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N° 3343

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 16 septembre 2020

RAPPORT D’INFORMATION

 FAIT 

 

AU NOM DE LA DÉLÉGATION AUX DROITS DES FEMMES
ET À L’ÉGALITÉ DES CHANCES ENTRE LES HOMMES ET LES FEMMES (1),

sur l’accès à l’interruption volontaire de grossesse (IVG),

 

PAR

Mme Marie-Noëlle BATTISTEL et Mme Cécile MUSCHOTTI,

Députées,

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(1) La composition de la Délégation figure au verso de la présente page.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

La Délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes est composée de : Mme Marie-Pierre Rixain, présidente ; Mme Marie‑Noëlle Battistel, Mme Valérie Boyer, Mme Fiona Lazaar, M. Gaël Le Bohec vice-présidents ; Mme Isabelle Florennes, Mme Sophie Panonacle, secrétaires ; Mme Emmanuelle Anthoine ; Mme Sophie Auconie ; M. Erwan Balanant ; M. Pierre Cabaré, Mme Céline Calvez ; Mme Annie Chapelier ; M. Guillaume Chiche ; Mme Bérangère Couillard ; Mme Virginie Duby-Muller ; M. Philippe Dunoyer ; Mme Laurence Gayte ; Mme Annie Genevard ; M. Guillaume Gouffier-Cha ; Mme Sonia Krimi ; M. Mustapha Laabid ; Mme Nicole Le Peih ; Mme Geneviève Levy ; M. Thomas Mesnier ; Mme Cécile Muschotti ; M. Mickaël Nogal ; Mme Josy Poueyto ; Mme Isabelle Rauch ; Mme Laëtitia Romeiro Dias ; Mme Bénédicte Taurine ; Mme Laurence Trastour‑Isnart ; M. Stéphane Viry.

 

 

 


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SOMMAIRE

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Pages

introduction

SynthÈse des propositions

I. CONStat : Des conditions d’accÈs À l’ivg inÉgales sur l’ensemble du territoire national

A. Le recours À l’IVG sur le territoire français

1. Des écarts régionaux et d’âges particulièrement marqués

2. Délais de recours et méthodes choisies

B. Le parcours d’accès à l’IVG

1. Le recours à l’IVG en France

2. Les différentes étapes du recours à une IVG

a. La première consultation d’information

b. L’entretien psycho-social préalable (facultatif pour les majeures)

c. La seconde consultation pour le recueil du consentement

d. La réalisation de l’IVG

e. La visite de contrôle

3. La gratuité, une condition essentielle pour un égal accès à un droit fondamental

4. La confidentialité, un enjeu essentiel pour garantir l’accès à l’IVG de toutes les femmes et dans toutes les situations

a. La confidentialité pour les majeures

b. La confidentialité pour les mineures

C. une offre de soins variable selon les territoires

2. Des inégalités territoriales qui pénalisent surtout les femmes les plus vulnérables

3. Des difficultés d’accès accrues en période de crise sanitaire

4. Une remise en cause récurrente et pluriforme du droit à l’IVG à travers le monde

a. Les législations sur l’IVG dans le monde : un droit loin d’être universel

b. La résurgence de mouvements politiques anti-avortement

5. La problématique de l’entrave à l’IVG

a. La création d’un délit d’entrave spécifique pour le droit à l’IVG

b. La persistance d’entraves sur Internet via la diffusion d’informations orientées et erronées

II. SOLUTIONs : améliorer les conditions concrètes d’accès à l’IVG et faire évoluer les mentalités

1. Une activité peu considérée avec un effectif de praticiens décroissant

a. Une activité peu valorisée dans la pratique médicale

b. Une activité insuffisamment rémunérée

c. Revaloriser l’activité médicale d’IVG

2. Créer un annuaire des praticiens réalisant les IVG

3. L’ouverture de la pratique de l’IVG chirurgicale aux sages-femmes

a. La place des sages-femmes dans la pratique de l’IVG en France

b. Le débat sur l’ouverture de l’IVG chirurgicale aux sages-femmes

B. Des Évolutions possibles de la pratique des professionnels de santÉ pour permettre un meilleur accÈs À l’ivg

1. La suppression de la double clause de conscience

a. Textes de référence prévoyant cette double clause

b. L’IVG ne doit plus être assimilée à un acte médical à part

c. Deux garanties essentielles : la pratique de l’IVG par des médecins volontaires et la réorientation des patientes si nécessaire

d. Les débats sur la suppression de la clause de conscience spécifique à l’IVG

e. Supprimer la clause de conscience spécifique tout en préservant les garanties pour les patientes comme pour les personnels de santé

2. L’allongement du délai d’accès à l’IVG

a. La problématique des femmes contraintes d’aller à l’étranger pour recourir à un avortement hors délai en France

b. Les débats quant à la possibilité d’allonger de deux semaines le délai légal d’IVG en France

c. Ne laisser aucune situation sans réponse : un objectif accessible à droit constant

3. Respecter le choix des femmes entre les trois méthodes d’IVG

C. Un besoin de dÉculpabilisation du recours À l’ivg et de sensibilisation aux enjeux de la contraception

1. Changer le regard de la société et des professionnels de santé sur l’IVG

2. Améliorer l’éducation à la contraception

3. Simplifier le recours à l’IVG par une meilleure information relative au dispositif

TRAVAUX DE LA dÉlÉgation

annexe 1 : Éléments de comparaison internationale

La situation en Europe et l’exemple de la Pologne

La situation aux États-Unis

Annexe 2 : personnes entendues par lA dÉlÉgation

annexe 3 : personnes entendues par les RAPPORTEUREs

 


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introduction

 

Près d’un demi-siècle après le vote de la loi Veil qui permit la légalisation de l’avortement le 17 janvier 1975, il peut paraître paradoxal de devoir s’interroger sur la question de l’accès à l’IVG en France et sur la pertinence pour la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes de l’Assemblée nationale de constituer une mission d’information relative à la question spécifique de l’accès à l’IVG sur l’ensemble du territoire français.

Dans les faits, ce droit chèrement et durement acquis demeure fragile et il faut demeurer extrêmement vigilant sur l’exercice de celui-ci si l’on veut garantir à l’ensemble des femmes présentes sur le territoire français un égal droit d’accès et une réelle liberté de choix quant à la méthode (médicamenteuse ou chirurgicale).

Le droit à l’IVG semble aller de soi depuis l’adoption de la loi Veil. Pourtant, ses opposants n’ont jamais désarmé et ne cessent même de se renforcer. Leurs offensives, réelles en France, s’avèrent encore plus violentes dans d’autres pays, y compris en Europe. L’accès à l’avortement s’y trouve ainsi entravé au nom de convictions religieuses ou idéologiques, de politiques natalistes, ou en raison d’un manque de moyens dont les plus vulnérables font les frais.

En France, la principale explication aux difficultés d’accès à l’IVG résulte essentiellement du désintérêt à l’égard d’un acte médical peu valorisé et considéré comme peu valorisant. La charge du maintien effectif de ce droit repose essentiellement sur une poignée de praticiens militants dont beaucoup se trouveront bientôt à la retraite. Ainsi, en 2018, 1 725 médecins (dont 56,6 % de gynécologues) et 248 sages-femmes ont réalisé des IVG en cabinet libéral, celles‑ci représentant 25 % du total des IVG pratiquées. Rapporté au nombre de praticiens installés en cabinet, cela représente 2,9 % des généralistes et gynécologues et 3,5 % des sages-femmes([1]). Ces ratios semblent très limités pour faire face à la demande, d’autant plus que ces taux varient très fortement d’une région à une autre.

Pourtant, le nombre d’IVG est relativement stable. Depuis 2001, il varie chaque année entre 225 000 et 230 000. Il s’élevait à 224 300 en 2018. Cela représente une grossesse sur quatre puisqu’on compte une IVG pour un peu plus de trois naissances([2]).

Il est donc impératif que les femmes puissent accéder à l’IVG dans de bonnes conditions, sans que cela se transforme en parcours du combattant car il s’agit d’un droit fondamental, reconnu par la loi, et essentiel pour la vie et la liberté des femmes qui ont acquis ainsi le droit au contrôle de leur corps. En France, une femme sur trois recourt à l’avortement au long de sa vie. Comme le soulignait Mme Sarah Durocher, coprésidente nationale du Planning familial, une femme qui désire avorter le fera quoiqu’il arrive. Il est donc de la responsabilité des pouvoirs publics que chacune puisse y accéder sans subir des discours culpabilisants, dans le cadre d’un parcours plus fluide que celui constaté actuellement, permettant de garantir sa santé et sa liberté de choix sans devoir partir à l’étranger.

Or, force est de constater que les infrastructures ne sont pas à la hauteur des besoins dans certains départements, ce qui engendre des inégalités territoriales qui sont difficilement acceptables. La Haute Autorité de Santé (HAS) préconise que toute patiente obtienne une consultation dans les cinq jours. Tel n’est malheureusement pas la réalité dans de trop nombreux endroits, où l’on constate des délais de prise en charge sensiblement plus longs. Le Docteur Brigitte Noale, médecin anesthésiste au centre hospitalier régional d’Orléans, témoigne : « au moindre grain de sable, un congé maladie, un départ à la retraite ou des économies à faire, l’accès à l’IVG se complique ».

Il est donc indispensable de remédier à cette situation qui ne cesse de se dégrader. Cela ne pourra se faire sans la mobilisation de l’ensemble des acteurs, tant institutionnels que médicaux. Cet objectif implique des changements en profondeur, aussi bien dans les mentalités que dans les pratiques, ainsi que dans les moyens déployés pour répondre aux besoins des femmes. En effet, l’accès à l’IVG ne saurait, dans un pays où celle-ci a été érigée en droit depuis plus de 45 ans, se traduire par un parcours semé d’embûches, dont les principales victimes seraient les plus vulnérables et les plus démunies. Comme le soulignait le Pr Yves Ville, Chef de service de la maternité de l’hôpital Necker et membre de l’Académie nationale de médecine, lors de son audition par la Délégation du 3 juillet 2020, l’IVG apparaît en effet bien souvent comme simplement « tolérée » en France mais pas toujours garantie.

Il est donc grand temps d’amener à une prise de conscience collective concernant les menaces qui pèsent sur l’exercice de ce droit reconnu par la loi et rappelé dans une résolution votée par l’Assemblée nationale le 26 novembre 2014 qui réaffirme le droit fondamental à l’interruption volontaire de grossesse en France et en Europe ([3]). Cela nécessite, les faits et les chiffres sont là pour en témoigner, d’adopter de toute urgence une politique volontariste dans ce domaine. À cet égard, il est inacceptable qu’un nombre important de femmes, évalué entre 3 000 et 5 000 ([4]) chaque année, soient contraintes de se rendre à l’étranger pour faire pratiquer une IVG car elles se trouvent en dépassement de délai en France. Comment la France pourrait-elle conserver une quelconque crédibilité en matière de diplomatie féministe internationale, sans garantir les droits de ses propres citoyennes ? Nous avons donc un devoir d’exemplarité en la matière qui appelle des mesures fortes, faisant l’objet des recommandations proposées par vos rapporteures.

 


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   SynthÈse des propositions

Recommandation n° 1 : mettre en place une exonération généralisée d’avance de frais pour les femmes souhaitant recourir à une IVG.

Recommandation n° 2 : clarifier la réglementation afin de garantir le droit à l’anonymat et à la confidentialité de l’IVG pour toutes les femmes en établissant des procédures spécifiques, que ce soit en établissement de santé ou en ville.

Recommandation n° 3 : aménager un cadre réglementaire clair, précisant le rôle et les prérogatives du directeur d’établissement scolaire lorsqu’une élève mineure souhaite avorter sans en informer ses parents. Cette disposition devrait faire l’objet d’une circulaire du ministère de l’Éducation nationale et de la jeunesse adressée à l’ensemble des chefs d’établissement de l’enseignement secondaire (collèges et lycées). Elle pourrait utilement figurer dans le Guide du chef d’établissement édicté en février 2009 par le ministère, dans la fiche 34 relative à la surveillance, au sein du paragraphe consacré à la gestion des absences.

Recommandation  4 : aménager un cadre réglementaire permettant aux infirmiers scolaires d’endosser le rôle de majeur accompagnant une mineure souhaitant avoir recours à une IVG dans le cadre de leur service et sans engager leur responsabilité personnelle.

Recommandation  5 : imposer à l'ensemble des hôpitaux publics d'assurer une prise en charge des IVG et de ne pas refuser les patientes dont la grossesse se situe en fin de délai légal, celles-ci constituant une urgence absolue, afin d'assurer une offre de soins équitable sur l'ensemble du territoire.

Recommandation n° 6 : pérenniser l’allongement du délai de recours à l’IVG médicamenteuse en ville de cinq à sept semaines de grossesse, conformément à ce qui est déjà autorisé pour l’IVG médicamenteuse réalisée en milieu hospitalier.

Recommandation n° 7 : lutter contre la désinformation sur internet en poursuivant les auteurs dans le cadre du délit d’entrave et développer les sites officiels délivrant une information fiable.

Recommandation n° 8 : dresser un bilan de l’application de la législation relative au délit d’entrave afin, le cas échéant, de rendre le dispositif plus efficient.

Recommandation n° 9 : mettre en place une couverture totale et indexée des frais encourus par les professionnels dans la pratique de l’IVG.

Recommandation n° 10 : établir un forfait de remboursement différencié pour les départements et régions d’outre-mer qui prenne en compte la différence des coûts constatée sur ces territoires.

Recommandation n° 11 : créer des postes de praticiens hospitaliers fléchés vers la pratique de l’IVG et faire obligation à chaque service de gynécologie‑obstétrique en hôpital public de proposer une offre d’IVG. À cet égard, les chefs de service de gynécologie-obstétrique ne doivent pas être autorisés à ne pas organiser cette offre, au motif qu’ils ne sont pas favorables à l’IVG.

Recommandation n° 12 : mettre en place un répertoire des professionnels pratiquant l’IVG sur le modèle du site ivglesadresses.org, géré et mis à jour par les agences régionales de santé (ARS). Chaque ARS aurait à sa charge la mise en place d’un tel réseau sur le territoire de sa compétence, selon des modalités laissées à sa discrétion ou déterminées par voie réglementaire.

Recommandation n° 13 : autoriser la pratique de l’IVG chirurgicale sous anesthésie locale par les sages-femmes, dans les établissements et les centres de santé habilités, sur la base du volontariat.

Recommandation n° 14 : demander aux centres d’orthogénie d’assurer les formations nécessaires (geste technique, écoute des patientes) permettant aux sages-femmes de réaliser des IVG chirurgicales sous anesthésie locale.

Recommandation n° 15 : prévoir dans tous les centres d’orthogénie une salle blanche permettant de réaliser des IVG chirurgicales sous anesthésie locale.

Recommandation n° 16 : mettre en œuvre un parcours d’IVG simplifié et accéléré pour les femmes souhaitant avoir recours à une IVG et ayant dépassé la 9ème semaine de grossesse, en regroupant en un seul rendez-vous préalable à l’intervention, tous les examens (échographie, prise de sang) et consultations (praticien réalisant l’IVG, anesthésiste).

Recommandation n° 17 : rédiger ainsi le premier alinéa de l’article L. 2212‑8 : « Un médecin ou une sage-femme qui refuse de pratiquer une interruption volontaire de grossesse doit informer, sans délai, l’intéressée de son refus et lui communiquer immédiatement le nom de praticiens ou de sages-femmes susceptibles de réaliser cette intervention selon les modalités prévues à l’article L. 22122 ».

Recommandation n° 18 : allonger le délai de l’IVG chirurgicale de deux semaines, pour le faire passer de douze à quatorze semaines de grossesse, afin d’éviter que les femmes confrontées à des difficultés en début de parcours (errance médicale, délais de rendez-vous trop longs…), se trouvent hors délai et dans l’impossibilité de faire pratiquer une IVG en France.

Recommandation n° 19 : améliorer la prise en compte des éléments psycho‑sociaux de nature à représenter un péril grave pour la femme enceinte souhaitant recourir à une interruption médicale de grossesse (IMG) et modifier la composition des collègues de médecins appelés à statuer sur ces demandes, afin d’y assurer la présence d’un médecin pratiquant des IVG dans un centre d’orthogénie, plus à même d’apprécier le risque psycho‑social qu’un médecin pédiatre.

Recommandation n° 20 : développer et pérenniser l’accès aux différentes techniques d’IVG sur l’ensemble du territoire, en intégrant dans la formation initiale et la formation continue des praticiens susceptibles de pratiquer une IVG (gynécologues-obstétriciens, médecins généralistes, sages-femmes), une formation pratique à ces techniques, y compris pour l’IMG qui concerne des grossesses plus avancées que celles rentrant dans le délai de l’IVG.

Recommandation n° 21 : améliorer l’information des femmes sur leur droit au choix de la méthode d’IVG, en recommandant notamment aux médecins de présenter systématiquement les différentes méthodes à chaque femme se présentant pour une IVG et de lui rappeler qu’elle a le choix de la méthode.

Recommandation n° 22 : conformément à l’article L. 312-16 du code de l’éducation, assurer le respect effectif de l’obligation d’éducation à la sexualité et à l’égalité dans le cursus scolaire, notamment dès l’école primaire, en réaffirmant les obligations incombant aux directeurs d’établissement, en s’assurant de la formation des personnels et de l’existence de moyens humains et financiers suffisants pour mettre en œuvre les trois séances annuelles.

Recommandation n° 23 : réserver dans chaque établissement scolaire un volume horaire du CP à la Terminale et une enveloppe budgétaire dédiés à l’organisation des trois séances annuelles d’éducation à la sexualité et à l’égalité.

Recommandation n° 24 : organiser une diffusion plus large des outils pédagogiques existants afin de mieux sensibiliser la communauté éducative et de la doter de supports opérationnels lui permettant d’animer les séances d’éducation à la sexualité et à l’égalité.

 

Recommandation n° 25 : promouvoir des campagnes nationales d’information sur l’IVG utilisant différents moyens de diffusion et s’inscrivant dans la durée.

 

 

 

 


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I.   CONStat : Des conditions d’accÈs À l’ivg inÉgales sur l’ensemble du territoire national

Les travaux menés par vos rapporteures ont permis de constater une grande disparité des conditions d’accès à l’IVG suivant l’endroit où résident les femmes. Le phénomène des déserts médicaux concerne également la pratique de l’IVG : les femmes originaires de zones rurales sont les premières touchées par ce déficit de praticiens ; celles résidant en zones urbaines ne sont pas non plus épargnées en raison de l’insuffisance générale des capacités d’accueil et des politiques variables menées par les établissements, et qui concerne les moyens tant humains que matériels consacrés à l’IVG.

A.   Le recours À l’IVG sur le territoire français

Chaque année en France, l’IVG est l’objet d’études statistiques menées par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES). Ces enquêtes permettent de connaître plus précisément la situation de l’IVG sur notre territoire, son utilisation, le profil des femmes y ayant recours ainsi que les écarts pouvant exister entre tranches d’âges ou entre zones géographiques. Vos rapporteures ont par ailleurs interrogé chacune des agences régionales de santé afin d’obtenir les informations les plus proches des réalités territoriales.

1.   Des écarts régionaux et d’âges particulièrement marqués

En 2018, 224 300 IVG ont été pratiquées légalement en France selon la DREES ([5]). 93 % de ces IVG l’ont été en métropole. Le nombre d’IVG réalisées est en hausse de 3 % par rapport à l’année 2017. Chaque année, une IVG est réalisée pour un peu plus de trois naissances.

En 2018, le taux de recours à l’IVG est de 15 IVG pour 1 000 femmes âgées de 15 à 49 ans en France métropolitaine et de 27,8 IVG pour 1 000 femmes dans les départements et régions d’outre-mer (DROM). Le taux de recours à l’IVG connaît une augmentation globale depuis 1995. En 2017, il s’élevait à 14,8 pour 1 000.

Le nombre d’IVG pratiquées varie grandement selon les âges. Elles sont plus fréquentes pour les femmes de 20 à 24 ans dont le taux de recours reste stable par rapport aux années précédentes. Il est en baisse pour les femmes de moins de 20 ans et en légère hausse pour les femmes plus âgées.

Les écarts sont également marqués entre les régions, les taux de recours pouvant varier du simple au double. Ainsi, on constate dans la région Pays de la Loire un taux de recours de 10,9 IVG pour 1 000 femmes contre 22 IVG en Provence-Alpes-Côte d’Azur. Les DROM, l’Île-de-France et le Sud-Est (Provence-Alpes-Côte d’Azur et Corse) sont les zones géographiques où les taux de recours à l’IVG sont les plus élevés. Les taux sont également plus élevés pour les femmes de moins de 18 ans dans les DROM : 12,4 à La Réunion, 19,3 à Mayotte et ils sont supérieurs à 14 pour les autres DROM. Pour les femmes mineures des régions métropolitaines, ces taux varient entre 2,8 et 8,1 IVG pour 1 000 femmes.

 

Nombre d’IVG et taux de recours en France en 2018

Source : Assemblée nationale, données fournies par les agences régionales de santé, 2018.


à titre de comparaison, le nombre d’IVG réalisées en Espagne en 2018 était de 95 917 et le taux de recours s’élevait à 11,12 IVG pour 1 000 femmes ([6]). Comme en France, ce taux varie selon les catégories d’âges : il est de 18,59 pour 1 000 pour la catégorie 20-24 ans et de 8,96 pour 1 000 pour les femmes âgées de moins de 19 ans. En Espagne comme en France, il existe de fortes disparités entre les régions avec des taux de recours qui varient de 6,5 IVG pour 1 000 femmes en Galice à 14 IVG pour 1 000 femmes en Catalogne. Aux Pays-Bas, où la législation sur l’avortement est l’une des plus libérales de l’Union européenne, le taux de recours des femmes âgées de 15 à 45 ans était de 8,8 pour 1 000 en 2018 ([7]). Un quart de ces IVG ont été réalisées par des femmes appartenant à la classe d’âge 25-30 ans.

2.   Délais de recours et méthodes choisies

En France, le délai entre la première demande des femmes auprès d’un professionnel libéral ou hospitalier et la réalisation effective d’une IVG est en moyenne de 7,4 jours. Il peut varier de 3 à 11 jours en moyenne selon les régions ([8]).

En 2018, plus de la moitié des IVG ont été réalisées avant la 7ème semaine de grossesse. Cela représente 75 % des IVG pratiquées en Auvergne Rhône‑Alpes, 73 % des IVG du Grand Est ou encore 59 % des IVG en Corse ([9]). Selon l’étude de la DREES, seules 5,3 % des IVG ont été réalisées entre 10 et 12 semaines de grossesse, soit les deux dernières semaines où l’IVG est légalement possible en France. Il existe cependant de fortes disparités entre les régions. En 2018, le nombre d’IVG réalisées entre 10 et 12 semaines de grossesse était plus élevé dans les DROM et plus particulièrement à Mayotte (15,9 % de l’ensemble des IVG). En métropole, la proportion d’IVG réalisées entre 10 et 12 semaines de grossesse varie de 2 % à 11,7 % selon les départements.

En 2018, un quart des IVG ont été réalisées hors d’une structure hospitalière, soit 55 800 IVG. 24 % des IVG de France métropolitaine l’ont été en cabinet libéral, dans les centres de santé ou les centres de planification et d’éducation familiale (CPEF). Ce taux s’élève à 38 % dans les DROM. Ces pourcentages correspondent à 50 000 IVG en métropole et 5 500 dans les DROM.


Le nombre d’IVG médicamenteuses est en hausse depuis 2001 et, à l’inverse, le recours à la voie instrumentale ne cesse de diminuer. Ainsi, en 2018, 69 % des IVG ont été réalisées par voie médicamenteuse. D’après les résultats obtenus par les ARS et transmis à vos rapporteures, en 2018, en moyenne, 86,4 % des IVG pratiquées avant la 5ème semaine de grossesse et 69,6 % des IVG pratiquées entre la 5ème et 7ème semaine de grossesse ont été effectuées par voie médicamenteuse ([10]). La loi n° 2001-588 du 4 juillet 2001 relative à l'IVG et à la contraception et la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé ont élargi le droit d’effectuer des IVG médicamenteuses aux cabinets de ville et aux sages-femmes ce qui a sans doute contribué à l’augmentation du recours à l’IVG médicamenteuse et à la baisse du nombre d’IVG instrumentales. Pour la DREES, « cette transformation n’a pas conduit à une forte diminution de la part des IVG réalisées dans les hôpitaux publics. En revanche, la part des IVG réalisées en établissements privés a beaucoup diminué au profit des IVG médicamenteuses réalisées en ville » ([11]). Dans ce travail d’analyse, il convient cependant de tenir compte d’inégalités territoriales dans le choix des techniques d’IVG proposées aux femmes.

Le recours à l’IVG médicamenteuse reste néanmoins contrasté à l’intérieur du territoire français. Dans certaines régions comme la Corse, l’Auvergne Rhône‑Alpes et l’Île-de-France, la part d’IVG médicamenteuses réalisées avant la 5ème semaine de grossesse et entre la 5ème et 7ème semaine de grossesse est particulièrement faible au regard des autres régions de France. Dans les DROM, la proportion d’IVG médicamenteuses réalisées avant la 7ème semaine de grossesse est élevée (entre 86 % et 99 %).

