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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 29 AVRIL 1999

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. YVES COCHET

1. Saisine pour avis d'une commission (p. 3781).

2. Haut Conseil de l'agglomération parisienne. - Discussion d'une proposition de loi (p. 3781).

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur de la commission des lois.

M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

DISCUSSION GÉNÉRALE (p. 3784)

M.

Roger-Gérard Schwartzenberg, Mme François de Panafieu,

MM. Bernard Birsinger, Laurent Dominati, Jacky Darne, Henri Plagnol, Georges Sarre, Mme Nicole Catala,

MM. Georges Sarre, Serge Blisko, Mme Nicole Bricq.

Clôture de la discussion générale.

VOTE SUR LE PASSAGE À LA DISCUSSION DES ARTICLES (p. 3800)

MM. Jean-Marie Le Guen, Laurent Dominati, Mme Nicole Catala,

M.

Georges Sarre.

L'Assemblée, consultée, décide de ne pas passer à la discussion des articles ; la proposition de la loi n'est pas adoptée.

3. Ordre du jour des prochaines séances (p. 3802).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 29 AVRIL 1999

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. YVES COCHET,

vice-président

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à neuf heures.)

1 SAISINE POUR AVIS D'UNE COMMISSION

M. le président.

J'informe l'Assemblée que la commission de la production et des échanges a décidé de se saisir pour avis du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à l'innovation et la recherche (no 1410).

2 HAUT CONSEIL DE L'AGGLOMÉRATION PARISIENNE Discussion d'une proposition de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Georges Sarre, portant création d'une nouvelle collectivité territoriale : le Haut Conseil de l'agglomération parisienne (nos 1350, 1529).

La parole est à M. Jean-Pierre Michel, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

Monsieur le président, monsieur le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation, mes chers collègues, que nous soyons élus parisiens ou élus de la France profonde, nous connaissons tous l'agglomération parisienne, dans laquelle vit un Français sur six et qui se caractérise par une forte démographie et une économie riche. Cependant, cette agglomération est dépourvue d'instance de décision digne d'une grande métropole. Il s'agit là d'une situation singulière qui est héritée de l'histoire, celle-ci ayant été traversée par de nombreux conflits entre Paris et la province, et entre le pouvoir central, qui réside à Paris, et le pouvoir municipal parisien.

Certes, Paris est la capitale de la France et le siège des pouvoirs publics. Mais cette spécificité justifie-t-elle que la ville soit isolée de sa proche banlieue, que l'agglomération soit divisée en communes et en départements, ce qui rend très inégalitaire la distribution des richesses ? Les conséquences de cette situation sont aujourd'hui visibles. Il suffit, pour s'en convaincre, de parcourir la région parisienne en voiture, comme nous le faisons tous.

L'urbanisme souffre d'un manque de vision cohérente.

La ségrégation sociale s'aggrave entre l'est et l'ouest parisiens, alors même que la politique des transports urbains ou la lutte contre la pollution pâtit de délimitations territoriales héritées pour l'essentiel du siècle précédent. Il convient donc de réfléchir aux moyens de mettre en oeuvre une politique globale pour l'ensemble de l'agglomération.

Certes, des essais ont été tentés. Au cours des dernières années, sous la Ve République, des réformes successives ont été engagées, mais elles se sont finalement révélées inadaptées. Peut-être la plus intéressante était-elle celle de la loi du 2 août 1961, qui avait créé le district de Paris, a lors dirigé par Paul Delouvrier et regroupant 1 305 communes. Cela a permis de rattraper le retard de l'agglomération parisienne en matière de transports urbains, d'assainissement et de distribution de l'eau. Mais ce district, jugé un peu trop technocratique, a été supprimé par la loi du 6 mai 1976 portant création de la région Ile-de-France.

La loi du 10 juillet 1964 a supprimé le département de la Seine, qu'elle a réduit à la seule ville de Paris, et a créé les sept autres départements que nous connaissons aujourd'hui. Cette loi de déconcentration a institutionnalisé, identifié le morcellement de cet ensemble géographique.

D'autres textes ont progressivement rapproché du droit commun le statut de l'agglomération parisienne. C'est ainsi que la loi du 2 mai 1982 a institué un maire de Paris, doté de pouvoirs exécutifs qu'il n'avait pas auparavant. Quant à la loi du 31 mars 1982, dite loi «

PML »,e lle a transféré les mesures de décentralisation à l'ensemble de la région parisienne.

Tout cela aboutit à la situation que nous connaissons aujourd'hui : un morcellement de décisions qui nuit à la mise en place de politiques cohérentes.

N'oublions pas non plus, mes chers collègues, que les limites territoriales actuelles de la ville de Paris sont restées inchangées depuis 1960 et que ce découpage pose d'importants problèmes. Certes, il existe une collectivité territoriale - la région Ile-de-France -, qui englobe de vastes zones urbanisées, mais aussi des zones rurales situées aux confins de celle-ci, notamment sur les territoires des Yvelines, du Val-d'Oise, de la Seine-et-Marne et de l'Essonne. On voit bien que les limites actuelles de la région Ile-de-France ne définissent pas un territoire pertinent pour lancer et coordonner des politiques d'agglomération, au sens que leur donne la loi dite « loi Chevènement » en cours d'examen. Dans cette perspective, je rappellerai d'ailleurs que la région a plutôt compétence p our accompagner certaines politiques lancées par d'autres collectivités locales que pour les initier ellemême.

Cependant, si l'émiettement des centres de décision est nuisible, il ne saurait pour autant justifier un retour en arrière, c'est-à-dire une quelconque recentralisation de l'administration parisienne. C'est la raison pour laquelle


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la logique fédérative doit prévaloir. De même que la loi

«

PML » entendait donner, sans remettre en cause l'unité de la ville de Paris, aux arrondissements parisiens un droit de regard sur les décisions municipales les concernant, les instances de l'agglomération parisienne ne doivent pas donner lieu à la suppression de collectivités locales existantes, mais elles doivent promouvoir une plus grande solidarité entre les communes alors même, que, dans l'agglomération, l'intercommunalité, tant prônée par ailleurs, est très faiblement exercée.

Pour ce faire, il conviendrait de créer une nouvelle collectivité qui comprendrait la ville de Paris et les trois départements dits de la petite couronne ainsi que les communes mitoyennes qui souhaiteraient adhérer à cette nouvelle collectivité.

Cette collectivité aurait un organe délibérant élu au suffrage universel, ce qui lui donnerait une légitimité suffisante face aux autres collectivités, qui subsisteraient : les départements, la région et la ville de Paris. Elle serait dotée de compétences obligatoires et facultatives et disposerait de ressources financières lui permettant de mener les politiques que la loi lui attribuerait.

Tel est le sens de la proposition de loi que je rapporte ce matin, mes chers collègues, au nom de la commission des lois et qui a été déposée par M. Georges Sarre. Elle porte création d'une nouvelle collectivité territoriale : le Haut Conseil de l'agglomération parisienne.

En quelques mots, de quoi s'agit-il ? Il s'agit de créer une nouvelle collectivité territoriale, administrée par un Haut Conseil de l'agglomération parisienne, qui exercerait ses compétences sur les départements de Paris, des Hauts-de-Seine, de la Seine-SaintDenis et du Val-de-Marne. Le périmètre de cette collectiv ité pourrait être étendu par arrêté du préfet d'Ile-de-France à la demande des conseils municipaux i ntéressés, après avis conforme du conseil général compétent.

Ces dispositions visent à remédier à l'émiettement dont souffre le coeur de la région Ile-de-France et à créer une nouvelle collectivité territoriale qui reprenne les limites de l'ancien département de la Seine.

Cette nouvelle collectivité se verrait doter de compétences, et d'abord de compétences obligatoires, notamment en matière d'environnement : lutte contre la pollution des eaux et de l'air - dont nous en avons grand besoin dans l'agglomération parisienne -, lutte contre le bruit, assainissement, adduction et distribution d'eau, traitement et élimination des déchets et des ordures ménagères. Elle aurait également des compétences en m atière d'organisation des transports urbains, qu'il s'agisse de la conception des plans de déplacement et des transports urbains ou de la participation au financement.

Les transports urbains dans l'agglomération parisienne sont en effet notoirement déficients : il n'y a pas de continuité entre Paris, sa proche banlieue et le reste de l'agglomération. Il suffit de parcourir la capitale les soirs de week-end pour voir que nombre de jeunes ne peuvent pas regagner leur banlieue parce que la SNCF n'assure pas de service régulier la nuit et que les lignes de la RATP ne vont pas jusque-là.

Par ailleurs, le Haut Conseil pourrait se voir déléguer un certain nombre de compétences facultatives avec l'accord des deux tiers des conseils municipaux concernés, en matière d'aménagement de l'espace, de politique du logement - cela serait, de mon point de vue, particulièrement important -, de politique de la ville, de développement économique, d'animation socioculturelle, de gestion des services d'intérêt collectif comme les cimetières, les abattoirs ou les marchés, de voirie, de signalisation concernant le stationnement.

La nouvelle collectivité, avec un périmètre et des c ompétences, dont certaines seraient obligatoires et d'autres facultatives, devrait disposer d'une organisation, d'une administration. Et cette administration, quelle serait-elle ? Il s'agirait d'une assemblée élue au suffrage universel direct et dirigée par un exécutif collégial. Elle serait composée de 251 membres élus au suffrage universel direct, pour une durée de six ans renouvelable, comme les conseillers municipaux, et selon le mode du scrutin proportionnel à la plus forte moyenne, ce qui garantirait la pluralité de la représentation dans l'assemblée de la nouvelle agglomération.

L'assemblée serait dirigée par un exécutif, un bureau, composé d'un président et d'un certain nombre de viceprésidents - vingt au maximum. Les membres du bureau participeraient à l'élection des sénateurs. Ils compteraient donc parmi les grands électeurs.

Cette nouvelle collectivité territoriale devrait avoir des ressources propres pour mener les politiques qui lui incomberaient, notamment les politiques obligatoires énumérées dans la proposition de loi. Les recettes du budget du Haut Conseil comprendraient notamment la taxe professionnelle selon les dispositions de l'article 1069 nonies C du code général des impôts. Elle bénéficierait ainsi d'une ressource importante qu'elle percevrait selon un taux unique sur l'ensemble du territoire de son ressort.

Par ailleurs, le Haut Conseil pourrait compter parmi ses ressources le produit de la redevance sur les bureaux construits sur son territoire, les taxes perçues en cas de dépassement du coefficient d'occupation des sols, ainsi que le produit de la taxe sur les logements et les locaux d'activités vacants perçue dans son ressort.

Il s'agit là d'un ensemble de moyens financiers importants qui devrait permettre à la nouvelle collectivité territoriale d'exercer les compétences que la loi lui fixerait.

Telle est, mes chers collègues, l'économie de la proposition de loi déposée par M. Sarre.

Notre commission des lois a engagé, à la suite de mon rapport, une discussion riche et intéressante. A l'issue de cette discussion, elle a décidé de ne pas procéder à l'examen des articles et de laisser l'Assemblée juge du sort qu'elle veut donner à ce texte, qui est important et qui a en tout cas le mérite d'ouvrir un débat, débat nécessaire mais occulté, il faut le dire, par l'ancienne majorité à l'Assemblée et par la majorité municipale parisienne...

M. Jean-Marie Le Guen.

C'est vrai !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

... qui, assiégée dans son bunker, ne veut prendre aucune décision...

M. Jean-Marie Le Guen.

Exact !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

... pour faciliter la vie de nos concitoyens.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

M. Jean-Marie Le Guen.

Très bien !

M. Laurent Dominati.

Si c'était pour dire ça, il aurait mieux valu ne pas prendre la parole !

Mme Françoise de Panafieu.

C'est vraiment médiocre !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Ce ne sont pas les disputes internes qui administrent Paris, peut-être ?

Mme Françoise de Panafieu.

Quand on fait une conclusion, on la peaufine !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 29 AVRIL 1999

M. le président.

La parole est à M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

M. Emile Zuccarelli, ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, comme le souligne la proposition de loi portant création d'une nouvelle collectivité territoriale, le Haut Conseil de l'agglomération parisienne, la situation de Paris et de la région Ile-de-France est paradoxale et, à certains égards, préoccupante.

Le modèle français d'administration territoriale ne trouve pas ici son plein épanouissement, Paris et sa région constituant une somme de particularités territoriales, économiques et sociales.

Quelles sont ces spécificités ? En premier lieu, hors région parisienne, les différents pouvoirs issus de la décentralisation sont parvenus à un équilibre où, la plupart du temps, communes, départements et régions décident, agissent et se complètent. Un tel partage de responsabilité est ici plus difficile sur un territoire réduit où les exécutifs locaux interviennent dans le même espace, presque totalement urbanisé et devenu aujourd'hui une seule et même agglomération.

Assurément, la région ne peut pas assumer seule toutes les fonctions d'une instance politique d'agglomération.

En deuxième lieu, le haut niveau de l'activité économique, les investissements importants des collectivités locales, le revenu élevé par habitant n'ont pas mis fin aux déséquilibres sociaux, économiques et culturels entre l'ouest, d'une part, et l'est et le nord, d'autre part, de la région dont Paris est la ligne de partage.

Dès lors, monsieur Sarre, votre proposition de loi suscite légitimement deux questions : la première est celle des rapports entre les citoyens et les institutions locales, et la seconde celle de la pertinence du cadre administratif dans lequel sont prises les décisions.

Si l'on rapproche votre texte d'un certain nombre de projets du Gouvernement, en particulier de celui concernant le renforcement et la simplification de la coopération intercommunale, on retrouve la même philosophie : la solidarité d'agglomération, qui s'appuie sur la taxe professionnelle unique, la péréquation fiscale, des compétences structurantes dans un espace homogène, le développement économique et l'aménagement de l'espace exercés à l'échelle de l'agglomération.

Il y a donc de votre part, comme de celle du Gouvernement, un souci de traiter les problèmes difficiles qui se posent dans l'agglomération parisienne par une approche plus collective en termes de projets, plus forte en termes de démocratie, plus efficace en termes de financement.

Mais cette analyse et ces objectifs partagés ne sauraient conduire le Gouvernement à vous suivre dans vos conclusions. Je relève, en effet, deux difficultés dans la perspective institutionnelle que vous tracez.

En vous appuyant sur la jurisprudence du Conseil constitutionnel, vous faites du Haut Conseil de l'agglomération parisienne une collectivité territoriale, puisque celui-ci serait doté d'un conseil élu au suffrage universel, mais vous lui conférez aussi toutes les caractéristiques d'un établissement public de coopération intercommunale, dont la vocation est d'être spécialisée. C'est le sens de la liste des compétences que vous avez dressée.

Le Haut Conseil réalise donc une synthèse, intéressante mais juridiquement sans précédent, de ces deux formules, puisqu'il conjugue la légitimité démocratique de la première et les compétences strictement définies de la seconde.

Cette proposition présente cependant l'inconvénient de substituer le Haut Conseil, pour partie, aux communes et à la région. Elle risque donc à la fois de déséquilibrer les collectivités territoriales existantes dans l'exercice de leurs missions et d'amputer leurs ressources fiscales.

Je remarquais tout à l'heure dans mon propos introductif que l'un des problèmes de la région parisienne était l'enchevêtrement des compétences exercées par des autorités finalement concurrentes dans un même espace.

En créant un quatrième niveau de collectivité dans la région, le Haut Conseil risque d'accroître les pesanteurs administratives, d'ajouter encore à la multiplicité des centres de décision et de financement.

Sous l'angle de l'intercommunalité, votre démarche renoue avec la logique de la loi de 1966 sur les communautés urbaines en créant par la loi, et non par la libre volonté communale, une structure intercommunale nouvelle. C'est une difficulté. En effet, je ne suis pas sûr que la création par la voie législative du Haut Conseil, même limitée à Paris et à son agglomération, soit conforme aux relations que l'Etat souhaite entretenir avec les collectivités territoriales depuis les lois de décentralisation.

Enfin, on peut s'interroger sur le fonctionnement et la qualité des rapports, voire sur les conflits de légitimité, entre le Haut Conseil de l'agglomération parisienne et la région elle-même, les compétences étant proches, la « légitimité » démocratique comparable.

Il est à craindre que le dialogue naturel entre la région, d'une part, les communes et les départements, d'autre part, ne soit troublé par l'émergence d'un tel partenaire, c'est-à-dire une collectivité territoriale nouvelle d'un poids important. Si la clarification des compétences qu'opère votre proposition de loi entre ces collectivités locales se veut explicite, la coordination entre les projets et leurs financements ne serait pas aisée.

Dès lors, si votre texte, monsieur Sarre, va dans le sens d'un renforcement de la vitalité démocratique de nos institutions locales - il faut lui reconnaître ce mérite - et de la participation des citoyens à la vie publique, il peut complexifier les relations des collectivités locales entre elles et, par là même, celles de l'Etat avec ces mêmes collectivités.

