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N° 4524

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 7 octobre 2021.

RAPPORT

FAIT

 

 

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2022 (n° 4482),

 

PAR M. Laurent SAINT-MARTIN,

Rapporteur général

Député

 

——

 

ANNEXE N° 10
 

 

CULTURE :

 

CRÉATION

 

TRANSMISSION DES SAVOIRS ET DÉMOCRATISATION DE LA CULTURE

 

 

 

Rapporteure spéciale : Mme Dominique DAVID

 

Députée

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SOMMAIRE

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Pages

PRINCIPALES OBSERVATIONS  DE LA RAPPORTEURE SPÉCIALE

DONNÉES CLÉS

Introduction

I. le programme 131 : des moyens supplémentaires pour les opérateurs nationaux et les réseaux de la création dans les territoires

A. Un soutien renforcé aux opérateurs encore fragilisés par la crise

1. La situation de l’Opéra national de Paris

2. Un rebasage des dotations de subvention pour charges de service public pour répondre à des besoins durables

3. Des investissements importants

B. L’appui à la création dans les territoires

1. La réaffirmation de l’importance du rôle des festivals.

2. Un soutien accru aux acteurs de la création dans les territoires

C. La montée en charge du Fonds national pour l'emploi pérenne dans le spectacle (FONPEPS)

II. Le point d’attention de la rapporteure : le soutien aux artistes des arts visuels

A. un secteur sensiblement moins aidé par les pouvoirs publics que le spectacle vivant

1. Les principaux soutiens aux artistes et à la création du programme 131

a. L’action des FRAC

b. L’action du Centre national des arts plastiques

2. Des dispositifs d’aide durant la crise sanitaire qui n’ont pas tous fonctionné

a. Le fonds de solidarité : le dispositif privilégié par les artistes-auteurs des arts visuels quand ils pouvaient y avoir accès

b. Des dispositifs de soutien du CNAP à revoir

3. Le programme de commandes publiques « Mondes nouveaux » suscite des interrogations

B. une sortie des « pratiques de la gratuité » à programmer

1. L’instauration plus que bienvenue d’un droit de présentation

2. Faire respecter la règle du « 1 % de la commande publique »

3. Une structuration des filières à poursuivre

a. Le conseil national des professions des arts visuels

b. Le soutien aux organismes professionnels

c. Le rôle de structuration des territoires

4. Des dispositifs fiscaux à améliorer

a. L’élargissement de l’article 1460 du code général des impôts

b. Une prolongation et un élargissement du bénéfice de la déduction sur cinq ans du prix d’acquisition d’œuvres originales ou d’instruments de musique d’artistes vivants

i. La prolongation du dispositif

ii. L’élargissement du dispositif

III. Le programme 361 transmission des savoirs et démocratisation de la culture : une augmentation sans précédent des moyens pour le pass culture et une dynamique de développement de la recherche dans les écoles nationales supérieures d’architecture (ENSA) relancée

A. 181 millions d’euros de mesures nouvelles

1. Une attention particulière portée aux étudiants et à l’investissement dans les territoires sur l’action 1 Soutien aux établissements de l’enseignement supérieur et insertion professionnelle

a. Le soutien aux étudiants

b. La réalisation d’investissements importants pour les établissements de l’ESC

2. L’action 2 Soutien à la démocratisation et à l’éducation artistique et culturelle marquée par l’enveloppe de 140 millions d’euros supplémentaire pour accompagner la généralisation du pass Culture

a. La généralisation du pass Culture

b. Un renforcement de la politique de soutien des territoires

3. L’action 3 : une action pour la langue française et les langues de France renforcée

4. L’action 4 : Une très légère augmentation de la dotation d’Universcience malgré une situation économique complexe

B. le suivi de la situation des ensa: la relance de la dynamique de création de postes en 2022

1. Le bilan de la réforme des ENSA

a. Le diagnostic du rapport de l’IGAC de novembre 2020

b. La mise en œuvre des recommandations

2. Le renforcement des moyens des ENSA et le développement de la recherche

IV. le programme 224 soutien aux politiques du ministère de la culture

A. L’évolution des dépenses de titre 2

B. Les autres dépenses

EXAMEN EN COMMISSION

PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA RAPPORTEURE SPÉCIALE

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L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

Au 10 octobre 2021, 44 % des réponses étaient parvenues à la commission des finances.

 


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   PRINCIPALES OBSERVATIONS
DE LA RAPPORTEURE SPÉCIALE

Le soutien apporté en France aux acteurs de la culture par les pouvoirs publics n’a pas eu d’équivalent dans le monde pendant la crise sanitaire. La Cour des comptes ([1]) chiffre à 6,28 milliards d’euros le montant des aides transversales ayant bénéficié au secteur de la culture pour la seule année 2020, auxquels s’ajoutent 949 millions d’euros au titre de l’année blanche de mars 2020 à décembre 2021 et 2,71 milliards d’euros au titre des mesures spécifiques d’urgence du ministère de la culture et du plan de relance pour 2020 et 2021.

Cet effort qui témoigne de la place si particulière qu’occupe la culture dans notre pays ne s’interrompt pas en 2022. Le plan de relance (programme 363 Compétitivité) ouvre 101 millions d’euros en CP pour 2022, l’ensemble des AE ouvertes en 2021 étant ainsi couvertes. Pour ce qui concerne spécifiquement le champ du rapport spécial, à savoir les programmes 131 Création, 361 Transmission des savoirs et démocratisation de la culture et 224 Soutien aux politiques du ministère de la culture, le PLF 2022 est encore une fois à la hauteur des attentes puisque le budget connaît une hausse sans précédent de 10,5 % en AE et 11,4 % en CP, pour atteindre un montant total respectivement de 2,456 milliards d’euros et 2,438 milliards d’euros.

Sur le programme 131 (+54 millions d’euros en CP après transferts), on notera notamment l’augmentation de 20 millions d’euros des crédits d’intervention au bénéfice des réseaux et acteurs artistiques dont 10 millions d’euros pour les festivals (hausse de plus de 50 % des crédits du ministère par rapport à 2019, année de référence hors covid), ce dont se félicite la rapporteure qui avait rappelé dans son rapport de novembre 2020 leur rôle structurant pour les territoires. Les rapports de Caroline Sonrier sur la politique de l’art lyrique et de Georges-François Hirsch et Christophe Tardieu sur l’Opéra national de Paris dressent des pistes d’amélioration intéressantes dont il faudra suivre attentivement la réalisation.

Le programme 361 connaît lui une hausse substantielle de presque 30 % en CP (+ 171,1 millions d’euros), essentiellement porté par le Pass culture (+ 140 millions d’euros). La rapporteure se félicite que le budget de fonctionnement des écoles nationales supérieures d’architecture (ENSA) soit abondé de 2,5 millions d’euros en crédits de fonctionnement dans le PLF 2022, ce qui permettra de redémarrer le processus de création de postes de décharge pour le développement de la recherche au sein de ces établissements à hauteur de 5 ETP comme la rapporteure spéciale l’avait demandé lors de l’examen du PLF 2021.

Conformément aux recommandations du rapport de l’Inspection générale des affaires culturelles (IGAC) de novembre 2020, l’adoption de l’amendement n°II-1492 sur la mission Recherche et enseignement supérieur consacre l’engagement du ministère en charge de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (MESRI) de participer à l’effort de développement de la recherche dans les ENSA conjointement au ministère de la culture.

La rapporteure ne peut que saluer cet engagement qu’elle avait appelé de ses vœux l’année dernière. Cette dynamique doit se poursuivre les prochaines années et la réflexion concernant l’avenir des établissements et leurs moyens a vocation à se prolonger.

La rapporteure spéciale a souhaité porter une attention particulière aux arts visuels. Dix fois moins subventionné que le secteur du spectacle vivant sur le programme 131, le secteur des arts visuels souffre depuis longtemps de « pratiques de la gratuité » qui précarisent l’ensemble des acteurs de la filière, malgré le rôle important joué par les fonds régionaux d’art contemporains (FRAC) et le Centre national d’arts plastique (CNAP) pour le soutien à la création et à la diffusion. Des solutions existent : droit de présentation, rémunération du processus de création, application du 1 % de la commande publique, structuration de la filière, etc. À court terme, la rapporteure défend des amendements visant :

– à clarifier le champ exonération de la cotisation foncière des entreprises (CFE) devant s’appliquer à l’ensemble des auteurs d’œuvres de l’esprit visés par le code de la propriété intellectuelle (art. 1460 du code général des impôts) ;

– à prolonger et étendre le dispositif permettant aux professionnels faisant l’acquisition d’œuvres originales d’artistes vivants ou d’instruments de musique de déduire du résultat de l’exercice d’acquisition et des quatre années suivantes, par fractions égales, une somme égale au prix d’acquisition (art. 238 bis AB du code général des impôts).

 

 


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   DONNÉES CLÉS

Évolution des crÉdits de Paiement par programme hors mesures de périmètre

(en millions d’euros)

Source : Commission des finances de l’Assemblée nationale d’après les documents budgétaires.

répartition des autorisations d’engagement du programme 131 dans le plF 2022 entre le spectacle vivant et les arts visuels

(en millions d’euros)

Source : Commission des finances de l’Assemblée nationale d’après les documents budgétaires

*L’enveloppe allouée à la compensation de l’augmentation de CSG pour les artistes auteurs de 18 millions d’euros a été divisée à parts égales pour le spectacle vivant et les arts visuels en l’absence d’informations plus précises.

 


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   Introduction

Les programmes de la mission Culture dont la rapporteure a la charge, à savoir le programme 131 Création, le programme 361 Transmission des savoirs et démocratisation de la culture, ainsi que le programme 224 Soutien aux politiques du ministère de la culture qui porte les crédits de personnel et des fonctions support du ministère de la culture, connaissent une hausse inédite depuis plus de 10 ans de 11,7 % en CP avant transfert (+ 255,8 millions d’euros en CP entre la LFI 2021 et le PLF 2022). Après mesures de transfert, le niveau de dotation des trois programmes atteint 2,456 milliards d’euros en AE et de 2,438 milliards d’euros en CP.

Évolution des crÉdits de la mission culture après transfert

(en million d’euros)

Numéro et intitulé du programme

Autorisations d’engagement

Crédits de paiements

LFI 2020

PLF 2021

Évolution valeur absolue

Évolution en %

LFI 2020

PLF 2021

Évolution en valeur absolue

Évolution en %

131 – Création

884,5

921,8

+ 37,3

+ 4,2 %

860,7

914,9

+ 54,2

+ 6,3 %

361 – Transmission des savoirs et démocratisation de la culture

581,5

756,4

+ 174,9

+ 30 %

576,7

747,9

+ 171,2

+ 29,7 %

224 – Soutien aux politiques du ministère de la culture

755,3

777,4

+ 22,1

+ 2,9 %

751,5

775,5

+ 24

+ 3,2 %

TOTAL

2 221,3

2 455,6

+ 234,3

+ 10,5 %

2 188,9

2 438,3

+ 249,4

+ 11,4 %

Source : documents budgétaires, commission des finances de l’Assemblée nationale.

Cette hausse sans précédent est expliquée notamment par la généralisation du pass Culture à l’ensemble des jeunes Français majeurs ainsi qu’à son extension aux collégiens et aux lycées (+ 140 millions d’euros). Sur le plan de relance, l’ensemble des autorisations d’engagement ouvertes en 2021 sur le programme 361 sont couvertes par des crédits de paiement ouverts en 2022.

crÉdits du plan de relance et de la mission culture

(en millions d’euros)

 

CP

Programmes 131 et 361

1 662,8

Programme 363 Compétitivité  (enveloppe relative aux politiques de création et de diffusion artistiques)

101

TOTAL

1 763,8

Source : documents budgétaires, commission des finances de l’Assemblée nationale.

L’enveloppe de 101 millions d’euros en CP de la mission Plan de relance est ainsi ventilée :

– 44 millions d’euros pour les opérateurs nationaux de la création ;

– 17 millions d’euros pour les institutions et réseaux de spectacle vivant musical et non musical (théâtre, danse, cirque, arts de la rue) dans les territoires ;

– 10 millions d’euros pour la mise en place d’un fonds de transition écologique pour les institutions de la création en région ;

– 10 millions d’euros pour compléter le programme exceptionnel de commande publique « Monde nouveaux » pour soutenir les artistes et créateurs ;

– 20 millions d’euros pour les investissements exceptionnels dans les établissements de l’enseignement supérieur culture.


I.   le programme 131 : des moyens supplémentaires pour les opérateurs nationaux et les réseaux de la création dans les territoires

Le programme 131 qui porte les crédits de la création dans le spectacle vivant et les arts visuels ainsi que le soutien à l’emploi pour le spectacle vivant est en hausse de 37,4 millions d’euros en AE et de 54,1 millions d’euros en CP après mesures de transfert (solde net des transferts de +6 millions d’euros en AE et CP lié notamment au rapatriement des crédits et emplois de l’académie de France à Rome), soit une hausse de 4,2 % en AE et de 5,9 % en CP.

