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N° 2724

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 26 février 2020.

 

 

 

RAPPORT

 

 

 

FAIT

 

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATION SUR LA PROPOSITION de loi pour des cantines vertueuses,

 

TOME II

COMPTE RENDU

 

 

Par Mme Clémentine AUTAIN,

 

 

Députée.

 

——

 

 

 

 

Voir le numéro :

Assemblée nationale :  2597.

 


 

 


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SOMMAIRE

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 Pages

Réunion du mercredi 26 février 2020 à 9 heures 30 ()

I. Discussion générale

II. Examen des articles


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Réunion du mercredi 26 février 2020 à 9 heures 30 ([1])

La commission des Affaires culturelles et de l’Éducation examine proposition de loi pour des cantines vertueuses (n° 2597) (Mme Clémentine Autain, rapporteure).

I.   Discussion générale

Mme Clémentine Autain, rapporteure. C’est la deuxième fois que je viens dans votre commission, puisque vous m’aviez déjà reçue l’année dernière à l’occasion de l’examen d’une proposition de loi visant à la gratuité des permis de conduire. Vous n’aviez alors pas répondu favorablement à notre proposition ; j’ose espérer qu’il en ira différemment ce matin avec le texte que je vous présente.

Cette proposition de loi a un objet assez simple, puisqu’il s’agit de rendre les cantines vertueuses, c’est-à-dire accessibles à toutes et à tous, sans discrimination selon l’origine sociale, donc sans exclusion des enfants issus de milieux défavorisés. Le concept de cantine vertueuse renvoie aussi, pour l’ensemble de la restauration collective, à une transition vers une alimentation saine et durable, c’est-à-dire vers l’agriculture biologique, les circuits courts et une juste rémunération des producteurs. En résumé, une cantine vertueuse est une cantine qui répond à la triple urgence climatique, sanitaire et sociale.

J’entends déjà certains affirmer que le Gouvernement est très engagé sur le sujet, et que La République en marche, se souciant des enfants pauvres, propose déjà la cantine à 1 euro. Nos collègues de la majorité, qui auraient, me dit-on, le souci du bien manger, promettent pour cela 20 % de bio dans les cantines d’ici à 2022. En réalité, ces mesures sont à des années-lumière du nécessaire et de l’urgence à la fois climatique, sanitaire et sociale que j’évoquais il y a quelques instants.

Parlons tout d’abord de la gratuité des cantines. Aujourd’hui, ce sont pas moins de 40 % des enfants issus de milieux très défavorisés qui ne sont pas inscrits à la cantine de leur établissement, et cette proportion atteint même 75 % dans les établissements classés en zone d’éducation prioritaire renforcée (REP+) – de mémoire, seulement 17 % des enfants des milieux plus favorisés ne fréquentent pas la cantine. Au sein des établissements classés en REP, les trois quarts des enfants pauvres ne vont pas à la cantine parce qu’elle est trop chère.

Relevons également que le fait pour un enfant de ne pas manger à la cantine oblige généralement sa mère à rester à la maison pour lui préparer son repas, ce qui empêche de nombreuses femmes de se socialiser et de chercher un emploi. En permettant aux personnes concernées de sortir de cette situation, notre proposition revêt donc un aspect vertueux supplémentaire, relatif à l’égalité hommes-femmes.

Derrière les chiffres, il y a des conséquences graves en termes de santé publique. L’obésité infantile progresse d’année en année sous les coups de boutoir de la malbouffe, de la consommation excessive de viande et des produits ultra-transformés. Les enfants pauvres ont quatre fois plus de chances d’en être victimes que les enfants de milieux socialement favorisés. Sans cantine pour apprendre les bonnes pratiques alimentaires et manger sainement au moins un repas par jour, cela n’est évidemment pas près de s’arranger. C’est pourquoi les pouvoirs publics doivent s’engager fortement pour améliorer la situation.

Les propositions qu’a faites le Gouvernement sont très insuffisantes pour répondre au défi qui se présente à nous. Le plan prévoyant un petit-déjeuner gratuit à l’école ainsi que la cantine à 1 euro sont des mesures relevant de la pure communication. Beaucoup de communes proposent déjà aux familles les plus démunies des repas à un prix inférieur ou égal à 1 euro. Je ne pense pas que ces familles voient un motif de se réjouir dans le fait qu’on leur promette une chose qui existe déjà… J’ajoute que, dans certaines communes confrontées à d’importantes difficultés financières, l’aide de 2 euros par repas proposée par le Gouvernement ne suffira pas pour que les repas soient servis à 1 euro. Une telle mesure ne pourrait, en effet, être mise en œuvre qu’au prix de pertes financières pour des collectivités qui, nous le savons, sont déjà étranglées par les mesures d’austérité budgétaire qu’on leur impose.

Puisque le Gouvernement ne propose rien de très concret, nous souhaitons avancer vers la gratuité des cantines scolaires, une mesure s’inscrivant dans la continuité du principe de gratuité de l’éducation nationale, bien que celui-ci recule de jour en jour à l’école, où l’on demande sans cesse aux parents 1 euro par-ci pour une photocopie, 2 euros par là pour autre chose. Nous pensons que les biens communs se renforcent grâce à la gratuité pour l’ensemble de l’éducation. À l’intérieur du temps scolaire, la cantine pourrait tout à fait, demain, faire partie du bien commun au travers de cette ambition de gratuité qui permet d’avancer vers l’égalité et le partage. C’est pourquoi nous proposons la gratuité de la cantine à tous les niveaux d’enseignement, de l’école primaire au lycée en passant par le collège.

Des cantines vertueuses, ce sont aussi des cantines où l’on mange bien. La loi EGALIM prévoit qu’à l’horizon 2022, 50 % des produits servis dans la restauration collective publique devront satisfaire un certain nombre de conditions, tenant notamment à la qualité des produits ou à leur impact sur l’environnement. Parmi ces 50 %, au moins 20 % des produits devront être issus de l’agriculture biologique. S’il s’agit là d’un premier pas, on ne peut sérieusement affirmer qu’il est suffisant : en 2018, seulement 4 % des produits consommés en restauration collective étaient bio, bien loin des 20 % promis pour 2022. Il faut impérativement aller plus loin en la matière en rehaussant les exigences légales.

Soutenir la consommation de produits bio dans les cantines, c’est aussi soutenir la transition vers le bio de l’agriculture française, de plus en plus nécessaire et de moins en moins proche au fil des renoncements et des promesses non tenues. Comme l’a souligné la Cour des comptes dans un récent référé, la trajectoire de sortie du glyphosate annoncée par le Gouvernement n’aura pas lieu, car la consommation de ce pesticide, dont les effets toxiques sur la santé sont connus, ne cesse de progresser : de 2009 à 2016, les volumes utilisés ont augmenté de 16 %, alors qu’ils auraient dû diminuer de 50 %. Pendant ce temps, 7,5 % seulement de la surface arable utile est consacrée à l’agriculture biologique.

Chaque année, 4 milliards de repas sont servis en restauration collective, pour un chiffre d’affaires de 16 milliards d’euros. Nous proposons de mettre ces sommes au service de la bifurcation écologique. Notre proposition de loi, modifiée par mon amendement à l’article 4, porte à 80 % la part de produits dans les cantines devant répondre à l’un des critères posés par la loi EGALIM et à 70 % la part de produits bio. En un second volet, tout aussi important, ce même amendement propose également d’inscrire les produits acquis dans le cadre de projets alimentaires territoriaux parmi les produits comptant pour le seuil de 80 % précédemment évoqué : en d’autres termes, il s’agit de soutenir les circuits locaux et l’approvisionnement de proximité, afin de réduire la distance entre l’endroit où le produit est récolté ou fabriqué et celui où il est consommé.

