Logo2003modif

N° 1234

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 septembre 2018.

 

 

RAPPORT  D’INFORMATION

 

 

 

DÉPOSÉ

 

 

en application de l’article 145 du Règlement

 

 

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

 

 

en conclusion des travaux de la mission relative
à la prévention santé en faveur de la jeunesse,

 

 

ET PRÉSENTÉ PAR

 

 

M. Cyrille ISAAC-SIBILLE et Mme Ericka BAREIGTS,

 

Députés.

 

——

 

 


1

SOMMAIRE

___

Pages

Avant-propos

SYNTHÈSE

introduction

première partie – Des inégalités de destins qui s’installent dès l’enfance et qui s'aggravent, signant l’échec de la politique de Santé publique menée par la France.

I. des inégalités sociales de santé considérables, qui ne régressent pas

A. Une différence d’espérance de vie de 13 ans entre les plus aisés et les plus pauvres

B. déterminants de santé et causes des inégalités sociales de santé

1. La notion de déterminants de santé

2. Des déterminants de santé moins favorables pour les catégories sociales moins aisées

II. Des inégalités territoriales de santé largement corrélées aux inégalités sociales

III. Des inégalités qui s’installent dÈs la grossesse et l’enfance, le rôle crucial de la prévention primaire chez la femme enceinte et dÈs le plus jeune âge

A. Des comportements de santé moins favorables chez les enfants issus de catégories modestes

B. La prévalence relativement forte de comportements défavorables à la santé chez les jeunes Français

deuxième partie – état des lieux de la politique de prévention à destination des jeunes : une multiplicité dacteurs, unE gouvernance EPARPILLEE et des financements dispersés

I. Un grand nombre d’acteurs intervenant dans la prévention-promotion de la santé en faveur des jeunes

A. Des acteurs institutionnels nationaux nombreux

1. Une politique de santé impliquant plusieurs ministères

2. Aux côtés des ministères, d’autres institutions de couverture nationale participent à la prévention santé

B. Une multitude d’acteurs sur les territoires

C. médecine scolaire et PMi, deux acteurs centraux de la prévention auprès des jeunes en prise à des difficultés structurelles

1. Les services de PMI : un acteur crucial de la prévention et de la réduction des inégalités de santé, pourtant délaissé dans certains territoires

2. La médecine scolaire en déclin

II. Une gouvernance éPARPILLéE

A. La gouvernance verticale : une répartition encore cloisonnée au niveau national, des déclinaisons inégales sur les territoires

1. La gouvernance nationale : la mise en place d’un comité interministériel pour la santé, une initiative allant dans le bon sens

2. La déclinaison locale des objectifs nationaux : le travail des ARS entre déploiement des politiques nationales et volontarisme local

3. Des collectivités locales pouvant être « de bonne volonté », sans pilotage, pour des politiques inégales sur le territoire

B. La gouvernance horizontale : des instances régionales de coordination qui se multiplient, entachant la lisibilité des dispositifs et dissolvant les responsabilités

1. L’ARS au cœur des acteurs régionaux et locaux

2. Des dispositifs multiples et insuffisamment coordonnés

III. Des financements dispersÉs, difficiles à identifier et insuffisants face aux enjeux

A. la difficile évaluation des dépenses allouées à la prévention, la multiplicité et la complexité des sources de financements

1. Le chiffrage des dépenses de prévention : une meilleure connaissance, conduisant à une évaluation globale de l’ordre de 15 milliards d’euros

a. Les dépenses de prévention relevant de la consommation de soins et de biens médicaux

b. Les dépenses de prévention relevant de la prévention institutionnelle

c. Des financements assurés pour moitié par l’assurance maladie

2. Des chiffres inexacts et des dépenses non recensées, notamment pour les collectivités locales, la difficulté à appréhender les inégalités entre territoires

3. La complexité des modes de financement de la prévention, les questions de périmètre

B. Des financements qui ne sont pas à la hauteur des enjeux

1. Les dépenses consacrées à la prévention sont inférieures à celles des autres États de l’OCDE…

2. … Alors que les dépenses de prévention offrent un retour sur investissement élevé et que les comportements à risque représentent des enjeux financiers conséquents

troisième partie  les actions menées : fondées sur des bases de données multiples, des actions de prévention dispersées qui ne sont pas nécessairement évaluées

I. Des données nombreuses, difficiles à exploiter

A. La multiplicité de données de santé et de leurs sources

B. Des données de santé portant sur la jeunesse parcellaires, difficilement utilisables et exploitées de façon variable

1. Des données partielles, tributaires du taux de réalisation des bilans et visites, et l’absence d’un bilan de santé à l’adolescence

2. Des modalités de recueil des données datées, qui les rendent difficiles à utiliser et à chaîner

3. Une exploitation inégale des données

C. Des données souvent recueillies au niveau national, qui ne sont pas nécessairement disponibles au niveau territorial

II. Des interventions de prévention multiples et dispersées, dont l’efficacité peut être débattue

A. Le cadre général : des plans qui s’accumulent, sans véritable cohérence d’ensemble

1. La multiplication de plans sectoriels

2. Un processus récemment engagé de rationalisation, autour du plan « Priorité prévention »

B. Des interventions de prévention nombreuses, menées en ordre dispersé et bien souvent ponctuelles

1. La dispersion des interventions en prévention

a. Une multiplicité des actions…

b. … qui nuit à leur efficacité

2. Le rôle de l’école et le parcours éducatif de santé : des enjeux essentiels pour la prévention en faveur de la jeunesse et l’amélioration de la littératie en santé, mais un dispositif trop récent pour être évalué

3. La formation des acteurs de la prévention santé : une professionnalisation insuffisante

C. Les limites des actions sur les comportements individuels dans le cadre des campagnes de communication, Des actions et messages dont l’efficacité apparaît sujette à débat

1. Des campagnes de communication susceptibles d’accroître les inégalités sociales de santé

2. Des actions et messages dont l’efficacité est contestée, notamment  face au poids du marketing publicitaire

3. Des interventions de prévention qui doivent être adaptées aux enfants et aux adolescents, l’enjeu des compétences psychosociales

a. L’écueil d’une prévention « adulto-morphe »

b. L’apport décisif du renforcement des compétences psychosociales chez les jeunes, qui n’est pas assez pris en compte

III. Une évaluation disparate des actions de prévention

A. La difficulté à définir des indicateurs généraux de suivi de santé publique

B. Des pratiques variables en matière d’évaluation des actions de prévention

1. Les évaluations des programmes de santé publique, conduites par différents acteurs, de portée variable

2. L’évaluation des actions et interventions elles-mêmes, très disparate et parfois même inexistante

3. La mise en place d’outils pour renforcer l’évaluation, à l’impact mal connu pour l’instant

quatrième partie – nos propositions : une gouvernance structurée et clarifiée, des actions ciblées à l’efficacité évaluée, fondées sur des données de santé étayées et bénéficiant de financements accrus

I. trois PRINCIPES cardinaux

A. la promotion de la santé DÈS LE PLUS JEUNE AGE

B. Une approche par déterminants de santé plutôt que par pathologies

C. le décloisonnement des acteurs de la santé publique

II. comment passer des intentions À l’action ?

A. Structurer et clarifier la gouvernance, en articulant pilotage national et dÉclinaison territoriale des actions, au plus prÈs des populations

1. Confier le pilotage national à une délégation interministérielle à la prévention

2. Articuler l’organisation régionale autour des agences régionales de santé et des commissions de coordination des politiques publiques de santé

3. Rassembler les acteurs de première ligne autour d’un maillage fin du territoire

4. Rapprocher les professionnels de santé exerçant dans les secteurs sanitaire, socio-sanitaire et éducatif

5. Favoriser la prise de conscience des enjeux de la prévention

B. dÉployer Des actions prÉcoces, différenciées, ciblÉes et à l’efficacitÉ prouvÉe, selon un universalisme proportionné, des interventions portant sur les dÉterminants environnementaux

1. Privilégier une prévention “différenciée”, ciblée sur ceux qui en ont le plus besoin

2. Améliorer le niveau de littératie des enfants et mettre l’accent sur les compétences psychosociales

3. Identifier les actions à l’efficacité prouvée pour les généraliser et diffuser les initiatives locales efficaces

4. Renforcer le suivi individuel de chaque famille et enfant, de la grossesse à 18 ans, par l’ensemble des professionnels de santé, la PMI et la médecine scolaire

5. Agir davantage sur les déterminants environnementaux

6. Retenir des vecteurs d’intervention adaptés à la jeunesse et associer les jeunes aux politiques de prévention

C. Améliorer les données de santé disponibles et développer l’évaluation des actions

1. Rationaliser et améliorer les données de santé disponibles

a. Moderniser le recueil de données de santé auprès de la médecine scolaire et de la PMI

b. Créer le dossier médical partagé dès la naissance

c. Mieux coordonner les producteurs de données de santé

d. Doter le futur service national universel d’un volet médico-social et en faire le support d’un bilan médical des jeunes de 15 ans

2. Renforcer l’évaluation des actions et des politiques de prévention

a. Développer un portail national sur les interventions évaluées de prévention

b. Définir un tableau de bord de l’état de santé de la population pour piloter la politique de prévention

D. mieux financer et professionnaliser la prévention

1. Améliorer la connaissance des dépenses fléchées vers la prévention

2. Accroître les moyens alloués à la prévention, notamment la prévention primaire, pour investir dans l’avenir

3. Professionnaliser le secteur de la prévention, par la formation des acteurs

feuille de route

TRAVAUX DE LA COMMISSION

annexe 1 : répartition des dépenses des départements en faveur des services de protection maternelle et infantile et de planning familial

annexe 2 : Liste des personnes auditionnées


1

   Avant-propos

● Aujourd’hui, l’espérance de vie des 5 % les plus aisés est supérieure de 13 ans à celle des 5 % les plus pauvres et le taux de mortalité évitable des hommes est deux fois plus élevé dans les Hauts-de-France et en Bretagne qu’en Île-de-France. La persistance d’inégalités sociales et territoriales très marquées signe l’échec de notre politique de santé publique. La santé constitue, aux côtés de l’éducation, l’une des deux grandes inégalités de destins des Français.

Parallèlement, la forte croissance des maladies chroniques et du nombre de personnes relevant d’affections de longue durée (ALD) conduit à nous interroger sur la soutenabilité de notre système de soins à moyen terme. « Changer de braquet » en matière de prévention est à notre sens indispensable pour assurer la pérennité de notre système de santé. D’un strict point de vue économique, les actions de prévention sont d’ailleurs « rentables » : des études montrent que pour un euro investi dans une intervention en santé publique, ce sont 14 euros en moyenne qui sont économisés par notre système social et sanitaire.

Les enjeux de la politique de prévention sont loin d’être périphériques, mais au contraire structurants, alors qu’aujourd’hui, notre système de santé s’inscrit essentiellement dans une logique curative, en étant centré sur les activités de soins. Pour user d’une métaphore mythologique, le dieu de la médecine, Esculape, avait deux filles, Hygie, déesse de la santé et de l’hygiène, et Panacée, déesse du remède et des soins, participant toutes deux de la bonne santé de chacun : aujourd’hui, Panacée, représentant la médecine curative, a pris un fort ascendant sur Hygie, symbolisant la médecine préventive, et il nous appartient de rééquilibrer leurs positions respectives.

Une telle évolution suppose de repenser l’organisation de notre système de santé, qui résulte d’un découpage historique entre d’une part, les actions en amont des soins, et donc la prévention, confiées à l’Etat et aux collectivités territoriales, et d’autre part les soins dispensés par les professionnels, pris en charge par l’assurance maladie – tandis que l’action en aval des soins (handicap, dépendance) relève des dispositifs d’assistance sociale (avec notamment les départements). Cette segmentation des branches de notre système de santé, qui engendre une forme de cloisonnement de leur action, doit être remise en question pour réformer notre politique de prévention.

● Nous avons souhaité engager une réflexion de fond sur notre système de santé, en centrant nos travaux sur la prévention primaire, soit les actions destinées à éviter l’apparition des maladies, et en nous concentrant sur la jeunesse. 

Ces orientations font écho à deux grands principes qui nous semblent devoir irriguer l’ensemble de notre politique de prévention. En premier lieu, il importe d’adopter une approche la plus en amont et la plus transversale possible autour des déterminants de santé, à la fois les déterminants individuels – soit les comportements de santé, qu’il s’agisse d’alimentation saine, d’activité physique, d’absence de consommation de tabac et d’alcool…– et les déterminants environnementaux, tendant à créer un environnement favorable à la santé, notamment en termes d’exposition aux facteurs de risque. C’est bien une démarche par déterminants de santé, permettant aux individus de préserver leur capital-santé tout au long de leur vie, qu’il faut déployer, de préférence à une logique par pathologies, trop sectorielle et segmentée, qui est généralement retenue aujourd’hui. 

En second lieu, notre politique de prévention doit mettre davantage l’accent sur les jeunes, dès le plus jeune âge et même dès la grossesse. Plus les interventions de prévention sont précoces, plus elles sont efficaces : l’objectif est bien d’inciter aux comportements favorables à la santé dès la petite enfance et de favoriser leur diffusion, afin d’éviter l’enracinement des mauvaises habitudes – sur lesquelles il est ensuite beaucoup plus difficile d’agir. Un tel investissement dans l’avenir doit permettre d’agir sur la santé de la population des prochaines décennies.

● De nos nombreuses auditions et lectures, nous avons retiré deux convictions. Tout d’abord, notre politique de prévention doit changer de paradigme, alors qu’en la matière, une approche strictement égalitaire s’avère inéquitable : elle creuse les inégalités sociales de santé, car ce sont ceux qui en ont le moins besoin qui s’approprient le mieux les messages et politiques de prévention et qui en bénéficient le plus. Nous devons réorienter notre action selon les principes d’un universalisme proportionné, qui consiste à déployer une politique de prévention visant toute la population, mais avec un ciblage qui tient compte du gradient social : l’intensité de l’action doit être plus grande pour ceux qui ont les besoins les plus importants, afin de réduire les inégalités sociales et territoriales de santé. 

En second lieu, il est indispensable d’accorder un portage politique fort, à tous les niveaux, à notre politique de prévention, pour garantir son efficacité. Aujourd’hui, les rapports et travaux foisonnent, les constats sont bien connus et unanimes de la part des différents acteurs : insuffisance du pilotage et de la gouvernance, dispersion des acteurs et des interventions, financements  éclatés et peu lisibles, défaut d’évaluation des actions et de professionnalisation des intervenants…  Une réelle prise de conscience des enjeux de la prévention a émergé au cours des dix dernières années, des mesures ont été prises mais les choses n’avancent que lentement.

Le Gouvernement a affiché un engagement marqué en faveur de la prévention lors de la présentation de la Stratégie nationale de santé, en décembre 2017, et du plan « priorité prévention » de mars dernier. Pour donner une nouvelle dimension à notre politique de prévention, il est nécessaire de transformer cette impulsion de façon résolue et durable, en proposant des solutions pratiques et concrètes et en érigeant la prévention en priorité politique, tant au niveau national que local.

Nous proposons à cet effet une feuille de route articulée autour de quatre axes : la clarification et la structuration de la gouvernance de notre politique de prévention ; le déploiement d’actions ciblées et évaluées, en mettant l’accent sur la littératie en santé des enfants et leurs compétences psycho-sociales ; l’amélioration des données de santé, tant collectives qu’individuelles, indispensables pour définir et évaluer des interventions ; l’estimation précise et l’amélioration des financements.


1

   SYNTHÈSE

L’objet du présent rapport est de proposer des solutions pour la mise en œuvre pratique d’une politique de prévention ambitieuse, permettant de réduire les inégalités de destins et d’en finir avec les déclarations de bonnes intentions !

Ces travaux se concentrent sur la prévention santé à l’égard de la jeunesse, et plus particulièrement sur les actions de prévention primaire, visant à éviter l’apparition des maladies et à promouvoir les comportements favorables à la santé, de la conception à la sortie de l’adolescence. Plus les actions de prévention et de promotion de la santé interviennent tôt, plus elles sont efficaces et « rentables ». De surcroît, les enfants et jeunes d’aujourd’hui sont par définition les adultes et les parents de demain : c’est la santé des populations des décennies à venir qui se joue actuellement.

Une telle approche impose de relever deux défis :

– les différences de temporalité entre l’action publique et la santé des populations : les résultats d’une politique de prévention orientée vers les jeunes ne peuvent être appréciés qu’à l’issue de plusieurs années, et plus probablement de plusieurs dizaines d’années ;

– La réconciliation des différentes branches de notre système de santé, qui découlent de l’organisation héritée de 1945, peu propice à la mise en œuvre d’une politique de prévention efficace.

I.   État des lieux

A.   Des inégalités de destins qui s’installent dès l’enfance et qui ne reculent pas, signant l’échec de la politique de santé publique menée par la FRance

 Des déterminants et comportements de santé moins favorables chez les enfants issus de catégories modestes (alimentation, sédentarité, surpoids et obésité, état dentaire, etc).

– La prévalence relativement forte de comportements défavorables à la santé chez les jeunes Français : à titre d’exemple, ils se situent parmi les plus mauvais élèves de l’Europe en termes de consommation de tabac et de cannabis.

– Des inégalités sociales et territoriales de santé marquées :

● 13 ans de différence d’espérance de vie entre les plus aisés et les plus pauvres pour les hommes et 8 ans pour les femmes ;

● Une espérance de vie en bonne santé plus élevée de 10 ans pour les hommes cadres que pour les ouvriers ;

● Des inégalités territoriales largement corrélées aux inégalités sociales : un taux de mortalité évitable deux fois plus élevé dans les Hauts-de-France qu’en Île-de-France pour les hommes (et une fois et demie pour les femmes)

B.   Une multiplicité d’acteurs, une gouvernance éparpillée, des financements dispersés 

 

Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.

Flèche orange : pilotage/financement

Flèche verte : actions

 Les services de protection maternelle et infantile (PMI) : des acteurs cruciaux de la prévention et de la réduction des inégalités de santé, pourtant délaissés dans certains départements :

De très fortes disparités dans les crédits dévolus par les départements à leurs services de PMI, des normes d’activité qui ne sont pas respectées dans tous les départements : seuls 6 départements sur 10 atteignaient la norme d’activité relative au suivi des enfants en 2012.

– La médecine scolaire en difficulté, faute de médecins

Un taux de réalisation de la visite des 6 ans de 47,5 % en 2015-2016, contre 80 % en 2013-2014

 Des collectivités locales pouvant être « de bonne volonté » mais laissées sans pilotage, pour des politiques inégales selon les territoires

 Des financements dispersés, difficiles à identifier et insuffisants face aux enjeux : le coût social annuel du tabagisme est évalué à 122 milliards d’euros, celui de l’alcool à 118 milliards d’euros, tandis que celui de l’obésité est estimé à 20 milliards d’euros.

Or investir dans la prévention est « rentable » : pour un euro investi dans une intervention en santé publique, ce sont 14 euros en moyenne qui sont économisés par notre système social et sanitaire.

C.   fondées sur des bases de données multiples, des actions de prévention dispersées qui ne sont pas nécessairement évaluées

– Des sources de données de santé, individuelles ou collectives, multiples, non chaînées, difficiles à utiliser ;

 Des plans qui s’accumulent, sans véritable cohérence d’ensemble ;

 Des interventions de prévention nombreuses, menées en ordre dispersé et bien souvent ponctuelles. Plus de 26 000 actions de terrains sont recensées, conduites par 7 000 acteurs, hors Île-de-France… ;

 Des interventions principalement axées sur les comportements individuels, des campagnes de communication susceptibles d’accroître les inégalités sociales de santé ;

 Un dispositif essentiel insuffisamment développé : le parcours éducatif de santé, pour le renforcement des compétences psycho-sociales et de la littératie en santé des enfants ;

 Une évaluation disparate des actions de prévention.

II.   NOs propositions

La stratégie nationale de santé présentée en décembre 2017, la présentation du plan « priorité prévention » en mars dernier par le comité interministériel pour la santé et l’instauration du service sanitaire témoignent d’un engagement significatif en faveur de la prévention et de la promotion de la santé et pourraient annoncer un réel virage de notre politique de santé publique.

Ces différentes initiatives vont dans le bon sens ; pour porter leurs fruits, elles doivent être soutenues et mises en œuvre de façon résolue et efficace.

     Deux convictions :

– il n’est pas nécessaire de créer de nouveaux acteurs, de nouvelles structures, de nouveaux modes d’intervention, au risque d’ajouter encore de la complexité à un paysage déjà peu lisible et éclaté. La priorité doit être de s’appuyer sur ce qui existe, en coordonnant davantage les dispositifs et en mettant en lien les institutions et les acteurs nationaux, régionaux et locaux.

– en lisant  des rapports récents, en écoutant les propos des personnes auditionnées, les constats sont unanimes : insuffisance du pilotage de notre politique de prévention, notamment en direction de la jeunesse, dispersion des acteurs et des interventions, insuffisance des financements. On perçoit une réelle prise de conscience des enjeux de la prévention au cours des dix dernières années, mais les choses évoluent lentement. Pour « faire décoller » notre politique de prévention, il est indispensable d’assurer un portage politique fort à tous les niveaux, national comme local.

     Tous les acteurs de la prévention sont en grande attente.

Afin de réduire les inégalités sociales et territoriales qui s’installent dès l’enfance,

Afin de réduire les maladies chroniques qui apparaîtront à l’âge adulte, responsables de l’augmentation des dépenses de l’assurance maladie,

AUX ACTES !

     Des propositions s’appuyant sur trois grands principes :

– la promotion de la santé dès le plus jeune âge ;

– une approche par déterminants plutôt que par pathologies ;

– le décloisonnement des acteurs de la santé publique.

     Comment passer des « bonnes intentions » aux actes ?

– structurer et clarifier la gouvernance de la politique de prévention, pour coordonner les interventions et pour assurer l’égalité entre les habitants des différents territoires dans l’accès à la prévention ;

– privilégier des actions précoces et ciblées sur les populations qui en ont le plus besoin, selon le principe d’universalisme proportionné ; porter davantage les efforts sur les déterminants environnementaux ;

– améliorer notre système de données de santé et l’évaluation des actions de prévention ;

– clarifier les financements alloués au secteur de la prévention et professionnaliser davantage celui-ci.

A.   Structurer et clarifier la gouvernance de la politique de prévention, pour coordonner les interventions et pour assurer l’égalité entre les habitants des différents territoires dans l’accès à la prévention 

1.   Confier le pilotage national à une délégation interministérielle à la prévention

Un grand nombre de ministères et de politiques nationales sont impliqués dans la prévention, mais les ministères ont souvent une logique « propriétaire ». Le comité interministériel pour la santé du 26 mars dernier consacré à la prévention a été un signal fort, permettant une approche « multilatérale ».

Dans le prolongement de ce comité interministériel, les rapporteurs proposent de mettre en place une délégation interministérielle à la prévention, chargée de mettre en application la Stratégie nationale de santé 2018-2022. Seule instance nouvelle dont les rapporteurs préconisent la création, elle incarnerait le portage politique de la priorité donnée à la prévention.

2.   Articuler l’organisation régionale autour des agences régionales de santé et des commissions de coordination des politiques publiques de santé

Au niveau régional, la direction de la santé publique doit devenir la direction « pivot » des ARS. Elle doit s’appuyer sur la commission de coordination des politiques publiques de santé (CCPPS) régionale, qui réunit tous les acteurs concernés par la politique de prévention à l’échelle régionale. 

3.   Rassembler les acteurs de première ligne autour d’un maillage fin du territoire

Au niveau local, les acteurs « de première ligne » doivent être rassemblés et structurés sur l’ensemble des bassins de vie, autour des CLS (contrats locaux de santé) et des CPTS (communautés professionnelles territoriales de santé), pour déployer la politique de prévention au plus près des populations. Ces instances ont vocation à définir les priorités, évaluer les actions et les faire remonter au niveau régional à l’occasion d’une rencontre annuelle.

4.   Rapprocher les professionnels de santé exerçant dans les secteurs sanitaire, socio-sanitaire et éducatif

Aujourd’hui, chaque catégorie de professionnels de santé relève d’un statut distinct ; les médecins de PMI et ceux de l’éducation nationale sont recrutés par la voie d’un concours, les premiers relevant de la fonction publique territoriale et les seconds de la fonction publique de l’État.

Outre le recrutement de médecins contractuels, d’ores et déjà pratiqué, il pourrait être envisagé de permettre aux médecins exerçant en libéral ou dans le secteur hospitalier de venir pratiquer également, une partie de leur temps, au sein d’établissements scolaires ou en PMI.

Il serait également utile d’explorer les voies de réforme des statuts actuels des différents professionnels de santé, afin d’instaurer des passerelles pour l’exercice des différentes fonctions.

5.   Favoriser une prise de conscience des enjeux de la prévention

La prévention doit devenir la priorité de toutes les politiques, ce qui suppose d’assurer son portage politique à tous les niveaux.

Cette démarche pourrait se traduire par l’obligation de prendre en compte, avant toute décision, les incidences de celle-ci sur la santé,  en introduisant un « volet santé » dans la préparation des projets de loi, des schémas nationaux, régionaux ou locaux.

B.   dÉployer Des actions prÉcoces, différenciÉes, ciblÉes et à l’efficacitÉ prouvÉe, selon un universalisme proportionné, et des interventions portant sur les dÉterminants environnementaux

1.   Privilégier une prévention « différenciée », ciblée sur ceux qui en ont le plus besoin

Les actions de prévention générales, sans ciblage, conduisent à accroître les inégalités sociales de santé et sont associées à un risque de saupoudrage des moyens : cela revient à « arroser là où la terre est déjà mouillée ».  

Il faut donc privilégier une approche d’« universalisme proportionné » : l’objectif est que l’ensemble de la population puisse accéder aux programmes de prévention et de soins, tout en accordant une attention plus grande aux populations les plus exposées aux risques. L’intensité de l’action doit être plus grande pour ceux qui en ont le plus besoin, pour réduire les inégalités sociales et territoriales de santé.

2.   Améliorer le niveau de littératie des enfants et mettre l’accent sur les compétences psychosociales

Les interventions de prévention et de promotion de la santé auprès des jeunes doivent s’articuler autour de deux priorités, qui sont d’ailleurs liées : l’amélioration du niveau de littératie en santé des enfants et le développement de leurs compétences psychosociales, afin de leur permettre de prendre en charge leur santé de façon autonome et d’infuser les comportements favorables à la santé dans leur sphère familiale.

Pour ces deux priorités, le parcours éducatif de santé est un outil central, car les actions menées à l’école permettent de toucher tous les enfants, dans toutes les classes d’âge. Son renforcement suppose une amélioration de la formation des professeurs et la mise à disposition de manuels de support et d’une « boîte à outils », et il doit s’appuyer sur le service sanitaire.

3.   Identifier les actions à l’efficacité prouvée pour les généraliser et diffuser les initiatives locales efficaces

– La mise en œuvre d’actions évaluées, à l’efficacité prouvée, doit être généralisée, dans une démarche « top-down ». L’objectif serait d’identifier entre 20 et 30 interventions de prévention et de promotion de la santé, portant sur les différents déterminants de santé, et de les déployer sur l’ensemble du territoire.

– En sens inverse, selon une approche « bottom-up », les initiatives locales qui fonctionnent bien doivent être identifiées et « remonter » vers les instances régionales et nationales, pour pouvoir être diffusées.

– Il est nécessaire de développer un portail national sur les interventions évaluées de prévention. La mise en place d’un tel portail doit s’accompagner de formations auprès des acteurs de la prévention, à la fois pour renforcer leurs compétences et leur culture de l’évaluation et pour les former à la mise en œuvre d’interventions validées en santé publique.

– Les actions doivent s’inscrire dans la durée, car c’est la condition de leur efficacité : des interventions ponctuelles n’ont pas de résultats probants.

Les actions sur les bassins de vie doivent être menées avec le soutien des Instances régionales d’éducation et de promotion de la santé (IREPS) et par une accélération de la mise en place des CLS et CPTS, afin de promouvoir la santé et un environnement qui lui est favorable. 

4.   Renforcer le suivi individuel de chaque famille et enfant, de la grossesse à 18 ans, par l’ensemble des professionnels de santé

– Le renforcement du suivi individuel impose de définir des rendez-vous obligatoires s’inscrivant dans les dispositifs existants (certificat du 8ème jour, visites médicales scolaires, etc). Ces visites obligatoires seraient prévues aux huit jours du nouveau-né, puis au neuvième mois, à 3 ans, à 6 ans et à 12 ans, et elles pourraient être réalisées par les médecins de PMI, les médecins scolaires, mais aussi les médecins hospitaliers et libéraux.

 La mise en place d’une consultation de prévention valorisée auprès des médecins et dentistes, pour tous les enfants à l’âge de 6 ans, voire de 3 ans, compte tenu de l’avancement de l’âge de l’instruction obligatoire prévu à partir de la rentrée de 2019, irait également dans le bon sens.

– Il importe de mobiliser tous les professionnels de santé autour de la politique de prévention, ce qui inclut les médecins généralistes et les médecins spécialistes, les sages-femmes, ainsi que les infirmiers et les pharmaciens.

 Il est nécessaire de soutenir deux acteurs essentiels de la prévention des jeunes aujourd’hui en grande difficulté, à savoir la médecine scolaire et les services de PMI : en dressant un état des lieux précis de leur situation, en veillant à ce que la direction des services de PMI soit bien assurée par un médecin (certains départements ne respectant pas cette obligation légale) et en demandant aux départements un rapport annuel d’activité et financier sur leurs services de PMI, pour rendre compte de l’exercice des compétences et missions qui leur sont confiées par la loi.

Outre la réflexion sur une réforme des statuts et la mixité d’exercice des fonctions (vu supra), les mesures visant à accroître l’attractivité des professions de médecin scolaire et de PMI doivent être renforcées.

5.   Agir davantage sur les déterminants environnementaux

a.   Le renforcement de la régulation de l’accès aux produits addictifs, et plus largement de l’exposition aux facteurs de risque

Un tel renforcement implique :

– de faire respecter scrupuleusement les interdits existants, notamment l’interdiction de vendre du tabac et de l’alcool aux mineurs et l’établissement d’un débit de tabac à proximité d’un établissement scolaire ;

 d’encadrer plus fortement les pratiques de marketing déployées par les industriels du tabac et de l’alcool en direction des jeunes afin de contourner les interdits applicables en matière de publicité ;

– d’interdire la publicité à destination des enfants  pour les produits alimentaires de mauvaise qualité nutritionnelle. La suppression de la publicité pour les programmes jeunesse sur la télévision publique prévue par la loi dite « Gattolin » doit être étendue, au moins en ce qui concerne les produits alimentaires, aux chaînes de télévision privées.

b.   Agir sur l’environnement général des populations, une large ambition qui implique nécessairement une action interministérielle

Cette orientation suppose :

– de réduire l’exposition des populations à la pollution de l’air extérieur et intérieur, ainsi qu’aux produits chimiques dont les effets sur la santé sont mal connus, notamment les perturbateurs endocriniens ;

– d’améliorer la qualité de l’offre alimentaire par des mesures contraignantes. Il faut également étudier la généralisation du Nutriscore, au-delà des seules entreprises volontaires ;

– d’améliorer l’accessibilité des produits de bonne qualité nutritionnelle, en agissant sur les aliments servis en restauration collective, en créant des titres pour l’achat de fruits et légumes destinés aux populations défavorisées et en étudiant une réforme de la fiscalité des aliments selon leur qualité nutritionnelle ;

– de créer un environnement favorable à l’activité physique : cela implique de favoriser le développement d’équipements sportifs, mais aussi de prendre en compte l’impact de l’aménagement des territoires, notamment urbains, sur la santé, avec la création d’espaces verts et de parcours piétons, le développement de pistes cyclables, l’aménagement des voies de transport…

6.   Retenir des vecteurs d’intervention adaptés à la jeunesse et associer les jeunes aux politiques de prévention

Renforcer l’efficacité de la politique de prévention en direction des jeunes, et notamment des adolescents, implique de privilégier les vecteurs de communication qu’ils utilisent (internet, réseaux sociaux, applications sur smartphone…).

 Les campagnes de prévention et de promotion de la santé publique doivent davantage s’appuyer sur les principes du marketing social, en employant des méthodes similaires à celles des entreprises agroalimentaires, mais pour inciter à des comportements plus favorables à la santé.

Il est préférable de retenir une approche positive, qui ne soit pas « descendante », c’est-à-dire venant d’en haut, mais qui au contraire associe les populations, ce qui fait écho à la notion de « prévention par les pairs ». Pour être efficaces, les actions de prévention doivent être pensées pour et avec les populations.

C.   Améliorer les données de santé disponibles et développer l’évaluation des actions

1.   Rationaliser et améliorer les données de santé disponibles

Les données de santé sont cruciales en matière de prévention, à la fois pour disposer de données épidémiologiques permettant de cibler les actions de prévention et d’évaluer leur efficacité, et pour assurer le suivi de l’état de santé des enfants au travers des interventions des différents professionnels de santé.

– Il est impératif d’améliorer le recueil des données de santé par la PMI et la médecine scolaire, qui est aujourd’hui disparate, archaïque et non harmonisé selon les territoires.

Cela implique de généraliser l’informatisation de ce recueil, au travers d’un modèle unique et national, que ce soit pour la médecine scolaire – ce qui est prévu dans le cadre du programme Esculape – et pour les services de PMI, et de permettre l’utilisation de ces données à des fins épidémiologiques et statistiques.

– Il est nécessaire d’inciter à la création du dossier médical partagé (DMP) dès la naissance, en prévoyant par exemple l’automaticité de sa création à la maternité sauf opposition des parents.

– S’il s’agit d’une entreprise de longue haleine, il apparaît indispensable d’engager un travail de coordination des producteurs de données de santé et de remise à plat de notre outil statistique.

– Il conviendrait de doter le futur service national universel d’un volet médico-social, pour en faire le support d’un bilan médical des jeunes de 15 ans, sachant que précisément, à cet âge charnière, aucune visite ou bilan médical n’est aujourd’hui prévu.

2.   Renforcer l’évaluation des actions et des politiques de prévention

Parallèlement à la création d’un portail national des interventions évaluées de prévention, il est nécessaire d’établir un tableau de bord synthétique, comprenant un nombre limité d’indicateurs destinés à apprécier l’état de santé de la population française et son évolution. L’objectif serait d’élaborer un outil d’aide au pilotage et à l’évaluation des politiques de santé publique et, plus spécifiquement, de prévention.

Un des indicateurs qui semble devoir être retenu est celui de la santé bucco-dentaire, qui constitue un très bon prédicteur de l’état de santé des individus.

D.   mieux financer et professionnaliser la prévention

1.   Améliorer la connaissance des dépenses fléchées vers la prévention

Les financements alloués à la prévention sanitaire doivent faire l’objet d’une évaluation rigoureuse et transversale, ce qui  implique que soit institué un « jaune budgétaire » retraçant l’ensemble de ces moyens, qu’ils viennent de l’État, de la sécurité sociale, des collectivités territoriales ou encore des acteurs privés.

L’amélioration de l’évaluation des dépenses de prévention des collectivités territoriales suppose d’affiner la nomenclature budgétaire et comptable actuelle.

Ce n’est qu’en disposant de chiffres précis et étayés, permettant d’avoir un état des lieux complet et exact, que l’on pourra piloter la dépense consacrée à la prévention et définir le cas échéant une trajectoire d’évolution. Pour l’heure, les zones d’obscurité sont trop nombreuses.

2.   Accroître les moyens alloués à la prévention, notamment la prévention primaire, pour investir dans l’avenir

– Au risque de reprendre une préconisation formulée déjà à plusieurs reprises, il est nécessaire que la priorité affichée en faveur de la prévention par le Gouvernement se traduise dans les financements qui y sont alloués. Cela implique d’engager une réflexion sur la répartition de nos dépenses de santé entre dépenses consacrées aux soins, d’ordre curatif, et dépenses fléchées vers la prévention.

– La priorité accordée à la prévention implique aussi une clarification de son financement, qui est aujourd’hui éclaté, pour permettre un pilotage d’ensemble efficace. Il serait opportun d’engager une réflexion sur la création d’un fonds dédié au financement des actions de prévention des acteurs institutionnels, pour améliorer la lisibilité, la coordination et l’efficacité des dépenses en la matière.

 Cette clarification pourrait s’accompagner d’un fléchage d’une part du produit des « taxes comportementales » (droits de consommation sur les tabacs et alcools, contribution sur les boissons sucrées…) vers le financement des actions de prévention et de promotion de la santé.

3.   Professionnaliser le secteur de la prévention, par la formation des acteurs

Il est nécessaire de renforcer la formation des acteurs de la prévention, qu’il s’agisse des acteurs « de première ligne » ou de ceux mettant en œuvre et organisant les politiques de prévention. La structuration et la professionnalisation des acteurs de la prévention devraient s’accompagner du développement des cursus de formation initiale et continue – les deux processus devant s’alimenter de façon itérative.

Il est indispensable que les enseignants bénéficient d’une formation initiale solide et systématique en prévention et promotion de la santé pour pouvoir mettre en œuvre le parcours éducatif de santé, ce qui suppose que les Espé harmonisent et renforcent leurs modules de formation.


1

   introduction

 

« Une once de prévention vaut une livre de guérison »

Benjamin Franklin

● L’objet de ce travail est de proposer des solutions pour la mise en œuvre pratique d’une réelle politique de prévention réduisant les inégalités de destin, et d’en finir avec les déclarations de bonnes intentions !

Les rapports sur notre politique de santé publique qui se sont succédé au cours des dernières années parviennent au même diagnostic : la France se caractérise par une situation paradoxale, en associant une espérance de vie élevée par rapport aux autres pays de l’OCDE ([1]), et des taux de mortalité prématurée (avant 65 ans) et de mortalité dite « évitable » liée aux comportements défavorables de santé (consommation de tabac, d’alcool, suicides, accidents de la route…) alarmants, parmi les plus hauts des pays européens. En 2010, la France était la plus mal classée des pays européens en termes de taux de décès « évitable » pour les hommes – ce taux était 60 % plus élevé qu’au Royaume-Uni et 130 % plus élevé qu’en Suède –, et elle occupait l’antépénultième position pour les femmes.

Illustrant l’impact des comportements de santé à risque, ces chiffres sont révélateurs des lacunes et retards de notre politique de prévention. Ils sont corroborés par des indicateurs de prévention relativement médiocres en France : dans un classement publié en 2016 par la revue Lancet, prenant en compte 33 indicateurs liés à la santé, la France arrivait en 24ème position, compte tenu de ses résultats en matière de tabagisme, de consommation d’alcool, de sédentarité et de surcharge pondérale. Par ailleurs, si la santé des Français est jugée globalement satisfaisante, les maladies chroniques sont en expansion, avec plus de 20 millions de personnes concernées, tandis que 10 millions de personnes relevant du régime général se trouvaient en affection longue durée (ALD) en 2015 ([2]).

Autre trait saillant, notre système de santé ne parvient pas à combattre efficacement les inégalités sociales et territoriales de santé. Alors que les inégalités de revenus en France se situent dans la moyenne des pays de l’OCDE, les inégalités sociales de santé y sont particulièrement marquées et ne régressent pas : l’espérance de vie en bonne santé d’un homme cadre supérieur est par exemple supérieure de dix années à celle d’un ouvrier. Ces inégalités sociales de santé se doublent d’inégalités territoriales, caractérisées par des différentiels de prévalence de pathologies et une espérance de vie plus ou moins élevée selon les régions. Il apparaît donc que les politiques de santé, et en premier lieu de prévention, ne profitent pas de la même façon aux différents groupes sociaux et aux différents territoires.

● Selon une approche classique ([3]), la prévention est l’ensemble des mesures visant à éviter ou réduire le nombre et la gravité des maladies, des accidents et des handicaps. Dans une conception plus large, la prévention vise à favoriser la santé, soit, pour reprendre la définition de la Charte d’Ottawa de 1986 ([4]), un « état de complet bien-être physique, mental et social », ce qui implique de prendre en compte et d’agir sur les différents déterminants de santé, qu’ils soient sociaux, environnementaux, économiques, culturels ou comportementaux.

Un consensus se fait jour sur le fait que notre système de santé, centré sur les activités de soins, s’inscrit principalement dans une logique curative axée sur les individus, tandis que la prévention, collective comme individuelle, et la promotion de la santé sont en quelque sorte les parents pauvres de notre politique de santé publique.

Notre système de santé s’est ainsi organisé autour d’acteurs sanitaires institutionnels, notamment les hôpitaux, alors que les activités de prévention et de promotion de la santé relèvent d’une myriade d’acteurs, nationaux comme locaux, sans gouvernance structurée et claire. Parallèlement, la part des dépenses de prévention au sein des dépenses de santé s’avère limitée, et nettement en deçà de la moyenne des pays de l’OCDE, en oscillant, selon les conventions retenues, entre 2 % et 6 % – ce qui implique a contrario qu’entre 94 % et 98 % des dépenses de santé sont fléchées vers les dépenses de soins.

● Cela ne signifie pas pour autant que rien n’a été fait au cours des dernières années : la nécessité d’adopter une approche plus globale de la santé et de la prévention, mettant davantage l’accent sur la promotion de la santé, au-delà de la prévention médicalisée, et impliquant l’ensemble des politiques publiques, s’est imposée peu à peu depuis le début des années 2000. L’on peut observer une prise de conscience collective en la matière, et beaucoup d’interventions et d’actions ont été déployées, notamment au sein des collectivités locales.

D’un point de vue législatif, plusieurs jalons ont été posés à partir de 2002, cent ans après la loi du 15 février 1902 relative à la protection de la santé publique. Les lois de 2002 ([5]) et de 2004 ([6]) ont apporté une définition de la politique de prévention, selon une approche globale et transversale, avec la détermination d’objectifs de santé publique, tandis que la loi de 2009 ([7]) a procédé à la territorialisation des politiques de santé ; la loi de modernisation de notre système de santé de 2016 ([8]) a mis l’accent sur la prévention et la promotion de la santé, tout en instituant l’agence Santé publique France, issue de la fusion de trois établissements (Institut national de prévention et d’éducation pour la santé – INPES –, Institut de veille sanitaire – InVS –, et Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires – Eprus).

S’inscrivant dans le prolongement de ces lois, un net « virage préventif » a été opéré dans le cadre de la stratégie nationale de santé pour 2018‑2022 dévoilée en décembre 2017. La promotion de la santé et la prévention ont été placées en tête des priorités, aux côtés de la lutte contre les inégalités sociales et territoriales de santé. Ce tournant s’est concrétisé par le lancement du service sanitaire, en février dernier, ainsi que par la présentation du plan national de santé publique intitulé « priorité prévention » en mars dernier, et comportant vingt-cinq mesures phares.

Afin qu’elle puisse être mise en œuvre de façon efficace, cette orientation décisive doit être appuyée par un portage politique sans faille et s’accompagner de réformes structurelles portant à la fois sur la gouvernance de la politique de prévention, sur l’articulation d’interventions et d’actions autour de priorités identifiées, ainsi que sur un financement pérenne.

Elle doit également s’accompagner d’une réconciliation des différentes branches de notre système de santé résultant de l’organisation héritée de 1945, c’est-à-dire, pour simplifier, les acteurs de la médecine de santé publique – médecine scolaire et services de PMI au premier chef – et les acteurs de la médecine libérale et hospitalière, en les décloisonnant et en améliorant leur coordination.

● Le présent rapport se concentre sur la prévention santé à l’égard de la jeunesse, et plus particulièrement sur les actions de prévention primaire, visant à éviter l’apparition des maladies et à promouvoir les comportements favorables à la santé, dès la grossesse et la petite enfance jusqu’à la sortie de l’adolescence. C’est en effet auprès des jeunes que les interventions sont les plus cruciales : plus les actions de prévention et de promotion de la santé interviennent tôt, plus elles sont efficaces et « rentables ». De surcroît, les enfants et jeunes d’aujourd’hui sont par définition les adultes et les parents de demain, c’est donc la santé des populations des décennies à venir qui se joue actuellement.

Une telle approche impose de surmonter les différences de temporalité entre l’action publique et la santé des populations : les résultats d’une politique de prévention orientée vers les jeunes ne peuvent être appréciés qu’à l’issue de plusieurs années, et plus probablement de plusieurs dizaines d’années, soit un horizon temporel bien plus étendu que l’agenda politique d’un gouvernement. Engager une stratégie ambitieuse en faveur de la prévention impose de dépasser ce différentiel de durée et d’accepter que les fruits d’une politique soient recueillis bien après qu’elle ait été lancée.

 

 

   première partie

Des inégalités de destins qui s’installent dès l’enfance et qui s'aggravent, signant l’échec de la politique de Santé publique menée par la France.

I.   des inégalités sociales de santé considérables, qui ne régressent pas

Les inégalités sociales de santé ne se sont imposées en France comme un sujet de réflexion et de travaux que depuis une quinzaine d’années : la publication au début des années 2000 d’un premier rapport de l’Inserm sur les inégalités sociales de santé ([9])  a conduit à légitimer ce champ de recherche et à l’inscrire à l’agenda des chercheurs. Le programme de santé publique (2008-2013) mettait l’accent sur ces inégalités de santé et les déterminants sociaux de la santé, de même que la stratégie nationale de santé de 2013.

Pour autant, le constat effectué voilà quinze ans demeure : la France se caractérise par d’importantes inégalités de santé, qui ne diminuent pas.

A.   Une différence d’espérance de vie de 13 ans entre les plus aisés et les plus pauvres

● Alors même que les inégalités de revenus constatées en France sont dans la moyenne des pays de l’OCDE, les inégalités sociales de santé s’y avèrent particulièrement fortes. Un chiffre permet d’en prendre la mesure : l’espérance de vie des 5 % des hommes les plus aisés est supérieure de 13 années à celle des 5 % des hommes les plus pauvres… Les inégalités sociales de santé sont nettement plus marquées chez les hommes que chez les femmes, puisque l’écart est ramené à huit années pour ces dernières ([10]).