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Description générée automatiquement

À titre de comparaison, vos rapporteures tiennent à rappeler les chiffres des IVG en Espagne et aux Pays-Bas, où elles se sont rendues dans le cadre du présent rapport. En Espagne, la majorité des IVG se pratique dans des centres privés (86,05 %) et 70,51 % des IVG se font avant la 8ème semaine de grossesse ([12]). Les IVG sont majoritairement réalisées par voie chirurgicale (environ les deux‑tiers), mais la méthode médicamenteuse connaît un récent développement, notamment aux Baléares et en Catalogne. Aux Pays-Bas, où l’IVG est autorisée jusqu’à 22 semaines de grossesse (soit 24 semaines d’aménorrhée), 66 % des IVG ont été réalisées avant la 8ème semaine contre 0,5 % à la 21ème semaine ([13]). En 2018, aux Pays-Bas, 26,3 % des IVG ont été effectuées par traitement médicamenteux, 8,6 % par voie instrumentale et 65 % par une combinaison des méthodes instrumentale et médicamenteuse. La méthode utilisée varie entre hôpitaux et cliniques. Dans les hôpitaux, la méthode médicamenteuse a été privilégiée dans 80 % des cas ; dans les cliniques, la voie instrumentale, combinée ou non à la prise d’un traitement médicamenteux, a été utilisée dans 79 % des cas ([14]).

B.   Le parcours d’accès à l’IVG

L’interruption volontaire de grossesse ne se résume pas au rendez-vous pour pratiquer l’avortement en lui-même ; elle s’intègre en réalité dans un parcours de prise en charge comprenant plusieurs rendez-vous et une possibilité de suivi psycho-social. Ce parcours est essentiel pour permettre aux femmes d’être prises en charge dans de bonnes conditions et de bénéficier de toutes informations utiles et nécessaires.

1.   Le recours à l’IVG en France

L’interruption volontaire de grossesse fait partie des exceptions au parcours de soins coordonné, c’est-à-dire qu’il est possible pour la patiente de consulter un médecin autre que son médecin traitant. L’IVG peut être réalisée par trois types de praticiens : les gynécologues, les médecins généralistes et les sages‑femmes. Seuls les gynécologues et médecins généralistes peuvent réaliser des IVG chirurgicales ([15]). Depuis 2016, la loi autorise les sages-femmes à pratiquer des IVG médicamenteuses ([16]).

Les différentes méthodes d’IVG

Deux méthodes d’interruption volontaire de grossesse existent en France : l’IVG médicamenteuse et l’IVG chirurgicale – ou instrumentale.

La femme est libre de choisir la méthode de son IVG ; ce principe est clairement affirmé par le code de la santé publique : « toute personne a le droit d'être informée sur les méthodes abortives et d'en choisir une librement » (1). Suivant les recommandations de la Haute Autorité de Santé, l’IVG médicamenteuse ne peut être pratiquée que jusqu’à 5 semaines de grossesse en ville (7 semaines d’aménorrhée) ([17]) et jusqu’à 7 semaines de grossesse en établissement de santé (9 semaines d’aménorrhée). L’IVG chirurgicale peut être pratiquée jusqu’au délai légal de 12 semaines de grossesse, soit 12 semaines de grossesse (14 semaines d’aménorrhée). ([18])

L’IVG médicamenteuse consiste en une prise de comprimés par voie orale, au cours d’une consultation avec un médecin ou une sage-femme de mifépristone, suivie, entre 36 et 48 heures plus tard, d’une prise par voie orale à domicile de misoprostol. La deuxième prise déclenche l’interruption de la grossesse. Dans 60 % des cas, l’avortement se produit dans les 4 heures suivant la prise du misoprostol. Dans 40 % des cas, l’avortement a lieu dans les 24 à 72 heures suivant la prise du misoprostol. La méthode médicamenteuse est efficace dans 95 à 98 % des cas.

L’IVG chirurgicale ne peut être pratiquée que par un médecin et uniquement en établissement de santé ou en centre de santé. Elle peut avoir lieu sous anesthésie générale ou locale. Comme pour le choix de la méthode d’IVG, le principe est celui du choix par la femme de sa méthode d’anesthésie. L’IVG chirurgicale consiste en une aspiration de l’œuf ; pour cela le col de l’utérus est dilaté, afin de permettre au médecin d’introduire une canule reliée à un dispositif aspirant. L’intervention dure une dizaine de minutes et se déroule dans un bloc opératoire.

(1)     Article L. 22121 du code de la santé publique.

Médecins généralistes et sages-femmes doivent suivre une formation complémentaire s’ils souhaitent exercer une activité d’IVG ([19]).

Si un praticien souhaite exercer une activité d’IVG médicamenteuse hors établissement de santé, il est dans l’obligation d’établir une convention avec un établissement de santé ([20]), de façon à ce que les éventuelles complications puissent y être prises en charge rapidement. Le médecin ou la sage-femme remettent à la patiente les coordonnées de cet établissement de santé, ainsi qu’une fiche de liaison, définie conjointement avec l'établissement de santé signataire de la convention, contenant les éléments utiles de son dossier médical ([21]).

2.   Les différentes étapes du recours à une IVG

a.   La première consultation d’information

Première étape, cette consultation permet de formuler une demande d’IVG auprès d’un praticien, en exercice libéral ou au sein d’un établissement de santé, ou bien auprès d’un centre de planification, ou encore d’une association spécialisée, notamment les plannings familiaux. La patiente se voit normalement remettre un « dossier-guide de l’IVG » ([22]) et bénéficie d’une information complète : lieux et modalités de réalisation d’une IVG, droit à choisir sa méthode d’IVG, risques éventuels et effets secondaires possibles ([23]). Le praticien doit également proposer à la patiente, lors de cette consultation d’information, la réalisation d’un entretien psycho-social. Ce dernier est facultatif pour les majeures mais obligatoire pour les mineures ([24]).

Lors de cette consultation, l’âge gestationnel de la grossesse doit être déterminé par l’interrogation de la patiente ; des examens sanguins et une échographie sont éventuellement prescrits. Si le praticien ou le centre de planification ne dispose pas du matériel nécessaire pour réaliser l’échographie dès la première consultation, celle-ci doit être réalisée à l’occasion d’une seconde consultation fixée dans les meilleurs délais. L’échographie doit normalement pouvoir être réalisée sur place si la femme consulte en secteur hospitalier ou dans les plus brefs délais, soit sur place soit chez un confrère ou une consœur si la femme consulte en ville. À cet égard, il serait souhaitable si la première échographie ne peut pas être faite lors du premier rendez-vous médical, et uniquement dans ce cas, que la patiente puisse venir avec une échographie de datation faite en amont. D’une manière générale, il est essentiel de regrouper autant que possible les consultations et les examens, afin de réduire les déplacements et les durées de trajets qui constituent une contrainte importante, notamment dans les zones rurales et pour les femmes qui travaillent. De plus, le regroupement des formalités en un nombre réduit de consultations permet de limiter le risque que les femmes se trouvent en situation de dépassement du délai légal.

À l’issue de cette première consultation, le médecin ou la sage-femme délivre une attestation de consultation médicale qui permettra à la patiente de poursuivre son parcours d’IVG.

b.   L’entretien psycho-social préalable (facultatif pour les majeures)

Il s’agit d’une « consultation avec une personne ayant satisfait à une formation qualifiante en conseil conjugal ou toute autre personne qualifiée dans un établissement d'information, de consultation ou de conseil familial, un centre de planification ou d'éducation familiale, un service social ou un autre organisme agréé. [Elle] comporte un entretien particulier au cours duquel une assistance ou des conseils appropriés à la situation de l'intéressée lui sont apportés » ([25]).

L’entretien se déroule entre la première consultation d’information et la seconde consultation de recueil du consentement. Il « a lieu dans un établissement d’information, de consultation ou de conseil familial, un centre de planification ou d’éducation familiale, un service social ou un autre organisme agréé, avec une personne qualifiée pour mener ces entretiens, dite conseiller conjugal » ([26]).

c.   La seconde consultation pour le recueil du consentement

Au cours de la seconde consultation, la patiente remet l'attestation de première consultation, confirme par écrit sa demande d’avortement, donnant ainsi explicitement son consentement au médecin ou à la sage-femme. Elle choisit, en concertation avec le professionnel de santé, la méthode d’avortement ainsi que le lieu de l’intervention. À l’issue de cette consultation, le professionnel de santé lui remet une deuxième attestation de consultation.

Depuis 2016, il n’y a plus de délai de réflexion minimal entre la consultation d’information et le recueil du consentement ([27]). Cependant, si un entretien psycho-social préalable a été organisé, un délai de 48 heures doit être respecté entre l’entretien psycho-social préalable et le recueil du consentement ([28]).

d.   La réalisation de l’IVG

Une fois le recueil du consentement réalisé, il peut être procédé à l’IVG.

L’IVG médicamenteuse se fait en deux temps ; d’abord avec un professionnel de santé, soit en ville soit en établissement de santé, puis éventuellement à domicile ou, notamment si elle est réalisée après la 5ème semaine de grossesse, en établissement de santé. Si la seconde partie de l’IVG médicamenteuse se déroule à domicile, le médecin ou la sage-femme fournit également à la patiente les ordonnances éventuellement nécessaires, notamment pour obtenir si besoin un traitement analgésique. Il doit également s’assurer qu’elle est en mesure de se rendre dans l’établissement de santé avec lequel la convention a été passée dans un délai d’environ une heure ([29]). Il est crucial que la patiente bénéficie d’un accompagnement antalgique pour la prise en charge de la douleur. Cet aspect doit faire l’objet d’une vigilance renforcée.

Si une IVG chirurgicale avec anesthésie générale est choisie par la femme, une consultation préanesthésique obligatoire doit également être réalisée avant l’intervention. L’opération ne demande en général que quelques heures d’hospitalisation.

e.   La visite de contrôle

Une fois l’IVG réalisée, une visite de contrôle doit avoir lieu entre le 14ème et le 21ème jour suivant l’IVG, pour vérifier que l’interruption est bien effective et s’assurer de l’absence de complications ([30]). Si l’IVG était chirurgicale, c’est le médecin ayant réalisé l’opération qui mène la consultation. Si l’IVG était médicamenteuse, la consultation a lieu dans le cabinet ou bien dans l’établissement de santé où officie le praticien ayant prescrit les médicaments. Un contrôle clinique ou une échographie pelvienne est réalisé pour vérifier l’efficacité de l’IVG. Un point sur la contraception de la femme est réalisé lors de cette consultation ([31]) et un entretien psychosocial lui est de nouveau proposé ([32]).

3.   La gratuité, une condition essentielle pour un égal accès à un droit fondamental

Si le recours à l’IVG a été légalisé en 1975 par la loi Veil ([33]), il n’est remboursé que depuis 1982 ([34]). La loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 ([35]), mise en œuvre par un décret de mars 2013 ([36]), prévoit un remboursement intégral du recours à l’IVG. Auparavant, l’assurance maladie prenait en charge à 100 % les IVG pour les assurées mineures, et entre 70 % à 80 % pour les assurées majeures. Le parcours d’IVG, c’est-à-dire l’ensemble des actes associés à l’IVG (examens de biologie, échographies, consultation de recueil du consentement…), est quant à lui intégralement remboursé depuis le 1er avril 2016.

Cette gratuité complète du parcours IVG permet une meilleure prise en charge des patientes et garantit l’accès de toutes les femmes à l’avortement. Le prix d’une IVG dépend de la méthode utilisée (médicamenteuse ou instrumentale) et du lieu où celle-ci est réalisée (établissement public ou privé, cabinet médical). Les dépenses occasionnées et incluses dans le forfait de soins sont prises en charge en totalité par l’Assurance Maladie.

Le remboursement de l’IVG comprend donc aujourd’hui : les analyses de laboratoire préalables à l’IVG ; l’échographie préalable à l’IVG ; la consultation médicale de remise de consentement préalable à l’IVG, si celle-ci n’a pas été réalisée en ville ; les deux consultations médicales de prise des médicaments et les médicaments dans le cas d’une IVG médicamenteuse ; l’anesthésie locale ou générale et la consultation pré-anesthésique si besoin, l’acte d’IVG et la surveillance, l’accueil et l’hébergement dans le cas d’une IVG chirurgicale ; l’éventuelle injection d’anticorps anti-D pour les femmes dont le rhésus sanguin est Rh-négatif ; la consultation médicale de contrôle (au cours de laquelle le médecin peut choisir de réaliser un contrôle par échographie).

Les autres actes (première consultation préalable, analyses de biologie médicale, éventuelles échographies) ne sont pas inclus dans le forfait remboursé à 100 %. Ils sont néanmoins intégralement pris en charge. ([37])

Ce remboursement prend la forme de forfaits ([38]). Selon un rapport de 2009 de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS), « depuis le 1er janvier 2003, les dépenses afférentes à l’IVG ne relèvent plus du budget de l’État, mais de celui de l’Assurance Maladie et les prestations d’hospitalisation sont intégrées dans les objectifs de dépenses des établissements. Les pouvoirs publics ont décidé, néanmoins, de laisser l’activité d’IVG en dehors de la tarification à l’activité (TAA) dès la mise en œuvre de cette nouvelle modalité de tarification » ([39]).

Le coût d'une IVG chirurgicale est remboursé par l'Assurance Maladie à 100 % sur la base d'un tarif forfaitaire variable de 463,25 euros à 664,05 euros en fonction de l'établissement de santé (hôpital ou clinique), du type d'anesthésie (locale ou générale) et de la durée de l'hospitalisation. Le coût d'une IVG médicamenteuse, en établissement de santé (hôpital, clinique), est remboursé par l'Assurance Maladie à 100 % sur la base d'un tarif forfaitaire fixé à 282,91 euros. Le coût d'une IVG médicamenteuse de ville (cabinet médical, centre de santé, centre de planification et d'éducation familiale) est remboursé par l'Assurance Maladie à 100 %, avec des tarifs fixés par arrêté à chaque étape. Le médecin qui réalise l'ensemble d'une IVG facture chacune de ses étapes, pour une rémunération forfaitaire qui représente entre 187,92 euros et 193,16 euros.

Demeure toutefois une problématique d’avance de frais. Trois catégories de femmes en sont actuellement dispensées : les jeunes femmes mineures, les femmes bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaire (CMUC) et les femmes bénéficiaires de l’aide médicale de l’État (AME). Dans tous les autres cas, les frais de l’IVG doivent être avancés avant d’être remboursés. Dans le cas où la femme irait avorter à l’étranger, elle ne peut pas prétendre à un remboursement. Lors de leurs déplacements aux Pays-Bas et en Espagne, vos rapporteures ont pu rencontrer les cliniques accueillant des Françaises souhaitant recourir à un avortement au-delà des douze semaines et constaté le coût de celui-ci qui varie selon l’avancée de la grossesse ([40]).

Vos rapporteures considèrent que la nécessité pour une majorité de femmes de devoir avancer les frais de leur IVG constitue un frein à leur accès à ce droit, notamment pour les femmes en situation de précarité. Vos rapporteures proposent donc une dispense d’avance de frais pour toutes les femmes quelle que soit leur situation.

Recommandation n° 1 : mettre en place une exonération généralisée d’avance de frais pour les femmes souhaitant recourir à une IVG.

4.   La confidentialité, un enjeu essentiel pour garantir l’accès à l’IVG de toutes les femmes et dans toutes les situations

En sus de la gratuité, la confidentialité est un principe constitutif du droit à l’interruption volontaire de grossesse. Ce principe est particulièrement important dans certains environnements familiaux hostiles à l’IVG ou dans certaines situations personnelles précaires ou difficiles.

Actuellement, deux régimes de confidentialité s’appliquent selon que la patiente est majeure ou mineure.

a.   La confidentialité pour les majeures

Pour les majeures, la circulaire 04/569 du 26 novembre 2004 dispose que : « pour les femmes qui tiendraient absolument à préserver l'anonymat, le médecin aura la possibilité de l'orienter vers un établissement de santé, qui seul peut assurer une stricte confidentialité de l'IVG. À cet effet, il est souhaitable que le médecin signale cette situation à l’établissement de santé afin que ce dernier s’organise pour prendre en charge la femme concernée dans les meilleurs délais et, dans la mesure du possible, dans des délais compatibles avec la pratique des IVG par voie médicamenteuse » ([41]). À l’heure actuelle, seule la réalisation d’une IVG dans un établissement de santé, qui assure la dispense d’avance de frais, permet de garantir un véritable et complet anonymat de l’intervention. Toutefois, pour les IVG pratiquées en cabinet de ville, dans un centre de planification ou dans un centre de santé, la feuille de soins remplie par le médecin ou le centre, ainsi que le décompte de remboursement transmis par la caisse de sécurité sociale sont aménagés de façon à préserver la confidentialité de l’IVG vis-à-vis de l’entourage.

Mme Anne-Elizabeth Mazel, médecin généraliste et membre du conseil d’administration du Réseau entre la ville et l’hôpital pour l’orthogénie (REVHO), a soulevé deux problématiques liées à la confidentialité.

La première concerne les jeunes majeures dans l’accès à l’IVG. Selon elle, « Sur la question de la confidentialité, il y a un public dont on n’a pas du tout parlé, parce qu’on se focalise beaucoup sur les mineures, mais en fait ce n’est pas celles qui avortent le plus. Il y a également la problématique des jeunes majeures par rapport au secret médical, lorsque ces jeunes majeures veulent préserver la confidentialité concernant leur IVG […] On a beaucoup de jeunes femmes qui ont entre 18 et 24 ans, qui ne sont pas du tout protégées comme elles le sont quand elles sont mineures, qui n’ont pas révélé leur IVG auprès de leur entourage et pour qui la révélation d’une IVG peut être catastrophique, puisqu’il existe un grand tabou à ce sujet dans certains milieux » ([42]).

La seconde porte sur les difficultés techniques qui existent pour garantir la confidentialité : « comment est-ce qu’on garantit vraiment la confidentialité ? C’est très compliqué. En théorie, quand on avorte à l’hôpital, on peut en bénéficier mais malheureusement du fait de certaines contraintes hospitalières, notamment de logiciels inadaptés, […] on doit faire appel à d’autres méthodes. Ainsi, à l’AP-HP, le logiciel de gestion de patients ne permet pas de préserver la confidentialité et on doit recourir à des identités de substitution pour les patientes. Elles s’enregistrent sous des noms de substitution. Parce que sinon les factures sont envoyées au domicile ce qui peut conduire à des histoires dramatiques dans plusieurs hôpitaux de l’APHP avec des jeunes filles qui se sont fait mettre dehors de chez elles parce que la facture de l’IVG est arrivée à la maison. Donc maintenant on utilise des identités secrètes » ([43]).

Lors du déplacement de vos rapporteures à Romans-sur-Isère, l’équipe d’orthogénie du centre hospitalier a témoigné de cette procédure permettant un anonymat total de la femme recourant à un avortement. À travers un code spécifique et une identité de substitution, cela permet une prise en charge classique et bien organisée de ces femmes. Selon eux, les demandes d’anonymat sont toutefois relativement rares.

Vos rapporteures considèrent néanmoins qu’un accès libre à l’IVG passe nécessairement par la possibilité de garantir une confidentialité effective de l’opération si la femme en fait la demande. Les conditions actuelles de garantie de la confidentialité pour les femmes majeures ou mineures émancipées ne semblant pas pleinement satisfaisantes, elles estiment qu’il convient d’adopter une réglementation claire et spécifique établissant un droit à la confidentialité pour toutes les femmes et déterminant les procédures adaptées pour assurer l’anonymat et la confidentialité.

Recommandation n° 2 : clarifier la réglementation afin de garantir le droit à l’anonymat et à la confidentialité de l’IVG pour toutes les femmes en établissant des procédures spécifiques, que ce soit en établissement de santé ou en ville.

b.   La confidentialité pour les mineures

Dans le cas où la patiente est mineure et qu’elle souhaite conserver le secret, un principe d’anonymat et de confidentialité absolue s’applique.

La circulaire 49/2003 du 24 mars 2003 précise que « le principe de l’anonymat est imposé aux organismes de sécurité sociale (article D. 132-5 du Code de sécurité sociale). Les documents nécessaires au remboursement des actes et des frais de soins sont transmis : - soit par l’établissement de santé au service médical près la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (celui-ci les rend anonymes, les documents anonymes sont ensuite transmis au service administratif pour règlement), - soit anonymisés dès l’origine par le professionnel de santé. En tout état de cause, aucune identification de l’assurée ne doit être possible et aucun décompte ne doit être adressé à l’ouvrant droit » ([44]).

Ce dispositif est complété par la circulaire 04/569 du 26 novembre 2004 pour les IVG réalisées en ville, qui précise que « le principe légal de prise en charge anonyme et gratuite des IVG concernant les mineures pour lesquelles le consentement parental n’a pas pu être recueilli s’applique aux interruptions de grossesse pratiquées en ville. Les procédures à mettre en œuvre sont précisées par la circulaire CIR49/2003 du 24 mars 2003 émanant de la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés » ([45]).

Cependant, malgré l’affirmation du principe de confidentialité absolue de l’IVG pour les mineures, des difficultés pratiques de mise en œuvre existent. En particulier, ces mineures étant a priori scolarisées soit dans un collège, soit dans un lycée, le chef d’établissement est indirectement mis au courant de l’IVG en raison de l’absence de la mineure lors des heures de cours.

Le Syndicat des infirmiers scolaires (SNIES) indiquait lors de son audition que « le secret professionnel s’impose aux infirmiers scolaires. Néanmoins, ils ne peuvent pas excuser une absence d’élève qui accomplit des démarches préalables, ou subit une IVG (ce qui peut représenter 3 à 4 absences) car cela dépend de la responsabilité du chef d’établissement. L’infirmier ne peut qu’attester que la jeune fille est absente pour raison de santé dont elle est légalement autorisée à garder le secret » ([46]). Or, selon les auditions menées par vos Rapporteures, la principale raison de santé pour laquelle l’infirmier est autorisé à garder le secret est un recours à l’IVG dont l’intéressée souhaite préserver la confidentialité. Le chef d’établissement peut donc indirectement connaître de la situation de la jeune fille.

Une lettre d’information juridique (LIJ) de 2008 portant sur cette problématique a par ailleurs été adressée aux directeurs d’établissement. Cette dernière précise que « la volonté d’une élève mineure de recourir à une interruption volontaire de grossesse relève d’une démarche personnelle et privée. Aucune disposition du code de la santé publique ne prévoit, comme c’est le cas pour la contraception d’urgence, de modalités d’intervention de la part de l’établissement d’enseignement. L’infirmier scolaire ne peut jouer le rôle du majeur accompagnant qu’à titre privé » ([47]). Cette dernière recommande, dans le cas où l’élève a la possibilité de consulter en dehors du temps scolaire que le personnel de santé de l’établissement « se limite à la renseigner sur les dispositions légales prévues à l’article L. 2212-7 du code de la santé publique et sur les établissements ou organismes susceptibles de la recevoir pour la consultation préalable obligatoire prévue à l’article L. 2212-4 du même code » ([48]).

Si l’élève n’a pas la possibilité de consulter en dehors du temps scolaire, la LIJ rappelle d’abord qu’« il n’est pas possible de déduire des dispositions du code de l’éducation relatives aux compétences du chef d’établissement, et notamment de ses articles R. 421-8 à R. 421-11, une compétence du chef d’établissement pour accorder ou refuser une autorisation de sortie en vue de permettre à une élève mineure de se rendre dans une structure médico-sociale pour une consultation préalable à une interruption volontaire de grossesse et d’y subir les actes et soins qui lui sont liés. », avant de conclure que « dans ce cas précis, du fait du caractère médical du motif justifiant l’absence, cette autorisation devrait être octroyée de plein droit si les conditions légales sont remplies » ([49]). Quant à la question de la discrétion, la LIJ indique que « le chef de l’établissement paraît donc fondé à garder le silence sur une telle absence, dès lors que le personnel de santé l’aura dûment informé de ce que "l’élève est absente pour un motif médical dont elle est légalement autorisée à garder le secret", sans autre précision. Ainsi devraient être préservés à la fois le secret auquel est astreint le personnel de santé et le droit de l’élève à garder le secret sur sa démarche, vis-à-vis de ses parents notamment. Ce choix personnel sera utilement attesté par une déclaration écrite de l’élève, remise au personnel de santé. ».

Si le cadre réglementaire apparaît ainsi favorable à l’exercice par les élèves mineures de leur droit à recourir à une IVG dans le secret, il n’existe pas de réglementation générale et explicite sur le sujet et l’opposition d’un directeur d’établissement sur ces questions est de nature à mettre tant la mineure que l’infirmier scolaire dans une situation très délicate. Vos rapporteures considèrent qu’un tel flou juridique autour du rôle et du pouvoir d’appréciation du chef d’établissement permettrait certaines dérives, par exemple dans le cas où celui‑ci n’est pas favorable aux avortements. Il est nécessaire d’adopter un cadre réglementaire précisant explicitement qu’un chef d’établissement est en mesure de permettre à une élève de s’absenter pour une raison médicale gardée confidentielle par l’infirmier scolaire et ne doit alors pas en informer les parents.

