N° 3446
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 décembre 2001.
PROPOSITION DE LOI
relative à la réforme des dispositions concernant
la publicité foncière en Alsace et en Moselle.
(Renvoyée à la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée
par M. Armand JUNG,
Député.
Droit local.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
En Alsace-Moselle, le service public de la publicité foncière est assuré depuis plus d'un siècle par les bureaux fonciers des tribunaux d'instance, à la tête desquels se trouvent placés des juges du Livre foncier. Ces bureaux fonciers tiennent le Livre foncier, qui se compose de l'ensemble des registres de publicité des droits réels immobiliers relatifs à une circonscription foncière déterminée.
Les deux finalités du système local de publicité foncière consistent à garantir la sécurité juridique et à informer les tiers. Pour ce qui est de la sécurité, le régime local règle les conflits de droits réels immobiliers susceptibles de voir le jour par l'inopposabilité du droit non publié ou inscrit frauduleusement, et attribue une présomption simple d'exactitude aux inscriptions figurant au Livre foncier. En ce qui concerne l'information, le Livre foncier offre un tableau synoptique de la propriété et des charges la grevant dont la consultation est ouverte à toute personne faisant valoir un intérêt légitime.
Ces aspects qualitatifs contribuent indiscutablement à promouvoir la transparence de l'information foncière, favorisent la rapidité de conclusion des opérations immobilières, compte tenu du temps gagné par l'existence d'une consultation directe du Livre foncier, et dynamisent le marché hypothécaire.
En ce début du xxie siècle, deux défis sont pourtant lancés au droit local de la publicité foncière.
Le premier, et non des moindres, consiste à adapter les textes aux contraintes liées à l'informatisation du Livre foncier. L'objectif de cette informatisation est de faire entrer le Livre foncier dans la société de l'information en rendant ses informations accessibles par Internet, tout en modernisant son exploitation et préservant la protection due à la vie privée, à l'instar des systèmes comparables de publicité foncière existant en Allemagne, en Suisse ou en Autriche qui ont été informatisés il y a quelques années. De cette manière, le Livre foncier demeurera à même de répondre aux exigences du marché immobilier et hypothécaire européen.
Le second est celui de l'actualisation des sources légales, à savoir les articles 36 à 65 formant le chapitre III intitulé « Droit sur les immeubles - Livre foncier » du titre II de la loi civile d'introduction du 1er juin 1924. En effet, les règles locales, datant pour l'essentiel des années vingt, ont subi l'outrage du temps. La qualité des textes s'est sensiblement amoindrie en raison de l'évolution du droit général, qui s'est intensifiée après 1945. Par ailleurs, des difficultés d'articulation entre le droit local et le droit général ont vu le jour, notamment avec la multiplication des opérations emportant dissociation entre la propriété du sol et la propriété des constructions.
Pour relever ces défis, un groupement d'intérêt public pour l'informatisation du Livre foncier d'Alsace-Moselle (GILFAM) a été créé en 1994. Ce groupement se compose de l'Etat, des trois conseils généraux, de la région Alsace, de l'Institut du droit local (IDL) et du conseil interrégional des notaires.
Fort de cette avancée, un groupe de travail associant les juristes du GILFAM, de l'IDL, du ministère de la Justice et du notariat a élaboré une série de propositions de textes, qui a été approuvée, dans son orientation générale, par la commission d'harmonisation du droit privé. Pour l'essentiel, les textes proposés consistent à élargir le domaine de la publicité foncière, à repenser le régime de l'accès au Livre foncier, à instituer une faculté pour le juge du Livre foncier de pouvoir constater l'acquisition d'un droit par le jeu de la prescription acquisitive, à normaliser les requêtes en inscription et enfin à créer un établissement public chargé d'assurer l'exploitation du Livre foncier informatisé.
