N° 3011

______

ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 27 mai 2020

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE LOI, APRÈS ENGAGEMENT DE LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE, de règlement du budget et d’approbation des comptes de l’année 2019 (n° 2899),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

Député

 

——

 

 

ANNEXE N° 40
 

 

SÉCURITÉS

 

SÉCURITÉ CIVILE

 

 

 

Rapporteur spécial : M. Bruno DUVERGÉ

 

Député

____

 


 

 

 

 


SOMMAIRE

___

 

SYNTHÈSE ET chiffres clés

RECOMMANDATIONS du rapporteur spécial

PREMIÈRE PARTIE : EXÉCUTION des crÉdits demandÉs

A. Une exécution conforme à l’autorisation budgétaire

1. L’analyse des dépenses par nature

a. Des dépenses de personnel dynamiques

b. Des dépenses de fonctionnement dépendantes de l’activité opérationnelle

c. Des dépenses d’intervention exécutées conformément à la prévision

d. Une légère sous exécution des dépenses d’investissement du programme

2. L’Agence du numérique de la sécurité civile, unique opérateur du programme

B. Le dispositif de performance du programme

SECONDE PARTIE : L’IMPACT BUDGÉTAIRE DE LA CRISE SANITAIRE EN 2020

A. Une adaptation des modes opératoires

1. La mise en place d’un plan de continuité d’activité

2. Les missions spécifiques de la sécurité civile dans le cadre de la crise

B. Un impact budgétaire encore incertain

1. Les dépenses de titre II

2. Les dépenses hors titre II

3. Les ressources extra-budgétaires du programme

EXAMEN EN COMMISSION

PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

ANNEXE : SOURCES UTILISÉES


— 1 —

 

   SYNTHÈSE ET chiffres clés

En 2019, les crédits du programme 161 Sécurité civile ont été exécutés à hauteur de 548,3 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE), et 452,4 millions d’euros en crédits de paiement (CP), soit une baisse de 316 millions d’euros en AE et une hausse de 33,2 millions d’euros en CP. Cette variation s’explique par l’exécution du marché de renouvellement de la flotte d’avions de la sécurité civile.

Le rapporteur considère que l’exécution des crédits est rigoureuse, comme en atteste leur taux de consommation, et conforme à la prévision établie en loi de finances initiale.

Toutefois, des tensions sont constatées, comme chaque année, sur les dépenses de fonctionnement et d’intervention liées aux activités opérationnelles. Dans ce cadre, la réserve de précaution a été intégralement levée en fin de gestion (8,7 millions d’euros).

Le taux de disponibilité des avions de la sécurité civile s’est dégradé en 2019. Deux incidents, dont l’un a causé la mort d’un pilote, sont survenus durant l’année. En raison de fragilités importantes constatées sur les trains d’atterrissage des avions Tracker, la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises (DGSCGC) a décidé de l’arrêt définitif de cette flotte.

En 2020, la sécurité civile a été particulièrement mobilisée durant la crise. Le rapporteur salue l’implication des sapeurs-pompiers, qui ont réalisé plus de 80 000 interventions en lien avec le covid-19, et l’action de l’ensemble des personnels de la DGSCGC.

L’impact budgétaire de la crise demeure à ce stade incertain. Des surcoûts ont été constatés en raison des missions spécifiques assurées par la sécurité civile depuis le mois de février 2020, parmi lesquelles le transport de matériels et de patients par hélicoptère, ou l’organisation de la gestion interministérielle de crise. Toutefois le nombre d’interventions menées sans lien avec l’épidémie a chuté en raison du confinement, générant des économies.

Par ailleurs, un certain nombre d’activités ont été ralenties. Les procédures de recrutement, les formations et l’installation des sirènes ont été repoussées, ce qui engendre de moindres dépenses de personnel et d’investissement. Toutefois certaines d’entre elles pourront être rattrapées durant l’année.

Enfin, l’application des règles sanitaires affecte l’organisation de la lutte contre les feux de forêt. Le rapporteur sera donc attentif à cet enjeu.

Évolution de la consommation des crédits du programme 161

(en millions d’euros)

Source : commission des finances, d’après les rapports annuels de performances.

PRévision et exécution des dépenses liées
à l’activité opérationnelle en 2019

(en millions d’euros)

Source : commission des finances, d’après les rapports annuels de performances.

Activité des hélicoptères de la sécurité civile
entre février et mai, en 2019 et 2020

Source : commission des finances, d’après les données fournies par la DGSCGC.

 

 


— 1 —

 

 

    

   RECOMMANDATIONS du rapporteur spécial

Les recommandations suivantes ont été formulées à l’issue des travaux du rapporteur :

– le rapporteur invite le ministère de l’intérieur à étudier la possibilité de créer une deuxième réserve de précaution, à la main du responsable de la fonction financière ministérielle, mobilisable rapidement en cas de dépenses imprévues. Cette réserve permettrait de limiter les risques de tension en gestion sur les crédits, en cas d’aléas exceptionnels impactant l’exercice budgétaire. La présente proposition faisait notamment l’objet d’une préconisation du contrôleur général et comptable ministériel ;

– le rapporteur estime qu’il est impératif que la DGSCGC se dote d’objectifs capacitaires explicites, afin de disposer d’une meilleure visibilité pour piloter ses investissements. Le futur livre blanc de la sécurité intérieure peut être un support pertinent dans ce cadre ;

– le rapporteur estime que la création de nouveaux indicateurs de performance retraçant l’activité de la DGSCGC en matière d’harmonisation des moyens des services d’incendie et de secours est souhaitable. À cet égard, l’interopérabilité des systèmes de gestion d’alerte (SGA) et des systèmes de gestion des opérations (SGO) constituent désormais des enjeux majeurs pour la sécurité civile, et il semblerait pertinent qu’ils fassent l’objet d’une analyse dans le dispositif de performance ;

– le rapporteur invite enfin la DGSCGC à se rapprocher des associations de sécurité civile et de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris afin de mesurer dans les meilleurs délais leurs besoins de financement, dans la mesure où leur situation budgétaire s’est dégradée durant la crise sanitaire.