Ne concluez pas de mon propos que je me satisfais d'un statu quo qui serait l'alibi de l'inaction. Nous savons qu'à Paris et dans son agglomération, les réalités économiques s'affranchissent du cadre territorial existant. Dans un contexte de multiplication des politiques publiques sur un espace urbain homogène, on constate qu'il n'y a pas coïncidence entre les espaces de gestion et les espaces de représentation politique. Cette situation est aujourd'hui le fait de la plupart des grandes agglomérations de notre pays. Mais aucune ne concentre autant d'institutions sur un même espace urbanisé que Paris.

La recherche d'une structure adaptée aux spécificités parisiennes est ancienne. En choisissant de créer, puis de maintenir le type d'organisation actuelle, les législateurs successifs ont, par nécessité, écarté d'autres types d'organisation qui présentaient certains avantages, mais ne répondaient pas entièrement aux problèmes à résoudre.

Le district parisien, la réforme de la région parisienne de 1 964, les lois de décentralisation, la loi du 31 décembre 1982 dite PML, ont fixé le schéma actuel


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de notre organisation territoriale. Cette dernière peut être améliorée et je note à ce propos la volonté, plusieurs fois entendue pour Paris même, de rapprocher les citoyens des élus, à travers les maires d'arrondissement. Il est vrai que les difficultés parfois ressenties par les maires d'arrondissement pour exercer les missions qui sont légitimement les leurs conduisent à s'interroger sur le statut actuel de la ville de Paris. Sans pour autant aller jusqu'à l'institution des arrondissements en collectivités de plein exercice, il faut, sans précipitation, poursuivre la réflexion sur une telle question. L'essentiel, monsieur le député - je crois que vous pouvez me rejoindre sur ce point -, est qu'il faut aujourd'hui porter un regard différent sur Paris et son agglomération. Il s'agit là d'une nécessité.

Pour l'Etat, depuis la fin de la guerre jusqu'à ces dernières années, Paris et l'Ile-de-France relevaient quasi exclusivement d'un enjeu d'aménagement du territoire autour d'une seule exigence, celle d'un rééquilibrage Paris-province. Si cette approche reste en partie actuelle, une autre est apparue autour de la question de la gestion urbaine, qui doit désormais être posée.

Les fractures de l'espace urbain déchirent le tissu social de cette région. Les déséquilibres entre l'Ouest, d'une part, l'Est et le Nord, d'autre part, n'ont pas été réduits, loin de là. Je n'en citerai qu'un seul exemple : les communes les plus riches en 1985 le sont encore aujourd'hui, et peut-être plus encore ; les communes les plus pauvres en 1985 le sont toujours et plus encore, quinze ans plus tard. En termes de chômage, d'éducation, de logement, de fiscalité, de sécurité, cette ligne de partage se trouve amplifiée par l'évolution spontanée qui joue toujours au détriment des territoires les plus fragiles.

La gestion urbaine doit désormais mobiliser l'Etat et déboucher sur une territorialisation des politiques nationales. Cela veut dire qu'il faut adapter les politiques publiques à des espaces urbains de plus en plus différents, qui demandent un traitement qui leur est propre. C'est un point important car, s'agissant de Paris et de son agglomération, les enjeux revêtent une dimension à la fois nationale et locale. C'est pourquoi le Gouvernement souhaite que les modalités d'administration du territoire qui s'esquissent aujourd'hui trouvent, à Paris et dans son a gglomération, un terrain d'application nouveau et adapté.

Le renforcement de l'intercommunalité, la fiscalité d'agglomération qui l'accompagne, la péréquation fiscale, la contractualisation entre l'Etat et les agglomérations, la politique de la ville offrent de nouveaux outils...

Mme Françoise de Panafieu.

C'est vrai ! M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

... et me paraissent de nature à corriger la relation ville centre-périphérie, ainsi que les relations des communes entre elles. Mais il faut pour cela réunir deux conditions, car si l'Etat est résolu à faire face à ses responsabilités, il ne peut le faire seul.

Le partenariat que le Gouvernement attend des collectivités locales ne constitue pas un désengagement de l'Etat. Au contraire, il doit être le signe d'un volontarisme politique qui met en perspective les actions de moyen et de long terme dont l'Etat a la charge avec les politiques de proximité qui relèvent des collectivités locales. C'est cette synthèse qu'il faut aujourd'hui réaliser.

C'est la première condition.

Ensuite, il faut aussi que les collectivités locales collaborent entre elles. Je n'ignore rien des progrès accomplis sur ce point, mais ils ne sont pas encore à la hauteur des problèmes à résoudre.

Mme Françoise de Panafieu.

En effet ! M. le ministre de la fonction publique, de la réforme de l'Etat et de la décentralisation.

Si en matière de services à la population des résultats ont été atteints grâce aux engagements des collectivités locales, il reste encore beaucoup à faire, tout comme dans le domaine économique et social. Or, cette nouvelle étape repose sur le décloisonnement territorial, sur le renforcement volontaire des solidarités. Le cadre d'administration du territoire parisien ne doit pas être un obstacle à son développement, il faut désormais que projet et territoire se rejoignent : c'est la seconde condition.

Ces remarques n'interdisent pas d'agir dès à présent.

C'est ainsi, il faut le souligner, que le projet de loi relatif à l'organisation urbaine et à la simplification de la coopération intercommunale a prévu de renforcer très sensiblement la péréquation fiscale entre les communes de la région à travers l'approfondissement des mécanismes du fonds de solidarité des communes de l'Ile-de-France créé par la loi du 13 mai 1991 en permettant, de surcroît, d'inciter à la coopération intercommunale au sein de la région. Ce nouveau dispositif devrait permettre de résorber les inégalités criantes existant entre les communes de l'Ile-de-France.

Voilà, mesdames, messieurs, ce que je souhaitais vous dire. Maîtriser et organiser son propre développement, tel est le sens, monsieur Sarre, de votre démarche pour Paris et son agglomération. Par votre proposition de loi, vous ouvrez une réflexion essentielle pour les habitants d'Ilede-France. Vous avez, à coup sûr, atteint cet objectif en provoquant un tel débat. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste.) Discussion générale

M. le président.

Dans la discussion générale, la parole est à M. Roger-Gérard Schwartzenberg.

M. Roger-Gérard Schwartzenberg.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, géographiquement et économiquement, Paris s'inscrit dans un environnement global, dans une continuité naturelle avec les communes de banlieue. Bref, dans une agglomération parisienne, dans un espace parisien qui ne peut se résumer à ce que l'on appelle souvent « Paris intramuros ».

D'après le recensement de 1990, l'agglomération pari-s ienne regrouperait 9 300 000 habitants, dont 2 150 000 habitants pour la ville capitale elle-même.

Peut-on continuer de séparer, de couper Paris de sa banlieue, à la différence de ce qui se fait pour Londres, par exemple, qui s'est développée dans la continuité entre le centre et les faubourgs ? Paris, il est vrai, a tendance à se clôturer, à se renfermer sur elle-même, selon une tendance qui ne date pas d'hier, qu'il s'agisse de la barrière d'octroi, délimitée au

XVIIIe siècle par l'enceinte des Fermiers généraux, ou qu'il s'agisse de la construction des fortifications, décidée par Thiers en 1841.

Depuis 1860, depuis le Second Empire, donc depuis près de 140 ans, Paris a cessé de s'étendre et n'a plus varié dans sa définition géographique. Bien ! Mais est-ce une raison pour que la capitale, prenant à la lettre l'expression « Paris intramuros », se renferme à l'intérieur de ses murs, se comporte presque parfois en forteresse repliée sur elle-même, relevant son pont-levis, ou en système clos coupé de sa périphérie ? Est-ce une raison pour nourrir une sorte de psychose obsidionale, comme une forteresse qui se sentirait menacée par les Barbares refoulés en dehors du limes, comme sous le Bas-Empire romain ?


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La proposition de loi de notre collègue Georges Sarre me paraît à la fois raisonnable et judicieuse. Celui-ci, qui est d'ailleurs, et depuis longtemps, un élu de Paris intramuros , n'est pas un nouveau Josué tournant autour des murailles de Jéricho, accompagné du son des trompettes du même nom pour faire tomber les murailles de la ville et s'emparer de celle-ci. (Sourires.) Son projet est moins radical (Sourires), si je puis dire, et plus limité. Il s'agit seulement de réinsérer Paris dans l'espace parisien, de mettre fin à une coupure artificielle et dommageable entre la capitale et les communes de la première couronne qui englobe les trois départements voisins : Hautsde-Seine, Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne.

A l'époque de l'intercommunalité, il paraît normal d'aménager la coopération entre la ville-centre et ses communes périphériques. D'ailleurs, celles-ci sont souvent peuplées par des habitants qui vivaient autrefois, ou naguère, à Paris et qui ont été transférés ou relégué s à l'extérieur de la capitale par une politique immobilière qui a vidé celle-ci de ses catégories les plus populaires.

Certains domaines ne peuvent être gérés efficacement que dans et par l'intercommunalité - c'est le cas en particulier des transports et de l'environnement, au sens large, en y englobant la lutte contre le bruit et la pollution, le traitement des déchets, l'adduction et la distribution de l'eau.

Comme député du Val-de-Marne, je voudrais souligner combien cette proposition de loi est utile, notamment pour remédier aux déséquilibres et aux inégalités que connaît et concentre l'Est parisien par rapport à l'ouest de l'agglomération, par rapport à Neuilly, Auteuil, Passy.

L a nouvelle collectivité territoriale disposerait de recettes provenant en particulier de la taxe professionnelle et elle pourrait procéder en son sein aux péréquations nécessaires afin de remédier à une situation qui actuellement concentre, d'une part, les activités économiques, donc la taxe professionnelle, à l'Ouest et, d'autre part, les habitants modestes, donc les dépenses sociales, à l'Est.

On travaille souvent à Levallois ou à Puteaux. On y crée, par son travail, de la richesse et donc de la base pour la taxe professionnelle, mais on habite souvent à Ivry ou à Villeneuve-Saint-Georges, à charge pour ces communes de financer logements sociaux, écoles et aide sociale.

Etrange division des tâches : aux uns les activités et donc les recettes fiscales, aux autres l'habitat populaire et donc les dépenses à financer sur de maigres budgets ! Ce texte est nécessaire et innovant. M. le ministre disait à l'instant qu'il constituait une synthèse juridique sans précédent. Est-ce un grave grief ? Je crois, au contraire, que la capacité d'invention et le droit d'innovation sont les responsabilités normales du législateur. Nous sommes un peu là pour cela.

Cette nouvelle collectivité territoriale serait administrée par un Haut Conseil, sur lequel je ne reviens pas, élu au suffrage universel direct. A la différence des regroupements plus ou moins administratifs ou technocratiques, cette agglomération aurait à sa tête ce Haut Conseil directement issu du vote populaire. En République, le seul pouvoir légitime n'est-il pas celui qui est issu du suffrage universel ? La vraie démocratie est toujours préférable à la technocratie et au pouvoir des cabinets. Cavour le disait déjà dans une phrase restée fameuse : « La pire des chambres vaut toujours mieux que la meilleure des antichambres. »

(Sourires.)

On ne peut donc qu'apporter son soutien à cette proposition de loi, dont l'objectif est naturel et légitime : sortir Paris de son système clos, réconcilier la ville-centree t ses communes périphériques, ouvrir celle-là sur celles-ci. Bref, il s'agit d'essayer de remplacer les murailles d'aujourd'hui par les passerelles de demain ; de remplacer le repli sur soi par l'ouverture à autrui. N'est-ce pas un projet naturel pour la République, qui croit, par définition et en tout cas par devise, à l'égalité et à la fraternité ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste.)

M. Georges Sarre.

Très bien !

M. le président.

La parole est à Mme Françoise de Panafieu.

Mme Françoise de Panafieu.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi qui nous est aujourd'hui présentée par notre collègue Georges Sarre vise à la résurrection d'un super conseil général de la Seine, agrandi aux limites actuelles de la petite couronne, comprenant Paris et les trois départements issus de la loi de 1964 : Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne.

En tant qu'élue de Paris, je suis très consciente de la nécessité de décloisonner les politiques municipales et départementales en Ile-de-France, de même que les politiques régionales dans le cadre du grand bassin parisien, et, en cela, monsieur le ministre, je ne ferai que reprendre sous une autre forme certains des propos que vous venez de tenir.

C'est en dépassant l'horizon devenu trop étroit des limites administratives traditionnelles que nous permettrons à notre ville capitale, à notre agglomération, à la région d'Ile-de-France de mieux jouer le rôle de pôle de développement européen et international nécessaire au progrès de l'ensemble de notre nation. Mais le maire de Paris et les élus de sa majorité municipale, dont je suis membre, estiment que ce que vous proposez aujourd'hui, monsieur Sarre, va à l'encontre des évolutions nécessaires.

L'exposé des motifs évoque « la croissance continue de l'agglomération parisienne », mais celle-ci ne s'est pas laissée enfermer dans un territoire. L'agglomération est une réalité évolutive qui ne peut exclure Cergy-Pontoise, Mantes ou Melun. Votre nostalgie, monsieur Sarre, et celle de certains de vos amis, pour le feu département de la Seine vous fait oublier les réalités urbaines actuelles, qui rendent la proposition très réductrice. L'environnement, par exemple, pose des problèmes et exige des responsabilités allant bien au-delà de ces limites trop étroites, aussi bien pour l'air, puisque l'ozone en été se trouve surtout au-dessus de Rambouillet ou de Fontainebleau, que pour les déchets ; puisque les décharges pour déchets ultimes sont en Seine-et-Marne et dans le Vald'Oise. Après 2002, date butoir de la loi dite « loi Royal » de 1992, elles seront d'ailleurs menacées si Mme Voynet persiste à bloquer l'usine de tri et de traitement de Vitry, malgré les demandes réitérées de la Ville de Paris.

Nous sommes donc loin, monsieur Sarre, des frontières très étroites de votre proposition.

Vous me permettrez, après cette première critique, d'en émettre une seconde, générale et précise à la fois. Il me semble que votre proposition est génératrice de confusion. En multipliant les niveaux de décision, elle conduirait immanquablement à des dépenses publiques nouvelles : multiplication des fonctionnaires et des élus, pour des fonctions qui, au demeurant, sont déjà remplies par les assemblées actuelles. Le risque de conflits serait donc réel entre les actuelles responsabilités régionales, départementales et municipales, d'une part, et les compétences proposées pour ce « super-département » de la Seine, d'autre part.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 29 AVRIL 1999

C'est dans d'autres directions que doivent évoluer les structures franciliennes. Il convient, à notre sens, de renforcer les compétences du conseil régional d'Ile-deFrance, en particulier pour ce qui concerne le transport et l'environnement. Ce conseil régional commence à voir ses compétences renforcées, mais il faut aller plus franchement dans ce sens.

Il convient également de développer les coopérations interdépartementales et intercommunales existantes. Les organismes issus de la disparition du département de la Seine - comme les barrages-réservoirs, les parcs des sports, et plus tard le SYCTOM - sont des lieux de consensus où la passion politique est plus mesurée et l'efficacité plus grande. J'en parle en toute connaissance de cause ayant été membre du SYCTOM pendant plus de six ans. Ne politisons pas à l'extrême et au mauvais sens du terme des structures volontaires et nécessaires d'interdépartementalité et d'intercommunalité, qu'il faut sans doute étendre à d'autres domaines.

Enfin, je regrette une fois de plus le penchant constant que montre ce type de propositions pour l'accroissement des dépenses publiques. Quels coûts de fonctionnement, quels coûts d'investissement pour cette nouvelle collectivité locale dont je pense avoir démontré l'inadaptation et l'inutilité ? Pourquoi créer 251 élus supplémentaires, intermédiaires entre les 209 conseillers régionaux, les 133 conseillers généraux des départements et les 163 conseillers de Paris ? Cela ferait 756 élus, pas un de moins, alors que le conseil général de la Seine (pour la même population) comptait 150 membres.

Comment voulez-vous que les administrés s'y retrouvent, qu'ils sachent à qui s'adresser ? Si l'on vous suivait, monsieur Sarre, on diluerait les responsabilités au lieu de les renforcer, ce que nous n'avons jamais cessé de faire, pour qu'en face des électeurs il y ait des élus nommément responsables. Vous parlez de renforcer la solidarité. On aboutirait, en fait, à l'accroissement du flou et de l'incompréhension.

M. Laurent Dominati et M. Roger Lestas.

Très juste !

Mme Françoise de Panafieu.

Comment voulez-vous que ces nouveaux élus puissent trouver leur place, puissent trouver une assise dans la confusion qui régnerait si votre proposition était adoptée ? L'Ile-de-France, aujourd'hui, a besoin de clarification.

Elle a besoin d'un accroissement des pouvoirs des assemblées locales actuelles. Elle a besoin de passerelles au-delà des limites traditionnelles, en complément de l'action régalienne des services de l'Etat indispensable pour la région capitale. Lorsqu'on est un élu parisien responsable, et le maire de Paris, ici présent, ne me démentira pas, on ne peut passer sous silence le fait que, dans une ville comme la nôtre, l'Etat joue un rôle fondamental. Il ne saurait être question de le remplacer.

Alors, monsieur Sarre, pour toutes les raisons que je viens de rappeler succinctement et malgré l'intérêt que nous portons, vous le savez, à votre action municipale, nous ne saurions approuver votre proposition. C'est pourquoi le groupe RPR ne votera pas le passage à la discussion des articles.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Bernard Birsinger.