I. - L'ÉLARGISSEMENT DU DOMAINE
DE LA PUBLICITÉ
Dans la conception de la publicité foncière retenue par la loi civile du 1er juin 1924, la publicité au Livre foncier est exclusivement imposée à fin d'opposabilité aux tiers. Le Livre foncier est alors envisagé en tant qu'institution civile tranchant les conflits de droits réels immobiliers. L'innovation majeure de la loi d'harmonisation n° 90-1248 du 29 décembre 1990 a été la création d'une publicité informative des jugements rendus en matière de procédure collective. Le jalon est depuis lors posé pour élargir le domaine de la publicité obligatoire à fin d'information des tiers. La proposition de loi contribue à cette extension en prescrivant l'inscription au Livre foncier des limitations administratives au droit de propriété et les dérogations à ces limitations. Avec cette avancée, il y aura une identité des niveaux d'information en droit général et de droit local.
II. - L'ACCÈS AU LIVRE FONCIER INFORMATISÉ
Actuellement, l'accès au Livre foncier est ouvert à toute personne faisant valoir un intérêt légitime, certains professionnels (notaires et avocats) et personnes publiques en étant cependant dispensés. Afin d'intégrer les impératifs tenant au respect de la vie privée et les modalités de consultation électronique, la proposition de loi institue un nouveau régime de consultation. La distinction traditionnelle entre les collectivités publiques et certaines catégories de professionnels, et les autres personnes est conservée. Au demeurant, plusieurs précisions sont apportées en ce qui concerne les collectivités publiques afin de tenir compte de la décentralisation et de l'émergence de la coopération intercommunale. Par ailleurs, l'énumération des officiers ministériels est enrichie par l'ajout des huissiers de justice, appelés fréquemment à accomplir des actes portant sur des biens immobiliers.
Ceci étant acquis, une nouvelle distinction est établie entre, d'une part, les informations essentielles englobant celles relatives à l'identité du propriétaire et à l'énoncé des droits ou charges dont il est titulaire et, d'autre part, les autres informations, telles que le régime matrimonial ou le montant du prêt garanti. Cette discrimination se justifie par la protection de la vie privée dont les atteintes sont sanctionnées par l'article 9 du code civil et au respect de laquelle veille la Commission nationale informatique et liberté dans la mesure où les informations sont collectées sur des fichiers informatisés.
La distinction entre les informations essentielles et celles touchant à la vie privée est la seule qui est de nature à permettre au Livre foncier de conserver son atout majeur de registre public accessible à tous les usagers désireux d'obtenir des informations foncières. C'est notamment pour cette raison que la proposition de loi prévoit que les professionnels qu'elle désigne disposent d'un accès, dans l'exercice de leur compétence, à l'ensemble des données de la publicité foncière. Par ailleurs, le titulaire du droit, ainsi que toute personne dûment autorisée, se voient reconnaître l'accès à l'ensemble des informations sur un bien.
III. - L'ADMISSION A LA PUBLICITÉ FONCIÈRE DES DROITS ACQUIS PAR PRESCRIPTION TRENTENAIRE
Afin d'assurer le caractère complet de la publicité foncière, la proposition de loi attribue au juge du Livre foncier le pouvoir de faire constater, dans le cadre de la matière gracieuse, l'acquisition d'un droit par prescription trentenaire, tel le droit de propriété immobilière. Cette avancée est de nature à renforcer l'exactitude du Livre foncier après l'écoulement d'un délai de trente ans au sujet d'immeubles dont le propriétaire ne peut plus être atteint ou identifié.
L'instauration de cette prérogative au profit du juge du Livre foncier sous la forme d'une dérogation à la règle de l'effet relatif de la publicité est cependant bornée par au moins deux limites. D'une part, ce magistrat ne fait qu'autoriser l'inscription du bien au nom du possesseur sur le fondement des éléments de preuve rapportés par ce dernier. D'autre part, si la prescription vient à être contestée, seul le juge du fond est compétent pour déterminer si le possesseur a pu ou non acquérir la propriété par usucapion.
