N° 3448
ASSEMBLÉE NATIONALE
CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958
ONZIÈME LÉGISLATURE
Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 5 décembre 2001.
PROPOSITION DE LOI
tendant à la création d'un régime de retraite complémentaire obligatoire et rénovant le régime de retraite de base pour les non-salariés agricoles.
(Renvoyée à la commission des affaires culturelles, familiales et sociales, à défaut de constitution d'une commission spéciale dans les délais prévus par les articles 30 et 31 du Règlement.)
présentée
par M. Jacques DESALLANGRE
Député.
Retraites : Régime agricole.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Les agriculteurs ont, depuis la Seconde Guerre mondiale, joué un rôle déterminant dans la reconstruction et le développement de notre pays. La nation leur a, au sortir de la guerre, confié pour mission de nourrir la totalité de la population et d'assurer la sécurité d'approvisionnement alimentaire. Mais grâce à leurs efforts, ils sont allés bien au-delà de cette mission première et ont fait de la France le deuxième exportateur mondial de produits agricoles.
Les exploitants agricoles participent donc aujourd'hui pleinement à la puissance économique de notre pays et au solde positif de la balance commerciale. Mais les fonctions qu'ils remplissent pour notre société ne se cantonnent pas à la seule production; ils assurent aussi la préservation de nos campagnes et participent activement à l'aménagement du territoire en luttant contre la désertification de certaines régions.
Ils ont par ailleurs fourni au pays, par le nombre de leurs enfants, la main-d'_uvre nécessaire à l'essor des secteurs secondaires et tertiaires de notre économie. Leur contribution indirecte au développement de l'industrie et des services ne doit donc pas être négligée car elle fut par ailleurs génératrice d'une chute du nombre d'exploitants. Cette perte de main-d'_uvre au sein des activités agricoles a provoqué le déséquilibre démographique pour partie responsable des difficultés de l'assurance vieillesse agricole.
Mais, malgré le déséquilibre du ratio actif/retraité, rien ne saurait justifier le caractère dérisoire, voire indigne, de certaines pensions. Nous devons collectivement aux agriculteurs la reconnaissance pour leurs efforts et le travail accompli. C'est un droit pour eux, ce doit être un devoir moral pour la société française dans son ensemble.
C'est pourquoi les associations revendiquent toujours une revalorisation du montant minimum des retraites au niveau de 75% du SMIC, comme cela leur a été promis.
En revanche, ce n'est ni le RMI, ni les allocations du FNS, ni une quelconque prestation de nature sociale que souhaitent les retraités agricoles.
C'est davantage une reconnaissance morale de leur contribution durant plusieurs décennies à la reconstruction: puis à la bonne marche de la nation, qu'ils attendent. C'est un véritable droit qu'ils veulent voir reconnu, comme pour les autres catégories de Français.
Seule une véritable «retraite», perçue au même titre que tous les autres citoyens qui ont travaillé, effacerait leur sentiment d'injustice. Mais celle-ci doit être en rapport avec celle des autres catégories de citoyens, ce qui est toujours loin d'être le cas.
A titre indicatif, la retraite moyenne des différentes catégories sociales s'établissait en 1997 comme suit :
- Exploitants agricoles : 2380 F; l'épouse : 1450 F.
- Artisans et commerçants : 3366 F.
- Salariés agricoles : 4162 F.
- Moyenne des retraites : 7600 F.
- Régime général : 8469 F.
- Autres régimes : 8789 F.
- Fonctionnaires : 11230 F.
Le contentieux était à l'époque très chargé entre les retraités agricoles et les pouvoirs publics. Deux fois déjà, ils avaient été gravement déçus par des promesses non tenues, qu'elles viennent des candidats de gauche (M. François Mitterrand en 1981) ou de droite (M. Jacques Chirac en 1995).
Ces promesses étaient pourtant raisonnables. Mais, jusqu'en 1997, ne furent arrêtées que des micromesures sans grande incidence financière. L'étroitesse des mesures proposées a motivé l'accusation de démagogique que ces promesses ont suscité.
Dans un souci de justice sociale, la proposition de loi n° 404, mise en distribution le 14 novembre 1997 avec comme premiers signataires Michel Suchod, Michel Crépeau, Georges Sarre, Jacques Desallangre, Guy Hascoët et Marie-Hélène Aubert, avait posé les problèmes et proposait de relever à 55% du SMIC les retraites agricoles les plus faibles.
