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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

SOMMAIRE

PRÉSIDENCE DE M. LAURENT FABIUS

1. Questions au Gouvernement (p. 8105).

AVENIR DE L'AFP (p. 8105)

M. Michel Françaix, Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication.

POLITIQUE ÉTRANGÈRE DES ÉTATS-UNIS (p. 8106)

MM. Paul Quilès, Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

ACCORD DE STABILISATION ET D'ASSOCIATION AVEC LA MACÉDOINE (p. 8106)

MM. Philippe Duron, Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

POLITIQUE FORESTIÈRE (p. 8107)

MM. François Brottes, Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget.

FINANCEMENT DE LA RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL (p. 8108)

M. Thierry Mariani, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

FINANCEMENT DE LA CMU (p. 8109)

M. Philippe Auberger, Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

FINANCEMENT DE LA RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL (p. 8110)

Mmes Marie-Thérèse Boisseau, Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

RÉFORME DES TRIBUNAUX DE COMMERCE (p. 8111)

M. Pierre Albertini, Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

DÉLINQUANCE ET INSÉCURITÉ (p. 8112)

MM. Francis Delattre, Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

RÉGULARISATION DES SANS-PAPIERS (p. 8113)

MM. Bernard Birsinger, Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

VISITE DU PRÉSIDENT IRANIEN EN FRANCE (p. 8114)

MM. Jean Pontier, Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

D

EUXIÈME CONFÉRENCE MONDIALE SUR L'E

DUCATION (p. 8115)

MM. Pierre Carassus, Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

2. Loi de finances pour 2000 (première partie). - Suite de la discussion d'un projet de loi (p. 8116).

M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget.

M. Didier Migaud, rapporteur général de la commission des finances.

EXPLICATIONS DE VOTE (p. 8119)

MM. Philippe Auberger, Christian Cuvilliez, Jean-Jacques Jégou, Jean Rigal, Gilbert Gantier, Jean-Louis Idiart.

VOTE SUR L'ENSEMBLE DE LA PREMIÈRE PARTIE (APPLICATION DE L'ARTICLE 44, ALINÉA 3, DE LA CONSTITUTION) (p. 8125)

Adoption, par scrutin, par un seul vote, des dispositions ayant fait l'objet de la seconde délibération et de l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 1999.

Suspension et reprise de la séance (p. 8125)

PRÉSIDENCE DE M. PATRICK OLLIER

3. Rappel au règlement (p. 8125).

MM. Arnaud Montebourg, le président.

4. Loi de financement de la sécurité sociale pour 2000. Discussion d'un projet de loi (p. 8126).

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour les recettes et l'équilibre général.

M. Claude Evin, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour l'assurance-maladie et les accidents du travail.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour l'assurance vieillesse.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteur de la commission des affaires culturelles, pour la famille.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles.

Renvoi de la suite de la discussion à la prochaine séance.

5. Fin de la mission temporaire d'un député (p. 8145).

6. Adoption d'une résolution en application de l'article 88-4 de la Constitution (p. 8145).

7. Ordre du jour de la prochaine séance (p. 8145).


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COMPTE RENDU INTÉGRAL

PRÉSIDENCE DE M. LAURENT FABIUS

M. le président.

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

M. le président.

Mes chers collègues, je vous indique que, à l'issue des questions au Gouvernement, je ne suspendrai pas la séance et que nous passerons immédiatement aux explications de vote et au vote, par scrutin public, sur la première partie du projet de loi de finances pour l'an 2000.

1

QUESTIONS AU GOUVERNEMENT

M. le président.

L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par les questions du groupe socialiste.

AVENIR DE L'AFP

M. le président.

La parole est à M. Michel Françaix.

M. Michel Françaix.

Ma question s'adresse à Mme la ministre de la culture et de la communication.

La présentation par le nouveau président-directeur général de l'AFP de son plan de développement stratégique suscite, nous le constatons tous, des inquiétudes.

L'explosion d'Internet et du multimédia nécessite des investissements massifs et, sans doute, il est vrai, des transformations profondes dans le fonctionnement de l'AFP. Même si le tout multimédia érigé en axe unique de développement me paraît hasardeux -, d'ailleurs, à chaque fois qu'un nouveau média est apparu, la mort programmée des autres ne s'est jamais produite - il est évident que la recherche de capitaux et de partenaires, y compris privés, en fonction des projets, est sans doute utile. Mais cela ne doit pas se faire au détriment des métiers de base, des missions et des valeurs de l'Agence à laquelle nous sommes tous attachés. La rentabilité est une condition indispensable au développement de l'Agence mais elle n'est pas sa raison d'être, laquelle est de fournir dans le monde entier une information impartiale et digne de confiance.

Nous le savons tous, le paradoxe est que l'AFP est une entreprise d'intérêt national mais qu'elle est, de par sa vocation, une entreprise mondiale.

C'est pourquoi je souhaite que les perspectives d'avenir de l'AFP soient approfondies en associant les salariés, bien évidemment les représentants de la presse et aussi le Parlement.

Pouvez-vous, madame la ministre, nous précisez votre position sur l'avenir de l'AFP ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.

Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication.

Monsieur le député, l'AFP est et doit rester une agence française au rayonnement mondial, reconnue pour l'indépendance, l'objectivité et la qualité de l'information qu'elle délivre. A cet égard, elle contribue d'ailleurs à défendre sur le plan international la diversité culturelle.

Nous devons tout faire pour empêcher que l'AFP ne soit condamnée à l'immobilisme ou au déclin par la révolution d'Internet et une concurrence de plus en plus âpre sur le marché de l'information.

Il y a urgence. Différer ou retarder la mise en oeuvre d'un développement de l'AFP serait compromettre gravement la situation concurrentielle de l'agence sur les marc hés aujourd'hui en pleine expansion. Pour qu'elle demeure une agence mondiale de référence, elle ne doit pas manquer le tournant d'Internet et du multimédia.

Elle doit bénéficier des moyens d'une véritable entreprise de communication et devenir un acteur majeur de la société de l'information. C'est pour cela qu'il est nécessaire - et vous l'avez dit, monsieur le député - que l'AFP dispose d'un capital et puisse nouer des partenariats.

Cependant, la mission d'information, telle qu'elle incombe historiquement à l'AFP, est une mission particulière d'intérêt général. Cette mission doit s'accomplir à l'abri des effets nocifs que pourrait exercer sur son indépendance le seul jeu des forces du marché. La réforme de l'AFP ne peut, dès lors, se faire à n'importe quelle condition. En toute hypothèse, la pérennité de l'engagement de l'Etat et l'indépendance de l'information resteront garanties par la loi. L'organisation de l'AFP et ses missions essentielles continuent à être déterminées par la loi et je dis aussi de la façon la plus nette qu'il est exclu que l'AFP puisse être contrôlée par des entreprises privées.

En un mot, il n'y aura pas, monsieur le député, de privatisation de l'AFP. L'Etat, les partenaires historiques de l'agence, les personnels conserveront leur place essentielle et déterminante dans la nouvelle AFP.

Comme l'a souhaité le Gouvernement, le président de l'agence a engagé une large concertation avec les personnels, bien sûr, notamment dans le cadre du comité d'entreprise, avec la presse également. Le collège presse du conseil de l'agence a constitué un groupe de travail sur la réforme dont le Gouvernement et le président attendent beaucoup.

Le projet de réforme sera donc arrêté à l'issue d'un débat, associant de la façon la plus large les salariés, la presse et tous ceux qui sont concernés par l'avenir de l'agence.

Le renouveau de l'Agence France Presse est une cause nationale et c'est au Parlement qu'il incombera de recréer les fondements d'une agence moderne, pérenne, indépendante et ouverte au monde. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)


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POLITIQUE ÉTRANGÈRE DES ÉTATS-UNIS

M. le président.

La parole est à M. Paul Quilès.

M. Paul Quilès.

Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.

Un haut responsable militaire américain, commandant les opérations aériennes lors du conflit du Kosovo, vient de faire des déclarations inadmissibles devant le Sénat des

Etats-Unis. Le général Short a, en effet, affirmé que le contrôle politique exercé par la France sur les objectifs assignés aux forces alliées avait prolongé le conflit et mis en danger la vie des pilotes.

Un député du groupe socialiste.

C'est scandaleux !

M. Paul Quilès.

Il a demandé qu'à l'avenir, en cas d'opérations aériennes communes, les Etats-Unis puissent imposer sans objection leurs propres choix politiques et militaires.

M. Jacques Myard.

Etonnant, non ?

M. Paul Quilès.

Pour le général Short, les choses sont simples et sa formule est percutante : « Si tu ne peux pas jouer avec les grands, reste à la maison ! » Ou plutôt, en traduisant littéralement : « Quand on n'est pas un grand chien, on reste à la porte et on n'a rien à dire. » Et pour

ceux qui n'auraient pas compris, il a ajouté : « Le grand chien, c'est l'armée de l'air américaine. »

Ces déclarations n'ont pas été désavouées par les autorités politiques américaines qui se sont contentées de dire que « l'unité de l'Alliance avait un prix ».

Monsieur le ministre, comment interprétez-vous ces propos ambigus ? Avez-vous l'intention de faire des représentations auprès du gouvernement américain, pour qu'il reconnaisse, sans équivoque, le caractère décisif de la c ontribution française à la solution du conflit du Kosovo ? Ces déclarations surviennent dans un contexte où l'unilatéralisme dont font preuve les Etats-Unis se renforce. Pour preuves, je citerai le refus du Sénat américain de ratifier le traité d'interdiction des essais nucléaires et la volonté affichée de relancer le projet du président Reagan de guerre des étoiles. Tout cela, à l'évidence, risque de conduire à une reprise de la course aux armements. Dans le même temps, la politique américaine réduit les Nations unies à l'impuissance en bloquant la nécessaire réforme du Conseil de sécurité et en accumulant les dettes à l'égard de l'ONU, dettes qui se montent actuellement à plus de 10 milliards de francs.

M. Charles Cova.

C'est scandaleux !

M. Paul Quilès.

Monsieur le ministre, nous aimerions savoir comment la France compte réagir à cette évolution t out à fait inquiétante de la politique américaine.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

Monsieur le député, la contribution que la France avait décidé, souverainement et librement, d'apporter à la solution de l'affaire du Kosovo, d'abord diplomatiquement puis militairement, a été saluée à de nombreuses reprises, sans ambiguïté, de façon élogieuse, par tous nos alliés, tant par nos alliés européens que par les Etats-Unis.

A propos de la déclaration du général Short...

M. Jacques Myard.

C'est un peu court !

M. le ministre des affaires étrangères.

... je redirai que l'Alliance Atlantique est une alliance de nations souveraines au sein de laquelle il n'est pas question d'accepter que l'un des pays, quels que soient les moyens dont il dispose, puisse trancher pour les autres.

La façon dont nous nous sommes comportés dans l'affaire du Kosovo visait à démontrer chaque jour que, quand nous disions que nous ne faisions pas la guerre au peuple serbe mais à un régime qui s'était rendu odieux à toute l'Europe, cela avait un sens précis : épargner le plus possible les victimes civiles d'opérations qu'il fallait, malgré tout et malheureusement, conduire.

C'est ainsi que la France s'est comportée dans la prise de décisions quotidienne et il n'est pas question de laisser l'OTAN évoluer vers ce qu'a l'air de souhaiter le général que vous citiez.

Quant à l'unilatérisme de ce que j'appelle personnellement l'« hyperpuissance américaine », pour bien montrer que c'est bien différent de la « superpuissance » et que les choses ont changé de dimension, avec les pensées qui peuvent en découler comme en témoignent de telles déclarations, je dirai simplement que dans le monde actuel, plus on est puissant, plus on doit avoir le sens des responsabilités. C'est ce que nous attendons de nos alliés, c'est ce que nous leur rappelons et ne manquerons pas de leur rappeler.

(Applaudissements sur les bancs du groupes ocialiste, du groupe communiste, du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) ACCORD DE STABILISATION ET D'ASSOCIATION AVEC LA MACÉDOINE

M. le président.

La parole est à M. Philippe Duron.

M. Philippe Duron.

Ma question s'adresse à M. le ministre des affaires étrangères.

Le 9 juin dernier, après la signature de l'accord militaire de Kumanovo, l'OTAN suspendait, au bout de deux mois, ses frappes sur la Yougoslavie. Cette opération militaire avait été déclenchée le 24 mars afin de mettre un terme à la politique de purification ethnique menée par le régime de Milosevic au Kosovo. Cette crise a eu un fort impact sur la région des Balkans, au coeur même de notre continent.

L'Union européenne a maintenant un rôle essentiel à jouer dans l'aide à apporter à ces pays, qu'il s'agisse de l'Albanie, de la Bosnie, de la Macédoine ou de la Croatie.

Il y va de sa crédibilité. Il y va aussi de la stabilité de la région.

Le 8 septembre dernier, la Commission européenne proposait aux quinze Etats membres de l'Union de l'autoriser à négocier un accord de stabilisation et d'association avec l'ancienne République yougoslave de Macédoine.

Cet accord d'un genre nouveau est destiné à renforcer las tabilité politique et économique de cette jeune République et, au-delà, de la région tout entière.

La Commission propose que cet accord contienne des dispositions relatives à la coopération de l'Union européenne avec la Macédoine dans de très nombreux


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domaines, notamment la justice et les affaires intérieures, a insi qu'un engagement de la Macédoine d'ajuster progressivement sa législation sur celle de l'Union européenne. Cet accord de stabilisation et d'association devrait également permettre l'établissement d'une zone de libre-échange entre l'Union européenne et la Macédoine dans un délai de dix ans après son entrée en vigueur.

Un tel accord constituerait un élément essentiel de la contribution de l'Union européenne à la stabilité de ce pays alors même que les élections présidentielles, qui se tiendront le 31 octobre prochain, verront le départ du président Gligorov qui a présidé à l'émergence de ce jeune Etat. Par cet accord l'Union européenne contribuerait également de manière importante au pacte de stabilité pour l'Europe du Sud-Est adopté le 10 juin dernier.

Le début des pourparlers entre la Commission et la République de Macédoine est soumis à l'approbation d'un mandat de négociation par les Etats membres. J'aimerais donc connaître, monsieur le ministre, la position du gouvernement français à ce sujet.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

Monsieur le député, vous avez raison d'insister sur l'importance de la Macédoine dans l'avenir des Balkans.

Au-delà de l'affaire du Kosovo, au-delà de ce qu'il a fallu faire il y a quelques années pour la Bosnie, au-delà des problèmes que pose l'Albanie, nous voulons naturellement apporter à l'ensemble des pays de cette région, du sud-est de l'Europe, une aide et une coopération qui soient les plus adaptées à leurs besoins.

La Macédoine est un pays qui a fait face avec beaucoup de sagesse aux problèmes de la région. Ainsi la question des relations entre la minorité albanophone et les autres macédoniens y est traitée avec un plus grand sens des responsabilités que dans certains pays voisins.

Nous voulons les aider et les encourager.

C'est pourquoi l'Union européenne a mis au point un nouveau type d'accords, des accords de stabilisation et de coopération, qui visent à accompagner l'ensemble de ces pays dans le cadre du pacte de stabilité dont la mise en oeuvre est quelque peu bloquée aujourd'hui du fait que le changement attendu en Serbie n'a pas encore eu lieu - mais il aura lieu. Nous procéderons par une approche globale tout en traitant chaque pays en fonction de ses problèmes particuliers. Dans ce cadre, nous aiderons la Macédoine dans son cheminement vers l'Union européenne à travers les accords que vous avez cités et que nous soutiendrons.

POLITIQUE FORESTIÈRE

M. le président.

La parole est à M. François Brottes.

M. François Brottes.

Ma question s'adresse à M. le secrétaire d'Etat au budget.

La loi de finances comporte un grand nombre de baisses d'impôts, notamment par le biais de nombreuses suppressions de taxes. (« Faux ! Faux ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Ne vous en déplaise, chers collègues ! Concernant, par exemple, la forêt et la filière bois, deux mesures viennent anticiper sur la prochaine loi de modernisation forestière. Il s'agit, d'une part, de la suppression de la taxe qui alimentait le fonds forestier national et, d'autre part, de la suppression de la taxe sur le défrichement.

Il va de soi qu'une baisse d'impôt est toujours une bonne nouvelle. Encore faut-il expliquer clairement, pour le FFN, comment et à quelle hauteur il sera compensé, et, pour la taxe sur le défrichement, quelles mesures accompagneront - avant et après le vote - la loi forestière afin que cette suppression ne constitue pas un signal fort encourageant un déboisement sauvage et intempestif, comme ce pourrait être le cas, par exemple, dans le massif forestier landais, où l'on risque ainsi de déstabiliser l'équilibre qui existe entre la ressource et la filière.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat au budget.

M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget.

Monsieur le député, je vais répondre à votre question en mon nom propre et au nom de Jean Glavany, retenu par un conseil des ministres de l'agriculture à Bruxelles.

Vous le savez, la forêt est une priorité importante du Gouvernement.

M. Jacques Myard.

Langue de bois ! (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le secrétaire d'Etat au budget.

Un de vos collègues, M. Jean-Louis Bianco, a produit sur ce sujet un rapport remarquable dont le titre est : « Un enjeu pour le futur ».

Monsieur le député, vous avez participé au dialogue sur ce sujet en organisant un colloque (« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République. Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste) sur l'avenir de la forêt. Au cours de ce colloque, M. Jean Glavany a annoncé que le Fonds forestier national serait remis à niveau, alors qu'il avait été très négligé entre 1993 et 1997 (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), et que les taxes qui alimentent ce fonds seraient diminuées.

Dans le projet de loi de finances dont j'espère, mesdames et messieurs de l'opposition, que vous allez le voter dans un instant (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants),...

M. Bernard Accoyer.

Vous croyez au Père Noël !

M. le secrétaire d'Etat au budget.

... figurent deux dispositions.

La première est l'intégration du fonds forestier national au budget du ministère de l'agriculture et de la forêt, conformément aux recommandations de transparence de la Cour des comptes. Bien que ce fonds soit intégré, des articles isolés permettent de continuer à en identifier les crédits, lesquels vont être majorés, passant de 417 millions de francs en 1999 à 482 millions de francs en l'an 2000.

Voilà une progression - 65 millions de francs - que l'on n'avait pas vue depuis longtemps.

Ensuite, deux taxes, la taxe forestière et la taxe sur les défrichements, sont supprimées dans le but d'alléger les impôts, notamment la taxe forestière sur les entreprises de sciage.


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En ce qui concerne le défrichement, vous vous faites l'écho des inquiétudes des professionnels, qui craignent que la suppression de cette taxe n'encourage de forts défrichements.

La réponse à votre question, monsieur le député, se trouve, comme vous l'avez dit, dans la prochaine loi d'orientation forestière que le Gouvernement est en train de préparer. D'ici là, des dispositions transitoires seront prises pour éviter ce risque. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

Nous passons aux questions du groupe du Rassemblement pour la République.

FINANCEMENT DE LA RÉDUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL

M. le président.

La parole est à M. Thierry Mariani.

M. Thierry Mariani.

Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la Démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M adame la ministre, vous avez, pendant deux semaines, tenté de nous expliquer que votre réforme sur la réduction autoritaire du temps de travail à 35 heures était financée.

Mme Odette Grzegrzulka.

Et elle a formidablement réussi !

M. Thierry Mariani.

On avait du mal mais on finissait par avoir un doute.

Pendant deux semaines, malgré nos protestations, malgré le refus des partenaires sociaux de contribuer à ce qui constituait un véritable hold-up sur les fonds sociaux, vous vous êtes obstinée et vous nous avez répondu quelquefois avec mépris, souvent avec mauvaise foi, toujours avec l'autosatisfaction qui caractérise votre Gourvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Aujourd'hui, sous la pression unanime et légitime des partenaires sociaux, vous renoncez à faire appel aux organismes paritaires pour financer votre projet.

M. Jacques Myard.

Ça s'arrose !

M. François Goulard.

Elle a cédé !

M. Thierry Mariani.

Mais ce recul - cette retraite -...

M. Jacques Myard.

La Bérézina !

M. Thierry Mariani.

... tout comme votre financement, n'est que virtuel.

En effet, vous allez prélever 5,6 milliards de droits sur les alcools qui étaient jusqu'à présent versés au fonds de solidarité vieillesse pour compenser directement le coût de la réduction du temps de travail, mais, dans le même temps, vous prélevez la même somme à la sécurité sociale pour alimenter le fonds de réserve des retraites, qui devrait être pour partie financé par les excédents du fonds de solidarité vieillesse.

En bref, au lieu de financer les 35 heures, les partenaires sociaux financeront directement le fonds de réserve sur les retraites. Le problème reste donc entier. Votre loi n'est toujours pas financée. Les 35 heures, comme tous vos projets, semblent reposer sur des fondations de papier.

Ma question est donc très simple. Comment comptezvous financer concrètement le coût du passage aux 35 heures autrement qu'en taxant davantage les entreprises, les partenaires sociaux, les retraités et les classes moyennes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le député, je constate que la visite d'un haut dignitaire chinois vous inspire et je m'en réjouis, mais vous verrez que notre financement n'est pas de papier mais beaucoup plus dur qu'un grand nombre de ceux que vous avez mis en place pendant que vous étiez au pouvoir. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste. Protestations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Vous avez l'air de vous réjouir que nous ayons modifié notre dispositif après discussion avec les partenaires sociaux. Je l'avais annoncé dès le 7 septembre à la commission des affaires sociales et nous en avons parlé à plusieurs reprises, monsieur Mariani, vous le savez bien, lors de l'examen de la loi sur la durée du travail. Je n'ai jamais dit pendant les débats, tout le monde peut en lire le compte rendu, que tout était financé. (Rires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean-Louis Debré.

Quel aveu !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

J'ai expliqué que nous continuerions à discuter et je vous en apporterai tout à l'heure la preuve. Vous avez d'ailleurs vous-même fait référence la semaine dernière, à l'occasion d'une question, au fait que les discussions n'étaient pas terminées.

J'en viens au fond.

Nous allons discuter dans quelques instants du projet de loi de financement de la sécurité sociale qui continue à permettre l'engagement de deux grandes réformes que le Gouvernement réalise avec sa majorité : la réduction de la durée du travail et la baisse des charges sociales.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Ne vous en déplaise, grâce à ces grandes réformes, la confiance revient, la croissance est là (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), le chômage recule (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste), et, bien que certains l'aient souhaité, nous ne renonçons pas, car cela aurait été alors une reculade politique, à ces réformes qui vont dans le sens de la réduction du chômage et qui sont attendues pas nos concitoyens.

M. Lucien Degauchy.

Elle n'y croit plus !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Lorsque nous avons proposé aux partenaires sociaux il y a quelques mois de faire ce qu'eux-mêmes avaient fait en


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finançant l'ARPE ou les conventions de coopération, ce que mon prédécesseur a fait en finançant les AFR, sur le dos de l'UNEDIC, allais-je-dire, ils n'ont pas accepté une telle activation des dépenses passives, comme ils l'appelaient. Nous avons donc remis le travail sur la table et nous avons discuté avec eux pour trouver de nouvelles modalités.

M. Lucien Degauchy.

C'est de l'improvisation !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Où en sommes-nous aujourd'hui ? Notre réforme, sur quatre à cinq ans, coûtera environ 105 milliards de francs et nous savons comment en financer 85 %. J'aurais aimé qu'il en soit ainsi an lorsque M. Juppé a fait voter la ristourne dégressive. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste.) Lorsque je suis arrivée en 1997, première année d'application, il manquait déjà 7 milliards ! Nous avons dû les trouver ! (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Que dire de la baisse de l'impôt sur le revenu pour laquelle nous avons dû trouver 40 milliards. Certains expliquent même que nous sommes là aujourd'hui parce que le Président de la République avait peur qu'on ne puisse pas participer à l'euro faute d'avoir financé cette grande réforme !

M. Lucien Degauchy.

C'est nul !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Et que dire, enfin, de cette grande loi sur la famille que M. Balladur a fait voter, qui a entraîné 14 milliards de déficit de la branche famille (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) et qui, si elle avait été appliquée, aurait entraîné un déficit de 25 milliards ? (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Finalement, ce qui vous intéresse aujourd'hui, c'est de commenter les commentaires, de savoir qui sort gagnant de telles ou telles discussions. Nous, ce qui nous intéresse, ne vous en déplaise, c'est de voir que le chômage recule, que les Français vivent mieux, et de nous dire que c'est peut-être un peu grâce à nous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Vives exclamations et huées sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

FINANCEMENT DE LA CMU

M. le président.

La parole est à M. Philippe Auberger.

M. Philippe Auberger.

Tout d'abord, madame la ministre de l'emploi, alors que vous aviez annoncé à la commission des finances que le surplus du fonds de solidarité vieillesse en l'an 2000 servirait au fonds de réserve des retraites, vous n'avez pas répondu à M. Mariani, parce que vous ne pouvez pas doter ce fonds comme vous l'aviez promis. (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Mme Odette Grzegrzulka.

Nous n'avons pas de leçons à recevoir de vous !

M. Philippe Auberger.

Voici un nouveau cas d'improvisation financière. Lors de la discussion du projet de loi de finances pour l'an 2000, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie nous a confirmé que le financement de la couverture médicale universelle était désormais du ressort de la sécurité sociale. Or nous ne trouvons ni dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale qui sera débattu tout à l'heure ni dans les documents annexes la moindre trace de financement.

Est-il exact que le fonds est désormais du ressort de la sécurité sociale ? Pourquoi, dans ces conditions, ne figuret-il pas dans les documents annexes au projet de loi de financement ? Ne craignez-vous pas la censure du Conseil constitutionnel en nous présentant un projet de loi de financement manifestement tronqué ? (Applaudissements sur plu-s ieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Pouvez-vous nous donner dans leur grande masse les recettes et les dépenses pour l'an 2000 de ce fonds qui devrait exister à compter du 1er janvier de l'année prochaine ? Les décrets concernant la CMU ne sont toujours pas publiés, mais la presse s'est fait l'écho d'un fort décalage entre ce qui avait été annoncé lors de l'examen du projet de loi et les modalités d'application qui sont maintenant prévues. Les critères de ressources, par exemple, seraient abaissés, les étudiants seraient exclus du dispositif, les conditions pour les étrangers plus rigoureuses. (Exclamations sur divers bancs.) Pouvez-vous nous expliquer les raisons de ces revirements ? Combien de personnes en définitive sont susceptibles de bénéficier de la CMU et pour quel montant ? Enfin, n'avez-vous pas gravement sous-estimé le cours réel de la CMU lorsque vous nous avez présenté votre projet il y a six mois ? (Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

D'abord, monsieur Auberger, comme nous nous y sommes engagés, le fonds de réserve des retraites recevra bien 5,6 milliards de la sécurité sociale. (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Thierry Mariani.

Aujourd'hui !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Absolument ! C'est dans la loi de financement que nous allons examiner dans deux heures. (Vives protestations sur les mêmes bancs.)

M. Thierry Mariani.

Vous venez de le décider.

M. le président.

Un peu de calme, mes chers collègues.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je comprends que vous n'ayez pas encore eu le temps d'examiner l'ensemble des décisions qui ont été prises mais je


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vous rassure : les 5,6 milliards de la sécurité sociale prévus pour abonder le fonds des charges sociales abonderont effectivement le fonds de réserve des retraites, et celui-ci disposera bien, monsieur Auberger, comme je l'avais annoncé devant la commission des finances et comme le Premier ministre s'y était engagé, de 15 à 20 milliards au 1er janvier 2001.

M. Bernard Accoyer.

S'il y a des excédents !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Les engagements que j'avais pris devant la commission des finances sont totalement tenus et nous aurons l'occasion d'en discuter ensemble dans l'après-midi.

Mme Odette Grzegrzulka.

Ils ne seront pas là !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

En ce qui concerne la couverture maladie universelle, la loi a créé un fonds particulier. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Laissez-moi au moins vous répondre ! On vote des lois au Parlement, je suis étonnée que les députés n'en connaissent pas le contenu.

Permettez-moi donc de vous le rappeler.

Ce fonds est financé en partie par l'Etat et en partie par une contribution des assureurs, des mutuelles et des organismes de prévoyance.

M. Maurice Leroy.

Lesquels ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Un débat s'est engagé pour savoir si les 1 500 francs annuels moyens qui avaient été retenus dans les travaux préparatoires avec les organismes comme coût de l'assurance complémentaire pour les malades qui bénéficieront de la CMU sont suffisants.

M. François Goulard.

Tout de même ! Nous avons prévu de faire le point au bout d'un an avec les organismes complémentaires.

Aucun élément ne permet aujourd'hui de dire que ces 1 500 francs ne permettront pas de rentrer dans les clous puisque les départements qui ont déjà mis en place une aide médicale gratuite de même nature y parviennent.

Comme je l'ai déjà indiqué la semaine dernière, mais je le répète avec grand plaisir, la plupart des décrets sont aujourd'hui passés au Conseil d'Etat et sont à la signature. Nous lançons par ailleurs une grande campagne d'information et de sensibilisation pour que les 6 millions de personnes qui peuvent bénéficier de la couverture maladie universelle...

M. Lucien Degauchy.

C'est nul !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Vous trouvez peut-être ça nul, mais la France est aujourd'hui le seul pays au monde où les plus démunis, soit plus de 6 millions de personnes, vont pouvoir accéder gratuitement aux soins et bénéficier du même système que les autres Français. Vous devriez vous en réjouir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Nous passons aux questions du groupe de l'Union pour la démocratie française.

FINANCEMENT DE LA RE

DUCTION DU TEMPS DE TRAVAIL

M. le président.

La parole est à Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Ma question s'adresse à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité. (« Ah ! » sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.) Madame la ministre, le financement des 35 heures obligatoires va coûter très cher à notre pays.

Un député du groupe socialiste.

Et le chômage, c'est gratuit ?

Mme Marie-Thérèse Boisseau.

Ce financement n'est manifestement pas satisfaisant.

Sous la pression de l'ensemble des partenaires sociaux, vous reculez, et vous renoncez à faire payer les chômeurs et les retraités (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance), mais il est une autre catégorie de Français qui ne doit pas être mise à contribution, ce sont les millions de salariés.

Il est injuste que les salariés des entreprises ne pouvant passer aux 35 heures - et il y en aura plus que vous ne pensez - soient privés d'une partie substantielle du bénéfice de leurs heures supplémentaires, bénéfice qui ira directement dans les caisses de l'Etat. Les salariés vont payer pour les 35 heures. C'est inacceptable et contraire à vos engagements. (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Il est tout aussi inacceptable que des salariés voient leurs heures supplémentaires rémunérées de façon différente selon que leur entreprise est passée qu'ils travaillent dans des entreprises passées ou non à 35 heures.

Madame la ministre, vous devez revoir votre copie.

Vous avez le temps d'ici à l'adoption définitive de la loi.

Que comptez-vous faire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et sur de nombreux bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je vous remercie tout d'abord, madame la députée, de me donner l'occasion d'évoquer une nouvelle fois le coût des 35 heures.