 

Évolution des autorisations d’engagement et des crÉdits de Paiement
du programme 131 après mesures de transfert

(en millions d’euros)

Numéro et intitulé de l’action

Autorisations d’engagement

Crédits de paiements

LFI 2021

PLF 2022

Évolution en valeur absolue

Évolution en %

LFI 2021

PLF 2022

Évolution en valeur absolue

Évolution en %

01 – Soutien à la création, à la production et à la diffusion du spectacle vivant

749,9

782,4

+ 32,5

+4,3 %

725,7

758,1

+ 32,4

+ 4,3 %

02 – Soutien à la création, à la production et à la diffusion des arts visuels

89,5

89,4

- 0,1

- 0,1 %

90

106,7

+ 16,7

+ 15,7 %

06 – Soutien à l’emploi et structurations des professions

45

50

+ 5

+ 11,1 %

45

50

+ 5

+ 10,0 %

TOTAL

884,4

921,8

+ 37,4

+ 4,2 %

860,7

914,8

+ 54,1

+ 5,9 %

Source : documents budgétaires, commission des finances de l’Assemblée nationale.

47,7 millions d’euros de mesures nouvelles en CP ont ainsi été obtenus pour dans le cadre du PLF 2022 (soit une augmentation de + 5,6 % par rapport à la LFI pour 2021).

présentation des mesures nouvelles en CP dans le plf 2022

Nature de la mesure nouvelle

Ventilation

Montant des crédits accordés

Renforcement du FONPEPS

 

5 millions d’euros

Renforcement des politiques de la création dans les territoires

Soutien aux festivals

10 millions d’euros

Soutien au spectacle vivant

8 millions d’euros

Soutien aux arts visuels

2 millions d’euros

Soutien aux opérateurs nationaux

Rebasage des subventions

2,5 millions d’euros

Accompagnement de la transformation du mobilier national en établissement public administratif et développement de ses missions en faveur des métiers d’art et du design

2,5 millions

Rebasage des deux caisses de retraite de la Comédie Française et de l’Opéra national de Paris

2 millions d’euros

Soutien aux investissements

Salle Jean Vilar au théâtre de Chaillot

7 millions d’euros

Projet de la Cité du théâtre

3 millions d’euros

Relogement du CNAP à Pantin

4,7 millions d’euros

Schéma directeur du Mobilier national

2 millions d’euros

Source : Direction générale de la création artistique.

A.   Un soutien renforcé aux opérateurs encore fragilisés par la crise

La poursuite en 2021 des mesures de restriction sanitaire (fermeture, réouverture avec jauge, pass sanitaire) a fragilisé de nouveau les finances des opérateurs nationaux de la culture. À l’été, les pertes pour 2021 étaient estimées à 104 millions d’euros pour l’ensemble des opérateurs nationaux du programme 131 (contre 140 millions d’euros en 2020).

L’équilibre des établissements pourrait encore se dégrader sur la fin de l’année avec un infléchissement du volume de ventes estimé entre – 10 % et – 40 % ainsi qu’une baisse des paniers moyens constatés par spectateur. S’il peut s’agir d’un simple changement conjoncturel de consommation, avec des achats de billets plus tardifs et « impulsifs » ou d’un effet marginal du pass sanitaire, des craintes existent aujourd’hui dans le secteur du spectacle vivant concernant un changement durable des pratiques.

L’enveloppe du plan de relance prévue pour 2022 (44 millions d’euros prévus sur le programme 363 Compétitivité) devrait permettre d’éponger une partie des pertes mais cela pourrait s’avérer insuffisant et nécessiter l’ouverture de crédits supplémentaires lors du collectif budgétaire de fin d’exercice.

Ainsi, la situation interroge de façon plus aiguë encore que les années précédentes sur l’évolution des pratiques culturelles et de fait, des modèles économiques des opérateurs.

 

répartition des aides en CP du plan de relance par opérateur en 2022

(en euros)

 

Fonctionnement

Investissement

Total

Cité de la musique - Philharmonie de Paris

500 000

-

500 000

Centre national de la danse

-

-

-

Comédie-Française

500 000

11 600 000

12 100 000

Ensemble intercontemporain

-

-

-

La Villette

-

5 000 000

5 000 000

Opéra-Comique

500 000

-

500 000

Opéra national de Paris

5 000 000

20 000 000

25 000 000

Cité de la Céramique - Sèvres et Limoges

-

-

-

Théâtre national de Chaillot

-

-

-

Théâtre national de la Colline

-

-

-

Théâtre national de l'Odéon

-

-

-

Théâtre national de Strasbourg

-

-

-

Palais de Tokyo

900 000

 

 

Total

7 400 000

36 600 000

44 000 000

Source : Direction générale de la création artistique (DGCA).

1.   La situation de l’Opéra national de Paris

L’Opéra national de Paris accuse ainsi une perte de 45 millions d’euros en 2021 (comprenant l’aide du plan de relance de 15 millions d’euros versée en 2022 au titre de l’année 2021) : le public non francilien (30 % du public) principalement étranger n’est pas encore revenu et plus de 160 représentations ont été annulées depuis le mois de mai.

Dans ce contexte l’opérateur a demandé à l’État une aide supplémentaire de 25 millions d’euros qui devrait être accordée à l’occasion de l’examen du collectif budgétaire de fin d’année.

Dans son rapport de l’année dernière, la rapporteure avait rappelé que le modèle économique de l’Opéra national de Paris, fondé sur une augmentation constante des recettes propres (augmentation de la tarification, taux d’occupation maximisé, recours croissant au mécénat) sans s’attaquer à l’augmentation continue des coûts était dans l’impasse. La crise sanitaire qui aura causé 105 millions d’euros de perte en deux ans suscite aujourd’hui une prise de conscience.

Bien que les conclusions du rapport de Georges-François Hirsch et Christophe Tardieu n’aient pas été rendues publiques, des efforts futurs visant à contenir la hausse spontanée des coûts sont absolument nécessaires. La maîtrise des dépenses artistiques par une refonte de la politique et des méthodes de programmation artistique est indispensable : baisse des cachets, rigueur dans la fabrication des costumes et des décors, enchaînement fluidifié des productions, capacité à produire des spectacles plus « durables » pouvant s’exporter ou faire l’objet d’une co-production. La maîtrise des dépenses liées au « théâtre en ordre de marche » (coûts fixes) nécessite de redéfinir les règles de service et de fonctionnement des deux sites (Bastille et Garnier) de l’établissement : la rapporteure souhaite que la renégociation salariale se déroule dans le climat le plus serein possible avec les partenaires sociaux.

L’objectif partagé avec l’État est celui d’un retour à l’équilibre des finances de l’établissement d’ici 2024. L’abandon du projet de salle modulable annoncé par Alexandre Neef constitue un signal positif témoignant de la bonne volonté de la direction de l’établissement. En contrepartie des efforts, la ministre s’est engagée à maintenir un engagement financier élevé et à donner de la visibilité à l’opérateur : les crédits prévus pour la salle modulable sont maintenus (20 millions d’euros) pour permettre le réinvestissement et la transformation de l’établissement même sans mise en œuvre du projet. La dotation en fonctionnement (+0,9 million d’euros) est ainsi en augmentation en 2022.

2.   Un rebasage des dotations de subvention pour charges de service public pour répondre à des besoins durables

Au-delà de la crise, le PLF 2022 permet, grâce à l’enveloppe supplémentaire ouverte sur le programme 131, d’opérer un rebasage des dotations des opérateurs pour prendre en compte des besoins pérennes des établissements. Il s’agit ainsi :

– de consolider l’ambition artistique des opérateurs, en particulier des plus fragiles d’entre eux (Sèvres, Chaillot, Opéra-Comique) ou déterminants pour l’emploi permanent (Comédie Française, Opéra national de Paris) ;

– d’assurer la structuration du secteur de la création en renforçant la capacité d’intervention et d’action d’opérateurs ressource pour leurs champs respectifs (Centre national des arts plastiques, Centre national de la danse).

Évolution de la subvention pour charges de service public des opérateurs du programme 131 depuis 2017

(en millions d’euros)

 

LR 2017

LR 2018

LR 2019

LR 2020

LFI 2021

PLF 2022

Évolution 2017/2022

EPCCSL - Établissement public Cité de la Céramique - Sèvres et Limoges

3,9

4

4,1

4,4

4,05

4,1

+ 5,13 %

CNAP - Centre nation des arts plastiques

7,2

7,6

8,2

11,8

7,6

7,8

+ 8,33 %

ONP - Opéra national de Paris

97,3

97,7

97,3

97,3

97,2

98,1

+ 0,82 %

Cité de la musique - Philharmonie de Paris - Orchestre de Paris*

41,5

41,6

41,6

41,6

42

42

+ 1,20 %

Comédie-Française

25,3

25,3

25,3

25,3

25,3

25,4

+ 0,40 %

EPPGHV - Établissement public du parc et de la grande halle de la Villette

21

24,3

21,2

21,2

21,2

21,2

+ 0,95 %

Théâtre national de Chaillot

13,5

13,6

13,5

13,5

13,5

13,6

+ 0,74 %

Théâtre national de l’Odéon

12,4

12,6

12,5

12,5

12,5

12,5

+ 0,81 %

Opéra-Comique

11,7

12,4

12,2

12,2

12,2

12,4

+ 5,98 %

Théâtre national de Strasbourg

9,7

9,7

9,6

9,7

9,9

9,9

+ 2,06 %

Théâtre national de la Colline

9,5

9,6

9,5

9,6

9,8

9,8

+ 3,16 %

CND - Centre national de la danse

9,2

9,4

9

9

9

9,1

- 1,09 %

Ensemble Inter contemporain

3,9

3,9

3,9

4

3,9

3,9

-

Total

266

271,7

267,9

272,1

268,15

269,8

+ 1,39 %

Source : Commission des finances.

Par ailleurs, la dotation en fonds propres de plusieurs opérateurs est renforcée afin de soutenir durablement les stratégies d’investissement visant à améliorer la performance des outils autant que les conditions d’accueil des publics : Cité de la musique-Philharmonie de Paris (+0,3 million d’euros), Établissement public du parc et de la grande halle de la Villette (+0,5 million d’euros)

Par ailleurs, l’enveloppe de 2,5 millions d’euros en faveur du Mobilier national (service à compétence national) vise à poser des bases solides à sa transformation à venir en établissement public et à compenser un sous-financement chronique relevé par la Cour des comptes. Ce rebasage doit contribuer à la transmission et à la diffusion des savoir-faire du Mobilier national, notamment en sécurisant les moyens dédiés à l’apprentissage proposé au sein de l’établissement (60 apprentis), en renforçant la programmation culturelle de la structure, et en permettant la mise en œuvre d’une nouvelle base de gestion et de diffusion des collections, la base actuelle datant de 1996.

3.   Des investissements importants

17 millions d’euros supplémentaires de dépenses d’investissement en CP sont prévus en 2022, dont 7 millions d’euros pour la salle Jean Vilar à Chaillot, 3 millions d’euros pour la Cité du théâtre et 4,65 millions d’euros pour le relogement du Centre national des arts plastiques (CNAP) à Pantin. Les dépenses d’investissement et de dotations en fonds propres représentent ainsi 69 millions d’euros en CP pour l’ensemble du programme en 2022.

échéancier de décaissement de crédits pour les projets du cnap
et du théâtre national de chaillot

(en millions d’euros)

 

Relogement du CNAP à Pantin

Théâtre national de la Danse - Chaillot

CP avant 2021

9,4

-

CP 2021

14

-

CP 2022

20

7

CP 2023

20

8

CP 2024

5,2

4

Le « projet Vilar » du théâtre de Chaillot prévu sous maîtrise d’ouvrage directe de l’établissement de 2022 à 2025 prévoit la rénovation complète de la salle Jean Vilar et plus largement des espaces inclus dans le périmètre de cette zone restructurée pour la dernière fois en 1975. Il s’agit d’améliorer le confort des spectateurs, des équipes techniques et artistiques, de mettre en conformité réglementaire l’ensemble des installations et des équipements et d’améliorer la performance énergétique du bâtiment.

Le projet de relocalisation du CNAP à Pantin et d’une partie des réserves du Mobilier National s’impose en raison de la fin programmée des baux locatifs de l’établissement à La Défense en août 2024 et du coût important des implantations actuelles (2,3 millions d’euros de loyers et charges locatives annuels et plus de 1 million d’euros de coûts de fonctionnement). Le site de Pantin acheté en 2017 et situé sur une parcelle de 17 741 m2 comprend un bâtiment principal bénéficiant d’une structure porteuse en béton et de volumes adéquats qui permettent de réaliser ce projet dans une technicité sobre et efficace selon les informations transmises par le CNAP.

