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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE

DE

M.

FRANÇOIS D'AUBERT

1. Conseil supérieur de la magistrature. - Discussion, en deuxième lecture, d'un projet de loi constitutionnelle (p. 5994).

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

M. Jacques Floch, rapporteur de la commission des lois.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 5997)

MM. Philippe Houillon, Louis Mermaz, Pierre Albertini, Pascal Clément, Jean-Luc Warsmann.

Clôture de la discussion générale.

DISCUSSION

DES ARTICLES (p. 6002)

Article 1er A. - Adoption (p. 6002)

Article 1er (p. 6002)

Amendement no 1 de la commission des lois : M. le rapporteur, Mme la garde des sceaux. - Adoption.

Amendement no 2 de la commission : M. le rapporteur,

Mme la garde des sceaux. - Adoption.

Adoption de l'article 1er modifié.

Article 2 (p. 6003)

Amendement no 3 de la commission : M. le rapporteur,

Mme la garde des sceaux. - Adoption.

Adoption de l'article 2 modifié.

VOTE

SUR L'ENSEMBLE (p. 6003)

Adoption de l'ensemble du projet de loi constitutionnelle.

Suspension et reprise de la séance (p. 6003)

2. Loi d'orientation agricole. - Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi (p. 6003).

DISCUSSION

DES ARTICLES (suite) (p. 6003)

Article 2 (suite) (p. 6004)

M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche.

A mendement de suppression no 299 de M. Jacob : MM. Christian Jacob, François Patriat, rapporteur de la commission de la production ; le ministre. - Rejet.

Amendements nos 447 de M. Micaux, 303 de M. Jacob et 858 de M. Bouvard : MM. Roger Lestas, Christian Jacob, Serge Poignant, le rapporteur, le ministre, JeanClaude Lemoine. - Rejets.

Amendement no 747 de M. Sauvadet : MM. François Sauvadet, le rapporteur, le ministre, Christian Jacob. Rejet.

Amendements nos 646 de M. Proriol et 14 de M. Rebillard : MM. Jean Proriol, Jacques Rebillard, le rapporteur, le ministre, François Sauvadet. - Rejet de l'amendement no 646.

M. Jacques Rebillard. - Retrait de l'amendement no

14.

M. Jean Proriol.

Amendement no 300 de M. Guillaume : MM. François Guillaume, le rapporteur, le ministre, Jean Auclair. Adoption.

L'amendement no 15 de M. Rebillard n'a plus d'objet.

Amendements identiques nos 77 de la commission de la production et 549 de M. Adevah-Poeuf : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Amendement no 735 corrigé de M. Marchand : Mme MarieHélène Aubert, MM. le rapporteur, le ministre, Christian Jacob. - Rejet.

Amendement no 832 de M. Leyzour : M. Félix Leyzour. Retrait.

Amendement no 734 corrigé de M. Marchand : Mme MarieHélène Aubert, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendements nos 36 de M. Poignant, 78 corrigé de la c ommission, avec les sous-amendements no 516 de M. Sauvadet et 953 du Gouvernement, et amendements identiques nos 5 de M. Robert Lamy, 229 de M. Estrosi et 239 de M. Micaux : MM. Serge Poignant, le rapporteur, Robert Lamy, Christian Estrosi, Roger Lestas, le ministre, François Sauvadet, Christian Jacob. - Adoption de l'amendement no 36 ; le sous-amendement no 516 et l'amendement no 78 corrigé n'ont plus d'objet, non plus que les amendements identiques.

Amendements identiques nos 301 de M. Guillaume et 509 de M. Sauvadet : MM. François Guillaume, Germain Gengenwin, le rapporteur, le ministre, François Sauvadet, Michel Bouvard, Serge Poignant. - Rejet.

A mendement no 17 de M. Rebillard : M. Jacques Rebillard. - Retrait.

Amendement no 79, deuxième rectification, de la commission : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

A mendement no 269 de M. Patriarche : MM. Paul Patriarche, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendements identiques nos 4 de M. Robert Lamy, 40 corrigé de M. Jacob, 230 de M. Estrosi, 240 de M. Micaux et 302 de M. Mignon, et amendements nos 503 de M. Gérard Voisin, 748 et 510 de M. Sauvadet : MM. Robert Lamy, Christian Jacob, Christian Estrosi, Roger Lestas, Gérard Voisin, François Sauvadet, Germain Gengenwin, le rapporteur, le ministre. - Rejets.

Amendements identiques nos 55 de M. Ollier, 282 de M. Bouvard, 305 de M. Jacob, 468 corrigé de M. Estrosi, 490 de M. Briane, 760 de M. Charroppin et 647 de M. Proriol : MM. Michel Bouvard, Christian Jacob, Christian Estrosi, François Sauvadet, Jean Charropin, Jean Proriol, le rapporteur, le ministre, Maurice AdevahPoeuf. - Rejet.

Suspension et reprise de la séance (p. 6020)

Amendement no 304 de M. Jacob : MM. Christian Jacob, le rapporteur, le ministre. - Adoption.

A mendements nos 241 de M. Micaux et 512 de M. Sauvadet : MM. Roger Lestas, Germain Gengenwin, le rapporteur, le ministre. - Rejets.

Amendement no 511 de M. Sauvadet : MM. Germain Gengenwin, le rapporteur, le ministre. - Rejet.


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Amendements nos 12 de M. Patriarche et 306 à 309 de M. Mariani : MM. Paul Patriarche, Christian Jacob, Michel Bouvard, Jean-Claude Lemoine, le rapporteur, le ministre, Jean Auclair. - Rejets.

Amendement no 513 de M. Sauvadet : MM. Jacques Le Nay, le rapporteur, le ministre, Germain Gengenwin, Christian Jacob. - Rejet.

Amendement no 736 corrigé de M. Marchand : Mme MarieHélène Aubert, MM. le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 514 de M. Sauvadet : MM. Jacques Le Nay, le rapporteur, le ministre, Germain Gengenwin. - Retrait.

Amendement no 471 de M. Ollier, amendements identiques nos 467 de M. Estrosi, 491 de M. Briane, 763 de M. Cha-r oppin, 817 corrigé de M. Bonrepaux, 857 de M. Bouvard, et amendement no 649 de M. Proriol : MM. Michel Bouvard, François Sauvadet, Jean Proriol, le rapporteur, le ministre. - Rejets.

Amendement no 16 corrigé de M. Rebillard : MM. Jacques R ebillard, le rapporteur, le ministre, Jean-Claude Lemoine. - Retrait.

Amendement no 762 de M. Baroin : MM. Michel Bouvard, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 833 de M. Leyzour : MM. Félix Leyzour, le rapporteur, le ministre, Jacques Rebillard. - Adoption.

Amendements nos 515 de M. Sauvadet et 648 de M. Proriol : MM. François Sauvadet, Jean Proriol, le rapporteur, le m inistre, Christian Jacob, Maurice Adevah-Poeuf. Rejets.

A mendement no 750 de M. Barrot : MM. François Sauvadet, le rapporteur, le ministre. - Rejet.

Amendement no 80 rectifié de la commission, avec les sousamendements nos 846 de M. Leyzour, 741 corrigé de M. Marchand et 937 de M. Sauvadet : MM. le rapporteur, le ministre, Félix Leyzour. - Retrait du sousamendement no 846.

Mme Marie-Hélène Aubert, MM. Jacques Le Nay, le rapporteur, le ministre, François Sauvadet, Jean-Claude Lemoine. - Adoption du sous-amendement no 741 corrigé ; rejet du sous-amendement no 937 ; adoption de l'amendement no 80 rectifié et modifié.

Adoption de l'article 2 modifié.

Article 3 (p. 6028)

Mme Béatrice Marre, MM. Jean-Claude Sandrier, François Sauvadet.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

3. Dépôt d'un rapport d'information (p. 6030).

4. Ordre du jour des prochaines séances (p. 6030).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. FRANÇOIS D'AUBERT,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt et une heures.)

1

CONSEIL SUPÉRIEUR DE LA MAGISTRATURE Discussion, en deuxième lecture, d'un projet de loi constitutionnelle

M. le président.

L'ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, du projet de loi constitutionnelle relatif au Conseil supérieur de la magistrature (nos 1017 et 1104).

La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, les 2 et 3 juin derniers votre assemblée a examiné en première lecture et adopté sans modification le projet de loi constitutionnelle relatif au Conseil supérieur de la magistrature, qui est l'un des éléments clés de la réforme de la justice que j'ai engagée.

Permettez-moi de vous rappeler que cette réforme comporte trois volets : Le premier concerne l'amélioration du fonctionnement de la justice au quotidien. C'est la plus urgente et la plus attendue des réformes. A ce titre, le projet de loi sur la simplification et l'efficacité de la procédure pénale a déjà été voté en première lecture par le Sénat. Quant au projet de loi sur l'accès au droit, il a été adopté par votre assemblée en première lecture.

Le deuxième volet est destiné à mieux garantir les libertés de nos concitoyens. Le projet de loi renforçant la protection de la présomption d'innocence et - ne l'oublions pas - des droits des victimes a été adopté par le c onseil des ministres et transmis au Parlement. Il comprend les dispositions nécessaires à la sauvegarde de la présomption d'innocence et à la protection des droits de la défense, notamment par l'instauration d'un juge de la détention provisoire et par une limitation des cas où celle-ci peut être ordonnée. Il comprend également des dispositions permettant d'ouvrir des fenêtres de publicité au cours de la procédure d'instruction, de façon que les intéressés puissent se défendre contre les charges qui pèsent sur eux. Il comprend enfin des dispositions visant à interdire les images pouvant porter atteinte à la dignité des personnes menottées, et à protéger les victimes majeures ou mineures.

Enfin, le troisième volet de la réforme a pour objet d'assurer une justice indépendante et impartiale. C'est de ce troisième volet que le projet de loi constitutionnelle est la clé de voûte.

Je l'avais dit devant vous en première lecture et je le redis aujourd'hui : le soupçon d'intervention des politiques dans les procédures judiciaires compromet gravement la confiance que tout citoyen doit avoir dans notre justice. Pour restaurer cette confiance, il est indispensable de clarifier les rapports entre la justice et le pouvoir politique - notamment le pouvoir exécutif - et d'interdire désormais toute intervention du pouvoir politique dans les affaires particulières.

Cette orientation constituait l'une des priorités fixées par le Premier ministre dans sa déclaration de politique générale du 19 juin 1997. Telle a été ma pratique depuis quinze mois. Cette pratique, encore faut-il l'inscrire dans la loi. C'est l'objet du projet de loi sur les rapports entre la chancellerie et le parquet qui a été transmis au Parlement après délibération en conseil des ministres.

Mais dès lors que les parquets ne recevront plus d'instructions, il faut garantir leur indépendance dans leur carrière et leur nomination. Tel est précisément l'objet du projet de loi constitutionnelle que nous examinons à nouveau ce soir. Aucune nomination ne pourra se faire désormais dans les parquets sans accord formel du Conseil supérieur de la magistrature, aussi bien pour les procureurs de la République que pour les procureurs généraux, qui sont, vous le savez, les chefs des parquets dans les cours d'appel. Le pouvoir disciplinaire appartiendra au Conseil supérieur de la magistrature.

En contrepartie de ce pouvoir accru dans la nomination des magistrats et l'exercice du pouvoir disciplinaire, il était nécessaire de modifier la composition du Conseil supérieur de la magistrature pour qu'il reflète plus largement la société dans sa diversité et non pas seulement les préoccupations des magistrats.

La réforme constitutionnelle a donc pour objet d'assurer une justice indépendante et impartiale en clarifiant les rapports entre justice et pouvoir politique. Elle s'articule autour de trois axes : Renforcer les garanties statutaires des magistrats du parquet, en matière de nomination comme de discipline ; Elargir la composition du Conseil supérieur de la magistrature en évitant à la fois la politisation et le corporatisme ; Affirmer l'unité de la magistrature. Le projet de loi la consacre. Il est vrai que les modalités par lesquelles cette unité s'exprime peuvent être discutées. Mais à l'issue d'un débat particulièrement riche, votre assemblée, en adoptant le texte du Gouvernement, a marqué son approbation de cet objectif et de ses modalités. Je vous en remercie.

Le Sénat, lors de l'examen du texte en première lecture, a accepté l'économie générale de la réforme.

Il a notamment retenu l'avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature sur les nominations des magistrats du parquet, mais en prévoyant une exception pour les procureurs généraux sur laquelle je reviendrai dans un instant.

Il a accepté l'extension des garanties disciplinaires aux magistrats du parquet.


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Il a enfin validé l'idée selon laquelle la composition du Conseil supérieur de la magistrature devait réserver une majorité aux non-magistrats.

Le Sénat a par ailleurs amendé le texte de loi constitutionnelle. Certains de ces amendements ne remettent pas en cause la cohérence de la réforme ; l'un d'entre eux, en revanche, bouleverse le nouvel équilibre recherché.

Quels sont les amendements qui, aux yeux du Gouvernement, ne remettent pas en cause l'économie générale du texte ? L'une des principales modifications introduites par le Sénat porte sur le maintien de deux formations distinctes du Conseil supérieur de la magistrature, compétentes l'une à l'égard des magistrats du siège, l'autre à l'égard des magistrats du parquet, ces deux formations étant complétées par une formation plénière compétente pourr épondre aux demandes d'avis du Président de la République.

Le projet du Gouvernement que vous avez voté retenait une autre orientation : instituer une formation unique, justement pour traduire, y compris au sein du Conseil, l'unité de la magistrature et l'harmonisation des garanties statutaires des magistrats du siège et du parquet.

Je tiens à réaffirmer, une fois encore, le principe de l'unité du corps judiciaire, qui est essentiel au regard des libertés publiques : les magistrats du parquet, comme ceux du siège, participent au contrôle du respect des libertés individuelles et des droits de l'homme.

Je suis toutefois sensible à l'opinion exprimée à plusieurs reprises au cours des débats, selon laquelle les magistrats du parquet exercent des missions d'une nature distincte de celles du siège, et dans un cadre différent puisqu'il est hiérarchisé.

C'est la raison pour laquelle, suivant en cela l'avis de votre commission des lois - que je tiens à remercier à nouveau, et en particulier sa présidente - le Gouvernement n'est pas opposé au maintien de deux formations au sein du Conseil supérieur, dès lors que juges et parquetiers bénéficieront de garanties comparables et que l'institution d'une formation plénière pour répondre aux demandes d'avis du Président de la République marquera nettement l'unité du corps.

D'autres modifications apportées par le Sénat et approuvées par votre commission me paraissent également pouvoir être retenues.

Il s'agit en premier lieu du mode de désignation des personnalités extérieures et de leur régime d'incompatibilité. Le Sénat a notamment souhaité que le vice-président du Conseil d'Etat, le premier président de la Cour des comptes et le premier président de la Cour de cassation désignent conjointement quatre personnalités au lieu de deux, estimant que le président du Conseil économique et social n'avait pas à nommer deux personnalités.

I l s'agit en second lieu de la consécration par l'article 19 de la Constitution de la pratique d'absence de contreseing pour la désignation de personnalités extérieures par le Président de la République. Ce n'est là que la codification d'une pratique qui aligne la nomination de membres du CSM par le Président de la République sur la nomination de membres du Conseil constitutionnel à laquelle il procède.

Sur deux points, en revanche, votre commission des lois a adopté une position différente de celle du Sénat et que le Gouvernement approuve.

En premier lieu, le Sénat avait souhaité préciser, dans l'article 65 de la Constitution, que le pouvoir de proposition du Conseil supérieur de la magistrature s'étend aux présidents des tribunaux de première instance et des tribunaux supérieurs d'appel. Une telle précision n'apparaît pas nécessaire, dans la mesure où les présidents de ces juridictions sont déjà nommés sur proposition du Conseil supérieur de la magistrature, conformément à une pratique constitutionnelle constante.

En second lieu, et j'en arrive au seul point, mais essentiel, qui motive mon désaccord avec le Sénat, le texte qu'il a adopté exclut du champ de l'avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature les procureurs généraux, qui devraient, éventuellement sur avis simple du C onseil, continuer à être nommés en conseil des ministres. Je rappelle qu'aujourd'hui le CSM n'est même pas appelé à donner son avis.

Le Gouvernement, comme votre commission des lois, ne peut être favorable à cette disposition qui rompt la cohérence de la réforme. L'exigence d'un avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature pour la nomination de tous les magistrats du parquet, sans exception, est en effet seule de nature à écarter le soupçon d'intervention de l'exécutif dans les affaires particulières. Exclure de l'avis conforme les procureurs généraux serait la plus claire manifestation qu'ils demeurent soumis au pouvoir exécutif.

Avec cette disposition, nous sommes au coeur du débat. Je considère que les chefs de parquet doivent bénéficier des mêmes garanties que tous les autres magistrats du parquet. En effet, il serait paradoxal que les procureurs bénéficient de garanties de nomination liées à l'avis conforme du CSM - ce que le Sénat a accepté mais que les procureurs généraux, qui ont la charge de conduire l'action publique et qui sont leurs supérieurs hiérarchiques, en soient exclus.

Paradoxe d'autant plus grand que le Gouvernement a l'intention de renforcer l'autorité hiérarchique des procureurs généraux sur les magistrats du ministère public de leur ressort. Le procureur général sera en effet chargé d'assurer la coordination de la mise en oeuvre par chaque procureur des orientations générales de politique pénale, de façon que les citoyens soient traités à égalité sur l'ensemble du territoire de la République. Je n'imagine pas que les procureurs aient des garanties d'indépendance renforcées alors que, dans le même temps, leurs chefs, qui ne bénéficieraient pas de ces garanties, verraient leur pouvoir hiérarchique accru.

Accepter un tel amendement, ce serait d'abord renforcer la mainmise du pouvoir politique sur les magistrats du parquet, alors que l'objectif de la réforme est précisément d'écarter tout soupçon d'intervention dans les affaires individuelles. D'ailleurs, la commission présidée par le premier président Truche avait à cet égard estimé ne pas devoir « faire une place à part aux procureurs généraux, le rôle plus important qu'elle [souhaitait] leur voir tenir devant avoir pour conséquence des garanties de nomination ».

Dès lors que le Gouvernement souhaite renforcer le rôle des procureurs généraux dans l'application des directives de politique pénale générale, il est essentiel que leur garanties soient identiques à celles des autres magistrats du parquet, si l'on ne veut pas jeter la suspicion sur les raisons qui guident l'action publique.

Le système que je propose, et qui a été retenu par votre commission, est de nature à promouvoir une coopération satisfaisante entre le pouvoir politique et l'organe constitutionnellement indépendant chargé d'assister le Président de la République dans sa mission d'assurer l'indépendance de la magistrature.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

En effet il y a, d'un côté, le pouvoir de proposition de nomination de tous les magistrats du parquet, qui appartient au garde des sceaux ; de l'autre, l'avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature sur ces nominations.

Les deux sont obligés de collaborer et de trouver un accord sur la nomination des magistrats du parquet, et aucun ne peut l'emporter sur l'autre.

Je crois que l'équilibre auquel les deux assemblées sont parvenues est bon. En proposant cette réforme constitutionnelle, je m'étais fixé l'objectif de rétablir la confiance des citoyens dans l'indépendance de la justice. D'une certaine façon, cette réforme ne fait que codifier une pratique qui a été la mienne depuis quinze mois et qui fait ses preuves au fil du temps qui passe. La politique pénale a été menée par le Gouvernement sans obstacle et il me semble que les citoyens reprennent confiance dans l'indépendance de la justice de leur pays.

Je suis heureuse que le Sénat ait accepté les grandes orientations de la réforme constitutionnelle que je vous propose et je me félicite des remarquables travaux des deux commissions des lois.

Je pense également que les modifications apportées par le Sénat sont de nature à améliorer le texte de l'article 65 de la Constitution.

Toutefois, il ne me semble pas possible de se rallier à sa proposition qui tend à maintenir la nomination des procureurs généraux en conseil des ministres. Cette proposition ne constitue pas seulement un amendement au texte. En fait elle le bouleverse et revient à refuser le troisième volet de la réforme, qui vise à une justice impartiale et égale pour tous.

C'est pourquoi, suivant en cela votre commission des lois, sa présidente et son rapporteur que je remercie encore pour leur travail, je vous demande de rétablir la disposition qui permet de nommer tous les magistrats du parquet en France sur avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

M. Jacques Floch, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, « L'Assemblée nationale ménage le Sénat au sujet de la réforme du Conseil supérieur de la magistrature » titre Le Monde dans un entrefilet relatant les travaux de la commission des lois de la semaine dernière.

M. Pierre Albertini.

Si ce n'est qu'un entrefilet, ce n'est pas grave !

M. Jacques Floch, rapporteur.

C'est un peu court, mais cela correspond aussi à une certaine réalité, car, en tant que rapporteur et après avoir suivi, puis lu avec grand intérêt les débats du Sénat, j'ai cru utile de faire miennes les propositions sénatoriales sauf une qui concerne la nomination des procureurs généraux. En effet, comme vous l'avez dit, madame la garde des sceaux, accepter cet amendement du Sénat serait remettre en cause la cohérence de l'ensemble de la réforme. Je m'en expliquerai dans quelques instants.

Auparavant, je veux revenir sur plusieurs critiques ou affirmations entendues lors de la réunion de la commission des lois.

D'abord ce texte viendrait trop tôt, et il aurait fallu débattre d'abord du statut des magistrats et des autres textes que vous nous proposez, madame la garde des sceaux, pour réformer la justice.

Une simple lecture de notre Constitution et une meilleure connaissance des procédures législatives, mais aussi un grand souci de politique cohérente me permettent de ne pas accepter cette remarque.

La loi, en France, c'est d'abord la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, le préambule de la Constitution de 1946, la Constitution de 1958, les lois constitutionnelles qui réforment la Constitution, les lois organiques qui permettent la bonne application des articles de la Constitution, les lois ordinaires.

De plus, le Conseil d'Etat, avec sagesse, refuse d'examiner les projets de loi organique tant que la loi constitutionnelle n'est pas débattue et adoptée. Cela correspond au simple ordre des choses. En effet, si les membres du Conseil d'Etat ne font pas la loi, ils examinent, si je puis dire, son bon droit. Pour cela ils veulent connaître les intentions du législateur, vos intentions.

Une deuxième remarque me paraît d'importance, selon laquelle la garantie de l'indépendance de la magistrature serait liée à la procédure de nomination des magistrats qu'ils soient du siège ou du parquet.

Suspecter ainsi, un tant soit peu, les magistrats quels qu'ils soient d'exercer leurs fonctions en tenant compte essentiellement du pouvoir de nomination, c'est leur faire une injure, dont je m'étonne qu'elle n'étonne pas grand monde, y compris parfois au sein de la magistrature ellemême.

Très heureusement, notre Constitution précise deux p rincipes qu'il faut rappeler : le Président de la République est le garant de l'indépendance de l'autorité judiciaire ; la légitimité de la magistrature procède, elle, de la garantie qu'elle accorde, de par ses fonctions, à tous les citoyens en matière de libertés individuelles.

Par ailleurs, notre système pénal, notre code de procédure pénale, pour ne parler que d'eux, montrent l'étendue des pouvoirs des procureurs et procureurs généraux tant dans les fonctions accusatoires que dans leurs missions quasi juridictionnelles. Ce simple rappel montre bien qu'il faut qu'ils échappent au soupçon permanent d'être par trop dévoués au pouvoir politique quel qu'il soit.

La troisième remarque est la crainte de voir cette notion d'indépendance faire fi de la hiérarchie, hiérarchie qu'il vous faudra préciser dans les futures lois d'application, madame la garde des sceaux.

Aujourd'hui, en préalable aux discussions à venir, je m'en tiendrai à votre déclaration au Sénat du 24 juin dernier : « Les magistrats du parquet seront sous la direction et sous le contrôle de leur chef hiérarchique ; le procureur général animera et coordonnera la mise en oeuvre, par chaque procureur de la République de son ressort, des directives de politique générale. » Cela est simple et

compréhensible.

Plusieurs fois, avec l'insistance qu'il fallait, vous avez affirmé que vous n'intervenez pas dans les affaires particulières ; mais vous donnez des instructions et des directives de politique générale afin que, sur l'ensemble du territoire de la République, la loi soit appliquée telle que le l égislateur l'a voulu. Cela est simple et facile à comprendre même par moi.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

Restait cette suspicion un peu extraordinaire : et si certains membres du parquet n'appliquaient pas les directives générales et les instructions du garde des sceaux ? Où sommes-nous ? Dans quel pays, sous quel régime ? Depuis qu'elle existe, la République a su instaurer une organisation hiérarchique de tous les corps de ses serviteurs mais aussi les cadres disciplinaires qui assurent le bon fonctionnement des institutions. Il ne peut en être autrement dans la magistrature.

Mes chers collègues, je vous propose, non pas dans un souci de ménager le Sénat, mais avec la préoccupation essentielle, primordiale de voir aboutir cet élément fort de la réforme de la justice, d'accepter un certain nombre de propositions émanant de la Haute assemblée.

La première est le retour au double collège même si cela fait la part belle aux parquetiers qui passeront ainsi de quatre représentants à cinq alors que le nombre de magistrats du siège sera ramené de six à cinq. Je rappelle pour mémoire que sur 6 000 magistrats, l'on dénombre 1 374 membres du parquet dont 36 procureurs généraux.

La deuxième revient au fonctionnement du CSM en double formation avec la possibilité de siéger en formation plénière si le Président de la République le sollicite.

En ce qui concerne la nomination des membres du CSM, le Sénat a laissé au Président de la République, au président du Sénat et à celui de l'Assemblée nationale le soin de choisir chacun deux personnalités. En revanche il a retiré ce pouvoir de nomination au président du Conseil économique et social au prétexte que celui-ci ne bénéficie pas de la légitimité donnée par un scrutin populaire, pour porter de deux à quatre le nombre des personnalités désignées conjointement par le vice-président du Conseil d'Etat, le premier président de la Cour de cassation et le premier président de la Cour des comptes, ce qui peut sembler contradictoire avec l'argument précédemment avancé. Toutes ces personnalités ne doivent être membres ni des assemblées, ni de l'ordre judiciaire, ni des juridictions administratives.

En tout état de cause, l'équilibre est respecté pour que le CSM ne soit pas atteint par une sorte de corporatisme.

Enfin, je vous propose d'adopter aussi une proposition plutôt de forme que de fond concernant les magistrats siégeant dans les territoires d'outre-mer.

