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N° 3171

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ASSEMBLÉE   NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 1er juillet 2020.

RAPPORT  DINFORMATION

DÉPOSÉ

en application de larticle 145 du Règlement

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

sur les propositions du groupe de travail sur le logement concernant la reprise et le plan de relance dans le bâtiment et les travaux publics après lépidémie de Covid-19

 

ET PRÉSENTÉ PAR

M. Richard LIOGER,

Député

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SOMMAIRE

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Pages

Synthèse du rapport et des propositions

Introduction

I. Le bâtiment a été durement frappé par la crise

II. La relance du bâtiment doit passer par une politique du logement volontariste et ambitieuse

Propositions pour la relance du bâtiment et des travaux publics

I. Faire du bâtiment le fer de lance de la transition écologique

1. Placer la rénovation énergétique des bâtiments au cœur de la relance

2. Optimiser le parc existant en faveur dun nouvel urbanisme

II. Favoriser un service public plus résilient et réactif

1. Accélérer lappropriation par les services de lÉtat des outils et procédures numériques disponibles

2. Favoriser la transition numérique des collectivités

III. mettre le logement social et étudiant au cœur de la relance

1. Rendre leurs moyens daction aux organismes de logement social

2. Mieux accompagner laccession à la propriété

3. Privilégier le développement du logement étudiant

Annexe  1 : Liste des personnes auditionnées par le groupe de travail

Annexe  2 : Liste des acteurs ayant contribué par écrit aux travaux du groupe de travail

annexe  3 : NOTES HEBDOMADAIRES ÉTABLIES PAR LE GROUPE DE TRAVAIL


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   Synthèse du rapport et des propositions

La crise sanitaire et le confinement ont été propices à la redécouverte de l’importance de l’habitat. De ce fait, la crise a également mis en lumière les problèmes profonds qui le caractérisent : l’habitat dégradé, les inégalités de logement, ou encore la suroccupation des foyers. Face à ce constat, le groupe de travail chargé de suivre les évolutions du secteur du logement pendant la crise sanitaire estime qu’une partie importante des solutions à ces problématiques est à trouver dans la relance de la filière du bâtiment et des travaux publics, essentielle pour notre économie mais aussi pour construire un parc de logement qui corresponde aux attentes de nos concitoyens.

Le bâtiment et les travaux publics ont été parmi les secteurs de l’économie les plus affectés par la crise sanitaire, et leurs besoins exigent une réponse forte de la part des pouvoirs publics, à même de permettre une relance axée sur la transition écologique et la justice sociale et fondée sur une efficacité amplifiée des services publics. À ce titre, la relance du bâtiment passe par une politique du logement ambitieuse et volontariste qui se décline en trois axes.

Axe 1 : Faire du bâtiment et du logement des leviers prioritaires de la transition écologique en optimisant le parc bâti français.

Proposition 1. Élargir la prime de transition écologique aux ménages aisés des neuvième et dixième déciles en créant une prime minorée au-delà du neuvième décile, qui viendra en remplacement du crédit d’impôt transition énergétique appelé à disparaître.

Proposition 2. Clarifier et simplifier le maquis des aides existantes en fusionnant les dispositifs de soutien au sein de la prime de transition écologique et faire de l’Agence nationale de l’habitat l’acteur de référence en la matière, en la dotant des moyens de faire connaître ses dispositifs auprès des particuliers.

Proposition 3. Mettre en œuvre un fonds d’urgence au titre des certificats d’économies d’énergie, à destination des très petites entreprises et petites et moyennes entreprises labellisées « Reconnu garant de l’environnement » (RGE), et alimenté par les obligés fournisseurs d’énergie en échange de l’obtention de certificats d’économies d’énergie.

Proposition 4. Maximiser l’utilisation du parc de logements existants en mobilisant les logements vacants et en limitant davantage le recours à la location touristique de courte durée.

Proposition 5. Intensifier les efforts en faveur de la résorption de l’habitat insalubre en étudiant les possibilités d’élargissement des programmes de revitalisation du territoire et en poursuivant l’incitation à la rénovation des logements anciens et dégradés.

Proposition 6. Accélérer la lutte contre l’artificialisation en mettant en œuvre un dispositif de bonus/malus fiscal qui permette de promouvoir la réhabilitation des friches au détriment des projets d’artificialisation.


Axe 2 : Amplifier les efforts de dématérialisation de laction publique en faveur dune administration plus résiliente et plus réactive.

Proposition 7. Contraindre les services de l’État et des collectivités à se saisir pleinement des outils disponibles, notamment les documents d’arpentage numériques.

Proposition 8. Mettre en œuvre une planification préalable des adaptations que rendraient nécessaires une situation de crise pour les procédures d’autorisation d’urbanisme et s’assurer que ces adaptations ne rendent pas plus difficile la continuité d’activité des entreprises.

Proposition 9. Promouvoir le dialogue et le décloisonnement des administrations d’État et, plus largement des services publics impliqués dans la chaîne de la construction.

Proposition 10. Sortir définitivement de la dépendance au papier de manière à fluidifier et simplifier les procédures, notamment en période de crise. S’assurer que toutes les procédures relatives à l’urbanisme soient entièrement dématérialisées sans dépôt papier d’ici 2022.

Proposition 11. Doter les services publics intervenant dans le domaine des autorisations d’urbanisme des capacités de travailler efficacement à distance.

Proposition 12. Rationaliser et limiter le nombre et la nature des documents complémentaires que peuvent demander les services des collectivités lors de l’instruction des autorisations d’urbanisme, dans l’optique d’apporter de la visibilité aux acteurs du bâtiment.

Axe 3 : Faire du logement social et du logement étudiant des moteurs de la relance du BTP et dune politique du logement solidaire.

Proposition 13. S’engager à un effort financier significatif en faveur du logement social en choisissant le moyen financier le plus approprié : baisse de la TVA à 5,5 % ou exonération temporaire sur tous les investissements HLM, baisse de la réduction de loyer de solidarité (RLS), abondement exceptionnel du Fonds national des aides à la pierre (FNAP).

Proposition 14. Optimiser et accélérer les investissements des organismes de logement social en allégeant certaines règles de la commande publique, et en permettant aux opérateurs des gains en agilité du fait de la simplification de la procédure d’agrément.

Proposition 15. Poursuivre et amplifier la mobilisation du foncier public inutilisé par la libération des emprises foncières en favorisant les pratiques de cession à l’euro symbolique assorties d’une clause d’intéressement.

Proposition 16. Soutenir l’accession à la propriété par la mobilisation du prêt social location-accession (PSLA) et les organismes de foncier solidaire (OFS).

Proposition n° 17. Demander à chaque organisme de logement social d’envergure de se doter d’une filiale orientée vers les ménages à très faibles ressources.

Proposition 18. S’assurer que le resserrement des conditions d’accès au crédit ne pèse pas sur l’accession à la propriété en demandant au Haut Conseil de stabilité financière d’étudier régulièrement la nécessité d’un assouplissement des conditions d’octroi de crédit.

Proposition 19. Accompagner financièrement les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS) par la création d’un volet du grand plan d’investissement consacré à la réhabilitation et à la construction de logements étudiants.

Proposition 20. Faire évoluer la loi pour permettre aux CROUS et aux universités de participer aux outils de portage des opérations immobilières au niveau local (SPL, SEML, SEMOP), aux côtés des collectivités et des bailleurs sociaux et privés. Élaborer des plans locaux de développement du logement étudiant impliquant tous les acteurs.


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   Introduction

I.   Le bâtiment a été durement frappé par la crise

Limpact sur le secteur du bâtiment de la crise sanitaire ainsi que des mesures de confinement qui ont été adoptées dans le cadre de létat durgence sanitaire, a été rapide et brutal. La filière s’est trouvée dès le 17 mars confrontée à une crise majeure provoquée par la paralysie quasi-totale de toutes les opérations de construction. Cette situation a résulté notamment du fait de la mise à l’arrêt des chantiers, rendue nécessaire par l’impossibilité d’y assurer la sécurité sanitaire des travailleurs, et de la prorogation de l’instruction des autorisations d’urbanisme par les services publics compétents. Du 16 mars au 6 avril, les activités de construction ont ainsi connu un taux d’arrêt situé entre 90 et 93 %, selon les estimations. La mise à l’arrêt des opérations a, à son tour, suscité des difficultés en termes de sécurisation des sites et de responsabilité du maître d’ouvrage et des entreprises intervenantes en la matière.

Laction positive des pouvoirs publics na pas suffi à éloigner le spectre dun ralentissement durable de la filière. À la suite de l’adoption du guide de préconisations sectoriel le 2 avril, l’État, les collectivités et les entreprises se sont accordées sur la nécessité de voir la filière reprendre une activité normale le plus rapidement possible, afin de ne pas porter préjudice à sa stabilité. Cependant, la prise en charge des surcoûts liés à la mise en œuvre des mesures sanitaires, qui représentent entre 10 et 20 % des coûts totaux d’un chantier, ainsi que les désaccords à ce sujet entre les donneurs d’ordre et les entreprises, ont ralenti de façon importante la reprise. Il en a résulté en un taux d’activité d’environ 30 % pendant le mois d’avril. Dans l’ensemble, plus de 90 % des entreprises du bâtiment ont vu leur activité affectée par la crise, et un tiers des entreprises étaient complètement fermées à la fin du mois d’avril, taux qui s’élevait jusqu’à 80 % en Île-de-France, dans le Grand Est et dans les Hauts-de-France. Les entreprises du secteur ont eu massivement recours à l’activité partielle, pour trois quarts d’entre elles.

Les pouvoirs publics ont eu soin daccompagner de près les professionnels de façon à permettre ainsi une interruption aussi brève que possible de lactivité en limitant les faillites et les licenciements. Un décret a été pris dès le 3 avril, autorisant les notaires à procéder à l’authentification à distance des actes durant la période du confinement, ce qui a permis la reprise des procédures de transaction immobilière ([1]). De la même façon, là où la prorogation initiale des délais applicables en matière d’urbanisme avait pu susciter l’inquiétude des professionnels, le Gouvernement a introduit dès le 15 avril une nouvelle ordonnance de manière à limiter la période durant laquelle les autorisations d’urbanisme ne sont pas instruites et, plus tard, restent vulnérables à un recours. Il a également sécurisé juridiquement les contrats, en suspendant notamment les effets des clauses relatives aux pénalités de retard.

Les pouvoirs publics ont rapidement pris des mesures pour accompagner les entreprises des filières concernées, menacées par des difficultés de trésorerie. Le soutien accordé en vertu du fonds de solidarité a été affermi pour les nombreux artisans et indépendants de la filière par la validation le 10 avril d’un versement exceptionnel en indemnité de pertes de gains. Plafonné à 1 250 euros, ce versement est pris en charge par le Conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants (CPSTI), organe de gestion de la retraite complémentaire des artisans et indépendants. En outre, l’annualisation du chiffre d’affaires pris en compte dans le calcul de l’aide versée par le fonds de solidarité, a été permise à partir du 15 avril ([2]). Ceci a permis de venir en aide à de nombreux cabinets d’architectes en difficulté, ce qui témoigne de l’écoute et de la réactivité du Gouvernement par rapport aux besoins des professionnels. Des mesures ont également été prises pour soutenir les interventions à domicile, particulièrement importantes dans la rénovation. C’est le cas par exemple du courrier adressé par le Gouvernement aux consommateurs en mai, les invitant à poursuivre la réalisation des travaux.

Ces interventions ont permis dès les mois de mai et de juin la reprise de la majorité des chantiers du bâtiment, selon un rythme assez rapide (53 % des chantiers repris le 7 mai, 72 % le 15 mai, 83 % le 29 mai). Au 12 juin, 93 % des chantiers étaient ouverts, 69 % d’entre eux enregistrant un niveau d’activité normal tandis que 24 % rapportaient encore une activité ralentie. Cette reprise se note également en termes d’emplois, avec 93 % des équivalents temps plein (ETP) d’avant-crise en activité au 12 juin. Cependant, un rythme moindre est encore à noter en juin dans trois régions, qui ont un niveau d’ouverture des chantiers situé entre 85 et 90 % : l’Île-de-France, la Provence-Alpes-Côte d’Azur et les Hauts‑de‑France. En dépit de la reprise, l’activité des entreprises n’a donc pas encore retrouvé son rythme d’avant-crise. Parmi les chantiers à l’arrêt à mi-juin, un tiers d’entre elles prévoyaient une reprise d’activité dès la deuxième moitié du mois de juin. La principale difficulté freinant encore la reprise est la mise au point des conditions de redémarrage par la maîtrise d’ouvrage ou la maîtrise d’œuvre.

Ces chiffres rassurants ne doivent pas masquer lexistence de problèmes profonds qui pourraient transformer la mise à larrêt temporaire des opérations en ralentissement durable du secteur. En premier lieu, la mise en œuvre des mesures de protection sanitaire des travailleurs sur les chantiers et dans les bureaux a engendré des surcoûts liés aux dépenses d’équipement et à une baisse de productivité qui résulte du caractère chronophage des protocoles. En deuxième lieu, le gel de l’instruction des autorisations d’urbanisme et le décalage de la fin des recours occasionne une augmentation de la période d’insécurité juridique des projets pendant lesquels les travaux ne peuvent pas commencer. Enfin et en dépit des mesures déployées par le Gouvernement, la remise à plus tard des interventions à domicile pour les petits chantiers fragilise de manière considérable le bilan de nombreuses petites entreprises.

II.   La relance du bâtiment doit passer par une politique du logement volontariste et ambitieuse

Parmi les acteurs les plus éprouvés par la crise se trouvent les ménages eux-mêmes. Le Gouvernement a pris des mesures pour s’assurer que les ménages ne se trouveraient pas expulsés de leur logement du fait d’une baisse des ressources due à la crise sanitaire. La trêve hivernale a fait l’objet d’une première prolongation dès le mois de mars, avant d’être à nouveau étendue par le Parlement jusqu’à la fin de la période d’état d’urgence sanitaire. En dépit des mesures de soutien financier apportées par le Gouvernement, à l’instar de l’activité partielle, certaines études ont montré que jusqu’à 3,9 millions de ménages pouvaient être concernés dans cette période par une baisse de leurs revenus tandis que leurs charges locatives demeurent fixes, mettant en péril leur capacité à assumer leurs paiements ([3]).

Les acteurs du parc locatif social ont été particulièrement actifs dans le soutien et laccompagnement de leurs locataires et le groupe de travail tient à saluer leur engagement. Les bailleurs sociaux ont travaillé avec les associations de représentants de locataires de façon à élaborer un suivi systématique et régulier des locataires pouvant éprouver des difficultés de paiement, et ont mis en œuvre des reports, étalements et échelonnements de paiement qui ont donné à leurs locataires les moyens de rester dans leur logement. Ces engagements ont cependant fragilisé la situation financière déjà délicate de nombre d’organismes de logement social, et le groupe de travail appelle à un soutien engagé de la part de l’État.

La crise sanitaire a également mis en lumière les inégalités dhabitat qui caractérisent limmobilier de notre pays. La suroccupation des logements ([4]), qui a pu se ressentir particulièrement pendant les sept semaines qu’a duré le confinement strict de la population, concerne 5 millions de personnes. Cette situation touche principalement les personnes vivant en appartement puisque 16,5 % des appartements sont suroccupés ([5]). 13,7 % de la population de l’agglomération parisienne vit ainsi en situation de suroccupation, pourcentage qui s’élève à 25,4 % des ménages qui vivent dans un des quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) de l’agglomération. Par ailleurs, la crise a également mis en lumière la vulnérabilité des 10,5 millions de personnes qui vivent seules, dont plus d’un quart a plus de 75 ans, ainsi que celle des personnes sans accès à Internet (12 % de la population n’a pas accès à Internet à domicile).

Ces inégalités doivent concentrer lattention des pouvoirs publics et plaident en faveur dune amplification de nos efforts en termes de réhabilitation du parc bâti en France. L’habitat dégradé et la suroccupation des foyers constituent des défis que le Gouvernement a constamment le souci de relever, comme en témoignent les nombreuses dispositions en la matière contenues dans la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (ÉLAN). Nous pouvons et devons cependant aller encore plus loin en la matière, et ces problématiques constituent des leviers d’action auxquels pourra contribuer un plan de relance ambitieux pour la filière du bâtiment.

La relance du bâtiment ne constitue pas le seul vecteur dune politique du logement ambitieuse et volontariste. Le groupe de travail a déjà eu l’occasion, le 27 mai dernier à l’occasion de la publication du rapport de restitution des travaux des groupes de suivi, de mettre l’accent sur l’importance de l’accompagnement financier des locataires pendant cette période de difficulté économique. D’autres propositions en faveur du logement ont été émises par le groupe de travail tout au long de son activité.

Néanmoins, le groupe de travail sest ici concentré sur la production de recommandations, dans le secteur du logement, en vue de la relance du bâtiment et des travaux publics. C’est en requalifiant massivement, en développant de nouvelles méthodes pour le recyclage immobilier et foncier, et en construisant de nouveaux logements notamment pour les parcs social et étudiant, que nous parviendrons à résorber la carence en logements qui continue de caractériser le parc français. La relance du bâtiment constitue à ce titre pour nous un pilier essentiel en vue de parvenir à un logement plus équitable et plus durable.

 


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   Propositions pour la relance du bâtiment et des travaux publics

Une relance réussie de la filière du bâtiment et des travaux publics apparaît comme une condition nécessaire dune reprise économique durable de la France dans les années à venir. La crise actuelle fournit cependant une occasion de repenser en profondeur le modèle français de la construction et de son adéquation avec les enjeux qui seront ceux de la décennie à venir : transition écologique, transition numérique, diminution des inégalités de logement. Le bâtiment apparaît ainsi comme l’un des premiers leviers pour parvenir à un logement plus durable et mieux réparti.

La filière du bâtiment a vocation à occuper une place centrale dans leffort national en vue de la transition écologique. La construction participe fortement aux émissions de gaz à effet de serre et peut contribuer, par l’artificialisation des terres, à mettre en péril l’environnement. Il est donc d’importance cruciale d’adapter les moyens de la filière pour correspondre aux attentes de nos concitoyens. Les besoins en logement du pays demeurent très importants, et la rénovation comme la construction neuve ont leur place dans la filière de demain pour y faire face. Quoique le recyclage foncier et immobilier doive devenir un réflexe plutôt qu’une exception, ils n’excluent pas pour autant la nécessité de construire également du neuf.

Les diverses activités de la filière et notamment la construction de logements neufs pâtissent souvent dans les procédures qui les caractérisent de lourdeurs et de longueurs qui grèvent leur efficacité et nous empêchent de parvenir à résorber la carence en logements. Notre pays demeure marqué par une chaîne de la construction exceptionnellement longue, qui fait intervenir un très grand nombre d’interlocuteurs public et privés, et qui nécessite une quantité élevée de procédures administratives. Un grand nombre de ces procédures sont justifiées par des impératifs de protection sanitaire et environnementale des populations et des travailleurs. Celles-ci doivent impérativement être repensées en vue de leur meilleure efficacité, ce qui passe au premier chef par une dématérialisation plus aboutie.

Le groupe de travail a cependant souhaité ne pas alourdir les difficultés financières qui pèsent sur laction publique. À cet effet, il invite le Parlement à interroger les dispositifs fiscaux impliqués dans la filière, et plaide en faveur d’une relance qui mobilise en priorité les moyens à destination du logement social et du logement étudiant, deux secteurs très affectés par la crise qui ont fortement besoin de soutien.

Le groupe de travail a eu également à cœur la stabilité de lenvironnement juridique pour les particuliers et les entreprises. Les secteurs du logement et du bâtiment sont corsetés par des dispositifs qui changent souvent ; or la sécurité financière et les capacités de planification des acteurs doivent être confortées par la cohérence dans le temps du cadre normatif. La stabilité juridique signifie aussi de donner aux acteurs le temps d’adapter leurs comportements plutôt que de leur imposer des réformes abruptes, sauf lorsque l’impose l’urgence.

Dans cette optique, le groupe de travail estime quil est nécessaire de déterminer des grandes lignes pour la politique du logement, non seulement dans le cadre de la relance en sortie de crise mais aussi pour la décennie à venir. Les impératifs écologiques qui sont ceux de notre temps – neutralité carbone, efficacité énergétique, recyclage et réemploi des espaces déjà urbanisés à favoriser par rapport à de nouvelles artificialisations – doivent guider notre action et nos recommandations.

I.   Faire du bâtiment le fer de lance de la transition écologique

1.   Placer la rénovation énergétique des bâtiments au cœur de la relance

 La rénovation thermique des bâtiments constitue dores et déjà lune des priorités de la relance du fait de ses effets bénéfiques sur lempreinte carbone et la limitation des émissions de gaz à effet de serre. Mentionnée explicitement par le Gouvernement et par le Président de la République dans son allocution télévisée du 14 juin, elle est également mise en avant par la Convention citoyenne sur le climat qui a rendu ses conclusions le 21 juin. La structure de l’habitat a en effet un impact considérable sur l’empreinte carbone des ménages : le parc immobilier français compte pour plus de 15 % des émissions de gaz à effet de serre en France. Le respect des objectifs de la stratégie nationale bas carbone (SNBC) définie à l’article L. 222-1 du code de l’environnement, qui fixe un cap de réduction des gaz à effet de serre de 40 % d’ici à 2030, exige la division par deux des émissions de gaz à effet de serre du fait du bâtiment.

La rénovation énergétique a en outre pour elle de nombreux atouts qui en font une politique appréciée au-delà de ses effets bénéfiques pour lenvironnement. Elle permet aussi de baisser structurellement les charges des ménages locataires et donc de faire diminuer la part des charges contraintes dans leur budget de logement. Ces charges ont une part forte dans les divers mécontentements sociaux exprimés ces dernières années, la part des dépenses liées au logement ayant crû jusqu’à atteindre aujourd’hui 26 % du budget des ménages en moyenne, et même 40 % du budget pour les ménages modestes dans le parc privé. En outre, la rénovation énergétique constitue une politique qui favorise économiquement les artisans et les petites et moyennes entreprises, du fait de la structure morcelée de l’offre dans ce domaine.

Le groupe de travail remarque que le sens social de limportance du sujet de la rénovation énergétique semble avoir nettement évolué dans la période récente, et notamment depuis l’adoption de la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat. Ceci devrait augmenter la capacité d’action du législateur dans ce domaine, en dépit des coûts importants que nécessite la mise en œuvre de cette politique. La Convention citoyenne pour le climat, qui a mis la rénovation énergétique au cœur de son propos, a cependant souligné les investissements importants qu’implique cette politique. Elle a estimé à 15,5 milliards d’euros par an les coûts de la rénovation de 500 000 logements classés F ou G, dont plus de 11 milliards au titre des seules maisons individuelles, et à 6,7 milliards d’euros le coût pour rénover 300 000 logements classés D ou E.

Les propositions sont très nombreuses, certaines allant dans le sens dune plus forte dimension coercitive notamment en direction des ménages aisés, tandis que dautres recommandent de conserver une politique plutôt incitative. Certains proposent une politique plus coercitive fondée sur un malus fiscal à l’encontre des ménages propriétaires de logements énergivores, tandis que d’autres préfèrent rester sur une approche incitative. Le groupe de travail estime, comme le ministre chargé de la ville et du logement, qu’il appartient au législateur de concilier les deux approches.

Le groupe de travail recommande en premier lieu délargir les bénéficiaires éligibles à la prime de transition écologique (PTE). La PTE, entrée en vigueur au 1er janvier 2020 et distribuée par l’Agence nationale de l’habitat (ANAH) sous le nom commercial « Ma Prime Rénov’ », ne concerne à l’heure actuelle que les ménages modestes et très modestes des déciles 1 à 4, mais se verra étendue dès janvier 2021 aux déciles 5 à 8. Les ménages à revenus intermédiaires, actuellement couverts par le crédit d’impôt transition énergétique (CITE), seront en effet éligibles à la prime à partir de 2021. De nombreux professionnels plaident en faveur de l’extension de la PTE aux ménages aisés, appartenant au neuvième et dixième déciles de revenus, actuellement exclus du dispositif. Ces ménages, qui peuvent encore en 2020 bénéficier du CITE au titre de certains travaux (isolation des murs, du toit, des rampants, des plafonds des combles ; changement de matériel de chauffage, installation d’une pompe à chaleur si elle n’est pas air/air), n’y auront plus accès à partir de 2021.

Or le groupe de travail pense que législateur doit veiller à ne pas créer un effet de signal négatif pour les particuliers aisés qui souhaitent rénover leur logement. L’un des objectifs du remplacement du CITE par la PTE consistait à augmenter la part des ménages modestes parmi les bénéficiaires des aides à la rénovation énergétique – en 2019, plus de 50 % de l’aide versée au titre du CITE bénéficiait à des ménages appartenant aux deux derniers déciles, selon le ministre chargé de la ville et du logement. Sans abandonner cet objectif, il faut admettre que la sortie complète des ménages appartenant aux deux derniers déciles de tout dispositif d’aide aura un effet délétère sur leur volonté d’assumer les coûts de ces travaux. La mise en œuvre d’une aide minorée à destination de ces ménages pourrait apporter une incitation à ne pas abandonner les projets.

 

Une telle évolution nexclut pas dautres avancées, comme par exemple la montée en charge du dispositif éco-prêt à taux zéro, actuellement peu connu, par le doublement de la rémunération des institutions prêteuses lorsque les ménages ont des revenus modestes, ou le fléchage de la déductibilité des charges locatives pour les bailleurs qui réalisent des travaux de rénovation vers les travaux qui concourent concrètement à une baisse des charges du locataire. Par ailleurs, en contrepartie de cette mesure incitative, le groupe de travail estime que des mesures coercitives doivent être pensées pour sanctionner les comportements des ménages propriétaires de logements à très faible efficacité énergétique qui sont en capacité financière de procéder à des travaux et qui décident de ne pas le faire.

Les aides existantes en matière de rénovation énergétique, très nombreuses, se sont empilées depuis quelques années au point où les particuliers peinent à connaître les dispositifs dont ils pourraient bénéficier :

   le crédit dimpôt pour la transition énergétique (CITE), qui existe encore jusqu’à la fin de l’année 2020, est un crédit d’impôt accordé sous conditions de ressource au foyer dont le revenu fiscal de référence est supérieur à une valeur déterminée mais inférieur à un plafond qui dépend du quotient familial appliqué au foyer demandeur ;

   la prime de transition énergétique (PTE), appelée « Ma Prime Rénov’ », est attribuée par l’ANAH aux propriétaires de logement pour leur résidence principale. La prime, soumise à des conditions de ressources, est attribuée au titre de travaux réalisés par une entreprise reconnue garant de l’environnement (RGE) ;

   l’ANAH met également en œuvre des aides au titre de ses programmes Habiter mieux, notamment ses programmes Habiter mieux Sérénité et Habiter mieux Agilité, ciblés sur les ménages modestes et très modestes. Ces aides ont vocation à être fusionnées au sein de la PTE ;

   la prime énergie, dite aussi « Coup de pouce » ou « prime CEE », est distribuée à tous les ménages sans conditions de ressources par les fournisseurs d’énergie signataires des chartes Coup de pouce Chauffage ou Coup de pouce Isolation au titre des travaux de rénovation thermique réalisés par un intervenant certifié « Reconnu garant de l’environnement » (RGE). Les fournisseurs d’énergie se voient attribuer en échange des certificats d’économies d’énergie (CEE) ;

   le dispositif d’éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ) permet également de financer de travaux de rénovation énergétique des logements, mais pâtit à l’heure actuelle d’un très faible taux de recours ;

   les collectivités territoriales et les caisses d’allocations familiales (CAF) peuvent également mettre en œuvre des aides ciblées au titre des travaux de rénovation thermique.

Une simplification de ce maquis pourrait être de nature à favoriser la connaissance par les acteurs et lappropriation par les ménages des dispositifs. On pourrait attendre d’une telle évolution qu’elle lève les incertitudes qui peuvent freiner la mise en œuvre de travaux de rénovation et qu’elle permette aux professionnels de communiquer plus facilement auprès des particuliers sur leur offre et sur les possibilités de diminuer le montant des travaux à entreprendre.

Les entreprises spécialisées dans les travaux de rénovation énergétique, qui sinquiètent dune pérennisation de la baisse des commandes, souhaitent voir adopter des mesures en faveur des certificats déconomie dénergie (CEE). La baisse des commandes résulterait à la fois de la réticence des particuliers à voir évoluer les travailleurs dans leur domicile, et du caractère moins prioritaire de ce genre de travaux pour un grand nombre de ménages, notamment au printemps. Le Gouvernement a pris dès le mois de mars des mesures permettant le prolongement des certificats d’économies d’énergie au titre de l’isolation et du chauffage ([6]) mais les professionnels réclament davantage de mesures permettant de soutenir la demande.