Toutefois, ce n’est pas tout de fixer de nouvelles obligations ; il faut également réfléchir aux modalités de mise en œuvre de cette ambition. C’est pourquoi, en complément des objectifs que je viens de présenter, la proposition de loi prévoit la mise en place de dispositifs de formation à destination des acteurs de la restauration collective, afin de les sensibiliser aux enjeux écologiques et de permettre aux cantines de réussir le passage à une alimentation saine et durable. Par exemple, la réduction du gaspillage, qui atteint un niveau assez dramatique dans nos cantines, permettrait de dégager des économies importantes et d’acheter des produits équitables pour les producteurs.

Toutes ces mesures ont évidemment un coût pour les collectivités territoriales. Nous en avons tout à fait conscience et, contrairement au Gouvernement, nous ne prétendons pas donner aux collectivités d’une main pour mieux les plumer de l’autre. Le coût pour les communes, les départements et les lycées de la gratuité et du passage au bio sera, dans le cadre de notre proposition, entièrement compensé par l’État sous la forme d’une majoration de la dotation globale de fonctionnement (DGF).

Nous n’entendons pas déléguer une compétence nouvelle aux collectivités, ni les obliger à se débrouiller pour mettre en œuvre la gratuité ; il s’agit bien que l’État prenne en charge cette compensation financière de façon durable. Notre proposition ne porte donc aucunement atteinte au principe de libre administration des collectivités territoriales, ni à celui de leur autonomie financière. La Cour des comptes a publié hier son rapport public annuel 2020 où elle évoque, dans le chapitre consacré aux cantines, « la nécessité d’investissements lourds et coûteux » dans les écoles primaires. Pour vous donner une idée du montant de ces investissements, les cuisines centrales nouvelles qui doivent d’être installées à Nanterre représentent un coût de 5 millions d’euros, ce qui n’est pas une petite somme, même s’il s’agit d’un investissement ayant des répercussions très positives sur de nombreux points, notamment en termes d’embauches sur le territoire concerné.

Pour ce qui est du financement de ces mesures par l’État, je précise d’emblée que, dans le cadre d’une proposition de loi, le seul moyen auquel nous puissions recourir consiste en la création de taxes. Il existe une multitude de mesures de nature à permettre de dégager des marges de manœuvre afin d’investir dans des propositions à caractère utile, solidaire et écologique : à ce titre, je pourrais vous parler pendant des heures des quatorze tranches d’impôt sur le revenu… Je vois que certains de nos collègues me regardent avec des yeux ronds, pourtant c’est un fait : on pourrait refondre toute la fiscalité et ainsi dégager des milliards d’euros !

En l’occurrence, nous avons choisi de vous faire deux propositions très simples à mettre en œuvre. La première consisterait à rétablir l’impôt sur la fortune, ce qui rapporterait 3,5 milliards d’euros, c’est-à-dire exactement ce que coûterait la gratuité des cantines. On pourrait parvenir au même résultat de bien d’autres façons, par exemple en supprimant la flat tax ou les avantages accordés aux entreprises au titre des mesures ayant remplacé le CICE : bref, nous avons là un véritable puits sans fond où nous pourrions trouver des milliards et des milliards d’euros qui nous permettraient de faire des choses utiles.

Notre seconde proposition consiste à financer entièrement le passage au bio par la mise en œuvre d’une taxe nouvelle sur les entreprises commercialisant des pesticides. Cette mesure présenterait un autre avantage, celui de nous faire sortir plus vite des produits phytosanitaires, grâce à la sanction financière qu’elle représenterait pour les entreprises du secteur. Nous ferions donc ainsi d’une pierre deux coups.

En conclusion, avec des cantines gratuites, écologiques et orientées vers les produits locaux, nous pouvons améliorer la santé de nos enfants comme la nôtre. C’est de cette manière que nous garantirons un modèle alimentaire soutenable pour les décennies à venir, et je pense que nous avons là l’occasion d’accomplir une avancée majeure, à condition de ne pas nous payer de mots. Nous pouvons nous donner les moyens de le faire, pour nos enfants et pour l’avenir de la planète.

M. Gaël Le Bohec. J’ai déposé, dès mars 2018, une proposition de loi relative à la tarification de la restauration scolaire, signée par plus de 130 collègues. Je suis donc heureux, madame la rapporteure, que vous remettiez le sujet sur la table avec votre proposition de loi pour des cantines vertueuses, d’autant que je vous rejoins sur certains points.

Comme vous, je pense que la cantine est un levier essentiel au service de la nécessaire transition écologique. Comme vous, je pense qu’il est nécessaire de faire fonctionner un triangle vertueux associant les producteurs et les consommateurs, sans oublier et même en mettant en avant les collectivités territoriales. Comme vous, je pense que la restauration scolaire doit répondre à une exigence de justice sociale – je dirai même de cohésion sociale – à l’heure où un enfant sur cinq vit malheureusement en dessous du seuil de pauvreté. Comme vous, enfin, je pense que la cantine joue un rôle fondamental en matière de santé publique et peut être un levier sanitaire de premier plan.

Cependant, j’estime que vous avez oublié un point fondamental au sujet des cantines scolaires, à savoir qu’il s’agit d’un service profitant avant tout aux enfants eux-mêmes et à leurs apprentissages : si la cantine est si importante, c’est parce qu’il est impossible d’apprendre quand on a le ventre vide. Pour les trois millions d’enfants pauvres que compte notre pays, le repas pris à la cantine est parfois malheureusement le seul vrai repas qu’ils prendront au cours d’une journée. Pour moi, c’est donc essentiellement pour garantir à tous les enfants des conditions d’apprentissage correctes qu’il est nécessaire de faire évoluer la tarification des cantines scolaires.

En avril 2019, sous l’impulsion des députés du groupe La République en Marche, ayant donné lieu à un débat auquel j’ai apporté ma contribution, le Gouvernement a mis en place le dispositif de cantine à 1 euro, constituant le premier pas d’une dynamique qu’il convient, certes, d’amplifier et d’adapter afin de la rendre plus efficace.

Pour ce qui est de votre proposition, je suis désolé de devoir vous dire qu’elle manque totalement les objectifs que vous fixez vous-même. Envisager, comme vous le faites, d’établir un service public de la restauration scolaire, c’est le meilleur moyen de sortir les collectivités territoriales du cercle vertueux où elles se trouvent. Il faut, au contraire, continuer à impliquer l’échelon local, car ce sont les initiatives locales, appuyées financièrement et structurellement par l’État, qui permettent de coller au mieux à la réalité des habitants des territoires. À ce titre, les collectivités accomplissent un travail de grande qualité.

Par ailleurs, avec votre proposition, vous ratez également l’objectif pourtant essentiel de faisabilité, ce qui est un comble. Votre financement se base d’abord sur la réintroduction de l’ISF, qui n’existe plus. Hypothéquer le financement de votre proposition sur quelque chose qui n’existe pas, ce n’est pas très sérieux ! Vous évaluez votre proposition à 3 milliards d’euros de financement pour un peu plus d’un milliard de repas servis chaque année. Vous proposez donc d’instaurer la gratuité pour un service censé coûter environ 3 euros par repas : avec cette évaluation, vous êtes bien en dessous de la réalité, puisqu’un repas de qualité revient plutôt à 7 euros aux collectivités, ce qui représente un différentiel non négligeable.