Par une action inlassable des députés auprès du gouvernement depuis 1997, nous avons obtenu des revalorisations substantielles des minima pour les chefs d'exploitation mais aussi les conjoints et aides familiaux. Malgré cette remise à niveau, les pensions agricoles restent en deçà de la juste reconnaissance que nous devons aux agriculteurs.
Nous vous proposons en conséquence d'adopter une loi assurant à tous une pension supérieure à 75% du SMIC, comme le revendique légitimement les retraités et leurs associations, grâce à la création d'une retraite complémentaire obligatoire par répartition.
Tous doivent pouvoir bénéficier de cette réforme qu'ils soient actif ou retraité, chef d'exploitation, conjoint ou aide familial. Car tous ont fourni les mêmes efforts.
Nous souhaitons par ailleurs poursuivre cet objectif d'égalité en améliorant certaines dispositions du droit discriminatoire des retraites agricoles. Ainsi, l'article 5 de notre projet permet d'aligner le régime des minorations pour les carrières incomplètes sur celui applicable aux salariés du régime général. Dans cette même perspective égalitaire, l'article 6 crée un minimum forfaitaire pour la majoration attribuée au titre de l'éducation des enfants. Ainsi, les agriculteurs ne se verront plus doublement pénalisés par la modicité de leurs pensions. Enfin, l'article 7 institue la mensualisation des pensions agricoles qui sont encore aujourd'hui payées trimestriellement alors que les artisans en 1999 et les commerçants en 2000 ont obtenu le versement mensuel.
Les agriculteurs ont depuis plus de cinquante ans accompli les missions qui leur furent confiées et leurs devoirs avec zèle ; le principe républicain impose que l'égalité des droits leur soit reconnue.
I. - FONDATION ET MUTATIONS
DU RÉGIME DE RETRAITES AGRICOLES
C'est en 1952 qu'apparut l'esquisse de l'assurance vieillesse agricole assurant une prestation uniforme et limitée dont l'objectif était d'éviter le prélèvement sur les revenus agricoles. Ce dispositif fut amélioré et pérennisé par la loi du 5 janvier 1955 qui instaura un véritable régime de retraite des exploitants agricoles.
Mais cette réforme laissa subsister une forte disparité avec le régime général. Cette disparité alors justifiée par l'absence de cotisation préalable ne fut que très imparfaitement comblée. Certaines inégalités se sont même accrues. L'objectif affirmé dès les années 80 fut l'égalité de traitement avec les salariés du régime général grâce à des revalorisations successives, notamment des plus faibles retraites.
Mais, malgré les cinquante années qui nous séparent de la création du régime, la parité n'est toujours pas acquise. Le régime des retraites agricoles reste dérogatoire et défavorable aux agriculteurs, car les revalorisations successives n'ont pas pour autant permis de repenser et rénover au fond ce régime.
Les mesures intervenues depuis 1997 font une large place aux revalorisations des retraites les plus faibles mais réforment aussi le régime en créant le statut de conjoint collaborateur. Le plan pluriannuel (1997-2002) de revalorisation avait permis une hausse des minima de près de 30% pour les chefs d'exploitation et 79% pour les conjoints et aides familiaux afin de réduire cette disparité.
1997 Mesure 2001 Mesure 2002
Chef d'exploitation 33482 40742 43425
Veuves 30068 38196 43425
Conjoints 19292 32855 34476
Aides familiaux 19292 32855 34476
Le nombre de bénéficiaires des mesures de revalorisation est passé de 607000 en 1997 à 835000 en 2001. Cet élargissement a permis d'imprimer un mouvement de rattrapage pour tous mais avec un effort particulier en faveur des conjoints et aides familiaux.
Par ailleurs, la loi d'orientation agricole du 9 juillet 1999 réforma en profondeur la place des conjoints collaborateurs en leur donnant un réel statut avec l'ouverture d'un droit à retraite proportionnelle en contrepartie d'une cotisation à la charge du chef d'exploitation. A ce jour, plus de 80000 personnes ont opté pour ce statut.