En effet, les sénateurs ont précisé que le CSM ferait des propositions pour les nominations des présidents des tribunaux supérieurs d'appel ou des tribunaux de première instance. Dans les territoires d'outre-mer - Nouvelle-Calédonie, Polynésie française, Wallis-et-Futuna ainsi que dans les collectivités territoriales de Saint-Pierreet-Miquelon et Mayotte, les tribunaux de première instance se substituent aux tribunaux de grande instance, de même que les tribunaux supérieurs d'appel remplacent les cours d'appel dans les deux collectivités territoriales précitées.

Comme l'a souligné la garde des sceaux lors du débat au Sénat, il n'est pas indispensable de modifier sur ce point l'article 65 de la Constitution, compte tenu de la coutume constitutionnelle incluant les emplois de président de tribunal de première instance et de président de tribunal supérieur d'appel dans le champ du pouvoir de proposition du Conseil supérieur de la magistrature. En outre la « constitutionnalisation » de ces juridictions rendra plus lourdes d'éventuelles modifications de l'organisation judiciaire propre aux territoires d'outre-mer. Cette précision sur le champ du pouvoir de proposition du CSM aurait pu être apportée par la future loi organique.

Cela étant, je vous proposerai un amendement tendant à supprimer la référence à la nomination aux postes de président des tribunaux supérieurs d'appel et des tribunaux de première instance introduite par le Sénat.

Mes chers collègues, malgré les remarques du président de la commission des lois du Sénat, que certains ont considérées comme désagréables à l'égard de l'Assemblée nationale, je vous propose de prendre en compte l'excellent travail du Sénat et d'adopter l'ensemble du projet de loi constitutionnelle ainsi modifié par notre commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Discussion générale

M. le président.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Philippe Houillon.

M. Philippe Houillon.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, lors de la première lecture du projet de loi constitutionnelle relatif au Conseil supérieur de la magistrature, les députés du groupe Démocratie libérale avaient voté contre ce texte de circonstance, qui apportait une réponse ponctuelle à des problèmes observés dans le fonctionnement du service public de la justice, mais sans participer d'une vision globale de la justice dans notre pays.

Notre opposition était alors fondée sur une question de forme, ainsi que sur deux questions de fond.

Sur la forme, nous avions regretté de ne pouvoir nous p rononcer en toute connaissance de cause sur les c ontours d'une nouvelle indépendance du parquet.

Quand bien même nous respectons la hiérarchie des textes qui veut qu'une loi organique ne soit discutée qu'après le vote de la loi constitutionnelle à laquelle elle se rapporte, nous estimions qu'il ne revenait pas aux membres de la représentation nationale de ne se prononcer que sur une partie de la réforme envisagée. Or, au moment de l'examen du projet de loi constitutionnelle en première lecture, nous n'avions toujours pas connaissance, madame la garde des sceaux, de votre projet définitif relatif aux relations entre le parquet et la chancellerie, qui nous paraît inséparable de cette révision constitutionnelle.

Depuis lors, certes, le projet de loi nous est parvenu. Je constate cependant qu'il n'a toujours pas fait l'objet d'un examen par notre assemblée et que nous ne disposons d'aucun renseignement précis sur son inscription à l'ordre du jour. Nous considérons donc, à nouveau, que vous ne nous permettez pas de nous prononcer en toute sérénité dans ce débat, pourtant fondamental pour l'avenir de notre société. Je me réjouis d'ailleurs que le rapporteur de votre majorité partage mon avis sur cette question - malgré ce que je viens de l'entendre dire à la tribune puisque, en commission des lois, il a regretté que « le débat d'orientation sur la justice n'ait pas été l'occasion pour les parlementaires de faire connaître leur vision globale concernant la réforme des relations entre le parquet et la chancellerie ».

Monsieur le rapporteur, nous sommes donc d'accord sur ce point. Je regrette que vous ne l'ayez pas répété dans les mêmes termes à l'instant. Cela aurait été plus conforme à ce que vous aviez dit en commission.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Nous avons manqué le coche.

M. Philippe Houillon.

Sur le fond, notre groupe formulait deux objections à votre projet.

En premier lieu, nous ne voulions pas vous donner un blanc-seing sur la question de principe de l'indépendance du parquet par rapport au peuple français, sans aucune


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

garantie quant aux modalités de jouissance de cette indépendance, quant à l'application par le gouvernement d'une politique pénale sur l'ensemble du territoire, quant aux conditions d'une éventuelle responsabilité des magistrats et quant au respect des libertés et des droits de la défense.

Notre groupe est tout à fait attaché au principe de l'ind épendance de la magistrature, affirmé dans notre Constitution. Nous ne sommes naturellement pas opposés au principe d'un renforcement des garanties données aux magistrats des parquets, mais il ne s'agit que d'un aspect du problème.

Nos questions sur la garantie des libertés des justiciables, sur l'égalité des citoyens et sur l'équilibre de l'institution judiciaire sont restées sans réponse. De même, la garantie pratique et concrète d'une politique pénale uniforme sur l'ensemble du territoire, décidée par le Gouvernement de la République face à un parquet totalement indépendant, est demeurée incertaine.

En second lieu, votre projet, madame la garde des sceaux, entretenait une malheureuse confusion des genres.

Les magistrats du siège et ceux du parquet ont des fonctions très différentes. Le magistrat du parquet est l'avocat de la société, l'avocat de la République ; c'est lui qui demande au juge l'application de la loi quand il saisit le tribunal. Il est une partie au procès pénal.

De cette séparation des fonctions, exigée - je me permets de vous le rappeler - par la Convention européenne des droits de l'homme, doit découler une différence de statut. C'est pourquoi nous sommes favorables au maintien d'un lien entre le peuple français et sa justice, au travers d'une politique pénale que le gouvernement a la charge de définir. Dans ce cadre, nous souhaitons le maintien d'un certain lien entre les magistrats du parquet et le gouvernement.

Ces nombreuses réserves que nous avions exprimées avaient rendu, à l'époque, un vote positif impossible.

Aujourd'hui, des éléments nouveaux nous donnent raison.

Vous le savez, les trente-cinq premiers présidents des cours d'appel, qui sont parmi les plus hauts magistrats du pays, réunis en assemblée plénière le 28 mai 1998, ont pris unanimement position pour le maintien d'une distinction franche entre les fonctions de magistrat du parquet et celles de magistrat du siège.

Dans son compte rendu, la conférence des premiers présidents considère que « les responsabilités du parquet et du siège étant de nature différente, il convient que les citoyens puissent les distinguer clairement », alors même que leurs images respectives sont de plus en plus brouillées. Ces magistrats déplorent en effet une « dynamique qui conduira les citoyens à éprouver de plus en plus de difficultés à distinguer les magistrats du siège et ceux du parquet prenant des décisions quasi juridictionnelles et perçus comme de véritables juges ».

L'idée fait d'ailleurs son chemin, car, en relisant le compte rendu des débats du Sénat, j'ai constaté que M. Badinter estimait lui aussi que les parquets « assument une mission quasi juridictionnelle ». Le problème, c'est que ce n'est pas vraiment leur rôle.

Afin d'assurer une véritable différenciation entre ces deux catégories de magistrats, dans la mesure où seuls les magistrats du parquet conduisent une politique d'action publique, qui est une sorte de déclinaison et une adaptation de la politique pénale décidée par le gouvernement, les premiers présidents de cour d'appel préconisaient la constitution de deux conseils supérieurs de la magistrature distincts. A leurs yeux : « un conseil supérieur unique nuirait à toute démarche de clarification ».

Le projet de loi constitutionnelle revient à l'Assemblée pour une deuxième lecture, après que le Sénat a, dans sa sagesse, amélioré ce texte dans un sens que nous approuvons. En particulier, nous nous réjouissons que les sénateurs aient maintenu deux formations distinctes pour les magistrats du siège et ceux du parquet, dans le souci de marquer la différence de nature entre ces deux fonctions, comme la nécessité de marquer tant l'indépendance du parquet par rapport au gouvernement que l'indépendance du siège par rapport au parquet.

De la même manière, nous soutenons totalement la volonté des sénateurs de maintenir un lien entre les procureurs généraux et le gouvernement, en assurant leur nomination en conseil des ministres, contrairement à l'ensemble des autres membres du parquet qui font l'objet d'un avis conforme du CSM. Cette nomination est seule à même d'investir toute la hiérarchie du parquet de la légitimité nécessaire à son action.

Compte tenu de ces avancées, comme d'autres que vous ne remettez d'ailleurs pas en cause, nous aurions pu, madame la garde des sceaux, modifier le sens de notre vote ce soir. Toutefois, la majorité de la commission des l ois, probablement conseillée par le Gouvernement compte tenu de ce que j'ai entendu tout à l'heure, a adopté un amendement du rapporteur maintenant la nécessité d'un avis conforme du CSM pour la nomination des procureurs généraux.

La conclusion est donc simple : si cet amendement est voté ce soir, nous aurons donc un retour sur ce point au texte adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, texte désapprouvé par ceux des plus hauts magistrats de ce pays que j'ai cités. Par voie de conséquence, les députés du groupe Démocratie libérale et Indépendants, si cet amendement était adopté, voteraient une nouvelle fois contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Jacques Floch, rapporteur.

Ce serait dommage !

M. le président.

La parole est à M. Louis Mermaz.

M. Louis Mermaz.

Mme la garde des sceaux, vous avez restitué le débat de ce soir dans le cadre de la réforme générale de la justice et montré comment ce texte initial en préparait d'autres.

Le Gouvernement a déposé un projet de loi constitutionnelle réformant le Conseil supérieur de la magistrature et l'Assemblée nationale l'a approuvé tel quel le 3 juin dernier. Le Gouvernement et l'Assemblée avaient voulu alors, et nous poursuivons toujours cette idée, assurer l'indépendance des magistrats, ce qui suppose qu'ils soient légitimes, responsables et impartiaux.

Afin de réaliser ces objectifs, notre majorité avait suivi le Gouvernement en voulant un Conseil supérieur de la magistrature où les non-magistrats soient majoritaires, même si c'est de justesse - treize non-magistrats sur vingt-trois, en comptant le Président de la République et le garde des sceaux -, afin de prévenir l'esprit de corporatisme toujours très fort dans ce type d'organisme.

Nous avions entendu donner au CSM ainsi remodelé des pouvoirs incontournables dans la nomination des magistrats du parquet ; le Conseil continuant de présenter des propositions au garde des sceaux pour la nomination des principaux magistrats du siège, des membres de la Cour de cassation, des premiers présidents des cours


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d'appel, des présidents des tribunaux de grande instance.

Pour la nomination des autres magistrats, le CSM donnerait toujours un avis conforme, mais également, et c'est une novation, pour celle de tous les magistrats du parquet.

Enfin, nous avions voulu fusionner au sein du CSM les deux corps - siège et parquet - pour tous leurs actes, sauf pour le cas où ils siégeraient en formation disciplinaire.

Or le Sénat a modifié très sensiblement cet équilibre le 24 juin dernier, et plus particulièrement sur trois dispositions.

Le texte qui nous revient prévoit que le président du Conseil économique et social ne sera plus appelé à désigner deux personnalités n'appartenant ni à l'ordre judiciaire, ni au Parlement, ni bien entendu au CES. Ce seront le vice-président du Conseil d'Etat, le premier président de la Cour de cassation et le premier président de la Cour des comptes qui désigneront conjointement non plus deux personnalités comme prévu initialement, mais quatre. Cette dernière disposition, convenons-en, est d'un très grand classicisme et fera regretter à beaucoup d'entre nous ce que prévoyait la Constitution de 1946 : en effet, à l'époque, sur les quatorze membres composant le CSM, six personnalités étaient élues pour six ans par l'Assemblée nationale et choisies hors de ses membres. C'était une époque où la représentation parlementaire avait certes plus de pouvoir qu'aujourd'hui... Au demeurant, n'assistons-nous pas depuis plusieurs années à un démantèlement continu des prérogatives de l'Assemblée nationale au bénéfice d'une multitude de comités et d'organismes avec pouvoir de contrôle, de nomination, d'interprétation des lois ? N'y a-t-il pas là un abaissement inquiétant du pouvoir législatif, donc un appauvrissement de la démocratie ? Le Sénat a prévu également que le CSM siègerait dans tous les cas - nomination et discipline - en deux formations distinctes, sauf lorsqu'il sera appelé à assister le président de la République par ses avis.

Enfin, et surtout, le CSM ne donnerait plus d'avis conforme - liant par conséquent le Gouvernement pour la nomination du procureur général auprès de la Cour de cassation ni pour celle des trente-trois procureurs généraux qui continueraient d'être désignés en conseil des ministres.

Que reste-t-il donc de la réforme du CSM présentée comme la clef de voûte de la réforme à venir de la justice ? Essentiellement - et ce n'est pas rien - la composition nouvelle du CSM où les non-magistrats seront majo-r itaires de justesse, fait nouveau par rapport à la Constitution de la Ve République et au texte sorti de la révision constitutionnelle de juillet 1993 et qui nous ramène à la situation instaurée par la Constitution de 1946, laquelle établissait une composition beaucoup plus favorable aux non-magistrats. Les sénateurs auraient-ils été eux aussi sensibles au risque de corporatisme ? Pour le reste, notamment la double formation - siège et parquet - et la nomination des procureurs généraux, c'est en gros le maintien du texte antérieur, tel qu'issu de la révision constitutionnelle de juillet 1993, à quelques exceptions près. Celles-ci ne sont d'ailleurs pas négligeables, car le Conseil supérieur de la magistrature disposera désormais, comme l'avait proposé le Gouvernement et accepté l'Assemblée nationale en première lecture, du pouvoir de décision en matière disciplinaire à l'encontre des magistrats du parquet comme des magistrats du siège, mais en siégeant en deux formations distinctes.

Comme il faut arriver à des votes similaires dans chacune des assemblées pour que la réforme ait une chance d'aboutir, le Gouvernement nous invite à faire preuve d'une certaine élasticité, ce dont nous ne saurions le critiquer. Du reste, le rapporteur et notre commission des lois dans sa majorité l'ont suivi. Nous devons donc restreindre nos prétentions et nous rallier aux amendements sénatoriaux, hormis celui sur les procureurs généraux, qui n'avait d'ailleurs pas été voté par la commission des lois de la deuxième assemblée.

En conclusion, l'avenir de la réforme du CSM va donc dépendre de l'attitude du Sénat. Se contentera-t-il des pas que nous croyons inévitable de faire dans sa direction ou raidira-t-il sur le texte qu'il a largement modifié ? L'avenir le dira.

Deuxième remarque : d'autres textes fondamentaux vont être soumis à la discussion de l'Assemblée nationale, notamment celui sur la réforme de la présomption d'innocence. L'Assemblée s'en est déjà préoccupée en votant une proposition de loi de notre collègue Tourret, proposition que vous avez conservée jusqu'alors sous le coude, madame la garde des sceaux. Nous en retrouvons certaines idées dans le projet que vous venez de déposer. Ce texte contenait des avancées très importantes. Nous souhaiterons aller peut-être plus loin en l'amendant.

Enfin, il y aura la réforme des procureurs, réforme d'autant plus importante que nous souhaitons, tout comme vous, que désormais les procureurs n'interviennent plus dans les affaires individuelles. Mais nous voulons aussi une politique pénale pour l'ensemble du territoire : lorsque le Premier ministre reçoit le procureur général de Bastia, c'est certainement pour lui parler de choses importantes, tant pour la justice que pour la sécurité publique...

Nous voterons le texte qui nous est soumis ce soir. Il constitue une avancée mais, comme je vous l'ai déjà dit, le plus important est encore devant nous. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Pierre Albertini.

M. Pierre Albertini.

Monsieur le président, madame la garde des sceaux, lorsque ce texte est venu en première lecture devant notre assemblée le 2 juin dernier, je m'étais, au nom de nombreux collègues, interrogé sur l'ordre des facteurs. Pour nous, il apparaissait évident que la réforme du CSM devait être le couronnement plus que le commencement de la grande réforme de la justice souhaitée par le Président de la République, mise en oeuvre par le Gouvernement et surtout attendue avec beaucoup d'impatience par nos concitoyens.

J'avais en même temps souligné trois aspects positifs que je rappellerai très rapidement. Le premier avait trait à la mixité, c'est-à-dire à l'association des magistrats et des personnalités extérieures avec une légère prédominance des secondes. Le but était d'éviter un risque souvent dénoncé ici et que tous ceux qui ont siégé au Conseil supérieur de la magistrature ont souligné : la tendance qu'a toute institution, dès lors qu'elle n'est composée que de membres du corps, de prendre en charge presque exclusivement les intérêts de celui-ci sans se soucier ou en se souciant moins de l'intérêt général. Cette menace ne guette pas seulement le Conseil supérieur de la magistrature ; d'autres exemples vont dans le même sens.

Le deuxième aspect positif est celui de l'élection. Il nous apparaissait comme le seul procédé tout à la fois incontestable et démocratique pour choisir lesdits magistrats composant le futur CSM.


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Troisième aspect positif, la procédure de nomination, qui reposait très largement sur l'avis conforme pour la plus grande partie des magistrats concernés. Cette procédure de nomination assurait à nos yeux un bon équilibre dans l'appréciation des qualités humaines et professionnelles et du sens des responsabilités des magistrats.

En résumé, le renforcement des garanties constitutionnelles, notamment celles qui visaient le parquet, nous paraissaient aller dans le bon sens. Le soupçon existe depuis longtemps ; il est souligné par tous les travaux, notamment le groupement d'intérêt public qui suit l'évolution de la justice dans l'opinion. Je n'ai pas besoin d'insister pour rappeler que cela devrait nous créer une ardente obligation de donner de cette institution une image plus impartiale et plus flatteuse.

Le groupe UDF s'était donc prononcé positivement, tout en assortissant son vote de l'expression d'un certain nombre de souhaits, de quelques craintes aussi sur la réussite globale de la réforme, et pas seulement sur celle qui portait sur le Conseil supérieur de la magistrature.

Quatre mois plus tard, où en sommes-nous ? Le débat est d'abord éclairé par les travaux du Sénat, que je qualifierai, par principe et par respect pour la Haute Assemblée, de « toujours fructueux » - ce qui m'autorisera à prendre, de temps en temps, quelques libertés avec les conclusions de nos collègues sénateurs.

Il est vrai qu'au-delà des corrections, des précisions, de la simplification dans la procédure de nomination introduites par la Haute assemblée, il demeure tout de même entre le texte de l'Assemblée et celui du Sénat une divergence essentielle qui porte sur le maintien de deux formations spécifiques : l'une pour le siège, l'autre pour le parquet.

A titre personnel, il me semble que cette division

« fonctionnelle », si j'ose dire, doit emporter notre approbation. Elle correspond d'abord à une différenciation incontestable des rôles respectifs des membres du parquet et les magistrats du siège : même s'ils sont complémentaires et indissociables dans la chaîne judiciaire, ils ne font pas, on l'a rappelé à plusieurs reprises, tout à fait le même métier.

Ensuite, cette division ne porte aucunement atteinte à l'objectif du renforcement des garanties constitutionnelles du parquet. Enfin, pourquoi ne pas le dire, elle est largement souhaitée, même si son expression est quelque peu différente, par les premiers présidents de cour d'appel qui comptent évidemment parmi nos plus hauts magistrats ; j'ai lu avec beaucoup d'intérêt les conclusions de leur conférence nationale qui s'est tenue à Saclay en mai dernier.

Le débat est également éclairé par les textes et par les orientations que vous avez produits dans l'intervalle, madame le garde des sceaux, en vue de cette importante, nécessaire, souhaitable et urgente réforme de la justice.

Nous savons ce que nos concitoyens souhaitent : une justice plus simple, plus rapide, plus indépendante.

Or c'est précisément sur ce terrain que les doutes nous assaillent. Le premier porte sur les orientations mêmes de votre réforme et spécialement sur la relation entre la justice et le pouvoir politique.

Vous cédez, me semble-t-il, à la tentation d'une forme de résignation. Le pouvoir politique a une mission très noble ; il ne s'agit en aucun cas de faire obstacle au cours de la justice, mais bien de l'orienter, d'en évaluer l'efficacité, de lui conférer les moyens qu'elle mérite et de la réformer si nécessaire - je pense tout spécialement à la carte judiciaire dont nous aurons certainement l'occasion de reparler. Or, par une espèce d'autocensure qui sévit également chez bien d'autres acteurs politiques, j'ai le sentiment d'une mise à l'écart, d'une mise en retrait. Un peu confortable dans l'immédiat, certes ; mais est-ce efficace compte tenu de l'aspiration de nos concitoyens ? Je ne le pense pas.

Je crois au contraire que nous courrons le risque d'un effritement du principe d'égalité devant la justice et un danger que nous ne devrions pas masquer : l'émiettement de notre politique pénale, avec 33 procureurs généraux et 180 procureurs de la République.

Certes, M. Floch nous a rappelé que le parquet restait organisé selon un principe hiérarchique. Mais enfin, il ne suffit pas de le dire pour garantir que l'ensemble des parquetiers mettront en oeuvre dans nos régions, départements et circonscriptions judiciaires les mêmes priorités.

Le danger est, à l'évidence, réel et considérable.

Enfin, je doute de l'amélioration de la justice au quotidien, c'est-à-dire de celle qui intéresse en fait nos concitoyens.

Le débat sur la justice est, hélas ! inversement proportionnel à l'importance des questions telles que les ressentent en fait les Français. On parle beaucoup du parquet, on parle beaucoup du soupçon. En réalité, ce qui intéresse les Français, c'est d'abord la justice à laquelle ils sont ou peuvent être confrontés tous les jours. Les dysfonctionnements, vous les connaissez : les cabinets d'instruction croulent sous les dossiers, la justice civile est engorgée, le traitement de la délinquance de masse n'est pas correctement assuré. Les peines de substitution exigent un suivi, une individualisation, une implication forte non seulement des magistrats, mais aussi des éducateurs, des travailleurs sociaux, autant de points qui pèchent, et vous le savez. Et le sentiment d'impunité que ressentent souvent nos jeunes en raison de cette inefficacité croissante ne fait naturellement que les encourager à gravir l'échelle catastrophique de la délinquance.

Enfin, le moral de l'institution n'est pas bon. Tous ceux qui côtoient assez fréquemment les magistrats du siège ou du parquet se rendent bien compte de leurs doutes, d'abord sur eux-mêmes, et c'est fort légitime, mais aussi sur la fonction de juger. Ils se posent beaucoup de questions sur leur place dans la société, sur leur articulation avec la police, avec la gendarmerie, etc.

Tout cela traduit aussi, hélas ! une absence de lisibilité de votre réforme dont les lignes ne leur apparaissent pas clairement. Je crains qu'elle ne soit qu'une réforme hybride, qu'elle ne reste au milieu du gué sur des aspects importants.

Pour toutes ces raisons, madame le garde des sceaux, je crois que le groupe UDF s'abstiendra sur le texte.

M. le président.

La parole est à M. Pascal Clément.

M. Pascal Clément.

Madame le garde des sceaux, j'aurais envie de commencer en vous disant que j'en veux au Gouvernement. En effet, alors que la question se pose depuis quelque temps déjà, votre réforme a été mal expliquée à l'opinion publique. Je reconnais certes que les partis politiques eux non plus n'ont pas apporté leur contrib ution ; peut-être avons-nous tous une part de respnsabilité pour avoir, dans ce débat déjà ancien, entretenu la confusion entre deux fonctions fondamentalement d istinctes, que mes collègues Houillon et Albertini viennent de rappeler : celle du parquet qui défend la société et celle du siège qui juge.

On entend déjà les raccourcis politiques faciles : la droite voudrait garder la justice dans sa main et répugnerait à une véritable indépendance des juges, alors que la


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gauche souhaiterait l'indépendance totale de la justice.

Mais n'oublions pas que la justice renvoie, dans ce cas d'espèce, à deux fonctions extrêmement différentes. A ce propos, je voudrais insister un court instant sur la fonction du procureur.

Il a été rappelé que le procureur requérait, qu'il défendait la société mais il a surtout la fonction de maîtriser l'opportunité des poursuites. Et je ne vois pas au nom de quoi il peut le faire ! Parce qu'il a passé un concours ou a été admis à faire valoir je ne sais quelle équivalence ? Le rapporteur a rappelé que le Président de la République occupait le sommet de la pyramide de la justice. C'est d'ailleurs pour cette raison que la Constitution a prévu qu'il préside le CSM. Or vous n'avez pas, que je sache, remis en cause le fait que le Président de la République présidât le CSM, ce qui est assez contradictoire avec le projet actuel. Si vous voulez couper tout lien avec tout élu du suffrage universel, il faut mettre à l'écart le premier d'entre eux. Mais si vous acceptez qu'il préside le Conseil supérieur de la magistrature, chargé non seulement de la nomination des magistrats mais - et j'y viendrai - des procédures qui peuvent être engagées contre eux, je ne vois pas pourquoi vous refusez que pour les parquets, et particulièrement comme le demande le Sénat, le Parquet général, il y ait des nominations en Conseil des ministres.

Mais ce n'est pas seulement le texte présenté ce soir qui pose problème. Plus fondamentalement, nous ne sommes pas d'accord sur votre conception de la justice.

Puis-je rappeler que c'est tout de même un gouvernement « de droite » - pour parler comme vous - qui a fait en sorte que la réforme constitutionnelle sur le CSM soit votée en juillet 1993 par l'ensemble du Parlement. Il y a cinq ans, pour la première fois dans l'histoire de la République, les juges du siège devenaient intégralement indépendants. Depuis, à cause du manque de pédagogie que je dénonçais d'entrée de jeu dans mon discours, on a assimilé les parquetiers aux juges.

Je suis convaincu que cette réforme, madame le garde des sceaux, si elle devait aller jusqu'à son terme, ne durerait pas, parce qu'elle ne correspond pas aux réalités.

Comme on veut garder, en France, l'unité du corps des magistrats, et parce qu'il existe des passerelles entre les deux - ce qui est d'ailleurs assez plaisant et même quelquefois positif pour les magistrats eux-mêmes - on voudrait que le statut ne changeât point quand on va du parquet vers le siège, ou, ce qui est plus rare, du siège vers le parquet ! Il est donc à parier, je le crains, que si ce projet aboutit, demain ou après-demain, un gouvernement engage la réforme créant le corps des parquetiers et parallèlement or, comme chacun le sait, les parallèles ne se rejoignent pas ! - le corps des juges, consacrant l'existence de deux carrières totalement parallèles dans ce pays.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Peut-être !