Espérance de vie à la naissance par sexe et par niveau de vie mensuel

fig1

Note : en abscisse, chaque point correspond à la moyenne des niveaux de vie mensuels d'un vingtile. Chaque vingtile comprend 5 % de la population.

Source : L’espérance de vie par niveau de vie, INSEE Première, février 2018

Le graphique permet par ailleurs de constater que le gain d’espérance de vie associé à une augmentation du niveau de vie est plus important chez les personnes les moins aisées que chez les plus favorisées : ainsi, aux environs d’un niveau de vie de 1 000 euros par mois, 100 euros supplémentaires sont associés à près d’un an d’espérance de vie en plus chez les hommes et à 0,7 an pour les femmes. Autour de 2 500 euros, une hausse de revenu de 100 euros se traduit par un gain d’espérance de vie de 0,2 an chez les hommes et de 0,1 an chez les femmes.

● Ces inégalités peuvent également être appréhendées par le biais de l’espérance de vie en bonne santé : en France, à 35 ans, les hommes cadres supérieurs bénéficient d’une espérance de vie sans aucune incapacité (difficultés visuelles, auditives, de la marche, difficultés dans les gestes de la vie quotidienne…) de 34 années, sur une espérance de vie totale de 47 ans. Les hommes ouvriers de 35 ans ont une espérance de vie sans incapacité de 24 ans, soit dix ans de moins, sur une espérance de vie totale de 41 années. Là encore, le différentiel est moins important parmi les femmes, mais n’est pas anecdotique (8 ans de plus d’espérance de vie sans incapacité pour une cadre, par rapport à une ouvrière) ([11]).

● Ces inégalités sociales de santé n’ont pas reculé au cours du temps : le différentiel d’espérance de vie entre cadres et ouvriers est resté stable depuis le milieu des années 1970, à savoir environ trois années pour les femmes et six années pour les hommes. Il n’a pas reculé en quarante ans, parallèlement à la hausse continue de l’espérance de vie ([12]).

Évolution de l’espérance de vie à 35 ans par catégorie sociale
pour les hommes

Source : État de santé de la population, édition 2017, DREES et Santé publique France

 


Évolution de l’espérance de vie à 35 ans par catégorie sociale
pour les femmes

Source : État de santé de la population, édition 2017, DREES et Santé publique France

B.   déterminants de santé et causes des inégalités sociales de santé

1.   La notion de déterminants de santé

● La santé des populations résulte d’interactions entre différents facteurs, qui sont qualifiés de déterminants de santé (niveau de revenu, éducation, habitudes de santé, conditions de travail, risques environnementaux, logement, travail, système de soins…). Ces déterminants peuvent être répartis en deux grandes catégories : les déterminants individuels de santé, qui résultent des comportements de chacun, plus ou moins favorables à la santé, et les déterminants environnementaux, qui s’imposent aux individus.

Le schéma ci-après permet d’appréhender les interactions entre ces différents déterminants.  

Dans son acception initiale, la prévention sanitaire était appréhendée par rapport à la maladie : en 1948, l’OMS définissait la prévention comme « l’ensemble des mesures visant à éviter ou réduire le nombre et la gravité des maladies, des accidents et des handicaps », en distinguant la prévention primaire, correspondant aux actions destinées à éviter l’apparition d’une maladie, la prévention secondaire, pour détecter la maladie et en ralentir la progression, et la prévention tertiaire, qui tend à diminuer les récidives, les complications et les séquelles de la maladie.

Néanmoins, une approche plus globale de la prévention a progressivement émergé : dans une conception plus large, exprimée notamment dans la charte d’Ottawa de 1986 de l’OMS, elle est définie comme les actions favorisant un « état de complet bien-être physique, mental et social » des personnes, une « situation dans laquelle un groupe ou un individu peut d’une part, réaliser ses ambitions et satisfaire ses besoins, et d’autre part, évoluer avec le milieu ou s’adapter à celui-ci ». Cette approche de la prévention impose d’agir sur les différents déterminants de santé et donc d’inclure le prisme de la santé dans toutes les politiques, comme le souligne l’OMS dans la déclaration d’Alma-Ata sur les soins de santé primaires en 1978. La notion dite « Health in all policies » (HiAP), soit la « santé dans toutes les politiques », est ainsi présentée dans la déclaration d’Adelaïde de l’OMS en 2010 comme « une approche intersectorielle des politiques publiques qui tient compte systématiquement des conséquences sanitaires des décisions, qui recherche des synergies et qui évite les conséquences néfastes pour la santé afin d’améliorer la santé de la population et l’équité en santé. »

 

● Les principaux facteurs de santé individuels sont bien identifiés : figurent parmi eux le tabagisme, l’alcool, l’activité physique et l’alimentation, ces deux derniers items étant corrélés au surpoids et à l’obésité, ainsi que les autres addictions (consommation de cannabis, d’ecstasy et d’autres substances illicites), ou encore le manque de sommeil – autant de facteurs sur lesquels il est possible d’avoir une influence par des interventions et actions de prévention primaire.

État des lieux des principaux facteurs individuels de risque dans la population française

L’on peut constater une forte prévalence du tabagisme en France par rapport aux autres pays de l’OCDE : bien qu’en recul continu, avec une diminution historique en 2017 (moins un million de fumeurs quotidiens), le taux de fumeurs quotidiens s’établit à 26,9 % alors que le taux moyen au sein de l’OCDE est de 18 % ([13]).

Il en va de même pour la consommation d’alcool : celle-ci a fortement diminué au cours des dernières décennies, mais reste à un étiage élevé de 11,8 litres d’alcool pur par habitant de plus de 15 ans – l’équivalent de 2,6 verres quotidiens par habitant de plus de quinze ans –, soit la quatrième place parmi les 34 pays de l’OCDE.

Enfin, plus de 52 % des hommes sont en surcharge pondérale en France, dont 14,8 % sont en situation d’obésité, et ces proportions sont respectivement de 40 % et 15 % pour les femmes ([14]). Ces chiffres sont plutôt plus favorables que ceux constatés dans les autres pays de l’OCDE : la France se situe en dessous de la moyenne des pays de l’OCDE, et figure en dixième place (sur 34 pays) des pays les moins touchés par le surpoids et l’obésité – les habitudes culinaires françaises semblent constituer un facteur de protection à l’égard de l’épidémie mondiale d’obésité. Les taux de surpoids et d’obésité sont toutefois en progression continue en France depuis 20 ans, aussi bien pour les hommes que les femmes.

Évolution du taux de personnes en situation d’obésité depuis 1994

Source : commission des affaires sociales, sur la base des données de l’Enquête santé et protection sociale (ESPS) figurant dans l’État de santé de la population en France – 2017

2.   Des déterminants de santé moins favorables pour les catégories sociales moins aisées

Fort logiquement, si les classes les plus favorisées économiquement ou les plus diplômées ont un meilleur état de santé et une espérance de vie plus longue, c’est qu’elles bénéficient d’une combinaison de déterminants de santé plus favorables.

● Ce sont en effet les populations les moins favorisées (revenus faibles, peu de diplômes) qui cumulent les expositions aux différents facteurs environnementaux défavorables, qu’il s’agisse de l’environnement professionnel (travail physiquement pénible, travail de nuit, exposition aux produits toxiques) ou de l’environnement personnel (bruit, logements insalubres, mauvaise qualité de l’air ou de l’eau…).

● De plus, nombre de déterminants individuels de santé, tels qu’une alimentation saine, l’activité physique, l’absence de consommation de tabac et d’alcool, sont échelonnés selon des gradients sociaux. Pour le dire autrement, les catégories sociales les moins favorisées ont généralement des comportements individuels moins favorables à la santé, et ce dès le plus jeune âge.

Ainsi, le taux de fumeurs quotidiens était quasiment deux fois plus élevé parmi les personnes sans diplôme que parmi celles qui ont fait des études supérieures (soit 38,9 % contre 21,1 %) en 2016 – et il a d’ailleurs évolué en sens inverse au cours des quinze dernières années, en augmentant chez les moins diplômés et en baissant chez les plus diplômés, ce qui conduit mécaniquement à un creusement des inégalités de santé :

La prévalence du surpoids apparaît également nettement plus forte chez les populations moins diplômées : la part de population en surpoids est 80 % plus élevée chez les femmes n’ayant pas le baccalauréat que chez celles qui ont un niveau d’études équivalent à bac+3 (soit 53,4 % contre 29,6 %) ; ce taux est de 45 % pour les hommes.


Prévalence du surpoids chez les hommes et les femmes de 18-74 ans selon le diplôme en 2015

 

Source : Enquête Esteban 2015 – étude de santé sur l’environnement, la biosurveillance, l’activité physique et la nutrition

Le rapport précité sur l’état de santé de la population indique que les disparités sociales en matière de surpoids semblent s’accroître depuis les années 1980 : l’enquête décennale santé de l’INSEE a montré que la prévalence de l’obésité avait augmenté de 7 points chez les agriculteurs entre 1992 et 2003, contre 2 points chez les cadres. De même, l’écart des prévalences d’obésité entre les personnes de niveau brevet ou sans diplôme et celles titulaires d’un diplôme supérieur au baccalauréat était passé de 5 à 10 points sur la même période.

● Il ne s’agit nullement d’en conclure que les comportements moins favorables à la santé sont l’unique expression de la responsabilité des individus, et qu’en quelque sorte, si les personnes moins diplômées ou aisées sont en moins bonne santé, c’est de leur faute. L’analyse des comportements de santé dits « individuels » renvoie à un environnement social, à une histoire collective, à des questions culturelles et d’accès à l’information ; les conditionnements sociaux pèsent sur le libre arbitre de chacun d’entre nous, de façon positive ou négative.

Par ailleurs, facteurs individuels et environnementaux peuvent être liés ; le surpoids est aussi corrélé aux prix des denrées favorables à la santé, qui sont plus élevés et donc moins accessibles aux plus modestes. Comme le relève le Haut conseil de la santé publique dans son rapport précité sur le PNNS, une calorie de fruits et légumes coûte en moyenne 5 fois plus cher qu’une calorie de tous les autres aliments. Une alimentation de forte densité énergétique et pauvre en nutriments, basée sur des produits transformés, est bien moins chère qu’une alimentation équilibrée à base de produits frais….  et favorise l’obésité et les maladies chroniques.  

Une étude récente, effectuée sur une cohorte de plus de 100 000 personnes, a même conclu qu’une hausse de 10 % de la consommation des produits ultratransformés ([15]) se traduisait par une augmentation de plus de 10 % du risque de développer un cancer, et un cancer du sein en particulier…([16])

II.   Des inégalités territoriales de santé largement corrélées aux inégalités sociales

● Les différentes catégories socio-professionnelles étant inégalement réparties sur le territoire, les disparités sociales de santé s’accompagnent de disparités territoriales. Certes, des facteurs autres que sociaux peuvent jouer un rôle, qu’il s’agisse de l’accès aux soins, lié à la problématique des « déserts médicaux », de certaines pathologies spécifiques liées au climat, comme la prévalence de la dengue et du chikungunya en outre-mer, ou encore de diversité des cultures alimentaires ; toutefois, le critère social apparaît largement dominant.

Dans sa contribution sur la stratégie nationale de santé, le Haut conseil pour la santé publique (HCSP) a ainsi observé qu’à l’échelle locale, les inégalités territoriales de santé sont presque toujours le reflet des inégalités sociales des populations qui y vivent. À des populations résidant dans des territoires aux conditions sanitaires enviables, dans les Alpes, le Lyonnais et l’Alsace, s’opposent d’autres, qui se répartissent dans les Ardennes, en Picardie et sur le littoral de la Manche.

Le HCSP souligne que les inégalités territoriales, en termes de mortalité ou de morbidité (prévalence des maladies), se creusent, entre régions, mais aussi entre grandes et petites villes, entre espaces urbains, périurbains et zones rurales…

De nets écarts apparaissent entre les régions en termes d’espérance de vie : la mortalité est plus forte dans un croissant allant de la Bretagne à la région Hauts-de-France, ainsi que dans les départements d’outre-mer, alors que l’espérance de vie est plus favorable en région Île-de-France et en Auvergne-Rhône-Alpes.

 

Source : État de santé de la population en France, édition 2017, SPF et DREES

● Les écarts territoriaux sont plus importants encore lorsque l’on considère le taux de mortalité prématurée (avant 65 ans) et le taux de mortalité « évitable » : pour les hommes, le taux de mortalité évitable est deux fois plus élevé dans les Hauts-de-France qu’en Île-de France, et pour les femmes, plus d’une fois et demie

Le taux de mortalité prématurée des hommes est quant à lui 30 % plus élevé en Bretagne qu’en Auvergne-Rhône-Alpes (les données ne sont malheureusement pas disponibles pour les départements d’outre-mer).

Ces données sur la mortalité prématurée et évitable peuvent d’ailleurs être corrélées avec celles portant sur les déterminants de santé, notamment l’obésité. Les travaux réalisés sur la cohorte Constances permettent d’établir que le taux de personnes souffrant d’obésité à Lille est le double de celui constaté à Bordeaux ou à Paris.

https://presse.inserm.fr/wp-content/uploads/2016/10/Carte-Ob%C3%A9sit%C3%A9-Nom-villes.jpg

 

Source : Prévalence du surpoids, de l’obésité et des facteurs de risque cardio-métaboliques dans la cohorte Constances, collectif, avril 2016

● Les données régionales figurant dans l’état de santé de la population de 2017 permettent d’appréhender de façon plus fine ces inégalités territoriales, et notamment les spécificités des territoires à l’égard de certaines pathologies.  

Ainsi, par exemple, dans la région Grand-Est, est constatée une mortalité élevée liée aux pathologies pour lesquelles la consommation de tabac est un facteur de risque, notamment dans le nord-est des Ardennes, le nord de la Meurthe-et-Moselle, dans le bassin houiller et autour de Saint-Dizier.

Les données analysées par l’INSEE permettent quant à elles de constater des différences de taux de mortalité néonatale très significatives selon les départements : en 2014, ce taux était de 1,1 pour 1 000 naissances en Charente et de 1,3 dans le Tarn, mais il atteignait 5,1 dans la Haute-Vienne, 7,8 dans la Nièvre et 5,4 dans les départements d’outre-mer.

● Les inégalités territoriales de santé sont encore plus criantes lorsque l’on considère les départements d’outre-mer au regard de l’hexagone.

À cet égard, les rapporteurs déplorent que les différents indicateurs de santé ne soient pas toujours disponibles pour les départements d’outre-mer, particulièrement pour certains d’entre eux (comme Mayotte), et estiment que cela n’est pas acceptable au regard de l’unité du territoire français. 

 

 

L’absence de certaines données relatives aux départements d’outre-mer

Au cours de leurs travaux et auditions, les rapporteurs ont pu constater que les données et statistiques sur la santé ne sont pas toujours complètes, en ce qu’elles ne recouvrent pas systématiquement les départements d’outre-mer.

C’est pour Mayotte et, dans une moindre mesure, pour la Guyane, que les données sont le plus souvent manquantes ([17]). Mais plus largement, l’on constate que l’ensemble des départements d’outre-mer ne sont pas toujours inclus dans certaines statistiques. Pour prendre un exemple parmi d’autres, l’évolution de la prévalence des fumeurs et leur répartition en fonction des catégories socio-professionnelles, présentées dans l’État de santé de la population de 2017, ne portent que sur la France hexagonale, sans prendre en compte la population ultramarine.

Certains indicateurs ne sont pas disponibles pour les départements d’outre-mer ; par exemple, dans ce même rapport sur l’état de santé de la population en 2017, la prévalence du surpoids et de l’obésité chez l’adulte n’est présentée que pour la France hexagonale, la Guadeloupe et la Martinique ; aucune donnée n’est fournie pour La Réunion, la Guyane et Mayotte.

De même, les travaux conduits sur la cohorte Elfe (étude longitudinale française depuis l’enfance), par le suivi de près de 20 000 enfants nés en 2011 (voir infra), ne portent que sur des enfants nés en France hexagonale, les départements d’outre-mer ne se trouvant pas dans le champ de l’étude…

Sur la base des données disponibles pour les départements d’outre-mer, des écarts importants apparaissent pour les principaux indicateurs de santé – espérance de vie, mortalité prématurée et mortalité infantile ; s’y ajoutent des pathologies particulières qui ne sont que pas ou peu prises en compte par des politiques publiques d’envergure. Les institutions de santé publique y sont dans une situation souvent plus critique que dans l’hexagone. Par ailleurs, chaque territoire d’outre-mer présente des problématiques qui lui sont particulières.

Des inégalités territoriales de santé particulièrement marquées en outre-mer

 L’espérance de vie à la naissance à Mayotte et en Guadeloupe est la plus faible de France : pour les hommes, elle est de 74,7 ans à Mayotte et 76,1 ans en Guadeloupe, soit une différence de six et quatre ans avec la région parisienne (80,8 ans). Un peu moins large, l’écart d’espérance de vie pour les femmes est distribué de la même manière entre les régions ([18]).

La mortalité prématurée est elle aussi supérieure dans les départements et régions d’outre-mer (DROM) : 225 décès sur 1 000 sont considérés comme prématurés en outre-mer, contre 200 dans l’hexagone. Toutefois, la mortalité évitable est plus faible dans les DROM que dans l’hexagone, hormis à La Réunion, où la mortalité causée par la consommation de tabac et d’alcool fait partie des plus importantes de France.

La mortalité infantile est plus de deux fois supérieure dans les DROM (hors Mayotte) que dans l’hexagone (7,6 contre 3,3 pour mille). Les naissances prématurées sont elles aussi plus nombreuses dans chacun des départements et territoires d’outre-mer : elles atteignent ainsi 10,4 % à La Réunion et 13 % en Guyane, alors qu’elles oscillent entre 6,2 % et 7,6 % dans l’hexagone. C’est à Mayotte, en Guyane et à La Réunion que les indicateurs sur la prématurité, la mortalité infantile et la mortalité périnatale sont les moins favorables.

● À ces chiffres alarmants sur la mortalité répondent ceux sur l’obésité, les maladies chroniques, les grossesses prématurées et les suicides, tous supérieurs aux chiffres métropolitains. Ainsi, alors que l’obésité atteint 15 % dans l’hexagone en 2014, pour la population globale, elle est passée en Martinique de 26 % en 2003 à 33 % en 2013 ([19]), soit un écart de 18 points entre la Martinique et la France. Alors que 3,6 % des enfants métropolitains de CM2 sont en situation d’obésité en 2014, ce taux atteint 5,5 % dans les DROM.

La prévalence du diabète est beaucoup plus forte dans les outre-mer : elle est par exemple deux fois supérieure à La Réunion que dans l’hexagone ([20]), alors que plus de 9 Réunionnais sur 100 sont diabétiques, selon le Baromètre santé réalisé en 2014 dans les DROM. Les complications liées au diabète, elles aussi plus nombreuses dans les DROM, surviennent de surcroît à un âge plus jeune (âge médian jusqu’à 7 années plus faible) ([21]). Il est par ailleurs établi que la prévalence du diabète serait bien supérieure en réalité : 33 % des malades ignorent leur état ([22]). La mortalité par accident vasculaire cérébral (AVC) explose en outre-mer comparativement à l’hexagone : les taux d’hospitalisation pour AVC sont 1,5 fois supérieurs, et les taux de mortalité par AVC deux fois supérieurs.

Les DROM sont en outre affectés par des problèmes de santé sexuelle et de santé mentale plus importants que dans l’hexagone : alors que le phénomène des grossesses précoces (avant 19 ans) est très faible dans l’hexagone (autour de 4 %), son taux est de 27 % en Guyane et de 23 % à La Réunion ([23]). La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) attire par ailleurs l’attention sur la surreprésentation des violences faites aux femmes dans les outre-mer, rapports sexuels non consentis en tête.

● Il convient une nouvelle fois de rappeler le lien entre inégalités territoriales et inégalités sociales de santé, très visible en outre-mer : le taux de chômage en 2014 y est deux à trois fois supérieur que dans l’hexagone. La DREES note que le niveau de vie et le niveau d’éducation sont « nettement inférieurs » à ceux de l’hexagone ([24]). Remarquant le lien direct entre variables socio-économiques et niveau de santé, elle attire toutefois l’attention sur le fait qu’à situation socio-économique équivalente, les individus sont en moins bonne santé en outre-mer : « habiter dans les DROM multiplie jusqu’à 1,5 fois les risques de déclarer une santé assez bonne ou mauvaise » ([25]). Les femmes sont les plus touchées par les problèmes de santé déclarés dans les DROM.

● L’enquête sur l’État de santé de la population en France en 2017 permet toutefois de montrer les différences de situations socio-sanitaires entre les territoires d’outre-mer : si ces territoires sont globalement dans une situation plus défavorable que dans l’hexagone (au regard des taux de chômage, de la dépendance aux allocations reçues, de la mortalité…), la Martinique et la Guadeloupe présentent toutes deux une situation plus favorable que La Réunion et la Guyane : taux de mortalité inférieurs, population plus âgée, meilleure scolarisation, fécondité des jeunes femmes (12-17 ans) inférieure.

Parmi la Martinique, la Guadeloupe, La Réunion et la Guyane, cette dernière se trouve dans la situation la plus préoccupante : elle présente le plus fort taux de chômage, le plus grand nombre de personnes dépendant des prestations sociales et d’enfants non scolarisés et la fécondité des jeunes femmes la plus élevée de France.

● Enfin, alors même que les indicateurs de santé publique sont alarmants, et encore davantage au regard de l’hexagone, certaines institutions de santé publique font défaut dans les outre-mer. Les services de santé scolaire, déjà en déshérence dans l’hexagone, y ont des moyens encore amoindris. Rappelons que Mayotte est dotée de 3 médecins scolaires (dont aucun titulaire), quand la moitié de la population y a moins de 20 ans. Aucune « maison maternelle » n’existe à Mayotte pour les jeunes femmes enceintes exclues de leur milieu familial.

III.   Des inégalités qui s’installent dÈs la grossesse et l’enfance, le rôle crucial de la prévention primaire chez la femme enceinte et dÈs le plus jeune âge

A.   Des comportements de santé moins favorables chez les enfants issus de catégories modestes

Des différences de comportements de santé peuvent être identifiées dès la grossesse en fonction de déterminants sociaux et économiques. Selon les données figurant dans l’enquête périnatale nationale de 2016 ([26]), les femmes en situation de précarité suivent moins les consultations prénatales et sont plus nombreuses à fumer ; leurs enfants sont plus nombreux à naître prématurément (naissance avant 37 semaines). Différentes études montrent que la part des mères initiant et maintenant l’allaitement est moins élevée parmi celles qui sont les moins diplômées et dont les revenus sont moins élevés ([27]) – alors qu’il existe un consensus scientifique sur l’intérêt et les bénéfices d’avoir recours à l’allaitement pour la santé de l’enfant et de la mère.

Si le taux de mortalité des enfants et adolescents, essentiellement dû aux accidents et aux cancers, a fortement régressé au cours des dernières années, tandis que leur santé bucco-dentaire s’améliore régulièrement depuis vingt ans sous l’effet des progrès de l’hygiène et des habitudes alimentaires, les données disponibles, issues des enquêtes réalisées au sein des établissements scolaires ([28]), permettent d’identifier des différences de comportements de santé parmi les enfants en fonction de la catégorie sociale de leurs parents. Il apparaît ainsi que les inégalités sociales de santé s’enracinent dès le plus jeune âge et qu’elles se cumulent tout au long de la vie.

L’exemple le plus frappant est celui de l’obésité : la prévalence moyenne de l’obésité chez les enfants de CM2 était de l’ordre de 3,6 % en 2015, mais elle était de 5,5 % chez les enfants d’ouvriers et de 1,4 % chez les enfants de cadres, soit un rapport de 1 à 4… Le différentiel est moins marqué en matière de surpoids, mais est également fort perceptible, avec des taux de respectivement 21,5 % pour les enfants d’ouvriers et 12,7 % pour les enfants de cadres. Ce différentiel social se retrouve à tous les âges.

Or l’obésité infantile est un très bon facteur prédictif de l’obésité à l’âge adulte : un adolescent obèse a entre 50 % et 70 % de risque de développer une obésité à l’âge adulte, et il existe une corrélation forte entre l’indice de masse corporelle à l’âge de 6 ans et celui à l’âge adulte, en raison notamment de la grande capacité de formation des cellules adipeuses au cours de la petite enfance. C’est par ailleurs lors des six premières années que les appétences et les goûts peuvent être modulés, renforçant l’importance d’une bonne alimentation dès le plus jeune âge ([29]).


Prévalence de l’obésité selon le groupe socio-professionnel des parents

Source : enquêtes nationales de santé réalisées par la DREES et la DGESCO

On peut aussi constater, et c’est étroitement lié, que les enfants de cadres font davantage de sport que ceux d’ouvriers (78,4 % contre 66,9 % font du sport au moins une fois par semaine), qu’ils boivent moins de boissons sucrées (15,2 % contre 26,4 % consomment tous les jours des boissons sucrées), qu’ils passent moins de temps devant un écran (8,4 %, contre 16,4 %, passent deux heures ou plus par jour devant un écran les jours de classe) ([30]).

Enfin, la santé bucco-dentaire, qui est un bon indicateur de l’état de santé d’un individu, permet également de mettre en lumière des inégalités sociales importantes. Si la tendance d’ensemble est à l’amélioration, il apparaît que les enfants de cadres sont plus nombreux à avoir des dents indemnes de caries que ceux d’ouvriers et que la part de dents cariées non soignées est nettement plus importante chez ces derniers (19,2 % des enfants d’ouvriers en CM2 ont au moins une dent cariée non soignée, contre 8,1 % chez les enfants de cadres). 

Part des enfants dont les dents sont indemnes de caries, selon le groupe socio-professionnel des parents

Source : enquêtes nationales de santé réalisées par la DREES et la DGESCO

B.   La prévalence relativement forte de comportements défavorables à la santé chez les jeunes Français

● Certes, la part des jeunes en surpoids apparaît nettement moins forte en France que dans les autres pays de l’OCDE, et elle tend à se stabiliser au cours des dernières années, alors que la tendance générale est à la hausse au sein de l’OCDE. La France était en 2013-2014 le troisième pays où le taux de surpoids des jeunes de quinze ans est le plus faible, après le Danemark et la Lituanie.  

Surpois auto-déclaré (obésité comprise) chez les jeunes âgés de 15 ans,
2013-2014

Source : Panorama de la santé 2017 - OCDE

Néanmoins, il apparaît que l’activité physique des jeunes en France se trouve à un étiage bas, comparativement aux autres pays de l’OCDE : notre pays se trouve en queue de peloton aux côtés de la Suisse, de l’Italie et d’Israël. Notamment, l’activité sportive des jeunes chute drastiquement à la sortie du lycée : s’ils sont nombreux à avoir une pratique régulière durant leur scolarité, la sortie du système scolaire conduit à une plus grande sédentarité ([31]).

Activité physique quotidienne modérée à intense chez les jeunes âgés de 15 ans, 2013-14

 

Source : Panorama de la santé 2017 - OCDE

 Par ailleurs, pour les adolescents, la consommation de tabac, d’alcool et surtout de cannabis s’avère sensiblement plus élevée en France que dans la moyenne des pays européens. Sur chacun de ces points, les jeunes Français se situent parmi les plus « mauvais élèves » de l’Europe, comme l’illustrent les cartes ci-après fournies par l’Office français des drogues et des toxicomanies (OFDT) sur la base de l’enquête Espad (European School Project on Alcohol and other Drugs).

Usage du canabis dans le mois À 16 ans, en europe

Consommation de cigarettes dans le mois à 16 ans,
en europe

Alcoolisations ponctuelles importantes (API) dans le mois à 16 ans,
en europe

Source : enquête Espad 2011

S’agissant du tabac, les jeunes Français étaient même les troisièmes plus gros fumeurs des pays de l’OCDE en 2013-2014, derrière l’Italie et la Hongrie, avec un taux de fumeurs chez les jeunes de quinze ans (fumant au moins une fois par semaine) de 19 %, contre 11,7 % en moyenne dans les pays de l’OCDE.

part des jeunes âgés de 15 anS fumant au moins une fois par semaine en
2013-14

Source : Panorama de la santé 2017 - OCDE

● Parmi les enjeux de santé identifiés chez les jeunes Français, figurent les troubles comportementaux et cognitifs, les troubles spécifiques du langage et des apprentissages, souvent appelés troubles DYS (dyslexie, dysphasie, dyscalculie, dyspraxie, déficit de l’attention…). Ces troubles touchent entre 6 % et 8 % de la population dans son ensemble et sont souvent tardivement et mal détectés, ce qui pose la question de la formation des médecins. Les enjeux de santé mentale sont également essentiels, avec les risques de comportements addictifs, de troubles alimentaires, de dépression et tentatives de suicides etc, qui apparaissent statistiquement assez mal connus mais ont été évoqués par nombre de personnes auditionnées. Notons néanmoins que 1,4 % des garçons et 6,8 % des filles entre 15 et 18 ans déclarent avoir déjà fait une tentative de suicide, et que 600 jeunes de moins de 25 ans meurent par suicide chaque année ([32]).

● Enfin, au-delà des comportements des enfants et adolescents, en 2016, 16,6 % des femmes enceintes fumaient encore au moins une cigarette par jour au troisième trimestre de grossesse, soit un taux comparable à celui constaté en 2010 (17 %) par l’enquête nationale périnatale précitée de 2016.  

Selon une récente étude publiée par Santé publique France, 11,7 % des mères d’enfants de cinq ans ou moins déclaraient avoir consommé de l’alcool au cours de leur dernière grossesse ([33]). Cette proportion est en diminution, puisqu’elle atteignait 23 % en 2010 ; l’étude relève toutefois que cette baisse pourrait traduire une évolution des comportements des femmes enceintes, mais aussi une plus grande difficulté des femmes à admettre leur consommation d’alcool compte tenu du renforcement des campagnes de communication sur les dangers qui y sont associés. De fait, la consommation d’alcool pendant la grossesse est susceptible d’engendrer des troubles importants chez les enfants (répercussions physiques, cognitives et comportementales) ; environ 400 enfants sont concernés chaque année par des troubles causés par l’alcoolisation fœtale (TCAF) – sachant que la prévalence de ces troubles est très probablement sous-estimée, du fait notamment de la difficulté à repérer les enfants présentant de tels troubles ([34]) .

   deuxième partie

état des lieux de la politique de prévention à destination des jeunes : une multiplicité d’acteurs, unE gouvernance EPARPILLEE et des financements dispersés

 

Comme le souligne le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie dans son avis précité de juin 2017 sur les politiques de prévention, historiquement, la prise en charge de la santé a été découpée selon des modalités transparaissant encore aujourd’hui dans notre organisation : en 1945, l’État et les collectivités territoriales se sont vu confier l’organisation et le financement de l’action en amont des soins ; l’assurance maladie a pris en charge les soins dispensés par les professionnels de soins et les établissements de santé ; enfin, l’action en aval des soins (handicap, dépendance) relève des dispositifs d’assistance sociale, notamment départementaux. Notre système de santé s’avère segmenté, cloisonné et sectorisé.   

C’est ce qui explique que les interventions des différents acteurs de la santé en matière de prévention apparaissent insuffisamment articulées et coordonnées. Cette situation est accentuée par le fait que la première caractéristique des politiques de santé publique est leur nécessaire transversalité : par construction, la pluralité des déterminants de santé implique d’associer une multiplicité d’acteurs dans les politiques de promotion de la santé et de prévention.

De ce fait, si la prévention-promotion de la santé mobilise un grand nombre d’intervenants sur l’ensemble du territoire français, la dispersion des efforts consentis conduit à nous interroger sur l’efficacité de leur gouvernance. Pour le dire de façon schématique, si tous les acteurs font de la prévention, le risque est qu’aucun d’entre eux ne se saisisse vraiment du sujet.

Enfin, le contexte financier dans lequel se déploie la politique de prévention-promotion de la santé est peu lisible : les financements apparaissent dispersés, difficiles à identifier et insuffisants face aux enjeux.

I.   Un grand nombre d’acteurs intervenant dans la prévention-promotion de la santé en faveur des jeunes

Les acteurs concernés par la promotion de la santé sont nombreux, aussi bien au niveau de la définition des objectifs, des priorités et des actions que de leur mise en œuvre effective. Ces acteurs sont de niveau national, de niveau régional, où doivent se décliner les objectifs nationaux, et de niveau local, au plus près des populations. Le caractère transversal de la santé implique par ailleurs la mobilisation d’acteurs intervenant dans d’autres domaines : les transports, l’éducation, l’alimentation et l’agriculture, l’environnement et la justice sont autant de champs où les problématiques de santé ont émergé au cours des dernières années.

Toutefois, cette transversalité ne s’est encore qu’imparfaitement traduite dans la gouvernance des politiques de promotion de la santé ; si des coopérations entre acteurs émergent, l’organisation « en silo » des politiques publiques porte un fort préjudice aux politiques de promotion de la santé.

A.   Des acteurs institutionnels nationaux nombreux

1.   Une politique de santé impliquant plusieurs ministères

● La politique de promotion de la santé est d’abord du ressort de l’État et plus particulièrement du ministère de la santé. Étant nécessairement transversale, a fortiori en ce qui concerne la jeunesse, elle concerne une pluralité de ministères et de directions :

– Au sein du ministère de la santé, la direction générale de la santé (DGS), mais aussi la direction de la sécurité sociale (DSS) et la direction générale de l’offre de soins (DGOS) ont chacune des prérogatives en matière de prévention‑promotion de la santé. La DGS élabore la stratégie et le pilotage global ; la DSS supervise les différents organismes de sécurité sociale et adapte leurs prestations aux besoins de la population ; la DGOS veille à la mise en œuvre des politiques publiques relatives à l’offre de soins. Elles ont ainsi toutes trois un rôle à jouer dans la mise en œuvre de la stratégie nationale de santé, et donc dans la prévention et la promotion de la santé, objectif premier de la SNS. Le secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales (SGMAS) participe au pilotage des réseaux territoriaux en matière de santé.

– Le ministère de l’éducation nationale joue un rôle prépondérant dans la prévention-promotion de la santé auprès des enfants et des adolescents, par l’organisation de la médecine scolaire et par le biais des enseignements délivrés, notamment ceux s’inscrivant dans le parcours éducatif de santé (PES). La direction de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative du ministère de l’éducation nationale participe également à la mise en œuvre des objectifs de prévention.

– Le ministère de la transition écologique et solidaire, par son rôle en matière de transports, mais également de protection de l’environnement, n’est pas moins concerné par la prévention-promotion de la santé ; il héberge en son sein un comité de la prévention et de la précaution, créé en 1996 ([35]) ;

– Le ministère des sports participe à la promotion de la santé par le développement de l’activité physique pour tous, qui constitue un déterminant essentiel de santé ;

– Le ministère de la cohésion des territoires, par ses missions en matière de logement ;

– Le ministère de l’agriculture et de l’alimentation, par ses actions en matière de qualité de l’alimentation et de l’agriculture ;

– Le ministère de la justice, qui promeut la santé des jeunes au sein de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ).

D’autres ministères peuvent se trouver associés aux politiques de santé de manière épisodique, à l’instar du ministère des outre-mer pour les approches populationnelles spécifiques en outre-mer. Par ailleurs, des instances interministérielles participent à l’élaboration, à la mise en œuvre et au suivi de la politique de santé et de prévention : la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) doit être en mesure de fournir une expertise sur l’état de santé de la population et le système de soins.

2.   Aux côtés des ministères, d’autres institutions de couverture nationale participent à la prévention santé

● Pour définir la politique de santé publique et ses déclinaisons, notamment en prévention, le ministère de la santé et l’ensemble des acteurs institutionnels s’appuient sur des instances d’expertise :

– le Haut conseil de la santé publique (HCSP) ainsi que la Haute autorité de santé (HAS) ont pour mission de conseiller le Gouvernement et ont des champs d’expertise larges en matière de santé publique ([36]) ;  

– l’agence Santé publique France occupe une place centrale en matière de prévention : à la fois agence d’expertise, opérateur de missions de prévention et organisme de veille sanitaire, Santé publique France anime et pilote des actions de prévention à l’échelle nationale et locale ; elle dresse un panorama de l’état de santé de la population avec la DREES. Santé Publique France rassemble les connaissances sur ce qui fonctionne et peut ainsi diffuser les actions de prévention efficaces, en mettant à la disposition des acteurs de la littérature de santé, des outils et des supports de communication ;

 –  d’autres organismes peuvent apporter leur expertise : l’École des hautes études en santé publique (EHESP), créée par la loi de santé publique de 2004 ([37]), la Société française de santé publique (SFSP), espace de réflexion interprofessionnel, ou encore l’Institut de recherche en santé publique (IReSP), groupement d’intérêt scientifique pour la recherche en santé publique ;

– l’Institut national contre le cancer (Inca) ou l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) ont des missions plus spécifiques, leur permettant de cibler les actions probantes dans certains domaines, tandis que l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) réalise des expertises collectives sur des sujets ciblés ;

– enfin, le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (HCAAM) est une instance de réflexion et de propositions qui a pour mission spécifique d’évaluer les enjeux et les modalités de fonctionnement de l’assurance maladie, et de préconiser le cas échéant des évolutions et réformes.

● La Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM) est un autre acteur de poids au niveau national : alors qu’historiquement l’assurance maladie prenait exclusivement en charge les soins curatifs selon le partage issu de 1945, elle a progressivement vu ses remboursements s’étendre aux soins préventifs du fait de l’apparition de médicaments agissant de manière préventive et du développement des techniques de dépistage.

La création des bilans de santé, la mise en place de plusieurs expérimentations et l’accompagnement de programmes de niveau national ou local a confirmé sa position d’acteur dans la prévention-promotion de la santé, comme l’illustre le programme national M’T Dents lancé en avril 2007 pour encourager les bilans bucco-dentaires chez les enfants.

La Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) intervient également dans la promotion de la santé et la prévention auprès de la petite enfance, par le biais de ses actions de soutien à la parentalité, visant notamment à favoriser la famille productrice de santé et de bien-être pour les enfants.

Les complémentaires santé se sont également affirmées comme des acteurs incontournables dans le champ de la prévention en santé. Les mutuelles étudiantes ont leur rôle à jouer, par des actions de sensibilisation et d’éducation à la santé des jeunes, notamment. Emevia, mutuelle étudiante, témoigne de 3 000 actions de prévention menées auprès de 400 000 étudiants. La Mutualité Française, forte de 600 mutuelles, comptabilise 8 000 actions sur le territoire et revendique, en 2017, un million de personnes concernées par ces actions, lesquelles ne sont pas réservées à leurs adhérents.

Enfin, de grandes entreprises, notamment dans le secteur agroalimentaire, ont créé des fondations telles que l’Institut Danone, la Fondation Louis Bonduelle, la Fondation Nestlé France, la Fondation Carrefour ou encore la Fondation Bel, conduisant des actions de promotion de la santé, qui concernent généralement la nutrition. Certaines fondations proposent par exemple aux acteurs locaux des ressources financières et des outils pour développer des travaux ou des actions – par exemple le programme Clemantine, kit de formation gratuit développé par l’Institut Danone et destiné à la formation des personnels de restauration scolaire, pour aborder les besoins nutritionnels des enfants et le rôle des cantines dans leur éducation alimentaire.

B.   Une multitude d’acteurs sur les territoires

Une multitude d’acteurs est saisie des questions de prévention. Si certains ont essentiellement un rôle d’impulsion et de coordination, beaucoup agissent quotidiennement auprès des populations.

●  Dans cette première catégorie, les acteurs institutionnels :

– Les Agences régionales de santé (ARS) ont été encouragées à s’approprier les questions de prévention dès leur création en 2010 ([38]). Aux termes de l’article L. 1431-2 du code de la santé publique, elles sont dotées de deux grandes missions : définir et mettre en œuvre territorialement la politique de santé et réguler, orienter et organiser l’offre de santé en région, par leurs compétences en matière de professions de santé, dans le domaine hospitalier et le champ médico-social.

Leur mission de déclinaison des politiques de santé publique a permis d’affirmer dès 2010 la place de la prévention et promotion de la santé. La loi de modernisation de notre système de santé (LMSS) du 28 janvier 2016, ayant acté le renforcement de la place de la prévention dans le système de santé en son titre premier, a doté les ARS d’un rôle d’animation territoriale en matière de prévention et les encourage à organiser le décloisonnement des prises en charge, avec la notion de parcours.

Par leur double mission de pilote de la politique de santé publique et de régulation de l’offre de santé en région, elles contribuent à la prévention et promotion de la santé en mettant en œuvre les objectifs de la stratégie nationale de santé, d’une part, et en veillant à la formation des professionnels, à leur répartition sur le territoire ainsi qu’à l’accès à la prévention et promotion de la santé, d’autre part. Pour ce faire, les ARS financent des projets de prévention et de promotion de la santé portés par des associations ou des professionnels de santé.

Placées sous la tutelle des ministres chargés de la santé, des personnes âgées et des personnes handicapées ([39]), les ARS bénéficient d’une grande autonomie dans la définition de ces actions de promotion, éducation et information à la santé. Leurs prérogatives étendues en font les acteurs centraux des politiques de prévention et de promotion de la santé à l’échelle régionale.

 – Les collectivités territoriales, régions, départements et communes se sont saisies, bien que de manière variable sur le territoire, des questions de prévention, proposant divers services à leurs administrés. À chaque échelon des collectivités territoriales correspondent les compétences liées à la prévention et promotion de la santé.

Les régions sont compétentes pour la formation des professionnels paramédicaux et des travailleurs sociaux depuis 2004 ([40]).

Les départements sont responsables de la protection maternelle et infantile (PMI) ([41]) (voir infra) ainsi que de l’aide sociale à l’enfance ([42]).

Alors que les communes ont a priori des compétences limitées en matière de santé (compétences de veille sanitaire, d’hygiène, de salubrité et de vaccination, compétences médico-sociales de recueil d’informations, de construction ou subvention d’infrastructures sanitaires et de gestion de centres spécialisés), la reconnaissance du caractère transversal de la santé et de ses déterminants révèle les compétences bien plus larges des communes pouvant influencer la santé, notamment leurs compétences en matière de logement, de transport, d’écoles maternelles et élémentaires et de leurs services de restauration, de structures d’accueil de la petite enfance, de sport, d’aménagement du territoire, de gestion des espaces naturels, de traitement des déchets et des eaux usées, etc ([43]).

– Les Observatoires régionaux de santé (ORS), qui sont le plus souvent des associations relevant de la loi de 1901, participent à la connaissance de l’état de santé de la population en région et offrent un appui aux ARS et aux collectivités territoriales, ainsi qu’aux professionnels de santé. Au nombre de 17, ils conduisent des études et enquêtes, mais aussi des évaluations des actions menées en santé. Ils sont des centres de ressources pour les professionnels de la santé et de la prévention.

● Directement au contact des populations, les professionnels de santé :

Les professionnels de santé, libéraux et hospitaliers, représentent évidemment une première ligne incontournable pour la prévention et la promotion de la santé des enfants. Des gynécologues-obstétriciens, sages-femmes, médecins généralistes aux pédiatres, psychiatres, kinésithérapeutes et orthophonistes, en passant par les infirmiers et les pharmaciens, tous jouent un rôle en prévention et promotion de la santé.

Des dispositifs ont été introduits afin d’encourager les médecins généralistes et spécialistes à développer leurs actions de prévention, dans le cadre de la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP) créée en 2012 et revue en 2016.

Les médecins et infirmières scolaires sont bien évidemment parmi les professionnels de santé les plus concernés par la prévention et la promotion de la santé des enfants, de la maternelle au lycée. 

Les services de PMI, qui relèvent des départements, mobilisent différents professionnels de santé (médecins, infirmières, sages-femmes, puéricultrices...) dans une approche pluridisciplinaire ; ils sont également des acteurs de premier plan en matière de prévention auprès de la jeunesse, en étant chargés d’assurer des actions en santé auprès des femmes enceintes et des jeunes enfants jusqu’à six ans. Leurs activités sont multiples : consultations, vaccinations, visites à domicile, planification familiale, bilans de santé en école maternelle, etc.

Les établissements hospitaliers peuvent également constituer des acteurs de prévention et de promotion de la santé. Le directeur de l’ARS de Nouvelle Aquitaine, M. Michel Laforcade, soulignait par exemple que dans cette région, le versement de certains financements relevant de l’ARS et destinés aux hôpitaux pouvait être conditionné à la mise en œuvre par ces derniers d’actions de prévention.

Pour autant, si tous les professionnels de santé sont nécessairement partie prenante de la politique de prévention, ils agissent de façon segmentée et sans coordination : les professionnels de santé libéraux, ceux hospitaliers, ceux relevant de la PMI et ceux issus de la médecine scolaire relèvent de statuts et de financements distincts, leur organisation est cloisonnée et ils s’appuient sur des données de santé différentes, qu’ils ne partagent pas.

● Enfin, toujours au contact des populations, figurent les acteurs suivants :

– Les associations, comme Aides dans la lutte contre le sida ou Fédération Addiction pour la lutte contre les addictions, sont également des acteurs essentiels. Plus spécifiquement, les Instances régionales d’éducation et de promotion de la santé (IREPS), réunies au niveau national par la Fédération nationale pour l’éducation et la promotion de la santé (FNES), jouent un rôle structurant dans la promotion de la santé : au nombre de dix-huit sur le territoire français dont cinq en outre-mer, les IREPS dispensent des formations en promotion de la santé, réalisent elles-mêmes des interventions et sont un centre de ressources documentaires.

– Les Maisons des adolescents, les points d’accueil écoute jeunes (PAEJ), et d’autres organismes spécialisés tels que les Centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie (CSAPA) exercent des activités de prévention et de promotion de la santé quotidiennement.

● S’agissant des populations les plus vulnérables, l’aide sociale à l’enfance (ASE), la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) et les missions locales jouent un rôle crucial en prévention et promotion de la santé des jeunes ; elles sont un vecteur d’accès aux droits en santé et œuvrent à la réduction des inégalités sociales de santé :

– L’aide sociale à l’enfance (ASE) ne doit pas être oubliée dans son rôle de prévention et promotion de la santé en faveur des jeunes. Prenant en charge 290 000 jeunes ([44]), elle fait face à des problématiques d’accès aux droits à la santé ; elle participe de leur éducation à la santé et de la garantie de conditions de vie saines pour les jeunes placés. De manière générale, les lieux de prise en charge des jeunes en difficulté sont des lieux de prévention et promotion de la santé, tels les foyers de jeunes travailleurs (FJT) ([45]).