Le financement des cantines scolaires et l’établissement d’une démarche vertueuse ne sauraient se passer d’une démarche réaliste. Au passage, on peut d’ailleurs regretter que vous n’ayez manifestement pas pris le temps de consulter les acteurs impliqués au moyen d’auditions, qui vous auraient sans doute permis d’aboutir à un travail plus convaincant. Vous avez évoqué à plusieurs reprises des promesses faites par le Gouvernement et sa majorité ; or il ne s’agit pas de simples promesses, puisque les dispositifs évoqués ont donné lieu à des lois et à des mesures concrètes. Vous faites d’ailleurs vous-même référence à la loi EGALIM, en disant qu’il va être compliqué de faire passer l’objectif de présence de produits bio au menu des cantines de 4 % à 20 %, comme le prévoit la loi, tout en proposant vous-même d’inscrire dans la loi un objectif de 70 % – un autre exemple du manque de réalisme de votre proposition.

Par ailleurs, vous devriez préciser que l’aide de l’État permet aujourd’hui à de nombreuses métropoles de proposer aujourd’hui des repas à moins de 1 euro. Pour ce qui est du prix du repas, plutôt que la gratuité pour tous, je propose, pour ma part, l’instauration d’un principe de solidarité et de redistribution : à la doctrine aveugle et chimérique que vous avez défendue, j’oppose un ensemble de mesures permettant de répondre de façon adaptée, concrète et réaliste, une alternative plus juste et plus ambitieuse sur le plan social, et totalement viable sur le plan économique, tout en répondant aux enjeux écologiques et au maintien nécessaire du lien avec les territoires.

Mme Frédérique Meunier. C’est avec beaucoup d’attention que j’ai pris connaissance de cette proposition de loi du groupe La France insoumise, dont le titre même promet un sujet intéressant. Mais que recouvre cette appellation de « cantines vertueuses » ?

Nous partageons tous l’objectif de proposer aux enfants des écoles une alimentation saine et durable ; cependant, force est de constater que cette proposition est marquée par quelques dérives idéologiques et politiques, sur lesquelles nous reviendrons. Dans l’exposé des motifs, nos collègues citent des chiffres marquants – un milliard de repas servis chaque année à 8 millions d’élèves –, mais évoquent également une pauvreté accrue, un triangle vertueux entre producteurs, consommateurs et collectivités territoriales, le tout en tenant compte de l’urgence écologique. Si nous ne pouvons que partager ce diagnostic, il n’en est pas de même du remède à prescrire.

La première mesure proposée est celle de la gratuité de la restauration collective. Nous y voilà ! Pour nos collègues, une bonne réforme est une réforme gratuite, mais qui coûte à tous les contribuables, ce que nous ne pouvons évidemment pas cautionner. Si l’intention est louable, et permettrait à chacun de soulager sa conscience de gauche, nous devons être des élus responsables. Au-delà du coût, évalué à 3,2 milliards d’euros, une telle mesure constitue un vrai choix de société. Pour notre part, nous estimons qu’il convient de réfléchir à une solution intermédiaire, qui permettrait aux enfants de familles défavorisées de manger correctement à la cantine, tout en garantissant une responsabilisation des parents.

En Corrèze, le conseil départemental apporte aux familles des aides à la restauration, allouées sous condition de ressources, dans le respect d’un plan de maîtrise sanitaire. Les cuisiniers s’engagent au quotidien pour renforcer la qualité et développer l’éducation nutritionnelle. Le temps de restauration, c’est aussi un temps d’éducation au goût, à la lutte contre le gaspillage, aux enjeux environnementaux, au respect des agriculteurs, à la qualité de l’eau et au traitement et au recyclage des déchets. Comme vous le voyez, les territoires n’ont pas attendu cette proposition de loi pour innover.

De même, les pratiques de dénonciation des élèves dont les parents ne payent pas les factures de cantine, que vous évoquez, sont marginales. Maire d’une commune de 8 500 habitants comprenant quatre écoles, je peux vous dire que 98 % des communes ne fonctionnent pas comme vous le dites, et que des aides peuvent être allouées par le biais des CCAS afin de permettre aux enfants de familles défavorisées de prendre au moins un repas équilibré au cours de la journée. Évitons de stigmatiser en désignant des pratiques isolées, pour lesquelles il est rapidement trouvé une solution, et faisons confiance aux élus de la République.

Pour ce qui est de l’idée de nationaliser le service de restauration, confier ce service à l’État, au même titre que l’éducation nationale, nécessiterait une embauche massive de fonctionnaires et se traduirait donc par une explosion de la dépense publique, dont nous sommes déjà champions du monde… Il paraît dangereux de proposer la nationalisation du service de restauration collective, car, à terme, le coût d’une telle mesure pour l’État serait bien plus élevé que les 3,2 milliards d’euros résultant de la gratuité des cantines.

La loi EGALIM impose de servir 20 % d’aliments biologiques et 30 % d’aliments durables ou labellisés en 2022. En Corrèze, le conseil départemental a lancé l’opération « Bio dans les collèges », et la plateforme Agrilocal19 a été mise en place afin d’encourager le recours aux circuits courts et l’approvisionnement de proximité.

S’agissant de l’article 6, gager la gratuité des cantines sur le rétablissement de l’ISF est un artifice démagogique, un chiffon rouge agité pour opposer un peu plus nos concitoyens les uns aux autres. Pourquoi ne pas l’avoir gagée sur le coût des syndicats en France ? Au-delà du symbole, la suppression de l’ISF constitue une mesure de confiance vis-à-vis des investisseurs, tout comme l’impôt sur les sociétés dont la baisse du taux a rapporté 3 milliards d’euros de plus en 2019.

Nous avons sur ce point des désaccords idéologiques forts et une vision différente de l’économie. Nous ne voterons pas, en l’état, cette proposition de loi.

Mme Sophie Mette. Le bien manger, l’éducation à l’alimentation et la justice sociale sont des sujets chers au MODEM. En traitant des cantines scolaires, vous abordez la question essentielle de l’accès de nos enfants à une alimentation de qualité dans le cadre scolaire. Depuis le début du quinquennat, nombre d’initiatives ont été prises, signe que ce parlement a bien conscience de cet enjeu.

L’école joue, à cet égard, un rôle primordial, tant au regard du volume de repas distribués que de la sensibilisation à une bonne alimentation qu’elle peut accomplir. De nombreuses initiatives locales existent déjà – comme la Semaine du goût, la préparation de produits issus de l’agriculture biologique, ou encore la multiplication, à l’initiative de certaines collectivités territoriales, du recours aux circuits courts – et la puissance publique les encourage.

Il est impératif que les cantines scolaires soient accessibles au plus grand nombre, car l’alimentation constitue bien souvent un marqueur social fort, l’accès à une alimentation de qualité dépendant du niveau de vie. Il est donc important d’encourager, au moyen de tarifs sociaux accessibles à tous, la participation à la cantine scolaire là où elle est encore facultative.

La proposition de loi du groupe La France insoumise tente de maximiser l’effet des mesures déjà votées par cette majorité, notamment dans la loi EGALIM : 50 % de produits locaux et de qualité et 20 % issus de l’agriculture biologique dans les services de restauration collective, création d’une instance régionale chargée d’en favoriser la mise en œuvre, expérimentation à l’école, au moins une fois par semaine, du menu végétarien, interdiction progressive du plastique, lutte contre le gaspillage alimentaire et sensibilisation des plus jeunes à ces enjeux.