M. Pascal Clément.

Je ne crois pas en effet que le système que vous proposez puisse fonctionner longtemps.

On sait trop les dérapages qu'il y a dans tous les pays en matière de justice. En France, l'actualité nous le montre, il n'y a pas de responsabilité qui corresponde à l'indépendance que nous voulons tous pour les juges. Là, il n'y a pas plus de responsabilité prévue pour les parquetiers. Je renvoie d'ailleurs à ce qu'a dit le rapporteur en commission des lois - il me corrigera si nécessaire - à propos des quarante-huit procédures engagées contre des magistrats, dont quatre seulement ont été sanctionnés, ce qui est extrêmement peu.

Et quand on veut faire en sorte, M. Mermaz l'a dit, que le CSM comporte une voix de non magistrat, ne doit-on pas se souvenir que le corporatisme a régné pendant toute la durée de la IVe République au CSM ? Il est vrai qu'il comportait alors des parlementaires, ce qui était pire que tout, je l'admets.

Je le répète, madame le garde des sceaux, nous n'avons pas la même vision de la justice. Si vous voulez que nous nous rapprochions, il faut créer deux corps totalement distincts, sans aucune passerelle, le corps des parquetiers et celui des juges. La réforme constitutionnelle pourrait alors, selon moi, être acceptée par tous dans ce pays.

(Applaudissements sur quelques bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Luc Warsmann.

M. Jean-Luc Warsmann.

Madame la garde des sceaux, mes chers collègues, nous voici donc invités à examiner en seconde lecture un texte portant réforme du Conseil supérieur de la magistrature, dont la portée, il faut le dire, est relative.

Il ne s'agit, en effet, que de poursuivre une réforme engagée en 1993. En outre, il ne porte pas sur les problèmes essentiels de la justice. Croire que modifier la désignation des membres du Conseil supérieur de la magistrature ou le rôle de ceux-ci offrirait aux magistrats une garantie absolue d'indépendance et, au final, une crédibilité et efficacité accrues, serait une utopie.

Nous sommes conduits, par ailleurs, à nous interroger sur la méthode avec laquelle est conduite la réforme de la justice. Certes, sur le principe, les voies semblaient claires puisque c'est le Président de la République lui-même qui, en décembre 1996 et en janvier 1997, avait montré combien cette réforme était nécessaire et en avait tracé les grandes voies. Mais nous aurions souhaité, à ce stade de la discussion, avoir connaissance de l'ensemble des projets de loi. On ne pouvait pas, me dira-t-on, tout discuter à la fois. Peut-être m'expliquera-t-on également qu'il y a une certaine logique à commencer par un projet de révision constitutionnelle et à continuer par des projets de lois organiques puis par des projets de lois ordinaires.

Sans doute, mais cela ne nous empêchait pas de connaître l'ensemble de la réforme pour pouvoir nous prononcer.

Hacher ainsi, en quelque sorte, les différents projets nous fera passer à côté de questions, dont je citerai quelquesunes, qui ont trait au fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature.

Depuis longtemps, le Conseil supérieur de la magistrature émet des voeux. Je pense par exemple à la communication des rapports de l'inspection générale des services judiciaires. Cela changera-t-il ou non ? Son budget serat-il individualisé ? Comment sera nommé son secrétaire ? Les procureurs seront-ils désignés en petit conseil sous la présidence du garde des sceaux ou bien, comme les premiers présidents et les présidents des tribunaux de grande instance, en grand conseil sous celle du Président de la République ? Voilà des questions techniques qui ont trait au fonctionnement du Conseil supérieur de la magistrature, et qui, bien que posées par des collègues à l'Assemblée et au Sénat, n'ont pas obtenu de réponse, alors même que l'on nous demande de valider un projet de révision constitutionnelle.


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Ce projet nous conduit également à présenter des remarques sur le fond. Ce qui est derrière ce projet, c'est tout simplement la légitimité et l'efficacité de l'action publique en France. Et, si je pose le problème de la légitimité de l'action publique, c'est parce que nous sommes dans un système d'opportunité des poursuites. Chaque procureur de la République, en décidant de poursuivre ou de ne pas poursuivre une infraction ne doit pas prendre une décision arbitraire ; il doit agir dans le cadre d'une p olitique pénale nationale. Les procureurs de la République ne sont pas élus ; cela est étranger à notre tradition. C'est donc bien en cohérence avec la politique p énale nationale qu'ils peuvent fonder une action publique.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Tout à fait !

M. Jean-Luc Warsmann.

Cette action publique doit être légitime, mais elle doit également être efficace.

Madame la garde des sceaux, vous vous êtes à plusieurs reprises exprimée sur ce sujet. Vous nous avez expliqué, en substance, qu'en tant que garde des sceaux vous disposiez des outils nécessaires à une action publique efficace, en donnant des directives générales à l'ensemble des parquets. Voilà un sujet qui aurait bien mérité un débat.

Vous avez la possibilité de donner des directives générales, certes. Les parquets ont-ils les moyens de les appliquer ? Etes-vous en mesure de vérifier leur suivi ? Cet été, les médias se sont emparés des affaires de dopage et nous avons vu les instructions se multiplier.

Pendant le Tour de France, nous avons appris que quelques mois auparavant le parquet de Reims, à la suite d'une saisine des douanes, avait eu entre les mains les éléments pour engager une poursuite dans une affaire de dopage sportif. L'affaire était restée en instance jusqu'à ce que les médias en fassent apparaître d'autres et qu'alors la procédure soit lancée. Que s'est-il passé ? Nous avons entendu alors plusieurs ministres du Gouvernement, vous-même et Marie-George Buffet, notamment, affirmer que la lutte contre le dopage était un des objectifs du Gouvernement. Mais alors, aviez-vous donné des consignes en la matière ? Si vous en aviez donné, ontelles été appliquées ou pas ? Avez-vous les moyens de les faire appliquer dans une procédure particulière ? L'exemple que j'ai pris en matière de dopage, qui est particulièrement marquant, pourrait être multiplié à l'infini. De nombreux professeurs de droit le disent : la coordination de l'action publique avec la politique pénale se résume bien souvent à une coordination des décisions de classement sans suite des différents parquets.

Tels sont les problèmes que soulève ce projet de réforme du Conseil supérieur de la magistrature, madame la garde des sceaux. Vous avez choisi de nous demander de nous prononcer sur un projet précis, un projet de modification constitutionnelle.

Il reste quelques points de divergence avec le Sénat, notamment à propos de la nomination des procureurs généraux. Nous devrions d'ailleurs - et vous aussi - nous attarder sur cette question parce que je crois que les sénateurs ont voulu souligner ainsi la nécessité d'une procédure de désignation des procureurs généraux qui leur donne assez d'autorité pour pouvoir véritablement relayer la politique pénale nationale et, dans le ressort de chacune des cours d'appel, coordonner l'action publique. Ce sont d'ailleurs ces mêmes motivations qui avaient amené le législateur, en 1992, à introduire leur nomination en conseil des ministres. Néanmoins, ce point n'est pas essentiel dans la réforme, même si nous souhaiterions qu'il soit l'occasion d'un débat.

Vous nous demandez ce soir de nous prononcer sur l'intégralité du projet de révision constitutionnelle. Le groupe RPR ne modifiera pas sa position de première lecture et il souhaite que les prochaines semaines donnent l'occasion de rectifier l'engagement général de la réforme de la justice et d'avoir un débat permettant d'assurer la cohérence de l'ensemble des textes.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La discussion générale est close.

Discussion des articles

M. le président.

J'appelle maintenant, dans les conditions prévues par l'article 91, alinéa 9, du règlement, les articles du projet de loi dans le texte du Sénat.

Article 1er A

M. le président.

« Art. 1er A. - Dans l'article 19 de la Constitution, les mots : "et 61" sont remplacés par les mots ; ", 61 et 65". »

Je mets aux voix l'article 1er A. (L'article 1er A est adopté.)

Article 1er

M. le président.

« Art. 1er . - L'article 65 de la Constitution est ainsi rédigé :

« Art. 65. - Le Conseil supérieur de la magistrature est présidé par le Président de la République. Le ministre de la justice en est le vice-président de droit. Il peut suppléer le Président de la République.

« Le Conseil supérieur de la magistrature comprend, outre le Président de la République et le ministre de la justice, cinq magistrats du siège et cinq magistrats du parquet élus, un conseiller d'Etat désigné par le Conseil d'Etat et dix personnalités n'appartenant ni au Parlement ni à l'ordre judiciaire ni à l'ordre administratif. Le Président de la République, le président de l'Assemblée nationale et le président du Sénat désignent chacun deux personnalités. Le vice-président du Conseil d'Etat, le premier président de la Cour de cassation et le premier président de la Cour des comptes désignent conjointement quatre personnalités.

« La formation compétente à l'égard des magistrats du siège est composée, outre le Président de la République et le ministre de la justice, des cinq magistrats du siège et de l'un des magistrats du parquet, du conseiller d'Etat et de six des personnalités.

« La formation compétente à l'égard des magistrats du parquet est composée, outre le Président de la République et le ministre de la justice, des cinq magistrats du parquet et de l'un des magistrats du siège, du conseiller d'Etat et de six des personnalités.

« La formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l'égard des magistrats du siège fait des propositions pour les nominations des magistrats du siège à la Cour de cassation, des premiers présidents des cours d'appel et des présidents des tribunaux de grande instance, des tribunaux supérieurs d'appel et des tribunaux de première instance. Les autres magistrats du siège sont nommés sur son avis conforme.

« Les magistrats du parquet sont nommés sur l'avis conforme de la formation du Conseil supérieur de la magistrature compétente à l'égard des magistrats du parquet, à l'exception des procureurs généraux.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

(1) Se reporter au texte de l'article publié dans le compte rendu de la deuxième séance du mardi 6 octobre 1998.

« La formation compétente à l'égard des magistrats du siège et la formation compétente à l'égard des magistrats du parquet statuent respectivement comme conseil de discipline des magistrats du siège et des magistrats du parquet. Elles sont alors présidées respectivement par le premier président de la Cour de cassation et par le procureur général près ladite Cour.

« Le Conseil supérieur de la magistrature se réunit en formation plénière pour répondre aux demandes d'avis formulées par le Président de la République.

« Une loi organique détermine les conditions d'application du présent article. »

M. Floch, rapporteur, a présenté un amendement, no 1, ainsi rédigé :

« A la fin de la première phrase du cinquième alinéa du texte proposé pour l'article 65 de la Constitution, supprimer les mots : ", des tribunaux supé-r ieurs d'appel et des tribunaux de première instance". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Je confirme que nous souhaitons que les tribunaux supérieurs d'appel et les tribunaux de première instance des territoires d'outre-mer ne soient pas inscrits dans le texte constitutionnel.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Avis favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

1. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Floch, rapporteur, a présenté un amendement, no 2, ainsi rédigé :

« A la fin du sixième alinéa du texte proposé pour l'article 65 de la Constitution supprimer les mots : ", à l'exception des procureurs généraux". »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Il s'agit de l'amendement clé de ce débat. Le Sénat a décidé que les procureurs généraux ne seraient pas nommés sur avis conforme du CSM. Je vous propose de revenir au texte de l'Assemblée.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Avis favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

2. (Après une épreuve à main levée déclarée douteuse, l'Assemblée est consultée par assis et levé.)

M. le président.

L'amendement est adopté.

Je mets aux voix l'article 1er , modifié par les amendements adoptés.

(L'article 1er , ainsi modifié, est adopté.)

Article 2

M. le président.

« Art. 2. I. L'article 90 de la Constitution est rétabli dans la rédaction suivante :

« Art. 90. Jusqu'à sa première réunion dans la composition issue de la loi constitutionnelle no du , le Conseil supérieur de la magistraturee xerce les compétences qui lui sont conférées par l'article 65 de la Constitution dans sa rédaction issue de la loi constitutionnelle no 93-952 du 27 juillet 1993. »

« II. L'article 90 de la Constitution est abrogé à la date de la première réunion du Conseil supérieur de la magistrature dans la composition issue de la présente loi. »

M. Floch, rapporteur, a présenté un amendement, no 3, ainsi libellé :

« Substituer au premier alinéa du I de l'article 2 les trois alinéas suivants :

« I. - Il est rétabli dans la Constitution un titre et un article ainsi rédigés :

« Titre XVII »

« Dispositions transitoires ».

La parole est à M. le rapporteur.

M. Jacques Floch, rapporteur.

Le Sénat a introduit dans la Constitution des dispositions transitoires, mais il a oublié d'inscrire un titre ; c'est l'objet de cet amendement de pure forme : titre XVII, Dispositions transitoires.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme la garde des sceaux.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

3. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 2, modifié par l'amendement no

3. (L'article 2, ainsi modifié, est adopté.)

Vote sur l'ensemble

M. le président.

Je ne suis saisi d'aucune demande d'explication de vote.

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi constitutionnelle.

(L'ensemble du projet de loi constitutionnelle est adopté.)

M. le président.

La séance est suspendue.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à vingt-deux heures vingt, est reprise à vingt-deux heures vingt-cinq.)

M. le président.

La séance est reprise.

2

LOI D'ORIENTATION AGRICOLE Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi d'orientation agricole (nos 977, 1058).

Discussion des articles (suite)

M. le président.

Cet après-midi, l'Assemblée a poursuivi l'examen des articles et a entendu les orateurs inscrits sur l'article 2 (1).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Article 2 (suite)

M. Louis Le Pensec, ministre de l'agriculture et de la pêche.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, j'ai écouté avec attention les vingt orateurs inscrits sur l'article relatif au CTE, le contrat territorial d'exploitation.

La politique agricole est organisée autour de règlements administratifs et le contrat territorial d'exploitation est d'abord un moyen moderne d'organisation entre les agriculteurs et l'Etat. A travers le CTE, je vous propose der econnaître les projets d'exploitation, au lieu de récompenser et d'accroître encore le capital d'exploitation accumulé.

Le contrat, me dira-t-on, n'est pas totalement nouveau en agriculture. Ce qui est nouveau, c'est la volonté de regrouper progressivement les aides aux agriculteurs dans le cadre d'un contrat cohérent, couvrant l'ensemble des activités des exploitations et exprimant un véritable projet de développement global de l'exploitation. N'en déplaise à certains, les agriculteurs n'attendent pas des pouvoirs publics des carottes, mais des orientations et un cadre qui leur permettent de travailler.

J'ai déjà expliqué comment le CTE serait la traduction de mes orientations. Plus concrètement, comment cela sera-t-il géré si le Parlement adopte ce projet ? Ainsi qu'il a été expliqué, un guide d'élaboration des CTE sera adressé dans les départements. Il fera la synthèse nationale des préfigurations engagées dans les départements.

Réglons tout de suite cette mauvaise querelle sur les préfigurations. J'ai reçu soixante-quinze demandes émanant des professionnels (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République), complétées par des lettres de parlementaires. Je tiens ici les courriers à votre disposition. Le président de la FNSEA en personne, devant le conseil national de son organisation, m'a demandé de considérer que, désormais, tous les départements étaient concernés. Mais il n'y a eu aucune inititative de ma part ou de celle de qui que ce soit dans mon cabinet pour susciter je ne sais quelle demande de préfiguration. C'est en toute spontanéité, traduisant en même temps l'intérêt porté au CTE par les professionnels, que les choses se sont passées.

Les contrats types seront élaborés dans les départements, arrêtés par les préfets en concertation avec les régions.

Les projets seront préparés par les agriculteurs euxmêmes, avec l'appui des organismes du monde agricole : ADASEA, chambres d'agriculture. Ils seront signés par les agriculteurs et les préfets.

Quel en sera le contenu ? Il m'a déjà été donné de dire que les CTE comporteront deux axes.

Le premier consistera à développer la valeur ajoutée et à créer des emplois, par une reconversion vers l'agriculture biologique, par exemple, ou l'engagement dans une démarche de qualité, de diversification, de valorisation des productions.

Le second sera l'axe territorial et environnemental, une action collective pour préserver un bassin versant, par exemple, ou le respect de pratiques agronomiques favorables à l'environnement, comme le maintien d'une couverture végétale en hiver ou de bandes enherbées en bordure de cours d'eau, la restauration d'un bocage. Ce ne sont là que quelques illustrations. Je ne doute pas que les préfigurations ne nous mettent en présence de milliers d'idées et de projets.

Est-ce pour autant une suradministration ? Je réponds non. Je ne conteste pas les difficultés d'une mise en oeuvre initiale, mais au fur et à mesure que nous regrouperons les aides publiques dans les CTE, ce cadre deviendra cohérent et simplificateur. Et puis, j'insiste sur ce point, la passation d'un contrat entre deux partenaires, en l'occurrence l'agriculteur et l'Etat, me paraît un acte moderne, adapté aux exigences de responsabilité d'une démocratie comme la nôtre.

Mais, me dit-on, vous allez créer des frustrations.

Quelle politique agricole s'est-elle faite en un jour, ou même en un an ? Et, je n'hésite pas à dire dans cette assemblée qui compte quelques anciens ministres de l'agriculture, la traduction des lois de 1960 et de 1962, dont l'adoption fut si conflictuelle, ne l'oublions pas, qu'à côté des débats de l'époque, ceux que nous connaissons dans cette assemblée m'apparaissent somme toute presque plaisants (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...

M. François Sauvadet.

Vous les souhaitez plus toniques ? On va faire un effort. (Sourires.)

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Ce n'est pas une invitation, monsieur Sauvadet ! Je sais que d'autres sur ces bancs en seraient capables, mais ne les encourageons pas ! La traduction des lois de 1960 et de 1962, disais-je, ne s'est pas faite au lendemain de leur promulgation. Il a fallu deux décennies pour qu'elles soient totalement mises en oeuvre. Tout le monde ne pourra pas signer un CTE tout de suite, c'est vrai, mais la politique agricole a vécu de mises en oeuvre, d'attentes et de réalisations depuis qu'elle existe. Pensons un peu à ce qu'était la dotation

« jeune agriculteur » à ses débuts. Les files d'attente n'ont pas suffi à condamner cet outil que la loi avait mis en place. Alors, oui, il faudra monter en puissance, en adaptant progressivement le basculement des crédits, mais n ous en reparlerons lorsque nous discuterons de l'article 3.

La durée du contrat ne relève pas de la loi mais du décret. Chacun, je crois, en conviendra. Je suis, pour ma part, favorable à une durée de quatre ou cinq ans, mais je poursuivrai les consultations.

En instituant le contrat territorial d'exploitation, nous ferons entrer le monde agricole dans une démarche que je comparerai à la mise en place, en 1986, du dispositif de développement agricole.

Il s'est bien agi alors de faire entrer les agriculteurs, avec leurs organisations, dans une démarche de modernisation, d'amélioration technique, de recherche de performance. S'il a fallu un décret, celui de 1966, et s'il a fallu créer l'ANDA, c'est bien parce que telle était la condition nécessaire pour que démarre le mouvement. Le développement agricole s'est opéré, parce que le monde agricole s'en est emparé. Les résultats ne se sont pas manifestés du jour au lendemain mais, lorsque le mouvement s'est engagé, il est rapidement devenu irréversible.

Je suis convaincu que les CTE sont d'abord une démarche. Il faut donc en élaborer les règles avec les acteurs eux-mêmes.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

A en juger par le nombre des amendements que vous avez déposés, je serais tenté de dire que vous ne vous êtes pas trompé sur leur importance pour la mise en oeuvre des nouvelles orientations que nous souhaitons imprimer à la politique agricole.

J'ai trouvé, dans vos amendements, un grand nombre de remarques et de suggestions pertinentes. La commission, monsieur le rapporteur, a notamment fait un excellent travail pour clarifier la notion de CTE et mieux définir ce qu'il doit contenir. Elle a ainsi affirmé que le CTE devait correspondre à un projet économique ou global intégrant les trois fonctions de l'agriculture : économique, sociale et environnementale. Elle a également rappelé que l'emploi était une des préoccupations majeures auxquelles le CTE doit répondre. Tous ces ajouts clarifient le texte et sont bienvenus. D'autres encore peuvent être retenus, à condition de ne pas rompre l'équilibre entre les différentes préoccupations.

Si je suis d'accord pour aller au fond du débat sur chacun des points soulevés, je souhaiterais néanmoins que le texte final reste lisible et ne soit pas trop alourdi par des mentions redondantes, mais j'aurai, je n'en doute pas, l'occasion de revenir sur ce point au fil des amendements.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

M. Jacob et les membres du groupe du Rassemblement pour la République appartenant à la c ommission de la production et des échanges et M. Dupont ont présenté un amendement, no 299, ainsi rédigé :

« Supprimer l'article 2. »

La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob.

Monsieur le ministre, vous avez déjà longuement évoqué les CTE. Inutile de vous dire que vous ne nous avez pas convaincus, loin de là.

Ces contrats territoriaux d'exploitation, contrairement à ce que M. Patriat disait cet après-midi, constituent, pour nous, la charpente de la loi d'orientation. Dans ces conditions, ils doivent évidemment répondre aux objectifs assignés dans l'article 1er : l'installation en agriculture, la transmission d'exploitation, la parité de la garantie sociale avec les autres catégories socioprofessionnelles, auxquelles nous avons ajouté par voie d'amendement le renforcement de la capacité d'exportation, le développement des biocarburants, la prise en compte des situations spécifiques dans les zones de montagne, les zones défavorisées, les départements d'outre-mer et les zones humides.

Le CTE ne répond à aucun de ces objectifs. C'est la raison pour laquelle nous maintenons nos amendements, au-delà des critiques sur le financement, opéré sur des fonds existants.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission de la production et des échanges ?

M. François Patriat, rapporteur de la commission de la production et des échanges.

Je vous écoute depuis deux jours. Bien entendu, ce n'est pas cette loi que vous auriez souhaitée.

Dans un premier temps, vous auriez voulu un article 1er pléthorique, où on aurait ajouté la fiscalité et d'autres él éments et, maintenant, vous voulez détruire un à un, non pas la colonne vertébrale, mais les quatre chapitres du texte de loi : vous ne voulez pas du CTE, ni du contrôle des structures ; vous êtes en désaccord sur le volet qualité, vous ne voulez pas de l'IGP et vous contestez par ailleurs le volet formation.

J'ai le sentiment que la loi que vous souhaitiez n'est même pas celle qu'avait préparée le prédécesseur de M. Le Pensec,...

M. Christian Jacob.

Si, largement, mais on n'a pas eu l'occasion d'en débattre !

M. François Patriat, rapporteur.

... texte qui comprenait à peu près les mêmes volets, sans l'idée du CTE.

Alors, je conçois que c'est une entreprise de destruction en règle de la loi, c'est clair. Le CTE n'est pas la charpente de la loi, il est un outil au service de l'installation, du territoire, de l'emploi, du déplacement du curseur de la plus-value de l'aval vers l'amont, de l'organisation économique. C'est un outil qui nous paraît aujourd'hui adapté, indispensable, auquel répond favorablement le monde agricole. Aujourd'hui encore, entre dix-neuf heures et vingt et une heures, un responsable du plus gros groupe coopératif de la région Languedoc-Roussillon me disait : le CTE c'est notre outil, c'est notre affaire, nous y adhérons.

M. Jean Auclair.

C'est faux !

M. François Patriat, rapporteur.

Alors j'ai l'impression qu'on ne voit pas les mêmes agriculteurs !

M. Jean Auclair.

C'est votre loi, pas celle des agriculteurs !

M. François Patriat, rapporteur.

Pour ces raisons, la commission a décidé de rejeter votre amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 299.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de quatre amendements nos 447, 721, 303 et 858, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 477, présenté par M. Micaux, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le premier alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural :

« Toute personne physique ou morale exerçant une activité agricole au sens de l'article L.

311-1 p eut souscrire avec l'autorité administrative un contrat territoral d'exploitation. Cette souscription doit au préalable avoir reçu l'accord du propriétaire du fonds sur lequel est exercée cette activité. Le c ontrat territorial d'exploitation comporte un ensemble d'engagements portant sur les conditions et les modes de production, la contribution de l'activité de l'exploitation et celle du propriétaire dans la pérennité de la préservation des ressources naturelles, de l'occupation de l'espace ou de la réalisation de services collectifs, ainsi que du développement de projets collectifs de production ou d'aménagement. »

L'amendement no 721, présenté par M. Dutreil, est ainsi libellé :

« Dans la première phrase du premier alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural, après les mots : " contrat territorial ", rédiger ainsi la fin du premier alinéa : " d'exploitation. Cette souscription doit au préalable avoir reçu l'accord du propriétaire du fonds sur lequel est exercée cette activité. Le contrat territorial d'exploitation comporte


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

un ensemble d'engagements portant sur les conditions et les modes de production, la contribution de l'activité de l'exploitation à la préservation des ressources naturelles, ainsi qu'au développement de p rojets collectifs de production ou d'aménagement ". »

L'amendement no 303, présenté par M. Jacob et les m embres du groupe du Rassemblement pour la République appartenant à la commission de la production, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural :

« Toute personne physique ou morale exerçant une activité au sens de l'article L.

311-1 peut souscrire avec l'autorité administrative un contrat territorial d'exploitation. En cas de faire-valoir indirect, cette souscription doit au préalable avoir reçu l'accord du propriétaire du fonds sur lequel est exercée cette activité. Le contrat territorial d'exploitation comporte un ensemble d'engagements portant sur les conditions et les modes de production, la contribution de l'activité de l'exploitation et celle du propriétaire dans la pérennité de la préservation des ressources naturelles, à l'occupation de l'espace ou à la réalisation de services collectifs, ainsi qu'au développement de projets de production ou d'aménagement. »

L'amendement no 858, présenté par M. Michel Bouvard, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le premier alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural :

« Toute personne physique ou morale exerçant une activité au sens de l'article L.

311-1 peut souscrire avec l'autorité administrative un contrat territorial d'exploitation qui a pour objectif d'inciter les exploitations agricoles à développer un projet global intégrant les trois fonctions économique, environnementale et sociale de l'agriculture mentionnées à l'article 1er . Il comporte un ensemble d'engagements portant sur les conditions et les modes de production ainsi que sur leur efficacité économique, la contribution de l'activité de l'exploitation à la préservation des ressources naturelles, à l'occupation de l'espace ou à la réalisation de services collectifs, ainsi qu'au développement de projets collectifs de production ou d'aménagement. »

La parole est à M. Roger Lestas, pour soutenir l'amendement no 447.

