Accueil > Archives de la XIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus analytiques (1998-1999) |
Assemblée nationale COMPTE RENDU ANALYTIQUE OFFICIEL Session ordinaire de 1998-1999 - 18ème jour de séance, 44ème séance 1ère SÉANCE DU MERCREDI 28 OCTOBRE 1998 PRÉSIDENCE DE M. Patrick OLLIER vice-président SOMMAIRE : LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 1999 (suite) 1 MOTION DE RENVOI EN COMMISSION 6 La séance est ouverte à neuf heures. L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 1999. Mme Catherine Génisson - Comme l'a montré mon collègue Philippe Nauche hier, notre système de santé a franchi une étape décisive en prenant en charge la prévention en plus des soins curatifs. Votre projet de loi, Madame la ministre, met en place des réformes structurelles. Il marque une croissance importante des crédits définis au titre de l'ONDAM. Cela est très positif. Je voudrais aujourd'hui souligner une nécessité : celle de l'enveloppe hospitalière en fonction de l'état sanitaire des régions, afin d'adapter l'offre de soins et ainsi d'en garantir la qualité, comme la sécurité sanitaire et l'égalité des patients. Le rapport du Haut Comité de la santé publique vient de montrer le poids des facteurs géographiques, économiques, sociaux, politiques et institutionnels dans l'évolution de la situation sanitaire. Une meilleure péréquation s'impose dans la répartition des moyens. Les inégalités sont manifestes entre les régions. Ainsi, le Nord-Pas-de-Calais est au dernier rang des régions françaises avec 135 % de plus de cirrhose du foie chez les femmes, 62 % de plus pour les pathologies pulmonaires chez les hommes et je pourrais également citer les tumeurs et les affections cardio-vasculaires. Il en résulte une espérance de vie à la naissance inférieure de trois ans à la moyenne nationale. Or le sous-équipement hospitalier de la région est patent, la densité de médecins spécialistes y est moindre que sur le reste du territoire et il manque 80 postes d'hospitalo-universitaires même si quatre praticiens supplémentaires seront affectés dans la région d'ici à deux ans. Cependant, le défaitisme n'est pas de mode dans cette région où la rareté rend vertueux et innovant. Il est vrai que la situation du Nord-Pas-de-Calais n'est pas unique. Il existe d'autres disparités régionales et aussi des disparités intrarégionales, notamment en Ile-de-France. Un système de péréquation fondé sur des critères objectifs et transparents est nécessaire. Mais il ne suffira pas à faire évoluer notre système de soins. La recomposition du tissu hospitalier doit être également entreprise ; elle ne doit pas être subie et aucun des acteurs de la santé ne doit y perdre ("Très bien !" sur les bancs du groupe socialiste). Les professionnels de la santé doivent être invités à travailler davantage dans une logique de réseaux et de complémentarité des soins, ce qui améliorerait la sécurité sanitaire. Le projet de création d'une unité de chirurgie cardiaque commune entre le centre hospitalier de Lens et une clinique privée proche donne un bon exemple. M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles - Très bien ! Mme Catherine Génisson - Sa mise en place s'est toutefois heurtée à des problèmes juridiques complexes. Un effort de simplification s'impose donc. La réorganisation de la prise en charge de la maternité et de la périnatalité au niveau national s'inscrit dans la même logique. Elle vise à la diminution de la mortalité maternelle de 30 %, et de la mortalité périnatale de 18 % ainsi que la réduction de l'hypotrophie du nouveau-né et la mise en place d'un suivi généralisé des femmes pendant leur grossesse. Le critère de maintien de l'activité d'une maternité a été fixé à 300 accouchements par an, ce qui ne constitue pas un couperet mais une base permettant l'adaptation progressive des moyens. Votre projet prévoit également une meilleure surveillance des grossesses à risque, le développement de "maisons de naissance" et la généralisation d'un suivi postnatal effectué à domicile par des sages-femmes. C'est un exemple remarquable d'engagement politique au service de la sécurité sanitaire de nos concitoyens et non une "restructuration timorée" comme le disait notre collègue Dubernard ("Très bien !" sur les bancs du groupe socialiste). Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité et M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé - Très bien ! M. Bruno Bourg-Broc - Notre collègue Dubernard, lui, sait de quoi il parle ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) M. Jean-Paul Bacquet - Mme Génisson, qui est praticien hospitalier, connaît son sujet ! Mme Catherine Génisson - La poursuite des réformes implique un changement culturel profond que seules une meilleure information des citoyens et des concertations larges rendront possibles. Enfin, je voudrais évoquer la situation des médecins hospitaliers à haute pénibilité de travail -urgentistes, anesthésistes... La réorganisation des hôpitaux facilitera leur travail. Le problème est toutefois plus large et nous déposerons un amendement sur ce point. Votre projet de loi, Madame la ministre, Monsieur le ministre, met en place de profondes réformes. Nous, socialistes, le soutiendront et feront des propositions constructives tout au long de la discussion (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). M. Jean-Pierre Blazy - Je voudrais attirer l'attention du Gouvernement sur la situation des établissements hospitaliers et médico-sociaux d'Ile-de-France en mon nom et en celui de plusieurs de mes collègues dont Yves Tavernier. Bien entendu, la réduction des déficits des comptes sociaux de la nation est indispensable et constitue la meilleure garantie de la préservation des droits fondamentaux auxquels les Français sont très attachés. Il est également souhaitable qu'une péréquation existe pour réduire les inégalités entre les régions. Toutefois, l'hôpital public en Ile-de-France est en réelle difficulté ainsi que le démontre le récent livre blanc de l'APHP et de l'UHRIF. La répartition de la fraction de l'ONDAM affectée aux établissements de santé est en effet défavorable à l'Ile-de-France dont les budgets hospitaliers ne progressent que de 0,35 % en 1997, ce qui rend impossible la simple reconduction de l'existant, alors que l'enveloppe nationale croît de 2,1 %. L'hôpital public francilien supporte donc depuis deux ans l'essentiel de l'effort de péréquation nationale avec une ponction d'environ 1,2 milliard de francs qui correspond selon le livre blanc à la perte de 5 000 emplois équivalents hospitaliers. Le programme de médicalisation du système d'information, principal outil d'analyse utilisé par le Gouvernement pour procéder à la répartition régionale des moyens, doit être amélioré. La Cour des comptes a dénoncé à plusieurs reprises les limites inhérentes à ce dispositif. En effet, le PMSI ne mesure que très partiellement la réalité des besoins et reflète mal la qualité des soins. Incomplet pour certaines spécialités, comme la réanimation, le PMSI ne prend en outre pas suffisamment en compte les urgences, les consultations externes, la psychiatrie, domaines particulièrement développés en Ile-de-France. De plus, la permanence étant relativement moins assurée qu'ailleurs par la médecine libérale, le recours aux urgences des hôpitaux y est plus important. Selon l'enquête annuelle SAE, les activités de court séjour en médecine, chirurgie et obstétrique comparées aux activités globales de l'hôpital représentent 60 % des journées d'hospitalisation en Ile-de-France contre 45 % dans la plupart des autres régions. Les hôpitaux franciliens constituent en effet des recours pour les pathologies lourdes et rares des établissements de province. Eu égard à la qualité des soins, la constitution de ces pôles d'excellence est pertinente. Cependant, une telle concentration a un coût dont le point ISA ne rend pas compte. Selon la caisse régionale d'assurance maladie, les transferts interrégionaux coûtent 1,5 milliard par an aux hôpitaux d'Ile-de-France. De nombreuses études montrent que la consommation de soins et les besoins sanitaires évoluent selon la richesse de la région. Or l'INSEE, dans une étude comparative, a établi que l'Ile-de-France est la première région européenne par son PIB. Si la frange aisée de la population réclame les meilleures pratiques médicales, l'hôpital public francilien se doit aussi d'accueillir des populations pauvres et de traiter les pathologies des grandes villes : dépression, toxicomanie, sida. L'Ile-de-France n'est pas une région comme les autres. Le redéploiement budgétaire, purement comptable, tient insuffisamment compte des besoins de la population. Continuer à vouloir aligner en quelques années le point ISA de l'Ile-de-France sur une moyenne arithmétique, ce serait compromettre la qualité des soins. Monsieur le ministre si l'effort est nécessaire, il doit être pondéré, mesuré et réparti dans le temps. Je considère, avec Claude Evin, que "les critères actuels de répartition manquent de lisibilité et de transparence. En outre, la représentation nationale ne dispose d'aucune évaluation claire des effets de la répartition régionale sur l'hôpital public. Enfin, des inégalités persistent entre les hôpitaux publics de la banlieue parisienne et l'Assistance publique des hôpitaux de Paris, du fait de l'existence pour celle-ci d'un régime particulier de tutelle financière exorbitant du droit commun. On constate d'importantes différences entre les valeurs des points ISA : 14,04 F en Ile-de-France, contre 15,17 F pour l'APHP et 12,14 F en moyenne nationale, soit, respectivement, un différentiel de 15,8 % et de 24,95 %. Même si l'APHP joue un rôle spécifique dans notre système de santé, j'approuve les propos tenus par Mme Aubry lors du débat de l'année dernière : "la transparence est nécessaire partout". Il est urgent d'aligner sur le droit commun la compétence de l'agence régionale d'hospitalisation d'Ile-de-France sur l'APHP. M. le Président - Veuillez conclure, je vous prie. M. Jean-Pierre Blazy - Les propositions de M. Evin doivent être enfin mises en oeuvre. Je demande au Gouvernement de nous donner des garanties suffisantes pour l'année 1999 sur trois points : la prise en compte de la spécificité francilienne, l'évaluation annuelle des résultats de la péréquation et la réforme de l'APHP (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). M. le Président - Mes chers collègues, je vous demande de bien vouloir respecter votre temps de parole. Mme Sylvie Andrieux - Composante essentielle de notre système de soins, le réseau hospitalier accueille 14 millions de personnes par an. Chaque jour, 200 000 personnes franchissent la porte d'un hôpital. Malheureusement, les inégalités persistent, qu'il s'agisse de la sécurité, de la qualité des soins ou de la répartition géographique des lits et des spécialités. Ce projet contient un certain nombre de mesures visant à adapter l'offre de soins aux besoins, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir. Mais il ne faut pas négliger les spécificités locales. Ainsi à Marseille, l'hôpital privé représente autant de lits que l'hôpital public, alors que celui-ci détient 70 % des places au plan national. En imposant à l'hôpital public des contraintes supplémentaires, comme la tarification des médicaments, ne risque-t-on pas de détériorer la qualité des soins ? De même, si l'ouverture de services d'urgence sociale est souhaitable, elle doit donner lieu à l'octroi de nouveaux moyens financiers. A Marseille, la fréquentation des services d'urgence a augmenté de 6 % par an au cours de ces dernières années, alors que la population a diminué et que le nombre des hospitalisations reste stable. Les grands marginaux ne représentent d'ailleurs que 2 % des entrées. Environ 15 % des passages en urgence sont le fait des populations les plus démunies, qui réagissent trop tardivement. Environ 30 % des consultations devraient être faites dans le réseau de la médecine de ville, mais les patients les moins solvables se tournent vers l'hôpital. Pour adapter l'offre aux besoins pour réduire les inégalités, il est donc nécessaire de prendre en considération la sociologie des patients. Dans les quartiers les plus défavorisés de Marseille, la mortalité est supérieure de 25 % à la moyenne de la ville, faute de prévention et d'information. Si l'espérance de vie, dans notre région, est inférieure à la moyenne nationale, la conférence régionale de la santé a mis en évidence une surmortalité des jeunes de 15 à 24 ans. En outre, 15 % des Marseillais vivent avec des ressources inférieures au seuil