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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 11 MAI 1999

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. LAURENT FABIUS

1. Questions au Gouvernement (p. 4303).

LUTTE CONTRE LE DOPAGE (p. 4303)

M. Alain Néri, Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports.

KOSOVO (p. 4304)

MM. Bernard Roman, Lionel Jospin, Premier ministre.

CORSE (p. 4305)

MM. François Fillon, Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

CORSE (p. 4306)

MM. Jean-Luc Warsmann, Alain Richard, ministre de la défense.

CORSE (p. 4307)

MM. Hervé de Charette, Lionel Jospin, Premier ministre.

CORSE (p. 4308)

MM. Laurent Dominati, Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

KOSOVO (p. 4310)

MM. Jean-Claude Sandriers, Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes.

AVENIR DU THERMALISME (p. 4311)

MM. François Liberti, Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

KOSOVO (p. 4311)

MM. Pierre Carassus, Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes.

RETRAITES (p. 4312)

MM. Gilles Carrez, Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

PRÉSIDENCE DE M. ARTHUR PAECHT

2. Aménagement du territoire. Suite de la discussion, en nouvelle lecture, d'un projet de loi (p. 4313).

M. Philippe Duron, rapporteur de la commission de la production.

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

EXPLICATIONS DE VOTE (p. 4315)

MM. Félix Leyzour, Pierre Hellier, Yves Coussain, Serge Poignant, Patrick Rimbert, Jean-Michel Marchand.

VOTE SUR L'ENSEMBLE (p. 4319)

Adoption de l'ensemble du projet de loi.

3. Ordre du jour de la prochaine séance (p. 4319).


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 11 MAI 1999

COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. LAURENT FABIUS

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président.

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par les questions du groupe socialiste.

LUTTE CONTRE LE DOPAGE

M. le président.

La parole est à M. Alain Néri.

M. Alain Néri.

Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme la ministre de la jeunesse et des sports.

Madame la ministre, le nouveau développement des affaires de dopage ne fait que confirmer la nécessité et l'intérêt de la loi relative à la protection de la santé des sportifs et à la lutte contre le dopage, votée à l'unanimité, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, il y a quelques semaines.

Personne ne conteste que votre loi doit permettre d'éradiquer le dopage, qui est à la fois un problème de société et un problème de santé publique, et qui porte atteinte à l'éthique du sport. En effet, le dopage n'est pas circonscrit à quelques disciplines sportives ou à quelques sportifs professionnels ; il frappe à tous les niveaux, y compris chez les jeunes et les adolescents, et dans de nombreux sports.

Oui, il est urgent d'adresser un carton rouge définitif au dopage, en mettant hors d'état de nuire les pourvoyeurs, véritables trafiquants de drogue, et en mettant hors jeu les sportifs dopés, qui trichent et bafouent l'esprit même du sport ! Pour cela, il faut agir vite et, connaissant votre détermination, je vous demande de bien vouloir nous dire dans quels délais vous pensez, premièrement, rendre publics les décrets et circulaires d'application indispensables à la mise en place effective des mesures concrètes sur le terrain ; deuxièmement, mettre en place le Conseil de prévention et de lutte contre le dopage ; troisièmement, rendre opérationnels les antennes médicales et les laboratoires dans les régions, pour procéder dans de bonnes conditions à l'indispensable suivi médical des sportifs.

Enfin, quelles initiatives comptez-vous prendre pour arriver à l'harmonisation des législations dans les différents pays européens, et même mondialement ? Car n'oublions pas que la grandeur du sport, c'est d'être avant tout universel. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de la jeunesse et des sports.

Mme Marie-George Buffet, ministre de la jeunesse et des sports.

Monsieur le député, soyez certain de ma détermination à lutter contre le fléau du dopage. Si je devais éprouver des doutes, un matin en me réveillant, les chiffres qui me parviennent me convaincraient qu'il faut continuer cette lutte sans états d'âme. Nous avons reçu 15 000 appels au téléphone anonyme dopage ; près de la moitié concernent des mineurs et 74 pratiques sportives sont en cause.

Les décrets d'application de la loi ont été rédigés rapidement. Avant la fin du mois, nous réunirons le Conseil de prévention et de lutte contre le dopage pour qu'il puisse les examiner et, fin juin, tout sera bouclé, car nous avons besoin d'aller très vite. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Le suivi médical longitudinal sera assuré. La demande des fédérations est beaucoup plus importante que nous ne l'avions pensé et l'unité médicale mobile ne peut pas répondre à cette demande. C'est pourquoi, en collaboration avec M. Kouchner et le ministère de la santé, nous avons décidé d'établir un cahier des charges en vue d'agréer une série de laboratoires qui pourront assurer le suivi médical à la demande des fédérations. En septembre, le laboratoire national de Châtenay-Malabry sera lui-même prêt à assurer ce suivi avec un certain nombre d'antennes mobiles, car nous avons besoin de nous rapprocher des sportifs.

Au niveau de l'Europe, il ne suffit pas de voter à l'unanimité une résolution contre le dopage, comme cela a été fait en janvier. Il faut que les actes suivent la résolution.

M. Alain Calmat.

Très bien !

Mme la ministre de la jeunesse et des sports.

Or je dois constater que, sauf dans une minorité de pays de l'Union européenne, les décisions prises au Conseil de Vienne en décembre et la résolution votée à l'unanimité en janvier par les quinze ministres des sports des Etats membres ne sont pas encore suivies d'actes réels. Je pense que cela ne peut pas durer ainsi.

M. Maxime Gremetz.

Très bien !

Mme la ministre de la jeunesse et des sports.

C'est pourquoi j'ai décidé de remettre le sujet sur la table lors de la réunion des ministres des sports des 1er et 2 juin.

Nous avons besoin d'actions concertées de l'Union européenne pour être efficaces dans la lutte contre le dopage.

(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe socialiste.)

Je pense également que l'on ne peut pas continuer indéfiniment à attendre que les décisions prises lors de la réunion du Comité international olympique à Lausanne entrent dans les faits. Je suggère donc que les proposi-


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tions faites par l'Union européenne sur l'Agence internationale du dopage soient examinées sans délai par le Comité international olympique. Sinon, nous perdrions toute crédibilité au niveau de la lutte internationale contre le dopage.

Enfin, à l'occasion des affaires intervenues depuis la fin de la semaine dernière, une grande avancée a été réalisée

Grâce à la collaboration de plusieurs ministères - l'intérieur et les douanes, la justice, la santé, la jeunesse et les sports -, nous avons enfin pu obtenir que les sportifs ne soient plus les seuls à être inquiétés, mais que le soient également ceux qui font de l'argent en portant atteinte à leur intégrité physique et morale, c'est-à-dire les pourvoyeurs. Je souhaite que l'action soit poursuivie en ce sens. Si la prévention est est l'acte fondamental pour faire reculer le fléau du dopage, il nous faut également lutter contre les pourvoyeurs. Je me félicite que nous ayons enfin commencé à le faire après des années d'inertie.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste, du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert, et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie Française - Alliance.)

KOSOVO

M. le président.

La parole est à M. Bernard Roman.

M. Bernard Roman.

Monsieur le Premier ministre, depuis sept semaines, la communauté alliée s'efforce d'empêcher l'irréparable au Kosovo. Contrainte par la résolution froide d'un dirigeant qui n'a pas hésité à jeter des centaines de milliers de personnes sur les routes, la France a dû, avec ses alliés, gérer la tragédie, insolite en Europe, d'un peuple, le peuple kosovar, chassé dans les pires conditions de sa terre.

Sommes-nous aujourd'hui à la veille d'un tournant ? Sommes-nous à la veille d'une évolution vers la diplomatie, d'un retour au Conseil de sécurité des Nations unies ? Les opérations militaires de l'OTAN sont-elles sur le point d'atteindre leur objectif et de ramener le gouvernement yougoslave à la table de négociation ? Ces questions, nous pouvons nous les poser car, depuis quelques jours, les initiatives bienvenues se succèdent.

Elles restent cependant difficiles à cerner. Le G 8, la semaine dernière, a rendu public un communiqué qui pourrait ouvrir les portes d'un compromis. La Russie, l'Allemagne sont quotidiennement sur le pont de la diplomatie. La Finlande, très sollicitée, paraît devoir jouer un rôle important dans la définition d'une force de sécurité acceptée par tous. La Serbie a annoncé hier un retrait de forces qui reste à confirmer et à préciser. La Chine, en dépit du bombardement inexplicable et profondément choquant de son ambassade, regretté par la France et par les alliés, étudierait en ce moment même le communiqué du G 8.

P ensez-vous, monsieur le Premier ministre, que l'ensemble de ces signes puissent être interprétés comme le prélude à une nouvelle étape qui pourrait, dans les jours qui viennent, annoncer la fin des opérations militaires et l'ouverture d'un processus de paix respectueux des accords de Rambouillet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur plusieurs bancs du groupe communiste et du groupe Radial, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le Premier ministre.

M. Lionel Jospin, Premier ministre.

Monsieur le député, sommes-nous à la veille d'une nouvelle étape en ce qui concerne le conflit du Kosovo ? Je ne saurais le pronostiquer. Ce que je peux vous dire, c'est que nous y travaillons.

Par la détermination que l'Alliance continue à manifester dans les frappes contre les forces militaires et de répression serbes, par l'engagement clair que notre objectif de guerre est bien le retour des réfugiés et des déportés dans leur pays, un pays voué à la démocratie et où ils vivront en sûreté (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur divers bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert), par la volonté de ne négliger aucune piste de caractère diplomatique qui permette d'avancer l'issue de ce conflit, nous préparons ce que vous espérez un prélude.

Demain, j'aurai à nouveau l'occasion de recevoir à Matignon les présidents des groupes parlementaires de l'Assemblée nationale et du Sénat ainsi que les présidents des commissions des affaires étrangères et de la défense.

Mais, puis-je, dès aujourd'hui, à l'Assemblée, donner quelques éléments à la réprésentation nationale ? D'abord, je souhaiterais m'associer aux très profonds regrets que le Président de la République a exprimés hier, en Finlande, à l'intention des autorités chinoises, à la suite du bombardement dont l'ambassade de Chine a été victime par erreur. Un message de condoléances leur a d'ailleurs été adressé par le ministre des affaires étrangères, Hubert Védrine, au nom des autorités françaises.

J'espère très profondément que cet accident malheureux ne remettra pas en cause les progrès substantiels qui ont été réaliséss au cours des huit derniers jours dans le champ diplomatique. Durant la semaine qui s'est écoulée, les ministres des affaires étrangères des Huit, après les directeurs politiques de ces mêmes huit pays, ont pu a dopter, vous le savez, une importante déclaration commune énumérant sept principes généraux considérés comme nécessaires pour aboutir à une solution de cette crise : Cessation immédiate et vérifiable de la violence et de la répression au Kosovo ; Retrait des forces militaires, de police et paramilitaires ; Déploiement dans la province d'une présence internationale civile et de sécurité efficace, endossé et adopté par les Nations unies ; E tablissement d'une administration intérimaire au Kosovo décidé par le Conseil de sécurité des Nations unies ; L iberté et sécurité de retour au Kosovo pour l'ensemble des déportés et des réfugiés ; Processus politique pour établir un accord-cadre prévoyant une autonomie substantielle pour le Kosovo ; Approche globale du développement économique et social pour la stabilisation de la région.

