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Document E1355
(Mise à jour : 12 décembre 2009)


Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1251/1999 instituant un régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables, pour y inclure le lin et le chanvre destinés à la production de fibres. Proposition de règlement portant organisation commune des marchés dans le secteur du lin et du chanvre destinés à la production de fibres.


E1355 déposé le 2 décembre 1999 distribué le 3 décembre 1999 (11ème législature)
   (Référence communautaire : COM(1999) 0576 final du 10 novembre 1999, transmis au Conseil de l'Union européenne le 15 novembre 1999)

  • Travaux en Délégation

    Ce document a été examiné

  • Adoption par les instances communautaires

    Ce document a été adopté définitivement par les instances de l'Union européenne :

    Règlement (CE) n° 1673/2000 du Conseil du 27 juillet 2000 portant organisation commune des marchés dans le secteur du lin et du chanvre destinés à la production de fibres.
    (JO L 193 du 29 juillet 2000) (Notification d'adoption publiée au JOLD du 29/08/2000 p.13354)

    Règlement (CE) n° 1672/2000 du Conseil du 27 juillet 2000 modifiant le règlement (CE) no 1251/1999 instituant un régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables, pour y inclure le lin et le chanvre destinés à la production de fibres.
    (JO L 193 du 29 juillet 2000) (Notification d'adoption publiée au JOLD du 29/08/2000 p.13354)

Base juridique :

Articles 36 et 37 du traité CE.

Procédure :

– Majorité qualifiée au Conseil ;

– avis du Comité économique et social ;

– avis du Comité des régions.

Avis du Conseil d’Etat :

Les deux propositions de règlement ont pour objet, d’une part, de modifier le régime de soutien aux producteurs de lin et de chanvre, d'autre part d'abroger le règlement (CEE) n° 1308/70 du Conseil du 4 juillet 1970 portant OCM dans les secteurs du lin et du chanvre et instaurant, pour ces cultures, une nouvelle OCM organisée selon des modalités simplifiées.

Les dispositions portant création ou suppression d’une OCM revêtent un caractère législatif ( cf. avis de la section des travaux publics n° 355 794 du 22 février 1994), il convient de regarder l’ensemble de ce nouveau dispositif relatif à la culture et au marché du lin et du chanvre comme relevant du domaine législatif.

Motivation et objet :

L’organisation commune des marchés du lin et du chanvre, qui résulte d’un règlement n° 1308/70/CEE du 4 juillet 1970, prévoit un régime d’aides à l’hectare fonctionnant selon les modalités suivantes :

– une aide forfaitaire à l’hectare pour le lin textile (815,6 euros par hectare), partagée entre le producteur (25 %) et le premier transformateur (75 %). Cette aide est différenciée selon les rendements historiques de six zones de production ;

– une aide forfaitaire à l’hectare de chanvre produit (662,8 euros par hectare), intégralement versée au producteur et non différenciée selon les rendements de production.

Cette OCM ne comporte ni système d’intervention, ni mécanisme stabilisateur, ni dispositif de restitutions à l’exportation. Elle se limite à prévoir une aide au stockage en cas de perturbation grave du marché qui, dans les faits, est très rarement utilisée. La teneur en substance psychotrope, le THC, des semences de chanvre est également contrôlée. C’est ainsi que l’octroi de l’aide forfaitaire est subordonné à un plafonnement de la teneur des semences en THC. On sait en effet que certaines catégories de chanvre peuvent être utilisées comme ingrédient de base de la marijuana.

Chacun admet que le fonctionnement de cette organisation de marché souffre d’un certain nombre de dysfonctionnements liés à des phénomènes de « chasse à la prime ». Le niveau élevé des soutiens à l’hectare a en effet incité des pays comme l’Espagne et, dans une moindre mesure, le Royaume-Uni, à développer les surfaces de production de lin dans la seule optique de bénéficier des aides communautaires.

Cette véritable explosion des surfaces de production tient notamment à un différentiel de primes entre le secteur du lin et du chanvre (où l’aide est forfaitaire) et celui des céréales (où l’aide est liée aux rendements, ces derniers étant peu élevés dans les pays du sud). Les producteurs de céréales peuvent donc être incités, pour des motifs exclusivement liés à la recherche de subventions, à s’orienter vers la culture du lin et du chanvre.

Ces dérives se sont traduites par une forte hausse du budget communautaire consacré au lin textile et au chanvre, qui est passé de 74 millions d’euros en 1995 à 158 millions en 1999.

Cette situation ne pouvait perdurer et la Commission a souhaité mettre un terme à ces dysfonctionnements. Elle a donc élaboré une première proposition en 1996 prévoyant d’instaurer une surface maximale garantie et deux niveaux d’aide par hectare, selon le type de récolte pratiqué. Mais elle n’a pu recueillir l’accord d'une majorité d'Etats membres. La Commission a dès lors choisi de renforcer les contrôles, exigeant désormais un rendement minimal à respecter pour l’octroi de l’aide, une intégration des superficies cultivées dans le SIGC des cultures arables et un système de contrats obligatoires entre producteurs et premiers transformateurs.

Mais comme l’indique l’exposé des motifs, « le régime est devenu extrêmement complexe et la multiplication des contrôles et des procédures administratives le rend difficile à gérer ». C’est ce qui a fondé la Commission européenne à proposer une réforme d’ensemble de l’OCM lin et chanvre.

Appréciation au regard du principe de subsidiarité :

La politique agricole commune est une politique communautaire.