 – De la même manière, la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) s’est engagée depuis 2013 à promouvoir la santé des jeunes qu’elle prend en charge en déployant la démarche « PJJ promotrice de la santé ».

– Bien que non dotées de missions en santé publique, les missions locales ont reçu de la LMSS l’obligation de rediriger les jeunes présentant des problèmes de santé vers les services compétents. Elles font parfois l’objet de conventions avec les ARS, comme en Île-de-France ([46]). Au contact direct des jeunes en rupture par rapport au système scolaire, les missions locales revendiquent un fort potentiel en matière de prévention auprès d’une population sortie des radars de la médecine scolaire et souvent éloignée de la médecine de ville, comme l’a indiqué M. Jean-Paul Dupré, président de l’association régionale des missions locales Occitanie.

Le schéma ci-après représente, de manière simplifiée, les différents acteurs intervenant dans la prévention et la promotion de la santé :

Les acteurs de la prévention en faveur des jeunes

Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.

C.   médecine scolaire et PMi, deux acteurs centraux de la prévention auprès des jeunes en prise à des difficultés structurelles

1.   Les services de PMI : un acteur crucial de la prévention et de la réduction des inégalités de santé, pourtant délaissé dans certains territoires 

● Le rôle de la PMI en matière de santé publique est largement reconnu. Faisant le lien entre tous les milieux de vie de l’enfant (maternité, domicile, crèche, etc) et travaillant avec l’ensemble des professionnels de santé (médecins libéraux, pédopsychiatrie, médecine scolaire, etc) et les travailleurs sociaux, les services de PMI assurent un suivi global des enfants, de la grossesse à l’âge de 6 ans, et parfois au-delà.

Relevant de la compétence des départements en vertu de l’article L. 2112-1 du code de la santé publique, ses missions concernent essentiellement la prévention, puisque la PMI organise « des consultations prénuptiales, prénatales et postnatales et des actions de prévention médico-sociale en faveur des femmes enceintes », et « des consultations et des actions de prévention médico-sociale en faveur des enfants de moins de six ans ». Elle est également chargée de réaliser un bilan de santé pour les enfants âgés de trois à quatre ans, notamment en école maternelle, ainsi que des actions médico-sociales préventives à domicile pour les femmes enceintes, les parents en période post-natale et des actions d’information sur la santé, en sus de ses activités de planification familiale ([47]).

Par son ancrage territorial (on dénombrait 5 100 points fixes de consultations en 2012 ([48])), la PMI est particulièrement propice au suivi différencié des personnes en difficulté sociale et des enfants vulnérables (pour cause de prématurité, de maladies chroniques, etc). La PMI est ainsi un acteur indispensable de l’accès à la santé pour tous : la couverture vaccinale est supérieure dans les territoires où la PMI est bien implantée, alors même qu’il s’agit souvent des territoires les plus en difficulté ([49]).

● Les services de PMI font face à des difficultés structurelles, du fait de l’implication variable des assemblées départementales, du manque de moyens et de la pénurie de médecins : le défenseur des droits dénonçait ainsi dans son rapport de 2017 ([50]) « la situation inquiétante » de ces services.

Leur financement est assuré par les départements, tandis que la CNAM leur rembourse des actes médicaux, mais sous condition de conventionnement – qui est en cours de généralisation ; en revanche, les actes des puéricultrices ou autres actes de prévention collective et individuelle ne peuvent être sujets à remboursement. Le financement hors actes médicaux se fait sur projet, donc de manière ponctuelle. Comme le souligne le défenseur des droits dans son rapport, dans de nombreux départements, les ressources humaines des services de PMI stagnent ou régressent, alors que les besoins augmentent. Les contraintes budgétaires, conjuguées à un problème de démographie médicale, ont des conséquences directes sur le fonctionnement des services. Le nombre de médecins de PMI est en effet passé, entre 2009 et 2015, de 1 936 à 1 724 ETP ([51]), soit une chute de 11 % des effectifs en six ans, ce qui résulte largement du caractère peu attractif des statuts et salaires des médecins de PMI.

La PMI est de ce fait de moins en moins en mesure de remplir ses missions. En 2006, l’IGAS estimait que 50 % des enfants de moins d’un an avaient eu un contact avec la PMI ; en 2012, 700 000 enfants de moins de six ans ont bénéficié de consultations de médecins de la PMI, soit moins d’un septième des enfants de 0 à 6 ans. Certains services de PMI sont contraints de réduire le périmètre de leur action et de retenir des priorités, en abandonnant des pans entiers des actions de prévention primaire, ou en limitant le suivi aux enfants de moins de deux ans. Les bilans de santé de la PMI sont de manière générale de moins en moins poussés, par manque de temps, de moyens et de compétences : ils sont souvent uniquement sensoriels et réalisés par des infirmières et non des médecins, comme prévu par la loi ; enfin, le dialogue avec les parents se raréfie, de même que les visites à domicile ([52]).

Dans son rapport public annuel de 2012, la Cour des comptes a par ailleurs souligné la « couverture inégale des services de PMI » ([53]), qui conduit à ce que certains services ne remplissent plus les missions que la loi leur confie. Seuls 6 départements sur 10 atteignaient la norme d’activité relative au suivi des enfants en 2012 et près d’un département sur deux n’assurait pas de séances pré ou postnatales ([54]). Les inégalités entre départements sont particulièrement alarmantes en ce qui concerne le nombre de médecins de PMI. Si, en 2012, on comptait en Seine-Saint-Denis 980 médecins ETP affectés à la PMI pour 100 000 naissances, ce chiffre tombait à 66 dans le Finistère. On observe des écarts pour les taux de sages-femmes de PMI allant de 1 à 17 ([55]).  

normes PMI 1normes PMI 2

Ces différences ont un impact direct sur l’accès aux soins et la santé des enfants : en 2016, la proportion des enfants scolarisés bénéficiant d’au moins un dépistage dans le cadre du bilan de santé des 3-4 ans variait de 51 % à 100 % selon les départements ; plus frappant encore, la proportion des enfants bénéficiant d’un examen médical variait de 1 % à 74 % ([56]).

Il a enfin été souligné auprès des rapporteurs que le manque de médecins de PMI était largement lié à la faible attractivité de ces postes et à un manque de reconnaissance professionnelle, résultant de difficultés d’organisation et d’exercice des missions. L’absence de mise à disposition de vaccins constatée dans certains départements conduit à ce que les professionnels de PMI ne puissent pas répondre aux besoins des populations qui viennent les consulter. Par ailleurs, dans certains départements, dont le nombre n’est malheureusement pas connu avec précision, la direction des services de PMI n’est pas assurée par un médecin, alors qu’il s’agit d’une obligation légale ([57]) ; en pratique, les médecins de PMI peuvent se retrouver sous l’autorité hiérarchique de personnels relevant de la filière sociale ou administrative, moins qualifiés et non spécialisés en santé publique, ce qui nuit à la coordination des actions et à la motivation des personnels.

Instrument de réduction des inégalités de santé et d’accès aux soins, les PMI ne sont plus à même de remplir leurs missions dans certains départements.

2.   La médecine scolaire en déclin

Créée au sortir de la seconde guerre mondiale, la médecine scolaire a de longue date tenu un rôle prépondérant dans la santé des élèves et dans la lutte contre les inégalités de santé ([58]). Ce rôle a été renforcé au cours des années 1990, notamment par la création d’une mission de promotion de la santé en 1991 au sein du ministère de l’éducation nationale et par la désignation d’objectifs spécifiques aux populations à risque, qu’il s’agisse des maladies chroniques (1993), du handicap (2005) ou des difficultés d’apprentissage (2015) ([59]). En 2015, deux circulaires ont précisé le rôle des médecins et infirmiers de l’éducation nationale dans la prévention et la promotion de la santé auprès des élèves et leur suivi individualisé au sein d’un parcours de santé ([60]) .

● Parmi les nombreuses missions de la médecine scolaire énumérées dans la circulaire n° 2015-118 du 10 novembre 2015 et sédimentées au fil des années, la prévention occupe une place centrale :

– des visites médicales prises en charge par la médecine scolaire doivent avoir lieu au cours des sixième (par un médecin) et douzième (par une infirmière) années de l’enfant, aux termes de l’article L. 541-1 du code de l’éducation ;

– un avis médical doit être donné sur l’orientation et l’aptitude des élèves de 15 à 18 ans pour les travaux réglementés ;

– la médecine scolaire organise des actions collectives en promotion de la santé, par la participation aux comités d’éducation à la santé et à la citoyenneté (CESC), la surveillance de l’environnement scolaire, la contribution à la formation des professionnels et l’éducation à la santé.

Des missions de suivi spécifique des élèves à risque ou présentant des difficultés particulières s’y ajoutent :

–  depuis 1993, une série de plans ont été créés, centrés sur les enfants rencontrant des difficultés : le projet d’accueil individualisé (PAI) est mis en place par la médecine scolaire à la demande des parents d’enfants atteints par une maladie chronique, en concertation avec le médecin traitant ; le projet personnalisé de scolarisation (PPS) en milieu scolaire ordinaire des élèves en situation de handicap, en relation avec les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) pour les 279 000 élèves en situation de handicap scolarisés en 2016 ; enfin, un plan d’accompagnement personnalisé (PAP) pour les enfants ayant des troubles de l’apprentissage.

– à ces missions, s’ajoutent les urgences, ainsi que le suivi d’enfants dépistés et les adaptations nécessitées par les élèves (visites lors d’un décrochage scolaire, enseignement adapté…).

● En principe renforcée par la loi pour la refondation de l’école de 2013 ([61]), qui donne à l’école la « responsabilité de l’éducation à la santé et aux comportements responsables » et « le suivi de la santé des élèves », la médecine scolaire se trouve pourtant dans une situation de déshérence soulignée par l’ensemble des acteurs du champ sanitaire et de l’éducation : l’Académie nationale de médecine ([62]), le Sénat ([63]), et le CESE([64])  ont publié au cours des deux dernières années des rapports alarmants sur le sujet.

Pour remplir ses nombreuses missions dans les 69 000 établissements scolaires français, l’éducation nationale ne dispose en effet plus que de 1 035 médecins en 2016. Ce nombre est de surcroît en chute libre et l’on déplore un effondrement de 20 % des effectifs depuis 2008.

Évolution du nombre de médecins scolaires depuis 2007

Source : projet annuel de performance de la mission « Enseignement scolaire » annexé au projet de loi de finances pour 2018.

Le nombre de médecins est toutefois plus élevé si l’on prend en compte les non-titulaires (1 770 médecins titulaires et non-titulaires exerçaient en 2015). Chaque médecin titulaire ou médecin de l’éducation nationale (MEN) a la charge de territoires devant comprendre entre 5 000 et 7 000 élèves, mais variant en réalité de 2 000 à 46 000 élèves sur le territoire national selon l’enquête syndicale de 2015-2016 ([65]). Les infirmières scolaires, auxquelles le recours démontre l’importance (15 millions de visites reçues en 2011), étaient au nombre de 7 594 en 2017 ; dans le secondaire, il est prévu une infirmière pour 598 élèves. À la différence des médecins, les postes d’infirmières sont en général pourvus. 

De même que pour les médecins de PMI, le métier de MEN est peu attractif au regard des conditions salariales ([66]) et de travail, mais aussi du concours de recrutement, qui constitue une barrière à l’entrée. De surcroît, une fois le concours obtenu, les médecins stagiaires doivent suivre une formation théorique à l’École des hautes études en santé publique de Rennes, pour une durée de 8 à 16 semaines, ce qui peut représenter un frein du fait des contraintes familiales et géographiques que cela peut occasionner pour les stagiaires. En 2015, 42 % seulement des postes ouverts aux concours ont été pourvus ([67]).

● Conséquence de la pénurie en médecins scolaires, les visites médicales obligatoires ne sont pas toutes assurées, avec des variations importantes selon les territoires. Le taux de réalisation de la visite des 6 ans est en chute : selon les données fournies par la DGESCO, 80 % des élèves de 6 ans bénéficiaient d’un bilan de santé en 2013-2014, mais ce taux est passé à 47,5 % en 2015-2016…

La visite de dépistage infirmier en sixième, à 12 ans, est loin d’être systématique, puisque seulement 30,4 % des élèves en avaient bénéficié en 2015‑2016 (ce qui représente toutefois une légère hausse par rapport à 2013-2014, où le taux était de 27 %).

Surtout, comme le souligne l’Académie nationale de médecine dans son rapport de 2017, le taux d’enfants ayant bénéficié d’une visite varie très fortement selon les départements. Selon les données fournies par la DGESCO, en 2015-2016, ce taux oscillait entre 13,3 % dans l’académie de Montpellier et 93 % dans l’académie de Clermont-Ferrand, en passant par 50,7 % dans l’académie de Besançon, ce qui creuse les inégalités territoriales et sociales de santé : la médecine scolaire est bien souvent la seule occasion, pour les enfants issus de milieux défavorisés, d’avoir accès à un médecin. Il convient toutefois de noter que le taux de réalisation des visites est supérieur dans les établissements relevant de l’éducation prioritaire, avec une moyenne de 64,5 %, ce qui résulte du ciblage de ces établissements.

Les territoires les plus en difficulté sont bien souvent ceux qui manquent le plus de médecins scolaires : Mayotte ne compte plus aucun médecin titulaire ([68]), quand elle est le plus jeune département de France, avec 9 500 enfants nés en 2016 ([69]) ; la Seine-Saint-Denis compte quant à elle 29 médecins pour 340 000 élèves ([70]).

II.   Une gouvernance éPARPILLéE

La multitude d’acteurs intervenant en prévention et en promotion de la santé nécessiterait une gouvernance renforcée, afin d’assurer la cohérence des messages et l’efficacité des actions auprès des populations et des territoires. Or les acteurs de première ligne, notamment les associations, les professionnels de santé, la médecine scolaire et la PMI, déplorent tous l’organisation « en silo » et le fonctionnement cloisonné de la politique de santé et de prévention en France, qui nuit à l’atteinte des objectifs et à son efficacité.

La prévention et la promotion de la santé présentent en effet un double enjeu de gouvernance, à la fois verticale et horizontale : la déclinaison des politiques nationales au niveau local, d’une part, et la coordination des différentes politiques portant sur les déterminants de santé, d’autre part. Un fonctionnement en silo ne remplit les objectifs ni de la première gouvernance, ni de la seconde.

A.   La gouvernance verticale : une répartition encore cloisonnée au niveau national, des déclinaisons inégales sur les territoires

1.   La gouvernance nationale : la mise en place d’un comité interministériel pour la santé, une initiative allant dans le bon sens 

Le principe de la « santé dans toutes les politiques » implique la participation d’un grand nombre d’acteurs au niveau national. L’organisation actuelle, allant dans le sens d’une plus grande transversalité de la gouvernance, est encore insuffisante pour piloter efficacement la prévention à l’échelle nationale.

La promotion de la santé est chapeautée par le ministère de la santé, qui définit les objectifs et fixe les priorités. La direction générale de la santé a ainsi pour mission de « préserver et améliorer l’état de santé de la population », mission qu’elle met en œuvre en définissant la Stratégie nationale de santé (SNS) sur cinq ans sous l’autorité du ministre chargé de la santé. Néanmoins, ainsi que le souligne le HCAAM dans son avis de juin 2017, les autres ministères intervenant en matière de prévention ont souvent une logique « propriétaire » : la santé au travail relève du ministère du travail, la santé à l’école du ministère de l’éducation, etc. Une telle approche favorise un fonctionnement « en silo ».

La SNS 2018-2022 pose désormais comme objectif la transversalité des parcours et de la gouvernance ([71]) en santé publique, par la mobilisation de l’ensemble des politiques publiques et des ministères, dans une approche coordonnée et concertée, selon l’approche de « santé dans toutes les politiques ». Une telle transversalité des politiques de santé oblige à considérer tous les déterminants de santé. Elle jette ainsi un éclairage nouveau sur les questions environnementales dans le cadre des politiques d’aménagement urbain et de transports. L’approche transversale est encore plus spécifiquement nécessaire en ce qui concerne les outre-mer, dont les indicateurs de santé sont bien plus inquiétants que dans l’hexagone.

Un comité interministériel pour la santé (CIS) a été créé en 2014 afin de « favoriser la prise en compte de l’éducation pour la santé et la promotion de la santé dans l’ensemble des politiques publiques » ([72])  et de s’assurer  que « la coordination des politiques publiques en faveur de la santé soit assurée au niveau régional ».

Jusqu’à la fin de 2017, son bilan est apparu limité puisqu’il s’est résumé à l’élaboration d’un plan interministériel de lutte contre l’antibiorésistance. C’est en 2017 que son action a pris de la consistance, avec l’élaboration puis la publication en mars 2018 du plan national de santé publique dit « priorité prévention » ([73]). Ayant vocation à coordonner les ministères pour faire de l’objectif de « santé dans toutes les politiques » une réalité, le CIS devra se saisir pleinement de son rôle et asseoir sa légitimité pour y parvenir.

L’agence nationale de santé publique, ou Santé publique France, est quant à elle dotée d’un rôle d’expertise, d’appui et de coordination en matière de prévention et de promotion de la santé, ainsi que d’opérateur dans certains cas, mais elle n’exerce pas d’autorité sur les autres acteurs.

2.   La déclinaison locale des objectifs nationaux : le travail des ARS entre déploiement des politiques nationales et volontarisme local

Les ARS constituent des acteurs essentiels de la prévention dans les territoires, dans leur rôle de déclinaison de la SNS et des politiques de santé publique définies par la direction générale de la santé ; la coordination et le pilotage de leur action sont assurés par le secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales (SGMAS).

Le SGMAS a en effet pour double mission d’assurer la cohérence des politiques entre les trois ministères sociaux que sont le ministère du travail, le ministère des solidarités et de la santé et le ministère des sports, et d’assurer le pilotage des réseaux nationaux relevant d’eux. En matière de santé, le SGMAS assure ainsi le pilotage des ARS.

Le SGMAS assure le suivi des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) conclus entre les ARS et le ministère de la santé, d’une durée de quatre ans ([74]), en particulier dans le cadre d’un conseil national de pilotage incluant notamment des directions santé du ministère de la santé, de la CNAM et de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).

Il réunit également le collège des directeurs généraux des ARS et la direction générale de la santé pour échanger autour de la déclinaison des politiques nationales.

Enfin, le SGMAS a pour mission d’attribuer les crédits du Fonds d’intervention régional (FIR) dévolus à la prévention santé, une enveloppe de 479 millions d’euros ([75]), qui offre une marge de manœuvre aux ARS pour financer des politiques de prévention.

 

  SGMAS

____________________________________________________________

 

Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.

● Aussi, selon l’organisation de l’action au plan régional retenue par la LMSS, les ARS sont tenues de décliner territorialement la stratégie nationale de santé, mise en place pour une durée qui ne peut excéder dix ans ([76]), en définissant un projet régional de santé (PRS). Le PRS comprend un cadre d’orientation stratégique (COS) d’une durée de dix ans également, un schéma régional de santé (SRS) établi pour cinq ans, ainsi qu’un programme régional d’accès à la prévention et aux soins (PRAPS) ([77]) de cinq ans.

temporalités de programmation et de financements

Source : note du HCAAM sur la conduite de la politique de prévention et de promotion de la santé, 23 février 2017.

Disposant de la personnalité juridique, les ARS sont placées sous la tutelle des ministères des affaires sociales aux termes de l’article L. 1 432-1 du code de la santé publique. Elles sont appuyées par les commissions de coordination des politiques publiques (CCPP) chargées de la prévention, de la santé scolaire, de la santé au travail et de la PMI, prévues un décret du 31 mars 2010 ([78]).

Leur autonomie s’illustre notamment dans leur utilisation des crédits du FIR alloués à l’action 1 « Promotion de la santé, prévention des maladies, des traumatismes, du handicap et de la perte d’autonomie », avec une allocation des ressources qui varie assez fortement d’une région à l’autre. Ces crédits peuvent être consacrés à cinq domaines : la prévention et l’observation en santé et la diffusion des bonnes pratiques ; l’éducation à la santé, la prévention des maladies et des comportements à risque ; le dépistage et le diagnostic de maladies transmissibles ; la gestion des situations sanitaires exceptionnelles ; la prévention des traumatismes, des handicaps et de la perte d’autonomie.

Ainsi, alors que la région Hauts-de-France consacrait 67,3 % de ses crédits relevant de l’action 1 à l’éducation à la santé et la prévention des maladies en 2016, la région Pays de la Loire n’y allouait que 36 %, accordant une priorité plus importante au dépistage ([79]) – sachant que sur l’ensemble des ARS, la part des moyens consacrés à l’éducation à la santé atteint 50 %.

Pourcentage des crédits de l’action 1 du FIR dévolu à l’éducation à la santé et à la prévention des maladies par région

Malgré la mission confiée aux ARS de décliner les politiques nationales, le rééquilibrage de leurs objectifs au profit de la prévention et de la promotion de la santé par la LMSS, ainsi que le rôle d’animateur du SGMAS, cette politique de prévention peut être inégalement mise en place selon les territoires. Nombre d’acteurs rencontrés ont exprimé un sentiment d’impuissance face au caractère « personne-dépendant » des politiques menées par les ARS, c’est-à-dire les variations des mesures retenues par les ARS en fonction des personnes en poste. Certaines ARS se sont saisies de la prévention et promotion de la santé dès les PRS de première génération, mais d’autres demeurent timides, même dans le cadre de la seconde génération des PRS.

La région Auvergne-Rhône Alpes a ainsi décliné son COS en six parcours prioritaires témoignant d’une approche populationnelle dans son SRS et a identifié de multiples leviers agissant sur les déterminants de santé, allant des liens renforcés avec les structures sportives aux actions ciblées sur l’eau potable, en passant par la formation des décideurs. Dans le même temps, la région Grand-Est s’est concentrée dans son second PRS sur la prévention secondaire, dépistages en tête.

● Les ARS sont issues de la transformation des Agences régionales d’hospitalisation (ARH), créées en 1996 ([80]) et ayant pour mission la supervision des hôpitaux. À leur création, elles ont rassemblé, en plus des services des ARH, ceux de six autres organismes : les directions régionales et départementales des affaires sanitaires et sociales (DRAS et DDASS), les unions régionales des caisses d’assurance maladie (URCAM), les groupements régionaux de santé publique (GRSP) et certains services administratifs et médicaux de l’assurance maladie. Jusque-là assurées par les GRSP, les politiques de prévention ont été intégrées au sein des ARS. Néanmoins, la dimension curative a continué à prévaloir au début du déploiement des ARS, dans la continuité du travail des ARH, structure principale hébergeant les six autres, et certains interlocuteurs des rapporteurs ont souligné que toutes les ARS n’avaient pas effectué leur « mutation » d’ARH.

Les acteurs locaux remarquent par ailleurs un certain éloignement des ARS par rapport aux territoires : un président de conseil départemental a déclaré voir plus facilement la ministre de la santé que le directeur de l’ARS sur son territoire. M. Jean-Michel Rapinat, directeur délégué des politiques sociales de l’Assemblée des départements de France (ADF), a relevé l’éloignement des ARS par rapport aux communes ([81]) en soulignant que la commune et le département sont l’axe de la proximité, là où doivent se mettre en place les politiques de santé au plus proche des populations et des territoires. Les départements, par la voix de l’ADF, déplorent un manque de reconnaissance de l’échelon départemental dans le domaine médico-social ([82]) et la grande rigidité de certaines ARS par rapport à leurs propositions.

L’ADF remarque par ailleurs les inégalités de volontarisme et de bonne entente entre les ARS et les départements à l’œuvre sur les territoires. Ainsi, en Bourgogne-France-Comté, un avis défavorable a été émis par tous les départements au sujet des relations avec l’ARS pour l’établissement du PRS ([83]).

Sur les quarante-neuf départements ayant répondu à la sollicitation de l’ADF à propos de leurs relations avec leur ARS lors de l’élaboration du PRS, sept ont émis un avis favorable, douze un avis favorable avec réserves, dix un avis réservé ou partagé, et vingt-et-un avis très réservé ou défavorable ([84]). La prise en compte des politiques publiques locales lors de l’élaboration du PRS par les ARS est ainsi jugée insatisfaisante par une majorité de départements.

3.   Des collectivités locales pouvant être « de bonne volonté », sans pilotage, pour des politiques inégales sur le territoire 

● N’ayant que peu de compétences en matière de santé, les départements sont pourtant responsables de la PMI, acteur crucial en matière de prévention en faveur des enfants. Le Gouvernement a souhaité la doter d’un organe d’animation et de pilotage afin de réduire les inégalités territoriales : la LMSS a instauré le principe d’une animation nationale des actions conduites par les services de PMI, prévu par l’article L. 1411-1 du code de la santé publique ; un comité d’animation nationale des actions de PMI (CANA-PMI), rassemblant la DGS et l’ADF, a ainsi été mis en place.

Ayant tenu sa première réunion début 2017, le CANA-PMI a ciblé des thématiques sur lesquelles elle souhaite concentrer son travail (santé périnatale, perturbateurs endocriniens, santé psychique des jeunes enfants) et se donne pour vocation d’échanger les bonnes pratiques entre les départements ([85]). Son rôle apparaît pour l’heure limité à une enceinte d’échanges entre les acteurs, peu susceptible de permettre de résorber à court terme les inégalités territoriales et de moyens.

● De même, les différentes villes et communes se sont emparées des questions de prévention et de promotion de la santé de manière très inégale. Certaines villes et métropoles se sont érigées en « championnes » de la promotion de la santé, en rejoignant notamment le réseau français des Villes-santé de l’OMS : 86 villes et 6 intercommunalités françaises en font partie, couvrant 12,6 millions d’habitants. Ainsi, la ville de Nantes a déployé des assistants sociaux dans les écoles, ainsi que des psychologues cliniciens, au prix d’un investissement considérable, quand d’autres s’investissent beaucoup moins ([86]). Les politiques de santé des communes ne sont pas homogènes sur le territoire.

L’engagement plus ou moins important des communes et collectivités territoriales peut s’expliquer par plusieurs facteurs, d’ordre politique, historique ou encore économique. Mais il ne faut pas sous-estimer le fait que certaines collectivités ont davantage de difficultés à intervenir en matière de prévention par manque de moyens financiers ; or les communes les plus en difficulté sont bien souvent celles dont les populations sont plus défavorisées que la moyenne et ont davantage de besoins en prévention.


la gouvernance de la prévention en faveur des jeunes

 

 

 

 

Flèche orange : pilotage/financement

Flèche verte : actions.

Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.

 


1

B.   La gouvernance horizontale : des instances régionales de coordination qui se multiplient, entachant la lisibilité des dispositifs et dissolvant les responsabilités

1.   L’ARS au cœur des acteurs régionaux et locaux

La loi de modernisation de notre système de santé (LMSS) a confié aux ARS un rôle d’animation territoriale en matière de prévention. Elles créent, pilotent et animent plusieurs instances de coordination de la prévention et promotion de la santé en région et elles financent une part considérable des actions locales.

● Principal cadre de déploiement de la politique de santé en région, le PRS est établi par l’ARS en concertation avec les acteurs régionaux : la conférence régionale de la santé et de l’autonomie, les conseils départementaux de la citoyenneté et de l’autonomie, le préfet de région, les collectivités territoriales, le conseil de surveillance de l’ARS participent à son élaboration aux termes de l’article R. 1434-1 du code de la santé publique ([87]). Les ARS organisent parfois des consultations auprès des citoyens ou des élus ([88]). En dernier lieu, c’est le directeur général de l’ARS qui signe le PRS.

Modalités d’élaboration du PRS

Source : commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.

Les ARS ont depuis la LMSS l’obligation légale de constituer un conseil territorial de santé (CTS) en remplacement des conférences de territoires créées par la loi Hôpital, Patients, Santé et Territoires (HPST) ([89]), dans un objectif de renforcement de la démocratie sanitaire : les CTS rassemblent des représentants d’élus de collectivités territoriales, des services de PMI et des acteurs du système de santé. Seules instances qui réunissent les ARS et les représentants des collectivités territoriales, les CTS participent à l’élaboration du PRS et veillent en outre à la participation des habitants aux démarches de santé.

Acteurs de première ligne de la prévention et promotion de la santé, les professionnels de santé sont encouragés à se constituer en communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) sous l’égide de l’ARS afin d’œuvrer à la mise en place des parcours de santé : cette notion de parcours de santé nécessite la bonne coordination des différents professionnels de santé autour des patients et de leurs problématiques particulières.

Les communautés professionnelles territoriales de santé

Les CPTS ont été instaurées par  la loi de modernisation de notre système de santé de 2016 et figurent à l’article L. 1434-12 du code de la santé publique. Créées à l’initiative des professionnels de santé ou de l’ARS si un besoin est identifié, les CPTS sont composées de ces professionnels regroupés, le cas échéant, sous la forme d'une ou de plusieurs équipes de soins primaires, d'acteurs assurant des soins de premier ou de deuxième recours et d'acteurs médico-sociaux et sociaux concourant à la réalisation des objectifs du projet régional de santé.

Les membres de la CPTS formalisent un projet de santé, qui est transmis à l’ARS.  Ce projet de santé précise notamment le territoire d’action de la CPTS.

Enfin, au plus près des territoires, la prévention et la promotion de la santé peuvent être mises en œuvre dans le cadre des contrats locaux de santé (CLS) et les ateliers villes-santé, toujours avec la participation de l’ARS.

Les contrats locaux de santé ont été créés par la loi HPST et figurent à l’article L. 1434-10 du code de la santé publique : cet article prévoit que les CLS peuvent être conclus par l’ARS avec les collectivités territoriales et leurs groupements pour mettre en œuvre le PRS, et qu’ils peuvent porter sur la promotion de la santé, la prévention, les politiques de soins et l’accompagnement médico-social et social. En l’absence de précisions supplémentaires du législateur, les CLS sont libres et peu contraignants ; ils peuvent également inclure l’assurance maladie, des services et établissements médico-sociaux et sanitaires, les professionnels de santé, les associations, les services de l’État (l’éducation nationale, par exemple), le conseil départemental, le conseil régional, etc. Leur durée moyenne est de trois ans. Un coordonnateur du CLS, souvent financé par l’ARS, est chargé d’encourager les acteurs parties prenantes à remplir les objectifs fixés.

Les ateliers santé ville (ASV) ont été créés par le comité interministériel des villes du 14 décembre 1999 ; ils visent à associer les habitants et les professionnels aux choix en matière d’accessibilité aux soins et à la prévention santé. Une circulaire du 13 juin 2000 ([90]) détaille leurs objectifs et fonctionnement : ils ont vocation à améliorer la cohérence des actions menées en faveur des populations défavorisées ([91]). Depuis la création des ARS, les ASV sont pilotées en partie par les ARS et par les services déconcentrés de l’État.

● Au-delà de leur rôle de coordination, les ARS ont également des prérogatives de financement des acteurs locaux pour la prévention et la promotion de la santé, conformément à l’article L. 1431-2 du code de la santé publique. Elles attribuent ces financements soit sur la base de contrats pluriannuels d’objectifs et de financement (CPOF) sur trois ans ou de contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens sur cinq ans (CPOM), soit dans le cadre d’appels à projets spécifiques. La plupart des ARS privilégient dorénavant les CPOF (région Grand-Est, PACA, Guyane, Hauts-de-France), au détriment des appels à projets annuels. Ceux-ci demeurent toutefois pour une partie non négligeable du financement de la prévention (500 000 euros en Guyane, un million d’euros en Normandie).

Ainsi, en 2016, les ARS ont participé au financement d’environ 90 % des actions de prévention et de promotion de la santé ciblant les moins de 25 ans, répertoriées dans la base de données OSCARS (voir infra). Les associations représentent plus de 50 % des porteurs de projets recensés dans la base ([92]).

2.   Des dispositifs multiples et insuffisamment coordonnés

● Les différentes instances de coordination pilotées par les ARS ne semblent pour la plupart remplir qu’insuffisamment leurs missions.

En premier lieu, les commissions de coordination des politiques publiques de santé chargées de la prévention (CCPPS), créées en 2010 et chargées d’appuyer les ARS, semblent avoir un rôle limité.

Les commissions de coordination des politiques publiques de santé

C’est la loi HPST qui a prévu la création des commissions de coordination des politiques publiques de santé dans les domaines de la prévention de la santé scolaire, de la santé au travail et de la protection maternelle et infantile (article L. 1432-1 du code de la santé publique).

Aux termes du décret n° 2010-346 du 31 mars 2010, ces commissions réunissent les services de l’État (ARS, préfecture, rectorat, Drjscs – direction régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale, Dirrecte – direction régionale des entreprises, de la consommation, du travail et de l'emploi –, Dréal – direction régionale de l'environnement, de l'aménagement et du logement –, Draaf – direction régionale de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt, etc), les conseils départementaux et conseils régionaux, des représentants des communes ou intercommunalités et des représentants des organismes de sécurité sociale.

Elles sont chargées d’assurer la cohérence et la complémentarité des actions déterminées et conduites par leurs membres en matière de prévention.  

Le HCAAM exprime un jugement sévère à leur encontre : il note un « fonctionnement très hétérogène voire inexistant » ([93]). L’ARS de la région Île-de-France fait cependant valoir leur réel intérêt lorsqu’elles fonctionnent bien, notamment si elles se concentrent sur une thématique donnée – en l’occurrence, en Île-de-France, la santé des jeunes.

Pour la coopération entre les professionnels de santé, les conseils territoriaux de santé (CTS), remplaçant les conférences de santé et ayant vocation à être l’instance de démocratie sanitaire par excellence, échouent à satisfaire les acteurs : les syndicats des psychiatres français, des médecins généralistes, des médecins généraux, le syndicat national des pédiatres français et le syndicat national des pédiatres des établissements hospitaliers ont ainsi dénoncé le fait que les CTS seraient une « chambre d’enregistrement des projets des ARS » et leur faible représentativité. Certains élus semblent partager cette appréciation et déplorent le manque d’écoute des ARS, ainsi que le peu d’influence que peuvent exercer les CTS. Plus largement, il serait souhaitable de davantage prendre en compte les positions exprimées par les élus à l’égard des décisions des ARS, précisément dans un souci de renforcement de la démocratie sanitaire.  

–À l’inverse, les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) ont été saluées comme permettant un vrai échange entre les professionnels ; elles ne concernent toutefois que les professionnels de santé et ne sauraient remplacer une instance de démocratie sanitaire. Pour prendre en compte les problématiques des patients dans leur globalité, elles se révèlent par ailleurs insuffisantes : des initiatives locales entre professionnels de santé ont vu le jour pour pallier ces insuffisances et le défaut de collaboration entre médecins généralistes et psychiatres, pourtant nécessaire à une prise en charge précoce et efficace ([94]).

– À ces dispositifs destinés aux professionnels de santé s’ajoutent les Unions régionales des professionnels de santé (URPS), rassemblant toutes les spécialités de la santé, participant au PRS et interlocuteur privilégié de l’ARS. Enfin, le dispositif des plateformes territoriales d’appui (PTA) vient en aide aux professionnels de santé dans la prise en charge de patients en situations complexes ; les PTA sont également financés par les ARS. Aussi, si tous ces dispositifs ne se recoupent pas, le risque de chevauchement et de perte de lisibilité est évident.

● Pour la coopération entre les différents acteurs de la prévention et promotion de la santé, les CLS ont démontré leur potentiel ; ils ont vocation à réduire les inégalités sociales et territoriales de santé, en s’appuyant sur des diagnostics locaux.

Les CLS peuvent être des instances primordiales pour la promotion de la santé, en organisant l’intersectorialité au plus près des populations : la Fédération nationale d’éducation et de promotion de la santé (FNES) relevait en septembre 2017 que les CLS de première génération se concentraient sur la promotion de la santé, et que l’approche populationnelle a été de plus en plus privilégiée. Les CLS de seconde génération ont démontré leur capacité à couvrir également les thématiques du soin et du médico-social, ainsi qu’à encourager les évaluations d’impact sur la santé (EIS). Mis en place sur les ressources existantes, les CLS n’ont pas généré de surcoût important ([95]).

Toutefois, ils sont encore insuffisamment déployés sur le territoire. Selon les données recueillies, le nombre de CLS signés au 15 septembre 2017 était de 305, et l’on dénombrait plus de 68 projets de contractualisation ([96]) . On comptabilise actuellement :

– 66 CLS en Île-de-France, couvrant 6,1 millions d’habitants, soit 50 % de la population totale de la région, et 57 % des quartiers prioritaires de la ville (QPV). Neuf autres CLS sont en cours d’ouverture et huit sont en négociation.

– en Auvergne-Rhône Alpes et dans les Hauts-de-France, 31 et 26 CLS couvrent respectivement 3 millions et 2,8 millions d’habitants, soit environ 40 % des habitants des deux régions.

– les CLS couvrent 31,8 % de la population en Occitanie et 76 % des QPV.

– la région Provence-Alpes-Côte-D’azur compte seulement cinq CLS (sans que le nombre d’habitants concernés ne soit connu), alors que la région réunit près de 5 millions d’habitants.

Les moyens alloués aux CLS sont eux aussi très variables selon les territoires. La région de Guyane alloue 70 000 euros pour chacun des CLS signés, quand l’Île-de-France a consacré 1,14  million d’euros à ses 66 CLS en 2018, soit 17 000 euros par CLS en moyenne.

Le suivi des CLS au niveau national n’est pas systématique ; un dispositif de suivi avec la remontée de fiches harmonisées existait lors de la mise en place des premiers CLS, mais il n’est plus opérationnel aujourd’hui ([97]). La visibilité est ainsi assez faible sur la mise en œuvre des CLS.

Enfin, les CLS sont intriqués dans une multiplicité de dispositifs territoriaux et de proximité aux périmètres pas toujours clairement définis, parmi lesquels les dispositifs précités – les ateliers villes santé, les conseils territoriaux de santé, les plateformes territoriales d’appui, les communautés professionnelles territoriales de santé, etc  –, mais aussi  les groupements hospitaliers de territoire, les contrats de ville, les schémas de cohérence territoriale, ainsi qu’une profusion de plans.

● Les différents acteurs publics sont eux-mêmes insuffisamment coordonnés : les ARS et les départements pour les services de PMI et d’aide sociale à l’enfance (ASE) ne disposent pas d’une instance de discussion et de collaboration. L’ARS Île-de-France note ainsi la situation préoccupante de l’ASE en matière de santé et déplore le manque de coopération possible entre les services ([98]).

III.   Des financements dispersÉs, difficiles à identifier et insuffisants face aux enjeux

● Dans un rapport de 2011 sur la prévention sanitaire, la Cour des comptes écrivait ([99]) : « L’effort financier global consacré à la prévention est difficile à mesurer. (…) Aucun acteur ne dispose en totalité d’une connaissance transversale et exhaustive des financements affectés aux politiques de prévention sanitaire ». Sept ans plus tard, l’on peut reprendre au mot près ce constat pour la prévention en général, et a fortiori la prévention destinée à la jeunesse.

Corrélativement à la multiplicité des acteurs intervenant dans le champ de la prévention, les financements sont divers et proviennent aussi bien de l’État et de ses agences que de l’assurance maladie, des mutuelles, des collectivités locales ou même de fondations d’entreprises. Comme le souligne la DGS dans ses réponses aux rapporteurs, ces moyens sont « inégalement exécutés et sans vision d’ensemble quant à leur pilotage. Le cloisonnement s’accompagne de sous-exécution budgétaire alors même que les besoins de financement de la prévention sont patents ».

La Cour des comptes a préconisé à deux reprises, en 2011 ([100]) puis en 2017 ([101]), l’élaboration d’un document de politique transversale (ou « orange budgétaire ») sur la prévention sanitaire joint chaque année au projet de loi de finances, afin de disposer d’une vision consolidée de l’effort budgétaire de l’État. L’objectif est d’évaluer le montant des dépenses de prévention selon une méthodologie homogène et constante et de clarifier les règles d’imputation budgétaire, pour apporter à la représentation nationale une information précise. Elle a également recommandé, en 2017, d’inclure les dépenses de prévention dans la construction de l’ONDAM (objectif national des dépenses de l’assurance maladie) sous la forme d’un sous-objectif distinct.

Pour l’heure, ces recommandations sont restées lettre morte.

Les rapporteurs ont souhaité réunir au cours d’une table-ronde l’ensemble des services pouvant apporter un éclairage sur le chiffrage des moyens de la prévention, à savoir la DREES, la direction générale de la santé (DGS), la direction de la sécurité sociale (DSS) et la direction du budget (DB). Pour autant, les échanges n’ont pas permis de lever les incertitudes constatées dans les chiffrages, particulièrement en ce qui concerne les moyens apportés par les collectivités locales, et ont conduit au contraire à identifier des évaluations inexactes ou parcellaires, qui donnent à penser qu’un travail considérable reste à faire.

● Des chiffres disponibles, l’on peut toutefois conclure que les moyens dévolus à la prévention en France sont dans l’ensemble relativement limités au regard des autres pays de l’OCDE et qu’ils ne sont pas à la hauteur des enjeux, lorsqu’on les met en regard des coûts associés aux risques.

Il convient de noter qu’en l’absence de données détaillées sur la prévention à destination de la jeunesse, les rapporteurs présentent, dans les développements suivants, les chiffres disponibles portant sur l’ensemble des dépenses de prévention, quel que soit l’âge des bénéficiaires.

A.   la difficile évaluation des dépenses allouées à la prévention, la multiplicité et la complexité des sources de financements

1.   Le chiffrage des dépenses de prévention : une meilleure connaissance, conduisant à une évaluation globale de l’ordre de 15 milliards d’euros

Il serait injuste de dire que rien n’a été fait en matière de chiffrage des financements alloués à la prévention sanitaire depuis le constat de la Cour des comptes en 2011. La DREES a en effet effectué un travail d’identification des dépenses de prévention sanitaire dans l’édition 2016 de son rapport annuel sur les dépenses de santé ([102]).

Les dépenses portant sur la prévention dite « institutionnelle », c’est-à-dire financée ou organisée par des fonds et des programmes de prévention nationaux ou départementaux (médecine du travail, médecine scolaire, services de protection maternelle et infantile, campagnes de dépistage et de promotion de la santé, etc) faisaient déjà l’objet d’une estimation annuelle.

Les travaux réalisés par la DREES en 2016 ont consisté à identifier les dépenses de prévention qui sont disséminées dans la consommation de soins et de biens médicaux (CSBM), que ce soit sous forme de consultations, de dépistages ou encore de médicaments.

Sur la base de ces travaux, les dépenses de prévention relevant de la CSBM ont été évaluées à 9,3 milliards d’euros en 2014, tandis que les dépenses de prévention institutionnelle s’établissaient à 5,8 milliards d’euros, soit un total de 15,1 milliards d’euros. Cet agrégat représente environ 6 % des dépenses de santé, lesquelles étaient évaluées à 257 milliards d’euros en 2014 et qui ont atteint 266 milliards d’euros en 2016 ([103]).

La distinction opérée entre dépenses de prévention relevant de la CSBM et dépenses de prévention institutionnelle est basée sur notre mode de financement et d’organisation des soins, et non sur la nature des dépenses de prévention (par exemple, dépenses de prévention primaire, secondaire et tertiaire, pour reprendre la classification définie par l’OMS).

a.   Les dépenses de prévention relevant de la consommation de soins et de biens médicaux

● Les moyens consacrés à la prévention au sein de la CSBM sont largement destinés aux dépenses de médicaments, à hauteur de 45 % en 2014 (4,2 milliards d’euros), principalement pour les traitements anti-hypertension et anti-cholestérol.

Les consultations et actions préventives des médecins (suivi médical des enfants, examens gynécologiques, délivrance de certificats médicaux, échographies de suivi de grossesse, etc) représentaient environ 2,3 milliards d’euros. Les analyses de biologie (explorations lipidiques ou thyroïdiennes, dépistages de carences, etc) s’élevaient à 1,3 milliard d’euros et les soins dentaires (détartrages, polissage des dents) atteignaient 800 millions d’euros. Enfin, les soins à l’hôpital représentaient 450 millions d’euros en 2014 et correspondaient notamment à la prise en charge de l’alcoolisme (séjours pour sevrage) ou à des surveillances et conseils diététiques.

Répartition des 9,3 milliards d’euros de dépenses de prévention au sein de la consommation de soins et biens médicaux en 2014

Source : commission des affaires sociales, sur la base des comptes de la santé

Il n’est pas toujours aisé de déterminer quelles dépenses relèvent de la prévention et lesquelles relèvent des soins, par exemple pour les consultations. La DREES indique par exemple que si un soin peut être réalisé avec une visée curative ou préventive selon les patients, et que les données ne permettent pas de distinguer les situations, les dépenses ne sont pas prises en compte dans la prévention ; par ailleurs, l’évaluation ne prend en compte ni les consultations des sages-femmes et des auxiliaires médicaux, ni les cures thermales.

Un groupe de travail piloté par la DGS et la DREES a été mis en place pour améliorer la méthodologie utilisée pour estimer les dépenses de prévention, mais s’est pour l’instant limité aux dépenses concernant la périnatalité, selon les informations fournies aux rapporteurs.

b.   Les dépenses de prévention relevant de la prévention institutionnelle

Les dépenses de prévention dite « institutionnelle » se divisent en deux grands blocs : la prévention individuelle (3,6 milliards d’euros) et la prévention collective (2,2 milliards d’euros).

● La prévention individuelle représente environ 3,6 milliards d’euros en 2016, et elle se répartit entre prévention primaire (3 milliards) et prévention secondaire (0,6 milliard), reprenant la classification de l’OMS.

La majorité des dépenses de prévention primaire correspond à la médecine du travail (1,6 milliard d’euros), tandis que les dépenses restantes sont destinées essentiellement à la petite enfance et aux jeunes, par l’intermédiaire des services départementaux de PMI (660 millions d’euros) et de la médecine scolaire (580 millions d’euros).

