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N° 3350

______

 

ASSEMBLÉE   NATIONALE

 

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

QUINZIÈME LÉGISLATURE

 

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 23 septembre 2020.

 

 

 

RAPPORT  D’INFORMATION

 

 

 

DÉPOSÉ

 

en application de l’article 145 du Règlement

 

 

PAR LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

 

 

en conclusion des travaux de la mission d’évaluation et
de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

sur la chirurgie ambulatoire

 

 

ET PRÉSENTÉ PAR

 

 

M. Marc DELATTE et Mme Nadia RAMASSAMY,

 

Députés.

 

——

 

 

 


 

 

 


  1  

SOMMAIRE

___

 Pages

introduction

I. Un bilan encourageant pour une transformation majeure

A. un développement facilité par la mobilisation de différents outils

1. Un taux globalement satisfaisant qui reflète encore une disparité entre secteur public et secteur privé

a. Une progression régulière depuis 2010

b. Un développement différencié selon les spécialités

c. Un déploiement disparate selon les établissements et les territoires

2. Parmi les différents outils mobilisés, les mesures « starter » se sont révélées les plus efficaces

a. Un cadre normatif assoupli pour faciliter la transformation

b. Le déploiement dune méthodologie pour accompagner la transformation

c. Lincitation tarifaire pour susciter la transformation

d. La mise sous accord préalable pour engager la transformation

e. La contractualisation pour acter la transformation

3. La chirurgie ambulatoire est un marqueur de qualité

a. Une évolution plébiscitée par tous les acteurs du système de santé

b. Une évolution encouragée par les sociétés savantes

c. Une évolution portée par la démarche globale de réduction de la durée des séjours

B. Une évolution perfEctible

1. Une ambition qui se heurte à la réalité de la situation des hôpitaux

a. Une ambition contrariée par lobjectif de réduction capacitaire

b. Une ambition déjouée par une politique tarifaire illisible et incomplète

2. Des améliorations à opérer en amont et en aval des opérations

a. Lenquête menée par la Haute Autorité de santé révèle une importante marge de progression

b. Le suivi des opérations programmées pourrait être amélioré

3. Un accès encore inégal à la chirurgie ambulatoire

a. Une prise en charge qui bute sur la vulnérabilité de patients fragilisés

b. Une prise en charge freinée par lisolement social et géographique de certains patients

II. Axer la chirurgie ambulatoire sur la qualité de la prise en charge

A. sattacher à la situation des plus vulnérables

1. Privilégier les hôtels hospitaliers

2. Professionnaliser la prise en charge des plus vulnérables

a. Mieux former la communauté médicale à la précarité des patients

b. Instaurer une procédure de prise en charge des publics fragiles

c. Intégrer la prise en charge des patients vulnérables dans le cadre commun

d. Mieux rembourser les patients pris en charge en ambulatoire

B. intéresser les établissements de santé et leurs professionnels au développement de la chirurgie ambulatoire

1. Intéresser les établissements de santé au développement de lambulatoire

2. Intéresser les équipes en charge de la chirurgie ambulatoire

C. inscrire la chirurgie ambulatoire dans lécosystème de santé

1. Tenir compte de lenvironnement hospitalier

a. Instituer des opening centers, ce qui suppose de sadapter à tous les profils de patients

b. Maintenir le lien entre la chirurgie pratiquée en ambulatoire et celle pratiquée en hospitalisation complète

c. Adapter lobjectif global à la nature et à lactivité des établissements

d. Réussir la récupération améliorée après chirurgie (RAAC)

2. Ancrer la pratique dans le territoire

a. Susciter des équipes territoriales au sein des groupements hospitaliers de territoire

b. Susciter une coopération entre secteurs public et libéral

3. Resserrer les liens avec la ville

a. Faire évoluer le financement

b. Sappuyer sur les professionnels de santé de ville

Synthèse des propositions

Travaux de la commission

annexe n° 1 : Liste des personnes auditionnées

annexe N° 2 : QuESTIONNAIRE E-SATIS EN CHIRURGIE AMBULATOIRE

Annexe  3 : glossaire


  1  

   introduction

Véritable prouesse technique, l’opération chirurgicale dans le cadre de la chirurgie ambulatoire représente un double défi organisationnel et humain.

Elle impose aux professionnels de santé de réviser les conditions de prise en charge des patients dans le respect de leur autonomie. Elle implique des gestes précis, l’application de recommandations de bonnes pratiques, l’organisation de nouveaux flux, la restructuration des locaux hospitaliers, l’évolution de nouveaux métiers ainsi que la transformation des lits anciennement dédiés à l’hospitalisation complète. Pratiquée dans les établissements de santé, la chirurgie ambulatoire n’impose pas moins une coordination avec les professions de santé exerçant en ville. L’hôpital ne constitue donc plus le lieu unique de prise en charge, celle-ci étant partagée avec les acteurs de la ville. La chirurgie ambulatoire implique par conséquent de surmonter le clivage couramment observé entre médecine hospitalière et médecine de ville.

Elle représente également un défi humain majeur. L’apparition de nouvelles techniques de prise en charge a permis la réduction progressive de la durée de séjour jusqu’à permettre de bénéficier d’une opération chirurgicale en arrivant le matin et en repartant le soir. Cette nouvelle pratique ne saurait se réduire à une simple aubaine économique même si elle constitue encore une des motivations. De nombreuses personnes auditionnées ont voulu souligner qu’elle reste un art médical requérant une approche humaine. On pourrait considérer qu’avec l’apparition des nouvelles technologies et l’acquisition des nouvelles connaissances, la médecine gagnerait en technicité ce qu’elle perdrait en humanité. Or, le processus de prise en charge requiert au contraire un surcroît d’humanité car le succès de l’opération repose sur le postulat d’un patient actif. Si le patient bénéficie toujours de l’opération chirurgicale, il n’en est pas moins un acteur à part entière. Le temps passé avec le patient doit être l’occasion de parvenir à mieux le connaître afin que la prise en charge constitue une réussite complète.

C’est en gardant à l’esprit cette double dimension que les rapporteurs ont mené les travaux portant sur la chirurgie ambulatoire alors qu’un cap ambitieux a été fixé en 2017 pour 2022 : à cette date, 70 % des actes de chirurgie devraient être réalisés en ambulatoire, c’est-à-dire sans nuit passée à l'hôpital, contre un peu plus de la moitié en 2017.

Les rapporteurs se sont naturellement interrogés sur les facteurs permettant d’atteindre un tel objectif. Près de 80 personnes ont ainsi été reçues à l’occasion de 27 auditions. Celles-ci ont rapidement montré que la réussite de cet objectif nécessitait d’abord d’établir un bilan du chemin parcouru depuis l’amorce du virage ambulatoire. En l’espèce, si elle peut être considérée comme encourageante, la transformation vers la chirurgie ambulatoire s’opère sur un terrain parsemé de quelques embûches.

Pour des raisons distinctes, chacun des acteurs considérés (sociétés savantes, établissements de santé, professionnels, sans oublier les représentants des patients ou encore les autorités de tutelles et les régulateurs) s’est investi dans la conduite d’une transformation qui bouleverse le paysage de l’organisation des soins. Si la dimension économique constitue un facteur clef de la transformation, elle ne saurait cependant éclipser la perspective première de notre système de soins : assurer l’égalité de prise en charge dans des conditions optimales de qualité et de sécurité. Ce leitmotiv a constitué le bruit de fond de chacune des auditions qui ont été menées. Au regard de cet horizon, l’objectif n’est que partiellement atteint en raison des différences de taux affectant les établissements selon qu’ils relèvent du secteur public ou privé, selon son case-mix, selon son statut, selon sa localisation géographique ou encore selon le profil socio-économique de son territoire d’implantation.

Et si un potentiel de transformation subsiste, il est nécessaire de garder à l’esprit que l’étape la plus simple a été accomplie. Cette affirmation peut sembler incongrue alors même que nombre d’établissements de santé, particulièrement issus du secteur public, sont confrontés à de graves difficultés. Et pourtant, la transformation a principalement concerné les gestes les plus simples et les patients dont les profils et l’environnement socio-économique ne constituent pas un facteur de risque pour la prise en charge.

Atteindre la cible de 70 % suppose de s’attacher aux patients dont la prise en charge se caractérise par une certaine complexité liée aux pathologies, au grand âge, aux comorbidités, aux handicaps ou aux freins socio-économiques, culturels ou géographiques. Et si pour le personnel soignant, le patient se singularise bien évidemment par la pathologie dont il souffre, il est tout autant considéré comme acteur de santé nécessitant une prise en charge globale. Prendre en charge un patient, c’est aussi s’adapter à une histoire personnelle et particulière. En d’autres termes, l’objectif fixé pour 2022 nécessite d’anticiper, d’aller au-devant de ces histoires individuelles et d’améliorer les conditions de prise en charge, en investissant davantage sur la dimension qualitative des soins, en privilégiant de la souplesse dans la déclinaison des objectifs selon les établissements hospitaliers, et en améliorant la prise en charge post opératoire par une coopération accrue entre la ville et l’hôpital.

Dans ce contexte, les rapporteurs estiment que la prise en compte de la vulnérabilité doit constituer un axe significatif de la stratégie de transformation. Il n’est évidemment pas question de réduire la personne à son état de santé ou à son environnement socio-économique et de l’y enfermer. Il est au contraire proposé que les parcours de prise en charge s’ajustent aux aspérités du terrain par un surcroît d’attention au bénéfice des patients dont la prise en charge se révèle plus délicate. Enfin, les rapporteurs observent que la crise sanitaire majeure que nous traversons illustre la nécessite de conserver des lits permettant d’accueillir les patients, et que le virage ambulatoire ne doit pas se traduire par une diminution drastique des lits en établissements de santé.

L’objectif fixé par le Gouvernement n’est pas insurmontable. Pour y parvenir, les rapporteurs ont formulé seize propositions dont le spectre couvre le domaine législatif, règlementaire et infra-règlementaire.

I.   Un bilan encourageant pour une transformation majeure

A.   un développement facilité par la mobilisation de différents outils

Tous les établissements de santé publics, privés non lucratifs et lucratifs autorisés à exercer une activité de soins en chirurgie et médecine sont potentiellement concernés par la chirurgie ambulatoire. En effet, la réglementation de la chirurgie ambulatoire n’est pas basée sur une liste positive d’actes ciblés mais sur des critères d’éligibilité que doivent remplir les patients, qui sont a priori tous concernés par cette pratique, étant souligné qu’il appartient aux professionnels de santé de décider si le patient est éligible ou non. Si la technique s’adapte au profil du patient, elle tend aussi à s’adapter au profil de l’établissement et de ses caractéristiques.

Les établissements prétendant à la réalisation de chirurgies ambulatoires doivent toutefois être en capacité d’engager des ressources humaines formées aux spécificités des prises en charge ambulatoires et de garantir la présence permanente d’une équipe pluri-professionnelle composée a minima de médecins et d’infirmiers diplômés d’État, dont les fonctions sont définies à l’article D. 6124‑305 du code de la santé publique. En outre, la pratique de la chirurgie ambulatoire, qui relève de la chirurgie programmée, requiert de facto de profondes réorganisations des soins à l’hôpital, un bouleversement de l’organisation hospitalière traditionnellement structurée autour des séjours de nuit et une rupture avec l’hospitalo-centrisme. Cette nouvelle approche doit désormais être davantage organisée autour et avec le patient, les personnes ressources et les acteurs de santé. Par ailleurs, une amélioration de la coordination des prises en charge entre la ville et l’hôpital est rendue indispensable par le déploiement de la chirurgie ambulatoire. Tous ces facteurs doivent être pris en compte pour opérer un bilan un tant soit peu objectif de la mise en œuvre de la chirurgie ambulatoire.

1.   Un taux globalement satisfaisant qui reflète encore une disparité entre secteur public et secteur privé

a.   Une progression régulière depuis 2010

Des données transmises par l’Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH), il apparaît que le bilan est encourageant si l’on s’attache à l’évolution du taux global de chirurgie ambulatoire, entendue comme étant le rapport entre le nombre de séjours de chirurgie ambulatoire et le nombre de séjours en chirurgie.

En 2017, le taux sétablit à 55,9 % pour un nombre total de séjours en chirurgie de 6,34 millions. Cette pratique, qui ne représentait que 43,3 % de lactivité chirurgicale globale en 2010 ([1]), est en croissance depuis plusieurs années, notamment sous limpulsion des politiques publiques mises en œuvre pour favoriser son développement. Le taux devrait atteindre 57,8 % en 2018 selon une progression que lATIH qualifie de linéaire. Notons enfin quà compter de 2014, le taux de recours à la chirurgie ambulatoire a commencé à dépasser celui de lhospitalisation complète.

Les dernières informations portées à la connaissance des rapporteurs font état d’un ralentissement de la progression en 2019. Cette observation, qui traduit sans doute la nécessité d’accomplir une nouvelle marche, n’infirme pas le constat général d’une impressionnante évolution en l’espace de quelques années.

Évolution du Taux global de chirurgie ambulatoire (2010-2018)

Source : Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH).

Ce mouvement global en faveur de la chirurgie ambulatoire se traduit par une évolution capacitaire ainsi que par une évolution du nombre de séjours :

– entre 2010 et 2018, on enregistre une diminution de 25 % des lits d’hospitalisation complète, leur nombre passant de 83 510 à 62 468. Parallèlement, le nombre de places de chirurgie ambulatoire a bondi de près de 40 %, passant de 13 590 à 18 882 ;

– sur la même période, le nombre de séjours en hospitalisation complète a diminué de 22 %, passant de 4,3 millions à 3,3 millions quand le nombre de séjours de chirurgie ambulatoire enregistre une progression de 33 %, passant de 3,8 millions à près de 5,1 millions.

Le graphique suivant retrace ces évolutions sur l’ensemble de la période.

Évolution comparée des capacités d’hospitalisation et de la durée des séjours de l’hospitalisation complète (HC) et de la chirurgie ambulatoire (CA) (2010-2018)

 

Sources : données extraites de la Statistique annuelle des établissements de santé (SAE) de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) et retraitées par la direction générale de l’offre de soins (DGOS)

b.   Un développement différencié selon les spécialités

Ce taux global masque des différences selon les activités qui reflètent, pour certaines d’entre elles, une transformation de l’approche chirurgicale.

Les taux de recours à la chirurgie ambulatoire varient considérablement d’une spécialité chirurgicale à l’autre mais ont globalement pour caractéristique commune d’augmenter régulièrement depuis plusieurs années. Parmi ces spécialités, une forte variation peut être observée entre les types de prise en charge, certaines d’entre elles étant réalisées presque exclusivement en ambulatoire, à l’instar de la libération du canal carpien, intervention pratiquée dans près de 97 % des cas en ambulatoire en 2018.

La spécialité bénéficiant du taux de recours le plus important à la chirurgie ambulatoire est l’ophtalmologie, où celui-ci s’élève à 90 % en 2017 suivant une progression continue depuis 2013, principalement sous l’influence des interventions sur le cristallin avec ou sans vitrectomie. En parallèle, ce taux se limite à 34 % en 2017 pour la chirurgie digestive, spécialité qui présente toutefois la progression observée la plus forte dans le recours à la chirurgie ambulatoire.

En réponse aux interrogations des rapporteurs, l’ATIH souligne que certaines activités présentent déjà un taux ambulatoire quasiment à 100 % ‑ comme la chirurgie des drains transtympaniques (98,6 % en 2018).

D’autres activités enregistrent un taux déjà élevé mais continuent toujours leur progression. Les interventions sur le cristallin étaient effectuées à 89,9 % en ambulatoire en 2014, le taux ayant atteint 95,3 % en 2018. C’est aussi le cas de l’activité de ligatures de veines et éveinages : 84,0 % en 2014, 90,3 % en 2018.

Des progressions spectaculaires ont été enregistrées pour un autre groupe d’activités. On soulignera l’augmentation du taux d’interventions sur les ligaments croisés sous arthroscopie de 12,0 % en 2014 à 53,0 % en 2018. Sur la même période, les arthroscopies de l’épaule ont été multipliées par 2,5 (21,8 % contre 53,7 %), les interventions sur la rétine par 2 (29,7 % contre 62,2 %), et les rhinoplasties par 1,6 (56 % contre 34,3 %).

Enfin, des spécialités se prêtent plus facilement que d’autres à la pratique de la chirurgie ambulatoire en raison d’évolutions techniques majeures. La miniaturisation des outils a permis des prises en charge de moins en moins invasives notamment en urologie mais aussi en sénologie.

c.   Un déploiement disparate selon les établissements et les territoires

Ce taux global doit aussi être affiné car il ne reflète qu’une situation moyenne. Il doit être distingué selon les établissements, les territoires et les spécialités rencontrées dans la mesure où des disparités subsistent.

Un écart de plus de 10 points en moyenne est observable entre les établissements de santé relevant de l’ancien secteur de financement par dotation globale (dit secteur « ex-DG » ([2])) et ceux relevant de l’ancien secteur de financement déterminé par l’objectif quantifié national (dit secteur « ex OQN » ([3])). En 2018, le taux s’élève à 47,3 % pour les premiers et 65,9 % pour les seconds. L’ATIH relève par ailleurs que la progression moyenne annuelle pour les cliniques est d’environ deux points contre 1,6 point pour les établissements relevant du secteur ex-DG. Selon les dernières données transmises par l’ATIH, sur les 8,1 millions de séjours enregistrés, 4 millions étaient programmés dans le secteur privé à but lucratif contre 3,4 dans les établissements publics ([4]).

Le secteur privé s’est investi très tôt dans le développement de la chirurgie ambulatoire pour des raisons de « survie économique » ([5]). Comme souligné par le SNARF (Syndicat national des anesthésistes réanimateurs), l’impératif consistait essentiellement à diminuer les frais de fonctionnement liés aux durées d’hospitalisation conduisant les structures à s’adapter en conséquence.

Déchargés du temps administratif et de l’obligation de formation des jeunes professionnels, les médecins officiant dans le secteur privé ont également pu mieux saisir l’opportunité d’une transformation vers la chirurgie ambulatoire. Les conditions d’exercice, particulièrement celles relatives à la rémunération, ont aussi permis d’attirer des personnels motivés et parfois en quête d’autres horizons après une formation effectuée dans le secteur public.

La réallocation des ressources du secteur public s’est effectuée de façon moins rapide en raison notamment des différences de « case-mix », c’est-à-dire des disparités de l’éventail des cas médicaux et chirurgicaux traités par les établissements de santé.

Évolution du taux de chirurgie ambulatoire selon les anciens secteurs de financement (2010-2018)

Source : Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH)

 

Dans son bilan transmis aux rapporteurs, l’ATIH relève ainsi un lien entre la diversité du case-mix et le recours à l’ambulatoire. Plus l’éventail est resserré, plus le taux est important, confirmant ainsi les interventions de certains représentants des professionnels de santé comme des fédérations hospitalières. Pour le syndicat national des infirmiers anesthésistes (SNIA), le « secteur privé capte les interventions courtes » alors que le secteur public est davantage confronté à des profils de patients plus complexes et plus fragiles, davantage « affaiblis » et présentant « plusieurs pathologies différentes » rendant le recours à la chirurgie ambulatoire plus incertain.

Plus récemment, une étude de la Drees rappelle que « les établissements privés à but lucratif, "du fait dune plus grande spécialisation dans des interventions chirurgicales peu complexes" (Toutlemonde, 2018) réalisent 64 % des séjours du premier groupe danalyse qui concerne les interventions les plus pratiquées tous secteurs confondus » ([6]). Les opérations concernées sont la chirurgie de la cataracte (31 % des séjours de ce premier groupe), la chirurgie orthopédique ou encore la traumatologie (arthroscopies, biopsies ostéoarticulaires et chirurgies de la main ou du poignet).

Pour sa part, la Fédération hospitalière de France (FHF) plaide en faveur d’une équivalence de comparaison entre les deux secteurs, celle portant sur les taux bruts étant peu pertinente. L’application d’un taux standardisé réduit ainsi l’écart de 5 points entre les deux secteurs : 58,8 % pour le secteur public (qui constitue l’essentiel du bataillon des établissements de santé du secteur ex-DG) et 63,1 % pour le secteur privé lucratif. Cet écart traduirait l’accueil par le secteur public des patients aux profils plus complexes : séjours sévères, patients âgés de moins de 5 ans et de plus de 60 ans ou encore patients en situation précaire, soit autant de profils pour lesquels la chirurgie ambulatoire n’est pas toujours indiquée.

Présentation du « taux standardisé de chirurgie ambulatoire » 

Le taux de chirurgie ambulatoire étant nettement dépendant du case-mix de l’établissement, la Fédération hospitalière de France a élaboré une méthode visant à pondérer le taux constaté (taux brut) par un coefficient représentant le poids que représente l’opération chirurgicale dans la base nationale de référence. Ainsi, « le taux standardisé correspond au taux de chirurgie ambulatoire quaurait la catégorie étudiée si elle avait le même case-mix […] que la base nationale ».

Pour obtenir le taux global au niveau de l’établissement de santé, il suffit d’additionner les taux standardisés de chacune des opérations.

Source : contribution écrite de la Fédération hospitalière de France

À l’appui de ces remarques opportunes, les rapporteurs souhaiteraient mettre en avant les informations présentées par l’ATIH.

S’agissant de la répartition du recours à la chirurgie ambulatoire selon les classes d’âge, l’opérateur indique que, si le taux est élevé chez les enfants de moins de cinq ans (77 % en 2017), « il est moins fréquent chez les personnes âgées de 75 ans et plus », s’élevant à 48 % en 2017.

S’agissant du degré de sévérité, l’ATIH souligne également que l’activité chirurgicale réservée aux cas les plus sévères explique, au-delà de la diversité du « case-mix » que le taux des centres hospitaliers régionaux universitaires (CHRU) soit moins élevé que pour les autres établissements relevant du même secteur. Poursuivant ses comparaisons l’ATIH illustre l’importance du paramètre représenté par le degré de sévérité à travers deux exemples :

– s’agissant des cholécystectomies sans exploration de la voie biliaire principale à l’exception des affections aiguës ([7]), « la part des prises en charge ambulatoire dans les séjours sans sévérité est relativement proche entre les secteurs (de lordre de 53 %) ». Une comparaison, intégrant les séjours avec sévérité, fait apparaître un taux plus faible pour les établissements ex-DG (47 %) que pour les établissements ex-OQN (51 %) ;

– S’agissant des interventions réparatrices pour hernies à l’exception des hernies inguinales, crurales, pratiquées sur les patients âgés de plus de 17 ans, « les taux de prises en charge en ambulatoire dans les séjours sans sévérité sont relativement proches [soit] de lordre de 60 % ». Si l’on intègre les séjours sévères, le taux est de 53 % pour le secteur ex DG contre 58 % dans le secteur ex-OQN, abaissant « le taux de 7 points [pour les établissements relevant du premier secteur] et seulement 3 points dans [l’autre] secteur […] ».

Auditionnée par les rapporteurs, la conférence des directeurs généraux de CHU a abondé dans ce sens en soulignant que les établissements qu’ils dirigent portent « des autorisations prévues dans le schéma régional ou interrégional [de santé] et qui les [ont] conduits à des prises en charge de recours sur un territoire [important] assez peu éligibles à de l’activité ambulatoire ». Ainsi, « la chirurgie cardiaque, la chirurgie vasculaire, les greffes ou la neurochirurgie, qui sont des marqueurs forts des spécialités de recours assurées par les CHU et qui représentent une part importante de leur activité, ne sont que peu éligibles à ce jour compte tenu des techniques opératoires […] » ([8]).

● Si la pratique de la chirurgie ambulatoire est en constante augmentation, son développement reste enfin inégal en fonction des territoires.

Les disparités régionales de développement de la chirurgie ambulatoire incluent des écarts pouvant aller jusqu’à environ 18 points entre les régions administratives. En 2018, la région Pays de la Loire présente un taux de chirurgie ambulatoire de 61,3 % quand la Guyane se caractérise par un taux de 43 %. Rapporté à la France métropolitaine, le différentiel se réduit à 6 points, la région Grand Est se caractérisant par le taux le plus bas (55,7 % en 2018).

Cet écart pourrait aussi être corrélé à la forte densité d’établissements privés dans les régions les plus performantes. Un rapport de l’association française de chirurgie, daté de septembre 2017, relevait ainsi que si le secteur privé « conserve des parts de marché majoritaires dans toutes les régions », il est en situation de quasi-monopole dans quelques régions comme les régions Pays de la Loire et Provence-Alpes-Côte-d’Azur ([9]).

Selon une étude récente de la Drees ([10]), les différences territoriales peuvent aussi s’expliquer par la différence de patientèle (âge, comorbidité, situation sociale) ou encore par la distance entre le lieu de résidence du patient et l’établissement d’hospitalisation, ou la taille de ce dernier conduisant ses auteurs à proposer « des centres de taille moyenne spécialement dédiés à la chirurgie ambulatoire » pour les territoires les moins bien pourvus.

On note cependant une tendance à la réduction des écarts, comme a eu l’occasion de le souligner la région Grand Est lors de son audition. Les documents remis aux rapporteurs par le directeur général de l’Agence régionale de santé (ARS) indiquent que si « le taux en Grand Est a progressé au même rythme que le national entre 2014 et 2016 […] lécart […] se réduit progressivement à partir de 2016 ». Selon l’ARS, cette réduction de l’écart « est liée au fait que le rythme de progression au national ralentit alors que la progression en Grand Est reste constante ». En 2014 et 2018, le taux de chirurgie ambulatoire a ainsi progressé de 8,3 points, une augmentation plus importante que la moyenne nationale constatée sur la même période (7,9 points). Par comparaison, les ARS des régions Île-de-France et Hauts‑de-France, également auditionnées par les rapporteurs, ont vu leur taux respectivement augmenter de 7,5 points et 7,2 points entre 2014 et 2018. On notera cependant que les Pays de la Loire restent la région pour laquelle le développement de la chirurgie ambulatoire est plus rapide que la moyenne. Il faut également souligner que ces évolutions générales couvrent des réalités diverses. La région des Hauts-de-France se caractérise ainsi par des taux de progression disparates selon les territoires.

Si l’on veut davantage caractériser les disparités territoriales, l’étude précitée de la DREES offre quelques éléments d’analyse complémentaires. Ses auteurs ont ainsi procédé à la répartition des opérations entre quatre groupes distincts. Ils notent que le premier groupe des opérations les plus pratiquées se caractérise par une répartition territoriale homogène (cataracte, chirurgie de la main ou du poignet) tout comme le dernier groupe qui concerne les 16 opérations les moins couramment pratiquées. Les deux groupes intermédiaires, qui concentrent la moitié des interventions, présentent une forte hétérogénéité entre les départements. La DREES fait l’hypothèse que les disparités puissent être imputables à des différences de pratiques, « indépendantes de la diversité de patientèle de chaque territoire ». Cette observation accrédite l’idée selon laquelle le développement de la chirurgie ambulatoire est étroitement liée à l’engagement du praticien et à la politique de l’établissement qui se traduit dans l’élaboration de son projet médical et dans sa politique de recrutement.


