N° 2738

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 4 mars 2020

 

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES SUR LE PROJET DE LOI, autorisant lapprobation de laccord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de lInde relatif à la prévention de la consommation illicite et à la réduction du trafic illicite de stupéfiants, de substances psychotropes et de précurseurs chimiques, et des délits connexes.

PAR Mme Valérie THOMAS

Députée

——

 

ET

 

ANNEXE : TEXTE DE LA COMMISSION

DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

 

 

 


 


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  SOMMAIRE

___

Pages

introduction

I. UNe relation bilatérale stratégique

A. linde, un partenaire indispensable

1. Un géant démographique et économique

2. Une relation bilatérale qui sintensifie

B. La coopération policière sur les drogues, une opportunité Pour la france

1. Présentation du système policier et judiciaire indien

2. Présentation des liens entre la France et lInde sur le trafic et la consommation illicites de stupéfiants et de substances psychotropes et sur le trafic de précurseurs chimiques

3. Un accord de coopération policière inscrit dans une approche globale

II. Contenu et conséquences attendues de laccord

A. contenu de laccord

1. Une inscription dans les engagements nationaux et internationaux de la France et de lInde

2. Des modalités de coopération techniques et opérationnelles élargies

3. Des garanties sur la protection des données

4. Un suivi et une évaluation de laccord

5. Des dispositions finales classiques

B. effets attendus de laccord

1. Une augmentation de la coopération technique et opérationnelle

2. Un impact financier limité

3. Une occasion de promouvoir les actions de prévention et de traitement auprès du partenaire indien

4. Un exemple pour dautres accords de coopération policière

CONCLUSIOn

annexes

ANNEXE 1 : TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION des affaires étrangères

Annexe n° 2 : liste des personnes auditionnées par la rapporteure


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   introduction

Notre commission est saisie du projet de loi autorisant l’accord de coopération policière entre la France et l’Inde signé le 10 mars 2018 à New Delhi, par le ministre français de l’Europe et des affaires étrangères, M. Jean Yves Le Drian, et par le ministre indien de l’intérieur, M. Rajnath Singh. Cet accord est relatif à la prévention de la consommation illicite et à la réduction du trafic illicite de stupéfiants, de substances psychotropes et de précurseurs chimiques, ainsi qu’aux délits connexes.

Le positionnement et le poids démographique de l’Inde, en font un acteur régional majeur dans la lutte contre ces substances et contre leur consommation. Si l’on omet le trafic de médicaments détournés de leur usage et le trafic de précurseurs chimiques, dont l’ampleur reste difficile à mesurer, l’Inde joue un rôle limité dans la production des drogues. Toutefois, elle constitue un territoire de transit pour ces trafics et, de plus en plus, un lieu de consommation.

Cet accord témoigne plus généralement de la volonté conjointe de la France et de l’Inde de renforcer leurs relations bilatérales. Il doit, par ailleurs, être rapproché des initiatives récentes lancées par les parties pour renforcer leur partenariat en matière de lutte contre le terrorisme et de lutte contre la fraude médicamenteuse.

I.    UNe relation bilatérale stratégique

A.   l’inde, un partenaire indispensable

1.   Un géant démographique et économique

La République de l’Inde est un État fédéral composé de vingt-neuf États et sept territoires de l’Union. Avec 1,35 milliard d’habitants (Banque mondiale, 2018), l’Inde est le deuxième pays le plus peuplé au monde et pourrait prendre la première position en 2025. Elle est également la cinquième puissance économique mondiale (Fonds monétaire international, 2018). Elle a su développer une économie de services (53,9 % de son produit intérieur brut selon la Banque asiatique de développement en 2017), mais aussi une industrie performante (29,1 %), notamment dans les secteurs électronique et pharmaceutique. Elle est ainsi le premier producteur de médicaments génériques au monde.

Le développement du pays souffre toutefois de la persistance de fortes inégalités sociales. Le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) évaluait ainsi l’indice de développement humain (IDH) de l’Inde à 0,640 en 2017, plaçant le pays au 130e rang mondial. La Chine, grande rivale économique et démographique de l’Inde, étant quant à elle classée 86e et le Bangladesh, son voisin, 136e.

L’Inde est une démocratie parlementaire. En mai 2019, les Indiens ont donné la majorité au parti conservateur Bharatiya Janata Party (BJP) et Narendra  Modi a été, de nouveau, nommé au poste de Premier ministre.

Dans le concert des nations, l’Inde se mobilise dans les organisations et les enceintes internationales pour renforcer son influence (Nations unies, BRICS, G20). Elle brigue un siège de membre permanent au Conseil de sécurité des Nations unies par l’intermédiaire du « G4 » (Allemagne, Brésil, Inde, Japon).

2.   Une relation bilatérale qui s’intensifie

La relation bilatérale entre la France et l’Inde se fonde sur une proximité de positions sur de nombreux sujets globaux dont la défense des droits de l’homme, le multilatéralisme et la lutte contre le terrorisme.

Elle a été marquée par le lancement du « partenariat stratégique » en 1998 autour de quatre axes : défense, sécurité, spatial, nucléaire civil. Le contrat d’acquisition de trente-six avions Rafale par l’Inde à l’entreprise française Dassault Aviation, signé en 2016, et le projet de construction de six réacteurs nucléaires à eau pressurisée (EPR) à Jaitapur (État du Maharashtra), ont conforté ce partenariat.

 

Plus généralement, les relations entre les deux États ont été renforcées par la multiplication des rencontres bilatérales à haut niveau et les actions de coopération qui en ont découlé. Le Premier ministre indien Narendra Modi s’est ainsi entretenu avec le Président de la République française Emmanuel Macron à Paris le 3 juin 2017, puis ce dernier a effectué une visite d’État en Inde du 9 au 12 mars 2018. Un sommet bilatéral entre Narendra Modi et Emmanuel Macron a enfin été organisé les 22 et 23 août 2019 à Paris, avant une invitation au sommet du G7 de Biarritz, les 25 et 26 août 2019.

Signe du dynamisme de ce partenariat entre nos deux pays, 205 accords bilatéraux ont été conclus entre la France et l’Inde depuis l’indépendance de cet État en 1947, dont 135 environ seraient encore en vigueur.

B.   La coopération policière sur les drogues, une opportunité Pour la france

1.   Présentation du système policier et judiciaire indien

LInde étant une république fédérale, la compétence policière est, en principe, du ressort de chacun de ses États et Territoires. Néanmoins, les différents services de police des États fédérés (State Police) sont coordonnés au niveau national par des services centraux et par des forces paramilitaires, placés sous la direction du ministre de lintérieur. En matière de lutte contre le trafic de stupéfiants, le service central de référence est le Narcotics Control Bureau (NCB), créé en 1986. Il coordonne les actions menées par les polices des États fédérés en matière de lutte contre les trafics de produits stupéfiants et en anime la coopération internationale dans ce domaine.