Ces mesures témoignent de l’importance pour nous de ce sujet, et nous souhaitons les voir se concrétiser. Nous étudierons avec attention le contenu de votre proposition de loi, mais nous écarterons toutes les mesures purement polémiques ou politiques pour nous cantonner à celles pouvant réellement faire avancer notre société et contribuer à l’intérêt général.

Mme Michèle Victory. La lutte contre la pauvreté et pour le recul des inégalités reste un enjeu majeur. Or les associations luttant pour les droits fondamentaux des enfants, comme l’UNICEF, nous le rappellent avec insistance : sur les 8,7 millions de Français pauvres, 2,76 millions sont des enfants.

Dans le cadre des indices déterminant la pauvreté, l’INSEE utilise une liste de besoins fondamentaux, comme le fait de pouvoir, pour les adultes, consommer de la viande ou une autre source de protéines au moins tous les deux jours. S’y ajoutent des besoins spécifiques aux enfants, comme la consommation quotidienne de fruits et de légumes, la possibilité d’inviter des copains à la maison pour jouer ou de disposer d’un endroit calme où faire ses devoirs. Les enfants concernés par cette proposition de loi subissent des privations, en particulier en matière d’alimentation.

Selon une étude du Conseil national d’évaluation du système scolaire (CNESCO), 55 % des établissements scolaires interrogés ne proposent pas aujourd’hui de politique tarifaire spécifique, et seuls 22 % d’entre eux appliquent une grille allant, pour les familles les plus modestes, jusqu’à la gratuité. Les chiffres sont parlants : 40 % des enfants de familles défavorisées ne déjeunent pas à la cantine, contre 17 % des enfants de catégories plus favorisées. Cette inégalité, qui joue dès la maternelle et qui est depuis longtemps dénoncée par des associations caritatives ainsi que par la Fédération des conseils de parents d'élèves (FCPE), s’ajoute à celles contre lesquelles nous devons nous engager avec force afin de nous rapprocher de l’idéal que porte notre école républicaine et qui vise précisément à corriger les inégalités et à permettre à nos enfants de s’épanouir.

L’apport sanitaire d’une politique permettant à toutes les familles d’accéder aux cantines scolaires n’est plus à démontrer. On sait à quel point influent sur la vie scolaire, sur les apprentissages et sur la capacité à être réceptif et concentré la lutte contre l’obésité, la malbouffe et l’absentéisme médical, et l’accès aux apports nutritionnels. Certaines études montrent que le fait de partager un repas augmenterait la quantité d’aliments absorbés, ce qui limite le grignotage, source de problèmes sanitaires qui collent aux inégalités sociales.

Le temps de la cantine est aussi celui d’une expérience de socialisation importante, au cours de laquelle les différences peuvent s’estomper au profit d’un sentiment d’appartenance à un groupe. L’organisation de repas pris en commun et reposant sur des règles communes participe également des aspects positifs de la restauration collective, qui permet de fixer un cadre à des enfants qui s’en sont bien souvent affranchis.

Le droit à la cantine doit donc devenir effectif.

Les aides mises en place au travers de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté, dont ne bénéficient que les communes bénéficiaires de la fraction « cible » de la dotation de solidarité rurale (DSR), c’est-à-dire les 10 000 premières communes de moins de 10 000 habitants les plus défavorisées, ne sont pas en adéquation avec les difficultés que rencontrent nombre de municipalités. Or ce sont les communes les plus petites qui ont le plus de mal à s’engager dans une telle politique – 81 % des villes de plus de 100 000 habitants l’ont en effet déjà appliquée. Il s’agit donc bien de permettre à l’ensemble des communes et des établissements scolaires de répondre à cette problématique. Trois enfants – quatre dans les réseaux REP+ – par classe arrivent encore à l’école sans avoir pris de petit‑déjeuner.

Le texte que nous proposent nos collègues du groupe La France insoumise repose tant sur une ambition forte que sur un modèle vertueux, où le rôle de l’alimentation interroge de manière générale nos pratiques, l’organisation de nos réseaux, la place des lobbies et notre projet de société. La question est donc relativement simple : quels mécanismes faut-il soutenir afin que les collectivités rendent ce service accessible à tous ? Il s’agit bien, pour nous, de défendre un système permettant une régulation alimentaire et ne se contentant plus d’inciter les communes à s’orienter vers des tarifications plus justes.

Seules 31 % des collectivités prennent en compte la composition des revenus de la famille pour la facturation des repas : le caractère non contraignant de la législation en la matière n’est, à l’évidence, pas compatible avec l’objectif de réduction des inégalités. Il s’agit donc de mettre en place un système permettant à tous les enfants d’accéder à ce service de première nécessité. À la gratuité universelle, mon groupe préférerait une uniformisation des tarifs permettant aux seules familles les moins favorisées de ne pas payer les repas.

Cependant, les exemples offerts par d’autres pays européens, notamment par le Royaume-Uni où l’absence totale de restauration collective scolaire jusqu’à une période récente a entraîné d’immenses problèmes sanitaires, ou par la Suède et la Finlande qui ont, elles, choisi un système de restauration scolaire gratuit, montrent clairement les apports bénéfiques de la gratuité. Nous soutenons donc la cohérence de la démarche affichée par ce texte et voterons en sa faveur.

Mme Béatrice Descamps. Jamais aucune famille ne devrait renoncer à la qualité de son alimentation en raison de ses moyens. L’idée selon laquelle les personnes aisées peuvent se nourrir correctement et celles aux revenus modestes doivent se contenter d’une nourriture de mauvaise qualité est inacceptable.

Tout progrès en la matière passe par l’amélioration de la qualité de la nourriture dans les restaurants scolaires : il faut éduquer nos enfants au goût et à la diversité des aliments dont ils doivent appréhender les bienfaits pour leur organisme.

Les enfants en surpoids risquent, une fois adultes, de souffrir et sont plus susceptibles que les autres de contracter des maladies cardio-vasculaires à un âge précoce. Ces maladies sont en grande partie évitables ; priorité doit donc être donnée à la prévention. Les services de restauration scolaire doivent participer à cet objectif de santé publique et de justice sociale, un enfant d’ouvrier étant deux fois plus susceptible d’être en surpoids ou de souffrir d’obésité qu’un enfant de cadre. Il existe donc un lien indiscutable entre ressources financières du foyer et qualité de l’alimentation de l’enfant.

Les deux premiers articles du texte proposent de faire de la restauration scolaire un service public gratuit. Vous en évaluez le coût à 3,2 milliards d’euros, qui seraient financés par le rétablissement de l’ISF, dont la suppression aurait, selon vous, occasionné un manque à gagner pour les finances publiques de 3,5 milliards d’euros. Vous oubliez simplement que cet impôt a laissé place à l’impôt sur la fortune immobilière (IFI), dont le produit s’est élevé l’an dernier à 2,1 milliards d’euros. Le rétablissement de l’ISF ne vous apporterait donc que 1,4 milliard d’euros, n’assurant ainsi que le financement partiel de votre mesure.

Vous ne distinguez pas, en outre, les bénéficiaires de la gratuité de la restauration scolaire au titre du plan pauvreté lancé en 2018, qui comportait la gratuité, certes limitée aux écoles situées dans des territoires très défavorisés, du petit-déjeuner et le déjeuner à 1 euro. Sans doute faudrait-il aller plus loin en étendant le zonage concerné, mais il ne paraît pas opportun que la solidarité nationale finance la cantine de foyers aux revenus confortables. Chaque nouvelle dépense publique nous impose d’appliquer le principe de bonne gestion.

