N° 3011

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 27 mai 2020

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE LÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE LOI, APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, de règlement du budget et dapprobation des comptes de lannée 2019,

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 3

 

ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET TERRITORIALE DE LÉTAT

 

 

 

Rapporteur spécial : M. Jacques Savatier

 

Député

____

 


—  1  —

SOMMAIRE

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Pages

SYNTHÈSE ET RECOMMANDATIONS

INTRODUCTION

PREMIÈRE PARTIE : UN NOUVEL EXERCICE DE CONTINUITÉ  ET DE STABILITÉ, À L’EXÉCUTION GLOBALEMENT MAÎTRISÉE

A. Éléments généraux : des dépenses stables, une exécution maîtrisée mais marquée par une tension spécifique

1. Une hausse des crédits ouverts et une quasi-stabilité des dépenses

2. Une exécution conforme malgré une tension sur les dépenses de personnel du programme 307

3. Une légère hausse des dépenses de personnel qui confirme la tendance malgré une volonté de réduction des effectifs concentrée sur le programme 307

B. Programme 307 Administration territoriale : une exécution complexifiée par un schéma d’emploi baissier

1. Des dépenses en légère baisse

2. Une nouvelle baisse des effectifs qui a suscité des tensions d’exécution

3. Un dispositif de performance pertinent mais incomplet, des résultats en progrès

C. Programme 232 Vie politique, cultuelle et associative : des dépenses en légère augmentation dans une année marquée par deux scrutins

1. Une légère augmentation de la consommation des crédits

2. Des dépenses de personnel légèrement en hausse en raison dun plafond demplois presque totalement utilisé

3. Un coût électoral qui sera probablement en hausse en raison du retour à la circonscription unique pour les élections européennes

4. La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques devrait voir ses pouvoirs d’investigation renforcés

D. Programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur : des dépenses et des effectifs maîtrisés et en légère hausse

1. Une augmentation modérée des dépenses et un nouveau renforcement des effectifs

2. Une consolidation des progrès favorisant une meilleure maîtrise des dépenses contentieuses

3. La sécurité privée : un enjeu de régulation auquel ne peut répondre que partiellement le Conseil national des activités privées de sécurité

a. Le secteur de la sécurité privé souffre de faiblesses structurelles

b. Le CNAPS ne dispose que d’une partie des outils pour répondre aux enjeux de la sécurité privée

c. La réglementation de certaines prestations et la commande publique pourraient venir soutenir la professionnalisation et la structuration du secteur

SECONDE PARTIE : L’IMPACT DE LA CRISE SANITAIRE EN MATIÈRE DE DÉPLOIEMENT DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DE MOBILISATION DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES

A. Des politiques publiques perturbées mais des missions prioritaires assurées

1. Certaines politiques publiques du programme 232 sont les plus affectées de la mission et connaissent des perturbations autour du report du second tour des élections municipales

a. L’organisation des élections municipales a été perturbée par la crise sanitaire.

b. L’activité de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et son chantier de dématérialisation seront affectés

2. L’administration territoriale de l’État a su s’adapter pour assurer l’exercice des missions prioritaires dans la crise mais aurait besoin à l’avenir de s’engager dans une démarche interministérielle et multicanal plus résolue

a. L’activité s’est vite et bien réadaptée pour assurer la continuité des missions prioritaires et faire face à la crise tout en protégeant les agents

b. Un ralentissement ou arrêt des missions non-prioritaires qui aurait pu être atténué par une meilleure capacité de télétravail

c. La place clef du numérique au sein de la gestion de crise vient poser l’enjeu de la mise au profit des technologies digitales par le ministère de l’Intérieur

d. Cette phase met en lumière le besoin de renforcement de l’inter-ministérialité de l’administration, de l’unité de l’État dans les territoires et la nécessité d’aller plus loin dans la déconcentration

e. Une période de déconfinement qui invite à trouver un nouvel équilibre entre poursuite des activités de crise et reprise des autres missions

3. La crise a rendu plus saillants encore les enjeux posés par la sécurité privée

a. Le CNAPS a fonctionné en mode dégradé durant la crise, un effort important de déstockage l’attend afin d’assurer un retour à la normale de l’activité du secteur privé

b. La crise a souligné certaines failles de la sécurité privée et va à moyen terme renforcer son importance

B. LA CRISE NE DEVRAIT PAS BOULEVERSER L’EXÉCUTION BUDGÉTAIRE

1. La nature des dépenses de la mission rend l’exécution peu sujette à de fortes perturbations

2. Certaines dépenses sont cependant susceptibles de voir leur exécution significativement affectée

3. Des effets généraux sont à prévoir mais auront certainement des effets budgétaires réduits

EXAMEN EN COMMISSION

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

ANNEXES (DONT SOURCES UTILISÉES)

 


—  1  —

   SYNTHÈSE ET RECOMMANDATIONS

– Principaux constats sur l’exécution 2019 :

Globalement, l’année 2019 a été une année de transition maîtrisée avant les modifications majeures de 2020, exécutée conformément aux autorisations parlementaires.

Comme en 2018, le schéma d’emploi baissier supporté par le programme 307 Administration territoriale a été créateur de tensions. L’application du plan « Préfectures nouvelle génération » dans sa dimension réduction et réaffectation des effectifs apparaît difficilement soutenable. Le niveau d’effectif dans les préfectures semble avoir atteint un point en dessous duquel la réalisation des missions pourrait être affectée.

La baisse des effectifs de la mission ne se traduit pas par une baisse de la masse salariale équivalente.

– Principaux constats sur les conséquences de la crise sanitaire ;

Face à la crise sanitaire, l’administration territoriale a su se réorganiser vite et de manière efficace.

La capacité de mise en télétravail des agents du ministère de l’Intérieur s’est révélée insuffisante.

Le rapporteur spécial recommande :

– de stopper la réduction des effectifs de l’administration territoriale dès cette année

– d’engager une réflexion sur l’homogénéisation des statuts des agents de la fonction publique d’État au niveau départemental, afin de permettre le développement de l’interministérialité de l’administration territoriale, au service d’une plus grande efficacité et de carrières plus riches pour les agents ;

– d’engager une réflexion sur l’approfondissement de la déconcentration de l’État dans le ressort départemental, afin de donner aux préfets les moyens d’appliquer les politiques nationales de manière plus adaptée à leur territoire ;

– de repenser la politique d’économie sur les dépenses de personnel, en déplaçant la focale du nombre d’agents vers un suivi de la masse salariale

 

 

– que le ministère de l’intérieur mette à niveau ses capacités dans le domaine du télétravail, en particulier au sein de l’administration territoriale, par un effort capacitaire mais aussi de formation des agents et en particulier des agents en situation de management ;

– de reconnaître à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) le droit de solliciter directement les établissements de crédits et les financeurs afin d’obtenir des informations, et celui d’accéder aux informations contenues dans les fichiers des comptes bancaires et les fichiers des contrats de capitalisation et assurance-vie tenus par l’administration fiscale ;

–  de normer certaines prestations clefs du secteur de la sécurité privée, de réformer les modalités d’encadrement des formations des agents de sécurité et d’assouplir le fonctionnement territorialisé du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) afin de soutenir la structuration du secteur et d’en rendre la régulation plus résiliente ;

– de fournir à la Commission du contentieux du stationnement payant (CCSP) les moyens nécessaires pour éviter l’engorgement prévisible de ses capacités de traitement.

 

 

 

 

 

 

*

*     *

 

 

 

 

 

 


—  1  —

INTRODUCTION

La mission Administration générale et territoriale de lÉtat (AGTE) constitue le support budgétaire de l’ensemble des moyens humains, matériels et financiers dont dispose le ministère de l’intérieur afin d’assumer trois de ses responsabilités fondamentales :

– garantir l’exercice des droits des citoyens dans le domaine des libertés publiques ;

– assurer la présence et la continuité de l’État sur l’ensemble du territoire national ;

– mettre en œuvre à l’échelon local les politiques publiques nationales.

Elle comprend trois programmes :

– Le programme 354 : Administration territoriale de l’État, issu de la fusion des programmes 307  Administration territoriale, qui recouvrait l’ensemble des moyens (crédits et emplois) des préfectures, des sous-préfectures et des représentations de l’État dans les collectivités d’outre-mer ([1]) et 333 qui regroupait les crédits de fonctionnement des directions départementales interministérielles (DDI), des directions et délégations régionales placées sous l'autorité des préfets de région, des secrétariats généraux pour les affaires régionales (SGAR). Il intégrait également les emplois déconcentrés gérés par les services du Premier ministre ([2]).

– le programme 232 : Vie politique, cultuelle et associative ;

– le programme 216 : Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur.

Deux opérateurs lui sont rattachés : l’agence nationale des titres sécurisés (ANTS) au programme 354 et le conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) au programme 216.

En vue de l’examen du projet de loi de règlement 2019, et en raison de la crise sanitaire liée au covid-19 qui frappe le pays, le rapporteur spécial a consacré les travaux menés dans le cadre du Printemps de l’évaluation 2020 à une estimation de l’impact de la crise sanitaire sur le déploiement des politiques publiques et la mobilisation des crédits budgétaires dans le périmètre de la mission Administration générale et territoriale de l’État.

 


—  1  —

   PREMIÈRE PARTIE : UN NOUVEL EXERCICE DE CONTINUITÉ
ET DE STABILITÉ, À L’EXÉCUTION GLOBALEMENT MAÎTRISÉE

Avant un exercice 2020 marqué par de profondes évolutions de périmètre, en particulier la création du programme 354, et un calendrier électoral fourni, l’année 2019 aura été une année de transition. Elle s’inscrit dans la continuité de l’année 2018 avec une exécution une nouvelle fois globalement conforme à la programmation.

A.   Éléments généraux : des dépenses stables, une exécution maîtrisée mais marquée par une tension spécifique

Les dépenses sont restées presque stables d’une année sur l’autre. L’exécution a été conforme à la programmation avec des taux de consommation satisfaisants et une absence de décret d’avance. L’exécution du schéma d’emplois de réduction des effectifs du programme 307 constitue toutefois une tension marquante pour l’exercice.

1.   Une hausse des crédits ouverts et une quasi-stabilité des dépenses

Pour l’ensemble de la mission, l’exercice 2019 présente une hausse de 2,6 % des crédits de paiement inscrits par rapport à la LFI 2018. Ce mouvement s’explique principalement par la hausse des crédits du programme 232, en raison du calendrier électoral de l’année (élection des représentants français au Parlement européen et élections provinciales en Nouvelle-Calédonie). L’exercice 2019 confirme que ce sont des échéances électorales que dépendent les évolutions majeures quant au volume de crédits de la mission AGTE, à périmètre constant.

Cependant, les dépenses réalisées restent quasi stables (+ 0,14 %). Pour l’ensemble de la mission, les crédits consommés en 2019 s’élèvent à 2 825,66 millions d’euros en crédits de paiement. Les autorisations d’engagement consommées sont de 2 771,50 millions d’euros, et affichent, elles aussi, une stabilité (+ 0,55 %).

Le taux de consommation des crédits de la mission atteint 98 % pour les crédits de paiement et 97 % pour les autorisations d’engagement.


ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION
ADMINISTRATION GÉNÉRALE ET TERRITORIALE DE LÉtat de 2014 À 2019

(en millions d’euros)

 

 

LFI 2014

LFI 2015

LFI 2016

LFI 2017

LFI 2018

LFI 2019

Variation 2019/2018

Taux d’engagement 2019

 

 

(exécution)

(exécution)

(exécution)

(exécution)

(exécution)

(exécution)

307 
Administration territoriale

AE

1 800,09

1 778,68

1 705,67

1 759,59

1 749,57,

1 747,31

– 0,13 %

97 %

1 755,13

1 754,04

1 664,55

1 725,43

1 726,91

1 701,14

– 1,49 %

CP

1 798,43

1 777,89

1 696,42

1 744,02

1 745,24

1 731,98

– 0,76 %

98 %

1 746,48

1 752,29

1 669,54

1 705,28

1 718,78

1 699,33

– 1,13 %

232 
Vie politique, cultuelle et associative

AE

312,96

438,39

99,37

474,06

122,50

205,86

68,05 %

91 %

279,95

308,74

185,87

381,05

171,40

188,29

9,85 %

CP

312,97

439,15

99,29

470,07

125,82

204,39

62,45 %

92 %

278,53

267,76

232,81

370,84

175,51

187,34

6,74 %

216 
Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur

AE

888,98

733,43

794,55

928,63

885,69

909,91

2,73 %

97 %

927,96

749,74

828,35

923,64

858,12

882,07

2,79 %

CP

787,72

751,34

814,55

954,14

946,17

953,39

0,76 %

98 %

 

770,94

768,63

797,21

943,50

927,33

938,99

1,26 %

Total

AE

3 002,03

2 950,50

2 599,59

3 162,28

2 757,76

2 863,08

3,82 %

96,8 %

2 963,04

2 812,52

2 678,77

3 030,12

2 756,43

2 771,50

0,55 %

CP

2 899,12

2 968,38

2 610,26

3 168,23

2 817,23

2 889,76

2,57 %

98 %

2 795,95

2 788,68

2 699,56

3 019,62

2 821,62

2 825,66

0,14 %

Source : rapports annuels de performances.

2.   Une exécution conforme malgré une tension sur les dépenses de personnel du programme 307

L’exécution des crédits est globalement conforme à la programmation, pour la deuxième année de suite. L’exécution des dépenses ne présente pas de tension particulière, en l’absence de décret d’avance et avec une loi de finances rectificative suffisamment anticipée pour permettre le bon déroulement de la fin d’exercice. Toutefois, la tension sur l’exécution du schéma d’emploi du programme 307 a fondé le recours à la réserve de précaution pour répondre aux besoins de personnel des préfectures (cf. infra). Cette mobilisation a été compensée par l’annulation de la réserve ministérielle du programme 216.

Par ailleurs, la mission est également affectée par sa contribution à la solidarité interministérielle, en particulier au profit des missions Sécurités et Asile, immigration, intégration.

3.   Une légère hausse des dépenses de personnel qui confirme la tendance malgré une volonté de réduction des effectifs concentrée sur le programme 307

Les dépenses de personnel s’élèvent à un peu plus de 1,99 milliard d’euros. Elles progressent de 1,2 %, principalement du fait de la hausse des crédits consommés par le programme 216 (+ 3,8 %). Les dépenses de personnel sont tendanciellement en hausse malgré des schémas d’emplois ambitieux, spécialement sur le programme 307.

La consommation du programme 307 Administration territoriale présente une légère baisse (– 1 %) en ce qui concerne les dépenses de personnel.

Sur le plan des emplois, l’exercice 2019 se solde par une baisse des effectifs de la mission : ceux-ci représentent 32 187 équivalents temps plein travaillé (ETPT) contre 32 566 ETPT en 2018. Après un exercice 2018 haussier, 2019 renoue avec le mouvement de baisse entamé depuis 2015.

La baisse des effectifs est essentiellement le fait du programme 307 Administration territoriale (– 774 ETPT), tandis que la croissance des effectifs du programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur se poursuit (+ 394). L’Agence nationale des titres sécurisés (ANTS) sature son plafond d’emploi tandis que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) et le Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS) parviennent presque à saturer le leur.

Évolution des effectifs de la mission administration gÉnÉrale
et territoriale de l’ÉTAT (par programme) entre 2012 et 2019

(en équivalents temps plein travaillés)

 

LFI 2014

(exécution)

LFI 2015

(exécution)

LFI 2016

(exécution)

LFI 2017

(exécution)

LFI 2018

(exécution)

LFI 2019

(exécution)

Évolution

2019/2018

Évolution

2019/2018

307 Administration territoriale

27 554

27 247

26 187

26 346

25 829

25 417

– 412

– 2 137

27 499

26 562

25 797

25 985

25 659

24 885

– 774

– 2 614

232 Vie politique, cultuelle et associative

43

47

44

51

51

51

0

8

43

47

44

51

48

49

1

6

216 Conduit et pilotage des politiques de l’intérieure

5 768

6 585

7 320

7 330

7 486

7 442

– 44

1 674

5 399

6 243

6 437

6 702

6 859

7 253

394

1 854

TOTAL

33 365

33 879

33 551

33 727

33 366

32 910

 456

 455

32 941

32 852

32 278

32 738

32 566

32 187

 379

 754

Source : rapports annuels de performances 2014 à 2019.

B.   Programme 307 Administration territoriale : une exécution complexifiée par un schéma d’emploi baissier

Le programme 307 Administration territoriale porte les moyens destinés à permettre aux préfectures d’accomplir leurs missions dans le domaine de la sécurité nationale, de la délivrance des titres, du contrôle de légalité, de la coordination des actions ministérielles et des actions de modernisation et de qualité. Il était le programme le plus important de la mission AGTE par le montant de ses ressources financières et le niveau de ses effectifs.

1.   Des dépenses en légère baisse

Les crédits de paiements inscrits (1,7 milliard deuros) et consommés (1,6 milliard deuros) enregistrent une baisse modérée (de respectivement
– 0,76 % et – 1,13 %).

2.   Une nouvelle baisse des effectifs qui a suscité des tensions d’exécution

L’administration territoriale poursuit la réduction de ses effectifs
( 412 ETPT en prévision,  774 en exécution). Le programme connaît le plus faible nombre d’agents depuis sept exercices, avec 24 885 ETPT en exécution.

Dans le cadre du plan « Préfectures nouvelle génération » (PPNG), les missions prioritaires identifiées avaient fait l’objet d’un soclage des effectifs. Une cible d’agents par mission devait être atteinte par le recrutement de nouveaux agents et surtout par la réaffectation d’agents ayant des missions d’accueil en préfecture pour la délivrance de titres, concernées par des baisses d’effectifs. Cependant, la conjonction de la baisse globale des effectifs et de la montée en puissance de certaines missions, en particulier au sein des services des étrangers, n’a pas permis d’atteindre ces cibles.

Par ailleurs, le rapporteur voudrait insister sur le problème que pose une réflexion centrée sur le schéma d’emploi et le nombre d’ETPT pour juger de la capacité du programme à mener à bien l’objectif d’économies budgétaires posé par le PPNG. En effet, le recours aux contractuels pour accomplir les missions malgré la baisse du nombre de fonctionnaires vient amoindrir cette économie budgétaire.

