Claude, André, Charles, Antoine Hettier de Boislambert

1906 - 1986

Informations générales
  • Né le 26 juillet 1906 à Hérouvilette (Manche - France)
  • Décédé le 22 novembre 1986 à Paris (Paris - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIe législature
Mandat
Du 17 juin 1951 au 1er décembre 1955
Département
Manche
Groupe
Rassemblement du peuple français

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1940 à 1958 (La documentation française)


Né le 26 juillet 1906 à Hérouvillette (Calvados)

Décédé le 22 février 1986 à Paris (13e)

Député de la Manche de 1951 à 1955

Claude Hettier de Boislambert est né le 26 juillet 1906 dans une famille originaire de Caen. Bachelier en 1922, il fait des études de droit et suit les cours de l'Ecole libre de sciences politiques. Ses études terminées, disposant d'une fortune suffisante pour conserver un modèle de vie aristocratique, il fait du sport, voyage en Afrique centrale, découvre la Scandinavie, l'Europe centrale et le Proche-Orient et se livre à son activité favorite, la chasse. Claude Hettier de Boislambert est alors le type même de l'aristocrate éclairé propriétaire foncier. Il dirige, en effet, une exploitation agricole à Sainte-Marie du Mont, dans la Manche, quand, en 1939, l'ordre de mobilisation générale le conduit à revêtir l'uniforme de lieutenant de cavalerie.

Durant la première bataille de France, Claude Hettier de Boislambert commande un peloton à cheval dans un groupe de reconnaissance avant d'être officier de liaison auprès de l'Armée britannique et de participer aux opérations de Belgique avec les unités de chars de la 1re Division cuirassée anglaise. Ayant rejoint les lignes françaises sur la Somme, le 20 mai 1940, il participe aux combats qui retardent l'avance des armées allemandes et se retrouve acculé à la mer, à Brest. Convaincu qu'il faut continuer coûte que coûte le combat, il traverse la Manche à bord du paquebot Guinean en entraînant avec lui les officiers et sous-officiers qui servent sous ses ordres. Il est le premier officier à se rallier dès le 19 juin au général de Gaulle dont il avait pu mesurer la détermination lorsqu'il l'avait rencontré au cours des opérations sur le sol national. Il est affecté au premier état-major que le général met sur pied ainsi qu'à son cabinet. En compagnie du capitaine Leclerc et de René Pleven, le capitaine de Boislambert, qui connaît très bien l'Afrique pour y avoir chassé régulièrement avant la guerre, participe à l'opération hardie qui entraîne le ralliement du Cameroun en août 1940 et s'empare à Pointe-Noire de cinq cargos français. Cette action d'éclat lui vaudra d'être fait Compagnon de la Libération. Promu chef d'escadron avant la tentative franco-britannique sur Dakar le 23 septembre, Hettier de Boislambert prend la direction des opérations intérieures en soutien au débarquement qui finalement n'aura pas lieu. C'est un échec et il est arrêté le 30 septembre à l'issue d'une chasse-poursuite de cinq jours dans la brousse. Il est condamné, le 13 juin 1941, aux travaux forcés à perpétuité et est emprisonné à Saint Etienne puis à Gannat d'où il s'évade fin 1942. Il rejoint alors Londres, au début de l'année 1943. Claude Hettier de Boislambert accompagne le général de Gaulle à la conférence de Casablanca, remplit différentes missions en Afrique puis, nommé lieutenant-colonel, il est chargé de mettre sur pied la mission militaire française de liaison administrative qui a pour objet d'harmoniser les rapports entre les forces alliées et les populations libérées. En fait, il s'agissait d'une pièce essentielle dans le dispositif qui visait à interdire l'établissement de l'AMGOT (gouvernement militaire allié des territoires occupés), c'est-à-dire de l'administration de la métropole par des officiers alliés. Au fur et à mesure de l'avance des alliés en métropole, il contribue à rétablir la souveraineté française. Le plus souvent en première ligne, il entre parmi les premiers dans les villes libérées, Caen, Saint-Lô, ou bien encore Rennes où il est blessé le 2 août 1944.

