Accueil > Archives de la XIe législature > Les comptes rendus > Les comptes rendus analytiques (1998-1999)

Assemblée nationale

COMPTE RENDU

ANALYTIQUE OFFICIEL

Session ordinaire de 1998-1999 - 85ème jour de séance, 215ème séance

1ère SÉANCE DU JEUDI 8 AVRIL 1999

PRÉSIDENCE DE Mme Nicole CATALA

vice-présidente

          SOMMAIRE :

ORIENTATION AGRICOLE -nouvelle lecture- (suite) 1

    ARTICLE PREMIER 1

    ARTICLE PREMIER bis 2

    ARTICLE PREMIER ter 3

    ART. 2 3

    ART. 3 7

    ART. 4 8

    ART. 5 12

    AVANT L'ART. 6 A 14

    ART. 6 A 14

    ART. 6 B 14

    ART. 6 14

    ART. 7 15

    ART. 7 bis 15

    ART. 7 ter 15

    ART. 7 quater 15

La séance est ouverte à neuf heures.


Top Of Page

ORIENTATION AGRICOLE -nouvelle lecture- (suite)

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion en nouvelle lecture du projet de loi d'orientation agricole.

Mme la Présidente - J'appelle maintenant dans les conditions prévues à l'article 91, alinéa 9 du Règlement, les articles du projet pour lesquels les deux assemblées n'ont pu parvenir à un texte identique, dans le texte du Sénat.

ARTICLE PREMIER

M. François Sauvadet - Nous sommes tous d'accord avec les grands objectifs fixés à cet article, qui a été largement amendé. C'est ainsi à notre initiative que la capacité exportatrice de la France y est affirmée. Nous nous réjouissons aussi qu'y soit mentionnée la nécessité d'assurer la sécurité alimentaire mondiale. Mais les articles suivants, hélas, ne semblent pas de nature à répondre à de telles ambitions.

M. François Patriat, rapporteur de la commission de la production - L'amendement 4, qui tend à supprimer les mots "et industrielles", est rédactionnel.

M. Jean Glavany, ministre de l'agriculture et de la pêche - Avis favorable.

L'amendement 4,mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - Le rapport de M. Bianco sur la politique forestière a été unanimement salué, et un projet est en préparation. Il nous a semblé utile de rappeler ici la place de la forêt. Tel est l'objet de l'amendement 5. En revanche la précision que propose M. Sauvadet ne paraît pas indispensable.

M. François Sauvadet - Le sous-amendement 211, tend à rappeler que la politique forestière fait partie intégrante de la politique agricole.

Le rapport Bianco a été bien accueilli par les professionnels. Les propriétaires, les exploitants et l'ensemble de la filière attendent maintenant qu'il se traduise par une grande loi forestière. Quand nous sera-t-elle soumise ?

M. le Ministre - Je suis favorable à l'amendement 4. Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée sur le sous-amendement 211.

A la suite de la communication que j'ai faite en conseil des ministres fin novembre 1998, le Gouvernement a fait siennes les recommandations du rapport Bianco. Les groupes de travail avec les professionnels sont maintenant en place et le texte devrait être prêt à la fin de l'année pour, je l'espère, un examen début 2000.

Le sous-amendement 211, mis aux voix, est adopté.

L'amendement 5, ainsi sous-amendé, mis aux voix, est adopté.

L'article premier modifié, mis aux voix, est adopté.

ARTICLE PREMIER bis

M. François Sauvadet - Avec cet article important, nous en venons à ce que le ministre a appelé la démocratie. Si le pluralisme et la représentation des composante-s du monde agricole sont des nécessités, la représentativité n'en doit pas moins obéir à certaines règles, auxquelles nous souhaitons ici donner corps. Il nous semble que le seuil de 15 % est acceptable car il permet à la fois l'expression de tous et le respect du fait majoritaire.

De telles règles ne doivent pas varier en fonction de circonstances, c'est pourquoi il nous semble dangereux de renvoyer à un décret car on ne discerne pas bien vos intentions. Si vous voulez abaisser le seuil, il faut le dire clairement...

M. le Ministre - Je dis clairement non !

M. François Sauvadet - ...Et si tel n'est pas le cas, pourquoi ne pas l'inscrire dans la loi ?

M. le Rapporteur - L'amendement 6 rectifié renvoie la détermination des conditions de représentativité des syndicats d'exploitants à un décret en Conseil d'Etat. Notre intention n'est pas d'abaisser le seuil, mais de trouver des critères qui permettent à chacun de s'exprimer.

L'amendement précise par ailleurs que ces syndicats ont vocation à être représentés au sein de divers organismes car, je le dis par avance à M. Leyzour, il est des cas où leur présence n'est pas indispensable.

M. Germain Gengenwin - Nous voici sur l'un des points qui ont entraîné l'échec de la CMP. Nous ne souhaitons pas éliminer qui que ce soit des réunions mais éviter des présences inopportunes.

Nous proposons donc, par le sous-amendement 210, que seules soient représentées les organisations syndicales ayant obtenu plus de 15 % des voix aux élections à la chambre d'agriculture.

M. Félix Leyzour - J'enregistre avec satisfaction qu'on en revient au pluralisme. J'aurais toutefois préféré qu'on écrive "sont représentées" plutôt que "ont vocation à être représentées". C'est le sens de notre sous-amendement 226.

M. le Rapporteur - Avis défavorable aux deux sous-amendements.

M. le Ministre - Monsieur Sauvadet, le Gouvernement ne propose pas que toutes les organisations professionnelles soient représentées, mais seulement celles qui sont représentatives, c'est-à-dire qui dépassent un seuil minimum de voix.

Vous voulez figer les critères de représentativité dans la loi : or cette question a toujours été du domaine du décret et cette souplesse me paraît indispensable. Je précise que je n'ai pas l'intention de modifier les règles actuelles.

Je demande donc le retrait ou le rejet du sous-amendement 210.

Monsieur Leyzour, je comprends votre souci. Toutefois, la formule "ont vocation à être représentées" signifie simplement que seules les organisations qui le souhaitent participeront aux commissions, nous ne voulons pas les y obliger.

M. Christian Jacob - Votre réponse nous satisfait. Nous voulions éviter que le seuil de 15 % des voix ne soit pas remis en question.

M. Charles de Courson - Compte tenu de l'engagement du Gouvernement, nous retirons notre sous-amendement 210.

L'amendement 6 rectifié est fort éloigné du texte initial. Pouvez-vous nous confirmer que les filières interprofessionnelles, notamment les organismes intervenant dans le secteur des produits AOC, ne sont pas concernées ?

M. le Ministre - Le texte même précise qu'il ne s'applique pas aux organisations interprofessionnelles.

M. Félix Leyzour - Compte tenu des explications du ministre, je retire le sous-amendement 226.

L'amendement 6 rectifié, mis aux voix, est adopté.

L'article premier bis ainsi modifié, mis aux voix, est adopté.

ARTICLE PREMIER ter

M. François Sauvadet - L'effort de revalorisation des retraites, commencé à l'époque où M. Vasseur était ministre, doit être poursuivi, notamment en faveur des conjoints d'exploitants. Il faut que le rapport soit suivi de mesures de revalorisation !

M. le Rapporteur - L'amendement 7 de la commission, qui porte sur la première partie de l'article, tend à revenir au texte voté en première lecture. Nous insistons sur la nécessité de revaloriser les retraites les plus faibles, tout en prenant en compte les adjonctions du Sénat sur les retraites complémentaires.

M. Charles de Courson - Il faut cesser de revaloriser les petites retraites agricoles sans tenir compte de l'ensemble des avantages de vieillesse perçus par les intéressés. Beaucoup d'agriculteurs sont pluri-actifs et certains ont des retraites non agricoles importantes. Est-ce que l'étude annoncée portera aussi sur ce point ? Cela permettrait de faire des économies, et donc d'accélérer la revalorisation des petites retraites.