S’inscrivant dans la ZAC du futur éco-quartier des gares de Pantin – 4 chemins, l’enjeu est de valoriser ce bâtiment et de requalifier son inscription dans la ville. La DGCA a mandaté l’Opérateur du patrimoine et des projets immobiliers pour réaliser les études et les travaux par la convention de mandat du 9 avril 2018 qui a fixé l’enveloppe financière prévisionnelle de l’opération à 58 millions d’euros. Un avenant à la convention du mandat a rehaussé le coût de 10 millions d’euros.

B.   L’appui à la création dans les territoires

20 millions d’euros sont prévus pour soutenir la création dans les territoires.

1.   La réaffirmation de l’importance du rôle des festivals.

Une enveloppe supplémentaire de 10 millions d’euros est prévue pour les festivals dans le PLF 2022. Le financement des festivals sur le programme 131 s’est élevé à 31,1 millions d’euros en 2020, dont 10 millions d’euros consommés au titre du fonds de soutien spécifique pour aider à la sauvegarde de ces manifestations durement touchées par la crise sanitaire. En 2019, ce soutien était inférieur à 20 millions d’euros euros.

L’enveloppe de 10 millions d’euros constitue donc une forme de pérennisation de cette enveloppe exceptionnelle. Pour la rapporteure, cette augmentation est logique : la crise a permis à de très nombreuses DRAC de découvrir et de subventionner des structures demeurées jusque-là « hors radar ». Le nombre de festivals aidés est passé de 170 en 2019 à 650 en 2020. Si tout saupoudrage des crédits est à éviter, la rapporteure souhaite qu’au bénéfice de la crise, les festivals découverts et dont le rôle de structuration et de diffusion dans les territoires est avéré continuent de bénéficier d’un soutien du ministère de la culture.

Suite aux deux premières éditions des États généraux des festivals (Avignon, 2 et 3 octobre 2020, Bourges, 28 juin) qui ont notamment permis une restitution des enquêtes socio-économique portant notamment sur le public, le projet de cartographie dans trois régions pilotes (Bretagne, Grand-Est, Île-de-France) et l’analyse de la problématique du développement durable, la troisième séquence des États généraux des festivals prévue le 1er décembre 2021 à Toulouse doit permettre d’acter le réengagement de l’État autour d’un texte cadre et de présenter la poursuite de la cartographie dans les régions du « grand sud » et dans les Antilles françaises. À compter de 2022, un panorama sur la réalité des festivals en France sera également disponible via des études statistiques conduites par le ministère notamment dans l’étude des pratiques culturelles.

2.   Un soutien accru aux acteurs de la création dans les territoires

Le montant total des crédits d’intervention déconcentrés pour les acteurs de la création atteint 363,4 millions d’euros en CP pour le spectacle vivant (hausse affichée à périmètre constant de 8 millions d’euros hors soutien spécifique pour les festivals) et 30,1 millions d’euros en CP pour les arts visuels (hausse affichée à périmètre constant de 2 millions d’euros). Cette enveloppe de 10 millions d’euros doit notamment permettre le soutien aux artistes plasticiens par un renforcement des aides directes, le développement des résidences d’artistes, le renforcement des moyens des labels et réseaux pour les arts vivants et visuels.

La rapporteure indique par ailleurs que 68,6 millions d’euros sont prévus au titre du volet culture des contrats de plan État-régions (CPER) 2021-2027. Plusieurs priorités se dégagent pour le ministère de la culture : la rénovation des lieux labellisés et des réseaux des territoires, le renforcement du maillage territorial, la diffusion des pratiques innovantes réalisées dans l’ensemble de l’écosystème, l’accompagnement des créations artistiques intégrant du numérique, le soutien au développement durable et à la transition écologique. À titre d’exemple, le volet culture permettra une requalification des « scènes de musique actuelle » Rock School Barbey à Bordeaux et Krakatoa à Mérignac en Nouvelle-Aquitaine.

Par ailleurs, les dispositifs du programme Compétitivité de la mission Plan de relance sont prolongés en 2022 :

– le fonds de transition écologique doté de 20 millions d’euros sur deux ans (16,7 millions d’euros en AE et 10,4 millions d’euros en CP consommés en 2021) réparti entre les DRAC en fonction des projets d’investissements, doit permettre une remise aux normes concernant par exemple l’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite et s’inscrire dans une perspective de transition écologique, en cofinancement avec les collectivités territoriales propriétaires de ces équipements. Un critère de faisabilité des projets en 2 ans a été retenu et a conduit à abandonner certains projets qui ne respectaient pas cette condition ;

– l’enveloppe de 17 millions d’euros en CP qui doit être ouverte en 2022 pour les institutions et réseaux du spectacle vivant musical et non musical (théâtre, danse, cirque, arts de la rue) dans les territoires repose sur plusieurs priorités :

● le soutien de structures et d’équipes qui ne sont habituellement pas soutenues par les DRAC ;

● le soutien renforcé à l’accueil des artistes en résidence pour soutenir l’emploi artistique y compris hors des lieux labellisés, en partie engorgés ou freinés par leur capacité à s’engager et à diffuser ;

● le ciblage des jeunes artistes et des projets favorisant l’insertion des jeunes diplômés ;

● le rééquilibrage des aides sur le territoire, notamment vers les territoires les plus éloignés d’une offre culturelle.

Au titre du plan de relance en 2021 (20 millions d’euros pour le spectacle vivant « non musical » et 23 millions d’euros pour le spectacle vivant musical), 27,2 millions d’euros en CP ont déjà été consommés au 12 octobre 2021 en soutien à 1 165 bénéficiaires du spectacle vivant non musical et à 750 bénéficiaires du spectacle vivant musical.

C.   La montée en charge du Fonds national pour l'emploi pérenne dans le spectacle (FONPEPS)

Après une montée en puissance progressive en 2017 et 2018, le Fonds national pour l'emploi pérenne dans le spectacle (FONPEPS) connaît aujourd’hui un succès grandissant. La prévision budgétaire de 2021 est déjà largement dépassée puisqu’au 30 septembre 2021, 20 millions d’euros avaient été payés par l’Agence de services et de paiement (ASP). La dotation supplémentaire de 5 millions d’euros en AE = CP pour une enveloppe totale de 27 millions d’euros dans le PLF 2022 apparaît en ce sens absolument nécessaire et pourrait même se révéler insuffisante eu égard aux aléas de la reprise et au dynamisme de l’aide unique à l’embauche (AESP) réformée en 2019.

augmentation des crédits de paiement du fonpeps de 2018 à 2022
(prévision et exécution)

(en millions d’euros)

Source : Commission des finances d’après les documents budgétaires.

Les données relatives à l’exécution 2021 constituent une prévision de l’Agence de services et de paiement.

Deux décrets ont été publiés les 8 et 11 août 2021 afin de mobiliser de manière temporaire et exceptionnelle jusqu’au 31 décembre prochain, deux aides du FONPEPS : l’aide unique à l’embauche (AESP) et l’aide aux spectacles de petites jauges (APAJ). Les décrets se traduisent par des adaptations des conditions d’éligibilité aux aides (jauge augmentée ou embauche au cachet par exemple) ainsi que par des barèmes plus avantageux. La rapporteure note que selon la vigueur de la reprise et la situation de l’emploi, les partenaires sociaux pourraient demander la pérennisation en 2022 de certaines de ces mesures temporaires exceptionnelles. Celles-ci ne sont cependant pas budgétées dans le PLF 2022.

II.   Le point d’attention de la rapporteure : le soutien aux artistes des arts visuels              

Comme le rappelle le CIPAC, la fédération des professionnels de l’art contemporain, la spécificité du secteur de la création des arts visuels est de compter une multitude d’acteurs aux statuts différents et aux économies diverses :

– des artistes-auteurs, créateurs ayant le statut d‘indépendant vivant principalement de la vente de leurs œuvres et de la cession des droits qui y sont attachés ;

– des indépendants, qui ne sont pas nécessairement artistes-auteurs, mais qui travaillent à leurs côtés comme les restaurateurs d’œuvres d’art, les critiques d’art, les médiateurs, etc.

– des structures publiques (régies directes, établissement public de coopération culturelle) ou associatives subventionnées dont la majorité a une économie reposant sur des co-financements de l’État et des collectivités territoriales ;

– des sociétés commerciales (galeries principalement) dont l’économie repose uniquement sur les recettes de leur activité de commerce d’art ;

– des fondations d’entreprises, structures de droit privé dont l’existence est permise par les dispositions fiscales particulières s’appliquant à ces structures.

Le rapport du Gouvernement sur la situation des arts visuels remis au Parlement en octobre 2017 en application de l’article 45 de la loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de création, à l’architecture et au patrimoine, a tenté d’objectiver la situation des artistes-auteurs dans les arts visuels. Le secteur concernerait selon des estimations restrictives 65 000 travailleurs indépendants relevant du régime social des artistes auteurs dont presque la moitié œuvrent en Île-de-France. Si les pratiques sont extrêmement diverses (gravure, illustration, peinture, photographie, design, dessin, sculpture, arts de la mode et du textile, etc.), les graphistes et designers textiles représenteraient 40 %, les plasticiens, compris en un sens large, 45 %, les photographes 10 % et les illustrateurs 5 % de cette population. La production de la branche des arts visuels représenterait 5 milliards d’euros, dont 4,4 milliards d’euros pour la production marchande selon les données du département des études, de la prospective, des statistiques et de la documentation du ministère de la culture. Par comparaison, le spectacle vivant représenterait 11,8 milliards d’euros.

Au-delà de ces chiffres, le rapport constatait une dégradation de la rémunération de nombreux professionnels et un mouvement de précarisation touchant l’ensemble des acteurs, diffuseurs compris, alors que les artistes n’étaient que 10 000 à percevoir durablement de leur art un revenu net supérieur à 1 430 euros. Les arts visuels souffriraient d’une faible structuration aussi bien causée par la fragilité du modèle économique des acteurs qu’à l’origine de cette fragilité. De nombreux points sont mis en avant : l’absence de mécanisme de soutien à l’emploi (à l’inverse du salariat et de l’intermittence dans le spectacle vivant), un régime de protection social lacunaire et une action des organismes de recouvrement des cotisations et contributions sociales des artistes-auteurs longtemps déficiente (des améliorations sont à noter depuis la rédaction de ce rapport), une absence de rémunération du processus de création, la faible protection des droits d’auteurs, la petite taille des diffuseurs, etc. Le rapport indique ainsi : « mis bout à bout, ces indicateurs dessinent donc un système économique faible, où les producteurs sont peu rémunérés, où les diffuseurs sont majoritairement fragiles, où prédomine l’absence de régulation économique. »

La crise sanitaire a encore plus fragilisé l’écosystème des arts visuels. La rapporteure a donc souhaité au cours de ses travaux préparatoires à l’examen du PLF 2022 rencontrer l’ensemble des acteurs des arts visuels : les représentants et syndicats d’artistes généralistes ou représentant certaines esthétiques (photographie, plasticiens, designers, etc.) mais également les diffuseurs (les centres d’art, les galeries privées et l’ensemble des professionnels de l’art contemporain), les commissaires, les critiques d’art et les régisseurs, les organismes de gestion collective (ADAGP, SAIF et SCAM), ainsi que les opérateurs publics de soutien à la création (l’association PLATFORM qui représente les fonds régionaux d’art contemporain – FRAC – ainsi que le Centre national des arts plastiques – CNAP). Ce travail qui ne prétend pas, loin de là, à l’exhaustivité, doit permettre de déboucher sur quelques propositions concrètes pouvant être défendues lors de l’examen du projet de loi de finances.

A.   un secteur sensiblement moins aidé par les pouvoirs publics que le spectacle vivant

Le rapporteur l’a constaté au cours des auditions : les acteurs des arts visuels ressentent une certaine forme d’injustice entre le soutien dont peut disposer le spectacle vivant et les crédits qui sont destinés à leur secteur. Les arts visuels représentent en moyenne 10 % des crédits du programme 131 contre 90 % pour le spectacle vivant.

Au cours des auditions, la DGCA l’a rappelé : « la disproportion avec le spectacle vivant tient au fait que les politiques publiques investissent massivement dans l’emploi de techniciens et d’interprètes auxquels, en outre, la solidarité interprofessionnelle accorde un accès à l’indemnisation du chômage dans des conditions favorables, relativement à d’autres professions. Rien de tel traditionnellement pour les arts plastiques, où l’on investit – peu – dans les œuvres, sans vraiment se soucier de la rémunération de l’artiste ou du créateur. ».