Sur les 105 milliards de baisses de charges programmées pour les cinq ans à venir, car le Gouvernement, par souci d'anticiper, recherche dès maintenant le financement pour les cinq ans à venir, et je crois qu'on peut s'en féliciter (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants), le coût des 35 heures est de 40 milliards, les 65 autres milliards devant aider l'artisanat, le commerce, les services, qui attendent depuis longtemps une telle réforme, M. Barrot le rappelait encore récemment. Cette réforme ne reste pas à l'état de projet comme c'était le cas avec vous, et elle est financée, contrairement à ce que vous pensez.

Le coût d'un emploi généré par les 35 heures sera de 55 000 à 70 000 francs selon les entreprises. Par rapport au contrat initiative-emploi mis en place par le gouverne-


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ment Juppé, dont le coût était de 330 000 francs (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la Démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) , par rapport à la ristourne Juppé - 1 million de francs la première année, 200 000 francs les autres années -, c'est la mesure la moins coûteuse, l'ensemble des organismes économiques le disent.

M. Lucien Degauchy.

Personne n'y croit plus, même pas vous !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Vous nous dites que les salariés ne toucheront plus d'heures supplémentaires. Excusez-moi, madame la députée, mais puis-je vous demander comment l'opposition souhaite traiter le problème du chômage ? Quelles sont vos idées pour réduire le chômage ? (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Vous avez empêché la croissance en taxant les ménages de 200 milliards pendant quatre ans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Vous vous êtes opposés aux emplois-jeunes ! (Mêmes mouvements.)

C'est nous qui lançons la France dans les nouvelles technologies et aidons les créateurs d'entreprises. (Mêmes mouvements.)

Plusieurs députés du groupe du Rassemblement pour la République.

Ce n'est pas vrai !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Enfin, nous diminuons la durée du travail et nous réduisons les charges sociales. Vous en avez beaucoup parlé mais vous n'avez jamais rien fait. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Huées sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Alors quels sont vos projets ? (Huées sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

C'est peut-être la question que de nombreux Français se posent au moment où le chômage baisse, où la confiance est là et où la croissance de notre pays est parmi les plus élevées des pays industrialisés.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur de nombreux bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

RÉFORME DES TRIBUNAUX DE COMMERCE

M. le président.

La parole est à M. Pierre Albertini.

M. Pierre Albertini.

Je regrette encore une fois que Mme Aubry, dérivant au gré de ses humeurs (Protestations sur les bancs du groupe socialiste), n'ait pas répondu aux q uestions posées. C'est un débat démocratique ici.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et sur quelques bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Protestations sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Vous le devez à la représentation nationale ! Je voudrais, pour ma part, interroger Mme la ministre de la justice, garde des sceaux, sur le profond malaise qu'éprouvent aujourd'hui les juges des tribunaux de commerce.

(Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste.)

Ceux-ci ont le double sentiment d'être jetés en pâture à l'opinion et de ne pas être associés, madame la ministre, à la réforme que vous conduisez.

La conférence générale des tribunaux de commerce, qui s'est réunie il y a quelques jours à Bordeaux, a très clairement exprimé ses inquiétudes et un grand nombre de juges consulaires, vous le savez, menacent de démissionner à la fin de l'année judiciaire.

(Exclamations et applaudissements sur divers bancs du groupe socialiste.)

M. Christian Bataille.

Bon débarras ! (Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Pierre Albertini.

Les tribunaux suivants risquent de ne plus fonctionner au 31 décembre 1999 : Poitiers, Auch, Montauban, Grenoble, Nîmes, Chartres, Alès, Montpellier, Reims, Epernay, Pau, La Roche-sur-Yon, Agen, Béziers, Rouen et Carcassonne...

M. Didier Boulaud.

Quelle horreur !

M. Pierre Albertini.

... et la liste va, hélas ! probablement s'allonger.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

Une réforme est naturellement souhaitable, mais tout dépend de la manière de la mettre en oeuvre et des objectifs que vous définissez.

Peut-on, en effet, laisser planer le discrédit sur toute une institution (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste)...

Plusieurs députés du groupe socialiste.

Oui !

M. Arnaud Montebourg.

Il existe !

M. Pierre Albertini.

Monsieur Montebourg, vous êtes un esbroufeur. Je vous en prie, laissez-moi parler ! (Protestations sur les bancs du groupe socialiste. - Huées sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

De nombreux députés du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.

Montebourg dehors !

M. Arnaud Montebourg.

Vous êtes fous ! (Huées sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Mes chers collègues, revenez un peu au calme ! Je vous demande un instant de vous interroger sur le spectacle que vous donnez. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste.)

De nombreux députés du groupe du Rassemblement pour la République.

C'est leur faute !

M. le président.

Poursuivez, monsieur Albertini.

M. Pierre Albertini.

Peut-on jeter le bébé avec l'eau du bain et laisser perdre sans dommages le savoir-faire accumulé par un certain nombre de praticiens connaissant bien la réalité des affaires et le droit des affaires ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

M. Didier Boulaud.

Le droit aux affaires !

M. Pierre Albertini.

Le nombre de magistrats étant à peine plus élevé qu'en 1920, est-il prioritaire d'affecter les nouveaux postes à la justice consulaire ? Ne convient-il pas de les affecter en priorité à la justice civile, qui est aujourd'hui très largement asphyxiée, vous le savez parfaitement ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Didier Boulaud.

Allez dire cela à M. Méhaignerie !

M. Pierre Albertini.

Ma question sera très simple : comment comptez-vous mettre en oeuvre la concertation sur les objectifs, le calendrier et les moyens d'une réforme souhaitable sans casser l'outil que la tradition nous a légué ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et sur de nomb reux bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux, ministre de la justice.

Monsieur le député, vous avez raison de dire qu'il y a un malaise dans les tribunaux de commerce, et la réforme est justement destinée à le dissiper. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Vous prétendez que les tribunaux de commerce n'ont pas été associés à la mise en oeuvre de la réforme voulue par le Gouvernement. C'est faux !

M. François Rochebloine.

Ah non !

Mme la garde des sceaux.

J'ai reçu leurs représentants à plusieurs reprises moi-même,...

M. Henri Plagnol.

Cela ne sufit pas ! Mme la garde des sceaux ... et, lors de leur dernier congrès, le 15 octobre, à Bordeaux, je leur ai envoyé par lettre un résumé de la concertation que j'avais établie avec leur président pour leur exposer les principes de la réforme.

Pour vous, une réforme est nécessaire - et je vais vous dire dans un instant ce que nous allons faire, mais vous contestez aussitôt les moyens que nous employons pour la mettre en oeuvre. Permettez-moi de vous dire que ce Gouvernement a pris l'engagement de ne jamais présenter au Parlement de réforme qui ne serait pas financée. (Vives exclamations, rires et applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Je suis très heureuse, mesdames, messieurs les membres de l'opposition, de voir que vous applaudissez cet engagement et le fait que le Gouvernement le tienne. (Mêmes mouvements.)

M. Yves Fromion.

C'est ridicule !

Mme la garde des sceaux.

Pour la réforme des tribunaux de commerce, cent postes sont prévus, sur les deux cent douze postes de magistrat que nous allons créer l'an prochain, ce qui veut dire que la majeure partie de la réforme sera financée.

Vous me dites, d'autre part, qu'il existe dans les tribunaux de commerce un véritable savoir-faire, et vous me demandez comment nous allons le conserver. Vous n'êtes pas sans savoir, monsieur le député, que la réforme voulue par le Gouvernement a précisément pour objectif de ne pas supprimer les tribunaux de commerce. On aurait pu imaginer - c'était d'ailleurs une des options proposées par le rapport de votre assemblée établi par M. Colcombet et M. Montebourg - de les supprimer, mais ce n'est pas la voie dans laquelle s'est engagé le Gouvernement. Les tribunaux de commerce seront maintenus, et ils resteront présidés par des juges consulaires. Ce qui changera, c'est que les chambres qui, à l'intérieur de ces tribunaux, sont chargées des procédures collectives, c'est-à-dire des liquidations d'entreprises - ce sont elles qui ont donné lieu aux dérives que nous condamnons - seront désormais présidées par des magistrats professionnels, qui resteront assistés par des magistrats consulaires.

(Applaudissements sur divers bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Il n'est donc nullement question de supprimer les tribunaux de commerce. Ils seront maintenus avec tout leur savoir-faire. Car s'il y a eu des dérives, à vrai dire peu nombreuses par rapport à la masse des affaires traitées, beaucoup de juges consulaires font un travail excellent, avec beaucoup de compétence, et d'ailleurs de façon bénévole.

Quant aux juges consulaires qui ont annoncé qu'ils démissionneraient, eh bien ils démissionneront. Cela concernera treize tribunaux sur cent quatre-vingt-onze, soit moins de 6 %. Il n'y a donc pas lieu de s'alarmer et, en tout état de cause, la continuité du service public sera assurée, s'il le faut, par les tribunaux de grande instance.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous en venons aux questions du groupe Démocratie libérale et Indépendants.

DE

LINQUANCE ET INSE

CURITE

M. le président.

La parole est à M. Francis Delattre.

M. Francis Delattre.

Monsieur le président, je vais m'efforcer de poser calmement une question à M. le ministre de l'intérieur.

Monsieur le ministre, un récent rapport de l'INSEE démontre qu'un fait de délinquance sur cinq est effectivement enregistré par la police.

M. Jacques Myard.

Scandaleux !

M. Francis Delattre.

Ce qu'un institut démontre aujourd'hui, tous les Français qui ont eu à déposer une plainte le savent depuis longtemps, tant il est vrai que beaucoup est fait pour les en dissuader. On peut dire que vous avez réussi une première en matière de prévention.

Indiscutablement, la meilleure prévention que vous avez réussie est celle du dépôt de plainte.

(Sourires sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

Malgré un thermomètre défaillant, tous les indicateurs depuis le début de l'année, depuis neuf mois, traduisent une banalisation de la violence et de la criminalité, dans les villes comme dans les banlieues. Et que dire des écoles, où nous sommes régulièrement confrontés à des dégradations, à du racket et à des atteintes corporelles, notamment sur la personne des enseignants ? Face à ce constat, on se demande, monsieur le ministre, ce qu'est devenu votre beau projet de police de proximité. Celle-ci devait s'articuler autour de deux éléments forts, les contrats locaux de sécurité et les ADS, les adjoints de sécurité. C'est ainsi que des milliers de jeunes ont été affectés, sans aucune formation, sur la voie


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

publique et en particulier sur les bases d'îlotage, sur les terrains les plus difficiles. Le discours fort habile tenu aux assises de Villepinte, qui essayait de démontrer que la sécurité de nos concitoyens était maintenant au coeur des priorités de la gauche, est donc aujourd'hui à un tournant. Aussi je voudrais vous poser trois questions précises, monsieur le ministre.

Tout d'abord, comment allez-vous gérer les effectifs qui chaque année vont connaître 6 000 départs en retraite, alors que les écoles de police ont aujourd'hui la capacité de former 3 000 policiers ? Ensuite, qu'avez-vous entrepris pour réduire la distorsion entre les effectifs théoriques et le nombre de policiers réellement sur le terrain.

Quelle suite avez-vous réservée aux suggestions fort sages émises par notre collègue Tony Dreyfus dans le rapport qu'il a rédigé dans le cadre de la mission d'évaluation et de contrôle, chère au président Fabius ? Qu'avez-vous entrepris pour adapter la localisation des effectifs à la carte de la délinquance et qu'avez-vous fait des propositions émanant du rapport Hyest-Carraz ? Enfin, 20 000 jeunes formés en quinze jours, ont été affectés sur la voie publique, dans les quartiers difficiles, et représenteront en l'an 2000 un quart des effectifs de la police en tenue : pensez-vous, monsieur le ministre, que cette politique est raisonnable ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'intérieur, pour une réponse courte.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

Difficile de répondre brièvement à un tel déluge de questions.

D'abord, il est totalement inexact de dire que les chiffres réels de la délinquance sont cinq fois supérieurs à ceux déclarés à la police,...

M. Yves Nicolin.

C'est la réalité !

M. Guy Teissier.

C'est un rapport de l'INSEE qui le dit !

M. le ministre de l'intérieur.

... et ce pour une raison extrêmement simple. C'est que l'enquête de l'INSEE porte sur 5 500 ménages, et a pour objet de connaître le sentiment d'insécurité, ce qui n'a rien à voir avec le chiffre de la délinquance tel qu'on l'enregistre, et qui correspond aux délits et crimes déclarés à la police. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Par exemple, s'agissant des atteintes à la personne ou à la dignité, les chiffres cités par l'enquête de l'INSEE sont cent quinze fois supérieurs aux déclarations. Pour les menaces ou chantages, ils sont soixante-dix fois supérieurs. C'est dire qu'il faut relativiser ces chiffres, monsieur le député, tout comme il faut relativiser les statistiques officielles, lesquelles montrent d'ailleurs que la délinquance est parfaitement contenue puisque sur neuf mois, on enregistre une croissance de 1,38 % et une baisse de 1,33 % de la délinquance de voie publique.

(Exclamations sur les mêmes bancs.)

D'autre part, je ne peux vous laisser dire que les adjoints de sécurité sont formés en quinze jours. (« Si ! » sur les mêmes bancs.) Non.

Leur formation a été prolongée de deux à huit semaines. Sur les 13 000 qui ont été recrutés, 759 ont déjà réussi le concours de gardien de la paix. (Exclamations sur les mêmes bancs.)

M. Laurent Dominati.

Ça n'a rien à voir !

M. le ministre de l'intérieur.

S'agissant des départs à la retraite, ils étaient aisément prévisibles, puisqu'ils correspondent aux générations recrutées après mai 1968.

(« Ah ! » sur divers bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Et ce n'est pas ma faute s'il y avait dans les écoles de police 2000 élèves en 1995, alors qu'il y en a aujourd'hui 6 131. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.) J'ai obtenu de M. le Premier ministre le recrutement de 1 664 gardiens de la paix supplémentaires cette année, que je pourrais affecter sur le terrain l'an prochain et en 2001.

Quant aux dispositions prévues à la suite du rapport Hyest-Carraz, elles seront mises en oeuvre cas par cas, comme nous l'avons toujours dit, après concertation, naturellement, aussi bien des élus que des syndicats professionnels. La politique qui est menée, monsieur le d éputé, s'inscrit dans une perspective stratégique d'ensemble. Cela dit, la police de proximité, bien sûr, fera peut-être remonter le chiffre des statistiques, dans la mesure où il y a actuellement un écart entre les chiffres et la réalité (« Ah ! » sur divers bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants) , mais qui n'est pas du tout celui qui a été annoncé, à tort, par certains journaux.

(Exclamations sur les mêmes bancs.)

M. Patrick Devedjian.

Finalement, tout va bien !

M. le ministre de l'intérieur.

Pour le reste, tout est fait de manière cohérente : schéma national de la formation,r ecrutement des adjoints de sécurité, signature de 300 contrats locaux de sécurité - 400 étant en cours d'élaboration -, redéploiement des effectifs sur trois ans, au rythme de 1 200 policiers par an.

M. Lucien Degauchy.

Ah ! C'est formidable !

M. le ministre de l'intérieur.

C'est ainsi que nous pourrons répondre au sentiment d'insécurité qui est en effet une réalité, que je connais, que je ne néglige pas, mais que je ne vous reconnais pas le droit d'exploiter comme vous le faites. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Yves Fromion.

Où est Colonna ?

M. le président.

Nous en venons à une question du groupe communiste.

RÉGULARISATION DES SANS-PAPIERS

M. le président.

La parole est à M. Bernard Birsinger.

M. Bernard Birsinger.

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Depuis le 26 septembre, les sanspapiers de Seine-Saint-Denis occupent un local de SaintDenis pour exiger leur régularisation administrative, et six d'entre eux sont en grève de la faim. Cette forme d'action, même si on ne l'approuve pas, doit être entendue comme un cri de désespoir, de déception, le cri de femmes et d'hommes à qui le Gouvernement avait redonné espoir en affirmant vouloir une politique d'immigration respectueuse de la dignité des individus.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

L'espoir s'est brisé contre le mur de l'arbitraire des décisions rendues. Ces hommes et ces femmes se sentent trahis, eux qui n'ont pas hésité, pour constituer leur dossier, à confier les blessures intimes de leur vie de clandestins, eux qui n'ont pas hésité à découvrir leur visage, leur nom, leur domicile.

Le droit à la vie familiale et la preuve de leur intégration à la société française étaient les deux idées-forces du Gouvernement pour la régularisation des sans-papiers.

Soixante mille personnes qui ont fait la preuve de leur intégration en se rendant dans les préfectures sont toujours sans papiers. Parmi ces soixante mille, il en est dont le droit à la vie familiale est suspendu au couperet du prochain contrôle d'identité.

Au nom d'une politique d'immigration humaniste, il faut que le Gouvernement régularise ces femmes et ces hommes, tout comme il a eu le courage de régulariser soixante-quinze mille personnes dans le cadre de la circulaire du 24 juin 1997.

Je pense que le moment est venu d'avoir un débat serein et sérieux sur l'immigration. Les choses bougent.

Même M. Juppé déclare que l'immigration zéro ne veut pas dire grand-chose et appelle de ses voeux une lutte efficace contre les puissants réseaux qui exploitent la maind'oeuvre clandestine. Régulariser ces soixante mille personnes, c'est leur donner le droit de ne plus être honteusement exploitées. La politique de codéveloppement que nous appelons de nos voeux ne se fera pas sans eux.

L'impasse dans laquelle se trouve une mesure comme le contrat de réinsertion dans le pays d'origine le prouve bien. En ce sens, monsieur le Premier ministre, ne pensez-vous pas qu'il faut régulariser ces personnes, afin d'ouvrir la voie à une politique d'immigration axée sur les droits de la personne et le codéveloppement des pays d'émigration ? (Applaudissements sur les bancs du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre de l'intérieur.

M. Jean-Pierre Chevènement, ministre de l'intérieur.

Monsieur le député, le Gouvernement considère que la maîtrise des flux migratoires est une nécessité.

(« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la Répubique, du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Bien entendu, il a procédé à un certain nombre de régularisations, mais sur la base de critères précis, notamment de critères familiaux, qui ont correspondu à 57 138 régularisations, soit 71 % des 80 085 auxquelles il a été procédé sur la base de la circulaire que j'ai signée. Et 16 879 célibataires - soit 21 % du total -, parce qu'ils étaient bien intégrés, ont également bénéficié de cette régula risation. Le Gouvernement a pris ces décisions en se fondant sur les recommandations de la Commission nationale consultative des droits de l'homme.

Pourquoi le Gouvernement considère-t-il qu'il faut maîtriser les flux migratoires ?

M. Yves Fromion.

Question intéressante !

M. le ministre de l'intérieur.

Tout simplement parce qu'il existe en dehors de nos frontières ce que Karl Marx (Exclamations sur les mêmes bancs)...

M. Yves Fromion.

Marx avec nous !

M. le ministre de l'intérieur.

... appelait une immense armée industrielle de réserve et que refuser de maîtriser les flux migratoires reviendrait à s'abandonner aux forces du marché, monsieur le député. Ce serait s'abandonner aux forces des marchands de main-d'oeuvre qui exerceraient alors sur le marché du travail une pression que nous considérons comme illicite.

Il est vrai qu'un certain nombre de permis de travail ont été délivrés en 1998 : 36 600 contre 26 700 en 1997 et 6 400 en 1996. C'est l'effet des régularisations opérées.

Mais nous devons faire un certain nombre de distinctions. D'abord, le droit à la vie familiale est pleinement pris en compte, ainsi que l'intégration à la société française. Il ne suffit pas, comme vous l'avez dit, de se rendre dans une préfecture pour faire la preuve que sa régularisation est justifiée. Car il y a d'autres clandestins - le journal Le Monde les estime à 300 000 : que répondrionsnous à tous ceux qui n'ont pas fait cette démarche relativement simple, dès lors que, sur la base de critères d éfinis, nous avons refusé un certain nombre de demandes ? L'accord franco-algérien s'applique, étant entendu que le Conseil d'Etat a considéré que la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme était évidemment applicable aux ressortissants algériens. Je suis d'ailleurs tout à fait disposé à renégocier cette convention pour tenir compte de la loi dite Reseda, que le Parlement a votée et qui est donc une loi de la République, et pour faire en sorte que toutes ces dispositions soient harmonisées.

M. Maurice Leroy.

C'est nul !

M. le ministre de l'intérieur.

La libre circulation, que nous nous efforçons de promouvoir, ne signifie pas, monsieur le député, la libre installation. Vous devez aider le Gouvernement à résister à la mondialisation libérale.

(Exclamations sur divers bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Maurice Leroy.

Quel charabia !

M. le ministre de l'intérieur.

Quant au préfet de SeineSaint-Denis, il est prêt à examiner, au regard de la loi et des critères dont j'ai parlé, la situation de ceux qui sont concernés dans l'affaire que vous évoquez. Mais, à cet égard, les modalités du conflit ne changent rien, si ce n'est qu'elles aggravent bien inutilement la situation des personnes. La loi doit être appliquée, monsieur le député, dans le respect du principe d'égalité.

(Applaudissements sur quelques bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

M. Yves Fromion.

Où est Colonna ?

M. le président.

Nous passons aux questions du groupe Radical, Citoyen et Vert.

VISITE DU PRÉSIDENT IRANIEN EN FRANCE

M. le président.

La parole est à M. Jean Pontier.

M. Jean Pontier.

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre et concerne la visite en France, les 27 et 28 octobre prochains, du président iranien Khatami et les rencontres prévues à cette occasion au plus haut niveau de l'Etat français.

En août dernier, M. le ministre des affaires étrangères écrivait : « La France considère, avec ses partenaires de l'Union européenne, qu'il est important de marquer notre appréciation pour les orientations prises par le président Khatami, pour sa volonté de réforme et ses ambitions d'ouverture ». Force est de reconnaître aujourd'hui que les fruits n'ont pas passé la promesse des fleurs.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

En effet, la répression brutale du timide mouvement des étudiants en juillet dernier, la condamnation à mort de quatre étudiants, la fermeture de quotidiens, les poursuites judiciaires engagées contre d'autres journaux ou contre des journalistes, l'arrestation de treize citoyens juifs, la rocambolesque affaire Helmut Hofer, l'accablant rapport d'Amnesty International sur les conditions de détention en Iran, ainsi que le maintien de la peine de lapidation pour les femmes adultères ne peuvent que plaider en faveur d'une certaine reconsidération de la position française exprimée il y a peu.

S'il y a lieu de continuer à encourager le régime iranien à mettre en place une véritable politique d'ouverture, telle qu'annoncée, il serait inacceptable pour la France que le président Khatami n'apporte pas avant sa venue des garanties en matière de respect des droits fondamentaux de l'homme. Il serait bien inopportun que notre pays puisse apparaître comme la caution d'un régime qui reste fondé sur l'intolérance et le refus des droits de l'homme. La Realpolitik, fût-elle d'inspiration commerciale, ne saurait, me semble-t-il, justifier le renoncement aux valeurs de la République française.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Hubert Védrine, ministre des affaires étrangères.

Monsieur le député, vous êtes soucieux du sort des étudiants en Iran, nous aussi. Vous êtes vigilant quant au sort des treize Juifs iraniens qui ont été arrêtés avec une trentaine d'autres Iraniens et qui sont accusés, d'une façon qui nous paraît invraisemblable, d'espionnage : nous le sommes aussi. Nous l'avons dit publiquement, et nous avons également agi, de façon discrète, avec beaucoup d'insistance. Vous êtes soucieux de la démocratisation de l'Iran, de son ouverture, nous aussi. Aucune de ces justes causes n'avancerait mieux si nous renoncions à avoir un dialogue au sommet et des échanges avec le président Khatami, qui a été élu par le corps électoral iranien, dans des élections non contestées, contre les tenants les plus archaïques de la ligne antérieure de la révolution islamique, et qui a été élu, des analyses l'ont montré, par une immense majorité de jeunes et de femmes, qui attendent de sa part une ouverture qui est contrecarrée par des actions constantes dans ce pays, notamment sur le plan judiciaire ou sur le plan policier.

N ous n'avons donc pas changé d'analyse. Nous sommes tout à fait lucides et prudents, et nous savons la violence des luttes qui existent à l'heure actuelle dans ce pays. Nous pensons qu'il est utile pour l'avenir de l'Iran comme pour l'ensemble de la région que nous ayons ce dialogue, qui sera, soyez-en certain, très franc et très direct. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe socialiste, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

DEUXIÈME CONFÉRENCE MONDIALE

SUR L'ÉDUCATION

M. le président.

La parole est à M. Pierre Carassus.

M. Pierre Carassus.

Monsieur le ministre des affaires étrangères, le Manifeste de la jeunesse pour le

XXIe siècle, adopté dimanche dernier par le Parlement mondial des enfants, a appelé les gouvernements à faire de l'éducation une priorité.

Aujourd'hui, près de 140 millions d'enfants, majoritairement des filles, n'ont pas du tout accès à l'éducation.

Cette situation est d'autant plus difficile à tolérer lorsque l'on sait que, entre douze et quinze ans, il y a plus de jeunes au travail qu'à l'école, selon les estimations du BIT. Faut-il s'en étonner alors que, pour la cinquième année consécutive, l'aide publique au développement des pays industrialisés a diminué et que le poids d'une dette excessive écrase les pays du Sud ? Soulignons aussi que, pour résorber cette dette, la Banque mondiale et le FMI imposent à ces pays des politiques d'ajustement qui les obligent à réduire leurs dépenses publiques, notamment celles liées à l'éducation.

La deuxième conférence mondiale sur l'éducation se tiendra à Dakar en avril 2000. La première s'est tenue il y a bientôt dix ans. A l'époque, 150 gouvernements s'étaient engagés à universaliser l'accès à l'éducation, notamment pour les enfants de cinq à quinze ans ; on peut constater que le bilan est loin d'être positif.

La prochaine conférence mondiale de Dakar ne peut, dix ans après, reprendre les mêmes engagements si ceux-ci doivent rester sans effet. C'est pourquoi, monsieur le ministre, je souhaite que vous nous indiquiez comment le gouvernement français entend préparer cette conférence.

Le Parlement sera-t-il associé à sa préparation ? Cette conférence ne peut se contenter d'être un moment d'échanges et de considérations généreuses pendant que le FMI et la Banque mondiale continuent d'imposer leur politique de restriction des dépenses publiques, qui interdit de fait la scolarisation des enfants des pays en voie de développement. Alors qu'on sait qu'il suffirait de 6 milliards de dollars pour scolariser tous les enfants dans le monde, peut-on espérer que des engagements financiers précis seront pris lors de cette conférence ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le ministre délégué à la coopération et la francophonie.

M. Charles Josselin, ministre délégué à la coopération et à la francophonie.

Monsieur le député, la question de l'accès à l'éducation universelle est en effet fondamentale et, dix ans après la conférence de Jomtien, qui s'est tenue en Thaïlande à l'initiative de l'UNICEF, du FNUAP, de l'UNESCO et de la Banque mondiale, et à laquelle la France était associée, la communauté internationale se prépare à évaluer et à poursuivre les efforts qui ont été consentis en ce qui concerne l'accès à l'éducation et à la formation.

Chaque pays va présenter son rapport. La France présentera le sien, qui a été réalisé par les administrations compétentes, avec la participation de représentants de la société civile. Il comprendra le bilan de l'éducation en France, mais aussi celui de son action internationale en ce domaine.

Je rappelle qu'une étape intermédiaire est prévue, continent par continent, en Hongrie, au mois de février.

Vous avez souhaité que les parlementaires y soient assocés ; la France est prête à intégrer des parlementaires dans sa délégation.

L'objectif, vous le savez, est d'atteindre en 2015 l'accès pour tous à l'éducation. Et les chiffres que vous avez rappelés montrent assez l'ampleur des défis qu'il nous faut relever.

La France, pour sa part, a affirmé trois priorités. La première est le renforcement des capacités nationales. La seconde est l'accès à la formation de base, en tenant


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compte des besoins des populations et des Etats, en associant la société civile à la réalisation des objectifs. La troi sième est la qualité.

Vous avez parlé de la Banque mondiale, et je tiens à insister sur le rôle important que joue cette institution en ce qui concerne les constructions scolaires et les programmes d'éducation. Je souligne également que, depuis quelques années, la Banque mondiale comme le Fonds monétaire internationale accordent plus d'attention aux aspects sociaux du développement, et la France y est pour quelque chose. Je crois que nous sommes désormais un peu à l'abri des programmes d'ajustement structurel qui sacrifiaient souvent les programmes sociaux.

Faut-il rappeler que l'initiative en faveur du désendettement des pays en développement prévoit, en contrepartie, la lutte contre la pauvreté, et nécessairement, à ce titre, un renforcement des moyens de lutte en faveur de l'éducation ? Mais la lutte pour l'éducation ne se résume pas à un aspect quantitatif. La France travaille ainsi, en collaboration avec l'UNICEF, au développement de l'éducation des filles, et elle prend part aux recherches conduites en ce qui concerne les programmes et les contenus, par l'Association pour le développement de l'éducation en Afrique. Je rappelle que nous consacrons 25 % de l'aide publique au développement à l'éducation et que nous mobilisons 1,5 milliard de francs en faveur de l'éducation dans les pays en développement.

Si nous devons y poursuivre ces efforts, il serait bon que d'autres en fassent beaucoup plus. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

Nous en avons terminé avec les questions au Gouvernement.

2 LOI DE FINANCES POUR 2000

PREMIÈRE PARTIE Suite de la discussion d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle les explications de vote et le vote sur l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2000 (nos 1805, 1861).

Je rappelle que la conférence des présidents a décidé que le vote aurait lieu par scrutin public, en application de l'article 65-1 du règlement.

La parole est à M. le secrétaire d'Etat au budget.

M. Christian Sautter, secrétaire d'Etat au budget.

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des finances, monsieur le rapporteur général, mesdames, messieurs les députés, l'Assemblée va procéder au vote de la première partie du projet de budget pour 2000. Avant les explications de vote des groupes, je souhaiterais souligner brièvement les progrès accomplis durant le débat.

De nombreuses améliorations au texte initial du Gouvernement ont été discutées et votées afin de renforcer les priorités du Gouvernement et de sa majorité, celles d'une croissance plus riche en emplois et porteuse de solidarité.

Sur le plan fiscal, les allégements au profit des ménages ont été accrus de près de 1,5 milliard de francs par rapport aux propositions du Gouvernement. La barre des 30 milliards de francs de baisses d'impôts en faveur des ménages sera donc franchie l'an prochain.

Les mesures adoptées sont particulièrement favorables à la justice sociale. Je pense aux exonérations de taxe d'habitation en faveur, d'une part, des ménages modestes et, d'autre part, des bénéficiaires du RMI retrouvant un emploi. Ces deux mesures bénéficieront à plus d'un million de ménages en l'an 2000. Je pense également à l'accélération de la suppression du droit de bail en 2000, qui bénéficiera également à un million de ménages acquittant un loyer compris entre 2 500 et 3 000 francs.

Concernant l'impôt sur le revenu, la suppression des conditions d'âge pour la réduction d'impôt au titre des frais dans les établissements de long séjour est également une mesure sociale importante. En outre, la suppression du droit de timbre sur les cartes de séjour représente un geste symbolique fort qui vient compléter les mesures

« citoyennes » de suppression des droits sur les cartes d'identité et les permis de conduire en 1999 et de suppression des droits d'examen en 2000.