M. le Ministre - Le Gouvernement soutient l'amendement de la commission.

Monsieur Sauvadet, je reconnais que le Gouvernement précédent avait engagé une revalorisation des retraites, mais le Gouvernement actuel a fait beaucoup plus.

Monsieur de Courson, la revalorisation des retraite agricoles pose en effet un problème de coordination avec certains avantages. Ce sera effectivement l'un des sujets abordés par ce rapport, qui devrait être terminé assez vite, afin que nous puissions prendre des mesures dans le prochain budget.

M. Joseph Parrenin - Je voudrais appeler l'attention sur l'absence de régime complémentaire pour les agriculteurs. C'est un pas important à franchir dans les années à venir. Mais il ne faut pas s'en cacher la difficulté, car des cotisations supplémentaires seront nécessaires.

Je pense à cette présidente et à ce directeur d'une caisse de MSA, dans le Doubs, qui ont été poursuivis pour escroquerie parce qu'ils avaient mis en recouvrement des cotisations. Ce fait illustre la réticence d'une partie du monde paysan à payer des cotisations. Sauf que c'est indispensable pour bénéficier à 60 ans d'une retraite équivalente à celle des autres catégories professionnelles. Bref, il faut que nous ayons ensemble le courage de mettre en place un système de retraite complémentaire.

L'amendement 7, mis aux voix, est adopté.

L'article premier ter modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 2

M. André Vauchez - Nous voici au contrat territorial d'exploitation, pièce maîtresse du projet. Près de 80 départements ont répondu à votre invitation, Monsieur le ministre, et ont esquissé une préfiguration des CTE ; et le Conseil supérieur d'orientation et de coordination de l'économie agricole et alimentaire va se prononcer. Si l'on veut réconcilier l'agriculteur avec la société, il importe en tout cas que les CTE fassent l'objet d'une forte concertation avec tous les usagers de la nature et aussi les élus locaux, car ce sont ces derniers qui, par exemple, assurent le service de l'eau ou font appliquer les chartes de l'environnement. Je salue donc la position de la commission, qui a rétabli le lien entre les CTE et la politique d'aménagement du territoire conduite par les pays. C'est particulièrement important dans les zones d'agriculture intensive. Je me réjouis aussi que la commission ait écrit, à l'article 4, que les aides apportées à l'exploitant devaient être modulées et planifiées. Il faut en effet qu'à l'avenir les aides soient plus importantes pour les petits, moindres pour ceux qui ont déjà beaucoup. C'est ainsi que nous mettrons fin à des pratiques maintes fois dénoncées de course à l'hectare et d'agriculture trop intensive, nuisibles au développement durable. C'est également ainsi que nous aiderons les jeunes à s'installer.

M. François Sauvadet - Nous retombons dans l'opposition entre gros et petits...

Je ne suis pas hostile a priori au CTE car le contrat est une idée moderne, mais encore faut-il que celui-ci ne soit pas le prétexte à une suradministration. Or je lis dans le projet que les contrats- types vont être arrêtés par le préfet, après avis du CSO, et sur des orientations définies par le ministère. L'opposition a certes obtenu, par voie d'amendements, que l'avis de la profession soit demandé. Mais c'est bien le moins ! Et je préférerais une formule plus souple qu'un contrat-type aux allures de carcan.

Vous ne nous avez pas répondu, Monsieur le ministre, au sujet du financement des CTE. De sorte que beaucoup craignent un marché de dupes. Vous avez certes parlé de modulation des aides, mais il faudrait préciser selon quels critères. Et nous aimerions savoir si les aides sectorielles vont dépendre ou non de la signature d'un CTE, qui, rappelons-le, est un contrat individuel signé avec le représentant de l'Etat. Même question pour les aides à l'installation.

Plus l'on creuse la question du financement, plus les organisations agricoles ont le sentiment qu'on leur propose un marché de dupes.

M. Serge Poignant - Mes questions rejoignent celles de M. Sauvadet. Il faut dire que cet article, qui a été la pierre d'achoppement de la CMP, en laisse beaucoup sans réponse. Les CTE seront-ils une possibilité ou une obligation ? La question se pose particulièrement pour les transmissions d'installations.

Et le problème du financement est pour nous fondamental. Nous aimerions donc avoir des précisions à ce sujet.

M. le Ministre - Vous évoquez la consultation des professionnels, Monsieur Sauvadet. Mais cette consultation se fait déjà et le CSO, qui s'est saisi passionnément du dossier, y a déjà consacré plusieurs séances de travail. Son avis sera un avis conforme.

Le financement des CTE est un cofinancement. 450 millions ont déjà été programmés : 300 millions inscrits au budget de la nation et 150 millions de crédits européens. C'est d'ailleurs bien parce qu'il y a cofinancement que nous tenions à ce que cette loi d'orientation agricole soit examinée en même temps que sont menées les négociations sur la PAC. Pour ce qui est de la modulation des aides, nous ferons en sorte que le plus grand nombre possible d'Etats européens nous suivent dans cette voie de façon à adresser un signal global aux agriculteurs européens. Selon quels critères se fera-t-elle ? Nous allons en débattre avec les organisations professionnelles, avec vous... Le montant total des aides, le revenu brut d'exploitation, l'emploi devront en tout état de cause être pris en considération.

Reste une dernière question sur laquelle je veux faire toute la clarté pour qu'on cesse de se faire peur sans raison : je veux parler de la conditionnalité des aides. Lorsqu'un CTE a été signé -et je répète que cela procédera d'une démarche purement volontaire-, il aura vocation à rassembler l'ensemble des concours publics, de manière à ce qu'on ait une vue globale de ceux-ci, mais ce ne sera en aucun cas une condition pour toucher quelque aide que ce soit. Par exemple, quand un jeune s'installera, s'il signe un CTE, celui-ci comprendra la DJA ; mais, dans le cas contraire, il bénéficiera tout aussi sûrement de cette dotation. De même en ce qui concerne l'ICHN...

M. Germain Gengenwin - Vous changez de ton !

M. le Ministre - Non, c'est ce que j'ai toujours dit. Au surplus, la conditionnalité serait illégale car elle romprait l'égalité de tous devant la loi. Les agriculteurs auront donc les mêmes droits, qu'ils aient ou non signé un CTE. J'espère vous avoir rassurés ! (Exclamations sur les bancs du groupe UDF, du groupe du RPR et du groupe DL)

M. François Sauvadet - Vous n'avez pas toujours tenu ce langage !

M. le Ministre - Mais si !

Mme la Présidente - La profusion des sigles risque de transformer ce débat en discussion pour initiés : pensez aux profanes ! (Applaudissements sur plusieurs bancs)

M. le Rapporteur - Si nous n'usons pas de sigles, le débat risque d'être allongé, je le crains...

Le ministre n'a pas dit autre chose que ce que j'avais moi-même tenté d'expliquer en première lecture, mais il l'a fait avec plus de force de conviction. Vous n'avez donc plus de raisons de vous montrer anxieux.

M. Vasseur avait trouver hier les mots justes : le CTE sera un bon outil pourvu qu'il soit clairement défini, convenablement financé et mis au service des objectifs pour lesquels nous nous battons tous depuis plusieurs années, a-t-il dit. Je me félicite donc de la complémentarité qui s'affirme sur ce point entre la majorité et l'opposition. Ce contrat territorial, souhaité par la profession, ne sera pas une panacée, mais il instaurera de nouvelles relations entre l'Etat et les agriculteurs. Si j'ai bien interprété aussi la position de M. Leyzour, nous devrions donc pouvoir rassembler une majorité en sa faveur.

L'amendement 8 reprend globalement la rédaction de l'article adoptée par l'Assemblée, en supprimant donc l'obligation, introduite par le Sénat, de participer à des projets de développement collectif. Il est certainement souhaitable que ces contrats s'inscrivent dans le cadre d'un pays, d'une communauté de communes ou de tout autre micro-territoire mais, soyons lucides, ce ne sera pas toujours possible. D'où la nécessité d'autoriser les CTE à caractère particulier.