II. - CRÉATION POUR TOUS LES NON-SALARIÉS AGRICOLES D'UN RÉGIME DE RETRAITE COMPLÉMENTAIRE OBLIGATOIRE
Malgré l'amélioration substantielle des petites retraites agricoles à l'issue du plan de revalorisation entrepris depuis 1997, le légitime objectif de 75% du SMIC réclamé par les retraités n'est pas atteint.
A partir de 2002 la pension de retraite pour une carrière complète ne pourra être inférieure au minimum vieillesse (43854 F pour les chefs d'exploitation; 34816 F pour les conjoints et aides familiaux).
Au-delà de ce plan pluriannuel de revalorisation et de la reconnaissance morale que leur doit la nation pour leur effort de reconstruction et leur participation à la bonne marche de notre économie, cette proposition de loi vise à instituer un régime de retraite complémentaire qui permette d'atteindre l'objectif de 75% du SMIC pour tous les pensionnés agricoles.
Ce régime complémentaire obligatoire et par répartition serait un nouveau pas vers l'égalité de traitement. Egalité à l'égard des autres professionnels indépendants qui bénéficient déjà d'un tel dispositif : professions libérales dès 1949 et professions artisanales en 1979.
Egalité entre les agriculteurs quel que soit leur revenu. En fixant dans la loi le minimum de 75% du SMIC pour tous, cela permettra même aux plus modestes d'accéder à une retraite digne de ce nom. Ce minimum n'empêchera nullement les agriculteurs plus aisés de cotiser en proportion et de bénéficier par conséquent d'une pension plus importante. Mais cette solidarité entre tous les agriculteurs ne pourra être acquise que par la mise en place d'un régime obligatoire par répartition. Seul le caractère obligatoire permet une réelle mutualisation du risque vieillesse. Seule la répartition avec fixation d'un minima favorise l'égalité où chacun participe en fonction de sa capacité contributive.
Notre proposition de loi vise également à parfaire l'égalité et la solidarité entre tous les agriculteurs quel que soit leur statut. Le mouvement que nous avons cherché à imprimer depuis 1997 vise à fixer des minima communs quel que soit le statut de chef d'exploitation, de conjoint ou d'aide familial. Il serait donc incompréhensible d'exclure de la réforme que nous proposons les conjoints et aides familiaux. Eux aussi concourent pleinement aux travaux agricoles. Ces conjoints (ce sont le plus souvent des femmes) et aides familiaux furent longtemps les oubliés de la reconnaissance et de la solidarité nationale. Les réformes depuis 1997 ont permis un rattrapage; il ne faudrait pas les laisser aujourd'hui sur le bord de la route. Ils doivent donc pouvoir se constituer une retraite complémentaire et bénéficier des minima. Il serait absurde de recréer des inégalités que nous avons justement cherché à estomper depuis 1997. A défaut de prétendre à la perfection, le dispositif que nous proposons intègre de plein droit les conjoints et aides familiaux dans le régime de retraite complémentaire. Les décrets d'application viendront préciser les modalités de mise en _uvre en fonction du statut de chacun.
Enfin, notre proposition assure l'égalité entre les générations. Les agriculteurs possèdent déjà depuis 1998 un mécanisme de retraite complémentaire mais non obligatoire et par capitalisation. Le régime dit COREVA n'apporte pas de réponse satisfaisante au regard de l'objectif de solidarité. Ses caractéristiques excluent de fait la majeure partie des agriculteurs, notamment les plus modestes mais aussi tous les actuels retraités qui n'auraient pas cotisé et ne bénéficieraient par conséquent d'aucun avantage.
A l'inverse, le régime complémentaire obligatoire permet d'intégrer les retraités d'aujourd'hui par la mutualisation entre agriculteurs mais aussi grâce à l'effort de la nation dans son ensemble. La contribution de la collectivité nationale sera indispensable car, d'une part, le régime agricole doit faire face à un lourd déséquilibre démographique et, d'autre part, la création de toutes pièces d'un nouveau régime impose une période de transition compensant l'absence de cotisation des anciens agriculteurs.
Tous les retraités doivent pouvoir prétendre à cette retraite complémentaire, même s'ils n'ont pu cotiser et si leur durée d'assurance dans une régime obligatoire ne leur permet pas de bénéficier d'une retraite à taux plein. Le minimum de 75% du SMIC leur sera bien évidemment applicable car la portée de cette mesure est générale. Néanmoins, un décret déterminera les conditions de proratisation en fonction de la durée d'activité, sachant que les différents coefficients de minoration ne sauraient vider la réforme de sa substance.