Parallèlement, à l'initiative du groupe communiste et apparentés, l'extension de l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune aux héritiers de droits d'auteurs et la non-indexation du barème se traduisent par un accroissement du rendement de cet impôt. La réduction de l'avoir fiscal entre sociétés vise à favoriser l'investissement productif par rapport au placement spéculatif.

Les préoccupations environnementales, partagées par nombre d'entre vous, ont également été prises en compte à travers le renforcement des incitations concernant l'aquazole et la baisse de la taxe sur les véhicules de société dits « propres ».

Enfin, le sort des associations, dont chacun connaît le rôle essentiel pour l'emploi et le développement de la solidarité, n'a pas été oublié. La baisse de la taxe sur les salaires pesant sur elles ainsi que la réduction des droits d'enregistrement sur les dons et legs au profit de certaines d'entre elles permettront de conforter le développement de leurs activités.

Je tiens par ailleurs à souligner les efforts accrus au profit des collectivités locales, en particulier dans le domaine de la péréquation. Comme l'avait annoncé le Premier ministre à Strasbourg, la dotation de solidarité u rbaine a reçu un abondement supplémentaire de 500 millions de francs au cours de nos débats, pour favoriser la rénovation urbaine des quartiers les plus en difficulté. Trois amendements déposés par votre commission des finances ont également été adoptés. Ils prévoient une majoration de 150 millions de francs au profit des communes rurales les plus modestes, l'aménagement des mécanismes du contrat de croissance et de solidarité afin d'éviter toute perte de dotation de compensation de la taxe professionnelle pour les communes défavorisées, et une amélioration de l'indexation de la compensation de taxe professionnelle.

Au total, l'enveloppe en faveur des collectivités locales sera supérieure de 3,7 milliards de francs à ce qu'aurait donné la prolongation pure et simple du pacte de stabilité mis en place par la précédente majorité.

Je voudrais, pour conclure, me réjouir de la grande qualité des débats qui ont eu lieu durant la semaine dernière, en particulier sur deux sujets emblématiques des


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

préoccupations communes du Gouvernement et de sa majorité, a savoir le régime des stock-options et le traitement des flux de capitaux spéculatifs.

Concernant les stock-options, l'initiative du président Bonrepaux a permis d'avoir un véritable débat de fond, d'une très grande qualité. Je pense que votre collègue Jean-Pierre Balligand et l'ancien commissaire au Plan, Jean-Baptiste de Foucauld, en tireront de très utiles réflexions pour aborder le champ plus large de l'épargne salariale. Le Gouvernement a pris des engagements qu'il tiendra, comme il a tenu ceux qu'il a pris depuis deux ans en matière fiscale, qu'il s'agisse de la réforme de la taxe professionnelle ou de la baisse de la TVA sur les travaux dans les logements. D'ores et déjà, notre débat s'est traduit par une mesure de moralisation importante avec, à l'initiative de M. François Hollande, la taxation des indemnités perçues par les dirigeants en cas de départ de l'entreprise et, inversement, l'exonération des indemnités versées après un licenciement collectif.

Concernant la taxe Tobin et le problème plus vaste des mouvements de capitaux spéculatifs, notre débat a permis d'écarter la solution illusoire, voire dangereuse pour notre pays, qu'aurait constitué la mise en place d'une taxe limitée à notre seul pays. Mais un amendement très important a été adopté à l'initiative de la commission des finances afin de préparer la France à une initiative, dans le cadre de sa future présidence de l'Union européenne, sur la régulation internationale des mouvements de capitaux, sur la lutte contre la spéculation financière et sur la définition de nouvelles modalités de lutte contre la concurrence fiscale dommageable. D'un débat hautement symbolique est sortie une conclusion pratique sur la meilleure solution pour avancer.

Mme Béatrice Marre.

Très bien !

M. le secrétaire d'Etat au budget.

Au total, la discussion de ce projet de budget a été particulièrement riche, et elle a été ponctuée de moments forts. Elle a permis de faire avancer nos priorités, nos idées, de faire progresser le débat démocratique.

Je souhaite remercier tous ceux qui, sur tous les bancs, y ont pris part dans un esprit constructif, en ayant - cela va de soi - une pensée particulière pour les différents groupes de la majorité, en particulier pour le président et le rapporteur général de la commission des finances. J'espère que, tous ensemble, nous pourrons continuer à travailler dans cet esprit républicain au cours des débats des prochaines semaines.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

M. Didier Migaud, rapporteur général de la commissison des finances, de l'économie générale et du Plan.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les lois de finances s'inscrivent désormais dans un programme pluriannuel qui fournit un cadre de référence dépassant les strictes contraintes de l'annualité budgétaire. La tenue, maintenant traditionnelle, d'un débat d'orientation budgétaire, a permis à la fin du printemps d'affiner les perspectives. Aussi bien le projet présenté à la mi-septembre ne comportait-il plus guère de surprises, d'autant que la « mesure phare » - la baisse de la TVA sur les travaux réalisés dans les logements existants - était annoncée et attendue.

L'intérêt soutenu que les parlementaires portent à la loi de finances ne s'est pas démenti : avec quarante-trois heures de débat sur cette première partie, nous nous situons un peu en retrait par rapport aux quarante-huit heures de l'année dernière, mais au-dessus de la moyenne des dix précédentes années, qui s'établit autour de quarante heures.

Mme Nicole Bricq.

Belle statistique !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

Le nombre d'amendements est également au-dessus de la moyenne des dernières années : 556 amendements ont été enregistrés, contre 572 l'an passé et 498 sur le projet de loi de finances pour 1998.

Nos débats se sont - il faut s'en réjouir - déroulés dans un climat très serein, et je tiens à saluer tous nos collègues, pour beaucoup membres de la commission des finances, siégeant sur tous les bancs, qui ont apporté avec assiduité leur contribution à cette discussion.

S'agissant d'abord des hypothèses économiques, personne n'a véritablement contesté les prévisions prudentes, il faut le reconnaître, retenues par le Gouvernement, qui se situent dans la fourchette basse du consensus des experts. C'est une situation inédite, qui a contraint l'opposition à situer sa critique sur le terrain de la sincérité du budget.

Je crois qu'à cet égard nos débats auront permis d'établir que, au-delà des changements de périmètre budgétaire, d'ailleurs souvent motivés par un souci de clarific ation, il n'y a, dans ce budget, ni trucage ni dissimulation. Il reste que l'articulation des comptes de l'Etat et des comptes sociaux est sans doute perfectible...

M. Michel Bouvard.

Tout à fait ! C'est un euphémisme !

M. Didier Migaud, rapporteur général.

... et il sera nécessaire que nous nous penchions à froid sur cette question sérieusement contestée. Selon l'agrégat retenu traditionnellement par la commission des finances, le taux d'évolution des charges de l'Etat en 2000, considérées dans le périmètre de 1999, sera de 0,64 % en francs courants, soit une diminution de 0,26 % en volume. Un effort accru d'économies et de redéploiements permet cependant de financer les priorités du Gouvernement et de sa majorité, c'est-à-dire celles choisies par les électeurs en 1997 : emploi et solidarité, éducation, justice et sécurité, environnement, culture.

N otre assemblée va bientôt consacrer quelque trois semaines à l'examen détaillé des fascicules budgétaires. Elle pourra le faire dans un esprit nouveau, forte des conclusions de la mission d'évaluation et de contrôle que la commission des finances a créée - à votre initiative, monsieur le président de l'Assemblée - et dont le l etmotiv est : « contrôler réellement pour dépenser mieux ». Quelques conséquences ont déjà été tirées de ces travaux : notre marge de progression est certaine. Il faudra, bien sûr, poursuivre ce travail et obtenir qu'il soit encore mieux pris en compte par le Gouvernement.

L'examen des crédits se déroulera également, à titre expérimental pour cinq budgets, dans des conditions nouvelles.

L'approfondissement des travaux menés au sein des commissions saisies pour avis, complété par une procédure de questions écrites budgétaires, doit permettre de concentrer le débat en séance publique sur l'essentiel. La première expérience faite la semaine dernière par la commission des lois sur le budget de la justice paraît à cet égard prometteuse.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

Pour en revenir à la première partie, soumise aujourd'hui à notre vote, je dirai que ses dispositions fiscales répondent à un double objectif.

Il s'agit tout d'abord d'assurer une véritable réduction des prélèvements obligatoires. Je ne reviendrai pas sur les raisons qui devraient conduire à enregistrer une hausse de ces prélèvements pour 1999. J'observe cependant qu'avec une baisse annoncée de quelque 40 milliards de francs des impôts, le budget pour 2000 marque une réelle rupture.

Le second objectif est la justice fiscale, avec une amplification des inflexions engagées dès 1997.

La mesure la plus importante, la baisse de la TVA sur les travaux réalisés dans les logements existants, répond à cette double exigence. Cette mesure - une fois n'est pas coutume - aura fait l'unanimité sur nos bancs. Nous l'avons voulue, nous avons convaincu le Gouvernement de la soutenir, et celui-ci a convaincu la Communauté européenne de l'autoriser. On peut observer que l'Assemblée a pu, à cette occasion, peser de tous son poids.

Le Gouvernement a fait preuve, au cours de ce débat, comme l'année passée, d'un esprit d'ouverture notable : soixante-douze amendements ont été adoptés et le projet a été modifié sur des points importants.

En faveur des ménages, tout d'abord, et particulièrement des plus modestes, nous avons adopté plusieurs mesures significatives : suppressions de la condition d'âge pour la réduction d'impôt au titre des dépenses d'hébergement en établissements de long séjour ; majoration de 30 000 francs à 36 000 francs au seuil de loyer annuel pour la suppression du droit de bail dès 2000 ; réduction de 1 500 francs à 1 200 francs du montant maximal de la taxe d'habitation pour les contribuables de condition modeste ; exonération de taxe d'habitation pendant un an pour les RMIstes ayant retrouvé un emploi ; suppression du droit de timbre de 220 francs sur la carte de séjour des étrangers.

Au total, les allégements supplémentaires pour les ménages atteignent 1,4 milliard de francs.

S'agissant des associations, nous avons aménagé le régime des réductions d'impôt accordées pour les dons qui leur sont consentis.

Nous avons exonéré de droits d'enregistrement les dons et legs aux associations et fondations défendant les animaux ou l'environnement.

Enfin, nous avons relevé l'abattement de taxe sur les salaires, dont bénéficient les associations de moins de trente salariés.

Au total, il s'agit d'un effort supplémentaire de 210 millions de francs au profit du monde associatif, dont la contribution à l'affermissement du lien social est majeur.

Nous avons en outre amplifié la prise en compte de l'environnement par la fiscalité en diminuant encore le taux de la TIPP sur l'aquazole et en réduisant la taxe sur les véhicules de transport des sociétés pour les véhicules propres.

Concernant les entreprises, nous avons adopté, à l'unanimité, un dispositif équilibré permettant d'éviter que le décès de leurs dirigeants n'entraîne leur démantèlement.

En faveur des collectivités locales, on notera la majoration, sur proposition du Gouvernement, de 500 millions de francs de la dotation de solidarité urbaine ; une meilleure indexation de la compensation de la réforme de la taxe professionnelle, ce qui représente un abondement de 250 millions de francs ; la majoration de 150 millions de francs de la dotation de solidarité rurale et, enfin, une mesure d'un montant de 150 millions de francs au titre de la dotation de compensation de la taxe professionnelle pour les communes les plus défavorisées.

Pour conclure sur les allégements d'impôt, je rappellerai que l'intervention de notre assemblée en première lecture aura été plus significative que ne le donnerait à penser la simple observation des résultats nets. Apparemment, la première délibération aura entraîné une augmentation mineure de 283 millions de francs des recettes.

Cependant, ce montant représente le solde de mouvements d'une tout autre ampleur. Au total, et sans tenir c ompte des dispositions sur lesquelles il nous est demandé de revenir en seconde délibération ni de l'assujettissement de Réseau ferré de France à la TVA, les recettes ont été, d'une part, accrues de 5,1 milliards et, d'autre part, diminuées de 2,5 milliards. Le volume des recettes déplacé par nos votes est donc de l'ordre de 7,6 milliards. Rapportées aux ressources définitives nettes, les masses déplacées représentent un pourcentage de 0,5 %. Cependant, si l'on compare ces masses au montant des « aménagements de droits » opérés par le projet, c'est-à-dire à la marge de manoeuvre effective dont a disposé le Gouvernement, soit 54,9 milliards de francs, nos votes auront eu une incidence atteignant près de 14 % de ce montant.

En matière de dépenses, il convient de noter, à ce stade, un effort important de 1,2 milliard de francs en faveur des retraites agricoles les plus faibles.

Aujourd'hui nous sommes appelés à nous prononcer sur trois amendements présentés par le Gouvernement en seconde délibération.

J'observerai d'abord que le nombre de ces amendements est moins important que les années précédentes, et je m'en réjouis.

Sur le fond, je regrette, comme je l'ai dit samedi à l'aube, que l'amendement adopté par l'Assemblée sur la taxation de certaines oeuvres d'art à l'ISF ne soit pas retenu par le Gouvernement, non plus qu'un autre amendement qui vise à écarter une disposition que l'Assemblée a adoptée par « péché de gourmandise », en quelque sorte, à savoir la réduction du taux de la TVA sur les produits de la confiserie.

Quant au déficit budgétaire, il s'établirait, après notre première délibération et compte tenu de la seconde, au même montant, à 3 millions de francs près, que dans le projet de loi initial, soit 215,4 milliards de francs. Faut-il le rappeler, ce retour apparent à la case départ témoigne non pas du faible poids de l'Assemblée dans ce débat, mais plutôt de son sens des responsabilités : toutes les dispositions nouvelles que nous avons adoptées ont été gagées par des mesures raisonnables, contribuant à accentuer l'effort de justice fiscale à l'oeuvre dans ce projet.

C'est ainsi que l'avoir fiscal attaché aux dividendes perçus par les sociétés au titre de leurs participations financières a été réduit. le régime fiscal des indemnités de départ des dirigeants de société a été clarifié et la non réévaluation du barème de l'ISF s'inscrit également dans cette perspective, tandis que la suppression du crédit d'impôt-emploi prend en compte les conclusions de la mission d'évaluation et de contrôle.

En conclusion, je me réjouirai de la qualité des rapports qui se sont établis entre le Gouvernement et la commission des finances. Je constaterai également avec satisfaction que l'ensemble des groupes de la majorité plurielle a été associé à la concertation et que ceux-ci ont pu voir aboutir leurs propositions.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

Je soulignerai que des engagements forts ont été obtenus du Gouvernement sur trois points importants.

D'abord, en ce qui concerne la lutte contre les mouvements internationaux spéculatifs de capitaux et les paradis fiscaux, le Gouvernement présentera, au printemps prochain, un rapport exposant notamment le programme de la présidence française de l'Union européenne pour faire avancer ce dossier.

Ensuite, s'agissant des stock-options, le Gouvernement s'est engagé, au cours de la discussion d'un amendement du président de la commission des finances, à présenter l'an prochain un texte sur l'épargne salariale introduisant la transparence et prévoyant une fiscalité proche de l'impôt sur le revenu, applicable sur les revenus perçus à compter du 1er janvier 2000.

Enfin, si les plus-values fiscales résultant de la croissance le permettent, des dispositions seront prises dès le début de l'été prochain pour alléger la taxe d'habitation acquittée par les contribuables au titre de l'année 2000.

Après avoir remercié l'ensemble de ceux qui ont participé à nos travaux, je crois pouvoir résumer l'opinion majoritaire de la commission des finances en invitant l'Assemblée à se prononcer favorablement lors du vote qui va intervenir.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et sur quelques bancs du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Explications de vote

M. le président.

Nous en venons aux explications de vote.

Je donnerai la parole à un orateur par groupe, pour cinq minutes.

Pour le groupe du Rassemblement pour la République, la parole est à M. Philippe Auberger.

M. Philippe Auberger.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous voici parvenus au terme de la discussion de la première partie de la loi de finances pour l'an 2000, loi de finances qualifiée de « la plus transparente » et de « la plus sincère », ce qui en dit long sur les lois de finances précédentes que nous a présentées le Gouvernement.

(Sourires et exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

Mais est-il vraiment sincère de nous présenter une loi de finances où les prévisions de recettes sont établies à partir de données aussi manifestement sous-évaluées ? Quelle crédibilité peut-on accorder à une loi de finances qui nous promet, une nouvelle fois, une baisse des prélèvements obligatoires alors que cette promesse n'a été tenue ni en 1998 ni en 1999 ? (« Aucune ! » sur plu-s ieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

A u contraire, nos prélèvements obligatoires n'ont jamais été aussi élevés.

(« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Désormais, nous détenons le record absolu des grands pays industrialisés et des onze pays de l'euro.

(« C'est vrai ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

M. Gilles Carrez.

Notre président le dit lui-même !

M. Philippe Auberger.

Peut-on considérer que les baisses d'impôts promises aux ménages sont suffisantes (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République) , alors que, depuis la gestion socialiste, ces derniers ont vu leurs charges fiscales augmenter de 5 000 francs par an ? (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

Un député du groupe communiste.

Et la gestion Juppé ?

M. le président.

N'en venez pas aux mains tout de suite ! (Sourires.)

Poursuivez, monsieur Auberger.

M. Philippe Auberger.

Si le Gouvernement a pu négocier une baisse de TVA sur les travaux immobiliers, il a montré bien peu d'empressement pour demander la même baisse en faveur de la restauration,...

M. Jean-Yves Le Déaut.

Pourquoi ne l'avez-vous pas décidée en votre temps ?

M. Philippe Auberger.

... laissant les Portugais l'obtenir seuls. Qui peut croire que les allégements différés cette année sur l'impôt sur le revenu, la taxe d'habitation ou la T VA pourront tous trouver place dans le budget de 2001 ? (« Personne ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République.)

Mme Nicole Bricq.

On verra bien !

M. Philippe Auberger.

La majorité cherche-t-elle à se réserver des marges de manoeuvre dans la seule perspect ive des prochaines échéances électorales ? (« Oh ! Jamais ! » sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants. - Exclamations sur de nombreux bancs du groupe socialiste.)

M. Patrick Ollier.

On s'interroge !

M. Philippe Auberger.

Quant à la fiscalité sur les entreprises, on prétend la diminuer alors qu'on a multiplié les impôts nouveaux pour financer les 35 heures, et ce au détriment de l'emploi qu'on déclare par ailleurs vouloir encourager.

Est-ce au nom de la transparence qu'on affiche un taux de progression des dépenses de 0,9 % tout en multipliant les fonds extrabudgétaires pour financer les dépenses en forte progression, comme celles relatives aux 35 heures ou à la couverture maladie universelle ? Comment peut-on prétendre qu'il s'agit désormais de dépenses de sécurité sociale alors qu'hier les mêmes dépenses figuraient au budget de l'Etat ? Où est la sincérité ? Un député du groupe du Rassemblement pour la République.

Il n'y en a pas !

M. Philippe Auberger.

On prétend faire diminuer la dette publique par rapport au PIB alors qu'elle a constamment augmenté sous la gestion socialiste et que la diminution prévue du déficit de l'Etat - 20 milliards de francs - est manifestement insuffisante. D'ailleurs, les plus hautes autorités européennes de la Commission et de la Banque centrale ne se sont pas privées de nous le faire savoir.

Comment peut-on prétendre que cette loi de finances participe à la réduction des inégalités alors que le nombre de titulaires du RMI et des allocations de solidarité ne fait que croître, qu'une fraction importante des emplois créés sont des emplois précaires et que les sommes importantes dépensées pour la création d'emplois en créent en vérité très peu ?


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

Enfin, le rapport économique, social et financier relève justement, à sa page 49, que « la période actuelle de redémarrage de l'activité constitue une opportunité pour accumuler des réserves budgétaires afin de pouvoir les utiliser en cas de retournement conjoncturel ». Or non seulement rien n'est fait en ce sens, mais on accumule les dépenses nouvelles, mal financées, qui seront autant de bombes budgétaires à retardement pour l'avenir.

P our toutes ces raisons, mes chers collègues, le groupe RPR votera contre la première partie du projet de loi de finances pour 2000.

(Applaudissements sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Pour le groupe communiste, la parole est à M. Christian Cuvilliez.

M. Christian Cuvilliez.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, depuis le début de la mandature, nous déplorons que l'architecture globale du budget prenne comme point de départ, comme seul point d'appui, le pacte de stabilité européen.

Les attentes de nos concitoyens, telles qu'elles s'expriment dans les sondages, mais davantage dans le mouvement social, comme le 16 octobre dernier, et plus encore dans les urnes, dont notre majorité a été issue en 1997, ne sont pas pleinement satisfaites par la loi de finances pour 2000.

Qu'il ait été pour la droite difficile, pour ne pas dire laborieux, de faire entendre une voix critique sur le projet de budget, celle-ci se contentant de souligner que d'importantes dépenses publiques étaient transposées de fait dans le financement des 35 heures et donc que les vraies questions budgétaires se discutaient aussi hors de la loi de finances, voilà qui en dit long sur le profil bas budgétaire pour l'an 2000.

Nous nous réjouissons que la mobilisation des partenaires sociaux - et pas seulement du MEDEF, comme on a tendance à le faire croire - dont le groupe communiste s'est fait le relais dans le débat sur les 35 heures et dans la discussion en commission sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, ait amené le Gouvernement à revoir sa copie.

M. Maurice Leroy.

A reculer !

M. Christian Cuvilliez.

En effet, en renonçant à faire participer les organismes sociaux au financement du fonds pour l'allégement de la réforme pour la sécurité sociale, le Gouvernement s'est vu en position de trouver, en dehors du débat budgétaire, de nouvelles recettes et a indiqué qu'il allait proposer « d'affecter à ce fonds de manière pérenne une fraction des droits sur l'alcool, de l'ordre de 5,6 milliards ». S'il s'agit en fait - la question a tout à l'heure été évoquée lors des questions d'actualité - de transférer cette somme du fonds de solidarité-vieillesse, destiné normalement à couvrir les allocations et en particulier le minimum vieillesse, au fonds de financement de la réforme des cotisations patronales, cela ne règle, à notre avis, la question ni de manière satisfaisante ni de manière définitive, et cela risque de priver le fonds de solidarité-vieillesse de ses capacités d'évolution et de réponse aux attentes de ses attributaires.

Dans le même temps, la droite, de manière caricaturale, n'a cessé de répéter son leitmotiv contre les dépenses publiques, regrettant trop de déficits, trop d'impôts, trop de prélèvements obligatoires.

On connaît la musique : c'est la même que vous nous jouez depuis plusieurs années ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

L'an dernier cependant, ainsi que je l'ai souligné lors du débat d'orientation budgétaire, on a, en votant la loi de finances, limité, s'agissant d'un budget total d'environ 1 600 milliards, l'évolution budgétaire à 75 milliards environ, dont un premier tiers affecté à la résorption du déficit, un deuxième à la réduction des prélèvements et le troisième à l'évolution des budgets d'activité.

La loi de finances pour 2000 ne fait pas exception à cette règle : la marge de manoeuvre de la représentation nationale n'est guère plus importante cette année dans la mesure où, sur un total d'environ 78 milliards, ce sont 39 milliards qui sont affectés à la résorption du déficit et 39 autres à la réduction des prélèvements, le reste étant affecté à l'évolution des budgets d'activité, soit 0,3 % seulement, hors charges de la dette.

C'est dire combien il sera difficile de rendre les arbitrages dans la deuxième partie de la loi de finances, qui révélera les grandes difficultés que présentera l'établissement de ces budgets d'activité.

M. Jean-Jacques Jégou.

Suspense !

M. Christian Cuvilliez.

Je pense, par exemple, au budget de la recherche et de l'enseignement supérieur et à celui de la fonction publique d'Etat, qui ont déjà été déclarés irrecevables par les intéressés eux-mêmes.

Trop peu de nos propositions qui visaient à aider l'investissement et l'emploi ou à empêcher les comportements spéculatifs des entreprises ou des dirigeants d'entreprise ont été prises en compte.

M. Charles de Courson.

Il faut augmenter la pression !

M. Christian Cuvilliez.

C'est le cas de la majoration de la taxe professionnelle pour les entreprises qui licencient alors qu'elles ont été bénéficiaires - suivez mon regard jusqu'à Clermont-Ferrand -, comme de la mise en place d'une taxe spécifique permettant de limiter le recours au travail précaire ou de la nécessité d'intégrer à l'assiette de la taxe professionnelle les actifs financiers. Or les observateurs considèrent que la discussion budgétaire n'est devenue intéressante que lorsque l'on a abordé la question de la fiscalité des entreprises à travers le scandaleux régime des stock-options.

C omment mettre en balance, avons-nous alors demandé, les 27 000 détenteurs de stock-options qui détiennent un potentiel de 45 milliards de francs et les millions de chômeurs, retraités, RMIstes, qui réclament légitimement une augmentation des minima sociaux ? Telle a été une partie de la question qui a été éludée da ns la discussion.

Le débat sur les stock-options qui nient la force du travail, qui dépendent, comme le dit Jacques Calvet, PDG, ou plutôt ci-devant PDG, « de la bourse transformée en casino », a des implications très concrètes et très douloureuses pour le monde du travail et le mouvement social.

En effet, on ne peut répondre aux licenciements et aux inégalités en enfermant les salariés dans une logique qui survalorisera encore davantage l'actionnaire au détriment du travail et de la vocation d'investissement des entreprises.

Vous aurez noté comment, sur l'article 10, la droite s'est faite pateline, doucereuse, aimable, pour soutenir l'idée des allégements fiscaux et le projet de banalisation


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des stocks-options.

(Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. François Vannson.

Arrêtez ! Faites plutôt des propositions !

M. Christian Cuvilliez.

Nous pensons, nous communistes, qu'on ne doit pas permettre que la rémunération des dirigeants d'entreprise soit liée aux spéculations hasardeuses et à la prédation des entreprises.

M. François Vannson.

Oh ! la la !

M. Christian Cuvilliez.

Nous avons pris acte, et nous nous associerons dans un esprit constructif au groupe de travail constitué sur ce sujet.

M. Maurice Leroy.

M. Cuvilliez est centriste ! (Sourires.)

M. Christian Cuvilliez.

Nous avons noté avec attention les engagements du Gouvernement. En effet, la question des stock-options et plus généralement celle de l'épargne salariale seront intégrées au projet de loi sur les régulations promis par le Premier ministre pour le premier semestre 2000. Le texte que nous proposera M. le ministre de l'économie, sur la base du rapport que rendront M. de Foucauld et M. Balligand, aura pour but d'instaurer la transparence, de permettre la mutualisation des fonds, de prévoir la participation des salariés aux décisions des conseils d'administration et d'aborder la fiscalisation.

Sur ce dernier point, nous restons demandeurs : nous souhaitons que la fiscalité soit revue. Nous avons relevé avec intérêt que vous n'excluez pas qu'elle soit modulée selon le montant des plus-values, pour aller même jusqu'au barème de l'impôt sur le revenu.

En ne retenant pas, dès cette loi de finances, l'amendement Bonrepaux que nous avons nous autres repris et qui prévoyait une disposition taxant plus lourdement les revenus liés aux stock-options, vous avez accordé un sursiss upplémentaires à leurs détenteurs, notamment aux détenteurs spéculateurs qui font actuellement l'actualité.

Dans le débat plus global sur l'épargne salariale, nous resterons attentifs à la retraite par répartition, à tous les systèmes d'épargne de précaution et de sécurité, et nous resterons particulièrement hostiles à tout ce qui s'apparente à ce qu'on pourrait appeler l'

« enrichissement sans cause » de quelques-uns.

Concernant la taxe Tobin, si le Gouvernement s'est engagé, à la suite de l'amendement de la commission des finances, à déposer avant le 15 juin 2000 un rapport comportant trois éléments essentiels - un diagnostic, une évaluation, une présentation de programme d'action -, je regrette que nous n'ayons pu adopter l'amendement cosigné par cent dix d'entre nous et auquel l'ensemble de notre groupe reste attaché dans l'esprit et dans la lettre.

Nous serons donc attentifs aux suites qui y seront données.

Naturellement, et je peux dire heureusement, monsieur le secrétaire d'Etat, nous avons obtenu dans ce débat un certain nombre de satisfactions. (« Ah ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)...

M. Michel Bouvard.

Pas pour ce qui concerne la confiserie !

M. Christian Cuvilliez.

... et d'encouragements relatifs à la fiscalité locale : le maintien du degrèvement de la taxe d'habitation pour les RMIstes retrouvant du travail, la baisse de la cotisation minimale de la taxe d'habitation de 1 500 à 1 200 francs, l'augmentation de la DSU de 500 millions pour les collectivités locales et la revalorisation des compensations de la base salariale de la taxe professionnelle à 2,05 % au lieu de 0,821 %.

De plus, plusieurs amendements ont été adoptés à notre initiative - je passe sur l'accident un peu comique de la « TVA chocolat » - ou à l'initiative conjointe des groupes de la majorité. En effet, viennent s'ajouter à la baisse ciblée de la TVA sur les travaux de restauration d'immeubles, le relèvement de la suppression de la contribution représentative du droit au bail de 30 000 à 36 000 francs par an, ce qui avantagera 80 % des locataires de HLM où d'immeubles communs ; le relèvement de l'abattement de la taxe sur les salaires de 28 000 à 33 000 francs pour les associations d'utilité publique ; la réduction de 45 à 40 % de l'avoir fiscal sur les dividendes perçus par les sociétés filles, et encore le plafonnement de la participation publique à 50 % du coût des plans sociaux.

Nous restons bien évidemment dans l'attente d'une réforme plus globale de la fiscalité locale ; vous vous y êtes engagé, monsieur le secrétaire d'Etat, avec M. StraussKahn, absent aujourd'hui, mais qui nous le confirmera.

Je souhaite d'ailleurs au passage que notre amendement visant à exonérer les RMIstes du foncien bâti soit pris en compte dans la deuxième partie de la loi de finances.

Et nous pensons qu'il est possible d'aller plus loin encore dans les baisses ciblées de TVA.

M. Yves Nicolin.

Arrêtez-vous là !

M. Christian Cuvilliez.

L'impôt sur la fortune. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants)...

M. Michel Inchauspé.

Vous aviez cinq minutes !

M. Charles de Courson.

Il est reparti pour un quart d'heure !

M. Jean-Pierre Brard.

Laissez-le parler, c'est le sujet le plus intéressant !

M. Christian Cuvilliez.

Les députés de l'opposition se sentent concernés !

M. le président.

Veuillez conclure, monsieur Cuvilliez.

M. Christian Cuvilliez.

J'aimerais bien, monsieur le président, mais il y a un blocage.

L'impôt sur la fortune n'a pas fait l'objet d'un débat très approfondi. C'était pourtant nécessaire. Nous souhaitons toujours que le sujet soit réexaminé, non pas pour le caractère emblématique ou stigmatisant de cet impôt, mais pour en améliorer le rendement et l'efficacité en élargissant son assiette et en redéfinissant son barème.

A cet égard, je regrette que l'amendement de JeanPierre Brard tendant à intégrer les oeuvres d'art à l'assiette soit d'ores et déjà voué à l'abandon. Cela ne nous empêchera pas de continuer à demander avec insistance que les actifs financiers soient mieux pris en compte, dans ce domaine comme dans celui de la taxe professionnelle.