Nous avons également repris une innovation du Sénat : le préfet arrêtera un ou plusieurs contrats-types, laissant aux intéressés le soin de négocier les contrats eux-mêmes. Mais, une fois que cela sera fait, c'est le préfet qui passera contrat avec l'agriculteur.

Les choses étant ainsi clarifiées, nous devrions pouvoir faire tous ensemble un beau CTE !

M. Christian Jacob - Votre réponse, Monsieur le ministre, n'est pas plus claire que celle de votre prédécesseur, mais elle est plus maligne ! Contrairement à M. Le Pensec, vous ne dites pas que la DJA ou l'ICHN seront intégrées au CTE, mais que celui-ci a vocation à "rassembler l'ensemble des concours publics". Mais qu'est-ce qui justifie cela ? Dix-sept ans de syndicalisme m'ont appris à voir les coups venir de loin, et j'en vois un qui se prépare ici ! Poussé par des membres de cette majorité, vous en viendrez bientôt à invoquer l'article L. 201, à lier l'octroi des concours publics à l'existence d'un contrat... Si tel n'était pas votre objectif d'ailleurs, pourquoi tiendriez-vous à tout regrouper dans le CTE ?

Vous voulez d'autre part financer ces contrats grâce à la modulation. Je rappelle que ces compensations sont calculées, depuis le ministère de M. Mermaz, en fonction des coûts de production dans chaque département. Puis, pour écrêter, on a pris en compte pour un tiers la moyenne nationale et pour deux tiers la moyenne régionale, s'agissant du rendement. Enfin, sous M. Le Pensec, on est passé à 50/50, ce qui permettait de favoriser les régions à plus faible rendement. Si vous consacrez demain 20 % de la modulation aux CTE, vous allez bouleverser votre paysage agricole : vous inciterez par exemple les céréaliers, qui ne sont pas tous exportateurs, à se tourner vers d'autres productions, au détriment des producteurs d'autres régions qui n'ont pas la même ressource.

De même en ce qui concerne l'emploi. J'en suis moi aussi soucieux, mais attention à ce qu'on prendra en compte : les seuls emplois directs ou les emplois indirects également ? Certaines déclarations, dans votre majorité, ont de quoi agacer : M. Parrenin, par exemple, semble tellement aimer les petits, les pauvres, que toute sa politique vise à en créer de nouveaux ! Prenons l'exemple de l'élevage bovin pour la viande : ce secteur compte peu d'emplois directs, mais les emplois indirects sont nombreux, dans la transformation et la commercialisation. Le simplisme serait donc dangereux en la matière !

Ne confondons pas non plus chiffre d'affaires et revenu d'exploitation : dans certains secteurs, le premier est élevé mais le résultat est beaucoup plus mince, tandis que la situation est inverse là où il y a circuit court... Je crains donc que vous ne lanciez des idées sans y avoir suffisamment réfléchi. Certes, vous êtes prêt à en discuter avec nous mais, si nous ne posons pas de garde-fous dans la loi, vous viendrez avec dispositifs déjà ficelés et tout ou presque sera dit ! Prenez donc garde dès maintenant aux risques de bouleversement !

M. Joseph Parrenin - Je me félicite de l'engagement que vient de prendre le ministre en ce qui concerne la modulation. Nous voyons bien que cela inquiète M. Jacob et ses mandants, mais nous serons derrière le Gouvernement ! En effet, le principal reproche qu'on a fait à la PAC de 1992, c'était de se traduire par des chèques exorbitants accordés à certains agriculteurs, qui ont ainsi trouvé le moyen de grossir encore ! (Exclamations sur les bancs du groupe du RPR)

La modulation poursuit donc deux objectifs : maintenir les petites et moyennes entreprises et éviter aux gros, à force de manger les petits, d'avoir mal au ventre !

M. Christian Jacob - Démagogie !

M. Charles de Courson - Monsieur le ministre, vous êtes parti à Bruxelles avec l'idée que vous obtiendriez la dégressivité et que vous affecteriez le différentiel aux CTE. Vous n'avez obtenu que la modulation et vous comptez donc alimenter ainsi les CTE. Mais cette modulation s'applique également aux exploitations, qu'elles aient signé un CTE ou non. Faudrait-il faire une surmodulation ?

Pour des exploitations pratiquant la pluriculture, la compensation pourra se monter à 200 ou 240 %, surtout dans les zones fragiles. Alors comment allez-vous articuler la modulation à hauteur d'un plafond de 20 % selon que l'entreprise est sous CTE ou non ? Vous allez moduler le taux de modulation ? Et le principe d'égalité ?

M. Félix Leyzour - Le sous-amendement 227 prévoit que le CTE comporte, outre les engagements sur les orientations de la production, des engagements sur les conditions et les modes de production. C'est tout cela qui doit servir à la modulation des aides, pour lutter contre les dérives que nous avons connues.

M. le Rapporteur - La commission a jugé que cette préoccupation est déjà prise en compte par l'amendement 8.

M. le Ministre - Je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée. La précision n'est peut-être pas inutile.

M. Christian Jacob - Ce sous-amendement change tout ! Conditions et modes, cela veut dire que le préfet va expliquer à l'agriculteur comment il doit labourer ! On donne des pouvoirs exorbitants à ces nomades de luxe que sont les préfets... (Murmures sur les bancs du groupe socialiste) Oui, ils changent de département tous les deux ans, alors qu'il y a des gens qui depuis plusieurs générations vivent en harmonie avec le territoire. Ce sous-amendement est dangereux.

M. Félix Leyzour - Moi, je considère qu'il est salutaire.

Le sous-amendement 227, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Félix Leyzour - Le sous-amendement 228 complète le texte dans le même esprit, en parlant de l'emploi "et ses aspects sociaux".

M. le Rapporteur - La commission a repoussé cet amendement mais, à titre personnel, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

M. le Ministre - Sagesse.

Le sous-amendement 228, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - La commission n'a pas examiné le sous-amendement 282 de M. Parrenin, mais j'y suis favorable. Il va de soi que le Gouvernement doit respecter les règles communautaires, et nous lui faisons confiance pour rééquilibrer les aides publiques et préserver les crédits ICHN. Il est donc inutile et même dangereux que la loi précise les crédits qui seront intégrés dans les CTE.

M. le Ministre - Avis favorable. J'ai dit tout à l'heure que les CTE regroupaient l'ensemble des crédits accordés à une exploitation, mais qu'ils n'étaient pas une condition de leur attribution. De la même façon, le respect de la réglementation européenne s'impose quand on affecte des crédits communautaires, et ce sous-amendement coule de source pour alléger le texte.

M. Jean-Claude Chazal - Les ICHN sont un dû, les CTE doivent être un plus. Inclure les ICHN dans les CTE, pourquoi pas, à la condition expresse qu'il n'y ait pas substitution. Mais vous venez de dire que les agriculteurs bénéficieraient des ICHN de la même façon avec ou sans CTE. Quel intérêt alors, dans une zone de montagne par exemple, de conclure un CTE qui n'apporte rien ?

Je pense que les CTE sont particulièrement destinés à améliorer la situation dans les zones défavorisées.

Le sous-amendement 282, mis aux voix, est adopté.

M. Germain Gengenwin - Par le sous-amendement 206 corrigé, nous proposons de subordonner les CTE à l'avis de la commission départementale d'orientation agricole.

Tout le problème est de savoir quelles contraintes exactes l'on imposera à l'agriculteur qui aura signé un CTE, en matière de préservation des ressources naturelles ou d'utilisation des engrais par exemple. C'est pourquoi nous demandons que le contrat soit signé par le préfet "sur proposition de la commission départementale d'orientation agricole".

M. le Rapporteur - La commission a considéré que si l'ensemble de la profession et la CDOA devaient être associées à l'élaboration du contrat-type, il n'était pas souhaitable de réitérer cette démarche pour chaque contrat particulier. Donc avis défavorable.