Dans sa note d’analyse de l’exécution budgétaire pour 2019, la Cour des comptes met d’ailleurs en lumière que l’évolution des crédits consacrés au titre 2 apparaît sur longue période déconnectée de l’évolution des emplois qui n’ont cessé de diminuer depuis 2010. En 2019, si les effectifs ont baissé de – 3 %, la baisse des crédits consommés n’a été quant à elle que de – 1,1 %.

Le rapporteur spécial recommande donc de repenser la politique d’économie sur les dépenses de personnel, en déplaçant la focale du nombre d’agents vers un suivi de la masse salariale effective.

Par ailleurs, cette baisse des effectifs est créatrice de tensions en gestion budgétaire et dans la recherche de la performance. Comme le relève la Cour des comptes dans sa note d’analyse de l’exécution budgétaire pour 2019 : « la dégradation de l’activité dans plusieurs services, au cours de l’année 2019, a conduit le RPROG à solliciter un dégel de la réserve de précaution afin de mettre en place un plan d’urgence pour renforcer les services les plus en tension et ainsi faire face à la dégradation des indicateurs d’activité. ».

Ce sont en particulier les services des étrangers et les centres d’expertise et de ressources titres (CERT) qui nécessitaient ces renforts en personnel afin de remplir leurs missions.

Cette difficulté relative au schéma d’emploi avait déjà affecté l’exercice 2018.

EFFECTIFS DU PROGRAMME 307 (PAR ACTION) DEPUIS 2015

(en équivalent temps plein)

Action

LFI 2015

LFI 2016

LFI 2017

LFI 2018

LFI 2019

Variation 2019/2018

exécution

exécution

exécution

exécution

exécution

01 Coordination de la sécurité des personnes et des biens

2 917

2 870

2 962

2 949

2 944

– 5

3 398

3 084

3 058

3 988

3 437

– 551

02 Réglementations générales garantie de l’identité et de la nationalité, et délivrance des titres

11 861

11 556

11 988

11 588

11 188

– 400

11 905

12 085

12 054

9 712

10 466

754

03 Contrôle de légalité et conseil aux collectivités territoriales

2 583

2 501

2 619

2 619

2 614

– 5

2 805

2 763

2 841

3 002

2 687

– 315

04 Pilotage territorial des politiques gouvernementales

8 923

8 406

8 618

8 588

8 571

– 17

7 576

7 791

7 941

8 859

8 295

– 564

05 Animation e soutien du réseau

859

854

85

85

– 

– 

878

74

91

98

– 

– 

TOTAL

27 143

26 187

26 272

25 829

25 317

– 512

26 562

25 797

25 985

25 659

24 885

– 774

Source : rapports annuels de performances.

3.   Un dispositif de performance pertinent mais incomplet, des résultats en progrès

Les indicateurs présents dans les projets annuels de performance (PAP) et les rapports annuels de performance (RAP) retranscrivent bien les objectifs politiques du programme et offrent une variété qui permet au responsable de programme de les mobiliser comme outils de gestion.

Certains indicateurs absents des PAP et RAP relatifs aux délais de délivrance de titres sécurisés pourraient être intégrés dans le corpus des indicateurs. Ils sont actuellement déjà renseignés et utilisés par l’administration.

Si les cibles ne sont pas atteintes dans leur majorité, les résultats en sont proches, et en progression en ce qui concerne les indicateurs relatifs aux titres sécurisés.

C.   Programme 232 Vie politique, cultuelle et associative : des dépenses en légère augmentation dans une année marquée par deux scrutins

Le programme 232 retrace les moyens matériels et humains dont dispose le ministère de l’intérieur afin de garantir aux citoyens le respect de leurs droits à prendre part à la vie électorale (actions 1 à 3), à la vie associative (action 5) et dans l’exercice de la liberté religieuse (action 4).

1.   Une légère augmentation de la consommation des crédits

Comme observé précédemment, les dépenses réalisées au titre de l’organisation des élections (objet de l’action 2) commandent l’évolution globale de la consommation du programme 232.

L’action 2 voit le montant de ses crédits de paiement consommés passer d’un peu plus de 100,66 millions d’euros en 2018 à près de 114,27 millions d’euros en 2019. Ces chiffres représentent une hausse de 13,5 %.

L’année 2019 a vu la tenue de deux scrutins généraux : l’élection des représentants au Parlement européen le 26 mai et les élections provinciales de Nouvelle-Calédonie le 12 mai.

Dans ce contexte, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (objet de l’action 3) enregistre quant à elle une baisse de la consommation de crédits de paiement de 11,8 %. Le montant des dépenses réalisées s’élève à un peu plus de 5,9 millions d’euros.

Cette baisse s’explique par une année 2018 pauvre en scrutins, n’impliquant pas pour la Commission une charge élevée de comptes de campagne à traiter en 2019.

L’exécution de l’action 1 Financement des partis se caractérise par une grande stabilité. Le montant des crédits consommés est de 66,2 millions d’euros au terme de l’exercice, contre 66,1 millions d’euros en 2018.

2.   Des dépenses de personnel légèrement en hausse en raison d’un plafond d’emplois presque totalement utilisé

Les crédits consommés sur le titre 2 par le programme 232 correspondent aux dépenses de personnel de la CNCCFP. Les personnels relevant des autres actions du programme sont rattachés au programme 307 ou au programme 216.

Représentant 49,44 ETPT au terme de l’exercice, les effectifs de la commission apparaissent en légère hausse par rapport à 2018 (48 ETPT) et en deçà de l’autorisation parlementaire (51 ETPT), autorisation identique à celle de 2018. La CNCCFP atteint son plus haut niveau d’emploi depuis 2014. Au 31 décembre 2019, la Commission comptait 59 ETP.

3.   Un coût électoral qui sera probablement en hausse en raison du retour à la circonscription unique pour les élections européennes

L’évaluation de la performance du programme repose sur la mesure du coût de l’élection. L’indicateur retenu est le coût moyen de l’élection par électeur inscrit sur les listes électorales.

En 2019, les élections européennes sont concernées par cet indicateur. Toutefois, il faut en général compter deux ans après que le scrutin a eu lieu pour connaître son coût consolidé. On peut cependant déjà prévoir que les élections européennes de 2019 ont eu un coût plus élevé que celles de 2014, en raison du rétablissement de la circonscription unique au niveau national. En effet, ce rétablissement a entraîné le doublement de la taille du bulletin de vote. Cet agrandissement a suscité des coûts plus importants en matière de remboursement et d’acheminement des plis.

La comparaison avec les précédentes élections européennes sur le plan de la performance sera rendue malaisée par cette évolution.

4.   La Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques devrait voir ses pouvoirs d’investigation renforcés

Le 20 décembre 2019, la Cour des comptes a fait part au Premier ministre des recommandations de modifications législatives résultant de son examen des comptes et de la gestion de la CNCCFP pour les exercices 2012 à 2018.

Le 17 mars 2020, le Premier ministre a transmis sa réponse aux recommandations de la Cour des comptes. Le rapporteur spécial appuie les propositions formulées par le Premier ministre.

La CNCCFP devrait voir ses pouvoirs d’investigation renforcés via une extension de ses pouvoirs actuels à l’égard des tiers.

Il pourrait lui être reconnu la possibilité de solliciter directement les établissements de crédits et les financeurs des partis et des candidats, à l’instar des pouvoirs qu’elle détient déjà, tels la possibilité de recourir à des experts et de requérir un officier de police judiciaire pour procéder à des investigations.

L’on pourrait aussi permettre à la Commission d’accéder aux informations contenues dans les fichiers des comptes bancaires et les fichiers des contrats de capitalisation et assurance-vie tenus par l’administration fiscale, comme peut le faire la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP).

Cela permettrait à la CNCCFP de mieux exercer son office dans un cadre juridique stable et garant du respect de la sincérité des scrutins.

D.   Programme 216 Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur : des dépenses et des effectifs maîtrisés et en légère hausse

Le programme 216 constitue le support budgétaire des crédits et des ressources humaines dévolus aux fonctions de pilotage du ministère de l’intérieur ou dédiés à la gestion de différentes prestations mutualisées et à ses affaires juridiques et contentieuses. Il intègre depuis l’exercice 2016 les effectifs des services déconcentrés effectuant des missions de sécurité et d’éducation routières, et depuis 2017, les crédits du Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD).

1.   Une augmentation modérée des dépenses et un nouveau renforcement des effectifs

Les crédits de paiement inscrits augmentent de 0,76 %, à hauteur de 953,39 millions d’euros. Les dépenses réalisées croissent un peu plus fortement
(+1,26 %, à 938,99 millions d’euros) et s’approchent du pic de 2017 (943,50 millions d’euros).

Cette hausse s’explique en partie par l’augmentation des crédits relevant du titre 2 (+ 8 %) en raison de la prise en charge des personnels de la Direction de la modernisation et l’administration territoriale (DMAT) situés en administration centrale, en provenance du programme 307.

Cependant, comme déjà pointé dans le rapport spécial établi lors de la loi de règlement de 2018, le support par le programme 216 du fonctionnement de la commission du contentieux du stationnement payant (CCSP) présente un risque en passe de se concrétiser. En effet, l’engorgement de cette structure se profile, et fait peser un risque sur les crédits et emplois du programme 216.

Le rapporteur spécial renouvelle donc sa préconisation et recommande de fournir à la Commission du contentieux du stationnement payant (CCSP) les moyens nécessaires pour éviter l’engorgement prévisible de ses capacités de traitement.

Il invite également à examiner d’éventuelles réformes proposées par la CCSP susceptibles d’alléger la charge du contentieux du stationnement payant.

Le renforcement des effectifs de la mission bénéficie presque totalement au programme 216.

Au terme de l’exécution, les personnels relevant du programme Conduite et pilotage des politiques de l’intérieur représentent 7 253 ETPT. Il apparaît en nette hausse (+ 394 ETPT), faisant suite à une hausse tout aussi forte en 2018 (+ 427 ETPT). La consommation des emplois atteint son plus haut niveau.

2.   Une consolidation des progrès favorisant une meilleure maîtrise des dépenses contentieuses

Le montant des crédits consommés sur l’action 6 Affaires juridiques et contentieuses s’élève à 87,78 millions d’euros en crédits de paiement. Cela représente un léger recul de ces dépenses (91,53 millions d’euros en 2018), après la forte baisse de 34,31 % entre 2017 et 2018. 2019 confirme donc la meilleure maîtrise des dépenses de contentieux du ministère, grâce à la mise en œuvre du plan de maîtrise de la dépense contentieuse conçu par la direction des libertés publiques et des affaires juridiques (DLPAJ).

Les dépenses dépassent une nouvelle fois les prévisions de la loi de finances, malgré le rebasage à 80 millions d’euros obtenu en 2018 et reconduit en 2019. Si ce rebasage sincérise ces crédits et permet un meilleur pilotage de l’exécution de la dépense, il peut sembler en dessous des besoins réels de crédits.

3.   La sécurité privée : un enjeu de régulation auquel ne peut répondre que partiellement le Conseil national des activités privées de sécurité

Le Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS), institué sous la forme d’un établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de l’intérieur, est chargé de la régulation de l’ensemble des activités privées de sécurité dont l’exercice est régi par le livre VI du code de la sécurité intérieure (surveillance et gardiennage, transport de fonds, protection de l’intégrité physique des personnes, sûreté aéroportuaire, recherches privées, protection des navires). Le CNAPS est un opérateur relevant du programme 216.

Le CNAPS délivre, suspend ou retire les différents agréments, autorisations et cartes professionnelles permettant l’exercice d’une activité privée de sécurité.

Le CNAPS assure la discipline de la profession et veille au respect du code de déontologie qui s'applique à l'ensemble des activités de sécurité privée. À ce titre, à l’issue d’une procédure contradictoire conduite par ses agents, il peut prononcer des sanctions disciplinaires susceptibles de recours.

Le secteur des activités privées de sécurité connaît une importance croissante. On compte 165 000 agents privés de sécurité, à comparer aux 250 000 personnels composant les forces de sécurité de l’État. Les attentats qu’a connus la France à partir de 2015 ont renforcé les exigences de sécurité privée, ce qui se traduit par un accroissement de la demande de prestations de sécurité privée. Cependant, s’il s’agit d’activités privées, leur lien à la sécurité impose qu’elles fassent l’objet d’une régulation, opérée par le CNAPS.

a.   Le secteur de la sécurité privé souffre de faiblesses structurelles

Le secteur connaît principalement des enjeux de structuration économique. Comme le pointait le rapport Thourot-Fauvergue (septembre 2018), le secteur est éclaté, avec une qualité de prestations très hétérogène selon les acteurs et une capacité d’offre inégale selon les territoires. Cela peut s’expliquer en partie par les prix proposés par les donneurs d’ordre.

Actuellement, les prix auxquels consentent les donneurs d’ordre sont faibles, car beaucoup d’entre eux perçoivent la sécurité comme une obligation à laquelle satisfaire au plus bas coût possible. Peu d’entre eux voient la sécurité comme une composante de la qualité de leur service rendu au client.

Pour les entreprises de sécurité privée, les marges sont donc faibles, surtout si l’on garde à l’esprit que les prestations sont souvent effectuées par des entreprises en sous-traitance de rang deux ou trois. À cela s’ajoute le fait que les exigences techniques s’accroissent, élevant d’autant les coûts des entreprises, qui peinent à les répercuter dans leurs prix.

Cette donne culturelle et cette faiblesse des prix font partie des causes du sous-dimensionnement des capacités d’offre du secteur. En effet, les entreprises du secteur versent des salaires souvent faibles à leurs employés. Or, les métiers exigent pour les salariés des agréments et des formations. Il n’est donc pas actuellement attirant pour un demandeur d’emploi d’investir dans sa formation pour toucher ensuite des rémunérations proches du SMIC. Il en résulte une pénurie de main-d’œuvre, qui se retrouve dans la sous-utilisation des agréments délivrés par le CNAPS (150 000 agréments délivrés par an). Une part importante des employés de la sécurité privée exerce cette activité comme un complément de revenus ou comme un emploi temporaire dans l’attente de mieux.

L’offre est donc insuffisante et le profil des employés de la sécurité privée s’en ressent, les entreprises de sécurité ayant à recourir à des employés étrangers en particulier européens pour lesquels le CNAPS ne peut bien souvent effectuer les mêmes contrôles que pour les nationaux en raison de la reconnaissance des diplômes qui prévaut dans le droit communautaire. Cela constitue un enjeu de sécurité et de souveraineté au vu des missions exercées par ces employés.

b.   Le CNAPS ne dispose que d’une partie des outils pour répondre aux enjeux de la sécurité privée

Dans ce contexte, la question est de savoir si le CNAPS dispose des moyens budgétaires et juridiques de répondre aux enjeux de la régulation du secteur.

Sur le plan budgétaire, aucune tension ne semble émerger et le CNAPS ne semble pas sous-doté pour mener à bien ses missions. Ni le CNAPS ni la tutelle du ministère de l’intérieur n’ont exprimé de demande de besoins supplémentaires.

Toutefois, et comme l’ont avancé à plusieurs reprises les acteurs auditionnés par le rapporteur spécial, le CNAPS ne dispose pas des outils nécessaires pour répondre à l’ensemble des enjeux posés par le secteur.

Premièrement, le CNAPS n’est pas une autorité de régulation économique, il n’a pas de missions ni de pouvoirs relatifs à la structuration économique du secteur et à la garantie d’un bon équilibre de l’offre et de la demande, bien que son action puisse in fine avoir des effets de cet ordre.

Ensuite, le CNAPS n’est pas décideur de la politique de sécurité, comme d’autres autorités de régulation qui régulent par la norme leur secteur, bien qu’il soit doté d’une commission qui s’interroge sur les éléments de fond et qu’il participe aux réflexions sur les évolutions à apporter, notamment dans le cadre du futur Livre blanc de la sécurité intérieure. À ce jour, l’État n’a pas d’outils de régulation économique ou de planification à même d’assurer l’émergence d’une sécurité privée répondant aux besoins et aux enjeux actuels.

c.   La réglementation de certaines prestations et la commande publique pourraient venir soutenir la professionnalisation et la structuration du secteur

Dans la configuration actuelle, des évolutions peuvent être envisagées afin de mieux répondre aux enjeux de la sécurité privée, dans l’objectif que les progrès soient suffisamment rapides pour que la sécurité privée soit à la hauteur de l’enjeu en 2024 pour les Jeux olympiques d’été de Paris.

Il pourrait être envisagé que certaines prestations parmi les plus structurantes (la palpation par exemple) soient normées. Sur le modèle des normes incendie, ces dernières permettraient d’assurer un niveau minimal et homogène de qualité sur les activités jugées les plus importantes. Cela aurait aussi comme avantage de permettre aux entreprises de se voir payées au juste prix et d’engager ainsi une démarche vertueuse rejaillissant sur l’offre et la qualité des agents privés de sécurité.

Ces normes viendront donner plus de poids à l’activité de contrôle du CNAPS, qui pourrait ainsi mieux contrôler le fond des activités privées de sécurité et non plus uniquement la forme. Les contrôles constituent l’un des leviers de la professionnalisation du secteur.

En outre, les acteurs publics devraient participer à l’amélioration de la sécurité via leur qualité de donneurs d’ordre.

En effet, 25 % à 30 % du chiffre d’affaires de la sécurité privée proviennent du secteur public. La commande publique représente donc une des clefs de l’évolution culturelle et des politiques d’achats nécessaires à une meilleure rémunération et structuration du secteur de la sécurité privée.

 


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   SECONDE PARTIE : L’IMPACT DE LA CRISE SANITAIRE EN MATIÈRE DE DÉPLOIEMENT DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DE MOBILISATION DES CRÉDITS BUDGÉTAIRES

Le rapporteur spécial tient tout d’abord à souligner et saluer la capacité de l’administration, en particulier territoriale, à maintenir son activité dans la crise et à fournir ainsi un apport essentiel à la lutte contre l’épidémie. Cette crise montre la qualité de l’administration française, le dévouement de ses agents et sa capacité à faire face aux situations les plus graves et les plus imprévisibles, après avoir dû affronter d’autres épisodes éprouvants pour l’administration territoriale (épisode des gilets jaunes, grève dans les transports). Le ministère de l’intérieur sait gérer les crises, en particulier au sein des préfectures, en faisant preuve d’une grande réactivité.

A.   Des politiques publiques perturbées mais des missions prioritaires assurées

Le ministre de l’intérieur et les députés au sein de leur circonscription ont constaté cette performance et ont confirmé leur attachement à l’administration territoriale, garante de la continuité et de la présence de l’État sur le territoire national.

Cependant, les travaux du rapporteur amènent à constater que si l’on souhaite que cette résilience exemplaire perdure, se renforce, et que le service rendu à l’usager s’améliore, l’administration territoriale doit tirer les conséquences de cette crise inédite.

1.   Certaines politiques publiques du programme 232 sont les plus affectées de la mission et connaissent des perturbations autour du report du second tour des élections municipales

a.   L’organisation des élections municipales a été perturbée par la crise sanitaire.

Le premier tour des élections municipales s’est tenu le 15 mars, permettant l’élection de l’intégralité du conseil municipal dans 30 143 communes. Avec la phase de déconfinement entamée le 11 mai, ces conseils municipaux prennent leurs fonctions.

Dans près de 5 000 communes, représentant 16,5 millions d’électeurs, un second tour est cependant nécessaire pour rendre possible l’élection des conseils municipaux et conseils communautaires. Toutefois, en raison de la situation sanitaire, le gouvernement a pris la décision de reporter le second tour, prévu initialement le 22 mars.

Le 22 mai, le Premier ministre a déclaré qu’après concertation avec les forces politiques du pays, le Gouvernement a décidé de présenter le 27 mai un décret au président de la République appelant les électeurs à se rendre aux urnes pour le second tour des municipales le 28 juin prochain.

Lors du même discours, le Premier ministre a cependant souligné le fait que cette décision était réversible et conditionnée à la possibilité d’organiser les scrutins dans des conditions sanitaires suffisamment sécurisantes.

b.   L’activité de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et son chantier de dématérialisation seront affectés

Les effets de la crise sanitaire sur l’activité de contrôle des comptes de campagne de la CNCCFP sont pour le moment restés limités eu égard au calendrier de contrôle qui prévoyait initialement un dépôt des comptes de campagne des élections municipales au 22 mai 2020. À la suite des annonces gouvernementales, la date limite de dépôt des comptes fixée initialement au 22 mai a été reportée à ce jour au 10 juillet pour les candidats présents au seul 1er tour et au 11 septembre pour les candidats du second tour si l’élection est maintenue au mois de juin.

Ce report du calendrier se traduit par un décalage des recrutements initialement programmés pour renforcer les services de la CNCCFP sur les aspects contrôle, logistique et anonymisation. La possibilité d’accueillir physiquement les nouveaux agents pour leurs activités pose également problème, les normes de distanciation sociales ne pouvant permettre d’accueillir tous les agents au siège de la CNCCFP pour la durée du contrôle.

Une deuxième difficulté tient à la mobilisation des rapporteurs. Ces derniers avaient été mobilisés par la CNCCFP sur le calendrier initial de contrôle et il était prévu d’organiser en mai à la fois leurs formations théorique et informatique. En effet, la CNCCFP a souhaité l’élargir par la désignation de nouveaux candidats. Ces formations ont dû être différées et la possibilité d’une tenue en présentiel avant le 10 juillet 2020 n’est pas encore garantie (limitation du nombre de personnes, rapporteurs présents dans toute la France).

Des formations à distance sont envisagées pour les nouveaux rapporteurs en particulier pour la formation théorique mais des difficultés pourraient apparaître dans la prise en main de l’application métier. Une mise à jour de la formation théorique et de l’application métier sera adressée aux rapporteurs ayant déjà effectué des contrôles de comptes de campagne

Enfin, de nouvelles questions sont apparues concernant des dépenses qui continuent à courir depuis le 15 mars (situation des candidats présents au seul premier tour et qui n’ont pas pu rendre par exemple leur local de campagne). Peuvent-elles ouvrir droit à remboursement alors que l’élection est terminée et que ces dépenses ne sont pas effectuées pour l’obtention des suffrages des électeurs ? Quid également de toutes les dépenses qui se sont poursuivies pour les candidats du second tour (la campagne n’étant pas suspendue) mais qui n’ont pu être effectuées (meeting avec toutes les conséquences comme l’annulation de la salle, tracts déjà imprimés mais non utilisés).

S’agissant des contraintes pesant sur les candidats, ces derniers pourraient rencontrer des difficultés pour justifier de leurs dépenses si des sociétés n’existent plus (absence de pièces justificatives).

L’impact du confinement est, en revanche, beaucoup plus important sur la préparation du contrôle des comptes pour les élections municipales sur plusieurs aspects :

Les modalités concrètes du contrôle sont difficiles à définir dès lors que les textes définitifs ne sont pas publiés. Par ailleurs, les contraintes sanitaires
post-confinement rendront l’activité plus difficile, en réduisant les possibilités de réunion et de déplacements.

S’agissant du contrôle du respect de leurs obligations comptables par les partis politiques, le confinement est intervenu à un moment critique dans le calendrier annuel de la dématérialisation des reçus-dons pour ces derniers. S’agissant de données sensibles ne pouvant être traitées hors d’un environnement sécurisé, un retard a été généré dans le déroulement de ces opérations. La décision pragmatique de substituer au contrôle a priori, un contrôle a posteriori a été prise.

En dernier lieu, la démarche de dématérialisation (l’acquisition d’un système d’information de gestion des comptes de campagne et de leurs contrôles), dans laquelle est engagée la CNCCFP est perturbée par la crise sanitaire. Ce projet constituait une des priorités de 2020 pour la Commission. À l’heure actuelle, la CNCCFP n’est pas en mesure d’évaluer les conséquences sur le calendrier établi, qui avait pour horizon un déploiement de la plateforme pour l’élection présidentielle de 2022.

2.   L’administration territoriale de l’État a su s’adapter pour assurer l’exercice des missions prioritaires dans la crise mais aurait besoin à l’avenir de s’engager dans une démarche interministérielle et multicanal plus résolue

La réorientation de l’activité sur les missions prioritaires et nécessaires à la lutte contre le virus, comme les activités de pilotage et de sécurité, a été promptement menée. La gestion interne a pu être parfois plus difficile, notamment en raison de manques dans le domaine du télétravail.

De manière plus structurante, la crise vient rendre plus visible le besoin d’un approfondissement de l’interministérialité dans les territoires, de la déconcentration et d’un changement de vision de l’enjeu de la digitalisation.

a.   L’activité s’est vite et bien réadaptée pour assurer la continuité des missions prioritaires et faire face à la crise tout en protégeant les agents

Au sein des effectifs de l’administration territoriale, certains agents affectés à d’autres missions que celles jugées prioritaires se sont portés volontaires pour renforcer les brigades constituées pour assurer la continuité des missions essentielles durant la crise.

Le ministère de l’intérieur s’est dès le mois de mars mis en capacité de commander les masques, les matériels de protection individuels et le gel hydroalcoolique nécessaire à la protection de ses agents.

Pour ce faire, il s’est appuyé sur le Service de l’achat, de l’innovation, de la logistique du ministère de l’intérieur (SAILMI). Ce service nouvellement créé a prouvé sa valeur en répondant efficacement aux exigences imposées par la crise. Ce moment a permis de mesurer l’importance de pouvoir compter sur les capacités de ce service pour fournir rapidement les matériels nécessaires.

b.   Un ralentissement ou arrêt des missions non-prioritaires qui aurait pu être atténué par une meilleure capacité de télétravail

Les missions non essentielles dans la crise ont été mises en retrait, voire arrêtées quand leur poursuite n’était pas appropriée. On compte parmi ces missions l’instruction des titres par les CERT, l’activité des services étrangers, le contrôle de légalité, etc. L’ensemble des missions non prioritaires a fonctionné dans un mode dégradé. La crise rendra donc logiquement plus difficile l’atteinte de certaines cibles de performance fixées pour 2020, notamment les objectifs concernant les délais de délivrance des titres.

Si ces impacts étaient attendus au vu du contexte, ils ont été accentués par un certain manque de capacité d’offre d’un télétravail efficace à des agents pourtant en demande. En effet, les syndicats auditionnés mettent avant le fait que les matériels et les procédures de télétravail n’étaient pas à un niveau suffisamment avancé pour que le meilleur mode d’activité dégradée possible ait été atteint. Cela concerne en premier lieu les manques matériels et techniques : ordinateurs portables, accès à distance aux boîtes mails et réseaux partagés, univers de travail « Noémi », logiciels sécurisés et efficaces de visioconférence ou encore signature électronique.

Cela a également trait aux pratiques professionnelles, qui intègrent le besoin renforcé d’encadrement des agents isolés de leurs collègues et de nouvelles modalités d’organisation à distance du service. Les syndicats avancent également que pour organiser le lancement du télétravail, le ministère de l’intérieur ne disposait pas dans certains départements des coordonnées de ses agents, ce qui a pu rendre moins fluide la communication des informations et l’organisation de l’activité. Par ailleurs, le recrutement de vacataires sur des durées allant d’un à six mois constitue un frein au télétravail, au vu de la difficulté de renouveler régulièrement les procédures de création d’accès sécurisés.

Si le télétravail n’a pas pu être proposé à tous les agents ne pouvant continuer d’exercer en présentiel, il a tout de même été déployé de manière massive relativement aux capacités du ministère à la veille de la crise sanitaire.

Noémi, nouveau dispositif de télétravail du ministère de l’intérieur, était expérimenté durant les mois de janvier et de février. Dès le mois de mars, il a été proposé aussi largement que possible aux agents. Il a notamment permis aux secrétariats généraux pour l’administration du ministère de l’intérieur (SGAMI) de continuer à remplir leurs missions, en particulier la paie des agents, au sein de l’administration déconcentrée.

Étant donné que le dispositif Noémi n’avait pas vocation à prendre une telle ampleur aussi tôt dans l’année, des moments de saturation des infrastructures ont eu lieu durant les premières semaines. Cependant, les capacités ont connu une montée en puissance progressive.

Autre point nodal du télétravail, le système de visioconférence a permis de tenir des conférences hautement sécurisées.

Le rapporteur spécial recommande donc que le ministère de l’intérieur mette à niveau ses capacités dans le domaine du télétravail, en particulier au sein de l’administration territoriale, par un effort capacitaire mais aussi de formation des agents et en particulier des agents en situation de management. La direction du numérique (DNUM) nouvellement créée semble tout indiquée pour porter cet effort et ainsi renforcer la capacité de résilience de l’administration en cas de crise.

Le ministère semble déjà s’être engagé dans cette voie en acquérant 11 000 postes de télétravail supplémentaires.

Le rapporteur spécial souligne que le télétravail est un levier d’amélioration de la qualité de vie des agents de l’administration centrale comme territoriale. Il pourrait permettre aux agents de passer moins de temps dans les transports et même éventuellement de gagner en pouvoir d’achat en habitant plus à l’écart des grandes métropoles, où les coûts de l’immobilier sont difficilement soutenables pour les salaires de la fonction publique.

Organiser le télétravail de manière pérenne pour ceux qui le souhaitent permettrait d’apporter un élément de réponse aux problématiques de pouvoir d’achat de certains fonctionnaires, alors que la politique territoriale de l’État tend à concentrer les emplois publics dans les grands centres urbains sans pouvoir augmenter les salaires de manière suffisante pour garantir un reste à vivre comparable à celui que les fonctionnaires auraient dans d’autres territoires. Le télétravail apparaît également comme un vecteur de maîtrise de la dépense publique en évitant une confrontation des salaires de la fonction publique avec les coûts immobiliers des grandes villes.

Dans ce cadre, le rapporteur spécial tient à mettre en lumière le fait que les emplois administratifs qui ne nécessitent pas de contacts physiques directs avec les usagers ou le territoire n’ont pas vocation à être concentrés dans les grandes villes. Au contraire, ces emplois pourraient se situer dans les villes moyennes et les zones rurales, afin de revivifier ces territoires, d’améliorer le pouvoir d’achat et la qualité de vie des fonctionnaires et en proposant un mode de vie qui correspond aux aspirations de certains agents.

Ce besoin de capacités de télétravail rejoint un enjeu plus large de communication avec les agents. Au déclenchement du confinement, certains agents n’ayant pas une implication directe au sein des missions prioritaires ont été peu informés de ce qui était attendu d’eux ou de leur situation administrative faute d’avoir reçu un arrêté de situation, selon les syndicats auditionnés. Les agents en autorisation spéciale d’absence (ASA) ont été en particulier peu contactés par leur hiérarchie.

À ce dialogue distant s’ajoutent aux yeux de certaines organisations syndicales des choix qui pourraient être de mauvais signaux envoyés aux agents dans cette période, vecteur d’une certaine absence de reconnaissance. La première inquiétude se porte sur l’attribution de la prime exceptionnelle à destination des agents prévue dans la deuxième loi de finances rectificatives. Si celle-ci doit bien se voir attribuée aux agents mobilisés dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire afin de tenir compte de leur surcroît de travail significatif durant cette période, certaines organisations syndicales craignent que les télétravailleurs en soient exclus, ce qui serait un manque de reconnaissance de leur engagement.

Par ailleurs, ces dernières relaient l’inquiétude de certains agents quant à l’application des dispositions de l’ordonnance du 15 avril 2020 relative à la prise de jours de réduction du temps de travail ou de congés dans la fonction publique de l'État et la fonction publique territoriale au titre de la période d'urgence sanitaire. Cette ordonnance impose des jours de congés et de réduction du temps de travail, 10 au maximum, pour les agents en ASA et ouvre au chef de service la possibilité d’en imposer aux autres agents (fonctionnaires et contractuels de droit public) en télétravail, dans une limite de 5 jours maximum.

En parallèle, on peut néanmoins se féliciter que le dialogue social se soit maintenu au sein des préfectures.

c.   La place clef du numérique au sein de la gestion de crise vient poser l’enjeu de la mise au profit des technologies digitales par le ministère de l’Intérieur

Le télétravail a été un point clef de la gestion interne de la crise, et on a vu qu’il peut être un vecteur de réforme et d’efficacité pour le ministère de l’intérieur. Le même constat peut être tiré pour le versant externe de relations à l’usager du ministère de l’intérieur.

En effet, si le ministère de l’intérieur s’est engagé dans une démarche de digitalisation de certaines de ses fonctions et services, il ne s’est pas encore efforcé de tirer le plein potentiel de celles-ci.

Les titres sécurisés symbolisent cette situation. Si le plan « Préfectures nouvelle génération » avait comme axe fort la dématérialisation de la demande et de l’instruction de certains titres sécurisés (carte nationale d’identité, permis de conduire, certificat d’immatriculation du véhicule, passeport), il n’avait pas permis de s’interroger sur la nécessité de conserver des titres physiques.

Pourtant, on peut parfois douter de leur utilité concrète. Ainsi, depuis l’instauration du permis à points en 1992, le titre physique du permis de conduire ne permet plus aux forces de l’ordre de juger de l’autorisation d’un citoyen de conduire un type de véhicule. Les agents de police et de gendarmerie ont besoin d’avoir accès à une base de données à jour pour effectuer ces contrôles.

Sur le plan électoral, le même raisonnement peut être appliqué peu ou prou au répertoire électoral unique (REU). Celui-ci a permis la mise en place depuis le 1er janvier 2019 d’une date limite d’inscription sur les listes électorales pour un scrutin donné, dans le cas général, au 6ᵉ vendredi précédant ce scrutin. Auparavant, il fallait être inscrit sur les listes électorales adéquates au 31 décembre de l’année précédente afin de pouvoir voter au scrutin en question. Cependant, le REU, en tant que base permettant de juger en temps réel de la situation des citoyens, devrait permettre à terme de mener à bien, sur la base du volontariat des citoyens, la dématérialisation de la carte électorale, qui n’est délivrée qu’une fois l’an, mais aussi de la propagande électorale.

Ceci permettrait d’effectuer des économies budgétaires d’impression et d’acheminement des cartes et de la propagande électorale, qui coûte au minimum 450 millions d’euros sur une mandature, mais aussi éventuellement d’enrichir la communication électorale à l’égard des citoyens. En effet, nous pourrions imaginer que les citoyens ayant choisi de recevoir leur carte et la propagande électorale par un biais numérique pourraient également faire l’objet de communication comme des rappels des dates des scrutins et d’emplacement de leur bureau de vote.

Dans ce cadre, le projet de carte nationale d’identité électronique (CNIE) devrait se voir mis à profit pour engager une réflexion sur un système centré autour de cette CNIE comme unique titre physique délivré gratuitement aux citoyens. La CNIE servira aux citoyens à prouver leur identité de manière sécurisée, offrant ainsi la possibilité de vérifier leur situation administrative dans différents domaines, par exemple le fait de détenir un permis de conduire valide ou non. La CNIE deviendrait le point nodal d’un système cohérent, plus économe pour les finances publiques et plus ergonomique pour les usagers. Ce beau projet doit être mené non pas comme une mesure technique, mais comme une manière nouvelle d’aborder les relations entre usagers et administrations, tout en permettant d’opérer des économies substantielles.

Toutefois, ces évolutions doivent être menées dans le total respect de la protection des données personnelles mais aussi en tenant compte des attentes d’une partie de la population dans l’incapacité d’instaurer une relation numérique avec l’administration. La démarche de dématérialisation totale de la demande de certains titres engagée par le PPNG a su montrer les frustrations et les effets néfastes que le sentiment d’absence de l’État dans les territoires pouvait générer au sein de la population.

La voie réside dans une vision multicanale, qui doit être pensée pour renforcer les services publics et non pas pour venir réduire la dépense publique.

d.   Cette phase met en lumière le besoin de renforcement de l’inter-ministérialité de l’administration, de l’unité de l’État dans les territoires et la nécessité d’aller plus loin dans la déconcentration

Si l’adaptation de l’activité de l’administration territoriale au contexte de crise s’est opérée rapidement, certains interlocuteurs du rapporteur spécial soulignent que la logique de continuité a été moins rapidement appliquée au sein de certaines directions départementales interministérielles (DDI), qui ont fermé avec le confinement. Ceci vient renforcer la pertinence du chantier des secrétariats généraux communs (SGC), qui auraient permis une meilleure coordination d’entrée de jeu au niveau des DDI. La création des SGC, qui constitue à l’heure actuelle le chantier d’importance de renforcement de l’interministérialité et une des priorités majeures du programme 354 pour 2020, a été reportée au 1er janvier 2021 en raison de la crise actuelle. Par ailleurs, il est à souligner que le programme 354 souffre d’un manque de crédits pour financer les dépenses d’ordre immobilier nécessaires aux réformes de l’organisation territoriale de l’État actuellement à l’œuvre. À titre d’exemple, le ministère de l’intérieur estime qu’il manque au moins 13 millions d’euros de crédits de paiement pour mener à bien les chantiers qui permettront aux SGC d’entamer leur action au 1er janvier 2021.

Le rapporteur spécial tient à insister sur le fait que cette crise a montré une fois de plus que, surtout dans les moments de gros temps, l’État doit pouvoir parler d’une seule voix au sein des départements. Cette voix, ce doit être celle du préfet, un des seuls fonctionnaires du territoire représentant de l’État nommé en Conseil des ministres.

Cependant, l’émergence et la gestion interministérielle des DDI des fonctions supports par les SGC se heurtent aux disparités de règles de travail (traitement, primes, évolution de carrière) qui caractérisent les agents des DDI en raison de leur appartenance ministérielle ou de leur corps. Le maintien de ces différences entre agents positionnés parfois sur les mêmes fonctions rend plus difficile une gestion réellement interministérielle de l’administration territoriale, crée des freins à la mobilité des agents et des frictions au sein des services. Or, on voit qu’au quotidien mais surtout dans la crise, c’est bien le préfet, qui pilote l’action de l’État au niveau départemental et nécessite pour cela de pouvoir disposer de l’administration.

La tendance est actuellement à rendre l’administration territoriale interministérielle, en particulier dans le ressort départemental. Dans cette vision, le rapporteur spécial estime que cette crise doit servir pour approfondir l’interministérialité de l’administration territoriale de l’État au niveau départemental, sous l’autorité du préfet. C’est cette organisation qui assure le plus d’efficacité et de réactivité à l’action de l’État.

Il recommande donc d’engager une réflexion sur l’homogénéisation des statuts des agents de la fonction publique d’État au niveau départemental, afin de permettre un approfondissement de l’interministérialité de l’administration territoriale, au service d’une plus grande efficacité et de carrières plus riches pour les agents. 

Cela enrichirait la carrière des agents implantés dans un territoire en leur ouvrant des possibilités de mobilité et d’évolution plus importantes et en renforçant l’égalité et la justice dans la reconnaissance de leur mérite par leur rémunération.

Une administration plus unitaire et plus efficace doit aller de pair avec une plus grande déconcentration de l’État. La crise a mis en lumière que même dans un domaine tel que la santé publique, les mêmes dispositifs ne valent pas de la même manière pour la Ville de Paris, un département littoral ou un autre rural très peu affecté par l’épidémie. Un nouveau pas dans la déconcentration sous la houlette de préfets renforcés dans leurs prérogatives permettrait à l’État de répondre plus pertinemment et in fine de manière plus équitable aux contextes très divers qui constituent la France.

Le rapporteur spécial recommande donc d’engager une réflexion sur l’approfondissement de la déconcentration de l’État dans le ressort départemental, afin de donner aux préfets les moyens d’appliquer les politiques nationales de manière plus adaptée à leur territoire.

Ces évolutions pourraient également être bénéfiques aux finances publiques en accroissant les capacités de mutualisation des fonctions supports des services départementaux et en modulant les réponses selon le juste besoin de chaque territoire.

e.   Une période de déconfinement qui invite à trouver un nouvel équilibre entre poursuite des activités de crise et reprise des autres missions

Le principal défi de la phase de déconfinement sera de trouver l’équilibre qui permettra aux administrations de la mission AGTE de continuer à exercer ses missions prioritaires et de lutte face à l’épidémie (pilotage, cabinet) tout en permettant une reprise progressive des autres missions (délivrance des titres, lutte contre la fraude documentaire, contrôle de légalité) et en assurant la sécurité des agents.

Dans les services centraux, le télétravail est largement maintenu et le travail en présentiel se fait par roulement des effectifs ou pour des missions définies et limitées dans le temps.

Dans les services déconcentrés, les difficultés relatives au télétravail semblent rendre plus difficile la reprise des activités dans des conditions sanitaires satisfaisantes pour les agents.

Les difficultés de rattrapage auxquelles vont faire face les responsables de programmes, seront aggravées pour Secrétaire général du ministère de l’intérieur, responsable du programme 354 Administration territoriale de l’État par une programmation 2020 prévoyant une réduction des effectifs. Le projet annuel de performance du programme 354 annexé à la loi de finances pour 2020 prévoyait un schéma d’emploi de – 451 ETP sur l’année et ce malgré les difficultés occasionnées par des schémas d’emplois baissier lors des deux exécutions précédentes (2019 et 2018).

Le rapporteur spécial recommande de stopper la réduction des effectifs de l’administration territoriale dès cette année.

3.   La crise a rendu plus saillants encore les enjeux posés par la sécurité privée

a.   Le CNAPS a fonctionné en mode dégradé durant la crise, un effort important de déstockage l’attend afin d’assurer un retour à la normale de l’activité du secteur privé

La crise a eu un impact important sur l’établissement dans la mesure où la totalité des personnels dédiés à l’instruction des titres a été confinée sans possibilité de télétravailler puisque les agents ne peuvent consulter les fichiers de police en dehors de leur lieu de travail. Le CNAPS n’était donc plus en mesure d’absorber le flux des demandes d’autorisations.

Cependant, l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 modifiée, relative à la prorogation des délais échus pendant la période d'urgence sanitaire et à l'adaptation des procédures a prorogé pour le temps de l’état d’urgence les autorisations déjà accordées, ce qui a permis de maintenir les agents privés de sécurité en capacité de travailler.

La difficulté réside donc sur les nouveaux entrants qui ne pouvaient recevoir les autorisations. Ce moment de vide dans les recrutements va poser problème dans quelques mois. Cela représente également un enjeu administratif pour le CNAPS car il va devoir traiter le stock de demandes qui s’est constitué. Toutefois, le phénomène est identifié par le CNAPS, qui va pouvoir y répondre si le déconfinement lui permet un retour à une activité normale. Il mobilise à cet effet son effectif de contrôleurs qui, ne pouvant jusqu’à nouvel ordre se déplacer sur le terrain, renforceront les missions de police administrative de l’établissement. Les commissions locales (CLAC) et nationale (CNAC) seront à nouveau réunies en visioconférence.

b.   La crise a souligné certaines failles de la sécurité privée et va à moyen terme renforcer son importance

La crise du Covid-19 vient impulser une nouvelle accélération pour ce secteur, des mesures de sécurité sanitaire ayant vocation à s’imposer pour une durée certainement longue dans tout lieu, public ou privé, accueillant du public. Si le secteur privé est envisagé et régulé comme un secteur économique privé, la crise a permis de montrer de manière plus claire son importance pour la vie de la Nation et même pour la bonne marche du service public.

L’exemple le plus frappant est celui de la distribution des prestations sociales au sein de bureaux de poste durant le confinement. En temps normal, la sécurité de ces moments, qui peuvent être sujets à tensions, est assurée par des entreprises privées de sécurité, embauchées par le groupe La Poste. Or, durant le confinement, certains bureaux de poste n’ont pas pu recourir à ces sociétés, désorganisées par les mesures sanitaires en vigueur. Ce sont donc les forces publiques qui ont dû assurer ces missions. On voit bien ici que la frontière entre sécurité privée et publique est dans les faits plus poreuse qu’en droit, et que ce qui est considéré comme des activités privées a une implication concrète pour l’ordre public. Il permet également de prendre conscience que lorsque la sécurité privée manque à ses tâches, la sécurité publique est contrainte à pallier ces défaillances, ce qui n’est pas souhaitable tant du point de vue des finances que de l’action publique.

Avec la nouvelle ampleur que la sécurité privée va prendre à la suite de la crise, il ne faut pas que les faiblesses du secteur s’érigent en obstacle à l’activité économique et sociale ou ne viennent devoir être compensées par le secteur public. En tout état de cause, il faut bien avoir conscience que l’État sera tenu responsable par les citoyens si des dysfonctionnements majeurs se font jour dans le domaine de la sécurité privée. En effet, la sécurité sous toutes ses formes reste vue comme une compétence régalienne et donc opposable à l’État.

C’est une donnée à garder à l’esprit dans la perspective des Jeux olympiques d’été de Paris en 2024.

Une évolution dans le domaine de la formation pourrait se révéler profitable. Pour répondre aux problèmes de formation des agents durant la crise, le CNAPS a pu autoriser des formations à distance, ce qui n’était auparavant pas possible. Une réflexion sur la poursuite et l’élargissement de ces modalités devrait être menée.

Actuellement, les activités de formation sont normées mais les examens à l’issue de ces formations sont effectués par l’organisme formateur. Cela ne présente pas toutes les garanties d’impartialité et donc de qualité effective des agents formés et rend les modalités peu souples. L’on pourrait penser à évoluer vers un système où les modalités de formation seraient plus libres, mais les examens nécessaires à l’obtention des agréments de la responsabilité des pouvoirs publics, sur le modèle du permis de conduire et des auto-écoles.

On peut tirer de la séquence de confinement qui s’achève un enseignement pour le fonctionnement spécifique du CNAPS. Le CNAPS pourrait gagner à évoluer vers un mode d’activité plus collégial avec un assouplissement du fonctionnement territorialisé des Commissions locales d’agrément et de contrôle (CLAC), qui permettrait de répartir plus efficacement l’activité entre celles-ci en cas de déséquilibre ou en période de crise. Ainsi, un CLAC pourrait reprendre à son compte tout ou partie des dossiers d’agrément ou d’actions disciplinaires d’un autre CLAC aux capacités de traitement saturées ou contraint à la fermeture temporaire. Le cas s’est produit durant la crise du Covid 19 avec la fermeture du CLAC de Metz.

En conclusion, au vu de l’aggravation probable des difficultés structurelles du secteur de la sécurité privée, le rapporteur spécial forme le souhait que le Livre blanc de la sécurité intérieure en préparation fasse toute sa place aux enjeux de la sécurité privée, maillon indispensable d’un « continuum de sécurité » (objet du deuxième groupe de travail du Livre blanc) efficace au service de notre souveraineté et de la vie quotidienne des Français.

B.   LA CRISE NE DEVRAIT PAS BOULEVERSER L’EXÉCUTION BUDGÉTAIRE

La mission Administration générale et territoriale de l’État dispose en programmation pour 2020 de 4,13 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 3,96 milliards d’euros en crédits de paiement.

Le programme 354 Administration territoriale de l’État rassemble les moyens des préfectures, sous-préfectures, et représentations de l’État dans les collectivités d’Outre-mer et une partie des moyens des services déconcentrés de l’État. Il est doté pour 2020 de 2,52 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 2,29 milliards d’euros en crédits de paiement.

Le programme 232 Vie politique, cultuelle et associative est doté pour 2020 de 241 millions d’euros en autorisations d’engagement et 235 millions d’euros en crédits de paiement et le programme 216 Conduite des politiques de l’intérieur de 1,37 milliard d’euros en autorisations d’engagement et 1,43 milliard d’euros en crédits de paiement.

1.   La nature des dépenses de la mission rend l’exécution peu sujette à de fortes perturbations

La nature des crédits de la mission ne laisse pas penser que la crise sanitaire entraîne un bouleversement de l’exécution budgétaire. En effet, la forte proportion de dépenses de personnel (65 %) confère une certaine inertie à l’exécution, bien que ces crédits puissent se voir perturbés par la crise sanitaire (cf. infra).

Par ailleurs, une part importante des crédits de fonctionnement de la mission, en particulier au sein du programme 216, supporte des dépenses récurrentes, comme la maintenance informatique ou les loyers, peu sujettes à variation même dans un contexte comme celui de la crise du Covid-19.

2.   Certaines dépenses sont cependant susceptibles de voir leur exécution significativement affectée

L’organisation des élections (action 02 du programme) constitue la politique publique potentiellement la plus affectée de la mission. Étant donné le poids de cette action au sein du programme 232 (66 % des crédits), l’incertitude sur son exécution représente un enjeu pour l’exécution des crédits du programme.

Toutefois, si les élections ont bien lieu le 28 juin prochain, cela impliquera certainement que les crédits de l’action 02 du programme 232 seront consommés voire feront l’objet d’une sur-exécution en raison de possibles dépenses supplémentaires liées à l’épidémie.

Les perturbations de la tenue des élections municipales affecteront également la CNCCFP, non seulement en 2020, mais également en 2021, car ses activités de contrôle des comptes de campagne s’effectuent bien en aval des jours de scrutin. Avec le report du second tour des élections municipales ou l’ensemble des deux tours de ce scrutin, la charge de travail en 2021 sera alourdie. Selon la CNCCFP, le plafond d’emplois fixé à 58 ETP pour 2021 sera insuffisant.

Cela pourra également avoir un impact sur le déménagement prévu depuis le 36 rue du Louvre, locaux actuels de la Commission qu’elle devra quitter, le propriétaire ayant refusé le renouvellement du bail.

L’exécution du schéma d’emploi baissier du nouveau programme 354
(– 471 ETP) pourrait être également remise en cause pour pouvoir résorber les stocks de tâches qui se sont accumulées dans un contexte d’activité dégradée. Plus généralement, il existe une tension structurelle sur les effectifs des préfectures, qui semblent avoir atteint un point bas qui ne permet que difficilement de remplir les missions confiées au réseau préfectoral.

Les économies budgétaires seraient amoindries d’autant.

3.   Des effets généraux sont à prévoir mais auront certainement des effets budgétaires réduits

En ce qui concerne les dépenses de personnel, la crise a imposé un ralentissement voire un gel du recrutement des agents et donc une réduction du volume d’emploi. Ces mécanismes peuvent conduire à une sous-exécution du schéma d’emploi et des dépenses de personnel.

Toutefois, une configuration classique de renouvellement ou de croissance faible d’un personnel en grande majorité composé de fonctionnaires vient amoindrir ces dynamiques.

En outre, le ministère essaie de réduire les baisses de recrutement en adaptant ses procédures, par exemple en effectuant des oraux par visioconférence dans le cadre de l’examen professionnel d’attaché d’administration de l’État relevant du ministère de l’Intérieur.

A contrario, les primes versées aux fonctionnaires au titre de leur action durant la crise viendront contrebalancer ces effets de sous-consommation.

Certaines dépenses de fonctionnement comme les dépenses d’entretien, de fluides, de fournitures pourraient se réduire durant la crise. En ce qui concerne la mission AGTE, on peut penser en particulier à un report des dépenses liées au contentieux portées par le programme 216.

Toutefois, la crise sanitaire occasionnera des dépenses exceptionnelles de fonctionnement telles que l’achat de matériels de protection et d’hygiène, le nettoyage spécifique des locaux. Cela pour venir compenser ou dépasser les baisses de dépenses intervenues par ailleurs. Le ministère de l’Intérieur a indiqué qu’une demande de dégel de la réserve de précaution sera certainement émise pour couvrir ces frais supplémentaires.

Certaines dépenses d’investissement de la mission, immobilières ou informatiques, tant en autorisations d’engagement qu’en crédits de paiement pourraient a minima être retardées par les effets de la crise sur l’activité économique. Ces dépenses semblent les plus susceptibles de connaître une sous-exécution. Elles ne représentant cependant que 5 % des crédits de paiement de la mission.

 


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   EXAMEN EN COMMISSION

Lors de sa réunion de 15 heures, le lundi 3 juin 2019, la commission des finances, réunie en commission dévaluation des politiques publiques, a entendu le rapporteur spécial des crédits de la mission Administration générale et territoriale de l’État.

 

La vidéo de cette réunion est disponible sur le portail dédié de l’Assemblée nationale. Le compte rendu est également lisible en ligne.

 

 


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   LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

– Commission nationale les comptes de campagne et des financements politiques : M. François Logerot, président ; Mme Sylvie Calvès, secrétaire-générale

– Conseil national des activités privées de sécurité : M. Cyrille Maillet, directeur

– Ministère de l’Intérieur, Direction des libertés publiques et des affaires juridiques : M. Guillaume Saour, sous-directeur des polices administratives ; M. Christophe Borgus, adjoint du sous-directeur et chef du bureau des polices administratives ; M. Martin Alline, adjoint au chef de bureau

– Ministère de l’Intérieur, Secrétariat général, Direction de l’évaluation de la performance, de l’achat, des finances et de l’immobilier et Direction de la modernisation et de l’administration territoriale : M. Antoine Gobelet, directeur de l’évaluation de la performance, de l’achat, des finances et de l’immobilier ; M. Jean-Gabriel Delacroy, sous-directeur de l’action territoriale, direction de la modernisation et de l’action territoriale ; M. Sébastien Audebert, chef du bureau du pilotage des moyens de l'administration territoriale ; Mme Parvine Lacombe, adjointe à la cheffe du bureau des élections et des études politiques

– Syndicat Force ouvrière préfectures : Mme Christine Marot, secrétaire nationale ; Romuald Deliencourt, chargé de communication

– Syndicat national unitaire des personnels du Ministère de l’intérieur : M. Philippe Izoulet, secrétaire général ; M. Éric Berton, secrétaire général adjoint

 Syndicat UNSA-Intérieur ATS : M. Paul Afonso, secrétaire général

 

 

 


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   ANNEXES (DONT SOURCES UTILISÉES)

 

Cour des comptes, mission Administration générale et territoriale de lÉtat, Note d’analyse de l’exécution budgétaire 2019, avril 2019.

CNAPS, « Covid 19 Information aux professionnels de la sécurité privée », mise à jour du 18 mai 2020, dernière consultation le 26 mai 2020, URL : http://www.cnaps.interieur.gouv.fr/content/download/4211/36012/file/CNAPS%20-%20Information%20aux%20usagers%20-%20PCA%2018-05-2020.pdf

Rapport annuel de performances 2019, mission Administration générale et territoriale de lÉtat.

Site internet du Gouvernement, page « Déclaration d'Édouard Philippe sur l'organisation du second tour des élections municipales », dernière consultation le samedi 23 mai URL : https://www.gouvernement.fr/partage/11581-declaration-d-edouard-philipe-sur-l-organisation-du-second-tour-des-elections-municipales

 

 


([1]) Le programme 307 était déjà auparavant l’un des programmes de la mission Administration générale et territoriale de l’État.

([2]) Le programme 333 était auparavant l’un des programmes de la mission Direction de l’action du Gouvernement.