L a première phase de l'examen du budget, qui s'achève, ne clôt donc pas le débat budgétaire. Des dispositions peuvent encore être prises d'ici à décembre. Et par-delà le budget, d'autres chantiers sont à l'ordre du jour, comme le contrôle de l'usage des fonds publics, l'octroi de nouveaux droits de contrôle et d'intervention


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pour les salariés et la constitution effective d'un pôle public financier pour desserrer l'étreinte des marchés sur l'économie.

C'est en prenant en compte les avancées, mais aussi ce qu'il reste à faire pour concrétiser les engagements de la gauche, avec la volonté de construire et en assumant pleinement la responsabilité de leur participation au Gouvern ement, que les communistes vont voter le volet

« recettes » du projet de loi de finances pour l'an 2000.

(Applaudissements sur les bancs du groupe communiste et sur quelques bancs du groupe socialiste.)

M. le président.

La parole est à M. Jean-Jacques Jégou, pour le groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance.

M. Jean-Jacques Jégou.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, dans un contexte économique international quasiment euphorique,...

M. Alain Rodet.

N'exagérons rien !

M. Jean-Jacques Jégou.

... l'Assemblée nationale a examiné le projet de budget pour 2000 présenté par le Gouvernement. Si nous constatons dans notre pays, et plus généralement en Europe, une croissance exceptionnelle, force est de constater que le Gouvernement fait rater aux Français le rendez-vous de la croissance, à plus d'un titre.

La nécessité de financer les 35 heures a conduit le Gouvernement à nous présenter un budget opaque, démantelé par le transfert de recettes et de dépenses au budget de la sécurité sociale.

M. René Couanau.

C'est vrai !

M. Jean-Jacques Jégou.

Malgré la croissance qui vous est offerte, vous n'avez pas jugé utile de proposer les réformes qui s'imposent pour permettre aux Français d'envisager l'avenir avec confiance. Votre appétit pour la dépense publique vous conduit à en poursuivre l'augmentation. Il en est ainsi du fonctionnement de votre administration, dont les budgets progressent de 1,62 %.

M. Alfred Recours.

Ce que vous dites est scandaleux !

M. Jean-Jacques Jégou.

Que dire aussi de la progression du montant des rémunérations et pensions civiles des fonctionnaires, en hausse de 3,7 % ? Certes, il y a bien la baisse de la TVA sur les travaux, que vous portez comme l'étendard de la baisse des impôts. Mais c'est la seule vraie bonne nouvelle pour les Français, qui pourront ainsi améliorer leur logement.

M. Jean-Claude Lefort.

Ce n'est déjà pas mal !

M. Jean Michel.

Et ce n'est pas avec vos promesses qu'ils auraient pu en faire autant !

M. Jean-Jacques Jégou.

Je crois percevoir les raisons objectives pour lesquelles vous avez sauté l'obstacle des réformes. Au cours de la discussion, nous nous sommes vite rendu compte que le Gouvernement et sa majorité plurielle n'étaient pas d'accord sur grand-chose.

M. Maurice Leroy.

C'est clair !

M. Jean-Jacques Jégou.

C'est ainsi qu'après une longue suspension de séance pendant le débat sur les stock-options de M. Jaffré, il a fallu tout le talent de Dominique Strauss-Kahn...

M. le secrétaire d'Etat au budget.

C'est gentil !

M. Jean-Jacques Jégou.

... pour élever momentanément le débat, en traitant de la redistribution des richesses et de la répartition des revenus primaires, sujets auxquels l'opposition a ajouté la création de richesses.

Cela nous a tirés quelques instants de la médiocrité dans laquelle nous avaient entraînés les communistes. (Protestations sur les bancs du groupe communiste.)

M. Jean-Luc Reitzer.

Excellent !

M. Jean-Claude Lefort.

Vous savez ce qu'ils vous disent, les communistes ?

M. Jean-Jacques Jégou.

Néanmoins, la grande réforme de l'épargne salariale que nous appelons de nos voeux a été renvoyée au printemps prochain.

En revanche, au détour d'un amendement, s'est engagé un débat sur les bienfaits de la taxe dite « Tobin » sur les transactions financières internationales, que M. le secrétaire d'Etat lui-même à qualifiée de symbolique, et qui nous a pourtant retenus deux heures, tard dans la nuit.

Avec tous ces débats dans le débat, celui que nous attendions n'a pas eu lieu. Rien n'a été tranché. Vous avez régulièrement botté en touche, monsieur le secrétaire d'Etat. C'est d'actualité, je vous l'accorde (Sourires) ...

M. André Santini.

Joli !

M. Jean-Pierre Brard.

Ne talonnez pas !

M. Patrick Braouezec.

Vous semblez préférer la mêlée à l'ouverture, monsieur Jégou ! (Sourires.)

M. Jean-Jacques Jégou.

... mais, en la matière, après cinq jours de discussion, c'était surtout timoré et inefficace. Dans le débat interne à votre majorité plurielle, vous n'avez pas su arbitrer clairement. Pis, vous avez souvent cédé de la manière la plus contestable aux demandes pressantes des communistes, dont on a bien vu qu'ils n'avaient pas changé.

M. Félix Leyzour.

Voilà ce qui vous dérange !

M. Jean-Jacques Jégou.

Bref, vous avez vraiment manqué votre rendez-vous avec les Français. (Exclamations sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Le groupe UDF a toujours milité pour la maîtrise et l'efficacité de la dépense publique. Jacques Barrot, lui, lorsqu'il était ministre du travail et des affaires sociales, avait réduit les cotisations sociales (Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance) et financé cette mesure par un prélèvement sur toutes les ressources de l'Etat, provenant des ménages comme des entreprises, à hauteur de 40 milliards.

M. Jean-Luc Reitzer.

M. Jégou a raison !

M. Alain Clary.

Et les Français vous ont renvoyés chez vous !

M. Jean-Jacques Jégou.

Nous sommes donc favorables à une baisse des cotisations sociales, particulièrement sur les bas salaires, ce qui permettrait de relever sensiblement les salaires directs les plus faibles. Car je vous rappelle que les revenus, en France, sont plus faibles que chez nos principaux voisins.

M. Alain Rodet.

Mais non !

M. Jean-Jacques Jégou.

Monsieur le secrétaire d'Etat, le débat a montré l'incapacité du Gouvernement à se saisir véritablement des réformes indispensables. Votre budget pour 2000 ne prépare pas l'avenir des Français.

M. Alain Rodet.

Mais si !

M. Jean-Jacques Jégou.

Vous n'avez pas tenu compte des travaux et des propositions de la MEC.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

Pour toutes ces raisons, le groupe UDF votera contre la première partie du projet de loi de finances pour 2000.

(« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. le président.

Pour le groupe Radical, Citoyen et Vert, la parole est à M. Jean Rigal.

M. Jean Rigal.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, au terme du débat sur la partie « recettes » du projet de loi de finances pour 2000, il revient à chaque groupe de se prononcer, par son vote, sur l'acte politique majeur qu'est le budget de la nation.

Il s'agit d'un moment particulièrement important de la vie parlementaire, puisque, en tant que représentants du peuple, nous devons apporter notre consentement à l'impôt. Et nous, qui sommes de parfaits républicains, nous sommes particulièrement attachés à ce principe, garantie de toute vie collective.

Le groupe Radical, Citoyen et Vert est donc favorable à ce budget, pour trois raisons. D'abord, parce qu'il vise à consolider la croissance en stimulant l'activité économique, et par conséquent l'emploi. Ensuite, parce qu'il permet d'inverser la spirale infernale de la dette publique afin de retrouver des marges de manoeuvre et de préserver les générations futures. Enfin, parce qu'il poursuit une réforme fiscale orientée vers l'emploi et la justice sociale.

L'élaboration du projet de loi de finances n'est pas un exercice facile.

Le projet qui nous a été soumis repose sur une prévision de croissance située dans une fourchette de 2,6 à 3 %, que nous jugeons légitimement prudente. Comme l'a indiqué, non sans humour, M. le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, lors de la discussion générale, « la prévision est un art difficile, surtout quand on parle de l'avenir ».

Pour 2000, la stratégie budgétaire du Gouvernement est de stabiliser en volume les dépenses publiques, et d'affecter les fruits de la croissance d'une part à des baisses d'impôts, pour 39 milliards de francs, et d'autre part à la réduction du déficit, pour 21 milliards de francs.

S'agissant de la dépense publique, j'observerai simplement que les tenants d'une diminution drastique du rôle de l'Etat font souvent partie aussi de ceux qui réclament plus de crédits lors de l'examen des budgets des différents ministères.

(« Bravo ! » sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur les bancs du groupe socialiste.)

Les principales dispositions fiscales concernant les ménages, les entreprises, notamment les PME et les artisans du bâtiment, ainsi que les associations sont positives.

La suppression progressive de la taxe professionnelle sur les salaires se poursuit. Le 15 septembre dernier, le taux de TVA sur les travaux d'entretien des logements est passé de 20,6 à 5,5 %. La réduction de TVA sur les services d'aide à la personne est également une mesure favorable à l'emploi - il conviendra cependant d'être vigilant quant à ses effets concrets sur l'offre associative. La suppression dès l'an 2000 du droit de bail pour les locataires payant moins de 3 000 francs de loyer par mois est de nature à augmenter le pouvoir d'achat des ménages concernés. Par ailleurs, les petits propriétaires bailleurs se verront rembourser le droit de bail qu'ils avaient acquitté pour la période du 1er janvier au 30 septembre 1998. Les droits de mutation, appelés aussi frais de notaire, sont ramenés à 4,8 % depuis le 15 septembre dernier.

Le projet de loi comprend enfin diverses mesures en faveur des petites entreprises et de la fiscalité écologique, ainsi qu'un nouveau train de simplifications fiscales dont on ne peut que se réjouir.

Si la discussion parlementaire a permis d'améliorer le projet de loi sur plusieurs points - taxe d'habitation pour les ménages les plus modestes, indemnités de départ des dirigeants d'entreprises, transmission anticipée des entreprises familiales, revalorisation des retraites agricoles, dotations de l'Etat aux collectivités locales, et la liste n'est pas exhaustive - plusieurs problèmes importants ne sont pas encore réglés.

Je citerai plus particulièrement la réduction des inégalités, le niveau excessif des prélèvements obligatoires, le taux de TVA sur la restauration traditionnelle et sur l'ensemble de l'activité des métiers de services, la redevance sur l'audiovisuel, la taxe sur les mouvements de capitaux spéculatifs, dite « taxe Tobin », ou encore le régime fiscal des stock-options, qui, très légitimement, interpelle et choque nos concitoyens. (Applaudissement sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. Bernard Charles.

Très bien ! MM. Pierre Carassus, Gérard Saumade et Aloyse Warhouver.

Il a raison !

M. Jean Rigal.

A ce sujet, monsieur le secrétaire d'Etat, j'attirerai votre vigilante attention sur la rémunération des dirigeants français de filiales de groupes internationaux. Il y a un vrai problème de traçabilité et, au final, d'imposition des options de la société mère que peuvent également détenir ces dirigeants - sous réserve toutefois des conventions fiscales internationales.

L e Gouvernement a pris plusieurs engagements, notamment sur la réduction des inégalités et sur la diminution des prélèvements obligatoires, qui devront être tenus d'ici la fin de la législature. Nous y veillerons.

Au total, monsieur le secrétaire d'Etat, je pense que vous l'aurez compris, les députés du groupe RCV, radicaux de gauche, MDC et Verts, voteront la première partie du projet de loi de finances pour 2000, en vous apportant leurs adhésion vigilante et en restant disponibles pour continuer à améliorer ce texte. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe Radical, Citoyen et Vert et sur quelques bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Avant de donner la parole à l'avantdernier orateur inscrit pour les explications de vote, je vais, d'ores et déjà, faire annoncer le scrutin de manière à permettre à nos collègues de regagner l'hémicycle.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. Gilbert Gantier.

M. Gilbert Gantier.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, moi qui ai suivi toutes les discussions budgétaires depuis quelques années, j'ai l'impression que celle-ci nous a donné l'occasion de voir tomber les masques.

(Exclamations sur les bancs du groupe socialiste.)

On nous annonçait une gauche moderne, acquise aux baisses d'impôts, sensible à la maîtrise des dépenses publiques, favorable à l'innovation.

M. Didier Boulaud.

Ça sent le pétrole !

M. Gilbert Gantier.

Or nous avons vu une gauche a rchaïque, considérant l'entreprise comme un lieu d'exploitation, ravivant le fantôme usé de la lutte des classes, tentant de taxer par tous les moyens les créateurs de richesse.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

Nous avons vu aussi une gauche hésitante, fragile, divisée. Malgré ses talents de prestidigitateur, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ne parvient même plus à convaincre sa propre majorité. Ainsi, nous avons assisté - un peu en spectateurs, il est vrai - au psychodrame de l'article 10, à propos des stock-options, il aura fallu en effet une suspension de séance - annoncée pour un quart d'heure, mais qui s'est finalement prolongée pendant plus d'une heure - pour trouver un comprom is bancal : l'abandon de l'amendement Bonrepaux contre la promesse d'un durcissement à venir du régime des stock-options.

Du reste, pendant tout le débat budgétaire, le Gouvernement a dû subir un harcèlement permanent de la part d'une partie de sa majorité, exigeant un virage à gauche toute.

Le caractère même de cette discussion prouve que le budget 2000 est un mauvais budget, peu transparent et sans aucune ligne directrice. Il traduit clairement l'impasse dans laquelle est engagée la majorité actuelle.

(Rires sur les bancs du groupe socialiste.)

Le Gouvernement ne parvient même pas à tirer les conséquences de la croissance, faute de quoi il pert une partie de ses soutiens - ceux qui rêvent de protectionnisme, de nationalisations et de dirigisme. Toutefois, il ne peut pas non plus favoriser les stock-options, comme il l'aurait souhaité, semblet-il, ni créer de fonds de pension. Il ne peut pas instiller de la concurrence dans les secteurs de l'énergie, du transport ou ailleurs, contrairement à ce que préconise le rapport économique et financier qu'il a lui-même présenté.

Le budget 2000 n'est pas un budget vertueux. Il laisse filer les dépenses. La croissance, les artifices comptables donnent l'illusion d'une certaines maîtrise, mais les débudgétisations, les transferts de recettes vers des fonds ne trompent plus personne. Les dépenses continuent d'augmenter : plus 1,8 %, et non pas plus 0,9 %, comme le prétend le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.

Durant toute la semaine dernière, le groupe Démocratie libérale et Indépendants s'est opposé à toutes les augmentations d'impôt que le Gouvernement et la majorité veulent imposer une fois de plus à notre pays.

M. Didier Boulaud.

Ça sent le pétrole !

M. Gilbert Gantier.

La majorité a décidé, durant les débats, d'accroître la pression fiscale en diminuant l'avoir fiscal des entreprises, en supprimant la réduction d'impôt pour création d'emplois, en taxant les retransmissions sportives, en fiscalisant les indemnités de licenciement j'en passe.

M. Jean-Pierre Brard.

Et des meilleures !

M. Gilbert Gantier.

Le groupe Démocratie libérale et Indépendants s'enorgueillit pour sa part de s'être toujours battu en faveur de la réduction des prélèvements obligatoires.

M. Didier Boulaud.

Et avec quel succès !

M. Gilbert Gantier.

Nous avons demandé la baisse du taux normal de TVA, car nous considérons que les fruits de la croissance rendent possible une réduction de l'écart excessif entre le taux réduit et le taux normal, comme la gauche s'y était engagée en 1997.

D'autre part, nous avons demandé l'abaissement du taux de TVA sur la restauration. Nous ne comprenons pas pourquoi ce qui est possible pour les travaux d'entretien ne le serait pas pour la restauration, d'autant plus q ue d'autre pays européens, comme le Portugal, appliquent un taux réduit à ce secteur. Nous regrettons que la majorité plurielle n'ait pas voté un de nos amendements, semblable à celui qu'elle avait elle-même déposé sur ce sujet. Le même scénario s'est d'ailleurs déroulé pour notre amendement visant à réduire le taux de TVA sur les installations sportives.

Enfin, la majorité a refusé de réformer l'impôt sur le revenu et d'en diminuer le poids. Au contraire, je le rappelle, d'après le Gouvernement lui-même, il augmentera de 13 milliards de francs l'année prochaine. Le Gouvernement nous a renvoyés au projet de loi de finances pour 2001. Il nous abreuve de belles paroles, mais ne propose rien de tangible dans l'immédiat.

Avec la croissance dont nous bénéficions cette année, le Gouvernement avait les moyens de mener une politique de réforme : réforme des impôts, réforme des structures de l'Etat.

Nous assistons en direct à un grand gaspillage qui nous rappelle une certaine époque Rocard.

(Protestations sur les bancs du groupe socialiste.)

La France doit cesser de se singulariser en Europe par son total immobilisme.

Pour toutes ces raisons, le groupe Démocratie libérale et Indépendants votera contre la première partie de ce budget qui va à contre-courant de ses aspirations et de ce que font tous nos partenaires.

(Applaudissements sur les bancs du groupe Démocratie libérale et Indépendants, du groupe du Rassemblement pour la République et du goupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. le président.

Pour le groupe socialiste, la parole est à M. Jean-Louis Idiart.

M. Jean-Louis Idiart.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, chers collègues, le contexte économique mondial a permis à notre pays d'enregistrer, grâce aux mesures prises par le Gouvernement, des résultats particulièrement positifs. Ce projet de loi accompagne l'emploi et la croissance. Il n'y a que nos collègues de l'opposition pour croire, ou sembler croire, que cette croissance n'est pas forte. Ils se heurtent simplement à la dure réalité, celle d'un gouvernement de la majorité plurielle qui obtient des résultats après une longue et difficile période pour eux, qui s'est terminée par la crucifixion de 1997 ! (Rires sur divers bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Nous avons pour objectifs la diminution du déficit budgétaire ainsi qu'une dépense maîtrisée et orientée donnant la priorité à l'emploi, l'éducation et la justice. Ce budget soutient et dynamise la consommation.

Cette discussion budgétaire de haute tenue s'est déroulée dans un climat positif après une préparation méthodique avec la majorité plurielle. Le débat politique a été très fort, comme nous l'avons voulu. En effet comment pourrait-on débattre à l'extérieur et pas dans l'hémicycle d'un sujet aussi fort que la taxation des stock-options ? Comment pourrait-on débattre à l'extérieur et pas dans l'hémicycle de la taxe Tobin ? Comment pourrait-on discuter à l'extérieur et pas dans l'hémicycle de la taxation des très fortes indemnités de départ après licenciement ? Personne n'aurait compris que l'Assemblée nationale n'en débatte pas au moment où tant d'affaires défraient la chronique. Nous avons donc évoqué tous ces sujets, voté des dispositions particulières et fixé des objectifs.

L'amendement de François Hollande et du groupe socialiste répond au souci de juste taxation des très hautes indemnités de départ.

L'amendement de Didier Migaud et du groupe socialiste prévoit que le Gouvernement adressera au Parlement un rapport évaluant les pertes de recettes publiques résul-


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tant de la concurrence fiscale internationale ainsi que l'incidence que pourrait avoir l'instauration de prélèvements assis sur les mouvements de capitaux pour les finances publiques, et présentant le programme d'action de la présidence française de l'Union européenne relatif à la régulation internationale des mouvements de capitaux.

L'amendement de M. Bonrepaux et du groupe socialiste sur les stock-options a permis d'obtenir des engagements du Gouvernement sur une loi qui serait applicable dès le 1er janvier 2000 et dont nous discuterons au cours du premier semestre 2000.

Nous voyons aboutir notre demande de baisse de la TVA puisque vingt milliards d'allègements profiteront aux ménages faisant exécuter des travaux dans un logement. A cet égard, il est paradoxal d'entendre les orateurs de l'opposition trouver la diminution de TVA trop faible alors qu'ils nous avaient plutôt habitués à des augmentations. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert. - Protestations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République, du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.) Nous souhaitons que la baisse de la TVA se poursuive en l'an 2000. Nous pensons non seulement à la restauration, mais également aux couches pour personnes malades. Pour ces personnes malades en grande difficulté, la diminution de la TVA sur les services à domicile s'applique dès cette année. Le relèvement de l'abattement de taxe sur les salaires dont bénéficient les associations vient compléter ces mesures.

Ce projet de loi, amendé, prévoit la réduction de 1 500 à 1 200 francs du montant maximum de taxe d'habitation supporté par les contribuables les plus modestes ainsi que l'exonération de cette taxe d'habitation, la première année, pour les RMIstes retrouvant un emploi.

Autre mesure forte : la suppression du droit de bail dès cette année pour les locataires payant un loyer inférieur à 3 000 francs par mois.

A la liste des quarante-huit taxes supprimées cette année s'ajoute la disparition du droit de timbre sur les titres de séjour.

Toutes ces mesures vont dans le sens d'une meilleure croissance pour notre pays et d'une plus grande justice.

(« C'est trop long ! » sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République.) Elles sont conformes aux engagements que nous avons pris pour l'année 2000. Nous voterons ce texte. Monsieur le secrétaire d'Etat, vous avez la confiance du groupe socialiste. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

Vote sur l'ensemble de la première partie (application de l'article 44, alinéa 3, de la Constitution)

M. le président.

A la demande du Gouvernement, et en application de l'article 44, alinéa 3, de la Constitution, l'Assemblée est appelée à se prononcer, par un seul vote, sur les dispositions ayant fait l'objet d'une seconde délibération, ainsi que sur l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2000.

Je rappelle que le vote est personnel et que chacun ne doit exprimer son vote que pour lui-même et, le cas échéant, pour son délégant, les boîtiers ayant été cou plés à cet effet.

Le scrutin est ouvert.

....................................................................

M. le président.

Le scrutin est clos.

Voici le résultat du scrutin : Nombre de votants ...................................

562 Nombre de suffrages exprimés .................

562 Majorité absolue .......................................

282 Pour l'adoption .........................

311 Contre .......................................

251 L'Assemblée nationale a adopté.

Suspension et reprise de la séance

M. le président.

La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures dix, est reprise à dix-sept heures quinze, sous la présidence de M. Patrick Ollier.)

PRÉSIDENCE DE M. PATRICK OLLIER,

vice-président

M. le président.

La séance est reprise.

3 RAPPEL AU RÈGLEMENT

M. Arnaud Montebourg.

Je demande la parole pour un rappel au règlement.

M. le président.

La parole est à M. Arnaud Montebourg, pour un rappel au règlement.

M. Arnaud Montebourg.

Tout à l'heure, pendant les questions au Gouvernement, M. Albertini, qui posait une question sur la réforme des tribunaux de commerce à

Mme la garde des sceaux...

M. le président.

Excusez-moi de vous interrompre, monsieur le député, mais ce n'est pas un rappel au règlement ! C'est un fait personnel. Conformément aux dispositions de l'article 58 du règlement vous aurez donc la parole en fin de séance.

M. Arnaud Montebourg.

Le président Fabius a estimé que je pourrais m'exprimer à la reprise de la séance sur le fondement de l'article 58-4 du règlement !

M. le président.

Je suis pour le respect total de notre règlement. Donc, soyez bref, je vous prie !

M. Arnaud Montebourg.

Je vous remercie, monsieur le président.

M. Albertini, député de Seine-Maritime, a cru utile tout à l'heure, en posant à Mme la garde des sceaux une question sur la réforme des tribunaux de commerce, de me qualifier d'« esbroufeur », probablement en raison des constatations sévères qu'une commission d'enquête parlementaire, présidée par M. Colcombet et dont j'étais le rapporteur, a pu faire sur ces juridictions commerciales.

Je tiens à lui signaler que ces propositions de réforme des tribunaux de commerce, que Mme Guigou a défendues


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tout à l'heure dans cet hémicycle, ont été approuvées non seulement par l'ensemble des députés de la majorité, mais également par l'inspection générale des services judiciaires et l'inspection générale des finances, qui a enquêté elle aussi dans ces juridictions. Il n'y a nulle esbroufe dans ces tristes constatations, qui reflètent d'ailleurs le désespoir de dizaines de milliers de justiciables.

M. Albertini m'a fait parvenir une lettre dans laquelle il dit n'avoir eu aucune intention de m'apostropher dans l'hémicycle et précisant que si je jugeais le mot « esbroufeur » offensant, il le retirerait volontiers. J'en suis heureux et je l'en remercie, car ce terme me semble sinon offensant, du moins désobligeant.

4

LOI DE FINANCEMENT DE LA SÉCURITÉ SOCIALE POUR 2000 Discussion d'un projet de loi

M. le président.

L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 (nos 1835, 1876).

La parole est à Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mme Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, monsieur le président de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan, madame, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les députés, pour la troisième année consécutive je vous présente le projet de loi de financement de la sécurité sociale. L'objectif est toujours le même : garantir la pérennité de notre système de sécurité sociale. Dans le prolongement de ce qu'avait annoncé Lionel Jospin dans sa déclaration de politique générale, notre orientation n'a pas bougé : nous voulons l'équilibre des comptes de la sécurité sociale pour garantir à nos concitoyens l'égal accès à des soins de qualité et leur assurer à chaque étape de leur vie la pérennité d'une protection sociale efficace et toujours plus juste, du moins nous l'espérons.

Cet équilibre est la condition sine qua non d'un horizon dégagé pour continuer à progresser, notamment sur la question des remboursements. Il n'était plus possible de laisser le déficit chronique du régime général menacer, telle une épée de Damoclès, les fondements mêmes de notre protection sociale. Selon les termes mêmes de l'ordonnance de 1945 « la sécurité sociale est la garantie donnée à chacun, qu'en toutes circonstances, il disposera des moyens nécessaires pour assurer sa subsistance et celle de sa famille dans des conditions décentes ». Pourtant, malgré la croissance, beaucoup d'hommes et de femmes restent au bord du chemin, à regarder passer le convoi de ceux qui prospèrent. La sécurité sociale, pivot de la solidarité nationale, leur est indispensable pour accéder aux droits fondamentaux et pour sortir de la situation dans laquelle ils se trouvent.

Nous devons aussi anticiper sur l'avenir et l'évolution profonde du paysage démographique et de la pyramide des âges dans notre pays. Le vieillissement de la population et une meilleure prise en charge du handicap se traduisent par une hausse de la demande en services sociaux et en offre de soins. C'est un nouveau défi pour la sécurité sociale.

De tels enjeux s'accommodent mal du coût d'un déficit pesant et inhibant. Il nous fallait donc réagir par nécessité, par conviction, mais aussi parce que c'était un impératif de justice sociale.

Depuis deux ans, nous avons entrepris de redresser les comptes sociaux. Nous enregistrons d'ores et déjà les résultats des efforts consentis, même si beaucoup reste encore à faire - j'ai été amenée à le dire à plusieurs reprises, notamment devant les commissions.

En 1999, le régime général devrait approcher l'équilibre, avec un déficit prévu autour de 4 milliards, soit 0,3 % de ses dépenses et 1,5 % de l'ensemble des déficits publics. Ce résultat confirme le redressement du régime général. Ces chiffres de la Commission des comptes ne sont ni subjectifs, ni polémiques. Ils montrent simplement que, de 54 milliards en 1996, le déficit est passé aujourd'hui à 4 milliards. Les raisons de la réduction du déficit sont certes multiples, mais on peut en relever trois principales.

Tout d'abord, il y a la bonne tenue des recettes. La croissance y a bien évidemment contribué, une croissance notamment due aux mesures prises par le Gouvernement pour rétablir la confiance et relancer la consommation.

La baisse du chômage et le retour à l'emploi d'un grand nombre de nos concitoyens, qui résultent de la politique menée par le Gouvernement, a également a pporté des cotisations nouvelles. De fait, 750 000 emplois en plus, 350 000 chômeurs en moins, cela représente des cotisations supplémentaires.

Enfin, cette amélioration des recettes est particulièrement liée à la réforme du financement de la sécurité sociale, que nous avons engagée il y a deux ans en basculant les cotisations d'assurance maladie des salariés vers la CSG et en élargissant les prélèvements sur le patrimoine. Cette mesure, qui a été inspirée par un souci de justice sociale et pour éviter que seuls les salaires contribuent au financement de la sécurité sociale, a rapporté 2 milliards de plus que prévu.

Ensuite, il y a les mesures correctrices que nous avons été amenés à prendre, à la suite des dérapages de certains professionnels par rapport aux objectifs fixés. Aux termes de l'ordonnance Juppé, la CNAM était paralysée dès lors qu'il n'y avait pas de convention signée avec les professionnels. C'était le cas par exemple pour les spécialistes.

Aussi, nous avons été amenés, dès le milieu de l'année dernière, à prendre un certain nombre de mesures qui ont donné lieu par la suite dans la quasi-totalité des cas, et je m'en réjouis, à des accords avec les professionnels concernés. Je pense aux radiologues, aux cardiologues, aux laboratoires biologiques. D'autres dispositions ont été prises avec les cliniques et les dentistes.

Nous avons également réussi à signer avec l'ensemble des organisations de pharmaciens des accords de régulation et qui reconnaissent les pharmaciens comme de vrais acteurs de notre système de soins. Là aussi, c'est un progrès.

Enfin, dernier élément, mais non le moindre, qui explique l'amélioration des résultats de la sécurité sociale, nous bénéficions des premiers résultats des réformes structurelles que nous avons engagées. Je pense notamm ent aux recompositions hospitalières pour mieux prendre en compte les attentes de la population et accélé-


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rer l'adaptation des hôpitaux, et à la mise en place d'une politique du médicament ambitieuse. Cette dernière entraîne aujourd'hui des économies et permet aussi d'avoir des prix et des taux de remboursement liés au service médical rendu.

L'hôpital tient ses budgets et la tendance sur le médicament s'infléchit alors que les honoraires des généralistes comme des spécialistes sont restés conformes à l'objectif qui leur était fixé cette année.

Bien sûr, la branche maladie est encore déficitaire et je ne me réjouis donc pas complètement des résultats de cette année mais ce déficit de douze milliards est identique à celui que nous avions prévu en mai dernier alors que de nombreux commentaires prédisaient un dérapage pouvant aller jusqu'à 18 ou 20 milliards.

M. Yves Bur.

50 milliards en deux ans !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Je rappelle que, sur ces 12 milliards, 8,4 sont dus au dérapage de l'année précédente puisque, comme vous le savez, nous additionnons les déficits. Les résultats sont donc bien là même s'il reste encore dans certains domaines des efforts à accomplir - j'y reviendrai dans quelques instants.

En l'an 2000, le régime général devrait dégager un excédent d'environ 2 milliards de francs, compte tenu des mesures proposées dans le projet de loi qui vous est soumis. Pour la première fois depuis quatorze ans, si ces prévisions se réalisent, le régime général va donc connaître une situation excédentaire. Certes, les dépenses de santé ont augmenté, mais c'est inévitable dès lors que la croissance revient. C'est vrai dans tous les pays industrialisés, dès que le pouvoir d'achat s'accroît, les dépenses de santé et d'éducation sont celles qui augmentent le plus. Encore faut-il faire en sorte que seules celles qui sont indispensables progressent. Tel est bien l'objectif d'une politique de santé publique.

