Mahasumpo Raveloson

1909 - 1966

Informations générales
  • Né le 1er janvier 1909 à Bélalanda (Madagascar)
  • Décédé le 7 octobre 1966 à Tananarive (Madagascar)

Mandats à l'Assemblée nationale ou à la Chambre des députés

Régime politique
Quatrième République - Assemblée nationale
Législature
IIe législature
Mandat
Du 17 juin 1951 au 1er décembre 1955
Département
Madagascar

Biographies

Biographie de la IVe République

RAVELOSON-MAHASAMPO
Né vers 1909 à Belalanda (Madagascar)
Décédé le 7 octobre 1966 à Tananarive (Madagascar)

Député de Madagascar de 1951 à 1956

Né vers 1909 à Belalanda, dans le sud malgache déshérité et sous-administré, Raveloson-Mahasampo appartient à un sous-groupe Sakalava devenu une petite ethnie en raison de sa singularité : les Vezo sont en effet la seule population de l'île qui vive entièrement de la mer. C'est une population mobile, ouverte sur le monde extérieur, surtout au niveau de ses groupes statutaires "nobles" dominants dont est issu le jeune Raveloson-Mahasampo, qui hérite aussi d'une vieille hostilité aux Merina, arrivés en conquérants dans le pays en 1889 seulement. Dans une région très faiblement scolarisée, il a la chance de pouvoir entrer à l'école régionale de Tuléar. Remarqué pour sa vigueur physique et son dynamisme, il est admis à l'école Le Myre de Vilers de Tananarive, le modèle malgache de "William-Ponty" à Dakar. Il bénéficie ainsi de la nouvelle politique du gouverneur général Olivier (1924-1930), qui au nom de la "politique des races", cherche à régionaliser le recrutement des fonctionnaires subalternes.
Au terme d'études vécues comme un déracinement, Raveloson-Mahasampo retourne à Tuléar où il épouse une jeune Tsimenatse, le clan "de ceux qui n'ont pas honte" (de nouer des relations étroites avec les Européens). Huit enfants naissent de 1929 à 1941. Jusqu'à la guerre, Raveloson-Mahasampo exerce la fonction d'écrivain-interprète dans la région de Tuléar. Sa carrière fait un bond à la fin de la guerre, quand il devient gouverneur administratif, c'est-à-dire proche collaborateur du chef de district français. Il s'intéresse alors à la politique. Suivant l’un de ses amis du Parti des Déshérités de Madagascar (PADESM), il aurait pris position contre le leader local du nationalisme, Jonah Raseta, un médecin merina, quand il se serait aperçu, en discutant avec lui, qu'il n'avait que dédain pour le petit peuple symbolisé par les tireurs de pousse. En octobre 1945, il soutient donc l'adversaire de Raseta, le côtier Totolehibe. Mais ce dernier se fera battre en octobre 1945 (première constituante), juin 1946 (seconde constituante) et novembre 1946. Payant d'audace, Raveloson-Mahasampo se présente lui-même en juin 1946, mais il ne recueille que 497 voix contre 13 529 à Raseta et 8 502 à Totolehibe.
Au même moment, il est l'un des fondateurs et premier dirigeant à Tuléar, du PADESM, le parti des côtiers et des basses classes de l'Imerina, les anciens dominés sous la monarchie merina, qui voient le parti nationaliste MDRM comme celui des classes dirigeantes merina traditionnelles. Raveloson-Mahasampo est aussi, en août 1946, à Tananarive, l'un des huit rédacteurs du Voromahéry, le journal du PADESM, que de violentes polémiques opposent à la presse nationaliste MDRM. Cet organe de presse interpelle rudement Ravoahangy lorsque ce dernier vient à Tuléar, à l'instigation de l'administration locale.
En janvier-février 1947, il est élu conseiller provincial de Tuléar (le PADESM y remporte quatre sièges sur cinq) et le 30 mars, membre de l'assemblée représentative de Madagascar.
L'insurrection vient d'éclater, mais malgré une forte implantation MDRM, la région de Tuléar ne bouge pas. En juin 1947, le Haut-commissaire rend compte à Paris que 200 notables de la vallée du Fiherenana sont venus "spontanément reconnaître leurs erreurs et demander pardon" et que, ailleurs, quelque 1 000 membres du MDRM sont également venus demander pardon au gouverneur Raveloson-Mahasampo. Désormais, le sud-ouest de Madagascar est le fief de ce dernier.