 

 

 

 

 


— 1 —

 

   PREMIÈRE PARTIE : EXÉCUTION des crÉdits demandÉs

Le programme 161 Sécurité civile porte, au sein de la mission Sécurités, l’ensemble des politiques du ministère de l’intérieur consacrées à la protection des populations et à la gestion de crise. Il est composé de quatre actions :

– l’action 11 Prévention et gestion de crises finance les dispositifs de prévention, d’alerte, de mobilisation opérationnelle et de solidarité nationale en cas de crise ;

– l’action 12 Préparation et interventions spécialisées des moyens nationaux finance l’acquisition, l’entretien et la mobilisation des moyens nationaux de sécurité civile : flottes d’hélicoptères et d’avions, forces militaires de la sécurité civile, équipes de démineurs ;

– l’action 13 Soutien aux acteurs de la sécurité civile finance la coordination et la formation des autres acteurs de la sécurité civile : services départementaux d’incendie et de secours (SDIS) et associations de sécurité civile ;

– l’action 14 Fonctionnement, soutien et logistique finance les fonctions de soutien général du programme : services d’état-major, inspection générale de la sécurité civile, fonctions financières, juridiques et de gestion des ressources humaines, dépenses informatiques et de carburant des véhicules terrestres.

Le rapporteur estime que l’exécution des crédits en 2019 est rigoureuse, dans la mesure où elle est conforme à l’autorisation budgétaire. Néanmoins, les crédits liés aux activités opérationnelles de la DGSCGC sont particulièrement volatiles, et le vieillissement des flottes aériennes obère les capacités d’intervention de la sécurité civile.

A.   Une exécution conforme à l’autorisation budgétaire

En 2019, l’exécution des crédits du programme 161 Sécurité civile s’établit à 548,3 millions d’euros en autorisations d’engagement (AE), et 452,4 millions d’euros en crédits de paiement (CP).

En comparaison avec l’année 2018, les crédits exécutés diminuent de 316,14 millions d’euros en AE et progressent de 33,2 millions d’euros en CP.

Évolution de la consommation des crédits du programme 161

(en millions d’euros)

Source : commission des finances, d’après les rapports annuels de performances.

Cette évolution découle principalement de l’exécution du marché de renouvellement de la flotte d’avions Tracker. Sa notification avait entraîné une hausse importante et ponctuelle des AE consommées en 2018. Leur niveau retrouve en 2019 la moyenne de consommation des années précédentes. À l’inverse, le premier avion Dash ayant été livré en juin 2019, les premiers décaissements effectués à ce titre expliquent la progression de la consommation des CP par rapport à l’année 2018. Cette hausse demeure néanmoins contenue, dans la mesure où l’échéancier de paiement, ainsi que les livraisons, s’échelonnent jusqu’en 2024.

L’exécution des crédits du programme 161 est conforme à la prévision, dans la mesure où 96 % des AE et 99,4 % des CP ouverts en loi de finances initiale (fonds de concours et attribution de produits compris) ont été consommés.


— 1 —

 

Mouvements budgétaires et exécution des crédits du programme en 2019

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Crédits ouverts en LFI (a)

457,8

537,1

Loi de finances rectificative

– 1,2

– 1,2

Reports de crédits

+ 57,7

+ 0,03

Régulation budgétaire*

+ 0,3

+ 0,4

FDC et ADP**

+ 18,9

+ 18,9

Total des crédits ouverts (b)

533,4

555,1

Exécution (c)

452,4

548,3

Niveau de dépenses (c/b)

84,81 %

98,7 %

Taux de consommation (c/a)

98,8 %

102 %

*Transferts et arrêtés d’ouvertures pour répartition.

**Fonds de concours et attribution de produits.

Source : commission des finances, d’après le rapport annuel de performances.

Le programme est abondé, chaque année, de ressources extra-budgétaires (fonds de concours et attribution de produits), qui représentent environ 3,5 % des crédits exécutés du programme.

En 2019, ces ressources ont été estimées à 14,2 millions d’euros, pour un résultat de 18,9 millions d’euros. 13,8 millions d’euros ont été versés sur le programme 161 au titre du fonctionnement de l’infrastructure nationale partageable de transmissions (INPT), et 1,7 million d’euros ont pour origine la participation de l’Union européenne aux missions de la DGSCGC dans le cadre du mécanisme de protection civile européen.

Par ailleurs, le programme est composé de deux dépenses fiscales :

– l’exonération des vacations horaires et des avantages retraite servis aux sapeurs-pompiers volontaires, dont le coût est stable en 2019 (56 millions d’euros) ;

– l’exonération de droits de mutation des successions des sapeurs-pompiers décédés en opération de secours, dont le coût n’est pas précisé.

Si l’exécution du programme est conforme à l’autorisation budgétaire, des situations disparates peuvent être observées selon la nature des dépenses, expliquant ainsi les écarts constatés entre la prévision et l’exécution des crédits par actions.