M. Bernard Birsinger.

Monsieur le président, monsieur le ministre, chers collègues, les députés communistes sont et seront de tous les chantiers législatifs visant à donner toute son efficacité à l'action des collectivités locales.

Nous n'avons jamais mesuré nos efforts pour favoriser les coopérations librement décidées et pour doter les collectivités des moyens nécessaires à ces coopérations. Nous sommes attachés à un renforcement de l'intercommunalité et à un aménagement du territoire de nature à réduire les inégalités et à promouvoir le développement économique et social.

Dans le cadre de la coopération intercommunale, il faut effectivement, monsieur Sarre, rendre beaucoup plus franchissables les frontières du périphérique. Mais mon groupe ne tire pas de ce constat les mêmes conclusions que vous.

Les élus, eux aussi, sont particulièrement soucieux de développer les coopérations. Depuis des années, ils ont fait ce pari, souvent avec succès.

Cependant, à y regarder de plus près, l'intercommunalité qui marche est une intercommunalité de projet sur des territoires pertinents. Les communes s'engagent dans les coopérations pour un projet concret et utile, élaboré et développé en communs. C'est cette conception-là que le législateur doit promouvoir, en procurant des moyens institutionnels et financiers nouveaux aux collectivités locales.

Nous sommes aussi convaincus qu'il n'y a pas d'incompatibilité entre l'autonomie communale et le renforcement des coopérations. Au contraire, l'autonomie communale est l'élément central de notre conception de la coopération. Les communes sont le creuset de la citoyenneté à la française. Elles sont l'institution où la participation et le contrôle des citoyens s'exercent le plus simplement. Elles sont le lieu privilégié des services publics de proximité, celui où le public est le mieux à même de participer à l'élaboration du service rendu. Il convient de s'appuyer sur cette richesse démocratique et de favoriser la mise en commun librement consentie des volontés et des moyens pour construire ensemble des projets d'intérêt commun. C'est le sens que nous donnons aux coopérations intercommunales.

Ainsi, puisque nous plaçons au centre de notre réflexion l'intérêt de nos concitoyens, nous accueillons n égativement tout dessaisissement non consenti des compétences exercées par les communes et les départements. Nous émettons de grandes réserves devant une proposition de loi qui organise de manière rigide le transfert vers une nouvelle structure de compétences aussi essentielles que le développement économique, l'aménagement, les transports urbains, l'habitat et le logement social, l'insertion économique ou la prévention de la délinquance. Nul doute que chacune de ces compétences appelle de nécessaires coopérations, et les communes ne se privent pas pour en nouer. Faut-il pour autant en déléguer autoritairement l'exercice à une nouvelle structure plus éloignée des citoyens ? Les principales critiques que nous avions formulées sur le projet de loi visant à favoriser la coopération intercommunale demeurent hélas valables pour la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui. Même si le nombre de compétences qui seraient dévolues au Haut conseil de l'agglomération parisienne reste inférieur à celui des compétences qui risquent d'être transférées aux communautés d'agglomération, nous tenons à rappeler nos plus grandes réserves.

Tout d'abord, d'une manière générale, nous ne pouvons partager l'analyse présentée dans l'exposé des motifs, qui tend à attribuer à la prétendue absence de politique de la ville et de planification commune tous les maux de


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notre société. Les causes de la précarité et de l'insécurité sont, pour l'essentiel, à chercher ailleurs. Ces phénomènes sont bien les conséquences de la politique de libéralisation et de déréglementation suivie pendant des années dans notre pays à l'initiative de la droite. La politique d'aménagement conduite en Ile-de-France a fait mal, et vous en êtes, madame de Panafieu, l'une des responsables.

Quel que soit le choix opéré en matière d'intercommunalité, en matière de politique de la ville, si l'on ne va pas plus loin dans le changement voulu par les Français en 1997, on continuera à récolter chômage, galère et violence.

Cela étant dit, le texte qui nous est proposé contient certains éléments contradictoires avec la démarche que je viens de développer. Ils tiennent pour l'essentiel aux aspects autoritaires de la procédure de constitution du Haut Conseil de l'agglomération parisienne qui intégrerait des communes contre leur gré ; aux transferts de compétences obligatoires, environnement et transports urbains, qui rendraient le conseil municipal incompétent pour délibérer dans ces domaines ; aux transferts de c ompétences facultatives, décidés à la majorité des deux tiers des communes concernées, ce qui pourrait aboutir à un dessaisissement des communes contre leur gré ; au financement de cette nouvelle collectivité territoriale qui ne mobiliserait pas de fonds nouveaux.

Concernant les moyens financiers, je pense qu'il faut faire preuve de courage politique et aller chercher l'argent là où il se trouve. (Rires sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Laurent Dominati.

Certes !

M. Bernard Birsinger.

Nous avons atteint la limite dans les prélèvements fiscaux qui peuvent être imposés aux ménages. Il convient de taxer aussi les actifs financiers des entreprises, et de le faire rapidement. L'assiette ainsi élargie pourrait alors faire l'objet d'une péréquation n ationale dont profiteraient en premier lieu les communes les plus démunies. Si l'on sait qu'il y a de graves fractures au sein de la région parisienne, il s'y trouve aussi de vastes pôles de richesses, auxquels il faudrait s'intéresser plus attentivement.

D'une manière générale, ce Haut Conseil de l'agglomération parisienne porte en lui l'effacement des collectivités existantes : les communes et les départements de Paris et de la petite couronne. Un tel bouleversement est-il justifié ? Les départements, à écouter certains, seraient aujourd'hui dépassés et superflus, ils seraient devenus un obstacle à la compétitivité des entreprises, une entrave à l'essor de l'intercommunalité. S'agissant d'une composante de l'originalité française qui favorise le maillage fin des services publics, il convient d'y regarder de plus près avant d'en nier l'utilité, et particulièrement en région parisienne.

L'étendue de leurs compétences sociales, leur rôle traditionnel de péréquation, l'importance des budgets d'invest issement, les aides apportées aux réalisations des communes confèrent aux départements un rôle essentiel dans la cohésion sociale et territoriale, dans l'aménagement plus équilibré du territoire, un rôle de garde-fou contre la mise en concurrence des territoires et des hommes induite par une construction européenne encore dominée par la logique libérale. Les lois de décentralisation ont permis à ces collectivités d'être à l'avant-garde des progrès réalisés en rendant possible une mise en oeuvre des décisions au plus près de l'expression des besoins. Elu de la Seine-Saint-Denis, je peux témoigner que le département constitue aussi un cadre idéal pour faciliter l'essor des coopérations entre les différentes collectivités locales. Nous n'entendons pas laisser remettre en cause le riche acquis des départements de la petite couronne.

Si une raison motive notre opposition à cette proposition de loi, c'est bien qu'elle porte en elle l'éloignement des citoyens des lieux réels où se prennent les décisions.

Elle s'inscrit dans la mise en concurrence des régions dans l'espace européen et revient sur les acquis démocratiques de la décentralisation.

Cependant, nous sommes de ceux qui pensent que la situation de Paris et de la région parisienne doit faire l'objet d'un vaste débat avec les citoyens et leurs élus.

Nous avons déjà souligné, lors de l'examen du projet de loi relatif à la coopération intercommunale au mois de janvier dernier, que le devenir institutionnel de l'Ile-deFrance doit faire l'objet de mesures spécifiques. Cette région est caractérisée par une très forte densité d'habitate t de population, par l'enchevêtrement des bassins d'emploi et de vie. La structure urbanistique de la région concourt elle-même à cet enchevêtrement. Les schémas d'aménagement successifs et la loi de 1992 sur l'intercommunalité y ont peu remédié.

Certains des objectifs affichés dans la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui sont aussi ceux des députés communistes.

Je pense particulièrement à l'équilibre social de l'habitat, pour lequel tant reste à faire, y compris par des mesures contraignantes pour les villes refusant d'accueillir du logement social sur leur territoire.

Je pense aussi aux nécessaires efforts à accomplir pour rééquilibrer l'emploi en région parisienne ou aux dispositifs de solidarité qu'il convient d'amplifier encore. Il y va de la cohésion de cette région et, au-delà, de la société dans son ensemble.

Je pense enfin à la ville de Paris. Il y a urgence. Il convient notamment d'aller vers un rééquilibrage général en faveur des mairies d'arrondissement. C'est le sens d'une proposition de loi sur l'organisation administrative de Paris, Marseille et Lyon, que les députés communistes ont tout récemment déposée. Il s'agit d'étendre les compétences des mairies d'arrondissement pour développer les mécanismes de concertation entre la ville et ces mairies, et favoriser ainsi l'exercice de la citoyenneté.

Pour en finir avec la proposition de loi que nous examinons, permettez-moi d'évoquer rapidement l'incompatibilité entre l'objectif affiché dans l'exposé des motifs la représentation de chaque commune au sein du Haut Conseil - et le choix du mode de scrutin départemental pour l'élection de ses membres.

Telles sont les raisons pour lesquelles les députés communistes voteront contre le passage à la discussion des articles. Nous ne souhaitons pas revenir trente ans en arrière en rétablissant l'ancien département de la Seine.

Avec la construction européenne, la loi à venir sur l'aménagement du territoire, celle sur l'intercommunalité, les conditions de l'exercice démocratique et les rapports entre les citoyens et leurs élus vont être transformés en profondeur. Dans ce processus, nous faisons le choix de porter l'exigence de droits nouveaux pour les citoyens, de moyens nouveaux pour les collectivités, d'une intercommunalité de projet librement décidée. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et du groupe socialiste. - M. le rapporteur applaudit également.)

M. le président.

La parole est à M. Laurent Dominati.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 29 AVRIL 1999

M. Laurent Dominati.

Fleurs et couronnes ! Que d'éloges, monsieur Sarre, et quel bel enterrement ! Tous les orateurs précédents, après avoir vanté vos mérites, ont finalement expliqué qu'ils ne voulaient à aucun prix de votre proposition de loi. Mais évidemment, puisque ce sont des amis politiques, ils vous ont envoyé des tombereaux de fleurs. Je ferai de même, mais à une différence près : quelle que soit l'estime réciproque que nous puissions nous porter en tant qu'élus, nous ne faisons pas partie de la même mouvance politique.

Il est assez intéressant d'entendre le rapporteur dire tout le bien qu'il pense de cette proposition de loi, puis annoncer que la commission ne veut pas en discuter. Le ministre, dont les amis appartiennent au même groupe politique que vous, en pense lui aussi le plus grand bien, mais il nous demande de ne surtout pas l'adopter. Quant au parti communiste, attaché à la gestion de ces départements sur lesquels il assoit sa puissance, il refuse énergiquement non pas le débat - tout le monde l'accepte mais la discussion des articles.

Pour ma part, j'aurais aimé que l'on en discute, même si, la plupart du temps, je m'y serais opposé. Cela m'aurait permis au moins de déposer des amendements et d'engager un débat au fond. Car, monsieur le ministre, si vous aviez voulu un véritable débat, il ne fallait pas vous opposer à la discussion des articles. Et vous, chers amis de la majorité, si vous pensiez vraiment que la proposition de Georges Sarre est intéressante, pourquoi avoir refusé également leur examen, même si c'était pour voter contre ? Au moins, vous auriez pu déposer vos amendements, nous les nôtres, et nous aurions eu un débat sur le statut et l'avenir de Paris, les pouvoirs de la région, les compétences du STP. Et je vous assure qu'il y aurait un peu plus de monde en séance et, dans les tribunes, un public peut-être plus parisien que celui de chez notre ami Lestas.

Tout cela est assez symptomatique de la façon de procéder de cette majorité, qui aligne les belles paroles mais n'agit pas vraiment en conformité avec qu'elle dit. Je profiterai néanmoins de l'occasion que vous m'offrez, monsieur Sarre, pour parler moi aussi de ce dont vous parlez, c'est-à-dire de deux choses : la remise en cause de la loi PML et le grand Paris.

La loi PML, vous avez raison, n'est pas une bonne loi.

C'était d'ailleurs une loi socialiste, qui avait pour objet initial de découper Paris en tranches, comme veulent toujours le faire les communistes, si j'ai bien entendu M. Birsinger. Vous l'aviez adoptée, mes chers collègues, dans un contexte d'offensive politique contre le maire de l'époque et elle a ainsi abouti à un statut un peu bâtard, avec des compétences partagées entre les maires d'arrondissement mais mal réparties par la loi, dans une sorte d'incertitude.

Les maires d'arrondissement devraient certes avoir des compétences réelles - et je vais y venir - mais s'ils réclament à juste titre des pouvoirs, il faut bien reconnaître qu'ils n'ont pas la responsabilité de lever l'impôt et ne peuvent pas être jugés sur ce qu'ils font.

Voilà un problème essentiel, l'autre problème étant évidemment - tout le monde en convient - de conserver l'unité de la capitale et de la commune de Paris.

Deuxième question, le grand Paris. Faut-il garder le département ? C'était l'objet de l'intervention de Françoise de Panafieu. Faut-il garder les départements de la couronne ? Les communistes ont parfaitement compris le ver que vous mettiez dans le fruit départementaliste. Je ne sais si tout le monde a apprécié à sa juste mesure l'avancée que vous proposez.

Pour ma part, je dirai que s'il se pose des questions quant à la démocratie locale dans la région parisienne et à Paris...

M. Bernard Birsinger.

A Paris, surtout !

M. Laurent Dominati.

S'agissant des départements, certains de mes collègues auront des choses à dire. Votre heure arrivera ! La question est donc de savoir comment augmenter la démocratie locale. Que peut-on faire pour les citoyens, les paysans de Paris ou de l'Ile-de-France ? Vous proposez de créer un échelon administratif supplémentaire. S'agit-il d'un renforcement du pouvoir des élus ou d'un renforcement de la confusion des pouvoirs et, donc, paradoxalement, du pouvoir de l'Etat ? Le pouvoir de l'Etat à Paris et en Ile-de-France est, en effet, plus important que partout ailleurs sur le territoire national. En tout cas, nous sommes contre cette proposition d'abord parce que vous n'envisagez de supprimer ni un département - pas même celui de Paris -, ni les départements et que vous jetez la confusion dans la répartition des pouvoirs entre la région, les différents départements, les communes et l'Etat.

Ensuite, vous affaiblissez l'intercommunalité. En effet, que deviendront le pouvoir et l'autorité des maires avec un Haut Conseil élu au suffrage direct ? Vous savez très bien - Françoise de Panafieu l'a évoqué - que les syndicats intercommunaux ne sont pas des assemblées politiques. Les élus votent au-delà de leurs appartenances politiques. Ainsi, des élus communistes peuvent joindre leurs voix à celles des libéraux, et des élus socialistes voter différemment les uns des autres.

M. Bernard Birsinger.

Assez rarement !

Mme Françoise de Panafieu.

Non, c'est fréquent !

M. Laurent Dominati.

Cela se produit tous les jours, monsieur Birsinger ! Vous savez très bien qu'on ne retrouve aucun clivage politique dans les structures intercommunales. En revanche, ils apparaîtront de nouveau dans une structure élue à la proportionnelle. Le Haut Conseil ne renforcera donc pas l'intercommunalité. Au contraire ! En effet, vous allez affaiblir les pouvoirs des maires et politiser totalement les assemblées. Or l'intercommunalité doit servir les intérêts du citoyen, et non pas des élus ou des partis politiques.

Enfin - et c'est paradoxal pour un élu parisien - vous affaiblissez Paris, ne serait-ce que du point de vue financier. La taxe professionnelle à Paris est de 12,7 %, contre 17,2 %, en moyenne, en Ile-de-France.

M. Bernard Birsinger.

Vous avez tout laissé aux entreprises !

M. Laurent Dominati.

Si l'on appliquait ce dernier taux aux entreprises parisiennes, elles verseraient plus de trois milliards de francs supplémentaires. Je rappelle que les compétences que vous imaginez de donner au Haut Conseil correspondent à un coût évalué à quelque deux milliards. Je ne vois vraiment pas quel intérêt cette nouvelle structure présenterait pour les Parisiens qui paieraient plus et auraient moins de services. Sans doute irezvous le leur expliquer dans les différents arrondissements de Paris. Cette question peut paraître mineure, mais la responsabilité de la décision de voter les dépenses publiques n'est pas sans importance.

Troisième question de fond, faut-il réformer la loi

PML ? Pour nous, et nous l'avons déjà dit, c'est une loi bâtarde, une loi de circonstances, qui menace effectivement les compétences des uns et des autres. Ce dernier argument est d'ailleurs sans cesse utilisé : pas un mois ne


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 29 AVRIL 1999

s'écoule à Paris sans que l'on entende dire qu'à Paris la loi n'était pas respectée. Un ministre l'a expliqué récemment encore dans cet hémicycle. Qu'attend-il pour la faire respecter si tel est vraiment le cas ? Cela étant, cette loi Defferre est bien confuse et il faudrait la faire évoluer. Selon quels critères ? En aucun cas ceux des élus, maires, conseillers municipaux ou conseillers généraux. Seuls les critères des citoyens doivent prévaloir. Que veulent-ils ? Ils veulent un meilleur service à un meilleur coût dans un service de proximité et avec une plus forte démocratie locale. Voilà ce qui, selon les élus libéraux, intéresse les Parisiens et même les habitants des autres communes du grand Paris que vous appelez de votre voeu.