Recommandation n° 3 : aménager un cadre réglementaire clair, précisant le rôle et les prérogatives du chef d’établissement scolaire lorsqu’une élève mineure souhaite avorter sans en informer ses parents. Cette disposition devrait faire l’objet d’une circulaire du ministère de l’Éducation nationale et de la jeunesse adressée à l’ensemble des chefs d’établissement de l’enseignement secondaire (collèges et lycées). Elle pourrait utilement figurer dans le Guide du chef d’établissement édicté en février 2009 par le ministère, dans la fiche 34 relative à la surveillance, au sein du paragraphe consacré à la gestion des absences.

Une dernière difficulté se pose dans l’exercice de son droit à une IVG confidentielle par l’élève mineure. L’article L. 2212-7 du code de la santé publique dispose que « si la mineure ne [souhaite pas obtenir le consentement du ou des titulaires de l’autorité parentale ou, le cas échéant, de son représentant légal] ou si le consentement n'est pas obtenu, l'interruption volontaire de grossesse ainsi que les actes médicaux et les soins qui lui sont liés peuvent être pratiqués à la demande de l'intéressée, présentée dans les conditions prévues au premier alinéa. Dans ce cas, la mineure se fait accompagner dans sa démarche par la personne majeure de son choix. ». Or, les personnels médicaux ne peuvent jouer le rôle de « personne majeure de son choix » que dans un stade strictement privé, engageant ainsi leur responsabilité personnelle.

S’agissant là encore d’une difficulté pratique, vos rapporteures considèrent qu’une solution doit y être apportée et qu’il conviendrait sans doute d’envisager dans quelle mesure les infirmiers scolaires pourraient endosser, sur la base du volontariat, ce rôle d’accompagnant d’une mineure souhaitant avoir recours à une IVG, sur demande de cette dernière. Une telle mission, en sus de leurs missions et actions actuelles, nécessiterait une disponibilité supplémentaire de ces personnels qui, selon le SNIES, sont aujourd’hui un peu moins de 8 000 ([50])  pour 11 300 établissements du second degré et 51 700 écoles. La mettre en place impliquerait donc de s’assurer du nombre suffisant d’infirmiers scolaires. Vos rapporteures estiment qu’ils jouent un rôle prépondérant dans l’accès des jeunes filles à l’IVG et, plus généralement, dans l’information des adolescents sur la contraception et la santé sexuelle.

Vos rapporteures sont donc favorables à l’adoption d’un cadre réglementaire prévoyant que l’autorisation d’absence de l’infirmier scolaire est de droit quand il s’agit d’accompagner une mineure souhaitant avoir recours à une IVG et que le régime de responsabilité s’appliquant dans ce cas est le régime de droit commun de la responsabilité des agents publics lors du service.

Recommandation n° 4 : aménager un cadre réglementaire permettant aux infirmiers scolaires d’endosser le rôle de majeur accompagnant une mineure souhaitant avoir recours à une IVG dans le cadre de son service et sans engager sa responsabilité personnelle.

C.   une offre de soins variable selon les territoires

Vos rapporteures ont constaté au cours de leurs auditions et de leurs déplacements en province que l’offre de soins en matière d’IVG était très contrastée suivant les territoires, tant en ce qui concerne le nombre de praticiens de santé que celui des établissements de santé pratiquant l’IGV. Ces inégalités territoriales ont des conséquences sur les conditions d’accès à l’IGV et sur les délais d’obtention des rendez-vous, ainsi que sur la liberté de choix de la méthode par les femmes.

1. Un nombre d’établissements et de professionnels de santé pratiquant l’IVG qui varie considérablement selon les territoires

Les dernières statistiques fournies par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES) sont révélatrices de ces disparités régionales. En effet, la DREES a recensé les IVG en 2018 selon la région de résidence de la femme, en distinguant dans chaque région, les IVG en établissement hospitalier, les forfaits médicamenteux remboursés en centres de santé et en centres de planification et d’éducation familiale (CPEF), ainsi que les forfaits remboursés en cabinet libéral. Ce travail est décrit dans le tableau ci-après.

 Il apparaît que le nombre d’IVG pratiquées est très variable suivant les régions et reflète généralement les différences de population. Ainsi, la région Auvergne Rhône-Alpes (17 333 IVG), se trouve en 2ème place, juste après l’Île‑de‑France (34 766 IVG), ce qui correspond à son classement en terme de population.

En revanche, la répartition entre IVG pratiquées en ville ou en établissement de santé est très différente suivant les régions. L’Île-de-France, l’Auvergne Rhône-Alpes et l’Occitanie affichent un nombre d’IVG pratiquées en cabinet libéral beaucoup plus important que les autres régions. En effet, la majorité des gynécologues libéraux exercent en Île-de-France ce qui permet un accès facilité à l’IVG en ville. Par ailleurs, les zones rurales voient le nombre de services d’orthogénie se réduire avec la fermeture progressive des petites maternités et n’ont d’autre choix de proximité que l’IVG médicamenteuse. La répartition du nombre d’IVG entre les différents praticiens et les établissements de santé résulte donc essentiellement de l’offre de soins locale et non, le plus souvent, des choix exprimés par les femmes qui, lorsqu’elles privilégient la proximité géographique par choix ou par nécessité, doivent se plier à l’offre locale.

2.   Des inégalités territoriales qui pénalisent surtout les femmes les plus vulnérables

Cette offre de soins contrastée suivant les territoires se traduit par un allongement des délais de rendez-vous et de prise en charge, notamment dans les établissements de santé et par des trajets importants pour les femmes qui ne peuvent pas être prises en charge au plus près de leur domicile. Cette situation est d’autant plus préjudiciable que l’IVG nécessite plusieurs rendez-vous, ce qui est particulièrement pénalisant pour les femmes ne disposant pas de moyen personnel de locomotion, dans des zones rurales isolées, et qui doivent en outre s’absenter de leur travail ou faire garder leurs enfants pour se rendre aux consultations obligatoires. Cela amène parfois les femmes à se trouver à la limite du délai autorisé, avec toute l’angoisse et le désarroi que peuvent engendrer de telles situations. Comme en témoigne le Docteur Laurence Wittke, du Planning familial d’Orléans, « l’hôpital de la ville fait au mieux, avec ses petits moyens. Mais lorsqu’on lui envoie une femme avec un délai limite, il a parfois du mal à entendre qu’il s’agit d’une urgence ». Il faut dans certains cas rediriger les patientes vers un autre département.

Les conditions d’accès à l’IVG varient donc considérablement selon les régions. Le Centre-Val de Loire, pourtant limitrophe de l’Île-de-France, souffre d’un manque de gynécologues et de généralistes. Au sein même du département du Loiret, les disparités sont fortes selon qu’on habite, par exemple, Pithiviers, où la maternité et le centre IVG ont fermé en 2016, ou bien Orléans. Ces inégalités territoriales débouchent inévitablement sur des inégalités sociales, les femmes les plus vulnérables (revenus modestes, mineures, …) et a fortiori celles qui se trouvent en situation de précarité (SDF, femmes migrantes, personnes handicapées, victimes de violences conjugales,...) rencontrant les plus grandes difficultés.

À cet égard, certains territoires semblent jouir d’une meilleure organisation que d’autres. Vos rapporteures ont tenu à échanger avec un large panel d’acteurs locaux (planning familial, centres de planification, hôpitaux et cliniques, sages‑femmes, représentants du milieu scolaire), lors de tables-rondes organisées le 21 octobre et les 25 et 29 novembre 2019, afin de mieux appréhender la réalité du terrain dans un territoire, l’Isère, caractérisé par une forte prévalence de zones rurales et des difficultés de locomotion pour se rendre dans les grandes agglomérations de la région, du fait du relief et du climat, surtout pendant l’hiver. Il est ressorti de ces échanges que la situation y est globalement satisfaisante, ce qui apporte la démonstration qu’il est possible de faire face à la demande d’IVG, y compris dans les zones rurales, lorsqu’une bonne organisation, reposant sur la collaboration des différents acteurs, est mise en place. On note toutefois que la coopération hors cadre de santé pourrait être améliorée, notamment avec l’Agence régionale de santé. Ainsi, la présence d’un réseau efficace de professionnels libéraux, d’établissements hospitaliers et d’associations apparaît primordiale en la matière et fait, bien souvent, la différence entre les territoires.

Néanmoins, la persistance de fortes inégalités territoriales n’en demeure pas moins problématique. L'IVG constituant un droit reconnu par la loi, sa prise en charge doit être assurée par l'ensemble des hôpitaux publics, lesquels sont financés par la collectivité. Il n'est plus concevable qu'en fonction des convictions du chef de service de tel ou tel hôpital, aucune offre d'orthogénie ne soit assurée ou que l'établissement public refuse d'assurer les IVG entre dix et douze semaines de grossesse, alors que le délai légal n'est pas dépassé. Il s'agit là d'une protection essentielle pour les femmes les plus vulnérables qui ne peuvent s'adresser à une clinique privée ou se rendre à l'étranger, pour des raisons d'information et de coût. L’offre de soins ne doit pas être à géométrie variable et chaque hôpital public doit être tenu d’assurer la prise en charge des IVG puisqu’il s’agit d’un droit reconnu à toutes les femmes par la loi. 

Recommandation n° 5 : imposer à l'ensemble des hôpitaux publics d'assurer une prise en charge des IVG et de ne pas refuser les patientes dont la grossesse se situe en fin de délai légal, celles-ci constituant une urgence absolue, afin d'assurer une offre de soins équitable sur l'ensemble du territoire

3.   Des difficultés d’accès accrues en période de crise sanitaire

Trois tables rondes en visioconférence ont été organisées par la Délégation le 28 mai, le 24 juin et le 3 juillet 2020, au cours desquelles ont été évoquées les conditions d’accès à l’IVG au cours de la période de confinement de mi-mars à mi-mai 2020 et sur les difficultés rencontrées par les femmes, ainsi que sur les enseignements à en tirer pour l’avenir.

Les représentantes du Planning familial ont indiqué que, dès le début du confinement, le Planning familial a dû fermer 70 points d’accueil. Il a maintenu le contact avec les femmes en utilisant des chats, les réseaux sociaux, ainsi que les lignes téléphoniques. Le numéro vert national a enregistré une recrudescence d’appels de 50 % dans les deux premières semaines du confinement, les demandes de renseignements portant essentiellement sur l’IVG et les tests de grossesse. Au total, le numéro vert a connu une augmentation de 34 % des appels sur toute la durée du confinement. Il ressortait de ces appels un sentiment de culpabilité des femmes qui s’excusaient de déranger pour une IVG et de mobiliser des soignants en période de pandémie. Elles exprimaient également la crainte de se déplacer et de se rendre en milieu hospitalier. Vos rapporteures tiennent à souligner l’importance du numéro vert mis en place par le Planning familial. En raison de sa bonne connaissance du terrain, le Planning familial peut en effet orienter efficacement les personnes appelantes vers des médecins ou structures disponibles et favoriser ainsi une prise en charge rapide. Les données issues des appels à ce numéro vert sont particulièrement intéressantes. Elles permettent par exemple d’identifier qu’un certain nombre de femmes peuvent avoir été mal orientées jusqu’à l’appel sur ce numéro.

Le Planning familial s’est montré inquiet du risque de désinformation pendant cette période, les femmes se renseignant beaucoup sur internet. Or, les moteurs de recherche font souvent remonter en tête de liste des sites anti‑avortement diffusant des informations fausses, en indiquant notamment qu’il n’était pas possible de faire pratiquer une IVG pendant le confinement.

La généralisation de la téléconsultation ainsi que celle de l’IVG médicamenteuse hors hôpital ont été considérées comme des avancées mais ne sont pas apparues suffisantes. Le Planning familial a exprimé la crainte que des femmes se trouvent en dépassement de délai à la suite du confinement. Il a également souligné que toutes les femmes n’ont pas les moyens de se rendre à l’étranger, une IVG y coûtant entre 600 et 3 000 euros, hors frais de trajet et d’hébergement. La seule alternative, pour les femmes au-delà de douze semaines de grossesse, était alors l’IMG c’est-à-dire un parcours lourd dans lequel, au final, ce n’est pas la femme qui décide mais les médecins.

Vos rapporteures ont confirmé que les déplacements effectués à l’étranger, dans le cadre de la mission d’information, ont permis d’établir que la réalisation des IVG à l’étranger était bien trop souvent le seul recours possible des femmes hors délai, lequel s’est trouvé considérablement compliqué, voire impossible, pendant la période de confinement du fait des restrictions relatives aux déplacements et des barrières aux frontières.

Le parcours d’IVG pendant le confinement s’est traduit par des difficultés supplémentaires : celles liées aux déplacements, les femmes habitant en zones non-urbaines étant contraintes de parcourir de grandes distances ; l’obligation d’effectuer trois consultations médicales avant de pouvoir accéder à l’IVG médicamenteuse ; les femmes ayant repris le travail qui se trouvent moins disponibles pour les rendez-vous ; les jeunes filles vivant chez leurs parents tenues de justifier leurs déplacements … Pour y remédier, le Planning familial a proposé que la prise en charge des femmes puisse être effectuée en une seule fois.

Des difficultés d’accès à l’IVG chirurgicale ont été constatées en territoire rural. Le président du planning familial de l’Aveyron, département où n’est pratiquée que l’IVG médicamenteuse, a par exemple indiqué que des patientes ont dû être réorientées vers d’autres départements. Des mineures se sont trouvées en grande difficulté. De même, les publics n’ayant pas de médecin traitant et ne sachant pas à qui s’adresser pour la contraception, se sont trouvés livrés à eux‑mêmes. On a observé également une retenue des femmes sur la question de la santé sexuelle qui n’était pas considérée comme une urgence, ce qui s’est traduit par un retard de prise en charge, notamment pour des tumeurs.

Afin que les femmes ne soient pas obligées de revenir plusieurs fois, la Maison des femmes à Saint-Denis a assuré une prise en charge globale en un seul rendez-vous : échographie, prise de sang comportant le test de grossesse et la détermination du groupe sanguin et remise des médicaments pour avorter à la patiente au cours du même rendez-vous.

Durant le confinement, les blocs opératoires étant réquisitionnés pour la réanimation, les IVG chirurgicales ont été généralement pratiquées sous anesthésie locale. Concernant les patientes préférant une anesthésie générale, les cliniques privées voisines ont été sollicitées et ont répondu favorablement. On a pu constater néanmoins quelques dépassements d’honoraires, de l’ordre de cinquante euros, pour l’anesthésie. Aujourd’hui, les blocs opératoires ont rouvert.

Le Pr Yves VILLE, Chef de service de la maternité de l’hôpital Necker et membre de l’Académie nationale de médecine, a estimé que la crise sanitaire a soulevé davantage de problèmes organisationnels que médicaux. Il a été notamment difficile de faire reconnaître l’IVG comme une urgence et de garantir son accès, les pouvoirs publics ne s’en étant pas toujours donnés réellement les moyens. La demande de prolongation de quinze jours de l’IVG chirurgicale pendant la période de crise sanitaire n’a pas été entendue, malgré les multiples amendements déposés par des parlementaires. Ainsi, l’IVG apparaît comme simplement « tolérée » en France mais pas toujours garantie. Or, le confinement a duré deux mois et pour une femme désirant interrompre une grossesse, deux mois de difficultés d’accès à l’IVG représentent naturellement une durée particulièrement longue.

La téléconsultation est apparue inégalement adaptée, de nombreuses patientes ayant besoin de rencontrer physiquement le médecin prenant en charge leur IVG.

À la suite de l’expérience menée pendant la période de confinement, de nombreux acteurs ont souhaité pérenniser le rallongement du délai de l’IVG médicamenteuse en ville. La méthode médicamenteuse étant actuellement la plus utilisée puisqu’elle représente les deux tiers des IVG annuelles, il est important de faciliter l’accès à celle-ci en permettant aux praticiens libéraux de la pratiquer dans les mêmes conditions de délai que les établissements hospitaliers, à savoir jusqu’à sept semaines de grossesse. Cette mesure serait d’autant plus pertinente qu’un quart seulement des IVG sont pratiquées hors établissements hospitaliers et que l’allongement du délai de l’IVG médicamenteuse en ville permettrait d’alléger la charge des établissements de santé souvent submergés de demandes. Or, cet afflux de patientes à gérer ralentit la prise en charge et ne laisse plus alors comme possibilité que l’IVG chirurgicale, laquelle peut être pratiquée jusqu’à douze semaines de grossesse.

Recommandation 6 : pérenniser l’allongement du délai de recours à l’IVG médicamenteuse en ville de cinq à sept semaines de grossesse, conformément à ce qui est déjà autorisé pour l’IVG médicamenteuse réalisée en milieu hospitalier.

4.   Une remise en cause récurrente et pluriforme du droit à l’IVG à travers le monde

Au-delà des difficultés concrètes d’accès à l’IVG qui peuvent exister, de manière plus ou moins aiguë sur le territoire français, il existe d’autres obstacles qui menacent ce droit fondamental. En effet, en France comme à travers le monde, le droit à l’avortement fait l’objet de remises en cause régulières, pouvant même se traduire par des législations plus restrictives. Il se voit parfois entravé par des actions militantes ou par des phénomènes de désinformation volontaire qui sont le fruit de groupes souhaitant limiter voire supprimer ce droit.

a.   Les législations sur l’IVG dans le monde : un droit loin d’être universel

Pour des raisons qui peuvent être morales, religieuses, sanitaires, éthiques ou juridiques, ce droit fait l’objet de législations plus ou moins restrictives. L’Organisation mondiale de la santé, en partenariat avec les Nations-Unies, a construit un site Internet permettant de comparer les législations en vigueur ([51]) de manière très détaillée. Le Centre pour les droits reproductifs, une organisation américaine à but non lucratif, divise les législations en cinq catégories, avec :

‒ les pays où l’IVG est totalement interdite, quelles que soient les circonstances (y compris donc les cas de viol ou de danger pour la santé de la femme). Cela concernerait 26 pays et 5 % des femmes en âge d’être enceintes, soit 90 millions de personnes ;

‒ les pays où l’IVG n’est autorisée que si la grossesse entraîne un risque létal pour la femme ; cela concernerait 22 % des femmes en âge d’être enceintes, soit 359 millions de personnes ;

‒ les pays où l’IVG n’est autorisée que pour des raisons sanitaires (y compris, dans certains cas, pour des raisons psychologiques) ; cela concernerait 39 pays et 14 % des femmes en âges d’être enceintes, soit 237 millions de personnes ;

‒ les pays où l’IVG est autorisée pour des raisons sanitaires, économiques et sociales ; cela concernerait 23 % des femmes en âge d’être enceintes, soit 386 millions de personnes ;

‒ les pays où l’IVG est autorisée sur simple demande de la femme, sans que celle-ci doive justifier de sa demande ; cela concernerait 67 pays et 36 % des femmes en âge d’être enceintes, soit 590 millions de personnes.

À titre d’illustration, l’annexe 1 du présent rapport présente l’état des législations en Europe et aux États-Unis.


b.   La résurgence de mouvements politiques anti-avortement

Le débat autour du droit à l’avortement connaît aujourd’hui un fort renouveau, nourrissant une forme de remise en cause de ce droit fondamental dans le monde avec une volonté, parfois clairement affichée, de certains groupes politisés, de restreindre, parfois drastiquement, l’accès à l’IVG. « L’avortement est une pratique qui fait souvent l’objet d’une désapprobation sociale ou morale. Même dans les pays où il a été légalisé de longue date, "le recours à l’avortement apparaît toujours comme une pratique soulevant de nombreuses questions d’ordre éthique, philosophique et scientifique et la légitimité d’y recourir semble encore problématique" (Bajos et Ferrand, 2011, p. 44). En effet, le recours à l’avortement est considéré dans certaines sociétés comme révélateur d’une sexualité qui s’écarte des normes en vigueur, par exemple une sexualité hors mariage. Il révèle les difficultés de prévention des grossesses, les femmes étant souvent considérées comme responsables de cet échec ou de l’absence de contraception (Bajos et al., 2002). Il permet le refus de la maternité pour les femmes. La question de l’avortement est de ce fait profondément liée à celle des rôles sexués et des inégalités de genre » ([52]). Entendue par vos rapporteures, la sociologue Nathalie Bajos, directrice de recherches à l’Inserm, a souligné que les normes sociales de la maternité ont beaucoup évolué et que la décision d’IVG est toujours quelque part le reflet des normes sociales. Chaque cas est singulier mais il reste une réaction de la femme par rapport à une norme sociale qui est l’affaire de tous.

Le débat politique sur le droit à l’IVG est marqué depuis plusieurs années par la montée en puissance de mouvements conservateurs anti-IVG ou « anti‑choix ». « Les mouvements anti-choix se caractérisent par leur opposition au droit à l’avortement. Ils mettent en exergue un "droit à la vie pour l’enfant à naître" et se désignent eux-mêmes sous l’appellation "pro-vie", en s'appropriant les terminologies utilisées par les organisations de promotion et de défense des droits humains » ([53]). Ce mouvement politique est d’ailleurs dénoncé dans un rapport de 2018 réalisé par le Forum parlementaire européen pour des droits sexuels et reproductifs (European Parliamentary Forum on Population and Development – EPF) portant notamment sur l’action de l’European Agenda, groupe d’influence conservateur dont le but est de « rétablir l’ordre naturel dans la société », ce qui passe notamment par l’interdiction de l’avortement mais également celle de la procréation médicalement assistée, de l’ouverture du mariage aux couples homosexuels ou encore du divorce ([54]). En militant à travers les pays occidentaux, il semblerait que ce groupe parvienne progressivement à influencer certains décideurs, voire certaines législations, et ainsi à peser pour une restriction progressive du droit à l’avortement.

Ces mouvements d’opposition à l’IVG sont également présents en France, organisant chaque année depuis le milieu des années 2000 des marches pour la vie réunissent ainsi de manière très visible les opposants à l’avortement ([55]).

Face à cette remise en cause d’un droit pourtant fondamental, l’Assemblée nationale, sous l’impulsion de la Délégation aux droits des femmes, a adopté en novembre 2014 une proposition de résolution visant à réaffirmer le droit à l’IVG cosignée par tous les présidents de groupes politiques. Adoptée le jour anniversaire de l’ouverture des débats parlementaires de la loi Veil, cette résolution vise à réaffirmer le droit fondamental à l’IVG en France et en Europe. Le droit de disposer de son corps et celui de prendre librement des décisions autonomes pour sa santé, sans crainte de discriminations, de violences, de coercitions, sont des droits fondamentaux. Ils impliquent en particulier l’accès aux services de santé, à une information de qualité, aux méthodes modernes de contraception et à un avortement sûr et légal.

Article unique de la résolution visant à réaffirmer le droit fondamental à l’IVG en France et en Europe, adoptée par l’Assemblée le 26 novembre 2014

« L’Assemblée nationale (…) réaffirme l’importance du droit fondamental à l’interruption volontaire de grossesse pour toutes les femmes, en France, en Europe et dans le monde ; rappelle que le droit universel des femmes à disposer librement de leur corps est une condition indispensable pour la construction de l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, et d’une société de progrès ; affirme le rôle majeur de la prévention, et de l’éducation à la sexualité, en direction des jeunes ; affirme la nécessité de garantir l’accès des femmes à une information de qualité, à une contraception adaptée, et à l’avortement sûr et légal ; souhaite que la France poursuive son engagement au niveau européen, comme international, en faveur d’un accès universel à la planification familiale ».

5.   La problématique de l’entrave à l’IVG

a.   La création d’un délit d’entrave spécifique pour le droit à l’IVG

La loi de 2014 pour l’égalité réelle a étendu le délit d’entrave à l’IVG aux actes préalables prévus par le code de la santé publique (consultations, etc.), afin d’y inclure le fait d’empêcher ou de tenter d’empêcher de s’informer sur l’avortement ou sur ces actes préalables ([56]) (et non plus seulement d’avoir recours à l’acte en lui-même).

En février 2017, le Parlement a adopté la proposition de loi n° 2017-347 relative à l’extension du délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse qui vise à sanctionner les auteurs de sites Internet qui, sous une apparente neutralité, fournissent en réalité des informations biaisées et idéologiquement orientées à propos de l’IVG, influençant ainsi le libre choix des personnes cherchant à s’informer sur ce sujet.

« [Cette] proposition de loi poursuit ce même objectif [que la loi de 2014] : étendre le délit d’entrave à l’IVG aux nouvelles pratiques trompeuses, aujourd’hui déployées sur internet, qui peuvent aller jusqu’à la pression psychologique et morale sur les femmes enceintes ou les personnels des établissements pratiquant l’IVG. Elle rappelle que le choix de recourir à l’avortement ne relève pas de l’expression d’une opinion personnelle, mais de l’exercice d’une liberté fondamentale qui doit être protégée et garantie en tant que telle » ([57]).

Cette proposition de loi visait notamment les sites anti‑IVG (voir infra) et prévoyait qu’« est puni de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende le fait d'empêcher ou de tenter d'empêcher de pratiquer ou de s'informer sur une interruption volontaire de grossesse ou les actes préalables prévus par les articles L. 22123 à L. 22128 par tout moyen, y compris par voie électronique ou en ligne, notamment par la diffusion ou la transmission d'allégations ou d'indications de nature à induire intentionnellement en erreur, dans un but dissuasif, sur les caractéristiques ou les conséquences médicales d'une interruption volontaire de grossesse :

 Soit en perturbant l'accès aux établissements mentionnés à l'article L. 22122, la libre circulation des personnes à l'intérieur de ces établissements ou les conditions de travail des personnels médicaux et non médicaux ;

 Soit en exerçant des pressions morales et psychologiques, des menaces ou tout acte d'intimidation à l'encontre des personnes cherchant à s'informer sur une interruption volontaire de grossesse, des personnels médicaux et non médicaux travaillant dans les établissements mentionnés au même article L. 22122, des femmes venues recourir à une interruption volontaire de grossesse ou de l'entourage de ces dernières » ([58]).