— 1 —

 

exécution 2019 Par action

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

LFI*

Exécution

Écart

LFI*

Exécution

Écart

11 – Prévention et gestion des crises

53,7

41,0

– 24,0 %

35,5

41,8

+ 18,0 %

12 – Préparation et intervention spécialisées des moyens nationaux

240,9

240,5

0 %

339,3

336,8

– 1,0 %

13 – Soutien aux acteurs de la sécurité civile

165,2

158,4

– 4,0 %

164,0

158,6

– 3,0 %

14 – Fonctionnement, soutien et logistique

12,4

12,1

–  3,0 %

12,8

11,1

– 13,0 %

Total programme 161

472,2

452,4

  4,2 %

551,5

548,3

  0,6 %

*Prévision en loi de finances initiale, y compris fonds de concours et attribution de produits.

Source : Rapport annuel de performances 2019.

1.   L’analyse des dépenses par nature

Dans l’ensemble, la gestion des dépenses du programme 161 est maîtrisée. Toutefois, à l’instar des années précédentes, les dépenses de personnel sont dynamiques, et des difficultés de prévision concernant les dépenses hors titre 2 liées aux activités opérationnelles sont constatées.

a.   Des dépenses de personnel dynamiques

Les dépenses de personnel ont été exécutées en 2019 à hauteur de 180,34 millions d’euros, soit à 98,4 % des crédits estimés en loi de finances initiale (183,31 millions d’euros). Le plafond d’emplois, fixé à 2 484 ETPT en 2019, a été exécuté à hauteur de 2 454 ETPT (98,8 %).

Les dépenses de titre 2 progressent par ailleurs à hauteur de 5,13 millions d’euros par rapport à 2018 (soit une hausse de 3 %). Le schéma d’emplois du programme s’établit en 2019 à + 10 ETP, conformément à la prévision.

Néanmoins, le schéma d’emplois explique seulement 0,8 million d’euros de la hausse observée en 2019. Les mesures catégorielles expliquent quant à elles 1,2 million d’euros de la progression, dont la majorité découle de l’application du protocole parcours professionnels, carrières et rémunérations (PPCR), et de la revalorisation de la prime de vol du groupement d’hélicoptères de la sécurité civile (GHSC) ([1]).

La Cour des comptes avait souligné le dynamisme des mesures catégorielles du programme dans le cadre de son rapport thématique de mars 2019 ([2]). En effet, alors que les dépenses de rémunération du programme, hors CAS Pensions et hors prestations et cotisations sociales, ont progressé de 4,9 % entre 2011 et 2016, la Cour souligne que 45 % de cette hausse s’explique par « d’importantes mesures de revalorisation statutaires et indemnitaires ».

Cette progression, selon la Cour, est particulièrement marquée pour les fonctionnaires de police qui composent le groupement d’intervention du déminage (GID) ou le GHSC, qui bénéficient de rémunérations brutes supérieures aux rémunérations moyennes observées dans la fonction publique d’État. Ce niveau de rémunération élevée s’explique notamment par le cumul de régimes indemnitaires applicables à ces personnels.

S’il convient de rappeler que la définition du régime indemnitaire des fonctionnaires de police ne relève pas directement de la compétence de la DGSCGC, et que la montée en charge du PPCR concerne l’ensemble des agents de l’État, le rapporteur constate qu’en 2019 les dépenses de rémunération du programme (hors CAS Pensions et hors prestations et contributions sociales) progressent de 3 millions d’euros (soit + 2,9 %), bien au-delà des estimations de la Cour, qui anticipait une hausse des dépenses de rémunération de l’ordre de 1,86 % par an en moyenne sur la période 2017-2022.

b.   Des dépenses de fonctionnement dépendantes de l’activité opérationnelle

De nombreux dispositifs portés par le programme et relevant de dépenses hors titre 2 font l’objet d’une sollicitation variable, en fonction de l’ampleur de l’activité opérationnelle pendant l’année.

Pour l’année 2019, l’estimation des crédits hors titre 2 ouverts sur le programme 161 s’est fondée sur l’hypothèse d’aléas climatiques de basse intensité durant la saison de feux de forêt. Or, la saison 2019 s’est avérée être d’une intensité supérieure à la moyenne de la période 2009-2018, notamment en raison de conditions météorologiques extrêmes qui ont touché le territoire métropolitain. Alors que la moyenne décennale de la surface brûlée chaque année s’élève à 4 850 hectares par an, le bilan pour l’année 2019 s’établit à 8 480 hectares brûlés.

Pour faire face à cette activité opérationnelle relativement élevée, le responsable de programme a utilisé la fongibilité pour exécuter en dépenses de fonctionnement certaines dépenses budgétées en investissement, telles certaines dépenses initialement consacrées au système d’alerte et d’information des populations.

La réserve de précaution a également fait l’objet d’un dégel intégral (6,3 millions d’euros en AE et 8,7 millions d’euros en CP) afin de couvrir une partie de ces dépenses supplémentaires.

Les dépenses de fonctionnement s’élèvent en 2019 à 125,28 millions d’euros en AE et 146,64 millions d’euros en CP, pour une prévision – hors fonds de concours et attribution de produits – s’établissant respectivement à 109,24 millions d’euros en AE (soit une exécution à hauteur de 114 % des crédits prévus) et 127,25 millions d’euros en CP (117 % des crédits estimés en LFI).

Toutefois, il convient de constater qu’en prenant en compte les fonds de concours et les attributions de produits, le montant des crédits estimés s’élève à 123,65 millions d’euros en AE et 141,66 millions d’euros en CP, réduisant ainsi l’ampleur de la sur-exécution à 101 % et 104 % par rapport aux crédits prévus.

L’origine du dépassement en dépenses de fonctionnement constaté en 2019 est concentrée sur quatre postes de dépenses, fortement dépendants de l’activité opérationnelle.