Pour aller dans le sens d'un meilleur service à un moindre coût avec une plus grande proximité et une plus forte démocratie locale, il faudrait commencer, monsieur le ministre, par mettre fin au régime d'exception de l'Ilede-France et de la capitale. En effet, si vous voulez davantage de démocratie, monsieur Sarre, efforcez-vous d'abord de faire en sorte que l'Ile-de-France dispose des mêmes pouvoirs que les autres régions ! Je rappelle qu'en matière de transports, alors que - et c'est une anomalie les Parisiens paient, l'Ile-de-France paie, c'est l'Etat qui décide.

Commençons par améliorer la transparence et la responsabilisation des élus locaux avec la politique des transports. Tous les gouvernements annoncent qu'ils vont changer les choses mais ils ne le font jamais. Allez, chiche, monsieur le ministre, monsieur Sarre, donnez plus de responsabilité au conseil régional d'Ile-de-France ! A moins que vous ne soyez méfiants à l'égard du président du conseil régional d'Ile-de-France, ce que je n'ose penser. Comment pourrait-il en être ainsi, il appartient à l'actuelle majorité ? Je crois vraiment qu'il faut retrouver le droit commun en ce qui concerne l'Ile-de-France. Je ne parle pas d'un point de vue partisan.

M. Serge Blisko.

Nous sommes tous d'accord làdessus !

M. Laurent Dominati.

Il en va de même pour la solidarité. Le fonds de solidarité régionale d'Ile-de-France est alimenté par les Franciliens, mais c'est l'Etat qui décide de l'affectation des sommes. Transférez-le au budget du conseil régional ! Cela représente tout de même près de 4 milliards de francs. On a beaucoup parlé de manque de solidarité, d'accroissement de la fracture sociale, mais l'Etat dispose de beaucoup de moyens pour réduire cette fracture sociale ou géographique. Si vous voulez véritablement accroître le pouvoir des élus, confiez-leur la gestion du fond. C'est votre majorité ! Troisième élément : la pollution, la politique des transports, d'hygiène, de circulation, de stationnement. Mais, en la matière, le maire de Paris n'a aucun pouvoir. Là encore, rendez les pouvoirs aux Parisiens ! Rendez les pouvoirs aux élus ! Vous parlez de démocratie. Commencez par appliquer la démocratie communale ! Jadis, vous vous étiez opposé à l'élection d'un maire à Paris.

M. Georges Sarre.

Non, c'est faux !

M. Laurent Dominati.

Si ! Lors de la réforme du statut de Paris, vous étiez contre l'élection d'un maire dans la capitale.

M. Georges Sarre.

Faux !

M. Laurent Dominati.

Aujourd'hui, et je ne trahis pas votre pensée disant cela - M. Chevènement l'a encore rappelé -, vous êtes opposé au transfert des compétences de police municipale au maire de Paris. Ce pouvoir relève pourtant de la compétence normale de tous les maires de France, notamment en ce qui concerne la circulation et le stationnement. Vous regrettez que l'on respire mal à Paris. Mais c'est l'Etat qui est le principal responsable de cette situation ! Le maire de Paris n'a pas de pouvoir en la matière. Donc, encore une fois, si vous voulez renforcer la démocratie, commencez par vous rapprocher du droit commun des collectivités locales, qu'elles soient régionales ou communales.

Si, au contraire, on veut modifier la loi PML et renoncer au droit commun pour Paris et la région, considérant que c'est la capitale et que la métropole parisienne doit être comparée au grand Londres, au grand Berlin et non pas à Nantes, Marseille ou Lyon, il faudra alors aller vers un régime d'exception, mais toujours dans le sens d'un meilleur service, d'un meilleur coût pour une plus grande proximité.

Du côte des Verts, du côté des socialistes, on souhaite un renforcement du pouvoir des maires d'arrondissement.

Pourquoi pas ? Ils ont déjà des compétences pour le fonctionnement des crèches, des écoles, des bibliothèques, des équipement locaux sportifs, des espaces verts ; il faudrait leur en donner en matière d'investissement.

En effet, c'est le pouvoir local, y compris à Paris, qui est le plus à même de savoir s'il faut construire une crèche ici, refaire une école maternelle là. C'est lui qui est le plus compétent en matière d'équipements locaux. Mais si l'on s'engage sur cette voie, il faut prendre en considération deux éléments. Premièrement, sur quels critères les citoyens jugeront-ils l'action de leur maire d'arrondissement ? Il faut prévoir une enveloppe globale d'investissement pour chaque mairie et l'asseoir sur un nombre d'habitants. C'est en fonction des choix qui seront réalisés à partir de cette enveloppe d'investissement que les habitants pourront juger l'action de leur maire.

Cela suppose, mes chers collègues, de revoir la taille des arrondissements. Actuellement, le 1er arrondissement compte 18 000 habitants, contre 230 000 pour le 15e . Ce n'est pas la même chose du tout. Dans un cas, avant de faire le premier investissement important - gymnase, crèche, école ou bibliothèque -, il faudra attendre au moins la fin du premier mandat, car l'enveloppe ne sera pas assez importante pour mener une véritable politique.

Dans l'autre cas, en revanche, et alors qu'il n'y aura pas plus de relation de proximité, le maire disposera d'un pouvoir d'investissement considérable.

Si donc on veut rentrer dans cette logique - et les élus démocrates libéraux y sont prêts -, il faut revoir le découpage administratif de Paris de façon à créer des arrond issements d'une taille comparable. Chacun devrait compter de 50 000 à 70 000 habitants. Cela permettrait de mener une politique tout en assurant une relation de proximité avec les habitants.

Deuxième élément, il faudrait corrélativement renforcer le pouvoir du maire de Paris dans certaines compétences qui relèvent actuellement du préfet de police, de par la loi du 12 messidor an VIII, et lui rendre sa pleine compétence en ce qui concerne la tranquillité publique, la police de stationnement et de circulation. N'est-il pas paradoxal, en effet, de vouloir renforcer la démocratie à Paris et ailleurs, et de sans cesse augmenter les pouvoirs de l'Etat et la confusion des pouvoirs entre les élus, ce qui amoindrit le pouvoir du décision du maire de Paris ? Comment peut-on prétendre travailler dans le sens de l'intérêt des citoyens si l'on ne pense qu'à rogner les pouvoirs des uns pour les attribuer aux autres dans la confusion et l'irresponsabilité ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 29 AVRIL 1999

Enfin, vous évoquez la question du grand Paris. Créer une structure de concertation permanente et représentative des différentes communes limitrophes où la capitale serait évidemment représentée paraît une bonne idée.

Cela semble même indispensable. Faut-il créer un Haut Conseil, concurrent des différents pouvoirs ? Non et je m'en suis expliqué.

En revanche, il faudrait effectivement mettre en place une structure de concertation permanente pour Paris.

Faut-il même agrandir Paris ? Faut-il considérer, comme cela s'est fait dans les siècles précédents, que, finalement, Paris n'est pas limité par le périphérique et que Neuilly et Paris, Montreuil et Paris, c'est un peu pareil ? Pourquoi pas ? A une condition toutefois, et vous l'avez dit très justement, que cela soit voulu par les populations concernées et ne relève pas d'une décision administrative. Il est hors de question de procéder à des annexions qui iraient à l'encontre d'une démocratie locale. On pourrait envisager des référendums locaux. Nous y sommes favorables pour ce type de questions, notamment.

On pourrait donc considérer que, sous certaines conditions, Paris n'est pas seulement dans Paris. D'ailleurs, c'est ce qu'a fait l'Etat qui a généreusement accordé le nom de Paris à La Défense, et ce pour des raisons commerciales et foncières. Ajouter le nom de Paris à d'autres communes permettrait peut-être, en effet, de freiner la pression commerciale et foncière qui s'exerce sur le territoire parisien. Ce n'est donc pas une idée à rejeter.

Mais il faudrait le faire, encore une fois, en redéfinissant les pouvoirs locaux au sein même de ce qui serait une agglomération, en fonction du voeu des habitants des différentes communes concernées et en ne faisant pas de cette ambition une ambition seulement administrative.

Une mise au point, pour conclure. Vous prétendez pour justifier vos projets que c'est la politique de fracture sociale qui chasserait de Paris sa population la plus pauvre.

M. Serge Blisko.

Malheureusement !

M. Bernard Birsinger.

C'est vrai et vous continuez !

M. Laurent Dominati.

Je constate d'abord que cette affirmation traduit une méconnaissance totale de la situation parisienne. Certes, il y a des quartiers "chics", c'est vrai. Mais on trouve aussi des chômeurs, en plus grand nombre que dans bien d'autres départements de l'Ile-deFrance. Prenez par exemple le critère des ZEP.

Mme Françoise de Panafieu.

Je peux en parler, je suis l'élue d'une ZEP !

M. Laurent Dominati.

Elles sont, je le rappelle, très officiellement définies à partir du nombre de chômeurs, du nombre de personnes non francophones et du niveau de revenus. Eh bien, à Paris, le nombre des ZEP est supérieur à la moyenne nationale. Paris, c'est à la fois des gens riches et des gens très pauvres, en grande partie attirés par la réputation de la capitale. Ils espèrent pouvoir y améliorer leurs conditions, ce qui est parfois le cas, heureusement ! Le jugement que vous portez va donc totalement à rebours de la réalité parisienne. Vous ne prenez pas en compte la diversité de Paris.

Mme Françoise de Panafieu.

Et le budget social de Paris !

M. Laurent Dominati.

J'ajoute, monsieur le ministre, qu'il n'est pas exact de dire que les communes les plus pauvres sont devenues de plus en plus pauvres et les plus riches encore plus riches. Il y a quelques exceptions à cela. Ainsi, Issy-les-Moulineaux était très pauvre. Mais grâce à un nouveau maire, à une autre majorité et à une autre politique, notamment fiscale, la ville a pris un essor totalement différent.

M. Bernard Birsinger.

Et les pauvres sont partis !

Mme Françoise de Panafieu.

Non !

M. Laurent Dominati.

Il faut dire aussi que les élus des c ommunes dites pauvres entretiennent la pauvreté, notamment dans l'est de la région Ile-de-France et que la politique menée dans les départements gouvernés depuis je ne sais combien de temps par le parti communiste engendrent la pauvreté avec une certaine satisfaction.

M. Bernard Birsinger.

Caricature !

M. Laurent Dominati.

On a l'impression que vous êtes heureux d'en vivre. C'est l'échec total d'une politique d'urbanisme qui a consisté à loger les gens dans des cités coincées entre l'avenue Karl-Marx et une « maison du peuple ». (Exclamations sur les bancs du groupe communiste.) En réalité, vous avez entretenu la pauvreté par l'assistanat et par une politique fiscale qui a repoussé les entreprises et donc le développement. Là aussi, il faut, à un moment ou à un autre, se poser les vraies questions et définir les véritables enjeux pour le développement de la capitale et de la solidarité.

Mes chers collègues, vous l'aurez compris, nous ne sommes opposés ni à une réforme du statut de Paris ni à une réflexion sur le grand Paris avec une nouvelle répartition des pouvoirs en Ile-de-France. Nous y sommes plus que prêts. Démocratie libérale fera d'ailleurs des propositions en ce sens. Elles seront sûrement plus audacieuses que la proposition trop administrative, à notre goût, de Georges Sarre et auront pour seul objectif de mettre en place un système de responsabilité claire des élus. Tel n'est pas actuellement le cas à Paris, pas plus que dans la région Ile-de-France. Trop souvent, la véritable responsabilité relève de l'Etat qui ne met pas suffisamment en oe uvre une politique cohérente pour l'Ile-de-France, comme on peut le constater en matière de pollution, de déchets ou de transports. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Jacky Darne.

M. Jacky Darne.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, toute une partie de l'exposé des motifs de la proposition de loi de Georges Sarre portant création d'une nouvelle collectivité territoriale peut être partagée, tant certains constats s'imposent.

Ainsi en est-il de cette évidence : l'insuffisance, voire l'absence de coopération entre les villes et les départements de l'aire parisienne a conduit au creusement des inégalités des différents territoires. Nul n'est besoin d'être un fin observateur pour constater le contraste saisissant qui existe entre des pôles de développement et de richesses parmi les premiers au monde et des zones de désindustrialisation, de pauvreté et de violence.

A cet égard, je voudrais dire à M. Dominati, qui tente de faire porter à certains maires la responsabilité de cet état de choses, que, maire moi-même d'une commune où la politique de la ville a de l'importance, j'ai souvent discuté avec Pierre Cardo de Chanteloup-les-Vignes.

M. Laurent Dominati.

Et alors ?

M. Jacky Darne.

Or il estime qu'en dépit de tout ce qu'il s'efforce de faire, il n'arrive pas à freiner la pauvreté et les difficultés.


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M. Laurent Dominati.

Cela n'a rien à voir avec ce que je disais ! M. Cardo est un libéral !

M. Jacky Darne.

Cela montre qu'il s'agit non pas d'une responsabilité individuelle mais bien d'une logique d'organisation du territoire et d'un refus de coopérer et de faire preuve de solidarité de la part de ses voisins plus riches.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

C'est vrai !

M. Laurent Dominati.

Pas du tout ! C'est l'échec de votre politique depuis quarante ans !

M. Serge Blisko.

C'est vous qui avez fait l'Ile-deFrance !

M. Jacky Darne.

Quoi qu'il en soit, Paris a une histoire un peu plus ancienne et sa structuration est d'une autre nature. La disparité des richesses des collectivités, en particulier dans les bases de taxe professionnelle, rend particulièrement difficile toute inversion de cette évolution. Comparez les bases de taxe professionnelle dans le département des Hauts-de-Seine et dans le département de la Seine-Saint-Denis ! J'observe, du reste, que les oppositions suggérées par Georges Sarre ne correspondent pas tout à fait à l'évolution actuelle : on ne peut se borner à opposer le centre et la périphérie, laquelle serait décomposée en une petite et une grande couronne. L'organisation de l'aire urbaine est autrement plus complexe et une construction en quadrants paraît plus pertinente.

Cela dit, l'organisation administrative actuelle, puisque c'est là-dessus que porte la proposition de loi, est-elle, en tout ou partie, responsable de cette situation ? A l'évidence oui, en partie.

Le découpage de l'Ile-de-France en 1 300 communes, sept départements, auquel viennent s'ajouter l'intervention importante de l'Etat et les syndicats, est dénoncé par tous les analystes comme une survivance historique qui ne permet pas de répondre correctement aux problèmes posés. Il manque, c'est vrai, un vrai pouvoir d'agglomération. Mais si ce constat, déjà ancien et largement partagé, n'a pas trouvé de réponse satisfaisante, c'est bien que l'application à l'Ile-de-France des logiques de décentralisation qui se sont développées dans le reste du territoire et y ont bien marché pose quelques difficultés.

M. Laurent Dominati.

C'est vrai !

M. Jacky Darne.

Capitale prédominante de la France, dix millions d'habitants, pôle historique essentiel, place du pouvoir central, autant de données qui pèsent très lourdement, le récent débat sur la simplification et le renforcement de la coopération intercommunale l'ont bien montré. On rappelle régulièrement que l'Ile-de-France est un cas particulier et que l'on ne peut y appliquer ce qui est valable ailleurs. Dans un tel contexte, on comprend que Georges Sarre souhaite ne pas laisser de côté la modernisation administrative de cet espace. Qu'il me permette cependant de lui faire remarquer que des propositions d'une telle ampleur méritent, si l'on souhaite les voir aboutir, d'être collectives et que son action solitaire n'est pas un gage de réussite.

Mais regardons les choses au fond.

Je vois quatre faiblesses principales dans cette proposition de loi : elle complique singulièrement l'organisation administrative ; elle ne porte pas sur un territoire pertinent ; elle fait fi du conseil régional et l'appauvrit ; enfin, il existe d'autres moyens de développer la solidarité.

Premièrement, elle complique l'organisation du territoire. Alors que nous venons d'adopter en première lecture un texte sur la simplification de l'intercommunalité où nous avons repoussé l'élection au suffrage universel essentiellement pour éviter la création d'une nouvelle collectivité et donc d'une nouvelle légitimité, Georges Sarre propose la création d'une nouvelle collectivité avec élection au suffrage universel direct, sans en supprimer aucune.

Les habitants de l'agglomération parisienne ont déjà quelque peine à faire la part de ce qui relève de la responsabilité de l'Etat, des communes, des départements et de la région. Croit-il sérieusement que l'on facilitera la citoyenneté en créant une nouvelle collectivité ? Deuxièmement, sa proposition ne porte pas sur un territoire pertinent. Paris et les trois départements de la première couronne ne sont proposés par aucun économiste, aucun géographe, aucun analyste comme un espace mérit ant une organisation spécifique. Dans aucun des domaines de compétence préconisés par Georges Sarre, il ne paraît de nature à apporter un plus. La grande couronne évolue ; nombre de ses communes se trouvent désormais dans la même cohérence que celles de la première couronne. Peut-on croire par exemple qu'une compétence « transport » serait efficacement exercée par le Haut Conseil de l'agglomération, alors que, à l'évidence, l'espace concerné dépasse largement celui qui relèverait de son cadre géographique de compétences ? Troisièmement, cette proposition vide de son rôle, de sa mission le conseil régional. J'ai été frappé par l'important dossier consacré à l'Ile-de-France dans le dernier numéro de mars 1999 de l'institut de la décentralisation, Pouvoirs locaux. On y trouve une bonne quinzaine d'articles où tous les auteurs, qu'ils soient fonctionnaires, universitaires ou responsables politiques, soulignent la place que doit occuper la région dont ils jugent les contours globalement satisfaisants.

