Abdelmadjid Benhacine

1914 - 1982

Informations générales
  • Né le 20 février 1914 à Constantine (Algérie)
  • Décédé le 27 février 1982 à Montpellier (Hérault - France)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Cinquième République - Assemblée nationale
Législature
Ire législature
Mandat
Du 30 novembre 1958 au 3 juillet 1962
Département
Anciens départements d'Algérie
Groupe
Unité de la République

Biographies

Biographie de la Ve République

BENHACINE (Abdelmadjid)
Né le 20 février 1914 à Constantine (Algérie)
Décédé le 27 février 1982 à Montpellier (Hérault)

Député de Constantine de 1958 à 1962

Abdelmadjid naît en 1914 dans une famille citadine de Constantine, à l’est de l’Algérie. Il est, comme ses parents, un « Algérien musulman » : s’il jouit de la nationalité française, il ne dispose pas de tous les droits compris dans la citoyenneté républicaine. Il effectue ses études primaires à l’école française et à l’école coranique. En 1932, à l’âge de dix-huit ans, il s’engage dans les spahis algériens, célèbre régiment de cavaliers dans lequel il s’illustre pendant quinze années. Il participe, pendant la Seconde guerre mondiale, aux campagnes de France et de Tunisie. En 1947, il quitte son régiment de spahis avec le grade d’adjudant-chef. Il est alors employé à la station expérimentale d’élevage du Khroub, dans le sud de Constantine, en tant que surveillant animalier.
La carrière politique de l’ancien spahi ne commence qu’avec l’entrée de l’Algérie en guerre d’indépendance, avec les attentats simultanés de la Toussaint 1954. C’est le retour au pouvoir du général de Gaulle, après les manifestations du printemps 1958, qui donne vraiment le départ de son engagement. L’un des points marquants de la politique algérienne du pouvoir gaulliste consiste en l’organisation dans les départements ultra-méditerranéens des élections législatives. En effet, depuis leur ajournement sine die par le gouvernement Guy Mollet en 1956, l’Algérie n’a pas élu de députés. La consultation électorale, censée normaliser une situation des plus violentes, est prévue pour la fin du mois de novembre 1958. L’une des particularités de ce scrutin tient aux dispositions contenues dans l’ordonnance du 16 octobre 1958 relative à l’élection des députés des départements d’Algérie à l’Assemblée nationale. Le principe du double collège, d’abord, est aboli au profit d’un collège unique pour tous les électeurs, qu’ils soient Français ou Français musulmans. Il s’agit, ensuite, d’un scrutin de liste majoritaire à un tour, sans panachage ni vote préférentiel. Chaque liste de candidats doit, enfin, « respecter une certaine proportion entre les citoyens de statut civil de droit commun et les citoyens de statut civil local, afin de permettre une juste représentation des diverses communautés ». Dans la treizième circonscription algérienne, celle de Constantine, cette répartition est fixée à un candidat de statut civil de droit commun et trois candidats de statut civil local, ou Français musulman d’Algérie.
Abdelmadjid Benhacine présente sa candidature à l’Assemblée nationale sur la Liste présentée par les Comités de salut public. Ces derniers sont directement issus des manifestations du 13 mai ; ils se sont développés à travers l’Algérie et regroupent des partisans résolus de l’autorité française, dont un certain nombre de militaires et anciens militaires. Abdelmadjid Benhacine prend la tête de la liste. Les candidats, par l’intermédiaire de leur profession de foi, se déclarent directement issus du mouvement du 13 mai 1958, qui affirmé « l’union indéfectible de l’Armée et de la Nation », et se réclament de la personnalité du général Salan. Ils poursuivent les buts que se sont donnés les hommes de mai 1958 : « l’intégration de l’Algérie et du Sahara à la patrie française », « le renouveau de la France en lui reforgeant une âme qui lui redonne le sens de la grandeur et de la foi dans son destin ». Les candidats revendiquent leur noviciat en matière politique : ils affirment leur volonté de tenir à distance « la dictature des partis », qui fait le jeu du « communisme destructeur » ; pour eux, en Algérie la politique doit céder la place à l’action économique et sociale, annoncée par le général de Gaulle dans son discours de Constantine. Les candidats finissent en affirmant que voter pour eux, c’est dire « oui à l’Algérie française », « oui à la France ».
La formation des listes, la campagne électorale, le scrutin lui-même ne respectent guère le processus démocratique habituel : les membres de l’administration, mais aussi les militaires, soutiennent explicitement certaines listes et font pression sur la population votante. Dans la grande ville de l’est algérien, trois listes candidates à la représentation parlementaire sont de même inspiration « Algérie française ». Une Liste républicaine démocratique et socialiste est par ailleurs en lice. La Liste du Comité de salut public obtient 35 % des suffrages exprimés, suivie de près par la Liste républicaine de concorde et d’action sociale pour la promotion d’une fraternelle civilisation qui obtient 30 % des suffrages exprimés. Ce sont les quatre députés de la liste ayant obtenu le plus de voix qui sont envoyés à l’Assemblée nationale, parmi eux Abdelmadjid Benhacine.
Le nouveau député constantinois s’inscrit au groupe de la Formation administrative des élus d’Algérie et du Sahara (EAS), qui prend à partir du mois de juillet 1959 le nom de groupe de l’Unité de la république (UR). En 1960, il s’apparente au groupe de l’Union pour la nouvelle République (UNR), dont il est exclu en 1961 du fait de son appartenance au Rassemblement démocratique algérien (RDA). En 1962 il rejoint le groupe de l’Entente démocratique. Abdelmadjid Benhacine est nommé membre de la Commission de la production et des échanges (1959), puis de la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République (1960), enfin de la Commission des affaires culturelles, familiales et sociales (1962). Il intervient à plusieurs reprises à la tribune du Palais Bourbon. Le 14 octobre 1959, lors de la discussion sur la déclaration du Premier Ministre relative à la politique générale du gouvernement, il exprime sa pleine confiance dans le général de Gaulle au nom de la population algérienne qu’il représente en partie. Il explique que le chef de l’Etat est « le seul qui ait tenu ses promesses », quand en Algérie les réformes sont longtemps restées à l’état de discours. Le lendemain, lors de la même discussion, il dénigre ceux qui en Algérie ont retiré leur soutien au général de Gaulle, considérant ses actions en faveur des Français musulmans comme excessives, et fait état de menaces qu’il aurait reçues. Le 2 février 1960, lors de la discussion sur les pouvoirs spéciaux du gouvernement en Algérie, il revient sur la « semaine des barricades » du mois précédent à Alger et dénonce les incohérences de la répression en Algérie depuis le début des « événements ». Il rappelle que la paix ne saurait advenir sans que la justice soit respectée, et recueille lors de son discours de nombreux applaudissements des députés de gauche. Le 7 décembre 1960, il prend part à la discussion sur la déclaration du Premier Ministre relative à l’Algérie. Il exprime alors « un cri de désespoir, un ultime appel à la raison des gens lucides et de bonne foi ». Il revient sur le passé algérien, et demande : « Est-ce la faute des Algériens s’ils ont subi depuis cent trente ans une politique faite de contradictions et d’incohérence ? Est-ce la faute des Algériens de s’être vus refuser la citoyenneté française au temps où leur loyalisme et les sacrifices qu’ils avaient consenti la justifiaient pleinement ? ». Le député constantinois est interrompu à de nombreuses reprises par ses contradicteurs, parmi lesquels Saïd Boualam et Jean-Marie Le Pen qui lui lance notamment « C’est l’armée qui vous a envoyé ici ! ». Il continue : le but à atteindre en Algérie, avec la France, est l’autodétermination. Avec courage, il défend les nationalistes algériens, dont Ferhat Abbas qu’il cite, et explique : « Si je ne comprends pas très bien le français, c’est que je n’ai pas eu la chance d’aller assez longtemps à l’école ». Pour lui, « l’Algérie doit beaucoup à la France », mais « l’Algérie doit aussi énormément à la révolution appelée dédaigneusement rébellion ». Son intervention provoque un véritable incident dans les tribunes du Parlement, certains députés menaçant de quitter la salle tandis que d’autres demandent le départ voire la déchéance de Benhacine. Le 29 juin 1961 enfin, il prend part au débat sur la déclaration du gouvernement relative aux problèmes algériens, et rappelle qu’il a toujours pensé « que seule négociation pouvait apporter une solution au dramatique problème algérien ». Il critique le fait que la France exige des nationalistes algériens une trêve unilatérale sans faire taire les armes de son côté ; il condamne par ailleurs l’ensemble des préalables exigés pour ouvrir les négociations, qui les retardent et hypothèquent leur avenir. Il explique enfin que « l’espoir d’une paix durable en Algérie réside dans la négociation loyale entre le gouvernement français et le GPRA » (gouvernement provisoire de la république algérienne).
Le député algérien manifeste, tout au long de son mandat, sa fidélité à l’égard du pouvoir gaulliste. Il se prononce, le 16 janvier 1959, en faveur du programme du gouvernement Debré ; le 15 octobre de la même année il approuve la déclaration de politique générale faite par le Premier ministre. Le 23 décembre 1959 en revanche, il ne prend pas part au vote sur le projet de loi concernant l’enseignement privé. Le 2 février 1960, il vote pour le projet de loi sur les pouvoirs spéciaux du gouvernement. Enfin, le 27 avril 1962, il se prononce en faveur du programme du nouveau Premier ministre Georges Pompidou. Durant les années de son mandat de député, Abdelmadjid Benhacine poursuit également une activité politique locale en Algérie : entré dans la délégation spéciale de la commune du Khroub en 1956, il est élu conseiller municipal de la ville en 1958.
Le 3 juillet 1962, le mandat de député français d’Abdelmadjid Benhacine prend fin, avec l’indépendance de l’Algérie. En ce jour, l’ordonnance relative au mandat des députés et sénateurs élus dans les départements algériens et sahariens y met un terme. L’ancien parlementaire vit les dernières années de sa vie à Montpellier, avec son épouse. Il y décède en 1982. Il était décoré de la Médaille militaire.