Dans sa décision n° 2017-747 DC du 16 mars 2017, le Conseil constitutionnel toutefois a émis une réserve d’interprétation sur ce texte en considérant que « la seule diffusion d'informations à destination d'un public indéterminé sur tout support, notamment sur un site de communication au public en ligne, ne saurait être regardée comme constitutive de pressions, menaces ou actes d'intimidation au sens des dispositions contestées, sauf à méconnaître la liberté d'expression et de communication. Ces dispositions ne peuvent donc permettre que la répression d'actes ayant pour but d'empêcher ou de tenter d'empêcher une ou plusieurs personnes déterminées de s'informer sur une interruption volontaire de grossesse ou d'y recourir. [Et que] sauf à méconnaître également la liberté d'expression et de communication, le délit d'entrave, lorsqu'il réprime des pressions morales et psychologiques, des menaces ou tout acte d'intimidation à l'encontre des personnes cherchant à s'informer sur une interruption volontaire de grossesse, ne saurait être constitué qu'à deux conditions : que soit sollicitée une information, et non une opinion ; que cette information porte sur les conditions dans lesquelles une interruption volontaire de grossesse est pratiquée ou sur ses conséquences et qu'elle soit donnée par une personne détenant ou prétendant détenir une compétence en la matière » ([59]).

Intégrant cette réserve d’interprétation, la loi n° 2017-347 relative à l'extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse a été promulguée le 20 mars 2017. S’il est nécessaire de progresser quant aux conditions de mise en œuvre de cette législation, vos rapporteures insistent sur l’importance du délit d’entrave. Lors de leurs déplacements en Espagne et aux Pays-Bas, elles ont d’ailleurs pu constater que l’entrave à l’IVG était encore une pratique bien réelle, avec par exemple des manifestations devant les cliniques spécialisées. Dans les deux cas, les responsables politiques qu’elles ont eu l’occasion de rencontrer se sont montrés extrêmement intéressés par le principe du délit d’entrave et par l’idée de le décliner dans leur propre législation.

b.   La persistance d’entraves sur Internet via la diffusion d’informations orientées et erronées

Les opposants à l’avortement trouvent avec Internet un champ d’action puissant, qui leur permet notamment de tenter d’influencer les jeunes générations ([60]) en diffusant des informations orientées, voire erronées afin de les décourager à avoir recours à l’avortement.

Le lancement d’un site gouvernemental officiel – www.ivg.gouv.fr –apportant une information fiable sur la nature et les conséquences d’une IVG sans chercher ni à la promouvoir, ni à la décourager, a permis de lutter contre ces fausses informations. Toutefois, l’action des anti-IVG sur Internet demeure importante. L’exemple emblématique de cette mouvance est le site « ivg.net », actif également sur les réseaux sociaux. Ce dernier fait partie des premiers résultats de recherche Internet sur le mot-clé « IVG ».

Mme Philippe-Sentis explique qu’elle et son mari ont « créé le Centre Billings France afin de faire la promotion de la régulation naturelle des naissances. Puis, il y a dix ans, [ils ont] voulu faire une action très concrète de dissuasion à l’avortement. Le site ivg.net est le moyen de rentrer en contact avec ces femmes effrayées par l’idée d’accueillir un enfant » ([61]). D’autres sites militent activement contre le recours à l’IVG et diffusent parfois de fausses informations, ou des informations tronquées ou orientées afin d’influencer le choix des femmes ([62]).

Ces sites diffusent ainsi un corpus d’idées fausses sur l’IVG pour dissuader les femmes d’avoir recours à un avortement. Parmi ces idées figure notamment le fait que recourir à l’IVG rendrait stérile ou causerait des séquelles psychologiques comme le « post-traumatic stress disorder ». Ils insistent également sur les aides que reçoivent les femmes ayant donné naissance à un enfant.

Enfin, le site « ivg.net » offre une ligne d’appel gratuite d’information à destination des femmes enceintes souhaitant éventuellement avoir recours à une IVG. Selon plusieurs témoignages, cette ligne d’appel pratique en réalité une propagande anti-IVG parfois extrêmement insistante.

Mme Catherine Coutelle, rapporteure au nom de la commission des affaires sociales sur la proposition de loi relative à l’extension du délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse, a indiqué que « certaines femmes s’orientent sans se méfier vers le site IVG.net, qui est le plus connu, car il est très référencé et propose un numéro vert. Une femme de vingt-neuf ans raconte : "On m’a demandé s’il n’y avait pas, au fond de moi, une petite voix me disant que je voudrais garder mon enfant et me conseillant de repousser mon rendez-vous chez le gynécologue". Cette jeune femme a ensuite été harcelée par sms et au téléphone pour qu’elle accepte de repousser le rendez-vous. Elle ne l’a pas fait et a menacé de déposer plainte. Les sms ont alors cessé. Quand elle s’est tournée vers d’autres structures, comme le Planning familial, elle a raconté comment elle avait été trompée » ([63]).

Vos rapporteures considèrent que la désinformation constitue un frein à l’accès à l’IVG, particulièrement pour les femmes peu ou mal informées qui iraient chercher une information fiable sur Internet et qui seraient soumises à l’influence d’informations orientées.

Cependant il apparaît difficile d’établir des restrictions à l’information disponible sur Internet ; il convient en effet de respecter la liberté d’opinion tout en s’assurant que celle-ci ne fasse pas entrave à l’accès des femmes à l’information sur l’IVG. Aussi, les efforts publics doivent s’orienter vers l’amélioration de la qualité et de l’accessibilité de l’information objective sur internet. Par ailleurs, il semblerait utile de réfléchir à une meilleure applicabilité et application du délit d’entrave à l’IVG sur Internet.

Recommandation n° 7 : lutter contre la désinformation sur internet en poursuivant les auteurs dans le cadre du délit d’entrave et développer les sites officiels délivrant une information fiable.

Recommandation n° 8 : faire un bilan de l’application de la législation relative au délit d’entrave afin, le cas échéant, de pouvoir rendre le dispositif plus efficient.

II.   SOLUTIONs : améliorer les conditions concrètes d’accès à l’IVG et faire évoluer les mentalités

L’accès à l’IVG se heurte actuellement à plusieurs goulots d’étranglement à des stades successifs du parcours qu’il faut analyser et traiter pour remédier aux pesanteurs auxquelles se heurtent les femmes, pouvant rendre ce parcours difficile, compliqué et angoissant.

Un des obstacles principaux rencontré par les femmes est la difficulté à trouver un praticien proche de son domicile pour pratiquer l’IVG demandée dans des délais rapides. Les femmes ignorent la plupart du temps à qui s’adresser et perdent parfois un temps important en début de grossesse, avant de trouver le professionnel de santé ou la structure qui les prendra en charge. Par ailleurs les déserts médicaux et le nombre insuffisant de praticiens de santé pratiquant des IVG se traduisent par des délais de prise en charge et d’attente pour les rendez‑vous, notamment en milieu hospitalier qui les conduisent dangereusement vers la limite du délai légal. Il est donc nécessaire d’améliorer l’information des femmes et d’élargir l’offre, aussi bien en médecine de ville qu’en milieu hospitalier.

1.   Une activité peu considérée avec un effectif de praticiens décroissant

a.   Une activité peu valorisée dans la pratique médicale

Plusieurs des personnes auditionnées partagent le même constat : la pratique de l’IVG est actuellement assez largement assurée par une génération de praticiens militants qui, à la suite des lois du 17 janvier 1975 et du 31 décembre 1979, se sont engagés pour la mise en œuvre concrète du droit à l’IVG. L’âge moyen des gynécologues médicaux est actuellement de 60,9 ans et celui des gynécologues obstétriciens est de 47,6 ans en 2018 en France selon la DREES ([64]).

À ce départ à la retraite d’une partie de la profession s’ajoute un certain désintérêt pour l’activité d’IVG. Le docteur Philippe Faucher, gynécologue‑obstétricien et président du REVHO, a ainsi fait valoir lors de son audition que l’IVG était « le parent pauvre » de la gynécologie-obstétrique ([65]). Il a dénoncé la faible considération pour la pratique de l’IVG d’un point de vue scientifique et technique, les gestes étant considérés comme simples et l’activité d’orthogénie n’étant pas valorisée comme les autres activités de la spécialité ; ce point de vue a d’ailleurs été confirmé lors de l’audition du Syndicat National des Gynécologues et Obstétriciens de France (Syngof) ([66]). Les gynécologues‑obstétriciens s’en détournent au profit d’autres pratiques considérées comme plus intéressantes techniquement et plus valorisantes, comme la procréation médicalement assistée (PMA). Cette déconsidération se traduit aussi par le statut auquel sont soumis les praticiens. Mme Anne-Elizabeth Mazel, médecin généraliste et membre du conseil d’administration du REVHO, indiquait par exemple que l’équipe de l’hôpital Avicenne - Hôpitaux Universitaires Paris Seine-Saint-Denis (Bobigny) était presque intégralement rémunérée à la vacation ([67]). Cette rémunération est très faible et fait ainsi reposer la réalisation des IVG sur la bonne volonté du personnel praticien. Lors de son audition, la docteure Sophie Gaudu allait dans le même sens en indiquant que pour les praticiens ne bénéficiant pas du statut de praticien hospitalier, « l’activité d’IVG s’apparentait à du bénévolat » ([68]).

b.   Une activité insuffisamment rémunérée

Il faut également souligner le fait qu’en plus d’être peu considérée, l’activité d’IVG peut se révéler déficitaire.

Le rapport établi en 2009 par l’IGAS indiquait que les recettes perçues du fait d’une activité d’IVG ne couvraient les dépenses encourues par les praticiens réalisant cette activité qu’à hauteur de 50 % ([69]). Bien que des revalorisations du tarif forfaitaire de l’activité d’IVG aient eu lieu en 2008 ([70]) et 2009 ([71]), le même rapport indique qu’elles « ne permettent pas encore de rattraper le retard pris dans les années précédentes par rapport aux coûts réels de l’IVG chirurgicale ». Par la suite, un décret et un arrêté des 25 et 26 mars 2013 ([72]) ont prévu la prise en compte des charges afférentes à l’activité d’IVG pour les remboursements et procédé à une revalorisation significative des forfaits d’IVG. Enfin l’arrêté du 26 février 2016 relatif aux forfaits afférents à l'interruption volontaire de grossesse a procédé à une dernière revalorisation des forfaits d’IVG ([73]).

Cependant, il semblerait que toutes ces revalorisations demeurent insuffisantes puisque la docteure Sophie Gaudu indiquait en audition que l’activité d’IVG chirurgicale se pratiquait encore en 2019 à perte pour les services hospitaliers ([74]). De plus, ces revalorisations successives des forfaits de remboursement de l’IVG ne sont pas indexées, ce qui constitue une limite notable, car l’inflation les rend inadéquates au bout de quelques années.

Les spécificités des départements et régions d’outre-mer ne sont par ailleurs pas prises en compte dans le cadre des forfaits de remboursement d’IVG. Mme Chrytel Mathurin-Bornat, co-présidente de l’association nationale des centres d’IVG et de contraception (ANCIC), faisait valoir lors de son audition que le prix du forfait pour une IVG médicamenteuse était basé sur le prix du médicament en métropole ([75]). Or, si ce médicament, le mifégyne, coûte 70 euros sur le territoire métropolitain, il coûte 120 euros à la Réunion, alors que la base de remboursement est la même.

Le fait que l’IVG soit une activité réalisée à perte par les praticiens et les établissements de santé en fait une pratique médicale non attractive et porte ainsi indirectement une atteinte à son accès pour toutes les femmes et de manière équitable sur l’ensemble du territoire national. Ainsi, assurer la pérennité financière de la réalisation de cette activité est une première étape indispensable pour la rendre plus attractive et ainsi développer l’offre sur le territoire et parvenir, in fine, à un meilleur accès pour les femmes.

Cette dévalorisation financière de l’acte d’IVG explique en partie les délais d’attente notoirement trop longs pour obtenir un rendez-vous d’IVG en milieu hospitalier. L’IVG apparaît très clairement comme le parent pauvre de l’hôpital et ne se voit attribuer que la portion congrue des moyens disponibles. En effet, l’accès aux blocs opératoires met toutes les spécialités médicales en compétition. Les établissements ont donc tendance à donner la priorité aux chirurgies complexes, plus rémunératrices et aux interventions permettant de facturer des dépassements d’honoraires, ce qui n’est pas le cas de l’IVG chirurgicale, acte simple, dont la tarification est encadrée par un forfait. Ainsi, même les hôpitaux dotés d’un centre d’orthogénie n’ont souvent qu’un accès restreint au bloc opératoire, se limitant à quelques heures par semaine, ce qui ne permet de réaliser qu’un nombre limité d’IVG, même s’il s’agit d’interventions de courte durée, ne mobilisant le bloc qu’une vingtaine de minutes à chaque fois.

Vos rapporteures considèrent donc qu’une couverture totale des coûts afférents à l’activité d’IVG doit être mise en place. Cette couverture devra être indexée de manière à ce que l’inflation ne la rende pas insuffisante dans les années suivantes. De même, la particularité des départements et régions d’outre-mer devra être prise en compte dans l’établissement de cette couverture, afin de remédier aux disparités de tarification constatées aujourd’hui.

Or, l’IVG constitue un acte médical à part entière qui doit être considéré comme tel, ce qui nécessite qu’il soit rémunéré à son juste coût. Ce droit étant garanti par la loi, les pouvoirs publics ne peuvent se contenter de s’en remettre à la bonne volonté des praticiens et des établissements de santé pour qui cette activité relèverait davantage du bénévolat que d’une pratique médicale rémunérée à sa juste valeur. Il est donc indispensable que le forfait de prise en charge corresponde au coût réel de l’acte d’IVG et soit revalorisé en conséquence.

Recommandation n° 9 : mettre en place une couverture totale et indexée des frais encourus par les professionnels dans la pratique de l’IVG.

Recommandation n° 10 : établir un forfait de remboursement différencié pour les départements et régions d’outre-mer qui prenne en compte la différence des coûts constatée sur ces territoires.

c.   Revaloriser l’activité médicale d’IVG

Un certain nombre de mesures ont été prises pour revaloriser la pratique de l’IVG et permettre le renouvellement du personnel praticien. En premier lieu un diplôme d’études spécialisées (DES) de gynécologie médicale a été réintroduit en 2003 et la ministre des Solidarités et de la Santé avait annoncé en 2018 l’ouverture de postes de formation supplémentaires dans le 3ème cycle d’études médicales ([76]). La ministre avait également annoncé à la même occasion une réorganisation de l’offre de soins par les ARS de manière à permettre un meilleur accès à l’IVG. Ces mesures n’ont cependant pas réussi à enrayer la diminution du nombre de gynécologues médicaux, qui reste particulièrement insuffisant. Si le nombre de gynécologues est demeuré stable entre 2013 (7 853 gynécologues) et 2018 (avec 7 825 gynécologues recensés), la proportion de gynécologues médicaux a largement diminué, passant de 3 600 à 2 795 praticiens quand dans le même temps le nombre de gynécologues obstétriciens a augmenté de 4 253 à 5 030 ([77]). L’âge moyen des gynécologues médicaux étant de 60,9 ans, on peut anticiper de nombreux départs à la retraite dans un futur proche.

En 2018, une proportion faible de gynécologues pratique l’IVG. La DREES relevait 3 547 gynécologues exerçant exclusivement à titre libéral. Or, toujours selon elle, seuls 976 gynécologues ont pratiqué des IVG hors établissement de santé en 2018, soit 27, 5 % ([78]).

Pour améliorer l’offre sur le territoire, la pratique de l’IVG médicamenteuse a été ouverte à la profession des sages-femmes par la loi du 26 janvier 2016 ([79]) et bien que des problèmes de mise en œuvre soient à déplorer, 248 sages-femmes ont pratiqué l’IVG en 2018 ([80]). Les sages-femmes ont souvent des difficultés à trouver le stage de formation auquel elles sont assujetties auprès d’un établissement hospitalier en raison de la fermeture de beaucoup de maternités qui a entraîné celle des centres d’orthogénie qui y étaient rattachés. Elles rencontrent également des difficultés, notamment dans les territoires ruraux, à trouver une structure hospitalière avec laquelle conclure la convention de rattachement, impérative pour tous les praticiens de santé désireux de pratiquer des IVG médicamenteuses.

Vos rapporteures considèrent que cette faible valorisation de l’activité d’IVG constitue un autre frein majeur à son accès pour les femmes. L’existence d’une offre satisfaisante sur tout le territoire passe nécessairement par un nombre suffisant de praticiennes et de praticiens. Une revalorisation de l’activité d’IVG permettrait d’arriver à un nombre convenable de praticiens et à son renouvellement régulier, conditions nécessaires à la garantie d’un accès effectif à l’IVG.

Il conviendrait également de prévoir la création de postes de praticiens hospitaliers dédiés. Ces postes permettent de garantir un accès à l’IVG dans le service en question et d’offrir des débouchés valorisants et attractifs pour les praticiens. Une seconde mesure de nature à atteindre un tel résultat passe par la création de débouchés universitaires pour les praticiens.

Recommandation n° 11 : cer des postes de praticiens hospitaliers fléchés vers la pratique de l’IVG et faire obligation à chaque service de gynécologieobstétrique en hôpital public de proposer une offre d’IVG. À cet égard, les chefs de service de gynécologie-obstétrique ne doivent pas être autorisés à ne pas organiser cette offre au motif qu’ils ne sont pas favorables à l’IVG.

2.   Créer un annuaire des praticiens réalisant les IVG

Il n’existe pas aujourd’hui de base de données officielle regroupant la totalité des personnels pratiquant l’IVG. Le site du Gouvernement ivg.gouv.fr ne renvoie qu’à deux listes : celle des centres de planification et celle des établissements de consultation et d’information. Aussi il n’y a pas de moyen pour une femme souhaitant avorter de savoir quel professionnel de santé proche de chez elle pratique l’IVG.

On recense cependant des initiatives locales, comme celle du REVHO, réseau régional implanté en Île‑de-France. REVHO a ainsi développé le site ivglesadresses.org qui offre un répertoire complet des professionnels pratiquant l’IVG en Île-de-France (et à proximité). Vos rapporteures saluent la pertinence de ce système de référencement qui ne renvoie qu’à des professionnels pratiquant l’IVG et acceptant de nouvelles patientes. Cela leur permet ainsi de ne pas risquer de se retrouver face à des professionnels invoquant la clause de conscience et donc d’économiser un temps précieux pour obtenir leur première consultation. Ce site est régulièrement mis à jour, notamment pendant la période estivale et les vacances, de façon à ne renvoyer les femmes souhaitant recourir à l’IVG que vers des praticiens en capacité de les recevoir.

Si cette initiative est précieuse et mérite d’être soutenue et étendue, les pouvoirs publics doivent intervenir là où de telles initiatives n’existent pas, de manière à garantir l’information des femmes et l’accès à l’IVG sur l’ensemble du territoire national. Un tel maillage pourrait être réalisé par le biais des ARS dont la mission est d’organiser l’offre de soins. D’autant plus qu’elles ont connaissance des professionnels de santé pratiquant l’IVG dans leur ressort puisqu’elles ont notamment en charge la signature des conventions obligatoires entre les praticiens de santé désireux de pratiquer l’IGV et l’établissement de santé public ou privé ayant accepté qu’ils leur soient rattachés pour la pratique de l’IVG médicamenteuse en ville.

L’ARS d’Île-de-France faisait valoir lors de son audition qu’un tel référencement obligerait à renvoyer à tous les praticiens, au nom du principe d’égalité ([81]). Il faut cependant souligner que le Conseil d’État et le Conseil constitutionnel jugent avec constance que « le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit » ([82]). Or, dans le cas de l’établissement d’une liste des praticiens susceptible de permettre à une femme d’accéder à l’IVG, il est tout à fait possible de considérer que la condition d’existence d’un intérêt général est satisfaite, la mise en œuvre du droit à l’IVG relevant d’une liberté publique. De même que la limitation du référencement sur une telle plateforme aux seuls professionnels acceptant de pratiquer l’IVG répond directement à l’objet d’une telle mesure, à savoir la mise en œuvre effective du droit à l’IVG.

Vos rapporteures estiment donc que la mise en place de répertoires régionaux des professionnels pratiquant l’IVG est une initiative de nature à garantir une meilleure effectivité du droit à l’IVG et à éviter que des femmes se trouvent hors délai, faute d’avoir trouvé un praticien à temps.

Recommandation n° 12 : mettre en place d’un répertoire des professionnels pratiquant l’IVG sur le modèle du site ivglesadresses.org, géré et mis à jour par les ARS. Chaque ARS aurait à sa charge la mise en place d’un tel réseau sur le territoire relevant de sa compétence, selon des modalités laissées à sa discrétion ou déterminées par voie réglementaire.

3.   L’ouverture de la pratique de l’IVG chirurgicale aux sages-femmes

a.   La place des sages-femmes dans la pratique de l’IVG en France

Depuis la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016, les sages-femmes sont autorisées à pratiquer les IVG médicamenteuses ([83]). En 2018, 248 sages-femmes libérales ont pratiqué 5 332 IVG médicamenteuses ([84]). La proportion d’IVG réalisées par les sages‑femmes libérales s’élève donc à environ 2,3 % des IVG réalisées en France au total et à 10,5 % de celles réalisées dans un cadre libéral. Par comparaison 1 725 médecins libéraux ont pratiqué 45 200 IVG hors établissement de santé ([85]).

Il y avait 22 812 sages-femmes en France en 2018 ([86]). Un peu plus d’1 % d’entre elles se sont saisies de la possibilité de réaliser des IVG médicamenteuses dans un cadre libéral au cours de la période 2016-2018. Cette proportion est comparable à celle des médecins généralistes pratiquant l’IVG dans un cadre libéral : la DREES dénombrait 60 214 médecins généralistes exerçant uniquement à titre libéral en 2018 ([87]), dont 749 d’entre eux avaient pratiqué des IVG hors établissement de santé ([88]). L’étude de 2019 de la DREES ne précise cependant pas la proportion d’IVG réalisées par des sages-femmes en établissement de santé.

Lors de son audition par vos rapporteures, la direction générale à l’offre de soin (DGOS) estimait que les sages-femmes n’avaient pas véritablement saisi la possibilité qui leur était donnée de réaliser des IVG médicamenteuses ([89]).

Cependant, le Conseil national de l’ordre des sages‑femmes (CNOSF) fait valoir des difficultés à concrétiser les conventions avec un établissement de santé public ou privé auxquelles la pratique de l’IVG est conditionnée. Afin de pratiquer des IVG hors établissement de santé, les sages-femmes doivent conclure une convention avec un établissement de santé ([90]). Pour la conclure, la sage-femme doit justifier d’« une pratique suffisante et régulière des interruptions volontaires de grossesse médicamenteuses dans un établissement de santé, attestée par le directeur de cet établissement sur justificatif présenté par le responsable médical concerné » ([91]). En pratique, une telle justification passe par la réalisation d’une formation théorique complétée par une formation pratique prenant la forme d’un stage dans l’établissement de santé signataire de la convention. Or, la réalisation du stage se heurte à un certain nombre de difficultés, dont le manque de moyens et de places de stage au sein des établissements de santé et, comme pour la problématique de l’accès à l’IVG en général, l’absence d’engagement de certains chefs de service.

Le nombre a priori relativement faible d’IVG réalisées hors établissement de santé par des sages-femmes peut sans doute s’expliquer aussi par le caractère récent du dispositif – le décret d’application date du 2 juin 2016, le dispositif n’était donc applicable que depuis un an et demi lors de la réalisation de l’étude de la DREES en 2018 – et les difficultés pratiques rencontrées par les sages-femmes souhaitant s’investir dans le dispositif, ces difficultés étant de nature à ralentir la mise en œuvre de ce dispositif encore récent.

Vos rapporteures considèrent que les sages-femmes sont une force de soutien participant à l’amélioration de l’accès à l’IVG, avec un potentiel de montée en charge important, ces dernières étant presque trois fois plus nombreuses que les gynécologues (22 812 sages-femmes pour 7 825 gynécologues en 2018). Cependant elles ne peuvent aujourd’hui pratiquer que l’IVG médicamenteuse ([92]). Or, le respect du choix de la méthode d’IVG ainsi que les difficultés d’accès à l’IVG instrumentale militeraient en faveur de la reconnaissance aux sages-femmes de la possibilité de réaliser des IVG instrumentales. De ce point de vue, la docteure Sophie Gaudu a fait valoir lors de son audition que « même s’il n’y aura pas forcément beaucoup de sages-femmes intéressées, celles qui le seront le feront très bien et il n’y a pas de raison de les en empêcher ».

b.   Le débat sur l’ouverture de l’IVG chirurgicale aux sages-femmes

Ainsi que le souligne l’Association Nationale des Sages-Femmes orthogénistes (ANSFO), l’IVG médicamenteuse fait déjà partie du champ de compétence des sages-femmes, au même titre que certains gestes chirurgicaux : révision utérine, délivrance artificielle, retrait d’implant, réfection d’épisiotomie. Comme le fait remarquer le Conseil national de l’ordre des sages-femmes, les sages‑femmes ont l’habitude des geste endo-utérins. La Haute Autorité de Santé (HAS) mène d’ailleurs actuellement une étude expérimentale, dans le cadre d’un protocole signé avec l’hôpital de la Pitié Salpêtrière de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP), afin de déterminer la faisabilité d’étendre aux sages‑femmes le droit de pratiquer des IVG chirurgicales (par aspiration), sous anesthésie locale à l’hôpital ou dans un centre de santé.

Les instances représentatives des gynécologues ne sont pas favorables à une extension de la compétence des sages-femmes à la pratique de l’IVG chirurgicale. Le Syndicat national des gynécologues et obstétriciens de France (syngof) considère que « ce serait mettre les sages-femmes en difficulté que de les confronter à des situations dont elles ne peuvent gérer les complications » et que « l'évolution est de faire plus d'IVG médicamenteuses et d'IVG chirurgicales » ([93]).

La profession des sages‑femmes semble dans l’ensemble favorable à l’ouverture de la pratique de l’IVG chirurgicale. Ainsi, l’AANSFO a lancé une pétition réclamant une compétence des sages-femmes pour l’IVG chirurgicale ([94]) relayée par l’Association nationale des sages-femmes libérales (ANSFL) ([95]). L’Organisation nationale syndicale des sages‑femmes (ONSSF) a quant à elle regretté que le Sénat n’ait pas adopté des amendements ouvrant l’IVG chirurgicale aux sages‑femmes en juin 2019 ([96]). Le Conseil national de l’ordre des sages‑femmes (CNOSF) s’est lui aussi prononcé en faveur d’une telle extension de compétence : « le CNOSF, depuis de nombreuses années, plaide en faveur de la possibilité pour les sages-femmes de réaliser des IVG instrumentales dans les établissements de santé. Cette évolution permettrait de donner une pleine compétence à la sagefemme en matière d’orthogénie » ([97]).

Dans le même sens, une majorité des personnes auditionnées par vos rapporteures ont estimé que les sages-femmes disposaient des compétences nécessaires pour réaliser le geste technique d’une IVG par aspiration (sans curetage) après une formation appropriée. Le docteur Philippe Faucher, gynécologue-obstétricien et président du REVHO, a indiqué lors de la table ronde sur l’accès à l’IVG du 24 juillet 2019 qu’« énormément d’études scientifiques montrent que pour l’IVG médicamenteuse il n’y a absolument aucune différence que ce soit au niveau de la sécurité ou de l’acceptabilité et de la satisfaction des patientes, et les mêmes études ont montré que pour l’IVG instrumentale il n’y a pas plus de complications. Pour ce qui est de la sécurité de la femme, il n’y a pas de différence à partir du moment où la sage-femme est formée, et c’est apparu dans des études scientifiques » ([98]).

Ainsi, vos rapporteures estiment opportun d’ouvrir aux sages-femmes la possibilité de réaliser des IVG chirurgicales sous anesthésie locale. Ces dernières disposent des compétences nécessaires à la réalisation des gestes de cette opération et il paraît contre-productif de restreindre la pratique de sages-femmes volontaires. En effet, un plus grand nombre de praticiens habilités à pratiquer l’IVG ne peut avoir que des effets bénéfiques sur l’effectivité de l’accès à l’IVG pour les femmes. Cette ouverture doit naturellement s’accompagner des exigences de formations théoriques et pratiques applicables pour de telles opérations, de manière à garantir la santé des femmes et la prise en charge des éventuelles complications. Cela nécessiterait une réorganisation des moyens matériels dans les centres d’orthogénie, avec mise à disposition de salles blanches, actuellement en nombre très limité, permettant de réaliser des IVG chirurgicales sous anesthésie locale ce qui, en outre, résoudrait en partie la question de l’accessibilité aux blocs opératoires. En effet, l’engorgement de ces derniers, ainsi que les créneaux restreints attribués à la réalisation des IVG instrumentales sous anesthésie générale, sont en partie responsables des délais trop longs de prise en charge à l’hôpital, alors même qu’il s’agit des patientes dont le terme de grossesse est le plus avancé et qui ne peuvent plus recourir à l’IVG médicamenteuse. Ainsi, pendant les vacances d’été, le délai d’attente pour obtenir un rendez-vous dans les quelques hôpitaux acceptant des patientes est de l’ordre de trois semaines, ce qui est générateur d’angoisse et de sentiment d’insécurité pour les femmes concernées qui craignent alors de ne pas pouvoir réaliser leur IVG avant la fin du délai légal autorisé.

Recommandation n° 13 : autoriser la pratique de l’IVG chirurgicale sous anesthésie locale par les sages-femmes dans les établissements et les centres de santé habilités, sur la base du volontariat.

Recommandation n° 14 : demander aux centres d’orthogénie d’assurer les formations nécessaires (geste technique, écoute des patientes) permettant aux sages-femmes de réaliser des IVG chirurgicales sous anesthésie locale.

Recommandation n° 15 : prévoir dans tous les centres d’orthogénie une salle blanche permettant de réaliser des IVG chirurgicales sous anesthésie locale.

B.   Des Évolutions possibles de la pratique des professionnels de santÉ pour permettre un meilleur accÈs À l’ivg

Le droit à l’IVG est un droit fondamental encadré et garanti par la loi depuis 45 ans. Comme exposé précédemment, certains obstacles demeurent, ne permettant pas dans toutes les situations un accès simple et rapide à l’IVG. Ces difficultés se sont d’ailleurs aggravées, comme il fallait s’y attendre, durant la récente crise sanitaire. Vos rapporteures considèrent qu’il est impératif d’assouplir aujourd’hui une part de l’encadrement de ce droit à l’IVG pour en renforcer l’effectivité et en garantir l’accès à toute femme le souhaitant. Pour cela, elles appellent à supprimer la double clause de conscience et, tout en maintenant le délai légal, à mieux prendre en compte les éléments psycho-sociaux pouvant mettre en péril la santé de la femme dans le cadre de la décision d’une IMG et à offrir une réelle liberté de choix aux femmes en matière de méthode d’IVG.

1.   La suppression de la double clause de conscience

a.   Textes de référence prévoyant cette double clause

L’acte médical d’interruption volontaire de grossesse présente la particularité de pouvoir être refusé d’être pratiqué en raison d’une double clause de conscience.

Comme pour tout acte médical, une clause de conscience générale permet au personnel de santé de ne pas pratiquer d’IVG en vertu du code de la santé publique qui précise que « quelles que soient les circonstances, la continuité des soins aux malades doit être assurée. Hors le cas d'urgence et celui où il manquerait à ses devoirs d'humanité, un médecin a le droit de refuser ses soins pour des raisons professionnelles ou personnelles. S'il se dégage de sa mission, il doit alors en avertir le patient et transmettre au médecin désigné par celui-ci les informations utiles à la poursuite des soins » ([99]). Cet article du code de la santé publique reprend l’article 47 du code de déontologie des médecins, qui prévoit que, « hors le cas d’urgence et celui où il manquerait à ses devoirs d’humanité, un médecin a le droit de refuser ses soins pour des raisons professionnelles ou personnelles ». Les sages-femmes bénéficient de la même clause de conscience générale en application de l’article R. 4127-328 du même code. Il en va de même pour les infirmiers en application de l’article R. 4312-12 du même code.

En ce qui concerne l’IVG, à cette clause générale de conscience de nature réglementaire s’ajoute une seconde clause spécifique, c’est-à-dire ne concernant que les actes d’avortement, de nature législative. Cette clause de conscience spécifique est prévue à l’article L. 2212-8 du code de la santé publique qui dispose qu’« un médecin ou une sage-femme n'est jamais tenu de pratiquer une interruption volontaire de grossesse mais il doit informer, sans délai, l'intéressée de son refus et lui communiquer immédiatement le nom de praticiens ou de sagesfemmes susceptibles de réaliser cette intervention selon les modalités prévues à l'article L. 2212-2. Aucune sage-femme, aucun infirmier ou infirmière, aucun auxiliaire médical, quel qu'il soit, n'est tenu de concourir à une interruption de grossesse. Un établissement de santé privé peut refuser que des interruptions volontaires de grossesse soient pratiquées dans ses locaux. Toutefois ce refus ne peut être opposé par un établissement de santé privé habilité à assurer le service public hospitalier que si d'autres établissements sont en mesure de répondre aux besoins locaux. Les catégories d'établissements publics qui sont tenus de disposer des moyens permettant la pratique des interruptions volontaires de la grossesse sont fixées par décret » ([100]).

Comme le soulignait Mme Nathalie Bajos, sociologue-démographe et directrice de recherche à l'Inserm, lors de son audition ([101]), une telle clause spécifique de conscience n’existe que dans trois cas en droit français :

‒ pour l’IVG, aux articles L. 2212-8 et R. 4127-18 du code de la santé publique ;

‒ pour la stérilisation, à l’article L. 2123-1 du code de la santé publique qui dispose notamment que cet acte ne peut être pratiqué sur une personne mineure et qu’« un médecin n'est jamais tenu de pratiquer cet acte à visée contraceptive mais il doit informer l'intéressée de son refus dès la première consultation » ;

‒ pour la recherche sur les embryons, à l’article L. 2151-7-1 du code de la santé publique qui dispose qu’« aucun chercheur, aucun ingénieur, technicien ou auxiliaire de recherche quel qu'il soit, aucun médecin ou auxiliaire médical n'est tenu de participer à quelque titre que ce soit aux recherches sur des embryons humains ou sur des cellules souches embryonnaires autorisées en application de l'article L. 2151-5 ».

Soit, comme le faisait remarquer la sociologue Nathalie Bajos, deux actes (sur trois) qui concernent directement le contrôle de la fécondité. Elle souligne que cela induit l’idée que l’IVG n’est pas un droit comme les autres. Selon elle, cela représente une violence symbolique qui a une influence sur les pratiques.

b.   L’IVG ne doit plus être assimilée à un acte médical à part

L’existence d’une double clause de conscience, c’est-à-dire à la fois l’application de la clause générale réglementaire qui concerne tous les actes médicaux et l’application de la clause spécifique législative qui concerne uniquement l’IVG conduit à faire de l’avortement un acte médical à part.

Or, l’existence de cette double clause est en lien direct avec le contexte entourant l’adoption de la loi du 17 janvier 1975. En effet, si la dépénalisation a été votée en 1975, l'IVG ne pouvait alors être pratiquée que sous certaines conditions et notamment que : le médecin et le personnel soignant pouvaient refuser de pratiquer l'IVG ; l'état de grossesse devait placer la femme dans une situation de détresse ; l'autorisation parentale était obligatoire pour les mineures non émancipées ; un délai de réflexion de sept jours minimum devait être respecté avant l'IVG ; le délai légal de l'IVG était de 10 semaines de grossesse ; l’Assurance maladie ne remboursait pas cet acte.

Depuis, ce dispositif a été assoupli de manière notable. Ainsi, depuis la loi Veil, de nombreuses lois sont venues confirmer et préciser le droit à l'avortement. La loi n° 82-1172 du 31 décembre 1982 a instauré le remboursement des frais médicaux par l’Assurance maladie (prise en charge de 70 %, portée à 100 % en 2013). La loi nº 93-121 du 27 janvier 1993 a instauré un délit spécifique d'entrave à l'IVG, complété par la loi n° 2014-873 du 4 août 2014, qui inclut la perturbation de l’accès aux femmes à l’information sur l’IVG dans le champ du délit d'entrave et par la loi n° 2017-347 du 20 mars 2017 qui a étendu ce délit à certaines activités sur internet. La loi n° 2001-588 du 4 juillet 2001 a quant à elle porté de 10 à 12 semaines le délai légal pour pratiquer un avortement. Enfin, la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 a permis aux sages-femmes de pratiquer des IVG médicamenteuses et supprimé le délai de réflexion de sept jours entre la première consultation et la confirmation écrite.

Ainsi, progressivement, la majeure partie des restrictions initiales a été supprimée. La seule survivance consiste en la clause de conscience spécifique à l’IVG. Or, celle-ci n’apporte rien en ce qui concerne la liberté d’un professionnel de santé de pratiquer un acte médical, puisque ce droit lui est déjà reconnu par la clause générale. En revanche, elle contribue à faire de l’acte médical d’IVG un acte simplement toléré et non un droit à part entière, comme la loi le prévoit. Au‑delà de la liberté de chaque médecin ou sage-femme de pratiquer, ou non, à titre individuel, l’acte d’IVG, cette double clause peut conforter le peu d’empressement d’un chef de service défavorable à la réalisation de l’IVG, qui sans en entraver l’exercice, n’y affectera que des moyens et personnels minimaux. Le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) sur la prise en charge de l’IVG soulignait d’ailleurs déjà cette problématique en 2009 en affirmant que l’IVG est « une activité qui demeure très dépendante des équations personnelles et locales » ([102]). De même, certains médecins font valoir leur clause de conscience à partir d’un certain nombre de semaines et refusent par exemple de pratiquer l’IVG entre dix et douze semaines de grossesse (soit entre douze et quatorze semaines d’aménorrhée), raccourcissant ainsi, de fait, le délai autorisé par la loi, alors même que le geste technique (aspiration) est le même entre dix et douze semaines. L’IGAS indiquait ainsi qu’« une enquête téléphonique réalisée en 2009 auprès de 56 établissements d’IledeFrance pratiquant des IVG montrait que 16 sur 56 seulement pouvaient donner un rendez-vous permettant de réaliser l’IVG avant la date butoir de 14 semaines d’aménorrhée à une femme se présentant à 12 semaines » ([103]). Un effort de pédagogie doit donc être mené, lequel pourrait être dévolu aux ARS, ainsi qu’aux représentants locaux de l’État, afin de sensibiliser les établissements de santé sur la nécessité de permettre aux femmes de bénéficier d’une prise en charge de leur IGV jusqu’à la limite du délai légal autorisé, à savoir douze semaines. À cet égard, il convient de mettre en avant le fait que les femmes ne sont pas toujours responsables de leur prise en charge tardive, notamment dans les zones où l’offre de soins est rare et éloignée et où les délais d’obtention des rendez-vous obligatoires sont sensiblement plus longs que la moyenne recommandée par la Haute Autorité de Santé, qui préconise que toute patiente obtienne une consultation dans les cinq jours.

Ce constat problématique a été très largement partagé par les personnes auditionnées par vos rapporteures ainsi que par celles rencontrées au cours de leurs déplacements en France. Selon ces témoignages, certains établissements de santé ne pratiquent en effet pas les avortements au-delà de dix semaines car le geste médical apparaît alors plus long et plus délicat, avec un risque de complications supérieur, ce qui n’est pas avéré dans les faits. Le centre hospitalier de Cavaillon, où vos rapporteures ont pu rencontrer l’équipe médicale et sociale en charge des IVG, refuse par exemple de pratiquer les IVG chirurgicales entre 12 et 14 semaines d’aménorrhée considérant que le geste est alors trop risqué et qu’ils ne sont pas équipés pour faire face aux éventuelles complications, notamment parce qu’ils ne disposent pas de service de réanimation.

Si la sécurité médicale de l’acte d’IVG est bien évidemment une priorité, vos rapporteures rappellent toutefois que le droit français autorise la femme à recourir à un avortement jusqu’à 14 semaines d’aménorrhée. L’organisation des services hospitaliers ne doit en aucun cas faire entrave à leur accès à ce droit fondamental et il leur semble indispensable de garantir une réorientation rapide et efficace des patientes qui ne pourraient pas être prises en charge pour cette raison.

Recommandation n° 16 : mettre en œuvre un parcours d’IVG simplifié et accéléré pour les femmes souhaitant avoir recours à une IVG et ayant dépassé la 9ème semaine de grossesse, en regroupant en un seul rendez-vous préalable à l’intervention, tous les examens (échographie, prise de sang) et consultations (praticien réalisant l’IVG, anesthésiste).

c.   Deux garanties essentielles : la pratique de l’IVG par des médecins volontaires et la réorientation des patientes si nécessaire

La rédaction de la clause de conscience spécifique à l’IVG comporte deux garanties essentielles à la bonne prise en charge des femmes souhaitant avoir recours à un avortement : d’une part, d’être prise en charge par un médecin volontaire pour pratiquer les IVG ; d’autre part, d’être rapidement réorientée si le professionnel de santé contacté n’accepte pas de la pratiquer.

Vos rapporteures insistent sur l’importance que l’IVG soit réalisée par un médecin ou une sage-femme volontaire pour pratiquer ce type d’acte médical. En effet, il ne saurait être question de forcer un professionnel de santé à pratiquer une IVG, non seulement parce qu’il convient de respecter la volonté de chaque professionnel, mais également parce que cela conduirait à une prise en charge de mauvaise qualité des patientes, notamment sur le plan psychologique. Au cours de leurs auditions et déplacements, vos rapporteures ont recueilli plusieurs témoignages de mauvaise prise en charge de femmes par des professionnels de santé opposés à l’IVG, avec des remarques culpabilisantes et une absence d’empathie. Le planning familial de la Drôme témoignait par exemple recevoir encore régulièrement des femmes ayant fait l’objet de critiques très dures de la part du médecin qui les recevait en premier entretien pour une demande d’IVG.

Vos rapporteures considèrent que de telles situations ne sauraient perdurer : il s’agit là d’une forme d’entrave à l’IVG. L’avortement est un droit fondamental, prévu et garanti par la loi ; il ne saurait être remis en cause par les critiques personnelles que certains personnels de santé se permettraient de formuler, mettant ainsi des femmes qui souhaitaient recourir à l’IVG dans une situation de honte et de culpabilité qui n’a pas lieu d’être.

En ce sens, l’existence d’une clause de conscience générale, sans clause spécifique à cet acte, suffit à garantir la liberté de choix des praticiens de santé, en leur permettant de ne pas pratiquer l’IVG, au même titre que n’importe quel autre acte médical, sans induire pour autant une stigmatisation particulière de l’acte d’IVG.

Si la clause de conscience générale suffit à permettre aux professionnels de santé de ne pas pratiquer une IVG, la clause législative spécifique pose un garde-fou supplémentaire en prévoyant une réorientation obligatoire de la patiente. Ainsi, un médecin ou une sage-femme qui refuserait de pratiquer une IVG demandée par une de ses patientes est contraint par la loi de la réorienter dans les meilleurs délais vers un confrère ou une consœur qui pourrait réaliser l’avortement. Le code de la santé publique précise en effet clairement que le professionnel de santé refusant de pratiquer une IVG « doit informer, sans délai, l'intéressée de son refus et lui communiquer immédiatement le nom de praticiens ou de sages-femmes susceptibles de réaliser cette intervention selon les modalités prévues à l'article L. 2212-2 » ([104]).

Cette obligation de réorientation est primordiale, afin de permettre aux femmes d’entrer le plus vite possible en contact avec un professionnel de santé en capacité de les accompagner dans cette démarche. Compte tenu de la limitation à douze semaines de grossesse du droit à l’IVG, l’entrée rapide dans le parcours IVG est essentielle. Or, en pratique, cette réorientation fait souvent défaut. Sans doute faut-il y voir une certaine négligence voire une mauvaise volonté de la part des praticiens de santé ne désirant pas pratiquer d’IVG. À cela s’ajoute le fait que les praticiens ne pratiquant pas l’IVG n’ont pas nécessairement connaissance de ceux qui la pratiquent, d’autant plus qu’il n’existe pas d’annuaire, hormis quelques initiatives régionales, comme celle mise en place par le réseau REVHO en Île‑de‑France. Or, la réorientation rapide et efficace des femmes doit permettre de concilier la clause de conscience des personnels de santé et le droit fondamental à l’avortement. Vos rapporteures insistent donc sur la nécessité de maintenir dans la loi une telle obligation de réorientation.

d.   Les débats sur la suppression de la clause de conscience spécifique à l’IVG

Le principe de la suppression de la double clause de conscience, c’est‑à‑dire la suppression de la clause législative spécifique ne concernant que l’acte d’IVG, a recueilli un assez large consensus auprès des personnes auditionnées par vos rapporteures et lors de leurs déplacements sur le terrain.

Seules les organisations représentatives des gynécologues-obstétriciens ont émis une opposition marquée à une telle suppression. La docteure Elisabeth Paganelli, secrétaire générale du Syngof auditionnée par vos rapporteures, faisait ainsi valoir qu’« il n'y a pas de double clause de conscience, il y a une clause de conscience spécifique qui est la contrepartie de l'autorisation d'interrompre une grossesse et demeure indispensable étant donné la spécificité du geste. Elle est d'autant plus importante quand il s'agit d'un service public, il faut protéger les agents du service public qui peuvent être contraints au quotidien par les obligations du service public » ([105]). Quant au Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français (CNGOF), il considère que la clause de conscience spécifique stigmatise mais qu’elle protège la femme, en imposant une obligation de réorientation de celle-ci vers un praticien ou un établissement de santé pratiquant l’IVG.

Le Planning Familial défend quant à lui depuis plusieurs années la suppression de cette double clause de conscience au motif que « chaque femme à laquelle un médecin envoie comme message "ma conscience prime sur la vôtre" se sent rejetée et dévalorisée/méprisée. Pourtant, l’avortement est un événement courant dans la vie des femmes puisqu’une femme sur trois en France aura recours à l’IVG dans sa vie. L’égalité entre les personnes ne peut passer par la domination du choix du.de la professionnel.le. La posture professionnelle inclut l’empathie et l’assistance bienveillante » ([106]).

L’association Osez le féminisme, relayant le collectif « Avortement en Europe, les femmes décident », défend également la suppression de la double clause de conscience car « nous ne sommes plus en 1975 où il a fallu arracher le droit à l’avortement par une lutte acharnée. L’IVG, malgré les nombreux obstacles dressés, est devenue une pratique courante. En 2014, un sondage IFOP montrait que 75 % des Français.e.s étaient pour l’avortement. Il est donc largement temps de supprimer cette double clause de conscience spécifique d’un autre âge, tout en maintenant l’obligation de communiquer le nom d’autres praticiens » ([107]).

De la même manière, une majeure partie des personnes auditionnées se sont prononcées en faveur d’une suppression. L’argument le plus récurent est celui qu’exprimait Nathalie Bajos : l’existence d’une telle clause de conscience spécifique conduit à une stigmatisation particulière de l’acte d’IVG, contribuant ainsi à en faire un acte médical à part et participe donc de la culpabilisation des femmes y recourant ([108]). Le docteur Philippe Faucher, gynécologue-obstétricien et président du REVHO dénonçait une « clause de conscience à géométrie variable », que certains utilisent pour justifier d’un refus de pratiquer à partir d’un certain nombre de semaines ([109]). Il indiquait également qu’en pratique les médecins invoquant la clause de conscience ne respectent pas toujours leur obligation de renvoyer la patiente vers un autre médecin acceptant de pratiquer l’IVG, ce qui limite donc l’utilité de cette clause de conscience spécifique ([110]).

Par ailleurs, Santé Publique France faisait valoir que cette clause de conscience spécifique participait du cloisonnement de l’IVG dans le parcours de santé des femmes et empêchait qu’elle soit traitée dans un parcours de santé sexuelle intégré ([111]). Un tel traitement intégré de l’acte d’IVG permettrait notamment de mieux aborder la question de la contraception post-avortement. Cela permettrait de faire de l’IVG un acte médical comme un autre, sans pour autant nier son importance dans le parcours de vie d’une femme y recourant.

Adhérant à tous ces arguments et considérant que l’IVG ne doit plus être stigmatisée de la sorte, vos rapporteures ont examiné les possibilités de suppression de cette clause spécifique tout en garantissant les droits des professionnels de santé et ceux des patientes. Une telle évolution leur semble non seulement souhaitable mais possible.

e.   Supprimer la clause de conscience spécifique tout en préservant les garanties pour les patientes comme pour les personnels de santé

Vos rapporteures considèrent que l’existence d’une double clause de conscience spécifique à l’IVG contribue effectivement à stigmatiser le recours à l’IVG et à faire de cet acte un acte à part, ce qui a pour conséquence d’en restreindre les conditions d’accès. Si la clause de conscience spécifique prévue par l’article L. 2212‑8 organise effectivement une garantie supplémentaire par l’obligation qui est faite aux médecins de renvoyer la patiente vers un collègue acceptant de pratiquer l’IVG, cette garantie peut être préservée tout en supprimant la clause en elle-même.

Elles suggèrent de rédiger ainsi le premier alinéa de l’article L. 2212‑8 : « Un médecin ou une sage-femme qui refuse de pratiquer une interruption volontaire de grossesse doit informer, sans délai, l’intéressée de son refus et lui communiquer immédiatement le nom de praticiens ou de sages-femmes susceptibles de réaliser cette intervention selon les modalités prévues à l’article L. 22122 »[112].

Cette rédaction permettrait ainsi de préserver la partie protectrice de la clause de conscience spécifique qui prévoit une réorientation des patientes tout en ne faisant plus figurer à proprement parler une clause de conscience spécifique : finalement le refus de pratiquer l’IVG, qui serait toujours explicitement mentionné par la loi ainsi rédigée, découle simplement de la clause réglementaire générale du droit de refuser de pratiquer un acte médical. Cette rédaction permettrait de faire progresser le droit à l’IVG et d’en finir avec une vision archaïque d’un acte médical spécifique, tout en apportant ainsi des garanties suffisantes aux professionnels de santé qui ne souhaiteraient pas pratiquer l’acte d’IVG, en assurant également l’information et la réorientation des femmes par le médecin ou la sage-femme lorsqu’il ne souhaite pas pratiquer l’IVG.