H ubert Védrine est aujourd'hui à Moscou pour s'entretenir avec son homologue russe. Le 13 mai prochain, le Président de la République se rendra également dans la capitale russe pour y rencontrer son homologue, le Président Eltsine. Moi-même, les 24 et 25 mai, dans le cadre de la rencontre entre les deux premiers ministres et les deux commissions, j'aurai l'occasion d'aborder les problèmes du processus de paix, dans lequel la Russie jouera un rôle essentiel.

Les directeurs politiques des Huit sont désormais en train de travailler à l'élaboration d'un projet de résolution qui pourrait être déposé conjointement par les huit pays


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au conseil de sécurité des Nations unies, afin de fournir la base d'une issue politique à ce conflit, si les autorités serbes et M. Milosevic veulent bien accepter les bases raisonnables d'un compromis ou bien si nous les y conduisons par la force, et c'est la politique que nous menons.

Le secrétaire général des Nations unies s'est lui-même mobilisé. Il a désigné deux hauts représentants, M. Karl Bild et M. Eduard Kukan. Nous souhaitons que les travaux entrepris par la diplomatie russe se poursuivent et nous sommes prêts à lui voir jouer pleinement son rôle de partenaire.

Dans cette dynamique diplomatique - au sein de laquelle, d'ailleurs, la présence en Europe de M. Rugova, désormais libre, peut être un élément positif -, nous venons d'apprendre que les autorités serbes annonçaient un début de retrait au Kosovo. Nous avons pris connais-s ance de cette nouvelle avec attention, mais nous l'accueillons avec la plus grande prudence. D'abord, parce que, au moment où je vous parle, il n'y a nulle confirmation sur le terrain d'un réel retrait au Kosovo. Ensuite, parce que, instruits par l'expérience, nous savons que M. Milosevic n'a pas été avare de promesses qu'il n'a pas tenues ; nous nous souvenons encore du siège de Sarajevo. Enfin, parce que, en tout état de cause, il ne s'agirait que de la réalisation, si elle était mise en oeuvre, d'une seule des conditions que la communauté internationale a mises à la solution du problème du Kosovo.

Détermination dans l'action militaire, ouverture pour rechercher une issue diplomatique, tout cela n'a de sens que si on le fait en direction des hommes et des femmes kosovars chassés de leur pays, en Macédoine, en Albanie, au Monténégro et ailleurs. Je renouvelle ici l'engagement solennel que nous les reconduirons chez eux, dans des conditions dignes d'une vie véritablement humaine. Je confirme que la France reste au premier rang de l'action humanitaire pour faire face à la situation d'urgence actuelle. Je rappelle enfin, comme le ministre de la défense et le ministre des affaires étrangères ont eu l'occasion de le dire au procureur du tribunal pénal international, Mme Arbour, que ce tribunal aura le soutien résolu de la France pour que, dans l'avenir, justice soit rendue aux victimes de la tragédie et pour que ses auteurs soient châtiés.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, sur de nombreux bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert, et sur quelques bancs du groupe Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe du Rassemblement pour la République.

CORSE

M. le président.

La parole est à M. François Fillon.

M. François Fillon.

Monsieur le Premier ministre, l'affaire de l'incendie du restaurant Chez Francis (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) n'est pas un fait divers dont on pourrait attendre tranquillement (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert)...

M. le président.

Une seconde, monsieur Fillon.

M. François Fillon.

Je remarque, monsieur le président, que le groupe socialiste ne veut pas écouter cette question.

M. le président.

Mesdames, messieurs de la majorité, il faut écouter M. Fillon dans le silence de la même façon que Mmes et MM. de l'opposition écouteront la réponse dans le silence. C'est la règle démocratique dans un Parlement comme le nôtre. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Philippe Vasseur.

Cela gratte où ça fait mal !

M. le président.

Je vous en prie.

Monsieur Fillon, vous avez seul la parole et pas M. Vasseur.

M. François Fillon.

Monsieur le Premier ministre, l'affaire de l'incendie du restaurant Chez Francis n'est pas un fait divers dont on pourrait attendre tranquillement que la justice l'élucide.

M. Christian Bataille.

Vous n'avez pas confiance en la justice ?

M. François Fillon.

Il s'agit d'une affaire d'Etat : c'est une affaire d'Etat parce qu'elle met en cause l'Etat ; c'est une affaire d'Etat parce qu'elle met en cause le droit ; c'est une affaire d'Etat parce qu'elle met en cause la place de la Corse dans la République.

La justice nous dira peut-être qui est coupable de cet acte pathétique, mais elle ne répondra pas à la question essentielle : comment, après l'assassinat d'un préfet, le premier dans l'histoire de la République, comment après l'incarcération d'un préfet, la première dans l'histoire de la République, l'autorité de l'Etat peut-elle être rétablie en Corse ? Seul le Gouvernement peut répondre à cette question parce que c'est une question politique.

Mme Nicole Bricq.

Il a déjà répondu !

M. François Fillon.

Vous affirmez que vous n'êtes pas coupable d'avoir ordonné ou couvert des actes illégaux en Corse. Je suis prêt à vous croire ; j'ai envie de vous croire.

Mme Odette Grzegrzulka.

Menteur !

M. François Fillon.

Mais je ne peux pas accepter que vous refusiez d'assumer vos responsabilités politiques.

Vous avez choisi le préfet Bonnet. Vous lui avez donné des pouvoirs exceptionnels. Vous ne pouvez donc pas vous en tenir à la thèse de sa seule responsabilité et encore moins à celle de ses désordres mentaux.

Mme Odette Grzegrzulka.

La question !

M. François Fillon.

Vous pouvez d'autant moins le faire que cette thèse est la quatrième que vous défendez.

M. Dominique Dord.

Eh oui !

M. François Fillon.

Après « les gendarmes n'y sont pour rien » ; après « les gendarmes sont tombés dans un traquenard » ; après « les gendarmes sont seuls responsables » ; vous ne résoudrez pas la crise politique ouverte par cette affaire avec « le préfet Bonnet est responsable de tout ».

Monsieur le Premier ministre, nous ne demandons la démission de personnes. (« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Nous demandons seulement la vérité.

Vous avez aujoud'hui, ici, à l'Assemblée nationale, une dernière occasion d'assumer votre responsabilité en disant au pays toute la vérité. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 11 MAI 1999

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'intérieur. (Vives protestations et huées sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Un peu de silence, s'il vous plaît. M. le ministre de l'intérieur a seul la parole.

M. Richard Cazenave.

Va-t-il encore nous lire une lettre du préfet Bonnet ?

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

Monsieur le député, dans aucun système, et à plus forte raison dans aucune démocratie, on ne peut exclure que se produise un dysfonctionnement. Simplement, on peut exiger qu'il soit rapidement détecté et sanctionné.

M. Jean-Luc Warsmann.

Et assumé !

M. le ministre de l'intérieur.

En l'occurrence, cet acte aberrant était imprévisible car il ne correspondait en aucune manière à la politique d'établissement de l'Etat de droit. Il en est la négation même.

Je vous appelle donc à une certaine circonspection, monsieur le député, car, dans cette affaire, il faut que la justice procède aux confrontations nécessaires. Or elle ne l'a pas encore fait.

M. Richard Cazenave.

Si cela va aussi vite que pour le préfet Erignac, cela va prendre du temps !

M. le ministre de l'intérieur.

Avant même de prononcer un jugement définitif, j'aimerais que vous gardiez présent à l'esprit le souci d'une élémentaire justice.

Je voudrais que l'opposition qui, naturellement, est faite pour s'opposer, ne le fasse pas au mépris d'un cert ain nombre de principes (Murmures) et sur les décombres de l'Etat qu'il nous appartient à tous de défendre. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean Ueberschlag.

Vous n'avez pas de leçons à donner !

M. Arnaud Lepercq.

C'est trop facile !

M. Pierre Lellouche.

Répondez à la question !

M. le ministre de l'intérieur.

Je tiens tout de même à souligner que ce dysfonctionnement a été rapidement mis en lumière et sanctionné, bien que l'on ne connaisse pas encore toute la réalité. De toute façon, nous la connaîtrons, et le Gouvernement n'a jamais cherché à la dissimuler (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Il a eu le souci de tirer, aussi vite que cela était possible, toutes les conséquences de ce que l'on savait, c'està-dire les aveux des trois gendarmes puis la garde à vue du préfet.

J'aimerais donc que l'opposition garde une certaine mesure.

(Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Une partie de l'opposition insulaire s'est mise à la remorque des nationalistes. Je ne dis pas toute l'opposition insulaire, mais j'écoute ce que dit M. le député Francisci, quand il condamne très fermement la stratégie d'alliance de M. Rossi avec les nationalistes pour porter à la tête de la commission Europe de l'Assemblée de Corse M. Talamoni, tête de la liste Corsica Nazione (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), lequel, jusqu'à plus ample informé, n'a pas condamné le recours à l'action clandestine et à la violence. Or je souhaiterais que, dans cette affaire, on ne fasse pas preuve de naïveté.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. Pierre Lellouche.

Monsieur Chevènement, gardez le sens de la mesure !

M. le ministre de l'intérieur.

Chacun sait bien que la situation qui prévaut en Corse ne date pas d'hier. A cet égard, je n'aurai pas la mauvaise grâce de faire un retour en arrière. Pourtant cela me serait très facile. Mais je vous dis que vous n'avez pas le droit de vous solidariser avec les nationalistes, avec ceux qui manient le revolver et le bâton de dynamite, avec ceux qui font régner la peur, le chantage et le racket.

(Vives protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean Ueberschlag.

N'importe quoi !

M. Arnaud Lepercq.

Pyromane !

M. le ministre de l'intérieur.

La droite républicaine et continentale s'honorerait en se désolidarisant de ceux qui, jusqu'à présent, ont refusé de condamner la violence nationaliste.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

CORSE

M. le président.

La parole est à M. Jean-Luc Warsmann.

M. Jean-Luc Warsmann.

Monsieur le Premier ministre, à l'origine de cette très grave affaire corse (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste) il y a votre décision de créer en Corse un service spécial : le GPS.

M. Christian Bataille.

Il n'y a que ça qui vous intéresse !

M. Jean-Luc Warsmann.

Or nous venons d'apprendre que cette décision a été prise par votre Gouvernement, lors d'une réunion interministérielle qui s'est tenue le 14 mai 1998.

M. Christian Bataille.

Parlez-nous d'un certain hélicoptère dans l'Himalaya !

M. Jean-Luc Warsmann.

Aussi, dans un but de transparence, je vous demande, monsieur le Premier ministre, de rendre public le compte rendu intégral de cette réunion interministérielle qui a eu de si funestes conséquences. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de la défense.

(Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 11 MAI 1999

M. Arnaud Lepercq.

L'honneur de la gendarmerie !

M. le président.

Un peu de silence, s'il vous plaît ! Monsieur le ministre de la défense, vous avez seul la parole.

M. Alain Richard, ministre de la défense.

Monsieur le député, vous souhaitez être mieux informé encore sur les motivations de la création de cette unité supplémentaire s'ajoutant aux 1 500 gendarmes en service en Corse.

M. Patrick Devedjian.

On veut le compte rendu de la réunion !

M. le ministre de la défense.

Cette décision a été la conséquence directe de la volonté du Gouvernement de consentir des efforts supplémentaires pour rétablir l'Etat de droit en Corse (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) après l'assassinat du préfet Erignac.

