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Document E2840
(Mise à jour : 12 décembre 2009)


Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil concernant les droits des personnes à mobilité réduite lorsqu'elles font des voyages aériens.


E2840 déposé le 10 mars 2005 distribué le 23 mars 2005 (12ème législature)
   (Référence communautaire : COM(2005) 0047 final du 16 février 2005, transmis au Conseil de l'Union européenne le 18 février 2005)

 Base juridique :

Article 80, paragraphe 2, du traité instituant la Communauté européenne.

 Procédure :

- adoption à la majorité qualifiée par le Conseil ;

- codécision avec le Parlement européen ;

- avis du Comité économique et social européen ;

- avis du Comité des régions.

 Avis du Conseil d’Etat :

La proposition de règlement communautaire établit une série d'obligations à l'égard des transporteurs aériens et des gestionnaires d'aéroports en faveur des personnes à mobilité réduite. Elle interdit notamment tout refus de transport motivé par le handicap, sauf exceptions liées à la sécurité dans des conditions restrictives. Elle prescrit d'offrir une assistance gratuite à ce public dans les aéroports, répondant à des caractéristiques précises, mais aussi à bord des avions. Elle prévoit que les Etats membres détermineront des sanctions en cas d'infraction.

En droit interne, les règles essentielles d'accessibilité pour les personnes handicapées sont établies généralement par la loi. Notamment, les articles 111-7 et suivants du code de la construction et de l'habitation régissent l'accessibilité des établissements recevant du public, au titre desquels figurent notamment les aéroports. La loi d'orientation sur les transports intérieurs (LOTI) fixe, au titre du « droit au transport », un objectif d'accessibilité. La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a accru l'intervention du législateur dans de nombreux domaines. Son article 45 porte sur les transports publics et fixe un objectif d'accessibilité des services de transports collectifs d'ici 10 ans. Il prévoit également l'établissement dans les trois ans d'un schéma directeur d'accessibilité par les gestionnaires des aéroports.

La nature législative découle également des obligations commerciales précises imposées aux transporteurs aériens, et de la nécessité pour les Etats membres d'instituer une sanction « effective, proportionnée et dissuasive » ce qui semble appeler évidemment la caractérisation d'une infraction pénale.

 Motivation et objet :

La proposition de règlement a pour objet de poser des règles destinées à protéger les personnes à mobilité réduite qui empruntent des transports aériens.

A cette fin, elle édicte les principales dispositions suivantes :

- l’interdiction pour un transporteur de refuser un passager pour cause de mobilité réduite, sauf pour des raisons de sécurité qui doivent être notifiées par écrit à la personne concernée ;

- la désignation du gestionnaire d’aéroport comme responsable unique de l’assistance aux personnes à mobilité réduite dans l’aérogare et jusqu’au siège de l’avion (objectif de continuité de la prise en charge) : le gestionnaire peut sous-traiter le service à des tiers (y compris à des compagnies aériennes) ;

- l’obligation pour le transporteur et le gestionnaire de l’aéroport de fournir une assistance gratuite aux personnes à mobilité réduite, à condition que le passager ait informé le transporteur de ses besoins au moins 24 heures avant le départ ;

- la possibilité pour les gestionnaires d’aéroport de percevoir une redevance auprès des transporteurs pour financer l’assistance aux personnes à mobilité réduite : cette redevance serait calculée au prorata du trafic passagers de chaque compagnie sur l’aéroport concerné et pourrait être modulée dans le cas de certains services.

 Textes législatifs nationaux susceptibles d’être modifiés :

Il ressort de la fiche d’impact fournie par le SGAE, qu’un problème de calendrier semble se poser entre la date d’entrée en vigueur du règlement communautaire intervenant deux ans après sa publication au JOCE et la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, dont l’objectif d’accessibilité des services de transports collectifs doit être atteint dans les dix ans soit au plus tard en 2015.

La nécessité pour les Etats membres d’instituer des sanctions « effectives, proportionnées et dissuasives » impose l’élaboration d’une mesure nationale relevant, en fonction de la sanction retenue, pénale ou administrative, du domaine de la loi ou du règlement. En l’espèce, l’option d’un régime de sanctions administratives, établi par décret en Conseil d’Etat, est la plus envisageable.

 Réactions suscitées :

La France marque son accord avec les objectifs de la Commission concernant l’assistance due aux PMR à savoir leur prise en charge immédiate à l’aéroport, l’encadrement très strict de leur refus de transport et la gratuité des services pour les bénéficiaires. Elle insiste également pour que le dispositif retenu permette de coordonner au mieux les expériences des gestionnaires d’aéroports et des transporteurs aériens.

Il ressort des premières consultations, que compagnies aériennes et aéroports ont des points de vue divergents concernant la désignation du gestionnaire de l’aéroport comme responsable unique et le financement du service fourni aux PMR.

Les principales compagnies aériennes, représentées par l’AEA ( Association of European Airlines ), s’opposent au monopole dont bénéficieraient les aéroports pour l’assistance aux passagers à mobilité réduite dans l’aérogare. Elles demandent à garder la possibilité d’offrir elles-mêmes un service autonome (option dite de «  opt out  » ou Airline Service Option ), notamment dans le cas de l’exploitation de leurs grandes plates-formes de correspondance, en mettant en avant la qualité des services que leurs agents peuvent fournir. Elles soulignent la relation contractuelle existante entre passagers et transporteurs aériens et non entre passagers et gestionnaires d’aéroport.

Les transporteurs aériens secondaires représentés par l’IACA ( International Air Carrier Association ), parfois peu présents sur un aéroport donné, sont favorables à la proposition de la Commission.

Les aéroports européens, représentés par l’ACI ( Airports Council International ), comme au plan national ADP et l’UCCEGA (Union des Chambres de Commerce et des Gestionnaires d’Aéroports), soutiennent la mise en place d’un système centralisé et obligatoire sous la responsabilité du gestionnaire d’aéroport. Les gestionnaires aéroportuaires considèrent que la coexistence d’une offre de service optionnelle proposée par les compagnies aériennes et d’un service centralisé par le gestionnaire mettrait en péril la viabilité économique de ce dernier.

 Etat d’avancement de la discussion :

> La Commission des transports du Parlement européen a examiné, le 11 octobre 2005, le rapport de M. Robert Evans.

Le rapporteur a présenté des amendements visant notamment à :

- préciser que ce sont sous des formes accessibles que les transporteurs aériens mettent à disposition du public les règles de sécurité appliquées au transport des personnes à mobilité réduite ;

- prévoir que la fixation des normes de qualité pour l’assistance aux personnes à mobilité réduite doit tenir compte des spécificités locales au lieu d’être limitée aux aéroports d’une certaine taille.

Le Conseil « Transports » du 6 octobre 2005 a dégagé à l’unanimité, une orientation générale sur la proposition de règlement concernant les droits des personnes handicapées et des personnes à mobilité réduite lorsqu’elles voyagent par voie aérienne, dans l’attente de l’avis que rendra le Parlement européen en première lecture.

Les principaux éléments de ce projet de règlement tel que modifié par le Conseil sont les suivants :

* Les personnes handicapées et les personnes à mobilité réduite ne se voient pas refuser un transport aérien en raison de leur handicap ou de leur mobilité réduite, sauf pour des motifs de sécurité justifiés ou s’il est physiquement impossible de les embarquer, en raison de la taille des portes d’un aéronef par exemple. En cas de refus d’embarquer ces personnes, celles-ci se voient offrir la possibilité d’effectuer, sans frais additionnels, une réservation sur un autre vol ou, si cela n’est pas possible, se voient proposer le remboursement de leur billet.

* Les personnes handicapées et les personnes à mobilité réduite recevront une assistance dans les aéroports et à bord des aéronefs si elles informent la compagnie d’aviation de leurs besoins spécifiques suffisamment à l’avance. En cas de délai insuffisant, l’aéroport sera néanmoins tenu de tout mettre en œuvre afin de fournir cette assistance.

* S’agissant de l’entité responsable de l’assistance aux personnes handicapées et aux personnes à mobilité réduite dans les aéroports, le Conseil a finalement décidé que les entités gestionnaires des aéroports devaient se voir confier la responsabilité générale de cette assistance ; ces entités gestionnaires peuvent fournir l’assistance elles-mêmes ou s’acquitter de cette responsabilité en la déléguant par contrat à un ou plusieurs tiers, par exemple des transporteurs aériens. Les entités gestionnaires peuvent recouvrer les coûts de cette assistance auprès des compagnies aériennes. L’assistance à bord continuera de relever de la responsabilité des compagnies aériennes.

* Dans les aéroports dont le trafic annuel est de 150 000 mouvements de passagers commerciaux ou plus, l’entité gestionnaire établira des normes de qualité pour l’assistance prévue dans le règlement et déterminera les ressources nécessaires pour y répondre, en collaboration avec les compagnies aériennes et les organisations représentant les personnes handicapées et les personnes à mobilité réduite. Ces normes tiendront compte des politiques et des codes de conduite internationalement reconnus en ce qui concerne la facilitation du transport de personnes handicapées et de personnes à mobilité réduite.

* Une personne handicapée ou une personne à mobilité réduite qui estime que le présent règlement n’a pas été respecté devrait en faire part à l’entité gestionnaire de l’aéroport ou au transporteur aérien concerné, selon le cas. Si la personne handicapée ou la personne à mobilité réduite ne peut obtenir satisfaction par cette voie, elle peut déposer plainte auprès de l’organisme ou des organismes désignés à cette fin par l’Etat membre concerné.

 Conclusion :

La proposition présentée par la Commission fait partie des mesures qui, parce qu’elles fournissent une illustration concrète des objectifs poursuivis par la construction européenne, méritent d’être soutenues sans réserve.

La Délégation a approuvé la présente proposition de règlement au cours de sa réunion du 22 novembre 2005.