Les professionnels de lénergie ont aussi également souffert économiquement pendant la crise et sont exposés à une carence de CEE. Le groupement des délégataires de CEE estime que leur activité a baissé de 70 % en volume de CEE reçus en mars et de 90 % en avril. Du côté des nouveaux projets de rénovation énergétique, ils auraient baissé de 60 % au mois d’avril. La baisse d’activité devrait se poursuivre selon les professionnels, se situant aux alentours de 45 % en juin et de 20 % en septembre. Les semaines de confinement ont représenté un retard important pris dans l’audit des chantiers et dans l’instruction et la délivrance des CEE.

Le groupe de travail soutient la demande des fédérations des filières du bâtiment et de lénergie, qui souhaitent la création dun fonds durgence à destination des petites et moyennes entreprises, abondé par les obligés au titre des certificats d’économie d’énergie (CEE). Les entreprises productrices d’énergie s’inquiètent en effet, du fait de l’interruption des travaux, de la baisse du niveau de production des CEE dont elles ont besoin pour satisfaire à leurs obligations réglementaires, et des pénalités en carence CEE dont elles pourraient avoir de ce fait à s’acquitter sur la période à venir ([7]). L’inflation du prix des CEE sur le marché n’est pas non plus souhaitable, car elle contribue à la hausse des factures d’énergie (les coûts de CEE représentent entre 3 et 4 % des factures d’énergie). L’abondement d’un fonds spécial par les producteurs d’énergie, en échange de l’obtention de CEE, permettrait de venir au soutien des artisans de la rénovation reconnus garants de l’environnement (RGE), et les acteurs du bâtiment et de l’énergie s’accordent sur leur intérêt mutuel à un tel dispositif ([8]).

Cette clarification doit être accompagnée d’un effort de prévision sur la cinquième période à venir de mise en œuvre des certificats d’économies d’énergie, de façon à donner de la visibilité aux acteurs en la matière.

2.   Optimiser le parc existant en faveur d’un nouvel urbanisme

Entre limpératif écologique de limitation de la nouvelle artificialisation des territoires et la raréfaction du foncier disponible dans les centres urbains, le logement existant doit être mobilisé au maximum. L’existence d’un pourcentage considérable de logements vacants jusque dans les zones les plus tendues constitue régulièrement un motif d’émotion dans l’opinion publique, et le groupe de travail croit fermement que l’action la plus forte doit être déployée pour mettre fin à cette situation économiquement irrationnelle et porteuse d’externalités négatives. L’existence de logements vacants contribue en effet au renchérissement des prix de l’immobilier, à la désertification des centres urbains, à la nécessité de construire toujours plus en périphérie des métropoles, et par là à des tensions supplémentaires sur les infrastructures existantes.

Le groupe de travail recommande dexpérimenter un dispositif de malus fiscal lorsquune construction neuve de logements est entreprise dans une commune concernée par un niveau élevé de vacance. L’indicateur de l’Insee LOG T2 montre que pour l’année 2016, la commune de Paris qui compte 1,37 million de logements, a un nombre de logements vacants proche de 115 000 logements, ce qui correspond à plus de 8 % de tout le parc. Il demeure difficile de cerner quelle est dans cette proportion la part correspondant à la vacance pour ainsi dire « frictionnelle » due aux déménagements et emménagements. La situation est plus grave dans un certain nombre de villes moyennes, où le taux de logements vacants peut dépasser 13 ou 14 % (Vichy, Montluçon, Lunéville, Nevers). Selon l’Insee, l’augmentation du nombre de logements vacants en banlieue et en périphérie des grandes agglomérations, très patente au cours des années 2010, est le signe d’une perte d’attractivité d’une partie du parc, dont elle estime qu’elle est accélérée par l’augmentation des constructions neuves.

La période est également propice à de nouvelles restrictions à la location touristique des biens immobiliers, qui réduit le marché de la location de longue durée et contribue à linflation des coûts du logement. L’une des raisons qui expliquent la difficulté croissante des Français à se loger réside en effet dans la sortie d’un grand nombre de logements du marché locatif traditionnel pour rejoindre celui de la location meublée de courte durée, notamment à travers l’intermédiaire de plateformes d’hébergement touristique, dont la plus connue est la plateforme américaine Airbnb.

Un effet bénéfique des restrictions actuelles sur les déplacements internationaux est une réorientation des biens vers le marché locatif que le groupe de travail propose daccompagner et dencourager, dans la mesure où il peut contribuer à enrayer la spirale de renchérissement du logement, notamment dans les zones très tendues qui sont aussi des centres touristiques majeurs. Plutôt que de nouveaux allégements fiscaux visant à inciter au retour sur le marché de la location, au prix d’un coût pour les finances publiques, le groupe de travail propose de prendre des mesures fiscales désincitant à la mise sur le marché de la location touristique des logements, par exemple par la création d’une taxe sur les logements accueillant plus de 30 jours par an des locataires de courte durée.

Un autre vecteur damélioration du parc de logements qui doit constituer une priorité dans la relance concerne lhabitat insalubre et indécent. D’après diverses estimations, dont celles de la Fondation Abbé Pierre, la France compterait entre 400 000 et 800 000 logements indignes dans le parc privé. Le logement indigne, qui est celui « dont l’état expose les occupants à des risques manifestes pouvant porter atteinte à leur sécurité physique ou à leur santé » ([9]), constitue à cet égard un levier prioritaire dans le cadre de la relance. Malgré les difficultés à estimer le nombre de logements touchés par ce phénomène, on peut estimer que le logement indigne concerne encore aujourd’hui environ un million de personnes. Or ces logements constituent une ressource en vue de la conciliation des objectifs d’agrandissement du parc de logements et de maîtrise de l’artificialisation des terres.

La résorption du logement insalubre par une politique volontariste de rénovation du parc a connu depuis deux ans des avancées qui doivent être amplifiées dans le cadre de la relance. Le dispositif fiscal de réduction d’impôt pour la rénovation du logement ancien, dit « Denormandie », cible efficacement les travaux de rénovation engagés par les particuliers dans les communes concernées par le programme Action Cœur de ville et qui ont signé une convention d’opération de revitalisation du territoire (ORT). Ces programmes ont par ailleurs permis des progrès notables dans le réinvestissement des centres-bourgs délaissés. Une amplification du soutien accordé à ces programmes pourrait par exemple passer par l’augmentation de la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) au titre des actions de requalification des cœurs de ville qui s’inscrivent dans un projet global de réhabilitation.

Laugmentation du parc de logements et la limitation de lartificialisation des terres doivent être conciliées par la mobilisation des friches urbaines. Si la rénovation thermique ou encore la réhabilitation du bâti dégradé sont des modalités prioritaires pour le recyclage du parc immobilier, ce n’est pas seulement le patrimoine bâti mais aussi l’assiette foncière elle-même qui peut être recyclée. Les friches urbaines qui jalonnent notre territoire constituent autant de ressources dont la reconversion doit être un pilier d’une politique foncière à la fois sobre et ambitieuse. Une réflexion est d’ores et déjà engagée par les ministères concernés en vue de l’élaboration d’une stratégie nationale de lutte contre l’artificialisation des terres qui passe par la réhabilitation des friches, et la Convention citoyenne pour le climat a également choisi de signaler l’importance de ce sujet.

Diverses dispositions sont proposées pour rendre les projets de requalification des friches urbaines plus attractives financièrement, notamment lorsqu’elles comportent des travaux de dépollution longs et coûteux. Un dispositif de malus fiscal, appliqué aux programmes qui impliquent l’artificialisation de nouvelles terres, qui alimenterait par compensation un fonds spécial à destination de la résorption des friches, pourrait constituer un levier d’action efficace pour promouvoir une utilisation sobre et responsable de notre vivier foncier.


II.   Favoriser un service public plus résilient et réactif

La crise a mis en lumière un certain nombre de facteurs de lenteur et de blocage dans le traitement par les administrations publiques des demandes émanant du secteur de la construction. En dépit de la réactivité du Gouvernement et notamment du ministère de la ville et du logement, qui a permis de prendre des ordonnances dans des délais serrés pour assurer la sécurité juridique des acteurs du secteur, les procédures relatives à la construction et notamment l’instruction des autorisations d’urbanisme ont été très fortement affectées par la crise sanitaire. Cette situation met en péril les entreprises de la filière en retardant de façon parfois considérable l’aboutissement des projets en cours, et en freinant le démarrage de nouveaux projets. La relance doit être l’occasion de rendre plus efficace la chaîne de la construction en optimisant les processus administratifs pour davantage de réactivité et de souplesse.

1.   Accélérer l’appropriation par les services de l’État des outils et procédures numériques disponibles

Des outils numériques existent dans de nombreux domaines, dont les professionnels se sont saisis, mais que les administrations montrent une certaine réticence à adopter. L’exemple des documents d’arpentage numériques, communément appelés sous leur dénomination anglaise BIM (building information modelling), illustre une certaine lenteur des services de l’État, pourtant ailleurs très aptes à la dématérialisation, à s’adapter à des processus numériques. Leur utilisation, possible à grande échelle depuis 2012, est encore peu mise en œuvre par les services du cadastre en dépit des demandes répétées des professionnels. Ceux-ci, des promoteurs aux géomètres-experts, rapportent leur consternation quant à l’impossibilité d’avancer sur ce dossier.

LÉtat doit montrer lexemple de la dématérialisation en adoptant rapidement les nouveaux outils numériques lorsquils permettent de simplifier les procédures sans perte dinformation. L’incapacité de l’État à assumer sa propre transformation alors qu’il exige celle des collectivités a été pointée par de nombreux acteurs. Ce genre de possibilité doit être largement privilégiée et priorisée par les acteurs publics lorsqu’elle est disponible.

La crise sanitaire a aussi révélé que certaines procédures peuvent devenir plus difficiles en temps de crise car les administrations adoptent un comportement excessivement prudent par rapport aux autorisations quelles délivrent. De nombreux professionnels ont rapporté auprès du groupe de travail que, pendant la période de confinement, loin d’être simplifiées pour permettre aux entreprises de mieux poursuivre leurs activités dans une période de grande difficulté économique, les procédures nécessitant l’aval des administrations publiques ont pu dans certains cas être alourdies. Un exemple concerne les autorisations de survol pour les relevés de terrain effectués par drone. Celles-ci sont, en temps normal, accordées de manière tacite par les délégations à l’aviation civile des préfectures. Cependant, pendant la période de confinement, c’est une autorisation expresse qui a pu être demandée, empêchant dans certaines situations des professionnels de poursuivre leur activité.

Les procédures applicables au moment dune crise doivent dorénavant faire lobjet dune réflexion au préalable qui permette de concilier les impératifs de sécurité et defficacité. Si le groupe de travail comprend les exigences qui peuvent mener les administrations à adopter des procédures contraignantes pour accorder certaines autorisations, il n’en demeure pas moins qu’un alourdissement, même temporaire, des formalités administratives en temps de crise expose encore davantage aux aléas économiques des entreprises déjà fortement menacées.

La chaîne de la construction fait intervenir un très grand nombre dacteurs publics et privés, ce qui complexifie et rallonge le parcours du montage au bouclage des projets. Au nombre des services publics sollicités, on compte l’huissier de justice, les services fiscaux de l’État en charge du cadastre, les services instructeurs des collectivités, les directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), les architectes des Bâtiments de France (ABF) des unités départementales de l’architecture et du patrimoine (UDAP), services déconcentrés à l’échelle du département des directions régionales des affaires culturelles (DRAC), les services de l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP), les commissions sécurité-incendie, les services de voirie et les concessionnaires de réseaux.

Laccélération du traitement des projets durbanisme nécessite de chercher des solutions pour remédier aux problèmes que pose lexistence dun grand nombre dinterlocuteurs. Les projets peuvent parfois pâtir d’un déficit de communication entre les services et de la nécessité de présenter à plusieurs étapes du parcours des demandes qui prennent chaque fois un certain temps à être traitées. Une réflexion doit être lancée sur les moyens concrets de raccourcir le parcours des projets en promouvant un décloisonnement des procédures et une meilleure communication entre les acteurs publics.

2.   Favoriser la transition numérique des collectivités

En dépit de la dynamique lancée par ladoption de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de laménagement et du numérique (ÉLAN) vers la dématérialisation des procédures dans les collectivités territoriales, il demeure à lheure actuelle une culture du papier particulièrement préjudiciable dans le contexte de la crise sanitaire. L’un des facteurs rendant plus difficile le passage intégral au télétravail au moment de la crise semble en effet avoir été la dépendance d’un certain nombre de procédures, encore à l’heure actuelle, au dépôt et à l’enregistrement physiques de dossiers papier qui accompagnent le traitement numérisé des demandes.

La dématérialisation engagée il y a deux ans exige de mettre fin à la dépendance papier des administrations. Dans la mesure où ces procédures ne mettent pas en jeu la réalisation d’actes authentiques – actes qui engagent des problématiques spécifiques – il est difficile d’accepter cet attachement continué au papier, qui nuit à l’efficacité du traitement et contribue par ailleurs à un usage trop abondant du papier par les administrations.

Toutes les procédures durbanisme doivent être concernées par des procédures entièrement dématérialisées sans dépôt de dossier papier dici à 2022, pour tenir les délais initialement prévus par la loi ÉLAN. Pour les demandes d’autorisation d’urbanisme, qui nécessitent le dépôt numérique de quantité de documents, il semble particulièrement inadmissible de continuer d’exiger un dépôt papier, et les administrations devront se passer de cette exigence dans les meilleurs délais.

La crise a montré une certaine impréparation des administrations au travail à distance. Si l’arrêt des chantiers de construction au mois de mars se justifiait par la nécessité d’assurer la sécurité sanitaire des intervenants de chantier et de mettre en place des protocoles permettant la reprise de l’activité d’une manière à assurer cet impératif, la cessation presque complète dans de nombreuses collectivités des procédures d’instruction des dossiers de demande d’autorisation d’urbanisme doit poser question. Nombre de collectivités et de services déconcentrés de l’État intervenant également dans la chaîne de la construction n’ont pas été en mesure de mettre en œuvre le télétravail d’une façon qui permettait la bonne continuité de l’activité.

Dans loptique de parer à de nouvelles crises qui pourraient survenir à lavenir, il semble prioritaire dassurer une meilleure continuité, à distance si nécessaire, des services locaux dinstruction des autorisations durbanisme. Cette exigence peut nécessiter le déploiement d’ordinateurs portables et de téléphones portables de service, ainsi que d’outils logiciels permettant la connexion à distance des employés, et les efforts financiers dans ce sens devront être accompagnés par l’État.

Les procédures relatives aux autorisations durbanisme sont particulièrement longues et complexes dans notre pays alors que la relance appelle un déploiement rapide de notre potentiel de construction. Les professionnels attirent l’attention sur le fait que ces procédures durent très longtemps même lorsque les demandes sont raisonnables, et que certaines collectivités peuvent demander des dizaines de pièces complémentaires aux pièces figurant au dossier. Ces demandes excessives suscitent l’incompréhension des parties prenantes et participent de l’opacité de l’action publique. Elles peuvent même parfois paraître aux yeux des acteurs comme une instrumentalisation de la procédure afin de repousser dans le temps ou de freiner la réalisation de projets politiquement délicats, ce qui favorise une défiance peu constructive des acteurs vis-à-vis des pouvoirs publics. En tout état de cause, ces manœuvres dilatoires fragilisent l’équilibre financier des projets en étendant les délais de réalisation et peuvent mettre en péril la santé des entreprises qui y sont investies.

Il paraît nécessaire de limiter fortement le recours des collectivités aux demandes de pièces complémentaires dans le cadre de linstruction des autorisations durbanisme. Une telle clarification permettrait d’apporter de la visibilité aux particuliers et aux professionnels, ce qui sécuriserait les projets en ouvrant la possibilité aux professionnels de prendre leurs dispositions dans des délais raisonnables. Devant le risque d’empilement des documents demandés, il paraît nécessaire de réfléchir aux meilleurs moyens, législatifs ou réglementaires, de prévenir les demandes excessives des services instructeurs.


III.   mettre le logement social et étudiant au cœur de la relance

1.   Rendre leurs moyens d’action aux organismes de logement social

Les acteurs du logement social se sont engagés très activement pendant la crise sanitaire afin de protéger les populations logées et de les accompagner au cours des difficultés économiques qui en découlent. Dans une charte signée en commun avec les cinq fédérations d’associations de locataires agréées à l’échelle nationale, les entreprises sociales de l’habitat, les offices publics de l’habitat, les coopératives d’HLM et les associations régionales d’organisme d’habitat social ont pris vingt engagements visant à accompagner les locataires HLM en situation de fragilité économique. Ils ont eu à cœur de soutenir les locataires par diverses actions : l’accompagnement dans leurs démarches et, le cas échéant, le soutien financier des ménages éprouvant des difficultés de paiement, la mise en œuvre, dans la mesure du possible, d’un étalement des charges par des reports de paiement, des versements partiels et l’échelonnement de la dette, la mise en place de dispositifs de suivi commun entre les bailleurs sociaux et les associations sur les cas difficiles, le report ou l’étalement des régularisations débitrices.

Aux yeux du rapporteur, ces comportements vertueux confirment limportance pour les communautés des bailleurs sociaux comme acteurs du commun, en témoigne aussi leur engagement du 8 juin à accélérer leurs investissements. Leur rôle privilégié dans la vie des 11 millions de Français qui louent un logement social doit en faire des acteurs centraux dans la relance. Ils conduisent les projets du lancement de la conception du bâtiment jusqu’à l’usager du logement et maîtrisent ainsi la diversité des aspects de la chaîne du logement. La Fédération des offices publics de l’habitat (FOPH) et la Fédération des entreprises sociales pour l’habitat (FESH) ont publié le 8 juin un engagement à accélérer de manière considérable leur politique d’investissement dès 2020 et pour la période de trois ans qui vient, en matière à la fois de réhabilitations (150 000 réhabilitations annuelles de plus de 5 000 euros) et de nouvelles constructions (130 000 constructions neuves). C’est un signal positif pour les entreprises du bâtiment, et notamment pour les PME, qui devrait aider le secteur à se redresser.

Les contreparties demandées par les organismes de logement social rappellent le besoin daccompagnement financier par lÉtat. Les bailleurs sociaux demandent, pour leur rendre une marge de manœuvre financière, une revalorisation des aides personnelles au logement (APL) supérieure à l’inflation ainsi qu’un gel de la réduction de loyer de solidarité à son niveau actuel. Comme la quasi-totalité des acteurs du bâtiment pendant cette période, les opérateurs HLM plaident pour une réduction des taux de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur leurs opérations, demandant un retour au taux réduit de 5,5 %.

Le Gouvernement doit accepter de faire un effort financier significatif en faveur du logement social pour le mettre au cœur dune relance solidaire. Dans un contexte financièrement contraint, une telle évolution sur la TVA est difficile à envisager pour le secteur du bâtiment en général, mais les effets financiers pour l’État d’une réduction ciblée sur les opérateurs HLM devrait être étudiée. Une telle baisse pourrait aussi prendre la forme d’une exonération temporaire de TVA pendant la période d’application des mesures de protection sanitaire dont la mise en œuvre est exigée par les guides de préconisations adoptés par les acteurs. L’évolution à la baisse de la réduction de loyer de solidarité (RLS) pourrait également constituer un moyen d’action. Une autre façon de compenser les carences financières sérieuses subies par les acteurs du logement social serait un abondement exceptionnel du Fonds national des aides à la pierre (FNAP) de la part de l’État, qui serait également un signal volontariste en faveur d’une relance construite sur le logement social.

Les moyens daction des organismes de logement social peuvent également être amplifiés par des adaptations réglementaires visant à lever les freins administratifs qui pénalisent leurs opérations. Les contrats cadres pluriannuels allotis pourraient être permis, comme le propose l’Union sociale pour l’habitat, afin d’accélérer la production de logements sous maîtrise d’ouvrage HLM et de privilégier les entreprises locales. D’autres possibilités consisteraient à faciliter la délivrance des permis de construire aux bailleurs sociaux dans des délais encadrés, en autorisant les préfets à accorder de manière exceptionnelle des permis dérogatoires aux règles architecturales locales.

Les acteurs du logement social sont également demandeurs dévolutions qui permettent de rapprocher les procédures de la définition des besoins. Ils proposent par exemple de déconcentrer les agréments à l’échelle régionale et d’en dématérialiser l’instruction. Ils recommandent également de conditionner l’octroi des aides à la pierre et la délivrance des garanties des collectivités à la maîtrise des prix en vente en état futur d’achèvement. Enfin, ils mettent en avant la possibilité de supprimer ou d’adapter les zonages locatifs pour les opérations sous maîtrise d’ouvrage HLM.

La mobilisation du foncier public au service du logement social et du logement étudiant doit être amplifiée. Le foncier des administrations de l’État est vaste et l’État cède chaque année 70 à 80 terrains pour la construction de logements. Cette politique, pilotée par la Commission nationale de l’aménagement, de l’urbanisme et du foncier (CNAUF), agit en faveur de la résorption de la carence de logements dans un contexte marqué par la rareté du foncier disponible mais aussi par la hausse de son prix. Cette pratique doit être réservée expressément à la construction de logements sociaux ou de logements étudiants.

Afin dempêcher que les cessions de terrain par les collectivités ne contribuent à la spirale inflationniste des prix du foncier, et afin de favoriser au contraire la baisse de ces prix, des modalités de cession alternatives doivent être encouragées. Les opérations d’aménagement ayant souvent un coût difficile à prévoir, il peut être stipulé au contrat une clause d’intéressement ou de « retour à meilleure fortune » qui prévoit la rémunération du vendeur dans le cas où le retour financier du terrain est positif. Le groupe de travail propose d’encourager dans les pratiques de cession des collectivités et de l’État les ventes à l’euro symbolique assorties d’une clause d’intéressement.

La crise que nous avons vécue a mis en évidence les difficultés considérables quéprouvent certaines populations à accéder au logement. Le Gouvernement a augmenté ses capacités d’hébergement pour parvenir à un total de près de 180 000 places ouvertes au mois de mai. D’autres dispositifs, à l’image des centres d’hébergement spécialisés (CHS), ont été mis en œuvre pour accueillir les personnes en difficulté. Socialement, nous avons pris conscience que les personnes désocialisées, sorties du monde du travail depuis longtemps et sans ressources stables sont particulièrement vulnérables du point de vue sanitaire, ce qui est exacerbé dans un contexte pandémique.

En dépit de leur plus grande vulnérabilité, les populations en manque de stabilité économique et sociale ont beaucoup de mal à trouver un logement pérenne, même auprès des acteurs du logement social. Elles sont en effet systématiquement pénalisées par le manque de garanties dont elles disposent sur le paiement du loyer et des charges. Les bailleurs sociaux, bien qu’ils œuvrent à accueillir les locataires en situation de grande précarité, notamment par le biais des programmes de prêts locatifs aidés d’intégration (PLAI), exigent cependant des conditions de ressources et de garanties que ne peuvent satisfaire ces demandeurs.

Certains opérateurs de logement social ont mis en place des structures capables daccompagner ces publics. C’est le cas notamment de CDC Habitat (filiale du groupe Caisse des dépôts et consignations), et de sa filiale Adoma. Incarnation actuelle de la Société nationale de construction de logements pour les travailleurs algériens (SONACOTRAL) créée en 1956, Adoma a la charge de la construction et de la gestion d’habitats à vocation solidaire. Elle gère à ce titre plus de 70 000 places de logement accueillant quelques 90 000 personnes en difficulté dans des structures diverses : centres d’hébergement, résidences sociales, foyers de travailleurs migrants. De la même façon, l’entreprise sociale de l’habitat Batigère a créé l’Association pour l’accompagnement, le mieux-être et le logement des isolés (AMLI) qui déploie une action consacrée aux ménages les plus fragiles, avec des logements adaptés aux besoins des demandeurs. Ces actions ne se limitent pas à des seules opérations de logement mais aussi à des missions sociales, de l’accompagnement sur le marché du travail à l’intervention d’éducateurs.

Le groupe de travail propose de demander aux bailleurs sociaux et aux groupes de logement social disposant dun parc important de faire un effort en faveur des populations exclues du parc social. Face à cette problématique préoccupante, une réponse est en effet exigée qui mobilise les acteurs à l’échelle locale, et les opérateurs de logement social sont souvent ceux qui connaissent le mieux les populations en grande difficulté économique et sociale. Celui-ci pourrait prendre la forme de la création de filiales spécifiquement destinées à prendre en charge les populations à revenus très réduits ou très instables mais qui ne relèvent pas cependant de la politique d’hébergement déployée à destination des personnes sans domicile.

2.   Mieux accompagner l’accession à la propriété

Il y a tout lieu de craindre un resserrement des taux de crédit immobilier, qui pourrait encore davantage freiner le marché du bâtiment. Les principales craintes exprimées par les professionnels portent sur le comportement des banques lors de la reprise, dans un contexte qui sera peut-être marqué par une baisse de la solvabilité des ménages. La crise de 2008 nous a enseigné que le moment le plus dangereux de la crise est celui où les banques, par crainte d’un manque de rentabilité, commencent à rehausser leurs exigences sur les crédits accordés aux particuliers. Les institutions financières avaient dès le mois de janvier resserré les conditions de l’accès au crédit immobilier par suite d’une recommandation du Haut Conseil de stabilité financière invitant à exiger des emprunteurs un taux d’effort inférieur à 33 % et à limiter le taux des maturité des emprunts à 25 ans ([10]). Ce resserrement avait dès avant le début de la crise suscité une baisse de l’accession à la propriété, estimée à 100 000 accessions en moins par an ([11]).

Face à ce qui pourrait se transformer en véritable crise de laccession à la propriété, il est nécessaire de prendre des mesures en faveur de la capacité des ménages à lachat. À cet effet, le groupe de travail propose d’amplifier le financement des ménages cibles en maintenant le prêt à taux zéro (PTZ) sur l’ensemble du territoire et en mettant en place une prime exceptionnelle à l’achat pour les ménages sous plafonds de revenus qui se portent acquéreurs dans le neuf ou en vente HLM.

Un effort de simplification des agréments du prêt social location-accession (PSLA) et le report des dates butoirs pour lobtention de lagrément définitif doivent également être entrepris en faveur du soutien des acteurs de l’accession sociale ; cet effort se conjugue aux efforts de simplification des voies d’action des organismes de logement social prévus à la proposition n° 14. Enfin, le logement solidaire doit être mobilisé comme vecteur de l’accession sociale pour la relance : il faut encourager l’action des organismes de foncier solidaire (OFS) en facilitant leur financement par la Banque des territoires (filiale du groupe Caisse des dépôts et consignations) et en simplifiant le cadre réglementaire qui s’applique à ces opérations.

Le groupe de travail estime quil est très important dans un tel contexte de signaler lattachement à laccession et la confiance dans la capacité des particuliers à rembourser leur prêt. De nombreux professionnels, y compris les professionnels de l’immobilier, demandent une réflexion sur l’assouplissement des conditions de l’accès au crédit immobilier. Ils soulignent le très bas taux de défaut lié à un endettement immobilier en France, ainsi que le niveau très bas du taux d’intérêt moyen sur les crédits immobiliers (1,16 % en avril), qui devrait se maintenir du fait de la politique accommodante de la Banque centrale européenne. Ces conditions, qui demeurent très bonnes, devraient, selon eux, permettre de desserrer les exigences sur le taux d’effort des ménages.

Un signal positif des autorités financières quant à la soutenabilité des emprunts immobiliers des particuliers sera en mesure de freiner pour partie les comportements de précaution de la part des prêteurs. Le HCSF n’a pas souhaité donner ce signal lors de sa réunion du 19 juin, mais il devrait poursuivre son étude du marché et se tenir prêt à intervenir dans ce sens si le resserrement de l’accès au crédit devait se confirmer.

3.   Privilégier le développement du logement étudiant

La fermeture des universités, qui aura duré du mois de mars jusquà la fin de lannée académique, a fortement affecté les structures consacrées à laccompagnement des étudiants. Le Centre national des œuvres universitaires et scolaires (CNOUS) a signalé ainsi une baisse de l’activité des restaurants des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS) qui a engendré un manque à gagner de l’ordre de 200 millions d’euros entre avril et septembre, baisse qui vient affecter des capacités financières déjà dépassées par les besoins. Les CROUS ont aussi subi le départ d’un grand nombre d’étudiants des résidences collectives dont ils ont la gestion, engendrant une autre baisse de ressources.