1.   Les principaux soutiens aux artistes et à la création du programme 131

Sur le programme 131, plusieurs dispositifs existent pour soutenir les artistes : aides individuelles (1,6 million d’euros dans le PLF 2022), allocation d’installation d’atelier (0,4 million d’euros dans le PLF 2022), soutien à des résidences (1,1 million d’euros dans le PLF 2022), etc. Les centres d’art sont également soutenus à hauteur de 7,4 millions d’euros dans le PLF 2022. La rapporteure souhaite s’arrêter sur l’action des FRAC et le CNAP qui constituent deux types d’acteurs jouant un rôle important dans le soutien à la création et à la diffusion en dehors de l’action des centres d’art.

a.   L’action des FRAC

Les FRAC ont été créées en 1982 et fondées sur un partenariat entre l’État et les régions. Elles ont pour mission de constituer des collections publiques d’art contemporain, de les diffuser auprès de tous les publics sur l’ensemble du territoire régional et d’accompagner la rencontre du public avec des œuvres par des actions de médiation.

Les vingt-deux FRAC conservent plus de 36 000 œuvres (dont 51 % d’artistes français) et diffusent 25 % de ces œuvres chaque année : 670 expositions ont lieu dont 550 hors les murs (plus de la moitié ayant lieu dans des structures d’éducation). En 2019, cela représentait 1,770 million de visiteurs dont 330 000 scolaires. En 2020, les FRAC ont acheté 918 œuvres (790 en 2019) de 389 artistes (372 en 2019). 74 % des artistes avaient bénéficié ainsi d’un premier achat.

Sur le programme 131, la dotation de fonctionnement des FRAC représente 9,1 millions d’euros et le budget d’acquisition 2,4 millions d’euros. Avec des équipes constituées en moyenne de 14 ETP et un budget moyen (totalisant acquisitions et fonctionnement) de 1,46 million d’euros (soit 1,28 million d’euros pour le fonctionnement et 185 956 euros pour les acquisitions). Leurs recettes proviennent à 90 % de subventions publiques (30 % pour l’État et 54 % pour les régions). La DGCA conclut de ces données, rapportées au volume d'activité et à la fréquentation des FRAC, à l’efficacité de l’investissement public dans ce domaine.

La conservation des œuvres, toujours plus nombreuses, pèse cependant fortement sur les coûts de fonctionnement des FRAC. Se pose régulièrement la question de la conservation des œuvres et de l’élargissement de la capacité d’accueil de leurs réserves. L’augmentation des besoins en fonctionnement pèse sur la capacité d’acquisition.

En dehors de l’enveloppe exceptionnelle de 1,5 million d’euros pour permettre des acquisitions supplémentaires (60 000 euros par FRAC) ouverte dans le cadre de la relance, les budgets d’acquisition des FRAC n’ont pas été réévalués depuis plus de 10 ans : leur pouvoir d’achat a donc diminué et avec lui, leur rôle de rampe de lancement pour de nombreux artistes. Le budget d’acquisition des FRAC ne représente aujourd’hui que 12 % de leur budget.


 

budget (recettes) des fracs en 2019

(en euros)

Source : Association PLATFORM.

 

 

 

 


—  1  —

Si la rapporteure s’interroge sur la possibilité de revendre certaines œuvres acquises pour diminuer les contraintes liées à la conservation et dégager des ressources supplémentaires pour l’acquisition d’œuvres originales d’artistes vivants, elle remarque d’abord que l’inaliénabilité des œuvres achetées par les FRAC a été renforcée par les articles 5 et 57 de la loi n° du 7 juillet 2016 dite « loi LCAP » qui instaurent le label « Fonds régional d’art contemporain (FRAC) » et modifient le code du patrimoine en apportant une protection juridique supplémentaire aux collections (affectation irrévocable de la présentation au public de la collection). Par ailleurs, les acteurs rencontrés sont plutôt hostiles à l’idée : signal potentiellement négatif envoyé au marché concernant l’artiste dont l’œuvre est revendue, difficultés probables à trouver un acheteur, affaiblissement de la politique de patrimonialisation dont la durabilité constitue un des atouts principaux.

b.   L’action du Centre national des arts plastiques

Le Centre national des arts plastiques (CNAP) est un établissement public, opérateur du programme 131, qui concourt comme les FRAC au soutien à la création, à l’enrichissement du patrimoine contemporain national et à la diffusion de ce patrimoine au public.

Pour l’accomplissement de ces missions, le CNAP :

– acquiert à titre gratuit ou onéreux et commande pour le compte de l’État des œuvres (acquisitions et commande publique). Si le budget total de l’établissement est environ trois fois inférieur à celui de l’ensemble des FRAC, son budget d’acquisition est seulement deux fois inférieur ;

– prête et dépose les œuvres de la collection dans des institutions culturelles publiques ou privées ;

– attribue des aides (dispositifs de soutien) ;

– organise des actions de promotion de l’art contemporain (éditions, co-production d’expositions, communication, partenariats, etc.) ;

– assure une mission d’information et de conseil à l’intention des collectivités publiques et des professionnels.

Le plafond d’emploi atteignant 77 ETPT, 48 postes sont dédiés au pôle collection, 11 postes au pôle soutien à la création (commandes et acquisitions) et 3 postes pour le développement culturel, aux partenariats et aux éditions, pour ce qui concerne l’action « métier ».


—  1  —

évolution des subventions de l’opérateur depuis 2017

(en millions d’euros)

 

2017

2018

2019

2020

2021

SCSP

7,010

7,227

7,804

7,924

7,961

Acquisitions

2,070

2,183

2,183

2,160

2,160

Investissement

0,276

0,291

0,291

0,288

0,288

Source : CNAP.

Hors acquisitions (622 œuvres auprès de 114 artistes en 2019 pour un montant de 2 045 347 euros) et dispositifs exceptionnels liés à la crise sanitaire, 12 dispositifs de soutien à la création existent au bénéfice des artistes (soutien au projet artistique), des théoriciens et critiques d’art, des éditeurs (soutien à l’édition imprimée ou numérique, soutien à la participation à un salon à l’étranger) et des galeries d’art contemporain (soutien à la première exposition, soutien à une publication, avance remboursable pour la production d’une œuvre originale, valorisation de la scène française à l’étranger, etc.). En 2019, 702 dossiers ont été déposés et 288 soutiens accordés (dont 153 artistes soutenus) pour un montant global de 1 249 381 euros.

Par ailleurs, 233 expositions organisées en France et à l’étranger ont présenté une ou plusieurs œuvres du CNAP (soit au total 1 317 œuvres) en 2019. Par ailleurs, 318 œuvres ont été déposées dans 50 lieux.

2.   Des dispositifs d’aide durant la crise sanitaire qui n’ont pas tous fonctionné

Outre le mécanisme d’exonération de charges, les artistes auteurs ont bénéficié de plusieurs dispositifs de soutien durant la crise sanitaire et dans le cadre du plan de relance. Tous n’ont cependant pas donné satisfaction.

soutiens exceptionnels aux arts visuels en 2021 et 2022
(hors programme « nouveaux mondes »)

(en millions d’euros)

Fonds d'urgence

5,8

Opérateurs

3,9

Acquisition du CNAP

3,2

Aide aux jeunes créateurs de mode

0,5

Soutien aux métiers d'art

1

Soutien des DRAC et des FRAC

1,8

Commande photographique

5,5

TOTAL

21,7

Source : DGCA.

a.   Le fonds de solidarité : le dispositif privilégié par les artistes-auteurs des arts visuels quand ils pouvaient y avoir accès

Si au début de la crise, les auteurs n’étaient pas pris en compte en raison de problèmes techniques liés au numéro de SIRET, ce problème une fois résolu, ce sont environ 47 000 artistes-auteurs (sur une population de 200 000 artistes-auteurs) qui ont été soutenus par le fonds de solidarité pour un montant total de 246 millions d’euros. Il n’est pas possible de préciser la part relevant des arts visuels.

Ce fut de loin, le dispositif le plus plébiscité par les auteurs des arts visuels quand ils pouvaient y avoir accès ce qui ne fut pas toujours le cas. La preuve de la perte de revenus fut parfois difficile à apporter (en raison des « pratiques de la gratuité » au sein des arts visuels et au caractère souvent tardif du processus de contractualisation qui y prédomine). La forte variabilité des revenus a également handicapé les artistes dont les revenus étaient en dessous de leur moyenne sur les périodes de référence. Les jeunes auteurs, comme dans de nombreux secteurs économiques, ont également été davantage en difficulté.

b.   Des dispositifs de soutien du CNAP à revoir

Si les acteurs des arts visuels (SAIF, syndicats représentatifs, CIPAC, etc.) ont plaidé pour la création d’un fonds unique pouvant éventuellement donner lieu à un versement forfaitaire, le choix fut de créer des fonds sectoriels, en subsidiarité du fonds de solidarité, sans que l’égalité de traitement entre les artistes auteurs n’ait toujours été garantie.

Pour les arts visuels, c’est le CNAP qui a été chargé du soutien exceptionnel aux auteurs des arts visuels. En 2020 et en 2021, le CNAP a renforcé ses dispositifs existants et mis en place trois dispositifs de soutien exceptionnel :

– le fonds d’urgence, lancé dès mars 2020, a permis de soutenir 822 artistes-auteurs pour un montant global de plus de 1,5 million d’euros. Ce dispositif a permis de soutenir les artistes-auteurs face à leur perte de rémunération suite aux annulations et reports d’expositions et autres évènements ;

– l’aide exceptionnelle ciblée sur les charges fixes, mise en place pour 2021 et 2022 pour vocation de soulager partiellement les galeries d’art contemporain, pendant le temps de la crise sanitaire, d’une partie de leurs charges fixes pesant le plus lourdement dans leur économie. À ce jour, 64 aides ont été attribuées pour un montant total de 398 000 euros alors que le dispositif a été doté de 2 millions d’euros ;

– le fonds exceptionnel de garantie des revenus artistiques, pour le 1er semestre 2021, est un accompagnement financier dédié aux artistes-auteurs pour les aider à surmonter les difficultés économiques qu’ils rencontrent du fait de la crise sanitaire. Doté de 5 millions d’euros, seules 289 aides avaient été attribuées fin septembre pour un montant global de 761 125 euros.

La rapporteure s’étonne du très faible niveau de consommation du fonds exceptionnel de garantie. Elle comprend que les retards de versement du fonds de solidarité ont pu conduire à une forme de télescopage, étant rappelé que le fonds exceptionnel de garantie n’est ouvert qu’aux personnes qui n’en bénéficient pas.

Elle regrette également que le CNAP ait tardé à mettre en œuvre le dispositif faute de réponse positive apportée à sa demande d’effectifs supplémentaires. Outre la complexité du dispositif, reconnue par la DGCA, les associations et syndicats représentatifs des artistes auteurs, qui n’ont pas été consultés dans l’élaboration des critères d’éligibilité, regrettent que ces critères écartent un nombre important d’artistes qui auraient pu bénéficier du fonds. En comparaison, le fonds d’urgence TRAVERSÉES doté de 1 million d’euros pour le maintien de l’activité artistique et coordonné par le CIPAC, la FRAAP (Fédération des réseaux et associations d’artistes) et le réseau Diagonal semble avoir été mis sur pied rapidement et avoir mieux répondu à la situation des artistes.

Présentation du dispositif « fonds exceptionnel de garanties » du CNAP

Le dispositif s’adresse aux artistes-auteurs qui subissent une perte de leurs revenus artistiques (revenus accessoires inclus) supérieure ou égale à 40 % au premier semestre (janvier-juin) 2021 par rapport aux revenus 2019 ou à la moyenne de leurs revenus 2017-2019.

L’aide permet de garantir 60 % des revenus artistiques perçus au premier semestre (janvier-juin) 2021 par rapport aux revenus 2019 ou à la moyenne de leurs revenus 2017-2019.

Pour les artistes auteurs ayant eu une perte de revenus artistiques (revenus accessoires inclus) supérieure à 1 500 euros par mois considéré, le montant de l’aide couvre l’intégralité de la perte.

L’aide minimale est de 500 euros. L’aide est plafonnée à 9 000 euros au titre du 1er semestre 2021 par demandeur.

Si les commissions de l’automne devraient favoriser une montée en puissance du dispositif, la rapporteure plaide pour le report des crédits non consommés alors que la sortie de crise s’annonce lente pour le secteur des arts visuels.