Répartition des dépenses de prévention individuelle primaire en 2016

Source : commission des affaires sociales, sur la base des comptes de la santé

Les dépenses de prévention secondaire concernent pour l’essentiel des actions de dépistage (416 millions d’euros), ainsi que les bilans de santé réalisés au profit des assurés sociaux de plus de 16 ans (181 millions d’euros).

● La prévention collective, qui relève plutôt de la prévention primaire, comprend elle aussi deux blocs, d’inégale importance en termes de moyens financiers, par référence aux deux grandes catégories des déterminants de santé :

– les actions sur les comportements (information, promotion et éducation à la santé), pour 412 millions d’euros en 2016 ;

– les actions sur l’environnement (prévention des risques professionnels, prévention et lutte contre la pollution, sécurité sanitaire de l’alimentation…), pour 1,8 milliard d’euros en 2016.

Répartition des dépenses de prévention collective portant sur les comportements en 2016

 

Répartition des dépenses de prévention collective portant sur l’environnement en 2016

 

Source : commission des affaires sociales, sur la base des comptes de la santé

● In fine, les dépenses de prévention telles que recensées par la DREES se répartissent comme suit :

Répartition des 15,1 milliards d’euros de dépenses de prévention en 2014

Source : commission des affaires sociales, sur la base des comptes de la santé

c.   Des financements assurés pour moitié par l’assurance maladie

Au préalable, il convient d’indiquer que sur les 15,1 milliards d’euros fléchés vers la prévention, seuls 11 milliards sont financés par le secteur public : le solde est assuré par le secteur privé, soit au titre de la médecine du travail (1,6 milliard d’euros), soit au titre de la couverture des dépenses de santé par les mutuelles et assurances ou par les patients, au titre de leur reste à charge.

● L’assurance maladie est le premier financeur des actions de prévention, soit environ 50 % des 15,1 milliards d’euros. Cela résulte bien évidemment de sa prépondérance dans le financement des dépenses relevant de la CSBM, à hauteur de 72 % ([104]).

Mais l’assurance maladie contribue également au financement de la prévention institutionnelle par le biais :

– du Fonds national de prévention, d’éducation et d’information sanitaire (FNPEIS) créé en 1988, qui réalise des dépenses de 360 millions d’euros en 2017 : il finance notamment des actions de vaccinations, de prévention bucco-dentaire (notamment l’action M’T dents), de lutte contre le tabagisme, des actions de dépistages, ainsi que les bilans de santé ;

– du Fonds d’intervention régional (FIR) ([105]), créé en 2012 : sur le montant total de 3,3 milliards d’euros alloués au fonds en 2016, 479 millions d’euros étaient inscrits sur l’action 1 « promotion de la santé, prévention des maladies, des traumatismes, du handicap et de la perte d’autonomie » : ces sommes sont versées aux ARS, qui sont chargées de les allouer aux différentes actions de prévention menées dans leur ressort territorial, comme vu supra.

Les ARS bénéficient d’une grande souplesse dans l’utilisation des moyens du FIR, du fait du caractère fongible de l’essentiel des crédits au sein du fonds ; toutefois, les moyens alloués aux actions relevant de l’action 1 ne peuvent être affectés à d’autres dépenses (par exemple à des activités de soins ou à des prises en charge médico-sociales), en application du principe de fongibilité asymétrique. À l’inverse, des crédits supplémentaires peuvent être mobilisés pour être dirigés vers l’action 1.

Évolution des dépenses du FIR relevant de l’action 1 « promotion de la santé » entre 2014 et 2016

(en euros)

 

2014

2015

2016

Dont prévention et observation en santé, évaluation des programmes de santé et de la diffusion des bonnes pratiques

25 907 348

33 177 524

37 539 760

Dont éducation à la santé, prévention des maladies, des comportements à risques ainsi que des risques environnementaux et ETP

228 561 316

245 168 140

240 811 358

Dont dépistage et le diagnostic de maladies transmissibles

99 772 252

97 281 345

124 704 990

Dont gestion des situations sanitaires exceptionnelles

799 574

576 422

2 670 746

Dont prévention des traumatismes, des handicaps et de la perte d'autonomie, à l'exclusion de celles dont le financement incombe aux conseils généraux

61 587 592

63 432 728

70 363 869

Autres

0

0

3 059 534

Total

416 630 096

439 638 174

479 152 273

Source : rapport d’activité 2016 du fonds d’intervention régional – secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales, octobre 2017

Les crédits dévolus à l’action 1 « promotion de la santé, prévention des maladies, des traumatismes, du handicap et de la perte d’autonomie » connaissent d’ailleurs une évolution plutôt favorable entre 2014 et 2016, en enregistrant une hausse de 15 % (ils passent de 416 à 479 millions d’euros), mais avec des effets de périmètre difficiles à évaluer. Ce sont les crédits alloués à la prévention et l’observation sanitaire et à l’évaluation des programmes de santé qui progressent le plus fortement (+ 45 %).

● Selon les données de la DREES, l’État et les collectivités territoriales financent 59 % des dépenses de prévention institutionnelle dans leur ensemble – soit 3,4 milliards d’euros –, et, en son sein, 81 % des dépenses de prévention collective (actions sur les comportements et sur l’environnement). Toutefois, la DREES n’est pas en mesure de répartir cette part totale de 59 % entre État et collectivités territoriales.

Les financements apportés par l’État relèvent notamment du programme 204 de la mission « Santé », intitulé « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins », où figurent 486 millions d’euros de crédits en loi de finances pour 2018. Ils comprennent notamment les crédits destinés à différentes agences ([106]), avec environ 60 millions d’euros alloués à Santé publique France au titre des actions de prévention, ainsi que les moyens destinés au pilotage de la politique de santé publique.

Les financements de l’État relèvent également du programme 230 « Vie scolaire » au sein de la mission « Enseignement scolaire », avec les crédits dévolus à la médecine scolaire (506 millions d’euros pour l’action « santé scolaire », complétés par des crédits de soutien relevant du programme 214), et du programme 181 « prévention des risques », au sein de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », qui finance notamment le Plan national santé environnement (PNSE). Le programme 206 « Sécurité et qualité sanitaires de l’alimentation » au sein de la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales » finance quant à lui des actions en faveur de la qualité de l’alimentation

Les financements apportés par les collectivités locales réunissent essentiellement les moyens attribués aux services de la PMI, ainsi que des dépenses exposés par les départements en matière de promotion de la santé (voir infra).

● Le graphique ci-après donne une vision schématique de la répartition du financement des 15,1 milliards d’euros évalués par la DREES :

Répartition des dépenses de financement de la prévention par catégorie d’acteurs

Source : commission des affaires sociales, sur la base des comptes de la santé

● La part des dépenses de prévention institutionnelle dans les dépenses courantes de santé a baissé entre 2010 et 2016, passant de 2,4 % à 2,2 % : parallèlement au dynamisme de la dépense courante de santé (passée de 234 à 266 milliards d’euros entre 2010 et 2016), les dépenses de prévention institutionnelle sont restées quasiment stables.

Cette stabilité recouvre des situations contrastées : les dépenses de prévention collective sont orientées à la baisse, y compris en euros courants. Cette évolution touche les dépenses affectées aux actions sur les comportements (notamment les programmes et campagnes d’éducation et de promotion de la santé), et, dans une moindre mesure, celles portant sur l’environnement.

En revanche, les dépenses relatives à la prévention individuelle primaire et secondaire sont en augmentation (même s’il faudrait neutraliser les effets de l’inflation), du fait de la hausse des moyens alloués à la médecine du travail et à la médecine scolaire, qui vient compenser la baisse de ceux dévolus aux services de PMI.


évolution des dÉpenses de prévention institutionnelle depuis 2010

(en millions d’euros)

 

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

Prévention individuelle primaire

2 805

2 818

2 824

2 951

2 973

2 989

3 019

Vaccins

123

129

126

131

132

134

136

PMI et planning familial

688

683

673

681

673

662

658

Médecine du travail

1 512

1 536

1 527

1 599

1 619

1 632

1 645

Médecine scolaire

482

470

498

540

549

561

580

Prévention individuelle secondaire

631

610

604

667

667

660

654

Dépistage des tumeurs

173

193

184

194

179

172

171

Dépistage sida, hépatites, tuberculose…

203

160

161

198

210

205

204

Dépistage autres pathologies

25

27

26

35

36

40

40

Examens de santé

181

180

182

184

184

185

181

Bilans bucco-dentaires

49

50

51

56

58

58

58

Prévention collective

2 394

2 374

2 368

2 323

2 285

2 206

2 196

Actions sur les comportements : information, promotion et éducation à la santé

517

503

498

500

479

413

412

Campagnes en faveur des vaccinations

24

24

24

24

24

23

23

Lutte contre les IST, Santé sexuelle, contraception

28

33

31

24

21

12

6

Lutte contre l'addiction

105

101

98

93

83

77

76

Nutrition santé

27

15

17

17

18

16

16

Autres pathologies

22

19

27

31

31

28

29

Actions d'information, promotion et éducation à la santé

311

311

301

311

302

257

262

Actions sur l'environnement

1 877

1 871

1 870

1 823

1 806

1 793

1 784

Hygiène du milieu

530

538

533

542

558

575

587

Prévention des risques professionnels

249

258

254

259

246

238

239

Prévention et lutte contre la pollution

225

198

172

143

138

132

138

Surveillance, veille recherche, expertise et alerte

319

305

325

325

312

317

314

Urgences et crises

-28

26

42

49

40

25

20

Sécurité sanitaire de l'alimentation

582

546

544

505

512

506

486

Total prévention institutionnelle

5 830

5 802

5 796

5 941

5 925

5 855

5 870

Double compte avec la CSBM

144

108

102

103

107

102

110

Prévention institutionnelle consolidée

5 686

5 694

5 694

5 838

5 818

5 753

5 760

Source : comptes de la santé de 2016, DREES.

2.   Des chiffres inexacts et des dépenses non recensées, notamment pour les collectivités locales, la difficulté à appréhender les inégalités entre territoires

● Les travaux réalisés par la DREES permettent d’avoir une vision d’ensemble des grandes masses financières allouées à la prévention. Toutefois, le panorama n’est pas complet, notamment en ce qui concerne les dépenses des collectivités locales, et il comporte des données inexactes.

Les dépenses des collectivités locales sont appréhendées essentiellement par le biais des crédits destinés aux services de PMI par les départements (soit 660 millions d’euros en 2016). Toutefois, il s’avère, après recoupements avec les services de la direction générale des collectivités locales (DGCL), que les chiffres figurant dans le tableau supra, issus des comptes de la santé, ne sont pas exacts : l’écart constaté est même supérieur à 230 millions d’euros. Ainsi, le tableau établi par la DREES fait état de financements destinés à la PMI de 662 millions d’euros en 2015 et de 658 millions d’euros en 2016, alors que les montants fournis par la DGCL sont de respectivement 410 et 405 millions d’euros… Sans que l’on sache avec exactitude les raisons de cet écart, les chiffres de la DGCL sont plus représentatifs de la réalité. En tout état de cause, les moyens alloués à la PMI sont très nettement inférieurs aux chiffres figurant dans le tableau général sur les moyens alloués à la prévention.

Des écarts considérables dans les dépenses allouées à la PMI par les différents départements

Les données transmises par la DGCL retracent pour chaque département les dépenses au titre des services de PMI – qui incluent les dépenses au titre du planning familial, du fait de la nomenclature actuelle (correspondant à la fonction 41). Ces chiffres permettent de constater des écarts très importants entre les différents départements dans les efforts qu’ils consacrent à la PMI, avec par exemple 10,2 millions d’euros pour le département du Var et 1,5 million d’euros pour le département de la Haute-Savoie (voir tableau en annexe).

Certes, de tels écarts peuvent s’expliquer par les populations plus ou moins nombreuses des collectivités concernées. Néanmoins, lorsque l’on rapporte les dépenses des départements au titre des services de PMI au nombre d’enfants de moins de 4 ans qui y vivent([107]) – indicateur approximatif du nombre d’enfants se trouvant dans le champ de ces services –, les écarts apparaissent tout aussi significatifs : la « dépense moyenne », soit les crédits destinés aux services de PMI rapportés au nombre d’enfants de moins de 4 ans, réalisée par les départements peut s’échelonner entre 11 euros pour l’Eure-et-Loir et 16 euros pour l’Oise, contre 610 euros pour la Guadeloupe, 487 euros pour le Val-de-Marne et 470 euros pour la Seine-Saint-Denis – soit un rapport de 1 à 55 entre les deux extrêmes

Des départements tels que le Vaucluse, le Tarn-et-Garonne, la Gironde ou la Vendée présentent un ratio de dépenses par enfant de moins de 4 ans inférieur à 18 euros, tandis que l’Essonne, la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, le Lot, les Landes ou encore le Gard ont tous un ratio supérieur à 200 euros.  

Il serait certes réducteur d’évaluer l’efficacité des services de PMI à la seule aune des crédits qui y sont alloués. Pour autant, ces montants montrent que certains départements délaissent la PMI, tandis que d’autres engagent des moyens importants en faveur de la santé de la petite enfance.

Il est également difficile d’évaluer les financements accordés aux actions d’information, de promotion et d’éducation à la santé par ces mêmes départements. L’agrégat intitulé « actions d’information, promotion et éducation à la santé », dont les montants sont passés de 311 à 262 millions d’euros entre 2010 et 2016, est composé pour plus des deux tiers de financements provenant de départements – soit 224 millions d’euros en 2016. Dans la nomenclature comptable des départements, la sous-fonction 42, au sein de la fonction 4 consacrée à la prévention médico-sociale, concerne la prévention et l’éducation pour la santé, les campagnes d’éducation à la santé, ainsi que les actions de prophylaxie et de lutte contre les addictions. Toutefois, le montant de 224 millions d’euros est issu de données anciennes, qui ont été vieillies au cours des années par les statisticiens.

Lorsque l’évolution de données d’une année sur l’autre n’est pas connue, les services statistiques peuvent procéder à leur vieillissement, en s’appuyant sur le taux d’évolution de données comparables, mais ce processus de vieillissement, bien évidemment utile, perd de sa pertinence lorsqu’il est utilisé sur une longue période, en faisant peser un aléa fort sur l’exactitude des données au bout de plusieurs années.

● Par ailleurs, les dépenses de prévention exposées par les communes, les EPCI et les régions ne sont pas retracées précisément dans ces comptes. En effet, comme l’indiquent les services de la DGCL, les nomenclatures comptables et budgétaires retenues par le ministère de l’intérieur n’identifient pas les dépenses de prévention, ni pour les communes, ni pour les régions : ces dépenses de prévention et de promotion de la santé peuvent être disséminées dans d’autres catégories de dépenses (par exemple, pour les communes, l’hygiène et la salubrité publique, les actions spécifiques de lutte contre la pollution, etc), mais ne sont pas identifiées en tant que telles.

Pour autant, les communes, notamment, peuvent être très actives en la matière, comme vu supra. À titre d’exemple, il a été indiqué aux rapporteurs que la ville de Nantes comptait pas moins de 57 agents travaillant dans des services de santé publique et qu’elle avait créé, comme d’autres villes en France, un service de santé scolaire.

Il est possible de rassembler des informations par bribes, mais le puzzle reste incomplet : par exemple, la FNES a consolidé, à la demande des rapporteurs, les sources de financement dont bénéficient les IREPS : 63 % de leurs financements proviennent des ARS, 6 % des conseils départementaux et 4 % des conseils régionaux, ce qui permet de constater que les collectivités territoriales financent les interventions des IREPS dans une proportion non négligeable. Il ressort également des données fournies par une base recensant les différentes actions de prévention, intitulée OSCARS ([108]) (voir infra), que les communes sont le deuxième financeur, en nombre, des actions locales de prévention orientées vers la jeunesse, après les ARS.

Les moyens consacrés à la prévention sanitaire par les collectivités locales sont donc probablement nettement plus élevés que ceux recensés actuellement, sans que l’on puisse cependant disposer d’un ordre de grandeur.

● De surcroît, en l’absence de données statistiques, il n’est pas possible d’établir des comparaisons entre collectivités, et donc d’appréhender les inégalités qui peuvent exister entre territoires. L’on peut penser que de telles inégalités sont réelles, entre communes dotées de ressources importantes et communes moins favorisées, entre communes urbaines et communes rurales, entre des collectivités engagées depuis longtemps pour la santé publique et d’autres où ce n’est pas le cas.

Il serait d’ailleurs intéressant de pouvoir identifier les communes qui, confrontées à des problèmes de santé publique liés à des inégalités sociales, engagent des actions de prévention volontaristes et y allouent des moyens importants alors même qu’elles se trouvent dans une situation financière peu favorable – soit, en d’autres termes, des communes pauvres dont l’état de santé des habitants est moins bon que la moyenne, qui font le choix d’investir pour améliorer cet état de santé.

● Enfin, il faut observer qu’au-delà des dépenses des collectivités territoriales, certaines dépenses de prévention ne sont pas comptabilisées non plus dans le chiffrage de la DREES. Tel est par exemple le cas de financements dispersés dans les budgets des différents ministères, comme les crédits alloués par le ministère de l’agriculture au programme national pour l’alimentation (PNA), par exemple pour des projets alimentaires territoriaux, d’autres appels à projets (5 millions d’euros sur trois ans) et les enveloppes annuelles aux directions régionales de l’alimentation, de l’agriculture et de la forêt (2 millions par an) ([109]), ou encore les moyens dévolus par le ministère des sports aux plans sport santé bien-être et les subventions du Fonds de développement de la vie associative (FDVA) et du Fonds de coopération de la jeunesse et de l’éducation populaire (FONJEP) dévolues aux projets de santé.

Autre exemple, les dépenses consacrées par les mutuelles à des actions de prévention – dont la plus connue est « Bouge ! Une priorité pour ta santé » – représentent chaque année environ 14 millions d’euros, selon les informations transmises par la Mutualité française, mais elles ne sont pas intégrées non plus dans les dépenses institutionnelles.

Il en va de même pour les entreprises, notamment dans le secteur agroalimentaire, qui financent par le biais de leurs fondations (l’Institut Danone, la Fondation Louis Bonduelle, la Fondation Nestlé France, la Fondation Carrefour ou encore la Fondation Bel), des actions de promotion de la santé, qui concernent généralement la nutrition. Si toutes les fondations n’ont pas répondu aux demandes d’information des rapporteurs, la Fondation Nestlé France a indiqué consacrer chaque année de l’ordre d’un million d’euros à des actions de nutrition, tandis que la Fondation Louis Bonduelle évalue ses financements annuels à environ 500 000 euros. L’entreprise Bel estime à 160 000 euros le montant de ses financements axés vers les actions en faveur de la prévention santé pour la jeunesse en 2017 ([110])

3.   La complexité des modes de financement de la prévention, les questions de périmètre

● Somme toute, de nombreux acteurs assurent le financement d’actions de prévention, parfois conjointement, par exemple dans le cadre d’appels à projets, sans que l’on puisse recenser de façon exhaustive les moyens alloués, ni avoir une vision globale claire, et de ce fait, un pilotage d’ensemble.

Il est révélateur que deux rapports consacrés à l’évaluation de plans de prévention, l’un sur le plan national nutrition santé ([111]), l’autre sur le plan sport santé bien-être ([112]), dressent à peu près le même constat : il est difficile de retracer les crédits totaux affectés à ces plans de façon fiable, qu’ils soient nationaux ou locaux. Le rapport sur le plan sport santé bien-être indique ainsi que « compte tenu du caractère dispersé et hétérogène des initiatives locales et d’un suivi national insuffisant, la mission a rencontré de nombreuses difficultés à faire un état des lieux exhaustif des actions menées et à consolider les financements associés ».

Plusieurs personnes auditionnées par les rapporteurs, comme M. Emmanuel Rusch, président du bureau de la Société française de santé publique, M. Jean-Pierre Couteron, président de Fédération Addiction ou encore M. François Baudier, président de la FNES, ont par ailleurs souligné que les financements alloués aux associations et autres intervenants de « première ligne » n’étaient pas pérennes, et ne permettaient pas d’inscrire leurs actions de prévention dans le temps. Le financement par des « appels à projets » ponctuels, notamment pour les subventions versées par les ARS, ne donne pas de visibilité dans le temps aux intervenants, tout en mettant les acteurs en concurrence, ce qui n’est pas propice à des interventions coordonnées.

● On peut également constater une complexité certaine dans la prise en charge de certaines dépenses de prévention, qui ne répond pas toujours à une logique d’efficacité, mais semble résulter de la sédimentation de différents dispositifs. À titre d’exemple, les vaccins peuvent être pris en charge par l’assurance maladie dans les conditions de droit commun, avec un taux de remboursement oscillant entre 60 % et 70 %, ou bien pris en charge en totalité par le FNPEIS pour certains vaccins, ou encore être gratuits lorsqu’ils sont réalisés dans les services de PMI… ce qui n’obéit à aucune considération particulière de santé publique. L’on peut constater une problématique similaire pour le financement des dépistages.

● Enfin, on observera qu’il n’est pas aisé d’identifier les moyens dévolus à la prévention primaire, par opposition à la prévention secondaire ou tertiaire, ni ceux fléchés vers la promotion de la santé. Tout dépend d’ailleurs de la définition que l’on donne de la prévention primaire, dont les contours sont sujets à discussion. En tout état de cause, la nomenclature retenue par la DREES apparaît avoir une acception large de la prévention primaire, puisque sont incluses dans la prévention individuelle primaire la médecine du travail ainsi que la médecine scolaire, alors même qu’une partie de ses activités correspond à de la prévention secondaire (dépistages).

Il n’est a fortiori pas possible d’isoler la part des dépenses de prévention bénéficiant aux enfants et aux jeunes, même si certaines dépenses – PMI, médecine scolaire – sont spécifiquement orientées vers cette population.

● De façon incidente, on peut s’interroger sur la nature préventive de certaines des dépenses recensées par la DREES, notamment les médicaments. Si l’on comprend la logique de cette classification – puisque ces médicaments visent à prévenir la survenance des maladies –, leur part dans les dépenses de prévention, proche de 30 % (4,2 milliards d’euros), ne laisse pas d’interroger, d’autant qu’ils incluent des médicaments – par exemple des contraceptifs hormonaux (pour 350 millions d’euros) – dont la visée préventive peut être débattue. Pour filer la métaphore mythologique, Panacée vient en quelque sorte empiéter sur le terrain d’Hygie…

B.   Des financements qui ne sont pas à la hauteur des enjeux

1.   Les dépenses consacrées à la prévention sont inférieures à celles des autres États de l’OCDE…

● Au risque de reprendre une antienne rebattue, il faut rappeler que les dépenses allouées à la prévention en France sont nettement plus faibles que dans la plupart des pays de l’OCDE.

La nomenclature retenue pour recenser les dépenses de prévention, donc apprécier l’effort de chaque pays, n’est pas neutre. Ainsi, les dépenses de prévention prises en compte dans le cadre des travaux de l’OCDE n’incluent pas les dépenses relevant de la CSBM ; une partie de la prévention collective sur l’environnement comptabilisée par la DREES est également exclue, notamment les moyens consacrés à l’hygiène du milieu, la sécurité sanitaire de l’alimentation et la lutte contre la pollution. Les dépenses de prévention prises en compte sont donc évaluées à 4,6 milliards d’euros.

Pour autant, le périmètre retenu est a priori similaire et donc comparable pour les différents États de l’OCDE. À cet égard, la France ne se trouve pas dans une position favorable, lorsqu’on la compare à ses principaux partenaires : la part des dépenses de prévention au sein des dépenses de santé est de l’ordre de 1,8 % en France en 2016, contre 6 % au Canada, par exemple, ou 4 % en Italie.

Part des dépenses de prévention au sein des dépenses courantes de santé dans les pays de l’OCDE, en %

Source : statistiques de l’OCDE sur la santé.

La situation n’est pas beaucoup plus favorable lorsqu’on rapporte les dépenses de prévention au nombre d’habitants, en prix courants : alors que le Canada, les États-Unis, le Royaume-Uni et les Pays-Bas font figure de bons élèves, la France occupe à nouveau une position médiocre dans le classement :

 

Montant des dépenses de prévention par habitant, en prix courants et en parité de pouvoir d’achat courante, dans les pays de l’OCDE, en dollars

Source : statistiques de l’OCDE sur la santé.

2.   … Alors que les dépenses de prévention offrent un retour sur investissement élevé et que les comportements à risque représentent des enjeux financiers conséquents

● La « rentabilité » des dépenses de prévention est scientifiquement étayée ; différents travaux mettent en évidence le retour sur investissement élevé qu’offrent les interventions en santé publique, comme l’a rappelé Mme Linda Cambon, professeure à l’EHESP. Un article publié en mars 2017 souligne ainsi que, pour un euro investi dans une intervention en santé publique, ce sont 14 euros en moyenne qui sont économisés par notre système social et sanitaire ([113]). Le retour sur investissement apparaît variable selon la nature des interventions : les interventions législatives offrent un fort retour sur investissement (par exemple le vote d’une taxe), ce qui résulte aussi de leur faible coût, tandis que ce retour est plus ou moins élevé selon qu’il s’agit de promotion ou de protection de la santé, d’actions portant sur certaines populations ciblées, d’interventions nationales ou locales, etc.  

Pour autant, et cela a été souligné à plusieurs reprises par les personnes auditionnées, les dépenses de prévention sont souvent les premières touchées par les coupes budgétaires, parce que celles-ci y sont plus faciles et qu’elles « se voient moins ». Réduire les moyens alloués au fonctionnement quotidien d’un hôpital est plus difficile que supprimer des crédits finançant des actions de prévention, d’autant plus que les effets d’une telle suppression ne se voient pas dans l’immédiat.

Comme le souligne l’article précité, les bénéfices retirés d’une politique de prévention sont considérables et certains pour la population dans son ensemble. En revanche, ils sont considérés comme limités et incertains par les votants individuels…

● La relative modicité des ressources allouées à la prévention en France apparaît d’autant plus frappante lorsqu’on la met en regard des enjeux financiers des comportements à risque objets des politiques de prévention. Ainsi, l’Office français des drogues et toxicomanies (OFDT) a publié en septembre 2015 une étude évaluant le « coût social » annuel en France de l’alcool, ainsi que celui du tabac et des drogues illicites. Le coût social inclut le coût des vies perdues et de la perte de qualité de vie, les pertes de production ainsi que le coût pour les finances publiques (soit le coût des soins et les dépenses de répression et de prévention, minoré par la taxation des produits et les économies sur les dépenses de retraites). Ce coût social est évalué à environ 118 milliards d’euros pour l’alcool et à 122 milliards d’euros pour le tabac, tandis que celui des drogues illicites représente près de 9 milliards d’euros ; chaque année, l’État doit payer respectivement pour l’alcool, le tabac et les drogues illicites, 3 milliards, 13,8 milliards et 2,4 milliards… ([114])  

Le coût social associé à la surcharge pondérale et à l’obésité est quant à lui estimé à 20 milliards d’euros par an, selon une étude récente réalisée par la direction générale du Trésor ([115]).

Ce montant de 20 milliards d’euros peut être mis en regard avec les montants précités sur les moyens dévolus à la politique de nutrition : ils ont reculé de façon constante au cours des dernières années, pour passer de 8,3 à 3,6 millions d’euros entre 2011 et 2015…

évolution des dépenses de Santé Publique France pour la Nutrition entre 2011 et 2015

(en millions d’euros)

VENTILATION

2011

2012

2013

2014

2015

communication

5,7

6,47

4,8

4,65

2

édition/diffusion

1,13

1,46

0,48

1,07

0,98

études

0,32

0,5

0,37

0,1

0,3

divers

1,15

1,17

0,55

0,48

0,35

TOTAL

8,3

9,6

6,2

6,3

3,63

Source : IGAS.

 

De façon générale, les moyens dévolus à Santé publique France pour développer des actions de prévention et de promotion de la santé sont restreints : celles-ci mobilisent environ 70 personnes, sur un effectif total de l’agence de l’ordre de 580 ; pour mémoire, dans le périmètre de l’actuelle agence Santé publique France, les effectifs ont été réduits de 76 ETP depuis 2010.

L’on peut d’ailleurs penser que le montant des dépenses de Santé publique France en matière de nutrition n’est pas nécessairement beaucoup plus important que les moyens déployés par les grandes entreprises agroalimentaires pour des actions de communication et de promotion de la santé, notamment en matière de nutrition, dans le cadre de leurs fondations, au regard des chiffres évoqués supra (1 million d’euros pour la fondation Nestlé France, 0,5 million pour la fondation Louis Bonduelle)

Il peut d’ailleurs être intéressant de favoriser ce système de financement des actions de prévention par des fondations, mais il convient de veiller à ce que celles-ci ne soient pas guidées par le souci de promouvoir les produits de l’entreprise concernée. Afin de garantir leur cohérence avec les orientations des politiques de santé publique, il serait utile d’instaurer un dispositif de labellisation de ces interventions de prévention, par exemple par un organisme tel que Santé publique France.

S’agissant du rôle des acteurs privés dans la politique de prévention, l’on peut observer que l’Observatoire national de l’activité physique et de la sédentarité (ONAPS) installé en 2015 par le ministère des sports, qui est chargé de mesurer l’impact de la pratique physique et de la sédentarité sur la santé, est financé à 70 % par la fondation Coca-Cola USA au titre de ses actions de mécénat, ce qui peut soulever quelques interrogations. 

 

 

   troisième partie

les actions menées : fondées sur des bases de données multiples, des actions de prévention dispersées qui ne sont pas nécessairement évaluées

I.   Des données nombreuses, difficiles à exploiter

 DONNEES COLLECTIVES

Les données de santé constituent un enjeu essentiel en matière de prévention, à double titre : elles sont indispensables pour définir scientifiquement une politique de prévention, sur la base d’informations objectives et complètes, déclinées sur différentes échelles territoriales ; elles permettent d’évaluer l’efficacité des actions de prévention, et plus largement de la politique de santé publique, en mesurant l’évolution des différents indicateurs au cours du temps, avant et après les actions.

 SUIVI INDIVIDUEL DES JEUNES

Par ailleurs, ces données peuvent être abordées du point de vue individuel, en sus de l’approche épidémiologique. Il est très utile de disposer de données de santé chaînées pour un même individu, pour suivre son état de santé et disposer de son historique médical, dès l’enfance, afin de l’inscrire dans un parcours de soins cohérent dans le temps.

À coup sûr, les données et indicateurs de santé ne manquent pas, et nombreux sont les acteurs qui produisent des données et alimentent des bases, mais ils le font souvent de façon autonome, sans coordination d’ensemble, dans des formats qui ne sont pas nécessairement harmonisés ou compatibles. En miroir de la multiplicité des acteurs et des sources de financement, les données de santé sont nombreuses et morcelées, parfois parcellaires. Elles ne sont pas toujours disponibles au niveau territorial.  

A.   La multiplicité de données de santé et de leurs sources

● La première base de données de santé est le Système national de données de santé (SNDS). Créé par la loi de modernisation de notre système de santé de 2016 ([116]), le SNDS réunit :

– le SNIIRAM (Système national d’information inter régimes de l’assurance maladie), qui rassemble les informations issues des remboursements effectués par les régimes d’assurance maladie pour les soins du secteur libéral ([117]) ; cette base a été créée en 1999 et les données ont été collectées et organisées à partir de 2002. De ces données sur les remboursements (médicaments délivrés, consultations et examens, etc), peuvent être excipées des informations d’ordre médical, par exemple sur la prévalence de l’hypercholestérolémie (par le recensement des personnes traitées par médicament hypolipémiant), de la maladie d’Alzheimer ou du diabète (selon le même principe, à partir des traitements suivis par les patients), mais aussi le taux de consultation annuelle d’un dentiste, la couverture vaccinale ou le dépistage des cancers ;

– les données des hôpitaux et autres établissements de santé, qui relèvent du programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) lancé en 1996 ; les données sont collectées par l’agence technique d’information sur l’hospitalisation (ATIH) ([118]) et peuvent fournir des informations sur la répartition des séjours hospitaliers selon la pathologie traitée, sur l’âge et le sexe des patients, sur des hospitalisations liées à des IVG ou des complications survenues lors d’une grossesse, sur la prématurité des nouveau-nés et sur leur répartition selon le poids ;

– la base de données sur les causes médicales de décès (BCMD), gérée par le CepiDc (centre d’épidémiologie sur les causes médicales de décès) de l’Inserm ; elle rassemble les données figurant dans les certificats de décès, notamment les maladies ou affections morbides à l’origine du décès ainsi que les autres facteurs y ayant contribué, et permet de déterminer les taux de mortalité prématurée et évitable, le nombre de décès liés à l’alcool, le taux de mortalité par cancer des enfants et des adultes, la mortalité maternelle et périnatale, etc.

Le SNDS a vocation à intégrer sous peu deux bases supplémentaires : les données médico-sociales des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) et un échantillon représentatif des données de remboursement par bénéficiaire transmis par les mutuelles.

● S’ils ne disposent pas d’une véritable base de données en tant que telle, les services de PMI centralisent un grand nombre de données sur la petite enfance, par le biais des certificats du huitième jour, du neuvième mois et du vingt-quatrième mois, établis à l’occasion des examens obligatoires, qui leur sont adressés par les médecins – ou qu’ils réalisent eux-mêmes, le cas échéant ([119]), ainsi que par l’intermédiaire des bilans de santé des enfants de 3-4 ans, notamment en école maternelle.

De même que les services de PMI, les services de médecine scolaire disposent d’un grand nombre d’informations sur la santé des élèves, qui sont notamment réunies à l’occasion des visites des sixième et douzième années. Sont recueillies lors de ces visites des informations sur le poids, les vaccinations, la santé bucco-dentaire, les troubles auditifs et de la vue, etc…

● Par ailleurs, de nombreuses enquêtes sont réalisées à intervalles réguliers sur certains aspects de la santé des populations, particulièrement des enfants et adolescents, et peuvent fournir des données sur différents déterminants de santé :

– l’enquête nationale périnatale, réalisée à peu près tous les cinq ans (1995, 1998, 2003, 2010 et 2016) : elle porte sur l’état de santé des femmes enceintes et des nouveau-nés, ainsi que sur les facteurs de risque périnatal. Elle est issue des travaux de Santé publique France, de la DGS et de la DGOS ainsi que de l’Inserm et de la DREES ; elle permet de disposer par exemple de statistiques sur la consommation de tabac et d’alcool par les femmes enceintes, sur la prématurité et sur le recours à l’allaitement ;

– les enquêtes nationales de santé en milieu scolaire, réalisées par la DREES, en coordination avec la DGESCO et la médecine scolaire, auprès des élèves de grande section, de CM2 et de troisième : elles ont lieu tous les deux ans, depuis 1999, avec un roulement sur les trois niveaux scolaires, soit tous les six ans pour un niveau scolaire donné. L’enquête réalisée auprès des enfants de grande section est adossée à la visite médicale des six ans et elle porte sur un échantillon d’environ 30 000 enfants, tandis qu’un bilan de santé spécifique est mis en place auprès d’environ 10 000 enfants de CM2 ou de troisième, afin de répondre aux besoins de l’enquête (sur les conditions de vie, le poids et la taille, les troubles de la vue et de l’audition, les habitudes de vie, etc) ;

– l’enquête internationale Health Behaviour in School-aged Children (HBSC), réalisée tous les quatre ans sous l’égide de l’OMS, et à laquelle la France participe depuis 1994 : supervisée par la DGS et Santé publique France, cette enquête est menée auprès d’un échantillon de 10 000 jeunes de 11 à 15 ans (en 2014) : elle porte sur les habitudes alimentaires, les activités physiques, l’image de soi, le poids, l’usage de produits psychoactifs, les relations amoureuses et sexuelles, le harcèlement… ;

– l’enquête internationale European School Project on Alcohol and other Drugs (ESPAD), réalisée tous les quatre ans depuis 1995 dans les lycées européens : coordonnée par l’Observatoire français des drogues et toxicomanies, avec l’appui de la DGESCO, l’enquête ESPAD a concerné en 2015 un échantillon de 10 000 jeunes de la seconde à la terminale et porte notamment sur les usages du tabac, de l’alcool, des tranquillisants et du cannabis ;

– l’enquête sur la santé et les consommations lors de l’appel de préparation à la défense (Escapad) : réalisée par l’OFDT tous les trois ans auprès de jeunes de 17 ans lors de la journée défense et citoyenneté (JDC), elle permet de disposer de données sur la consommation de tabac, d’alcool et de cannabis des jeunes. Plus de 40 000 jeunes ont participé à cette enquête en 2017 ;

– l’enquête Santé et protection sociale (ESPS) portant sur la santé, l’accès aux soins et la couverture maladie en France : depuis 1988, elle recueille tous les deux ans des données sur l’état de santé, la couverture maladie et le recours aux soins d’un échantillon représentatif de 8 000 ménages, soit 22 000 personnes. Cette enquête fournit par exemple des informations sur le renoncement aux soins, la pratique d’une activité sportive, la consommation de fruits et légumes, mais aussi les atteintes de la vision et de l’audition ;

– les enquêtes Obépi sur l’obésité réalisées sur l’INSERM tous les deux ans depuis 1997 – la dernière enquête disponible datant de 2012 ;

– différentes enquêtes plus ponctuelles, telles l’enquête de santé Esteban 2014-2016 de Santé publique France sur l’environnement, la biosurveillance, l’activité physique et la nutrition, les enquêtes INCA ([120]) sur les habitudes et consommations alimentaires des Français, établies par l’ANSES, ou encore les enquêtes Escal, Baromètre santé DOM (BSDom) et Kannari sur la santé et la nutrition en outre-mer.

● Enfin, des projets spécifiques permettent également d’obtenir des données de santé publique : tel est le cas des travaux portant sur la cohorte Constances (pour les adultes de plus de 18 ans), résultant d’un projet de la CNAM et de l’Inserm engagé en 2012. Constituée d’un échantillon représentatif de 200 000 adultes de 18 à 69 ans, la cohorte Constances vise à étudier les déterminants professionnels et sociaux de santé. Elle a notamment permis d’établir des données sur la prévalence de l’obésité par région.

Il en va de même pour les travaux conduits sur la cohorte Elfe (étude longitudinale française depuis l’enfance) sous l’égide de l’Institut national d’études démographiques (INED), qui consiste en un suivi dans le temps d’enfants nés en 2011 – 18 000 enfants ont été initialement inclus dans la cohorte – pour mieux connaître les différents facteurs (environnement, entourage familial, conditions de vie…) qui peuvent influer sur le développement physique et psychologique de l’enfant et sur sa santé. Pour l’heure, il est encore tôt pour en retirer des données de santé publique, mais elle a donné lieu à une première étude sur l’allaitement.

Enfin, l’on peut également citer le projet EDP Santé, conduit par la DREES et l’INSEE, qui vise à apparier les données du SNDS avec les données de suivi de l’échantillon démographique permanent (EDP) qui, produit par l’INSEE, comporte des informations familiales, sociales et fiscales sur 3,6 millions d’individus : ce projet devrait apporter des éclairages sur les inégalités sociales de santé.

Le schéma ci-après présente les différentes sources de données de santé :

données

Source : commission des affaires sociales.

En jaune : les données de santé concernant la jeunesse.

En vert : les données de santé concernant l’ensemble de la population.

● Au total, ces nombreuses données sont recueillies et exploitées par une multitude acteurs, qu’il s’agisse de Santé publique France, de la DREES, de la PMI, de l’assurance maladie, des ORS, de la DGS, de l’OFDT, de l’ANSES, ou encore de l’Inserm, qui ne sont pas nécessairement coordonnés et peuvent couvrir des champs similaires. À titre d’exemple, les travaux de l’ANSES et de Santé publique France dans le cadre des études Esteban et Inca pourraient être rationalisés en réalisant une seule étude de surveillance épidémiologique sur l’alimentation.

Par ailleurs, les enquêtes énumérées supra ne sont pas réalisées tous les ans, mais tous les deux, trois, quatre voire cinq ans selon les cas, ce qui ne permet pas de disposer d’informations actualisées dans certains domaines.

L’ouvrage précité « État de santé de la population en France », publié depuis 2007 et coordonné par Santé publique France et la DREES pour l’édition de 2017, s’appuie sur ces différents indicateurs et données.

B.   Des données de santé portant sur la jeunesse parcellaires, difficilement utilisables et exploitées de façon variable

Les deux principaux acteurs qui recueillent des données de santé sur les enfants et les adolescents sont les services de PMI et la médecine scolaire ; pour autant, le taux de réalisation des visites et dépistages par ces services s’avère très variable, tandis que le recueil et le traitement des données se font généralement de façon artisanale et peu optimisée.

De ce fait, les données recueillies et susceptibles d’être utilisées pour le suivi épidémiologique de la santé des jeunes ne sont pas exhaustives et sont difficilement exploitables ; on ne peut pas les mettre en lien avec les autres données disponibles par ailleurs (par exemple dans le SNDS), ni effectuer un chaînage des informations pour les enfants d’abord suivis par la PMI, puis par la médecine scolaire.

1.   Des données partielles, tributaires du taux de réalisation des bilans et visites, et l’absence d’un bilan de santé à l’adolescence

● Comme vu supra, les difficultés que rencontrent la médecine scolaire et la PMI se traduisent par une diminution du taux de réalisation des visites et bilans médicaux. Le taux pour le bilan médical des six ans s’est limité à 47,5 % pour la rentrée 2015-2016, avec de très grandes disparités entre les territoires, tandis que le taux du dépistage infirmier à 12 ans est de l’ordre de 30 %.

Selon les chiffres figurant dans l’étude précitée de la DREES sur la PMI, 72 % des enfants de 3-4 ans ont bénéficié d’un bilan de santé en 2012 (75 % ont eu un dépistage visuel, 69 % un dépistage auditif et 60 % un dépistage des troubles du langage), mais l’on ne connaît pas l’évolution de ce taux au cours des dernières années.

Une part importante des certificats de santé du 8ème jour est recueillie par les services de PMI – le taux de retour étant de l’ordre de 80 % à 90 %, selon les données disponibles ([121]). En revanche, il n’en est pas de même pour les certificats du 9ème et du 24ème mois. Selon un rapport publié par la DREES en 2017 ([122]), en 2015, le taux de couverture des certificats de santé du 9ème mois et du 24ème mois ([123])  était estimé à respectivement 40 % et 30 % des enfants.

Les données de santé recueillies ne sont donc pas exhaustives. Elles ne sont pas non plus nécessairement représentatives d’un point de vue statistique, puisque la réalisation ou non des visites dépendent des ressources en personnel des services compétents – PMI et médecine scolaire –, et non des profils des établissements.

● Enfin, si des visites médicales sont organisées à l’âge de six ans, puis de 12 ans, rien n’est prévu à 15 ou 16 ans, soit à la fin du collège : il s’agit du passage à l’adolescence, période de profonds changements physiques et de vulnérabilité à l’égard des conduites à risques (tabagisme, substances psychoactives, dépressions, etc). Il serait utile d’introduire une visite médicale à cet âge.

2.   Des modalités de recueil des données datées, qui les rendent difficiles à utiliser et à chaîner

● Les modalités de recueil des données, tant par la PMI que par la médecine scolaire, apparaissent quelque peu archaïques : des questionnaires papier sont encore utilisés, notamment dans le cadre des enquêtes nationales de santé en milieu scolaire conduites par la DREES. L’informatisation est loin d’être la règle, la situation varie selon les départements et les rectorats. Des dispositifs spécifiques ont été mis en place dans certains territoires : à titre d’exemple, dans la région Nouvelle Aquitaine, l’ARS a financé un dispositif permettant aux infirmiers scolaires de saisir informatiquement les données issues des bilans de santé à six ans.

● Une application informatique, intitulée Esculape, est en cours de déploiement au bénéfice des médecins scolaires afin de permettre une dématérialisation du dossier médical des élèves ([124]) : doivent figurer dans ce dossier les bilans médicaux en grande section, les examens à la demande, en protection de l’enfance, les projets d’accueil personnalisé, etc ([125]). L’application Esculape doit permettre de recueillir des données de façon informatisée et donc les rendre utilisables à des fins statistiques, dans tous les territoires, de façon uniforme. Elle a vocation à être mise en relation avec l’application Lien pour les infirmiers scolaires et l’application Ametisse pour les assistants de services sociaux, au sein du projet Diapason, qui devrait être opérationnel à la rentrée 2019. 

L’installation de l’application Esculape intervient pour le moins tardivement, alors même que certaines ARS ont déjà investi dans l’informatisation de la médecine scolaire. On peut d’ailleurs s’interroger sur l’articulation entre l’application Esculape et le dossier médical partagé des enfants, à venir.   

En tout état de cause, il paraît logique et utile que cette application soit accessible aux médecins de PMI, afin d’assurer la continuité du suivi médical des enfants, avant et après 6 ans, et aux services de la DREES, pour la réalisation des enquêtes et études.

En effet, pour l’heure, la transmission des dossiers de la PMI à la médecine scolaire ne semble ni systématique ni suivre un processus très clair. Il a été indiqué aux rapporteurs, en réponse à une question sur les conditions de transmission des dossiers entre ces deux services, que « la PMI et la santé scolaire travaillent en partenariat ; néanmoins, le maillage est plus ou moins développé sur chaque territoire. Dans la mesure du possible, les services de PMI transmettent aux personnels de santé de l’éducation nationale les résultats des bilans de santé effectués lors de la troisième ou de la quatrième année de l’enfant ».

Disposer d’un accès à Esculape éviterait à la DREES de réaliser ses enquêtes sur la base de formulaires papier, et cela lui donnerait surtout accès à une base de données portant sur tous les élèves, et non seulement à un échantillon représentatif : la DREES pourrait travailler de façon plus ciblée et plus précise, en identifiant les problématiques spécifiques à certaines communes, voire à certains quartiers. Elle souhaiterait également pouvoir intégrer au dispositif un module de questions sur les habitudes de vie, pour disposer du même niveau d’information que dans le cadre des enquêtes actuelles.

Pour autant, si l’accès à Esculape de la DREES et des médecins de PMI est à l’étude, il ne semble nullement acquis, du moins à court terme, pour des raisons de compatibilité de systèmes d’information, mais aussi de protection des données personnelles.

● La problématique est similaire pour la visite médicale des 3-4 ans relevant des PMI : il n’y a pas d’informatisation systématique, et de surcroît, le format de ces bilans varie selon les départements, qui fonctionnent chacun de façon autonome, sans coordination. Comme le souligne un rapport de la FNORS ([126]), « ces bilans de santé n’ont pas fait l’objet d’une fiche-type nationale qui permettrait de collecter de manière identique les informations. La mise en place du recueil est à l’initiative des départements, et la définition de chaque indicateur leur est propre, rendant difficilement comparables les données entre elles, à l’exception des indicateurs explicites tels que l’indice de masse corporelle (IMC). »

En revanche, une fiche type a été établie pour les certificats de santé du 8ème jour, du 9ème mois et du 24ème mois : un programme de dématérialisation de ces certificats est engagé par la DGS, avec la mise en place d’une plateforme nationale de routage des certificats. Néanmoins, la diversité des logiciels utilisés pour restituer les données, qui dépend des moyens de la PMI ou du prestataire qu’elle a choisi, peut susciter des difficultés, avec des incompatibilités entre les différents formats de fichiers choisis.

3.   Une exploitation inégale des données

En l’absence d’un système d’informatisation généralisé et uniforme des données recueillies par la PMI et la médecine scolaire, celles-ci ne font pas l’objet de remontées systématiques au niveau national et ne sont pas suffisamment exploitées au niveau local, comme le constate le rapport précité de la FNORS. Il est difficile de décliner les données de santé et indicateurs au niveau territorial, notamment à l’échelle infra-régionale, et a fortiori d’évaluer leur évolution dans le temps.

Au-delà des enquêtes nationales réalisées par la DREES sur la base des visites scolaires et des certificats de santé, les données peuvent être analysées et exploitées, généralement par les ORS ([127]). Mais il s’agit d’exploitations ponctuelles, tributaires des commandes passées aux ORS (généralement par les ARS), réalisées de façon hétérogène, et il n’est pas possible de réaliser des comparaisons entre territoires.

Certes, les données collectées par la médecine scolaire et la PMI sont complétées par les différentes enquêtes auprès des jeunes (HBSC, ESPAD, Escapad, etc), mais ces dernières sont fondées sur des échantillons, plus ou moins vastes, et la logique ainsi que la finalité ne sont pas les mêmes.

Au total, en dépit du grand nombre de données recueillies et des enquêtes menées, la connaissance fine de l’état de santé des jeunes, territoire par territoire, n’est pas assurée.

C.   Des données souvent recueillies au niveau national, qui ne sont pas nécessairement disponibles au niveau territorial

Les différences d’exploitation des données issues des PMI et de la médecine scolaire selon les territoires renvoient à une problématique plus générale pour les données de santé, à savoir la difficulté à décliner les indicateurs et données à l’échelle territoriale, de façon uniforme et systématique.  

● Les indicateurs de santé publique liés aux comportements, tels que la prévalence du surpoids et de l’obésité, la consommation d’alcool, le tabagisme, l’activité physique, la santé bucco-dentaire, chez les jeunes comme chez les adultes, ne sont disponibles qu’au niveau national ; ils sont issus d’enquêtes sur des échantillons de population, parmi celles citées supra, mais ils ne peuvent être obtenus aux différentes échelles territoriales, pour pouvoir définir, puis évaluer les actions de prévention adaptées, que ce soit au niveau régional, départemental ou local.  

Par ailleurs, les échantillons ne comportent pas systématiquement de données sur tous les territoires, et notamment sur les outre-mer, comme vu supra.

● Les informations figurant dans le SNDS peuvent en revanche être synthétisées aux différents niveaux territoriaux – la commune de rattachement des personnes dont les remboursements sont retracés figure dans le SNIIRAM et les certificats de décès sont rattachés à un lieu. Cela permet donc de disposer d’informations sur la prévalence du diabète ou du cholestérol dans tel ou tel département, par exemple.

Néanmoins, les données collectées par le SNIIRAM sont liées aux actes médicaux (soins, consultations), ce qui induit un biais, à savoir que ne sont recensées que les pathologies prises en charge : cela exclut par exemple les diabètes non détectés, ou encore les malades d’Alzheimer non traitées (soit par défaut de diagnostic, soit par intolérance aux effets des médicaments).

Par ailleurs, les données du SNDS, qui sont accessibles de façon permanente à des acteurs tels que la DGS, Santé publique France, l’assurance maladie, l’Inserm, ainsi qu’aux ARS, ne peuvent être utilisées par les collectivités locales que dans le cadre d’un appel à projet – sachant que les règles afférentes s’appliquent depuis peu de temps, et qu’en tout état de cause, l’utilisation et le traitement des données du SNDS impliquer de disposer de ressources humaines suffisantes. Sur les 478 demandes d’accès au SNDS reçues par l’Institut national des données de santé (INDS), deux seulement provenaient de collectivités locales et 25 d’associations.

Le dispositif actuel ne permet pas aux collectivités territoriales d’avoir un accès simple à des indicateurs de santé publique portant sur leurs populations. Il a d’ailleurs été indiqué aux rapporteurs que les communes devaient payer pour avoir accès à des données de santé collectées et analysées par les ORS, susceptibles d’être utilisées pour réaliser des actions de prévention. Cela s’explique par le mode de financement des ORS – compte tenu de leur statut associatif, ils sont tributaires des financements apportés par les ARS et autres collectivités pour réaliser des études – mais ce n’est guère satisfaisant en termes d’allocation des ressources publiques. 

Enfin, les données figurant dans le SNDS ne donnent pas véritablement d’informations sur les déterminants de santé, puisqu’elles sont axées sur les pathologies et les soins auxquels elles donnent lieu. L’interprétation des pathologies permet bien sûr d’avoir des indications sur les comportements et déterminants de santé, mais de façon décalée dans le temps, puisqu’elles surviennent parfois plusieurs décennies après les comportements défavorables. 

● D’autres pays, tels que la Finlande, disposent de registres locaux et nationaux de santé, et procèdent à des enquêtes régulières, fondées sur des indicateurs de santé-clés ([128]). La Finlande dispose d’ailleurs d’une expérience de plus de 50 ans dans le recueil de données de santé, ce qui explique aussi son avance. Le Royaume-Uni a développé un outil spécifique, le portail NICE (National Institute for health and Care Excellence), qui permet d’accéder à un grand nombre de données sur les comportements de santé (tabagisme, alcool, activité physique) sur un territoire donné, et d’évaluer les effets de différentes interventions en prévention sur ce territoire : en quelques clics, un maire peut par exemple disposer d’une évaluation du nombre de fumeurs dans sa commune, et estimer l’efficacité et le coût de telle ou telle action de prévention (campagne téléphonique, distribution de documents, substituts nicotiniques).

Les données de santé en Finlande

En Finlande, un système complet de remontée d’informations sur la santé de la population a été mis en place depuis une cinquantaine d’années, par le biais de registres nationaux, de registres locaux et d’enquêtes régulières ([129]) .

Les registres nationaux de santé, qui sont informatisés, comportent des informations sur la mortalité et la morbidité, l’utilisation des services de soins et les données sur les dépenses de soins ; ils sont mis à jour chaque année par les instituts et agences nationaux (Institut national de la santé et de la protection sociale – THL –, Institut finlandais de la médecine du travail – FIOH –, Agence finlandaise des médicaments – Fimea, etc). Chaque personne possède un numéro associé, ce qui permet de mener des recherches à travers les différents registres : d’autres registres administratifs, sur le logement et les revenus par exemple, peuvent être croisés avec les registres de santé.

Les informations issues des registres nationaux sont complétées par les registres locaux et des enquêtes nationales. La loi oblige ainsi les municipalités à transmettre des rapports de santé (welfare reports) et, depuis 2011, à recourir aux évaluations d’impact sur la santé (Health Impact Assessment, HIA). En 2015, un tiers des municipalités remplissaient leurs obligations au regard des HIA. Par ailleurs, deux types d’enquêtes sont menées régulièrement sur tout le territoire : les Health Examination Surveys (HESs), qui décrivent l’état de santé de la population, et les Health Interview Surveys (HISs), qui retranscrivent les comportements, états de santé, besoins, utilisations des services de santé et opinions exprimées par les individus.

L’approche de la France n’est probablement pas la même que celle des pays anglo-saxons à l’égard de la collecte et de l’exploitation d’informations personnelles, ce qui s’explique pour partie par des raisons culturelles et historiques. Pour autant, il apparaît indispensable de coordonner davantage les multiples producteurs de données, d’harmoniser leurs pratiques et de moderniser l’exploitation de données disponibles, notamment pour les enfants et adolescents. 

II.   Des interventions de prévention multiples et dispersées, dont l’efficacité peut être débattue

A.   Le cadre général : des plans qui s’accumulent, sans véritable cohérence d’ensemble

1.   La multiplication de plans sectoriels

● Plusieurs rapports récents portant sur la prévention et la santé publique dressent un même constat : les plans de santé publique et de prévention foisonnent mais sont mal coordonnés et mal suivis dans le temps, et ils ne bénéficient pas de financements bien identifiés. La Cour des comptes, dans son rapport de 2011 sur la prévention sanitaire, avait critiqué, en des termes sévères, le manque de cohérence et de hiérarchisation des plans de santé publique, avec des « redondances plus ou moins fortes parfois de l’un à l’autre ».

La Cour soulignait également que le manque de rigueur dans la conception des plans de santé publique nuisait à la lisibilité de l’action publique et donnait parfois l’impression que leur élaboration pouvait obéir davantage à une logique médiatique, à la recherche d’effets d’annonce, qu’à une volonté stratégique et durable.

Dans son rapport sur le plan national nutrition santé 3 (PNNS) ([130]), l’IGAS a établi un diagnostic similaire, en soulignant les difficultés d’articulation entre le PNNS, mené par le ministère de la santé, le plan national pour l’alimentation (PNA) coordonné par le ministère de l’agriculture, et le plan sport santé bien-être relevant du ministère des sports. L’IGAS a notamment souligné que le PNA se positionnait en réalité en concurrent direct du PNNS, bien qu’affirmant son caractère complémentaire, et que les positions parfois divergentes de la DGS et de la direction générale de l’alimentation mettaient en porte-à-faux l’éducation nationale au moment de traduire les orientations de chacun des plans dans les documents d’orientation ou les aides pédagogiques…

Le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie, dans le cadre de ses travaux sur la refondation des politiques de prévention-promotion santé en 2017, a ainsi réalisé un schéma assez éclairant, malgré ou grâce à son manque de lisibilité, qui montre la juxtaposition des plans et leur horizon temporel très variable :


Présentation des différents plans de santé publique selon leur thème et leur horizon temporel

L'action par les plans (2) p30

Source : note du HCAAM sur la conduite de la politique de prévention et de promotion de la santé, 23 février 2017.

 


1

● La DGS est ainsi impliquée dans un grand nombre de plans de santé publique : à la mi-année 2017, elle pilotait à titre principal sept plans de santé publique, qui concernent le tabac, la nutrition, la maladie de Lyme, la vaccination, la santé mentale, la santé sexuelle et la santé des personnes placées sous main de justice.

La DGS était par ailleurs co-pilote sur treize autres plans de santé publique, parmi lesquels ceux sur la santé environnementale, l’anti-biorésistance, les infections associées aux soins, l’accès à l’IVG, l’amiante, les micropolluants dans l’eau, les risques liés au radon, les perturbateurs endocriniens, etc.

Enfin, la DGS contribue à quinze autres plans de santé publique, allant des soins palliatifs à la lutte contre les drogues et les conduites addictives, en passant par l’autisme, la santé outre-mer, l’alimentation, la réduction des émissions de polluants atmosphériques ou encore la perte d’autonomie, etc.

 Comme l’a indiqué la DGS aux rapporteurs, la caractéristique principale des plans en vigueur est qu’ils ne sont pas adossés à une loi de programmation, bien que leur déploiement soit prévu sur plusieurs années, et qu’ils ne bénéficient pas en général de crédits dédiés prévus sur la durée de leur mise en œuvre.

Par ailleurs, ces plans ne sont pas nécessairement assortis d’indicateurs et d’objectifs chiffrés, ce qui ne permet pas d’évaluer leurs effets – ou au contraire de constater leur absence de résultats –, et d’en tirer le cas échéant des enseignements.

2.   Un processus récemment engagé de rationalisation, autour du plan « Priorité prévention »

● Sur la base de ces différents constats, la DGS s’est engagée dans un chantier de définition d’un plan de santé publique pluriannuel, transversal, ayant vocation à fédérer les plans épars actuels, afin de donner davantage de visibilité et de cohérence aux priorités de prévention et de promotion de la santé à long terme pour les pouvoirs publics. Ce chantier a conduit à la présentation de 160 actions intersectorielles couvrant les différents âges de la vie, au sein du plan « Priorité prévention – rester en bonne santé tout au long de sa vie », présenté en mars dernier par le Comité interministériel pour la santé. La refonte des différents plans, par des regroupements pertinents, doit se poursuivre.

Ce plan vise à définir une approche globale pour obtenir un environnement favorable à la santé. Ses deux premiers volets traitent de la jeunesse, avec tout d’abord les « mille premiers jours », soit la grossesse et les deux premières années de la vie, puis la « santé des enfants et des jeunes ». Les deux autres volets concernent « la santé des adultes de 25 à 65 ans », et « bien vieillir et prévenir la perte d’autonomie ».


Actions du plan « priorité prévention »

Source : Comité interministériel pour la santé – dossier de presse du 26 mars 2018


1

Au sein du volet des « mille premiers jours », figurent notamment la prévention des consommations à risque (alcool, tabac, cannabis) pendant la grossesse et la création d’un site internet d’information du public sur les produits chimiques contenus dans les produits de consommation courante, et les risques associés.

Pour le volet consacré aux enfants et aux jeunes, il est prévu la mise en place d’un parcours de santé des 0-6 ans, avec l’actualisation et la modernisation des outils de suivi et une nouvelle version du carnet de santé et des certificats de santé ; l’expérimentation d’un parcours de coordination renforcée « santé-accueil-éducation »  entre 0 et 6 ans, la prévention de l’obésité par la promotion de l’activité physique, le renforcement de l’offre médicale en outre-mer, par la création de postes d’assistants spécialistes « outre-mer », la promotion de la santé à l’école, par des programmes du type « Aller bien pour mieux apprendre » et la mise à disposition des parents de ressources, notamment dans la « mallette des parents », la prévention des risques auditifs chez les jeunes, l’expérimentation dans certaines régions d’un « PASS préservatif » et le renforcement des interventions des consultations jeunes consommateurs, etc.

Pour les adultes, il est prévu de passer du forfait au remboursement classique pour les traitements de substituts nicotiniques (TSN), d’introduire un troisième dépistage organisé pour le cancer du col de l’utérus, de simplifier le parcours vaccinal, d’étendre le Nutriscore à la restauration collective et commerciale, de réduire la consommation de sel, etc. D’autres mesures concernent les personnes âgées, notamment l’organisation des soins bucco-dentaires en EHPAD.

● Les financements destinés aux différentes actions de ce plan représentent environ 400 millions d’euros sur cinq années, qui se ventilent ainsi : 160 millions d’euros pour le passage du forfait au remboursement classique pour les TSN, 60 millions d’euros pour l’expérimentation sur trois ans d’un forfait de prise en charge de l’activité physique adaptée pour les patients atteints d’obésité, 46 millions d’euros fléchés vers la simplification du parcours vaccinal et 34 millions d’euros pour l’école promotrice de la santé.

Selon les données transmises aux rapporteurs par la DGS, le financement proviendra pour plus de la moitié (55 %) de l’ONDAM soins de ville ou hospitalier, d’autres financements (notamment la convention d’objectifs et de gestion entre l’État et l’assurance maladie – COG-CNAMTS, autres programmes d’État), pour 21 %, avec également la montée en charge d’un fonds pour l’innovation en santé, pour 20 millions d’euros sur le parcours vaccinal. Il a été indiqué que la déclinaison précise et son portage par source de financement doivent encore être stabilisés.

B.   Des interventions de prévention nombreuses, menées en ordre dispersé et bien souvent ponctuelles

1.   La dispersion des interventions en prévention

a.   Une multiplicité des actions…

● Le constat est unanime : les interventions de prévention et de promotion de la santé, réalisées auprès des jeunes comme de l’ensemble de la population, sont multiples et conduites de façon autonome par différents acteurs – associations, professeurs dans les établissements scolaires, éducateurs spécialisés, animateurs de temps périscolaires, professionnels de santé, gendarmes et policiers, etc – et dans des cadres divers – dans des établissements scolaires, dans des clubs sportifs, dans le cadre de manifestations locales, dans des centres de PMI, dans les entreprises, etc.

Là encore, on constate une dispersion des efforts, en l’absence d’un pilotage clair des actions menées sur les territoires, ce qui fait peser le risque d’un saupoudrage : à savoir un grand nombre d’actions concernant un nombre limité de personnes et intervenant de façon ponctuelle, sans s’inscrire dans la durée.

Le rapport d’évaluation réalisé par l’IGAS sur le PNNS résume ainsi la déclinaison au niveau local du plan national, « laissée à l’appréciation des ARS et des préfets. Une multitude d’actions sont entreprises sur le territoire, sans cohérence d’ensemble et elles ne concernent qu’un petit nombre de personnes. Les administrations partenaires et les acteurs locaux piochent dans les différents plans pour tenter de donner une cohérence à l’action publique. ».

Ce constat reste valable pour la mise en œuvre du plan sport santé bien-être : le rapport précité de l’IGAS et de l’IGJS relève que les acteurs du sport santé se sont fortement mobilisés, ce qui a permis « un foisonnement d’actions menées principalement par des acteurs associatifs » mais a relevé « le caractère dispersé et hétérogène des initiatives locales et un suivi national insuffisant ».

Il est ainsi bien difficile de disposer d’une vision d’ensemble des actions de prévention qui sont conduites sur les territoires et de chiffrer le nombre de personnes – et notamment de jeunes – qui ont bénéficié d’actions de prévention.

● Certes, la base de données OSCARS (Outil d’observation et de suivi cartographique des actions régionales de santé) recense les actions conduites dans les régions contribuant à l’atteinte des objectifs régionaux de santé publique. Elle confirme l’impression de foisonnement des acteurs et des initiatives retirée des auditions : alors même que certaines régions, notamment lÎle-de-France, ne sont pas parties prenantes de la base, plus de 26 000 actions de terrain y sont recensées, conduites par environ 7 000 acteurs

La base OSCARS a été conçue initialement par le Comité régional d’éducation pour la santé Provence-Alpes-Côte d’Azur (CRES PACA) en 2005, puis successivement adoptée par d’autres régions (douze au total ont adopté le module généraliste), mais sur la base du volontariat : certaines régions n’alimentent pas cette base de données – tel est donc le cas de l’Île-de-France, région la plus peuplée de France –, et certaines qui l’ont rejointe sont en retard dans la saisie des données, en raison d’un manque de moyens humains ; de ce fait, la cartographie des actions n’est pas complète.

Les conditions dans lesquelles cette base a été constituée, à l’initiative d’un acteur local et sur la base de la bonne volonté des acteurs, ainsi que son absence de généralisation sont d’ailleurs symptomatiques : elles illustrent bien le défaut de pilotage des actions territoriales au niveau national. Pour très utile qu’elle soit, la base recense les actions effectuées, mais elle n’indique pas le nombre de leurs bénéficiaires ni l’évaluation de leur efficacité.  

● Sur la base d’une extraction de données réalisée par le CRES PACA, les actions de promotion de la santé ciblées sur les moins de 25 ans en 2016 ont été décomptées : elles sont au nombre de 1 833 – dont 1 304 ciblées sur les 10-18 ans. La base de données permet de réaliser des classifications, par porteurs d’action, par financeurs et par thèmes. Les données transmises aux rapporteurs permettent de constater que les associations représentent généralement la moitié des porteurs de projets, le second porteur étant généralement les communes ; pour la tranche d’âge 10-18 ans, c’est l’éducation nationale qui est le second porteur de projets.

Les thématiques abordées dans le cadre des interventions varient selon les âges : si la nutrition et l’activité physique prédominent chez les 0-5 ans, puis chez les 6-9 ans, d’autres thématiques prennent le pas chez les 10-18 ans et les 16-25 ans, telles que les conduites addictives, la santé sexuelle et la santé mentale. 

b.   … qui nuit à leur efficacité

●  Le foisonnement d’initiatives peut conduire à ce que les messages de prévention qui sont délivrés soient contradictoires, ou du moins qu’ils manquent de cohérence, ce qui nuit nécessairement à leur portée. Comme les travaux du pédiatre Jacques Fortin le montrent, plus un jeune, et particulièrement un adolescent, rencontre dans son milieu de vie des adultes porteurs d’un discours et d’attitudes cohérents, plus ses choix seront adaptés aux enjeux de santé.

Autre écueil, certains publics peuvent bénéficier de plusieurs interventions, alors que d’autres jeunes ne sont concernés par aucune, sans que cette différence de traitement ne soit justifiée par des besoins moindres de telle ou telle population.

● La dispersion des actions est souvent associée à leur absence d’inscription dans la durée. Tous les interlocuteurs des rapporteurs l’ont souligné : une action ponctuelle et isolée, par exemple sous la forme d’une séance de sensibilisation des élèves aux dangers du tabac, risque fort d’être dépourvue d’effets, même si elle donne bonne conscience à ses promoteurs. Comme l’a indiqué le CRES PACA aux rapporteurs, un programme structuré de promotion de la santé mené en 1991 auprès d’élèves de CM2 et s’inscrivant dans la durée, sur toute l’année scolaire, a été évalué quatre ans plus tard, en 1995, lorsque les enfants étaient en troisième : il est apparu que les membres du groupe ayant bénéficié du programme de prévention étaient moins nombreux à fumer et avaient une alimentation plus équilibrée que ceux du groupe témoin, qui n’avaient bénéficié d’aucun programme ; en revanche, le groupe exposé à des interventions ponctuelles avait les mêmes résultats que le groupe témoin, ce qui revient à dire que ces interventions épisodiques étaient dénuées d’efficacité ([131]) .

● La multiplicité des interventions et des acteurs risque de se traduire par leur segmentation et leur absence de suivi : par exemple, une commune peut engager une action de prévention en nutrition auprès d’élèves en école élémentaire, dans le cadre de la restauration collective. Une fois les élèves passés au collège, géré par les départements, l’action peut ne connaître aucune suite, et les efforts déployés auprès des enfants de 6 à 11 ans peuvent se retrouver réduits à néant du fait de l’absence de coordination entre les collectivités.  

● Dernier point, en raison de la faiblesse du pilotage d’ensemble, la mise en œuvre des actions de prévention et de promotion est bien souvent liée aux personnes qui les impulsent, soit au niveau politique (commune, département, région), soit au niveau administratif (responsables au sein des ARS notamment). Ce mode de fonctionnement rend ces actions dépendantes des personnes, et donc susceptibles d’être remises en cause en cas de changement politique ou administratif. À titre d’exemple, le département des Landes mène depuis 2004 des actions en faveur de la santé sexuelle des jeunes, du fait d’un engagement politique local marqué, initié par M. Henri Emmanuelli, et alors même qu’il ne s’agit pas d’une compétence du département. De telles initiatives sont bien évidemment très positives, mais leur mise en œuvre est par construction variable selon les territoires, dépendantes des personnes exerçant les responsabilités concernées et, d’une certaine façon, sources d’inégalités entre les territoires.

2.   Le rôle de l’école et le parcours éducatif de santé : des enjeux essentiels pour la prévention en faveur de la jeunesse et l’amélioration de la littératie en santé, mais un dispositif trop récent pour être évalué

● L’école est un acteur incontournable en matière de prévention et de promotion de la santé auprès des jeunes, puisque tous les enfants se retrouvent sur ses bancs.

La mission de promotion de la santé qui incombe à l’école est définie par l’article L. 121-4-1 du code de l’éducation, tel qu’introduit par la loi de refondation de l’école du 8 juillet 2013 ([132]). Lors des auditions, il a été souligné à de multiples reprises que la santé des enfants était un enjeu central pour l’école, ne serait-ce que parce qu’elle est une condition de la réussite scolaire des élèves.

● Plusieurs textes sont venus affirmer et renforcer le rôle de l’école en matière de prévention et de promotion de la santé : après la circulaire du 2 décembre 2011 relative à la politique éducative de santé ([133]), la loi de refondation de l’école du 8 juillet 2013 a introduit la notion de parcours de santé au sein de l’article L. 541-1 du code de l’éducation. Ce parcours est axé sur l’éducation à la santé, sur la prévention – avec des actions centrées sur une ou plusieurs problématiques de santé (nutrition, conduites addictives, vaccinations, etc) et sur la protection de la santé, pour créer un environnement favorable à la santé et au bien‑être. Ces orientations figurent dans une circulaire du 10 novembre 2015 ([134]).

Enfin, dernière étape, la LMSS du 26 janvier 2016 a réaffirmé la place de ce parcours de santé, tout en précisant qu’il devait être éducatif : il est ainsi devenu le parcours éducatif de santé (PES), qui a donné lieu à une nouvelle circulaire du 28 janvier 2016 ([135]).

Le parcours éducatif de santé devrait être un vecteur central d’amélioration de la littératie en santé des enfants. La littératie en santé correspond en effet aux compétences et à la motivation des individus à accéder, comprendre, évaluer et utiliser l’information en vue de prendre des décisions concernant leur santé. Elle est l’une des clés de la politique de santé publique et de la réduction des inégalités sociales de santé.

Littératie en santé et santé publique

La littératie en santé est devenue un concept central de santé publique. Correspondant initialement à la capacité à comprendre des informations médicales complexes et à respecter des traitements thérapeutiques, elle s’est progressivement élargie aux questions de santé publique. Cette extension du concept, à la fois dans son sens et dans sa portée, apparaît dans la définition proposée par Kristine Sorensen (2012) : la littératie en santé implique « la connaissance, les compétences, la motivation et la capacité d’un individu à repérer, comprendre, évaluer et utiliser des informations sur la santé lors de la prise de décision dans les contextes des soins de santé, de la prévention des maladies et de la promotion de la santé pour maintenir ou améliorer la qualité de la vie. » Cette définition inclut donc les compétences et connaissances nécessaires pour rester en bonne santé tout au long de la vie.

Nombre d’études ont établi un lien direct entre littératie et santé des individus, en montrant notamment que les personnes ayant un faible niveau de littératie en santé sont moins susceptibles d’adopter des comportements favorables à la santé, de participer à des programmes de dépistage et d’utiliser les services de prévention.

Selon une enquête européenne réalisée en 2015 ([136]) conduite dans huit pays européens ([137]) (la France n’en faisant pas partie), plus de 12 % des personnes interrogées avaient un niveau de littératie en santé insuffisant et 35 % un niveau limité. Ces taux varient fortement selon les pays : par exemple, le taux de littératie insuffisante était élevé en Bulgarie (27 %) et en Autriche (18 %), mais très bas aux Pays-Bas (2 %). Aux États-Unis, près de la moitié de la population adulte aurait des difficultés à s’approprier l’information sur la santé, selon des travaux de 2004 ([138])

L’augmentation du niveau de littératie en santé apparaît donc comme une priorité de santé publique, identifiée comme telle par l’OMS. Le bureau régional pour l’Europe de l’OMS a ainsi publié en 2013 un document stratégique ([139]) qui appelait à créer et renforcer des environnements favorables à la littératie en santé et à élaborer des politiques pour aborder la littératie en santé aux niveaux local, national et international. Ces actions ont vocation à être mises en œuvre au niveau territorial le plus fin, pour rendre les personnes autonomes et leur permettre de prendre les décisions ayant un impact favorable sur leur santé dans leur vie quotidienne – à leur domicile, sur leur lieu de travail, dans les systèmes de soins.

 

● La mise en œuvre du PES est impulsée et coordonnée par la DGESCO, une convention cadre ayant été conclue entre le ministère de l’éducation nationale et le ministère de la santé en novembre 2016, afin de définir notamment un programme commun d’actions. Elle est pilotée au niveau académique par les recteurs – des conventions ayant également été signées entre rectorats et ARS –  et elle est déclinée au niveau de l’établissement – école, collège ou lycée –, en mobilisant des instances telles que le comité d’éducation à la santé et à la citoyenneté (CESC).

● Selon les informations transmises par la DGESCO, le PES ne crée pas de nouveaux enseignements mais a pour objectif de développer la promotion de la santé en s’adossant aux enseignements disciplinaires et interdisciplinaires figurant dans le socle commun de connaissances, de compétences et de culture, de la maternelle au lycée. Le volume horaire dévolu au PES selon les niveaux scolaires n’est pas déterminé, car le PES est une démarche transversale, qui peut avoir lieu sur des temps divers, au cours d’un enseignement (sciences de la vie et de la terre, éducation physique et sportive), mais aussi pendant les temps péri- et extrascolaires des élèves.

Sa mise en œuvre fait intervenir les enseignants, ainsi que les médecins et infirmières scolaires, des associations agréées, telles que l’association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (ANPAA), l’Arbre des connaissances (association pour la promotion des sciences et de la recherche) ou des associations conventionnées (Ligue nationale contre le cancer, MAIF, Croix Rouge française, Unicef, etc).

● Le PES est un dispositif récent, puisque son déploiement a été engagé à la rentrée 2016. Il n’a pas encore fait l’objet d’évaluations. Il est donc à ce stade difficile d’en faire un premier bilan, mais il semble que ce nouveau parcours éducatif ait un peu de mal à trouver sa place, ou du moins que son déploiement soit inégal selon les territoires. Le fait que le volume horaire consacré au PES ne soit pas défini ne permet pas de le sanctuariser, en quelque sorte, ni d’apprécier la place qu’il a pu prendre dans les enseignements.

Son pilotage relève largement du recteur d’académie, qui dispose d’une grande autonomie. Les instances de gouvernance au niveau académique semblent d’ailleurs insuffisamment claires : si la circulaire précitée du 10 novembre 2015 prévoyait la création de cellules académiques de pilotage de la politique éducative sociale et de santé, coordonnées par le proviseur vie scolaire, la circulaire du 10 août 2016 ([140]) a déployé les CESC aux échelles académique et départementale, avec l’institution de CAESC et de CDESC ; de ce fait, l’on constate une certaine redondance des instances chargées du déploiement du PES, entre cellules académiques et CAESC.

Dans ses réponses aux rapporteurs, la DGESCO a souligné que le PES se définit par son cadre d’action, dans et hors de l’école. Il existe donc un fort enjeu autour de la question du partenariat sur les différents territoires éducatifs : le PES prend appui sur les politiques publiques menées sur le territoire et doit permettre d’initier un rapprochement avec des dispositifs locaux (contrats locaux de santé, projet éducatif territorial, ateliers santé ville, etc), ce qui soulève là encore les questions de gouvernance et d’égalité entre les territoires.

3.   La formation des acteurs de la prévention santé : une professionnalisation insuffisante

● Comme l’ont relevé différentes personnes auditionnées, en dépit de l’apparente simplicité des sujets de prévention (inciter à une alimentation équilibrée, décourager l’entrée dans le tabac, etc), les interventions en prévention et en promotion de la santé ne s’improvisent pas : une action mal conduite peut être au mieux inefficace, au pire contre-productive.

La bonne volonté ne suffit pas et les interventions doivent être réalisées par des personnes bien formées. La professionnalisation du secteur de la prévention sanitaire constitue donc un enjeu crucial.

● Là encore, différents interlocuteurs des rapporteurs, tels que M. Emmanuel Rusch, président de la Société française de santé publique, ou encore MM. Franck Chauvin et Didier Jourdan, se sont exprimés dans le même sens : les interventions en prévention et promotion de la santé auprès des jeunes sont réalisées par un grand nombre d’acteurs, qu’il s’agisse de professionnels de la santé, d’enseignants, de salariés ou de bénévoles d’associations, parmi lesquels les IREPS, des chargés de mission des mutuelles et des caisses d’assurance, etc, et leurs statuts respectifs sont très différents. Leur niveau de formation peut être très variable.

S’agissant des acteurs spécialisés dans la promotion de la santé, un récent avis de la Conférence nationale de santé ([141]) souligne que les compétences dans le champ de la prévention et de la promotion de la santé ne sont généralement pas formalisées ni reconnues : le secteur est caractérisé par une multitude d’intitulés, de formations disparates, de qualifications variables liées aux types de formations initiales des acteurs, aux emplois proposés et aux employeurs (secteurs public, privé ou associatif).

Cet avis relève également que « les acteurs de la promotion de la santé sont peu connus et reconnus, souvent même invisibles aux yeux des autres acteurs de santé. Ils sont dispersés, trop souvent mis en concurrence, fragilisés par des financements annuels non pérennes, sans visibilité de moyen terme. L’absence de référentiel de compétences en matière de promotion de la santé est un des obstacles à un recours adéquat aux bons acteurs, au bon moment, pour les bonnes politiques. ».

De fait, les parcours de formation en promotion et prévention de la santé semblent aujourd’hui insuffisants, ce qui résulte du défaut de structuration du secteur de la prévention, de débouchés limités, de la précarité des emplois et de leur manque de reconnaissance : selon les données transmises par le ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, si une cinquantaine de mentions de masters portent sur des formations dont au moins un parcours est orienté vers la prévention, on ne compte parmi eux que trois mentions « Santé publique », qui analysent les politiques de prévention et forment les futurs responsables des organismes chargés de ces politiques ([142]), ainsi que trois mentions en « ingénierie de la santé » ouvertes à des professionnels du soins et à des professionnels chargés de mettre en place des politiques de santé publique. S’y ajoutent plusieurs diplômes universitaires (DU).

● Le défaut de formation constitue également un enjeu pour les enseignants, qui se trouvent en première ligne auprès des enfants et adolescents en matière de promotion de la santé dans le cadre du PES.

La formation initiale des enseignants est assurée par les écoles supérieures du professorat et de l’éducation (Espé) ; or les maquettes d’enseignements sont variables selon les Espé et les formations dispensées ne sont pas homogènes. Certains Espé sont nettement plus actifs que d’autres ([143]), le cas échéant avec l’appui du réseau des universités pour l’éducation à la santé (UNIRéS).

● En ce qui concerne les professionnels de santé, une avancée importe a été enregistrée en février 2018, avec l’annonce de la création du service sanitaire des étudiants en santé, dans le prolongement du rapport du professeur Loïc Vaillant ([144]). La mise en place du service sanitaire doit permettre à la fois de mieux former tous les futurs professionnels de santé aux questions de prévention et de promotion de la santé, en diffusant largement auprès d’eux cette culture, et de développer et démultiplier les interventions auprès des populations, réalisées par des personnes formées.

Le service sanitaire, une initiative unanimement saluée, une mise en œuvre à suivre de près

S’appuyant sur le rapport précité du professeur Loïc Vaillant, la ministre des Solidarités et de la Santé, Mme Agnès Buzyn, et la ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, Mme Frédérique Vidal, ont présenté le service sanitaire le 26 février 2018. Ce dispositif s’inscrit dans le cadre de la stratégie nationale de santé, qui met la prévention au premier rang des priorités. Ses modalités ont été fixées par un décret du 12 juin 2018 ([145]) ; son entrée en vigueur est prévue à la rentrée 2018-2019.

● Les étudiants en santé doivent recevoir une formation en prévention et promotion de la santé, avant d’intervenir auprès des populations, sur une durée totale de trois mois à mi-temps (ou six semaines à temps plein, ou 60 demi-journées, selon l’organisation retenue). Le service sanitaire poursuit ainsi un double objectif :

– former les futurs professionnels de santé à la prévention et à la promotion de la santé, et donc la faire entrer dans leurs pratiques ;

– multiplier les actions de prévention auprès des populations afin de promouvoir les comportements favorables à la santé.

● Dans un premier temps, 47 000 étudiants en santé seront concernés par ce service à la rentrée 2018. La rentrée suivante verra ce nombre porté à 50 000. Les étudiants interviendront notamment dans les établissements scolaires, mais aussi dans les entreprises, en EHPAD, dans les établissements de santé et médico-sociaux, les crèches, les lieux de privation de liberté… Dans un premier temps toutefois, les interventions devraient sans doute concerner principalement les établissements scolaires, compte tenu du nombre de lieux à trouver pour le déroulement des actions de prévention et de la répartition de ces structures sur le territoire national, d’autant que dans le champ de l’éducation, les missions et les acteurs sont bien identifiés.

Sur les territoires, les facultés sont chargées de piloter le service sanitaire : il leur revient de choisir les modalités de formation et d’intervention. La formation de trois mois pourra ainsi être continue ou discontinue et les actions de prévention pourront être effectuées en une seule ou en plusieurs fois. Quatre thématiques principales ont été retenues : la nutrition, l’activité physique, les addictions (alcool, tabac, cannabis, autres drogues illicites) et la santé sexuelle, intégrant la contraception. Néanmoins, cette liste n’est pas limitative et d’autres thématiques pourront être proposées localement, compte tenu d’initiatives existantes ou de priorités identifiées (sensibilisation à la vaccination, troubles du sommeil, écrans, gestes qui sauvent, etc).

● Si les acteurs auditionnés par les rapporteurs partagent un certain enthousiasme vis-à-vis du service sanitaire, saluant « une première pierre vers un changement de paradigme pour les professionnels de santé » ([146]), tous attirent l’attention sur la nécessité d’assurer une formation rigoureuse et cohérente pour les étudiants. L’autonomie des facultés sur la définition de la formation peut alors susciter des interrogations quant à la cohérence des messages portés et à l’égalité territoriale.

La dimension territoriale du service sanitaire est également un enjeu de taille : comment s’assurer que les populations les plus éloignées de la santé seront bien celles bénéficiant en premier lieu du dispositif ? Les territoires d’outre-mer, mais aussi les zones rurales, devront faire l’objet de mesures particulières d’orientation des étudiants pour faire du service sanitaire un véritable instrument de réduction des inégalités sociales et territoriales de santé.

 

C.   Les limites des actions sur les comportements individuels dans le cadre des campagnes de communication, Des actions et messages dont l’efficacité apparaît sujette à débat

1.   Des campagnes de communication susceptibles d’accroître les inégalités sociales de santé

● Les stratégies de prévention sanitaire sont largement fondées, en France, sur les déterminants individuels de santé, notamment en matière d’alimentation et d’activité physique, ou encore de tabagisme, en s’appuyant sur des campagnes de communication auprès du grand public. C’est par exemple le cas pour la mise en œuvre du PNNS depuis 2001, avec la diffusion de messages tels que « manger au moins cinq fruits et légumes par jour », « manger bouger », etc.

Les messages qui doivent accompagner les publicités pour certains aliments gras ou sucrés, en application de la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique ([147]), relèvent de la même logique. Les annonceurs doivent ainsi faire figurer des messages tels que : « pour votre santé, pratiquez une activité physique régulière », ou « pour votre santé, évitez de grignoter entre les repas », « pour votre santé, évitez de manger trop gras, trop sucré, trop salé ». Ces messages sont adaptés lorsqu’ils sont destinés à la jeunesse, avec par exemple « pour être en forme, dépense-toi bien », « pour bien grandir, mange au moins cinq fruits et légumes par jour », etc. 

Tant les campagnes de communication que ce dispositif adossé aux publicités sont une illustration du « paradigme du consommateur bien informé », pour reprendre les termes du rapport d’expertise collective de l’Inserm sur l’action sur les comportements nutritionnels ([148]) : parmi les moyens de prévention sanitaire, l’information du consommateur est privilégiée, ce qui fait peser avant tout sur le consommateur la responsabilité de prendre soin de sa santé, sur la base des informations qui lui sont fournies.

Or, une approche uniquement fondée sur les comportements et responsabilités individuels,  qui n’inclut pas suffisamment d’interventions sur l’environnement – qu’il s’agisse d’offre alimentaire, d’accès aux équipements sportifs, d’accessibilité des jeunes au tabac, par exemple – ne peut avoir que des résultats limités. Ces limites sont probablement plus prégnantes chez les jeunes, moins susceptibles d’adhérer à des messages de responsabilisation. 

C’est en tout cas le constat que fait le HCSP en matière d’alimentation dans son rapport sur le PNNS, en constatant la poursuite de la hausse du taux de population en surpoids pendant la mise en œuvre du PNNS.   C’est la raison pour laquelle le HCSP préconise une réorientation de ce programme, en intervenant davantage sur les déterminants environnementaux de santé, en sus des actions sur les déterminants individuels. Certes, le PNNS comprend d’ores et déjà des actions portant sur l’offre alimentaire, comme la signature de chartes d’engagement de progrès nutritionnels avec les entreprises agroalimentaires et la mise en place du dispositif Nutriscore, signalétique nutritionnelle figurant sur les emballages alimentaires ([149]). Ces programmes constituent indéniablement des avancées, mais ils sont effectués sur la base d’engagements volontaires des acteurs, et n’ont pas de caractère contraignant.

● Une démarche centrée sur les comportements individuels est même susceptible de creuser les inégalités sociales de santé, parce que les messages et recommandations ne sont pas reçus de la même façon par les différentes catégories sociales : celles qui sont les mieux à même de s’approprier les messages de santé publique et donc d’en bénéficier sont généralement les plus diplômées et les plus aisées, tandis que les campagnes ont une efficacité moindre pour les personnes issues de catégories sociales plus modestes ou en situation de précarité.

Pour reprendre les termes de MM. Jourdan et Chauvin, il apparaît qu’une approche égalitaire en matière de santé publique est en fait inéquitable, en ce qu’elle renforce les inégalités.

Une étude réalisée par l’INRA en 2008 sur la réception des recommandations nutritionnelles vient illustrer cette analyse.

Conclusion de l’étude réalisée par l’INRA sur les recommandations nutritionnelles

Une étude réalisée par l’INRA en 2008 sur les recommandations nutritionnelles a fait l’objet d’analyses dans le rapport précité de l’Inserm sur les comportements nutritionnels. Si tous les individus des différentes catégories sociales, hormis ceux en situation de grande précarité, connaissent les recommandations et les mentionnent spontanément, la réception des messages diffère fortement selon les catégories sociales. Les individus peuvent être répartis en quatre groupes.

Au sein du premier groupe, correspondant aux catégories aisées (cadres, professions intellectuelles supérieures, professions intermédiaires, etc), les recommandations sont bien reçues, comprises et aisément mises en pratique, car leur application ne suppose qu’une modification légère de leurs pratiques quotidiennes.

Le deuxième groupe, composé des professions intermédiaires et des employés en trajectoire d’ascension sociale, s’avère très sensible aux recommandations et s’emploie à les mettre en œuvre, mais au prix d’efforts plus importants, du fait de la distance entre les recommandations perçues et leurs pratiques d’alimentation, source de culpabilité pour certains.

Dans le troisième groupe, composé des personnes de catégorie modeste et populaire, se développe à l’endroit des messages et recommandations une réaction critique, témoignant d’une forme de distance : les recommandations sont perçues comme une imposition extérieure, des injonctions auxquelles ils résistent.

Enfin, le quatrième groupe réunit les individus les plus précaires (chômeurs de longue durée, notamment), qui témoignent d’une grande indifférence à ces campagnes, puisque dans ces milieux, la priorité est davantage d’avoir assez à manger (en particulier pour les enfants) et de gérer la pénurie.

Plusieurs facteurs expliquent ces différences, notamment les contraintes financières, du fait du prix relatif des fruits, des légumes et du poisson par rapport aux autres aliments, mais aussi les représentations sociales du « bien manger », la vision du lien entre alimentation et santé par les individus des différents groupes sociaux – l’optique préventive étant prédominante dans les classes aisées alors qu’une approche curative est davantage présente dans les classes plus populaires – et enfin les représentations du corps.

L’Inserm conclut en soulignant que les personnes issues de milieux modestes ont le sentiment de messages de santé imposés depuis l’extérieur, qui véhiculent des valeurs qui leur sont étrangères ; les messages et campagnes sont perçus comme une remise en question et une dévalorisation de leurs pratiques et de leurs savoirs, voire de leur identité.

Ces conclusions rejoignent le constat fait par plusieurs personnes auditionnées : les messages de prévention peuvent être perçus comme stigmatisants et culpabilisants, et comme des injonctions venues d’en haut. Ils peuvent alors donner lieu à des réactions de rejet et de refus au sein des populations, puisqu’il paraît impossible de s’y conformer, et ils peuvent s’avérer in fine sans effets, voire contreproductifs.

Un travail conduit à l’INPES a d’ailleurs montré que, avant la diffusion massive des messages sanitaires accompagnant la publicité alimentaire, les ouvriers étaient 2,5 fois plus nombreux que les cadres à juger que les messages sanitaires étaient culpabilisants, et ils étaient cinq fois plus nombreux à les trouver anxiogènes.

Enfin, de façon générale, les campagnes de communication nationales délivrent un message unique et ne prennent pas suffisamment en compte les spécificités culturelles et territoriales des populations – alors même qu’en matière nutritionnelle, notamment, elles peuvent être assez structurantes –, ni les spécificités sociales, comme cela vient d’être exposé.

Les choses évoluent toutefois, avec la volonté de décliner les messages des campagnes nationales au niveau territorial, pour se placer au plus près des populations. La campagne « Moi(s) sans tabac » conduite par Santé publique France et la CNAM depuis 2016 s’appuie ainsi sur un nombre croissant de relais locaux, avec 3 000 actions locales en 2016 et 10 000 en 2017. Les très bons résultats obtenus à l’issue de la campagne de 2017 semblent confirmer l’efficacité de cette approche.

2.   Des actions et messages dont l’efficacité est contestée, notamment  face au poids du marketing publicitaire

● En matière de prévention, l’efficacité des campagnes de communication et des messages est limitée par la multiplication des recommandations, qui peut être source de perplexité chez les individus ou conduire à leur dévalorisation, voire à un désintérêt pour ce qui s’apparenterait de près ou de loin à un message de santé.

Certaines recommandations peuvent par ailleurs s’avérer obscures et dérouter les adultes comme les enfants. Comme le souligne l’Inserm dans son rapport précité, la recommandation visant à inciter à consommer chaque jour cinq fruits et légumes a suscité beaucoup d’incompréhensions, dans toutes les catégories sociales. Les personnes ne savaient pas s’il s’agissait de consommer cinq portions, ou cinq fruits et légumes différents, voire cinq fruits et cinq légumes différents par jour… Pour beaucoup, notamment dans les catégories populaires, l’objectif proposé paraissait inaccessible, tandis que parmi les catégories plus aisées, il était plutôt perçu comme un idéal vers lequel tendre.

Le mode de diffusion des messages de prévention, dans le cadre des publicités pour des produits gras et sucrés, peut engendrer des confusions : ils peuvent être perçus comme une caution des produits présentés dans la publicité. Ainsi, un message encourageant à la consommation de fruits et légumes accompagnant une publicité pour un yaourt à la fraise peut être compris par certains consommateurs comme le fait que le yaourt, avec son arôme à la fraise, constitue l’une des portions de fruits préconisées…

Une récente recherche expérimentale (Werle et Cuny [2012]) a même montré des effets inattendus des messages sanitaires accompagnant les publicités, tant au niveau implicite que comportemental : le produit alimentaire annoncé, en l’occurrence une crème glacée, était perçu moins négativement d’un point de vue implicite en présence du message sanitaire qu’en son absence et les participants à l’étude choisissaient plus souvent de consommer la glace en présence d’un message sanitaire que lorsqu’il n’y en avait pas...

● Il faut par ailleurs avoir conscience des limites des messages sanitaires, en matière de nutrition, mais aussi de consommation d’alcool et de tabac, face aux techniques de marketing utilisées par les marques pour séduire les consommateurs, particulièrement les enfants et les adolescents.

En dépit de l’interdiction de la publicité en faveur de l’alcool et du tabac posée par la loi Evin, ces industries continuent à développer un marketing efficace, particulièrement tourné vers les jeunes. Ce marketing peut prendre différentes formes, comme le développement de produits attractifs pour les jeunes, avec des cigarettes aromatisées et des alcools plus sucrés (qui ciblent les jeunes filles, notamment), le placement de produits dans les films et les jeux vidéos, la pénétration d’internet et des réseaux sociaux pour contourner les interdictions de publicité – avec la création de pages Facebook sur les cigarettes Gauloises ou Lucky Strike, par exemple… –, le mécénat, etc ([150])

L’agroalimentaire est l’un des trois premiers secteurs réalisant les plus fortes dépenses publicitaires tous médias confondus depuis de nombreuses années ; les produits promus dans le cadre des publicités alimentaires sont essentiellement des produits gras, sucrés ou salés ([151]). De nombreux travaux montrent que le marketing alimentaire favorise la consommation d’aliments défavorables d’un point de vue nutritionnel et que les publicités ont une influence sur les comportements alimentaires effectifs, par exemple une augmentation des actes de grignotage après avoir vu des publicités.

L’impact du marketing et de la publicité est d’ailleurs accru par le récent développement du neuromarketing, lequel consiste à utiliser les neurosciences et les sciences cognitives pour améliorer les stratégies de marketing et de communication des marques, en agissant en dessous du seuil de conscience des consommateurs.

Comme le souligne le HCSP dans son rapport précité sur le PNNS, des recherches récentes montrent comment la communication commerciale (publicité, parrainage, placement de produits dans les films) influence favorablement les évaluations et les préférences pour les marques à un niveau non conscient, plus précisément sur les attitudes implicites et la mémoire implicite. Par exemple, les bannières publicitaires sur Internet provoquent des effets bénéfiques sur l’attitude à l’égard de la marque sans être vues consciemment. Une marque à peine entrevue et aussitôt oubliée laisse des traces favorables à la marque, lesquelles restent stockées au moins trois mois après l’exposition en mémoire implicite. Dans le cas de l’insertion des marques au sein de jeux vidéos auxquels jouent les jeunes (publicité in-game), des études montrent les influences de ce moyen sur la mémorisation des marques dans les mémoires aussi bien implicite (inconsciente) qu’explicite (consciente) des enfants.

Face à l’impact de telles techniques de marketing, la portée des campagnes de communication de santé publique peut sembler bien modeste. Cela implique de travailler à leur amélioration, pour accroître l’impact des messages, en se fondant sur ce que l’on appelle le « marketing social », qui consiste à appliquer les outils et méthodes inspirés du marketing commercial pour améliorer les campagnes de prévention.

3.   Des interventions de prévention qui doivent être adaptées aux enfants et aux adolescents, l’enjeu des compétences psychosociales

a.   L’écueil d’une prévention « adulto-morphe »

Au-delà des limites des campagnes de communication, destinées à tous les publics, les actions de prévention et de promotion de la santé conduites auprès des jeunes ne prennent pas toujours en compte les spécificités de cette population, ce qui risque de nuire à leur efficacité.

● Plusieurs interlocuteurs des rapporteurs, comme Mme Marie-Rose Moro, directrice de la maison des adolescents de Solenn, ont souligné l’écueil de concevoir la prévention auprès de jeunes de façon « adulto-morphe », en transposant les ressorts comportementaux des adultes aux enfants, ce qui s’avère peu pertinent.

De nombreuses recherches montrent par exemple que les enfants et adolescents ne possèdent pas la maturité cognitive, métacognitive, affective, comportementale et sociale pour prendre en compte les possibles effets délétères, à moyen et long terme, de leurs comportements alimentaires immédiats. Axer une action de prévention auprès des enfants en soulignant les effets néfastes de tel ou comportement alimentaire sur leur santé dans plusieurs années, voire plusieurs décennies, est donc très probablement inefficace ; et il en va de même pour le tabac.

● De même, les actions de prévention doivent tenir compte de l’âge des enfants et de leur réceptivité aux messages en fonction de celui qui les délivre. À la différence des enfants plus jeunes, les adolescents sont probablement moins susceptibles d’adhérer à des messages de prévention « descendants », venant de leurs professeurs, ou plus largement de figures d’autorité. Ils sont plus sensibles à des actions réalisées par des « presque pairs », avec lesquels ils peuvent échanger plus facilement. De ce fait, on peut s’interroger sur l’efficacité des actions conduites dans les collèges et lycées par des gendarmes et policiers dans le cadre des programmes de prévention anti-drogue ([152]), qui se contenteraient de présenter les effets et dangers associés à la consommation de produits psychoactifs. Une telle intervention peut même, si elle est mal mise en œuvre, éveiller la curiosité d’adolescents en quête d’interdits à braver et les conduire à essayer le produit, au lieu de les décourager.

Il importe également que les actions de prévention menées auprès des enfants, notamment les plus jeunes, associent les parents, même de façon indirecte, pour ne pas créer de conflits de loyauté des enfants à l’égard des parents, par exemple en matière d’alimentation.

● Enfin, une action de prévention à destination des jeunes ne peut se résumer à la distribution de dépliants ou flyers, que ce soit dans les établissements scolaires, les clubs sportifs ou les maisons des adolescents. Cela est probablement vrai pour les adultes, mais cela l’est encore plus pour des jeunes accoutumés à consulter des informations de façon dématérialisée. Comme l’a indiqué le général Philippe Pontiès, directeur du service national et de la jeunesse, un grand nombre de dépliants, portant sur des sujets variés, dont la prévention sanitaire, sont distribués aux jeunes à l’occasion de la journée de défense et de citoyenneté… et se retrouvent invariablement dans les poubelles environnant le site, ce qui incite à la modestie sur l’impact de ce type d’actions.

b.   L’apport décisif du renforcement des compétences psychosociales chez les jeunes, qui n’est pas assez pris en compte

● Nombre d’interlocuteurs des rapporteurs, notamment M. Eric Breton, professeur à l’EHESP, M. Jean-Pierre Couteron, président de Fédération Addiction, ou encore M. Nicolas Prisse, président de la Mildeca, ont souligné que le développement des compétences psychosociales chez les enfants devait constituer un axe majeur de la politique de prévention et de promotion de la santé.

L’expression, au premier abord obscure, de « compétences psychosociales » correspond, selon la définition de l’OMS établie en 1993, à « la capacité d’une personne à répondre avec efficacité aux exigences et aux épreuves de la vie quotidienne. » L’OMS identifie dix principales compétences psycho-sociales, qui vont par deux, et qui sont toutes étroitement liées à l’estime de soi et aux compétences relationnelles :

– savoir résoudre les problèmes/savoir prendre des décisions ;

– avoir une pensée critique/avoir une pensée créatrice ;

– savoir communiquer efficacement/être habile dans les relations interpersonnelles ;

– avoir conscience de soi/avoir de l’empathie pour les autres ;

– savoir gérer son stress/savoir gérer ses émotions.  

Ces compétences constituent en quelque sorte des « déterminants de déterminants » de santé, puisqu’il est avéré que les comportements à risque pour la santé tels que la prise de substances psychoactives, les comportements violents ou encore les rapports sexuels à risque sont plus fréquents chez les personnes dont les CPS sont peu développées.

● Le renforcement des CPS chez les jeunes est donc un levier majeur pour prévenir les problèmes d’addiction ou de santé mentale, comme le met en évidence l’expertise collective réalisée par l’Inserm sur les conduites addictives chez les adolescents en 2014 ([153]). Ce rapport relève les effets bénéfiques des interventions de développement des CPS sur la prévention ou la diminution de la consommation d’alcool, de tabac, de cannabis et d’autres substances illicites chez les adolescents, notamment lorsqu’elles sont axées sur la résistance à l’influence des pairs, la prise de décision, la communication, l’affirmation et l’estime de soi. Chez les enfants plus jeunes, le renforcement des CPS favorise le développement global (social, émotionnel, cognitif, physique), augmente le bien-être et contribue à augmenter les comportements favorables à la santé.

Si le champ des CPS s’est largement développé à partir du début des années 1990 à l’international, cette approche semble avoir davantage de difficulté à s’implanter en France ([154]) : quelques initiatives locales ont eu lieu dans les années 1990. L’IREPS Pays de la Loire a développé un site intitulé « Le cartable des compétences psychosociales », avec la mise à disposition de ressources, notamment pour les enfants et pré-adolescents de 8 à 12 ans. Des programmes de développement des CPS ont été déployés dans certains territoires, par exemple dans le rectorat de Lyon, à Marseille, dans l’Hérault. On peut citer par exemple le programme Tina et Toni, destiné aux enfants de 4 à 6 ans, le programme Prodas (Programme de développement affectif et social), provenant du Québec, ou encore le programme ABMA (Aller Bien pour Mieux Apprendre), qui comporte un volet de développement des CPS. 

Pour autant, l’engouement pour les CPS est relativement récent, et ce n’est que depuis peu que son développement est affirmé comme un axe important en matière de prévention et promotion de la santé –  il figure d’ailleurs dans la Stratégie nationale de santé 2018-2022 ainsi que dans le plan « priorité prévention » présenté en mars dernier.

III.   Une évaluation disparate des actions de prévention

L’évaluation de la politique de prévention peut s’apprécier à deux échelles : d’abord, l’évaluation de la santé des Français, résultante de notre politique de prévention et de santé publique dans son ensemble, ensuite, l’évaluation des différentes actions de prévention, que ce soit dans le cadre de plans nationaux ou pour des actions spécifiques.

A.   La difficulté à définir des indicateurs généraux de suivi de santé publique

● Le rapport annexé à la loi précitée du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique proposait de suivre une série d’indicateurs transversaux de la santé de la population et définissait pas moins de cent objectifs de santé spécifiques accompagnés de propositions d’indicateurs « souhaitables ».

Un premier travail coordonné par la DGS et la DREES en 2004-2005 a permis de définir de façon opérationnelle les indicateurs de suivi de l’évolution des problèmes de santé visés par ces objectifs, en collaboration avec les principaux producteurs de données, différents experts ainsi que des représentants des utilisateurs potentiels de ces indicateurs. La DREES a ensuite coordonné, à partir de 2006, la production de rapports annuels, décrivant l’évolution de ces indicateurs au fur et à mesure de leur disponibilité, en partenariat avec l’ensemble des producteurs de données ; ce rapport, initialement annuel, est intitulé « L’État de santé de la population en France ». Depuis 2011, il est publié tous les deux ans et il constitue une mine d’informations très précieuses.

Le travail de définition des indicateurs réalisé en 2004-2005 a été renouvelé et actualisé en 2013-2014, en associant là encore les partenaires participant à l’élaboration des rapports annuels ; ces travaux ont donné lieu à la publication d’un rapport de plus de 500 pages, établissant un bilan des indicateurs existants et en proposant d’autres.

Pour autant, ces indicateurs s’avèrent nombreux et touffus ; comme vu supra, l’actualisation de nombre d’entre eux n’est pas régulière et ils ne sont pas toujours déclinés territorialement. Ils ne constituent pas un outil véritablement opérationnel de suivi de la santé publique et de la prévention.

● En 2013, la ministre de la santé a demandé au HCSP de travailler à la réalisation d’un tableau de bord synthétique de l’état de santé de la population et du fonctionnement du système de santé, afin d’assurer le pilotage interministériel de la stratégie nationale de santé et de réaliser une communication annuelle auprès du grand public.

Le tableau de bord proposé par le HCSP dans une note de mai 2014 ([155])  proposait quinze indicateurs – tels que le taux de mortalité prématurée « évitable » par la prévention, l’espérance de vie sans incapacité à 50 ans, le taux de renoncement aux soins, le taux de prescriptions inadéquates de psychotropes chez le sujet âgé, le maintien et le retour à l’emploi de personnes souffrant de maladies chroniques ou la prévalence du surpoids chez les jeunes – , parmi lesquels six existaient déjà et étaient recueillis actuellement.

Un tel tableau de bord devait permettre de dresser un portrait annuel de l’état de santé de la population, mais aussi un état des lieux du système de soins et de prise en charge – alors que les cent objectifs portaient uniquement sur l’état de santé de la population.  

Néanmoins, ces travaux n’ont pas connu de suite.

B.   Des pratiques variables en matière d’évaluation des actions de prévention

L’évaluation des actions de prévention, notamment de prévention primaire, vise à mesurer les effets obtenus en termes de réduction de la fréquence ou de la sévérité des problèmes de santé que l’on cherche à prévenir, en les mettant en regard des ressources utilisées.

Ce travail d’évaluation se heurte à des difficultés structurelles : en premier lieu, les effets de la prévention primaire peuvent être différés, parfois de plusieurs décennies, et nécessiter une analyse sur temps long pour les mesurer ([156]). En second lieu, plusieurs facteurs de risque peuvent contribuer de façon cumulative à des effets communs sur la santé et entrer en synergie, comme par exemple les effets combinés de l’alcool et du tabac sur différentes types de cancer, ou ceux de l’alimentation et de l’activité physique en matière de surpoids. Il n’est pas toujours aisé d’identifier et d’isoler les effets d’une action de prévention intervenant sur l’un des facteurs.

La complexité de la démarche d’évaluation d’une politique de prévention ne doit toutefois pas être utilisée comme prétexte pour la faire passer au second plan ou pour la considérer comme optionnelle. L’évaluation des grands « programmes » de prévention, tels que le PNNS ou le plan national de prévention des risques pour la santé liés à l’environnement, est structurée et prévue par les textes, même si sa portée peut s’avérer limitée ; en revanche, l’évaluation des actions de prévention elles-mêmes est loin d’être systématique, qu’elles déclinent l’un des grands programmes ou qu’elles soient conduites de façon autonome.

1.   Les évaluations des programmes de santé publique, conduites par différents acteurs, de portée variable

Aux termes de l’article R. 1411-4 du code de la santé publique, les plans et programmes nationaux de santé publique donnent lieu à un suivi annuel et à des évaluations pluriannuelles, destinés à apprécier les résultats obtenus et à en tirer les enseignements nécessaires pour adapter les politiques publiques.

En pratique, de tels travaux d’évaluation sont conduits par la Haute autorité de santé et le HCSP, les corps d’inspection ministériels et interministériels, des instances ad hoc, ou encore le Haut Conseil de l’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur (HCERES) pour le volet recherche. La Cour des comptes peut aussi être amenée à évaluer les politiques de santé de façon ponctuelle, dans le cadre du rapport annuel sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale ou de rapports particuliers ([157]).

Un même plan peut faire l’objet de plusieurs évaluations : ainsi, le PNNS 3 a donné lieu à un rapport de l’IGAS, publié en juillet 2016, mais aussi à un rapport du HCSP en novembre 2017.

Pour autant, l’établissement d’un bilan des grands programmes de prévention se heurte à la difficulté d’évaluer les actions conduites pour les décliner. Le rapport précité de l’IGAS sur le PNNS 3 relève ainsi que « dresser le bilan du PNNS est difficile en raison du grand nombre des actions, de la diversité des cibles, du caractère anecdotique ou expérimental de certaines initiatives de terrain, de la multiplicité des indicateurs et de la difficulté d’établir des corrélations. » Le rapport précité sur le plan santé sport bien-être aboutit au même constat.

Le travail d’évaluation est également limité par le manque de certaines données : le rapport de l’IGAS sur le PNNS observe aussi que « l’évaluation du PNNS 3 s’est heurtée à la non disponibilité des conclusions des études qui auraient permis d’apprécier certaines évolutions intervenues depuis le plan précédent ; et à l’absence d’un cadre de référence stable, dont les données (y compris épidémiologiques), régulièrement actualisées, fourniraient la base d’un pilotage concerté des actions ».

Enfin, certains plans de santé publique, parmi le foisonnement évoqué supra, sont peu structurés et sans réelle consistance, ce qui rend difficile un travail d’évaluation autre que purement formel.

2.   L’évaluation des actions et interventions elles-mêmes, très disparate et parfois même inexistante

Comme l’a relevé M. Pierre Arwidson, en matière de soins, l’évaluation est systématique : les médicaments doivent recevoir une autorisation de mise sur le marché, délivrée par une instance européenne ou nationale ([158]), avant d’être commercialisés, tandis que les activités de soins donnent lieu à des recommandations et à la définition de bonnes pratiques, notamment par la Haute autorité de santé.

Il n’en va pas de même pour les actions de prévention, dont l’évaluation des effets n’est pas systématique. Comme vu supra, les enjeux de prévention peuvent sembler simples et relever du « bon sens », mais cela ne signifie pas que l’on puisse improviser une intervention, sans méthodologie ni analyse de son impact.

● L’évaluation peut prendre des formes très diverses : elle peut correspondre à une auto-évaluation par celui qui réalise l’action, sur la base de critères propres ou par rapport à un référentiel de « bonnes pratiques » ; elle peut être réalisée par une autorité extérieure, en lien avec un dispositif de financement, ou par une autorité scientifique externe, etc.

Elle consiste en principe à mesurer les effets d’une action sur un déterminant de santé ou sur une pathologie particulière, le cas échéant plusieurs années après l’action. Dans une acception bien moins ambitieuse, elle peut se limiter à des aspects quantitatifs, par exemple mesurer le nombre de personnes touchées par une action, le nombre de dépliants distribués, le degré de notoriété d’un slogan ou le nombre d’acteurs partenaires d’une intervention.

Une réelle évaluation des actions de prévention, au-delà de simples indicateurs quantitatifs, a en tout cas un coût, estimé en général à 10 % à 15 % du coût de l’action elle-même. Elle doit être conceptualisée dès l’origine sans quoi elle est beaucoup plus difficile à mettre en œuvre ensuite.

● Or la dispersion des actions, qui a été évoquée plus haut, a une répercussion directe sur leur évaluation. Les interventions ponctuelles et d’ampleur limitée, en termes de personnes touchées, sont en pratique difficilement évaluables, car le coût de l’évaluation serait disproportionné par rapport à l’ampleur du projet. Beaucoup d’actions réalisées à petite échelle ne font l’objet d’aucune évaluation fondée sur un protocole rigoureux, ni d’aucune diffusion des évaluations produites.

Réaliser des travaux d’évaluation nécessite d’ailleurs une certaine stabilité des intervenants et des financements, ainsi que le développement d’une expertise parmi les opérateurs : lorsque les actions sont menées par des petites associations, avec des financements à court terme et un turn over important, cela s’avère plus difficile – si ce n’est impossible.

Des interventions plus importantes ont néanmoins fait l’objet d’évaluations scientifiques approfondies, comme par exemple, l’étude sur le programme ICAPS (intervention auprès des collégiens centrée sur l’activité physique et la sédentarité) – cette intervention étant initialement issue du champ de la recherche – ou encore les Ecoles Caramboles en Guadeloupe et en Martinique en 2005-2008 sur la nutrition,  promues dans ces territoires par les ARS. 

● Dans l’ensemble, l’impression retirée des auditions est celle d’une grande disparité des pratiques d’évaluation, avec des actions qui ne font l’objet d’aucune évaluation, si ce n’est le nombre de personnes touchées, mais aussi parfois une surcharge administrative dans certains cas, conduisant à l’écriture de rapports qui ne sont lus par personne – ou encore une « surévaluation » des interventions de routine, pour lesquelles on demande parfois des indicateurs de résultats de santé, alors qu’en routine, c’est le respect des référentiels qui importe, comme le souligne le rapport précité du HCAAM.

Manque en tout état de cause une structuration des politiques d’évaluation, un cadre général qui fournirait un référentiel et des bonnes pratiques, et qui permettrait d’identifier les interventions efficaces aux effets prouvés, susceptibles d’être généralisées. 

3.   La mise en place d’outils pour renforcer l’évaluation, à l’impact mal connu pour l’instant

Une initiative intitulée Inspire ID, soit Initiative en santé publique pour l’interaction de la recherche, de l’intervention et de la décision, a justement été engagée en 2015, en se fixant pour objectif d’identifier et de diffuser des actions probantes ou prometteuses de terrain, c’est-à-dire des actions dans le champ de la prévention et de la promotion de la santé qui ont prouvé leur efficacité.

Cette démarche très positive réunit un grand nombre d’acteurs – Santé publique France, l’École des hautes études en santé publique, l’Institut de recherche en santé publique (IReSP), l’Institut national du cancer, la Société française de santé publique, la FNES, la Haute autorité de santé, le HCSP, le SGMAS, les ARS, etc. Elle est articulée autour de la recherche, notamment interventionnelle – à savoir la conception, la mise en œuvre et l’évaluation scientifique d’interventions en santé publique. L’objectif est triple :

– constituer un portail national sur les interventions en santé publique, pour renforcer la veille et la diffusion des actions probantes et des actions prometteuses : les actions probantes s’appuient sur des données scientifiques validées et concernent le plus souvent des programmes complexes étayés par des revues de la littérature, tandis que les actions prometteuses s’appuient sur des éléments de preuve relevant de dispositifs d’évaluation solides et construits, mais qui ne font pas systématiquement l’objet de publications scientifiques ;

– accompagner les acteurs dans l’échange et le partage des connaissances, en proposant un accompagnement des acteurs locaux et nationaux, et en développant des offres de formation initiale et continue ;

– favoriser le développement d’une recherche en santé publique associant chercheurs et utilisateurs de données de recherche.

Il existe d’autres initiatives, telles que le site Evalin, ou guide d’évaluation des interventions en nutrition, qui est proposé aux acteurs de la prévention. La DGS a indiqué qu’il était demandé aux ARS de le promouvoir, mais qu’il était en pratique trop peu utilisé.

 

   quatrième partie

nos propositions : une gouvernance structurée et clarifiée, des actions ciblées à l’efficacité évaluée, fondées sur des données de santé étayées et bénéficiant de financements accrus

 

La stratégie nationale de santé présentée en décembre dernier, la réunion du comité interministériel pour la santé et la présentation du plan « priorité prévention » en mars dernier, de même que l’instauration du service sanitaire, témoignent d’un engagement significatif en faveur de la prévention et de la promotion de la santé et pourraient annoncer un réel virage de notre politique de santé publique. Ces initiatives vont dans le bon sens ; pour porter leurs fruits, elles doivent être soutenues et mises en œuvre de façon résolue et efficace, en définissant des solutions concrètes et pratiques.

 

Afin de réduire les inégalités sociales et territoriales qui s’installent dès l’enfance

Afin de réduire les maladies chroniques qui apparaitront à l’âge adulte, responsables de l’augmentation des dépenses de l’assurance maladie.

 

AUX ACTES !

● Une première conclusion s’impose : il n’est pas nécessaire de créer de nouveaux acteurs, de nouvelles structures, de nouveaux modes d’intervention, au risque d’ajouter encore de la complexité à un paysage déjà peu lisible et éclaté. La priorité doit être de s’appuyer sur ce qui existe, en coordonnant davantage les dispositifs et en mettant en lien les institutions et les acteurs nationaux, régionaux et locaux.

Deuxième conclusion : en lisant des rapports récents, en écoutant les propos des personnes auditionnées, les constats sont unanimes, à la fois sur l’insuffisance du pilotage de notre politique de prévention, notamment en direction de la jeunesse, sur la dispersion des acteurs et des interventions, sur l’insuffisance des financements. On perçoit une réelle prise de conscience des enjeux de la prévention au cours des dix dernières années, de forts engagements ont été affichés mais ils n’ont pas nécessairement été suivis d’actions et de financements pérennes ; in fine les choses évoluent lentement.

Un portage politique à tous les niveaux est absolument crucial pour passer à la vitesse supérieure et réformer de façon structurelle notre politique de prévention. C’est le fait de faire de la prévention une priorité politique de premier plan, soutenue par tous les ministères et par tous les acteurs locaux, qui permettra d’avancer.

● S’appuyant sur trois grands principes, la promotion de la santé dès le plus jeune âge, une approche par déterminants plutôt que par pathologies, ainsi que le décloisonnement des acteurs de la santé publique, les rapporteurs articulent leurs propositions autour de quatre axes principaux :

– structurer et clarifier la gouvernance de la politique de prévention, pour coordonner les interventions et assurer l’égalité entre les habitants des différents territoires dans l’accès à la prévention ;

– privilégier des actions précoces et ciblées sur les populations qui en ont le plus besoin, selon le principe d’universalisme proportionné ; porter davantage les efforts sur les déterminants environnementaux ;

– améliorer notre système de données de santé et l’évaluation des actions de prévention ;

– clarifier les financements alloués au secteur de la prévention et professionnaliser davantage celui-ci.

I.   trois PRINCIPES cardinaux

A.   la promotion de la santé DÈS LE PLUS JEUNE AGE 

Au regard du double constat – enracinement des inégalités de santé dès l’enfance et prévalence relativement forte de comportements défavorables à la santé parmi les jeunes Français – le renforcement de la prévention et de la promotion de la santé auprès des enfants et adolescents doit constituer une priorité de notre politique de santé publique.

De surcroît, c’est auprès de cette population jeune que les interventions de prévention sont les plus cruciales. Plus les actions de prévention et de promotion de la santé interviennent tôt, plus elles sont efficaces : l’économiste et prix Nobel James Heckman souligne ainsi que de meilleurs « retours sur investissement » sont obtenus par des approches précoces, comme l’illustre le schéma ci-après ([159]).

The20Heckman20Curve_v2

Des actions précoces, dès le plus jeune âge, favorisent l’appropriation de bonnes pratiques et leur enracinement durable, alors qu’il est bien plus difficile et bien moins efficace d’intervenir auprès de publics plus âgés, ne serait-ce qu’à l’adolescence, une fois que certains comportements défavorables à la santé sont adoptés.

Un certain nombre d’aptitudes clés, qui s’installent ou non au cours de l’enfance, ont des conséquences dans de nombreux domaines sanitaires, sociaux et économiques ([160]).

Enfin, par définition, les enfants et jeunes d’aujourd’hui sont les adultes et les parents de demain, et c’est la santé des populations des décennies à venir qui se joue actuellement.

La littérature scientifique montre d’ailleurs que les « mille premiers jours de vie », à savoir les premiers instants de vie de l’embryon jusqu’aux deux ans de l’enfant, sont une période clé pour favoriser la santé des enfants et futurs adultes.

Les enjeux de santé publique et de prévention liés à la grossesse, qui étaient insuffisamment reconnus jusqu’à une période récente, sont en effet considérables : au-delà des conséquences connues de la consommation d’alcool et de tabac par la  femme enceinte, l’environnement maternel pendant la grossesse, qu’il s’agisse des comportements nutritionnels  ou de l’exposition à des produits toxiques, peut prédisposer le nouveau-né puis l’individu devenu adulte à développer certaines pathologies : c’est ce qui correspond au concept d’origine développementale des maladies de l’adulte (DOHaD : Developmental Origins of Health and Diseases). À titre d’exemple, une prise de poids élevée pendant la grossesse expose le nouveau-né à un risque de macrosomie, et corrélativement, lorsqu’il grandira, à un ensemble de maladies métaboliques du fait d’une programmation métabolique précoce ([161]). Une étude menée en 2009 ([162]) montre également l’importance des expositions in utero (diététique, tabac) dans le développement immunitaire du fœtus et dans la programmation à la susceptibilité aux maladies allergiques et à l’asthme, ce qui est lié à l’épigénétique, c’est-à-dire à l’influence de l’environnement sur l’expression des gènes d’un individu ([163]).

B.   Une approche par déterminants de santé plutôt que par pathologies

Notre politique de santé publique s’articule principalement autour de la prévention des pathologies, ce qui résulte largement de notre prisme curatif, alors que c’est bien une approche par déterminants de santé qu’il convient d’adopter, qu’ils soient individuels ou environnementaux.

L’objectif est de favoriser la préservation du capital santé des populations, par la combinaison de comportements et d’un environnement propices à la santé, ce qui implique une approche transversale qui ne peut se résumer à lutter contre l’apparition de telle ou telle pathologie.

C.   le décloisonnement des acteurs de la santé publique

Au regard de la segmentation de notre système de santé publique, héritée de 1945, il apparaît indispensable d’évoluer et de favoriser le décloisonnement des différents acteurs. L’objectif doit être de réconcilier les différentes branches de la santé, notamment les professionnels de santé libéraux, les professionnels hospitaliers et les professionnels relevant de ce que l’on peut définir comme la « médecine sociale », à savoir les professionnels de la PMI, de la médecine scolaire et du travail.

Chaque catégorie d’acteurs agit aujourd’hui de façon autonome, sans réelle coordination, avec des statuts et des financements différents, ce qui nuit à la cohérence de notre politique de santé publique. Rééquilibrer le rôle de la prévention et du soin, ou pour le dire autrement, remettre sur un pied d’égalité Hygie et Panacée, implique de dépasser l’organisation actuelle pour mobiliser tous les acteurs autour d’une priorité commune : la prévention et la promotion de la santé.

II.   comment passer des intentions À l’action ?

A.   Structurer et clarifier la gouvernance, en articulant pilotage national et dÉclinaison territoriale des actions, au plus prÈs des populations

La prévention n’appartient à personne car elle doit être le fait de tous.

Comme indiqué supra, les rapporteurs ne souhaitent pas créer de structures nouvelles, mais plutôt mettre en avant et accroître l’efficacité des structures qui existent déjà mais auxquelles toute la place n’a pas été faite.            

Tous les acteurs de la prévention manifestent une grande attente et sont convaincus que seul un portage politique fort peut permettre une prise de conscience des enjeux de la prévention et une accélération de leur prise en compte.

1.   Confier le pilotage national à une délégation interministérielle à la prévention

Un grand nombre de ministères et de politiques nationales sont impliqués dans la prévention, mais les ministères ont souvent une logique « propriétaire », pour reprendre l’expression du HCAAM : chacun souhaite conduire de façon autonome sa politique propre. Il est indispensable de dépasser cette logique, qui favorise un fonctionnement en tuyau d’orgues, sans coordination.

Le Comité interministériel pour la santé du 26 mars dernier consacré à la prévention a été un signal fort, ouvrant la voie à une approche « multilatérale ».

Dans le prolongement de ce comité interministériel, les rapporteurs proposent de mettre en place une délégation interministérielle à la prévention, qui serait identifiée comme le pilote national chargé de mettre en application la Stratégie nationale de santé 2018-2022 élaborée par l’ensemble des ministères, ainsi que la politique de prévention. Seule instance nouvelle dont les rapporteurs préconisent la création, elle incarnerait le portage politique de la priorité donnée à la prévention. Elle serait chargée d’une mission de coordination des ministères et des acteurs au niveau national et elle veillerait à la déclinaison de la politique de prévention au niveau régional et territorial, en supervisant l’action des ARS.  

2.   Articuler l’organisation régionale autour des agences régionales de santé et des commissions de coordination des politiques publiques de santé

Alors que dans nombre d’ARS, la direction principale est bien souvent la direction de l’offre de soins – ce qui résulte de l’histoire des ARS, successeurs des agences régionales de l’hospitalisation –, la « direction de la santé publique » doit devenir le pivot des ARS, pour assurer la déclinaison au niveau régional de la politique de prévention, prenant en compte les spécificités des territoires.  

Chaque ARS doit s’appuyer sur la Commission de coordination des politiques publiques de santé régionale (CCPPS) chargée de la prévention, de la santé scolaire, de la santé au travail et de la PMI, qui doit jouer tout son rôle. Comme le relève le HCAAM, le fonctionnement de ces CCPPS régionales est aujourd’hui hétérogène, voire inexistant, alors même que par leur composition, elles sont des organismes transversaux mettant tous les acteurs concernés autour de la table et qu’elles permettent de prendre en compte les différents aspects de la prévention. Elles seraient en quelque sorte la déclinaison au niveau régional du comité interministériel pour la santé.

3.   Rassembler les acteurs de première ligne autour d’un maillage fin du territoire

La politique de prévention doit être mise en œuvre au plus près des populations, au niveau des bassins de vie, en utilisant et généralisant deux outils existants, dont le déploiement est variable selon les territoires : 

– les Contrats Locaux de Santé (CLS), dont le format est aujourd’hui libre et peu contraignant, et dont le développement varie fortement selon les régions : les CLS réunissent l’ARS et les collectivités territoriales et leurs groupements (communes ou intercommunalités), et peuvent associer un grand nombre d’acteurs. Il importe d’inciter au développement des CLS, en suscitant, facilitant et finançant leur création, pour assurer un maillage fin de l’ensemble du territoire ;

– les Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS), qui regroupent les acteurs de santé d’un territoire, à l’initiative des professionnels de santé, et permettent d’améliorer leur coordination. De même, le déploiement de ce dispositif introduit en 2016 par la LMSS doit être encouragé.

La mise en relation et la coordination des CLS et des CPTS, au niveau des bassins de vie, seraient également de nature à réconcilier et rapprocher la « médecine de soins » et la « médecine sociale ».

Pour être efficace, une politique de prévention doit être déclinée au niveau local, en mobilisant les acteurs sur le terrain, lesquels ont une connaissance fine des spécificités et besoins des populations. 

4.   Rapprocher les professionnels de santé exerçant dans les secteurs sanitaire, socio-sanitaire et éducatif

Pour réconcilier les branches de notre système de santé, il est indispensable d’engager une réflexion sur les possibilités de décloisonnement des professionnels de santé exerçant en libéral, en hospitalier, dans la médecine scolaire et dans la PMI. Aujourd’hui, chaque catégorie de professionnels relève d’un statut distinct ; les médecins de PMI et ceux de l’éducation nationale sont recrutés par la voie d’un concours, les premiers relevant de la fonction publique territoriale et les seconds de la fonction publique de l’État.

Outre le recrutement de médecins contractuels, d’ores et déjà pratiqué, il pourrait être envisagé de permettre aux médecins exerçant en libéral ou dans le secteur hospitalier de venir pratiquer également, une partie de leur temps, au sein d’établissements scolaires ou en PMI.

Il serait également utile d’explorer les voies de réforme des statuts actuels des différents professionnels de santé, afin d’instaurer des passerelles pour l’exercice des différentes fonctions, entre « médecine libérale » et « médecine sociale », et d’offrir une plus grande souplesse dans les recrutements et dans la gestion des visites et consultations en PMI et en établissements scolaires.

Pour autant, une telle réforme ne doit pas s’accompagner d’une baisse d’exigence dans la qualification des professionnels de santé : les compétences requises pour exercer en PMI, par exemple, sont bien spécifiques et nécessitent un apprentissage. Il importe d’accompagner une telle évolution par des formations rigoureuses, réalisées de façon décentralisée dans la mesure du possible.

5.   Favoriser la prise de conscience des enjeux de la prévention

La prévention santé doit devenir la priorité de toutes les politiques, ce qui suppose d’assurer son portage politique à tous les niveaux, national comme local.

Tous les élus doivent s’impliquer afin que la prévention irrigue l’ensemble des politiques publiques. Cette démarche pourrait se traduire par l’obligation de prendre en compte, avant toute décision, les incidences de celle-ci sur la santé,  en introduisant un « volet santé » dans la préparation des projets de loi, des schémas nationaux, régionaux ou locaux (schémas de cohérence territoriale, plans locaux d’urbanisme, plans de déplacements urbains, etc) ou encore lors de la passation de marchés publics, par exemple en restauration collective (cantines scolaires, notamment).

B.   dÉployer Des actions prÉcoces, différenciées, ciblÉes et à l’efficacitÉ prouvÉe, selon un universalisme proportionné, des interventions portant sur les dÉterminants environnementaux

Plusieurs principes doivent irriguer et guider les interventions et programmes de prévention en faveur de la jeunesse :

– Les actions de prévention doivent s’inscrire dans le cadre d’un universalisme proportionné, en visant toute la population, mais avec un ciblage qui tient compte  du gradient social : l’intensité de l’action doit être plus grande pour ceux qui en ont le plus besoin, pour réduire les inégalités sociales et territoriales de santé.  

Une approche égalitaire en matière de prévention est inéquitable et peut même renforcer les inégalités ; il faut donc adopter une approche inégalitaire pour être équitable, sans quoi les actions bénéficient à ceux qui en ont le moins besoin. Pour le dire autrement, l’équité implique de prendre en compte la réalité des situations, sur le terrain, pour assurer une réelle égalité entre les populations.

Résultat de recherche d'images pour "égalité équité caisse"

 

– Les actions de prévention doivent être davantage dirigées vers les déterminants environnementaux de santé, outre les déterminants individuels – c’est-à-dire les comportements de santé de chacun –, qui sont aujourd’hui privilégiés dans notre politique de prévention : créer un environnement favorable à la santé est propice à la réduction des inégalités de santé ;  

– Les actions doivent intervenir le plus précocement possible, dès la grossesse, pour être les plus efficaces et « rentables » ;

– Les actions doivent s’inscrire dans la durée, car c’est la condition de leur efficacité : des interventions ponctuelles n’ont pas de résultats probants.

1.   Privilégier une prévention “différenciée”, ciblée sur ceux qui en ont le plus besoin

● Les actions de prévention générales, sans ciblage, conduisent à accroître les inégalités sociales de santé et sont associées à un risque de saupoudrage des moyens, qui ne sont pas orientés vers ceux qui en ont le plus besoin : cela revient à « arroser là où la terre est déjà mouillée », pour reprendre une expression imagée fréquemment entendue au cours des auditions.

Il faut donc privilégier une approche d’« universalisme proportionné », définie par le professeur britannique Michael Marmot, en tenant compte du gradient social de santé : l’objectif est qu’à la fois l’ensemble de la population puisse accéder aux programmes de prévention et de soins, tout en accordant une attention plus grande aux populations les plus exposées aux risques, selon leur position sociale et leur statut socio-économique.

Cette approche doit aussi intégrer une dimension géographique, car certains territoires, tels les outre-mer, sont caractérisés par des difficultés sanitaires particulières, ce qui impose de déployer des efforts plus grands pour les résorber.

Les actions de prévention doivent cibler les populations à risque, en revêtant une intensité plus grande auprès d’elles pour réduire les inégalités sociales et territoriales de santé. Toutefois, la prévention différenciée porte en elle le risque de générer une stigmatisation des personnes concernées. Il convient ainsi d’être particulièrement attentif à cette dimension et prévoir des dispositifs satisfaisant à des critères éthiques stricts.

Cela implique d’identifier les populations et territoires qui doivent être ciblés, donc de disposer de données locales précises sur les difficultés spécifiques des populations, qu’il s’agisse de la prévalence de l’obésité et du diabète, des problèmes de santé mentale, du tabagisme, etc.

● Un exemple évoqué en audition permet d’illustrer cette approche : en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, l’ARS a travaillé sur un relevé de l’indice de masse corporelle (IMC) d’enfants scolarisés en grande section de maternelle, transmis par les deux rectorats, afin d’en faire une analyse cartographique pour identifier les écoles où les enfants avaient un IMC supérieur à la moyenne. Un programme d’éducation nutritionnelle intitulé Ratatouille et Cabrioles a ensuite été déployé dans les établissements ciblés. On peut également évoquer l’exemple du programme général de prévention bucco-dentaire M’T dents déployé par la CNAM depuis 2005 auprès de tous les jeunes de 6 à 24 ans ([164]) , qui a donné lieu à une déclinaison particulière pendant l’année scolaire 2016-2017 dans des classes de CP situées en zones REP et REP+ , notamment avec des séances de dépistage sur place.

Une démarche d’universalisme proportionné impose de prendre davantage en compte les jeunes qui se trouvent les plus éloignés des actions générales de prévention, alors qu’ils ont des besoins en santé généralement bien plus grands que la moyenne, notamment les jeunes relevant de l’aide sociale à l’enfance (ASE), qu’ils soient placés en établissement ou hébergés par un assistant familial, mais aussi ceux relevant de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ).

2.   Améliorer le niveau de littératie des enfants et mettre l’accent sur les compétences psychosociales

Les interventions de prévention et de promotion de la santé auprès des jeunes doivent s’articuler autour de deux priorités, qui sont d’ailleurs liées : l’amélioration du niveau de littératie en santé des enfants et le développement de leurs compétences psychosociales. Sur ces deux points, le parcours éducatif de santé constitue un outil central, car les actions menées à l’école permettent de toucher tous les enfants, dans toutes les classes d’âge.

● Les actions visant à accroître le niveau de littératie des enfants sont destinées à leur faire acquérir les connaissances et les compétences leur permettant de prendre en charge leur santé de façon autonome et responsable et d’exercer leur libre arbitre en toute connaissance de cause.

Cette approche rejoint la notion d’empowerment des populations à l’égard de la prévention, qui vise à les impliquer dans l’amélioration et la protection de leur santé, en leur donnant la maîtrise des déterminants de leur santé et en leur permettant de protéger leur capital santé.

● Les programmes de prévention, notamment ceux développés dans le cadre de l’éducation nationale, doivent mettre l’accent sur le développement des compétences psychosociales, dont on a vu supra qu’elles jouent un rôle décisif en matière de prévention pour les jeunes, particulièrement à l’égard des conduites addictives. Par ailleurs, le renforcement des CPS est un atout dans la promotion de la santé sexuelle, ainsi que dans la lutte contre la radicalisation, qu’elle soit politique ou religieuse.

Cela implique de déployer sur l’ensemble du territoire les actions menées de façon expérimentale dans certaines académies ou certains départements, et de les conduire dans la durée, pour qu’elles aient une réelle efficacité, dès le plus jeune âge et jusqu’au lycée.

3.   Identifier les actions à l’efficacité prouvée pour les généraliser et diffuser les initiatives locales efficaces

● La mise en œuvre d’actions évaluées, à l’efficacité prouvée, doit être généralisée. Il s’agit de permettre aux financeurs comme aux acteurs de l’intervention de disposer à la fois de documents d’aide à l’élaboration fondés sur des données solides et d’exemples d’interventions efficaces en prévention et promotion de la santé, portant sur les différents déterminants de santé, et de les déployer sur l’ensemble du territoire. L’objectif serait d’identifier entre 20 et 30 interventions de prévention et de promotion de la santé, portant sur les différents déterminants de santé ([165]) et de les déployer sur l’ensemble du territoire.

Bien évidemment, cela implique de s’interroger systématiquement sur les conditions de transférabilité des actions selon les contextes locaux et d’adapter les interventions aux spécificités des territoires.

Cette approche est indissociable d’un renforcement de l’évaluation des actions, par la mise en place d’un portail national sur les interventions en santé publique (voir infra).

●  En sens inverse, selon une approche « bottom-up » les initiatives locales qui fonctionnent bien doivent être identifiées et « remonter » vers les instances régionales et nationales pour pouvoir être diffusées. Il s’agit de valoriser les actions locales et l’innovation. On constate en effet une profusion d’initiatives au niveau local, mais peu de remontées d’informations : des initiatives créatives et efficaces restent confidentielles et circonscrites.

À titre d’exemple, à La Réunion, le taux de grossesses précoces est élevé et ne régresse pas. Au sein du lycée professionnel de Vue-Belle, à Saint-Paul, situé dans ce département, des jeunes ont travaillé sur la réalisation d’un jeu de société sur la santé sexuelle, et les résultats obtenus, en termes de diminution des grossesses précoces, se sont avérés remarquables. L’objectif est de faire remonter ce type d’initiatives, pour que d’autres territoires et collectivités puissent bénéficier de l’expérience acquise.

4.   Renforcer le suivi individuel de chaque famille et enfant, de la grossesse à 18 ans, par l’ensemble des professionnels de santé, la PMI et la médecine scolaire

●  Notre politique de prévention doit s’appuyer sur le développement des actions collectives, mais aussi sur le renforcement du suivi individuel. Cela implique de définir des rendez-vous obligatoires, en s’inscrivant dans les dispositifs existants (certificat du 8ème jour, visites médicales scolaires, etc), pour assurer un suivi rigoureux et systématique des enfants et adolescents.

Cinq visites obligatoires devraient être réalisées, par les médecins de PMI, les médecins scolaires, mais aussi les médecins hospitaliers et libéraux, aux étapes suivantes : aux huit jours du nouveau-né, puis au neuvième mois, à 3 ans, à 6 ans et à 12 ans.  

 La mise en place d’une consultation de prévention valorisée auprès des médecins et dentistes, pour tous les enfants à l’âge de six ans, voire de 3 ans, compte tenu de l’avancement de l’âge de l’instruction obligatoire prévu à partir de la rentrée de 2019,  irait également dans le bon sens.

À cet égard, on peut observer que la CSMF (confédération des syndicats médicaux français) et le groupe de protection sociale Klesia ont conclu en juin dernier un accord de collaboration portant sur des consultations de prévention dans un cadre professionnel ; une telle consultation sera opérationnelle à la rentrée 2018 pour les salariés de la branche des transports routiers. 

● Développer le suivi individuel de la santé des jeunes implique de venir au secours de deux acteurs essentiels aujourd’hui en grande difficulté : les services de PMI et la médecine scolaire.

Il est indispensable de dresser un état des lieux précis des services de PMI et de leur fonctionnement – le dernier rapport consacré à ces services est celui de l’IGAS, publié en 2006… – et de mesurer précisément les différences existantes dans les services et consultations accessibles dans les territoires.

Sur la base de constats étayés, il faudra étudier les moyens d’assurer l’égalité entre les différents départements, ce qui implique que ceux-ci réalisent les missions qui sont dévolues par la loi aux services de PMI, dans le respect du principe de libre administration des collectivités locales. Dans un premier temps, il faudrait demander aux conseils départementaux d’établir un rapport annuel d’activité et financier sur leurs services de PMI, pour rendre compte de l’exercice des compétences et missions qui leur sont confiées par la loi.

Un état des lieux similaire devrait être réalisé pour la médecine scolaire, afin d’identifier les territoires où les postes de médecins ne sont pas pourvus et où le taux de réalisation des bilans et visites est particulièrement bas.

Il faut veiller à ce que la direction des services de PMI soit bien assurée par un médecin, alors que certains départements ne respectent pas cette obligation légale, prévue par l’article L. 2112-1 du code de la santé publique. 

D’ores et déjà, les mesures visant à accroître l’attractivité des professions de médecins scolaires et de PMI doivent être renforcées.

Il serait utile de réformer l’organisation de la formation des médecins stagiaires de l’éducation nationale, qui sont contraints de suivre un cursus à Rennes pendant 8 à 16 semaines, en raccourcissant cette période au profit de formations décentralisées.

● Cette politique passe également par la mobilisation de tous les professionnels de santé autour de la prévention, ce qui inclut les médecins généralistes et les médecins spécialistes, les sages-femmes, mais aussi les infirmiers et les pharmaciens.

Le maillage territorial des pharmacies – environ 22 000 officines – et le niveau de formation des professionnels qui y travaillent sont deux atouts essentiels, qui doivent conduire à inclure davantage les pharmaciens dans les actions de prévention et de promotion de la santé ; les syndicats de pharmaciens ont d’ailleurs indiqué aux rapporteurs qu’ils étaient pleinement disposés à participer davantage, de façon coordonnée avec les autres acteurs.

Les infirmiers doivent également être des acteurs incontournables de la prévention et de la promotion de la santé, là encore du fait de leur maillage territorial – environ 116 000 infirmiers libéraux exercent leur activité aujourd’hui – et de leur proximité quotidienne avec les patients, qui permettent d’établir des liens de confiance avec les populations et de délivrer des messages de prévention qui seront bien reçus.

À cet égard, la mise en place du service sanitaire constitue une réelle avancée, en permettant une plus grande formation et sensibilisation de tous les futurs professionnels de santé aux enjeux de la prévention.

5.   Agir davantage sur les déterminants environnementaux

● Notre politique de prévention est largement articulée autour d’actions ciblant les déterminants individuels de santé, comme le rappelle le HCSP dans son rapport sur le PNNS, mais cette approche est précisément corrélée au creusement des inégalités de santé, en faisant reposer sur les individus la responsabilité d’adopter de bons comportements de santé.

S’il est indispensable d’intervenir sur les déterminants comportementaux en renforçant notamment la littératie en santé des enfants, cette approche doit être accompagnée d’actions résolues sur l’environnement, pour offrir aux populations le cadre de vie le plus favorable possible aux bons comportements de santé.

● Premier axe de cette approche, il importe de renforcer la régulation de l’accès aux produits addictifs, et plus largement de l’exposition aux facteurs de risque.

Comme le soulignait M. Jean-Pierre Couteron, président de Fédération Addiction, l’exposition des jeunes aux produits addictifs est beaucoup plus forte et plus précoce aujourd’hui, du fait des évolutions de notre société : la culture de la dérégulation s’est généralisée, c’est-à-dire la possibilité d’avoir un accès à tout, sans limite, qu’il s’agisse d’alcool, de tabac, de drogues, mais aussi de contenus violents ou pornographiques. Cette profonde mutation fait peser une charge supplémentaire sur les acteurs des politiques de prévention.

Sans prétendre revenir sur une telle évolution sociétale, il est indispensable de renforcer l’encadrement de l’exposition des jeunes à ces produits et facteurs de risque. Cela implique :

– de faire respecter scrupuleusement les interdits existants, que ce soit l’interdiction de vendre du tabac et de l’alcool aux mineurs ou l’établissement d’un débit de tabac à proximité d’un établissement scolaire ; les dispositions relatives à l’interdiction de la publicité directe ou indirecte en faveur de l’alcool autour des établissements scolaires en outre-mer, introduites par la loi sur l’égalité réelle outre-mer du 28 février 2017 ([166]), doivent être mises en œuvre ; cette mesure constitue en effet une forme d’expérimentation avant, le cas échéant, sa généralisation sur l’ensemble du territoire national.

L’interdiction de la vente de tabac et d’alcool aux mineurs pourrait d’ailleurs conduire à ouvrir le débat de l’interdiction de la consommation de ces produits par les mineurs, par cohérence avec l’interdiction de leur vente.  

– d’encadrer plus fortement les pratiques de marketing déployées par les industriels du tabac et de l’alcool en direction des jeunes pour contourner les interdits applicables en matière de publicité ; les jeunes sont particulièrement ciblés, à la fois parce qu’ils sont plus vulnérables et parce qu’ils sont les consommateurs de demain ;

– d’interdire la publicité à destination des enfants pour les produits alimentaires de mauvaise qualité nutritionnelle : les différents rapports publiés sur le sujet ([167]) soulignent les limites de l’autorégulation en la matière et préconisent une réelle règlementation du marketing alimentaire en direction de la jeunesse, dans la lignée des recommandations de l’OMS. La suppression de la publicité pour les programmes jeunesse diffusés par la télévision publique prévue par la loi dite « Gattolin » ([168]) doit être étendue, au moins en ce qui concerne les produits alimentaires, aux chaînes de télévision privées.

Il n’a évidemment pas échappé aux rapporteurs que ces préconisations sont difficiles à mettre en œuvre, compte tenu de l’influence exercée par l’industrie agroalimentaire, par les médias – la publicité constituant pour eux une source majeure de revenus ([169]) – et par les producteurs d’alcool ([170]). Ce constat ne saurait toutefois servir de prétexte à l’inaction.

● Deuxième axe, il est nécessaire d’agir sur l’environnement général des populations, ambition qui implique une action interministérielle :

– réduire l’exposition des populations à la pollution de l’air extérieur et intérieur, ainsi qu’aux produits chimiques dont les effets sur la santé sont mal connus, notamment les perturbateurs endocriniens ; cela concerne tout particulièrement les femmes enceintes, alors qu’en septembre 2017, des chercheurs de l’Inserm ont lancé l’alerte sur l’effet conjugué de différents perturbateurs endocriniens pendant la grossesse sur la santé de l’enfant à naître, notamment sur le développement de son système reproducteur ;

– améliorer la qualité de l’offre alimentaire par des mesures contraignantes, pour aller au-delà des chartes d’engagement de progrès nutritionnels des industries agroalimentaires : les propositions du HCSP en faveur d’une définition par voie règlementaire des standards de composition nutritionnelle par catégories d’aliments doivent être expertisées pour être mises en œuvre. Il faut également étudier la généralisation du Nutriscore, au-delà des seules entreprises volontaires, dans la lignée des mesures du plan « priorité prévention » qui prévoit son extension à la restauration collective et commerciale.

La qualité de l’offre alimentaire joue un rôle crucial sur la santé des populations : selon le rapport précité du HCSP sur le PNNS 3, une étude a modélisé qu’une réduction de 15 % à 25 % des apports de sel des aliments transformés en Australie et en Nouvelle-Zélande s’accompagnerait d’une diminution du risque d’événement cardio-vasculaire de 10 % à 20 % et d’une baisse de la mortalité totale de 6 % à 14 %.

– améliorer l’accessibilité des produits de bonne qualité nutritionnelle, en agissant sur les aliments servis en restauration collective, en créant des titres pour l’achat de fruits et légumes destinés aux populations défavorisées et en étudiant une réforme de la fiscalité des aliments selon leur qualité nutritionnelle ;

– créer un environnement favorable à l’activité physique : cela implique de mettre à disposition des populations davantage d’équipements sportifs, notamment en développant l’ouverture des gymnases de l’éducation nationale aux clubs sportifs, mais aussi de prendre en compte l’impact de l’aménagement des territoires, notamment urbains, sur la santé, avec la création d’espaces verts et de parcours piétons, le développement de pistes cyclables, l’aménagement des voies de transport, etc. Des mesures très simples peuvent avoir un impact significatif : placer des bancs sur les parcours de promenade, par exemple, permet d’accroître notablement l’activité des personnes âgées, mais aussi des enfants, ainsi que l’a montré l’installation de bancs sur une promenade à Nice.

À cet égard, les évaluations d’impact sur la santé (EIS), portant notamment sur les projets d’aménagement urbain, commencent à se développer en France. Elles doivent être encouragées : souvent réalisées par les ORS, elles visent à identifier les éléments d’une politique ou d’un projet qui pourraient avoir une influence sur la santé des populations et sur la distribution de ces effets au sein des différents groupes qui la composent, afin d’éclairer la décision publique pour maximiser ses effets positifs sur la santé.

6.   Retenir des vecteurs d’intervention adaptés à la jeunesse et associer les jeunes aux politiques de prévention

● Renforcer l’efficacité de la politique de prévention en direction des jeunes, notamment des adolescents, implique de privilégier les vecteurs de communication qu’ils utilisent : en cela, les médias traditionnels – télévision, radio, affiches, dépliants – ne sont pas nécessairement les plus efficaces, et c’est davantage sur internet, les réseaux sociaux et les applications sur smartphone qu’il faut faire porter les efforts. 

D’ores et déjà, Santé publique France a investi ces modes de communication, par exemple en créant le site onsexprime.fr, avec des vidéos courtes adoptant un ton décalé en faveur de la santé sexuelle et de la prévention des maladies sexuellement transmissibles. Le ministère de la santé s’est également associé, à la fin de l’année 2017, à deux vidéastes de vulgarisation scientifique très populaires sur Youtube, Julien Menielle, de la chaîne « Dans ton corps », et Bruce Benamran, de la chaîne « E-penser », pour la réalisation de vidéos sur la vaccination – l’une a été vue plus de 300 000 fois et l’autre plus de 530 000 fois.

Il appartient à Santé publique France et aux acteurs de la prévention de mettre davantage l’accent sur ces modes de communication, afin d’exploiter au mieux le potentiel des outils numériques pour informer les jeunes et faire de la prévention.

Ils pourraient utilement s’inspirer de l’exemple du ministère de la défense, qui s’est très bien approprié l’outil numérique pour ses campagnes de communication et de recrutement : l’armée de terre a ainsi une chaîne Youtube consacrée au recrutement, avec des vidéos très professionnelles, dont certaines sont vues par plusieurs millions de personnes.

Il est également nécessaire de développer davantage des interventions utilisant des outils numériques, comme des applications pour smartphone, des programmes de coaching sur internet, axés sur l’activité physique, le tabagisme ou l’alimentation. D’ores et déjà, des initiatives existent (par exemple, l’ecoaching proposé sur le site tabac-info-service.fr) mais elles ne semblent pas suffisamment connues, ni forcément adaptées et déclinées auprès du public jeune.

● Les campagnes de prévention et de promotion de la santé doivent davantage s’appuyer sur les principes du marketing social, en employant les méthodes similaires à celles des entreprises agroalimentaires, mais pour inciter à des comportements favorables à la santé. À cet égard, l’expertise collective de l’Inserm portant sur les comportements nutritionnels met en exergue plusieurs recommandations intéressantes ([171]).

● De façon générale, nombre de personnes auditionnées ont souligné que des interventions moralisatrices, fondées sur un discours de la faute, n’étaient pas efficaces, et qu’il était préférable de retenir une approche positive, qui ne soit pas « descendante », venant d’en haut, mais qui au contraire associe les populations.

Comme le soulignaient M. Franck Chauvin et M. Didier Jourdan, les actions de prévention doivent être pensées avec et pour les populations pour être efficaces. On n’agit pas de façon positive sur la santé des gens contre eux. Cela suppose de s’appuyer sur des associations implantées dans les territoires et les quartiers, qui connaissent les populations qui y vivent, de développer un dialogue citoyen et de recourir à la « prévention par les pairs », ce qui participe également de la démarche d’empowerment des populations évoquée supra.

La « prévention par les pairs » suppose en effet que les actions de prévention soient conduites par des personnes perçues comme semblables aux bénéficiaires de l’action, par leur âge, leur fonction, leur situation sociale, leur éducation, leur appartenance ethnique, leur culture ou leur mode de vie([172]).

Plus spécifiquement, s’agissant des jeunes, cela implique de mettre l’accent sur la prévention et la promotion de la santé réalisées par des jeunes du même âge ou quasiment, qui peuvent faire passer des messages de façon plus efficace et adaptée (« les jeunes parlent aux jeunes ») et d’engager un dialogue, de susciter davantage de participation et de questions. Les « pairs éducateurs » peuvent également se situer dans une perspective d’entraide et de soutien, plutôt que dans une perspective « professorale » et descendante. Pour autant, la prévention par les pairs doit être encadrée et pensée, car elle implique de choisir les pairs ([173]), de les former et d’assurer un suivi des échanges.

Le service sanitaire mis en œuvre à partir de la rentrée de 2018 s’inscrit dans cette approche, alors que les étudiants en santé pourront être considérés par les élèves comme des « presque pairs », particulièrement lorsqu’ils interviendront dans les lycées.

C.   Améliorer les données de santé disponibles et développer l’évaluation des actions

1.   Rationaliser et améliorer les données de santé disponibles

Les données de santé sont cruciales en matière de prévention, à la fois pour disposer d’informations épidémiologiques permettant de cibler les actions de prévention et d’évaluer leur efficacité et pour assurer le suivi de l’état de santé des individus au travers des interventions des différents professionnels de santé.

a.   Moderniser le recueil de données de santé auprès de la médecine scolaire et de la PMI

Il est impératif d’améliorer le recueil des données de santé par la PMI et la médecine scolaire, qui est aujourd’hui disparate, archaïque et non harmonisé selon les territoires.

Cela implique de généraliser l’informatisation de ce recueil, au travers d’un modèle unique et national, que ce soit pour la médecine scolaire – ce qui est prévu dans le cadre du programme Esculape – et pour les services de PMI. L’objectif serait d’adopter un outil informatique commun, en étendant l’utilisation d’Esculape aux services de PMI et en l’adaptant si nécessaire.

Il importe de permettre l’utilisation des données collectées par la médecine scolaire – et le cas échéant par la PMI –, dans le cadre d’Esculape, à des fins statistiques et épidémiologiques, notamment par la DREES. Comme l’ont souligné plusieurs personnes auditionnées, notamment M. Jean-Marc Aubert, directeur de la DREES, cela implique de prendre en compte dès la conception des systèmes d’information la possibilité d’extraire des données de façon anonyme, pour pouvoir utiliser facilement les données récoltées par telle ou telle administration.

Cette orientation est indissociable d’un effort substantiel en faveur de la médecine scolaire et de la PMI, par une réorganisation des missions le cas échéant, afin d’accroître le taux de réalisation des visites, examens et dépistages médicaux et de disposer de données représentatives.

b.   Créer le dossier médical partagé dès la naissance

Après bien des déboires, le développement et le déploiement du dossier médical partagé (DMP) ont été relancés, sous la responsabilité de la CNAM. Il est nécessaire d’inciter à la création de ce DMP dès la maternité, en prévoyant par exemple l’automaticité de sa création à la naissance sauf opposition des parents.

Le DMP aurait ainsi vocation à remplacer le carnet de santé, en permettant d’enregistrer, de stocker et de consulter les examens et données de santé dès la naissance et ainsi disposer d’un historique complet, tant pour la personne concernée que pour les professionnels de santé. Aujourd’hui, il suffit de perdre son carnet de santé pour n’avoir plus aucune trace de son historique vaccinal… À l’ère du développement numérique dans tous les domaines, ce mode de fonctionnement semble d’un autre âge. 

c.   Mieux coordonner les producteurs de données de santé

S’il s’agit d’une entreprise de longue haleine, il apparaît indispensable d’engager un travail de coordination des producteurs de données de santé et de remise à plat de notre outil statistique.

Le SNDS, comportant les données sur les remboursements de soins et de médicaments, constitue un outil tout à fait remarquable qui offre un grand potentiel en santé publique, y compris en prévention.

Il doit toutefois être complété par des données portant sur les déterminants de santé à la fois exhaustives, actualisées et portant sur les différents territoires. Cela implique d’améliorer les dispositifs existants, en pilotant et en coordonnant au niveau national l’activité des différents producteurs de données pour obtenir des informations comparables sur l’ensemble du territoire.

Afin de mieux cerner les inégalités sociales et territoriales de santé, il serait également utile de prendre en compte la situation socio-économique des individus dans les bases de données de santé, pour les bases qui ne comportent pas d’informations de ce type, par exemple le niveau d’études ou encore le revenu fiscal des individus. Cela pourrait prendre la forme d’un indicateur de défavorisation géographique ([174]) – un tel indicateur est d’ores et déjà appliqué au sein du SNIIRAM.

d.   Doter le futur service national universel d’un volet médico-social et en faire le support d’un bilan médical des jeunes de 15 ans

● La journée de défense et de citoyenneté (JDC) touche environ 96 % d’une classe d’âge ([175]) et a réuni environ 770 000 jeunes en 2017 ; elle est réalisée dans l’écrasante majorité des cas (94 %) à 17 ans. Par son quasi-universalisme, elle pourrait permettre de recueillir des informations de santé très exhaustives auprès des jeunes de 17 ans. Néanmoins, le format actuel de la JDC – une journée, soit sept heures de présence des jeunes – est trop court pour réaliser une visite médicale et même pour faire remplir un questionnaire médical systématique ([176]).

La JDC est toutefois l’occasion de délivrer aux jeunes des informations relatives à la santé, notamment sur le don d’organes et de gamètes, sur le don du sang ainsi que sur la vaccination. Elle sert également de support à la réalisation de l’enquête Escapad, se déroulant sur deux semaines tous les trois ans ([177]) et axée sur la consommation par les jeunes de substances psychoactives.

Pour mémoire, avant la suspension du service national en 1996, les « trois jours » comportaient une visite médicale destinée à évaluer l’état de santé des jeunes, mais par construction, cette visite ne concernait que la moitié d’une classe d’âge, à savoir les jeunes hommes.

● En revanche, dans le cadre de la mise en place du service national universel (SNU) actuellement à l’étude, se pose la question de l’introduction d’un module médico-social : le récent rapport relatif à la création du SNU ([178]) préconise que dans le cadre de la première phase du SNU, dite « de cohésion », qui concernerait les jeunes de 15 à 18 ans, une vérification de l’état de santé des jeunes soit réalisée.

Le SNU, dont le format sera bien plus long que la JDC, constituerait en effet une opportunité unique de recueillir des données de santé auprès de tous les jeunes de 15 ans, sachant que précisément, à cet âge charnière, aucune visite ou bilan médical n’est aujourd’hui prévu.

Les rapporteurs estiment qu’il serait très utile d’intégrer une telle composante sanitaire au sein du SNU, en prévoyant des modalités de recueil informatisées des données de santé qui soient compatibles avec les systèmes d’information utilisés par la médecine scolaire. Cette composante sanitaire pourrait inclure des actions de promotion de la santé – en s’appuyant sur le service sanitaire, par exemple.

2.   Renforcer l’évaluation des actions et des politiques de prévention

a.   Développer un portail national sur les interventions évaluées de prévention

● Une refonte de notre politique de prévention et de promotion de la santé impose de s’appuyer des actions à l’efficacité scientifiquement évaluée – l’objectif étant, comme indiqué supra, d’identifier un certain nombre d’interventions efficaces et d’encourager leur généralisation dans les territoires.

Cela implique de disposer d’un ensemble d’interventions de santé publique scientifiquement validées et mises à la disposition des acteurs de prévention, dans le cadre d’un portail national d’actions de prévention, qui inclurait des projets issus de la recherche interventionnelle. Les 20 ou 30 interventions « de référence » évoquées supra, y seraient recensées de façon privilégiée.

L’initiative Inspire ID présentée supra s’inscrit dans cette logique mais elle ne semble bénéficier ni du portage ni des moyens nécessaires pour être utilisée par l’ensemble des acteurs de prévention. Il est donc nécessaire de lui donner une plus grande résonance.

Ce portail doit permettre d’aller plus loin que la base de données OSCARS, qui recense les actions de prévention sans apporter d’informations sur leur efficacité ou sur les évaluations qui en ont été faites.

Il devrait aussi comporter un module permettant aux acteurs locaux de faire remonter leurs propres interventions, lorsqu’elles ont prouvé leur efficacité, dans le cadre de la démarche « ascendante » évoquée supra.

À une autre échelle, la création en France de la chaire UNESCO, couplée au centre collaborateurs OMS « EducationS & Santé », a pour ambition de promouvoir la recherche, la formation et le soutien au développement des politiques et des pratiques dans le champ de la promotion de la santé des enfants et adolescents à l’école et dans leur environnement. Elle s’appuie sur un consortium d’universités, institutions, collectivités et réseaux internationaux. Cet ancrage au sein des différents réseaux nationaux et internationaux les positionne comme un acteur stratégique pour le soutien scientifique au développement d’outils d’intervention et à l’élaboration de politiques intersectorielles entre la santé et l’éducation.

● La mise en place d’un tel portail doit s’accompagner de formations auprès des acteurs de la prévention, à la fois pour renforcer leurs compétences et leur culture de l’évaluation et pour les former à la mise en œuvre d’interventions validées en santé publique. Dans la lignée des préconisations du HCSP formulées dans son rapport sur la stratégie nationale de santé, il serait nécessaire que les acteurs de prévention bénéficient d’un accompagnement et de transferts de connaissances, qui seraient mis en œuvre par une organisation régionale structurée, fédérant les acteurs locaux.

Il serait également nécessaire de développer des centres de ressources documentaires spécialisés capitalisant les expériences, relayant les actions probantes et fournissant des outils pédagogiques « clés en main ».

A cette mesure, doit être associé un investissement plus important en recherche interventionnelle, permettant de concevoir et d’évaluer les interventions de santé publique.

b.   Définir un tableau de bord de l’état de santé de la population pour piloter la politique de prévention

Il est nécessaire de remettre sur le métier la réflexion engagée en 2013 sur l’établissement d’un tableau de bord synthétique, comprenant un nombre limité d’indicateurs destinés à apprécier l’état de santé de la population française et son évolution. L’objectif serait d’élaborer un outil d’aide au pilotage et à l’évaluation des politiques de santé publique et, plus spécifiquement, de prévention.

Les travaux réalisés par le HCSP en 2013-2014 pourraient être utilement repris. L’un des indicateurs qui semble devoir être retenu est celui de la santé bucco-dentaire : de l’avis de plusieurs personnes auditionnées, il constitue un très bon prédicteur de l’état de santé des individus, en ce qu’il reflète à la fois leur niveau de vie, leurs comportements nutritionnels (avec le cas échéant les effets d’une forte consommation de produits sucrés) ainsi que l’accès ou non aux soins bucco-dentaires. 

D.   mieux financer et professionnaliser la prévention

1.   Améliorer la connaissance des dépenses fléchées vers la prévention

A la lumière des auditions réalisées, il apparaît clairement que l’évaluation des moyens alloués à la prévention sanitaire doit être remise à plat et faire l’objet de travaux rigoureux et approfondis, en actualisant des chiffres qui ont été vieillis au cours des années et en prenant mieux en compte des dépenses aujourd’hui laissées de côté.

● Cela implique tout d’abord que soit institué un document de politique transversale (DPT) dit « orange budgétaire », ou bien une annexe générale dite « jaune budgétaire », sur la prévention en faveur de la santé, qui serait annexé chaque année au projet de loi de finances. Le DPT, recommandé à deux reprises par la Cour des comptes, devrait permettre d’avoir une vision d’ensemble de l’effort budgétaire consenti par l’Etat en faveur de la prévention, en prenant en compte les actions de tous les ministères, y compris par exemple les crédits accordés par le ministère des sports ou celui de l’agriculture pour le financement d’actions de prévention primaire. Un « jaune budgétaire » serait de portée plus large, et serait destiné à évaluer l’ensemble des financements dévolus à la politique de prévention, qu’ils viennent de l’État, de la sécurité sociale, des collectivités territoriales ou encore des acteurs privés – sur le modèle du « jaune budgétaire » portant sur la formation professionnelle.

● Dans cette perspective, il est indispensable d’améliorer l’évaluation des ressources fléchées vers la prévention par les différents acteurs, et au premier chef par les collectivités territoriales.

Cela implique d’affiner la nomenclature budgétaire et comptable actuelle, qui ne permet pas aujourd’hui d’identifier les dépenses des communes, EPCI et régions consacrées à la prévention, et de réaliser un travail statistique fin par niveau territorial, afin de chiffrer les dépenses consacrées à la prévention par les différentes collectivités et d’apprécier, le cas échéant, les inégalités pouvant exister entre les territoires.

Ce n’est qu’en disposant de chiffres précis et étayés, permettant d’avoir un état des lieux complet et exact, que l’on pourra piloter la dépense consacrée à la prévention et définir le cas échéant une trajectoire d’évolution. Pour l’heure, les zones d’obscurité sont trop nombreuses.

2.   Accroître les moyens alloués à la prévention, notamment la prévention primaire, pour investir dans l’avenir

● Au risque de reprendre une préconisation formulée déjà à plusieurs reprises, il est nécessaire que la priorité affichée en faveur de la prévention par le Gouvernement se traduise dans les financements qui y sont alloués. Certes, le plan portant sur la prévention annoncé en mars dernier est doté de financements supplémentaires de 400 millions d’euros sur cinq ans. Néanmoins, définir une priorité en faveur de la prévention implique d’engager une réflexion sur la répartition de nos dépenses de santé entre dépenses consacrées aux soins, d’ordre curatif, et dépenses fléchées vers la prévention.

 Allouer davantage de moyens à la prévention est un réel investissement sur l’avenir : le retour sur investissement est incontestable, mais n’est pas immédiat, ce qui implique de dépasser un horizon politique de court terme.

Il apparaît à cet égard nécessaire de renforcer les moyens alloués à Santé publique France, acteur central de la prévention en France, alors même qu’il a connu une diminution de ses effectifs au cours des dernières années ; les équipes travaillant en son sein sur la prévention des différents risques, notamment, sont peu étoffées. Une politique de santé publique ambitieuse impose de donner davantage de moyens à son opérateur de tête – pour mémoire, si Santé publique France dispose d’effectifs d’environ 70 personnes sur les sujets de prévention et de promotion de la santé, son homologue britannique compte environ 240 personnes travaillant sur ces mêmes sujets, avec de surcroît une direction dédiée au marketing social comptant 98 agents…

● La priorité accordée à la prévention implique aussi une clarification de son financement, qui est aujourd’hui éclaté, pour permettre un pilotage d’ensemble efficace. Il serait opportun d’engager une réflexion sur la création d’un fonds dédié au financement des actions de prévention des acteurs institutionnels, pour améliorer la lisibilité, la coordination et l’efficacité des dépenses en la matière.

La création du « fonds tabac » ([179]) constitue une avancée, avec 100 millions d’euros prévus en 2018 pour le financement des actions locales, nationales et internationales de lutte contre le tabagisme – ces moyens provenant d’une contribution à la charge des fournisseurs de tabac. Le « fonds tabac » reste toutefois sectoriel et n’améliore pas la gouvernance et le financement global de la prévention.

Il pourrait être la première étape d’un fléchage d’une partie du produit des « taxes comportementales » vers le financement des actions de prévention et de promotion de la santé. À l’heure actuelle, ces taxes, telles que le droit de consommation sur le tabac, les droits de consommation sur les alcools et la cotisation sur les alcools de plus de 18 degrés, la contribution sur les boissons sucrées et celle sur les boissons édulcorées, viennent financer l’assurance maladie et la MSA, mais elles n’abondent pas les dépenses de prévention et de promotion de la santé – à l’exception du fonds tabac, donc. Pour mémoire, le montant total des recettes de ces taxes s’établit à près de 17 milliards d’euros. 

Montant et affectation des principales taxes comportementales

Nature de l’imposition

Organisme chargé du recouvrement

Montants prévus pour 2018

Affectation des ressources

Droit de licence sur la rémunération des débitants de tabac

DGDDI

330 millions d’euros

CNAMTS

Droit de consommation sur les tabacs

DGDDI

11,84 milliards d’euros

CNAMTS (99,75 %) et RAVGDT (0,25 %)

Contribution sociale à la charge des fournisseurs de tabac

DGFIP

132 millions d’euros

Fonds tabac -CNAMTS

Droits de consommation sur les alcools

DGDDI

2,22 milliards d’euros

CCMSA non salariés

Droit de circulation sur les vins, poirés, cidres et hydromels

DGDDI

118 millions d’euros

CCMSA non salariés

Cotisations sur les alcools de plus de 18°

DGDDI

728 millions d’euros

CCMSA non salariés

Droit de circulation sur les bières et boissons non alcoolisées

DGDDI

980 millions d’euros

CCMSA non salariés

Contribution sur les boissons sucrées

DGDDI

322 millions d’euros

CCMSA non salariés

Contribution sur les boissons édulcorées

DGDDI

48 millions d’euros

CCMSA non salariés

Taxe spéciale sur les huiles végétales, fluides ou concrètes

DGDDI

137 millions d’euros

CCMSA non salariés

Taxe Premix

DGDDI

1 million d’euros

CNAMTS

Source : annexe 6 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018

3.   Professionnaliser le secteur de la prévention, par la formation des acteurs

● Parallèlement au développement de l’évaluation et de l’expertise, notamment via la recherche interventionnelle, il est indispensable de renforcer la formation des acteurs de la prévention, qu’il s’agisse des acteurs « de première ligne » ou de ceux mettant en œuvre et organisant les politiques de prévention. La prévention ne s’improvise pas.

Comme vu supra, les parcours de formation ne sont pas suffisants, au regard des quelques masters existants. La structuration et la professionnalisation des acteurs de la prévention devraient s’accompagner du développement des cursus de formation initiale et continue – les deux processus devant s’alimenter de façon itérative.

La mise en place du service sanitaire imposera en tout état de cause de déployer des moyens supplémentaires afin de piloter les modules de formation destinés aux plus de 50 000 étudiants en santé.

● L’enjeu de la formation est tout aussi crucial chez les acteurs de prévention qui occupent par ailleurs d’autres fonctions – en premier lieu, évidemment, les enseignants, mais aussi tous les adultes travaillant dans les milieux éducatifs et prenant en charge des mineurs, comme les éducateurs sportifs ou les animateurs sociaux.

Il est indispensable que les enseignants bénéficient d’une formation initiale solide et systématique en prévention et promotion de la santé pour pouvoir mettre en œuvre le parcours éducatif de santé, ce qui suppose que les Espé harmonisent et renforcent leurs modules de formation.


1

   feuille de route

Trois principes

– Pour faire « décoller » une politique de prévention et permettre une véritable prise de conscience collective, le portage politique est essentiel ;

– Il n’est pas nécessaire de créer de nouvelles structures mais plutôt de mettre en avant et d’accroître l’efficacité et l’influence des structures qui existent déjà, mais auxquelles toute la place n’a pas été faite ;

– Pour réussir, il est impératif de décloisonner les secteurs sanitaire, socio-sanitaire et éducatif, afin de mobiliser tous les acteurs autour d’une politique de prévention érigée au premier rang des priorités.

I. Gouvernance structurée et clarifiée, articulant le pilotage national et déclinant les actions auprès des jeunes

Un pilotage national : le Comité interministériel pour la santé du 26 mars dernier et la réunion des directeurs d’ARS et des recteurs d’académie ont été des signaux forts.

● Mise en place d’une délégation interministérielle

Une organisation territoriale :

● Faire de la « direction de la santé publique » le pivot des ARS.

● Donner tout son rôle à la Commission de coordination des politiques publiques de santé (CCPPS), qui réunit notamment l’ARS, la préfecture, le rectorat, la Dirrecte, la Dréal, les conseils départementaux et régionaux, des représentants des communes et intercommunalités et des représentants des organismes de sécurité sociale

Rassembler les acteurs de première ligne autour d’un maillage territorial :

Organiser leur travail en commun avec au moins une rencontre annuelle et généraliser :

● Les contrats locaux de santé (CLS) réunissant les  élus (communes ou intercommunalités), l’ARS, l’éducation nationale, les associations, etc

● Les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS)

II. Actions précoces, ciblées et différenciées, selon un universalisme proportionné

 Venir au secours de deux acteurs essentiels aujourd’hui en grande difficulté :

 Les services de PMI : demander aux conseils départementaux de rendre compte de la compétence qui leur a été confiée par la loi, par un rapport d’activité et financier annuel

– La médecine scolaire : rendre attractif le métier de médecin scolaire par une réforme de leur statut et permettre une mixité d’exercice médical afin de faciliter leur recrutement

 Renforcer le suivi individuel dès la grossesse, en organisant cinq rendez-vous obligatoires, à 8 jours, à neuf mois, à 3 ans, à 6 ans et à 12 ans, et en mettant en place une consultation de prévention valorisée pour les professionnels de santé pour les enfants à l’âge de 6 ans, voire de 3 ans, compte tenu de l’avancement de l’âge de l’instruction obligatoire prévu à partir de la rentrée de 2019. Associer pharmaciens, sages-femmes, infirmiers, orthophonistes…, cette proposition étant rendue possible par le décloisonnement de la médecine (médecins hospitaliers, de PMI, scolaires ou libéraux)

 Instaurer le dossier médical personnel (DMP) dès la naissance, remplaçant le carnet de santé et compatible avec Esculape 

 Développer un portail national des interventions évaluées de prévention, avec une approche « top-down » et « bottom-up », en identifiant une vingtaine ou une trentaine d’actions évaluées de prévention pour les déployer sur les territoires

 À l’école, le parcours éducatif de santé est un outil central pour l’amélioration du niveau de littératie en santé des enfants et le développement de leurs compétences psychosociales

 Sur les bassins de vie, avec le soutien des IREPS et la participation des associations, accélérer la mise en place des CLS et CPTS

III. Déterminants environnementaux

 Impliquer les décideurs publics dans la politique de prévention, par la prise en compte des enjeux de santé lors de toute prise de décision, en introduisant un « volet santé » dans la préparation des projets de loi, ainsi que des schémas et plans nationaux, régionaux ou locaux

 Créer un environnement favorable à l’activité physique, par le développement des équipements sportifs, mais aussi dans l’aménagement des territoires

 Renforcer la régulation de l’accès aux produits addictifs en faisant respecter les interdits existants, en encadrant les pratiques de marketing des industriels du tabac et de l’alcool en direction des jeunes qui contournent les interdits en matière de publicité, interdire la publicité à destination des enfants pour les produits alimentaires de mauvaise qualité nutritionnelle

 Améliorer la qualité de l’offre alimentaire en généralisant le Nutriscore par exemple

 Améliorer l’accessibilité des produits sains, en agissant sur les aliments servis en restauration collective et en étudiant une réforme de la fiscalité des aliments selon leur qualité nutritionnelle

IV. Vecteurs d’intervention

Retenir des vecteurs d’intervention adaptés à la jeunesse et associer les jeunes aux politiques de prévention

 S’appuyer sur les principes du marketing social

● Adopter une approche positive, qui ne soit pas « descendante », mais au contraire associe les populations.

MM. Franck Chauvin et M. Didier Jourdan soulignent que les actions de prévention pensées avec et pour les populations sont efficaces.

V. Données de santé

Améliorer la collecte et la gestion des données de santé pour développer l’évaluation des actions : les données de santé sont cruciales en matière de prévention, permettant de cibler les actions de prévention, d’évaluer leur efficacité et d’assurer le suivi de l’état de santé des enfants.

 Faire converger les systèmes d’informatisation et de recueil des données de la CPAM, de la PMI, de la médecine scolaire, au travers d’un modèle unique et national, à des fins statistiques et épidémiologiques

Cela implique de prendre en compte dès la conception des systèmes d’information la possibilité d’extraire des données de façon anonyme.

S’il s’agit d’une entreprise de longue haleine, il apparait indispensable d’engager un travail de coordination des producteurs de données de santé et de remise à plat de l’outil statistique.

 Établir un tableau de bord synthétique de l’état de santé de la population, comportant un nombre limité d’indicateurs nationaux, régionaux et locaux, et assurer le suivi dans la durée de ces indicateurs (surcharge pondérale, activité physique, état psychique, santé bucco-dentaire, littératie ou compétences psychosociales, etc)

VI. Dépenses

 Un « document de politique transversale » ou un « jaune budgétaire » sur la prévention sanitaire, annexé chaque année au projet de loi de finances (PLF) permettant d’avoir une vision d’ensemble de l’effort budgétaire en faveur de la prévention consenti par l’État – en prenant en compte les actions de tous les ministères, y compris par exemple les crédits accordés par le ministère des sports ou celui de l’agriculture pour le financement d’actions de prévention primaire –, mais aussi des moyens alloués par les autres acteurs (sécurité sociale, collectivités locales, acteurs privés…)

Cela permettrait d’identifier les inégalités territoriales existantes dans les dépenses consacrées à la prévention.

Disposer de chiffres précis et étayés nous donnerait un état des lieux complet, ce qui permettrait :

 De piloter la dépense de prévention et de définir le cas échéant une évolution.

 D’engager une réflexion sur la répartition de nos dépenses de santé entre dépenses consacrées aux soins, d’ordre curatif, et dépenses fléchées vers la prévention.

VII. Moyens et financements

 Encourager les financements venant des assurances, des mutuelles, des fondations d’entreprise ; leurs actions de prévention doivent être validées et contrôlées par l’autorité publique.

 Renforcer les moyens alloués à Santé publique France, acteur central de la prévention en France, étoffer les équipes travaillant en son sein sur la prévention des différents risques.

 Créer un fonds dédié au financement des actions de prévention des acteurs institutionnels. Il pourrait constituer une première étape d’un fléchage d’une part du produit des « taxes comportementales » vers le financement des actions de prévention et de promotion de la santé.

VIII- Professionnaliser le secteur de la prévention

 Former l’ensemble des acteurs par la mise en place de modules d’enseignement (dans les universités, les ESPE,…) pour renforcer leurs compétences et leur culture de l’évaluation et pour les former à la mise en œuvre d’interventions validées en santé publique.

 Développer des manuels de support et des « boîtes à outils »

 Déployer le service sanitaire sur tous les territoires

À moyen terme :

Préparer une loi de programmation permettant d’adosser une politique de prévention et doter le futur service national universel d’un volet médico-social.

 

 


1

   TRAVAUX DE LA COMMISSION

La commission des affaires sociales, sous la présidence de Mme Brigitte Bourguignon, présidente, s’est réunie le mercredi 12 septembre 2018 pour examiner le rapport d’information de M. Cyrille Isaac-Sibille et Mme Ericka Bareigts en conclusion des travaux de la mission d’information relative à la prévention santé en faveur de la jeunesse.

Cette réunion n’a pas fait l’objet d’un compte rendu écrit. Les débats sont accessibles sur le portail vidéo du site de l’Assemblée nationale à l’adresse suivante :

http://www.assemblee-nationale.tv/video.6564056_5b98be8925751.commission-des-affaires-sociales--prevention-sante-en-faveur-de-la-jeunesse-12-septembre-2018

La Commission autorise, en application de l’article 145 du Règlement, le dépôt du rapport d’information en vue de sa publication.

 


    

   annexe 1 :
répartition des dépenses des départements en faveur des services de protection maternelle et infantile et de planning familial

Départements

Dépenses en 2014

Dépenses en 2015

Dépenses en 2016

Dépenses en 2017

Nombre d'enfants de 0 à 4 ans au 1er janvier 2018

Dépenses du département rapportées au nombre d'enfants de moins de 4 ans en 2017

01 Ain

1 903 622

1 900 681

1 878 938

1 737 304

39 022

45

02 Aisne

1 418 103

1 676 576

1 287 627

1 273 244

30 704

41

03 Allier

540 678

536 231

464 022

475 097

15 316

31

04 Alpes-de-Haute-Provence

613 866

568 176

629 323

646 810

7 625

85

05 Hautes-Alpes

635 912

630 116

440 002

496 589

6 827

73

06 Alpes-Maritimes

2 575 558

2 802 270

2 519 619

2 808 794

55 585

51

07 Ardèche

1 717 695

1 773 872

1 652 242

1 426 005

15 861

90

08 Ardennes

680 148

602 893

659 221

534 028

14 053

38

09 Ariège

1 052

1 246

781

608

6 970

0

10 Aube

784 819

729 130

666 596

645 728

16 883

38

11 Aude

1 588 624

1 898 552

1 863 738

1 711 070

17 261

99

12 Aveyron

533 889

407 960

424 611

404 356

12 388

33

13 Bouches-du-Rhône

5 097 437

5 151 503

4 797 696

5 329 250

119 372

45

14 Calvados

1 337 759

1 329 533

1 310 358

1 246 267

34 859

36

15 Cantal

369 573

292 889

336 367

334 418

5 727

58

16 Charente

296 220

361 460

389 647

353 088

16 521

21

17 Charente-Maritime

1 243 076

846 856

833 785

855 228

27 930

31

18 Cher

1 048 286

803 367

675 181

729 830

14 576

50

19 Corrèze

546 592

537 884

375 352

379 756

10 004

38

2A Corse-du-Sud

4 335 951

4 560 742

4 686 033

5 246 558

7 203

728

2B Haute-Corse

1 918 787

1 981 503

2 098 341

2 070 798

8 298

250

21 Côte-d'Or

1 870 634

2 056 449

1 864 056

1 791 521

27 110

66

22 Côtes-d'Armor

4 944 718

4 859 298

5 006 236

4 951 433

28 514

174

23 Creuse

1 241 130

1 306 030

1 468 744

1 473 139

4 482

329

24 Dordogne

412 753

398 345

414 072

469 614

16 751

28

25 Doubs

657 225

663 698

570 020

504 826

31 081

16

26 Drôme

1 431 580

1 474 115

1 294 939

1 396 420

28 766

49

27 Eure

733 367

681 473

656 019

615 208

35 418

17

28 Eure-et-Loir

306 178

280 663

262 757

278 639

25 176

11

29 Finistère

4 366 180

3 837 532

3 212 829

2 648 317

43 962

60

30 Gard

9 740 615

9 148 118

9 268 031

9 708 182

39 085

248

31 Haute-Garonne

3 828 319

2 405 005

2 171 715

2 359 950

79 995

30

32 Gers

2 003 315

2 007 701

2 120 913

2 103 400

8 262

255

33 Gironde

1 204 893

1 233 941

1 253 139

1 248 541

85 644

15

34 Hérault

4 349 046

4 062 506

4 205 707

4 187 848

61 477

68

35 Ille-et-Vilaine

6 591 556

7 085 706

7 359 061

9 319 979

61 339

152

36 Indre

916 355

931 514

852 208

887 103

9 152

97

37 Indre-et-Loire

2 767 165

2 851 252

2 336 195

1 991 316

32 266

62

38 Isère

6 005 475

5 929 138

6 303 894

7 129 941

75 058

95

39 Jura

493 556

465 914

492 195

409 477

12 955

32

40 Landes

4 074 328

4 247 180

4 451 621

4 334 516

18 846

230

41 Loir-et-Cher

711 890

730 774

761 386

691 503

16 445

42

42 Loire

1 645 332

1 554 484

1 603 626

1 593 559

42 514

37

43 Haute-Loire

454 743

448 487

436 202

404 405

10 787

37

44 Loire-Atlantique

3 846 066

3 287 669

2 823 209

2 257 546

82 851

27

45 Loiret

5 641 693

5 728 558

5 713 661

5 764 238

39 809

145

46 Lot

1 776 291

1 823 185

1 864 648

1 848 975

6 784

273

47 Lot-et-Garonne

798 114

789 056

643 740

565 973

15 946

35

48 Lozère

257 553

246 507

267 430

257 981

3 237

80

49 Maine-et-Loire

983 212

1 009 905

834 164

1 121 074

46 252

24

50 Manche

5 081 697

4 938 978

4 930 939

4 781 520

23 836

201

51 Marne

2 644 526

2 740 895

2 561 636

4 255 113

32 068

133

52 Haute-Marne

284 735

284 800

299 224

278 393

8 376

33

53 Mayenne

380 182

347 123

345 385

303 958

16 761

18

54 Meurthe-et-Moselle

1 864 242

1 908 847

2 067 779

1 767 592

38 436

46

55 Meuse

347 632

344 120

342 648

273 936

9 228

30

56 Morbihan

872 632

1 024 344

995 867

1 009 598

36 280

28

57 Moselle

2 214 638

1 453 182

1 598 043

1 507 616

54 062

28

58 Nièvre

467 860

622 721

591 555

438 924

8 326

53

59 Nord

7 436 672

7 333 906

7 199 007

5 444 417

163 367

33

60 Oise

1 414 220

1 428 774

871 126

804 870

51 478

16

61 Orne

2 902 963

2 777 201

2 731 142

2 769 513

13 118

211

62 Pas-de-Calais

4 304 673

3 862 048

4 033 689

4 170 520

86 919

48

63 Puy-de-Dôme

5 520 540

5 730 152

5 902 201

6 042 620

33 010

183

64 Pyrénées-Atlantiques

3 242 894

2 352 188

3 245 638

3 192 343

31 920

100

65 Hautes-Pyrénées

449 547

464 515

3 340 200

3 377 622

9 536

354

66 Pyrénées-Orientales

1 549 451

1 588 282

1 908 091

1 489 856

23 350

64

67 Bas-Rhin

1 957 528

2 049 082

2 047 511

2 071 805

60 476

34

68 Haut-Rhin

1 288 704

1 660 048

1 832 753

1 627 596

42 874

38

69 Rhône

3 398 623

 

-

 

120 622

48

69D Rhône

-

535 816

583 883

575 654

 

 

69M Métropole de Lyon

-

4 673 146

4 926 087

5 254 732

 

 

70 Haute-Saône

245 738

244 559

263 123

219 861

11 867

19

71 Saône-et-Loire

1 179 560

1 276 971

1 349 445

1 721 722

26 530

65

72 Sarthe

1 218 361

1 182 730

1 337 017

1 148 188

31 085

37

73 Savoie

1 006 473

867 087

804 583

387 629

22 480

17

74 Haute-Savoie

1 841 239

1 750 583

1 594 214

1 547 174

50 934

30

75 Paris

33 210 693

31 975 880

31 949 561

32 731 702

108 029

303

76 Seine-Maritime

1 654 235

1 989 134

1 563 826

1 770 798

71 252

25

77 Seine-et-Marne

2 497 624

2 283 431

2 256 886

2 243 593

94 367

24

78 Yvelines

15 435 107

19 411 904

5 108 597

2 727 585

93 016

29

79 Deux-Sèvres

675 806

891 319

855 417

823 896

18 602

44

80 Somme

1 282 166

1 457 687

1 162 747

1 136 585

30 213

38

81 Tarn

855 866

854 900

818 792

795 221

18 721

42

82 Tarn-et-Garonne

410 646

357 945

264 902

256 965

14 368

18

83 Var

9 410 241

9 786 128

9 886 164

10 166 651

51 075

199

84 Vaucluse

459 876

680 484

519 746

489 285

31 485

16

85 Vendée

471 702

435 138

539 043

555 603

34 190

16

86 Vienne

502 945

486 168

503 981

542 981

21 947

25

87 Haute-Vienne

416 101

403 563

405 449

416 348

17 803

23

88 Vosges

1 321 970

1 091 648

978 768

1 232 665

17 052

72

89 Yonne

534 020

590 839

629 944

558 273

17 580

32

90 Territoire de Belfort

166 549

160 741

181 277

154 259

8 062

19

91 Essonne

1 525 072

1 459 771

1 350 039

28 710 653

90 376

318

92 Hauts-de-Seine

37 531 854

39 543 249

35 693 001

33 267 785

106 570

312

93 Seine-Saint-Denis

64 967 644

65 292 895

63 903 619

62 221 587

132 465

470

94 Val-de-Marne

45 621 369

47 930 463

46 880 388

45 810 219

94 074

487

95 Val-d'Oise

1 752 334

1 600 215

1 580 809

1 589 878

91 641

17

971 Guadeloupe

12 940 289

13 074 979

13 153 945

12 758 469

20 915

610

972 Martinique

3 547 908

2 872 598

11 136 463

5 228 536

17 725

295

973 Guyane

6 052 647

5 993 509

5 924 820

6 649 234

32 001

208

974 La Réunion

4 863 152

4 837 862

5 299 241

5 499 378

62 525

88

976 Mayotte

782 713

904 315

6 416 937

7 681 921

40 945

188

 

405 246 788

410 746 499

405 169 046

423 502 293

3 816 887

111

Source : direction générale des collectivités locales et estimation de la population par l’INSEE

Note de lecture : le tableau comporte des chiffres très probablement erronés pour le département de l’Ariège (dépenses sans doute sous-estimées) et pour celui de l’Essonne, pour lequel les dépenses en 2017 sont très élevées (28,7 millions en 2017, contre 1,35 million en 2016) mais les chiffres exacts ne sont pas disponibles.


   annexe 2 :
Liste des personnes auditionnées

(Par ordre chronologique)

                   École des hautes études en santé publique (EHESP) – M. Eric Breton, directeur de la chaire Santé publique France « Promotion de la santé », M. David Authier, maître de conférence et président du Réseau des universités pour l’éducation à la santé, et M. Eric Legrand, professeur associé en promotion de la santé et coordinateur de la chaire de recherche sur la jeunesse

                   M. Loïc Vaillant, professeur des universités et auteur du rapport « Mise en œuvre du service sanitaire pour les étudiants en santé »

                   Réseau français des Villes-Santé de l’OMS  Mme Charlotte Marchandise, présidente, Mme Patricia Saraux, vice-présidente et médecin directeur de la Mission santé publique de la ville de Nantes, et Mme Zoé Héritage, directrice-coordinatrice

                   Société française de santé publique (SFSP)  M. Emmanuel Rusch, président du bureau

                   Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) – M. Jean-Marc Aubert, directeur, Mme Muriel Barlet, sous-directrice de l’observation de la santé et de l’assurance maladie, et M. Patrick Aubert, sous-directeur de l’observation de la solidarité

                   Santé publique France  M. François Bourdillon, directeur général, Mme Sylvie Quelet, directrice de la prévention et de la promotion de la santé, et M. Mili Spahic, directeur de cabinet

                   Syndicat national des médecins de protection maternelle et infantile – M. Pierre Suesser, président, et Mme Cécile Garrigues, vice-présidente

                   Haut Conseil de Santé Publique (HCSP) M. Thierry Lang, membre du collège, et Mme Virginie Halley des Fontaines, vice-présidente de la commission spécialisée sur les maladies chroniques

                   Mme Marie Choquet, épidémiologiste, Mme Marie-Hélène Bouvier, épidémiologiste, et Mme Renée Pomarède, médecin de santé publique

                   Ministère des sports, direction des sports – Mme Laurence Lefèvre, directrice, et Mme Nadine Richard, sous-directrice de l’action territoriale, du développement des pratiques sportives et de l’éthique du sport

                   Mme Linda Cambon, professeure à l’EHESP et membre de la commission spécialisée sur les maladies chroniques du HCSP, et M. Pierre Arwidson, directeur adjoint de la prévention et de la promotion de la santé à Santé Publique France

                   Mme Carole Martin de Champs, directrice de l’Observatoire régional de santé (ORS) Auvergne-Rhône-Alpes et M. Julien Giraud, directeur adjoint de l’ORS Nouvelle Aquitaine, membre du bureau de la Fédération nationale des ORS (FNORS)

                   Mutualité française (*) Mme Géraldine Merret, responsable du pôle protection sociale à la direction de la santé,  M. Bertrand Dupouy, délégué à la jeunesse et aux mutuelles étudiantes, et Mme Meriem Bouchefra, chargée d’affaires publiques

                   Audition commune :

         Google France (*)  M. Benoît Tabaka, directeur des relations institutionnelles et des politiques publiques, et M. Olivier Esper, directeur des relations institutionnelles de Google France

         Facebook (*) M. Anton Battesti, directeur des affaires publiques, et Mme Ophélie Gerullis, responsable des affaires publiques

                   Fédération Addiction  M. Jean-Pierre Couteron, président, et M. Georges Martinho, délégué général adjoint

                   Fédération française des diabétiques (*) M. Gérard Raymond, président, et Mme Claire Desforges, responsable des affaires publiques

                   Direction générale de la santé (DGS)  M. Philippe Guilbert, de la mission Stratégie-Recherche, M. Patrick Ambroise, adjoint à la sous-directrice de la santé des populations et de la prévention des maladies chroniques, M. Michel Chauliac, de la sous-direction de la prévention des risques liés à l’environnement et à l’alimentation, M. Alain Fontaine, chef de la mission stratégie et recherche, et Mme Julie Bouscaillou, chargée de mission pour la santé des jeunes

                   Association nationale des industries alimentaires (ANIA) – M. Jérôme François, administrateur et président de la commission alimentation et santé, Mme Esther Kalonji, directrice de la commission alimentation et santé,  et M. Alexis Degouy, directeur des affaires publiques

                   Association nationale de prévention en alcoologie et addictologie (ANPAA)  M. Bernard Basset, vice-président, Mme Nelly David, directrice générale, et M. Guillaume Quercy, directeur des activités

                   Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche – Mme Rachel-Marie Pradeilles-Duval, cheffe du service de la stratégie des formations et de la vie étudiante, M. Jean-Christophe Paul, chef du département des formations de santé, et M. Stéphane Carton, adjoint de la cheffe du département de l’orientation et de la vie des campus

                   Forum français de la jeunesse – M. Anthony Ikni, délégué général du Forum Français de la Jeunesse, M. Baptiste Mougeot, vice-président d'EmeVia, M. Omar Didi, co-président du MAG Jeunes LGBT, et M.  Romain Panza, administrateur de la LMDE

                   Ministère de l’éducation nationale – Direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO) – Mme Françoise Pétreault, sous-directrice de la vie scolaire, des établissements et des actions socio-éducatives et Mme Véronique Gasté, cheffe du bureau de la santé, de l’action sociale et de la sécurité

                   Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) : M. François-Xavier Brouck, médecin conseil, directeur de la direction des assurés, et M. Saïd Oumeddour, responsable du département de la prévention et de la promotion de la santé

                   Mme Joëlle Boyer, présidente de l'association Total Respect, et Mme Christine Lazerges, présidente de la Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme (CNCDH)

                   M. Franck Chauvin, président du Haut conseil de santé publique, et M. Didier Jourdan, professeur en sciences de l’éducation à l’université d’Auvergne, titulaire de la chaire « éducationS et prévention » de l’Unesco

                   Table ronde :

       Fédération nationale d’éducation et de promotion de la santé (FNES)  M. François Baudier, président, et Mme Séverine Lafitte, coordinatrice des projets

       Instance régionale d’éducation et de promotion de la santé pour tous (IREPS) Nouvelle Aquitaine Mme Céline Fouchet, responsable du service programme et responsable de l’antenne de la Creuse, et Mme Céline Turcot, chargé de projets, à l’antenne des Landes

       Comité régional d’éducation pour la santé (CRES) Provence-Alpes-Côte d’Azur  Mme Zeina Mansour, directrice

                   EmeVia  Mme Christine Nunes-Manso, chargée de mission, et M. Benjamin Chkroun, délégué général

                   Mission interministérielle de lutte contre les drogues et conduites addictives (MILDECA) – M. Nicolas Prisse, président, et Mme Valérie Saintoyant, déléguée

                   M. Rémy Collomp, chef de pôle pharmacie au centre hospitalier universitaire de Nice, Mme Véronique Negre et Mme Thuy Nguyen

                   Actuarielles – Mme Anne Marion, présidente

                   Assemblée des départements de France – M. Jean-Michel Rapinat, directeur délégué des politiques sociales, et Mme Ann-Gaëlle Werner-Bernard, conseillère pour les relations avec le Parlement

                   Secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales (SGMAS) – Mme Béatrice Tran, chargée de mission

                   M. Jean-Paul Dupré, président de l’association régionale des missions locales d’Occitanie, M. Eric Augade, président des missions locales d’Occitanie, M. Lilian Ah Von, directeur de la mission intercommunale de l'ouest (MIO), et M. Jean-Pierre Munich, directeur de la mission locale ouest audois (MLOA)

                   Conseil économique, social et environnemental (CESE) – M. Jean-François Naton, co-rapporteur de l’avis,  Mme Fatma Bouvet de la Maisonneuve, co-rapporteure de l’avis, et M. Damien Lanel, administrateur de la section des affaires sociales et de la santé

                   Audition commune :

  Ministère de l’agriculture et de l’alimentation, direction générale de l’alimentation  M. Patrick Dehaumont, directeur général, et M. Cédric Prévost, sous-directeur de la politique de l’alimentation

  Conseil national de l’alimentation - Madame Karine Boquet, secrétaire interministérielle

                   Ministère de l’éducation nationale, direction de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative – M. Jean-Benoît Dujol, délégué interministériel à la jeunesse et directeur de la direction de la jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative

                   Mme Marie-Rose Moro, psychiatre, professeure des universités, directrice de la maison des adolescents de Solenn, Hôpital Cochin

                   Caisse nationale pour la solidarité et l’autonomie (CNSA) – Mme Marie-Anne Montchamp, présidente du conseil

                   CNAMTS  M. Yvon Merlière, directeur de la mission dossier médical partagé

                   Institut national des données de santé (INDS)Mme Dominique Polton, présidente, et Mme Yvanie Caillé, directrice

                   Table ronde :

 Ministère des solidarités et de la santé

 Ministère de l’action et des comptes publics

                   Institut national d’études démographiques (INED) – Mme Marie-Aline Charles, directrice d’études, responsable de l’étude démographique ELFE (étude longitudinale française depuis l’enfance), Mme Corinne Bois, coordonnatrice santé de la cohorte Elfe, médecin de PMI, et Mme Marie-Noëlle Dufourg, coordonnatrice santé de la cohorte Elfe, pédiatre

                   Table ronde :

  Fédération nationale des Orthophonistes (FNO) – Mme Anne Dehêtre, présidente

  Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI) – M. Thierry Amouroux, secrétaire général, et M. William Perel

  Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (SNIIL) – M. John Pinte, vice-président

 Fédération nationale des infirmiers (FNI) – M. Philippe Tisserand, président

                   Table ronde :

  Syndicat des psychiatres français (SPF) – M. Maurice Bensoussan, président, et M. François Kammerer, vice-président

  Syndicat des médecins généralistes (MG France)  Mme Alice Perrain, vice-présidente

  Syndicat des médecins libéraux (SML) – M. Philippe Vermesch, président, et Mme Sophie Bauer, secrétaire générale

  Confédération des syndicats médicaux de France (CSMF) (*)  M. Jean-Paul Ortiz, président

 Syndicat national des pédiatres français (SNPF) – Mme Brigitte Virey, présidente

– Syndicat national des pédiatres des établissements hospitaliers (SNPEH) – M. Jean-Louis Chabernaud, vice-président

                   Ministère de la défense  Général Philippe Pontiès, directeur du service national et de la jeunesse, et lieutenant-colonel Pierre-Augustin Bourdette

                   Table ronde :

 Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) – M. Philippe Besset, vice-président, et Mme  Jocelyne Wittevrongel, vice-présidente

  Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) – M. Gilles Bonnefond, président, Mme Bénédicte Bertholom, responsable des affaires réglementaires, et Mme Marie-Josée Augé-Caumon, conseillère

  Syndicat national des pharmaciens praticiens hospitaliers universitaires (SNPHPU)  M. Pascal Le Corre, président

                   Agence régionale de santé (ARS) d’Île-de-France  M. Luc Ginot, directeur de la promotion de la santé et de la réduction des inégalités

                   Mme Nicole Philibert, co-présidente de l’Association « Dystinguons-nous » et Mme Nathalie Groh, présidente de la Fédération française des DYS

                   Mme Corinne Bois, coordonnatrice santé de la cohorte Elfe, médecin de PMI

                   Agence régionale de santé (ARS) Nouvelle Aquitaine – M. Michel Laforcade, directeur général 

                   Secrétariat général des ministères chargés des affaires sociales, délégation à la stratégie des systèmes d’information de santé (DSSIS), service public d’information en santé (SPIS) – Mme Giovanna Marsico, déléguée et Madame Rachel Duriez, chargée de mission

(*) Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité de transparence pour la vie publique s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale.


([1]) Soit 85 ans pour les femmes et 78,9 ans pour les hommes, selon les données figurant dans « L’état de santé de la population en France » publié en 2017 par Santé publique France et la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES).  

([2]) Stratégie nationale de santé – contribution du Haut conseil de la santé publique, septembre 2017

([3]) Définition apportée par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en 1948.  

([4]) Charte d’Ottawa de promotion de la santé de l’OMS, 1986

([5]) Loi  2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé.

([6]) Loi  2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique.  

([7]) Loi  2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires.

([8]) Loi  2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.  

([9]) Les inégalités sociales de santé, Annette Leclerc, Didier Fassin, Hélène Grandjean, Monique Kaminski, Thierry Lang, Inserm, éditions la Découverte, 2000.  

([10])  L’espérance de vie par niveau de vie, INSEE Première, février 2018, n° 1687.

([11]) Pour une politique nationale nutrition santé en France – PNNS 2017-2021, rapport du Haut conseil de la santé publique (HCSP), septembre 2017.

([12])  L’état de santé de la population en France, édition 2017, DREES et Santé publique France

([13]) Panorama de la santé 2017, les indicateurs de l’OCDE, OCDE, 2017.  

([14])  Données de l’Enquête santé et protection sociale (ESPS) présentées dans l’État de santé de la population en France – 2017.

([15]) La classification NOVA permet de catégoriser les aliments selon 4 groupes, en fonction de leur degré de transformation industrielle (aliments peu ou pas transformés, ingrédients culinaires, aliments transformés, aliments ultra-transformés). Les aliments ultra-transformés comprennent par exemple les pains et brioches industriels, les barres chocolatées, les biscuits apéritifs, les boissons sucrées, les nuggets, les soupes instantanées, les plats cuisinés congelés ou prêts à consommer, et tous produits transformés avec ajout de conservateurs autres que le sel (nitrites par exemple). Des colorants, émulsifiants, texturants, édulcorants et d’autres additifs sont souvent ajoutés à ces produits.

([16]) Consumption of ultraprocessed foods and cancer risk : results from NutriNet-Santé prospective cohort, Collectif, février 2018, British Medical Journal.

([17]) S’agissant de Mayotte, l’absence de données portant sur les périodes antérieures  à 2014 s’explique toutefois par le fait que Mayotte n’est devenu le 101ème département français qu’en 2011.

([18]) État de santé de la population en France en 2017, DREES et Santé Publique France

([19]) Etudes Escal et Kannari reprises dans l’État de santé de la population en France en 2017.  

([20]) Diabète et santé publique à La Réunion, Comment transformer un cercle vicieux en un cercle vertueux, CESER Île de La Réunion, 2014.

([21]) État de santé de la population en France en 2017, DREES et Santé Publique France

([22]) Diabète et santé publique à La Réunion, Comment transformer un cercle vicieux en un cercle vertueux, CESER Île de La Réunion, 2014.

([23]) Note sur l’éducation et le droit à la protection de la santé dans les outre-mer, CNCDH, 15 mai 2018.

([24]) Études et résultats, n° 1057, DREES, avril 2018.

([25]) Ibid.

([26]) Enquête nationale périnatale – 2016 ; Les naissances et les établissements, Situation et évolution depuis 2010,  INSERM et DREES, octobre 2017  

([27]) Inégalités sociales de santé en lien avec l’alimentation et l’activité physique, sous la direction de l’Inserm, expertise collective, 2014 ; chapitre 12 sur les déterminants sociaux de l’allaitement.

([28])  Enquêtes nationales de santé réalisées auprès des élèves de grande section, de CM2 et de troisième, réalisées tous les deux ans par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES). 

([29]) Nouvelles approches de la prévention en santé publique, L’apport des sciences comportementales, cognitives et des neurosciences, Centre d’analyse stratégique,  2008.

([30]) « La santé des élèves de CM2 en 2015 : un bilan contrasté selon l’origine sociale », Études et résultats de la DREES, février 2017.

([31]) Audition de M. Jean-Benoît Dujol, délégué interministériel à la jeunesse et directeur de la direction jeunesse, de l’éducation populaire et de la vie associative.

([32]) Regards sur la santé publique d’hier à aujourd’hui, ADSP, septembre 2017. 

([33])  Baromètre santé 2017 ; consommations d’alcool et de tabac durant la grossesse, expertise collective, Santé publique France, 2018.

([34]) Surveillance des troubles causés par l’alcoolisation fœtale : analyse des données du programme de médicalisation des systèmes d’information en France entre 2006 et 2013, expertise collective, Santé publique France, 2018.

([35]) Arrêté du 30 juillet 1996 portant création du Comité de la prévention et de la précaution.

([36])  Le HCSP a pour mission de « contribuer à l’élaboration, au suivi annuel et à l’évaluation pluriannuelle de la stratégie nationale de santé » ainsi que de fournir aux pouvoirs publics l’expertise nécessaire  « à la conception et l’évaluation des politiques et stratégies de prévention et de sécurité sanitaire » (article L. 1411-4 du code de la santé publique). La HAS a pour objet d’améliorer la qualité du système de soins et médico-social ; elle est chargée d’évaluer la qualité et l’efficacité des actions ou programmes de prévention, notamment d’éducation pour la santé, aux termes de l’article L. 161-40 du code de la sécurité sociale.  

([37]) Loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique.

([38]) Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires et décret n° 2010-336 du 31 mars 2010 portant création des agences régionales de santé.

([39]) Article L. 1432-1 du code de la santé publique.

([40])  Loi n° 2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales.

([41]) Articles L. 2112-1 et L. 2112-2 du code de la santé publique. .  

([42]) Articles L. 221-1 et L. 221-2 du code de l’action sociale et des familles.

([43]) Voir pour la répartition des compétences le tableau Répartition des compétences, 31 août 2015 : https://www.collectivites-locales.gouv.fr/files/files/Annexe_1_Tableau_des_competences_Communes___Departements___Regions_14012016.pdf

([44]) Les chiffres clés en protection de l’enfance ; estimation des prises en charge au 31 décembre 2014, pour la France entière par l’Observatoire national de la protection de l’enfance (ONPE), en ligne : https://www.onpe.gouv.fr/chiffres-cles-en-protection-lenfance.  

([45])  Une convention existe entre l’Association pour le Logement des Jeunes Travailleurs (ALJT) et l’ARS en Ile de France, pour 435 actions menées auprès de 2 107 résidents en 2015, selon les données fournies par l’ARS d’Ile de France.

([46]) Six missions locales font l’objet de conventions pluriannuelles 2015/2017 dans le Val d’Oise. Réponses de l’ARS Île de France au questionnaire transmis par les rapporteurs de la mission d’information, juillet 2018.

([47]) Article L. 2112-2 du code de la santé publique.  

([48])  « Les services de PMI : plus de 5000 sites de consultations en 2012 », Études et résultats, DREES, avril 2015.

([49])  Les inégalités sociales de santé dans l’enfance, IGAS, mai 2011

([50]) Droits de l’enfant en 2017, Défenseur des droits.

([51]) Chiffre correspondant aux ETP renseignés par les services de PMI ; notons qu’un nombre supérieur de départements n’avaient pas renseigné ce chiffre en 2009 qu’en 2015. Calcul réalisé à partir du tableau de la DREES, «Personnels de PMI – Médecins (effectifs et ETP) au 31 décembre et vacations au cours de l’année – 2009 à 2015) », Le personnel des services de protection maternelle et infantile, en ligne : http://www.data.drees.sante.gouv.fr/ReportFolders/reportFolders.aspx?IF_ActivePath=P,371,377,552.

([52]) Audition de M. Pierre Suesser, co-président du SNPMI, et Mme Cécile Garrigues, co-présidente, par les rapporteurs de la mission d’information prévention santé en faveur des jeunes, le 28 mars 2018.

([53])  « La politique de périnatalité : l’urgence d’une remobilisation » Rapport public annuel, Cour des comptes, 2012.

([54]) DREES, 2015, ibid.

([55])  Données transmises par le SNPMI, mars 2018.

([56]) Document transmis par Mmes Corinne Bois, Marina Tilly, Marie-Noëlle Dufourg et Marie-Aline Charles, Unité mixte Ined-Inserm-EFS ELFE, 27 juin 2018.

([57]) Cette disposition figure à l’article L. 2112-1 du code de la santé publique. Le Conseil d’État, dans un arrêt de 2005, a confirmé l’annulation d’une réorganisation du service de PMI du département de la Dordogne se traduisant par la mise en place d’unités territoriales déconcentrées, qui conduisaient à ce que ces unités ne se trouvent plus sous l’autorité d’un médecin.

([58]) Deux rapports publiés en 2011, l’un de la Cour des comptes et l’autre de l’Assemblée nationale, ont porté sur la médecine scolaire : une contribution de la Cour des comptes en septembre 2011 et un rapport d’information de M. Gaudron et Mme Pinville, au nom du comité d’évaluation et de contrôle des politiques publiques, en novembre 2011.

([59]) La médecine scolaire en France, Académie nationale de médecine, 24 octobre 2017.

([60]) Circulaire n° 2015-118 du 10 novembre 2015 sur les missions des médecins de l’éducation nationale et circulaire n° 2015-119 du 10 novembre 2015 sur les missions des infirmiers-ières de l’éducation nationale.

([61]) Loi n° 2013-595 du 8 juillet 2013 d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République.  

([62])  La médecine scolaire en France, Académie nationale de médecine, 24 octobre 2017.

([63]) Avis budgétaire au nom de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication sur le projet de loi de finances pour 2017, M. Jean-Claude Carle et Mme François Férat, sénateurs ; 24 novembre 2016.

([64]) Pour des élèves en meilleure santé, CESE,  mars 2018.

([65]) La médecine scolaire en France, Académie nationale de médecine, 24 octobre 2017.

([66]) L’Académie nationale de médecine note que les MEN sont  « les moins bien rémunérés des médecins de la fonction publique ».

([67]) Pour des élèves en meilleure santé, CESE, mars 2018.

([68]) Pour des élèves en meilleure santé, CESE,  mars 2018.

([69]) « Mayotte, département le plus jeune de France », Insee Première, Balicchi J., Bini J-P., Daudin V., Actif N., Rivière J., n° 1488, février 2014.

([70]) Pour des élèves en meilleure santé, CESE, mars 2018.

([71]) Stratégie nationale de santé 2018-2022, Ministère des solidarités et de la santé.

([72])  Décret n° 2014-629 du 18 juin 2014 portant création du comité interministériel pour la santé.

([73])  Priorité prévention, rester en bonne santé tout au long de sa vie, 26 mars 2018.

([74]) Article L. 1433-2 du code de la santé publique.  

([75]) La dotation de la mission « prévention » du FIR était de 424,2 millions d’euros en 2014 et de 479,1 millions d’euros en 2016.

([76]) Article R. 1411-1 du code de la santé publique.

([77]) Article L. 1434-2 du code de la santé publique.

([78]) Décret  2010-346 du 31 mars 2010 relatif aux commissions de coordination des politiques publiques de santé.

([79]) SGMAS, Fonds d’intervention régional, rapport d’activité 2016, octobre 2017.

([80]) Ordonnance n° 96-346 du 24 avril 1996 portant réforme de l'hospitalisation publique et privée.

([81]) Audition de M. Jean-Michel Rapinat, directeur délégué des politiques sociales de l’ADF, Mme Ann-Gaëlle Werner-Bernard, conseillère pour les relations avec le Parlement.

([82]) Document transmis par l’ADF, juillet 2018.

([83]) Ibid.

([84]) Ibid.

([85])  Audition de M. Jean-Michel Rapinat, directeur délégué des politiques sociales de l’ADF, Mme Ann-Gaëlle Werner-Bernard, conseillère pour les relations avec le Parlement.

([86]) Audition du Réseau français des Villes-Santé de l’OMS, Mme Charlotte Marchandise, Présidente, et Dr Patricia Saraux, directrice de la santé publique – Ville de Nantes.

([87]) Décret n° 2016-1023 du 26 juillet 2016 relatif au projet régional de santé

([88]) L’ARS Île-de-France organise une consultation des mairies et la participation des habitants lors de l’élaboration du PRS (audition de M. Luc Ginot, directeur de la promotion de la santé et de la réduction des inégalités de l’Agence Régionale de Santé (ARS) d’Île de France)

([89]) Loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, article 118.

([90]) Circulaire DGS/SP2/2000/324 du 13 juin 2000 relative au suivi des actions de santé en faveur des personnes en situation précaire.

([91]) Ateliers santé ville, une démarche locale pour la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé, Délégation interministérielle à la ville, les éditions de la DIV, 2007.

([92]Données transmises par le Comité régional d’éducation pour la santé (CRES) de Provence-Alpes-Côte-D’azur.

([93]) Note du HCAAM sur la conduite de la politique de prévention et de promotion de la santé, 23 février 2017.

([94]) Un dispositif de soins partagés en psychiatrie (DSPP) de l’enfant et de l’adolescent a ainsi été mis en place dans l’agglomération toulousaine, de même que dans les Yvelines Sud. Ces DSPP ont témoigné de bons résultats pour la coordination des médecins généraux et des psychiatres.

([95]) Les contrats locaux de santé (CLS) : un outil d’avenir ?, François Baudier, Fédération nationale d’éducation et de promotion de la santé (FNES), 6 septembre 2017

([96]) Contrats locaux de santé : ‘état des lieux à fin 2017, service des politiques d’appui au pilotage et de soutien, direction générale de la santé.

([97])  Les contrats locaux de santé (CLS) : un outil d’avenir ?, François Baudier, Fédération nationale d’éducation et de promotion de la santé (FNES), 6 septembre 2017

([98])  Audition de M. Luc Ginot, directeur de la promotion de la santé et de la réduction des inégalités de l’Agence Régionale de Santé (ARS) d’Île de France, le 12 juillet 2018.

([99])  La prévention sanitaire, octobre 2011, communication à la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale.

([100]) Rapport précité sur la prévention sanitaire d’octobre 2011.  

([101])  L’avenir de l’assurance maladie : assurer l’efficience des dépenses, responsabiliser les acteurs, novembre 2017, rapport public thématique

([102]) Les dépenses de santé en 2015 : résultat des comptes de la santé – édition 2016, DREES  

([103])  Ce montant pour 2016 inclut la consommation de soins et biens médicaux, pour 198,5 milliards d’euros, les soins de longue durée pour les personnes âgées et handicapées en établissements (20 milliards d’euros), les indemnités journalières pour maladie (14 milliards d’euros), la prévention institutionnelle (5,8 milliards d’euros) ainsi que les dépenses en faveur du système de soins (12 milliards, dont 7,6 milliards pour la recherche médicale et pharmaceutique).

([104]) Les 28 % restants étant financés par les mutuelles et autres complémentaires santé, ainsi que par les patients et l’État, au titre de l’aide médicale d’État.

([105])  Le FIR est financé pour l’essentiel par l’assurance maladie (sur un montant total de 3,3 milliards d’euros, 3 milliards sont issus de la dotation des régimes obligatoires d’assurance maladie, le montant restant provenant de l’État (132 millions d’euros) et de la CNSA (115 millions d’euros).

([106]) 325 millions d’euros, dont 151 millions d’euros pour Santé Publique France, 118 millions d’euros pour l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), 42,3 millions pour l’Institut national du cancer (Inca), et 14,1 millions d’euros pour l’Agence nationale de sécurité sanitaire, de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses).

([107]) Sachant que les chiffres disponibles portent sur la population estimée au 1er janvier 2018.  

([108]) Outil d’observation et de suivi cartographique des actions régionales de santé

([109]) Audition de M. Patrick Dehaumont, directeur général, et M. Cédric Prévost, sous-directeur de la politique de l’alimentation du Ministère de l’agriculture et de l’alimentation, direction générale de l’alimentation.

([110]) Dont 45 000 euros provenant de la fondation Bel et représentant 15 % du budget de celle-ci – les 115 000 euros restants correspondant à des financements par l’entreprise Bel elle-même.

([111]) Évaluation du programme national nutrition santé 2011-2015 et 2016 (PNNS 3) et du plan obésité 20102013, rapport établi par l’inspection générale des affaires sociales, juillet 2016.   

([112])  Évaluation des actions menées en matière d’activité physique et sportive à des fins de santé, rapport établi par l’inspection générale des affaires sociales (IGAS) et l’Inspection générale de la jeunesse et des sports (IGJS), mars 2018.

([113]) Return on investment of public health interventions : a systematic review, par Rebecca Masters, Elspeth Anwar, Brendan Collins, Richard Cookson, Simon Capewell, Journal of epidemiology and community health, mars 2017

([114]) Le coût social des drogues en France, Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), note de septembre 2015, M. Pierre Kopp

([115]) Obésité : quelles conséquences pour l’économie et comment les limiter, Lettre n° 179 de la direction générale du Trésor, septembre 2016.

([116]) La loi de modernisation du système de santé a par ailleurs réformé profondément les conditions d’accès aux données de santé, en unifiant la gouvernance des bases de données, en définissant une doctrine d’accès à ces données et en simplifiant les procédures d’accès. Le pilotage du SNDS est assuré par la DREES, tandis que l’assurance maladie est responsable du traitement et de la mise à disposition des données. L’Institut national des données de santé (INDS), prenant la succession de l’Institut des données de santé en 2017, est chargé d’accompagner et de fluidifier l’accès aux données de santé, dans les conditions prévues par la loi, en évaluant notamment l’intérêt public des demandes. 

([117]) Figurent pour chaque bénéficiaire l’âge, le sexe et le lieu de résidence, ainsi que le bénéfice, le cas échéant, de la couverture maladie universelle et la mention d’une affection de longue durée. La base contient les dates de soins ainsi que les montants remboursés par l’assurance maladie et payés par le patient ; elle comprend le codage détaillé des médicaments délivrés, des actes techniques des médecins, des dispositifs médicaux et des prélèvements biologiques.  

([118]) Tout séjour dans un établissement de santé, public ou privé, fait l’objet d’un recueil systématique et minimal d’informations administratives et médicales qui sont utilisées principalement pour le financement des établissements de santé (tarification à l'activité) et pour l’organisation de l’offre de soins (planification).

([119]) Prévus par les articles R. 2132-1 et suivants du code de la santé publique.  

([120]) Les études INCA sont réalisées tous les sept ans : INCA1 (1998-1999) ; INCA2 (2006-2007) et INCA3 (2014-2015).  

([121]) Le taux de réception des certificats de santé du 8ème jour s’est par exemple établi à 87 % dans le département de la Drôme en 2014, selon une étude de l’ORS Auvergne-Rhône Alpes.

([122])  Le troisième certificat de santé de l’enfant, 2015, Document de travail – Sources et méthodes/DREES, n°63, septembre 2017.

([123]) Soit le rapport entre le nombre de certificats reçus et le nombre d’enfants nés.

([124]) L’application a été expérimentée dans six académies (La Réunion, Lille, Lyon, Montpellier, Nancy-Metz et Versailles) et elle est déployée au niveau national depuis novembre 2017.

([125]) Un second volet, en cours de développement, doit permettre de recueillir les informations liées notamment aux actions collectives (formation, éducation à la santé…) et à l’analyse de l’activité.

([126])  L’état de santé des élèves en France ; apport des observatoires régionaux de santé sur la production d’indicateurs liés à la santé des élèves ; ORS Nouvelle-Aquitaine, ORS Midi-Pyrénées et FNORS, décembre 2017.

([127]) L’ORS Auvergne a ainsi réalisé en 2015-2016 une publication sur les élèves de l’académie de Clermont-Ferrand, tandis que l’ORS de Guadeloupe a publié une étude en 2012-2013 sur la thématique de la surcharge pondérale. L’ORS de la région Auvergne Rhône-Alpes a également exploité les certificats du huitième jour dans le département de la Drôme, ce qui permet de disposer de données sur la consommation d’alcool et de tabac de la mère, sur la santé des enfants à la naissance, le taux de prématurité, la part d’enfants allaités, etc.

 

([128]) Les indicateurs clés finlandais ont été sélectionnés dans le cadre d’un  projet intitulé « National Indicator Project » entre 2009 et 2012 ; l’objectif était de faciliter l’utilisation d’indicateurs pour mettre en œuvre des politiques publiques au niveau local.

([129]) Finnish experiences of health monitoring : local, regional, and national data sources for policy evaluation, Katri Kilpeläinen, Suvi Parikka, Päivikki Koponen, Seppo Koskinen, TuuliaRotko, Timo Koskela & Mika Gissler (2016) Global Health Action, 9:1, 28824.

 

([130]) Évaluation du programme national nutrition santé 2011-2015 et 2016 - PNNS3, rapport établi par l’IGAS, juillet 2016

([131]) Équilibre de vie en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, 10 ans d’action dans les écoles, évaluation ; Comité régional d’éducation pour la santé de Provence Alpes-Côte d’Azur, 1995

([132]) Cet article dispose que le champ de cette mission comprend la mise en place d’un environnement scolaire favorable à la santé, la participation à la politique de prévention sanitaire mise en œuvre aux différents niveaux territoriaux, la coordination des actions conduites dans le cadre de la PMI, et, au titre de la médecine scolaire, la réalisation d’examens et de bilans de santé, ainsi que la détection des  problèmes de santé ou carences.  

([133]) Circulaire n° 2011-216 du 2 décembre 2011 sur la politique éducative de santé dans les territoires académiques. Elle a défini un programme d’actions autour de sept domaines prioritaires, notamment l’acquisition par les élèves de bonnes habitudes d’hygiène de vie, la généralisation de l’éducation nutritionnelle, la promotion de l’activité physique, la généralisation de l’éducation à la sexualité, etc.  

([134]) Circulaire n° 2015-117 du 10 novembre 2015 sur la politique éducative sociale et de santé en faveur des élèves.  

([135]) Circulaire n° 2016-008 du 28 janvier 2016 sur la mise en place du parcours éducatif de santé pour tous les élèves.  

([136]) Comparative report on health literacy in eight EU member states – Enquête européenne sur la littératie en santé (HLS-EU) conduite dans huit pays ; The European Literacy Project 2009-2012, Executive Agency for health and consumers.

([137]) Autriche, Allemagne, Bulgarie, Grèce, Irlande, Pays-Bas, Pologne et Espagne.  

([138]) Health Literacy : a prescription to end confusion ; Institute of Medicine ; National Academies Press (US) ; 2004.  

([139]) Health literacy : The solid facts ; OMS, bureau régional pour l’Europe, 2013 ; Ilona Kickbusch, Jurgen M. Pelikan, Franklin Apfel et Agis D. Tsouros.

([140]) Circulaire n° 2016-114 du 10 août 2016 sur les orientations générales pour les comités d’éducation à la santé et à la citoyenneté.  

([141]) Renforcer et mobiliser les acteurs de la prévention et de la promotion de la santé ; avis de la Conférence nationale de santé adopté en assemblée plénière le 8 février 2018.  

([142]) L’une de ces mentions est spécialisée dans la prévention à l’égard des jeunes ; elle est dispensée à l’université de Rennes 1, conjointement avec l’École des hautes études en santé publique.  

([143]) L’Espé de l’académie de Lyon prévoit par exemple, dans le cadre des masters de premier et second degré, un module de douze heures d’éducation à la santé.  

([144]) Mise en œuvre du service sanitaire pour les étudiants en santé, rapport de M. Loïc Vaillant, janvier 2018.  

([145]) Décret n° 2018-472 du 12 juin 2018 relatif au service sanitaire des étudiants en santé.

([146]) Audition de Linda Cambon et Pierre Arwidson, le 5 avril 2018.

([147]) Aux termes de l’article L. 2133-1 du code de la santé publique, les annonceurs sont tenus d’apposer un message sanitaire à tout message publicitaire pour des boissons avec ajouts de sucres, de sel ou d’édulcorants de synthèse ou des produits alimentaires manufacturés. Ils ne peuvent déroger à cette obligation qu’à condition de verser une contribution à Santé publique France, destinée à financer la réalisation et la diffusion d’actions d’information et d’éducation nutritionnelle.

([148]) Agir sur les comportements nutritionnels – Règlementation, marketing et influence des communications de santé  - Expertise collective de l’Inserm, publié en 2017. 

([149]) Recommandé par les pouvoirs publics depuis octobre 2017, le Nutriscore est un logo qui informe sur la qualité nutritionnelle simplifiée des aliments, en complément de la déclaration nutritionnelle obligatoire ; il se présente sous la forme d’une échelle de lettres en couleur, de A (en vert), correspondant à une bonne qualité nutritionnelle, au E (en rouge).

([150]) La loi Evin interdit les opérations de parrainage (lors de manifestations sportives, festives ou culturelles par exemple) par les producteurs de boissons alcooliques. Seul le mécénat est autorisé. En revanche, le mécénat n’est pas autorisé pour les fabricants de tabac.  

([151]) En France, en 2012, d’après les données de l’enquête Kantar Media, les investissements publicitaires pour des aliments gras, sucrés ou salés constituaient 46 % des investissements publicitaires alimentaires (soit 1,4 milliard d’euros) et 72 % des investissements publicitaires alimentaires réalisés sur les écrans télévisés jeunesse.  

([152]) Programmes dispensés par les policiers formateurs anti-drogue (PFAD) et par les gendarmes formateurs relais anti-drogue (FRAD)

([153])  Conduites addictives chez les adolescents – une expertise collective de l’Inserm, février 2014.

([154]) Les compétences psycho-sociales : définition et état des connaissances, par Mme Elisabeth Luis et Mme Béatrice Lamboy, dans « La santé en action » n° 431, mars 2015, revue de l’Inpes.

([155]) Note de réponse à la saisine de Mme la ministre de la santé concernant le tableau de bord synthétique de l’état de santé de la population et du fonctionnement du système de santé, 2 mai 2014, HCSP

([156]) Tel est le cas par exemple pour les effets de la lutte contre le tabagisme sur le cancer du poumon ; la forte hausse de la prévalence du cancer du poumon chez les femmes à compter de 2005 résulte sans doute du développement du tabagisme dans cette population depuis la fin des années 1970.

 

([157]) Par exemple, Les politiques de lutte contre les consommations nocives d’alcool, rapport public thématique de la Cour des comptes de juin 2016.

([158]) Soit la Commission européenne, après avis de l’EMA, soit l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM).

([159]The productivity argument for investing in young children, James J. Heckman et Dimitriy V. Masterov, avril 2007, NBER Working paper series

([160])  A gradient of childhood self-control predicts health, wealth and public safety, collectif, proceedings of the National Academy of sciences of the United States of America, 2011.

([161]) Le concept des origines développementales de la santé, de Marie-Aline Charles, Cyrille Delpierre et Bernadette Bréant, 2016, Médecine Sciences.

([162])  Asthma and pregnancy : emerging evidence of epigenetic interactions in utero, Prescott SL, Clifton V., octobre 2009, US National Library of Medicine, National Institutes of Health.

([163]) En d’autres termes, l’épigénétique correspond à l’étude des changements dans l’activité des gènes n’impliquant pas de modification de la séquence d’ADN et pouvant être transmis lors des divisions cellulaires. Contrairement aux mutations qui affectent la séquence d’ADN, les modifications épigénétiques sont réversibles.

([164]) Le programme M’T dents consiste à envoyer aux parents des enfants concernés un courrier invitant à réaliser un examen bucco-dentaire, pris en charge à 100 % par l’assurance maladie (les soins consécutifs étant aussi pris en charge à 100 %), et à procéder à une séance de sensibilisation collective à l’hygiène bucco-dentaire. Son budget annuel total est de 55 millions d’euros. Ce programme a été étendu aux jeunes adultes de 21 ans et de 24 ans en avril 2018.

([165]) On peut penser par exemple à l’intervention ICAPS (intervention auprès des collégiens centrée sur l’activité physique et la sédentarité) : ce programme conduit dès 2002 a prouvé l’efficacité de la promotion de l’exercice physique sur la prévention de l’excès de poids chez l’adolescent et son déploiement est encouragé par Santé publique France depuis 2011.

([166]) L’article 53 de la loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer et portant autres dispositions en matière sociale et économique, prévoit qu’en Guadeloupe, en Guyane, en Martinique, à la Réunion, à Saint-Barthélemy et à Saint-Martin, le représentant de l’Etat détermine un périmètre autour des établissements scolaires dans lequel la publicité en faveur de l’alcool, directe ou indirecte, est interdite.

([167]) Rapport précité sur l’IGAS sur le PNNS 3, rapport précité du HCSP sur le PNNS 3

([168]) Loi  2016-1771 du 20 décembre 2016 relative à la suppression de la publicité commerciale dans les programmes jeunesse de la télévision publique.  

([169]) Lors de l’examen en mai dernier du projet de loi dit « agriculture et alimentation », des amendements visant à interdire ou limiter les messages publicitaires en faveur de produits alimentaires et boissons trop riches en sucres, sels ou matières grasses, ciblant les enfants de moins de 16 ans, ont été rejetés.

([170])  Les débats parlementaires sur la loi de modernisation de notre système de santé en 2015  ont ainsi conduit à assouplir les dispositions de la loi Evin de 1991 sur la publicité en faveur de l’alcool.

([171]) Parmi lesquelles : engager des recherches pour mieux comprendre les besoins et motivations des personnes visées par les messages afin d’affiner leur objectif ; en tirer une segmentation de la population pour développer des campagnes spécifiques pour chaque sous-groupe ; tenir compte du seuil minimum d’exposition en-dessous duquel un message a peu de chance d’avoir un impact, mais aussi du phénomène de saturation qui entraîne l’indifférence, voire le rejet ; jouer de la complémentarité des médias afin de communiquer de manière plus ciblée, voire individuelle ; valoriser les comportements « vertueux » pour indiquer les avantages à changer ses habitudes.

([172]) Définition apportée par M. Shiner, « Defining peer education », 1999

([173]) Une étude de 2006 de Thomas W. Valente  montre ainsi que l’efficacité d’un programme de prévention du tabagisme mis en œuvre par des pairs varie selon les modalités de désignation des « pairs » leaders et de constitution des groupes bénéficiant du programme.   

([174]) L’indice de « défavorisation », ou « deprivation index », doit permettre de rendre compte d’un état de désavantage observable relatif à la communauté ou la société à laquelle appartient une personne. Un tel indice constitue une mesure contextuelle caractérisant le milieu socio-économique dans lequel vivent les individus d’une aire géographique donnée, à un moment donné, et que l’on attribue à l’ensemble des individus de cette aire.

([175]) La réalisation de la JDC entre 16 et 25 ans est une condition nécessaire pour passer le baccalauréat et les concours administratifs, ainsi que pour passer le permis de conduire.

([176]) Est en revanche réalisée une évaluation des capacités de lecture des jeunes, afin de détecter les situations d’illettrisme.   

([177]) Désormais tous les quatre ans.  

([178]) Rapport relatif à la création d’un service national universel, établi par le général Daniel Menaouine, rapporteur du groupe de travail, 26 avril 2018.  

([179]) Décret n° 2016-1671 du 5 décembre 2016 portant financement d’un fonds de lutte contre le tabac.  Ce fonds, créé au 1er janvier 2017, relève de la CNAMTS, en associant dans son conseil de gestion la Mildeca, Santé publique France ou encore l’Inca.