En tout cas, les comptes du régime général ont connu un redressement de 40 milliards en trois ans, le déficit cumulé sur cette période s'élevant, quant à lui, à 18 milliards, montant qui est à comparer aux 266 milliards des gouvernements qui nous ont précédé entre 1993 et 1997, monsieur Bur.

M. Pascal Terrasse.

C'est la réalité !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Avant d'être interrompue il y a un instant par M. Bur, je ne souhaitais pas rappeler ce chiffre qui n'est pas à l'honneur des gouvernements qui nous ont précédé mais tout le monde sait aussi qu'il n'est pas facile de réduire le déficit de la sécurité sociale - je suis bien payée pour le savoir.

Il y a dans ces résultats et ces prévisions - et je reviens à des considérations qui devraient, je l'espère, être plus consensuelles - une raison de nous réjouir ensemble car nous avons tous intérêt à ce que la sécurité sociale sorte du rouge pour construire une politique ambitieuse de santé publique mais s'agissant aussi de la famille, des accidents du travail ou de décisions à prendre en matière de recettes.

Personne n'a intérêt à une remise en cause de la sécurité sociale, à laquelle les Français sont extrêmement attachés. L'excédent de l'ensemble des administrations sociales, qui est déjà de 10 milliards en 1999 et qui devrait s'élever à 20 milliards en 2000 montre combien les comptes sociaux apportent aussi leur tribut à la réduction des déficits.

Les résultats sont donc encourageants mais nous devons rester prudents pour l'avenir et tout aussi déterminés à poursuivre les réformes structurelles que nous avons engagées. Je me permettrai de les reprendre en évoquant chaque branche.

Tout d'abord en matière de santé, nous devons poursuivre les politiques structurelles engagées depuis deux ans. La pérennité de notre système de protection sociale est, j'en suis convaincue, à ce prix. La qualité des soins, la maîtrise des dépenses de santé sont non seulement indispensables mais complémentaires. L'égalité d'accès à des soins de qualité passe aussi par la diminution des dépenses infondées et par une meilleure répartition des dépenses de santé partout sur le territoire.

C'est à partir de là que nous avons engagé une rénovation profonde du cadre conventionnel qui régit les relations entre les caisses d'assurance maladie et l'ensemble des professionnels de santé. Une étape nouvelle et décisive vous est proposée dans le projet de loi que nous allons examiner.

Il s'agit, comme l'avait demandé le conseil d'administration de la CNAM dans son programme stratégique, de faire en sorte que la régulation de la médecine de ville soit placée sous l'entière responsabilité des caisses et des professionnels de santé. Le dispositif qui vous est soumis confie donc aux caisses et aux syndicats représentatifs la tâche de gérer un objectif de dépenses et de prendre toute mesure nécessaire au respect de celui-ci.

Cette orientation est conforme au plan stratégique de la CNAM mais aussi aux propositions qui avaient été faites par un certain nombre de députés de la commission des affaires sociales conduits par Claude Evin, et sous l'égide évidemment de leur président.

Il appartiendra à la CNAM et aux autres caisses de gérer une enveloppe déléguée qui regroupera l'ensemble des honoraires des professionnels de santé. La gestion se fera, autant que possible, par la négociation. Les parties conventionnelles pourront décider d'agir sur les pratiques professionnelles, de réfléchir sur l'évolution des nomenclatures, en faisant en sorte de mieux évaluer et de mieux contrôler les pratiques inutiles, et de travailler sur la cotation et l'évaluation des actes.

C'est un pas en avant essentiel qui permettra, en ce qui concerne la médecine de ville, de remettre les partenaires du système de santé au coeur même de l'évolution du système de sécurité sociale. Nous mettons véritablement en place la maîtrise médicalisée des dépenses de santé.

Le mécanisme de reversement qui avait été imposé aux médecins en cas d'évolution excessive des prescriptions n'a reçu ni l'aval du Conseil d'Etat pour le mécanisme qui a précédé le nôtre ni celui du Conseil constitutionnel.

Son efficacité n'était d'ailleurs pas de même nature que la clause de sauvegarde que nous avons mise en place avec l'industrie pharmaceutique et qui est beaucoup plus facile à gérer pour chaque laboratoire en termes d'évolution du chiffre d'affaires et des résultats.

Nous vous proposons donc d'abroger ce mécanisme en associant plus étroitement les professionnels de santé à la maîtrise des prescriptions. Là aussi, nous donnons la possibilité à la CNAM, par des mesures incitatives permettant d'engager tous ceux qui le souhaitent vers de meilleures pratiques - un bon usage des soins et des prescriptions -, d'avancer dans un domaine qui reste encore un élément difficile dans la maîtrise de nos dépenses de santé.


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J'en arrive au médicament. Depuis deux ans, nous avons mis en place une véritable politique du médicament. Elle s'articule autour de quatre axes. Le premier vise à mieux garantir la sécurité et la qualité des médicaments, à améliorer l'encadrement de la sécurité sanitaire, à renforcer les pouvoirs de police sanitaire, à informer le public et les professionnels de santé et à lutter plus efficacement contre la iatrogénie médicamenteuse dont on sait qu'elle coûtait très cher à la sécurité sociale.

Deuxième axe, il convient d'améliorer l'accès aux médicaments. La principale réforme dans ce domaine, c'est, bien sûr, la mise en oeuvre de la CMU pour six millions de bénéficiaires. Mais d'autres décisions ont également été prises. Elles concernent la mise à disposition d'innovations thérapeutiques à l'hôpital avant même leur autorisation de mise sur le marché, l'amélioration de la lutte contre la douleur grâce à l'utilisation de nouveaux antalgiques adaptés à l'usage pédiatrique, le développement de la contraception d'urgence ou la mise à disposition en ville de certains médicaments dans les maladies graves.

Troisième axe, le Gouvernement a engagé d'importantes réformes pour favoriser la recherche et le développement de nouveaux médicaments.

Quatrième axe, enfin, pour permettre une meilleure allocation des ressources, mais aussi une meilleure transparence, nous avons mis en place une nouvelle politique du médicament autour de trois orientations.

Tout d'abord, le développement du médicament générique. Chacun sait qu'à service médical rendu égal, on peut réaliser des économies très importantes. Le droit de substitution que vous avez voté a été accordé aux pharmaciens avec lesquels nous avons négocié un accord.

Celui-ci leur permet de délivrer aux patients un médicament générique dont l'efficacité est indentique à celle du médicament de référence. Nous commençons à percevoir les premiers résultats de cette mesure. Elle laisse à penser que la substitution a démarré très rapidement chez les pharmaciens.

Ensuite, la réévaluation des médicaments et la réforme du remboursement. Nous en avons souvent parlé, il s'agit de prévoir des règles transparentes et précises pour décider du principe et du taux de remboursement d'un médicament, à partir du service médical rendu. Comme je l'ai expliqué à plusieurs reprises devant l'Assemblée, le travail réalisé dès notre arrivée au sein des classes thérapeutiques nous a montré que le prix d'une même molécule produite par des laboratoires différents pouvait varier de un à trois avec des taux de remboursement tout à fait différents.

Il faut dire que notre système était relativement archaïque, puisque les prix et les taux de remboursement étaient fixés par des négociations bilatérales entre l'Etat et les laboratoires. Il fallait donc plus de transparence.

C'était important tant pour les laboratoires, en termes de concurrence, que pour les malades afin qu'ils connaissent réellement le service médical rendu. Cette disposition permettra également à la sécurité sociale de savoir si un médicament apporte un plus par rapport aux thérapies précédentes, ce qui est essentiel pour établir le juste prix.

Certains médicaments seront ainsi moins remboursés tandis que d'autres, plus innovants, le seront mieux. Tel n'était pas le cas jusqu'à présent et cela pénalisait les laboratoires les plus avancés.

Un décret en Conseil d'Etat, qui va sortir dans quelques jours, fixera précisément ces nouvelles règles. D'ores et déjà, nous avons sollicité de la commission de la transparence une évaluation concernant 1 100 spécialités.

Cette appréciation sur le service médical rendu a été transmise aux laboratoires pharmaceutiques. Nous en sommes actuellement à la phase contradictoire. Les décisions définitives seront prises au mois de novembre.

Troisième orientation, enfin, le développement de l'approche conventionnelle. A partir d'éléments plus transparents vis-à-vis du public et des laboratoires, nous souhaitons continuer à négocier avec l'industrie pharmaceutique, dans son entier, et avec chacun des laboratoires.

Nous avons ainsi signé un accord sectoriel avec le SNIP le Syndicat national de l'industrie pharmaceutique - que nous mettons en oeuvre actuellement.

Ce travail effectué sur les médicaments, et qui doit entraîner des économies substantielles, nous devons maintenant l'étendre aux matériels médicaux dont les dépenses continuent à augmenter de manière très importante. Les pansements, les prothèses et les accessoires feront désormais l'objet d'une évaluation par une commission d'experts de l'Agence de sécurité sanitaire des produits de santé afin d'apprécier leur service médical avant l'admission au remboursement et la fixation du prix. Nous allons ainsi progresser encore dans les réformes structurelles. L'objectif est de payer le juste prix et de reconnaître les avancées lorsqu'elles existent.

J'en viens à l'hôpital. Le Gouvernement conduit l'évolution de notre système hospitalier avec pour priorité de remettre au centre du système hospitalier la personne malade et son entourage. L'ouverture de l'hôpital vers l'extérieur, et notamment vers les plus exclus, la lutte contre la douleur, l'attention portée aux personnes âgées, la lutte contre les dangers de l'alcoolisme et du tabagisme, notamment chez les jeunes, l'accompagnement des mourants, mais également le renforcement de la sécurité sanitaire, de la qualité par l'accréditation, la poursuite de l'effort de réduction des inégalités entre régions, constit uent autant de volets de l'action publique qui concourent à la réalisation de cet objectif ambitieux qui consiste à remettre le malade au coeur du système hospitalier.

Cette politique s'organise autour de trois axes majeurs.

Il s'agit tout d'abord de promouvoir la qualité et la sécurité des soins. Nous avons déjà bien avancé dans l'accréditation. Quarante établissements se sont portés volontaires pour entrer dans ce dispositif mis en place par l'ANAES. Ils seront 200 dès la fin de cette année. Le patient, un peu objet jusqu'à présent, devient sujet dans le système hospitalier. Par ailleurs, des actions en matière d'information et de transparence du fonctionnement du système hospitalier sont engagées. Les commissions de conciliation dans les établissements de santé se généralisent. Quant à l'implication des usagers par l'intermédiaire de leurs associations, elle est de plus en plus forte.

Telles sont les évolutions que nous suscitons et qui se développent avec force actuellement.

Réduire les inégalités dans l'accès aux soins, c'est le deuxième objectif de la politique hospitalière. Je ne reviens pas sur la CMU et rappellerai seulement l'existence des permanences d'accès aux soins de santé, PASS, qui sont des lieux d'accueil pour les plus démunis. Leur montée en charge, prévue sur trois ans avec un objectif de 300 PASS installées en l'an 2000, est déjà largemente ngagée avec 200 structures qui fonctionnent au 31 décembre 1999.

La réduction des inégalités entre les régions et les établissements est également prioritaire. Notre politique de réduction des inégalités repose donc sur des critères objectifs : un dispositif d'allocations différenciées de res-


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sources associant des critères sanitaires - l'état de santé de la population -, démographiques, mais aussi d'efficience économique des différents établissements.

Les dotations régionalisées qui ont été communiquées aujourd'hui à votre commission des affaires culturelles, familiales et sociales vont de 1,25 % pour l'Ile-de-France à 3,80 % pour la Picardie, région la mieux dotée étant donné ses difficultés.

Mme Odette Grzegrzulka.

Très bien, elle en avait besoin !

M. Jean-Pierre Blazy.

L'Ile-de-France aussi !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

L'Ilede-France est beaucoup mieux lotie cette année que les années précédentes. J'espère d'ailleurs que cette évolution permettra de prendre en compte les différences extrêmement grandes qui existent encore à l'intérieur de cette région.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Très bien !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Il y a, en effet, à l'intérieur de chaque département des hôpitaux bien dotés - je pense à ceux des Hauts-de-Seine ou de la Seine-Saint-Denis...

M. Jean-Paul Bacquet.

Très juste !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... et d'autres qui le sont beaucoup moins.

M. Jean-Paul Bacquet.

Sous-prolétarisés !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Aussi avons-nous demandé au directeur de l'ARH de prendre en compte ces éléments car les inégalités ne sont pas seulement interrégionales ; elles existent aussi à l'intérieur d'une même région.

Un autre objectif de la politique hospitalière consiste à adapter l'offre de soins aux besoins de la population pour répondre au exigences de qualité, de sécurité et d'amélioration de l'accès aux soins. Cela impose de continuer à faire évoluer notre système hospitalier. Tel est bien l'esprit de la révision des schémas régionaux d'organisation de la santé de deuxième génération. Nous rendrons publics, soit à la fin de cette semaine, soit au début de la prochaine, les résultats pour l'ensemble des régions, deux régions ayant pris du retard. Mais, d'ores et déjà, on peut dire qu'au-delà des priorités nationales - urgences, périnatalité, cancérologie - les SROS ont retenu bien d'autres priorités liées aux besoins des différentes régions.

Ainsi, pour certains SROS, c'est la prise en charge de la chirurgie, le suicide chez les jeunes ou l'alcoolisme qui ont donné lieu à des programmes particuliers. Comme nous l'avions souhaité, ils se sont appuyés sur les besoins de santé, sur la réalité des réponses d'aujourdhui pour apporter de meilleures réponses demain.

Tous les schémas régionaux d'organisation de la santé ont recherché l'articulation d'un meilleur accès aux soins, d'un haut niveau de technicité et d'une amélioration de la sécurité et de la qualité.

Ils se sont attachés ainsi à répondre au mieux aux demandes de la population. Je pense par exemple au développement des centres de lutte contre la douleur chronique rebelle ou à l'amélioration des soins dans le domaine de l'insuffisance rénale chronique. De nombreux états généraux ont fait état de telles demandes.

C'est aussi le cas du développement des réseaux, notamment dans le domaine de la périnatalité et de la cancérologie, pour garantir, comme nous l'avions souhaité, à chaque patient, quel que soit son lieu d'habitation, sa catégorie sociale ou son carnet d'adresses, la meilleure prise en charge en fonction de la gravité et de l'état d'avancement de sa maladie, dans le service le plus approprié. C'est bien évidemment particulièrement important pour la cancérologie ou la périnatalité dans les grossesses à risques.

M. Jean-Paul Bacquet.

Et pour l'alcoolisme !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'est maintenant chose faite avec ces réseaux.

Les schémas régionaux d'organisation de la santé présentent donc une évolution très importante des services offerts à la population.

En ce qui concerne les cliniques privées, nous proposons de modifier le système de tarification, très largement critiqué par les syndicats représentatifs de ces cliniques.

Que constate-t-on ? Des tarifs différents pour des prestations équivalentes s'appliquant dans des régions différentes ou au sein d'une même région.

Le projet de loi qui vous est soumis propose donc une réforme en profondeur des modes de régulation, fondée comme pour les hôpitaux, sur la contractualisation et sur une meilleure prise en compte de l'activité médicale dans la tarification.

Les nouvelles règles applicables posent le principe d'une régulation organisée à un double niveau : au niveau national, un accord annuel fixera les évolutions moyennes des tarifs des cliniques ; au niveau régional, dans un second temps, les agences régionales d'hospitalisation et les représentants régionaux des syndicats signataires fixeront les règles de modulation et d'harmonisation des tarifs des prestations.

Le Gouvernement prend ainsi ses responsabilités, afin que l'hôpital et la clinique avancent d'un même pas, et au rythme du développement des mises en réseau. Nous ne pouvons, bien sûr, pas oublier que l'hôpital public ne remplit pas les missions que remplissent les cliniques ; il ne choisit ni les malades ni les pathologies. Pas plus que nous pouvons oublier, lorsque nous allouons les ressources, qu'il remplit des tâches très importantes d'éducation, de formation et de recherche.

Rarement notre système de protection contre la maladie aura été autant réformé en moins de deux ans, et pourtant ! Comme je l'ai toujours dit le débat sur le financement de la sécurité sociale au Parlement est un point positif des ordonnances Juppé.

J'éprouve un sentiment de frustration ou d'inachevé à ne devoir parler que des mesures qui ont des effets financiers. Or la politique de santé publique qui est derrière les chiffres représente pourtant l'essentiel de ce que nous essayons de mettre en place.

Notre système de santé nécessite une rénovation profonde. Les états généraux de la santé, voulus par le Premier ministre, que nous avons menés avec Bernard Kouchner, ont montré que les attentes des Français étaient fortes en ce domaine. Des milliers de réunions se sont tenues et nous ont montré quelles étaient les attentes de nos concitoyens : ils nous ont dit très clairement le système de santé qu'ils souhaitaient et comment ils souhaitaient y être représentés.

Ainsi le Gouvernement a-t-il décidé de présenter, au début de l'année prochaine - et nous le préparons Dominique Gillot et moi-même -, un projet de loi consacré à la santé et aux droits des malades. Le texte devrait s'organiser autour de trois grands axes dont nous aurons l'occasion de reparler au printemps prochain.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

Premier axe, la démocratie sanitaire. Pour aller au-delà des lois de financement de la sécurité sociale, il nous faut mieux organiser l'élaboration de la politique de santé publique. Nous envisageons - je le dis tout de suite afin d'en reparler éventuellement dans le débat - de retenir le principe d'un débat chaque année au Parlement, avant l'été, afin de définir les priorités de santé publique. Cela permettrait au Gouvernement de s'appuyer sur la parole démocratique des élus pour préparer la loi de financement de la sécurité sociale et pour fixer, ensemble, les priorités attendues par nos concitoyens.

Cela est d'autant plus nécessaire que si nous arrivons à dégager des excédents, nous devrons choisir entre les différentes priorités. Par exemple, comme je le souhaite, mieux rembourser certains soins comme la dentisterie ou l'optique. Que mettre de côté pour la retraite ? Comment mieux prendre en compte les catégories non encore concernées par l'accès aux soins ? Ces éléments - mais a ussi les évolutions thérapeutiques, malheureusement aussi des maladies qui se développent comme les maladies de dégénérescence de la vieillesse, d'Alzheimer aux sénilités précoces -, nous aurons à les prendre en compte. Il est bon qu'un débat nous permette d'en parler de la manière la plus démocratique possible.

En amont du débat parlementaire, il serait sans doute souhaitable que les conférences régionales et la conférence nationale de santé fassent des propositions.

Pour faire progresser la démocratie sanitaire dans notre pays, il faudra également régionaliser le système de santé plus que ce n'est le cas aujourd'hui. Depuis deux ans, nous avons essayé de développer les unions régionales de médecins et élargi les pouvoirs des ARH. Dès que la situation de la sécurité sociale sera meilleure et que nous aurons mis en place des politiques structurelles, nous pourrons aller vers une régionalisation plus poussée collant au maximum aux besoins de santé de la population et à ce qu'elle demande. C'est bien à ce niveau que les réseaux peuvent exister et que les complémentarités peuvent être guidées.

Dans la démocratie sanitaire il existe un chapitre essentiel auquel Dominique Gillot et moi-même sommes particulièrement attachées : les droits des malades. Ceux-ci doivent être réaffirmés, complétés, adaptés aux attentes qui se sont exprimées lors des états généraux de la santé.

Ce sont des droits fondamentaux. Leur consécration par la loi marquera l'aboutissement de la démarche des associations pour que les malades prennent toute leur place dans le système de soins et conquièrent leur droit à la parole dans un système où, il faut le dire, ils ont l'impression très souvent de ne pas être entendus et de ne pas comprendre totalement ce qui leur arrive. Les dispositions sur les droits des malades seront donc une composante essentielle de ce texte.

Outre la démocratie sanitaire, le projet comprendra des dispositions relatives à la réforme des études médicales annoncée par le Premier ministre lors de la clôture des états généraux et une large redéfinition du cadre de la prévention dans notre pays.

M. Yves Bur.

Enfin !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Avec le droit des malades, ce qui nous est le plus demandé par un grand nombre de nos concitoyens, c'est que la prévention devienne un élément majeur de notre politique de santé publique. Là aussi, nous y travaillons.

Des dispositions relatives à la qualité des soins trouveront place dans ce projet de loi. Nous ne pouvons pas traiter dans la loi de financement de la sécurité sociale, comme nous le souhaiterions, le développement des réseaux, la fixation de normes sanitaires, le développement des référentiels de bonne pratique ou l'adaptation d es systèmes d'information. Toutes ces questions appellent une intervention du législateur.

Le troisième volet a trait à la modernisation de l'assurance maladie.

Nous tirerons les conséquences des débats ouverts depuis deux ans dans les lois de financement de la sécurité sociale. Ce volet procédera, comme certains parlementaires l'ont souhaité, à une rénovation des conditions d'exercice de la médecine de ville, notamment du système conventionnel. Des dispositions concerneront également les caisses. La CNAMTS prépare un projet de branche pour être plus efficace et nous pourrons en tirer les conséquences législatives.

Telles sont les grandes orientations du projet de loi sur lequel nous travaillons actuellement et qui sera le prolongement naturel des débats qui ont eu lieu lors des états généraux, mais aussi de ceux que nous avons dans cette Assemblée, et des réformes structurelles que nous mettons en place depuis maintenant deux ans.

J'en ai terminé - si je puis dire car on pourrait en parler pendant des heures - avec la partie santé de notre projet de loi de financement de la sécurité sociale, et j'aborderai maintenant, de manière plus rapide, les autres branches, en commençant par les retraites.

Je ne vais pas répéter ce que vous avons été amenés à dire à plusieurs reprises, notamment le Premier ministre.

Nous savons que nous devons nous atteler à la réforme de nos régimes de retraite, ce que nous faisons actuellement dans cette période de concertation avec les principaux acteurs. Le Premier ministre a fait part de son souhait d'annoncer des réformes en début d'année. Nous savons qu'une réforme des retraites doit d'abord s'appuyer sur notre volonté de conforter notre système de retraite par répartition, seul garant de la justice sociale et de la solidarité entre les générations.

Mais je suis convaincue que les réponses attendues par les Français sont beaucoup plus larges. Elles concernent aussi la place des personnes âgées dans la société. A l'occasion de l'année internationale des personnes âgées décidée par l'Unesco, nous avons mis en place des groupes de travail qui nous feront des propositions d'ici à la fin de l'année. Elles posent surtout une question qui malheureusement n'est pas derrière nous, mais encore devant nous, celle des problèmes de la dépendance. Je crains, malgré la réforme de la prestation spécifique dépendance, malgré les décrets qui vont paraître pour fixer des minima et certaines dispositions DMOS pour remonter le seuil sur succession, que nous ne soyons pas à la hauteur de la question, et nous aurions intérêt à y réfléchir à nouveau ...

M. Gérard Bapt.

Très bien !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

... en prenant en compte deux critères : le niveau de la dépendance physique, mentale, morale et la dépendance financière. Nous devrions être grandement aidés dans ce domaine par le rapport de Mme Guinchard-Kunstler qui nous propose, et nous allons le faire dès cette année, d'aider à l'expérimentation sur la coordination gérontologique autour de la personne âgée.

M. Yves Bur.

C'est compliqué !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

En effet, mais c'est aussi le devoir de l'Etat, des collectivités locales et des prestataires de service de se pencher sur la personne âgée et sa famille plutôt que de mener des guerres de tranchées sur nos missions respectives.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

Si nous arrivions à mieux travailler ensemble, comme à Strasbourg ou à Lunel, et à réunir les prestataires de service, de l'aide à domicile jusqu'à l'hôpital, en passant par la maison de retraite, les médecins généralistes ou les infirmières, ainsi que les financeurs, pour aider une personne âgée à choisir son mode de vie - à domicile ou en établissement - et à le faire évoluer au fur et à mesure de son état de santé, nous n'aurions pas perdu notre temps.

Tel est l'enjeu qui est devant nous. L'effectivité de la décentralisation, ce n'est pas de tourner le dos aux autres acteurs, c'est d'être capable de travailler ensemble. Et je ne cesse de le dire aux conseils généraux et aux communes.

En ce qui concerne les retraites de base, le Gouvernement a décidé une revalorisation de 0,5 % au 1er janvier 2000, ce qui aboutira à une progression du pouvoir d'achat de 1 % sur deux ans.

S'agissant de la branche des accidents de travail et des maladies professionnelles, nous avons depuis deux ans profondément changé le système de reconnaissance des maladies professionnelles, en modifiant les délais de presc ription, en rouvrant les dossiers des victimes de l'amiante, en rendant opposable le barème d'invalidité pour les caisses, en créant de nouveaux tableaux, dont celui des lombalgies et des dorsalgies graves - ce qui était attendu depuis très longtemps -, en fixant des délais stricts aux caisses, pour répondre aux demandes de reconnaissance des maladies professionnelles. Tout ceci commence à porter ses fruits.

Par ailleurs, nous avions pris l'année dernière une mesure importante en faveur des salariés victimes de l'amiante en prévoyant un système de cessation anticipée d'activité pour les salariés qui ont travaillé à la fabrication de l'amiante. Je m'étais engagée, à la demande de plusieurs députés, à étendre ce dispositif. Nous allons y procéder dans ce projet de loi en l'étendant aux salariés des entreprises de flocage, de calorifugeage, aux secteurs de la construction et de la réparation navale, ainsi qu'aux dockers qui ont travaillé dans des ports où transitait l'amiante. Tout un travail contradictoire pour définir les entreprises concernées a été mené avec les syndicats et les organisations patronales, ce qui nous permet de mieux apprécier la situation.

Concernant la branche famille, nous poursuivons la rénovation de la politique familiale. Je me réjouis de pouvoir vous dire que cette politique doit beaucoup à Dominique Gillot qui avait été chargée par le Gouvernement de mener une grande concertation avec le mouvement familial.

Deux conférences ont permis des avancées majeures : la reconnaissance de la place de la famille dans la société à la fois comme un repère majeur pour les enfants, mais aussi comme un lieu de socialisation et de définition de leur personnalité.

Ainsi, la conférence qui s'est tenue le 7 juillet 1999 a retenu plusieurs axes d'action que vous retrouverez dans la loi : mieux aider les familles à prendre en charge les jeunes adultes en relevant à vingt et un ans l'âge limite pris en compte pour le calcul des allocations logement et du versement du complément familial ; conforter les parents dans leur rôle éducatif, notamment par un appui renforcé des services publics. La délégation interministérielle à la famille commence à mettre en place, avec la CNAF et avec les associations familiales, des structures d'accueil des parents en difficulté pour les aider à remplir leur fonction parentale ; permettre une meilleure articulation entre la vie familiale et la vie professionnelle. Certains amendements, à la suite du rapport de Mme Génisson dans la loi sur la réduction de la durée du travail, nous permettent d'aller dans ce sens. Nous travaillons par ailleurs, pour la prochaine conférence, sur deux sujets majeurs : la simplification et l'amélioration des aides au logement et les aides apportées aux modes de garde des enfants.

La revalorisation des prestations familiales prévue dans le projet de loi consiste, comme pour les retraites, en une majoration de 0,5 % cette année. Par ailleurs, le Gouvernement s'est engagé à fixer dans la loi la pérennité des ressources consacrées à la politique familiale, afin que la branche famille ait des ressources qui évoluent comme la richesse nationale. C'est un engagement du Premier ministre qui est inscrit dans la loi.

Du déficit de 14,5 milliards, la branche famille est passée à un léger excédent en 1999 et 2000.

J'en arrive - dernier axe - à la réforme du financement de la protection sociale. Je le rappelle, cet engagement a été pris l'année dernière. Après la réforme des cotisatio ns salariées que nous avions faite il y a deux ans, le Gouvernement a entrepris celle des cotisations patronales.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

C'est un point clé !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

En effet, car on parle beaucoup du financement de la durée du travail, mais on oublie aussi qu'un de nos objectifs essentiels était d'élargir l'assiette des cotisations patronales à d'autres éléments que les salaires. Pour la première fois cette année, nous l'avons fait, en y incluant la taxe sur les bénéfices et la taxe sur les activités polluantes.

M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général.

Enfoncez le clou !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Mais oui, monsieur Recours, j'enfonce le clou ! Les cotisations patronales ne seront donc pas uniquement assises sur les salaires.

Et quels que soient les débats que nous pouvons avoir - ils font partie de la vie politique ! - sur tous les bancs, l'exonération des charges patronales, à condition qu'elle ait des contreparties en matière d'emplois...

M. Yves Bur.

C'est nous qui l'avions engagée !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'est vrai, vous aviez déposé des propositions de loi sur ce thème ! Cette exonération, disais-je, est considérée comme une réforme majeure permettant à la fois aux entreprises de main-d'oeuvre de résister à la concurrence internationale et aux entreprises de services, du commerce et de l'artisanat, très créatrices d'emplois, d'en créer davantage encore dans l'avenir.

Notre système d'exonération des charges patronales est à la fois plus ample et plus puissant que celui qui avait été mis en place par la réforme Juppé, puisque les allégements vont jusqu'à 1,8 fois le SMIC. Il n'y a pas de trappe à bas salaires, mais une évolution douce des baisses de charges sociales. Mais nous avons souhaité qu'elles aient une contrepartie en matière d'emplois, d'où le lien avec la réduction de la durée du temps de travail.

Je rappelle que le coût global de cette réforme sur cinq ans - si toutes les entreprises passent aux 35 heures serait de l'ordre de 105 milliards : 65 milliards au titre des baisses de charges proprement dites et 40 milliards au titre de l'aide structurelle apportée pour aider au financement de la réduction de la durée du travail.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

Comme je l'ai rappelé tout à l'heure lors d'une question d'actualité, le coût d'un emploi créé par la réduction du temps de travail variera, selon les entreprises, de 55 000 à 75 000 francs. C'est donc la mesure la moins coûteuse de toutes celles que la droite comme la gauche ont mis en place depuis des années. On peut la comparer au CIE, au CES et même aux emplois-jeunes, qui sont la deuxième mesure la moins coûteuse, à 94 000 francs par emploi.

I l s'agit donc bien d'organiser la solidarité de l'ensemble des salariés et des entreprises pour créer des emplois à un moindre coût pour la collectivité.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Excellent !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Nous avons demandé aux partenaires sociaux de faire participer les organismes de protection sociale et l'UNEDIC au financement de ces 40 milliards. Pour les 65 autres milliards, outre les 40 milliards dont nous disposons déjà représentant le coût de la ristourne Juppé, les 25 milliards complémentaires sont financés par la taxe sur les bénéfices et par la taxe sur les activités polluantes.

Nous avions pensé mettre en place un système d'activation des dépenses passives, que non seulement avait soutenu certaines organisations patronales et syndicales, mais que celles-ci avaient elles-mêmes mis en place par le biais de deux dispositifs : l'ARPE qui permettait à des entreprises de faire partir leurs salariés plus tôt à la retraite et d'embaucher des jeunes, et les conventions de coopération qui font que, aujourd'hui, l'UNEDIC continue de verser des indemnités de chômage à des entreprises qui embauchent des chômeurs.

Nous avions pensé, et nous n'étions pas les seuls, je le répète, qu'il n'était pas anormal que, dès lors qu'il y avait une contrepartie en emplois, des rentrées de cotisations ainsi que de moindres dépenses, l'UNEDIC, la sécurité sociale participe avec l'Etat au financement des 35 heures.