IV. - LA NORMALISATION DES REQUÊTES
L'informatisation du Livre foncier implique une normalisation du traitement des requêtes en inscription afin de simplifier les tâches au juge du Livre foncier et de garantir l'exactitude des informations. Aussi, la proposition de loi pose-t-elle le principe d'une requête normalisée obligatoire pour faciliter la saisine du juge du Livre foncier et accélérer l'examen des requêtes dans la perspective d'une dématérialisation des actes.
V. - LA CRÉATION D'UN ÉTABLISSEMENT PUBLIC
Dans la perspective d'assurer l'exploitation des systèmes destinés à supporter le Livre foncier informatisé, le projet de loi crée un établissement public d'Etat, dont le financement sera assuré notamment par la redevance perçue lors de la consultation du Livre foncier informatisé.
Le conseil d'administration de l'établissement public comprendra pour moitié des représentants de l'Etat et pour moitié des représentants des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, de la région Alsace, de l'Institut du droit local et du conseil interrégional des notaires.
L'adoption de la présente proposition de loi sera de nature à pérenniser les atouts du Livre foncier afin d'en faire un instrument de publicité à la pointe du progrès, dans un contexte européen marqué par l'émergence et le développement des nouvelles technologies de communication.
PROPOSITION DE LOI
Chapitre Ier
Dispositions modifiant le chapitre III du titre II de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle
Article 1er
L'article 36 de la loi du 1er juin 1924 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 36. - Dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle, la publicité foncière est régie par le présent chapitre. »
Article 2
Après l'article 36 de la loi du 1er juin 1924 précitée, sont insérés deux articles ainsi rédigés :
« Art. 36-1. - I. - Les droits sur les immeubles, les privilèges et les hypothèques sont ceux prévus par la législation civile française, ainsi que les prestations foncières des articles 1105, alinéa 1er, 1107 et 1108 du code civil local, de l'article 75 de la loi d'exécution du même code et l'hypothèque d'exécution forcée de l'article 866 du code local de procédure civile.
« Les règles concernant l'organisation, la constitution, la transmission et l'extinction des droits réels immobiliers et autres droits et actes soumis à publicité sont celles de la législation civile française, sauf les modifications ci-après.
« II. - Les servitudes foncières constituées avant le 1er janvier 1900 doivent être inscrites au livre foncier, à peine d'extinction, dans un délai de cinq ans à compter de la promulgation de la loi n° 000000 du 000000000. Les modalités d'application du présent alinéa sont fixées par un décret. »
« Art. 36-2. - Le Livre foncier est constitué des registres destinés à la publicité des droits sur les immeubles.
« Le Livre foncier désigne le livre foncier définitif, le livre foncier provisoire et le livre foncier de propriété.
« Le Livre foncier peut être tenu sous forme électronique dans les conditions fixées par l'article 1316-1 du code civil.
« Le Livre foncier est tenu sous l'autorité du juge du Livre foncier. »
Article 3
L'article 37 de la loi du 1er juin 1924 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 37. - I. - La consultation au service du Livre foncier ou à distance des données essentielles est libre, laquelle porte sur les nom et prénoms du titulaire de droits, sa dénomination s'il s'agit d'une personne morale, l'identification cadastrale de l'immeuble, ainsi que la nature des droits, des servitudes, des sûretés et des charges relatifs à celui-ci.
« II. - Les services administratifs de l'Etat et les collectivités territoriales et leurs établissements publics de coopération pour l'exercice de leurs compétences, les notaires, les avocats, les huissiers de justice, dans l'exercice d'un mandat légal, ont accès sur place ou à distance à l'ensemble des données de publicité foncière détenues par un bureau foncier. En outre, toute personne peut accéder sur place ou à distance à l'ensemble des données relatives à un bien, en justifiant d'une autorisation du titulaire du droit de propriété prévu à l'article 543 du code civil, d'un titre exécutoire ou d'une autorisation judiciaire.
« III. - L'inscription d'un droit au Livre foncier doit être portée à la connaissance du titulaire du droit ou des droits concernés avec l'indication de son droit d'accès et de rectification.