M. François Sauvadet - Comment fait-on aujourd'hui pour la politique des structures ?

M. le Ministre - Avis défavorable.

M. Christian Jacob - Jusqu'à présent, le préfet est toujours intervenu sur proposition de la commission mixte départementale. Pourquoi en irait-il différemment avec les CDOA ? Si le préfet décide seul, autant les supprimer d'emblée.

M. François Sauvadet - Je ne comprends pas ce refus opposé au rôle actuel des CDOA. On peut craindre la prééminence du rôle de l'Etat. Nous aurions souhaité davantage d'équilibre tout comme nous aurions souhaité que les propriétaires soient préalablement informés avant toute modification des structures d'exploitation.

M. le Rapporteur - C'est une commission d'experts qui fixe les règles du football, mais c'est ensuite l'arbitre qui, sur le terrain, détermine seul si telle phase de jeu y est conforme. On ne convoque pas de nouveau l'ensemble de la commission ! En l'espèce, la profession fixera le cadre global en élaborant le contrat-type mais c'est ensuite le préfet qui seul décidera des contrats individuels. Mes chers collègues, votre proposition alourdirait inutilement le dispositif. A croire que vous n'en voulez pas ! Les agriculteurs vous le reprocheraient.

Le sous-amendement 206 corrigé, mis aux voix, n'est pas adopté.

M. Charles de Courson - Le sous-amendement 207 tend à préciser que le pronom "il" au début de la première phase de l'avant-dernier alinéa désigne le contrat-type.

M. le Rapporteur - L'article 2 traite du CTE, non du contrat-type. Vous pouvez retirer votre sous-amendement, Monsieur de Courson.

M. le Ministre - Même avis.

Le sous-amendement 207 est retiré.

M. le Ministre - Le Gouvernement est bien entendu favorable à l'amendement 8 de la commission.

Qu'est-ce que la modulation ? Tout simplement, un mécanisme de redistribution des aides. Les prélèvements seront effectués sur la base des critères définis au niveau européen -montant total des aides, revenus de l'exploitation et emplois-, dans une limite de 20 %. Je rassure donc M. Jacob : la réglementation européenne interdit une modulation sur la base du chiffre d'affaires. Quant à la réaffectation des sommes ainsi prélevées, elle s'opérera par le biais des CTE. Je ne comprends donc pas les inquiétudes exprimées. L'agriculteur qui signera un CTE pourra prétendre, en contrepartie de certains engagements pluriannuels, à des aides supplémentaires, nationales et européennes. Cela ne remet pas en question les indemnités existantes comme l'ICHN. Tout agriculteur de montagne continuera d'y avoir droit. Simplement le signataire d'un CTE obtiendra un plus.

M. Germain Gengenwin - La modulation passera donc par les CTE.

M. Charles de Courson - Mieux valait le dire clairement.

M. Serge Poignant - Rien n'a été dit de la liaison entre les CTE et les projets des pays, ces nouvelles entités prévues par la loi relative à l'aménagement du territoire qui, soit dit en passant, n'existeront pas partout. Pourriez-vous nous en dire davantage, Monsieur le ministre ?

M. le Ministre - Je reviens un instant sur la question précédente. Oui, la modulation vise bien à réorienter les aides, les prélèvements s'effectuant sur la base des critères fixés par l'accord de Berlin et la redistribution s'opérant, elle, dans le cadre des CTE et seulement d'eux.

Je réponds maintenant à M. Poignant. Le CTE, contrat individuel entre un exploitant et le représentant de l'Etat, peut inclure des volets collectifs, propres à un terroir ou à un pays. Les régions, les départements, voire les communes, pourront parfaitement abonder les CTE dans une perspective d'aménagement du territoire, sans bien sûr y être obligés.

M. François Sauvadet - Les contrats-types ne sont pas négociables.

M. le Ministre - Mais si, puisque la CDOA sera consultée. Les collectivités feront comme elles l'entendent. Je pense, pour ma part, qu'elles seront plus nombreuses que vous croyez à soutenir les CTE, car elles y verront leur intérêt.

M. Germain Gengenwin - La carotte est là...

L'amendement 8, mis aux voix, est adopté et l'article 2 est ainsi rédigé.

ART. 3

M. François Sauvadet - Dans la mesure où le nouveau fonds aura vocation à regrouper les crédits destinés à la gestion territoriale de l'espace agricole et forestier, j'aimerais savoir ce qu'il adviendra dans ce cadre des crédits du fonds forestier national.

M. Charles de Courson - En droit budgétaire, qui dit fonds dit chapitre budgétaire, voire crédit global. Pourtant l'article 3 mentionne différents concours, y compris provenant de la gestion forestière dont les fonds ne sont pas inscrits au budget de l'agriculture mais sur un compte spécial du Trésor, le FFN. Avez-vous donc l'intention de transférer une partie de ces crédits au profit du nouveau fonds ?

M. Germain Gengenwin - M. Jean-Baptiste, retenu, souhaite savoir si les OGAF seront reprises dans le cadre des CTE.

M. le Ministre - Nous avons eu assez de mal à les mettre en place, bien sûr les OGAF seront préservées dans les TOM.

Le FFN n'est pas concerné par ce dispositif. Il a d'ailleurs vocation à être renforcé dans le cadre de la loi forestière en préparation. Si cet article fait référence à la gestion de l'espace forestier, c'est parce que cela est prévu par le règlement européen. En outre près d'un agriculteur sur deux produit du bois et la forêt joue un rôle essentiel dans l'espace rural. Enfin, elle figurait déjà dans le FGER.

M. François Sauvadet - Ces précisions étaient nécessaires.

L'article 3, mis aux voix, est adopté.

ART. 4

Mme Béatrice Marre - Cet article concrétise la volonté de réorienter les aides, qui est pour nous au coeur de la politique agricole française. La commission a fait oeuvre utile en rétablissant les dispositions supprimées par le Sénat parce qu'il ne croyait pas aux CTE ou parce qu'il n'en voulait pas.

La modulation se fera par les CTE. Les sommes perçues sur les mieux lotis alimenteront le fonds créé à l'article 3 et seront redistribuées à ceux qui en ont besoin.

Cette modulation figure dans l'accord de Berlin, nous y tenions car à défaut la France et l'Europe auraient été en mauvaise posture dans les futures négociations de l'OMC.

M. François Sauvadet - Avec ce dispositif, on va donc prendre à certains pour redistribuer à d'autres, uniquement par le biais des CTE.

Il faut toutefois mesurer l'importance de la compensation économique pour les régions productrices d'oléoprotéagineux qui vont être frappées de plein fouet par les conséquences de l'accord de Berlin et qui n'ont guère de possibilité de produire autre chose. La modulation devrait tenir compte de ces spécificités.

La commission a par ailleurs supprimé la référence aux entreprises agricoles. Je le regrette car nous avons aussi besoin de telles entreprises.

Dans le cadre d'une enveloppe budgétaire limitée il vous faudra faire des choix et j'aimerais donc savoir quels seront les heureux bénéficiaires des CTE, d'autant que les prélèvements seront destructeurs pour certaines régions et que la modulation pourra aller jusqu'à 20 %, avec les conséquences que M. de Courson a décrites.

Enfin, comment ne pas être inquiet de la suppression de toute référence aux politiques de compensation du handicap. Le Sénat affirmait pourtant à juste titre le principe que : "l'aide financière apportée par les contrats territoriaux d'exploitation a un caractère spécifique et ne peut conditionner les subventions, prêts, bonifications d'intérêts, remises partielles d'impôts ou de taxes octroyés aux agriculteurs selon les modalités déjà définies dans le code rural."

M. Charles de Courson - Vous prévoyez de moduler selon des critères objectifs puis de redistribuer par les CTE selon des critères bien plus flous. Je m'interroge donc sur la compatibilité de cette redistribution avec le droit communautaire.

Ma deuxième question porte sur le budget : est-ce que les aides citées à l'article 4 seront financées par le fonds créé à l'article 3 ?