L’article 4 vise à élever les seuils de produits de qualité et issus de l’agriculture biologique que doivent respecter les repas servis en restauration collective. Ne devrions-nous pas laisser les dispositions concernées, qui ne s’appliquent que depuis peu, porter leurs fruits avant de les réformer ?

Pour financer vos autres mesures, vous créez une taxe supplémentaire assise sur le chiffre d’affaires des entreprises phytopharmaceutiques. Si j’entends bien votre objectif de faire d’une pierre deux coups, une telle création reviendrait in fine à en faire supporter la charge aux agriculteurs, dont l’activité est sans nul doute la plus précaire dans notre pays. Pensez-vous que cela soit judicieux ?

Nous pensons que c’est à la solidarité nationale de se préoccuper de l’obésité et du surpoids qui accablent nos enfants, en raison de la malbouffe omniprésente dans leur environnement et de leur méconnaissance de ce qu’ils mangent. Même si nous partageons l’ambition de ce texte, notre désaccord sur les moyens à mettre en œuvre pour l’atteindre nous conduit à l’aborder défavorablement.

M. Bastien Lachaud. Plus d’un milliard de repas sont distribués en France tous les ans dans les établissements scolaires. La cantine, parce qu’elle touche à l’alimentation de centaines de milliers de jeunes, peut constituer à la fois un puissant levier d’action pour protéger et améliorer la santé publique, un outil au service de l’environnement ainsi qu’un puissant vecteur de relance d’une économie de proximité basée sur les circuits courts et favorisant le bio comme les petites exploitations. Or nous sommes loin, aujourd’hui, dans notre pays, de l’exploiter en ce sens. Pour que la cantine soit placée au cœur d’un grand projet alimentaire écologique, encore faut-il qu’elle soit accessible à tous. Or ce n’est absolument pas la norme sur le territoire national.

Dans notre pays, trois millions d’enfants, soit un enfant sur cinq, vivent sous le seuil de pauvreté. Pour beaucoup de familles modestes, la cantine est trop chère, comme l’affirment tant le Défenseur des droits que la Cour des comptes dans son rapport annuel 2020, publié hier. Dans les établissements des réseaux REP+, seuls 25 % des enfants mangent à la cantine le midi. Dans les milieux plus aisés, la proportion est trois fois supérieure.

Notre proposition de loi vise à réparer cette injustice intolérable en instaurant, comme la République l’avait jadis fait avec l’enseignement public, la gratuité de la restauration collective, mais aussi la qualité. Cela est d’autant plus important que les enfants des familles modestes sont également ceux qui souffrent le plus, du fait des difficultés financières de leurs parents, d’une mauvaise alimentation, souvent trop sucrée, trop grasse et dominée par des produits d’origine industrielle, qui met leur santé de futur adulte en danger.

Chaque enfant, quelle que soit sa situation familiale, doit avoir accès tous les midis à une alimentation équilibrée, saine et respectueuse de l’environnement. C’est là une des principales préoccupations des familles. Dans nos villes, comme à Aubervilliers, dans ma circonscription, des collectifs de parents se mobilisent contre la qualité défectueuse des repas. J’ai visité avec certains d’entre eux le syndicat intercommunal qui gère les repas de cette ville et de nombreuses autres en région parisienne : 8 cuisiniers y préparent 25 000 repas par jour ; les plats sont stockés dans des barquettes en plastique, dont on sait les risques qu’elles présentent en raison des microparticules.

Notre proposition de loi se préoccupe également de qualité nutritionnelle et sanitaire des repas en aidant les communes les plus fragiles à investir dans un retour progressif à des régies publiques qualitatives et de proximité, et en favorisant des circuits locaux. C’est la voie à suivre, car les grandes structures exerçant en délégation de service public ou en externalisation complète ne permettent bien souvent pas de respecter les standards de qualité suffisants et occasionnent des surcoûts.

En outre, les normes introduites devront également veiller à ce que les chaînes d’approvisionnement des cantines respectent l’environnement.

Vous l’aurez compris, notre projet vise à mettre en place des cantines vertueuses, car elles constitueraient également de puissants vecteurs de progrès sanitaire, social, écologique et économique, dont les premiers bénéficiaires seront nos enfants. Les familles, elles, verraient leur pouvoir d’achat s’améliorer et pourraient ainsi s’offrir une meilleure alimentation à la maison. La santé publique en sortirait également gagnante, tout comme la lutte contre l’obésité et l’environnement, puisque les chaînes industrielles de production alimentaire seraient abandonnées, qu’il serait moins recouru au plastique et que le bio s’en trouverait valorisé. Les petits agriculteurs, sollicités au travers des circuits courts, verraient leurs carnets de commandes se remplir.

Bref, ce que nous proposons ne ferait que des gagnants et serait finançable en rétablissant notamment l’ISF et en taxant davantage le commerce des produits phytopharmaceutiques. Les sondages montrent que les Français y sont largement favorables : je vous invite donc à entendre leur message et à soutenir cette proposition de loi.

Mme Elsa Faucillon. Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine soutient à la fois l’ambition, le contenu et le financement de cette proposition de loi. Comme le disait Federico Fellini, « Le mot réalisme ne veut rien dire. Dans une certaine mesure, tout est réaliste. Il n'y a pas de frontière entre l'imaginaire et le réel. » Le conseil départemental des Hauts-de-Seine, dirigé par M. Patrick Devedjian, tire argument du réalisme pour expliquer aux membres de l’opposition dans cette assemblée qu’Elior ou Sodexo se partagent les marchés de la restauration dans les collèges en recherchant le profit maximum et en mettant bien souvent dans les assiettes des choses qui ne devraient être proposées ni à des enfants ni à des adultes.

Les cantines scolaires font débat, tant à la maison que dans les circonscriptions, car elles font partie du quotidien, et donnent parfois lieu à des pratiques nauséabondes dans notre société, comme celle consistant à punir des enfants dont les parents n’ont pas réglé la cantine. Dans une ville comme Colombes, même lorsque les inspecteurs d’académie parviennent à faire scolariser des enfants qui vivent dans un squat ou dans un bidonville, ou sont hébergés par le 115, la mairie fait en sorte qu’ils ne puissent pas déjeuner à la cantine. Cela prouve qu’il s’agit d’un sujet éminemment politique que nous devons nous approprier, et l’État également.

L’article 186 de la loi relative à l'égalité et à la citoyenneté a pourtant complété le code de l'éducation par un article L. 131-13 : « […] L'inscription à la cantine des écoles primaires, lorsque ce service existe, est un droit pour tous les enfants scolarisés. Il ne peut être établi aucune discrimination selon leur situation ou celle de leur famille. » Force est de constater que malheureusement cette disposition n’est pas respectée. Le Défenseur des droits a ainsi constaté que l’accès à la restauration scolaire, parfois difficile pour les enfants des familles à revenus modestes, pénalisées du fait de tarifs élevés, reste souvent entravé par de véritables discriminations.

L’absence de service public gratuit de cantine pour tous les enfants révèle également de nombreuses inégalités territoriales. La création d’un tel service permettrait de lutter contre celles-ci et participerait à la lutte contre le changement climatique. Face à ce défi, il convient de proposer aux enfants des produits de qualité, issus de l’agriculture biologique. C’est en les éduquant à une alimentation saine que les pratiques citoyennes et sociétales s’amélioreront.

