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Document E3044
(Mise à jour : 12 décembre 2009)


Proposition de règlement du Conseil relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions et la coopération en matière d'obligations alimentaires.


E3044 déposé le 27 décembre 2005 distribué le 30 décembre 2005 (12ème législature)
   (Référence communautaire : COM(2005) 0649 final du 15 décembre 2005, transmis au Conseil de l'Union européenne le 15 décembre 2005)

Le Conseil européen de Tampere d’octobre 1999 a demandé que des règles de procédure communes spéciales soient établies en matière d’obligations alimentaires, en vue de simplifier et d’accélérer le règlement des litiges transfrontaliers et que soient supprimées les mesures intermédiaires requises pour permettre la reconnaissance et l’exécution d’une décision rendue dans un autre Etat membre. Ainsi le programme de reconnaissance mutuelle en matière civile de novembre 2000 fixe pour objectif la suppression de la procédure d’exequatur en faveur des créanciers alimentaires. Le programme de La Haye de novembre 2004 indique que la poursuite de la mise en œuvre du programme de reconnaissance mutuelle constitue une priorité essentielle.

La proposition vise à ce que les créanciers alimentaires puissent obtenir aisément, rapidement, et, le plus souvent, sans frais, un titre exécutoire valable dans l’espace judiciaire européen et aboutir concrètement au paiement régulier des sommes dues. Dans ce but, elle utilise les différents instruments pertinents de la coopération judiciaire civile : fixation des règles relatives à la compétence internationale et à la loi applicable, reconnaissance et exécution, levée des obstacles au bon déroulement de la procédure.

Il s’agit de simplifier les procédures – notamment pour l’établissement de la créance alimentaire – et d’offrir au créancier l’aide nécessaire, à travers en particulier la mise en place de mécanismes de coopération entre les Etats membres. Il est également prévu la possibilité, pour le créancier, d’effectuer les démarches nécessaires sur le lieu de sa résidence habituelle.

D’autre part, le règlement unifie les règles existantes : à l’heure actuelle, les conventions particulières auxquelles les Etats membres sont parties prévalent sur la règle communautaire.

Par ailleurs, le règlement renforce la sécurité juridique en mettant un terme à la disparité des règles de conflit de lois. Le principe posé est que la loi du pays dans lequel le créancier a sa résidence habituelle régit les obligations alimentaires.

Enfin, la proposition prévoit un ensemble de mesures ayant pour objectif d’assurer l’efficacité et la pérennité du recouvrement. Il s’agit en particulier de permettre au créancier d’obtenir une décision qui puisse bénéficier d’un système d’exécution simple et harmonisé dans l’ensemble de l’Union.

La proposition de règlement découle des résultats de la consultation organisée à partir du Livre vert sur les obligations alimentaires d’avril 2004 et du travail mené avec les experts des Etats membres.

La base juridique de la proposition sont les articles 61 et 65 du traité instituant la Communauté européenne.

Compte tenu du fait que la proposition concerne le droit de la famille, la procédure est celle prévue à l’article 67, paragraphe 2, du traité : le Conseil se prononce à l’unanimité après consultation du Parlement européen.

Le texte proposé a été transmis à l’Assemblée nationale le 27 décembre 2005.

Au cours des réunions intervenues dans le cadre du Comité du Conseil sur les questions de droit civil, sous présidences finlandaise et allemande, la France s’est déclarée en faveur de la proposition de règlement. Elle a, en particulier, accueilli favorablement le regroupement en un texte unique de l’ensemble des questions intéressant les obligations alimentaires, notamment celles relatives à la loi applicable. Elle a estimé que « seule une telle approche globale permet de créer les conditions d’une confiance mutuelle suffisante pour atteindre les objectifs, poursuivis par le Conseil, de suppression de l’exequatur et de facilitation du recouvrement transfrontalier des pensions alimentaires »( 1).

Néanmoins la délégation française a fait part de son opposition aux points suivants :

– l’harmonisation des règles de procédure : la France est opposée aux articles 22 et 23 qui prévoient la citation à personne du défendeur. Elle estime que ces dispositions créent des rigidités inutiles. Par ailleurs, elle souhaite le renforcement du droit du débiteur de réexamen du jugement par défaut. Le rapporteur ne souscrit pas à cette position française : il serait bon qu’existe une réelle obligation en la matière. Toutefois, ce souci ne doit pas aboutir à freiner l’ensemble du projet ;

– l’exécution forcée des décisions : la France s’est déclarée en opposition avec les articles 34 et 35 qui permettent des mesures d’exécution forcée décidées par le juge (ordre de prélèvement automatique mensuel et ordre de gel temporaire d’un compte bancaire). La délégation française a estimé que les mécanismes proposés portent une atteinte grave aux droits du débiteur et qu’il n’appartient pas à l’Union d’introduire une telle procédure. Le rapporteur considère, au contraire, que de telles mesures d’exécution, qui existent déjà en droit français, seraient tout à fait pertinentes au niveau européen, et qu’il faut impérativement assurer une meilleure exécution des obligations alimentaires ;

– le fonctionnement de la coopération administrative : la France souhaite que le règlement soit complété, s’agissant de la coopération administrative, et que des modalités de coopération plus souples soient introduites.

La proposition est conforme au principe de subsidiarité : le but recherché ne pourrait être atteint au niveau des Etats membres. En revanche, pour la délégation française, les articles 34 et 35 qui prévoient des mesures d’exécution forcée ne sont pas conformes au principe de proportionnalité, allant audelà de ce qui est nécessaire pour atteindre les objectifs poursuivis. Pour le rapporteur, on peut peut-être considérer que ces articles ne sont pas conformes, mais qu’ils sont, en revanche, conformes à un principe de justice qu’il faut privilégier.

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M. Jacques Floch, rapporteur, a présenté ce document au cours de la réunion de la Délégation du 20 mars 2007.

Suivant l’avis du rapporteur, la Délégation a approuvé la proposition de règlement, y compris les dispositions des articles 34 et 35 prévoyant des mesures d’exécution forcée en matière bancaire.

(1) Note de la délégation française au Comité sur les questions de droit civil (29 novembre 2006).