M. Patrick Devedjian.

Quel effort supplémentaire !

M. le ministre de la défense.

J'ai d'ailleurs le souvenir, comme certainement nombre d'entre vous, que ce renforcement des moyens était demandé sur tous les bancs de cette assemblée. Il a même été approuvé par la commission qui avait été créée par l'Assemblée nationale pour analyser les difficultés de rétablissement de l'Etat de droit en Corse.

M. Pierre Lellouche.

Donc vous savez !

M. Christian Bergelin.

Le compte rendu !

M. le ministre de la défense.

Je rappelle que les missions qui avaient été confiées à cette unité sont assumées dans tout le pays par la gendarmerie, à l'exception d'une : la protection des autorités de l'Etat contre les risques d'attentat.

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Le compte rendu ! Le compte rendu !

M. le ministre de la défense.

Je vous rappelle qu'en Corse, en 1996, 400 tentatives d'attentat ont visé des services ou des personnalités de l'Etat.

M. Richard Cazenave.

Le compte rendu !

M. le ministre de la défense.

Ces besoins de protection restent nécessaires.

M. Philippe Vasseur.

Le compte rendu !

M. le ministre de la défense.

A l'issue de la réattribution des missions du GPS que le Gouvernement vient de décider, cette mission de protection de personnalités persiste.

M. Pierre Lellouche.

Ce n'est pas maintenant, mais il y a un an qu'il fallait le faire !

M. Pierre Lequiller.

Le compte rendu !

M. le ministre de la défense.

Je pense que personne ne critiquera cette attitude.

M. Arnaud Lepercq.

Vous pouviez le faire avant !

M. le ministre de la défense.

La décision a donc été prise sous mon autorité après une délibération du Gouvernement. Les missions qui étaient imparties au GPS sont maintenues.

En revanche, dans l'esprit que vient de rappeler JeanPierre Chevènement, les risques engendrés par la difficulté de contrôler une formation aussi particulière ont été pris en compte et sa suppression a été décidée, ses autres missions étant réattribuées à des unités permanentes de la gendarmerie. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - « Le compte rendu ! Le compte rendu ! »s ur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. le président.

Nous reviendrons au groupe du Rassemblement pour la République s'il nous reste un peu de temps en fin de séance.

Nous en venons aux questions du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

CORSE

M. le président.

La parole est à M. Hervé de Charette.

M. Hervé de Charette.

Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, je voudrais à mon tour parler des conséquences de ce qui s'est passé en Corse il y a quelques semaines. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Christian Bataille.

Continuez comme ça !

M. Hervé de Charette.

J'ai observé que la majorité n'aimait pas que l'on évoque ce sujet. Peut-être va-t-elle accepter que l'on en parle avec mesure, mais aussi avec sérieux et avec gravité. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Monsieur le Premier ministre, vous avez déclaré récemment que chacun était responsable de ses actes. Cette déclaration a une très grande importance, parce qu'elle détermine le contenu et les modalités de fonctionnement de notre démocratie. Malheureusement, je crains que, derrière ces mots, se cachent les efforts que multiplie le Gouvernement pour dégager sa propre responsabilité.

(Protestations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Eh oui !

M. Hervé de Charette.

Voilà pourquoi je tiens à vous interroger de nouveau sur le sens des propos que vous avez tenus.

M. Christian Bataille.

Ce n'est pas sérieux !

M. Hervé de Charette.

La responsabilité individuelle est une chose, la responsabilité politique, la responsabilité gouvernementale en sont une autre. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

L orque l'on regarde les résultats des événements récents, on constate que deux corps essentiels au bon fonctionnement de notre République ont été ébranlés.

Leur autorité, leur prestige et, par conséquent, leur capacité à agir sont désormais en cause. Les attentats ont repris et le débat sur l'indépendance de la Corse est de nouveau ouvert. Bref, nous avons devant nous un champ de ruines et il faut ajouter, monsieur le ministre, l'affaiblissement subi par votre propre gouvernement à cause de cette crise politique majeure.

J'ai donc deux questions à vous poser.

L orsque les plus hauts fonctionnaires de l'Etat commettent des fautes dans l'exercice de leurs responsabilités, est-il établi que, dans notre République, les hommes politiques qui les nomment, qui les dirigent, qui ont la


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 11 MAI 1999

charge de les contrôler, n'ont aucune responsabilité en aucune circonstance ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

De nombreux députés du groupe socialiste.

Ouvéa ! Ouvéa !

M. Hervé de Charette.

Par ailleurs, le Gouvernement est-il prêt à accepter que se tienne, dans cette assemblée, le débat qui me paraît nécessaire sur l'avenir de la Corse où l'incertitude a désormais remplacé la fermeté précédente ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le Premier ministre.

M. Lionel Jospin, Premier ministre.

Monsieur le député, quand un Premier ministre, quand un ministre de la défense, quand un ministre de l'intérieur, quand un gouvernement, à la suite d'actes graves de destruction, comme celle d'une paillote en Corse dans des conditions i llégales, s'expriment devant l'Assemblée nationale, répondent aux questions, aux interpellations et aux critiques ; quand la presse, à travers ses colonnes, établit des faits, souvent, formule des spéculations, parfois, interpelle, critique, débat ; quand le Premier ministre juge qu'il est nécessaire de s'exprimer, plus massivement et en direct, devant nos concitoyens et le fait devant dix millions de personnes, face aux médias et aux caméras de télévision...

M. Claude Goasguen.

C'est qu'il se sent mal !

M. le Premier ministre.

... ils sont en plein dans l'exercice de leurs responsabilités politiques ! (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Dominique Dord.

Ils gèrent la crise !

M. Richard Cazenave.

Il faut répondre aux questions !

M. le Premier ministre.

Je souhaite que toute personne détentrice d'une autorité, ayant exercé des responsabilités, où que ce soit, soit prête à en assumer, devant l'opinion, la responsabilité politique, je dis bien politique. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

C'est ce que j'ai fait. C'est ce que le Gouvernement a fait. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Vous semblez davantage gênés cette fois.

M. le président.

Un peu de silence, s'il vous plaît !

M. le Premier ministre.

En ce qui concerne la nomination du préfet Bonnet, puisque c'est de cela dont il est question, je vous rappelle que ce haut fonctionnaire a été nommé préfet de Corse le 7 février 1998...

M. Richard Cazenave.

Par qui ?

M. le Premier ministre.

... quelques heures après l'assassinat du préfet Erignac, parce que les autorités de l'Etat ont estimé que nous devions marquer immédiatement que l'Etat était à nouveau représenté symboliquement et physiquement en Corse par un préfet.

M. Alain Néri.

Très bien !

M. le Premier ministre.

Nous avons pris cette décision en quelques heures et Bernard Bonnet a été nommé en conseil des ministres sur proposition du ministre de l'intérieur avec l'acceptation du Premier ministre et celle du Président de la République. (Rires et vives exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. De nombreux députés du groupe Démocratie libérale et Indépendants font mine d'ouvrir un parapluie.)

Mesdames, messieurs, la responsabilité est partagée par tous ceux qui prennent les décisions.

Pour le reste, le Gouvernement a laissé la justice exercer son action afin qu'elle établisse librement la vérité.

(Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Les Corses peuvent eux-mêmes se convaincre que, désormais, la loi s'applique à tous. Le fait que, dans des conditions exceptionnelles, un préfet et des gendarmes puissent être placés sous mandat de dépôt...

M. Pierre Lellouche.

C'est pathétique !

M. le Premier ministre.

... montre en effet aux Corses que la loi est la même pour tous ! Nous serons donc d'autant plus fondés à demander qu'elle soit respectée par tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

C'est ainsi que le Gouvernement fonctionne. Je pense que l'opinion le comprend ainsi. C'est elle que je veux pour juge de ma responsabilité politique et je n'ai pas peur de son jugement. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Dominique Dord.

Prétentieux !

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe Démocratie libérale et Indépendants.

CORSE

M. le président.

La parole est à M. Laurent Dominati.

(Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Christian Bataille.

On va revoter dans le 3e arrondissement !

M. le président.

Mes chers collègues, un peu de silence, ainsi le veulent nos règles.

M. Laurent Dominati.

Monsieur le Premier ministre, je voulais précisément vous demander ce que signifiait, pour vous, assumer une responsabilité politique. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)


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M. Didier Boulaud.

Et que dire des listes électorales dans votre arrondissement ?

M. Laurent Dominati.

Parler devant les caméras de télévision, s'exprimer à l'Assemblée nationale, tenir certains propos que je vais rappeler est une chose. Mais assumer une responsabilité politique cela devrait signifier, dans une démocratie normale, tirer les conséquences de ses échecs. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Didier Boulaud.

Allez demander à votre père s'il sait compter !

M. Laurent Dominati.

Monsieur le Premier ministre, vous avez considéré que le dossier corse était une priorité qui devait relever de l'interministériel, c'est-à-dire de vous-même et votre cabinet. Vous avez donc décidé de mettre en oeuvre des mesures d'exception en Corse. Après l'assassinat du préfet Erignac, vous avez bénéficié d'un certain consensus, en Corse et dans toute l'opinion publique, pour restaurer l'Etat de droit. (Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Laurent Dominati.

Jamais les thèses nationalistes et indépendantistes n'ont été aussi en faveur qu'aujourd'hui.

Jamais l'Etat n'a été ridiculisé à ce point. Jamais un ministre de l'intérieur n'a été aussi mal, aussi peu informé de ce que faisait son préfet. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Rires et exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Et quand on est ministre de l'intérieur, ou bien l'on contrôle, ou bien...

P lusieurs députés du groupe socialiste.

Debré ! Debré ! Debré !

M. Laurent Dominati.

Il n'y a même pas dix jours, le ministre de l'intérieur disait se porter personnellement garant du préfet Bonnet. Aujourd'hui, il explique qu'il est malade ! (Huées sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Q ui est malade ? Le Gouvernement ou le préfet ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

On ne peut pas devant l'Assemblée nationale se déclarer garant d'un préfet, puis affirmer, comme vous l'avez fait, monsieur le Premier ministre, qu'il n'y a pas d'enquête parallèle en Corse, quand on découvre ensuite qu'il y en a bien eu. On ne peut pas assurer devant la représentation nationale qu'il n'y a pas d'écoutes parallèles quand il y a bel et bien des écoutes parallèles.

Maintenant, voilà que vous dites à tous nos concitoyens, à l'Assemblée nationale, que vous n'étiez pas informé !

M. le président.

Concluez, monsieur Dominati.

M. Laurent Dominati.

Etait-ce un dossier prioritaire ou non ? Etait-ce réellement une priorité pour votre gouvernement ? Et si hier vous n'étiez pas informé, l'êtes-vous aujourd'hui ? (Vives exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Veuillez conclure, s'il vous plaît !

M. Laurent Dominati.

Monsieur le président, j'aimerais conclure, mais d'abord me faire entendre ! Y avait-il, oui ou non, un plan d'ensemble d'actions illégales menées par les autorités de l'Etat ? (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.) Qu'a dit le colonel lorsqu'il est venu à Paris ? (Mêmes mouvements.) La Commission de Bruxelles a donné sa démission pour beaucoup moins que cela, monsieur le Premier ministre ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Concluez, s'il vous plaît, monsieur Dominati !

