas pour l’instant le montant des économies que cette réforme a générées. On dit toujours que la première année, il faut accompagner et communiquer. Ce qui est certain, c’est que l’amélioration du recouvrement entraînera une augmentation des recettes, d’un point ou d’un point et demi. Nous envisagerons des transformations à la DGFiP qui passeront par une baisse des effectifs à la fin du quinquennat.

J’aurai l’occasion de revenir par écrit à l’interpellation de M. Roseren car j’attends d’autres informations sur ces évaluations. Qu’il sache que je partage ses exigences.

S’agissant du FTAP, monsieur le président, nous avons consommé les crédits pour les deux premières années et le deuxième appel à projets va être lancé. Il existe des éléments dans le projet de loi de règlement. M. Saint-Martin, qui est rapporteur spécial pour les missions liées à mon ministère, est parvenu à un équilibre dans le financement dès la première année. Pour 2018, sur les 200 millions, 120 millions d’euros, me semble-t-il, ont été apportés pour des projets qui concernent surtout l’administration centrale et peu l’administration territoriale, à l’exception de la préfecture de la région Occitanie. Nous aurons l’occasion d’y revenir.

Enfin, monsieur El Guerrab, nous avons eu longuement l’occasion d’évoquer la fiscalité des Français établis hors de France. Je constate qu’il y a des positions contradictoires entre ceux qui souhaitent que nous fondions la fiscalité sur la nationalité, ceux qui se battent en tant qu’« Américains accidentels », ceux qui mettent en regard exonération de CSG et financement de la protection sociale…

M. Mjid El Guerrab. En Europe !

M. le ministre. Oui, en Europe car, hormis la Suisse, les systèmes de protection sociale sont convergents. Pour l’instant, le Gouvernement ne souhaite pas modifier cette fiscalité.

 

 

 


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   AUDITION DE M. DIDIER MIGAUD, PRÉSIDENT DU HAUT CONSEIL DES FINANCES PUBLIQUES ET PREMIER PRÉSIDENT DE LA COUR DES COMPTES

Lors de sa réunion du 22 mai 2019, la commission a entendu M. Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques et Premier président de la Cour des comptes, sur l’avis du Haut Conseil relatif au solde structurel des administrations publiques présentées dans le projet de loi de règlement de 2018, et sur le rapport de la Cour relatif aux résultats et à la gestion budgétaire de l’exercice 2018 et sur la certification des comptes de l’État – exercice 2018.

M. le président Éric Woerth. Nous accueillons ce matin M. Didier Migaud, qui représente deux institutions en même temps, lesquelles ont élaboré trois documents : l’avis relatif au solde structurel des administrations publiques, en tant que président du Haut Conseil des finances publiques, l’acte de certification des comptes de l’État et le rapport sur les résultats de la gestion budgétaire, en tant que Premier président de la Cour des comptes.

Nous commencerons les commissions d’évaluation des politiques publiques dès mardi prochain. Je tiens à souligner la contribution essentielle de la Cour et à l’en remercier très vivement. Les notes d’analyse de l’exécution budgétaire (NEB) ont été communiquées plus tôt que d’habitude, et le dépôt du projet de loi de règlement a pu être avancé par le Gouvernement d’une semaine. Tout cela a beaucoup facilité le travail de la commission et des rapporteurs spéciaux, que vous êtes quasiment tous, en vous faisant gagner un temps sans doute précieux.

Je remercie également les magistrats de la Cour des comptes, qui sont toujours très disponibles pour rencontrer les rapporteurs spéciaux et répondre à leurs interrogations – beaucoup d’entre vous ont rencontré les magistrats de la Cour. En outre, la Cour a remis, en temps utile, les cinq enquêtes que je lui avais demandées l’an dernier, en application du 2° de l’article 58 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Pour les futures enquêtes, il est convenu avec la Cour, à laquelle je communiquerai nos demandes dès le début du mois de juillet, que la remise des rapports puisse intervenir au printemps 2020. Je rappelle aux commissaires qu’ils doivent me faire parvenir leurs suggestions au plus tard d’ici à la fin du mois. J’avais déjà lancé cet appel, je le réitère, mais cette fois-ci les délais vont bientôt se clore.

Le Printemps de l’évaluation se prolongera en séance publique du 17 au 19 juin. Il vous reviendra d’ailleurs, monsieur le Premier président, d’ouvrir cette deuxième édition du Printemps de l’évaluation, l’après-midi du 17 juin, par une intervention suivie d’un débat. Se tiendront ensuite, comme vous le savez, des séances de débat ou de questions sur les thèmes qui ont été choisis, ou qui sont en voie de l’être, par les groupes, mais aussi l’examen des propositions de résolution, dont les cinq seront inscrites par la Conférence des présidents, sur proposition de la commission des finances.

M. Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques et Premier président de la Cour des comptes. Comme chaque printemps, je suis très heureux de venir devant votre commission pour vous présenter plusieurs travaux produits par la Cour des comptes et le Haut Conseil des finances publiques, à la demande du législateur organique. Ils visent à éclairer la discussion du projet de loi de règlement pour 2018, que vous allez engager dans quelques jours.

Je suis accompagné, ce matin, de Raoul Briet, président de la première chambre de la Cour, de Michèle Pappalardo, présidente de chambre et rapporteure générale, de Christian Charpy et Emmanuel Belluteau, présidents de section, et de Cécile Fontaine, conseillère-maître. François Monier représente le Haut Conseil des finances publiques, dont il est le Rapporteur général.

Mon propos portera successivement sur trois documents qui viennent de vous être remis : l’acte de certification des comptes de l’État pour 2018, le rapport sur l’exécution du budget de l’État en 2018 et l’avis du Haut Conseil des finances publiques relatif au solde structurel des administrations publiques, présenté dans le projet de loi de règlement.

J’appelle dès à présent votre attention sur la différence de périmètre de ces trois travaux : l’acte de certification et le rapport sur l’exécution du budget de l’État ne concernent que les comptes et le budget de l’État, quand l’avis du Haut Conseil porte sur l’ensemble des finances publiques.

Le rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, dont le périmètre couvre lui aussi l’ensemble des administrations publiques (APU), vous sera adressé le mois prochain et prolongera les analyses qui vous sont présentées aujourd’hui.

Avant de vous détailler le contenu de ces documents, je voudrais dire un mot du calendrier de publication de ces trois travaux. Ils vous sont remis une quinzaine de jours plus tôt qu’à l’accoutumée, puisque, cette année encore, la date de dépôt du projet de loi de règlement a été avancée d’une semaine. Le ministre de l’action et des comptes publics a d’ailleurs indiqué souhaiter que, d’ici à 2021, ce dépôt ait lieu à la mi-avril, afin que l’examen du projet de loi intervienne lors de la présentation du programme de stabilité.

Ce changement de calendrier répond à une préoccupation qui me semble particulièrement vertueuse, celle de vous permettre de consacrer davantage de temps à l’examen du projet de loi de règlement. Vous avez souhaité, vous aussi, renforcer cette étape essentielle du calendrier budgétaire, en mettant en place, depuis l’an dernier, un Printemps de l’évaluation. Nous ne pouvons que souscrire à cette initiative, qui permettra, à terme, à la loi de règlement de devenir une véritable « loi de résultats » et, ainsi, un temps fort de l’évaluation et du contrôle parlementaires. C’est un souhait que j’avais d’ailleurs formulé devant vous l’année dernière, lorsque je suis intervenu, au mois de juin, dans l’hémicycle.

Néanmoins, si un tel resserrement du calendrier est bienvenu, il ne doit pas affecter les conditions de réalisation des travaux de la Cour. Ceux-ci dépendent, en effet, de la complète disponibilité des éléments d’informations statistiques, budgétaires et comptables fournis par les services du ministère de l’action et des comptes publics et nécessaires à la réalisation de nos diligences de contrôle et de certification.

Or, dès cette année, le resserrement du calendrier de dépôt du projet de loi de règlement a posé quelques difficultés. Ainsi, le Haut Conseil des finances publiques a été conduit à formuler son avis avant que l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) ne publie les premiers résultats des comptes annuels de 2018, nécessaires au calcul du solde structurel des administrations publiques. En l’occurrence, ces résultats ont été publiés vendredi dernier, soit quelques jours après la parution de l’avis du Haut Conseil. Ces nouvelles données vont conduire à de légères modifications des chiffres figurant dans l’avis. Compte tenu de ces modifications, le Haut Conseil prévoit de publier dans les jours qui viennent un avis rectifié, cohérent avec un éventuel amendement du Gouvernement.

À l’avenir, l’avancement du calendrier du dépôt du projet de loi de règlement devra donc nécessairement aller de pair avec celui de la mise à disposition de toutes les données statistiques, budgétaires et comptables produites à cette occasion par les ministères économiques et financiers. Elles sont nécessaires aux juridictions financières pour réaliser les travaux que lui a confiés le législateur organique dans les meilleures conditions et en préservant un délai raisonnable d’instruction.

Cette précaution ayant été formulée, j’en viens au contenu des trois documents qui vous ont été remis. Je commencerai par l’acte de certification des comptes de l’État pour l’exercice 2018.

J’insisterai en particulier sur trois éléments.

D’abord, il me semble utile de rappeler quelques chiffres-clés, relatifs à la situation financière de l’État présentée dans son compte général. Les états financiers mettent en lumière la situation nette fortement négative des comptes de l’État, à hauteur de 1 296 milliards d’euros, au 31 décembre 2018. Ce chiffre correspond à près de quatre années de produits fiscaux. En 2006, lors du premier exercice de certification conduit par la Cour, la situation nette des comptes de l’État en représentait la moitié, c’est-à-dire « seulement » deux années. Cela traduit bien la détérioration de la situation financière de l’État qui s’est opérée ces dernières années et que nous avons eu l’occasion de documenter à de nombreuses reprises.

Comme j’ai déjà eu l’occasion de le faire il y a un an, je crois donc utile d’insister à nouveau sur le fait que le passif de l’État représente plus du double de son actif ; autrement dit, ce que l’État doit représente plus de deux fois ce qu’il possède et, ce, sans même tenir compte de ses engagements hors bilan, qui atteignent un peu plus de 4 000 milliards d’euros.

Sur le fond, ensuite, l’acte de certification confirme la poursuite de la démarche de fiabilisation des comptes de l’État que nous constatons année après année. Ainsi, les améliorations réalisées en 2018 permettent de lever quatorze parties des réserves formulées sur les comptes de l’exercice passé. On peut citer, à titre d’exemples, les progrès réalisés dans l’estimation de la valeur du parc immobilier de l’État à l’étranger ou de celle des établissements publics de santé.

Comme en 2017 et en 2016, la Cour a donc certifié les comptes de l’État sous quatre réserves substantielles. La première est systémique : en dépit de quelques progrès, dont l’acte rend compte, la Cour considère que les modalités de tenue de la comptabilité générale de l’État dans Chorus et l’efficacité encore insuffisante de son contrôle interne entraînent une limite générale dans l’étendue des vérifications que le certificateur doit conduire. Les trois autres réserves concernent différentes anomalies, portant respectivement sur les stocks militaires et les immobilisations corporelles, les immobilisations financières et les produits et charges régaliens.

Depuis treize années que les comptes de l’État sont certifiés, nous sommes donc parvenus au stade où ne demeurent que des réserves substantielles, dont nous savons que l’érosion sera lente. Elle sera facilitée par la qualité du dialogue noué entre le certificateur et la direction générale des finances publiques (DGFiP) qui est, dans ce domaine, notre principal interlocuteur. Ce dialogue vise autant à traiter les réserves persistantes qu’à prendre en compte les nouveaux sujets qui apparaissent inévitablement à mesure que les politiques publiques évoluent, que les comptes sont plus faciles à auditer et que les travaux de certification progressent.

À cet égard – et ce sera mon dernier point – il me semble utile de vous indiquer que la Cour dresse cette année le constat général d’une relance de la dynamique de fiabilisation des comptes de l’État, dont nous souhaitons naturellement qu’elle se poursuive.

Les échanges noués avec la DGFiP ont ainsi été très constructifs tout au long de l’année passée, et nous nous en réjouissons. Un planning et une feuille de route ont par exemple été établis à l’automne 2018 pour rechercher les moyens de simplifier, à la fois la production et l’audit des comptes, et de moderniser les modalités de relations entre l’administration et le certificateur. Notre objectif commun – plus largement – est de faire en sorte que les données de comptabilité générale soient plus facilement utilisables et plus utiles, pour les gestionnaires, mais aussi pour vous-mêmes.

La qualité de ce dialogue est en tout cas de bon augure pour le traitement des vingt‑cinq constats d’audit énoncés par l’acte de certification. Ce dialogue devra aussi trouver à s’appliquer à l’identification de toutes les conditions à remplir pour accélérer le calendrier de production des comptes tout en préservant ses conditions d’examen par la Cour.

J’en viens à la présentation des conclusions de notre rapport sur l’exécution du budget de l’État. Comme l’année dernière, j’aurai aussi l’occasion de présenter ces conclusions le 17 juin dans l’hémicycle et de formuler un certain nombre de messages, plus généraux, sur la situation de nos comptes publics.

Je commencerai par émettre à nouveau une précision méthodologique : outre le changement de calendrier que j’ai évoqué en introduction, nous avons aussi procédé cette année à une adaptation du format et du contenu des soixante-six notes d’exécution budgétaire qui accompagnent ce rapport. Nous en étions convenus ensemble l’année dernière, lors de la remise du rapport sur l’exécution budgétaire de 2017. Par ailleurs, ces notes vous ont été transmises dès le 2 mai, c’est-à-dire juste après votre réception des rapports annuels de performances, pour vous permettre, ainsi, de les étudier plus en amont de l’examen du projet de loi de règlement.

Sur le fond, les modifications portées aux notes d’exécution budgétaire répondent à différents souhaits que vous avez exprimés. Ils visaient notamment à disposer de davantage d’analyses par programme, à avoir plus de problématisation et de profondeur historique, et à donner une image plus complète des moyens consacrés à chaque politique publique. Il est prévu que ce processus d’amélioration se déroule sur deux exercices ; nous serons donc particulièrement attentifs à l’appréciation que vous porterez sur les changements qui ont été effectués cette année et à vos éventuelles propositions d’évolution pour l’année prochaine.

Nous y serons d’autant plus attentifs que ces notes constituent, je crois, un outil de travail particulièrement précieux pour appréhender l’exécution budgétaire de chaque mission.

Certaines notes sont d’ailleurs susceptibles de vous intéresser tout particulièrement ; je pense par exemple à la note consacrée à la mission Cohésion des territoires, qui identifie une baisse de 1,2 milliard d’euros sur les dépenses d’aide au logement entre 2017 et 2018, suite aux mesures d’économies décidées dans ce secteur. Ou à la note consacrée à la mission Écologie qui présente l’analyse budgétaire liée à la généralisation du chèque énergie, en remplacement des tarifs sociaux du gaz et de l’électricité destinés aux ménages modestes.

Je pourrai multiplier les exemples tant ces travaux sont denses et riches. Sachez en tout cas que la Cour se tient à votre disposition pour vous apporter, selon les missions qui vous intéressent, les éclairages complémentaires qui vous sont utiles. Je sais d’ailleurs que des rapporteurs spéciaux ont d’ores et déjà souhaité entendre des équipes de la Cour pour approfondir certains éléments développés dans les notes d’exécution budgétaire, et je m’en réjouis. Ce qui fait passer notre indicateur du nombre d’auditions de quarante à près de quatre-vingt-dix.

Sur le fond, le rapport qui vous est remis comporte trois grands axes.

Le premier détaille les conditions d’exécution du budget de l’État en 2018. Nous constatons notamment que celle-ci s’est faite de manière plus maîtrisée qu’en 2017.

Le deuxième axe, plus structurel, approfondit la situation singulière du budget de l’État par rapport à l’ensemble des administrations publiques : après trois années de quasi‑stabilité, le déficit de l’État s’est creusé en 2018, alors que le solde des administrations publiques connaissait une évolution contraire.

Le troisième axe de ce rapport consiste, au-delà de l’analyse de la gestion 2018, à souligner la complexité croissante et le manque de lisibilité du budget de l’État, et à dresser un bilan du dispositif de performance établi par la LOLF.

Je commencerai par restituer les principaux constats ayant trait à l’exécution du budget de l’État au cours de l’année 2018.

D’un point de vue qualitatif, la Cour fait état d’améliorations incontestables par rapport à l’exercice 2017, dont l’exécution s’était révélée particulièrement heurtée. Le rapport établit notamment qu’en 2018, les mises en réserve de crédits ont été circonscrites, la gestion infra-annuelle normalisée, les reports de charges et de crédits contenus et les normes de dépenses tenues.

Cette situation tient pour une part importante à l’amélioration de la qualité de la budgétisation initiale et de la programmation des dépenses : les sous-budgétisations se sont ainsi limitées à 1,5 milliard d’euros en 2018, contre 4,4 milliards d’euros en 2017.

Grâce aux efforts entrepris, aucun décret d’avance n’a été nécessaire en cours de gestion, alors que les exercices précédents en avaient connu deux ou trois. Les annulations et ouvertures de crédits comptent également parmi les plus basses, depuis l’entrée en vigueur de la LOLF. La Cour salue tout particulièrement le faible niveau de la réserve, puisque le taux de mise en réserve est passé de 8 % en 2017 à 3 % en 2018. Nous ne pouvons évidemment que souhaiter que cet effort de maîtrise de l’exécution budgétaire se poursuive au cours des prochains exercices.

Mais, malgré ces satisfecit, quelques pratiques de gestion critiquables persistent. Le rapport signale, par exemple, le maintien de sous-budgétisations dans le domaine des opérations extérieures, à hauteur de 600 millions d’euros. Il relève également l’utilisation inappropriée de la dotation pour dépenses accidentelles ou imprévisibles, qui a principalement couvert une sous-budgétisation de 100 millions d’euros liée au Mécanisme européen de stabilité (MES).

D’un point de vue quantitatif, le rapport formule un certain nombre d’observations quant aux résultats de la gestion achevée.

S’agissant des dépenses, la Cour relève que, par rapport à 2017, les dépenses de l’État ont continué à progresser, à hauteur de 0,9 % sur le périmètre de la nouvelle norme de dépense pilotable. Le rythme de progression des dépenses du budget général a pour sa part été limité à 0,3 %, contre 3,2 % sur un périmètre équivalent l’année dernière.

La progression des dépenses en 2018 résulte de l’augmentation significative des dépenses de personnel, qui se sont accrues de 2 % entre 2017 et 2018, malgré une stabilisation des effectifs. Cela tient notamment à l’effet, en 2018, des recrutements effectués en 2017, et aux mesures salariales intervenues alors, telles que l’application du protocole sur les parcours professionnels, les carrières et les rémunérations (PPCR). Par ailleurs, même si la croissance de la masse salariale a légèrement ralenti par rapport à 2017 – + 2 % contre + 3,4 % –, elle demeure supérieure à la moyenne de l’évolution constatée entre 2008 et 2017. En définitive, les dépenses de personnel représentent désormais près de 39 % des dépenses du budget général.