En 1944, Claude Hettier de Boislambert est désigné pour siéger à l'Assemblée consultative provisoire de Paris. Il préside le groupe de la Résistance extra-métropolitaine et participe aux travaux des commissions des colonies- dont il rapporte le budget des finances et de l'information. Le 15 novembre 1945, il est nommé gouverneur de Rhénanie et le reste jusqu'en 1951. A ce poste, il œuvre particulièrement à la reconstruction du land rhéno-palatin nouvellement crée, et au redémarrage de l'industrie.

En 1951, Claude Hettier de Boislambert décide de succomber à l'appel de la politique et démissionne pour se présenter aux élections législatives dans la Manche et sous l'étiquette du Rassemblement du Peuple Français. Le 17 juin, la liste qu'il conduit obtient 61 249 voix sur 199 487 suffrages exprimés et obtient deux élus, les sièges ayant été répartis à la représentation proportionnelle. A l'Assemblée, Claude Hettier de Boislambert est nommé membre de la Commission des affaires étrangères et à partir de 1954 de la Commission des territoires d'outre-mer. Ce bon connaisseur de l'Afrique fut aussi vice-président de la commission d'enquête chargée de vérifier les modalités d'application du code du travail dans les territoires d'outre-mer et les territoires associés. Au Palais-Bourbon, Claude Hettier de Boislambert s'intéresse plus particulièrement aux questions touchant à l'Union française et aux relations internationales. Ainsi, en 1954, a-t-il été nommé membre de la commission de coordination pour l'étude des questions relatives à la CECA.

Au cours de la législature, il dépose différentes propositions de résolution ou de loi. Ainsi, le 27 juin 1952, une proposition de loi tendant à instituer un permis de chasse unique dénommé « permis national de chasse » ou bien encore le 22 juillet 1953 une proposition de résolution invitant le gouvernement à déposer un projet de loi assurant la mise en œuvre du régime de l'allocation de vieillesse des personnes non salariées. Il intervient aussi en faveur des victimes de la rupture des digues de la baie de Veys dans la Manche. Sans doute est-ce par égard pour l'ancien Français libre René Pleven qu'il s'abstient lors du vote de son investiture, le 24 juillet 1951, mais manifeste malgré tout son hostilité à la tentative qui est faite de poursuivre les formules de Troisième force en votant contre la composition de son gouvernement, le 11 août. En septembre, il approuve les lois Marie et Barangé et, le 13 décembre, s'oppose à l'adoption du traité de la CECA. Le 6 mars 1952, Claude Hettier de Boislambert ne suit pas les vingt-sept députés RPF qui votent l'investiture d'Antoine Pinay. Il ne participe pas au vote et s'abstient volontairement sur l'ordre du jour tendant à approuver la composition du gouvernement. Après que le général de Gaulle eut rendu sa liberté aux députés RPF, Claude Hettier de Boislambert s'inscrit au groupe de l'URAS, puis des Républicains sociaux. Le 6 janvier 1953, il vote l'investiture de René Mayer et le 27 mai, il prend part au débat sur l'investiture du président du conseil désigné, Paul Reynaud. Il ne cache pas qu'il est tenté d'apporter son suffrage car la réforme de la Constitution est une priorité absolue et Paul Reynaud a annoncé qu'il ne formera de cabinet que si le Parlement vote en huit jours un projet de révision constitutionnelle qui autoriserait la dissolution automatique de l'Assemblée, dans l'hypothèse où un gouvernement serait renversé moins de dix-huit mois après sa formation. Mais, en fait, l'attachement de l'ancien président du conseil de la Troisième République à l'Armée européenne indispose le député gaulliste. Parler, comme l'a fait Paul Reynaud, de l'alternative, entre armée européenne et armée allemande est un faux dilemme, fait observer Claude Hettier de Boislambert. Evoquant son expérience de gouverneur de l'état rhéno-palatin il note que le « öhne uns » (sans nous) des Allemands n'était pas un cri de lâcheté mais un cri de prudence. Quant au traité de CED, il exige des garanties supplémentaires. Certes, conclut-il, « la stabilité et la continuité gouvernementales sont indispensables », mais il n'est pas possible de les acquérir à un prix aussi dangereux. Aussi, décide-t-il de s'abstenir volontairement, position qu'il conserve lors du vote de l'investiture de Pierre Mendès France le 4 juin. En revanche, il vote l'investiture de Joseph Laniel mais la dégradation de la situation en Indochine le conduit à priver le gouvernement de son soutien.

Les 6 et 13 mai 1954, en effet, Claude Hettier de Boislambert interpelle le gouvernement sur sa politique en Indochine. Il souligne l'interdépendance des questions de la CED et de l'Indochine : « les problèmes posés, dit-il, dépassent même les barbelés de Dien Bien Phu, car c'est notre présence en Asie, la structure et la cohésion de toute l'Union française qui est aujourd'hui en cause. » Aussi refuse-t-il d'accorder sa confiance au gouvernement. « C'est en pensant avec angoisse à nos blessés, à ceux qui se battent, à leurs épreuves, que beaucoup d'entre nous répondront non à la question de confiance. ». Et, il ajoute : « la gloire de nos armes permet une négociation honorable qui ne saurait pour cela et en aucune façon (...) être une capitulation. ». Le lendemain, les combats cessaient à Dien-Bien-Phu. Le 13 mai, il refuse à nouveau au nom de ses amis, la confiance au gouvernement et, le 25 mai, il est nommé par la Commission des territoires d'outre-mer membre suppléant de la Commission de coordination pour l'examen des problèmes intéressant les Etats associés d'Indochine. Le 12 juin, il refuse la confiance réclamée par le gouvernement et participe ainsi à sa chute. Il accorde alors son soutien à Pierre Mendès France, approuve son investiture et sa politique en Indochine. Il vote la question préalable du général Aumeran qui rejette sans débat le projet de Communauté européenne de défense le 30 août 1954 et dans la foulée les accords de Londres et de Paris. Le 4 février 1955, il apporte à nouveau son soutien au gouvernement à l'issue des interpellations sur sa politique en Afrique du Nord, en vain puisque le gouvernement est renversé.

Le 26 octobre 1955, Claude Hettier de Boislambert prend part à la discussion d'interpellations sur la politique générale du gouvernement Edgar Faure. Comme « partisan convaincu de la nécessité de la stabilité gouvernementale, d'une juste répartition des pouvoirs et des responsabilités (...) », il dénonce à nouveau l'instabilité gouvernementale et fustige la politique du cabinet qui conduit la France à la démission et à l'isolement comme l'attestent les résultats du référendum sur le statut de la Sarre. Quant à l'Afrique du Nord, sa situation exige une politique de fermeté qui trancherait avec les atermoiements pratiqués jusque-là. Le député de la Manche s'interroge, enfin, sur la politique de la France en Indochine. Il exprime la méfiance que lui inspire Diem et dénonce le trucage des élections. « Le référendum, dit-il, a été conduit dans des conditions qui seraient comiques si l'instant n'était pas grave. ». Il suggère que les Etats-Unis tirent les ficelles au Vietnam quand il faudrait laisser toutes les sensibilités s'exprimer pour faire face au seul danger, le communisme du Nord. D'ailleurs, poursuit-il, tout ce qui est fait en Indochine encourage le communisme, « le grand bénéficiaire des attitudes de votre gouvernement » lance-t-il à Edgar Faure. Le 2 janvier 1956, Claude Hettier de Boislambert n'est pas réélu député de la Manche.

Pour n'avoir jamais cessé de voyager régulièrement en Afrique depuis les années Vingt, l'ancien député de la Manche avait acquis une connaissance approfondie de ce continent. Aussi, le général de Gaulle le nomme-t-il, en 1960, ambassadeur et haut-représentant de la France auprès de la Fédération du Mali puis, après son éclatement, ambassadeur de France à Dakar (Sénégal) et ceci jusqu'en 1962. Il est alors nommé par le Président de la République, Grand Chancelier de l'Ordre de la Libération et le reste jusqu'en 1978. En 1974, il se prononce en faveur de l'élection à la présidence de la République de Valéry Giscard d'Estaing, non sans provoquer quelques remous chez ses compagnons gaullistes.

Il meurt à Paris le 22 février 1986.