M. Laurent Dominati.

Il faut continuer de mener une politique de restauration de l'Etat de droit en Corse, dites-vous. Mais que vous reste-t-il de crédibilité pour le faire ? Comment peut-on vous croire ? Qui peut avoir confiance dans les institutions ? Que signifie pour vous assumer une responsabilité politique, si ce n'est parler ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants et sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance. - Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

L'Assemblée nationale est naturellement le lieu où peut s'affirmer une responsabilité politique ; il vous appartient, mesdames et messieurs les députés de l'opposition, de faire jouer les procédures prévues à cet effet. (Exclamations sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Arnaud Lepercq.

Bla, bla, bla !

M. Pierre Lellouche.

Nous ne sommes pas pressés !

M. le ministre de l'intérieur.

Pour ce qui concerne le ministre de l'intérieur, il assume ses responsabilités. Si j'ai proposé le préfet Bonnet pour prendre la suite du préfet Erignac dans une circonstance tragique, c'est d'abord qu'il n'y avait pas beaucoup de volontaires. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Il était le plus déterminé, il avait l'expérience de la police en tant qu'ancien directeur de la police territoriale, il connaissait la Corse : tout cela paraissait le qualifier. (Exclamation sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) J'ajoute que vous n'avez pas le droit, alors même que le préfet Bonnet n'a pas avoué ce dont le chargent ses accusateurs,...

M. Armand Lepercq.

Et pourquoi ?

M. le ministre de l'intérieur.

... de faire comme si lui seul était la seule origine de cet acte encore une fois aberrant et totalement contraire aux orientations données par le Gouvernement, qui dans bien d'autres domaines ont porté leurs fruits. Car on ne doit pas oublier les acquis positifs qui ont été remportés...

M. Pierre Lellouche.

Un préfet mort et un autre en prison en un an, bravo Chevènement !

M. le ministre de l'intérieur.

... durant les quinze mois qui ont suivi l'assassinat du préfet Erignac.

Regardez les chiffres des attentats et des actions violentes. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Mes chers collègues, je vous en prie !

M. le ministre de l'intérieur.

En 1996, 449. En 1997, 361. En 1998, 132. Et pour les quatre premiers mois de 1999, 68. Certes, c'est encore beaucoup trop.


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Dans bien d'autres domaines, on pourrait relever les acquis de cette politique...

M. Arnaud Lepercq.

Nous n'avons pas besoin d'un expert comptable !

M. le ministre de l'intérieur.

... qui devra, comme j'ai eu l'occasion de le dire, être poursuivie pendant bien longtemps, et probablement par plusieurs gouvernements.

Depuis plus de vingt-cinq ans, la Corse va de période de répression en période de négociation et de compromission. Il est temps de tenir une ligne ferme. Or cette affaire de la « paillote », démesurément gonflée par certains d'entre vous (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) ...

M. Pierre Lellouche.

Grâce à vous ! Grâce à vos âneries !

M. le ministre de l'intérieur.

... est pour tous les contempteurs de la légalité républicaine, pour tous ceux qui ont érigé la loi du racket, du chantage, de la peur en loi de l'île, l'occasion de triompher, de pavoiser, de faire en sorte que notre politique puisse être mise en doute ! Or elle ne le sera pas. Car la volonté du Gouvernement, à travers le tout nouveau préfet, M. Lacroix, est de faire prévaloir le règne de la loi, comme s'y était engagé le Prem ier ministre dans sa déclaration d'investiture, le 19 juin 1997 : premièrement, assurer la continuité dans l'application de la loi ; deuxièmement, mettre l'accent sur le développement ; troisièmement, entretenir un véritable dialogue avec les élus, dont je souhaite qu'ils manifestent un esprit de responsabilité à la hauteur des défis qui sont devant nous tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe communiste.)

M. Arnaud Lepercq.

Bla, bla, bla !

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe communiste.

KOSOVO

M. le président.

La parole est à M. Jean-Claude Sandrier.

M. Jean-Claude Sandrier.

Monsieur le président, monsieur le Premier ministre, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.

La guerre au Kosovo connaît aujourd'hui un tournant.

Une issue au conflit apparaît désormais possible, pour peu que la recherche d'une solution politique prenne le pas sur la logique de guerre. Chaque jour qui passe accroît les risques de dérapage et le bombardement de l'ambassade de Chine en est la confirmation. Chaque jour qui passe accroît les risques d'un engrenage dont personne ne peut mesurer les conséquences.

Il y a quelques jours, l'accord intervenu lors du sommet du G8 laissait fortement entrevoir l'espoir d'avancées significatives dans le sens d'une solution politique. Sans rien lâcher sur le fond quant au respect des droits de l'homme, au retour des réfugiés et au nécessaire déploiement d'une force civile et de sécurité sous l'égide de l'ONU, il propose une porte de sortie à la partie serbe.

Fort du soutien de la communauté internationale, validé juridiquement par les Nations unies, il pourrait permettre, en cas d'obstruction des autorités de Belgrade, d'isoler Milosevic et son régime, y compris dans son propre pays.

Deux éléments nouveaux offrent l'occasion d'élargir de façon décisive la voie entrouverte au G8 : l'annonce d'un retrait partiel des forces armées yougoslaves du Kosovo et le soutien de la Chine au plan proposé par le G8 si l'OTAN arrête ses bombardements. Nous avons le devoir politique, devant toute la communauté internationale, de prendre au mot les auteurs de ces déclarations. Il convient donc, comme l'a d'ailleurs demandé le président de la République italienne, de suspendre les frappes de l'OTAN, permettant ainsi à la Chine d'apporter son soutien, au sein du Conseil de sécurité, au plan de paix proposé par le G8. Cela placerait Milosevic dans l'impossibilité de renier sa parole...

M. Christian Jacob.

Ce ne serait pas la première fois !

M. Jean-Claude Sandrier.

... sur un retrait partiel, puis total, du Kosovo, sauf à se déconsidérer auprès de ses soutiens eux-mêmes.

Un député du groupe de l'Union pour la démocratie française.

Il y a toujours des naïfs !

M. Jean-Claude Sandrier.

Comme le souhaite aujourd'hui une majorité de nos concitoyens, la France doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour créer les conditions permettant que s'ouvrent enfin des négociations sous l'égide de l'ONU.

Monsieur le ministre, à partir de ces éléments nouveaux, quelles initiatives concrètes notre pays entend-il prendre pour parvenir à ce but ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. Claude Hoarau.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.

M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes.

Monsieur le député, je voudrais d'abord revenir sur l'erreur tragique et meurtrière qui a conduit au bombardement de l'ambassade de Chine à Belgrade, pour redire, après le Président de la République et le Premier ministre, nos très profonds regrets. Le Chancelier Gerhard Schro der, qui préside à l'heure actuelle l'Union européenne, est en ce moment même à Pékin pour faire part à la Chine de ses regrets et lui rappeler que nous comptons sur elle dans la recherche d'une solution politique.

En effet, comme vous l'avez dit, ces derniers jours ont été marqués par une activité diplomatique intense et qui marque des progrès. Vous avez rappelé la réunion du G8 à Bonn le 6 mai, au cours de laquelle les alliés, mais aussi les Russes ont repris les cinq conditions proposées par la France et consacrées par le secrétaire général de l'ONU.

De nombreux émissaires sont également à l'oeuvre : M. Bildt, M. Kukan, M. Tchernomyrdine et le Président f inlandais M. Ahtisaari auquel le Président de la République a rendu visite hier et encore aujourd'hui.

Tout cela a un but : trouver une résolution, dans le cadre du Conseil de sécurité des Nations unies, pour une solution politique au Kosovo.

Cela dit, je ne crois pas que l'on puisse prendre au mot M. Milosevic, pour reprendre votre expression. Il nous a appris au contraire qu'il fallait parfois, et même souvent, se défier de ce qu'il disait. C'est pourquoi nous prenons avec attention, mais aussi avec circonspection, l'annonce du retrait de certaines troupes au Kosovo.

Nous ne disposons en effet d'aucune information vérifiable sur le retrait de ces troupes, qui, en toute hypothèse, resterait insuffisant par rapport aux cinq conditions dont je viens de rappeler le nécessaire respect.


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A total, nous devons, me semble-t-il, poursuivre sur une double attitude : une très grande détermination dans l'action militaire, avec une vigilance accrue quant au choix des cibles et à la précision des tirs de l'OTAN, mais aussi dans la recherche d'une solution politique. La France y travaille : Hubert Védrine est aujourd'hui à Moscou - ce qui explique que je vous réponde à sa place - et le Président de la République s'y rendra le 13 mai, puis le Premier ministre, les 24 et 25 mai. Telle est la volonté de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

AVENIR DU THERMALISME

M. le président.

La parole est à M. François Liberti.

M. François Liberti.

Madame la ministre de l'emploi et de la solidarité, M. Alain Bocquet se joint à moi pour appeler votre attention sur les mesures proposées pour le thermalisme dans le plan stratégique de la caisse nationale d'assurance maladie.

Sur proposition du directeur de la CNAM, le conseil d'administration s'est en effet prononcé par un vote pour ne plus rembourser les cures thermales, à l'exception de trois indications. Cette disposition, si elle était retenue, provoquerait la disparition de cette activité de soins dans notre pays et compromettrait le fragile équilibre de nombreuses stations thermales qui investissent avec audace pour améliorer leurs intallations et redynamiser des régions bien souvent sinistrées économiquement.

C'est le cas dans ma circonscription, où la ville de Balaruc-les-Bains, troisième station nationale, gère deux structures, emploie 450 salariés et vient d'investir 25 millions de francs pour garantir son avenir économique.

Cette décision intervient alors que la CNAM et la profession avaient depuis 1997 contractualisé la forfaitisation tarifaire et l'harmonisation des soins, afin justement de rationaliser les dépenses de santé. De surcroît, l'enseignem ent obligatoire de l'hydrothérapie médicale a été confirmé par l'arrêté du 4 mars 1997.

Il est à noter que la part du thermalisme dans les dépenses d'assurance maladie est infime : elle se situe autour de 2,5 %, bien loin de la part constatée en Italie, en Espagne ou en Allemagne. Le prix d'une cure thermale de 18 jours équivaut en moyenne à celui d'une journée d'hospitalisation.

M. le président.

Concluez, s'il vous plaît.

M. Jean Ueberschlag.

C'est intéressant !

M. François Liberti.

On ne peut non plus faire l'impasse sur les recettes que génère cette activité en matière de cotisations sociales dans toutes les branches de la sécurité sociale, particulièrement dans la branche maladie.

Une communication du président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, l'estimait en 1996 à 800 millions de francs. Ajoutez à cela les recettes induites par la TVA, la taxe professionnelle,...

M. le président.

Veuillez conclure, monsieur Liberti.

M. François Liberti.

... l'impôt sur le revenu des salariés dans la dimension économique pluri-sectorielle créée par le thermalisme qui compte environ 120 000 emplois.

V ous comprendrez, madame la ministre, que l'ensemble de la profession puisse douter de la justesse et de la cohérence des propositions de la CNAM, qui me paraissent aller à l'encontre des objectifs de croissance et d'emploi que le Gouvernement s'est fixés. Je me fais donc l'interprète des médecins, des exploitants thermaux, des salariés, des curistes et de tous ceux dont l'activité dépend directement du bon fonctionnement des établissements thermaux pour vous demander de refuser les propositions de la CNAM et de pérenniser l'activité thermale pour le plus grand bien de la santé publique, de son économie et du maintien des activités qui s'y rattachent.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Monsieur Liberti, votre question était pertinente, mais bien longue ! La parole est à M. le secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale, pour une réponse d'une minute.

M. Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Il me reste, monsieur le député, peu de temps pour vous répondre.

Je sais combien vos préoccupations sont partagées sur tous les bancs. Vous avez vous-même indiqué qu'il s'agissait d'un vote de la CNAM. Nous sommes très attentifs à ce que la CNAM délibère. Il est tout à fait normal qu'elle s'interroge sur chacune des dépenses remboursées.

Cela dit, le Gouvernement considère cette délibération comme un point de départ de la discussion avec les intéressés. Le président Bocquet sait très bien que nous souhaitons que les indications des cures thermales soient en quelque sorte rajeunies, en tout cas modernisées et prennent au besoin davantage en compte les considérations d'ordre familial et social ; des prises en charge psychologiques pourraient être éventuellement proposées.

Mais rien n'est encore décidé. Nous connaissons évidemm ent le poids que représentent les 120 000 à 130 000 emplois de ce secteur. Nous savons aussi que, dans quarante-cinq départements, les cures thermales représentent un élément important d'aménagement du territoire. Mais vous ne pouvez empêcher la CNAM de s'interroger sur le service médical rendu et que son point de vue serve de point de départ à la discussion.

(Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous en venons à une question du groupe Radical, Citoyen et Vert.

KOSOVO

M. le président.

La parole est à M. Pierre Carassus.

M. Pierre Carassus.

Monsieur le Premier ministre, parce que les moyens énoncés ne paraissent pas en adéquation avec les objectifs officiellement poursuivis par l'OTAN, les députés du Mouvement des citoyens vous avaient fait part de leur opposition à la décision de bombarder la Serbie. Ces frappes, présentées comme sans risques pour les populations, devaient en quelques jours anéantir l'appareil militaire de Milosevic. Nous savons, hélas ! ce qu'il en est aujourd'hui. Rien ne peut justifier la mort de civils, doublement victimes : victimes de la dictature de Milosevic, victimes des bombardements de l'OTAN. Quel démocrate peut accepter que l'on touche à un peuple lorsque l'on prétend atteindre un régime ? La situation à laquelle nous sommes confrontés peut se résumer ainsi : un pays à genoux, l'exode et des crimes qui s'intensifient au Kosovo ; et un Milosevic politiquement renforcé. Et voilà que nous avons de surcroît sur les bras une agression considérée comme un acte de guerre à l'égard d'un grand pays non engagé dans ce conflit : la Chine ! Nous sommes donc à un tournant décisif. Deux logiques s'opposent : un processus de guerre dont on sait les dangers, les incertitudes, et dont les derniers errements


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 11 MAI 1999

peuvent nous faire craindre des périls et des engrenages dont personne ne peut prévoir l'issue ; un processus diplomatique qui, pour aboutir, doit prendre en compte tous les signes d'ouverture, même minimes, donnés par Belgrade.

Ne pensez-vous pas, monsieur le Premier ministre, que la France, dans ce contexte, doive avoir le courage de faire entendre sa propre voix afin de privilégier la recherche d'une solution politique négociée ? Il est impératif de suspendre les bombardements pour mettre Milosevic au pied du mur. Quelle nouvelle initiative la France entend-elle prendre pour en finir avec le conflit du Kosovo et retrouver le chemin de la paix et de l'espoir ? (Applaudissements sur les quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.

M. Pierre Moscovici, ministre délégué chargé des affaires européennes.

Monsieur le député, je ne reviendrai pas sur les informations données par le Premier ministre et que je viens de rappeler à la représentation nationale.

Nous sommes consternés par le bombardement de l'ambassade de Chine, et l'Union européenne multiplie ses efforts pour réintroduire la Chine, dont le poids est très important en tant que membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, dans le jeu diplomatique.

J'ajoute que, à mon sens, il ne faut pas opposer une logique de guerre, dans laquelle nous ne sommes d'ailleurs pas, et une logique politique. La logique militaire contribue à faire plier Milosevic : nous en voyons les premiers signes avec l'arrivée de M. Rugova à Rome et même les annonces - qu'il faut prendre avec circonspection - du retrait de certaines troupes serbes du Kosovo.

Au total, monsieur le député, la France ne ménage pas sa peine ni ses efforts diplomatiques pour parvenir à une solution politique dans le cadre du Conseil de sécurité.

C'est le sens des visites effectuées par les plus hauts représentants de la diplomatie et des autorités françaises à Moscou. C'est aussi le sens des engagements que nous avons pris et que nous poursuivrons dans le cadre du G

8. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous en revenons à une question du groupe du Rassemblement pour la République qui dispose de quatre minutes.

RETRAITES

M. le président.

La parole est à M. Gilles Carrez.

M. Gilles Carrez.

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre, mais elle ne concerne pas la Corse.

(« Ah ! » sur les bancs du groupe socialiste.) Elle concerne le problème des retraites.

En 1993, le gouvernement d'Edouard Balladur, dès sa prise de fonctions, a eu le courage politique de réformer le régime des retraites des salariés du secteur privé en allongeant la durée de cotisation. En 1995, le gouvernement d'Alain Juppé, conscient de la nécessité de traiter de façon équitable l'ensemble des régimes de retraite, lui aussi, avec courage, a évoqué la nécessaire réforme des régimes de retraite des fonctionnaires et des agents publics.

M. Alain Néri.

Avec quel succès !

M. Gilles Carrez.

Aujourd'hui, alors même que tout le monde reconnaît que la France va connaître, en 2005, un véritable choc démographique avec, d'une part, la diminution du nombre des actifs cotisants et, d'autre part, la forte augmentation du nombre des retraités, vous, monsieur le Premier ministre, vous vous contentez de demander un énième rapport pour établir des pistes de réforme qui ont déjà été mille fois préconisées par les différ ents experts. Tout cela, en fin de compte, monsieur le Premier ministre, pour nous informer qu'il est urgent d'attendre car, vous le savez, les mesures à prendre risquent d'être impopulaires.

M. Jean-Michel Ferrand.

C'est la méthode Jospin !

M. Gilles Carrez.

Eh bien ! mes chers collègues, les Français apprécieront : de notre côté, le courage et la responsabilité ; du vôtre, la légèreté et l'attentisme ! (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Patrick Rimbert.

La question !

M. Gilles Carrez.

Monsieur le Premier ministre, ma question est simple. Votre décision de ne rien faire estelle davantage conditionnée par la crainte du choc démographique de 2005 ou par celle du choc électoral de 2002 ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

M. Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Monsieur le député, je ne sais p as quelle sera l'ampleur du choc démographique en 2005, mais je sais que le dernier choc électoral ne nous a pas été trop désagréable ! (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe communiste. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Michel Ferrand.

Profitez-en, ça ne durera pas ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Le commissaire au Plan, Jean-Michel Charpin, a remis son rapport qui traduit un assez large consensus. C'est un premier point, et il fallait commencer par là. Il fallait, en effet, commencer par obtenir, de la part de la plus grande partie, à défaut de l'intégralité, des acteurs, un accord sur le bilan. Ce dernier comprend deux parties et il ne faut pas se borner à en évoquer la seconde.

La première montre, en effet, que notre système de répartition, depuis cinquante ans, a rempli sa mission, apporté au pays ce qu'on en attendait, et satisfait très largement l'ensemble des Français.

La seconde partie, comme vous l'avez souligné, expose que, dans les années qui viennent - et non pas seulement 2005 car le « choc démographique », monsieur le député, sera un phénomène très progressif qui se déroulera de 2005 à 2020...

M. Bernard Accoyer.

Et le babyboom, il a été progressif ? M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

La situation démographique du pays deviendra telle que se poseront inéluctablement des problèmes.

Aussi il convient d'entreprendre de les résoudre.

C'est pourquoi, après que le rapport lui a été remis, le Premier ministre a mis en place une phase de concertation, pendant laquelle seront discutés, par ma collègue


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 11 MAI 1999

Martine Aubry avec les organisations syndicales et patronales ainsi que des associations, les différentes modalités et les éléments de la réforme à mettre en oeuvre pour que notre système de répartition puisse passer sans encombre cette étape.

M. Richard Cazenave.

Jusqu'à quand ? M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Vous trouvez que c'est de l'attentisme, monsieur le député. Mais lorsque le précédent gouvernement a voulu traiter le problème des retraites, la moitié de la France s'est retrouvée dans la rue : c'était fin 1995 ! Faut-il, pour être efficace, mettre les Français dans la rue sans obtenir de résultat ? (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Ou prendre les quelques mois nécessaires pour qu'ensemble, nous trouvions des solutions ?

M. Richard Cazenave et M. Guy Drut.

Autant dire, ne rien faire ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Depuis deux ans, dans de très nombreux domaines, le Gouvernement a montré que sa méthode...

M. Richard Cazenave.

... était de ne rien faire ! M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

... qui consiste à associer les partenaires sociaux et les Français à la discussion, permettait de trouver des solutions.

Croyez-moi, nous trouverons, pour le système de retraites, ensemble - et je suis sûr que vous vous y associerez - des solutions autres que celles que les mouvements de décembre 1995 avaient empêché d'aboutir.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

(M. Arthur Paecht remplace M. Laurent Fabius au fauteuil de la présidence.)

PRÉSIDENCE DE M. ARTHUR PAECHT,

vice-président

2 AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE Suite de la discussion, en nouvelle lecture, d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la suite de la discussion, en nouvelle lecture, du projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire et portant modification de la loi no 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire (nos 1527 rectifié, 1562).

Jeudi soir, l'Assemblée a terminé l'examen des articles.

La parole est à M. le rapporteur de la commission de la production et des échanges.

M. Philippe Duron, rapporteur de la commission de la production et des échanges.

Monsieur le président, madame la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, mes chers collègues, nous voici donc parvenus à la fin de la nouvelle lecture de la loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire.

Je tiens à remercier ici Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement, qui a su être à l'écoute des préoccupations des parlementaires, et en tenir compte. Mes remerciements s'adressent aussi au président de notre commission, M. André Lajoinie, et plus largement à l'ensemble des députés, qui ont permis que nous ayons un débat intéressant et constructif et ainsi de préciser et d'enrichir le texte.

Je me félicite que nous soyons arrivés à un texte qui, tout en intégrant les améliorations apportées par le Sénat, telles que l'introduction d'un schéma sur le sport, revient largement à la version que nous avions adoptée en première lecture, le 9 février dernier.

En effet, le Sénat, en choisissant de rester fidèle à la philosophie de la loi du 4 février 1995, fondée essentiellement sur l'aide à apporter aux territoires en difficulté, et donc sur une logique de zonages, avait profondément apprauvri l'esprit de la loi d'orientation.

L'aménagement du territoire ne saurait se réduire à c ompenser les handicaps. Votre texte, madame la ministre, propose donc une nouvelle démarche, que vous avez fort bien su résumer en ces trois mots : un projet, un territoire, un contrat.

L'élaboration de projets, qui se traduiront dans des chartes de pays ou d'agglomérations, permettra de mobilier toutes les énergies locales. C'est autour de ces projets que s'organiseront les nouveaux territoires pertinents, les pays et les agglomérations. Il s'agit là de prolonger l'évolution profonde amorcée par les contrats de plan Etat-r égions en l'étendant aux nouveaux territoires qui répondent à l'organisation et aux pratiques économiques et sociales de notre temps.