Elles considèrent en outre que l’alinéa 3 du même article qui prévoit qu’un « établissement de santé privé peut refuser que des interruptions volontaires de grossesse soient pratiquées dans ses locaux » doit être interprété comme posant à tous les établissements publics disposant des équipements et personnels nécessaires l’obligation de pratiquer cet acte.

Recommandation n° 17 : rédiger ainsi le premier alinéa de l’article L. 22128 : « Un médecin ou une sage-femme qui refuse de pratiquer une interruption volontaire de grossesse doit informer, sans délai, l’intéressée de son refus et lui communiquer immédiatement le nom de praticiens ou de sages-femmes susceptibles de réaliser cette intervention selon les modalités prévues à l’article L. 22122 ».

2.   L’allongement du délai d’accès à l’IVG

a.   La problématique des femmes contraintes d’aller à l’étranger pour recourir à un avortement hors délai en France

Pour rappel, l’IVG peut, en France, être pratiquée jusqu’à 12 semaines de grossesse, soit 14 semaines d’aménorrhée. Il faut cependant souligner que l’interruption médicale de grossesse, prévue aux articles L. 2213‑1, L. 2213‑2 et L. 2213‑3 du code de la santé publique, permet, dans certains cas, d’avoir recours à un avortement au-delà de ce délai. L’article L. 2213‑1 dispose ainsi que « l’interruption volontaire d'une grossesse peut, à toute époque, être pratiquée si deux médecins membres d'une équipe pluridisciplinaire attestent, après que cette équipe a rendu son avis consultatif, soit que la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme, soit qu'il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic ».

Toutes les femmes dépassant le délai légal d’IVG ne peuvent donc pas recourir simplement à une IMG. Chaque année entre 3 000 et 4 000 femmes seraient ainsi conduites à sortir du cadre légal français en se rendant à l’étranger pour avoir recours à un avortement, le risque étant que les personnes ne disposant pas des moyens aient possiblement recours à un avortement clandestin, même si le phénomène est difficile à évaluer, aucune donnée n’existant dans ce domaine. Cette solution de pratiquer l’IVG à l’étranger présente en effet un coût relativement élevé excluant ainsi les femmes les plus précaires. En effet, quand une résidente française recourt à une IVG à l’étranger, l’intervention n’est plus remboursée par la sécurité sociale française ni prise en charge par le pays où elle a lieu. Au-delà du prix de l’intervention elle-même, le voyage et éventuellement l’hébergement, selon l’éloignement du domicile de la femme, peuvent également représenter un coût élevé.

Dès le début de la mission d’information, vos rapporteures ont été particulièrement interpellées par l’existence d’un nombre non négligeable de femmes contraintes de se rendre à l’étranger pour avoir recours à une IVG. Elles considèrent que cette situation, injuste et inégalitaire en tous points, est absolument inacceptable. À leurs yeux, la réflexion sur un éventuel allongement du délai légal de l’IVG relève avant tout de la recherche d’une solution pour éviter à ces femmes une telle démarche coûteuse, souvent complexe et hors de tout circuit de soins. Pour mieux saisir cette problématique et identifier les éventuelles solutions, elles ont choisi d’étudier la situation dans les deux pays frontaliers qui semblent accueillir la majeure partie des femmes françaises souhaitant avoir recours à une IVG hors délai : l’Espagne et les Pays-Bas.

Ces deux déplacements, ont permis d’échanger avec les acteurs des services de santé, des associations équivalentes au Planning familial français et les services ministériels compétents et ainsi de constater la venue dans ces deux pays de Françaises souhaitant avoir recours à un avortement au‑delà du délai de 12 semaines de grossesse et de se rendre compte qu’il s’agit là d’une réalité bien connue et d’ailleurs prise en compte par les différents acteurs locaux.

Votre corapporteure, Mme Marie-Noëlle Battistel, s’est rendue en Espagne, les 12 et 13 février 2020. Elle s’y est notamment entretenue avec Mme Noelia Vera, Secrétaire d’État à l’égalité, ainsi qu’avec la fédération des plannings familiaux espagnols et l’association des cliniques accréditées.

Depuis 2010, l’interruption volontaire de grossesse y est autorisée jusqu’à 14 semaines de grossesse ; une Française peut donc y avoir recours entre 12 et 14 semaines sans difficulté. Entre 14 et 22 semaines, l’interruption de grossesse est autorisée pour motif médical s’il existe un risque pour la santé de la femme (que ce risque soit physiologique ou psychologique) ou si le fœtus présente certaines anomalies. Le risque pour la santé de la femme est évalué par un seul médecin, qui peut être un psychiatre. Comme l’ont montré les entretiens conduits sur le terrain, il est courant que les cliniques privées pratiquant des avortements emploient un psychiatre en charge de l’évaluation de ce type de situation ; il est alors relativement facile pour une femme, y compris pour une ressortissante française, d’accéder à une interruption de grossesse pour motif médical jusqu’à 22 semaines de grossesse. Au-delà de ce délai, l’interruption de grossesse est par contre très contrôlée. Elle ne peut se faire qu’en raison d’un risque aggravé de maladie chronique pour le fœtus et son autorisation est soumise à l’avis d’un comité éthique et d’un comité médical. Ces situations sont en réalité assez rares, avec seulement 40 avortements au-delà de 22 semaines de grossesse.

Depuis 2014, 95 000 IVG sont réalisées chaque année en Espagne, un nombre relativement stable. Parmi elles, 78 % ont lieu avant la 9ème semaine de grossesse, 95 % avant la 14ème semaine. Les avortements entre 14 et 22 semaines ne concernent que 5 % des situations. L’âge moyen des femmes ayant recours à une IVG est de 23 ans. 80 % des IVG sont réalisées dans les 200 centres privés accrédités à la pratique de l’IVG.

Il n’a toutefois pas été possible d’obtenir avec précision et certitude le nombre de femmes françaises non résidentes en Espagne ayant recours à un avortement sur le territoire espagnol. Selon le ministère de la santé, 8,3 % des avortements réalisés annuellement concernent des femmes non résidentes en Espagne. En 2018, cela concernerait environ 8 000 avortements. Le ministère ne dispose pas des données par nationalité, mais estime que cela ne concernerait qu’entre 80 et 200 Françaises. Selon le Planning familial espagnol en revanche, en 2018, 1 462 femmes européennes non espagnoles auraient eu recours à un avortement en Espagne. Il ne peut toutefois là encore pas préciser le nombre de femmes françaises parmi ce total. Toutefois, l’association des cliniques accréditées à la pratique de l’IVG considère quant à elle qu’il est possible qu’environ 1 000 femmes françaises recourent chaque année à une IVG en Espagne.

Le coût de l’avortement est fonction du nombre de semaines de grossesse ; il est d’environ 350 euros en dessous de douze semaines, de 450 euros entre 12 et 14 semaines, de 700 euros entre 15 et 16 semaines, de 900 euros entre 17 et 18 semaines, de 1 200 euros entre 19 et 20 semaines, de 1 700 euros à 21 semaines et de 2 200 euros à la 22e semaine, délai maximal autorisé en Espagne. À ces frais viennent bien sûr s’ajouter les éventuels coûts de transport et d’hébergement.

Votre corapporteure, Mme Marie-Noëlle Battistel, s’est également rendue aux Pays‑Bas, les 19 et 20 février. Elle y a notamment échangé avec des responsables du ministère de la Santé, du bien-être et des sports et a visité la clinique Beahuis et Bloemenhovekliniek à Amsterdam.

Dans ce pays, le délai légal de recours à l’avortement est fixé depuis les années 1980 à 22 semaines. 30 000 IVG y sont réalisées chaque année ; 70 % par méthode chirurgicale et 30 % par voie médicamenteuse. 90 % d’entre elles ont lieu dans l’une des quatorze cliniques accréditées spécialisées dans l’acte d’IVG. Deux types d’accréditation existent : d’une part pour pratiquer des avortements jusqu’à la 12e semaine (par voie médicamenteuse ou par aspiration) ; d’autre part pour les avortements jusqu’à la 22e semaine (par curetage).

Les cliniques, comme le ministère en charge de la santé, de même que les associations de santé sexuelle et reproductive ont pu affirmer qu’en 2018 ce sont 810 femmes françaises qui se sont rendues au Pays-Bas pour avoir recours à une interruption volontaire de grossesse.

La tarification d’une IVG est plafonnée par l’État à 500 euros jusqu’à la 12e semaine et à 875 euros jusqu’à la 22e semaine. Encore une fois, à ce coût s’ajoutent les éventuels frais de voyage et de séjour qui peuvent être importants si la femme n’a pas réalisé de premier rendez-vous médical en France et se voit obligée de respecter le délai de cinq jours de réflexion qui existe aux Pays-Bas.

b.   Les débats quant à la possibilité d’allonger de deux semaines le délai légal d’IVG en France

L’allongement du délai de recours à l’IVG est un débat récurrent qui est revenu au-devant des préoccupations lors de la période de confinement, tant sur la scène politique que dans le monde militant ou dans la sphère médicale. Un amendement proposant de rallonger le délai de deux semaines a d’ailleurs été adopté en première lecture, puis supprimé lors de l’examen du projet de loi relatif à l'organisation et à la transformation du système de santé ([113]). Ce sujet conduit ainsi régulièrement à des confrontations politiques et idéologiques sur la place de l’avortement en droit français, ainsi que sur les méthodes et les moyens permettant de pratiquer l’IVG.

Un certain nombre de problèmes pratiques liés à la mise en œuvre de l’allongement du délai légal ont d’ailleurs été soulevés lors des auditions de vos rapporteures. Le docteur Philippe Faucher, gynécologue-obstétricien et président du REVHO, explique qu’à partir de douze semaines de grossesse, la méthode d’avortement instrumentale n’est plus la même : cela nécessite une formation à d’autres gestes. Or, il semblerait que les praticiens ne soient actuellement pas formés à ce geste ([114]). La docteure Sophie Gaudu, qui pratique la dilatation extraction, affirme être prête à former des praticiens à cette technique ([115]). De fait, si l’allongement du délai devait être décidé, une période de formation des professionnels serait nécessaire et le nouveau délai ne pourrait donc pas être immédiatement appliqué.

Le docteur Philippe Faucher a également souligné que la réalisation des IVG entre 12 et 14 semaines de grossesse se concentrera nécessairement dans les établissements de santé acceptant déjà de réaliser des IVG entre 10 et 12 semaines de grossesse ([116]). Le Syngof indiquait lors de son audition que l’allongement du délai risquait de dissuader ceux qui pratiquent l’IVG jusqu’à 12 semaines de grossesse de continuer cette pratique ([117]). Vos rapporteures considèrent qu’il existe en effet un risque que l’augmentation du délai légal réduise le nombre de praticiens pratiquant l’IVG.

Il y a urgence en la matière, environ 5 000 femmes étant contraintes de se rendre chaque année à l’étranger, dans des pays proches où le délai légal est supérieur à celui de la France, pour faire pratiquer leur IVG. L’allongement du délai de deux semaines, qui constitue une demande forte des associations engagées auprès des patientes, permettrait de faire face à certaines situations d’urgence et de détresse ne trouvant actuellement de réponse que dans le cadre de l’IMG, où la décision relève du corps médical et non de la femme.

Si une extension du délai de deux semaines pourrait résoudre ce type de difficultés, un meilleur accès à l’IVG dans les délais légaux passerait également par la levée des obstacles existant sur le parcours d’accès à l’IVG, par une meilleure information et par une prise en charge des cas particuliers. Cette évolution doit intervenir sans préjudice des mesures permettant de fluidifier le parcours des patientes, afin d’éviter que celles‑ci risquent de se trouver en situation de dépassement du délai légal. Cela nécessite un renforcement de l’information qui doit commencer en milieu scolaire et une meilleure orientation des patientes en début de parcours. Il s’agit d’une question qui repose sur un véritable engagement des pouvoirs publics, aussi bien au niveau national que local, afin que l’organisation des soins permettre de répondre à l’ensemble des demandes d’IVG.

À l’heure actuelle, la mesure la plus efficace pour lutter contre la plupart des départs à l’étranger paraît bien être l’allongement du délai de recours à l’IVG de deux semaines. Celui-ci permettrait que des femmes en situation de vulnérabilité ou ayant subi un retard de prise en charge, notamment les jeunes filles dont le rythme de menstruations n’est pas encore régulier et qui risquent de découvrir leur grossesse tardivement, puissent avoir accès à l’IVG dans des conditions sanitaires, psychologiques et financières satisfaisantes.

Recommandation n° 18 : allonger le délai de l’IVG chirurgicale de deux semaines, pour le faire passer de douze à quatorze semaines de grossesse, afin d’éviter que les femmes confrontées à des difficultés en début de parcours (errance médicale, délais de rendez-vous trop longs, …), se trouvent hors délai et dans l’impossibilité de faire pratiquer une IVG en France.

c.   Ne laisser aucune situation sans réponse : un objectif accessible à droit constant

Ces différents arguments conduisent vos rapporteures à penser que l’allongement du délai légal d’accès à l’IVG n’est pas la principale solution pour améliorer l’accès à l’IVG des femmes actuellement contraintes de se rendre à l’étranger pour avorter. Elles rappellent en premier lieu que, si l’on retient l’hypothèse des 3 000 femmes contraintes de se rendre à l’étranger chaque année pour une IVG, cela représente environ 1,3 % du total des femmes souhaitant y recourir. Compte tenu de leurs auditions et de leurs déplacements sur le terrain, il leur apparaît que cette proportion ne changerait pas ou très peu en allongeant de 15 jours le délai légal. Bien sûr, certaines situations individuelles trouveraient alors à se résoudre, mais il semble probable que la situation générale n’en serait pas bouleversée. Or, il est à leurs yeux inacceptable que ces femmes ne soient pas en mesure de trouver une solution en France, dans un parcours de soins coordonnés et en bénéficiant d’une prise en charge financière totale par le système de sécurité sociale.

Plusieurs points leur paraissent importants pour prévenir ces difficultés dans le parcours IVG des femmes et ils seront développés dans la partie suivante : une meilleure information relative à la contraception et à la grossesse, de manière à éviter les découvertes de grossesse trop tardives, une réduction de l’errance médicale ou encore la simplification du parcours des femmes enceintes souhaitant recourir à l’IVG.

Concernant le délai légal en lui-même, vos rapporteures considèrent toutefois qu’il serait opportun de réfléchir à la prise en charge de certaines situations dans le cadre de l’IMG prévue aux articles L. 2212-1 à L. 2213-3 et R. 2213‑1 à R. 2213‑16 du code de la santé publique. En effet, une IMG peut être réalisée, sans délai limite de semaines de grossesse, si « la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme » ou s’il « existe une forte probabilité que l’enfant à naître soit atteint d’une affection d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic ». Or, la santé de la femme peut tout à fait être mise en péril sur un plan psycho-social – et non pas seulement d’un point de vue uniquement physiologique.

Il importe de mieux prendre en compte l’aspect psycho-social de la santé de la femme dans les décisions d’IMG. Selon un rapport de 2007 du centre Hubertine-Auclert, les situations de viol ne sont par exemple par suffisamment prises en compte. Il considère que « pour les femmes [victimes de viol] ayant dépassé les délais légaux de l’IVG en France, l’IMG reste d’un accès difficile, elles ont alors recours à l’IVG à l’étranger » ([118]). Il est pourtant concevable qu’une femme enceinte à la suite d’un viol puisse vouloir interrompre sa grossesse à tout moment, par une IVG jusqu’à la 12e semaine ou par une IMG ensuite. De la même manière, les situations de dénis de grossesse doivent également être prises en compte.

Selon la docteure Perrine Millet, gynécologue obstétricienne, créatrice de l’association Un maillon manquant qui vise à une meilleure prise en charge des violences sexistes et sexuelles par les personnels de santé, une IVG sur quatre serait liée à une situation de violences. Or, elle estime que cette réalité, confirmée par plusieurs des acteurs de terrain rencontrés, n’est absolument pas prise en compte. Vos rapporteures estiment pourtant que les violences sont également un élément de détresse psycho-sociale à prendre en compte dans une décision d’IMG et appellent à un meilleur accompagnement des femmes dans ces situations. Une meilleure prise en compte des éléments psycho-sociaux pouvant représenter un danger pour la santé de la femme dans le cadre de la procédure d’IMG serait de nature à améliorer la prise en charge des femmes souhaitant recourir à un avortement.

La position du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) sur l’IMG pour détresse psycho-sociale

L’IMG d’indication maternelle implique une prise en compte des causes psycho‑sociales « lorsqu’il y a péril grave pour la santé de la mère ». Ce cadre juridique existe depuis la loi du 4 juillet 2001 (Code de la santé publique, article L. 2213-1 et suivants ; article R. 2213-1 et suivants).

L’IMG psycho-sociale est actuellement mal connue dans les services de gynécologie‑obstétrique. Elle concerne des femmes en situation de danger personnel, de violences, de difficultés psychologiques majeures ou d’extrême précarité, rendant impossible la poursuite de leur grossesse alors même qu’elles dépassent le délai légal de l’IVG de 14 semaines d’aménorrhée. Ces situations rendent compte d’une bonne part des déplacements à l’étranger pour interruption de grossesse, néfastes pour la santé, onéreux voire inaccessibles pour certaines femmes.

La prise en charge de ces femmes est inégalement répartie sur le territoire national. Recevoir et écouter les femmes, les informer sur l’ensemble des alternatives et des aides psychologiques, sociales et médicales, et débattre au sein de nos staffs dédiés de la nécessité de les prendre en charge ne présume en rien de la conclusion décisionnelle de l’équipe. Cela permet simplement de mesurer le degré de détresse, ce qui n’a pas lieu lorsque les structures hospitalières éconduisent d’emblée les femmes qui ont dépassé le délai légal de l’IVG. Le CNGOF recommande une formalisation de ces IMG dans chaque centre avec le centre pluridiscplinaire de diagnostic prénatal local (en charge d’un bilan annuel d’activité).

Cette discussion au sein du service analyse le péril (gravité - certitude - immédiateté) pour la santé de la mère.

Les situations difficiles, voire dramatiques, que vivent les femmes justifient des processus de réflexion des équipes médicales dans la clarté et la transparence en utilisant complètement les dispositions légales de notre pays.

L’accueil, la rencontre ainsi que les décisions doivent être mis en œuvre par ceux qui sont en responsabilité de réaliser les actes d’IMG.

Les principes éthiques qui soutiennent cette nécessité de prise en charge sont les principes de justice, d’autonomie auxquels s’ajoute l’obligation d’information éclairée des femmes.

Source : http://www.cngof.fr/actualites/677-img-psycho-sociale-position-du-cngof

 

Recommandation n° 19 : améliorer la prise en compte des éléments psycho‑sociaux de nature à représenter un péril grave pour la femme enceinte souhaitant recourir à une IMG et modifier la composition des collèges de médecins appelés à statuer sur ces demandes, afin d’y assurer la présence d’un médecin pratiquant des IVG dans un centre d’orthogénie, plus à même d’apprécier le risque psycho-social qu’un médecin pédiatre.

3.   Respecter le choix des femmes entre les trois méthodes d’IVG

La femme a le choix entre trois méthodes d’IVG : l’IVG médicamenteuse, l’IVG chirurgicale avec anesthésie locale et l’IVG chirurgicale avec anesthésie générale.

Ce choix connaît un certain nombre de limites textuelles :

– si l’IVG est réalisée en ville avant 5 semaines de grossesse, elle ne peut être réalisée que par voie médicamenteuse. Si la femme souhaite recourir à une IVG instrumentale, elle n’a pas d’autre choix que de se rendre en établissement de santé ou en centre de santé ;

– au contraire, si l’IVG est réalisée après le délai de 9 semaines de grossesse, cette IVG ne peut être qu’instrumentale ; dans ce cas, la femme conserve le choix de la méthode d’anesthésie qui peut être locale ou générale.

L’intérêt du choix par les femmes de la méthode d’IVG est illustré par une étude écossaise reprise dans le rapport de l’IGAS de 2009 ([119]). Selon cette étude, le taux d’insatisfaction vis-à-vis de la méthode employée des femmes ayant pu choisir leur méthode d’IVG s’élevait à 5 % alors que le taux d’insatisfaction vis‑à‑vis de la méthode employée de celles n’ayant pu exercer le choix de la méthode d’IVG s’élève à 22 %. Les auteurs de l’étude concluent en indiquant que les femmes souhaitant recourir à la méthode d’IVG de leur choix devraient pouvoir être libres de le faire.

À ce premier constat s’opposent plusieurs éléments. Les femmes restent dépendantes de l’offre de soin disponible sur leur territoire. Selon les calculs réalisés par le journal Le Monde, entre 2007 et 2017, hors fusions d’établissements, 70 centres ont fermé en France métropolitaine. En dix ans, le nombre de centres pratiquant l’IVG a diminué de 7,7 % ([120]). Ici encore, des inégalités entre les territoires sont constatées. En 2019, dans un rapport tirant les principaux enseignements de l’enquête qualitative et territoriale auprès des ARS, le ministère de la santé a reconnu qu’il existait en France « des territoires en tension dans la majorité des régions » où des difficultés pour l’accès à certaines techniques d’IVG étaient observées ([121]). 37 départements compteraient ainsi moins de cinq professionnels de santé libéraux pratiquant les IVG médicamenteuses ([122]). Ce manque de structures et les disparités sur le territoire restreignent inévitablement l’offre de soins et par conséquent, la liberté des femmes à recourir à la méthode d’IVG de leur choix.

Ensuite, vient le coût respectif des IVG médicamenteuse et chirurgicale. En effet, il faut rappeler que l’activité d’IVG chirurgicale s’effectue à perte pour les établissements de santé ([123]). Ainsi, l’IVG médicamenteuse présente pour ces derniers l’avantage d’être plus rapide et moins coûteuse, tout en permettant de ne pas avoir à utiliser de lits ou de places dans les blocs opératoires. La réalisation d’IVG médicamenteuse est donc plus intéressante, d’un point de vue purement financier, pour les établissements de santé, comme cela a été dit à plusieurs reprises au cours des auditions de vos rapporteures, ainsi que dans plusieurs analyses faites du contexte hospitalier français ([124]). On peut légitimement supposer que cet état de fait trouve sa traduction dans la proportion toujours plus grande d’IVG médicamenteuses réalisées en France : 30 % en 2001 contre 70 % en 2018, avec une évolution stable depuis lors ([125]).

De plus, comme l’indique l’IGAS en 2019 : « dans son rapport remis au Gouvernement en 1999 sur l’IVG en France le Pr. Nisand indiquait : "il semble que le choix de la technique utilisée soit déterminé par la pratique des centres d'IVG, avec peu de possibilités de choix pour les femmes". Dix ans après la situation ne semble pas s’être fondamentalement modifiée alors même que l’éventail des méthodes théoriquement utilisables s’est accru avec l’IVG médicamenteuse » ([126]).

Enfin, les femmes ayant recours à l’IVG souffrent parfois d’un manque d’information, notamment sur le fait qu’elles ont le droit de choisir la méthode de leur IVG. Au cours de leurs déplacements, vos rapporteures ont pu constater que l’information des femmes s’était largement améliorée grâce au site gouvernemental sur l’IVG, mais qu’elle demeure disparate. Certaines femmes ne connaissent par exemple pas l’existence de l’IVG médicamenteuse avant de consulter un médecin.

Vos rapporteures considèrent qu’un meilleur accès à l’IVG passe aussi par une meilleure information des femmes de leur droit au choix de la méthode d’IVG. En effet, différentes études montrent qu’une IVG est mieux vécue lorsque la femme a effectivement le choix de la méthode. Or, une grande partie d’entre elles ne sont pas informées de ce droit et il semble que ce choix est souvent dicté par les réalités territoriales et médicales. Ainsi, des efforts doivent être déployés afin que les femmes soient informées de leur droit au choix à la méthode dès, voir avant, leurs premières démarches d’accès à l’IVG.

Recommandation n° 20 : développer et pérenniser l’accès aux différentes techniques d’IVG sur l’ensemble du territoire, en intégrant dans la formation initiale et la formation continue des praticiens susceptibles de pratiquer une IVG (gynécologues-obstétriciens, médecins généralistes, sages-femmes), une formation pratique à ces techniques, y compris pour l’IMG qui concerne des grossesses plus avancées que celles rentrant dans le délai de l’IVG.

Recommandation n° 21 : améliorer l’information des femmes sur leur droit au choix de la méthode d’IVG, en recommandant notamment aux médecins de présenter systématiquement les différentes méthodes à chaque femme se présentant pour une IVG et de lui préciser effectivement qu’elle a le choix de la méthode.

C.   Un besoin de dÉculpabilisation du recours À l’ivg et de sensibilisation aux enjeux de la contraception

Le problème d’accès à l’IVG trouve ses racines dans les représentations mentales et sociétales liées à l’avortement. Cette question sensible qui touche au contrôle de la fécondité et à la maîtrise de leur corps par les femmes fait encore débat, même si les législations autorisant le recours à l’avortement se sont multipliées dans la plupart des pays. Le faible nombre de praticiens et d’établissements de santé pratiquant l’avortement par rapport à une demande qui s’avère stable de la part des femmes, traduit ces réticences cachées. Le sort matériel fait à cet acte (absence d’implication des pouvoirs publics, moyens dédiés insuffisants, dévalorisation de l’acte) n’est que l’expression de mentalités qui évoluent plus lentement que la législation.