Dans le PADESM, Raveloson-Mahasampo est en position de force et, arguant des défaites répétées de Tololehibe, il exige au congrès du parti tenu à Tuléar, en décembre 1947, d'être déjà désigné comme candidat de l'ouest aux législatives prévues pour l’année 1951. En fait, il représente ces notables, côtiers anti-mérina qui ne veulent pas d'un parti centralisé lançant ses directives de Tananarive. Il incarne aussi la tendance francophile favorable au statu quo, contre une "gauche" de nationalistes modérés. Il en résulte une sécession : en avril 1948, il fonde l' "Union démocratique côtière" (UDC), qui entraîne à sa suite l’adhésion des régions de Tuléar et de Diego-Suarez, et plus de la moitié des sections du PADESM. Raveloson-Mahasampo a donc pris la lourde responsabilité d'une politique de division des Malgaches, tant dans le jeu des partis qu'à l'intérieur du sien.
Clientélisme régional et francophilie affichée assurent du moins le succès de sa carrière à court terme. Aux élections provinciales de 1949, l'UDC remporte 12 des 20 sièges au conseil de Tuléar, et un succès également dans la province de Majunga. Son chef est élu vice-président de l'assemblée représentative de Madagascar.
Aux législatives du 17 juin 1951, il est facilement élu par 229 107 voix contre 4 807 à son adversaire, un Padesm "de gauche". Un autre candidat Padesm, Philibert Tsiranana, le futur président de la République, avait accepté de se désister en faveur de Raveloson-Mahasampo moyennant la promesse d'un siège de sénateur aux élections de 1952.
La profession de foi du nouvel élu est claire : "Patriote animé d'un indéfectible attachement à la France", il promet de "travailler pour le mieux-être du peuple malgache et pour entretenir au mieux l'amitié franco-malgache. Il prend acte de la condamnation des trois députés de 1946-1947 qui ont "commis des actes anti-français". Mais ceci ne signifie nullement qu'il n'a pas de revendications à présenter : il réclame l'extension des pouvoirs des assemblées, provinciales et représentatives, et des conseils municipaux, pour tout ce qui touche à la vie des populations ; un nouveau code civil plus moderne pour les Malgaches ; un effort important de modernisation de l'agriculture, et surtout "l'ouverture d'écoles supérieures dans les principales villes", ainsi que l'abolition de toute distinction entre enseignants autochtones et enseignants européens. En effet, pour le nouveau député de Madagascar, "une indépendance et une liberté sans instruction et sans travail, c'est le retour à la barbarie et à l'anarchie". De fait, il n'y a de lycée qu'à Tananarive, et c'est la loi-cadre qui, en 1957, en créé un par chef-lieu de province, donc aussi à Tuléar. En 1951, Raveloson-Mahasampo scande : "il nous faut des élites… originaires de ce pays". Il est bien placé pour savoir ce qui a manqué à sa formation.
Ce sont ces lacunes de formation, en effet, qui expliquent que, de 1951 à 1956, Raveloson-Mahasampo ne se manifeste pratiquement pas au parlement. Nommé à la commission des territoires d’Outre-mer où il siège de manière non continue (1951-1952 et 1954-1956), sa seule initiative parlementaire est un rapport déposé au nom de la commission précitée et rejetant la demande communiste d'abroger le décret de mai 1947 prononçant la dissolution du Mouvement démocratique de rénovation malgache (MDRM). Par ailleurs, Raveloson-Mahasampo, qui s'est inscrit au groupe de l’Union démocratique et socialiste de la Résistance (UDSR) derrière François Mitterrand, n'effectue aucune intervention et ne dépose aucune proposition de loi ou de résolution, se contentant de voter les projets présentés par son collègue Ranaivo-Jonah, député des Hautes-Terres, notamment sur l'amnistie des Malgaches condamnés pour participation aux événements de 1947.
