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le 11 juin 1998

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N° 951

______

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 3 juin 1998.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DE LA PRODUCTION ET DES ÉCHANGES (1) SUR LE PROJET DE LOI (n° 873), relatif aux enquêtes techniques sur les accidents et les incidents dans l’aviation civile,

PAR M. JEAN-PIERRE BLAZY,

Député.

——

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Transports aériens.

La commission de la production et des échanges est composée de : M. André Lajoinie, président ; MM. Jean-Paul Charié, Jean-Pierre Defontaine, Pierre Ducout, Jean Proriol, vice-présidents ; MM. Léonce Deprez, Patrick Ollier, Daniel Paul, Patrick Rimbert, secrétaires ; MM. Jean-Pierre Abelin, Jean-Claude Abrioux, Stéphane Alaize, Damien Alary, André Angot, François Asensi, Henri d'Attilio, Jean-Marie Aubron, Pierre Aubry, Jean Auclair, Jean-Pierre Balduyck, Jacques Bascou, Mme Sylvia Bassot, MM. Christian Bataille, Jean Besson, Gilbert Biessy, Claude Billard, Claude Birraux, Jean-Pierre Blazy, Serge Blisko, Jean-Claude Bois, Daniel Boisserie, Franck Borotra, Christian Bourquin, Mme Danièle Bousquet, MM. François Brottes, Marcel Cabiddu, Alain Cacheux, Dominique Caillaud, André Capet, Jean-Paul Chanteguet, Jean Charroppin, Philippe Chaulet, Jean-Claude Chazal, Daniel Chevallier, Pierre Cohen, Alain Cousin, Yves Coussain, Jean-Michel Couve, Jean-Claude Daniel, Marc-Philippe Daubresse, Philippe Decaudin, Michel Delebarre, Eric Doligé, François Dosé, Jean-Pierre Dufau, Marc Dumoulin, Dominique Dupilet, Philippe Duron, Jean-Claude Etienne, Laurent Fabius, Alain Fabre-Pujol, Albert Facon, Alain Ferry, Jean-Jacques Filleul, Jacques Fleury, Nicolas Forissier, Roland Francisci, Claude Gaillard, Robert Galley, Claude Gatignol, André Godin, Alain Gouriou, Joël Goyheneix, Michel Grégoire, Gérard Grignon, Hubert Grimault, Lucien Guichon, Gérard Hamel, Patrick Herr, Claude Hoarau, Elie Hoarau, Robert Honde, Christian Jacob, Claude Jacquot, Mme Janine Jambu, MM. Aimé Kergueris, Thierry Lazaro, Patrick Lemasle, Jean-Claude Lemoine, Jacques Le Nay, Jean-Claude Lenoir, Arnaud Lepercq, Pierre Lequiller, René Leroux, Roger Lestas, Alain Le Vern, Félix Leyzour, Michel Liebgott, Lionnel Luca, Jean-Michel Marchand, Daniel Marcovitch, Alain Marleix, Daniel Marsin, Philippe Martin, Jacques Masdeu-Arus, Roger Meï, Roland Metzinger, Pierre Micaux, Yvon Montané, Gabriel Montcharmont, Bernard Nayral, Jean-Paul Nunzi, Joseph Parrenin, Paul Patriarche, François Patriat, Germinal Peiro, Jacques Pélissard, Jean-Claude Perez, Mmes Marie-Françoise Pérol-Dumont, Annette Peulvast-Bergeal, MM. Serge Poignant, Ladislas Poniatowski, Bernard Pons, Jacques Rebillard, Jean-Luc Reitzer, Gérard Revol, Mme Marie-Line Reynaud, M. Jean Rigaud, Mme Michèle Rivasi, MM. Jean Roatta, André Santini, Joël Sarlot, Georges Sarre, Mme Odile Saugues, MM. François Sauvadet, Bernard Schreiner, Jean-Claude Thomas, Léon Vachet, Daniel Vachez, François Vannson, Michel Vaxès, Michel Vergnier, Alain Veyret, Gérard Voisin, Roland Vuillaume.