Cette situation n’est pas acceptable et il est impératif de mettre l’accent sur la formation des professionnels de santé, sur l’information des femmes et sur l’éducation de tous, les représentations mentales se formant dès le plus jeune âge.

1.   Changer le regard de la société et des professionnels de santé sur l’IVG

En France, malgré les évolutions législatives, le regard porté sur l’IVG reste encore trop souvent négatif. De nombreuses femmes ne peuvent toujours pas parler librement de leur avortement à leurs proches ou à leur famille, et certains professionnels de santé ne cachent pas leur désapprobation relative à cet acte médical. En outre, le tabou qui règne autour de l’IVG, acte médical légal depuis 45 ans, se renforce par les attaques de groupes conservateurs, très présents sur les réseaux sociaux, culpabilisant les femmes qui désirent avorter. Des sites comme « ivg.net » ou la page Facebook « IVG vous hésitez ? Venez en parler » regorgent de témoignages accusateurs et culpabilisants.

Le changement de regard sur l’avortement doit se traduire par un changement de vocabulaire. En effet, certains mots créent un sentiment de culpabilité chez les femmes en décrivant l’avortement comme un « échec » ou une « épreuve douloureuse » à affronter. Ce vocabulaire peut être employé aussi par bien par les proches que par les professionnels de santé eux-mêmes. D’après l’étude « Prise en charge et stigmatisation des avortantes dans l’institution médicale : la classe des femmes sous surveillance » des sociologues Marie Mathieu et Lucile Ruault, l’IVG reste un acte très stigmatisé dans le milieu médical ([127]). Les femmes ayant eu recours à l’IVG sont encore perçues par certains professionnels de santé comme des personnes « déviantes » ou « en situation de détresse ». Certains professionnels n’hésitent pas à qualifier les femmes ayant eu recours plusieurs fois à l’IVG de « récidivistes », mot relevant du registre criminel aux lourdes connotations négatives. Ces observations concordent avec les résultats de l’enquête menée en 2015 par l’ARS d’Île-de-France sur l’expérience de l’IVG qui révèle qu’un tiers des femmes a rencontré de difficultés d’accès ou d’accompagnement. Parmi elles, 15 % déclarent avoir subi des pressions psychologiques de la part d’un professionnel de santé et 12 % évoquent des commentaires inappropriés ou culpabilisants ([128]).

Ainsi, le changement de regard sur l’IVG doit passer par une banalisation du discours et un meilleur accès à des informations fiables et non culpabilisantes pour les femmes. Le site « IVG, je vais bien, merci ! » s’inscrit dans cette démarche de libération de la parole des femmes ([129]). Pour contrer les discours trop souvent culpabilisants, le site regroupe des témoignages de femmes ayant eu recours à l’IVG, mais refusant de se sentir coupables ou en détresse. « Cette décision doit être respectée : nous ne sommes pas des idiotes ou des inconséquentes. Nous n’avons pas à nous sentir coupables, honteuses ou forcément malheureuses […] Nous déclarons avoir avorté et n’avoir aucun regret : nous allons très bien » ([130]). Rappelons que s’il peut être un acte difficile à vivre pour certaines femmes, aucune étude ne prouve que l’avortement engendre des traumatismes physiques ou psychologiques comme peuvent l’affirmer les détracteurs de l’IVG. Il s’agit en réalité d’un acte médical qui fait partie du parcours de vie de nombreuses femmes et qui ne doit pas être stigmatisé ni stigmatisant, aussi bien pour les femmes que pour les soignants.

2.   Améliorer l’éducation à la contraception

La sensibilisation à la contraception doit avoir lieu à la fois avant et après le recours à l’IVG. Il est important que chaque femme puisse avoir accès facilement à ces informations afin de trouver la contraception adaptée. Comme l’a expliqué Mme Anouk Fouilloux, sage-femme de la Maison de Santé de Fontbarlettes, la contraception n’est pas toujours facile et certaines femmes peinent à trouver une méthode qui leur convienne. Or, une contraception adaptée est une condition nécessaire pour éviter au mieux les grossesses non désirées et certains recours à l’IVG.

Des initiatives d’information et d’éducation à la contraception existent déjà. C’est par exemple le cas du site choisirsacontraception.fr, un site public géré par l’agence nationale Santé publique France. Ce dernier présente la totalité des moyens de contraceptions efficaces connus, avec toutes les informations pratiques pour se les procurer ou les utiliser.

Durant la scolarité, chaque élève doit en principe suivre des séances d’éducation à la vie sexuelle et affective pendant lesquelles sont abordées, entre autres, les questions de contraception. L’article L. 312-16 du code de l’éducation dispose ainsi qu’une « information et une éducation à la sexualité sont dispensées dans les écoles, les collèges et les lycées à raison d'au moins trois séances annuelles et par groupes d'âge homogène. Ces séances présentent une vision égalitaire des relations entre les femmes et les hommes. Elles contribuent à l'apprentissage du respect dû au corps humain. Elles peuvent associer les personnels contribuant à la mission de santé scolaire et des personnels des établissements mentionnés au premier alinéa de l'article L. 2212-4 du code de la santé publique ainsi que d'autres intervenants extérieurs conformément à l'article 9 du décret n° 85-924 du 30 août 1985 relatif aux établissements publics locaux d'enseignement. Des élèves formés par un organisme agréé par le ministère de la santé peuvent également y être associés ».

Or, comme le souligne le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes (HCE), : « quinze ans après l’obligation légale d’assurer l’éducation à la sexualité auprès des jeunes, le constat est unanime et partagé : l’application effective des obligations légales en matière d’éducation à la sexualité en milieu scolaire demeure encore parcellaire, inégale selon les territoires car dépendante des bonnes volontés individuelles. Elle est, selon le point de vue de certain.e.s acteur.rice.s, inadaptée aux réalités des jeunes » ([131]).

Le baromètre du Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes

25 % des écoles répondantes déclarent n’avoir mis en place aucune action ou séance en matière d’éducation à la sexualité, nonobstant leur obligation légale.

Les personnels de l’Éducation nationale sont très peu formés à l’éducation à la sexualité.

Lorsque l’éducation à la sexualité est intégrée à des enseignements disciplinaires, elle est largement concentrée sur les sciences (reproduction) plutôt que d’être intégrée de manière transversale en lien avec la dimension citoyenne et l’égalité filles-garçons.

Lorsque des séances ou actions d’éducation à la sexualité sont menées, cela ne concerne pas toutes les classes du CP à la Terminale, mais en priorité des classes de CM1 et de CM2 pour l’école, des classes de 4ème et 3ème pour le collège, et des classes de 2nde pour le lycée.

Les thématiques les plus abordées sont la biologie/reproduction, l’IVG/contraception, le VIH/Sida et la notion de « respect », notamment entre les sexes. À l’inverse, les questions de violences sexistes et sexuelles ou d’orientation sexuelle sont les moins abordées.

Le manque de moyens financiers, de disponibilité du personnel et la difficile gestion des emplois du temps sont perçus comme les principaux freins à la mise en œuvre de l’éducation à la sexualité et, a contrario, la formation est vue comme le principal facteur facilitateur. »[132]

Source : Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, rapport n° 2016-06-13-SAN-021 relatif à l’éducation à la sexualité « Répondre aux attentes des jeunes, construire l’égalité femmes-hommes », 13 juin 2016.

Lors de son audition le Syndicat national des infirmiers et infirmières éducateurs en santé (SNIES-UNSA) a indiqué quant à lui que « les infirmier.e.s participent aussi directement aux séances auprès des élèves sur des thématiques très variées : plus de 49 % des élèves, tous niveaux confondus, ont bénéficié d’au moins une action collective de prévention pilotée par l’infirmier.e. Selon l’enquête SNIES « Notre Métier », environ deux tiers des élèves bénéficient chaque année d’au moins une action de prévention menée par l’infirmier.e. Parmi ces actions, 9 sur 10 concernent l’éducation à la vie affective et sexuelle » ([133]).

Il est ainsi possible d’identifier un nombre important d’obstacles pratiques à la mise en œuvre des séances d’éducation à la sexualité à l’école, comme le montrent d’ailleurs plusieurs rapports de la Délégation aux droits des femmes. Or, ces séances sont les moments privilégiés pour aborder les questions relatives à la contraception. Concernant l’IVG en tant que telle, elle n’est pas présente dans les ressources thématiques d’éducation à la sexualité proposées par Eduscol ([134]). L’IVG ne semble ainsi abordée qu’au détour des fiches 8 et 9, consacrées respectivement à la contraception ([135]) et au désir d’enfant, aux grossesses adolescentes, à la parentalité et la famille ([136]).

Recommandation n° 22 : conformément à l’article L. 312-16 du code de l’éducation, assurer le respect effectif de l’obligation d’éducation à la sexualité et à l’égalité dans le cursus scolaire, notamment dès l’école primaire, en réaffirmant les obligations incombant aux directeurs d’établissement, en s’assurant de la formation des personnels et de l’existence de moyens humains et financiers suffisants pour mettre en œuvre les trois séances annuelles.

Recommandation n° 23 : réserver dans chaque établissement scolaire un volume horaire du CP à la Terminale et une enveloppe budgétaire dédiés à l’organisation des trois séances annuelles d’éducation à la sexualité et à l’égalité.

Recommandation n° 24 : organiser une diffusion plus large des outils pédagogiques existants afin de mieux sensibiliser la communauté éducative et de la doter de supports opérationnels lui permettant d’animer les séances d’éducation à la sexualité et à l’égalité.

3.   Simplifier le recours à l’IVG par une meilleure information relative au dispositif

Actuellement, malgré un certain nombre d’outils disponibles, dont beaucoup à l’initiative de structures associatives comme le Planning familial, on constate un déficit d’information patent des femmes, notamment des publics les plus fragiles, tant en ce qui concerne l’IVG de manière générale que des modalités pratiques pour celles qui souhaitent y recourir.

Des campagnes d’information nationales organisées à périodicité régulière apparaissent donc indispensables pour que l’information diffuse dans toutes les couches sociales et sur l’ensemble du territoire. De telles campagnes devraient utiliser différents vecteurs pour être sûres d’atteindre tous les publics. Ainsi, il est observé que les jeunes se renseignent en priorité sur Internet, notamment sur les réseaux sociaux, tandis que d’autres vecteurs, comme la presse, la télévision ou l’affichage sont davantage susceptibles de retenir l’attention des autres femmes. Il ne faut pas négliger les publics précaires (femmes SDF, femmes migrantes) pour lesquelles un suivi personnalisé est nécessaire. Il est donc important de renforcer les moyens dont sont dotés les travailleurs sociaux, afin qu’ils puissent développer cette action d’information auprès des femmes les plus exposées. Cette information devrait être relayée au niveau local, par exemple par la mise à disposition de plaquettes d’information dans les services ouverts au public : mairies, caisses primaires d’assurance maladie, CAF, Pôle Emploi, etc.

Par ailleurs, le souci principal des femmes, qui engendre des pertes de temps en début de parcours, est de savoir à quel praticien (gynécologue, médecin généraliste, sage-femme) s’adresser au plus près de son domicile. Cela passe nécessairement par la constitution d’annuaires régionaux, dont la mise en place et l’actualisation régulière devrait être confiées en priorité aux ARS qui ont pour mission principale l’organisation de l’offre de soins.

Les difficultés du parcours d’IVG sont en partie imputables au manque d’informations théoriques mais surtout pratiques sur l’IVG qui, cumulé avec le nombre insuffisant de praticiens et de structures dédiées, rend ce parcours particulièrement pesant et angoissant pour les femmes concernées et les place parfois en situation délicate par rapport aux délais légaux.

Si le renforcement de l’offre de soins nécessite des actions à moyen et long termes, et passe certainement par des assouplissements concernant les acteurs autorisés à pratiquer l’IVG, l’amélioration de l’information fait quant à elle appel à des mesures plus faciles à mettre en œuvre et dans de meilleurs délais. Or, elle contribuerait de manière significative à fluidifier le parcours d’IVG, en évitant les pertes de temps en début de grossesse.

Il convient donc de se mobiliser rapidement pour que ce droit fondamental reconnu aux femmes soit un droit effectif et non un droit virtuel, à géométrie variable, creusant les inégalités sociales et territoriales. Il en va de la dignité des femmes et de leur sérénité face aux aléas de l’existence.

Recommandation n° 25 : promouvoir des campagnes nationales d’information sur l’IVG, utilisant différents moyens de diffusion et s’inscrivant dans la durée.

 

 


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   TRAVAUX DE LA dÉlÉgation

Lors de sa réunion du 16 septembre 2020, sous la présidence de Mme Marie‑Pierre Rixain, la Délégation a adopté le présent rapport et les recommandations présentées supra (pages 11 à 13).

La vidéo de cette réunion est accessible en ligne sur le portail vidéo de l’Assemblée nationale à l’adresse suivante : http://assnat.fr/W9B2JQ

 

 

 


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   annexe 1 : Éléments de comparaison internationale

La situation en Europe et l’exemple de la Pologne

Dans certains pays, y compris dans les pays développés, la difficulté d’accès à l’IVG ne résulte pas uniquement d’une pénurie de praticiens et d’une offre de soins inégale. C’est le droit même à l’IVG qui est remis en question dans certains pays, par exemple la Pologne. Dans certains pays européens, la difficulté d’accès à l’IVG peut résulter non seulement d’un déficit de praticiens ou des caractéristiques de l’offre de soins, comme c’est le cas en Italie, mais aussi d’une remise en cause même du droit l’IVG, comme c’est le cas en Pologne.

« En 2017, parmi les 43 pays européens, 29 l’autorisent à la demande de la femme, soit pour 72 % des femmes européennes en âge fécond, et 4 pour des raisons socioéconomiques. Une majorité de pays ont révisé leur législation dans les années 19701980. L’accès à l’avortement demeure restreint dans les autres : il est même totalement interdit dans 4 pays (Andorre, Malte, Saint-Marin et le Vatican) ; il est légal depuis 2013 en Irlande en cas de danger pour la vie de la femme, l’autorisation en cas de malformation du fœtus ayant été rejetée. En mai 2018, un référendum a été organisé pour libéraliser l’avortement. Les Irlandais ont majoritairement voté en faveur de cette réforme autorisant l’interruption volontaire de grossesse (IVG) sans conditions jusqu’à 12 semaines de grossesse, et jusqu’à 24 semaines dans des cas exceptionnels. Les lois se sont également assouplies ces dernières décennies dans quelques pays européens : depuis la fin des années 1990, l’Albanie, l’Espagne, l’Estonie, le Luxembourg, le Portugal et la Suisse l’autorisent sans restriction, et depuis 2009 il l’est à Monaco pour préserver la vie ou la santé de la femme, en cas de malformation du fœtus, de viol ou d’inceste » ([137]).

Il existe en Europe une forme de consensus pro-IVG, d’ailleurs souligné en 2008 par une résolution du Conseil de l’Europe qui « considère que l’avortement ne doit pas être interdit dans les délais de gestation raisonnables. Interdire l’avortement n’aboutit pas à réduire le nombre d’avortements : cela mène surtout à des avortements clandestins, plus traumatisants, et contribue à l’augmentation de la mortalité maternelle et/ou au développement du " tourisme de l’avortement ", qui est coûteux, reporte le moment de l’avortement et engendre des inégalités sociales » ([138]).

Malgré cette forme de consensus, plusieurs pays européens connaissent des législations bien plus restrictives ou des difficultés d’accès importantes.

Alors que l’IVG avait été légalisé en 1956, les lois polonaises relatives à l’avortement font aujourd’hui partie des plus restrictives en Europe, limitant son accès à quatre circonstances : en cas de malformation du fœtus, de viol, d’inceste ou de danger grave pour la santé de la femme enceinte. Ces limitations conduisent les femmes souhaitant avoir recours à une IVG en dehors de ces quatre cas à subir des avortements illégaux, parfois particulièrement dangereux pour leur santé. De manière répétée, en 2011, 2013, 2015 et 2016, des projets de loi tendant à interdire l’avortement en toutes circonstances ont été présentés, mais ont été retirés face à d’importants mouvements sociaux. En 2018 encore, un nouveau projet de loi tendait à interdire l’avortement en cas de malformation du fœtus – ce qui représente 95 % des avortements légaux selon Amnesty International ([139]) – mais il n’a pas été adopté.

Même dans les pays où l’accès à l’IVG est permis par la loi, l’accès peut y être drastiquement limité, au point de constituer un véritable déni de droit. En Italie, la proportion des médecins objecteurs de conscience atteint les 93 % dans certaines régions ([140]). En Irlande, depuis le 1er janvier 2019, l’IVG est autorisée sans conditions jusqu’à 12 semaines de grossesse et jusqu’à 24 semaines s’il existe un risque sérieux pour la santé ou la vie de la femme enceinte. L’IVG est également autorisée en cas d'anomalie du fœtus qui pourrait conduire à sa mort in utero. L’ONG Amnesty International estime cependant que de graves lacunes demeurent, telles que « l’ambiguïté induite par le terme retenu, à savoir le "préjudice grave" pour la santé d’une femme, l’absence de disposition concernant l’accès aux services en cas de malformations graves et non mortelles du fœtus, les délais obligatoires et le maintien de la criminalisation des professionnels de santé » ([141]).

Enfin, rappelons que l’IVG est toujours totalement interdite à Malte. Les femmes ayant avorté ou les médecins ayant pratiqué une IVG risquent jusqu'à trois ans de prison ferme.

La situation aux États-Unis

Les États-Unis connaissent également des restrictions importantes à l’accès à l’IVG, malgré la garantie constitutionnelle apportée par la décision de la Cour suprême Roe v. Wade de 1973 ([142]). Il existe cependant un fort mouvement conservateur militant pour la remise en cause du droit à l’avortement et ce dernier a connu récemment une montée en puissance du fait de l’arrivée d’une majorité conservatrice à la Cour Suprême. Cette situation pourrait conduire à remettre en cause la jurisprudence Roe v. Wade protectrice du droit à l’IVG, d’autant qu’un certain nombre d’États ont adopté des lois anti-avortement afin de fournir la base juridique pour qu’une affaire puisse remonter jusqu’à la Cour suprême. Le plus emblématique de ces textes est une loi de l’Alabama, adoptée au printemps 2019 ([143]), qui prévoit une interdiction totale de l’avortement, sauf risque pour la vie de mère (ce qui exclut donc le viol, l’inceste et la malformation ou non-viabilité du fœtus) et qui punit la pratique de l’avortement par un médecin de 99 ans de réclusion criminelle ([144]). Certains états ont adopté des « trigger laws », des lois qui entreront en vigueur si la Cour suprême devait abandonner sa jurisprudence Roe v. Wade et qui ont pour objet d’interdire l’accès à l’avortement. Une technique couramment utilisée est celle consistant à faire appliquer de manière extrêmement stricte des mesures de sécurité draconiennes aux centres et cliniques d’avortement de manière à rendre très difficile leur activité, voire à obtenir leur fermeture.


   Annexe 2 : personnes entendues par lA dÉlÉgation

 Mercredi 24 juillet 2019

Planning familial :

‒ Mme Sarah Durocher, coprésidente nationale du Planning familial

‒ Mme Martine Leroy, trésorière du Planning familial

Association Nationale des Centres d’IVG et de Contraception (ANCIC) :

‒ Mme Chrystel Mathurin-Bornat, coprésidente de l’ANCIC

Réseau entre la ville et l’hôpital pour l’orthogénie (REVHO) :

‒ Dr Philippe Faucher, praticien hospitalier à l’unité fonctionnelle d’orthogénie, pôle périnatalité, hôpitaux universitaires Est parisien - site Armand Trousseau, membre du réseau REVHO

‒ Dr Anne-Elisabeth Mazel, médecin généraliste, praticienne hospitalière contractuelle dans le service d’orthogénie de l’hôpital Avicenne et chargée de mission numérique au sein du réseau REVHO

 Jeudi 28 mai 2020 (visioconférence)

Planning familial :

‒ Mme Sarah Durocher, coprésidente nationale du Planning familial

‒ Mme Bénédicte Paoli, membre du bureau confédéral du Planning familial

‒ M. Jean-Louis Roussel, président du Planning familial de l’Aveyron

Maison des femmes à Saint-Denis :

‒ Dr Ghada Atem, gynécologue, médecin-chef de la Maison des femmes à Saint‑Denis

 


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   annexe 3 : personnes entendues par les RAPPORTEUREs

 Mercredi 10 juillet 2019

Agir pour la santé des femmes (ADSF) :

‒ Mme Nadège Passereau, déléguée générale de l’ADSF

‒ Mme Marème Sylla, responsable de la coordination de soins

Fédération nationale des centres d’information sur les droits des femmes et des familles (FNCIFF) :

‒ Mme Annie Guilberteau, présidente de la FNCIDFF

 Jeudi 26 septembre 2019

Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) :

‒ Dr Philippe David, gynécologue obstétricien, pôle hospitalier mutualiste Jules Verne, membre de la commission sur l’orthogénie et de la commission d’éthique du CNGOF

Conseil national professionnel de gynécologie et obstétrique (CNPGO) et Fédération Nationale des Collèges de Gynécologie Médicale (FNCGM) :

‒ Dr Arnaud Grisey, gynécologue obstétricien

‒ Dr Héliane Missey Kolb, vice-présidente de la FNCGM

Conseil national de l’ordre des médecins :

‒ Dr Anne-Marie Trarieux, présidente de la section éthique et déontologie

‒ Dr Claude Siret, conseillère nationale

 Jeudi 10 octobre 2019

Association nationale des sages-femmes orthogénistes (ANSFO) :

‒ Mme Alice Rocq, présidente de l’ANSFO

‒ Mme Marie Astrid Bernon, sage-femme

‒ Mme Delphine Giraud, sage-femme

Conseil national de l’ordre des sages-femmes (CNOSF) :

‒ Mme Anne-Marie Curat, présidente du CNOSF

‒ M. David Meyer, chargé des relations institutionnelles

‒ Mme Sandrine Brame, trésorière

Syndicat national des gynécologues et obstétriciens de France (Syngof) :

‒ Dr Elisabeth Paganelli, secrétaire générale du Syngof

 Mardi 15 octobre 2019

Agence régionale de santé Ile-de-France :

‒ Mme Laurence Desplanques

Collège national des sages-femmes de France (CNSF) :

‒ M. Adrien Gantois, président du CNSF

Syndicat national des infirmiers et infirmières éducateurs de santé (SNIEUNSA) :

‒ M. Alexandre Faure-Maury, secrétaire national

− Mme Annie Routier, secrétaire nationale

 Mardi 22 octobre 2019

Caisse nationale de l’Assurance maladie (CNAM) :

‒ M. François-Xavier Brouck, directeur des assurés

‒ Mme Mathilde Marmier, responsable adjointe du département des produits de santé

Direction générale de l’enseignement scolaire (DGESCO) :

‒ Mme Anne Bennet, adjointe à la sous-directrice de la vie scolaire, des établissements et des actions socio-éducatives

‒ Mme Véronique Gasté, cheffe du bureau de la santé, de l’action sociale et de la sécurité

− Mme Nathalie Bajos, directrice de recherche à l’INSERM

Réseau entre la ville et l’hôpital pour l’orthogénie (REVHO) :

‒ Dr Philippe Faucher, praticien hospitalier, unité fonctionnelle d’orthogénie, pôle périnatalité, Hôpitaux universitaires Est parisien, site Armand Trousseau

 


 Mardi 29 octobre 2019

Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) :

‒ Mme Catherine Lesterpt, adjointe à la cheffe de service des droits des femmes et de l’égalité entre les femmes et les hommes

‒ Mme Julie Vanhecke, chargée de mission

Direction générale de l’offre de soins (DGOS) :

‒ Mme Sylvie Escalon, sous-directrice de la régulation de l’offre de soins par intérim

‒ Mme Frédérique Collombet-Migeon, chargée de mission périnatalité

‒ Dr Lydia Valdes, adjointe à la cheffe de bureau Plateaux techniques et prises en charge hospitalières aigües

 Mardi 5 novembre 2019 :

Assistance Publique des Hôpitaux de Paris (AP-HP)

‒ Dr Elisabeth Carricaburu, cheffe du service périnatalité de l’AP-HP

‒ Dr Sophie Gaudu, gynécologue orthogéniste

Santé Publique France :

‒ Mme Lucile Bluzat, en charge de la communication sur la thématique santé sexuelle

Haute Autorité de Santé (HAS) :

− Dr Marie-Hélène Rodde-Dunet, cheffe du service de l’évaluation de la pertinence des soins et de l’amélioration des pratiques et des parcours, à la Direction de l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins


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   Annexe 3 : déplacements des rapporteures

 Déplacement de Mme Battistel à Avignon, le 3 février 2020

− M. Bertrand Gaume, Préfet de Vaucluse

Centre hospitalier de Cavaillon :

− Mme Anne Desroche, directrice adjointe de l’hôpital

− Docteur Khélifa Abrous, chef de service gynécologie obstétrique et du centre de planification et d'éducation familiale (CPEF)

− Docteure Zivile Névérauskiene, médecin référent du CPEF

− Mme Patricia Duret, sage-femme, coordinatrice du pôle chirurgie obstétrique et du CPEF

− Mme Emmanuelle Debeir, sage-femme du service gynécologie obstétrique et du CPEF

− M. Franck Delétraz, conseiller conjugal et familial du CPEF

ARS et Planning Familial :

− Mme Nadra Benayache, déléguée départementale adjointe de Vaucluse, responsable du département animation des politiques territoriales

− M. Christophe Tonner, chargé de mission au département animation des politiques territoriales de la délégation de Vaucluse

− Mme Caroline Van de Vondèle, chargée de mission soins en détention, IVG et autorisations de chirurgie esthétique à la Direction de l’offre de soins à Marseille

− Dr Perrine Mazet, gynécologue médicale, responsable du CPEF du centre hospitalier d’Avignon

− Mme Ghislaine Dejean, présidente du Planning Familial de Vaucluse

− Mme Diane Lindeckert, directrice du Planning Familial de Vaucluse

− Dr Michel Cadart, médecin du Planning Familial de Vaucluse

− Mme Ladaycia Chafica, conseillère conjugale et familiale au Planning Familial de Vaucluse

− Mme Andrée Badaroux, conseillère conjugale et familiale au Planning Familial de Vaucluse

 Déplacement des rapporteures à Valence le 5 février

− M. le Préfet Hugues Moutouh préfet de la Drôme

Planning familial :

− Mme Frédérique Clausse, Secrétaire générale, et plusieurs salariés du Planning familial.