3.   Le programme de commandes publiques « Mondes nouveaux » suscite des interrogations

Les acteurs auditionnés (artistes et diffuseurs) sont assez dubitatifs concernant le programme « Mondes nouveaux ». Le calendrier de l’appel à projet à l’été a été jugé peu propice. Ils craignent que la part réservée aux arts visuels soit limitée : la DGCA indique que 1/3 des dossiers et bourses d’études retenus par le comité d’expert concernent les arts visuels. Certains regrettent le nombre restreint d’artistes concernés : la DGCA indique 260 dossiers retenus, auxquels s’ajoutent 80 collectifs.

Pour rappel, ce programme doté de 30 millions d’euros sur deux ans doit permettre de donner un élan nouveau à la création notamment chez les jeunes créateurs. Les artistes sont invités à proposer des projets « en résonance avec un ou des sites du patrimoine architectural, historique et naturel ». Le programme implique ainsi la participation directe du Centre des monuments nationaux et le Conservatoire du littoral.

B.   une sortie des « pratiques de la gratuité » à programmer

Les acteurs sont unanimes : il faut sortir les arts visuels de ces « pratiques de la gratuité » qui empêchent de rémunérer dignement les artistes et de mieux structurer la filière. Les acteurs publics sont particulièrement concernés par cette attention à porter aux acteurs des arts : si le droit de présentation est de mieux en mieux respecté dans les lieux de diffusion soutenus par le ministère de la culture, ce n’est pas le cas du 1 % artistique. Les critiques d’art rencontrés ont également rappelé que les galeries d’art étaient souvent beaucoup plus respectueuses du travail que certains grands opérateurs de la culture disposant pourtant de moyens importants.

Ce soutien renforcé est d’autant plus nécessaire que le retour à la normale après la crise sanitaire n’a rien d’une évidence. Le carnet de commandes demeure encore très affaibli et la reprise des projets dans les arts visuels nécessite un temps long, la crise sanitaire ayant constitué un coup d’arrêt qui ne permet pas une reprise immédiate.

Différentes réflexions existent allant du renforcement de la politique de soutien immobilier (création d’ateliers logements, ouverture de lieux et de résidences de création, etc.) à la création d’un statut de l’artiste des arts visuels, en passant par des dispositifs de soutien à l’emploi. La rapporteure présente ci-dessous les pistes qui lui semblent prioritaires et dont certaines sont déjà mises en œuvre.

1.   L’instauration plus que bienvenue d’un droit de présentation

La pratique a très longtemps été de ne pas rémunérer les auteurs des arts plastiques et graphiques à l’occasion de l’exposition au public de leurs œuvres. Si le droit d'exposition entre dans la catégorie du droit de représentation défini par l'article L. 122-2 du code de la propriété intellectuelle, la promotion du travail des artistes-auteurs est souvent apparue comme étant une compensation suffisante pour les diffuseurs.

Aujourd’hui, la gratuité du travail des artistes plasticiens ne peut plus être considérée comme la règle. Le rapport Racine a permis de remettre le sujet au cœur des préoccupations des acteurs. La recommandation du 18 décembre 2019 du ministère de la culture visant à rémunérer les artistes-auteurs au titre de la présentation publique de leurs œuvres est aujourd’hui progressivement appliquée par les acteurs soutenus par le ministère de la culture (lieux labellisés, FRAC, etc.).

Si elle reste fondée sur le volontariat, la recommandation semble aujourd’hui être appliquée de plus en plus systématiquement grâce à la mise en place du barème fixé par le ministère en coordination avec les organismes de gestion collective.

Il faut sans aucun doute aller plus loin aujourd’hui dans la rémunération de la présentation des œuvres qui ne s’applique qu’aux institutions publiques ou soutenues par le ministère de la culture. La rapporteure salue la proposition de loi relative à la rémunération des artistes en arts visuels présentée par la députée Fabienne Colboc. Cette dernière vise :

– à inscrire dans le code de la propriété intellectuelle l’obligation de rémunération minimum des artistes plasticiens pour l’exposition de leurs œuvres par des structures bénéficiant d’un soutien financier de l’État ;

– à créer un service de médiation pour aider à dénouer les litiges individuels opposant les artistes des arts visuels aux acteurs de l’aval ;

– à ce que la cession gratuite des droits d’auteur fasse l’objet d’une mention distincte au sein d’un contrat justifiant de l’intention libérale.

La rapporteure a constaté, à quel point ce dernier point est extrêmement important pour les artistes-auteurs. Si certains peuvent et souhaitent, librement et souverainement, décider d’abandonner leurs droits d’auteur, cette décision leur revient à eux seuls.

2.   Faire respecter la règle du « 1 % de la commande publique »

Le 1 % artistique est une mesure qui consiste à réserver, à l’occasion de la construction ou de l’extension de bâtiments publics, une somme permettant la réalisation d’une ou plusieurs œuvres d’art spécialement conçues pour le lieu. C’est aujourd’hui un des principaux outils de soutien à la création dans le cadre de la commande publique, tout en assurant une diffusion dans un lieu de vie du quotidien et de l’espace public. Régie par le décret du 29 avril 2002 relatif à l’obligation de décoration des constructions publiques, cette mesure s’applique à toutes les opérations dont la maîtrise d’ouvrage est assurée par l’État et ses établissements publics (hors EPIC) ainsi qu’aux collectivités territoriales ou leurs groupements.

Or, alors même que le dispositif du 1 % artistique est ouvert dorénavant à l’art éphémère ce qui suscite certaines interrogations chez les acteurs des arts visuels, on constate que l’obligation est aujourd’hui très diversement respectée, faute de dispositif contraignant pour les acteurs publics. La rapporteure a eu l’occasion de l’indiquer lors de son intervention en commission des affaires culturelles : dans sa région, la Nouvelle Aquitaine, les artistes ont épinglé le conseil régional, le conseil départemental ainsi que la mairie de Bordeaux, ces collectivités n’ayant pas ou mal respecté cette obligation.

Il ne s’agit nullement ici de stigmatiser un territoire particulier : les « oublis » du 1 % sont légion partout sur le territoire. Selon les informations de la DGCA qui demeurent lacunaires et gagneraient à être complétées ([2]), il semblerait que l’Alsace et les Hauts de France n’appliquent pas le 1 %, que l’Occitanie plafonne sous ses 1 % à 80 000 euros et que très peu de projets en Guadeloupe, en Bourgogne Franche-Comté et en Auvergne Rhône Alpes soient observés. Des efforts de pédagogie ont été consentis : un guide pratique de la commande publique artistique et du 1 % artistique a été édité et distribué auprès des collectivités territoriales. Les 12 000 exemplaires ont été épuisés, ce qui montre aussi la bonne volonté de nombreux acteurs locaux souhaitant s’emparer de ces enjeux.

L’État et ses établissements publics dans les territoires doivent absolument donner l’exemple ce qui n’est pas toujours le cas : une nouvelle circulaire relative à l’obligation d’appliquer le 1 % artistique à destination des préfets est ainsi en voie de préparation pour rappeler tout simplement aux représentants de l’État l’obligation de respecter la loi.

3.   Une structuration des filières à poursuivre

La structuration de la filière des arts visuels constitue aujourd’hui un enjeu prégnant. Le CIPAC indique ainsi que l’absence d’existence d’une branche professionnelle consacrée aux métiers des arts visuels constitue un obstacle important au développement de la filière (développement d’une convention collective, formation professionnelle, reconnaissance des métiers).

Différents mécanismes, dont certains paraissent ambitieux, sont cités par les acteurs des arts visuels : la mise en place d’une politique de soutien à l’emploi équivalente au FONPEPS tel qu’il existe pour le spectacle vivant, la création d’un statut professionnel des auteurs des arts visuels embrassant l’ensemble des dispositions sociales, fiscales et de propriété intellectuelle, la création d’un centre national des artistes auteurs dont la rapporteure doute qu’il puisse véritablement réunir l’ensemble des esthétiques.

a.   Le conseil national des professions des arts visuels

Plus modestement, la création du Conseil national des professions des arts visuels (CNPAV) a déjà constitué une étape importante saluée par tous les acteurs. Les membres du CNPAV et la DGCA elle-même estiment cependant qu’une montée en puissance du CNPAV est nécessaire.

À ce jour, il n’y a eu que deux séances plénières du CNPAV depuis sa création : une première sous la présidence du ministre Franck Riester, en juin 2019, et, une seconde en janvier 2021 présidée par la ministre Roselyne Bachelot. La rapporteure constate qu’en 2020 le CNPAV n’a pas été réuni alors que c’était précisément le moment, en pleine crise sanitaire, de permettre aux acteurs de se parler. Pour la Société des auteurs des arts visuels et de l'image fixe (SAIF) : « cette structure n’a pas répondu à ses objectifs et son activité a été liée au fonctionnement du bureau qui a été désigné et non élu par le CNPAV ».

Il semblerait que l’instance dispose de moyens propres (financiers ou humains) insuffisants ne permettant pas son fonctionnement optimal. Les représentants des artistes, mais aussi les commissaires d’expositions et les critiques d’art souhaitent qu’un défraiement soit prévu comme c’est l’usage dans ce type de commission au-delà du simple remboursement des frais de transport.

b.   Le soutien aux organismes professionnels

Dans un souci de transparence et pour répondre aux demandes d’un syndicat d’artistes-auteurs, la rapporteure retranscrit la liste des subventions accordées aux organismes et syndicats subventionnés par le programme 131 pour le secteur des arts visuels.

liste des organismes professionnels et syndicats subventionnÉs sur l’action 6 du programme 131 pour le secteur des arts visuels en 2021

(en euros)

 

 Montants prévisionnels

Consommation à date

Subventions 2021

 AE

 CP

 AE

 CP

ADRA

35 000

35 000

 

 

AICA

25 000

25 000

25 000

25 000

ALLIANCE FRANCAISE DES DESIGNERS (AFP)

35 000

35 000

35 000

35 000

ANCAP

7 201

7 201

 

 

ANEAT

20 000

20 000

20 000

20 000

ARTS EN RESIDENCE

50 000

50 000

50 000

50 000

BLA !

35 000

35 000

 

 

CAAP

8 000

8 000

8 000

8 000

CIPAC

130 000

130 000

130 000

130 000

COMITE PROFESSIONNEL DES GALERIES D'ART (CPGA)

35 000

35 000

 

 

COMMISSAIRES D'EXPOSITION ASSOCIES (CEA)

35 526

35 526

35 526

35 526

Développement des centres d'art (DCA)

120 000

120 000

120 000

120 000

Fédération des réseaux et associations des artistes plasticiens (FRAAP)

105 000

105 000

105 000

105 000

MAISON DES ARTISTES

20 000

20 000

 

 

Plan Photo - Société Française de Photographie - Iconos

30 000

30 000

30 000

30 000

PLATFORM

120 000

120 000

120 000

120 000

RESEAU DIAGONAL

80 000

80 000

 

 

RESEAU DIAGONAL

45 000

45 000

45 000

45 000

Scène française - Réseau documents d'artistes

120 000

120 000

120 000

120 000

SNAP CGT

8 000

8 000

8 000

8 000

UNION DES PHOTOGRAPHES PROFESSIONNELS (UPP)

12 000

12 000

 

 

USOPAVE

15 000

15 000

 

 

VIDEOMUSEUM

120 000

120 000

120 000

120 000

TOTAL

1 210 727

1 210 727

971 526

971 526

Source : DGCA.

c.   Le rôle de structuration des territoires

Les acteurs des arts visuels ont rappelé également leur attachement aux SODAVI (schémas d’orientation pour les arts visuels) qui constituent un « outil de construction conjointe des politiques publiques en faveur des arts visuels, au service des acteurs professionnels des arts visuels et des publics » dans les territoires réunissant l’ensemble des acteurs (DRAC, collectivités territoriales, artistes, écoles d’art, labels et centres d’art, acteurs privés). Leur fonctionnement très inégal sur le territoire est regretté. Une enveloppe de 900 000 euros est prévue sur le programme 131 pour venir en soutien de 15 SODAVI.

4.   Des dispositifs fiscaux à améliorer

La rapporteure souhaite défendre deux amendements pour soutenir le secteur des arts visuels.

a.   L’élargissement de l’article 1460 du code général des impôts

L’article 1460 du code général des impôts prévoit une exonération de la cotisation foncière des entreprises (CFE) pour :

– les peintres, sculpteurs, graveurs et dessinateurs considérés comme artistes et ne vendant que le produit de leur art ;

– les photographes auteurs ;

– les auteurs et compositeurs.

La rédaction actuelle de l’article 1460 complexifie la compréhension du dispositif en utilisant des notions désuètes qui ne correspondent pas aux nouvelles formes d’activité des artistes-auteurs, engendrant une source d’insécurité pour les professionnels. Les services fiscaux eux-mêmes n’auraient pas toujours une compréhension précise du dispositif et exigeraient le paiement de la CFE à des personnes exonérées aujourd’hui. Par ailleurs, à partir du moment où l'exonération s'applique aux seules activités de création distincte de toute activité de type industrielle, artisanale ou commerciale ([3]), la différence de traitement entre artistes ne paraît pas fondée a priori.

Dans un esprit de simplification et de compréhension de la norme fiscale, il conviendrait de retenir une définition précisée qui viserait l’ensemble des auteurs d’œuvres de l’esprit visés par le code de la propriété intellectuelle (articles
L. 112-2 et L. 112-3).

b.   Une prolongation et un élargissement du bénéfice de la déduction sur cinq ans du prix d’acquisition d’œuvres originales ou d’instruments de musique d’artistes vivants

L’article 238 bis AB du code général des impôts prévoit pour les entreprises, soumises à l’impôt sur les sociétés (IS) et à l’impôt sur le revenu selon le régime des bénéfices industriels et commerciaux, et qui font l’acquisition d’œuvres originales d’artistes vivants ou d’instruments de musique de déduire du résultat de l’exercice d’acquisition et des quatre années suivantes, par fractions égales, une somme égale au prix d’acquisition.

i.   La prolongation du dispositif

La rapporteure souhaite premièrement prolonger le dispositif que la loi
 2019-1479 de finances pour 2020 a borné au 31 décembre 2022. La suppression du dispositif fragilisera la reprise du secteur du marché de l’art, dans un contexte économique incertain où les effets de la crise risquent de durer plus longtemps : les acquisitions par les particuliers et les institutions restent à confirmer et les ventes non réalisées par les entreprises ne seront pas compensées par des acquisitions par les institutions publiques, auprès des galeries ou auprès des artistes, d’après les informations transmises aussi bien par la DGCA que par l’ensemble des acteurs de la filière.

ii.   L’élargissement du dispositif

Deuxièmement, la rapporteure souhaite étendre le dispositif aux professions libérales qui n’en bénéficient pas aujourd’hui, étant rappelé qu’elles ne peuvent pas satisfaire aujourd'hui à la condition de création d'un compte de réserve spéciale au passif du bilan. L’amendement se propose ainsi de corriger cette limite d’ordre technique en créant un suivi fiscal et comptable spécifique pour les entreprises soumises à l’impôt sur le revenu au titre des bénéfices non commerciaux (BNC).

Étendre ce dispositif aux professions libérales permettrait ainsi de soutenir la création dans les arts visuels en encourageant les acteurs des territoires à acheter des œuvres originales et à les exposer à leur clientèle/patientèle. 31 % des collectionneurs sont aujourd'hui issus des professions libérales et leur présence sur l'ensemble du territoire favoriserait une meilleure répartition des acquisitions auprès d'artistes en région. L’extension aux entreprises imposables en BNC permettra ainsi aux galeries d’art installées dans les territoires de motiver des achats d’entreprises de petite et moyenne taille.

Par ailleurs, l’exposition au public des œuvres à la clientèle de l’entreprise permet de diversifier les façons de présenter une œuvre et surtout en démocratise l’accès. En effet, une exposition dans le cadre de locaux ouverts à la clientèle d’une entreprise permet de toucher un public qui n’est pas venu pour regarder des œuvres. Ce type d’exposition permet une monstration incidente à un public nouveau qui n’est pas nécessairement celui habitué à fréquenter les lieux dédiés à la culture. L’exposition à la clientèle répond ainsi également à un objectif de démocratisation culturelle.

III.   Le programme 361 transmission des savoirs et démocratisation de la culture : une augmentation sans précédent des moyens pour le pass culture et une dynamique de développement de la recherche dans les écoles nationales supérieures d’architecture (ENSA) relancée

Le budget du programme 361 présente une augmentation sans précédent de 174,9 millions d’euros en AE (+30 %) et de 171,3 millions d’euros en CP (+30 %). Hors mesures de transfert, cette hausse atteint même 184,9 millions d’euros en AE et 181,1 millions d’euros en CP dans le PLF 2022.

 

Évolution des autorisations d’engagement et des crÉdits de Paiement
du programme 361 aprÈs mesures de transfert

(en millions d’euros)

Numéro et intitulé de l’action

Autorisations d’engagement

Crédits de paiements

LFI 2021

PLF 2022

Évolution en valeur absolue

Évolution en %

LFI 2020

PLF 2022

Évolution en valeur absolue

Évolution en %

01 – Soutien aux établissements d’enseignement supérieur et insertion professionnelle

245,6

258,5

+ 12,9

+ 5,3 %

241,2

262,5

+ 21,3

+ 8,8 %

02 – Soutien à la démocratisation et à l’éducation artistique et culturelle

220,2

381,2

+ 161

+ 73,1 %

220,4

369,4

+ 149

+ 67,6 %

03 – Langue française et langues de France

3,2

4,2

+ 1

+ 31,3 %

3,2

4,2

+ 1

+ 31,3 %

04 –Recherche culturelle et culture scientifique et technique

112,6

112,4

– 0,2

– 0,2 %

111,9

111,9

0

+ 0,0 %

TOTAL

581,5

756,4

+ 174,9

+ 30,1 %

576,6

747,9

+ 171,3

+ 29,7 %

Source : Commission des finances de l’Assemblée nationale.

Par ailleurs, 20 millions d’euros en crédits de paiement sont prévus sur le programme 363 Compétitivité de la mission Plan de relance pour la rénovation du réseau des écoles de l’enseignement supérieur culture (ESC) et la modernisation de leurs outils pédagogiques et infrastructures informatiques.

A.   181 millions d’euros de mesures nouvelles

À périmètre constant, l’ensemble des actions du programme connaissent une augmentation de leurs crédits de paiement :

– 26,1 millions d’euros de mesures nouvelles sont prévus pour l’action 1 Soutien aux établissements d’enseignement supérieur et insertion professionnelle (solde de transferts sortants de 4,8 millions d’euros notamment lié au transfert des 47 ETPT de l’Académie de France à Rome du programme 361 vers le programme 131 Création) notamment liées aux projets d’investissement des écoles de l’enseignement supérieur culture (+ 8,3 millions d’euros), à la remise à niveau des financements territoriaux (+ 7,5 millions d’euros) mais également au soutien des bourses (+4 millions d’euros) et aux besoins de fonctionnement des écoles nationales supérieures d’architecture (+ 2,5 millions d’euros) ;

– 153 millions d’euros de mesures nouvelles (solde de transfert sortant de 4 millions d’euros) bénéficient à l’action 2 Soutien à la démocratisation et à l’éducation artistique et culturelle, dont 140 millions d’euros pour le seul dispositif du pass Culture pour les jeunes de plus et moins de 18 ans ;

– l’action 3 Langue française et langues de France bénéficie d’une hausse de 1 million d’euros de ses crédits pour soutenir en administration centrale et dans les DRAC la délégation générale à la langue française et aux langues de France ;

– la dotation en fonds propres d’Univers science et la protection sociale de ses agents sont abondées de 1,05 million d’euros sur l’action 4 Recherche culturelle et culture scientifique et technique (transferts sortants de 1,08 million d’euros).

1.   Une attention particulière portée aux étudiants et à l’investissement dans les territoires sur l’action 1 Soutien aux établissements de l’enseignement supérieur et insertion professionnelle

Hors soutien aux écoles nationales supérieures d’architecture (ENSA) abordé dans une partie spécifique, 6 millions d’euros supplémentaires seront consacrés aux étudiants de l’ESC et des efforts importants d’investissement dans les territoires sont consentis.

mesures nouvelles en CP concernant l’action 1

(en millions d’euros)

Réponses aux conséquences de la crise: vie étudiant et insertion

2

Rebasage des bourses et frais de gestion

4

Harmonisation du cadre de gestion des contractuels sur le réseau des écoles

0,8

Fonctionnement des ENSA

2,5

Fonctionnement des écoles d'art

1

Projets d'investissements dans les écoles de l'ESC

8,3

Remise à niveau des financements territoriaux (CPER et hors CPER)

7,5

TOTAL

26,1

Source : Délégation générale à la transmission, aux territoires et à la démocratie culturelle

a.   Le soutien aux étudiants

Le nombre d’étudiants boursiers de l’enseignement supérieur culture a augmenté de façon significative au cours des années 2019 et 2020 pour atteindre 11 428 étudiants en décembre 2020. L’enveloppe attribuée aux bourses sur critères sociaux a dont été abondée de 4 millions d’euros supplémentaires (28,9 millions d’euros en CP dans le PLF 2022). Le montant des autres aides reste quant à lui stable (aide au mérite, déplacement des étudiants d’Outre-mer, assistance aux étudiants en situation de handicap, bourse de mobilité pour les élèves des ENSA, etc.). Ces bourses sont calculées en fonction des taux de bourses déterminés par le ministère en charge de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation à l’exception de la prise en charge d’aides destinées aux déplacements des étudiants d’Outre-mer, spécifique au ministère de la culture.

2 millions d’euros supplémentaires après l’augmentation du même montant en 2021 sont destinés à favoriser l’entrée dans la vie professionnelle des étudiants tout en soutenant la vie étudiante durant leur formation. Ces moyens se répartiront entre : culture pro (+0,7 million d’euros) qui permet aux écoles de développer des actions d’accompagnement vers la vie professionnelle en lien avec l’environnement territorial et avec une implication renforcée des DRAC, le développement d’incubateurs et de pépinières (+0,7 million d’euros), le soutien au mentorat et au tutorat (+ 0,2 million d’euros) ainsi que les mesures en faveur de la vie étudiante pour l’accès à la santé et la lutte contre toutes les formes de discriminations (+ 0,4 million d’euros).

L’intégration dans la vie professionnelle des étudiants de l’ESC doit constituer une priorité notamment au sein des écoles supérieures d’art plastique comme le rappelle le rapport de la Cour des comptes portant sur L’enseignement supérieur en arts plastiques de décembre 2020 ([4]). Ce rapport rappelle que le taux d’insertion professionnelle atteint 80 % ce qui est le plus faible des écoles sont la tutelle du ministère : « ce résultat, décevant au regard de l’exigence et du coût des formations, conduit à s’interroger sur la qualité du suivi de l’insertion professionnelle, l’accompagnement des diplômés, l’adaptation des enseignements au contexte dans lequel évolue l’art contemporain, et le niveau de professionnalisation des cursus ».

b.   La réalisation d’investissements importants pour les établissements de l’ESC

Outre l’augmentation de 4,3 millions d’euros (+3 %) des subventions pour charges de service public des établissements de l’ESC (enveloppe totale de 139,7 millions d’euros en AE et en CP), les dépenses d’investissement augmentent en 2022.

Le niveau d’AE inscrites au titre 5 (dépenses d’investissement) pour l’ESC est maintenu en 2022 par rapport à 2021 mais les dépenses d’investissement en CP augmentent de 8,3 millions d’euros marquant l’avancée opérationnelle des projets prioritaires.

échéanciers des opérations prioritaires des établissements de l’esc

(en millions d’euros)

 

Total Opération

Avant 2022

2022

Post 2022

 

AE

CP

AE

CP

AE

CP

ENSA Toulouse

10,6

10,6

2

0

2

0

6,6

ENSA Marseille

27,8

27,8

22,2

0

2

0

3,6

ENSABE Grand Chimay

1,1

1,1

0,5

0

0,3

0

0,4

Villa Arson

10,3

4,2

0,5

0

2

6,1

7,8

Cergy

12

12

2

0

2

0

8

TOTAL

61,8

55,7

27,2

0

8,3

6,1

26,4

Source : Délégation générale à la transmission, aux territoires et à la démocratie culturelle

La rapporteure constate que le coût anticipé du projet de la Villa Arson, édifice qui réunit une école nationale supérieure d’art, un centre national d’art contemporain, une résidence d’artistes et une bibliothèque spécialisée, a été doublé entre le PLF 2021 et le PLF 2022.

Le projet de la Villa Arson : un coût encore indéterminé

La Villa Arson occupe un vaste domaine de plus de 2 hectares dominant Nice. La Villa et son jardin sont inscrits au titre des monuments historiques depuis 1943 et l'architecture de la Villa a obtenu le label « Patrimoine du XXe siècle » en novembre 2000. L’établissement connaît aujourd’hui d’importants désordres bâtimentaires et doit prévoir de nombreuses interventions, qui doivent s’échelonner sur plusieurs années :

– des travaux de restauration des bétons, ainsi que des travaux d’étanchéité et de consolidation des structures ;

– des travaux dans le cadre des préconisations du plan « gestion des jardins » en 2020/2021/2022 ;

– un projet de réhabilitation complète du grand théâtre, vétuste et amianté.

Le responsable de programme indique qu’il est difficile de chiffrer avec exactitude le montant réel de l’ensemble de ces travaux, les études préalables n’étant pas encore finalisées. Des ordres de grandeur ont été communiqués mais doivent être analysés avec précaution : entre 3 et 5 millions d’euros pour la restauration des bétons et entre 6 et 9 millions d’euros pour la réhabilitation du théâtre.

L’école a lancé en 2021 un diagnostic bâtimentaire très détaillé de l’ensemble des espaces (bilan sanitaire et patrimonial), afin d’avoir une vision plus précise des sommes à engager et de leur échelonnement sur plusieurs exercices. Ce diagnostic permettra également d’alimenter le dossier de la DRAC pour le classement définitif de l’ensemble du site.

En 2022, les sommes inscrites au PLF (2 millions en CP) doivent principalement permettre :

– de finaliser les études de remise en état des bétons et de réaliser des travaux d’urgence, le cas échéant ;

– d’amorcer la réhabilitation du théâtre, projet prioritaire pour le directeur de cet établissement, et qui n’avait pas été mentionné dans le PLF 2021.

Par ailleurs, la rapporteure salue l’avancée rapide des travaux prévus dans le cadre du plan de relance (LFI 2021) : 30,8 millions d’euros en CP ont déjà été consommés au 30 septembre 2021 sur l’enveloppe de 50 millions d’euros prévus par le programme Compétitivité de la mission Plan de relance.

avancée des dépenses d’investissement du plan de relance

(en millions d’euros)

Source : Délégation générale à la transmission, aux territoires et à la démocratie culturelle

2.   L’action 2 Soutien à la démocratisation et à l’éducation artistique et culturelle marquée par l’enveloppe de 140 millions d’euros supplémentaire pour accompagner la généralisation du pass Culture

153 millions d’euros de mesures nouvelles sont prévus sur l’action 2.

mesures nouvelles en CP concernant l’action 2

(en millions d’euros)

Actions livre et lecture

1,5

Développement des pratiques amateurs et financement des Olympiades culturelles

1,5

Ateliers Médicis

3

Appel à projet

5

Soutien aux dynamiques territoriales

2

Généralisation du Pass culture

140

TOTAL

153

Source : Délégation générale à la transmission, aux territoires et à la démocratie culturelle.

a.   La généralisation du pass Culture

199 millions d’euros sont prévus pour le pass Culture dans le PLF 2022. Cette dotation acte budgétairement la généralisation du dispositif à l’ensemble des jeunes de 18 ans en mai dernier :

– 155 millions d’euros sont destinés aux plus de 18 ans (enveloppe de 300 euros dont chaque jeune bénéficie pendant 24 mois pour profiter de propositions culturelles de proximité et d’offres numériques dans la limite de 100 euros) ;

– 38 millions d’euros sont alloués à la part individuelle des jeunes de moins de 18 ans, tandis que la part collective est portée par le ministère en charge de l’éducation nationale sur le programme 230 Vie de l’élève (45 millions d’euros) ;

– 6 millions d’euros supplémentaires sont destinés aux moyens de fonctionnement et d’investissement de la SAS.

605 000 comptes ont été créés depuis le 20 mai 2021 (soit un total de 771 000 comptes bénéficiaires pour 825 000 jeunes susceptibles de bénéficier du dispositif). 11 000 offreurs culturels ont rejoint le pass dont 7 286 proposent uniquement des offres physiques. Depuis la généralisation, 119,70 euros sont dépensés en moyenne par les jeunes, représentant 7,5 achats en moyenne.

Il faut se féliciter de la généralisation et de l’extension de ce puissant outil de démocratisation étendu à tous les jeunes. Pour la première fois, un dispositif qui soutient la demande et les pratiques s’adresse directement au libre choix des individus

Les achats font aujourd’hui la part belle aux livres, à la musique et à l’audiovisuel (96 % des réservations). La bonne santé actuelle des librairies n’est pas sans lien avec le pass Culture, étant rappelé qu’aucun achat d’ouvrage ne peut être réalisé sur une plateforme numérique. La réouverture des lieux culturels au printemps dernier devrait favoriser une diversification des réservations au bénéfice du spectacle vivant et les musées.

Pour la rapporteure, le pass Culture doit être l’occasion de réfléchir sur les goûts et pratiques des plus jeunes. Si le pass Culture est un puissant outil d’émancipation par le libre choix des individus, il doit aussi être articulé à une action de médiation et d’éducation artistique et culturelle. C’est déjà souvent le cas dans la pratique : de nombreux libraires saisissent l’occasion de la venue de jeunes, peu habitués à fréquenter ce type de lieux, pour leur faire découvrir certains ouvrages et certaines esthétiques pour lesquels ils n’étaient pas venus. Dans cette perspective, un volet collectif complémentaire pour les moins de 18 ans sera mis en œuvre à partir de 2022.

Le volet collectif permettra aux professeurs de financer des activités d’éducation artistique et culturelle (EAC) pour sa classe, de la 4e à la terminale, et d’accompagner les élèves dans la découverte des usages du pass. Chaque établissement bénéficiera, pour l’année scolaire, d’une dotation virtuelle calculée au prorata du nombre d’élèves scolarisés dans chaque niveau d’enseignement concerné à partir du montant par élève suivant :

– 25 euros par élève en quatrième et en troisième ;

– 30 euros par élève en seconde et en CAP ;

– 20 euros par élève en première et en terminale.

Ce volet collectif se double d’un volet individuel, fonctionnant sur le même principe que le pass Culture proposé pour les jeunes de 18 ans : 20 euros pour les jeunes âgés de 15 ans, 30 euros pour les jeunes âgés de 16 ans et de 17 ans.

Hors pass Culture, les crédits de l’éducation artistique et culturelle sont relativement stables (96,5 millions d’euros). On constate :

– une croissance des crédits strictement dédiés aux pratiques artistiques et culturelles en temps scolaire qui doivent passer de 22,9 millions d’euros en 2020 à 26 millions d’euros en 2022. Si la crise sanitaire conduit à revoir à la baisse la cible du taux d’enfants ayant bénéficié d’une action d’EAC au cours de l’année de 88 % à 70 % en 2021, les efforts seront accentués afin d’atteindre l’objectif de 100 % d’enfants touchés par l’EAC d’ici 2023 ;

– la baisse de 1,2 million d’euros concernant la formation des acteurs de l’EAC (7 millions d’euros prévus en CP dans le PLF 2022) permise par l’émergence de formats hybrides en distance et en présentiel et le report de certaines formations en 2022 liées à la crise sanitaire.

b.   Un renforcement de la politique de soutien des territoires

En 2022, un appel à projet national de 5 millions d’euros sera lancé visant à accompagner les structures et acteurs culturels dans leurs actions en faveur des territoires, des publics et de l’innovation. Pour le délégué général, il s’agira de soutenir les projets les plus innovants mais aussi les mieux inscrits dans leur territoire, engagés dans une dynamique de participation des citoyens à la vie culturelle en lien notamment avec les collectivités locales et l’ensemble du tissu associatif. L’ensemble des acteurs culturels seront concernés, au premier rang desquels les festivals et tous les lieux partenaires du ministère de la Culture.

Le nouveau partenariat avec l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) va se traduire par une feuille de route et un agenda de travail partagés. La délégation travaille à développer une approche globale des enjeux, fondée sur une analyse partagée des dynamiques territoriales à accompagner ou stimuler, et permettant d’articuler l’ensemble des dispositifs existants.

Dans ce cadre, 1 million d’euros de mesure nouvelle permettront d’accompagner le déploiement des tiers lieux piloté par l’Agence : soutien aux initiatives existantes, accompagnement de la mise en réseau, cartographie des lieux et soutien existant du ministère, évaluation de l’impact social et économique, etc.

Les contrats-lecture seront également renforcés à hauteur de 1,5 million d’euros. 

3.   L’action 3 : une action pour la langue française et les langues de France renforcée

Une enveloppe supplémentaire de 1 million d’euros en AE et en CP devrait être ouverte sur l’action 3 pour un total de 4,2 millions d’euros

Dans les territoires, les pactes linguistiques seront accompagnés à l’instar de celui en vigueur dans la région Hauts-de-France. Les crédits centraux seront consacrés aux outils numériques innovants pour sensibiliser le public – et notamment les plus jeunes – à la richesse de la langue française, et pour favoriser son appropriation par le plus grand nombre dans la dynamique créée par la future Cité internationale de la langue française.

4.   L’action 4 : Une très légère augmentation de la dotation d’Universcience malgré une situation économique complexe

Si la dotation en fonds propres accordée à Universcience est en très légère augmentation de 0,5 million d’euros dans le PLF 2022 – le niveau de la subvention pour charges de service public conjuguée à la dotation en fonds propres atteignant 102,1 millions d’euros la situation de l’opérateur reste très complexe.

Le budget rectificatif 2021 voté à l’été a acté une baisse des ressources propres de l’opérateur passant de 15 millions d’euros à 12,2 millions d’euros, entraînant une dégradation du solde budgétaire de fonctionnement anticipé, qui s’établit à -10,6 millions d’euros (contre -9 millions d’euros au budget initial). Du 19 mai (date de la réouverture des lieux culturels) au 30 juin 2021, une baisse de fréquentation de plus de moitié par rapport à 2018 a été constatée. La rapporteure espère que 2022 permettra un retour à l’équilibre et le retour des groupes scolaires sur site, dont les visites semblent s’être fortement réduites. L’année prochaine sera l’occasion :

– de poursuivre les réflexions concernant la rénovation de la bibliothèque et les travaux liés au schéma pluriannuel de stratégie immobilière 2018-2022 et au plan de relance (rénovation de la serre, rationalisation des espaces tertiaires) ;

– de poursuivre le développement du numérique (visites en ligne et formats hybrides, médiations scolaires, stages de science en distanciel, site leblob.fr, etc.).

 

B.   le suivi de la situation des ensa: la relance de la dynamique de création de postes en 2022

L’année dernière, la rapporteure avait souhaité mettre en lumière les difficultés concernant la mise en œuvre de la réforme des Écoles nationales supérieures d’architecture écoles nationales supérieures d’architecture (ENSA) ; elle a poursuivi son travail, en commission comme en séance, dans le cadre de l’examen du PLF 2022.

1.   Le bilan de la réforme des ENSA

La réforme des ENSA liée notamment aux décrets n° 2018-105 et suivants visait :

– à rapprocher les ENSA dans leur fonctionnement des établissements supérieurs de recherche (séparation du rôle de directeur et de président du conseil d’administration, création d’une instance nationale chargée de la qualification des enseignants chercheurs, etc.) ;

– à renforcer l’autonomie des établissements sur le plan de la gestion (élaboration d’un contrat pluriannuel d’établissement entre l’État et chaque école) comme sur le plan scientifique et éducatif (création d’un conseil pédagogique et scientifique) ;

– à accélérer le développement de la recherche (clarification du statut des enseignants-maîtres de conférences et professeurs, enseignants contractuels et intervenants extérieurs – recrutement de nouveaux ETP pour permettre des décharges horaires faisant passer le service de plusieurs enseignants-chercheurs de 320 heures à 192 heures, etc.).

a.   Le diagnostic du rapport de l’IGAC de novembre 2020

Face aux difficultés remontées des ENSA concernant la mise en œuvre de la réforme, l’IGAC a rendu un rapport en novembre pour objectiver les difficultés et proposer certaines solutions. Ce rapport, non rendu public mais dont la rapporteure a eu communication, est très précieux. Il permet d’objectiver un certain nombre de faits.

Les chiffres clés des ENSA (rapport IGAC 2020)

L’effort budgétaire annuel de l’État vis-à-vis des ENSA est de 169 millions d’euros. En moyenne, les recettes propres des ENSA s’élèvent à 16 % de leur budget. La hausse de leur budget à euros constants est de 1 % par an depuis 2014.

Les ENSA regroupent 19 828 élèves, soit plus de la moitié de l’enseignement supérieur culture. Ce chiffre est stable depuis plus de 20 ans (18 000 élèves environ avant les années 2000). L’insertion professionnelle atteint 86 % pour une activité professionnelle dans le champ des diplômes, soit le taux d’insertion le plus élevé de l’enseignement supérieur culture en moyenne de 75 %. Le salaire moyen des jeunes diplômés des ENSA qui s’élève à 23 800 euros est également le plus élevé de l’ESC.

Le corps enseignant des ENSA est composé à hauteur de 67 % d’enseignants titulaires (T2), au nombre de 1 101 (149 professeurs et 761 maîtres de conférences) auxquels s’ajoutent 269,5 enseignants associés. Moins de 10 % des enseignants-chercheurs disposent d’une décharge horaire pour leur activité de recherche.

Le ratio de dépense par étudiant peut être estimé en moyenne à 8 500 euros avec de fortes disparités selon les établissements (de 6 900 euros à 10 000 euros, la taille de l’établissement faisant évoluer ce ratio à la hausse), alors que la moyenne de l’enseignement supérieur s’élève à 13 000 euros et que dans certains établissements sous tutelle du ministère de la culture, la barre des 25 000 euros par étudiant est dépassée.