INTRODUCTION 5

EXAMEN EN COMMISSION 11

I.– DISCUSSION GÉNÉRALE 11

II.– EXAMEN DES ARTICLES 13

Article premier : Enquêtes techniques relatives aux accidents ou incidents aériens 13

TITRE PREMIER – DISPOSITIONS GÉNÉRALES 13

Chapitre unique 13

Article L. 711-1 du code de l’aviation civile : Définition et conditions de l’enquête technique 13

Article L. 711-2 du code de l’aviation civile : Indépendance et permanence de l’organisme d’enquête 17

Article L. 711-3 du code de l’aviation civile : Agents habilités à l’enquête technique 20

TITRE II - L’ENQUÊTE TECHNIQUE 21

Chapitre premier – Pouvoirs des enquêteurs 21

Article L. 721-1 du code de l’aviation civile : Accès au lieu de l’accident 21

Article L. 721-2 du code de l’aviation civile : Accès aux enregistrements 22

Article L. 721-3 du code de l’aviation civile : Prélèvement aux fins d’examen et d’analyse au cours d’une enquête ou d’une information judiciaire 23

Article L. 721-4 du code de l’aviation civile : Prélèvements aux fins d’examen et d’analyse en dehors d’une enquête ou d’une information judiciaire 24

Article L. 721-5 du code de l’aviation civile : Droit de communication 25

Article L. 721-6 du code de l’aviation civile : Communication des résultats des examens médicaux effectués après l’événement 26

Chapitre II – Préservation des éléments de l’enquête 26

Article L. 722-1 du code de l’aviation civile : Préservation de l’état des lieux et des documents 26

Article L 722-2 du code de l’aviation civile : Immunités disciplinaires et administratives 28

Chapitre III :  Procédures – Procès-verbaux de constat 29

Article L. 723-1 du code de l’aviation civile : Procès-verbaux 29

TITRE III – DIFFUSION DES INFORMATIONS ET DES RAPPORTS D’ENQUÊTE 29

Chapitre unique 29

Article L. 731-1 du code de l’aviation civile : Secret professionnel 29

Article additionnel après l’article L. 731-1 du code de l’aviation civile : Publication en cours d’enquête de recommandations 31

Article L. 731-2 du code de l’aviation civile : Publication du rapport d’enquête technique 31

TITRE IV – DISPOSITIONS PÉNALES 32

Chapitre unique 32

Article L. 741-1 du code de l’aviation civile : Manquement à l’obligation de signaler un accident ou un incident 32

Article L. 741-2 du code de l’aviation civile : Entraves à l’enquête technique 33

Article L. 741-3 du code de l’aviation civile : Sanctions pénales applicables aux personnes morales 33

Article 2 : Décret en Conseil d’Etat 34

TABLEAU COMPARATIF 35

MESDAMES, MESSIEURS,

Au-delà de toutes les peurs enfouies en chacun, c’est certainement parce qu’il n’est pas rassurant de n’avoir que l’air pour tout support que le vol aérien inquiète les voyageurs.

Même s’il est un mode de transport sûr, la répercussion d’un accident d’avion sur l’opinion publique est toujours plus importante que celle d’un sinistre impliquant un moyen de transport terrestre. En même temps, c’est cette sensibilisation qui a conduit à renforcer la sécurité aérienne. C’est ainsi notamment que parallèlement à l’enquête judiciaire consécutive à un accident et visant à déterminer les responsabilités, une enquête technique est menée ayant pour objet d’analyser les causes de ces mêmes accidents, afin d’émettre des recommandations pour prévenir leur répétition.

Depuis le milieu des années 80, on observe globalement une stabilisation des paramètres représentatifs du “ taux de sécurité ” même si d’une année sur l’autre, certains d’entre eux évoluent. Un des indicateurs les plus fréquemment cités est le nombre de passagers tués dans le transport public régulier, rapporté au nombre de passagers kilomètres transportés (PKT) dans cette activité. Depuis le milieu des années 80, ce taux annuel est d’environ 0,05 mort par 100 millions de PKT, sa valeur oscillant entre 0,03 et 0,08. La valeur moyenne de ce taux sur la même période est de 0,026 pour le transport aérien régulier français.

Pour autant, la communauté aéronautique internationale ne se satisfait pas de cette situation, ne serait-ce que pour prévenir l’augmentation du nombre d’accidents ou de victimes du simple fait de l’augmentation de l’activité. En effet, des prévisions reprises par l’OACI font état d’une croissance annuelle soutenue, entre 5 et 8 % suivant les régions géographiques et le type d’activité, et ceci au-delà de l’horizon 2010. Ainsi, à taux d’accident constant, cette croissance du trafic risquerait mécaniquement d’entraîner une banalisation de la fréquence des catastrophes aériennes. Les voies de prévention empruntées sont nombreuses : amélioration de la circulation des enseignements dérivés des événements constatés et, de manière naturelle, renforcement du rôle joué par les enquêtes sur les accidents et les incidents, rationalisation des systèmes de retour d’expérience, amélioration du contrôle des compagnies aériennes par les administrations de tutelle nationales, mise en place par l’OACI d’un dispositif mondial de surveillance de la sécurité et de l’exercice de l’autorité de tutelle par les Etats contractants, intensification des efforts dans le domaine des facteurs humains pour passer du stade de la recherche à celui de la connaissance appliquée, mise en oeuvre de nouvelles technologies etc.