Cette réforme ambitieuse ne pourra atteindre ces objectifs que grâce à la participation financière de la collectivité. Cependant, le carcan de l'article 40 de la Constitution interdisant aux parlementaires de créer des dépenses nouvelles ne nous a pas permis d'intégrer dans le dispositif législatif l'indispensable contribution financière de l'Etat. Néanmoins, la discussion en séance de cette proposition de loi devrait permettre au gouvernement de proposer par amendement un financement public garantissant l'équilibre du régime ainsi créé. Cette participation financière de l'Etat figurerait au premier alinéa du futur article L. 732-58.
III. - VERS UNE PLUS GRANDE ÉGALITÉ DE TRAITEMENT DES RETRAITES AGRICOLES
La création d'un nouveau pilier de l'assurance vieillesse agricole ne doit pas nous exonérer de toutes autres réformes du régime de base. En effet, les améliorations susceptibles d'êtres apportées au régime actuel afin de parvenir à une plus grande égalité de traitement entre les retraités sont nombreuses. Cette proposition de loi ne prétend pas réformer la totalité de l'assurance vieillesse agricole mais souhaite humblement corriger certains des dispositifs qui se révèlent injustes dans leur application.
Dans cette perspective, l'article 5 de cette proposition de loi vise à réformer les coefficients de minoration pour carrière incomplète en calquant le nouveau dispositif sur celui applicable aux salariés du régime général. L'article 6 instaure un montant forfaitaire pour la majoration de pension attribuée aux retraités ayant élevé au moins trois enfants. Enfin, l'article 7 organise la mensualisation des pensions agricoles.
1. Application du droit commun des minorations pour les carrières incomplètes
Tous les salariés ayant effectué une carrière incomplète (inférieure à 37 annuités et demie) voient leur pension de retraite affectée d'un coefficient de minoration proportionnel aux nombres d'années manquantes. Il en est de même pour les ressortissants du régime des non-salariés agricoles.
Mais, alors que le régime général minore les pensions de 2,5 % par année, les retraités agricoles se voient amputés de coefficient hors de proportion :
- 15% les deux premières années;
- 10% les trois suivantes;
- 40% la sixième année.
Ces coefficients fixés par le décret 94-714 du 18 août 1994 furent déjà révisés en 1997 afin d'amoindrir leur caractère pénalisant. Mais ils engendrent toujours de lourdes et disproportionnées conséquences. Un agriculteur qui n'aurait accompli que 32,5 années de carrière verrait sa pension amputée de 60% pour les seules cinq années manquantes. De même, les exploitants agricoles (chef d'exploitation, conjoint ou aide familial) ayant effectué une carrière courte inférieure à 32,5 années se voient privés de ce droit à pension.
Dans la majorité des cas, les personnes disposant de carrières de moins de 32,5 années en agriculture ont exercé d'autres professions qui leur procurent une pension de retraite. Cependant, certaines personnes (conjoints, aides familiaux, préretraités) ont eu des carrières brèves exclusivement en agriculture, et n'entrent pas dans le champ des revalorisations.
Rappelons qu'une mesure d'intégration dans le champ des revalorisations pour 2000 permet d'appliquer aux personnes disposant de carrières exclusives en agriculture, situées entre 27,5 et 32,5 années, le même coefficient de minoration que pour 32,5 années. Elle a bénéficié à 36000 personnes veuves et conjointes monopensionnées. Mais elle ne répond pas pleinement à la disproportion des minorations.
Ces situations sont inacceptables au regard du travail fourni par ces exploitants agricoles et injustes au regard du principe d'égalité. Nous ne pouvons supporter que des personnes ayant travaillé la majeure partie de leur vie se voient privées des moyens de leur subsistance. La nation a un devoir moral d'assurer à tous les vieux travailleurs une retraite digne.
En conséquence, l'article 5 de cette proposition de loi propose d'assurer pleinement l'égalité de traitement entre les retraités agricoles et les pensionnés du régime général. Nous proposons de calquer les coefficients de minoration des retraites agricoles sur le droit commun du régime général.
Donc, pour chacune des années d'écart, le coefficient de minoration serait de 2,5%. Le décret d'application fixerait quant à lui la durée minimum de cotisation ouvrant droit à pension.
