Maurice Lacroix

1893 - 1989

Informations générales
  • Né le 28 août 1893 à Pignols (Puy-de-Dôme - France)
  • Décédé le 13 février 1989 à Champeix (Puy-de-Dôme - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Gouvernement provisoire de la République française
Législature
Ire Assemblée nationale constituante
Mandat
Du 21 octobre 1945 au 10 juin 1946
Département
Seine
Groupe
Résistance démocratique et socialiste

Biographies

Biographie extraite du dictionnaire des parlementaires français de 1940 à 1958 (La documentation française)



Né le 28 août 1893 à Pignols (Puy de Dôme)
Décédé le 13 janvier 1989 à Champeix (Gironde)

Membre de la première Assemblée nationale constituante (Seine).

De son père professeur de l'enseignement libre et maire de Pignols, Maurice Lacroix hérite d'une soif de connaissances et une vocation à dispenser son savoir. Elève brillant, il entre à l'Ecole Normale Supérieure en 1912. Agrégé de lettres en 1915, il est nommé à l'Ecole française d'Athènes où, il voit défiler les jeunes gens de sa génération qui montent au front des Dardanelles.

De retour en France, il enseigne quelque temps en province, puis est rapidement amené à enseigner à Paris. C'est au lycée Henry IV qu'il fera la majeure partie de sa carrière. Il y présidera longtemps à la destinée d'Hypokhâgne et de Khâgne. Engagé dans la vie syndicale, il dirigera le journal de la Fédération de l'enseignement du deuxième et du troisième degré, intitulé Le Syndicaliste Universitaire. Lorsque sa conscience oppose sa foi catholique à son cœur socialiste, il trouve en Marc Sangnier une réponse à ses dilemmes.

Il se présente sur une liste d'Union républicaine pour la paix dirigée par ce dernier aux élections législatives de 1924 dans la troisième circonscription de la Seine. Avec respectivement 7 596 et 15 065 voix sur 198 996 suffrages exprimés, ni lui, ni Marc Sangnier ne sont élus. Cette première tentative d'accéder à la députation le pousse à poursuivre son engagement politique. Membre de Jeune République, mouvement fondé par Sangnier en 1912, il en devient vite l'un des leaders. Il s'illustre enfin comme un fervent partisan de cette vieille idée athénienne qu'est la démocratie lorsque celle-ci, à la fin des années trente, est menacée par l'agitation des ligues.

Maurice Lacroix marque son refus de l'occupation et du régime de Vichy dès la fin de 1940. Prenant des risques inconsidérés, il distribue ouvertement des tracts prônant la résistance au nom de Jeune République. Plus tard il rejoint le réseau Résistance de Jacques Destrée, auprès de qui il gagne, par son courage et son abnégation, la considération des résistants parisiens et la Légion d' honneur après la libération.

Dédaignant les sollicitations du MRP qui fait alors de Marc Sangnier son président d'honneur, c'est en deuxième position derrière Paul Rivet qu'il figure sur la liste SFIO qui se présente dans la première circonscription de la Seine, le 21 octobre 1945, aux élections à la première Assemblée nationale constituante. Sa liste obtient 90 469 voix sur 429 633 suffrages exprimés et deux des dix sièges à pourvoir. Elu SFIO, il rejoint néanmoins très vite le groupe de l'Union démocratique socialiste des résistants (UDSR). Il est élu membre de la Commission de l'éducation nationale et des beaux-arts et membre de la Commission du travail et de la sécurité sociale. Nommé rapporteur de la Commission d'enquête sur les opérations électorales dans le département d'Oran, Maurice Lacroix porte un regard attentif et vigilant sur les départements algériens. Outré par le comportement des gendarmes français lors de l'enquête, il montre, en revanche, de la compréhension pour la rébellion des indigènes lors des émeutes de la fin de la guerre. Il manifeste également ses positions démocrates et son opposition aux excès d'un pouvoir aux mains d'un homme seul. Le 23 novembre 1945, il insiste sur l'importance du multipartisme, puis, les 15 et 17 avril 1946, lors des débats sur le mode d'élection du président de la République, il met en garde l'Assemblée contre tout risque de « Brumaire » que pourraient tenter les héros de la Résistance. Défenseur convaincu des petites formations politiques, pourvoyeuses, d'après lui, d'idées nouvelles, Maurice Lacroix s'oppose aussi à l'excès de puissance des grands partis. Aussi, va-t-il se battre avec énergie, au cours des premiers jours d'avril 1946, contre la loi Bardoux, qui veut imposer un mode d'élection proportionnel compliqué et surtout injuste selon lui, car il risque de spolier près d'un million d'électeurs par l'application de la règle des cinq pour cent.

Toutefois, tous ces centres d'intérêts n'effacent pas la passion de Maurice Lacroix pour l'école laïque. Il évoque celle-ci lors de la séance du 15 mars en disant simplement : « J'en ai été élève, j'en suis fonctionnaire et je lui ai confié mes enfants ». Sa participation à la Commission de l'éducation nationale et des beaux arts est très active, puisque, sur des sujets techniques relatifs aux heures supplémentaires et au Conseil supérieur de l'éducation nationale, il en est le rapporteur à trois reprises, les 19 février, 23 mars et 13 avril 1946. Il interpelle aussi le ministre par une question écrite, le 18 décembre 1945, sur la pension des enseignants retraités. Son combat au sein de l'Assemblée vise essentiellement à conserver à l'éducation nationale et à ses agents des moyens décents pour faire leur œuvre dans la formation des futurs citoyens.

Professeur mais aussi chrétien et père de famille, Maurice Lacroix cherche à protéger la cellule familiale. Il dépose ainsi, le 23 novembre 1946, une proposition de résolution tendant à donner aux chefs de famille les mêmes avantages fiscaux que les contribuables sans enfants. Quelques mois plus tard, le 19 mars 1946, il prend position en faveur de l'amendement de Germaine Peyrolles qui tend à faire une place à la famille dans le Préambule à la Constitution. Il sait aussi parler de la grande famille ouvrière au sein de la Commission du travail, dont il sera rapporteur, le 24 avril 1946, pour autoriser le gouvernement provisoire à changer la constitution de l'Organisation internationale du travail.

Il ne se représente pas en 1946 mais tente à nouveau sa chance en 1951 dans la deuxième circonscription de la Seine. Second sur une liste du Cartel des gauches indépendantes conduite par Claude Bourdet qui obtient moins de deux pour cent des suffrages exprimés, il n'est pas élu. Maurice Lacroix retrouve donc ses élèves dès 1946 et reprend la rédaction d'un Dictionnaire Grec-Français et la traduction des Bacchantes d'Euripide. Mais ses publications ne dépasseront jamais la confidentialité des spécialistes du grec ancien. Sa dernière lutte il la mènera contre la création d'une agrégation de lettres modernes, tant il croit à la valeur pédagogique de l'apprentissage du grec et lu latin. Il poursuivra jusqu'à quatre-vingt-cinq ans son enseignement du grec aux agrégatifs du cours Sévigné à Paris. Sa mort, onze ans plus tard, en 1989, conclura la vie bien remplie de ce chrétien fervent, défenseur de la démocratie et de la langue de Périclès.