Les origines d’un accident aérien, notamment pour les transports publics, de ligne ou affrétés, qui se distinguent ainsi de l’aviation générale (avions privés ou aéro-clubs) sont souvent multiples. C’est pourquoi l’enquête technique porte à la fois sur l’appareil, ses composants et équipements, et sur le comportement du personnel navigant.

La pratique de l’enquête technique est constante en France depuis plus de 50 ans. Ces enquêtes portent autant sur les accidents aériens, qui sont définis comme tels dès lors qu’une personne est blessée grièvement, que sur les incidents graves (dans ce cas, il s’agit d’un événement, dont les circonstances indiquent qu’un accident a failli se produire, lié à l’utilisation d’un avion et qui compromet ou pourrait compromettre la sécurité de l’exploitation). L’analyse de tels incidents est parfois particulièrement instructive et utile à la prévention des accidents eux-mêmes.

Le système actuellement en vigueur organisant les enquêtes techniques n’a pas de base légale. Il est fondé sur l’article R 425-2 du code de l’aviation civile, qui dispose que “ le ministre chargé de l’aviation civile ou, s’il s’agit des essais et réceptions, le ministre des armées fait procéder à toutes investigations et enquêtes en vue de rechercher et de constater les causes des accidents ou incidents. ” La France se conforme ainsi aux normes et pratiques internationales recommandées, qu’elle a largement contribué à établir, définies dans l’annexe 13 à la convention relative à l’aviation civile internationale, dite Convention de Chicago, du 7 décembre 1944. Cette annexe, maintes fois amendée, a été adoptée à l’origine par le Conseil de l’OACI le 11 avril 1951.

En cas d’accident ou d’incident grave affectant un aéronef civil sur le territoire français, l’enquête technique est effectuée par le Bureau Enquêtes-Accidents (BEA), organisme directement rattaché au ministre chargé de l’aviation civile, en association le cas échéant avec les représentants de l’État d’immatriculation ou de l’État de construction de l’aéronef. Pour certains accidents, une commission d’enquête peut être instituée. La dernière en date est la commission d’enquête sur l’accident du Mont Sainte Odile, du 20 janvier 1992.

Inversement, lorsque l’événement se produit à l’étranger et qu’il implique une compagnie aérienne française ou un aéronef pour lequel la France est responsable de la navigabilité, ce qui est notamment le cas des Airbus et des ATR, le BEA missionne un ou plusieurs représentants qui sont associés à l’enquête.

Des experts du constructeur et de l’exploitant de l’aéronef, des représentants des personnels, peuvent être invités à participer aux travaux. Les constatations et les enseignements tirés de l’enquête, ainsi que les recommandations éventuelles, sont transmises au ministre chargé des transports et à la direction générale de l’aviation civile (DGAC). Le rapport est également à la disposition des entreprises et personnes concernées. En outre, pour certains accidents particulièrement graves ou instructifs, le ministre peut autoriser la publication du rapport.

Le nombre d’accidents d’aviation générale est d’environ 450 par an, chacun donnant lieu à une enquête plus ou moins approfondie en fonction des circonstances. Par ailleurs une cinquantaine d’événements, qu’il s’agisse d’accidents ou d’incidents, concernant des aéronefs de transport, font l’objet d’une intervention du BEA en France ou à l’étranger.

En 1996, le BEA est intervenu sur 488 accidents en France, ayant causé la mort de 79 personnes, dont une en transport public à la suite des violentes turbulences rencontrées par un Boeing 747 d’Air France au dessus de l’Afrique. Deux accidents matériels de transport public, tous deux liés à des problèmes de réacteurs, ont également fait l’objet d’enquête.

A l’étranger, le BEA a participé pour la même année, avec l’accord des activités américaines, aux enquêtes sur l’accident du vol TWA 800 à New-York, où 47 français figuraient parmi les 230 victimes, ainsi que sur un début d’incendie à l’Île Maurice d’un Airbus d’Air Mauritius et sur deux accidents d’hélicoptère, l’un en Norvège, l’autre au Portugal. Il a également apporté son assistance technique au Mali, au Niger, à la Côte d’Ivoire et au Maroc.