A Madagascar même, il suscite la colère des nationalistes quand en 1953, pour les élections à l'Assemblée de l'Union française, il s'allie, tout comme les autres parlementaires malgaches, aux Européens conservateurs pour faire barrage aux nationalistes durs. Raveloson-Mahasampo va donc être l’une des premières victimes de la réorientation de la politique de l'administration coloniale. En 1951, celle-ci cherchait à effacer les traces de 1947 en poussant en avant des pro-français inconditionnels. A partir de 1954, les Français cherchent des candidats de consensus, donc un rapprochement avec les nationalistes modérés. Ils vont sacrifier assez cyniquement leurs anciens partisans et jouer la carte Tsiranana en 1955-1956.
Mais Raveloson-Mahasampo a cru trop longtemps que le clientélisme local, appuyé sur l'administration, devait suffire à assurer définitivement sa stature de chef, au point qu'il a laissé l’UDC entrer en léthargie. Sa campagne électorale, fin 1955, est réduite au strict minimum. Le résultat est en conséquence : aux élections du 2 janvier 1956, Tsiranana remporte 253 000 voix, alors que le député sortant n'en recueille que 17 496. Ce résultat montre combien l'administration est toujours l'acteur principal de la vie politique. Mais il n’est pas inattendu non plus, dans la mesure où Tsiranana a une dimension nationale, en face d’un adversaire qui n'a qu'une vision régionale des problèmes.
La carrière politique de Raveloson-Mahasampo n'est cependant pas terminée, mais elle ne dépasse plus le cadre local. Aux élections municipales de novembre 1956, sa liste "présence française" remporte encore un succès à Tuléar contre la liste nationaliste de Monja Jaona. Aux élections provinciales du 31 mars 1957, très importantes car chargées de faire émerger une nouvelle classe politique malgache destinée à occuper les institutions prévues par la loi-cadre, il conduit une liste de l'UDSM, le parti pro-français, héritier de l'aile droite du PADESM. C'est encore un succès, à la suite duquel il est élu vice-président de l'assemblée représentative de Madagascar. Mais cette UDSM, malgré des traits spécifiques de parti démocrate-chrétien (libéralisme, parlementarisme, décentralisation), n'a qu'une organisation trop faible et un programme trop vague pour se différencier nettement du PSD de Tsiranana, et éviter d'être phagocytée par lui. Raveloson-Mahasampo sait en tirer les conséquences. En mai 1959, il convoque les cadres UDSM de Tuléar et leur demande de faire confiance à Tsiranana.
Aux municipales d'octobre 1959, UDSM et PSD s'allient contre l'extrême gauche MONIMA de Monja Jaona. Après 1960, l'UDSM s'évanouit. Mais Tsiranana sait se montrer généreux. Raveloson-Mahasampo, remarié après deux veuvages, finit tranquillement sa carrière comme sénateur de Madagascar. Il décède le 7 octobre 1966.
L'un de ses fils, Christopher, né en 1932, embrasse la carrière militaire et épouse Hortense Velonjara, fille du député Pascal Velonjara. Il devint ainsi le beau-frère de Didier Ratsiraka, lui-même époux de Céline Velonjara, et président de la Deuxième République malgache (1975-1993). Le général Christopher Raveloson-Mahasampo, ministre de la défense et chef redouté de la DGID, la police secrète, passe pour l'homme le plus puissant d'un régime dont, avec son épouse, il incarne la tendance socialiste tiers-mondiste la plus autoritaire et la plus radicale. Sous la Troisième République malgache, en 2001-2002, le petit-fils Raveloson-Mahasampo, gouverne Tuléar. Il s’agit là d’un exemple parmi d'autres, qui confirme les propos connus selon lesquels le PADESM de 1946-1956 a été le vivier de tous les maîtres du pays jusqu'au début du XXIème siècle.