Sur l’action 11 Prévision et gestion des crises, l’exécution des crédits alloués à l’utilisation de produits retardants et de carburant pour les aéronefs a dépassé la prévision. Il en va de même pour les crédits alloués à l’utilisation des véhicules des formations militaires de la sécurité civile (ForMiSC) et à la maintenance en condition opérationnelle (MCO) des avions de la sécurité civile, portés par l’action 12 Préparation et intervention spécialisées des moyens nationaux.

Prévision et exécution des dépenses de fonctionnement dépendantes de l’activité opérationnelle

 

Prévision

Exécution

Taux d’exécution

Carburant des aéronefs

8,8

11,8

134 %

Produits retardants

2,4

5,0

208 %

Utilisation véhicules FORMISC

0,7

1,6

228 %

MCO des avions de la sécurité civile

40,1

41,8

104 %

Source : commission des finances, d’après les documents budgétaires.

Concernant les crédits alloués au carburant des aéronefs, la DGSCGC indique cependant qu’une partie du dépassement observé s’explique notamment par une sous-facturation en 2018, qui a entraîné un report de charge en 2019. Par ailleurs, le coût du carburant au litre pour les avions a été plus important que prévu, du fait « du coût d’avitaillement et du poids des intermédiaires ».

 

Par ailleurs, le coût de l’utilisation des véhicules ForMiSC dépasse pour la première fois 1,5 million d’euros sur une année, ce qui démontre, selon la DGSCGC, l’impact du vieillissement du parc de véhicules, et justifie l’effort d’acquisition réalisé en 2019. Il est donc permis de croire que, pour les exercices budgétaires à venir, l’exécution des crédits sur ce poste de dépenses sera davantage conforme à la prévision.

c.   Des dépenses d’intervention exécutées conformément à la prévision

Les dépenses d’intervention du programme ont été exécutées à hauteur de 114,9 millions d’euros en AE 116,9 millions d’euros en CP, soit un montant conforme à la prévision (116,8 millions d’euros en AE et 116,8 millions d’euros en CP).

Il convient toutefois de constater que ce résultat à l’échelle du programme masque les difficultés que rencontre la DGSCGC pour prévoir le montant des dépenses d’intervention dont l’exécution dépend de l’activité opérationnelle. À l’instar des dépenses de fonctionnement précitées, les crédits alloués aux colonnes de renfort ont été exécutés au-delà des estimations formulées en loi de finances initiale.

En effet, 2,4 millions avaient été prévus pour le financement des colonnes de renfort, pour une exécution s’élevant à 6,6 millions d’euros en 2019. Le dépassement est imputable à l’intensité de la saison des feux de forêt et à l’accident de l’usine de Lubrizol, ainsi qu’aux divers évènements ayant eu lieu durant l’année, tels le G7 ou encore le 75ème anniversaire du Débarquement.

Par ailleurs, s’il convient de garder à l’esprit que les dépenses faisant l’objet d’écarts les plus notables par rapport à la prévision sont étroitement liées à l’activité opérationnelle, la Cour des comptes souligne que « ces dépenses sont relativement rigides, une faible intensité de la saison des feux de forêt se traduisant par moins d’intervention mais davantage d’entraînements. Il en va de même pour les dépenses de fonctionnement des moyens terrestres, en raison du pré-positionnement quasi-systématique des colonnes de renfort sur les zones à risque » ([3]).

Recommandation n° 1 : le rapporteur souscrit à la proposition qui avait été formulée par le contrôleur budgétaire et comptable ministériel, afin de prévenir les risques de tensions en gestion sur les crédits.

Ce dernier proposait de créer une deuxième réserve de précaution, à la main du responsable de la fonction financière ministérielle, mobilisable rapidement en cas de dépenses imprévues.

d.   Une légère sous exécution des dépenses d’investissement du programme

Les dépenses d’investissement du programme s’élèvent en 2019 à 25,8 millions d’euros en AE et 98,4 millions d’euros en CP. Si la dépense en CP est légèrement sous-exécutée (103,6 millions d’euros prévus en LFI), la dépense en AE fait l’objet d’une sous-exécution plus marquée (42,3 millions d’euros prévus en LFI).

L’essentiel des dépenses d’investissement est consacré au renouvellement de la flotte de Tracker. 63,9 millions d’euros ont été ainsi dépensés en 2019, correspondant au paiement versé lors de la livraison du premier Dash.

Les autres investissements importants ont concerné les véhicules des unités d’instruction et d’intervention de la sécurité civile (UIISC) à hauteur de 8,2 millions d’euros, et les équipements de déminage (4,4 millions d’euros).

La sous-consommation des crédits s’explique par des retards dans l’exécution de certains projets d’investissement :

– la rénovation des hélicoptères EC145, qui génère une sous-consommation de 1,2 million d’euros ;

– la réalisation de projets immobiliers, notamment la construction d’une zone de vie pour le centre de déminage de Strasbourg (coût total du projet estimé à 3,7 millions d’euros) ;

La réalisation du projet relatif au système d’alerte et d’information des populations (SAIP) est enfin inférieure à la programmation initiale, entraînant une sous-consommation de crédits à hauteur de 2,3 millions d’euros en AE et 0,6 million d’euros en CP.

Il convient enfin de constater que les investissements réalisés par la DGSCGC, portant pour la plupart sur des projets complexes, entraînent un montant de restes à payer important sur le programme. Au 31 décembre 2019, 414,8 millions d’euros d’engagement restent non couverts par des paiements, soit pratiquement l’équivalent du budget du programme 161 sur une année.

2.   L’Agence du numérique de la sécurité civile, unique opérateur du programme

Le programme 161 est le support d’un unique opérateur, créé en 2018 : l’Agence du numérique de la sécurité civile (ANSC).