M. Roger Lestas.

L'amendement no 447 de M. Micaux propose d'associer le propriétaire, c'est-à-dire le bailleur du fonds, à la souscription du CTE. Le fait qu'il donne son avis me paraît justifié. Dans les programmes de maîtrise des pollutions d'origine agricole par exemple, sur de petits noyaux d'exploitation, c'est le bailleur du fonds de la petite exploitation qui prend toute la responsabilité de l'investissement lorsque l'exploitation s'agrandit. Je soutiens l'amendement de M. Micaux sur le contrat territorial d'exploitation qui va dans le même sens.

M. le président.

L'amendement no 721 n'est pas défendu.

La parole est à M. Christian Jacob, pour soutenir l'amendement no 303.

M. Christian Jacob.

L'amendement no 303 comme celui de M. Micaux vise à associer les propriétaires. En cas de faire-valoir indirect, la souscription d'un CTE doit au préalable avoir reçu l'accord du propriétaire du fonds sur lequel est exercée cette activité. Dans certains cas, la nature du bien peut changer. Le propriétaire doit au moins avoir l'occasion d'exprimer son avis. Tout le monde pourrait intervenir, les associations de consommateurs, les associations de défense de l'environnement, et émettre un avis sur ces CTE, sauf le propriétaire du bien foncier ? Cela paraît pour le moins choquant.

Si l'on souhaite continuer à avoir une agriculture demain, si l'on souhaite voir des jeunes s'installer, on doit prendre bien davantage en considération les propriétaires fonciers que cela n'est le cas. Il faut bien que des propriétaires prennent à bail afin d'éviter aux jeunes agriculteurs d'être confrontés en plus du coût auquel ils ont à faire face dans les dix ou quinze premières années suivant leur installation au coût de l'achat du foncier.

M. le président.

L'amendement no 858 est-il défendu ?

M. Serge Poignant.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces trois amendements ?

M. François Patriat, rapporteur.

Ils ont été repoussés par la commission, mais l'amendement no 858 de M. Bouvard est quasiment satisfait par l'amendement no 79, deuxième rectification, de la commission que nous examinerons ultérieurement.

Trois éléments de réponse.

Tout d'abord, pour avoir de bons fermiers, il faut de bons propriétaires, c'est évident. Mais là n'est pas la question. Il s'agit aujourd'hui de traiter du CTE. Comment un tel contrat pourrait-il être destructeur du bien sur lequel s'exercera l'activité ? Le CTE, tel que vient de le définir parfaitement M. le ministre, constitue au contraire un projet global qui vise à valoriser le potentiel économique, agronomique, différencié de l'exploitation.

Ensuite, nous ne souhaitons pas que le texte de loi fasse intervenir les relations propriétaires-bailleurs.

Enfin, il est inscrit dans le texte de loi que le contrat territorial d'exploitation sera signé sous réserve des droits des tiers. C'est clair. Cela garantit par ailleurs le bien du propriétaire. Vous avez donc satisfaction, monsieur Jacob.

Vous avez cru trouver un nouvel écueil, mais votre amendement est redondant.

Pour toutes ces raisons, la commission a rejeté les trois amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

La Fédération nationale de la propriété agricole a été partie prenante au groupe de travail sur la loi d'orientation agricole. L'aspect territorial du CTE vise notamment à développer des pratiques agronomiques qui soient favorables à l'environnement et à la protection des ressources naturelles. Ces pratiques ne peuvent que renforcer la conduite en bon père de famille du fermier. Elles ne requièrent donc pas l'avis préalable du propriétaire, qui, au demeurant, viendrait alourdir les procédures.

M. le président.

La parole est à M. Christian Jacob, pour répondre à la commission.

M. Christian Jacob.

Monsieur le rapporteur, qu'il n'y ait pas destruction du bien, c'est une évidence, du moins je l'espère. Mais il peut y avoir modification de la nature des biens, dans l'affectation des bâtiments par exemple.

Dans les baux ruraux, le propriétaire peut spécifier un certain nombre de choses : le maintien de certaines superficies en herbe, le maintien d'arbres ou de clôtures, etc. Si


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

on n'inscrit pas l'autorisation expresse du propriétaire, celui-ci peut se retrouver, à la fin du fermage ou à la fin du contrat, avec une modification de son bien qu'il n'avait pas souhaitée. Dans la mesure où l'on demande l'avis à tout le monde, demander aussi l'avis du propriétaire me semble un minimum !

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine, pour répondre au Gouvernement.

M. Jean-Claude Lemoine.

Il peut aussi y avoir une modification de destination des bâtiments. La pluriactivité est prévue dans les CTE. Rien n'empêche le fermier d'ouvrir un gîte, par exemple. Quand le propriétaire récupérera son bien, ses bâtiments agricoles auront pu subir des modifications qui peuvent lui poser des difficultés.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Patriat, rapporteur.

Le point évoqué par M. Jacob et M. Lemoine porte un nom, c'est la conduite de l'exploitation. Celle-ci est prévue dans le code rural.

M. Christian Jacob.

Non, nous sommes en présence d'un nouvel outil.

M. François Patriat, rapporteur.

Si jamais, monsieur Lemoine, le fermier transforme une étable en gîte, je ne pense pas que le propriétaire y perde beaucoup ! (Sourires.)

M. Christian Jacob.

C'est de la mauvaise foi.

M. Jean-Claude Lemoine.

Et les impôts fonciers ?

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 447.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 303.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 858.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Sauvadet, de Courson, Gengenwin, Heriaud, Lestas, Christian Martin et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et apparentés ont présenté un amendement, no 747, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural, après les mots : "peut souscrire", insérer les mots : ", après en avoir informé le propriétaire des fonds sur lesquels est exercée cette activité,". »

La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet.

Monsieur le ministre, vous avez dit tout à l'heure que vous aviez largement engagé la concertation avec la Fédération nationale de la propriété a gricole. C'est bien. Ces sujets sont essentiels, ils concernent en effet la destination des biens. Malheureusement, on ne trouve pas trace de cette concertation dans le texte que vous avez proposé.

Aussi, dans le prolongement des amendements qui viennent d'être déposés notamment Christian Jacob, nous avons déposé un amendement qui pourrait recevoir votre agrément puisqu'il vise à informer le propriétaire avant la signature du CTE.

Dès le début de cette discussion, nous avons insisté sur la nécessité de n'opposer ni les vocations agricoles entre elles ni les acteurs agricoles. Que les propriétaires soient systématiquement absents de ce texte, alors qu'ils constituent l'un des fondements de l'activité agricole, nous paraît choquant.

J'aimerais que vous nous précisiez, monsieur le ministre, si vous avez délibérément oublié les propriétaires ou si vous souhaitez les associer à cette démarche qui peut modifier la structure du bien. Il ne s'agit pas, comme vous l'avez laissé entendre, d'engager la propriété agricole vers des destinées qui en modifieraient considérablement la nature. Il nous semble simplement légitime d'informer le propriétaire de tout changement du bien.

C'est un amendement de bon sens.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

Monsieur Sauvadet, je crois avoir déjà répondu. Je soulèverai une objection supplémentaire. Il y a 4 millions de propriétaires fonciers et 600 000 exploitations, un agriculteur peut très bien avoir quatre ou cinq propriétaires, voire huit ou neuf.

M. Guy-Michel Chauveau.

C'est courant en effet.

M. François Patriat, rapporteur.

S'il fallait avoir l'accord de chacun d'entre eux avant de signer un CTE, vous imaginez la difficulté. Vous avez vous-même reconnu tout à l'heure que c'était difficile. Ce le serait encore plus.

M. François Sauvadet.

Je souhaite que les propriétaires soient seulement informés.

M. François Patriat, rapporteur.

C'est la même démarche.

M. François Sauvadet.

Non !

M. Christian Jacob.

C'est un amendement de repli.

M. François Patriat, rapporteur.

Tout ce que vous avez évoqué est déjà prévu dans le code rural.

La commission a repoussé l'amendement no 747.

M. François Sauvadet.

Et vous ?

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Défavorable !

M. le président.

La parole est à M. Christian Jacob, pour répondre à la commission.

M. Christian Jacob.

Dans l'amendement no 303, je demandais l'autorisation expresse du propriétaire. François Sauvadet demande simplement que le propriétaire soit informé.

M. Guy-Michel Chauveau.

Ce serait difficile à gérer.

M. Christian Jacob.

Adresser simplement un courrier d'information à son propriétaire me semble le minimum, si on respecte tant soit peu son propriétaire.

M. François Sauvadet.

C'est de la simple courtoisie.

M. Jacques Fleury.

Il n'y a pas de sanctions, cela n'a aucune importance !

M. le président.

La parole est à M. François Sauvadet, pour répondre au Gouvernement.

M. François Sauvadet.

J'ai posé des questions. Pour la qualité des débats et pour éclairer nos compatriotes et les agriculteurs, notamment sur la portée du CTE, je crois qu'il ne faut pas pratiquer l'esquive ou dire simplement que l'on s'oppose aux amendements.

Monsieur le ministre, je vous ai posé une question préc ise au travers de cet amendement : pourquoi ne retrouve-t-on jamais dans votre texte les propriétaires ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

Nous ne prétendons pas que l'intérêt des propriétaires doit primer sur celui des personnes qui exploitent le bien.

Nous disons simplement qu'ils doivent être présents.

Dans notre conception de l'agriculture, il ne faut pas opposer les acteurs du territoire, les acteurs sociaux entre eux. J'aimerais avoir une réponse à ma question.

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Le contrat territorial d'exploitation ne porte en rien préjudice aux biens des propriétaires.

M. Christian Jacob.

C'est ce que vous dites !

M. François Guillaume.

On n'en sait rien !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Est-ce que pour un assolement on informe le propriétaire ?

M. Christian Jacob.

C'est différent, monsieur le ministre.

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Non, vraiment, il est répondu à votre préoccupation par la clause qui est prévue dans le contrat territorial : le CTE est conclu sous réserve du droit des tiers. Votre amendement est donc tout simplement redondant.

M. Christian Jacob.

Pas du tout !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

On fait de la « sur-administration ».

M. Jacques Fleury.

En effet !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 747.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 646 et 14, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 646, présenté par MM. Proriol, Kergueris, Forissier, Goulard et Mme Bassot, est ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural, après les mots : "contrat territorial d'exploitation qui", insérer les mots : "a pour objectif d'inciter les exploitations agricoles à développer un projet économique. Il". »

L'amendement no 14, présenté par M. Rebillard, est ainsi libellé :

« Après les mots : "un contrat territorial d'exploitation", rédiger ainsi la fin du premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural : "qui a pour objectif d'inciter les exploitations agricoles à développer un projet économique global intégrant les trois fonctions de l'agriculture visées à l'article 1er . Il comporte..." (Le reste sans changement.) » La parole est à M. Jean Proriol, pour soutenir l'amendement no 646.

M. Jean Proriol.

Dans la discussion générale, comme dans la discussion sur l'article 2, nous avons, les uns et les autres, insisté sur le fait que l'activité principale de l'agriculteur c'était quand même la production. Vous ne nous avez jamais dit le contraire.

M. Guy-Michel Chauveau.

Heureusement !

M. Jean Proriol.

Nous vous proposons simplement de nous en donner acte et de l'écrire dans le texte. Merci pour celui qui a dit « heureusement » puisqu'il a l'air de partager notre point de vue.

M. Guy-Michel Chauveau.

Vous enfoncez des portes ouvertes !

M. Jean Proriol.

Puisque vous reconnaissez oralement que l'activité de production est l'activité principale, écrivons-le dans le texte.

M. Jacques Fleury.

L'amendement donne un caractère exclusif.

M. le président.

La parole est à M. Jacques Rebillard, pour soutenir l'amendement no

14.

M. Jacques Rebillard.

Mon amendement va dans le même sens. L'un de ses objectifs est justement de répondre à l'opposition et en lui prouvant que le contrat territorial d'exploitation ne néglige pas la fonction de production.

La loi d'orientation, et en particulier le CTE, a notamment pour objectif de corriger les excès des modes de production actuels. En aucun cas un responsable politique ne négligerait la fonction de production de l'agriculture.

M. François Sauvadet.

Ah !

M. Jacques Rebillard.

Mais il vaut mieux le dire.

L'autre objectif, c'est d'éviter que ce type de contrat ne soit dévié de sa fonction principale, la production, et utilisé à des fins marginales. En d'autres termes, il n'est pas nécessaire de permettre à des baba cool de s'installer en agriculture.

(Sourires.)

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces deux amendements ?

M. François Patriat, rapporteur.

Comme nous l'avons fait pour nombre d'amendements à l'article 1er , je renvoie M. Proriol et M. Rebillard, ils auront ainsi satisfaction, à l'amendement no 79, deuxième rectification, à l'article 2 qui est ainsi rédigé :

« Après le premier alinéa de cet article, insérer l'alinéa suivant :

« Le contrat territorial d'exploitation a pour objectif d'inciter les exploitations agricoles à développer un projet économique global qui intègre les fonctions de l'agriculture mentionnées à l'article 1er de la loi no du d'orientation agricole. »

Nous avons préféré cette rédaction qui reprend les deux propositions de façon plus complète et qui émane, ne nous le cachons pas, des mêmes sources.

M. François Sauvadet.

De nous !

M. Françoise Patriat, rapporteur.

Monsieur Sauvadet, vous avez été très prolifique, mais votre imagination, que je connais, ne vous permet quand même pas de tout inventer. La mienne non plus d'ailleurs ! Mais ce soir, je n'ai pas envie de me battre. J'ai envie de débattre avec vous.

M. Jean Proriol.

Nous aussi.

M. François Patriat, rapporteur.

Bien entendu.

Je pense, monsieur Proriol et monsieur Rebillard, que vous pourriez accepter ce repli sur l'amendement no 79, deuxième rectification. On ne vas pas voter trois amendements qui ont la même signification.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

La préoccupation de M. Proriol est fort bien exprimée dans l'amendement no 79, deuxième rectification, et j'apprécierais qu'il en tirât toutes les conséquences.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

M. le président.

La parole est à M. François Sauvadet, pour répondre à la commission.

M. François Sauvadet.

Tout au long de ce débat, nous avons salué le fait que M. Patriat nous écoute. Nous avons simplement regretté qu'il ne nous écoute pas davantage.

M. Joseph Parrenin.

Trop plutôt !

M. François Sauvadet.

Sur la vocation économique, on ne peut pas dire que cette idée n'ait pas été suggérée par l'opposition de manière régulière, je vous renvoie aux propos que nous avons tenus. Depuis le début, nous avons précisément demandé que la vocation de production et la vocation de projet économique de l'exploitation soient bien clairement indiquées comme étant les fondements de l'activité agricole.

Je me réjouis donc, monsieur le rapporteur, que vous ayez repris cette idée et, monsieur le ministre, que vous en ayez souligné la grande qualité.

M. Jean-Paul Durieux.

Enfantillage !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 646.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

La parole est à M. Jacques Rebillard.

M. Jacques Rebillard.

Monsieur le président, je retire l'amendement no

14.

M. le président.

L'amendement no 14 est retiré.

La parole est à M. Proriol.

M. Jean Proriol.

Vous avez été trop rapide, monsieur le président. Vous avez soumis au vote l'amendement no 646 alors que j'allais le retirer. Je le fais a posteriori, sachant qu'il a été repoussé.

(Sourires.)

M. le président.

M. Guillaume et les membres du groupe du Rassemblement pour la République appartenant à la commission de la production ont présenté un amendement, no 300, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural, substituer aux mots : "les conditions et les modes de production" les mots : "une conduite de son activité respectueuse de l'environnement". »

La parole est à M. François Guillaume.

M. François Guillaume.

Je m'inquiète des engagements qui vont être demandés à l'exploitant : il devrait désormais s'engager sur les modes de production. Ceux-ci sont évolutifs. Par ailleurs, il faut laisser à l'exploitant, qui est chef d'entreprise, le soin de gérer son exploitation. On ne va tout de même pas lui indiquer comment il faut faire, il le sait en général mieux que les législateurs ! De plus, j'ai le sentiment que nous sommes en train de mettre en place une législation aux termes sibyllins, sans explication ni justification claires, qui nécessiteront d'être précisés par des décrets d'application. C'est extrêmement dangereux. Nos administrés, qui sont victimes de ce genre d'interprétation de la loi par des décrets, protestent en se demandant comment on a pu en arriver à de telles dispositions. Ils se retournent alors contre le législateur, qui généralement n'y peut rien car ce sont des décrets qui ont précisé des concepts peu clairs.

J'ai cru comprendre, monsieur le ministre, qu'il s'agissait simplement de demander aux agriculteurs de s'engager sur des modes de production respectueux de l'environnement. Et c'est la raison pour laquelle je propose de substituer à une phrase de votre texte celle qui figure dans mon amendement. S'il s'agit vraiment de respecter l'environnement, dites-le tout de suite. Si ce n'est pas le cas, précisez-nous ce que vous entendez par modes de production de telle façon que nous le sachions avant de voter. Nous avons besoin d'y voir clair sur le sujet.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

Monsieur Guillaume, vous venez de faire mentir M. Sauvadet : je vous écoute ! Dites-moi quel rapporteur d'un texte de loi, disposant d'une forte majorité, a accepté autant d'amendements émanant de l'opposition ?

M. Christian Jacob.

Personne n'a fait aussi bien que vous, bien sûr ! (Sourires.)

M. François Patriat, rapporteur.

Avec ceux que j'ai acceptés ce matin, cela en fait quatre-vingt-trois, soit plus du tiers des amendements acceptés par la commission ! Dans mes rangs, on me dit même que je vais parfois un peu loin.

Ne soyez plus inquiet, monsieur Guillaume, votre amendement a été accepté par la commission.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Le Gouvernement considère que cet amendement est redondant, mais il s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

M. le président.

La parole est à M. Jean Auclair.

M. Jean Auclair.

Monsieur le ministre, vous n'avez toujours pas répondu à la question que je vous ai posée et que se posent les agriculteurs de zones difficiles comme la Creuse. Ces derniers veulent savoir si, lorsqu'ils signeront un CTE, il sera question du chargement. Si tel est le cas, pouvez-vous m'indiquer quel sera le plafond du chargement pour qu'un agriculteur puisse bénéficier d'un

CTE ?

M. le président.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Ce n'est pas au ministre à définir, département par département les spécificités du CTE. C'est donc dans le contrat type que de telles précisions seront arrêtées.

M. Jean Auclair.

Il y aura tant de chargements que de départements !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 300.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'amendement no 15 de M. Jacques Rebillard n'a plus d'objet.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 77 et 549.

L'amendement no 77 est présenté par M. Patriat, rapporteur, M. Verguier et les commissaires membres du groupe socialiste ; l'amendement no 549 est présenté par MM. Adevah-Poeuf, Patriat, Parrenin, Bataille et les membres du groupe socialiste.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article 311-3 du code rural, après les mots : "modes de production", insérer les mots : "l'emploi,". »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no

77.

M. François Patriat, rapporteur.

La bataille pour l'emploi constitue une dimension essentielle de la politique que doit mener tout gouvernement. La préservation de l'emploi constitue aussi un aspect de la multifonctionnalité de l'agriculture, à savoir la fonction sociale.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

Nous avons rappelé que ce texte de loi repose à la fois sur l'efficacité, sur la légitimité et sur l'équité. S'agiss ant de l'efficacité, l'emploi fait partie des éléments que nous voulons voir avancer.

M. le président.

Puis-je considérer, monsieur le rapporteur, que vous avez également défendu l'amendement no 549 ?

M. François Patriat, rapporteur.

Tout à fait, monsieur le président.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur ces deux amendements ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 77 et 549.

(Ces amendements sont adoptés.)

M. Christian Jacob.

Pourtant, c'est redondant !

M. le président.

M. Jean-Michel Marchand, Mme Aubert, MM. Aschieri, Cochet, Hascoët et Mamère ont présenté un amendement, no 735 corrigé, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural, après les mots : "les m odes de production,", insérer les mots : "la recherche d'un niveau élevé de sécurité et de qualité des biens alimentaires et non alimentaires produits sur l'exploitation,". »

La parole est à Mme Marie-Hélène Aubert.

Mme Marie-Hélène Aubert.

Il s'agit, par cet amendem ent, de préciser que parmi les engagements que comporte un CTE figure la recherche d'un niveau élevé de sécurité et de qualité des biens alimentaires et non alimentaires produits sur l'exploitation. Il nous semble essentiel d'affirmer ces objectifs de qualité et de sécurité.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

Défavorable dans la mesure où cet engagement est implicite compte tenu de la définition du CTE.

M. Michel Bouvard.

C'est redondant !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Même avis que la commission.

M. le président.

La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob.

Un tel amendement sous-entend que les produits agricoles ne répondent pas à un niveau de sécurité alimentaire.

M. Michel Bouvard.

C'est une suspicion inadmissible !

M. Christian Jacob.

En effet, ce type d'amendement ne peut que faire naître un sentiment de suspicion permanent et systématique. Or la France peut se vanter, quels que soient les gouvernements ou les ministres en place, d'avoir un système de sécurité alimentaire très fiable comparé à ceux de tous les autres pays, de l'Union européenne comme du monde entier.

Inscrire ce genre de phrase dans le texte revient à faire naître un sentiment de suspicion à l'égard de nos produits et des producteurs eux-mêmes, mais aussi à l'égard des fonctionnaires de la direction de l'alimentation chargés des contrôles ou du corps des douaniers.

On veut faire croire que, en renforçant les dispositions du texte, on va améliorer la qualité. Mais de qui se moque-t-on ? Y a-t-il en France des décès causés par l'insécurité alimentaire ? Non ! Par conséquent, ne faisons pas d'excès de zèle dans ce domaine et respectons les producteurs, qui étaient attachés à la qualité bien avant que de telles propositions soient faites. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 735.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Leyzour, Dutin, Goldberg, Sandrier, Vila et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 832, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural, après les mots : "les modes de production", insérer les mots : "le développement de productions de qualité". »

La parole est à M. Félix Leyzour.

M. Félix Leyzour.

Cet amendement fait également référence au développement de productions de qualité. J'ai bien entendu ce que viennent d'indiquer le rapporteur et le ministre, considérant qu'une telle précision n'apporterait rien de plus par rapport aux objectifs qui ont été fixés avec le CTE. Par conséquent, je retire mon amendement.

M. Michel Bouvard.

C'est redondant !

M. le président.

L'amendement no 832 est retiré.

M. Jean-Michel Marchand, Mme Aubert, MM. Aschieri, Cochet, Hascoët et Mamère ont présenté un amendement, no 734 corrigé, ainsi rédigé :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 311- du code rural, après les mots : "l'activité de l'exploitation", insérer les mots : ", dans le cadre des principes énoncés à l'article L. 200-1 du code rural,". »

La parole est à Mme Marie-Hélène Aubert.

Mme Marie-Hélène Aubert.

J'espère que le rapporteur écoutera autant la majorité que l'opposition.

S'agissant de la contribution de l'activité de l'exploitation à la préservation des ressources naturelles, je voudrais préciser qu'elle s'exerce dans le cadre de l'article L. 200-1 du code rural, qui est d'ailleurs issu de la loi Barnier. Cet article pose un certain nombre de principes qui permettent de préciser ce qu'il convient d'entendre par préservation de l'environnement. Je le lis : « Les espaces, ressources et milieux naturels, les sites et paysages, « la qualité de l'air », les espèces animales et végétales, la diversité et les équilibres biologiques auxquels ils participent font partie du patrimoine commun de la nation.

« Leur protection, leur mise en valeur, leur restauration, leur remise en état et leur gestion sont d'intérêt général et concourent à l'objectif de développement durable qui vise à satisfaire les besoins de développement

« et la santé » des générations présentes sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs. Elles s'inspirent, dans le cadre des lois qui en définissent la portée, des principes suivants : le principe de précaution,... le principe d'action préventive et de correction,... le principe pollueur-payeur,... le principe de participation... »

Cet article du code rural me paraît constituer une référence importante pour préciser ce qu'on entend par protection de l'environnement, notamment pour préciser


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qu'il doit s'agir essentiellement d'actions préventives et pas seulement de solutions curatives qui, d'ailleurs, sont souvent fort imparfaites et suffisent à peine à corriger les dégâts commis.

Par conséquent, il nous semble extrêmement important de préciser ce qu'on entend par préservation des ressources naturelles et, pour cela, de faire référence à l'article L. 200-1 du code rural.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

Madame Aubert, le rapporteur rapporte au nom de la commission. Il ne traite pas mieux telle ou telle partie de cet hémicycle. Il essaie de dégager des synthèses qui correspondent à l'esprit du texte. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. François Sauvadet.

C'est une belle conception !

M. François Patriat, rapporteur.

Vous tenez à me mettre en difficulté avec mes amis ? (Sourires.) Cela dit, j'apprécie votre réaction.

Madame Aubert, nous avons retenu ce matin en commission plusieurs des amendements que vous aviez déposés avec M. Marchand.

M. Michel Bouvard.

Ces votes ont été acquis grâce aux voix de l'opposition !

M. François Patriat, rapporteur.

S'agissant du présent amendement, je considère qu'il ne suffit pas d'inscrire

« durable » partout pour que ce soit durable.

Nous avons souligné toute la journée d'hier que l'agriculture devait produire des éléments alimentaires et non alimentaires de qualité et que seule une politique de filières reposant sur la qualité permettra à l'agriculture de dégager demain des revenus et des plus-values.

Rajouter à chaque fois des éléments qui apparaissent comme redondants ne pourrait qu'alourdir le texte.

Vous avez raison sur le fond, mais nous pensons que ce n'est pas nécessaire sur la forme.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

L'objectif poursuivi par cet amendement est mentionné, nous nous en souvenons tous, dans l'article 1er du projet de loi.

Le texte que je propose suggère d'ailleurs d'aller au-delà de ce qui est simplement une exigence de respect de la réglementation, puisque nous encourageons les actions positives des agriculteurs pour la préservation des ressources naturelles.

Dans ces conditions, l'amendement ne m'apparaît pas de nature à clarifier le texte et je suis donc défavorable à son adoption.

M. le président.

La parole est à Mme Marie-Hélène Aubert.

Mme Marie-Hélène Aubert.