Aujourd’hui, seuls 2 % des aliments servis quotidiennement sont issus de l’agriculture biologique. Le service public de restauration scolaire doit également favoriser tant cette dernière que les circuits courts. L’on voit combien, même pour les municipalités qui souhaitent les développer, une telle révolution est aujourd’hui coûteuse. Vous avez cité des exemples de villes qui peuvent encore se le permettre ; ce n’est pas le cas de beaucoup d’autres.

Il faudra également former les cuisiniers de collectivités à de nouvelles pratiques et à de nouveaux modes de cuisson, ainsi qu’à la préparation des protéines végétales et à la lutte contre le gaspillage, et financer l’achat d’équipements comme des ateliers de découpe, de conserveries ou de matériels permettant de lutter contre le gaspillage alimentaire.

Cette proposition de loi nous invite également à nous pencher sur l’opportunité de rendre obligatoire ou non un menu végétarien, afin de permettre aux enfants qui ne veulent pas manger de viande ou de poisson, parfois contre l’avis même de leurs parents, de se nourrir de façon équilibrée.

Nous soutenons donc cette proposition de loi.

Mme Danièle Cazarian. L’article 3 de la proposition de loi vise à améliorer la prise en compte des enjeux environnementaux dans la restauration collective des écoles publiques.

Vous préconisez notamment le recours aux circuits courts pour l’achat de produits alimentaires afin de créer, au sein d’un même territoire, un lien entre le producteur et les consommateurs, ce qui se fait déjà dans nombre d’établissements. Cela ne risque-t-il pas, cependant, de limiter la diversité des aliments proposés à nos enfants ?

M. Maxime Minot. Plusieurs choses me chagrinent dans cette proposition de loi, à commencer par la gratuité, mot magique qui sous-entend que la restauration scolaire ne coûterait rien. Or nous savons tous qu’à la fin, les contribuables paient une note déjà largement salée.

Me chagrine également une forme d’autoritarisme : imposer une proportion aussi importante de produits bio à un horizon aussi court traduit une méconnaissance de la filière agricole française, qui n’est pas en mesure d’en produire autant. Cela obligerait à importer des produits provenant d’autres pays d’Europe, ce qui affaiblirait tant notre compétitivité que l’objectif écologique poursuivi.

Or vous savez aussi bien que moi que nos voisins européens n’imposent pas du tout les mêmes normes que nous en la matière. Si l’objectif est louable, de nombreuses collectivités territoriales ont déjà pris des mesures en ce sens.

Mme Emmanuelle Anthoine. Pour pouvoir consommer localement, il faut qu’existent sur place à la fois des producteurs locaux et une production diversifiée. En pratique, certaines régions ont développé un modèle polycultural, d’autres sont plus orientées vers la monoculture, mais certains territoires ne comptent aucuns producteurs locaux. Mon département, la Drôme, ne se trouve pas dans ce cas, puisqu’il est un pionnier innovant du bio en France et que sa gamme de produits est variée. Pour les territoires qui n’ont pas la possibilité d’organiser des circuits courts, que proposez-vous ?

M. Frédéric Reiss. Des efforts indéniables et remarquables sont faits aujourd’hui en matière de restauration scolaire par les communes, par les établissements publics de coopération intercommunale, par les départements et les régions. Vous préconisez l’agriculture biologique et les circuits courts : on se rend compte, lors des assemblées générales cantonales, que beaucoup d’initiatives vont d’ores et déjà dans la bonne direction.

Cependant, votre généralisation des produits bio ne me semble pas très réaliste, et je m’interroge sur le bilan carbone d’un produit bio. Pour l’empreinte carbone du secteur agricole, vaut-il mieux manger bio ou local ?

M. Fabien Di Filippo. Vous reproduisez avec cette proposition de loi l’une des erreurs commises avec la loi EGALIM de pousser à l’excès les produits bio, alors que les normes en la matière restent poreuses et favorisent les produits étrangers. Je ne pense pas qu’une telle démarche soit vertueuse, ni du point de vue sanitaire ni du point de vue environnemental. Il faudrait tout simplement remplacer le mot bio par le mot local. Je suis père de très jeunes enfants et, pour les nourrir, je fais plus confiance aux agriculteurs de mon territoire qu’à un concept très poreux.

Mme Clémentine Autain, rapporteure. Je remercie mes collègues Michèle Victory, Elsa Faucillon et Bastien Lachaud : nous défendons cette idée de cantines vertueuses sur les mêmes bases.

Monsieur Le Bohec, nous sommes d’accord sur la nécessité de renforcer l’apprentissage. Pour le reste, nous n’avons pas du tout la même approche. Vous affirmez que l’ISF n’existe pas ; nous proposons de le rétablir tel qu’il existait à votre arrivée au pouvoir, à savoir un impôt sur la fortune non restrictif, dont le produit annuel s’élevait à plusieurs milliards d’euros. Vous avez choisi de réduire la voilure au profit des plus riches ; nous pensons qu’il vaut mieux mettre tous ces milliards dans des choses plus utiles.

Je vous rassure, nous avons procédé à des auditions, notamment des représentants de Cantine nouvelle, de la Fondation pour la nature et l’homme, et du collectif « Pas d’usines, on cuisine », qui sont des acteurs de terrain travaillant ces questions et qui nous alertent à raison.

Certaines villes ont, en effet, déjà instauré des cantines vertueuses. Il s’agit d’expériences très encourageantes sur lesquelles il serait possible de s’appuyer. J’observe, en particulier, que Mouans-Sartoux est passé au 100 % bio, que Saint-Étienne-du-Rouvray, ville populaire, a atteint 80 % et qu’Alençon s’est également engagée dans cette voie. Mais pour que cette démarche vertueuse du point de vue social et environnemental puisse être engagée sur tout le territoire, l’État doit l’accompagner. Il ne s’agit pas d’autoritarisme, mais du pouvoir d’impulsion des pouvoirs publics.

Nos estimations financières ne seraient pas justes, dites-vous. Ne disposant pas de l’expertise de l’État, nous nous sommes appuyés sur les chiffres fournis notamment par les associations. Si vous disposez de chiffres plus précis, nous pourrions affiner le gage.

Nous sommes en désaccord complet avec les positions exprimées par les représentants du groupe Les Républicains. Ce qu’ils considèrent comme trop d’État, trop de fonctionnaires et trop d’impôts, sert, à notre sens, le service public qui permet d’améliorer les conditions de vie des gens et la mise en commun des biens. Nos approches sont sans doute irréconciliables.

Notre collègue Béatrice Descamps, comme certains collègues du groupe La République en marche, a indiqué qu’une bonne gestion de la grille tarifaire des cantines scolaires devrait conduire à faire payer les riches, mais pas les pauvres. Pour notre part, nous pensons que c’est au niveau des revenus qu’il faut agir, de sorte que l’on n’ait pas à établir des quotients familiaux pour tous les dispositifs de la vie, et qui rappellent en permanence à chacun son statut de riche ou de pauvre. La société devrait garantir par les rémunérations et par l’impôt des différences de revenus qui ne soient pas telles que l’on doive réintroduire des péréquations pour rétablir un équilibre. Cela fait toute la différence, y compris du point de vue symbolique, de ne pas avoir, lorsque vous gagnez peu, à remplir des tonnes de formulaires. La gratuité permet précisément d’émanciper de la paperasserie et de conforter les biens communs. La lutte contre les inégalités sociales et de revenu, et donc contre les injustices, doit se jouer ailleurs, raison pour laquelle je suis également favorable à la gratuité des transports.

S’agissant de la diversité alimentaire, on ne peut évidemment pas demander à des territoires de se fournir au plus près des cantines si la production locale ne s’y prête pas. Mais peut-être est-ce l’occasion de s’interroger sur l’usage des terres. Par exemple, dans ma circonscription urbaine, les terres qui forment l’immense triangle de Gonesse pourraient être utilisées à des fins agricoles.

Mme Sylvie Charrière. Elles sont polluées.

Mme Clémentine Autain, rapporteure. On pourrait les dépolluer.

Mme Sylvie Charrière. Il faudrait déplacer l’aéroport. C’est irréaliste !

Mme Clémentine Autain, rapporteure. Ce n’est pas irréaliste. À Sevran, nous avons une association pour le maintien d'une agriculture de proximité (AMAP). C’est bien qu’il y a des possibilités, y compris dans des territoires urbains, pour les pratiques agricoles.

Peu importe si l’on ne peut pas s’approvisionner à 100 % sur le marché local, nous voulons simplement donner une impulsion aux circuits courts et protéger des terres agricoles menacées par des projets inutiles – il en existe en dehors du triangle de Gonesse.

Quant à préférer le local au bio, je ne suis pas d’accord avec M. Di Filippo, car ce sont deux choses très différentes. L’agriculture locale peut être intensive, bourrée de pesticides et très mauvaise pour la santé.

M. Fabien Di Filippo. Le bio d’Espagne est bourré de pesticides aussi !

Mme Clémentine Autain, rapporteure. Produire et consommer local, oui, mais sans oublier la qualité de l’agriculture. Si l’agriculture bio n’est aujourd’hui pas suffisamment présente sur notre territoire, c’est aussi parce que la PAC a introduit une logique ne favorisant pas son développement. En l’absence de mécanismes vertueux d’incitation et de soutien aux filières bio, celles-ci ne peuvent évidemment se développer. Notre démarche s’inscrit dans une vision plus globale de l’économie et de l’agriculture.

 

 

 

II.    Examen des articles

Article 1er : Principe de gratuité du service public de restauration scolaire

La commission est saisie de l’amendement AC1 de Mme Agnès Thill.

Mme Agnès Thill. Je ne suis pas favorable à la gratuité des repas dans le cadre scolaire. Certes, les communes appliquent des tarifs dégressifs, au point que la cantine pour les enfants est presque gratuite. Dans l’établissement où j’exerçais avant d’être élue, le huitième et plus bas tarif correspondait à un prix par repas de 0,13 euro ; je facturais donc 2,50 euros par mois, qui n’étaient, bien entendu, ni réclamés ni payés.

Faire de la restauration scolaire un service public gratuit revient à entrer dans une dynamique infinie d'assistanat qui fait perdre aux citoyens le prix de chaque chose. La tarification actuelle des cantines vise tant à responsabiliser les parents qu'à apprendre aux enfants que chaque chose a un prix et que rien ne tombe du ciel.

Suivant l’avis défavorable de la rapporteure, la commission rejette l’amendement.

Puis elle rejette l’article 1er.

Article 2 : Conséquence de la gratuité sur la tarification de la restauration scolaire

La commission est saisie de l’amendement AC9 de M. Gaël Le Bohec qui fait l’objet du sous-amendement AC12 du président Bruno Studer.

M. Gaël Le Bohec. Le véritable objectif est celui de la solidarité et de la redistribution, et le dispositif de la cantine à 1 euro, entre autres, y participe – les collectivités peuvent toujours faire le choix d’un tarif de la première tranche entre 0 et 1 euro. D’aucuns ne voient dans ce dispositif que de la communication, mais 8 000 enfants bénéficiaires, et probablement plus après son élargissement, et 200 000 petits-déjeuners gratuits servis, je n’appelle pas cela de la communication. Il est nécessaire que les communes mettent en place une progressivité des tranches.

M. le président Bruno Studer. Madame la rapporteure, nous partageons les objectifs, pas les moyens de les atteindre.

Cet amendement vise tout à la fois à inscrire le dispositif de la cantine à 1 euro dans la loi et donc à le pérenniser, à garantir la progressivité de la tranche tarifaire correspondante, et à en élargir les bénéficiaires puisque n’étaient visées initialement que les communes percevant la fraction « cible » de la DSR.

Mme Clémentine Autain, rapporteure.  Je suis assez impressionnée, monsieur Le Bohec, parce que l’amendement ne fait rien d’autre que supprimer nos propositions en réécrivant entièrement l’article 2. Il est superflu, redondant et inutile.

Vous proposez que les tarifs soient fixés par la collectivité ayant la charge de la cantine et qu’ils ne puissent être supérieurs au coût de revient du service par usager – en fait, la situation actuelle. Quel est donc l’apport ?

Permettez-moi de citer l’article R. 531-52 du code de l’éducation : « Les tarifs de la restauration scolaire fournie aux élèves des écoles maternelles, des écoles élémentaires, des collèges et des lycées de l'enseignement public sont fixés par la collectivité territoriale qui en a la charge », et l’article R. 531-53 du même code : « Les tarifs mentionnés à l'article R. 53152 ne peuvent, y compris lorsqu'une modulation est appliquée, être supérieurs au coût par usager résultant des charges supportées au titre du service de restauration, après déduction des subventions de toute nature bénéficiant à ce service. »

Vous aurez remarqué qu’il s’agit, presque mot pour mot, des troisième et quatrième alinéas de l’amendement. Pour ma part, je ne crois pas que le rôle du législateur consiste à faire des copier-coller de dispositions réglementaires en vigueur.

Le cinquième alinéa, quant à lui, commence ainsi : « Ces tarifs peuvent être fixés selon un barème progressif ». Non seulement les collectivités territoriales peuvent déjà fixer un barème progressif, et un certain nombre d’entre elles le font, mais une telle disposition n’a aucune valeur normative, et donc aucune conséquence concrète, à la différence de ce que nous proposons dans notre texte, à savoir une véritable gratuité des cantines scolaires pour tous les enfants. Vous comprendrez donc que je sois totalement opposée à cet amendement.

Quant au sous-amendement…

M. le président Bruno Studer. Il vise à consolider un certain nombre de dispositions dans la loi ; mais je suppose que vous y êtes également opposée, puisque vous rejetez l’amendement.

Mme Clémentine Autain, rapporteure. Vous avez tout compris.

M. Gaël Le Bohec. Notre objectif est de sécuriser un certain nombre de dispositions en les inscrivant dans la loi. Il est important d’inciter les communes qui ont instauré un barème progressif à poursuivre cette démarche.

Si vous ne voulez pas tenir compte de mes propos, peut-être écouterez-vous ceux de Mme Victory, qui a rappelé que, dans plus de 60 % des communes, les tarifs ne sont pas progressifs. Si vous trouvez qu’il n’est pas important d’inciter ces communes à adopter le système, c’est votre droit. Quant à nous, c’est précisément ce que nous voulons faire. Dans mon territoire, les communes sont enchantées par le système de la cantine à 1 euro, qu’elles trouvent simple et pour lequel, en plus, elles reçoivent une aide financière de l’État. Peut-être faut-il élargir le système, aller encore plus loin, mais il importe aussi de féliciter ceux qui ont d’ores et déjà introduit la progressivité.

La commission adopte successivement le sous-amendement et l’amendement ainsi sous-amendé, et l’article 2 est ainsi rédigé

En conséquence, l’amendement AC2 de Mme Agnès Thill n’a plus d’objet.

Article 3 : Former les professionnels de la restauration collective aux enjeux de la bifurcation écologique et solidaire

La commission rejette l’article 3.