Cet article propose d'établir la parité entre les régimes de retraite afin d'assurer l'égalité des pensionnés.
2. Création d'un minimum forfaitaire pour la majoration attribuée au titre de l'éducation des enfants
Le code de la sécurité sociale prévoit que les pensions de retraite sont majorées de 10% pour tout assuré ayant élevé au moins trois enfants. Cette majoration se justifie par l'effort particulier consenti par ces familles et par la nécessité pour la nation de développer des mesures favorisant la natalité.
Mais le caractère purement proportionnel de cette bonification la rend inégalitaire car les familles ayant les revenus les plus modestes ne perçoivent qu'une très modique majoration alors qu'elles ont consenti aux mêmes efforts pour élever leurs enfants.
Ce caractère inégalitaire est particulièrement significatif pour les retraités agricoles qui doivent déjà se contenter des plus faibles pensions et à qui l'on ne propose donc que des majorations dérisoires. Si pour le régime général de base le montant de la majoration s'élève en moyenne à 720 F, il n'est que de 210 F pour une agricultrice. Cette injustice fut déjà relevée et dénoncée lors de débats au Parlement. Nous souhaitons que la loi corrige cet effet pervers de la pure proportionnalité en intégrant un minimum forfaitaire.
Ce forfait symboliserait la reconnaissance minimale que la nation doit à tout citoyen ayant participé à la politique familiale de notre pays. Cette réforme profiterait en premier lieu aux retraités agricoles mais aussi à tous les retraités ne bénéficiant que d'une faible pension.
3. Mensualisation des retraites agricoles
L'article 1119 de l'ancien code rural disposait que les allocations de retraites étaient versées trimestriellement. Or, la réforme du code rural, par l'ordonnance du 15 juin 2000, supprima cet article sans pour autant apporter de réponse législative à la périodicité du versement des pensions. Il est donc souhaitable de remédier à cette carence.
Cependant, il ne paraît plus opportun de retenir la périodicité trimestrielle car elle ne permet pas aux bénéficiaires de gérer sereinement leur budget. Une périodicité mensuelle serait plus appropriée et répondrait à la légitime et récurrente revendication de tous les retraités agricoles. Pourquoi les retraités agricoles ne pourraient-ils bénéficier des droits qui furent accordés en 1999 aux artisans et en 2000 aux commerçants.
Le coût de cette mesure ne serait qu'un coût de trésorerie la première année, correspondant à l'avancement de deux mensualités. Le mode de gestion financière envisagé par la MSA permettrait de limiter ce coût aux seuls frais financiers.
Dans le cadre de la discussion budgétaire pour 2002, les parlementaires ont obtenu par amendement que le gouvernement dépose un rapport complet et chiffré sur la mensualisation des pensions agricoles.
Les études auprès des associations d'agriculteurs et de la MSA ayant été menées, l'article 7 de la proposition de loi vise à instituer ce versement mensuel. Le gouvernement sera libre de déterminer par décret le mécanisme financier qu'il souhaite mettre en _uvre afin d'y parvenir (l'élaboration du rapport au parlement devrait contribuer à l'éclairer).
Améliorer le sort de certains de nos compatriotes injustement défavorisés, d'une catégorie sociale qui a tant compté pour la nation, tel est l'objet, Mesdames, Messieurs, de la proposition de loi que nous vous demandons de bien vouloir adopter.
PROPOSITION DE LOI
TITRE Ier
CRÉATION D'UN RÉGIME DE RETRAITE COMPLÉMENTAIRE PAR RÉPARTITION
POUR LES NON-SALARIÉS AGRICOLES
Article 1er
Il est institué un régime d'assurance vieillesse complémentaire obligatoire par répartition au bénéfice des chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole, des conjoints et des aides familiaux visés à l'article L. 732-56 du code rural, dans les conditions définies aux articles L. 732-57 à L. 732-60 et L. 762-36 à L. 762-39 du même code.
Article 2
La section 3 du chapitre II du titre III du livre VII du code rural est complétée par une sous-section 3 : «Assurance vieillesse complémentaire obligatoire» et cinq articles ainsi rédigés :
«Art. L. 732-56. - I. - Sont obligatoirement affiliées au régime de l'assurance vieillesse complémentaire obligatoire les personnes occupées au 1er janvier 2002, ou postérieurement à cette date, en qualité de chef d'exploitation ou d'entreprise agricole, de conjoint ou d'aide familial, aux activités ou dans les exploitations, entreprises ou établissements visés aux 1° à 5° de l'article L. 722-1.