Je ne comprends pas bien que l'on accepte un amendement de M. Guillaume (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République), qui précise que l'exploitation doit avoir une conduite respectueuse de l'environnement - et là, on considère que ce n'est pas redondant - alors que l'on refuse un amendement qui tend à préciser ce que l'on entend par respect de l'environnement.

M. Christian Jacob.

Le rapporteur serait-il partial ?

Mme Marie-Hélène Aubert.

J'avoue que je suis assez stupéfaite de voir la façon dont sont pris en considération les différents amendements relatifs à ce sujet.

Si cette référence à l'article L.

200-1 du code rural effraie et qu'on préfère s'en tenir à des déclarations très générales sur le respect de l'environnement, cela augure mal du contenu du contrat territorial d'exploitation !

M. Christian Jacob.

Et cela peut être lourd de conséquences pour la majorité !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 734 corrigé.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de six amendements, nos 36, 78 corrigé, 5, 229, 239 et 261, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 36, présenté par M. Poignant, est ainsi rédigé :

« A la fin du premier alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural, substituer aux mots : "à l'occupation de l'espace ou à la réalisation de services collectifs ainsi qu'au développement de projets collectifs de production ou d'aménagement", les mots : "au développement de projets collectifs de production agricole". »

L'amendement no 78 corrigé, présenté par M. Patriat, rapporteur, MM. Poignant, Lestas, Le Nay, Morisset, Deprez et Leyzour, est ainsi libellé :

« Après les mots : "ou à la réalisation", rédiger ainsi la fin du premier alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural : "d'actions d'intérêt général, ainsi qu'au développement de l'emploi et de projets individuels ou collectifs de production, de transformation et de commercialisation". »

Sur cet amendement, MM. Sauvadet, de Courson, Gengenwin, Hériaud, Martin et Méhaignerie ont présenté un sous-amendement, no 516, ainsi rédigé :

« Compléter l'amendement no 78 corrigé par les mots : ", dans le respect d'une concurrence équilibrée et loyale". »

Les amendements nos 5, 229, 239 et 261 sont identiques.

L'amendement no 5 est présenté par MM. Robert L amy, Poignant, Etienne, Jacob, Mignon, Angot, Demange et les membres du groupe du Rassemblement pour la République appartenant à la commission de la production ; l'amendement no 229 est présenté par M. Estrosi ; l'amendement no 239 est présenté par M. Micaux ; l'amendement no 261 est présenté par

M. Nicolin.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural, substituer aux mots : "ou à la réalisation de services collectifs, ainsi qu'au développement de projets collectifs", les mots : "agricole ainsi qu'au développement de projets collectifs agricoles". »

La parole est à M. Serge Poignant, pour soutenir l'amendement no

36.

M. Serge Poignant.

Cet amendement est en cohérence parfaite avec celui que j'avais déposé à l'article 1er et propose notamment de supprimer la référence à la réalisation de services collectifs, comme cela avait d'ailleurs été décidé en commission.

On va me rétorquer que l'amendement no 78 corrigé, que j'ai cosigné et qui est en discussion commune avec celui-ci, devrait me donner satisfaction. Certes, il me donne partiellement satisfaction, mais encore faudrait-il


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bien définir les actions d'intérêt général. Pour ma part, je p référerais que l'on s'en tienne, comme je l'avais demandé à l'article 1er , au développement de projets collectifs de production agricole. D'autant que l'amendement no 78 corrigé fait référence à des projets collectifs non seulement de production, mais aussi de transformation et de commercialisation.

Je souhaite également supprimer la référence à des projets collectifs d'aménagement, considérant qu'il s'agit plus d'une tâche incombant à la collectivité. Or l'amendement no 78 corrigé ne supprime pas cette référence. Je maintiens donc mon amendement afin qu'il ne soit plus fait référence aux services collectifs, lesquels empiètent sur le travail des artisans.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no 78 corrigé.

M. François Patriat, rapporteur.

Par la même occasion, je donnerai par avance l'avis de la commission sur tous les amendements.

Nous avons déjà eu ce débat tout à l'heure. Moimême, en commission, j'ai jugé que l'expression « services collectifs » pouvait prêter à confusion et engendrer des querelles inutiles. Par conséquent, j'ai préféré revenir à l'esprit du texte et qu'il soit fait référence à des actions d'intérêt général : j'ai donc, avec certains collègues, déposé un amendement en ce sens qui devrait donner satisfaction à nombre d'entre nous.

Dans cet amendement, nous faisons en outre référence au « développement de l'emploi et de projets individuelso u collectifs de production, de transformation et commercialisation ». Or, dans le même souci de ne pas créer d'équivoque, le Gouvernement a l'intention de déposer un sous-amendement qui tendrait à supprimer à la fin de l'amendement les mots : « de transformation et de commercialisation ». Je défends donc l'amendement no 78 corrigé tel qu'il a été approuvé par la commission, sous réserve de la proposition du Gouvernement.

M. le président.

La parole est à M. Robert Lamy, pour soutenir l'amendement no

5.

M. Robert Lamy.

Il est défendu.

M. le président.

La parole est à M. Christian Estrosi, pour défendre l'amendement no 229.

M. Christian Estrosi.

Même avec l'amendement de la commission, on peut craindre que subsiste un doute sur la possibilité d'utiliser des aides publiques pour livrer une concurrence déloyale à certaines activités dans le monde rural, et plus particulièrement dans les zones de montagne, où nous savons que la vie n'est pas facile.

M. Michel Bouvard.

C'est vrai !

M. Christian Estrosi.

Il ne faudrait pas que demain, des artisans et des commerçants se voient concurrencés de façon déloyale à cause d'aides publiques accordées à des exploitations agricoles auxquelles on autoriserait la possibilité de diversifier leurs activités.

M. le président.

La parole est à M. Roger Lestas, pour défendre l'amendement no 239.

M. Roger Lestas.

L'amendement no 239 de M. Micaux rejoint celui de M. Estrosi.

Il est proposé, par cet amendement, de ne pas inclure dans le champ du contrat territorial d'exploitation la possibilité de financer des actions portant sur « la production de services collectifs », qui iraient bien au-delà des domaines traditionnels de l'agriculture, y compris dans sa conception multifonctionnelle.

En effet, la contractualisation entre les exploitants agricoles et l'Etat en vue du bénéfice d'aides publiques aboutira à avantager une catégorie socioprofessionnelle par rapport aux autres pour l'exercice d'une même activité.

Bien entendu, il ne s'agit pas là de remettre en cause l'effort de l'Etat en direction de l'agriculture. Toutefois, il serait inacceptable que celui-ci accorde, dans le cadre de ces contrats, des aides financières aux agriculteurs pour la réalisation de travaux relevant notamment de l'artisanat ou du commerce. Une telle orientation engendrerait de graves distorsions de concurrence, qui ne peuvent être admises en milieu rural où le tissu économique est fragile.

C'est pourquoi il est impératif que l'objet de ces contrats territoriaux d'exploitation soit strictement limité à l'activité agricole proprement dite. A cet égard, cet amendement doit s'accompagner d'une modification de l'article 6 du présent projet de loi, qui étend sensiblement la notion juridique de l'activité agricole.

M. le président.

L'amendement no 261 n'est pas défendu.

Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Il s'agit bien, ici, d'inscrire dans les objectifs de la loi les trois fonctions de l'exploitation agricole : économique, sociale et environnementale. Je saisis cette occasion pour rassurer les représentants des artisans et des commerçants qui se sont inquiétés du fait qu'une portée trop large pourrait être donnée au CTE. Il s'agit, avec le CTE, de rester dans le cadre de la définition de cette exploitation multifonctionnelle.

Par ailleurs, la participation à la réalisation de projets collectifs m'apparaît de nature à présenter des aspects positifs pour les autres activités développées en milieu rural.

En conséquence, je suis favorable à l'amendement no 78 corrigé, sous réserve de l'adoption d'un sous-amendement tendant à supprimer à la fin de cet amendement les mots : « de transformation et de commercialisation ».

J'ajoute que si l'Assemblée adopte tout à l'heure l'amendement de M. Leyzour tendant à faire figurer le mot « emploi » à la phrase précédente, il ne me paraît pas opportun de conserver dans le texte de l'amendement no 78 corrigé les mots « de l'emploi ».

M. le président.

Je donne lecture du sous-amendement p résenté par le Gouvernement et qui portera le numéro 953 :

« A la fin de l'amendement no 78 corrigé, supprimer les mots : "de transformation et de commercialisation". »

La parole est à M. François Sauvadet, pour répondre à la commission.

M. François Sauvadet.

Nous sommes là au coeur d'un vrai problème qui a fait l'objet d'une réflexion approfondie en commission, laquelle nous a tous beaucoup intéressés.

Vous avez rappelé, monsieur le ministre, les préoccupations exprimées par un certain nombre d'artisans, mais aussi par des entrepreneurs de travaux agricoles qui déploient leur activité sur l'ensemble du territoire.

Je ne vous cache pas que nous aurions préféré que l'article 2 soit ainsi rédigé : « [...] un contrat territorial d'exploitation qui comporte un ensemble d'engagements portant sur les conditions et les modes de production, la contribution de l'activité de l'exploitation à la préserva-


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t ion des ressources naturelles et à l'occupation de l'espace ». Et tout ce qui se traduirait par des services collectifs aurait été induit par les missions assumées dans le cadre de l'activité de l'exploitation liée à la préservation des ressources naturelles.

Vous avez souhaité aller au-delà pour marquer une volonté politique sur laquelle nous appelons votre attention. Il faut veiller, lorsqu'on veut marquer une volonté, à ne pas introduire de nouveaux déséquilibres dans un monde rural où tous les acteurs doivent trouver leur place. Nous sommes persuadés que les agriculteurs ont un rôle essentiel à jouer, et nous l'avons tous rappelé au cours de ce débat, mais, de grâce, n'introduisez pas de nouvelles disparités ou de nouvelles concurrences par le biais des aides publiques, car cela risque d'avoir des conséquences sur l'emploi.

Nous avons présenté un amendement de repli, en liaison avec la commission, et nous souhaitons vivement que la notion d'emploi reste au coeur des préoccupations car elle est tout à fait essentielle, s'agissant des projets de production, de transformation et de commercialisation. Elle est également nécessaire si l'on veut, comme vous le souhaitez, mieux valoriser les produits, et vous avez insisté à ce sujet sur l'importance des microfilières.

M. le président.

La parole est à M. Serge Poignant.

M. Serge Poignant.

Je maintiens l'amendement no 36 mais je ne suis pas opposé au sous-amendement du Gouvernement car je n'avais pas demandé que soit rajouté le développement de l'emploi et de projets individuels ou collectifs de production, de transformation et de commerc ialisation, comme l'a proposé la commission dans l'amendement no 78 corrigé.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Patriat, rapporteur.

Je réponds à M. Estrosi, qui connaît bien la montagne, pour lever une ambiguïté.

Qui pourrait douter que les agriculteurs, surtout en montagne, effectuent des actions d'intérêt général ? Il ne s'agit pas de traduire un souci politique, monsieur Sauvadet, mais de rappeler qu'on entend rémunérer d'une façon ou d'une autre certaines fonctions assumées par les agriculteurs.

Quand des éleveurs vont faire paître leurs animaux dans certaines zones pour réduire les risques d'incendie, c'est une action d'intérêt général.

Quand les agriculteurs de montagne participent à des actions à but touristique, ce sont des actions d'intérêt général.

Ne confondons pas actions d'intérêt général, multifonctionnalité et pluriactivité.

M. François Sauvadet.

Mais il ne faut pas confondre l'objectif avec l'activité induite !

M. François Patriat, rapporteur.

Pour la pluriactivité, nous avons d'ailleurs pour amendement, bien défini la notion et encadré le chiffre d'affaires.

Il ne doit donc pas y avoir de problème entre nous, d'autant que je vous propose d'adopter un amendement de l'opposition.

M. le président.

La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob.

Serge Poignant a accepté le compromis proposé par M. le ministre. Mais on n'en serait pas arrivé là si on en était resté à la rédaction de l'article L. 311-1 du code rural, qui est simple et évite toute ambiguïté : « Sont réputées agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à l'exploitation d'un cycle biologique de caractère végétal ou animal et constituant une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement de ce cycle ainsi que les activités exercées par un exploitant agricole qui sont dans le prolongement de l'acte de production ou qui ont pour support l'exploitation. »

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

36. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'amendement no 78 corrigé et les sous-amendements nos 953 et 516 tombent, de même que les amendements nos 5, 229 et 239.

Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 301 et 509.

L'amendement no 301 est présenté par M. Guillaume et les membres du groupe du Rassemblement pour la République appartenant à la commission de la production ; l'amendement no 509 est présenté par MM. Sauvadet, de Courson, Gengenwin, Heriaud, Lestas, Ligot et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et apparentés.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Dans le premier alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural, supprimer les mots : "ou à la réalisation de services collectifs". »

La parole est à M. François Guillaume, pour soutenir l'amendement no 301.

M. François Guillaume.

Il est défendu.

M. le président.

La parole est à M. Germain Gengenwin pour soutenir l'amendement no 509.

M. Germain Gengenwin.

Ces deux amendements proposent la suppression des mots : « ou à la réalisation de services collectifs. » En effet, les services collectifs ne

relèvent pas des CTE. Avec votre texte, le maire d'une petite commune rurale ne pourra pas demander à un agriculteur de déneiger ou de tondre un terrain de football si cela n'est pas prévu dans le CTE.

Mais plus simplement, monsieur le ministre, que doit faire un agriculteur pour profiter d'un CTE ? Qu'est-ce que cela lui rapportera, quelles seront ses contraintes, à quoi doit-il s'engager ? C'est ça, les véritables questions que tous les agriculteurs de France se posent aujourd'hui, et j'aimerais que nous puissions leur répondre clairement à l'occasion de ce débat.

M. François Guillaume.

Très bien !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les amendements en discussion ?

M. François Patriat, rapporteur.

Même argumentation que précédemment mais je répondrai à la dernière question de M. Gengenwin.

C'est très simple : si vous voulez demain signer un CTE, ce que je vous souhaite, vous remplirez un contrat type où figureront des contraintes que vous accepterez ou que vous n'accepterez pas, et qui concerneront des aspects relevant de la politique nationale, comme la maîtrise de l'environnement ou la protection de l'eau, par exemple.

Vous vous inscrirez dans un contrat régional où apparaîtront les priorités que définira demain le conseil régional d'Alsace. Enfin, le contrat comprendra une partie individuelle où figurera, par exemple, le déneigement d'un terrain de sport. Vous avez la réponse à votre question.

Cela dit, je rappelle que nous avons déjà débattu de ces amendements à plusieurs reprises. Monsieur Poignant, tout à l'heure, nous nous étions mis d'accord sur l'amen-


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dement no 78 corrigé qui satisfaisait tout le monde. Pourquoi, alors, avoir maintenu votre amendement no 36 ? Vous auriez pu le retirer et voter l'amendement sur lequel nous étions d'accord. Peu importe mais, dorénavant, peut-être serai-je plus rigoureux. Je propose pour l'heure de rejeter ces deux amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

La préoccupation des auteurs des amendements nos 301 et 509 était satisfaite par l'amendement no 78 corrigé de la commission, qui parlait d'« actions d'intérêt général ».

J'ai précisé hier que l'Union professionnelle agricole et les chambres de métiers approuvaient cette nouvelle rédaction.

M. le président.

La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet.

Je ne veux pas alourdir le débat, mais nous sommes là au coeur de la définition des contours du contrat territorial d'exploitation.

Les amendements en discussion ne sont pas de pure forme. Il est très différent de faire figurer a priori la production de services collectifs dans les objectifs du contrat territorial d'exploitation et d'ouvrir à des exploitants la possibilité, dans le cadre de leurs activités professionnelles et de la préservation des ressources, d'exercer des activités induites produisant des services collectifs. La différence est fondamentale.

Nous ne souhaitons pas faire de l'agriculteur, a priori, un producteur de services. Si l'exercice de ses activités de préservation des ressources se traduit par des prestations de services collectifs, fort bien, mais n'en faisons pas un objectif. Il y a une différence de fond entre nous à ce sujet et nous craignons qu'on ne crée de nouveaux déséquilibres.

N'oublions pas, monsieur le ministre, qu'il s'agit de contrats individuels qui seront signés entre un exploitant et l'Etat.

Fixer a priori un objectif de prestation de services collectifs lors de la signature d'un contrat avec l'Etat risque d'aboutir à un système aux conséquences perverses. Nous ne sommes donc pas en désaccord sur la forme, mais sur le fond. Et si nous insistons sur ce point en séance publique, comme nous l'avons fait en commission, c'est parce que nous souhaitons obtenir des précisions sur les concours du CTE, afin d'éviter des effets que vous ne mesurez pas aujourd'hui.

M. le président.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

La réponse du rapporteur m'a plongé dans un abîme de perplexité et dans une grande inquiétude, car je l'ai entendu dire que les conseils régionaux allaient avoir à se prononcer sur le périmètre et sur le contenu des CTE.

M. François Patriat, rapporteur.

Ce n'est pas ce que j'ai dit !

M. Michel Bouvard.

Il y a vraiment là un problème.

J'ai conduit de nombreuses délégations d'agriculteurs et d'élus au ministère de l'agriculture. Chaque fois, on nous répondait : « Nous aurions pu faire certaines choses pour l'agriculture de montagne, mais la région dont vous dépendez n'a pas voulu contracter lors de l'élaboration du Plan. » Si le conseil régional de Rhône-Alpes définit

demain les contours et la politique des CTE pour l'ensemble du massif alpin, alors que ce conseil est principalement composé d'élus urbains, je m'interroge sur la manière dont le système pourra fonctionner. Je voudrais que le rapporteur lève l'ambiguïté car le conseil régional intervient tout à coup, alors qu'on n'en avait jamais entendu parler auparavant.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Patriat, rapporteur.

J'ai dit tout à l'heure quelque chose qui avait déjà été dit au cours du débat.

Quand un CTE prend en compte des priorités nationales, régionales, individuelles, locales ou de pays, il convient d'assurer la cohérence. J'imagine que votre région a déjà défini ses priorités agricoles : élevage ovin, engraissement des bovins, traitement des zones dangereuses, par exemple.

L es contrats territoriaux d'exploitation devront, demain, s'inspirer de ces priorités régionales afin qu'on puisse définir une politique cohérente. Je n'ai pas dit que les conseils régionaux donneraient leur avis, ni qu'ils financeraient obligatoirement ces contrats, mais que les CTE doivent s'inscrire dans une politique régionale.

Plus globalement, il y a sur les CTE une opposition politique entre nous, vous avez raison. Certains d'entre vous ne veulent pas des CTE, qui seraient trop flous, trop compliqués. Mais vous voulez aussi plus d'argent ! Soyez donc cohérents car, pour l'heure, la cohérence est de notre côté ! (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. François Guillaume.

M. François Guillaume.

Monsieur le rapporteur, plus v ous nous donnez des explications et moins nous comprenons.

(Rires sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Kofi Yamgnane.

Ça n'est pas étonnant !

M. Augustin Bonrepaux.

Normal !

M. François Patriat, rapporteur.

C'est l'âge !

M. François Guillaume.

Ces messieurs s'excitent, mais ils n'ont aucune compétence pour décider ce qu'il est bon de faire dans un village. Ils proposent un contrat territorial d'exploitation qui sera défini au niveau national, puis redéfini au niveau régional, au niveau départemental et - je suppose - au niveau communal.

Il y aura donc 680 000 contrats territoriaux d'exploitation : un par exploitant.

Vous allez peut-être décider qu'on ne pourra pas mettre plus de 100 unités d'azote ou 80 unités de potasse à l'hectare mais, quand il s'agira de traiter de l'entretien des paysages ou de la protection des ressources naturelles, monsieur Patriat, vous verrez que ce qui se passe chez vous n'a rien à voir avec ce qui se passe dans mon village.

Vous parlez dans l'abstrait, donnez-nous des exemples précis ! Allons-nous revenir à la situation que nous avons connue dans le passé ? Dans nos villages - peu s'en souviennent -, au lieu de payer des impôts locaux, on effectuait des travaux, des prestations en nature, et le conseil municipal décidait quel agriculteur ramasserait, pour telle somme, tant de mètres cubes de cailloux pour les mettre sur tel chemin. Ensuite, tout était contrôlé par une commission communale qui vérifiait si les travaux avaient bien été réalisés.

Est-ce cela que vous voulez, monsieur Patriat ? La situation n'est pas comparable d'un village à l'autre et vous ne pourrez pas définir un contrat type au niveau départemental. Il faudra autant de contrats que d'exploi-


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tants ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Patriat, rapporteur.

Monsieur Guillaume, je vous donnerai un exemple de ce que pourrait être une cohérence régionale et individuelle.

J'ai longuement abordé ce problème hier en évoquant les pays, auxquels certains d'entre nous ont adhéré, n'estpas, monsieur Sauvadet ? J'ai parlé de la moutarde de Dijon ; je parlerai aujourd'hui du cassis de Dijon, que vous connaissez bien, monsieur Guillaume.

M. Alain Néri.

Ah ! Enfin !

M. François Patriat, rapporteur.

Actuellement, pour faire du cassis de Dijon, il suffit de faire macérer les fruits pendant quelques heures chez un transformateur de Dijon. L'idée des responsables politiques de Bourgogne et des agriculteurs des hautes côtes de Nuits et de Beaune est de créer une appellation d'origine contrôlée et de faire une liqueur à partir d'un cassis noir cultivé en Bourgogne.

Demain, dans cette région aride où il y a des éleveurs de moutons, des éleveurs de chèvres qui font du fromage et qui ont une exploitation du type CTE, si des agriculteurs veulent conclure un CTE spécifique pour fabriquer du cassis, il s'agira d'une production régionale qui bénéficiera de l'AOC et permettra une plus-value ainsi qu'une reconquête du territoire et un repeuplement.

J'espère que, maintenant, vous avez compris ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Exclamationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

La parole est à M. Germain Gengenwin.

M. Germain Gengenwin.

Tous les collègues qui sont ici et qui ont l'expérience de la vie des conseils régionaux savent que ceux-ci ont contractualisé, dans le cadre des contrats de plan, les problèmes de l'agriculture. Une telle politique permet à chacune des régions d'adapter ces contrats aux productions locales. Pourquoi voulez-vous renverser cette politique et la faire passer dans des CTE dirigés par l'Etat ? Monsieur le rapporteur, laissons donc les départements et les régions continuer à mettre de l'argent dans le développement agricole.

M. Michel Vergnier.

Cela ne change rien !

M. le président.

La parole est à M. Serge Poignant.

M. Serge Poignant.

A en croire M. le rapporteur, j'aurais dû, pour tenir compte des articles suivants, retirer l'amendement no 36. Mais il n'y a aucun coup fourré ! Que les choses soient claires : j'ai dit par deux fois que j'étais d'accord sur le sous-amendement proposé par le Gouvernement. Je ne souhaite donc pas qu'on m'accuse de quoi que ce soit. Le même cas de figure s'est présenté à l'article 1er . Et, si l'amendement no 36 avait été repoussé, j'aurais voté l'amendement no 78 corrigé.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 301 et 509.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

M. Rebillard a présenté un amendement, no 17, ainsi rédigé :

« Dans, le premier alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural, après le mot : "développement", insérer le mot : "économique". »

La parole est à M. Jacques Rebillard.

M. Jacques Rebillard.

Cet amendement a été présenté dans le même esprit que les précédents, qui tendent à insister sur l'aspect économique du contrat territorial d'exploitation. Dans la mesure où ce souci est repris dans l'amendement no 79 rectifié de notre excellent collègue Patriat, je le retire.

M. le président.

L'amendement no 17 rectifié est retiré.

Je suis saisi de deux amendements nos 79, deuxième rectification, et 550, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 79, deuxième rectification, présenté par M. Patriat, rapporteur, M. Parrenin et les commissaires membres du groupe socialiste est ainsi rédigé :

« Après le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural, insérer l'alinéa suivant :

« Le contrat territorial d'exploitation a pour objectif d'inciter les exploitations agricoles à développer un projet économique global qui intègre les fonctions de l'agriculture mentionnées à l'article 1er de la loi no du d'orientation agricole. »

L'amendement, no 550, présenté par M. Parrenin, M. Bataille et les membres du groupe socialiste est ainsi rédigé :

« Après le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural, insérer l'alinéa suivant :

« Le contrat territorial d'exploitation a pour objectif d'inciter les exploitations agricoles à développer un projet économique global qui intègre les trois fonctions de l'agriculture visées à l'article 1er »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no 79, deuxième rectification.

M. François Patriat, rapporteur.

Comme je l'ai dit plusieurs fois, cet amendemeant de repli donne satisfaction à l'ensemble de nos collègues dans la mesure où il précise que le CTE « a pour objectif d'inciter les exploitations agricoles à développer un projet économique global qui intègre les trois fonctions de l'agriculture visées à l'article 1er » de la loi d'orientation agricole que nous allons voter.

Il donne du même coup satisfaction aux auteurs des amendements suivants notamment MM. Parrenin et Bataille.

M. le président.

L'amendement no 550 n'est pas défendu.

Quel est donc l'avis du Gouvernement sur l'amendement no 79, deuxième rectification ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 79, deuxième rectification.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

M. Patriarche a présenté un amendement, no 269, ainsi rédigé :

« I. Après le premier alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural insérer l'alinéa suivant :

« Toute personne physique ou morale exerçant une activité agricole au sens de l'article L. 311-1 en Corse peut souscrire un contrat territorial d'exploitation avec l'autorité administrative et la collectivité territoriale de Corse. »


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La parole est à M. Paul Patriarche.

M. Paul Patriarche.

Certains de mes collègues ont parlé de compétences régionales. Je rappellerai pour ma part que la loi de 1991, appelée également « statut Joxe », confère à la collectivité territoriale de Corse des compétences en matière agricole via l'office agricole et lui confie la mission de déterminer les grandes orientations du développement agricole et rural. D'où cet amendement, conforme à un vote que l'assemblée de Corse a émis dernièrement.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

M. Patriarche a participé aux travaux de la commission et j'ai bien compris sa préoccupation concernant la Corse. La commission a pourtant repoussé son amendement, considérant que la disposition qu'il propose relève plutôt du domaine réglementaire. Un décret en Conseil d'Etat précisera d'ailleurs les conditions de mise en oeuvre de l'article 2 ; j'espère qu'il donnera satisfaction à M. Patriarche.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Sans méconnaître le rôle important joué par la collectivité territoriale en Corse, il me semble que les CTE doivent être signés par les représentants de l'Etat.