La crise sanitaire et économique contribue à aggraver encore la situation dun grand nombre détudiants. Les associations impliquées dans l’aide alimentaire rapportent qu’un nombre de plus en plus élevé d’étudiants demandent de l’aide. Tandis que plus de 19 % des étudiants vivent d’ores et déjà en dessous du seuil de pauvreté, les acteurs expriment de vives craintes concernant l’impact de la crise sur leur niveau de vie. La précarité étudiante avait déjà amené le CNOUS, avec le soutien du ministère de l’enseigneur supérieur, de la recherche et de l’innovation, à annoncer en décembre 2019 le gel des loyers des 175 000 logements du parc géré par les CROUS pour l’année 2020.

Dans ce contexte, le CNOUS a invité le groupe de travail à réfléchir à une gamme dinstruments permettant la mobilisation du logement étudiant pour relancer le secteur du bâtiment tout en faisant progresser un domaine délaissé. Il a fait remarquer que 20 000 logements étudiants ont besoin de réhabilitation et que les logements manquent très fortement dans les territoires tendus, ce qui occasionne des gênes très considérables pour le public étudiant et aggrave les inégalités d’accès à l’enseignement supérieur. Par ailleurs et en dépit du plan de construction de 60 000 logements étudiants, la carence de logements étudiants par rapport aux 700 000 étudiants bénéficiaires d’une bourse continue de peser fortement sur les étudiants demandeurs. Cette situation appelle un engagement financier pour faire du logement étudiant l’un des vecteurs de la relance du secteur.

Le groupe de travail a retenu que des solutions juridiques existent pour améliorer, à coûts constants, la qualité et lefficacité des opérations menées : la simplification des procédures de recours à la maîtrise d’ouvrage directe ou l’incitation à développer des marchés de partenariat entre le CNOUS, les bailleurs sociaux et les collectivités. C’est une culture de la coopération entre les CROUS et les acteurs du logement qui doit être promue à l’échelle locale.

Cette possibilité passe en premier chef par une plus grande association des CROUS aux instruments de portage des opérations de construction. Les sociétés publiques locales, qui sont des sociétés anonymes compétentes notamment pour réaliser des opérations d’aménagement et de construction, exercent leur activité exclusivement pour le compte de leurs actionnaires qui sont à 100 % des collectivités territoriales ou leurs groupements. Élargir l’actionnariat de ces organes aux CROUS et aux universités permettraient, sans diluer leur caractère public, de compléter leur action publique avec un volet étudiant nécessaire dans les communes qui hébergent des établissements d’enseignement supérieur et de recherche. Il en va de même pour les sociétés d’économie mixte locales (SEML) et les sociétés d’économie mixte à opération unique (SEMOP), qui comptent déjà des établissements publics parmi leurs actionnaires.

Les stratégies locales en faveur de laccroissement du parc étudiant doivent faire lobjet dun plan local de développement du logement étudiant. L’élargissement de l’actionnariat des structures de portage des opérations doit en effet aller de pair avec l’élaboration d’un plan qui permette d’associer les divers acteurs dans une coopération formalisée, qui pourrait devenir obligatoire dans les régions concernées par un taux particulièrement élevé de carence en matière de logement étudiant (déficit défini par la faiblesse du parc de logements étudiants existant par rapport au nombre d’étudiants éligibles).


   Annexe n° 1 :
Liste des personnes auditionnées par le groupe de travail

-         M. Julien Denormandie, ministre auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ville et du logement, a été auditionné par la commission des affaires économiques.

-         Mme Rachel Chane See Chu, conseillère du ministre chargé de la ville et du logement

-         Mme Marianne Louis, directrice générale de l’Union sociale pour l’habitat (USH) *

-         M. Bruno Arcadipane, président d’Action Logement Groupe *

-         M. Roger Madec, président de Paris Habitat *

-         M. Patrick Liébus, président de la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB) *

-         M. Jacques Chanut, président de la Fédération française du bâtiment (FFB) *

-         MM. Régis Lambert, président, et Hervé Gasteaud, délégué général de l’Union nationale des géomètres-experts (UNGE) *

-         Mme Alexandra François-Cuxac, présidente de la Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) *

-         M. Damien Hereng, président de la Fédération française des constructeurs de maisons individuelles (FFC)

-         M. Olivier Burot, président de l’Institut des constructeurs et promoteurs (ICP)

-         M. Jean-François Humbert, président du Conseil supérieur du notariat (CSN) *

-         M. Jean-Marc Torollion, président de la Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM) *

-         MM. Lionel Janot, président, et Stéphane Prouzeau, délégué général de la Fédération interprofessionnelle des diagnostiqueurs immobiliers (FIDI) *

-         M. Denis Dessus, président du Conseil national de l’ordre des architectes (CNOA) *

-         M. Christophe Kullmann, président-directeur général de Covivio *

-         Mme Méka Brunel, directrice générale de Gecina *

 

 

 

* Ces représentants dintérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, sengageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de lAssemblée nationale.


   Annexe n° 2 :
Liste des acteurs ayant contribué par écrit aux travaux du groupe de travail

-         Centre national des œuvres universitaires et scolaires (CNOUS)

-         Caisse des dépôts et consignations

-         CDC Habitat *

-         Union sociale pour l’habitat (USH) *

-         Action Logement Groupe *

-         France urbaine

-         Fédération des entreprises publiques locales

-         Fondation Abbé Pierre

-         Droit au logement

-         Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB) *

-         Fédération française du bâtiment (FFB) *

-         Fédération nationale des travaux publics (FNTP) *

-         Fédération des promoteurs immobiliers (FPI) *

-         Conseil national de l’ordre des architectes (CNOA) *

-         Union nationale des entreprises du paysage (UNEP)

-         Union nationale des géomètres-experts (UNGE)*

-         Syndicat du retrait et du traitement de l’amiante et des autres polluants (SYRTA) *

-         Union des laboratoires de santé du bâtiment (ULSB)

-         Union française de l’électricité (UFE) *

-         Union des syndicats de l’immobilier (UNIS) *

-         Gecina *

 

 

 

 

* Ces représentants dintérêts ont procédé à leur inscription sur le registre de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique, sengageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de lAssemblée nationale.


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   annexe N° 3 :
NOTES HEBDOMADAIRES ÉTABLIES PAR LE GROUPE DE TRAVAIL

 RÉPUBLIQUE  FRANÇAISE

____________________________________ LIBERTÉ - ÉGALITÉ – FRATERNITÉ

COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

GT SUIVI DU SECTEUR LOGEMENT

 

 

 

Paris, le 6 avril 2020

 

 

Groupe de travail Logement

 

M. Richard Lioger

 

 

Objet : Point sur la situation du secteur Logement dans le contexte de la crise sanitaire

 

À noter : audition de M. Julien Denormandie, ministre chargé du logement, le jeudi 23 avril à 17 heures.

I.   Une forte demande d’hébergement qui mobilise les acteurs publics et privés

1. Laccueil des sans-abri. C’est la question qui focalise le plus l’attention du ministère de la ville et du logement (MVL) depuis le début de la crise. Plusieurs problématiques s’imposent : la protection sanitaire de populations vulnérables ; le confinement des sans-abri ; l’aide alimentaire. L’épidémie a fortement perturbé les dispositifs de distribution d’aide, ce qui a pour conséquence un accès plus difficile pour les personnes sans abri aux ressources de première nécessité.

Mesures déployées. Le MVL a mis en œuvre un dispositif exceptionnel d’accueil des sans-abri, financé par une majoration de la dotation du programme 177 « Hébergement » de l’ordre de 65 millions d’euros. Il a annoncé un faisceau de mesures :

Évaluation. Les acteurs font état, malgré une mise en œuvre globalement positive des mesures d’urgence, de plusieurs difficultés :

-          un manque de personnels et de volontaires sur le terrain ;

-          un manque de matériels de protection pour les personnels déployés pour accueillir les personnes sans abri dans les CHS et pour les associations chargées de la distribution des « chèques services solidaires » ;

-          la pérennisation des séjours dans les CHS, alors même que ceux-ci sont censés être de courte durée avant l’accueil dans un lieu plus adapté à un séjour de longue durée ;

-          la difficulté dappliquer toujours les mesures barrière sur le terrain.

Les acteurs attirent également l’attention sur les difficultés occasionnées par le confinement dans lhabitat indigne. Ils font également état d’une surcontamination observée dans les secteurs touchés par la suroccupation des logements.

 

2. Lhébergement temporaire des personnels soignants et travailleurs sociaux. Il y a une demande forte, particulièrement dans les agglomérations de Paris, Lyon, Marseille et Lille, de places d’hébergement de la part des personnels mobilisés dans le secteur sanitaire : soignants des hôpitaux et des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), travailleurs sociaux et bénévoles mobilisés dans les CHS.

Mesures déployées. Sollicité par le ministre chargé de la ville et du logement, la plateforme AirBnb a mis en place depuis le 24 mars une plateforme de mise à disposition gratuite de logements, appelée Appart Solidaire. Au 31 mars, 5 000 offres de logements avaient été proposées sur la plateforme, pour 11 000 nuitées réservées.

D’autres plateformes similaires ont été mises en place, notamment celle du site immobilier pap.fr (1 200 offres déposées). Le groupe Action Logement a mis 600 logements vacants à la disposition des personnels des EHPAD. Les groupes hôteliers, à l’instar d’Accor et de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH), sont également mobilisés.

II.   Dans le secteur locatif, des difficultés potentielles en matière de paiement des loyers

La baisse des revenus des ménages du fait du passage à lactivité partielle peut occasionner pour les locataires des difficultés à payer les charges, dont le loyer forme une grande partie.

Des mesures ont été déployées pour accompagner les locataires en difficulté :

Évaluation. Les acteurs interrogés font état de la menace d’un problème croissant de solvabilité des ménages en situation de baisse de revenus. Ils alertent sur la capacité des FSL, dont les enveloppes cumulées représentent 350 millions d’euros, à faire face à une hausse certaine du nombre de demandeurs. Ils invitent lÉtat à se pencher sur la création dun fonds national exceptionnel ou sur une dotation complémentaire des FSL.

III.   L’économie du bâtiment menacée à court et moyen termes

1. Limpact sur le bâtiment des conditions détériorées de la sécurité sanitaire sur les chantiers de construction. Les conditions détériorées de la sécurité sanitaire, notamment le manque de masques de protection et les distances réduites entre les travailleurs de chantier, ont causé linterruption à partir du 17 mars de 93 % des chantiers de construction ([12]) ainsi que la mise en activité partielle de deux millions de salariés du BTP.

Le Gouvernement a cherché à permettre rapidement la reprise des chantiers. Un guide de bonnes pratiques ([13]) qui précise lensemble des mesures et procédures applicables afin d’assurer le bon déroulement des travaux a été publié le 2 avril après deux semaines de concertation entre l’organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics (OPP-BTP) et les professionnels du secteur et après validation par les ministères concernés.

 

2. Les difficultés issues de lapplication des mesures durgence inquiètent les professionnels du secteur du bâtiment et une nouvelle ordonnance devrait être prise. L’application de l’ordonnance n° 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période durgence sanitaire aurait pour conséquence le ralentissement durable de l’activité de construction pour les contrats privé ([14]) même au-delà de la période d’urgence.

Les inquiétudes des acteurs du secteur du bâtiment se cristallisent autour de deux points : linstruction retardée des autorisations durbanisme et le ralentissement durable qui pourrait s’ensuivre pour le secteur ; les insécurités juridiques occasionnées pour les opérations immobilières en cours du fait de la prorogation seulement partielle des délais qui s’y appliquent (encadré 1).

 

Les professionnels du secteur ont rapidement exprimé leurs inquiétudes et le Gouvernement travaille actuellement sur une nouvelle ordonnance qui devrait être prête d’ici deux semaines. Des solutions ont été proposées pour résorber les difficultés (encadré 2).

 

3. La difficulté dévaluer limpact économique de la crise sur le marché de limmobilier. Il a déjà montré des signes de fléchissement du fait de la baisse des transactions, même si les acteurs de l’immobilier mettent en œuvre des moyens pour permettre la poursuite des opérations, notamment par une dématérialisation accrue des procédures. Du fait de la crise et de la limitation des déménagements intervenue le 1er avril ([15]), le nombre de nouvelles locations est également amené à chuter fortement.

L’inconnue de la durée du confinement fait peser des incertitudes sur l’évolution du marché. Si les ménages connaissent une baisse de revenus durable, le fléchissement pourrait être plus marqué. Si une baisse des prix devait avoir lieu, elle affecterait vraisemblablement en premier lieu les zones moins tendues. En tout état de cause, les modalités dobtention dun crédit immobilier auront une importance centrale pendant la crise et en sortie de crise pour relancer la demande dans le bâtiment.

La mobilisation en sortie de crise des opérateurs du logement pour soutenir la demande de logements s’avérera sans doute déterminante dans : CDC Habitat sest dores et déjà engagée pour lachat de 40 000 logements sociaux, intermédiaires et « abordables » ; Action Logement pourrait s’engager dans le même sens.

Certains acteurs sont demandeurs de mesures permettant de faciliter les acquisitions, et le MVL travaille d’ores et déjà à faciliter les acquisitions dans l’immobilier neuf.

 

 

 


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 RÉPUBLIQUE  FRANÇAISE

____________________________________ LIBERTÉ - ÉGALITÉ – FRATERNITÉ

COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

GT SUIVI DU SECTEUR LOGEMENT

 

 

Paris, le 13 avril 2020

 

 

Groupe de travail Logement :

 

M. Richard Lioger

 

 

Objet : Point sur la situation du bâtiment et de limmobilier et tableau de bord du logement

Les métiers relatifs au logement dans léconomie appartiennent à une diversité de filières qui ont en commun des difficultés considérables dans ladaptation aux contraintes issues de la crise sanitaire et des mesures adoptées pour lendiguer, et dont lintégrité économique pourra être très rapidement menacée si ces situations perdurent. Lindustrie du bâtiment, en particulier, fait face en ce moment à un ensemble de blocages qui contribuent à mettre en péril la pérennité des opérations dans toutes leurs phases (tableau 2). Les services immobiliers sont également affectés et pourraient lêtre davantage à mesure que la crise se prolonge.

I.   L’Économie du bâtiment et de l’immobilier sous tension

1.   L’industrie du bâtiment est parmi les secteurs les plus touchés par la crise

Sil est encore tôt pour juger de limpact de la crise, les opérations dans le secteur du bâtiment ont été arrêtées pendant plus de deux semaines et la reprise des chantiers se fait de manière lente et partielle, ce qui occasionne des pertes conséquentes pour lactivité. Il est encore trop tôt pour pouvoir disposer de chiffres complets sur les perspectives du secteur et aucune des notes de conjoncture publiées par les instituts de référence ne lui consacrent à ce jour d’analyse systématique. Les chiffres de la perte d’activité liée à l’épidémie et à la mise en œuvre des mesures d’endiguement enregistrés sont, pour le moment, le fruit d’estimations quant à l’impact de l’arrêt de 93 % des chantiers de construction entre le 17 mars et le 6 avril. Du fait du poids du bâtiment dans la production (6 %), cette baisse de l’activité contribuerait pour cinq points à la baisse agrégée de l’activité en mars. Si une partie des chantiers, notamment ceux de petite taille, ont pu reprendre cette semaine, l’ampleur de la reprise demeure incertaine. Les perspectives de moyen terme sont assombries par l’état des carnets de commandes, qui ont retrouvé leur niveau bas de la fin 2015 (données Banque de France) après la reprise sensible vécue sur la période 2017-2019.

Les perspectives du secteur de la rénovation sont mitigées alors quil concerne un grand nombre de petites entreprises qui ne sont pas en mesure de supporter une période prolongée dinactivité. La place du bâtiment dans la consommation des ménages est très inférieure à sa place dans l’activité (2 % des dépenses de consommation), mais cette consommation, qui concerne essentiellement des travaux spécialisés et de rénovation, pourrait s’effondrer de 90 % dans un contexte marqué par la difficulté des interventions dans les domiciles habités. Ces entreprises plus fragiles, principalement des PME-PMI, constituent la majorité des 700 000 entreprises du secteur, dont 90 % sont de très petites entreprises qui comptent moins de dix salariés.

La baisse de lactivité du fait de larrêt des chantiers a dores et déjà donné lieu à un recours massif à lactivité partielle qui devrait perdurer. Le secteur de la construction constitue un secteur très intensif en main-d’œuvre. Après une décennie difficile marquée par le recul des projets et des effectifs, qui constitue aussi la toile de fond sur laquelle intervient la crise pour les acteurs, l’emploi dans le secteur a progressé en 2018 pour la première fois depuis 2011 pour atteindre plus de 1,8 million de travailleurs (6,7 % de la population active) ([16]). Il s’agit en grande partie d’emplois qui ne sont pas réalisables à distance, aussi bien dans le bâtiment que dans la promotion immobilière. De ce fait, l’interruption des travaux occasionne mécaniquement un recours massif au chômage partiel, qui concerne plus de 630 000 employés, le secteur du BTP constituant le troisième demandeur de chômage partiel.

 

 

CONSTRUCTION ([17])

ACTIVITÉS IMMOBILIÈRES

Part du secteur dans le PIB (Insee)

6 %

13 %

Part dans la consommation des ménages (Insee)

2 %

19 %

Solde agrégé de lactivité au mois de mars (OFCE)

- 51 %

- 18 %

Perte dactivité mensuelle estimée avril (Insee)

- 88 %

- 1 %

Contribution à la baisse du PIB estimée (Insee)

- 5 pts

- 0.2 pts

Impact dun mois de confinement sur la FBCF (OFCE)

- 50 %

0

Total des emplois affectés (OFCE)

- 850 000

- 22 0000

dont chômage partiel (OFCE)

- 637 000

- 18 000

Chômage partiel en  % demandes totales (DARES)

14.2 %

2.2 %

Climat des affaires : prévisions dactivité (ENC de la BdF) ([18])

- 82 (B) / - 78 (TP)

n/c

Tableau 1. Indicateurs macroéconomiques pour mars (estimations) et avril (prévisions)

2.   Les services immobiliers pourraient voir leur situation se dégrader

Le secteur immobilier demeure pour le moment moins affecté, mais pourrait lêtre davantage si le confinement venait à être fortement prolongé. Le nombre de transactions totales enregistrées sur l’année, qui a atteint la barre des 1 million en 2018 et en 2019, devrait reculer cette année d’au moins 100 000 à 200 000 transactions, en fonction de la durée totale de restriction d’activité. Certains acteurs demeurent néanmoins confiants : dans le cas où l’épidémie serait jugulée avant l’été, la reprise du secteur devrait être dynamique, soutenue par le report partiel des projets du printemps. Un confinement prolongé, qui entraînerait des dépôts de bilan et une hausse du chômage, aurait un impact plus significatif dans la mesure où l’investissement immobilier est sujet à une forte élasticité-revenu, notamment par rapport à la location.

Limpact de la crise actuelle sur les prix de limmobilier, quoique certainement récessif et dans tous les cas hautement incertain, devrait être limité, notamment dans les zones tendues. Là où un repli du marché devrait occasionner une stabilité ou une légère baisse des prix dans les zones peu tendues, le potentiel financier des acheteurs dans les grandes zones urbaines ne devrait pas être trop fortement affecté. L’impact mesuré devrait donc être moindre que celui constaté en 2008, d’autant plus que la baisse des prix de 7 % constatée à cette occasion avait été amplifiée par les phénomènes spéculatifs sur les actifs immobiliers qui l’avaient précédée. De manière générale, les prix de l’immobilier ne suivent que d’assez loin les fluctuations boursières, comme en témoignent les épisodes de 2000-2002 et 2007-2009 (voir graphique 1).

Evolution du prix de l'immobilier en France, du CAC 40 et du taux de chômage.

Graphique 1. Superposition des courbes de valeurs boursières, de taux de chômage et de prix de limmobilier, 1996-2020 (source Les Échos, données Insee)

II.   Des difficultÉs sectorielles logistiques et financiÈres

1.   Le blocage des opérations dans le bâtiment menace la survie des entreprises

De nos échanges avec les acteurs du secteur, il ressort que, malgré leur ferme volonté de voir reprendre les chantiers dans les meilleurs délais, de nombreuses difficultés demeurent dans la poursuite des opérations de construction (voir note du 6 avril et tableau 2). Tout en saluant louverture dont font preuve les administrations, les entreprises font état de difficultés croissantes dans plusieurs domaines.

Les difficultés logistiques dans lapprovisionnement en moyens de protection continuent de freiner le bon déroulement des travaux. Les acteurs continuent de souligner les difficultés de la reprise des chantiers dans la mesure où les possibilités de protection sanitaire des travailleurs sont limitées. Devant les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre des préconisations du guide des bonnes pratiques publié le 2 avril par lorganisme de protection professionnelle du bâtiment et des travaux publics (OPP-BTP), celui-ci a fait évoluer ses recommandations le 10 avril. Là où il avait dans un premier temps préconisé le port sur les chantiers de masques « de type chirurgical II-R ou de protection supérieure », avec une efficacité de filtration des particules supérieure à 95 %, il a accepté vendredi dernier le port de masques à usage non sanitaire de catégorie 1, dotés d’une capacité de filtration des particules de 90 à 95 % et préconisés par l’administration pour les professionnels en contact avec le public dans la note d’information commune de trois directions centrales du 29 mars dernier ([19]). Les acteurs avaient en effet fait remonter les difficultés d’approvisionnement dans un contexte marqué doublement par des tensions sur le marché des masques et par les besoins prioritaires des secteurs sanitaire et médico-social. Il n’est pas encore clair dans quelle mesure l’approvisionnement en masques non sanitaires de type I se fera plus facilement. L’usage des masques de catégorie 2 (capacité de filtration de 70 à 80 %) demeure exclu, et l’organisme énumère les cas où le port d’un masque certifié FFP1 doit être privilégié, qui comprennent les travaux chez une personne malade.

Les entreprises sont touchées à la fois par les difficultés sur les chantiers présents et par lannulation des commandes futures. En dépit des interrogations posées par le guide de l’OPP‑BTP, la plupart des acteurs ont considéré qu’il s’agit d’un outil sécurisant, qui permet la reprise du travail dans de bonnes conditions. Cependant, des difficultés considérables demeurent pour l’organisation d’un chantier : coordination des intervenants, organisation de la succession des corps de métier sur un même site, coprésence de plusieurs sous-traitants. De nombreuses tâches nécessitent en outre que les travailleurs se tiennent plus près les uns des autres que ne l’exigent les indications. Face à ces difficultés, la Confédération des artisans et petites entreprises du bâtiment (CAPEB) rapporte le 10 avril que 75 % des chantiers de ses adhérents connaissent encore un taux arrêt d’au moins 40 %.

Face aux problèmes de trésorerie des entreprises, lÉtat a accepté le 10 avril de permettre le versement dune aide envers les travailleurs indépendants et artisans ([20]). Les acteurs, en proie à des difficultés de financement, ont mis en lumière le manque de réactivité des banques sollicitées dans ces situations. Le 10 avril, la direction de la sécurité sociale a validé le versement automatique à ses adhérents, par le Conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants (CPSTI), organe de gestion de la retraite complémentaire des artisans et indépendants, d’une indemnité de pertes de gains pour le mois d’avril ([21]). Le versement, cumulable aux aides perçues au titre du fonds de solidarité, est attribué par le biais des URSSAF en compensation des pertes d’activité enregistrées et dans la limite maximale de 1250 euros nets d’impôts et de cotisations sociales, étant précisé que le montant versé à un travailleur ne peut dépasser sa contribution annuelle au régime complémentaire des indépendants (RCI). Le montant total déboursé par le CPSTI devrait s’élever à 1,5 milliard d’euros.

Au-delà de ces difficultés, les acteurs attirent lattention sur des problèmes de rentabilité engendrés par les surcoûts liés aux nouvelles normes sanitaires, qui pourraient menacer la solvabilité des entreprises. Les chantiers en cours ou signés étant fondés sur un prix forfaitaire, les surcoûts engendrés par la crise (équipement des travailleurs, temps de travail pour l’indication, le rappel et l’appropriation des mesures de protection, adaptation des processus, perte de productivité du fait de l’isolement des ouvriers sur certaines tâches) sont entièrement à la charge de l’entreprise de BTP. Or les taux de marge commerciale dans le bâtiment à proprement parler (hors promotion immobilière), entamés depuis plusieurs années par la hausse du coût des matériaux, étant de l’ordre de 1 à 2 % du chiffre d’affaires, la charge nouvelle, estimée à 3 % du chiffre d’affaires, pourrait faire peser une charge insupportable sur les entreprises. Les acteurs alertent dès lors sur la possibilité de voir un certain nombre d’entreprises déposer le bilan, ce qui peut engendrer des difficultés sectorielles dans la mesure où les chantiers mettent en scène un grand nombre d’entreprises, le départ d’une d’entre elles pouvant mettre les autres dans des difficultés à leur tour.

2.   Les activités immobilières sont encore possibles par voie numérique

Le secteur fait face à un problème de conduite et daboutissement des transactions immobilières qui na été que partiellement résolu par le décret n° 2020-395 du 3 avril dernier, qui visait à intensifier le recours aux transactions virtuelles. Selon certaines estimations ([22]) 100 000 transactions étaient en cours au 15 mars dernier et ont été suspendues jusqu’à la parution du décret, du fait de l’impossibilité de conclure des actes authentiques devant notaire. Ces transactions représentaient 400 millions d’euros en honoraires pour les professionnels. Le décret, qui autorise l’authentification d’un acte par visio-conférence, ne permet cependant qu’une reprise partielle de l’activité, dans la mesure où moins de 50 % de notaires sont équipés de logiciels permettant l’authentification par visio-conférence et où une partie importante des clients ne sont pas non plus équipés ou ne souhaitent pas poursuivre une transaction par des moyens numériques. L’activité notariale demeure de ce fait très affectée par le confinement, les études ne fonctionnant actuellement qu’à un taux d’activité de 15 % ([23]). L’activité diminuée de La Poste a également contribué à cette perte, la distribution des courriers recommandés, nécessaires notamment pour les accords de prêt ou la rétractation, étant fortement affectée.

En dépit de limpossibilité pour les agents immobiliers de faire procéder à une visite physique des biens, de nombreux acteurs signalent que les transactions peuvent être assurées de manière presque entièrement digitale, de lestimation à la signature des actes. À titre d’exemple, pour régler la difficulté liée à l’estimation de la valeur du bien, certains réseaux mettent à disposition de leurs agences une plateforme d’estimation virtuelle, qui permet au vendeur de faire estimer son bien par écran après avoir rempli un questionnaire et échangé avec l’agent. Quoique la validation définitive d’une vente n’intervienne qu’après le déplacement physique de l’acheteur sur les lieux, ces services permettent à une partie conséquente de la transaction de se faire par moyen numérique. Une opportunité de marché se dégage en particulier pour les entreprises de la « proptech », qui proposent depuis plusieurs années des estimations par visio-conférence et dont la part du marché immobilier est déjà passée de 1 à 10 % entre 2015 et 2019, pour un chiffre d’affaires total de 503 millions d’euros.

III.   les Entreprises demandent un engagement public fort

Dans limmédiat, les acteurs continuent dinsister sur lurgence damender lordonnance accordant des délais (voir note du 6 avril). Ils attendent aussi une prise en charge par les collectivités des coûts engendrés par les équipements sanitaires exigés. La majorité des acteurs mettent également laccent sur le manque de réactivité du côté des banques et des assureurs, et souhaiteraient une intervention de la puissance publique pour les sensibiliser au soutien des entreprises.

En sortie de crise, les suggestions sont nombreuses pour augmenter et diversifier le soutien des acteurs publics au secteur :

-         un accompagnement public de la reprise par la commande publique afin de pallier la carence certaine de la demande privée (voir les engagements pris par CDC Habitat) ; certains proposent la mobilisation du logement étudiant utilisé comme levier dans un plan d’investissement public lié au « 1 % logement » ;

-         un recours accru aux dépenses fiscales en faveur de la construction, notamment un élargissement aux revenus intermédiaires des crédits d’impôt accordés au titre de l’aide à la rénovation, ou le basculement d’un système de crédits d’impôt à l’investissement locatif vers un système « à l’allemande » fondé sur l’amortissement ;

-         une utilisation des leviers non fiscaux permettant de stimuler la demande privée de travaux de construction-rénovation, qui pourrait passer par la mobilisation du prêt à taux zéro et de Ma Prime Rénov’, ou encore l’extension de la TVA réduite aux travaux de construction-rénovation afin de les amener au taux de 5,5 % actuellement appliqué aux seuls travaux de rénovation énergétique.