La possibilité pour les pays et les agglomérations de contractualiser directement avec l'Etat offre à ces territoires des perspectives nouvelles et fortes.

Aux pays et aux agglomérations s'ajoutent, dans la nouvelle architecture territoriale proposée par le projet de loi, deux autres territoires d'action, les pôles de taille européenne et les territoires en difficulté, ce qui prouve bien que la majorité est loin d'être opposée au rééquilibrage, comme on a pu le lui reprocher. Elle considère simplement qu'il ne peut, à lui seul, fonder la politique d'aménagement du territoire.

Les dispositions relatives aux pays et aux agglomérations, que l'Assemblée avait enrichies de manière significative lors de la première lecture, et que le Sénat avait en grande partie réduites, appauvries, ont été aujourd'hui rétablies et clarifiées.

Le projet de loi d'orientation entend, d'autre part, et c'est là une autre disposition essentielle, partir des besoins des Français. Les huit, et maintenant neuf, schémas de services collectifs qui fixent au plan national les objectifs d e l'Etat en matière d'aménagement du territoire obéissent à cette logique, en se fondant sur les besoins de services et d'équipements, et non plus sur la seule offre exprimée. Le Sénat avait rétabli la logique inverse, et il importait donc de revenir, ici aussi, à la version adoptée par notre assemblée.


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A côté de la recomposition territoriale qu'elle propose, et de ces nouveaux instruments qu'elle met en place, la loi que nous allons adopter vise aussi à renforcer la démocratie participative, en prévoyant la représentation des citoyens au sein des différentes instances de l'aménagement du territoire par le biais de leurs associations. Il nous fallait rétablir cette importance disposition supprimée par le Sénat. C'est maintenant chose faite.

La présence des services publics et l'égal accès à ceux-ci en tout point du territoire constituent, nous en convenons tous, un des aspects essentiels de l'aménagement du territoire. Les députés avaient eu à coeur, lors de la première lecture, d'enrichir le texte du Gouvernement, qui, vous l'avez vous-même reconnu, madame la ministre, était quelque peu insuffisant dans ce domaine. Le Gouvernement nous avait entendus et avait complété le projet de loi de manière significative par le biais de deux amendements, l'un instaurant le service universel postal, l'autre instituant les maisons de services publics. Le Sénat était revenu sur ces dispositions. Nous les avons rétablies en nouvelle lecture.

Approche novatrice fondée sur l'initiative et les potentialités des acteurs locaux, nouvelle architecture territoriale mieux adaptée à la vie économique et sociale de nos concitoyens, meilleure prise en compte de leurs aspirations et de leurs besoins, introduction de la notion de développement durable : votre projet de loi, madame le ministre, refonde la politique d'aménagement du territoire. Notre assemblée avait contribué à l'améliorer et à l'enrichir en première lecture. Nous avons su, lors de cette nouvelle lecture, rétablir, en les précisant, les principales dispositions de ce texte transformé par le Sénat.

C'est pourquoi je suis convaincu qu'il recevra le large soutien d'une majorité de notre assemblée.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Mme Dominique Voynet, ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, la première lecture du projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire par votre assemblée, aux mois de janvier et février derniers, avait déjà permis de préciser, au terme d'un vrai débat, les intentions du gouvernement et de prendre en compte vos préoccupations. Elle avait débouché sur un texte dont je m'étais félicitée.

Son examen par le Sénat et les bouleversement que celui-ci lui a apportés nous ont conduits à examiner en nouvelle lecture un texte profondément modifié. Le Sénat avait, en effet, réécrit très largement le texte sans prendre en compte les arguments et les propositions que j'avais formulés au nom du Gouvernement, et malgré une grande disponibilité de ma part pour les propositions des sénateurs.

C'est donc avec le souhait de rebâtir un texte proche de celui que vous aviez voté le 9 février 1999 que j'ai repris cette discussion, en prenant en compte, le cas échéant, les précisions ou améliorations qu'avait pu formuler le Sénat dans sa première lecture.

Est-il encore besoin de rappeler les grands axes de ce texte ? D'abord, un aménagement du territoire dans une perspective de développement durable, attachée à la fois à répondre aux besoins de court terme et à prendre en compte les enjeux de long terme. Elle ne peut se confondre avec une approche réduite à l'environnement, mais au contraire intègre étroitement performance économique globale, cohésion sociale, qualité de l'environnement et des milieux et méthode d'élaboration et de mise en oeuvre associant les partenaires intéressés.

Ensuite une priorité donnée à l'emploi par la préoccupation de l'efficacité de politiques publiques au regard de leur contribution à la lutte contre le chômage.

Une société plus juste et plus solidaire aussi, à laquelle l'aménagement du territoire doit contribuer sans pour autant prétendre la résoudre à elle seule, en veillant à la réduction des déséquilibres entre territoires et à la mobilisation des processus de cohésion sociale et territoriale aux diverses échelles, locale, régionale, nationale et européenne.

La valorisation des ressources, enfin, qui doit fonder le développement en confiant la soin à la politique d'aménagement du territoire de privilégier les territoires de projet que sont les agglomérations, les pays, les parcs naturels.

Ces quatre axes s'inscrivent dans un processus d'intégration de la France à une Europe élargie et à une organisation décentralisée, à la fois riches d'opportunités et de défis pour notre pays.

L'adoption du schéma de développement de l'espace communautaire par le Conseil des ministres en charge de l'aménagement du territoire dans l'Union européenne, hier, à Potsdam, formalise un cadre de référence à ce processus avec lequel le texte qui vous est soumis aujourd'hui est totalement cohérent.

C'est pour revenir à cette approche, partagée par votre assemblée et le Gouvernement, qu'il importait de revenir au texte voté en première lecture. C'est d'ailleurs la voie que proposait pour l'essentiel votre commission.

Cette nouvelle lecture a permis de prendre en compte quelques évolutions résultant de la discussion au Sénat. Je citerai notamment le caractère public des débats du CNADT, la notion de valorisation du bénévolat des acteurs associatifs, la possibilité pour les collectivités locales de mettre en place des réseaux de télécommunications à haut débit dans un cadre tout à fait maîtrisé, la reconnaissance des comités d'expansion et agences de développement auxquels vous avez adjoint les comités de bassin d'emploi, et le neuvième schéma des services collectifs, celui du sport.

Plus significativement, cette nouvelle lecture a permis de rétablir la cohérence des quatre grands choix stratégiques concernant la politique d'aménagement du territoire fixés à l'article 2 du projet et l'évaluation de la faisab ilité de fonds régionaux pour l'emploi et le développement. Elle a également permis de réécrire les dispositions relatives à la mise en place des pays et à la constitution d'agglomérations comme territoires de projet.

Elle a permis enfin de réintroduire les dispositifs concernant la participation des forces vives des territoires grâce au conseil de développement.

En complément, vous avez supprimé des dispositions introduites par le Sénat qui dénaturaient le projet et sa logique, en particulier sur le contenu des schémas de services, et tout spécialement ceux sur les transports et les dispositions relatives au financement des autoroutes, sur les articles relatifs au code de l'urbanisme ou aux interventions économiques des collectivités locales, qui font l'objet de textes en préparation par le Gouvernement, ainsi que les dispositions relatives aux zonages. Vous avez également rétabli la transposition de la directive postale.


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Et j'ai eu l'occasion de vous confirmer, au nom du Gouvernement, qu'un projet de loi transposant de façon plus complète la directive vous serait prochainement présenté.

M. François Brottes.

Très bien ! Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Vous avez enfin rétabli l'équilibre que nous avions trouvé lors de l'examen initial du projet sur les modalités d'association du Parlement à l'élaboration des schémas de services collectifs : association des deux délégations parlementaires avant l'approbation des schémas par décret ; réexamen des choix stratégiques et des conditions de leur mise en oeuvre dans les schémas par un projet de loi débattu au plus tard deux ans avant l'échéance des prochains contrats de plan.

En conclusion, le texte qui résulte de cette nouvelle lecture privilégie, comme l'a rappelé votre excellent rapporteur, Philippe Duron, le projet et le contrat sur la réglementation. Il propose une approche active et vert ueuse d'un développement mieux partagé et plus conscient de ses responsabilités. Il dessine un chemin adapté à l'évolution du contexte, à la fois plus ouvert, plus décentralisé et plus à l'écoute des populations.

L'Assemblée a ainsi défini, sur la proposition du Gouvernement, les orientations et le cadre d'élaboration de la politique - partagée, contractuelle - d'aménagement et de développement durable du territoire de notre pays.

Partagée, en précisant le rôle et les axes stratégiques de l'Etat en la matière grâce aux neuf schémas de services collectifs, le cadre de l'organisation territoriale et les territoires de projet, les objectifs et les procédures pour la présence des services publics.

Contractuelle, les termes que vous avez fixés étant nécessaires, d'une part, à la négociation qui va s'engager cet été avec les régions pour les contrats de plan et les documents de programmation européens dans le cadre d'une stratégie unique pour la période 2000-2006 et, d'autre part, à la fixation des modalités d'association des collectivités territoriales, notamment les départements, et des partenaires économiques, sociaux et associatifs, à ces échéances.

Je remercie tous les parlementaires qui ont pris une part active à ce travail, en particulier Philippe Duron, rapporteur, et André Lajoinie, président de la commission de la production et des échanges, qui ont toujours eu le souci d'aller au fond des choses, et de prendre en compte les préoccupations exprimées tant par leurs collègues que par le Gouvernement. Nous avons ainsi, me semble-t-il, fait en sorte que soit concrétisé l'engagement du Premier ministre de donner un cadre nouveau, un cadre durable à la politique d'aménagement du territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.) Explications de vote

M. le président.

Nous en arrivons aux explications de vote.

La parole est à M. Félix Leyzour, pour le groupe communiste.

M. Félix Leyzour.

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous voici arrivés au terme de la deuxième lecture du projet de loi sur l'aménagement et le développement durable du territoire.

Le groupe communiste et apparentés avait voté le texte en première lecture après une discussion riche, ouverte, au cours de laquelle le texte de départ avait été complété, précisé, amendé sur de nombreux points.

Lors de son passage devant le Sénat, comme il a déjà été indiqué, le texte que notre assemblée avait adopté a été, non pas amendé, mais profondément modifié, transformé, dénaturé, ce qui fait qu'il n'a pas été possible, lors de la commission mixte paritaire, d'aboutir à un compromis.

M. Germain Gengenwin.

Vous détruisez le travail du Sénat !

M. Félix Leyzour.

Une deuxième lecture était donc nécessaire. Elle a, sur l'essentiel, permis le retour aux dispositions principales du texte adopté ici en première lecture.

Je rappelle que nous attendons de la politique d'aménagement et de développement durable du territoire, un aménagement et un développement équilibré qui prenne appui sur la diversité de nos territoires, de nos régions, qui en valorise les atouts et réponde aux besoins sociaux.

Une réelle politique d'aménagement du territoire doit donc conjuguer l'action contre les inégalités territoriales avec la lutte contre les inégalités sociales.

M. Germain Gengenwin.

Ce sont des mots !

