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Assemblée nationale

COMPTE RENDU

ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 1998-1999 - 25ème jour de séance, 64ème séance

1ère SÉANCE DU VENDREDI 6 NOVEMBRE 1998

PRÉSIDENCE DE M. Arthur PAECHT

vice-président

          SOMMAIRE :

LOI DE FINANCES POUR 1999 -deuxième partie- (suite) 1

    QUESTIONS 19

    APRÈS L'ART. 76 24

La séance est ouverte à neuf heures.


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LOI DE FINANCES POUR 1999 -deuxième partie- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion de la deuxième partie du projet de loi de finances pour 1999.


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ANCIENS COMBATTANTS

M. Jean-Pierre Kucheida, rapporteur spécial de la commission des finances - Il m'apparaît particulièrement opportun d'examiner le budget du secrétariat d'Etat aux anciens combattants à quelques jours de ce 11 novembre 1998, 80ème anniversaire de la fin de la Première Guerre mondiale, cette boucherie sans égale, rappelée hier par le Premier ministre au sinistre Chemin des Dames.

Marqué comme il l'a été, très jeune, par La Peur, le terrible roman de Gabriel Chevalier, par la succession des monuments aux morts dans tous les villages français, puis par le retour d'Algérie, en cercueil plombé, de ses tout juste aînés, votre rapporteur a toujours pensé que les anciens combattants avaient des droits sur la France, qu'il ne fallait pas leur marchander, tout en sachant raison garder. C'est pourquoi il est satisfait de pouvoir vous dire ce matin que la commission des finances s'est prononcé à l'unanimité en faveur du budget des anciens combattants.

Ce budget se caractérise par une action accrue en faveur du monde combattant. En effet, bien que le nombre de pensionnés ait malheureusement diminué de 4 % cette année, le budget pour 1999 n'accuse qu'une baisse de 2 %, avec un montant global de 25 498 millions de francs. Le douzième budget civil de l'Etat doit traduire les économies obligatoires liées à la baisse du nombre des pensionnés qui sont passés de 1,7 million en 1967 à 550 000 en 1997, et qui ne seront plus que 250 000 en 2018.

L'effort constaté s'exprime par une diminution de budget bien moindre que les années précédentes, puisqu'elle avait été de 3,5 % en 1998, et de plus de 5 % en 1997. C'est un budget dynamique, puisque 4,7 % seulement des crédits sont destinés au fonctionnement des services, cependant que 95,2 % seront utilisés pour les dépenses d'intervention -dette viagère et actions de "solidarité mémoire".

Mais la caractéristique principale de ce budget est d'être conforme au devoir de reconnaissance nationale. L'application du rapport constant coûtera 293 millions de francs. Je rappelle que le fort décalage qui existait avant 1981 a été corrigé, la grave injustice dont étaient victimes les anciens du feu étant ainsi réparée. Depuis 1983, le rattrapage au même niveau que les hausses des rémunérations publiques est systématiquement respecté. Par ailleurs, les soins médicaux gratuits et l'appareillage restent gratuits dans le cadre du droit à réparation.

Le montant moyen des pensions versées -33 328 F- sera revalorisé de 1,47 %, taux supérieur à celui de l'inflation prévue. Au paiement de la retraite de 840 000 anciens combattants seront consacrés 2 226 millions de francs, montant revalorisé de 1,9 % par rapport à 1998. Le groupe socialiste proposera d'aller plus loin encore, en prenant en compte les anciens combattants d'Afrique du Nord et en faisant passer de 18 à 15 mois le délai de service nécessaire à l'obtention de la carte de combattant, juste preuve de reconnaissance de la nation.

Le budget prévoit une part importante consacrée aux actions de solidarité : 5 613 millions de francs, contre 3 973 millions en 1989, malgré la forte baisse du nombre des ayants droit. De plus, quatre mesures nouvelles apparaissent. En premier lieu, l'allocation de remplacement pour l'emploi va permettre aux anciens d'Afrique du Nord de quitter l'entreprise dès 58 ans s'ils remplissent certaines conditions, et les anciens combattants pourront désormais prétendre au bénéfice de l'ARPE même en cas de refus de l'employeur -mesure qui soit dit en passant, pourrait valoir pour tous les bénéficiaires potentiels de cette allocation ! L'Etat versera, à ce titre, une subvention de 20 millions de francs. Je rappelle que l'ARPE a permis le départ en retraite de 111 298 allocations et l'embauche subséquente de 100 795 personnes. Le groupe socialiste proposera la suppression de l'attente de six mois actuellement nécessaire pour pouvoir bénéficier de l'ARPE.

La deuxième mesure nouvelle est la revalorisation des rentes mutualistes, qui coûtera 6,3 millions de francs à l'Etat. Il est prévu que son plafond passe de 95 en 1998 à 100 points en 1999. Le groupe socialiste considère qu'il faut, là encore, aller plus loin, et fixer ce plafond à 102 points dès 1999 (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste), cette mesure ne pesant pas de manière significative sur le budget de l'Etat.

Troisième mesure nouvelle : l'affiliation gratuite à la Sécurité sociale pour les mutualistes pensionnés à 85 % qui ne sont pas assurés sociaux par ailleurs. Le coût de cette exonération est de 84 millions de francs.

Dernière mesure nouvelle, la subvention d'action sociale de l'Office national des anciens combattants est portée à 46,7 millions de francs, en augmentation de 11 % par rapport à 1998. Là aussi, il faudrait aller plus loin et porter l'augmentation à plus de 20 % grâce à un budget supplémentaire de 5 millions pour prendre en compte les cas les plus douloureux.

Ce budget développe en outre les actions de mémoire. Vous avez d'ailleurs été exemplaire personnellement sur ce plan et je ne dis pas cela pour vous passer la "brosse à reluire".

M. Michel Herbillon - Quoique... (Sourires)

M. le Rapporteur spécial - Je suis député depuis 1981 et je n'avais jamais vu depuis un secrétaire d'Etat aux anciens combattants s'activer autant ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. François Rochebloine - C'est vrai !

M. le Rapporteur spécial - Je vous ai rencontré, Monsieur le ministre, à Lorette. Je vous rencontrerai demain à Vimy et je sais que vous étiez hier avec le Premier ministre au Chemin des Dames. Vous êtes donc allé dans de nombreux endroits marquer la solidarité du Gouvernement avec les anciens combattants.

L'importance de ces actions de mémoire s'accroît à mesure que les conflits s'éloignent dans le temps. Des crédits de 60 millions, dont 9 millions de mesures nouvelles, leur sont affectés. La dotation destinée aux commémorations augmente de 10 % et celle allouée aux actions d'information historique de 80 %. L'entretien des nécropoles sera mieux assuré grâce à un crédit supplémentaire de 1,3 million. 96 emplois seront créés à raison d'un par service départemental de l'Office national des anciens combattants et des emplois-jeunes seront recrutés pour développer ces actions de mémoire. Il serait intéressant que vous précisiez quelles seront leurs missions. Nous, socialistes, pensons qu'il faut faire davantage pour développer la mémoire citoyenne.

Aux dispositions de votre budget en faveur des anciens combattants, il faut ajouter le maintien de la demi-part fiscale supplémentaire attribuée aux anciens combattants et aux invalides dont la commission des finances est fière. La volonté d'accorder un meilleur traitement aux anciens combattants est donc claire.

Nous pensons qu'il faut aller plus loin et envisager, à terme, la décristallisation. Celle-ci permettra une solidarité avec ceux qui ont, eux aussi, droit à la reconnaissance de la France.

La solidarité, la considération et l'attention de la patrie pour ceux qui l'ont si magnifiquement servie doivent être aussi exemplaires que l'ont été ces jeunes à qui l'on a tout demandé à vingt ans. Depuis près de quarante ans, la France vit en paix. Cet héritage sans prix, nous le devons à nos anciens combattants, à ceux qui, un jour, eurent vingt ans du côté de Verdun, de Dunkerque, des plages de Normandie, dans les rizières enfiévrées d'Indochine ou dans les Aurès. La reconnaissance nationale doit s'exprimer clairement à leur égard. Elle doit être le remerciement toujours renouvelé d'un peuple reconnaissant à ceux qui lui ont assuré la liberté.

Votre budget, Monsieur le ministre, est satisfaisant grâce au bon travail des commissions des affaires sociales et des finances. Si les amendements de mes amis socialistes étaient acceptés, ce serait un bon budget (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

M. Maxime Gremetz, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles - Pour 1999, votre budget s'établit à 25,478 milliards en diminution de 2 % par rapport à 1998, après des baisses déjà enregistrées en 1998 et 1997, respectivement de 3,5 % et de 5 %. Comme les années précédentes, 95,2 % des dépenses portent sur les interventions qui mobilisent 24,25 milliards de francs, principalement au titre de la dette viagère. Les dépenses de personnel représentent seulement 3,3 %, les dépenses de fonctionnement 1,4 % et les dépenses d'investissement 0,1 % des dépenses totales.

Les dépenses liées à l'invalidité représentent traditionnellement plus de 70 % du total. Depuis plusieurs années, on observe que les actions de solidarité augmentent ; avec 5 613 millions de francs, ces actions représenteront en 1999 environ 22 % des dépenses totales.

La réduction des effectifs n'affectera en 1999 que l'administration centrale, les effectifs du secrétariat d'Etat diminuant de 161 emplois en 1999 -soit de 6,9 %. Fort heureusement, le nécessaire réseau d'accueil et de proximité sera maintenu.

La réduction de crédits par rapport à 1998 est justifiée, d'après ces services par la baisse régulière des effectifs de pensionnés. Aujourd'hui, sur les 4,2 millions de ressortissants, les bénéficiaires d'une pension ne sont plus que 552 000. Le budget se traduirait donc par une augmentation nette de l'effort moyen consenti par la nation en faveur de chaque ancien combattant.

Cette présentation du budget est significative : il faudrait se réjouir que le droit à réparation soit honoré, alors que cela ne représente, somme toute, que le minimum minimorum que l'on est en droit d'attendre d'une administration chargée d'appliquer le code des pensions militaires d'invalidité fixant les droits reconnus par la nation aux anciens combattants et victimes de guerre.

Les ressources tirées de la diminution du nombre de pensionnés année par année ne sont pas affectées à l'amélioration de leurs droits. Je le déplore.

Ce discours rassurant occulte en effet mal l'absence de moyens pour satisfaire les plus importantes demandes du monde combattant.

Des éléments positifs sont néanmoins à relever.

Ainsi, je me réjouis de la majoration des crédits de la dette viagère afin d'intégrer les hausses de rémunérations publiques prévues et donc de permettre une revalorisation significative des pensions. L'application du rapport constant à la dette viagère représentera un montant de 293 millions, soit un taux de progression de 1,47 % pour les pensions. Le montant de la retraite du combattant sera, quant à lui, revalorisé de 1,9 %.

Cependant si le rapport constant est strictement appliqué, son mode de calcul est contesté.

Au total, le projet de budget pour 1999 comporte 54,8 millions de mesures nouvelles dont les augmentations de 11 % de la dotation concernant les commémorations et de 79 % de l'enveloppe allouée aux actions.

Votre budget renforce la solidarité due aux anciens combattants.

Ainsi, plus 6,3 millions de crédits supplémentaires seront consacrés à l'augmentation du plafond de la rente mutualiste.

L'enracinement de la génération d'Algérie dans le monde combattant est également favorisé.

L'article 75 étend le bénéfice de l'ARPE, de manière automatique, aux salariés anciens combattants d'Afrique du Nord, qui, cessant leur activité, remplissent les conditions requises, mais dont la demande se heurte à un refus de la part de leur employeur. Celui-ci ne sera désormais plus en mesure de l'opposer au départ du salarié et sera soumis d'office à l'obligation d'embauche compensatrice.

20 millions sont affectés au financement de cette mesure qui permettra le versement d'une allocation de remplacement aux titulaires de la carte du combattant ayant servi en AFN, se trouvant à dix-huit mois de l'âge de la retraite et réunissant les conditions de durée d'années requises. Cette mesure devrait bénéficier, en 1999, à 163 personnes et jusqu'en 2001 à 401 personnes supplémentaires. Elle concernera donc en tout et pour tout sur trois ans moins de 500 personnes. Je propose qu'elle soit étendue aux anciens d'AFN titulaires de la carte de reconnaissance de la nation.

Par ailleurs, je me réjouis que M. Jean-Pierre Masseret, ait reconnu que ce que l'on a appelé pudiquement les "événements" d'Algérie ont en fait constitué une guerre. Votre rapporteur est heureux que le langage officiel s'accorde enfin avec les faits ! Mais cette nouvelle appellation ne doit pas être que symbolique ; elle implique que ces anciens combattants se voient reconnaître les mêmes droits que tous les autres.

