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Cérémonie de remise de diplômes aux Justes de France
par le Comité français pour Yad Vashem
à l'Assemblée nationale
le mardi 2 mai 2000

Allocution prononcée par M. Raymond FORNI

Président de l'Assemblée nationale

Monsieur le Président,

Monsieur l'Ambassadeur,

Mesdames et Messieurs,

L'Assemblée nationale rend hommage aujourd'hui aux  Justes  de France, ces hommes et ces femmes qui sont l'honneur et la fierté de notre pays. Cette cérémonie nous rassemble dans une même émotion et une même volonté de saluer ces Français qui, par un geste spontané, personnel ont dit « non » à l'intolérable. Qui ont su à un moment ô combien douloureux de notre Histoire se dresser face à l'inacceptable.

Le 29 février dernier, les députés adoptaient à l'unanimité le projet de loi visant à instaurer une journée nationale d'hommage aux Justes de France. Le 9 mars suivant, mon prédécesseur Laurent Fabius, inaugurait une plaque en mémoire des sept jeunes résistants, jugés et condamnés à mort à l'Hôtel de Lassay, devenu durant cette période affreuse de l'Occupation, et pour cette circonstance, en une sorte de profanation de la Démocratie, le siège d'un tribunal militaire nazi. Je suis heureux qu'en ce jour notre Parlement prenne part, une nouvelle fois, à cette _uvre de mémoire, symbole d'un humanisme républicain, inscrit dans le c_ur et l'esprit de chaque citoyen.

Je sais combien il est difficile d'évoquer ces heures sombres de notre histoire, qui blessent notre mémoire. Mais, ainsi que l'écrivait Voltaire en 1766 dans l'Avis sur les parricides, « loin d'oublier ces temps abominables, il faut les remettre fréquemment sous nos yeux ». En ce moment de recueillement, le peuple juif se souvient, et la France avec lui. Pour sauver de l'oubli le nom des six millions de victimes de l'holocauste. Pour honorer, maintenant et demain, la mémoire de tous ceux qui, dans leur âme et leur chair, ont porté l'innommable souffrance. Pour témoigner, encore et toujours, de ce tragique passé que nous ne voulons plus jamais vivre.

Le mal comme le bien doivent être connus. Aujourd'hui, grâce au remarquable travail du Comité français pour Yad Vashem, l'Etat d'Israël reconnaît et honore celles et ceux qui ont refusé de se soumettre à la volonté exterminatrice de l'idéologie nazie. Pour eux, au péril de leur vie, l'évidence du devoir, le souci de l'autre, la valeur suprême de la vie ont été plus forts que tout. Par leurs petits gestes et leurs grandes actions, ils ont rendu à tous les persécutés la liberté et cette part de lumière qu'est l'espoir. Il convient de ne jamais oublier l'héroïsme de ces Justes qui, en sauvant des vies humaines, ont également sauvé la dignité de notre pays. Que leurs noms ne soient pas seulement inscrits sur le Mur d'Honneur du Jardin des Justes à Yad Vashem, mais aussi gravés dans toutes nos mémoires. C'est notamment un impérieux devoir pour celles et ceux qui siègent ici dans cette Assemblée parlementaire et qui sont porteurs d'une parcelle de la représentation nationale, celle que nous a délégué chacune et chacun de nos concitoyens.

Aux martyrs de la Shoah, à toutes les victimes du nazisme, nous devons un souvenir éternel ; aux  Justes de France, nous devons une gratitude infinie et les remerciements de la nation. En leur rendant hommage aujourd'hui, nous saluons la noblesse du véritable don de soi. Le siècle qui s'achève a vu l'Europe laisser champ ouvert aux pires atrocités. Par leur sacrifice, exemplaire pour les générations futures, les Justes ont contribué à sceller, sur cette terre, le triomphe de la liberté et de la démocratie sur le totalitarisme et la barbarie.

La France est grande quand elle est solidaire et fraternelle. Vous avez incarné ce qu'elle a de meilleur et vous en êtes, ceux qui sont ici, ceux qui n'ont pu venir et pour lesquels nous avons une particulière affection, ceux qui nous ont quittés à jamais, vous en êtes la plus belle image.