« Toute personne peut obtenir communication des informations concernant ses biens et ses droits et, sous réserve des droits des tiers, exiger la rectification, la modification ou la suppression d'une information inexacte, incomplète ou périmée.
« IV. - La consultation et la communication des données détenues par le service du Livre foncier, à l'exclusion des données mentionnées au I du présent article, peuvent donner lieu au versement d'une redevance dans des conditions fixées par décret.
« V. - Un décret détermine les conditions d'application du présent article. »
Article 4
L'article 38 de la loi du 1er juin 1924 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 38. - Sont inscrits au Livre foncier, aux fins d'opposabilité aux tiers, les droits suivants :
« a) la propriété immobilière, quel que soit son mode d'acquisition ;
« b) la superficie, l'emphytéose et tout autre droit réel conféré par un bail, l'usufruit établi par la volonté de l'homme, l'usage, l'habitation, les servitudes foncières établies par le fait de l'homme, l'antichrèse, le droit réel résultant d'un titre d'occupation du domaine public de l'Etat ou d'un établissement public de l'Etat délivré en application des articles L. 34-1 à L. 34-9 du code du domaine de l'Etat et de l'article 3 de la loi n° 94-631 du 25 juillet 1994 complétant le code du domaine de l'Etat et relative à la constitution de droits réels sur le domaine public et les prestations foncières ;
« c) les privilèges et les hypothèques ;
« d) le droit du locataire et du fermier en cas de bail d'une durée de plus de douze années ;
« e) le paiement anticipé ou la cession d'une somme équivalant à trois années de loyers ou de fermages non échus ;
« f) les restrictions au droit de disposer insérées dans un acte d'aliénation ou découlant de tous autres actes, tels que promesses de vente, legs ou donations sous conditions ou avec charge de restitution prévue par les articles 1048 et 1049 du code civil, droit de retour conventionnel prévu par les articles 951 et 952 du code civil, droit de réméré, ainsi que celles résultant de la saisie immobilière ou de toutes autres décisions judiciaires ;
« g) tout droit à la résolution d'un contrat synallagmatique ;
« h) le droit à la révocation d'une donation ;
« i) le droit au rapport en nature d'une donation prévue par les articles 859 et 865 du code civil ;
« j) les droits résultant des actes et décisions constatant ou prononçant la résolution, la révocation, l'annulation ou la rescision d'une convention ou d'une disposition à cause de mort ;
« k) toute servitude dont la publicité foncière est prévue par la loi à peine d'inopposabilité. »
Article 5
L'article 38-1 de la loi du 1er juin 1924 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 38-1. - Dès le dépôt de la requête en inscription et sous réserve de leur inscription, les droits et restrictions visés à l'article 38, ainsi que la prénotation prévue par l'article 39, sont opposables aux tiers qui ont des droits sur l'immeuble et qui les ont fait inscrire régulièrement.
« L'opposabilité des donations et restitutions demeure régie par les articles 941 et 1070 du code civil.
« Les baux qui n'ont pas été inscrits ne peuvent être opposés aux tiers pour une durée supérieure à douze années. Les quittances ou cessions anticipées de loyers ou fermages non inscrits ne peuvent être opposées pour une somme supérieure à trois années. »
Article 6
Après l'article 38-1 de la loi du 1er janvier 1924 précitée, sont insérés deux articles ainsi rédigés :
« Art. 38-2. - Sont inscrits au Livre foncier pour l'information des usagers, à la diligence de l'administration ou des personnes tenues d'y procéder :
« 1° Les limitations administratives au droit de propriété et les dérogations à ces limitations ;
« 2° Les jugements de redressement et de liquidation judiciaires.
