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Document E3732
(Mise à jour : 12 décembre 2009)


Proposition de décision du Conseil relative à la conclusion de l'accord entre la Communauté européenne et l'Australie sur le commerce du vin.


E3732 déposé le 13 décembre 2007 distribué le 13 décembre 2007 (13ème législature)
   (Référence communautaire : COM(2007) 0712 final du 20 novembre 2007, transmis au Conseil de l'Union européenne le 20 novembre 2007)

M. Thierry Mariani, rapporteur, a présenté ce texte au cours de la réunion de la Délégation du 16 janvier 2008.

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Le secteur vitivinicole européen est régi par une organisation commune de marché( 1) réglementant les mesures de gestion de la production, la circulation et la vente des produits ainsi que les procédés de vinification et l’étiquetage. Par ailleurs, compte tenu de l’importance des flux commerciaux concernant les produits vitivinicoles, des accords bilatéraux lient l’Union européenne et certains pays tiers. Ainsi, des accords ont été conclu avec l’Afrique du Sud, le Canada, le Chili et l’Australie.

I. Le cadre général de la négociation

La crise de la viticulture européenne qui a motivé la récente réforme de l’organisation commune de marché vitivinicole est due pour une large part à la concurrence des pays du vins du nouveau monde. La stratégie de marketing de ces pays nouvellement producteurs est redoutablement efficace mais elle repose notamment sur ce qu’il ne faut pas craindre d’appeler le « pillage » des appellations européennes, privant ainsi les vins européens de leurs avantages historiques et donc de leurs atouts( 2). Aussi les négociations bilatérales avec les pays tiers producteurs ont –elles mis l’accent sur la défense de ces appellations.

Parmi ces pays, l’Australie est un partenaire important de l’Union européenne. Ce pays se situe en effet en quatrième position des pays exportateurs mondiaux après l’Italie, la France et l’Espagne, représentant plus de 10 % des exportations mondiales. Les importations européennes en provenance d’Australie ont augmenté de 87 % entre 2000 et 2006. En 2006, les exportations de vins de l’Union européenne vers l’Australie se sont établies à 62 millions d’euros et les importations de l’Union européenne en provenance d’Australie, à 86,8 millions d’euros.

Les relations entre l’Australie et l’Union européenne sont actuellement régies par l’accord relatif au commerce du vin approuvé par la décision 94/184/CE du Conseil et négocié avant la signature de l’accord ADPIC (accord sur les droits de propriété intellectuelle contenu dans les textes de l’Organisation mondiale du commerce). Cet accord imposait de nouvelles négociations qui ont été engagées dés 1994 sur la base de cette exigence. Elles ont principalement porté sur l’abandon progressif par l’Australie de certaines dénominations de vins de la Communauté européenne. Alors qu’elles auraient dû aboutir avant fin 1997, les négociations étaient dans l’impasse depuis 2000. Elles ont finalement repris en 2004 et ont abouti en juin 2007 à ce nouveau projet d’accord.

II. Un accord globalement satisfaisant pour la viticulture européenne

Au terme de ces longues négociations, il apparaît que le résultat est équilibré et améliore très sensiblement l’accord de 1994, notamment sur le point essentiel de la négociation, à savoir la protection des indications géographiques européennes. L’Australie a ainsi accepté de supprimer rapidement l’usurpation d’indications géographiques jusqu’ici considérées comme génériques. Ainsi, est prévue l’élimination de dénominations telles que Chablis, Champagne, Burgundy, Sauterne, Graves, Marsala, Moselle, Sherry, Manzanilla et Port dans un délai d’un an après l’entrée en vigueur de l’accord et dans un délai de dix mois, de l’appellation Tokay. Il s’agit d’un calendrier très rapide qui ne concerne pas certains génériques qui ont été retirés de la liste des indications géographiques de part et d’autre par reconnaissance mutuelle.

En échange, l’Union européenne concède la reconnaissance de nouvelles pratiques œnologiques figurant à l’annexe 1. Mais il faut toutefois noter qu’il s’agit de pratiques déjà concédées à d’autres pays ou admises par l’Organisation internationale de la vigne et du vin (OIV), ce qui aurait en tout état de cause rendu caduque toute tentation de restriction devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Des critères sont clairement définis pour l’évaluation de ces nouvelles pratiques et concernent notamment les exigences sanitaires et phytosanitaires. Des procédures d’opposition et d’arbitrage sont prévues.

Par ailleurs, l’accord permet dans son titre III de sauvegarder le régime communautaire d’étiquetage des vins, en prévoyant notamment l’établissement d’une liste des indications facultatives autorisées pour les vins australiens (indication des variétés de vignes, indications relatives à un prix, à une médaille ou un concours, indications concernant une couleur particulière). L’indication des cépages sur les étiquettes est réglementée. Est prévue la suppression de l’utilisation, dans un délai d’un an à compter de l’entrée en vigueur de l’accord, de l’utilisation des indications « Hermitage » et « Lambrusco » sur les étiquettes des vins originaires d’Australie.

En outre, l’accord prévoit la protection en Australie des expressions traditionnelles de l’Union européenne. L’Australie pourra utiliser certaines de ces expressions traditionnelles correspondant à des termes qui désignent des vins de qualité en Australie, termes définis dans l’accord.

Enfin, la Commission a accepté d’autoriser des dispositions de certification simplifiées, conformément à la législation européenne.

Cet accord est conforme aux préconisations que la Délégation pour l’Union européenne a exprimées dans plusieurs propositions de résolution( 3) et qui ont mis l’accent sur la nécessité de protéger les indications géographiques communautaires dans le cadre de l’OMC et des accords bilatéraux. C’est pourquoi, il importe d’être vigilant sur les prochaines négociations à la fois bilatérales et multilatérales.

Sur le plan multilatéral, l’Europe devrait mettre à profit les négociations du cycle de Doha, pour obtenir la création, au sein de l’OMC, d’un registre recensant et protégeant les indications géographiques européennes de vins et spiritueux, dans le cadre de l’accord sur la propriété intellectuelle (ADPIC). La création d’un tel registre a été demandée dans une proposition de résolution de l’Assemblée nationale le 17 décembre 2005( 4). Parallèlement aux négociations portant sur la création de ce registre multilatéral, l’Europe doit persévérer dans la défense de sa proposition déposée en août 2003 à l’OMC, consistant à retrouver l’usage exclusif de vingt deux appellations de vins et spiritueux (Bordeaux, Bourgogne, Chablis, Champagne, Chianti, Porto…).

Sur le plan bilatéral, l’accord signé le 20 décembre 2005 avec les Etats-Unis est très déséquilibré au détriment de la viticulture européenne( 5). En effet, si les Etats-Unis se sont engagés à reconnaître le système européen des indications géographiques, en revanche, la question des appellations semi-génériques (champagne, sauternes, chablis.) n’est pas réglée. L’Union européenne devra faire valoir ses droits sur ce point lors de la deuxième phase des négociations actuellement engagées.

La Délégation a approuvé ce projet d’acte communautaire après l’exposé du rapporteur.

(1) La réforme de l’OCM vitivinicole a été adoptée le 19 décembre 2007 et rentrera en vigueur le 1er août 2008.
(2) Sur ce point, voir les rapports d’information n°3643 de M. Philippe-Armand Martin et n° 404 de M. Thierry Mariani, au nom de la Délégation pour l’Union européenne.
(3) Voir les rapports d’information n° 3643 de M. Philippe- Armand Martin et n° 404 de M. Thierry Mariani , au nom de la Délégation pour l’Union européenne
(4) Résolution n° 524 du 17 décembre 2005.
(5) Il comprend notamment une clause d’antériorité dite clause du grand père, aux termes de laquelle les usurpations actuelles ne sont pas concernées par l’accord dès lors qu’un « certification of label approval » (COLA) leur a été délivré avant la ratification de l’accord bilatéral. Une des conséquences pratiques est notamment que la marque « Korbel California Champagne », entre autres, ne peut être remise en cause.