S’agissant des recettes, les recettes totales de l’État ont été nettement plus élevées que la prévision initiale établie en loi de finances initiale (LFI) : + 8,7 milliards d’euros. Parmi ces recettes, ce sont les recettes fiscales nettes qui ont connu une exécution plus forte qu’attendu, à savoir + 8,8 milliards d’euros.

Bien qu’en hausse par rapport à la prévision, parce que l’évolution spontanée des recettes a été dynamique (+ 13 milliards d’euros), les recettes fiscales sont toutefois en légère baisse par rapport à 2017, notamment en raison des mesures importantes de baisses d’impôts prises en 2018 ou de mesures prises les années précédentes.

Vous le savez en effet, les baisses de prélèvement ont été significatives ces dernières années. Ainsi, pour la seule année 2018, en dépit d’un alourdissement de 4,1 milliards d’euros des recettes provenant de la fiscalité énergétique, les différentes mesures adoptées ont eu un impact net sur les recettes fiscales de moins 16,5 milliards d’euros, dont moins 13,5 milliards d’euros résultant de mesures d’allégement fiscal.

Même si elles sont plus élevées que les prévisions initiales, les recettes nettes totales de l’État accusent donc une baisse de 1 milliard d’euros par rapport à 2017. Cette baisse aurait d’ailleurs dû atteindre 3,8 milliards d’euros si des recettes de droits de mutation en 2017 n’avaient pas été imputées à tort sur 2018, ce que nous avions déploré l’année dernière, dans la précédente édition du rapport sur le budget de l’État.

Grâce à des recettes plus élevées qu’anticipées, le déficit de l’État a été relativement contenu par rapport à la prévision établie en LFI. Il atteint en effet 76 milliards d’euros soit 9,6 milliards d’euros de moins que le niveau fixé en LFI.

Mais ce constat ne doit pas occulter la trajectoire d’évolution et l’ampleur du déficit de l’État.

À un tel niveau, le déficit de l’État représente en effet 23,4 % des dépenses nettes du budget de l’État, c’est-à-dire 4 milliards d’euros de plus que les dépenses de la mission Enseignement scolaire et 3 milliards de plus que les recettes de l’impôt sur le revenu. Surtout, et pour la première fois depuis 2014, le déficit de l’État est en hausse par rapport à l’année précédente, à hauteur de 8,3 milliards d’euros.

La trajectoire de l’État diverge donc de celle de l’ensemble des administrations publiques. En effet, le déficit de l’État en comptabilité nationale a atteint près de 3 % du produit intérieur brut (PIB) en 2018. Il est, de ce fait, nettement supérieur au déficit de l’ensemble des administrations publiques, qui a baissé de 0,3 point en 2018, pour s’établir à 2,5 %. En conséquence, alors que la dette de l’ensemble des APU se stabilise à 98,4 points de PIB, celle de l’État progresse, atteignant 78,3 points de PIB, soit 1,2 point de PIB de plus que l’année passée.

Au regard de cette situation contrastée, nous avons souhaité approfondir l’analyse du rôle particulier de l’État au sein des administrations publiques : c’est l’objet du deuxième message délivré dans ce rapport.

L’explication des divergences observées entre la situation de l’État et celle de l’ensemble des administrations publiques ne se trouve pas du côté des dépenses, dont l’augmentation, quelle que soit l’approche retenue, a tendance à ralentir. Le facteur explicatif se trouve plutôt dans la politique suivie en matière de recettes et, plus particulièrement, de recettes fiscales.

En effet, l’État définit la politique de prélèvements obligatoires, non seulement pour ses propres impôts – l’impôt sur le revenu, la taxe sur la valeur ajoutée ou encore l’impôt sur les sociétés –, mais aussi pour les ressources des collectivités territoriales et de la sécurité sociale. Ainsi, les baisses de prélèvements destinées à améliorer la compétitivité des entreprises ou à augmenter le pouvoir d’achat des ménages prennent notamment la forme de mesures relevant de la sécurité sociale, comme la suppression de cotisations salariales maladie et chômage, ou des collectivités locales, telles que le dégrèvement de la taxe d’habitation, qui font l’objet de compensations pesant sur le budget de l’État.

C’est donc le budget de l’État qui supporte l’essentiel du coût net des baisses de prélèvements, alors que ces baisses portent sur les recettes de toutes les administrations publiques.

Or, l’État ne peut pas réduire ses propres dépenses à due concurrence des baisses de prélèvements opérés sur l’ensemble des administrations publiques, d’autant plus qu’il porte aussi la charge d’intérêt sur 80 % de la dette publique.

Nous tirons de cette situation trois enseignements. Le premier enseignement, c’est qu’il faut veiller à ce que l’effort de baisse des impôts soit proportionné à l’effort de baisse de la dépense. Ensuite, qu’il faut que cet effort de maîtrise de la dépense soit réparti sur l’ensemble du champ des administrations publiques et non du seul État. Enfin, et c’est le troisième enseignement, que, si nécessaire et notamment si l’on souhaite réduire plus rapidement le déficit du budget de l’État, le partage des recettes et des charges entre l’État et les autres secteurs d’administrations publiques mérite de faire l’objet d’un réexamen.

J’en viens au troisième et dernier message-clef figurant dans ce rapport. Il concerne la complexité croissante du budget de l’État, ainsi que les limites de la démarche de performance mise en œuvre par la LOLF.

Ce n’est pas un constat spécifique à la gestion budgétaire observée en 2018 ; néanmoins, nous avons souhaité y accorder des éléments d’analyse plus substantiels, qui intéresseront tout particulièrement les rapporteurs de la mission d’information relative à la mise en œuvre de la loi organique relative aux lois de finances (MILOLF) qui ont engagé des travaux de bilan de cette loi organique à l’approche de son vingtième anniversaire.

J’ai d’ailleurs eu l’occasion d’être entendu dans ce cadre devant votre commission, au mois de mars. Je vous ai indiqué alors que la Cour se tiendrait à la disposition de la mission d’information dans la suite de ses travaux. Elle a déjà prévu d’entendre de manière informelle le président Briet et Cécile Fontaine qui m’accompagnent, le 27 juin prochain. De notre côté, comme je vous l’avais indiqué en mars, la Cour a programmé l’année prochaine la réalisation d’un rapport public thématique consacré au bilan de la LOLF, comme elle l’avait fait en 2011. S’il est nécessaire d’ajuster notre calendrier en fonction de vos souhaits, nous pourrons, bien évidemment, y réfléchir.

J’en reviens à la question de la complexité du budget de l’État. Vous le constatez au quotidien, la dépense de l’État constitue un agrégat hétérogène, peu lisible et instable. Il est extrêmement complexe, sinon parfois impossible, de parvenir à en délimiter précisément les contours et à en apprécier les évolutions.

Cette complexité tient pour partie aux entorses persistantes faites aux grands principes budgétaires, tout particulièrement au principe d’universalité. Bien souvent en effet, les démembrements du budget de l’État conduisent à ce que les crédits budgétaires ne retracent qu’une partie, finalement très réduite du financement de certaines politiques publiques.

En conséquence, si l’on cherche à analyser la dépense de l’État sur le seul périmètre du budget général, on a une réelle difficulté à retracer des évolutions pertinentes et à appréhender la totalité des concours publics qui financent une activité déterminée.

Nous avions choisi l’année dernière de nous intéresser à l’un des outils portant atteinte à la cohérence du cadre budgétaire, les fonds sans personnalité juridique. Le rapport sur l’exécution du budget de l’État pour 2018 réitère ces analyses, en présentant de façon détaillée l’un de ces spécimens, le Fonds pour l’innovation et l’industrie, créé en 2018.

Il constitue une bonne illustration des critiques que nous avons formulées sur les fonds sans personnalité juridique, qui font anormalement échapper au champ de l’autorisation parlementaire et des règles qui s’y appliquent des crédits qui pourraient parfaitement être autorisés et gérés chaque année en utilisant le cadre budgétaire normal de la LOLF. En l’espèce, le rapport formule une recommandation visant à substituer à ce fonds pour l’innovation un dispositif de soutien à l’innovation inclus dans le budget général.

Nous avons également consacré des développements substantiels aux dépenses fiscales, dont le coût a continué à progresser en 2018, de 6,7 milliards d’euros, par rapport à 2017. Leur montant atteint ainsi près de 100 milliards d’euros, pour l’année 2018. Depuis 2013, le coût des dépenses fiscales a progressé de près de 5,6 % par an, soit 1,8 % si l’on exclut l’effet du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). Les dispositifs nouveaux se sont ainsi multipliés, sans que les dispositifs existants ne soient réexaminés. J’ajouterai que le plafonnement de ces dépenses demeure inopérant et leur évaluation lacunaire.

Vous êtes, si j’ose dire, les principales victimes des problèmes de fond que je viens successivement d’évoquer. Ils ont en effet pour conséquence de limiter la portée de l’autorisation parlementaire et, plus largement, de réduire la capacité du Parlement à appréhender, dans leur globalité, les enjeux financiers associés à l’action de l’État, notamment sur une longue période. Aussi, nous souhaitons bien évidemment que les différentes recommandations que nous formulons dans ce rapport puissent progressivement remédier à cette situation.

J’en viens aux observations que nous établissons sur la démarche de performance. Le chapitre qui lui est consacré permet de dresser un bilan globalement décevant des réalisations portées par la LOLF en la matière.

En réalité, il confirme une perception que nous avions déjà : la culture de la performance dans la gestion publique est une greffe qui n’a pas encore parfaitement pris. Nous en relevons plusieurs symptômes, tels que le caractère surabondant et peu utilisé de la documentation budgétaire.

Sur le temps long, nous observons aussi que toutes les démarches de modernisation de l’État – quelles qu’en aient été les appellations – se sont construites à côté de ce dispositif de performance, signe de son caractère peu opérant ou, au moins, de sa faible appropriation par les décideurs publics.

La valeur ajoutée du bilan que nous avons réalisé tient pour partie à l’important travail de parangonnage effectué par les rapporteurs. Je sais que c’est un point d’attention et d’intérêt important pour la MILOLF. Ce travail permet, en effet, de replacer l’expérience française parmi celles de nos voisins étrangers. Nous avons également procédé à une consultation en ligne des responsables de programme, riche d’enseignements. Vous pourrez prendre connaissance de ces différents éléments en annexe du rapport qui vous a été remis.

Globalement, si notre analyse nous conduit à dresser un bilan décevant de la démarche de performance, ce bilan ne doit pas conduire à céder au découragement. Car la LOLF a clairement permis de faire bouger les lignes, et de dépasser la seule logique de moyens qui lui préexistait. Il est vrai, par ailleurs, que le contexte budgétaire, particulièrement tendu qui a prévalu à partir de 2008, a fortement raccourci l’horizon des gestionnaires et rétréci leurs marges de manœuvre et qu’il a, ainsi, en partie annihilé les effets positifs du dispositif de performance promu par la LOLF.

S’il n’est donc pas souhaitable de revenir en arrière, notre rapport propose un certain nombre de pistes de refondation de ce dispositif.

D’abord, mieux distinguer les objectifs stratégiques, de niveau politique, et les objectifs de gestion fixés aux responsables de programmes, car un gestionnaire ne peut être tenu pour responsable que de ce sur quoi il a de vraies marges de manœuvre.

Ensuite, conduire, en complément de ce dispositif, des revues de dépenses et des évaluations de politiques publiques de façon régulière et selon un programme prévu dans la loi de programmation des finances publiques et présenté au Parlement, comme le font la plupart des partenaires de la France.

Enfin, rendre de vraies marges de gestion aux responsables de programme, en leur redonnant des perspectives de moyen terme par un renouveau des dispositifs de contractualisation et de fongibilité.

J’achèverai mon propos en tant que président du Haut Conseil des finances publiques, pour vous présenter en quelques mots l’avis que le Haut Conseil vient de formuler sur le projet de loi de règlement.

Cet avis est rendu en application de la loi organique relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques de décembre 2012. Conformément à la volonté du législateur organique, le Haut Conseil doit, à cette occasion, comparer l’exécution constatée en 2018 avec la trajectoire de solde structurel, définie dans la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2018 à 2022. Pour rappel, ce solde correspond au solde nominal, corrigé des effets liés à la conjoncture économique et déduction faite des mesures ponctuelles et temporaires.

En l’espèce, l’avis formule deux constats.

Le premier porte sur le niveau du déficit structurel. Alors qu’il s’élevait à 2,4 points de PIB en 2017, le déficit structurel, tel qu’il est présenté dans l’article liminaire du projet de loi de règlement qui nous a été communiqué le 24 avril, est estimé à 2,1 points de PIB en 2018. Les graphiques que vous voyez défiler retiennent ces chiffres, qui correspondent à ceux figurant dans notre avis et qui nous ont été présentés avant la publication des comptes annuels de l’INSEE.

Le Haut Conseil a constaté dans son avis que le solde structurel estimé pour 2018 était identique à celui prévu par la LPFP promulguée en janvier 2018. Cependant, comme je l’ai indiqué en introduction, cette estimation va évoluer à la suite de la publication par l’INSEE de nouvelles données.

Selon les estimations dont nous disposons, il semblerait que le déficit structurel soit légèrement revu à la hausse et, donc, que le solde structurel soit un peu plus dégradé que celui inscrit en LPFP, et ce, d’un peu plus de 0,1 point. Le solde structurel estimé pour 2018 ne serait ainsi plus identique à celui prévu par la LPFP, même s’il en serait proche.

La conclusion du Haut Conseil n’en serait toutefois pas modifiée, et dans tous les cas, il n’y a pas lieu de déclencher le mécanisme de correction prévu par la loi organique de décembre 2012.

Je rappelle que la mise en œuvre de ce mécanisme est prévue lorsqu’un écart de solde structurel par rapport à la loi de programmation atteint au moins 0,5 point de PIB sur une année donnée, ou 0,25 point de PIB par an en moyenne sur deux années consécutives.

Le second constat formulé par notre avis porte sur la décomposition de la variation du solde structurel.

Entre 2017 et 2018, compte tenu des arrondis et sous réserve de nouvelles estimations qui pourront être établies par la direction générale du Trésor, le déficit structurel se serait réduit de 0,2 point de PIB. Ce chiffre pourrait être ramené à 0,1 point compte tenu des données publiées la semaine dernière par l’INSEE. Cette amélioration s’explique, selon le Gouvernement, par un effort sur les dépenses publiques, compris entre + 0,4 point et + 0,3 point selon les estimations retenues, partiellement compensé par des mesures de baisse des prélèvements obligatoires à hauteur de moins 0,2 point.

S’agissant plus particulièrement de l’effort en dépense, il résulte d’une croissance des dépenses publiques moins rapide que la croissance potentielle du PIB, estimée à 1,25 %. Toutefois, le Haut Conseil relève que la recapitalisation d’Areva, en 2017, a un impact significatif sur le calcul de cet effort.

Si l’on neutralise les 4,5 milliards d’euros de dépense publique liés à cette recapitalisation, opérée en 2017, la croissance de la dépense en volume est alors de l’ordre de 1 % en 2018, soit une augmentation pratiquement identique à celle constatée en 2017. Hors impact de la recapitalisation d’Areva, l’effort en dépense serait alors de 0,2 point en 2018 et l’effort structurel serait réduit à zéro, voire légèrement négatif avec les nouvelles estimations.

En tout état de cause, le Haut Conseil souligne que le solde structurel reste encore très éloigné de l’objectif de moyen terme, soit – 0,4 point de PIB, défini dans la loi de programmation. Je pense que vous aurez un amendement du Gouvernement, présentant les nouveaux chiffres de l’INSEE, pour votre discussion sur le projet de loi de règlement.

Je ne sais si le Gouvernement a l’intention de saisir, à nouveau, le Haut Conseil, mais ce dernier se saisira de ces nouveaux chiffres pour actualiser son avis. Même si cela ne change pas fondamentalement les constats opérés par le Conseil, ils modifient quelques données et il est important de les préciser.

M. le président Éric Woerth. Je vous remercie, monsieur le Premier président, pour votre présentation des trois rapports extrêmement complets. Je note, s’agissant de l’acte de certification des comptes de l’État pour 2018, que le jugement de la Cour des comptes est assez sévère ; il se rapproche, en tout cas, des commentaires que l’opposition avait formulés au ministre, la semaine dernière.

Le déficit de l’État augmente de 12 %, un fait suffisamment rare pour être relevé. S’il est moins important que prévu, la réalité est qu’il y a, entre 2017 et 2018, une forte augmentation du déficit de l’État. Le constat et le même pour la dette financière de l’État.

S’agissant des dépenses fiscales, un sujet sensible que nous abordons souvent, vous indiquez qu’elles sont en augmentation et qu’elles ne sont pas pilotées.

En ce qui concerne l’augmentation de la dépense, vous notez, à juste titre, un ralentissement de cette augmentation. Cependant, au vu de l’avis du Haut Conseil relatif à l’ensemble des dépenses publiques – et non pas uniquement des dépenses de l’État –, une question se pose sur la mesure de la dépense en volume. Vous indiquez qu’il convient de prendre comme coefficient déflateur la valeur du PIB et non pas celui de l’indice des prix à la consommation. Vous corrigez l’impact de la recapitalisation d’Areva. Vous aboutissez à une augmentation d’un peu moins de 1 % en volume de la dépense publique ; or ce n’est pas du tout la manière dont le Gouvernement présente les choses. Quelle est selon vous, d’ailleurs, la meilleure manière de présenter les choses, et surtout, la manière la plus proche de la réalité ?

S’agissant des effectifs, vous notez l’augmentation de la masse salariale, et relevez que les baisses d’effectifs prévues par la loi de finances pour 2018 ne se sont pas réalisées
– moins 500 emplois entre 2017 et 2018 ; nous sommes très loin des objectifs de réduction qui ont été affichés politiquement.

Je note également une forte élasticité des recettes à la croissance : 1,8 % contre 1,4 %. Selon vous, est-ce dû à la structure de notre système fiscal, à une sous-estimation de l’élasticité ou voyez-vous d’autres raisons ?

Enfin, vos remarques sur la démarche de performance sont particulièrement intéressantes. Je ne reviendrai pas sur ce que vous avez indiqué concernant le fonds pour l’innovation, nous l’avions exprimé au moment de l’examen de la loi relative à la croissance et à la transformation des entreprises, mais vous en tirez les conséquences sur le plan technique. Vous proposez une refondation de la démarche de performance intéressante. Notre commission a recréé la MILOLF ; nous pourrons ainsi utiliser à bon escient les conclusions et les propositions de la Cour. La démarche de performance est essentielle, c’est d’ailleurs pour cette raison que la LOLF a succédé à l’ordonnance de 1959.