« Art. 38-3. - Sont inscrites au Livre foncier, à peine d'irrecevabilité, les demandes en justice tendant à obtenir la résolution, la révocation, l'annulation ou la rescision d'une convention ou d'une disposition à cause de mort. »
Article 7
Les articles 39 à 44 de la loi du 1er janvier 1924 précitée sont ainsi rédigés :
« Art. 39. - Une prénotation peut être inscrite avec le consentement des intéressés ou en vertu d'une décision judiciaire dans le but d'assurer à l'un des droits énumérés à l'article 38 son rang d'inscription ou de garantir l'efficacité d'une rectification ultérieure.
« Art. 40. - L'inscription des droits a lieu sur requête.
« Les requêtes sont portées sur un registre spécial, au fur et à mesure de leur dépôt, dans des conditions fixées par décret.
« Ce registre peut être tenu sous forme électronique dans les conditions fixées par l'article 1316-1 du code civil.
« A peine de rejet, la requête est établie et présentée, par remise ou transmission, au service du Livre foncier compétent, dans des conditions fixées par décret.
« Art. 41. - L'inscription d'un droit mentionné aux articles 38 et 39 emporte présomption de l'existence de ce droit en la personne du titulaire.
« Art. 42. - Tout acte portant sur un droit susceptible d'être inscrit doit être, pour les besoins de l'inscription, dressé en la forme authentique, par un notaire, un tribunal ou une autorité administrative.
« Tout acte entre vifs, translatif ou déclaratif de propriété immobilière, tout acte entre vifs portant constitution ou transmission d'une servitude foncière souscrit sous une autre forme doit être suivi, à peine de caducité, d'un acte authentique ou, en cas de refus de l'une des parties, d'une demande en justice, dans les six mois qui suivent la passation de l'acte.
« Par dérocation au premier alinéa, tout acte entre vifs, portant constitution ou transmission des droits et restrictions au droit de disposer désignés à l'article 38 sous les lettres b, c, d, e, f, g, h, i, le consentement à l'inscription d'une prénotation visé à l'article 39, la mention de l'article 2152 du code civil en cas de cession peuvent être inscrits si les signatures des parties sont authentiquement légalisées.
« Art. 43. - Les notaires, les greffiers et les autorités administratives sont tenus de faire inscrire, sans délai et indépendamment de la volonté des parties, les droits résultant d'actes dressés devant eux et visés à l'article 38.
« Par dérogation, ils peuvent être dispensés par les parties de faire inscrire les droits visés aux alinéas g, h et i de l'article 38.
« Dans l'accomplissement des formalités de l'inscription, les notaires ont qualité pour représenter les parties contractantes et leurs ayants cause, sans pouvoir spécial de leur part. Ils sont tenus de prêter leur ministère lorsqu'ils en sont requis.
« Art. 44. - Le titulaire d'un des droits énoncés à l'article 38 ne peut être inscrit avant que le droit de son auteur immédiat n'ait été lui-même inscrit. Le titulaire d'un droit autre que la propriété ne peut être inscrit qu'après l'inscription du propriétaire.
« Par exception aux dispositions du premier alinéa, le juge du Livre foncier peut, à la requête de tout intéressé, inscrire le droit portant sur un immeuble acquis par prescription ou par accession, dans les conditions fixées par décret.
« Si la prescription est contestée, le juge du fond est seul compétent.
« L'héritier n'est dispensé d'inscrire son droit de propriété que si un acte translatif ou déclaratif de propriété est dressé dans les dix mois du décès. »
Article 8
Les articles 45 à 50 de la loi du 1er juin 1924 précitée sont ainsi rédigés :
« Art. 45. - La date et le rang de l'inscription sont déterminés par la mention du dépôt de la requête portée au registre des dépôts.
« Lorsque des requêtes relatives au même immeuble sont déposées simultanément, elles ont rang égal. En cas de parité de rang, les privilèges du vendeur et du copartageant priment les droits inscrits du chef du nouveau propriétaire.
« L'article 2134 du code civil ne s'applique pas.
« Art. 46. - Le juge du Livre foncier vérifie si le droit visé dans la requête est susceptible d'être inscrit, si l'acte répond à la forme prescrite, si l'auteur du droit est lui-même inscrit conformément aux dispositions de l'article 44 et, enfin, si les parties sont capables et dûment représentées. Il statue par voie d'ordonnance, selon les règles de la matière gracieuse.
