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Document E3242
(Mise à jour : 12 décembre 2009)


Eurojust : Accord de coopération entre Eurojust et les États-Unis d'Amérique.


E3242 déposé le 25 septembre 2006 distribué le 27 septembre 2006 (12ème législature)
   (Référence communautaire : SN 3680/1/06 Rev 1 du 7 septembre 2006)

Ce projet d’accord vise à renforcer la coopération entre Eurojust et les Etats-Unis d’Amérique en matière de lutte contre les formes graves de criminalité internationale, en particulier le terrorisme. Ce sera le quatrième accord conclu par Eurojust avec un pays tiers, conformément à l’article 27 de la décision du Conseil du 28 février 2002 instituant Eurojust, après ceux signés avec la Norvège, l’Islande et la Roumanie. Des négociations sont également en cours avec la Suisse, et des discussions informelles ont été ouvertes avec la Fédération de Russie et l’Ukraine.

Les négociations avec les Etats-Unis n’ont pas été faciles, notamment en raison des différences de systèmes juridiques, en ce qui concerne la protection des données personnelles en particulier. Le recours à la peine de mort aux Etats-Unis, ainsi que l’existence de juridictions militaires d’exception pour juger les « ennemis combattants » – récemment confirmée par le Congrès («  Military Commission Act  ») à la suite de la décision de la Cour suprême du 29 juin 2006 – ont également rendu indispensable d’obtenir de solides garanties.

L’accord prévoit de renforcer les échanges d’informations et la coordination entre les autorités chargées des poursuites des Etats-Unis et celles des Etats membres. A cette fin, les Etats-Unis détacheront un procureur de liaison auprès d’Eurojust et au moins un point de contact national sera désigné au sein des autorités judiciaires américaines. Le mandat du procureur de liaison et la durée de son détachement seront établis par les Etats-Unis. Il aura notamment accès à l’information contenue dans le casier judiciaire des Etats-Unis de la même manière que le droit américain le prévoit pour un procureur ou une personne ayant des compétences équivalentes. Des réunions opérationnelles et stratégiques entre les autorités américaines et Eurojust sont prévues.

En cas de transferts d’informations, la partie requérante doit notifier à l’autre partie la finalité pour laquelle les informations sont demandées. Les informations transmises peuvent être utilisées à des fins d’enquête et de procédures pénales ou dans le cadre des procédures judiciaires ou administratives non pénales qui y sont liées, pour écarter une menace immédiate et sérieuse pesant sur la sécurité publique de l’une des parties, ou à toute autre fin si ces informations ont été rendues publiques ou avec l’accord préalable de la partie qui a transmis les informations. Les informations communiquées ne pourront être transmises à un pays ou une instance tiers sans le consentement de la partie les ayant transmis.

Des dispositions spécifiques sont prévues en matière de protection des données personnelles et de vie privée. Les parties doivent notamment agir en pleine conformité avec leurs législations respectives, s’assurer que les données à caractère personnel communiquées sont appropriées et pertinentes au regard de la finalité spécifique de la demande et ne conserver les données que pendant la durée nécessaire aux fins auxquelles elles ont été fournies. L’article 11 du projet prévoit également que les données personnelles particulièrement sensibles (c’est-à-dire celles qui révèlent l’origine raciale ou ethnique, les opinions politiques, les convictions religieuses ou autres, l’appartenance syndicale ainsi que les données relatives à la santé et à la vie sexuelle) ne peuvent être fournies que si elles sont particulièrement pertinentes pour écarter une menace immédiate et sérieuse pesant sur la sécurité publique ou pour lutter contre des formes graves de criminalité transnationale.

Un droit d’accès, de rectification et d’effacement des données personnelles est reconnu aux personnes concernées, conformément à la législation de la partie sollicitée (qui est, en ce qui concerne la partie américaine, plus restrictive que la législation européenne sur ce point). L’accès peut être refusé s’il risque de compromettre la finalité du traitement, les enquêtes et les poursuites en cours ou les droits et libertés des tiers. Contrairement aux accords précédents, aucune référence n’est faite au niveau de protection assuré par la Convention du Conseil de l’Europe du 28 janvier 1981, la décision instituant Eurojust ou le règlement intérieur d’Eurojust. L’organe de contrôle commun d’Eurojust a cependant approuvé l’accord le 15 août 2006.

Des limites et conditions à l’utilisation des données transmises peuvent être imposées par la partie qui transmet ces informations, lorsqu’elle ne pourrait pas, en l’absence de ces conditions, donner suite à la demande d’entraide examinée (art. 10 paragraphe 2). Cette disposition, similaire à celle figurant dans l’accord d’entraide judiciaire entre l’Union européenne et les Etats-Unis, permettra, en particulier, d’interdire qu’il soit fait usage des informations transmises dans le but de prononcer ou d’exécuter une peine de mort. Une disposition spécifique sur ce point aurait cependant été préférable.

Compte tenu des garanties prévues concernant l’application de la peine de mort et la protection des données personnelles, la Délégation, au cours de sa réunion du 17 octobre 2006, a approuvé ce projet d’accord qui permettra de renforcer la coopération entre Eurojust et les Etats-Unis d’Amérique en matière de lutte contre les formes graves de criminalité, y compris le terrorisme, en l’état des informations dont elle dispose.