Chargée de la mise en œuvre du projet NexSIS 18-112, l’ANSC est financée par les services départementaux d’incendie et de secours ainsi que par l’État. Elle disposait en 2019 de ressources s’élevant à 11,9 millions d’euros, dont 6,8 millions d’euros issus de versements effectués par l’État, relevant de subventions pour charges de service public et de dotations en fonds propres.

Les dépenses de l’opérateur s’élèvent en 2019 à 3,2 millions d’euros. Son solde budgétaire est donc excédentaire à hauteur de 8,7 millions d’euros. Toutefois, ce solde est composé de 4,4 millions d’euros de restes à payer, correspondant à des dépenses d’investissement, qui basculent par conséquent sur la gestion 2020.

Par ailleurs, l’ANSC dispose d’un plafond d’emplois s’élevant à 12 ETPT. Ce plafond a été exécuté à hauteur de 9 ETPT, auxquels s’ajoutent 7 personnels mis à disposition par d’autres structures. Il a notamment été indiqué au rapporteur que la sous exécution du plafond s’explique par des difficultés de recrutement, les profils recherchés correspondant à des personnels informaticiens spécialisés.

B.   Le dispositif de performance du programme

Le programme 161 est composé de quatre objectifs et de six indicateurs :

Maquette de performance du programme 161

Objectifs

Indicateurs

1 - Assurer l’efficacité et l’efficience des dispositifs de lutte contre les feux de forêt

Efficacité du dispositif de protection des forêts pendant la campagne « saison feux »

2 - Assurer la disponibilité des moyens aériens et leur conformité aux besoins opérationnels

Efficience des opérations de secours aux personnes en hélicoptère dans les milieux difficiles

Taux de disponibilité opérationnelle des avions d la sécurité civile

3 – Faire évoluer la cartographie des centres de déminage pour éliminer les munitions historiques et faire face à la menace terroriste

Taux d’évolution des stocks collectés de munitions anciennes

Interventions sur objets suspects dans les délais

4 – Harmoniser les moyens des services départementaux d’incendie et de secours

Taux d’adhésion des SDIS à l’infrastructure complémentaire Acropole-Antarès

Source : Rapport annuel de performances 2019.

Dans l’ensemble, les résultats des indicateurs du programme sont satisfaisants.

 

Un point d’attention particulier doit néanmoins être souligné, au regard du taux de disponibilité opérationnelle des avions de la sécurité civile. S’élevant à 94 % en 2018, le responsable de programme avait défini une cible de 96 % en 2019, ce qui correspond à l’objectif contractuel fixé au titulaire du contrat de maintenance en condition opérationnelle des avions.

Toutefois, le taux de disponibilité des appareils de la sécurité civile a chuté en 2019, pour atteindre 89,8 %. Cette dégradation s’explique par l’accident du Tracker T22 fin juillet 2019, qui a entraîné la mort d’un pilote, ainsi que par la rupture d’un train d’atterrissage du Tracker T12 en septembre, ce qui a conduit à interdire les vols de l’ensemble de la flotte Tracker. Après diverses expertises menées sur les avions de la flotte, la reprise des vols a été autorisée le 12 novembre 2019. Toutefois de nouvelles fragilités ont été identifiées sur les trains d’atterrissage, qui ont conduit, in fine, à l’arrêt définitif de la flotte Tracker le 14 février 2020.

En effet, la flotte était particulièrement vieillissante, avec un âge moyen en octobre 2019 s’élevant à 63 ans. Le contrat de renouvellement de la flotte s’échelonnant jusqu’en 2024, il existe donc un risque que les capacités opérationnelles de la DGSCGC ne soient pas suffisantes pour répondre à l’ensemble des missions impliquant la mobilisation des flottes aériennes dans les mois à venir.

À ce titre, la Cour des comptes a pu relever, dans le cadre des observations définitives formulées dans le cadre de son enquête sur la DGSCGC ([4]), et du référé relatif au contrat général interministériel ([5]), que le ministère de l’intérieur ne possède pas d’objectifs capacitaires lui permettant de planifier ses besoins en investissements sur une base triennale et quinquennale. Dans les faits, les décisions d’investissements, notamment en matière de moyens aériens, se font en fonction de l’obsolescence des appareils. La situation actuelle démontre que ce mode de gestion peut générer des risques opérationnels, et des tensions sur l’utilisation des moyens nationaux.

Recommandation n° 2 : dans la perspective de la définition du prochain livre blanc sur la sécurité intérieure, le rapporteur estime qu’il est impératif que la DGSCGC se dote d’objectifs capacitaires explicites, afin de disposer d’une meilleure visibilité pour piloter ses investissements. Cette question concerne également les hélicoptères de la sécurité civile, dont la flotte n’a pas fait l’objet de renouvellement depuis 2011. En 2019, un accident en Martinique a entraîné l’indisponibilité d’une machine, dont le remplacement par un appareil basé en métropole a créé un déficit capacitaire temporaire.

Enfin, il apparaît que l’indicateur associé à l’objectif 4 du programme arrive à saturation, et ne reflète plus vraiment la performance de l’action d’harmonisation des moyens des SDIS menée par la DGCSGC. Alors que le projet NexSIS est en cours d’élaboration, la création d’indicateurs portant sur ce dernier apparaît souhaitable.

Recommandation n° 3 : le rapporteur considère que l’interopérabilité des systèmes de gestion d’alerte (SGA) et des systèmes de gestion des opérations (SGO) constituent désormais des enjeux majeurs pour la sécurité civile, et il semblerait pertinent qu’ils fassent l’objet d’une analyse dans le dispositif de performance.