Ainsi, M. Jacques Lévy, universitaire géographe, écrit :

« Osons le dire, l'aire métropolitaine de Paris, dont le périmètre Ile-de-France offre une approximation honorable, est une ville. » M. Huchon lui-même, le président

du conseil régional, considère également, et ce n'est pas étonnant, que la région est bien la structure institutionnelle la plus apte à faire face à l'ensemble des problèmes auxquels se trouve confrontée la région capitale. Je crois donc qu'il faut donner tout son poids au conseil régional et non créer une structure intermédiaire.

Quatrièmement, il existe d'autres moyens pour développer la solidarité. Je n'en citerai que trois.

Le premier est le fonds de solidarité Ile-de-France, dont le projet de loi sur l'intercommunalité examiné en première lecture a consacré et renforcé l'existence. Il me paraît constituer un des outils appropriés. Peut-être n'est-il pas le seul, peut-être faut-il aller plus loin ; à cet égard, la proposition de Georges Sarre sur la taxe professionnelle unique d'agglomération mérite d'être creusée, sans qu'il soit pour autant nécessaire de créer une nouvelle collectivité locale. Quoi qu'il en soit, cette forme de solidarité financière apparaît comme une première piste évidente.

La coopération intercommunale constitue aussi une des réponses possibles, bien que partielle, car l'intercommunalité dans la région Ile-de-France ne peut se concevoir comme dans le reste de la France. Il n'empêche que des


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expériences existent ou se développent, qui permettent d'apporter dans certains des domaines visés par la proposition de loi des réponses en matière de coopération et de solidarité.

Dans le domaine plus particulier des transports, lui aussi visé par la proposition de loi, je crois moi aussi que la réforme du syndicat des transports parisiens est une nécessité...

M. Serge Blisko.

Très juste !

M. Jacky Darne.

... et qu'elle peut constituer une réponse, mais il n'y a pas besoin pour cela de créer une nouvelle collectivité locale.

De nouveaux projets de réforme des transports en commun sont engagés. Les précédents, on le sait, n'ont pas abouti pour des raisons diverses. Mais on peut espérer que, cette fois-ci, les discussions en cours réussiront et donneront au conseil régional et à ceux qui payent un pouvoir réel dans cette organisation, permettant de parvenir à une agglomération solidaire : on sait le rôle des transports à cet égard.

Les quelques pistes que je viens de vous exposer me conduisent à demander à Georges Sarre de reprendre avec l'ensemble des parties prenantes la réflexion qui permettra de construire une agglomération plus solidaire ; M. Dominati lui-même, si je l'ai bien entendu tout à l'heure, s'est déclaré d'accord tout à la fois pour repenser la loi PLM qui en a effectivement bien besoin, et pour construire une politique d'agglomération dont il a conscience qu'elle fait défaut. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Henri Plagnol.

M. Henri Plagnol.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en tant qu'élu du Val-deMarne, je suis bien entendu très sensible au diagnostic posé par notre collègue Sarre dans sa proposition de loi relative à la création d'un Haut Conseil de l'agglomération parisienne. Comment ne pas partager ses conclusions sur l'hypertrophie de l'agglomération parisienne et ses conséquences pour les 10 millions d'habitants qui vivent dans la région capitale ? Le mal de vivre de gens quotidiennement prisonniers d'embouteillages qui pèsent très lourdement sur leur vie quotidienne, les inégalités justement soulignées entre Paris, la ville phare, et sa périphérie, entre l'est et l'ouest de l'Ile-de-France, qui ne cesssent de se creuser - Paris et les Hauts-de-Seine concentrent aujourd'hui les deux tiers des sièges sociaux et, en matière d'impôts sur les revenus, l'écart entre le Val-de-Marne ou la Seine-Saint-Denis et l'ouest de l'Ilede-France n'a cessé d'augmenter au cours des dix dernières années ; l'inadaptation enfin du cadre institutionnel, le manque de clarté dans la répartition des compétences dévolues à chaque collectivité et l'insuffisance de représentativité. Conseiller général du Val-de-Marne, j'avoue bien humblement que bien des habitants de mon canton ne connaissent pas leur élu,...

M. Serge Blisko.

Ils ont tort !

M. Henri Plagnol.

... qui n'a aucune espèce de « visibil ité » dans l'actuelle organisation institutionnelle. Je reviendrai sur ce point.

Mais autant le diagnostic est juste, autant la réponse institutionnelle apparaît totalement inadaptée, et ce pour trois raisons : l'assise territoriale de la structure que notre collègue propose de créer est clairement dépassée ; elle concurrencera inutilement la région ; enfin, le moins qu'on puisse dire est qu'elle n'est pas en phase avec les choix récemment exprimés par le Gouvernement dans le cadre des précédents débats sur l'aménagement du territoire et l'intercommunalité.

Je développerai très rapidement ces trois critiques.

Une assise territoriale inadaptée. Comment peut-on prétendre aujourd'hui ressusciter le conseil général de la Seine alors qu'en vingt ans plus d'un million d'habitants se sont installés dans les départements de la grande couronne, qui représentent aujourd'hui environ la moitié de la population de l'Ile-de-France ? Il n'y a donc aucune espèce de pertinence à prétendre résoudre des problèmes tels que ceux de l'environnement, de la pollution de l'air, des flux domicile-travail quotidiens uniquement à partir de la petite couronne et de la ville capitale.

Je ne prendrai qu'un exemple en matière de transports : le point le plus difficile de la circulation se situe aujourd'hui à Joinville, au croisement de deux autoroutes.

Cet embouteillage monstre est essentiellement lié à la venue quotidienne des habitants de la grande couronne, en l'occurrence de la Seine-et-Marne. La création d'un Haut Conseil de l'agglomération parisienne ne résoudrait en rien ces problèmes de vie quotidienne des Franciliens.

Il est bien évident que le seul échelon pertinent est celui de la région. Michel Giraud, alors président de la région Ile-de-France, n'avait-il pas été jusqu'à inventer le « grand bassin parisien », qui reposait sur un dialogue entre la région Ile-de-France et les régions périphériques, tant il est vrai que l'échelon régional lui-même apparaît déjà dépassé pour certains problèmes d'aménagement du territoire, telles les dessertes aéroportuaires ? C'est faire preuve d'un archaïsme surprenant pour un élu aussi audacieux que vous, cher collègue Georges Sarre, que de vouloir ressusciter une structure qui ne prendrait en compte que la petite couronne. A l'évidence, ce n'est pas la bonne réponse.

Mais il y a plus surprenant et je regrette qu'un représentant de M. Huchon ne soit pas parmi nous pour donner son sentiment, car c'est bel et bien le procès de la région que vous faites.

Mme Nicole Bricq.

Exactement !

M. Laurent Dominati.

C'est vrai !

M. Henri Plagnol.

En effet, toutes les compétences que vous prétendez dévoluer à votre haut Conseil de l'agglomération parisienne en matière d'environnement, en m atière d'action sociale, en matière d'aménagement économique, ce sont très exactement celles de la région.

M. Laurent Dominati.

Et de l'Etat !

M. Henri Plagnol.

Nous sommes en ce moment même occupés, les uns et les autres, à examiner le projet de contrat de plan Etat-région. M. Huchon est venu en présenter les différentes rubriques au conseil général du Valde-Marne : elles recouvrent mot pour mot les attributions que vous prétendez transférer à ce Haut Conseil. Entendez-vous par là que la région ne ferait pas son travail ? Si réellement vous prétendez résoudre les problèmes de vie quotidienne des Franciliens, demandez donc, puisque vous faites partie de la majorité, à l'Etat et à la région de se donner les moyens d'y remédier, par exemple en créant un réseau de transports en commun qui résoudrait enfin le problème crucial des transports de banlieue à banlieue, appelés à augmenter, je vous le rappelle, de 40 % dans les dix ans qui viennent.

M. Laurent Dominati.

Exact !

M. Henri Plagnol.

Votre nouvel échelon territorial apparaît donc inutile, puisqu'il existe déjà une collectivité régionale.


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Ma troisième critique porte sur la cohérence avec l'ensemble de l'action gouvernementale. Je vous croyais pourtant un des proches du ministre de l'intérieur Laurent Dominati s'en est amusé tout à l'heure. Nous venons, que je sache, de voter un projet qui prévoit de renforcer l'intercommunalité en le faisant reposer sur le v olontariat des communes. Or vous proposez une démarche exactement inverse, autoritaire, jacobine, qui consiste à créer un échelon non pas intercommunal, mais supracommunal, qui dépouillera toutes les communes relevant de ce haut conseil de l'essentiel de leurs ressources de taxe professionnelle. Où est la cohérence ? U n deuxième projet gouvernemental, celui de Mme Voynet, relatif à l'aménagement du territoire, précise en toutes lettres que l'échelon pertinent est l'échelon régional et que l'aménagement de la région parisienne doit entrer dans le cadre d'un schéma de bassin régional.

Là encore, mettez-vous d'accord ! Où est la cohérence d'ensemble de l'action gouvernementale ? On peut s'en inquiéter connaissant les enjeux essentiels que tout cela représente pour la vie quotidienne des dix millions de Franciliens.

Cela étant dit, si votre réponse institutionnelle est inadaptée, elle part d'un diagnostic juste. Pour notre part, nous proposons trois orientations : renforcer l'échelon régional en faisant en sorte de rapprocher la région Ilede-France du droit commun, supprimer les départements - sur ce point, j'ai peur de ne pas être d'accord avec le groupe communiste -...

M. Bernard Birsinger.

Ce n'est pas un scoop !

M. Henri Plagnol.

... et développer de façon pragmatique l'intercommunalité.

Première direction : renforcer l'échelon régional. Tous les problèmes que vous évoquez relèvent, je l'ai dit, de cette collectivité. Le contrat de plan Etat-région nous offre l'occasion de leur apporter un début de réponse.

Faute de temps pour développer toutes les compétences qui devraient être dévolues à la région, je n'en prendrai que deux, à commencer par celle des transports.

La région va enfin, heureuse décision, être représentée au conseil d'administration du syndicat des transports parisiens. Je m'en réjouis, mais c'est insuffisant.

M. Laurent Dominati.

Très juste !

M. Henri Plagnol.

En fait, c'est elle qui devrait gérer l'ensemble des transports de l'agglomération parisienne.

Nous pourrions enfin partir de la réalité quotidienne des habitants sans être l'otage de grands appareils d'Etat qui ont certainement toutes les compétences nécessaires en ingénieurs ou en technologie mais qui connaissent moins bien que les élus les voeux des habitants.

M. Laurent Dominati.

Très bien !

M. Henri Plagnol.

Même chose pour la carte hospitalière : la réforme voulue par Alain Juppé et reprise sur ce point par l'actuel gouvernement consistait à renforcer les délégations régionales, partant du constat que les nécessaires restructurations et la mise en place de politiques hospitalières répondant le mieux aux besoins des habitants ne pouvaient s'effectuer que dans un cadre régional.

Il fallait aller au bout de cette logique : il n'est plus nécessaire de confier la gestion des hôpitaux publics aux départements. Il faut supprimer un échelon inutile et aller dans le sens de la régionalisation. Je n'évoquerai même pas tout ce qui a trait à l'environnement : le problème de la pollution de l'air ne peut évidemment être traité dans un cadre communal ou départemental.

Les plans de déplacements urbains que vous évoquez avec justesse dans votre diagnostic ne trouvent de solution que dans le cadre régional. Les noeuds d'embouteillage, je vous le disais tout à l'heure, se situent en général à la limite de la grande et de la petite couronne. Vous ne pouvez résoudre ces questions dans le cadre de votre Haut Conseil.

Deuxième direction, audacieuse celle-là, il faut avoir le courage de remettre en cause l'existence des départements en Ile-de-France. Je ne suis pas, pour ma part, acquis à l'idée que l'on devrait avoir partout, sur l'ensemble du territoire, les mêmes structures. Et là, je retrouve l'inspiration de votre projet, à savoir le constat de l'inutilité des départements de la petite couronne. Je suis conseiller général. Eh bien, je reconnais avec vous que je ne sers pas à grand-chose. D'abord, je le disais précédemment, les habitants ne connaissent pas leur conseiller général, à la différence de ce qui se passe en province, ou en tout cas dans les régions rurales. Nous sommes élus dans des morceaux de ville, dans un des morceaux de cette gigantesque agglomération parisienne, et nos actions n'ont pratiquement aucune pertinence dans la résolution des problèmes de vie quotidienne des habitants.

Mais il y a plus grave encore. En encourageant artificiellement le patriotisme de département dans le Val-deMarne, la Seine-Saint-Denis ou les Hauts-de-Seine, qui ne répondent à aucune logique historique ni même géographique, on aboutit à creuser les inégalités.

M. Laurent Dominati.

Absolument.

M. Henri Plagnol.

En effet, comme le disait Laurent Dominati, l'échec, vingt ans après, est patent. Les départements du Val-de-Marne et de la Seine-Saint-Denis n'ont jamais été aussi pauvres et aussi défavorisés ni les Hauts-de-Seine aussi riches. On voit bien que le département est loin de pouvoir résoudre ces problèmes. Il n'est pas le bon échelon.

Mes collègues communistes, dans leur plaidoyer pro domo - je vous rappelle qu'ils gèrent deux des trois départements de la petite couronne - prétendaient que, en ce qui concerne l'action économique et l'aménagement du territoire, les départements pouvaient jouer un rôle utile en matière d'investissement. Mais c'est évidemment faux ! Il suffit d'ailleurs d'examiner leurs budgets, qui sont consacrés pour l'essentiel au fonctionnement. En matière d'investissement, l'échelon pertinent, c'est l'échelon régional - il faudrait même imaginer une extension au grand bassin parisien -, ce n'est en aucun cas l'échelon départemental.

M. Laurent Dominati.

Très bien !

M. Henri Plagnol.

Pour ce qui concerne les missions de proximité dévolues aux départements, qui, celles-là, renvoient à une réalité - la gestion des collèges, la gestion de certaines routes d'intérêt départemental, voire des modes d'action sociale -, qu'est-ce qui empêcherait que les conseillers régionaux, élus dans le cadre de leur département, siègent duex, trois ou quatre fois par an pour résoudre ces problèmes ? On ne va tout de même pas justifier l'existence d'une collectivité uniquement par la gestion des collèges ! Cela n'a pas de sens. Il faut maintenant avoir le courage de remettre en cause l'existence de l'échelon départemental.

Enfin, il faut encourager, de façon pragmatique, l'intercommunalité. J'évoquerai le cas du bois de Vincennes, qui est frontalier entre la ville de Paris et les communes riveraines, situées dans le Val-de-Marne, dont je suis l'élu.

Celles-ci se sont organisées pour monter une structure de


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dialogue avec la Ville de Paris. Voilà un exemple intelligent. Nous aimerions que la Ville de Paris entende le voeu que formulent des communes val-de-marnaises de cogérer ensemble davantage le bois de Vincennes. Cela pose le problème de l'organisation de la préfecture de Paris, et bien d'autres questions concrètes que je n'ai pas le temps de développer ici. Voilà un exemple, parmi des centaines d'autres, de ce que peuvent faire, de façon pragmatique, des structures intercommunales. En matière de traitement des ordures ménagères, en matière de gestion des parcs sportifs ou des espaces verts, il est bien évident qu'il ne s'agit pas de politiser artificiellement ces structures, mais de les faire fonctionner au mieux, dans l'intérêt de l'ensemble des habitants.

Le seul échelon, mes chers collègues, que connaissent, aiment et respectent les habitants de l'Ile-de-France, vous le savez bien, c'est la commune. La seule personne qu'ils connaissent, c'est leur maire. Il faut donc faire confiance aux élus locaux. Le groupe UDF est très attaché à ce que l'on appelle le principe de subsidiarité : il faut renforcer le plus possible les échelons proches des gens. C'est dans ce cadre-là, en respectant cet échelon communal, qu'il faut encourager les rapprochements nécessaires, à partir des projets concrets.

En conclusion, pour répondre à tous les problèmes réels de vie quotidienne que vous évoquez dans votre proposition, nous considérons qu'il faut achever la décentralisation, encourager les énergies locales. Achever la décentralisation, c'est faire rentrer l'Ile-de-France dans le droit commun, c'est-à-dire donner à la région la plénitude de ses compétences, transférer aux communes tout ce qui peut l'être et faire en sorte que les départements deviennent inutiles.

M. Laurent Dominati.

Très bien !

M. Henri Plagnol.

C'est en faisant confiance aux habitants et à leurs élus que nous arriverons à résoudre les vrais problèmes que vous avez évoqués, et notamment le mal de vivre des Franciliens.