Ce projet de budget se caractérise enfin par la volonté de donner un nouvel élan à l'ONAC ainsi qu'à la politique de la mémoire.

D'autre part, l'article 76 relève de 95 à 100 points d'indice de PMI la référence servant de calcul au plafond majorable de la retraite mutualiste, afin de garantir le pouvoir d'achat de ces rentes. Je me félicite de cette mesure tout en rappelant -et en reprenant à mon compte- la revendication des associations des anciens combattants, qui militent pour que l'on porte cette référence à 105 points d'indice.

Cependant des lacunes graves persistent et ces avancées apparaissent mineures au regard des revendications exprimées avec le plus de force et de constance par les associations. Nous ne saurions nous satisfaire d'un budget qui passe ainsi sous silence certaines demandes essentielles, légitimes et raisonnées. J'appelle solennellement le Gouvernement à suivre une tout autre logique que celle qui a présidé aux budgets précédents, et à rembourser les dettes de la nation. On ne saurait marchander en ce domaine ! Quelles que soient les contraintes budgétaires et les priorités, il serait incompréhensible que ce budget-ci ne comporte pas de mesures nouvelles et significatives, en faveur notamment des anciens combattants d'Afrique du Nord.

L'année passée, j'avais fortement regretté les carences du projet de budget et l'insuffisance des mesures annoncées à la "dernière minute" par le Gouvernement. Cette année, je ne peux que réitérer ces observations et ces critiques car le projet apparaît tout aussi pauvre que le précédent.

M. François Rochebloine - Très bien !

M. le Rapporteur pour avis - Il faut aussi, dès 1999, mettre un terme aux contentieux en suspens. Nombre de revendications peuvent parfaitement être satisfaites du fait de la diminution du nombre d'ayants droit, qui se traduit mécaniquement par la diminution de la dette viagère. Certaines de ces mesures, d'ailleurs proposées par tous les groupes parlementaires, n'auraient que de faibles incidences financières. Il s'agit de la levée des forclusions pour l'obtention de la carte de combattant volontaire de la Résistance,...

M. François Rochebloine - Très bien !

M. Alain Néri - Que ne l'avez-vous fait ?

M. le Rapporteur pour avis - ...de l'attribution du titre de reconnaissance de la nation pour participation à des missions humanitaires en Algérie entre juillet 1962 et juillet 1964, de la possibilité de dispenser des soins adaptés aux psychotraumatisés de guerre et d'une attribution équitable de la carte de combattant aux anciens d'Afrique du Nord.

Pour être plus coûteuse, d'autres ne doivent pas pour autant être abandonnées : je pense au dégel total des pensions des plus grands invalides, ainsi qu'à la décristallisation des pensions de ceux qui, ayant combattu pour la France, sont aujourd'hui citoyens de nations indépendantes.

Il apparaît nécessaire, en tout état de cause, de résorber le contentieux entre le monde combattant et les pouvoirs publics. Le bénéfice de la retraite anticipée doit ainsi être accordé de toute urgence aux anciens d'AFN, faute de quoi le nombre de bénéficiaires potentiels diminuera sensiblement au cours des prochaines années. Or, pas plus que le précédent, le projet de budget pour 1999 ne comporte une telle mesure. Pourtant, à attendre, vous avez vous-même reconnu, Monsieur le secrétaire d'Etat, qu'on s'exposait à prendre une disposition d'une portée ridicule...

Votre argumentaire sur ce point ne me convainc pas du tout. Comme je l'ai dit devant le congrès de la FNACA, le 18 octobre, il faut que les anciens combattants puissent bénéficier de la retraite anticipée avant 60 ans, en fonction du temps passé sous les drapeaux en Afrique du Nord. Dans mon esprit, il s'agit d'un droit et non d'une obligation. En outre, je le répète, il y a extrême urgence ("Très bien !" sur les bancs du groupe UDF).

Un député socialiste - Gremetz-Rochebloine, même combat !

M. le Rapporteur pour avis - Non : je me contente de rapporter avec objectivité. Au reste, le 8 mai 1997, le Premier ministre lui-même n'a-t-il pas écrit au président de la fédération nationale des anciens combattants : "Dans un premier temps, nous nous engageons à accorder la retraite anticipée aux chômeurs en fin de droits justifiant de quarante annuités de cotisations, diminuées du temps passé en Afrique du Nord" ?

La présentation de ce projet a provoqué un mécontentement légitime au sein des associations représentatives et un certain étonnement de la part d'un grand nombre de parlementaires. En l'état, il apparaît inacceptable. Il doit donc être amendé pour supprimer la condition de six mois d'allocation différentielle avant de pouvoir prétendre à l'allocation de préparation à la retraite, pour relever à 105 points d'indice de PMI la référence servant à calculer le plafond majorable des rentes mutualistes, pour ramener le temps de présence en Afrique du Nord exigé pour l'octroi de la carte de combattant de 18 à 12 mois ; pour permettre à tous les anciens d'AFN de faire valoir leur droit à la retraite anticipée, et pour rétablir les crédits sociaux de l'ONAC tels qu'ils étaient dans la loi de finances initiale pour 1997.

Au cours de la réunion de la commission, le 4 novembre, plusieurs amendements ont été discutés, mais non mis aux voix, le président de la commission ayant opposé l'irrecevabilité. Comme ils n'en traduisent pas moins la volonté de nombreux parlementaires, il a été convenu que je les présenterai de façon pressante au Gouvernement. C'est ce que je fais bien volontiers.

Certains ont reçu l'accord de l'ensemble des groupes. Ainsi celui qui vise à augmenter de 5 millions les crédits sociaux de l'ONAC, qui a reçu l'approbation de MM. Alain Néri, Patrick Malavieille, de Mme Roselyne Bachelot-Narquin et de MM. François Rochebloine et Georges Colombier.

De même deux amendements, l'un de moi-même, visant à augmenter le montant de la rente mutualiste donnant lieu à majoration, en portant la référence à 105 points d'indice et l'autre de MM. Rochebloine et Colombier visant à porter cette référence à 102 points. Après discussion, j'ai estimé cette dernière demande raisonnable, et les cinq groupes l'ont approuvée, ainsi qu'un autre amendement des mêmes auteurs tendant à mettre fin à des disparités de traitement entre des anciens combattants souffrant pourtant de handicaps similaires.

MM. Rochebloine et Colombier et moi-même avions ensuite proposé d'abaisser de 18 à 12 mois le temps de présence en Afrique du Nord nécessaire pour pouvoir prétendre à l'attribution de la carte de combattant, M. Rochebloine présentant en outre un amendement de repli, abaissant ce temps à 15 mois. C'est cette dernière proposition que les cinq groupes ont retenue.

Enfin, deux amendements, l'un présenté par moi-même, l'autre par MM. Rochebloine et Colombier, visaient tous deux à supprimer l'obligation d'avoir perçu pendant six mois consécutifs l'allocation différentielle pour pouvoir ensuite prétendre à l'allocation de préparation à la retraite. Eux aussi ont reçu l'accord de tous les groupes.

En revanche, sur l'amendement présenté par M. Desallangre et moi-même, visant à accorder la retraite anticipée professionnelle à tous les anciens combattants d'Afrique du Nord et sur l'amendement de repli la réservant aux anciens combattants chômeurs en fin de droits, seuls les groupes communiste, RPR, UDF et DL se sont exprimés favorablement.

Au terme de cette discussion, les groupes RPR, UDF, DL ont donné un avis défavorable à ce budget en l'état, le groupe socialiste donnant au contraire un avis favorable et le groupe communiste optant pour une abstention "positive". J'ai de même déclaré m'abstenir.

M. Michel Herbillon - C'est la participation sans soutien !

M. le Rapporteur pour avis - Les groupes ont souhaité que les votes indicatifs en commission puissent être modifiés en fonction de vos réponses (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, sur quelques bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe UDF).

M. Patrice Carvalho - Ce budget des anciens combattants appelle une appréciation contrastée. Sa diminution de 2 % qui prend en compte mécaniquement la baisse du nombre des anciens combattants traduit une volonté d'économie, non une volonté de réponse à des besoins réels. Le respect du droit à réparation pour tous les ressortissants de l'ONAC devrait amener à utiliser l'ensemble des sommes rendues disponibles pour résoudre les contentieux qui restent à régler.

Le budget contient, c'est vrai, des avancées. Ainsi, pour le rapport constant, mais ce n'est pas suffisant : le "rapport constant" concernant non seulement les pensions de guerre, mais aussi la retraite du combattant, le Gouvernement entend-il utiliser un nouveau mode de calcul prenant en compte les primes attribuées à la fonction publique ?

Autre mesure positive, l'automaticité du versement de l'ARPE -la préretraite contre l'embauche d'un jeune- pour les salariés ayant combattu en Afrique du Nord.

Le plafond majorable de la rente mutualiste anciens combattants est porté à l'indice 100 au lieu de 95 en 1998. Mais il faudrait le porter à 105 pour répondre à l'attente des intéressés.

Autre satisfaction -même si elle n'est pas budgétaire-, votre déclaration récente, Monsieur le secrétaire d'Etat, affirmait enfin qu'il y avait eu guerre en Algérie. L'engagement de la France en Afrique du Nord, de 1952 à 1962, a été en effet une véritable guerre : trois millions de jeunes Français y ont été confrontés, dont 30 000 ont été tués, 250 000 blessés ou frappés de maladie, tandis que le nombre des morts atteignait un million du côté algérien. Et personne n'a oublié qu'à l'issue de cette tragédie, une partie de la population a dû quitter, dans des conditions dramatiques, la terre où elle était née.

Si l'article 75 permet, grâce à la convention ARPE, le départ en préretraite des anciens combattants qui le souhaitent, la question de la retraite professionnelle anticipée n'est pas abordée. Les anciens combattants doivent pouvoir, s'ils le souhaitent, bénéficier de la retraite avant 60 ans, en fonction du temps passé sous les drapeaux en Afrique du Nord. Je rappelle que les partis communiste et socialiste s'y étaient engagés pendant la campagne électorale, et qu'il y va donc du respect de ses engagements par la gauche.

M. Jacques Floch - C'est fait.

M. Patrice Carvalho - Pas encore. En ce qui concerne l'ARPE, il faudrait supprimer la condition de six mois au fonds de solidarité : les bénéficiaires de l'APR doivent pouvoir prétendre à la retraite complémentaire à taux plein par l'attribution de points gratuits.

L'égalité des droits appelle de régler la question de la campagne double : un trimestre passé en Afrique du Nord devrait être validé par un trimestre de cotisation sociale, et le temps de présence en Afrique du Nord exigé pour pouvoir prétendre à la carte d'ancien combattant ramené à 12 mois.

S'agissant de la Seconde Guerre mondiale, le devoir de mémoire, dont les crédits progressent, reste intact -et les jeunes générations sont conscientes que la vigilance est nécessaire. Mais ce devoir devrait mieux s'exprimer à l'égard de ceux dont la valeur de l'engagement, dans ces années terribles, n'est pas pleinement reconnue -par exemple les réfractaires qui méritent la reconnaissance de la nation et les résistants qui se voient encore opposer une forclusion de droit et de fait aux demandes du titre de combattant volontaire de la Résistance. Des résistants emprisonnés au titre du décret Sérol de 1939 ne peuvent obtenir la reconnaissance de leurs droits. Quant aux victimes de la déportation du travail, on devrait leur en reconnaître le titre.

La question de la décristallisation des pensions doit aussi trouver une solution pour que tous ceux qui ont combattu sous les couleurs de la France, aient les mêmes droits, quels que soient leur nationalité et leur pays de résidence.

Dans une réforme respectueuse de la spécificité française du monde combattant, l'ONAC doit être pérennisé et ses crédits sociaux -drastiquement réduits l'an passé- devraient être augmentés davantage.

Mais la question majeure reste celle de la retraite anticipée pour les chômeurs en fin de droits justifiant de 40 années de cotisations diminuées du temps passé en Afrique du Nord. Comme elle n'a pas été prise en compte, en dépit des engagements électoraux de M. Jospin, les députés communistes s'abstiendront (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste).

M. François Rochebloine - Lors de la précédente discussion budgétaire, je m'étais plu, Monsieur le ministre, à souligner votre volonté de dialogue avec le monde combattant, ce qui n'avait pas toujours été le cas pour certains de vos prédécesseurs. Nous avions formé beaucoup d'espoirs quant à la solution des demandes principales de la troisième génération du feu.