Association « Un Maillon manquant » :

− Mme Perrine Millet, présidente de l’association

Agence régionale de santé :

− Mme Zhour Nicollet, déléguée territoriale de l’ARS de la Drôme

− Mme Brigitte Vitry, responsable du pôle de santé publique

−  Mme Françoise Marquis

Conseil départemental de la Drôme :

−  M. Bernard Haegel, directeur des territoires d'action sociale du Conseil départemental de la Drôme 

Mme Hélène Guilbaud, conseillère conjugale et familiale

DDCS :

− Mme Annie Marchant, directrice adjointe de la DDCS

− Mme Marie‑Madeleine Koelsch, déléguée départementale aux droits des femmes

Maison de santé Fontbarlettes :

−  Mme Anouk Fouilloux, sage-femme

Centre hospitalier de Romans Hôpitaux Drôme Nord :

− M. Jean‑Pierre Coulier, directeur

− M. Damien Veyrier, cadre supérieur socio-éducatif, responsable du service social

− Dr Nicolas Gallo, médecin obstétricien chef de pôle femme enfant

− Mme Christelle Moréon, sage-femme coordinatrice pôle femme enfant

− Mme Caroline Meiller, conseillère conjugale

 

 Déplacement de Mme Battistel à Madrid (Espagne), les 12 et 13 février 2020

− Réunion avec Mmes Isabel Serrano et Filomena Ruggiero, de la Fédération des plannings familiaux d’Espagne (FPFE).

− Échanges avec des députés de la Commission à l’égalité.

− Réunion avec l’association des cliniques accréditées à l’IVG en Espagne et notamment Mme Francisca Garcia Gallego, présidente ; M. José Antonio Bosch, conseiller juridique ; Mme Eva Rodriguez Amario, vice‑présidente et Mme Celia Herrero, communication.

− Réunion avec M. Enrique del Olmo, de la Direction générale de la santé publique, de la qualité et de l’innovation, au ministère de la Santé.

− Réunion avec Mme Noelia Vera, Secrétaire d’État à l’égalité, et Mme Ángela Rodriguez, Conseillère de la ministre, ancienne députée et vice‑présidente de la Commission à l’égalité du Congrès des députés.

− Réunion à la Direction générale de l’humanisation et de l’attention au patient, du ministère régional de la Santé de la Communauté autonome de Madrid.

 Déplacement de Mme Battistel à Amsterdam (Pays-Bas), les 19 et 20 février 2020

− Mme Anne Genoud, Consule générale de France aux Pays-Bas ; Dr Xavier Fallières, anesthésiste à l’hôpital Albert Schweitzer de Dordrecht ; Mme Carole Liedorp, conseillère au service social du Consulat général d’Amsterdam ; Mme Aurélia Gimenez, conseillère politique intérieure et presse

Clinique Beahuis et Bloemenhovekliniek et rencontre avec :

− M. Rob Benschop et Mme Femke van Staaten, membres de la direction ;

− Dr Elles Garcia ;

− Mme Yvonne Borgaarts, porte-parole de l’ONG Rutgers ; Mme Ellen Giepmans, directrice de la FIOM.

Échanges avec le ministère de la Santé, du bien-être et des sports et notamment Mmes Sanne van Wezel et Systke de Jong, responsables du dossier avortement au sein de la direction santé publique.                        

Échanges au GGD (planning familial néerlandais) avec Mme Claudia van der Kleij-Hazelhoff, Cheffe de bureau, Direction - service du personnel

Échanges avec Mme Corinne Ellemeet (députée Groenlinks) à la Tweede Kamer (Deuxième chambre du Parlement).              


([1]) DREES, Etudes et résultats, septembre 2019, n° 1125.

([2]) DREES, Etudes et résultats, septembre 2019, n° 1125.

([3])  http://www.assemblee-nationale.fr/14/ta/ta0433.asp.

([4]) « Mettre fin au scandale des départs à l’étranger », rapport d’information de l’Assemblée nationale n° 2702 de Mme Danielle Bousquet, 15 novembre 2000.

([5]) DREES, 224 300 interruptions volontaires de grossesse en 2018, Etudes et Résultats n° 1125, septembre 2019.

([6]) Consulter les statistiques du ministère espagnol de la santé, de la consommation et du bien-être social : https://www.mscbs.gob.es/profesionales/saludPublica/prevPromocion/embarazo/tablas_figuras.htm.

([7]) Consulter le rapport annuel 2018 de la loi sur l'interruption de grossesse du ministère néerlandais de la santé, du bien-être et des sports: https://www.igj.nl/documenten/rapporten/2020/02/06/jaarrapportage-wet-afbreking-zwangerschap-2018.

([8]) Accès à l’IVG - Principaux enseignements de l’enquête qualitative et territoriale auprès des agences régionales de santé, Ministère des solidarités et de la santé, septembre 2019.

([9]) Source : Assemblée nationale, données fournies par les agences régionales de santé, 2018.

([10]) Ibid.

([11]) DREES, 224 300 interruptions volontaires de grossesse en 2018, Etudes et Résultats n° 1125, septembre 2019.

([12]) Consulter les statistiques du ministère espagnol de la santé, de la consommation et du bien-être social : https://www.mscbs.gob.es/profesionales/saludPublica/prevPromocion/embarazo/tablas_figuras.htm.

([13]) Consulter le rapport annuel 2018 de la loi sur l'interruption de grossesse du ministère néerlandais de la santé, du bien-être et des sports: https://www.igj.nl/documenten/rapporten/2020/02/06/jaarrapportage-wet-afbreking-zwangerschap-2018.

([14]) Ibid.

([15]) Article L. 2212-2 du code de la santé publique.

([16]) Article 127 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

([17]) Article R. 2212‑10 du code de la santé publique.

([18])  https://www.has-sante.fr/jcms/c_2857715/fr/ivg-medicamenteuse-les-protocoles-a-respecter

([19]) Article R. 2212‑11 du code de la santé publique. Avec une échographie de datation faite en amont

([20]) Article L. 2212‑2 du code de la santé publique.

([21]) Article R. 2212‑15 du code de la santé publique.

([22]) Disponible à l’adresse suivante : https://ivg.gouv.fr/IMG/pdf/guide_ivg_2018_dossier_guide.pdf.

([23]) Article L. 2212‑3 du code de la santé publique.

([24]) Article L. 2212‑4 du code de la santé publique.

([25]) Ibid.

([26]) https://ivg.gouv.fr/IMG/pdf/guide_ivg_2018_dossier_guide.pdf

([27]) Article 82 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

([28]) Article L. 2212‑5 du code de la santé publique.

([29]) Article R. 2212‑14 du code de la santé publique.

([30]) Article R. 2212‑18 du code de la santé publique.

([31]) Article L. 2212‑9 du code de la santé publique.

([32]) Article L. 2212-4 du code de la santé publique.

([33]) Loi n° 75-17 du 17 janvier 1975 relative à l'interruption volontaire de la grossesse.

([34]) Loi n° 82-1172 du 31 décembre 1982 relative à la couverture des frais afférents à l'interruption volontaire de grossesse non thérapeutique et aux modalités de financement de cette mesure.

([35]) Loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013.

([36]) Décret n° 2013-248 du 25 mars 2013 relatif à la participation des assurés prévue à l'article L. 322-3 du code de la sécurité sociale pour les frais liés à une interruption volontaire de grossesse et à l'acquisition de contraceptifs par les mineures.

([37]) https://www.ameli.fr/assure/sante/themes/ivg/cout-ivg

([38]) Voir partie II-A-1 du présent rapport pour le détail de ces remboursements.

([39]) Inspection générale des affaires sociales, Claire Aubin Danièle Jourdain Menninger, Laurent Chambaud, La prise en charge de l'interruption volontaire de grossesse, octobre 2009, page 45.

([40]) A ce sujet, voir la partie sur l’allongement du délai de recours à l’IVG ci-après.

([41]) Circulaire N° DGS/DHOS/DSS/DREES/04/569 du 26 novembre 2004 relative à l'amélioration des conditions de réalisation des interruptions volontaires de grossesse : pratique des IVG en ville et en établissements de santé – consulter le texte de la circulaire.

([42]) Table ronde organisée par la délégation aux droits des femmes le 24 juillet 2019 – voir la vidéo.

([43]) Ibid.

([44]) Circulaire 49/2003 du 24/03/2003 relative aux modalités de prise en charge des IVG des mineures sans consentement parental et à la préservation de l'anonymat dans les circuits d'échange – consulter le texte de la circulaire.

([45]) Circulaire N° DGS/DHOS/DSS/DREES/04/569 du 26 novembre 2004 relative à l'amélioration des conditions de réalisation des interruptions volontaires de grossesse : pratique des IVG en ville et en établissements de santé – consulter le texte de la circulaire.

([46]) Audition par vos Rapporteures, 15 octobre 2019.

([47]) La responsabilité des personnels de l’Éducation nationale accompagnant des mineures dans des démarches relatives à une contraception d’urgence ou à une intervention volontaire de grossesse, Lettre d’information juridique, 28 octobre 2008.

([48]) Ibid.

([49]) Ibid.

([50]) Panorama sur les effectifs administratifs, techniques, sociaux, de santé et bibliothèques engagés dans les missions de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur, février 2016 (derniers chiffres communiqués par le ministère)

([51]) Consulter le site de l’OMS sur l’IVG : https://abortion-policies.srhr.org/?mapq=

([52]) Institut national des études démographiques, Agnès Guillaume, Clémentine Rossier, « L’avortement dans le monde. État des lieux des législations, mesures, tendances et conséquences », Population, 2018.

([53]) Conseil économique, social et environnemental, Droits sexuels et reproductifs en Europe : entre menaces et progrès, Véronique Séhier, novembre 2019 – consulter le rapport.

([54]) Forum Parlementaire Européen sur la population et le développement, rapport « Restaurer l'ordre naturel, un agenda pour l'Europe », avril 2018 – consulter le rapport de l’EPF.

([55]) Les organisateurs estiment entre 30 000 et 50 000 le nombre des manifestants en janvier 2019 – source : https://enmarchepourlavie.fr/dossier-de-presse/ [URL consultée le 13 mai 2020].

([56]) Article 25 de la loi n° 2014-873 du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes.

([57]) Rapport n° 4245 fait au nom de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale sur la proposition de loi relative à l’extension du délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse par Mme Catherine Coutelle.

([58]) Article unique de la loi n° 2017‑347 du 20 mars 2017 relative à l'extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse (modifiant l’article L. 2223‑2 du code de la santé publique).

([59]) Décision n° 2017-747 DC du 16 mars 2017, Loi relative à l'extension du délit d'entrave à l'interruption volontaire de grossesse – voir le texte de la décision du Conseil constitutionnel.

([60]) Selon le Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, parmi les 15-30 ans, plus de 57 % des femmes utilisent internet pour s’informer sur des questions relatives à la santé et 80 % des jeunes qui y ont eu recours jugent crédibles les informations recueillies.

([61]) Source : https://lanef.net/2018/08/30/contraception-et-avortement/ [URL consultée le 14 mai 2020].

([62]) Plusieurs exemples de sites existent : les survivants ; simoneforever ou encore sauvez-pikachu.

([63]) Examen du proposition de loi n° 4118 relative à l’extension du délit d’entrave à l’interruption volontaire de grossesse –  voir le compte rendu.

([64]) Source : DREES (consulter les données).

([65]) Table ronde organisée par la Délégation aux droits des femmes le 24 juillet 2019 – voir la vidéo.

([66]) Audition par vos Rapporteures, le 10 octobre 2019.

([67]) Table ronde organisée par la Délégation aux droits des femmes le 24 juillet 2019 – voir la vidéo.

([68]) Audition conduite par vos Rapporteures de l’Assistance publique et des hôpitaux de Paris (APHP), 5 novembre 2019.

([69]) IGAS, Claire Aubin Danièle Jourdain Menninger, Laurent Chambaud, La prise en charge de l'interruption volontaire de grossesse, octobre 2009, page 47.

([70]) Arrêté du 4 avril 2008 portant modification de l'arrêté du 23 juillet 2004 relatif aux forfaits afférents à l'interruption volontaire de grossesseconsulter l’arrêté.

([71]) Arrêté du 4 août 2009 modifiant l'arrêté du 23 juillet 2004 relatif aux forfaits afférents à l'interruption volontaire de grossesseconsulter l’arrêté.

([72]) Décret n° 2013-248 du 25 mars 2013 relatif à la participation des assurés prévue à l'article L. 322-3 du code de la sécurité sociale pour les frais liés à une interruption volontaire de grossesse et à l'acquisition de contraceptifs par les mineuresconsulter le décret – et arrêté du 26 mars 2013 modifiant l'arrêté du 23 juillet 2004 modifié relatif aux forfaits afférents à l'interruption volontaire de grossesseconsulter l’arrêté.

([73]) Pour le remboursement actuel des actes IVG, voir les articles 1 à 4 de l’arrêté du 26 février 2016 : https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000032164949&dateTexte=20191112.

([74]) Audition par vos Rapporteures de l’Assistance publique et des hôpitaux de paris (APHP), 5 novembre 2019.

([75]) Table ronde organisée par la délégation aux droits des femmes le 24 juillet 2019 – voir la vidéo.

([76]) « La première brique, c’est de former plus de gynécologues médicaux, c’est ce que nous faisons avec la réforme du troisième cycle des études médicales, 70 postes ont été ouverts l’année dernière, nous allons augmenter progressivement ce nombre d’interne mais pour augmenter la formation des médecins, il faut des services qui forment ces médecins et aujourd’hui nous n’avons pas la quantité de services suffisants pour augmenter considérablement le nombre d’internes, donc les choses vont s’arranger, mais en quelques années. » – réponse à une question de Mme la députée Maud Petit – voir la vidéo de la séance.

([77]) Source : http://www.data.drees.sante.gouv.fr/TableViewer/tableView.aspx.

([78]) Ibid.

([79]) Article 127 de la loi n° 2016‑41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

([80]) Source : http://www.data.drees.sante.gouv.fr/TableViewer/tableView.aspx.

([81]) Audition de l’Ars d’Île-de-France par vos Rapporteures, 15 octobre 2019.

([82]) Conseil constitutionnel, décision DC n° 87232 « Mutualisation de la Caisse nationale de Crédit agricole », 7 janvier 1988.

([83]) Article 127 de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

([84]) DREES, 224 300 interruptions volontaires de grossesse en 2018, Etudes et Résultats n° 1125, septembre 2019.

([85]) Ibid.

([86]) Source : http://www.data.drees.sante.gouv.fr/ReportFolders/reportFolders.aspx?IF_ActivePath=P,490,497,970,982

([87]) Source : http://www.data.drees.sante.gouv.fr/TableViewer/tableView.aspx?ReportId=3792.

([88]) DREES, 224 300 interruptions volontaires de grossesse en 2018, Etudes et Résultats n° 1125, septembre 2019.

([89]) Audition de la DGOS par vos Rapporteures, 29 octobre 2019.

([90]) Article L. 2212‑2 du code de la santé publique ; le contenu de la convention est défini à l’annexe 22-1 du même code.

([91]) Article R. 2212-11 du code de la santé publique.

([92]) Article L. 2212-2 du code de la santé publique.

([93]) Audition du Syngof par vos rapporteures, 10 octobre 2019.

([94])  Consulter le texte de la pétition.

([95]) https://ansfl.org/actualites/petition-de-lassociation-nationale-des-sages-femmes-orthogenistes/.

([96])  https://onssf.org/actions-syndicales/ivg-volte-face-de-la-ministre-de-la-sante/

([97]) Contribution écrite transmise par le CNOSF à vos rapporteures dans le cadre du présent rapport.

([98]) Table ronde organisée par la Délégation aux droits des femmes le 24 juillet 2019 – voir la vidéo.

([99]) Article R. 4127-47 du code de la santé publique.

([100]) Cette clause spécifique est rappelée à l’article R. 4127-18 du code de la santé publique : « Un médecin ne peut pratiquer une interruption volontaire de grossesse que dans les cas et les conditions prévus par la loi ; il est toujours libre de s’y refuser et doit en informer l’intéressée dans les conditions et délais prévus par la loi ». Les sages-femmes bénéficient de la même clause de conscience générale en application de l’article R. 4127-328 du même code. Il en va de même pour les infirmiers en application de l’article R. 4312-12 du même code.

([101]) Audition de Mme Nathalie Bajos par vos rapporteures, 22 octobre 2019.

([102]) IGAS, Claire Aubin Danièle Jourdain Menninger, Laurent Chambaud, La prise en charge de l'interruption volontaire de grossesse, octobre 2009, page 49.

([103]) IGAS, Claire Aubin Danièle Jourdain Menninger, Laurent Chambaud, La prise en charge de l'interruption volontaire de grossesse, octobre 2009, page 45.

([104]) Article L. 2212-8 du code de la santé publique.

([105]) Audition du Syngof par vos rapporteures, 10 octobre 2019.

([106]) Voir le site du Planning familial.

([107]) Voir le site d’Osez le féminisme.

([108]) Audition de Mme Nathalie Bajos par vos rapporteures, 22 octobre 2019.

([109]) Audition de REVHO par vos rapporteures, 22 octobre 2019.

([110]) Table ronde organisée par la Délégation aux droits des femmes le 24 juillet 2019 – voir la vidéo.

([111]) Audition de Santé Publique France par vos rapporteures, 5 novembre 2019.

[112] Au moment de la rédaction du présent rapport, il s’agissait de la rédaction proposée par l’article 21 du projet de loi nº 2658, modifié par le Sénat, relatif à la bioéthique, en instaurant un art. L. 2213‑4 traitant de la clause de conscience pour les interruptions médicales de grossesse. Vos rapporteures souhaitent l’adoption définitive de cette rédaction qui constitue une véritable avancée et qui devra ensuite être étendue à l’IVG.

([113]) Voir les séance du Sénat du 7 juin (voir le compte-rendu) et du 11 juin 2019 (voir le compte-rendu).

([114]) Table ronde organisée par la délégation aux droits des femmes, 24 juillet 2019 – voir la vidéo.

([115]) Audition par vos rapporteures de l’Assistance publique et des hôpitaux de paris (APHP), 5 novembre 2019.

([116]) Table ronde organisée par la délégation aux droits des femmes, 24 juillet 2019 – voir la vidéo.

([117]) Audition du Syngof par vos rapporteures, 10 octobre 2019.

([118]) Voir le rapport du centre Hubertine Auclert : https://m.centre-hubertine-auclert.fr/sites/default/files/fichiers/etude-cfcv-sur-les-grossesses-apres-un-viol-2006-2007.pdf

([119]) Henshaw RC et al. Comparison of medical abortion with surgical vacuum aspiration : women’s preferences and acceptability of treatment. British Medical Journal, 1993, in IGAS, Claire Aubin Danièle Jourdain Menninger, Laurent Chambaud, « La prise en charge de l'interruption volontaire de grossesse », annexe 5, Octobre 2009, p.136.

([120]) François Béguin , Mathilde Costil et Sylvie Gittus, Le Monde, Près de 8 % des centres pratiquant l’IVG en France ont fermé en dix ans, 27 septembre 2019 [URL consultée le 3 juin 2020].

([121]) Accès à l’IVG - Principaux enseignements de l’enquête qualitative et territoriale auprès des agences régionales de santé, Ministère des solidarités et de la santé, septembre 2019.

([122]) François Béguin , Mathilde Costil et Sylvie Gittus, Le Monde, Près de 8 % des centres pratiquant l’IVG en France ont fermé en dix ans, 27 septembre 2019.

([123]) Mme la docteure Sauphie Gaudu, audition de l’APHP, 5 novembre 2019.

([124]) Revues générales Gynécologie, réalités en gynécologie-obstétrique 153, Avril 2011, Les avantages de l’IVG médicamenteuse, P. Roblin, R. Shojai, centre de gynécologie sociale, CHU Nord, Marseille : « Actuellement, près des trois-quarts des 220 000 IVG annuelles sont à la charge du secteur public. Avec la restructuration et le regroupement de l’offre de soins, près de 5 % des centres assurent plus de 25 % des IVG. Compte tenu du déséquilibre entre la demande et l’offre de soins, les capacités d’accueil des unités sont souvent saturées, entraînant des délais d’attente longs, notamment durant la période estivale. Par ailleurs, l’aspiration chirurgicale reste sur le plan financier un acte sous-coté par rapport à son coût réel. L’avantage de la voie médicamenteuse dans ce contexte permet une externalisation des soins de proximité et une augmentation de l’offre de soins. Enfin, dans notre expérience, la voie médicamenteuse entraîne moins de refus de soins pour clause de conscience, ce qui permet d’élargir le nombre de médecins participant à la prise en charge de ces femmes » - consulter l’article.

([125]) DREES, Annick Villain, 224 300 interruptions volontaires de grossesse en 2018, Etudes et Résultats n° 1125, septembre 2019.

([126]) Rapport réalisé en février 1999 et remis au Gouvernement par le professeur I. Nisand « L’IVG en France, propositions pour diminuer les difficultés que rencontrent les femmes » cité par le rapport de l’IGAS réalisé par Claire Aubin Danièle Jourdain Menninger, Laurent Chambaud sur « La prise en charge de l'interruption volontaire de grossesse », annexe 5, Octobre 2009, p. 39.

([127]) Marie Mathieu, Lucile Ruault, « Prise en charge et stigmatisation des avortantes dans l’institution médicale : la classe des femmes sous surveillance », Politix, 2014/3 (N° 107), p. 33-59.

([128]) 50–50 Magazine, « Stop au tabou : l’IVG, un protocole méconnu, un droit qui ne fait pas l’unanimité », février 2020.

([129]) Voir l’appel du collectif Les filles des 343 sur le site « IVG, je vais bien, merci ! »

([130]) Ibid.

([131]) Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, rapport n° 2016-06-13-SAN-021 relatif à l’éducation à la sexualité « Répondre aux attentes des jeunes, construire l’égalité femmes-hommes », 13 juin 2016.

([132]) Rapport n° 2016-06-13-SAN-021 relatif à l’éducation à la sexualité – Répondre aux attentes des jeunes, construire l’égalité femmes-hommes, Haut Conseil à l’égalité entre les femmes et les hommes, 13 juin 2016.

([133]) Contribution écrite du SNIES transmise à vos rapporteures.

([134]) Ressources thématiques sur l'éducation à la sexualité Eduscol, voir fiches thématiques.

([135]) Fiche thématique Eduscol sur l’éducation à la sexualité n° 8 : la contraception, consultable en ligne.

([136]) Fiche thématique Eduscol sur l’éducation à la sexualité n° 9 : Désir d’enfant - Grossesses adolescentes

- Parentalité et famille, consultable en ligne.

([137]) Institut national des études démographiques, Agnès Guillaume, Clémentine Rossier, « L’avortement dans le monde. État des lieux des législations, mesures, tendances et conséquences », Population, 2018.

([138]) Conseil de l’Europe, « Accès à un avortement sans risque et légal en Europe », Résolution 1607, texte adopté par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, 16 avril 2008 voir le texte de la résolution.

([139]) Consulter le communiqué d’Amnesty International sur le projet de loi relatif à l’IVG en Pologne [URL consultée le 13 mai 2020].

([140]) Source : https://www.lemonde.fr/europe/article/2018/05/23/en-italie-70-des-medecins-refusent-de-pratiquer-des-ivg_5303169_3214.html [URL consultée le 13 mai 2020].

([141]) Consulter le communiqué d’Amnesty International sur la dépénalisation de l’avortement en Irlande [URL consultée le 22 mai 2020].

([142]) Voir la décision de la Cour suprême américain.

([143]) Source : https://www.lemonde.fr/international/article/2019/05/15/l-alabama-vote-la-loi-la-plus-repressive-des-etats-unis-sur-l-avortement_5462285_3210.html [URL consultée le 3 juin 2020].

([144]) Consulter le texte de la loi : https://legiscan.com/AL/text/HB314/id/1980843.