M. Laurent Dominati et M. Jean Tiberi.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. Georges Sarre.

M. Georges Sarre.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous sommes réunis ce matin à l'invitation du groupe RCV, branche MDC (Sourires) , pour parler de l'agglomération parisienne.

J'apprécie ce débat, un vrai débat d'idées, et les collègues qui sont intervenus l'ont fait avec cordialité et sérieux, permettant à la réflexion d'avancer. Je les en remercie. Nous nous connaissons, nous avons de l'estime les uns pour les autres, notamment nous, les élus parisiens, et plus largement ceux de la région ou de l'agglomération parisienne : il est donc bien normal que nous nous exprimions franchement.

C'est vrai que ma proposition dérange, c'est vrai que ma proposition « décoiffe ». Et je vais essayer d'exposer un certain nombre d'idées simples que je crois profondément justes.

Auparavant, je remercie le président de mon groupe, M. Roger-Gérard Schwartzenberg, qui a bien voulu plaider en faveur de cette proposition de loi. Il ne l'a pas fait par amitié, il l'a fait parce que, député du Val-de-Marne et élu municipal, il pense comme moi qu'il est nécessaire que les choses évoluent dans l'agglomération parisienne.

Je voudrais dire à Mme de Panafieu et à M. Birsinger que si aujourd'hui les élus peuvent avoir le sentiment qu'ils sont responsables - et ils le sont en effet devant leurs électrices et leurs électeurs -, dans les faits, au quotidien, je ne suis pas certain qu'ils aient réellement le pouvoir d'agir. Je suis même convaincu que, dans le cadre strictement communal, nous sommes ficelés, en Ilede-France et plus encore dans l'agglomération parisienne, ficelés de toutes parts. A cet égard, certains propos m'ont un peu désarçonné. Ainsi, il a été dit qu'il était possib le d'agir au niveau du SYCTOM et autres syndicats intercommunaux. Mais, et ne voyez aucune malveillance dans mon propos, c'est là que l'élu est franchement dépossédé, c'est là que la transparence n'existe pas, c'est là qu'il y a des difficultés et que les choses se déroulent en petit comité. Les choses se passent dans un cadre si restreint que les décisions ne sont pas vraiment démocratiques, même si, formellement, toutes les règles sont parfaitement respectées. Donc, des choses ont été dites qui ne sont pas vraies, qui ne sont pas justes.

Quant à la coopération intercommunale, bien sûr que je connais le projet de loi de Jean-Pierre Chevènement.

Et c'est une bonne chose pour la France, j'en suis convaincu. Mais pour l'agglomération parisienne, permettez-moi de vous dire que cela ne changera pas grandchose. Car ou bien ce seront des communes pauvres qui coopéreront entre elles - et deux mariés pauvres n'ont jamais fait une noce riche -, ou bien, ce qui est vraisemblable, il ne se passera rien. Et je dis à notre collègue Plagnol - sans vouloir agresser directement le maire de Paris...

M. Jean Tiberi.

Merci !

M. Georges Sarre.

... sans vouloir l'agresser gratuitement (Sourires) - que toutes les communes du Val-deMarne qui incluent le bois de Vincennes pourront s'intégrer dans toutes les structures que vous voudrez pour dialoguer avec la Ville de Paris, le problème ne sera pas véritablement abordé au fond tant qu'une même structure ne rassemblera pas tout le monde.

Le diagnostic que l'on doit faire, pour être tout à fait objectif, c'est qu'aujourd'hui, en Ile-de-France et dans l'agglomération parisienne, cela ne va pas. Si tel est bien le cas, essayons donc de voir comment faire pour sortir de cette situation.

A l'intérieur de la région Ile-de-France, il y a l'agglomération parisienne. Et croyez-moi, c'est suffisamment large ! Cela va jusqu'à Antony, par exemple ! C'est une mégapole, dans laquelle vit un Français sur six. Outre Paris, elle comprend les départements limitrophes des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis et du Val-deMarne.

Paradoxalement, malgré des atouts exceptionnels - une région chargée d'histoire et une capitale, Paris, la plus belle ville du monde -, la majorité de la population vit mal en agglomération parisienne. Il faut donc agir. Et c'est pour ne pas être un élu Ponce Pilate que j'ai déposé cette proposition de loi. C'est le sens de cette initiative.

L'agglomération parisienne est aujourd'hui un pôle économique important à l'échelle européenne et même mondiale, notamment pour l'accueil des entreprises étrangères, mais elle est soumise à une très rude concurrence et doit donc maximiser ses atouts. Or, il est aujourd'hui urgent de juguler les problèmes de croissance et d'équilibre qui affectent cette conurbation.

En premier lieu, la pollution atmosphérique, qui est devenue un danger pour la santé publique. Bien sûr, à la limite, il faudrait, si l'on veut complètement s'attaquer au problème, aller jusqu'aux frontières du pays ! Mais dans


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cette logique, il faudrait dépasser les frontières de la France pour aller jusqu'à celles de l'Europe - ce qui donnerait déjà matière à débattre - et plus loin encore !

M. Laurent Dominati.

C'est la planète qui doit se réunir !

Mme Nicole Bricq.

De Vancouver à Vladivostok !

M. Georges Sarre.

C'est pourquoi j'ai appelé tout à l'heure à un sommet de Kyoto ! (Sourires.)

Soyons sérieux, il est possible d'agir au niveau de l'agglomération parisienne. Et je signale que je dépose une proposition de loi tendant à ce que le STP ne soit plus seul compétent en matière de transports. La présence en son sein des élus du conseil régional d'Ile-de-France est bien légitime, c'est une avancée, mais il faut aller plus loin.

M. Laurent Dominati et M. Henri Plagnol.

Très bien !

M. Georges Sarre.

Car vous n'empêcherez jamais que la SNCF et la RATP travaillent chacune dans son coin.

S ans une instance de coordination et de décision commune, il n'y aura pas de réels progrès pour la population parisienne.

La conséquence de cette situation, c'est que l'agglomération perd de son attractivité pour les entreprises. Beaucoup d'entre elles vont ailleurs.

D'autre part, dans une conurbation où tout n'est pas fait pour favoriser l'accès à la citoyenneté, l'esprit civique risque d'être supplanté par le communautarisme et le repli sur eux-mêmes de certains quartiers. Ce serait un mauvais coup contre l'intégration, ce serait l'américanisation d'une partie de l'agglomération parisienne ; non pas l'américanisation style Californie ou Silicon Valley, mais plutôt la communautarisation style Harlem. Et c'est bien cela qui est déjà en train de se produire dans de nombreux quartiers de l'agglomération parisienne. Alors, oui ou non, l'intégration est-elle autre chose qu'un slogan ? V eut-on s'y attaquer et prendre les mesures qui s'imposent ?

M. Serge Blisko.

Très bien !

M. Georges Sarre.

Il est en effet évident que l'une des conséquences du développement désordonné de cette agglomération est l'apparition de zones de banlieue où l'Etat de droit n'est plus respecté, où les valeurs républicaines ont volé en éclats, où la nation et la citoyenneté ne sont plus connues. Il n'est pas admissible que s'y installe un climat susceptible, demain, de devenir comparable à celui des villes américaines, un climat de violence qui se nourrit de la désagrégation du tissu social et du chômage.

Pourquoi cette situation ? Parce que le développement de l'agglomération n'a pas été pensé en fonction de l'évolution de la société française, parce qu'en région parisienne quelques problèmes très concrets rendent difficile l'intégration des jeunes de banlieue, et en particulier celle des jeunes issus de l'immigration, dont le Gouvernement a fait à juste titre une des ses priorités.

Il faut par exemple développer encore les transports collectifs entre communes de banlieue, mais aussi entre celles-ci et Paris, pour aller à l'école, au travail, pour sortir le soir et rentrer chez soi. Pour reprendre ce que disait avec raison le rapporteur, M. Jean-Pierre Michel, j'invite le maire de Paris, ici présent, à faire comme moi. Monsieur Tiberi, un soir, en rentrant chez vous, après une sortie entre amis, passez donc dans le secteur du Châtelet :...

M. Laurent Dominati.

Bonne idée !

M. Georges Sarre.

... boulevard de Sébastopol et dans les rues adjacentes, vous verrez des centaines de jeunes.

Pourquoi sont-ils là ? Parce qu'ils ne peuvent pas rentrer chez eux : il n'y a pas de transports en commun, et tout le monde ne peut pas se payer un taxi, surtout à dix-sept, dix-huit ou vingt ans. Alors, ils sont là et ils traînent.

M. Henri Plagnol.

Absolument.

M. Georges Sarre.

Ils traînent jusqu'à six heures du matin, jusqu'à ce que les portes du métro ouvrent. Et lorsque les portes du métro ouvrent, s'ils ont un peu bu, s'ils sont fatigués, s'ils sont excités, s'ils sont en bande, vous ne serez pas surpris que des sièges soient lacérés, qu'il y ait du cassage et du saccage. Il faut prendre ces choses en considération et, hélas, on ne le fait pas toujours.

M. Henri Plagnol.

Très juste !

M. Georges Sarre.

Il est possible de changer cela, mais seulement si les institutions qui définissent l'avenir de l'agglomération sont adaptées aux nouvelles réalités, et donc fort différentes de celles qui prévalaient pendant les Trente Glorieuses, lorsque fut dessinée la carte administrative actuelle. A cet effet, il faut enfin créer une structure de coopération entre Paris et les villes des départements de la première couronne.

Le projet de loi relatif à l'intercommunalité permet, en région parisienne comme ailleurs, des regroupements de c ommunes. Mais ceux-ci auront un périmètre, des compétences sectorielles et des moyens financiers limités, alors qu'il est temps de mettre fin aux égoïsmes locaux pour penser en commun l'avenir de l'agglomération.

Assurer un développement plus équilibré et plus humain de l'agglomération parisienne, c'est garantir l'égalité des citoyens devant les services publics, notamment dans les quartiers en difficulté, particulièrement ceux dont l'enclavement est aujourd'hui important faute de transports collectifs et d'équipements de proximité suffisants, c'est favoriser l'intégration sociale et économique de jeunes qui n'ont trop souvent comme seul horizon que leur cité et leur ville, c'est accélérer leur mobilité au sein d'une agglomération qui aura des projets de développement à l'échelon supracommunal.

Créer une instance élue qui gère ce développement, c'est favoriser l'émergence d'une véritable identité de l'agglomération et faire de ses habitants des citoyens qui exprimeront leur choix par le vote, puisque le Haut Conseil sera élu au suffrage universel direct, condition sine qua non de sa légitimité.

Paris, comme les communes de banlieue, gagnera à cette réforme.

La capitale, parce qu'elle ne peut ignorer ce qui se passe au-delà du périphérique. Il aurait été utile, par exemple, qu'une coopération intercommunale se soit instaurée entre Paris, Ivry et Charenton lors de la conception de la ZAC Paris rive gauche. De même, il est indispensable de mettre en place une politique de lutte contre la pollution, de maîtriser les déplacements automobiles et que soit pensée en commun entre la Ville de Paris et sa périphérie une politique des transports. D'autres projets d'aménagement devront, demain, être communs à Paris et aux communes voisines.

Mais les villes de banlieue trouveront elles aussi avantage à la création du Haut Conseil. Jusqu'ici, elles ne pouvaient engager qu'un partenariat bilatéral avec Paris et ne le faisaient pas parce que le rapport de force était inégal, et le demeure, bien entendu.


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Avec la création de cette instance dans laquelle toutes les villes seront représentées, le dialogue devient multilatéral et le respect des prérogatives des communes est garanti.

En résumé, mes chers collègues, et pour conclure, le Haut Conseil sera un lieu de débats politiques et un outil de la démocratie locale.

La croissance légitime, naturelle de l'agglomération parisienne va se poursuivre. Il faut l'accompagner en remodelant une carte administrative qui n'est plus adaptée. En effet, il faut que l'Etat ait un interlocuteur fort dans l'agglomération parisienne pour que de nouvelles solidarités entre les communes voient le jour. Ce sera le Haut Conseil.

Un débat sur l'avenir institutionnel de l'agglomération est indispensable. Je pense que cette proposition permet une avancée intellectuelle, et même, j'ose le croire, politique.

Mes chers collègues, mon seul objectif est que le débat permette de traiter correctement, et au fond, de questions extraordinairement lourdes. Tel est le sens de ma proposition de loi.

Je ne vais pas faire plaisir à tout le monde en disant même si je suis très respectueux et très soucieux des libertés communales - que, aujourd'hui, chaque maire vit dans son pré carré, qu'il a mécaniquement un horizon borné, limité : sa commune ! Peu importe, ce qui se passe à côté ! Peu importe ce que nous pourrions faire ensemble ! Ce qui compte c'est que moi, maire de telle commune, je puisse dire à mes électeurs que j'ai réalisé ceci ou cela ! Eh bien non ! Je suis d'accord avec vous : parler d'identité des élus en région parisienne, notamment au niveau des conseils généraux, ce n'est pas voir les choses telles qu'elles sont.

Et vous avez raison de dire que tout le monde ne vous connaît pas en tant que conseiller général. Comment pourrait-il en être autrement ? Quant à prétendre que ma proposition brouillerait la visibilité, c'est un discours d'aveugle pour aveugles !

M. Henri Plagnol.

Très bien !

M. Georges Sarre.

La politique, au sens noble du terme, c'est se préoccuper de l'intérêt général. C'est ce que j'ai voulu faire en déposant ce texte pour sensibiliser la représentation nationale aux difficultés de l'agglomération parisienne. Car, quoi qu'on en pense, quoi qu'on en dise, la région parisienne, l'agglomération parisienne et Paris, ce n'est pas comme ailleurs.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Très bien !

M. le président.

La parole est à Mme Nicole Catala.

Mme Nicole Catala.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, permettez-moi tout d'abord de saluer la créativité de M. Sarre, notre collègue, dans cet hémicycle, mais aussi au Conseil de Paris. S'intéressant au fonctionnement de la ville de Paris, il montre, sur ce thème, une grande imagination.

En effet, ce matin, il nous invite à débattre d'une proposition de loi qui crée non pas seulement un Haut Conseil, mais une véritable collectivité territoriale nouvelle, une collectivité tout à fait inédite, une sorte d'OVNI dans le ciel des collectivités territoriales.

Cette collectivité d'un type nouveau serait une struct ure interdépartementale comprenant au départ puisque, semble-t-il, la voie reste ouverte à une extension de son champ géographique - Paris et les départements limitrophes, les Hauts-de-Seine, la Seine-Saint-Denis et le Val-de-Marne. On a ainsi l'impression de revenir à l'ancien département de la Seine.

Mais il est possible de porter un autre regard sur cette proposition. En réalité, ce que M. Sarre nous propose et c'est étonnant de la part d'un élu parisien - c'est de prélever un montant non négligeable du budget de la ville et du département de Paris au bénéfice des populations extérieures.

M. Jean Tiberi et M. Laurent Dominati.

C'est vrai !

Mme Nicole Catala.

Dans son domaine propre d'attribution - les transports, l'environnement, l'eau - ce Haut Conseil se substituerait de plein droit aux collectivités locales existantes dans une partie de leurs compétences, m ais il pourrait en outre recevoir délégation des c ommunes membres en matière d'aménagement de l'espace, d'habitat, d'aide sociale et peut-être même bien davantage, puisque la voie est ouverte à une extension considérable de son champ d'action.

Cette proposition de loi me semble souffrir d'un manque de cohérence et procéder d'un mauvais diagnostic, sans préjudice d'autres critiques.

Vous même, monsieur Sarre, et vos amis politiques, avez déposé des propositions de loi tendant à accorder plus de pouvoirs aux mairies d'arrondissement, au motif qu'il serait souhaitable que les Parisiens bénéficient d'une plus grande démocratie de proximité et de plus de solidarité locale. Avec de telles propositions, vous feriez courir le risque aux Parisiens de connaître des traitements différents selon les arrondissements, pour ce qui concerne les équipements locaux ou les activités culturelles ou sportives. Si l'on donne plus de pouvoir aux mairies d'arrondissement, il en découlera, c'est évident, des différences entre les arrondissements.

Or, l'un des motifs que vous avancez pour justifier la proposition de loi d'aujourd'hui, c'est précisément qu'il existe des disparités de traitement entre Paris et la petite couronne. Vous proposez donc d'introduire à l'échelon inférieur des disparités que vous critiquez lorsque vous les constatez à un échelon supérieur, celui du périmètre de cet hypothétique Haut Conseil de l'agglomération parisienne. Où est la logique ? Sans doute est-ce une marque de « créativité », mais je ne peux pas vous suivre sur ce terrain ! Votre proposition de loi procède, je le disais, d'un mauvais diagnostic, ou si l'on préfère, elle se trompe de cible. Pour justifier la création de cette nouvelle collectivité territoriale, vous relevez, en effet, des dysfonctionnements dans le domaine des transports, de l'accès au logement ou de l'environnement. Ces difficultés, dites-vous, seraient le résultat de l'absence de politique de coopération et de planification communes entre villes et départements de l'aire urbaine parisienne. De ces difficultés, vous nous l'avez redit tout à l'heure, résulteraient des inégalités entre les espaces urbains de la région en matière de ressources fiscales, de potentiel d'accueil des entreprises, de composition du parc de logements et de desserte en transports, de sorte que les habitants de la région se trouveraient, selon leur lieu de résidence, dans des situations inégalitaires. Vous dressez d'ailleurs un constat assez sombre de la situation.