Ces espoirs sont aujourd'hui déçus. Je vous l'aurais dit en réunion de la commission des affaires sociales, si votre audition n'avait dû être annulée pour cause de Pacs. Je tiens cependant à vous féliciter pour l'emploi, dans vos interventions, du mot "guerre" au lieu de la notion de "maintien de l'ordre".

Le budget 1999 baisse de 2,1 % : comme tous vos prédécesseurs, de droite ou de gauche, vous n'avez pu résister à Bercy et obtenir le maintien des crédits de votre ministère qui vous aurait permis de satisfaire aujourd'hui certaines revendications prioritaires.

Toutefois, pour être objectif, je dois souligner certains points positifs. D'abord, l'augmentation des crédits sociaux de l'ONAC, qui avaient été fortement diminués l'an dernier. Ensuite, l'inscription de 20 millions de francs pour les personnes susceptibles de bénéficier de l'ARPE mais dont les employeurs ne souhaitaient pas se séparer. Cependant cette mesure ne concernera que 163 personnes en 1999... (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. Alain Néri - Quelles sont vos sources ?

M. François Rochebloine - ...et 401 sur trois ans -je tire cette donnée de l'excellent rapport de M. Gremetz, vous voyez que je suis objectif (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste). Je l'ai toujours été !

Autre mesure positive, l'augmentation du plafond de la rente mutualiste qui passe de 95 à 100 points. Je proposerai cependant avec mes collègues Barrot et Colombier de le porter à 105 points, ou au moins à 102 -avec sept points de plus par an, on arriverait en cinq ans aux 130 points promis.

Enfin, en cette année du quatre-vingtième anniversaire de l'armistice, j'approuve l'augmentation substantielle des crédits consacrés à la mémoire.

Sur d'autres points, je serai beaucoup plus critique et d'abord sur votre refus d'accorder la retraite anticipée en fonction du temps passé en AFN, mesure dont le coût est estimé par le Front uni à 4 milliards sur quatre ans. A défaut, je propose avec Georges Colombier de ne prendre en compte que le temps passé en AFN au-delà de la durée légale du service national. Cette proposition a eu l'assentiment du Front uni.

Par ailleurs, j'aurais souhaité qu'on supprime la condition de perception de l'APR pendant une période de six mois consécutifs. Avec Georges Colombier et Maxime Gremetz, nous avons déposé un amendement dans ce sens.

Je regrette de ne pas retrouver dans le budget le dispositif de la proposition de loi Gremetz que nous avons été plusieurs à cosigner, et qui permettait aux chômeurs en fin de droits ayant participé aux opérations en AFN entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962 et totalisant 40 annuités de cotisation d'assurance vieillesse, déduction du temps passé en AFN, de bénéficier de la retraite anticipée avant l'âge de 60 ans. Bien sûr, vous allez m'opposer que l'allocation différentielle, ayant été portée l'an passé à 5 600 F pour les chômeurs serait plus avantageuse. Mais ce n'est sans doute pas vrai pour tout le monde : pourquoi ne pas laisser le choix aux intéressés ?

S'agissant de la carte du combattant, le meilleur critère serait celui de la territorialité, tel qu'il a été retenu pour la gendarmerie. Le dispositif avait été réexaminé par le représentant de votre prédécesseur, dont les propositions ont été acceptées par le Front uni. Vous avez répondu l'an dernier en fixant à 18 mois la durée de présence en Algérie nécessaire pour l'attribution de la carte, et vous l'avez étendue à la Tunisie et au Maroc. Nous vous avions fait part de nos réserves, considérant que cela ne remédiait pas aux inégalités pour ceux ayant servi moins de 18 mois. Vous-même, Monsieur le ministre, au congrès de la FNACA à La Rochelle, vous avez reconnu que la moyenne du temps passé en Algérie était de 16 mois environ.

Aussi, comme l'an passé, et comme Alain Néri d'ailleurs, nous avons déposé un amendement ramenant à 12 mois la durée exigée pour l'obtention de la carte. Néanmoins, recherchant le consensus, nous avons aussi déposé un amendement de repli fixant cette durée à 15 mois, ce qui constituerait une réelle avancée.

Il me faut une nouvelle fois aborder la réforme du rapport constant. Le rapport présenté par M. l'inspecteur général de Chalvron donne satisfaction aux anciens combattants, mais il faudra lui donner une suite. Cette modification du mode de calcul est réclamée. Elle améliorera la transparence.

Enfin, une série de problèmes demeurent sans solution.

Je pense à la "campagne double", qui certes aurait un coût, mais dont devraient bénéficier les fonctionnaires et assimilés, anciens d'AFN, suivant les règles du code des pensions civiles et militaires.

Il importe aussi de remédier à l'inégalité des pensions des plus grands mutilés, réglées selon des valeurs du point variables. Deux pensionnés justifiant d'un descriptif d'infirmité identique peuvent en effet percevoir deux pensions différentes, avec une variation de 10 % de l'une à l'autre. Vous l'avez d'ailleurs reconnu vous-même, Monsieur le ministre.

Il serait souhaitable de revenir à une valeur unique du point de pensions. Georges Colombier et moi-même avons déposé un amendement en ce sens.

Autre difficulté, la décristallisation des pensions et retraites des anciens combattants et ressortissants des pays membres de l'Union française devenus aujourd'hui indépendants.

Vous devez encore reconnaître la qualité de veuves de guerre de combattants tués aux combats et morts pour la France et lever les forclusions concernant la reconnaissance de combattant volontaire de la Résistance. Sur ce point, les décrets interdisent l'application de la loi, ce qui nous a conduit, Georges Colombier et moi-même, à déposer un amendement.

Enfin, je déplore l'absence de mesures nouvelles pour améliorer les droits des veuves, des internés et des PRO.

Je ne peux conclure sans aborder le problème de la suppression du ministère des anciens combattants, qui va être intégré dans celui de la défense, dont nous allons examiner le budget cet après-midi. Doit-on voir là des prémices du rattachement annoncé ?

J'ai noté qu'il n'interviendrait qu'avec l'accord du monde combattant, lequel ne pourrait accepter une telle réforme que si le Gouvernement prenait des engagements précis : le maintien d'un interlocuteur privilégié, avec si possible un ministre délégué, la conservation d'un budget autonome et la réaffirmation du principe d'imprescriptibilité du droit à réparation. Quelles assurances peut-on avoir pour l'avenir ? Aujourd'hui, les intéressés sont 4,6 millions, avec peu d'ayants cause. Dans 20 ans, il n'en restera que 2,5 millions, avec beaucoup d'ayants cause.

Quels seraient les avantages de ce rattachement ? Il n'y a pas d'urgence, même si les arguments liés à la réforme des armées méritent d'être étudiés.

Mais attention : lorsque la décision sera prise, il ne sera plus question de revenir en arrière.

Le groupe UDF votera donc contre ce budget, comme il l'a fait en 1993, 1995, 1996 et 1997... (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste) sauf si vous acceptiez nos amendements.

Mme Véronique Neiertz - Nous avons déposé les mêmes !

Mme Odette Grzegrzulka - Soyez constructif !

M. François Rochebloine - Je l'ai toujours été. D'ailleurs, j'ai le sentiment d'avoir été plus gentil avec vous, Monsieur le ministre, que les orateurs précédents.

M. Alain Néri - C'est mérité !

M. Jean-Paul Durieux - La reconnaissance de la nation à l'égard des anciens combattants, le souvenir des heures de douleur et de gloire de son histoire sont les raisons d'être de votre département ministériel.

Dans quelques jours, nous allons célébrer le 80ème anniversaire du 11 novembre 1918. Dans quelques mois, ce sera le 36ème anniversaire de la fin de ce que nous appelons, comme vous, la "guerre" d'Algérie. Je vous demande, au seuil du troisième millénaire, de renouveler le contrat moral qui nous unit aux anciens combattants en réaffirmant votre volonté de pérenniser votre département ministériel et l'imprescriptibilité du droit à réparation.

MM. Maxime Gremetz et François Rochebloine - Très bien !

M. Jean-Paul Durieux - Vous menez, avec les associations d'anciens combattants, une étroite concertation sur l'évolution de votre ministère et son éventuel adossement à celui de la défense. Nous partageons votre volonté de maintenir un département ministériel spécifique, doté d'un budget autonome, et de développer l'ONAC et ses services déconcentrés.

Votre budget évolue d'une manière moins défavorable que les années précédentes : il ne baisse en effet que de 2 %, contre 3,5 % en 1997 et 5 % en 1996.

Je note avec satisfaction, la revalorisation significative de la dette viagère, même s'il reste à régler l'irritant problème du rapport constant.

M. François Rochebloine - Très bien !

M. Jean-Paul Durieux - Vous aborderez la question devant la commission tripartite.

Parmi les mesures nouvelles, insistons sur l'application de l'ARPE aux anciens combattants. Ce n'est pas, certes, la retraite anticipée, mais cette décision nous semble plus conforme aux aspirations des anciens combattants, qui veulent faire place aux jeunes...

M. Jean-Jacques Weber - C'est le reniement de vos promesses électorales !

M. François Rochebloine - Et les chômeurs ?

M. Jean-Paul Durieux - J'approuve l'élévation à 100 points du plafond majorable de la retraite mutualiste, le rétablissement des moyens de l'ONAC et votre effort en vue de réhabiliter les maisons de retraite des anciens combattants.

Mais notre soutien ne va pas sans quelques réserves. Bien avant la présentation de votre budget, les députés socialistes vous ont fait connaître leur volonté d'améliorer votre budget sur plusieurs points, comme le renforcement de l'action sociale de l'ONAC en faveur des veuves d'anciens combattants ou la réforme des conditions d'attribution de la carte du combattant. L'an dernier, nous avons abaissé à dix-huit mois la durée minimale de service en Afrique du Nord. Il faut cette année la ramener à quinze mois.

Nous souhaitons aussi relever à 102 points le plafond majorable de la retraite mutualiste et atteindre en cinq ans l'objectif de 130 points.

Il est temps de garantir l'accès direct à l'APR en supprimant le sas de six mois. Pourquoi imposer cette période de purgatoire aux anciens combattants ?

Enfin, même si votre budget nous rend optimistes dans ce domaine, il importe de développer les initiatives citoyennes dans chaque département, de façon que les jeunes générations fassent leur l'histoire des anciens combattants.

Le groupe socialiste approuve ce budget, mais vous demande de prendre des engagements (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Georges Colombier - Je regrette qu'en raison d'un ordre du jour trop chargé et modifié en dernière minute, nous n'ayons pas pu vous auditionner, Monsieur le ministre, en commission des affaires sociales. C'est d'autant plus regrettable que nous apprécions votre sens de l'écoute et du dialogue.

Même s'il comporte quelques avancées, ce projet de budget ne répond pas aux attentes légitimes du monde combattant.

Cette année encore, nous ne dérogeons pas à la règle selon laquelle les ministres se montrent très satisfaits de leur budget.

On ne peut cependant justifier la baisse du budget par la disparition d'une partie des pensionnés et ayants droit. Depuis des années, nous aurions pu profiter des marges dégagées pour satisfaire les revendications majeures des anciens combattants.

Il est regrettable que leur budget baisse de 2 % par rapport à celui de 1998, qui avait déjà baissé de 3,5 %.

Quelques avancées sont à mettre à votre crédit, cependant, comme la reconnaissance de la guerre d'Algérie. On ne parle plus des "événements" d'Algérie, ni d'opérations de maintien de la paix. Mais il faut aller au bout de cette logique et reconnaître aux anciens combattants d'Algérie les mêmes droits qu'aux autres.

Les crédits sociaux sont augmentés de 12 millions, dont la moitié pour les maisons de retraite ; c'est bien, mais ce n'est jamais qu'un retour à la case départ, après la baisse de cette année. J'approuve, par ailleurs, l'affectation à la politique de la mémoire de 7 millions supplémentaires, qui serviront notamment à financer un emploi-jeune par département.

Le plafond majorable de la retraite mutualiste passe à 100. Pour qu'il atteigne 130 dans cinq ans, il faut au moins le porter à 102, comme le propose la commission. Je me réjouis que 20 millions soient consacrés à la mise en oeuvre du dispositif ARPE, mais je regrette que seuls 400 salariés puissent en bénéficier en trois ans, et j'appuie la proposition d'extension formulée par M. Gremetz. Je déplore également que le projet de budget ne comporte pas la suppression du stage de six mois entre l'allocation différentielle et l'allocation de préparation à la retraite, mais un amendement du Gouvernement nous redonne espoir.