Troisième question : l'article mentionne des remises d'impôts et de taxes. Mais seule une loi peut créer de telles remises. Et ce n'est pas le ministre de l'agriculture qui les accorde, mais le ministre des finances. Comment allez-vous articuler les CTE gérés par votre ministère et des remises qui sont, pour la plupart, accordées au niveau national par le ministre des finances lui-même ou par le directeur général des impôts ?

M. le Ministre - Les droits acquis seront maintenus. Les remises d'impôts et les bonifications d'intérêt, qui ne sont effectivement pas du ressort du ministère de l'agriculture, n'ont rien à voir avec le CTE et le fonds de l'article 3. Dès lors qu'elles sont prévues par la loi, elles seront maintenues, qu'il y ait ou non CTE. Vous n'avez aucune raison de vous inquiéter sur ce point.

M. le Rapporteur - L'amendement 9 est important. Nous sommes guidés par deux critères essentiels : l'efficacité économique et la justice sociale. Nous voulons aider les zones qui ont le plus de difficultés, et ne pourront jamais obtenir des rendements maxima (Murmures sur les bancs du groupe UDF et du groupe du RPR).

Vous êtes peut-être pour la justice, mais quand vous vous prononcez contre le plafonnement et la modulation, vous contribuez moins à la justice que nous.

M. de Courson demande s'il y a des aides non plafonnées. Oui, les aides européennes sont calculées en fonction des rendements et des quantités, sans limite de plafond.

La DJA est identique pour tous les agriculteurs, ce n'est pas équitable (Protestations sur les bancs du groupe du RPR).

Il est clair que là, je ne défends pas les intérêts de ma région : je n'irai pas dire aux vignerons de Bourgogne qu'ils vont pouvoir signer un CTE, ce serait faux. Mais dans le même territoire, certains agriculteurs y auront droit.

C'est dans cet esprit de justice et d'efficacité économique que nous avons introduit, par cet amendement, quatre critères importants : le nombre d'actifs, le revenu global d'exploitation, la qualité environnementale, la prise en compte des territoires voisins.

M. Charles de Courson - Je sais que nos collègues de la majorité adorent les symboles et les mythes. Mais les mythes ont une limite, qui est le principe de réalité ! Nous légiférons non pas sur les aides européennes, mais sur les aides nationales. Quelles sont celles qui ne sont pas plafonnées ? Il n'y en a pas. Parler de plafonnement, c'est donc vous faire plaisir à bon compte, c'est tomber dans l'idéologie.

La DJA est modulée et plafonnée. Je vous défie de me citer une seule aide française qui ne le soit pas, auquel cas je retirerai le sous-amendement 217.

Un de nos collègues a dit : "Les gros polluent, les petits ne polluent pas". Ce n'est pas si simple. Il faut arrêter ces schémas à la française sur "les gros" et "les petits". Vous seriez d'ailleurs bien en peine de me dire quand on commence à être "un gros" !

M. le Rapporteur - La commission a repoussé le sous-amendement 217.

M. Christian Jacob - Je suis d'accord avec Charles de Courson : il n'y a pas d'aide nationale qui ne soit plafonnée. Vous avez cherché un pur effet d'affichage.

Vos réponses sur le financement des CTE, Monsieur le ministre, sont insuffisantes : la première année, vous prenez 300 millions de crédits sur plusieurs autres fonds que vous amputez ou supprimez. Mais les années suivantes, comment ferez-vous ? Vous augmenterez le taux de modulation !

Sur le plafonnement, arrêtez la distinction caricaturale entre les gros et les petits. Savez-vous où les primes sont les plus importantes ? Dans les régions intermédiaires comme la Lorraine ou la Charente, pas en Seine-et-Marne. Les grandes exploitations se situent dans des régions difficiles, où la seule possibilité pour les agriculteurs est d'entrer dans un système de production extensive. Qu'allez-vous dire aux agriculteurs de Côte-d'Or, Monsieur Patriat ?

Mme Béatrice Marre - Nous connaissons tous les chiffres : vous savez très bien que votre département, Monsieur Jacob, se situent, comme le mien, l'Oise, tout en haut du tableau des revenus bruts d'exploitation et je m'en félicite. Mais cela n'exclut pas qu'il y ait dans ces départements des agriculteurs ayant besoin d'aide, c'est le cas en particulier dans ma circonscription.

L'opposition nous dit que les aides sont déjà plafonnées et que ce n'est donc pas la peine de l'écrire. Mais d'autres aides peuvent être créées, par exemple pour les oléagineux, et elles auront vocation à être plafonnées. Ecrivons-le !

M. le Rapporteur - M. de Courson voudrait qu'il y ait moins de pauvres et plus de riches. Je suis d'accord. Pourtant, certains de ses amendements fiscaux donnent à penser qu'il est plus difficile de gérer l'opulence que la misère... (Sourires sur les bancs du groupe socialiste)

M. Jacob me demande ce que je vais répondre aux agriculteurs des régions intermédiaires. Mais je n'ai pas l'habitude de tenir des propos démagogiques et lorsque je parle avec un agriculteur des plateaux de la Côte d'Or qui exploite à lui tout seul 250 hectares, je ne lui dis pas qu'il faudrait qu'il reçoive toujours plus mais je lui fais observer que l'aide publique dont il bénéficie est fondée sur des quintaux historiques, ce qui est sans équivalent dans les autres professions. En revanche, un agriculteur qui fait de la culture en serre à Livron ne bénéficie aujourd'hui d'aucune aide européenne, alors qu'il crée des emplois et qu'il est confronté à une rude concurrence. N'est-il pas normal de chercher à rééquilibrer équitablement les aides dans le sens de la justice sociale, de l'emploi et de l'efficacité économique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste)

M. Charles de Courson - Parmi les secteurs agricoles qui marchent le mieux, il en est qui ne reçoivent aucune aide, les viticulteurs champenois par exemple, et je m'en félicite car c'est cela, l'autonomie et la dignité.

Monsieur le rapporteur, vous confondez efficacité économique et justice sociale.

M. le Rapporteur - Les deux peuvent aller de pair.

M. Charles de Courson - Mais ne sont pas une seule et même chose ! L'efficacité économique, c'est une agriculture dynamique capable de soutenir le choix de l'internationalisation des échanges. Il ne faut pas mettre le social avant l'économique, sauf à détruire l'activité économique, ruiner le pays et finalement aggraver les maux sociaux !

Par ailleurs, Monsieur le ministre, la capacité de polluer n'est pas fonction de la taille de l'exploitation. J'ai dans ma circonscription de gros agriculteurs qui ont adhéré à des plans de réduction de la pollution et des petits qui ne l'ont pas fait.

M. le Ministre - Notre débat sur les "gros" et les "petits" est très politique, au sens noble du terme. Mais je n'ai jamais dit, Monsieur Jacob, que tel département ne comptait que des gros exploitants et tel autre que des petits. Et je n'ai jamais dit non plus qu'à telle taille d'exploitation correspondait forcément tel niveau de revenu. Car je sais bien que dix hectares de vignobles d'un grand cru rapportent plus que 100 hectares de coteaux de céréales non irrigués.

Reste qu'il faut prendre en compte le fait qu'il y a d'un côté des grandes exploitations qui se battent à coups de millions pour conquérir des marchés à l'exportation -et je sais leur apport à notre balance commerciale-, de l'autre des petits qui se battent pour boucler leurs fins de mois.

M. François Sauvadet - Ce sont parfois les mêmes.

M. le Ministre - Non.

Il faut tenir compte de cette diversité et aider davantage ceux qui en ont le plus besoin : Si nous voulons enrayer l'exode rural, nous devons aider les petites exploitations à vivre, en particulier dans les zones défavorisées -montagne, par exemple. La réorientation des aides tente de concilier cet objectif avec l'efficacité économique. C'est, je crois, un beau projet.

M. Sauvadet me demande combien de CTE vont être signés. Je lui réponds : le plus possible. En précisant toutefois que le CTE ne doit pas être confondu avec un distributeur automatique mais emporte des engagements et des contraintes pluriannuels pour l'exploitant. Par conséquent, un tri s'opérera selon une logique de projet.