M. Joël Giraud, Rapporteur général. Monsieur le Premier président, vous intervenez, ce matin, en diverses qualités, et je vous remercie pour cette présentation. Je remercie également l’ensemble des magistrats ici présents. Le nouveau rythme de travail que nous avons souhaité établir avec la Cour est un gage de l’efficacité de la politique d’évaluation publique que nous voulons mener. J’espère que tout cela va pouvoir se poursuivre, pour le plus grand bien du redressement de nos finances publiques.

Permettez-moi simplement une remarque, monsieur le président, connaissant maintenant la sémantique de la Cour, je ne pense pas que le terme de sévérité soit tout à fait opportun pour décrire la teneur des documents que nous avons reçus. S’il y avait de la sévérité, je ne sais quelle terminologie pourrait être employée pour les rapports de ces dix dernières années.

J’aborderai trois sujets. Le premier est relatif à ce que vous avez appelé « votre deuxième message-clef », à savoir le déficit de l’État.

Je l’ai déjà indiqué, lors de la présentation du projet de loi de règlement par le ministre de l’action et des comptes publics, le déficit public se réduit, mais celui de l’État augmente de manière significative, passant de 67,7 milliards d’euros à 76 milliards d’euros. Je souligne, dans l’ensemble de mes rapports, depuis que je suis Rapporteur général, que l’État porte l’essentiel du déficit public, de sorte que vos propos, formulés dans ce deuxième message-clef, me semblent importants. La situation est encore plus nette cette année, puisque le déficit de l’État est supérieur au déficit public.

Cette situation résulte du fait que l’État supporte seul l’essentiel des baisses des prélèvements obligatoires. De sorte que vous suggérez, dans votre rapport, de revoir la répartition des prélèvements obligatoires entre l’État et les autres catégories d’administrations publiques, et en particulier la sécurité sociale.

Monsieur le Premier président, pourriez-vous nous en dire plus sur vos préconisations en la matière, de façon que cet élément important de l’analyse de nos déficits, qui parfois relève d’une sémantique qui confine à la confusion, puisse être à la fois précis et efficace pour l’affichage de nos politiques publiques ?

Mes questions suivantes sont relatives aux dépenses fiscales, sur lesquelles la Cour a énormément travaillé. Une bonne dépense fiscale est une dépense efficiente qui atteint un objectif qui est justifié, pour un coût proportionné. Pour apprécier l’efficience et les marges de manœuvre, il nous faut disposer d’évaluations exhaustives et des données qui soient extrêmement précises. Or, vous le savez, nous disposons de données qui sont parfois lacunaires, et je reste poli, c’est la raison pour laquelle, je compte d’ailleurs consacrer un volet du prochain rapport sur l’application des mesures fiscales à ce sujet.

L’année dernière, j’ai sollicité Bercy à plusieurs reprises, ainsi que de nombreux collègues, pour effectuer un travail d’évaluation de l’ensemble des niches, à l’image de ce qui avait été réalisé en 2011, par le comité Guillaume. Un comité qui renaît aujourd’hui, puisqu’un rapport a été commandé à l’Inspection générale des finances sur ce sujet. Je voudrais m’assurer, monsieur le Premier président, que la Cour est bien associée à cette évaluation, au titre de la « convergence des luttes » contre les niches fiscales.

Pensez-vous que, si une niche ne poursuit pas d’autre objectif que celui de réduire le taux de prélèvement, elle devrait être intégrée à la norme fiscale de référence ?

Je voudrais également connaître la position de la Cour sur ce qui, précisément, constitue la norme de référence, c’est-à-dire la ligne de partage, souvent floue, entre ce qui est une niche et ce qui n’en est pas.

Pour terminer, je reviendrai sur l’un des propos que vous avez tenus dans votre troisième message-clef, toujours dans le cadre budgétaire de l’État. Vous avez souligné qu’il paraît de moins en moins lisible, que le nombre d’opérateurs et de fonds ne cesse d’augmenter, et que les concours de l’État aux opérateurs se sont accrus de 10 % entre 2012 et 2017.

J’ai le sentiment que le mouvement, qui avait un temps été freiné, avec la mise en œuvre de la LOLF, est reparti de plus belle. Dans le même temps, la tendance est également à l’augmentation du nombre d’affectations de recettes, aussi bien à l’initiative du Gouvernement que des parlementaires.

Comment expliquez-vous ce mouvement de fond en faveur de dérogations aux principes d’unité et d’universalité budgétaires ? Comment limiter, voire réprimer, cette inclinaison générale, sans pour autant passer pour un parangon de vertu ?

Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas. Monsieur le président Migaud, je vous remercie pour votre présence. Je me réjouis aussi que l’année 2018 ait été marquée par une gestion des dépenses de l’État, conforme à la prévision initiale, et maîtrisée en exécution, je cite : « une programmation plus sincère des dépenses ». Je pense que mes collègues abonderont dans ce sens.

Je tiens à souligner qu’aucun décret d’avance en cours d’année n’a été nécessaire, ce qui est une excellente nouvelle, quand nous comparons avec les gestions précédentes. La hausse du déficit a été contenue à un niveau significativement inférieur à celui qui était prévu en LFI. Les transferts financiers destinés aux collectivités locales ont fortement progressé, dépassant pour la première fois leur montant de 2014.

Ma question concerne la trajectoire du déficit de l’État ; nous en avons parlé, mais je souhaiterais obtenir davantage de précisions. Dans votre rapport sur le budget, vous soulignez que la trajectoire du déficit de l’État diverge de celle de l’ensemble des administrations publiques, l’État compensant les baisses de prélèvements qu’il leur impose – la taxe d’habitation en est un exemple très concret. De ce fait, il porte l’essentiel du coût net des baisses de prélèvements opérées sur l’ensemble des recettes des administrations publiques, ainsi que la charge d’intérêt portant sur près de 80 % de la dette publique.

Or, l’État n’est pas à même de réduire ses propres dépenses à due concurrence des baisses de prélèvements opérées sur l’ensemble des administrations publiques. Je vous cite : « Ces baisses doivent saccompagner defforts de réduction des dépenses sur lensemble du champ des administrations publiques et non du seul État. »

Pourriez-vous nous préciser les réductions de dépenses auxquelles vous faites référence ?

Mme Véronique Louwagie. Monsieur le Premier président, je vous remercie pour votre exposé. La lucidité de vos propos, votre jugement et votre opinion étayée dans le cadre de votre avis, tranchent véritablement avec l’enthousiasme du ministre Gérald Darmanin qui est venu nous présenter le projet de loi de règlement la semaine passée.

Je réagirai sur trois points et vous poserai deux questions.

D’abord, vous soulignez l’aggravation du déficit de l’État en 2018, avec un déficit proche de 3 % du PIB, et indiquez que l’effort ne vient pas du tout de l’État dans l’amélioration du déficit public.

Ensuite, le déficit structurel, de 2,3 %, ne s’améliore quasiment pas par rapport à celui de 2017 – 2,4 % –, ce qui est inquiétant. Par ailleurs, il est en effet anormal que le Haut Conseil soit amené à rendre un avis avant que l’INSEE ne publie les premiers résultats des comptes annuels de 2018.

Enfin, je souhaitais souligner que, hors recapitalisation d’Areva en 2017, l’effort structurel serait nul en matière de dépenses.

Ma première question est relative à la dépense de la masse salariale, qui représente 39 % du budget général. Une dépense importante, en augmentation de 2 % par rapport à 2017, malgré une stabilisation des effectifs, augmentation probablement due en partie aux nouveaux protocoles des parcours professionnels. Cette augmentation, relativement importante, constatée en 2018, n’est-elle pas de nature à remettre en cause les évolutions des dépenses qui étaient prévues, au niveau de l’État, pour les années à venir ?

Ma seconde question concerne l’évolution des dépenses fiscales – une évolution importante. Vous avez un peu joué au jardinier, en indiquant que la greffe n’avait pas pris, mais nous constatons que la performance n’est pas dans l’ADN du Gouvernement. Vous avez même précisé qu’il ne fallait pas se décourager – c’est dire que vous y avez probablement pensé. Une rupture forte, un changement de cap n’est-il pas nécessaire pour réussir à évoluer, s’agissant de ces dépenses fiscales ?

M. Mohamed Laqhila. Monsieur le Premier président, merci pour cette présentation qui, permettez-moi de le souligner, relève une meilleure programmation des dépenses, et de ce fait une plus grande sincérité du budget.

Oui, nous pourrions nous dire que la réduction du déficit public, de 4 points en dix ans, est nettement inférieure au reste de la zone euro, où la moyenne des déficits était de 0,7 point de PIB fin 2018.

Oui, nous pourrions aussi déplorer que la France soit le seul pays de l’Union européenne à afficher cette année un déficit supérieur à 3 %, aux côtés de la Roumanie
– 3,5 %.

Oui, nous pourrions déplorer la dégradation constante, depuis deux ans, du déficit de l’État, qui va continuer de croître. Une évolution qui ne vous a pas échappé, puisque vous relevez dans votre rapport, que pour la première fois depuis 2014, et après trois ans de quasi-stabilité, le déficit budgétaire de l’État est en hausse ; c’est peut-être dû au phénomène que nous observons, depuis novembre 2018, avec les derviches tourneurs des ronds-points du samedi.

Mais rappelons que l’État est le seul à supporter les baisses d’impôts et de charges sociales. À ce titre, l’année 2018 est intéressante, parce qu’elle illustre bien la problématique suivante : d’un côté, une dépense qui, malgré un effort de maîtrise important, continue d’évoluer ; de l’autre côté, une baisse de recettes, via des baisses d’impôts. Comment le déficit ne pourrait-il pas augmenter ?

Mais cela signifie surtout que, pour maîtriser le déficit public, une action puissante doit être menée sur la dépense publique. Même s’il ne vous appartient pas, d’un point de vue politique, de faire des propositions de priorité sur la réduction des dépenses, ne pouvez-vous pas aiguiller, orienter l’État sur quelques pistes de méthodologie, lui suggérer une ou deux positions visant à parvenir à une baisse substantielle des dépenses de l’État et notamment de faire progresser le pilotage stratégique et le contrôle de gestion au sein des ministères ?

Enfin, s’agissant de la certification des comptes de l’État, la Cour certifie les comptes au 31 décembre qui sont « réguliers et sincères et donnent une image fidèle de la situation financière et du patrimoine de lÉtat », mais émet quatre réserves substantielles, contre treize en 2006. Vous avez relevé vingt-cinq anomalies ou incertitudes propres à affecter la fiabilité des comptes. Avez-vous chiffré le montant total de ces anomalies ?

M. Jean-Louis Bricout. Notre calendrier parlementaire oblige à nous exprimer, sur l’avis du Haut Conseil de la fonction publique, sur un solde structurel, calculé sur un PIB qui n’est pas complètement qualifié. Cette situation quelque peu inconfortable nous impose une certaine réserve dans nos propos, en particulier au regard du déficit structurel, lui aussi quelque peu incertain.

En revanche, le tableau de la page 3 montre une certitude : l’oubli de la recapitalisation d’Areva, 4,5 milliards d’euros sur les opérations ponctuelles et temporaires, dont la neutralisation pèse sur le solde public. D’ailleurs, le Haut Conseil note que si l’on neutralise cette dépense de 4,5 milliards d’euros en 2017, l’effort en dépenses est nul en 2017, au lieu de 0,2 point de PIB, et de 0,2 point en 2018 au lieu de 0,4 point. La croissance de la dépense publique en volume est alors, en 2018, du même ordre que 2017 – 0,9 point – à près de 1 %.

Sur le budget de l’État, le déficit est moindre que prévu par rapport à la loi de finances pour 2018, grâce certainement à de meilleures recettes – environ 11 milliards d’euros de plus – mais pourtant en hausse par rapport à 2017, contrairement à celui de l’ensemble des administrations publiques. Le déficit de l’État est attendu à 76 milliards d’euros, soit une hausse de 8,3 milliards d’euros par rapport à 2017. C’est la première fois depuis 2014 que le déficit augmente.

S’agissant de la dette, elle a progressé de 70,3 milliards d’euros, plus de 4,2 % entre 2017 et 2018, mais le niveau exceptionnellement bas, heureusement, des taux d’intérêt, a permis à l’État de stabiliser sa charge à 40,5 milliards d’euros.

Je résume : un effort de baisse de dépenses complètement insuffisant, 0,2 point de PIB ; des recettes de l’État qui diminuent de 1,2 milliard d’euros par rapport à 2017, en raison d’une baisse des recettes fiscales – on parle de 13,5 milliards d’euros dus à la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF), à la flat tax et à la prise en charge de la taxe d’habitation ; une forte augmentation du déficit de l’État, de plus de 12 %, supérieure au déficit public ; une dette qui continue de s’envoler.

Même si des évolutions restent à venir sur certains indicateurs, nous avons tout de même une certaine idée du point chute budgétaire ; un point de chute qui est en quelque sorte conforme aux prévisions que sous-entendent vos décisions politiques, prises depuis le début de mandat.

En marge de cet exercice, aujourd’hui quelque peu décalé, je serais plutôt preneur des grandes incertitudes de 2018 qui pèseront fortement sur le budget 2019. Qu’en sera-t-il de l’exonération des 20 % les plus riches sur la taxe d’habitation – un impact de 8 milliards d’euros ? On parle aussi de supprimer des niches fiscales pour financer les réductions d’impôt des classes moyennes ; sur quels critères d’appréciation devons-nous, selon vous, effectuer ces choix ?

Par ailleurs, les mesures prises en fin d’année 2018 et au premier trimestre 2019, suite au mouvement des « gilets jaunes », interrogent et même inquiètent. Je ne partage pas complètement l’analyse qui a été faite par notre collègue Charles de Courson, qui a vu dans ces décisions un virage vers des politiques plus keynésiennes, une politique de la demande plus affirmée sur différentes mesures de pouvoir d’achat et une idée d’alléger les politiques de l’offre.

Non, je dirais plutôt que nous sommes simplement sur une ligne rectificative des erreurs grossières de début de mandat qui ont complètement plombé en 2018, la consommation des ménages (– 0,6 point de PIB) et créé ces ruptures sociales, fiscales et territoriales.

Non, je crois que la ligne politique n’a pas réellement changé. D’ailleurs vous vous inquiétez des conséquences sur la dette. Mais quelque part, vous avez raison, puisque, en réalité, elle est assise sur du déficit qui est lui-même causé par les cadeaux inutiles au monde de la finance. Vous auriez peut-être pu mieux rétablir les équilibres entre les politiques de l’offre et la demande en revenant sur votre erreur de la suppression de l’ISF, en rectifiant la flat tax ou en évitant une double charge des aides aux entreprises, en décalant de quelques mois les baisses de cotisations.

À dette égale, mais réorientée sur un plan d’investissement durable, cette dette aurait sûrement permis une relance de l’économie de proximité, indispensable dans les territoires ruraux.

Certes, il n’y a pas lieu de déclencher le mécanisme de correction prévu par l’article 23 de la loi organique de 2012 ; pour autant nous ne nous réjouissons pas des résultats de 2018, et nous affirmons notre différence quant aux orientations politiques et économiques adoptées.

Mme Patricia Lemoine. La lecture du rapport de la Cour des comptes ainsi que celle de l’avis du Haut Conseil des finances publiques nous conduisent à qualifier ce budget de sincère dans sa programmation des dépenses, comme dans son exécution, mieux maîtrisée. D’ailleurs, nous constatons une diminution du nombre des sous-budgétisations, ainsi qu’une absence de décret d’avance en cours d’année, alors que les gestions précédentes en avaient connu deux ou trois. Ce budget est peut-être même le plus sincère depuis une décennie, et nous pouvons rendre hommage à cet effort de sincérité, même si celui-ci n’est pas totalement achevé.

Le déficit public de la France est pour la deuxième année consécutive sous la barre des 3 % du PIB, à 2,5 % contre 2,8 % en 2017. Les dépenses progressent à un rythme ralenti, mais continuent de progresser. Ce qui m’amène au second constat : les efforts pour rétablir les finances publiques ont été insuffisants en 2018.

Après trois ans de quasi-stabilité, le déficit budgétaire de l’État est en hausse, atteignant 76 milliards d’euros, contre 67 milliards d’euros en 2017 ; il a excédé de 33,3 milliards d’euros le niveau qui lui aurait permis de stabiliser la dette, rapportée au PIB, contre 23,4 milliards d’euros en 2017.

Même si la dette de l’ensemble des administrations publiques et stabilisée en ratio de PIB, elle poursuit sa progression en valeur, exposant l’État, en cas de remontée future des taux d’intérêt. La situation financière de l’État a continué de se détériorer en 2018, alors même que nos voisins européens, depuis plusieurs années déjà, réduisent leur endettement, à l’exception, évidemment, de l’Italie.

Suite à ce constat, je vous poserai trois questions, monsieur le Premier président.

Concernant le montant des restes à payer, celui-ci s’établit, pour 2018, à 118,9 milliards d’euros dans le projet de loi de règlement, alors que dans le rapport de la Cour des comptes, il est estimé à 110,1 milliards d’euros. Pourriez-vous nous expliquer cette différence de traitement comptable ? Et surtout les restes à payer, les charges à payer et les dettes fournisseurs sont-ils justifiés ? En bref, l’État est-il un bon payeur ?

Le mécanisme de plafonnement et d’écrêtement des taxes affectées devrait apporter à l’État une recette de 933 millions d’euros en 2018. En 2013, les reversements des taxes affectées au budget général de l’État atteignaient 218 millions d’euros. Ne pensez-vous pas que cette inflation des écrêtements agira comme un repoussoir, pour tout gouvernement, de rebudgétiser les taxes, dont l’affectation ne se justifierait pas, ou de mettre en œuvre une modulation à la baisse des taux des taxes affectées – je vise en l’occurrence la recommandation numéro 6 du rapport de juillet 2018 sur les taxes affectées ?

Enfin, concernant les primes d’émission que pensez-vous du recours à cet instrument pour la gestion de la dette, notamment à long terme ?

M. Éric Coquerel. Je ferai quelques remarques à propos de ce rapport.

Premièrement, si nous tenons compte de l’inflation et de l’augmentation de la population, l’augmentation de 0,3 % des dépenses entre 2017 et 2018 se traduit en réalité par une baisse effective de 1,8 %. Je note, par ailleurs, que ces dépenses ne comprennent que 3,5 % d’investissement, ce qui, chacun en conviendra, est fort peu.

Deuxièmement, malgré cette baisse, le déficit est une augmentation. Une augmentation qui s’explique par le fait que, comme d’habitude, l’État perd des recettes ; des recettes qui sont orientées de manière très inégale et très inefficace pour l’économie. En effet, l’exonération de 16,5 milliards d’euros de prélèvements obligatoires profite aux plus riches : suppression de l’ISF, remplacé par l’impôt sur la fortune immobilière ; prélèvement forfaitaire unique (PFU), qui a coûté 300 millions d’euros de plus, comme nous l’avions annoncé lors du débat parlementaire ; baisse de l’impôt sur les sociétés (IS).