Ces quelques avancées restent insuffisantes, et le budget est inacceptable en l'état. En particulier, les attentes des anciens combattants d'Afrique du Nord ne sont toujours pas satisfaites. Je salue l'objectivité de M. Gremetz, dont j'ai cosigné, avec de nombreux collègues, la proposition de loi permettant aux chômeurs ayant le nombre d'annuités suffisantes d'accéder à la retraite anticipée. Le Gouvernement fait valoir que la plupart des personnes concernées perçoivent actuellement des allocations de remplacement plus avantageuses ; c'est vrai si l'on tient compte des seules retraites du régime général, mais ce ne l'est plus si l'on y ajoute les retraites complémentaires. J'ai conscience du coût élevé de cette mesure, mais il faut au moins en faire bénéficier les chômeurs en fin de droits. Il sera trop tard l'an prochain !

Les propositions élaborées en octobre 1996 par M. Pasquini sur la carte du combattant n'ont pas été reprises, et c'est fâcheux, car leur adoption éteindrait les contentieux en cours. La dernière loi de finances avait fixé comme critère un séjour de 18 mois en Algérie ; François Rochebloine et moi proposons d'abaisser cette durée de trois mois et de lever la restriction écartant certains anciens combattants au Maroc et en Tunisie.

Les propositions orales du groupe de travail sur le rapport constant n'apparaissent pas. Il serait souhaitable de les officialiser. Quant au titre de reconnaissance de la nation, il devrait être attribué à tous les militaires stationnés en Algérie jusqu'au 1er juillet 1964, sans que cela donne droit à la carte du combattant.

Je me permets d'insister pour que soient déplafonnées les pensions des plus grands invalides et abrogé l'article L. 114 bis du code des pensions militaires d'invalidité, qui atteint ces derniers dans leur dignité.

L'attribution de la carte du combattant volontaire de la Résistance est entourée d'un excès de formalisme, qui crée des situations aberrantes et injustes. Je demande la levée de ces obstacles à l'obtention, par certains authentiques résistants, du titre qu'ils ont mérité.

Enfin, d'autres problèmes demeurent, comme les veuves, la campagne double, la décristallisation, le rétablissement de la proportionnalité des pensions ou la reconnaissance des psychotraumatismes de guerre.

Je conclurai mon propos en abordant l'avenir de l'ONAC, dont les services départementaux doivent, selon moi, rester des services de proximité. Seul son rattachement au ministère de la défense permettra d'anticiper l'évolution démographique tout en préservant les droits matériels et moraux de ceux qui ont rendu des services à la nation. Pour autant, les anciens combattants doivent conserver un interlocuteur gouvernemental ayant au moins le titre de secrétaire d'Etat et doté d'un budget autonome. Si nul ne remet en cause le droit à réparation, prenons garde aux vieux démons qui resurgissent régulièrement !

Le groupe DL avait voté contre le budget en commission. Il déterminera sa position définitive en fonction des réponses du Gouvernement (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF).

M. Didier Quentin - Malgré quelques avancées, ce budget ne répond pas aux attentes légitimes du monde combattant. Il est d'abord décevant par sa diminution de 2,1 % : la disparition naturelle des ayants droit aurait permis de redéployer 760 millions de façon à régler de nombreux contentieux, mais seuls 54 millions y sont consacrés. Or de nombreuses lacunes demeurent, notamment dans l'application du droit à réparation à la troisième génération du feu.

L'accord du 22 octobre 1996 sur l'attribution de la carte du combattant aux anciens d'Afrique du Nord reste à appliquer, et en particulier l'extension des 18 mois de présence à ceux qui étaient au Maroc et en Tunisie (Interruptions sur les bancs du groupe socialiste).

M. Alain Néri - C'était une promesse de Pasquini ! (Protestations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Didier Quentin - L'accession à la retraite anticipée avait été promise par le premier secrétaire du parti socialiste lors de la campagne de 1997, et annoncée dans la déclaration de politique générale du 19 juin de la même année. Cet engagement doit être enfin tenu, faute de quoi le temps viendra régler le problème, mais d'une manière fort peu honorable... Je confirme donc au ministre que nous sommes à ses côtés pour obtenir gain de cause contre bercy, qui excipe de la démographie pour justifier la réduction des crédits au lieu de la mettre à profit pour régler les contentieux. On nous avait également dit qu'il fallait attendre le retour de la croissance, or celle-ci, selon M. Strauss-Kahn, est bien là : il y a donc du grain à moudre...

La restructuration de l'ONAC va dans le bon sens, mais la situation de nombreux fonds de secours départementaux et le manque de moyens pour la rénovation des maisons de retraite sont inacceptables : les autorisations de programme s'élèvent à 6,5 millions, quand les besoins sont estimés à 300 millions !

Il est regrettable qu'aucune mesure nouvelle ne soit prise en faveur des veuves, dont les pensions sont souvent inférieures aux minima sociaux, et que le bénéfice de la campagne double soit toujours refusé aux fonctionnaires anciens combattants de la guerre d'Algérie, bien que le Gouvernement accepte désormais d'employer officiellement ce terme. Je souligne aussi que le stage de six mois entre l'allocation différentielle et l'allocation de préparation à la retraite n'a toujours pas été supprimé, et je souhaite savoir si le Gouvernement entend attribuer le titre de reconnaissance de la Nation aux militaires ayant servi en Afrique du Nord entre le 2 juillet 1962 et le 1er juillet 1964.

S'agissant des pensions d'invalidité, trois revendications importantes restent sans suite : le rattrapage des points d'indice perdus entre 1991 et 1995, du fait de la cristallisation, par les grands invalides ; la proportionnalité des pensions au taux d'invalidité ; l'amélioration de la lisibilité du rapport constant, pourtant promise pendant la campagne électorale. Rien n'est prévu non plus pour l'indemnisation des PRO, pour la reconnaissance de la pathologie spécifique aux anciens internés et des troubles post-traumatiques d'apparition différée.

Je reconnais volontiers qu'un effort a été accompli en faveur de la mémoire et de l'information historique. C'est le moins que l'on pouvait attendre en ce quatre-vingtième anniversaire de l'armistice du 11 novembre 1918... Cela dit, je déplore une nouvelle fois qu'aucune politique commune ne soit engagée avec l'éducation nationale sur l'enseignement de la mémoire et le respect dû à nos aînés, ni avec les chaînes publiques de télévision. Certes, des brochures seront distribuées dans les établissements scolaires et un emploi-jeune sera créé dans chaque département, mais c'est assez dérisoire ! En outre, certaines maladresses auraient dû être évitées, comme la représentation, sur le timbre commémoratif de l'armistice de 1918, du drapeau du Reich et l'absence de ceux de pays alliés, comme la Belgique ou le Canada !

Beaucoup d'anciens d'Afrique du Nord se sont indignés à juste titre de l'hommage rendu aux "porteurs de valises", le 16 octobre dernier, par le centre culturel algérien.

Mme Odette Grzegrzulka - Nous aussi !

M. Yann Galut - Le ministre a répondu à une question sur ce sujet !

M. Didier Quentin - J'espère que les protestations dont il a fait état lors de la séance du 27 octobre éviteront que cette manifestation scandaleuse ne se reproduise.

Je tiens aussi à évoquer la situation des harkis : Madame Aubry a annoncé, le 27 octobre, un plan général les concernant, et nous serons d'une particulière vigilance à cet égard.

Mme Martine David - Qu'avez-vous fait ?

M. Didier Quentin - Je ne voudrais pas terminer sans dire l'importance que nous attachons au maintien d'un département ministériel chargé des anciens combattants et doté d'un budget autonome. Encore faut-il, toutefois, que ce budget corresponde à la dette de la nation envers ceux qui lui ont sacrifié leur vie ou leur jeunesse. A cet égard, vouloir aligner les anciens combattants sur l'ensemble des autres contribuables, en supprimant la demi-part supplémentaire était une insulte. Cette idée scélérate a heureusement été abandonnée grâce à la vigilance des associations et de la représentation nationale...

M. Yann Galut - De toute la représentation nationale !

M. Didier Quentin - L'Assemblée nationale a aussi évité le pire en rejetant l'abaissement du plafond du quotient familial pour les invalides et anciens combattants qui bénéficient de la demi-part supplémentaire. Nous attendons maintenant de vous, Monsieur le ministre, que vous obteniez un abondement sensible de vos crédits, et que vous reteniez nos amendements proposés. Faute de quoi, avec regret mais avec détermination, le groupe RPR votera contre ce budget (Applaudissements sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL ; murmures sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jacques Floch - Monsieur le ministre, je ne parlerai pas de votre budget, car certains de mes collègues du groupe socialiste le feront avec talent, et sans démagogie.

Je suis avec une attention particulière le travail réaliste et efficace de notre ministre, et je ne peux que dire ma surprise devant les difficultés rencontrées pour surmonter des problèmes qui peuvent sembler modestes mais qui ne le sont pas du tout pour ceux qui en subissent les conséquences. Il semble, à dire vrai, que le secrétariat d'Etat dérange... On peut comprendre que le rappel de certains faits gène, mais cinq millions d'ayants droit justifient quelque considération ! Je ne citerai qu'un cas : celui des fonctionnaires rapatriés, anciens combattants de la Deuxième Guerre mondiale qui, en dépit de la loi votée le 3 décembre 1982 à la demande de François Mitterrand, continuent de rencontrer des difficultés considérables. Le précédent gouvernement ayant fait disparaître les instances consultatives prévues dans les textes, rien ne bouge ! Ce dysfonctionnement frôle la caricature. Le groupe socialiste est tout disposé à vous aider, Monsieur le ministre, à surmonter les difficultés que rencontrent les anciens combattants français et tous ceux qui, étrangers, ont combattu pour la France.

S'il arrive au Parlement de légiférer pour des problèmes de forme, il lui arrive aussi, souvent, de prendre des décisions solennelles, qui recueillent l'unanimité. Aujourd'hui, je vous propose, Monsieur le ministre, de faire accepter par le Gouvernement, soit sous forme d'un projet de loi, soit sur proposition parlementaire, la reconnaissance du fait de guerre en Algérie entre 1954 et 1962.

La France a depuis longtemps reconnu de manière implicite cette réalité historique en accordant à tous ceux qui avaient servi durant cette période dans l'armée française le titre d'ancien combattant et les plus hautes autorités de l'Etat -le Président et le Premier ministre tout comme vous, Monsieur le ministre- ont pourtant déclaré faire leur cette interprétation de l'histoire. Il est temps que la loi traduise cette volonté commune, et décide de remplacer dans tous les textes et sur tous les monuments l'expression "opérations de maintien de l'ordre en Algérie" par les termes "guerre d'Algérie 1954-1962".

Nul ne peut s'offusquer d'une telle proposition, ni prétendre qu'elle soulève une difficulté diplomatique. Cette relecture de l'histoire est de nature à la rendre plus compréhensible aux jeunes générations. Elle contribuera aussi à une réelle réconciliation avec le peuple algérien, à l'image de celle qui a eu lieu, en d'autres temps, avec le peuple allemand.

Plus qu'un souhait, plus qu'un voeu, il s'agit d'une exigence dont je sais, Monsieur le ministre, que vous l'approuvez (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jacques Desallangre - J'aurais préféré, Monsieur le ministre, que votre budget, qui accuse une baisse de 2 % en raison de la chute du nombre des ayants droit, restât constant. La réduction des dépenses induites par la dette viagère aurait en effet pu permettre de satisfaire des revendications légitimes demeurées insatisfaites.

J'avais signé, avec certains de mes collègues du conseil parlementaire de l'UFAC une proposition de loi visant à faire bénéficier de la retraite anticipée les anciens combattants ayant cotisé 40 annuités diminuées du temps passé en Afrique du Nord. Cette mesure, qui répondait à un engagement pris par le Premier ministre, devait permettre de résoudre certaines situations délicates. Vous nous avez répondu que le dispositif envisagé pourrait se révéler défavorable à certains. Peut-être... mais pourquoi ne pas les laisser choisir ?

En contrepartie, vous nous proposiez d'engager certaines réformes, dont l'attribution de l'ARPE aux anciens combattants et la suppression du "stage" de 6 mois entre l'allocation différentielle et l'allocation de préparation à la retraite. Je me réjouis de voir portée à votre budget la somme de 20 millions visant à la mise en oeuvre de cette mesure. Le dispositif prévu me conduit cependant à exprimer une attente et une réserve.

En premier lieu, la réforme prévue doit intervenir au plus vite. Je note à cet égard avec satisfaction qu'il sera désormais possible de bénéficier du dispositif même en cas de refus de l'employeur. Il est toutefois encore nécessaire de rédiger un avenant à la convention du 6 septembre 1995 et je souhaite que tout soit fait pour rendre les nouvelles dispositions applicables dès le vote du projet de loi de finances.

Ma réserve tient à ce que la réforme, opportune de l'ARPE, ne concerne que les anciens combattants qui occupent un emploi. Il reste à la compléter pour corriger l'injustice faite aux chômeurs, aux professions indépendantes et aux invalides.

Je déplore d'autre part que votre proposition visant à supprimer le "stage" de six mois entre l'allocation différentielle et l'allocation de préparation à la retraite ne trouve pas sa traduction dans votre budget. Ce délai, qui a pour objet de limiter l'accès à l'APR aux seuls chômeurs non susceptibles de retrouver un emploi me paraît injustifié, et l'adoption de l'amendement permettrait d'apporter une solution à la détresse de certains anciens combattants d'Afrique du Nord, tout en illustrant la ligne de conduite que vous avez choisie en respectant depuis un an les engagements que vous aviez pris. Le coût relativement modeste de cette réforme -moins de 4 millions de francs- devrait nous permettre de parvenir à un accord.

Dans un second amendement, je propose l'amendement de 5 millions des crédits d'action sociale de l'ONAC, afin de compenser l'amputation des subventions survenue en 1998, laquelle avait suscité les très vives protestations d'anciens combattants, dont je m'étais fait l'écho à cette tribune. J'ai pu apprécier depuis, votre honnêteté et votre courage politique, puisque vous avez reconnu devant l'assemblée générale de l'UFAC que cette décision avait été une erreur. Mais le rétablissement des crédits d'action sociale de l'ONAC au niveau de 1997 prévu dans votre budget ne permettra pas à lui seul à l'ONAC de remplir pleinement sa mission sociale. Et la majoration de crédits que je propose doit aussi s'interpréter dans le cadre plus général de la modernisation indispensable que vous allez engager.

Vous aurez compris, Monsieur le ministre, que votre budget suscite en moi un préjugé très favorable. Je souhaite recevoir au cours du débat les informations complémentaires qui me permettront de le voter. Je souhaite aussi que mes propositions soient reçues avec compréhension. Ainsi pourrez-vous poursuivre votre tâche de pacification de relations entre le Gouvernement et le monde des anciens combattants (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV et du groupe socialiste).

M. Michel Meylan - Au moment où je prends la parole, Monsieur le ministre, la seule mesure novatrice de votre budget est l'application automatique des règles d'attribution de l'ARPE aux anciens combattants d'Afrique du Nord qui en ont fait la demande et qui se sont vu opposer un refus par leur employeur, lequel est donc obligé d'embaucher un jeune. Je doute de la constitutionnalité d'une telle mesure, elle me paraît contradictoire avec les principes de la libre entreprise et de la liberté d'embauche.

Toutefois, le public concerné par cette mesure est restreint. Une dérogation à l'obligation d'embauche serait donc envisageable.

Cette mesure ne doit en outre pas faire oublier nos nombreux camarades anciens combattants d'Afrique du Nord qui sont au chômage. Je regrette que votre budget ne dissocie pas les formes de solidarité et l'ARPE, ce qui aurait permis de résoudre une partie des difficultés auxquelles sont confrontés ces anciens combattants.

Je me réjouis par contre que l'assouplissement des conditions d'attribution de la carte de combattant soit applicable à ceux qui ont combattu en Tunisie ou au Maroc. Toutefois, je souhaite que la durée soit abaissée à 13 ou à 14 mois, ce qui correspond à la durée moyenne de séjour en Afrique du Nord des dernières générations qui y ont combattu.

Je souhaite que soient attribuées des points supplémentaires aux possesseurs du titre de reconnaissance de la nation, comme cela avait été évoqué le 22 octobre 1996 par le groupe de travail sur l'assouplissement des modalités d'attribution de la carte du combattant.

Les circonstances qui ont accompagné l'entrée en vigueur des accords d'Evian ont justifié le maintien de nombreux appelés en Afrique du Nord jusqu'en 1964. La prolongation jusqu'au 1er juillet 1964 de la période d'attribution du titre de reconnaissance de la Nation est donc légitime. La situation est similaire pour ceux qui ont servi en Indochine entre le 11 août 1954 et le 1er octobre 1957.

J'appelle votre attention, Monsieur le ministre, sur la situation difficile des veuves de guerre dont les pensions mériteraient d'être réévaluées.

En ce qui concerne la validation pour la retraite des périodes de stage effectuées dans les écoles de rééducation professionnelles de l'ONAC, deux mesures sont nécessaires. Il faudrait tout d'abord permettre la validation d'un trimestre supplémentaire de cotisation pour les anciens combattants d'Afrique du Nord ayant effectué un stage de réadaptation de deux ans dans les écoles professionnelles de l'ONAC qui n'est pas validé pour l'assurance vieillesse. Il faudrait d'autre part autoriser le rachat de points auprès du régime général de la sécurité sociale pour ces périodes de stage de rééducation fonctionnelle effectués dans les écoles de l'ONAC avant le 1er janvier 1969. Envisagez-vous d'inclure ces mesures, en les étendant aux anciens combattants d'Indochine, dans l'éventuel DMOS évoqué par Mme Aubry lors de la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale ?

En ce qui concerne la validation des périodes de service militaire pour les anciens combattants d'Afrique du Nord, je rappelle que le temps du service militaire est validé s'il a eu lieu entre le 31 octobre 1954 et le 2 juillet 1962, période de mobilisation, à la seule condition que l'ancien combattant ait eut, dans les trois ans qui ont suivi la fin du service, une activité ouvrant droit à affiliation. En revanche, la période du service militaire légal en cas de maintien ou de rappel sous les drapeaux accomplie en métropole n'est validée que si les intéressés avaient cotisé antérieurement. Or il est souvent difficile pour ces anciens combattants de justifier d'une activité professionnelle préalable à leur service. Je souhaite donc que la totalité des services militaires soit prise en compte comme période assimilée pour le calcul de la retraite.

Enfin, la retraite du combattant n'est versée qu'à partir de 65 ans. Il serait préférable qu'elle le soit dès l'âge de 60 ans ou au moment de la prise effective de la retraite puisque vous avez renoncé au dispositif de retraite anticipée.

Mon vote dépendra de votre position sur ces questions, ainsi que sur la décristallisation, sur l'augmentation du plafond de la retraite mutualiste, sur la politique de mémoire et sur l'avenir de l'ONAC, symbole auquel nous sommes tous ici très attachés de la reconnaissance de la nation au monde combattant (Applaudissements sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR).

M. Alain Néri - Votre budget est, comme celui qui le précédait, un budget de volonté, de conviction et de progrès. C'est pourquoi je suis particulièrement surpris par des propos qui révèlent chez certaines une mémoire sélective, sinon une amnésie.

M. Jean-Jacques Weber - C'est votre cas !

M. François Rochebloine - C'est un anti-portrait !

M. Alain Néri - Les faits sont têtus, mes chers collègues, et les anciens combattants ne se satisfont pas d'incantations, ils veulent des mesures concrètes ! ("Très bien !" sur les bancs du groupe socialiste ; "Justement" sur les bancs du groupe DL, du groupe UDF et du groupe du RPR) Je viens d'une région où la vie est difficile et où l'on sait compter. Or des avancées concrètes ont été réalisées grâce aux amendements proposés l'an dernier par mon groupe et adoptés à la surprise de certains membres de l'opposition.

Ainsi, nous avons abaissé la durée d'attribution de la carte de combattant à dix-huit mois de service en Afrique du Nord, je veux dire en Algérie mais ce lapsus est révélateur : pour ma génération, l'expression de guerre d'Algérie désignait la totalité des combats d'Afrique du Nord.

Nous avons également porté le plafond de la rente mutualiste à 95 points et nous l'avons indexé sur le point d'indice des pensions.

M. Jean-Jacques Weber - Très bien !

M. Alain Néri - En ce qui concerne les retraites, nous avons estimé qu'il était de notre devoir que les anciens combattants les plus démunis disposent d'un revenu d'au moins 5 600 F nets par mois. Ceux qui touchent cette allocation sont satisfaits car ils savent compter et préfèrent, au-delà de l'habillage, 5 600 F à 3 300 ou 3 500 F. Voilà la vérité (Protestations sur les bancs du groupe UDF, du groupe DL et du groupe du RPR).

M. François Rochebloine - Pas du tout ! L'allocation du fonds de solidarité était de 4 500 F.

M. Alain Néri - Le rapport de notre collègue Gremetz a repris certaines des propositions que nous avions faites lorsque nous avions rencontré le Front uni le 21 octobre. Il s'agit de la suppression du sas de 6 mois pour avoir droit à l'APR, de 5 millions de crédits supplémentaires pour les veuves de guerre et l'augmentation du plafond de la rente mutualiste pour la porter à 102 points, rythme qui permettrait d'atteindre 130 points en fin de législature.

M. François Rochebloine - Et de tenir vos engagements !

M. Yann Galut - Nous, nous les tenons.

M. Alain Néri - Je sais combien vous êtes attaché à l'entretien de la mémoire. Nous proposons de lui consacrer deux millions supplémentaires pour permettre des actions de terrain notamment en direction des jeunes.

Enfin, nous avions fixé l'an dernier la durée à 18 mois, car c'était la durée légale du service national. Or nous avons constaté que le temps moyen de séjour en Algérie n'était que 16 mois et 22 jours de sorte que notre dispositif privait certains anciens combattants de la reconnaissance qui leur est due.

M. François Rochebloine - Et oui !

M. Alain Néri - Nous proposons donc de fixer cette durée à quinze mois en accord avec l'ensemble des groupes.

L'ARPE est une mesure qui améliore le dispositif existant. L'année dernière, nous avions alloué 5 600 F nets aux chômeurs, car ils étaient prioritaires. Aujourd'hui nous autorisons l'ensemble des anciens combattants d'Afrique du Nord, ayant cotisé quarante annuités, à bénéficier d'une retraite bien méritée.

M. François Rochebloine - Vous pourriez leur laisser le choix !

M. Alain Néri - Cela permettra des embauches de jeunes. C'était l'une des revendications de la FNACA,...

M. François Rochebloine - C'est faux !

M. Alain Néri - ...car les anciens combattants souhaitaient une fois de plus manifester leur solidarité avec la nation (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Rapporteur pour avis - Je vous demande d'être sérieux (Applaudissements sur quelques bancs du groupe DL, du groupe du RPR et du groupe UDF). M. Masseret nous a dit que l'ARPE pouvait bénéficier à 600 personnes. Il ne faut pas masquer la réalité (Mêmes mouvements). J'avais évoqué un chiffre inférieur et certains se sont interrogés sur mes sources. Ce sont vos propres services, Monsieur le ministre, qui donnent une fourchette de 80 à 120 bénéficiaires potentiels.

M. Michel Herbillon - Les faits sont têtus !

M. le Rapporteur pour avis - Comme certains n'y étaient pas, j'ai rappelé les positions qui se sont exprimées en commission : chacun peut ainsi se déterminer en toute connaissance de cause. Je ne laisserai donc pas mettre en cause le sérieux de mon travail !

M. le Rapporteur spécial - J'avoue ne pas comprendre cette querelle : ce qui compte, c'est la qualité de la mesure ! Pour le nombre des bénéficiaires, on verra ensuite... (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

Mme Odette Grzegrzulka - C'est la sagesse même !

M. Jean-Pierre Masseret, secrétaire d'Etat aux anciens combattants - Je vous remercie tous pour la qualité de l'échange. Je sais gré aussi aux rapporteurs d'avoir parfaitement exposé ce budget, ce qui me permettra de consacrer les trente minutes dont je dispose à répondre à vos questions... qui sont trente à peu près aussi, si je me fie à mes notes !

S'agissant d'abord du rapport constant, le Gouvernement s'était engagé à rendre le dispositif plus clair. Des réunions de travail ont été organisées au secrétariat d'Etat, à la suite de quoi je viens de transmettre au monde combattant deux propositions alternatives. Fédérations et associations ont seulement commencé de me faire parvenir leurs réponses de sorte que je ne puis vous dire aujourd'hui laquelle sera retenue. En revanche, je puis vous assurer qu'après négociation avec le ministre du budget, une décision sera arrêtée conformément à l'engagement pris par le Premier ministre.

Vous avez demandé que soit réduite la durée de présence en Algérie exigée pour l'obtention de la carte de combattant : un amendement du Gouvernement va la ramener de 18 à 15 mois ("Très bien" et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

M. François Rochebloine - Très bien !

M. le Secrétaire d'Etat - La mesure sera en outre étendue aux anciens du Maroc et de Tunisie.

Un deuxième amendement supprimera le "sas" de six mois, cette période probatoire pendant laquelle il fallait percevoir l'allocation différentielle pour pouvoir prétendre à l'APR (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. François Rochebloine - Très bien !