J'en reviens au sous-amendement 217. Je ne vois pas ce qu'il y a de choquant, Monsieur de Courson, à préciser que les aides liées aux CTE sont, comme les autres, plafonnées.

M. Christian Jacob - Vous ne m'avez pas répondu sur le financement à partir de la deuxième année.

M. le Ministre - Mais en année 2, on recommence tout simplement ! Avec, de nouveau, des crédits budgétaires et le produit de la modulation. On ne tombe pas dans un gouffre à la fin de l'année 1, rassurez-vous !

Le sous-amendement 217, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'amendement 9, mis aux voix, est adopté.

M. le Rapporteur - L'amendement 10 tend à supprimer les quatrième, cinquième et sixième alinéas du I de cet article, qui se réfèrent à "l'entreprise agricole". Vous allez dire, Monsieur Jacob, que je récite un catéchisme mais, pour moi, il y a d'un côté les exploitations agricoles, grosses ou petites, de l'autre les entreprises. Répéter "entreprise, entreprise, entreprise", comme naguère "Europe, Europe, Europe", peut faire plaisir mais ne sert à rien. A moins que vous ne vouliez, Messieurs, que les agriculteurs de Seine-et-Marne paient la taxe professionnelle et soient soumis aux mêmes impôts que des chefs d'entreprise. Mais alors dites-le ! En définissant clairement l'exploitation agricole et en lui accordant un régime fiscal spécifique mais non dérogatoire, je crois que nous sommes dans le juste et je vous invite donc à adopter cet amendement de la majorité plurielle et de la commission.

M. le Ministre - Avis favorable.

M. François Sauvadet - Vous dénaturez mon propos, Monsieur le rapporteur : en ce qui concerne la modulation, j'ai simplement insisté sur l'aspect économique des choses, notamment pour les régions intermédiaires et pour les producteurs d'oléoprotagineux. Quant à la diversité, nous souhaitons bien sûr qu'elle soit reconnue : ne l'ai-je pas dit dans ma question préalable ? Ne cherchons donc pas à nous diviser artificiellement. Pour autant, ce n'est pas en prenant aux uns pour donner aux autres qu'on réglera tous les problèmes. Certaines entreprises agricoles vivent difficilement et leur situation sera encore plus compromise avec ce plafonnement à 20 %.

M. Christian Jacob - Je ne comprends pas bien ce qui vous gêne dans les alinéas que vous voulez supprimer : seriez-vous contre la modernisation ? Contre la reconversion des entreprises "en vue d'améliorer leur viabilité" ? Contre "la création et le développement d'entreprises agricoles à responsabilité personnelle qui contribuent au développement local" ? Contre "la reconnaissance de l'exploitation agricole en tant qu'entreprise agricole" ?

Monsieur le rapporteur, vous invoquez la justice sociale à l'appui de considérations caricaturales sur la fiscalité agricole, mais trouvez-vous normal qu'une catégorie socio-professionnelle ait à payer des cotisations sociales sur des revenus réinvestis dans l'outil de production ? Vous menacez les agriculteurs de la taxe professionnelle en oubliant qu'ils paient la taxe sur le foncier non bâti, par exemple. Mais votre déclaration a eu le mérite d'éclairer l'Assemblée : vous refusez toute avancée en matière de cotisations sociales, en dépit du rapport prévu !

M. Charles de Courson - Je ne comprends pas non plus ce qui vous gêne : est-ce le mot "entreprise" ? Remplacez-le par "exploitation" !

M. le Rapporteur - Ces dispositions sont une incitation à l'agrandissement !

M. Charles de Courson - Cessez d'entrer dans l'avenir à reculons. Un seul d'entre vous peut-il, en me regardant dans les yeux, jurer qu'on peut techniquement stabiliser la taille des exploitations au cours des dix années qui viennent ? Non ! Nous sommes comme vous pour le contrôle des structures mais nous sommes aussi réalistes et nous disons ce que nous pensons -et que vous pensez d'ailleurs également ! Quant à ces trois alinéas, aucun ne prépare une poursuite de la concentration : acceptez donc ma proposition !

M. le Ministre - Il y a aussi le dernier alinéa...

M. Charles de Courson - Eh bien, supprimons-le ! Mais gardons les deux autres : depuis cinquante ans, que fait-on d'autre que d'essayer de préserver des exploitations viables et de moderniser ? Et même les communistes sont pour les exploitations à responsabilité personnelle -tant pis pour Lénine ! Je fais appel au bon sens du rapporteur...

Mme la Présidente - Je donnerai encore la parole à quelques orateurs, mais j'appelle chacun à la concision car il me semble que la discussion des articles n'avance guère.

M. Félix Leyzour - MM. Jacob et de Courson font semblant de ne pas comprendre de quoi il retourne, mais ils le savent parfaitement. L'article 4 définit deux objectifs prioritaires : l'installation des jeunes et l'adaptation du système d'exploitation aux exigences économiques, environnementales et sociales. En ajoutant le regroupement, on favorisera l'agrandissement des exploitations et on dénaturera le contrat territorial.

Monsieur de Courson, vous avez le don de toujours parler avec un peu de condescendance mais le bon sens que vous invoquez serait, dit-on, la chose la mieux partagée. En tout cas, je n'ai jamais vu personne avouer qu'il en manquait. Et ce bon sens nous commande de revenir au texte, tel qu'il était avant que le Sénat ne l'amende.

M. Joseph Parrenin - Le rapporteur avait limité son propos à la question des entreprises mais il y a d'autres choses qui font difficulté dans ces trois alinéas, notamment une volonté affirmée de toujours restructurer et agrandir ! Or les agriculteurs commencent à exiger des freins à la disparition des exploitations. Nous devons en manifester la volonté politique et la volonté personnelle !

Monsieur de Courson, je n'ai pas levé la main quand vous avez demandé si nous croyions à une stabilisation possible mais je suis prêt à vous fournir les relevés de MSA qui en font foi : mon exploitation, à dix ares près cédés pour la construction d'une route départementale, avait la même superficie -26 ha 60- quand je l'ai cédée en 1997 que lorsque je l'avais acquise en 1964 !

M. Christian Jacob - Vous n'êtes pas un cas isolé !

M. Patrick Ollier - On met en cause M. de Courson mais, derrière lui, c'est toute l'opposition qui essaie de bâtir avec le Gouvernement, la commission et la majorité, une loi efficace. Comment peut-on exclure des objectifs prioritaires la modernisation, pour s'en tenir à ce point ? C'est ce qui coûte le plus aux agriculteurs et les CTE pourraient l'oublier ? Ce ne serait pas réaliste et je soutiens donc la proposition de notre collègue visant à ne supprimer que le sixième alinéa. J'espère que le ministre saura se montrer conciliant sur ce point essentiel...

M. le Ministre - Je vous ferai simplement observer que le texte proposé par la commission parle d' "adaptation aux exigences économiques". Arrêtons cette mauvaise querelle : l'amendement va dans le bon sens, il faut l'adopter.

L'amendement 10, mis aux voix, est adopté.

M. Yves Cochet remplace Mme Catala au fauteuil présidentiel.

PRÉSIDENCE DE M. Yves COCHET

vice-président

M. le Rapporteur - L'amendement 11 tend à revenir au texte de l'Assemblée à propos de l'aide financière, à ceci près qu'il en prévoit l'interruption ou même le remboursement si les clauses du contrat territorial ne sont pas respectées.

M. le Ministre - Avis favorable.

M. Germain Gengenwin - Cet amendement dit le contraire de ce que défend le ministre. La version du Sénat était bien meilleure.

S'agissant du plafonnement, à quel niveau s'effectuera-t-il ? Selon quels critères ?

L'amendement 11, mis aux voix, est adopté.

L'article 4 modifié, mis aux voix, est adopté.

ART. 5

M. François Sauvadet -  Cet article traite de la commission départementale d'orientation de l'agriculture. Celle-ci donne son avis sur les contrats-types. Alors pourquoi avez-vous refusé qu'elle le fasse sur les CTE ? Vous dites que les CTE correspondent, non à une logique de guichet mais de projet, et pourtant vous laissez au seul préfet le soin d'apprécier les projets ! L'avis de la CDOA permettrait de prendre mieux en considération les conditions locales.