de pauvreté, et l'étude que mène actuellement le SMIROUX va montrer l'importance des maladies pneumo-allergologiques dans les quartiers défavorisés. Oui, il faut réduire les inégalités, restructurer notre réseau hospitalier et adapter l'offre aux besoins, mais nous devons aller plus loin encore, analyser la répartition sociologique des maladies et traiter en priorité les populations les plus exposées. Il faut mettre en place une véritable politique de réseau entre l'hôpital et les professionnels de santé. Il faut restructurer, sans mettre les hôpitaux en état de veille. Depuis dix ans, nos collectivités territoriales ont investi de 15 à 25 millions par an dans des équipements lourds de type innovant. Elles continueront leurs effets. Pour renforcer l'efficacité de notre système de soins, il importe de prendre en compte non seulement les inégalités régionales mais aussi les inégalités sociales. C'est sans réserves que je soutiendrai votre projet (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). M. Francis Hammel - Ce projet concerne certes l'ensemble de nos concitoyens mais je désire centrer mon propos sur les personnes handicapées. Non que je veuille en faire une catégorie particulière : l'objectif est bien de renforcer l'exercice de leur citoyenneté et de leur rendre toute leur dignité. Après quatre années de stagnation, voire de régression, la politique en direction des handicapés a pris un nouveau visage à partir de 1998, même si la loi de finances pour 1998 était nécessairement une loi de transition. Les dispositions annoncées pour cette année et le projet de réforme de la loi de 1975 sur les institutions sociales et médico-sociales contribueront à mieux répondre aux aspirations des handicapés et de leurs associations. En 1998, l'effort d'insertion des handicapés s'est traduit par la création de 500 places en atelier protégé et de 2 000 places de CAT. Les crédits pour la formation ont augmenté de 5 %. Une étude sur l'amélioration des modalités de fonctionnement des COTOREP a par ailleurs été engagée. L'intégration scolaire des enfants handicapés a été facilitée par la création de postes d'accompagnement dans le cadre des emplois-jeunes. Cette intégration demande cependant à être améliorée par le développement des services d'éducation spécialisée et de soins à domicile. Le message que vous avez transmis, conjointement avec Mme Ségolène Royal, lors de la conférence de presse du 10 septembre dernier, nous rend espoir : "La politique conduite par le Gouvernement vise à favoriser une socialisation et une intégration des jeunes handicapés aussi précoce que possible, notamment grâce au programme d'équipement en centres d'action médico-sociale précoce et grâce à l'amélioration de leur niveau de formation générale et professionnelle". Par ailleurs, la prise en compte du handicap lié à la surdité doit être mieux assurée. A cet effet, la mission confiée à l'une de nos collègues nous permettra d'envisager des mesures adaptées. Pour 1999, on peut relever des engagements significatifs, comme les mesures annoncées pour la prévention et la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles, lesquelles contribueront à la fois à protéger les travailleurs exposés et à améliorer les conditions de vie de personnes mutilées ou intoxiquées. Le renforcement des moyens de l'inspection du travail et la clarification des missions de la médecine du travail et l'attribution d'un capital-décès aux ayants droit vont dans le sens d'une plus grande justice sociale. La politique d'intégration que vous entendez mener en faveur des personnes handicapées, à tous les âges de vie et dans tous les aspects de la vie collective, constitue la réaffirmation d'une grande ambition nationale. Un plan pluriannuel de création de places en maisons d'accueil spécialisées, en foyers, en CAT et en ateliers protégés est envisagé. Le Gouvernement nous apporte enfin des solutions. La réforme annoncée de la loi de 1975 prolongera ce débat. Mais je ne puis conclure sans me faire l'écho des revendications immédiates du monde handicapé même lorsqu'elles sortent du champ de cette loi : création de postes d'auxiliaires de vie -les 1 864 postes actuels ne suffisent pas ; revalorisation de l'allocation aux adultes handicapés, qui correspond à 65 % du SMIC net et se dégrade depuis quinze ans ; meilleur accès aux transports collectifs et aux logements ; amélioration des modalités d'attribution des aides techniques ; enfin, solutions d'accueil pour les handicapés vieillissants sortant des établissements médico-sociaux. Incontestablement une nouvelle énergie doit être déployée pour développer une politique favorisant l'insertion des personnes handicapées et leur rendant ainsi, au-delà de leurs spécificités, leur dignité de citoyen à part entière (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Mme Nicole Feidt - Cette discussion nous permet, au-delà des enjeux de la nouvelle organisation sanitaire et sociale, de mettre l'accent sur quelques secteurs, et de préciser la politique à engager pour les personnes âgées et pour les handicapés, qui sont 5 millions. Notre rapporteur, Alfred Recours, a demandé un "coup de pouce" pour les handicapés. J'irai dans le même sens. Dois-je rappeler la situation des jeunes dépendant des instituts médico-pédagogiques et des instituts médico-professionnels ? A leur majorité, que deviennent les enfants déficients légers mentaux ? Il existe trop peu de solutions satisfaisantes pour eux. Même si notre gouvernement a fait des efforts significatifs en 1998, les places en centre d'adaptation par le travail, dans les ateliers protégés et dans les foyers occupationnels sont insuffisantes. Il faut accélérer le programme d'ouvertures d'établissements spécialisés pour résorber le nombre des handicapés en attente dans des institutions inadaptées à leur âge et à leur situation. La réforme de la loi de 1975 devrait comprendre des mesures leur permettant des allers et retours entre le milieu spécialisé et le milieu ordinaire, évitant d'avoir à opter pour "le tout-institution" ou "le tout-domicile". C'est une demande des familles. Il est également important, Madame la ministre de l'emploi, de faire appliquer la loi sur l'intégration des handicapés dans le monde du travail. Trop souvent les entreprises ne s'acquittent pas de leur obligation d'embauche, préférant payer qu'aider à l'insertion. Nous pourrions trouver des partenariats pour qu'une prise en charge efficace soit mise en place en faveur des jeunes handicapés et de leurs familles. De manière plus globale, l'intégration sociale, culturelle et sportive des handicapés devrait trouver sa place dans une politique de la ville, en particulier pour ceux qui ne sont pas en institution. Des expériences étrangères existent en ce domaine. Pour bien agir, il faut avoir une connaissance réelle des situations : pourquoi ne pas prévoir un rapport pour avis sur les handicapés qui nous éclairerait sur la vie des établissements spécialisés et les résultats des politiques conduites ? En tout état de cause, les objectifs d'équité et de solidarité qui sont les nôtres font espérer que des solutions seront trouvées, y compris dans ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Vous avez dit, Monsieur le ministre, votre volonté de mettre en place une vraie politique des soins palliatifs pour les personnes en fin de vie. Nous ne pouvons que vous en féliciter. J'aimerais insister sur un autre problème, le sort des personnes âgées. Beaucoup de nos collègues, Pascal Terrasse en particulier, ont dit avec talent... M. Pascal Terrasse - Merci ! (Rires) Mme Paulette Guinchard-Kunstler - ...les inquiétudes que leur inspirait l'avenir des retraites. Je voudrais, pour ma part, insister sur la nécessité de relever le minimum vieillesse : la faiblesse de ce revenu ne permet pas toujours d'avoir une alimentation équilibrée ni de se déplacer pour aller voir sa famille. Donner la priorité, comme vous le faites, aux faibles retraites, est essentiel. Quant aux personnes âgées dépendantes, le débat politique a été trop dominé par le problème du financement de la prestation, occultant d'autres aspects du problème. Ce débat a abouti à la loi sur le PSD, qui n'aide qu'une partie trop faible des personnes âgées dépendantes et introduit des inégalités. Il faut fixer un tarif minimum et relever le minimum de récupération des successions, mais aussi, conjointement, améliorer le financement de l'aide à l'accompagnement et la qualité de la réponse à la dépendance. M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles pour la vieillesse - Très bien ! Mme Paulette Guinchard-Kunstler - Nous ne progresserons qu'en suivant cette double logique : améliorer le financement, améliorer la réponse qualitative. Depuis des années des associations, des médecins, des institutions ont pris des initiatives en ce sens. La qualité d'une revue comme Entourage, les projets développés dans certaines maisons de retraite ont contribué à faire évoluer les choses. Mais ces avancées sont insuffisamment soutenues par les pouvoirs publics. Combien de gériatres font partie des équipes d'évaluation de la dépendance dans les départements ? Trop souvent ce sont des pédiatres qui assurent ce rôle ! Quand les départements font le choix du gré à gré pour les interventions d'aide ménagère dans le cadre de la PSD, cela veut dire qu'ils acceptent d'envoyer des personnes non formées à la dépendance chez les personnes les plus en difficulté ! M. Denis Jacquat, rapporteur - Très juste ! Mme Paulette Guinchard-Kunstler - L'amendement de Pascal Terrasse retenu par la commission permettra d'améliorer la qualification des aides ménagères. Le rapport Hespel a montré que l'exonération des emplois à domicile ne contribue pas à la professionnalisation des aides ménagères. Et combien de médecins généralistes sont-ils réellement formés à la complexité des problèmes médicaux, mais aussi affectifs et sociaux, que rencontrent les personnes âgées ? J'insiste donc sur la nécessité de mettre en place, à côté du financement de la dépendance, une véritable politique gérontologique sur le terrain. Des médecins, des responsables d'associations, des soignants, des familles l'attendent. Nous vous soutiendrons dans cette direction (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). M. le Président - La discussion générale est close. MOTION DE RENVOI EN COMMISSION M. le Président - J'ai reçu de M. José Rossi et des membres du groupe Démocratie Libérale une motion de renvoi en commission en application de l'article 91-6 du Règlement. M. François Goulard - Un des mérites de la réforme constitutionnelle de 1996 est de nous donner, une fois par an, l'occasion d'avoir un grand débat sur l'avenir de notre protection sociale. C'est un sujet de préoccupation majeur car, dans la période incertaine que nous vivons, la nécessité d'une sécurité sociale concernant tous les Français contre les grands risques de l'existence doit être réaffirmée. Et force est de constater les insuffisances des régimes en vigueur. Si nous n'y prenons garde, nous allons vivre une crise de la protection sociale... M. Denis Jacquat, rapporteur - Très juste ! M. François Goulard - La question est donc : comment sauver la Sécurité sociale ? Sur les retraites, le Gouvernement vient de botter en touche et de renvoyer le sujet à un énième rapport ; mais tout le monde sait que l'équilibre de nos régimes de retraites est menacé -l'excellent rapport de M. Jacquat l'a bien montré... M. Denis Jacquat, rapporteur - Merci ! M. François Goulard - ...par l'évolution contrastée du nombre d'actifs et du nombre de retraités. Actuellement, la durée moyenne de la vie augmente de deux mois par an. L'assurance maladie coûte de plus en plus cher, pour des remboursements de moins en moins élevés et une qualité de soins qui est loin d'être irréprochable. Quant à la branche famille, qui n'est pas la priorité du Gouvernement, elle aurait besoin d'un nouvel élan. On ne voit pas avec quelles ressources vous le lui donneriez. Ne parlons pas, enfin, de ce "quatrième risque" que constitue la dépendance. Cette situation difficile nécessite une prise de conscience collective et de nouvelles approches. En persistant dans votre optimisme sur les perspectives financières, en refusant de remettre en cause des solutions traditionnelles dont l'inefficacité est démontrée, vous niez les problèmes dès que l'on sort du très court terme. C'est pour cela que le groupe Démocratie Libérale a déposé cette motion de renvoi en commission. D'abord, nous émettons les mêmes réserves sur les hypothèses qui fondent l'équilibre économique de votre projet