S'agissant du rôle de la collectivité territoriale, j'ai demandé au préfet de région de mener un exercice de préfiguration en tenant compte de la spécificité de la Corse.

Pour ces motifs, j'apprécierai que l'amendement soit retiré.

M. le président.

La parole est à M. Paul Patriarche.

M. Paul Patriarche.

Monsieur le ministre, ce n'est pas coquetterie de ma part. Je ne fais que rapporter un vote unanime de l'assemblée de Corse émis lors de la session du 2 septembre.

Sur le statut de la Corse, je n'ai pas à insister à titre personnel. Il reste que certaines compétences sont dévolues à l'assemblée de Corse en matière de développement agricole et rural - avec, nous le savons, les dérives et les inconvénients que l'on a pu relever...

M. le président.

Votre amendement est donc maintenu ?

M. Paul Patriarche.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 269.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de neuf amendements nos 4, 40 corrigé, 230, 240, 262, 302, 503, 748 et 510, pouvant être soumis à une discussion commune.

Les amendements no 4, 40 corrigé, 230, 240, 262 et 302 sont identiques.

L'amendement no 4 est présenté par M. Robert Lamy ; l'amendement no 40 corrigé est présenté par M. Jacob, M. Poignant et les membres du groupe du Rassemblement pour la République appartenant à la commission de la production ; l'amendement no 230 est présenté par M. Estrosi ; l'amendement no 240 est présenté par M. Micaux ; l'amendement no 262 est présenté par M. Nicolin ; l'amendement no 302 est présenté par MM. Mignon, Etienne, Jacob et les membres du groupe au Rassemblement pour la République appartenant à la commission de la production, M. Demange et M. Angot.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural, substituer aux mots : "l'ensemble de l'activité de l'exploitation agricole," les mots : "la production agricole de l'exploitation,". »

L'amendement no 503, présenté par M. Gérard Voisin, est ainsi rédigé :

« Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural, substituer aux mots : "l'ensemble de l'activité" les mots : "la production agricole". »

L'amendement no 748, présenté par MM. Sauvadet, de Courson, Gengenwin, Hériaud, Lestas, Le Nay, Morisset, Landrain, Deprez, Martin, Grimault et Ligot, est ainsi rédigé :

« Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural, après le mot : "concerne", supprimer les mots : "l'ensemble de". »

L'amendement no 510, présenté par MM. Sauvadet, de Courson, Gengenwin, Hériaud, Lestas, Le Nay, Morisset, Landrain, Deprez, Martin, Grimault et Ligot est ainsi rédigé :

« Dans la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural, substituer aux mots : "l'activité de l'exploitation agricole" les mots : "l'activité agricole de l'exploitation,". »

La parole est à M. Robert Lamy, pour soutenir l'amendement no

4.

M. Robert Lamy.

Notre vision des choses n'a pas changé. Notre préoccupation est constante : il ne s'agit pas de remettre en cause l'effort de l'Etat envers les agriculteurs, mais d'éviter toute distorsion de concurrence qu'entraînerait la mise en place d'aides financières pour la réalisation de travaux qui relèvent d'autres activités, notamment de l'artisanat et du commerce.

M. le président.

La parole est à M. Christian Jacob, pour soutenir l'amendement no 40 corrigé.

M. Christian Jacob.

Le plus simple, dans ce domaine, est d'en rester à la définition de l'article 311-1 du code rural, qui délimite l'activité agricole et son prolongement dans le cadre de la production. Tenons-nous en au prolongement de l 'activité naturelle et il n'y aura pas de difficulté.

Cet équilibre a souvent été discuté par les organisations agricoles et avec les artisans. Et nous avons toujours trouvé la limite en deçà de laquelle chacun pouvait rester.

Prenons l'exemple des activités de transformation de volailles ou de porcs. A partir du moment où les porcs ou les volailles sont produits et transformés dans l'exploitation, il n'y a pas de réaction de la part des artisans. En revanche, si les porcs ou les volailles sont achetés sur un marché, ramenés à la ferme, transformés et vendus, on se heurte à des difficultés.

Tenons-en nous donc à la définition simple figurant à l'article 311-1 du code rural. Ne cherchons pas à aller audelà. Sinon, on se touvera systématiquement en situation conflictuelle, comme c'est le cas pour les travaux d'entretien, avec le carburant utilisé par les agriculteurs et le gazole utilisé par des artisans.

L'équilibre auquel on était parvenu convenait à tout le m onde. Pourquoi chercher à déplacer les bornes ? L'économie rurale, l'ensemble des communes rurales


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n'auront rien à gagner à ces distorsions et aux animosités qui risquent de surgir. Les agriculteurs et les artisans ont besoin les uns des autres. Nous avons besoin de tous pour maintenir dans ces régions les services publics et pour y fixer la population. Bref, ne perturbons pas les règles.

M. le président.

La parole est à M. Christian Estrosi, pour soutenir l'amendement no 230.

M. Christian Estrosi.

Je reprends l'exemple cité par M. le rapporteur : celui de l'éleveur qui, grâce au soutien accordé à son activité en montagne, contribuera à l'entretien des pâturages et à la prévention des incendies de forêts. Si la volonté du Gouvernement comme de la commission est d'aller dans cette direction, ils ne verront pas de difficulté majeure à accepter cet amendement qui ne fait qu'assainir la situation et préciser ce que nous a indiqué M. le rapporteur tout à l'heure.

M. le président.

La parole est à M. Roger Lestas, pour défendre l'amendement no 240 de M. Micaux.

M. Roger Lestas.

L'amendement de M. Micaux reprend exactement la même rédaction que les précédents. Il a pour objet d'éviter le développement de distorsions supplémentaires de concurrence entre les agriculteurs et les autres secteurs économiques.

M. le président.

L'amendement no 262 n'est pas défendu.

La parole est à M. Christian Jacob, pour défendre l'amendement no 302.

M. Christian Jacob.

Il est défendu.

M. le président.

La parole est à M. Gérard Voisin, pour défendre l'amendement no 503.

M. Gérard Voisin.

Cet amendement répond aux mêmes motifs que les précédents. Je tiens néanmoins à le défendre. M. Patriat, notre rapporteur, nous a fourni dese xplications concernant l'agriculture. Mais prenons l'exemple d'un maraîcher qui sait fabriquer des châssis. Il peut se mettre un jour à souder, à faire des châssis et à les vendre. Cette distorsion de concurrence serait extrêmement gênante.

M. le président.

La parole est à M. François Sauvadet, pour soutenir l'amendement no 748.

M. François Sauvadet.

Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, vous vous interrogiez il y a quelques instants sur la cohérence de nos propos. Ou nous avons des difficultés d'expression et il nous faut vraiment faire un petit effort, ou vous avez des difficultés à suivre ce que nous vous disons, et nous vous appelons alors à en faire un.

Nous n'avons jamais dit que le contrat en lui-même était une mauvaise chose. Souvenez-vous de l'exception d'irrecevabilité que nous avons défendue. Nous y avons affirmé très clairement, en tout cas à l'UDF, que nous étions très attachés à l'idée même du contrat en ce sens qu'elle permet de maîtriser la dépense publique en adaptant les moyens disponibles aux objectifs fixés.

Seulement, la vision que vous nous offrez du CTE n'est pas celle que nous partageons, et nous vous demandons des précisions, que vous ne nous avez d'ailleurs pas apportées. Sur le contour du CTE, vous vous êtes contenté de confirmer que c'était un contrat passé entre l'Etat et l'individu et l'entreprise agricole. Sur les financements, on sait seulement qu'il y aura 12 000 CTE signés, et 300 millions de crédits d'Etat débloqués. Mais nous aurons l'occasion d'y revenir. Sur la cohérence...

M. Guy-Michel Chauveau.

C'est une loi d'orientation !

M. François Sauvadet.

Mes chers collègues, nous sommes là pour débattre !

M. Guy-Michel Chauveau.

Ce n'est pas une loi de programme !

M. le président.

Monsieur Chauveau, vous pouvez vous exprimer quand vous le souhaitez. Laissez M. Sauvadet défendre son amendement tranquillement !

M. François Sauvadet.

Il est minuit, nous avons encore du temps à passer ensemble. Je souhaite que nous le fassions d'une manière extrêmement courtoise, comme ce fut le cas jusqu'à présent.

Nous avons souhaité nous aussi ce rendez-vous entre l'agriculture et la nation, en liaison avec les rendez-vous européens et mondiaux. La discussion est sérieuse. Nous ne sommes pas là pour nous jeter des anathèmes, mais pour débattre de l'avenir de l'agriculture.

Nous demandons au Gouvernement - et au rapporteur - des précisions sur que ce qu'il entend faire. Cette demande est tout à fait légitime. Elle correspond strictement au travail du législateur. Nous sommes là, mes chers collègues, pour remplir notre mission.

L'amendement no 748 est un amendement de pure forme. Je sais, monsieur le ministre, que vous y êtes attaché. En l'occurrence, il ne me semble pas opportun de parler de l'ensemble de l'activité agricole, « à l'exception » de...

M. le président.

La parole est à M. Germain Gengenwin, pour soutenir l'amendement no 510.

M. Germain Gengenwin.

Cet amendement porte lui aussi sur la première phrase du deuxième alinéa de l'article 2. La rédaction qu'il propose est meilleure et facilement compréhensible. Elle est destinée à éviter toute concurrence avec les autres acteurs du monde rural.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces neuf amendements ?

M. François Patriat, rapporteur.

Je suis un peu rassuré, monsieur le président. Neuf amendements très proches dont six identiques, ce n'est peut-être pas la pensée unique, mais cela traduit au moins la cohérence de l'Alliance... sur un point.

(Rires sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Christian Jacob.

Comme nous ne sommes pas sûrs de l'audition du rapporteur, nous préférons nous répéter !

M. le président.

Monsieur le rapporteur, ne vous laissez pas impressionner ! M. François Patriat, rapporteur. Je suis parfois pour le comique de répétition, mais là, ce n'est pas le cas...

Vos amendements visent à limiter l'activité de l'exploitation par une définition strictement agricole.

Monsieur Sauvadet, j'ai parlé du cassis. Vous avez parlé de la construction des châssis, qui ne constituent pas une activité agricole. M. Rebillard, quant à lui, s'est placé dans le cadre d'un vrai CTE. Il fait du mouton et de la f ramboise dans les conditions que j'ai évoquées.

L'exemple est précis.

Monsieur Sauvadet, vous allez maintenant répondre à ma question, vous êtes président de l'Association de développement de l'Auxois...

M. Michel Vergnier. Félicitations !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

M. François Patriat, rapporteur. ... qui correspond à un pays et à sept cantons. Cette association, dont vous réunissez le bureau une fois par mois et auquel j'ai le plaisir d'assister, ne reçoit-elle pas des crédits qui viennent de l'Europe pour financer des chambres d'hôtes, des fermes auberges, des activités de différenciation qui ne relèvent pas de l'activité agricole principale, mais qui font partie de la production, et de l'activité de l'exploitation ? Ainsi, quand vous êtes à Vitteaux, vous trouvez bien de parler de l'ensemble de la production agricole, que vous aidez par ailleurs. Et quand vous êtes ici, vous me dites qu'on fait de la concurrence déloyale aux artisans ! Où est la cohérence dont vous parlez ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Je propose donc de rejeter ces neuf amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Je partage les préoccupations de ceux qui ne souhaitent pas faire du CTE un instrument pour concurrencer les commerçants et les artisans en milieu rural, et je crois en avoir donné quelques gages depuis hier, sur ce point.

Pour autant, les CTE sont les instruments de la prise en compte de la multifonctionnalité de l'agriculture et le support d'un contrat global entre l'agriculteur et les pouvoirs publics.

Hier, vous vous êtes presque tous prononcés pour d éfendre la multifonctionnalité. Celle-ci doit être reconnue dans le CTE. C'est pourquoi je n'envisage pas de donner une suite favorable aux neuf amendements qui sont proposés.

M. le président.

La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet. Monsieur le rapporteur, vous avez pris un excellent exemple. Nous le connaissons bien puisque nous siégeons dans le même pays. Mais il y a une vraie différence entre le contrat territorial d'exploitation et le contrat pays. Dans le contrat de pays, les objectifs ont été définis en concertation avec l'ensemble des acteurs du territoire, les agriculteurs, mais aussi les artisans, les commerçants. Nous avons d'ailleurs tout particulièrement veillé, notamment en matière de développement touristique, à ne pas exacerber la concurrence et nous avons joué, au contraire, la carte de la complémentarité.

Monsieur le ministre, vous parlez de la multifonctionnalité, et il est évident que l'agriculture remplit de multiples fonctions. Personne ne le niera, c'est une réalité.

La multifonctionnalité, comment doit-elle s'exprimer ? Est-elle liée d'abord et avant tout à l'activité agricole, sur laquelle viennent se greffer à la périphérie des activités accessoires lorsqu'il y a défaillance d'autres acteurs du monde rural et qu'on entend demander à l'agriculture de jouer un rôle qui excède celui qui est traditionnellement le sien ? Ou bien est-ce cette périphérie de l'activité agricole qui doit être considérée comme la priorité ? Cette question, si j'ose dire, n'est pas « périphérique » ; c'est un point extrêmement important dans la définition du contrat.

C'est la raison pour laquelle nous avons déposé cet amendement. Nous pensons que la multifonctionnalité ne peut s'exprimer qu'à partir de l'activité agricole, surtout lorsque sa périphérie est appelée à se développer avec des crédits d'Etat.

Enfin monsieur le ministre, la vision même qui inspire votre contrat est une vision étatique. Dès le départ, vous l'avez dit, l'Etat établira des contrats types. C'est grâce à nos amendements, repris par la commission et le rapporteur, dont je salue le travail, qu'il a été décidé que le contrat type serait soumis à tout le moins à la commission d'orientation agricole. On voit bien la différence de conception. Et si ce débat se révèle aussi intéressant, c'est qu'il oppose deux visions de l'agriculture : une vision beaucoup trop étatique et qui vise à recentraliser un certain nombre de crédits - la remarque vaut d'ailleurs aussi pour l'aménagement du territoire ; une vision décentralisée, territoriale, où tout le monde doit pouvoir prendre sa place dans les activités offertes sur nos territoires. Voilà ce qui nous oppose. Voilà ce que le débat permet de mettre en lumière.

M. Joseph Parrenin. Vive le CTE !

M. le président.

La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob.

Je veux prolonger l'argumentation de François Sauvadet. Moi aussi, monsieur Patriat, je puis vous citer l'exemple d'un pays, le seul de toute la région Ile-de-France et l'un des tout premiers qui aient été créés à titre expérimental : le pays Bassée-Montois. Là aussi, nous avons fait un travail en commun avec l'ensemble des acteurs locaux : associations, élus, artisans, agriculteurs. On a mis tout le monde autour de la table et on a conçu un grand projet de développement autour d'activités très diverses, puisqu'elles vont de la maison de l'emploi à des formations pour les assistantes maternelles, en passant par un programme touristique comportant par exemple des réaménagements de carrière et des circuits de randonnée pédestre. Tous ces responsables ont su se rassembler, mais en dehors d'un cadre qui bloque les initiatives, comme celui que vous envisagez dans vos contrats territoriaux. A vouloir à tout prix que la loi régente tout, on aboutit forcément à des blocages.

Je vous l'ai dit hier, la pérennité ne se décrète pas. Elle provient de la capacité à générer des résultats en faisant travailler ensemble les hommes des secteurs les plus divers sur un projet qui recueille leur commun accord.

Alors, ne cherchons pas à inventer la poudre en créant des contrats territoriaux fondés sur une réglementation drastique qui romprait tous les équilibres. Localement, les gens sont parfaitement capables de se mettre d'accord sans le secours de dispositifs qui, concrètement, ne leur apporteront rien. Tout ce qu'on y gagnera sur le plan agricole, c'est le risque d'accroître les distorsions de concurrence et donc les difficultés entre les exploitants et les autres acteurs de l'économie rurale.

Si nous voulons véritablement faire du développement local, nous y réfléchirons dans le cadre de la loi sur l'aménagement du territoire. Même si les quelques échos que nous avons des propositions de Mme Voynet ne vont malheureusement pas dans ce sens, c'est dans ce cadre-là que nous pourrons encourager des projets de développement local. Ne laissons pas croire que les CTE le permettront.

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 4, 40 corrigé, 230, 240 et 302.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 503.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 748.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 510.

(L'amendement n'est pas adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

M. le président.

Je suis saisi de sept amendements identiques nos 55, 282, 305, 468 corrigé, 490, 760 et 647.

L'amendement no 55 est présenté par MM. Ollier, Auclair, Michel Bouvard, Gaymard, Guichon, Marleix, Pélissard, Vannson et Vuillaume ; l'amendement no 282 est présenté par MM. Michel Bouvard, Accoyer, Cazen ave, Dumoulin, Gaymard, Inchauspé, Limouzy et Mariani ; l'amendement no 305 est présenté par M. Jacob, les membres du groupe du Rassemblement pour la République appartenant à la commission de la production, M. Dupont et M. Ollier ; l'amendement no 468 corrigé est présenté par M. Estrosi ; l'amendement no 490 est présenté par M. Briane ; l'amendement no 760 est présenté par M. Charroppin ; l'amendement no 647 est présenté par MM. Proriol, Giscard d'Estaing, Meylan et Perrut.

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Compléter la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural par les mots : "ainsi que des mesures de c ompensation de handicap naturel permanent, notamment celles relatives aux surcoûts des exploitations situées en zone de montagne". »

La parole est à M. Michel Bouvard, pour soutenir l'amendement no

55.

M. Michel Bouvard.

Je défendrai ensemble cet amendement de M. Ollier et mon amendement no 282.

Il s'agit de concrétiser ce que nous a indiqué hier M. le ministre dans sa réponse aux orateurs inscrits dans la discussion générale, en précisant et en clarifiant le principe selon lequel les aides compensatrices de handicap, telles qu'elles existent aujourd'hui, sont délivrées sans contrepartie. Cela suppose évidemment qu'il n'y ait pas contractualisation.

Cette précision est nécessaire pour garantir la perpétuation du régime applicable aux exploitations de montagne, préalable indispensable à toute autre démarche spécifique à l'agriculture de ces régions. Ces aides - l'indemnité spéciale montagne et les indemnités compensatrices de handicap naturel, mais aussi les aides aux bâtiments d'élevage et à la mécanisation - ont pour unique fonction d'assurer le maintien des exploitations.

L'exposé des motifs des amendements précise que s'il doit y avoir d'autres mesures dans le cadre du CTE, elles devront naturellement faire l'objet de discussions, mais que le maintien des aides compensatrices de handicap est, j'y insiste, un préalable.

M. le président.

La parole est à M. Christian Jacob, pour défendre l'amendement no 305.

M. Christian Jacob.

Il est défendu, ainsi que le 468 corrigé.

M. le président.

La parole est à M. François Sauvadet, pour soutenir l'amendement no 490.

M. François Sauvadet.

Monsieur le ministre, vous avez apporté hier des précisions assez rassurantes sur l'avenir de l'indemnité spéciale montagne. Le rapporteur avait d'ailleurs bien conscience qu'il nous fallait évoquer la montagne dans ce débat. Pour le reste, je rejoins les arguments développés par mes collègues.

M. le président.

La parole est à M. Jean Charroppin, pour défendre l'amendement no 760.

M. Jean Charroppin.

Défendu !

M. le président.

La parole est à M. Jean Proriol, pour défendre l'amendement no 647.

M. Jean Proriol.

Nous faisons nôtres, bien entendu, les arguments développés par M. Bouvard et M. Sauvadet.

I ls sont d'ailleurs repris par le président Giscard d'Estaing, M. Meylan, M. Perrut et moi-même dans l'exposé des motifs de notre amendement.

Nous demandons, nous aussi, d'écrire dans le texte ce que le Gouvernement a déclaré hier. Vous vous souvenez peut-être, monsieur le ministre, que je vous avais interpellé pour vous demander si les indemnités compensatrices de handicap naturel devraient faire un jour l'objet d'une contractualisation. Vous m'avez répondu non. Eh bien, précisons-le dans la loi.

Je demande à cet égard l'appui de tous les élus de la montagne, car la montagne est tranversale. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.)

Qu'il s'agisse des Alpes, des Pyrénées ou du Massif central, elle n'est pas délimitée par des frontières politiques. Je compte bien sûr, en particulier, sur l'appui de mon compatriote auvergnat,

M. Adevah-Poeuf.

Il s'agit simplement d'écrire à l'article 2 que les aides compensatrices de handicap ne seront pas contractualisables et n'entreront donc pas dans le champ du CTE.

Alors, élus de la montagne, nous vous attendons à son pied ! (Sourires.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur, pour répondre à toute la montagne ! (Sourires.)

M. François Patriat, rapporteur.

Nous avons longuement débattu de ce dossier ce matin même en commission.

M. François Sauvadet.

C'est vrai.

M. François Patriat, rapporteur.

Pourquoi ces amendements ont-ils été repoussés par la commission ?

M. François Guillaume.

Scandaleux !

M. François Patriat, rapporteur.

Ce n'est pas que nous ne nous intéressions pas à la montagne, mais il se trouve que les aides spécifiques n'ont pas vocation à être intégrées dans le CTE.

Tout à l'heure, monsieur Jacob, vous nous avez accablés de reproches : « Votre CTE ne va rien apporter, vous allez mettre tout ce qui existe déjà dedans et il n'y aura pas un sou en plus ! »

M. Germain Gengenwin.

Enfin la vérité !

M. François Patriat, rapporteur.

Eh bien là, nous sommes d'accord avec vous et nous vous disons que les aides spécifiques n'ont pas vocation à être intégrées dans les CTE. Leur pérennisation n'est nullement mise en cause, ni l'intérêt que nous portons à ces régions.

Donc, on ne mettra pas la montagne dans le CTE ! Elle fait l'objet d'une loi à part et ce sont des mesures à part que nous entendons pérenniser. D'ailleurs, si nous avions mis les crédits montagne dans le fonds de financement, vous auriez crié au hold-up. Nous n'avons ni l'envie de le faire ni l'intention de tomber dans ce piège !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Chacun sait l'intérêt que je porte à la politique de la montagne et les efforts que j'accomplis actuellement pour qu'elle soit pleinement reconnue au niveau communautaire.

M. François Guillaume.

Elle l'est déjà !

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

La politique de la montagne sera donc poursuivie et elle n'est nullement en cause dans ce texte. Je l'ai dit hier à la tri-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

bune et je le répète, les indemnités compensatrices de handicap naturel ne sont pas inscrites dans le fonds de financement du CTE. Je partage donc l'avis du rapporteur et ne suis pas favorable aux amendements proposés.

M. le président.

La parole est à M. Michel Bouvard.

M. Michel Bouvard.

Monsieur le ministre, nous voulons bien vous faire confiance sur ce point, mais il nous aurait semblé plus prudent que la spécificité de ce régime soit inscrite dans le texte de manière à en assurer totalement la pérennité.

Dans le passé, en effet, s'il n'y a pas eu de remise en cause de l'indemnité spéciale montagne ou de l'ICHN, il y a eu parfois des opérations de fusion de lignes budgétaires. L'aide aux bâtiments d'élevage et l'aide à la mécanisation ont été fusionnées avec les crédits destinés aux mises aux normes, ce qui nous pose de gros problèmes pour dégager les moyens indispensables à l'installation des jeunes ou au développement de la mécanisation. L'inscription dans la loi nous aurait donc rassurés.

C'est pourquoi je maintiendrai personnellement mon amendement, en demandant au ministre de ne pas y voir un doute sur sa propre parole, mais un souci de sécuriser ces acquis pour l'avenir.

M. le président.

La parole est à M. Maurice AdevahPoeuf.

M. Maurice Adevah-Poeuf.

Mon collègue Jean Proriol ne cesse de me citer et je m'en réjouis vraiment, encore que si c'était le second signataire de l'amendement qui l'avait fait, je me serais senti encore plus grandi. (Sourires.)

Cela dit, les engagements du ministre me paraissent satisfaisants. S'agissant des indemnités compensatrices de handicap naturel, je ne vois pas ce qui autorise quiconque, dans cette enceinte ou au-dehors, à mettre leur pérennité en doute, sachant qu'elles seront forcément maintenues.

Si elles ne l'étaient pas, du reste, ce n'est pas un amendement de cette nature, relatif au contrat territorial d'exploitation, qui pourrait régler le problème. Alors, battonsnous ensemble, partout où nous nous trouvons, pour que ces politiques-là soient maintenues au niveau communautaire, et laissons le CTE tel qu'il est maintenant amendé.

C'est le meilleur travail que nous puissions faire.

M. le président.

La parole est à M. Jean Proriol.

M. Jean Proriol.

Bien entendu, nous donnons acte à M. le ministre de sa déclaration et nous comptons sur sa parole. Mais la rumeur nous dit que les ministres peuvent changer...

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Les députés aussi !

M. Jean Proriol.

... que d'aucuns, sur ces bancs, sont peut-être en train de se préparer à prendre le relais. Alors, nous préférons l'inscription dans la loi. Cela permettra au ministre futur, si jamais la rumeur se confirmait, de tenir les engagements de M. Le Pensec. (Sourires.)

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 55, 282, 305, 468 corrigé, 490, 760 et 647.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue pour une dizaine de minutes.

(La séance, suspendue le mercredi 7 octobre à zéro heure quinze, est reprise à zéro heure vingt-cinq.)

M. le président.

La séance est reprise.

M. Jacob et les membres du groupe du Rassemblement pour la République appartenant à la commission de la production ont présenté un amendement, no 304, ainsi rédigé :

« Compléter l'avant-dernière phrase du deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural par les mots : "et du propriétaire lorsque l'exploitant est locataire du fonds sur lequel le contrat est engagé". »

La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob.

Il est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Avis défavorable !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 304.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements, nos 241 et 512, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 241, présenté par M. Micaux, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi la dernière phrase du deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural : "Il est conclu sous réserve du droit des tiers et notamment ceux des propriétaires". »

L'amendement no 512, présenté par MM. Sauvadet, de Courson, Gengenwin, Hériaud, Lestas, Martin et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et apparentés est ainsi rédigé :

« Compléter la dernière phrase du deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural par les mots : "et notamment ceux des propriétaires bailleurs". »

L'amendement no 241 est défendu.