Sur la composition de la CDOA, nous ne partageons pas la position du Sénat. Il n'est pas question de faire de ce lieu de discussion technique un forum en élargissant excessivement sa composition.

M. le Ministre - Je n'ai pas la même conception que vous de l'Etat. Le préfet n'est pas un "nomade de luxe", mais le représentant de l'Etat républicain, porteur de l'intérêt général. Considérer que ses décisions sont des diktats impersonnels, c'est faire fi de cette tradition républicaine.

Cela dit, l'amendement 287 répond à un souci de prudence. Certes, la composition de la CDOA relève du pouvoir réglementaire, mais à partir du moment où le Sénat fait une longue énumération, il est opportun d'inscrire "notamment" afin de ne pas figer la situation.

M. le Rapporteur - Avis favorable.

L'amendement 287, mis aux voix, est adopté.

M. Charles de Courson - Les amendements 221 et 173 excluent de la CDOA les représentants du commerce indépendant de l'alimentation, des consommateurs, des associations pour l'environnement et, pour le 221, de l'artisanat. En quoi leur avis est-il intéressant vu les compétences actuelles des CDOA ? Du reste, cet article pourrait être censuré par le Conseil constitutionnel car la composition de la commission relève du domaine réglementaire.

M. le Rapporteur - Hier, M. Jacob considérait le texte du Sénat comme sa bible, à tel point que cela en devenait presque désobligeant pour notre assemblée !

Je pense que refuser d'associer distributeurs, artisans et consommateurs à la définition de la politique agricole, c'est se priver d'un soutien important. Si on fait participer les consommateurs à la CDOA, on évite de les avoir contre soi le jour où il faut réfuter des attaques mensongères portées contre une filière. Voyez le problème de la listéria. Je rappelle que la CDOA travaille par sections. Les consommateurs ne discuteront pas de l'attribution des terres, mais ils doivent être présents pour la définition de la politique agricole du département. Pour une fois que le Sénat fait du bon travail, acceptez-le !

M. le Ministre - Même avis.

M. Christian Jacob - Vous êtes décidément des fanatiques des commissions, des colloques, des groupes et des sous-groupes de travail ! Les CDOA comprendront 80 personnes. La commission départementale de l'urbanisme commercial en compte cinq ! Vous voulez rendre les CDOA ingérables pour donner le maximum de pouvoir au préfet.

La loi sur l'aménagement du territoire encourt le même reproche : chaque fois qu'un schéma devait être soumis à l'Assemblée nationale, on a préféré confier cette compétence à l'administration départementale ou régionale.

S'agissant de la CDOA, il faut s'en tenir à la présence des agriculteurs et des représentants de la DDA.

M. le Ministre - Je dois tout de même rappeler que cet amendement a été déposé par l'opposition !

Replaçons les choses dans leur contexte. A l'occasion de la première lecture, nous avons constaté dans nos circonscriptions que l'article 6 suscitait des inquiétudes dans le monde artisanal. Il a donc été modifié, et n'a, du coup, plus convenu aux professionnels. La suppression de cet article jointe à la modification de la composition des CDOA constitue un compromis équilibré trouvé par le Sénat. Ne le déséquilibrez pas.

M. Pierre Micaux - Je fais partie de l'opposition et j'entends y rester, mais, en l'occurrence, je soutiens le ministre. L'artisanat et le petit commerce doivent être présents chaque fois que possible pour participer à la lutte contre les distorsions de concurrence.

M. le Rapporteur - Très bien !

L'amendement 173, mis aux voix, n'est pas adopté, non plus que le 221.

M. Jean Proriol - L'amendement 186, que je défends au nom de Mme Bassot, rejoint tout à fait le 229 de M. Leyzour.

Il serait judicieux que la CDOA puisse donner un avis non seulement sur les projets de CTE proposés par les préfets ou les DDA mais aussi sur ceux émanant de l'initiative des agriculteurs eux-mêmes.

M. Félix Leyzour - Mon amendement 229 a en effet le même objet que le 186. Il me paraît opportun de pouvoir tenir compte de situations particulières. Même si le contrat-type demeure la règle, il ne faut pas exclure a priori les projets proposés par les exploitants. Afin de lever toute ambiguïté, je propose de rectifier mon amendement et d'écrire "des projets" plutôt que "les projets de contrats proposés par les exploitants".

M. le Président - L'amendement 229 est donc rectifié en remplaçant "les" par "des".

M. le Rapporteur - Avis défavorable à ces deux amendements. La demande de M. Leyzour est déjà satisfaite puisque la définition même du CTE prévoit qu'il peut exister des contrats particuliers. Les deux tiers des CTE seront d'ailleurs des variantes du contrat-type.

M. le Ministre - Avis défavorable également.

L'amendement 186 et l'amendement 229 rectifié, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.

M. le Rapporteur - Mon amendement 254 a pour objet de préciser que les filières agricoles les plus représentatives dans un département sont de facto représentées à la CDOA. Les viticulteurs de Champagne ne sont pas syndiqués, non plus que les producteurs de fruits et légumes du Sud ou de la Bretagne. Serait-il envisageable qu'ils n'aient pas de représentant à la CDOA des départements concernés, alors même que leur filière y occupe le plus grand nombre d'emplois agricoles et y crée la plus forte valeur ajoutée ? Je ne le pense pas. Cela étant, la commission ne m'ayant pas suivi, je m'en remets à la sagesse de l'Assemblée.

M. le Ministre - Je comprends le souci du rapporteur mais cette question n'a pas sa place dans la loi. Je peux m'engager à ce que les décrets d'application prennent en compte cette préoccupation mais je ne souhaite pas introduire une disposition aussi rigide dans la loi. Mieux vaudrait retirer cet amendement.

L'amendement 254 est retiré.

L'article 5 modifié, mis aux voix, est adopté.

AVANT L'ART. 6 A

M. le Rapporteur - L'amendement 12 tend à intituler le titre II : "Exploitations et personnes".

L'amendement 13 est de conséquence, visant à substituer dans l'intitulé du chapitre Ier le mot "exploitation" au mot "entreprise".

Les amendements 12 et 13, acceptés par le Gouvernement, mis aux voix, sont adoptés.

ART. 6 A

M. le Rapporteur - Les amendements 14, 15, 16 et 17 tendent à supprimer les articles 6 A, 6 B, 6 C et 6 D introduits par le Sénat. La commission a préféré en effet que les adaptations fiscales et sociales -nécessaires, Monsieur de Courson, j'en conviens- fassent l'objet d'une réflexion globale à la suite du rapport prévu à l'article 65 du projet.

S'agissant de l'amendement 14 plus précisément, il tend à supprimer la disposition introduite par le Sénat étendant le champ des charges déductibles du bénéfice imposable.

M. le Ministre - Avis favorable à ces amendements.

M. Charles de Courson - Nous avons déposé ici en première lecture les mêmes amendements que ceux adoptés par le Sénat. Toutes les personnes de bon sens conviennent en effet de la nécessité d'agir pour faciliter la transmission des exploitations. Est-il normal par exemple que la rémunération des parts conservées par un exploitant pour faciliter l'installation de son successeur ne soient pas déductibles du bénéfice imposable de ce dernier alors que s'il avait emprunté pour acheter la totalité des parts, ses charges d'emprunt seraient déductibles ? Non. C'est pourquoi il conviendrait de conserver l'article 6 A introduit par le Sénat et donc de rejeter l'amendement 14.

On nous renvoie toujours à plus tard. C'est l'habitude de tous les gouvernements, de celui-ci plus encore que de ses prédécesseurs. Mais qu'est-ce qu'une loi d'orientation agricole sans volet ni fiscal ni social ?

L'amendement 14, mis aux voix, est adopté et l'article 6A est supprimé..