que pour le budget. Les recettes que vous anticipez dépendent de la masse salariale ; que la croissance diminue et tout l'équilibre de votre projet est compromis. En outre, vous supposez que les lourdes sanctions suffiront à régler le problème des dépenses : ce n'est pas acquis. L'objectif des dépenses est fixé par rapport au projet de loi de l'an dernier. Or il est déjà largement dépassé. Vous ne le respecterez pas sauf à prendre des mesures de coercition telles que vous risquez de provoquer des remous chez les professionnels. Par ailleurs, les déficits sociaux sont pris en compte pour le respect des critères de Maastricht. Le gouvernement précédent nous avait mis en situation de passer à l'euro. Votre excès d'optimisme risque de nous en empêcher. Au passage je ne peux que regretter le peu de moyens d'expertise dont disposent les parlementaires. Le Président de l'Assemblée vient d'ailleurs de créer un groupe de travail sur le contrôle parlementaire et l'efficacité des dépenses publiques. Toujours sur un plan général, ce projet ne donne aucune indication sur la compensation des allégements de charges prévus par l'article 3 de la loi sur les 35 heures. Le Gouvernement ne nous donne aucune précision sur l'impact de cette mesure, je ne vois pas pourquoi. M. le Président de la commission des affaires culturelles - Oui, pourquoi ? M. François Goulard - Vous allez nous le dire ensuite. Il n'y a pas que le poids des charges sociales qui met en cause l'équilibre global, mais aussi leur répartition. Les dépenses de protection sociale représentent 30 % du PIB contre 20 % il y a vingt ans. La France devance tous les grands pays sauf ceux de l'Europe du Nord. L'an dernier, le transfert des cotisations maladie des salariés vers la CSG s'est accompagné d'un accroissement de 5 milliards du poids des charges sociales. Au total, ces charges ont augmenté de 15 milliards en 1997. Toujours plus de prélèvements -et votre projet va dans ce sens-, cela est devenu insupportable. Par l'article 5, vous luttez contre le recours de certains artisans et commerçants à la location-gérance pour échapper à toute cotisation sociale. Il ne faut pas encourager l'évasion fiscale ou le refus de cotiser. Mais ne comprenez-vous pas que si commerçants et artisans arrivent à de telles extrémités, c'est qu'ils en ont ras-le-bol des prélèvements qui les écrasent ? Cet été, le rapport Malinvaud confirmait que la baisse des charges sociales sur les bas salaires créait de l'emploi. Certaines de vos déclarations nous donnaient espoir. La gauche socialiste du moins, semblait admettre ce qui est une évidence. Mais la réforme que vous annoncez d'un transfert de charges des bas salaires vers les hauts salaires est remise à plus tard. Nous le déplorons pour tous les chômeurs. Dans votre projet, la seule mesure relative aux charges sociales est, à l'article 4, le plafonnement au SMIC de l'exonération pour la première embauche. C'est une erreur, car dans les PME cette première embauche ne concerne pas forcément quelqu'un à bas salaire. Sans nous attarder sur l'article premier -le rapport qui, l'an dernier, faisait vingt pages est réduit cette fois à dix pages de glose administrative- venons-en à la branche retraites. Son équilibre est sérieusement menacé dans un avenir proche, je l'ai dit. Le baby boom s'est achevé vers 1965. La population a néanmoins continué à augmenter, de 52 millions d'habitants en 1975 à 60 millions aujourd'hui. Maintenant arrivent sur le marché du travail et de plus en plus tard les classes relativement creuses nées après 1965 tandis que partent à la retraite de plus en plus tôt, les classes nombreuses de l'après-guerre. Et l'année charnière n'est pas 2020 et 2025 mais bien 2006, c'est-à-dire demain. Avec 1,3 actif pour un retraité, il sera absolument impossible de financer les retraites avec le régime actuel par répartition. En 2015, l'équilibre du régime général d'assurance vieillesse imposera dix points de cotisations de retraite supplémentaires. Imagine-t-on que les actifs accepteront une telle ponction ? Imagine-t-on, dans le cas contraire, que les retraités accepteront un effondrement de leur pouvoir d'achat ? Non. C'est la raison pour laquelle il y aurait eu, depuis longtemps déjà, urgence à agir ; et vous nous renvoyez à un futur rapport... L'acceptation passive de la catastrophe annoncée est d'autant plus inacceptable que nous ne laissons pas aux générations qui nous suivent une situation nette positive : nous leur imposons jusqu'en 2014 la charge de la CADES, c'est-à-dire une dette de plus de 200 milliards, dont la responsabilité est d'ailleurs partagée par les gouvernements successifs. Le livre blanc sur les retraites, rédigé sous le gouvernement de Michel Rocard, comportait cet avertissement : "Ne rien faire est exclu". Le gouvernement d'Edouard Balladur, sous l'impulsion de Simone Veil, l'avait entendu et avait fait voter la loi courageuse du 23 juillet 1993. La plupart des pays confrontés à ce problème ont pris ou s'apprêtent à prendre des mesures également courageuses. En ce qui vous concerne, vous inventez le fonds de réserve, destiné à sauver nos régimes de retraite par répartition. Je ne critique pas l'idée de constituer des provisions pour faire face à la détérioration prévisible de ces régimes, bien au contraire. De la même façon, on oblige les entreprises à provisionner les indemnités de départ en retraite, y compris celles qui seront versées dans plusieurs décennies. Mais je ne crois pas les gouvernements, quels qu'ils soient, suffisamment vertueux pour se plier à une telle discipline. Pour le seul régime général, il faudrait constituer très rapidement une provision de 200 milliards : pense-t-on qu'un gouvernement serait prêt à doter chaque année de plusieurs dizaines de milliards un fonds de réserve ? Personnellement, je ne le crois pas. D'ailleurs, affecter comme vous le faites 2 milliards au fonds de réserve est réellement dérisoire. Le FSV -fonds de solidarité vieillesse- a aujourd'hui, en vertu de la loi du 22 juillet 1993, trois missions : il enregistre les dépenses correspondant au minimum vieillesse ; il prend en charge les majorations de pension accordées en fonction du nombre d'enfants et pour conjoint à charge ; il couvre les dépenses correspondant aux périodes validées gratuitement pour raison de service national ou de chômage. Créer au sein du FSV une section pour le fonds de réserve, qui n'a pas de rapport avec les autres, ne donne pas à ce fonds le statut adéquat. De plus, la contribution sociale de solidarité à la charge des sociétés, assise sur le chiffre d'affaires, n'est évidemment pas ce qu'il convenait de choisir comme première ressource du fonds de réserve. Enfin, le mode de répartition de l'excédent de la CSSS est un partage de fonds de tiroir : 1 milliard pour le BAPSA, 2,9 milliards pour corriger une imprécision statistique qui a privé le régime d'assurance vieillesse des travailleurs salariés d'une contribution normalement due par le FSV ; et puisqu'il reste 2 milliards, on les affecte au fonds de réserve. C'est le résidu du reliquat ! Une réponse partielle au problème majeur que nous devons affronter aurait dû être apportée depuis longtemps avec les fonds de pension. Après les critiques acerbes entendues dans les rangs de la majorité, le Gouvernement paraît esquisser une ouverture sur ce sujet. Les fonds de pension ne méritent pas le dénigrement dont ils font l'objet. Ils existent d'ailleurs déjà, mais au bénéfice de certaines catégories qui ne sont pas les plus menacées : la PRÉFON, destinée aux agents publics, en est un, dont la générosité est remarquable puisqu'il n'existe aucune limite à la contribution déductible de l'impôt sur le revenu ; les plans d'épargne entreprise permettent aux salariés de se constituer des compléments de retraite. On met en avant les risques de gestion : c'est l'épouvantail Maxwell... Or tous les spécialistes savent qu'il existe des réponses techniques : ce sont les règles prudentielles. Le paritarisme dans la justice peut également constituer une sécurité importante. Un grand chef d'entreprise disait récemment que des fonds de pension à la française, gérés paritairement, auraient l'énorme avantage d'introduire sur les marchés financiers des sommes prêtes à s'investir avec des objectifs de moyen terme. L'exclusivité des régimes de retraite par répartition appartient à une époque de stabilité, de l'emploi au sein d'une seule entreprise, avec une progression régulière de carrière. Aujourd'hui, les carrières sont moins linéaires et les régimes de capitalisation constituent un complément adapté. Sauvegarder nos régimes de retraite par répartition, les conforter par un système d'épargne-retraite, sensibiliser nos compatriotes aux difficultés à venir au lieu d'endormir leurs craintes : voilà ce qu'il faudrait faire, et que vous ne faites pas. M. Denis Jacquat, rapporteur - Très bonne démonstration. M. François Goulard - Merci. J'en viens à l'assurance maladie, sur laquelle se concentrent en général les discussions relatives à la Sécurité sociale. Son coût est l'une des préoccupations premières. On se perd à compter les hausses de cotisations depuis 1945 : une vingtaine au moins... Avant le basculement des cotisations salariés vers la CSG l'an passé, le taux de cotisation avait eu le temps d'être multiplié par plus de deux en cinquante ans... Dans les comparaisons internationales -que nous omettons trop souvent de faire-, nous ne faisons pas très bonne figure : classé dans la moyenne en 1997, notre pays est aujourd'hui avec l'Allemagne, celui d'Europe qui consacre à la santé la plus grosse fraction de sa richesse nationale -près de 10 %. Pour autant, nous ne sommes ni les mieux remboursés, ni les mieux soignés. Le taux de remboursement est aujourd'hui de 71 %. M. Claude Evin - 73 %, selon le rapport de la commission des comptes de la santé. M. François Goulard - En tout cas, ce taux est sensiblement plus faible qu'en Grande-Bretagne et en Allemagne, où il est supérieur à 90 %. M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé - Le taux de remboursement est de 73 % abstraction faite des mutuelles ! M. François Goulard - Naturellement, mais les taux de cotisations n'incluent pas non plus les mutuelles. M. le Secrétaire d'Etat - Le taux de remboursement de 73 % est cité comme un dogme mais, contrairement aux autres pays, le nôtre assure une prise en charge par les mutuelles. Il ne faut pas oublier de le préciser quand on parle des performances de notre système de santé en général. M. François Goulard - Vous me fournissez une excellente transition. En effet, nous assistons au développement d'une couverture maladie à deux vitesses : d'un côté, les assurés les mieux protégés qui, grâce à leur mutuelle, bénéficient d'une couverture sociale proche de 100 % ; de l'autre, environ 20 % de démunis, qui sont tout simplement privés de soins. Dans son rapport sur les conditions d'application de la couverture maladie universelle, Jean-Claude Boulard note que "l'écart tend à s'accroître entre le droit et la réalité en matière de santé... En 1996, un Français sur quatre déclare avoir renoncé à se soigner une fois dans l'année pour des raisons financières". Bref, la couverture sociale à deux vitesses est une réalité. Quant à la qualité des soins, même si notre médecine reste remarquable, elle n'est pas irréprochable si l'on s'en tient aux indicateurs globaux. Hormis la longévité exceptionnelle des Françaises, les chiffres ne sont pas très rassurants. Ainsi, avec un taux de mortalité infantile de 0,58 % en 1995, la France se place au onzième rang des pays de l'OCDE. M. Pascal Terrasse - Nous n'avons pas les mêmes chiffres. M. François Goulard - Ce sont ceux de l'OCDE. Notre pays est ainsi derrière la Suisse, l'Allemagne, le Danemark et les Pays-Bas. Nos performances sont également très moyennes pour ce qui est de l'espérance de vie, si l'on excepte les femmes. Au total, en 1995, parmi douze pays européens, la France se situait en huitième position sur la base d'un indice synthétique reflétant le niveau sanitaire global. Ainsi, la France se caractérise à la fois par un niveau élevé des dépenses de santé, par une prise en charge importante des dépenses de santé par les patients eux-mêmes et par une situation sanitaire moyenne. Dans le remarquable ouvrage qu'il a consacré à la Sécurité sociale, le directeur général de la CNAM dresse ce constat : "Cinquante ans après la création du régime général, les Français paient leur assurance maladie beaucoup plus cher que les autres assurés des pays développés, pour être moins bien remboursés". M. Claude