ÉVOLUTION COMPARÉE DU TAUX DE CHIRURGIE AMBULATOIRE SELON LES RÉGIONS (2010-2018)

 

2014

2015

2016

2017

2018

Écarts 2014-2018

Martinique

49,8 %

49,7 %

49,9 %

52,2 %

53,4 %

3,6 points

Corse

54,0 %

54,8 %

55,9 %

56,9 %

58,3 %

4,3 points

La Réunion

52,5 %

53,3 %

54,4 %

55,7 %

57,7 %

5,2 points

Guadeloupe

51,5 %

51,9 %

54,7 %

53,8 %

57,6 %

6,1 points

Hauts de France

51,0 %

52,6 %

54,9 %

56,5 %

58,2 %

7,2 points

Occitanie

48,5 %

50,4 %

52,4 %

54,2 %

55,8 %

7,3 points

Ile-de-France

52,2 %

54,2 %

56,2 %

57,9 %

59,7 %

7,5 points

Provence-Alpes-Côte d‘Azur

52,3 %

53,9 %

56,2 %

58,1 %

59,9 %

7,7 points

Normandie

48,6 %

50,3 %

52,7 %

54,8 %

56,4 %

7,8 points

MOYENNE NATIONALE

50,0 %

51,9 %

54,1 %

55,9 %

57,8 %

7,9 points

Centre-Val de Loire

48,7 %

50,1 %

52,3 %

54,7 %

56,6 %

7,9 points

Auvergne-Rhône-Alpes

49,0 %

51,2 %

53,8 %

55,4 %

56,9 %

7,9 points

Nouvelle Aquitaine

49,5 %

51,7 %

53,8 %

55,4 %

57,4 %

7,9 points

Grand Est

47,4 %

49,4 %

51,5 %

53,6 %

55,7 %

8,3 points

Bretagne

48,8 %

51,4 %

53,4 %

55,1 %

57,3 %

8,4 points

Bourgogne-Franche-Comté

46,9 %

49,0 %

51,5 %

53,5 %

55,9 %

9,0 points

Guyane

33,7 %

34,5 %

34,8 %

38,3 %

43,0 %

9,4 points

Pays de la Loire

51,4 %

54,2 %

56,5 %

58,8 %

61,3 %

9,9 points

2.   Parmi les différents outils mobilisés, les mesures « starter » se sont révélées les plus efficaces

Le développement de la chirurgie ambulatoire s’explique par la mobilisation de plusieurs facteurs : l’assouplissement du cadre juridique, la mise à disposition d’outils de pilotage, l’incitation tarifaire mais surtout la mise sous accord préalable.

a.   Un cadre normatif assoupli pour faciliter la transformation

Le développement de la chirurgie ambulatoire a pu être favorisé par l’évolution du cadre juridique.

Jusqu’en 2003, l’ouverture de capacités en chirurgie ambulatoire était strictement conditionnée à une suppression concomitante de lits de chirurgie en hospitalisation complète : le « taux de change » était de 2 à 2,25 lits au départ, puis de 3 à 3,25 lits en 1999, ramené ensuite à 1 et 2 lits, sous condition d’activité. L’ordonnance du 4 septembre 2003 ([11]) a depuis instauré un régime d’autorisation des places de chirurgie en ambulatoire découplé de l’évolution des lits de chirurgie en hospitalisation complète.

On notera également que, depuis la publication du décret n° 2012-969 ([12]) aucune norme quantitative n’est fixée quant à l’organisation de la structure. Est par contre privilégiée une approche qualitative et adaptative des organisations et des prises en charge.

Si reste requise la présence minimale permanente, pendant les heures d’ouverture des structures, d’un médecin qualifié, d’un infirmier (ou, pour l’activité de soins de suite et de réadaptation, d’un infirmier ou d’un masseur-kinésithérapeute) ainsi que d’un anesthésiste-réanimateur, a en revanche été supprimée l’exigence de disposer d’un infirmier ou d’un masseur-kinésithérapeute pour cinq patients présents ainsi que de deux infirmiers supplémentaires pendant la durée d’utilisation du secteur opératoire. De même, le règlement intérieur approuvé par l’ARS a été remplacé par une « charte de fonctionnement » transmise à l’ARS.

Les structures de chirurgie ambulatoire répondent à une organisation spécifique décrite au sein d’une charte de fonctionnement, prévue par l’article D. 6124-305 et transmise par le directeur de l’établissement de santé au directeur général de l’ARS. Celle-ci précise l’organisation de la structure, les conditions de désignation et la qualification du médecin coordonnateur, l’organisation de la continuité des soins ainsi que les formations nécessaires au bon fonctionnement de la structure de soins.

Ces unités disposent également d’une équipe médicale et paramédicale dédiée dont les fonctions et les tâches sont définies par la charte de fonctionnement.

Selon le premier alinéa de l’article D. 6124-303 du code de la santé publique, « le nombre et la qualification des personnels médicaux et auxiliaires médicaux ainsi que le nombre daides-soignants exerçant dans les structures et unités de soins […] sont adaptés aux besoins de santé des patients, à la nature et au volume dactivité effectués, et aux caractéristiques techniques des soins ».

Selon le même article, une présence minimale permanente de personnels est requise pendant les heures d’ouverture et pendant toute la durée des prises en charge. Cette obligation requiert la présence d’un médecin qualifié, d’un infirmier diplômé d’État, d’un médecin anesthésiste réanimateur ainsi qu’un nombre d’infirmiers diplômés d’État « adapté à lactivité pendant la durée dutilisation du secteur opératoire ». On notera par ailleurs que ces structures peuvent également recourir à des personnels exerçant également en hospitalisation complète sur le même site.

Les structures de chirurgie ambulatoire doivent en outre disposer de locaux et matériels dédiés aux termes du troisième alinéa de l’article D. 6124-301, à l’exception des blocs opératoires qui peuvent relever d’une autre structure. En effet, l’article D. 6124-302 ne porte que sur « laccueil et le séjour des patients » et de leurs accompagnateurs, « lorganisation, la préparation et la mise en œuvre optimale des protocoles de soins intégrant la prise en charge de la douleur », « la surveillance et le repos nécessaires à chaque patient » ainsi que « le stockage des produits de santé et lentretien du matériel nécessaire aux soins et au transport des patients, la prédésinfection de ces matériels et lélimination des déchets dactivité de soins à risque infectieux ».

Enfin, l’article D. 6214-304 formule des exigences de qualité et de sécurité de prise en charge. Les structures « sont [ainsi] tenues dorganiser la continuité des soins en dehors de leurs heures douverture, y compris les dimanches et jours fériés » et doivent se doter « à cet effet dun dispositif médicalisé dorientation immédiate des patients ». Si elle ne peut elle-même assurer cette continuité des soins, elle doit conclure une convention avec un « établissement de santé accueillant en hospitalisation à temps complet des patients relevant de la ou des disciplines pratiquées par la structure ». En outre, chacun des patients pris en charge se voit remettre un bulletin de sortie avant son départ. Dûment signé par l’un des médecins de la structure, il « mentionne lidentité des personnels médicaux ayant participé à lintervention, les recommandations sur les conduites à tenir en matière de surveillance postopératoire ou anesthésique concernant en particulier la prise en charge de la douleur, et les coordonnées des personnels de létablissement de santé assurant la continuité des soins ».

b.   Le déploiement d’une méthodologie pour accompagner la transformation

La mise en place de la chirurgie ambulatoire a également été facilitée par la mise à disposition d’outils de pilotage.

L’accompagnement méthodologique a constitué le socle initial du développement de la chirurgie ambulatoire. Si les nombreux acteurs auditionnés par les rapporteurs n’ont pas spontanément cité ces outils, ils n’ont pas non plus souligné leur inutilité. Les professionnels de santé ont été plus soucieux de porter un message sur la qualité de la prise en charge que sur les gains d’efficience que pourrait entraîner la mise en place d’une nouvelle organisation fondée sur la chirurgie ambulatoire. L’amélioration des connaissances et le recours à de nouvelles techniques ne constituent un réel progrès que s’ils s’adressent à tous, aux personnels soignants comme aux patients. En revanche, les ARS comme les représentants des directions d’hôpital ont pu souligner l’intérêt de ces outils d’accompagnement, dans lesquels ils pouvaient « piocher » un certain nombre de recommandations, en établissant bien une distinction entre les outils de première génération et ceux relevant de la deuxième génération.

● Les outils de première génération ont été développés par la Haute autorité de santé (HAS) et l’Agence nationale d’appui à la performance (ANAP) qui ont formalisé une coopération en 2011. Ils ont permis de contribuer à l’amorçage de la chirurgie ambulatoire dans le secteur public, le secteur privé étant, quant à lui, engagé depuis longtemps dans cette démarche.

Lors de son audition, la HAS a souligné la publication, en avril 2012, d’un rapport « socle de connaissances » à destination des professionnels de santé consistant en un état des connaissances réalisé à partir des données françaises et internationales (état des données publiées, informations sur les enjeux).

Ce rapport a été rapidement suivi par la publication, en mai 2013, de recommandations organisationnelles avec la mise en place d’outils de pilotage, dont la construction a suivi une démarche d’approche ascendante ainsi qu’un parangonnage afin d’identifier « les facteurs clefs de réussite et les défaillances potentielles » ([13]).

Il a enfin été suivi par la mise à disposition, par l’ANAP, d’un guide (« Chirurgie ambulatoire : mode demploi ») dont l’objet vise à présenter les « étapes clés dun projet de développement de la chirurgie ambulatoire, depuis le cadrage du projet jusquà sa mise en œuvre et à la pérennisation des actions » ([14]).

Des outils de mesures ont été parallèlement développés :

– Interdiag Chir Ambu, est un outil de diagnostic interne de chirurgie ambulatoire consistant en un questionnaire de 196 questions « permettant, pour un établissement de santé, dévaluer son niveau de maturité pour chacune des recommandations » ([15]) organisationnelles. Cet outil permet d’informer concrètement les établissements sur le chemin qu’il leur reste à parcourir au regard de chaque préconisation.

– Parallèlement un logiciel de microcosting a été développé suivant une double finalité économique et organisationnelle afin d’identifier les gains résultants d’une éventuelle réorganisation et de simuler les coûts induits par les choix organisationnels. Il s’agit de l’Outil prospectif d’évaluation économique relatif à l’ambulatoire (OPEERA) développé alors qu’aucune incitation tarifaire ne poussait au basculement vers la chirurgie ambulatoire.

L’ensemble de ces éléments constitue le socle initial du développement des outils. La HAS et l’ANAP estiment que ces outils présentent toujours leur utilité dans la démarche de transformation et constituent encore des « éléments de référence » ([16]), hormis sans doute l’outil OPEERA dans la mesure où le « relais a été pris par la politique tarifaire » ([17]).

Les autres outils d’accompagnement de la chirurgie ambulatoire

Plusieurs méthodes et outils ont été mis à la disposition des établissements de santé et des professionnels pour la transformation vers la chirurgie ambulatoire.

L’outil IGAS/IGF estime « le potentiel de transférabilité ambulatoire ». Selon la CNAM, il présente l’avantage d’être simple mais comporte divers inconvénients : non prise en compte des case-mix, construction sur « les pratiques de durées de séjour constatées (pas forcément les bonnes pratiques) », « décalage par rapport aux recommandations et à l’évolution de la tarification » et absence d’évolution dans le temps.

Itinéraire chirambu consiste en « un outil documentaire en ligne construit autour de 3 itinéraires permettant de s’orienter dans l’ensemble de la production HAS/ANAP sur l’organisation ambulatoire ». Cet outil apporte « des recommandations, des outils de diagnostic, des check lists, des fiches de mise en œuvre, des débats d’experts et des retours d’expérience d’établissements français et européens ». Il comprend l’outil Interdiag chir ambu.

Source : Caisse nationale d’assurance maladie

En réponse aux questions posées par les rapporteurs, l’ARS Grand Est a indiqué que « globalement, lensemble des établissements [a] mis en place des outils de pilotage de la chirurgie ambulatoire au sein de leur structure » et que l’ensemble des données et outils sont utiles dans la mesure où ils permettent des analyses à différents niveaux.

● Afin d’instaurer une nouvelle dynamique de développement, des outils de deuxième génération ont été développés, à l’instar de « Visuchir », logiciel mis à disposition par la Caisse nationale de l’assurance maladie (CNAM).

Au moment de son audition, la CNAM soulignait, qu’après trois mois de mise en œuvre, le bilan de l’utilisation de l’outil était assez encourageant. Sur les 17 000 connexions alors enregistrées, 74 % provenaient des établissements de santé, dont deux tiers issus du secteur privé et un tiers du secteur public. Près de huit mois plus tard, soit après un an de mise en service, 30 000 connexions étaient recensées.

« Visuchir » est un outil médicalisé qui permet d’établir des comparaisons acte par acte tout en tenant compte du case-mix de l’établissement. L’intérêt de ce logiciel réside tant dans sa simplicité d’utilisation que dans les potentialités de développement qu’il laisse entrevoir au travers de données comparatives. L’ARS Grand Est a indiqué aux rapporteurs qu’elle réservera à cet outil une place centrale de sa politique active de chirurgie ambulatoire, particulièrement à l’occasion des dialogues de gestion avec les établissements de santé. À cet effet, l’ARS a indiqué aux rapporteurs qu’elle envisageait des formations à la manipulation de « Visuchir » en lien avec l’assurance maladie et à destination des établissements de santé « présentant un fort potentiel de développement afin d’aboutir à une prise de conscience des professionnels par lélaboration dune feuille de route ». La CNAM comme d’ailleurs les ARS considèrent cet outil comme très complémentaire de la politique de mise sous accord préalable (MSAP) afin de davantage accompagner les établissements de santé « en retard ». L’outil permet de comparer ces derniers à des établissements similaires les plus performants. Bien que non coercitif, « Visuchir » constitue bien un levier privilégié de la transformation.

Visuchir en quelques mots

« L’outil de data-visualisation VISUCHIR permet pour chaque établissement et chaque professionnel de santé d’analyser, de comparer et de suivre ses pratiques chirurgicales, d’estimer son potentiel de développement ambulatoire à partir des 20 % d’établissements les plus performants en ambulatoire pour chacun de ses actes ».

La CNAM indique que « chaque professionnel peut retrouver sa propre activité chirurgicale ».

Il « apporte des benchmarks en indiquant les bonnes pratiques chirurgicales ambulatoires » et permet aux établissements de santé de se comparer selon quatre niveaux :

– comparaison nationale « avec l’ensemble des établissements de santé géographiques publics et privés France entière » ;

– comparaison régionale « avec l’ensemble des établissements de santé géographiques publics et privés de sa région » ;

– comparaison par « catégorie d’établissement » (centres hospitaliers, centres hospitaliers universitaires, établissements de santé privés d’intérêt collectif, centres de lutte contre le cancer, cliniques privées, établissements du service de santé des armées) ;

– comparaison avec les établissements présentant le même case-mix ambulatoire.

Il est en accès libre, permettant à tout utilisateur de se connecter facilement sans mot de passe.

La CNAM souligne enfin que Visuchir « est la plus grosse base de données mondiale en santé en open data puisque couvrant la totalité des sites chirurgicaux français et leurs 36 millions d’actes chirurgicaux ».

Source : Caisse nationale d’assurance maladie

De son côté l’ANAP a indiqué à la MECSS son engagement dans la mise en place de nouveaux outils méthodologiques destinés à accompagner une nouvelle dynamique de développement de l’ambulatoire. Les travaux portent notamment sur la réhabilitation améliorée après chirurgie (cf. 3 du présent A).

En tout état de cause, il importe a minima d’avoir un retour objectif des établissements et des acteurs de santé portant sur l’utilisation de ces outils et leur place dans la stratégie de transformation. Cette objectivation apparaît nécessaire aux yeux des rapporteurs si l’on souhaite, un tant soit peu, améliorer le pilotage.

Proposition n° 1 Évaluer le cadre méthodologique mis à la disposition des acteurs de santé pour accompagner le développement de la chirurgie ambulatoire

c.   L’incitation tarifaire pour susciter la transformation

La tarification à l’activité (T2A) constitue le nerf du financement des activités de chirurgie qu’elles soient pratiquées en ambulatoire ou en hospitalisation complète. Pour ce faire, l’ensemble des établissements de santé se voient appliquer une grille tarifaire reflétant la typologie des malades et des actes pratiqués. Les séjours hospitaliers sont classés en groupements homogènes de malades (GHM) – qui présentent des caractéristiques similaires – auxquels on attribue un tarif. Deux grilles coexistent, l’une pour le secteur ex-DG (secteur public), l’autre pour le secteur ex-OQN (secteur privé).

Pour chacun des GHM, une codification alphanumérique de 6 caractères est établie, les 5 premiers chiffres composant la racine. Le dernier caractère est un chiffre évaluant le degré de sévérité du séjour sur une échelle de 1 à 4 pour l’hospitalisation complète ou encore une lettre lorsqu’il s’agit d’une hospitalisation en ambulatoire (lettre J) ou d’une hospitalisation de très courte durée (lettre T).

Dans une publication récente ([18]), la Drees et l’INSEE indiquent que, jusqu’à l’année 2009, aucun GHM n’était codé en J. Les spécialités médicales « étaient regroupées dans un GHM au faible tarif ». En conséquence, la tarification « nincitait pas les hôpitaux à développer la chirurgie ambulatoire » ([19]). Les auteurs de l’étude poursuivent en indiquant que « lincitation tarifaire mise en place et progressivement étendue à lensemble des racines consiste à appliquer un tarif identique pour une prise en charge en ambulatoire (sans nuitée) et une prise en charge conventionnelle de faible niveau de sévérité (avec nuitée). Cela peut sobtenir en unifiant les tarifs du GHM de niveau 1 et du GHM de niveau J (lorsque ce dernier existe), ou en supprimant la borne basse du GHM de niveau 1 » ([20]). Avec la mise en place du tarif unique, les hôpitaux sont incités à basculer progressivement vers l’ambulatoire. Plusieurs campagnes successives ont été mises en œuvre portant le tarif unique de 17 racines de GHM en 2009 à 105 en 2014 pour le secteur public et de 20 à 98 pour le secteur privé sur la même période ([21]).

Cette politique dincitation a produit quelques effets. Dans la publication précitée, les auteurs soulignent que si la progression de la chirurgie ambulatoire ne doit rien aux vagues dincitations tarifaires entre 2009 et 2011, une légère augmentation se produit « pour les racines appartenant aux vagues 2012 et 2013 ».

d.   La mise sous accord préalable pour engager la transformation

Le basculement vers la chirurgie ambulatoire semble plus marqué lorsque l’incitation financière s’accompagne d’une mise sous accord préalable. Cet effet est cependant plus observable dans le secteur public que dans le secteur privé. L’ARS Grand Est souligne, pour sa part, qu’« au regard des données disponibles, les mesures incitatives nont pas permis une accélération du développement de la chirurgie ambulatoire mais ont certainement permis de maintenir un développement continu ».

Prévu par la loi de financement de la Sécurité sociale de 2008 et codifié à l’article L. 162-1-17 du code de la sécurité sociale, la mise sous accord préalable (MSAP) vise à subordonner la prise en charge des prestations ou des actes délivrés par les établissements de santé à l’accord préalable de l’assurance maladie. Cette procédure est décidée par le directeur général de l’ARS après avis de l’organisme local d’assurance maladie. Elle est notamment justifiée par l’un des quatre constats suivants :

– « une proportion élevée de prestations dhospitalisation avec hébergement qui auraient pu donner lieu à des prises en charge sans hébergement ou sans hospitalisation » ;

– « une proportion élevée de prescriptions de ces prestations dhospitalisation avec hébergement qui auraient pu donner lieu à des prises en charge sans hébergement ou sans hospitalisation » ;

– « un écart significatif entre le nombre dactes, de prestations ou de prescriptions réalisés par létablissement de santé et les moyennes régionales ou nationales pour une activité comparable » ;

– « une proportion élevée dactes, de prestations ou de prescriptions réalisés par létablissement de santé non conformes aux référentiels établis par la Haute Autorité de santé ».

La procédure vise donc à mettre sous surveillance des établissements de santé, particulièrement ceux qui sont les plus en retard. Elle a concerné 5 gestes marqueurs en 2008, 17 en 2009, 38 en 2012, 43 en 2014 et 55 aujourd’hui.

Selon les informations apportées par la CNAM, l’Assurance Maladie « a conduit 7 campagnes nationales de MSAP en chirurgie depuis 2008 » aboutissant, en chiffres cumulés, à suivre 1 738 gestes, répartis pour 45 % dans le secteur privé et 55 % pour le secteur public. Entre 2013 et 2017, 558 établissements ont ainsi été mis sous accord préalable.

Selon les termes de la CNAM, cette procédure « impose une contrainte forte à l’établissement pour réaliser des actes en chirurgie ambulatoire » et « a permis de montrer qu’il est possible de changer les pratiques » car elle comporte « essentiellement un effet pédagogique et préventif ». La MSAP contribue à « un effet de « starter » pour le développement de la chirurgie ambulatoire au sein des établissements où des spécialités sont les plus éloignées de la chirurgie ambulatoire » et « il en résulte un effet positif à court terme de "rattrapage" par rapport à la moyenne nationale ».

Selon les éléments transmis par la Direction générale de l’offre de soins (DGOS), la liste des gestes marqueurs « ne sera plus amenée à évoluer » pour plusieurs raisons, parmi lesquelles « la réticence de certaines sociétés savantes à étendre cette liste à d’autres actes du fait de leur opposabilité » et la « priorité accordée au « déploiement de l’outil "Visuchir" ».

Pratiques de la chirurgie ambulatoire selon la catégorie des établissements

 

Catégorie

Séjours chirurgie

Séjours chirurgie ambulatoire

 

Taux 2013

Taux 2017

France

3 271 207

2 730 028

75,9 %

83,5 %

AP-HP/AP-HM/HCL

106 137

75 084

63,5 %

70,7 %

CHR/CHU

234 053

166 625

62,7 %

71,2 %

CH/HIA

611 992

484 650

70,5 %

79,2 %

CLCC

25 554

18 095

62,0 %

70,8 %

Privé

2 119 580

1 841 134

79,7 %

86,9 %

Privé non lucratif

168 893

140 055

76,9 %

82,9 %

Source : CNAM.

L’ARS Grand Est s’est servie de ce levier pour améliorer son taux de prise en charge en ambulatoire avec des résultats significatifs comme le montre le tableau ci-après.

Évolution du taux de chirurgie ambulatoire constatée pour quelques opérations significatives dans les établissements de santé de la région Grand Est

Gestes marqueurs

Taux constaté en décembre 2016

Taux constaté en avril 2018

France

Grand Est

France

Grand Est

14 – Chirurgie de l’épaule

30,8 %

33,5 %

45,0 %

50,8 %

20 – Chirurgie des hernies inguinales

63,8 %

65,5 %

68,7 %

69,8 %

26 – Chirurgie du cristallin (isolé excepté avec association BELB001)

93,0 %

92,3 %

95,3 %

95,6 %

28 – Chirurgie du nez

55,3 %

44,4 %

63,3 %

57,2 %

35 – Cholécystectomie (si racine GHM = 07C14)

43,2 %

38,1 %

53,7 %

50,2 %

Source : Agence régionale de santé Grand Est

Cela étant, l’ARS souligne que ses équipes n’ont pas été en « mesure de vérifier si les pratiques sont pérennisées dans le temps » tout en soulignant que « ce dispositif contraignant est critiqué par les professionnels de terrain au regard de sa lourdeur ».

Comme la Cour des comptes a pu déjà le souligner, la MSAP « a été un stimulant fort pour développer la pratique ambulatoire » ([22]). Reste à savoir si le recours à cette procédure contraignante, qui peut être vécue comme coercitive par certains professionnels médicaux, produit des effets à long terme. Dans sa réponse au questionnaire transmis par les rapporteurs, la CNAM indique que « des évaluations plus qualitatives sont en cours et seront menées en partenariat avec l’Association française de chirurgie ambulatoire (AFCA) et la Société française d’anesthésie et de réanimation (SFAR) au regard notamment de l’effet dans la durée des MSAP ». Pour les rapporteurs, ces travaux bienvenus mériteraient de pouvoir être systématisés.

Proposition n° 2 Systématiser l’étude des effets à long terme de la mise sous accord préalable sur la transformation des séjours d’hospitalisation complète en séjours de chirurgie ambulatoire.

e.   La contractualisation pour acter la transformation

Si la MSAP constitue une réponse ultime, la démarche d’accompagnement, qui repose sur la confiance, reste encore un levier d’incitation structurant dans l’approche des ARS.

● Cet accompagnement passe notamment par la contractualisation.

Le développement de la chirurgie ambulatoire constitue un axe majeur de la stratégie nationale de santé qui ambitionne de transformer notre système de santé dans le cadre plus global du « virage ambulatoire ». Plusieurs leviers sont à cet égard mobilisés pour y parvenir, parmi lesquels la politique de contractualisation et la MSAP.

La dernière instruction disponible de la DGOS (2015) fixe ainsi un rythme de progression à « intégrer dans la détermination des cibles contractualisées dans le cadre des [contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens (CPOM) conclus entre les ARS et les établissements de santé] ». L’instruction souligne qu’il « conviendra denvisager avec létablissement concerné les actions à conduire pouvant éventuellement faire lobjet dune contractualisation ».

Des objectifs sont définis par l’instruction. L’annexe n° 3 fixe à cet effet les cibles nationales et régionales de développement de la chirurgie ambulatoire pour les années 2015 à 2020. Le taux cible au niveau national à atteindre est de 66,2 %. L’annexe n° 5 définit une méthode permettant aux ARS de situer le potentiel de développement de la chirurgie ambulatoire des établissements de santé, au regard des cibles nationales et régionales. La circulaire complète le dispositif avec des dispositifs d’accompagnement allant de l’« accompagnement renforcé » (autodiagnostic, simulation capacitaire, plan d’action) à l’accompagnement dans la restructuration au titre de l’« offre à faire évoluer » en passant par le simple « suivi » (identification d’actions supplémentaires à mettre en œuvre).

L’outil privilégié reste le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM). Le CPOM décline le plan régional de santé (PRS) au niveau des établissements de santé. Il fixe notamment « les objectifs quantitatifs et qualitatifs des activités de soins et équipements matériels » ([23]).

Dans le cadre contractuel, la mise en place de la chirurgie ambulatoire a été le principal levier utilisé par les démarches d’incitation au retour à l’équilibre des établissements de santé. C’est le cas des CPOM qui participent de la mise en œuvre non seulement « de la politique nationale dinnovation médicale et de recours » mais aussi ainsi des « autres engagements, notamment de retour à léquilibre financier » ([24]). Toutefois, ces CPOM ont vocation à évoluer à l’avenir, alors que l’une des préconisations issues du Ségur de la santé vise à simplifier ces outils de contractualisation.

● La démarche d’accompagnement peut aussi s’inscrire dans le cadre du comité interministériel de performance et de la modernisation de l’offre de soins (COPERMO) qui assure le suivi des établissements de santé amenés à conduire un « projet dinvestissement majeur et dont il convient de maîtriser les enjeux financiers, le dimensionnement et linsertion dans loffre de soins territoriale » ainsi que « ceux dont la situation budgétaire obère la capacité à se projeter vers lavenir et qui doivent sengager dans un processus de redressement rapide » ([25]).

Dans le cas particulier des projets d’investissements, étant entendu que « le virage ambulatoire [constitue] un axe de performance central », l’ARS tout comme le COPERMO « demandent des cibles ambitieuses permettant de prévoir des bâtiments adaptés au besoin capacitaire à horizon de 10 ans. En effet, lenjeu est de ne pas construire des bâtiments inadaptés et générateurs de coûts, notamment en termes de surface, lhôpital de demain étant amené à se recentrer sur des missions dexpertise et de plateau technique avec une dimension dhébergement moins importante » ([26]).

