Accueil > Archives de la XIIe législature > Discours de M. Jean-Louis Debré, Président de l'Assemblée nationale

04/05/2005 - Inauguration de l'exposition organisée à l'occasion du 30e anniversaire de la création par la loi du 10 juillet 1975 du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres

Monsieur le Président du Conservatoire,

Chers collègues,

Mesdames et Messieurs,

Soyez remercié, cher Président Didier Quentin, d'avoir eu cette excellente idée d'ouvrir toutes grandes les fenêtres de notre Palais Bourbon sur les vastes horizons de la mer en associant ainsi l'Assemblée nationale aux diverses manifestations qui ponctuent ce trentième anniversaire de la création du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres.

Quoi de plus légitime en effet que de rappeler que c'est ici, à l'Assemblée nationale, que fut créé le Conservatoire par la loi du 10 juillet 1975 sous l'impulsion du Premier ministre de l'époque, Jacques Chirac ?

Onze ans plus tard, c'est encore à l'Assemblée nationale, en 1986, que fut votée à proprement parler la loi relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral, dite « loi littoral ».

Je souhaite aujourd'hui, à la faveur de ce trentième anniversaire, rendre hommage au formidable travail accompli par les membres et les divers responsables qui se sont succédés au sein du Conservatoire du littoral. Grâce à leur action sur le terrain et en dépit de certaines réticences ou de difficultés récurrentes, la volonté du législateur a pu, au fil des années, se concrétiser ! Beau bilan même s'il reste à conforter : en effet, au 31 janvier 2005, le Conservatoire du littoral a acquis pas moins de 73.200 hectares, soit 861 kilomètres de rivages.

Je remercie les artistes et la Fondation d'entreprise Gaz de France. Je suis frappé par la très grande qualité du travail réalisé par des photographes de tout premier plan, dont la plupart sont ce matin à nos côtés. Je me réjouis que le Conservatoire ait pu constituer avec l'aide de ses partenaires un fond photographique d'une beauté non seulement incomparable mais qui a aussi, et principalement, vocation à souligner combien nos espaces côtiers sont des environnements fragiles soumis à de nombreuses pressions telles que l'urbanisation excessive et incontrôlée, la pollution souvent catastrophique ou encore, comme vient de le rappeler une récente étude, l'érosion des sols.

Beauté et fragilité, voilà me semble-t-il le message principal que délivre notre exposition sur les « figures du littoral » français.

Cette beauté de notre espace côtier représente 4 % du territoire national où sont installés 10 % de la population et 12 % des logements. C'est en partie à la beauté de notre littoral que nous devons les bons bilans successifs de notre industrie touristique.

Mais gardons à l'esprit que nous devons ces chiffres d'une bonne fréquentation de notre littoral au fait même qu'il est préservé. C'est pour la beauté originelle de nos côtes que nombre d'étrangers et de Français font le voyage pour venir se ressourcer dans ce que les spécialistes appellent si joliment « le tiers sauvage du littoral français».

La préservation, au-delà de son évidence écologique, est donc aussi un enjeu économique de tout premier plan. Pour rester séduisant, notre littoral doit rester beau !

***

Mesdames et Messieurs, chers amis,

Persévérons dans nos efforts, aidons le Conservatoire à remplir sa juste mission d'intérêt public, félicitons-nous certes du premier bilan de ces trente années de travail mais soyons vigilants !

Il nous faut être vigilants politiquement. En premier lieu ici, à l'Assemblée et plus généralement au Parlement et dans toutes les instances de pouvoir public, notamment les collectivités locales. Il nous faut savoir résister à certaines pressions qui menacent les espaces naturels côtiers et lacustres français. Je sais que tous les amis de la mer et du littoral peuvent compter sur les députés et sénateurs membres du Conservatoire du littoral.

Le Conservatoire ne peut pas remplacer le rôle des maires. Il ne s'agit pas de se cacher derrière des organismes. Je lance donc un appel à tous les maires de France. Je leur dit vous avez une responsabilité envers les générations futures. Je leur rappelle que notre mission est claire : ne fuyons jamais nos responsabilités ! Nous devons partager et faire partager par le plus grand nombre l'ambition des Français pour la protection de leur environnement.

Il nous faut être vigilants en second lieu car la nature elle-même nous l'impose. J'en veux pour preuve cette étude scientifique rendue publique il y a tout juste un mois qui souligne un littoral français menacé par la hausse du niveau de la mer qui grignote les côtes. Pour la première fois, dans le cadre d'un atelier organisé par le Conservatoire, les scientifiques ont cerné précisément l'impact de l'érosion et la montée de la mer dues au réchauffement climatique sur les plages, les dunes, les falaises, les polders ou prés-salés.

Un seul exemple : l'érosion devrait faire perdre à l'horizon 2100 plus de 80% de sa surface au site de la dune du Pyla en Aquitaine.

Le Maire d'Évreux a également retenu de cette étude que la Normandie est la région la plus exposée aux risques de submersion !

14 % des sites du Conservatoire : estuaire de l'Orne, Manche, basse vallée de l'Yères, etc. se retrouveraient épisodiquement sous l'eau à la fin de ce siècle.

Que le caractère alarmant de ces chiffres nous fasse réfléchir ! Mais que ces chiffres ne troublent cependant en rien le plaisir et l'émotion que nous éprouvons devant ces magnifiques photos d'une exposition que je vous invite maintenant à découvrir.

Je vous remercie.