Evin, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles, pour l'assurance maladie et les accidents du travail - Il faudra que vous en tiriez les conséquences lorsque nous examinerons les articles ! M. François Goulard - Dans ces conditions, des réformes s'imposent. M. Mattei a rappelé hier les multiples plans qui se sont succédé pour réaliser des économies et pour tenter de maîtriser les dépenses, sans jamais procéder à une réforme d'ensemble de l'assurance maladie. Le gouvernement d'Alain Juppé s'est attelé à cette tâche avec courage, détermination et cohérence. M. Gérard Terrier - Et maladresse. M. François Goulard - C'est grâce à lui qu'a lieu le débat qui nous réunit aujourd'hui. Prenant le relais à la fin de l'année 1997, l'actuel gouvernement a feint, dans un premier temps, de nier les difficultés de l'exercice, parlant peu de l'assurance maladie sans se priver, toutefois, de critiquer l'action de son prédécesseur immédiat. Mais, bien entendu, les mêmes causes produisant les mêmes effets, les dépenses de santé se sont emballées au début de l'année 1998. Vous avez réagi, Madame la ministre, de la même façon que plusieurs de vos prédécesseurs avec, sans doute, davantage de fermeté : les laboratoires, les radiologues, les chirurgiens dentistes furent les premiers à subir les rigueurs de vos décisions. Vous nous proposez aujourd'hui d'inscrire dans la loi des mécanismes qui reprennent les mesures adoptées cet été, soit une baisse tarifaire en cours d'année en cas de dépassement de l'objectif national de dépenses de santé. Dans la même hypothèse, des mesures collectives plus contraignantes qu'auparavant seront prises à l'encontre des professions de santé. Que vous baptisiez ce mécanisme "clause de sauvegarde" dans les médias ou "contribution conventionnelle" dans votre projet, il ne s'agit ni plus ni moins que d'une sanction pécuniaire collective destinée à contraindre le corps médical à réaliser des économies. Hélas, ce qui a échoué hier échouera demain pour les mêmes raisons. D'abord, une réforme ne réussit pas contre l'ensemble des professions concernées. Mme la Ministre - Nous sommes bien d'accord. M. François Goulard - La signature de tel ou tel accord par un syndicat plus ou moins représentatif ne vous garantit pas la compréhension des professions de santé, qui sont résolument hostiles à des sanctions pécuniaires. Attendons de voir leurs réactions lorsque le mécanisme sera appliqué. L'échec de votre plan est certain parce qu'il prétend régir une réalité complexe par des mesures uniformes, nationales et centralisées, parce qu'il faut soumettre les acteurs à des règles au lieu de les mettre en mesure d'exercer leurs responsabilités, parce qu'un système aussi complexe que notre assurance maladie ne se gouverne pas par oukases mais par des mécanismes décentralisés faisant appel à l'initiative et à la responsabilité individuelle des acteurs. Les systèmes de responsabilité collective encouragent les comportements répréhensibles. Ainsi, avec votre contribution conventionnelle, le médecin vertueux qui cherche à bien soigner en économisant les deniers de l'assurance maladie, sera aussi pénalisé que le médecin laxiste. D'autre part, si l'application d'une enveloppe globale était efficace, comment expliquer la véritable pénurie dont souffrent certains de nos hôpitaux publics soumis à ce système depuis plusieurs années ? Certains services sont fermés un jour par semaine faute de moyens. Et que dire de l'incapacité de l'Etat à gérer la démographie médicale, à mettre fin au manque de chirurgiens et d'anesthésistes ? Bref, des mesures contraignantes ne résoudront pas les problèmes de l'assurance maladie. D'autres pays, aussi exigeants que le nôtre en matière de protection sanitaire et sociale, ont abouti à la même conclusion. Les Hollandais ont été les premiers, il y a près de dix ans, à mettre au point une alternative au système antérieur. Leur réforme a posé plusieurs principes. Tout d'abord, l'extension de l'assurance maladie à toute la population. Ensuite, la suppression du monopole des caisses mutualistes d'assurance maladie obligatoires. Les assureurs privés et les caisses ont été contraints d'accepter tout candidat à l'assurance sur la base d'un contrat standard avec des cotisations maximales identiques pour tous. La concurrence est régie par l'interdiction de la sélection des risques et un système de compensation financière est institué pour tenir compte des profils différents des assurés. Une compensation réalisée entre les caisses nationales est financée par une contribution assise sur l'ensemble des revenus. En Allemagne, des lois de 1989 et 1993 ont mis en place un système reposant sur la liberté de choix pour les assurés entre trois caisses, une caisse locale, une caisse corporative organisée au niveau de la profession et une caisse d'entreprise. Une compensation appelée financement moyen normalisé est versée selon le profil des assurés de chaque caisse. La Suisse a également mis en place un système concurrentiel reposant sur les principes de non-sélection des assurés et de compensation entre caisses. Ces pays ne sont pas des épouvantails sociaux. Ils ont en outre des performances sanitaires supérieures aux nôtres. On peut donc, je crois, tirer quelques leçons de leurs expériences. Elles nous enseignent tout d'abord que notre sacro-saint modèle institué en 1945 n'est pas l'unique possibilité pour garantir une assurance maladie socialement avancée. Il faut en revanche être conscient que des solutions alternatives ne sont possibles que si sont garanties la non-discrimination des assurés, la compensation entre les caisses pour tenir compte des profils différents des usagers et une surveillance publique efficace, ce qui complique l'amélioration des systèmes d'appréciation des performances médicales. Que nous apporteraient-elles ? Introduire de la concurrence entre les organismes d'assurance maladie les inciterait tout d'abord à mieux gérer. Je crois que l'exemple des mutuelles des étudiants illustrent cette possibilité. Je veux l'évoquer sans esprit polémique, la publicité qu'elles connaissent actuellement étant liée à des agissements malhonnêtes qui peuvent se produire partout et qui intéressent la justice et non le Parlement. Ce qui est digne d'intérêt par contre, c'est le fait que ces mutuelles, parce qu'elles sont en concurrence pour la gestion de l'assurance maladie des étudiants, connaissent les coûts de gestion les plus faibles de notre système de protection sociale. M. Albert Facon - Bien sûr, car les jeunes sont rarement malades ! M. François Goulard - Je vous remercie de m'apprendre que les jeunes sont en meilleure santé que les personnes âgées ! Mais je parle des coûts de la gestion administrative, qui sont, eux, indépendants de l'âge des assurés. Je vous signale également que le délai de paiement de ces mutuelles est de l'ordre de deux jours. Ce petit secteur nous montre donc comment, grâce à la concurrence, il est possible de rendre l'assurance maladie plus efficace. En outre, si les acteurs sont plus autonomes et plus responsables, ils seront incités à prendre des initiatives et à conduire des expérimentations sources de progrès. Il existe aujourd'hui des ressources d'initiative brimées dans les caisses primaires, les mutuelles et chez les professionnels de la santé. La réforme nécessaire doit donc reposer sur la confiance, la responsabilité et la liberté. Votre projet tourne le dos à ces principes, Madame la ministre, et ne peut donc trouver grâce à nos yeux. Il est centralisateur, uniformisateur et fondé sur la défiance vis-à-vis de tous les acteurs du système de santé. Ainsi vous augmentez encore la taxation des laboratoires pharmaceutiques, grands satans parmi les grands satans à vos yeux, mais qui risquent, en conséquence, de s'implanter hors de France. Je remarque également que votre projet de loi constate l'incapacité de l'assurance maladie à tenir une comptabilité digne de ce nom, c'est-à-dire en droits constatés, de sorte qu'un organisme gérant 600 milliards va utiliser la comptabilité de caisse que l'on interdit même aux petits commerçants. Votre projet manifeste aussi votre prédilection pour les solutions autoritaires. Ainsi, l'article 6 prévoit que l'administration devra être payée par virements alors que ce sujet aurait pu être discuté avec les entreprises. Vous n'avez pas même été capable de parvenir à un accord avec les professionnels sur la forme sous laquelle les données doivent être transmises à l'administration et, là encore, vous aurez recours à la contrainte de la loi qui, en son indigeste article 16, n'établit d'ailleurs qu'un dispositif de contrôle dérisoire. L'article 19 modifie de manière choquante le mécanisme d'incitation à la cessation d'activité des médecins. L'article 20 établit un fonds d'aide aux soins de ville, que vous avez, à tort, souhaité centralisé. Votre projet manifeste donc l'incapacité du système actuel à être géré rationnellement. J'en viens, enfin, à l'article 13 consacré à la famille qui marque un des plus extraordinaires aller et retour réalisé par un Gouvernement... (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) M. Pascal Terrasse - Nous, nous tenons compte de l'avis des Français. M. François Goulard - ...puisque vous renoncez enfin à la mise sous condition de ressources des allocations familiales que vous aviez pourtant tant défendu. Mme Dominique Gillot, rapporteur pour la famille - Et vous le regrettez ! M. Bruno Bourg-Broc - Pourquoi les dispositions de votre projet ne sont-elles pas rétroactives sur ce point alors qu'elles le sont sur tant d'autres ? M. François Goulard - Je me demande combien de frais de gestion supplémentaires aura entraîné votre revirement. Mme la Ministre - Et le carnet de santé ? M. François Goulard - On ne peut se prévaloir des turpitudes des autres pour justifier les siennes, Madame la ministre ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste) Mes chers collègues, j'aimerais pouvoir terminer. M. Alfred Recours, rapporteur pour les recettes et l'équilibre général - Plus vous êtes long, plus vous risquez d'être interrompu ! M. François Goulard - Au-delà de cette péripétie, je déplore le manque d'ambitions de votre politique familiale puisque, à l'exception de l'heureuse extension de l'allocation de rentrée scolaire, rien n'est fait pour les familles qui sont dans notre pays les grandes perdantes dans la distribution du pouvoir d'achat, ni pour les enfants, et donc pour notre avenir collectif. Notre Sécurité sociale est un bien précieux menacé par une crise qui en sape les fondements essentiels. Il faut des réformes courageuses reposant sur la confiance, sur la responsabilité des acteurs et sur la qualité des prestations. Or votre politique est au contraire figée. C'est pourquoi j'appelle au renvoi en commission de votre projet de loi (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF). M. Alfred Recours, rapporteur pour avis - Demander le renvoi en commission, c'est laisser entendre que la commission n'a pas fait son travail. Je crois au contraire que l'ensemble des rapporteurs, ainsi que les fonctionnaires de l'Assemblée, auxquels je tiens à rendre hommage (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste), ont fourni un travail remarquable dans des conditions difficiles. Je souhaite donc que nous passions le plus vite possible à l'examen des articles. M. Pascal Terrasse - Notre collègue Goulard demande le renvoi du projet en commission. L'opposition était pourtant bien peu nombreuse lorsque nous avons examiné ce projet. Je ne comprends donc pas l'intérêt de cette demande car la majorité et les fonctionnaires ont bien travaillé. Nous souhaitons tous défendre la Sécurité sociale, mais nous divergeons sur les moyens à utiliser. Le précédent gouvernement proposait une maîtrise comptable, nous souhaitons au contraire une maîtrise médicalisée dans la transparence. M. Goulard a évoqué l'inquiétude des Français sur le financement des retraites, nous reprochant de ne pas aller assez vite. Or un tel sujet mérite une réflexion approfondie, dans la sérénité. C'est pourquoi une mission a été confiée au commissaire général du Plan. Nous n'avons pas l'intention d'imiter le gouvernement Juppé, qui avait jeté deux millions de personnes dans les rues ! (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) Nous voulons réformer en profondeur notre système de protection sociale, de manière structurelle et durable. Pour la première fois depuis 1987, le budget de la Sécurité sociale sera en équilibre. Une couverture maladie universelle va être créée et les familles, grâce au travail réalisé par Mme