Mais si de tels dysfonctionnements existent, ne sont-ils pas dus principalement aux défaillances de l'Etat dans la m ise en oeuvre des politiques publiques qui lui incombent ? C'est à l'Etat d'assurer l'égalité entre les territoires, les départements, les collectivités locales ! C'est à l'Etat de mener une politique efficace en matière de


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sécurité ! C'est à l'Etat de faire en sorte que les transports soient bien organisés dans le cadre de l'Ile-de-France, y compris dans le cadre de Paris et de la petite couronne ! Alors, c'est à l'Etat, monsieur le député, c'est au Gouvernement de M. Jospin qu'il faut vous adresser si vous constatez des inégalités qui vous choquent ! Ce n'est pas en créant une superstructure inédite que vous réglerez ces problèmes.

Je souligne au passage qu'il existe déjà des instances de coopération intercommunale qui règlent d'une manière relativement satisfaisante les principaux problèmes des habitants de Paris et de la petite couronne, qu'il s'agisse du SIAAP pour l'eau, du SYCTOM pour le traitement des ordures ménagères ou encore du STP pour les transports. Nous ne partons donc pas de zéro.

Je le répète, s'il y a des dysfonctionnements en dépit de cette coopération intercommunale, c'est vers le Gouvernement qu'il faut se tourner.

En réalité, ce que veut M. Sarre, c'est faire supporter par les Parisiens les frais de l'amélioration des conditions de vie des habitants des départements limitrophes, alors que Paris donne déjà beaucoup au titre de la solidarité.

Mme Nicole Bricq.

Ça, on peut en discuter !

Mme Nicole Catala.

Il ne faut pas oublier que Paris a versé 480 millions de francs en 1998 et va verser, en 1999, 490 millions de francs au titre de la solidarité urbaine. Il contribue ainsi à plus de 70 % à l'alimentation du fonds de solidarité de la région Ile-deFrance. Ce ne sont tout de même pas des chiffres négligeables ! Vous proposez, mon cher collègue, de transférer au bénéfice de ce Haut Conseil la taxe professionnelle de Paris, soit 6 milliards de francs. Cette somme, il faudra bien que les Parisiens la compensent par des contributions nouvelles.

M. Georges Sarre.

Me permettez-vous de vous interrompre, madame Catala ?

Mme Nicole Catala.

Volontiers, à condition que cette interruption soit déduite de mon temps de parole.

M. le président.

Certainement, madame ! La parole est à M. Georges Sarre, avec l'autorisation de Mme Catala.

M. Georges Sarre.

Si je souhaite cette taxe professionnelle unique, c'est pour qu'il n'y ait plus de concurrence. Vous dites, madame, que cela coûte cher aux Parisiens. Mais quand nous nous sommes retrouvés avec un marché en panne, il y a eu retournement de la situation dans le département des Hauts-de-Seine et dans les autres départements de la région parisienne. A Paris même, nous avions des stocks de bureaux - et nous en avons encore dont nous ne savions que faire. Est-ce bien de garder ainsi pendant des années des milliers de mètres carrés vides de bureaux équipés de façon moderne ? Ne serait-il pas plus intelligent de mettre un terme à cette concurrence ? Pourquoi me servir, ma chère collègue, l'argument selon lequel ça va coûter de l'argent aux Parisiens ? Je ne suis pas en train de mener la bataille des municipales à Paris ! Je cherche comment résorber la misère et les inégalités en agglomération parisienne.

Mme Nicole Catala.

Monsieur Sarre, vous n'êtes pas convaincant. Vous savez bien que chaque collectivité locale - et ce n'est pas vrai seulement pour Paris - est libre d'organiser le développement de tel ou tel secteur.

M. Laurent Dominati.

Pour les bureaux, c'est l'Etat !

Mme Nicole Catala.

En effet ! En tout cas, monsieur Sarre, vous exprimez un point de vue extraordinairement autoritaire quant aux compétences des collectivités locales. Vous voulez les mettre sous tutelle.

M. Georges Sarre.

Vous préférez le gaspillage ?

Mme Nicole Catala.

Pas du tout ! Nous sommes engagés dans des opérations de reconversion de bureaux, vous le savez bien, mais elles prennent du temps.

Avec votre proposition, les Parisiens, mais aussi les habitants des départements limitrophes seraient amenés à supporter, en plus de la compensation de la perte de recettes, les frais de fonctionnement d'une institution de 251 personnes, frais qui ne seraient pas négligeables.

Outre ces critiques - car je pense que vous ne nous emmenez pas sur une piste raisonnable -, je voudrais faire une observation d'une autre nature.

Avec ce texte, vous portez atteinte, à mon avis, au principe constitutionnel de libre administration des collectivités locales. L'article 10 de votre proposition prévoit que le Haut Conseil pourra étendre ses compétences audelà de celles qu'elle lui fixe expressément, avec l'accord d'une majorité qualifiée des conseils municipaux concernés, ce qui conduira à des abandons forcés de compétences. Le Conseil constitutionnel ne s'est pas prononcé, mais, indubitablement, c'est en contradiction avec le principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales. Si votre proposition de loi n'est pas retenue, nous n'aurons pas l'occasion de saisir le Conseil constitutionnel. En revanche, je préconiserais de le faire si elle venait à être adoptée, car il y a là un vrai grief d'inconstitutionnalité.

De surcroît, en proposant d'inclure, le cas échéant, dans le périmètre de ce Haut Conseil, des communes du département de l'Essonne ou du Val-d'Oise si elles le souhaitaient, votre proposition conduirait à ce qu'il y ait dans ces départements - ou d'autres - deux catégories de communes : celles qui seraient rattachées au Haut Conseil et bénéficieraient donc de la manne que représentera la taxe professionnelle et les autres communes - du même département - qui n'en bénéficieraient pas.

Nous aurions donc, au sein de la région Ile-de-France, des départements inclus dans le périmètre du Haut Conseil et d'autres non, qui connaîtraient donc des régimes différents et, le cas échéant, au sein d'un même département, des communes qui seraient soumises aussi à des régimes juridiques différents.

Vous nous présentez là une construction extrêmement sophistiquée mais juridiquement incorrecte. Prendre le risque de créer des collectivités locales à statut inégal au sein d'un même ensemble régional n'est pas une perspective acceptable. C'est pourquoi nous repousserons votre proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la Démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Serge Blisko.

M. Serge Blisko.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la proposition de loi de M. Sarre a le grand mérite de poser les problèmes dont les élus d'Ile-de-France ont pris conscience depuis longtemps. Je tiens à le remercier de nous permettre d'ouvrir le débat sur un sujet complexe.

Le rapport de M. Jean-Pierre Michel, présente fort bien un certain nombre de ces problèmes.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 29 AVRIL 1999

L'isolement de la capitale par rapport aux communes de banlieue, de la petite et de la grande couronne est le fruit de notre histoire, on l'a rappelé ce matin, de même q ue la répartition inégalitaire des richesses entre communes et départements, mais celle-ci est surtout la conséquence de choix politiques, de choix d'Etat puis de choix des élus de ces communes et départements de la petite et de la grande couronne. Les plus chanceux d'entre eux les ont attirées à eux en laissant à d'autres, en particulier les départements de la Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, les difficultés.

Il existe un réel manque de cohérence dans la politique urbaine. Les exemples ne manquent pas, ils ont été évoqués et ils nous viennent tous à l'esprit.

Mais le plus grave, qui est apparu dans les vingt dernières années, c'est le cloisonnement social qui mène inexorablement à l'apparition de ghettos. Tous ces problèmes attendent une réponse, en urgence. Mais, au vu de la proposition de loi qui nous est présentée, je regrette de vous le dire, monsieur Sarre, j'ai bien peur que nous ayons encore à attendre.

En effet, si nous sommes en total accord avec votre diagnostic, nous ne pouvons l'être avec la thérapeutique que vous nous proposez.

Votre démarche, d'abord, appelle une remarque : comment imaginer créer un nouvel échelon de collectivités territoriales - et c'est complexe - sans chercher au préalable l'assentiment des élus régionaux, généraux, municipaux, qui sont tous concernés, et au premier chef ceux des trois départements que vous avez cités ? Une réforme d'une telle ampleur aurait mérité une vaste consultation de tous les élus. Elle aurait dû être le fruit d'un travail collectif et concerté. Tel n'a pas été le cas, et je le regrette vivement.

Sur le fond, vous nous proposez la création d'un Haut Conseil de l'agglomération parisienne, agglomération que vous limitez - même si vous en prévoyez l'éventuelle extension - à Paris et aux trois départements qui constituaient l'ancien département de la Seine, supprimé il y a plus de trente ans.

Pour ma part, je pense que la définition de l'agglomération parisienne est à rechercher ensemble et que, en tout cas, elle ne peut pas être celle-là.

Les problèmes que rencontrent, aujourd'hui, les habitants et les élus des Yvelines, de Seine-et-Marne, du Vald'Oise, de l'Essonne sont, à l'évidence, ceux d'une même agglomération. Il y a là une continuité. Beaucoup de ces personnes travaillent à Paris, de moins en moins, certes, mais elles traversent Paris, ce qui crée un vrai problème puisque leurs déplacements prennent jusqu'à une heure par jour. Elles sont par conséquent complètement impliquées dans les problèmes de la capitale et des départements limitrophes.

La grande couronne n'est que l'extension, après guerre, du phénomène de banlieue et de petite couronne amorcé au

XIXe siècle et au début du XXe

Tout simplement, les problèmes se sont déplacés plus loin. S'arrêter au 94, alors que, bien évidemment, le phénomène se prolonge dans le 91, c'est opérer une distinction un peu compliquée.

Je souhaite que nous nous interrogions plus sur ce qu'on appelle l'agglomération parisienne. Certes, il y a des définitions politiques, des définitions administratives, mais il y a aussi une définition prenant en compte le vécu et la vie quotidienne des habitants.

En ce qui concerne la création d'un Haut Conseil, j'avoue que je ne suis pas enthousiaste. Je ne suis pas favorable à la multiplication des superstructures et à l'ajout d'échelons supplémentaires. Cela ne participe pas obligatoirement à l'efficacité de la démocratie.

On propose d'ajouter 251 nouveaux conseillers aux quelques milliers d'élus du conseil régional, des 8 conseils généraux, des 1 280 communes et du Conseil de Paris, lequel a déjà un statut très particulier. Je n'ai pas le sentiment que cette multiplication du nombre des élus permettrait aux Franciliens d'avoir une meilleure lisibilité de leurs institutions et une meilleure connaissance de leurs représentants : M. Plagnol ne serait toujours pas mieux connu et il en irait de même pour celui qui serait élu au Haut Conseil.

Selon une vieille plaisanterie, chaque fois qu'il y a un problème en France, on crée une commission d'étude.

J'ai l'impression que pour régler les gros problèmes que connaît l'Ile-de-France, on propose de faire de même en voulant créer un échelon supplémentaire d'agglomération.

A mon avis, ce n'est pas la bonne réponse à apporter.

Je crois, en effet, que les institutions dont nous disposons, tant à Paris qu'en Ile-de-France, sont suffisantes pour résoudre le plus grand nombre des problèmes qui ont été évoqués, même si les pratiques doivent être différentes et les compétences réparties autrement. Et nous souhaitons surtout que ceux qui doivent décider de la politique régionale jouent pleinement leur rôle.

Il y a d'abord le dialogue entre le conseil régional d'Ile-de-France, les collectivités territoriales et l'Etat.

Ainsi, le dernier SDAURIF a bien été le fruit d'un dialogue de plusieurs années entre le préfet d'Ile-de-France et les conseils généraux, même s'il a été repoussé dans l es départements pour des raisons politiciennes.

Les contrats de plan Etat-région, qui sont d'actualité, sont un autre élément.

De même, les lois de péréquation fiscale doivent permettre de trouver un plus juste équilibre entre les collectivités qui sont riches et celles qui sont pauvres. C'est une voie dans laquelle le Gouvernement s'est bien engagé depuis plusieurs années. C'est de cette façon que l'on peut lutter contre les égoïsmes locaux. Il ne faut pas, monsieur Dominati, céder à la loi du marché et du laisser-faire. Nous devons rééquilibrer par la fiscalité les inégalités résultant de la loi du marché.

M. Laurent Dominati.

C'est quoi la loi du marché !

M. Serge Blisko.

Il faut corriger les égoïsmes locaux. Il en va de la survie de notre région et de la cohésion sociale.

M. Laurent Dominati.

Il n'y a pas de loi du marché à Paris !

M. Serge Blisko.

L'intercommunalité, dont nous avons parlé ici-même il y a quelques semaines, et l'interdépartementalité représentent une véritable chance pour les collectivités locales et le moyen de parvenir à une meilleure cohésion.

Les outils existent et rendent de réels services, mais ils méritent d'être améliorés, en particulier le SIAAP et le SYCTOM, dont le fonctionnement et la transparence ne sont pas satisfaisants. Pour autant, cela prouve que quand les communes veulent travailler ensemble, elles disposent pour ce faire de structures adéquates, et ce depuis longtemps.

J'estime que la présente proposition de loi attaque un peu trop le conseil régional d'Ile-de-France. Certes, il lui manque une majorité stable, et c'est ce qui peut expliquer


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un certain nombre des problèmes qui se posent aujourd'hui, ainsi que la paralysie qui est la sienne pour conduire une grande politique régionale. Toutefois, il dispose d'outils qui, à plusieurs reprises, ont fait preuve de leur efficacité - je pense à l'IAURIF, qui travaille très bien, ainsi qu'à l'agence régionale des espaces verts - et qui doivent permettre de parvenir à une plus grande cohérence en matière de politique urbaine et de défense de l'environnement.

Mme Françoise de Panafieu.

Bien sûr !

M. Serge Blisko.

Par ailleurs, et nous l'avons tous dit, un certain nombre d'organismes, comme le STP, ont aussi une mission à remplir en matière de décloisonnement des agglomérations. A cet égard, monsieur le ministre, il faut que la loi mette un terme à cette situation grotesque et ubuesque - tout le monde l'a relevé qui fait que la région, principal bailleur de fonds, ne participe pas au STP.

Je plaide aussi pour la réanimation de l'agence foncière technique de la région parisienne, l'AFTRP, et pour son renforcement.

Je comprends ce que M. Sarre veut faire, en particulier en ce qui concerne Paris. Nous nous retrouvons sur le diagnostic : il faut faire vivre la démocratie locale à Paris, et donc renforcer les liens de proximité entre les maires, les conseils d'arrondissement et la population. Sur ce p oint, je suis totalement d'accord avec M. Sarre.

M. Dominati n'a, de ce point de vue, pas tort non plus.

Le débat est ouvert.

Par contre, je ne suis pas d'accord avec M. Dominati quand il évoque la différence de taille des arrondissements. Après tout, il y a des petites communes - certaines n'ont que 200 habitants et vivent très mal - et des grandes communes. Or il n'y a pas d'arrondissement m icroscopique, le rapport est de un à quinze : 18 000 habitants contre 230 000. Le maire d'un arrondissement de 20 000 habitants et l'équipe qui l'entoure ont des prérogatives suffisantes pour conduire une politique de qualité.

M. Laurent Dominati.

On peut en parler !

M. Serge Blisko.

Nous lançons un débat sur la refonte de la loi PML du 31 décembre 1982. En effet, après seize ans d'application, nous nous sommes rendu compte que la pratique n'a pas toujours correspondu aux attentes des élus.

M. Jean Tiberi.

Vous avez mis du temps pour vous en apercevoir !

M. Serge Blisko.

Monsieur Tiberi, la pratique de la ville de Paris est beaucoup plus centralisée et davantage jacobine que celle des villes de Lyon et de Marseille !

M. Jean Tiberi.

C'est inexact ! Vous êtes mal informé !

M. Serge Blisko.

Pourtant, les élus de Lyon et de Marseille, de quelque bord qu'ils soient, sont très surpris quand on leur explique comment les choses se passent dans les arrondissements parisiens.

M. Jean Tiberi.

Il s'y passe exactement la même chose que dans les arrondissements lyonnais ou marseillais !

M. Serge Blisko.

Le débat a été lancé, notamment par M. Dominati, et il doit aller jusqu'à son terme. Il faut dire clairement ce qu'il convient de faire pour insuffler un peu de démocratie dans la vie locale à Paris.

Je tiens à vous rassurer immédiatement, monsieur le maire de Paris, il n'est pas question de toucher à l'unité de la capitale,...

M. Jean Tiberi.

Merci !

M. Serge Blisko.

... qui doit rester la capitale que nous aimons tous, la plus belle ville du monde, comme disait Georges Sarre.

Il est très important que les deux pôles subsistent.

Tous les Parisiens le souhaitent, car cela correspond à un besoin à la fois politique et humain.

Des structures existent, monsieur Sarre, et il faut les faire vivre. Nous devons en avoir la volonté politique.