Le système judiciaire indien est également imprégné par ce jeu d’équilibre entre les échelons centraux et fédérés. Il est organisé selon un modèle unifié et intégré de juridictions, qui appliquent à la fois le droit des États fédérés et le droit fédéral. Ce modèle obéit à une structure pyramidale. Au sommet se trouve la Cour suprême (Supreme Court) qui exerce le contrôle de constitutionnalité des actes règlementaires et des lois, tranche les conflits de compétences entre l’État fédéral et les États fédérés ou entre les États fédérés et constitue une cour d’appel de dernier ressort pour certains jugements des hautes cours fédérées (high courts). Ces dernières ont une compétence d’appel et exercent un pouvoir de surveillance sur les différentes cours de district (district courts), qui ont elles-mêmes une compétence d’appel envers les différentes juridictions subordonnées, pénales et civiles, placées dans leurs juridictions territoriales. Les hautes cours sont la juridiction principale en matière civile et sont compétentes en matière pénale pour traiter des affaires les plus graves et prononcer, le cas échéant, la peine capitale.

L’article 31A du Narcotic Drugs and Psychotropic Substances Act (1985) prévoit la possibilité de condamner à mort une personne pour trafic de stupéfiants. Cependant, cet article a fait l’objet d’un amendement en 2014, rendant la peine de mort optionnelle. En outre, depuis 2004, seules trois condamnations à mort ont été exécutées et, à chaque fois, dans des affaires de terrorisme. En 2012, un Indien a été condamné à mort dans le cadre d’une récidive de trafic de stupéfiants, mais son exécution n’a pas encore eu lieu.

Il est important de noter qu’au début de l’année 2020, aucun ressortissant français n’était détenu en Inde pour infraction à la législation indienne sur les stupéfiants.

2.   Présentation des liens entre la France et l’Inde sur le trafic et la consommation illicites de stupéfiants et de substances psychotropes et sur le trafic de précurseurs chimiques

Le positionnement géographique et le poids démographique de l’Inde en font un acteur régional majeur de la lutte contre les flux illicites de drogues et de précurseurs chimiques, c’est-à-dire des substances chimiques utilisées dans le processus de fabrication d’une drogue.

L’Inde est tout d’abord confrontée à une consommation croissante de stupéfiants.

Sur l’année 2017, le gouvernement indien estime que 23 millions de personnes (2,1 % de la population) ont consommé des opiacés, l’héroïne étant la substance la plus courante (1,1 % de la population), suivie par les opioïdes détournés de leur usage médical (1 %). Ce niveau de consommation est plus élevé qu’en France, où 0,75 % de la population aurait consommé de l’héroïne en 2017 (étude de l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies – OFDT, 2019). La proximité géographique de l’Inde avec les pays producteurs d’héroïne, en particulier l’Afghanistan et le Pakistan, peut expliquer cette différence.

La consommation de cannabis est également élevée (3 % de la population concernée en Inde), avec une production locale importante, qui s’inscrit, en partie, dans les traditions de certaines régions (Pendjab, Haryana). Cette consommation, qui concerne avant tout l’herbe de cannabis mais peu la résine de cannabis, est beaucoup plus faible que celle constatée en France (7,5 % de la population).

Si la consommation de cocaïne (0,1 %) et d’amphétamine (0,2 %) progresse en Inde, elle demeure encore relativement peu élevée, notamment en comparaison de la France (0,9 % et 0,6 %). Ces drogues sont toutefois de plus en plus consommées par la jeunesse indienne.

L’Inde est également, dans une certaine mesure, une plateforme de transit pour le trafic de drogues de la région. Située à proximité du « triangle d’or » (Laos, Birmanie, Thaïlande) et surtout du « croissant d’or » (Iran, Afghanistan, Pakistan) qui constitue la zone de production d’opium la plus importante au monde, le sous-continent indien est l’une des principales routes pour le trafic international d’héroïne à destination de la Chine et de l’Asie du Sud-Est, mais aussi de l’Australie et de l’Amérique du Nord. En Inde, si les laboratoires locaux de production d’héroïne se développent, la drogue arrive ainsi surtout des pays voisins par voie terrestre, via la frontière avec le Pakistan (notamment dans l’État du Pendjab), ou par voie maritime. En 2017, les garde-côtes indiens ont intercepté, au large du Gujarat, un navire de commerce transportant 1,5 tonne d’héroïne. L’impact de ce trafic en Europe est extrêmement limité, l’héroïne arrivant majoritairement par la route dite « des Balkans ».

De même, si l’Inde est un producteur de cannabis, il n’existe pas de route directe vers la France.

Par ailleurs, en raison d’une très puissante industrie pharmaceutique, l’Inde connaît désormais de nombreux détournements de médicaments (tramadol, morphine) et de précurseurs de drogues, comme l’éphédrine et la pseudoéphédrine. Ces détournements se font essentiellement à destination de la Birmanie, de l’Afrique, voire du Moyen-Orient pour le tramadol, dont le trafic aurait servi au financement du terrorisme.

Les principaux flux illicites de stupéfiants en provenance d’Inde et à destination de la France concernent les drogues de synthèse interceptées à l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle par les douanes françaises, sur le vecteur aérien du fret express. L’Inde apparaît notamment sur la route de la méthamphétamine fabriquée dans le « triangle d’or ». Des envois par voie aérienne, avec des volumes allant d’une dizaine à plusieurs centaines de comprimés, sont ainsi régulièrement interceptés, en lien avec la diaspora indienne présente en France ou en Europe. La France apparaît aussi comme un pays de transit pour la kétamine et le khat.

3.   Un accord de coopération policière inscrit dans une approche globale

Si les flux illicites de drogues entre la France et l’Inde sont peu nombreux, ils s’inscrivent toutefois dans la volonté des deux États de réduire ces trafics et d’engager toute coopération qui peut y contribuer.

L’Inde joue un rôle actif dans la lutte internationale contre les drogues. Elle est ainsi impliquée dans les travaux conduits par l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC) et participe à l’Initiative du Pacte de Paris contre le trafic d’opiacés en provenance d’Afghanistan. De plus, elle contribue à la montée en puissance du Drug Offences Monitoring Desk (SDOMD) de l’Association régionale de coopération d’Asie du Sud (South Asian Association for Regional Cooperation, SAARC), une structure d’échanges d’informations basée au Sri Lanka et qui regroupe les huit pays de la zone.

Cet accord a été demandé par le partenaire indien en 2013 dans le cadre du groupe de travail franco-indien sur le contre-terrorisme, soulignant ainsi le lien établi par New Delhi entre ces deux thématiques, en particulier sous l’angle de la lutte contre le financement des groupes terroristes. Le trafic de stupéfiants est, en effet, une des principales sources de revenu des groupes terroristes présents en zone Afghanistan-Pakistan, ainsi que pour les relais de ces groupes en Asie du Sud.

Cette demande s’inscrit dans le contexte du partenariat entre la France et l’Inde en matière de lutte contre le terrorisme, qui a débuté après les attentats de Bombay en 2008. La coopération technique et opérationnelle a été renforcée, en particulier en termes d’enquêtes anti-terroristes avec la National Investigation Agency (NIA) indienne et en termes d’échange d’expertise entre les unités d’intervention (Groupe d’intervention de la gendarmerie nationale, GIGN, et National Security Guard, NSG, indien). À la suite de la visite d’État de mars 2018, la coopération a été approfondie autour de deux axes : la prévention et la lutte contre la radicalisation, et la lutte contre le financement du terrorisme. L’Inde a participé à la conférence organisée par la France sur le sujet en avril 2018 (« No money for terror »). Elle est membre de la Coalition de Paris créée à cette occasion. Elle pourrait être le troisième pays à accueillir une conférence internationale sur la thématique, après l’Australie en novembre 2019.

En outre, si l’Inde est traditionnellement moins impliquée dans la lutte contre les précurseurs chimiques et le trafic de médicaments (véritables ou frauduleux) car elle craint de porter atteinte à son industrie pharmaceutique florissante, le pays est toutefois de plus en plus conscient des enjeux liés à leurs détournements. Le présent accord, dont il est demandé d’autoriser l’approbation, devrait permettre de renforcer la sensibilisation et l’action de l’Inde.

La France souhaite notamment que cet accord soit un élément du renforcement de la coopération franco-indienne dans la lutte contre la fraude médicamenteuse. Deux séminaires franco-indien ont été organisés sur cette question, en 2015 et 2018, et un séminaire régional, en 2019. Un dialogue annuel interservices est instauré. Dans ce cadre, une délégation de l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique français (OCLAESP) s’est rendue à New Delhi en janvier 2020 pour conduire une mission d’étude sur la fraude médicamenteuse. Enfin, en 2018, la direction générale des douanes et droits indirects (DGDDI) a créé un poste d’attaché douanier pour l’Asie du Sud-Est à Bangkok. Celui-ci a depuis engagé un début de coopération entre les douanes françaises et indiennes dans la lutte contre le trafic de faux médicaments.

 


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II.   Contenu et conséquences attendues de l’accord

A.   contenu de l’accord

1.   Une inscription dans les engagements nationaux et internationaux de la France et de l’Inde

 

Le préambule du présent accord, dont il est demandé d’autoriser l’approbation, rappelle les principales conventions internationales qui lient déjà l’Inde et la France en matière de lutte contre les stupéfiants :

– la convention unique sur les stupéfiants du 30 mars 1961, telle que modifiée par le protocole du 25 mars 1972 portant amendement de la convention unique sur les stupéfiants de 1961 ;

– la convention sur les substances psychotropes du 21 février 1971 ;

– la convention des Nations unies contre le trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes du 20 décembre 1988 ;

– la convention des Nations unies contre la criminalité transnationale du 15 novembre 2000.

Ces conventions dressent, notamment, la liste des produits classés comme stupéfiants. Elles servent donc de référence à l’article 1er du présent accord qui définit les notions fondamentales utilisées dans la suite de ses stipulations.

Ces conventions assurent également la pénalisation du trafic et promeuvent la coopération internationale. Mais le présent accord va plus loin, puisqu’il promeut une coopération bilatérale plus étroite que celle a minima prévue dans les conventions multilatérales.

2.   Des modalités de coopération techniques et opérationnelles élargies

L’article 2 précise que l’accord devra respecter le droit interne des États parties et, pour la France, le droit de l’Union européenne.

Il précise également quels sont ses principaux objectifs et quel est le champ des domaines de coopération visés : la conduite d’actions pour prévenir et lutter contre le trafic de drogues (qui incluent les stupéfiants et certaines substances psychotropes) et de précurseurs chimiques ; le contrôle et la surveillance de la production de précurseurs chimiques ; la prévention de la consommation de drogues au moyen de campagnes d’éducation et de sensibilisation de la population ; la mise en œuvre de politiques publiques sanitaires et sociales pour les personnes affectées par les drogues.

L’article 3 définit les principales modalités de la coopération permises par l’accord.

La coopération est tout d’abord technique : transmissions d’études et de recherches analytiques et prospectives, échanges juridiques, formations (accueil de stagiaires, séminaires) et échanges d’expertise entre agents spécialisés de chaque Partie, etc.

L’article 4 présente les modalités de cette coopération technique et l’inscrit dans une programmation annuelle.

La coopération est également opérationnelle avec des échanges d’informations, y compris des données à caractère personnel, et la mise à disposition d’équipements et de ressources humaines pour les opérations. Ce volet comprend l’élaboration de plans, programmes et projets en matière de prévention du trafic, de prévention de la consommation et de soutien médical et de réinsertion pour les personnes affectées par les drogues. Les modalités pratiques de cette coopération sont précisées à l’article 5.

3.   Des garanties sur la protection des données

L’article 6 du présent accord fixe les exigences à respecter en matière de confidentialité des informations et des documents. Les informations ne peuvent notamment pas être transmises à un tiers sans autorisation expresse de l’autorité compétente les ayant transmises.

L’article 7, paragraphe 1, précise le cadre juridique applicable en matière de protection des données à caractère personnel. Il est défini dans le strict respect de la législation nationale. Les exigences du droit interne restent donc pleinement applicables à toute opération de traitement ou de transfert réalisée sur le fondement du présent accord.

L’article 7, paragraphe 2n comporte également des dispositions détaillées constituant des « garanties appropriées » au sens du droit de l’Union européenne et du droit français :

– article 37 de la directive dite « police justice » (UE) 2016/680/JAI du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relative à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel par les autorités compétentes à des fins de prévention et de détection des infractions pénales, d’enquêtes et de poursuites en la matière ou d’exécution de sanctions pénales, et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la décision-cadre 2008/977/JAI du Conseil ;

– article 112 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

Les deux articles 6 et 7 du présent accord assurent ainsi la conciliation des besoins opérationnels (avec un certain des informations minimales indispensables aux actions de lutte contre le trafic des drogues et des précurseurs chimiques) et du respect des libertés publiques.

Pour la France, l’échange des données s’inscrit dans le cadre des textes suivants :

– la loi du 6 janvier 1978 précitée, telle que modifiée par la loi n° 2018-493 du 20 juin 2018 relative à la protection des données personnelles et l’ordonnance n°2018-1125 du 12 décembre 2018 ;

– la directive précitée du 27 avril 2016 (notamment ses articles 35 à 37) ;

– la convention (STE n°108) du Conseil de l’Europe pour la protection des personnes à l’égard du traitement automatisé des données à caractère personnel, adoptée à Strasbourg le 28 janvier 1981 et son protocole additionnel du 8 novembre 2001.

Alors que l’Inde se caractérisait jusqu’ici par une législation peu protectrice des données personnelles, elle change aujourd’hui radicalement de position. Le projet de loi sur la protection des données personnelles (Personal Data Protection Bill), déposé devant la Chambre basse du Parlement indien le 11 décembre 2019 et qui devrait être adopté d’ici la fin de l’année 2020, est beaucoup plus protecteur que le droit existant, sans préjuger toutefois des éventuels amendements qui pourraient être apportés à ce projet.

Ce changement de position de la part des autorités indiennes s’explique par deux facteurs :

– l’arrêt Puttaswamy de la Cour suprême indienne prononcé le 24 août 2017 : la Cour suprême a confirmé que le droit au respect de la vie privée fait partie intégrante du droit à la vie et à la liberté individuelle au sens de l’article 21 de la Constitution indienne et des droits fondamentaux garantis par la troisième partie de la Constitution ;

– le souhait des autorités indiennes d’obtenir de la part de la Commission européenne une reconnaissance de niveau de protection équivalent, par une décision d’adéquation au sens de l’article 45 du Règlement général sur la protection des données (RGPD) et de l’article 36 de la directive (UE) 2016/680. Cette reconnaissance est nécessaire pour les échanges avec l’Europe. De plus, un grand nombre d’entreprises indiennes ont dû respecter les standards du RGPD et en ont fait bénéficier les entreprises et personnes privées indiennes.

4.   Un suivi et une évaluation de l’accord

Les articles 8 et 9 du présent accord assurent les modalités de suivi et d’évaluation de l’accord. Un groupe de travail de haut niveau sera en particulier créé pour contrôler et évaluer les activités réalisées dans le cadre de l’accord. Si la composition exacte du groupe n’est pas précisée, celui devra être constitué des représentants de l’ensemble des autorités compétentes. Du côté français, il sera donc composé a minima des autorités compétentes du ministère de l’intérieur et du ministère de l’Europe et des affaires étrangères.

5.   Des dispositions finales classiques

L’article 10 du présent accord définit les différentes voies de règlement des différends relatifs à son interprétation ou à son application : à l’amiable, par la consultation ou la négociation entre les Parties et par la voie diplomatique.

De facture classique, l’article 11 fixe les modalités d’entrée en vigueur, d’amendement et de dénonciation de l’accord, conclu pour une durée de trois ans et renouvelable par tacite reconduction pour de nouvelles périodes de trois ans. Il précise les effets de la dénonciation de l’accord et encadre le processus de résiliation du contrat.

B.   effets attendus de l’accord

1.   Une augmentation de la coopération technique et opérationnelle

Jusqu’ici, la coopération technique et opérationnelle restait relativement limitée à la lutte contre les stupéfiants et contre les précurseurs chimiques.

Sur les vingt-cinq actions de coopération technique programmées en 2019, la plupart concernaient encore la lutte antiterroriste.

De même, pour la coopération opérationnelle, on dénombrait vingt-six messages envoyés par l’Office anti-stupéfiants (OFAST) français à l’Inde en 2019, en plus des échanges opérationnels ponctuels du service de la sécurité intérieure (SSI) de l’ambassade de France à New Delhi, composé d’un commissaire de police et d’un officier de gendarmerie. Le SSI peut en effet transmettre des informations au NCB indien, le plus souvent à la suite d’interpellations réalisées lors du démantèlement de réseaux de trafic de drogues. Ces échanges s’ajoutent également aux canaux que représentent les bureaux centraux de l’Organisation internationale de la police criminelle (OIPC – Interpol).

2.   Un impact financier limité

Pour les services français impliqués dans la coopération, les charges financières sont limitées. La coopération technique s’inscrira dans une programmation annuelle qui permettra d’étudier l’opportunité et l’efficience de chaque projet.

La coopération opérationnelle est effectuée dans le cadre de structures existantes.

3.   Une occasion de promouvoir les actions de prévention et de traitement auprès du partenaire indien

Dès le préambule, une approche duale combinant, d’une part, la prévention et le traitement et, d’autre part, la répression, est privilégiée. Cette approche est ensuite déclinée dans les articles 2 et 3 qui prévoient des actions de coopération pour prévenir le trafic et la consommation de drogues ainsi que la mise en place de politiques sanitaires dédiées aux personnes affectées par cette consommation.

Concrètement, cette coopération passera essentiellement par des échanges d’expériences et de bonnes pratiques, par exemple pour promouvoir la campagne Listen First, lancée par l’ONUDC avec le soutien de la France.

Elle permettra de sensibiliser à cette question l’Inde, qui avait jusqu’alors choisi une ligne essentiellement répressive.

4.   Un exemple pour d’autres accords de coopération policière

Dans les années 2000, la France n’a conclu de convention bilatérale portant spécifiquement sur la coopération en matière de trafic illicite de stupéfiants qu’avec l’Espagne. Elle privilégie en effet les accords bilatéraux couvrant la coopération policière dans sa globalité.

Un accord sectoriel de coopération policière présente toutefois l’avantage de poser un premier jalon pour une coopération policière plus poussée et permet de décrire les besoins techniques et opérationnels spécifiques. Ainsi le présent accord passé avec l’Inde offre l’opportunité de préciser le domaine de la coopération de manière très détaillée, ainsi que ses modalités pratiques. Il permet même d’inclure une approche duale, en incluant la prévention et le traitement des personnes affectées par les drogues.

La négociation d’accords similaires est envisagée avec d’autres pays (Cuba et le Venezuela), mais aucune de ces négociations ne s’est, à ce stade, concrétisée.

 


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   CONCLUSIOn

Le présent accord signé entre la France et l’Inde le 10 mars 2018 à New Delhi est le premier engagement bilatéral franco-indien en matière de coopération policière. Il renforcera la coopération technique et opérationnelle dans la lutte contre la consommation et le trafic illicites de stupéfiants, de substances psychotropes et contre le trafic illicite de précurseurs chimiques. Au-delà, il participe au nouvel élan donné à la coopération bilatérale entre nos pays et s’inscrit plus spécifiquement dans le cadre de la lutte contre la criminalité transnationale et la lutte contre le terrorisme, dans une région du monde particulièrement touchée par ces deux fléaux.

Cet accord innovant, qui se différencie par une approche globale de la coopération (technique et opérationnelle avec des modalités très détaillées) ainsi que par la volonté d’associer la répression à la prévention et au traitement des usagers, pourrait servir de modèle dans d’autres pays, notamment les grands pays producteurs de stupéfiants et de précurseurs chimiques.

Cet accord permettra par ailleurs de répondre à la volonté exprimée par la France et par l’Inde de renforcer leur coopération stratégique concernant les drogues de synthèse et les nouveaux produits de synthèse (NPS). Cet objectif relève de la mesure 38 du Plan national de lutte contre les stupéfiants, présenté par le gouvernement français le 17 septembre 2019.

L’accord a été approuvé le 21 mai 2018 par la partie indienne. Ce texte n’a pas nécessité d’autorisation parlementaire en Inde. Ainsi, son approbation par la France entraînera son entrée en vigueur immédiate.

 


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EXAMEN EN COMMISSION

La commission examine le présent projet de loi au cours de sa séance du mercredi 4 mars 2020.

Mme la présidente Marielle de Sarnez. Nous allons maintenant examiner le projet de loi autorisant la ratification de l’accord conclu le 10 mars 2018 entre la France d’une part, et l’Inde d’autre part, dont la rapporteure est Valérie Thomas que je remercie pour l’excellent travail accompli.

Cet accord est important, il ajoute une pierre de plus à l’édifice de notre coopération franco-indienne. On dénombre aujourd’hui pas moins de 135 accords bilatéraux en vigueur dans des domaines extrêmement variés : cela va de la défense à l’énergie en passant par la coopération spatiale. Le partenariat stratégique conclu en 1998 entre nos deux pays et la visite d’État effectuée par le président de la République en mars 2018 ont créé une dynamique de coopération que nous devons bien évidemment intensifier.

Je voudrais néanmoins souligner ici deux motifs d’inquiétude sur la situation. Tout d’abord, la loi sur la nationalité indienne, qui a été voté en décembre 2019 et qui discrimine les musulmans, exacerbe les tensions, et nous sommes inquiets devant les événements récents qui se sont déroulés à New Dehli et qui font renaître le risque d’affrontements communautaires terribles. Ces événements ont provoqué la mort de 47 citoyens indiens. Et puis, il y a une interrogation sur la situation au Cachemire qui est évidemment une situation préoccupante. Je rappelle qu’au cours de l’été 2019, le Premier ministre indien avait révoqué le statut d’autonomie de la région Jammu et Cachemire majoritairement musulmane et que, depuis, cette région est occupée militairement. Nous devrons rester extrêmement vigilants sur ces questions dans les semaines et les mois à venir.

Mme Valérie Thomas, rapporteure. J’ai donc reçu pour mission de vous présenter l’accord conclu le 10 mars 2018 entre la France, d’une part, et l’Inde, d’autre part, dont il vous est demandé d’autoriser la ratification. Négocié depuis 2013, cet accord a été signé à New Delhi en 2018 par notre ministre de l’Europe et des affaires étrangères, M. Jean-Yves Le Drian, et le ministre de l’intérieur indien, M. Rajnath Singh.

Cet accord traite d’une thématique que l’on étudie assez peu dans notre commission : la prévention de la consommation illicite et la réduction du trafic illicite de stupéfiants et de substances psychotropes, c’est-à-dire les substances qui agissent sur le système nerveux central en modifiant les processus biochimiques et physiologiques cérébraux. Cet accord inclut donc le trafic de certains médicaments, comme la morphine ou les antidépresseurs.

Cet accord traite également d’un enjeu majeur dans la lutte contre le trafic de stupéfiants, mais encore souvent méconnu : le trafic illicite de précurseurs chimiques. Les précurseurs chimiques sont les composés chimiques, psychoactifs ou non, qui sont indispensables à la préparation et à la fabrication des stupéfiants. Ils sont le plus souvent détournés du commerce légal, ce qui rend la lutte contre leur trafic particulièrement complexe.

Je voudrais vous donner ce matin quelques chiffres, très éloquents, sur la consommation de drogues. Selon le Rapport mondial sur les drogues publié par l’Organisation des Nations unies (ONU) en 2019, 271 millions de personnes âgées de quinze à soixante-quatre ans avaient consommé des drogues en 2016, soit 30 % de plus qu’en 2009. L’Inde bien évidemment est touchée par cette forte croissance de la consommation de drogues. Selon le gouvernement indien, 23 millions de personnes ont par exemple consommé des opiacés en 2017, l’héroïne étant la substance la plus courante, suivie par les opioïdes détournés de leur usage médical.

Cet accord élargit les modalités de coopération technique et opérationnelle entre nos pays pour lutter contre la consommation et le trafic de ces différentes substances : stupéfiants, psychotropes et précurseurs chimiques.

La coopération technique, détaillée aux articles 3 et 4, comprend notamment la transmission d’études, les échanges juridiques ou d’expertises entre agents spécialisés de chaque partie, ou encore l’organisation de formations.

La coopération opérationnelle, détaillée aux articles 3 et 5, inclut des échanges d’informations, y compris de données à caractère personnel, et la mise à disposition d’équipements et de ressources humaines pour les opérations.

Soyons toutefois honnêtes, l’Inde n’est pas le partenaire le plus stratégique pour la France en matière de lutte contre le trafic de drogues et de précurseurs chimiques. J’ai étudié les chiffres : à ce jour, il n’y a pas de « route » directe de trafic entre nos deux pays. Néanmoins, l’Inde reste un pays de transit pour le trafic de drogues de la région. Elle est située à proximité du « triangle d’or » et du « croissant d’or ».

En outre, en raison d’une très puissante industrie pharmaceutique, l’Inde connaît de nombreux détournements de médicaments, notamment de tramadol et de morphine – ainsi que de précurseurs de drogues, comme l’éphédrine et la pseudoéphédrine, même si ceux-ci sont aujourd’hui difficiles à évaluer. Ces détournements partent ensuite vers la Birmanie, l’Afrique, voire le Moyen-Orient pour le tramadol. Comme vous le savez, le trafic de tramadol aurait contribué au financement du terrorisme.

Cet accord doit donc être rapproché des initiatives bilatérales récentes entre nos deux pays pour lutter contre la fraude médicamenteuse. Je citerai les séminaires franco-indiens organisés par l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique français (OCLAESP) ou encore la création d’un poste d’attaché douanier pour l’Asie du Sud-Est par la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI).

Le présent accord permettra d’améliorer la sensibilisation et l’action de l’Inde en matière de lutte contre les précurseurs chimiques et la fraude médicamenteuse. Surtout, cet accord est un outil au service du renforcement des relations bilatérales entre nos deux pays. L’Inde est aujourd’hui un partenaire indispensable pour la France. C’est un géant démographique – 1,35 milliard d’habitants – et économique – la cinquième ou la sixième puissance économique mondiale selon les classements. C’est aussi la plus grande démocratie du monde et un pays avec lequel nous partageons des combats communs, notamment la lutte contre le terrorisme.

C’est d’ailleurs le partenaire indien qui a sollicité la France en 2013 pour cet accord, dans le cadre du groupe de travail franco-indien sur le contre-terrorisme. New Delhi établit en effet un lien direct entre la lutte contre le trafic de stupéfiants et la lutte contre le terrorisme, en particulier sous l’angle de la lutte contre le financement des groupes terroristes. Le trafic de drogues est, en effet, une des principales sources de revenu des groupes terroristes présents en zone Afghanistan-Pakistan, ainsi que pour les relais de ces groupes en Asie du Sud.

Toutefois, ce n’est pas parce que nous cherchons à renforcer notre sécurité commune, que nous devons mettre de côté les libertés des citoyens. J’ai donc été très vigilante sur les dispositions qui concernent la protection des données à caractère personnel.

Les personnels des ministères de l’intérieur et de l’Europe et des affaires étrangères que j’ai été interrogés sur ce sujet m’ont garanti que la France avait été intransigeante lors de la rédaction de cet accord. C’est d’ailleurs l’une des raisons qui expliquent la longueur des négociations avec l’Inde.

Ainsi, l’article 7, consacré à la protection des données personnelles, prévoit que les transferts de ces données s’effectuent dans le strict respect de la législation nationale de chaque Partie. Par ailleurs, cet article comporte des dispositions détaillées constituant des « garanties appropriées » au sens du droit de l’Union européenne et du droit français.

Il convient par ailleurs de souligner la volonté des autorités indiennes d’assurer une meilleure protection des données à leur population. Dans le rapport, j’évoque le projet de loi sur la protection des données personnelles, beaucoup plus protecteur que le droit existant, déposé devant la Chambre basse du Parlement indien en décembre, sans préjuger toutefois des éventuels amendements qui pourraient être apportés.

Outre la protection des données, la France a aussi su défendre son approche « duale » de la lutte contre la consommation et le trafic de stupéfiants. Cette approche, déclinée aux articles 2 et 3, combine d’une part, la répression, mais aussi d’autre part, la prévention et le traitement des personnes affectées par les drogues. Le Rapport mondial sur les drogues de l’ONU publié en 2019 le rappelle : la prévention et le traitement continuent de faire défaut dans de très nombreux pays. L’Inde, en fait partie. Les autorités indiennes choisissent jusqu’ici une approche avant tout répressive.

Pour terminer, je soulignerais le caractère innovant de cette convention. Il s’agit d’une convention policière sectorielle. Elle cible la lutte contre la consommation de stupéfiants, de substances psychotropes et de précurseurs chimiques, et détaille avec une grande précision les modalités de coopération. Elle permet donc d’aller beaucoup plus loin sur ces sujets qu’un accord de coopération policière global. Ce type d’accord bilatéral spécialisé pourrait être reproduit avec les grands pays producteurs de drogues ou de précurseurs chimiques.

Ainsi, mes chers collègues, je vous invite à voter sans réserve en faveur de la ratification de cet accord.

Mme Anne Genetet. Avant de revenir sur le fond de cet accord, je voudrais vous remercier madame la présidente pour avoir fait une remarque sur la situation que rencontre l’Inde aujourd’hui. Je voudrais, à titre personnel, condamner très fermement la politique actuellement menée par Narendra Modi qui est anti-musulmane – il faut appeler un chat un chat – et qui, suite à la loi sur la nationalité publiée le 11 décembre dernier, fait qu’un certain nombre de citoyens musulmans vont se retrouver sans citoyenneté et donc apatrides, faute de pouvoir prouver leurs ascendances indiennes. C’est vraiment très grave et ceci donne lieu actuellement à des émeutes, notamment à New Delhi mais également dans le nord-est de l’Inde, avec des personnes décédées dans des conditions hautement critiquables. Je voudrais rappeler que je condamne cette situation.

Pour en venir à cet accord, qui est très complet, vous avez également rappelé son originalité et les différentes façons de le décliner. Je voudrais aussi rappeler que cela permettrait sans doute de traduire en actes très concrets la mesure 38 prévue par le plan français de lutte contre les stupéfiants, publié en 2019. La mesure 38 de ce plan prévoit d’envisager un renforcement de la coopération stratégique et opérationnelle avec la Chine et l’Inde dans le domaine des drogues de synthèse. Ce plan, que nous avons présenté en septembre 2019, est un ensemble de 55 mesures pour répondre à six objectifs, et le sixième objectif était justement le développement de cette coopération internationale. Ce plan prévoit des mesures très concrètes et notamment la création du nouvel office anti-stupéfiant, l’OFAST.

Je lis dans votre rapport, à la page 10, qu’il y a trois actions qui ont été entreprises pour la coopération France-Inde. Tout d’abord, en matière de la lutte contre la fraude médicamenteuse, des séminaires bilatéraux en 2015 et 2018 et régional en 2019. La deuxième action est le dialogue annuel avec une délégation de l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (OCLAESP). Enfin, la troisième action est la création d’un poste d’attaché douanier à Bangkok en Asie du Sud-Est pour contribuer à la lutte contre les trafics.

Deux questions me viennent à l’esprit : pourquoi l’OFAST n’est-il pas cité comme interlocuteur dans la coopération France-Inde, dans cet accord ? D’autre part, l’attaché douanier à Bangkok, c’est bien, mais l’Inde ce n’est pas l’Asie du Sud-Est. Bangkok et Dehli, ce n’est pas juste à côté. Compte tenu de la taille de l’Inde et de sa position centrale, en particulier sa proximité vis-à-vis de l’Afghanistan et du Pakistan, ne pourrions-nous pas envisager la création d’un poste d’attaché douanier à Delhi ?

Mme Bérengère Poletti. L’histoire indienne est en partie liée à celle de la drogue. Des drogues sont utilisées lors de certains rites hindous. Le dernier rapport de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime pointe du doigt une augmentation inquiétante du nombre de personnes souffrant de troubles liés à l’usage de la drogue en Inde qui aurait progressé, Madame la rapporteure vous en avez parlé, de 15 % par rapport à 2016.

Cette progression est en partie liée à la vente libre de médicaments dans ce pays. En effet, il est possible pour quiconque de se procurer tout type de médicament sans aucune ordonnance. Elle peut aussi s’expliquer par la pauvreté et les désillusions provoquées par l’exode rural, mais aussi par les liens entre le trafic de drogue et la politique. En effet, lors des élections locales et même provinciales, il n’est pas rare de voir de la fraude préélectorale avec l’achat de votes par le traditionnel octroi d’alcool ou d’argent liquide par les candidats aux électeurs. Mais, depuis peu et en particulier dans l’État du Penjab, l’achat de voix s’effectue aussi contre des doses de drogue. Le discours public de fermeté n’empêche pas les candidats de démarcher des électeurs potentiels en leur offrant de la drogue. Dès lors, au vu des liens étroits entre la politique indienne et les substances illicites, ne risquons-nous pas de nous retrouver face à un décalage entre la réalité du terrain indien et le discours officiel promu dans cet accord ?

M. Frédéric Petit. Merci madame la rapporteure pour votre rapport. Le document que nous étudions aujourd’hui est un « contrat » qui a été signé en 2018 par l’Inde et la France. Il marque surtout une avancée dans nos relations stratégiques et de sécurité. Nos pays vont un peu plus loin dans ce domaine, ce qui est une bonne chose. La question des drogues est certes sérieuse mais, vous l’avez rappelé vous-même madame la rapporteure, l’Inde a une situation particulière du fait de ses voisins du « triangle d’or » et du « croissant d’or » et du fait de son industrie pharmaceutique. Mais c’est surtout un pays de transit, avec une superficie immense. Les problèmes qui doivent être gérés sont donc davantage d’ordre logistique, organisationnel et liés à la surveillance et à la coopération que de l’ordre de la lutte contre les narcotrafiquants.

Ce qui me semble important c’est que cet accord, avec une collaboration un peu atone et assez modeste dans son contenu, marque la première pierre d’accords plus fréquents avec un pays qui fait preuve d’un fédéralisme assez particulier. Cet accord va donc demander une collaboration énorme et très structurée. Ma question s’intéresse plutôt au regard que vous avez sur cet accord comme première pierre ainsi qu’aux étapes suivantes qui pourraient en découler. D’autres coopérations sont-elles prévues pour entériner un accord qui est, pour l’instant symbolique, mais qui comprend des éléments qui sont du domaine des premières étapes ? Quelles sont les prochaines étapes de notre collaboration judiciaire et policière avec l’Inde ?

M. Alain David. C’est un accord important qui concerne la lutte contre les drogues et contre le terrorisme. Ce qui est aussi très inquiétant en Inde et dans le secteur, c’est l’affirmation hindoue, qui fait qu’aujourd’hui les minorités, en particulier la minorité musulmane, sont inquiétées, sont chassées. On le constate aussi dans un certain nombre de pays limitrophes, en particulier le Bangladesh et la Birmanie, avec notamment les difficultés que rencontre le peuple Rohingya. C’est très inquiétant. Je pense que toutes les collaborations que l’on pourra mettre en place avec l’Inde ne devront pas oublier les droits de l’homme ainsi qu’un certain nombre de valeurs que nous devons défendre et porter dans toutes les négociations que nous menons avec ces pays.

M. Jean-Michel Clément : Merci madame la rapporteure pour ce rapport. Pour notre groupe, cet accord intergouvernemental est important parce qu’il va permettre de participer à l’effort de santé publique et de contribuer au maintien de l’ordre et de la sécurité publique. Il renforcera en particulier la lutte contre les faux médicaments, qui est une urgence pour la santé publique mondiale. On voit aujourd’hui toute l’importance d’un dispositif de cette nature. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime qu’un médicament sur dix est falsifié dans le monde. Concernant les médicaments vendus sur Internet, un médicament sur deux serait un faux médicament. C’est une réalité, le trafic de faux médicaments se mondialise à une vitesse préoccupante. Il est très lucratif et il rapporterait vingt fois plus que le trafic d’héroïne.

J’avais été précédemment rapporteur d’un texte de loi sur la contrefaçon. Nous avions pu constater à l’époque qu’en matière de contrefaçon, les sujets étaient beaucoup plus larges qu’on ne le pensait. Il ne s’agissait pas uniquement de problèmes de montres ou de vêtements : la contrefaçon touchait des sujets beaucoup plus sensibles, notamment les médicaments. De plus, cette contrefaçon va plus vite que les mesures que nous prenons pour la contrer. Les entreprises elles-mêmes se dotent de services adaptés à la lutte contre la contrefaçon. Nos services de douane sont insuffisants, ou du moins insuffisamment préparés à la rapidité à laquelle les choses évoluent. Je pense que cet accord doit permettre aussi, à tous ceux qui sont concernés par ce sujet, d’accélérer le processus de vérification pour anticiper au maximum.

Il y a aussi un autre élément important : ces trafics sont mondiaux. Les groupes terroristes et mafieux se déplacent. C’est un marché. Lorsqu’on a infiltré une filière, on s’aperçoit très rapidement qu’une autre vient aussitôt prendre sa place. C’est lorsque l’on pense avoir fait le travail dans un pays donné que, très vite, ailleurs, les choses peuvent reprendre. C’est bien d’avoir un accord avec l’Inde, mais je pense qu’avec les pays voisins nous aurions besoin d’avoir les mêmes préoccupations, et cela fait partie de mes questions. Sommes-nous en capacité d’avoir, avec les pays voisins de la région, des accords de cette nature qui pourraient nous permettre d’avoir une lutte efficace ? On sait très bien qu’au-delà de l’Inde, le problème se déplacera dans les pays voisins. Je crois que cela fait partie des sujets qui nous préoccupent.

Le dernier sujet est la question de la protection des données personnelles. L’Union européenne et la France ont une législation particulièrement protectrice. Je pense notamment au Règlement général sur la protection des données (RGPD). Or, cet accord avec l’Inde prévoit une coopération, y compris en matière de données à caractère personnel. Si l’Inde a un projet de loi à ce sujet, examiné par la Chambre basse du Parlement indien depuis le 11 décembre dernier, nous ne savons pas quel sera le texte finalement adopté. Ma question est la suivante : pouvez-vous nous rassurer quant à la protection totale et efficace des données à caractère personnel qui seraient échangées entre nos deux pays ?

Mme Brigitte Liso. Merci madame la rapporteure pour ce travail tout à fait éclairant. Au-delà de la relation bilatérale entre la France et l’Inde, votre rapport souligne l’importance primordiale de maintenir, voire d’intensifier, la coopération entre nos deux pays. Compte tenu de sa position géographique, l’Inde constitue un espace stratégique pour la lutte contre les stupéfiants et contre le terrorisme et son financement. Cette coopération entre nos deux pays se réfère donc à des enjeux, mais également à notre attachement commun pour le respect inconditionnel des droits de l’homme. Permettez-moi alors de vous poser deux questions. D’abord, quel rôle occupe réellement l’Inde sur la scène internationale vis-à-vis de la réduction du trafic illicite de stupéfiants et de la lutte contre le terrorisme ? Deuxièmement, pensez-vous que l’organe international de lutte contre les stupéfiants joue pleinement son rôle contraignant ?

Mme Isabelle Rauch. En préambule, je voudrais déjà m’associer aux propos d’Anne Genetet concernant la condamnation de la politique antimusulmane menée par le Premier ministre Narendra Modi que je condamne moi aussi.

La rapporteure a très bien rappelé l’importance de la protection des données dans son rapport. Madame la rapporteure, vous nous avez dit que c’était particulièrement long. Pourquoi ce délai ? Pourriez-vous également nous en dire un peu plus sur ce sujet que je trouve extrêmement important ?

Mme Annie Chapelier. Merci madame la rapporteure pour ce rapport sur un sujet dont on ne parle pas suffisamment, et qui était en effet très éclairant. Une question sur le « dark net ». Selon le dernier rapport publié par les Nations unies sur la drogue et le crime, la tendance mondiale à l’achat de drogue sur internet, en particulier sur les plateformes du « dark net » utilisant des crypto-monnaies, est déjà très répandue en Asie du Sud-Est, et tout particulièrement en Inde. Vous avez parlé du marché des faux médicaments et de celui de la drogue. Ces deux commerces se font de plus en plus sur le net. Il y a un véritable marché numérique de la drogue. Est-ce que vous auriez des précisions sur ce qui existe actuellement pour améliorer, entre la France et l’Inde, le contrôle bilatéral de ces plateformes de vente sur le web, et quelle forme prend la lutte contre ces plateformes en ligne qui sont en train de récupérer la part du lion ? 

Mme Valérie Thomas, rapporteure. Avant de répondre à ces questions, je veux également vous faire part de mon inquiétude, face à la montée d’un certain populisme, voire d’un nationalisme en Inde. Près de deux millions de musulmans risquent de devenir apatrides et c’est extrêmement inquiétant. Pour répondre à Anne Genetet sur l’OFAST et sur la non-présence de l’OFAST dans l’accord : l’OFAST n’existait pas à l’époque où l’accord a été négocié. Il n’est donc pas cité mais il jouera, bien évidemment, tout son rôle. C’est le service de sécurité intérieure de l’ambassade qui travaillait avec l’Inde sur la lutte contre les stupéfiants.

Concernant un éventuel attaché douanier à New Dehli, pourquoi pas. C’est une idée. Néanmoins, je vous rappelle que, dans l’accord, la coopération est à la fois policière et douanière. Il faudrait donc peut-être voir quels seront les effets de cet accord et, si la coopération est extrêmement serrée et qu’elle se passe au mieux, alors peut-être que l’on pourrait se doter d’un poste de douanier en Inde. C’est quelque chose que l’on pourrait suggérer au Quai d’Orsay.

Madame Poletti, effectivement, la vente libre de médicaments en Inde est un souci mais l’accord ne répond pas à ce problème-là car c’est un problème interne. Ce n’est donc pas le propre d’un accord international, mais c’est effectivement lié. Ce que l’on peut dire, c’est que la très longue négociation de cet accord a permis à l’Inde de prendre conscience de cet enjeu. On peut espérer que l’accord soit aussi un déclencheur pour des modifications internes, en tout cas pour créer une vision différente, une approche différente, de ce qu’est le médicament.

Quand on discute avec l’Inde, le sujet du médicament est extrêmement sensible. L’Inde est le premier producteur de médicaments génériques. Les Indiens ont conscience qu’un certain nombre de faux médicaments traversent le pays pour être ensuite expédiés en Afrique et, dans une moindre mesure, en Europe, mais surtout en Afrique. C’est un enjeu sensible car ils n’ont pas envie de déstabiliser leur industrie pharmaceutique. C’est aussi une des raisons qui fait que l’accord a mis du temps à être négocié. Chaque mot a été pesé, chaque approche a été mesurée.

Cette accord a aussi la vertu de pousser les Indiens à modifier leur politique intérieure, à s’intéresser davantage aux médicaments. Par ailleurs, je l’ai cité dans mon propos, il y a eu deux séminaires de travail avec l’Inde sur ce sujet-là. Les choses avancent petit à petit, il ne s’agit pas d’être brusque, l’accord est une partie de la réponse au problème du médicament.

