Michel Dreyfus-Schmidt

1932 - 2008

Informations générales
  • Né le 17 juin 1932 à Belfort (Territoire-de-Belfort - France)
  • Décédé le 7 septembre 2008 à Belfort (Territoire-de-Belfort - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
IIIe législature
Mandat
Du 12 mars 1967 au 30 mai 1968
Département
Territoire-de-Belfort
Groupe
Fédération de la gauche démocrate et socialiste

Mandats au Sénat ou à la Chambre des pairs

Sénateur
du 2 octobre 1980 au 1er octobre 1989
Sénateur
du 2 octobre 1989 au 30 septembre 1998
Sénateur
du 1er octobre 1998 au 7 septembre 2008

Fonds d'archives

Un fonds Michel Dreyfus-Schmidt, qui représente 32,8 mètres linéaires, est conservé aux Archives du Sénat sous la cote 17 EO. Il a été déposé par Michel Dreyfus-Schmidt en 2006, puis donné le 6 mars 2009 par ses enfants. Ces archives, dont la consultation est soumise à autorisation, concernent l'activité parlementaire de Michel Dreyfus-Schmidt et couvrent la période 1957-2008. Elles sont décrites dans un inventaire méthodique.

Un fonds Pierre et Michel Dreyfus-Schmidt de 12,96 mètres linéaires est conservé aux Archives départementales du Territoire de Belfort sous la cote 144 J. Il s’agit d’archives produites entre 1919 et 2008, et qui ont été déposées par la famille en 2008. En outre, des papiers relatifs à l’étude Dreyfus-Schmidt mais concernant également les activités parlementaires de Michel Dreyfus-Schmidt de 1967 à 1990, sont conservés aux Archives départementales. Ils représentent 66 mètres linéaires et sont consultables sous la cote 68 J. Ces documents ont été déposés entre 1993 et 1995. Chacun des ces deux fonds est décrit dans un répertoire numérique. Leur consultation est soumise à autorisation.

Biographies

Biographie de la Ve République

DREYFUS-SCHMIDT (Michel Isaac)
Né le 17 juin 1932 à Belfort (Territoire de Belfort)
Décédé le 7 septembre 2008 à Belfort (Territoire de Belfort)

Député du Territoire de Belfort de 1967 à 1968
Sénateur du Territoire de Belfort de 1980 à 2008

Né en 1932 dans le Territoire de Belfort, Michel Dreyfus-Schmidt est le fils de Pierre Dreyfus-Schmidt, député-maire radical de Belfort de 1945 à 1951, puis de 1956 à 1958. Son père était progressiste avant de rejoindre le Parti socialiste unifié (PSU). Dans sa lignée, Michel Dreyfus-Schmidt s’inscrit au PSU au terme de ses études à l’Institut d’études politiques de Paris et à la faculté de droit de l’université de Paris. Avocat inscrit au barreau de Belfort, il est exclu du PSU en 1964 pour s’être allié localement au MRP et à des dissidents gaullistes, afin d’être élu conseiller municipal de Belfort, à la mort de son père. En 1966, il devient cinquième adjoint de Jean Legay, qui dirige une municipalité de tendance centre-démocrate et socialiste. Après un échec en 1971, Michel Dreyfus-Schmidt retrouve son mandat municipal en 1977 et le conserve jusqu’à sa mort en 2008. En 1965, il soutient François Mitterrand, dont il est le délégué départemental. Un an plus tard, il reconstitue la fédération du Parti radical indépendant avant de prendre le secrétariat de la Fédération de la gauche démocrate et socialiste (FGDS). Il gravite dans la nébuleuse de la Convention des institutions républicaines, mais c’est sous l’étiquette FGDS qu’il est élu conseiller général en 1966. Vice-président de la FGDS de 1976 à 1979, il entre en 1969 au comité directeur du parti socialiste.

Michel Dreyfus-Schmidt se présente aux législatives de 1967 sous l’étiquette FGDS dans la 1ère circonscription du Territoire de Belfort, dont était élu son père jusqu’à sa mort en 1964. A l’issue du premier tour, avec 9 693 voix, soit 34,41 % des suffrages exprimés, il est en ballottage défavorable, devancé par le candidat gaulliste, qui recueille 11 332 voix. Il remporte le second tour avec 52,25 % des suffrages exprimés, et 15 239 voix, grâce au désistement du candidat communiste, qui avait obtenu 4 197 voix au premier tour.