Les CHU de Strasbourg, de Nancy et de Reims, tout comme le centre hospitalier de Verdun et les établissements relevant du même groupement hospitalier de territoire ont été suivis au titre du COPERMO.

Néanmoins, le COPERMO a vocation à être supprimé, ainsi que cela été recommandé au terme du Ségur de la santé. Ce comité, perçu comme un outil trop centralisé de gestion des investissements, cristallisant le ressentiment des communautés hospitalières des établissements de santé sur les attendus en termes de performance et de redressement financier, doit être remplacé par un conseil national de l’investissement en santé, au rôle et à la composition différents : ce conseil doit associer des représentants des élus, se situer dans l’accompagnement des projets, répartir les enveloppes d’investissement et se prononcer uniquement sur les projets financés en totalité sur fonds publics ou supérieurs à 100 millions d’euros. L’objectif poursuivi est de déconcentrer davantage la gestion des investissements, et de territorialiser et décloisonner les projets.

En tout état de cause, la démarche de chirurgie ambulatoire ne peut se comprendre qu’au regard de la maîtrise globale de l’enveloppe allouée à l’assurance maladie. Pour les établissements de santé privés, cette transformation a constitué un élément clef de leur survie. Pour les établissements publics, l’enjeu est quelque peu différent, l’endettement ne se traduisant pas nécessairement par la fermeture de la totalité de la structure hospitalière. Il n’en demeure pas moins que l’épée de Damoclès constituée par la baisse d’activité et l’endettement qui en résulte a permis d’amorcer la marche vers la chirurgie ambulatoire. Au centre hospitalier de Nogent-le-Rotrou, cette transformation a débouché sur un succès retentissant et a permis de redresser une activité en perte de vitesse. Pour les structures publiques, qui constituent la majorité des cas, la transformation a pu être suscitée à l’occasion des plans de redressement financier accréditant l’idée d’une évolution « subie » plutôt que « voulue » comme a pu le souligner la Fédération hospitalière de France lors de son audition.

3.   La chirurgie ambulatoire est un marqueur de qualité

On pourrait penser que l’objectif de réductions capacitaires, dans un contexte de maîtrise des dépenses sociales, constitue « l’alpha et l’oméga » de la chirurgie ambulatoire, mais il faut repenser cet objectif à l’aune des leçons que nous avons tirées de la pandémie de la Covid 19. Faire face à l’urgence de la situation a nécessité une réorientation et une réorganisation de notre système de soins, avec un redéploiement logistique et humain qui a conduit à repousser, sine die, les actes de chirurgie programmée non urgents.

Les rapporteurs ont à cœur de retraduire fidèlement les propos tenus par l’ensemble des personnes auditionnées, qu’il s’agisse des représentants des patients, des professionnels eux-mêmes, voire des sociétés savantes. La chirurgie ambulatoire ne saurait être réduite à un simple enjeu économique. Elle met également en jeu des nouvelles pratiques de soins très exigeantes en termes de qualité et de sécurité dans un contexte de chirurgie programmée. En ce sens, la chirurgie ambulatoire constitue un important marqueur de la qualité de prise en charge.

a.   Une évolution plébiscitée par tous les acteurs du système de santé

Comparée à l’hospitalisation complète, la chirurgie ambulatoire possède d’indéniables avantages qu’il importe de souligner.

● Dans un environnement où le facteur temps occupe une place prédominante, la chirurgie ambulatoire représente un atout certain pour les patients et leur entourage puisqu’il permet d’éviter les contraintes liées à l’hospitalisation complète, comme a pu le souligner France Assos santé lors de son audition. Pour le professeur Philippe Ceruse, chef de service à l’Hôpital de la Croix Rousse ([27]), « le patient sen porte mieux » car il n’est plus porté à « rester une semaine à lhôpital sans rien faire et à déambuler dans les couloirs ». Dans sa contribution adressée aux rapporteurs, le syndicat CNI ([28]) indique que « la population est, dans lensemble, demandeuse et satisfaite de la prise en charge en ambulatoire ».

Une opération pratiquée en chirurgie ambulatoire réduit les risques d’exposition aux maladies nosocomiales et partant, de complications associées. Le Pr Corinne Vons, présidente de l’Association française de chirurgie ambulatoire (AFCA), est ainsi allée à rebours des idées reçues sur le surcroît de risques associés à une opération pratiquée en ambulatoire plutôt qu’en hospitalisation complète. S’insurgeant contre l’idée que la chirurgie ambulatoire présente des impondérables, le Pr Vons a fait valoir que de nombreuses études scientifiques démontraient le contraire. Poursuivant son plaidoyer en faveur de l’ambulatoire et des efforts à produire pour maîtriser les complications chirurgicales, le Pr Vons a indiqué aux rapporteurs que l’idée selon laquelle l’hôpital constitue un lieu de sécurité est erronée car l’hospitalisation peut gêner le recouvrement de la santé. L’hospitalisation « est source d’infections par des germes nosocomiaux » en même temps qu’elle « gêne [la] réhabilitation » car le patient « reste couché sans bouger [favorisant ainsi] les risques thromboemboliques ».

Dans son approche globale de la qualité et de la sécurité des soins, la Haute Autorité tend à confirmer la perception majoritairement positive des patients à l’égard de la chirurgie ambulatoire.

Des indicateurs publics de qualité et d’efficacité ont ainsi été élaborés par la HAS. Suivant une expérimentation réalisée entre 2015 et 2016, celle-ci a développé des indicateurs basés sur l’analyse du parcours du patient – avant, pendant et après son opération –, afin d’accompagner le déploiement sécurisé de la chirurgie ambulatoire ([29]). Elle a également déployé en 2019 un questionnaire e-Satis destiné aux patients pris en charge au titre de la chirurgie ambulatoire afin d’évaluer leur degré de satisfaction. Selon cet indicateur, les patients attribuent à la chirurgie ambulatoire un score global de 76,4 %.

● Du point de vue des établissements de santé, la chirurgie ambulatoire a permis de davantage fluidifier les flux, comme l’ont notamment souligné les représentants des trois plus grands établissements de santé lors de leurs auditions ([30]). De façon générale, l’irruption de l’ambulatoire a permis de réorganiser les circuits de prise en charge conduisant à un rapprochement géographique entre le bloc opératoire et l’accueil spécifiquement dédié à l’ambulatoire et à la suppression ou la réorganisation du brancardage.

● Les professionnels impliqués dans la chirurgie ambulatoire, auditionnés en nombre par les rapporteurs, ont tenu à souligner les effets positifs de la nouvelle organisation fondée sur la chirurgie ambulatoire.

Chacun des acteurs engagés est un maillon essentiel de la chaîne depuis l’infirmière chargée de l’accueil, de l’information du patient et son suivi post-opératoire jusqu’au chirurgien en passant par l’anesthésiste, les infirmiers de blocs opératoires, les infirmiers anesthésistes, les aides-soignants et les brancardiers. Bien évidemment, cette dimension collective existe aussi – fort heureusement – dans le cadre de l’hospitalisation complète. Cela étant, la programmation des actes effectués en chirurgie ambulatoire accroît la responsabilité de chacun des acteurs puisqu’il importe que le patient soit en état de sortir à l’issue de son hospitalisation. Le moindre grain de sable est ainsi susceptible d’enrayer sa prise en charge. L’enchaînement des étapes rend encore plus prégnant l’articulation entre la prise en charge préopératoire (recueil des informations du patient), l’opération à proprement parler (fluidité du parcours, disponibilité du bloc) et le suivi post-opératoire (éviter les éventuelles complications). La chirurgie ambulatoire est une suite d’opérations à flux tendu qui suppose une nouvelle pratique collective. N’oublions pas que l’ambulation désigne autant la façon de marcher que la façon de penser notre système de soins. Cette révolution dans la façon de soigner bouscule et interroge autant les professionnels de santé qu’elle suscite une nouvelle dynamique et les responsabilise. Chaque acteur a, dans la chaîne de soins, un rôle essentiel, dans le cadre d’une chirurgie programmée, exigeante, nécessitant autant la précision du geste que la motivation d’une équipe.

La mise en œuvre de la démarche patient debout

La démarche du « patient debout » est un nouveau mode de prise en charge des patients induite par le virage ambulatoire opéré par les établissements de santé. Si elle répond à un enjeu d’efficience, elle vise également à améliorer le service rendu au patient dans le respect de sa dignité et de son autonomie.

Cette démarche « consiste à accompagner un patient qui marche jusqu’au bloc opératoire plutôt que couché sur un brancard ».

Elle rend le patient acteur de santé, redéfinit les rapports entre celui-ci et l’équipe soignante tout en modifiant le circuit de prise en charge et la logistique associée.

Pour sa mise en œuvre, l’ANAP suggère :

– d’inscrire la démarche dans le projet médical d’établissement afin d’assurer un pilotage spécifique ;

– de définir un modèle organisationnel en définissant des critères d’éligibilité du patient, en choisissant une tenue appropriée préservant la dignité du patient, en identifiant le mode de transport utilisé jusqu’au bloc opératoire, en améliorant les modalités d’informations du patient et en redéfinissant les tâches du personnel soignant avant et après l’opération chirurgicale ;

– de procéder à son évaluation.

Source : http://bloc-operatoire.anap.fr/publication/2138-mettre-en-oeuvre-la-demarche-patient-debout-au-bloc-operatoire

Ces évolutions affectent positivement les autres activités hospitalières. De nombreux acteurs ont insisté sur les effets positifs des nouvelles pratiques professionnelles dans la prise en charge des patients en hospitalisation complète. La pratique de la chirurgie ambulatoire, qui suppose une prise en charge spécifique, ne constitue donc pas une pratique isolée. Il convient de ne pas sous-estimer le rayonnement de cette nouvelle organisation dans l’environnement hospitalier et l’émulation qu’elle peut susciter.

Dans sa contribution transmise aux rapporteurs, la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne privés non lucratifs (FEHAP) souligne que la « prise en charge en ambulatoire transforme les métiers » et suppose une « organisation millimétrée du travail en équipe et la gestion de flux importants de patients dans un environnement technique complexe ».

Pour sa part, le syndicat CNI relève que les personnes affectées aux unités de chirurgie ambulatoire « montrent majoritairement une satisfaction de leur travail et des prises en charge quils effectuent, tant en termes de relation soignant-soigné quen termes de technicité ».

b.   Une évolution encouragée par les sociétés savantes

Le développement de la chirurgie ambulatoire doit beaucoup aux travaux opérés par les associations des professions de santé. L’élargissement des gestes marqueurs ne peut se faire sans la concertation avec ces dernières, qu’il s’agisse de l’association française de chirurgie ambulatoire (AFCA) ou des sociétés savantes. Le site internet du ministère des solidarités et de la santé indique ainsi qu’il « nexiste aucune recommandation de caractère réglementaire concernant lanesthésie et les actes pouvant être réalisés dans le cadre de la chirurgie ambulatoire, mais seulement des recommandations établies par les sociétés savantes et lassociation française de chirurgie ambulatoire (AFCA) ».

Instituée en 2014 sous la forme d’une association, l’AFCA est en contact avec toutes les structures homologues de chirurgie ambulatoire dans le monde. Pluridisciplinaire et multi professionnelle, l’association regroupe l’ensemble des professionnels impliqués dans la chirurgie ambulatoire (anesthésistes, chirurgies, secrétaires médicaux, directeurs d’établissements). Elle fait le lien entre les institutions et les sociétés savantes et contribue au développement de l’ambulatoire, à la formation et à la diffusion de la connaissance.

De leur côté les sociétés savantes œuvrent à la qualité et à la sécurité des actes pratiqués en chirurgie ambulatoire par l’émission de recommandations. Dans sa contribution transmise aux rapporteurs, le syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes réanimateurs élargie (SNPHARe) indique que « la réglementation et les recommandations des sociétés savantes pour les prises en charge ambulatoires ont défini un certain nombre de mesures permettant de sécuriser le retour à domicile du patient » comme « ne pas être seul au retour et jusquau lendemain matin, un accompagnement par une personne majeure et capable, avoir un téléphone, pas dexcès dalcool ou de prise de stupéfiants […], pas de conduite automobile ou autre responsabilité, pas dactivité professionnelle ou denfants en bas âge à charge, […] une bonne compréhension des consignes dont la traduction est indispensable en cas de barrière linguistique ».

La société française d’anesthésie et de réanimation (SFAR) formule de son côté quelques prescriptions dans le cadre des anesthésies pratiquées en ambulatoire portant à la fois sur les actes et les critères d’éligibilité des patients.

S’agissant des actes, le site internet de la société savante ([31]) indique qu’ils doivent être « de courte durée », « à risque faible, notamment hémorragique et respiratoire », et « aux suites simples, peu douloureuses et nimpliquant pas de handicap important » sans exclure un élargissement « en fonction de lexpérience acquise, et notamment après évaluation des résultats » et pour autant que les extensions fassent l’objet « dun accord préalable entre opérateur et anesthésiste ».

S’agissant des patients, il est indiqué que leur sélection dépend de l’application de critères sociaux et médicaux. Pour les premiers, diverses exigences sont posées telles que la « compréhension suffisante de ce qui est proposé », « laptitude à observer les prescriptions médicales », des « conditions dhygiène et de logement au moins équivalentes à celles quoffre une hospitalisation », la « disponibilité dune personne, responsable et valide, pour raccompagner le patient et rester la nuit suivante auprès de lui » ou encore « laccès rapide à un téléphone ». Les critères médicaux ont trait aux conditions d’âge et bien évidemment à l’état de santé du patient.

Ces recommandations ne constituent qu’un exemple parmi d’autres des documents disponibles sur le site internet de la SFAR. En 2017, la société savante a émis des recommandations portant sur la prise en charge des sujets âgés dans le cadre ambulatoire, partant du constat que le vieillissement de la population allait conduire à un accroissement du nombre de ces patients susceptibles de bénéficier des gestes « sous anesthésie locale, loco-régionale, générale ou encore sous sédation » ([32]). Plus récemment, on pourra encore noter la publication de recommandations portant sur la « réhabilitation améliorée après lobectomie pulmonaire » ([33]).

Pourquoi les rapporteurs tiennent-ils à insister sur ces éléments ?

Tout d’abord, ils sont intimement convaincus que le développement de la chirurgie ambulatoire et l’attrait que cette pratique peut exercer sont liés à la volonté collective de s’inscrire dans de nouvelles pratiques et à l’excellence des recommandations opérées par les sociétés savantes qui regroupent des professionnels de santé soucieux d’agir pour des soins effectués dans des conditions de qualité et de sécurité satisfaisantes. C’est là une condition essentielle de l’extension des gestes susceptibles d’être effectués.

Ensuite, et comme le souligne le syndicat CNI dans sa contribution adressée aux rapporteurs, « les recommandations de bonnes pratiques donnent les critères dinclusions et dexclusions des patients en ambulatoire » et conditionnent la réussite du parcours du patient, particulièrement les consultations préopératoires du chirurgien et de l’anesthésiste au cours desquelles il est procédé à « lévaluation complète de la capacité de compréhension du patient et de sa compatibilité sociale qui conditionne le reste de la prise en charge, y compris lors du retour à domicile ».

c.   Une évolution portée par la démarche globale de réduction de la durée des séjours

Le développement de la chirurgie ambulatoire s’inscrit dans le cadre plus général de la diminution de la durée du séjour des patients qu’autorisent la validation de nouvelles pratiques et l’acquisition de nouvelles techniques médicales. Sociétés savantes, établissements de santé comme institutions de santé ont particulièrement insisté sur les effets de la récupération améliorée après chirurgie (RAAC) ([34]) concernant la prise en charge des patients. Celle-ci emporte nécessairement des conséquences sur la chirurgie ambulatoire puisque, réduction de la durée du séjour aidant, des patients pris en charge en hospitalisation complète sont susceptibles de pouvoir ultérieurement être accueillis en ambulatoire.

La chirurgie ambulatoire et la RAAC, développées dans les pays anglo-saxons à la fin des années soixante pour la première et dans les pays du Nord de l’Europe pour la seconde, présentent des traits communs. Dans les deux cas, le patient est au centre d’une procédure qui impose une modification de l’organisation hospitalière.

● Une récente publication scientifique ([35]) identifie ainsi trois conditions de réussite pour la RAAC.

Elle suppose d’abord une adaptation des ressources humaines dédiées au parcours du patient. La publication relève que si la RAAC implique une réduction des soins techniques (« absence ou retrait plus rapide des sondes ou drains »), elle requiert des autres activités un surcroît d’attention et de rigueur comme « la mise au fauteuil et à la marche plus précoces ou la réalimentation précoce ». Et les auteurs de souligner que « le nursing perd en technicité mais valorise le temps à motiver le patient à simpliquer dans sa récupération après chirurgie » tout en concluant aux « métiers à introduire dans les unités […] en soutien des kinésithérapeutes ».

Cette démarche repose sur l’anticipation des obstacles et des difficultés susceptibles de surgir postérieurement à la prise en charge et de compromettre la réhabilitation du patient. Elle suppose une mobilisation des personnels soignants, la mise en place de protocoles précis et surtout une information adéquate du patient. À certains égards, la RAAC, comme d’ailleurs la chirurgie ambulatoire, s’inspire de la démarche d’éducation thérapeutique qui vise à rendre le patient et son entourage capables de prendre en charge l’affection dont il souffre dans le cadre d’un projet de soins. Elle suppose alors que l’équipe soignante soit davantage formée à l’information du patient.

Aux Hospices civils de Lyon, la mise en place de la RAAC a ainsi permis une diminution des complications ainsi que des besoins en lits mais a supposé d’investir davantage sur l’information apportée au patient et à son « coaching » avant et après l’opération en désignant des infirmières de coordination et référentes.

Dans sa contribution transmise aux rapporteurs, la FEHAP insiste sur la formation des personnes aux « spécificités de programmation et de coordination de la prise en charge – en formation initiale et continue ». La fédération met aussi en lumière aussi l’enjeu de responsabilité à l’égard des patients « plus immédiate avec une charge mentale liée aux risques à la sortie de cette hospitalisation de courte durée ».

La RAAC implique également une modification de l’« architecture dédiée au parcours du patient ». Soulignant que les professionnels doivent faire le deuil de la réduction des lits, les auteurs de la publication précitée insistent sur la mise en place d’une nouvelle organisation permettant :

– aux patients de bénéficier de « lieux dexercice adaptés (salles dexercices physiques, tapis de marche, bicyclette...) partagés entre plusieurs services de chirurgie et permettant aux patients de sencourager entre eux » ;

– « lorganisation de séquences type école de patients et son accompagnant pour soutenir la préparation du patient à sa chirurgie » ;

– l’identification de « bureaux dentretien infirmier pour la préparation du patient à sa chirurgie ».

Les Hospices civils de Lyon ont ainsi mis en place des salons d’accueil dans tous leurs établissements et ont procédé à l’aménagement de leurs unités conventionnelles afin de permettre aux patients de déambuler et de manger en dehors de leur chambre.

La RAAC suppose enfin une évolution des « outils logiciels et objets connectés permettant de suivre les parcours patient avant, pendant et après lhospitalisation ». Si le déploiement du dossier médical partagé et sa mise à jour constituent un enjeu majeur, l’interopérabilité des systèmes d’information au sein des structures hospitalières constitue un défi encore important. Parallèlement, cette nouvelle organisation suppose le déploiement de nouveaux protocoles incluant le recours aux outils numérisés.

● À certains égards, ces pistes d’amélioration induites par la prise en compte de la RAAC pourraient être aussi prises en compte pour la poursuite du développement de la chirurgie ambulatoire.

La SFAR plaide ainsi pour une réflexion commune à ces deux enjeux davantage centrée sur la pathologie et plaide pour la mise en place de circuits distincts : un circuit court, un circuit standard et un circuit long centré sur l’hospitalisation. La chirurgie ambulatoire doit donc s’insérer dans son environnement immédiat et doit être intelligemment articulée avec les autres activités. Rejoignant les préconisations mentionnées dans la publication scientifique précitée, la SFAR suggère de mettre fin à la « course aux lits » et davantage permettre la transformation des lits « aigus » en lits « post aigus ». Les Hospices civils de Lyon s’inscrivent quelque peu dans cette perspective puisque la mise en œuvre de leur projet d’établissement a intégré dans son évolution architecturale l’identification de circuits courts en chirurgie ambulatoire (3 heures et moins) et la mise en place de circuits de moyenne durée (4 heures) ou à la journée (5 heures et plus).

La FEHAP souligne à cet égard lintérêt de davantage investir sur larticulation entre RAAC et chirurgie ambulatoire. La fédération plaide pour lélaboration de recommandations par la HAS et lANAP afin de mettre en place des unités chirurgicales de court séjour pour que les patients insusceptibles dêtre en chirurgie ambulatoire le soient dans le cadre conventionnel mais « dans le même esprit » ([36]).

B.   Une évolution perfEctible

Si le développement de la chirurgie ambulatoire présente d’indéniables bénéfices, il n’est pas exempt de difficultés. Cette mutation s’opère dans un contexte de crise des moyens et des effectifs s’agissant tout particulièrement des hôpitaux publics. À cet égard, la pandémie a, en elle-même, renforcé la conviction partagée de la nécessité d’accélérer la mise en place du plan « Ma santé 2022 », complété par les mesures édictées dans le cadre du Ségur de la santé, notamment le financement de 4 000 lits « à la demande » que les établissements de santé pourront ouvrir en fonction des besoins.

Par ailleurs, le basculement vers la chirurgie ambulatoire s’est naturellement adressé à la partie de la population susceptible de davantage correspondre aux critères médicaux et sociaux d’éligibilité aboutissant à la mise à l’écart des patients en situation d’isolement social et géographique. Enfin, des premières évaluations, il ressort que des efforts significatifs doivent encore être accomplis en amont et en aval des opérations programmées.  

1.   Une ambition qui se heurte à la réalité de la situation des hôpitaux

Chacun sait les difficultés auxquelles sont confrontés les établissements de santé. Dans un contexte où la croissance de l’ONDAM hospitalier est soumis à de fortes contraintes, les établissements ont été invités à se restructurer en profondeur. Les établissements privés, pour lesquels toute baisse d’activité est susceptible d’aboutir à la fermeture définitive et le licenciement du personnel, se sont ainsi lancés très tôt dans cette mutation en y voyant une opportunité de maintien d’activité, de croissance, voire de simple survie. C’est l’une des raisons de l’avance prise par le secteur privé dans la chirurgie ambulatoire. Le secteur public cherche, quant à lui, à combler le retard pris alors même que les hôpitaux sont plus qu’invités à diminuer la charge de leur endettement en opérant des réductions capacitaires ou à opérer des rapprochements dans le cadre de la mise en place des groupements hospitaliers de territoire. La reprise annoncée de la dette globale des hôpitaux, à hauteur d’un tiers, et la croissance de l’ONDAM devraient amener le « ballon d’oxygène » attendu, sans occulter pour autant les nécessaires réformes de notre système de santé. Dans ce contexte, deux difficultés ont été régulièrement mises en avant au cours des auditions.

a.   Une ambition contrariée par l’objectif de réduction capacitaire

S’agissant des seuls hôpitaux publics, l’évolution souffre d’un effet de ciseaux. Incités à fermer davantage de lits pour opérer leurs restructurations, les établissements publics sont rapidement confrontés à une diminution de leurs recettes alors que, dans le même temps, le niveau des charges de fonctionnement se maintient.

Les hôpitaux publics ont en effet été structurés autour de l’hospitalisation complète. L’évolution vers l’hospitalisation de jour suppose un redéploiement significatif des effectifs et de la logistique sans compter que les suppressions d’emplois qu’elle pourrait impliquer peut concerner des territoires déjà fortement éprouvés par la désindustrialisation et les pertes de populations. Comme l’a justement souligné l’ARS du Grand Est, cette conjoncture « provoque des difficultés dans la conduite du changement ».

L’articulation autour de l’hospitalisation complète concerne également le système tarifaire qui tient compte des charges de personnel et de fonctionnement mobilisées par celles-ci. Si le changement de pratique est rapidement mis en œuvre, l’hôpital perd immédiatement le bénéfice des tarifs d’une hospitalisation complète sans que les coûts diminuent. En résumé, les hôpitaux ne sont guère incités à effectuer la bascule vers l’ambulatoire à moins d’y être fortement contraints.

L’impact de l’ambulatoire emporte d’abord des effets sur la chirurgie conventionnelle comme le souligne le syndicat CNI, « la première conséquence [étant] la diminution du taux doccupation des lits dans les unités dhospitalisation [entraînant] une fermeture des lits ». Les unités d’hospitalisation conventionnelle « voient donc leurs charges en soins salourdir puisque le public nécessite des interventions plus lourdes, dites de recours, et accueille des patients ne pouvant être inclus dans le parcours ambulatoire du fait de leurs comorbidités ».

On notera par ailleurs que la mise en place de la chirurgie ambulatoire nécessite un investissement important des établissements et des équipes concernées sans gain immédiat.

Pour les hôpitaux publics, les contraintes architecturales sont telles que la mise en place de circuits adaptés de prise en charge en ambulatoire suppose de supporter le coût des travaux d’aménagements ou de réaménagements. Or, la diminution des recettes n’incite guère à la planification de ces opérations conduisant les autorités à ajuster l’organisation existante.

Cet ajustement n’est pas sans effet. Dans sa contribution, le SNPHARe souligne ainsi « le manque de places dans les structures actuelles dédiées à lactivité ambulatoire » et indique qu’« il nest pas possible de réaliser dans de bonnes conditions une activité de chirurgie ambulatoire si celle-ci nest pas réalisée dans une unité dhospitalisation dédiée, avec du personnel en nombre et formé à cette activité aux contraintes particulières ». Or, cet objectif ambitieux provoque des difficultés importantes lorsque l’on décide d’ouvrir « au sein dunités dhospitalisation conventionnelle des unités ambulatoires dites « foraines » [car] cela entraîne également des prises en charge hasardeuses qui désorganisent totalement les blocs opératoires avec, là encore, une majoration des coûts de prise en charge pour la structure mais totalement transparente pour les organismes de financement ». À l’appui de ses propos, le SPHARe souligne que le « mélange sans cloisonnement organisationnel avec les activités durgence ou de chirurgie lourde peut conduire à une désorganisation de ces dernières et à la réalisation dans de mauvaises conditions de travail pour les professionnels (débordements nocturnes au bloc opératoire car lactivité ambulatoire est passée en premier) et de sécurité pour les patients (moins de personnels et dactivités techniques en horaire de permanence des soins) ».

En outre, portées par un projet ambitieux, les équipes s’investissent volontiers dans les nouvelles pratiques sans intéressement particulier ni pour les personnels – les rémunérations restent figées et liées à la grille indiciaire de la fonction publique – ni pour le service. Dans une étude transmise à la représentation nationale ([37]), M. Frédéric Bizard souligne l’absence de partage de gains entre les acteurs. Les gains consécutifs au développement de la chirurgie ambulatoire sont immédiatement captés par les autorités gestionnaires au détriment des équipes. L’étude précitée souligne par ailleurs qu’en négligeant ou en sous-estimant l’impact des changements de pratique sur les personnels, « on risque de provoquer un îlot de résistance chez une partie du personnel qui assimilera la chirurgie ambulatoire à une industrialisation excessive du soin ». Tout en soulignant l’intérêt des équipes pour la chirurgie ambulatoire, le syndicat CNI alerte également sur le « sentiment de déshumanisation des soins du fait de la rotation des interventions et du temps imparti pour les soins ».

