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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE

DE

M.

RAYMOND

FORNI

1. Décision du Conseil constitutionnel sur des requêtes en contestation d'opérations électorales (p. 2177).

2. Epargne et sécurité financière. - Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, d'un projet de loi (p. 2177).

DISCUSSION GÉNÉRALE (suite) (p. 2177)

MM. Jean Proriol, Alain Rodet, Yves Deniaud, Jean-Pierre Brard, Germain Gengenwin, Michel Inchauspé, Jean-Louis Dumont, François Loos, Yvon Montané, Yves Cochet.

Clôture de la discussion générale.

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

DISCUSSION

DES ARTICLES (p. 2196)

Article 1er (p. 2196)

MM. Christian Cabal, Jean Vila.

Amendement no 259 de M. Vila : MM. Raymond Douyère, rapporteur de la commission des finances, pour la réforme des caisses d'épargne ; le ministre. - Retrait.

Amendement no 131 de M. Jégou : MM. Jean-Jacques Jégou, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Amendement no 283 de M. Balligand : M. Jean-Pierre Balligand. - Retrait.

Amendement no 266 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur.

Sous-amendement no 312 de M. Douyère : M. le ministre. Adoption du sous-amendement no 312 et de l'amendement no 266 modifié.

L'amendement no 215 n'a plus d'objet.

Amendement no 267 de M. Brard : M. Jean-Pierre Brard. Cet amendement n'a plus d'objet.

Amendements nos 169 de M. Douyère et 202 de M. Cochet : MM. le rapporteur, Yves Cochet. - Retrait de l'amendement no 202.

M. le ministre. - Adoption de l'amendement no 169.

Adoption de l'article 1er modifié.

Article 2 (p. 2201)

M. Jean-Jacques Jégou.

Amendements nos 209 corrigé de M. Cabal et 132 de M. Jégou : MM. Yves Deniaud, le rapporteur, le ministre, Jean-Pierre Brard, Jean-Jacques Jégou. - Rejets.

Adoption de l'article 2.

Article 3 (p. 2204)

M. Jean Vila.

Amendement no 252 de M. Brard : M. Jean-Pierre Brard.

Amendement no 253 de M. Brard : MM. Jean-Pierre Brard, le rapporteur, le ministre, Jean-Jacques Jégou. - Retrait de l'amendement no 253 ; rejet de l'amendement no 252.

Amendement no 210 de M. Cabal : MM. Yves Deniaud, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

Adoption de l'article 3.

Article 4 (p. 2206)

Les amendements nos 211 de M. Cabal et 133 de M. Jégou n'ont plus d'objet.

Amendement no 16 de la commission des finances : MM. le rapporteur, le ministre. - Adoption.

Adoption de l'article 4 modifié.

Après l'article 4 (p. 2207)

Amendement no 134 de M. Jégou : MM. Jean-Jacques Jégou, le rapporteur, le ministre. - Retrait.

M. le rapporteur.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

3. Dépôt d'une proposition de loi organique (p. 2208).

4. Dépôt de propositions de loi (p. 2208).

5. Dépôt d'un rapport sur une proposition de résolution (p. 2209).

6. Dépôt d'un projet de loi constitutionnelle modifié par le Sénat (p. 2209).

7. Dépôt d'une proposition de loi modifiée par le Sénat (p. 2209).

8. Ordre du jour des prochaines séances (p. 2209).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE de M. RAYMOND FORNI,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à vingt-et-une heures quinze.)

1 DÉCISION DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL

SUR DES REQUÊTES EN CONTESTATION D'OPÉRATIONS ÉLECTORALES

M. le président.

En application de l'article L.O. 185 du code électoral, j'ai reçu du Conseil constitutionnel communication d'une décision de rejet relative à des contestations d'opérations électorales.

C onformément à l'article 3 du règlement, cette communication est affichée et sera publiée à la suite du compte rendu intégral de la présente séance.

2 ÉPARGNE ET SÉCURITÉ FINANCIÈRE Suite de la discussion après déclaration d'urgence d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, après déclaration d'urgence du projet de loi relatif à l'épargne et à la sécurité financière (nos 1244, 1420).

Discussion générale (suite)

M. le président.

Cet après-midi, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.

La parole est à M. Jean Proriol.

Mes chers collègues, je vous invite à respecter scrupuleusement le temps de parole qui vous a été imparti, de même que j'invite M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, s'il en est d'accord, à répondre aux orateurs d'une manière concise, comme il a l'habitude de le faire avec talent !

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Merci, monsieur le président.

M. Jean Proriol.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, sous l'intitulé quelque peu opaque du projet que nous devons examiner, s'articulent en fait deux réformes : celle des caisses d'épargne et celle du renforcement de la sécurité financière. Mon collègue Laffineur a dit la position du groupe Démocratie libérale sur la seconde. Mon propos se limitera donc aux caisses d'épargne et tendra à répondre à une double question : pourquoi et comment réformer les caisses d'épargne ? D'abord, pourquoi les réformer ? Jusqu'à présent, elles sont toujours parvenues à surmonter les difficultés inhérentes à leur statut tout à fait particulier et elles ont connu un développement spectaculaire. Aujourd'hui, les difficultés sont d'une tout autre nature et s'appellent c oncurrence élargie, bouleversements technologiques, nouveaux métiers, avènement de l'euro, crise du système bancaire et financier, et bien sûr, on l'a dit, mondialisation. Or il est clair qu'elles ne disposent pas des moyens pour relever ces défis.

Leur statut devient un handicap, rendant par exemple impossible toute tentative de croissance externe, comme l'illustrent les exemples malheureux de reprise avortée du CIC ou du Crédit foncier de France. Leur développement ne manquera pas d'être prochainement freiné faute de sociétaires et, surtout, elles seront totalement isolées à l'heure de l'unification des marchés financiers dans le cadre de l'Union monétaire européenne. Les pays voisins, et même les Etats-Unis, ont réformé les statuts de leurs caisses d'épargne.

Réformer est donc devenu le maître mot. Voilà quand même plus de deux ans que les caisses d'épargne attendent ce rendez-vous et il aura fallu près de douze versions successives pour parvenir au projet actuel ! La réforme a cependant été déclarée « urgente » à moins que l'appât du gain n'attise la convoitise des pouvoirs publics sous couvert de donner aux caisses d'épargne les moyens de leur développement...

Regardons maintenant si la fin justifie effectivement les moyens. Comment réformer les caisses d'épargne ? Tout le monde s'accorde sur la nécessité d'abandonner un statut hérité de réformes successives, notamment, selon la loi des huit ans, celles de 1983, 1991 et maintenant 1999, et de rapprocher les caisses d'épargne du régime bancaire de droit commun.

Nous ne remettons pas en cause l'emprunt d'un statut coopératif voisin de celui qui a fait très largement ses preuves au Crédit agricole : mais cet alignement est en fait une banalisation douce. Le groupe Démocratie libérale n'est pas contre la douceur, même s'il aurait souhaité, comme dans le dossier de la transposition de la Directive sur l'électricité, que le Gouvernement aille plus loin.

En effet, il est des points fondamentaux qui, s'ils n'étaient pas révisés, seraient de nature à obérer la pér ennité de la nouvelle organisation et à obtenir l'effet inverse de celui recherché en nuisant au bon fonctionnement du groupe.

Le problème le plus évident est le niveau des fonds propres et les modalités de leur placement. Les fonds propres, nous le savons, sont déterminants pour la crédibilité d'une entreprise et encore plus d'une banque.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

Attention à ne pas trop « décapitaliser » la future Caisse nationale des caisses d'épargne en puisant dans les réserves de l'Ecureuil ! Le projet prévoit le placement de parts sociales dans le public à hauteur de 18,8 milliards de francs, ce qui, d'après les enquêtes réalisées auprès de la population, semble être très supérieur à la capacité de placement des caisses d'épargne qui a été évaluée à 12 ou 13 milliards de francs au maximum.

Je voudrais à ce stade, monsieur le ministre, citer un exemple bien précis, celui de la caisse d'épargne d'Auvergne.

Cette dernière dispose, ou va disposer, d'une dotation statutaire de 335 millions de francs à placer. Dans le cadre actuel du projet, la mise sur le marché du capital social signifie que 33,5 millions de francs au maximum, soit 10 %, auprès des collectivités locales et 33,5 millions de francs aux maximum, soit 10 %, pourront être placés auprès du personnel : 268 millions de francs au minimum devront donc être placés auprès du public, et ce, dans un délai maximum de quatre ans. Si la part est estim ée, ou fixée, à cent francs, il faudra trouver 2 680 000 clients, alors que l'Auvergne compte 1 314 000 habitants. Si la part est à mille francs, il suffit d e trouver 268 000 clients, chiffre beaucoup plus cohérent avec les 400 000 clients actifs de la caisse d'épargne d'Auvergne.

M. Alain Rodet.

Pensez-vous au Limousin ? (Sourires.)

M. Jean Proriol.

Le Limousin aura sa part tout à l'heure, monsieur Rodet ! Le projet ne prévoit pas qu'un sociétaire qui dispose de plusieurs parts puisse bénéficier de droits de vote proportionnels.

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Ce ne serait pas une coopérative.

M. Jean Proriol.

Il est donc peu vraisemblable qu'une même personne souscrive plus d'une part, dont la rémunération est, par définition, aléatoire. Ce serait en outre peu compatible avec l'esprit de la société coopérative et avec la volonté affichée par le Gouvernement de disposer d'une base sociale la plus large possible.

Il est donc indispensable, à notre avis, soit de réduire le montant à placer dans le public dans un souci de cohérence avec les possibilités de placement réel du réseau soit d'augmenter le délai de placement, quatre ans paraissant bien court - M. Jégou l'a dit également - à de nombreuses caisses régionales.

On pourrait aussi autoriser les caisses d'épargne à porter les parts sociales le temps de finir leur placement ultérieur auprès de nouveaux sociétaires.

Deuxième point à éclaircir : les pouvoirs de la Fédération nationale des caisses d'épargne. Le rapport Douyère parlait d'une chambre des COS - l'expression n'a pas été retenue, je crois - mais cette instance, à notre sens, n'a pas les moyens à hauteur de ses attributions.

A moins d'interpréter le texte de façon très extensive, on ne retrouve pas dans le projet la définition, au sein de la fédération, de la politique commune aux caisses d'épargne et permettant de cadrer l'action de la caisse nationale. Autrement dit, on ne retrouve pas l'art de

« faire la banque autrement », qui est le slogan des caisses d'épargne.

Un amendement en ce sens, cosigné par mon collègue Gilbert Gantier, a été adopté par la commission des finances. C'est un début, mais il faut confirmer l'essai. Et j'appelle tous mes collègues à la plus grande vigilance sur un retournement possible, et habituel, de la majorité plurielle sur ce point !

M. Jean-Louis Dumont.

C'est un procès d'intention ! Jamais cela ne s'est produit. (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard.

C'est de la jalousie.

M. Jean Proriol.

Ma remarque appelle à la vigilance, monsieur Brard, et je le sais, la vôtre est grande ! En troisième lieu, il faut définir le rôle de la Caisse des dépôts et consignations. On sait que sa présence dans le capital est rassurante quant à la qualité de la signature du réseau de l'Ecureuil. On sait aussi qu'elle a déjà constitué une force de blocage comme en témoigne l'échec du CENCEP sur son opération de rachat du CIC, que le Crédit mutuel, autre groupe coopératif, a su habilement récupérer.

Ne faut-il pas, monsieur le ministre, envisager une présence peut-être un peu moins prégnante de la Caisse des dépôts ou contrebalancer cette présence par la rentrée d'autres organismes de type européen liés par un pacte d'actionnaires ? J'ai cru comprendre que vous étiez ouvert à cette idée. Il s'agit d'une question de prospective à long terme dont on ne peut faire l'économie et nous attendons, bien entendu, confirmation dans votre réponse.

Avant d'aborder les problèmes du personnel des caisses, il y a lieu d'obtenir des précisions sur les droits des sociétaires : droit de vote au sein des groupements locaux d'épargne, selon la règle, « un sociétaire, une voix » ; droit de retrait des sociétaires pour lequel une référence explicite à la loi de 1867 sera impérative ; et, bien sûr, droit à la rémunération desdites parts sociales.

Sur ce dernier point, à partir de l'instant où plus de 18 milliards de francs auront été, ou devront, être placés dans le public, l'annonce de la rémunération s'imposera.

A quel taux ? Celui du livret A ? Un taux supérieur, murmure-t-on dans les couloirs. Le projet est très « sioux » sur ce point.

Point délicat, et non des moindres : le statut du personnel - 40 000 salariés. Imprégné de la culture forte du réseau, ce personnel a dû s'adapter aux réformes successives et jusqu'à présent il les a réussi. Ce statut est envié, pourquoi le nier ? Mais, il rencontre les mêmes difficultés de financement des retraites que les autres régimes. Une solution est proposée à partir de provisions déjà constituées et par des prélèvements futurs sur les résultats du réseau.

Puisque le Gouvernement n'a pas tranché, il faudra sans doute négocier avec les partenaires sociaux, mais pourra-t-on dire aux jeunes qui entrent dans le réseau qu'ils auront à faire face à des charges très lourdes pour assurer la retraite de leurs anciens ? Le personnel le sait.

On ne peut qu'encourager ses représentants à se montrer responsables et souhaiter du courage et du savoir-faire à la nouvelle équipe de la future Caisse nationale des caisses d'épargne.

En conclusion, les caisses d'épargne se trouvaient à un tournant de leur histoire : avancer, se réformer ou, progressivement, disparaître riches mais disparaître tout de même. Malheureusement, la réforme que vous nous proposez ne nous paraît pas réunir les conditions nécessaires et suffisantes de la réussite. Dans cette affaire, le Gouvernement, monsieur le ministre, marche sur des oeufs ! Résultat : trop de non-dits, trop d'imprécisions, trop de structures, trop d'hésitations.


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Dans l'état actuel du projet, le groupe Démocratie libérale ne pourra pas le voter.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie Libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Alain Rodet.

M. Alain Rodet.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, une institution financière dont le réseau gère près de trente millions de comptes et de livrets ne se réforme pas sans débat, ni controverses.

Ainsi en va-t-il des caisses d'épargne pour lesquelles ce projet de loi suggère de nouvelles perspectives. Le texte traite également de la sécurité financière et prend en compte les changements profonds et récents qui ont affectés le paysage financier européen.

Pouvait-il en être autrement ? Certainement pas. La préparation de ce débat a été longue et approfondie. Elle a débuté avec la mission confiée à notre collègue Douyère dont le rapport a constitué la base de la très large discussion qui a précédé le dépôt du projet - discussion vive et tonique, notamment au sein du réseau de l'Ecureuil.

Très vite, on a pu constater que l'avenir de la caisse de retraite, la CGR, tiendrait une grande place dans la nature des jugements émis sur le projet lui-même. Et si le texte renvoie cette question à un traitement ultérieur, à la charge du groupe qui naîtra à l'issue de la procédure législative, il n'en reste pas moins vrai que ce problème a pesé très lourdement dans plusieurs discussions. La sévérité de certaines appréciations vis-à-vis du projet peut s'analyser comme une procédure de précaution engagée avant les négociations qui s'engageront dans quelques mois sur l'avenir de la CGR.

Cela dit, la réforme envisagée par le Gouvernement et suggérée par les conclusions du rapport Douyère propose plusieurs évolutions qui paraissent aujourd'hui indispensables. Ne pas y souscrire, les refuser, c'est à coup sûr mettre en danger un réseau dont on vient de chanter les louanges en en appelant aux mânes du duc de la Rochefoucauld-Liancourt et de Benjamin Delessert. Le devoir de mémoire en matière d'épargne n'est certes pas inutile, à condition que l'on n'avance pas à reculons vers l'avenir.

Le projet que nous examinons me paraît répondre aux grandes préoccupations de ceux qui souhaitent conserver aux caisses d'épargne leurs missions fondamentales dans une sphère financière de plus en plus fébrile et imprévisible.

S'agissant ainsi des missions d'intérêt général, le texte est clair et les engagements pris par le Gouvernement, notamment le refus de banaliser le livret A, lèvent bien des hypothèques. Mais l'adoption d'un statut coopératif a donné lieu à des commentaires plus mitigés. Rien d'étonnant à cela : le statut coopératif a parfois l'échine souple et certaines opérations dans le passé ont été couvertes du label coopératif sans pour autant avoir apporté la preuve d'un fonctionnement réellement mutualisé. Il n'en reste pas moins vrai que, dans le cas des caisses d'épargne, le choix de ce statut, pour peu qu'il repose sur un large sociétariat, lui-même organisé, devrait me semble-t-il permettre de donner aux caisses d'épargne l'assise qui leur fait défaut.

Sans doute le texte présente-t-il quelques risques ; mais, dans une matière pareille, on ne peut jamais ramener le risque au degré zéro. Tout dépendra finalement de l'implication des agents, de la motivation des responsables pour faire vivre la future fédération nationale et pour garantir au réseau devenu groupe une réelle autonomie et une réelle combativité.

Le passage de la notion de réseau à celle de groupe est une nécessité absolue. Tout en gardant une structure décentralisée, les caisses d'épargne ont besoin d'un organe central qui dépasse l'actuelle dyarchie qui n'a pas toujours donné satisfaction. La transformation de la caisse centrale et du CENCEP en une caisse nationale appuyée par une fédération incarnant le sociétariat me paraît être une donnée essentielle pour garantir l'intégrité du groupe, mais aussi sa force.

Le plus important, l'essentiel à mon avis, reste le partenariat affirmé avec la Caisse des dépôts et consignations.

Cela me paraît être, là encore, une obligation impérative.

On pourrait même souhaiter, c'est en tout cas l'option que je souhaiterais voir retenir, que ce partenariat soit encore plus explicitement affiché dans la loi. La Caisse des dépôts est la structure financière la plus originale et la plus puissante sur le plan européen et même au-delà. Elle incarne, à mon avis, le meilleur de la tradition financière publique française. Son rayonnement, ses moyens d'action, les différents systèmes de garantie dont elle a la charge ont donné à cette institution une réputation, une signature excellente sur le plan international. La réaffirmation de ce partenariat avec le groupe des caisses d'épargne nous permet d'envisager un secteur financier public opérant dans un large espace, mais avec des chances de succès évidentes. Si l'on y joint les services financiers de La Poste et la Caisse nationale de prévoyance, tous les ingrédients sont réunis pour constituer un groupe public financier très actif dans un océan sans doute libéral, mais où ce groupe public pourra faire valoir ses arguments.

De surcroît, et certains d'entre nous ont défendu cette option depuis 1995-1996, il nous paraît essentiel d'indiquer, dès le débat parlementaire, que le Crédit foncier doit rejoindre ce groupe.

M. Jean-Pierre Brard.

Parfait !

M. Alain Rodet.

On peut s'étonner en effet que les caisses d'épargne n'aient pas souhaité en 1996 s'impliquer dans la reprise du Crédit foncier.

M. Jean-Louis Dumont.

Ça va changer !

M. Alain Rodet.

A la différence de nos collègues de l'opposition, nous pensons qu'il est beaucoup plus intéressant pour le groupe Caisse des dépôts-caisses d'épargne de prendre position dans le Crédit foncier et de l'utiliser en l'intégrant dans une galaxie financière publique que de pousser, comme on l'a fait, à une absorption du Crédit industriel et commercial, qui aurait posé de sérieux problèmes au groupe des caisses d'épargne.

Les grands axes étant ainsi posés réaffirmation des missions d'intérêt général, choix coopératif, renforcement de la notion de groupe au travers d'une organisation de direction unique, réaffirmation du partenariat privilégié avec la Caisse des dépôts, nous voilà à la veille de constituer un groupe qui aura, dans notre vie financière, de solides atouts à faire valoir.

Sans être un maniaque de la rentabilité, on peut souhaiter au nouveau groupe des caisses d'épargne un sens plus affirmé de la performance : huitième sur le plan européen en ce qui concerne la collecte, il n'est que le cinquante-troisième pour les prêts à la clientèle. Ce n'est pas céder à la dérive libérale que de souhaiter ardemment de voir certains ratios améliorés.

Pour ce qui concerne le passé récent, je persiste à penser et je ne suis pas le seul - que la réforme de 1983 aura été essentielle pour la réussite de celle d'aujourd'hui.

Si on n'avait pas réformé les caisses d'épargne en 1983, le


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groupe, en tant que tel, n'existerait plus aujourd'hui. Il aurait été démantelé. Ceux qui ont pris cette initiative à l'époque, sur la base du rapport Anciant, ont fait un choix courageux, un choix d'avenir.

On a beaucoup parlé de la protection de l'épargne populaire, des fonds propres et de cette manne providentielle sur laquelle l'Etat aimerait faire main basse. Mais quelque bons qu'aient été les résultats du groupe des caisses d'épargne, il ne faudrait pas pour autant dépeindre la situation du petit épargnant sous des aspects pas trop idylliques. Le petit épargnant souvenons-nous, a perdu avec son livret A plus de la moitié de son épargne entre 1968 et 1983... Voilà qui devrait peut-être refroidir les ardeurs ou les enthousiasmes excessifs de certains sur le rôle irremplaçable qu'ont joué les caisses d'épargne dans la protection de l'épargne populaire. Ce n'est que depuis le début des années 80 qu'existe une véritable protection de l'épargne populaire. Certes, le reflux de l'inflation n'y a pas été étranger, mais la création en 1983 du livret d'épargne populaire et des CODEVI, puis la réforme elle-même de 1983 ont bien servi la protection des petits épargnants.

On a également entendu des propos du même ordre sur la mission irremplaçable des caisses d'épargne dans le domaine du logement social. Elle est, c'est vrai, essentielle : mais n'allons pas pour autant effacer d'un coup de gomme toutes les aspérités que pose le financement du logement social au jour d'aujourd'hui ! L'examen du budget du logement pour 1999, à la fin de l'année dernière, a donné lieu en commission à un débat très intéressant. Notre collègue Dumont, qui en est le rapporteur, peut en témoigner. La situation en matière de logement social reste très difficile en dépit des efforts du Gouvernement, particulièrement du secrétaire d'Etat Louis Besson.

M. Jean-Louis Dumont.

Tout à fait.

M. Alain Rodet.

En effet, le taux de 4,30 % appliqué pour les prêts locatifs aidés, est insupportable...

M. Jean-Louis Dumont.

Ils sont trop chers !

M. Alain Rodet.

... et ne permet pas aux offices de construire, comme on le leur demande, des logements accessibles aux catégories les plus modestes. Cela pose évidemment le problème de la gestion du livret A.

Certes, les caisses d'épargne ont rempli leur office ; le taux de rémunération, à 1,2%, est ce qu'il est. Pourra-t-il rester durablement à ce niveau ? Personne ne peut l'affirmer.

M. le président.

Monsieur Rodet, acheminez-vous vers votre conclusion.

M. Alain Rodet.

Je vais conclure, monsieur le président.

Voilà donc qui devrait ramener les enthousiasmes de ceux qui invoquent le logement social à de plus justes p roportions, en leur rappelant les problèmes qui demeurent.

Il est difficile, on le voit bien, d'arguer que ce texte serait un projet de privatisation, pour des raisons évid entes de bon sens. Pour commencer, les caisses d'épargne sont des établissements de crédit de droit privé à but non lucratif et dépourvus pour l'instant de propriétaire. Ensuite, les conditions de la réforme des caisses d'épargne ne peuvent en aucun cas être comparées à la mutualisation de la caisse nationale de crédit agricole en 1986-1987.

M. Jean-Pierre Brard.

Il faut espérer !

M. Alain Rodet.

Ne confondons pas : il s'agissait à l'époque de transformer un établissement public en autre chose. Enfin, l'affirmation dans la loi de l'adossement du groupe des caisses d'épargne à la Caisse des dépôts et consignations marque bien la place du réseau dans le futur groupe public qui pourra se constituer autour de la grande dame de la rue de Lille, et que rejoindraient le Crédit foncier de France, La Poste et la Caisse nationale de prévoyance.

C'est la raison pour laquelle, monsieur le ministre, je considère que ce projet, en dépit des imperfections qu'il peut révéler sur tel ou tel article, représente une avancée importante pour le groupe des caisses d'épargne, qu'il permet de pérenniser et également de rénover dans un espace public dont nous avons impérativement besoin.

Comme toute réforme, celle-ci n'est pas sans risque mais, après tout, il n'y a pas de choix sans risque ; comme le dit un grand auteur, quand la prudence est partout, le courage n'est nulle part.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Yves Deniaud.

M. Yves Deniaud.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la réforme des caisses d'épargne qui nous est présentée découle d'une réflexion engagée depuis longtemps. Il y a eu le rapport Lambert, les réflexions de Jean Arthuis, sous l'ancienne majorité...

M. Jean-Pierre Brard.

N'exagérons pas, les réflexions de Jean Arthuis restent à venir !

M. Xavier Deniau.

Les réflexions d'Arthuis en valent bien d'autres ! La mutualisation avait déjà été évoquée à cette époque et, pratiquement, tout le monde a fini par se rallier à cette solution que le bon sens impose. Tout cela aurait pu nous conduire à une approbation de cette opération. Malheureusement, les conditions de sa mise en oeuvre ne nous paraissent pas acceptables.

Les désastres du récent passé bancaire français et les remous qui agitent les établissements financiers mondiaux doivent inciter à la plus extrême prudence. La transformation des caisses d'épargne devrait être entourée d'un luxe de précautions : parce que c'est l'institution financière la plus populaire, au sens plein du mot, auprès des Français, mais aussi parce que son ancienneté, ses traditions, l'affligent d'un certain nombre de pesanteurs qui rendent sa rentabilité faible.

La France ne peut se permettre de rater la mutualisation de ses caisses d'épargne. Rien ne serait pire que de les lancer dans une nouvelle aventure pleine de risque sans toutes les chances de réussir, et d'avoir ensuite à voler à leur secours à grands frais, à coups de milliards nous avons été habitués à des montants très élevés ! Or ce qui nous est proposé recèle à notre sens de graves dangers pour le bon accomplissement de la réforme.