— 1 —

 

   SECONDE PARTIE : L’IMPACT BUDGÉTAIRE
DE LA CRISE SANITAIRE EN 2020

Avec plus de 80 000 interventions menées afin de porter assistance à des personnes présentant des symptômes du covid-19, le plus souvent pour les transporter vers un centre hospitalier, les sapeurs-pompiers ont été fortement mobilisés durant la crise.

Le rapporteur souhaite saluer leur implication et leur professionnalisme. Malgré leur faible visibilité médiatique au cours de ces dernières semaines, les sapeurs-pompiers et l’ensemble des services du ministère de l’intérieur ont été en mesure d’assurer une continuité de service partout sur le territoire. Leur concours a été déterminant, aux côtés des personnels soignants, pour apporter une réponse efficace à la crise.

Par ailleurs, plus de 1 200 sapeurs-pompiers ont été infectés par le virus, et près de 1 700 d’entre eux ont été placés à l’isolement depuis le mois de mars.

La sécurité civile est une politique largement décentralisée. Les collectivités locales et établissements publics de coopération intercommunale ont donc largement contribué à financer les dispositifs et les opérations visant à lutter contre l’épidémie, à travers l’action des services départementaux d’incendie et de secours.

Le programme 161 Sécurité civile, doté de 491,3 millions d’euros en 2020, porte quant à lui les crédits visant à financer les dispositifs de prévention et de gestion des crises, la préparation et l’intervention des moyens nationaux, ainsi que les mesures d’harmonisation et de coordination des forces sur le territoire.

S’il est encore trop tôt pour chiffrer précisément les conséquences budgétaires de la crise en matière de sécurité civile, il apparaît d’ores et déjà que le programme 161 a supporté des dépenses imprévues. Toutefois, la réduction du nombre de missions sans lien avec l’épidémie et le ralentissement de nombreuses activités ont pu générer des économies. Dans l’ensemble, il apparaît que l’exécution des crédits du programme 161 suit la trajectoire prévue en début de gestion.


A.   Une adaptation des modes opératoires

La DGSCGC est parvenue à assurer l’intégralité de ses missions durant la crise. L’application des règles sanitaires a notamment conduit les forces de la sécurité civile à adapter leurs modes opératoires, et à réaliser des interventions spécifiques dans le cadre de la lutte contre l’épidémie.

1.   La mise en place d’un plan de continuité d’activité

L’ensemble des services rattachés à la DGSCGC ont mis en place un plan de continuité d’activité afin d’assurer les missions leur incombant.

Les services opérationnels (groupement des moyens aériens, groupement d’intervention du déminage, groupement des moyens nationaux terrestres) ont adapté leur organisation. À ce titre, le groupement d’intervention du déminage a mis en place des services étanches afin d’éviter les risques d’infection. Les techniciens de la maintenance aéronautique ont pu travailler depuis leur domicile, effectuant seulement les opérations de maintenance obligatoires.

Les agents des services administratifs ont été placés, pour 40 % d’entre eux, en télétravail. 20 % des agents ont par ailleurs été placés en autorisation d’absence exceptionnelle, lorsque la nature de leurs fonctions était incompatible avec la mise en place du télétravail.

Dans l’ensemble, les missions relevant de la DGSCGC ont été assurées. Il a par exemple été indiqué au rapporteur que les procédures de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle ont été menées sous format dématérialisé, ce qui a permis de traiter 1 900 dossiers durant la période de confinement.

En revanche, les procédures de recrutement et les formations assurées par l’école nationale supérieure des officiers des sapeurs-pompiers (ENSOSP) ont été suspendues. Les bâtiments de l’ENSOSP ont notamment été utilisés pour accueillir des ressortissants français rapatriés de Wuhan au début de la crise.

2.   Les missions spécifiques de la sécurité civile dans le cadre de la crise

La DGSCGC a été impliquée à différents niveaux dans la lutte contre l’épidémie, le premier étant le soutien opérationnel des différents acteurs publics œuvrant dans le cadre de la lutte contre l’épidémie.

En vertu de ses missions de prévention et de gestion de crise, la DGSCGC assure notamment le pilotage de la gestion de crise au sein de la cellule interministérielle de crise (CIC), devenu centre interministériel de crise en avril 2020, ainsi qu’à travers le centre opérationnel de gestion interministérielle de crise (COGIC).

 

Les ForMiSC ont renforcé ces deux dispositifs afin d’apporter leur expertise en matière de préparation logistique des opérations. Elles ont également participé aux opérations de rapatriement et de mise en quarantaine des ressortissants français séjournant en Chine, et assuré plusieurs missions d’appui aux autorités préfectorales de Mayotte et la Réunion pour la planification des opérations. Enfin, un soutien des ForMiSC a été apporté à la zone de défense et de sécurité Nord pour la mise en place d’une cellule funéraire provisoire. Au plus haut de la crise, une centaine de personnes ont été mobilisées à ce titre.

La sécurité civile a par ailleurs été directement engagée dans des opérations de secours et de transport.

Pour les opérations visant à transporter un patient de son domicile jusqu’à un établissement de santé, diverses adaptations ont été nécessaires afin de veiller au respect des règles sanitaires. Les véhicules de secours à victimes (VSAV) et les véhicules de secours à blessés (VSAB) des formations militaires de la sécurité civile ont dû faire l’objet d’un ciblage afin de ne pas augmenter les risques de contamination. En d’autres termes, certains véhicules ont été spécifiquement mobilisés pour le transport de patients atteints du covid-19.

La sécurité civile a également participé, aux côtés du ministère des armées et du ministère de la santé, aux opérations de transport de patients et de matériels sur le territoire national, en vue d’éviter la saturation des hôpitaux, ainsi que les ruptures d’approvisionnement.