Article 4 :Amélioration de la qualité des produits servis dans la restauration collective publique

La commission examine l’amendement AC7 de la rapporteure.

Mme Clémentine Autain, rapporteure. j’ai déjà présenté cet amendement tout à l’heure.

Mme Cécile Rilhac. En tant que députée du Val-d’Oise, je souhaite rétablir quelques vérités à propos du triangle de Gonesse. C’est bel et bien la majorité qui a décidé d’abandonner le projet de mégacomplexe de loisirs et de commerces EuropaCity, auquel vous avez fait référence ; c’est bien la majorité qui travaille de manière transpartisane dans le Val‑d’Oise, avec le soutien de l’État, pour trouver des projets alternatifs plus vastes dans le triangle de Gonesse – y compris, peut-être, des projets agricoles.

Mme Clémentine Autain, rapporteure. Eh bien voilà !

M. Fabien Di Filippo. Vous avez dit tout à l’heure, madame la rapporteure, quelque chose de terriblement faux et irresponsable pour défendre votre projet d’augmenter la part de bio : le bio serait mieux qu’une agriculture locale « bourrée de pesticides ». Or nos agriculteurs respectent les normes et font un travail remarquable. Vos propos sont donc au‑delà de la caricature, ils sont tout simplement faux. Comparez nos productions locales à bien des productions bio d’Amérique du Sud ou même d’autres pays européens, et vous verrez que la qualité de nos produits est très nettement supérieure.

La commission rejette l’amendement.

Elle en vient à l’amendement AC8 de M. Gaël Le Bohec.

M. Gaël Le Bohec. L’amendement vise à supprimer les pourcentages proposés pour les produits bio et de qualité, dont on a vu qu’ils étaient irréalistes. Il faut commencer par franchir le cap des 20 %, ce qui est déjà un enjeu considérable, en termes tant de surfaces cultivées que de circuits d’approvisionnement pour certaines collectivités. Nous proposons donc d’en rester aux objectifs déjà très ambitieux de la loi EGALIM. Pour ce faire, nous demandons la suppression du deuxième alinéa de l’article 4.

Contre l’avis de la rapporteure, la commission adopte l’amendement.

Elle est saisie de l’amendement AC4 de Mme Agnès Thill.

Mme Agnès Thill. Cet amendement vise à passer d’un choix hypothétique à une priorité réelle donnée aux projets locaux et aux circuits courts dans le choix des produits à destination des repas servis dans les restaurants collectifs. Cela correspond parfaitement aux objectifs du Gouvernement en matière de santé publique, de protection de l’environnement et de redynamisation de l’économie locale par la priorité donnée aux acteurs de proximité.

Mme Clémentine Autain, rapporteure. J’ai le sentiment, madame Thill, que mon amendement AC7 répondait d’une certaine manière à vos préoccupations. Avis défavorable.

Quant à l’amendement précédent de M. Le Bohec, il visait en fait, y compris en ce qui concerne la part de produits bio, à en rester à ce qui est déjà prévu. Je ne vois pas très bien en quoi cela permet d’avancer. Tout à l’heure, vous avez procédé de la même manière : il est très bien que certaines collectivités aient instauré des tarifs progressifs, disiez-vous. C’est sûr, des tarifs progressifs sont préférables à des tarifs qui ne le sont pas, mais la gratuité, c’est encore mieux !

La commission rejette l’amendement.

Puis elle adopte l’article 4 modifié.

Article 5 : Instauration d’une dotation relative au soutien
à une restauration scolaire saine et durable

La commission est saisie de l’amendement AC10 de M. Gaël Le Bohec.

M. Gaël Le Bohec. Beaucoup de questions se posent, on le voit : le périmètre des communes visées est-il le bon ? Faut-il inciter d’autres communes à adopter le dispositif ? Si oui, comment ? Quelles aides peut-on leur apporter, notamment en milieu rural ? Pour répondre à ces questions, nous demandons la remise au Parlement, avant le 1er janvier 2021, d’un rapport relatif au financement par l’État de la mise en place de la tarification sociale des cantines. Il s’agit de trouver les moyens d’inciter encore plus de collectivités territoriales à instaurer une telle tarification.

Mme Clémentine Autain, rapporteure. Cet amendement vise à substituer à l’article 5 une demande de rapport, ce qui revient pour ainsi dire à le supprimer. Je sais bien que, chaque fois qu’il y a un problème, par exemple les punaises de lit, soit on crée un numéro de téléphone soit on commande un rapport. Nous pourrions être un peu plus ambitieux, et essayer de formuler des propositions.

M. Stéphane Testé. Pourtant, les demandes de rapport, ça vous connaît !

Mme Clémentine Autain, rapporteure. Certes, mais nous sommes dans l’opposition, ce qui fait une grande différence : parfois, la demande de rapport est l’élément ultime auquel s’accrocher. Quand on est en responsabilité, il en va tout autrement.

Si je ne suis pas forcément opposée à la rédaction d’un rapport, je le suis au fait que votre amendement supprime en pratique l’article 5, qui prévoit la participation de l’État à l’effort financier, ce qui n’est quand même pas rien.

La commission adopte l’amendement, et l’article 5 est ainsi rédigé.

Après l’article 5

La commission est saisie de l’amendement AC6 de la rapporteure.

Mme Clémentine Autain, rapporteure.  M. Le Bohec va être ravi : je propose la remise d’un rapport.

La commission rejette l’amendement.

Articles 6 et 7 : Gages financiers

La commission rejette successivement les articles 6 et 7.

Après l’article 7

La commission examine l’amendement AC11 de M. Gaël Le Bohec.

M. Gaël Le Bohec. L’amendement AC11 vise à financer d’une façon classique, et tenant compte des besoins réels, les surcoûts éventuels découlant de la proposition de loi, plutôt que de recourir à des gages fantaisistes ou irréalistes.

Mme Clémentine Autain, rapporteure. Je suis impressionnée par votre entêtement à défendre l’ISF. Visiblement, vous êtes fiers d’avoir supprimé cet impôt qui touchait les plus riches. Je trouve cela fascinant.

M. Gaël Le Bohec. L’ISF est une véritable question, et on a le droit d’avoir des points de vue différents. Je discute souvent, dans ma circonscription, de la manière dont nous avons fait évoluer l’ISF. Fondamentalement, je suis gêné que l’on taxe des gens qui ont investi leur capital dans des start-up, n’ont parfois rien gagné et ont même pris un risque important, car la moitié d’entre elles disparaît. Nous n’avons pas la même vision, madame Autain. Ce n’est pas grave : chacun de nous défend la sienne.

Mme Maud Petit. Vous aurez constaté que, s’agissant de la suppression de l’ISF, le MODEM s’était abstenu !

La commission adopte l’amendement.

Enfin, elle adopte l’ensemble de la proposition de loi modifiée.

 

*

*     *

 

En conséquence, la commission des Affaires culturelles et de l’Éducation demande à l’Assemblée nationale d’adopter la présente proposition de loi dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

 

 

 

– Texte adopté par la commission :

http://www.assemblee-nationale.fr/15/ta-commission/r2724-a0.asp

– Texte comparatif :

http://www.assemblee-nationale.fr/15/pdf/rapports/r2724-aCOMPA.pdf

 

 

 

 

 


([1]) Lien vidéo : http://videos.assemblee-nationale.fr/video.8831630_5e562aaa7aea3.commission-des-affaires-culturelles-et-de-l-education--acces-aux-colonies-de-vacances--cantines-ve-26-fevrier-2020