Il résulte enfin des auditions que les personnels soignants aspirent majoritairement à travailler dans de bonnes conditions, ce qui suppose non seulement de repenser l’organisation hospitalière et les flux de patients mais aussi d’intégrer l’incertitude et les impondérables susceptibles d’affecter la chirurgie programmée. Si cette organisation n’est pas mieux appréhendée, elle risque de générer un phénomène de tension, voire de souffrance au travail.

En résumé, la mise en place de la chirurgie ambulatoire souffre dinjonctions contradictoires. Rares ont été les personnes auditionnées à ne pas avoir recouru à ces termes. Les représentants des ARS auditionnées en ont eux-mêmes convenu. Le docteur Henri-Jean Philippe, référent chirurgie de lARS dÎle-de-France, a notamment souligné que les ARS avaient davantage focalisé leur action sur des objectifs économiques, reconnaissant que désormais laccompagnement avait changé et portait davantage sur un objectif de qualité, de pertinence, de sécurité des patients et déquité daccès aux soins ([38]). Lobjectif économique a quelque peu perturbé le message adressé aux établissements, aux équipes de soignants, aux élus ainsi quaux populations en instillant lidée dune « chirurgie au rabais » alors quil sagit au contraire dune « chirurgie de lexcellence ».

b.   Une ambition déjouée par une politique tarifaire illisible et incomplète

● Le caractère illisible de la politique tarifaire n’a pas davantage contribué à aborder positivement la chirurgie ambulatoire. Le caractère incitatif du tarif unique a sans doute permis d’encourager le développement de la chirurgie ambulatoire mais comme cela a déjà été souligné, cette incitation n’a pas été franchement déterminante à moins d’être associée à la mise sous accord préalable. De fait, la politique incitative a pu être neutralisée par les baisses de tarifs programmées dans les campagnes tarifaires annuelles.

Dans l’étude précitée, les auteurs soulignent la forte tentation pour l’assurance maladie « dengranger lensemble des économies à court terme générées par la chirurgie ambulatoire ». Cette approche s’est traduite par la fixation d’objectifs chiffrés pour le développement de l’ambulatoire tant au titre du plan ONDAM triennal 2015-2017 (420 millions d’euros en économies cumulées) que du plan ONDAM 2018-2022. Or cette « vision court-termiste et comptable des pouvoirs publics est pourtant un obstacle majeur pour atteindre les objectifs de moyen terme de la chirurgie ambulatoire et au global pour réussir le virage ambulatoire » qui supposent la « modernisation du parc hospitalier et les gains pour les patients ».

De fait, les représentants des établissements de santé ont souvent insisté sur le prisme de la réduction des charges privilégié par les autorités tarifaires qui a par ailleurs été percuté par l’« effet yoyo » de la politique tarifaire selon les termes employés par Mme Laurence Bernard, membre du bureau de la conférence nationale des directeurs de centres hospitaliers ([39]). À titre d’exemple, les tarifs de la méniscectomie étaient fixés à 1 385 euros en 2009 pour retomber à 1 045 euros les années suivantes, remonter ensuite dans des proportions voisines de 1 300 euros en 2014 pour finalement redescendre à 1 257 euros en 2019. Ces oscillations tarifaires, également constatées pour d’autres actes, ne sont pas de nature à faciliter le dialogue de gestion entre la direction de l’hôpital et les équipes soignantes. Il est extrêmement difficile de faire comprendre le modèle de construction des coûts de chirurgie ambulatoire sans compter que la marge, qui aurait pu être tirée du développement de la chirurgie ambulatoire, se trouve « inversée » pour certains établissements. Leurs recettes ont pu baisser du fait de la politique nationale sur les groupements homogènes de séjour (GHS), rendant particulièrement délicate la couverture des coûts fixes. Ce constat est partagé par la fédération de l’hospitalisation privée pour laquelle la pression exercée par la diminution des tarifs était telle que nombre d’établissements ont été conduits à vouloir abandonner le virage ambulatoire. Dans sa note adressée aux rapporteurs, Mme Faujour, directrice des coopérations et de la stratégie aux hospices civils de Lyon, souligne que « si la rémunération de la chirurgie ambulatoire il y a 15 ou 20 ans avait été supérieure ne serait-ce que de 100 à 150 euros par acte sur 3 à 5 ans, il aurait été possible de financer la mutation » car le tarif « aurait en quelques années agi comme un moteur de changement ».

Interrogée sur la mise en place du plan ONDAM, la DGOS a souligné que le « plan ONDAM 2018-2022 intègre une pluralité de thématiques dont une thématique axée sur la structuration de l’offre de soins qui intègre notamment des actions au titre du développement de l’ambulatoire tant en chirurgie (où il s’agit de mobiliser l’ensemble des établissements ayant encore des marges de progression sur ce champ) qu’en médecine (où il s’agit d’inciter les établissements à développer leur prise en charge en médecine ambulatoire) ». La direction précise cependant que si la LFSS pour 2020 « intègre une cible d’économies au titre de cette thématique de structuration de l’offre de soins pour 215 millions d’euros », « depuis la campagne 2019, il n’y a plus d’économies ciblées au titre de la chirurgie ambulatoire comme cela a pu être le cas dans le cadre des campagnes précédentes ».

● Les modalités de tarification constituent un obstacle supplémentaire au développement de la chirurgie ambulatoire.

Le tarif issu des GHS ne prend en compte que l’acte de chirurgie et n’inclut ni les prestations réalisées en amont, ni celles entreprises en aval, comme ont pu le souligner les représentants des établissements de santé ([40]). Or, le temps passé à l’information du patient, à la coordination des acteurs au sein de l’établissement de santé ainsi qu’au suivi du patient participe de la qualité de la prise en charge. La question n’est pas tant de procéder à l’augmentation des revenus des professionnels de santé mais de reconnaître une activité qui implique de nouvelles méthodes de travail et porteuse de gains de productivité. Force est de constater que la construction tarifaire qui est aujourd’hui pratiquée ne permet pas de récompenser ces efforts, pas plus qu’elle ne permet la coordination « hors les murs » avec les acteurs de la ville. L’ensemble de ces remarques est partagé par les acteurs. À titre d’exemple, toutes les fédérations hospitalières ont souhaité insister sur la prise en compte d’un financement « hors les murs ».

Le tarif issu des GHS constitue par ailleurs un tarif moyen applicable à des patients pris en charge à un coût moyen comme ont eu l’occasion de souligner tant M. Bizard ([41]) que les représentants des grands établissements publics de santé ([42]).

Le référentiel de coûts étant national, « limpact économique de la pratique de chirurgie ambulatoire [dépend] de la position de chaque établissement par rapport à [celui-ci] ». Or, dans son étude réalisée pour l’URPS de la région Nouvelle-Aquitaine, M. Bizard constate qu’« un établissement disposant dune base de coûts plus élevée que le référentiel de 10 % va se retrouver en perte de 30 % (pour le privé) ou 20 % (pour le public) sur un acte réalisé en hospitalisation complète et en gain de 10 % sur un acte réalisé en ambulatoire », le déficit étant par ailleurs accru en raison de « la perte de revenus additionnels apportés par lhospitalisation conventionnelle, comme la chambre particulière ». M. Bizard conclut en soulignant que « le retard dans la pratique de la chirurgie ambulatoire se paie donc au prix cher en matière de déficit à léchelle de létablissement ».

Par construction, cette tarification n’est pas nécessairement adaptée aux prises en charge complexes qui nécessitent plus que d’autres davantage d’attention et d’investissement. Les représentants des CHU, qui ont fait progresser la chirurgie ambulatoire à travers la RAAC et qui constituent des acteurs essentiels de la prise en charge de cas complexes en leur qualité d’établissements de recours, ont bien évidemment insisté sur ce point. Du reste, la chirurgie ambulatoire s’est davantage concentrée sur les patients « faciles » pour lesquels l’état de santé comme les conditions de vie favorisaient l’éligibilité. Or, le potentiel de développement de la chirurgie ambulatoire suppose à tout le moins d’intégrer, dans l’organisation des soins, le caractère structurant du vieillissement de la population et partant, de la complexité des pathologies. Le financement devrait pouvoir tenir compte de ces aspects s’agissant tout particulièrement de la prise en charge en aval. Il semble également important que le référentiel des coûts puisse davantage tenir compte des spécificités des territoires et inclure un volet financier de « rattrapage » pour les établissements les plus en difficulté.

2.   Des améliorations à opérer en amont et en aval des opérations

La réussite de la chirurgie ambulatoire tient autant à l’opération à proprement parler que des conditions de préparation (amont) et de sortie (aval). S’il est souligné – à juste titre – que trois quarts des patients sont satisfaits, il existe encore une marge de progression.

a.   L’enquête menée par la Haute Autorité de santé révèle une importante marge de progression

C’est ce que révèlent les résultats d’une campagne nationale lancée par la Haute Autorité de santé en mai 2018 afin d’évaluer « la satisfaction et l’expérience des patients hospitalisés pour une chirurgie ambulatoire ». Cette enquête « suit les étapes importantes du parcours de soins : avant hospitalisation, accueil, prise en charge, chambre et repas, sortie de létablissement et retour à domicile » ([43]).

Deux semaines après son opération, le patient reçoit un courriel comprenant un lien vers un questionnaire en ligne (cf. questionnaire e-Satis MCO CA en annexe 2). Cette enquête de satisfaction permet à la HAS d’établir un indicateur pour chaque établissement de santé (score de satisfaction et d’expérience) tandis que leur agrégation permet d’établir une synthèse de la satisfaction des usagers à l’échelle nationale. La première campagne menée en 2018, dont les résultats sont disponibles sur le site de la HAS, a concerné un peu plus de 900 établissements de santé qui ont mis à disposition le questionnaire type à près de 500 000 patients. Le taux de réponse se situe dans des proportions voisines de 30 %.

Si le score national de satisfaction globale et d’expérience est de 76,4 %, la campagne de la HAS met toutefois en lumière de moins bons résultats ou, à tout le moins, des marges de progression.

En amont, le taux de satisfaction s’élève à 80,4 % et 9 patients sur 10 ont répondu avoir reçu des informations de qualité « bonne » à « excellente » avant l’opération. Pour les trois quarts des patients, un rappel des consignes préopératoires a été effectué par tout moyen (sms, appel téléphonique…). 83,7 % des patients ont reçu le passeport ambulatoire, normalement remis après le rendez-vous avec le chirurgien et l’anesthésiste, qui contient l’ensemble des informations nécessaires à la compréhension du parcours du patient et qui peut être ultérieurement enrichi en fonction des consultations.

Si 9 patients sur 10 estiment que les professionnels ont su les rassurer et les mettre en confiance lors de leur prise en charge, 56,4 % jugent cependant avoir ressenti de l’inquiétude ou de l’anxiété au cours de l’hospitalisation.

L’organisation de la sortie et la préparation du retour à domicile recueillent le moins bon score (68 %). Un patient sur cinq estime que le délai d’attente du médecin, dont la venue conditionne la sortie, est trop long. Si 87,6 % estiment que « les informations sur les traitements à prendre après la sortie (nouveaux médicaments, reprise de traitement) » sont « bonnes » à « excellentes », 25 % signalent ne pas avoir reçu d’informations sur les signes ou complications susceptibles de les amener à contacter l’établissement en urgence. Par ailleurs, seuls 70 % des répondants indiquent avoir reçu un numéro de téléphone à contacter en cas d’urgence et 28 % déclarent « navoir pas reçu de document à leur sortie contenant des informations sur leur intervention et leur suivi ». S’agissant par ailleurs du contact post-opératoire, la moitié des patients (52,1 %) a été contactée entre 1 et 3 jours après leur sortie par sms ou appel téléphonique.

Si les résultats sont globalement bons, des efforts doivent cependant être accomplis pour que la prise en charge en ambulatoire gagne en qualité et en sécurité. En effet, la réussite de cette prise en charge présuppose que le patient soit acteur de sa guérison et dispose de l’ensemble des informations permettant d’éclairer au mieux les équipes de soignants notamment pour évaluer les signes de complication post-opératoires à son retour au domicile.

Pas une des personnes auditionnées n’a remis en question la nécessité d’avoir une organisation précise et exigeante qui suppose que la sortie du patient soit anticipée en amont de l’opération. Dans sa contribution adressée aux rapporteurs, la FEHAP souligne que « le risque inhérent à la décision de " mise à la rue", lorganisation à réunir pour le retour à domicile (dans la plupart des cas) en aval exigent une attention globale et préparée pour le patient par chacune des équipes ». Pour sa part, le SNPHARe souligne que si « la réglementation et les recommandations des sociétés savantes pour les prises en charge ambulatoire ont défini un certain nombre de mesures permettant de sécuriser le retour à domicile du patient », « il ny a aucune garantie de leur mise en œuvre puisque le patient est sans surveillance » et que « cela dépend uniquement de sa bonne volonté à lacceptation de la procédure de soin ».

Il ressort de cette enquête comme des auditions menées par les rapporteurs qu’un effort significatif doit encore être entrepris en amont des opérations. C’est une étape cruciale qui conditionne la réussite de la prise en charge. Le syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux souligne, dans sa contribution, que l’évaluation multidisciplinaire, menée avant l’entrée en chirurgie ambulatoire, vise à « mettre en place une stratégie permettant danticiper les risques post-hospitalisation » tels que les « facteurs prédictifs de la douleur post-opératoire, de la tolérance aux analgésiques ». La qualité de l’information délivrée aux patients et la sensibilisation de ceux-ci à la détection des signes de complication est cruciale. Elle participe autant à leur consentement éclairé qu’à l’observance des prescriptions et conseils délivrés par les équipes soignantes. La bonne volonté et l’acceptation de la procédure de soins sont très largement conditionnées par la délivrance d’une information complète, loyale et exhaustive.

b.   Le suivi des opérations programmées pourrait être amélioré

Les rapporteurs ont souhaité investiguer, pour leur part, les éventuelles complications consécutives liées à une prise en charge en ambulatoire et susceptibles de se traduire soit par une déprogrammation de l’opération, soit par une transformation en hospitalisation complète au jour de l’intervention, soit par une ré‑hospitalisation consécutive à l’opération.

● À ce jour, aucune statistique portant sur la déprogrammation d’opérations chirurgicale à J0 n’est disponible. Un tel indicateur permettrait de mieux évaluer la prise en charge et d’améliorer sensiblement sa qualité.

Interrogée sur ces éléments, l’ATIH souligne que « pour des raisons de facturation, les systèmes dinformation hospitaliers des établissements les empêchent de conserver [l’information du] passage en unité ambulatoire ». Cela étant, l’ATIH indique avoir travaillé avec les acteurs pour « mettre en place un dispositif de recueil identique pour tous les établissements ». La notice relative au Programme de médicalisation des systèmes d’information (PMSI) élaborée pour la campagne tarifaire 2019, qui permet de coder les actes afin d’établir la tarification à l’activité, « précise lévolution du résumé standardisé de sortie par la création dune variable "conversion" ».

● Un autre indicateur est aujourd’hui particulièrement utilisé. Les établissements de santé relevant des hospices civils de Lyon (HCL) suivent avec attention le taux de conversion et les différents motifs justifiant la transformation en hospitalisation complète du séjour d’un patient programmé pour être pris en charge en ambulatoire. Dans leur contribution, les représentants des HCL soulignent que « selon les motifs, […] certaines conversions [peuvent être considérées] comme des éléments indésirables sur lesquels » il est possible d’agir. À cet effet, il est demandé aux unités de chirurgie ambulatoire « de repérer les motifs corrigibles de conversion » au travers d’un « reporting trimestriel des dossiers ».

Interrogée sur la mise en place de ces deux indicateurs, la DGOS souligne, dans sa contribution écrite, que si « la mise en place d’un indicateur de déprogrammation peut être intéressante pour piloter une unité de chirurgie ambulatoire (UCA) […] sa signification n’est pas univoque ». La DGOS poursuit en indiquant que la déprogrammation « peut être liée à une défection du patient, à une pathologie intercurrente (infectieuse par exemple rendant impossible l’intervention, cette situation étant fréquente en pédiatrie), ou être liée à des problèmes d’organisation interne de l’établissement (programmation des blocs opératoires, organisation des admissions dans l’UCA, problème de disponibilité non anticipé du personnel) ».

S’agissant de la transformation en hospitalisation complète, la DGOS relève que l’indicateur « peut traduire diverses situations : problème médical imprévu lié à une complication survenue lors de l’intervention ou de ses suites, problème d’organisation du bloc et de l’UCA (amplitude horaire insuffisante d’ouverture de l’UCA, programmation trop tardive de l’intervention dans la journée, retard de la signature de la sortie…) ».

La DGOS estime donc que « quel que soit l’indicateur retenu, il importe que celui-ci fasse l’objet d’une analyse contextualisée et croisée, au regard de plusieurs indicateurs […] afin que les acteurs impliqués puissent, le cas échéant, envisager les améliorations organisationnelles souhaitables quand celles-ci sont en cause ».

Les rapporteurs souscrivent aux remarques de la DGOS qui relèvent du bon sens. Ils estiment donc indispensable de compléter l’indicateur de conversion en hospitalisation complète par la déprogrammation à J0.

Proposition n° 3 Mettre en place un indicateur de suivi des déprogrammations d’opérations effectuées en chirurgie ambulatoire dans la journée (à J0)

● Pour suivre les ré-hospitalisations intervenues après chirurgie ambulatoire, l’ATIH a procédé à la mise en place de deux indicateurs à J+3 et J+7.

S’agissant des ré-hospitalisation à J+7, c’est-à-dire intervenant dans un délai de 1 à 7 jours, l’ATIH souligne que le taux mesuré en 2016 est moins élevé en ambulatoire (1,9 %) qu’en hospitalisation complète (3,4 %), quelle que soit l’activité concernée (médecine, chirurgie, obstétrique). En analysant plus finement les déterminants, l’ATIH révèle que le taux de ré-hospitalisation est encore plus faible en chirurgie qu’en médecine. Là encore, la comparaison entre prise en charge en ambulatoire et hospitalisation complète fait ressortir un bien meilleur taux pour celle-là : il est de 1,0 % contre 2,4 %.

Sagissant des ré-hospitalisations à 3 jours, lATIH indique avoir travaillé avec la HAS pour la mise en place dun indicateur pertinent permettant de suivre ces événements par chacun des établissements. Lors de son audition, lATIH a souligné quil nétait pas encore « mature » mais quelle avait réalisé un suivi « global », au terme duquel elle constate une stabilité « autour de 0,6 % entre 2015 et 2017 ».

Ces éléments sont de nature à conforter les propos convergents sur la ré-hospitalisation, tenus par les établissements, les professionnels de santé ou encore les experts. Dans son étude précitée, M. Bizard évoque à cet égard l’impact neutre ou favorable de l’ambulatoire sur la ré-hospitalisation et en conclut que « la pratique de la chirurgie ambulatoire nentraîne pas de modification substantielle sur la qualité des soins et que dans certains cas elle améliore les résultats » sans compter qu’elle « tend à réduire les risques de complications nosocomiales et les risques thromboemboliques post-opératoires liés à un alitement prolongé ».

Malgré tout, les rapporteurs souhaiteraient compléter cette panoplie de suivi par deux propositions.

Ils suggèrent dans un premier temps d’opérer une analyse plus fine des taux de re-hospitalisation par racine de GHM afin de davantage cibler les axes d’amélioration.

Ils proposent également la mise en place d’un indicateur portant sur une période plus longue (J+ 30) même s’ils restent conscients des difficultés posées par son élaboration. Dans leur contribution, les représentants des Hospices civils de Lyon soulignent que nombreux biais existent, notamment les comorbidités. Un patient peut être ainsi hospitalisé pour une autre raison qu’une complication résultant de son opération en chirurgie ambulatoire. Une telle analyse requerrait de « focaliser lapproche sur la typologie des interventions et de travailler en lien avec les chirurgiens pour repérer dans les hospitalisations qui suivent les complications attendues au regard de lintervention » tout en prenant en compte les prises en charge au titre de l’urgence.

Dans sa contribution écrite, la DGOS juge que si « l’indicateur est intéressant, […] il reste peu significatif car les ré-hospitalisations peuvent survenir pour des causes non liées à l’intervention chirurgicale elle-même ». La direction entend davantage privilégier les indicateurs à J+3 et J+7.  Elle indique que « le taux de ré-hospitalisation entre J1 et J7 est plus significatif car plus " probablement " en lien avec le séjour chirurgical, comme l’indiquent la littérature internationale et la HAS ».

Interrogés sur la mise en place d’un indicateur à J+30, les professionnels de santé du centre hospitalier de Soissons reconnaissent, que s’il est difficile à construire, cet indicateur peut constituer « le miroir de la réussite de la chirurgie ambulatoire ». Le médecin de ville qui oriente son patient vers un confrère spécialiste en vue d’une telle prise en charge a tout intérêt à disposer d’une information sur le taux de ré-hospitalisation ; un faible taux agit comme une incitation à la chirurgie ambulatoire et achève de convaincre le patient.

Lucides sur les efforts qu’il faudrait déployer pour produire un tel indicateur, les rapporteurs estiment ainsi que l’exploitation des données serait de nature à améliorer sensiblement la prise en charge.

Proposition n° 4 Mettre en place un indicateur de suivi des ré-hospitalisations intervenant dans un délai de 30 jours à compter de l’opération réalisée en chirurgie ambulatoire.

Proposition n° 5 Permettre un meilleur suivi des ré-hospitalisations en déclinant les indicateurs par racine de GHM.

De la même manière, il pourrait être envisagé d’étendre cet indicateur de suivi aux complications ne faisant pas l’objet d’une hospitalisation mais traitées par la médecine de ville. Or, la production d’un tel outil bute sur l’absence d’un véritable chaînage entre ville et hôpital.

● L’analyse de l’indicateur de ré-hospitalisation à J+7 apporte une information complémentaire. Globalement, il apparaît que le taux d’entrée par les urgences est plus élevé pour les patients ré-hospitalisés, soulignant par contraste la nécessité d’améliorer la prise en charge en ville. Évidemment, la coordination avec le médecin traitant constitue un enjeu qui dépasse le strict cadre de la chirurgie ambulatoire. Et si la pénurie de médecins de ville peut être un élément d’explication, elle ne saurait constituer l’argument ultime du défaut d’accompagnement du patient à son retour à domicile. Quel que soit l’interlocuteur auditionné, la nécessité d’améliorer l’aval est une condition sine qua non de la réussite de la chirurgie ambulatoire. Or, l’enjeu consiste au moins autant à « faire plus » qu’à « faire mieux » pour reprendre les termes employés par M. Corvaisier, directeur général adjoint de l’ARS des Hauts-de-France ([44]).

Reçu en audition, lInstitut de recherche et de documentation en économie de la santé (IRDES) a souhaité alerter les rapporteurs sur les ruptures de prise en charge des patients. Si lIRDES précise navoir récemment mené aucune étude spécifique sur la chirurgie ambulatoire, elle a néanmoins illustré ses propos en présentant les conclusions dune dernière étude sur le parcours des patients consécutif à une hospitalisation pour accident vasculaire cérébral (AVC). Après lépisode, « six patients sur dix ont un parcours comprenant une prise en charge majoritairement à domicile, un patient sur quatre bénéficiant dactes de rééducation en ville » ([45]). Lorsque la prise en charge est majoritairement effectuée à domicile, la rééducation ne peut débuter quaprès une première consultation auprès dun médecin généraliste. Les conclusions de létude montrent que cette première consultation intervient dans un délai moyen de 12 jours après lhospitalisation – un délai bien trop long pour assurer une prise en charge de qualité alors que la rééducation aurait dû être initiée sous la forme dune prescription hospitalière. Il y a donc bien un enjeu de rupture du parcours de soins.

Les ARS auditionnées par les rapporteurs soulignent que si la prise en charge doit être améliorée, il convient alors de développer une logique de parcours depuis l’amont jusqu’en aval de l’opération. Si la bonne organisation interne de l’hôpital est une condition nécessaire de la réussite de la prise en charge, elle n’est toutefois pas suffisante pour présenter la qualité requise. Les relations avec la ville doivent en conséquence être renforcées.

La FEHAP partage ce constat en indiquant que « la prise en charge en chirurgie ambulatoire doit pouvoir concerner plus de patients à condition dêtre assise sur un lien ville/hôpital solide » et en plaidant aussi pour une amélioration de l’articulation avec la médecine libérale. Les rapporteurs souscrivent à cette proposition de bon sens en ajoutant que cette articulation mérite aussi d’être étendue aux acteurs paramédicaux, infirmiers, aides-soignants, kinésithérapeutes, pharmaciens d’officine, aides à domicile et toute personne qualifiée pour assurer le retour du patient à domicile dans les meilleures conditions.

L’absence de la lettre de liaison pour 28 % des patients, comme l’indique l’enquête menée par la HAS, révèle la nécessité de mieux identifier les interlocuteurs à l’hôpital. Le score devrait être de 100 % ! Si un numéro de téléphone est confié au patient dans le cadre du suivi post-opératoire, il importe que les professionnels de la ville puissent savoir à qui s’adresser en cas de besoin et disposer d’un document exploitable. C’est là une nécessité que tous les acteurs libéraux n’ont pas manqué de souligner. Réciproquement, les acteurs hospitaliers doivent pouvoir également disposer d’un point de contact en ville pour s’assurer que le retour à domicile corresponde aux exigences requises par les sociétés savantes.

De la même manière, les représentants des hôpitaux appellent de leurs vœux l’association des acteurs de ville selon des modalités à définir dans la mesure où « la prise en charge se joue en équipe » ([46]). La conférence des directeurs généraux de CHU souligne à cet égard la nécessité d’un « maillage avec les services infirmiers et les aides-soignants à domicile ». Les syndicats de médecins plaident parallèlement pour l’information des intervenants de la prise en charge afin d’améliorer tant la gestion des alertes que la coordination.

Plus largement, le développement de la chirurgie ambulatoire doit s’inscrire dans une approche transversale, à la fois pour les soins, mais aussi pour l’environnement global des patients, par exemple le logement. Les dispositions prises pour l’adaptation des logements au vieillissement, avec les aides prévues par le Gouvernement pour aménager des douches à l’italienne dans les habitations, sont un bon exemple des améliorations de l’habitat qui peuvent concourir à l’accès aux soins en chirurgie ambulatoire.

3.   Un accès encore inégal à la chirurgie ambulatoire

Particulièrement investie dans le développement de la chirurgie ambulatoire, le professeur Corinne Vons, présidente de lAFCA, estime quil est possible de prendre en charge des patients souffrant dune pathologie lourde comme des patients en situation de précarité pour autant quil existe une bonne préparation. Lobstacle de la langue ou les conditions dhygiènes de vie ne constituent pas un obstacle en soi mais nécessitent un surcroît dattention et dinvestissement. Force est de constater que des marges de progression subsistent en ces domaines. Les ARS auditionnées ne sy sont pas trompées en estimant que le potentiel de développement de la chirurgie ambulatoire suppose de sattacher aux patients vulnérables. Si des efforts doivent encore être accomplis en amont et en aval, comme le suggère létude réalisée par la HAS, des progrès significatifs doivent aussi être engagés pour assurer laccès aux soins des patients plus fragiles. Ces personnes nont pas été incluses dans lenquête menée par la HAS et pour cause, elles ne disposent pas dadresses courriel et ne peuvent donc être recontactées. Cet angle mort de lévaluation doit pouvoir être traité. Cest ce que tend à démontrer une étude menée par ATD Quart Monde ([47]) dont les conclusions peuvent être confortées par une récente publication de la Drees.

a.   Une prise en charge qui bute sur la vulnérabilité de patients fragilisés

L’enquête d’ATD Quart Monde, qui porte sur la médecine ambulatoire, a été en partie consacrée à la chirurgie ambulatoire appliquée aux patients vulnérables. Quatre constats en ont été tirés.

S’agissant des opérations menées en amont de l’opération, qui ont trait à l’information du patient, la compréhension de l’acte et donc au recueil de son consentement, l’enquête révèle des « éléments positifs » et souligne que, selon le médecin consulté, « des explications orales, des schémas ou des dessins explicatifs » sont fournis au patient.

Cependant, le renseignement du questionnaire anesthésique préopératoire pose davantage de difficultés.

Selon le rapport, les « patients sont livrés à eux-mêmes sans certitude quant à lexactitude des réponses fournies » : « étrangers, illettrés ou sans instruction », les patients regrettent de ne pouvoir remplir le questionnaire avec l’aide du médecin anesthésiste.

Selon ATD Quart Monde, les patients ont également du mal à voir l’intérêt qu’il y a à répondre à un questionnaire type, par ailleurs sans relation directe avec leur pathologie. Les patients ont également le sentiment que les informations portées sur les questionnaires sont « prise[s] à la légère » par les professionnels de santé.

Les patients n’ont pas non plus une vision claire des antécédents sanitaires familiaux. En effet, une grande partie est issue de « milieux de grande pauvreté [et a] connu des situations familiales compliquées : placement dès leur jeune âge, abandon parental, orphelinat, violences… ».

Afin de pouvoir remplir ce fameux questionnaire, les patients font appel à des relais mais cette intermédiation n’est pas exempte d’interrogations éthiques, voire de tensions éthiques. Cette situation pose question s’agissant du respect du secret médical d’une part, de la vie privée d’autre part, dont l’article L. 1110-4 du code de la santé publique rappelle qu’ils constituent les droits élémentaires des malades et des usagers des systèmes de santé.

Le respect du consentement pose enfin difficulté et « se résume quelquefois à un formalisme administratif où le consentement consiste à faire signer une feuille type au patient » alors qu’il s’agit pourtant d’un principe essentiel du droit de la santé. L’article L. 1111-4 du code de la santé publique ne pose-t-il pas la nécessité du « consentement libre et éclairé de la personne » pour les actes médicaux et les traitements ?

S’agissant de l’accompagnement, ATD Quart Monde relève qu’un « vrai travail est fait » à l’occasion de la sortie de l’hôpital. En revanche, cet effort notable doit plus à l’investissement du chirurgien qu’à la mise en place d’un protocole spécifique. Du reste, les témoignages recueillis par l’association mettent en exergue l’absence de consignes spécifiques concernent le suivi post-opératoire.

Le rapport dénonce également la fréquence des dépassements d’honoraires relatifs aux consultations de l’anesthésiste ou du chirurgien sans oublier l’absence de prise en charge des frais supplémentaires occasionnés par l’hospitalisation (frais d’hôtellerie). Au cours de son audition, Mme Boissonnat Pelsy a notamment porté à la connaissance des rapporteurs la pratique de « dépassements dhonoraires dissimulés » fort peu respectueuse de la vulnérabilité des patients. Un établissement de santé conditionne ainsi l’accès à la chirurgie ambulatoire à l’achat d’un « petit nécessaire [contenant] des échantillons de produits de beauté », d’une valeur de 30 euros ([48]) !

Enfin, ATD Quart monde a souhaité sensibiliser les rapporteurs sur le respect des « critères environnementaux », c’est-à-dire l’évaluation par les équipes de santé des conditions de vie du patient ou de son isolement. S’agissant de l’hygiène de vie, les exigences relatives à l’asepsie ne semblent pas prises en compte. Les rapporteurs renvoient à cet égard aux témoignages sélectionnés par ATD Quart monde dans son rapport. L’isolement géographique se double de l’isolement social et il n’est pas rare que la distance entre la résidence ou le lieu de soins se révèle source de complication. ATD Quart monde relève la difficulté à obtenir des bons de transport, voire à être remboursé.

b.   Une prise en charge freinée par l’isolement social et géographique de certains patients

Bien que ne portant pas spécifiquement sur les personnes vulnérables, une récente étude menée par la Drees, qui vise à identifier le potentiel de développement de la chirurgie ambulatoire, avance un certain nombre de conclusions, qui ajoutées aux malheureux constats formulés par ATD Quart Monde, confortent l’idée que la prise en charge en ambulatoire doit nécessairement évoluer dans une optique inclusive ([49]), étant bien entendu précisé que l’équipe soignante reste à même d’apprécier la possibilité d’une prise en charge en ambulatoire dans l’intérêt du patient et pour sa propre sécurité.

Cette étude qui tend à caractériser le recours à la chirurgie ambulatoire révèle deux enseignements importants. En premier lieu, elle indique que « les opérations "programmées" et peu complexes ont davantage de chances dêtre réalisées en ambulatoire ». Le recours à l’hospitalisation est davantage fréquent à la suite d’un passage aux urgences. Or, les rapporteurs tiennent à souligner que ce sont les personnes en état de vulnérabilité qui sont les plus concernées par les passages aux urgences.

Le second enseignement porte sur les caractéristiques individuelles du patient. L’étude relève que « lâge des patients et leur éloignement du site dhospitalisation pèsent sur la pratique de la chirurgie ambulatoire ». S’agissant de l’âge, les auteurs avancent l’explication d’une « corrélation existant entre lâge et létat général de santé du patient » nécessitant une surveillance post-opératoire plus étroite. L’étude souligne par ailleurs que « la prise en charge en ambulatoire est plus difficile lorsque le patient présente des comorbidités », ce qui, bien souvent, est le cas des personnes en état de vulnérabilité.

L’isolement géographique pèse enfin sur la proposition d’une prise en charge en ambulatoire, l’étude notant d’une part que « lorsque le patient réside dans un autre département que celui où il est hospitalisé, la prise en charge a également moins de chances dêtre réalisée en ambulatoire, toutes choses égales par ailleurs », d’autre part que « le temps de trajet entre le domicile du patient et le lieu dhospitalisation a également un impact ». Enfin, à partir d’un « indicateur géopopulationnel calculé au niveau de la commune du patient », les auteurs ont souhaité mesurer « un indice de défavorisation sociale de la commune de résidence du patient », un paramètre approximant la catégorie sociale et ont relevé que « la probabilité dune prise en charge ambulatoire est dautant plus faible que le patient vient dune commune défavorisée ».

L’enquête d’ATD Quart Monde ainsi que l’étude de la DREES révèlent les défis qu’il reste encore à relever afin de réduire les disparités d’accès à la chirurgie ambulatoire. Si l’on excepte les pathologies les plus complexes pour lesquelles une hospitalisation complète s’impose, il apparaît essentiel de tenir compte de la situation des personnes vulnérables. Notre organisation des soins doit pouvoir évoluer pour apporter une réponse satisfaisante. Plus qu’un obstacle, ce défi à relever est une condition sine qua non de l’objectif de 70 % assigné par les pouvoirs publics. Celui-ci ne peut être atteint sans s’attacher à ces enjeux. En matière de chirurgie ambulatoire, le plus facile semble en effet avoir été accompli.

II.   Axer la chirurgie ambulatoire sur la qualité de la prise en charge

La deuxième marche du développement de la chirurgie ambulatoire est aujourd’hui symbolisée par l’objectif de 70 %. Cet acte 2 de la chirurgie ambulatoire ne pourra plus seulement s’appuyer sur une extension à de nouveaux gestes marqueurs permis par l’innovation technologique et l’évolution des connaissances. Comme cela a déjà été indiqué, l’étape la plus facile a été accomplie, la réussite de la seconde étape devant davantage s’attacher à la qualité de la prise en charge. La situation des patients identifiés comme vulnérables doit constituer un axe important des politiques régionales de santé. L’amélioration de la qualité de la prise en charge passe également par l’intéressement des équipes hospitalières qui participent grandement au virage de la chirurgie ambulatoire. Enfin, toute transformation nécessite de s’adapter à la réalité de l’organisation hospitalière et territoriale : en la matière, la recherche de l’innovation doit partir du principe que si un cadre commun s’applique, il n’existe pas de solution unique.

A.   sattacher à la situation des plus vulnérables

Dans sa contribution adressée aux rapporteurs, le SNPHARe s’interroge sur les objectifs assignés à la chirurgie ambulatoire et s’interroge notamment sur le profil de patient à laquelle elle est censée s’adresser : « les riches ? les pauvres ? les citadins ? les ruraux ? les plus vieux ? les plus jeunes ? les moins malades ? les plus malades ? ». Ces questions sont plus que pertinentes et ont requis l’attention des rapporteurs, soucieux de bâtir un système de santé accessible à tous. C’est la raison pour laquelle l’acte 2 de la chirurgie ambulatoire doit aussi s’adresser aux patients en situation de vulnérabilité, qu’ils soient socialement ou géographiquement isolés. Du reste, les ARS semblent considérer qu’il s’agit d’un axe important du développement de la chirurgie ambulatoire. Lors de son audition, l’ARS Île-de-France a d’ailleurs annoncé avoir lancé une enquête portant sur les personnes en situation de précarité et en attend les résultats pour ajuster la politique de santé.

L’attention doit d’abord être portée sur l’isolement qui constitue un « frein au développement de la chirurgie ambulatoire » selon les termes employés par le SNPHARe. L’éloignement de la structure hospitalière de même que les conditions d’accès (routes et moyens de transport), la médicalisation du bassin de vie dans lequel réside le patient sont autant de paramètres à prendre en compte. Rappelons‑nous que parmi les critères d’éligibilité à la chirurgie ambulatoire, la SFAR recommande un « éloignement de moins dune heure dune structure de soins adaptée à lacte » ([50]) et de prévoir « une personne [accompagnante] valide et responsable ». Ces deux conditions sont difficiles à remplir compte tenu de l’éloignement des structures.

L’isolement social apparaît également comme un facteur aggravant, le patient ne pouvant compter sur un proche pour être transporté. Et si des moyens adaptés peuvent être programmés (taxis par exemple), la situation d’isolement rend plus délicate la surveillance post-opératoire. Cet isolement peut encore être compliqué par les difficultés de compréhension ou les barrières linguistiques, comme cela a été souligné par le rapport d’ATD Quart-Monde.

S’il est vrai que les pays proches de nous ont « une approche sans doute un peu plus "humaniste" » de la chirurgie ambulatoire ([51]) pour reprendre les termes employés par le président de l‘Association française d’urologie (AFU), il devient alors indispensable de relever les enjeux précités, la chirurgie ambulatoire ne se résumant pas à une simple technique. Plusieurs pistes mériteraient à cet égard d’être explorées.

1.   Privilégier les hôtels hospitaliers

Plusieurs interlocuteurs ont avancé l’idée de développer les hôtels hospitaliers, entendus comme l’hébergement proposé aux patients au sortir d’une opération et dont l’état requiert le maintien dans l’enceinte hospitalière le temps d’assurer que les premières heures post-opératoires se déroulent dans de bonnes conditions. Dans son étude, M. Frédéric Bizard avance l’idée que le « développement des hôtels hospitaliers peut aussi étendre le champ daction de la chirurgie ambulatoire » ([52]).

Or, comme ont eu l’occasion de le souligner les représentants des directeurs généraux de CHU, le dispositif des hôtels hospitaliers est « balbutiant », les établissements de santé ne s’en étant pas encore emparés. S’il s’agit d’un sujet périphérique pour la majeure partie des prises en charge, il apparaît cependant très important aux yeux des rapporteurs qui souhaitent que soit prise en compte la situation des publics plus fragiles.

Les hôtels hospitaliers font actuellement l’objet d’une expérimentation dont la paternité revient au ministre des solidarités et de la santé, M. Olivier Véran, lorsqu’il était rapporteur de la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2015 pour l’assurance maladie. Il s’agit d’hébergements non médicalisés à vocation temporaire, anticipée et programmée dans le cadre du parcours de soins du patient. La prestation d’hébergement peut être assurée en régie directe par l’établissement de santé ou faire l’objet d’une délégation à un tiers par voie de convention ([53]).

La HAS a parallèlement défini des critères d’éligibilité dans un rapport d’orientation publié en 2015 ([54]), relatifs à l’organisation de la prise en charge (périmètre, parcours de soins), aux caractéristiques des patients (critères d’autonomie, critères médicaux) ou aux caractéristiques sociales. Sur ce dernier point, le rapport d’orientation souligne que « pour certains patients dont les conditions de vie sont un obstacle au retour au domicile, lhébergement non médicalisé à proximité dun établissement de santé peut être proposé » et que « ce point devra lobjet dune attention particulière dans lévaluation de lexpérimentation ». En tout état de cause, ces prestations d’hébergement ne s’adressent pas nécessairement à la seule chirurgie ambulatoire mais sont susceptibles d’embrasser d’autres situations. La DGOS a bien voulu indiquer aux rapporteurs que l’hébergement non médicalisé concerne « les prises en charge en amont ou en aval des hospitalisations complètes médicales ou chirurgicales, les hôpitaux de jour de médecine (HDJ) ainsi que les séances itératives (radiothérapie, chimiothérapie…) ».

Dans cet esprit, M. Olivier Véran, alors rapporteur général de la commission des affaires sociales, avait proposé de redynamiser le dispositif en étendant le cadre expérimental à la chirurgie ambulatoire dans un amendement déposé à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2020, qui n’avait toutefois pas été adopté.

À l’issue du Ségur de la santé, en juillet dernier, M. Olivier Véran a annoncé une généralisation de l’expérimentation des hôtels hospitaliers dès 2021.

Selon les précisions apportées par la DGOS aux rapporteurs, « les hébergements non médicalisés ont bien bénéficié aux patients plutôt éloignés géographiquement dans le cadre de prises en charge courtes, ambulatoires et peu sévères dans le respect des recommandations de la HAS ».

Ce dispositif peut être utilisé dans le cadre de la chirurgie ambulatoire mais « essentiellement en amont de la prise en charge en cas d’éloignement géographique dès lors que la durée de prise en charge […] est longue et nécessite une admission tôt dans la matinée ». A contrario, la DGOS indique que le recours à un hébergement non médicalisé n’est pas nécessaire après l’opération « dans la mesure où le patient ne nécessite pas, le plus souvent, de soins post-opératoires ou de suivi complexe justifiant la réalisation de soins hospitaliers ». Elle ajoute que « la pratique de la chirurgie non invasive, de techniques d’anesthésie modernes, d’une gestion préventive des vomissements et de la douleur, l’organisation de la sortie avec remise de consignes précises de sortie, permettent au patient d’avoir peu de soins au domicile ; le suivi peut être réalisé à distance par l’équipe de soins (téléphonique ou application smartphone) ». De fait, l’éloignement géographique ne constitue plus une contre-indication ou un frein au développement de la chirurgie ambulatoire.

Les premières expérimentations ont souligné tout l’intérêt de proposer un hébergement non médicalisé en amont de l’opération. Deux enjeux méritent cependant d’être encore creusés :

– la précarité ou l’isolement social étant un facteur déterminant l’éligibilité à la chirurgie ambulatoire, la mise à disposition d’une telle capacité d’hébergement en aval de l’opération pour les publics isolés et/ou précaires pourrait constituer une piste intéressante si l’on souhaite vraiment s’inscrire dans une démarche d’égalité aux soins. Il importe donc d’en évaluer l’intérêt pour ces patients.

– le modèle économique détermine la faisabilité du projet d’hébergement non médicalisé et pose la question du tarif, de sa prise en charge par comparaison à une hospitalisation complète. Pour les patients en situation de précarité, la question du reste à charge reste ainsi déterminante.

L’ARS Grand Est a signalé aux rapporteurs la mise en place d’un projet d’hôtel patient connecté porté par le CHU de Strasbourg et l’Institut de chirurgie guidée. Les rapporteurs souscrivent à cette proposition tout en soulignant que l’objectif de 70 % fixé pour la prise en charge en ambulatoire commande de ne pas différer la mise en œuvre du cadre expérimental.

Proposition n° 6 Suivre la généralisation annoncée de l’expérimentation relative aux hôtels hospitaliers et évaluer leur intérêt pour la prise en charge des publics isolés et/ou précaires dans le cadre de la chirurgie ambulatoire.

2.   Professionnaliser la prise en charge des plus vulnérables

Parallèlement au cadre expérimental des hôtels hospitaliers, il conviendrait aussi de renforcer le cadre méthodologique afin de proposer aux patients en situation vulnérable une prise en charge spécifique. La dimension sociale n’est bien souvent traitée qu’en marge d’organisations d’abord pensées comme une réponse moyenne à des besoins moyens.

En l’espèce, il importe que le profil des patients vulnérables soit davantage considéré, quitte à faire l’objet de protocoles. L’audition d’ATD Quart Monde évoque, à cet égard, l’état de sidération des équipes face à la situation des personnes vulnérables. Pour cette association, la sidération devant la misère empêche le professionnel de poser son diagnostic. Or, les professionnels de santé ne sont pas que de simples techniciens mais sont aussi des acteurs de la vie de leurs patients.

a.   Mieux former la communauté médicale à la précarité des patients

Une première proposition consisterait à « faire évoluer les professionnels de santé, par leur formation sur la relation soignant / soigné » ([55]) comme le suggère ATD Quart monde.

La loi du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé procède à une refonte globale des études de santé, particulièrement les études des futurs médecins. Animé par la volonté de former des professionnels à la tête bien faite plutôt qu’à la tête bien pleine, le Gouvernement a l’ambition de revoir les maquettes de formation. Il pourrait être opportun d’adapter les modules de formation en tenant compte des situations de précarité.

La DGOS a indiqué aux rapporteurs que « la formation actuelle des futurs professionnels de santé comprend d’ores et déjà des enseignements aux problématiques de la prise en charge d’un patient en situation de précarité » :

– s’agissant de la formation initiale des médecins, « le régime des études de médecine des premier et deuxième cycles comprend d’ores et déjà des unités d’enseignements dédiées à la précarité d’un patient. Ainsi, les étudiants de premier et de deuxième cycle sont formés à l’identification des facteurs de risque et à l’évaluation d’une situation, à l’identification des différents types et niveaux de précarité, aux morbidités et leurs particularités les plus fréquemment rencontrées ainsi qu’à l’évaluation de la situation médicale, psychologique et sociale d’un patient en situation de précarité et à la mise en place de dispositifs médico-sociaux adaptés ». Par ailleurs, la DGOS souligne que « la réforme du deuxième cycle des études de médecine qui s’appliquera aux étudiants entrant dans le deuxième cycle à compter de la rentrée universitaire 2020 n’entend pas revenir sur cet enseignement qui participe de la prise en charge globale et de qualité d’un patient » ;

– s’agissant du troisième cycle des études de médecine, la DGOS estime que les étudiants « sont également en capacité, dès leur première année d’internat, de prendre en charge un patient dans sa globalité » et indique que « certaines maquettes de formation des DES lient la prévention, le dépistage et la prise en charge d’un patient à ses conditions socio-économiques, à l’âge ou encore au handicap (ex : DES d’endocrinologie-diabétologie-nutrition) ».

La proposition d’ATD Quart-Monde visant à la mise en place d’un module « précarité » en formation initiale semble satisfaite par l’organisation actuellement en vigueur. Il ressort cependant des échanges avec certains étudiants que les unités d’enseignements ne sont pas satisfaisantes. S’il est nécessaire pour les futurs médecins de savoir repérer des situations de précarité et de parvenir à une évaluation globale de la personne, il semble cependant nécessaire qu’un effort particulier soit porté sur le savoir-être. La proposition d’ATD Quart-Monde tend à axer la formation sur « la communication, linformation [sur les droits] [..] le respect de la dignité de la personne malade, la pédagogie, lattention à la relation empathique et aux relations humaines […], la connaissance du handicap, le respect des autres et de la limite de leur pouvoir de communication » ([56]).

Sans alourdir le cursus de la formation des médecins, la piste évoquée par ATD Quart-Monde pourrait être satisfaite par le recours au « patient formateur » dont le principe a été intégré dans la loi relative à l'organisation et à la transformation du système de santé à l’initiative de notre collègue Stéphanie Rist. L’article L. 632-1 du code de l’éducation, relatif aux études médicales, a ainsi été modifié afin de « favoris[er] la participation des patients dans les formations pratiques et théoriques ». Pour la DGOS, « une telle disposition législative représente une base forte pour que les universités et leurs facultés de santé intègrent ces méthodes à leurs formations et à leurs pratiques d’évaluation ». Comme ATD Quart Monde, les rapporteurs proposent de développer des modules de mise en situation faisant intervenir des « patients formateurs en situation de vulnérabilité ».

Parallèlement, et à l’instar de la proposition formulée par ATD Quart-Monde, il pourrait être opportun d’intégrer ces techniques de simulation dans le cadre des obligations de formation professionnelle continue.

Proposition n° 7 Recourir aux « patients formateurs » :
– dans le cadre de la formation initiale des études de santé ;
– dans le cadre de l’obligation de formation professionnelle continue des professionnels de santé.

b.   Instaurer une procédure de prise en charge des publics fragiles

La mise en place de protocoles permettrait d’aider les professionnels de santé à dépasser ce stade de la sidération pour davantage se concentrer sur les soins à apporter au public vulnérable.

La chirurgie ambulatoire nécessite un accompagnement renforcé des patients, particulièrement lorsqu’il s’agit de surmonter des obstacles linguistiques ou des difficultés de compréhension en raison de l’illettrisme et de l’illectronisme. Toutefois l’accompagnant est rarement neutre. Il est susceptible d’opérer « une prise de pouvoir »  ([57]) sur la personne vulnérable et de remettre en question « la relation soignant-soigné ». Valable pour tout patient, le consentement éclairé aux soins est un principe essentiel du droit de la santé. Parce que « la personne malade a droit au respect de sa dignité » ([58]), il importe de davantage réinvestir le cadre des relations entre personnes vulnérables et soignants. Si la médiation est nécessaire, celle-ci doit pouvoir trouver à s’appliquer dans un cadre médical afin de préserver tant le secret médical que la vie privée de l’usager.

Interrogée sur cette proposition, la DGOS souligne que « depuis la loi de modernisation du système de santé de 2016, la médiation sanitaire au même titre que l’interprétariat linguistique constituent une composante du système de santé ». L’article L. 1110-13 du code de la santé publique en précise les contours et prévoit notamment la mise en place de référentiels élaborés par la Haute Autorité de santé définissant les modalités d’intervention des acteurs ainsi que le cadre dans lequel les personnes éloignées des systèmes de prévention et de soins peuvent avoir accès à des dispositifs de médiation sanitaire et d'interprétariat linguistique. Ces référentiels ont été publiés en octobre 2017.

Il a été indiqué aux rapporteurs qu’ « une majorité d’ARS a inscrit le renforcement de la médiation sanitaire dans leur Programme régional pour l’accès à la prévention et aux soins des plus démunis (PRAPS) et soutient des projets incluant l’intervention d’un médiateur en santé ». Mais les services du ministère de la santé reconnaissent que « les couvertures restent toutefois insuffisantes ».

Il pourrait être opportun de se fixer un cap visant à pallier les insuffisances constatées d’ici 2022. Le ministère de la santé pourrait ainsi demander à chacune des ARS de généraliser les protocoles de prise en charge des patients en situation de vulnérabilité prévoyant les conditions d’intervention d’un médiateur en santé en s’appuyant :

– sur le secteur associatif,

– sur les hôpitaux, pour lesquels la DGOS indique qu’il est parfois difficile « de pérenniser les postes du fait d’une connaissance insuffisante de cette fonction et de son intérêt, et de l’absence de statut défini dans la fonction publique hospitalière » ;

– sur les structures de villes dans la mesure où « dans certains territoires, les structures de santé de ville, centres de santé et maisons de santé pluri professionnelles, sont également déjà équipés en "médiateurs en santé" ».

Proposition n° 8 Généraliser les protocoles de prise en charge des patients en situation de vulnérabilité en prévoyant les conditions d’intervention d’un médiateur en santé d’ici 2022

c.   Intégrer la prise en charge des patients vulnérables dans le cadre commun

L’attention portée aux publics vulnérables suppose également d’insérer leur parcours de prise en charge dans le cadre du droit commun. Il n’est pas question de mettre en place une voie parallèle qui serait le parcours de second rang, pour ne pas dire le « parcours du pauvre ». ATD Quart Monde met en garde contre toute velléité de constituer des « dispensaires pour pauvres » ou toute structure aboutissant à enfermer les pauvres dans un ghetto. « Ma santé 2022 » fixe un objectif ambitieux de développement des communautés professionnelles de santé qui prend appui sur des dispositions législatives et conventionnelles. Alors que l’article L. 1434-12 du code de la santé publique prévoit l’élaboration de projet de santé par les CPTS, le récent accord conventionnel interprofessionnel ([59]) en faveur du déploiement de ces structures fixe des missions socles, parmi lesquelles « lorganisation de parcours pluri professionnels autour du patient ».

Les communautés professionnelles territoriales de santé

Aux termes de l’article L. 1434-12 du code de la santé publique, la communauté professionnelle territoriale de santé consiste en un regroupement de professionnels de santé « afin dassurer une meilleure coordination de leur action et ainsi concourir à la structuration des parcours de santé ». La CPTS peut s’adjoindre le concours d’acteurs médico-sociaux et sociaux concourant à la réalisation des objectifs du projet régional de santé.

Depuis l’adoption de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, les membres de la CPTS formalisent un projet de santé, qu’ils transmettent à l’agence régionale de santé.

L’accord conventionnel interprofessionnel conclu en juin 2019 entre l’Union nationale des caisses d’assurance maladie (Uncam) et les syndicats représentatifs des différentes professions de santé prévoit le versement d’une aide financière par l’assurance maladie aux CPTS dont le projet de santé a été validé par l’agence régionale de santé.

La prise en charge des plus vulnérables doit pouvoir être intégrée dans ce cadre commun, l’idée étant de pouvoir favoriser l’émergence d’un parcours de soins adapté et proposé par les structures de soins habituellement proposées. Le rapport d’ATD Quart Monde suggère à cet effet de « développer larticulation entre les dispositifs spécifiques daide aux personnes en difficulté (PASS, consultations gratuites, etc.) et les professionnels de ville (système de droit commun) ».

La qualité de ces parcours de soins pourrait être améliorée à travers le suivi des personnes en situation de vulnérabilité. Dans le cadre de laccréditation des établissements de santé, la HAS sappuie sur la méthode du patient traceur quelle a elle-même mise en œuvre. Cette méthode, qui concerne avant tout les établissements de santé disposant d’une autorisation en chirurgie, a ensuite été adaptée aux soins de ville afin d’analyser le « parcours de santé dans son ensemble ou d’une partie de ce parcours, en incluant les secteurs sanitaire, médico-social et social ».

Pour la DGOS, cette méthode « d’évaluation transversale, pluriprofessionnelle et impliquant nécessairement les acteurs de ville et hospitaliers » pourrait tout à fait être mise en place par les CPTS dans le cadre de leur mission optionnelle « qualité pertinence ». La DGOS ajoute à cet effet que « la définition du plan d’actions d’amélioration prévu par la méthode […] peut contribuer à la définition et à la mise en place d’un parcours de santé chirurgie ambulatoire par les CPTS ».

Compte tenu des précisions qui leur ont été apportées, les rapporteurs considèrent avec un certain intérêt la proposition formulée par ATD Quart Monde visant à étendre la méthode du patient traceur aux patients bénéficiant d’une complémentaire santé solidaire dans le cadre de la chirurgie ambulatoire.

Il n’est évidemment pas envisageable d’alourdir la charge des CPTS alors que l’objectif immédiat consiste d’abord à favoriser leur émergence. Cela étant, pour les CPTS qui seraient les plus avancées, cette proposition pourrait être de nature à davantage assurer une prise en charge de qualité et réduire les évènements indésirables dues aux ruptures de prise en charge.

Proposition n° 9 Susciter la mise en place par les CPTS de la méthode d’évaluation du patient traceur pour les parcours de santé de chirurgie ambulatoire impliquant notamment les patients bénéficiant d’une complémentaire santé solidaire

d.   Mieux rembourser les patients pris en charge en ambulatoire

Au cours de son audition, l’IRDES avait notamment relevé que si d’un point de vue global l’ambulatoire peut générer des économies, cette réalité ne se vérifie pas forcément pour les patients en terme de coût complet. Il n’existe toutefois aucune étude particulière portant sur la chirurgie ambulatoire. Le directeur de l’IRDES a cependant pris l’exemple de la chirurgie orthopédique, qui dans le cadre de la RAAC, implique un surcroît de prise en charge en ville et pour laquelle il a été constaté une accumulation de tickets modérateurs pour le patient ([60]) .

L’étude rétrospective et prospective portant sur l’impact de la chirurgie ambulatoire précitée abonde en ce sens en évoquant « un gain théorique financier mais non effectif pour les patients » ([61]).

Cette étude démontre que la pratique ambulatoire génère une économie sur tous les actes comprise entre « 31 euros et 57 euros », résultant de l’absence de nuitées et permettant de réduire le coût des chambres particulières et du forfait journalier. Ces derniers coûts sont financés par les organismes complémentaires d’assurance maladie (OCAM) pour la plupart des patients. Les économies bénéficient donc davantage aux OCAM qu’aux patients eux-mêmes puisque les primes des « contrats privés en santé augmentent en moyenne de plus de 3 % par an depuis 2000 » ». La même étude note que « le taux de retour des cotisations des contrats individuels est ainsi passée de 78 % en 2009 à 74 % en 2016 ».

Les rapporteurs conviennent des efforts qui ont été entrepris par les OCAM dans la mise en place du reste à charge zéro dans les domaines de l’optique, des audioprothèses et des soins dentaires. Il n’en reste pas moins évident que le développement de la chirurgie ambulatoire doit pouvoir bénéficier à tous les acteurs de notre système de santé. Or, si l’assurance maladie et les OCAM sont habituellement présentés comme étant des financeurs de notre organisation de soins, ce n’est que grâce aux cotisations versées par les assurés sociaux ou aux contributions dont s’acquittent les citoyens imposables. S’il apparaît essentiel de préserver les ressources financières de notre système de santé, il importe aussi de faire bénéficier les patients des progrès dans l’efficience de la prise en charge et des économies qu’ils induisent.

Fort de ce constat, les rapporteurs pensent qu’il pourrait être envisageable de mieux rembourser les prestations hospitalières réalisées en chirurgie ambulatoire par les OCAM comme suggéré par M. Bizard dans son étude précitée, « notamment sur les compléments dhonoraires ».

Cet effort ne peut être imposé aux OCAM sauf à remettre en question la liberté d’entreprendre et la liberté contractuelle qui constituent le cadre de référence de la protection sociale complémentaire. Si le législateur devait toutefois l’imposer, la mesure devrait toutefois être proportionnée et présenter des garanties. Selon le Conseil constitutionnel, l’assurance complémentaire obligatoire ne relève pas de la sécurité sociale au sens de l’article 34 de la Constitution ([62]). Et s’il admet que le législateur puisse attenter à la liberté contractuelle, son contrôle est toutefois plus exigeant que celui exercé dans le cadre du contrôle des dispositions relatives à la sécurité sociale. On rappellera que c’est sur ce fondement qu’a été censurée la partie du dispositif de la loi de modernisation de notre système de santé relative à la mise en place du tiers payant généralisé pour les OCAM qui ne leur offrait pas suffisamment de garanties.

Cette voie apparaissant périlleuse, il semblerait plus indiqué que l’effort demandé aux OCAM puisse être l’objet de négociations.

À cet égard, on pourra faire valoir qu’en contrepartie de la diminution des cotisations ou de l’augmentation de la prise en charge des dépassements d’honoraires, les services du ministère chargé de la santé œuvrent pour une plus grande fiabilité des modalités de calcul du forfait journalier actuellement pris en charge par les OCAM.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2020 poursuit la réforme du calcul du forfait journalier pour les établissements publics et privés non lucratifs antérieurement financés par dotation globale. Et si le texte abandonne la méthode visant à asseoir le forfait journalier sur les tarifs issus des GHS en lieu et place des tarifs journaliers de prestation, il ne prévoit pas moins la mise en place d’une « tarification nationale journalière » qui serait progressivement mise en œuvre entre 2021 et 2023. La réduction des écarts de tarification entre établissements permettrait à cet effet de réduire sensiblement la participation des OCAM au financement du forfait hospitalier qu’ils ont été amenés à prendre en charge pour le compte de leurs assurés.

Proposition n° 10 Tendre vers un « zéro reste à charge » pour les patients engagés dans un parcours de chirurgie ambulatoire

 

Le calcul du forfait journalier à l’issue de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2020

La LFSS pour 2004 a fait des tarifs nationaux de prestations issus des groupements homogènes de séjour (GHS) la base de calcul du forfait journalier à la charge des assurés.

Les modalités de calcul font l’objet d’une dérogation pour les établissements de santé publics et une partie des établissements privés non lucratifs, antérieurement financés sous dotation globale. Pour ces derniers, le calcul du ticket modérateur se fait sur la base d’une autre assiette, le tarif journalier de prestations (TJP). Ce n’est pas le cas des établissements privés anciennement sous objectif quantifié national, dont le forfait est calculé à partir des GHS.

Les TJP sont déterminés par chacun des établissements sur la base de ses charges et de son activité prévisionnelle.

L’article 35 supprime l’objectif d’homogénéisation de calcul des forfaits journaliers à partir de la tarification à l’activité et de nouvelles modalités de calcul sur la base d’une nomenclature simplifiée et fixée au niveau national.

Le nouveau modèle entrera en vigueur le 1er janvier 2021 et sera progressivement mis en œuvre jusque 2023.

B.   intéresser les établissements de santé et leurs professionnels au développement de la chirurgie ambulatoire

Le recours à la mise sous accord préalable (MSAP) a été abondamment utilisé par les autorités régulatrices pour faciliter le basculement vers la chirurgie ambulatoire alors même que les difficultés financières rencontrées par les établissements de santé les enjoignaient de revoir leur modèle économique. L’ARS Grand Est reconnaît en avoir fait une utilisation « très offensive ».

Mais si les études démontrent une transformation des séjours d’hospitalisation complète en chirurgie ambulatoire, les effets à long terme de la MSAP sur l’irréversibilité de la transformation ne sont pas encore documentés. C’est ce que souligne l’ARS Grand Est dans sa réponse au questionnaire transmis par les rapporteurs en constatant que si un effet « est constaté sur le taux dambulatoire avant/après MSAP », les services n’ont pas été « en mesure de vérifier si les pratiques sont pérennisées dans le temps ». En effet, si un effet d’apprentissage est observable, la pratique de la MSAP est considérée comme une lourde contrainte exercée sur les praticiens par l’assurance maladie.

À la différence de la MSAP qui implique autant la direction de l’hôpital que les médecins, la mise en place du tarif unique n’a pas bénéficié du même effet d’entraînement. Une note de la Drees avance une explication intéressante. Selon les auteurs de l’étude, c’est « la direction de lhôpital, consciente des enjeux afférents aux recettes de lhôpital, qui est principalement concernée par le mécanisme de tarif unique, qui ne peut vraisemblablement toucher les médecins quau travers de la communication de la direction de lhôpital » ([63]). Pour être efficace, il importe que l’incitation tarifaire puisse également être perçue par les autorités médicales. Cette explication rejoint les conclusions de l’étude précitée menée par M. Frédéric Bizard. Ce dernier note que si « lensemble des parties prenantes institutionnelles […] bénéficiaient de limpact économique de la [chirurgie ambulatoire] », le professionnel de santé reste le « grand absent de ces gains économiques », particulièrement les personnels soignants de l’équipe chirurgicale qui décident et mettent en œuvre le développement de la chirurgie ambulatoire. L’IRDES a par ailleurs abondé dans ce sens en rappelant que, s’agissant des hôpitaux publics, le médecin ne perçoit pas les tarifs et n’est donc pas directement incité à développer de nouveaux modes de prise en charge ([64]).

M. Frédéric Bizard poursuit en signalant que l’atteinte de l’objectif de 70 % nécessite une « forte accélération de la pratique de la chirurgie ambulatoire » : le gain annuel, qui a été de 1,8 point par an de 2010 à 2016, devra être de 2,7 points par an jusqu’en 2022. Or, seul un mécanisme incitatif intéressant autant les professionnels de santé que les établissements pourra être de nature à générer cette forte accélération. Les résultats de l’étude précitée démontrant que « le virage ambulatoire en chirurgie ne se traduit pas par un déplacement de la demande et de la dépense de soins de lhôpital vers la ville », il semble tout à fait pertinent de redistribuer les efforts accomplis aux établissements et à leurs équipes.

Cet intéressement au développement de la chirurgie ambulatoire est d’ailleurs un appel lancé tant par les professionnels de santé que par les fédérations hospitalières.

1.   Intéresser les établissements de santé au développement de l’ambulatoire

S’agissant des établissements de santé, l’intéressement pourrait permettre de financer la transformation des lieux dont les rapporteurs ont déjà souligné qu’ils étaient particulièrement inadaptés à la mise en place de circuits dédiés à la chirurgie ambulatoire, du fait notamment des contraintes architecturales.

● L’acte 2 de la chirurgie ambulatoire pourra être l’occasion, pour certains établissements, d’élargir les gestes marqueurs à des actes plus lourds et plus complexes. Selon la FEHAP, cette ambition suppose une « incitation financière afin daider les établissements à développer de nouveaux parcours ». M. Bizard suggère ainsi de permettre aux établissements de bénéficier des économies générées par la baisse des coûts de production sous la forme d’une capacité d’autofinancement destinée à financer les investissements liés à la transformation des structures et à former les personnels.

Cette incitation peut consister à augmenter la dotation affectée à l’unité de chirurgie ambulatoire pour financer la poursuite de sa transformation et améliorer les conditions matérielles (accueil des patients, environnement professionnel des équipes dédiées à la chirurgie ambulatoire…).

Elle doit également permettre de renforcer la politique de formation du personnel, qui constitue un axe structurant de la transformation des pratiques. Plusieurs interlocuteurs ont fait valoir l’importance de la mise à jour des connaissances des équipes – qu’il s’agisse des personnels médicaux comme paramédicaux – tout en regrettant la faiblesse de la formation continue en la matière. Les anesthésistes l’ont souligné lors de leur audition.

Rappelons notamment que le cadre réglementaire applicable aux structures de chirurgie ambulatoire impose la mise à disposition de personnels formés. L’article D. 6124-305 du code de la santé publique prévoit que la charte de fonctionnement propre à chaque structure de soins précise notamment les « formations nécessaires, en raison notamment du processus et de lorganisation spécifiques de la structure ».

Or, ainsi que le souligne la contribution du syndicat CNI, le sujet de la formation continue est « particulièrement difficile » car « sil paraît évident et nécessaire », il est patent que les budgets qui lui sont alloués « ne font que décroître » sans compter que « les effectifs hospitaliers ne permettent pas toujours, et de moins en moins, de libérer les agents pour quils puissent suivre une formation quelle quen soit la durée ».

Le personnel soignant souligne aussi la lourdeur administrative qui prévaut pour le traitement de chaque demande de formation. Parfaitement légitime, l’accès à la formation participe de l’amélioration de la qualité des soins et de l’attractivité du service autant qu’elle bénéficie au patient.

Un simple rappel des obligations liées au développement de la formation continue ne suffira certainement pas à inciter les établissements à investir davantage dans cette voie d’excellence. Pour opérer ce changement, il importe que les autorités de tutelle intègrent dans leurs stratégies de transformation, des axes d’amélioration de la qualité de la prise en charge. À cet effet, les rapporteurs suggèrent de procéder à une évaluation du respect du cadre réglementaire relatif à la formation des personnels applicable aux structures de chirurgie ambulatoire.

Proposition n° 11 Évaluer le respect du cadre réglementaire relatif à la formation des personnels applicable aux structures de chirurgie ambulatoire

● Le pilotage des établissements de santé et la conduite du changement présentent plusieurs axes qui constituent l’ossature du tableau de bord prospectif théorisé par Kaplan et Norton. Sans entrer dans des considérations qui relèvent davantage de la pratique de terrain que de la prescription législative, il importe de rappeler que, pour structurant qu’il soit, l’axe financier doit être mis en regard des axes « clients », « processus interne » ou « organisation ».

Or, ce que l’on a coutume de désigner comme le « capital humain » est un facteur clé du succès de la transformation, qui rend possible la mobilisation des personnels d’une organisation donnée. Adaptée à la politique de santé publique, cette dimension suppose de ne pas sous-estimer la nécessité d’un personnel formé au sein d’une unité ambulatoire structurée et organisée.

Les contrats pluriannuels d’objectifs et de performance devraient pouvoir faciliter la mise en place de la vision stratégique déterminée par les établissements de santé. Et si l’objectif de retour à l’équilibre constitue un objectif sain et louable, il est nécessaire de pouvoir l’articuler avec la mobilisation d’autres impératifs, sans quoi la transformation demandée ne pourra porter de fruits à long terme.

Les auditions ont mis en lumière des acteurs très attachés à développer une médecine de qualité dont le symbole ne se résume pas aux seules innovations techniques. Les rapporteurs ont rencontré des personnels investis, enthousiastes et convaincus de la nécessité d’améliorer les pratiques tout en accordant une importance particulière à leur relation avec les patients. Ces mêmes personnels ont également fait part de leur désarroi face à une modification de la prise en charge davantage axée sur le rendement et qui nourrit un sentiment de déshumanisation.

Or, il importe aux rapporteurs de prendre en considération ces appels. La chirurgie ambulatoire ne saurait se réduire à une simple réduction capacitaire. Elle est bien plus que cela. Si elle permet fort opportunément de participer au retour à l’équilibre, elle est autant une transformation visant à la qualité de la prise en charge. Il suffit pour s’en convaincre de s’intéresser aux recommandations formulées par les sociétés savantes destinées à accompagner les nouvelles modalités de prise en charge. Si tout le monde en a convenu, particulièrement les ARS auditionnées, il importe d’accorder du crédit aux alertes formulées par les personnels soignants. Les actes doivent pouvoir suivre les paroles encourageantes des autorités de tutelle.

2.   Intéresser les équipes en charge de la chirurgie ambulatoire

Les progrès de la chirurgie ambulatoire doivent également pouvoir être imputés à l’équipe qui a permis que s’opère la transformation.

Or, selon le SNARF ([65]), l’équipe est bien le seul acteur qui n’a pas été valorisé alors même qu’il est un élément moteur. Persuader le patient de la pertinence du recours à la chirurgie ambulatoire, organiser les consultations pré-hospitalisations pour mieux anticiper les opérations post-hospitalisations demande du temps et de l’investissement. Le SNARF poursuit en indiquant que « si lon veut franchir la marche […] il est indispensable de valoriser le travail médical qui permet de faire de lambulatoire ». L’UNPS plaide également pour ce légitime retour sur investissement. La transformation vers la chirurgie ambulatoire a davantage été pensée comme une source d’économies. S’il est compréhensible de vouloir maîtriser l’ONDAM en bénéficiant des diminutions de coûts générées par la chirurgie ambulatoire, il l’est tout autant d’envisager un partage des économies générées entre acteurs. Le professeur Karine Nouette-Gaulin, secrétaire générale de l’AFCA, appuie cette idée en affirmant que pour améliorer la qualité de la prise en charge, « il est important de réfléchir à une redistribution des moyens pour accompagner [l’]élan [de la chirurgie ambulatoire] ».

Ce partage des économies peut prendre plusieurs formes.

Il peut s’agir de modalités telles que le versement de bonus sur salaires, sous la forme de primes. Il ne s’agit pas d’une simple augmentation de rémunération, mais « dune juste reconnaissance dune activité plus intensive et dune nouvelle façon de travailler qui génère plus de qualité et de productivité », comme le souligne M. Frédéric Bizard.

Dans cette perspective, plusieurs interlocuteurs ont tout particulièrement insisté sur la valorisation du temps passé avec les patients. La chirurgie ambulatoire repose sur le pari de l’autonomie du patient. Or, un patient dûment informé est la garantie d’un parcours de qualité. Le sentiment de déshumanisation des soins qui résulte de la rotation des interventions et du temps imparti pour la prise en charge pourrait être surmonté si les personnels paramédicaux se sentaient davantage reconnus dans leur rôle.

Le temps infirmier nécessaire à l’information des patients doit être suffisant afin de permettre une bonne évaluation du patient.

Le temps de l’organisation et de la coordination est aussi un facteur clef du succès de la transformation. Dans ce contexte, la délégation de tâches pourrait davantage être explorée suivant les recommandations formulées notamment par le Syndicat national des infirmiers de bloc opératoire (SNIBO) ([66]). Les infirmiers de bloc opératoire (IBODE) peuvent contribuer au développement de la chirurgie ambulatoire alors qu’aucune fonction ne leur est aujourd’hui assignée en phase préopératoire. S’il importe que le patient puisse rencontrer le médecin et l’anesthésiste, il pourrait être envisageable de libérer du temps en intégrant la participation des IBODE dans ce processus. Cette étape est essentielle tant pour préparer l’opération que la sortie. De la même manière, le SNIBO plaide pour que les IBODE jouent un rôle plus important dans la sortie du patient. À l’heure actuelle, c’est la visite du chirurgien qui conditionne cette sortie. Dans les deux cas, il n’appartient évidemment pas au législateur de se substituer aux professionnels de santé ou aux sociétés savantes. Par contre, il peut suggérer à ces acteurs d’explorer ces pistes qui pourraient éventuellement se concrétiser par des recommandations de bonnes pratiques formulées par les sociétés savantes, l’AFCA ou encore par la HAS.

À cet égard, l’AFCA suggère que les seuils fixés par les ARS pour l’atteinte des objectifs de chirurgie ambulatoire ne soient pas tant associés à des suppressions de postes qu’à des redéploiements.

Les gains tirés de la transformation des séjours pourraient être redéployés dans l’objectif d’optimiser le parcours de soins à travers le recours aux nouvelles technologies, leur mise à disposition auprès des patients en tenant compte des éventuels freins liés à l’illettrisme, l’illectronisme, les handicaps notamment sensoriels mais aussi la barrière de la langue. Un effort particulier doit être porté sur la compréhension du parcours de soins, des consignes et des attendus ainsi que sur leur reformulation par le patient. Au-delà de ces nécessaires efforts qui participent du renforcement du niveau de confiance entre soignant et soigné, il importe aussi de s’attacher à améliorer l’accueil des patients au travers d’infrastructures évolutives, plus chaleureuses : il a été souligné à de nombreuses reprises que l’arrivée du patient au bloc opératoire sans brancardage participe au succès de son parcours tout en améliorant son degré de satisfaction.

L’intéressement des équipes pourrait prendre la forme d’une enveloppe financière dédiée directement gérée par l’équipe soignante, qui permettrait de financer l’acquisition de petits matériels ou encore la formation du personnel.

C.   inscrire la chirurgie ambulatoire dans lécosystème de santé

Il semble indispensable que la transformation s’appuie sur un état des lieux de l’existant réalisé par les professionnels de santé avec l’appui de la direction de l’hôpital.

Les Hospices civils de Lyon (HCL) ont su adapter leur organigramme en instituant une direction de la transformation apte à procurer l’ingénierie d’organisation nécessaire à l’évolution de son activité. La stratégie de transformation a par ailleurs été un élément structurant du projet médical d’établissement. Le centre hospitalier de Nogent-le-Rotrou a, quant à lui, réussi sa mue avec le concours de professionnels libéraux et est parvenu à dynamiser une activité qui était pourtant confrontée à de graves difficultés.

Cet état des lieux pourra permettre l’éclosion d’un projet qui s’appuiera sur l’environnement existant, tiendra compte des contraintes propres à chaque établissement, conservera des liens avec la chirurgie en hospitalisation complète, s’adaptera aux réalités territoriales et resserrera les liens avec la médecine de ville. Il implique donc de considérer le taux de 70 % comme un objectif global, susceptible d’être ajusté en fonction des situations rencontrées.

1.   Tenir compte de lenvironnement hospitalier

Dans son étude consacrée à la chirurgie ambulatoire, la DREES réactive l’idée de mettre en place des centres de taille moyenne susceptibles de répondre aux besoins des patients très éloignés des établissements pratiquant aujourd’hui la chirurgie ambulatoire. Cette idée n’est pas nouvelle : l’idée de centres autonomes, situés en dehors des enceintes hospitalières et bénéficiant d’une autorisation propre a déjà été avancée par la Haute Autorité de santé en juillet 2010 ([67]) puis par l’Assurance maladie dans son rapport sur les charges et produits pour l’année 2012 ([68]). Les rapporteurs se sont naturellement penchés sur cette question. Majoritairement, les personnes auditionnées ont manifesté leur intérêt pour le maintien des liens avec la chirurgie en hospitalisation complète conduisant d’une part à ne pas spontanément soutenir l’idée d’une prise en charge externe, d’autre part à plaider en faveur du maintien d’une certaine perméabilité entre chirurgie ambulatoire et hospitalisation complète.

a.   Instituer des opening centers, ce qui suppose de s’adapter à tous les profils de patients

La mise en place de centres autonomes, entendus comme des structures juridiquement et géographiquement indépendantes, aussi dénommés opening centers, présente des avantages certains et constitue une réponse aux besoins de santé d’un territoire donné compte tenu du réservoir d’offre de soins.

Comme l’a rappelé la DGOS dans sa réponse au questionnaire des rapporteurs, des centres autonomes existent déjà, étant précisé que la qualité et la sécurité des soins requièrent la conclusion d’une « convention avec une structure pratiquant la chirurgie en hospitalisation complète permettant ainsi […] la prise en charge du patient en hospitalisation complète en cas de complications […] ou de toute autre hypothèse imposant une conversion [d’un séjour de chirurgie ambulatoire en séjour d’hospitalisation complète] ».

Le syndicat des médecins libéraux (SML) a avancé l’idée de centres autonomes, pour lesquels les modalités d’autorisation seraient assouplies. Outre la possibilité d’offrir une prise en charge de proximité, ces structures ambulatoires fonctionneraient de manière allégée puisque leur statut serait intermédiaire entre un cabinet médical et un établissement de santé. Ces centres permettraient de répondre aux besoins exprimés par certains professionnels de santé visant à proposer des prises en charge dans leurs cabinets médicaux moyennant une évolution des recommandations, une accréditation et un financement dédié. Le SML a ainsi listé un certain nombre d’actes susceptibles d’être traités dans ce qu’il nomme la « chirurgie externe » : les opérations de la cataracte, la chirurgie vasculaire, celle des canaux carpiens. Selon le SML, il existe même une volonté très forte en ophtalmologie et en oto-rhino-laryngologie.

Dans un environnement très marqué par la contrainte financière, l’instauration de centres autonomes peut présenter certaines difficultés. Les centres autonomes sont-ils susceptibles de répondre à une demande qui ne peut être satisfaite ? Et pour quels actes ? Pour quelle patientèle ? Selon quels tarifs ? L’instauration de ces centres peut-elle contribuer à déséquilibrer l’activité des établissements publics comme privés ? Le financement par l’assurance maladie de nouveaux blocs, répondant parfaitement aux exigences de qualité et de sécurité mais susceptibles de faire doublon, est-il vraiment pertinent alors que le budget de l’assurance maladie doit être maîtrisé ?

D’autres représentants de médecins ne souscrivent pas à la mise en place d’opening centers. Le docteur François Honorat, co-président du syndicat Le Bloc, met en garde contre une approche strictement déterminée à partir des évolutions techniques et suggère plutôt de davantage tenir compte du profil des patients : âgés, souffrant de poly-pathologies et isolés ([69]). Pour cette organisation, il importe de ne pas proposer un univers « déshumanisé » où la rotation des opérations pourrait être en partie dictée par la nécessité d’obtenir une volumétrie satisfaisante d’actes portant sur des patients dont la prise en charge est la plus aisée.

En d’autres termes, la mise en place de centres autonomes ne peut être détachée de son environnement qu’il s’agisse de l’offre de soins existante ou de la patientèle. Plusieurs critères doivent être satisfaits : s’agit-il d’une offre complémentaire ? Les actes pratiqués pourront-ils permettre d’améliorer le taux global de chirurgie ambulatoire ? Sera-t-il tenu compte des patients vulnérables ? Quelle articulation avec l’offre hospitalière existante ?

Les rapporteurs n’ont pas la prétention de répondre à ces questions à la place des professions de santé et des autorités régulatrices. Ils estiment cependant nécessaire qu’avant de procéder à de nouvelles autorisations, l’effort soit déjà porté sur l’offre existante au regard des enjeux du moment.

b.   Maintenir le lien entre la chirurgie pratiquée en ambulatoire et celle pratiquée en hospitalisation complète

Plusieurs interlocuteurs ont souligné tout l’intérêt de maintenir un lien entre RAAC et chirurgie ambulatoire, considérant que la séparation des circuits ambulatoires et d’hospitalisation complète était une erreur. Dans les deux cas, la prise en charge du patient est la même, tout autant que la préparation de la sortie. Par ailleurs, la RAAC visant d’abord la réduction de la durée de séjour permet d’envisager ultimement le basculement vers une prise en charge en ambulatoire. Il y a donc une certaine logique à privilégier l’osmose entre des pratiques afin d’améliorer de concert l’organisation, les pratiques de soins et la formation des personnels. Cette approche plaide pour un maintien des structures au sein des établissements de santé.

Subsiste cependant une autre question. Faut-il identifier au sein de l’hôpital une structure uniquement dédiée à l’ambulatoire et totalement hermétique par rapport à la prise en charge en hospitalisation complète ?

On retrouve les mêmes obstacles que pour la prise en charge en centres autonomes. Cette organisation nécessite la mise en place dun bloc dédié avec un matériel dédié et des équipes à répartir sur les deux sites. Or, comme a pu le souligner le Professeur Rossi, président de la commission médicale détablissement de l’Assistance publique-Hôpitaux de Marseille (AP-HM), la réussite dune chirurgie suppose une cohésion déquipe quil est particulièrement difficile de mettre en place si celle-ci se disperse entre plusieurs sites et alors que les établissements de santé, particulièrement publics, affrontent une pénurie des personnels affectés aux blocs opératoires, quil sagisse danesthésistes ou dinfirmiers. Comme la souligné Mme Faujour dans sa contribution écrite, « la rareté des personnels de blocs fait que loption dun bloc tout compris […] devient une nécessité » ([70]).

De la même manière, le Docteur Pierre Lanot, secrétaire général du SNARF ([71]), considère que l’existence de structures uniquement dédiées à l’ambulatoire est un frein au développement de la RAAC et in fine de l’ambulatoire, en raison même de la proximité d’approche entre les deux modes de prise en charges. Selon lui, la prise en charge des patients doit être effectuée au sein de la même structure mais selon des circuits différents. C’est d’ailleurs cette démarche qui a conduit quelques-unes des personnes auditionnées à organiser l’activité hospitalière autour de circuits distincts, fondés sur des structures d’accueil et de secrétariats distincts mais centrés sur l’utilisation du même bloc opératoire.

Malgré tout, une organisation fondée sur l’utilisation d’un bloc commun présente, à n’en pas douter, des enjeux importants.

Le premier défi à relever résulte de l’articulation avec les soins non programmés. Le syndicat national des infirmiers-anesthésistes a souligné l’interférence résultant d’un passage en urgence sur la mise à disposition des blocs. Son représentant évoque ainsi « la déstructuration du bloc opératoire » en raison du fléchage opéré par les services d’urgence. Des patients prévus en ambulatoire font finalement l’objet d’une hospitalisation. À l’évidence, ce défi doit être relevé.

Lévolution des techniques plaide pour une organisation optimale. Selon Mme Faujour, de « plus en plus de chirurgies lourdes pourront se faire en ambulatoire », ce qui suppose de pouvoir disposer déquipements plus lourds que ceux actuellement disponibles pour une opération en chirurgie ambulatoire. Selon la directrice, il faut tenir compte de lessor des nouvelles techniques utilisées en chirurgie majeure, telles que la robotique rénale, la chirurgie prothétique qui seront à lavenir utilisées dans le cadre ambulatoire. La présence de matériels distincts au sein dun même bloc peut présenter des difficultés dorganisation quil importe davoir à lesprit.

En tout état de cause, la solution à retenir est celle qui tient compte de l’environnement et des contraintes. Encore une fois, il appartient à chaque établissement d’opérer un bilan coût-avantage de l’organisation à mettre en place. Pour les hôpitaux publics, la rareté des ressources en personnel ou en matériel plaide plutôt en faveur d’une structuration autour d’un bloc commun.

c.   Adapter l’objectif global à la nature et à l’activité des établissements

L’atteinte de la cible en ambulatoire doit pouvoir être adaptée à la situation de chacun des établissements. L’application d’un taux uniforme peut constituer un obstacle dirimant selon la nature des établissements ou des activités qu’ils proposent.

Telle est la situation des CHU. Ces établissements de santé portent des autorisations d’activités spécifiques au titre du schéma régional de santé et qui les conduisent à des prises en charges de recours peu éligibles à la chirurgie ambulatoire compte tenu des techniques médicales (neurochirurgie, chirurgie cardiaque, greffes ou neuroradiologie interventionnelle). Ils assurent aussi une mission d’enseignement requérant la formation des médecins à la diversité de leur métier. Pour reprendre les termes de la conférence des directeurs généraux de CHU, leur appliquer un objectif de 70 %, du moins à court terme, n’est ni raisonnable ni réaliste. Au mieux, les CHU peuvent s’engager sur une cible de 50 %. Il importe d’en tenir compte.

De la même manière, il pourrait être envisageable d’avoir une application souple de l’objectif de 70 %. Cet objectif pourrait s’appliquer à l’échelle d’un GHT tout en laissant aux établissements qui le composent la liberté de parvenir à des cibles différenciées, qui tiendraient compte à la fois de la nature de leur activité, de leur organisation et des plateaux techniques proposés. C’est ce qu’avait eu l’occasion de souligner la conférence des directeurs généraux de CHU lors de son audition. À l’instar des CHU, le centre hospitalier (CH) de Saint-Quentin constitue l’hôpital de recours pour le GHT dont il constitue l’établissement support. Son directeur a notamment indiqué que la complexité des pathologies prises en charge ne permettait d’espérer qu’un taux de 60 %. Par contre, l’objectif pouvait être atteint, voire dépassé, pour les hôpitaux de proximité. Pour les professionnels rencontrés, il semble donc tout indiqué d’envisager une approche adaptée à la situation de chaque établissement en retenant un taux différencié.

Proposition n° 12 Apprécier l’atteinte des taux cibles de chirurgie ambulatoire au niveau du groupement hospitalier de territoire

Dans ses échanges avec les rapporteurs, la DGOS a souhaité rappeler que si « l’instruction du 28 septembre 2015 relative au programme de développement de la chirurgie ambulatoire a retenu une cible nationale de chirurgie ambulatoire de 66,2 % à horizon 2020 », la méthode a néanmoins « permis d’envisager des cibles par établissement au regard des case-mix et des cibles par région qui sont la synthèse des cibles des établissements de santé pour une région donnée ». Il a en outre été précisé aux rapporteurs que « l’objectif de 70 % de chirurgie ambulatoire à horizon 2022 suit le même principe que celui qui a conduit à la fixation des cibles nationales, régionales et par établissement pour la période 2015-2020. Ainsi, n’induit-il pas que chaque spécialité, chaque établissement et chaque région atteignent un taux de 70 % […] ».

Dans ce contexte, le recours à Visuchir, qui permet de déterminer un calcul du potentiel de développement de la chirurgie ambulatoire sur la base des meilleures pratiques, constitue un outil majeur d’adaptation à la situation des établissements de santé. À cet effet, plusieurs interlocuteurs ont insisté sur la nécessité de faire converger les instruments de pilotage, particulièrement l’articulation entre Visuchir et la méthode IGAS-IGF permettant de déterminer les cibles par région et par établissement. La DGOS souligne que « les potentiels calculés dans VISUCHIR et les cibles établies au niveau national avec l’ATIH, n’ont donc pas les mêmes finalités. Les premiers doivent avoir pour objectif de permettre aux établissements de mener une réflexion sur leur propre projet de développement de la chirurgie ambulatoire dans le cadre de leur projet médical et constituent une aide pour le dialogue médicalisé avec les ARS. Les taux cibles établis par la méthode IGAS/IGF, eux, permettent de calculer la transférabilité en fonction des niveaux de sévérité et des durées moyennes de séjour observés ». Elle a cependant indiqué que ces taux seront prochainement réactualisés et porteront jusqu’aux années 2022-2023.

d.   Réussir la récupération améliorée après chirurgie (RAAC)

Enfin, si la chirurgie ambulatoire constitue un défi important, il ne doit pas masquer l’enjeu majeur que représente la RAAC pour les hôpitaux. Les transformations demandées au titre de l’ambulatoire ne doivent pas obérer la capacité des hôpitaux à travailler sur la réduction de la durée moyenne de séjour en hospitalisation complète. En outre, le basculement vers la chirurgie ambulatoire est conditionné aux succès qui pourront être obtenus au titre de la RAAC, les deux approches étant consubstantielles. Ce discours a été tenu à de multiples reprises tant par les sociétés savantes que par les professionnels de santé ou les représentants des hôpitaux les plus impliqués dans ce changement de paradigme. S’il y a parfois un chevauchement entre les deux transformations et un intérêt partagé, il importe de conserver un certain équilibre dans ce qui est demandé aux établissements concernés afin d’éviter les injonctions contradictoires.

Par ailleurs, il importe d’avoir à l’esprit que la disparition de lits d’hôpitaux ne peut constituer un objectif en soi. Des représentants des syndicats de médecins libéraux ont ainsi désapprouvé la « frénésie du développement de la chirurgie ambulatoire » conduisant à la fermeture des lits en hospitalisation complète dans une optique d’efficience. Selon eux, il doit être tenu compte de la nécessité de maintenir des lits compte tenu de l’enjeu représenté par la prise en charge médicale de patients âgés et polypathologiques. Cette remarque de bon sens est partagée par nombre d’interlocuteurs auditionnés comme par les rapporteurs eux-mêmes.

2.   Ancrer la pratique dans le territoire

La trajectoire de transformation des établissements hospitaliers doit s’inscrire dans son territoire et requiert, à certains égards, une complémentarité des actions menées par chacun des établissements de santé.

Pour les établissements publics, il importe évidemment de s’inscrire dans la démarche des groupements hospitaliers de territoire (GHT). Les auditions ont été l’occasion de souligner deux éléments capitaux pour la réussite du basculement en ambulatoire.

a.   Susciter des équipes territoriales au sein des groupements hospitaliers de territoire

Pour permettre aux établissements composant le GHT d’améliorer leur score, la direction du centre hospitalier de Saint-Quentin plaide pour la mise en place d’une équipe territoriale dédiée à la chirurgie ambulatoire. Animée par l’établissement support, cette équipe pourrait rayonner sur les autres établissements composant le GHT et coordonner l’action en faveur de la chirurgie ambulatoire. Ces échanges entre équipes soignantes sont primordiaux mais ne sont guère encouragés aujourd’hui compte tenu des modalités de tarification hospitalière et de rémunération des personnels. Pour engager une dynamique au sein des GHT, il faudrait pouvoir intéresser les médecins volontaires à s’investir dans la transformation tout en incitant les hôpitaux à coopérer plutôt qu’à se concurrencer. Faire émerger la figure d’un praticien territorial, voire d’une équipe territoriale, pourrait grandement faciliter le développement de la chirurgie ambulatoire afin de diffuser les bonnes pratiques et soutenir les centres hospitaliers qui manqueraient de ressources pour amorcer le virage ambulatoire.

Réagissant à cette proposition, la DGOS souligne que « cette initiative, qui n’est pas unique, permet effectivement de réorganiser l’offre dans une vision territoriale au sein d’un GHT via des coopérations entre professionnels ».

Pour les modalités de financement, la DGOS suggère qu’« un accompagnement via le fonds d’intervention régional (FIR) puisse être envisagé sous réserve notamment que les actions du projet soient en conformité avec les missions du FIR ». Cette voie dépend étroitement des priorités des ARS, sans compter que les ressources tirées du FIR ne sont pas illimitées.

Dès lors, un encadrement par les expérimentations portées par l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 pourrait éventuellement être envisagé.

Proposition n° 13 Susciter la mise en place d’une équipe territoriale dédiée à la chirurgie ambulatoire au sein des groupements hospitaliers de territoire

b.   Susciter une coopération entre secteurs public et libéral

La coopération entre secteurs public et libéral constitue un autre axe qui pourrait être encouragé dès lors que chaque acteur y trouve son compte. Le centre hospitalier de Nogent-le-Rotrou a engagé une dynamique qui a permis de redresser une activité marquée par quelques difficultés. La mue a pu être opérée grâce à l’action de deux professionnels engagés ‑ les docteurs Antoine Rogeau et Didier Sciard. Plusieurs facteurs ont permis le succès de cette remarquable transformation : la présence d’un médecin coordonnateur, les conditions de travail et la flexibilité des modalités de rémunération des médecins engagés : certains sont salariés quand d’autres exercent en libéral, reversant une partie de leur rémunération au centre hospitalier. Cette transformation doit aussi beaucoup à la flexibilité du personnel soignant. Pour continuer à rester au centre hospitalier, les infirmiers anesthésistes ont consenti à exercer dans d’autres services, par exemples aux urgences. Le souhait de rester sur place a impliqué de la part de ces personnels engagés une adaptation de leur métier.

Évolution de l‘activité ambulatoire du centre hospitalier de nogent-le-rotrou

 

Le CH de Nogent-le-Rotrou fait par ailleurs partie de ces structures à taille humaine, assez adaptées à la prise en charge des personnes isolées. Du reste, l’organisation retenue ne s’écarte pas du modèle des hôpitaux de proximité, statut auquel le CH de Nogent-le-Rotrou pourrait prétendre à l’avenir. L’émergence de modèles mixtes d’organisation des soins est une chance pour les territoires dont les besoins de santé doivent être mieux couverts. L’exemple de Nogent-le-Rotrou n’est sans doute pas reproductible à l’identique sur l’ensemble du territoire national mais il prouve que la volonté des acteurs, associée à la prise en compte de l’offre disponible, sont susceptibles d’engager de vrais changements. Cet exemple participe de la réhabilitation des structures de proximité dont l’activité est assurée grâce au concours de médecins libéraux.

3.   Resserrer les liens avec la ville

Pour que la pratique de la chirurgie ambulatoire progresse, il ne suffit pas seulement d’une bonne organisation interne à l’hôpital. Il importe également de développer une logique de parcours qui intègre les étapes en amont et en aval de l’opération chirurgicale. Ce constat, mis en lumière par l’enquête de la HAS, est en outre partagé par la totalité des personnes auditionnées. Plusieurs suggestions ont à cet égard été formulées confirmant par ailleurs les pistes privilégiées par le ministère de la santé.

a.   Faire évoluer le financement

L’incitation à la coopération doit passer par une évolution du financement. Cette remarque, qui n’est pas fondamentalement nouvelle, résulte du constat que la rémunération d’actes isolés n’incite pas à l’organisation d’un parcours cohérent mais plutôt à la fragmentation des prises en charge. Paiement à l’acte dans le secteur libéral et tarification à l’activité dans le secteur hospitalier ne favorisent pas la coopération et encore moins la coordination des soins. Ces modes de paiement n’encouragent pas non plus à améliorer la qualité de la prise en charge. En d’autres termes, le paiement à l’acte, qui s’inscrit dans une logique quantitative, ne rémunère pas les missions, le temps de la coordination, l’accompagnement ou encore le temps de suivi médical à distance. Or, il apparaît que nombre de suggestions émises par les rapporteurs pourraient être encouragées par la mise en place d’une tarification à l’épisode de soins qui fait actuellement l’objet d’expérimentations dans le cadre de l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

La tarification à l’épisode de soins fait notamment partie des trois expérimentations nationales issues des appels à manifestation d’intérêt ([72]). Une première expérimentation porte sur le paiement à lépisode de soins sur la colectomie pour cancer ([73]) . La seconde porte sur la prothèse totale de hanche et la prothèse totale de genou ([74]). Une deuxième vague dexpérimentation a été lancée en janvier 2020.

Les différentes phases d’expérimentation du paiement à l’épisode de soins

Aux termes du rapport remis au Parlement sur les expérimentations innovantes engagées dans le cadre de l’article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018, trois phases sont prévues :

– une phase dite « dapprentissage de 12 à 18 mois » qui consiste en une « simulation des résultats, sans impact financier et sans modification des règles de facturation » ;

– une phase de « financement rétrospectif » pendant une durée minimale de deux ans consistant à appliquer le nouveau modèle de financement sans modification des règles de facturation, et dont le bilan peut donner lieu à « la redistribution dun bonus ou à la récupération dun malus » ;

– Une troisième phase de « financement prospectif » consistant à verser le « forfait " pour solde de tout compte " […] à un destinataire unique en charge de répartir ensuite le montant entre les différents acteurs mobilisés ».

Source : Rapport au Parlement sur les expérimentations innovantes en santé (article 51 de la loi de financement pour la sécurité sociale pour 2018)

Ces expérimentations pourraient utilement permettre de tester de nouvelles modalités de prise en charge du patient, afin de résoudre plusieurs enjeux posés par l’enquête de la HAS, particulièrement la généralisation de la lettre de liaison ou l’appel destiné à s’assurer du bon état du patient. Cette dernière opération est particulièrement consommatrice en temps et, dans certaines situations, le recours aux nouvelles technologies pourrait permettre d’assurer une aussi bonne, voire une meilleure gestion, d’éventuelles alertes. Les hospices civils de Lyon ont développé « lappel du lendemain », « réalisé pour tous les patients opérés du lundi au jeudi, le lendemain », étant précisé que l’appel relatif aux opérations pratiquées le vendredi est passé le lundi suivant ([75]). À l’hôpital de la Croix Rousse, cet appel représente la mobilisation d’un agent quatre heures par jour pour une quarantaine de patients. Il pourrait être remplacé par la gestion de sms pour certaines chirurgies comme le proposent les HCL : cataracte, coloscopie, chirurgie des membres supérieurs. Mais, comme le reconnaît Mme Faujour, ces dispositions fonctionnent pour une patientèle plutôt urbaine qui a toujours la possibilité de s’adresser aux urgences en cas d’impondérable.

Pour des patients plus éloignés, le retour à domicile est plus problématique et suppose de trouver des solutions plus adaptées. Le recours à des objets connectés pourrait constituer une piste prometteuse mais il suppose de « savoir gérer les alertes […] les retours dinformation et acheter les licences avec un système sécurisé » ([76]) pour l’hôpital et de disposer du matériel adéquat ou d’une couverture réseau opérationnelle pour le patient.

De la même manière, les expérimentations sont également l’occasion d’évaluer la qualité des prises en charge en s’attachant aux enjeux de réhospitalisations. À l’instar de l’IRDES, les rapporteurs plaident en faveur de l’utilisation d’un indicateur J+30, couplé à un ajustement de la tarification, pour inciter les équipes à une meilleure prise en charge de qualité. Comme a eu l’occasion de le souligner M. Denis Raynaud, la littérature internationale montre que la modification des « incitations tarifaires sur les réadmissions permet de diminuer les ré-hospitalisations » ([77]). Naturellement, cette incitation tarifaire ne peut produire de bons résultats que si l’équipe chirurgicale bénéficie d’un bonus lié à l’amélioration de la prise en charge ou à l’innovation. Les expérimentations engagées, qui portent sur des épisodes de soins particulièrement complexes, n’incluent pas spécifiquement d’indicateurs J+30. Mais il a été indiqué aux rapporteurs que les « -hospitalisations sont étudiées et prises en compte dans le modèle pendant la durée de l’épisode de soins » en suivant notamment « une liste limitative de complications [ayant un] lien certain avec l’intervention »

b.   S’appuyer sur les professionnels de santé de ville

La mise en place de parcours de prise en charge passe nécessairement par une meilleure coordination avec la ville.

La mise en place des CPTS pourrait constituer une interface intéressante, mais accroître le niveau d’exigence apparaît encore prématuré. Assortir les CPTS d’une mission supplémentaire, de fait non prévue par l’accord conventionnel interprofessionnel, pourrait constituer un coup d’arrêt à une dynamique qui s’engage à peine. Il importe en premier lieu de réussir la mise en place des 1 000 CPTS qui constitue l’un des axes du plan « Ma santé 2022 » et d’assurer les missions socles qui leur sont assignées. Ce n’est que sur ces étais solides que l’on pourra alors envisager d’autres missions.

● Dans l’immédiat, il pourrait être envisagé de renforcer, s’agissant des établissements publics, le rôle de la commission médicale d’établissement (CME) en ouvrant sa composition aux professionnels médicaux de la ville afin de davantage faciliter la coordination.

L’article L. 6144-1 du code de la santé publique dispose que la CME « contribue à lélaboration de la politique damélioration continue de la qualité et de la sécurité des soins ainsi que des conditions daccueil et de prise en charge des usagers » et « propose au directeur [de l’établissement] un programme dactions assorti dindicateurs de suivi » qui « prend en compte les informations contenues dans le rapport annuel de la commission des usagers ».

Une modification de la composition nécessiterait une évolution législative et réglementaire. L’article L. 6144-2 du même code prévoit ainsi qu’elle est composée « des représentants des personnels médicaux, odontologiques, maïeutiques et pharmaceutiques » dont les qualités sont précisées par l’article R. 6144-3. Il s’agit évidemment des professionnels de santé exerçant à l’hôpital tels que les chefs de pôles, les représentants des personnels titulaires ou non titulaires, des internes, l’ensemble de ces personnels disposant d’une voix délibérative. Peuvent être associés aux membres de droit, d’autres représentants disposant d’une voix consultative tel que le président du directoire, le président de la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques.

Il pourrait être opportun de prévoir un représentant des professionnels de santé exerçant à titre libéral hors de l’établissement au titre de la coordination des soins associée à la chirurgie ambulatoire. Ce représentant pourrait être associé à la CME et disposer d’une voix consultative. Les modalités de cette association gagneraient évidemment à être précisées avec l’aide des professionnels de santé.

Cette évolution nécessiterait par ailleurs de préciser les missions de la CME afin qu’elle soit pleinement investie des questions liées à la prise en charge en ambulatoire telles que la coordination des soins tout au long du parcours, y compris avec la médecine de ville. Une telle modification requerrait a minima de modifier à la fois les articles L. 6144-1, relatif aux missions de la CME, et D. 6144-1, qui concerne les matières dans lesquelles la CME est consultée.

Cette proposition s’inscrit dans le cadre des discussions relatives à la révision des modalités de gouvernance des établissements publics de santé, qui incluent la question des futurs hôpitaux de proximité. À l’occasion de ces travaux, les acteurs hospitaliers ont exprimé un certain intérêt en faveur d’une ouverture vers les professionnels de ville.

La DGOS indique, à cet effet, qu’il « conviendra […] de prendre en compte la diversité [des] professionnels de ville et également la montée en charge progressive des communautés professionnelles territoriales de santé, ainsi que de proposer des modalités de participation et de contribution qui puissent susciter leur adhésion ». Du côté des établissements publics de santé, « doivent pouvoir être prises en compte la diversité des modèles de groupement hospitalier de territoire (offre de soins, taille, distance, présence d’un CHU ou non, etc.) et la reconnaissance de leur pluralité, en intégrant de la souplesse et de l’agilité dans les règles d’organisation et de fonctionnement ».

Proposition n° 14 Intégrer les professionnels de ville au sein des commissions médicales d’établissement

● Une autre proposition pourrait consister à investir dans le rôle des infirmiers libéraux exerçant dans nos territoires pour faciliter la prise en charge des patients. En la matière, les rapporteurs, comme les professionnels auditionnés, notent qu’une marge de progression subsiste.

Le syndicat CNI relève ainsi que les infirmiers libéraux « déplorent un manque de lien avec lhôpital » et soulignent que « lorganisation de dernière minute lorsque le patient na pas prévenu en amont de sa prise en charge peut les mettre en difficulté » sans compter qu’« il ny a pas toujours de fiche de liaison qui leur permette daider les patients lorsquils sont de retour chez eux et quils sont perdus dans leur prise dantalgique » ([78]).

Si l’on souhaite améliorer la qualité de la prise en charge des patients actuels et viser l’extension à des publics plus fragiles ou plus vulnérables, il apparaît indispensable d’associer davantage les infirmiers libéraux. Professionnels de proximité, ils sont les mieux à même d’accompagner les patients ‑ en lien avec le médecin traitant – et de faciliter les échanges avec l’équipe hospitalière.

À cet égard, le SNIIL a fait part de l’expérience normande baptisée DIASPAD ([79]), mise en place par l’URPS en lien avec divers établissements de santé et l’ARS, et qui correspond en tous points à certaines des préconisations des rapporteurs. Un suivi spécifique est ainsi proposé aux patients dont l’acte chirurgical ne nécessite pas d’hébergement mais se traduit par une sortie précoce, dans le cadre qui de l’ambulatoire, qui de la RAAC. Cette organisation « sadresse en particulier aux personnes physiquement, psychologiquement ou socialement fragiles » ([80]) et leur permet d’être visitées dès le retour à domicile par un personnel infirmier jusqu’au quatrième jour après l’opération.

Le dispositif s’appuie sur un numéro d’appel unique de la structure ambulatoire de l’établissement de santé, qui peut être composé par les infirmiers libéraux pour obtenir toute information relative aux « surveillances, complications, pansements, à la gestion de la douleur, à la consultation auprès du spécialiste, à l’hospitalisation, etc… » ([81]).

L’intérêt de cette organisation, qui repose sur le consentement du patient, réside dans la préparation du retour à domicile au stade le plus précoce de la prise en charge, c’est-à-dire bien avant l’intervention chirurgicale. Ces échanges permettent notamment de programmer la visite de l’infirmier libéral le soir de l’opération et de programmer la sortie à une heure compatible avec son passage. Elle prend enfin appui sur une charte entre l’établissement et l’URPS qui récapitule les obligations des parties (échanges d’informations, remplissage des divers documents de liaison et de suivi, déclarations d’évènements indésirables et de complications éventuelles).

Cette organisation se double d’un partenariat de formations dispensées par les praticiens de l’établissement de santé qui permettent de réactualiser « les connaissances des professionnels de ville sur les différentes techniques chirurgicales employées et les soins ou recommandations pour le suivi ». Ces sessions de formation permettent également d’aborder « les évaluations du parcours patient et les axes damélioration » ([82]).

Cette expérimentation est actuellement financée dans le cadre du fonds d’intervention régional (FIR) afin de couvrir notamment la rémunération de l’acte infirmier de suivi et d’accompagnement.

La DGOS a indiqué aux rapporteurs que « ce dispositif a participé activement à l’évolution positive du taux régional de chirurgie ambulatoire, au renforcement de la coordination et la continuité des soins ambulatoires grâce à la synergie des acteurs impliqués » et qu’« il a impulsé la rencontre entre professionnels qui travaillaient à distance les uns des autres ». Compte tenu du degré de satisfaction des patients et des professionnels, l’ARS Normandie procèdera en 2020 au déploiement du dispositif sur l’ensemble de son territoire.

S’il est encore trop tôt pour généraliser une telle expérience, des dispositifs expérimentaux similaires pourraient toutefois être mis en place dans d’autres régions.

Dans l’intervalle et afin d’améliorer les relations entre la ville et l’hôpital, les rapporteurs suggèrent que la lettre de sortie, mise à la disposition du patient, soit systématiquement adressée au médecin traitant et à l’infirmier libéral en charge de son suivi.

Le droit actuel ne prévoit qu’une remise de la lettre de liaison au médecin traitant et le cas échéant au praticien qui a adressé le patient à l’hôpital. L’article R. 1112-1-2 du code de la santé publique dispose en outre qu’ «  à la sortie de létablissement de santé, [la] lettre de liaison, rédigée par le médecin de létablissement qui la pris en charge, est remise au patient par ce médecin, ou par un autre membre de léquipe de soins mentionnée au 1° de larticle L. 1110-12 qui la pris en charge, et qui sassure que les informations utiles à la continuité des soins ont été comprises ». La lettre est enfin versée au dossier médical partagé du patient lorsqu’il a été créé.

Cette lettre contient plusieurs informations parmi lesquelles :

– la « synthèse médicale du séjour précisant le cas échéant, les événements indésirables survenus pendant lhospitalisation, lidentification de micro-organismes multirésistants ou émergents, ladministration de produits sanguins ou dérivés du sang, la pose dun dispositif médical implantable »,

–  les « traitements prescrits à la sortie de létablissement (ou ordonnances de sortie) et ceux arrêtés durant le séjour et le motif darrêt ou de remplacement, en précisant, notamment pour les traitements médicamenteux, la posologie et la durée du traitement » ;

–  les « suites à donner, le cas échéant, y compris dordre médico-social, tels que les actes prévus et à programmer, recommandations et surveillances particulières ».

L’infirmier libéral pourrait être destinataire de la lettre de liaison en tant que membre de l’équipe de soins au sens du 2° de l’article L. 1110-12 du code de la santé publique. Cette disposition permet en effet de « reconnaître [à des professionnels de santé] la qualité de membre de léquipe de soins par le patient qui sadresse à eux pour la réalisation des consultations et des actes prescrits par un médecin auquel il a confié sa prise en charge ». Il conviendrait à cet effet de modifier l’article R. 1112-1-2 du code de la santé publique. La même logique conduirait à inclure d’autres professionnels de santé tels que les kinésithérapeutes chargés de la rééducation.