M. Félix Leyzour.

Cette politique entre nécessairement en contradiction avec la vague libérale qui déréglemente, qui met en compétition les territoires et les travailleurs et contre laquelle il faut lutter en permanence. (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. Guy Teissier.

Sans relâche !

M. Félix Leyzour.

En abordant cette deuxième lecture, notre objectif était d'arriver à un texte qui prenne en compte les préoccupations de la population, de ses élus, dont l'application permette d'avancer vers toujours plus de démocratie, de justice, d'égalité entre les territoires, entre les gens qui y vivent et y travaillent.

Nous nous réjouissons que le texte sur lequel nous allons nous prononcer ait, entre autres points que je ne vais pas rappeler, rétabli la disposition que nous avions proposée, qui avait été retenue en première lecture par notre assemblée et supprimée par le Sénat, concernant la création de fonds régionaux, regroupant divers financements et pouvant faire appel à l'épargne régionale de façon à favoriser le développement local à travers les PME et les PMI.

Pour les territoires pertinents de développement, à côté de la région définie comme pivot de la mise en oeuvre des politiques d'aménagement, le pays a trouvé sa confirmation dans une expression souple, pragmatique, qui tient compte de la diversité des situations.

Les agglomérations sont également définies comme un espace d'aménagement aujourd'hui nécessaire, qu'il faudra mettre en place avec beaucoup de précaution.

Le département, qui est aussi une réalité incontournable dans la mise en oeuvre des politiques sociales, sportives, culturelles, d'aménagement rural et d'intervention économique, est également retenu comme partenaire dans la préparation et la mise en application des contrats de plan.

Si le rôle de pivot de la région a été reconnu, la notion de chef de file n'a pas été retenue pour éviter l'exercice de la tutelle d'une collectivité sur les autres. La concertation, l'élaboration en commun de projets, la coopération constituent la voie la meilleure pour travailler et avancer ensemble.


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Je ne cacherai pas que nous avons exprimé les plus expresses réserves sur la tentation de plus en plus fréquente d'introduire dans la loi de manière subreptice des amendements sur des questions aussi importantes et aussi complexes que la directive postale ou le devenir des télécommunications, avec, ici, les boucles locales de télécommunications. Des problèmes réels sont posés à ce niveau et il faut les aborder dans des débats globaux, comme nous l'avons fait avec la directive sur l'électricité.

Nous avions demandé le retrait de l'article introduit par le Gouvernement après que la question a été abordée par le Sénat. Nous n'avons pas été suivis et nous le regrettons. Nous nous sommes ensuite abstenus sur l'amendement gouvernemental repris par la commission.

C'est là l'expression d'approches différenciées que nous avons sur certaines questions au sein de la majorité, et il ne sert à rien de les dissimuler quand elles existent. Le débat est toujours un moyen pour avancer. Ces questions traduisent des réalités de terrain sur lesquelles, les uns et les autres, nous aurons à intervenir, à travailler, à agir pour éviter une accentuation des déséquilibres territoriaux.

Cette différence d'appréciation sur le point que je viens d'indiquer ne nous conduit pas à modifier notre vote global sur le texte rétabli dans ses dispositions principales.

Le groupe communiste et apparentés émettra donc un vote positif sur ce texte, conscient que les meilleurs textes sont ceux qui trouvent ensuite la meilleure application.

(Applaudissements sur les bancs du groupes communiste, du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. Pierre Hellier, pour le groupe Démocratie libérale.

M. Pierre Hellier.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, l'examen en nouvelle lecture de ce texte a plutôt été rapide, en comparaison avec le marathon de la première lecture, qui avait duré trois semaines et épuisé près de 1 200 amendements. Il est vrai que le débat a été tronqué. En effet, les améliorations apportées par nos collègues sénateurs ont été balayées d'un revers de manche. Déjà, lors de l'examen de ce texte en commission mixte paritaire, la majorité de gauche n'a pas souhaité établir le dialogue avec l'opposition qui était ouverte à la discussion, ce qui a conduit à l'échec de la CMP. Pourtant, le texte du Sénat était bon.

Mme Nicole Bricq.

Vous êtes député, pas sénateur !

M. Pierre Hellier.

Quelles sont les grandes mesures de votre texte, madame la ministre ?

Un article 19 qui se borne à confirmer les pays créés par la loi de février 1995. Certes, l'intervention du préfet a été réintroduite pour mieux établir l'intervention de l'Etat dans le processus de constitution des pays. Cette mesure augure mal de l'avenir puisqu'elle prépare, à plus long terme, la reconnaissance des pays comme échelons administratifs supplémentaires.

Un article 20 sur les agglomérations qui, tout le monde l'a déjà dit, aurait plus sa place dans le projet de loi Chevènement sur l'intercommunalité.

Mme Nicole Bricq.

C'est complémentaire !

M. Pierre Hellier.

Vous avez réintroduit le seuil de 5 0 000 habitants avec une commune-centre de 15 000 habitants, alors que les sénateurs avaient assoupli ce dispositif, qu'ils avaient renvoyé à la discussion de la loi relative à la coopération intercommunale.

Des schémas de services collectifs entre lesquels il manque un lien de cohérence puisque vous aves supprimé le schéma national.

Des lacunes dans le schéma des services collectifs de transport de personnes et de marchandises, cette disposition étant totalement muette sur des points aussi importants que les infrastructures, les fournitures de services, les plates-formes multimodales, l'amélioration de la qualité des services, l'impact prévisible des nouvelles directives européennes et sur l'Europe des transports.

Une transposition hâtive, tardive et partielle de la directive européenne sur le service postal, alors que, vu l'enjeu, celle-ci aurait mérité un projet de loi spécifique et débattu, comme cela a été le cas pour l'électricité.

La création d'une délégation parlementaire à l'aménagement du territoire, considérée par mon collègue Jean Proriol comme une « échappatoire consentie du bout des lèvres, et destinée à refuser au Parlement le droit de débattre de l'aménagement du territoire ». Cette délégation ne voit le jour que parce que vous refusez de soumettre au vote du Parlement les schémas de services coll ectifs. Cette disposition montre bien que le Gouvernement, au-delà de son discours, n'entend pas décentraliser sa politique d'aménagement du territoire.

Votre projet de loi se veut d'aménagement du territoire, mais il ne concerne en fait que les zones urbaines.

Aucune mesure sérieuse pour la montagne n'est envisagée ni aucune mesure pour lutter contre la désertification du monde rural, alors que l'urbanisation mal maîtrisée est à l'origine de problèmes sociaux de plus en plus graves.

Vous nous imposez la création de maisons de services publics pour maintenir ces derniers dans les petites communes, mais vous vouliez également faire participer ces petites communes, qui manquent déjà de moyens, au financement de ces services publics, alors que, dans les villes, ils sont gratuits. Grâce à la sagesse de cette assemblée, cette dernière mesure a pu être évitée et nous nous en félicitons.

Il manque enfin à votre texte un réel volet économique. Lors de la discussion au Sénat, notre collègue Jean-Pierre Raffarin a introduit des dispositions fort intéressantes pour le développement économique des territoires, en particulier pour les PME.

Il s'agissait notamment de créer un fonds commun de placement de proximité, sur le modèle du fonds commun de placement dans l'innovation, pour drainer l'épargne de proximité des particuliers vers les entreprises des zones fragiles, d'inciter à la mise en réseau des entreprises au sein des territoires, par le biais du fonds national de développement des entreprises, sur le modèle des grappes d'entreprises et des districts industriels italiens, d'alléger les droits sur les transmissions anticipées d'entreprises en milieu rural et urbain sensible pour y maintenir l'activité, et de proroger les exonérations fiscales, notamment les exonérations d'impôt sur les bénéfices, instituées par la lo i de 1995 pour les entreprises qui s'implantent dans les zones fragiles, comme les zones urbaines et les zones rurales sensibles.

Ce sont de telles mesures en faveur des PME et de l'emploi qui sont le principal gage du développement durable. Or vous n'avez pas cru bon de les soutenir, madame la ministre,...

Mme la ministre de l'aménagement du territoire et de l'environnement.

Vous non plus ! Il n'y a pas eu un député de votre groupe pour les soutenir !

M. Pierre Hellier.

... alors que la priorité du gouvernement auquel vous appartenez est bien l'emploi. Il est vrai que ce gouvernement n'en est pas à une contradiction près.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 11 MAI 1999

Pour toutes ces raisons, et comme lors de la première lecture, le groupe Démocratie libérale votera unanimement contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. Yves Coussain, pour le groupe UDF.

M. Yves Coussain.

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, 44 % des Français préféreraient vivre dans une petite commune rurale et 48 % d'entre eux estiment que, dans dix ans, la vie la plus moderne sera la vie à la campagne. C'est là le résultat d'un tout récent sondage.

Il est clair que la majorité de nos compatriotes préfèrent la campagne à la grande ville. La loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire devrait avoir en son coeur cette vision prospective et se fixer comme objectif de donner aux Français la possibilité de choisir véritablement leur lieu de vie. Actuellement, en effet, en raison de la concentration des emplois, des difficultés qu'il y a encore à circuler dans certains espaces, de l'absence de services efficaces et modernes, ce choix n'existe pas.

A l'évidence, 150 à 200 ans d'industrialisation et de concentration urbaine ont déséquilibré nos territoires, vidé nos campagnes et surpeuplé les métropoles urbaines.

Les logiques nouvelles de la société de l'information et de la communication peuvent favoriser un rééquilibrage démographique à condition qu'une forte volonté politique, et non une simple gestion destinée à guérir les traumatismes liés à la concentration des habitants sur 10 % du territoire et à la désertification des 90 % restants, se mette en place et s'exprime.

Le projet sur lequel nous allons voter devrait exprimer cette volonté. Nos collègues sénateurs lui ont donné du corps et de l'ambition, mais, revu et corrigé par nos débats, il ressemble sur le fond au projet initial, en dépit, il faut le reconnaître, d'avancées intéressantes en matière d'équipements et de services de l'information et des télécommunications. A ce sujet, je souhaiterais remercier notre rapporteur Philippe Duron pour son esprit d'ouverture.

Outre ce manque de vision à long terme et l'absence de la volonté d'infléchir des tendances naturelles hostiles à un bon aménagement qu'exigerait le seul titre de la loi, voici à nouveau plusieurs reproches que nous adressons à ce projet.

Il ne clarifie pas les compétences et ne parle pas de péréquation des ressources.

Il exclut le Parlement de l'aménagement du territoire.

Il n'y a pas d'objectif contraignant et clair en matière d'équipements et d'infrastructures de communications, et, sur ce sujet, madame la ministre, nous sommes en total désaccord. Pour nous, la bonne circulation des hommes et des marchandises est un préalable et la condition indispensable à toute démarche d'aménagement du territoire.

Autres reproches : le risque de complication des procédures avec l'obligation pour les pays de se constituer en structures nouvelles et le refus d'intégrer le volet économique dans un projet dont la première priorité affichée était de favoriser l'emploi.

Voilà pourquoi, entre autres raisons, le groupe UDF votera contre ce projet de loi.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Serge Poignant, pour le groupe du Rassemblement pour la République.

M. Serge Poignant.

Madame la ministre, nous arrivons au terme de la deuxième lecture de ce projet de loi qui vaudra nouvelle orientation pour l'aménagement du territoire. Le Sénat, dans un esprit constructif, avait apporté des améliorations fort intéressantes, mais la majorité de l'Assemblée voulait manifestement que la CMP échoue, cela a été rappelé à plusieurs reprises. J'aurais aimé que vous acceptiez les avancées proposées par le Sénat sur quelques points majeurs, sur lesquels je reviendrai. Ce ne fut pas le cas au cours de ce débat et je le regrette profondément.

Le schéma de synthèse : rejeté. Il permettait de réunir dans un document unique l'ensemble des schémas de services collectifs et d'être un document de référence national et européen.

La notion de schéma de services et d'équipements : envolée. Il est pourtant évident que développement durable et infrastructures d'équipements vont de pair et sont complémentaires.

La consultation du Parlement : refusée. Vous venez de priver la représentation nationale d'une analyse et d'un débat sur les grandes orientations fixées à l'horizon 2020, considérant qu'une délégation parlementaire suffisait.

Le volet économique : absent. J'avais cru comprendre que le Gouvernement avait fait de l'emploi sa priorité.

Aider les entreprises à se développer, là où elles en ont besoin, vous n'en avez montré ni la volonté ni l'ambition.

Pourtant, vous avez introduit subrepticement un article concernant tout un domaine, celui de la directive postale.

Vous venez de supprimer quatre points majeurs du texte que le Sénat avait proposés, suppressions que nous ne pouvons accepter - je ne parlerai pas du reste - car elles sont trop significatives de votre état d'esprit. Je donne acte néanmoins au rapporteur de la commission, notre collègue Philippe Duron, de ses efforts objectifs pour arriver à certaines conciliations de bon sens.

Nous revenons globalement au texte qui a été initialement voté en première lecture, vous l'avez dit vousmême, texte que nous continuons à trouver déséquilibré et dépourvu d'ambition pour notre pays. Le groupe RPR n'a pas trouvé de réponses aux préoccupations essentielles que j'ai formulées au début de ce débat. Aussi votera-t-il contre votre projet de loi à l'issue de cette deuxième lecture. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. Patrick Rimbert, pour le groupe socialiste.

M. Patrick Rimbert.

Nous allons nous prononcer sur la loi d'orientation et d'aménagement durable du territoire après trois longs débats : deux dans cette assemblée et un au Sénat. Le projet de loi initial a été modifié, enrichi, même par le Sénat. Certes, toutes ses propositions ne s'y retrouvent pas, mais ce n'est pas la même majorité qu'à l'Assemblée nationale, dois-je vous le rappeler ?

M. Claude Gaillard.

Et alors ?

M. Patrick Rimbert.

Quels sont les éléments sur lesquels nous allons nous prononcer aujourd'hui ?

Le dévelopement durable ne sera plus un sujet de colloque ou de séminaire, mais une notion inscrite dans la loi, qui devra être prise en compte dans les contrats entre l'Etat et les collectivités territoriales.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 11 MAI 1999

Sont pris en compte des territoires pertinents de projets.

La région est réaffirmée comme tête de file de l'aménagement du territoire. C'est là où s'établira la statégie de l'aménagement du territoire, en concertation bien entendu avec l'Etat ; là où auront lieu les principales mobilisations.

Il y a aussi les agglomérations. On ne peut déplorer qu'elles soient des lieux où il y a du chômage, voire de la violence, sur lesquels pèsent de mauvais soupçons comme je viens de l'entendre à l'instant - et refuser que les hommes et les femmes qui y habitent puissent prendre leur destin en main et élaborer un projet d'agglomération. C'est ce que cette loi va leur permettre et c'est une chose essentielle.

Les pays, enfin, seront des associations volontaires de collectivités pour construire des chartes de développement.

L'objectif est d'associer des agglomérations, mais aussi les pays ruraux ; bref, d'associer les hommes et les femmes d'un territoire pour que ceux-ci, ensemble, fassent des propositions et décident de leur destin.

J'ai entendu dire que les zones rurales sensibles et les territoires en difficulté en milieu rural étaient abandonnés. Dois-je rappeler que ce projet reprend une partie de la loi Pasqua qui a prévu un certain nombre de dispositions pour ces territoires ? Comme ces articles ne sont pas annulés, soit la loi Pasqua est critiquable - sans doute -, soit certains ont fait preuve de quelque étourderie.

Les députés socialistes sont très vigilants à l'égard de ces territoires. Lorqu'il existe des fonds en leur faveur, nous votons de quoi les financer. Nous ne laissons pas des enveloppes creuses, ce que a parfois été le cas.

L'association des forces vives des territoires et de l'ensemble du Parlement a un sujet majeur, celui de l'aménagement. Que ce soit au niveau national, au niveau régional, ou au niveau des agglomérations et des pays, le conseil de développement associera à cet enjeu majeur les milieux économiques, sociaux, culturels et associatifs.

C'est un élément qui n'avait pas été pris en compte. Or ce texte met l'accent non seulement sur l'aménagement du territoire mais aussi sur le fait que la mobilisation des hommes et des femmes est une garantie du développement des territoires.

Grâce à la création d'une délégation parlementaire au Sénat et à l'Assemblée nationale, le Parlement pourra se saisir à tout instant des problèmes de l'aménagement du territoire. Il n'y aura pas seulement un débat unique puisque, tout au long de la session, les délégations parlementaires pourront faire des propositions et des évaluations, et avancer sur ce sujet.

Je rappelle également, pour ceux qui l'auraient oublié, que les schémas de transport seront soumis au Parlement après leur mise en oeuvre et leur évaluation.

Par ailleurs, cette loi d'orientation, si elle mobilise les territoires, les collectivités et les habitants, réaffirme aussi les engagements de l'Etat. En effet, grâce à neuf schémas de services collectifs, et non par le biais d'un petit document de synthèse qui fait bien mais qui est tellement de synthèse qu'il ne contient pas grand-chose, l'Etat indique clairement aux territoires la stratégie à suivre.

De même, l'Etat s'est engagé - c'est inscrit dans la loi et le CIADT en sera l'un des moyens - à faire en sorte que modernisation de l'Etat soit synonyme d'aménagement, ce qui n'a pas été et ce qui n'est pas toujours le cas. Le préfet en sera le garant, que ce soit à l'échelon régional ou à l'échelon départemental.

Grâce notamment au rapporteur, dont je tiens à souligner ici la gentillesse, la capacité d'écoute et d'impulsion, à M. Brottes, pour le schéma de La Poste, à M. Filleul, pour le schéma des transports, à M. Nayrou pour le schéma des équipements sportifs, le groupe socialiste a contribué, comme l'a relevé Mme la ministre, à améliorer profondément le projet de loi, lequel répond désormais totalement à sa volonté et à ses désirs et, je l'espère, à ceux de cette assemblée.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Pour conclure, je dirai que, en votant ce texte, l'Assemblée nationale fera clairement le choix d'une mobilisation générale, non pour reconstituer de façon nostalgique des espaces à l'image de ceux du passé, mais pour construire et développer des territoires impliquant les femmes et les hommes qui les habitent et les collectivités qui les représentent. Elle se donnera la capacité de suivre, d'évaluer et de se prononcer sur la politique d'aménagement du territoire. Un territoire, un projet, un contrat : voilà ce à quoi nous sommes conviés. Le groupe socialiste votera ce projet de loi.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est M. Jean-Michel Marchand, pour le groupe Radical, Citoyen et Vert.

M. Jean-Michel Marchand.

Dans quelques minutes nous allons voter en nouvelle lecture le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire. Je crois que nous avons bien fait de rétablir le texte que nous avions adopté en première lecture, tout en prenant en compte certains enrichissements apportés par le Sénat et la commission. A cet égard, je voudrais saluer le travail et la très grande compétence de notre rapporteur.

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Excellent rapporteur !

M. Jean-Michel Marchand.

Vous savez bien, madame la ministre, que notre vote vous est acquis, mais je voudrais revenir sur trois points.

Le premier concerne l'aménagement du territoire.

Celui-ci s'inscrit parmi les priorités stratégiques de la politique gouvernementale que sont l'emploi et la cohésion sociale, lesquelles ne peuvent être que largement partagées sur l'ensemble de ces bancs.

Votre projet permet d'être opérationnel grâce aux schémas de services collectifs, qui sont les garants du rôle de cadrage et de régulation dévolu à l'Etat. Il contribue aussi au renforcement de la décentralisation en reconnaissant les compétences de la région dans le domaine de l'aménagement du territoire. Il permet enfin la mise en oeuvre d'une véritable démocratie participative de tous les acteurs de terrain.

Qui peut ne pas être en accord avec l'élaboration des schémas régionaux par les acteurs de terrain ? Qui peut ne pas être en accord avec la création de conseils de développement permettant la mise en synergie des acteurs locaux et s'appuyant sur les comités de bassin d'emploi, les comités d'expansion et les agences de développement.

Le deuxième point est relatif à la structuration de notre t erritoire en pays et communautés d'agglomération.

Nous avons eu à ce propos des débats de grande qualité, qui nous ont permis de parvenir, me semble-t-il, à des


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définitions et à une articulation fort convenable entre pays, comme territoires de projet, et communautés d'agglomération. Nous avons également trouvé une articulation entre pays et parcs naturels régionaux. Tout cela traduit la complémentarité et la solidarité entre l'urbain et le rural. Qui peut être en désaccord avec de tels concepts ? J'en viens au dernier point, qui a trait au développement durable. Celui-ci est au service du développement économique et de la création d'emplois, fait référence aux recommandations inscrites dans les agendas 21 locaux finalisés lors du sommet de Rio, met en avant le rôle essentiel tenu par les services publics, considère d'une façon globale les questions économiques, sociales, culturelles et environnementales, et, enfin, prend en compte la préservation des ressources naturelles, des espaces, des espèces et des milieux. Qui peut ne pas être d'accord avec un tel concept ? Pour conclure, madame la ministre, je dirai que cette loi trace des orientations pour les vingt prochaines années, le Parlement gardant le pouvoir de rediscuter ces orientations et de les réactualiser. Ce texte repose sur un triptyque qu'il me plaît de rappeler : un projet, un territoire, un contrat. Ce triptyque résume la philosophie de ce texte et en fait sa force.

M. Eric Doligé.

Quelle chute !

M. Jean-Michel Marchand.

Nous avons besoin de cette loi en urgence pour donner encore plus de sens et de cohérence à la réflexion et au travail d'élaboration des futurs contrats de plan. C'est pourquoi, madame la m inistre, je peux vous assurer du vote positif de l'ensemble du groupe Radical, Citoyen et Vert.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert, du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Nous en avons terminé avec les explications de vote.

Vote sur l'ensemble

M. le président.

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi.

(L'ensemble du projet de loi est adopté.)

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

3

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président.

Ce soir, à vingt et une heures, troisième séance publique : Discussion du texte élaboré par la commission mixte paritaire sur les dispositions restant en discussion du projet de loi portant diverses mesures relatives à la sécurité routière et aux infractions sur les agents des exploitants de réseau de transport public de voyageurs : M. René Dosière, rapporteur (rapport no 1580).

(Procédure d'examen simplifiée.)

Suite de la discussion de la proposition de loi, nos 1515 - 1503 rectifiée 1353 - 1514 - 1560, de Mme Gilberte Marin-Moskovitz tendant à favoriser le développement des soins palliatifs et l'accompagnement des malades en fin de vie : Mme Gilberte Marin-Moskovitz, rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport no 1563).

La séance est levée.

(La séance est levée à seize heures cinquante.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT