N° 1980
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 1er décembre 1999.
PROPOSITION DE LOI
réformant le plan d'épargne en actions (PEA)
pour développer l'
actionnariat populaire.
(Renvoyée à la commission des finances, de l'économie générale et du plan, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles30 et 31 du Règlement.)
présentée
par MM. Jean de GAULLE, Jean-Louis DEBRÉ
et les membres du groupe du Rassemblement pour la République (1)
et apparentés (2),
Députés.

(1) Ce groupe est composé de : MM. Jean-Claude Abrioux, Bernard Accoyer, Mme Michèle Alliot-Marie, MM. René André, André Angot, Philippe Auberger, Jean Auclair, Gautier Audinot, Mmes Martine Aurillac, Roselyne Bachelot-Narquin, MM. Edouard Balladur, Jean Bardet, François Baroin, Jacques Baumel, Christian Bergelin, André Berthol, Léon Bertrand, Jean-Yves Besselat, Jean Besson, Franck Borotra, Bruno Bourg-Broc, Michel Bouvard, Victor Brial, Philippe Briand, Michel Buillard, Christian Cabal, Gilles Carrez, Mme Nicole Catala, MM. Jean-Charles Cavaillé, Richard Cazenave, Henry Chabert, Jean-Paul Charié, Jean Charroppin, Philippe Chaulet, Jean-Marc Chavanne, Olivier de Chazeaux, François Cornut-Gentille, Alain Cousin, Jean-Michel Couve, Charles Cova, Henri Cuq, Jean-Louis Debré, Lucien Degauchy, Arthur Dehaine, Jean-Pierre Delalande, Patrick Delnatte, Jean-Marie Demange, Yves Deniaud, Patrick Devedjian, Eric Doligé, Guy Drut, Jean-Michel Dubernard, Jean-Pierre Dupont, Nicolas Dupont-Aignan, Christian Estrosi, Jean-Claude Etienne, Jean Falala, Jean-Michel Ferrand, François Fillon, Roland Francisci, Pierre Frogier, Yves Fromion, Robert Galley, René Galy-Dejean, Henri de Gastines, Jean de Gaulle, Hervé Gaymard, Jean-Pierre Giran, Michel Giraud, Jacques Godfrain, Louis Guédon, Jean-Claude Guibal, Lucien Guichon, Jean-Jacques Guillet, Gérard Hamel, Michel Hunault, Michel Inchauspé, Christian Jacob, Didier Julia, Alain Juppé, Jacques Lafleur, Robert Lamy, Pierre Lasbordes, Thierry Lazaro, Pierre Lellouche, Jean-Claude Lemoine, Arnaud Lepercq, Jacques Limouzy, Thierry Mariani, Alain Marleix, Jean Marsaudon, Philippe Martin, Patrice Martin-Lalande, Jacques Masdeu-Arus, Mme Jacqueline Mathieu-Obadia, MM. Gilbert Meyer, Jean-Claude Mignon, Charles Miossec, Pierre Morange, Renaud Muselier, Jacques Myard, Jean-Marc Nudant, Patrick Ollier, Mme Françoise de Panafieu, MM. Robert Pandraud, Jacques Pélissard, Dominique Perben, Pierre Petit, Etienne Pinte, Serge Poignant, Bernard Pons, Robert Poujade, Didier Quentin, Jean-Bernard Raimond, Jean-Luc Reitzer, Nicolas Sarkozy, André Schneider, Bernard Schreiner, Philippe Séguin, Frantz Taittinger, Michel Terrot, Jean-Claude Thomas, Jean Tibéri, Georges Tron, Jean Ueberschlag, Léon Vachet, Jean Valleix, François Vannson, Roland Vuillaume, Jean-Luc Warsmann, Mme Marie-Jo Zimmermann.
(2) MM. Pierre Aubry, Xavier Deniau, François Guillaume, Jacques Kossowski, Franck Marlin, Anicet Turinay.
Banques et établissements financiers.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Mesdames, Messieurs,
Depuis sa création en 1992, le plan d'épargne en actions (PEA), qui a pour but d'" encourager le financement en fonds propres des entreprises et l'épargne contractuelle à long terme ", a grandement contribué au développement de l'actionnariat populaire en France. Les nombreux avantages fiscaux qu'il offre, la simplicité de son mécanisme, conjugués à l'attrait croissant des particuliers pour l'investissement en actions, grâce notamment aux opérations de privatisation, sont les principales clés de son succès.
Inspiré du plan d'épargne populaire, le plan d'épargne en actions peut être ouvert auprès de la plupart des organismes financiers (établissements de crédit et compagnies d'assurance en particulier) afin de recueillir des placements (plafonnés depuis l'origine à 600 000 francs par titulaire) qui doivent être, sauf exceptions, investis en actions de sociétés françaises. A condition que l'épargne investie soit conservée pendant cinq ans au moins, les différents produits induits par les placements effectués dans les PEA sont exonérés d'impôt sur le revenu.
Depuis 1992, le succès de cette formule ne s'est pas démenti. A la fin du mois de juin 1999, le nombre de plans atteignait 4,3 millions (1) (soit 833 000 de plus qu'en octobre 1998), pour un encours total de 444,7 milliards de francs (soit 23 % de plus en un an). Cette incitation faite aux épargnants français à participer au soutien de l'économie française représente pourtant, pour l'Etat, un coût budgétaire minime. En 1998, le coût des avantages concédés, évalué à 5 milliards de francs (3,5 milliards en 1997), est bien inférieur au coût, par exemple, de l'exonération des intérêts du PEP (6,1 milliards en 1998) ou des mesures favorables à l'assurance-vie (31,8 milliards en 1998).
(1) Instruction du 31 mai 1999, publiée dans le Bulletin officiel des impôts le 9 juin 1999.
Or, sept ans après sa création, ce produit, principal soutien à l'investissement en actions et outil essentiel au développement de l'actionnariat populaire, semble, dans son champ d'application comme dans ses règles de fonctionnement, trop restreint et, au regard de quelques évolutions récentes du monde financier et boursier, quelque peu inadapté. Malgré tous ses avantages, la part du PEA dans les actifs financiers des ménages demeure marginale. En 1996, sur un total de 269 milliards de francs de revenus de l'épargne mobilière exonérée totalement ou partiellement, les dividendes d'actions exonérés dans le cadre du PEA ne représentaient ainsi que 3 %.
Dans ces conditions, plusieurs améliorations pourraient redonner un nouveau souffle au PEA, au service d'un plus large actionnariat populaire, d'un marché des actions plus dynamique et d'un meilleur financement des fonds propres des entreprises françaises, et l'aider, à l'heure des économies ouvertes, à conserver tout son attrait :
1. Tirer les conséquences des fusions et alliances mettant en jeu des sociétés françaises.
La multiplication des mariages d'entreprises françaises avec des sociétés étrangères entraîne, avec la perte de la nationalité française qu'ils occasionnent souvent, l'inéligibilité de ces nouvelles valeurs au PEA. C'est ainsi le cas de quatre titres récents, fortement présents dans les PEA. Avec l'accord Aérospatiale Matra - Dasa, la nouvelle entité va être soumise au droit néerlandais. Il en va de même du rapprochement Seita - Tabacalera qui donnera naissance à une nouvelle entité régie par le droit espagnol. Les titres de la société Péchiney, qui devrait perdre la nationalité française en s'alliant avec le canadien Alcan et le suisse Algroup, ne pourront plus, eux non plus, figurer dans un PEA. Tout comme Dexia, qui est appelé à devenir Dexia Belgium, régi par le droit belge. Ces évolutions naturelles, qui ne sauraient d'ailleurs se limiter à ces quatre exemples, se heurtent à la rigidité originelle des principes et champ d'application du PEA. Dans ces cas d'espèce, elles iraient même à l'encontre des souhaits du législateur, en obligeant les particuliers désireux de conserver l'avantage fiscal de leur PEA à transférer ces valeurs devenues " étrangères " vers un compte ordinaire, tout en compensant, par un versement en liquide immédiat sur le PEA, le montant correspondant à la valeur des titres ainsi déplacés.
Il apparaît donc nécessaire de rendre éligibles au plan d'épargne en actions les titres de sociétés étrangères issues d'une fusion avec une société d'origine française, dont les titres étaient préalablement éligibles au PEA.
Toutefois, pour éviter les effets pervers qui consisteraient à rendre éligibles au PEA des titres étrangers issus de fusions déséquilibrées, une condition est rendue nécessaire : la société française qui fait l'objet de cette fusion doit représenter, directement ou indirectement, au moins 25 % du nouvel ensemble.
C'est ce que prévoit l'article ler de la présente proposition de loi.
2. Favoriser une internationalisation " intelligente " des portefeuilles de PEA.
L'internationalisation du PEA semble être une condition nécessaire au développement de l'actionnariat populaire et au maintien de l'attrait de ce dispositif pour les particuliers. Sans cette adaptation aux comportements de placement des Français et à l'ouverture naturelle de notre économie, l'instrument PEA est assurément voué à l'extinction. En Grande-Bretagne, par exemple, le plan d'épargne en actions des sociétés cotées est ouvert aux sociétés britanniques, mais aussi européennes.
L'article 2 de la proposition de loi prévoit ainsi l'ouverture du PEA aux titres de sociétés non françaises dont le siège social est situé sur le territoire de l'Union européenne, dans la limite de 40% de la valeur des versements. Il est à noter que cette limite n'intègre pas les valeurs visées à l'article 1er. Cette solution a aussi le mérite d'aligner ce dispositif sur le régime réservé aux professionnels gérant les SICAV, autorisés à investir en actions étrangères, dans la limite de 40% de leurs actifs.
Toujours dans le but de renforcer l'attrait de ce dispositif, il est prévu de ne plus limiter les titres éligibles aux seuls titres admis aux négociations sur un marché réglementé français. L'article 3 préconise ainsi d'élargir le PEA aux titres inscrits à la cote du premier marché ou du second marché, ainsi qu'aux titres admis aux négociations sur le nouveau marché, mais aussi, dans la limite expresse définie dans l'article 2, aux titres négociés dans des bourses européennes réglementées. Il s'agit ici d'appliquer au PEA les évolutions récemment retenues pour les contrats dits DSK, suite à la mise en demeure de la Commission européenne (1).
(1) Instruction du 31 mai 1999, publiée dans le Bulletin officiel des impôts le 9 juin 1999.
Ces deux mesures ne pourront d'ailleurs que contribuer à la diversification des portefeuilles d'actions, et donc des risques, sans toutefois perdre de vue l'ambition première de favoriser l'investissement productif en direction des intérêts français.
3. Réévaluer le plafond des versements.
Ces modifications ont pour but de permettre un développement le plus large possible du PEA, en incitant chez tous les épargnants, même les plus modestes, à une épargne de long terme en actions, plus orientée vers le risque que sur la rente. Mais pour stimuler ce dispositif, et ainsi favoriser cette réorientation de l'épargne individuelle vers les investissements les plus productifs, il apparaît également nécessaire de réévaluer le plafond des versements. Cette mesure pourrait contribuer à un plus large engagement des capitaux détenus par les particuliers dans les entreprises françaises qui, aujourd'hui, ne trouvent trop souvent de solution de financement qu'auprès des capitaux et fonds d'investissement étrangers.
Limité, depuis l'origine du dispositif, à 600 000 francs pour chacun des titulaires du plan, ce plafond des versements est appelé à augmenter. L'article 4 prévoit ainsi de le faire passer à 900 000 francs.
Conjuguée à la baisse des taux d'intérêt rendant moins attractives les formules classiques d'épargne contractuelle, et au dynamisme des banques qui proposent de plus en plus de formules souples d'investissement boursier programmé, à destination des particuliers de tout âge et de toute condition, cette proposition de loi pourrait donner un souffle nouveau au PEA et à l'actionnariat populaire qu'il favorise.
Pour toutes ces raisons il vous est proposé, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir l'adopter.

PROPOSITION DE LOI
Article 1er

Le I de l'article 2 de la loi n° 92-666 du 16 juillet 1992 relative au plan d'épargne en actions est complété par un alinéa ainsi rédigé :
" 3. La condition relative à la nationalité de l'émetteur des titres éligibles au plan d'épargne en actions est levée lorsqu'il s'agit de titres nés de la fusion d'une ou plusieurs sociétés ayant leur siège social à l'étranger avec une société anonyme, en commandite par actions ou à responsabilité limitée dont les titres étaient précédemment éligibles au plan d'épargne en actions, à la condition expresse que cette dernière représente, directement ou indirectement, au moins 25 % du capital du nouvel ensemble. "

Article 2

Le dernier alinéa (2) du I de l'article 2 de la loi précitée est ainsi rédigé :
" 2. La part des titres visés aux a), b) et c) dont l'émetteur a son siège dans l'un des pays de l'Union européenne autre que la France, détenus directement ou via un OPCVM dans le cadre d'un plan d'épargne en actions ne peut être supérieure à 40 % des versements.
Les titres émis par des organismes ayant leur siège en France mais n'étant pas soumis à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun au taux normal ne sont pas éligibles au plan d'épargne en actions. Pour l'application de la présente loi, la condition relative au taux normal d'imposition ne s'applique toutefois pas aux entreprises nouvelles mentionnées à l'article 44 sexies du code général des impôts ainsi qu'aux sociétés visées aux 1° ter et 3° septies de l'article 208 du même code. "

Article 3

Le deuxième alinéa (a) du I de l'article 2 de la loi précitée est ainsi rédigé :
" a) Certificats coopératifs d'investissement, actions ou certificats d'investissement de sociétés lorsqu'ils sont admis aux négociations sur un marché réglementé français, qu'il s'agisse du premier marché, second marché ou nouveau marché, ou sur un marché réglementé européen ou lorsque, traités au marché hors-cote d'une bourse de valeurs française, ils figurent sur une liste publiée chaque année par arrêté. "

Article 4

I. - A la fin du dernier alinéa de l'article 1er de la loi précitée, la somme : " 600 000 F " est remplacée par la somme : " 900 000 F".
II. - A la fin du dernier alinéa du I de l'article 163 quinquies D du code général des impôts, la somme : " 600 000 F " est remplacée par la somme : " 900 000 F ".

Article 5

Les pertes de recettes induites par la présente proposition de loi sont compensées à due concurrence par un relèvement des droits perçus au titre des articles 575 et 575 A du code général des impôts.

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N° 1980.- Proposition de loi de M. Jean de Gaulle réformant le plan d'épargne en actions (PEA) pour développer l'actionnariat populaire (renvoyée à la commission des finances).


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