« L'Etat est responsable des fautes commises par le juge du Livre foncier dans l'exercice de ses fonctions, sauf son recours contre ce dernier. L'action en responsabilité est portée devant les tribunaux civils et doit l'être, à peine de forclusion, dans le délai d'un an à partir de la découverte du dommage ; elle se prescrit par trente ans à partir du jour où la faute a été commise.
« Art. 47. - Les privilèges généraux sur les immeubles et le privilège du syndicat des copropriétaires sont dispensés de la formalité de l'inscription.
« Art. 47-1. - Pour les besoins de leur inscription, les privilèges et hypothèques portant sur des lots dépendant d'un immeuble soumis au statut de la copropriété sont réputés ne pas grever la quote-part de parties communes comprises dans ces lots.
« Néanmoins, les créanciers inscrits exercent leurs droits sur ladite quote-part prise dans sa consistance au moment de la mutation dont le prix forme l'objet de la distribution ; cette quote-part est tenue pour grever des mêmes sûretés que les parties privatives et de ces seules sûretés.
« Pour les besoins de leur publication, les ordonnances d'exécution forcée portant sur des lots dépendant d'un immeuble soumis au statut de la copropriété sont réputées ne pas porter sur la quote-part des parties communes comprises dans ces lots.
« Néanmoins, les créanciers saisissants exercent leur droit sur ladite quote-part, prise dans sa consistance au moment de la mutation dont le prix forme l'objet de la distribution.
« Art. 48. - L'inscription ne peut avoir lieu que pour une somme déterminée et sur des immeubles déterminés.
« Si la créance est indéterminée, le chiffre en est évalué par le créancier en principal et accessoires, sans préjudice de l'application des articles 2161 et suivants du code civil au profit du débiteur.
« Art. 49. - Le privilège des architectes, entrepreneurs, maçons et autres ouvriers prévu par le 4° de l'article 2103 du code civil prend rang à la date du dépôt de la requête en inscription du premier procès-verbal prévu par ce texte, pour la somme fixée dans ce procès-verbal.
« Art. 50. - Le privilège de séparation des patrimoines qui appartient aux créanciers et légataires peut être inscrit avant que l'héritier soit lui-même inscrit, mais ne peut plus l'être après l'inscription du transfert de la propriété à un tiers. »
Article 9
L'article 51 de la loi du 1er juin 1924 précitée est abrogé.
Article 10
Les articles 52 et 57 de la loi du 1er juin 1924 précitée sont ainsi rédigés :
« Art. 52. - L'inscription des privilèges et des hypothèques est régie par les dispositions de l'article 45 sans effet rétroactif.
« Art. 57. - Les tutelles et curatelles visées par l'article 4 de la loi n° 90-1248 du 29 décembre 1990 donnent lieu à inscription de l'hypothèque sur les immeubles du tuteur ou du curateur dans les conditions des articles 2143 et 2144 du code civil. »
Article 11
L'article 58 de la loi du 1er juin 1924 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 58. - Les immeubles du tuteur devant être grevés de l'hypothèque légale au profit des mineurs et majeurs en tutelles, ainsi que la somme pour laquelle cette hypothèque légale doit être inscrite, sont fixés, selon leur compétence, par le tribunal des tutelles ou par le conseil de famille, convoqué d'office ou sur requête du subrogé tuteur, d'un parent, allié ou créancier du mineur, ou du ministère public. Dans cette fixation, il doit être tenu compte des autres garanties fournies par le tuteur.
« Le tribunal des tutelles ou le conseil de famille peuvent décider de surseoir à l'inscription, s'il n'en résulte aucun préjudice pour le mineur ou le majeur en tutelle.
« Il doit être sursis à l'inscription, lorsque le tuteur fournit un nantissement jugé suffisant en espèces, rentes ou créances sur l'Etat, actions, obligations ou titres sur lesquels la Banque de France consent des avances.
« Ces dispositions sont applicables à l'hypothèque légale des personnes en tutelle prévue à l'article 2144 du code civil. »
Article 12
L'article 59 de la loi du 1er juin 1924 précitée est ainsi rédigé :
« Art. 59. - Tout notaire recevant un acte duquel il résulte que de nouveaux droits ou valeurs sont échus à un mineur ou à un majeur en tutelle doit donner avis sans délai au juge des tutelles compétent, au moyen d'un extrait de l'acte sur papier libre et sans frais ; cet envoi est mentionné en marge de la minute. »
Article 13
Les articles 60 et 61 de la loi du 1er juin 1924 sont abrogés.
Article 14
Les articles 62 à 65 de la loi du 1er juin 1924 sont ainsi rédigés :
« Art. 62. - Les dispositions de l'article 2123 du code civil sont applicables à l'hypothèque judiciaire. L'hypothèque est inscrite, pour la totalité de la créance, sur les divers immeubles du débiteur, à moins que le créancier ne le requière autrement.
« Art. 63. - Les inscriptions conservent l'hypothèque et le privilège dans les conditions prévues aux articles 2154 à 2154-3 du code civil.
« Art. 64. - La radiation d'une inscription a lieu soit en vertu d'une mainlevée consentie sous forme authentique par le titulaire du droit inscrit ou son ayant droit et sur sa requête, soit en vertu d'une décision judiciaire.
« La radiation d'une inscription concernant un droit, dont l'existence ou la durée est subordonnée à un événement à date incertaine survenant en la personne du titulaire de ce droit, a lieu également sur requête du propriétaire de l'immeuble grevé ou sur requête de tout autre intéressé, s'il est fait la preuve de cet événement par la production de pièces justificatives, notamment d'actes d'état civil. Le consentement du titulaire de l'inscription n'est pas nécessaire.
« Lorsque l'inscription comporte une date extrême d'effet, le juge du Livre foncier ordonne d'office sa radiation à cette date.
« Art. 64-1. - Les actes de mainlevée de l'hypothèque légale du Trésor sont dispensés de la forme authentique.
« Art. 65. - Les dispositions de l'article 38-2 relatives aux mentions informatives, de l'article 40 relatif au caractère obligatoire de la forme des requêtes et de l'article 37 relatif à la consultation du Livre foncier s'appliquent à une date fixée par décret et au plus tard le 1er janvier 2006. »
Chapitre II
Dispositions relatives à l'établissement public d'exploitation du Livre foncier informatisé
Article 15
Il est créé un établissement public de l'Etat, qui est chargé :
1° D'assurer ou de faire assurer l'exploitation et le maintien en condition opérationnelle des systèmes destinés à supporter le Livre foncier informatisé ;
2° D'assurer le contrôle des opérations ci-dessus, notamment au regard des obligations de régularité juridique et de sécurité.
Article 16
L'établissement est administré par un conseil d'administration et dirigé par un directeur général. Le conseil d'administration comprend, outre son président, pour moitié des représentants de l'Etat et pour moitié des représentants des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, de la région Alsace, de l'Institut du droit local et du conseil interrégional des notaires.
Le président du conseil d'administration et le directeur général sont nommés par décret.
Article 17
Le financement de l'établissement public est assuré notamment :
1° Par la redevance prévue à l'article 37 de la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ;
2° Par l'Etat.
Article 18
Les emplois permanents de l'établissement public sont pourvus par des agents dont le statut est régi par le décret en Conseil d'Etat, pris en application de l'article 7 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat. Les contrats des personnels du groupement créé en application de la loi n° 94-342 du 29 avril 1994 sont transférés à l'établissement public.
Article 19
Les charges qui incomberaient à l'Etat sont compensées, à due concurrence, par une augmentation des tarifs visés aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.
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N°3446-Proposition de loi de M.Jung relative à la réforme des dispositions concernant la publicité foncière en Alsace et en Moselle.(commission des lois)
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