Gillot, seront davantage soutenues. Nous refusons de substituer l'assurance privée à l'assurance publique, gage de solidarité, nous ne voulons pas remplacer notre système de sécurité sociale par des fonds de pension à l'américaine. Le groupe socialiste ne votera pas cette motion de renvoi en commission (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste). M. Bernard Accoyer - Avec la révision constitutionnelle et les ordonnances de 1996, le précédent gouvernement a mis à la disposition du Parlement un outil essentiel pour sauver notre protection sociale. Or vous ne l'utilisez pas et détournez la procédure de son objet. Un travail de concertation était nécessaire. La commission aurait dû s'en charger. Pourquoi ne l'a-t-elle pas fait ? Parce que le Gouvernement abuse de la session unique, qui devait à l'origine donner un rythme de travail plus régulier aux fonctionnaires de l'Assemblée, auxquels je rends hommage, ainsi qu'aux élus. Il est inadmissible qu'au moment où elle examinait un texte aussi important que le projet de loi de financement, la commission ait été saisie en extrême urgence de la proposition relative au pacte civil de solidarité (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste). Peut-on considérer comme prioritaire un texte déclaré irrecevable, que vous présentez de nouveau, en violation de la Constitution ? (Protestations sur les bancs du groupe socialiste ; applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL) En procédant de la sorte, le Gouvernement a perturbé nos travaux. Dans ce projet, on ne trouve aucune mesure touchant à la nécessaire réforme des cotisations. Il aurait fallu y réfléchir en commission... M. Pascal Terrasse - Vous n'y êtiez pas ! M. Bernard Accoyer - Je n'ai pas manqué une minute du débat en commission. Vous avez quant à vous brillé par votre absence (Protestations sur les bancs du groupe socialiste). Vous n'abordez pas la réforme des retraites. Il est malhonnête de vouloir faire croire que notre régime de répartition pourra être sauvé par votre fonds de réserve. On ne trouve rien, dans ce projet, sur la réforme de l'hospitalisation. Le Gouvernement ne fait que régler ses comptes avec les professions libérales, dont les conditions de travail auraient pu être examinées, mais aussi avec les familles. Une fois de plus, seuls ceux qui ont des enfants paieront davantage ! Il y a donc lieu de revoir ce projet en commission et le groupe RPR votera la motion de renvoi (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF et du groupe DL). M. Jean-Pierre Foucher - Avec ce projet, le Gouvernement fait un pari osé. Son optimisme me rend admiratif. Cependant, nous savons déjà que la croissance ne sera pas suffisante pour assurer l'équilibre des comptes. Nous avons posé des questions au Gouvernement, mais n'avons eu aucune réponse. M. le Secrétaire d'Etat - Vous les aurez tout à l'heure. M. Jean-Pierre Foucher - Les mesures relatives à l'assurance maladie ont été prises sans concertation avec les professionnels de santé. A l'encontre de la médecine de ville et des laboratoires pharmaceutiques, vous allez instituer des sanctions collectives, c'est-à-dire aveugles et injustes. Vous mettez à bas la politique conventionnelle, en prévoyant de remettre en cause les conventions tous les quatre mois. Vous vous acharnez sur la médecine de ville et pénalisez notre industrie pharmaceutique, au lieu de la protéger. Quant au problème des retraites, on ne le réglera pas sans mettre en place des systèmes par capitalisation et sans renforcer l'autonomie de la branche vieillesse, pour responsabiliser ses gestionnaires, les partenaires sociaux. Vous prétendez qu'il n'y aura pas de prélèvements supplémentaires sur les familles. Or la réforme du quotient familial les pénalisera. En outre, vous ne voulez pas revenir sur la suppression de l'AGED et des aides à l'emploi familial. Ce projet n'a pas été bien préparé. C'est pourquoi le groupe UDF votera cette motion de renvoi en commission (Applaudissements sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR). M. Jean-François Mattei - Bien entendu, le groupe DL fera de même. Je félicite les fonctionnaires et les élus pour le travail accompli en vue d'enrichir ce projet. Notre débat touche à l'avenir même de notre société. Si nous souhaitons le renvoi de ce texte en commission, ce n'est pas parce que le travail effectué a été mauvais, mais parce que les mesures annoncées sont insuffisantes pour préparer l'avenir. Nos propositions n'ont pas été entendues. M. Alfred Recours, rapporteur - On ne vous a pas vu en commission ! M. Jean-François Mattei - Nos convictions divergent. Mais un tel sujet, nul ne peut douter que notre préoccupation première soit la santé des Français (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR). M. Maxime Gremetz - Le groupe communiste ne votera pas le renvoi en commission, que rien ne justifie. Le travail en commission a été sérieux. M. le Président de la commission des affaires culturelles - Merci, Monsieur Gremetz. M. Maxime Gremetz - La droite, toutes tendances confondues trouve ce texte mauvais. Personne ne prétend qu'il soit parfait. Nous pensons quant à nous qu'il doit être amélioré. C'est pourquoi nous avons déposé des amendements que la droite, d'ailleurs, n'a pas voté en commission... M. Bernard Accoyer - Nous avons soutenu votre amendement relatif aux allocations familiales ! M. Maxime Gremetz - D'accord. Mais pas celui qui vise à élargir l'assiette des cotisations aux revenus financiers ! Vous préférez, sur la question du financement, batailler pour la création de fonds de pension, ce que nous refusons. Nous avons là une divergence fondamentale (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste). La motion de renvoi en commission, mise aux voix, n'est pas adoptée. Mme Odette Grzegrzulka - L'opposition s'en va ! Vous êtes les figurants du Parlement ! (Protestations sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF) Mme la Ministre - M. Bernard Kouchner et moi-même allons répondre assez longuement sur les sujets évoqués dans cette discussion générale. Il existe au moins un point d'accord entre nous : c'est que les ordonnances Juppé ont eu le mérite de permettre, chaque année, un vrai débat parlementaire sur l'avenir de la protection sociale (Interruptions sur les bancs du groupe du RPR et du groupe UDF). Je remercie l'ensemble de la commission et des rapporteurs de leurs remarques et propositions, ainsi que les intervenants, notamment MM. Barrot et Mattei, même si je ne partage pas tous leurs points de vue. Il y a visiblement un certain malaise de l'opposition face à ce projet de loi, qui se traduit par certaines contradictions. Nous avons entendu tout et son contraire : M. Accoyer et M. Bur nous ont accusés d'"immobilisme social", mais en même temps M. Préel et M. Bur nous ont reproché d'en faire trop, notamment vis-à-vis de la CNAM. Si nous avons dû intervenir en juillet, c'est parce que les conventions et une partie des ordonnances Juppé ont été annulées par le Conseil d'Etat. Fallait-il, devant le dérapage des dépenses, attendre les bras croisés ? Pour ma part, j'aurais préféré continuer à avancer dans le cadre de conventions bien rédigées, notamment avec les radiologues ! On nous a aussi reproché tantôt d'être trop laxistes, tantôt d'être coercitifs. M. Préel estime que l'enveloppe des hôpitaux permet tout juste de financer les restructurations, tandis que M. Bur se plaint que les efforts pèsent uniquement sur la médecine de ville et pas assez sur l'hôpital (Interruptions sur les bancs du groupe UDF). M. Dubernard et M. Goulard, eux, dénoncent la pénurie qui menace le système hospitalier. Certains nous disent "vous avez cassé le plan Juppé", d'autres "vous faites du super-Juppé ou du Juppé bis". Le plan Juppé, ce n'est pas mon problème : ce que nous voulons, c'est que le système de santé fonctionne mieux et que la Sécurité sociale soit sauvée. J'aurais pu sortir des dossiers sur le coût du carnet médical de santé ou de l'informatisation des cabinets médicaux : je ne l'ai pas fait -la Cour des comptes s'en chargera, du reste- parce que je crois que la Sécurité sociale vaut mieux que cela. Notre but, c'est d'améliorer les outils existants, de modifier ceux qui doivent l'être et de mettre en place ceux qui ne l'étaient pas -tout ceci sans a priori ni tabou. Quelle est la différence profonde entre la politique précédente et la nôtre ? Elle ne porte pas sur les objectifs : tout le monde est d'accord ici sur la nécessité d'une maîtrise médicalisée des dépenses de santé. Ce que nous voulons avant tout, c'est un système de santé plus sûr et accessible à tous, au moindre coût, c'est-à-dire évitant les gaspillages et les doubles emplois. Nous sommes tous d'accord là-dessus. Mais alors que M. Juppé croyait, semble-t-il, que seule une disposition coercitive comme la clause de reversement pouvait faire changer les comportements, nous, nous pensons que ce sont les réformes structurelles qui provoquent peu à peu les évolutions nécessaires. Par exemple, quand nous sommes arrivés au gouvernement, l'ensemble des médecins étaient opposés à l'informatisation. Pas par ringardise, mais parce que la CNAM leur avait envoyé un énorme dossier leur expliquant que l'informatisation, par la transmission des feuilles de soins, allait permettre de contrôler leur activité. Ils ne voulaient pas de cela et ils avaient raison. Ils ont eu peur qu'on traite de la même manière un médecin du 5ème arrondissement de Paris qui a une clientèle jeune et un médecin de Nice qui soigne surtout des personnes âgées. Nous avons repris ce dossier et expliqué aux médecins que la télé-transmission n'avait pas pour objectif le contrôle individuel et la coercition, mais était surtout un outil de veille épidémiologique, d'aide au diagnostic et de suivi des malades (Interruptions sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR). Nous avons chargé M. Renaudin de reprendre le dialogue avec la CNAM et les professions de santé et aujourd'hui le résultat est là : la carte SESAM-Vitale se met en place, ainsi qu'un réseau de santé sociale avec des logiciels d'aide au traitement, avec les précautions nécessaires pour éviter des publicités déguisées. Les chiffres sont clairs : en six mois le nombre de cabinets informatisés est passé de 30 à 50 %. Le bouche à oreille va fonctionner et bientôt tous les médecins vont reconnaître l'utilité médicale de cette informatisation. Autre exemple, la démographie médicale : nous manquons d'anesthésistes, alors qu'il y a trop de médecins dans d'autres spécialités. Nous avons négocié pendant dix mois et il y a eu un accord en juin pour instituer à l'internat des quotas par spécialité en fonction des besoins. Si nous avions procédé de façon autoritaire, il y aurait eu des grèves dans les hôpitaux et le problème ne serait pas résolu. Dans tous les domaines, notre souci a été de travailler et avancer par la concertation. Pour l'hôpital, la révision des schémas régionaux s'est faite à partir des besoins locaux de santé et en concertation avec les élus et les personnels de santé. Les réseaux entre hôpitaux publics, hôpitaux privés et médecine de ville se sont développés, c'est encore un exemple de réforme structurelle en cours. Monsieur Mattei, vous dites que la maîtrise médicalisée des dépenses a échoué. Mais ma conviction, c'est qu'elle n'a pas été réellement tentée : les outils n'étaient pas en place, ils commencent seulement à l'être, qu'il s'agisse de l'informatisation, de la mise en réseau, de la réunification de certains hôpitaux... C'est vrai que les réformes structurelles sont chose difficile : mettre fin à la surconsommation de médicaments demande tout un travail d'explication. Mais c'est ainsi que nous parviendrons à un système de soins plus efficace et moins coûteux. Nous n'avons pas fait tout cela contre les professionnels de santé. Monsieur Goulard, vous êtes bien payé pour savoir qu'une réforme ne marche pas quand elle est faite contre l'ensemble des professions. Nous en avons tiré les leçons et c'est pourquoi nous avons, dès le départ, travaillé avec les médecins. Tout le monde n'est pas d'accord d'un coup, c'est normal. Mais regardez, l'an dernier toutes les associations familiales étaient contre la réforme des allocations, aujourd'hui elles trouvent juste de modifier le quotient familial (Interruptions sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR). Il est donc possible de faire appel à la solidarité des citoyens dès lors que les efforts sont justes, et bien répartis. En tout cas, nous continuerons dans cette optique de solidarité, et non pas en soutenant