A l’Assemblée nationale, Michel Dreyfus-Schmidt rejoint le groupe FGDS et la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Il est également membre de la commission supérieure de codification. Lors de cette législature, il fait preuve d’une intense activité. Il dépose une proposition de loi tendant à modifier les dispositions de l’article 129 du Code civil relatif à l’absence, le 17 avril 1968. Il rend, le 22 mai 1968, un rapport supplémentaire au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République sur le projet de loi, et les propositions de loi, d’amnistie en relation avec les troubles de mai 1968.

Ses talents d’orateur s’expriment le 23 mai 1967 dans le débat qui suit la déclaration du gouvernement sur les problèmes de la jeunesse. Il dénonce leur approche négative par le gouvernement. Il présente l’animation et l’encadrement des jeunes en dehors de l’éducation nationale comme un moyen, pour la jeunesse, de « s’organiser, de se révéler à elle-même, de trouver son âme », et souligne « le rôle immense des animateurs, nécessaires partout où les jeunes se retrouvent, particulièrement dans les centres socio-culturels qu’un effort énorme des municipalités - il est vrai secondées par l’Etat - a fait apparaître un peu partout en France ». Il dénonce le manque de moyens flagrant (5 000 animateurs quand il en faudrait 50 000) et l’absence de formation des jeunes des classes moyennes n’ayant pas réussi le baccalauréat. De manière prémonitoire, il affirme que la jeunesse française « n’aime pas les guides et est rebelle à l’embrigadement ».

Le député dépose des amendements sur un grand nombre de textes en discussion, dans des domaines variés : l’organisation des justices de paix en Polynésie française, en avril 1967 ; l’amélioration de l’habitat, en mai 1967 ; l’organisation judiciaire de la région parisienne, en juillet 1967 ; le service national, en novembre 1967 ; le projet de loi de finances rectificative pour 1967 ; la question technique de la validation des concours annulés, en novembre 1967 ; la rectification des limites des départements de l’Ain, de l’Isère et du Rhône, en décembre 1967 ; l’amnistie en relation avec les événements d’Algérie, en décembre 1967 ; les donations entre époux, ce même mois ; les objets abandonnés chez les ouvriers et les industriels, en avril 1968 ; la responsabilité civile dans le domaine de l’énergie nucléaire, en mai 1968.

Il intervient longuement, en octobre 1967, sur le projet de loi portant sur le droit des incapables majeurs, présentant en outre de nombreux amendements sur ce texte très technique.

De même, en juillet puis en décembre 1967, se plaçant dans la droite ligne de son père qui, le premier, avait déposé une proposition de loi, le 23 février 1956, demandant la légalisation de la contraception, il intervient en faveur de la proposition de loi de Lucien Neuwirth tout en proposant de nombreux amendements, qu’il n’hésite pas à retirer pour éviter de retarder l’adoption du texte. Son premier argument en faveur de la mesure tient à l’absence de logements salubres en nombre suffisant pour accueillir tous les enfants qui naissent. Il s’agirait ainsi « de voter cette proposition de loi pour éviter que les enfants qui viennent au monde ne soient élevés dans de mauvaises conditions ». Loin de se dire antinataliste, il entend plutôt défendre une planification des naissances. Si la liberté de choix de la femme n’est pas officiellement avancée, il cite Françoise Giroud et trouve inacceptable que des femmes subissent des grossesses trop rapprochées qui mettent en danger leur santé et que des jeunes filles soient obligées d’avoir des enfants qu’elles ne peuvent élever. Dans ce débat, il soutient Lucien Neuwirth lorsqu’il souhaite que l’âge requis pour obtenir un contraceptif sans autorisation parentale soit 18 ans, tandis que le Sénat campe sur l’âge de la majorité légale, qui est alors de 21 ans.

Le 22 mai 1968, Michel Dreyfus-Schmidt intervient au nom de la commission des lois comme rapporteur du projet de loi portant amnistie des événements qui ont eu lieu entre le 15 février et le 15 mai 1968. Ce projet de loi répond, entre autres, à la demande présentée par cinq prix Nobel de littérature, le 8 mai 1968, afin d’obtenir la libération d’étudiants emprisonnés. Le rapporteur ne manque pas d’émailler son propos de remarques personnelles, doutant notamment du bien-fondé d’exiler de France « un garçon dont les étudiants, à tort ou à raison, avaient fait leur leader », qu’on reconnaît comme Daniel Cohn-Bendit, interdit de séjour le 21 mai. Appelant à l’apaisement, il rappelle que plusieurs propositions de loi ont été déposées en faveur d’une amnistie avant le dépôt du projet de loi du gouvernement, en faveur duquel la commission s’est prononcée à l’unanimité. Le 16 mai 1968, lors d’une allocution télévisée, Georges Pompidou avait accordé aux étudiants une amnistie totale, alors que plus de 8 millions de Français se mettaient en grève. Le député de Belfort est interrompu à de fréquentes reprises, ses positions sur l’amnistie des infractions, « contraventions, délits ou crimes » commis par les forces de l’ordre, irritant les députés gaullistes. Il blâme notamment les personnalités ayant envoyé les forces de l’ordre qui seraient, selon lui, responsables des dérapages. Il appelle l’Assemblée à voter le projet de loi sans retard, afin de restaurer le calme. Malgré les objections des communistes et la foule qui se pressait alors devant le Palais-Bourbon, l’amnistie est votée à l’Assemblée. Les infractions commises en relation avec les événements survenus dans l’Université et les manifestations par les manifestants autant que par les forces de l’ordre sont amnistiées mais les faits liés à la guerre d’Algérie ne sont pas couverts.

Le même jour, Michel Dreyfus-Schmidt vote avec son groupe une motion de censure contre le gouvernement Pompidou, laquelle échoue de justesse.

Aux élections législatives de juin, qui suivent la dissolution de l’Assemblée nationale, le député sortant se représente. Il obtient 8 592 voix au premier tour. Son principal adversaire, le candidat de l’Union pour la Nouvelle République (UNR) André Tisserand, qui a recueilli 12 615 voix, remporte le second tour, porté par la « vague bleue », avec 51,92 % des suffrages exprimés. Après la campagne de 1968, Michel Dreyfus-Schmidt sera condamné en diffamation par le Tribunal de Grande Instance de Belfort pour avoir révélé que son opposant avait été membre de la Légion française des combattants et de la Milice, alors que la décision le condamnant à l’indignité nationale avait été annulée.

En 1969, Michel Dreyfus-Schmidt entre au bureau national du PS. Il rejoint son comité directeur en 1971, où il s’inscrit dans la tendance Savary-Mollet. En 1973, privé de l’investiture du parti, qui échoit à Jean-Pierre Chevènement, il se présente aux législatives sous l’étiquette Mouvement réformateur-Centre républicain, mais n’obtient que 2 485 voix, soit 8 % des suffrages exprimés.

Elu au Sénat en 1980, Michel Dreyfus-Schmidt conserve son mandat jusqu’à 2008. Inscrit au groupe socialiste, il siège à la commission des lois du Sénat, où il s’illustre lors de débats importants comme celui sur la peine de mort. Vice-président du Sénat de 1986 à 1998, il dépose des propositions de loi pour la légalisation de l’euthanasie (2004) et le mariage des couples de même sexe (2006). Michel Dreyfus-Schmidt fut également membre de la Cour de Justice de la République (1993-2008), ainsi que de la Haute Cour de Justice (1989-2008), vice-président de la délégation française à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (1998) et à l’Assemblée de l’Union de l’Europe Occidentale en 2000. Il était aussi impliqué dans plusieurs associations : président du groupe « Socialisme et Judaïsme », il appartenait au Congrès Juif mondial, dont il fut vice-président honoraire en 1991 et membre du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), siégeant à son comité directeur peu avant sa mort, le 7 septembre 2008. Dans l’oraison funèbre prononcé lors de ses obsèques par Robert Badinter, celui-ci le décrit comme « le premier à convaincre et le dernier à partir » de l’hémicycle, comme celui qui défendait des justes causes, la lutte contre le totalitarisme, le racisme, l’antisémitisme, les discriminations, la torture et la peine de mort.

Gérard Larcher, lorsqu’il fit son éloge funèbre au Sénat, remarque lui aussi sa ténacité, ses innombrables rappels au règlement et ses multiples amendements, autant que ses talents d’orateur : « De Jean Jaurès et de Pierre Mendès France, qu’il révérait l’un et l’autre, il avait la puissance du verbe et le goût du débat : franc, loyal, puissant ».