Plus de 40 recommandations sont issues du rapport IGAC qui concernent aussi bien la gouvernance (clarification attendue du rôle joué par les différentes instances collégiales créées par la réforme et consolidation du rôle des directeurs), que l’exercice de la tutelle (renforcement du dialogue stratégique et budgétaire, articulation du rôle joué par les différentes directions compétentes, autonomie renforcée des établissements), l’achèvement de la mise en œuvre juridique de la réforme, la montée en puissance du CNECEA (Conseil national des enseignants-chercheurs des ENSA) ou le renforcement des moyens (développement de la recherche et soutien aux personnels administratifs).

b.   La mise en œuvre des recommandations

Sur les 42 recommandations du rapport, celles traitées prioritairement par le ministère relèvent de trois champs :

– doter les ENSA de moyens administratifs supplémentaires pour la bonne mise en œuvre de la réforme de 2018 (et notamment de son volet ressources humaines avec la déconcentration des opérations de recrutement des enseignants) ;

– former les personnels des instances et des comités de sélection aux exigences de leurs fonctions (89 personnes déjà formées) ;

– adopter les textes réglementaires permettant de finaliser le cadre juridique de la réforme (rédaction et publication des arrêtés en cours).

Des contrats pluriannuels sont également en cours. La délégation générale à la transmission aux territoires et à la démocratie culturelle indique également que la question des enseignants contractuels fait l’objet d’un examen au sein du ministère.

Une recommandation du rapport retient l’attention de la rapporteure spéciale : « identifier chaque ENSA dans les projets et rapports annuels de performance du programme 361, et les faire figurer individuellement dans la liste des opérateurs financés par ce programme ». Cette information importante devra être présente dans le prochain PLF.

2.   Le renforcement des moyens des ENSA et le développement de la recherche

Le rapport IGAC met en avant l’alourdissement des tâches administratives pour les enseignants comme pour le personnel administratif (ATS) en raison de la réforme (travaux des comités créés au sein des écoles et procédures de recrutement déconcentrées). Pour les agents administratifs, la baisse du taux de vacance, la montée en compétences et la revalorisation du traitement sont ainsi souhaités par le rapport. Les enseignants doivent également pouvoir bénéficier de décharges pour assurer leur rôle administratif renforcé.

Par ailleurs, et c’était là le point central soulevé par son rapport de l’année dernière, la rapporteure avait mis en avant la nécessité de développer la recherche au sein des ENSA, cruciale pour aborder les défis du futur comme la définition et diffusion des solutions de transition écologique et sociale, thèmes choisis par assises nationales par les ENSA des 14 et 15 octobre derniers. Si le nombre d’enseignants engagés à divers titres dans la recherche au sein des 37 unités de recherche des ENSA est passé de 250 à 493 de 2014 à aujourd’hui, la rapporteure avait noté que la dynamique de création de postes de décharge horaire (permettant pour un enseignant de passer d’un service de 320 à 192 heures par an) initiée par le ministère en charge de la culture et le ministère en charge de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (MESRI) de 2017 à 2019 à hauteur de 15 postes créés par an et par ministère s’était soudainement interrompue en 2020. Le rapport IGAC a confirmé la nécessité de réinstaurer un mécanisme de création paritaire de postes de décharge entre le MESRI et le ministère de la culture.

Le ministère de la culture créera 5 nouveaux ETP de décharge en 2022 après avoir déjà réalisé cet effort en 2021. Grâce à la reprise du dialogue entre les deux ministères et l’engagement de la rapporteure, des amendements du Gouvernement examinés en séance permettent de transférer de la mission Recherche au programme 224 Soutien aux politiques du ministère de la culture de la mission Culture 5 ETP ainsi que le montant de rémunération correspondant (435 000 euros) afin que le MESRI participe à nouveau aux efforts de développement de la recherche au sein des ENSA. La rapporteure salue cette nouvelle dynamique et espère qu’elle pourra s’inscrire dans la durée.

La réflexion sur les moyens apportés aux ENSA ne doit pas s’arrêter  : un observatoire économique de la profession est ainsi en voie d’être créé afin d’engager une réflexion à plus long terme sur le nombre d’étudiants formés qui stagne depuis trop d’années alors que les besoins dans les territoires sont plus que jamais importants. Les présidents des conseils d’administration et les directeurs d’établissement rappellent que le nombre d’architectes en France rapporté à la population est un des plus bas d’Europe (45 architectes pour 100 000 habitants en France contre 98 en moyenne pour l’Union Européenne). Des « déserts architecturaux » seraient en train d’apparaître sur le territoire français.

Une nouvelle mission IGAC-IGESR est en cours pour anticiper les effectifs étudiants à prévoir dans les années à venir et répondre aux besoins de la profession.

IV.   le programme 224 soutien aux politiques du ministère de la culture

La hausse du budget du programme support de la culture atteint 2,9 % en AE et 3,2 % en CP après mesure de transfert et 3,2 % en AE et 3,5 % hors mesure de transfert, légèrement moins élevée que l’année dernière.

Évolution des autorisations d’engagement et des crÉdits de Paiement
du programme 224

(en millions d’euros)

Numéro et intitulé de l’action

Autorisations d’engagement

Crédits de paiements

LFI 2021

PLF 2022

Évolution en valeur absolue

Évolution en %

LFI 2021

PLF 2022

Évolution en valeur absolue

Évolution en %

06 – Action culturelle et internationale

7,4

7,4

0

0,0 %

7,4

7,4

0

0,0 %

07 – Fonctions de soutien du ministère

747,9

770

+22,1

+3,0 %

744,1

768,1

+24

+3,2 %

TOTAL

755,3

777,4

+22,1

+2,9 %

751,5

775,5

+24

+3,2 %

Source : documents budgétaires, commission des finances de l’Assemblée nationale.

L’action 06 est stable dans le PLF 2022. Seules les dépenses de masse salariale et de fonctionnement du ministère sont en augmentation.

A.   L’évolution des dépenses de titre 2

Concernant l’évolution de la masse salariale, le double mouvement de réduction du plafond d’emplois et de rattrapage du niveau de rémunération des agents du ministère se poursuit :

– le schéma d’emploi prévu est de – 15 ETP en 2022 (contre – 25 ETPT en LFI 2021) porté par le secrétariat général du ministère sur la filière administrative, soit un plafond d’emploi de 9 528,13 ETP après mesures de transfert et de périmètre. Cela devrait générer une économie de 0,4 million d’euros en 2022 (et de 1,1 million d’euros en prenant en compte le schéma d’emplois 2021 en année pleine) ;

15 millions d’euros de mesures nouvelles sont prévus pour le personnel du ministère dont 13 millions d’euros au titre du plan de rattrapage indemnitaire. Par ailleurs, le solde net positif de glissement vieillesse technicité s’établit à 2,7 millions d’euros.

L’augmentation des dépenses de titre 2 entre 2021 et 2022 atteint ainsi 17,2 millions d’euros pour atteindre 682,8 millions d’euros en CP.

B.   Les autres dépenses

Les dépenses de fonctionnement et d’investissement hors titre 2 concernant les fonctions de soutien du ministère sont en augmentation de 6,1 millions d’euros en CP pour atteindre 85,2 millions d’euros

4,5 millions d’euros de mesure sont à noter pour poursuivre la transformation numérique du ministère afin :

– d’améliorer l’environnement de travail des agents ;

– de fluidifier les chaînes de décision et de traitement ;

– de développer la politique des données ;

– de favoriser l’émergence de projets innovants ;

– de développer une vision commune et partagée avec les acteurs partenaires du ministère de la culture ;

– de soutenir la politique de formation.

Comme l’a rappelé l’année dernière la rapporteure, la transformation numérique du ministère doit aussi bien concerner les agents du ministère et des opérateurs que les citoyens en accélérant le processus de dématérialisation dans la dynamique d’Action publique 2022 ainsi que les professionnels de la culture qui doivent bénéficier d’un écosystème d’innovation culturel compétitif.


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EXAMEN EN COMMISSION

Au cours de sa réunion du 20 octobre 2021, la commission des finances a examiné les crédits de la mission Culture.

La vidéo de cette réunion est disponible en ligne.

Le compte rendu sera prochainement consultable sur le site de l’Assemblée nationale.

Conformément à l’avis favorable de la rapporteur spéciale, la commission a adopté les crédits de la mission Culture.

 

 

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PERSONNES AUDITIONNÉES PAR LA RAPPORTEURE SPÉCIALE

Syndicat national des artistes plasticiens (SNAP) : M. Clément Valette,
co-secrétaire général du SNAP CGT,

Comité des artistes-auteurs plasticiens (CAAP) : Mme Katerine Louineau, administratrice

Syndicat national des artistes-auteurs (SNAA) : Mme Mireille Lépine, secrétaire générale

Solidarité Maison des Artistes (SMDA) :

M. Jean-Marc Bourgeois, plasticien - scénographe, secrétaire général SMdA Cfdt

Union des photographes professionnels (UPP) : M. Matthieu Baudeau, président

Syndicat national des photographes (SNP) : M. Tomoya Fujimoto

Syndicat national des sculpteurs et plasticiens (SNSP) : M. Christian Claudel, artiste sculpteur, délégué du SNSP pour la région Grand Est

Union nationale des peintres et illustrateurs (UNPI) : Mme Pascale Collange, trésorière

Alliance française des designers (AFD) : Mme Christophe Lemaire, administrateur de l’AFD, designer graphique

Congrès interprofessionnel de l'art contemporain (CIPAC) : Mme Catherine Fourniaud Texier, vice-présidente

Congrès interprofessionnel de l'art contemporain (CIPAC) : M. Xavier Montagnon, secrétaire général

Comité professionnel des galeries d'art (CPGA) : Mme Marion Papillon, présidente

Comité professionnel des galeries d'art (CPGA) : Mme Gaëlle de Saint-Pierre, déléguée générale adjointe, responsable juridique et fiscale

Fédération des réseaux et associations d'artistes plasticiens (FRAAP) : Mme Julie Desmidt, déléguée générale

Association française de développement des centres d'art (DCA) : Mme Garance Chabert, co-présidente DCA, directrice de La Villa du Parc - centre d’art contemporain d’intérêt national à Annemasse

Association française de développement des centres d'art (DCA) : Mme Chloé Monneron, chargée d’administration et de communication DCA - association française de développement des centres d’art contemporain

Syndicat national des agences de photographie et d'illustration générale (SNAPIG) : Mme Emmanuelle de Larminat, trésorière

Association française des régisseurs d'œuvres d'art (AFROA) : M. Thomas Brancaleoni, régisseur des œuvres au musée du Louvre, secrétaire de l’AFROA

Association internationale des critiques d'art (AICA) : Mme Elisabeth Couturier, présidente, M. François Salmeron, trésorier

CEA Association française des commissaires d'exposition : M. Jérôme Cotinet-Alphaize, président, Mme Guslagie Malanda, coordinatrice générale

ADAGP : Mme Nathalie Meindre, responsable du pôle Adhésion et Action professionnelle

SAIF : Mme Agnès Defaux, directrice juridique

SCAM : M. Nicolas Mazars, directeur des affaires juridiques et institutionnelles, M. Alexis Kerzerho, juriste, chargé du répertoire des images fixes

Platform : Mme Vitalie Taittinger, présidente du Frac Champagne-Ardenne, et de Platform, le réseau des Frac, Mme Julie Binet, secrétaire générale

Opéra national de Paris : M. Alexander Neef, directeur général, M. Martin Ajdari, directeur général adjoint

Centre national des arts plastiques : M. Marc Vaudey, directeur du pôle création

Direction générale de la création artistique (DGCA) : M. Christopher Miles, directeur général

Délégation générale à la transmission, aux territoires et à la démocratie culturelle : M. Noël Corbin, délégué général


([1]) Cour des comptes, Le soutien du ministère de la culture au spectacle vivant pendant la crise de la covid19, septembre 2021. Rapport disponible à l’adresse suivante : https://www.ccomptes.fr/fr/publications/trois-audits-flash-sur-les-mesures-de-soutien-dans-le-secteur-de-la-culture-pendant-la

([2]) La DGCA indique « qu’il est délicat de réaliser ce recensement est délicat de réaliser ce recensement sur l’ensemble des commanditaires publics et examiner toutes leurs constructions sur la totalité du territoire national.»

([3]) La distinction entre l’activité artistique et l’activité artisanale n’est cependant pas toujours évidente comme pour les photographes.

([4]) Rapport disponible à l’adresse suivante : https://www.ccomptes.fr/sites/default/files/2021-01/20210120-58-2-enseignement-superieur-arts-plastiques.pdf