Mais n’oublions pas les niches fiscales, qui, de nouveau, explosent cette année avec plus 6,7 milliards d’euros. Par ailleurs, j’adhère à la remarque de la Cour des comptes selon laquelle le CICE n’a eu aucun impact de court terme sur l’investissement, la recherche et les exportations. Et il a probablement eu un effet positif, mais modéré, sur l’emploi, de l’ordre de 100 000 emplois sauvegardés ; ce qui fait cher l’emploi. Autre niche fiscale qui coûte cher, celle relative au gazole pour les transports routiers, qui progresse de 453 millions d’euros ; une très mauvaise affaire pour le climat et l’État.

Ma troisième et dernière remarque est d’importance. Je suis heureux que la Cour des comptes pointe la question du fonds d’innovation, en se demandant pourquoi ce dispositif de soutien ne trouve pas sa place dans le budget général. Or, nous nous apercevons qu’il s’agit uniquement d’un effet de communication : il nous a été vendu une dotation de 10 milliards d’euros sur les ventes d’Aéroports de Paris (ADP), Engie et La Française des jeux, alors que, en réalité, seulement 250 millions d’euros lui seront consacrés annuellement, soit fort peu par rapport au coût que représentent ces privatisations pour la Nation. Je suis heureux que la Cour des comptes pointe l’inefficacité de ce dispositif, elle renforce ainsi notre volonté de rassembler 4,7 millions de signatures contre la privatisation d’ADP.

M. Jean-Paul Dufrègne. Monsieur le Premier président, je vous remercie pour cette présentation. Vous l’indiquez, le déficit budgétaire s’est dégradé de 8,3 milliards d’euros en 2018 par rapport à 2017, relativisant les leçons de bonne gestion et d’autosatisfaction auxquelles nous avons eu droit de la part du ministre, la semaine dernière.

Une dégradation du déficit qui, et vos chiffres le montrent bien, découle directement de ces 13,5 milliards d’euros d’allégements d’impôts, adoptés dans le cadre de ce que nous avons appelé « le budget des riches ».

Parmi ces 13,5 milliards, il y a 3,5 milliards de surcoût de CICE, qui chiffre l’addition de ce CICE à plus de 20 milliards d’euros en 2018 ; 3,2 milliards au titre de la disparition de l’ISF ; 1,6 milliard d’euros pour l’allégement sur les revenus du capital, la flat tax ; 1,2 milliard d’euros au titre de la baisse de l’IS ; mais il y a aussi 1,8 milliard d’euros que vous n’intégrez pas dans ces 13,5 milliards d’euros, et qui échappent néanmoins aux caisses de l’État, du fait du non-remplacement de la taxe à 3 % sur les dividendes qui a été supprimée, sans compensation. Le coût de l’ensemble des mesures à destination des plus aisés et du capital est donc de 15,3 milliards d’euros.

On conviendra que les 3 milliards d’euros découlant de la baisse de la taxe d’habitation représentent une paille au regard de cette privatisation de nos finances publiques, au profit d’une petite minorité. D’autant que le produit de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) a augmenté de 4,3 milliards, d’euros, celui de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, de 2,6 milliards d’euros.

C’est donc très clair : le budget 2018 a organisé un transfert inédit de richesses de ceux qui avaient peu vers ceux qui avaient tant, au détriment des finances publiques, au détriment des générations futures.

Mes questions porteront d’abord sur ces allégements d’impôt. La Cour des comptes chiffre la mise en place du PFU à 1,6 milliard d’euros pour 2018, soit 300 millions d’euros de plus que ce qui avait été évalué par le Gouvernement. À titre d’exemple, 300 millions d’euros, c’est ce qui manque pour revaloriser les retraites agricoles à 85 % du salaire minimum interprofessionnel de croissance – ce ne sont pas, bien évidemment, les mêmes priorités. Comment expliquer cette flambée du coût du PFU de l’ordre de 23 % ?

Concernant la suppression de l’ISF, vous nous confirmez son coût à 3,2 milliards d’euros. Disposez-vous de retours sur ses effets en termes économiques ?

Enfin, j’en viens aux niches fiscales. Le cap des 100 milliards d’euros a été franchi, dont 20 milliards d’euros de CICE. Ces 100 milliards, je le rappelle, ne prennent pas en compte les 7 milliards d’euros de la niche « Copé », ni les 20 milliards d’euros du régime mère-fille. Pour limiter le coût de ces niches, en plus de supprimer les plus inefficaces et coûteuses, ne pourrions-nous pas instaurer un plafonnement par entreprise, comme cela existe pour les particuliers ?

M. Charles de Courson. Deux petites questions pour commencer sur la certification des comptes. Au regard de la gravité des quatre réserves, dites substantielles, émises par la Cour des comptes, pourquoi celle-ci ne refuse-t-elle pas purement et simplement de certifier les comptes de l’État ? Pourriez-vous nous développer ce que vous entendez – dans l’une des quatre réserves substantielles – par « les difficultés de recensement et dévaluation des stocks de matériel militaire » ? Les armes nucléaires sont-elles visées ?

L’avis du Haut Conseil montre l’insuffisance de l’effort de réduction structurelle de la dépense publique, que vous réévaluez à 0,3 point de PIB, c’est-à-dire à quelque 7 milliards d’euros par an. Mais vous ne rappelez pas que, lors du débat de juillet 2017, le ministre avait expliqué, et c’était parfaitement exact, que l’effort devrait être d’environ 20 milliards d’euros par an ; c’est-à-dire que les 7 milliards d’euros représentent le tiers de l’effort qu’il conviendrait de réaliser pour redresser les finances publiques.

Le ministre nous a expliqué que tout était formidable, puisqu’il y avait une baisse en volume ; naturellement, il a choisi l’indice des prix à la consommation. Alors que vous, comme tout le monde, vous vous fondez sur l’indice des prix à la production – et vous constatez de ce fait une augmentation en volume.

Par ailleurs, vous indiquez que le Gouvernement a procédé à des baisses de recettes fiscales et sociales, notamment en continuant d’augmenter les dépenses fiscales, alors que l’État n’a pas les moyens de cette politique. Pourriez-vous nous en dire un peu plus ? Vous l’avez dit, il conviendrait d’inciter l’État à réaliser des dépenses que lorsqu’il bénéficie de réductions de dépenses à due concurrence.

Ma dernière question est relative à la présentation des lois de finances. Au fond, tout est fait pour que l’on n’y comprenne rien – je résume votre quatrième point. C’est-à-dire que l’on débudgétise, on crée des comptes, la quintessence ayant été l’affaire du programme d’investissements d’avenir (PIA) : c’est extraordinaire, c’est même formidable, cette inventivité, cette perversité budgétaire de la direction du budget dans sa présentation !

Il me semble que vous n’y allez pas assez fort, pour montrer comment l’intelligence humaine est consacrée à dissimuler la réalité. Or le travail de la Cour des comptes, c’est montrer la réalité, rebudgétiser pour montrer autre chose, et respecter les principes d’unité, d’universalité et de non-affectation. Pourriez-vous nous dire à quoi aboutirait une rebudgétisation, afin que la représentation nationale ait une vision claire de la situation, et non pas de la dissimulation de la gravité de la situation.

M. le président Éric Woerth. La direction du budget ne peut que constater une augmentation et une difficulté à résoudre les problèmes de finances publiques depuis bien longtemps. Elle essaie simplement d’y apporter une pierre plus constructive. La vraie question concerne la source de la dépense.

Mme Cendra Motin. Monsieur le Premier président, dans votre rapport sur l’exécution budgétaire 2018, vous fournissez des éléments importants concernant l’évolution de la masse salariale de l’État. Ces éléments sont d’autant plus utiles que le suivi de la masse salariale de la fonction publique et de ses opérateurs est déterminant pour la dépense publique et soulève des difficultés à tous les niveaux.

Ainsi, il n’est pas inutile de rappeler qu’il n’existe aucun outil dédié à la masse salariale globale de l’emploi public. Les dernières données disponibles en la matière, contenues dans le bilan social de la direction générale de l’administration et de la fonction publique, datent de 2016, et ne donnent qu’une analyse partielle de la masse salariale de l’État.

En outre, plusieurs définitions de l’emploi public peuvent être utilisées. En 2015, si nous comptions 5,48 millions d’agents publics, 5,65 millions d’emplois publics étaient recensés, en nous référant à une définition alternative, utilisée en matière de comparaisons internationales et qui s’étend légèrement au-delà du champ des trois fonctions publiques.

Pour la seule masse salariale de l’État, le suivi s’avère complexe et lacunaire, du fait de la non-inclusion des opérateurs, alors même que ceux-ci perçoivent 50,5 milliards d’euros de financement public et comptent plus de 400 000 emplois.

Les plus de 1 500 éléments de paye comptabilisés, la très faible information du Parlement en cours d’exécution, l’influence de facteurs peu prévisibles ou maîtrisables sur la masse salariale de certains ministères et la variété des politiques ministérielles mises en place, ou encore l’effet de l’enchaînement rapide de décisions politiques, tous ces éléments constituent autant de facteurs qui contribuent à la fragilité de ce suivi, alors même que la masse salariale de l’État représente 39 % des dépenses du budget général en 2018.

Face à ces constats, quelles sont les préconisations de la Cour visant à améliorer le suivi, notamment en cours d’exécution, de la masse salariale de l’État et de la masse salariale publique, de façon plus globale ?

Pourriez-vous également nous détailler les raisons que vous avez identifiées expliquant l’évolution de la masse salariale que vous avez constatée sur 2018, et la répartition par ministère, alors même que le Gouvernement a décidé de ne pas augmenter le point d’indice en 2018.

M. Fabrice Brun. Monsieur le Premier président, lors de la publication de votre rapport, plusieurs chiffres ont frappé les Français. D’abord, près d’un quart des dépenses de l’État est financé à crédit ; quelles sont vos préconisations pour sortir de cette spirale ?

Ensuite, vous estimez que si l’État est devenu le maillon faible des finances publiques, c’est aussi parce qu’il est le seul à supporter les baisses d’impôts et de charges sociales. Vous chiffrez à 16,5 milliards d’euros, en 2018, les compensations auprès des organismes de protection sociale et des collectivités locales, la contrepartie de la suppression des cotisations sociales et de la disparition progressive de la taxe d’habitation. Et vous concluez, au regard de ces éléments, que l’État devra se poser la question de la répartition de la charge budgétaire avec les autres acteurs.

Pouvez-vous préciser la position, les orientations ou au moins la méthodologie préconisée pour élaborer une nouvelle répartition ?

M. Jean-Louis Bourlanges. Monsieur le Premier président, vous signalez, dans ce rapport extrêmement riche, que la trajectoire de l’État diverge de celle de l’ensemble des administrations publiques, et Véronique Louwagie interprétait tout à l’heure ce fait de la façon suivante : « cela prouve que l’État n’a pas fait les efforts nécessaires ». En réalité, votre rapport ne dit pas cela. Il dit que l’État, dans cette affaire, est le cochon de payant, c’est-à-dire qu’il prend à sa charge les allégements effectués en faveur des collectivités territoriales et du système social. Et comme par ailleurs les dépenses de l’État sont certainement, parmi les trois secteurs, les plus difficiles à comprimer – elles correspondent à des priorités extrêmement fortes un peu partout –, nous ne pouvons que constater cette divergence.

Cependant, je m’interroge. Cette divergence que vous critiquez, est-elle totalement illégitime ? Il me semble que nous devons vraiment distinguer, dans ce domaine, le problème des collectivités territoriales et celui des systèmes sociaux. S’agissant des collectivités territoriales, vous avez raison, les responsabiliser suppose de les obliger à mettre en parallèle leurs dépenses et les ressources qu’elles prélèvent sur les administrés, l’État devant se contenter d’une fonction de péréquation, à travers les dotations. Or il y a quelque chose qui n’est pas très satisfaisant dans les allégements réalisés.

Mais en matière de dépenses sociales, n’avons-nous pas simplement affaire à une sorte d’extension du périmètre de l’État dans le champ des protections, à travers les allégements sociaux sur les assurances maladie et chômage, à savoir, le domaine de la solidarité ? Au bout du compte, ne s’agit-il pas, d’une façon un petit peu sauvage, d’une extension du principe d’unité et d’universalité dont la Cour s’attache toujours à rappeler la pertinence ? Le seul défaut n’est-il pas simplement de bien théoriser et de bien cadrer la nouvelle part des responsabilités de l’État en matière sociale ?

Mme Christine Pires Beaune. Monsieur le Premier président, je me contenterai de vous poser une seule question, en tant que rapporteure spéciales des crédits de la mission Remboursements et dégrèvements. L’exécution budgétaire, sur ces crédits, est inflationniste ; certes, ils sont évaluatifs.

La première phase de la réforme de la taxe d’habitation en explique une partie, mais plus de 1 milliard d’euros s’explique par des contentieux individuels, au titre de l’IS. J’ai lu votre note d’exécution budgétaire, dans laquelle ce constat est effectué, mais vous ne donnez pas d’explication à ce dépassement.

Depuis cette note d’exécution budgétaire, avez-vous obtenu des explications du Gouvernement ? Car selon l’article 10 de la LOLF, le ministre est tenu de fournir une explication sur ce dépassement. Pouvez-vous m’indiquer le montant minimum, le montant maximum, le montant moyen et le montant médian de ces remboursements exceptionnels, au titre de l’IS ?

Enfin, comment sont-ils répertoriés, sur votre diaporama, page 15, entre « mesures mécaniques » et « allégements de fiscalité » ?

M. Michel Castellani. Je vous remercie, monsieur le Premier président, pour ce rapport dont le constat est évidemment complexe. Un rapport que nous pouvons d’ailleurs lire avec des tonalités différentes, en insistant sur les aspects négatifs ou sur les aspects un peu plus positifs.

Dans les chapitres quatre et cinq de ce rapport, vous soulignez la complexité croissante, le manque de lisibilité et la nécessité de refonder une démarche de performance pour améliorer l’efficience de la dépense publique. Votre onzième recommandation vise à distinguer un nombre limité d’objectifs stratégiques. C’est, en la matière, un minimum. Et il est étonnant d’avoir attendu si longtemps pour le souligner.

Sur le fond, je retiendrai trois points – je ne reviendrai pas sur les remarques formulées par Charles de Courson.

D’abord, le déficit structurel se réduit un peu ; ensuite, les dépenses du budget général augmentent de 2,6 milliards d’euros ; et enfin, les prélèvements au profit des collectivités locales baissent de 3,5 milliards d’euros. Nous avons le sentiment que les collectivités locales jouent un rôle de variable d’ajustement, alors qu’elles sont indispensables en termes d’investissement ou de politiques de proximité.

Ma question est très simple : que préconisez-vous comme nature de relations financières et budgétaires entre l’État central et les collectivités territoriales, pour l’avenir ? Faudrait-il, selon vous, augmenter la compétence fiscale des collectivités territoriales ?

M. Jean-René Cazeneuve. Justement, monsieur le Premier président, s’agissant des collectivités territoriales, j’ai lu dans votre rapport trois éléments qui me paraissent intéressants. Page 95, vous écrivez que « la contractualisation entre lÉtat et les collectivités territoriales a permis datteindre les objectifs 2018 » ; nous nous en félicitons.

Vous nous dites également que pour les régions, le transfert de la TVA, plutôt que la dotation globale de fonctionnement, leur a permis l’obtention d’un gain de recettes de quelque 300 millions d’euros. Il s’agit d’ailleurs d’un message pour mes collègues : le transfert d’une part d’impôt national peut avoir un certain nombre d’avantages.

Vous nous dites, enfin, que les transferts de l’État aux collectivités territoriales sont à un niveau record, de 106,6 milliards d’euros.

Certes, tout le monde peut se réjouir de la gestion vertueuse des collectivités territoriales. Mais elle est accompagnée d’une dynamique des dépenses transférées par l’État aux collectivités territoriales – les droits de mutation à titre onéreux, la TVA, etc. Elle est aussi facilitée par le fait que la baisse des prélèvements obligatoires est supportée exclusivement par l’État.

Ma question, monsieur le Premier président est la suivante : les dépenses en volume de l’État ont-elles été, pour la première fois, inférieures à celles des collectivités territoriales ? L’État serait-il moins vertueux que les collectivités territoriales ?

Mme Marie-Christine Dalloz. Monsieur le Premier président, vous indiquez dans votre rapport que le besoin de financement de l’État a continué à progresser, pour s’établir à pratiquement 192 milliards d’euros, mais que les primes nettes des décotes à l’émission demeurent significatives : 11,3 milliards d’euros. Pour mémoire, elles étaient, dans le passé, à 20 millions d’euros, et nous les trouvions excessives.

Je vous poserai la même question qu’à monsieur le ministre, qui ne m’a pas répondu. Les immobilisations incorporelles et corporelles, entre 2017 et 2018, ont progressé de 21,7 milliards d’euros. Quelle est selon vous l’explication ? Je souhaiterais comprendre cette augmentation.

Par ailleurs, dans votre dixième recommandation relative au fonds innovation et industrie, vous indiquez qu’un dispositif de soutien à l’innovation devrait être inclus dans le budget général. Il s’agit, je l’imagine, de la traduction normale et naturelle de votre regard suspicieux – je pèse mes mots – sur le PIA.

Vous relevez, sur votre graphique, qu’il n’y a que le PIA3 ; or je vous rappelle qu’il reste des « queues de programme » des PIA1 et PIA2, dont nous ne voyons pas le bout. Avez‑vous un regard précis sur ces PIA ?

M. Jean-Paul Mattei. Je n’ai, pour ma part, qu’une question à poser, au vu des bons résultats de l’exercice 2018. À combien la Cour évalue-t‑elle la marge de manœuvre budgétaire disponible pour tenir les engagements en faveur du pouvoir d’achat qui ont été votés au moment de la crise des « gilets jaunes » ? Quelles perspectives d’évolution le Haut Conseil distingue-t-il, notamment au titre de la contractualisation avec les collectivités territoriales ?

Mme Valérie Rabault. Monsieur le Premier président, je vous poserai deux questions et ferai une remarque.

La première question porte sur le tableau que vous présentez, page 103 de votre rapport, et plus précisément sur les 24 milliards d’euros de dépenses fiscales dont nous ne connaissons pas les bénéficiaires. Je connais l’intérêt du Rapporteur général pour ce type de sujet, puisqu’il mène un certain nombre de démarches sur cette question, mais nous parlons là de 24 milliards d’euros ! Pouvez-vous nous en dire un peu plus ?

Concernant la gestion des finances publiques, vous indiquez, page 186 du rapport, à propos des indicateurs de la LOLF, qu’il y a une confusion entre les objectifs gestionnaires et politiques. Je vous rejoins pleinement sur ce point.

Et je citerai un exemple : pour la mission Culture, le programme 224, l’un des indicateurs est le « ratio d’efficience bureautique ». Je veux bien qu’on évalue les politiques culturelles au travers d’un ratio d’efficience bureautique, mais je pense qu’il s’agit plutôt, et vous avez raison de l’indiquer, d’un dévoiement de l’esprit de la LOLF qui, en réalité, vise à donner des indicateurs pour piloter des politiques publiques, et non cocher des cases pour se faire plaisir.

Tout le chapitre consacré à ces indicateurs me paraît être extrêmement important, puisqu’on se cache derrière ces indicateurs pour ne pas avoir à évaluer les politiques publiques. L’exemple de la culture est très frappant, c’est peut-être une « technoïsation rampante » ou le manque de courage des responsables politiques à assumer, ou en tout cas à effectuer une vraie évaluation de leurs politiques publiques.

Enfin, je vous remercie pour le chapitre que vous avez consacré au fonds innovation. Vous dénoncez, à raison, l’usine à gaz que le Gouvernement est en train de monter – voilà deux ans que nous la dénonçons. Le plus simple serait de faire en sorte que l’Agence des participations de l’État récupère les dividendes des titres qu’elle détient. Et nous pourrions définir, en loi de finances initiale, le montant de dividendes que nous souhaitons « reflécher » vers le budget de l’État et le montant que nous voulons attribuer pour financer une politique d’investissement.

Cette façon de procéder est beaucoup plus simple que l’usine à gaz que le Gouvernement est en train de monter, qui consiste à vendre, entre autres, ADP – une vente à laquelle 248 parlementaires ont peut-être porté un coup d’arrêt. Monsieur le Premier président, je vous remercie, en tout cas, de cet éclairage très objectif, qui dénonce lui aussi cette usine à gaz.

M. Saïd Ahamada. L’année dernière, la moitié des questions qui avaient été posées concernait la sous-budgétisation et la sincérité du budget. Je nous félicite du fait que, aujourd’hui, le budget soit conforme à ce que nous avons voté – ce qui me semble être un principe, non seulement de bonne gestion, mais aussi, tout simplement, de respect des parlementaires.

Comment systématiser ce principe de sincérité budgétaire ? Est-ce éventuellement en accroissant les pouvoirs du Haut Conseil ? Quel votre avis sur cette question, monsieur le Premier président ?

Mme Émilie Bonnivard. Monsieur le Premier président, mes questions concernent la dette publique. Vous indiquez, page 53 du rapport, que nous sommes fortement exposés au risque de remontée des taux d’intérêt de notre dette. Une hausse de 1 point des taux augmenterait le service de la dette de 2 milliards d’euros la première année, de 4,7 milliards d’euros la deuxième année et de 18,8 milliards d’euros au bout de dix ans.

Ce risque est bien réel et compromet la possibilité, pour les générations à venir, de bénéficier du même niveau a minima de services publics et de solidarité nationale que nous. Nous continuons donc, de manière totalement irresponsable, à fragiliser l’avenir par manque de courage pour diminuer durablement nos dépenses publiques et améliorer notre solde structurel.

La dette est bien une réalité, c’est une bombe à retardement que nous nous efforçons tous de ne pas regarder en face ; de sorte que nous faisons courir un risque aux générations à venir.

Je vous poserai deux questions, afin que nous comprenions bien quelle est cette dette et sa nature. Quelle est la structure de la dette publique, très concrètement ? Et qui sont les créanciers de cette dette ?

M. M’jid El Guerrab. Monsieur le Premier président, permettez-moi cette caricature : si nous étions une entreprise, vous n’auriez pas certifié nos comptes. Vous les auriez peut-être même rejetés, voire saisi la justice.

Parmi les réserves que vous avez émises, un sujet m’est particulièrement cher : notre patrimoine corporel et son évaluation. Vous vous dites dans l’impossibilité de l’évaluer, alors même qu’il est évalué. Comment avez-vous procédé ? L’avez-vous surévalué ? Sous-évalué ? Comment cela fonctionne-t-il ?

M. le Premier président de la Cour des comptes. Je commencerai à répondre à ces nombreuses questions, et le président Briet complétera mes propos, sachant que de nombreuses questions se recoupent et portent sur des préoccupations communes.

Par ailleurs, il ne m’appartient pas de répondre à un certain nombre de commentaires qui ont été formulés, et certaines de vos questions s’adressent, non pas au Premier président de la Cour des comptes ou au président du Haut Conseil que je suis, mais au Gouvernement. Enfin, je répondrai à d’autres de vos questions quand je vous présenterai le rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques. En effet, là, nous allons raisonner toutes APU confondues, et entrer davantage dans le détail que n’a pu le faire, parce que ce n’est pas sa mission, le Haut Conseil des finances publiques, qui a une mission bien particulière. Même si nous avons eu l’occasion de dire que nous aurions souhaité que le mandat du Haut Conseil puisse être plus explicite en matière d’appréciation de la cohérence du schéma de finances publiques, qui est présenté en complément du scénario macroéconomique.

S’agissant du calcul de la croissance de la dépense publique en volume, que vous avez évoqué, monsieur le président, mais aussi d’autres députés, l’indice des prix à la consommation, hors tabac, est le déflateur plus traditionnel qui est retenu pour la dépense publique. Il est vrai qu’il présente un certain nombre d’avantages, et il est bien identifié, y compris par le grand public. Il ne peut plus être révisé, une fois l’année terminée, et il est cohérent avec les évolutions de nombreuses dépenses publiques qui sont indexées justement sur ce déflateur prix ; et en particulier toutes les prestations sociales.

Mais il présente aussi des inconvénients. Le plus important, c’est qu’il est un peu plus sensible au prix de certains produits importés, et notamment du pétrole. Ce qui lui a parfois valu des fluctuations importantes au cours des dernières années, sans grand rapport avec la dépense publique.

Pourquoi le Haut Conseil raisonne-t-il à partir de cet indicateur ? C’est tout simplement parce que, selon lui, il correspond davantage aux fondamentaux de la richesse produite dans le pays, même si toutes ces évolutions ne sont pas toujours faciles à interpréter. Il est par ailleurs cohérent avec le calcul de l’effort en dépenses, qui est une composante de l’effort structurel. Ce sont les raisons pour lesquelles, le Haut Conseil raisonne à partir de ces deux éléments de comparaison.

Vous avez raison, monsieur le président, les recettes fiscales de l’État sont plus sensibles à la croissance du PIB que celles de l’ensemble des APU. L’élasticité des recettes fiscales de l’État a été de 1,8, en 2018, et de 1,2 pour l’ensemble des APU.

L’impôt sur le revenu et l’IS, qui représentent plus d’un tiers des recettes fiscales de l’État, sont bien évidemment particulièrement sensibles à la conjoncture ; davantage, par exemple, que les cotisations sociales. L’État est plus exposé à l’évolution de la conjoncture que les autres administrations publiques. Il existe une explication, que nous évoquons dans le rapport, sur les écarts entre exécution et prévision.

Plus généralement, je pourrais dire que, si les écarts entre les prévisions et les exécutions de recettes sont d’une certaine façon inévitables, nous relevons qu’en France, cet exercice de prévision est un exercice strictement interne au ministère des finances, alors que, dans beaucoup d’autres pays, il associe des parties tierces à ces prévisions. De fait, il peut y avoir moins d’écart. Et puis, faute de transparence ex ante sur le processus de prévisions, les écarts, quand il y en a, effectivement, pourraient être mieux expliqués ex post. Notamment dans le projet de loi de règlement et dans les annexes du projet de loi de finances. Cela fait l’objet d’une recommandation de la Cour, parce que ce n’est pas toujours fait au niveau des gouvernements.

Concernant la démarche de performance, nous partageons ce que vous avez dit monsieur le président avec un certain nombre de députés : le dispositif a déçu, effectivement, par rapport à celui mis en place par la LOLF et aux attentes.

Il faut cependant reconnaître que, lorsque nous comparons avec ce qui se passe dans d’autres pays, nous voyons bien les difficultés qu’il y a à apprécier les dispositifs de performance et leur utilisation dans ces pays. C’est la raison pour laquelle, qu’un certain nombre de pays ont réduit leur nombre d’indicateurs, les ont dissociés entre les objectifs stratégiques et les objectifs de gestion. Mais surtout, ils ont accompagné le dispositif de performance par des dispositifs de revue de dépenses systémiques.

Ils ont fait en sorte d’intégrer les revues de dépenses au processus budgétaire annuel, ce qui n’est pas le cas en France. Et c’est en fait à ces deux conditions que le dispositif de performance peut être utile pour renforcer l’efficacité et l’efficience de la dépense publique ; c’est l’objet d’une recommandation que nous formulons.

Bien entendu, les indicateurs doivent être relativement stables, sinon cela ne permet pas d’apprécier l’évolution d’une politique publique sur une période donnée, mais de temps en temps, nous devons pouvoir ajuster.

Ce que nous constatons, c’est que les résultats ne sont que peu examinés, rarement utilisés, très peu analysés pour en tirer des conséquences en termes de réforme de l’action de l’action publique.

Nous souhaitons pouvoir continuer cet échange avec vous, éventuellement dans le cadre de la MILOLF, et bien évidemment avec le Gouvernement.

Sur le principe de l’universalité budgétaire, vous êtes plusieurs à avoir insisté sur cette question. Si nous insistons sur ce point, c’est tout simplement parce que cela nuit à la capacité du Parlement à procéder à des arbitrages éclairés et globaux sur le budget de l’État.

Je suis tenté de reprendre la balle au bond, Charles de Courson ayant proposé à la Cour de reconsolider dans le budget de l’État tout ce qui, aujourd’hui, en est sorti. C’est une idée intéressante. Nous allons voir ce que nous pouvons faire en la matière. C’est ambitieux, mais je pense que cela pourrait effectivement vous être très utile.

Cette évolution est le fruit d’un contexte, celui de difficultés financières qui exigent des arbitrages difficiles. Dans le cadre de ces arbitrages, des mesures sont prises pour tenter de réguler la dépense. D’où l’imagination utilisée pour exploiter tous les points de fuite possibles, au motif de sanctuariser un certain nombre de dépenses auxquelles les responsables politiques tiendraient ; j’avoue que j’ai quelque difficulté à comprendre cette argumentation.

Mais rien n’empêche un gouvernement de considérer que des dépenses, parce qu’elles sont prioritaires, ne font pas l’objet de régulation budgétaire. D’une certaine façon, c’est un manque de confiance en soi extraordinaire, car s’il y a une volonté politique de sanctuariser des crédits, vous devez pouvoir le faire, y compris au sein du budget de l’État. Sortir des dépenses du budget de l’État n’est pas sain : cela encourage des pratiques qui peuvent trop se distinguer des règles qui s’appliquent lorsque les dépenses sont dans le budget de l’État.

C’est la raison pour laquelle nous insistons à chaque fois sur ce sujet. Les parlementaires devraient se saisir de ces recommandations, car il en va de la pertinence de l’autorisation parlementaire comme de celle du contrôle.

Nous nous proposons de supprimer les fonds qui sont devenus sans objet, de réintégrer dans le budget de l’État un certain nombre de ces fonds, ou de les confier à un opérateur, mais dans des conditions plus transparentes.

Cette évolution n’est pas une fatalité, nous l’avons vu, des retours à l’universalité budgétaire sont possibles, l’exemple des PIA, notamment le PIA3, montre qu’il est possible de réintégrer un certain nombre de choses, même si cela n’a pas été fait pour les PIA1 et PIA2.

La question des dépenses fiscales n’est pas simple, parce que, comme l’indiquent la Cour des comptes et le Conseil des prélèvements obligatoires, dans leurs rapports successifs, il n’existe pas de définition de la norme fiscale. De fait, celle des dépenses fiscales est incertaine et soumise à variation. La définition de la norme et l’élaboration de la liste des dépenses fiscales sont des processus internes au ministère des finances, dont la pertinence est d’ailleurs régulièrement interrogée par la Cour. Et la classification des dispositions dérogatoires, au sein de la liste des dépenses fiscales, fait souvent l’objet de modifications.

Nous avons donc à nouveau appelé l’attention du Gouvernement sur les dépenses fiscales, notamment sur le statut de certaines dépenses fiscales anciennes qui n’ont pas été révisées depuis vingt ans, si bien que, dans certains cas, ces régimes dérogatoires sont devenus avec le temps la norme de calcul de l’impôt – ce qui justifierait leur déclassement.

Tel est le sujet de la frontière entre la norme de calcul de l’impôt et la dépense fiscale, ou ce que nous appelons plus couramment la niche fiscale. C’est un sujet sur lequel le Parlement devrait avoir son mot à dire.

L’autre sujet lourd concernant les dépenses fiscales est celui de leur évaluation, de la réévaluation régulière. Nous avons nous-mêmes procédé à quelques évaluations de certaines dépenses fiscales, notamment de celles en faveur du logement, qui représentent près de 20 % des dépenses fiscales. Elles ont fait, de notre part, l’objet de constats critiques, puisque nous avons pu noter un effet non avéré de ces dépenses sur la modération des loyers, un effet non démontré sur le volume des constructions. Un risque inflationniste. Une insuffisance de ciblage, même si un certain nombre de décisions ont pu être adoptées depuis. Un coût d’opportunité relativement élevé, et puis la création d’effets d’aubaine. Autant de critiques vives sur ce type de dépenses fiscales.

Nous avons eu l’occasion de vous remettre un rapport sur la dépense fiscale en faveur du mécénat. Or, là aussi, nous avons pu constater que la dépense fiscale n’était pas toujours ni évaluée ni contrôlée, et qu’un certain nombre de mesures – sans remettre en cause la pertinence d’une niche – pouvaient être recommandées en la matière.

Un travail est en cours, auquel nous ne sommes pas associés, mais c’est un sujet que nous suivons depuis longtemps, et régulièrement nous essayons de pointer telle ou telle dépense fiscale pour vous apporter un certain nombre d’éléments d’analyse. Nous le faisons aussi pour le secteur de la sécurité sociale. Nous devrions d’ailleurs créer un chapitre sur les niches sociales dans le rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, que nous vous présenterons au mois d’octobre.

Autre sujet difficile, celui de la répartition des prélèvements obligatoires entre les différentes APU, et pour lesquels l’État joue le rôle de centrale des déficits. Parce qu’il décide. Et parce qu’il le décide pour le compte des autres. L’État doit se voir dans sa grande dimension ; l’État est responsable toutes APU confondues.

D’ailleurs, dans le programme de stabilité – le président Briet me rappelait les chiffres –, entre 2018 et 2022, une réduction du déficit est programmée de – 2,5 % à – 1,2 % du PIB. En revanche, le déficit de l’État ne se réduit pas ; en fait, il est stable. Il est de 3,1 % en 2018, et il est prévu qu’il soit toujours de 3,1 % en 2022.

Comment expliquer, globalement, la diminution du déficit public ? C’est tout simplement parce que les APU vont bénéficier d’un excédent. Vous ne pouvez pas réduire les déficits, si, d’un côté, la dépense continue d’augmenter, même si vous la maîtrisez davantage, et d’un autre, vous diminuez très sensiblement les prélèvements obligatoires et les impôts. C’est mathématique, nous avons une augmentation du déficit.

Si vous souhaitez réduire les déficits, il convient de proportionner la baisse des recettes à une plus grande maîtrise de l’évolution de la dépense publique. Tous secteurs confondus, et non pas uniquement l’État. Les rapports de la Cour et ceux des chambres régionales des comptes montrent qu’il existe quelques marges de manœuvre, au niveau notamment des collectivités territoriales – elles l’ont démontré en 2018 –, mais aussi de la sécurité sociale.

Ensuite, la question, est « jusqu’où compenser ». Je vous répondrai qu’il s’agit d’arbitrages politiques relevant des pouvoirs publics. Nous, nous pointons les sujets en formulant un certain nombre de constats.

S’agissant de la masse salariale, elle augmente effectivement de 2 %. C’est la conséquence de décisions antérieures. L’augmentation de la masse salariale est inférieure à 2017 – puisqu’elle était supérieure à 3 % –, mais il est vrai que, compte tenu des décisions qui ont été prises en 2017, l’augmentation est tout de même plus importante que durant la période 2008-2016.

S’agissant de la certification des comptes, il faut faire attention, l’État n’est pas non plus une entreprise, même si d’ailleurs la certification des comptes de certaines grandes entreprises peut susciter quelques interrogations.

Nous avons émis quelques réserves substantielles, et procédé à quelques éléments de comparaison avec les États-Unis et le Royaume-Uni.

Ce débat s’est imposé dès l’origine, et un certain nombre d’entre vous s’en souviennent. J’ai eu l’occasion de participer à ce débat, à la place qui est la vôtre aujourd’hui. De manière consensuelle, une position avait été adoptée, celle de ne pas politiser le débat sur certification ou pas ou certification avec réserves, et je me souviens d’échanges très vifs entre le ministre du budget de l’époque, Jean-François Copé, et le Premier président de la Cour des comptes, Philippe Séguin. Il en reste d’ailleurs des souvenirs à la Cour des comptes. L’opposition, dont je faisais partie, avait été associée aux échanges, ce qui avait permis une plus grande sérénité du débat. Le sujet était d’autant plus sensible que la première année d’exécution était une année extrêmement sensible, celle de l’élection présidentielle de 2002.

Ce sujet n’était donc pas facile, et la Cour, sans renoncer aux observations qu’elle devait faire et à son travail de certificateur, avait décidé, à l’époque, de certifier les comptes avec réserves. Il existait d’ailleurs une différence, qui a fait l’objet d’un long débat, entre les réserves substantielles et les réserves. Aujourd’hui, ne restent que des réserves substantielles, mais elles sont moins nombreuses – quatre sur les treize initiales.

Ce travail a son intérêt ; nous pouvons néanmoins regretter le manque de lien entre cet exercice de certification et l’amélioration de la qualité même de la gestion. La Cour a formulé un certain nombre de propositions sur ces sujets, qui ont fait l’objet d’échanges constructifs avec la DGFiP. Et nous sommes convenus de nous revoir cette année pour définir comment nous pourrions progresser ensemble. Car il nous paraît évident que celui qui tient les comptes et le certificateur doivent pouvoir travailler ensemble, de manière constructive, sans remettre en cause l’indépendance du certificateur.

M. Raoul Briet, président de la première chambre de la Cour des comptes. Concernant la certification, une fois le choix initial réalisé, nous sommes, avec la DGFiP, dans une démarche d’accompagnement de l’amélioration des comptes. Mais il s’agit d’une démarche exigeante, puisque, année après année, nous fixons un certain nombre de points d’étape pour lesquels des progrès nous semblent possibles. Nous aidons d’ailleurs la DGFiP à les réaliser, puis nous vérifions si la feuille de route, esquissée de manière commune, a bien été respectée. Il nous semble, de manière pragmatique, qu’il s’agit de la meilleure manière d’améliorer les comptes. Et nous avons pu constater, en 2018, que la DGFiP jouait le jeu.

La prochaine étape, qui sera d’importance, est de faire en sorte que cette comptabilité générale serve plus directement au gestionnaire et sorte des débats entre le producteur de comptes et le certificateur.

S’agissant des incertitudes mentionnées dans l’acte de certification, il ne s’agit pas, à proprement parler, d’un coût. Il existe des incertitudes sur les données comptables et, par construction, les réserves étant de nature systémique, nous ne pouvons pas leur associer une incidence financière.

Je rappelle néanmoins que l’essentiel des problèmes ou des enjeux en termes de certification de l’État sont du côté du bilan, actif et passif, et non pas du résultat. Et dans l’acte de certification, vous trouvez une indication chiffrée, du type de celle que vous souhaitez, sur ce qu’auraient été les modifications dans les chiffres présentés, s’agissant du résultat et du bilan, si un certain nombre d’observations d’audit formulées par la Cour avait été suivies.

Concernant les stocks et le matériel militaire, je rappellerai que les stocks militaires représentent plus de la moitié du stock total de l’État. Nous sommes en situation d’amélioration continue depuis les deux ou trois dernières années, c’est un très lourd chantier pour le ministère des armées, néanmoins des insuffisances et des anomalies très significatives subsistent, qui font que nous ne pouvons pas lever cette réserve ; il faudra encore probablement quelques années pour y parvenir.

Concernant les restes à payer, dont le chiffre ne serait pas le même dans le rapport et dans le projet de loi de règlement, il s’agit d’une question de périmètre. Le chiffre cité dans le rapport a été calculé sur le périmètre du budget général, alors que celui qui est indiqué dans le projet loi de règlement porte à la fois sur le budget général et les budgets annexes et les comptes spéciaux.

Ce qui nous intéresse, dans cette question des restes à payer ou des charges à payer, au-delà de leur définition et de leur lecture en comptabilité budgétaire ou générale, c’est de regarder s’il existe des facteurs de risque ou des indicateurs de tension, à la lecture des restes à payer ou des charges à payer, c’est-à-dire des phénomènes qui pourraient laisser penser qu’un certain nombre de charges ont été anormalement reportées sur les exercices suivants.

L’année 2018 a été une année de « re-sincérisation » de la budgétisation, et relativement sereine en termes d’exécution budgétaire ; nous n’avons noté aucune aggravation des charges à payer ou des restes à payer – voire une légère diminution.

Concernant les remboursements et les dégrèvements, une question posée par Mme Pires Beaune, je rappelle d’abord le courrier du ministre du budget à propos du dépassement des crédits évaluatifs du programme 200 Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État, qui correspond à une remarque que nous avons formulée en cours de l’instruction au ministère des finances. Ce dernier avait oublié une disposition de la loi organique qui impose d’informer la commission des finances des dépassements des montants figurant sur ces registres en matière de crédits évaluatifs. Une recommandation qui, à peine formulée, a été suivie d’effet, comme vous avez pu le constater.

Sur le fond du sujet, s’agissant des causes communes éventuelles aux contentieux, et en particulier aux gros contentieux, nous partageons votre interrogation, madame Pires Beaune et, au cours de l’instruction, nous n’avons eu pas de réponses satisfaisantes à ces sujets. Nous avons simplement un engagement, pris par la directrice du budget, de faire en sorte d’être, à l’avenir, en mesure d’apporter des réponses à ce type de sujet, notamment pour savoir ce qu’il en est des contentieux en matière d’IS, et comment ils s’expliquent.

C’est une somme de nombreux dossiers ; y a-t-il des facteurs communs ou des faits communs à l’origine de ces gros contentieux ? Une analyse qui n’est pas faite aujourd’hui et nous ne pouvons que souhaiter, comme vous, qu’elle soit faite à l’avenir.

Une question plus technique a été posée sur ce qu’il fallait entendre par des mesures mécaniques dans l’évolution des recettes fiscales de 2017 à 2018. Pour l’essentiel, ce sont des mesures de non-reconduction, en 2018, de mesures exceptionnelles. Cela est notamment lié à la contribution exceptionnelle qui a été mise en place, suite à l’annulation de la taxe sur les dividendes.

En matière de dépenses fiscales, il est vrai que, pour une part importante d’entre elles, aucune comptabilisation ou estimation n’a été effectuée sur le nombre de bénéficiaires. Le chiffre de 33 milliards d’euros a été cité ; nous avons indiqué, dans le tableau, que, s’agissant des taux réduits de TVA, l’indication chiffrée n’aurait pas grand sens, puisque ce sont des taux qui bénéficient à l’ensemble de la population. Mais en laissant ce cas de côté, nous arrivons encore à 24 milliards d’euros de dépenses fiscales pour lesquelles il n’y a pas d’estimation du nombre de bénéficiaires. Comment peut-il y avoir l’esquisse d’un début d’évaluation, si nous n’avons pas connaissance des bénéficiaires ? Il s’agit là d’un trou noir dans la connaissance, qui est un préalable à toute démarche d’évaluation un tant soit peu sérieuse.

Sur la dette, une question a été posée sur les primes à l’émission. C’est une pratique qui n’est pas propre à la France, et à laquelle elle recourt de façon assez systématique par rapport à d’autres pays de l’Union européenne. Elle a un impact sur le niveau la dette, puisque dans l’immédiat, elle vient diminuer la dette en trésorerie. Cependant, ce phénomène devrait décroître, puisque, au fur et à mesure que la dette est remboursée, les émissions qui sont effectuées à des taux très élevés disparaissent dans le stock de dette. De sorte que, les écarts de taux entre les dettes nouvelles et les dettes anciennes tendront à diminuer.

Concernant la dette des non-résidents, qui représente 53 % du stock total de dette, elle baisse régulièrement depuis 2015, et ce pour une raison toute simple : la Banque centrale européenne (BCE), dans le cadre de sa politique monétaire, est devenue détentrice d’une fraction non négligeable de la dette française. La dette détenue par des non-résidents a baissé au prorata de l’acquisition sur le marché secondaire, par la BCE, de titres de dettes françaises.

S’agissant des effectifs, le rapport et les NEB fournissent des éléments sur les différents facteurs de surprise dans l’exécution 2018. Les tensions, en termes de crédits, se sont retrouvées au ministère de l’éducation nationale, avec des emplois qui devaient rester stables et qui finalement ont crû de plus de 800, en raison d’un nombre d’entrées plus important et de sorties moins nombreuses qu’attendu.

Nous avons assisté au phénomène inverse au ministère de l’action et des comptes publics, puisqu’une diminution de 1 450 emplois était prévue, et qu’elle a été de 1 902 emplois.

Globalement, un petit nombre d’emplois a été créé, là où il était prévu une diminution faible du nombre d’emplois, avec des situations variables selon et ministères.

Dernier point, concernant la sanctuarisation des crédits budgétaires, ou la conduite de la politique d’investissement, nous avons travaillé en 2015 sur un premier bilan de mise en œuvre des PIA – PIA1, PIA2 et PIA3 – et nous allons engager un travail visant à poursuivre cette analyse ainsi que sur le début du Grand programme d’investissement, dont l’exécution a commencé.

 

 

 

 


—  1  —

   DISCUSSION GÉNÉRALE

Lors de sa réunion du 5 juin 2019, la commission a examiné le projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2018.

M. Joël Giraud, Rapporteur général. Le projet de loi de règlement fait désormais l’objet d’une procédure d’examen renforcée avec l’institution du Printemps de l’évaluation. Cette deuxième édition est un succès ; j’en profite pour saluer la qualité des travaux des rapporteurs spéciaux et des rapporteurs pour avis.

Comme vous le savez, nous avons demandé que le calendrier soit avancé pour disposer de davantage de temps. Il s’ensuit que le projet de loi a été adopté en Conseil des ministres avant la publication par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) des comptes nationaux, le 29 mai. Je présenterai un amendement à l’article liminaire pour tenir compte de ces données. Les révisions, de faible ampleur, portent non pas sur le déficit public, mais sur ses composantes. L’avis rectificatif transmis hier par le Haut Conseil des finances publiques n’est d’ailleurs modifié qu’à la marge. Il y est relevé que le déficit structurel est « proche de celui figurant dans la loi de programmation de janvier 2018 et qu’il n’y a donc pas lieu de déclencher le mécanisme de correction prévu par l’article 23 de la loi organique » de 2012.

Comme nous avons déjà débattu des aspects généraux avec le ministre et le Premier président de la Cour des comptes, que nous avons discuté de chacune des politiques publiques et que nous débattrons à nouveau en séance, je serai bref sur le fond.

En tant que Rapporteur général, je tiens à faire part de ma satisfaction. Ce projet de loi de règlement est le premier à porter sur un exercice complet dont la majorité parlementaire et le Gouvernement sont responsables, donc comptables. Un projet de loi de règlement a pour objet de comparer les résultats d’exécution à exécution et de vérifier la qualité des prévisions fournies au Parlement au stade de l’examen de la loi de finances initiale. Or sous ces deux aspects – d’exécution à exécution, et d’exécution à prévision – le présent texte ne mérite aucun grief.

D’exécution à exécution, le rétablissement des finances publiques se poursuit. Le déficit public diminue de 0,3 point de PIB, conformément à ce que prévoyait la loi de programmation des finances publiques. Il se situe désormais à 2,5 % du PIB, son niveau le plus bas depuis 2006. Ce résultat a été obtenu concomitamment à la mise en œuvre du programme de baisse des impôts voulu par le Gouvernement et sa majorité. Les dépenses des ministères ont été maîtrisées, avec une augmentation limitée à 1,4 milliard d’euros par rapport à 2017, soit une hausse de 0,6 %.

L’exécution s’est également révélée meilleure que les prévisions. Le déficit public est amélioré de 0,3 point de PIB par rapport à la prévision de la loi de finances initiale. De même, les recettes fiscales nettes sont supérieures de 8,8 milliards d’euros grâce au retour de la croissance. Le niveau des dépenses des ministères est en retrait de 921 millions d’euros par rapport à la loi de finances initiale. Les deux normes de dépenses de l’État – la norme de dépenses pilotables et l’objectif de dépenses totales de l’État – ont été respectées, avec une sous-consommation de 1,4 milliard d’euros pour la première et de 51 millions d’euros pour la seconde. Quant aux sous-budgétisations, d’énormes progrès ont été réalisés depuis 2017 puisqu’elles sont passées de 4,4 milliards à 1,5 milliard d’euros et portent essentiellement sur les opérations extérieures des armées. L’un des intérêts du Printemps de l’évaluation réside sans doute dans le fait que nous avons pu discuter de l’ensemble de ces sous-budgétisations avec les ministres concernés.

Le Gouvernement n’a pas abusé des techniques de régulation budgétaire. Ainsi que l’a souligné le Premier président de la Cour des comptes, les annulations et ouvertures de crédits se situent à l’un de leurs niveaux les plus bas depuis l’instauration de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Je rappelle qu’il n’y a pas eu de décret d’avance et que le taux de mise en réserve de crédits a été abaissé de 8 % à 3 %, hors dépenses de personnel.

J’en conclus que le Parlement a été correctement informé au stade de l’examen de la loi de finances, et que l’exécution a été conforme à ce que nous avons souhaité. Je vous propose donc de passer à l’examen des amendements.

 

 

 

 

 


—  1  —

   EXAMEN DES ARTICLES

Article liminaire
Solde structurel et solde effectif de l’ensemble
des administrations publiques de l’année 2018

Le présent article met en œuvre l’article 8 de la loi organique du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques ([40]). Ainsi, est présenté un tableau de synthèse retraçant le solde structurel et le solde effectif de l’ensemble des administrations publiques résultant de l’exécution de l’année 2018, les soldes prévus par la loi de finances pour 2018 (LFI 2018) ([41]) et par la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 (LPFP 2018-2022) ([42]), ainsi que l’écart aux soldes prévus.

L’arrondi au dixième des différentes valeurs retenues explique certains écarts du tableau.

Tableau de synthèse de l’article liminaire

(en points de PIB)

Solde

Exécution 2018

LFI 2018

LPFP 2018-2022

Prévision

écart

Prévision

écart

Solde structurel

– 2,1

– 2,1

0,0

– 2,1

0,0

Solde conjoncturel

– 0,2

– 0,4

0,2

– 0,4

0,2

Mesures ponctuelles et temporaires

– 0,2

– 0,2

0,0

– 0,2

0,0

Solde effectif

– 2,5

– 2,8

0,2

– 2,8

0,2

Source : présent projet de loi de règlement.

Dans son avis n° HCFP-2019-2 du 15 mai 2019 ([43]), le HCFP a indiqué que le calcul du déficit structurel était conforme à la LPFP 2018-2022.

Toutefois, le présent projet de loi et l’avis du HCFP ont été élaborés avant la publication des comptes nationaux de la Nation par l’INSEE, intervenue le 29 mai. Or, cette publication est de nature à modifier légèrement les hypothèses de calcul des différentes composantes du déficit public.

Ces données sont analysées dans la partie générale du présent rapport (cf. fiche n° 1).

*

*     *

La commission examine l’amendement CF19 du Rapporteur général.

M. le Rapporteur général. Cet amendement ne vise pas à modifier le montant du déficit public, qui demeure à 2,5 % du PIB, mais à tirer les conséquences des bonnes nouvelles en provenance de l’INSEE.

Les composantes structurelle et conjoncturelle sont légèrement revues car l’écart de production se réduit plus vite que prévu. Le PIB potentiel est désormais très proche du PIB effectif. Pour être technique et précis, l’écart de production était initialement prévu à ‑ 0,3 point de PIB, il est finalement de – 0,1 point de PIB.

Ces calculs ont pour base l’hypothèse de croissance potentielle de la loi de programmation des finances publiques, fixée à 1,25 % pour 2018, qui avait été́ jugée « réaliste et raisonnable » par le Haut Conseil des finances publiques. Cet amendement ne modifie pas les hypothèses de la loi de programmation des finances publiques (LPFP), il se borne à tirer les conséquences de l’estimation de la croissance effective publiée par l’INSEE le 29 mai.

M. Charles de Courson. Votre amendement ne fait que hâter les nouvelles estimations, si ce n’est que le solde structurel est remonté de – 2,1 % à – 2,3 % du PIB. Pouvez-vous rappeler quel était le solde structurel en 2017 ?

M. le Rapporteur général. D’ordinaire, monsieur de Courson, lorsque vous posez une question, c’est que vous connaissez la réponse…

M. Charles de Courson. Il était de – 2,3 %. Il n’y a donc pas de réduction du solde structurel. Cela mérite un commentaire, monsieur le Rapporteur général ! Les précédentes estimations faisaient pourtant apparaître une légère baisse, de 0,2 %. Cela signifie que les baisses des prélèvements obligatoires n’ont pas été financées par de nouvelles réductions des dépenses. Lorsque l’automne viendra, le solde structurel remontera.

M. le Rapporteur général. C’est ce qui avait été prévu par la LPFP. Rassurez-vous, vous pourrez vous réjouir plus encore en 2019 !

M. Charles de Courson. Il y aura donc une hausse du solde structurel. Cet article liminaire montre que les finances publiques dérivent. Tout l’intérêt des chiffres réside dans le commentaire que l’on peut en faire.

M. le Rapporteur général. Vous ne pourrez pas nier l’effort en dépenses.

M. Charles de Courson. L’effort en dépenses représente seulement le tiers de ce qui avait été annoncé en juillet 2017. L’effort structurel est de 0,2 ou 0,3 % selon les années, soit 6 à 7 milliards d’euros, à rapporter aux 20 milliards annuels que l’on nous avait promis.

M. le Rapporteur général. Vous vous rattraperez en votant la proposition de loi visant à rétablir le pouvoir d’achat des Français, qui n’aggrave pas du tout la situation…

M. Charles de Courson. Pour votre information, je n’appartiens pas au groupe qui l’a déposée et j’y suis fondamentalement opposé.

M. le président Éric Woerth. Monsieur le Rapporteur général, vous n’avez sans doute pas suffisamment regardé ce texte, qui propose toutes les économies que ne vous faites pas et un changement de pied sur la taxe d’habitation. Il ne peut pas y avoir d’un côté les dépenses proposées par la majorité, toujours vertueuses, et de l’autre celles proposées par l’opposition, toujours critiquables.

Mais là n’est pas le sujet. Monsieur de Courson, dans la trajectoire des finances publiques, le solde de l’État ne varie pas.

M. Charles de Courson. Il serait intéressant de distribuer les conclusions de la mission de consultation annuelle du Fonds monétaire international (FMI), pour qui les principaux domaines de réforme sont les suivants : préserver la viabilité des finances publiques et accroître l’efficience du secteur public ; accroître l’emploi et la productivité ; continuer de renforcer la résilience du secteur financier. La mission s’inquiète du niveau trop élevé de la dette et invite la France à consentir des efforts bien supérieurs.

M. le président Éric Woerth. Avec le Rapporteur général, nous avons rencontré la délégation du FMI ; nous avons deux visions différentes de la gestion du pays.

La commission adopte l’amendement.

Puis elle adopte l’article modifié.

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Après l’article liminaire

La commission examine l’amendement CF1 de M. Charles de Courson.

M. Charles de Courson. C’est un amendement que je dépose chaque année. L’existence du Haut Conseil des finances publiques a permis des évaluations beaucoup plus réalistes des recettes, c’est incontestable. Or l’évaluation du montant des crédits doit se faire au regard des moyens nécessaires à la poursuite des missions de service public. Dans un contexte d’effort de sincérisation budgétaire, il serait dans l’intérêt du Gouvernement et du Parlement d’étendre les compétences du Haut Conseil afin qu’il puisse se prononcer sur les dépenses du projet de loi de finances à venir, notamment sur les OPEX, l’aide médicale de l’État et trois ou quatre autres secteurs dans lesquels le Gouvernement devrait faire preuve d’une plus grande sincérité.

M. le Rapporteur général. Comme chaque année, je vous répondrai que la conformité́ de votre amendement au texte organique paraît plus qu’incertaine. Vous pourriez plus opportunément proposer cette modification dans le cadre de la réforme de la LOLF. Dans l’intervalle, je vous invite à retirer cet amendement.

M. Charles de Courson. C’est avec plaisir que je le retirerai, en contrepartie de l’engagement que vous venez de prendre de l’intégrer dans la prochaine modification de la LOLF ! Quand le texte sera-t-il prêt, monsieur le président ?

M. le président Éric Woerth. Nous y œuvrons, et vous le savez puisque vous faites partie de la mission d’information sur la mise en œuvre de la LOLF.

M. Charles de Courson. Il serait bon que le Gouvernement ne nous oppose pas de mauvais arguments. Si la commission des finances, toutes tendances confondues, était favorable à une telle proposition, cela pourrait peser sur le Gouvernement.

L’amendement est retiré.

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Article 1er
Résultats du budget de l’année 2018

Conformément au paragraphe I de l’article 37 de la LOLF ([44]), le présent article arrête le montant définitif des dépenses et des recettes de l’État en 2018, duquel découle le résultat budgétaire ou le solde d’exécution des lois de finances.

Le I arrête le résultat budgétaire de l’État en 2018, hors opérations avec le FMI, à – 76 milliards d’euros.

Le II arrête, dans un tableau, le montant définitif des recettes et des dépenses du budget général, des budgets annexes et des comptes spéciaux de l’année 2018.

Ces données sont analysées dans la partie générale du présent rapport (cf. fiche 1).

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La commission adopte l’article 1er sans modification.

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Article 2
Tableau de financement de l’année 2018

Conformément au paragraphe II de l’article 37 de la LOLF, le présent article arrête le montant définitif des ressources et des charges de trésorerie ayant concouru à la réalisation de l’équilibre financier de l’année 2018. Le besoin et les ressources de financement sont ainsi arrêtés à 191,9 milliards d’euros.

Ressources et charges de trésorerie de l’année 2018

(en milliards d’euros)

Besoin et ressources de financement de l’État

Exécution 2018

Besoin de financement

191,9

Amortissement de la dette à moyen et long termes

116,6

dont remboursement du nominal à valeur faciale

115,9

dont suppléments d’indexation versés à l’échéance (titres indexés)

0,7

Amortissement des autres dettes

Déficit à financer

76

Autres besoins de trésorerie

– 0,6

Ressources de financement

191,9

Émissions de dette à moyen et long termes, nettes des rachats

195,0

Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement

Variation nette de l’encours des titres d’État à court terme

– 13,6

Variation des dépôts des correspondants

9,8

Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l’État

– 11,1

Autres ressources de trésorerie

11,8

Source : article 2 du projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2018.

Cet article présente les flux de trésorerie ayant concouru à l’équilibre financier de l’État et non son équilibre comptable, défini en comptabilité générale et budgétaire de l’État.

Ces données sont analysées dans la partie générale du présent rapport.

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La commission adopte l’article 2 sans modification.

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Article 3
sultat de l’exercice 2018  Affectation au bilan et approbation
du bilan et de l’annexe

Le présent article soumet à l’approbation du Parlement les états financiers de l’État. Aux termes du paragraphe III de l’article 37 de la LOLF, « la loi de règlement approuve le compte de résultat de l’exercice, établi à partir des ressources et des charges constatées » et « elle affecte au bilan le résultat comptable de l’exercice et approuve le bilan après affectation ainsi que ses annexes ».

Le I du présent article approuve le compte de résultat de l’exercice relatif à l’année 2018, lequel fait ressortir un résultat patrimonial de – 51,9 milliards d’euros, et mentionne dans un tableau les charges et produits de l’État.

Le II affecte au bilan ce résultat à la ligne « report des exercices antérieurs ».

Le III approuve le bilan après affectation du résultat comptable. La situation nette du bilan de l’État s’établit ainsi à – 1 295,6 milliards d’euros au 31 décembre 2018.

Le IV approuve les informations complémentaires figurant à l’annexe du compte général de l’État.

Par ailleurs, l’article 47–2 de la Constitution, issu de sa révision du 23 juillet 2008, prévoit que « les comptes des administrations publiques sont réguliers et sincères. Ils donnent une image fidèle du résultat de leur gestion, de leur patrimoine et de leur situation financière ».

Sur ce fondement, la Cour des comptes est chargée de procéder à la certification de la régularité, de la sincérité et de la fidélité des comptes de l’État en application du 5° de l’article 58 de la LOLF. Elle a certifié que, au regard des règles et principes comptables qui lui sont applicables, le compte général de l’État de l’exercice 2018, est régulier et sincère, et donne une image fidèle de la situation financière et du patrimoine de l’État, sous quatre réserves substantielles.

Ces données sont analysées dans la partie générale du présent rapport (cf. fiche 6).

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La commission adopte l’article 3 sans modification.

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Article 4
Budget général  Dispositions relatives aux autorisations
d’engagement et aux crédits de paiement

Le présent article arrête les montants définitifs, par mission et par programme, des autorisations d’engagement (AE) et des crédits de paiement (CP) consommés sur le budget général.

Aux termes du 2° du IV de l’article 37 de la LOLF, le présent article « ouvre, pour chaque programme ou dotation concerné, les crédits nécessaires pour régulariser les dépassements constatés résultant de circonstances de force majeure dûment justifiées et procède à l’annulation des crédits n’ayant été ni consommés ni reportés ».

À ce titre, le présent article ouvre des crédits complémentaires à hauteur de 1,37 milliard d’euros en AE et en CP, exclusivement au titre de la mission Remboursements et dégrèvements sur le programme Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État.

Il annule des crédits non consommés et non reportés à hauteur de 6,9 milliards d’euros en AE et 1,1 milliard d’euros en CP, dont 260 millions d’euros en AE et 259 millions d’euros en CP au titre du programme Remboursements et dégrèvements d’impôts d’État.

Ainsi, le présent article prévoit un niveau d’annulations nettes (hors la mission Remboursements et dégrèvements) de crédits à hauteur de 6,6 milliards d’euros en AE et de 0,9 milliard d’euros en CP.

L’annexe Développement des crédits ouverts et des dépenses constatées au budget général au présent projet de loi de règlement a pour objet de détailler la situation définitive des ouvertures en AE et en CP, les dépenses constatées sur le budget général et les modifications demandées en loi de règlement.

Les données contenues dans cet article sont analysées dans la partie générale du présent rapport.

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La commission adopte l’article 4 sans modification.

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Après l’article 4

La commission examine, en présentation commune, les amendements CF4, CF3, CF5, CF6, CF7, CF8, CF9, CF10 et CF11 de Mme Christine Pires Beaune.

Mme Christine Pires Beaune. Ces amendements visent à demander au Gouvernement de remettre au Parlement des rapports justifiant des annulations d’autorisations d’engagement – à hauteur de 5,2 milliards d’euros – et de crédits de paiement – à hauteur de 438 millions d’euros. Il s’agit d’amendements d’appel, pour obtenir du Gouvernement des explications notamment sur les crédits des missions Défense, Justice, Outre-mer et Travail et emploi.

M. le Rapporteur général. J’ai bien compris que ces amendements visaient à susciter la discussion en séance, avec le Gouvernement, mais aussi avec les rapporteurs spéciaux, puisqu’il leur appartient, dans le cadre de l’examen de la loi de règlement, d’interroger les ministres sur les crédits non consommés. Je vous propose de retirer ces amendements.

Les amendements sont successivement retirés.

La commission en vient à l’examen de l’amendement CF12 de M. Michel Castellani.

M. Michel Castellani. Cet amendement prévoit que le Gouvernement remet au Parlement un rapport dressant un état des lieux de la compensation financière par l’État des transferts de compétence aux collectivités territoriales, un sujet dont il a été fortement débattu à l’occasion de la réforme de la taxe d’habitation.

M. le Rapporteur général. Je comprends l’inquiétude des collectivités face aux modifications en cours de la fiscalité locale. Pour autant, je vous demanderai de retirer cet amendement.

Le code général des collectivités territoriales encadre strictement la compensation financière des transferts de compétences. Chaque année, la commission consultative sur l’évaluation des charges du Comité des finances locales établit, à l’intention du Parlement et à l’occasion de l’examen du projet de loi de finances, un bilan sur l’évolution des charges transférées aux collectivités.

En outre, une annexe au projet de loi de finances est consacrée aux transferts financiers de l’État aux collectivités. Ce « jaune budgétaire », très détaillé, distingue les transferts de compétences, mais également les compensations liées à des réformes de la fiscalité locale. De fait, sa lecture attentive rendrait inutiles et sans objet bien des demandes de rapports au Gouvernement.

M. le président Éric Woerth. Il est vrai que le « jaune » est très utile et que l’analyse transversale des crédits a beaucoup progressé.

M. Michel Castellani. Le sujet est bien trop important : je maintiens l’amendement.

La commission rejette l’amendement.

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Article 5
Budgets annexes  Dispositions relatives aux autorisations
d’engagement et aux crédits de paiement

Le présent article arrête les montants définitifs, par mission et par programme, des AE et des CP consommés sur les budgets annexes.

Le budget annexe Contrôle et exploitation aériens présente un niveau de consommation de 2,2 milliards d’euros en AE et en CP au titre de l’exercice 2018. Le budget annexe Publications officielles et information administrative présente un niveau de consommation de 149 millions d’euros en AE et 147 millions d’euros en CP.

En application du 2° du IV de l’article 37 de la LOLF, le présent article procède également à l’annulation d’AE non engagées et non reportées au titre de l’exercice 2018 sur :

– le budget annexe Contrôle et exploitation aériens à hauteur de 10,5 millions d’euros ;

– le budget annexe Publications officielles et information administrative à hauteur de 17 millions d’euros.

Parallèlement, il annule les CP non consommés et non reportés sur :

– le budget annexe Contrôle et exploitation aériens, à hauteur de 14,4 millions d’euros ;

– le budget annexe Publications officielles et information administrative, à hauteur de 11,8 millions d’euros.

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La commission adopte l’article 5 sans modification.

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Article 6
Comptes spéciaux  Dispositions relatives aux autorisations d’engagement, aux crédits de paiement et aux découverts autorisés. Affectation des soldes

Le I du présent article arrête dans un tableau le montant des autorisations d’engagement consommées sur les comptes spéciaux, au 31 décembre 2018, par mission et programme.

Autorisations d’engagement ouvertes et consommées des comptes d’affectation spéciale et comptes de concours financiers

(en milliards d’euros)

Année

Autorisations d’engagement ouvertes en loi de finances initiale

Autorisations d’engagement consommées en loi de règlement

Différence entre autorisations d’engagement ouvertes et autorisations d’engagement consommées

2013

189,52

182,21

– 7,31

2014

195,08

180,61

– 14,46

2015

183,30

173,22

– 10,08

2016

196,52

187,85

– 8,67

2017

204,29

200,38

– 3,90

2018

207,26

198,73

– 8,53

Source : lois de finances et lois de règlement successives.

Le II arrête dans un tableau les résultats des comptes spéciaux, au 31 décembre 2018, par mission et programme.

crédits de paiement ouverts et consommés des comptes d’affectation spéciale et comptes de concours financiers

(en milliards d’euros)

Année

Crédits de paiement ouverts en loi de finances initiale

Crédits de paiement consommés en loi de règlement

Différence entre crédits de paiement ouverts et crédits de paiement consommés

2013

189,45

181,82

– 6,62

2014

195,15

185,99

– 9,15

2015

183,16

173,11

– 10,04

2016

196,18

187,12

– 9,06

2017

203,03

198,11

– 4,91

2018

205,78

198,55

– 7,23

Source : lois de finances et lois de règlement successives.

Le III arrête, dans un tableau, à la date du 31 décembre 2018, les soldes des comptes spéciaux dont les opérations se poursuivent en 2019.

Le IV reporte les soldes arrêtés au III à la gestion 2019 à l’exception :

 d’un solde débiteur de 14 984 382,40 euros sur le compte de concours financiers Prêts à des États étrangers

 d’un solde créditeur de 63 561 735,98 euros et sur le compte d’opérations monétaires Émissions des monnaies métalliques ;

– et d’un solde débiteur de 4 514 425,79 euros sur le compte d’opérations monétaires Pertes et bénéficies de change.

Ces données sont analysées dans la partie générale du présent rapport.

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La commission adopte l’article 6 sans modification.

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Article 7
Ratification du décret  2018-1073 du 3 décembre 2018 relatif
à la rémunération de services rendus par le ministère de la défense
et par les formations musicales de la gendarmerie nationale et du décret  2018-1274 du 26 décembre 2018 relatif aux redevances
des services de navigation aérienne

En application de l’article 4 de la LOLF, le présent article procède à la ratification de deux décrets, afin de prévenir leur caducité.

L’article 4 de la LOLF prévoit en effet que « la rémunération de services rendus par l’État peut être établie et perçue sur la base de décrets en Conseil d’État pris sur le rapport du ministre chargé des finances et du ministre intéressé. Ces décrets deviennent caducs en l’absence d’une ratification dans la plus prochaine loi de finances afférente à l’année concernée ».

I.   Le décret n° 2018-1073

Le décret n° 2018-1073 relatif à la rémunération de services rendus par le ministère de la défense et par les formations musicales de la gendarmerie nationale vise à unifier les différents régimes issus :

– du décret n° 83-927 du 21 octobre 1983 fixant les conditions de remboursement de certaines dépenses supportées par les armées ;

– du décret n° 86-366 du 11 mars 1986 relatif à la rémunération de certains services rendus par le ministère de la défense ;

– et du décret n° 81-97 du 2 février 1981 modifié autorisant la perception par le ministère de la défense de rémunérations pour services rendus par les formations musicales des armées.

Il a pour objet de constituer la base réglementaire unique fixant les modalités principales de la rémunération de services rendus au profit de tiers par :

– par les états-majors, directions et services du ministère de la défense et les organismes qui leur sont rattachés ;

– et par les formations musicales de la gendarmerie nationale à l’occasion de fêtes, manifestations, réunions ou concerts ne présentant pas un caractère officiel ou militaire.

L’article 7 du décret soumis à ratification précise que les prestations font l’objet d’une convention conclue avec le bénéficiaire avant le début de l’activité, afin de fixer les conditions financières et techniques de la prestation.

L’article 10 du décret indique que les crédits correspondant aux recettes issues de la rémunération des prestations donnent lieu à attribution de produits aux programmes budgétaires relevant du ministère de la défense ou du ministère de l’intérieur qui en ont supporté la charge, conformément à la procédure prévue au III de l’article 17 de la LOLF.

L’article 12 du décret abroge les trois décrets susmentionnés, dans la mesure où il s’y substitue.

II.   Le décret n° 1018-1274

Le décret n° 2018-1274 relatif aux redevances des services de navigation aérienne vise à assurer la mise en conformité du droit national avec les dispositions de deux règlements d’exécution européens :

– le règlement d’exécution (UE) n° 390/2013 de la Commission du 3 mai 2013 établissant un système de performance pour les services de navigation aérienne et les fonctions de réseau ;

– et le règlement d’exécution (UE) n° 391/2013 de la Commission du 3 mai 2013 établissant un système commun de tarification des services de navigation aérienne.

Ainsi, le décret dont il est demandé la ratification a pour objet :

– d’une part, de simplifier le recouvrement des redevances pour services terminaux de la circulation aérienne par l’organisation Eurocontrol ([45]) ;

– et d’autre part, de prévoir, en cas de non-paiement des redevances dues, la possibilité de suspendre les services de navigation aérienne à l’encontre de l’usager débiteur.

Le décret modifie des articles réglementaires du code de l’aviation civile. Il précise que « la fourniture des installations et services de navigation aérienne par l’État est rémunérée par des redevances de navigation aérienne » (article R. 134-1 du code de l’aviation civile). Il distingue :

– la redevance de route (usage des installations et services en-route de navigation aérienne mis en œuvre par l’État dans l’espace aérien relevant de sa responsabilité), représentant 1,4 milliard d’euros de recettes annuelles en 2018 ([46]) ;

– et la redevance pour services terminaux (usage des installations et services terminaux de navigation aérienne mis en œuvre par l’État à l’arrivée et au départ des aérodromes métropolitains), représentant 214 millions d’euros de recettes annuelles en 2018.

Eurocontrol est chargé du recouvrement de la redevance de route, tandis que le comptable du budget annexe Contrôle et exploitation aériens est chargé du recouvrement de la redevance pour services terminaux de la circulation aérienne en métropole.

Le ministre chargé de l’aviation civile peut suspendre les services de navigation aérienne à l’encontre de tout usager qui n’a pas acquitté les redevances dues. Cette décision est prise à la demande, soit d’Eurocontrol, soit du comptable du budget annexe précité.

Le décret détermine également le régime applicable à l’outre-mer, en fixant une redevance océanique (usage des installations et services en-route de navigation aérienne) et une redevance pour services terminaux de la circulation aérienne outre-mer (usage des installations et services terminaux de navigation aérienne mis en œuvre par l’État à l’arrivée et au départ des aérodromes outre-mer), qui représentent 46 millions d’euros de recettes encaissées en 2018 pour les deux redevances. Le décret prévoit l’exonération des deux redevances pour certaines catégories de vols (militaires, humanitaires, de recherche et de sauvetage par exemple). Le comptable du budget annexe Contrôle et exploitation aériens est chargé du recouvrement de deux redevances.

Le présent article vise donc à autoriser la perception des rémunérations de services instituées ou modifiées par les deux décrets visés, au-delà de l’entrée en vigueur du présent projet de loi de règlement.

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La commission adopte l’article 7 sans modification.

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Après l’article 7

La commission examine l’amendement CF2 de M. Michel Castellani.

M. Michel Castellani. L’article 13 de la LOLF prévoit qu’« en cas d’urgence, des décrets d’avance pris sur avis du Conseil d’État et après avis des commissions de l’Assemblée nationale et du Sénat chargées des finances peuvent ouvrir des crédits supplémentaires sans affecter l’équilibre budgétaire défini par la dernière loi de finances ».

Afin de corriger ce dysfonctionnement et d’améliorer l’information du Parlement, l’amendement prévoit que les avis du Conseil d’État sur les décrets d’avance sont communiqués aux commissions de l’Assemblée et du Sénat chargées des finances.

M. le Rapporteur général. Les avis du Conseil d’État sont destinés au Gouvernement, qui seul peut décider de les rendre publics. En janvier 2015, le Président de la République a annoncé la publicité́ des avis du Conseil d’État sur les projets de loi, à l’exception des lois financières, des lois de ratification d’ordonnance et des lois autorisant la ratification ou l’approbation d’engagements internationaux.

Au nom du principe de séparation des pouvoirs, le législateur ne peut imposer dans la loi la transmission au Parlement de certains avis du Conseil d’État. Au surplus, cela me paraît relever de la loi organique. Je vous invite à observer la même sagesse que Charles de Courson, en retirant cet amendement pour le faire prospérer dans le cadre de la discussion sur la LOLF.

M. Charles de Courson. Monsieur le Rapporteur général, je ne pense pas que cet amendement relève de la loi organique. Souvenez-vous de ce problème que nous avons eu lors de la précédente législature sur un décret d’avance, lorsque la commission des finances s’est farouchement opposée à la réduction d’un certain nombre de crédits en matière de recherche : il eût été intéressant d’avoir l’avis du Conseil d’État !

Je ne vois pas en quoi l’information du Parlement dans ce domaine constitue une atteinte au principe de séparation des pouvoirs, d’autant que le Président de la République lui‑même a annoncé que la plupart des avis du Conseil d’État concernant les projets de loi seraient transmis. Il faudra bien, à terme, que ce soit le cas de tous les avis. Nous pouvons nous interroger sur le meilleur véhicule, mais sur le fond, monsieur le Rapporteur général, êtes-vous favorable à cette idée ?

M. le Rapporteur général. Sur le fond, et dans l’état actuel des textes, j’y suis défavorable.

M. Charles de Courson. Vous êtes plutôt un homme ouvert et indépendant d’esprit, certainement pas de ces rapporteurs généraux qui ne font que répéter ce que dit le ministre. Je ne comprends pas pourquoi vous n’êtes pas favorable à cette idée.

M. le Rapporteur général. Je vous expliquerai pourquoi lorsque nous aurons le débat sur la LOLF.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine, en présentation commune, les amendements CF14 et CF15 de Mme Sabine Rubin.

Mme Sabine Rubin. Ces deux amendements portent sur les niches fiscales qui, je le rappelle, ont fortement augmenté ces deux dernières années. Représentant un coût de 100 milliards d’euros, ces niches sont peu et mal évaluées.

L’amendement CF14 prévoit que le Gouvernement présente, sous forme d’annexe générale au projet de loi de règlement, un document contenant un chiffrage exhaustif du nombre de bénéficiaires et du coût de chacune des dépenses fiscales, ainsi que des précisions concernant leurs objectifs.

L’amendement CF15 prévoit que le Gouvernement remettra au Parlement, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la présente loi, un document présentant une méthode et un calendrier pour la mise en œuvre d’un programme d’évaluation de l’efficacité́ et de l’efficience des dépenses fiscales les plus significatives d’ici à 2022.

M. le Rapporteur général. Vous proposez de créer, pour le projet de loi de règlement, une annexe qui existe déjà̀ dans le cadre du projet de loi de finances, le tome II des Évaluations des voies et moyens. Or ce document est mal renseigné et il est difficile d’accéder aux informations. Par exemple, le tableau mentionnait un coût nul pour une niche bénéficiant au secteur de l’économie sociale et solidaire. Nous l’avions donc supprimée en première lecture avant de devoir la rétablir lorsqu’on s’est aperçu qu’il y avait bien des bénéficiaires. Autre exemple, il est inscrit « NC » (non communiqué) pour le chiffrage de beaucoup de mesures. Nul besoin d’avoir deux documents avec de tels défauts d’information. Plutôt que de créer un doublon, nous devons nous battre pour améliorer le tome II de l’Évaluation des voies et moyens.

Je précise en outre que dans le prochain rapport sur l’application des mesures fiscales ‑ RALF –, qui sera publié en juillet, je fournirai une étude très précise sur les dépenses fiscales qu’il est prioritaire d’évaluer. Même si je comprends parfaitement votre souhait, j’émettrai un avis défavorable sur cet amendement.

Le Gouvernement s’est engagé à réaliser le travail d’évaluation que vous sollicitez dans votre second amendement. Cet engagement avait d’ailleurs été pris à la suite des amendements que j’avais présentés. Une mission de l’Inspection générale des finances a été diligentée et devait rendre ses travaux à la fin du mois de mai. S’il était adopté, cet amendement ne ferait que retarder la publication de l’ensemble de ces travaux. Je ferai un point sur ce sujet dans le prochain RALF. Ici encore, avis défavorable.

M. Charles de Courson. Monsieur le Rapporteur général, lors la commission d’évaluation des politiques publiques consacrée hier soir à la mission Agriculture, à laquelle sont rattachées trente‑sept dépenses fiscales, vous avez proposé que nous supprimions toute dépense fiscale qui ne serait pas renseignée par le ministère concerné. L’idée est diabolique, mais efficace !

Il serait intéressant que vous la traduisiez sous forme d’amendement. Cela obligerait les administrations à renseigner et à expliciter un minimum les dépenses fiscales qui leur sont rattachées. Des discussions sur les dépenses fiscales étaient prévues dans les débats budgétaires internes à l’administration. Or nous avons découvert, dans les notes d’exécution budgétaire de la Cour des comptes, que cette discussion avait été supprimée, pour toutes sortes de raisons. Il serait bon de réaffirmer cette nécessité. Pour une fois, c’est vous qui avez eu cette idée diabolique, et pas moi, mais voulez-vous que je prenne l’initiative d’un tel amendement ? Vous pourriez, si vous le voulez, le cosigner.

M. Julien Aubert. Un « amendement Faust » !

Mme Émilie Cariou. Il est vrai que nous avons lancé l’examen des niches fiscales. Nous sommes même convenus, en bureau de la commission des finances, que cela figurerait dans les priorités des rapports et notamment de l’examen de cette loi de règlement. Nous constatons tous qu’il manque des données, mais si elles ne sont pas disponibles, c’est qu’il n’y a pas de données déclaratives. Cela signifie qu’à chaque fois que nous réexaminerons ou que nous prolongerons des niches fiscales, il nous faudra prévoir les mécanismes déclaratifs qui permettent d’en assurer le suivi.

Vous pouvez défendre cet amendement dans l’hémicycle, monsieur de Courson, mais que répondrez-vous aux agriculteurs qui viendront vous dire qu’ils ne peuvent plus étaler leur revenu sur six ans ? Que la niche a été supprimée faute de données chiffrées, parce que son suivi est rendu difficile compte tenu des états déclaratifs ? Ne soyons pas démagogiques : la volonté existe, il faut continuer de mettre la pression sur les ministères pour qu’ils aient de plus en plus d’informations. Il faudra progressivement adapter les systèmes d’information afin de pouvoir réaliser ces chiffrages et assurer le suivi. Je ne crois pas qu’un big bang fiscal qui produirait une loi de finances anxiogène en fin d’année servirait notre économie !

Mme Véronique Louwagie. Je veux réagir à l’affirmation, entendue à l’instant, selon laquelle un certain nombre de renseignements ne seraient pas à la disposition de l’administration fiscale. L’exemple donné n’est pas le bon exemple. Les agriculteurs qui bénéficient du régime des revenus exceptionnels communiquent toutes les informations en les reportant sur un imprimé précis de la liasse fiscale. Il y a donc, aujourd’hui, des indicateurs qui ne sont pas utilisés, et j’approuve les propos tenus par notre collègue Charles de Courson.

M. le Rapporteur général. Notre collègue Charles de Courson n’a pas parfaitement entendu le détail des propos que je tenais. J’ai dit que, lors de l’examen en commission du projet de loi de finances – pas lors de l’examen en séance du projet de loi de règlement –, je déposerai des amendements tendant à supprimer un certain nombre de niches fiscales si je n’obtiens pas un certain nombre de chiffres pourtant à la disposition des services du ministère des comptes publics. C’est une forme de dissuasion nucléaire. Une autre méthode pourrait être de recourir, comme je l’ai fait l’an dernier, au contrôle sur pièces et sur place. Il ne s’agit pas de tuer les bénéficiaires, il s’agit de savoir où nous en sommes et quelle est l’évolution des montants, mais je n’exclus pas de recourir à cette provocation lors de l’examen du projet de loi de finances en commission – je suis sûr que vous serez à mes côtés, cher collègue de Courson.

Mme Bénédicte Peyrol. Le suivi par ministère pourrait également être meilleur. Mme Rubin propose d’évaluer l’efficacité et l’efficience. Ce qui est en jeu, c’est donc la politique publique que finance la niche fiscale, mais les ministères se renvoient la balle – ou la renvoient à Bercy, en possession des données. Il s’agit donc d’identifier qui, dans les ministères, est responsable des niches, car elles visent à soutenir des politiques publiques précises.

M. le président Éric Woerth. Je crois que nous sommes tous d’accord. Il faut de la transparence et des données objectives, et nous constatons comme l’existence d’un verrou psychologique à propos des niches. Il s’agit aussi d’objectiver leur efficience.

M. Charles de Courson. Mme Peyrol a raison. Nous en avons débattu hier, à propos de la mission Agriculture. Un peu plus de 2 milliards d’euros de réduction de taxe intérieure sur la consommation des produits énergétiques sont imputés sur ce budget, alors qu’il n’est concerné qu’à hauteur de 850 millions d’euros – le reste concerne le bâtiment et les travaux publics. Actuellement, une niche fiscale n’est rattachée qu’à une mission fiscale. Il faudrait que cette imputation soit répartie entre les différentes missions concernées. Hier, nous avons vu que la totalité d’une dépense fiscale était imputée à la mission Agriculture, qui n’en bénéficie pourtant qu’en minorité ; ce n’est pas logique.

M. le Rapporteur général. Plus de clarté en la matière ne nuirait pas, je suis d’accord avec vous, monsieur le président. J’aimerais aussi que l’on s’abstienne de créer des niches fiscales sans évaluation préalable – je le dis à ceux de nos collègues qui surgissent au milieu de la nuit lors de l’examen du projet de loi de finances…

La commission rejette successivement les amendements.

Puis elle se saisit de l’amendement CF16 de M. Éric Coquerel.

Mme Sabine Rubin. Par cet amendement, nous demandons, conformément aux recommandations de la Cour des comptes, que le Parlement dispose de davantage d’informations à propos des recettes fiscales lors de l’examen de la loi de règlement du budget.

Certes, le Parlement peut apprécier l’évolution des recettes fiscales, mais celle-ci peut résulter deux facteurs bien distincts : de manière un peu spontanée, en fonction des variations du niveau général des revenus, ou parce que les mesures prises ont un impact sur les comportements.

M. le Rapporteur général. Vous demandez en fait, chère collègue, que le projet de loi de règlement comporte des informations qui nous sont données par la Cour des comptes, dans ses notes d’analyse de l’exécution budgétaire (NEB) ; j’en fais d’ailleurs une synthèse dans mon rapport, qui sera à votre disposition avant l’examen en séance. De ce point de vue, je pense que votre amendement est satisfait.

En outre, sa rédaction pose un petit problème, évoquant « l’impact des mesures prises sur les comportements ». Ce qui est intéressant, c’est leur impact budgétaire, précisément abordé dans les NEB.

Mme Sabine Rubin. Je ne retire pas cet amendement, même si nous pouvons revoir sa rédaction. C’est effectivement l’impact budgétaire qu’ont les mesures prises en raison de leur effet sur les comportements que nous voulons connaître.

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement CF17 de M. Éric Coquerel.

Mme Sabine Rubin. Par cet amendement, nous demandons que des documents de politique transversale soient publiés également à l’occasion de l’examen du projet de loi de règlement. En effet, ces documents sont très utiles en ce qu’ils permettent de rendre compte des efforts interministériels pour une politique publique en particulier.

M. le Rapporteur général. Les documents de politique transversale sont produits en vue de la discussion du projet de loi de finances initiale. Il s’agirait donc d’en produire également lors de l’examen du projet de loi de règlement. Je ne répète pas ce que j’ai déjà dit, j’ajoute simplement que si nous rééditons ce Printemps de l’évaluation, largement apprécié par tous les groupes, qui valorise le travail du Parlement, ce n’est pas pour que le Gouvernement nous fournisse de nouveaux documents de politique transversale. Nous en avons vraiment besoin lors de l’examen du projet de loi de finances ; ce n’est pas le cas au moment de l’examen du projet de loi de règlement, d’autant que le remarquable travail des rapporteurs spéciaux nous éclaire et permet au Parlement de proposer sa vision.

La commission rejette l’amendement.

Elle se saisit ensuite de l’amendement CF13 de Mme Sabine Rubin.

Mme Sabine Rubin. Nous demandons qu’une annexe supplémentaire au projet de loi de finances soit consacrée à la politique interministérielle de préservation de la biodiversité. Cette demande fait écho à la conférence de presse tenue le 23 mai 2019 par François de Rugy, qui a annoncé, pour le projet de loi de finances pour 2020, une évaluation de l’impact des décisions budgétaires du Gouvernement à l’aune de l’objectif d’une trajectoire qui contienne le réchauffement climatique dans la limite de deux degrés Celsius. Il a aussi annoncé des mesures de protection de la biodiversité.

Cet amendement procède en outre lui aussi du souci d’évaluer une politique qui relève de plusieurs missions.

M. le Rapporteur général. Il s’agit donc encore de créer un document de politique transversale. Je vous rappelle, chère collègue, qu’un rapporteur spécial a été désigné pour le programme 113, qui porte notamment sur la biodiversité ; c’est d’ailleurs M. Coquerel. Ce qui compte, c’est que l’analyse soit ainsi parfaitement faite.

Pour ma part, j’aime beaucoup les documents de politique transversale, mais il en existe déjà vingt et un. En fait de biodiversité, s’il est une espèce qui n’est pas en voie de disparition, c’est bien le document de politique transversale ! Ne demandons pas sans cesse que soient produits des documents complémentaires que ne lisent que très peu de personnes. Je préfère que l’accent soit mis sur la fiabilité et la clarté des informations.

La commission rejette l’amendement.

Puis elle examine l’amendement CF18 de M. Éric Coquerel.

Mme Sabine Rubin. Dans un but de clarté des comptes de l’État, nous proposons que les engagements annuels ou pluriannuels relevant de partenariats public-privé (PPP) soient visibles et lisibles.

M. le Rapporteur général. Votre amendement me paraît satisfait. Les dettes liées aux PPP figurent dans la comptabilité générale de l’État. Vous trouverez ainsi en page 52 un tableau qui récapitule les paiements minimaux futurs actualisés au titre des principaux contrats de partenariat public-privé immobiliers. Par ailleurs, les principes de la comptabilité générale étant définis par la loi organique relative aux lois de finances, la question que vous soulevez ne me paraît pas relever de la loi ordinaire. Je suis donc défavorable à cet amendement.

La commission rejette l’amendement.

*

*     *

Puis elle adopte l’ensemble du projet de loi de règlement modifié.

 


([1]) Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

([2]) Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

([3]) Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 (LPFP 2018-2022).

([4]) Loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.

([5]) Loi n° 2018-1104 du 10 décembre 2018 de finances rectificative pour 2018.

([6]) Cour des comptes, Le budget de lÉtat en 2018, résultats et gestion, mai 2019, page 19 (lien).

([7]) Règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil du 7 juillet 1997 relatif au renforcement de la surveillance des positions budgétaires ainsi que de la surveillance et de la coordination des politiques économiques.

([8]) Haut Conseil des finances publiques, avis n° HCFP-2017-3 du 24 septembre 2017 relatif au projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 (lien).

([9]) Avis n° 2019-2 relatif au solde structurel des administrations publiques présenté dans le projet de loi de règlement de 2018 (lien).

([10]) Loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

([11]) Loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.

([12]) Loi n° 2018-1104 du 10 décembre 2018 de finances rectificative pour 2018.

([13]) Pour la dernière loi de finances, voir Mme Christine Pires Beaune, rapporteure spéciale, Rapport sur le projet de loi de finances pour 2019, annexe 37 : Remboursements et dégrèvements, Assemblée nationale, XVe législature, n° 1255, 11 octobre 2018 (lien).

([14]) Cour des comptes, Note d’analyse de l’exécution budgétaire 2018, mission Remboursements et dégrèvements, mai 2019. La Cour recommande de « modifier la présentation du tableau déquilibre des ressources et des dépenses dans les lois de finances en déduisant des recettes fiscales brutes de lÉtat les seuls remboursements et dégrèvements relatifs à des impôts dÉtat pour la détermination des recettes fiscales nettes ».

([15]) Le montant des contributions versées par les agents au compte d’affectation spéciale Pensions n’a pas été inclus dans ce montant dans la mesure où il s’agit de cotisations en vue d’acquérir des droits à la retraite et non d’impôts.

([16]) Loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, article 149, paragraphe II.

([17]) Données issues du projet de loi de règlement, qui diffèrent à hauteur de 0,4 milliard d’euros du rapport de la Cour des comptes, publié en mai dernier.

([18]) Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

([19]) Cour des comptes, Le budget de l’État en 2018, mai 2019.

 

([20]) Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

([21]) Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

([22]) Loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense.

([23]) Compte général de l’État 2018, page 29.

([24]) Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

([25]) Loi n° 2012-1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017.

([26]) Loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019.

([27]) Cour des comptes, Le budget de lÉtat en 2017, mai 2018, page 187.

([28]) Exposé général des motifs du projet de loi de finances pour 2018, page 25.

([29]) Assemblée nationale, XVe législature, Commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, compte rendu n° 72, mercredi 21 février 2018, séance de 13 heures 30, page 13.

([30]) Décret n° 2018-54 du 31 janvier 2018 portant annulation de crédits.

([31]) Décret n° 2018-725 du 3 août 2018 portant annulation de crédits.

([32]) Décret n° 2018-1141 du 13 décembre 2018 portant annulation de crédits.

([33]) Loi n° 2018-1104 du 10 décembre 2018 de finances rectificative pour 2018.

([34]) Cour des comptes, Le budget de l’État en 2018, mai 2019, page 88.

([35]) Projet de loi de règlement du budget et d’approbation des comptes 2018, exposé général des motifs, page 42.

([36]) La valeur actualisée de l’encours de la dette correspond à la valeur nominale pour les titres à taux fixe et à la valeur nominale multipliée par le coefficient d’indexation à la date considérée pour les titres indexés.

([37]) La dette négociable de l’État désigne la dette contractée sous forme d’instruments financiers échangeables sur les marchés financiers (obligations et bons du Trésor). Il existe une dette non négociable, correspondant aux dépôts de certains organismes (collectivités territoriales, établissements publics…) sur le compte du Trésor et qui constitue aussi un moyen de financement de l’État.

([38]) Les obligations assimilables du Trésor (OAT) sont des valeurs assimilables du Trésor à moyen et long terme, de maturité de deux à cinquante ans. Les bons du Trésor à intérêts annuels (BTAN) correspondaient à des titres de moyen terme (de maturité initiale de deux à cinq ans), ils ne sont plus créés depuis 2013. Les titres équivalents sont désormais dénommés OAT, comme les titres de long terme. Le dernier BTAN a été amorti en juillet 2017. Les bons du Trésor à taux fixe (BTF) sont des titres assimilables du Trésor à court terme, de maturité initiale inférieure ou égale à un an (généralement 13, 26 et 52 semaines).

([39]) Cour des comptes, Le budget de l’État en 2017, mai 2018, page 55.

([40]) Loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques.

([41]) Loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018.

([42]) Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022.

([43]) Avis n° 2019-2 relatif au solde structurel des administrations publiques présenté dans le projet de loi de règlement de 2018 (lien).

([44]) Loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF).

([45]) Eurocontrol est une organisation intergouvernementale comprenant quarante-et-un membres. L’objet de l’organisation est de construire un ciel européen unique, en charge de la gestion du trafic aérien.

([46]) Annexe budgétaire Contrôle et exploitation aériens au projet de loi de règlement 2018, page 14.