Au total, 256 missions, dont 226 transferts de patients, ont été réalisées par hélicoptère entre le 25 février et le 11 mai 2020, ce qui a représenté 331 heures de vol. Les avions (en grande partie les Dash) ont réalisé 12 missions de transport de matériels et de personnels médicaux (39 heures de vol entre le 17 mars et le 7 mai 2020).

Les sapeurs-pompiers relevant des SDIS ont, au-delà des interventions de secours, participé à de nombreuses missions liées à la gestion de crise sur le terrain, parmi lesquelles :

– la mise en place de structures d’accueil et d’orientation dans les centres hospitaliers ;

– le renforcement des centres de régulation d’appels du « 15 » ;

– le soutien aux missions opérationnelles des services mobiles d’urgence et de réanimation (SMUR) ;

– le renforcement des transports sanitaires ;

– les actions à destination des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) ;

– les prêts d’équipement ;

– la réalisation des tests et la préparation des centres de dépistage sérologique.

Dans l’ensemble, tous les acteurs concourant à la sécurité civile ont su s’adapter aux contraintes découlant de la crise. La continuité du service public a été assurée sur l’ensemble du territoire, ce qui démontre le professionnalisme des acteurs de terrain et l’efficacité du modèle français de sécurité civile.

B.   Un impact budgétaire encore incertain

La gestion de la crise sanitaire a engendré des surcoûts pour la DGSCGC. Néanmoins, de manière générale, le niveau d’activité n’a pas excédé celui observé à la même période l’an passé. L’intensité des aléas climatiques et l’évolution de l’épidémie durant la deuxième moitié de l’exercice budgétaire détermineront également les conditions dans lesquelles sera exécuté le programme 161.

En premier lieu, il convient de constater que la chaîne de dépenses n’a pas été affectée par la crise. Le traitement des factures et des commandes a pu être effectué, sauf certaines exceptions, comme l’atteste le taux d’exécution des crédits du programme à la fin du mois d’avril 2020 (33 % des crédits de paiement inscrits en loi de finances initiale).

1.   Les dépenses de titre II

En matière de dépenses de personnel, peuvent être distingués les surcoûts liés à la crise, et les moindres dépenses découlant de l’arrêt de certaines activités.

Ainsi les astreintes, les indemnités des services en campagne, le déploiement des centres de confinement, les primes versées aux agents mobilisés durant la crise engendrent une dépense supplémentaire de l’ordre de 531 000 euros.

Toutefois, le confinement a affecté le paiement des primes et indemnités, la gestion des comptes épargne-temps et le versement des indemnités des jurys de concours. Dans la mesure où des rappels sont effectués en mai et juin, ces aléas n’entraînent qu’un simple décalage de la dépense.

L’interruption des procédures de recrutement et la diminution de certaines rémunérations en raison du confinement engendrent également une moindre dépense, dont l’impact est davantage significatif. La DGSCGC indique ainsi qu’une sous-consommation de l’ordre de 1,47 million d’euros est observée au 30 avril 2020, par rapport à la trajectoire qui avait été établie dans le cadre du document prévisionnel de gestion des emplois et des crédits de personnel (DPGECP). Si un effet de rattrapage devrait être observé concernant les recrutements, la DGSCGC anticipe à ce stade une sous exécution des dépenses de personnel d’environ 1 million d’euros par rapport à la prévision initiale.

2.   Les dépenses hors titre II

Les dépenses de fonctionnement ont été affectées par la crise, pour les raisons précitées. De façon contre-intuitive, l’impact budgétaire n’est pourtant pas significatif en comparaison avec l’estimation établie en loi de finances initiale.

La DGSCGC indique que les dépenses engagées en raison de la crise s’élèvent à 2,2 millions d’euros, en grande partie du fait des coûts de fonctionnement du COGIC et du CIC, de l’intervention des moyens nationaux, et des contraintes induites par le plan de continuité d’activité.

Toutefois, les moyens de la sécurité civile n’ont pas été sur-sollicités, tant et si bien que la DGSCGC estime qu’elle disposait encore d’une marge de manœuvre pour effectuer davantage d’opérations de transport de patients ou de matériels. Le nombre total de missions réalisées entre le 24 février et le 5 mai 2020 est même inférieur à ce qui avait été observé sur la même période en 2019.

Activité des hélicoptères de la sécurité entre le 24 février
et le 5 mai en 2019 et 2020

 

2019

2020

Écart

Nombre total de missions

4 131

2 640

– 36 %

Nombre total de secourus

3 004

1 811

– 39 %

Nombre total d’heures de vol

3 247

2 275

– 30 %

Source : DGSCGC.

Cet écart s’explique en grande partie par le confinement, qui a entraîné la fermeture des lieux de loisir et la réduction du trafic routier. Par ailleurs, le besoin de transferts inter-hospitaliers n’a pas augmenté en 2020, en dépit des missions réalisées en lien avec la crise sanitaire. Par conséquent, le nombre de transferts « classiques » a drastiquement chuté durant la crise. Il n’est cependant pas à exclure que la levée du confinement occasionne un effet de compensation, notamment en raison de la reprise des activités de loisir.

Concernant le groupement d’avions (GASC), le nombre minimum d’heures de vol n’a pas été atteint en 2020, en raison d’une faible activité et d’un faible nombre de feux de forêt à ce stade. Aucune économie ne pourra en être retirée, car le marché de maintien en condition opérationnelle (MCO) prévoit le paiement d’un nombre minimal d’heures de vol au prestataire chargé de l’entretien des avions, indépendamment des circonstances opérationnelles.

