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N° 3048

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 3 juin 2020

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LA PROPOSITION DE LOI

visant à sauver les secteurs de l’hébergement touristique, des cafés
et de la restauration en instaurant un taux réduit de taxe
sur la valeur ajoutée à 5,5 % jusqu’au 31 décembre 2020,

(n° 3005)

PAR Mme Brigitte KUSTER

Députée

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 Voir le numéro : 3005


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SOMMAIRE

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Pages

Avant-propos

I. pourquoi réduire le taux de tva applicable aux secteurs de l’hotellerie et de la restauration ? un mecanisme de soutien éprouvé             

A. les taux de tva dans l’hôtellerie et la restauration ont connu des variations récentes             

1. La restauration

2. L’hôtellerie

B. Un taux réduit rendu possible et donc appliqué au sein de l’Union européenne 

C. réduire le taux de TVA dans l’hotellerie et la restauration : des objectifs pluriels et ambitieux             

1. À qui profite une baisse de TVA ?

a. Un gain pour les consommateurs

b. Un gain pour les salariés et les chômeurs

c. Un gain pour les restaurateurs et les hôteliers

2. Un soutien à un tissu de TPE dense et fondamental pour l’économie française, qui aborde la crise déjà fragilisé             

a. Le secteur de l’hôtellerie-restauration est largement composé de TPE

b. Des entreprises déjà fragilisées : en 2019, les performances du secteur de l’hôtellerie ont été inférieures à celles constatées dans les autres pays de l’Union européenne             


II. pourquoi réduire maintenant le taux de tva dans l’hôtellerie et la restauration : une crise sanitaire aux conséquences économiques désastreuses pour ces secteurs             

A. La crise sanitaire liée à l’apparition du covid-19, sans précédent dans l’histoire contemporaine, porte en elle les germes d’une crise économique profonde             

B. Les mesures de police administrative PRISES PENDANT la crise sanitaire emportent des conséquences lourdes et immédiates pour le secteur de l’hotellerie restauration             

C. Les mesures d’urgence économique apparaissent insuffisantes pour préserver la survie de nombre d’entreprises du secteur de l’hotellerie restauration             

1. Le soutien à la trésorerie des entreprises par le report de paiement des échéances fiscalo-sociales ne concerne que certains prélèvements obligatoires             

2. La couverture de l’activité partielle a connu de compréhensibles retards de versement             

3. Le prêt garanti par l’État : un dispositif intéressant mais régulièrement refusé aux plus petites entreprises             

4. Le fonds de solidarité est d’une ampleur souvent insuffisante dans le secteur de l’hôtellerie restauration             

Travaux de la commission

Discussion générale

Examen des articles

 Article 1er : Instauration d’un taux réduit de TVA à 5,5 % pour les secteurs de l’hébergement et de la restauration jusqu’au 31 décembre 2020             

Article 2 : Rétablissement du taux intermédiaire de TVA pour les secteurs de l’hébergement et de la restauration au 1er janvier 2021             

Article 3 : Gage de la propposition de loi

Annexe : Liste des personnes auditionnées


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Mesdames, Messieurs,

Comptant près de 3 % de la population active française, le secteur du tourisme est le premier secteur créateur d’emploi – au demeurant non
délocalisables – en France.

Après avoir subi les effets des manifestations et des grèves à la fin de l’année 2019, la pandémie de Covid-19 frappe le secteur de l’hôtellerie et de la restauration de manière brutale : il s’agit de la partie de notre tissu économique la plus touchée, avec 90 % de l’activité à l’arrêt.

Au premier semestre 2020, les recettes des clientèles internationales et domestiques ont baissé de près de 45 milliards d’euros, par rapport aux 168 milliards d’euros de recettes en 2019.

Le secteur de l’hébergement touristique et de la restauration ont été les premiers à l’arrêt ; ils sont parmi les derniers à reprendre.

La baisse des capacités d’accueil due à la mise en œuvre des mesures sanitaires et la baisse de la demande – notamment dans les territoires les plus dépendants de la clientèle internationale – sont annonciatrices de temps difficiles pour ces secteurs déjà fragilisés.

Pour répondre à ces difficultés exceptionnelles et abaisser le point mort de rentabilité des entreprises du secteur de l’hôtellerie et de la restauration, il est proposé de diminuer temporairement le taux de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) applicable, de 10 % – pour l’essentiel – à 5,5 %.

Cette baisse de la TVA, étroitement circonscrite dans le temps, permettrait, pour un coût modeste pour les finances publiques, de sauver un grand nombre d’entreprises – donc d’emplois – en permettant la constitution de marges qui font actuellement cruellement défaut.


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   Avant-propos

I.   pourquoi réduire le taux de tva applicable aux secteurs de l’hotellerie et de la restauration ? un mecanisme de soutien éprouvé

A.   les taux de tva dans l’hôtellerie et la restauration ont connu des variations récentes

1.   La restauration

Avant le 1er juillet 2009, le taux de TVA sur les ventes à emporter dans la restauration était fixé à 5,5 %, tandis que les ventes à consommer sur place étaient assujetties à une TVA à 19,6 %. Les entreprises de la restauration traditionnelle, et plus particulièrement celles qui intervenaient sur le segment de l’entrée de gamme, n’avaient de cesse de dénoncer une concurrence déloyale de la part des entreprises réalisant des ventes à emporter. Ces entreprises avaient la théorie économique pour elles : dès lors que l’État n’a pas de motif d’intérêt général pour favoriser un type de restauration plutôt qu’un autre, la coexistence de deux taux de TVA différents sur des biens au moins partiellement substituables est dénuée de justification économique.

Une harmonisation des taux était donc souhaitable. Celle-ci pouvait se réaliser selon trois modalités : aligner le taux en vigueur pour les ventes à emporter sur celui des ventes consommées sur place ; aligner le taux en vigueur pour les ventes à consommer sur place sur celui des ventes à emporter ; aligner les taux affectant ces deux types de ventes sur un taux intermédiaire. 

Promise par M. Jacques Chirac lors de la campagne électorale précédant l’élection présidentielle de 2002, la baisse du taux de TVA dans la restauration n’avait pas pu être mise en œuvre faute d’accord au sein du Conseil de l’Union européenne.

Son successeur, M. Nicolas Sarkozy, s’était engagé à tenir cette promesse de campagne. Il est parvenu à emporter l’accord de ses collègues européens, lors du Conseil Écofin du 10 mars 2009, en présentant cette mesure comme un élément supplémentaire de la politique de relance à la suite de la crise financière d’alors.

Le choix réalisé en 2009 fut ainsi d’aligner le taux en vigueur pour les ventes à consommer sur place sur celui des ventes à emporter. Le Gouvernement de l’époque a souhaité mettre en œuvre cette promesse d’un taux réduit de TVA sans attendre la loi de finances de l’année, en utilisant le véhicule législatif du projet de loi de développement et de modernisation des services touristiques ([1]). Le but avoué était alors de faire en sorte que ce taux réduit s’applique dès la saison touristique estivale de 2009.

L’article 279 du code général des impôts fut donc enrichi, par ladite loi, d’un nouvel alinéa précisant que les ventes à consommer sur place, à l’exclusion de celles relatives aux boissons alcooliques – affectées du taux normal, de 20 % –, se verraient appliquer le taux réduit de 5,5 %.

En contrepartie, les professionnels de la restauration s’étaient engagés, au sein d’un « contrat d’avenir » signé au cours « d’États généraux de la restauration », à des contreparties en matière de baisses de prix, d’amélioration des conditions de rémunération et d’emploi, de création d’emplois et de modernisation des établissements.

La quatrième loi de finances rectificative pour 2011 a porté des dispositions créant un nouveau taux intermédiaire et y soumettant l’essentiel des opérations bénéficiant du taux réduit. Ce taux de TVA intermédiaire, fixé à 7 %, a été appliqué aux services de restauration, tant sur place qu’à emporter, par dérogation au principe général d’application du taux réduit de 5,5 % aux produits alimentaires ([2]).

La troisième loi de finances rectificative pour 2012 ([3]) a porté, à compter du 1er janvier 2014, le taux intermédiaire de 7 % à 10 %. Ce taux s’applique depuis aux secteurs de l’hôtellerie et de la restauration, notamment. Cette augmentation du taux a été justifiée, par le Gouvernement Ayrault, par le besoin de financement du crédit d’impôt pour la croissance et l’emploi (CICE), mesure phare du pacte de compétitivité. 

2.   L’hôtellerie

Du 14 juillet 1989 au 30 décembre 2011, le taux de TVA portant sur la fourniture de logements dans le secteur hôtelier et para-hôtelier – campings, maisons d’hôtes – était de 5,5 %. Ces prestations ont ensuite été taxées au taux intermédiaire, passant de 7 % en 2011 à 10 % au 1er janvier 2014, à l’instar de la restauration.

B.   Un taux réduit rendu possible et donc appliqué au sein de l’Union européenne

La directive 67/227/CE du 11 avril 1967 et la directive 77/388/CEE du 17 mai 1977 – modifiée à de nombreuses reprises – définissent un système commun aux États membres de l’Union européenne en matière de TVA ; elles en harmonisent l’assiette.

La directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 – dite « directive TVA », toujours en vigueur – a remplacé les deux précédentes directives.

Selon la directive TVA, les États membres peuvent avoir un taux normal supérieur ou égal à 15 %, et un ou deux taux réduits fixés au minimum à 5 %. La liste des catégories de biens et services susceptibles de se voir affecter d’un taux réduit est définie de manière limitative par le droit européen : si l’hôtellerie a, dès avant 2006 puis à compter de cette date, pu bénéficier d’un taux réduit ([4]), la restauration ne faisait pas partie de la liste de ces services.

Or, le Conseil ne peut prendre de décision, en matière d’harmonisation fiscale, qu’à l’unanimité. Ce verrou européen a sauté avec l’adoption de la directive 2009/47/CE du Conseil du 5 mai 2009 modifiant la directive 2006/112/CE en ce qui concerne les taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée.