Contenu et portée :

La proposition de la Commission comporte trois points essentiels :

1) Intégration du lin et du chanvre dans le régime de soutien applicable aux grandes cultures

Afin de simplifier le fonctionnement global de l’OCM et d’éliminer les sources de distorsion, la Commission propose d’intégrer le lin et le chanvre dans le régime du soutien aux grandes cultures. L’objectif est ainsi de parvenir à un montant des paiements à la surface de lin et chanvre égal à celui octroyé pour le lin oléagineux, ce dernier devant lui–même être rapproché de celui des céréales.

Il faut noter que cette intégration aurait pour conséquence d’inclure le secteur du lin et du chanvre dans le champ d’application de la modulation des aides instaurée par la dernière réforme de la PAC.

2) Modification des règles applicables à l'octroi d’une aide à la transformation de paille .

La Commission propose également de modifier les conditions d'attribution de l'aide à la transformation de la paille.

Cette aide sera d'un montant différencié selon qu’il s’agit de fibres longues ou de fibres courtes. Mais, alors que pour les fibres longues, l’aide augmentera pour compenser la baisse du paiement à la surface reçu par le producteur, le soutien aux fibres courtes de lin et aux fibres de chanvre serait supprimé au bout de cinq ans. La Commission justifie son choix par le fait que les fibres courtes supportent de faibles coûts de transformation et sont très généralement destinées à l’industrie de la pâte à papier ordinaire : un soutien transitoire, complémentaire du paiement à la surface, apparaît seul nécessaire afin de valoriser les investissements réalisés et en cours.

L’échéancier des aides à la transformation serait donc le suivant :

en euros par tonne

2000

2001

2002

2003

2004

2005

Fibres longues

60

120

180

180

180

200

Fibres courtes

40

40

40

40

40

0

3) La mise en place de systèmes de stabilisateurs .

Il n'existe aucune limitation communautaire des surfaces de production de lin et de chanvre. C'est pourquoi la Commission estime nécessaire d’établir un système de stabilisateurs budgétaires pour éviter une trop forte hausse des dépenses d’aide à la transformation. Il est ainsi proposé de fixer deux quantités maximales garanties au niveau communautaire, l’une pour les fibres longues de lin, l’autre pour les fibres courtes de lin et les fibres de chanvre, et de répartir ces quantités entre Etats membres en quantités nationales garanties (QNG).

Les QNG seraient pour la France de 55 800 tonnes pour les fibres longues et de 61 350 tonnes pour les fibres courtes.

L’ensemble de ces dispositions devrait permettre de ramener le niveau des dépenses budgétaires à 80 millions d’euros en 2000/2001 et 50 millions d’euros en 2005/2006.

Textes législatifs nationaux susceptibles d'être modifiés :

Aucun.

Etat d’avancement :

Les réactions des Etats membres – surtout ceux du Sud – sont très critiques à l’égard du projet de réforme. Alors que la Commission reste pour l’instant inflexible sur la défense de ses propositions, les Etats critiquent le mode de calcul discriminant des surfaces de référence et des quantités garanties et la suppression de l’aide à la transformation des fibres courtes au bout de quatre années.

Du côté français, l’Association Générale des Producteurs de Lin (AGPL) considère cette réforme comme un moindre mal pour la filière. Si les propositions de la Commission ne sauraient être globalement récusées, l’AGPL demande que le lin ne soit pas soumis à l’obligation de gel des terres comme les autres cultures arables.

Cette requête ne manque pas d’arguments. Le lin n’est–il pas une production non alimentaire, qui ne connaît, de surcroît, aucun excédent d’offre ? La réponse de la Commission est pour l’instant négative : exempter une production de l’obligation de gel des terres risquerait, selon elle, de créer des distorsions de concurrence.

La position du comité économique agricole de la production de chanvre et de la Fédération nationale des producteurs de chanvre est beaucoup plus critique à l’égard des propositions de la Commission.

Il est vrai que le dispositif de soutien prévu par le projet de réforme serait très pénalisant pour la filière du chanvre : d’une part l’alignement des aides à l’hectare sur le régime de soutien aux céréales correspondrait à une baisse de 45 % des primes d’ici 2005, selon les chiffres du ministère de l’Agriculture (et de 19 % pour le lin) ; d'autre part, le fait de réserver aux seules fibres contenant au maximum 5 % d’impuretés les aides à la transformation aboutirait à priver une partie des producteurs de ce système de soutien qui, rappelons–le, disparaîtrait à l’horizon 2005. Les professionnels considèrent que, si ces propositions restaient en l’état, elles entraîneraient une quasi–disparition du secteur traditionnel du chanvre industriel à fibres. Leur souhait est de parvenir à une réforme bien calibrée qui permette d’éliminer les « chasseurs de prime » tout en laissant subsister les vrais producteurs.

C’est pourquoi, ils demandent que l’aide à la transformation soit maintenue au–delà de 2004 pour les fibres courtes et que leur montant soit égal aux deux tiers de l’aide attribuée aux fibres longues.

La position du gouvernement français consiste à soutenir la philosophie générale du projet notamment l’inclusion des cultures textiles dans le régime général de l’OCM « cultures arables » qui répond au souci de limiter les risques de chasse à la prime mais de demander un certain nombre de garanties supplémentaires. Si le principe d’une limitation des dépenses au titre de l’OCM ne saurait être récusé, l’effort doit être mesuré. Le traitement de la filière chanvre doit, de ce point de vue, être amélioré, sauf à remettre en cause l’existence d’une filière économiquement viable. De même conviendrait il d’augmenter l’aide aux fibres courtes de lin et aux fibres de chanvre. Enfin, si un contrôle des utilisations de chanvre doit être instauré pour prévenir les risques de détournement vers des usages illicites, la France conteste la mise en place d’un système d’autorisation préalable.

Conclusion :

La Délégation a exprimé son soutien à la position défendue par les autorités françaises.