Bien entendu, c'est le placement des parts sociales qui est au coeur de nos fortes inquiétudes. Le montant exigé et le délai imparti nous paraissent en effet l'un trop élevé, l'autre trop court pour garantir la réussite d'une opération aussi délicate que décisive, du bon déroulement de laquelle dépend entièrement l'image que donnera, aussi bien vis-à-vis du monde financier, des agences de notation en particulier, que du grand public, le nouvel établissement mutualiste qui en naîtra. Nous savons les raisons qui ont conduit à fixer un montant de 18,8 milliards et un délai de quatre ans. Elles ne nous paraissent pas bonnes. Une somme plus raisonnable et un délai étendu


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à six ans permettraient un rythme de placement supportable, à même de susciter la confiance et l'adhésion des futurs sociétaires.

De la même façon, le réseau s'est exprimé clairement en faveur d'un montage plus simple pour relier les sociétaires aux caisses que celui des GLE qui, outre la connotation péjorative que suscite la prononciation de leur intitulé,...

M. Jean-Pierre Brard.

A quoi le sigle vous fait-il penser ?

M. Yves Deniaud.

... compliquent nocivement la perception du lien social entre les détenteurs de parts et la caisse concernée. Un seul organisme détenant le capital de chaque caisse et en distribuant directement les parts, ce serait à l'évidence beaucoup plus clair et efficace.

Au

XXIe siècle, un réseau de trente et une caisses suffit pour assurer la proximité nécessaire sur tout le territoire français, l'institution d'assemblées locales parachevant la convivialité souhaitable. Pourquoi ne pas faire confiance au bon sens du réseau plutôt qu'à une construction intellectuelle compliquée, élaborée par tel ou tel de vos services ? Ce serait, monsieur le ministre, témoigner d'un pragmatisme de bon aloi...

Venons-en maintenant à l'utilisation des 18,8 milliards que vous espérez récolter au terme du placement des parts sociales. Vous avez déjà prélevé 5 milliards dans la loi de finances ; vous entendez maintenant récupérer intégralement cette somme au profit d'un fonds de réserve des retraites du régime général. Ces exigences mettent en péril la réussite future des caisses d'épargne.

Entendons-nous bien. Nous ne contestons pas le principe d'un prélèvement de l'Etat ; nous en contestons le montant fixé a priori et le moment.

Pour nous, l'estimation de la somme à percevoir aurait dû suivre l'opération et non la précéder. Il eût fallu fixer un montant raisonnable pour le capital social et laisser aux caisses d'épargne le temps et les moyens nécessaires pour fixer leur organisation et régler tous les problèmes qui en découlent ou qui coexistent, notamment vis-à-vis du personnel, de son statut et de ses retraites.

La caisse de retraite représente en particulier une redoutable difficulté qui requerrait, dit-on, entre 15 et 40 milliards pour être surmontée. Il vaudrait mieux que cette impressionnante barrière soit franchie sans autre obstacle financier préalable.

Par ailleurs, sitôt livré à son nouveau destin, le réseau des caisses d'épargne se verra confronté inévitablement aux nécessités du moment de tous les autres acteurs f inanciers : diversification, regroupement, croissance externe. On dit, monsieur le ministre, que vous souhaitez le voir reprendre le Crédit foncier ; on parle de rapprochement avec les banques populaires. Quelle que soit l'opportunité, il faudra aux caisses d'épargne une solidité affichée et des fonds propres à la hauteur pour la saisir favorablement.

Au surplus, on peut penser que des nuages noirs ne tarderont guère à s'amonceler du côté de Bruxelles. Une offensive contre le livret bleu est déjà lancée. Comment ne pas penser que, sitôt la mutualisation opérée, elle ne s'étende, avec une virulence renforcée, au livret A pour imposer sa banalisation ? Si elle venait à réussir - à Dieu ne plaise - il faudrait également pouvoir mobiliser les res-s ources suffisantes pour financer un redéploiement commercial à la hauteur du préjudice subi en matière d'attractivité par un réseau habitué depuis toujours au flux constant et spontané des titulaires de ce livret. Vous justifiez le prélèvement par l'Etat de la totalité du produit de la vente des parts sociales, par les privilèges que celui-ci a consentis, notamment pour le livret A. Il serait paradoxal de faire payer ce privilège au moment où il pourrait disparaître ! Enfin, l'utilisation des fonds nous laisse perplexes. Si 18,8 milliards de francs, c'est trop pour les caisses d'épargne, ce n'est rien pour résoudre le problème du financement des retraites du régime général. Comment prétendre que ce montant puisse constituer, ne serait-ce qu'une amorce de solution pour les 14 millions de salariés du régime général alors que, nous venons de le voir, cela pourrait tout juste suffire à consolider les retraites des 40 000 salariés des caisses d'épargne ? Mettons cette somme en regard du tableau très intéressant que vous nous aviez aimablement fourni, monsieur le ministre, dans le document d'orientation budgétaire de l'an dernier, et qui chiffrait à 600 milliards de francs par an le besoin de financement supplémentaire des régimes de retraite par répartition à l'horizon 2015-2020. Réglons chaque question dans le cadre qui est le sien et apportons des réponses appropriées à la hauteur de chaque enjeu ! La réforme des caisses d'épargne doit, je le répète, leur laisser tous les moyens de réussir leur mutation. Les périls qui pèsent sur celle-ci ne sont pas conjurés par votre projet.

Différez le prélèvement, acceptez d'attendre le règlement des problèmes avant d'en fixer le montant et de l'opérer, simplifiez et clarifiez la procédure de vente des parts sociales et ce texte pourra devenir acceptable.

Tel que vous le présentez, il ne l'est pas, à notre grand regret, car personne, je crois, dans cet hémicycle ne souhaite faire de cette institution si populaire et si sensible aux yeux des Français un enjeu de polémique.

Je conclurai d'une boutade : laissez assez de noisettes à l'écureuil, pour qu'il vive longtemps et en bonne santé ! (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard.

Monsieur le ministre, c'est à l'heure où le domaine bancaire et financier, secteur clé de notre économie, connaît un vaste et intense mouvement de recomposition que s'ouvre le débat sur l'avenir des caisses d'épargne françaises. En effet, au coeur de ce bouleversement profond, fait de concentration et autres

« mégafusions », débute la discussion de la réforme d'un acteur singulier et indispensable de la banque française au sein de ce qui a vocation à devenir le pôle public et semipublic. Comme il a été évoqué par Alain Rodet, et à la suite de la discussion que nous avons déjà eue sur le devenir du secteur bancaire et financier, des idées que nous avons portées sur la constitution de ce pôle financier ont à l'évidence progressé, nous aurons certainement l'occasion d'y revenir dans la discussion.

Point n'est besoin d'avis autorisé d'experts en la matière pour se persuader de la spécificité de nos caisses d'épargne. La seule expression de l'attachement de plus de 26 millions de titulaires de livret A à leur banque de proximité suffit à prouver que la réforme de l'Ecureuil concerne une grande partie de l'épargne populaire hexagonale. Les représentants de la nation seraient bien inspirés de prêter attention à l'opinion exprimée par leurs concitoyens sur cette importante question bancaire. Une rencontre organisée pas plus tard que samedi dernier dans


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

ma bonne ville de Montreuil sur la réforme des caisses d'épargne m'a confirmé le caractère éminemment symbolique, quasi affectif du lien unissant les épargnants à leur établissement.

Or, plus que jamais, dans un maelstrm concurrentiel effréné, il apparaît essentiel que les caisses d'épargne participent à l'aménagement du territoire et, étant souvent le banquier des plus modestes, renforcent leur rôle de banque de proximité pour conforter leurs missions en faveur de l'épargne populaire.

Le projet de loi relatif à l'épargne et à la sécurité financière ne préserve pas les caisses d'épargne d'une remise en cause des missions d'intérêt général qui lui incombent, en particulier, tant que le dogme de la rentabilité financière, fixée à 10 % après impôt, ne lui est pas clairement déclaré inapplicable, contrairement à la religion des nouveaux croyants incapables d'affirmer la rationalité de ces 10 % devant lesquels ils se prosternent avec plus de componction que devant le dogme de l'immaculée conception.

(Exclamations sur divers bancs.)

M. Germain Gengenwin.

Oh !

M. Jean-Pierre Brard.

Monsieur Gengenwin, le dogme de l'immaculée conception, au moins, survit depuis 2000 ans et a le mérite de l'ancienneté, tandis que le nouveau dogme qu'on nous propose, je ne sais d'où il est sorti. De quelle révélation biblique ?

M. Germain Gengenwin.

Il n'y a pas de comparaison possible !

M. Jean-Pierre Brard.

Je suis assez d'accord avec vous parce que le nouveau dogme est tout à fait immoral. Le précédent, au moins, ne l'était pas puisqu'il n'y a pas eu passage à l'acte (Sourires sur divers bancs), mais c'est un autre débat qui nous éloigne un peu de notre sujet.

La mise en place d'un statut coopératif issu de la loi de 1947, objectif essentiel du projet, n'est pas dangereuse en elle-même, à la condition expresse que les missions d'intérêt général soient claires et que des garanties centrées sur le caractère démocratique de l'organisation et du fonctionnement des caisses d'épargne soient tout aussi clairement formulées et inscrites dans la loi.

En ce sens, il me paraît fondamental de réaffirmer le rôle primordial que doivent jouer au sein des caisses d'épargne les épargnants tous, sans l'institution d'une sorte de cens qui fleurerait bon la Restauration après la Révolution -, les salariés et les élus locaux. La moitié environ des titulaires de livret disposent de moins de 1 000 francs. On a affaire là aux plus modestes. On ne peut pas imaginer que ce gouvernement exclue des personnes qui, attachées aux caisses d'épargne n'ont pourtant pas d'argent, et qui ont d'autres soucis actuellement que d'acheter une part pour être sociétaires, de la participation à un projet qui peut être positif si tous les déposants sans exception sont associés.

Nous souhaitons formuler une proposition articulée autour de quatre axes majeurs.

En premier lieu, il est vital de redire avec force et de conforter les buts d'intérêt général incombant aux caisses.

Aujourd'hui, le livret A, outil bancaire à la disposition des plus modestes, contribue à rassembler une épargne populaire qu'il convient de préserver en exprimant clairement que la banalisation du premier livret est exclue.

En outre, on peut considérer que l'article 1er du projet, initialement rédigé de manière trop générale, mérite d'être réécrit pour énumérer clairement les missions que l'Ecureuil doit accomplir. Nous proposerons donc que, dans cet article fondamental, figurent en toutes lettres les missions de protection de l'épargne populaire, de financement du logement social, d'amélioration du développement économique local et régional, de lutte contre l'exclusion bancaire et financière de tous les acteurs de la vie économique, sociale et environnementale.

N'oublions pas, en effet, que les collectivités locales sont confrontées à d'importants besoins de crédits pour l'aménagement du territoire, la lutte contre la désertification, la réhabilitation des zones urbaines défavorisées ou encore la protection de l'environnement.

Deuxième axe, la coopération entre établissements bancaires de même nature doit être favorisée. Les caisses d'épargne représentent un élément central du pôle bancaire public nécessaire à l'Etat pour bénéficier d'un fort levier économique. En effet, des établissements de nature similaire ayant démontré leur savoir-faire dans des activités proches ou complémentaires représentent autant de partenariats potentiels dans le respect de l'identité de chacun, tant au niveau national - je pense à la Caisse des dépôts et non pas aux banques populaires, ni évidemment aux fausses banques mutualistes comme le Crédit agricole - qu'au niveau européen, l'ensemble des Etats étant confrontés aux mêmes difficultés sociales, aux mêmes débats de société. Il est possible de dégager des solutions qui convergent.

Sur le plan national, monsieur le ministre, nous serions t rès intéressés de vous entendre - M. Proriol et M. Deniaud vous ont d'ailleurs tendu la perche - parler du Crédit foncier. Cette question intéresse toute la représentation nationale, et notre curiosité n'est pas moindre que celle de nos collègues de droite, même si je ne suis pas sûr que nous ayons les mêmes intentions.

M. Christian Cabal.

Nos intentions sont pures !

M. Jean-Pierre Brard.

Des rapprochements entre établissements comparables participeraient ainsi à la constitution d'un grand pôle public et parapublic fort, au service de l'intérêt général pour lequel les critères de rentabilité financière élevée applicables aux banques AFB, par exemple, doivent être clairement écartés. Une parenthèse peut être ici rapidement ouverte pour s'interroger sur l'opportunité de tels niveaux de rentabilité, 10 % à 15 % après impôt, lorsque l'économie réelle ne croît que de 3 % environ.

Troisième axe, il va sans dire que les individus intéressés, épargnants et salariés, doivent occuper une place de premier plan au sein de cette réforme, et ce pour une raison simple : ils représentent la meilleure garantie d'une existence solide et durable des caisses d'épargne conforme aux objectifs de l'article 1er réécrit. Il apparaît donc nécessaire de réformer et de démocratiser les pouvoirs d'intervention en donnant une plus grande place aux acteurs sociaux emprunteurs, aux collectivités locales et, naturellement, aux déposants de livrets A, dont il faut rappeler que la moitié ont un dépôt moyen de 1 000 francs.

M. le président.

Veuillez conclure, monsieur Brard.

M. Jean-Pierre Brard.

Je vais donc accélérer, monsieur le président, pour aller vers ma conclusion.

Dans cette optique, il est nécessaire que chaque titulaire de livret A puisse détenir une part sociale du capital des caisses d'épargne par tranche de 10 000 francs déposés sur ce livret et se voir octroyer à cette occasion une part gratuite par livret A. Le nombre maximal des parts détenues serait donc fixé à dix et ne donnerait lieu et c'est un point de divergence entre nous - à aucune rémunération, tant il est vrai que la motivation des épargnants


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ne va pas prioritairement à la spéculation et à l'esprit de lucre. Le reste du capital pourrait ainsi être réparti entre les salariés, les artisans, les PME, les collectivités locales.

Quant au capital de la caisse nationale, organe central du réseau, les épargnants y seraient majoritaires, un tiers environ du capital étant diffusé entre divers investisseurs, notamment européens, de culture proche.

La réforme des caisses d'épargne, établissements à vocation populaire et de proximité, doit donc être l'occasion de redéfinir la périmètre de l'intérêt général et de d ynamiser l'élan européen en coopérant avec les Sparkassen allemandes, les caisses d'épargne italiennes ou espagnoles.

Enfin, nous insistons pour que le projet intègre la spécificité des départements d'outre-mer dans le sens d'une c ollecte des fonds directement affectée aux projets d'économie sociale de ces départements. Il en va de la cohérence économique et sociale du développement des DOM.

Pour toutes ces raisons, le projet de loi portant réforme des caisses d'épargne doit être pensé comme une opportunité pour mettre en place un établissement au sein duquel les épargnants, majoritaires, bénéficieraient d'une organisation démocratique conforme aux dispositions de la loi de 1947 sur la coopération, dont les missions d'intérêt général seraient clairement réaffirmées, mais aussi appréhendées comme une étape dans le cheminement vers un pôle financier public et semi-public vigoureux conscient de son avenir communautaire.

Monsieur le ministre, nous sommes des parlementaires, nous ne sommes donc pas des partisans du tout ou rien.

Nous sommes là pour travailler sur la base d'un texte que nous n'avons pas écrit : il est proposé et nous espérons que la discussion se déroulera dans un bon climat, meilleur que celui dans lequel s'est déroulée la séance de la commission des finances mercredi dernier, par exemple...

M. Dominique Baert, rapporteur de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan. Oh !

M. Jean-Pierre Brard.

... pour que nous puissions construire ensemble un projet allant dans le sens que je proposais. Entre les critiques formulées par nos collègues de droite et celles émises par M. Rodet, par exemple les nôtres vont au-delà -, il faut choisir, et serait tout à fait embêtant qu'à la fin de la discussion nos collègues de droite...

M. Jean-Jacques Jégou.

Pas de menaces, monsieur Brard. (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard.

Non, il s'agit de situer le débat politique.

M. le président.

Dès que l'on s'évade de son texte, on allonge la durée de son intervention, et vous avez déjà épuisé le temps qui vous était imparti, monsieur Brard !

M. Jean-Pierre Brard.

Absolument, monsieur le président, mais l'intérêt, c'est de débattre et non d'enchaîner d es interventions sans le moindre lien entre elles.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

Je ne suis pas sûr que la prochaine va faire suite à la vôtre.

(Sourires.)

La parole est à M. Germain Gengenwin.

M. Germain Gengenwin.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le projet qui nous est soumis est un assemblage de trois réformes avec la transformation du réseau des caisses d'épargne et de prévoyance en groupe bancaire mutualiste, un volet sur la sécurité financière et une réforme des sociétés de cré dit foncier. Compte tenu du temps de parole qui m'est imparti, je centrerai mes propos sur les deux premiers points.

En tant que fervent militant de l'économie sociale, je ne peux que me réjouir de voir enfin les caisses d'épargne prendre le statut de la loi de 1947 et rejoindre ainsi le giron des banques coopératives et mutualistes. Une telle mutation montre que l'organisation coopérative est plus que jamais un choix pertinent sur le plan économique et que ce régime jugé passéiste par certains est au contraire dans la droite ligne de la modernité.

Néanmoins, la nouvelle organisation du réseau des caisses d'épargne soulève des problèmes. En effet, certains points dérogent à l'esprit de la loi de 1947, je pense notamment aux groupements locaux d'épargne. On est en présence de coquilles vides, sans activité économique, qui ne peuvent être considérées comme des coopératives faute de lien direct entre les sociétaires et la Caisse d'épargne et de prévoyance. C'est pourquoi je présenterai avec mon ami Jean-Jacques Jégou des amendements tendant à les remplacer par des groupements régionaux d'épargne et de prévoyance, mécanisme dans lequel nous proposons de rétablir le lien entre le sociétaire et la Caisse d'épargne et de prévoyance.

L'article 7, qui supprime le régime spécifique dont bénéficient depuis 1895 les caisses d'épargne d'Alsace et de Lorraine-Nord en matière de libre emploi des res-s ources du livret A, est inacceptable. Monsieur le ministre, vous n'allez tout de même pas supprimer un système qui donne globalement satisfaction depuis plus d'un siècle à l'ensemble des caisses de ces régions de l'Est - et je ne suis pas le seul à le dire ? D epuis 1895, ces institutions ont la possibilité d'employer directement sur place 50 % des dépôts sur livret A en prêts aux collectivités locales et en prêts hypothécaires aux particuliers. Le maintien du mécanisme de libre-emploi est indispensable à l'équilibre du tissu bancaire régional. Il ne constitue pas une menace pour la pérennité du livret A, il n'y a aucune raison de s'inquiéter pour cela, contrairement à ce que pense malheureusement le rapporteur.

L'Etat n'est pas en reste puisqu'il saisit l'opportunité du passage des caisses d'épargne dans le secteur coopératif p our ponctionner allègrement cette institution.

L'article 24 met en place un dispositif remarquable par lequel l'Etat va au passage récupérer 18,8 milliards de francs sur quatre ans en plus des 5 milliards qui ont déjà été ponctionnés sur les réserves de cette banque dans le cadre de la loi de finances pour 1999. On crée un fonds de mutualisation appelé à recevoir le produit de la souscription des parts sociales et des certificats coopératifs d'investissement, les sommes ainsi collectées étant ensuite affectées au fonds de réserve et de garantie des retraites créé dans le cadre de la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999. Pour l'instant, les seules ressources connues du fonds de réserve sont constituées par ces ponctions sur les caisses d'épargne. On peut se demander quel sera l'organisme suivant qui sera appelé à le financer.

N'étant pas en mesure de dégager les moyens de vos ambitions, vous vous défaussez sur des structures économiques pour financer ce fameux fonds soi-disant destiné à consolider les régimes de retraite par répartition. Comment seront placées ces ressources ? Les caisses d'épargne chargées d'abonder le fonds de réserve ont toute compétence pour les placer. Comptez-vous leur confier cette charge ? Une réponse s'impose.


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Le volet relatif à la sécurité financière soulève deux problèmes majeurs. L'article 37, qui déplafonne la rémunération des parts sociales pour les seules banques coopératives et mutualistes, est doublement constestable.

Figurant au rang des mesures censées améliorer la sécurité financière des institions bancaires, cette disposition, qui remet en cause l'un des fondements du statut coopératif, à savoir l'impartageabilité des réserves, rique de porter atteinte à la pérennité même de l'entreprise.

De plus, cet article, qui stipule que le pourcentage d'un tiers des résultats devant être mis en réserve peut être augmenté sur décision de l'organe central au vu de la situation financière de la banque, a provoqué avec juste raison de vives réactions de la part des dirigeants des institutions concernées.

M. le président.

Monsieur Gengenwin, il faut conclure !

M. Germain Gengenwin.

Cinq minutes, c'est bien court ! Toutes ces raisons ont paru suffisantes pour proposer la suppression de l'article 37, approuvée par la commission. J'espère que vous vous rangerez à ces arguments, monsieur le ministre. M. le rapporteur à d'ailleurs été tout à fait convaincant.

M. Dominique Baert, rapporteur.

Merci !

M. Germain Gengenwin.

L'article 47, qui institue un système unique de garantie des dépôts bancaires, est le second point qui pose un problème majeur.

P ersonne ne disconvient que la sécurisation de l'ensemble des dépôts est indispensable, surtout à la lumière des exemples récents. Or le dispositif institué par le projet ne tient pas compte de l'existant et du fait que l'actuel dispositif de garantie propre au secteur coopératif et mutualiste assure à ses déposants une indemnisation illimitée.

Créer un fonds qui intervient au premier franc revient donc à faire payer les banques coopératives et mutualistes deux fois au lieu d'une.

Nous reviendrons dans le courant de la discussion sur plusieurs autres aspects du projet, à l'élaboration duquel, notre ami Jean-Jacques Jégou l'a dit, nous participerons d'une façon constructive.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Monsieur Gengenwin, je ne suis pas responsable de la répartition du temps de parole au sein de chaque groupe. Vous auriez pu disposer de plus de temps si vos amis l'avaient voulu.

M. Christian Cabal.

Ce sont de vrais amis ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Balligand.

C'est la faute... à « le groupe

UDF » ! (Rires.)

M. le président.

Après vos compliments sur les rapporteurs, je vous ai laissé poursuivre, mais ma mansuétude à des limites ! La parole est à M. Michel Inchauspé.

M. Jean-Pierre Balligand.

Enfin, un banquier va parler !

M. Jean-Pierre Brard.

Un spécialiste ! Un orfèvre au sens étymologique !

M. Jean Vila.

Un expert !

M. Michel Inchauspé.

Eh oui, un expert, comme l'a dit M. le ministre l'autre jour !

M. Jean-Pierre Balligand.

Non, un banquier !

M. Michel Inchauspé.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, ce projet comporte une série de propositions d'importance diverse qui marquent cependant une volonté de réforme indispensable au secteur financier français.

M. Cabal et M. Deniaud ont exposé le point de vue du RPR en ce qui concerne les caisses d'épargne. Je me contenterai donc de traiter d'abord de la sécurité financière des banques, des entreprises d'investissement et des assureurs, puis de la création des obligations foncières.

Il eut été souhaitable, monsieur le ministre, de voter par division, car, comme vous l'avez souligné, ce texte se divise en deux parties : l'une vraiment politique, l'autre beaucoup plus technique. Mais comme il s'agit de voter l'ensemble, nous essaierons d'adapter nos décisions aux aménagements apportés.

En ce qui concerne la sécurité des dépôts bancaires, M. Baert l'a signalé, le RPR, sous la direction de Philippe Auberger et moi-même, avait déjà présenté une proposition de loi, que vous reprenez, en allant peut-être plus loin...

M. Dominique Baert, rapporteur.

Exact !

M. Michel Inchauspé.

... sur une partie du texte, mais moins loin sur l'autre. Moins loin, parce que tout en renforçant les pouvoirs de la commission bancaire, vous n'allez pas jusqu'à lui donner son indépendance, comme c'est le cas dans d'autres pays de l'OCDE. En revanche, vous allez plus loin en créant un véritable fonds de garantie, tendant non seulement à garantir les dépôts de la clientèle, mais aussi, et c'est là l'essentiel, à exercer une mission curative et préventive, comme chez nos collègues européens.

Il était temps, car à partir du 1er janvier 2000, les banques des autres Etats membres de l'Union européenne pourront se prévaloir, sur le territoire français, de leur système de garantie très avantageux, en particulier pour les Italiens et les Allemands ; il offre en effet une garantie p ratiquement illimitée, puisqu'elle correspond, pour chaque client, à près du tiers des fonds propres de l'établissement.

Parmi ces derniers - est-ce une coïncidence ? - la Deutsche Bank, au lieu de s'intéresser à un partenaire français, a décidé de s'installer elle-même dans l'Hexagone, en créant dans un premier temps quinze bureaux dans les principales villes françaises.

Le financement de la sécurité financière est prévu par un crédit d'impôt imputable sur la fameuse contribution sur les institutions financières, spécificité française, unique en Europe, qui fut créée en 1982, exceptionnellement, pour une année, à la faveur des taux élevés que pouvaient alors pratiquer les banques. Ce n'est plus le cas et le montant des taux, heureusement, a décru des deux tiers.

Si l'idée de la répercussion sur la CIF est bonne, vous n'envisagez, monsieur le ministre, de ne récupérer qu'une partie de la cotisation sur cette contribution. Mais alors vous en venez à faire payer deux fois les établissements de crédits ! Vous faites donc peser une surcharge supplémentaire sur les établissements, qui paient par ailleurs d'autres taxes, nous l'avons dit, spécifiquement françaises, comme la taxe sur les salaires, avec des tranches à 13,60 %. Les Anglais sont plus forts. Ils ont inventé ce que l'on appelle la « TVA zéro », c'est-à-dire qu'ils récupèrent la totalité de la taxe, sans l'appliquer à la clientèle.


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Il n'est pas étonnant dès lors que les emplois bancaires diminuent chaque année, sauf dans certains réseaux bénéficiant de certains droits acquis. M. Douyère, d'ailleurs, au cours du dernier débat sur le secteur financier français, a préconisé la suppression de ces taxes franco-françaises.

M. Jean-Pierre Balligand.

Absolument !