ART. 6 B

M. le Rapporteur - Je me suis déjà expliqué.

M. Charles de Courson - Chacun s'accorde à reconnaître le caractère anormal, fatal d'ailleurs aux exploitations, du cumul en cas de liquidation de la taxation des plus-values et des droits de succession. Je proposais donc d'exonérer à hauteur de 75 % le membre de la famille qui reprend une exploitation de taxation sur les plus-values, avec un plafond, étant entendu que s'il cède l'exploitation reprise avant dix ans, il devra rembourser l'avantage fiscal consenti. Cette exonération serait de 50 % lorsque la transmission s'effectue au profit d'un jeune non membre de la famille.

Si nous souhaitons défendre les exploitations familiales, ces aménagements sont indispensables. Je vous demande donc de voter contre ces amendements de suppression des articles 6B, 6C et 6D.

M. Patrick Ollier - L'article 65 du projet prévoit que le Gouvernement présentera, avant le 1er avril 2000, un rapport sur les adaptations fiscales et sociales nécessaires. Celles-ci sont urgentes. Peut-on perdre deux ans de plus ? Le Gouvernement s'engage-t-il à ce que des dispositions soient effectivement prises d'ici à avril 2000, afin d'être à coup sûr traduites dans la loi de finances pour 2001 ?

M. le Ministre - La commission a décidé d'une méthode, il faut s'y tenir et je soutiens donc les amendements de suppression. On ne peut en effet réformer ainsi la fiscalité au coup par coup, même si M. de Courson a raison sur certains points. Dès que le rapport prévu aura été remis, le volet fiscal suivra, je l'espère dès la loi de finances 2001. Pour être certain que les délais soient respectés, je veillerai même à ce que ce rapport soit confié à un parlementaire.

L'amendement 15, mis aux voix, est adopté et l'article 6 B est ainsi supprimé.

L'amendement 16, mis aux voix, est adopté et l'article 6 C est ainsi supprimé.

L'amendement 17, mis aux voix, est adopté et l'article 6 D est ainsi supprimé.

ART. 6

M. Patrick Ollier - L'amendement 250 est défendu.

M. Félix Leyzour - Notre amendement 231 vise à revenir à la rédaction équilibrée adoptée en première lecture, qui avait été acceptée par tous, notamment par les artisans.

M. le Rapporteur - Avis défavorable. La rédaction retenue en première lecture était trop restrictive car elle écartait l'agrotourisme et risquait de se retourner contre les artisans.

M. Charles de Courson - Absolument.

M. le Rapporteur - J'aurai la même position sur l'article 7 bis.

M. le Ministre - Même avis.

Les amendements 161, 231, 250, mis aux voix, ne sont pas adoptés.

L'article 6 demeure supprimé.

ART. 7

M. Charles de Courson - Il existe déjà un fichier très large tenu par la MSA et un autre, des DDA. Par quel manque de rigueur nous propose-t-on d'en créer un nouveau, géré par les chambres d'agriculture ?

M. le Rapporteur - Elles le demandent !

M. Charles de Courson - Est-ce une raison pour l'accepter ? Assumons nos responsabilités de parlementaires !

Cette création n'est pas raisonnable d'autant qu'on voit mal le ministre quémander auprès de son collègue des finances une augmentation du budget des chambres d'agriculture et qu'elle se traduise donc par une hausse de la taxe pour frais de chambre d'agriculture.

Ce fichier n'apportera rien car il sera de moins bonne qualité que celui de la MSA. Nous ferions mieux d'ouvrir l'accès au fichier MSA.

Pour toutes ces raisons je propose, par l'amendement 222, de supprimer cet article.

M. le Rapporteur - Défavorable.

M. Charles de Courson - Pourquoi ?

M. le Ministre - Je peux comprendre les arguments de M. de Courson, mais c'est la loi Nallet qui a créé ce fichier. C'est dans le souci de préserver l'équilibre entre artisanat et agriculture que nous le rendons effectif. Je souhaite donc le rejet de l'amendement.

M. Germain Gengenwin - C'est en effet la loi Nallet qui a créé ce fichier, mais il n'a jamais vu le jour car les organisations professionnelles n'en ont jamais ressenti le besoin. Comment sera-t-il financé ?

L'amendement 222, mis aux voix, n'est pas adopté.

L'article 7, mis aux voix, est adopté.

ART. 7 bis

M. le Rapporteur - J'ai déjà défendu l'amendement 18, de suppression.

L'amendement 18, accepté par le Gouvernement, mis aux voix, est adopté et l'article 7 bis est ainsi supprimé.

ART. 7 ter

M. le Rapporteur - L'amendement 19 tend à supprimer cet article car on voit mal l'utilité de la définition qu'il comporte. Surtout, il permet la cessibilité des références de production en tant qu'éléments constitutifs de l'exploitation. Or, nous refusons tout marché des droits à produire.

M. le Ministre - Favorable.

L'amendement 19, mis aux voix, est adopté et l'article 7 ter est ainsi supprimé.

ART. 7 quater

M. Charles de Courson - En vertu d'un décret du ministre de l'équipement, un permis poids lourds est désormais nécessaire pour déneiger une route. Mais où va la France ? (Sourires) Sait-on comment les choses se passent sur le terrain ? Avec ce décret, les routes vont être déneigées plus tard et à un coût supérieur pour les collectivités.

A force d'imposer des normes, les gens vont renoncer à faire quoi que ce soit...

Nous ne pouvons laisser passer cela ! C'est pourquoi, tout en sachant fort bien que cela relève du domaine réglementaire, j'ai déposé l'amendement 223 rectifié, afin de mettre un terme à une aberration.

M. le Rapporteur - Nous allons déneiger... L'amendement de M. de Courson permet de légaliser une pratique utile à la société et qui ne met pas en péril la vie des gens. Avis favorable.

M. le Ministre - M. de Courson lave plus blanc que blanc dès qu'il s'agit de "débureaucratiser".

Il voit ici dans un décret du ministre des transports l'expression de la bureaucratie envahissante et irresponsable. Mais les choses ne sont pas si simples.

En effet, le déneigement effectué par des tracteurs est à l'origine d'accidents qui ne sont couverts ni par le code de la route ni par les assurances et qui donnent lieu à un contentieux important.

Je prends l'engagement de régler cette affaire par un décret commun avec le ministre de l'équipement et vous demande de retirer l'amendement.

M. Germain Gengenwin - Cet amendement est tout à fait justifié. Ayez un peu de charité pour les maires des communes de France : quel maire n'a pas déjà confié un tracteur à un employé municipal pour déneiger les routes ou arroser les fleurs ? A-t-il toujours le permis de conduire "poids lourds" ?

M. Patrick Ollier - Ma commune est à 1 500 mètres d'altitude et elle est enneigée six mois par an. Je ne suis pas sûr que l'amendement 223 rectifié. règle le problème et l'argumentation du ministre traite de vraies questions. Je serais donc d'accord avec votre proposition, Monsieur le ministre, à condition que vous vous engagiez à prendre ce décret avant les premières neiges de l'hiver prochain, donc d'ici octobre.

M. le Ministre - Je m'y engage.

M. Charles de Courson - Votre collègue de l'équipement est-il d'accord pour prendre un décret commun ? Si oui, je retire mon amendement. Dans la négative, je le maintiens car je sais trop bien comment les choses se passent dans l'administration.

M. le Ministre - Monsieur de Courson, vous avez fait une grande école où on apprend le droit public et vous savez très bien que quand un ministre s'exprime dans l'hémicycle, il parle au nom du Gouvernement.

M. Charles de Courson - Je retire l'amendement, mais nous vous attendons aux premières neiges !

L'article 7 quater, mis aux voix, est adopté.

M. le Président - A la demande du Gouvernement, je vais lever la séance.

La suite du débat est renvoyée à la prochaine séance, qui aura lieu cet après-midi à 15 heures.

La séance est levée à 12 heures 20.

          Le Directeur du service
          des comptes rendus analytiques,

          Jacques BOUFFIER


© Assemblée nationale


© Assemblée nationale