«Sont affiliés à titre obligatoire à compter du 1er janvier 2002 et durant toute la période de perception de l'allocation de préretraite les titulaires de cette allocation mentionnés au deuxième alinéa du II de l'article 9 de la loi n° 91-1407 du 31 décembre 1991 modifiant et complétant les dispositions du code rural et de la loi n° 90-85 du 23 janvier 1990 relative aux cotisations sociales agricoles et créant un régime de préretraite agricole.
«Sont affiliés à titre obligatoire les personnes qui, au 1er janvier 2002 ou postérieurement, ont la qualité de chef d'exploitation ou d'entreprise agricole, de conjoint ou d'aide familial.
«Sont affiliés à titre obligatoire à compter du 1er janvier 2002 les titulaires de pensions d'invalidité visés aux 6» de l'article L. 722-10 et 1° de l'article 752-4 du présent code.
«II. - Bénéficient en outre de ce régime les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole, les conjoints et les aides familiaux dont la retraite servie à titre personnel a pris effet :
«1° Avant le 1er janvier 1997 et qui justifient de périodes minimum d'activité non salariée agricole et d'assurance en qualité de chef d'exploitation ou d'entreprise agricole, de conjoint ou d'aide familial accomplies à titre exclusif ou principal. Un décret précise les modalités suivant lesquelles les périodes d'assurance et les minima précédemment mentionnés sont déterminés;
«2° Entre le 1er janvier 1997 et le 1er janvier 2002 et qui justifient, dans un ou plusieurs autres régimes obligatoires, d'une durée d'assurance ou de périodes reconnues équivalentes et de périodes minimum d'assurance effectuées en qualité de chef d'exploitation ou d'entreprise agricole, de conjoint ou d'aide familial à titre exclusif ou principal. Un décret détermine les modalités de fixation des minima précédemment mentionnés.
III. - Les personnes dont la retraite servie à titre personnel prend effet postérieurement au 31 décembre 2001 et qui remplissent les conditions précisées au II 2° bénéficient du présent régime pour leurs périodes accomplies comme chef d'exploitation ou d'entreprise agricole, de conjoint et d'aide familial, à titre exclusif ou principal avant le 1er janvier 2002.
«Art. L. 732-57. - La gestion du régime d'assurance vieillesse complémentaire obligatoire des professions non salariées agricoles est assurée par les caisses de mutualité sociale agricole.
Les opérations relatives au régime complémentaire obligatoire devront faire l'objet de comptes distincts de ceux du régime de base institué en application du chapitre II des titres II et III du présent livre du code rural, et de ceux des autres régimes gérés par les caisses de mutualité sociale agricole.
Les modalités de service des prestations dues aux affiliés du régime d'assurance vieillesse complémentaire obligatoire des professions non salariées agricoles sont fixées par décret.
«Art. L. 732-58. - Le régime d'assurance vieillesse complémentaire obligatoire est financé par le produit des cotisations dues par les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole, les conjoints et les aide familiaux au titre de ce régime dans des conditions fixées par décret.
«Les ressources du régime couvrent les charges de celui-ci telles qu'énumérées ci-après :
«- les prestations prévues à l'article L. 732-60;
«- les frais de gestion.
«Le taux de la cotisation et la valeur de service du point de retraite, fixés par les décrets cités aux articles L. 732-59 et L. 732-60, sont déterminés dans le respect de l'équilibre entre les ressources et les charges du régime.
«Art. L. 732-59. - Les personnes affiliées au présent régime bénéficient, à compter de la date d'effet de leur retraite mentionnée à l'article L. 732-24 et au plus tôt au 1er janvier 2002, d'une retraite exprimée en points de retraite complémentaire. La périodicité des versements est fixée par le décret mentionné à l'article L. 732-57.
«Le nombre annuel de points est déterminé selon des modalités fixées par décret, en fonction de l'assiette retenue pour le calcul des cotisations. Le même décret détermine le nombre annuel de points portés à la date du 1er janvier 2002 au compte des personnes visées au II de l'article L. 732-56, à la date d'effet de la retraite au compte des personnes visées au III de l'article L. 732-56, ainsi que le nombre maximum d'années susceptibles de donner lieu à attribution de points pour les personnes mentionnées aux II et III de l'article L. 732-56.
«Le montant annuel de la prestation du régime d'assurance vieillesse complémentaire obligatoire alloué au bénéficiaire est obtenu par le produit du nombre total de points de retraite porté au compte de l'intéressé par la valeur de service du point de retraite.
«Un décret fixe annuellement la valeur de service du point de retraite.
«Art. L. 732-60. - Le total des retraites forfaitaire, proportionnelle et complémentaires versées à un chef d'exploitation ou d'entreprise agricole, à un conjoint ou à un aide familial ne peut être inférieur à 75% du SMIC. Cette disposition s'applique également aux pensions déjà liquidées.
«Un décret détermine les modalités d'application de cet article.»
Article 3
Le chapitre II du titre VI du livre VII du code rural est complété par une section 6 «Assurance vieillesse complémentaire obligatoire» et quatre articles ainsi rédigés :
«Art. L. 762-36. - Les dispositions de la sous-section 3 de la section 3 du chapitre II du titre III du présent livre relatives à l'assurance vieillesse complémentaire obligatoire des personnes non salariées sont applicables aux chefs d'exploitation agricole, aux conjoints et aux aides familiaux des départements d'outre-mer dans les conditions et sous les réserves précisées à la présente section.
«Art. L. 762-37. - Les cotisations dues au titre de l'assurance vieillesse complémentaire obligatoire par les chefs d'exploitation agricole, les conjoints et les aides familiaux sont assises sur une assiette forfaitaire fixée par décret; un décret fixe le taux des cotisations.
«Art. L. 762-38. - Les modalités de gestion du régime d'assurance vieillesse complémentaire obligatoire des chefs d'exploitation agricole, des conjoints et des aides familiaux dans les départements de la Guadeloupe, de la Guyane, de la Martinique et de la Réunion sont fixées par décret.
«Art. L. 762-39. - Pour l'application de l'article L. 732-56, la référence à l'article L. 762-30 est substituée à la référence à l'article L. 732-25 et pour l'application de l'article L. 732-60, la référence à l'article L. 762-29 est substituée à la référence à l'article L. 732-24.»
«Art. L. 762-40. - Le total des retraites forfaitaire, proportionnelle et complémentaires versées à un chef d'exploitation ou d'entreprise agricole, à un conjoint ou à un aide familial ne peut être inférieur à 75% du SMIC. Cette disposition s'applique également aux pensions déjà liquidées.
«Un décret détermine les modalités d'application de cet article.»
Article 4
Les dispositions de l'article L. 724-7 du code rural sont applicables de plein droit au régime institué par la présente loi.
TITRE II
AMÉLIORATION DU RÉGIME
DE L'ASSURANCE VIEILLESSE AGRICOLE
Article 5
L'article L. 732-18 du code rural est complété par l'alinéa suivant : «Les pensions sont payables mensuellement à terme échu.»
Article 6
Après la première phrase de l'article L. 732-5 du code rural, insérer une phrase ainsi rédigée : «Pour chacune des années d'écart, entre, d'une part, trente-sept années et demie et, d'autre part, le nombre d'années d'activité non salariée agricole accomplies par l'intéressés, le coefficient de minoration à appliquer est de 2,5 %. »
Article 7
Le premier alinéa de l'article L. 351-12 du code de la sécurité sociale est complété par une phrase ainsi rédigée : «Cette majoration ne peut être inférieure à un minimum déterminé par décret.»
Article 8
Les pertes de recettes pour l'Etat résultant du fait des articles 72 et 154 bis du code général des impôts, de l'application des articles 1er, 2 et 3 sont compensés par un relèvement, à due concurrence, du taux de la tranche supérieure du barème de l'article 885 U du code général des impôts.
Article 9
La charge résultant, pour le budget de la sécurité sociale, de l'application des articles précédents est compensé, à due concurrence, par le produit d'une taxe au profit de ce budget. Cette taxe est assise sur les produits agricoles et alimentaires importés des pays n'appartenant pas à l'Union européenne.
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N°3448-Proposition de loi de M.Desallangre tendant à la création d'un régime de retraite complémentaire obligatoire et rénovant le régime de retraite de base pour les non-salariés agricoles.(commission des affaires culturelles)
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