des corporatismes. Nous avons mis en place des groupes de travail médecins, nous avons négocié avec les internes et les pharmaciens. Nous avons aussi travaillé avec la CNAM -l'annualisation des conventions nous obligeait à intervenir pour lui donner plus d'autonomie ; l'avenant signé en juillet va dans ce sens. Enfin, nous aussi -et peut-être plus que vous- nous souhaitons que les partenaires conventionnels jouent un rôle plus grand -et que les pharmaciens également signent une convention avec la CNAM. Cette loi ouvre des possibilités en créant des filières autour d'un médecin référent, et des réseaux, en finançant la prévention, l'éducation pour la santé, l'évaluation, la création d'activités curatives hors du paiement à l'acte, la négociation régulière pour apprécier l'évolution des dépenses, la mise en place d'un fond d'aide à la qualité. Tout ceci ne fait pas l'unanimité, mais a permis d'avancer. Ainsi, en juillet, après un certain nombre de dérapages injustifiés nous avons signé des déclarations communes avec la plupart des professions concernées : les kinésithérapeutes, les orthophonistes, les biologistes, avec l'industrie du matériel médical. Les radiologues ne l'ont pas voulu. Je le regrette, mais ma porte leur reste ouverte. Nous poursuivons les discussions avec les internes qui ont montré leur maturité. Tous les syndicats de pharmaciens ont signé un accord pour que la profession devienne un véritable acteur de la santé. En juillet, nous avons aussi annoncé un certain nombre de mesures concernant l'industrie pharmaceutique, non pour sanctionner mais dans une logique conventionnelle (Murmures sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL). Nous avons demandé à un certain nombre de laboratoires qui n'avaient pas respecté les accords conclus de restituer les sommes à la Sécurité sociale. Ils ont signé. M. Thierry Mariani - Ils n'avaient pas le choix. Mme la Ministre - Vous trouvez anormal que lorsqu'on signe un accord avec l'Etat et qu'on ne le respecte pas, on paye ! C'est une façon bizarre de défendre la politique conventionnelle ! Aujourd'hui la totalité des laboratoires -sauf trois petits- ont signé les accords couvrant 98 % des normes que nous attendions. Voilà un travail sans effet d'annonce mais qui répond à une suite logique médicale. Parce que nous pensons que toutes ces réformes porteront leurs fruits, nous pensons aussi qu'il faut maintenir le système actuel et nous ne pouvons pas suivre M. Mattei quand il propose de mettre en concurrence secteur public et secteur privé. D'ailleurs, le rapport du CREDES conclut, à propos des exemples étrangers, que la mise en concurrence des assureurs entraîne toujours un risque de sélection et d'iniquité et que les économies ainsi engendrées ne le sont qu'à court terme et sont compensées par les surcoûts dus à la concurrence. Il n'y a donc pas là une voie d'avenir mais une impasse. J'en viens à quelques points plus précis soulevés par certains orateurs. Monsieur Le Garrec, nous partageons vos critiques sur l'établissement des comptes et adhérons à vos propositions. Une mission de l'IGAS fait le point sur les statistiques de dépenses de l'assurance maladie ; ce projet crée un conseil pour la transparence de l'assurance maladie. Pour M. Goulard, cela n'a aucun sens, mais les partenaires qui l'ont demandé sont ravis. J'ai aussi confié une mission à M. Deniel, conseiller-maître à la Cour des comptes, sur l'harmonisation des plans comptables des différents régimes. Nous débattrons d'autant mieux que les statistiques seront fiables. En octobre 1997, nous avons déjà entendu des critiques sur l'équilibre des comptes : les recettes étaient surestimées, en raison d'une hypothèse d'augmentation de 4 % de la masse salariale. On nous donnait rendez-vous dans un an. Force est de constater que les objectifs ont été tenus. Je suis donc prête à prendre rendez-vous de nouveau pour l'année prochaine puisque successivement MM. Barrot, de Courson, Bardet, Accoyer Préel, nous ont fait les mêmes reproches : nous surestimons la croissance. Les organismes internationaux la confirment pour la France ; un membre de la Cour des comptes nous a même demandé si les recettes de CSG n'étaient pas sous-estimées. Et comment dire que la réduction du temps de travail va faire diminuer la masse salariale ? Plus il y aura de chômeurs remis au travail, plus elle augmentera. M. Bernard Accoyer - Encore faudrait-il que les 35 heures créent des emplois ! Mme la Ministre - On ne peut pas dire une chose et son contraire. Ou la réduction du temps de travail ne fonctionne pas, et la masse salariale ne baisse pas ; ou elle fonctionne et la masse salariale augmente. Et aujourd'hui, les 485 accords signés se traduisent par une augmentation de 8 % des effectifs. L'ONDAM est effectivement rigoureux, Monsieur Barrot, puisque sa croissance de 2,6 % est inférieure à celle de l'économie. Mais il répond aux besoins car 16 milliards supplémentaires sont consacrés aux soins, et serviront au remboursement à 100 % du dépistage, au financement de l'accord salarial de la fonction publique hospitalière, à la revalorisation de la carrière des aides-soignants, à la création de 7 000 places de cure médicale et de 2 000 places de soins infirmiers à domicile pour les personnes âgées, à la création de places pour les adultes handicapés -c'est une première tranche- et au transfert à l'assurance maladie des centres d'hygiène alimentaire et d'alcoologie, en application de la loi sur l'exclusion. Nous affirmons donc bien notre priorité en faveur des plus fragiles. Sur la clause de sauvegarde, j'ai entendu des choses très différentes. Pour M. Bardet, l'opposition peut renier ses propres réformes et avoir le courage de dire que la responsabilité collective ne fait pas partie de ses références. C'est incroyable. Personne ne serait donc responsable de rien ? Avez-vous eu les mêmes scrupules en supprimant le remboursement de certains médicaments ? On ne peut pas dire que la Sécurité sociale est l'affaire de tous et celle des acteurs de la santé, et plaider pour l'irresponsabilité économique ! Ce qu'il faut, au contraire, c'est que cette responsabilité soit la plus juste possible. M. Barrot pose le problème de fond du contrôle individuel des professionnels. Pour lui, la clause de sauvegarde est injuste car elle traite les médecins vertueux comme ceux qui ne le sont pas et elle devrait donc être individualisée. Toutes nos réformes structurelles visent en effet à accroître la responsabilité individuelle des médecins -par l'information et par la formation- en même temps que leur responsabilité collective, par exemple en renforçant les unions régionales de médecins afin qu'ils évaluent eux-mêmes les pratiques. Si la première responsabilité des médecins est de bien soigner, la seconde est de soigner au meilleur coût. La responsabilité économique des médecins est globale, donc collective. On ne distingue pas assurés vertueux et non vertueux quand on augmente les cotisations. Il est normal que les médecins dont l'essentiel des ressources vient de la Sécurité sociale contribuent à l'équilibre de l'assurance maladie, ce qui a pour contrepartie la solvabilisation des malades. De toute façon, un médecin dont la clientèle augmente parce qu'un confrère prend sa retraite ou parce qu'il est apprécié, un médecin qui a dans sa clientèle des malades du sida dont les prescriptions sont lourdes, sont-ils moins vertueux ? M. François Goulard - Donc, c'est la responsabilité aveugle. Mme la Ministre - Aller vers l'individualisation serait aller vers un système bureaucratique à l'encontre de la qualité des soins. Mme Catherine Génisson - Très bien ! Mme la Ministre - Il ne faut pas montrer ici le vice, là la vertu. La CNAM sanctionnera les comportements aberrants. Mais il faut une responsabilité collective. Nous la rendons plus juste parce que les médecins contribueront en proportion de leurs revenus, et que nous impliquons aussi l'industrie pharmaceutique. Vous dites qu'il n'y a rien dans le projet sur l'hôpital ; mais les outils de la politique hospitalière existent depuis longtemps... Nous souhaitons, à travers la rénovation des schémas régionaux d'organisation de la santé, faire en sorte qu'il existe dans chaque région des plateaux techniques de haut niveau en même temps que des services de proximité. Cette année, 2 900 lits ont été fermés. En outre, 330 établissements négocient des regroupements ou des reconversions. C'est dire que sur le terrain les choses avancent. Le privé se rapproche du public, la médecine de ville et l'hôpital créent des réseaux... C'est comme cela que le système de soins peut améliorer son fonctionnement. En ce qui concerne la péréquation entre régions, nous avons l'intention d'aller vite. Il faut prendre en compte les mouvements des malades d'une région à l'autre, ainsi que l'état de santé de la population. Nous avons recomposé des indicateurs ; ils font apparaître que le Nord-Pas-de-Calais, la Picardie, le Poitou-Charentes sont très en retard et qu'au sein de l'Ile-de-France existent des différences inacceptables. Nous souhaitons donc, dans un délai de 5 à 7 ans, assurer un rattrapage. En ce qui concerne le médicament, je ne crois pas que les critiques de MM. Accoyer et Préel soient fondées. Nous avons quatre priorités : la sécurité et la qualité des produits ; l'amélioration des conditions d'accès à certains médicaments ; l'aide à la recherche, que, comme M. Barrot, je considère essentielle ; la rationalisation de la prescription et du remboursement. La sécurité est l'objectif que nous avons donné aux travaux de l'Observatoire national des médicaments ; elle est aussi la raison de l'organisation d'une couverture complémentaire systématique et de la dispense d'avance de frais pour les plus démunis. Pour faire progresser la recherche, nous avons réuni sous une même autorité les chercheurs et les industriels ; et Claude Allègre a mis la recherche médicale en tête dans la répartition de ses crédits de recherche. Par ailleurs, des mesures ont été prises pour assurer une meilleure utilisation des ressources. J'ai déjà parlé de la lutte contre les surconsommations ; nous mettons en place un référentiel public sur le médicament, qui sera accessible dès le début de l'année prochaine ; enfin, nous reprenons les classes thérapeutiques, avec une exigence quant à l'effet médical, et nous remettons de la cohérence dans les prix et dans les taux de remboursement. Monsieur Barrot, avec le système des prix administrés, le maintien artificiel de prix élevés pour soutenir des laboratoires, alors que les médicaments n'étaient pas toujours performants, a coûté cher à la Sécurité sociale ; mais de plus, il nous a empêchés d'aider l'industrie pharmaceutique la plus innovante. Les laboratoires ont signé parce qu'ils ont compris notre logique : nous voulons redonner une chance à l'industrie pharmaceutique française. Nous tournons le dos au malthusianisme, mais cela passe par la politique conventionnelle ; et il convient à cet égard de renforcer le comité économique du médicament. En ce qui concerne les cotisations patronales, dont vous être nombreux à avoir parlé, notamment Mme Fraysse, l'objectif du Gouvernement est de poursuivre la réforme du financement de la Sécurité sociale pour le rendre plus juste et plus favorable à l'emploi. Nous n'avons pas réussi, contrairement à ce que j'espérais à inscrire la première étape dans ce texte ; en effet, beaucoup de ceux qui souhaitaient à la fois élargir l'assiette et alléger les charges sociales pensaient qu'on pouvait remplacer à 100 % l'assiette salariale par la valeur ajoutée ; le rapport Malinvaud a montré que cela aurait des effets pervers. Nous devons donc nous donner quelques semaines supplémentaires pour trouver de nouvelles modalités ; mais je regarde avec intérêt l'amendement de la commission visant à dire clairement quel est l'objectif. La famille. Contrairement à ce que vous dites, Monsieur Préel, elle est pour nous une priorité. D'ailleurs, dans les propos des orateurs de l'opposition, j'ai retrouvé beaucoup de ce que Mme Gillot, le Premier ministre et moi-même, avions dit. La famille est l'entité de base, où l'enfant se construit, acquiert ses repères, apprend la solidarité. L'année dernier, nous avions pris des engagements, et notamment celui d'essayer de revenir sur le plafonnement des allocations familiales. Mme Gillot a mené une large concertation avec les associations familiales et les organisations syndicales ; la conférence de la famille nous a permis de nous mettre d'accord avec l'ensemble des partenaires sur les axes majeurs de notre politique. Nous savons