Le MCO des hélicoptères est estimé à 1 million d’euros du fait des missions menées durant la crise. Toutefois la baisse du prix du carburant, découlant de la chute du prix du baril du pétrole, pourrait engendrer des économies. Il est également à noter que le prestataire chargé de l’entretien des hélicoptères, Airbus, a accumulé un certain retard dans la facturation du service fait. Le rattrapage des factures non adressées en 2019 pourrait, sans lien avec la crise, entraîner un coût supplémentaire pour l’exercice en cours.

Les dépenses d’intervention sont exécutées conformément à la prévision. La plupart des missions en lien avec l’épidémie ont été réalisées au profit des Agences régionales de santé (ARS) et du ministère des solidarités et de la santé. En conséquence, les dépenses afférentes aux colonnes de renfort n’ont pas été affectées.

Le directeur général de la sécurité civile et de la gestion des crises a toutefois signalé au rapporteur que les règles sanitaires constituent des contraintes importantes dans le cadre du pré-positionnement des colonnes de renfort. Ces dernières sont placées dans les territoires vulnérables aux feux de forêt afin d’intervenir rapidement. La fermeture des hôtels et des restaurants, ainsi que l’impossibilité de loger les forces en trop grand nombre dans une même pièce engendrent des coûts supplémentaires. Par ailleurs, à ce stade, les moyens matériels à la disposition de la sécurité civile ne permettent pas de pré-positionner l’ensemble des colonnes de renfort. Cette situation constitue un risque à l’égard des opérations de lutte contre les feux de forêt, auquel le rapporteur sera attentif.

Par ailleurs, la DGSCGC anticipe des surcoûts liés à la dégradation de la situation financière des associations de sécurité civile et de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris (BSPP). Ces derniers pourraient solliciter la DGSCGC pour obtenir des moyens budgétaires supplémentaires, bien qu’aucun crédit n’ait été inscrit en loi de finances initiale pour répondre à ce cas de figure.

Recommandation n° 4 : le rapporteur invite donc la DGSCGC à se rapprocher des associations et de la BSPP afin de mesurer dans les meilleurs délais leurs besoins de financement.

Les dépenses d’investissement du programme (hors crédits destinés à l’achat des avions) connaissent quant à elle une sous-exécution dont le montant n’a pas été précisé au rapporteur. Ce phénomène s’explique notamment par le retard pris en vue d’installer les sirènes participant au système d’information et d’alerte des populations (SAIP). En effet :

– la société Eiffage devait préparer l’installation de 20 sirènes à Mayotte au premier semestre 2020. En raison de la crise, ces opérations n’ont pas pu être menées, et la DGSCGC estime que le déploiement intégral des sirènes dans ce territoire ne pourra être envisagé qu’en 2021 ;

– aux Antilles, 12 sirènes devaient être installées, à la suite de l’installation prioritaire des sirènes à Mayotte. Par conséquent, les opérations d’installation sont également repoussées en 2021 ;

– en métropole, les installations restant à effectuer et les opérations de maintenance ont été suspendues entre le mois de mars et le 11 mai 2020.

3.   Les ressources extra-budgétaires du programme

Le mécanisme européen de protection civile et de l’aide humanitaire n’a pas été enclenché dans le cadre de la crise. Aucun versement de fonds de concours n’est donc attendu de la part de la Commission européenne en lien avec la crise sanitaire. Plus généralement, la DGSCGC n’anticipe aucune évolution des fonds de concours sur le programme.

En revanche, une diminution des rétablissements de crédits et attributions de produits encaissés sur le programme 161 est attendue. Chaque année, le programme bénéficie de crédits au titre des opérations menées par la DGSCGC dans le cadre du raccompagnement d’étrangers à la frontière, ou de l’organisation du Grand prix de Monaco. Toutefois, l’impact budgétaire de cette diminution sera relativement restreint, seuls quelques centaines de milliers d’euros étant habituellement versés sur le programme à ce titre.


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   EXAMEN EN COMMISSION 

Lors de sa réunion de 15 heures, le mercredi 3 juin 2020, la commission des finances, réunie en commission d’évaluation des politiques publiques, a entendu M. Bruno Duvergé, rapporteur spécial de la mission Sécurités, Sécurité civile.

 

 

La vidéo de cette réunion est disponible sur le portail dédié de l’Assemblée nationale. Le compte rendu est également lisible en ligne.

 

 


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   PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

 

Ministère de l’intérieur direction générale de la sécurité civile

– M. Alain Thirion, directeur général

 

Cour des comptes

– M. Jean-Michel Lair, conseiller maître

– Mme Margot Renault, auditrice

 


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   ANNEXE : SOURCES UTILISÉES

 

– Rapport annuel de performances sur la mission Sécurités, mai 2020 ;

– Cour des comptes, Note d’exécution budgétaire 2019 sur la mission Sécurités, mai 2020 ;

– Cour des comptes, Les personnels des services départementaux d’incendie et de secours et de la sécurité civile, mars 2019 ;

– Cour des comptes, Observations définitives, La Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises du ministère de l’intérieur, septembre 2019 ;

– Cour des comptes, Référé, La mise à jour du contrat général interministériel en matière de sécurité civile, octobre 2019.


([1]) La progression des dépenses de personnel s’explique par ailleurs par l’effet du glissement vieillesse-technicité (GVT) à hauteur de 0,9 million d’euros, et par diverses mesures de rebasage.

([2])  Cour des comptes, Les personnels des services départementaux d’incendie et de secours et de la sécurité civile, mars 2019.

([3]) Cour des comptes, note d’exécution budgétaire 2019 de la mission Sécurités, mai 2020.

([4])  Cour des comptes, Observations définitives, La Direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises du ministère de l’intérieur, septembre 2019.

([5]) Cour des comptes, Référé, La mise à jour du contrat général interministériel en matière de sécurité civile, octobre 2019.