Madame Poletti, je tenais à insister sur le fait que le sujet du médicament est pour nous un sujet essentiel, puisque nous sommes en rupture de stock sur certains produits, et que cela favorise les trafics illicites. En effet, quand on ne trouve pas les médicaments par la voie normale, ce genre de commerce émerge.

Mme la présidente Marielle de Sarnez. Ce constat doit amener la France et l’Union européenne à étudier comment améliorer encore notre autonomie sur cette grande question du médicament. Être à 95 % dépendant de l’extérieur, dans ce domaine-là comme dans d’autres, doit à mon sens amener de nouvelles réflexions.

Mme Valérie Thomas, rapporteure. Je partage complètement ce constat, et on a peut-être des questions à se poser sur la relocalisation d’une partie de notre production. Mais la question étant d’actualité, les choses vont peut-être changer dans les années à venir, ce qui est plutôt positif.

Monsieur Petit, vous avez compris que c’était un accord assez difficile à négocier. Il faut y voir un signe extrêmement encourageant dans cette coopération. La France avait des messages à faire passer. Le message de la prévention en fait partie. Ce message est bien passé auprès de l’Inde. La lutte contre les stupéfiants passe aussi par la prise en charge des utilisateurs et par la prévention. L’Inde prend conscience de l’ampleur de la consommation au sein de sa population. Le pays fait face aux mêmes problèmes que nous. La perception des autorités indiennes, vis-à-vis des stupéfiants, est en train d’évoluer.

Vous parliez de l’évaluation de l’accord, elle est prévue. Une équipe d’évaluation est mise en place. Au fil des évaluations, on pourra affiner la coopération, notamment sur la prise en compte des médicaments.

Monsieur David, bien évidemment, les valeurs de la France dans cet accord – mais également dans tous ceux qui ont été signés, je vous rappelle qu’il y a 135 accords en vigueur avec l’Inde – doivent être respectées. C’est bien pour cette raison que je me suis attachée à observer ce qui était écrit sur la protection des données personnelles.

Je me suis également intéressée aux sanctions relatives au trafic de drogue, en particulier en ce qui concerne la peine de mort. Une peine de mort a été prononcée il y a quelques années, pour trafic de drogue mais également pour crime. Il faut rester extrêmement vigilants pour faire respecter nos valeurs dans tous les accords que nous serons amené à signer.

Monsieur Clément, j’ai abordé la lutte contre les faux médicaments. Cet accord est un vrai premier pas. Je pense qu’à l’usage, on pourra aborder les questions qui fâchent. Je pense également qu’avec les risques de relocalisation de la production de médicament, l’Inde pourra se montrer plus stricte sur la production de médicaments falsifiés. Je vois cet accord comme un premier pas.

Je soulignais tout à l’heure l’idée d’accords voisins. Ce serait intéressant que les pays limitrophes se dotent de ce type d’accord de coopération policière, qui est très technique et opérationnel.

Je réponds en même temps à Annie Chapelier. Nous avons, au sein de notre police nationale, des spécialistes du « dark net ». Dans la coopération avec l’Inde et en particulier la coopération technique, qui inclut la formation, nos spécialistes pourront apporter leur expertise auprès des policiers indiens. Je pourrais demander au Quai d’Orsay si des accords avec les pays voisins sont envisagés. Je pense qu’il est important que ce type d’accord très ciblé puisse se développer.

Sur le sujet des données personnelles, je vais également répondre à Isabelle Rauch. Les négociations ont été longues comme je l’évoquais. La France voulait absolument que l’ensemble des précautions soient prises dans les échanges de données. Si le texte indien n’arrive pas à échéance ou n’est pas discuté, il est convenu que la législation française s’appliquera. La France était extrêmement attentive à cet aspect-là.

En outre, pour répondre plus précisément à Isabelle Rauch, si l’Inde a déposé ce projet de loi, évidemment, ce n’est pas seulement lié aux précautions apportées par cet accord avec la France. C’est en raison du climat des affaires. L’Inde s’est rendu compte que si elle voulait continuer à avoir des échanges avec l’Europe, elle devait se doter d’une législation respectant les données personnelles. J’y vois le symbole de la force de l’Union européenne et de la promotion de ses valeurs. C’est bien pour continuer à commercer avec les pays européens que l’Inde se dotera de cette législation. Je suis donc assez optimiste sur l’issue de la loi indienne.

Madame Liso, concernant la place de l’Inde à l’international, l’Inde a signé l’ensemble des traités internationaux sur la lutte contre les stupéfiants. L’organisation des États fédérés est plus complexe que celle des États centralisés. Mais il y a une vraie volonté du gouvernement indien de jouer tout son rôle dans la lutte contre les stupéfiants. Vous vouliez savoir si l'Organe international de contrôle des stupéfiants (OICS) jouait vraiment son rôle. S’il me paraît difficile de vous répondre, il me semble que les avis de l’OICS sont suivis. L’OICS est composée d’experts indépendants, dont les avis sont, en général, respectés. Le rôle de l’OICS est quasi juridique, il établit également la liste des stupéfiants chaque année. C’est à double tranchant, car on sait bien que quand un stupéfiant entre dans la liste, les trafiquants ont tendance à en créer un nouveau. Je crois que c’est un organe qui joue son rôle.

M. Buon Tan. J’aimerais demander une précision sur ce qui a été fait au niveau des accords avec les autorités indiennes pour contrôler et réprimer les trafics de médicaments. Par ailleurs, compte tenu du poids économique de l’industrie pharmaceutique en Inde, que vous avez d’ailleurs souligné dans le rapport, avez-vous senti une vraie volonté indienne pour avancer sur le sujet ? Ou s’agit-il d’une réponse politique ?  

Mme Valérie Thomas, rapporteure. Je le rappelle, l’accord ne porte sur la fraude médicamenteuse en générale. Il s’agit d’un premier pas qui permettra d’initier une coopération approfondie sur le sujet. C’est une question extrêmement sensible qu’il faut aborder avec prudence. Je pense qu’il y a une volonté de l’Inde, renforcée par les menaces de relocalisation de la production de médicaments et les enjeux de crédibilité pour son industrie pharmaceutique.

Mme la présidente Marielle de Sarnez. Si l’Inde veut préserver, à terme, la force de son industrie pharmaceutique, et en particulier pour les génériques, son intérêt est de lutter contre les faux médicaments.

La commission adopte l’article unique ainsi que l’ensemble du projet de loi sans modification.

 

 


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   annexes

   ANNEXE 1 : TEXTE ADOPTÉ PAR LA COMMISSION des affaires étrangères

 

Article unique

(Non modifié)

Est autorisée l’approbation de l’accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République de l’Inde relatif à la prévention de la consommation illicite et à la réduction du trafic illicite de stupéfiants, de substances psychotropes et de précurseurs chimiques, et des délits connexes, signé à New Delhi le 10 mars 2018, et dont le texte est annexé à la présente loi.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

                                                             

NB : Le texte de la convention figure en annexe au projet de loi (n° 2433)

 


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   Annexe n° 2 : liste des personnes auditionnées par la rapporteure

   Mme Lucile Carrez, rédactrice à la mission des accords et traités

   M. Laurent Legodec, adjoint au sous-directeur à la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée

 

   Commandant Aymeric Pigot, chef du bureau des accords internationaux

   Mme Clélia Rossi, adjointe au chef de bureau des accords internationaux