que tout n'est pas réglé ; nous avons d'ailleurs fixé des objectifs pour l'année prochaine. Mme Gillot et Mme Jacquaint ont évoqué la possibilité de remodeler certaines prestations ; nous sommes prêts à y réfléchir dans le cadre de la délégation interministérielle à la famille, pour préparer la conférence de l'année prochaine. J'ajoute que nous consacrons cette année 1 milliard de plus à l'action sociale de la CNAF, qui servira à développer les modes de garde dans les communes les plus défavorisées ainsi qu'à mettre en place des lieux d'accueil pour les parents dépassés et des lieux de rencontre entre les parents et les enfants. La retraite. Il y a bien longtemps que nous posons les mêmes problèmes... Nous souhaitons un diagnostic clair, qui ne soit pas contestable. Il ne sert à rien de montrer du doigt telle ou telle catégorie d'agents publics : il faut regarder d'abord quel est leur salaire, combien ils ont contribué et quels sont leurs avantages. Il faut examiner aussi les contrats passés -salaire moins élevé que dans le privé, retraite plus confortable. Nous avons donc demandé au commissariat du Plan de faire une analyse complète. Ensuite, nous devrons -je le redis aux membres de l'opposition, car lorsque j'entends M. Jacquat, je me dis que nous pouvons le faire ensemble- trouver les scénarios possibles pour conforter les régimes par répartition et mettre en place une épargne salariale à long terme. Que faire pour conforter les régimes par répartition ? Sans doute pourrait-on diminuer les retraites ou augmenter les cotisations patronales de 5 ou 10 %.... Mais ne devons-nous pas plutôt rechercher des moyens financiers nouveaux ? C'est toute la logique du fonds de réserve. J'ai bien entendu les quolibets sur les 2 milliards : nous aurions pu les afficher en excédent de la Sécurité sociale, mais nous préférons les affecter à la retraite par répartition. Les 15 à 20 milliards de fonds sociaux des caisses d'épargne, dont le ministre de l'économie a parlé, pourraient aussi alimenter ce fonds de réserve plutôt que d'être déposés à la Caisse des dépôts. Vous nous reprochez de n'avoir pas prévu tous les éléments de gestion de ce fonds. Mais c'est parce que nous attendons les conclusions du grand débat public qui débutera au mois de janvier et parce que nous voulons réfléchir à la façon dont nous surmonterons les difficultés que soulève le système des retraites. Nous avons placé ce fond de réserve au sein du fonds de solidarité vieillesse -FSV- parce qu'il relève à la fois de la Sécurité sociale et de la vieillesse. Le conseil de surveillance du FSV comprend des parlementaires, des représentants des caisses et des personnalités qualifiées. Nous sommes prêts à l'élargir pour y faire entrer des représentants patronaux et syndicaux. En ce qui concerne le PSD, Monsieur Sarre, j'ai réuni le comité de gérontologie il y a quelques semaines. Le nombre de bénéficiaires de cette prestation est passé à 35 000 à la fin du mois de mars à 60 000 à la fin du mois de juin et il atteindra peut-être 80 000 à 100 000 à la fin de l'année. Cela dit, il existe des différences inacceptables selon les départements. Dans quelques jours, un décret sur la tarification des établissements sera publié, comme je m'y étais engagée. Puis nous dresserons un bilan au mois de janvier en liaison avec les conseils généraux. Si nous constatons alors que la situation ne s'est pas améliorée, nous fixerons par décret des minima par établissement. Enfin, notre attention se porte aussi sur la situation des professionnels de la dépendance, dont les personnes âgées auront de plus en plus besoin. En ce qui concerne la branche famille, nous sommes passés de moins 12 milliards à notre arrivée au pouvoir à plus 3 milliards aujourd'hui. Une nouvelle conférence de la famille se réunira avant l'été prochain. S'agissant du système de santé, nous faisons en sorte d'avancer avec les acteurs. Je tiens à souligner le travail qui a déjà été accompli sur les maladies professionnelles, notamment en ce qui concerne l'amiante. Enfin, nous poursuivrons la recherche d'un financement pérenne pour la Sécurité sociale. En conclusion, le sujet méritait des réponses un peu longues. Nous l'abordons avec modestie, mais non sans détermination, car la Sécurité sociale est aussi le garant de la démocratie dans notre pays (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste). M. le Secrétaire d'Etat - Notre débat s'améliore d'année en année. M. François Goulard - Le secrétaire d'Etat aussi ! M. le Secrétaire d'Etat - Merci ! Nous critiquons le système que nous cherchons à améliorer tout en sachant qu'il n'est pas si mauvais que cela, comparé à celui des autres pays européens, sans parler, évidemment, des pays du tiers monde où un tel système n'existe même pas. Bien entendu, on pourrait faire mieux et nous sommes précisément là pour tenter d'y parvenir. Quoi qu'il en soit, le reste du monde nous envie notre système de santé, et je tiens à souligner les progrès qui ont été réalisés dans certains domaines. Ainsi, s'agissant de la mortalité infantile, nous avons beaucoup progressé au cours des dix dernières années, passant, selon le rapport du Haut Comité de la santé publique, de 7,3 %o en 1990 à 4,9 %o en 1995 et à 4,8 %o en 1996. Nous sommes maintenant au quatrième rang des pays européens devant l'Allemagne et les Pays-Bas. Le taux de mortalité périnatale s'est également amélioré. Certes, toujours selon le même rapport, les inégalités restent grandes entre les régions et à l'intérieur de celles-ci, en matière de prise en charge et de soins. D'autre part, notre pays se distingue des autres par ce qui est des conduites à risque, qu'il s'agisse du tabac, de l'alcool ou des accidents de la route. Bref, hormis ces critiques qui sont loin d'être négligeables, l'amélioration est manifeste. Pour ce qui est de l'espérance de vie, qui est un indicateur majeur, nous sommes très bien placés et nous gagnons trois mois chaque année. Je remercie M. Terrier d'avoir exposé si clairement les enjeux de la loi de financement de la Sécurité sociale, destinée à améliorer la prise en charge de la santé publique. Je remercie également M. Mattei du ton qu'il a employé pour ouvrir la discussion. Bien entendu, nous devons regarder les expériences étrangères et comparer les prises en charge. En revanche, je ne suis pas d'accord lorsque vous dites qu'il faut soit augmenter les recettes, soit diminuer les remboursements. Notre objectif est d'exercer un contrôle strict sur les dépenses, d'éviter le gâchis et d'utiliser au mieux les fonds disponibles pour assurer l'égalité sanitaire dans notre pays. C'est plus facile à dire qu'à faire et le problème ne se pose pas dans les mêmes termes selon qu'on parle des urgences, où la distance compte, ou des maladies chroniques. S'agissant des hôpitaux, nous publierons bientôt un document retraçant les 390 mouvements d'harmonisation dans les SROS. Le débat sur la prise en charge par les mutuelles était important. Certes, un taux de remboursement de 73 % nous place loin derrière les autres pays européens, mais c'est oublier que ceux-ci n'ont pas de mutuelles. En France, ceux qui n'ont pas de mutuelle seront mieux pris en charge grâce à la couverture maladie universelle pour les uns et au remboursement du ticket modérateur pour d'autres. Ces deux mesures gommeront les inégalités. Il faut mettre fin aux inégalités qui existent dans la formation des différentes professions de santé et en particulier dans celle des médecins. Cette réforme que nous avons engagée est toutefois très longue à mettre en oeuvre, car elle se heurte à tous les corporatismes. D'autres systèmes de formation initiale et continue sont pourtant nécessaires pour se rapprocher de l'égalité. Comme vous l'avez dit, Monsieur Mattei, la mise en concurrence que vous proposez existe déjà dans certains pays. Je crois que l'exemple des Etats-Unis est particulièrement significatif. M. Jean-François Mattei - C'est un modèle que j'ai rejeté ! M. le Secrétaire d'Etat - Il est pourtant très instructif, car les dépenses de santé augmentent là-bas vivement sans amélioration notable des performances sanitaires. C'est donc pour nous un exemple à fuir. Vous avez aussi évoqué le système hollandais dont nous ne pouvons pas nous inspirer, dès lors qu'il repose sur le principe d'une affiliation à des caisses différentes selon le revenu. En revanche, la mise en concurrence des caisses n'est pas inenvisageable. L'exemple israélien où les caisses syndicales ont été mises en concurrence est à cet égard intéressant. Je crois toutefois que notre système a fait ses preuves ce dont témoigneront nos performances sanitaires qui sont très bonnes et qui continuent de s'améliorer. Il faut garder cela à l'esprit lorsque l'on s'intéresse, ce qui est nécessaire, aux exemples étrangers. Je voudrais maintenant répondre à M. Accoyer. Sans lui chercher querelle, je ne peux pas le laisser parler de coercition et d'immobilisme. Mme Dominique Gillot, rapporteur - Il parlait de la politique de ses amis ! M. Bernard Accoyer - Je n'ai pas parlé de coercition. M. le Secrétaire d'Etat - Mme Aubry a répondu quant à l'immobilisme. En ce qui concerne la coercition, je vous rappelle que le plan Juppé instituait un mécanisme de reversement collectif. M. Bernard Accoyer - Individuel ! M. le Secrétaire d'Etat - Non, individualisé par le chèque mais collectif sur la profession. M. Bernard Accoyer - Mais il n'était pas lié au revenu. M. le Secrétaire d'Etat - C'était d'autant plus injuste. Vous avez également parlé, Monsieur Accoyer d'agression contre les professions de santé. On ne peut pas dire cela. Nous sommes en contact constant avec les professionnels et nous avons notamment négocié huit mois avec les internes. Alors où est l'agression ? Nous sommes d'ailleurs parvenus avec eux à un accord qui, pour la première fois, revalorisait leurs gardes et instituait dans l'internat les filières nécessaires en gynéco-obstétrique, en pédiatrie et en anesthésiologie. M. Jean-Michel Dubernard - Leur grève est tombée à un bon moment ! M. le Secrétaire d'Etat - C'est possible, mais la négociation, qui est bien préférable à la grève, a de toute façon abouti. Il ne reste qu'un point à régler : la possibilité, que tout le monde estime nécessaire, de distribuer les spécialités selon les nécessités régionales afin que nous puissions avoir des anesthésistes ou des chirurgiens là où l'on en manque car sinon il faut fermer l'hôpital ! M. Jean-Michel Dubernard - "Réorienter" l'hôpital, Monsieur le ministre (Sourires). M. le Secrétaire d'Etat - Il est temps que ce ministère cesse d'être celui du soin pour devenir enfin le ministère de la santé (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). Je vous signale en outre que jusqu'à présent la négociation nous a permis d'éviter de mettre les médecins dans la rue ce qui n'a pas toujours été votre cas ! (Protestations sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR) Je vous remercie, Monsieur Accoyer, d'avoir souhaité l'équilibre des comptes en 1999. M. Bernard Accoyer - Je le souhaite vivement. M. le Secrétaire d'Etat - Alors nous allons y arriver (Sourires), et vous y contribuerez en disant aux médecins qui veulent aller dans la rue qu'il est de l'intérêt de tous que le système fonctionne. M. Robert Pandraud - J'adore la ru,e pour ma part. M. le Secrétaire d'Etat - Ce que vous avez dit sur la pénalisation des laboratoires français par notre politique n'est pas juste. Mme Aubry vous a répondu à propos de la politique du médicament. Je voudrais, pour ma part, simplement souligner le paradoxe d'un marché captif qui a tétanisé notre recherche médicale, car tendue vers l'obtention de l'autorisation de mise sur le marché, elle a délaissé le développement de molécules innovantes. Nous avons trop longtemps soutenu des laboratoires produisant des médicaments insuffisamment performants. Nous entendons désormais examiner les produits en fonction de leurs seules qualités. Nous ne souhaitons pas pour autant pénaliser les laboratoires français et je me félicite d'ailleurs de la récente mise sur le marché d'un produit capital pour la lutte contre la douleur des enfants, le Codenfant, par un de nos laboratoires. M. Robert Pandraud - Comment s'appelle ce médicament ? M. le Secrétaire d'Etat - Le Codenfant. M. Jean-Marie Le Guen - Vous n'êtes plus un enfant, Monsieur Pandraud ! (Sourires) M. le Secrétaire d'Etat - Pour favoriser la multiplication d'innovations françaises, nous avons décidé, avec M. Allègre, de faire enfin du budget de la recherche médicale le premier budget de recherche français. En ce qui concerne l'hôpital, je