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Séminaire Interarmées des Grandes Ecoles Militaires
à l'Hôtel de Lassay le mercredi 4 avril 2001

Discours de M. Raymond Forni,

Président de l'Assemblée nationale

Messieurs les Ministres,

Cher Rudolf Scharping, Cher Alain Richard,

Mesdames, Mesdemoiselles et Messieurs,

Chers amis,

C'est avec fierté que je vous accueille ce soir à l'Hôtel de Lassay. Issus des plus grandes écoles militaires, vous vous préparez à jouer un rôle décisif dans la défense de notre pays. Vous avez choisi la France. Vous avez choisi de vous engager au service de la République : pour protéger tous ses citoyens bien sûr, mais également pour défendre, partout où ils sont menacés, les droits de l'homme et les libertés fondamentales.

Soyez salués et remerciés au nom de l'Assemblée nationale, et au nom de tous mes collègues, pour cet engagement qui vous honore et mérite notre respect le plus sincère.

Au lendemain d'un siècle qui a ensanglanté l'Europe, plus grande encore est ma fierté à recevoir ensemble, en présence des Ministres de la Défense de deux nations réconciliées, les représentants de cette armée européenne en construction. Je remercie chaleureusement l'ensemble des élèves officiers étrangers, et ceux qui les accompagnent, de leur présence parmi nous. Vous incarnez la puissance et les espoirs d'une Europe unie et solidaire.

A tous, je souhaite la bienvenue à l'Assemblée nationale, maison de la démocratie et dans le monde entier, symbole de justice et de liberté.

Depuis 50 ans, les troupes françaises n'ont été engagées que sur des théâtres d'opération relativement éloignés : du Liban au Kosovo, ou bien encore au Timor-Oriental. Elles y ont été appelées, la plupart du temps, dans un cadre multinational et sous l'égide des Nations Unies. Cette évolution a profondément transformé les principes de leur emploi et de leur commandement. Le nombre, les lieux et la nature des interventions de nos armées ont beaucoup évolué. Le rôle et les responsabilités de nos soldats aussi. Ce sont ainsi des défis encore inédits que, demain, les officiers que vous êtes auront à relever.

Pour les affronter, il vous sera indispensable de connaître, de manière claire et précise, l'environnement politique et institutionnel du Ministère de la Défense. Je salue l'initiative d'Alain Richard : ce séminaire interarmées devrait permettre à chacun d'entre vous de mieux comprendre la vie des institutions républicaines et devenir ainsi des acteurs avertis de notre système de défense.

Je souhaite par conséquent vous rappeler, en quelques mots, le rôle et les missions de l'Assemblée nationale où, depuis tant d'années, bat le coeur de notre République et de notre démocratie.

Composée de 577 députés, par la voix desquels s'expriment les doutes, les questions, et les propositions du pays tout entier, elle est le siège de la souveraineté de la nation.

Avec le Sénat et face aux pouvoirs exécutif et judiciaire, l'Assemblée incarne le pouvoir législatif. A ce titre, elle se voit investie de deux missions importantes pour la vie de notre démocratie : le vote de la loi et le contrôle du Gouvernement.

L'exercice de ses prérogatives ne la laisse pas étrangère aux affaires militaires. Bien au contraire : chaque année, en votant le budget de l'Etat, les députés se prononcent sur le montant des crédits accordés aux Armées. Je pense aussi à la loi de programmation militaire qui inscrit dans la durée notre politique de défense. Elle est un moment essentiel d'ouverture et de dialogue, où se dresse le bilan des décisions passées et se dessinent clairement les orientations à venir.

Je tiens également à saluer le travail réalisé par la Commission de la Défense nationale et des Forces armées, présidée par Paul Quilès. Elle réunit des parlementaires de chaque groupe qui examinent minutieusement les textes, projets de loi du Gouvernement ou propositions de loi d'origine parlementaire, concernant les Armées. Mais elle organise également des commissions d'enquête et des missions d'information déterminantes pour la défense de notre pays.

Ainsi, la Commission de la défense a consacré, l'année passée, une large part de ses travaux à la professionnalisation des armées, en définissant notamment le statut des officiers sous contrat dans le cadre de la loi sur les volontariats civils du 14 mars 2000, et en publiant le rapport de Bernard Grasset et Charles Cova sur les espoirs et les inquiétudes du personnel militaire.

Elle n'a pas hésité à constituer une mission d'information sur le « syndrome du Golfe » afin que la lumière soit faite sur ces questions qui engagent la santé et la sécurité de nos soldats.

La Commission a également poursuivi la réflexion, engagée par son Président, sur le contrôle parlementaire des opérations extérieures. Elle a publié un rapport de François Lamy qui propose de modifier la Constitution pour permettre une consultation du Parlement en cas d'engagement extérieur de nos forces.

Car n'oublions pas que l'Assemblée nationale dispose d'une suprême responsabilité. Comme le rappelle l'article 35 de la Constitution : « la déclaration de guerre est autorisée par le Parlement ». L'Assemblée, en accord avec le Sénat, produit en cas de guerre le seul cadre légal et légitime de l'utilisation de la force armée.

La nature des interventions militaires s'est aujourd'hui transformée. Pour que le principe de ce contrôle parlementaire continue à être respecté, il faut accepter de l'étendre à l'ensemble des missions confiées à nos armées hors de l'hexagone. La transparence doit en effet demeurer la règle de la démocratie.

Voilà Mesdames, Mesdemoiselles et Messieurs, le message de soutien et d'amitié que je souhaitais vous délivrer au nom de l'ensemble des députés, à l'occasion de ce premier séminaire interarmées des grandes écoles militaires.

Il ne suffit pas d'invoquer la paix ou la liberté. Il faut agir pour les défendre et les faire avancer. Il n'y a pas de tâche plus noble, plus urgente, plus exaltante. La France aujourd'hui, demain l'Europe, après-demain peut-être les Nations Unies, doivent pour cela disposer d'une armée moderne, efficace, prête à relever les défis du maintien de la paix dans le monde. Nous travaillons en ces lieux à la préparer. C'est aussi l'une des missions exigeantes et passionnantes de l'Assemblée nationale : vous donner chaque jour les moyens de préserver la solidarité et la fraternité entre les peuples.

Je vous remercie