Ces assemblées territoriales - aidées par l'Etat quand elles ne répondent pas aux espérances que les citoyens de l'Ilede-France ont placées en elles - doivent pouvoir fonctionner et travailler. Et c'est de la sorte que nous pourrons trouver des solutions aux problèmes de l'agglomération parisienne.

Je crois qu'il n'est pas besoin de créer une nouvelle structure. Ce que nous devons faire, c'est renforcer les outils que nous avons déjà à notre disposition et les adapter.

Je vous remercie, monsieur Sarre, d'avoir déposé la présente proposition de loi, car elle a le mérite d'ouvrir un débat qui me tient à coeur. Je souhaite que ce débat se poursuive, même si nous ne retenons pas l'idée de créer un Haut Conseil de l'agglomération parisienne.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à Mme Nicole Bricq.

Mme Nicole Bricq.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, Georges Sarre défend aujourd'hui une idée qui lui est chère, et il faut reconnaître qu'il fait preuve de constance en la matière depuis de nombreuses années.

Cela dit, je ne participe pas de l'éloge commun qui a été fait du diagnostic et, a fortiori, je pense que la solution proposée par notre collègue n'est pas adaptée pour corriger les dysfonctionnements analysés dans le rapport : essentiellement l'absence d'intercommunalité et le renforcement de la ségrégation sociale et spatiale.

S'arrêter aux frontières de la petite couronne procède d'une vision courte de l'espace et du temps. Pour ma part, je porterai la parole d'une élue de la grande couronne et précisément du seul département d'Ile-de-France qui soit encore en expansion démographique. En effet, globalement, l'Ile-de-France perd des habitants. Nous savons bien que, par vagues successives, le coeur de l'agglomération a rejeté de plus en plus loin ses couches populaires, ses couches moyennes, bref ses « couches productives » selon un langage marxiste que je n'hésite pas à utiliser. Ce qui a entraîné un accroissement des déplacements qui paraît sans limite et posé en conséquence des problèmes de transport et de pollution urbaine.

Ces problèmes sont aujourd'hui concentrés dans la grande banlieue. Au demeurant, ils se posent moins entre le centre et la périphérie que de banlieue à banlieue. C'est pourquoi les deux compétences qui relèveraient obligatoirement de la nouvelle intercommunalité - l'environnement et les transports - ne peuvent s'apprécier qu'au niveau de la région. C'est du reste l'objet principal de la négociation du XIIe contrat de Plan et des plans de déplacements urbains, notamment celui qu'a présenté récemment le préfet Duport il n'y a guère.

J'ai participé de bout en bout - et je crois avoir été la seule élue francilienne à le faire - au débat sur le texte relatif à l'intercommunalité. Et quand est arrivé en discussion le fameux article 57 qui proposait de renforcer la p éréquation entre les communes « riches » et les communes « pauvres », j'ai dit que le niveau pertinent de


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 29 AVRIL 1999

cette péréquation était, à mon avis, celui de la région tout entière. Je le répète aujourd'hui. Avec ses 145 quartiers sensibles - ce qui est un record en France - qui illustrent une terre de disparité, cette collectivité locale encore jeune mérite un regard neuf.

J'ajoute que la présente proposition de loi intervient dans le débat sur le texte relatif à l'intercommunalité de manière inopportune, car l'objectif essentiel de ce dernier est précisément d'accélérer l'intercommunalité en zone urbaine. Mais, et je l'ai dit au ministre de l'intérieur, même si je fais crédit au Gouvernement de sa volonté de réaliser des aires de développement pertinentes en zone urbaine, je pense que le texte sur l'intercommunalité n'est pas adapté à l'Ile-de-France - sur ce point, je suis d'accord avec M. Sarre.

A mon avis, l'échelon régional est le niveau pertinent pour apporter des solutions aux problèmes qui se posent, à condition que trois obstacles soient levés.

D'abord, la loi électorale doit être modifiée car elle ne permet pas, actuellement, de donner toute sa légitimité à l'action régionale. On sait bien la vieille méfiance traditionnelle du pouvoir central, quel qu'il soit du reste, de gauche ou de droite, vis-à-vis de cette collectivité jeune et pourtant porteuse d'avenir. Mais je crois que, à un horizon d'environ vingt ans - peut-être plus, peut-être moins -, nous verrons se dessiner un nouveau paysage administratif. Tout à l'heure, M. Plagnol a parlé des conseillers généraux et du conseil général. Je ne crois pas qu'on supprimera du jour au lendemain une collectivité qui a ses vertus, notamment en termes de proximité et d'action sociale. Mais on voit bien qu'en développant l'intercommunalité et en donnant toute sa légitimité à la région nous aurons, d'ici à vingt ans, un nouveau paysage administratif qui correspondra à la construction européenne.

M. Henri Plagnol.

Très juste !

Mme Nicole Bricq.

Ensuite, il convient de transférer des ressources de l'Etat vers la région - je pense au FARIF, le fonds d'action pour l'aménagement de la région Ile-de-France, mais aussi à des prélèvements spécifiques sur des taxes déjà existantes. Si notre région est spécifique - et elle l'est, étant donné sa grande disparité -, il faut lui donner les ressources qui conviennent.

Enfin, il convient de modifier les institutions dont le fonctionnement est aujourd'hui archaïque, comme si la décentralisation n'avait pas eu lieu. Je pense notamment au STP, dont je crois savoir qu'une réforme nous sera proposée avant la fin de l'année.

Il faut donc chercher la solution des problèmes qui se posent en franchissant une nouvelle étape de la décentralisation.

Vous évoquez dans votre rapport écrit, monsieur JeanPierre Michel, la nécessité de définir un nouvel espace de citoyenneté. Je suis d'accord, mais faisons en sorte que ce soit au niveau pertinent. Je ne suis pas la seule à penser, même si je reconnais que les esprits doivent encore évoluer à ce sujet, que ce niveau est celui de la région.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La discussion générale est close.

Vote sur le passage à la discussion des articles

M. le président.

La commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République n'ayant pas présenté de conclusions, l'Assemblée, conformément à l'article 94, alinéa 3, du règlement, est appelée à statuer sur le passage à la discussion des articles du texte initial de la proposition de loi.

Conformément aux dispositions du même article du règlement, si l'Assemblée vote contre le passage à la discussion des articles, la proposition de loi ne sera pas adoptée.

Dans les explications de vote sur le passage à la discussion des articles, la parole est à M. Jean-Marie Le Guen, pour le groupe socialiste.

M. Jean-Marie Le Guen.

Nous voterons contre le passage à la discussion des articles de la proposition de loi.

Non que les questions posées ne soient pas intéressantes.

En effet, le débat de ce matin a montré qu'il y avait matière à réflexion pour une meilleure organisation de l'agglomération parisienne. Il n'a donc pas été inutile que l'Assemblée soit saisie, même si l'initiative de notre collègue s'est assortie d'une concertation peut-être insuffisante...

Mme Françoise de Panafieu.

Ah bon, vous ne vous êtes pas concertés !

M. Jean-Marie Le Guen.

... et si son opportunité reste à vérifier sur d'autres bases. En effet, nous avons vu moins dans le débat de ce matin que dans les déclarations publiques - une attitude crispée de la droite, craignant que la gauche ne veuille s'attaquer à la capitale.

Soyons clairs, chacun sait bien que les seuls qui complotent aujourd'hui pour ou contre la capitale ne se trouvent pas dans les couloirs de l'Assemblée nationale mais plutôt dans ceux de l'Hôtel de ville ! (Exclamationss ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Je souhaite donc rassurer chacun à cet égard.

Reste que si le problème de l'agglomération est posé, celui de la gouvernance de la ville de Paris l'est aussi. Et c'est bien légitimement que plusieurs d'entre vous se sont interrogés sur la loi PML, ainsi que sur le fonctionnement de la décentralisation et de la déconcentration, sur la gestion de la capitale et, d'une façon plus générale, sur la participation démocratique dans celle-ci.

Plusieurs groupes, notamment le groupe socialiste, ont déposé des propositions de loi, et je souhaite que cette discussion puisse avoir lieu d'une façon extrêmement sereine. J'y appelle tous les groupes présents dans cet hémicycle, comme ceux du Conseil de Paris, dont j'attends qu'il accepte enfin de débattre des questions qui le concernent très directement. En effet, à chaque fois qu'il y a eu une poussée d'adrénaline dans les rangs de la majorité municipale, nous avons entendu tel ou tel évoquer la réforme de la loi PML. Souhaitons qu'enfin ce débat ait lieu, dans cette enceinte et, comme il est encore plus naturel - et sans doute préalablement - au Conseil de Paris.

Rien que pour cette raison, même si nous votons contre le passage à l'examen des articles, le débat de ce matin était utile. J'en remercie donc l'initiateur, un peu tardivement, en étant toutefois cetain qu'il y sera sensible.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste).

M. Georges Sarre.

Il est comblé !

Mme Françoise de Panafieu.

C'est un assassinat en douceur !

M. le président.

La parole est à M. Laurent Dominati, pour le groupe Démocratie libérale et Indépendants.

M. Laurent Dominati.

Il y a tout d'abord une question, un peu surprenante, que nous devons aborder au Parlement, et non pas au conseil de Paris, car c'est le Parle-


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ment qui fait la loi, y compris pour Paris. C'est que la fenêtre parlementaire est faite pour débattre des propositions de loi des différents groupes parlementaires. Et il y a une certaine déviation lorsqu'on accepte la discussion générale mais qu'on ne veut pas aller jusqu'au bout de cette discussion, c'est-à-dire examiner les articles.

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Cela est arrivé à d'autres !

M. Laurent Dominati.

Que la majorité procède ainsi à l'égard de l'opposition, on peut à la rigueur le comprendre, mais qu'elle agisse ainsi à l'égard d'un groupe de la majorité, vous admettrez que c'est plus curieux. Il est paradoxal d'entendre le représentant du groupe socialiste nous dire : « Nous voulons un débat au conseil de Paris, mais pour le débat à l'Assemblée nationale, ça suffit ! Fermez le ban, il n'y a plus rien à dire et plus rien à entendre ! » Au contraire ! Même si nous sommes en désaccord avec la proposition de M. Sarre - et pas avec certaines des idées que lui-même et ses amis développent -, nous considérons que le débat commence à peine et qu'il faudrait le poursuivre. J'ai indiqué que le groupe Démocratie libérale et Indépendants déposerait une proposition de loi tendant à réformer la loi PML, et j'ai apporté quelques précisions sur ce point. Il est vrai que la question des relations et de la répartition des compétences entre Paris, la région, les collectivités locales et l'Etat est posée. A mon sens, il est évident que l'Etat a, à Paris, une prépondérance de fait qui a conduit à des dysfonctionnements.

L'exemple cité par Georges Sarre est paradoxal : la région Ile-de-France est la seule où l'Etat dispose d'un droit d'agrément pour les bureaux. La question des relations entre les collectivités locales, c'est-à-dire les élus responsables devant les citoyens, et l'Etat est donc posée.

Monsieur Sarre, les socialistes disent qu'ils veulent le débat, mais, après vous avoir couvert de fleurs, ils refusent votre proposition de loi et refusent même la discussion des articles. Eh bien, nous, parce que nous sommes des démocrates et des libéraux, nous voulons le débat et nous voterons pour la poursuite de cette discussion. J'espère d'ailleurs que le Gouvernement tiendra sa parole d'organiser un véritable débat sur le statut de Paris. Monsieur Le Guen, il vous suffit de vous adresser au Premier ministre, dont vous êtes l'un des proches, pour demander que le Gouvernement prenne l'initiative d'une réforme de la loi, ce qui mettra fin à l'hypocrisie.

En ce qui nous concerne, nous y sommes prêts et nous vous disons : « chiche ! » (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Pour le groupe du Rassemblement pour la République, la parole est à Mme Nicole Catala.

Mme Nicole Catala.

La discussion générale, très fournie, qui vient d'avoir lieu a révélé tous les défauts de la proposition de loi de M. Sarre, les risques qu'elle recèle, son incohérence aussi. Il ne nous semble donc pas utile d'aller au-delà et d'aborder la discussion des articles. Cela aurait un sens si nous considérions que cette proposition de loi est amendable, mais telle n'est pas notre opinion.

Je suis d'ailleurs frappée que les amis de M. Sarre, à l'exception de M. Jean-Pierre Michel, qui est rapporteur, ne soient pas présents ; c'est dire que notre collègue n'a pas trouvé un large soutien dans son propre mouvement.

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Paris ne vaut pas une séance du matin ! (Sourires.)

Mme Nicole Catala.

En outre, l'hostilité du groupe socialiste montre qu'il est bien isolé.

Pour toutes ces raisons, monsieur le président, je pense que nous devons arrêter là notre discussion.

M. le président.

Pour le groupe Radical, Citoyen et Vert, la parole est à M. Georges Sarre.

M. Georges Sarre.

Décidément, jusqu'au bout, ce débat ne m'aura causé aucune déception : je dirai même que je suis ravi ! Je constate que Mme Catala vole au secours de M. Jean-Marie Le Guen. (Rires.)

Mme Nicole Bricq.

Elle est elle-même très surprise !

M. Georges Sarre.

Les amis de M. Tiberi, en général, ne procèdent pas ainsi, et la réciproque est vraie. Tout cela est donc parfaitement éclairant.

Nous avons eu un débat au fond. A part Mme Catala, tout le monde, M. Blisko, tous mes collègues du groupe Démocratie libérale et Indépendants et de l'Union pour la démocratie française, reconnaissent que le diagnostic est juste. Et Mme de Panafieu non plus n'est pas en désaccord sur ce diagnostic, même si elle ne partage pas l'objectif et la méthode.

Bref, nous constatons tous qu'il y a un malade. Est-il urgent de le soigner ? Non ! Il faut reporter cela à plus tard.

J'ai entendu des gloses sur la réforme du statut de Paris, mais ce n'était pas la question à l'ordre du jour.

Moi, je suis cohérent. J'ai déposé une proposition de loi visant à réformer la loi PML. Elle viendra à son heure, car je ne suis pas isolé, madame Catala.

Mme Nicole Catala.

Quand même !...

M. Georges Sarre.

Le groupe RCV s'est exprimé par la bouche de son président. Pensez-vous que j'allais mobiliser le ban et l'arrière-ban,...

M. Laurent Dominati.

Oui !

Mme Françoise de Panafieu.

Au moins l'arrière-ban parisien !

M. Georges Sarre.

Je suis le seul député MDC de Paris, ma chère collègue !

M. Jean-Marie Le Guen.

Vous avez quand même réussi à mobiliser Dominati !

M. Georges Sarre.

Je n'allais donc pas, disais-je, mobiliser le ban et l'arrière-ban pour constater qu'une majorité s'opposait à ce que nous passions à la discussion des articles.

Aujourd'hui, vous ne voulez pas débattre, vous ne voulez pas voter. Je le regrette profondément, parce que la situation est suffisamment grave pour que des dispositions soient prises, et le plus tôt serait le mieux.

Mme Nicole Bricq.

Mais de bonnes dispositions !

M. Georges Sarre.

Madame Bricq, qu'il y ait des désaccords, plus récents qu'anciens, d'ailleurs, tant mieux.

Cela permet en effet de voir sur quoi il est possible d'agir ensemble et sur quels points nous divergeons.

Je regrette la décision que vous allez prendre mais vous viendrez à ma proposition. Je serai patient : j'attendrai.

Monsieur Dominati, en 1975, je n'étais pas député, mais j'avais présenté avec mes collègues membres du groupe que je présidais au conseil de Paris, et auquel appartenaient Jean-Marie Le Guen ainsi que quelques autres, une proposition de loi visant à faire élire le maire de Paris au suffrage universel.

Il était urgent de décider aujourd'hui. Le problème est renvoyé à plus tard. J'espère qu'il ne sera pas trop tard, sinon les Parisiens, ceux qui vivent à Paris intra muros, pourraient bien le déplorer.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 1re SÉANCE DU 29 AVRIL 1999

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Très bien !

M. le président.

Je vais mettre aux voix le passage à la discussion des articles...

M. Laurent Dominati.

Le Gouvernement ne répond pas aux orateurs ? Le ministre n'existe pas !

Mme Catherine Tasca, présidente de la commission.

Sa parole est libre !

M. Laurent Dominati.

Je suis surpris qu'on passe directement au vote ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

S'il vous plaît, monsieur Dominati !

M. Laurent Dominati.

Le Gouvernement n'a pas répondu !

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur.

Le jour où il parlera, vous vous en mordrez les doigts !

M. le président.

Je mets aux voix le passage à la discussion des articles de la proposition de loi.

(L'assemblée décide de ne pas passer à la discussion des articles.)

M. le président.

L'assemblée ayant décidé de ne pas passer à la discussion des articles, la proposition de loi n'est pas adoptée.

3

ORDRE DU JOUR DES PROCHAINES SÉANCES

M. le président.

Cet après-midi, à quinze heures, deuxième séance publique : Suite de la discussion, après déclaration d'urgence, du projet de loi no 1419 portant création d'une couverture maladie universelle : MM. Jean-Claude Boulard et Alfred Recours, rapporteurs au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport no 1518, tomes I et II).

A vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de l'ordre du jour de la deuxième séance.

La séance est levée.

(La séance est levée à onze heures cinquante.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT