DÉLÉGATION POUR L'UNION EUROPÉENNE

COMPTE RENDU N° 179

Réunion du mardi 26 mars 2002 à 16 heures 30

Présidence de M. Alain Barrau

I. Rapport d'information de M. Jean-Marie Bockel sur la lutte contre l'immigration clandestine et ses filières dans l'Union européenne

Le rapporteur a constaté que l'immigration clandestine, réalité déjà ancienne, connaissait actuellement, sous l'effet de la constitution de l'espace Schengen, un changement profond de nature.

Le phénomène migratoire, est aujourd'hui un phénomène mondial illustrant la division entre le Nord et le Sud. Dans les pays en développement, l'évolution démographique annule les effets positifs de la croissance. En Europe, les flux migratoires se sont accentués depuis le milieu des années 1999 de sorte, en particulier, que 500 000 immigrés clandestins entrent en Europe occidentale, pour le plus grand bénéfice de trafiquants en lien avec la criminalité organisée. Les perspectives d'élargissement ne se sont cependant pas traduites par un afflux d'immigrants en provenance d'Europe de l'Est ; les incertitudes sont reportées sur les frontières extérieures de l'Europe élargie. Quantitativement, l'immigration clandestine en Europe a une origine de plus en plus lointaine ; elle se fait beaucoup par la voie maritime, et les Balkans sont devenus une zone clé du trafic des passeurs.

Evoquant les réponses apportées par l'Union européenne, M. Jean-Marie Bockel a souligné que la politique de l'asile et de l'immigration était appelée à devenir, dans un futur proche, une politique essentiellement européenne, dans la ligne du cadre tracé par le traité d'Amsterdam prolongé par le Conseil européen de Tampere. Le traité donne à la Commission les moyens de proposer au Conseil les instruments juridiques d'une harmonisation indispensable. La doctrine de Tampere donne la priorité au partenariat avec les pays d'origine et à la mise en place d'un régime d'asile européen commun ; le Conseil européen de Laeken a confirmé ces orientations. En revanche, Tampere a été moins précis quant à la stratégie de répression de l'immigration clandestine.

Les normes européennes, outre un projet de définition commune du regroupement familial, comportent une répression harmonisée du trafic des êtres humains et la mise en cause de la responsabilité des transporteurs. Quant aux actions coordonnées d'éloignement et de réadmission, leur mise en œuvre est compromise par les réticences des pays d'origine, et par des obstacles liés notamment à la difficulté de reconnaître la nationalité des clandestins ou à des questions pratiques. La définition d'un régime d'asile européen passe, selon la Commission, par la fixation de garanties minimales incluant la consécration du principe de non-refoulement et de normes minimales d'accueil des demandeurs d'asile.

Le partenariat avec les pays d'origine est un élément essentiel du contrôle souhaité des flux d'immigration. Il se heurte cependant aux difficultés concrètes de mise en œuvre des plans d'actions ; plus généralement, il suppose un accroissement du niveau de l'aide publique au développement.

Au moment même où les institutions européennes poursuivent ce travail d'élaboration des normes de coopération, les États membres - en dernier lieu l'Allemagne - adoptent ou envisagent d'adopter des dispositions plus restrictives sur l'immigration ; la proposition d'une méthode de coordination ouverte ne rencontre pas d'écho très positif. L'absence, en l'état, des conditions politiques appropriées pour l'établissement d'une action européenne effectivement harmonisée justifie la recherche persistante de réponses nationales.

Le rapporteur a présenté alors un constat de la situation française dominée par l'explosion du droit d'asile, tant conventionnel que territorial. Les moyens administratifs se révèlent très inadéquats au traitement du phénomène, en dépit des créations d'emplois nouveaux récemment décidées par le Gouvernement.

Le décalage est complet entre les textes et la réalité des procédures ; les chiffres montrent en particulier que la procédure de l'asile territorial est dépourvue d'efficacité et ils font apparaître un taux très élevé de décisions de rejet pour l'asile conventionnel. Il en résulte, pour les demandeurs d'asile, une très grande précarité des conditions de vie et des conditions d'accueil souvent dénoncées. C'est à juste titre que, alors que la présidence belge et la présidence espagnole se sont accordées pour faire avancer la préparation des textes européens sur le droit d'asile, le Haut commissariat aux réfugiés et les associations, en particulier Amnesty international, ont insisté sur le respect nécessaire des principes du statut des réfugiés.

Ecartant le maintien du statu quo, le rapporteur a proposé la restauration de la procédure d'asile dans sa véritable fonction, passant par l'admission, parmi les persécutions prises en compte pour l'octroi de la qualité de réfugié, des agissements de personnes privées, par la suppression de l'asile territorial et par la promotion d'un traitement plus humain et plus respectueux des personnes. La recherche nécessaire d'une conception renouvelée de la politique d'immigration suppose la reconnaissance du caractère irréaliste du concept d'immigration zéro ; mais il ne s'agit pas d'ouvrir les frontières à tout va, ne serait-ce que parce que les populations des pays d'immigration sont sensibles à tout ce qui, dans les pays d'accueil, peut être interprété comme le signal d'une attitude laxiste. En dehors des accords bilatéraux, on peut envisager de définir, en concertation avec les pays d'origine, des quotas d'immigration sans condition trop restrictive de spécialisation, donc moins rigoureux que les quotas professionnels proprement dits. De telles situations alternatives réduiraient par ailleurs la pression insupportable sur le droit d'asile.

M. Maurice Ligot s'est inquiété de l'accent mis par le rapporteur sur la condamnation du concept d'« immigration zéro », qui peut conduire les populations des pays d'émigration à envisager une ouverture sans limite des frontières européennes. Le danger d'une immigration massive de ressortissants de pays de l'Est n'est pas mince. Par ailleurs, on ne peut que déplorer l'envahissement par les demandeurs d'asile des centres d'accueil prévus pour les personnes sans domicile fixe. L'accroissement de l'immigration lié au regroupement familial et aux mariages blancs est un fait.

M. François Guillaume a demandé si les questions d'immigration étaient traitées avec les pays candidats dans la perspective de la mise en œuvre du principe communautaire de libre circulation.

Le Président Alain Barrau a confirmé qu'il était nécessaire d'aborder la question de l'immigration en liaison avec les pays candidats, et de définir une politique européenne du droit d'asile. Les associations ont raison d'insister sur la nécessité d'un traitement décent des demandeurs d'asile. Partageant l'opinion du rapporteur sur le caractère irréaliste de l'immigration zéro, il s'est interrogé sur la possibilité d'établir des quotas d'admission parmi les demandeurs d'asile eux-mêmes. Il a souhaité que le traitement des demandes d'asile se fasse de façon acceptable. Enfin, il s'est interrogé sur les modalités d'une coordination des services des différents États membres en cas d'arrivée massive d'immigrés clandestins par voie maritime.

Répondant aux intervenants, le rapporteur a notamment fourni les précisions suivantes :

- l'établissement prochain d'un régime d'asile européen commun estomperait les différences de traitement national actuellement constatées ;

- l'institution de quotas selon une formule souple et négociée limiterait la pression sur la procédure d'asile et en restaurerait le sérieux, en lien avec une politique raisonnée de maîtrise des flux migratoires.

La Délégation a ensuite examiné les propositions de conclusions présentées par le rapporteur.

Sur la proposition de Mme Béatrice Marre, elle a inséré, en premier point, le rappel de la nécessité du maintien à un niveau convenable de l'aide publique au développement comme préalable à toute politique d'immigration.

Elle a adopté, au point 3 des conclusions, une nouvelle rédaction proposée par le rapporteur en réponse à une demande de M. Maurice Ligot, faisant référence à la notion d'arrêt total des flux migratoires.

Puis elle a adopté les propositions de conclusions ainsi modifiées :

La Délégation pour l'Union européenne,

Vu les conclusions du conseil européen de Tampere (15 et 16 octobre 1999),

Vu la communication de la Commission en date du 15 novembre 2001 concernant une politique commune en matière d'immigration clandestine,

Vu la proposition de directive du Conseil relative à des normes minimales pour l'accueil des demandeurs d'asile dans les États membres (document E 1743),

Considérant qu'une politique réaliste de gestion des flux migratoires, négociée avec les pays d'émigration, peut contribuer de manière décisive à la solution du problème posé par le développement, partout constaté en Europe, d'une immigration clandestine utilisant, pour partie, le canal du droit d'asile au risque d'en compromettre le rôle, tel que le définit la Convention de Genève, de protection des personnes inquiétées pour leurs idées et opinions contre l'arbitraire et la persécution,

Rappelle que le maintien de l'aide publique au développement à un niveau élevé est le préalable nécessaire à la conduite de toute politique de l'immigration ;

Souhaite le développement au niveau européen d'une stratégie commune de lutte contre les filières d'immigration clandestine, associant notamment les pays candidats à l'adhésion ;

Constatant que l'attachement irréaliste au principe de l'arrêt total des flux migratoires concourt à favoriser le développement de l'immigration clandestine, invite le Gouvernement à promouvoir, dans le cadre des discussions européennes sur la politique commune de l'immigration, une approche fondée sur la reconnaissance de la nécessité d'une gestion maîtrisée de ces flux et la recherche, dans ce but, d'un partenariat avec les pays d'origine et de transit ;

Affirme l'intérêt, dans cette logique globale, de la mise en œuvre de la politique de codéveloppement, associant une négociation avec les pays d'origine sur les mouvements migratoires et une réflexion conjointe sur les objectifs et les moyens de plans d'action pour le développement ; soutient les initiatives prises par la France dans ce but ;

Souligne que, dans la perspective d'une harmonisation probable au niveau européen des conditions de reconnaissance de la qualité de réfugié, il est indispensable que soient prises les mesures propres à restaurer la procédure du droit d'asile dans sa finalité de protection des personnes persécutées pour leur action politique ou pour leurs opinions politiques, philosophiques et religieuses, notamment :

- par le renouvellement de l'interprétation officielle de la notion de persécution, incluant les faits de persécution imputables à des organisations ou groupements autres que les services d'État ;

- par le renforcement des moyens alloués à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, à qui doit être transférée la gestion de la totalité des procédures d'asile, entraînant la suppression du régime de l'asile dit « territorial » ;

- par la prévention, grâce à une action d'information appropriée, et la lutte contre les utilisations détournées de la procédure d'asile.

Enfin, la Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur le document E 1743 (proposition de directive du Conseil relative à des normes minimales pour l'accueil des demandeurs d'asile dans les États membres).

II. Communication de M. Pierre Brana sur la mission qu'il a effectuée en Turquie

M. Pierre Brana a tout d'abord rappelé que le statut de candidat avait été reconnu à la Turquie après le vote favorable du Parlement européen le 6 octobre 1999 et la décision du Conseil européen d'Helsinki en décembre 1999. A cette occasion, le Conseil avait souligné que la satisfaction des quatre critères politiques et des deux critères économiques de Copenhague constituaient un préalable mais qu'il était nécessaire que la Turquie règle les différends internationaux qui l'opposaient encore à la Grèce et à Chypre. Le « partenariat pour l'adhésion » a été adopté par le Conseil du 8 mars 2001 et le gouvernement turc a adopté un programme national pour l'adoption de l'acquis (PNAA), le 19 mars suivant.

Le rapporteur a alors souligné qu'aux incertitudes de la politique turque avaient correspondu les ambiguïtés de l'Europe. Les autorités turques ont longtemps méconnu les conséquences qu'entraînait leur candidature et ont entretenu une certaine confusion entre l'appartenance à l'OTAN et l'adhésion à l'Union européenne. Depuis dix ans, la Turquie semble avoir nourri deux rêves, d'un côté celui du rapprochement avec l'Europe, de l'autre celui de la constitution d'un ensemble turcophone la liant aux Républiques d'Asie centrale. De son côté, l'Union est amenée à s'interroger sur les conséquences de l'adhésion d'un pays de 64 millions d'habitants, dont le PIB ne représente que 29 % du PIB moyen actuel de l'Union et dont seuls 3 % du territoire se situent géographiquement sur le continent européen. Par ailleurs, la réticence de certains États comme l'Allemagne tient aux interrogations que fait naître l'intégration d'un pays comportant près de 98 % de musulmans et constituant à terme une puissance régionale.

Sur la situation politique, M. Pierre Brana a fait remarquer l'activité déployée par le gouvernement et le parlement turcs au cours des deux dernières années : 38 modifications de la Constitution de 1982, adoptées par le parlement turc le 3 octobre 2001, ont renforcé les garanties dans le domaine des droits de l'homme et des libertés fondamentales et limité l'application de la peine de mort ; 120 nouvelles lois ont été adoptées d'octobre 2000 à juin 2001. Le gouvernement turc prépare plusieurs projets législatifs pour mettre en œuvre de nouvelles garanties, et le programme soumis à la Grande Assemblée nationale de Turquie porte sur la liberté d'association, les compétences des services de police et de gendarmerie et le haut Conseil pour la radio et la télévision. Au niveau local ont été institués, dans chaque sous-préfecture, des comités des droits de l'homme chargés d'informer le public et d'organiser des séminaires de formation pour les fonctionnaires. Au niveau national, trois nouvelles structures ont été créées par la loi du 12 avril 2001 : la présidence des droits de l'homme est chargée du dialogue avec les autorités civiles ; le Conseil consultatif des droits de l'homme analyse la situation et propose des réformes ; le Comité d'investigation des allégations des violations en matière des droits de l'homme vérifie les cas qui lui sont soumis et diligente des enquêtes en marge d'éventuelles procédures judiciaires.

Le rapporteur a alors observé que, malgré ces évolutions positives, dans trois domaines, les progrès effectués restaient insuffisants pour garantir les libertés fondamentales et les droits de l'homme. Il a en premier lieu rappelé que, si la peine capitale faisait l'objet en Turquie d'un moratoire depuis 1984 et si la réforme constitutionnelle d'octobre 2001 avait limité l'application de la peine de mort à trois cas, la situation d'Abdullah Ocalan déformait le débat. La question de l'abolition sans limitation de la peine de mort doit donc être résolue sur le plan politique interne. Deux des trois partis de la coalition gouvernementale (l'ANAP et le DSP) seraient favorables à cette abolition tandis que le MHP s'y oppose encore.

Abordant la question des libertés fondamentales, M. Pierre Brana a souligné que les progrès réels dépendaient des modalités de l'application des nouveaux textes législatifs, et que la pratique de la torture et des traitements dégradants constituait une question des plus délicates. Les propos tenus par les associations de défense et de protection des droits de l'homme ont une tonalité plus que sceptique sur les engagements du gouvernement et sur la pratique sur le terrain. Les critiques les plus vives visent la persistance de l'immunité des agents publics (policiers ou gendarmes) auteurs de mauvais traitements, et l'absence de mécanismes de contrôle au sein des institutions chargées du maintien de l'ordre public. Parallèlement à ces interrogations, la Turquie sera amenée à résoudre trois problèmes : le maintien de la corruption (six ministres ont dû démissionner depuis le printemps 2001), le règlement des différends territoriaux avec la Grèce et la question chypriote.

Le rapporteur a alors exprimé le sentiment que ces incertitudes politiques seront levées progressivement. Un accord politique sera trouvé dans les prochains mois pour abolir la peine de mort. Un prochain train de réformes législatives renforcera les libertés fondamentales. Mais la fin des violations des droits de l'homme demandera davantage de temps, car les améliorations dépendront de l'évolution des mentalités des agents publics.

M. Pierre Brana a indiqué que, de manière générale, la situation économique constituait un contexte peu favorable aux adaptations structurelles nécessaires pour satisfaire les critères économiques. La Turquie sort de la crise économique et financière la plus grave de ces cinquante dernières années. Le plan d'assainissement conclu avec le FMI en décembre 1999 et la relance économique ont été interrompus suite à deux crises successives. Si l'alignement de la Turquie sur l'acquis communautaire est très avancé en ce qui concerne l'Union douanière, mise en œuvre depuis le 1er janvier 1996, et si la libéralisation du secteur des télécommunications est acquise, les progrès dans la transposition de la législation restent limités dans la plupart des autres secteurs. Peu d'évolutions ont été constatées pour la libre circulation des personnes, la reconnaissance mutuelle des qualifications professionnelles ou le droit des sociétés. Les politiques sociales, énergétiques et environnementales sont très en deçà de l'acquis. Le régime des aides d'État et le régime applicable aux marchés publics restent incompatibles avec l'acquis. Dans le domaine de l'agriculture, les structures de base commencent seulement à être mises en place. Enfin, de manière générale, les progrès sont faibles dans le renforcement des capacités administratives et judiciaires.

En conclusion, le rapporteur a souligné la nécessité d'enclencher une démarche dialectique entre la Turquie et l'Union. Autant les autorités turques doivent admettre que l'adhésion ne peut s'effectuer qu'aux conditions spécifiées par les Quinze, au nom des valeurs démocratiques et occidentales, autant l'Union doit tenir compte du contexte et de l'importance des réformes à entreprendre qui exigeront du temps. Les autorités turques affichent un volontarisme apparemment unanime malgré quelques réticences. Selon différents sondages, l'opinion publique turque est très favorable à la candidature de leur pays. Tous les partis se sont déclarés favorables au processus et insistent sur l'aide de l'Union pour soutenir de manière continue les efforts économiques et financiers à accomplir.

Trois points ont été particulièrement soulignés par les personnalités rencontrées : d'une part, l'inclusion sur la liste des organisations terroristes reconnues par l'Union européenne de deux organisations turques (le PKK et le DHKP-C islamiste), d'autre part, le non-décrochage de la Turquie par rapport à la Bulgarie et à la Roumanie, ces trois pays devant être inclus dans la même vague d'élargissement, enfin la fixation d'un calendrier pour l'ouverture de négociations et le processus de criblage, fixation qui pourrait intervenir à la fin de la présidence danoise ou avant l'achèvement des premières négociations d'adhésion.

Après avoir souligné l'actualité du débat sur la candidature de la Turquie à l'Union européenne, M. Jean-Marie Bockel a approuvé la démarche dialectique proposée par le rapporteur. Evoquant le principe d'adhésion d'un pays majoritairement musulman, il a rappelé que l'Islam était devenu une réalité en Europe, sans toutefois s'être stabilisé, et qu'il ne devait pas constituer un obstacle à l'adhésion de la Turquie. En revanche, la question des droits de l'homme et des droits des minorités constitue une des principales difficultés à résoudre, certains comportements des forces de l'ordre étant difficilement acceptables. Puis il s'est demandé comment évolueraient les forces armées turques, compte tenu de leur rôle majeur dans la vie politique et économique du pays. Enfin, il a considéré qu'il convenait de donner une perspective à la Turquie afin de conforter la démarche de modernisation de la société, démarche qui est soutenue par le peuple turc.

Evoquant la question chypriote, M. Maurice Ligot a regretté que la Turquie n'ait pas donné de signe favorable et n'ait pas manifesté sa bonne volonté à l'égard de l'Union européenne en incitant à la négociation les Chypriotes turcs et en cherchant une solution à la séparation de l'île.

Le Président Alain Barrau a tout d'abord souligné la situation particulière de la Turquie qui figure sur la liste des pays candidats mais pour laquelle les négociations ne sont pas encore ouvertes. Il a souligné le facteur très positif que constituait l'effort du parlement turc pour intégrer l'acquis communautaire dans la législation nationale en anticipant sur les négociations. Il a approuvé les remarques du rapporteur sur l'aspect géostratégique de la candidature turque, évoquant les risques que pourraient comporter pour le rapprochement avec l'Europe une alliance privilégiée États-Unis-Turquie au sein de l'OTAN, ou un rapprochement de la Turquie avec la Russie. Il a regretté que la situation des droits de l'homme ne s'améliore pas plus rapidement et s'est interrogé sur la place exorbitante des forces armées. Il a estimé que la place majoritaire de la religion musulmane ne constituait pas un obstacle aux négociations. Il a considéré que la Turquie devait jouer de son influence pour débloquer les négociations entre les parties chypriotes et accroître les contacts entre les communautés.

Puis le Président Alain Barrau a rappelé qu'il s'était toujours montré favorable à une négociation individualisée, pays candidat par pays candidat, et il a privilégié une démarche qui respecte les étapes et permette d'approuver l'adhésion des candidats au cas par cas. Il a estimé nécessaire d'envoyer un signe à la Turquie sur un calendrier possible d'ouverture des négociations et a souhaité qu'aient lieu des contacts parlementaires entre la France et la Turquie afin de renforcer les liens politiques avec ce pays candidat, notamment dans le cadre de la Convention sur l'avenir de l'Europe.

M. Pierre Brana a alors apporté les éléments d'information suivants :

- la Turquie est fondamentalement un pays laïc et ses autorités ont souligné, au cours de la mission qu'il a effectuée, l'intérêt de la candidature d'un État où la confession musulmane est majoritaire à l'égard du Proche et du Moyen Orient ;

- le PKK a annoncé qu'il abandonnait la lutte armée, ce qui expliquerait la diminution des attentats terroristes, notamment dans les quatre départements du sud-est du pays où l'état d'urgence reste en vigueur ;

- la Turquie évolue sur la question chypriote et, après une période où elle a tenu un double langage, devrait user de son influence pour qu'une solution soit élaborée ;

- le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales constitue un préalable pour satisfaire aux critères politiques de Copenhague. Les réformes du cadre législatif et réglementaire devront s'accompagner d'un changement des mentalités sur le terrain ;

- lier le sort de la Turquie à celui de la Bulgarie et de la Roumanie est une demande des autorités turques, qui n'en font cependant pas une condition sine qua non de leur propre candidature ;

- il est nécessaire de fixer un calendrier pour l'ouverture des négociations à la Turquie mais cette ouverture ne préjuge en rien des résultats des négociations ;

- si plus des 3/4 des turcs sont favorables à l'adhésion de leur pays, 45 % de la population estime cependant que l'Europe est très réticente vis-à-vis de l'adhésion de la Turquie. Cette idée peut être combattue en offrant une perspective qui renforcera la démarche pro-européenne.

III. Communication de M. Maurice Ligot sur les missions qu'il a effectuées en Lituanie et à Chypre

M. Maurice Ligot a tout d'abord rendu compte à la délégation des résultats de la mission effectuée à Vilnius du 12 au 15 février 2002 pour s'y entretenir avec les différents responsables politiques lituaniens, dont le Président de la République Vadam Adamkus, sur l'état d'avancement des négociations d'adhésion de la Lituanie à l'Union européenne.

La Lituanie est un pays européen, qui tente de répondre aux exigences de l'Union européenne avec conviction et sérieux, malgré les difficultés importantes qu'ont fait naître 50 ans d'annexion à l'Union soviétique et des déportations massives en Sibérie.

La stabilité politique et institutionnelle du pays est désormais bien assurée avec la cohabitation à la tête de l'exécutif d'un président, Vadam Adamkus, qui a vécu 50 ans aux États-Unis à la suite de l'arrivée des troupes soviétiques en Lituanie, et d'un Premier ministre, M. Brazauskas, qui est l'ancien secrétaire général du Parti communiste. Ils travaillent aujourd'hui tous les deux avec le même objectif : réussir la transition vers l'économie libérale, assainir les finances publiques et renouer avec une forte croissance, afin d'adhérer dès 2004 à l'Union européenne.

L'opinion publique est de plus en plus favorable à l'Europe, comme en témoignent les sondages, et la Lituanie est historiquement très attachée à la France.

M. Maurice Ligot a cependant évoqué les trois chapitres qui posent aujourd'hui les plus grandes difficultés à la Lituanie dans les négociations d'adhésion.

La Lituanie met tout d'abord en œuvre un important programme de renforcement des contrôles aux frontières avec la Biélorussie, en raison des difficultés politiques et économiques de ce pays, et avec l'enclave russe de Kaliningrad. La Lituanie s'en tiendra à une intégration stricte de l'acquis de Schengen, en imposant un visa pour le transit des citoyens de Kaliningrad dès le 1er juillet 2003, mais elle veillera à ce que les tarifs de ces visas demeurent très abordables, afin de ne pas isoler davantage la population de Kaliningrad, et de ne pas désorganiser complètement une économie très fragile.

L'élaboration d'une nouvelle stratégie énergétique constitue une autre source de difficultés. En effet, 70 % de l'électricité du pays est produite par la centrale nucléaire d'Ignalina, qui dispose de deux réacteurs identiques à ceux de Tchernobyl. Or, le G 7 les a considérés comme dangereux et non modernisables, et, sur la pression de la Commission européenne, la Lituanie a prévu la fermeture du premier réacteur en 2005 et du second en 2009. Cette décision risque de compromettre l'indépendance énergétique du pays, ainsi que son redressement économique, la Lituanie devant, à terme, importer son énergie. Or, de nombreux experts, ainsi que M. Roussely, président d'EDF, jugent Ignalina suffisamment sûre et contrôlée pour fonctionner quelques années. C'est la raison pour laquelle M. Maurice Ligot a proposé que l'Union européenne accorde un délai supplémentaire à la Lituanie, dans le but de procéder à un nouvel examen technique et financier du dossier, et renforce sensiblement son aide, afin de permettre à la Lituanie de faire face à tous les coûts induits par le démantèlement.

M. Maurice Ligot a également souligné l'insuffisante modernisation du secteur agricole, la faiblesse des quotas laitiers et sucriers accordés par l'Union européenne, et les réticences des paysans lituaniens face à un projet de révision de la Constitution permettant la vente des terres aux étrangers.

Soulignant le sérieux et la bonne volonté de tous ses interlocuteurs, et les progrès remarquables effectués par la Lituanie en quelques années, M. Maurice Ligot a conclu en souhaitant une attitude plus compréhensive de la part de l'Union européenne sur les chapitres relatifs à l'agriculture et à l'énergie.

M. Maurice Ligot a ensuite rendu compte de la mission qu'il a effectuée à Chypre du 4 au 7 mars 2002. Il a rappelé qu'il s'agissait d'un pays tout à fait européen, car principalement de culture grecque. Les Chypriotes grecs représentent en effet 82 % de la population de l'île, contre 18 % de Chypriotes turcs.

Ce pays présente, à ses yeux, plusieurs atouts importants pour entrer dans l'Union européenne. Ancien protectorat britannique, il a depuis longtemps une bonne pratique du commerce international. Il a, d'ailleurs, avec 1500 navires enregistrés et 1800 confiés à des sociétés de gérance, la sixième marine marchande du monde. D'autre part, il dispose d'un secteur touristique très important, qui représente 21 % de son PIB.

Il convient de rappeler, par ailleurs, que ce pays constitue un important centre offshore, regroupant 40 000 sociétés étrangères.

Chypre a fait d'importants efforts d'intégration de l'acquis communautaire, qui lui donnent les plus grandes chances d'entrer en 2004 dans l'Union européenne. C'est le cas, notamment, s'agissant de la marine marchande, qui fait l'objet de mesures de contrôle plus strictes sur la qualité des navires et les équipages. En matière de fiscalité, Chypre devrait porter son taux de TVA à 15 % et son taux d'impôt sur les sociétés à 10 %, ce qui, tout en constituant un progrès, n'est pas sans poser de problème au regard du niveau moyen de l'impôt sur les sociétés dans l'Union européenne.

Au sujet de la politique intérieure, le rapporteur a rappelé que le pays - y compris sa capitale - est séparé par une ligne de cessez-le feu entre le sud, regroupant les Chypriotes grecs, et le Nord, où vivent les Chypriotes turcs, une centaine de milliers d'immigrés d'Anatolie et 30 000 soldats turcs. Il a indiqué que si les discussions entre M. Clérides, Président de la République de Chypre, et M. Denktash, chef de file de la communauté chypriote turque, se poursuivaient, il semble improbable qu'un accord soit rapidement trouvé entre eux sur la réunification de l'île. La question qui se pose dès lors est de savoir si, en l'absence d'un tel accord, il convient d'accepter ou non l'entrée de Chypre dans l'Union.

Le rapporteur a considéré que si Chypre remplissait les critères d'intégration, l'Union devait accepter son entrée, même si cet accord n'était pas obtenu.

Le Président Alain Barrau a estimé que, sur le plan économique, les deux problèmes essentiels que posait Chypre étaient la sécurité de la marine marchande et l'existence de son important centre offshore. S'agissant de la question de la division de l'île, il a considéré que les négociations d'adhésion avaient eu le mérite d'intensifier les contacts entre les deux parties, même si, comme l'a souligné le rapporteur, ceux-ci sont encore trop formels.

IV. Examen de textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution

Sur le rapport du Président Alain Barrau, la Délégation a examiné des textes soumis à l'Assemblée nationale en application de l'article 88-4 de la Constitution.

¬ Commerce extérieur

La Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil sur l'opportunité de reconduire le programme d'action pour la douane dans la Communauté (douane 2007) et la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil portant adoption d'un programme d'action pour la douane dans la Communauté (douane 2007) (document E 1927).

Puis, la Délégation a examiné la proposition de règlement du Conseil ouvrant un contingent autonome pour les importations de viande bovine de qualité (document E 1951). Ce texte a pour objet d'ouvrir un tel contingent pour l'importation de 1000 tonnes de viande fraîche en provenance du Paraguay. Le Président Alain Barrau a estimé que ce texte soulève quelques difficultés. Tout d'abord, il résulte d'une initiative prise par la Commission en dehors de tout mandat de négociations donné par le Conseil. La Commission a en effet souhaité faire un geste en direction du Paraguay en raison du soutien apporté par ce pays à l'Union dans les négociations à la Conférence de Doha. Cette proposition ne se rattache pas aux offres faites par l'Union dans le cadre des négociations de l'accord d'association avec le Mercosur. De plus, l'accord avec le Paraguay pourrait constituer un précédent dangereux, la Commission envisageant d'ouvrir un contingent au bénéfice des importations de viande en provenance d'Argentine. Enfin, l'importation d'un contingent supplémentaire de viande ne peut que susciter des réserves dans le contexte de crise du marché de la viande bovine. Le Gouvernement est d'ailleurs opposé à l'adoption de la proposition de la Commission. Le Président Alain Barrau a rappelé toutefois que le renforcement des liens de l'Union avec les membres du Mercosur revêt un caractère stratégique dans la constitution d'alliances entre l'Europe et les pays en développement permettant de maîtriser la mondialisation. Il a également considéré que la négociation d'un bon accord avec le Mercosur ayant une réelle portée politique implique que les partenaires consentent à faire certains sacrifices sur le plan commercial tout en sauvegardant leurs intérêts essentiels. Mais il a également estimé que toute offre de l'Union doit se faire dans un cadre global et équilibré. La Délégation a finalement décidé de lever la réserve d'examen parlementaire afin que le Gouvernement s'oppose à l'adoption de ce texte au Conseil en raison des conditions dans lesquelles il a été négocié.

¬ Energie

La Délégation a ensuite examiné une proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives 96/92/CE et 98/30/CE concernant les règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel et la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les conditions d'accès au réseau pour les échanges transfrontaliers d'électricité : communication de la Commission au Conseil et au Parlement européen : achèvement du marché intérieur de l'énergie (document E 1742). Le Président Alain Barrau a d'abord rappelé que la proposition de directive modifiant les directives « Gaz » et « Electricité » vise à mettre en œuvre l'ouverture complète du marché de l'électricité pour les consommateurs non résidentiels (entreprises) d'ici le 1er janvier 2003, et pour l'ensemble des consommateurs au plus tard le 1er janvier 2005. Pour le secteur gazier, la date limite de l'ouverture prévue pour les consommateurs non résidentiels est le 1er janvier 2004 et pour l'ensemble des consommateurs le 1er janvier 2005. La proposition contient également des dispositions relatives à la séparation des activités, l'accès de tiers au réseau et aux infrastructures, l'autorité de régulation et les objectifs de service public. Le Président Alain Barrau a ensuite fait part des résultats du Conseil européen de Barcelone des 15 et 16 mars 2002 dans le domaine de la libéralisation des marchés du gaz et de l'électricité. Il a indiqué que le compromis obtenu à Barcelone prévoit une ouverture à la concurrence des marchés du gaz et de l'électricité à partir de 2004, aucune date n'ayant été fixée pour le marché résidentiel. En ce qui concerne les obligations de service public, la Commission s'est engagée à présenter un rapport fin 2002-début 2003 dans ce domaine. S'agissant de la séparation entre les producteurs et les réseaux, le Conseil européen s'est prononcé en faveur d'une séparation effective et non juridique, satisfaisant ainsi une demande française. S'agissant de l'accès des tiers au réseau, le Conseil européen s'est déclaré favorable à l'adoption d'une réglementation dans ce domaine. Enfin, en ce qui concerne la régulation du secteur, la formulation retenue à Barcelone ne demande pas l'institution d'une autorité de régulation spécifique : cette mission peut être exercée par un organisme ayant une compétence plus générale, solution qui a les faveurs de la France et de l'Allemagne.

Sur la proposition du Président Alain Barrau, la Délégation a adopté les conclusions suivantes sur le document E 1742 :

« - considérant l'intérêt économique de l'instauration d'un marché intérieur européen du gaz naturel et de l'électricité, basé sur la concurrence, la transparence et la non-discrimination ;

- considérant l'enjeu majeur que représentent la continuité et la qualité de la fourniture d'énergie, en termes de cohésion économique et sociale, notamment pour la protection des consommateurs vulnérables et pour le développement territorial, et d'un point de vue stratégique ;

- considérant l'importance des contrats à long terme pour la sécurité de nos approvisionnements et pour la « visibilité » économique nécessaire aux acteurs du marché ;

- considérant que la séparation juridique des entreprises de gestion des réseaux, en particulier pour la distribution, risquerait de rendre plus complexe l'accès à l'énergie des consommateurs non professionnels et de créer de fortes disparités de prix et de qualité entre ces consommateurs, alors même que la séparation de fait de la gestion des entreprises du réseau permettrait d'assurer le fonctionnement du marché de façon transparente et non-discriminatoire :

- demande le report du calendrier d'ouverture à la concurrence des marchés du gaz et de l'électricité prévu par la proposition de modification des directives « Electricité » et « Gaz » en ce qui concerne le secteur professionnel, à partir de 2004, et s'oppose à la fixation d'une date pour l'ouverture à la concurrence du secteur résidentiel ;

- demande que les obligations de service public soient pleinement incluses et précisées dans le texte, afin d'intégrer en particulier les exigences relatives à la sécurité de l'approvisionnement, la protection des consommateurs, la cohésion économique et sociale, la protection de l'environnement, et d'assurer une mise en œuvre équivalente de ces obligations dans l'ensemble des pays de l'Union ;

- demande qu'une évaluation périodique de l'ouverture à la concurrence soit effectuée, en termes économiques et au regard de la cohésion sociale et régionale ;

- demande que des autorités réglementaires indépendantes et spécialisées soient instaurées dans l'ensemble des États membres pour assurer la régulation et la transparence des marchés, et que les compétences prévues par la proposition de modification des directives leur permettent d'exercer efficacement leurs responsabilités dans tous les pays de l'Union ;

- souhaite que l'obligation de séparation juridique des entreprises de gestion des réseaux soit exclue de la proposition de modification des directives « Gaz » et « Electricité » actuellement en débat ;

- souhaite que l'équilibre économique du secteur de l'énergie et la sécurité des approvisionnements ne soient pas compromis par une remise en cause des contrats à long terme et de la maîtrise de l'utilisation des capacités de stockage de gaz. »

La Délégation a ensuite levé la réserve d'examen parlementaire sur le document E 1742.

La Délégation a également levé la réserve d'examen parlementaire sur la proposition de décision du Conseil relative à la reconduction de l'octroi d'avantages à l'entreprise commune Hochtemperatur-Kernkraftwerk GmbH (HKG) (document E 1944) et la proposition de décision du Conseil relative à la reconduction du statut d'entreprise commune à Hochtemperatur-Kernkraftwerk (HKG) (document E 1945).

¬ Justice et affaires intérieures

La Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur :

- le projet de décision-cadre relative à la protection de l'environnement par le droit pénal (document E 1720) ;

- la proposition de règlement du Conseil établissant un cadre général d'activité communautaire destiné à faciliter la mise en œuvre d'un espace judiciaire européen en matière civile (document E 1744) ;

- la proposition de directive du Conseil relative aux conditions dans lesquelles les ressortissants de pays tiers peuvent circuler librement sur le territoire des États membres pendant une durée maximale de trois mois, introduisant une autorisation spécifique de voyage et fixant les conditions d'entrée en vue d'un déplacement d'une durée maximale de six mois (document E 1780) ;

- une initiative de la Belgique, de l'Espagne, et de la France visant à l'adoption par le Conseil de la décision modifiant l'article 40§§ 1 et 7 de la convention d'application de l'accord de Schengen du 14 octobre 1985 relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes (document E 1831) ;

- la proposition de décision du Conseil établissant un programme-cadre sur la base du titre VI du traité sur l'Union européenne (document E 1905).

¬ Pêche

La Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur :

- la proposition de décision du Conseil relative à la signature et à l'application provisoire d'un accord relatif à la prorogation du protocole fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues par l'accord de pêche conclu entre la Communauté et la Guinée (document E 1938);

- la proposition de règlement du Conseil relatif à la conclusion de l'accord relatif à la prorogation du protocole 2000-2001 fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues par l'accord de pêche conclu entre la Communauté et la Guinée (document E 1939) ;

- la proposition de règlement du Conseil relatif à la conclusion du protocole fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues par l'accord de pêche conclu entre la Communauté et les Seychelles (document E 1948) ;

- la proposition de décision du Conseil concernant la conclusion et l'application provisoire du protocole fixant les possibilités de pêche et la contrepartie financière prévues par l'accord de pêche conclu entre la Communauté et les Seychelles (document E 1949) ;

- la proposition de règlement du Conseil portant adoption de mesures autonomes concernant l'importation des poissons et de produits de la pêche originaires de Hongrie (document E 1952) ;

- la proposition de règlement du Conseil portant adoption de mesures autonomes concernant l'importation des poissons et de produits de la pêche originaires de la Slovénie (document E 1953).

¬ PESC et relations extérieures

La Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur la proposition de décision du Conseil attribuant une aide macrofinancière supplémentaire à l'Ukraine (document E 1926).

Le Président Alain Barrau a indiqué aux membres de la Délégation que la proposition du Conseil relative à certaines mesures restrictives concernant le Zimbabwe (document E 1929) et le projet d'action commune du Conseil relatif à la mission de police de l'Union européenne en Bosnie-Herzegovine (document E 1955) avaient fait chacun l'objet d'une demande d'examen en urgence à laquelle il avait répondu en levant la réserve d'examen parlementaire. La Délégation en a pris acte.

La Délégation a ensuite levé la réserve d'examen parlementaire sur :

- la proposition de règlement du Conseil instituant certaines mesures restrictives spécifiques à l'encontre des personnes et entités liées à Oussama ben Laden, au réseau Al-Qaida et aux taliban et abrogeant le règlement (CE) du Conseil n° 467/2001 (document E 1959) ;

- la proposition de décision du Conseil relative à la signature d'un protocole additionnel à l'Accord européen établissant une association entre la Communauté et la Lettonie sur l'évaluation de la conformité et l'acceptation des produits industriels et la proposition de décision du Conseil relative à la conclusion de ce protocole (document E 1967) ;

- la proposition de décision du Conseil relative à la signature d'un protocole additionnel à l'Accord européen établissant une association entre la Communauté et la Lituanie sur l'évaluation de la conformité et l'acceptation des produits industriels et la proposition de décision du Conseil relative à la conclusion de ce protocole (document E 1971).

¬Questions budgétaires et fiscales

La Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur :

- la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relative à la coopération administrative dans le domaine de la TVA et la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 77/799/CEE du Conseil concernant l'assistance mutuelle des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs et indirects (document E 1763) ;

- la communication de la Commission au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social et au Comité des régions concernant les carburants de substitution pour les transports routiers et une série de mesures visant à promouvoir l'utilisation des biocarburants ; la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil visant à promouvoir l'utilisation des biocarburants dans les transports et la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 92/81/CEE en ce qui concerne la possibilité d'appliquer un taux d'accises réduit sur certaines huiles minérales qui contiennent des carburants et des biocarburants (document E 1921) ;

- la communication de la Commission au Parlement européen et au Conseil sur l'opportunité de poursuivre un programme d'action visant à améliorer les systèmes fiscaux du marché intérieur et la proposition de décision du Parlement européen et du Conseil portant adoption d'un programme communautaire pour améliorer le fonctionnement des systèmes d'imposition sur le marché intérieur (programme Fiscalis 2007) (document E 1925) ;

Par ailleurs, le Président Alain Barrau a informé les membres de la Délégation, qui en ont pris acte, qu'il avait levé la réserve d'examen parlementaire dans le cadre de la procédure d'examen en urgence sur les documents suivants :

- le projet de recommandation du Conseil sur la décharge à donner à la Commission sur l'exécution du budget général des Communautés européennes pour l'exercice 2000 (document E 1930) ;

- l'avant-projet de budget rectificatif et supplémentaire n°1 au projet de budget 2002 (document E 1940-1) ;

- l'avant-projet de budget rectificatif et supplémentaire n° 2 au budget 2002 (document E 1940-2).

La Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur la proposition de directive du Conseil modifiant la directive 77/388/CEE en ce qui concerne le régime particulier des agences de voyage (document E 1943).

¬ Questions sociales

La Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur :

- la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative aux machines et modifiant la directive 95/16/CE (document E 1680) ;

- la proposition de règlement du Conseil visant à étendre les dispositions du règlement n°1408/71 aux ressortissants de pays tiers qui ne sont pas déjà couverts par ces dispositions uniquement en raison de leur nationalité (document E 1950).

¬ Transports

La Délégation a levé la réserve d'examen parlementaire sur :

- la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif au comité de la sécurité maritime et modifiant les règlements en matière de sécurité maritime et de prévention de la pollution par les navires et la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant les directives en matière de sécurité maritime et de prévention de la pollution par les navires (document E 1565) ;

- la proposition de décision du Conseil relative à la conclusion de l'accord INTERBUS relatif au transport international de voyageurs par autocar ou autobus (document E 1839) ;

Le Président Alain Barrau a indiqué aux membres de la Délégation que la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (CEE) n° 95/93 du 18 janvier 1993 fixant des règles communes en ce qui concerne l'attribution des créneaux horaires dans les aéroports de la Communauté (document E 1928) avait fait l'objet d'une demande d'examen en urgence à laquelle il avait répondu en levant la réserve d'examen parlementaire. La Délégation en a pris acte.

¬ Concurrence

Avant de présenter les grandes lignes du document E 1974 relatif au nouveau projet de règlement d'exemption sur la distribution dans le secteur de l'automobile, le rapporteur a évoqué le contexte dans lequel la Délégation était appelée à se prononcer.

Abordant le régime juridique applicable en la matière, le rapporteur a rappelé que c'est sur la base d'un règlement dit d'exemption, pris en application de l'article 81, paragraphe 3, du traité, que la Commission autorisait le secteur de l'automobile à recourir à des pratiques dérogeant aux règles normales de concurrence. Le nouveau projet doit remplacer le règlement 1475/95 du 28 juin 1995 à compter du 1er octobre 2002. La confection d'un tel texte relève d'un pouvoir propre de la Commission, puisque, conformément à un règlement du Conseil du 2 mars 1965, la Commission n'est tenue de le transmettre ni au Conseil ni au Parlement européen. Seule est impérative la consultation du comité consultatif en matière d'ententes et de positions dominantes, organe composé d'experts et de représentants des administrations. Toutefois, il est d'usage que la Commission procède à de larges consultations avant l'adoption d'un règlement d'exemption, lesquelles sont ouvertes jusqu'au 16 avril 2002, soit durant une période de 30 jours suivant la publication du projet dans le Journal officiel des Communautés européennes.

Pour cette raison, le rapporteur a jugé utile que la Délégation examine ce texte, dès sa transmission, le 25 mars 2002, par le Gouvernement, d'autant qu'il s'agit d'un dossier sensible. Il a indiqué que les critiques formulées par le rapport d'évaluation de la Commission en date du 15 décembre 2000 sur les conditions d'application du règlement 1475/95 avaient suscité des doutes en France, notamment, quant aux chances d'une reconduction du règlement d'exemption. C'est pourquoi, en 2001, une délégation de l'Assemblée nationale conduite par le Président André Lajoinie, puis M. Laurent Fabius, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, avaient appelé l'attention de M. Mario Monti, commissaire en charge de la concurrence, sur les risques qui pourraient résulter d'une non-reconduction du régime d'exemption.

Exposant les grandes lignes du nouveau dispositif préconisé par la Commission, le rapporteur a observé que son souci de favoriser une plus grande ouverture à la concurrence avait amené la Commission à proposer l'interdiction de la combinaison entre distribution sélective et exclusive autorisée par le règlement 1475/95, ce qui obligera les constructeurs à choisir entre l'un de ces régimes lors de la désignation de leurs distributeurs. La Commission encourage également le multimarquisme, en levant plusieurs restrictions qui pèsent sur la vente de véhicules de différentes marques par un même distributeur. Quant au service après-vente des véhicules automobiles, le projet - fondé dans une large mesure sur les principes du règlement d'exemption 1475/95 - vise notamment à permettre aux constructeurs de sélectionner les réparateurs.

Se référant à des informations parues dans la presse, le rapporteur a noté que le projet présenté par M. Monti avait été critiqué par certains membres du collège des commissaires, notamment M. Pascal Lamy, lequel a fait état de ses préoccupations quant à la compétitivité de l'industrie européenne par rapport aux pays tiers, États-Unis et Japon en particulier. Le rapporteur a également relevé les critiques émises en France et en Allemagne, sur les conséquences du projet de la Commission pour l'emploi et l'aménagement du territoire.

En conclusion, le rapporteur a proposé que la Délégation tire profit de la période de consultation ouverte par la Commission pour appeler l'attention de cette dernière sur plusieurs points sensibles concernant les conséquences de l'abandon de toute protection territoriale des distributeurs, les garanties accordées aux consommateurs sur le service après-vente et la définition des pièces d'origine ainsi que sur l'assouplissement des conditions d'exercice du multimarquisme.

Le Président a proposé à la Délégation, qui l'a accepté, de faire part de ses préoccupations au Gouvernement et au commissaire Mario Monti.

V. Informations relatives à la Délégation

Le Président Alain Barrau a indiqué qu'il adresserait à tous les membres de la Délégation un document retraçant les travaux des deux premières sessions plénières de la Convention sur l'avenir de l'Europe, accompagné d'une revue de presse.