crois que vous comprendrez que nous ne fermons pas des hôpitaux parce que cela nous amuse ! L'harmonisation des maternités, que vous avez évoquée Madame Fraysse, est une nécessité ancienne puisque la première circulaire en ce sens date de 1972. Je voudrais d'ailleurs vous dire que si le seuil a été fixé à 300 accouchements par an, ce n'est pas là un chiffre magique qui nous conduirait à fermer systématiquement les maternités pratiquant un accouchement de moins. Il s'agit simplement du niveau d'activité nécessaire pour garantir la sécurité des patients et qui nous conduira à harmoniser les petites maternités afin de les renforcer. Nous en avons absolument besoin, car moins de 20 % des enfants de moins de 33 semaines naissent dans des maternités où une réanimation néonatale est possible contre 90 % chez nos voisins. Il faut renforcer la sécurité des mères et des enfants qui est un domaine où nous sommes en retard. Il ne s'agit d'ailleurs pas de fermer brutalement des maternités et la concertation nécessaire sera conduite notamment dans le cadre des états généraux. L'actualité récente nous a montré la nécessité de ne plus avoir dans notre pays de maternité dangereuse. Mme Jacqueline Fraysse - Il faut les moderniser. M. le Secrétaire d'Etat - Vous nous trouverez l'argent ! Mme Jacqueline Fraysse - Il ne faut pas les fermer. M. le Secrétaire d'Etat - Nous ne les fermerons pas si nous pouvons faire autre chose et en particulier les moderniser en les mettant en réseau. Je crois, d'autre part, que la prise en compte des conduites à risque est indispensable pour améliorer la santé des Français ; je pense en particulier au problème de la sécurité routière que nous avons tort de ne pas considérer sous l'angle de la santé publique. Vous nous parlez du retard des états généraux, Madame Fraysse. Je vous rappelle que près de 40 réunions importantes ont déjà eu lieu et qu'elles vont se multiplier sous l'impulsion des comités de pilotage régionaux. En ce qui concerne les médicaments génériques, je ne comprends pas qu'il y ait encore tant de méfiance alors que les médecins et les pharmaciens ont accepté leur introduction. Ne soyons pas plus royalistes que le roi ! Le seul problème qui demeure est celui des personnes âgées habituées à la couleur et à la taille de leurs comprimés. Nous avons demandé aux pharmaciens d'être particulièrement vigilants à leur égard et nous allons en outre distribuer des piluliers. Il faut recourir davantage aux médicaments génériques -15 % seulement de nos médicaments sont aujourd'hui "génériqués" alors que 80 % sont "génériquables" ce qui nous assurerait une économie de plus de 11 milliards sans affecter la qualité des soins, puisque ce sont les mêmes molécules. En ce qui concerne la prise en charge de la douleur et les soins palliatifs, nous avons lancé un plan triennal de lutte contre la douleur qui prévoit la prise en charge quasi systématique et la distribution d'un livret à ce sujet à tous les patients hospitalisés. Il faut cesser de considérer que c'est se montrer douillet que se plaindre. Nous souhaitons également permettre la prescription d'antalgiques majeurs par les infirmiers lorsque les patients souffrent et que les médecins ne sont pas disponibles. Ce n'est pas déchoir. On le fait depuis longtemps à l'étranger. L'excès de hiérarchie est nuisible en pareille matière. D'ailleurs, les services recevront des consignes générales ainsi que des consignes individuelles pour certains patients. M. Jean-Michel Dubernard - Pourquoi les 200 postes promis l'année dernière ont-ils disparu ? M. le Secrétaire d'Etat - Ce ne sont pas 200, mais 140 postes de praticiens qui ont été prévus pour les centres anti-douleur. Malheureusement, les médecins désignés pour ces postes sont rapidement absorbés par l'hôpital... M. Bernard Accoyer - On l'a compris. M. le Secrétaire d'Etat - Dans ce cas, ne m'interrogez pas. S'agissant des soins palliatifs, nous allons mettre en place un dispositif sans précédent. Il y aura des équipes mobiles et des équipes fixes dans toute la France. M. Préel nous a reproché notre "immobilisme". J'espère que mon plaidoyer le fera changer d'avis. Nous n'avons pas voulu étatiser la CNAM, qui jouira même d'une plus grande liberté. La répartition des enveloppes s'est faite dans le dialogue. Vous avez eu raison, Monsieur Préel, d'attirer notre attention sur les morts évitables. Mais reconnaissez que nous avons fait des efforts considérables dans le dépistage des cancers et de l'hépatite C. Je regrette que les accidentés de la route ne soient pas mieux pris en charge. Nous voulons prévenir mille décès par an. Un crédit de 250 millions nous permettra de dépister les cancers du sein et de l'utérus. Puis nous ferons en sorte de financer le dépistage des cancers colo-rectaux. J'espère que le remboursement à 100 % des frottis et des contrôles vous apparaît comme un progrès. Nous allons instituer un forfait par pathologie à l'intérieur du réseau, ce qui permettra au patient de consulter les différents spécialistes concernés. MM. Goulard et Dubernard ont insisté sur les spécialités. Mais celles-ci sont à vau-l'eau, faute d'une remise en cause des filières. Nous cherchons des remèdes. Dans quelques années -le temps de leur formation-, nous disposerons enfin d'anesthésistes en nombre suffisant... M. Jean-Michel Dubernard - Mais leur statut ? M. le Secrétaire d'Etat - Chaque fois que j'annonce une bonne nouvelle, vous cherchez à soulever un problème. Mme Odette Grzegrzulka - Il est positivement négatif ! M. le Secrétaire d'Etat - Nous avons revalorisé le travail de certaines catégories d'aides-soignants, mais il n'est pas possible de le faire pour toutes en même temps. Le caractère pénible du travail effectué doit être toutefois pris en compte dans la révision de certains statuts. Nous avons revalorisé la rémunération des praticiens assistants contractuels, le montant versé aux internes pour les gardes et le prix des accouchements. Nous avons reçu les urgentistes la semaine dernière. Faut-il faire du traitement de l'urgence une nouvelle spécialité ? Voilà un beau débat ! Quelqu'un me fait signe d'arrêter... J'avais compris qu'il fallait tenir jusqu'à 13 heures (Rires). Mais surtout si les parlementaires posent des questions, est-ce un exercice de style, ou attendent-ils des réponses ? MM. Evin et Préel se sont interrogés dans les mêmes termes sur l'Assistance publique-hôpitaux de Paris. Savez-vous combien il y a de services de chirurgie digestive à Paris ? M. Jean-Michel Dubernard - 42. M. le Secrétaire d'Etat - C'est parce que je vous l'ai dit hier (Sourires). 42, en effet, ce n'est pas raisonnable. Le président des directeurs de CHU l'a admis, on ne peut continuer à multiplier les services redondants pour nommer des chefs de service. Mme Aubry l'ayant déjà fait, je ne répondrai pas à M. Sarre. M. Bernard Accoyer - Ce n'est pas la peine ! M. le Secrétaire d'Etat - Pourquoi ne partez-vous pas, Monsieur Accoyer ? (Protestations sur les bancs du groupe du RPR) M. Laffineur a plaidé en faveur de l'autocontrôle des médecins. Nous y sommes tous favorables, mais il n'a encore donné aucun résultat. MM. Evin et Teulade ont expérimenté des dispositifs de maîtrise médicalisée des dépenses. C'est nécessaire, mais pas suffisant. Monsieur Dubernard, je ne vous ai pas répondu sur la dégradation du climat social dans les hôpitaux. Mais comment pouvez-vous prétendre l'améliorer à enveloppe égale ? Pour rendre la prise en charge plus égalitaire, il faut hiérarchiser les services entre eux et supprimer les spécialités redondantes. Monsieur Terrasse, vous souhaitez un égal accès de tous aux soins. Mais il faut atteindre cet objectif à qualité de soins égale, sans quoi nous ne ferions que creuser les inégalités. Parfois, faire quelques kilomètres est un gage de sécurité. Je remercie M. Perrut pour ce qu'il a dit à propos du dépistage du cancer. M. Jean-Paul Bacquet a parlé des références médicales opposables : nous avons conscience qu'il faut cesser de les opposer aux pratiques médicales. Je le remercie d'avoir défendu les génériques. Quant à l'informatisation, nous saluons les progrès réalisés. Monsieur Foucher, la signature des syndicats de pharmaciens devrait dissiper vos inquiétudes sur les génériques de substitution. Il est difficile de lier l'activité du médicament à son remboursement. Mais est-ce pénaliser les patients que de se demander à quoi ont servi les médicaments absorbés, que d'affirmer qu'une ordonnance de dix-huit produits est trop lourde ? Il faut réduire la consommation médicamenteuse au profit des molécules nouvelles. S'agissant de la prévention, il faut insister sur le fait que la CNAM va prendre à sa charge les mesures d'information et de mise en réseau. Le dispositif non prescriptif qui pourra être remboursé par la CNAM, la prise en charge au forfait de la pathologie, voilà l'élément le plus nouveau et je crois qu'il portera très vite des fruits. Madame Génisson, vous avez eu raison de souligner et regretter l'inégalité d'accès aux soins. En ce qui concerne les maternités, merci d'avoir souligné que le chiffre de 300 naissances par an n'est pas une guillotine. En ce qui concerne les services d'urgence, peut-être faudra-t-il reconnaître une spécialité d'urgentiste, le débat est ouvert. Mais ce qu'il faut en tout cas reconnaître, et nous l'avons fait, c'est le caractère pénible de certains postes ; on ne peut plus en rester au vieux système français qui intercalait une garde de nuit entre deux journées de travail. Mme Andrieux a, à juste titre, souligné la surmortalité dans certains quartiers. C'est une situation insupportable et nous essayons d'y remédier. Nous procédons au renforcement de la médecine scolaire. M. Jean-Pierre Foucher - Et l'article 7 ? M. le Ministre - Mme Guinchard-Kunstler a parlé du développement des soins palliatifs : nous allons très vite en mesurer les effets. M. André Aschieri a souhaité qu'on réintroduise l'éducation sanitaire à l'école primaire. C'est en cours, à titre expérimental, à la demande de la Conférence nationale de santé publique de 1997. Nous manquons de médecins scolaires : il conviendrait de renforcer leur statut pour qu'ils soient plus nombreux. Nous allons lancer une mission conjointe de l'inspection de l'éducation nationale et de l'IGAS sur ce sujet dans quelques semaines. Enfin, je rappelle que Mme Grzegrzulka et M. Aschieri ont presque achevé la mission que le Premier ministre leur avait confiée sur l'environnement et la santé (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). M. le Président de la commission des affaires culturelles - Je remercie les ministres pour la qualité de leurs réponses. Monsieur Kouchner, on ne se lasse pas de vous écouter ! (Rires) Néanmoins je demande une suspension de séance, car la commission doit se réunir à 14 heures 15 pour examiner une cinquantaine d'amendements dont certains, très importants, sont arrivés tardivement. M. le Président - Vous souhaitez que je lève la séance ? M. le Président de la commission des affaires culturelles - Exactement ! M. Bernard Accoyer - Rappel au Règlement ! Je trouve que ce qui se passe depuis deux heures dans l'hémicycle est insultant pour notre assemblée. Mme la ministre et M. le ministre ont fait de l'obstruction parlementaire (Protestations sur les bancs du groupe socialiste), ce qui est une nouveauté ! La majorité plurielle cherche à gagner du temps pour résoudre ses propres contradictions : c'est inacceptable ! (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste) M. Alfred Recours, rapporteur - Et vos motions de procédure, alors ? Quatre heures de débat ! M. Bernard Accoyer - Quant aux arguments du président de la commission, ils ne sont pas recevables. La réalité, c'est que cette majorité hétéroclite commence à se fissurer et ce sont les Français qui en paieront les conséquences. M. Alfred Recours, rapporteur - Décevant ! Mme la Ministre - Très franchement, je trouve cette déclaration totalement déplacée. Je croyais que les ordonnances Juppé avaient pour objet de provoquer un véritable débat démocratique au Parlement. Bernard Kouchner et moi-même avons essayé, depuis hier, d'écouter tous vos arguments et d'y répondre le plus complètement possible ce matin. Si vous posez des questions pour qu'on n'y réponde pas, c'est que la démocratie et vous-même, cela fait deux ! La démocratie et nous, cela fait un (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste). La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu cet après-midi, à 15 heures. La séance est levée à 12 heures 40. Le Directeur du service © Assemblée nationale © Assemblée nationale |