M. Jean-Luc Préel.

Le lien entre les deux n'est pas évident !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Beaucoup plus, en tout cas, que pour la ristourne dégressive qui a coûté 40 milliards sans qu'on puisse en mesurer la contrepartie ! Grâce à la loi sur la réduction de la durée du travail, et notamment aux amendements qui ont été adoptés sur le contrôle de la création d'emplois, nous saurons de manière claire - à la suite d'un amendement de M. Gremetz, j'ai annoncé que le Gouvernement en présenterait chaque année au Parlement un bilan - le nombre des créations d'emplois liées à la baisse des charges et à la réduction de la durée du travail. Grâce à ce bilan, on connaîtra donc les rentrées réelles de cotisations ainsi que celles d'impôts.

C ependant, dès lors que les partenaires sociaux n'étaient plus d'accord, il fallait changer le mode de financement. En démocratie, on discute ! En revanche, nous n'avons évidemment pas accepté de remettre en cause les fondements mêmes de nos objectifs et de nos politiques et, par exemple, de modifier la loi sur la réduction de la durée du travail. Il a donc été décidé de ne procéder qu'à quelques ajustements. Ainsi, la contribution sur les heures supplémentaires versée par les entreprises, dont le rendement sera de 7 milliards de francs, sera portée au fonds de baisse des charges.

M. Yves Bur.

Donc elle sera payée par les salariés !

M. le président.

Madame la ministre, si vous vous laissez interrompre, je ne peux garantir la bonne tenue des débats !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Monsieur le président, je compte toujours sur vous pour faire appliquer le règlement, et, d'ailleurs, j'ai raison, puisque vous intervenez toujours très efficacement !

M. Jean-Luc Préel.

Et c'est une façon de dialoguer !

M. le président.

Monsieur Préel, vous n'avez pas la parole ! Poursuivez, madame la ministre.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ces 7 milliards ne sont pas pris aux salariés. Qu'est-ce qui justifierait qu'un salarié qui reste à 39 heures voie brutalement augmenter sa rémunération de 10 %, alors que rien n'a changé dans sa façon de travailler ? Il ne me p araît pas anormal que ces 10 % complémentaires reviennent à la collectivité, car ces heures supplémentaires ne permettent aucune création d'emplois.

En ce qui concerne la sécurité sociale, nous avons prévu de prélever 5,6 milliards sur le produit des droits sur l'alcool qui étaient versés jusqu'à présent au fonds de solidarité vieillesse pour remplacer la participation des organismes paritaires qui était prévue. Le FSV est excédentaire. L'année prochaine, l'excédent devrait être de l'ordre de 11 à 12 milliards. Il faut savoir, en outre, que la taxe sur les alcools rapporte entre 11 et 12 milliards.

Elle pourrait, par conséquent, être sollicitée de manière pérenne pour financer la baisse des charges sociales, puisque c'est précisément 11 à 12 milliards qui étaient demandés à la sécurité sociale.

M. Jean Bardet.

Vous allez encourager l'alcoolisme !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Il ne semble pas anormal non plus que les alcools, dont un rapport récent vient de montrer - M. Recours, pour sa part, nous parlera sans doute du tabac - qu'ils portent gravement atteinte à la santé, contribuent à traiter le problème du financement de la sécurité sociale.

Non seulement le financement de notre réforme est bien prévu pour l'année 2000, mais également pour les quatre à cinq ans qui viennent. Sur les 105 milliards, nous avons déjà trouvé 85 à 90 milliards. Reste à trouver environ 15 milliards de francs. Si tous les gouvernements savaient cinq ans à l'avance comment financer leurs réformes, on pourrait se réjouir ! Je m'en serais réjouie quand je suis arrivée au Gouvernement et que j'ai constaté qu'il manquait 7 milliards pour finir de financer la ristourne Juppé en 1997 ! Telles sont les modifications que nous avons été amenés à réaliser. Je l'ai dit le 7 septembre devant la commission des affaires sociales : devant la position des partenaires sociaux, le Gouvernement était prêt à discuter. Je me réjouis de la réaction des organisations syndicales, hier, qui ont souhaité que s'organise rapidement une négociation sur l'indemnisation de l'UNEDIC, mais aussi sur la clarification de ses rapports avec l'Etat - comme je l'avais souhaité moi-même début septembre. Il faut savoir changer d'avis lorsqu'on n'est pas écouté. Dès lors que les objectifs restent les mêmes et que nous poursuivons les politiques que nous avons engagées, je n'ai aucun regret à le faire.

Je le répète, notre réforme des cotisations sociales est entièrement financée pour l'année 2000 et déjà largement pour les suivantes.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

Mesdames et messieurs les députés, un nouveau train de réformes est inscrit dans cette troisième loi de financement de la sécurité sociale que je présente devant vous.

En trois ans, nous aurons parcouru un chemin important dans chaque branche de la sécurité sociale. Aucune d'entre elles n'a été oubliée. Chacune a fait l'objet d'une politique ambitieuse du Gouvernement, avec des desseins clairs : assurer à notre pays un système de protection sociale pérenne, fondé sur la justice sociale, l'égalité des droits et la solidarité entre les individus et entre les générations. Chacun peut librement s'associer à un tel projet.

J'aspire à un débat débarrassé de toute figure tactique ou politicienne - même si c'est le jeu.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l'assurance vieillesse.

Ce n'est pas notre tempérament !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Nous serions déçus !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Moi, j'en serais heureuse car, sur un pareil thème, les Français attendent que nous prenions nos responsabilités.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Dont acte !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Ce texte est sans doute perfectible, même si nous nous sommes beaucoup inspirés des propositions de votre commission. Je serai donc ouverte à toute proposition.

Parler de la sécurité sociale, c'est parler d'un édifice formidable que bien des pays nous envient pour la protection qu'il garantit à nos concitoyens. C'est aussi parler du droit à l'avenir pour tous, car souvenons-nous en, sans la sécurité sociale, l'avenir cesserait d'être un droit pour tous, pour n'être plus qu'à un privilège pour quelquesuns. Tel est bien l'enjeu du débat que nous allons mener.

La sécurité sociale reste une belle ambition pour le

XXIe siècle. Nous devons encore en consolider les fondements tout en améliorant son mode de fonctionnement.

Je compte sur les députés pour nous aider à aller plus loin encore dans cette grande tâche. (Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, du groupe communiste et du groupe Radical, Citoyen et Vert.)

M. le président.

La parole est à Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Mme Dominique Gillot, secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, comme le disait Martine Aubry, parler de la sécurité sociale, même dans le cadre du projet de loi de financement, c'est aussi parler de santé publique, de la politique de santé publique définie pour répondre aux besoins de santé des assurés sociaux et des usagers. Il me revient donc dans ce débat d'exposer les engagements du Gouvernement en matière de santé et d'action sociale.

La politique que nous menons poursuit quatre objectifs fondamentaux qui fondent le rôle de l'Etat en matière de santé et d'action sociale : assurer l'égalité d'accès de tous les citoyens au système de santé ; réduire les inégalités devant la maladie ou la prise en charge ; garantir la qualité des services proposés et, enfin, assurer le respect de l'homme au sein du système de santé.

Pour l'action sociale, l'assurance maladie finance, à raison de 42 milliards de francs et dans le cadre d'une dépense en progression constante, les structures sociales et médico-sociales. La politique engagée à ce titre vise à adapter quantitativement et qualitativement les réponses aux besoins importants et évolutifs des personnes âgées, notamment dépendantes, et des personnes handicapées.

Nous avons, dans ces domaines, un devoir de solidarité qui impose une action déterminée dans la durée. Celle-ci est engagée, elle va se poursuivre.

Réduire les inégalités de santé et permettre à tous d'accéder aux soins : la démarche est difficile, mais c'est une priorité pour le Gouvernement, tant certaines disparités, encore importantes, entre régions ou catégories socioprofessionnelles sont choquantes dans un pays développé comme le nôtre.

Nous savons aussi maintenant de façon précise qu'une grande partie de ces disparités sont en rapport avec des conduites individuelles - consommation excessive d'alcool, de tabac, conduite routière à risque, notamment.

D evons-nous l'accepter comme une fatalité ? Notre réponse est non.

Pour réduire les inégalités, il nous faut donc mieux les connaître, mieux observer l'état de santé des régions et également mieux répartir les moyens.

La création de l'Institut de veille sanitaire, d'une part, de la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, d'autre part, représentent des avancées importantes dans le domaine de la connaissance. Dès l'année prochaine, des moyens supplémentaires seront consacrés à ce dispositif afin de développer de nouveaux domaines de surveillance, à savoir les pathologies liées au travail, les maladies chroniques et les accidents de la vie quotidienne ainsi que les déterminants de santé.

La réduction des inégalités passe également par une meilleure répartition des moyens. Il s'agit d'une démarche de fond, dans la mesure où aucun indicateur précis pris isolément ne reflète précisément une disparité dans l'accès à une offre de soins. Néanmoins, nous avançons et il est évident qu'une meilleure connaissance des réalités permettra d'améliorer encore les mécanismes de dotation, et de progresser.

Il nous faut aussi permettre à tous nos concitoyens d'accéder à des soins de qualité. La loi relative à la couverture maladie universelle, votée cette année, a constitué un projet majeur pour garantir à tous l'accès aux soins.

Cette couverture maladie universelle, vous le savez, vous qui avez largement contribué à son adoption, ouvre le droit également à une couverture complémentaire pour les plus modestes de nos concitoyens. Six millions de personnes sont concernées.

L'année 2000 verra la mise en oeuvre concrète de ce dispositif et marquera une avancée sociale majeure, à laquelle vous avez activement participé.

En parallèle, doit être poursuivie une politique d'égal accès à des soins de qualité. L'accréditation des établissements, qui a démarré cette année, ne résume pas, à elle seule, la politique en faveur de la qualité qui doit être conduite dans le monde hospitalier. Elle ne doit pas faire oublier tout le travail d'évaluation qui reste l'obligation des établissements et des professionnels : évaluation des pratiques professionnelles, des modalités d'organisation des soins, de toutes les actions qui concourent à une prise en charge adéquate du malade.

Renforcer les actions de prévention et de promotion de la santé sera aussi un facteur important de réduction des risques, en rapport avec les conduites individuelles : la consommation excessive d'alcool et de tabac, les accidents, les suicides - autant de facteurs expliquant une large part de cette surmortalité prématurée qui place la France loin derrière nos voisins européens.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

D'importants programmes ont été initiés cette année concernant, en particulier, la prévention des conduites addictives. Le Gouvernement entend renforcer l'efficacité et la cohérence de la politique de lutte contre les dépendances dangereuses pour la santé ou la sécurité publique.

Pour cela, un ambitieux plan triennal, tenant compte des nouvelles modalités de consommation, en particulier chez les jeunes, a été adopté le 16 juin dernier.

Il convient, en outre, d'assurer une meilleure prise en charge des personnes souffrant de maladies chroniques.

Nous voulons promouvoir une politique volontariste d'éducation thérapeutique de la personne malade. Il s'agit d'améliorer l'efficacité de la prise en charge et de permettre une plus grande autonomie de la personne malade. Le diabète et l'asthme feront l'objet l'année prochaine d'expérimentations locales et régionales.

La diminution du nombre de grossesses non désirées et le renforcement de la politique de contraception sont les objectifs d'un plan national d'information et d'action élaboré selon deux axes. Il s'agit, d'une part, de mieux informer pour mieux maîtriser la contraception par une campagne nationale de communication et, d'autre part, de prévenir les interruptions volontaires de grossesse tout en garantissant l'accès à l'IVG, si elle devient nécessaire, sur l'ensemble du territoire.

Il faut aussi diminuer les morts dues au suicide. Ce phénomène entraîne encore trop de morts évitables. Les actions entreprises dans le cadre du programme national de prévention du suicide, qui s'étend de 1998 à 2000, seront poursuivies. Je vous rappelle que notre objectif est de passer sous la barre symbolique des 10 000 morts dues au suicide par an en France.

M. Pascal Terrasse.

C'est énorme ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

En effet ! Enfin, j'aimerais insister sur un thème qui me semble encore insuffisamment pris en compte dans notre pays. Il s'agit de la politique de nutrition. Les troubles du comportement alimentaire progressent de façon alarmante : 13 % des jeunes Français de douze à dix-neuf anss eraient obèses. Pendant la présidence française de l'Europe, en 2000, je souhaite que les problèmes de nutrition soient l'un des thèmes prioritaires du travail des ministres de la santé des pays de l'Union européenne.

Il nous faut également renforcer la lutte contre les grandes causes de mortalité dans notre pays. Et j'insisterai en particulier sur la lutte contre le cancer et les maladies transmissibles. En ce qui concerne le cancer, les examens de dépistage bénéficient maintenant d'une prise en charge à 100 %. Les programmes de dépistage des cancers du sein et du col de l'utérus se mettent en place progressivement. De nombreuses mesures ont déjà été prises. Le comité national de prévention a été installé en décembre dernier. Par ailleurs, la qualité de l'organisation des soins en cancérologie sera renforcée sur la base de deux principes : la pluridisciplinarité dans la prise en charge ainsi que la continuité et la coordination des soins.

Nous poursuivons par ailleurs une politique active de lutte contre les maladies transmissibles. Les actions de lutte contre le VIH sida seront renforcées, avec en particulier la mise à disposition précoce de nouveaux médicaments et de nouveaux tests pour les personnes malades en échec thérapeutique. Les programmes de prévention seront développés, en particulier en direction des plus v ulnérables : les jeunes, les femmes, les personnes migrantes et les personnes en situation de précarité.

Les missions des centres de dépistage anonyme et gratuit ont été étendues au dépistage des hépatites B et C et aux maladies sexuellement transmissibles. A partir de l'année prochaine, si vous adoptez les propositions qui sont contenues dans ce projet, ce dépistage sera entièrement pris en charge par l'assurance maladie.

Un ambitieux programme national de lutte contre l'hépatite C a été mis en place cette année, parallèlement à la mise à disposition de nouveaux schémas de traitement. Ce programme, d'une durée de quatre ans, propose des priorités nationales qui sont mises en oeuvre au niveau local et régional, en vue notamment d'obtenir d'ici 2002 que plus de 75 % des personnes porteuses du VHC connaissent leur état sérologique et afin non seulement de réduire les risques actuels de nouvelle contamination par le VHC en favorisant les comportements préventifs, mais surtout d'améliorer, pour mieux agir, les connaissances sur le virus, la maladie, la thérapeutique et l'épidémiologie.

Par ailleurs, je souhaite redéfinir le champ de la santé mentale. Au-delà de la santé physique, chacun a droit à la protection de la santé mentale. Voilà pourquoi je souhaite que notre pays intègre à tout moment de l'offre de soins celle qui la concerne.

Si la psychiatrie constitue un enjeu fort, il est aussi en partie méconnu. Chaque année, en France, plus d'un million de personnes recourent aux soins des services de psychiatrie publique, et plus de 350 000 enfants et adolescents sont suivis annuellement par les secteurs de psychiatrie infanto-juvénile. Parallèlement, 20 % des consultations en médecine générale et 30 % des consultations d'urgence au sein des hôpitaux sont motivées par un problème de santé mentale. Mais nous sommes confrontés actuellement à la désaffection des psychiatres pour l'exercice dans le secteur psychiatrique public. Une concertation a donc été engagée cette année avec les professionnels. Elle devra se poursuivre afin de rechercher une meilleure organisation pour répondre aux besoins de la société, qui augmentent.

La sécurité sanitaire demeure la priorité du Gouvernement depuis son arrivée. Nous devons poursuivre et compléter la mise en place du dispositif instauré par la loi du 1er juillet 1998. Désormais, l'institut de veille sanitaire, l'agence française de sécurité sanitaire des produits de santé et l'agence française de sécurité sanitaire des aliments sont opérationnels. Nous leur avons consacré dès cette année de gros moyens. La réorganisation de la transfusion sanguine est en cours. L'agence française du sang fera place le 1er janvier 2000 au nouvel établissement français du sang comme prévu. Enfin, la création d'une agence santé-environnement doit permettre de mieux expertiser et d'évaluer l'impact potentiel sur la santé des perturbations de l'environnement.

Il nous faut aussi apporter des réponses adaptées aux besoins importants et évolutifs des personnes âgées dépendantes et des personnes handicapées.

Puisque l'espérance de vie et l'espérance de vie sans incapacité continuent de progresser en France, il nous faut agir. Du fait de la structure par âge de la population, le nombre des personnes dépendantes est appelé à s'accroître. Pour répondre à cette évolution, 2000 places de services de soins infirmiers à domicile et 7 000 lits de sections de cure médicale ont été financés l'an dernier. Cet effort sera poursuivi l'an prochain.

Afin que soient mieux prises en compte les situations de dépendance, l'action du Gouvernement vise à permettre le bon fonctionnement du secteur de l'aide à


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

d omicile, à préparer dans les meilleures conditions l'entrée en vigueur de la tarification des établissements pour personnes âgées. Cette réforme permettra également d'améliorer la qualité des prestations fournies et de mieux affirmer les droits des personnes.

Par ailleurs, près de 3 millions de personnes sont confrontées à un handicap plus ou moins grave, et nous sommes très préoccupés par cette situation.

Dans le cadre fixé par la loi d'orientation du 30 juin 1975, la politique globale conduite par le Gouvernement en faveur des personnes handicapées est déterminée par un double objectif : favoriser l'intégration de ces personnes dans un milieu de vie ordinaire, améliorer la prise en charge des plus gravement handicapées d'entre elles.

Ces objectifs commandent trois grandes catégories de mesures : promouvoir les dispositifs intégrant le mieux les enfants et les adultes, notamment par le développement des services ambulatoires, ce qui nous permettra de répondre à un désir très fortement exprimé, apporter une réponse adaptée durable à l'insuffisance de places dans les établissements spécialisés pour les adultes à travers le plan pluriannuel...

M. Pascal Terrasse.

Excellent ! Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

... et, enfin, répondre à des besoins de prises en charge spécifiques insuffisamment développées pour les handicaps trop lourds ou mal connus tels que l'autisme, les traumatismes crâniens ou les handicaps rares.

Voilà, très rapidement brossé, le secteur de santé publique et d'action sociale dont j'ai la responsabilité.

(Applaudissement sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général.

M. Alfred Recours, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour les recettes et l'équilibre général.

Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, je me souviens des années noires : les déficits s'accumulaient année après année, et l'on pouvait craindre pour l'avenir de la protection sociale.

Puis, heureusement,...

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Zorro est arrivé ! (Sourires.)

M. Alfred Recours, rapporteur.

Non ! Heureusement vint la dissolution.

(Rires.)

M. Pascal Terrasse.

Nous sommes arrivés !

M. le président.

Monsieur Terrasse, ne troublez par l'orateur, je vous prie.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Le déficit de la sécurité sociale est passé de plus de 50 milliards de francs à encore 4 milliards, malheureusement, mais l'ordre de grandeur n'est évidemment pas tout à fait le même.

D'une façon très curieuse, quand le déficit était de 50 milliards, il fallait dérembourser les médicaments et augmenter les cotisations par rafales, et, d'une certaine façon, personne n'y trouvait à redire.

M. Pascal Terrasse.

C'étaient les années noires !

M. Alfred Recours, rapporteur.

En effet ! Quand la période est meilleure, on peut chipoter sur 4, ou 5, 6 milliards de francs, ce que, n'en doutez pas, madame la ministre, nous allons faire au cours des débats ! L'une des raisons de cette amélioration, et vous l'avez évoquée, est la croissance. Une part de la croissance ne relève pas des décisions qu'ont pu prendre le Gouvernement ou la majorité dans ce pays, mais une part en est la conséquence.

Sur un terrain de football, après tout, seuls les bons gardiens de but ou les bons buteurs ont de la chance, jamais les mauvais !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Très bon !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Excellent !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Par conséquent, cette part de croissance qui relève de la chance, vous devez la revendiquer, madame la ministre, tout simplement parce que la chance est du côté de ceux qui gagnent et non de ceux qui perdent.

Il existe aussi une part de croissance due aux mesures gouvernementales qui se sont accumulées depuis deux ans et demi, ne serait-ce que les dernières, qui concernent la construction et le logement et qui ont fait redémarrer ce secteur d'une manière remarquable, ce qui génère des recettes dont bénéficie la protection sociale.

Cela vous permet, vous ne l'avez pas suffisamment dit à mon goût et d'autres vous le reprocheront peut-être, de prévoir une augmentation de l'ONDAM de 2,5 % cette année, par rapport à des résultats constatés l'année dernière et non pas, comme on en avait pris l'habitude, par rapport à des prévisions de l'année précédente, reposant elles-mêmes sur le résultat de l'année antérieure.

De telles dispositions vont dans le bon sens puisque, grâce à cette augmentation de l'ONDAM, nous contribuons à améliorer de manière non comptable la qualité des soins offerts aux Français, et je pense que, sur ce point, nous aurons d'autres choses à dire.

Et puis sont venues tout récemment des questions prétendument liées à la réduction du temps de travail.

Finalement, qu'avons-nous fait ensemble depuis deux ans et demi ?

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Enormément de choses.

(Sourires.)

M. Alfred Recours, rapporteur.

Dans un premier temps, nous avons réformé les cotisations salariales en faisant basculer les cotisations d'assurance maladie sur la CSG.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Très bien !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Cela a permis d'abonder assez largement les recettes, et de faire cotiser pour la protection sociale les revenus du patrimoine et les revenus financiers.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Exactement !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Cette réforme a permis d'élargir les capacités contributives pour la protection sociale. Elle a permis aussi aux salariés d'engranger 1,1 % de pouvoir d'achat supplémentaire, ce qui n'a pas été sans conséquences pour accompagner la relance et la croissance et augmenter la confiance du pays dans l'avenir.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Exactement !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

M. Alfred Recours, rapporteur.

Nous vous avions réclamé il y a deux ans et l'année dernière, et moi le premier, une réforme des cotisations patronales. Nous étions même un peu déçus l'an dernier de ne pas la voir engagée plus tôt.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

C'est vrai !

M. Alfred Recours, rapporteur.

On ne parlait pas à l'époque de la mise en oeuvre du financement de la RTT.

Eh bien, cette réforme des cotisations patronales, nous l'avons cette année ! On discute donc sur 5 ou 6 milliards résiduels dirai-je.

Mme Odette Grzegrzulka.

Une peccadille !

M. Jean-Luc Préel.

Au diable l'avarice !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Une loi a été votée sur la réduction du temps de travail et nous n'avons pas ici à nous poser le problème de son financement. Nous devons, en revanche, nous pencher sur le financement de la réforme des cotisations patronales.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Tout à fait !

M. Pascal Terrasse.

C'est ça le vrai problème !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Vous nous proposez des moyens nouveaux. J'aurais préféré, pour ma part, que l'on utilise la valeur ajoutée.

M. Gérard Bapt.

Vous n'êtes pas le seul !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Le projet prévoit néanmoins un élargissement de l'assiette des cotisations bien au-delà de la masse salariale des entreprises. Il institue une contribution sur les bénéfices pour les entreprises réalisant plus de 50 millions de chiffre d'affaires, avec un abattement à la base de 5 millions de francs, et affecte la TGAP, en l'étendant, au financement de la réforme.

Je me suis d'abord demandé ce qu'une telle taxe venait faire dans une loi de financement de la sécurité sociale.

M. Jean-Luc Préel.

Nous aussi !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Oui, mais lui a fini par comprendre ! (Sourires.)

M. Jean-Luc Préel.

Elle aurait dû servir à autre chose !

M. le président.

Poursuivez, monsieur le rapporteur.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Cela ressemble, c'est vrai, monsieur Préel, à un inventaire à la Prévert, mais après tout, ne faisons-nous pas partie de la commission des affaires culturelles ? (Rires et applaudissements sur divers bancs.)

Ce document poético-financier peut finalement s'intégrer dans le projet ! En tout état de cause, cette taxe existe, et je pense qu'elle a vocation à s'élargir et donc à mieux financer encore notre protection sociale.

Voilà donc une deuxième phase engagée très avant. Je reviendrai lors de l'examen des articles sur un certain nombre de points que je ne veux pas aborder maintenant parce que le temps qui m'est imparti ne me le permet pas.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Vous avez dit l'essentiel !

M. le président.

Je vous rappelle que chaque rapporteur dispose de dix minutes.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Ces derniers jours, madame la ministre, vous nous avez fait la démonstration qu'on ne force pas à boire un âne qui n'a pas soif.

(Rires sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean-Luc Préel et Mme Odette Grzegrzulka.

Qui est l'âne ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Je veux parler du baron, et ce n'est évidemment pas une injure puisque l'âne est un animal certes têtu mais reconnu pour son intelligence.

N'est-ce pas d'ailleurs l'anagramme d'une haute école que vous connaissez bien ? (Rires et applaudissements.)

Le MEDEF, puisque c'est de lui qu'il s'agit, a fait un choix stratégique...

Mme Odette Grzegrzulka.

De bas niveau !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Non, pas du tout ! C'est un choix respectable mais ce n'est pas le nôtre. Il a choisi de devenir un lobby à l'américaine, jouant un rôle politique dans notre société...

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Tout à fait.

M. Alfred Recours, rapporteur.

... et tournant le dos au paritarisme, contre la volonté de dizaines de milliers de mandataires patronaux qui se reconnaissent, eux, dans ce paritarisme, pour le pratiquer au quotidien.

Mme Paulette Guinchard-Kunstler.

Très juste !

M. Alfred Recours, rapporteur.

Finalement, ce n'est pas le problème du financement qui préoccupait la direction actuelle du MEDEF, c'était, pour lui, l'occasion de saisir une opportunité pour démontrer que c'étaient le Gouvernement et la majorité de gauche qui remettaient en cause le paritarisme.

M. Yves Bur.

C'est ce qu'ils ont failli faire !

M. Alfred Recours, rapporteur.

En ce qui me concerne, je n'ai jamais eu et je n'ai toujours pas l'intention d'obliger à boire un âne qui n'a pas soif.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Asinus asinum fricat, monsieur le rapporteur ! (Sourires.)

M me Odette Grzegrzulka.

Verba volant, scripta manent !

M. le président.

Je veillerai à l'écrire, celle-là ! (Sourires.) Madame, messieurs les rapporteurs, j'insiste sur le fait que vous devez respecter le temps de parole fixé par la conférence des présidents. Sinon, M. le président de la commission ne pourra pas intervenir cet après-midi.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l'assurance maladie et les accidents de travail.

M. Claude Evin, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l'assurance maladie et les accidents du travail.

Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, l'année 1999 a été marquée par plusieurs réflexions et débats portant sur le financement de notre système de santé. La Caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés a d'ailleurs pris très tôt l'initiative en la matière, parfois de manière excessive quant aux propositions formulées, mais avec, je crois, un réel souci d'accroître sa responsabilité dans la gestion du financement des soins. D'autres organismes ou d'autres institutions se sont aussi exprimés au cours de ces derniers mois pour formuler leurs propres réflexions dans ce débat, je pense au Conseil national de l'ordre des médecins ou à la Fédération hospitalière de France, pour n'en citer que quelques-uns.

Ces expressions traduisent bien la nécessité de poursuivre encore les réformes engagées au cours des dix dernières années par les gouvernements successifs et c'est afin


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

d'y contribuer qu'avec quelques collègues membres de la commission des affaires sociales de l'Assemblée, sous l'autorité de Jean Le Garrec, nous avons publié au début de cet été Dix orientations afin d'améliorer la qualité du système de santé et la prise en charge des soins.

Vous avez, madame la ministre, retenu dans ce projet celles de nos orientations qui avaient une incidence financière. Les mesures concernant l'organisation de notre système de santé feront l'objet d'un autre texte dans les proc hains mois. Soyez en tout cas assurée de notre disponibilité pour poursuivre la réflexion encore nécessaire avant l'examen de ce second projet de loi.

Maîtriser l'évolution des dépenses de santé pour assurer un meilleur remboursement par la sécurité sociale reste encore une préoccupation qui n'est pas aujourd'hui totalement satisfaite.

Si nous nous sommes rapprochés de l'objectif voté concernant les dépenses des établissements publics de santé, nous avons encore des efforts pour les établissements privés.

Concernant le médicament, nous disposons depuis la loi de financement pour 1999 d'outils de régulation dans le cadre des conventions avec le comité économique du médicament. Le recul n'est pas aujourd'hui suffisant pour en tirer des conclusions, mais notons toutefois que l'évolution constatée depuis le début de cette année, avant la mise en place du nouveau dispositif, montre un infléchissement de la croissance des dépenses par rapport à celles enregistrées l'année dernière.

C'est sur les dépenses de soins de ville que l'attention doit être la plus soutenue. Les chiffres pour 1999 font apparaître une nette décélération pour les honoraires grâce aux accords que vous avez conclus avec un certain nombre de professions de santé. J'aurai d'ailleurs l'occasion de revenir tout à l'heure sur les conditions dans lesquelles ils sont intervenus, le Gouvernement ayant été obligé de contractualiser aux lieu et place des caisses de sécurité sociale en raison de la carence des partenaires conventionnels. Il fallait le faire, mais il est évident que ce mode de fonctionnement ne peut perdurer.

Lorsque l'on fait le bilan de notre système conventionnel qui, depuis maintenant trente ans, définit les relations entre les caisses de sécurité sociale et les professionnels de santé, on ne peut que constater la situation de blocage dans laquelle il se trouve : la convention signée avec les généralistes rencontre des difficultés de mise en oeuvre ; quant aux spécialistes, ils sont actuellement régis par un règlement conventionnel minimal fixé par l'Etat parce que les partenaires conventionnels n'ont pu parvenir à signer un accord acceptable.

Cette situation n'a certes pas porté préjudice aux assurés sociaux qui continuent d'être soignés et remboursés de leurs soins, mais on ne peut se satisfaire éternellement d'une telle situation.

Vous nous proposez aujourd'hui de modifier le cadre législatif régissant les relations entre les caisses de sécurité sociale et les professionnels de santé afin de leur permettre de négocier directement les mesures nécessaires pour contenir l'évolution des honoraires. Les parties conventionnelles fixeront ainsi en début d'année les objectifs de dépenses et les tarifs pour chaque profession.

Il s'agit là de donner plus de responsabilité à l'assurance maladie et aux professionnels de santé. A ce sujet, je dois dire que j'ai été très étonné à la lecture d'une intervie w du président de la Caisse nationale d'assurance maladie parue dans un quotidien cet après-midi.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Nous aussi !

M. Claude Evin, rapporteur.

De deux choses l'une : ou le président de la CNAM n'a pas lu le projet de loi, ce qui peut arriver, ou ce qu'il dit dans cette interview traduit un refus de prendre ses responsabilités et tend à rendre par avance le Gouvernement et sa majorité responsables si les dépenses de médecine de ville n'étaient pas contenues dans les limites fixées.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Tout à fait.

M. Claude Evin, rapporteur.

Si tel était le cas, cela me semblerait particulièrement grave.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Parfaitement !

M. Claude Evin, rapporteur.

Il n'a jamais été écrit dans le projet de loi qu'il faudrait modifier les tarifs des médec ins, ni d'ailleurs des autres professions, tous les quatre mois.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Evidemment !

M. Claude Evin, rapporteur.

Ce que nous demandons à la CNAM, c'est de faire un point régulier de l'évolution de l'enveloppe d'honoraires qui lui aura été déléguée.

M. Alfred Recours, rapporteur.

C'est la moindre des choses.

M. Claude Evin, rapporteur.

A charge pour les caisses de sécurité sociale de justifier devant le Gouvernement ainsi que devant le Parlement, puisque nous le proposerons par amendement, les mesures qui auront été prises, ou qui ne l'auront pas été, pour respecter l'enveloppe.

Mais le Parlement, qui vote la loi de financement, ne peut attendre chaque année le dépôt de ce projet de loi pour constater que les enveloppes déléguées ont été respectées ou non.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Bien sûr !

M. Claude Evin, rapporteur.

On ne peut pas dire, comme le fait le président de la CNAM dans cette interview : « Depuis trois ans que les parlementaires discutent du budget de la sécurité sociale, les dépenses de santé ont augmenté de 56 milliards de francs. Pour quel bénéfice sanitaire ? Personne ne se pose cette question, ni au Parlement, ni au Gouvernement. » M. Jean-Marie Spaeth,

pour lequel j'ai par ailleurs beaucoup de sympathie, et j'oserais même dire d'amitié,...

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Il le mérite, c'est un Mosellan ! (Sourires.)

M. Claude Evin, rapporteur.

... aurait pu ajouter qu'à la CNAM, on ne s'est pas non plus beaucoup posé la question du bénéfice sanitaire des prestations que la caisse verse depuis bien plus de trois années. Et pourtant, j'y reviendrai, il y aurait beaucoup de choses à dire sur la gestion du risque par la CNAM. On ne peut donc avoir ces exigences à l'égard des autres et ne pas se les appliquer à soi-même.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Très bien !

M. Claude Evin, rapporteur.

Au-delà des négociations tarifaires, nous pensons que c'est le cadre conventionnel lui-même qui doit être repensé au cours des prochains mois. C'est ainsi qu'il nous semble utile de redéfinir ici le champ conventionnel. L'article L. 162-5 du code de la sécurité sociale, qui fixe le contenu des conventions médi-


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cales, doit être en effet revu. On ne peut maintenir une situation telle que le législateur doit modifier cet article en fonction des accords qui ont été négociés entre les partenaires conventionnels ou valider par la loi des décisions individuelles prises en application d'une convention qui risquerait de se faire annuler par le Conseil d'Etat, comme nous avons été bien obligés de le faire lors de l'adoption de la loi portant création de la couverture maladie universelle.

La question de la gestion du risque par la CNAM j'y faisais allusion tout à l'heure - doit aussi être revue.

Nous partageons avec la Cour des comptes le constat qu'elle formule dans son dernier rapport : « La branche maladie (...) a en permanence hésité entre une simple action de contrôle et le projet d'un travail collectif avec les professionnels de santé, analysant leurs pratiques et leur renvoyant des synthèses. La branche maladie est pour l'essentiel demeurée, malgré ses ambitions, un payeur. »

Le système de contrôle a montré aujourd'hui ses limites : lorsqu'il est prévu dans le cadre d'instances conventionnelles, les représentants des syndicats médicaux qui y siègent entravent souvent leur fonctionnement. Et les comités régionaux médicaux mis en place par l'ordonnance d'avril 1996 ont joué un rôle très limité. La réforme des systèmes de contrôle est donc aussi à l'ordre du jour.

Concernant l'hospitalisation, la situation est un peu moins « problématique ». Les mécanismes de conventionnement entre les établissements de santé et les agences régionales d'hospitalisation ont permis d'établir des règles plus transparentes dans chaque région quant à l'attribution des moyens budgétaires. Se trouve par contre aujourd'hui posée la question de la nécessaire modernisation des outils de tarification.

Nous avons voté, dans le titre IV de la loi portant création de la couverture maladie universelle, le support législatif pour la mise en place de la tarification par pathologie. Il est maintenant nécessaire que des expérimentations voient le jour sans tarder, et je sais d'ailleurs que le ministère y travaille.

Dans le projet de loi, nous modifions le dispositif concernant les cliniques, en permettant une adaptation de la politique tarifaire. Cela contribuera également, je le crois, à l'amélioration des relations entre les établissements privés de santé et les agences régionales d'hospitalisation.

Certains s'interrogent sur le paysage que dessine ce projet de loi de financement quant à l'organisation de notre système de soins et de son financement : l'ambulatoire aux caisses de sécurité sociale, le médicament et les établissements d'hospitalisation à l'Etat via, pour ces derniers, les agences régionales d'hospitalisation. Une séparation aussi nette ne me semble pas devoir être accentuée.

Nous mesurons tous chaque jour le fait que le malade pris en charge par notre système de soins est le même, qu'il soit traité en ville ou à l'hôpital. La prise en charge en réseau s'avère, notamment pour les pathologies les plus lourdes, une absolue nécessité. Les financements cloisonnés font souvent obstacle, de ce point de vue, à l'innovation en matière de prise en charge.

La définition des besoins de santé est de plus en plus affinée au niveau régional, car c'est à ce niveau qu'on peut le mieux adapter l'offre de soins à ces besoins. La mise en oeuvre des schémas régionaux d'organisation sanitaire a justement permis une évolution des structures de soins au niveau des établissements, mais on commence à mesurer la nécessité pour certaines spécialités en ville d'avoir aussi une réflexion planificatrice d'offre de services.

Tous ces éléments nous amènent à nous interroger sur le niveau pertinent d'organisation future de notre système de santé. Le niveau régional apparaît de plus en plus comme répondant à ces attentes. Certes, tout ne pourra pas être traité à ce niveau, et une articulation avec le niveau national sera toujours nécessaire. La transformation des agences régionales d'hospitalisation en agences régionales de santé ne pourra non plus ignorer la place faite aux partenaires sociaux dans la gestion de l'assurance maladie. Il ne faut pas non plus tout attendre d'une telle organisation régionale, qui ne réglera pas comme par enchantement la question des mécanismes de maîtrise de l'évolution des dépenses. Mais nous savons tous que c'est autour de ces questions qu'il faudra faire évoluer notre système de santé et son financement. Une réflexion dans ce domaine, à laquelle la commission des affaires sociales de l'Assemblée est prête à prendre toute sa part - comme elle est prête à y prendre toutes ses responsabilités -, s'avère indispensable dans les mois à venir.

J'ai souhaité, mes chers collègues, dans cette présentation orale de mon rapport, élargir le débat au-delà de cette loi de financement. Tout d'abord parce que vous trouverez dans le rapport écrit à la fois le bilan de l'action menée en 1999 et l'analyse des mesures pour 2000. Mais surtout parce qu'il est évident que si nous sommes contraints, de par la loi organique et la Constitution, de n'aborder ici que des aspects strictement financiers, ce qui biaise l'image de ce débat, il était important de rappeler que nos préoccupations sont d'abord celles qui visent à continuer de moderniser notre système de santé afin de garantir la qualité des soins et améliorer leur prise en charge.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l'assurance vieillesse.

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour l'assurance vieillesse.

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, la retraite constitue un sujet d'actualité. Elle présente cette caractéristique de nous projeter dans l'avenir tout en nous poussant à l'action dès aujourd'hui. Aussi est-on frappé, à la lecture du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 qui nous est présenté, par la modestie des mesures qui y figurent concernant ce sujet. Une fois de plus, la nécessaire ouverture du chantier se voit repoussée à demain.

Pourquoi attendre, alors que le diagnostic est fait ? Il est à craindre que le calendrier électoral nous renvoie en 2003, alors que chacun sait que la première échéance se situe à l'horizon 2006. Le rapport sur l'avenir de nos retraites présenté par Jean-Michel Charpin s'est fait dans la concertation, ce qui n'a nullement empêché les désaccords sur ses propositions de s'exprimer. Las, l'exécutif attend. Il consulte les organismes qui se sont déjà exprimés dans le cadre du rapport ainsi que dans la presse, il passe commande de nouveaux rapports, et finalement...

tout le monde attend. Demain, mesdames les ministres, ne sera-t-il pas trop tard ? Plus on attendra, plus cela sera douloureux. La France de demain sera celle des choix d'aujourd'hui.


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

Faut-il rappeler l'existence du Livre blanc sur les retraites de 1991, et celle des Perspectives à long terme sur les retraites ? Le diagnostic du rapport Charpin n'est pas, en soi, nouveau. Aussi rigoureux soit-il, ce rapport n'apporte pas d'élément réellement nouveau au débat. Les perspectives démographiques sont connues de longue date, et les choix aussi.

Allongement de la durée de cotisation, augmentation du taux de cotisation, modification de son assiette, épargne personnelle, fonds de réserve qui existent sur le papier depuis l'an dernier, prise en compte de la pénibilité du travail, harmonisation des régimes. De cette liste non exhaustive, qui osera dire qu'elle recèle une idée neuve ? Le rapport Charpin, monsieur le président de la commission, a « déclandestinisé » les études. C'est une base de travail et on n'a pas à être pour ou contre.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Très juste !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Mais aujourd'hui, ce ne sont plus des rapports qui sont nécessaires, mais de véritables mesures de réforme.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité et

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

C'est vrai !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

L'urgence réside, on le sait, dans l'évolution de la démographie. Le vieillissement de la population est inéluctable, l'espérance de vie augmente de trois mois par an. L'année 2006 sera celle de l'arrivée à la retraite des générations du baby-boom, devenu le papy-boom.

D'une croissance de 110 000 retraités supplémentaires par an aujourd'hui, on passera à partir de cette date à une croissance de 250 000.

Entre 1998 et 2040, le nombre des personnes âgées de plus de soixante ans devrait augmenter de dix millions, alors que les effectifs des moins de vingt ans, d'une part, et des personnes ayant entre vingt et quarante ans, d'autre part, diminueraient chacun de plus d'un million.

En 2040 un Français sur trois aura plus de soixante ans et il y aura sept retraités pour dix actifs, contre quatre pour dix actuellement.

A la même date, l'espérance de vie à la naissance devrait atteindre près de quatre-vingt-un ans pour les hommes et quatre-vingt-neuf ans pour les femmes contre respectivement 74,2 ans et 82,5 ans aujourd'hui ; ainsi, les générations nées en 1970 pourraient tabler sur une retraite théorique de vingt-trois ans, soit plus du double que pour leurs aînés nés en 1910.

Pour un nombre croissant de salariés, la fin de l'activité ne coïncide plus avec l'âge de la retraite. Devenus un véritable outil de régulation de la main-d'oeuvre, les mécanismes de cessation anticipée d'activité doivent faire l'objet d'une réflexion au sein de la réforme de la retraite.

Notre système de retraite par répartition, mesdames les ministres, a bien rempli sa mission et nous devons le garder. Mais ne rien faire est dangereux pour la répartition.

Le niveau de vie des retraités français est globalement équivalent à celui de la population active. Cependant, un décrochage s'est amorcé, qui est particulièrement sensible au mode d'indexation des pensions, selon que celles-ci sont indexées sur les salaires - cas des régimes spéciaux ou sur les prix - cas du régime général. Par ailleurs, il faut souligner que la parité de niveau de vie entre retraités et actifs a été rendue possible par l'apport du patrimoine propre des retraités, qui constitue 40 % de leur revenu.

Aussi, nous sommes tous conscients du risque que représente le déficit prévisible des régimes concernés pour la période 2006-2033 et cela, même dans les hypothèses les plus optimistes en termes de chômage formulées par la commission Charpin.

Après ces rappels indispensables, vient la question des questions : celle des choix qui doivent être faits afin de déterminer une politique pour les retraites. L'an passé, j'ai soutenu la création du fonds de réserve tout en dénonçant le caractère symbolique de la somme de 2 milliards de francs versée à ce fonds. Aujourd'hui, je maintiens ce terme : les 15 milliards annoncés pour le début de l'année prochaine demeurent insuffisants.

M. Jean-Luc Préel.

Ce fonds est d'ailleurs virtuel !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Non, il ne l'est plus depuis ce matin, monsieur Préel. Dans le Journal officiel daté du 26 octobre, figure un complément d'information concernant le fonds de réserve. Vous voyez que j'ai de bonnes lectures matinales. (Sourires.)

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Il faut vous tenir au courant, monsieur Préel !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Insuffisants, ces 15 milliards le sont à deux points de vue : par le montant luimême, bien sûr, puisque nous savons que l'utilisation du fonds à des fins de lissage de la hausse prévue des cotisations pour absorber la bosse démographique de la période concernée réclamera 66 milliards de francs dès 2006 et 480 milliards autour de 2040 ; par les modalités de l'abondement ensuite, puisque toutes les garanties ne sont pas données, aujourd'hui, de la pérennisation du versement des sommes.

Même si des mesures ont été annoncées au Journal officiel de ce matin, il nous faut donc, concernant le fonds, déterminer dès à présent son champ d'action. En effet, il ne s'applique aujourd'hui qu'aux régimes concernés par la réforme de 1993 : quid des autres régimes ? Faudra-t-il ou non les inclure dans le dispositif ? Si non, il conviendra d'indiquer les mesures envisagées pour eux.

B ien des discussions ont cours aujourd'hui sur l'épargne retraite. Je suis partisan d'ajouter un troisième étage à la fusée : régime de base, régime complémentaire, épargne personnelle réalisée dans des conditions de stricte égalité pour tous. Ces deux éléments, fonds de réserve et épargne personnelle, permettront de limiter de façon importante la hausse éventuelle du montant des cotisations, qui dépend au demeurant des choix politiques qui auront été faits. A cela devra s'ajouter un indispensable dispositif de pilotage, qui est d'ailleurs évoqué par le rapport Charpin.

Une autre piste évoquée par ce dernier est celle de l'allongement de la durée des cotisations. Cette proposition, qui a fait l'objet de nombreux commentaires, aurait en outre un effet mécanique de diminution du nombre de retraités à payer. Cependant, cette solution repose la question des moyens à mettre en oeuvre pour occuper les actifs. A cet égard, je rappelle que la France reste le pays d'Europe qui compte le plus grand nombre de cessations anticipées d'activité. Par ailleurs, il serait paradoxal de demander aux Français de travailler plus longtemps au cours de leur vie alors que nous venons de leur indiquer qu'ils allaient travailler moins longtemps chaque semaine.

M. Claude Evin, rapporteur.

Oh !

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'est le contraire !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Et pourtant, jusqu'ici, ça allait !


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Chacun ses idées ! Enfin, je persiste à penser qu'il faut une retraite à la carte et non une retraite-guillotine.

Une autre épine demeure plantée dans le pied des décideurs : la réforme des régimes spéciaux, et particulièrement du régime des fonctionnaires de l'Etat. En effet, il y a péril en la demeure, une explosion sociale étant à craindre si une harmonisation n'est pas faite.

Au chapitre des autres absents du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2000 qui nous est présenté il faut citer : les veuves civiles, la prestation spéficique dépendance, les handicapés vieillissants et les démences séniles.

Les veuves civiles sont absentes du présent projet. Leur situation ne s'est guère améliorée. Certes, la précédente loi de financement a réformé le régime de l'allocation veuvage, désormais versée pendant deux ans, mais c'est insuffisant. Des mesures sont nécessaires concernant : le taux de réversion ; le plafond de cumul entre un avantage propre et la réversion ; l'inclusion de la majoration pour enfant dans le montant du plafond de cumul ; le calcul pénalisant dans le cas d'une pluralité des réversions.

Il est annoncé, dans le rapport annexé au présent projet de loi, une réforme de la loi sur la prestation spécifique dépendance. Je ne peux que m'en réjouir. Gageons que cette nouvelle promesse prendra corps dans le DMOS annoncé pour le prochain printemps. Une vraie PSD ne peut voit le jour que par la mise en place d'un cinquième risque au sein de notre sécurité sociale. Je ne résiste pas - car je persiste dans ma demande annuelle à la tentation de citer ici une phrase figurant dans le texte de saisine du Conseil constitutionnel lui déférant la loi PSD. A cette époque, le groupe socialiste écrivait : « La loi organise ainsi méthodiquement la discrimination territoriale au détriment des personnes âgées dépendantes ».

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

C'est vrai !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

En ce qui concerne cette loi, on peut affirmer : après l'espoir, le désespoir. Il faut rendre aujourd'hui l'espoir aux personnes qui doivent bénéficier de la PSD.

M. Claude Evin, rapporteur.

Qui a voté cette loi ?

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Il le dit lui-même !

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Mais je le reconnais, monsieur Evin ! J'avais dit que c'était une première étape et entre ce que nous avons voulu et la réalité constatée, il y a un écart. Donc, il faut changer de voie et s'orienter vers l'introduction d'un cinquième risque.

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Très bien, vous êtes un homme honnête, monsieur Jacquat !

M. le président.

Monsieur Jacquat, il est temps de conclure.

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Je conclus, monsieur le président.

La situation des handicapés vieillissants ne doit pas non plus nous laisser indifférents, et cela d'autant moins que le vieillissement de l'ensemble de la population augmentera leur nombre comme leur durée de vie. Ces personnes connaissent de graves problèmes de prise en charge. En effet, arrivés au terme d'un emploi en milieu ordinaire ou en centre d'aide par le travail, ils se trouvent soit avec une retraite incomplète, soit confrontés à l'absence de structures adaptées à leur situation. Pour ce qui est des démences séniles, elles viennent de faire l'objet d'un rapport que j'ai eu l'honneur de présenter au nom d'une mission de la commission, et dont j'espère que les conclusions seront rapidement reprises.

Madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, le rapport de Mme Paulette Guinchard-Kunstler, Vieillir en France, rappelle quelques vérités mais comporte surtout des propositions qu'il convient d'étudier de près, notamment la création d'une allocation unique concernant tout le domaine de la dépendance.

C'est avec impatience qu'est attendu le résultat des travaux de la mission d'information conduite par M. Pascal Terrasse sur la réforme de la loi du 30 juin 1975 relative aux institutions sociales et médico-sociales.

Aussi, en conclusion, je veux proposer au Gouvernement de s'engager dans une vaste et ambitieuse réforme prenant globalement en compte, de façon cohérente, la retraite, la PSD et le secteur médico-social. Nous avons les moyens économiques de cette ambition et je ne doute pas, madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, que vous la partagez tous avec moi.

Ayons bien en tête le titre du rapport Charpin. Peut-on encore attendre ? Nous avons donné des années à la vie. Il faut à présent donner de la vie aux années.

(Applaudissements sur les bancs du groupe de l'Union pour la démocratie françaiseAlliance, du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe Démocratie libérale et Indépendants.)

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Très bien !

M. le président.

La parole est à Mme le rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales pour la famille.

M me Marie-Françoise Clergeau, rapporteur de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, pour la famille.

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les travaux de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales ont montré un certain apaisement du débat parlementaire sur la famille. Je m'en félicite et veux y voir la juste reconnaissance du travail engagé par la majorité depuis 1997. Le Gouvernement complète ainsi, par ce troisième volet, l'élaboration d'une politique de la famille répondant à des objectifs de justice et d'équité. La cellule familiale doit être reconnue comme le coeur de notre société. Organisée autour de l'enfant, elle doit lui permettre un apprentissage de la vie, en lui construisant un système de valeurs, entouré d'amour familial, et en lui fixant les repères indispensables qui l'aideront à conquérir son autonomie. Elle est le premier espace de solidarité et de socialisation, elle constitue la cellule indispensable à la fois à la construction de l'individu et à l'élaboration de la cohésion sociale. Le Gouvernement et la majorité en font un véritable projet politique animé par le débat et par la concertation permanente, inspirés par l'évolution de notre société et la prise en compte des nouveaux défis que les familles doivent relever quotidiennement. A cet égard, je veux saluer l'action qui a été menée par Dominique Gillot, ainsi que les travaux de la conférence de la famille, qui, par l'animation d'un dialogue fructueux, a de nouveau montré, lors de sa réunion du 7 juillet 1999, son importance dans l'élaboration d'une politique familiale ambitieuse et rénovée. Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui traduit bien dans les actes cette volonté


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de développer une politique familiale plus juste, plus solidaire, reconnaissant la place de l'enfant et valorisant le rôle des parents.

L'année 1999 est pour la branche famille celle du retour à l'équilibre. Les déficits causés par les mesures de la loi famille de 1994 sont désormais derrière nous. Certaines mesures de cette loi, comme l'amélioration des aides aux grands enfants, pourtant promise, n'ont jamais vu le jour sous la précédente majorité,...

Mme Odette Grzegrzulka.

Comme d'habitude !

M. Jean-Luc Préel.

Ni sous la vôtre !

M me Marie-Françoise Clergeau, rapporteur.

... leur mise en application étant suspendue à la réalisation d'excédents inaccessibles en raison du coût d'engagements irréalistes.

La branche famille, traditionnellement excédentaire plongeait ainsi dans le rouge.

Le déficit, de 16,6 milliards de francs en 1995, a été contenu à 1,9 milliard de francs en 1998, et les prévisions tablent sur un excédent de 3,2 milliards de francs en 1999.

En 2000, l'excédent de la branche devrait atteindre 2,5 milliards avant le financement des mesures nouvelles prévues par le présent projet de financement, dont le coût total s'élèvera à 1,1 milliard.

La branche famille renoue donc avec les excédents ; elle va de surcroît pouvoir bénéficier à nouveau d'une sécurisation de ses recettes. Le Gouvernement a décidé de renouveler pour la période 1998-2002 la garantie de ressources de la branche, prenant ainsi le relais de la garantie mise en place en 1994, qui a expiré.

Des comptes assainis et des recettes sécurisées conditionnent la conduite d'une politique familiale ambitieuse.

Depuis deux ans, le Gouvernement et la majorité ont entrepris une rénovation progressive de la politique familiale. Ils l'ont réalisée en profondeur et dans la concertation.

Ainsi, tous les engagements pris l'an dernier ont été tenus : le rétablissement de l'universalité des prestations familiales ; l'abaissement du plafond du quotient familial, qui s'est traduit par un supplément de ressources fiscales estimé à 3,9 milliards de francs.

M. Jean-Luc Préel, rapporteur.

Merci pour les familles !

Mme Marie-Françoise Clergeau.

... lié à une reprise par le budget de l'Etat de l'allocation de parent isolé, pour un montant de 4,2 milliards de francs ; l'extension de l'allocation de rentrée scolaire aux familles d'un enfant, qui concerne 380 000 familles et représente une dépense supplémentaire de 700 millions de francs.

Enfin, 530 000 familles seront concernées par l'alignement des loyers-plafonds de l'allocation de logement familial sur ceux de l'aide personnalisée au logement.

Cette rénovation s'appuie donc bien sur deux axes : tout d'abord, la reconnaissance du rôle des familles dans la cohésion sociale comme lieu de solidarité et de construction des repères pour l'enfant ; ensuite, sur la nécessité de mener une politique d'appui aux familles, guidée par la volonté de répondre à leurs besoins.

Ces convictions trouvent leur traduction dans les mesures proposées par le présent projet. Elles guident aussi la réflexion des pouvoirs publics en vue des deux grands chantiers de l'année prochaine : la remise à plat des aides à la petite enfance et l'harmonisation et la simplification des aides au logement. Ainsi, 340 millions de francs supplémentaires vont être distribués aux familles grâce à un coup de pouce exceptionnel de 0,3 % s'ajoutant à la revalorisation de la base mensuelle des allocations familiales indexée sur la hausse des prix.

En outre, il était important de prolonger l'effort engagé en 1997 pour une meilleure prise en charge des jeunes adultes. Il s'agit là d'une mutation de notre société qu'il convenait d'accompagner car, vous le savez, 73 % des jeunes de vingt ans habitent encore chez leurs parents.

L'âge limite des prestations familiales a été porté de dix-huit à dix-neuf ans au 1er janvier 1998, puis à vingt ans au 1er janvier 1999. Les familles, plus particulièrement les plus modestes d'entre elles, sont de plus en plus confrontées à la nécessité d'assumer la charge d'un jeune adulte non intégré dans un dispositif d'insertion professionnelle et ayant pourtant interrompu ses études ; elles ont largement bénéficié de cette mesure.

Pour 2000, une mesure ciblée a été choisie par le Gouvernement et est proposé dans le présent projet. L'âge limite sera relevé à vingt et un ans pour les familles nombreuses au travers du complément familial. Il le sera également pour les allocations logement, qui sont un élément primordial de solvabilisation du revenu des familles.

Au total, 175 000 familles bénéficieront cette année de ces mesures, pour un coût de 1,5 milliard de francs.

Mais la politique familiale ne se limite pas aux seules prestations. Le choix du Gouvernement est d'accompagner les jeunes vers l'autonomie, de les aider à s'insérer sur le marché du travail, notamment avec les emploisjeunes ou le programme TRACE, de faciliter l'accès au logement des jeunes.

L'appui aux familles et la reconnaissance de leur rôle passe également par la pérennisation de la majoration de l'allocation de rentrée scolaire. Cette majoration qui, d epuis 1997, a permis de porter son montant à 1 600 francs par enfant d'âge scolaire, est, vous le savez, une aide très attendue par les familles modestes.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 a étendu son versement à toutes les familles d'un enfant remplissant les conditions de ressources et d'âge.

A la rentrée de 1999, 350 000 familles en ont bénéficié. Cette majoration a vocation à devenir une véritable prestation de la branche famille. En outre, l'Etat reprendra à sa charge le financement du fonds d'action sociale pour les travailleurs immigrés et leurs familles.

Je pense que le dispositif de l'allocation de rentrée scolaire pourrait être amélioré, afin de mieux prendre en compte les coûts engendrés par le cycle de scolarisation de l'enfant : un lycéen et un enfant en classe maternelle n'engendrent pas le même coût pour leur famille.

Pour compléter et accentuer la politique de prestations familiales, les crédits d'action sociale sont encore cette année en augmentation significative ; ils augmenteront ainsi de 700 millions de francs.

Ces crédits seront en particulier utilisés pour développer des actions en faveur de la petite enfance, avec la poursuite des contrats enfance, et en mettant l'accent sur l'accueil diversifié en crèche collective, familliale ou parentale.

L'action sociale est l'instrument de la mise en oeuvre de la politique prioritaire de soutien aux parents, pour les aider à mieux assurer leurs devoirs et les conforter dans leur rôle éducatif.

Le réseau d'appui et d'accompagnement des parents sera ainsi renforcé. Une action nouvelle pour les caisses, la médiation familiale, continuera à se développer.


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Comme vous pouvez le constater, la politique familiale constitue une vraie priorité du Gouvernement et de la majorité à laquelle j'appartiens. Elle ne se limite pas aux missions de la seule branche famille et aux prestations familiales. Elle a connu de nombreuses déclinaisons à travers les différents textes que nous avons pu examiner dans cette enceinte. Ainsi, les lois de lutte contre les exclusions et de création de la couverture maladie universelle contribueront à lutter contre la précarité qui touche les familles les plus en difficulté. La loi sur la réduction du temps de travail, fraîchement adoptée, permettra par le temps libéré une meilleure articulation entre vie familiale et vie professionnelle, intégrant ainsi le fait que de très nombreux pères et mères de famille veulent réussir leur vie professionnelle tout en étant présents auprès de leurs enfants.

On peut citer à cet égard la facilitation du compte épargne-temps pour les parents d'enfants de moins de seize ans, l'instauration d'un délai de prévenance ou la possibilité d'aménager les horaires en fonction des périodes scolaires.

Les initiatives du ministère de l'éducation nationale pour promouvoir la place des familles au sein de l'école, et ainsi mieux associer les parents à la scolarité de leurs enfants, doivent être également soulignées.

Enfin, Mme Guigou prépare actuellement la réforme du droit de la famille, tant attendue depuis de nombreuses années.

Comme en témoignent l'ensemble de ces mesures, une rénovation en profondeur de notre politique familiale a été engagée. Je veux saluer ici le travail de la délégation interministérielle à la famille, qui permet la réussite de ce travail transversal.

Ce projet de loi de financement de la sécurité sociale nous donnera des moyens supplémentaires pour améliorer la vie des familles, mobiliser nos efforts en faveur de l'enfant et valoriser le rôle des parents.

Ainsi, nous avancerons vers une politique familiale plus solidaire, animée par le sens de la justice et de l'équité.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste et du groupe communiste.)

M. le président.

Merci, madame le rapporteur, pour votre concision.

La parole est à M. le rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l'économie générale et du Plan.

Monsieur le président, madame la ministre, madame la secrétaire d'Etat, mes chers collègues, nous nous apprêtons donc à examiner le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour l'an 2000. C'est le quatrième exercice du genre et, avant de dire quelques mots du projet dont nous allons débattre dans les jours qui viennent, je crois utile de tirer quelques enseignements des trois lois de financement de la sécurité sociale que notre pays a déjà connues.

Cette loi, voulue par le législateur organique en 1995 et inaugurée en 1996, a permis, me semble-t-il, une plus grande transparence dans le débat sur des sujets fondamentaux, de même qu'une responsabilisation des acteurs et, n'en doutons pas, un renforcement des droits du Parlement. Ne serait-ce que pour ces trois raisons, j'avais dit à l'époque et je répète aujourd'hui à cette tribune que ce fut une bonne réforme.

Des enseignements doivent cependant être tirés. Des incertitudes et des menaces institutionnelles pèsent en effet sur la loi de financement de la sécurité sociale.

Les incertitudes ont trait au périmètre de cette loi. Au fond, qu'est-ce que la sécurité sociale ? En effet, le choix qui fut fait de ne pas intégrer l'assurance chômage ou la caisse d'amortissement de la dette sociale dans le périmètre de la loi de financement doit être assumé, même si on peut le juger contestable aujourd'hui.

Le choix qui fut fait d'intégrer le fonds de solidarité vieillesse mais pas le fonds d'allégement des cotisations patronales peut paraître contradictoire, et le pouvoir exécutif comme le pouvoir législatif devront renforcer la doctrine en ce domaine, afin de donner à cette institution qu'est devenue la loi de financement de la sécurité sociale une valeur pérenne.

Mais il y a aussi des menaces. Celles-ci sont institutionnelles. Elles viennent par exemple du Conseil constitutionnel, dont on a pu constater avec surprise qu'il avait censuré en décembre 1998 une disposition qui prévoyait d'informer le Parlement avant le vote en première lecture du PLFSS et de lui indiquer la répartition prévisionnelle de l'ONDAM.

Cette disposition ayant été censurée d'office par le Conseil constitutionnel, on peut légitimement se poser la question de savoir s'il faudra de nouveau voter une loi organique pour renforcer les droits du Parlement. Si tel était le cas, nous ne pourrions que le regretter car, dans ces conditions, toutes les promesses de progrès en ce domaine ne seraient que des illusions perdues.

Les menaces viennent aussi du Conseil d'Etat qui, dans un arrêt de mars 1999, a dénié toute valeur normative au rapport annexé constitué par l'article 1er du projet de loi de financement de la sécurité sociale. Mais à quoi sert de délibérer d'un article et de le voter, éventuellement après l'avoir amendé, si le Conseil d'Etat lui dénie toute valeur législative ? Les conséquences peuvent être doubles. Soit nous amenderons comme nous le voudrons, sans aucun esprit de responsabilité - ce que je n'ose imaginer - ledit article. Soit, comme c'est plus probable, cet article, donc le rapport, dépérira, mais je ne suis pas sûr que ce soit la volonté du législateur organique de 1995.

Les points essentiels de la loi de financement de la sécurité sociale ont déjà été décrits par les orateurs qui m'ont précédé. Effectivement, l'excédent de 2 milliards de francs du régime général en l'an 2000 et de 7 à 8 milliards de francs tous régimes confondus traduisent évidemment le résultat de la croissance retrouvée et d'une politique affirmée avec constance depuis juin 1997. Ces excédents sont une bonne chose et je ferai remarquer qu'ils ont été obtenus sans diminuer les remboursements, contrairement à ce qu'on peut estimer qu'avait fait le gouvernement d'Edouard Balladur en 1993, et sans augmenter les prélèvements sur les ménages, contrairement à ce qu'avaient fait le gouvernement d'Edouard Balladur et celui d'Alain Juppé en 1993 et 1995. (Exclamations sur les bancs du groupe du Rassemblement pour la République et du groupe de l'Union pour la démocratie française-Alliance.)

M. Jean-Luc Préel.

Le gouvernement de Bérégovoy a fait la même chose !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Je conçois que cela vous gêne, mais les faits sont là.

Une chose est en tout cas remarquable : pour la première fois depuis de trop nombreuses années, les prestations maladies, famille et vieillesse ne seront pas, en l'an 2000, financées à crédit sur les générations futures, grâce à cet équilibre et à ces excédents. Sur ce point au


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moins, mon cher collègue Préel, nous pouvons nous réjouir de concert, si vous m'autorisez à vous associer à ces réjouissances.

La réforme qui me paraît la plus importante dans ce projet de loi de financement de la sécurité sociale est la création du fonds d'allégement des cotisations patronales.

C'est une mesure de transparence et de cohérence.

Une mesure de transparence car on sait que le transfert à ce fonds des droits perçus par l'Etat sur le tabac serviront à financer ce qu'il est convenu d'appeler la ristourne Juppé, c'est-à-dire l'abaissement des charges sur les salaires, jusqu'à 1,3 fois le SMIC, pour un montant de 39,5 milliards de francs.

On sait que le transfert de la TGAP élargie et la création de la cotisation sociale sur les bénéfices, pour un montant de 7,5 milliards de francs, vont servir à financer le nouveau barème d'allégement des charges patronales tel qu'il a été voté il y a quinze jours à l'occasion de l'examen de la deuxième loi sur la réduction du temps de travail.

Quand on additionne ces deux financements, on voit que, pour près de 47 milliards de francs, ce fonds ne f inance pas les 35 heures, comme d'aucuns se complaisent à le dire, mais bien les allégements de charges sociales, et nous serons sans doute tous d'accord pour reconnaître que c'est une bonne chose, car nous pensons que l'allégement des charges sur les bas salaires, jusqu'à 1,8 fois le SMIC, est probablement un des outils les plus efficaces pour réduire le chômage, un des éléments les plus efficaces de la politique de l'emploi qui est menée avec constance depuis le mois de juin 1997.

Mais cette création du fonds est aussi une mesure de cohérence parce que sont intégrées dans un même fonds toutes les mesures en faveur de l'emploi : celles dont je viens de parler mais également, pour 17,5 milliards de francs, celles qui ont trait à la réduction du temps de travail - ces 17,5 milliards de francs financeront les aides qui ont été décidées dans le cadre de la première loi -, de même que l'aide de 4 000 francs par salarié et par an, la compensation pérenne décidée dans le cadre de la deuxième loi.

Certes, il y a eu des problèmes de financement et, pour ma part, je ne jetterai pas la pierre à un gouvernement qui, lui, a voulu négocier, et est parvenu à un accord contractuel avec les partenaires sociaux sans que ceux-ci aient à se manifester trop bruyamment, je veux dire, mais vous l'avez tous compris, dans la rue. Sur ce sujet, l'expérience de certains a pu servir à d'autres...

Dès lors que ces 17,5 milliards de francs seront assurés, on peut envisager très sereinement le démarrage et la mise en vitesse de croisière de la réduction du temps de travail, dont nous savons qu'il s'agira d'un élément essentiel dans la lutte contre le chômage.

J'ai bien entendu, notamment lors des questions d'actualité, les remarques parfois virulentes, peut-être trop virulentes, qui ont été faites dès lors qu'il s'est agi de demander au fonds de solidarité vieillesse de céder une partie des droits sur l'alcool afin de financer le fonds d'allégement des charges sociales. Je m'interroge sur les raisons de cette indignation, dont j'ai du mal à savoir si elle est sincère ou feinte. S'agit-il d'une opposition de principe ? Autrement dit, estime-t-on qu'il est illégitime que les droits sur l'alcool financent un allégement des charges sociales ?

M. Alfred Recours, rapporteur.

Bonne question !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Au nom de quoi serait-il plus illégitime d'utiliser ces ressources publiques en faveur de l'emploi plutôt que, comme certains ont pu le proposer, pour l'éducation sanitaire ou les prestations maladie ? Au nom de quoi serait-il illégitime de demander au fonds de solidarité vieillesse de contribuer à cet allégement des charges sociales alors que, en 1994, certains ont déjà décidé une contribution du fonds de solidarité vieillesse ? Il ne s'agissait pas alors d'alléger les charges sur les cotisations patronales mais de faire prendre en charge par ce fonds les compléments familiaux des retraités de la fonction publique.

Quand j'entends certains affirmer aujourd'hui haut et fort qu'on vole les retraités pour financer les 35 heures, cela me paraît à peu près aussi intelligent que si, à l'époque, on avait dit qu'on volait les chômeurs pour financer les retraites des fonctionnaires.

Comme ces recettes ne sont pas illégitimes et parce que, en 1994, vous aussi, chers collègues de l'opposition, aviez imaginé un transfert de ce type, je n'imagine pas que ce débat, qui me paraît largement factice, puisse se poursuivre. Je ne vois pas en quoi la démocratie et la discussion au sein de notre assemblée y gagneraient.

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité nationale et Mme la secrétaire d'Etat à la santé et à l'action sociale.

Très bien !

M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis.

Si ce débat n'est pas fondé sur des questions de principe, c'est qu'il repose sur des questions d'opportunité.

Oui, nous vous avons fait de la peine, et je la devine assez grande, en n'offrant pas au MEDEF l'occasion de quitter les organismes paritaires ; ainsi, le Gouvernement et la majorité qui le soutient ne peuvent être accusés d'avoir mis un terme au paritarisme. C'est vrai que les discussions n'ont pas dû être commodes. Comme vous, mes chers collègues, j'ai pu lire dans la presse qu'il y avait eu des hauts et des bas. Les uns et les autres se sont exprimés de façon plus ou moins sincère, ont été plus ou moins crédibles, mais le résultat est là : un accord a été conclu. Je n'imagine pas que chacun des contractants n'y trouve pas son compte. En tout cas, une chose est certaine : le financement a été trouvé et cela me paraît excellent.

Je terminerai en disant deux mots de l'assurance maladie, non que j'éprouve le besoin de compléter le propos de notre excellent collègue Claude Evin, mais simplement pour indiquer, madame la ministre, que quelqu'un qui a bien évidemment mon estime et mon amitié a fait aujourd'hui des déclarations dont l'opportunité est discutable mais l'inélégance certaine.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Très bien !

M. le président.

La parole est à M. le président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

M. Jean Le Garrec, président de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales.

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, beaucoup de choses ont été dites, avec grand talent, et les orateurs qui se sont exprimés avaient soigneusement préparé leurs interventions.

Pour clôturer ce long débat introductif, long mais nécessaire, je me contenterai d'évoquer deux thèmes : d'une part, la rigueur et la sagesse du Gouvernement et,


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ASSEMBLÉE NATIONALE - 2e SÉANCE DU 26 OCTOBRE 1999

d'autre part, la qualité des rapporteurs, laquelle montre bien que le Parlement est décidé à assumer totalement son rôle dans le vote de la loi de financement de la sécurité sociale.

Je ne peux résister au plaisir de citer le nom de ces rapporteurs : M. Recours, dont on connaît le talent et la finesse, M. Evin, qui a une parfaite maîtrise du sujet, M. Jacquat, qui joue une petite musique qui est un peu différente mais que nous écoutons quand même avec plaisir,...

M. Denis Jacquat, rapporteur.

Merci !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

... Mme Clergeau, qui remplace très bien Mme Gillot, à qui nous avons assuré la réussite si ce n'est l'accès au Gouvernement...

(Sourires.)

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Grâce à ses talents !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

... et, enfin, M. Jérôme Cahuzac, dont je ne peux dire qu'une chose : il appartient à la commission des finances, mais il est aussi du Lot-et-Garonne, ce qui suffit à peindre son portrait.

(Sourires.)

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Il mériterait d'être membre de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Je parlais de la rigueur et de la sagesse du Gouvernement. Le fait est bien connu mais il faut le répéter, notre pays n'a pas une culture de réforme et chaque fois que nous essayons, quel que soit le Gouvernement, de faire bouger des lignes, nous rencontrons des difficultés. C'est ce qui vous arrive, madame la ministre, et vous avez eu raison de vous donner le temps de convaincre et de remettre l'ouvrage sur le métier.

Quels sont les enjeux ? Le premier ayant été remarquablement décrit par M. Recours, je n'y reviendrai que rapidement : je veux parler de l'élargissement de l'assiette de financement de la sécurité sociale. On a procédé à cet élargissement pour l a CSG et on va le faire pour les cotisations patronales. Il s'agit d'une réforme de première ampleur.

Tous nos efforts tendent à lutter contre le chômage, à développer l'emploi et à desserrer l'étau du chômage.

Aussi pouvions-nous nous attendre à ce que le vieux débat sur l'activation des dépenses passives prenne toute son ampleur. Ce débat, nous l'avions déjà connu et nous y avions participé : il a été au centre des réflexions du mouvement syndical.

Quelqu'un que je respecte beaucoup et qui est une amie, Mme Notat, ne disait-elle pas : « La création d'emplois se traduit par des cotisations sociales et des impôts supplémentaires, tandis que la baisse du chômage entraîne une réduction des indemnités et des dépenses publiques » ? Cela est évident. Et Mme Notat d'ajouter :

« Cela doit contribuer à l'activation des dépenses passives. » A celle-ci, jusqu'à ce jour, le MEDEF s'oppose.

Alors que nous engagions cette réforme à laquelle, nous le savions, le MEDEF était hostile, nous aurions pu espérer le soutien de l'ensemble du mouvement syndical pour aller jusqu'au bout de la démarche. Nous n'y avons pas réussi.

Vous prenez le temps, madame la ministre, de remettre l'ouvrage sur le métier. Cette bataille, nous la gagnerons, et nous la gagnerons avec l'appui du mouvement social et du mouvement syndical. Elle est essentielle.

De la même manière, nous posons le problème de l'avenir du partenariat en identifiant comme donnée de fond la clarification des responsabilités et des rapports.

L'hypocrisie de principe qui consiste à dire qu'il faut sauver le partenariat, mais sans admettre qu'il ne peut l'être que si l'on définit le champ des responsabilités, le champ des compétences et le champ des obligations, n'est pas acceptable.

Madame la ministre, vous avez engagé la réforme tout en prenant le temps pour la faire aboutir. La décision qui a été prise hier par les organisations syndicales, qui déclarent qu'elles sont prêtes à se réunir pour renouveler la convention de l'assurance chômage de l'ARPE, diverses mesures en faveur de l'emploi et de la formationreclassement, pour intégrer la nécessaire clarification des relations financières entre le régime d'assurance chômage et l'Etat, est fondamentale. Il serait terriblement choquant qu'au moment où les organisations syndicales prennent la décision de reposer l'ensemble des problèmes sur la table, le MEDEF, qui préside l'UNEDIC, ne participe pas à la négociation. Parce que si tel était le cas, nous saurions clairement où se trouvent ceux qui veulent du partenariat et ceux qui le refusent ; les masques tomberaient et nous saurions comment faire évoluer les choses.

M. Alfred Recours, rapporteur.

Très bien !

M. Jean Le Garrec, président de la commission.

Si cette clarification est fondamentale pour l'UNEDIC, elle l'est tout autant pour le système de sécurité sociale car, au fil des années, notre système - osons le dire ! - est devenu opaque, peu transparent, avec un jeu de responsabilités croisées qui fait qu'on ne sait pas comment maîtriser l'ensemble. A cet égard, rappelons la théorie bien connue de Max Weber : tout grand système risque, au fil du temps, de s'ankyloser.

Nous faisons, quant à nous, une analyse systémique.

Les propositions de M. Evin, issues d'un travail collectif, participent, et je l'en félicite, de la volonté de dire qui fait quoi, avec quel outil et comment on rend compte.

Mais je m'étonne de la déclaration du président de la CNAM, qui, au lieu de s'engager dans cette démarche, qu'il avait lui-même souhaitée, fait semblant de croire qu'elle va à l'encontre d'un système de partenariat que, en ce qui nous concerne, nous voulons défendre.

La réforme des systèmes de financement et celle qui doit déboucher sur une clarification des responsabilités, sont essentielles. Je suis très fier, je le dis avec beaucoup de sincérité, d'avoir, au nom de la commission, à la faveur d'un dialogue avec la CNAM, les partenaires sociaux et les professionnels de la santé, mené une réflexion qui a abouti à des propositions dont je suis heureux de constater qu'elles sont, pour nombre d'entre elles, reprises dans le projet de loi.

C'est ainsi que nous construirons l'avenir et je suis très fier de travailler avec l'équipe que je viens de présenter.

Il est bien évident, madame la ministre, que des outils sont nécessaires. Nous avons d'ailleurs interrogé à ce propos le président de la CNAM. Mais, pour des raisons constitutionnelles, ces outils ne peuvent figurer dans la loi de financement. Aussi vous demandons-nous de faire en sorte qu'au travers de la loi de modernisation du système de santé ou d'un DMOS - peu importe, à la limite, le support législatif -, nous puissions, le plus rapidement possible, c'est-à-dire dès le début de l'année prochaine, mettre en place les outils dont la CNAM a besoin et que réclame son président. Cependant, nous ne les lui appor-


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terons qu'à la condition qu'il les utilise et qu'il accepte de rendre compte de leur utilisation, non seulement devant le Gouvernement mais aussi devant le Parlement.

L'enjeu du débat que nous engageons est considérable.

Voilà trois ans qu'ensemble nous discutons et réfléchissons. Aujourd'hui, enfin, nous posons les fondements de la reconstruction des systèmes sociaux. Je n'accepte pas que l'on se contente de dire que les Français sont attachés à ces systèmes si l'on ne se donne pas tous les moyens d'assurer leur pérennité.

Soyez sûre, madame la ministre, que nous appuyons votre volonté, que nous contribuons à son expression, et qu'avec vous, tranquillement, avec sagesse, en respectant les interlocuteurs mais en restant très fermes sur nos propositions, nous irons jusqu'au bout de la démarche.

(Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste.)

Mme la ministre de l'emploi et de la solidarité.

Très bien !

M. le président.

La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

5

FIN DE LA MISSION TEMPORAIRE D'UN DÉPUTÉ

M. le président.

Par lettre du 25 octobre 1999, M. le Premier ministre m'a informé que la mission temporaire précédemment confiée à M. Alfred Recours, député de la deuxième circonscription de l'Eure, avait pris fin le 11 octobre 1999.

6 ADOPTION D'UNE RÉSOLUTION EN APPLICATION DE L'ARTICLE 88-4 DE LA CONSTITUTION

M. le président.

J'informe l'Assemblée qu'en application de l'article 151-3, alinéa 2, du règlement, est considérée comme définitive la résolution, adoptée par la commission de la production et des échanges, sur la préparation de la conférence ministérielle de l'OMC à Seattle (COM [1999] 331 final/no E 1285).

7

ORDRE DU JOUR DE LA PROCHAINE SÉANCE

M. le président.

Ce soir, à vingt et une heures, troisième séance publique : Suite de la discussion du projet de loi, no 1835, de financement de la sécurité sociale pour 2000 : MM. Alfred Recours, Claude Evin, Denis Jacquat et Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteurs au nom de la commission des affaires culturelles, familiales et sociales (rapport no 1876, tomes I à V) ; M. Jérôme Cahuzac, rapporteur pour avis au nom de la commission des finances, de l'économie générale et du plan (avis no 1873).

La séance est levée.

(La séance est levée à dix-neuf heures trente.)

L e Directeur du service du compte rendu intégral de l'Assemblée nationale,

JEAN PINCHOT


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ANNEXE AU PROCÈS-VERBAL de la 2e séance du mardi 26 octobre 1999 SCRUTIN (no 197) sur l'ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2000 (vote unique).

Nombre de votants .....................................

562 Nombre de suffrages exprimés ....................

562 Majorité absolue ..........................................

282 Pour l'adoption ...................

311 Contre ..................................

251 L'Assemblée nationale a adopté.

ANALYSE DU SCRUTIN Groupe socialiste (251) : Pour : 246. - MM. Yvon Abiven , Maurice Adevah-Poeuf , Stéphane Alaize , Damien Alary , Mme Sylvie Andrieux ,

M M. Léo Andy , Jean-Marie Aubron , Jean-Marc A yrault , Jean-Paul Bacquet , Dominique Baert , J ean-Pierre Baeumler , Jean-Pierre Balduyck , Gérard Bapt , Alain Barrau , Jacques Bascou , Christian Bataille , J ean-Claude Bateux , Jean-Claude Beauchaud ,

M me Yvette Benayoun-Nakache , MM. Henri B ertholet , Eric Besson , Jean-Louis Bianco , André B illardon , Jean-Pierre Blazy , Serge Blisko , Patrick Bloche , Jean-Marie Bockel , Jean-Claude Bois , Daniel Boisserie , Maxime Bono , Augustin Bonrepaux , André Borel , Jean-Michel Boucheron , Jean-Claude Boulard , Didier Boulaud , Pierre Bourguignon , Christian Bourq uin, Mme Danielle Bousquet , MM. Jean-Pierre Braine , Pierre Brana , Mme Frédérique Bredin , M. JeanPaul Bret , Mme Nicole Bricq , MM. François Brottes , Vincent Burroni , Marcel Cabiddu , Alain Cacheux , J érôme Cahuzac , Alain Calmat , Jean-Christophe C ambadelis , André Capet , Thierry Carcenac , Mme Odette Casanova , MM. Laurent Cathala , JeanY ves Caullet , Bernard Cazeneuve , Jean-Paul C hanteguet , Guy-Michel Chauveau , Jean-Claude C hazal , Daniel Chevallier , Didier Chouat , Alain Claeys , Mme Marie-Françoise Clergeau , MM. Jean C odognès , Pierre Cohen , François Colcombet , Mme Monique Collange , MM. François Cuillandre , Jean-Claude Daniel , Camille Darsières , Michel Dasseux , Y ves Dauge , Mme Martine David , MM. Bernard Davoine , Philippe Decaudin , Marcel Dehoux , Jean D elobel , François Deluga , Jean-Jacques Denis , Mme Monique Denise , MM. Bernard Derosier , Claude Desbons , Michel Destot , Paul Dhaille , Marc Dolez , François Dosé , René Dosière , Mme Brigitte Douay , MM. Raymond Douyère , Julien Dray , Tony Dreyfus , P ierre Ducout , Jean-Pierre Dufau , Mme Laurence D umont , MM. Jean-Louis Dumont , Dominique Dupilet , Jean-Paul Dupré , Yves Durand , Jean-Paul Durieux , Philippe Duron , Jean Espilondo , Claude Evin , Alain Fabre-Pujol , Albert Facon , Mme Nicole Feidt , MM. Jean-Jacques Filleul , Jacques Fleury , Jacques Floch , Pierre Forgues , Raymond Forni , Jean-Louis Fousseret , Michel Françaix , Christian Franqueville , Georges Frêche , Gérard Fuchs , Robert Gaïa , Roland G arrigues , Jean-Yves Gateaud , Jean Gaubert , Mme Catherine Génisson , MM. André Godin , Gaëtan Gorce , Alain Gouriou , Gérard Gouzes , Joël Goyheneix , B ernard Grasset , Michel Grégoire , Mmes Odette G rzegrzulka , Paulette Guinchard-Kunstler , MM. Jacques Guyard , Francis Hammel , Mme Cécile Helle , MM. Edmond Hervé , Jacques Heuclin , François Hollande , Jean-Louis Idiart , Mme Françoise Imbert , MM. Claude Jacquot , Serge Janquin , Jacky Jaulneau , Armand Jung , Jean-Noël Kerdraon , Bertrand Kern , Jean-Pierre Kucheida , André Labarrère , Mme Conchita Lacuey , MM. Jérôme Lambert , François Lamy , PierreC laude Lanfranca , Jack Lang , Jean Launay ,

M mes Jacqueline Lazard , Christine Lazerges ,

M M. Gilbert Le Bris , Jean-Yves Le Déaut , Mme Claudine Ledoux , MM. Jean-Yves Le Drian , Michel Lefait , Jean Le Garrec , Jean-Marie Le Guen , Patrick Lemasle , Georges Lemoine , Bruno Le Roux , René Leroux , Mme Raymonde Le Texier , MM. Alain Le Vern , Michel Liebgott , Mme Martine LignièresC assou , MM. Gérard Lindeperg , François Loncle , Bernard Madrelle , René Mangin , Jean-Pierre Marché , Daniel Marcovitch , Jean-Paul Mariot , Mme Béatrice Marre , MM. Daniel Marsin , Marius Masse , Didier Mathus , Gilbert Maurer , Guy Menut , Louis Mermaz , Roland Metzinger , Louis Mexandeau , Jean Michel , Didier Migaud , Mme Hélène Mignon , MM. Gilbert Mitterrand , Yvon Montané , Gabriel Montcharmont , Arnaud Montebourg , Philippe Nauche , Bernard Nayral , Henri Nayrou , Mme Véronique Neiertz , MM. Alain Néri , Michel Pajon , Joseph Parrenin , François Patriat , Christian Paul , Vincent Peillon , Germinal Peiro , JeanClaude Perez , Jean-Pierre Pernot , Mmes Marie-Françoise P érol-Dumont , Geneviève Perrin-Gaillard , Annette Peulvast-Bergeal , Catherine Picard , MM. Paul Quilès , A lfred Recours , Gérard Revol , Mme Marie-Line Reynaud , M. Patrick Rimbert , Mme Michèle Rivasi , MM. Alain Rodet , Marcel Rogemont , Bernard Roman , Y ves Rome , Gilbert Roseau , Mme Yvette Roudy , MM. Jean Rouger , René Rouquet , Michel SainteMarie , Mme Odile Saugues , MM. Bernard Seux , P atrick Sève , Henri Sicre , Michel Tamaya , Mmes Catherine Tasca , Christiane Taubira-Delannon , MM. Yves Tavernier , Pascal Terrasse , Gérard Terrier , Mmes Marisol Touraine , Odette Trupin , MM. Joseph Tyrode , Daniel Vachez , André Vallini , André Vauchez , Michel Vauzelle , Michel Vergnier , Alain Veyret , Alain Vidalies , Jean-Claude Viollet , Philippe Vuilque et Kofi Yamgnane.

Non-votant : M. Laurent Fabius (président de l'Assemblée nationale).

Groupe R.P.R. (136) : C ontre : 131. - MM. Jean-Claude Abrioux , Bernard Accoyer , Mme Michèle Alliot-Marie , MM. René André , André Angot , Philippe Auberger , Pierre Aubry , Jean Auclair , Gautier Audinot , Mmes Martine Aurillac , Roselyne Bachelot-Narquin , MM. Edouard Balladur , Jean Bardet , François Baroin , Jacques Baumel , Christian Bergelin , André Berthol , Léon Bertrand , Jean-Yves Bes-


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selat , Jean Besson , Franck Borotra , Bruno Bourg-Broc , Michel Bouvard , Victor Brial , Philippe Briand , Michel Buillard , Christian Cabal , Gilles Carrez , Jean-Charles Cavaillé , Richard Cazenave , Henry Chabert , Jean-Paul Charié , Jean Charroppin , Philippe Chaulet , Jean-Marc Chavanne , Olivier de Chazeaux , François CornutGentille , Alain Cousin , Jean-Michel Couve , Charles Cova , Henri Cuq , Jean-Louis Debré , Lucien Degauchy , Arthur Dehaine , Jean-Pierre Delalande , Patrick Deln atte , Jean-Marie Demange , Xavier Deniau , Yves Deniaud , Patrick Devedjian , Eric Doligé , Guy Drut , Jean-Michel Dubernard , Jean-Pierre Dupont , Nicolas D upont-Aignan , Christian Estrosi , Jean-Claude Etienne , Jean Falala , Jean-Michel Ferrand , François Fillon , Roland Francisci , Pierre Frogier , Yves Fromion , Robert Galley , René Galy-Dejean , Henri de Gastines , Jean de Gaulle , Hervé Gaymard , Jean-Pierre Giran , Michel Giraud , Jacques Godfrain , Louis Guédon , JeanClaude Guibal , Lucien Guichon , Gérard Hamel , Michel Hunault , Michel Inchauspé , Christian Jacob , Didier Julia , Alain Juppé , Jacques Lafleur , Robert Lamy , Pierre L asbordes , Pierre Lellouche , Jean-Claude Lemoine , Arnaud Lepercq , Jacques Limouzy , Thierry Mariani , A lain Marleix , Franck Marlin , Jean Marsaudon , P hilippe Martin , Patrice Martin-Lalande , Jacques

M asdeu-Arus , Mme Jacqueline Mathieu-Obadia , MM. Gilbert Meyer , Jean-Claude Mignon , Charles Miossec , Pierre Morange , Renaud Muselier , Jacques

M yard , Jean-Marc Nudant , Patrick Ollier , Robert Pandraud , Jacques Pélissard , Dominique Perben , Pierre Petit , Etienne Pinte , Serge Poignant , Bernard Pons , R obert Poujade , Didier Quentin , Jean-Bernard Raimond , Jean-Luc Reitzer , Nicolas Sarkozy , André Schneider , Bernard Schreiner , Philippe Séguin , Frantz Taittinger , Michel Terrot , Jean-Claude Thomas , Jean Tiberi , Georges Tron , Anicet Turinay , Jean Uberschlag , Léon Vachet , Jean Valleix , François Vannson , Roland V uillaume , Jean-Luc Warsmann et Mme Marie-Jo Zimmermann.

Groupe U.D.F. (70) : Contre : 70. - MM. Jean-Pierre Abelin , Pierre Albertini , Pierre-Christophe Baguet , Raymond Barre , Jacques Barrot , Dominique Baudis , François Bayrou , Jean-Louis Bernard , Claude Birraux , Emile Blessig , Mme MarieThérèse Boisseau , MM. Jean-Louis Borloo , Bernard Bosson , Mme Christine Boutin , MM. Loïc Bouvard , Jean Briane , Yves Bur , Dominique Caillaud , Hervé de Charette , Jean-François Chossy , René Couanau , Charles de Courson , Yves Coussain , Marc-Philippe Daubresse , J ean-Claude Decagny , Léonce Deprez , Renaud Donnedieu de Vabres , Philippe Douste-Blazy , Renaud D utreil , Alain Ferry , Jean-Pierre Foucher , Claude G aillard , Germain Gengenwin , Valéry Giscard d'Estaing , Gérard Grignon , Hubert Grimault , Pierre H ériaud , Patrick Herr , Mmes Anne-Marie Idrac , Bernadette Isaac-Sibille , MM. Henry Jean-Baptiste , Jean-Jacques Jégou , Christian Kert , Edouard Landrain , Jacques Le Nay , Jean-Antoine Leonetti , François tard , Maurice Leroy , Roger Lestas , Maurice Ligot , François Loos , Christian Martin , Pierre Méhaignerie , Pierre Micaux , Mme Louise Moreau , MM. Hervé Morin , Jean-Marie Morisset , Arthur Paecht , Dominique Paillé , Henri Plagnol , Jean-Luc Préel , Marc Reymann , Gilles de Robien , François Rochebloine , Rudy Salles , André Santini , François Sauvadet , Michel Voisin , Jean-Jacques Weber et Pierre-André Wiltzer

Groupe Démocratie libérale et Indépendants (44) : C ontre : 43. - Mme Nicole Ameline , M. François d' Aubert , Mme Sylvia Bassot , MM. Jacques Blanc , Roland Blum , Dominique Bussereau , Pierre Cardo , A ntoine Carré , Georges Colombier , Bernard Deflesselles , Francis Delattre , Franck Dhersin , Laurent Dominati , Dominique Dord , Charles Ehrmann , Nicolas Forissier , Gilbert Gantier , Claude Gatignol , Claude Goasguen , François Goulard , Pierre Hellier , Michel Herbillon , Philippe Houillon , Denis Jacquat , Aimé Kerguéris , Marc Laffineur , Jean-Claude Lenoir , Pierre Lequiller , Alain Madelin , Jean-François Mattei , Michel Meylan , Alain Moyne-Bressand , Yves Nicolin , Paul Patriarche , Bernard Perrut , Jean Proriol , Jean Rigaud , Jean Roatta , José Rossi , Joël Sarlot , Guy Teissier , Philippe Vasseur et Gérard Voisin.

Groupe communiste (35) : Pour : 33. - MM. Gilbert Biessy , Claude Billard , Bernard Birsinger , Alain Bocquet , Patrick Braouezec , Jean-Pierre Brard , Jacques Brunhes , Patrice Carvalho , Alain Clary , C hristian Cuvilliez , René Dutin , Daniel Feurtet , Mme Jacqueline Fraysse , MM. André Gerin , Pierre Goldberg , Maxime Gremetz , Guy Hermier , Robert H ue , Mmes Muguette Jacquaint , Janine Jambu ,

M M. André Lajoinie , Jean-Claude Lefort , Patrick L eroy , Félix Leyzour , François Liberti , Patrick Malavieille , Roger Meï , Ernest Moutoussamy , Bernard O utin , Daniel Paul , Jean-Claude Sandrier , Michel Vaxès et Jean Vila

Contre : 1. - M. Georges Hage.

Groupe Radical, Citoyen et Vert (33) : Pour : 32. - M. André Aschieri , Mmes Marie-Hélène Aubert , Huguette Bello , MM. Pierre Carassus , Roland C arraz , Gérard Charasse , Bernard Charles , Yves Cochet , Jean-Pierre Defontaine , Jacques Desallangre , Roger Franzoni , Guy Hascoët , Claude Hoarau , Elie Hoarau , Robert Honde , Guy Lengagne , Noël Mamère , J ean-Michel Marchand , Mme Gilberte Marin-Moskovitz , MM. Jean-Pierre Michel , Jean-Paul Nunzi , Jean Pontier , Jacques Rebillard , Jean Rigal , Mme Chantal Robin-Rodrigo , MM. Georges Sarre , Gérard Saumade , Roger-Gérard Schwartzenberg , Michel Suchod , Alain Tourret , Emile Vernaudon et Aloyse Warhouver.

Non-inscrits (7).

Contre : 6. - MM. Marc Dumoulin , Jean-Jacques Guillet , Lionnel Luca , Charles Millon , Jean-Pierre Soisson et Philippe de Villiers

Mise au point au sujet du présent scrutin (Sous réserve des dispositions de l'article 68, alinéa 4, du règlement de l'Assemblée nationale) Mme Nicole Catala, qui était présente au moment du scrutin ou qui avait délégué son droit de vote, a fait savoir qu'elle avai t voulu voter « contre ».