N° 2375

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 6 novembre 2019.

 

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires étrangères sur le projet de loi, adopté par le sénat, autorisant l’approbation de l’accordcadre relatif à la coopération en matière de sécurité sanitaire entre le Gouvernement de la République française et la Principauté de Monaco et de l’accord relatif à la coopération en matière de transfusion sanguine entre le Gouvernement de la République française et la Principauté de Monaco,

PAR M. Olivier DASSAULT

 

Député

——

 

ET

 

 

 

ANNEXE : TEXTE DE LA COMMISSION
DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

 

 

Voir les numéros :

Assemblée nationale :  1976.

 Sénat :  340, 503, 504 et T.A. 102 (2018‑2019).


 


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SOMMAIRE

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Pages

INTRODUCTION

I. Les enjeux sanitaires auxquels est confrontée La relation franco-monégasque

A. Limbrication des territoires franco-monégasques implique des enjeux sanitaires transfrontaliers particuliers

1. Limpossible autosuffisance en produits sanguins labiles de Monaco

2. Laccroissement des crises sanitaires internationales

B. la coopération transfrontalière franco-monégasque est déjà une réalité mais elle nécesssite un renforcement en matière de sécurité sanititaire et de santé

1. Une relation bilatérale étroite et privilégiée qui na eu de cesse de gagner en intensité

2. Les insuffisances constatées sagissant de la coopération en matière de sécurité sanitaire et de santé

a. Les carences des arrangements administratifs régissant la coopération en matière de transfusion sanguine

b. Labsence de la question de la sécurité sanitaire dans la convention francomonégasque de sécurité sociale de 1952

II. Des accords renforçant significativement la coopération franco-monégasque en matière de sécurité sanitaire et de transfusion sanguine

A. Un accord sui generis de coopération transfrontalière en matière TRANSFUSIONNELLE

1. Les objectifs de laccord relatif à la coopération en matière de transfusion sanguine

2. Les stipulations de laccord relatif à la coopération en matière de transfusion sanguine

3. Les conséquences juridiques de relatif à la coopération en matière de transfusion sanguine

B. Un accordcadre formalisant la coopération transfrontalière en matière de sécurité sanitaire

1. Les objectifs de laccordcadre relatif à la coopération en matière de sécurité sanitaire

2. Les stipulations de laccordcadre relatif à la coopération en matière de sécurité sanitaire

travaux DE LA COMMISSION

annexe  TEXTE adopté par la commission


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   INTRODUCTION

Les présents accords entre la France et Monaco relatifs, d’une part, à la coopération en matière de sécurité sanitaire et, d’autre part, à la coopération en matière de transfusion sanguine visent à consolider notre coopération transfrontalière. Ils viennent ainsi prolonger et renforcer les liens anciens et étroits qui unissent nos deux pays.

L’accord‑cadre en matière de sécurité sanitaire a pour objectif principal de permettre à Monaco de se conformer à ses obligations au regard du règlement sanitaire international de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Cet instrument juridique international contraignant, adopté en 2005 par les États membres de l’OMS, est destiné à protéger tous les États de la propagation internationale des maladies et des risques et urgences de santé publique, propagation favorisée par l’augmentation croissante des flux internationaux de voyageurs et de marchandises. Les autorités monégasques, pour pouvoir s’y conformer, souhaitent bénéficier d’un appui technique de la France. Une coopération renforcée en la matière permettra notamment de développer les capacités monégasques de réponse aux urgences sanitaires internationales, en particulier lorsqu’une alerte survient à bord d’un navire.

L’accord relatif à la coopération en matière de transfusion sanguine a pour objectif principal de permettre de répondre aux besoins en produits sanguins labiles de la population présente sur le territoire monégasque. À l’heure actuelle, l’Établissement français du sang (EFS) approvisionne déjà, en produits sanguins labiles, le centre hospitalier Princesse-Grace, seul hôpital public de Monaco. Le présent accord sui generis vise à renforcer cette coopération transfrontalière – qui est actuellement informelle – et à consolider son cadre juridique.

Ces deux accords n’entraîneront aucune implication financière pour la France dans la mesure où les coûts afférents seront intégralement pris en charge par les autorités monégasques compétentes.

Compte tenu de l’intrication de nos territoires et des relations d’amitiés intenses entre la France et Monaco, le renforcement de notre coopération bilatérale en matière de sécurité sanitaire d’une part et en matière transfusionnelle d’autre part apparaît crucial aux yeux de votre rapporteur.


I.   Les enjeux sanitaires auxquels est confrontée La relation franco-monégasque

Les liens étroits qui existent entre la France et Monaco et spécialement l’imbrication de leurs deux territoires sont vecteurs d’enjeux transfrontaliers spécifiques entraînant une coopération bilatérale dense dans divers domaines. Face aux enjeux sanitaires tels que les épidémies internationales ou bien les besoins des populations en produits sanguins labiles, cette coopération mérite d’être renforcée et consolidée.

A.   L’imbrication des territoires franco-monégasques implique des enjeux sanitaires transfrontaliers particuliers

Les zones frontalières constituent des espaces privilégiés de coopérations entre États voisins pour répondre aux besoins des populations locales, notamment en matière de santé ou de sécurité sanitaire. Or, la principauté de Monaco, disposant d’un territoire d’un peu plus de 2 kilomètres carrés, partage avec la France son unique frontière terrestre.

1.   L’impossible autosuffisance en produits sanguins labiles de Monaco

Le centre hospitalier Princesse‑Grace, seul hôpital public de la principauté a pour mission de satisfaire les besoins en produits sanguins labiles (PSL) du territoire. Malgré la compétence des personnels de ce centre hospitalier, la faible taille du site transfusionnel monégasque rend cette structure relativement fragile : le centre de transfusion sanguine de Monaco indique que, pour les trois dernières années, 5 100 poches ont été collectées, soit en moyenne 1 700 par an, alors que les besoins impliquent environ 4 000 dons de sang par an pour les 800 malades transfusés.

Par le biais de divers arrangements administratifs, l’EFS approvisionne d’ores et déjà Monaco en produits sanguins. De plus, il réalise la qualification biologique des dons prélevés à Monaco dans le cadre d’un contrat de sous‑traitance. Les cessions de l’EFS représentent environ 65 % des besoins de Monaco en concentrés de globule rouge, et 100 % des besoins en plaquettes et en plasma. En 2018, l’EFS a cédé 3 667 produits sanguins labiles pour une somme de 738 431 euros. En 2017, ces cessions s’élevaient à 4 080 produits sanguins labiles pour 772 628 euros.

Par ailleurs, il convient de souligner qu’aucune pénurie en produits sanguins labiles n’a affecté le territoire national français. Les appels au don initiés par l’EFS sont parfois à tort assimilés à des situations de pénurie, en raison notamment du prisme déformant des médias qui s’en font l’écho. Ils sont éventuellement déclenchés lorsque le stock national descend en dessous d’une valeur seuil fixée à douze jours de réserve – qui est un optimum, compte tenu de la courte durée de vie des produits sanguins – ou à l’occasion de période difficile ([1]) pour la collecte des produits sanguins laissant présager une baisse des réserves.

2.   L’accroissement des crises sanitaires internationales

Outre, les besoins spécifiques en produits sanguins, la France et Monaco doivent également coopérer afin de pouvoir faire face à des crises sanitaires dépassant leurs frontières communes. La multiplication des échanges de biens et de personnes à l’échelle mondiale accroît considérablement les risques sanitaires. Les grandes pandémies (virus de l’immunodéficience humaine, tuberculose, paludisme), épidémies (virus grippaux) et les maladies émergentes (syndrome respiratoire aigu sévère lié au coronavirus, virus Ebola ou virus Zika) rappellent régulièrement à la communauté internationale l’importance de la sécurité sanitaire, les difficultés à l’assurer et l’ampleur des conséquences qu’une crise sanitaire peut engendrer en l’absence de coopération régionale ou mondiale.

La sécurité sanitaire recouvre à la fois les activités préventives et correctives mises en œuvre pour réduire la vulnérabilité des populations face à des évènements sanitaires. La France s’est attachée, lors de son mandat au Conseil exécutif de l’OMS à la renforcer, grâce à la mise en œuvre du règlement sanitaire international. Adopté par les États membres de l’OMS, le 23 mai 2005 et en vigueur le 15 juin 2017, cet instrument international juridiquement contraignant vise à ce que les États s’engagent à acquérir et à maintenir un ensemble minimal de capacités opérationnelles pour détecter, alerter et répondre aux risques sanitaires. Il a pour objectif de permettre aux États de mieux contrôler la propagation internationale des maladies.

Dans cette optique, il est impératif que les États voisins que sont la France et Monaco renforcent leur solidarité et œuvrent de conserve pour assurer leur sécurité sanitaire s’agissant notamment des épidémies pouvant se déclarer à bord des navires de croisière.

B.   la coopération transfrontalière franco-monégasque est déjà une réalité mais elle nécesssite un renforcement en matière de sécurité sanititaire et de santé

La France et Monaco entretiennent des relations anciennes, étroites et privilégiées en raison de leur proximité géographique mais aussi de la communauté de destin qui les lie notamment au travers des traités d’amitié et de coopération de 1918, 2002 et 2005. Cependant certaines insuffisances, notamment dans les domaines de la santé et de la sécurité sanitaire méritent d’être comblées. Les présents accords visent justement à répondre à ces carences en renforçant dans ces deux domaines spécifiques la coopération bilatérale franco‑monégasque.

1.   Une relation bilatérale étroite et privilégiée qui n’a eu de cesse de gagner en intensité

Le traité d’amitié protectrice du 17 juillet 1918 encadre les relations entre la France et Monaco et constitue les fondations de notre relation bilatérale. Les relations politiques entre la France et Monaco ont depuis évolué dans le sens « dune souveraineté renforcée de la principauté », particulièrement depuis la signature du traité d’amitié et de coopération du 24 octobre 2002 et l’élévation du consulat de France à Monaco au rang d’ambassade de France à compter du 1er janvier 2006.

Différentes réunions bilatérales rythment la relation de proximité entre la France et Monaco notamment la commission chargée des questions locales de coopération transfrontalière, créée en 2006 et réactivée en juillet 2013, la commission mixte sur la fiscalité en charge du suivi de la convention fiscale de 1963 et du partage de la taxe sur la valeur ajoutée.

La commission annuelle de coopération franco‑monégasque, coprésidée par le secrétaire général du ministère de l’Europe et des affaires étrangères, et par le ministre d’État de la principauté de Monaco s’est réunie le 26 janvier 2018 à Monaco et le 1er avril 2019 à Paris. Ces derniers échanges ont porté sur le rapprochement avec l’Union européenne engagé par Monaco, les dossiers économiques d’intérêt commun, les questions internationales ainsi que la problématique de la coopération en matière sanitaire.

2.   Les insuffisances constatées s’agissant de la coopération en matière de sécurité sanitaire et de santé

Les enjeux sanitaires occupent une place significative dans le cadre des travaux de la commission annuelle franco‑monégasque néanmoins la question de l’absence de cadre formel s’agissant de la coopération en matière de sécurité sanitaire et les simples arrangements administratifs actuels en matière transfusionnelle ne se révèlent pas pleinement satisfaisants.

a.   Les carences des arrangements administratifs régissant la coopération en matière de transfusion sanguine

La coopération en matière de transfusion sanguine est actuellement régie par l’arrangement administratif entre la France et Monaco pris en application de la convention du 18 mai 1963 relative à la règlementation des pharmacies et relatif à la coopération pour la mise en œuvre des actes communautaires en matière de produits de santé.

Cet arrangement prévoit des conditions de coopération des services administratifs des deux parties en matière de contrôle des activités liées à la transfusion sanguine et à l’hémovigilance.

Le protocole d’accord entre la direction de l’action sanitaire et sociale de la principauté de Monaco et l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé de la République française du 6 janvier 2003, pris en application de l’arrangement administratif précité, prévoit les modalités d’inspection du centre de transfusion sanguine monégasque et une collaboration dans le cadre de l’hémovigilance.

Par ailleurs, existent actuellement trois conventions, d’une durée limitée, entre l’EFS et le centre de transfusion sanguine monégasque : une convention relative à l’approvisionnement de Monaco par l’EFS en produits sanguins labiles ; une convention relative à la qualification biologique des dons monégasques réalisée par l’EFS‑Occitanie ; une dernière convention relative à la sous‑traitance par Monaco à l’EFS de l’activité de contrôle qualité.

Cependant l’absence de stipulations conventionnelles précisant les obligations et responsabilités des acteurs concernés par la chaîne transfusionnelle pose problème. Il paraît dès lors impératif pour votre rapporteur d’y remédier par le biais d’un accord international adéquat entre nos deux pays.

Le présent accord relatif à la coopération en matière de transfusion sanguine permettra, aux yeux de votre rapporteur, de définir précisément le cadre juridique en matière transfusionnelle et permettra, par ailleurs, une simplification des démarches administratives et financières.

b.   L’absence de la question de la sécurité sanitaire dans la convention franco‑monégasque de sécurité sociale de 1952

La convention sociale signée le 28 février 1952 entre la France et Monaco permet aux frontaliers de disposer de soins de qualité près de lieu de résidence. De la sorte, les résidents frontaliers peuvent se faire soigner sur le territoire monégasque en étant pris en charge par leur caisse de sécurité sociale française et ce, dans les mêmes conditions que sur le territoire national. Cette faculté, accordée sans restriction aux assurés des Alpes‑Maritimes, peut être ouverte aux assurés français résidant dans d’autres départements sous réserve d’obtenir l’autorisation préalable de la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de Nice, qui est la caisse de liaison désignée par la convention. L’origine de cette disposition en matière de soins de santé répond à l’intrication des territoires français et monégasque et à la très grande dépendance du système de soins monégasque vis‑à‑vis de la patientèle française, qui représente près de 60 % de la patientèle à Monaco.

Les échanges entre la CPAM de Nice et les caisses sociales de Monaco sont très fluides et aucune difficulté de recouvrement de créances n’est à signaler.

Cependant, à ce jour, il n’existe aucun texte régissant la coopération bilatérale en matière de sécurité sanitaire, les échanges se faisant jusqu’à présent de manière informelle dans le cadre de la commission locale de coopération franco‑monégasque créée en 2005 et coprésidée par le ministre d’État monégasque, l’ambassadrice de France à Monaco et le préfet des Alpes‑Maritimes. Cette commission a pour vocation de traiter des questions de voisinage en matière d’affaires sociales, santé, transport et d’aménagement mais n’aborde pas les problématiques relatives à l’urgence sanitaire. Il semble donc nécessaire, aux yeux de votre rapporteur, de formaliser cette coopération à travers le présent accord‑cadre.

II.   Des accords renforçant significativement la coopération franco-monégasque en matière de sécurité sanitaire et de transfusion sanguine

A.   Un accord sui generis de coopération transfrontalière en matière TRANSFUSIONNELLE

1.   Les objectifs de l’accord relatif à la coopération en matière de transfusion sanguine

Il s’agit pour la France du premier accord international de ce type, qui se justifie par l’exiguïté du territoire monégasque et par la coopération déjà existante entre l’EFS et le centre de transfusion monégasque.

La faible taille du site transfusionnel de Monaco et le départ à la retraite du médecin en charge de la collecte ont fragilisé la structure monégasque qui ne peut plus assurer correctement l’ensemble de la chaîne transfusionnelle.

Dans l’objectif de sécuriser la collecte de sang et d’assurer la disponibilité en produits sanguins labiles pour les personnes hospitalisées au sein des établissements de santé monégasques, l’accord de coopération a été négocié pour la reprise complète de la chaine transfusionnelle par l’EFS : prélèvement, préparation des produits sanguins labiles et qualification des dons. Les campagnes de collecte de sang se dérouleront cependant toujours sur le territoire monégasque et pour ce faire, le centre hospitalier Princesse‑Grace de Monaco mettra à disposition son personnel, ses locaux ainsi que le matériel nécessaire.

À l’avenir, les dons effectués à Monaco seront intégrés sans distinction au circuit français. À cet égard, le droit monégasque en matière de transfusion sanguine a été aligné sur le droit français, et continuera de s’adapter aux évolutions de la législation française. En effet, en matière transfusionnelle, il est impératif que les référentiels juridiques applicables sur le territoire monégasque soient strictement similaires aux normes françaises.

2.   Les stipulations de l’accord relatif à la coopération en matière de transfusion sanguine

Le présent accord se compose de neuf articles.

L’article 1er indique les objectifs de cet accord qui vise à « prévoir les conditions et les modalités de coopération transfrontalière en matière dapprovisionnement en produits sanguins, les conditions de collaboration et les modalités de soutien à lautosuffisance en produits sanguins labiles, à travers lorganisation de collectes et de définir les conditions et les modalités de mise à disposition du personnel, des locaux et des matériels monégasques à la France sur le territoire monégasque permettant lorganisation de collectes ».

Le champ d’application du présent traité est défini à l’article 2 : il a vocation à s’appliquer à l’ensemble du territoire français et monégasque. Les autorités administratives compétentes sont, pour la France, la direction générale de la santé, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), l’EFS et l’agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte d’Azur ; et pour Monaco, le ministre d’État, le département des affaires sociales et de la santé et le centre hospitalier Princesse‑Grace.

L’article 3 fixe les conditions nécessaires pour la mise en œuvre de la coopération. Ainsi « lensemble des activités de la chaîne transfusionnelle à Monaco (…) est assuré par lEFS, afin de permettre la distribution et la délivrance en France, de produits sanguins labiles préparés à partir de sang collecté à Monaco ». L’article précise ensuite le champ de compétences et les ressources devant être mises à disposition des opérateurs français à Monaco. Il est prévu que l’ensemble des coûts engendrés par le dispositif sera pris en charge par les autorités monégasques compétentes. L’article fixe également le cadre juridique permettant la mise en place d’une convention entre l’EFS et le centre de transfusion sanguine du centre hospitalier Princesse‑Grace afin de définir les conditions du déploiement effectif et les modalités pratiques d’une coopération.