M. le Secrétaire d'Etat - En revanche, pour la rente mutualiste, le Gouvernement ne proposera pas de porter la référence à 102 points d'indice, comme vous l'avez souhaité. En un an, nous sommes passés en effet de 91 à cent points, soit une augmentation de 12,7 % sur les douze ou treize mois. Ce n'est pas négligeable. Cela étant, je n'oublierai pas cette revendication pour le prochain budget, mais je tiens à signaler que je ne me suis jamais engagé à porter cette référence à 130 points...

M. François Rochebloine - Le Premier ministre, si !

M. le Secrétaire d'Etat - Ce serait à vérifier. Quoi qu'il en soit, je veillerai à ce que le rattrapage se poursuive (Exclamations sur les bancs du groupe UDF).

Deux de vos trois demandes ayant été acceptées, et non les moindres, vous allez peut-être voter ce budget, Monsieur Rochebloine...

M. François Rochebloine - Et la réserve parlementaire ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Secrétaire d'Etat - J'en viens aux crédits d'action sociale de l'ONAC. J'ai reconnu que j'avais pris une mauvaise mesure dans le précédent budget, la répartition de ces crédits étant telle que les commissions départementales avaient moins à leur disposition pour aider les anciens combattants en difficulté. Le nouvel élan que nous voulions donner à l'ONAC a ainsi été compromis. Aussi les crédits seront-ils rétablis dans ce budget au même niveau que l'an passé. En outre, le 18 novembre, lors du vote de la loi de finances, le Gouvernement déposera un amendement les augmentant de 5 millions au bénéfice des veuves d'anciens combattants -celles qui, n'étant ni veuves de morts pour la France ni veuves d'invalides, ne perçoivent ni pension de réversion ni fraction d'une pension d'invalidité ("Très bien !" et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

Ce budget ne comporte aucune mesure de décristallisation. En effet, selon une étude que j'ai commandée et que je tiens à votre disposition, le pouvoir d'achat des pensions d'invalidité serait supérieur, dans les pays concernés, au pouvoir d'achat d'une pension de taux identique en France. Je compte faire réaliser une enquête complémentaire en vue d'évaluer ce que pourraient être des SMIC locaux.

Mais s'il n'y a pas décristallisation, nous nous sommes attaqués à une question de principe très gênante : celle de la forclusion. Vous savez qu'actuellement, un ancien combattant invalide se trouve dans l'incapacité de faire reconnaître une aggravation de son état et que, s'il meurt, en raison de la même forclusion, sa veuve ne perçoit rien -on considère qu'il y aurait nouvelle demande ! J'ai saisi le Premier ministre de ce point et un conseil interministériel va trancher, mais j'ai bon espoir que cette forclusion sera levée.

Dès que le budget sera voté, il sera possible de recruter sur des emplois "mémoire" -certains départements ont d'ailleurs commencé, grâce au partenariat qu'ils ont noué avec l'ONAC. Le ministère des anciens combattants ne doit pas être seulement le ministère des pensions : il doit agir auprès des jeunes générations pour que celles-ci comprennent mieux notre histoire, ainsi que les engagements et les valeurs du monde combattant, ce qui ne peut que conforter la conscience de leur propre citoyenneté. Les emplois "mémoire" ne se borneront pas par conséquent à la collecte des souvenirs : ils favorisent, en liaison avec l'éducation nationale et les collectivités, toutes les interactions propres à promouvoir ces valeurs. Il serait souhaitable d'ailleurs que, dans les contrats de plan Etat-régions, figure une ligne budgétaire consacrée à la mémoire (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV, du groupe socialiste et du groupe UDF).

Pour ce qui est de l'ARPE, j'ai en effet avancé, devant la commission des affaires sociales du Sénat, le nombre de 600 bénéficiaires environ. Si mes services en ont avancé un autre, sans m'en informer, je m'en expliquerai avec eux car il faut savoir qui commande, les politiques ou les fonctionnaires ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. François Rochebloine - Mais cela facilitera vos discussions avec Bercy !

M. le Secrétaire d'Etat - Comme l'a dit M. Kucheida, ce qui importe en tout état de cause, c'est le principe : désormais un ancien combattant salarié pourra quitter son travail à 58 ans en étant assuré de percevoir 75 % de son salaire de base.

Mme Véronique Neiertz - Les jeunes chômeurs en bénéficieront.

M. Alain Néri - En vertu de la solidarité entre générations !

M. le Secrétaire d'Etat - En effet. Et je ne puis qu'être en désaccord avec l'approche un peu trop libérale de M. Meylan...

M. Alain Néri - Cela nous rassure !

M. le Secrétaire d'Etat - Je reconnais, d'autre part, que je n'avais pas envisagé une extension de la mesure aux titulaires du TRN. Il faut que j'en étudie le coût : car il y a un coût budgétaire. Mais si on reste dans le cadre des sommes prévues sur trois ans, pourquoi pas ?

Sur la campagne double, chacun connaît ma position. Le dispositif mis en oeuvre pour les combattants de la Seconde Guerre mondiale correspondait à une période différente : l'âge de la retraite était à 65 ans, on rentrait plus tôt dans la vie active, il n'y avait pas de formation continue, la durée hebdomadaire du travail était plus longue. La question doit donc être appréciée globalement. En outre, introduire cette notion aboutirait à créer de nouvelles inégalités entre les fonctionnaires et les autres. C'est pourquoi, je respecte cette revendication, je ne la juge pas prioritaire. Cette position ne me vaut pas que des amis, mais elle a le mérite de la franchise !

M. Michel Meylan - C'est courageux.

M. le Secrétaire d'Etat - A propos de la CVR, Monsieur Colombier, on a pu rouvrir tous les dossiers qui étaient clos pour des raisons mécaniques : la moitié d'entre eux ont été traités...

Mme Odette Grzegrzulka - C'est remarquable !

M. le Secrétaire d'Etat - ...dont la moitié ont donné lieu à un accord. Mais vous comprendrez qu'on ait refusé la carte à des gens qui avaient été condamnés à la Libération pour collaboration ! Il faut bien un contrôle, sinon la carte est dévaluée -c'est ce que j'ai dit au congrès de Chambéry (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

S'agissant de TRN, je veux bien qu'on envisage une nouvelle extension, mais le coût serait élevé...

M. François Rochebloine - De quel ordre ?

M. le Secrétaire d'Etat - Etant donné les effets sur la retraite mutualiste, il sera forcément élevé. Mais les chiffres, vous savez... Ainsi l'an dernier, quand la durée de séjour en Afrique du Nord a été ramenée à 18 mois, on m'avait dit que cela entraînerait la distribution de 80 000 cartes -mais il y en a eu moins de 40 000.

M. le Rapporteur pour avis - 35 000 !

M. le Secrétaire d'Etat - Cette année, on arrive à 15 mois, et je remercie le budget de ne pas s'y être opposé -mais je remercie plus encore M. Jospin et M. Strauss-Kahn qui m'ont beaucoup aidé.

Mme Odette Grzegrzulka - Et les parlementaires ?

M. le Secrétaire d'Etat - Cela va de soi : sans eux rien ne pourrait se faire, s'agissant d'un secrétariat d'Etat qui a pour mission explicite de "défendre les intérêts de"... Sur le TRN, je ne prends pas d'engagement donc. On me dit que 15 000 personnes seraient concernées, ce qui ferait 150 millions de coût budgétaire.

A propos des psychotraumatismes de guerre, j'ai pris un engagement, et je le tiendrai malgré les réticences de ma propre administration (Exclamations et rires). Pourquoi ne pas le dire ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste) Il n'y a rien dans les budgets pour régler les pensions des plus grands invalides, et j'ai demandé une rencontre interministérielle sur le sujet. C'est vrai, il y a une inégalité de traitement...

M. François Rochebloine - La différence est importante.

M. le Secrétaire d'Etat - Pas tellement, mais c'est une question de principe.

Pour la retraite anticipée, je n'abandonne pas, et la réflexion continue pour l'an prochain.

M. François Rochebloine - Ce sera trop tard.

M. le Secrétaire d'Etat - Pas complètement, il y aurait encore quelques milliers de personnes concernées. Mais il est vrai qu'après quinze ans d'immobilisme sur cette affaire, cela pourrait paraître bien tardif. Cela dit, grâce aux mesures de 1998 et à la suppression du sas cette année, les chômeurs en fin de droits ayant cotisé 40 ans auront droit au moins à 5 600 F par mois -et leur indemnité peut aller jusqu'à 7 200 F-, ce qui est supérieur à bien des retraites.

M. Eric Doligé - Qui vous dit ça, vos services ? (Rires)

M. le Secrétaire d'Etat - Là-dessus, la vérification est facile. Donc, je ne renonce pas, mais je n'irai pas au-delà d'une date qui n'aurait plus de signification.

En ce qui concerne les veuves, il n'est pas envisagé de réversion pour la retraite des combattants -je ne parle pas de la retraite mutualiste ou de la pension d'invalidité, mais des 2 600 F annuels qui correspondent au droit à réparation, attribués sans conditions de ressources. Bricoler le dispositif, ce serait ouvrir la voie à une évolution contraire à ce qui s'est toujours fait depuis 1919. Elle n'empêche pas d'examiner ce qu'il est possible de faire sous l'angle de la solidarité.

La question de la guerre d'Algérie a été largement revue depuis quelque temps. Il n'y a pas que l'usage du mot "guerre", il y a eu des inaugurations de stèles, de plaques, une prise de conscience historique. Est-il possible d'aller plus loin, comme le propose M. Floch, avec une officialisation des choses ? Je ne serais pas opposé au principe, mais des problèmes se posent pour le budget -avec la question de la campagne double- et pour les affaires étrangères, par rapport au contenu des accords d'Evian.

La meilleure formule à mon avis, c'est de réunir les différents partenaires autour d'une table pour identifier les obstacles à lever.

Mme Odette Grzegrzulka - Ouais... (Rires)

M. le Secrétaire d'Etat - La proportionnalité des pensions date de 1919.

Les héros patriotes résistants ont été indemnisés, tout comme les incorporés de force. Il ne reste en suspens que 150 dossiers, déposés et demeurés sans réponse avant le décès de l'ayant droit.

Nous sommes tous conscients du rôle que doit jouer l'éducation nationale dans le domaine de la mémoire. Le monde combattant doit participer à cet effort, avec modestie sans doute, mais en s'efforçant de prendre des initiatives, car il a des choses à dire. Ce sera une de mes grandes préoccupations pour l'année 1999.

S'agissant du timbre commémoratif, il ne fait que reproduire les drapeaux des pays engagés tels qu'ils étaient en 1914 : le drapeau tsariste, celui de la royauté italienne, celui de l'empire allemand... C'est la réalité historique.

Mme Odette Grzegrzulka - M. Quentin ne l'a pas compris.

M. le Secrétaire d'Etat - Dire que nous avons reproduit un drapeau nazi est scandaleux. Je ne le dis pas pour vous, Monsieur le député, mais pour le journal qui a publié cela. Il mériterait un procès. C'est abominable en même temps que révélateur d'un certain état d'esprit (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

Il manque certes les drapeaux de la Belgique et du Canada. Ce parti pris artistique était de mettre en valeur les principaux belligérants. Il ne pouvait être question de reproduire les quatre-vingts drapeaux des nations concernées.

En ce qui concerne les "porteurs de valise", le Gouvernement a déjà condamné ce qu'il estime avoir été une provocation.

M. Yann Galut - C'est une réponse claire.

M. le Secrétaire d'Etat - M. Floch a évoqué la situation des anciens fonctionnaires d'Afrique du Nord. J'ai reçu leurs représentants et M. Zuccarelli, ministre de la fonction publique, va prendre une initiative en leur faveur.

Quant à la validation du temps passé dans les écoles de reconversion professionnelle, il s'agit d'un engagement ancien qui doit être honoré. Je souhaite que cette mesure figure dans le DMOS du printemps.

Avant l'ouverture de cette séance, Mme Grzegrzulka m'a interrogé sur l'institution nationale des invalides et sur son insertion dans notre dispositif de financement des dépenses de santé. Alors qu'il est traité comme un établissement privé, l'INI doit bénéficier au contraire du mode de financement des hôpitaux publics, afin de garantir la pérennité de son financement et de l'inscrire dans le réseau sanitaire, même si sa vocation spécifique doit être maintenue. Cette réforme pourrait intervenir dans le cadre du DMOS de printemps et donnerait lieu à la publication d'un décret modificatif.

L'ONAC aussi doit être encouragé. Cet organisme, garant du puritanisme, a un avenir. Sa charte, approuvée à l'unanimité par son conseil d'administration, vaut engagement du Gouvernement. D'ailleurs, les moyens de l'ONAC sont renforcés dans la présente loi de finances.

La réforme de mon département ministériel se fait dans la concertation. Les négociations avec le monde combattant, qui ont duré six mois, ont abouti le 31 octobre dernier. Le secrétariat d'Etat va s'intégrer au ministère de la défense, mais son rôle ira au-delà du seul versement des pensions. Il participera aux actions relatives à la mémoire et aux journées d'appel à la défense, afin de renforcer le lien entre l'armée et la nation. Le droit à réparation sera réaffirmé et son budget demeurera un budget spécifique, présenté par un membre du Gouvernement. Une structure de cabinet, l'ONAC et l'INI seront maintenus. Je n'assurerai aucune réforme qui ne soit pas celle-ci (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV).

Le Gouvernement, enfin, va présenter un amendement visant à relever de deux millions les crédits de la mémoire, afin que des actions puissent être menées dans chaque département.

Je souhaite que vous votiez ce budget, ou qu'au moins vous fassiez le choix d'une abstention positive... (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe RCV)

M. le Président - Je suis saisi par le groupe socialiste d'une demande de suspension de séance.

La séance, suspendue à 11 heures 40, est reprise à 11 heures 55.

M. Alain Néri - Conformément aux engagements que nous avions pris devant le Front uni, nous avons déposé cinq amendements, tendant à supprimer le stage de six mois entre l'allocation différentielle et l'allocation de préparation à la retraite, à ramener à quinze mois la durée de présence en Algérie exigée pour l'attribution de la carte du combattant, à relever à 102 points le plafond de la rente mutualiste, à abonder les crédits destinés aux veuves d'anciens combattants et à la politique de la mémoire. Le Gouvernement a repris les deux premiers à son compte, et nous avons dû retirer les autres en application de l'article 86, alinéa 4, du Règlement. Pouvons-nous avoir confirmation qu'ils seront satisfaits le 18 novembre, dernier jour de l'examen de la seconde partie de la loi de finances ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste ; exclamations sur les bancs du groupe du RPR, du groupe UDF et du groupe DL)

M. Jean-Jacques Weber - C'est une question téléphonée !

M. le Secrétaire d'Etat - Je ne puis que confirmer ce que j'ai dit à la tribune : je vais vous soumettre deux amendements à la fin de la discussion de ce matin et deux autres le 18 novembre (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

QUESTIONS

M. Jean-Jacques Weber - Chacun vous tient ici, Monsieur, pour un bon ministre, sympathique, honnête et aussi habile, vous venez d'en donner la preuve. Cependant il existe un décalage complet entre le débat qui se déroule ici et les réponses que vous nous donnez, d'une part, ce que vivent les anciens combattants que je rencontre chaque fin de semaine en Alsace d'autre part...

Les engagements pris par M. Jospin ne trouvent pas leur traduction dans votre budget, en diminution de 2 %. Dans le même temps, votre gouvernement s'apprête à faire voter, avec le Pacs, l'attribution de six milliards de francs à un petit lobby d'homosexuels... ("C'est lamentable" sur les bancs du groupe socialiste).

Ainsi, on marchande la retraite des uns, on maintient le blocage des pensions pour les aveugles et les grands invalides, et on laisse la loi de finances pour 1999 maltraiter les anciens combattants en supprimant leur demi-part fiscale. Le plafond de 11 000 F ne devrait pas s'appliquer aux titulaires d'un titre de pension militaire d'invalidité, non plus qu'aux veuves de guerre. Certes, tout cela a un coût. Mais que sont 4 milliards en 4 ans au regard des 24 milliards que coûtera le Pacs pendant la même période ?

Il est pourtant important que la nation française dise sa reconnaissance à ceux qui ont porté son honneur, ses couleurs et ses armes, qu'elle les traite avec équité et respect. Ce n'est pas ce que fait ce budget.

Encore cette forme d'irrespect n'est-elle pas la seule. A la veille du 80ème anniversaire de l'armistice je pense en effet aux survivants alsaciens presque centenaires de la Première Guerre mondiale auxquels la légion d'honneur a été refusée au motif révoltant que ces fils d'une Alsace abandonnée par la France en 1871 avaient dû servir dans l'armée prussienne. Ils sont Français depuis 80 ans : sont-ils donc des Français de deuxième catégorie ?

Cela étant dit, vous venez, Monsieur le ministre, de donner des précisions intéressantes sur le titre de reconnaissance de la nation -TRN-. Mais qu'en sera-t-il exactement pour les soldats qui ont servi en Afrique du Nord après le 1er juillet 1962, et, pour certains, jusqu'au 1er juillet 1964 ? Votre circulaire à ce sujet gagnerait à être explicitée, car elle a été diversement interprétée par les différentes directions de l'ONAC. Les combattants d'Afrique du Nord qui ont servi jusqu'au 1er juillet 1964 et ont reçu la médaille commémorative recevront-ils le TRN ?

M. le Secrétaire d'Etat - Représentant le Gouvernement, je resterai courtois. Je récuse naturellement l'idée selon laquelle il existerait un décalage formidable entre les engagements que j'ai pris et la réalité du budget soumis à l'Assemblée. J'ai toujours annoncé ce que j'allais faire, et aussi ce que je ne ferai pas, et je continuerai d'agir de la sorte.

Pour répondre à votre question précise, la circulaire relative à l'attribution du TRN est sans équivoque : elle concerne la période d'avril 1962 à juillet 1962. Je vérifierai auprès des directions départementales que les directives qu'elle contient sont appliquées avec exactitude. Pour le reste, j'examinerai la question, mais je ne peux, à ce jour, vous donner de réponse positive.

Mme Véronique Neiertz - Nous avons noté votre engagement de faire abonder, à hauteur de 5 millions de francs, les crédits de l'ONAC, abondement dont devraient bénéficier les veuves. Si les budgets de 1989, 1992 et 1993 avaient consacré la revalorisation des pensions des veuves de guerre, qui sont 122 000, nous parlons, aujourd'hui de 1,6 million de veuves d'anciens combattants, population considérable dont on parle trop peu. C'est pourquoi nous apprécions particulièrement l'engagement que vous avez pris en leur faveur. En mon nom personnel et au nom de mon collègue Jean Launay, je souhaite obtenir de vous les précisions suivantes : vous sera-t-il possible de donner à l'ONAC des instructions garantissant que ces nouveaux crédits leur seront affectés ? Pouvez-vous d'autre part envisager de passer progressivement, après négociations avec les associations concernées, de secours ponctuels au versement d'une allocation de solidarité à celles de ces femmes qui sont chômeuses en fin de droits ?

M. le Président - J'observe que chaque orateur double ou triple le temps de parole auquel il a droit. Je ne laisserai plus de tels écarts se produire.

M. le Secrétaire d'Etat - Bien entendu, des instructions seront données pour que, dans chaque département, les crédits en question soient destinés aux veuves d'anciens combattants. Quant à la mesure particulière que vous envisagez, je suis prêt à l'étudier, pour en appréhender l'impact et en définir les modalités d'application. Je suis certain, en effet, que l'on s'oriente vers un dispositif toujours plus tourné vers la solidarité (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Martine David - Ma question, à laquelle s'associe Mme Odette Grzegrzulka, porte sur les menaces qui, selon les rumeurs persistantes, pèsent sur la survie de l'ONAC et sur l'avenir de votre ministère et qui inquiètent vivement les adhérents des associations d'anciens combattants. Pouvez-vous, Monsieur le ministre, nous apporter des assurances sur leur pérennité ?

M. le Secrétaire d'Etat - Le Journal officiel porte témoignage que, par la volonté du Gouvernement, l'ONAC se verra doté des moyens propres à lui permettre de remplir l'ensemble de ses missions au service du monde combattant. L'ONAC n'est nullement menacé, bien au contraire : c'est l'office qui recevra les emplois-jeunes. Quant à la réforme de l'administration ministérielle, elle a pour unique objectif, précisément, de garantir le respect des intérêts matériels et moraux des anciens combattants, en perpétuant leur image de citoyenneté et d'exemplarité (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Annette Peulvast-Bergeal - Ce budget traduit des avancées certaines, notamment pour ce qui est du devoir de mémoire. Comment les mesures prévues seront-elles mises en oeuvre ? Ne pourrait-on envisager, par la signature de conventions, de créer des liens plus étroits entre l'éducation nationale et les anciens combattants, ce qui serait une excellente chose ?

Voilà un geste fort auquel les anciens combattants seraient particulièrement sensibles (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Secrétaire d'Etat - Vous connaissez l'intérêt que j'accorde au devoir de mémoire. Celui-ci nous concerne tous et je souhaite d'ailleurs multiplier les partenariats avec les collectivités locales dont l'intervention, sur le modèle des initiatives de Montauban et d'Orthez, est nécessaire.

Il nous faut aussi travailler davantage avec l'éducation nationale dans le cadre de la formation à l'esprit de défense qui sera donnée en collaboration avec le ministère de la défense, après la suppression du service national. La mémoire des combattants doit contribuer à la citoyenneté des jeunes générations (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe RCV).

M. Georges Sarre - Les crédits d'action sociale de l'ONAC augmentent. Retrouveront-ils à Paris le niveau qui était le leur avant l'amputation de 1998 ?

La retraite des anciens combattants de nos anciennes colonies est aujourd'hui ridicule, faute de revalorisation depuis de nombreuses années. Cela est incompatible avec la dette de sang que nous avons à leur égard. Allez-vous mettre en place un groupe de réflexion sur cette question comme vous vous y étiez engagé ?

Enfin, pour la retraite par anticipation, il faut agir pour la dernière génération concernée, en 1999. Plus tard, le dispositif ne sera plus qu'une aumône (Applaudissements sur les bancs du groupe RCV).

M. le Secrétaire d'Etat - J'ai trop de respect pour les anciens combattants pour leur faire l'aumône, Monsieur le député.

Les crédits d'action sociale de l'ONAC que vous avez évoqués augmenteront à Paris comme ailleurs.

En ce qui concerne la cristallisation, la situation n'est pas celle que vous dites. Une étude montre en effet que les pensions servies dans nos anciennes colonies confèrent pour un même montant un pouvoir d'achat bien plus important qu'en France. Je souhaite en revanche que des droits nouveaux soient accordés aux veuves.

J'étudie enfin la question des retraites anticipées afin de prendre des dispositions en 2000 si et si seulement si leur portée est alors conséquente (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Mme Nicole Ameline - Vous avez évoqué le devoir de mémoire, Monsieur le ministre, mais il y a aussi un devoir de justice. Les anciens combattants de la FNACA ont parfois doublement souffert : d'abord du fait de la guerre, puis de trente ans de chômage et d'exclusion. C'est pourquoi le dispositif de retraite anticipée est nécessaire. Or votre projet ne leur garantit pas la solidarité à laquelle ils ont droit. Nous connaissons les contraintes financières et vous savez notre attachement à la stabilisation des dépenses publiques. Nous croyons toutefois que l'Etat s'honore à en assumer certaines.

Nous sommes sensibles à votre souci pédagogique. Précisément 1999 marquera le 55ème anniversaire du débarquement et il devrait être l'occasion d'un hommage exceptionnel aux vétérans, alors que va s'achever un siècle marqué par la barbarie.

Que comptez-vous faire pour entretenir le souvenir de ce sacrifice collectif et célébrer l'avenir que nous offre l'espace européen dont l'unification nous a garanti une si longue paix ?

Il faudrait compléter le travail remarquable accompli par le comité du débarquement pour commémorer cet évènement exceptionnel, car c'est aussi sur les plages de Normandie qu'est née l'Europe que nous construisons.

M. le Secrétaire d'Etat - 1999 ne sera pas l'anniversaire du seul débarquement de Normandie mais aussi celui du débarquement de Provence et, plus généralement, celui de la libération de la France, notamment pour les Forces Françaises de l'Intérieur.

Ce sera l'occasion pour nous de commémorer l'action des combattants qui ont sacrifié leur destin individuel au destin collectif de la France, afin de transmettre aux plus jeunes les valeurs républicaines qui les animaient.

Je suis allé récemment à Caen car je souhaite, en collaboration avec le conseil régional de Basse-Normandie, témoigner notre reconnaissance aux Américains qui ont débarqué. L'Etat s'est en outre engagé à développer le mémorial.

1999 doit nous permettre d'illustrer les valeurs qui ont permis de vaincre la barbarie, de rétablir la dignité de la France et de diffuser son message universel de liberté, d'égalité et de paternité dans le concert des nations (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Michel Herbillon - Les anciens combattants estiment depuis fort longtemps et souvent à juste titre que l'Etat n'a pas toujours rempli l'engagement du droit à réparation qu'il avait pris envers eux. Ce sentiment a été ravivé cette année par la décision du Gouvernement de diminuer le plafond de l'avantage fiscal issu de la demi-part supplémentaire dont bénéficient les invalides et les anciens combattants. Vos déclarations qui tendent à minimiser la partie de cette mesure, ne les ayant pas rassurés, les députés ont rejeté cette disposition lors de la discussion budgétaire et le Gouvernement a finalement fait adopter en seconde délibération une réduction d'impôt de 5 380 F maximum pour compenser cette baisse du plafond.

Nous nous réjouissons de votre revirement, mai les anciens combattants, les invalides, les veuves de guerre, les titulaires d'une pension militaire d'invalidité ou d'une pension de réversion militaire d'invalidité ne sont que partiellement rassurés.

Ils savent en effet que le ministère des finances s'arrête rarement en chemin lorsqu'il cherche à supprimer un avantage fiscal. Celui-ci n'est pourtant que l'expression de la légitime reconnaissance de la nation à ceux qui ont garanti sa liberté.

Pouvez-vous vous engager à ce que les avantages bénéficiant aux anciens combattants, dont la demi-part supplémentaire, ne soient pas remis en cause dans l'avenir ?

M. le Secrétaire d'Etat - Ma responsabilité est de défendre les intérêts matériels et moraux du monde combattant.

Les pensions versées au titre du droit à réparation, reconnue en 1919, ne sont pas fiscalisées. La demi-part supplémentaire n'est pas une disposition liée au droit à réparation. Elle date de la loi de finances pour 1982.

Tout ce qui relève du code des pensions militaires d'invalidité et du droit à réparation échappe à la fiscalité et je m'engage bien entendu à défendre ce principe. Au demeurant, vous avez craint en vain : grâce à la majorité plurielle notamment... (Exclamations sur les bancs du groupe UDF)

M. François Rochebloine - Et à l'UDF !

M. le Secrétaire d'Etat - En effet. Grâce à la représentation nationale donc, le Gouvernement a mis en place un dispositif qui n'assujettira pas les anciens combattants de plus de 75 ans à un supplément d'impôt.

M. Guy Teissier - Heureux rattrapage ! Monsieur le secrétaire d'Etat, je vous avais sollicité cet été à propos de l'implantation du mémorial national consacré aux anciens combattants d'Afrique du Nord. Le 3 août, vous m'avez confirmé votre choix en faveur de Paris, laissant entendre que seule la capitale offrirait un site assez prestigieux. Cependant, pour 95 % au moins les anciens combattants d'Afrique du Nord sont passés par Marseille, la deuxième ville de France, cela à l'aller comme au retour, et tous se souviennent du camp de Sainte-Marthe.

Je regrette en outre que, lors de votre déplacement à Marseille, contrairement à l'usage, vous n'ayez pas convié les parlementaires du département à une réunion de travail où nous aurions pu évoquer ce dossier.

Vous imaginez bien que votre position a déçu les associations d'anciens combattants ainsi que tous les élus phocéens. Tout le conseil municipal, conscient des liens filiaux qui unissent Marseille aux anciens d'AFN, n'a pas hésité à signer une pétition que je lui avais soumise avec Mme Moll, adjointe au maire chargée des rapatriés, afin de protester contre votre décision. Comptez-vous proposer une une solution plus équitable ?

M. le Secrétaire d'Etat - Pour l'édification de ce mémorial, j'ai mis en place une commission regroupant sous la présidence de M. Lanzi, toutes les associations représentatives des anciens combattants d'AFN ainsi que quelques historiens et, avant même que les travaux ne débutent, j'ai annoncé que je me rangerai à sa proposition. Cette commission a tranché en faveur de Paris et je suis donc allé trouver le maire de la capitale pour déterminer un site. Pour l'instant, la ville manifeste quelques réticences, estimant qu'un monument érigé dans le 19ème arrondissement pourrait répondre à la définition, mais cela n'est pas conforme au voeu de la commission et, avec celle-ci, j'ai adressé la semaine dernière une lettre au maire de Paris pour le lui faire savoir.

Je m'en tiens donc à ce que j'avais annoncé. Cela ne m'empêche pas de participer à l'inauguration d'autres mémoriaux ou stèles dédiés, ici ou là, aux anciens combattants d'Afrique du Nord. Je crois d'ailleurs que la ville de Marseille a elle-même un projet, pour le Fort Saint-Jean, mais différent de celui qui nous occupe. Je n'ai rien contre aucune ville de France, mais le monde combattant veut ce mémorial dans la capitale et, à l'intérieur de celle-ci, sur un site assez prestigieux pour témoigner en faveur de l'histoire (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Eric Doligé - J'associe à ma question mes collègues Carré et Bernard, ainsi que le groupe RPR.

Comme l'a rappelé M. Carvalho par exemple, ce budget n'est pas totalement satisfaisant et le Premier ministre n'a pas tenu certains de ses engagements ! Ferez-vous au moins sur un point un effort ?

Il s'agit de la campagne double. Créées en 1831, les bonifications de campagne de guerre simple et double sont un droit à réparation, accordé aux anciens combattants fonctionnaires et assimilés depuis la loi du 14 avril 1924. Cette loi visait à rétablir une certaine équité entre ces fonctionnaires et leurs collègues restés au travail, qui continuaient de bénéficier d'un cursus normal. Toutes les générations du feu en ont bénéficié, à la seule exception de ceux qui ont participé à la guerre en Afrique du Nord.

Pourtant, la loi du 9 décembre 1974 reconnaissait "dans des conditions de stricte égalité avec les combattants des conflits antérieurs, les services rendus par les personnes qui ont participé sous autorité aux opérations effectuées en Afrique du Nord entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962".

Vous avez récemment fait valoir que le coût de la mesure s'élèverait à 1 200 millions, ce qui interdirait de l'inclure dans ce budget. Mais puisque nous constatons que l'économie se porte mieux, pourquoi ne pas faire bénéficier les anciens d'AFN des marges de manoeuvre ainsi dégagées ?

Même si vous ne "portez" pas la revendication, comme vous l'avez dit, elle est juste et, si vous leur aviez demandé, vos services nous auraient dit qu'en ne diminuant pas vos crédits de 540 millions, vous auriez pu faire la moitié du chemin !

M. le Secrétaire d'Etat - Je n'ai pas dit que la revendication n'était pas justifiée et je respecte ceux qui l'avancent car ils agissent dans un souci d'égalité. Si je ne la "porte" pas, c'est qu'elle coûterait en effet 1,2 milliard, mais c'est aussi que je ne veux pas creuser l'écart entre les anciens combattants de la fonction publique et ceux qui relèvent d'un statut de droit privé. Enfin, j'estime que nous avons affaire ici à des réalités sociales, culturelles et économiques différentes de ce qu'elles étaient lors des deux conflits mondiaux.

On m'a demandé d'organiser une réunion tripartite sur le sujet. J'en examine la possibilité, mais j'avoue que je répugne à organiser un débat dont je sais par avance qu'il n'aboutira pas à ce que souhaitent les intéressés (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Pierre Lasbordes - La question de la retraite anticipée est assez cruciale pour qu'on y revienne. En effet, si elle n'est pas réglée par ce budget, elle ne pourra guère l'être par les suivants dans la mesure où les classes 1960 et 1961 sont des classes creuses. Les anciens combattants encore en activité ont la faculté de recourir à l'ARPE, même si cela suppose de trouver un jeune qui vienne les remplacer, mais le problème reste entier pour les chômeurs en fin de droits. Vous m'opposerez que l'allocation différentielle du fonds de solidarité est supérieure à la pension de retraite, mais qu'adviendra-t-il au moment d'accéder à la retraite de plein droit ?

Vous comptez sur le soutien des anciens combattants pour réformer votre ministère : peuvent-ils en retour compter sur le vôtre pour la retraite anticipée ?

M. le Secrétaire d'Etat - Ni le monde combattant ni moi n'avons jamais lié la réforme du ministère et de l'ONAC à la satisfaction ou à l'abandon de telle ou telle revendication !

Soit on a une activité et on ne se pose pas la question de la retraite anticipée, sauf à recourir à 58 ans au dispositif ARPE ; soit on est chômeur en fin de droits, et l'on perçoit alors de 5 600 à 6 700 F, ce qui en général est plus que le montant cumulé de la retraite de sécurité sociale et de la retraite complémentaire.

Depuis un an, même si, juridiquement, la retraite anticipée n'a pas été accordée, la situation s'est tout de même beaucoup améliorée pour les anciens combattants victimes du chômage.

M. Robert Gaïa - J'associerai à ma question Mme Collange et M. Galut.

Les plus hautes autorités de l'Etat ont souhaité que, sur le conflit algérien, le langage officiel soit en harmonie avec la réalité des faits, telle que la perçoit la conscience nationale. Nous sommes un certain nombre ici à nous en féliciter, quels que soit par ailleurs les problèmes diplomatiques ou juridiques que cela pose. Mais le devoir de mémoire supposerait de tirer toutes les conséquences de cette reconnaissance, par un acte fort.

Ainsi l'Etat doit continuer de soutenir ces hommes et ces femmes originaires d'Afrique qui ont combattu pour la France, en améliorant leurs pensions et retraites. Lors de votre venue dans le Var, vous avez honoré la mémoire des combattants d'Afrique noire qui ont versé leur sang pour libérer la France et vous avez également pu visiter le mémorial consacré à l'Indochine. Reconnaître qu'il y a bien eu une guerre d'Algérie devrait conduire de même à ériger un mémorial national de l'Afrique du Nord, comme le réclament les anciens d'AFN. En avez-vous le projet et, si oui, quand et où ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste)

M. le Secrétaire d'Etat - J'ai dit quelle serait la procédure mise en oeuvre pour le mémorial, et je compte bien mener cela à terme, car il faut réintégrer cette période dans notre histoire (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Il serait souhaitable que le projet aboutisse au plus tard en 2002, pour le 40ème anniversaire de la fin du conflit (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Jean-Claude Beauchaud - Je me réjouis de voir les crédits de la mémoire augmenter de 10 %. Vous avez signé un accord avec l'ONAC pour créer 96 emplois-jeunes. Quand, et comment, seront-ils mis en place ? Seront-ils pérennisés dans cinq ans ?

Par ailleurs, la guerre d'Algérie reste un moment douloureux de notre histoire, pour ma génération en particulier. Les anciens combattants de mon département souhaiteraient que le mémorial soit érigé à Paris (Quelques applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. le Secrétaire d'Etat - Quelques emplois-jeunes ont été créés, et je souhaite que la mise en place se fasse rapidement. Des initiatives ont été prises déjà dans les Alpes-Maritimes, en Loire-Atlantique, dans la Meuse. On pourra s'attacher en particulier à la collecte de la mémoire vivante, à la gestion des archives du monde combattant, et en général appuyer les initiatives. Pour les régions qui le souhaiteraient, les contrats Etat-régions pourraient mentionner le devoir de mémoire qui rencontre d'ailleurs parfois les intérêts du tourisme. Si tous ensemble nous souscrivons à cette politique, il sera certainement possible de la développer (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

Les crédits inscrits à l'état B, titres III et IV, et à l'état C, titre V, successivement mis aux voix, sont adoptés.

Les articles 75 et 76, successivement mis aux voix, sont adoptés.

APRÈS L'ART. 76

M. le Secrétaire d'Etat - J'ai déjà expliqué le sens des amendements 55 et 56 rectifiés. Le premier ramène de 18 à 15 mois la durée de présence en Algérie nécessaire pour que la qualité de combattant soit reconnue -en incluant le temps passé en Tunisie et au Maroc. L'amendement 56 rectifié supprime le sas de six mois.

M. le Rapporteur spécial - Favorable.

M. le Rapporteur pour avis - Très favorable, cela répond à une demande unanime.

M. Georges Colombier - Je suis moi aussi très satisfait, nous avions déposé un amendement semblable.

Les amendements 55 et 56 rectifiés, successivement mis aux voix, sont adoptés.

M. le Président - Nous en avons terminé avec l'examen des crédits des anciens combattants.

La suite de la discussion du projet de loi de finances pour 1999 est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu cet après-midi, à 15 heures.

La séance est levée à 12 heures 55.

          Le Directeur du service
          des comptes rendus analytiques,

          Jacques BOUFFIER


© Assemblée nationale


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