M. Michel Inchauspé.

Il a parlé d'or et nous souhaitons qu'il soit suivi dans ses intentions.

Evidemment, monsieur le ministre, vous ne pouvez pas tout récupérer sur la CIF, mais le taux de 25 % est vraiment trop faible. Le minimum, au départ, devait être de 50 %, pour aboutir, en l'an 2002, avec l'instauration de la monnaie unique et l'arrivée des concurrents européens, à la compensation intégrale et à la disparition de cette contribution. En effet, la non-récupération totale fait que certains rechignent et qu'ils estiment ne pas devoir cotiser autant que les autres, en oubliant que le projet veut instaurer, M. le rapporteur l'a très bien dit, la notion de maison commune.

Il faut rappeler qu'il ne s'agit pas d'un système d'assurance, où le coût de la police correspond au risque couru.

Il s'agit d'une solidarité de place qui doit faire la renommée de Paris, comme l'a dit M. Baert. D'ailleurs, qui est à l'abri d'un sinistre ? Nous avons constaté l'effondrement des caisses d'épargne aux USA, de certains mutualistes en Italie, rachetés d'ailleurs par des réseaux français ; inutile de reparler du Crédit Lyonnais ou de Pallas-Stern. La Banque de France l'a très bien compris, puisque dans un sinistre récent, elle a anticipé sur la réforme en agissant et en participant de façon préventive. D'ailleurs, dans tous les pays européens, les établissements participent tous de la même manière, suivant les mêmes critères : dépôts, crédits et fonds propres.

S'agissant des fonds propres, monsieur le ministre, il faudrait - en vous appuyant sur le comité de Bâle, qui se réunit d'ailleurs le 9 avril pour déterminer un nouveau ratio Cook, et auquel vous devriez d'ailleurs lui suggérer une plus grande rigueur - que les établissements de crédit ne soient pas autorisés à faire entrer dans leur capital ce que l'on appelle des « produits innovants », qui alimentent de façon exagérée le « tier two ».

Déjà, l'utilisation abusive de titres subordonnés risque de tromper la clientèle, qui ne sera pas remboursée de ce genre de placement par le fonds, alors que ce sont des titres cotés et répandus dans le public. Dans le sinistre Pallas-Stern beaucoup d'investisseurs et de particuliers ont été frustrés de cette manière, par le fait de ces titres subordonnés, qui portaient évidemment le l'entête d'une banque et qui étaient distribués par des réseaux importants. Les propriétaires de ces titres, d'une certaine manière, ont subi une extorsion.

La proportion de 50 % de ces obligations faussement annuelles, faussement perpétuelles dans le capital, devrait être diminuée pour que les banques disposent de vrais fonds propres. Ce serait essentiel pour la garantie des déposants. Faut-il rappeler qu'en 1913 le Crédit lyonnais était la première banque mondiale, avec des retours sur actifs de 15 % ?

M. Germain Gengenwin.

A l'époque, le Lyonnais ne pouvait pas investir dans le cinéma ! (Sourires.)

M. Michel Inchauspé.

Monsieur le ministre, vous proposez aussi un fonds de garantie pour les compagnies d'assurance ; un sinistre récent en a prouvé la nécessité.

La profession, qui a dû faire face à cet accident, après quelques hésitations et sur votre incitation, a accepté de le constituer bien que, comme pour les banques, il occasionnera des frais supplémentaires.

Mais là aussi, la solidarité de place doit jouer que je sache, les réseaux d'assurance, qu'ils soient privés ou mutualistes, sont prêts à accepter l'application des mêmes critères sans tirer argument des risques objectifs occasionnés pour l'un ou pour l'autre.

Il est amusant de voir les assureurs, qui savent de quoi ils parlent, donner la leçon aux réseaux bancaires en leur signalant que ce n'est pas un problème d'assurance, mais bien un problème de solidarité de place, comme l'a dit

M. Baert.

Pourtant, monsieur le rapporteur, vous n'allez pas jusqu'au bout de votre logique, en présentant un amendement en sens contraire de l'objet du projet. La presse financière ne s'y est pas trompée. Nous en reparlerons.

Cependant, comme vous l'avez dit, la solidarité doit être dans la clarté de la maison commune.

Quant aux obligations foncières, leur création était demandée depuis longtemps, compte tenu du succès des Pfandbriefe en Allemagne. Les amendements proposés par M. le rapporteur vont dans le bon sens, car au départ, le texte prévoyait la possibilité de financer toute acquisition garantie ou cautionnée. Il était nécessaire de la limiter à l'immobilier, sans quoi ces sociétés n'auraient eu de foncières que le nom.

Néanmoins, pour qu'elles aient les mêmes possibilités qu'outre-Rhin, il faudrait que la quotité de garantie minimum soit portée de 60 % à 80 % ou 85 %. Sinon, les nouvelles sociétés foncières auront une activité fort réduite et ne répondront pas aux besoins de financement de l'habitat, qui fonctionne bien dans les pays voisins.

Elles auront l'avantage d'améliorer le ratio « tier one » des établissements de crédit en localisant les crédits hypothécaires dans une autre structure.

Nous pensons également, monsieur le ministre, que vous accepterez l'amendement de notre collègue Delalande, qui a reçu l'aval de M. le rapporteur Baert, portant sur l'extension du fonds de garantie des assurances aux sinistres survenus à la suite de défaillances de garants de constructeurs individuels.

M. Gérard Saumade.

Très bien !

M. Michel Inchauspé.

Sur ces divers sujets, nous présenterons des amendements et nous déterminerons notre vote en fonction de leur étude, de leur prise en considération.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Louis Dumont.

M. Jean-Louis Dumont.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, 1983, 1991, 1999 : trois étapes importantes, marquées par une réflexion de nos collègues Dominique Taddei, puis, à deux reprises, de Raymond Douyère. En 1999, les militants de l'économie sociale, des secteurs coopératif, mutualiste et associatif ont toutes raisons d'être satisfaits par le projet.

En proposant que les caisses d'épargne adoptent le statut de banques coopératives, le Gouvernement souligne avec pertinence la modernité d'un statut porteur d'avenir, issu de la loi fondatrice de 1947 et mis à jour en 1992, quelques mois après la reprise du CIC par le Crédit mutuel, de Natexis par les Banques populaires, et certainement avant des rapprochements entre le Crédit agricole et le Groupama.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

Moderne, car la coopération place l'homme au coeur de ses préoccupations. Moderne aussi, car le projet social intrinsèquement lié à la coopération valorise les principes de démocratie, de solidarité et de participation, et est donc une véritable école de la citoyenneté et de son expression. Moderne enfin, puisqu'un simple aperçu du poids des entreprises coopératives en France et dans le reste du monde doit achever de nous convaincre de leur capacité à organiser et à satisfaire les besoins des hommes et des femmes qui y font appel.

En matière bancaire, mais aussi dans les domaines du commerce - j'espère, mes chers collègues, que nous aurons l'occasion de revenir sur les coopératives de commerçants, et pourquoi pas dans quelques semaines -, de la consommation, de l'agriculture ou du logement, les entreprises coopératives n'ont pas fini de démontrer leur capacité à innover et à protéger leurs associés.

M. Germain Gengenwin.

Très bien !

M. Jean-Louis Dumont.

Pour autant, même s'il valorise le statut coopératif, le projet de loi énonce des promesses qu'il ne sait qu'imparfaitement tenir à l'égard de l'économie sociale. Je prendrai deux exemples.

Le futur réseau des caisses d'épargne s'appuiera sur des groupements locaux d'épargne, eux-mêmes sociétés à forme coopérative. Très bien ! me direz-vous. Mais, ces GLE ne sont que des coquilles vides.

M. Germain Gengenwin.

Eh oui !

M. Jean-Louis Dumont.

Ces sociétés ne font que porter les souscriptions des associés et n'ont pas pour objet de conduire une activité économique. La commission des finances, dans sa grande sagesse, a abaissé le seuil minimal des sociétaires des GLE de 2 000 à 500, ce qui va dans le bon sens. Il faudrait aussi, avec le même bon sens, tenir compte de certains particularismes locaux, comme en Alsace-Lorraine, où les caisses d'épargne suivent des règles un peu différentes en matière d'emploi des fonds provenant du livret A. Un collègue, issu lui aussi de l'économie sociale, y a fait référence.

Je cherchais mon collègue Balligand, pour lui dire que si l'appétit de la Caisse des dépôts et consignations peut a pparaître comme trop important, pour la caisse d'épargne de Lorraine-Nord, il est question de 3,240 milliards ! Certes, une partie de cet argent peut être placée librement à la Caisse des dépôts et consignations et entrer dans le système classique. Mais la caisse régionale de Lorraine-Nord peut intervenir tout à fait librement sur son propre marché, au bénéfice des collectivités locales, de l'économie de proximité.

Cela mérite donc réflexion, et peut-être même des amendements, une prise en considération. C'est difficile, on le sent, monsieur le ministre,...

M. Germain Gengenwin.

Mais non !

M. Jean-Louis Dumont.

... mais je sais que nombre de nos collègues interviendront sur ce sujet.

Autre exemple : le plafonnement des mises en réserve des caisses d'épargne, à l'article 6, et des banques coopératives, à l'article 37. Dominique Baert l'a reconnu en commission des finances, cette mesure ne se justifie complètement ni sur la forme ni sur le fond. Nous l'en remercions.

L'impartageabilité des réserves est l'un des principes fondamentaux du statut coopératif. C'est pourquoi j'ai présenté, avec de nombreux autres collègues, membres ou non du groupe interparlementaire de l'économie sociale, deux amendements de suppression portant sur l'article 37 et les deux dernières phrases de l'article 6.

La loi de 1992 révisant la loi de 1947 peut répondre aux besoins de valorisation des parts sociales. Je l'ai pratiquée dans les coopératives HLM, à la satisfaction à nos partenaires. Par ce biais, nous avons trouvé de nouveaux investisseurs. Nous avons ainsi relancé une activité, pas toujours bien vue certes du côté de Bercy, mais nous avons fait montre d'efficacité économique, au service d'hommes et de femmes cherchant à acquérir ou à louer un logement.

Monsieur le ministre, nous vous demandons un peu de cohérence : soutenez notre rapporteur Raymond Douyère, qui souhaite supprimer l'article 6 ! Dans son rapport, nous lisons avec intérêt le tableau qui présente les fonds propres des banques ; leur capacité d'intervention au service de l'économie du pays passe bien évidemment par ces fonds propres. On ne peut d'un côté manifester son attachement au statut coopératif et de l'autre multiplier les dérogations que je qualifierai « de confort » à la loi de 1947.

Un dernier mot à propos du fonds de garantie. L'intention est louable et j'y adhère volontiers et complètement, car la nécessité d'un tel fonds est incontestable. Les sinistres récents ne doivent plus se reproduire et les déposants comme les épargnants doivent trouver des garanties.

Mais, là encore, ce n'est pas un hasard, puisque les banques coopératives ont des intérêts différents des banques dites « de l'AFB ». La coopération a su se distinguer depuis des années en mettant en place des mécanismes de garantie protégeant les associés contre toutes les difficultés de leurs banques.

M. Germain Gengenwin.

Bien sûr, ils n'ont pas attendu cela !

M. Jean-Louis Dumont.

C'est pourquoi nous sommes plutôt favorable à la création d'un fonds « chapeau » comme en Allemagne ou en Hollande.

Rendons donc hommage encore une fois à notre rapporteur Dominique Baert. Dans sa grande sagesse, il a proposé un amendement qui peut convenir, en fonction là aussi de l'interprétation qui en sera faite.

M. le président.

Vous avez dépassé votre temps de parole, monsieur Dumont.

M. Jean-Louis Dumont.

Je ne m'en étais pas rendu compte. Quoi qu'il en soit, je m'achemine vers ma conclusion.

M. Jean-Louis Dumont.

Faute de temps, je passe sur le sinistre de la banque Pallas-Stern et sur les enseignements que nous pouvons en tirer.

M. Jean-Pierre Brard.

Ah oui, lesquels ?

M. Jean-Louis Dumont.

Toutefois, je signale que, parce qu'elle avait choisi comme dépositaires de certaines de ses OPCVM les banques populaires, une partie de ses clients, détenteurs de ces OPCVM, ont pu récupérer leurs liquidités. Ils ont donc compris ce que mutualisation voulait dire.

Le volontarisme au service des déposants, des petits épargnants doit être reconnu par la loi et le dispositif proposé par le projet doit être aménagé pour tenir compte de l'antériorité des banques coopératives et des garanties qu'elles ont offertes. Il faut aller plus loin. Je compte pour cela sur la qualité d'écoute des rapporteurs, ainsi que sur celle du ministre.

Ce projet de grande qualité doit être amélioré. Ne doutez pas de la vigilance des militants de l'économie sociale, par ailleurs parlementaires, pour faire en sorte que


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l'esprit de la coopération soit respecté pour ce qu'il est : un projet politique et social porteur d'avenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. François Loos.

M. François Loos.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, tous les huit ans, le gouvernement en place dépose un projet visant à réformer les caisses d'épargne : après les crus 1983 et 1991, voilà la cru 1999 ! Si la périodicité ne peut se justifier en elle-même, elle montre cependant que les caisses d'épargne évoluent et savent s'adapter.

P ermettez-moi de m'interroger ici, monsieur le ministre, sur les raisons qui vous ont poussé à entamer cette nouvelle étape dans la vie des caisses d'épargne.

Le présent projet vise à affirmer et à renforcer la mission d'intérêt général des caisses d'épargne, à les doter d'un statut coopératif, à renforcer la cohérence et l'efficacité de leur gestion, enfin, à instaurer un partenariat de développement avec la Caisse des dépôts et consignations.

Le renforcement de la mission d'intérêt général se traduira surtout par le versement de 18,8 milliards de francs à l'Etat. Et, si une partie de l'argent va au fonds de réserve pour les retraites, merci pour lui.

Mme Nicole Bricq.

Merci pour nous !

M. François Loos.

Les autres orientations affichées sont des moyens et non des objectifs.

Le statut coopératif se mettra en place par le biais de multiples groupes locaux - mais, si vous acceptez les modifications que nous proposons ces groupes seront peut-être régionaux -, groupes dans lesquels les employés seront assez faiblement représentés. Il s'agit probablement d'aller chercher très largement des sociétaires peu concernés, mais des fidèles clients. En fait, il faudrait que l'on puisse faire entrer des partenaires financiers dans le capital, au niveau central comme au niveau local. Tel est l'objectif, dites-le. Que l'on appelle ça participation ou partenariat, l'essentiel est que cela devienne bientôt possible.

L'efficacité de la gestion n'est pas mesurable à travers les textes, mais il est clair que l'équilibre de la gestion est bien entre les mains du Gouvernement et de la Caisse des dépôts. Suivant les règles et les taux, tout change. Ce n'est pas vraiment responsabilisant et encore moins efficace.

Quant au partenariat avec la Caisse des dépôts, ne nécessiterait-il pas un texte distinct puisque les activités de cette dernière vont être remises en cause dans un certain nombre de domaines ? Même si ce texte est intéressant, il nous semble que l'on aurait dû placer la discussion dans sa véritable perspective : je veux parler de l'avenir du livret A, attaqué par les banques AFB à Bruxelles, et ce au moment où l'inflation a disparu ; de la recherche de partenaires pour les caisses d'épargne, qui n'ont pas la dimension des grandes banques actuelles ; de l'avenir du financement du logement social ; de l'avenir du financement des collectivités locales.

Sur tous ces sujets, nous aimerions, monsieur le ministre, connaître vos intentions. La réforme des caisses d'épargne doit s'inscrire dans un tel cadre. S'agit-il de faire disparaître purement et simplement le livret A ou seulement de passer à un taux de 2 % après les élections ? Nous ne le savons pas. Comment allez-vous financer le logement avec un marché financier hautement concurrentiel, mais insuffisant pour les objectifs sociaux que ce secteur doit préserver ? Quels avantages donner, compatibles avec les textes européens et supportables pour le budget assis sur des ressources à long terme ? Comment l'Etat peut-il apporter sa garantie pour opérer la nécessaire transformation de fonds à court terme en crédits à long terme ? C'est à l'Etat que doit incomber la prise de risque qui correspond à ses objectifs d'investissement pour l'aménagement du territoire - par exemple, les TGV -, pour la cohésion sociale ou le logement social. Mais nous en sommes loin. Ce texte organise seulement la prochaine étape et, fatalement, renvoie ces questions à plus tard. Je le regrette, j'aurais préféré qu'on aborde vraiment les problèmes de fond.

Dans cette discussion générale, il me faut encore parler du droit local d'Alsace-Moselle. Depuis toujours, en Alsace-Moselle, le résultat financier du circuit court en place a toujours été très correct pour les caisses et pour leurs clients. Vous souhaitez l'abandonner pour ne pas être exposé, dites-vous, aux récriminations de la Commission de Bruxelles. D'abord, je dois vous dire que, dans d'autres domaines, vous n'avez pas toujours ces préoccupations. Ensuite, vous allez vous retrouver dans un système encore moins concurrentiel puisque, pour compenser les pertes importantes que votre décision implique, il faudra un financement particulier pour les caisses d'Alsace et de Moselle, puisque l'application du régime général se traduira par une perte immédiate et prolongée de nature à mettre en question la survie de ces établissements. Vous êtes donc obligés de créer des conditions spéciales. Du point de vue de Bruxelles, ce n'est sûrement pas mieux, et je crois qu'il faudra y revenir.

Certes, le droit local n'a pas à être sanctuarisé, ce n'est pas un héritage immuable. Il peut évoluer. Mais là où il est parfaitement adapté au contexte moderne de bonne gestion et de responsabilité, il ne faudrait tout de même pas nous faire « avaler » qu'il faut le sacrifier sur l'autel de l'Europe. En clair, vous comprenez que je réfute l'argument européen.

Sans véritable argument, sans accord local, sans analyse approfondie, il ne me semble pas raisonnable d'imposer ce changement au détour de ce texte. J'espère que nous pourrons, au cours de la discussion, vous le prouver et vous convaincre.

(Applaudissements sur les bancs de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Yvon Montané.

M. Yvon Montané.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, les caisses d'épargne occupent une place à part dans le paysage bancaire français, ne serait-ce que par leur incontestable réussite. Elles en sont un acteur majeur et original en constituant ce grand réseau de l'économie sociale, profondément enraciné dans la nation et dans la conscience collective des Français. Nous avons tous, un jour, placé un peu, ou beaucoup, de nos économies sur ce petit carnet rouge siglé d'un écureuil, appelé le livret A, et nous avons ainsi, parfois sans le savoir, participé au développement d'une économie au service de la collectivité et par là même au renforcement de la cohésion nationale.

Depuis cent quatre-vingts ans, les caisses d'épargne remplissent, dans le cadre de leurs activités, des missions et des services d'intérêt général. Cette vocation historique des caisses a contribué au maintien de valeurs telles que la solidarité et l'égalité dans un contexte d'économie de marché, parfois peu enclin à leur diffusion.


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Formidables acteurs de l'aménagement du territoire, notamment en milieu rural, avec leurs 4 220 agences, les caisses d'épargne ont pour objet social d'assurer la promotion et la collecte de l'épargne ainsi que le développement de la prévoyance pour satisfaire les besoins collectifs et familiaux.

Depuis leur création, les caisses d'épargne ont certes évolué, comme en témoignent les réformes de 1983 et 1991, mais le législateur a toujours souhaité leur conserver ce statut de « banque autrement », en leur garantissant des objectifs d'intérêt général.

Cependant, les caisses d'épargne sont aujourd'hui à un tournant de leur histoire. Du fait de la transformation du monde bancaire français et de la nouvelle donne européenne, une évolution de leur statut et de leur rôle dans l'économie de notre pays apparaît nécessaire. En effet, de nouveaux défis s'ouvrent à elles : ceux que constituent l'élargissement du champ d'action des institutions financières et l'élargissement de la concurrence entre établissements bancaires. Parce que leurs parts de marché sont parfois trop faibles, leur rentabilité limitée et leur organisation pas toujours efficiente, les caisses d'épargne doivent évoluer.

Mais, si le projet de loi doit prendre en compte cette réalité nouvelle, que nous ne contestons pas, la réforme des caisses d'épargne ne peut se faire que dans la fidélité à leurs traditions et dans le respect des principes qui ont toujours défini ces institutions. C'est pourquoi les caisses d'épargne doivent rester des banques sociales, généralistes et de proximité, ouvertes à tous. Elément essentiel de l'identité des caisses d'épargne, le but non lucratif de ces dernières doit être maintenu, et la rémunération des parts ne doit en aucun cas le faire oublier, d'autant que ce but n'empêche en rien la recherche de la productivité. Au service de la collectivité pour la satisfaction des besoins sociaux de la population : telle est la définition de la mission des caisses d'épargne d'hier et de demain.

Je me réjouis à ce titre que le Gouvernement ait clairement refusé la banalisation du livret A, détenu par plusieurs millions de Français, réaffirmant ainsi la primauté du rôle des caisses d'épargne dans le financement du logement social et indirectement dans la prévention de l'exclusion.

Il ne faut pas oublier non plus le rôle éducatif de l'Ecureuil, qui inculque naturellement les bienfaits de l'épargne avant la dépense, dans un monde où l'argent facile du crédit génère les affres de situations de surendettement ! Les caisses d'épargne ont en main les cartes pour garder cette spécificité de « banque différente » capable d'affronter la concurrence, tout en conciliant une activité commerciale plus intense, une approche sociale des différentes clientèles et la déclinaison de dividendes sociaux.

Parce qu'elles sont également les financeurs de l'économie locale et sociale, en appui avec les collectivités territoriales, les caisses d'épargne n'ont rien à gagner, bien au contraire, dans une course effrénée à la concurrence financière ou dans la recherche dogmatique de la rentabilité.

Une banque, et pas uniquement les caisses d'épargne, doit savoir prendre des risques et pas seulement en plaçant des actifs sur tel ou tel marché boursier.

M. René Leroux.

Très juste !

M. Yvon Montané.

Le texte doit permettre aux caisses d'épargne de rester au service des faibles revenus et des petites entreprises auxquels certaines grandes banques n'accordent que rarement leur confiance. Recherche du profit oblige ! Je souhaite en particulier, pour garantir ces objectifs, que le nombre des représentants des personnels et des collectivités locales dans les conseils d'orientation et de surveillance soit augmenté d'une ou deux personnes dans chaque catégorie.

Si je souscris aux objectifs du projet de loi en ce qui concerne l'adaptation des caisses d'épargne afin de mieux affronter la concurrence et assurer leur développement, je serai attentif au respect de leurs missions historiques d'intérêt général et de leur vocation sociale, afin notamment de ne pas exclure les plus démunis du système bancaire.

Je souhaite que les caisses d'épargne se placent au coeur de la croissance solidaire, tout en renforçant et en optimisant leur efficacité. A l'heure où les grands fusionnent ou absorbent les plus petits, préservons notre petit écureuil des appétits financiers de certains...

M. Jean-Jacques Jégou.

Pour cela, il lui faut amasser beaucoup de noisettes !

M. Yvon Montané.

... pour qu'il ne devienne pas une espèce en voie de disparition.

Enfin, abordant en quelques mots la partie du projet de loi relatif à la sécurité financière, je tiens à dire combien, comme beaucoup ici, mon émotion est grande face au corset asphyxiant que créerait l'article 37 pour le secteur mutualiste et coopératif. Sur proposition de son rapporteur Dominique Baert, que je remercie d'avoir su écouter et comprendre sur ce point la profession bancaire concernée, la commission des finances a voté la suppression de cet article. Elle a mille fois raison, et je souhaite, monsieur le ministre, que vous l'entendiez. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Yves Cochet.

M. Yves Cochet.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, il y a trois semaines, nous débattions dans cette enceinte de l'avenir du secteur bancaire dans le contexte de libéralisme ultraconcurrentiel tel qu'orchestré par le FMI et par l'Organisation mondiale d u commerce, qui annonce d'ailleurs l'organisation commerciale du monde. La France venait alors de ratifier en confiance le Ve protocole du GATT sur les services financiers.

Dans tous ces domaines la logique qui se dessine est claire : pour se trouver en concurrence avec les banques étasuniennes dans les pays dits émergents, la France aurait besoin de doper son propre système bancaire et d'aligner ses isolats bancaires semi-publics sur le reste du système AFB.

Cette logique n'est pas la nôtre, monsieur le ministre, et nous refusons que ce qui reste de remparts face à la dérégulation planétaire, c'est-à-dire ces garde-fous mutualistes, coopératifs, ces missions d'intérêt général, sautent pour que nos banques rentrent dans une logique de rentabilité accrue avec les mains libres.

Aujourd'hui, ce sont les caisses d'épargne qui sont en question. Le projet de loi vise à les doter d'un statut coopératif. Pourquoi pas ? Mais il faut le faire à condition que les missions d'intérêt général soient à la fois élarg ies et garanties.


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Je rêve d'une loi qui aurait pour objet principiel et p rincipal de lutter contre l'exclusion bancaire, par exemple, qui se préoccuperait d'abord des missions d'intérêt général et qui alignerait toutes ses dispositions ulté rieures sur cette préoccupation première.

Or l'article 6 du projet de loi vient vite dissiper cer êve : les missions d'intérêt général énoncées par l'article 1er - missions que nous pourrons élargir, je l'espère, - ne seront, en réalité, financées qu'en dernier, après que les sociétaires auront touché leurs dividendes.

Sur ce point, monsieur le ministre, nous ne vous suivons plus.

C'est pourquoi nous vous avons déposé deux types d'amendements.

D'une part, nous proposons d'enrichir les missions d'intérêt général des caisses d'épargne par des projets de p rotection de l'environnement et de développement durable du territoire - ce sont des mots désormais légitimes et même légaux.

D'autre part, nous avons déposé un amendement tendant à instaurer un dispositif qui inverse en quelque sorte les proportions entre le reversement de dividendes aux sociétaires et le financement des missions d'intérêt général, lesquelles devront être abondées en priorité. Nous voulons ainsi sécuriser leur financement, car nous nous intéressons autant à la sécurisation financière de ces missions d'intérêt général qu'à la sécurité des opérat ions de banque. Ce qui ne nous empêche pas, monsieur le ministre, d'approuver les grandes lignes du second volet de votre projet, fort nécessaire en ces temps de spéculation acharnée. Je rends hommage aux deux rapporteurs,

M. Douyère et M. Baert, pour ce second volet.

C'est également dans le souci que les missions d'intérêt général au sein du conseil d'orientation et de surveillance soient relayées que nous proposons d'y adjoindre des membres élus par les associations agréées relevant de l'économie locale ou sociale. Nous proposerons aussi, par amendement, un élargissement des missions.

Enfin, à l'article 10, dont il ne nous échappe pas quelle importance il donne à la Caisse des dépôts en tant qu'actionnaire, nous souhaitons que les services d'investissement soient conditionnés à un principe de solidarité territoriale entre les caisses affiliées, selon une péréquation solidaire dont la Caisse nationale devra être garante.

Encore une fois, il nous semble important de corréler la rentabilité des caisses d'épargne avec leurs missions d'intérêt général et d'animation du développement local.

Or, pour l'heure, ces garanties nous semblent absentes de votre texte, monsieur le ministre.

Pour toutes ces raisons, les députés Verts ne voteront pas ce texte en l'état. Mais nous espérons, comme vous l'avez dit dans votre propos initial, que la discussion des articles et des amendements permettra d'améliorer le texte dans le sens de l'intérêt général de notre pays.

M. le président.

La discussion générale est close.

La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Les interventions ont été nombreuses et nourries mais je vais essayer, monsieur le président, de respecter votre demande et de faire bref, afin que nous puissions commencer dès ce soir la discussion des articles.

M. le rapporteur Douyère a rappelé les raisons du choix d'un statut coopératif pour les caisses d'épargne et il a présenté rapidement les amendement qu'il propose au nom de la commission des finances.

Le premier thème qu'il a abordé est l'importance du capital social, et ce thème a été repris par plusieurs intervenants. Le chiffre de 18,8 milliards de francs représente, chacun l'a bien compris, la somme des dotations des caisses d'épargne. Bien sûr, on aurait pu choisir un autre chiffre, mais c'est celui qui a paru le plus incontestable, en raison même de son caractère purement arithmétique.

Il conduit à un capital sur fonds propres qui sera de l'ordre de 35 % pour les caisses d'épargne, à comparer au pourcentage des réseaux voisins : 37 % pour les Banques populaires, 41 % pour le Crédit mutuel et 22 % pour le Crédit agricole.

Comme ce montant était dans la fourchette correspondant au ratio capitaux-fonds propres des autres structures, il n'y avait aucune raison d'en changer, mais nous reviendrons sur ce point au cours du débat.

Vous avez ensuite évoqué, monsieur le rapporteur, un amendement sur la forfaitisation des versements au fonds de réserve. Je crois pouvoir dès maintenant vous donner mon accord sur cette procédure. Si la commission le souhaite, nous pourrons en effet aller dans ce sens ; cela devrait lever un certain nombre d'inquiétudes quant au préfinancement de l'opération.

V ous avez ensuite parlé des groupements locaux d'épargne, les fameux GLE, ce sigle qui vous déplaît tant, monsieur Jégou, bien que vous ne nous ayez pas proposé quelque chose de très différent d'un super-GLE. Nous aurons, là encore, l'occasion de revenir sur ce point puisqu'un grand nombre d'amendements ont été déposés à ce sujet. L'objectif des groupements locaux d'épargne est simple. Il consiste à créer le sociétariat et à l'animer, au plus près possible du terrain, c'est-à-dire des épargnants.

Et c'est là sans doute que nous divergeons. Si l'on considère qu'on est plus près de l'épargnant au niveau local, on penchera plutôt pout les GLE, si l'on croit que c'est au niveau régional, on penchera plutôt pour les GREP.

M. Baert, rapporteur pour la deuxième partie du texte, m'a interrogé sur le Crédit foncier. La méthode retenue consiste simplement à revenir à zéro, je l'ai dit à l'Assemblée à l'occasion d'une question d'actualité. Je crois que le Gouvernement a commis une erreur en voulant poursuivre la procédure qui avait été engagée par mon prédécesseur. Elle ne nous a conduits à rien et il ne fallait pas poursuivre. Nous avons donc arrêté et suivi une procédure reposant sur une restructuration, une clarification du bilan du Crédit foncier, l'objectif étant d'avoir une présentation beaucoup plus lisible, beaucoup plus claire, et de trouver un adossement qui convienne mieux à la majorité, mais je n'ai pas entendu de critiques à cet égard sur les bancs de l'opposition.

La procédure sera ouverte, transparente, sans discrimination, comme il se doit, fondée sur un cahier des charges qui affirmera - et je réponds là très précisément à l'une de vos questions - un lien particulier, spécifique, entre le Crédit foncier et sa future filiale : Société de crédit foncier. Une convention de gestion sera établie entre ces deux entités afin d'apaiser toutes les inquiétudes.

Vous avez ensuite fait part, monsieur le rapporteur, de votre crainte que les obligations foncières ne soient contradictoires avec les procédures de titrisation. Vous connaissez trop ces matières pour être tombé dans ce piège. En réalité, ces deux procédures sont complémentaires. Les banques auront la possibilité d'utiliser l'une ou l'autre, selon qu'elles veulent faire ou non du hors bilan.

Les deux instruments visent le même objectif et je ne crois pas qu'il y ait entre eux une quelconque contradiction. Nous aurons ainsi un système permettant d'opérer sur le marché de l'immobilier comme sur le marché


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foncier en général, afin de faire de la place de Paris un grand marché. Les banques allemandes en particulier sont très puissantes en ce domaine. L'ouverture que crée la mise en place de l'euro risquerait sinon de créer une concurrence particulière, et nos établissements seraient mal armés pour y répondre. Il me semble que la création des obligations foncières dans ce texte permet d'améliorer considérablement notre situation, l'objectif étant, chacun l'a compris, la baisse des coûts de refinancement.

J'en viens à la question de la contribution des institutions financières, que vous avez abordée monsieur le rapporteur, ainsi que beaucoup d'autres orateurs, notamment sur les bancs de l'opposition. Chacun se souvient que sa mise en place avait pour objet de compenser les conséquences d'une réforme de la taxe professionnelle, intervenue au début des années 80, qui présentait un avantage très particulier pour le système bancaire. C'est pour équilibrer cet avantage particulier, qui n'était pas voulu a priori mais qui était une conséquence mécanique de la réforme de la TP, qu'a été créée cette contribution.

En dépit de la réforme de la taxe professionnelle, que vous avez votée, et qui va faire disparaître en quelques années la part salaires, la raison fondamentale de la mise en place de la CIF n'a pas disparu. Je ne vois donc pas de raison, à court terme, pour que nous cédions à la tentation, exprimée par plusieurs d'entre vous, de supprimer la CIF. Qu'à moyen terme les conditions de concurrence à l'intérieur de la zone conduisent à harmoniser la fiscalité, dans ce domaine comme dans d'autres, c'est bien possible, mais il faut procéder par étapes. Une première étape sera franchie avec la déductibilité de la cotisation aux fonds de garantie, qui pourra s'imputer sur cette contribution. Nous verrons ensuite comment les choses peuvent avancer, mais il n'y avait pas de raison particulière pour supprimer cette cotisation à l'occasion du présent texte.

Vous m'avez également interrogé sur le cadrage financier des fonds de garantie. L'idée est que, s'agissant d'une banque, le fonds de garantie doit représenter à peu près 0,2 % des dépôts, soit à peu près 10 milliards de francs, et que, s'agissant des compagnies d'assurance, il devrait représenter 0,05 % des provisions, c'est-à-dire environ 1,6 milliard.

Certains d'entre vous pourront être surpris de la différence entre ces deux chiffres, mais chacun sait bien qu'il y a beaucoup plus de sinistres bancaires que de sinistres d'assurances. M. Inchauspé a rappelé qu'il n'y avait eu qu'un seul sinistre d'assurances récent, celui d'Europavie, alors qu'il y a malheureusement eu une longue liste de sinistres bancaires, privés ou publics. Par ailleurs, le coût de ces sinistres d'assurances est plutôt inférieur. Enfin et surtout, les contraintes de liquidité en matière d'assurances sont beaucoup moins grandes que celles en matière bancaire, car les comptes courants doivent bien entendu rester disponibles. Tout cela réuni a conduit à l'estimation que je vous donne, mais nous verrons bien, à mesure que les choses évolueront, s'il convient aussi de faire évoluer les montants de ces fonds de garantie.

M. le rapporteur Baert a enfin abordé la question de l'article 37, et je crois que pas un seul d'entre vous ne l'a pas évoquée. Je vois que cet article a causé beaucoup d'émoi, spontané généralement (Sourires.), suscité parfois, mais la vie politique fonctionne ainsi.

M. Jean-Louis Dumont.

C'est la solidarité qui a joué ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Vous avez raison, monsieur Dumont.

Quelle est la raison d'être de cet article, dont je reconnais volontiers qu'il n'est peut-être pas rédigé comme il convient ? L'objectif est simple : il s'agit de permettre la juste rémunération du coopérateur, qui fait partie des principes de la coopération. Je rappelle à ceux d'entre vous qui sont des spécialistes de ces questions ce qui est le cas de M. Dumont - que le colloque de l'Union coopérative internationale, qui s'est tenu en 1995 à Manchester et a redéfini la charte de la coopération, insiste sur la nécessité de parvenir à une juste rémunération du coopérateur. Certes, l'appréciation de ce qui est juste est subjective, mais il nous a semblé que le plafond de 4,6 % fixé par la loi de 1992 était quelque peu limitatif.

Ce point me semble pouvoir recueillir l'accord de chacun, mais peut-être le contenu de l'article 37 est-il lu autrement. L'impartageabilité des réserves, à laquelle vous avez fait allusion tout à l'heure, n'est pas le but que nous voulons atteindre. J'indique par conséquent dès à présent à tous ceux d'entre vous qui l'ont demandé, sur tous les bancs, que le Gouvernement proposera de supprimer l'article 37.

M. Jean-Louis Dumont.

Bravo ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Nous verrons ensemble comment nous pouvons avancer, répondre à une préoccupation que je crois légitime et permettre une rémunération satisfaisante des coopérateurs ; le Gouvernement vous soumettra en première ou en seconde lecture un amendement en ce sens et je vous remercie de vos applaudissements. (Applaudissements et rires sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Pierre Balligand.

M. Dumont n'applaudit pas ? (Sourires.)

M. Jean-Louis Dumont.

J'ai été le premier à applaudir, monsieur le ministre ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Tout à fait ! Comme si vous aviez su à l'avance ce que j'allais dire, ce qui serait très surprenant ! (Sourires.)

J'en viens aux interventions des orateurs inscrits dans la discussion générale, et je commencerai par M. Gantier, dont j'ai le sentiment qu'il s'intéresse plus aux questions qu'il pose qu'aux réponses qu'on peut lui faire car, malheureusement, il n'est plus parmi nous.

M. Jean-Pierre Brard.

Parce qu'il anticipe les réponses ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Néanmoins, ses questions étaient intéressantes.

La première critique de M. Gantier a été reprise par certains d'entre vous. Ce projet de loi serait un peu hétéroclite. Ce n'est pas mon sentiment. Mais si certains considèrent que deux sujets - la réforme des caisses d'épargne et la sécurité financière - c'est déjà trop, pourquoi ont-ils consacré une large part de leur intervention à parler d'un troisième sujet, la rémunération du livret A ? Je ne vois pas la logique qui a pu les conduire à interroger longuement le Gouvernement sur la façon dont il entendait continuer à financer le logement social, et à lui demander s'il entendait ou non diminuer le taux du livret A ; ces sujets sont tout à fait passionnants mais ils ne sont pas directement liés, vous en conviendrez, au projet de loi dont nous discutons.

M. Gantier a également affirmé que le choix d'un statut coopératif était dérogatoire. Je m'inscris en faux contre une telle assertion. M. le rapporteur Douyère l'a rappelé, les coopératives bancaires détiennent 17 % des


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parts de marché en Europe. Elles n'ont donc pas un statut dérogatoire. Et si l'on ajoute les caisses d'épargne, on arrive a plus de 50 % des dépôts. Ce statut est donc loin d'être dérogatoire.

En choisissant le statut coopératif, que la plupart d'entre vous ont reconnu adapté - certains ont dit que c'était le moins inadapté -, le Gouvernement a été dans le sens d'une formule largement répandue en Europe, et je crois que nous avons bien fait.

M. Jean-Louis Dumont.

Très bien ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Pour finir, M. Gantier a abordé un point qui a été repris par la plupart des orateurs de Démocratie libérales et du RPR, mais beaucoup moins par ceux de l'UDF. Selon lui, le projet de loi n'est pas bon parce que nous ne libéralisons pas. Eh bien oui, l'objectif du projet est non pas la libéralisation, mais le développement des caisses d'épargne.

Nous voulons les réformer parce que nous avons besoin de les adapter à un environnement qui change.

Cela ne veut pas dire que nous cherchons à tout prix la banalisation. L'objection de M. Gantier n'est donc pas perçue par le Gouvernement comme une critique mais, au contraire, comme un satisfecit.

Il n'est pas question de procéder à une opération de privatisation. M. Rodet et d'autres intervenants ont bien montré qu'il ne s'agissait pas d'une vraie cession, et c'est tout à fait juste. Au demeurant, si nous réalisions une p rivatisation, nous aurions certainement le soutien enthousiaste de Démocratie libérale, et peut-être du

RPR ; or nous avons pu constater que ce n'était pas vraiment le cas...

Restent les 5 milliards de francs qui constituent le remboursement du prêt de 1983. Certes, retenir 5 milliards pour un prêt de 3 milliards en 1983 comporte une part d'arbitraire,...

M. Germain Gengenwin.

C'est calculé à la louche !

M. Jean-Jacques Jégou.

Nous n'allons pas vous faire un procès ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

... mais nous n'allons pas chicaner sur ce point.

Ce qui est sûr, c'est que cette somme a été prévue dans la loi de finances pour 1999. C'est pourquoi, je récuse le calcul de M. Gantier, qui semblait dire que ces 5 milliards diminueraient les fonds propres et la solvabilité du système. Rien, dans la présente loi, ne diminue la solvabilité du système des caisses d'épargne, ni les 15 milliards du système de retraites, qui relèvent de la négociation entre les partenaires sociaux, ni les 18 milliards de capital social, qui ne représentent pas une ponction sur les fonds propres. Le calcul de M. Gantier était donc un peu rapide et un peu faux.

Mme Robin-Rodrigo a mis l'accent sur la solidarité, et sur la nécessité de faire jouer celle-ci dans le bassin de vie d'une même caisse d'épargne. Ce point est très important, mais je ne partage pas pour autant la conclusion qu'elle en tirait, à savoir que la part de chaque groupement local d'épargne devait rester fixée à 10 %. Un amendement proposé par le rapporteur permettra une discussion plus fine sur ce sujet. Ce qui est important, c'est que le principe de la coopération - un homme, une voix - soit respecté. En effet, un groupement local d'épargne de 2 000 sociétaires aura le même nombre de voix qu'un groupement local d'épargne de 100 000 sociétaires ; de ce point de vue, l'équilibre est respecté.

Bloquer à 10 %, et donc revenir sur l'amendement proposé par le rapporteur, me paraît limiter les possibilités de développement, mais nous aurons l'occasion de revenir longuement sur ce point.

Monsieur Laffineur, vous avez bien voulu reconnaître que la réforme des caisses d'épargne était nécessaire et je vous en remercie. Vous avez insisté ensuite sur le fait qu'il fallait plus banaliser, davantage libéraliser, et que, loin de le faire, le texte favorisait le statu quo social. Il y a là, sans doute, une légère divergence entre nous. Ce qui m'intéresse, c'est de mettre l'accent sur la convergence que je ressens entre nous, sur la nécessité de mettre en oeuvre ce projet de réforme, dans l'esprit que nous avons retenu, c'est-à-dire l'esprit de la coopération.

En ce qui concerne la deuxième partie de la loi, vous avez longuement souligné la nécessité de faire disparaître les impositions qui pèsent sur les banques. Vous avez évoqué la taxe sur les salaires, mais celle-ci, comme vous le savez, touche bien d'autres acteurs que les banques. Elle concerne toutes les entreprises qui ont moins de 90 % de leur activité soumis à la TVA, c'est-à-dire les banques mais aussi bien d'autres entreprises. Les banques paient grosso modo 10 milliards de taxes sur les salaires sur 48 milliards au total, et il n'est donc pas nécessaire de traiter ce sujet particulier à l'occasion d'une réforme des caisses d'épargne.

Quant à la contribution des institutions financières, j'ai dit tout à l'heure ce que j'en pensais. Vous reconnaîtrez tout de même, monsieur Laffineur, que cette contribution n'est pas sortie toute armée des urnes de juin 1997.

Elle existait bien avant et il a été loisible, de nombreux gouvernements de la faire baisser. Vous pouvez demander à celui-ci d'être plus vertueux que le précédent - et j'en suis fier -, mais il y a tout de même des limites.

Ma conviction profonde est que si une partie de l'hémicycle, notamment le groupe Démocratie libérale - peut-être d'autres -, vote contre ce texte parce que la libéralisation n'est pas suffisante, c'est qu'elle voulait renoncer au statut coopératif et retenir le statut de société anonyme. Mais, dans ce cas, la protection des caisses d'épargne contre une privatisation...

M. Jean-Louis Dumont.

Ou un prédateur ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

... serait nulle.

Chacun le sait, l'alternance jouera un jour, mais pas trop tôt.

M. Yves Deniaud.

Pas trop tard !

M. Dominique Baert, rapporteur.

Ce n'est pas pressé !

M. Germain Gengenwin.

Au cours du prochain millénaire ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Probablement pas avant le prochain millénaire, en effet ! (Sourires.)

Il est donc utile que la réforme des caisses d'épargne permette de mettre en place un statut qui, parce qu'il y aura une large diffusion des parts de coopérateurs, par millions sans doute, éloignera le spectre d'une privatisation des caisses d'épargne en leur donnant un statut sur lequel on ne pourra pas revenir.

M. Gérard Saumade.

Très bien ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Cela n'aurait pas été le cas si le Gouvernement avait retenu le statut de société anonyme, fût-ce


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celui de société anonyme publique, car les exemples sont nombreux d'entreprises publiques qui ont été privatisées un jour.

Je suis persuadé que le statut de coopérative protège et protégera les caisses d'épargne...

M. Jean-Louis Dumont.

Tout à fait ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

... contre une situation que beaucoup d'entre vous ont dénoncée, et qui consiste à les lancer seules dans le grand bain de la mondialisation financière, sous la pression des marchés, qu'ont évoquée M. Brard et M. Vila. Je crois que nous avons, grâce à la formule coopérative, trouvé l'équilibre que les uns et les autres recherchaient.

Vous avez d'ailleurs, monsieur Balligand, bien expliqué que le statut de coopérative protégeait contre les OPA.

Vous avez ensuite développé vos arguments sur les obligations foncières. L'objectif est bien celui que vous avez indiqué, monsieur le député - peut-être devrais-je dire monsieur le président du conseil de surveillance de la Caisse des dépôts -, c'est-à-dire développer sur la place de Paris un marché des titres sécurisé nous permettant de combattre à armes égales avec nos voisins allemands.

A la suite de cela, vous avez souhaité donner aux sociétés de crédit foncier la possibilité de racheter des titres sans les annuler, mais cela pose un problème très technique sur lequel nous reviendrons dans le cours du débat.

Il faut en effet faire très attention aux modalités d'une telle opération du fait de risques évidents de manipulations de cours et de gonflage artificiel des bilans. En l'état, le projet donne donc la possibilité de gérer les risques de remboursement anticipé en faisant des placements liquides et sûrs. On peut envisager d'autres solutions, mais il faut le faire avec beaucoup de précautions et nous aurons l'occasion d'en reparler avec plus de précision.

M. Cabal, avec sa verve habituelle, nous a parlé de l'ambiance délétère de ce débat. Honnêtement, j'en ai connu de plus durs. Personne ne sait comment il va se terminer, mais nous sommes ensemble depuis maintenant quelques heures et reconnaissez avec moi que, pour le moment, ce débat se passe raisonnablement. L'adjectif

« délétère » me paraît donc un peu exagéré, à moins, monsieur Cabal, que vous ayez pensé aux manifestants qui pouvaient se trouver dans la rue, mais honnêtement, là aussi, il m'a semblé qu'ils étaient sensiblement moins nombreux qu'en décembre 1995, par exemple, contre le projet concernant la SNCF. Certes, des opinions peuvent s'opposer, mais le débat se déroule dans de bonnes conditions et j'en remercie chacun ici.

Vous avez dit, monsieur Cabal, que le statut coopératif était « le moins inapproprié ». Il me semble que nous arrivons à tomber d'accord là-dessus. Je constate d'ailleurs que, petit à petit, les arguments avancent, ce qui explique sans doute que le climat ne soit pas aussi mauvais que vous l'avez décrit. Voyez-vous, j'obéis à une tradition politique selon laquelle le mouvement social est une chose importante. Lorsque les syndicats, les salariés se mettent en mouvement, cela veut dire quelque chose et il faut en tenir compte. Il faut les écouter. Et lorsque je constate que, l'importance du mouvement, au sein même des caisses d'épargne, diminue, j'en conclus que les arguments cent fois répétés par le rapporteur Douyère, par moi-même et par d'autres encore, ont fini par porter et que, sans avoir totalement convaincu - je ne prétends pas cela, loin de là ! -, nous avons quand même réussi à avancer. En effet, en janvier 1998, lorsque les premières idées ont été mises sur la table, il y avait 46 % de grévistes. Il y en avait 33 % en décembre 1998, 21 % le 2 mars dernier et il y en a 9 % aujourd'hui. Je ne conclus pas à une démobilisation, mais je me réjouis que nous ayons, petit à petit, les uns et les autres, amélioré le texte sur vos suggestions multiples et réussi à convaincre que nous allions finalement dans le bon sens, ce qui explique certainement un climat moins fâcheux que celui que vous évoquiez.

Monsieur Vila, vous avez, le premier, longuement évoqué la crainte de voir les caisses d'épargne se tourner vers la recherche systématique d'une rentabilité financière.

Mais je comprends, à ce que vous dites, que vous n'êtes évidemment pas contre le fait qu'une entreprise soit rentable, efficace, qu'il n'y ait pas de gâchis. Le problème est de savoir où va cette rentabilité. Si elle va à des projets sociaux locaux, si elle sert à améliorer les réserves et, dans une mesure raisonnable, à rémunérer des sociétaires qui sont non pas des actionnaires cumulant de très grosses sommes mais des sociétaires de coopératives en très grand nombre, nous n'avons pas de raison de ne pas être d'accord sur la nécessité d'avoir une institution qui fonctionne de façon rentable.

Vous vous êtes interrogé ensuite sur l'affectation au fonds de réserve des retraites des capitaux dégagés par la transformation en coopératives. Nous aurons, là aussi, l'occasion d'y revenir, mais nous savons tous que notre système de retraite par répartition pose un problème majeur. Certains ont dit, sur ces bancs, qu'y affecter 18 milliards de francs était une goutte d'eau. Il est vrai que c'est loin d'être suffisant. Mais il est vrai aussi que les verres se remplissent par gouttes d'eau successives. Si des excédents arrivent au fonds national vieillesse dans les années qui viennent, ils s'ajouteront à ces 18 milliards et les calculs réalisés par différentes institutions, pas seulement par mon ministère, montrent que ce fonds pourra ainsi être doté de plusieurs dizaines de milliards au moment où le problème sera le plus aigu, c'est-à-dire vers 2010, en raison des bosses démographiques. Certes, cela ne résoudra pas le problème des retraites par répartition auxquelles nous sommes très attachés. Il continuera à se poser de façon sérieuse, mais cela aidera à lui trouver une solution. Il ne faut donc pas négliger l'idée de constituer ainsi une pelote que nous pourrons utiliser lorsque la situation des retraites l'exigera. D'ailleurs, pour reprendre ce que disait M. Deniaud, je ne vois aucun inconvénient à ce que nous en mettions des noisettes dans la poche de notre système de retraite, et reconnaissez avec moi que se servir de quelque chose qui appartient à la nation pour équilibrer le régime de retraite par répartition des salariés, sans hausse de cotisations, relève d'une utilisation particulièrement solidaire.

Vous avez évoqué, monsieur Vila, la nécessité de renforcer les groupements locaux d'épargne, de leur permettre de contribuer à la définition de la stratégie des c aisses d'épargne, de renforcer leur fonctionnement démocratique. Il n'y a là rien qui me choque.

Vous avez abordé un point important, que je ne développerai pas longuement pour ne pas trahir l'engagement que j'ai pris auprès du président, relatif au système monétaire international. Vous avez raison, on ne peut pas à la fois affirmer, comme je l'ai fait en introduction de ce débat il y a quelques heures, qu'il faut réformer ces réseaux de caisses d'épargne parce qu'elles sont maintenant plongées dans un contexte de mondialisation financière et ne pas s'interroger dans le même temps sur la


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façon de réguler cet environnement international. Il me paraît tout à fait pertinent, monsieur le député, d'avoir fait le lien entre les deux, mais cela relève finalement de la même logique. La mondialisation financière s'impose à nous, nous ne pouvons pas y échapper. Nous devons donc essayer de la réguler. C'est l'action que je conduis sous l'autorité du Premier ministre, dans les instances internationales, pour que le système monétaire international fonctionne différemment. Nous devons par ailleurs mettre les caisses d'épargne à l'abri des effets nuisibles des gigantesques OPA dont on a eu un aperçu ou des formidables regroupements dont nous avons eu quelq ues exemples - nous en aurons peut-être encore d'autres. Tel est bien le sens du statut coopératif.