L’hémovigilance et la sécurité transfusionnelle sont traitées à l’article 4 qui donne compétence à l’ANSM sur le territoire monégasque qui devra mener ses inspections conjointement avec la direction de l’action sanitaire de Monaco.

La mise en conformité des conventions existantes est prévue par larticle 5. Ainsi, les deux conventions entre l’EFS et le centre de transfusion sanguine de Monaco signé le 6 mars 2000 et 16 septembre 2006 qui portent essentiellement sur la qualification biologique des dons du sang devront être mises en conformité dans un délai d’un an tout comme l’arrangement administratif relatif à la coopération pour la mise en œuvre des actes communautaires en matière de produits de santé du 4 mars 2002, afin notamment que l’EFS puisse se conformer aux dispositions du code de la santé publique.

L’accord pose en son article 6 le principe du droit applicable en matière de responsabilité médicale, à savoir, celui de l’État sur le territoire duquel sont prodigués les soins. Il pose également le principe de l’obligation d’assurance de responsabilité civile pour les professionnels de santé, les établissements et services de santé dispensant des soins dans ce cadre.

L’accord instaure, en son article 7 un comité de suivi pour suivre sa bonne mise en œuvre qui devra au minimum se réunir tous les deux ans et pourra le faire autant que de besoin à la demande de l’une ou l’autre partie. Le comité de suivi devra produire tous les quatre ans, un bilan sur le fonctionnement du dispositif de coopération. Cet article prévoit, par ailleurs, que les difficultés liées à la mise en œuvre de l’accord ou à son interprétation seront réglées par le comité de suivi et à défaut par la voie diplomatique.

Les articles 8 et 9 précisent que l’entrée en vigueur de l’accord se fera au premier jour du deuxième mois suivant la date de réception de la dernière notification des parties. Ils disposent que cet accord est conclu pour une durée indéterminée et que sa dénonciation est possible par notification écrite avec prise d’effet à compter de six mois après réception de la notification.

3.   Les conséquences juridiques de relatif à la coopération en matière de transfusion sanguine

Comme précisé dans l’étude d’impact accompagnant le projet de loi de ratification, cet accord franco‑monégasque aura quelques conséquences juridiques en droit interne.

D’une part, le présent accord va étendre le champ de compétence territorial de l’EFS, déterminé à l’article L. 1222‑1 du code de la santé publique, pour l’autoriser à collecter du sang en dehors du territoire national et ainsi dépasser le principe de spécialité qu’il se doit respecter du fait de son statut d’établissement public. En outre, un décret modifiant les dispositions de l’article D. 1221‑67 du même code, et créant un article additionnel, devra être pris. Il ouvrira la voie, dans le cadre de l’accord international prévoyant cette coopération transfrontalière, à l’importation en France de sang ou de ses composants destinés à la préparation de produits sanguins labiles, avant que les poches n’aient fait l’objet d’une qualification biologique. L’EFS s’engage, par ailleurs, à réaliser les tests et analyses immédiatement après leur importation.

D’autre part, Monaco n’est pas reconnue par l’Union européenne comme un État justifiant d’un niveau de protection des données à caractère personnel adéquat. Or, l’EFS partagera sa base de données de donneurs avec le centre de collecte monégasque pour permettre à un donneur français de réaliser un don sur le territoire monégasque et réciproquement. Le caractère sensible des informations médicales contenues dans cette base de données appellera donc un strict encadrement juridique, à travers des stipulations conventionnelles entre l’EFS et le centre hospitalier Princesse‑Grace. Il s’agira, en l’espèce, de clauses contractuelles types, établies par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL), qui permettront d’apporter les garanties appropriées.

Enfin, le droit monégasque doit, au préalable, se conformer au droit français pour permettre aux dons de sang collectés à Monaco d’intégrer le circuit de distribution français, et permettre, aux donneurs monégasques de déposer un recours devant les juridictions de leur pays sur tout sujet lié au don. Monaco a d’ores et déjà fait évoluer son droit interne pour se conformer au droit français ([2]).

B.   Un accord‑cadre formalisant la coopération transfrontalière en matière de sécurité sanitaire

1.   Les objectifs de l’accord‑cadre relatif à la coopération en matière de sécurité sanitaire

Pour pouvoir se conformer aux obligations du règlement sanitaire international de l’OMS, les autorités monégasques souhaitent pouvoir bénéficier d’un appui technique de la France dans le développement de leurs capacités de réponse aux urgences sanitaires, notamment pour les alertes qui pourraient survenir à bord des navires.