Tableau 2. Difficultés rencontrées par les acteurs du BTP tout au long des opérations de construction

 

 

Acteurs sollicités

Phase

Difficultés rencontrées

 

Propriétaire foncier

Architecte

Géomètre foncier

Bureaux détudes 

Équipes de conception

Huissier

Acteurs publics :

-services fiscaux

-services instructeurs

-services obligatoirement consultés (DREAL, ABF, INRAP, commissions sécurité-incendie)

MONTAGE

 

(acquisition

études

travaux

préparatoires)

     Prospection foncière :

        Reports de rendez-vous avec les prospects fonciers

        Indisponibilité des services du cadastre

        Caducité des promesses de vente

     Conception du projet :

        Indisponibilité des architectes (cabinets sous-équipés) et bureaux détudes (études de sol, environnementales)

        Impossibilité des réunions de concertation avec les habitants

        Difficulté pour les entreprises de visiter les sites

     Pré-commercialisation et financement :

        Difficulté de consultation des acquéreurs en bloc

        Dégradation des conditions de la prospection commerciale

        dégradation des conditions de consultation des banques

     Obtention des autorisations durbanisme :

        Indisponibilité des services publics dont lavis est requis à lappui de la demande de permis de construire

        Indisponibilité des services instructeurs des collectivités

        Blocage des organes délibérants des collectivités du fait du report du second tour des élections municipales

 

Promoteurs

Forces de vente

Notaires

Assureurs

Banques

COMMERCIA-LISATION

     Allongement des délais de recours, dont la purge est généralement une condition préalable au lancement de la commercialisation

     Dégradation des conditions de la prospection commerciale

     Blocage des contrats de vente en état futur dachèvement :

        Signature : impossibilité pour les clients de se déplacer + impossibilité pour certains promoteurs dutiliser la dématérialisation + ralentissement des banques et assureurs

        Notification : possibilité laissée à lacquéreur par lordonnance « délais » de ne pas purger le droit de rétractation avant trois mois

 

 

Services de voirie

Concessionnaires (énergie, assainissement)

Contrôleurs techniques

Contrôleurs sécurité et protection sanitaire

Maîtres dœuvre

Maîtres dexécution

Entreprises de BTP

Sous-traitants

Fournisseurs de matériaux

CONSTRUCTION

     Démarrage des chantiers :

        Interruption des travaux darchéologie préventive

        Indisponibilité des huissiers pour constater laffichage du permis de construire sur le site

        Indisponibilité des services pour enregistrer les déclarations douverture de chantier et pour délivrer les autorisations doccupation de voirie pour les installations de chantier

     Articulation des intervenants :

        Difficultés pour réunir les acteurs : maîtres dœuvre, CSPS, entreprises du BTP, concessionnaires pour les raccordements avant livraison (Veolia, Enedis, GRDF)

        Difficultés pour organiser la coprésence de différents corps de métier et de différentes entreprises sur le même site

     Déroulement des travaux :

        Difficultés dapprovisionnement en matériaux et équipements de construction et de protection

        Difficultés à tenir les distances minimales pour la protection sanitaire des travailleurs

        Difficulté/interdiction dêtre seul pour certaines missions (électricité, travaux en hauteur, manœuvre dengins)

        Difficultés à organiser les espaces collectifs de façon à permettre le respect des gestes barrière

 

Finisseurs (cuisinistes, architectes dintérieur…)

Syndics de copropriété

Agents immobiliers

Acquéreurs

Locataires

Déménageurs

LIVRAISON

     Blocage dun grand nombre dactes authentiques (blocages réglementaires pour la VEFA et sous-équipement des notaires)

     Difficultés denregistrement : indisponibilité des services fiscaux

     Blocage des assemblées générales de copropriété :

        Difficultés à trouver des syndics disponibles pour la livraison des parties communes

        Difficultés pour tenir une AG en labsence de vote sur les modalités dune AG en visio-conférence

     Limitation des déménagements

 


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TABLEAU DE BORD DES FILIÈRES ET DE LEURS PROBLÉMATIQUES

Filière concernée

Situation générale et difficultés identifiées

Dispositifs mis en œuvre par la filière et par les pouvoirs publics

Demandes de la filière à lattention des pouvoirs publics

BÂTIMENT ET TRAVAUX PUBLICS

Tous les sous-secteurs (construction, rénovation, secteurs public et privé)

- du 17/03 au 06/04 : arrêt de 93 % des chantiers de construction ; reprise partielle depuis, amplifiée

- pénurie de masques IIR et potentielle insuffisance de masques de catégorie 1

-interruption de l’instruction des autorisations d’urbanisme par les services des collectivités

- interruption des activités d’autres services dont la consultation est nécessaire pour les projets (DREAL, ABF, INRAP)

- 20/03 : engagement du MVL à produire un guide « dans les tout prochains jours »

- 25/03 : ordonnance n° 2020-306 prorogeant les délais échus pendant lEUS

- 02/04 : publication du guide des bonnes pratiques par lOPP-BTP

- 10/04: lOPP-BTP annonce la révision des obligations en matière de matériel de protection (masques de catégorie 1)

- 15/04 : ordonnance délais rectificative annoncée (Garde des Sceaux)

- semaine du 06/04 : reprise de linstruction des dossiers dans certaines agglomérations

 

-accompagnement public de sortie de crise en soutien à la demande pour la construction de logements (engagement pris de CDC Habitat)

-mobilisation de la commande publique dans le secteur TP (voir note)

-allégements de cotisations sociales

-recours accru aux dépenses fiscales et autres instruments de soutien

-réouverture des services publics sollicités par les acteurs

Promotion immobilière

- interruption de la majorité des réservations

- impossibilité de se rendre sur les chantiers

- sous-équipement des notaires qui doivent poursuivre leur travail à distance

- impossibilité de la prospection commerciale

 

- 02/04 : lettre MVL-MTES aux professionnels du déménagement les invitant à limiter leurs activités

- 03/04 : décret n° 2020-395 qui prévoit que les actes notariés puissent être signés à distance, permettant la signature des ventes en VEFA

-auraient souhaité être associés à l’élaboration du guide OPP-BTP

-revoir les dispositifs de dépense fiscale pour accompagner la sortie de crise (notamment Pinel)

Rénovation et rénovation énergétique

- au 10/04, 75 % des chantiers ont un taux darrêt supérieur à 40 %

- difficulté de gérer la présence de plusieurs artisans sur un même chantier

- difficulté des interventions en milieu habité qui concernent une grande partie des chantiers

- crainte que la perspective d’un confinement long ne fasse reporter les commandes

 

- 25/03 : arrêté MTES prolongeant à 2021 les CEE « Coup de pouce énergie » et « Coup de pouce chauffage » + prolongeant de 6 mois du délai de dépôt de l’aide CEE au titre des travaux de 2019

- 10/04 : la DSS valide la mobilisation de 1,5 milliard deuros pour une aide exceptionnelle (tous indépendants) sur le régime CPSTI, saluée par la CAPEB

-extension du taux réduit de TVA à 5.5 % à tous les travaux de rénovation

-augmentation de l’accès à Ma Prime Rénov’

-incitations aux banques et assureurs d’accompagner au mieux les PMI-PME en difficulté

Architecture et ingénierie

- difficultés à mettre en œuvre le télétravail

- mise à l’écart des discussions entre les entreprises du bâtiment et le Gouvernement

- difficultés de trésorerie des petits cabinets

 

- 23/03 : le CNOA et l’UNSFA demandent l’arrêt de tous les chantiers

-sécurisation des conditions de travail

-poursuite des chantiers essentiels ou proches de la livraison

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Filière concernée

Situation générale et difficultés identifiées

Dispositifs mis en œuvre par la filière et par les pouvoirs publics

Demandes de la filière à lattention des pouvoirs publics

HÉBERGEMENT DURGENCE

Hébergement durgence des sans-abri

- baisse du nombre de bénévoles et fermeture de nombreuses associations et centres d’accueil de jour

- dispositifs de distribution d’aide perturbés

- pérennisation des séjours en CHS

- difficulté d’application des gestes barrière sur le terrain

- 16/03 : le MVL s’engage à réquisitionner les places et à mobiliser les hôtels (UMIH, Accor) : au 12/04, 174 000 places ouvertes dont 9073 places dhôtel supplémentaires 

- 19/03 : ouverture progressive de 86 CHS (3100 places) au 12/04

- 01/04 : distribution quotidienne de 60 000 chèques services solidaires

 

-accélération des mises à l’abri en hôtel pour réduire la durée de séjour en CHS (FAP)

-amplification des moyens de protection matériels à la disposition des personnels (FAP)

Hébergement durgence des migrants

- 09/04 : problème de contamination dans les camps de migrants à Calais (accueillant 650 ou 1000 migrants selon les sources)

 

- déplacement des migrants vers des places d’hébergement et isolement des cas (mobilisation de 400 places par la préfecture)

-intensification de la mise à l’abri (Care4Calais, Secours catholique)

LOGEMENT ET SERVICES IMMOBILIERS

Services immobiliers

- 2e moitié de mars : 80 % de baisse d’activité, 75 % des entreprises du secteur et 14 000 emplois menacés (FNAIM)

- 02/04 : lettre MVL-MTES aux professionnels du déménagement les invitant à limiter leurs activités (urgence sanitaire ou sociale, péril)

- 03/04 : décret n° 2020-395 qui prévoit que les actes notariés puissent être signés à distance, permettant le lancement et la poursuite de certaines transactions

 

-aides fiscales pour faciliter la numérisation des activités des agences

-assouplissement des limitations aux déménagements pour permettre la reprise des mobilités 

 

Logement locatif (social, intermédiaire, contractualisé, libre)

- problème croissant de solvabilité des foyers du fait de la baisse des revenus engendrée par le passage à l’activité partielle

- capacité insuffisante à terme des FSL à venir en appui à tous les demandeurs

- difficultés du confinement dans l’habitat indigne ou dans les logements en situation de surpopulation

- 25/03 : ordonnance 2020-331 qui organise le report de la fin de la trêve hivernale.

- 20/03 : continuité des droits aux aides CAF

- 29/03 : report de la réforme des APL

-mobilisation FSL (350M) et ADIL par l’ADF

- 23/03 : cellule d’appui Action Logement pour impayés de loyer dans le social (les ESH) et l’intermédiaire (AFL, In’li) + simplification Visale + montée en charge soli’al

- 01/04 : reports d’échéance Banque des territoires à destination des EPL et bailleurs sociaux + plateforme d’intermédiation des prêts renforcée 

 

-fonds national exceptionnel de soutien

-dotation complémentaire des FSL

-reports d’échéances (loyers, charges) ou suspension partielles ou totales de loyers pendant la durée de confinement ou d’activité partielle

-allégements de quittance en direction des foyers peu aisés (Action Logement)

 

 

 

 


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 RÉPUBLIQUE  FRANÇAISE

____________________________________ LIBERTÉ ÉGALITÉ – FRATERNITÉ

COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

GT SUIVI DU SECTEUR LOGEMENT

 

 

 

Paris, le 20 avril 2020

 

 

Groupe de travail Logement :

 

M. Richard Lioger

 

 

Objet : Point sur la situation du bâtiment et tableau de bord du logement

 

À noter : audition de M. Julien Denormandie, ministre chargé du logement, le jeudi 23 avril à 17 heures.

I.   Le secteur du bâtiment en voie de reprise

1.   Les principales difficultés concernant les délais applicables ont été résorbées

La question des délais sappliquant aux autorisations durbanisme et aux clauses contractuelles avait profondément agité le secteur du bâtiment depuis la publication de lordonnance n° 2020-306 du 25 mars qui prorogeait la majorité de ces délais pour une période de trois mois. Le Gouvernement a pris mercredi 15 avril lordonnance rectificative n° 2020-427, dont l’article 8 vise à répondre aux préoccupations des acteurs rapportées dans notre note du 6 avril :

    En matière dinstruction et de délivrance des autorisations durbanisme : suppression de la « période juridiquement protégée » d’un mois qui devait suivre la fin de l’état d’urgence sanitaire (EUS), dite « mois tampon ». Les délais afférents à la délivrance des autorisations d’urbanisme recommenceront donc à courir dès la fin de l’EUS le 24 mai. Le Gouvernement a interrogé les collectivités sur la possibilité de faire courir le délai d’instruction des autorisations d’urbanisme pendant l’EUS ; les collectivités ayant émis un avis négatif, le Gouvernement n’est pas revenu sur cette disposition.

    En matière de délais de recours contre les autorisations durbanisme : en plus de la suppression, ici aussi, du « mois tampon », est également supprimé le rechargement automatique de la période à courir pour les recours en cours à la date du 12 mars prévu par l’ordonnance du 25 mars. Ces délais recommencent à courir dès la fin de l’EUS pour la période restante de recours, avec un délai minimum de sept jours cependant. À titre d’exemple, le délai de recours contre un permis de construire de maison individuelle publié le 14 janvier, qui devait expirer le 14 mars, expirera le 31 mai. Les délais qui auraient dû commencer à courir pendant l’EUS commenceront immédiatement à courir à l’achèvement de l’EUS.

    En matière de délais des clauses pénales dans les contrats : pour ce qui concerne les clauses prévoyant notamment des pénalités de retard ou de non-exécution du contrat, le temps du contrat courant pendant l’EUS et le mois tampon se trouve neutralisé. Le délai recommencera à l’issue de cette période, avec un délai minimum de huit jours (par exemple, des pénalités de retard prévues pour s’appliquer à partir du 14 mars s’appliqueront à partir du 2 juillet pour une fin d’EUS le 24 mai, après le mois tampon et le délai de huit jours).

Les professionnels du bâtiment ont salué la réactivité et louverture du ministère de la ville et du logement (MVL), et la plupart des mesures prises ont été favorablement accueillies. L’ordonnance conforte la sécurité juridique des situations contractuelles et permet, avec le guide des bonnes pratiques, d’envisager la reprise des chantiers dans des conditions acceptables.

Le MVL a annoncé pour mercredi prochain une nouvelle ordonnance relative à la copropriété qui viendrait compléter l’article 22 de lordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 qui a prorogé les mandats des syndics de copropriété pendant l’état d’urgence sanitaire.

2.   Des problèmes pratiques demeurent pour la sortie de crise

Limpulsion donnée par les mesures prises par lÉtat doit permettre la reprise progressive des travaux de construction. La ministre de la cohésion des territoires et le ministre chargé de la ville et du logement, prenant acte des mesures prises ces dernières semaines, ont prié cette semaine les préfets de lancer des processus de concertation en vue de rendre possible une reprise coordonnée de l’activité des entreprises du BTP. Une grande partie des entreprises qui n’ont pas encore repris leur activité envisagent une reprise graduée à partir du lundi 20 avril. L’objectif est dès lors de recenser les difficultés concrètes rencontrées (tableau 1) pour en permettre la résolution concertée.

 

 

CONSTRUCTION ([24])

ACTIVITÉS IMMOBILIÈRES

Santé (masques, gel, distance)

85 %

60 %

Approvisionnement

70 %

20 %

Difficultés financières

30 %

19 %

Fermeture administrative

22 %

38 %

Manque de débouchés

21 %

21 %

Manque de personnel

18 %

27 %

Difficultés aval (transport)

15 %

6 %

Tableau 1. Nature des difficultés rencontrées par les entreprises en % de salariés (DARES, enquête Acemo Covid, avril)

Les entreprises mettent laccent sur la nécessité de protéger les travailleurs lors du redémarrage de lactivité. Elles ont développé dans la concertation des stratégies en vue de la sortie de crise. Au plan de la protection sanitaire, certaines entreprises mettent en place le port de visières de protection ou l’organisation d’une prise de température systématique. Du point de vue de la minimisation des risques, peuvent être prévues la fermeture ou l’adaptation des cantines, la limitation de l’accès aux vestiaires ou encore la mise hors service des distributeurs. D’autres entreprises mettent l’accent sur la mobilisation d’outils de sensibilisation, tels la mise en place de « coronaquiz » à visée pédagogique.

3.   Les acteurs proposent des mesures pour la prise en charge des surcoûts

Les acteurs continuent dalerter sur les surcoûts engendrés par la mise en œuvre de ces mesures, qui peuvent monter jusquà 20 % des coûts salariaux totaux. Ces coûts ne pouvant être répercutés sur les clients pour ce qui concerne les contrats en cours, ils peuvent poser un problème de solvabilité à terme (voir note de la semaine dernière). L’évaluation précise des surcoûts engendrés pour les maîtres d’œuvre et les maîtres d’ouvrage est une priorité des acteurs, et l’Union sociale pour l’habitat a mis en place un groupe de travail des directeurs de patrimoine d’organismes HLM à cet effet, en invitant la Fédération française du bâtiment et la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment à s’y joindre.

Les organismes HLM proposent déjà des pistes pour la prise en charge de ces surcoûts, notamment pour les travaux réalisés en maîtrise d’ouvrage directe pour lesquels le contrôle de l’équilibre financier des opérations ne prévoit pas de marge permettant de les absorber :

        la mise en place d’un taux de TVA super-réduit ou d’une exonération de TVA sur les livraisons faites pendant la période d’application des prescriptions du guide de l’OPP-BTP ;

        l’abondement des financements pour les opérations du programme national pour la rénovation urbaine (PNRU) et du Nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) pendant la même période ;

        la substitution partielle aux prêts déjà accordés de prêts à taux zéro amortissables de la Caisse des dépôts ;

        l’allongement de la durée de préfinancement des opérations dont la livraison se trouve différée ;

        l’ouverture d’une enveloppe d’agrément permettant aux organismes HLM d’acheter des logements en cours de finalisation ou livrés dans les opérations privées en difficulté.

II.   points sectoriels sur des filiÈres touchÉes

1.   Les architectes dans la crise du bâtiment

 

La filière de larchitecture a été très affaiblie par la cessation de lactivité du bâtiment, qui a occasionné pour les 21 000 entreprises du secteur une perte de 6 milliards deuros de chiffre daffaires et de 60 milliards deuros en termes de suivi des chantiers. Tandis que de nombreux architectes ont pu poursuivre leur activité en télétravail, s’est posée la question de l’activité de leurs interlocuteurs : pour nombre d’architectes, les bureaux d’études et les clients, notamment s’agissant des collectivités territoriales, ont une réactivité très inférieure depuis le début de la crise.

 

Les architectes ont souhaité saluer la réactivité des pouvoirs publics, qui ont corrigé les modalités de calcul de lattribution des aides du fonds de solidarité pour tenir compte des problèmes de trésorerie de certaines professions. En effet, le fonctionnement financier de ce métier connaît une spécificité, puisque la rémunération est perçue une fois par contrat plutôt que par mensualités. En considération de cette situation, le ministre de l’économie et des finances a annoncé le 15 avril dernier l’annualisation du calcul de l’aide versée, qui résulte de la rédaction de l’article 3‑2 du décret n° 2020-371 du 30 mars modifié par le décret n° 2020-433 du 16 avril. La perte de chiffre d’affaires subie pourra désormais être calculée en comparant le chiffre d’affaires d’avril 2020 non plus au chiffre d’affaires du seul mois d’avril 2019, mais au chiffre d’affaires mensuel moyen de l’année 2019 ou, pour les entreprises créées après le 1er avril 2019, au chiffre d’affaires mensuel moyen sur la période comprise entre la date de création de l’entreprise et le 29 février 2020.

Les architectes se disent également prêts à aider les communes qui éprouveraient des difficultés à instruire les dossiers dautorisation durbanisme. Les architectes des bâtiments de France sont mobilisés et en capacité de délivrer leurs avis.

Le Conseil national de lordre des architectes a fait remonter plusieurs propositions en vue de stimuler le secteur en sortie de crise :

        sur le plan fiscal, il propose de généraliser la réduction d’impôt « Denormandie » dans l’ancien à toutes les zones et de revoir l’impôt sur la fortune immobilière afin d’inciter à l’investissement immobilier en sortie de crise. Il suggère également une révision des taxes et délais de raccordement ;

        pour ce qui est du bâtiment public, il propose de confier aux architectes une mission de diagnostic général des bâtiments en vue de préparer leur rénovation, qui serait étendue à une rénovation globale et non plus simplement thermique ;

        enfin, il invite à revoir en profondeur notre urbanisme, la concentration urbaine et les modalités de déplacement devant être questionnées à l’aune du développement du numérique et d’une nouvelle conception de l’aménagement.

2.   Le logement étudiant affecté par la fermeture des universités

La fermeture des universités, prolongée par le Gouvernement jusquà la fin de lannée académique, affecte les étudiants ainsi que les structures consacrées à leur accompagnement. Le Centre national des œuvres universitaires et scolaires (CNOUS) signale ainsi une baisse de l’activité des restaurants CROUS qui engendre un manque à gagner de l’ordre de 200 millions d’euros entre avril et septembre, baisse qui vient affecter des capacités financières déjà dépassées par les besoins.

Le CNOUS invite à réfléchir à une gamme dinstruments permettant la mobilisation du logement étudiant pour relancer le secteur du bâtiment tout en faisant progresser un domaine délaissé. Il fait remarquer que 20 000 logements étudiants ont besoin de réhabilitation et que les logements manquent très fortement dans les territoires tendus, ce qui occasionne des gênes très considérables pour le public étudiant et aggrave les inégalités d’accès à l’enseignement supérieur.

Le CNOUS propose trois solutions juridiques pour améliorer, à coûts constants, la qualité et lefficacité des opérations menées :

        une simplification des procédures dans le recours à la maîtrise d’ouvrage directe mise en place par la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement du numérique (ELAN) ;

        une incitation à développer des marchés de partenariat entre le CNOUS, les bailleurs et les collectivités ;

        une évolution législative permettant aux CROUS et aux universités de participer aux instruments de portage des opérations de construction (SEML, SEMOP, SPL).

Le CNOUS invite, au-delà de ces propositions, à réfléchir à des instruments financiers qui permettraient une véritable mobilisation du secteur :

        la mobilisation du foncier public avec une baisse des prix permettant l’investissement des universités ;

        un volet du grand plan d’investissement pour les CROUS, avec des corollaires tels que l’accélération de la délivrance des autorisations d’urbanisme, la libération des emprises foncières, et des aides directes via les bailleurs sociaux.

 

TABLEAU DE BORD DES FILIÈRES ET DE LEURS PROBLÉMATIQUES

Filière concernée

Situation générale et difficultés identifiées

Dispositifs mis en œuvre par la filière et par les pouvoirs publics

Demandes de la filière à l’attention des pouvoirs publics

BÂTIMENT ET TRAVAUX PUBLICS

Tous les sous-secteurs (construction, rénovation, secteurs public et privé)

-du 17/03 au 06/04 : arrêt de 93 % des chantiers de construction ; reprise partielle depuis, amplifiée

-pénurie de masques IIR et potentielle insuffisance de masques de catégorie 1

-interruption de l’instruction des autorisations d’urbanisme par les services des collectivités

-interruption des activités d’autres services dont la consultation est nécessaire pour les projets (DREAL, ABF, INRAP) 

-15/04 : concertation des entreprises et des préfets en vue d’une reprise graduée du secteur (voir corps de la note)

-20/03 : engagement du MVL à produire un guide « dans les tout prochains jours »

-25/03 : ordonnance n°2020-306 prorogeant les délais échus pendant l’EUS

-02/04 : publication du guide des bonnes pratiques par l’OPP-BTP ; 10/04: l’OPP-BTP annonce la révision des obligations en matière de matériel de protection (masques de catégorie 1)

-semaine du 06/04 : intensification de la reprise de l’instruction des dossiers dans certaines agglomérations

-15/04 : ordonnance délais rectificative (voir corps de la note)

 

-accompagnement public de sortie de crise en soutien à la demande pour la construction de logements (engagement pris de CDC Habitat)

-mobilisation de la commande publique dans le secteur TP (voir note)

-allégements de cotisations sociales

-recours accru aux dépenses fiscales et autres instruments de soutien

-réouverture des services publics sollicités par les acteurs

Promotion immobilière

-interruption de la majorité des réservations

-impossibilité de se rendre sur les chantiers

-sous-équipement des notaires qui doivent poursuivre leur travail à distance

-impossibilité de la prospection commerciale

-02/04 : lettre MVL-MTES aux professionnels du déménagement les invitant à limiter leurs activités

-03/04 : décret n°2020-395 qui prévoit que les actes notariés puissent être signés à distance, permettant la signature des ventes en VEFA

 

 

-auraient souhaité être associés à l’élaboration du guide OPP-BTP

-revoir les dispositifs de dépense fiscale pour accompagner la sortie de crise (notamment Pinel)

Rénovation et rénovation énergétique

-au 10/04, 75 % des chantiers ont un taux d’arrêt supérieur à 40 %

-difficulté de gérer la présence de plusieurs artisans sur un même chantier

-difficulté des interventions en milieu habité qui concernent une grande partie des chantiers

-crainte que la perspective d'un confinement long ne fasse reporter les commandes

-25/03 : arrêté MTES prolongeant à 2021 les CEE « Coup de pouce énergie » et « Coup de pouce chauffage » + prolongeant de 6 mois du délai de dépôt de l’aide CEE au titre des travaux de 2019

-10/04 : la DSS valide la mobilisation de 1,5 milliard d’euros pour une aide exceptionnelle à tous les indépendants sur le régime CPSTI, saluée par la CAPEB

 

-extension du taux réduit de TVA à 5.5 % à tous les travaux de rénovation

-augmentation de l’accès à Ma Prime Rénov’

-incitations aux banques et assureurs d’accompagner au mieux les PMI-PME en difficulté

Architecture et ingénierie

-difficultés à mettre en œuvre le télétravail

-mise à l’écart des discussions entre les entreprises du bâtiment et le Gouvernement

-difficultés de trésorerie des petits cabinets

 

-23/03 : le CNOA et l’UNSFA demandent l’arrêt de tous les chantiers

-15/04 : annonce de l’annualisation du calcul de l’aide du fonds de solidarité (voir note)

-sécurisation des conditions de travail

-poursuite des chantiers essentiels ou proches de la livraison

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Filière concernée

Situation générale et difficultés identifiées

Dispositifs mis en œuvre par la filière et par les pouvoirs publics

Demandes de la filière à l’attention des pouvoirs publics

HÉBERGEMENT D’URGENCE

Hébergement d’urgence des sans-abri

-baisse du nombre de bénévoles et fermeture de nombreuses associations et centres d’accueil de jour

-dispositifs de distribution d’aide perturbés

-pérennisation des séjours en CHS

-difficulté d’application des gestes barrière sur le terrain

-16/03 : le MVL s’engage à réquisitionner les places et à mobiliser les hôtels (UMIH, Accor) : au 17/04, 175 000 places ouvertes dont 10 102 places d’hôtel supplémentaires 

-19/03 : ouverture progressive de 90 CHS (3370 places) au 17/04

-01/04 : distribution quotidienne de 60 000 chèques services solidaires

 

-accélération des mises à l’abri en hôtel pour réduire la durée de séjour en CHS (FAP)

-amplification des moyens de protection matériels à la disposition des personnels (FAP)

Hébergement d’urgence des migrants

-09/04 : problème de contamination dans les camps de migrants à Calais (accueillant 650 ou 1000 migrants selon les sources)

 

-déplacement des migrants vers des places d’hébergement et isolement des cas (mobilisation de 400 places par la préfecture)

-intensification de la mise à l’abri (Care4Calais, Secours catholique)

LOGEMENT ET SERVICES IMMOBILIERS

Services immobiliers

-2e moitié de mars : 80 % de baisse d’activité, 75 % des entreprises du secteur et 14 000 emplois menacés (FNAIM)

-02/04 : lettre MVL-MTES aux professionnels du déménagement les invitant à limiter leurs activités (urgence sanitaire ou sociale, péril)

-03/04 : décret n°2020-395 qui prévoit que les actes notariés puissent être signés à distance, permettant le lancement et la poursuite de certaines transactions

-22/04 : ordonnance sur les syndics de copropriété annoncée

 

-aides fiscales pour faciliter la numérisation des activités des agences

-assouplissement des limitations aux déménagements pour permettre la reprise des mobilités 

 

Logement locatif (social, intermédiaire, contractualisé, libre)

-problème croissant de solvabilité des foyers du fait de la baisse des revenus engendrée par le passage à l’activité partielle (appel à contributions du CNH le 10/04)

-capacité insuffisante à terme des FSL à venir en appui à tous les demandeurs

-difficultés du confinement dans l’habitat indigne ou dans les logements en situation de surpopulation

 

-25/03 : ordonnance n°2020-331 qui organise le report de la fin de la trêve hivernale.

-20/03 : continuité des droits aux aides CAF

-29/03 : report de la réforme des APL

-mobilisation FSL (350M) et ADIL par l’ADF

-23/03 : cellule d’appui Action Logement pour impayés de loyer dans le social (les ESH) et l’intermédiaire (AFL, In’li) + simplification Visale + montée en charge soli’al

-01/04 : reports d’échéance Banque des territoires à destination des EPL et bailleurs sociaux + plateforme d’intermédiation des prêts renforcée 

 

-fonds national exceptionnel de soutien

-dotation complémentaire des FSL

-reports d’échéances (loyers, charges) ou suspension partielles de loyers pendant la durée d’activité partielle

-allégements de quittance en direction des foyers peu aisés (AL)

-16/04 : lancement de la campagne loyersuspendu.org par le DAL pour les travailleurs en activité partielle et les travailleurs informels

 


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  RÉPUBLIQUE  FRANÇAISE

____________________________________ LIBERTÉ ÉGALITÉ – FRATERNITÉ

COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

GT SUIVI DU SECTEUR LOGEMENT

 

 

Paris, le 27 avril 2020

 

 

Groupe de travail Logement :

 

M. Richard Lioger

 

Objet : Point sur la situation du bâtiment et de limmobilier et tableau de bord du logement

I.   LE BÂTIMENT CONTINUE DE CONCENTRER LES inquiÉtudes

1.   Des craintes persistent sur les perspectives de la filière

En dépit des difficultés liées à la mise en œuvre des mesures de protection sanitaire et à la prise en charge des surcoûts qui en résultent, le secteur du bâtiment a poursuivi cette semaine sa reprise progressive. Le taux d’activité actuel serait de 30 %, ce qui représente une amélioration de plus de 20 % par rapport à la situation qui prévalait encore il y a trois semaines ([25]). Les fédérations rapportent que les entreprises sont en voie d’intégration des préconisations du guide publié par lOPPBTP le 2 avril et continuent de mettre en place des procédures permettant de tenir compte des recommandations. Si la répartition de la prise en charge des surcoûts liés à ces exigences continue de freiner la reprise de nombreux chantiers impliquant une multitude d’acteurs, une partie des petits chantiers ont pu reprendre.

Les premières études chiffrées sur la période écoulée depuis le 15 mars confirment cependant le coût très élevé du confinement pour lactivité dans le bâtiment. Comme le rapporte la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB) dans sa note de conjoncture d’avril ([26]), les quinze jours d’arrêt des chantiers dans la deuxième moitié du mois de mars ont valu à la filière un recul agrégé de 12 % d’activité sur le premier trimestre 2020, recul le plus important qu’elle ait enregistré à ce jour (pour comparaison, le dernier trimestre de l’année 2009 avait valu à la filière un recul de 6,9 %). Pendant la période concernée, 80 % des entreprises de l’artisanat ont été complètement arrêtées, pour 17 % qui ont conservé une activité partielle et seulement 3 % qui ont connu une activité normale, essentiellement liée au dépannage ([27]).

La clientèle de ces entreprises est constituée en grande partie de particuliers, qui préfèrent annuler les travaux en cours ou à venir pour ne pas susciter de risque sanitaire. Le refus des clients particuliers de voir se poursuivre les travaux explique en effet, toujours selon les chiffres de la CAPEB, 71 % des arrêts de chantiers. En dépit de cette situation, l’effondrement est plus marqué dans la construction neuve (- 14,5 % d’activité sur le premier trimestre) que dans la rénovation (- 10,5 %), la maçonnerie connaissant une chute particulièrement brutale (- 16 %). La chute concerne davantage les régions au nord et à l’est, ainsi que la région parisienne, qui connaissent une baisse trimestrielle plus marquée (entre - 13 et - 14 %) que les régions à l’ouest (entre - 10 et - 11 %). Les problèmes de trésorerie pour les entreprises, déjà abordés dans la note du 7 avril, se confirment : 32 % des entreprises interrogées en font déjà état pour la période allant jusqu’au 30 mars, en les estimant liées à la crise sanitaire à 98 %.

Pour ce qui concerne les métiers du bâtiment qui ne relèvent pas de la construction, tels que les géomètres-experts ou encore les diagnostiqueurs immobiliers, ils sont également gravement atteints ([28]). Les géomètres-experts ont subi une baisse de leur activité de 50 à 70 % en avril, et prévoient une baisse similaire en mai. En projection annuelle, les premières estimations sont d’une baisse du chiffre d’affaires annuel de l’ordre de 20 à 30 % ([29]), baisse difficile à absorber pour des entreprises dont l’effectif moyen est de sept salariés. Au 15 avril, les diagnostiqueurs immobiliers subissent quant à eux une baisse d’activité de 90 %, et tablent sur une reprise lente, permettant 30 % d’activité en mai, 50 % en juin et 80 % en septembre seulement ([30]). Ils rapportent que le retour à l’activité d’avant-crise ne devrait pas se faire avant un an.

2.   Un consensus émerge sur la nécessité de pousser plus loin les efforts de simplification et de dématérialisation des procédures

Les acteurs continuent de rapporter une sous-réactivité marquée des acteurs publics, et notamment des services déconcentrés de lÉtat. Certains auditionnés mettent l’accent sur la bonne volonté des communes et des intercommunalités sollicitées, tout en la contrastant à l’inertie des services de l’État également nécessaires dans le traitement des dossiers. Au-delà des critiques portant sur l’absence de réactivité de l’INRAP et des architectes des Bâtiments de France, déjà rapportées par le groupe de travail (voir note du 7 avril), d’autres services font également l’objet de critiques. C’est le cas, selon certaines remontées, des services cadastraux gérés par les centres d’impôts locaux, dont l’intervention est nécessaire dans les cas de division parcellaire. Les entreprises regrettent que l’utilisation de documents d’arpentage numériques, possible depuis 2012, ne soit toujours pas mise en place par certains des services pertinents, ce qui donne une impression de mauvaise volonté. Selon d’autres acteurs, les délégations de l’aviation civile des préfectures ne répondent pas aux demandes d’autorisation de survol pour les relevés par drone effectués dans le cadre de certains dossiers, alors même que ces autorisations sont tacites en temps normal.

Ces critiques donnent lieu à des revendications fréquentes en faveur dune simplification administrative et dune meilleure dématérialisation. En particulier, de nombreux acteurs demandent une réduction du nombre d’interlocuteurs des services intervenant dans les procédures d’aménagement et d’urbanisme, afin d’accélérer et de fluidifier les opérations. Ils demandent également que, lorsqu’il existe des outils qui permettent une gestion dématérialisée des procédures, à l’image de la modélisation des informations de la construction (BIM), ceux-ci soient obligatoirement utilisés par les services pertinents de l’État.

3.   Les entreprises de la rénovation énergétique souhaitent la création d’un fonds d’urgence CEE

Cette très mauvaise conjoncture concerne également les entreprises spécialisées dans les travaux de rénovation énergétique, qui sinquiètent dune pérennisation de la baisse des commandes. Celle-ci résulterait à la fois de la réticence des particuliers à voir évoluer les travailleurs dans leur domicile, et du caractère moins prioritaire de ce genre de travaux pour un grand nombre de ménages, notamment au printemps. Le Gouvernement a pris dès le mois de mars des mesures permettant le prolongement des certificats d’économies d’énergie au titre de l’isolation et du chauffage ([31]), mais les professionnels réclament davantage de mesures permettant de soutenir la demande (voir la note du groupe de travail Energie).

Les fédérations des filières du bâtiment et de lénergie souhaitent voir valider la création dun fonds durgence à destination des PME, abondé par les obligés au titre des certificats déconomies dénergie (CEE). Les entreprises productrices d’énergie s’inquiètent en effet, du fait de l’interruption des travaux, de la baisse du niveau de production des CEE dont elles ont besoin pour satisfaire à leurs obligations réglementaires, et des pénalités en carence CEE dont elles pourraient avoir de ce fait à s’acquitter sur la période à venir ([32]). L’inflation du prix des CEE sur le marché n’est pas non plus souhaitable, car elle contribue à la hausse des factures d’énergie (les coûts de CEE représentent entre 3 et 4 % des factures d’énergie). L’abondement d’un fonds spécial par les producteurs d’énergie, en échange de l’obtention de CEE, permettrait de venir au soutien des artisans de la rénovation reconnus garants de l’environnement (RGE), et les acteurs du bâtiment et de l’énergie s’accordent sur leur intérêt mutuel à un tel dispositif ([33]).

II.   L’IMMOBILIER connaîtrAIT UNE BAISSE DURABLE

1.   Le ralentissement des activités immobilières pourrait se pérenniser

Les activités immobilières, qui ont connu une mise à larrêt brutale en mars après une année dynamique, devraient connaître un rattrapage relatif au printemps, qui ne compensera pas le ralentissement global du secteur. D’après les chiffres publiés par le Conseil supérieur du notariat, après une année 2019 qui a enregistré plus d’un million de mutations (+ 11 % sur l’année, avec une hausse des prix de + 3,7 %), l’année 2020 devrait connaître une chute minimale de 20 %. Le coup d’arrêt de mars devrait être compensé par un effet de rattrapage lors de la régularisation de l’ensemble des actes concernés par le décalage dans le temps ([34]) . Les perspectives sur le moyen terme restent faibles, dans la mesure où le marché immobilier est sujet à des délais qui ralentissent sa reprise et devraient affecter l’activité estivale, d’habitude élevée.

Une chute considérable de laccession à la propriété pourrait résulter de la crise actuelle. L’Observatoire des crédits résidentiels s’inquiète dans sa note de conjoncture trimestrielle ([35]) de la baisse très élevée du nombre des ménages en capacité d’accéder à la propriété, qui passerait de 900 000 en 2019 à 680 000 en 2021, ce qui représente un recul de près d’un quart. Cette situation concernerait en particulier les ménages en zone rurale et dans les villes moyennes, et aggraverait le manque de mobilité résidentielle dans le parc social. La perte pour le secteur immobilier est estimée à 26 % de production de crédits immobiliers en 2020, le nombre de prêts accordés ayant déjà chuté de 20 % en mars et de 50 % pendant la première moitié du mois d’avril.

2.   Les demandes exprimées portent sur l’assouplissement de l’accès au crédit

Les principales craintes exprimées sur le long terme portent sur le comportement des banques lors de la reprise, dans un contexte qui sera peut-être marqué par une baisse de la solvabilité des ménages. Les banques ont resserré en janvier les conditions de l’accès au crédit immobilier par suite d’une recommandation du Haut Conseil de stabilité financière invitant à exiger des emprunteurs un taux d’effort inférieur à 33 % et à limiter le taux de maturité des emprunts à 25 ans ([36]). Ce resserrement avait dès avant le début de la crise suscité une baisse de l’accession à la propriété estimée à 100 000 accessions en moins par an (chiffres OCL).

Dans ce contexte, les professionnels de limmobilier demandent une réflexion sur lassouplissement des conditions de laccès au crédit immobilier. Ils soulignent le très bas taux de défaut lié à un endettement immobilier en France, ainsi que le niveau très bas du taux d’intérêt moyen sur les crédits immobiliers (1,16 % en avril), qui devrait se poursuivre du fait de la politique accommodante de la Banque centrale européenne. Ces conditions, qui demeurent très bonnes, devraient selon eux permettre de desserrer les exigences sur le taux d’effort des ménages. D’autres préconisations sont avancées, qui rejoignent celles étayées dans la note du 20 avril, concernant l’élargissement du prêt à taux zéro ou encore l’extension du taux réduit de TVA.

 

Point sectoriel sur les difficultÉs dans le logement

Deux études parues cette semaine soulignent les difficultés qui existent dans le logement en période de confinement. La première, publiée par l’Insee ([37]), comporte deux enseignements :

La deuxième étude, publiée dans la revue Éclairages de lInstitut de recherches économiques et sociales par le chercheur Pierre Concialdi ([39]), porte sur les effets quinduit la baisse des revenus des ménages sur leur capacité à assumer leurs coûts locatifs. L’auteur identifie une « population à risque » de 3,9 millions de ménages qui pourraient être concernés dans cette période par une baisse de leurs revenus tandis que leurs charges locatives demeurent fixes, mettant en péril leur capacité à assumer leurs paiements. L’étude invite à réfléchir à un moratoire sur les loyers dans les cas où l’équilibre financier des ménages est très fortement affecté.


Difficultés identifiées

Dispositifs gouvernementaux et de la filière

BÂTIMENT

Trois semaines darrêt ferme des opérations de chantier entre le 17 mars et le 6 avril :

-impossibilité de mettre en œuvre systématiquement les mesures de distanciation sociale (vestiaires, réfectoires, usage partagé des outillages, engins et véhicules) ;

-coordination des entreprises dans les chantiers en coactivité (intervention simultanée ou successive, sur un même chantier, de travailleurs de différentes entreprises) ;

-difficulté d’intervenir en milieu habité.

 

Semaine du 6 avril : difficultés à reprendre les activités du fait de la pénurie de matériels de protection, notamment les masques.

 

Depuis le 13 avril, reprise échelonnée, freinée, notamment sur les chantiers en coactivité par les litiges sur la prise en charge des surcoûts engendrés par la mise en œuvre des préconisations du guide OPP-BTP, estimés jusquà 15-20 % des coûts totaux.

Publication le 2 avril dun guide de préconisations de sécurité sanitaire pour le bâtiment par lorganisme professionnel de prévention du BTP (OPP-BTP), organisme paritaire chargé de la prévention des ATMP et de lamélioration des conditions de travail, en concertation avec les fédérations professionnelles et les administrations. Le guide est conçu pour permettre la reprise des opérations de chantier rapidement et dans de bonnes conditions de protection sanitaire. Il recommande, entre autres :

- la formalisation par le maître d’ouvrage d’une liste de conditions sanitaires applicables, en concertation avec le maître d’œuvre et le coordinateur SPS ;

- la limitation de la coactivité ;

- la limitation des déplacements de tout personnel non indispensable sur les chantiers et dans les ateliers (notamment les apprentis et stagiaires) ;

- le port du masque dans le cas du travail à moins d’un mètre ou dans les interventions chez personnes malades ou à risque

- l’affichage démultiplié des consignes sanitaires ;

- le marquage spatial pour le respect des distances ;

- la limitation de l’accès aux espaces collectifs, l’organisation d’ordres de passage (réfectoire, salles de pause, bases vie, bungalows de chantier) et l’organisation par roulement de l’usage des réfectoires ainsi que leur désinfection entre chaque tour de repas ;

- l’attribution au possible d’outillages individuels ; et sinon la désinfection entre chaque utilisation des surfaces de contact des engins et véhicules partagés ;

- la présentation biquotidienne de l’organisation des travaux ;

- la mise à disposition de lingettes désinfectantes et de solution hydroalcoolique dans les lieux fréquentés ;

- la formation des personnels aux règles d’hygiène et à l’utilisation des masques ;

- la mise à disposition, pour les interventions chez les particuliers malades ou à risque, d’un kit de fourniture d’intervention (combinaison jetable, surchaussures, gants neufs adaptés, masque, gel hydroalcoolique, lingettes désinfectantes, eau et savon, essuie-mains jetables, sac à déchets).

Le 10 avril, le guide a été adapté pour tenir compte des difficultés d’approvisionnement en masques IIR en permettant aux travailleurs de porter des masques de catégorie 1, parfois dits « alternatifs ».

Carences dans la continuité du service public :

- interruption de linstruction des autorisations durbanisme par les services des communes et intercommunalités ;

- interruption de lactivité des services déconcentrés de lÉtat dont la consultation est nécessaire ou obligatoire : centre des impôts locaux (services cadastraux), directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), architectes des Bâtiments de France (ABF), services de l’archéologie préventive obligatoire (INRAP) ;

-indisponibilité des raccordeurs délégataires dune mission de service public dont le concours est nécessaire pour le raccordement du chantier et le bouclage des opérations (Veolia, Enedis, GRDF).

Lordonnance n° 2020-306 du 25 mars relative aux délais administratifs proroge les délais jusquà une période de trois mois après la fin de létat durgence sanitaire :

- la suspension des délais d’instruction des autorisations d’urbanisme (permis de construire, déclaration d’intention d’aliéner…) jusqu’à la fin d’une période égale à la durée de l’état d’urgence sanitaire + 1 mois tampon ;

- la suspension des délais de recours contre les autorisations d’urbanisme et leur rechargement au bout de même période.

 

Lordonnance est rectifiée le 15 avril pour répondre aux inquiétudes des professionnels et raccourcir les délais applicables :

- l’ordonnance rectificative supprime, pour ce qui concerne l’instruction des dossiers, le « mois tampon » qui succédera à l’EUS ;

- revient sur le rechargement des délais de recours, qui continueront à courir à compter de la fin de l’EUS pour la période qui restait à courir au 12 mars ;

- sécurise les clauses contractuelles afférentes aux pénalités de retard.

 

Certaines collectivités et intercommunalités (Poitiers, Nantes) ont mis en œuvre des procédures pour permettre la reprise de l’instruction.

Le ministre de la ville et du logement a enjoint les collectivités à reprendre dans la mesure du possible les activités d’instruction des dossiers.

Baisse de lactivité sur longue durée anticipée : report ou annulation d’une partie des projets en cours de lancement, retard au redémarrage du fait des difficultés à négocier la répartition des surcoûts, baisse du pouvoir d’achat des entreprises, particuliers et collectivités commanditaires, incertitudes longues sur le cycle électoral local.

Engagement de CDC Habitat à commander en VEFA 40 000 logements neufs en sortie de crise dont 15 000 sociaux, 15 000 intermédiaires et 10 000 libres et « abordables » contractualisés, principalement en zone tendue (A, Abis, B1) et en zone Action Cœur de ville (appel à projets du 25 mars).

Engagement de In’li (filiale intermédiaire du groupe Action Logement) à commander 10 000 logements intermédiaires en VEFA en sortie de crise.

Baisse de lactivité de 80 % dans la rénovation et gel des carnets de commande (refus des clients), qui touche principalement artisans et indépendants et suscite des problèmes de trésorerie.

Sauf interventions d’urgence (plomberie, électricité)

Mise en place du fonds de solidarité par l’État, qui concerne les TPE, indépendants, micro-entrepreneurs et professions libérales ; pour une aide défiscalisée d’abord plafonnée à 1 500 euros.

 

La direction de la sécurité sociale (DSS) valide la mobilisation de 1,5 milliard deuros à destination des indépendants, somme ponctionnée sur leur régime de retraite complémentaire et mis en œuvre par lorganisme de gestion, le CPSTI (10 avril). Laide sélève jusquà 1 250 euros par bénéficiaire et est cumulable au versement du fonds de solidarité.

Arrêt total des opérations de rénovation énergétique (mars). Difficulté de mettre en œuvre les mesures barrière et refus des clients de poursuivre les opérations.

Un arrêté de la direction générale de lénergie et du climat (DGEC) du 25 mars proroge jusquà 2021 les certificats déconomies dénergie (CEE) « Coup de pouce Chauffage », prolonge les CEE « Coup de pouce Isolation » et reporte de six mois le délai de dépôt des demandes daide au titre des travaux réalisés en 2019.

 

Faiblesse de la reprise à partir du    7 avril dans la rénovation énergétique. Asséchement des commandes (baisse du pouvoir d’achat des ménages, comportements de précaution face à l’intervention à domicile).

Courrier commun au PM du 22 avril des acteurs du bâtiment et de l’énergie, demandant la mise en place d’un fonds d’urgence à destination des TPE-PME de la rénovation énergétique, abondé par les entreprises obligées en échange de CEE.

Arrêt des activités de promotion immobilière, dû principalement à l’arrêt des transactions et à l’impossibilité de poursuivre les opérations de prospection et de commercialisation.

Le décret n° 2020-395 du 3 avril autorise, pendant la durée de létat durgence sanitaire et du mois tampon à suivre, la signature à distance des actes notariés. Ceci permet la conclusion à distance de VEFA, ce qui déroge temporairement à lexigence de présence physique pour les ventes dans le neuf (les ventes dans lancien pouvant déjà se faire à distance). Permet la reprise partielle des activités de promotion

Architectes : difficultés de trésorerie dues à l’inadaptation des modalités de calcul des aides versées par le fonds de solidarité.

Le décret n° 2020-433 du 16 avril permet lannualisation du chiffre daffaires pris en compte dans le calcul de laide versée au titre du fonds de solidarité.

Certains architectes, diagnostiqueurs, ingénieurs-conseils, bureaux détude, géomètres-experts, notaires :

-difficultés techniques dans le passage au télétravail ;

-nécessité d’aller sur le terrain pour nourrir le travail de bureau.

Accompagnement local dans certains cas (chambres des métiers et de l’artisanat, chambres du commerce et de l’industrie).


ACTIVITÉS IMMOBILIÈRES

Professionnels de limmobilier : blocage de 100 000 transactions en cours (début avril), baisse des nouvelles transactions et des déménagements.

Très mauvais accueil du courrier adressé le 1er avril par le ministre chargé de la ville et du logement et le secrétaire dÉtat chargé des transports aux professionnels du déménagement, demandant la réduction des activités.

Le décret n° 2020-395 du 3 avril valide la signature à distance des actes notariés, permettant la reprise partielle des transactions immobilières.

Instruments mises en œuvre par le secteur : plateformes d’estimation virtuelle, sollicitation des entreprises de la « proptech » (note du 13 avril).

Professionnels de l’immobilier : insécurité juridique quant à la validité de leurs droits à exercer leur métier.

Lordonnance n° 2020-306 du 25 mars relative aux délais administratifs proroge les droits des détenteurs dune carte professionnelle qui viennent à échéance pendant la période durgence sanitaire.

Non-réélection des syndics de copropriété du fait de la suspension des AG de copropriété, dont une grande partie se déroule en général en juin (350 000 AG).

Larticle 22 de lordonnance n° 2020-304 du 25 mars prolonge les mandats des contrats de syndics échus entre le 12 mars et le 24 juin. Pour éviter lorganisation de centaines de milliers dAG la dernière semaine de juin, larticle 1 de lordonnance n° 2020-460 du 22 avril étend cette prorogation aux contrats échus avant le 24 juillet.

 

HÉBERGEMENT

Lhébergement durgence des sans-abri a constitué la priorité du ministère de la ville et du logement dans la mesure où il s’agit d’un public particulièrement vulnérable face à l’épidémie, faisant souvent partie des publics identifiés comme à risque, et pour lesquels le confinement peut avoir des effets très néfastes (baisse du nombre d’associations et de bénévoles mobilisés).

 

Carences signalées dans le dispositif :

- manque personnels soignants et de matériel de protection dans les CHS ;

- pérennisation des séjours en CHS.

La direction interministérielle de l’hébergement et de l’accès au logement (DIHAL) a adopté rapidement une politique de mise à l’abri et de prise en charge (chiffres actualisés le 24 avril) :

- ouverture d’une enveloppe supplémentaire de 65 millions d’euros sur le programme 177 ;

- pérennisation de 14 000 chambres hivernales ;

- mise à disposition de 17 7000 places supplémentaires, dont 10 843 places en hôtel, celles-ci étant pour partie fruit de réquisitions et pour partie d’un accord entre l’État et les grands groupes hôteliers.

La direction générale de la cohésion sociale (DGCS) a mis en œuvre également des mesures (chiffres actualisés le 24 avril) :

- 3 488 places ouvertes dans 95 centres d’hébergement d’urgence (CHS) dits « sites spécialisés » depuis le 16 mars ;

- distribution de « chèques services » de 7 euros, à 65 000 bénéficiaires pour la 1ère commande du 1er avril. La 2e commande, lancée le 19 avril, cible 90 000 bénéficiaires avec un doublement en IdF et outre-mer ;

- plan de soutien à l’aide alimentaire (39 millions d’euros), annoncé le     23 avril, dont 25M€ pour les associations et 14M€ de chèques services.

Hébergement de migrants, notamment après la découverte d’un foyer de contamination dans les camps de Calais.

Déplacement par la préfecture des migrants vers des places d’hébergement et isolement des cas (mobilisation de 400 places d’hébergement).

Hébergement de personnels soignants des établissements hospitaliers, sociaux et médico-sociaux sollicités depuis le début de la crise sanitaire.

Le ministère de la ville et du logement a mené une action de coordination avec les acteurs publics et privés pour la mise à disposition de places d’hébergement, à travers l’initiative Appart’Solidaire, menée avec les opérateurs privés Airbnb et PAP (10 000 logements à disposition).

LOGEMENT

Baisse de revenus pour certaines catégories de la population, engendrant des difficultés à payer le loyer et les charges.

Les fonds de solidarité logement (FSL) des départements dont la mission consiste à prendre en charge les situations de loyers impayés ne dispose pas des capacités financières suffisantes pour venir en aide à tous les demandeurs.

- La continuité des droits aux aides versées par les caisses d’allocations familiales au titre des APL est décidée le 20 mars. La CNAF met au point une stratégie visant à garantir le maintien des droits aux APL, en permettant aux CAF de décaler les échéances et suspensions des droits prévues dans les procédures habituelles en matière d’impayés locatifs, de contrôle et suivi des logements non-décents et des situations de surpeuplement. Les échéances potentiellement génératrices de suspension des droits aux aides au logement sont reportées pour trois mois.

- Larticle 1er de lordonnance n° 2020-331 du 25 mars organise le report de la fin de la trêve hivernale jusquau 31 mai.

- La réforme de contemporanéisation du calcul du montant des APL prévue pour entrer en vigueur le 1er avril, qui pourrait affecter négativement les recettes de certains bénéficiaires APL, est reportée.

- Les agences départementales pour l’information sur le logement (ADIL) sont mobilisées en renfort pour fournir de l’information aux demandeurs ; à l’échelle nationale, l’Agence nationale pour l’information sur le logement (ANIL), la plateforme « SOS loyers impayés » et le numéro vert 0 805 160 075 sont également mobilisés.

 

Mesures des opérateurs :

- le groupe Action Logement met en place une cellule d’appui pour les impayés de loyer dans le logement social (par l’intermédiaire des entreprises sociales de l’habitat) et le logement intermédiaire (par l’association Foncière Logement et la filiale In’li). AL simplifie l’accès à la garantie Visale et prévoit une montée en charge de son dispositif soli’al.

- la Banque des territoires met en œuvre des reports d’échéance à destination des établissements publics locaux et des bailleurs sociaux et met à leur disposition une plateforme d’intermédiation des prêts renforcée. 

- certains bailleurs sociaux décident la suspension ou l’annulation des loyers (cf. la décision conjointe de l’OPH de Bobigny et de la mairie en date du 23 avril).

 


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  RÉPUBLIQUE  FRANÇAISE

____________________________________ LIBERTÉ ÉGALITÉ – FRATERNITÉ

COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

GT SUIVI DU SECTEUR LOGEMENT

 

 

Paris, le 4 mai 2020

 

 

Groupe de travail Logement :

 

M. Richard Lioger

 

Objet : Situation des locataires et du logement social ; points sur le bâtiment et les travaux publics

I.   Les acteurs publics interviennent pour soutenir les locataires

1.   Le soutien des locataires en difficulté de paiement continue de poser question

Laccompagnement financier des locataires en difficulté continue de poser des interrogations, de nombreux locataires voyant leurs revenus comprimés tandis que leurs charges de logement restent fixes. Selon les estimations, entre 2,5 et 2,8 millions de locataires sont concernés par cette situation, qui peut susciter pour ces ménages des difficultés à subvenir à leurs besoins les plus élémentaires (voir note de la semaine dernière), et qui a amené l’association Droit au logement à lancer la campagne « Loyer suspendu ». L’État compte sur la mobilisation exceptionnelle des fonds de solidarité logement (FSL) des départements et sur l’accompagnement des locataires par les agences départementales pour l’information sur le logement pour remédier aux situations difficiles, mais les acteurs continuent d’alerter sur l’insuffisance des financements des FSL, en particulier.

La Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) a développé une stratégie de garantie du maintien des droits aux aides personnalisées au logement (APL) à leurs allocataires, en reportant les échéances potentiellement génératrices de suspension des droits aux aides. Ainsi, en matière d’impayés de loyers, un délai supplémentaire de trois mois est accordé au-delà de la date limite initialement prévue pour fournir un plan d’apurement, la décision du FSL ou les justificatifs quant au respect d’un plan en cours. Pour ce qui est de la lutte contre la non-décence d’un logement, un délai complémentaire est mis en place à chaque étape de la procédure, pour tenir compte de l’impossibilité des propriétaires à réaliser des travaux durant la période de confinement, et de celle des caisses d’allocations familiales à mandater des partenaires pour réaliser les diagnostics permettant de clore les procédures arrivant à échéance. Enfin, en ce qui concerne la suroccupation de logement, les droits au maintien des APL accordés à titre dérogatoire arrivant à échéance durant la période de confinement sont prorogés de trois mois.

Face à ces circonstances, les bailleurs sociaux se retrouvent dans une position difficile, puisquils ne peuvent annuler la perception des loyers sans mettre en péril leur équilibre financier, comme l’a rappelé cette semaine l’Office public de l’habitat (OPH) de Bobigny au sujet de l’annulation des loyers sociaux annoncée le 23 avril par la commune. La grande majorité des bailleurs préfèrent donc procéder au cas-par-cas, en identifiant et résolvant individuellement les situations d’impayés de loyer. Certains bailleurs, à l’image de l’OPH du Jura, ont contacté leurs locataires les plus fragiles pour leur proposer des échelonnements ou des reports de loyers, tandis que d’autres, comme Plaine Commune Habitat, proposent l’étalement des paiements. Le groupe Action Logement a mis en place de son côté une cellule d’appui aux locataires en situation d’impayé de loyer dans ses logements intermédiaires et sociaux, ainsi que des allégements temporaires de quittance, la simplification du recouvrement des aides Visale, et un recours accru aux aides « soli’al ».

2.   Les bailleurs sociaux ont déployé d’autres mesures d’accompagnement

Les bailleurs sociaux ont pu être sollicités pour la mise à disposition de places dans le cadre de leffort dhébergement déployé depuis le début de la crise. Ainsi le bailleur francilien Seqens, filiale du groupe Action Logement, a-t-il réaménagé et ouvert à Athis-Mons un ancien établissement d’hébergement de personnes âgées dépendantes afin d’héberger 48 personnes sans domicile atteintes du covid-19. Certains bailleurs ont mis à disposition des personnels soignants des logements à proximité des centres hospitaliers, comme Immobilière 3F (45 logements), Le Mans Métropole Habitat (11 logements), ou encore ICF Habitat (10 logements), tandis que d’autres ont fait des dons d’équipement de protection sanitaire aux structures médicales (Espacil Habitat, Valloire Habitat).

De nombreux bailleurs ont mis en œuvre des moyens pour accompagner socialement et psychologiquement les locataires fragiles ou isolés, particulièrement vulnérables en situation de confinement. Il s’est agi pour eux de préserver le contact de manière à rompre l’isolement des locataires. Grand Dijon Habitat prend contact afin d’évaluer les besoins de dialogue, de médicaments ou de produits de première nécessité de ses locataires. D’autres bailleurs, à l’image de Sodineuf, d’Halpades ou de Paris Habitat constituent des listes de personnes à contacter en faisant appel au volontariat de leurs salariés. Les agences de CDC Habitat organisent des « appels bienveillants » avec leurs 45 300 locataires de plus de 70 ans ou en situation de handicap, ce qui doit permettre une prise de contact, l’identification des problèmes, et, au besoin, la mise en relation avec le centre communal ou intercommunal d’action sociale compétent.

II.   Les opÉrateurs publics s’engagent pour soutenir la production de logements

1.   Des engagements sont pris pour faciliter la reprise des chantiers

Le groupe Action Logement a pris des engagements afin de permettre le soutien de lactivité des TPE et PME œuvrant dans lécosystème de la production immobilière. Ses filiales immobilières se sont engagées à généraliser le traitement dématérialisé de toutes les factures des fournisseurs avec un engagement de paiement rapide, ne dépassant pas vingt jours, de façon à contribuer à leur trésorerie. Le groupe s’est également engagé à ne pas appliquer de pénalités aux retards qui découlent de l’épidémie, réviser les contrats de travaux dans le cadre de clauses de révision des prix et adapter les calendriers de paiements, au besoin par la mise en place d’avances forfaitaires. Il souhaite aussi adopter des mesures de soutien financier ciblé sur des TPE-PME « fournisseurs » et diminuer les retenues de garantie (sommes qui visent à assurer au maître d’ouvrage le bon déroulement des travaux) en fonction du montant des chantiers (0 % pour les chantiers inférieurs à 100 000 euros, moins de 2 % pour les chantiers supérieurs). Enfin, étant donné l’importance de la problématique sanitaire dans le cadre de la reprise du secteur, Action Logement s’est engagé, dans la mesure du possible, à prendre en charge une partie significative des surcoûts engendrés par la mise en œuvre des mesures de protection sanitaire pour faciliter la reprise des chantiers dans des conditions sécurisées.

2.   La commande des opérateurs est mobilisée pour relancer la construction

Le groupe CDC Habitat, filiale de la Caisse des dépôts et consignations, sest engagé, comme en 2009, à soutenir la demande de production immobilière en sortie de crise. Il a annoncé dès le 25 mars qu’il accompagnera au cours des douze prochains mois la production de 40 000 nouveaux logements en vente en état futur d’achèvement (VEFA), en actionnant notamment ses filiales CDC Habitat social et Adoma (logements très sociaux). Un appel à projets est d’ores et déjà organisé à cet effet. Les programmes, s’ils doivent être principalement situés en zone tendue A, Abis et B1, peuvent aussi concerner des communes Action Cœur de ville. Ce soutien concerne uniquement la production de logements neufs, dont 15 000 sociaux (la répartition en tranches n’a pas encore été déterminée), 10 000 intermédiaires et 15 000 libres contractualisés, dits « abordables ».

La filiale Inli du groupe Action Logement sest également engagée en ce sens, annonçant dès la fin du mois de mars un programme dachat de 10 000 logements intermédiaires d’ici la fin de l’année 2020. Ce programme doit contribuer à l’accélération du projet de production de 80 000 nouveaux logements intermédiaires. Pour soutenir la reprise d’activité du secteur, In’li s’engage à acquérir des stocks achevés ou en cours de travaux ou encore de sécuriser des opérations d’achat en bloc en cours de montage, tant en logements intermédiaires qu’en logements libres à loyers maîtrisés.

III.   Les bailleurs sociaux prÉconisent des mesures fortes pour la sortie de crise

1.   Des mesures d’accompagnement aux ménages en difficulté de paiement

Les bailleurs sociaux proposent des solutions sur le court terme pour mieux faire face aux problèmes dimpayés de loyers qui peuvent se présenter :

    augmenter les capacités financières des fonds de solidarité logement (FSL) départementaux par un abondement budgétaire de l’État (en contrepartie d’une participation de l’État à leurs autorités gestionnaires), élargir les publics bénéficiaires ainsi que les critères d’octroi des aides, et rendre effective la possibilité inscrite dans les textes pour les ménages de saisir directement le fonds ;

    renforcer les moyens des préfets pour la prévention des expulsions et, si nécessaire, pour l’indemnisation des propriétaires en cas de refus de concours de la force publique pour procéder à une expulsion ;

    poursuivre l’assouplissement des règles relatives au maintien de l’APL en cas d’impayés.

Ils appellent, en outre, à des évolutions institutionnelles qui permettraient de renforcer laccompagnement des ménages éprouvant des difficultés dans le règlement du loyer :

    donner aux commissions de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (CCAPEX) les moyens de rendre effective leur mission de coordination des acteurs avant expulsion : préfet, commission Banque de France, conseil départemental, FSL, CCAS/CIAS, caisse d’allocations familiales, bailleurs ;

    réduire le risque financier lié à la location en sécurisant les bailleurs : adapter les dispositifs de garantie locative existants et revenir sur les sous-actualisations récentes des barèmes APL, ce qui permettrait de réduire le taux d’effort des ménages en situation difficile ;

    conforter le rôle des intercommunalités dans leur rôle de pilote des politiques locales de l’habitat et des politiques de gestion de la demande et des attributions par la cotation de la demande dans le cadre des plans partenariaux de gestion de la demande et d’information des demandeurs (PPGID), avec la mise en place d’instances partenariales d’examen des situations complexes (à l’instar de ce qui se fait à Rennes et à Nantes).

2.   Des mesures permettant la reprise de la production de logements

Se plaçant dans la perspective dune crise longue, le mouvement HLM représenté par lUnion sociale pour lhabitat émet un ensemble de recommandations visant à relancer la production de logements tout en garantissant une offre adaptée aux besoins. Elle propose un plan triennal en production neuve et en réhabilitation, visant à la fois de répondre aux besoins de logements et à la nécessité de préserver l’emploi dans le bâtiment. Selon elle, la production de 300 000 logements et l’amélioration de 400 000 logements, notamment orientés vers le développement des offres PLAI et PLUS, permettraient de préserver 500 000 emplois dans le secteur. Pour y parvenir, il s’agirait de prendre les mesures suivantes :

    alléger les règles de la commande publique en rendant possibles des contrats cadre pluriannuels allotis (exemple de la réglementation d’intérêt général pour les Jeux olympiques) ;

    faciliter la délivrance des permis de construire en autorisant les préfets à accorder des permis dérogatoires aux règles architecturales locales ;

    éviter les surcoûts non essentiels par la prorogation des diagnostics de performance énergétique (DPE) périmés en 2020 jusqu’à la fin du plan de relance et le gel de l’obligation d’installation de douches sans ressaut ;

    alléger la procédure d’agrément : numériser et dématérialiser l’instruction des agréments, mobiliser les comités régionaux de l’habitat et de l’hébergement (CRHH) pour définir des chartes de maîtrise des prix en VEFA, expérimenter la suppression ou l’adaptation des zonages locatifs pour les opérations sous maîtrise d’ouvrage HLM ;

    retourner à un taux de TVA réduit sur tous les investissements des organismes HLM ;

    renforcer la production de PLAI par un retour de l’État dans le financement des aides à la pierre via le fonds national des aides à la pierre (FNAP) ;

    rendre la garantie d’emprunts faite aux organismes HLM obligatoire dans les communes carencées au titre des obligations de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU)  ;

    restaurer les marges de manœuvre des organismes HLM en supprimant la réduction de loyer de solidarité (RLS) et en renforçant l’effectivité des aides de taux de la Caisse des dépôts ;

    consolider le haut de bilan des organismes HLM en ouvrant une enveloppe annuelle de 1 milliard d’euros de prêts de haut de bilan bonifiés (PHBB) par la CDC et en élargissant les bénéficiaires ;

    accélérer le lancement des projets de rénovation urbaine et amplifier le traitement des quartiers les plus sensibles en augmentant le financement de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU).

Les acteurs proposent également des pistes pour parer au coup de frein que pourrait subir laccession à la propriété (voir note du 27 avril). En effet, plusieurs facteurs pourraient contribuer à un tel ralentissement : l’arrêt actuel du marché, le report des opérations jusqu’à après les municipales, l’inquiétude des ménages sur leurs revenus futurs, et le comportement plus prudent à attendre des banques quant à l’octroi des crédits. Plusieurs options sont proposées :

    amplifier le financement des ménages cibles en maintenant le prêt à taux zéro sur l’ensemble du territoire, en mettant en place une prime exceptionnelle à l’achat pour les ménages sous plafond de revenus se portant acquéreurs dans le neuf ou en vente HLM et en adaptant les modes d’analyse des risques des établissements bancaires pour qu’ils ne prennent pas en compte les périodes de chômage partiel ;

    soutenir les acteurs de l’accession sociale en reportant les dates butoirs pour l’obtention de l’agrément définitif et en simplifiant les agréments PSLA ;

    encourager l’action des organismes de foncier solidaire en facilitant le financement par la Banque des territoires et en simplifiant le cadre réglementaire.


FOCUS : TRACTATIONS AUTOUR DE LA REPRISE DES TRAVAUX

Le bâtiment donne lieu, depuis le 10 avril et ladoption du guide des préconisations de lOPP-BTP (voir notes précédentes et tableau de bord), à une reprise très lente. Certains chantiers, notamment ceux de très petite taille, ont pu reprendre en s’adaptant aux recommandations de protection sanitaire, mais le taux global d’activité n’atteint encore que 30 %. La reprise reste freinée dans une grande partie des chantiers par plusieurs facteurs :

    la prise en charge des surcoûts liés à la mise en œuvre des mesures sanitaires (10-20 % des coûts totaux) et les désaccords à ce sujet entre les parties prenantes ;

    la détermination de la responsabilité de la chaîne d’acteurs dans l’arrêt et le redémarrage des chantiers eu égard aux pénalités, indemnités et responsabilités vis-à-vis des intervenants des chantiers ;

    l’accompagnement financier nécessaire des entreprises fragilisées du secteur et en particulier les TPE et PME ;

    l’ouverture des hôtels pour accueillir les travailleurs de chantier en déplacement et celle des restaurants à proximité des chantiers ;

    d’éventuelles difficultés d’ordre juridique (autorisations administratives diverses) ;

    un manque confiance de certains acteurs de la chaîne, notamment les particuliers.

Face à ces difficultés, la direction de lhabitat, de lurbanisme et des paysages (DHUP) organise des réunions de consultation avec les parties prenantes de la construction afin de fluidifier la reprise. Le Gouvernement a également chargé le 28 avril le préfet Philippe Mahé de « proposer des mesures daccompagnement à la reprise des chantiers ».

Le ministère de léconomie et des finances a demandé aux parties prenantes de remettre leurs préconisations quant aux décisions à prendre pour faciliter la reprise. La CAPEB a remis sa contribution le samedi 25 avril. Le lundi 27 avril, la Fédération française du bâtiment et la Fédération nationale des travaux publics ont remis à leur tour leurs préconisations, parmi lesquelles :

    neutraliser ou compenser les surcoûts : appliquer l’imprévision à tous les contrats en cours, appliquer un coefficient de majoration au prix des marchés publics ; adopter des mesures transitoires comme la réduction des cotisations sociales patronales ou la défiscalisation ou l’exonération de cotisations des heures supplémentaires ;

    lever les blocages : installer rapidement les conseils municipaux, prolonger les délais de livraison dans les contrats de construction (CCMI, VEFA, CPI, VIR), lever les interdictions de circulation des poids lourds de plus de 7,5 tonnes, supprimer l’autorisation préfectorale pour les chantiers de plus de 100 personnes, interdire aux maires d’interdire les travaux en journée, le samedi, pendant la période estivale ou d’exiger un avis préalable de leurs services, sécuriser l’alimentation électrique, rouvrir les hôtels pour faciliter les grands déplacements, rouvrir sur réservation des restaurants ouvriers sous condition de respect des normes sanitaires ;

    préserver linvestissement des collectivités en mobiliser le fonds de compensations pour la TVA (FCTVA), la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) et la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) ;

    favoriser linvestissement dans le logement en élargissant le champ du crédit d’impôt à la transition énergétique (CITE) et en élargissant le taux réduit de 5,5 % de TVA à tous les travaux d’amélioration-entretien et à tous les logements locatifs sociaux neufs ;

    préserver les entreprises en prévoyant le remboursement dès avril 2021 de la créance tirée du report en arrière du déficit (carry back) de l’exercice 2020.


fiche : marchÉs publics, Évaluation des surcoUts et modification des cahiers des charges

Modification du plan général de coordination et charge nouvelle

La mise en œuvre obligatoire des préconisations du guide de lOPP-BTP publié le 2 avril engendre une charge extracontractuelle dont la répartition entre les intervenants peut être faite par avenant aux documents contractuels. La reprise des chantiers est soumise, comme le prévoit le guide de préconisations publié par l’OPP-BTP (voir notes précédentes), à la signature d’un protocole entre les différentes parties prenantes d’un chantier, détaillant les mesures de sécurité sanitaire mises en œuvre, qui doivent être adaptées à chaque site. Le maître d’ouvrage formalise, en accord avec les entreprises intervenantes et à l’aide des préconisations du guide, une liste des conditions sanitaires à appliquer, qui seront incluses dans le plan général de coordination sécurité et protection sanitaire (PGCSPS) révisé et déclinées dans les plans particuliers sécurité et protection sanitaire (PPSPS). Ces discussions comprennent un aspect financier, déterminant la répartition de la prise en charge financière des surcoûts provoqués par la mise en œuvre de ces mesures. Concrètement, la répartition de la charge nouvelle se fait par des avenants aux pièces financières annexées à lacte dengagement.

Le Gouvernement invite à procéder au cas par cas mais certains surcoûts donnent lieu à des litiges quant à leur répartition. Les ordonnances publiées à ce jour ne comportent pas d’indication sur la répartition des surcoûts et le Gouvernement a indiqué quil ne souhaite pas réglementer sur ce sujet, préférant les accords au cas par cas dans le cadre de discussions à l’amiable entre les parties prenantes sur un site. La Fédération française du bâtiment a indiqué que les acteurs parviennent en général assez facilement à un accord sur le coût des mesures de sécurité, de l’agrandissement des bases-vies, et des fournitures diverses. En revanche, il subsiste en général des difficultés plus importantes pour évaluer le coût de la moindre productivité provoquée par la mise en œuvre des mesures de sécurité. La fédération relève par ailleurs que les discussions se passent souvent mieux avec les donneurs d’ordre publics qu’avec les maîtres d’ouvrage privés.

La renégociation des clauses financières constitue-t-elle une obligation pour les donneurs d’ordre publics ?

Du fait du changement majeur de circonstances que constitue ladoption des mesures de sécurité sanitaire, le titulaire du contrat est fondé à demander la modification des prix qui y sont définis. Il nest pas évident cependant que le maître douvrage public soit obligé daccepter la revalorisation des prix, ni, a fortiori, de définir dans quelle mesure il doit prendre en charge une partie des surcoûts. L’article 6 de l’ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 relative aux contrats publics, qui concerne les contrats publics de concession et non de marché public, prévoit une indemnisation au titre des charges nouvelles qui naissent du fait de la crise pour le concessionnaire. Sans texte explicite s’appliquant aux marchés publics, il demeure cependant difficile d’affirmer qu’il s’agit pour le maître d’ouvrage d’une obligation. Si l’affaire devait aboutir au contentieux, il reste cependant très probable que le juge donnerait raison au titulaire.

Pour permettre la reprise la plus rapide des travaux, les donneurs dordre ont intérêt à accepter de négocier à lamiable la répartition des surcoûts par modification du contrat, qui peut être plus favorable dans bien des cas que ce que déciderait le juge du contrat. Les contrats de marchés publics contiennent en général des clauses de modification qui aménagent l’évolution des rapports financiers en fonction de la situation économique et financière. Dans la mesure où elles existent, de telles clauses encadrent les évolutions possibles. Au-delà cependant de ces clauses particulières, les contrats peuvent être modifiés en vertu de « circonstances imprévues » (article L. 2194-1 du code de la commande publique), même lorsque le contrat initial ne contient pas de clauses de modification. Si les discussions directes entre les intervenants n’aboutissent pas, il est possible, là où les documents contractuels le stipulent, d’avoir recours à une procédure de conciliation ou de médiation, qui constituent des modes alternatifs de règlement des conflits. Si ces procédures échouent, le titulaire du contrat peut saisir le tribunal administratif.

Les possibilités au contentieux

Deux doctrines juridiques fortement ancrées dans la tradition administrative pourraient trouver à sappliquer à des marchés publics de travaux : les sujétions techniques imprévues et la force majeure.

La doctrine des sujétions techniques imprévues trouve à sappliquer lorsquun événement anormal, extérieur à la volonté des parties et imprévisible a suscité le bouleversement de léconomie du contrat, sans pour autant, à la différence de la force majeure, en rendre impossible lexécution. Elle constitue une application de la théorie plus générale de l’imprévision, invoquée par le juge administratif depuis 1916, au cas des marchés de travaux publics. Le juge estime dans ce cas qu’il revient à la personne publique donneur d’ordre de prendre en charge les surcoûts engendrés par cet événement, qu’on appelle « charge extracontractuelle ». À la différence de l’imprévision, qui prévoit qu’une partie de la charge, considérée comme correspondant à une part normale d’aléa, doit être supportée par le titulaire du contrat, la doctrine des sujétions imprévues prévoit que l’entièreté de la charge extracontractuelle est assumée par la personne publique.

Les sujétions imprévues concernent cependant en premier lieu, comme limprévision, des événements qui ne bouleversent que de manière temporaire léconomie du contrat (pluies très fortes, crue, sols très durs à creuser ou au contraire instables). L’indemnité versée par la personne publique a vocation à rétablir l’équilibre financier brisé. Dans le cas des surcoûts ici en question, nous avons affaire à un bouleversement qui pourrait paraître définitif, ou tout au moins d’une durée longue et indéterminée. Le juge n’aurait donc pas recours immédiatement à la règle des sujétions imprévues.

Quand le bouleversement est définitif, cest plutôt vers la force majeure que se tourne traditionnellement le juge, qui estime quun événement « irrésistible », en modifiant fondamentalement léquilibre économique du contrat, en empêche lexécution et libère le titulaire de ses obligations ([40]). L’événement est, comme pour les sujétions imprévues, extérieur à la volonté des parties et imprévisible. Lorsque ce genre d’événement est avéré, le titulaire peut :

    demander la résiliation du contrat ;

    demander l’exonération des pénalités de retard pour la fraction du retard imputable à la force majeure (c’est ce qui a déjà été fait, par l’ordonnance n° 2020-427 du 15 avril, pour ce qui est du retard imputable aux mesures de confinement) ;

    s’il poursuit l’exécution du contrat dont l’équilibre économique est bouleversé, demander qu’il lui soit fait application de la théorie des sujétions imprévues, ce qui a pour effet de faire basculer vers la prise en charge intégrale du surcoût par la personne publique.


Annexe : principales prÉconisations du guide de l’OPP-BTP

Le guide de préconisations de sécurité sanitaire de l’organisme de prévention professionnelle du BTP, publié le 2 avril et mis à jour le 10 avril, comprend un certain nombre de dispositions dont une grande partie peut engendrer des surcoûts à la mise en œuvre :

    la formalisation par le maître d’ouvrage d’une liste de conditions sanitaires applicables, en concertation avec le maître d’œuvre et, le cas échéant, avec le coordinateur sécurité et protection sanitaire (CSPS) ; leur intégration dans le plan général de coordination SPS, les plans particuliers SPS et, le cas échéant, dans le plan de prévention ;

    la limitation de la coactivité ;

    la limitation des déplacements de tout personnel non indispensable sur les chantiers et dans les ateliers (notamment les apprentis et stagiaires) ;

    le port du masque de catégorie 1 dans le cas du travail à moins d’un mètre et le port du masque IIR lors des interventions chez les personnes malades ou à risque ;

    l’affichage démultiplié des consignes sanitaires ;

    le marquage spatial pour le respect des distances ;

    la limitation de l’accès aux espaces collectifs ;

    l’organisation d’ordres de passage pour l’utilisation des espaces collectifs (réfectoire, salles de pause, bases vie, bungalows de chantier) ;

    l’organisation par roulement de l’usage des réfectoires ainsi que leur désinfection entre chaque tour de repas ;

    l’attribution au possible d’outillages individuels ;

    la désinfection entre chaque utilisation des surfaces de contact des engins et véhicules partagés;

    la présentation biquotidienne de l’organisation des travaux ;

    la mise à disposition de lingettes désinfectantes et de solution hydroalcoolique dans les lieux fréquentés ;

    la formation des personnels aux règles d’hygiène et à l’utilisation des masques ;

    la mise à disposition, pour les interventions chez les particuliers malades ou à risque, d’un kit de fourniture d’intervention (combinaison jetable, surchaussures, gants neufs adaptés, masque, gel hydroalcoolique, lingettes désinfectantes, eau et savon, essuie-mains jetables, sac à déchets).

 


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  RÉPUBLIQUE  FRANÇAISE

____________________________________ LIBERTÉ ÉGALITÉ – FRATERNITÉ

COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

GT SUIVI DU SECTEUR LOGEMENT

 

 

Paris, le 11 mai 2020

 

 

Groupe de travail Logement :

 

M. Richard Lioger

 

Objet : Situation des locataires et de lhébergement ; tableau de bord du secteur

I.   la situation des locataires soulÈve des inquiétudes croissantes

1.   De nouvelles mesures sont adoptées pour soutenir les locataires en difficulté

Le projet de loi prorogeant létat durgence sanitaire prolonge la trêve hivernale à une nouvelle date butoir au 10 juillet. La trêve hivernale avait déjà fait l’objet d’une extension : prenant fin habituellement au 31 mars, elle avait été prolongée par l’article 1er de l’ordonnance n° 2020-331 du 25 mars jusqu’au 31 mai. Face à la prorogation de l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 10 juillet, un amendement du groupe La République en Marche, proposant, à l’article 10 du texte, la prorogation de la trêve jusqu’à la même date (10 juillet), a été adopté par l’Assemblée en séance et retenu dans le texte final issu de la commission mixte paritaire. La prorogation de la trêve hivernale a notamment pour effet de prolonger l’interdiction de la mise en œuvre de procédures d’expulsion locative et l’interruption de la fourniture d’énergie ([41]).

Les acteurs du parc locatif social ont également pris de leur côté des engagements pour prévenir les situations dexpulsion locative en prenant le mardi 5 avril des engagements en faveur du soutien économique des locataires. Dans une charte signée en commun avec les cinq fédérations d’associations de locataires agréées à l’échelle nationale ([42]), les entreprises sociales de l’habitat, les offices publics de l’habitat, les coopératives d’HLM et les associations régionales d’organisme d’habitat social ont pris 20 engagements visant à accompagner les locataires HLM en situation de fragilité économique. Ces engagements s’organisent selon plusieurs axes, qui visent à soutenir les locataires tout au long de leurs démarches :

    l’organisation de prises de contact systématiques et régulières des bailleurs sociaux avec les locataires du parc social identifiés comme pouvant potentiellement éprouver des difficultés de paiement du fait de la baisse de leurs ressources ;

    la mise en œuvre, dans la mesure du possible, d’un étalement des charges par des reports de paiement, des versements partiels et l’échelonnement de la dette ;

    la mise en place de dispositifs de suivi en commun entre les bailleurs sociaux et les associations sur les cas difficiles ;

    le report ou l’étalement des régularisations débitrices dues lors de la période de régularisation des loyers qui s’ouvre en mai, en tenant compte des capacités financières des locataires (avec maintien des régularisations créditrices dans tous les cas) ;

    l’accompagnement par les bailleurs et les associations des locataires dans leurs démarches auprès des institutions (fonds de solidarité logement, centre communal ou intercommunal d’action sociale, caisse d’allocations familiales, conseil départemental).

2.   Des craintes se font jour de voir une forte augmentation du nombre d’expulsions locatives au lendemain de la trêve hivernale

Les associations craignent une accumulation des difficultés financières du fait de lenchaînement de plusieurs mois de moindres revenus. Comme l’a déjà relevé le groupe de travail (voir note du 23 avril), le chercheur Pierre Concialdi ([43]) a identifié une population à risque de 3,9 millions de ménages qui ont subi lors des mois de mars, avril et mai une diminution ou un asséchement de leurs ressources tandis que leurs dépenses pré-engagées, composées notamment du loyer et s’élevant en moyenne à 27 % des ressources du foyer ([44]), restent fixes. Comme le relève la Fondation Abbé Pierre, d’autres coûts ont même pu connaître une augmentation du fait du confinement : téléphonie, électricité, eau, alimentation. Si les mois à venir devaient voir une augmentation des pertes d’emploi, du fait notamment de l’extinction progressive des dispositifs d’activité partielle mis en place pendant la période de confinement, les ménages éprouvant d’ores et déjà des difficultés de paiement verraient leur situation encore fragilisée.

Les acteurs font des propositions pour éviter de voir une augmentation forte du nombre des expulsions locatives à la fin de la trêve hivernale prolongée. La charte d’engagements du mouvement HLM est saluée mais les associations sollicitées estiment qu’il demeure nécessaire d’aller plus loin dans le soutien des locataires, notamment dans le parc libre. Certains proposent, par exemple, de mettre en œuvre, au-delà du logement social, des dispositifs permettant l’étalement ou l’annulation de la dette engrangée entre mars et septembre, à proportion du nombre de mois de baisse ou d’absence de revenus. Par ailleurs, la Fondation Abbé Pierre et l’association Droit au logement proposent de poursuivre le gel des expulsions locatives en prorogeant la trêve hivernale au-delà du 10 juillet. Elles souhaitent que l’État réfléchisse à la possibilité d’une « année blanche » pour les expulsions en ce qui concerne les locataires de bonne foi, qui permettrait la négociation des échéances et la diminution de la charge de la dette portée par certains ménages.

Les bailleurs et les locataires souhaitent également voir un engagement financier ou fiscal de lÉtat pour venir au soutien des organismes du logement locatif. La Fondation Abbé Pierre propose la création d’un fonds national d’aide au paiement des créances, doté d’au moins 200 millions d’euros, afin de venir en renfort des fonds de solidarité logement. Les bailleurs sociaux et les associations de locataires s’accordent sur la nécessité de revoir la réduction de loyer de solidarité (RLS), et réitèrent l’importance d’une intervention financière en faveur des bailleurs sociaux, afin de leur permettre une plus grande souplesse dans le traitement des impayés de leurs locataires.

II.   Les mesures adoptées en faveur de certains publics fragiles pourraient s’avérer insuffisantes

1.   Une aide exceptionnelle est apportée aux jeunes précaires

Le Gouvernement a annoncé lattribution dune aide aux jeunes ayant subi une baisse de revenus. Les personnes de moins de 25 ans qui ne sont pas étudiants et qui sont personnellement bénéficiaires d’une aide personnelle au logement (APL) recevront, de manière automatique, un versement de 200 euros de leur caisse d’allocations familiales, qui interviendra au mois de juin. Cette mesure, qui devrait concerner 415 000 personnes, demeure cependant peu précise au niveau des modalités d’attribution et de mise en œuvre.

Une aide de 200 euros sera également versée aux populations étudiantes ayant subi une baisse des ressources. L’année universitaire s’est en effet terminée de manière prématurée, et les étudiants qui travaillent tout au long de l’année pour financer leurs études, qui représentent 25 % du corps étudiant ([45]), ainsi que les étudiants qui travaillent l’été pour contribuer au financement des études de l’année suivante, peuvent avoir subi une baisse pérenne de leurs ressources. Le Premier ministre a donc annoncé devant le Sénat, le lundi 4 mai, l’attribution d’une aide ponctuelle en faveur des étudiants qui démontrent une baisse de leurs ressources. Cette aide ponctuelle et exceptionnelle de 200 euros sera disponible en juin à la demande des quelques 400 000 étudiants éligibles (les demandes seront enregistrées dès le 12 mai), et sera versée par les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS). L’attribution de l’aide est réservée aux publics suivants :

    les étudiants en formation initiale ayant subi la perte d’un emploi, d’une durée minimum de 8h par semaine, ou l’annulation d’un stage obligatoire donnant droit à une gratification, ou l’interruption d’un stage obligatoire donnant droit à une gratification et qui avait déjà démarré avant le confinement ;

    les étudiants ultramarins en formation initiale retenus en France métropolitaine.

Les acteurs ont salué lannonce de ces aides, qui se chiffrent au total à 150 millions deuros, tout en soulignant leur insuffisance par rapport à la situation financière des populations visées. Les syndicats étudiants ont critiqué également la complexité du dispositif prévu pour les étudiants en situations de baisses de revenus, et notamment la nécessité pour eux de faire une demande auprès de leur CROUS pour se voir attribuer l’aide. Les associations de locataires ont souligné le manque de précisions au sujet de l’attribution de l’aide aux jeunes précaires qui ne sont pas étudiants. Les acteurs demandent des solutions plus amples et de plus long terme, par exemple la suspension des loyers pour les étudiants logés dans les logements des CROUS (proposition des syndicats étudiants).

2.   Le dispositif de réquisition hôtelière fait l’objet de critiques

Le dispositif dhébergement durgence continue de monter en charge, avec plus de 21 000 places nouvelles mobilisées depuis le début du confinement. À ce jour, un total de plus de 178 000 places d’hébergement sont désormais ouvertes pour les sans-abri. Ce dispositif comprend 143 000 places pérennes de l’État, 14 000 places hivernales prolongées et 11 400 places hôtelières mises à disposition ou réquisitionnées, ainsi que d’autres places exceptionnelles, ouvertes dans des bâtiments mobilisés à cet effet : internats, villages vacances de VVF Villages, centres de l’Union des centres sportifs de plein air (UCPA) et de l ‘Agence nationale pour la formation professionnelle (AFPA).

Les associations alertent cependant sur les carences dans le dispositif de réquisition de places dhébergement dans les établissements hôteliers. Selon l’association Droit au logement, le temps de latence entre la réquisition préfectorale et l’utilisation effective des chambres aurait été dans certains cas très long, occasionnant une période d’inoccupation des chambres. Ailleurs, ce sont les conditions d’accueil qui interrogent : les personnes logées n’ont pas accès aux services de l’hôtel (cuisines, salles communes), les établissements n’assurent pas le service minimum (nettoyage régulier des chambres et des sanitaires, mise à disposition des draps) puisqu’ils ont mis leur personnel en activité partielle, mais facturent aux associations ou à l’État des prix qui ne correspondent pas au service rendu. La Fondation Abbé Pierre et l’association Droit au logement, si elles saluent l’efficacité de la réquisition des internats et autres espaces collectifs, qui permettent aux personnes accueillies de vivre dans une autonomie relative, invitent en revanche l’État à exercer davantage de vigilance sur ses partenariats hôteliers et à faire preuve de plus d’exigence en ce qui concerne les conditions d’accueil des personnes. Enfin, les acteurs sur le terrain souhaiteraient avoir davantage de visibilité sur la situation des personnes accueillies au-delà de l’horizon du déconfinement.

Le dispositif de centres dhébergement spécialisés (CHS) mis en œuvre par la direction générale de la cohésion sociale continue lui aussi de prendre de lampleur. Au début du mois de mai, ce sont 97 sites spécialisés, qui ont pour mission d’accueillir les personnes sans domicile atteintes du covid-19 mais ne nécessitant pas une hospitalisation, qui sont désormais ouverts. Ces sites représentent une capacité d’accueil de 3 600 personnes dans 80 départements, dont Mayotte et La Réunion. Si le déploiement de ces centres a globalement été salué pour sa rapidité et l’efficacité des CHS comme point d’accueil et de prise en charge, plusieurs carences sont soulignées. Les acteurs continuent de noter la pérennisation des séjours dans les centres d’hébergement, là où ils ne sont censés constituer qu’une étape. Ils soulignent aussi les déficiences existantes en matière de protection sanitaire, à la fois des personnels d’accueil et des personnes accueillies.


Difficultés identifiées

Dispositifs gouvernementaux et de la filière

BÂTIMENT

Trois semaines darrêt ferme des opérations de chantier entre le 17 mars et le 6 avril :

- impossibilité de mettre en œuvre systématiquement les mesures de distanciation sociale (vestiaires, réfectoires, usage partagé des outillages, engins et véhicules) ;

- coordination des entreprises dans les chantiers en coactivité (intervention simultanée ou successive, sur un même chantier, de travailleurs de différentes entreprises) ;

- difficulté d’intervenir en milieu habité.

 

Semaine du 6 avril : difficultés à reprendre les activités du fait de la pénurie de matériels de protection, notamment les masques.

Publication le 2 avril dun guide de préconisations de sécurité sanitaire pour le bâtiment par lorganisme professionnel de prévention du BTP (OPP-BTP), organisme paritaire chargé de la prévention des ATMP et de lamélioration des conditions de travail, en concertation avec les fédérations professionnelles et les administrations. Le guide est conçu pour permettre la reprise des opérations de chantier rapidement et dans de bonnes conditions de protection sanitaire. Il recommande, entre autres :

- la formalisation par le maître d’ouvrage d’une liste de conditions sanitaires applicables, en concertation avec le maître d’œuvre et le coordinateur SPS ;

- la limitation de la coactivité ;

- la limitation des déplacements de tout personnel non indispensable sur les chantiers et dans les ateliers (notamment les apprentis et stagiaires) ;

- le port du masque dans le cas du travail à moins d’un mètre ou dans les interventions chez personnes malades ou à risque

- l’affichage démultiplié des consignes sanitaires ;

- le marquage spatial pour le respect des distances ;

- la limitation de l’accès aux espaces collectifs, l’organisation d’ordres de passage (réfectoire, salles de pause, bases vie, bungalows de chantier) et l’organisation par roulement de l’usage des réfectoires ainsi que leur désinfection entre chaque tour de repas ;

- l’attribution au possible d’outillages individuels ; et sinon la désinfection entre chaque utilisation des surfaces de contact des engins et véhicules partagés ;

- la présentation biquotidienne de l’organisation des travaux ;

- la mise à disposition de lingettes désinfectantes et de solution hydroalcoolique dans les lieux fréquentés ;

- la formation des personnels aux règles d’hygiène et à l’utilisation des masques ;

- la mise à disposition, pour les interventions chez les particuliers malades ou à risque, d’un kit de fourniture d’intervention (combinaison jetable, surchaussures, gants neufs adaptés, masque, gel hydroalcoolique, lingettes désinfectantes, eau et savon, essuie-mains jetables, sac à déchets).

Le 10 avril, le guide a été adapté pour tenir compte des difficultés d’approvisionnement en masques IIR en permettant aux travailleurs de porter des masques de catégorie 1, parfois dits « alternatifs ».

Depuis le 13 avril, reprise échelonnée des chantiers. Des points de blocage freinant la reprise persistent :

- responsabilité de la chaîne d’acteurs dans l’arrêt et le redémarrage des chantiers eu égard aux pénalités, indemnités et responsabilités vis-à-vis des intervenants des chantiers ;

- prise en charge des surcoûts directement liés à la mise en œuvre des mesures sanitaires (10-20 % des coûts totaux) ;

- éventuelles difficultés d’ordre juridique (documents d’urbanisme, simplification et accélération des procédures) ;

- accompagnement financier aux entreprises fragilisées du secteur et en particulier le tissu de TPE/PME ;

- degré de confiance encore insuffisant de certains acteurs de la chaîne, notamment les particuliers.

La direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) organise depuis le 20 avril des réunions de consultation avec les parties prenantes de la construction afin de fluidifier la reprise.

 

Le 25 avril, la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment a remis ses préconisations au ministre de l’économie et des finances afin de faciliter la reprise des chantiers. Le 27 avril, la Fédération française du bâtiment et la Fédération nationale des travaux publics ont fait de même.

 

Le 28 avril, le Gouvernement charge Philippe Mahé, préfet, de « proposer des mesures d’accompagnement à la reprise des chantiers ». Il doit présenter son rapport et ses préconisations dans la semaine du 11 mai.

Carences dans la continuité du service public :

- interruption de linstruction des autorisations durbanisme par les services des communes et intercommunalités ;

- interruption de lactivité des services déconcentrés de lÉtat dont la consultation est nécessaire ou obligatoire : centre des impôts locaux (services cadastraux), directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), architectes des bâtiments de France (ABF), services de l’archéologie préventive obligatoire (INRAP) ;

-indisponibilité des raccordeurs délégataires dune mission de service public dont le concours est nécessaire pour le raccordement du chantier et le bouclage des opérations (Veolia, Enedis, GRDF).

Lordonnance n° 2020-306 du 25 mars relative aux délais administratifs proroge les délais jusquà une période de trois mois après la fin de létat durgence sanitaire en organisant :

- la suspension des délais d’instruction des autorisations d’urbanisme (permis de construire, déclaration d’intention d’aliéner…) jusqu’à la fin d’une période égale à la durée de l’état d’urgence sanitaire supplémentée d’un mois dit « tampon » ;

- la suspension des délais de recours contre les autorisations d’urbanisme et leur rechargement au bout de même période.

 

Lordonnance est rectifiée le 15 avril pour répondre aux inquiétudes des professionnels et raccourcir les délais applicables :

- suppression, pour ce qui concerne l’instruction des dossiers, du « mois tampon » qui devait succéder à l’EUS ;

- suppression du rechargement des délais de recours, qui continueront à courir à compter de la fin de l’EUS pour la période qui restait à courir au 12 mars ;

- sécurisation des clauses contractuelles relatives aux pénalités de retard.

 

Certaines collectivités et intercommunalités (Poitiers, Nantes) ont mis en œuvre des procédures pour permettre la reprise de l’instruction.

Le ministre de la ville et du logement a enjoint les collectivités à reprendre dans la mesure du possible les activités d’instruction des dossiers.

 

Une troisième ordonnance « délais » a été publiée le jeudi 6 mai afin de décorréler prorogation des délais et fin de létat durgence sanitaire. Les ordonnances précédentes ont en effet lié la prorogation des délais à la fin de lEUS, car les délais sont décrits comme recommençant à courir à la fin de lEUS. LEUS se trouvant prolongé, lordonnance du 6 mai fixe donc le 24 mai comme date de départ des délais.

Baisse de lactivité sur longue durée anticipée : report ou annulation d’une partie des projets en cours de lancement, retard au redémarrage du fait des difficultés à négocier la répartition des surcoûts, baisse du pouvoir d’achat des entreprises, particuliers et collectivités commanditaires, incertitudes longues sur le cycle électoral local.

- Engagements des opérateurs en faveur de la construction :

- CDC Habitat sengage à commander en VEFA 40 000 logements neufs en sortie de crise dont 15 000 sociaux, 15 000 intermédiaires et 10 000 libres et « abordables » contractualisés, en zone tendue (A, Abis, B1) et en zone Action Cœur de ville (appel à projets du 25 mars).

- In’li (filiale intermédiaire du groupe Action Logement) s’engage à commander 10 000 logements intermédiaires en VEFA.

 

- Engagements du groupe Action Logement pour le soutien des TPE-PME fournisseurs à la relance :

- traitement dématérialisé et rapide des factures (moins de 20 jours) ;

- non-application des pénalités de retard découlant de l’épidémie ;

- révision des contrats de travaux et adaptation des calendriers de paiement avec possibilité d’avances forfaitaires ;

- diminution des retenues de garantie en fonction du montant des chantiers (0 % pour un montant inférieur à 100 euros, 2 % au-delà) ;

- prise en charge significative des surcoûts engendrés par la mise en œuvre des mesures de protection sanitaire.

Baisse de lactivité de 80 % dans la rénovation et gel des carnets de commande (refus des clients), qui touche principalement artisans et indépendants et suscite des problèmes de trésorerie.

Sauf interventions d’urgence (plomberie, électricité)

Mise en place du fonds de solidarité par l’État, qui concerne les TPE, indépendants, micro-entrepreneurs et professions libérales ; pour une aide défiscalisée d’abord plafonnée à 1 500 euros.

 

La direction de la sécurité sociale (DSS) valide la mobilisation de 1,5 milliard deuros à destination des indépendants, somme ponctionnée sur leur régime de retraite complémentaire et mis en œuvre par lorganisme de gestion, le CPSTI (10 avril). Laide sélève jusquà 1 250 euros par bénéficiaire et est cumulable au versement du fonds de solidarité.

Arrêt total des opérations de rénovation énergétique (mars). Difficulté de mettre en œuvre les mesures barrière et refus des clients de poursuivre les opérations.

Un arrêté de la direction générale de lénergie et du climat (DGEC) du 25 mars proroge jusquà 2021 les certificats déconomie dénergie (CEE) « Coup de pouce Chauffage », prolonge les CEE « Coup de pouce Isolation » et reporte de six mois le délai de dépôt des demandes daide au titre des travaux réalisés en 2019.

 

Faiblesse de la reprise à partir du 13 avril dans la rénovation énergétique. Asséchement des commandes (baisse du pouvoir d’achat des ménages, comportements de précaution face à l’intervention à domicile).

- Courrier commun au PM du 22 avril des acteurs du bâtiment et de l’énergie, demandant la mise en place d’un fonds d’urgence à destination des TPE-PME de la rénovation énergétique, abondé par les entreprises obligées en échange de CEE.

- Report de lentrée en vigueur de la nouvelle réglementation environnementale des bâtiments (RE 2020), qui entrera en vigueur à lété 2021 (communiqué de presse du MCT du 7 mai).

 

Arrêt des activités de promotion immobilière, dû principalement à l’arrêt des transactions et à l’impossibilité de poursuivre les opérations de prospection et de commercialisation.

Le décret n° 2020-395 du 3 avril autorise, pendant la durée de létat durgence sanitaire et du mois tampon à suivre, la signature à distance des actes notariés. Ceci permet la conclusion à distance de VEFA, ce qui déroge temporairement à lexigence de présence physique pour les ventes dans le neuf (les ventes dans lancien pouvant déjà se faire à distance).

Architectes : difficultés de trésorerie dues à l’inadaptation des modalités de calcul des aides versées par le fonds de solidarité.

Le décret n° 2020-433 du 16 avril permet lannualisation du chiffre daffaires pris en compte dans le calcul de laide versée au titre du fonds de solidarité.

Certains architectes, diagnostiqueurs, ingénieurs-conseils, bureaux détude, géomètres-experts, notaires :

-difficultés techniques dans le passage au télétravail ;

-nécessité d’aller sur le terrain pour nourrir le travail de bureau.

Accompagnement local dans certains cas (chambres des métiers et de l’artisanat, chambres du commerce et de l’industrie).

ACTIVITÉS IMMOBILIÈRES

Professionnels de limmobilier : blocage de 100 000 transactions en cours (début avril), baisse des nouvelles transactions et des déménagements.

- Très mauvais accueil du courrier adressé le 1er avril par le ministre chargé de la ville et du logement et le secrétaire dÉtat chargé des transports aux professionnels du déménagement, demandant la réduction des activités.

- Le décret n° 2020-395 du 3 avril valide la signature à distance des actes notariés, permettant la reprise partielle des transactions immobilières.

- Instruments mis en œuvre par le secteur : plateformes d’estimation virtuelle, sollicitation des entreprises de la « proptech » (note du 13 avril).

 

Professionnels de limmobilier : insécurité juridique quant à la validité de leurs droits à exercer leur métier.

Lordonnance n° 2020-306 du 25 mars relative aux délais administratifs proroge les droits des détenteurs dune carte professionnelle qui viennent à échéance pendant la période durgence sanitaire.

 

Non-réélection des syndics de copropriété du fait de la suspension des AG de copropriété, dont une grande partie se déroule en général en juin (350 000 AG).

Larticle 22 de lordonnance n° 2020-304 du 25 mars prolonge les mandats des contrats de syndics échus entre le 12 mars et le 24 juin. Pour éviter lorganisation de centaines de milliers dAG la dernière semaine de juin, larticle 1er de lordonnance n° 2020-460 du 22 avril étend cette prorogation aux contrats échus avant le 24 juillet.

 

HÉBERGEMENT

Lhébergement durgence des sans-abri a constitué la priorité du ministère de la ville et du logement dans la mesure où il s’agit d’un public particulièrement vulnérable face à l’épidémie, faisant souvent partie des publics identifiés comme à risque, et pour lesquels le confinement peut avoir des effets très néfastes (baisse du nombre d’associations et de bénévoles mobilisés).

 

Carences signalées dans le dispositif :

- manque de personnels soignants et de matériel de protection dans les CHS ;

- pérennisation des séjours en CHS.

La direction interministérielle de l’hébergement et de l’accès au logement (DIHAL) a adopté rapidement une politique de mise à l’abri et de prise en charge (chiffres actualisés le 30 avril) :

- ouverture d’une enveloppe supplémentaire de 65 millions d’euros sur le programme 177 ;

- pérennisation de 14 000 chambres hivernales ;

- mise à disposition de 17 000 places supplémentaires, dont 11 397 places en hôtel, celles-ci étant pour partie fruit de réquisitions et pour partie d’un accord entre l’État et les grands groupes hôteliers.

La direction générale de la cohésion sociale (DGCS) a mis en œuvre également des mesures (chiffres actualisés le 30 avril) :

- 3 600 places ouvertes dans 97 centres d’hébergement d’urgence (CHS) dits « sites spécialisés » depuis le 16 mars ;

- distribution de « chèques services » de 7 euros, à 65 000 bénéficiaires pour la 1ère commande du 1er avril. La 2e commande, lancée le 19 avril, cible 90 000 bénéficiaires avec un doublement en IdF et outre-mer ;

- plan de soutien à l’aide alimentaire (39 millions d’euros), annoncé le   23 avril, dont 25M€ pour les associations et 14M€ de chèques services.

Les associations et notamment la FAP et le DAL constituent des maillons essentiels de la réussite de ces dispositifs.

 

Hébergement de migrants, notamment après la découverte d’un foyer de contamination dans les camps de Calais.

Déplacement par la préfecture des migrants vers des places d’hébergement et isolement des cas (mobilisation de 400 places d’hébergement).

Hébergement de personnels soignants des établissements hospitaliers, sociaux et médico-sociaux sollicités depuis le début de la crise sanitaire.

Le ministère de la ville et du logement a mené une action de coordination avec les acteurs publics et privés pour la mise à disposition de places d’hébergement, à travers l’initiative Appart’Solidaire, menée avec les opérateurs privés Airbnb et PAP (10 000 logements à disposition).

LOGEMENT

Baisse de revenus pour certaines catégories de la population, engendrant des difficultés à payer le loyer et les charges.

Les 5 fédérations agréées pour représenter les locataires au niveau national (AFOC, CGL, CLCV, CNL, CSF) rapportent une croissance des cas d’impayés dans les parcs social et libre.

Les fonds de solidarité logement (FSL) des départements dont la mission consiste à prendre en charge les situations de loyers impayés ne disposent pas des capacités financières suffisantes pour venir en aide à tous les demandeurs.

- La continuité des droits aux aides versées par les caisses d’allocations familiales au titre des APL est décidée le 20 mars. La CNAF met au point une stratégie visant à garantir le maintien des droits aux APL, en permettant aux CAF de décaler les échéances et suspensions des droits prévues dans les procédures habituelles en matière d’impayés locatifs, de contrôle et suivi des logements non-décents et des situations de surpeuplement. Les échéances potentiellement génératrices de suspension des droits aux aides au logement sont reportées pour trois mois.

- Larticle 1er de lordonnance n° 2020-331 du 25 mars organise le report de la fin de la trêve hivernale jusquau 31 mai.

Larticle 10 de loi prorogeant létat durgence sanitaire proroge à nouveau la trêve hivernale jusquau 10 juillet.

- La réforme de contemporanéisation du calcul du montant des APL prévue pour entrer en vigueur le 1er avril, qui pourrait affecter négativement les recettes de certains bénéficiaires APL, est reportée. La CNAF assure être prête pour mettre en œuvre la réforme au moment opportun.

- Les agences départementales pour l’information sur le logement (ADIL) sont mobilisées en renfort pour fournir de l’information aux demandeurs ; à l’échelle nationale l’Agence nationale pour l’information sur le logement (ANIL), la plateforme « SOS loyers impayés » et le numéro vert 0 805 160 075 sont également mobilisés.

- Création d’une aide exceptionnelle de 200 euros versée en juin à destination des bénéficiaires des APL de moins de 25 ans.

 

Les locataires du parc social peuvent être sujets à des vulnérabilités particulières en matière financière ou disolement.

Mesures des opérateurs :

- le groupe Action Logement met en place d’une cellule d’appui pour les impayés de loyer dans le logement social (par l’intermédiaire des entreprises sociales de l’habitat) et le logement intermédiaire (par l’association Foncière Logement et la filiale In’li). AL simplifie l’accès à la garantie Visale et prévoit une montée en charge de son dispositif soli’al.

- CDC Habitat met en œuvre une campagne d’accompagnement social des personnes âgées par des « appels bienveillants » (45 300 locataires)

-des bailleurs sociaux décident la suspension ou l’annulation des loyers

- charte dengagements commune signée le 5 mai entre les bailleurs sociaux et les associations de locataires agréées pour le soutien des locataires en situation de fragilité économique :

- prises de contact régulières des bailleurs sociaux avec leurs locataires en difficulté (engagement des bailleurs à mettre en œuvre systématiquement un dialogue avec les locataires en difficulté) ;

- étalement des charges par reports de paiement, versements partiels et échelonnement de la dette ;

- dispositifs de suivi commun bailleurs-associations sur les cas difficiles ;

- report ou étalement des régularisations débitrices dues lors de la période de régularisation qui s’ouvre en mai, en tenant compte des capacités financières des locataires (maintien des régularisations créditrices dans tous les cas) ;

- accompagnement par les bailleurs et les associations des locataires dans leurs démarches auprès des institutions (FSL, CCAS, etc.).

Difficultés financières pour les bailleurs sociaux qui mettent en œuvre des mesures de soutien financier vis-à-vis de leurs locataires.

La Banque des territoires met en œuvre des reports d’échéance à destination des établissements publics locaux et des bailleurs sociaux et met à leur disposition une plateforme d’intermédiation des prêts renforcée.

Étudiants ayant subi une perte de ressources du fait de lannulation de leur contrat ou dun stage.

Le Premier ministre annonce le 4 mai le versement d’une aide ponctuelle de 200 euros à destination des étudiants ayant subi une perte de revenus.

 

 


—  1  —

  RÉPUBLIQUE  FRANÇAISE

____________________________________ LIBERTÉ ÉGALITÉ – FRATERNITÉ

COMMISSION DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES

GT SUIVI DU SECTEUR LOGEMENT

 

 

Paris, le 18 mai 2020

 

 

Groupe de travail Logement :

 

M. Richard Lioger

 

Objet : Évolutions dans le bâtiment ; tableau de bord du secteur

1.   Le Gouvernement accompagne la reprise des travaux dans le logement

Le Gouvernement a entrepris un effort pour accompagner dans leur reprise les travaux à domicile, durement touchés pendant le confinement. Une lettre du Gouvernement aux particuliers a été adressée lundi 11 mai aux fédérations professionnelles du bâtiment. Ce courrier vise à informer les particuliers quant au guide des préconisations élaboré par lOrganisme de prévention professionnelle du bâtiment et des travaux publics (OPP-BTP) ([46]) et, ce faisant, les rassurer quant aux mesures de précaution sanitaire mises en œuvre dans le bâtiment, qui doivent permettre la poursuite de travaux ou la réalisation de nouveaux travaux à domicile sans mettre en péril les habitants. Les fédérations, qui estiment que 95 % des chantiers peuvent désormais se faire de manière sécurisée, ont accueilli favorablement cette initiative et espèrent quelle achèvera de rassurer leurs clients.

Les entreprises préconisent des actions de soutien pour inciter les particuliers à poursuivre leurs projets de rénovation. Les acteurs notent que les particuliers ont continué d’éprouver en avril des réticences à permettre la reprise des travaux chez eux, refusant dans 40 à 50 % des cas de recevoir des travailleurs à domicile. Ils continuent de craindre que la crise économique suscite des comportements de thésaurisation et la remise à plus tard des travaux de rénovation prévus. Ils recommandent à cet effet plusieurs mesures qui pourraient contribuer à renforcer la sécurisation des entreprises :

    une meilleure visibilité sur la cinquième période à venir de mise en œuvre des certificats d’économies d’énergie ;

    l’augmentation du budget du dispositif Ma Prime Rénov’ ainsi que son ouverture aux ménages des neuvième et dixième déciles de revenus ;

    la montée en charge du dispositif éco-PTZ par le doublement ou le triplement de la rémunération des banques lorsque les ménages demandeurs ont des revenus très modestes ;

    le fléchage de la déductibilité des charges locatives pour les bailleurs qui réalisent des travaux de rénovation à destination des travaux qui concourent à une baisse des charges du locataire.

Les acteurs notent globalement une reprise plus forte des travaux depuis la semaine du 4 mai, tendance qui pourrait sêtre renforcée depuis le 11 mai. Comme le rapporte la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment, sur le fondement de sa plus récente enquête de conjoncture, le taux de reprise des petits chantiers à domicile atteint d’ores et déjà plus de 50 %. Les professionnels tablent sur un taux d’ouverture des chantiers de 80 % en juin, avec un taux d’activité des chantiers ouverts de 80 %.

2.   Les tensions reprennent au sujet des délais et des surcoûts

Létat durgence sanitaire ayant été prolongé, de nouvelles questions se sont posées sur prorogation ou non des délais administratifs et contentieux. La loi n° 2020546 du 11 mai 2020 prorogeant létat durgence sanitaire a prorogé létat durgence sanitaire déclaré par larticle 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 durgence pour faire face à lépidémie de covid-19 jusquau 10 juillet 2020 inclus. Cette prorogation de létat durgence sanitaire aurait dû conduire, en vertu des dispositions en vigueur ([47]) à proroger, en dehors des différentes exceptions déjà prévues, les différents délais échus depuis le 12 mars jusquau 10 août (en incluant le « mois tampon » prévu dans de nombreuses dispositions après la fin de létat durgence sanitaire). Pour ce qui concerne, par exemple, les recours contentieux à lencontre des autorisations durbanisme publiées, les délais de recours auraient expiré le 10 octobre (maisons individuelles) ou le 10 novembre (autres constructions).

En conséquence, le Gouvernement a pris deux nouvelles ordonnances en matière de délais de façon à contribuer à une reprise rapide de la construction :

    lordonnance n° 2020-539 du 7 mai décorrèle les délais des procédures durbanisme de la fin de létat durgence sanitaire, de façon à permettre un redémarrage des délais au 24 mai, retenant la date initialement prévue ;

    lordonnance n° 2020-560 du 13 mai décorrèle les délais dexécution des contrats de la fin de létat durgence sanitaire, en conférant aux clauses contractuelles dont les effets avaient été suspendus, au nombres desquelles les pénalités de retard, une effectivité à partir du 24 mai ou du 23 juin.

Les professionnels du bâtiment craignent que la reprise des pénalités de retard ne contribue à la fragilisation des capacités financières des entreprises. La Fédération française du bâtiment et la Fédération nationale des travaux publics, qui ont accueilli favorablement la première ordonnance, ont réagi très négativement à la deuxième ([48]) . Elles considèrent en effet que la reprise des pénalités de retard dès avant la fin de l’état d’urgence sanitaire les met dans une position d’insécurité juridique, les exposant à la possibilité d’une « double peine » où les pénalités de retard s’ajouteraient aux surcoûts engendrés par la mise en œuvre des mesures de protection sanitaire.

Les litiges au sujet de la reprise des chantiers continuent également de ralentir la reprise des travaux dans les chantiers dampleur. Le médiateur des entreprises a rapporté que 10 à 15 % des demandes dont il est saisi proviennent du secteur du BTP, et que la majorité d’entre elles concernent la prise en charge des surcoûts occasionnés par la mise en œuvre des mesures de protection sanitaire et les pertes de productivité induites par cette modification des processus. Cette réalité correspond aux observations qui sont celles du groupe de travail depuis plusieurs semaines. Les entreprises du secteur continuent de demander une évolution réglementaire sur la prise en charge des surcoûts dans les marchés publics, mais le Gouvernement juge, à cette heure, que les différends doivent être résolus au niveau local, chantier par chantier.

3.   La ville de Paris prolonge la trêve hivernale dans le parc social

La mairie de Paris a annoncé le 15 mai lextension de la trêve hivernale dans le parc locatif social, à destination des ménages connaissant des difficultés à payer leur loyer. La trêve hivernale 2019-2020, prolongée par ordonnance du 31 mars jusqu’au 31 mai, puis par la loi jusqu’au 10 juillet, sera prolongée pour des locataires du parc social parisien jusqu’au 1er novembre 2020, qui est la date de début de la trêve hivernale 2020‑2021. Cette décision répond à la demande faite par les associations de représentants de locataires, la Fondation Abbé Pierre et l’association Droit au logement (voir note de la semaine dernière) de voir instituée une « année blanche » qui permettrait aux locataires de ne pas ressentir une trop forte pression dans une période marquée par une crise économique.

Le groupe de travail reconnaît quune nouvelle fois, après la charte dengagements signée le 5 mai par les représentants du mouvement HLM et les associations, les bailleurs sociaux ont su se montrer à lécoute et réactifs. L’office public de l’habitat Paris Habitat (125 000 logements) et les sociétés d’économie mixte Régie immobilière de la ville de Paris (60 000 logements) et Élogie-Siemp (28 000 logements) ont, semble-t-il, décidé cette mesure pour les locataires qui démontreront une baisse durable des revenus qui affecte durablement leur capacité de paiement du loyer. L’étalement et le report des échéances seront privilégiés dans la mesure du possible, et des annulations partielles seront envisagées en fonction des difficultés identifiées.


Difficultés identifiées

Dispositifs gouvernementaux et de la filière

BÂTIMENT

Trois semaines darrêt ferme des opérations de chantier entre le               17 mars et le 6 avril :

- impossibilité de mettre en œuvre systématiquement les mesures de distanciation sociale (vestiaires, réfectoires, usage partagé des outillages, engins et véhicules) ;

- coordination des entreprises dans les chantiers en coactivité (intervention simultanée ou successive, sur un même chantier, de travailleurs de différentes entreprises) ;

- difficulté d’intervenir en milieu habité.

 

Semaine du 6 avril : difficultés à reprendre les activités du fait de la pénurie de matériels de protection, notamment les masques.

Publication le 2 avril dun guide de préconisations de sécurité sanitaire pour le bâtiment par lorganisme professionnel de prévention du BTP (OPP-BTP), organisme paritaire chargé de la prévention des ATMP et de lamélioration des conditions de travail, en concertation avec les fédérations professionnelles et les administrations. Le guide est conçu pour permettre la reprise des opérations de chantier rapidement et dans de bonnes conditions de protection sanitaire. Il recommande, entre autres :

- la formalisation par le maître d’ouvrage d’une liste de conditions sanitaires applicables, en concertation avec le maître d’œuvre et le coordinateur SPS ;

- la limitation de la coactivité ;

- la limitation des déplacements de tout personnel non indispensable sur les chantiers et dans les ateliers (notamment les apprentis et stagiaires) ;

- le port du masque dans le cas du travail à moins d’un mètre ou dans les interventions chez personnes malades ou à risque

- l’affichage démultiplié des consignes sanitaires ;

- le marquage spatial pour le respect des distances ;

- la limitation de l’accès aux espaces collectifs, l’organisation d’ordres de passage (réfectoire, salles de pause, bases vie, bungalows de chantier) et l’organisation par roulement de l’usage des réfectoires ainsi que leur désinfection entre chaque tour de repas ;

- l’attribution au possible d’outillages individuels ; et sinon la désinfection entre chaque utilisation des surfaces de contact des engins et véhicules partagés ;

-la présentation biquotidienne de l’organisation des travaux ;

- la mise à disposition de lingettes désinfectantes et de solution hydroalcoolique dans les lieux fréquentés ;

-la formation des personnels aux règles d’hygiène et à l’utilisation des masques ;

- la mise à disposition, pour les interventions chez les particuliers malades ou à risque, d’un kit de fourniture d’intervention (combinaison jetable, surchaussures, gants neufs adaptés, masque, gel hydroalcoolique, lingettes désinfectantes, eau et savon, essuie-mains jetables, sac à déchets).

Le 10 avril, le guide a été adapté pour tenir compte des difficultés d’approvisionnement en masques IIR en permettant aux travailleurs de porter des masques de catégorie 1, parfois dits « alternatifs ».

Depuis le 13 avril, reprise échelonnée des chantiers. Des points de blocage freinant la reprise persistent :

- responsabilité de la chaîne d’acteurs dans l’arrêt et le redémarrage des chantiers eu égard aux pénalités, indemnités et responsabilités vis-à-vis des intervenants des chantiers ;

- prise en charge des surcoûts directement liés à la mise en œuvre des mesures sanitaires (10-20 % des coûts totaux) ;

- éventuelles difficultés d’ordre juridique (documents d’urbanisme, simplification et accélération des procédures) ;

- accompagnement financier aux entreprises fragilisées du secteur et en particulier le tissu de TPE/PME ;

- degré de confiance encore insuffisant de certains acteurs de la chaîne, notamment les particuliers.

La direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP) organise depuis le 20 avril des réunions de consultation avec les parties prenantes de la construction afin de fluidifier la reprise.

 

Le 25 avril, la Confédération de l’artisanat et des petites entreprises du bâtiment a remis ses préconisations au ministre de l’économie et des finances afin de faciliter la reprise des chantiers. Le 27 avril, la Fédération française du bâtiment et la Fédération nationale des travaux publics ont fait de même.

 

Le 28 avril, le Gouvernement charge Philippe Mahé, préfet, de « proposer des mesures d’accompagnement à la reprise des chantiers ».

 

 

Carences dans la continuité du service public :

- interruption de linstruction des autorisations durbanisme par les services des communes et intercommunalités ;

- interruption de lactivité des services déconcentrés de lÉtat dont la consultation est nécessaire ou obligatoire : centre des impôts locaux (services cadastraux), directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement (DREAL), architectes des bâtiments de France (ABF), services de l’archéologie préventive obligatoire (INRAP) ;

- indisponibilité des raccordeurs délégataires dune mission de service public dont le concours est nécessaire pour le raccordement du chantier et le bouclage des opérations (Veolia, Enedis, GRDF).

Lordonnance n° 2020-306 du 25 mars relative aux délais administratifs proroge les délais jusquà une période de trois mois après la fin de létat durgence sanitaire en organisant :

- la suspension des délais d’instruction des autorisations d’urbanisme (permis de construire, déclaration d’intention d’aliéner…) jusqu’à la fin d’une période égale à la durée de l’état d’urgence sanitaire supplémentée d’un mois dit « tampon » ;

- la suspension des délais de recours contre les autorisations d’urbanisme et leur rechargement au bout de même période.

 

Lordonnance est rectifiée le 15 avril pour répondre aux inquiétudes des professionnels et raccourcir les délais applicables :

- suppression, pour ce qui concerne l’instruction des dossiers, du « mois tampon » qui devait succéder à l’EUS ;

- suppression du rechargement des délais de recours, qui continueront à courir à compter de la fin de l’EUS pour la période qui restait à courir au 12 mars ;

- sécurisation des clauses contractuelles relatives aux pénalités de retard.

 

Certaines collectivités et intercommunalités (Poitiers, Nantes) ont mis en œuvre des procédures pour permettre la reprise de l’instruction.

Le ministre de la ville et du logement a enjoint les collectivités à reprendre dans la mesure du possible les activités d’instruction des dossiers.

 

Une troisième ordonnance « délais » n° 2020-539 a été publiée le jeudi            7 mai afin de décorréler la prorogation des délais en matière de délivrance des autorisations durbanisme et la fin de létat durgence sanitaire. Les ordonnances précédentes ont en effet lié la prorogation des délais à la fin de lEUS, car les délais sont décrits comme recommençant à courir à la fin de lEUS. LEUS ayant «été prolongé par la loi du 11 mai, lordonnance du 7 mai a retenu la 24 mai comme date de départ des délais.

 

Une quatrième ordonnance « délais » n° 2020-560 a été publiée le mercredi 13 mai afin de décorréler la prorogation des délais en matière de livraison des travaux, notamment les délais contractuels stipulant les pénalités de retard, et la fin de létat durgence sanitaire.

 

Baisse de lactivité sur longue durée anticipée : report ou annulation d’une partie des projets en cours de lancement, retard au redémarrage du fait des difficultés à négocier la répartition des surcoûts, baisse du pouvoir d’achat des entreprises, particuliers et collectivités commanditaires, incertitudes longues sur le cycle électoral local.

- Engagements des opérateurs en faveur de la construction :

- CDC Habitat sengage à commander en VEFA 40 000 logements neufs en sortie de crise dont 15 000 sociaux, 15 000 intermédiaires et 10 000 libres et « abordables » contractualisés, en zone tendue (A, Abis, B1) et en zone Action Cœur de ville (appel à projets du 25 mars).

-In’li (filiale intermédiaire du groupe Action Logement) s’engage à commander 10 000 logements intermédiaires en VEFA.

- Engagements du groupe Action Logement pour le soutien des TPE-PME fournisseurs à la relance :

- traitement dématérialisé et rapide des factures (moins de 20 jours) ;

- non-application des pénalités de retard découlant de l’épidémie ;

- révision des contrats de travaux et adaptation des calendriers de paiements avec possibilité d’avances forfaitaires ;

- diminution des retenus de garantie en fonction du montant des chantiers (0 % pour un montant inférieur à 100 euros, 2 % au-delà) ;

- prise en charge significative des surcoûts engendrés par la mise en œuvre des mesures de protection sanitaire.

Baisse de lactivité de 80 % dans la rénovation et gel des carnets de commande (refus des clients), qui touche principalement artisans et indépendants et suscite des problèmes de trésorerie.

Sauf interventions d’urgence (plomberie, électricité)

Mise en place du fonds de solidarité par l’État, qui concerne les TPE, indépendants, micro-entrepreneurs et professions libérales ; pour une aide défiscalisée d’abord plafonnée à 1 500 euros.

 

La direction de la sécurité sociale (DSS) valide la mobilisation de 1,5 milliard deuros à destination des indépendants, somme ponctionnée sur leur régime de retraite complémentaire et mis en œuvre par lorganisme de gestion, le CPSTI (10 avril). Laide sélève jusquà 1 250 euros par bénéficiaire et est cumulable au versement du fonds de solidarité.

Arrêt total des opérations de rénovation énergétique (mars). Difficulté de mettre en œuvre les mesures barrière et refus des clients de poursuivre les opérations.

Un arrêté de la direction générale de lénergie et du climat (DGEC) du             25 mars proroge jusquà 2021 les certificats déconomies dénergie (CEE) « Coup de pouce Chauffage », prolonge les CEE « Coup de pouce Isolation » et reporte de six mois le délai de dépôt des demandes daide au titre des travaux réalisés en 2019.

 

Faiblesse de la reprise à partir du 13 avril dans la rénovation énergétique. Asséchement des commandes (baisse du pouvoir d’achat des ménages, comportements de précaution face à l’intervention à domicile).

- Courrier commun au PM du 22 avril des acteurs du bâtiment et de l’énergie, demandant la mise en place d’un fonds d’urgence à destination des TPE-PME de la rénovation énergétique, abondé par les entreprises obligées en échange de CEE.

- Report de lentrée en vigueur de la nouvelle réglementation environnementale des bâtiments (RE 2020), qui entrera en vigueur à lété 2021 (communiqué de presse du MCT du 7 mai).

Arrêt des activités de promotion immobilière, dû principalement à l’arrêt des transactions et à l’impossibilité de poursuivre les opérations de prospection et de commercialisation.

Le décret n° 2020-395 du 3 avril autorise, pendant la durée de létat durgence sanitaire et du mois tampon à suivre, la signature à distance des actes notariés. Ceci permet la conclusion à distance de VEFA, ce qui déroge temporairement à lexigence de présence physique pour les ventes dans le neuf (les ventes dans lancien pouvant déjà se faire à distance).

Architectes : difficultés de trésorerie dues à l’inadaptation des modalités de calcul des aides versées par le fonds de solidarité.

Le décret n° 2020-433 du 16 avril permet lannualisation du chiffre daffaires pris en compte dans le calcul de laide versée au titre du fonds de solidarité.

Certains architectes, diagnostiqueurs, ingénieurs-conseils, bureaux détude, géomètres-experts, notaires :

-difficultés techniques et nécessité d’aller sur le terrain pour nourrir le travail de bureau ;

-non associés à l’élaboration du guide de l’OPP-BTP.

Accompagnement local dans certains cas (chambres des métiers et de l’artisanat, chambres du commerce et de l’industrie).

 

Publication, le 28 avril, du guide juridique et financier de préconisations pour une reprise sécurisée des chantiers du Conseil national de lordre des architectes, destiné principalement aux architectes et aux équipes de maîtrise dœuvre, mais pouvant servir aussi aux maîtres douvrage et aux coordonnateurs SPS.

ACTIVITÉS IMMOBILIÈRES

Professionnels de limmobilier : blocage de 100 000 transactions en cours (début avril), baisse des nouvelles transactions et des déménagements.

- Très mauvais accueil du courrier adressé le 1er avril par le ministre chargé de la ville et du logement et le secrétaire dÉtat chargé des transports aux professionnels du déménagement, demandant la réduction des activités.

- Le décret n° 2020-395 du 3 avril valide la signature à distance des actes notariés, permettant la reprise partielle des transactions immobilières.

- Instruments mis en œuvre par le secteur : plateformes d’estimation virtuelle, sollicitation des entreprises de la « proptech » (note du 13 avril).

Professionnels de limmobilier : insécurité juridique quant à la validité de leurs droits à exercer leur métier.

Lordonnance n° 2020-306 du 25 mars relative aux délais administratifs proroge les droits des détenteurs dune carte professionnelle qui viennent à échéance pendant la période durgence sanitaire.

Non-réélection des syndics de copropriété du fait de la suspension des AG de copropriété, dont une grande partie se déroule en général en juin (350 000 AG).

Larticle 22 de lordonnance n° 2020-304 du 25 mars prolonge les mandats des contrats de syndics échus entre le 12 mars et le 24 juin. Pour éviter lorganisation de centaines de milliers dAG la dernière semaine de juin, larticle 1er de lordonnance n° 2020-460 du 22 avril étend cette prorogation aux contrats échus avant le 24 juillet.

 

 

 

HÉBERGEMENT

Lhébergement durgence des sans-abri a constitué la priorité du ministère de la ville et du logement dans la mesure où il s’agit d’un public particulièrement vulnérable face à l’épidémie, faisant souvent partie des publics identifiés comme à risque, et pour lesquels le confinement peut avoir des effets très néfastes (baisse du nombre d’associations et de bénévoles mobilisés).

 

Carences signalées dans le dispositif :

- manque personnels soignants et de matériel de protection dans les CHS ;

- pérennisation des séjours en CHS.

La direction interministérielle de l’hébergement et de l’accès au logement (DIHAL) a adopté rapidement une politique de mise à l’abri et de prise en charge (chiffres actualisés le 30 avril) :

- ouverture d’une enveloppe supplémentaire de 65 millions d’euros sur le programme 177 ;

- pérennisation de 14 000 chambres hivernales ;

- mise à disposition de 17 7000 places supplémentaires, dont 11 397 places en hôtel, celles-ci étant pour partie fruit de réquisitions et pour partie d’un accord entre l’État et les grands groupes hôteliers.

La direction générale de la cohésion sociale (DGCS) a mis en œuvre également des mesures (chiffres actualisés le 30 avril) :

- 3 600 places ouvertes dans 97 centres d’hébergement d’urgence (CHS) dits « sites spécialisés » depuis le 16 mars ;

- distribution de « chèques services » de 7 euros, à 65 000 bénéficiaires pour la 1ère commande du 1er avril. La 2e commande, lancée le 19 avril, cible 90 000 bénéficiaires avec un doublement en IdF et outre-mer ;

- plan de soutien à l’aide alimentaire (39 millions d’euros), annoncé le 23 avril, dont 25M€ pour les associations et 14M€ de chèques services.

Les associations et notamment la FAP et le DAL constituent des maillons essentiels de la réussite de ces dispositifs.

Hébergement de migrants, après la découverte d’un foyer de contamination à Calais.

Déplacement par la préfecture des migrants vers des places d’hébergement et isolement des cas (mobilisation de 400 places d’hébergement).

Hébergement de personnels soignants des établissements hospitaliers, sociaux et médico-sociaux sollicités depuis le début de la crise sanitaire.

Le ministère de la ville et du logement a mené une action de coordination avec les acteurs publics et privés pour la mise à disposition de places d’hébergement, à travers l’initiative Appart’Solidaire, menée avec les opérateurs privés Airbnb et PAP (10 000 logements à disposition).

 

LOGEMENT

Baisse de revenus pour certaines catégories de la population, engendrant des difficultés à payer le loyer et les charges.

Les 5 fédérations agréées pour représenter les locataires au niveau national (AFOC, CGL, CLCV, CNL, CSF) rapportent une croissance des cas d’impayé dans les parcs social et libre.

Les fonds de solidarité logement (FSL) des départements dont la mission consiste à prendre en charge les situations de loyers impayés ne disposent pas des capacités financières suffisantes pour venir en aide à tous les demandeurs.

- La continuité des droits aux aides versées par les caisses d’allocations familiales au titre des APL est décidée le 20 mars. La CNAF met au point une stratégie visant à garantir le maintien des droits aux APL, en permettant aux CAF de décaler les échéances et suspensions des droits prévues dans les procédures habituelles en matière d’impayés locatifs, de contrôle et suivi des logements non-décents et des situations de surpeuplement. Les échéances potentiellement génératrices de suspension des droits aux aides au logement sont reportées pour trois mois.

- Larticle 1er de lordonnance n° 2020-331 du 25 mars organise le report de la fin de la trêve hivernale jusquau 31 mai. Larticle 10 de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant létat durgence sanitaire et complétant ses dispositions reporte la fin de la trêve hivernale au 10 juillet.  

- La réforme de contemporanéisation du calcul du montant des APL prévue pour entrer en vigueur le 1er avril, qui pourrait affecter négativement les recettes de certains bénéficiaires APL, est reportée. La CNAF assure être prête pour mettre en œuvre la réforme au moment opportun.

- Les agences départementales pour l’information sur le logement (ADIL) sont mobilisées en renfort pour fournir de l’information aux demandeurs ; à l’échelle nationale l’Agence nationale pour l’information sur le logement (ANIL), la plateforme « SOS loyers impayés » et le numéro vert 0 805 160 075 sont également mobilisés.

- Création d’une aide exceptionnelle de 200 euros versée en juin à destination des bénéficiaires des APL de moins de 25 ans.

Les locataires du parc social peuvent être sujets à des vulnérabilités particulières en matière financière ou disolement.

 

Mesures des opérateurs :

- le groupe Action Logement met en place une cellule d’appui pour les impayés de loyer dans le logement social (par l’intermédiaire des entreprises sociales de l’habitat) et le logement intermédiaire (par l’association Foncière Logement et la filiale In’li). AL simplifie l’accès à la garantie Visale et prévoit une montée en charge de son dispositif soli’al.

- CDC Habitat met en œuvre une campagne d’accompagnement social des personnes âgées par des « appels bienveillants » (45 300 locataires)

-  certains bailleurs sociaux décident la suspension des loyers

-charte dengagements commune signée le 5 mai entre les bailleurs sociaux et les associations de locataires agréées pour le soutien des locataires en situation de fragilité économique :

-prises de contact régulières des bailleurs sociaux avec leurs locataires en difficulté (engagement des bailleurs à mettre en œuvre systématiquement un dialogue avec les locataires en difficulté) ;

- étalement des charges par reports de paiement, versements partiels et échelonnement de la dette ;

- dispositifs de suivi commun bailleurs-associations sur les cas difficiles ;

- report ou étalement des régularisations débitrices dues lors de la période de régularisation qui s’ouvre en mai, en tenant compte des capacités financières des locataires (maintien des régularisations créditrices dans tous les cas) ;

- accompagnement par les bailleurs et les associations des locataires dans leurs démarches auprès des institutions (FSL, CCAS, etc.).

- annonce le 15 mai d’une prolongation de la trêve hivernale jusqu’à fin octobre par les bailleurs sociaux parisiens.

Difficultés financières pour les bailleurs sociaux qui mettent en œuvre des mesures de soutien financier vis-à-vis de leurs locataires.

La Banque des territoires met en œuvre des reports d’échéance à destination des établissements publics locaux et des bailleurs sociaux et met à leur disposition une plateforme d’intermédiation des prêts renforcée.

Étudiants ayant subi une perte de ressources du fait de lannulation de leur contrat ou dun stage. 

Le Premier ministre annonce le 4 mai le versement d’une aide ponctuelle de 200 euros à destination des étudiants ayant subi une perte de revenus.

 

 

 

 


([1]) Décret n° 2020-395 du 3 avril 2020 autorisant l’acte notarié à distance pendant la période d’urgence sanitaire

([2]) Décret n° 2020-433 du 16 avril 2020 relatif au fonds de solidarité

([3]) Pierre Concialdi, « Confinement, récession et baisse des revenus : quel impact des charges fixes de logement sur les contraintes budgétaires des ménages ? », Éclairages, n° 16, IRES, 21 avril 2020

([4]) Le logement suroccupé est, dans la définition de l’INSEE, celui qui comporte un nombre de pièces insuffisant au regard de la taille du ménage.

([5]) Vincent Bernard et al., « Conditions de vie des ménages en période de confinement », Insee, 21 avril 2020

([6]) Arrêté de la direction générale de lénergie et du climat du 25 mars.

([7]) Nous sommes dans la deuxième moitié de la quatrième période triennale de mise en œuvre du dispositif.

([8]) Les acteurs ont exprimé leur demande dans un courrier au Premier ministre envoyé le mercredi 22 avril.

([9]) Article 84 de la loi n° 2009-323 du 25 mars de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion.

([10]) Recommandation n° R-HCSF-2019-1 du Haut Conseil de stabilité financière en date du 20 décembre 2019

([11]) Estimations de l’observatoire des prix de l’immobilier

([12]) Selon une enquête menée par la Fédération française du bâtiment du 26 au 30 mars

([13]) https://telechargement.preventionbtp.fr/file/GUIDE-DE-PRECONISATIONS-COVID-19-OPPBTP.pdf

([14]) Une autre ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 portant diverses mesures d’adaptation des règles de passation, de procédure ou d’exécution des contrats soumis au code de la commande publique et des contrats publics qui n’en relèvent pas pendant la crise sanitaire née de l’épidémie de covid-19 aménage déjà de manière significative les règles applicables aux contrats publics.

([15]) Lettre commune du ministre chargé de la ville et du logement et du secrétaire d’État chargé des transports aux professionnels du secteur du déménagement, en date du 1er avril 2020.

([16]) Chiffres Insee, février 2020 (Tableaux de l’économie française).

([17]) Cette catégorie (section F de la nomenclature d’activités françaises) comprend, outre la construction en bâtiment entier et les métiers spécialisés, les filières du génie civil et de la promotion immobilière.

([18]) L’échelle du solde d’opinion des entreprises interrogées va de - 200 à + 200, un nombre négatif signalant une baisse de l’activité.

([19]) Note d’information commune de la direction générale de la santé, de la direction générale des entreprises et de la direction générale du travail du 29 mars 2020, décrivant les masques devant être portés par les professionnels.

([20]) Communiqué de presse du 3 avril où la Fédération française du bâtiment invite l’État à « prendre ses responsabilités ».

([21]) Communiqué de presse commun de la CPME, du MEDEF et de C2P du 10 avril.

([22]) Ces chiffres proviennent de la Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM).

([23]) Estimation communiquée par le Conseil supérieur du notariat (CSN)

([24]) Cette catégorie (section F de la nomenclature d’activités françaises) comprend, outre la construction en bâtiment entier et les métiers spécialisés, les filières du génie civil et de la promotion immobilière.

([25]) Estimations publiées par la Fédération des promoteurs immobiliers dans son communiqué de presse du jeudi 23 avril

([26]) Lettre d’information de la CAPEB parue le mercredi 22 avril

([27]) L’Union des entreprises de proximité (U2P) rapporte quant à elle que 81 % des entreprises connaissent sur la période une baisse de chiffre d’affaires supérieure à 70 %, tandis que 18 % connaissent une baisse inférieure à 70 % et que 1 % seulement des entreprises connaissent un chiffre d’affaires stable ou en hausse. Chiffres issus d’une enquête réalisée auprès de 6 000 entreprises par l’institut Xerfi I+C pour l’U2P, publiée le mercredi 22 avril.

([28]) Voir aussi le point sectoriel sur l’architecture dans la note du 20 avril

([29]) Chiffres issus d’un sondage interne réalisé auprès de ses adhérents par l’Union nationale des géomètres-experts (UNGE), et relayés lors d’une audition avec le groupe de travail

([30]) Chiffres issus d’un sondage interne réalisé auprès de ses adhérents par la Fédération interprofessionnelle des diagnostiqueurs immobiliers (FIDI), et relayés lors d’une audition avec le groupe de travail

([31]) Arrêté de la direction générale de l’énergie et du climat du 25 mars

([32]) Nous sommes dans la deuxième moitié de la quatrième période triennale de mise en œuvre du dispositif.

([33]) Les acteurs expriment leur demande dans un courrier au Premier ministre envoyé le mercredi 22 avril.

([34]) Hypothèse et chiffres de la note de conjoncture trimestrielle « Notaires de France » publiée par le Conseil supérieur du notariat (CSN), parue le mercredi 22 avril.

([35]) Note de conjoncture de l’observatoire Crédit Logement/Institut CSA, publiée le jeudi 23 avril.

([36]) Recommandation n° R-HCSF-2019-1 du Haut Conseil de la stabilité financière en date du 20 décembre 2019

([37]) Vincent Bernard et al., « Conditions de vie des ménages en période de confinement », INSEE, 21 avril 2020

([38]) Le logement suroccupé est celui qui comporte un nombre de pièces insuffisant au regard de la taille du ménage.

([39]) Pierre Concialdi, « Confinement, récession et baisse des revenus : quel impact des charges fixes de logement sur les contraintes budgétaires des ménages ? », Éclairages, n° 16, IRES, 21 avril 2020

([40]) Notons que le ministre de l’économie et des finances et la ministre du travail, s’ils ont pu considérer que l’épidémie en tant que telle était constitutive d’un cas de force majeure, ne se sont pas prononcés à l’égard des sujétions qui naissent de la mise en œuvre par les entreprises des mesures de protection sanitaire.

([41]) Voir le premier alinéa de l’article L. 412-6 du code des procédures civiles d’exécution pour la suspension des procédures d’expulsion locative et le troisième alinéa de l’article L. 115-3 du code de l’action sociale et des familles pour l’interdiction de l’interruption par les fournisseurs de la fourniture d’électricité, de chauffage ou de gaz.

([42]) Ces fédérations agréées sont celles qui siègent à la Commission nationale de concertation : l’Association Force ouvrière Consommateurs (AFOC), la Confédération générale du logement (CGL), la Confédération de la consommation, du logement et du cadre de vie (CLCV), la Confédération nationale du logement (CNL) et la Confédération syndicale des familles (CSF).

([43]) Pierre Concialdi, « Confinement, récession et baisse des revenus : quel impact des charges fixes de logement sur les contraintes budgétaires des ménages ? », Éclairages, n° 16, IRES, 21 avril 2020

([44]) Selon l’estimation de la direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) en 2017

([45]) Estimations de la direction de l’animation de la recherche et des études statistiques (DARES) en 2016.

([46]) Pour un résumé des principales préconisations de ce guide, voir l’annexe à la note du groupe de travail du 4 mai. Il est à noter que le Conseil national de l’ordre des architectes a également adopté, le 28 avril, un guide juridique et financier de préconisations pour une reprise sécurisée des chantiers.

([47]) Par application des dispositions des ordonnances n° 2020-305 et 2020-306 du 25 mars 2020

([48]) Communiqué de presse de la Fédération française du bâtiment, publié le jeudi 14 mai.