Proposition n° 15 Prévoir la remise de la lettre de liaison aux professionnels de santé libéraux qui assurent la prise en charge du patient en qualité de membre de l’équipe de soins au sens du 2° de l’article L. 1110-12 du code de la santé publique

● L’accompagnement de la douleur constitue dans ce contexte un axe d’amélioration important qui concerne aussi bien l’hôpital que la ville. L’enquête menée par la HAS a permis d’identifier les marges de progression dans la prise en charge actuelle.

Lors de son audition, le Pr Vons a particulièrement insisté sur l’importance de l’information à délivrer au patient dès les consultations préopératoires et la nécessité pour le personnel paramédical de bien s’assurer que les consignes médicales ont été comprises par le patient. La portée de l’ordonnance portant prescription d’antalgiques n’est pas clairement appréhendée : la prise de ces médicaments en prévention, c’est-à-dire avant l’apparition de la douleur, n’est pas intégrée par les patients et pourrait permettre d’améliorer le confort de la prise en charge et du recouvrement de la santé.

Pour améliorer la prise en charge des patients, des formations spécifiques à la gestion de la douleur pourraient aussi être proposées aux infirmiers de ville.

● Enfin, l’évaluation de l’adaptation de l’habitat du patient à son retour devrait pouvoir être obligatoirement abordée dès la phase d’entretiens préalables à l’opération destinée à s’assurer de l’éligibilité à la chirurgie ambulatoire (présence d’ascenseurs ou d’escaliers, présence d’une douche ou d’une baignoire…). Un questionnaire type, conjointement établi par les acteurs de l’hôpital et de la ville, pourrait à cet effet être proposé aux patients.

Proposition n° 16 Élaborer un questionnaire dédié à l’habitat du patient afin de mieux préparer le retour à domicile

 


   Synthèse des propositions

 

Proposition n° 1 Évaluer le cadre méthodologique mis à la disposition des acteurs de santé pour accompagner le développement de la chirurgie ambulatoire

Proposition n° 2 Systématiser l’étude des effets à long terme de la mise sous accord préalable sur la transformation des séjours d’hospitalisation complète en séjours de chirurgie ambulatoire.

Proposition n° 3 Mettre en place un indicateur de suivi des déprogrammations d’opérations effectuées en chirurgie ambulatoire dans la journée (à J0).

Proposition n° 4 Mettre en place un indicateur de suivi des ré-hospitalisations intervenant dans un délai de 30 jours à compter de l’opération réalisée en chirurgie ambulatoire.

Proposition n° 5 Permettre un meilleur suivi des ré-hospitalisations en déclinant les indicateurs par racine de GHM.

Proposition n° 6 Suivre la généralisation annoncée de l’expérimentation relative aux hôtels hospitaliers et évaluer leur intérêt pour la prise en charge des publics isolés et/ou précaires dans le cadre de la chirurgie ambulatoire.

Proposition n° 7 Recourir aux « patients formateurs » :
 dans le cadre de la formation initiale des études de santé ;
 dans le cadre de l’obligation de formation professionnelle continue des professionnels de santé.

Proposition n° 8 Généraliser les protocoles de prise en charge des patients en situation de vulnérabilité prévoyant les conditions d’intervention d’un médiateur en santé d’ici 2022.

Proposition n° 9 Susciter la mise en place par les CPTS de la méthode d’évaluation du patient traceur pour les parcours de santé de chirurgie ambulatoire impliquant notamment les patients bénéficiant d’une complémentaire santé solidaire.

Proposition n° 10 Tendre vers un « zéro reste à charge » pour les patients engagés dans un parcours de chirurgie ambulatoire.

Proposition n° 11 Évaluer le respect du cadre règlementaire relatif à la formation des personnels applicable aux structures de chirurgie ambulatoire.

Proposition n° 12 Apprécier l’atteinte des taux cibles de chirurgie ambulatoire au niveau du groupement hospitalier de territoire.

Proposition n° 13 Susciter la mise en place d’une équipe territoriale dédiée à la chirurgie ambulatoire au sein des groupements hospitaliers de territoire.

Proposition n° 14 Intégrer les professionnels de ville au sein des commissions médicales d’établissement.

Proposition n° 15 Prévoir la remise de la lettre de liaison aux professionnels de santé libéraux qui assurent la prise en charge du patient en qualité de membre de l’équipe de soins au sens du 2° de l’article L. 1110-12 du code de la santé publique.

Proposition n° 16 Élaborer un questionnaire dédié à l’habitat du patient afin de mieux préparer le retour.

 


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   Travaux de la commission

 

La Commission des affaires sociales a examiné le rapport d’information de M. Marc Delatte et Mme Nadia Ramassamy en conclusion des travaux de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale (MECSS) sur la chirurgie ambulatoire au cours de sa première séance du mercredi 23 septembre 2020.

Ce point de l’ordre du jour ne fait pas l’objet d’un compte rendu écrit. Les débats sont accessibles sur le portail vidéo du site de l’Assemblée à l’adresse suivante :

http://videos.assemblee-nationale.fr/video.9519399_5f6af82a5833e.commission-des-affaires-sociales--rapport-sur-la-chirurgie-ambulatoire--m-norbert-ifrah-pdt-de--23-septembre-2020

 

 

En application de l’article 145, alinéa 7, du Règlement, la commission autorise, à l’unanimité, le dépôt du rapport d’information en vue de sa publication.

 


   annexe n° 1 :
Liste des personnes auditionnées

L’ensemble des comptes rendus des auditions de la mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale sont disponibles sur le portail de la MECSS :

http://www2.assemblee-nationale.fr/15/commissions-permanentes/commission-des-affaires-sociales/mecss/mission-d-evaluation-et-de-controle-des-lois-de-financement-de-la-securite-sociale

Auditions du 7 mai 2019

   9 heures 30 : Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) : Mme Annelore Coury, directrice déléguée à la gestion et à l’organisation des soins, Dr. Ayden Tajahmady, adjoint au directeur de la stratégie des études et de statistiques, et Dr Annie Fouard, responsable de département

   10 heures 30 : Haute Autorité de santé (HAS) : Pr Dominique Le Guludec, présidente, Dr Catherine Grenier, directrice de l’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, et M. Pierre de Montalembert, chef de cabinet

Auditions du 22 mai 2019

   17 heures 15 :  Agence technique de l’information sur l’hospitalisation (ATIH) : M. Housseyni Holla, directeur général, Mme Joëlle Dubois, cheffe de service « Classifications, information médicale et modèle de financement », et Mme Véronique Sauvadet, cheffe de service « Financement et analyse économique »

   18 heures 15 : M. Alexis Vervialle, chargé de mission « Offre de soins » au sein de France Assos santé, et M. Nicolas Brun, coordinateur du pôle santé social de l’Union nationale des associations familiales (UNAF)

Auditions du 28 mai 2019

   9 heures 15 : Fédération hospitalière de France (FHF) : M. Alexandre Mokédé, responsable du pôle « Offre de soins », et M. Vincent Roques, adjoint au pôle « Finances »

   16 heures 15 : – Dr Jean-Paul Ortiz, président de la Confédération des syndicats médicaux de France (CSMF)* et Dr Bernard Huynh, vice-président de la branche « plateaux techniques lourds » de la Fédération des Médecins de France (FMF)

   17 heures 45 : Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs (FEHAP)* : Mme Christine Schibler, directrice de l’offre de soins et des parcours de santé, Dr Anne Lecoq, conseillère médicale au sein de la direction de l’offre de soins et des parcours de santé, et Pr Marc Beaussier de l’Institut Mutualiste Montsouris

Auditions du 29 mai 2019

   13 heures 45 : Agence nationale d'appui à la performance (ANAP) : Mme Sophie Martinon, directrice générale, et Mme Stéphanie Aftimos, responsable « Utilisateurs »

   16 heures 15 : M. Frédéric Bizard, président de l’Institut Santé

   17 heures 15 : Dr Laurent Delaunay, vice-président de la Société française d'anesthésie et de réanimation (SFAR), et président du comité « optimisation des parcours patients », Dr Pascal Alfonsi, chef de service d’anesthésie du groupe hospitalier Paris Saint-Joseph, et Dr Sébastien Bloc, anesthésiste-réanimateur

Auditions du 11 juin 2019

      14 heures : Association française de chirurgie ambulatoire (AFCA) : Pr Corinne Vons, présidente, et Pr Karine Nouette-Gaulin, secrétaire générale

      16 heures 15 : Audition commune des représentants des syndicats d’infirmiers :

- Syndicat CNI – Mme Céline Laville, présidente, et Mme Angélique Duprat, trésorière ;

- Syndicat national des infirmières et infirmiers libéraux (SNIIL) – Mme Catherine Kirnidis, présidente, et M. John Pinte, vice-président ;

- Syndicat national des infirmiers de bloc opératoire (SNIBO) – Mme Laurence Boulou, présidente, et M. Geoffroy Triboulin, membre du bureau ;

- Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI-CFE-CGC) – M. Thierry Amouroux, porte-parole, et M. Jérôme Malfaisan, membre du Bureau national ;

- Fédération nationale des infirmiers (FNI) – M. Daniel Guillerm, président, et Mme Pascale Lejeune, secrétaire générale

      17 heures 45 : Audition commune des représentants de syndicats d’anesthésistes :

- Syndicat national des anesthésistes-réanimateurs de France (SNARF) – Dr Christian Michel Arnaud, président, et Dr Pierre Lanot, secrétaire général

- Syndicat national des infirmiers-anesthésistes (SNIA) – M. Simon Taland, secrétaire général, et M. Raphaël Dufour, trésorier

- Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs élargi (SNPHARe) – Dr Laurent Heyer, membre du conseil d'administration

Audition du 12 juin 2019

      14 heures : M. Michel Ballereau, délégué général de la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP)*, M. Thierry Béchu, délégué général de la Fédération de l’hospitalisation privée – médecine, chirurgie, obstétrique (FHP-MCO), et Mme Béatrice Noëllec, directrice des relations institutionnelles

Auditions du 25 juin 2019

      16 heures 15 : Table ronde de représentants d’établissements de santé :

- Assistance Publique – Hôpitaux de Paris (AP-HP) – M. François Crémieux, directeur général adjoint

- Hospices civils de Lyon – Mme Véronique Faujour, directrice à la Direction des coopérations et de la stratégie, et Pr Philippe Ceruse, professeur des universités-praticien hospitalier, chef de service d’ORL de l’Hôpital de la Croix Rousse

- Assistance Publique – Hôpitaux de Marseille (AP-HM) – M. Jean-Olivier Arnaud, directeur général, et Pr Dominique Rossi, président de la commission médicale d’établissement

Audition du 26 juin 2019

      14 heures : Union nationale des professionnels de santé (UNPS) – M. Bertrand Lacroix de Vimeur de Rochambeau, gynécologue-obstétricien, co-président du syndicat Le Bloc, M. François Honorat, anesthésiste réanimateur, co-président du syndicat Le Bloc, M. Philippe Vermesch, stomatologue, président du Syndicat des médecins libéraux (SML), et Mme Sophie Bauer, secrétaire générale du SML

Audition du 2 juillet 2019

      16 heures 15 : Mme Sophie Beaupère, vice-présidente de l’Association des directeurs d’hôpital (ADH), directrice générale adjointe du centre de lutte contre le cancer Léon Bérard, et Mme Élodie Doreau, responsable de la communication et des affaires générales de l’ADH

Audition du 3 juillet 2019

      14 heures : Dr Huguette Boissonnat Pelsy, auteur du rapport d’ATD Quart Monde* « Le développement de la médecine ambulatoire : un autre regard », Mme Jeanne Dominique Billiotte, co-auteur du rapport, et Mme Micheline Adobati, membre du département Santé d’ATD Quart-Monde

Auditions du 22 octobre 2019

      17 heures 15 : M. Frédéric Boiron, directeur général du Centre hospitalier régional universitaire (CHRU) de Lille, et Pr François-René Pruvot, président de la conférence médicale d’établissement (CME) du CHRU de Lille et président de la conférence des Présidents de CME de CHU

      18 heures 15 : Pr Thierry Lebret, président de l’Association française d’urologie (AFU)

Auditions du 23 octobre 2019

      14 heures 30 : M. Michaël Galy, président de la commission des affaires médicales de la Conférence des Directeurs généraux de CHU et directeur général du CHU de SaintEtienne, et M. Harold Astre, directeur auprès de la présidente de la Conférence des Directeurs généraux de CHU

      15 heures 30 : Dr Marc Bernard, président de la conférence médicale d’établissement (CME) du Centre hospitalier de St Quentin, Dr Bernard Dron, président du Conseil de Bloc Opératoire et Mme Carine Colombelle, cadre supérieur de santé

      16 heures 30 : Audition commune des Agences régionales de santé (ARS) :

- Agence régionale de santé d’Île-de-France – M. Didier Jaffre, directeur de l’offre de soins, et Dr Henri-Jean Philippe, référent chirurgie

- Agence régionale de santé Grand Est – M. Christophe Lannelongue, directeur général, et M. Hugo Faure-Geors, inspecteur-responsable du service pertinence et innovation de la direction de la qualité, de la performance et de l’innovation

- Agence régionale de santé des Hauts de France – M. Arnaud Corvaisier, directeur général adjoint, directeur de l’offre de soins, et M. Pierre Boussemart, sous-directeur performance, efficience, qualité de l’offre de soins et des produits de santé

      18 heures : M. Denis Raynaud, directeur de l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (IRDES) et Mme Zeynep Or, directrice de recherche

Audition du 24 octobre 2019

      17 heures 30 : Dr Antoine Rogeau, chef du pôle ambulatoire du Centre hospitalier de Nogent-le-Rotrou, et Dr Didier Sciard, anesthésiste

Audition du 6 novembre 2019

      15 heures : M. Francis Saint-Hubert, président de la Conférence nationale des directeurs de centres hospitaliers (CNDCH), directeur du Centre hospitalier de Vendée à La Roche-sur-Yon, et Mme Laurence Bernard, membre du bureau

Auditions du 28 janvier 2020

      17 heures 15 : Fédération nationale de la mutualité française (FNMF)* : Mme Séverine Salgado, directrice Santé, et M. Yannick Lucas, directeur des affaires publiques

      18 heures 15 : Direction générale de l'offre de soins (DGOS) : Mme Sylvie Escalon, sous-directrice de la régulation de l’offre de soins, et Mme Lydia Valdes, adjointe à la cheffe de bureau « plateaux techniques et prises en charge hospitalières aigües »

 

Déplacement le 27 janvier 2020 à Soissons

      M. Eric Lagardère, directeur du centre hospitalier de Soissons

      M. Badri Matta, président de la Commission médicale d’établissement

      M. Philippe Clair, Chef du Pôle Chirurgie, anesthésie – réanimation urgences, et chef de service de chirurgie ambulatoire

      M. Hervé Paul, médecin responsable du Département d'information médicale (DIM)

      Mme Natacha Sabatier, cadre du service de chirurgie ambulatoire

      Mme Sandrine Jeanblanc, infirmière en chirurgie ambulatoire

      M. José Pulido, directeur référent du Pôle Chirurgie, anesthésie – réanimation urgences

 

 

(*) Ces représentants d’intérêts ont procédé à leur inscription sur le répertoire de la Haute Autorité de transparence pour la vie publique s’engageant ainsi dans une démarche de transparence et de respect du code de conduite établi par le Bureau de l’Assemblée nationale


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   annexe N° 2 :
QuESTIONNAIRE E-SATIS EN CHIRURGIE AMBULATOIRE

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


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   Annexe n° 3 : glossaire

 

AFCA  Association Française de Chirurgie Ambulatoire

AFU  Association française d’urologie

ANAP  Agence nationale d’appui à la performance

AP-HM Assistance publique-hôpitaux de Marseille

AP-HP Assistance publique – hôpitaux de Paris

ARS Agence régionale de santé

ATIH Agence technique de l’information sur l’hospitalisation

AVC Accident vasculaire cérébral

CA Chirurgie Ambulatoire

CH Centre hospitalier

CHU Centre hospitalier universitaire

CHRU Centre hospitalier régional universitaire

CNAM Caisse nationale d’assurance maladie

CME  Commission médicale d’établissement

COPERMO Comité interministériel de performance et de la modernisation de l’offre de soins

CPOM Contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens

CPTS Communautés professionnelles territoriales de santé

DIASPAD Dispositif de suivi et d’accompagnement post ambulatoire à domicile

DGOS Direction générale de l’offre de soins

DREES Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques

FEHAP Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne privés non lucratifs

FHF Fédération hospitalière de France

FIR Fonds d’intervention régional

GHM Groupement homogène de malades

GHS Groupement homogène de séjours

GHT Groupement hospitalier de territoire

HAS Haute Autorité de santé

HCL Hospices civils de Lyon

IBODE Infirmier (e) de bloc opératoire

IGAS Inspection générale des affaires sociales

IGF Inspection générale des finances

INSEE Institut national de la statistique et des études économiques

IRDES Institut de recherche et de documentation en économie de la santé

LFSS Loi de financement de la sécurité sociale

MECSS Mission d’évaluation et de contrôle des lois de financement de la sécurité sociale

MSAP Mise sous accord préalable

OCAM Organismes complémentaires d’assurance maladie

ONDAM Objectif national des dépenses d'assurance maladie

OPEERA Outil prospectif d’évaluation économique relatif à l’ambulatoire

PASS Permanences d’accès aux soins de santé

PMSI Programme de médicalisation de systèmes d’information

PRAPS  Programme régional pour l’accès à la prévention et aux soins des plus démunis

PRS Projet régional de santé

RAAC Récupération améliorée après chirurgie

SAE Statistique annuelle des établissements de santé

SFAR Société Française d’Anesthésie et de Réanimation

SML Syndicat de médecins libéraux

SNARF Syndicat national des anesthésistes réanimateurs

SNIA Syndicat national des infirmiers anesthésistes

SNIBO Syndicat national des infirmiers de bloc opératoire

SNIL Syndicat National des Infirmières et Infirmiers Libéraux

SNPHARe Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes réanimateurs élargie

TJP Tarif journalier de prestations

UCA Unité de chirurgie ambulatoire

UNPS Union nationale des professionnels de santé

URPS Union régionale des professionnels de santé

 

 

 

 

 


([1]) Pour des raisons pratiques, les séries portant sur le taux de chirurgie ambulatoire commencent à compter de l’année 2010 en raison de l’application d’un nouveau périmètre.

([2])  Le financement par dotation globale concernait alors le secteur public.

([3])  Ce financement concernait le secteur privé.

([4]) Pour 0,7 million dans les établissements privés d’intérêt collectif.

([5])  Audition commune des représentants de syndicats d’anesthésistes du mardi 11 juin 2019.

([6])  Les interventions sont réparties entre quatre groupes, le premier regroupant 14 interventions qui représentant « concernant 68 % des séjours de chirurgie » et pour lesquels le taux de chirurgie ambulatoire est élevé et assez homogène sur le territoire.

([7]) Ablation de la vésicule biliaire sans exploration instrumentale peropératoire.

([8])  Audition du mercredi 23 octobre 2019.

([9])  https://www.elsevier.com/fr-fr/connect/ifsiinfirmier/le-point-sur-la-chirurgie-ambulatoire-en-france.

([10])  Ingrid Lefebvre-Hoang, Engin Yilmaz, « État des lieux des pratiques de chirurgie ambulatoire en 2016 », Les dossiers de la DREES, n° 41, août 2019.

([11]) Ordonnance n° 2003-850 du 4 septembre 2003 portant simplification de l'organisation et du fonctionnement du système de santé ainsi que des procédures de création d'établissements ou de services sociaux ou médico-sociaux soumis à autorisation.

([12])  Décret n° 2012-969 du 20 août 2012 modifiant certaines conditions techniques de fonctionnement des structures alternatives à l'hospitalisation.

([13]) Audition du mardi 7 mai 2019.

([14])  https://www.anap.fr/ressources/publications/detail/actualites/chirurgie-ambulatoire-mode-demploi.

([15])  https://www.anap.fr/ressources/outils/detail/actualites/interdiag-chir-ambu-outil-de-diagnostic-interne-de-chirurgie-ambulatoire.

([16]) Audition du mercredi 29 mai 2019.

([17]) Audition du mercredi 29 mai 2019.

([18])  Alexandre Cazenave-Lacroutz (Insee), Engin Yilmaz (Drees), « Dans quelle mesure les incitations tarifaires et la procédure de mise sous accord préalable ont-elles contribué au développement de la chirurgie ambulatoire ? », les dossiers de la Drees, n° 40, août 2019 ; https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/dd40.pdf

([19])  Ibid.

([20]) Ibid.

([21])  Ibid.

([22]) Cour des comptes, « Chapitre VIII - la chirurgie ambulatoire », Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2013.

([23]) Article L. 6114-2 du code de la santé publique.

([24]) Ibid.

([25])  Circulaire interministérielle n°DGOS/PF1/DSS/DGFiP/2013/271 du 5 juin 2013 relative à la mise en place du comité interministériel de la performance et de la modernisation de l’offre de soins hospitaliers.

([26]) Document transmis par l’ARS Grand Est.

([27])  Table ronde des établissements de santé (AP-HP, HCL et AP-HM) du mardi 25 juin 2019.

([28])  CNI pour coordination nationale infirmière.

([29]) HAS, « IQSS 2019 - CA : Indicateurs de processus en chirurgie ambulatoire » 
https://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_2807207/fr/iqss-2018-ca-indicateurs-de-processus-et-de-resultats-en-chirurgie-ambulatoire.

([30]) Table ronde des établissements de santé (AP-HP, HCL et AP-HM) du mardi 25 juin 2019.

([31])  https://sfar.org/lanesthesie-du-patient-ambulatoire/

([32])  https://sfar.org/anesthesie-du-sujet-age-lexemple-de-fracture-de-lextremite-superieure-du-femur/

([33])  https://sfar.org/rehabilitation-amelioree-apres-lobectomie-pulmonaire/

([34]) D’autres acteurs recourent aux termes de réhabilitation améliorée après chirurgie.

([35])  Véronique Faujour, Sophie Berthier, Sandrine Couray Targec, « Quels sont les enjeux et les impacts économiques de la mise en place de la RAAC dans une structure de soins ? », 2019.

([36]) Audition du mardi 28 mai 2019.

([37])  Frédéric Bizard, Sophie Larrieu, Mathilde Faller, Sandrine Bourguignon, « Étude rétrospective et prospective de l’impact économique de la chirurgie ambulatoire, volet 2 », mai 2019.

([38])  Audition du mercredi 23 octobre 2019.

([39])  Audition du mercredi 6 novembre 2019.

([40])  Table ronde des établissements de santé (AP-HP, HCL et AP-HM) du mardi 25 juin 2019.

([41]) Audition du mercredi 29 mai 2019.

([42])  Table ronde des établissements de santé (AP-HP, HCL et AP-HM) du mardi 25 juin 2019.

([43])  https://www.has-sante.fr/jcms/c_2844894/fr/iqss-2019-e-satis-mcoca-mesure-de-la-satisfaction-et-de-l-experience-des-patients-hospitalises-pour-une-chirurgie-ambulatoire.

([44]) Audition du mercredi 23 octobre 2019.

([45])  https://www.irdes.fr/presse/communiques/195-analyse-sequentielle-et-determinants-des-parcours-de-soins-en-phase-post-aigue-d-un-accident-vasculaire-cerebral-avc.html.

([46]) Audition de la Conférence des directeurs généraux de CHU du mercredi 23 octobre 2019.

([47])  Huguette Boissonnat Pelsy, Chantal Sibué de Caigny, Jeanne Dominique Billiotte, « Le développement de la médecine ambulatoire : un autre regard », ATD Quart Monde.

([48]) Audition du mercredi 3 juillet 2019.

([49])  Ingrid Lefebvre-Hoang, Engin Yilmaz, « État des lieux des pratiques de chirurgie ambulatoire en 2016 », Les dossiers de la Drees, n° 41, août 2019.

([50]) C’est par exemple le cas en ce qui concerne les gestes vasculaires.

([51]) Audition du Pr Thierry Lebret, président de l’Association française d’urologie, mardi 22 octobre 2019.

([52])  Frédéric Bizard, Sophie Larrieu, Mathilde Faller, Sandrine Bourguignon, « Étude rétrospective et prospective de l’impact économique de la chirurgie ambulatoire », volet 2, mai 2019.

([53])  Décret n° 2016-1703 du 12 décembre 2016 relatif à la mise en œuvre de l'expérimentation des hébergements temporaires non médicalisés de patients.

([54])  Haute Autorité de santé, « Critères d’éligibilité des patients à un hébergement à proximité d’un établissement de santé », rapport d’orientation ; novembre 2015.

([55]) Ibid.

([56]) Ibid.

([57]) Audition d’ATD Quart-Monde du 3 juillet 2019.

([58]) Article L. 1110-2 du code de la santé publique.

([59])  Accord conventionnel interprofessionnel en faveur du développement de l’exercice coordonné et du déploiement des CPTS signé le 20 juin 2019.

([60]) Audition de l’IRDES du 23 octobre 2019.

([61])  Frédéric Bizard, Sophie Larrieu, Mathilde Faller, Sandrine Bourguignon, « Étude rétrospective and prospective de l’impact économique de la chirurgie ambulatoire », volet 2, mai 2019.

([62])  Cons. const., déc. no 2013-672, 13 juin 2013.

([63])  https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/dd40.pdf

([64]) Audition du mercredi 23 octobre 2019.

([65]) Audition du mardi 11 juin 2019.

([66]) Audition du mardi 11 juin 2019.

([67])  https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2010-10/rapport_chirurgie_cataracte.pdf.

([68])  https://www.ameli.fr/sites/default/files/rapport-activite-charges-produits-12_assurance-maladie.pdf.

([69]) Audition du mercredi 26 juin 2019.

([70]) La rareté des personnels nécessite aussi d’investir sur la formation du personnel infirmier pour accroître le nombre d’infirmiers de bloc opératoire (IBODE) et d’infirmiers anesthésistes diplômés d'État (IADE).

([71]) Audition du mardi 11 juin 2019.

([72])  Ministère des solidarités et de la santé, « Rapport au Parlement sur les expérimentations innovantes en santé (article 51 de la loi de financement pour la sécurité sociale pour 2018) », décembre 2019.

([73])  Arrêté du 17 juillet 2019 relatif à l'expérimentation nationale d'un paiement à l'épisode de soins chirurgical colectomie pour cancer et fixant la liste des établissements expérimentateurs.

([74])  Arrêté du 17 juillet 2019 relatif à l'expérimentation nationale d'un paiement à l'épisode de soins chirurgical prothèse totale de hanche et prothèse totale de genou et fixant la liste des établissements expérimentateurs.

([75]) Contribution de Mme Véronique Faujour, directrice des coopérations et de la stratégie aux Hospices civils de Lyon.

([76]) Contribution précitée.

([77]) Audition du mercredi 23 octobre 2019.

([78]) Contribution écrite du syndicat CNI.

([79]) Dispositif de suivi et d’accompagnement à domicile.

([80]) Contribution précitée.

([81]) Contribution précitée.

([82]) Contribution précitée.