Le présent accord‑cadre vise à donner un cadre juridique à la coopération franco‑monégasque pour prévenir et traiter les situations d’urgence sanitaire. Le territoire de la Principauté étant enclavé dans le territoire français, il est essentiel de fixer les conditions et modalités d’une telle coopération pour empêcher la propagation de toute maladie sur le territoire national.

2.   Les stipulations de l’accord‑cadre relatif à la coopération en matière de sécurité sanitaire

L’accord se compose de treize articles.

L’article 1er indique l’objet du présent accord‑cadre franco‑monégasque qui vise à :

– prévoir les conditions et les modalités de coopération transfrontalière en termes d’échange d’informations sanitaires et de prises en charge médicale et paramédicale des patients en cas d’urgence sanitaire ;

– prévoir les conditions de collaboration et les modalités de soutien, en matière d’épidémiologie ;

– définir les conditions et les modalités de mise à disposition par la France sur le territoire monégasque de matériel ou de moyens de prévention et de traitements en situation d’urgence sanitaire ;

– encadrer, en cas de risque d’épidémies graves, la possibilité de dérouter des navires du port de Monaco vers un point d’entrée sur le territoire français ;

– coopérer en matière de transfusion sanguine, selon le champ d’application et les modalités définis dans l’accord relatif à la coopération en matière transfusionnelle du 13 juillet 2017.

Le présent accord‑cadre s’applique, en vertu de son article 2, à la zone frontalière franco‑monégasque, soit le territoire de la principauté et celui de la région Provence‑Alpes‑Côte d’Azur. Il concerne toute personne victime d’une crise sanitaire sur le territoire monégasque ou exposé à un risque sanitaire survenant à bord d’un navire dans le cadre du règlement sanitaire international tel que prévu en son article 8.

Les autorités administratives compétentes sont, pour la France, l’agence régionale de santé Provence‑Alpes‑Côte d’Azur, la direction générale de la santé, la caisse primaire d’assurance maladie des Alpes‑Maritimes, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), le préfet de la zone de défense et de sécurité Sud et le préfet des Alpes‑Maritimes.

L’article 3 prévoit la mise en place d’un outil de coopération permettant l’échange d’information régulière sur les dispositifs sanitaires nationaux.

En vertu de larticle 4, les parties s’engagent à faire de la préparation des États aux risques de crise sanitaire une priorité de leur politique en matière de sécurité sanitaire internationale et à soutenir l’action du bureau de l’OMS de Lyon chargé de la coordination du règlement sanitaire international.

L’article 5 prévoit la mise en place d’un système de veille sanitaire et d’alerte entre les autorités françaises et monégasques en cas de « menace potentielle pour la santé des populations (…) les épidémies à potentiel de diffusion frontalière », l’habilitation des autorités compétentes à Monaco et en France pour « prendre des mesures proportionnées aux risques courus (…) et prévenir et limiter les conséquences des menaces possibles sur la santé des population », ainsi qu’une obligation d’information envers l’autre partie.

Les articles 6 et 7 prévoient la prise en charge hospitalière sur le territoire français dans le cas de « dépassements des moyens de réponse de gestion dune crise sanitaire » par les autorités monégasques suite à une « demande daide motivée à lAgence régional de santé ProvenceAlpesCôte dAzur (…) et au préfet ».

Larticle 8 fixe les différentes étapes et conditions avant d’autoriser le déroutage sur le territoire français d’un navire suite à la demande initiale des autorités monégasques.

Larticle 9 précise que la charge financière sera entièrement assumée par les autorités monégasques compétentes.

L’article 10 pose le principe du droit applicable en matière de responsabilité médicale, à savoir, celui de l’État sur le territoire duquel sont prodigués les soins et le principe de l’obligation d’assurance responsabilité civile pour les professionnels de santé, les établissements et services de santé dispensant des soins dans ce cadre.

Un comité de suivi est également prévu, à l’article 11 du présent accord‑cadre. Il se réunira en tant que de besoin à la demande de l’une ou l’autre partie. Par ailleurs, les difficultés liées à la mise en œuvre de l’accord‑cadre ou à son interprétation seront réglées par le comité de suivi et, à défaut, par la voie diplomatique.

Enfin, l’entrée en vigueur du présent accord‑cadre est prévue, à larticle 12, au premier jour du deuxième mois suivant la date de réception de la dernière notification des parties. En vertu de larticle 13, le présent accord‑cadre est conclu pour une durée indéterminée et sa dénonciation est possible par notification écrite avec prise d’effet à compter de six mois après réception de la notification.

 


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   travaux DE LA COMMISSION

La commission examine le présent projet de loi au cours de sa première séance du mercredi 6 novembre 2019.

Après l’exposé du rapporteur, une discussion s’engage.

Mme la présidente Marielle de Sarnez. Nous en venons aux orateurs des groupes.

Mme Samantha Cazebonne. Les accords entre États en matière de santé revêtent une importance capitale. Les textes qui nous sont soumis en sont une nouvelle illustration. La coopération en matière sanitaire existait déjà entre la France et Monaco mais l’encadrement légal apporté par ce texte permettra d’établir, en amont, des protocoles pour fluidifier l’action de coopération en cas de crise sanitaire. Si une pandémie survient – nous savons bien que les virus ne s’arrêtent pas aux frontières –, la population monégasque sera désormais prise en compte dans les plans d’urgence français.

Les transfusions sanguines sauvent des milliers de vies et nous pouvons nous réjouir que le second accord, en confiant la chaîne transfusionnelle à l’EFS, améliore pour les habitants de Monaco l’accès à des produits sanguins préparés et dotés d’une qualification biologique.

C’est le souci de l’humain qui coule dans les veines de ces deux accords et le groupe La République en Marche votera en faveur de ce projet de loi.

M. Michel Herbillon. Je ne vais pas continuer à filer cette métaphore poétique mais féliciter Olivier Dassault en rappelant qu’il est aussi président du groupe d’amitié France-Monaco et qu’il a manifesté depuis le début de la législature son intérêt pour le renforcement des liens entre nos deux pays, aux territoires si imbriqués. Il a su montrer toute l’importance de conclure des accords en matière sanitaire. Le groupe Les Républicains approuvera, bien sûr, ce projet de loi qui a des implications concrètes pour les populations.

Le rapporteur me permettra toutefois de faire une suggestion : il serait utile que la principauté développe des relations avec la première agence sanitaire d’Europe, je veux parler de l’ANSES, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail – et je ne dis pas cela seulement parce qu’elle a son siège à Maisons-Alfort, dans ma circonscription.

M. Michel Fanget. Des accords étaient nécessaires pour donner un cadre juridique officiel aux coopérations informelles qui se sont nouées en matière de sécurité sanitaire et de transfusion, domaines particulièrement importants pour les deux pays. Grâce au premier, Monaco pourra se conformer au règlement sanitaire international en déterminant un port d’entrée de secours sur le territoire français. Grâce au deuxième, les besoins de la population monégasque en matière de transfusion sanguine, bien supérieurs aux seules réserves de la principauté, seront mieux pris en compte. Il est important que nous puissions progresser en la matière. Les échanges entre l’EFS de Nice, organisme de liaison français, et les caisses sociales de Monaco étant très fluides, aucune difficulté relative au recouvrement anticipé des créances n’est à craindre.

Pour toutes ces raisons, le groupe du Mouvement Démocrate et apparentés apportera un soutien plein et entier à ce projet de loi.

M. Alain David. Monsieur le rapporteur, je me concentrerai sur la question de la conservation des données à caractère personnel. Il est prévu que la base de données de l’EFS soit partagée avec le centre de collecte monégasque afin qu’un donneur français puisse réaliser un don sur le territoire monégasque et inversement. Compte tenu du caractère sensible des informations médicales qu’elle contient, il convient d’établir un strict encadrement juridique à travers des stipulations conventionnelles entre l’EFS et le centre hospitalier Princesse-Grace. Des clauses contractuelles types établies par la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) devraient apporter les garanties appropriées.

Au demeurant, cet accord nous apparaît nécessaire car il favorise la coopération sanitaire entre deux pays étroitement liés. Le groupe Socialistes et apparentés votera en sa faveur.

M. Jean-Michel Clément. Bien évidemment, le groupe Libertés et Territoires votera en faveur de ce projet de loi qui me paraît frappé au coin du bon sens.

Je ferai seulement deux remarques personnelles.

Nous voyons que l’aide médicale de l’État est ici bienvenue et nous aimerions qu’elle soit tout aussi bienvenue en d’autres domaines.

Par ailleurs, je constate qu’en cas d’alerte sanitaire, il est plus facile à un navire à destination de Monaco d’accoster qu’à d’autres navires traversant la Méditerranée.

M. Jean-Paul Lecoq. Je tiens tout d’abord à saluer l’excellent rapport de notre collègue Olivier Dassault, fin connaisseur des réalités franco-monégasques.

L’accord sur la sécurité sanitaire est de bonne qualité : ma circonscription comprenant un port, je connais les impératifs qui s’imposent en cas de crise sanitaire à bord d’un navire.

S’agissant de la transfusion sanguine, je m’interroge sur l’alignement du droit monégasque sur le droit français dont nous déplorons le caractère discriminatoire. La proposition de loi que nos collègues socialistes avaient déposée en 2018 n’a pas été adoptée et les hommes homosexuels ne peuvent toujours pas donner leur sang, sauf s’ils mentent. Le droit de la principauté leur était-il plus favorable ?

M. Jacques Maire. À chaque fois qu’il est question de Monaco au sein de notre commission, je constate que l’unanimité prévaut et mon souhait est qu’elle prévale à nouveau pour adopter ce projet de loi. La principauté est un pôle économique et humain d’importance pour toute la sous-région qui va de l’ouest des Alpes-Maritimes jusqu’à la frontière italienne. L’interdépendance avec son arrière-pays étant très forte, il est de notre intérêt commun que la coopération sanitaire soit renforcée.

M. Jérôme Lambert. Avant de voter en faveur de ce projet de loi, comme mes collègues du groupe Socialistes et apparentés, je tiens à faire une remarque. Certes, il est bon de se préoccuper de la santé des citoyens monégasques, compte tenu des flux humains qui nous lient à ce territoire si proche du nôtre, mais j’aimerais que le même soin soit apporté au sort de tous les hommes, de toutes les femmes et de tous les enfants qui arrivent sur notre territoire.

M. Olivier Dassault, rapporteur. Chers collègues, je vous remercie pour ce soutien quasiment unanime qui me fait chaud au cœur. Ayant beaucoup apprécié l’image employée par Samantha Cazebonne, je dirai que ce soutien coule dans les veines de la commission des affaires étrangères.

Mme Samantha Cazebonne. Je tiens à préciser que je me réjouis comme vous, monsieur le rapporteur, de cette unanimité car j’ai un attachement de cœur pour Monaco qui se trouve dans ma circonscription.

M. Olivier Dassault, rapporteur. Je compte, chère collègue, sur votre présence aux réunions et diverses activités de notre groupe d’amitié.

La coopération franco-monégasque est déjà très dense en matière sanitaire et ces accords permettront de la consolider. C’est une chose essentielle pour les populations locales, qu’il s’agisse des habitants des Alpes-Maritimes ou de ceux de la principauté, qui sont à 60 % des Français, rappelons-le.

Monsieur David, sachez que l’alignement de la législation monégasque sur la législation française est à même de nous rassurer sur la protection des données personnelles.

Les intéressantes remarques de Jean-Michel Clément n’apportent pas de ma part de commentaires particuliers.

Quant à M. Lecoq, je le remercie pour ses compliments. Exprimés au nom de son groupe de la Gauche démocrate et républicaine, ils me touchent particulièrement. Je lui répondrai simplement que la correspondance totale entre deux droits est cruciale pour la sécurité sanitaire et pour une confiance mutuelle.

Ces accords, monsieur Lambert, apportent un appui technique à la principauté mais ils permettent surtout de protéger le territoire français et sa population.

La commission adopte l’article 1er et, à l’unanimité, l’article 2.

Elle adopte ensuite le projet de loi à l’unanimité sans modification.

 

 


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   annexe

TEXTE adopté par la commission

Article 1er

Est autorisée l’approbation de l’accord‑cadre relatif à la coopération en matière de sécurité sanitaire entre le Gouvernement de la République française et la Principauté de Monaco, signé à Paris le 13 juillet 2017, et dont le texte est annexé à la présente loi.

Article 2

Est autorisée l’approbation de l’accord relatif à la coopération en matière de transfusion sanguine entre le Gouvernement de la République française et la Principauté de Monaco, signé à Paris le 13 juillet 2017, et dont le texte est annexé à la présente loi.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                                                     

NB : Le texte de l’accord figure en annexe au projet de loi (n° 1976).


([1]) Les périodes difficiles pouvant déboucher sur des appels au don de la part de l’EFS correspondent à des événements calendaires particuliers comme les périodes de congés ou une succession de jours fériés durant lesquelles les habitudes de vie et de résidence des Français changent, les détournant de leurs lieux de dons habituels.

([2]) Lors de son audition par le rapporteur du Sénat, l’ambassadeur de Monaco en France a indiqué que le Conseil national, chambre unique du Parlement monégasque, avait adopté, le 3 avril 2019, le dernier texte nécessaire.