Cette directive permet aux États d’appliquer un taux réduit de TVA aux SFIMO – les services à forte intensité de main-d’œuvre – jusqu’à la fin de l’année 2010 et sans limitation de durée pour les services de restauration.

La France a été très active dans la négociation de cet accord, qu’elle demandait depuis 2002, et peut désormais mettre en œuvre dans son droit national le taux réduit de TVA pour la restauration.

 

La TVA réduite dans la restauration : historique européen

4 juin 2002 : demande officielle de la France à la Commission européenne tendant à permettre le passage de la restauration au taux réduit de TVA.

25 juillet 2003 : proposition de la Commission européenne visant à autoriser le passage de la TVA à taux réduit dans la restauration dans tous les États membres de l’Union européenne. Proposition refusée par le Conseil.

2005 : proposition de la présidence luxembourgeoise d’un compromis prévoyant une baisse temporaire de TVA, puis propositions de la présidence britannique tendant à trouver un compromis. Ces propositions seront refusées par le Conseil.

Janvier 2006 : mission donnée par le Conseil de l’Union européenne à la Commission européenne de présenter avant la fin juin 2007 un rapport d’évaluation générale de l’impact des taux réduits appliqués à des services fournis localement, dont la restauration.

5 juillet 2007 : communication de la Commission européenne sur les taux réduits de TVA, favorable à de telles mesures pour les services à forte intensité de main-d’œuvre (SFIMO), dont la restauration, dans la mesure où cela ne perturbe pas le bon fonctionnement du marché intérieur.

7 juillet 2008 : présentation par la Commission européenne d’une nouvelle proposition de directive sur les taux réduits de TVA.

12 décembre 2008 : demande de la Présidence française de l’Union européenne d’aboutir au sein du Conseil Écofin à un accord.

20 janvier 2009 : annonce d’un accord entre la France et l’Allemagne sur l’instauration d’un taux réduit de TVA dans la restauration.

10 mars 2009 : accord unanime des États membres de l’Union européenne, au sein du Conseil Écofin, sur une nouvelle liste des produits et services pouvant bénéficier d’un taux réduit de TVA, incluant la restauration, qui se traduit par l’adoption de la directive 2009/47/CE du 5 mai 2009.

Ces possibilités de taux réduits en matière d’hôtellerie et de restauration sont largement utilisées par les États membres.

Exemples de taux de tva au sein de l’union européenne en 2020

(en pourcentage)

Catégorie/
Pays

France

Belgique

Espagne

Italie

Luxem-bourg

Pays-Bas

Pologne

Rouma-nie

Hôtellerie

10

6

10

10

3

9

8

5

Restauration

10

12

10

10

3

9

8

5

Source : commission des finances à partir des données de la Commission européenne.

C.   réduire le taux de TVA dans l’hotellerie et la restauration : des objectifs pluriels et ambitieux

1.   À qui profite une baisse de TVA ?

La TVA est le principal impôt en termes de rendement en France ; les ménages en sont les principaux contributeurs, pour environ 70 %, en ce qu’elle constitue un impôt qui pèse principalement sur leurs consommations finales ([5]).

Lors d’une baisse des taux de TVA, si le prix hors taxes n’est pas modifié, c’est mécaniquement le prix final qui diminue. Cette baisse entraîne une hausse de la demande. Plus l’élasticité-prix de la demande est élevée et plus la hausse de la demande corrélativement à une baisse des prix est importante.

Inversement, si c’est le prix final qui ne diminue pas lors d’une baisse des taux de TVA, alors le prix hors taxes augmente : les profits réalisés dans le secteur s’accroissent.

Dans les faits, le résultat d’une baisse du taux de TVA conduit à un prix intermédiaire entre l’ancien prix de vente et celui qui aurait été observé si le prix hors taxes n’avait pas changé. Ainsi, il se produit à la fois une baisse du prix d’achat pour les consommateurs et une hausse du prix de vente pour les producteurs. Le gain de la réforme est partagé entre consommateurs et vendeurs de biens et services ; les quantités échangées sur le marché considéré augmentent : des emplois sont créés.

a.   Un gain pour les consommateurs 

Parmi les gains des agents, celui des consommateurs ne peut être afférent qu’à une baisse du prix.

Le passage d’une TVA perçue au taux intermédiaire au taux réduit, si elle est intégralement répercutée sur les prix des produits auxquels elle s’applique, permet une baisse des tarifs TTC de 4,5 %.

Il convient de préciser que le calcul de cette baisse part du postulat que la diminution de TVA concernerait l’ensemble des produits vendus à l’occasion d’une consommation sur place, y compris donc les ventes d’alcool, ce qui ne fut pas le cas en 2009.

En 2009, l’impact de la baisse de la TVA sur les prix dans le secteur de la restauration a été de l’ordre de 2,5 %, soit environ 25 % de l’impact baissier directement affecté aux baisses de prix. Les montants directement restitués aux consommateurs ont été en moyenne de 590 millions d’euros par an sur la période allant du 1er juillet 2009 au 31 décembre 2011 ([6]) .

Enfin, il s’agit de noter que la transmission aux prix de l’ajustement fiscal est rapide : plus de 70 % de la répercussion totale est acquise au bout d’un mois ([7]).

b.   Un gain pour les salariés et les chômeurs

L’augmentation de l’emploi suit celle de l’activité, cette dernière étant liée à l’augmentation de la demande.

En France, en 2017, le secteur de la restauration employait 486 000 personnes tandis que celui de l’hôtellerie comptait 165 000 équivalents temps-plein ([8]). À eux deux, ces secteurs emploient 3 % de l’ensemble des salariés français.

Avant la réforme de 2009, des études économiques estimaient que pour un ajustement aux prix des deux tiers, la réforme conduirait à une hausse de la production de 4 % dans le secteur de la restauration ([9]).

Effectivement, dès l’automne 2009, le secteur de l’hébergement et de la restauration a recommencé à créer des emplois : après avoir détruit 15 000 emplois entre décembre 2007 et juin 2009, près de 48 100 emplois ont été créés entre octobre 2009 et juin 2011, dont plus de 30 000 la première année.

Ainsi, le bilan du contrat d’avenir dans la restauration, publié par le ministère de l’artisanat, du commerce et du tourisme en novembre 2012, concluait :

« les chiffres de l’emploi dans le secteur mettent en évidence un solde de création d’emplois supérieur aux objectifs de création d’emplois sur la période du contrat d’avenir avec plus de 50 000 emplois créés. » ([10])

S’agissant des salariés, la grille conventionnelle des salaires dans la restauration a été sensiblement revalorisée, de 3,04 %, entraînant un supplément de masse salariale de 504 millions d’euros par an ([11]). Ont également été mis en place deux jours fériés supplémentaires ainsi qu’une mutuelle de santé spécifique.

c.   Un gain pour les restaurateurs et les hôteliers

La mise en place d’un taux réduit sur les services de restauration a été autorisée par l’Union européenne car il n’existe pas, dans ce secteur, de risque de concurrence déloyale entre les prestataires de services : le secteur n’est pas soumis à la concurrence internationale. Si cela avait été le cas, une baisse de TVA aurait été assimilée, par la Commission, a une aide d’État contraire au marché intérieur.

Économiquement, abaisser la TVA dans un secteur non soumis à concurrence internationale revient à subventionner le secteur : la ventilation des gains pourra se répercuter, avant toute chose, sur la profitabilité des entreprises.

Mais, est-ce vraiment une mauvaise chose ?

Le soutien public à l’investissement dans l’hôtellerie et la restauration se justifie de deux façons.

En premier lieu, l’État impose aux entreprises de ces secteurs de coûteuses mises aux normes dans le domaine sanitaire ou de l’accès au public, qu’il peut ainsi indirectement favoriser.

En second lieu, même dans des secteurs très intensifs en travail comme ceux évoqués, le développement de l’emploi implique une accumulation du capital : il faut donc favoriser les conditions de cette accumulation afin d’accompagner la croissance de l’emploi.

Ainsi, la réduction de la TVA sert ces objectifs en permettant une augmentation des prix hors taxes : la réduction de TVA n’est pas intégralement répercutée sur les prix à la consommation et les salaires : elle se retrouve dans la hausse des prix – hors taxes, donc indolore pour le consommateur –, ce qui aboutit à une hausse des marges commerciales qui se retrouve, in fine, dans le résultat d’exploitation des entreprises.

De cette sorte, les entreprises du secteur sont en mesure de constituer – ou reconstituer – une épargne qui pourra, dans un second temps, être investie.

En outre, l’amélioration de la situation comptable d’une entreprise lui permet d’accéder plus facilement au crédit, car les banques lui font alors plus facilement confiance.

éVOLUTION DU résultat des entreprises de la restauration ENTRE 2007 et 2009

 

2008/2007

2008/2009

Nombre d’entreprises

4 667

4 889

Chiffre d’affaires

+ 1,1 %

+ 2,1 %

Marge brute

+ 0,8 %

+ 3,9 %

Valeur ajoutée

– 0,1 %

+ 4,7 %

Charges de personnel

+ 2,2 %

+ 2,8 %

Résultat courant

– 4,0 %

+ 5,4 %

Source : rapport de M. Houel, précité.

2.   Un soutien à un tissu de TPE dense et fondamental pour l’économie française, qui aborde la crise déjà fragilisé

En termes d’emplois, le secteur d’activité lié à l’hôtellerie et à la restauration est l’un des plus dynamiques de l’économie française sur le long terme. Ce résultat est d’autant plus précieux qu’il s’agit d’emplois qui ne sont pas délocalisables. Pour autant, ces performances sont fragiles et demeurent étroitement liées à la conjoncture.

a.   Le secteur de l’hôtellerie-restauration est largement composé de TPE

Par rapport à l’ensemble de l’emploi salarié, les salariés du secteur de l’hébergement et de la restauration exercent plus fréquemment leur activité dans de petits établissements : en 2017, 39,8 % se retrouvent dans des établissements de moins de 10 salariés (contre 19,1 % pour l’ensemble des secteurs) et 42,4 % dans des établissements de 10 à 49 salariés (contre 26 % pour l’ensemble des secteurs).

Ainsi, les établissements de moins de 50 salariés emploient plus de 4 salariés sur 5 ([12]).

En outre, le recours à l’apprentissage, aux contrats à durée déterminée et aux emplois saisonniers est plus élevé que dans l’ensemble de l’économie, et les salariés sont en moyenne plus jeunes que dans l’ensemble des secteurs.

Comme dans l’ensemble de l’économie, la très grande majorité des salariés de l’hébergement et de la restauration, hors intérim, sont en CDI (82,1 % contre 88,2 % pour l’ensemble des secteurs). Toutefois, le recours aux CDD et aux apprentis est plus important dans ce secteur (14,6 % de CDD contre 10,1 % pour l’ensemble des secteurs et 3,3 % d’apprentis contre 1,6 %). C’est surtout dans l’hébergement que le recours aux CDD est élevé puisqu’il représente plus d’un contrat sur cinq (22,2 %).

Le secteur de l’hébergement et de la restauration est un secteur qui emploie des salariés assez jeunes, puisqu’ils sont 39,7 % à avoir moins de 30 ans alors qu’ils ne sont que 20,6 % pour l’ensemble des salariés. L’âge moyen des salariés de l’hébergement et de la restauration est de 35,7 ans (35,6 ans pour les hommes et 35,8 ans pour les femmes) contre 41,1 ans tous secteurs confondus. Les salariés de la restauration sont en moyenne plus jeunes que ceux de l’hébergement (34,8 ans contre 38,4 ans) ([13]).

Aussi, l’emploi de ce secteur est-il tout particulièrement sensible aux évolutions de la conjoncture économique. Son public, fragile, fait partie des premiers frappés en cas de crise.

 

b.   Des entreprises déjà fragilisées : en 2019, les performances du secteur de l’hôtellerie ont été inférieures à celles constatées dans les autres pays de l’Union européenne

En 2019, en France métropolitaine, la fréquentation en nuitées des hébergements collectifs touristiques – hôtels, campings et autres hébergements collectifs touristiques, dits « AHCT » – n’a crû que de 1,3 %, à 442 millions de nuitées.

L’hôtel demeure le premier mode d’hébergement collectif, avec 215 millions de nuitées, devant l’hôtellerie de plein air – les campings – avec 129 millions de nuitées, puis les AHCT, avec 99 millions de nuitées.

Bien moins soutenue qu’en 2017 ou 2018, cette fréquentation a pâti des mouvements sociaux qui ont jalonné l’année 2019. L’Île-de-France, qui accueille le tiers des nuitées hôtelières métropolitaines, a vu la fréquentation diminuer de 0,7 %.

Au sein de l’Union européenne, le nombre de nuitées a augmenté de 2,4 % en 2019. L’Espagne demeure le pays européen le plus touristique, avec 470 millions de nuitées, devant l’Allemagne et l’Italie. La France n’est donc pas sur le podium.

Le poids des non-résidents représente une part importante des nuitées touristiques françaises, avec 31 % du total, ce qui rend le secteur, ici aussi, particulièrement sensible aux évolutions de la conjoncture internationale ([14]).

II.   pourquoi réduire maintenant le taux de tva dans l’hôtellerie et la restauration : une crise sanitaire aux conséquences économiques désastreuses pour ces secteurs

A.   La crise sanitaire liée à l’apparition du covid-19, sans précédent dans l’histoire contemporaine, porte en elle les germes d’une crise économique profonde

L’épidémie de Covid-19 provoque une double crise de portée mondiale, à la fois sanitaire et économique. Confrontées à un syndrome viral très contagieux et méconnu, dont le nombre de cas pathologiques lourds peut rapidement submerger les systèmes de santé, un grand nombre de nations ont choisi de limiter strictement la liberté d’aller et de venir, donc de travailler, de leur population. L’humanité est calfeutrée ; l’économie, amputée.

C’est ainsi qu’a été décrété ([15]), le 17 mars 2020, le confinement de la population française, destiné à contenir la progression de la maladie dans notre pays : tout déplacement hors de son domicile, sous réserve de quelques exceptions, a été interdit.

Puis, la loi du 23 mars 2020 ([16]) a déclaré l’état d’urgence sanitaire pour une période de deux mois.  

Aussi, l’ensemble de notre économie subit un choc brutal d’offre, en raison de la fermeture temporaire de nombreuses entreprises, de l’immobilisation de la main-d’œuvre, de périodes prolongées d’activité partielle, de perturbations dans les chaînes d’approvisionnement et, enfin, de la chute des exportations dans de nombreux domaines. Elle subit, de même, un choc d’offre substantiel en raison de la diminution de la consommation des ménages.

Le développement de l’épidémie ouvre donc une période à la fois récessive et incertaine pour l’économie mondiale, donc nationale. Il est acquis que le choc économique sera d’une ampleur sans réel précédent.

Pour le Fonds monétaire international, il s’agit de la « pire crise économique depuis 1929 » ([17]) : la croissance du PIB mondial pourrait reculer de 3 %, tandis que l’économie européenne serait frappée de plein fouet par une récession (– 7,5 %).

La deuxième loi de finances rectificative pour 2020 ([18]) est construite sur une hypothèse de récession nationale de 8 % et d’un déficit public de 9,1 %.

B.   Les mesures de police administrative PRISES PENDANT la crise sanitaire emportent des conséquences lourdes et immédiates pour le secteur de l’hotellerie restauration

L’arrêté du 14 mars 2020 ([19]) a ordonné la fermeture des commerces non essentiels. Ainsi, de très nombreux commerces, au premier chef desquels les restaurants, qui sont des « établissements recevant du public », ont dû brutalement stopper leur activité.

Au total, plus de 1,8 million de salariés ont été directement touchés, et 330 000 indépendants ont vu leurs commerces fermés administrativement.

Avec près de 590 000 salariés et 120 000 non-salariés impactés, le secteur de la restauration traditionnelle – hors restauration rapide – est « le secteur le plus touché par la fermeture administrative » ([20]) .

Source : commission des finances à partir des données OFCE.

En effet, 18,5 millions d’emplois ne peuvent prétendre au télétravail : c’est évidemment le cas des métiers de l’hôtellerie et de la restauration.

Dans sa dernière note de conjoncture en date du 7 mai 2020 ([21]), l’INSEE évalue à – 90 % la perte d’activité du secteur de l’hébergement et de la restauration. C’est, là encore, le secteur le plus touché.

Si la perte d’activité n’est pas de 100 % du fait de la subsistance possible de vente à emporter et de livraison, cet expédient n’est pas à même de soulager économiquement les restaurateurs. De même, si les hôtels ne sont pas touchés par l’obligation de fermeture administrative, leur activité est, dans les faits, considérablement obérée du fait des limitations de circulations des nationaux, et de l’interdiction quasi complète de la venue de clientèle étrangère. Les éventuels services de restauration sont demeurés fermés durant la période.

Il convient d’ajouter à cela que les assurances « pertes d’exploitation » ne semblent pas couvrir pas les risques pandémiques, c’est-à-dire à même d’entraîner un dommage non matériel et systémique.

Certaines régions, plus touristiques que d’autres, sont particulièrement touchées. Il en est ainsi de la région Provence-Alpes-Côte-D’azur et de la Corse, dont les structures sectorielles les exposent plus qu’aucune autre à cette crise, ce d’autant qu’au « sein des secteurs les plus touchés, les petits établissements sont plus fréquents que dans le reste de l’économie (…). Ainsi, dans les secteurs où l’impact est le plus fort, 78 % des salariés travaillent dans un établissement de moins de 50 salariés, contre moins de la moitié pour l’ensemble des salariés » ([22]) .

C.   Les mesures d’urgence économique apparaissent insuffisantes pour préserver la survie de nombre d’entreprises du secteur de l’hotellerie restauration

Face à la gravité de la situation, le Gouvernement a apporté des réponses inédites, tant dans leur structure que dans leur ampleur. Elles demeurent pourtant insuffisantes.

1.   Le soutien à la trésorerie des entreprises par le report de paiement des échéances fiscalo-sociales ne concerne que certains prélèvements obligatoires

Le Gouvernement a annoncé le 16 mars dernier le report des échéances de paiement des cotisations sociales et des prélèvements fiscaux pour les entreprises, pour les mois de mars et d’avril.

Ce report concerne principalement l’impôt sur les sociétés, plus marginalement la taxe sur les salaires. La TVA n’est pas concernée.

2.   La couverture de l’activité partielle a connu de compréhensibles retards de versement

Le dispositif d’activité partielle, prévu par les articles L. 5122-1 à
L. 5122-5 du code du travail, s’adresse aux entreprises qui subissent une réduction de la durée habituelle du temps de travail de leur établissement ou une fermeture temporaire de tout ou partie de leur établissement dès lors qu’elles ont pour cause une circonstance exceptionnelle, comme une conjoncture économique ou un sinistre.

Les salariés en activité partielle reçoivent une indemnité horaire, versée par leur employeur, d’un montant égal à 70 % de leur salaire brut horaire, fixé au niveau réglementaire à l’article R. 5122-18 du code du travail, soit 84 % de leur salaire net horaire. En contrepartie, l’employeur perçoit une allocation financée conjointement par l’État et par l’Unédic (assurance chômage).

Simplifié par la première loi de finances rectificative pour 2020, le dispositif a également été étendu : pour les demandes d’allocation au titre des placements des salariés en activité partielle à compter du 1er mars 2020, le montant horaire de l’allocation est égal au montant de l’indemnisation que verse l’employeur au salarié, dans la limite du montant de l’indemnité à verser à des salariés percevant une rémunération brute de 4,5 SMIC.

Si les services de l’État ont été très fortement mobilisés pour servir ce dispositif dans les plus brefs délais, la demande considérable a notablement engorgé les services.

En effet, au 19 mai 2020, plus de 1 315 000 demandes d’autorisation préalable d’activité partielle avaient été déposées, concernant plus de 1 030 000 entreprises et 12 700 000 salariés ([23]) .

Cet engorgement des services a pu retarder la perception, par les entreprises, du remboursement des salaires versés en l’absence d’activité. Ainsi, des efforts de trésorerie ont été consentis par des entreprises dont l’activité ne permettait plus de générer des profits.

3.   Le prêt garanti par l’État : un dispositif intéressant mais régulièrement refusé aux plus petites entreprises

La crise actuelle se caractérise par une crise de trésorerie pour les entreprises : la baisse – sinon la suppression – de leurs recettes se conjugue avec le maintien de charges fixes ; leur trésorerie, qui n’est pas conçue pour supporter un déséquilibre de cette ampleur, connaît une baisse aiguë.

Le Gouvernement a donc souhaité faire en sorte que les canaux de financement demeurent ouverts, via des prêts de trésorerie à court terme permettant d’éponger les pertes subies.

Le mécanisme de la garantie permet à l’État de partager le risque pris par l’établissement de crédit.

Pour autant, les établissements prêteurs ont un rôle central dans la distribution de ces prêts garantis par l’État : ce sont elles qui, in fine, acceptent ou refusent les demandes de prêt des entreprises.

Or, il ressort des observations de terrain qu’un certain nombre de petites entreprises du secteur de l’hôtellerie restauration ont été confrontées à des refus de prêt, fût-il garanti par l’État à 90 %.

Ainsi, 3 700 dossiers ont été jugés éligibles par le médiateur du crédit pour le seul mois d’avril 2020, soit plus de 3 fois plus que sur l’ensemble de l’année 2019, où 1 005 l’avaient été. Comme le souligne la Banque de France, « Les entreprises concernées demeurent très majoritairement des TPE (moins de 10 salariés) dont la situation est souvent dégradée et qui sont confrontées à des refus de prêts garantis par l’État (PGE) » ([24]).

En outre, si le bien-fondé d’une telle mesure d’urgence n’est pas directement questionné, le risque du surendettement pour ces sociétés se posera inévitablement l’an prochain avec des bilans significativement accrus en face de free cash flow opérationnels réduits.

4.   Le fonds de solidarité est d’une ampleur souvent insuffisante dans le secteur de l’hôtellerie restauration

Le Gouvernement a créé, sur habilitation parlementaire, un fonds de solidarité temporaire dont l’objectif est de verser des aides directes ([25]).

Le fonds de solidarité s’adresse aux très petites entreprises, aux travailleurs indépendants, aux micro-entrepreneurs et aux professions libérales.

Ainsi, sont éligibles au fonds les entreprises, définies comme des personnes physiques ou morales de droit privé résidentes fiscales françaises et exerçant une activité économique, satisfaisant aux conditions cumulatives suivantes :

– l’effectif de l’entreprise est inférieur ou égal à dix salariés ;

– le chiffre d’affaires du dernier exercice clos est inférieur à un million d’euros ou, pour les entreprises n’ayant pas encore clos d’exercice, le chiffre d’affaires mensuel moyen sur la période comprise entre la date de création de l’entreprise et le 29 février 2020 est inférieur à 83 333 euros, montant correspondant à un douzième d’un million d’euros ;

– le bénéfice imposable du dernier exercice clos, majoré le cas échéant des sommes versées au dirigeant, est inférieur à 60 000 euros – ou, pour les entreprises n’ayant pas encore clos d’exercice, le bénéfice imposable à la date du 29 février, sur leur durée d’exploitation et ramené à douze mois est inférieur à 60 000 euros.

Le fonds verse aux entreprises éligibles deux types d’aides : une aide d’un montant maximal de 1 500 euros pour les entreprises subissant une baisse importante de leur chiffre d’affaires et, éventuellement, une aide complémentaire forfaitaire de 2 000 euros dont l’instruction des demandes est confiée aux régions.

Sont éligibles au premier volet du dispositif :

– d’une part, les entreprises qui ont fait l’objet d’une interdiction d’accueil du public intervenue entre le 1er mars et le 31 mars 2020 ;

– d’autre part, les entreprises dont le chiffre d’affaires a subi une baisse importante au mois de mars 2020. Il s’agit des entreprises qui ont subi une perte de chiffre d’affaires d’au moins 50 % entre le 1er mars et le 31 mars 2020 par rapport à la même période de l’année précédente. Pour les entreprises créées après le 1er mars 2019, le chiffre d’affaires de référence est le chiffre d’affaires mensuel moyen sur la période comprise entre la date de création de l’entreprise et le 29 février 2020. Dans sa version initiale, le décret du 30 mars avait fixé à 70 % le seuil de baisse de chiffre d’affaires ouvrant droit au bénéfice de cette aide. Cette condition a en définitive été assouplie, ce seuil ayant été abaissé à 50 % par le décret du 2 avril.

L’aide versée s’élève à 1 500 euros pour les entreprises qui ont subi une baisse de chiffre d’affaires supérieure ou égale à 1 500 euros. Pour les entreprises dont la baisse du chiffre d’affaires a été inférieure à 1 500 euros, le montant de l’aide est égal à leur perte de chiffre d’affaires.

Le deuxième volet du fonds de solidarité, instruit par les régions, complète le dispositif, mais n’a été ouvert que le 15 avril 2020.

Le 14 mai 2020, le Premier a annoncé, lors de l’annonce du plan de relance pour le secteur du tourisme, que le fonds de solidarité restera ouvert jusqu’à la fin de l’année 2020. En outre, les entreprises qui ont jusqu’à 20 salariés et deux millions d’euros de chiffre d’affaires pourront bénéficier de cette aide, avec un plafond fixé à 10 000 euros.

Ces mesures vont dans le bon sens.

Pour autant, le fonds de solidarité ne permet de compenser qu’une petite partie de la perte d’exploitation subie par les petits entrepreneurs du secteur de l’hôtellerie-restauration, surtout à la date du 20 mai 2020, où le montant maximal de l’aide est de 1 500 euros.

En outre, le choix d’un seuil de chiffre d’affaires, en haut du compte de résultat, est structurellement défavorable au secteur de l’hôtellerie restauration, aux marges faibles.

C’est parce que l’ensemble des dispositifs actuels ne sauraient suffire à apporter une réponse à la situation critique dans laquelle se trouve le secteur, que la présente proposition de loi propose une baisse temporaire du taux de TVA ci-après exposée.

 

 

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   Travaux de la commission

   Discussion générale

Au cours de sa séance du 3 juin 2020, la commission a examiné la proposition de loi.

Mme Brigitte Kuster, rapporteure. Ma collègue Émilie Bonnivard, cosignataire de cette proposition de loi avec Vincent Rolland, aurait souhaité en être la rapporteure et vous prie de l’excuser de ne pouvoir être parmi nous aujourd’hui. Pour sauver le secteur de l’hébergement touristique, des cafés et de la restauration, nous proposons d’instaurer un taux réduit de TVA à 5,5 % jusqu’au 31 décembre 2020.

Après avoir subi les effets des manifestations et des grèves à la fin de l’année 2019, le secteur de l’hôtellerie et de la restauration est brutalement frappé par la pandémie de covid-19. C’est le secteur le plus touché de notre économie, puisque 90 % de l’activité est à l’arrêt. Je rappelle que le tourisme emploie près de 3 % de la population active à des postes qui ne peuvent en outre être délocalisés. Au premier semestre 2020, ses recettes ont déjà diminué de 45 milliards d’euros.

L’hébergement touristique et la restauration, premiers secteurs mis à l’arrêt, seront parmi les derniers à reprendre. La réduction des capacités d’accueil due à la mise en œuvre des mesures sanitaires et la baisse de la demande, notamment dans les territoires dépendants de la clientèle internationale, annoncent des temps difficiles.

Pour pallier ces difficultés exceptionnelles, nous proposons de diminuer le taux de TVA à 5,5 % pour les entreprises de l’hôtellerie et de la restauration jusqu’à la fin de l’année 2020. Cette mesure sauverait un grand nombre d’entreprises, donc d’emplois, en permettant de reconstituer la trésorerie qui leur fait actuellement défaut.

La réduction du taux de TVA est un mécanisme de soutien déjà éprouvé : en 2009, le taux de TVA pour les ventes à consommer sur place a été aligné sur celui de la vente à emporter. Il avait alors été décidé de ne pas attendre le projet de loi de finances de l’automne, mais de voter un projet de loi spécifique afin d’appliquer la mesure pendant la saison touristique estivale. Notre logique est identique.

Ce taux réduit est rendu possible dans l’Union européenne (UE) par la directive TVA. Les États membres peuvent déterminer un taux normal supérieur ou égal à 15 %, et un ou deux taux réduits fixés au minimum à 5 %. Cette faculté est largement utilisée par les États membres pour l’hôtellerie et la restauration, qui sont admissibles à un taux réduit ; notre proposition est donc parfaitement conforme au droit européen.

Le taux de TVA réduit dans la restauration sert des objectifs ambitieux. Il améliorerait la rentabilité des restaurants et hôtels alors que la distanciation physique réduit le nombre de couverts et que l’État impose de coûteuses mises aux normes sanitaires. Il permettrait de soutenir un tissu de très petites entreprises (TPE) dense, fondamental pour l’économie française, mais qui aborde la crise fragilisé.

En termes d’emploi, le secteur de l’hôtellerie et de la restauration est l’un des plus dynamiques de l’économie française – il pourvoit plus d’un million d’emplois d’autant plus précieux qu’ils sont non délocalisables –, mais aussi l’un des plus fragiles puisque ses performances demeurent étroitement liées à la conjoncture. Les effectifs y sont assez jeunes : 40 % ont moins de 30 ans, et l’âge moyen est de 35,7 ans.

En 2019, les performances du secteur ont été inférieures en France à celles constatées dans les autres pays de l’Union européenne. Le mouvement des gilets jaunes et les grèves contre la réforme des retraites ont réduit la fréquentation des hôtels et campings. Avec 31 % de clientèle étrangère, le secteur est très sensible aux évolutions de la conjoncture internationale.

Les conséquences économiques de la crise sanitaire sont désastreuses. La fermeture de tous les restaurants a été décrétée le 14 mars 2020, et toute la population française a été confinée le 17 mars. Avec 600 000 salariés et 120 000 non-salariés, le secteur de la restauration traditionnelle, hors restauration rapide, est le plus touché par les fermetures administratives. Parmi les 18,5 millions d’emplois qui ne peuvent fonctionner en télétravail figurent évidemment ceux de l’hôtellerie et de la restauration. Dans sa note de conjoncture du 7 mai 2020, l’INSEE évalue la perte d’activité du secteur à 90 %. Les assurances pour perte d’exploitation ne semblent pas couvrir les risques pandémiques, de nature à entraîner un dommage non matériel et systémique.

Face à la gravité de la situation, le Gouvernement a apporté des réponses inédites par leur structure et leur ampleur, mais il s’agit de mesures d’urgence économique, insuffisantes pour préserver la survie de nombreuses entreprises de ce secteur.

Pour soutenir les trésoreries, il a annoncé le report des échéances de paiement des cotisations sociales et des prélèvements fiscaux des entreprises au titre des mois de mars et avril. Ce report concerne principalement l’impôt sur les sociétés, plus marginalement la taxe sur les salaires, mais pas la TVA.

La couverture de l’activité partielle a connu de nombreux retards de versement. Bien que les services de l’État aient été mobilisés pour servir ce dispositif dans les plus brefs délais, ils ont été engorgés par la demande, considérable. Au 19 mai, plus de 1 315 000 demandes d’autorisation préalable d’activité partielle ont été déposées, concernant plus de 1 030 000 entreprises et 12 700 000 salariés. Cette saturation des services a retardé le remboursement des salaires versés en l’absence d’activité. Des efforts de trésorerie ont donc été consentis par les entreprises alors qu’elles ne généraient plus de profits.

Le prêt garanti par l’État (PGE) est un dispositif intéressant, mais il a régulièrement été refusé aux plus petites entreprises. Le Gouvernement a maintenu les canaux de financement par des prêts de trésorerie à court terme permettant d’éponger les pertes subies. Néanmoins, de nombreuses petites entreprises du secteur de l’hôtellerie et de la restauration ont subi des refus de prêts, même garantis par l’État à 90 %. Ainsi, 3 700 dossiers ont été jugés éligibles par le médiateur du crédit pour le seul mois d’avril 2020, trois fois plus que pour toute l’année 2019. Comme le souligne la Banque de France, les entreprises concernées demeurent très majoritairement des TPE à la situation dégradée confrontées à des refus de PGE. Si le bien-fondé d’une telle mesure d’urgence n’est pas en question, le risque du surendettement de ces sociétés se posera inévitablement l’an prochain.

Le fonds de solidarité temporaire, permettant de verser des aides directes, n’est pas d’une ampleur suffisante pour le secteur touristique. Il est destiné aux TPE, aux travailleurs indépendants, aux micro-entrepreneurs et aux professions libérales. En présentant le plan de relance pour le secteur du tourisme, le 14 mai, le Premier ministre a annoncé que ce fonds resterait ouvert jusqu’à la fin de l’année 2020 et que son bénéfice serait élargi aux entreprises de moins de 20 salariés et 2 millions d’euros de chiffre d’affaires, pour un montant maximum de 10 000 euros. Si ces mesures vont dans le bon sens, le fonds de solidarité ne permettra de compenser qu’une part minime de la perte d’exploitation subie par les petits entrepreneurs du secteur de l’hôtellerie-restauration, surtout jusqu’au 20 mai 2020, puisque le montant maximum de l’aide est de 1 500 euros.

L’ensemble de ces dispositifs ne suffira pas pour répondre à la situation critique dans laquelle se trouve le secteur de l’hôtellerie et de la restauration. C’est pourquoi nous proposons une baisse de 4,5 points du taux de TVA, permettant aux acteurs du secteur de reconstituer leur trésorerie sans augmenter leurs prix, pour ne pas pénaliser leur fréquentation et le pouvoir d’achat de leur clientèle.

M. le président Éric Woerth. Cette proposition permettrait de reconstituer les marges et de gommer en partie les effets de trois mois de fermeture. Par ailleurs, la TVA des restaurateurs a déjà été réduite.

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général. Votre proposition nous permet de poursuivre le débat sur les mesures propres à soutenir la trésorerie des entreprises, particulièrement dans le domaine de la restauration. En portant le taux de TVA à 5,5 % jusqu’à la fin de l’année, votre objectif n’est pas de faire baisser les prix mais de permettre à ce secteur de restaurer des marges.

La baisse du taux ou l’exonération de TVA est un choix que n’ont pas fait le Gouvernement et la majorité pour le plan de soutien à l’économie. De fait, agir sur la valeur ajoutée est un geste d’accompagnement de l’activité. Or, lors de cette crise, nous avons volontairement empêché des entreprises de fonctionner, par fermeture administrative. Pour un professionnel de la restauration et l’hôtellerie, pendant cette fermeture, la priorité doit être de minimiser les charges – si rien ne rentre, rien ne sort. C’est le sens des mesures prises auprès des bailleurs, et de l’annulation des charges patronales et salariales ainsi que fiscales. Le soutien de la trésorerie des entreprises a été assuré par le fonds de solidarité ou les prêts garantis par l’État, ou par transfert des salaires avec le mécanisme d’activité partielle. Le secteur de l’hôtellerie et de la restauration a bénéficié à plein de ces dispositifs, et il continuera d’en bénéficier plus longtemps, car la fermeture administrative qui lui est imposée sera plus longue.

Le plan de relance pour l’hôtellerie et la restauration de 18 milliards d’euros permettra de prolonger l’activité partielle pour la durée de la fermeture administrative, sans reste à charge pour les entreprises. Le fonds de solidarité est également prolongé et sera rechargé. Les prêts garantis par l’État seront calibrés sur des bases saisonnières pour les professionnels de l’hôtellerie-restauration. Jusqu’au prochain projet de loi de finances, nous devons avoir pour obsession de renflouer la trésorerie de ces structures.

Il est toujours bon de redonner des marges à des professionnels qui ont subi une crise, certes. Mais il faut aider ces entreprises, à ce stade, à traverser une période sans activité ou marquée par une reprise très lente. Cet été, même dans les zones vertes, les mesures de distanciation réduiront les revenus des restaurants. Passer le taux de TVA de 10 % à 5,5 % ne suffirait donc pas pour rétablir les marges. Il est plus pertinent de prolonger le fonds de solidarité, les prêts garantis par l’État et le soutien à l’activité partielle afin d’adapter les effectifs à la fréquentation. L’État doit prolonger les mesures qui fonctionnent ; la baisse de la TVA n’est pas le bon outil aujourd’hui.

Dernier point de détail : il convient de vérifier la possibilité de réduire la TVA sur les boissons alcoolisées au regard du droit de l’Union européenne.

M. le président Éric Woerth. D’une certaine façon, les marges, c’est de la trésorerie.

Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas. Les conséquences de la crise du covid-19 sont telles que certains syndicats professionnels considèrent que, pour les cafés, hôtels et restaurants, 2020 sera une année perdue. Selon le Premier ministre, le tourisme fait face à la pire épreuve de son histoire moderne.

Réduire de 4,5 points le taux de TVA sur le prix d’un café me semble timide au regard des enjeux de trésorerie, des besoins d’investissements en matière sanitaire et des problèmes de gestion de ressources humaines dans ce secteur.

L’ampleur historique de la tâche appelle une réponse massive. C’est le fil conducteur du Gouvernement, dont le plan de relance de 18 milliards d’euros pour le secteur du tourisme s’ajoute à toutes les mesures décidées depuis le début du confinement : prolongation jusqu’à la fin 2020 et élargissement de l’éligibilité au fonds de solidarité pour les entreprises du secteur touristique ; report des charges locatives, d’eau et d’énergie ; exonération de cotisations sociales et patronales pour les TPE-PME ; possibilité laissée aux collectivités territoriales d’alléger la taxe de séjour sur les hébergements touristiques et de réduire des deux tiers la cotisation foncière des entreprises du secteur touristique ; maintien de l’indemnisation exceptionnelle du chômage partiel ; ouverture de l’accès au deuxième étage du fonds de solidarité pour les entreprises qui ont bénéficié de PGE.

La cohérence doit nous guider au sein de cette commission. L’adoption de mesures disparates peut conduire à des dispositifs redondants ou à des omissions.

Nous n’avons pas à rougir de notre action, et nous ne croyons pas en l’efficacité d’une baisse de TVA. Le groupe La République en marche ne votera pas cette proposition de loi.

M. le président Éric Woerth. Personne ne prétend que l’aide à apporter à ce secteur se résume à une baisse de la TVA.

Mme Véronique Louwagie. Notre pays a connu une récession de 5,6 % au premier trimestre, la pire de tous les États européens, et le nombre de chômeurs a augmenté de 850 000 en avril. Le plan de relance doit être à la hauteur.

Nous saluons les dispositifs déjà décidés : chômage partiel, PGE, fonds de solidarité, report puis annulation des charges. Mais les entreprises sont sous perfusion : le PGE est un emprunt pour financer un déficit, et il faudra le rembourser. Les entreprises ont des mois et des années difficiles devant elles. La reprise se fera dans des conditions compliquées pour celles de la restauration et du tourisme : les règles de distanciation et les mesures sanitaires auront un coût. La réduction de 4,5 points du taux de TVA augmenterait d’autant les marges et permettrait de faire face aux surcoûts de façon proportionnelle à l’activité.

Cette mesure aiderait les entreprises à redémarrer, et limiter sa durée au 31 décembre 2020 est sage.

Mme Sarah El Haïry. Pour le groupe MODEM, la TVA n’est pas le bon levier. Le vrai problème pour les entreprises du secteur du tourisme, c’est la consolidation des fonds propres, et nous appelons à une mobilisation plus forte des régions et des collectivités territoriales à ce sujet.

De plus, les prix à la carte n’étant pas encadrés en France, la baisse de TVA sera principalement supportée par les consommateurs. La réponse tient au plan de relance globale. Ce sont des actions de haut de bilan qui sont requises.

Mme Claudia Rouaux. Les restaurateurs ont envie de rouvrir. Un restaurant qui fonctionne en servant beaucoup de couverts devra reconstituer ses marges. Les prêts ne sont pas une solution idéale dans la mesure où ils devront être remboursés. La baisse de TVA est un moyen d’améliorer les marges.

Le chômage partiel est un pis-aller dans le secteur de la restauration, car tous ceux qui complètent leurs revenus avec les pourboires doivent supporter une baisse de revenus. Je soutiens donc cette proposition.

M. François Pupponi. Je m’étonne de la position de la majorité. Il faut un plan stratégique pour sauver le secteur de l’hôtellerie-restauration où les situations sont multiples. Le PGE ne convient pas à tous : ce n’est pas une solution pour ceux qui ont déjà des difficultés à rembourser leurs emprunts en cours. La TVA peut être un bon moyen, mais ce n’est pas le seul ; il doit s’insérer dans un arsenal juridique et budgétaire complet s’appuyant sur une analyse des situations, surtout dans les territoires très touristiques où la saison sera très courte – de juillet à septembre, contre avril à octobre en temps normal – et la fréquentation des touristes étrangers nulle.

Toutes les bonnes propositions sont à retenir. Face à la gravité de la situation, nous devons être capables d’entendre les propositions des uns et des autres afin de sauver ce secteur important de l’économie française.

Mme Émilie Cariou. Le chômage partiel a tout de même étatisé une partie des salaires en France. La TVA, qui est supportée par le consommateur, doit entrer à un moment donné dans les caisses de l’État.

Nous n’avons aucune certitude que la marge dégagée par la baisse de la TVA viendra augmenter les salaires. Si on entre dans ce genre de logique, il faut fixer des conditions.

Cette proposition de loi procède certes d’une bonne intention, mais, à ce stade, nous ne la voterons pas. Laissons l’activité redémarrer et appliquons d’abord tous les autres dispositifs que mes collègues ont rappelés. Nous aurons d’autres occasions d’adaptation, à travers un troisième projet de loi de finances rectificative et d’autres textes qui arriveront en fin d’année.

M. Jean-Paul Dufrègne. On peut s’interroger sur la pertinence d’une baisse uniforme du taux de TVA dans l’ensemble du secteur de l’hébergement et de la restauration. L’hôtellerie de luxe, par exemple, pourrait être exclue de ce dispositif.

À l’évidence, une mesure de baisse de la TVA ne suffira pas à sauver ce secteur, qui a besoin d’aides financières directes et surtout d’un redémarrage de l’activité, donc d’une fréquentation en hausse.

Le Gouvernement a avancé l’idée de réformer l’Agence nationale pour les chèques-vacances afin d’en ouvrir l’accès à davantage de salariés que les 4 millions actuels, notamment dans les petites et moyennes entreprises. À nos yeux, c’est une piste prometteuse. Permettre à davantage de Français de partir en vacances est une manière de jouer sur les deux tableaux : progrès social et redressement du secteur.

Cette proposition de loi, bien qu’elle comporte des insuffisances, permettrait d’agir rapidement sur les marges des entreprises concernées. Nous la voterons.

Mme Brigitte Kuster, rapporteure. J’avais moi-même bien pris soin de mentionner les mesures gouvernementales et de les saluer. Je crois les avoir présentées de façon assez objective, en soulignant leurs apports mais aussi leurs insuffisances. Mme Louwagie et M. Pupponi l’ont fait observer, il s’agit, non pas d’opposer une mesure à une autre, mais de s’inscrire dans un plan d’ensemble, dans une complémentarité de gestes en faveur d’un secteur dont l’activité a été touchée de manière tout à fait hors norme, à 90 %.

Avez-vous rencontré les hôteliers et les restaurateurs pour dire, sur le ton du chipotage, que ce n’est pas en abaissant la TVA sur le café que l’on réglera les choses ? Ces professionnels sont exsangues, et certains vont mettre la clé sous la porte. Ils nous demandent un accompagnement complémentaire. Ils n’ont pas à faire de marges, dites-vous, comme s’ils demandaient le beurre et l’argent du beurre : ce ne serait, pour eux, qu’un moyen de refaire de la trésorerie et d’avoir un peu d’oxygène supplémentaire. Alors que tous n’ont pas accès aux dispositions prises par le Gouvernement, que certains n’ont pas pu obtenir un PGE, cette mesure-là aurait le mérite de tous les concerner. Quant à exclure du dispositif l’hôtellerie de luxe, monsieur Dufrègne, on ne le pourrait pas pour une raison constitutionnelle.

Ce secteur est au bord du gouffre, et ce sont des milliers d’emplois qui risquent de passer à la trappe. On ne sait pas si la clientèle, et notamment la clientèle internationale qui représente 31 % du chiffre d’affaires, sera au rendez-vous cet été. On ne peut pas dire que ce secteur va redémarrer comme avant, car il va devoir supporter des frais supplémentaires liés aux contraintes sanitaires. Face à toutes ces difficultés, comment ne pas accepter de leur donner un peu d’oxygène supplémentaire, objectif de cette proposition ?

L’argent a certes un coût pour tout le monde, mais si vous n’aidez pas maintenant ces entreprises, c’est l’État qui, in fine, devra récupérer les chômeurs, les pertes d’exploitation ; c’est l’État qui sera appelé à la rescousse pour sauver les milliers d’entreprises qui vont faire faillite. Celles-ci ont besoin d’un geste fort et, dans un plan de relance que j’ai salué et que je trouve important, nous proposons un outil supplémentaire pour répondre aux inquiétudes de ce secteur particulièrement touché.

La commission en vient à la discussion des articles de la proposition de loi.

 

   Examen des articles

Article 1er

[Article 278-0 bis et 279 du code général des impôts]

Instauration d’un taux réduit de TVA à 5,5 % pour les secteurs de l’hébergement et de la restauration jusqu’au 31 décembre 2020

 

Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 1er de la proposition de loi modifie l’article 278-0 bis du code général des impôts afin d’affecter d’un taux de taxe sur la valeur ajoutée de 5,5 % :

– les prestations relatives à la fourniture de logements par le secteur hôtelier et
para-hôtelier ;

– la fourniture de logements et la location d’emplacement dans les campings classés ;

– la location d’aires d’accueil ou de terrains de passage pour les gens du voyage.

Il soumet également au taux de TVA à 5,5 % les ventes à consommer sur place dans la restauration ainsi que les ventes à emporter ou à livrer de produits alimentaires préparés en vue d’une consommation immédiate.

Corrélativement, il abroge les a, m et n de l’article 279 du CGI, qui portent actuellement l’imposition de ces activités au taux de TVA intermédiaire, de 10 %.

I.   l’État du droit 

A.   La TVA dans le secteur de la restauration

En application du m de l’article 279 du code général des impôts, les ventes à consommer sur place de produits alimentaires ou de boissons bénéficient du taux intermédiaire de TVA – de 10 % – à l’exclusion de celles relatives aux boissons alcooliques auxquelles s’applique le taux de 20 %.

Les ventes à consommer sur place consistent en la fourniture de nourriture préparée ou non ou de boissons, destinées à la consommation humaine, accompagnée de services connexes suffisants pour permettre leur consommation immédiate sur place.

Sont ainsi visés par ce taux intermédiaire les établissements spécialisés dans la restauration ou la consommation de boissons – restaurants traditionnels, restauration rapide, cafétérias, bars, cafés, etc. – ainsi que les exploitants de tous autres espaces permettant la consommation, situés, par exemple, dans des établissements de spectacle, des musées, des discothèques ou des enceintes sportives.

En revanche, ne constituent pas des ventes à consommer sur place les opérations suivantes :

● la livraison de nourriture, préparée ou non, et de boissons, qualifiées de vente à emporter ;

● de manière générale, les prestations de préparation ainsi que celles de transport et de livraison de nourriture – ou de boissons – sans aucun autre service connexe. Il en est ainsi, par exemple, de la livraison d’un repas par un traiteur.

Les autres produits alimentaires qui relèvent du taux normal lorsqu’ils sont vendus à emporter bénéficient du taux intermédiaire lorsqu’ils font l’objet d’une vente à consommer sur place.

Tableau récapitulatif des taux applicables pour les ventes à emporter ou à livrer de produits alimentaires préparés en vue d’une consommation immédiate, en fonction des produits et des situations

Produit

Taux

Commentaire

Repas servi dans un restaurant traditionnel

10 %

Article 279 du CGI

Plats servis dans une brasserie, une cafétéria, un bar ou un café

10 %

Restauration sur place dans un fast-food

10 %

Sandwichs, salades salées vendues avec assaisonnement séparé ou couverts

10 %

Ventes à consommer immédiatement, sauf vente de surgelés

Frites, sushis, pizzas, quiches etc. destinés à consommation immédiate et quel que soit le lieu de vente

10 %

À consommer immédiatement

Frites, sushis, pizzas, quiches etc. non destinés à consommation immédiate et quel que soit le lieu de vente

5,5 %

Pouvant être conservés du fait de leur conditionnement

Produits surgelés, plats cuisinés effectivement consommés immédiatement dans les locaux du vendeur

10 %

Grâce à la mise à disposition de couverts, de fours à micro-ondes et de tables, de chaises ou d’un comptoir

Sachets de chips, yaourts vendus avec ou sans cuillère et fruits

5,5 %

Ces produits n’ont pas vocation à être consommés sur place, sauf dans un restaurant

Pain, viennoiserie et pâtisseries sucrées

5,5 %

Ces produits n’ont pas vocation à être consommés sur place, sauf dans un restaurant

Glaces vendues à l’unité

10 %

Quel que soit le lieu de vente, y compris donc par un vendeur ambulant

Glaces conditionnées non destinées à consommation immédiate

5,5 %

Ces produits n’ont pas vocation à être consommés sur place

Produits livrés destinés à consommation immédiate

10 %

Dès lors que la préparation, la vente et la livraison se suivent immédiatement

Produits préparés chez le traiteur vendus à emporter ou à livrer

5,5 %

Ces produits n’ont pas vocation à être consommés sur place, à l’exclusion des produits préparés en vue d’une consommation immédiate

Produits vendus par un traiteur en association avec un service (salle, matériel, personnel)

10 %

L’ensemble est considéré comme un service de restauration sur place

Plateau de fruits de mer à emporter ou à livrer

10 % ou 5,5 %

10 % si le plateau contient des coquillages ouverts

Boissons non alcooliques vendues dans des contenants ne permettant pas leur conservation

10 %

Consommation immédiate

Boissons non alcooliques vendues dans des contenants permettant leur conservation

5,5 %

Boissons pouvant être conservées

Boissons alcooliques

20 %

En toutes circonstances

Consommations et produits alimentaires des
mini-bars dans les chambres d’hôtel

10 %

Sauf les boissons alcooliques soumises au taux normal

Produits alimentaires au taux normal

20 %

Ex. caviar ou margarine

Source : commission des finances à partir du BOFiP

B.   La TVA dans le secteur de l’hébergement

Les locations occasionnelles, permanentes ou saisonnières de logements meublés ou garnis à usage d’habitation sont en principe exonérées de TVA.

Cette exonération ne s’applique pas aux prestations hôtelières ou parahôtelières fournies dans des établissements d’hébergement qui font l’objet d’une exploitation professionnelle.

Le 4° de l’article 261 D du CGI dispose en effet :

« Toutefois, l’exonération ne s'applique pas :

a. Aux prestations d’hébergement fournies dans les hôtels de tourisme classés, les villages de vacances classés ou agréés et les résidences de tourisme classées lorsque ces dernières sont destinées à l’hébergement des touristes et qu’elles sont louées par un contrat d'une durée d'au moins neuf ans à un ou plusieurs exploitants qui ont souscrit un engagement de promotion touristique à l’étranger dans les conditions fixées par un décret en Conseil d’État ;

b. Aux prestations de mise à disposition d’un local meublé ou garni effectuées à titre onéreux et de manière habituelle, comportant en sus de l’hébergement au moins trois des prestations suivantes, rendues dans des conditions similaires à celles proposées par les établissements d’hébergement à caractère hôtelier exploités de manière professionnelle : le petit-déjeuner, le nettoyage régulier des locaux, la fourniture de linge de maison et la réception, même non personnalisée, de la clientèle.

c. Aux locations de locaux nus, meublés ou garnis consenties à l’exploitant d’un établissement d’hébergement qui remplit les conditions fixées aux a ou b, à l’exclusion de celles consenties à l’exploitant d’un établissement mentionné à larticle L. 631-1 du code de la construction et de l’habitation dont l’activité n’ouvre pas droit à déduction. »

Sont ainsi imposables les prestations d’hébergement fournies :

● dans les hôtels et les résidences de tourisme classées ;

● dans les villages de vacances classés ou agréés ;

● ainsi que les prestations d’hébergement fournies dans des conditions proches de l’hôtellerie : on parle de parahôtellerie.

Les dispositions du 4° de l’article 261 D s’appliquent sans préjudice du régime de l’article 293 B du même code : les locations passibles de la TVA peuvent échapper à la taxe lorsque l’exploitant bénéficie de la franchise en base.

La franchise en base de TVA

L’article 293 B du CGI prévoit un régime de franchise en base de TVA applicable, au titre d’une année N, aux assujettis établis en France dont le chiffre d’affaires hors taxe de l’année précédente n’excède pas :

– 82 800 euros ou 91 000 euros (mais à condition dans ce dernier cas que le chiffre d’affaires de la pénultième année ou N – 2 n’excède pas 82 800 euros) s’il s’agit d’assujettis dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place ou de fournir des logements ;

– 33 200 euros ou 35 200 euros (mais à condition dans ce dernier cas que le chiffre d’affaires de la pénultième année ou N – 2 n’excède pas 33 200 euros) pour les autres activités de prestations de services.

Ces limites s’entendent hors TVA. Cette franchise est susceptible de s’appliquer aussi bien aux entreprises individuelles qu’aux sociétés et aux associations sans but lucratif qui réalisent des opérations imposables à la TVA.

1.   Les hôtels de tourisme classés

Un hôtel de tourisme est un établissement commercial d’hébergement offrant des chambres ou des appartements meublés à une clientèle qui effectue un séjour à la journée, à la semaine ou au mois mais qui, sauf exception, n’y élit pas domicile.

Tous les établissements hôteliers qui ont fait l’objet d’un classement dans les conditions fixées par la réglementation du tourisme sont soumis à la TVA dans les conditions de droit commun.

Cette TVA est perçue au taux intermédiaire, de 10 %.

2.   La parahôtellerie

L’activité des exploitants qui offrent des prestations parahôtelières est imposable à la TVA, en vertu des dispositions du b du 4° de l’article 261 D du CGI, s’il est offert en plus de l’hébergement au moins trois des prestations suivantes :

● le petit-déjeuner ;

● le nettoyage régulier des locaux ;

● la fourniture de linge de maison ;

● la réception, même non personnalisée, de la clientèle.

Sont ainsi susceptibles d’être imposés sur ce fondement les gîtes ruraux, les chambres d’hôtes et les maisons et appartements meublés.

Pour être imposées à la TVA, ces prestations doivent être effectuées à titre onéreux et de manière habituelle.

La TVA est perçue au taux intermédiaire, de 10 %.

3.   Les campings classés

La fourniture de caravanes, de mobile homes et d’habitations légères de loisir assimilés à des installations fixées, spécialement aménagées et exclusivement réservés à l’habitation est considérée comme une fourniture de logement imposable à la TVA au taux normal.

Elle peut néanmoins, selon les dispositions du a de l’article 279 du CGI, être soumise au taux intermédiaire si les conditions suivantes sont remplies :

● les biens mis à disposition par l’exploitant pour assurer ses prestations d’hébergement doivent être spécialement aménagés pour un usage d’habitation ;

● le terrain de camping doit être classé par arrêté préfectoral dans les conditions prévues par la réglementation en vigueur.

II.   Dispositif proposé : Une baisse de TVA destinée à soutenir et relancer le secteur

A.   Une baisse de TVA dans le secteur de la restauration

1.   Un taux de TVA à 5,5 % sur les ventes à consommer sur place

L’article 1er de la présente proposition de loi modifie l’article 278-0 bis du CGI en insérant un N ainsi rédigé :

« N.  Les ventes à consommer sur place ; ».

De la sorte, il affecte d’un taux de TVA à 5,5 % la fourniture de nourriture préparée ou non ou de boissons, destinées à la consommation humaine, accompagnée de services connexes suffisants pour permettre leur consommation immédiate sur place.

Par ailleurs, l’article 1er de la présente proposition de loi modifie le 1° du A de l’article 278-0 bis du CGI en insérant, après le mot « alcooliques », les mots « sauf celles à consommer sur place ».

Ce faisant, il affecte d’un taux de TVA à 5,5 % les ventes de boissons alcooliques dans les bars et restaurants, actuellement soumises à un taux de TVA de 20 %.

 

2.   Un taux de TVA à 5,5 % sur les ventes à emporter ou à livrer de produits alimentaires préparés en vue d’une consommation immédiate

L’article 1er de la présente loi modifie l’article 278-0 bis du CGI en insérant un O ainsi rédigé :

« O.  Les ventes à emporter ou à livrer de produits alimentaires préparés en vue d’une consommation immédiate ».

Ainsi, les services de vente à emporter, pourront également bénéficier d’un taux de TVA à 5,5 %.

B.   Une baisse de TVA dans le secteur de l’hébergement

1.   Un taux de TVA à 5,5 % pour les activités hôtelières et para-hôtelières

L’article 1er de la présente loi modifie l’article 278-0 bis du CGI en insérant un M, dont le deuxième alinéa vise les prestations relatives « à la fourniture de logement et aux trois quarts du prix de pension ou de demi-pension dans les établissements d’hébergement ; ce taux s’applique aux locations meublées dans les mêmes conditions que pour les établissements d’hébergement ».

Ainsi, les prestations d’hébergement fournies dans les hôtels et résidences de tourisme classées et également dans les villages de vacances classés ou agréés seront soumis à un taux de TVA de 5,5 %.

2.   Un taux de TVA à 5,5 % pour la fourniture de logements dans les campings classés

L’article 1er de la présente loi modifie l’article 278-0 bis du CGI en insérant un M, dont le troisième alinéa vise les prestations relatives « à la fourniture de logement dans les terrains de campings classés et à la location d’emplacement sur les terrains de campings classés ».

Ces prestations seront ainsi également soumises à un taux de TVA réduit de 5,5 %.

3.   Un taux de TVA à 5,5 % pour la location d’aires d’accueil ou de terrains de passage des gens du voyage

L’article 1er de la présente loi modifie l’article 278-0 bis du CGI en insérant un M, dont le quatrième alinéa vise les prestations relatives « à la location d’aires d’accueil ou de terrains de passage des gens du voyage. »

Ces prestations seront, elles aussi, soumises à un taux de TVA réduit de 5,5 %.

Dans la mesure où le texte de l’article ne précise pas les conditions de son entrée en vigueur, celle-ci interviendrait le lendemain de la publication de la loi définitivement adoptée au Journal officiel

 

*

*     *

Mme Brigitte Kuster, rapporteure. L’article 1er instaure un taux réduit de TVA à 5,5 % pour les secteurs de l’hébergement et de la restauration jusqu’en décembre 2020. Ce taux remontera à partir du 1er janvier 2021 – c’est l’objet de l’article 2.

La commission adopte l’amendement rédactionnel CF1 de la rapporteure.

Elle rejette l’article 1er ainsi modifié.

 

*

*     *

Article 2
[Article 278-0 bis et 279 du code général des impôts]
   


Rétablissement du taux intermédiaire de TVA pour les secteurs de l’hébergement et de la restauration au 1er janvier 2021

Résumé du dispositif et effets principaux

L’article 2 de la proposition de loi modifie l’article 279 du code général des impôts afin d’affecter d’un taux de taxe sur la valeur ajoutée de 10 % :

– les prestations relatives à la fourniture de logements par le secteur hôtelier et
para-hôtelier ;

– la fourniture de logements et la location d’emplacement dans les campings classés ;

– la location d’aires d’accueil ou de terrains de passage pour les gens du voyage.

Il soumet également au taux de TVA à 10 % les ventes à consommer sur place dans la restauration ainsi que les ventes à emporter ou à livrer de produits alimentaires préparés en vue d’une consommation immédiate.

Les ventes à consommer sur place de boissons alcooliques seront, elles, affectées du taux normal de TVA, de 20 %.

Corrélativement, l’article 2 abroge les M, N et O de l’article 278-0 bis du CGI, et modifie le 1° du A de ce même article.

I.   Un rétablissement des taux de TVA en vigueur avant l’adoption de la présente proposition de loi…

Cet article rétablit strictement les régimes de TVA des secteurs de l’hôtellerie et de la restauration dans leurs rédactions en vigueur au 1er janvier 2020, c’est-à-dire avant l’éventuelle adoption de la présente loi.

Le taux intermédiaire, de 10 %, est donc rétabli.

Les ventes à consommer sur place de boissons alcooliques seront, elles, affectées d’une TVA au taux normal, de 20 %.

Les dispositions issues de l’article 1er de la présente loi sont corrélativement abrogées.

Aussi, le caractère très temporaire de cette baisse de TVA la rend parfaitement soutenable pour les finances publiques. 

II.   …qui la rend parfaitement soutenable pour les finances publiques

En 2019, le taux de TVA de 10 % applicable aux ventes à consommer sur place, à l’exception des boissons alcooliques, a engendré, en tant que dépense fiscale, de moindres recettes fiscales à hauteur de 2 982 millions d’euros pour le budget général de l’État ([26]).

La même année, le taux de TVA de 10 % applicable à la fourniture de logements dans les hôtels a engendré de moindres recettes fiscales de 850 millions d’euros pour le budget général de l’État ([27]).

Enfin, le coût du taux de TVA de 10 % applicable à la fourniture de logements dans les terrains de campings classés s’est élevé à 213 millions d’euros ([28]).

Le coût total a donc été de 4 045 millions d’euros pour une année pleine, en reconstituant ce manque à gagner à l’aune d’un taux de TVA de 20 %.

Plusieurs éléments minorent le coût pour les finances publiques d’un passage de 10 % à 5,5 %.

Premièrement, les recettes du secteur de l’hôtellerie et de la restauration seront, selon toute vraisemblance, largement amputées en 2020. Le secteur évalue cette perte à au moins un tiers.

À Paris, le taux d’occupation des hôtels entre mars et mai 2020 a été de 10 %. La moitié des restaurants ne rouvriront pas avant septembre, tout comme la plupart des palaces et la quasi-totalité des restaurants étoilés, qui vivent d’une clientèle à 80 % étrangère.

En outre, le respect des mesures sanitaires auxquelles s’est engagé le secteur réduit mécaniquement le taux d’occupation – surtout dans les restaurants – tout en accroissant les coûts.

Deuxièmement, le dispositif étant borné au 31 décembre 2020, l’évaluation de son coût doit se faire à proportion.

Ainsi, si le coût du passage d’un taux de TVA de 10 % à 5,5 % dans les secteurs de l’hôtellerie et de la restauration peut être évalué à environ 2 milliards d’euros en année pleine, il est d’un milliard pour un semestre.  

Le coût final de cette proposition de loi pour l’année 2020, qui est frappée de plein fouet par la chute du tourisme étranger et alors même que la France est la première destination de tourisme au niveau mondial, se situera probablement entre 500 millions et un milliard d’euros.

Ce montant est à apprécier au regard de la catastrophe pour l’emploi vers laquelle se dirige le secteur à l’automne.

Il convient également de garder à l’esprit que c’est l’État qui, en dernier ressort, supportera les conséquences des défaillances d’entreprises du secteur sur les prêts qu’il a garanti à hauteur de 90 %.

En outre, de moindres recettes de TVA, qui peuvent accroître les marges des entreprises, augmentent, en miroir, les recettes d’impôt sur les sociétés, minorant encore le coût budgétaire de la présente proposition.

*

*     *

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général. Je ne me suis prononcé tout à l’heure ni par dogmatisme ni par principe. Il ne s’agit pas de dire que le Gouvernement a raison et que vous avez tort, et nous admettons que d’autres outils d’aide et d’accompagnement des entreprises peuvent être pertinents dans cette bataille que nous menons tous.

En revanche, je maintiens que la baisse de la TVA n’est pas un bon outil alors que le secteur est encore soumis, soit à des fermetures administratives, soit à un redémarrage lent et contraint. Dans le cas présent, je préfère le subventionnement direct.

Mme Brigitte Kuster, rapporteure. L’un n’empêche pas l’autre !

M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général. J’aurais été favorable à la baisse de TVA si le fonds de solidarité n’avait pas existé. Au 1er juin, il représentait 500 millions d’euros pour le secteur de l’hôtellerie-restauration, soit le même ordre de grandeur qu’aurait entraîné la baisse de la TVA à 5,5 %. Plutôt que d’attendre une reprise de l’activité, et la création de valeur ajoutée, pour voir les effets de cette dernière, il est plus simple de procéder par subsides directs.

M. le président Éric Woerth. En général, vous votez un mois plus tard ce que nous vous proposons. Et puis, une relance se fait avec une panoplie d’instruments.

M. Charles de Courson. Il y a quarante ans, alors que j’étais jeune auditeur à la Cour des comptes et rapporteur au conseil des impôts, j’ai eu à examiner toutes les mesures de baisse ou de hausse de TVA, et leur incidence économique. L’amusant, c’est que personne n’avait jamais fait cette étude alors que des mesures de baisse ou de hausse sur divers secteurs d’activité étaient prises depuis vingt ans. L’intéressant, c’est que cette étude concluait que les incidences économiques sont très variables : une baisse de la TVA n’entraîne pas nécessairement une baisse du prix du produit toutes taxes comprises, cela dépend des situations de marché du moment. Bref, il n’y a pas de règle.

M. le président Éric Woerth. En tout cas, si vous baissez la TVA sans modifier le prix du produit, vous avez un peu plus d’argent : c’est le principe de cette proposition de loi.

La commission rejette l’article 2.

Article 3


Gage de la proposition de loi

Le présent article a pour objet de gager les pertes de recettes et charges induites pour l’État par la proposition de loi afin de permettre son dépôt.

La rapporteure et les auteurs de la proposition de loi n’envisagent toutefois pas de financer les mesures proposées par une augmentation de la fiscalité. 

*

*     *

La commission rejette l’article 3.

L’ensemble des articles de la proposition de loi ayant été rejeté, le texte est considéré comme rejeté.


—  1  —

   Annexe

   ListE des personnes auditionnées

­ Direction générale des entreprises, Dimitry Grygowski, sous-directeur Tourisme

­ Union des métiers des industries de l’hôtellerie (UMIH), Roland Héguy, président

­ GNI Ile-de-France, Pascal Mousset, président

 

 

 


([1]) Loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques.

([2]) Loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificatives pour 2011.

([3]) Loi n° 2012-1510 du 29 décembre 2012 de finances rectificative pour 2012.

([4]) Directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006, annexe III, paragraphe 12.

([5]) Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), L’incidence économique de la TVA, mai 2015.

([6]) Assemblée nationale, Rapport d’information n° 337 réalisé par T. Thévenoud au nom de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire relatif aux conséquences de la baisse du taux de TVA dans la restauration, octobre 2012.

([7]) Conseil des prélèvements obligatoires (CPO), La TVA comme instrument de politique économique, juin 2015.

([8]) INSEE, Élaboration des statistiques annuelles d’entreprises, Fiches sectorielles hôtellerie et restauration, mai 2020.

([9]) C. Carbonnier, À qui profite une baisse de TVA dans la restauration, 2007.

([10]) Ministère du tourisme, Bilan du contrat d’avenir dans la restauration, 23 novembre 2012.

([11]) Sénat, Rapport d’information n° 42 réalisé par M. Houel, au nom de la commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du territoire, sur le bilan du taux réduit de TVA dans le secteur de la restauration.  

([12]) Pôle emploi, Les métiers de l’hôtellerie et de la restauration, décembre 2017.

([13]) Ibid.  

([14]) INSEE, Les hébergements collectifs touristiques en 2019, mai 2020.

([15]) Décret n° 2020-260 du 16 mars 2020 portant réglementation des déplacements dans le cadre de la lutte contre la prorogation du virus Covid-19.

([16]) Loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d’urgence pour faire face à l’épidémie de Covid-19.

([17]) IMF, The Great Lockdown : Worst economic downturn since the Great Depression, April 2020.

([18]) Loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020.

([19]) Arrêté du 14 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus

Covid-19.

([20]) OFCE, Évaluation au 6 mai 2020 de l’impact économique de la pandémie de Covid-19 et des mesures de confinement sur le marché du travail en France, 6 mai 2020.

([21]) INSEE, Conjoncture française, 7 mai 2020.

([22]) INSEE, Tableau de bord de la conjoncture PACA, mai 2020.

([23]) DARES, Situation sur le marché du travail au 19 mai 2020.  

([24]) Banque de France, Saisines de la Médiation du crédit : flux hebdomadaires du 4 au 15 mai 2020.

([25]) Ordonnance n° 2020-317 du 25 mars 2020 portant création d’un fonds de solidarité à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l’épidémie de Covid-19 et des mesures prises pour lutter contre cette propagation.  

([26]) Annexe au projet de loi de règlement et d’approbation des comptes de l’année 2019, Développement des opérations constatées au budget général, dépense fiscale n° 730221, mai 2020.

([27]) Annexe au projet de loi de règlement et d’approbation des comptes de l’année 2019, Développement des opérations constatées au budget général, dépense fiscale n° 730205, mai 2020.

([28]) Annexe au projet de loi de règlement et d’approbation des comptes de l’année 2019, Développement des opérations constatées au budget général, dépense fiscale n° 730206, mai 2020.