La parole est à M. Germain Gengenwin pour soutenir l'amendement no 512.

M. Germain Gengenwin.

Cet amendement tend à préciser que parmi les tiers dont les droits doivent être respectés figurent les propriétaires bailleurs.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les amendements nos 241 et 512 ?

M. François Patriat, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 241.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 512.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Sauvadet, de Courson, Gengenwin, Hériaud, Lestas, Martin et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et apparentés ont présenté un amendement, no 511, ainsi rédigé :

« Compléter le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural par la phrase suivante : "Lorsque le contrat territorial d'exploita-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

tion comporte des dispositions susceptibles de porter atteinte aux droits du propriétaire bailleur, sa souscription doit au préalable avoir reçu l'accord du ou des propriétaires du fonds sur lequel est exercé l'activité de l'exploitation agricole". »

La parole est à M. Germain Gengenwin.

M. Germain Gengenwin.

Il paraît légitime que les propriétaires donnent leur accord au moment de la souscription des contrats territoriaux d'exploitation dans le cas où ceux-ci remettent en cause l'affectation des biens loués et sont donc susceptibles d'affecter leur valeur foncière, par exemple en cas de modification de structures.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

Défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 511.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de cinq amendements, nos 12, 306, 307, 308 et 309, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 12, présenté par M. Patriarche, est ainsi rédigé :

« Après la première phrase du deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural, insérer la phrase suivante : "Il peut prévoir des aides spécifiques en faveur des zones défavorisées et des zones de montagne". »

Les amendements nos 306 à 309 sont présentés par MM. Mariani, Martin-Lalande, Fromion et les membres du groupe du Rassemblement pour la République appartenant à la commission de la production.

L'amendement no 306, est ainsi rédigé :

« I. - Avant le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural, insérer l'alinéa suivant :

« Le contrat territorial d'exploitation peut comprendre un volet d'aides et de mesures spécifiques pour les zones défavorisées et de montagne. »

« II. - Compléter cet article par l'alinéa suivant :

« Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées par une majoration à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

L'amendement no 307, est ainsi rédigé :

« I. - Avant le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural, insérer l'alinéa suivant :

« Le contrat territorial d'exploitation peut comprendre un volet d'aides et de mesures spécifiques pour les zones défavorisées et les zones de cultures méditerranéennes en difficulté. »

« II. - Compléter cet article par l'alinéa suivant :

« Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées par une majoration à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

L'amendement no 308, est ainsi rédigé :

« I. - Avant le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural, insérer l'alinéa suivant :

« Le contrat territorial d'exploitation peut comprendre un volet d'aides et de mesures spécifiques pour les zones de cultures méditerranéennes en difficulté. »

« II. - Compléter cet article par l'alinéa suivant :

« Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées par une majoration à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

L'amendement no 309, est ainsi rédigé :

« I. - Avant le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural, insérer l'alinéa suivant :

« Le contrat territorial d'exploitation peut comprendre un volet d'aides et de mesures spécifiques pour les zones défavorisées. »

« II. - Compléter cet article par l'alinéa suivant :

« Les pertes de recettes pour l'Etat sont compensées par une majoration à due concurrence des droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts. »

La parole est à M. Paul Patriarche, pour soutenir l'amendement no

12.

M. Paul Patriarche.

Je sais que je vais enfoncer des portes ouvertes en parlant de la désertification, thème dont beaucoup de gens se gargarisent dans certaines régions, mais à propos duquel je ne vois rien venir. J'en discute souvent avec certains de mes collègues, comme m oi députés de circonscriptions très rurales qui regroupent parfois des centaines de communes.

Dans la mienne, qui est très étendue et où il est très difficile de circuler entre les vallées, deux tiers des quelque 200 communes qu'elle comporte comptent moins de cent habitants, dont la moitié ont même moins de cinquante habitants. Dans certains villages, ne vivent plus que cinq ou dix habitants.

Je pense très sincèrement, pour reprendre les propos tenus par François Sauvadet avant la suspension de séance à propos du CTE, que, dans ces petites zones, le contrat territorial d'exploitation peut être une bonne chose parce qu'il va permettre le maintien des familles qui s'accrochent - passez-moi l'expression - comme des Indiens à leur territoire.

Il conviendrait donc de prévoir des aides spécifiques pour ces zones défavorisées, déterminées en fonction de critères aisés à retenir puisqu'il suffirait de prendre les statistiques de l'INSEE montrant la diminution de la population. Cela mettrait les agriculteurs de ces zones à égalité avec ceux vivant dans des régions plus favorisées et permettrait d'autoriser, dans ce cadre, d'autres financements, par exemple par des comités locaux d'orientation ou des structures territoriales autonomes.

Tel est le sens de cet amendement.

M. le président.

La parole est à M. Christian Jacob, pour soutenir l'amendement no 306.

M. Christian Jacob.

Il s'agit en fait d'un amendement de cohérence avec le dixième alinéa de l'article 1er dont le début est ainsi rédigé : « La politique agricole prend en compte les situations spécifiques à chaque région, notamment aux zones de montagne, aux zones défavorisées... »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

M. le président.

La parole est à M. Michel Bouvard, pour soutenir l'amendement no 308.

M. Michel Bouvard.

Il est défendu, mais je crois que, pour une bonne organisation de nos débats, il faudrait joindre à la discussion commune de ces cinq amendements tous ceux qui, à partir de l'amendement no 471, traitent également des CTE, bien qu'ils ne portent pas sur le même paragraphe.

En effet, il ne me semble pas possible de traiter des uns sans les autres, car nous risquons d'avoir des problèmes si nous adoptons ceux qui sont soumis à notre examen sans avoir eu connaissance des autres.

M. le président.

Nous avons déjà cinq amendements en discussion commune. Je propose que nous en poursuivions l'examen.

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine pour défendre l'amendement no 309.

M. Jean-Claude Lemoine.

Il est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur ces cinq amendements ?

M. François Patriat, rapporteur.

Nous avons eu raison de repousser les amendements que vous avez proposés, mes chers collègues, pour viser certaines zones en particulier. Après les littoraux, la montagne, les villages, nous aurions ainsi décliné toutes les régions. Or le CTE n'a pas vocation à permettre l'octroi d'aides spécifiques aux zones en difficulté.

Monsieur Patriarche, je vous ai bien entendu. Je suis aussi l'élu d'une circonscription de 230 communes, dont cinquante ont moins de cinquante habitants. Je sais donc ce qu'est la désertification, mais je sais également que, audelà des aides pour compenser des handicaps naturels attribuées par telle ou telle collectivité, c'est dans ces régions que le CTE pourra être une bonne solution parmi d'autres. Il sera une opportunité dans les zones en difficulté, pour ceux qui auront un projet global d'exploitation.

En tout cas, il est contradictoire de s'opposer au CTE en général en prétextant qu'il s'agit d'un mauvais outil, puis de vouloir l'utiliser pour accorder des aides particulières dans certaines zones.

La position de la commission est équilibrée. Pour elle, les objectifs du CTE sont clairs et il ne peut concerner tout ce qui relève des aides spécifiques. C'est la raison pour laquelle elle a repoussé ces amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

La réorientation des soutiens publics par la mise en oeuvre des contrats territoriaux d'exploitation va largement bénéficier aux zones défavorisées, en particulier aux zones de montagne. Il n'est donc pas nécessaire de prévoir des aides spécifiques supplémentaires, d'autant que la politique de la montagne sera poursuivie et amplifiée dans le cadre communautaire.

Le Gouvernement est donc défavorable à ces amendements.

M. le président.

La parole est à M. Jean Auclair.

M. Jean Auclair.

Monsieur le ministre, je ne vous comprends pas très bien.

Lorsque je vous ai interrogé sur le chargement, vous m'avez répondu qu'il serait défini au niveau départemental. Or, monsieur le ministre, un même département peut comporter plusieurs zones qui ne sont pas toutes identiques. Ainsi, le mien comprend une zone de montagne, une zone de piémont, une zone défavorisée. Il n'est donc pas réaliste d'y prévoir un CTE uniforme.

D'autres départements sont dans le même cas.

Il faudrait tout de même bien préciser comment va se dérouler la mise en place des CTE dans les départements non homogènes.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

12. (L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 306.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 307.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 308.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 309.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Sauvadet, de Courson, Gengenwin, Hériaud, Lestas, Le Nay et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et apparentés ont présenté un amendement, no 513, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi le début du troisième alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural :

« Le préfet définit, après avis conforme de la commission départementale d'orientation de l'agriculture, un ou plusieurs contrats types... (Le reste sans changement.) »

La parole est à M. Jacques Le Nay.

M. Jacques Le Nay.

Nous n'entendons pas remettre en cause les compétences des services de l'Etat, notamment du préfet. Cela dit, puisqu'il s'agit d'une démarche contractuelle, il nous paraît nécessaire que la commission départementale d'orientation de l'agriculture non seulement soit consultée, mais donne un avis conforme sur les contrats types.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

Si vous voulez un avis conforme, monsieur Le Nay, vous allez bureaucratiser le système et alourdir le projet. Que tout le monde soit largement consulté, que la CDOA élabore les contrats types, indique les possibilités ouvertes, trace les voies. Mais de là à lui faire donner un avis conforme sur un contrat passé entre l'Etat, en l'occurrence la DDA, et l'agriculteur, c'est créer un risque de blocage. Or nous ne sommes pas pour la suradministration ni pour la bureaucratisation, n'est-ce p as, monsieur Jacob ? (Sourires.) Voilà pourquoi la commission a rejeté cet amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

La CDOA est une commission administrative consultative ; la demande présentée ne correspond pas au fonctionnement habituel de cette instance.

M. le président.

La parole est à M. Germain Gengenwin.

M. Germain Gengenwin.

L'explication du rapporteur et de M. le ministre, selon laquelle la CDOA n'est qu'une commission de consultation signifie qu'en fait, il


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

revient à l'Etat et au préfet seuls de dicter ce qui doit figurer dans le CTE. C'est une déclaration importante, très lourde de conséquences ; j'en prends simplement acte.

M. le président.

La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob.

Même argumentation : l'avis conforme de la CDOA a simplement l'intérêt de permettre une mise en place des CTE dans un esprit de délocalisation ou plutôt de décentralisation, les acteurs économiques, voire les autres représentants que vous y avez associés, se déterminant au vu de la façon dont le p rojet correspond aux réalités locales. J'avais cru comprendre que c'est ce que vous souhaitiez, monsieur le rapporteur. Et voilà que vous voulez à tout prix que cela soit régenté par le préfet ! Dans ces conditions, il suffit au ministre d'écrire au préfet pour lui dire qu'il veut ; il n'y aura plus besoin de l'avis de la CDOA. Ce sera encore plus simple et moins lourd, puisque la CDOA n'aura plus à se réunir trois ou quatre fois par semaine pour assurer les missions supplémentaires qu'on lui impose en permanence.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 513.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Marchaud, Mme Aubert, MM. Aschieri, Cochet, Hascoët et Mamère ont présenté un amendement, no 736 corrigé, ainsi libellé :

« Après le mot : "déterminant ", rédiger ainsi la fin de la première phrase du troisième alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural : "Pour chaque région agricole caractéristique un mode d'exploitation durable conformément aux dispositions des articles L.

200-1 à L.

200-2 et aux objectifs mentionnés au premier alinéa". »

La parole est à Mme Marie-Hélène Aubert.

Mme Marie-Hélène Aubert.

Un même département peut être composé de régions agricoles diverses. Notre amendement permet de préciser tout à la fois le souci de prendre en compte les caractéristiques propres de chaque région agricole et ce que l'on entend par respect de l'environnement. Comme vous-même l'avez du reste reconnu, monsieur le rapporteur, le mot « durable », désormais utilisé à toutes les sauces, ne suffit pas à lui seul à définir ce que l'on entend par là.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

Nous avons déjà rejeté un amendement similaire. Attendons la préfiguration de ce que sera demain le CTE. Au demeurant, l'objectif d'une agriculture respectueuse de l'environnement, poursuivi par Mme Aubert, est déjà inscrit dans la loi. Nous l'avons déjà mentionné à deux reprises, à l'article 1er puis dans l'article 2 ; il est donc inutile de le réintroduire ici.

Et qui pourra vérifier que le mode d'exploitation prévu par le CTE est durable ? Cela me paraît difficile. En tout état de cause, il n'est pas obligatoire de l'indiquer encore une fois au risque d'alourdir le texte.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Je partage l'avis de la commission. Le développement durable de l'agriculture est bien l'un des objectifs prioritaires inscrits dans cette loi.

M. le président.

La parole est à Mme Marie-Hélène Aubert.

Mme Marie-Hélène Aubert.

Je ne comprends toujours pas pourquoi on ne veut pas préciser le terme « durable ».

Tout le monde reconnaît qu'il est galvaudé. Nous proposons justement de lui donner une signification précise.

Nous le savons déjà, et nous nous réjouissons de voir tout le monde d'accord sur ce point dans cette assemblée, ce n'est déjà pas mal, que l'activité agricole doit être respectueuse de l'environnement. Nous ne cherchons pas à le répéter une fois de plus, mais simplement à préciser ce que nous entendons par respect de l'environnement. Si l'on ne veut pas le faire, nous en tirerons les conséquences.

M. Christian Jacob.

Chiche !

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 736 corrigé.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Sauvadet, de Courson, Gengenwin, Hériaud, Lestas, Le Nay et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et apparentés ont présenté un amendement, no 514, ainsi rédigé :

« Dans la première phrase du troisième alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural, après les mots : "un développement", insérer le mot : "économique". »

La parole est à M. Jacques Le Nay.

M. Jacques Le Nay.

La réussite du contrat territorial d'exploitation passe par l'efficacité économique d'un projet global d'exploitation.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

M. Le Nay a raison. La commission lui a donné satisfaction par avance, mais je ne sais s'il a bien entendu. A l'amendement no 79, en effet, nous avons déjà écrit que le CTE reposait sur un projet économique global. Est-il besoin de le réécrire ? Là encore, même question, même réponse...

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Avis défavorable.

M. Germain Gengenwin.

Nous le retirons, monsieur le président.

M. le président.

L'amendement no 514 est retiré.

Je suis saisi de sept amendements, nos 471, 467, 491, 763, 817 corrigé, 857 et 649, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 471, présenté par MM. Ollier, Auclair, Charroppin, Guichon, Marleix, Pélissard, Vannson, Vuillaume et Estrosi, est ainsi rédigé :

« Après la première phrase du troisième alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural, insérer la phrase suivante : "Ces contrats tiennent compte des caractéristiques géographiques et climatiques dans lesquelles s'exerce l'agriculture". »

Les amendements nos 467, 491, 763, 817 corrigé et 857 sont identiques.

L'amendement no 467 est présenté par M. Estrosi ; l'amendement no 491, est présenté par M. Briane ; l'amendement no 763 est présenté par M. Charroppin ; l'amendement no 817 corrigé est présenté par MM. Bonrepaux, Idiart, Migaud et les membres du groupe socialiste ; l'amendement no 857 est présenté par M. Michel Bouvard.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

Ces amendements sont ainsi rédigés :

« Après la première phrase du troisième alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural, insérer la phrase suivante : "Les contacts tiennent c ompte des caractéristiques géographiques dans lesquelles s'exerce l'agriculture". »

L'amendement no 649, présenté par M. Proriol et M. Meylan est ainsi rédigé :

« Dans la dernière phrase du troisième alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural, après les mots : "Ces contrats types", insérer les mots : "tiennent compte des caractéristiques géographiques dans lesquelles s'exerce l'agriculture, et". »

La parole est à Michel Bouvard, pour soutenir l'amendement no 471.

M. Michel Bouvard.

Monsieur le président, je défendrai également les amendements nos 467, 763 et 857.

Notre rédaction me paraît beaucoup plus respectueuse de l'esprit du texte puisque, sans faire référence à une zone géographique en particulier, elle précise que les contrats doivent tenir compte des caractéristiques géographiques dans lesquelles s'exerce l'agriculture.

En effet, une lecture un peu rapide du dispositif du CTE pourrait faire croire à une approche purement fonctionnelle de l'exploitation. Aussi, puisqu'il s'agit de fixer un cadre et que celui-ci devra être décliné dans les régions et les départements, il nous paraît important de bien préciser que les caractéristiques géographiques dans lesquelles s'exerce l'agriculture doivent être prises en compte dans la définition du contrat.

M. le président.

L'amendement no 817 corrigé de M. Augustin Bonrepaux n'est pas défendu.

La parole est à M. Jean Proriol, pour soutenir l'amendement no 649.

M. François Sauvadet.

C'est le même !

M. Michel Bouvard.

Le sujet suscite un grand consensus !

M. Jean Proriol.

Il est défendu, monsieur le président.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

Sur l'ensemble de ces amendements, l'avis de la commission est défavorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Les contrats types seront élaborés au niveau départemental en tenant compte des systèmes d'exploitation et éventuellement des caractéristiques des petites régions agricoles - je réponds ce faisant à une légitime préoccupation de M. Auclair. J'ai par exemple évoqué, à l'occasion d'un autre amendement, la notion de contrats territoriaux d'exploitation dans le cadre d'un bassin versant, c'est-àdire une réalité sous-départementale. La préoccupation des auteurs des amendements est donc bien prise en compte, en particulier dans l'avant-dernier alinéa de l'article 1er ; cette répétition me paraît donc inutile.

M. le président.

Je met aux voix l'amendement no 471.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix par un seul vote les amendements nos 467, 491, 763, 817 corrigé et 857.

(Ces amendements ne sont pas adoptés.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 649.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Rebillard a présenté un amendement, no 16 corrigé, ainsi rédigé :

« Compléter la dernière phrase du troisième alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural par les mots : "et après avis des présidents de conseil régional et général". »

La parole est à M. Jacques Rebillard.

M. Jacques Rebillard.

Le rapporteur l'a évoqué tout à l'heure : les conseils généraux et régionaux définissent pour leur territoire, d'une certaine façon, une politique globale pour leur agriculture. Parallèlement, le contrat territorial d'exploitation a quant à lui un aspect collectif, mais peut être décliné. Les deux doivent, me semble-t-il, se rejoindre et se mettre en cohérence.

J'illustrerai mon propos par un exemple. Dans ma région du Charolais, nous avons beaucoup de mal à mettre en place une filière d'engraissement de qualité. Le CTE pourrait être un excellent outil pour encourager les éleveurs à aller dans ce sens et à mettre en place une certification des élevages. C'est dans cet esprit que la cohérence est nécessaire. Mais si, à l'inverse, le CTE se mett ait à favoriser l'élevage d'animaux maigres et de broutards, nous irions à l'encontre de la politique souhaitée par les élus.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

J'ai bien entendu

M. Rebillard et j'ai apprécié, pour bien le connaître, l'exemple qu'il a cité. Nous sommes d'accord pour que les conseils généraux et régionaux s'investissent parallèlement ou adhèrent à la mise en place des CTE ; mais je crains que le fait d'aller recueillir l'avis des présidents de conseils régionaux ou de conseils généraux n'aille pas, dans certaines régions françaises, sans poser quelques problèmes.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Cet amendement propose de requérir pour l'élaboration des contrats types l'avis des présidents de conseils généraux et régionaux. Ceux-ci seront associés à la préparation des CTE types au plan régional et au plan départemental, et consultés au sein des DCOA dont nous examinerons au demeurant la composition. Il ne m'apparaît donc pas nécessaire d'accentuer le formalisme par une procédure de consultation de surcroît très lourde. J'apprécierai donc que M. Rebillard retire cet amendement.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine, pour répondre à la commission.

M. Jean-Claude Lemoine.

J'ai entendu tout à l'heure le rapporteur espérer que les conseils généraux et régionaux s'investiront dans les CTE. Si tel est le cas, il me paraît tout à fait normal de leur demander leur avis. Dès lors que l'on finance les CTE, on peut souhaiter avoir un droit de regard.

M. le président.

La parole est à M. Jacques Rebillard.

M. Jacques Rebillard.

Par solidarité majoritaire, je retire cet amendement.

(Sourires.)

M. François Patriat, rapporteur.

Très bien !

M. le président.

L'amendement no 16 corrigé est retiré.

M. Baroin a présenté un amendement, no 762, ainsi rédigé :

« Compléter le troisième alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural par la phrase suivante : "Ils sont examinés pour avis par le comité économique et social de la région concernée". »


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

Cet amendement est-il défendu ?

M. Michel Bouvard.

Il est défendu.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

S'il faut consulter la CDOA, les présidents des assemblées locales, le CES, qui faudra-t-il consulter au prochain amendement ?

M. Michel Bouvard.

L'évêque !

M. François Patriat, rapporteur.

Pourquoi pas ? (Sourires.) Je ne vois pas pourquoi les évêques ne s'investiraient pas dans les CTE !

M. Christian Jacob.

Je songeais justement à déposer un amendement !

M. Michel Bouvard.

C'est vrai, ils bénissent bien les troupeaux !

M. François Patriat, rapporteur.

Si les évêques veulent bien payer, le rapporteur est preneur.

(Sourires.)

L'amendement a été rejeté par la commission.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 762.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

MM. Leyzour, Dutin, Goldberg, Sandrier, Vila et les membres du groupe communiste ont présenté un amendement, no 833, ainsi rédigé :

« Compléter l'avant-dernier alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural par les mots : "Il prend éventuellement en compte les projets à caractère particulier présentés par les agriculteurs". »

La parole est à M. Félix Leyzour.

M. Félix Leyzour.

Plusieurs contrats types seront établis par le préfet. C'est une nécessité : il faudra un cadre bien é tabli qui traduise des orientations définies par le ministre. Nous aurions cependant souhaité que l'existence de ces contrats types élaborés par le préfet et ses services, en relation avec les différents organismes agricoles du département, laisse un peu de place aux propositions originales émanant des agriculteurs. Nous avons déjà vu, par le passé, certains agriculteurs incapables de faire entendre leur voix ; il serait souhaitable que leurs initiatives puissent être prises en compte.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

Dans un amendement qui n'a malheureusement pu être voté, nous reprenions votre idée, monsieur Leyzour, estimant qu'il devait y avoir, à côté de contrats collectifs facilement déclinables, d'autres contrats, plus individuels, que vous appeliez contrats spécifiques.

La commission a repoussé votre amendement mais, dans la mesure où l'autre amendement n'a pas été retenu tout à l'heure, le rapporteur, à titre personnel, serait tenté de lui donner un avis favorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Le Gouvernement considère que cette idée est déjà prise en compte dans le projet. Cela étant, il s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

M. le président.

La parole est à M. Jacques Rebillard.

M. Jacques Rebillard.

Une question au rapporteur : les apiculteurs, qui représentent une catégorie du monde agricole assez éprouvée à l'heure actuelle, pourront-ils conclure des CTE ?

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. François Patriat, rapporteur.

L'apiculture fait partie des activités de diversification-prolongation de l'exploitation. Je vous invite même à voter cet amendement daredare ! (Sourires.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 833.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements nos 515 et 648, pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 515, présenté par MM. Sauvadet, de Courson, Gengenwin, Hériaud, Martin, Micaux et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et apparentés, est ainsi rédigé :

« Compléter l'avant-dernier alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural par la phrase suivante : "En ce qui concerne les activités forestières, il s'inscrit dans le cadre des réglementations, orientations et documents de gestion prévus par le code forestier". »

L'amendement no 648, présenté par M. Proriol, est ainsi rédigé :

« Compléter l'avant-dernier alinéa du texte proposé pour l'article L. 311-3 du code rural par la phrase suivante : "En ce qui concerne la forêt, il s'inscrit dans le cadre des réglementations, orientations et documents de gestion prévus par le code forestier." » La parole est à M. François Sauvadet, pour soutenir l'amendement no 515.

M. François Sauvadet.

Nous avions, au début du débat, insisté sur la nécessité d'affirmer les liens naturels qui existent entre la forêt et l'agriculture. L'article 3, qui va légitimer l'article 2, nous donne satisfaction à ce sujet.

Et si je renvoie à l'article 3, c'est pour vous montrer, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, notre souci de cohérence. Il y est écrit que le fonds de financement

« a pour vocation de regrouper notamment les crédits destinés à la gestion territoriale de l'espace agricole et forestier... »

Vous avez parfois cherché à prendre notre cohérence en défaut. Eh bien, par l'amendement no 515 à l'article 2, nous souhaitons simplement préciser que « en ce qui concerne les activités forestières, il s'inscrit dans le cadre des réglementations, orientations et documents de gestion prévu par le code forestier ». L'objectif est, d'une part, de laisser ouverte la possibilité que le CTE puisse s'appliquer à la forêt, notamment à celle qui n'est pas soumise à plan de gestion - et cela concerne beaucoup d'espaces sur le territoire national - et, d'autre part, de s'assurer, s'il concerne la forêt, qu'il ne s'instaure pas en contradiction avec ce qui existe, notamment dans les CRPF, centres régionaux de la propriété forestière, pour la gestion de la forêt privée.

J'espère que cet amendement de cohérence retiendra toute votre attention, monsieur le ministre.

M. le président.

La parole est à M. Jean Proriol pour soutenir l'amendement no 648.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

M. Jean Proriol.

Monsieur le ministre, vous ne pouvez pas nous renvoyer au rapport Bianco ni au projet de loi qui en sortira pour traiter du CTE, sans quoi vous faites dépendre celui-ci, pour tout ce qui concerne les activités forestières de la future loi.

Vous avez chargé le préfet de réunir les commissions et de préparer les contrats types. J'ai assisté à l'une de ces c ommissions où des agriculteurs ont effectivement demandé s'ils pouvaient introduire dans le contrat type des actions sur la forêt. Nous savons qu'il existe une forêt paysanne où les agriculteurs travaillent depuis des générations tant pour eux que pour des particuliers. Dans nos zones de montagne boisées, des activités forestières seront incluses dans les CTE.

L'amendement que nous proposons, M. Sauvadet et moi-même, est un amendement de précaution, un amendement de prudence. Je ne comprendrai pas que vous le refusiez au risque de mettre en échec les propositions faites dans les départements boisés et déjà suggérées au sein des commissions que vous avez suscitées.

Voilà pourquoi j'insiste. Et j'en appelle à nouveau à tous les députés prolétaires de tous les pays et de la montagne : unissez-vous derrière la forêt paysanne et le petit amendement que nous voulons pour elle ! (Sourires.)

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les amendements no 515 et 648 ?

