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Conférence des Présidents des Parlements nationaux
organisée par l'Union interparlementaire
du 30 août au 1er septembre 2000 au siège des Nations Unies à New York

Discours de M. Raymond FORNI,

Président de l'Assemblée Nationale,

prononcé le mercredi 30 août 2000

Mesdames et Messieurs les Présidents,

Mesdames et messieurs les parlementaires,

Cette conférence des Présidents de Parlements nationaux revêt pour nous tous, en cette symbolique année 2000, une profonde signification.

Nous voulons d'abord exprimer l'attachement de nos Parlements à l'Union interparlementaire. Sa création en 1889, dont on me permettra de rappeler qu'elle a été notamment due à un parlementaire français, Frédéric Passy, Prix Nobel de la paix avec Henri Dunant en 1901, a marqué un des premiers efforts, sinon le premier, pour doter la société internationale d'institutions politiques communes.

Promouvoir la paix et la coopération entre les peuples grâce aux échanges entre leurs représentations élues est aujourd'hui une mission tout aussi indispensable.

L'Union interparlementaire qui rassemble les Parlements dans cette mission est pour eux un outil essentiel. Je tiens, au nom de l'Assemblée nationale française, à rendre hommage à son action, en saluant Madame Najma Akbarali Heptulla, première femme à avoir été portée à la présidence de son Conseil qui, nous le savons tous, ne ménage ni son temps ni son énergie au service de notre organisation.

Dans le monde contemporain où les évolutions technologiques, la compétition économique et les rapports entre Nations, voire entre civilisations, sont insuffisamment maîtrisés, il est en effet vital d'approfondir le sens de la démocratie et de développer le dialogue entre les peuples.

Les Parlements ont une vocation éminente à y contribuer, car ils incarnent le droit fondamental de la personne humaine à être associée aux orientations dont dépend son avenir, et d'abord en étant représentée par les élus de son choix.

Dans cet esprit, il importe que la présente conférence soit l'occasion de réaffirmer la nécessité de voir consacrer plus nettement le rôle des Parlements dans le concert des Nations.

L'Organisation des Nations Unies est le pivot de l'ordre mondial. Ses résultats, que ce soit dans le domaine du maintien de la paix ou du développement, apparaissent souvent en deçà des attentes. Mais il faut se garder de tout jugement hâtif ou injuste. Qu'il suffise d'imaginer combien plus désordonné encore serait le monde sans l'ONU ! Et si l'ONU n'est pas plus efficace, la responsabilité en revient, pour la plus grande part, aux Etats membres, qui ne s'acquittent pas de leurs obligations, qui ne lui donnent pas tous les moyens d'action dont elle a besoin.

La prédominance des Etats nations, dont les représentants des exécutifs forment l'Assemblée générale et composent toutes les instances de l'ONU, ne favorise donc pas toujours la régulation. Il faut par conséquent que l'ONU, et les autres organisations internationales, s'ouvrent davantage aux peuples eux-mêmes, à l'opinion publique mondiale, à la société civile internationale.

Cette aspiration se manifeste déjà, et c'est un phénomène heureux, à travers l'action des organisations non gouvernementales. Ces ONG expriment des valeurs universelles, s'attachent à défendre les droits de l'homme, à promouvoir plus d'équité économique et sociale, à préserver l'environnement. Leurs combats sont le plus souvent, à mes yeux en tout cas, légitimes.

Elles regroupent des militants, particulièrement sensibilisés ou actifs. Mais l'adhésion à ces ONG repose sur des choix personnels. Elles ne sauraient se prévaloir de la même représentativité que les Parlements démocratiquement élus, qui ont vocation à s'exprimer au nom du peuple tout entier, et sur tous les sujets.

Ce sont donc les Parlements qui sont les plus indiscutablement qualifiés pour incarner la société civile internationale, et pour s'en faire les porte parole auprès de l'ONU, et des autres organisations intergouvernementales.

L'accord de coopération conclu en 1996 entre l'Union interparlementaire et l'ONU a constitué un premier pas très positif en vue d'associer nos Parlements aux Nations Unies. Mais il faut sans doute aller plus loin. L'Union interparlementaire pourrait à terme devenir une véritable Assemblée parlementaire des Nations Unies, susceptible d'être consultée par l'Assemblée générale, le Conseil de Sécurité, le Conseil économique et social, et de leur faire des propositions.

Le moment me paraît en effet venu de donner sa pleine dimension politique à l'organisation mondiale en créant sa seconde composante, indispensable à son équilibre, celle qui est au plus près de la voix des peuples.

C'est dans une telle perspective que les échanges que nous nous attachons à approfondir entre Parlements nationaux au sein de l'UIP pourraient trouver leur pleine signification. La reconnaissance que l'institution parlementaire recevrait ainsi au niveau planétaire serait un authentique progrès démocratique.

Mesdames et Messieurs, il ne s'agit pas là d'une utopie, mais d'une orientation qui découle des tendances que nous pouvons déjà constater, et qui est commandée par la volonté d'améliorer le fonctionnement concret du système international.

Puissent notre présence et nos travaux, au siège des Nations Unies, marquer aux yeux des peuples du monde que nous représentons, notre attachement commun à cet idéal et notre détermination à le servir.

Je vous remercie.