Monsieur Jégou, je vous remercie du ton très modéré de votre intervention. Je me réjouis de ce que vous n'ayez rien trouvé à redire au statut coopératif, mais je veux vous dire mon sentiment sur l'article 1er . S'il traitait de la lutte contre l'exclusion au sens large, vous auriez sans doute raison de dire que ce n'est pas un objet bancaire, mais il s'agit de la lutte contre l'exclusion bancaire, c'està-dire, en clair, du droit au compte. Or, en réalité, ce droit au compte a déjà été, dans une large mesure, mis en oeuvre par la loi relative à la lutte contre les exclusions et concerne l'ensemble des structures bancaires, pas seulement les caisses d'épargne. Il y a donc là, tout au plus, un effet de répétition, mais je ne pense pas que ce soit très gênant. Il me paraîtrait plus fâcheux, en revanche, que ce soit contraire au statut de la coopération. Or cette volonté de favoriser l'accès de chacun à un produit bancaire, en particulier à un compte, correspond tout à fait à l'esprit de la structure coopérative. Nous aurons, là aussi, l'occasion d'y revenir puisque des amendements ont été déposés, mais je suis moins choqué que vous par l'emploi, ici, de termes qui n'apparaissent pas fréquemment dans un discours bancaire.

L'un des thèmes centraux que vous avez évoqués est c elui de la transformation des groupements locaux d'épargne en groupements régionaux d'épargne, des GLE en GREP. Le GLE ne vous plaît pas ! On peut en débattre très longtemps et préférer une structure régionale à une structure locale. Je ne suis pas sûr que l'objectif consistant à essayer de toucher au plus près les sociétaires soit mieux atteint par une structure régionale. Vous me répondrez que ce n'est pas le seul objectif, qu'il en existe un autre : assurer une prise directe plus forte sur les caisses d'épargne par l'intermédiaire du mécanisme que vous proposez. De deux chose l'une : ou bien la structure régionale que vous évoquez fonctionne comme les groupements locaux - c'est pourquoi je parlais tout à l'heure d'un super GLE -, et dans ce cas autant rester au niveau local ; ou bien elle est directement branchée sur la Caisse d'Epargne, mais à ce moment-là je ne suis pas certain que ne se pose pas un problème technique de définition.

En effet, la structure en question deviendra alors totalement transparente et disparaîtra sans doute à terme, si l'on suit votre logique, puisque le groupement régional se retirera après avoir distribué les parts aux sociétaires. Mais après cette période intermédiaire, après le retrait du GREP, il n'y aura plus de structure intermédiaire pour animer le sociétariat. Or l'objectif des groupements locaux d'épargne, c'est bien de se poursuivre pour animer le sociétariat. Sinon, comment peut-on espérer que vive un sociétariat dans une Caisse d'Epargne ayant des dizaines de milliers de sociétaires ? Nous réfléchirons donc ensemble à cette solution lors de l'examen de vos amendements, monsieur Jégou, mais je suis pas certain qu'il faille la retenir.

Vous avez dit sans agressivité que les groupements locaux d'épargne étaient une invention sui generis , que l'on n'avait jamais vu ça, que c'était original mais sans doute pas utile ! Je vous rappelle qu'en réalité les caisses locales du Crédit Agricole sont exactement la même chose que les groupements locaux d'épargne, c'est-à-dire une structure qui n'a pas d'activité commerciale propre mais qui a vocation soit à orienter vers les caisses régionales quand il s'agit de faire un prêt pour le Crédit Agricole, soit justement d'animer le milieu. L'idée que vous avez développée n'est peut-être finalement pas mauvaise, mais le projet étant construit comme il l'est, je ne suis pas certain qu'il faille la retenir.

En tout état de cause, vous avez souhaité des améliorations, s'agissant notamment des versements, et de ce point de vue vous rejoignez l'amendement de M. Douyère sur la forfaitisation des versements. Votre préoccupation de ce point de vue est la même et nous allons pouvoir la satisfaire.

Vous me demandez si le statut coopératif permettra des alliances avec des coopérateurs européens. La réponse est oui. Je ne dirai pas que c'est un objectif, car les caisses d'épargne seront libres de choisir leur destin, mais cela doit évidemment être une possibilité, car il y a de grands réseaux de caisses d'épargne en Europe et il est bien normal que les caisses d'épargne françaises puissent trouver des partenaires, à leur convenance.

Enfin, s'agissant de l'agrément des dirigeants, vous devez pouvoir convenir que c'est la contrepartie du livret A. Le réseau des caisses d'épargne présente une particularité que le Gouvernement ne veut pas banaliser : le fait de disposer d'un instrument d'épargne spécifique. Cet instrument d'épargne faisant partie de la politique du Gouvernement quel qu'il soit, en matière de soutien de l'épargne populaire, d'une part, et de financement du logement social, d'autre part, il n'est pas illégitime que cela conduise le Gouvernement à garder un lien avec la structure de direction. Comme vous l'avez dit, cet agrément a été très peu utilisé dans d'autres domaines. Mais puisqu'il y a une situation particulière liée au livret A, il n'est pas anormal qu'il y ait aussi une situation particulière de l'autre point de vue.

Enfin, vous avez évoqué la question du droit d'alerte des fonds de garantie. Sur ce point, le Gouvernement pourra sans doute vous donner satisfaction. Cela me paraît une bonne idée. Nous verrons quelle rédaction convient le mieux, mais en effet - ce point a d'ailleurs été repris par d'autres intervenants - faire en sorte que les fonds de garantie puissent disposer d'un droit d'alerte est quelque chose qui n'a pas été suffisamment explicité dans le texte du Gouvernement et nous pouvons avancer ensemble sur ce point.

M. Proriol a développé un long exemple auvergnat pour expliquer qu'il faudrait plus de sociétaires qu'il n'y a d'Auvergnats. Je n'ai pas compris si cela avait un quelconque rapport avec la réticence que ces derniers pourraient avoir à débourser un peu d'argent pour devenir sociétaires, ce qui renverrait à une longue tradition (Sourires), ce que j'ai compris, en revanche, c'est que votre calcul, monsieur Proriol, n'avait pas grand rapport avec mon problème, car je ne vois pas pourquoi on n'aurait qu'une part. Le principe de la coopération c'est « un homme, une voix », mais en n'ayant qu'une voix, on peut très bien avoir beaucoup de parts, sauf si l'on est attiré par le pouvoir à un point tel que l'on n'accepte d'acheter un nombre de parts important qu'à la condition que cela donne plus de pouvoir. Mais, monsieur Proriol, ni vous ni moi ne sommes des hommes de pouvoir (Sourires) et,


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par conséquent, nous devons admettre que nos concitoyens, eux aussi, peuvent avoir envie d'acheter des parts de coopérative de caisse d'épargne pour d'autres raisons que pour exercer le pouvoir. A partir de là, il n'y a aucune raison que les quelques centaines de milliers de personnes que vous évoquiez ne suffisent pas pour capter l'ensemble du sociétariat de la caisse d'épargne d'Auvergne. Je suis sûr, d'ailleurs, qu'il en sera ainsi.

M. Jean Proriol.

L'avenir le dira !

M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

En effet, mais comme vous souhaitez que cette réforme réussisse, nous souhaitons ensemble que l'avenir le dise correctement ! Quant à la Fédération nationale des caisses d'épargne et de prévoyance, elle représentera le réseau. Un amendement du rapporteur vise à en augmenter un peu le pouvoir, à la faire participer plus directement aux choix.

Nous aurons l'occasion d'en reparler mais, en ce qui me concerne, il n'y a pas de problème quant au principe.

M. Rodet a dit son approbation générale de ce texte, et je l'en remercie. Il a posé par ailleurs le problème du financement du logement social et de la rémunération de l'épargne. Je suis surpris, d'ailleurs, de constater que, sur tous les bancs de cette assemblée la préoccupation de financer à bon compte le logement social conduit les parlementaires à prendre la responsabilité de proposer des baisses de taux du livret A. Je ne dis pas que le Gouvernement est prêt à les suivre dans cette aventure folle.

Néanmoins, je constate que beaucoup d'entre vous défendent cette position.

M. Jean-Pierre Brard et

M. Daniel Paul.

A droite !

M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Oui, pardonnez-moi, c'était bien vers la droite que je me tournais ! M. Rodet a bien expliqué les raisons pour lesquelles il n'y avait pas privatisation. Je n'y reviens pas.

Monsieur Deniaud, vous avez dit que le placement des parts sociales était au coeur de vos inquiétudes, que le montant était trop élevé, que les délais étaient trop courts. Dix-huit milliards, quatre ans ! Trop court ? Combien pensez-vous que le réseau soit capable de placer en quatre ans ? Moins de 18 milliards, soit. Mais combien ?

M. Yves Deniaud.

Une douzaine de milliards ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Une douzaine ! Cela tombe bien. Les 18 milliards se décomposent en 13 milliards à placer et 5 milliards qui iront aux institutionnels. Le réseau ne doit donc en placer que 13. Vous avez dit 12. Vous voyez que nous sommes très proches. Nous y arriverons en quatre ans.

Mme Nicole Bricq.

Il vous a eu, monsieur Deniaud ! Il ne fallait pas répondre ! (Sourires.)

M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Restent les très importantes questions posées par M. Brard. Je ne débattrai pas avec lui de l'Immaculée Conception. Il est sur ce sujet infiniment plus compétent que moi. (Sourires.)

M. Jean-Pierre Brard.

Cela se discute, surtout dans la pratique ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

S'agissant des missions d'intérêt général à préciser, j'ai dit ce qu'il en était. Nous allons en reparler à l'article 1er

Je vous ai indiqué dans mon introduction qu'il était dans notre intention de faire en sorte, par la mécanique que nous mettons en place, que les caisses d'épargne deviennent un élément central du pôle public à condition qu'existent des partenariats nombreux avec la Caisse des dépôts et consignations.

Vous m'avez demandé de préciser les intentions du Gouvernement s'agissant du Crédit foncier. Je l'ai fait tout à l'heure. Le Gouvernement ne choisit pas comment va se faire l'adossement. Il faut qu'il y ait des candidatures. J'ai entendu, comme vous, que les caisses d'épargne pourraient être parmi les structures intéressées, mais il peut y en avoir d'autres. Evidemment, si les conditions du cahier des charges sont remplies, le Gouvernement ne verrait aucun inconvénient à ce que ce soit finalement au sein des caisses d'épargne que le Crédit foncier trouve à se loger. Cela nourrirait joliment le pôle public que nous souhaitons voir émerger.

Vous avez ensuite posé la question très compliquée de la part gratuite et, si je vous ai bien compris, il ne faudrait pas qu'elle porte rémunération. Mais, si elle ne porte pas rémunération, elle ne sera pas non plus cessible car personne n'achètera une telle part. Nous remettrions dès lors à certaines personnes, à tous les titulaires d'un livret A, une part qui ne porterait pas rémunération et qui ne serait pas cessible. La seule chose que leur procurerait cette part gratuite serait un droit de vote. Se pose alors la question, que nous avons déjà eu l'occasion d'évoquer, de savoir si, dans une structure comme la caisse d'épargne, on peut donner directement, spontanément, gratuitement, un droit de vote à quelqu'un parce qu'il en est l'un des déposants alors même que, chacun le reconnaît, les caisses d'épargne appartiennent à la nation.

N'y aurait-il pas là une rupture d'égalité entre les citoyens ? Je souhaite que nous y réfléchissions très précisément avant de faire naître des espoirs en nous engageant dans une voie qui risque de ne pas aboutir pour des raisons constitutionnelles.

En tout cas, vous avez exprimé le souhait que la discussion se déroule dans un bon climat. Pour ma part, j'y suis évidemment disposé. Du reste, vous aurez pu le constater, selon le Gouvernement, nombre des points que vous avez évoqués méritent d'être pris en considération.

M. Gengenwin nous a dit que les GLE étaient des coquilles vides. Comme je l'ai indiqué, c'est aussi vide ou pas plus que les caisses locales du Crédit agricole- il vit avec cela depuis bien longtemps.

M. Gengenwin a surtout insisté sur l'Alsace-Moselle.

D'ailleurs, il a ouvert un festival. D'autres intervenants ont pris ensuite le relais. Comme quoi l'Alsace, qui est chère à mon coeur...

M. Jean-Louis Dumont.

Et la Moselle alors ? (Sourires.)

M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Comme quoi l'Alsace et la Moselle - pardon, monsieur Dumont ! (Sourires.) - sont en tout cas bien présentes dans cette Assemblée. Mais le fait que l'Alsace et la Moselle soient chères à mon coeur ne signifie pas obligatoirement que votre proposition, monsieur Gengenwin, recueille mon assentiment.

Quel est le problème ? Il réside dans cette particularité qui fait que la moitié des fonds collectés ne sont pas centralisés. Cela présente deux caractéristiques : la liberté d'emploi et le rendement lié à cette liberté d'emploi.

S'agissant du rendement, nous sommes capables de neutraliser le problème de deux manières : d'une part, en relevant le taux de commissionnement que verse la Caisse


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des dépôts de 0,7 à 1,2 % ; d'autre part, en mettant en place au niveau de la Caisse nationale des caisses d'épargne une procédure de prêts à un taux adapté de telle sorte que la neutralité financière soit assurée. Une chose est donc sûre : même si la centralisation financière doit se faire, en termes de neutralité financière, l'équilibre sera assuré.

Reste la part de liberté. Celle-ci, me direz-vous, n'a pas de prix. Au coeur de la spécificité des critiques adressées au livret A, il y a le libre emploi des ressources. Mais je ne suis pas certain qu'il nous faille en discuter trop longuement.

Cela dit, j'appelle l'attention de chacun, en tout cas, sur le fait qu'inscrire dans la loi une particularité géographique serait ouvrir la boîte de Pandore avec les conséquences qui pourraient s'ensuivre.

Monsieur Gengenwin, vous l'avez vous-même indiqué, c'est à une tradition vieille d'un siècle que nous devons ce problème particulier. Trouvons les moyens de faire en sorte que les difficultés qu'il fait naître soient compensées, mais ne nous créons pas, en mettant le doigt dessus spécifiquement, une difficulté plus grande encore dont nous aurions ensuite tous à pâtir.

S'agissant du fonds de retraite, il sera géré par le fonds de solidarité vieillesse, ainsi que l'a prévu la loi de financement de la sécurité sociale de l'année dernière. Quels seront les emplois ? Nous aurons l'occasion d'en discuter.

Mais je ne pense pas qu'il y ait lieu de s'inquiéter du caractère excessivement risqué des placements que choisira cet organisme. En tout cas, la gestion sera assurée par le fonds de solidarité vieillesse.

Vous avez aussi réclamé la suppression de l'article 37.

Mais je ne reviens pas sur ce que j'ai déjà indiqué.

Sur la sécurité, vous avez regretté que soit créé un fonds général de garantie couvrant à la fois les banques mutualistes et les autres au motif que les banques mutualistes font déjà la police chez elle. Ce n'est pas faux.

Mais, de toute façon, elles ne paieront pas deux fois car la mise en place d'un système de « chapeau » les dispensera de payer la première fois.

Avait-on besoin de mettre en place ce fonds général ? La réponse est plutôt oui. D'ailleurs, les banques mutualistes en sont finalement convenues. Si nous voulons créer cette « maison commune », il faut que le plus d'institutions possibles soient des institutions générales et, de ce point de vue, je crois qu'il vaut mieux que le fonds de garantie couvre l'ensemble. Bien entendu, il n'est pas question que cela conduise les banques mutualistes à payer deux fois là où elles ne doivent qu'une fois.

Monsieur Inchauspé, vous avez bien voulu reconnaître que le texte du Gouvernement marquait une volonté de réforme, et je vous en remercie. Vous êtes intervenu ensuite sur la taxe sur les salaires et sur la CIF. Mais je n'y reviens pas puisque j'ai déjà eu l'occasion de m'exprimer sur ce point.

Vous avez, par ailleurs, fait un ensemble de remarques utiles sur les ratios prudentiels et les risques que font courir les titres subordonnés, en renvoyant aux travaux que le comité de Bâle met en place. Je partage votre point de vue. Il faut, en effet, puisque nous avons sur la table un projet de loi qui vise à mieux garantir le système financier, que tous les éléments de fragilité puissent être pris en compte. A cet égard, les travaux récents et à venir du comité de Bâle doivent pouvoir être intégrés à notre réflexion. Mais c'est bien un propos de spécialiste que vous avez tenu, étant sans doute l'un des rares banquiers dans cette assemblée ce soir. On comprend que ces questions vous aient préoccupé.

Puis, vous avez parlé d'un amendement relatif aux sinistres sur les constructions individuelles, que M. Jégou et des députés de la majorité ont également évoqué. Ce point est important et nous examinerons positivement, éventuellement en en revoyant un peu la forme, les amendements qui ont été proposés.

M. Dumont - cela n'a surpris personne, en tout cas, pas moi - est revenu sur l'Alsace et la Moselle.

M. Jean-Louis Dumont.

Je suis Meusien, monsieur le ministre ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Cela montre un mérite particulier. (Sourires.)

Vous avez mis l'accent sur le problème de l'impartageabilité des réserves, qui est, en effet, un élément fondamental de l'économie sociale. Je veux que vous soyez convaincu, monsieur le député, qu'en aucun cas, le Gouvernement n'a voulu attenter à ce principe fondateur de la coopération. Seule, sa maladresse est à l'origine d'une interprétation erronée. Nous allons donc corriger cela en modifiant l'article 37, voire en le retirant si c'est nécessaire.

Monsieur Loos, j'ai cru un instant que vous considériez que l'affectation au fonds de retraite n'était pas une affectation d'intérêt général. Mais ce n'est pas cela.

M. François Loos.

Si ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Dans ce cas-là, mon étonnement grandit, car il est clair qu'affecter quelque chose qui appartient à la nation au fonds de garantie des retraites, lequel concerne l'ensemble des Français, est bien une affectation d'intérêt général. Honnêtement, je n'en vois même pas qui pourrait être davantage d'intérêt général que celle-là. A vra i dire, c'est même la raison pour laquelle elle a été retenue.

En tout cas, cela me paraît plus d'intérêt général que les considérations sur le livret A qui aboutissent à poser des problèmes, certes légitimes et intéressants, sur le financement du TGV mais qui, pour le coup, sont assez éloignées de notre texte et de l'intérêt général au sens le plus large. Pour important qu'il soit, le financement du TGV ne présente qu'un intérêt général localisé mais pas national. Aussi le choix d'aider le système de retraite par la procédure qui est mise en oeuvre est-il le meilleur.

Je vous donne acte que vous êtes également intervenu sur l'Alsace et la Moselle. Mais je ne répète pas ce que j'ai pu dire à vos collègues.

M. Montané, avant-dernier intervenant, nous a fait valoir que les caisses d'épargne devaient rester des banques sociales. C'est aussi la position du Gouvernement. Pour cela, il a souhaité que, dans les COS, la part réservée aux collectivités locales, d'une part, et aux salariés, d'autre part, soit augmentée. Or nous sommes déjà dans une situation d'exception. Normalement, dans les organes de direction d'une coopérative, il n'y a, en effet, que des sociétaires. Là, nous avons mis en place un système dans lequel, à côté des sociétaires, siègent des col lectivités locales, des salariés. Je ne suis pas sûr que le fait d'en augmenter la part contribuerait à maintenir un équilibre. Certes, on peut augmenter la part de toutes les composantes, mais à ce moment-là, on obtient un COS plus nombreux, et non pas la parité. Telle n'était d'ailleurs pas votre idée, monsieur Montané.


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Des amendements visant à modifier la structure dans les COS ayant été déposés, notamment par le groupe communiste, nous aurons l'occasion de rediscuter de cette question.

Je voulais simplement attirer l'attention de l'Assemblée et la vôtre en particulier, monsieur le député, sur le fait que, par la présence des collectivités locales et des salariés, les COS ont déjà un statut particulier par rapport à une coopérative normale.

Enfin, M. Cochet nous a dit rêver d'une loi qui lutterait contre l'exclusion bancaire. Comme quoi, monsieur le député, il y a parfois des rêves éveillés puisque vous avez voté cette loi il y a un peu moins d'un an et qu'elle est aujourd'hui à l'oeuvre.

(Sourires.)

En fait, j'ai bien compris que vous souhaitiez insister sur ce point dans le présent texte. J'ai déjà eu l'occasion d'en dire un mot.

Ensuite, vous avez évoqué l'idée que le développement durable du territoire puisse faire partie des missions d'intérêt général. En soi, cela ne me dérange pas. Le catalogue risque simplement d'être un peu long. Mais, dans une certaine mesure, le développement durable du territoire qui a été adopté par l'Assemblée nationale à l'occasion du vote de LOADT ne me semble pas s'éloigner des missions d'intérêt général. Donc, si l'Assemblée en est d'accord, je ne m'y opposerai pas.

Enfin, vous avez posé la question de la répartition des résultats entre les projets locaux et sociaux, d'une part, et les sociétaires, d'autre part. Nous reviendrons sur ce point à l'occasion des amendements à l'article 6. Le sujet est effectivement important. Il faut décider comment on va organiser l'affectation des résultats des caisses d'épargne et de prévoyance. Personne n'a constesté qu'au moins un tiers du résultat distribuable doive être mis en réserve.

Mais comment se répartiront les deux tiers restants ? Sur ce point, l'Assemblée souhaite visiblement un débat auquel le Gouvernement se prêtera volontiers.

Mesdames, messieurs les députés, j'en arrive à ma conclusion. Pardonnez-moi d'avoir été long, mais je tenais à répondre aussi précisément que possible à chacune de vos interventions. S'il s'agit de dire que ce projet n'est pas satisfaisant parce qu'il ne banalise pas assez les caisses d'épargne, alors nous ne pouvons pas tomber d'accord, car nous avons précisément essayé de trouver un point d'équilibre entre la nécessité de faire évoluer les caisses d'épargne et d'organiser la réforme, sans abandonner la spécificité et la richesse de ce réseau qui s'est créé en deux cents ans. Du reste, j'ai senti que vous êtes nombreux, dans la majorité, et quelques-uns dans l'opposition, à partager ce sentiment.

En revanche, s'il s'agit de dire que la voie prise est la bonne - la moins mauvaise, diraient certains - mais que, sur tel ou tel sujet, on peut améliorer le texte, le Gouvernement est disposé à examiner avec vous les amendements avec l'objectif de parvenir à un texte qui permette aux caisses d'épargne d'être l'un des grands réseaux de l'avenir. J'ai déjà indiqué, d'ailleurs, que plusieurs de ces amendements rejoignaient les préoccupations du Gouvernement. Je suis pour ma part totalement convaincu que nous avons là un instrument d'une très grande qualité qui, avec une structure adaptée et les réformes qui sont évoquées peut, dans les cinq à dix ans, devenir un des principaux éléments de financement d'une économie décentralisée, des collectivités territoriales et de l'économie sociale.

Quant à la deuxième partie du texte, celle sur laquelle rapporte M. Baert, il me semble que les critiques souvent techniques qui ont été formulées pourront être levées et qu'il n'y a pas eu d'opposition manifeste.

Je terminerai mon intervention en vous remerciant pour le climat dans lequel la discussion générale s'est déroulée. Et je vous confirme ma volonté de parvenir, sur la plupart des articles, à des rédactions qui conviendront mieux à chacun d'entre vous et qui nous permettront de nous retrouver au moment du vote final. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Discussion des articles

M. le président.

J'appelle maintenant, dans les conditions prévues par l'article 91, alinéa 9, du règlement, les articles du projet de loi dans le texte du Gouvernement.

J'invite les orateurs inscrits sur les articles à intervenir aussi brièvement que possible, compte tenu de l'ampleur de la discussion générale et des réponses qui viennent d'être apportées par M. le ministre. Certains inscrits qui, en outre, ont déposé des amendements, interviendront aussi à ce titre. Tout cela, mes chers collègues, pour vous dire qu'il ne conviendrait pas de reprendre la discussion générale à tout propos.

Article 1er

M. le président.

Je donne lecture de l'article 1er :

PREMIÈRE PARTIE DE LA RÉFORME DES CAISSES D'ÉPARGNE

TITRE Ier

DISPOSITIONS PERMANENTES C HAPITRE Ier Le réseau des caisses d'épargne

« Art. 1er . - Le réseau des caisses d'épargne remplit des missions d'intérêt général. Il participe à la mise en oeuv re des principes de solidarité et de lutte contre les exclusions. Il a en particulier pour objet la promotion et la collecte de l'épargne ainsi que le développement de la prévoyance, pour satisfaire notamment les besoins collectifs et familiaux. Il contribue à la protection de l'épargne populaire et au financement du logement social.

« Dans les conditions fixées par l'article 6 de la présente loi, les caisses d'épargne et de prévoyance utilisent une partie des ressources relevant de leur activité bancaire et commerciale pour le financement de projets d'économie locale et sociale. »

La parole est à M. Christian Cabal.

M. Christian Cabal.

L'article 1er nous projette d'emblée sur une des difficultés essentielles de ce texte. Nous sommes confrontés si ce n'est à une contradiction, en tout cas à une conciliation relativement délicate entre l'objectif découlant des statuts, l'absence de caractère lucratif, et la compensation qui apparaît à travers différentes dispositions - lutte contre l'exclusion, finance-


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

ment du logement social. Bien qu'il y ait des incidences non négligeables en matière de rémunération du livret A, il faut reconnaître, monsieur le ministre, que la compensation n'est pas l'objet de ce texte. Cela étant, cet aspect ne peut pas nous laisser indifférents.

Mais c'est davantage à propos de l'affectation des dividendes sociaux que se pose le problème. Les caisses d'épargne vont être confrontées à des conditions de souscription des parts sociales qui ne sont pas aussi « affriolantes » que vous le laissez supposer, monsieur le ministre.

En effet, le CENSEP s'est livré à quelques opérations tests qui font apparaître que la réaction des déposants est relativement timide. Les conditions qui semblent devoir être mises en oeuvre en termes de rémunération des parts sociales ne seront certainement pas marquées par un emballement excessif.

Alors je ne sais si l'ensemble des citoyens français partagent les réserves des citoyens auvergnats (Sourires), mais il y aura incontestablement des difficultés. Je ne suis pas convaincu que chaque déposant acquerra notoirement plus de parts sociales que le nombre lui permettant d'être décemment sociétaire.

Le niveau de rémunération sera forcément non négligeable, pour ne pas dire important. Avec la nécessité de participer aux différentes modalités de mise en oeuvre de dividendes sociaux il va peser assez lourdement.

En plus, quand j'entends Yves Cochet envisager un renversement des ratios et des rapports, je crains vraiment que nous n'allions vers des difficultés majeures. Nous risq uons notamment de voir exploser le coefficient d'exploitation, ce qui contraindra les caisses à prendre des mesures très strictes en matière de réduction des coûts.

Tout cela se traduira inévitablement par une diminution de la voilure, c'est-à-dire du nombre d'agences, en particulier dans les zones défavorisées, dans les zones rurales à faible densité de population, voire dans certains quartiers, et donc par une diminution des effectifs.

Ainsi, la plus importante des vocations sociales des caisses, à savoir le maillage, ce réseau extrêmement dense qui permet aujourd'hui à tous les déposants, notamment les personnes âgées, de se trouver toujours à une courte distance d'une agence, risque d'être lourdement entravé par une disposition qui prétend précisément l'affirmer.

N'oublions pas que le maillage des caisses relève des capacités contributives de chaque caisse.

En outre, le ratio plafond fixé dans le projet risque assez rapidement de devenir un plancher. Car j'ai déjà noté, chez nos collègues qui ont des mandats locaux, une volonté manifeste de voir l'engagement financier être le plus important possible.

L'article 1er , complété par l'article 6, traduit des préoccupations incontestablement altruistes : mais à trop vouloir prouver, on risque le contraire. Je crains que les coûts induits sur le fonctionnement des caisses aient des effets négatifs beaucoup plus graves en termes de réseaux.

M. le président.

Monsieur Vila, vous êtes inscrit sur l'article. Peut-être pourriez-vous présenter en même temps votre amendement no 259 ? J'imagine que l'explication doit être la même...

M. Jean Vila.

Non, pas tout à fait, monsieur le président.

Dans la discussion générale, on l'a dit, les caisses d'épargne c'est 28 millions de clients, c'est le deuxième réseau collecteur d'épargne : 1 410 milliards gérés fin 1997 d ont 940 milliards de dépôts, 39 200 salariés, 4 220 agences. La réforme revêt donc un enjeu politique et économique considérable.

L'article 1er affirme que ce réseau remplit des missions d'întérêt général et participe à la mise en oeuvre des principes de solidarité et de lutte contre les exclusions. Nous proposerons par nos amendements de préciser ce qu'on entend par missions d'intérêt général. N'y a-t-il pas contradiction avec la sortie des caisses d'épargne du secteur non lucratif ? Comment les caisses d'épargne, qui devront reverser 30 % des bénéfices nets du groupe aux sociétaires, 18 milliards au fonds de garantie, et céder à l'Etat 5 milliards en plus de la vente pour 13 milliards de parts sociales aux sociétaires, pourront-elles assurer également les missions d'intérêt général ? Comment, en intégrant de fait le système bancaire commercial, les caisses d'épargne pourront-elles conserver leur spécificité d'investissement social, notamment le l ogement, et leur spécificité d'épargne populaire ? Comment pourront-elles en même temps assurer la rémunération des livrets A à un taux attractif pour les petits épargnants, des prêts attractifs aux organismes HLM etr épondre à la volonté de rentabilité accrue des sociétaires ? Ainsi que nous l'avons souligné dans la discussion générale, ces affirmations nous semblent contradictoires et nous souhaiterions être rassurés.

M. le président.

Nous en arrivons à l'amendement no 259, présenté par MM. Vila, Cuvilliez, Feurtet et les membres du groupe communiste et apparentés. Cet amendement est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 1er :

« Le réseau des caisses d'épargne, la Caisse nationale des caisses d'épargne, en partenariat avec la Caisse des dépôts, constituent un "pôle public et social d'impulsion des coopérations bancaires pour un crédit favorable à l'emploi et à la formation".

« C'est pour développer ce crédit nouveau, par l'octroi de prêts et de garanties, sans poursuivre de but lucratif, qu'ils accomplissent en coopération des missions d'intérêt général en matière de financement : pour le logement social, les projets d'infrastructures, le développement régional, les communes, les petites et moyennes entreprises.

« C'est aussi à cette fin que le réseau des caisses d'épargne et la Caisse nationale des caisses d'épargne en partenariat avec la Caisse des dépôts, contribuent à la protection et à la promotion de l'épargne populaire, grâce, en particulier, aux fonds collectés sur le livret A dont la spécificité est maintenue.

« Ensemble ils cherchent à soutenir des coopérations en France, en Europe et dans le monde permettant de maîtriser les marchés financiers et de faire refluer leur rôle grâce à la promotion d'un nouveau crédit favorable à l'essor de l'emploi et de la formation.

« Le réseau des caisses d'épargne, la Caisse nationale des caisses d'épargne et la Caisse des dépôts,r endent compte au Parlement national et aux conseils régionaux de l'efficacité de l'utilisation des fonds qu'ils collectent et centralisent au regard des exigences de croissance de l'emploi. Si besoin est, ils en rendent compte aussi au Parlement européen. »

Monsieur Vila, je considère que cet amendement a été présenté...

M. Jean Vila.

Non, monsieur le président.

M. le président.

... puisqu'il tend à réécrire l'article 1er

Quel est l'avis de la commission ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

M. Raymond Douyère, rapporteur.

La commission des finances a rejeté cet amendement.

M. Jean Vila.

Que je n'ai pas présenté !

M. Raymond Douyère, rapporteur.

Cet amendement dont la commission a débattu puisqu'il avait été déposé risquerait de peser sur l'autonomie de décision des caisses d'épargne. En proposant une énumération extrêmement précise, il s'oppose à l'esprit même du texte présenté par le Gouvernement.

Le réseau des caisses d'épargne devra remplir des missions d'intérêt général. Le ministre a ainsi évoqué la mi se en réserve du produit de la cession des parts sociales dans le fonds de solidarité retraite.

Le réseau participera aussi, de façon générale, notamment par la collecte des fonds sur le livret A, à des missions d'intérêt général puisque ces fonds, centralisés à la Caisse des dépôts, servent au financement du logement social.

A propos de l'exclusion bancaire, sujet sur lequel nous avons voté une loi, nous reprenons, en les accentuant, les dispositions de la loi bancaire relatives au droit au compte. Cela étant, il conviendra peut-être - ce sera une question d'éthique - que les caisses d'épargne aillent plus loin pour assurer effectivement à l'ensemble de leurs sociétaires non seulement le droit au chéquier et le droit d'accès aux guichets, pour y retirer de l'argent en fonction de leurs capacités, mais aussi un véritable service, notamment aux plus humbles et aux exclus de la société.

Ces actions pourront faire partie des missions d'intérêt général définies par l'article 1er . En revanche, leur limitation par une énumération précise, qui ne fait d'ailleurs même pas allusion à la lutte contre l'exclusion, n'a pas semblé pertinente à la commission des finances.

Je veux également répondre aux objections à propos de l'affectation générale au financement de projets d'économie locale et sociale qui fait l'objet du second alinéa de l'article. En ce qui concerne le système coopératif, la loi de 1947 prévoit implicitement une rémunération des sociétaires décidée par l'assemblée générale. Après les mises en réserve, cette dernière peut en effet affecter le surplus à d'autres coopératives, ou à des services supplémentaires, soit sous forme de réductions accordées aux sociétaires, soit dans des actions d'intérêt général.

Nous n'innovons donc pas. Nous mettons simplement en pratique ce qui est contenu dans la loi de 1947. Ainsi que le ministre y a fait allusion, l'article 6 définira les modalités particulières - dont l'intervention est également prévue par la loi de 1947 - selon lesquelles devront être décidées ces affectations.

Nous restons donc dans le droit-fil de la loi de 1947.

La rédaction proposée semble répondre à bon nombre des préoccupations exprimées à ce sujet et elle pourra être utilement complétée par certains amendements portant sur le premier ou le second alinéa de l'article.

Je souhaiterais donc, monsieur le président, que les amendements ayant un même objet, qu'ils portent sur le premier ou sur le second alinéa de l'article, soient examinés en même temps afin que le rapporteur puisse ensuite indiquer globalement ceux auxquels il est favorable.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

L'amendement tend à mettre en évidence les spécificités des caisses d'épargne, ce qui est d'ailleurs l'objet de l'article 1er . Sur le principe il n'y a pas de problème. En revanche, l'amendement procède à une énumération limitative de mesures générales.

M. Vila étant également signataire de l'amendement no 266 qui reprend la même préoccupation, une préoccupation que je partage avec lui, mais de façon plus c oncrète, il serait préférable qu'il retire l'amendement no 259 pour s'en tenir à l'amendement no 266, qui illustre parfaitement les objectifs visés par ses auteurs et correspond mieux au texte dans lequel il introduirait quelques précisions intéressantes. Le Gouvernement lui donnerait donc un avis favorable.

M. le président.

Que pensez-vous de cette proposition, monsieur Vila ?

M. Jean Vila.

Je retire l'amendement.

M. le président.

L'amendement no 259 est retiré.

Monsieur le rapporteur, il est difficile de répondre à votre demande. Les amendements sont soumis à une discussion commune dans les conditions fixées par le règlement. Déroger à l'ordre d'examen établi sur un sujet aussi technique et difficile risquerait d'introduire une certaine confusion dans nos débats.

M. Jégou et M. Paecht ont présenté un amendement, no 131, ainsi rédigé :

« Supprimer la deuxième phrase du premier alinéa de l'article 1er »

La parole et à M. Jean-Jacques Jégou.

M. Jean-Jacques Jégou.

Je voulais m'exprimer contre l'amendement de nos collègues communistes, venant ainsi appuyer le ministre qui a indiqué que le Gouvernement était prêt à accepter des amendements à condition qu'ils ne changent pas l'économie du projet. Je crois très sincèrement - et nous aurons l'occasion d'y revenir tout au long de la discussion - que nos collègues communistes ne sont pas sur la même planète.

M. Jean-Pierre Brard.

Pas sur la même que vous, c'est sûr !

M. Jean Vila.

Et cela nous rassure !

M. Jean-Jacques Jégou.

Notre collègue M. Brard, qui souvent joue les redresseurs de torts et siège à la commission de surveillance de la Caisse des dépôts avec M. Balligand, qui la préside, et avec moi - nous représentons la commission des finances -, est le premier à hurler contre l'impossibilité actuelle à laquelle se heurtent les sociétés d'HLM pour construire des logements sociaux ou très sociaux parce que les taux sont trop élevés compte tenu de celui du livret A.

M. Jean-Pierre Brard.

Je n'ai jamais dit ça !

M. Jean-Jacques Jégou.

C'est vraiment Gribouille ! Nous ne sommes pas dans un monde où l'on peut à la fois offrir des taux élevés pour les placements, comme le voudraient les Français, et proposer des taux bas pour les emprunts. Choisissez votre camp ! Tout en étant dans l'opposition, nous avons - je vous remercie de l'avoir remarqué, monsieur le ministre - une idée très coopérative, dans tous les sens du terme, des caisses d'épargne. Cependant, nous estimons qu'il n'est pas possible de surfer sur des contradictions en voulant à la fois lutter contre les exclusions bancaires et améliorer la gestion des caisses d'épargne.

Certains de nos collègues, y compris dans le groupe socialiste, parlent d'une banque à but non lucratif et de l'aggravation de l'environnement qui ne permet pas aux caisses d'épargne - tel est aussi votre avis, si j'ai bien compris, monsieur le ministre - d'avoir des résultats satisfaisants. Il faut donc les doter d'un statut leur permettant


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

d'améliorer leur gestion et de dégager des bénéfices qu'elles pourront ensuite répartir par tiers entre les réserves, leurs sociétaires et le financement de projets d'intérêt général. Nous devons en rester là.

C'est pourquoi mon amendement tend à supprimer la deuxième phrase de l'article 1er : « Il participe à la mise en oeuvre des principes de solidarité et de lutte contre les exclusions. » Cependant, pour vous montrer, monsieur le

ministre, que j'ai bien compris vos explications, j'accepterais de le retirer si l'on précisait qu'il s'agit des exclusions bancaires.

M. le président.

Monsieur Jégou, l'amendement suivant devrait vous donner satisfaction.

Mme Nicole Bricq.

L'amendement Balligand !

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Raymond Douyère, rapporteur.

La commission a rejeté cet amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

J'ai évoqué l'amendement no 266, déposé notamment par M. Vila et M. Brard, en indiquant que le Gouvernement le soutiendrait. Or il vise justement « la lutte contre l'exclusion bancaire et financière ».

Il me semble donc, monsieur Jégou, vous donner satisfaction. Vous pourriez donc retirer votre amendement et l'Assemblée se retrouverait sur l'amendement no 266.

M. le président.

Etes-vous convaincu, monsieur Jégou ?

M. Jean-Jacques Jégou.

Mon collègue Balligand a ccepterait-il d'ajouter le mot « bancaires » à

« financières » ?

M. le président.

Mes chers collègues, nous sommes entrés dans le cycle dangereux qui consiste à faire échange de bons procédés, car il devient alors difficile de mener une discussion suivie.

Pour l'instant, les amendements ont tous la rédaction dans laquelle ils ont été déposés. Ils pourront être modifiés en cours de discussion, sous réserve que la modification ne bouleverse pas complètement nos débats, mais nous n'en sommes pas là.

La parole est à M. le ministre.

M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Jégou a indiqué qu'il voterait l'amendement de M. Balligand s'il visait les exclusions « bancaires et financières ». Or M. Balligand paraît satisfait par l'amendement de M. Vila qui cite « l'exclusion bancaire et financière ». Il me semble donc que des individus norm alement constitués devraient pouvoir s'entendre (Sourires.) et adopter, après le retrait des autres amendements, l'amendement no 266.

M. le président.

L'amendement no 131 est-il retiré, monsieur Jégou ?

M. Jean-Jacques Jégou.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

L'amendement no 131 est retiré.

M. Balligand a présenté un amendement, no 283, ainsi rédigé :

« Compléter la deuxième phrase du premier alinéa de l'article 1er par les mots : "en particulier les exclusions financières". »

Monsieur Balligand, acceptez-vous la proposition de M. le ministre ?

M. Jean-Pierre Balligand.

Oui, je me rallie au souci du ministre d'essayer de trouver un compromis au travers de l'amendement de mes collègues communistes.

M. le président.

Je précise tout de même que cet amendement propose d'autres modifications. Vous les acceptez donc aussi ?

M. Jean-Pierre Balligand.

Oui, monsieur le président.

M. le président.

L'amendement no 283 est retiré.

MM. Brard, Feurtet, Vila et les membres du groupe communiste et apparentés ont présenté un amendement, no 266, ainsi libellé :

« Rédiger ainsi la dernière phrase du premier alinéa de l'article 1er : "Il contribue à la protection de l'épargne populaire, au financement du logement social, à l'amélioration du développement économique et régional et à la lutte contre l'exclusion bancaire et financière de tous les acteurs de la vie économique sociale, et environnementale". »

Sur cet amendement, M. Douyère a présenté un sousamendement, no 312, qui reprend l'amendement no 15 de la commission. Il est ainsi rédigé :

« Dans l'amendement no 266, après les mots : "l'épargne populaire", insérer les mots : ", à la collecte des fonds destinés". »

La parole est à M. Jean-Pierre Brard, pour soutenir l'amendement no 266.

M. Jean-Pierre Brard.

Chacun sera évidemment sensible à l'esprit oecuménique du ministre qui a amené

M. Jégou à avaler son chapeau.

(Murmures.)

Mme Nicole Bricq.

Oh non !

M. Jean-Pierre Brard.

Il s'agit d'un débat sérieux ! N otre collègue, que nous estimons tous, patelin comme il sait l'être, avait tout de même proposé de supprimer une disposition très importante dans le texte. Il n'a cependant pas pu assumer cette position jusqu'au bout. A cet égard notre amendement est infiniment meilleur, d'autant qu'il va à l'inverse de ce que voulait

M. Jégou.

M. le président.

Monsieur Brard, personne n'en doute puisqu'il est de vous ! (Sourires.)

Mais il n'est peut-être pas utile de mettre en cause la bonne volonté des uns et des autres.

M. Jean-Pierre Brard.

Monsieur le président, si vous voulez écrire mon texte, nous pouvons changer de place.

Permettez que je défende mon amendement.

M. le président.

Bien entendu !

M. Jean-Pierre Brard.

L'amendement no 266 va donc plus loin que ce qui a été évoqué, même s'il est en parfaite cohérence avec celui de notre collègue Jean-Pierre Balligand, car il vise plusieurs missions complémentaires.

Cela devrait même apporter, dans la durée, une réponse à la question des taux, dans la mesure où l'on n'en reste pas exclusivement au logement social pour donner aur éseau des caisses d'épargne d'autres missions qui devraient lui permettre de rémunérer convenablement le livret A.

Pour sa part, M. Jégou estime que le livret A est trop bien rémunéré : mais je ne l'ai pas entendu s'indigner du taux de rentabilité des placements boursiers !

M. Jean-Jacques Jégou.

Bien sûr, ce n'était pas le sujet !

M. Jean-Pierre Brard.

Or ils ont permis à ceux qui boursicotent d'enregistrer, l'année dernière, une plusvalue de 31,5 %.

M. Jean-Jacques Jégou.

Je sens que nous nous approchons de Liliane Bettencourt.

(Sourires.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

M. Jean-Pierre Brard.

Que voilà une réflexion très i ntéressante. Certains démons hantent les nuits de M. Jégou...

M. Jean-Jacques Jégou.

Non, les vôtres !

M. Jean-Pierre Brard.

Notre collègue est si conditionné qu'il finit par évoquer ceux dont il est chargé de défendre les intérêts ici.

(Murmures.)

Je n'insiste pas davantage, car le texte de notre amendement est simple et précis.

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur, pour donner l'avis de la commission sur l'amendement no 266 et présenter le sous-amendement no 312.

M. Raymond Douyère, rapporteur.

Comme le Gouvernement, je suis personnellement favorable à la rédaction proposée par MM. Brard, Feurtet et Vila, car elle résume effectivement la plus grande partie des activités d'intérêt général qu'exerceront les caisses d'épargne.

Néanmoins, j'avais déposé un amendement no 15 pour préciser, à propos du financement du logement social, qu'elles devaient participer à la collecte des fonds qui lui sont destiné. Nous savons tous que les caisses d'épargne ne participent pas directement au financement du logement social. Ce financement est assuré par l'intermédiaire de la centralisation opérée au niveau de la Caisse des dépôts et consignation.

Tout le monde semblant favorable à l'amendement no 266 dont l'adoption aurait fait tomber l'amendement no 15, j'ai je l'ai transformé celui-ci en un sous-amendement. Sous réserve de son adoption par l'Assemblée nationale, je suis favorable à l'amendement no 266.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix le sous-amendement no 312.

(Le sous-amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 266, modifié par le sous-amendement no 312.

(L'amendement, ainsi modifié, est adopté.)

M. le président.

En conséquence, l'amendement no 15 tombe.

MM. Brard, Feurtet, Vila et les membres du groupe communiste et apparentés ont présenté un amendement, no 267, ainsi rédigé :

« Compléter le premier alinéa de l'article 1er par les mots : "grâce en particulier aux fonds collectés sur le livret A dont la spécificité est maintenue". »

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard.

Il s'agit clairement avec cet amendement de réaffirmer la spécificité du livret A. Les propos que nous entendons montrent que cette précision n'est pas superfétatoire. Il faut éviter toute ambiguïté à cet égard.

M. le président.

Monsieur Brard, la présidence considère que cet amendement tombe dans la mesure où l'Assemblée a modifié la rédaction du premier alinéa de l'article 1er

M. Jean-Jacques Jégou.

Absolument.

M. le président.

Je suis saisi de deux amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 169, présenté par M. Douyère, est ainsi libellé :

« Après le mot : "projets", rédiger ainsi la fin du dernier alinéa de l'article 1er : "contribuant à la protection de l'environnement et au développement durable du territoire et pour celui de projets d'économie locale et sociale". »

L'amendement no 202, présenté par MM. Cochet, Aschieri, Mme Aubert, MM. Hascoët, Mamère et Marchand, est ainsi rédigé :

« Compléter le dernier alinéa de l'article 1er par les mots : ", de protection de l'environnement et de développement durable du territoire". »

La parole est à M. Raymond Douyère, pour soutenir l'amendement no 169.

M. Raymond Douyère, rapporteur.

Nous avons précisé dans la deuxième phrase du premier alinéa quelles étaient les missions d'intérêt général des caisses d'épargne.

Nous souhaitons, dans le second alinéa, préciser que les caisses d'épargne contribueront « à la protection de l'environnement et au développement durable du territoire et pour celui de projets d'économie locale et sociale », c'est-à-dire que le produit du dividende social des caisses d'épargne sera affecté à ces missions.

M. Cochet a déposé un amendement très voisin. Le mien me semble plus complet que le sien. S'il souhaitait y être associé, on pourrait le baptiser « Douyère-Cochet » et le faire adopter par l'Assemblée nationale, sous réserve qu'il retire le sien.

M. le président.

D'accord avec cette proposition, monsieur Cochet ?

M. Yves Cochet.

Bien entendu, le « et », en fait, permute plus ou moins les deux membres de phrase. Evidemment, du point de vue logique, si vous me permettez, la copule est commutative. (Sourires.)

La copule, c'est le

« et » !

Mme Nicole Bricq.

Nous avons compris, nous ne sommes pas complètement idiots !

M. Yves Cochet.

Parler des projets touchant à la protection de l'environnement avant ou après les projets d'économie locale et sociale, logiquement, c'est un peu la même chose.

Un moment, en commission, monsieur le rapporteur, vous m'avez dit que le concept d'économie locale et sociale - et même, le mot concept est-il peut-être philosophiquement un peu fort - recouvrait celui de protection de l'environnement et de développement durable du territoire. Je ne le crois pas. Quand on regarde ce qui a été fait par les caisses d'épargne du point de vue de la protection de l'environnement et du développement durable du territoire, c'est à peu près rien. Alors, mieux vaut l'écrire, vous l'admettez comme moi. Avant ou après

« économie locale et sociale » ? Peu importe ! Je veux bien la fusion de nos amendements... Comme il n'y a pas d'ordre de priorité réellement politique, tout est dans le même tas, on peut le faire.

M. Raymond Douyère, rapporteur.

On peut baptiser l'amendement « Cochet-Douyère » ! (Sourires.)

M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Comme la copule est commutative... (Sourires.)

M. Yves Cochet.

Là n'est pas la question !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

M. le président.

Mes chers collègues, êtes-vous vraiment sûrs de n'avoir pas besoin d'une suspension de séance ? (Sourires.)

A cette heure, personnellement, je me sens extrêmement las par cette discussion compliquée, je l'avoue. (Sourires.)

Mais vous allez nous éclairer, n'est-ce pas, monsieur le rapporteur ?

M. Raymond Douyère, rapporteur.

M. Cochet n'a qu'à retirer son amendement !

M. Jean-Louis Dumont.

Il faudrait une fusion de synthèse !

Mme Nicole Bricq.

Un PACS !

M. Yves Cochet.

Bon je veux bien retirer mon amendement.

M. le président.

Comme j'aurais vite compris si vous me l'aviez dit d'emblée ! (Rires.)

L'amendement no 202 est retiré.

Quel est l'avis du Gouvernement sur l'amendement no 169 ? M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Favorable à la copule, monsieur le président ! (Rires.)

M. le président.

Comme je vous comprends ! Considérons donc que l'amendement no 169 est cosigné par M. Douyère, M. Cochet... et les autres cosignataires de l'amendement no 202 ! Je mets aux voix cet amendement.

(L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 1er , modifié par les amendements adoptés.

(L'article 1er , ainsi modifié, est adopté.)

Article 2

M. le président.

« Art. 2. - Le réseau des caisses d'épargne comprend les caisses d'épargne et de prévoyance, les groupements locaux d'épargne, la Caisse nationale des caisses d'épargne et de prévoyance et la Fédération nationale des caisses d'épargne et de prévoyance. »

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, inscrit sur l'article.

M. Jean-Jacques Jégou.

Comme vous tous, j'aimerais que nous n'allions pas trop tard ce soir, et vous me pardonnerez d'être obligé, compte tenu de la structure du projet, d'aborder le problème des GLE et des GREP à l'article 2 - j'y reviendrai d'ailleurs plus précisément à l'article 4 où l'on touche le fond des choses.

Sans entrer dans le détail, le problème est la façon dont les caisses d'épargne vont passer sous statut coopératif. Selon votre proposition et celle du rapporteur, c'est par la création des GLE. Or ce système nous paraît empreint de beaucoup d'inconvénients. D'abord, il n'apparaît pas indispensable. Les caisses d'épargne auraient pu vendre elles-mêmes, je l'ai dit, leurs parts sociales. En fait, le système s'apparente à une sorte d'« usine à gaz ».

Je vais décrire rapidement les inconvénients des GLE qui sont des excroissances des caisses régionales et, en fait, vous ne l'avez pas nié, des coquilles vides. Vous avez également dit que le Crédit agricole avait la même utilisation. Pourquoi persister et fabriquer des structures qui n'auront pas d'existence réelle ?

Les groupements locaux d'épargne acquièrent le capital de la Caisse d'épargne au moyen d'un prêt sans intérêt.

Nous ne changeons pas l'économie du projet puisque, pour les GREP, il en va de même. Ils tenteront, ensuite, de vendre ce capital sous forme de parts de GLE qui ne seront pas des parts de caisses d'épargne ; cela me paraît un point très important. Les GLE sont les seuls sociétaires des caisses régionales, ce qui est tout à fait contraire au droit coopératif. J'ai besoin que vous m'apportiez à ce sujet une précision, mais ma déclaration n'est pas péremptoire, je n'ai rien inventé c'est bien la réalité. Les GLE n'ont pas vocation à recourir au service de la caisse.

Vous faites donc entrer les caisses d'épargne dans le statut coopératif en détournant la loi de 1947.

J'insisterai aussi sur la question de la répartition des dividendes. On va créer une inégalité de fait entre les coopérateurs. Les clients d'une même caisse d'épargne régionale ne dépendront pas du même GLE, puisqu'il y en aura plusieurs par région. Apparaîtra donc une différence de rémunération. Les participations croisées étant interdites, rien ne viendra corriger ce défaut.

La question de l'information du public me paraît encore plus grave puisque les GLE n'ayant pas d'existence propre, ils ne pourront pas délivrer d'information. Avec l'esprit constructif que vous avez remarqué, monsieur le ministre, le groupe UDF propose de substituer aux GLE les groupements régionaux d'épargne et de prévoyance. Il n'y aurait plus d'inégalités entre les coopérateurs mais au contraire prise directe, comme vous l'avez justement remarqué pour un coût de gestion nettement diminué, du fait du plus petit nombre de structures. Les GREP seront, de la même manière que les GLE, détenteurs des parts de caisses d'épargne, mais il n'existera pas de différence sur le plan de l'économie du projet puisque le prêt sans intérêt de la caisse d'épargne sera le même.

La différence fondamentale entre les GLE et les GREP est que les seconds vendront des parts de caisse d'épargne, c'est-à-dire une réalité rattachée à un bilan. Les sociét aires seront véritablement détenteurs des parts de caisses d'épargne, ce qui n'est pas le cas avec les GLE. Les GREP seront, en fait, des prestataires de services d'investissement, et seront inscrits, à ce titre, au registre du commerce et des sociétés, mais ils ne feront pas directement d'opérations de banque.

J'ajoute - et, là, je ne suis pas d'accord avec ce que vous avez dit tout à l'heure - que les GREP ne disparaîtront pas, puisqu'ils seront chargés, ensuite, de gérer les entrées et les sorties. Il y aura donc une pérennisation après la réforme : ils géreront environ 10 % des parts correspondant à la gestion des entrées et des sorties des coopérateurs. C'est eux qui souscriront, en cas d'augmentation de capital de la caisse régionale et qui géreront les sociétaires, comme vous le souhaitez, monsieur le ministre, par des sections locales rassemblant les coopérateurs du secteur. Il y aurait là véritablement un avantage.

On ne changerait rien, finalement à l'économie du projet, comme c'est votre souhait. Il ne s'agit pas seulement - vous l'avez bien compris - d'une question d'appellation. Le GREP est une formule plus simple, plus efficace et moins coûteuse qui ne change en rien l'économie du projet de loi que vous nous présentez. Au contraire, le GREP permettra, peut-être, une simplification et une clarification pour les sociétaires.

M. le président.

Je vous remercie, monsieur Jégou.

Une large réponse a été donnée tout à l'heure à ce sujet.

Je suis saisi de deux amendements pouvant être soumis à une discussion commune.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

L'amendement no 209 corrigé, présenté par M. Cabal et M. Yves Deniaud, est ainsi rédigé :

« Dans l'article 2, substituer aux mots : "les groupements locaux d'épargne", les mots : "les organismes de souscription des caisses d'épargne et de prévoyance". »

L'amendement no 132, présenté par MM. Jégou, Paecht et Gengenwin, est ainsi rédigé :

« Dans l'article 2, substituer aux mots : "locaux d'épargne", les mots : "régionaux d'épargne et de prévoyance". »

La parole est à M. Yves Deniaud, pour soutenir l'amendement no 209 corrigé.

M. Yves Deniaud.

Au fond, les appellations proposées par l'un et l'autre amendement n'ont guère d'importance,

« organismes de souscription » ou «

GREP », c'est toujours la même réalité. Le cas échéant, on choisira l'appellation la mieux acceptée.

Pour ma part, je voudrais insister sur les données historiques. Vous avez dit, monsieur le ministre, en faisant référence au Crédit agricole, qu'il y existait une tradition de caisse locale. Mais les caisses d'épargne, elles, sont sorties de la tradition des caisses locales au moment du regroupement. Maintenant, tous les clients des caisses d'épargne sont habitués à leurs caisses régionales. Dans ma région, tout le monde connaît la caisse d'épargne de Basse-Normandie. Tous ceux qui ont un livret A le savent, et cette caisse est une réalité concrète et vivante.

Les clients actuels de la caisse d'épargne comprendront aisément l'affaire s'il s'agit pour eux de devenir sociétaires directement de la caisse d'épargne de Basse-Normandie plutôt que de devenir sociétaires du GLE de Cherbourg, d'Alençon ou de Caen, des GLE qui détiendront indirectement des parts de la caisse d'épargne de BasseNormandie.

Telle est la réalité, et il faut bien la comprendre - surtout que les parts de GLE n'auront pas forcément la même rémunération suivant que l'on se trouve dans une ville ou une autre.

M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Si !

M. Yves Deniaud.

De là vient la difficulté à comprendre. Notre demande relève donc du bons sens, et c'est celle du réseau.

Pour ma part, j'ai eu une expérience de ce qu'est un réseau commercial et de la façon dont il doit être animé et motivé. Il y a deux façons pour une entreprise, industrielle, commerciale ou financière, de concevoir un produit. L'une consiste à laisser faire les techniciens ou les administratifs qui viennent vous dire, quand ils sont au bout de leur recherche : « Voilà ce que nous avons fait, qui est le meilleur et le plus beau. Au réseau commercial de se débrouiller pour le vendre tel quel ». L'autre consiste à interroger le réseau commercial pour l'entendre dire : « voilà ce que, à notre avis, nos clients souhaitent.

Aux techniciens et administratifs de se débrouiller pour sortir un produit conforme aux attentes et aux désirs de nos clients ! » Et c'est toujours la seconde solution qui fait éclore les réussites et toujours la première qui entraîne vers les échecs.

Voilà pourquoi je pense qu'il est de bon sens d'écouter ce que dit le réseau. Le placement, quoi que vous en pensiez, ne sera pas une opération facile. Notre suggestion est destinée à permettre de mettre toutes les chances du côté de la réforme pour que les parts soient placées le mieux et le plus facilement possible.

M. le président.

Monsieur Jégou, je considère que vous avez présenté votre amendement no 132.

Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?

M. Raymond Douyère, rapporteur.

La commission les ar ejetés. Permettez-moi, monsieur le président, pour gagner du temps sur la suite, de donner quelques précisions, en particulier sur la conception des GLE.

En fin de compte, nous cherchons les uns et les autres à parvenir à ce que l'application du statut coopératif impose la création rapide d'un sociétariat, l'adhésion à l'esprit coopératif et le maintien d'une culture de proximité. Effectivement, les GLE, en tant que tels au plus près de la division actuelle du réseau, en terme d'animation commerciale, peuvent permettre d'arriver à la proximité la plus grande du client.

M. Christian Cabal.

Ce n'est pas indispensable !

M. Raymond Douyère, rapporteur.

Les GLE sont de véritables sociétés coopératives. Et une coopérative est nécessaire pour procéder au placement des parts sociales, puisque, par le biais de la personnalité morale, les porteurs de parts sociales des GLE détiendront les parts de sociétaires de la caisse d'épargne. L'alternative proposée par la création de GREP revient, de même, non pas à une détention directe des caisses d'épargne, mais bien à une détention par l'intermédiaire des GREP.

M. Jean-Jacques Jégou.

C'est là que nous ne sommes plus d'accord.

M. Raymond Douyère, rapporteur.

Mais si. Pour le placement des parts sociales, vous serez bien obligés d'avoir une personnalité morale ! Il faut que la caisse d'épargne accorde à une structure qui, elle-même, a une personnalité morale, un prêt sans intérêt pour le placement des parts sociales, ce prêt étant remboursé au fur et à mesure du placement de celles-ci.

M. Jean-Jacques Jégou.

Là, pas de problème !

M. Raymond Douyère, rapporteur.

Les GLE, aussi bien que les GREP, vont donc gérer les entrées et les sorties du sociétariat. Il n'y a donc pas de différence.

M. Jean-Jacques Jégou.

Si !

M. Raymond Douyère.

rapporteur.

A tel point que le réseau, même lorsqu'il propose de remplacer les GLE par des GREP, propose bien sûr de conserver ses sections d'animation locale, car il voit bien qu'elles vont subsister.

Dans un cas comme dans l'autre, il y aura bien des parts de GREP ou de GLE, qui, eux mêmes, détiendront les parts de la coopérative caisse d'épargne. Voilà.

Une objection a été soulevée par M. Deniaud - et je crois que M. Jégou la partageait. Elle consiste à dire que les parts sociales seront rémunérées de manière différente selon les GLE. Certainement pas : comme vous le savez, c'est bien l'assemblée générale des caisses d'épargne puisque les GLE une fois constitués, c'est-à-dire après la phase de constitution de la caisse d'épargne, y enverront des délégués - qui déterminera la rémunération des par ts sociales. Elle sera donc la même pour l'ensemble des GLE. L'objection tombe donc complètement, et ne renforce pas celle qui a été formulée à l'encontre de la mise en place des GLE.

Enfin, les GLE, dit-on, seraient des coquilles vides. Si nous considérons que l'animation du sociétariat est une compétence de peu d'importance, alors on peut supposer, en effet, qu'ils le soient. Mais je ne crois pas que tel soit le cas. Et comme M. le ministre le rappelait fort opportunément, c'est le même dispositif qui existe dans d'autres systèmes coopératifs, notamment celui du Crédit agricole.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

La commission a donc rejeté les deux amendements.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Je comprends bien la préoccupation à laquelle répondent ces amendements.

D'abord, faisons tomber les faux débats. L'un d'entre eux vient d'être abordé par le rapporteur, celui de la rémunération. Il est clair que la rémunération est là même dans les différents GLE appartenant à la même caisse d'épargne. Il me semble qu'il n'y a pas d'ambiguité sur ce point.

L'autre aspect des choses consiste à savoir si le réseau - qu'il faut écouter, dans cette affaire, et pas seulement parce que c'est lui qui va placer les parts coopératives, mais parce que, de façon générale, il est bien normal de l'écouter - critique fortement le système local et soutient un système régional. A vrai dire, c'était le cas de l'ancienne direction des caisses d'épargne, mais la nouvelle, elle, semble se satisfaire très bien des groupements locaux, sous réserve d'amendements, que le rapporteur présentera d'ailleurs dans la suite de notre discussion. Je ne sens donc pas du tout dans le réseau, en tout cas dans son directoire, la même réticence aux GLE avec une préférence pour les structures régionales que j'avais pu sentir, en effet, il y a quelques mois sous la direction précédente.

Mais ce qui, pour moi, est majeur dans ce débat, c'est la proximité. Si je vois bien la simplification - car il y a bien un aspect de simplification dans la préférence régionale puisqu'il n'y a qu'une seule structure régionale et non plusieurs - je vois à l'inverse, qu'elle se paie en distance plus grande par rapport au sociétariat. Or tout le monde, je crois, tient à ce que le sociétariat soit vivant.

Tout dépend de l'accent mis sur cette affaire-là. Il me semble tout de même que si l'on veut que le sociétariat vive, il faut que les groupements soient constitués au plus près malgré la complication que cela introduit. Car je suis d'accord sur le fait que cela introduit une complication par rapport à la solution que vous préconisez mais la contrepartie de cette complication, c'est que nous aurons u ne animation véritable du sociétariat des caisses d'épargne.

Au bout du compte, il me semble tout de même préférable de rester dans la structure que nous avions initialement prévue. Reste un argument, celui-là irréfutable ; de M. Jégou : le GLE, ce n'est pas beau (sourires.)

Peut-être p ourrons-nous d'ici à la deuxième lecture trouver ensemble un autre nom que groupement local d'épargne, de façon que disparaîsse ce dernier handicap de la structure proposée par le texte.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard.

Nous sommes opposés à l'amendement de nos collègues, M. Jégou, M. Paecht et M. Gengenwin, pour des raisons un peu différentes de celles du rapporteur.

M. Yves Deniaud nous a dit qu'il fallait écouter ce que dit le réseau. Oh, mais ce n'est pas rassurant du tout ! Parce que tout cela ne fonctionne pas forcément avec une très grande transparence ! Nous connaissons, les uns et les autres, certains responsables de réseau qui rêvent de ressembler à un patron de banque AFB ! Il faut être lucide.

Il faut placer les parts, nous dites-vous. M. Jégou, pour justifier son amendement, fait référence au coût de fonctionnement. Nous, ce n'est pas du tout notre problème.

Nous sommes contre cet amendement pour les mêmes raisons que nous invoquerons pour défendre nos amendements à l'article 3. Selon nous, l'intérêt des GLE, c'est d'être plus proches de la réalité et d'avoir des sociétaires citoyens. Si vous vous placez sur une assise territoriale beaucoup plus large, nous savons bien comment les choses se passeront. Plus l'assise est large et plus les discussions sont formelles et plus vous avez affaire à des sociétaires passifs et moins à des sociétaires citoyens.

Si l'on veut pérenniser les caisses d'épargne dans leur finalité et leurs modalités d'action, il faut inscrire très clairement dans la loi les conditions de fonctionnement démocratiques que précisément votre amendement vient

« plomber », pour parler trivialement, et faire en sorte que les sociétaires soient partie prenante des choix, au plus près du terrain où ceux-ci devront s'appliquer. Notre logique n'a rien à voir avec l'animation commerciale.

Nous sommes dans une démarche de citoyenneté, pas dans l'épicerie.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.

M. Jean-Jacques Jégou.

Monsieur le président, je vous remercie de me redonner la parole ; le sujet le mérite. Je ne voudrais pas que l'on en finisse avec cet article et cet amendement en pensant que les GLE et les GREP, c'est pareil. Et pour une seule et bonne raison, que je voudrais bien rappeler une fois pour toutes : jamais nous n'avons dit que les GREP ne vendraient pas les parts sociales de la caisse. Là est justement la différence.

M. Raymond Douyère, rapporteur.

Non.

M. Jean-Jacques Jégou.

Les GREP peuvent vendre des parts de caisses, et ce n'est pas parce que M. Douyère prétend qu'ils ne le peuvent pas que nous allons nous coucher avec cette idée en tête, car c'est justement cela qui change tout entre les GLE et les GREP. M. Douyère a beau prétendre le contraire depuis plusieurs jours, je suis désolé de le contredire : nous avons bien préparé nos propositions. Non seulement elles ne présentent aucun inconvénient, mais tout devient beaucoup plus clair, sans rien modifier du reste au fond. Ce n'est pas un problème politique, monsieur Brard : vous présentez toujours les choses avec les méchants de ce côté et les bons de l'autre !

M. Jean-Pierre Brard.

Globalement, c'est vrai ! (Sourires.)

M. Jean-Jacques Jégou.

Sortez de cette paranoïa permanente qui en fait vous dessert : ce n'est pas de cela qu'il s'agit. Ce que nous voulons, c'est que les parts soient placées au mieux, en toute transparence et en pleine démocratie.

Monsieur le ministre, vous envisagez de nous faire l'amitié de changer l'appellation des GLE pour la rendre un peu plus digeste, mais ce n'est pas cela l'important.

GREP et GLE n'ont pas la même fonction : les GREP vendent les parts sociales, tandis que les GLE vendent seulement des parts de GLE, c'est-à-dire quelque chose de purement technique. Nous avons jusqu'à présent été tous d'accord, tout au moins parmi ceux qui acceptent le système coopératif et ses conséquences. J'entendais parler tout à l'heure sur les bancs de la majorité des caisses d'épargne frontalières et de partenariats avec les caisses d'épargne allemandes, italiennes, espagnoles, portugaises, par exemple.

M. Jean-Louis Dumont.

Des prises de participation.

M. Jean-Jacques Jégou.

Je vois mal de tels investisseurs venir solliciter une part de GLE ! Il va falloir que vous leur expliquiez ce que c'est et qu'en achetant des parts GLE, ils n'auront pas encore acquis des parts de caisse d'épargne et ils ne participeront pas.

M. Jean-Louis Dumont.

Si, dans des collèges différents.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

M. Jean-Jacques Jégou.

S'il s'agit de monter une usine à gaz, continuons ! Je vous en supplie, monsieur le ministre, essayez de tirer cette affaire au clair. Notre proposition est beaucoup plus simple, vous-même l'avez, me semble-t-il, ressenti tout à l'heure, et ne change rien dans le projet. Nous ne faisons qu'apporter une contribution positive qui ne présente aucun inconvénient sur le plan juridique ou politique. Libre au rapporteur de la reprendre à son compte ; après tout, c'est une loi de la République. Mais ne la refusez pas au motif qu'elle émane d'un groupe de l'opposition ! Nous cherchons simplement à simplifier cette loi pour améliorer la vente des parts que nous souhaitons voir réussir, en toute transparence, monsieur Brard.

M. Jean-Pierre Brard.

C'est de l'épicerie, pas de la démocratisation !

M. le président.

Chacun est désormais suffisamment informé ; reconnaissons cependant que cette discussion relève davantage du travail en commission que de la séance plénière.

Je mets aux voix l'amendement no 209 corrigé.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no 132.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 2.

(L'article 2 est adopté.)

Article 3

M. le président.

Je donne lecture de l'article 3 : C HAPITRE II Les caisses d'épargne et de prévoyance

« Art. 3. - Les caisses d'épargne et de prévoyance sont soumises, sous réserve des dispositions de la présente loi, aux dispositions de la loi no 47-1775 du 10 septembre 1947 modifiée portant statut de la coopération et aux dispositions de la loi no 66-537 du 24 juillet 1966 modifiée sur les sociétés commerciales.

« Elles sont des établissements de crédit et peuvent, nonobstant les dispositions de l'article 3 de la loi du 10 septembre 1947 précitée, exercer toutes les opérations de banque dans le cadre prévu par la loi no 84-46 du 24 janvier 1984 modifiée relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit. »

La parole est à M. Jean Vila, inscrit sur l'article.

M. Jean Vila.

Comme nous l'avons rappelé dans la discussion générale, nous sommes très attachés à la spécificité des caisses d'épargne, établissements à but non lucratif. En les transformant en établissements coopératifs, dotés d'un capital, de parts sociales et de certificats d'investissement rémunérés, cet article inscrit les caisses d'épargne dans le système bancaire commercial.

La disparition du statut à but non lucratif introduit de fait des critères de rentabilité financière immédiate, banalisant les caisses d'épargne dans le paysage bancaire français et européen.

Comment sera-t-il possible, avec ce statut d'établissement coopératif, de contribuer à développer investissement productif et emploi si les sociétaires exigent une rentabilité de leurs parts sociales ? Cette évolution favorisera des alliances, voire un regroupement avec d'autres organismes financiers. On mesure, au regard de leur poids financier, l'intérêt que peuvent représenter les caisses d'épargne dans la restructuration en cours et à venir de notre secteur bancaire et financier.

Les caisses d'épargne pourraient tout au contraire jouer un rôle moteur dans la constitution d'un grand pôle public et social pour impulser de nouvelles coopérations favorisant le crédit au service des investissements productifs et l'emploi, qui pourrait devenir un outil de lutte conte l'exclusion bancaire.

Les salariés des caisses d'épargne sont, vous le savez, très attachés à leurs missions. La grande majorité d'entre eux refuse la disparition du rôle que les caisses jouaient jusqu'à présent.

C'est pourquoi nous ne pouvons approuver la remise en cause du statut spécifique des caisses d'épargne, que nous proposons de moderniser afin qu'elles répondent encore mieux aux besoins des petits épargnants et à la nécessité de nouveaux investissements sociaux et productifs. Tels sera le sens des amendements que Jean-Pierre Brard vous présentera.

M. le président.

MM. Brard, Feurtet, Vila et les membres du groupe communiste et apparentés ont présenté un amendement, no 252, ainsi rédigé :

« Compléter l'article 3 par l'alinéa suivant :

« Les établissements de crédit soumis aux dispositions de la loi no 47-1775 du 10 septembre 1947 s'engagent à respecter le principe d'organisation et de fonctionnement démocratique inhérent au statut coopératif. »

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard.

Si vous me le permettez, monsieur le président, je présenterai en même temps les amendements nos 252 et 253, puisqu'ils visent le même objectif.

M. le président.

L'amendement no 253, des mêmes auteurs, est ainsi rédigé : Compléter l'article 3 par l'alinéa suivant :

« Les établissements de crédit soumis aux dispositions de la loi no 47-1775 du 10 septembre 1947 ne peuvent ni de leur propre fait ni par l'intermédiaire de sociétés dans lesquelles ils détiendraient une quelconque participation, intervenir sur un marché réglementé de valeurs mobilières. »

Veuillez poursuivre, monsieur Brard.

M. Jean-Pierre Brard.

Le choix coopératif est loin d'être anodin. Il ne se résume pas à l'option pour une structure parmi tant d'autres. C'est autant un choix d'organisation qu'une volonté morale et politique. Si l'on peut concevoir que le contexte, sévèrement concurrentiel, oblige le secteur bancaire et financier à procéder à des adaptations dans le fonctionnement des établissements de crédit, il est en revanche beaucoup moins supportable de voir quelques grands noms du secteur coopératif et mutualiste bafouer la lettre et l'esprit de la loi de 1947 en privilégiant le credo de la rentabilité à tout prix au détriment du statut coopératif, a priori peu motivé par la lucrativité, qu'ils avaient initialement choisi.

Hélas, les exemples ne manquent pas ; l'actualité la plus récente nous offre le spectacle peu réjouissant des velléités de cotations boursières affichées par quelque acteur bancaire de premier plan et de couleur verte, dit-on - et ce n'est pas une référence à notre collègue


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

Yves Cochet (Sourires) - dans la perspective de lever des fonds sur les marchés financiers par le truchement d'une société anonyme.

La logique des banques AFB n'est pas conciliable avec le choix coopératif et les établissements de crédit ayant opté pour ce dernier mode de gestion doivent s'engager à ne pas chercher à profiter des avantages procurés par les marchés financiers sans rendre compte de leur gestion à personne, si ce n'est de façon purement formelle.

La rédaction de l'amendement no 252 peut certes paraître quelque peu redondante par rapport à ce qu'indique déjà la loi. Mais, dans la mesure où celle-ci n'est pas respectée dans les faits, il nous paraît important que le législateur réaffirme la nécessité de respecter le principe d'organisation et de fonctionnement démocratique inhérent au statut coopératif.

L'amendement no 253 vise, quant à lui, à parer aux manipulations auxquelles se livrent ces établissements qui, telle la Banque verte que j'évoquais tout à l'heure, ont recours, en s'abritant derrière le statut coopératif, à un faux nez pour utiliser les mêmes méthodes que les banques opérant dans le secteur concurrentiel.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission sur les amendements ?

M. Raymond Douyère, rapporteur.

La commission n'a pas examiné l'amendement no 252. M. Brard vient de le dire lui-même, celui-ci est tout à fait redondant par rapport à la loi de 1947. Dans un esprit de totale conciliation et pour faire plaisir à M. Brard, je ne vois personnellement aucun inconvénient à l'insérer. Mais si une entreprise à statut coopératif ne respecte pas les obligations statutaires de la loi de 1947, je ne vois pas ce qui changera en réinscrivant dans la loi pour les caisses d'épargne qu'il faut respecter les dispositions de la loi de 1947... Si vraiment il s'agit de faire plaisir, je n'y vois aucun inconvénient ; mais cela n'apportera strictement rien au débat.

L'amendement no 253 n'a pas non plus été étudié par la commission. Cela dit, celle-ci avait examiné un amendement no 110 qui était en fait une contraction des amendements nos 252 et 253. Or elle avait conclu à un rejet, d'abord pour les raisons que je viens d'évoquer à propos de l'amendement no 252, ensuite au motif que la deuxième partie de l'amendement no 110, reprise dans l'amendement no 253, reviendrait à interdire aux établissements de crédit soumis à la loi de 1947 d'intervenir sur le marché réglementé, directement ou par l'intermédiaire de sociétés dans lesquelles ils tiendraient une quelconque participation. En d'autres termes, et très concrètement, les caisses qui aujourd'hui détiennent des parts de la Caisse centrale des caisses d'épargne et qui demain détiendront des parts majoritaires de celle-ci - puisque le texte prévoit 60 % - alors que ne pourront pas intervenir sur les marchés, la caisse centrale se livre tous les jours à ce genre d'opération.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement sur ces amendements ? M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Je comprends bien la préoccupation exprimée par M. Brard dans l'amendement no 252 ; à dire vrai, je la partage.

Si le Gouvernement souhaite que les caisses d'épargne aient un statut coopératif, c'est bien pour que celui-ci soit respecté. Sinon, ce n'est pas la peine de le chanter... La question est de savoir si le répéter deux fois aidera à avancer ou si le simple renvoi à la loi de 1947 portant statut de la coopération veut bien dire ce que nous voulons, en l'occurrence que les caisses d'épargne respectent le statut coopératif.

Si vous tenez à le rappeler avec force, cela ne me gène nullement et je m'en remettrai à la sagesse de l'Assemblée. Il me semble toutefois que le compte rendu de cette discussion - et de ce point de vue, votre amendement est très utile - montrera sans ambiguïté l'intention du Gouvernement comme de l'Assemblée, à savoir que les caisses d'épargne, dès lors qu'elles sont soumises au statut des structures coopératives défini dans la loi de 1947, doivent clairement se comporter comme telles. Ce rappel, objet précisément de votre amendement, devrait vous donner satisfaction, sans que nous ayons besoin de le réécrire.

Cela dit, encore une fois, si vraiment vous estimez utile de rappeler d'un côté que les caisses d'épargne sont soumises au statut de 1947 portant organisation de la coopération et de l'autre qu'elles doivent respecter le statut de la coopération, nous pouvons le faire ; mais, honnêtement, j'ai le sentiment que votre préoccupation, que je partage, est satisfaite et que vous pouvez retirer votre amendement no 252.

L'amendement no 253 est de nature un peu différente.

J'admets, sans référence particulière à telle ou telle banque, que les libertés prises par certaines structures avec leur statut coopératif, en utilisant des véhicules cotés, p uissent poser problème. De ce point de vue, je comprends bien les motivations de votre amendement qui me crée néanmoins deux difficultés.

Premièrement, il est arrivé, et encore tout récemment, que des structures coopératives prennent la responsabilité de structures cotées. Voudriez-vous par votre amendement aller jusqu'à défaire certaines prises de contrôle, comme celle du CIC par le Crédit mutuel ? A coeur vaillant rien d'impossible, certes, monsieur Brard : vous pourriez vouloir aller jusque-là pour respecter le statut de la coopération, mais je ne vous suivrai pas obligatoirement.

Il est une seconde difficulté à laquelle vous prêterez certainement attention. Si nous adoptions votre amendement, non seulement nous mettrions évidemment hors la loi la reprise du CIC par le Crédit mutuel mais, plus grave, nous rendons impossible la reprise du Crédit foncier par les caisses d'épargne. Voulez-vous vraiment que l'Assemblée rende ainsi impossible une opération que vous-même appeliez de vos voeux tout à l'heure ? Il serait sage de ne pas compromettre l'avenir par une intervention dont je comprends la justification, mais qui ne tombe peut-être pas exactement à propos.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.

M. Jean-Jacques Jégou.

Chapeau, monsieur le ministre ! Votre tâche n'est pas facile... Vous essayez de ramener à la raison les brebis égarées de la majorité plurielle.

M. Jean-Louis Dumont.

C'est fait avec talent !

M. Jean-Jacques Jégou.

En effet, et cela ne nous surprend pas. Mais à ce train, la nuit risque d'être longue, et peut-être aussi les deux suivantes et peut-être plus encore...

M. le président.

Tout à fait !

M. Jean-Jacques Jégou.

Sans aller jusqu'à dire que vous êtes dans la fosse aux lions, je vous vois jouer les dompteurs face aux coups de boutoir de nos collègues communistes qui cherchent à tirer votre texte dans un


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

sens que l'on devine fort bien, allant jusqu'à déclarer hors la loi des opérations telles que le rachat de Natexis par les Banques populaires ou du CIC par le Crédit mutuel.

Même pour faire plaisir à M. Brard, est-il vraiment utile de rappeler que la loi de 1947 est bien la loi de 1947 ? Pourquoi ne pas rappeler aussi toutes les dispositions de la loi de 1901 dans chacun des articles qui traitent de la réglementation applicable aux associations ? Votre intervention, très complète, en réponse aux intervenants a bien confirmé que nous restions dans la philosophie de la loi de 1947 : le statut coopératif et rien que le statut coopératif. Nous gagnerions du temps à ne pas devoir le rappeler sans arrêt au groupe communiste qui essaie de nous entraîner vers des virages où la majorité de cette assemblée ne souhaite pas aller.

M. le président.

La parole est à M. Jean-Pierre Brard.

M. Jean-Pierre Brard.

J'entends bien le dépit de M. Jégou, qui appartenait à une majorité où c'était : « Pas un mot dans les rangs ! ». Ici, nous discutons, nous faisons la loi en toute transparence, devant tout le monde, en particulier l'opinion publique et les médias. Je comprends bien votre rancoeur en voyant les occasions et les illusions - si tant est que vous en ayez eues encore que vous avez perdues à l'époque où vous fûtes dans la majorité. Cela dit, votre dépit ne nous empêchera pas de continuer ! L'amendement no 253 pose une réelle difficulté, relevée par le ministre comme par le rapporteur, que l'on ne peut balayer d'un revers de main. Or si la majorité est plurielle, le groupe auquel je suis apparenté l'est aussi.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Evidemment, à droite, ils ont du mal, ils subissent !

M. Yves Deniaud.

Il ne suffit pas d'affirmer n'importe quoi pour que ce soit vrai !

M. Jean-Pierre Brard.

Monsieur le ministre, nous souhaitons maintenir l'amendement no 252, mais nous retirons l'amendement no 253, puisqu'il n'est pas possible de résoudre le problème ce soir, et nous souhaitons continuer à travailler avec vous pour trouver une solution.

Nous voulons que vous fassiez un rappel à l'ordre à propos de pratiques inacceptables d'établissements mutualistes qui se comportent comme les établissements du réseau AFB alors qu'ils n'agissent pas du tout dans les mêmes conditions et théoriquement pas avec les mêmes finalités. Vous avez été clair sur ce point, mais, quand c'est écrit dans la loi, c'est encore mieux que lorsque ça l'est dans les minutes de la discussion.

M. le président.

L'amendement no 253 est retiré. Je mets aux voix l'amendement no 252.

(L'amendement n'est pas adopté.)

M. Cabal et M. Deniaud ont présenté un amendement, no 210, ainsi rédigé :

« Compléter l'article 3 par l'alinéa suivant :

« Chaque sociétaire dispose d'une voix à l'Assemblée générale ».

La parole est à M. Yves Deniaud.

M. Yves Deniaud.

Cet amendement vise simplement à manifester notre souci que soit respecté le principe démocratique inscrit dans le statut coopératif. Nous pensons avec regret que cette démocratie aurait été mieux exercée par des sociétaires directs des caisses d'épargne, pouvant participer à la gestion démocratique dans des assemblées locales ou des conseils consultatifs.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Raymond Douyère, rapporteur.

La commission a rejeté cet amendement.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Le Gouvernement est intéressé par cet amendement parce que leurs auteurs, me semble-t-il, souffrent les mêmes critiques que celles que M. Jégou adressait à M. Brard à l'instant. Un homme égale une voix, c'est le fondement même de la coopération.

Vous le voyez, monsieur Jégou, ma tâche est plus difficile que celle que vous évoquiez, car je dois aussi c onvaincre l'opposition de retirer ses amendements.

(Rires.)

M. le président.

Retirez-vous votre amendement, monsieur Deniaud ?

M. Yves Deniaud.

Tout à fait. Toutefois, il était bon de rappeller ce principe dans le débat.

M. le président.

Quel talent ! Le ministre convainc à la fois à gauche et à droite, ce qui est tout de même remarquable. (Rires.)

L'amendement no 210 est retiré.

Je mets aux voix l'article 3.

(L'article 3 est adopté.)

Article 4

M. le président.

« Art. 4. - Les parts sociales des caisses d'épargne et de prévoyance ne peuvent être détenues que par les groupements locaux d'épargne.

« Les statuts des caisses d'épargne et de prévoyance peuvent prévoir que le nombre de voix dont dispose chaque groupement est fonction du nombre de parts dont il est titulaire, sans que, dans ce cas, un même groupement puisse disposer de plus de 10 % des voix. »

Je suis saisi de deux amendements pouvant être soumis à une discussion commune.

L'amendement no 211, présenté par M. Cabal et M. Deniaud, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 4 :

« Un organisme de souscription des caisses d'épargne et de prévoyance est constitué en vue d'assurer la vente des parts de la caisse d'épargne ; à cet effet, il souscrit au capital de la caisse d'épargne et de prévoyance. L'exercice des droits attachés aux parts sociales est suspendu pendant la détention de celles-ci par l'organisme de souscription des caisses d'épargne et de prévoyance ».

« Peuvent être sociétaires de la caisse d'épargne et de prévoyance, dans les conditions prévues par less tatuts, les personnes physiques ou personnes morales ayant effectué avec la caisse d'épargne et de p révoyance une des opérations prévues aux articles 1er , 5, 6 et 7 de la loi du 24 janvier 1984 précitée, les salariés de cette caisse d'épargne et de prévoyance, les collectivités territoriales. Les collectivités territoriales ne peuvent toutefois pas détenir ensemble plus de 10 % du capital de la caisse d'épargne et de prévoyance ».

L'amendement no 133, présenté par MM. Jégou, Paecht et Gengenwin, est ainsi libellé :

« Rédiger ainsi l'article 4 :

« Peuvent être sociétaires de la caisse d'épargne et de prévoyance dans les conditions prévues par less tatuts, les personnes physiques ou personnes


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

morales ayant effectué avec la caisse d'épargne et de p révoyance, une des opérations prévues aux articles 1er , 5, 6 et 7 de la loi du 24 janvier 1984 précitée, les salariés de cette caisse d'épargne et de prévoyance, les collectivités territoriales. Les collectivités territoriales ne peuvent toutefois pas détenir ensemble plus de 10 % du capital de la caisse d'épargne et de prévoyance. »

M. Jean-Jacques Jégou.

Ces amendements tombent, monsieur le président.

M. le président.

Effectivement ! Les amendements nos 211 et 133 n'ont plus d'objet.

M. Douyère, rapporteur, a présenté un amendement, no 16, ainsi libellé :

« Après le mot "titulaire", rédiger ainsi la fin du dernier alinéa de l'article 4 : "Lorsque la part de capital que détient un groupement local d'épargne dans la caisse d'épargne et de prévoyance à laquelle il est affilié excède 30 % du total des droits de vote, le nombre de voix qu'il lui est attribué est réduit à due concurrence. »

La parole est à M. le rapporteur.

M. Raymond Douyère, rapporteur.

Nous abordons les difficultés d'application soulevées par les GLE.

Le projet dispose que les statuts de la caisse d'épargne et de prévoyance peuvent prévoir que le nombre de voix dont dispose chaque GLE peut varier en fonction du nombre de parts qu'il détient dans une limite de 10 % des voix. Ce plafond de 10 % pose trois types de problèmes.

Le premier tient à la correspondance entre le nombre total de parts sociales distribuées et le nombre total de voix en résultant. En effet, si un GLE possède plus de 10 % des parts, mais voit le nombre de ses voix limité à 10 %, le pourcentage total de voix attribuées sera inférieur à 100 %. Si le nombre de voix est une fonction linéaire du nombre de parts sociales, il est en effet mathématiquement impossible que les autres GLE, devant se partager moins de 90 % des parts sociales, puissent se partager 90 % des voix.

Le deuxième problème touche le nombre total de GLE nécessaire si les statuts de la caisse régionale retiennent la possibilité de moduler le nombre de voix en fonction du nombre de parts sociales. Fixer la limite du nombre maximal de voix qu'un GLE peut détenir à 10 % suppose que la caisse régionale concernée soit détenue par au moins dix GLE et qu'aucun d'entre eux ne possède plus de 10 % des parts sociales, sous peine de retomber dans l'impossibilité évoquée ci-dessus. Le nombre minimal de GLE peut devenir problématique dans le cas d'une caisse régionale de taille moyenne qui verrait son sociétariat très dispersé par rapport au niveau de son activité, et ce d'autant plus qu'une troisième catégorie de problèmes peut se poser.

En effet, l'application du régime fiscal « société mèrefiliale » à l'ensemble constitué par les GLE et leur filiale commune, la caisse régionale, pose des difficultés dans le cadre de la limite des 10 %. Défini notamment par les articles 145 et 216 du code général des impôts, le régime

« société mère-filiale » autorise la société mère, en l'occurrence un GLE, à retrancher de son bénéfice net total les produits nets de ses participations dans le capital de la caisse régionale, d'où une réduction de son bénéfice imposable. Cependant, ce régime ne peut s'appliquer qu'à deux conditions alternatives : la participation détenue par le GLE doit être supérieure à 150 millions de francs ; sa participation doit être supérieure à au moins 10 % du capital de la caisse régionale. Or, compte tenu de l'estimation du capital de chaque caisse qui oscille, exception faite de la caisse Ile-de-France Paris qui disposera d'un capital d'environ 2 020 millions de francs, entre 18 millions de francs pour la caisse de Guadeloupe et 1 070 millions de francs pour la caisse Côte d'Azur, aucun GLE ne p ourra bénéficier du régime « société mère-filiale », puisque le nombre minimal de GLE par caisse est fixé à dix compte tenu de la limite de 10 % imposée par le projet de loi.

C'est pourquoi, il est proposé par le présent amendement de porter le plafond de voix de 10 % à 30 % du total.

M. Jean-Jacques Jégou.

C'est très simple ! Vive les

GLE !

M. Raymond Douyère, rapporteur.

Dans l'hypothèse où un sociétaire détiendrait plus de 30 % du capital, il est nécessaire de prévoir une disposition qui permette de réduire le nombre de voix attribuées à chacun à due c oncurrence, sous peine de retrouver l'impossibilité mathématique évoquée ci-dessus.

C'est effectivement un peu compliqué, monsieur Jégou, mais je pense que cet amendement permettra de résoudre les difficultés que créait le texte gouvernemental. Avec les GREP, il y aurait aussi des difficultés...

M. Jean-Jacques Jégou.

Non !

M. Raymond Douyère, rapporteur.

... notamment lorsque des personnes morales souhaiteraient participer à un GREP-investisseur. On retomberait dans le même problème et il faudrait mettre en place des dispositions du même type.

Mieux vaut s'en tenir à la rédaction que je propose, qui permet de résoudre les difficultés soulevées par la rédaction du projet en maintenant la disposition principale qui est celle d'« un homme, une voix », modulée en fonction du nombre de parts détenues par chaque GLE.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Favorable.

M. le président.

Je mets aux voix l'amendement no

16. (L'amendement est adopté.)

M. le président.

Je mets aux voix l'article 4, modifié par l'amendement no

16. (L'article 4 est adopté.)

Après l'article 4

M. le président.

MM. Jégou, Paecht et Gengenwin ont présenté un amendement, no 134, ainsi rédigé :

« Après l'article 4, insérer l'article suivant :

« Peuvent être sociétaires des caisses d'épargne les investisseurs institutionnels, après avoir reçu un agrément de la Caisse nationale de caisse d'épargne, et notamment les caisses d'épargne européennes. »

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou.

M. Jean-Jacques Jégou.

Nous proposons de permettre aux caisses d'épargne européennes d'être actionnaires des caisses d'épargne françaises. Vous allez certainement me répondre, monsieur le ministre, que c'est bien compris ainsi, mais il me paraît nécessaire que vous nous donniez


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

des prévisions car le statut actuel des caisses d'épargne ne leur permet pas de recevoir des participations des caisses d'épargne européennes alors que les caisses d'épargne françaises ont quelques participations dans les caisses d'épargne allemandes.

Cet amendement a été refusé par la commission des finances au motif qu'il y aurait redondance et qu'il n'était pas utile de préciser. Je ne pense pas que cela soit toxique - je ne voudrais pas plagier M. Brard - mais je voudrais être convaincu, parce que c'est l'intérêt des caisses d'épargne, que le nouveau statut permettra une participation effective des caisses d'épargne de l'Union européenne.

M. le président.

Quel est l'avis de la commission ?

M. Raymond Douyère, rapporteur.

La commission n'a pas retenu cet amendement. Rien n'interdit actuellement aux caisses d'épargne européennes de participer au capital des GLE. Elles peuvent le faire directement en prenant une participation dans le capital d'un GLE. Les caisses d'épargne frontalières par exemple peuvent prendre une participation dans le capital d'une caisse d'épargne proche de la frontière. Par ailleurs, elles peuvent, si elles le souhaitent, procéder à une augmentation de capital et la réserver à un GLE personne morale investisseur.

Les dispositions que vous proposez, monsieur Jégou, ne sont donc pas nécessaires.

M. le président.

Quel est l'avis du Gouvernement ? M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Le Gouvernement est intéressé par l'amendement de M. Jégou parce que la procédure que vient d'évoquer le rapporteur a un inconvénient : au bout du compte, la caisse d'épargne, italienne par exemple, qui prendrait une participation aurait à elle seule un poids équivalent à un GLE regroupant 30 000, 40 000 ou 100 000 sociétaires.

Actuellement, comme le disait le rapporteur, rien n'empêche des partenaires européens de participer à notre structure de caisses d'épargne et, en ce sens, monsieur Jégou, vous avez satisfaction, mais la modalité par laquelle c'est possible semble avoir un inconvénient

« antidémocratique » et poser un problème.

Je suggère donc que vous retiriez votre amendement et que nous examinions ensemble, avec la commission, d'ici à la deuxième lecture peut-être, comment éviter une situation paradoxale qui, dans un environnement voulant être un environnement de coopérateurs, mettrait à égalité un intervenant extérieur et un grand nombre de sociétaires.

M. le président.

Retirez-vous votre amendement, monsieur Jégou ?

M. Jean-Jacques Jégou.

Je le retire.

M. le président.

L'amendement no 134 est retiré.

Mes chers collègues, j'appelle votre attention sur le fait que nous avons examiné, à ce moment de la discussion, dix-sept amendements sur plus de trois cents.

M. Raymond Douyère, rapporteur.

Ce sont les plus importants !

M. Jean-Jacques Jégou.

Nous avons déblayé le terrain !

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur.

M. Raymond Douyère, rapporteur.

Pour constituer un GLE personne morale, où pourrait entrer une caisse d'épargne européenne, il faut dix personnes morales. Elle ne serait donc pas seule. Il n'y a donc pas de problème.

M. le président.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

3 DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI

ORGANIQUE

M. le président.

J'ai reçu, le 9 mars 1999, de M. Emile Vernaudon, une proposition de loi organique destinée à améliorer l'équité des élections à l'Assemblée de la Poly nésie française.

Cette proposition de loi organique, no 1448, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la l égislation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

4 DÉPÔT DE PROPOSITIONS DE LOI

M. le président.

J'ai reçu, le 9 mars 1999, de M. JeanJacques Weber, une proposition de loi visant à modifier l'article 363 du code civil qui régit l'adoption simple.

Cette proposition de loi, no 1437, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 9 mars 1999, de M. Alain Ferry, une proposition de loi tendant à l'allégement de la taxe d'habitation des contribuables ayant à leur charge une personne handicapée.

Cette proposition de loi, no 1438, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 9 mars 1999, de M. Yves Nicolin, une proposition de loi tendant à assurer une meilleure rémunération de l'épargne des ménages modestes.

Cette proposition de loi, no 1439, est renvoyée à la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 9 mars 1999, de M. Yves Nicolin, une proposition de loi relative aux personnes handicapées hébergées par des familles d'accueil.

Cette proposition de loi, no 1440, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 9 mars 1999, de M. Yves Nicolin, une proposition de loi visant à instaurer l'obligation de faire certifier chaque année les budgets des collectivités territoriales.

Cette proposition de loi, no 1441, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 9 mars 1999, de M. Yves Nicolin, une proposition de loi instituant la règle de la majorité simple des tantièmes pour les décisions des assemblées générales des copropriétés.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

Cette proposition de loi, no 1442, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 9 mars 1999, de M. Jean-Pierre Michel et plusieurs de ses collègues, une proposition de loi tendant à réprimer le fait de chasser sous l'emprise d'un état d'imprégnation alcoolique.

Cette proposition de loi, no 1443, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 9 mars 1999, de M. Yves Nicolin, une proposition de loi tendant à reporter la date de valorisation de l'entreprise pour le calcul des droits de succession.

Cette proposition de loi, no 1444, est renvoyée à la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 9 mars 1999, de M. Denis Jacquat, une proposition de loi instaurant au profit des élus des locataires siégeant au sein des conseils d'administration des différents organismes HLM un régime d'autorisation d'absences.

Cette proposition de loi, no 1445, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 9 mars 1999, de M. Arthur Paecht, une proposition de loi relative à la prise en compte des droits à reconstitution de carrière de certains fonctionnaires du ministère de la défense.

Cette proposition de loi, no 1446, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

J'ai reçu, le 9 mars 1999, de M. Alain Madelin, une proposition de loi relative à la liberté de communication sur l'Internet.

Cette proposition de loi, no 1447, est renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

5 DÉPÔT D'UN RAPPORT

SUR UNE PROPOSITION DE RÉSOLUTION

M. le président.

J'ai reçu, le 9 mars 1999, de

M me Marie-Françoise Pérol-Dumont, un rapport, no 1450, fait au nom de la commission de la production et des échanges, sur la proposition de résolution (no 1281) de M. Alain Barrau, rapporteur de la délégation pour l'Union européenne, sur la réforme des fonds structurels (COM [98] 131 final/no E 1061).

6 DÉPÔT D'UN PROJET DE LOI CONSTITUTIONNELLE

MODIFIÉE PAR LE SÉNAT

M. le président.

J'ai reçu, le 5 mars 1999, de M. le Premier ministre, un projet de loi constitutionnelle, modifiée par le Sénat, en deuxième lecture, relatif à l'égalité entre les femmes et les hommes.

Ce projet de loi constitutionnelle, no 1436, est renvoyé à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, en application de l'article 83 du règlement.

7 DÉPÔT D'UNE PROPOSITION DE LOI

MODIFIÉE PAR LE SÉNAT

M. le président.

J'ai reçu, le 9 mars 1999, transmise par M. le président du Sénat, une proposition de loi, modifiée par le Sénat, visant à inciter au respect des droits de l'enfant dans le monde, notamment lors de l'achat des fournitures scolaires.

Cette proposition de loi, no 1449, est renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, en application de l'article 83 du règlement.

8

ORDRE DU JOUR

DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Aujourd'hui, à quinze heures, première séance publique : Questions au Gouvernement ; Discussion, en troisième lecture, du projet de loi constitutionnelle, no 1436, relatif à l'égalité entre les femmes et les hommes ; Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi, no 1244, relatif à l'épargne et à la sécurité financière : M. Raymond Douyère et M. Dominique Baert, rapporteurs, au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan (rapport no 1420, tomes I et II).

A vingt et une heures, deuxième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la première séance.

La séance est levée.

(La séance est levée le mercredi 10 mars 1999 à une heure cinq.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT

DÉCISION SUR DES REQUÊTES EN CONTESTATION D'OPÉRATIONS ÉLECTORALES Communication du Conseil constitutionnel en application de l'article L.O.

185 du code électoral Décision no 98-2571/2572/2573 du 9 mars 1999 (AN, Alpes-Maritimes, 2e circonscription) Le conseil constitutionnel, Vu 1o la requête no 98-2571 et les observations complémentaires présentées par Mme Marguerite Lombard, demeurant à Nice (Alpes-Maritimes), enregistrées au secrétariat génér al du


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 9 MARS 1999

Conseil constitutionnel respectivement les 7 et 9 décembre 1998 et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 22 et 29 novembre 1998 dans le département des Alpes-Maritimes en vue de la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ; Vu le mémoire en défense présenté par Mme Jacqueline

M athieu-Obadia, députée, enregistré comme ci-dessus le 22 décembre 1998 ; Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, enregistrées comme ci-dessus le 23 décembre 1998 ; Vu la décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, enregistrée comme cidessus le 3 mars 1999 approuvant le compte de campagne de Mme Mathieu-Obadia ; Vu 2o la requête no 98-2572 présentée par M. Jean-Louis Milla, demeurant à Puget-Théniers (Alpes-Maritimes), enregist rée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 8 décembre 1998 et tendant à l'annulation des mêmes opérations électorales ; Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, enregistrées comme ci-dessus le 23 décembre 1998 ; Vu 3o la requête no 98-2573 présentée par M. Jean-Marie Bernard, demeurant à Nice (Alpes-Maritimes), enregistrée aus ecrétariat général du Conseil constitutionnel le 10 décembre 1998 et tendant à l'annulation des mêmes opérations électorales ; Vu le mémoire en défense présenté par Mme Jacqueline

M athieu-Obadia, députée, enregistré comme ci-dessus le 22 décembre 1998 ; Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, enregistrées comme ci-dessus le 29 décembre 1998 ; Vu l'article 59 de la Constitution ; Vu l'ordonnance no 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code électoral ; Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ; Vu les autres pièces produites et jointes aux dossiers ; Le rapporteur ayant été entendu ; Considérant que les requêtes de Mme Lombard et de MM. Milla et Bernard sont relatives aux opérations électorales qui se sont déroulées dans la même circonscription ; qu'il y a lieu de les joindre pour y statuer par une même décision ; Sur la requête no 98-2571 : Considérant que les organes de presse sont libres de publier les articles de leur choix et ont le droit de rendre compte librement d'une campagne électorale ; que, si Mme Lombard soutient que deux articles publiés par un quotidien le jour du premier tour de l'élection auraient exercé une influence sur les électeurs en défaveur d'un candidat présent à ce premier tour, il ne résulte pas de l'instruction que ces articles, dont le contenu n'excède pas les limites de la polémique électorale, aient pu alté rer la sincérité des résultats du scrutin ; que, par suite, ses conclusions ne peuvent être accueillies ; Sur la requête no 98-2572 : Considérant qu'aux termes du second alinéa de l'article 33 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 survisée : « le droit de contester une élection appartient à toutes les personnes inscrites sur les listes électorales de la circonscription dans laquelle il a été pr océdé à l'élection ainsi qu'aux personnes qui ont fait acte de c andidature » ; Considérant que M. Milla n'est pas électeur dans la deuxième circonscription du département des Alpes-Maritimes et n'a pas fait acte de candidature dans cette circonscription ; que, par suite, sa requête n'est pas recevable ; Sur la requête no 98-2573 : Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir présentée par Mme Mathieu-Obadia : Considérant, en premier lieu, que, si M. Bernard invoque l'utilisation abusive par la candidate élue de moyens matériels mis à sa disposition par la ville de Nice et un abus de propagande, ces griefs ne sont assortis d'aucune précision permettant au juge de l'élection d'en apprécier la portée ; Considérant, en deuxième lieu, qu'à les supposer avérées, ni la référence faite, au cours de la campagne, au décès de l'ancien maire de Nice, ni la tentative, présentée d'ailleurs comme infructueuse, d'annulation d'un bulletin de vote du requérant n'auraient pu altérer la sincérité du scrutin ; Considérant, enfin, que le requérant ne peut utilement se prévaloir, à l'encontre de l'élection, du taux d'abstention élevé enregistré lors de cette élection ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les requêtes de Mme Lombard, de M. Milla et de M. Bernard doivent être rejetées, Décide : Art.

1er Les requêtes de Mme Marguerite Lombard, de M. Jean-Louis Milla et M. Jean-Marie Bernard sont rejetées.

Art.

2. La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 9 mars 1999, où siégeaient : MM. Roland Dumas, président, Georges Abadie, Michel Ameller, Jean-Claude Colliard, Yves Guéna, Alain Lancelot, Mme Noëlle Lenoir, M. Pierre Mazeaud et Mme Simone Veil.

ORGANISME EXTRAPARLEMENTAIRE COMMISSION SUPÉRIEURE DES SITES,

PERSPECTIVES ET PAYSAGES (1 poste à pourvoir) La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a désigné M. Bruno Bourg-Broc comme candidat.

La candidature est affichée et la nomination prend effet dès la publication au Journal officiel du samedi 6 mars 1999.

TEXTE SOUMIS EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION TRANSMISSION

M. le Premier ministre a transmis, en application de l'article 88-4 de la Constitution, à M. le président de l'Assemblée nationale, le texte suivant : Communication du 5 mars 1999 No E 1225. - Révision des conventions de Bruxelles et de L ugano (projet de convention, JUSTCIV 52, REV1 : 8796/1/98).