M. François Patriat, rapporteur.

La commission n'a pas examiné ces amendements qui lui sont parvenus trop tard. Bien que je trouve le plaidoyer de notre collègue émouvant, je m'en tiens à ce que nous avions dit au sujet de la forêt.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre d l'agriculture et de la pêche.

Selon le même principe que celui développé hier, réservons cela pour la loi forestière en préparation (« Non ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseA lliance et du groupe du Rassemblement pour la République) et parlons-en d'abord avec les forestiers.

J'émets donc un avis défavorable à ces amendements.

M. le président.

La parole est à M. Jean Proriol.

M. Jean Proriol.

Je vous avais dit, monsieur le ministre, que vous ne pourriez pas nous objecter que la loi forestière allait arriver. Il sera trop tard. Je ne comprends pas votre position qui paraît figée. Nous n'intégrons pas toute la forêt dans le présent projet. Nous disons que dans le CTE, des actions forestières sont possibles, dans le respect des réglementations. Nous n'allons pas au-delà ! Je comprends bien l'hésitation du rapporteur ; mais vous, je vous demande de vous en remettre à la sagesse de notre assemblée.

M. le président.

La parole est à M. Christian Jacob.

M. Christian Jacob.

Je citerai un exemple concret.

En janvier ou février 1993, au moment où Mme Ségolène Royal, alors ministre de l'environnement, présentait la loi sur les paysages, j'étais président du CNJA et je l'avais invitée à aller dans un département rural voir un projet d'aménagement du territoire monté par un agriculteur. J'avais choisi un département cher à notre ami Stéphane Alaize, l'Ardèche, où un jeune agriculteur avait élaboré un véritable projet d'aménagement du territoire qui avait un caractère forestier. Il s'agissait de mettre en place un pare-feu sur deux collines. Nous avons pu voir comment on pouvait, tout en respectant les paysages, arracher et déboiser une partie de la forêt, y implanter de l'herbe et y faire paître des moutons, ce qui permettait à la fois à l'agriculteur de développer son exploitation et de protéger du feu le village situé en contrebas.

Si je comprends bien la présentation que vous avez faite du CTE, monsieur le ministre, un tel projet pourrait entrer dans ce cadre. Mais si vous n'y intégrez pas la forêt, l'agriculteur ne pourra pas demander l'autorisation de défricher ou l'exonération des taxes de défrichement.

On voit, par cet exemple, l'intérêt d'associer la forêt au dispositif des CTE.

M. le président.

La parole est à M. Maurice AdevahPoeuf.

M. Maurice Adevah-Poeuf.

Je souhaite qu'on examine cette question mais pas dans la précipitation, d'autant que la commission n'a pas pu l'analyser, en mesurer la p ortée et en estimer toutes les conséquences. Je comprends bien qu'un amendement de cette nature ne puisse pas être accepté en l'état, s'il pouvait laisser entendre que la loi d'orientation agricole dont nous débattons aujourd'hui pourrait ouvrir la possibilité de CTE spécifiquement forestiers. Par ailleurs, il est clair qu'il n'existe pas de politique communautaire forestière ni donc d'aides qui y soient spécifiquement liées.

Cela dit, ces deux amendements méritent mieux qu'un simple rejet car la question se pose ou se posera inévitablement de la conformité d'un CTE, pour des exploitations exerçant une activité agricole à titre principal mais q ui ont inclu une part d'activité forestière, même minime, avec la réglementation forestière en cours d'élaboration.

Si nous devons repousser cet amendement aujourd'hui, je souhaite qu'un travail d'analyse et de concertation soit réalisé de façon qu'une solution convenable puisse être proposée à l'Assemblée en deuxième lecture.

M. le président.

La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet.

Comme vient de le conseiller notre collègue, il faut que nous soyons extrêmement précis sur ce point très particulier.

J'appelle simplement votre attention, monsieur le ministre, sur le fait que l'article 3 crée un fonds de financement des contrats territoriaux d'exploitation qui a pour vocation de regrouper notamment les crédits destinés à la gestion territoriale de l'espace agricole « et forestier... ».

C'est là qu'est le problème.

Si vous considérez que des crédits forestiers doivent alimenter ce fonds, il faut être extrêmement prudents. Nous ne pouvons pas vous dire : « banco ! » - j'allais dire

« Bianco ! » (Sourires) - parce qu'il y a des réglementations, orientations régionales, forestières, orientations régionales de production de la forêt privée, ainsi que des plans simples de gestion.

Que nous intégrions dans le champ des CTE la préoccupation de certaines forêts qui ne sont pas soumises à un plan simple de gestion, soit. Mais écartons a priori , dès l'article 2, s'agissant de financements qui sont prévus, des compétences qui relèvent d'autres domaines, et relèveront donc de la loi forestière.

C'est un amendement très important que nous vous proposons et nous vous demandons de bien vouloir le considérer sous l'angle que notre collègue vient fort bien d'expliquer. Un vrai problème se pose.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 515.

(L'amendement n'est pas adopté.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 648.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Barrot a présenté un amendement, no 750, ainsi rédigé :

« Avant le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural, insérer l'alinéa suivant :

« Toutefois, un contrat territorial d'exploitation peut déroger aux contrats types, sous condition d'avoir reçu l'avis conforme du CDOA. »

La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet.

Monsieur le ministre, M. Gengenwin vous a répondu très clairement lorsque vous avez évoqué le rôle purement consultatif d'une commission d'orientation agricole... que vous ne souhaitez pas consulter ! Dont acte. Vous reconnaîtrez avec moi que ce n'est pas un bel exemple de cohérence.

M. Jacques Barrot, dont nous soutenons l'amendement, essaie de rendre service en proposant qu'un contrat t erritorial d'exploitation puisse déroger aux contrats types - ce qui rejoint l'excellent amendement déposé par notre collègue Leyzour - sous condition d'avoir reçu l'avis conforme de la CDOA. Bien évidemment, si vouss ouhaitiez le sous-amender en supprimant le mot

« conforme », nous nous rallierions à cette proposition.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. François Patriat, rapporteur.

Avis défavorable.

Imaginez le mécanisme institué par M. Barrot : un preneur dépose un projet de CTE ; le préfet le lui refuse. Il se dira : je vais en faire un autre, aller à la CDOA et je l'obtiendrai ! Ce n'est pas sérieux.

Le contrat est signé entre le préfet, le DDA et l'agriculteur. Celui-ci peut déroger au contrat type, comme l'a dit M. Leyzour, mais pas demander l'avis de la CDOA. Il est dans le cadre évoqué tout à l'heure. M. Barrot a satisfaction : s'il ne s'inscrit pas dans le contrat type, un contrat spécifique pourra très bien être signé avec le préfet à condition de répondre aux normes et aux critères définis.

M. François Sauvadet.

Ça se précise !

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Avis défavorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 750.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

M. Patriat, rapporteur et M. Marchand ont présenté un amendement, no 80 rectifié, ainsi rédigé :

« Avant le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L.

311-3 du code rural, insérer l'alinéa suivant :

« Il prend en compte les orientations définies par le ministre de l'agriculture, après avis du conseils upérieur d'orientation et de coordination de l'économie agricole et alimentaire. Il s'inscrit dans le cadre des cahiers des charges définis au plan local, en lien avec les projets agricoles départementaux. »

Sur cet amendement, je suis saisi de trois sousamendements nos 846, 741 corrigé et 937.

Le sous-amendement no 846, présenté par MM. Leyzour, Dutin, Goldberg, Sandrier, Vila et les membres du groupe communiste, est ainsi rédigé :

« Dans l'amendement no 80 rectifié, substituer aux mots : "Il s'inscrit dans le cadre des cahiers des charges définis au plan local," les mots : ", et éventuellement les projets à caractère particulier présentés par les agriculteurs". »

Le sous-amendement no 741 corrigé, présenté par

M. Jean-Michel Marchand, Mme Aubert, MM. Aschieri, Cochet, Hascoët et Mamère, est ainsi rédigé :

« Compléter la dernière phrase de l'amendement no 80 rectifié par les mots : "et dans le cadre de la politique d'aménagement du territoire avec les projets des pays". »

Le sous-amendement no 937, présenté par MM. Sauvadet, de Courson, Gengenwin, Hériaud, Le Nay et les membres du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et apparentés, est ainsi rédigé :

« Compléter l'amendement no 80 rectifié par l'alinéa suivant :

« Dans le délai d'un an après la publication du décret mentionné à l'alinéa suivant, et chaque année par la suite, le Gouvernement dépose sur le bureau du Parlement un rapport sur les conditions de mise en oeuvre et sur l'efficacité des contrats territoriaux d'exploitation. »

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l'amendement no 80 rectifié.

M. François Patriat, rapporteur.

Cet amendement adopté par la commission situe le CTE par rapport aux orientations définies par le ministre de l'agriculture, aux cahiers des charges définis au plan local et aux projets départementaux.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Le Gouvernement s'en remet à la sagesse de l'Assemblée.

M. le président.

La parole est à M. Félix Leyzour, pour soutenir le sous-amendement no 846.

M. Félix Leyzour.

Il est retiré.

M. le président.

Le sous-amendement no 846 est retiré.

La parole est à Mme Marie-Hélène Aubert pour défendre le sous-amendement no 741 corrigé.

Mme Marie-Hélène Aubert.

Le contrat territorial d'exploitation doit être cohérent avec la politique d'aménagement du territoire qui se mettra en place et, notamment, avec les projets de pays. On ne peut pas avoir des dizaines de projets différents gérés par des structures différentes ! Il nous paraît donc extrêmement important de mettre en cohérence la loi d'orientation agricole et la loi d'aménagement du territoire et ses projets de pays.

M. le président.

La parole est à M. Jacques Le Nay pour défendre le sous-amendement no 937.

M. Jacques Le Nay.

Nous aimerions savoir ce que seront devenus les contrats territoriaux au bout d'un an et quelle aura été leur efficacité. Voilà pourquoi nous souhaitons que le Gouvernement dépose sur le bureau du Parlement un rapport sur les conditions de mise en oeuvre et sur l'efficacité des contrats territoriaux d'exploitation. Cela nous semble entrer dans notre mission de contrôle.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les sous-amendements no 741 corrigé et 937 ?

M. François Patriat, rapporteur.

Voyez, madame Aubert, que nous vous écoutons et que nous vous entendons : le rapporteur est favorable à votre sous-amendement qui prend en compte les projets de pays que nous avons évoqués ensemble.

En revanche, que M. Sauvadet n'y voie aucune crispation mais je suis défavorable au sien. Nous ne pouvons pas demander rapport sur rapport sur tout ce que nous votons. L'Assemblée ne ferait plus que voter des rapports et ne légiférerait pas ! Recentrons-nous sur notre mission première - notre CTE à nous ! - qui est d'abord de voter des lois et, à l'occasion, aussi souvent que cela est nécessaire, mais pas plus, de réclamer des rapports.

La commission est donc favorable au sous-amendement de Mme Aubert et défavorable à celui de M. Sauvadet.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur ces sous-amendements ?

M. le ministre de l'agriculture et de la pêche.

Favorable au sous-amendement de Mme Aubert et défavorable à celui de M. Sauvadet.

M. le président.

La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet.

Monsieur le rapporteur, je ne voudrais pas avoir à vous rappeler les missions du législateur, vous les connaissez aussi bien que nous : d'abord légiférer, mais aussi - et ce n'est pas M. de Courson qui me démentira - assurer un contrôle. De multiples rapports ont été publiés sur la question dont nous aurions aimé d'ailleurs qu'ils soient suivis d'effet.

C'est aussi le voeu que nous formulons pour les CTE.

Vous avez fait un pari sur le CTE. Nous vous avons demandé d'en préciser le contour. On voit bien qu'il s'agit d'une vision étatique, qu'il est soumis au bon vouloir du préfet.

Nous prenons date, monsieur le ministre : dans un an revenez nous voir, vous ou votre successeur, et dites-nous où nous en sommes et si le projet a été à la hauteur des espérances. C'est cela aussi la mission du Parlement.

Si je comprends que le ministre soit réservé sur ce sujet, je comprends moins que le rapporteur le soit.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Lemoine.

M. Jean-Claude Lemoine.

Je voudrais compléter les propos de M. Sauvadet.

Avec les contrats territoriaux, nous nous lançons dans une nouvelle politique. Ces contrats vont bénéficier de fonds publics, comme le fonds de gestion de l'espace rural, dont on connaissait l'utilisation auparavant, et qui avaient prouvé leur efficacité.

Il me paraît tout à fait normal qu'au bout d'un an d'application de cette nouvelle politique, nous sachions ce que deviennent ces fonds, si on doit les maintenir sur de tels contrats ou au contraire leur donner une autre destination.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 741 corrigé.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 937.

(Le sous-amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 80 rectifié, modifé par le sous-amendement no 741 corrigé.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

L'amendement no 708 de M. Yves Coussain n'est pas défendu.

M. le président.

Je mets aux voix l'article 2, modifié par les amendements adoptés.

(L'article 2, ainsi modifié, est adopté.

Article 3

M. le président.

« Art. 3. - Il est inséré dans le code rural un article L. 311-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 311-4 . - Il est créé un fonds de financement des contrats territoriaux d'exploitation. Ce fonds a pour vocation de regrouper notamment les crédits destinés à la gestion territoriale de l'espace agricole et forestier ainsi que ceux destinés aux contrats territoriaux d'exploitation.

« Les opérations du fonds sont inscrites au budget du ministère de l'agriculture dans les conditions fixées par la loi de finances. »

Plusieurs orateurs sont inscrits sur l'article.

La parole est à Mme Béatrice Marre.

Mme Béatrice Marre.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, l'article 3 du projet de loi d'orientation d'agricole crée un fonds de financement des contrats territoriaux d'exploitation, et il ne vous étonnera pas que je souhaite en illustrer la cohérence avec la démarche globale de ce projet de loi, mais aussi souligners on articulation avec les grandes orientations, qui semblent définitives, de la politique agricole commune.

Premier point, la cohérence interne de ce fonds.

Prévoir le financement du contrat territorial d'exploitation était une évidence, me direz-vous, mais ce qui est important, me semble-t-il, ce sont les choix qui ont présidé à la création de ce fonds.

En premier lieu, il s'agit d'une ligne nouvelle du budget de l'Etat - c'est le chapitre 44-84 nouveau du budget de l'agriculture - et non d'un compte d'affectation spéciale. Ce choix traduit votre volonté monsieur le ministre, de placer le CTE au centre d'une politique globale de l'espace rural puisqu'il sera abondé non par des ressources spéciales affectées, mais, potentiellement, par l'ensemble des ressources de l'Etat. L'ouverture d'une ligne budgétaire nouvelle, stable donc par essence, souligne aussi la volonté de pérenniser le rôle central du CTE.

En second lieu, ce fonds a vocation - je cite le projet à « regrouper, notamment, les crédits destinés à la gestion territoriale de l'espace de l'espace agricole et forestier, ainsi que ceux destinés au CTE. » Il replace donc le

contrat territorial d'exploitation dans son environnement, qui est l'espace rural, dont l'agriculteur est la principale composante.

Se fondent ainsi dans ce chapitre 44-84 nouveau, d'une part, des crédits existant précédemment pour des opérations de même nature, mais inscrites au moment de leur création sur des lignes budgétaires séparées - je veux parler du fonds de gestion de l'espace rural et des opérations groupées d'aménagement foncier -, et d'autre part, des crédits destinés directement aux agriculteurs mais ayant pleinement vocation par leur nature, à entrer dans le contrat territorial d'exploitation, le fonds d'installation des jeunes, par exemple.

C'est à partir de ces crédits qu'a été abondé, pour les deux tiers, dans le budget de 1999 que nous examinerons


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

dans quelques semaines, ce chapitre 44-84 nouveau du projet de budget du ministère de l'agriculture : 300 millions de francs, dont 140 millions de francs en provenance du FGER, 45 millions de francs en provenance des OGAF et 15 millions de francs venant du fonds d'installation des jeunes. Le troisième tiers de cet abondem ent premier, 100 millions de francs, comme le complément financier non budgétaire attendu pour 1999, qui est estimé à 150 millions de francs, relèvent, eux, de la cohérence de ce pilier central de la loi d'orientation agricole qu'est le CTE avec les évolutions prévisibles de la PAC dont je voudrais dire un mot maintenant.

Deuxième point : cohérence avec la PAC.

L'évolution de la PAC telle qu'elle apparaît dans les propositions de la Commission s'articule en dehors de la réforme des organisations communes de marchés, sur lesquelles nous reviendrons, autour de deux autres orientations.

Il s'agit en premier lieu, du rééquilibrage de la politique agricole en faveur des politiques horizontales et non u niquement du renforcement des organisations communes de marchés. Ainsi, il était cohérent de prendre, pour abonder le nouveau fonds, une partie des crédits destinés aux offices, 100 millions de francs pour 1999.

Il s'agit en second lieu de l'abondement de ce fonds au t itre des mesures agri-environnementales, cofinancées aujourd'hui à 50 % par la Communauté européenne.

Une première estimation permet d'attendre un retour de 150 millions de francs à ce titre pour l'année 1999, si besoin était.

En réalité, et j'en parlais encore cet après-midi avec M. Hervieu, président de l'APCA, tout le monde sait très bien que les 300 millions de francs déjà inscrits pour 1999 risquent de ne même pas être consommés, compte tenu de la date probable à laquelle les premiers CTE pourront être signés.

A l'avenir, au-delà de 1999, et dans la même cohérence, l'un des principes novateurs proposé par la Commission, qui est la modulation des aides et la libre utilisation des sommes par les Etats membres, dans le cadre de la subsidiarité, permettra d'abonder ce fonds dès l'année 2000.

Certains sur les bancs de l'opposition stigmatisent les crédits de 1999 en disant qu'il ne s'agit que d'un redéploiement. Eh bien oui, et je m'en félicite, monsieur le ministre. Vous avez engagé une action tendant à mieux dépenser, d'une manière plus cohérente, ce qui ne veut pas nécessairement dire dépenser plus. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.

M. Jean-Claude Sandrier.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, reconnaître les fonctions économiques, sociales et environnementales est un projet auquel nous souscrivons, mais ces fonctions doivent être correctement rémunérées pour favoriser l'adhésion aux CTE.

L'alimentation de ce fonds est donc cruciale. De son volume dépendra en grande partie la réussite de cette nouvelle politique de réorientation que vous voulez engager.

Il serait alimenté par des aides nationales et des transferts de crédits inscrits au budget, notamment ceux des mesures agri-environnementales, ou du fonds de gestion de l'espace rural.

Pour inscrire cette démarche contractuelle dans le temps, ce fonds ne doit pas simplement regrouper des fonds déjà existants ou reposer sur des transferts. Cela peut se concevoir éventuellement pour une période de lancement mais certainement pas sur le long terme. Il doit donc pouvoir bénéficier de fonds propres, correspondant à des ressources nouvelles, de nature budgétaire ou autre.

A terme, une politique de prêts bonifiés doit aussi être mise en place pour impulser le développement des CTE.

Il sera indispensable d'y associer une part des aides communautaires revenant à la France.

En outre, il faudra veiller à ne pas laisser s'implanter une dualité dans l'agriculture française et des effets pervers, avec, d'un côté, des améliorations et, de l'autre, la déstabilisation de productions.

Par ailleurs, ce fonds peut être l'occasion d'innover en matière de partenariat. C'est ainsi que la commission a proposé un concours des conseils généraux et régionaux.

Nous vous proposons de réfléchir à des partenariats financiers originaux et inédits avec le secteur bancaire, pour une politique de crédits d'utilité sociale à bas taux d'intérêt.

L'Etat a un rôle particulier à jouer pour rééquilibrer la distribution des richesses en faveur de l'emploi, du développement économique et non vers la spéculation financière.

Il s'agit donc de contribuer à orienter les moyens de financement existants, au regard des marges réalisées par les banques qui investissent dans l'agriculture, vers la création d'emplois et d'activités, en faveur des jeunes qui s'installent, notamment ceux qui ne répondent pas aux critères de la dotation jeune agriculteur et qui veulent s'installer en développant un CTE.

Le secteur bancaire a en effet largement bénéficié de l'essor du secteur agricole. Il est temps que les profits réalisés en aval de la production soient réinvestis dans la production elle-même. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. François Sauvadet.

M. François Sauvadet.

J'ai écouté avec attention l'une de nos collègues qui parlait de l'intérêt du nouveau fonds et qui voyait dans ce redéploiement un facteur de stabilité.

Vous qui êtes un grand professionnel en la matière, monsieur le ministre, puisque vous venez de redéployer un certain nombre de crédits, vous savez que les crédits a ujourd'hui redéployés dans un sens peuvent l'être demain dans un autre, tout simplement parce que la seule source qui garantirait la pérennité d'un financement pour un nouveau fonds, ce sont des ressources affectées.

Or celles-là ne le sont pas.

Comment allez-vous financer ces CTE ? Vous en avez annoncé 12 000, nous venons d'avoir un débat pour en préciser les contours, nous avons bien vu quelles étaient vos conceptions et nous ne les partageons pas.

Vous annoncez la création d'un fonds de 300 millions de francs, qui vont aller à des contrats individuels, passés entre l'Etat et l'exploitant. D'où viennent ces 300 millions ? J'ai cru comprendre qu'ils venaient pour partie du fonds de gestion de l'espace rural. Ce fonds répondait à une demande très forte de la profession, et je me souviens de l'émotion légitime qui avait traversé tous ces bancs lorsqu'il n'avait pas été doté à hauteur de nos espérances.

Aujourd'hui, il n'y a plus de fonds de gestion de l'espace rural !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 6 OCTOBRE 1998

Vous prenez également sur les OGAF, qui ont pourtant permis de conduire un certain nombre d'opérations sur des territoires fragiles. Il n'y aura pratiquement plus d'OGAF. Par contre, il y aura un CTE, individuel, négocié avec les préfets.

Vous prenez également sur le fonds d'installation agricole. J'essaie d'avoir un peu de mémoire et de cohérence ! Souvenez-vous, mes chers collègues, du débat sur le budget de l'agriculture où on nous a annoncé, et nous nous en sommes émus, la création d'un fonds devant permettre de favoriser l'installation, nécessité impérieuse dans notre société pour l'avenir de l'agriculture.

M. Christian Jacob.

En supprimant les PIDIL.

M. François Sauvadet.

Effectivement ! D'année en année, vous créez, vous supprimez, vous recréez. Vous me répondrez, monsieur le ministre que cela fait partie du mouvement ! Encore faut-il qu'il ait un sens ! Si vous prélevez de l'argent destiné à l'installation pour l'affecter à un projet individuel au travers d'un CTE, comment allez-vous financer un certain nombre d'installations de jeunes ? Le CTE, en effet, vous l'avez souligné vous-même, ne concerne pas les organisations communes de marchés. Or, un certain nombre de jeunes vont s'installer sur des marchés et, là encore, on en revient à la problématique européenne.

Un mot simplement des fonds européens.

Mme Marre a parlé de 150 millions. J'aimerais obtenir des assurances et des garanties sur cette somme qui nous serait accordée dès l'an prochain.

Au-delà, alors que nous allons engager des négociations avec nos partenaires européens et avec l'organisation mondiale du commerce, est-ce franchement le moment d'annoncer très clairement que vous renoncez en quelque sorte à un certain nombre de crédits d'aide aux marchés dans le contexte international que nous connaissons mais que vous en voulez une part pour la réaffecter différemment ? Vous refusez le mot de renationalisation. Essayons donc d'en trouver un autre plus conforme aux réalités.

Lequel préféreriez-vous pour éclairer cette réalité, toute simple, le fait que vous allez prendre aux uns pour redonner aux autres ? Mais cela va aller au-delà. Je crains, monsieur le ministre, que vous ne mettiez le doigt dans un engrenage qui risque de porter préjudice à l'ensemble des agriculteurs au travers des soutiens du marché. Nous sommes attachés, nous, à des soutiens de marché. Quand on aborde une négociation, il faut être offensif - le Président de la République l'a rappelé à Aurillac. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

C'est la première fois que je le cite ce soir, ne vous en émouvez pas trop !

M. Christian Jacob.

Pourtant, c'est notre référence permanente !

M. François Sauvadet.

On a les références que l'on peut, mais celle-là en est une très bonne s'agissant d'agriculture ! Nous vous demandons donc d'aborder la négociation avec un caractère offensif, et de ne pas tenir pour argent comptant une opportunité qui, en fait, se révèlerait favorable non pas à nous, qui sommes un grand pays producteur, mais plutôt à tous ceux qui ne demandent que cela en disant : débrouillez-vous. Cela ira à l'encontre de la construction européenne, en tout cas du sens que nous voulons lui donner.

J'espère que, comme sur le CTE, nous obtiendrons des éclaircissements sur tous ces points.

M. le président.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

3 DÉPO T D'UN RAPPORT D'INFORMATION

M. le président.

J'ai reçu, le 6 octobre 1998, de M. Jean-Pierre Brard, un rapport d'information, no 1105, déposé en application de l'article 145 du règlement par la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, sur la fraude et l'évasion fiscales.

4

ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Aujourd'hui, à quinze heures, première séance publique : Questions au Gouvernement ; Discussion du projet de loi, no 1075, autorisant la ratification du sixième protocole additionnel à l'Accord général sur les privilèges et immunités du Conseil de l'Europe : M. Paul Dhaille, rapporteur, au nom de la commission des affaires étrangères (rapport no 1103).

(Procédure d'examen simplifiée.)

Discussion du projet de loi, no 1076, autorisant la ratification de l'accord européen concernant les personnes participant aux procédures devant la Cour européenne des droits de l'homme : M. Paul Dhaille, rapporteur, au nom de la commission des affaires étrangères (rapport no 1103).

(Procédure d'examen simplifiée.)

Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi (no 977) d'orientation agricole : M. François Patriat, rapporteur, au nom de la commission de la production et des échanges (rapport no 1058).

A vingt et une heures, deuxième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 7 octobre, à une heure trente-cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT

TRANSMISSION D'UN PROPOSITION D'ACTE COMMUNAUTAIRE

M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le Président de l'Assemblée nationale, la proposition d'acte communautaire suivante : COMMUNICATION DU 5 OCTOBRE 1998 No E 1157. - Proposition de règlement du Conseil portant application d'un schéma pluriannuel de préférences tarifaires généralisées pour la période du 1er janvier 1999 au 31 décembre 2001 (COM [98] 521 Final).