En 1997, le BEA est intervenu sur 430 accidents en France, ayant causé la mort de 117 personnes, dont 10 en transport public (neuf en hélicoptère et un en avion), ainsi que sur plusieurs incidents graves. Il a participé à l’étranger à des enquêtes à Singapour, à Abu Dhabi, aux États-Unis, au Congo et en Indonésie (234 morts dans un accident à Sumatra) pour des accidents touchant des Airbus ; en Italie, pour un accident mortel impliquant un ATR et au Sénégal sur l’accident d’un appareil de la compagnie nationale qui a causé la mort de 18 passagers français. Le BEA a également apporté au cours de l’année écoulée son assistance technique à la Tunisie, au Maroc, au Cameroun, à la Côte d’Ivoire, à la Russie et à l’Ouganda.

Enfin, depuis le début de 1998, le BEA est intervenu à Taïwan (205 victimes) et aux Philippines (3 victimes) pour des accidents touchant des Airbus, ainsi qu’en Colombie pour un accident touchant un appareil affrété par Air France (53 morts). Il a apporté son assistance technique à la Tunisie.

Le système d’origine réglementaire actuellement en vigueur définissant le régime des enquêtes techniques donne globalement satisfaction, même si les moyens mis à la disposition du BEA pourraient être utilement accrus. Les éventuels problèmes rencontrés au cours des enquêtes découlent d’abord de l’absence d’une définition formelle de leur objectif exclusif de sécurité, ce qui peut parfois favoriser les malentendus et la mise en cause de l’action des enquêtes ; ils procèdent ensuite de l’absence actuelle de moyens juridiques. Il s’agit, d’une part, de l’absence de dispositions adaptées permettant au BEA d’associer des experts ou de consulter des organismes extérieurs sans risque d’indiscrétions, d’autre part, de l’absence de statut de l’enquête technique, ce qui soumet l’accès des enquêteurs à l’épave et aux informations au bon vouloir, selon le cas, des responsables de l’enquête judiciaire ou des entreprises concernées. Bien que la bonne volonté de la plupart des intervenants et les efforts d’information du BEA limitent à quelques cas par an le nombre de difficultés suscitant un blocage, les risques de chevauchement ou d’interférence entre les enquêtes judiciaire et technique existent en permanence.

C’est pourquoi il parait utile de donner une base légale définissant un cadre précis et les pouvoirs d’investigation lors des enquêtes techniques. Par ailleurs, l’adoption de la directive européenne n° 94/56/CE du Conseil du 21 novembre 1994 établissant les principes fondamentaux régissant les enquêtes sur les accidents et les incidents dans l’aviation civile impose aux Etats membres de transposer ses dispositions en droit interne. Cette directive s’inspire elle-même des principes régissant l’annexe 13 de la Convention de Chicago de l’OACI.

Ainsi, à l’utilité de l’adoption d’un dispositif législatif interne, s’ajoute une obligation communautaire. Les dispositions de la directive portent sur quatre points : l’enquête technique est obligatoire en cas d’accident ou d’incident grave ; l’organisme chargé des enquêtes techniques doit disposer d’une indépendance fonctionnelle ; les enquêteurs doivent se voir reconnaître des pouvoirs d’investigation ; enfin, les rapports d’enquête doivent avoir un caractère public.

L’article 12 de la directive 94/56 fait obligation aux États membres de s’y conformer au plus tard le 21 novembre 1996. La séparation institutionnelle qui existe en France entre enquêtes judiciaire et administrative a nécessité une clarification et la définition d’un équilibre précis entre les autorités, qui explique pour une part le retard pris pour procéder à cette transposition. Celui-ci a également été aggravé du fait de l’alternance politique de l’année dernière. Un projet de loi, déposé à la fin de la dixième législature relatif à l’enseignement, la formation et la sécurité dans les transports (n° 3413) avait été déposé sur le Bureau de l’Assemblée nationale le 11 mars 1997 ; il visait notamment à transposer en droit interne la directive précitée, mais n’avait pu être examiné avant la dissolution.

Votre rapporteur tient toutefois à relever qu’au 8 avril dernier, seuls six États (Royaume-Uni, Irlande, Danemark, Suède, Finlande et Pays-Bas) avaient procédé à cette transposition, la France ayant bénéficié d’un délai supplémentaire de la part de la Commission.

On peut noter qu’il s’agit là des pays où la justice n’intervient pas d’ordinaire après un accident d’aviation. Par ailleurs, trois d’entre eux, le Royaume-Uni, le Danemark et la Suède disposaient déjà d’un service d’enquêtes accidents distinct de la direction de l’aviation civile. Pour les trois autres, la mise en oeuvre de la directive a amené à séparer la structure d’enquête de la direction de l’aviation civile. Si les dispositions relatives aux enquêtes elles-mêmes sont très comparables, puisqu’elles découlent directement de la directive, l’organisation mise en place a été différente selon les pays.

L’Irlande a adopté une structure comparable à celle qui a été maintenue en Grande-Bretagne. Cette structure, très proche de celle proposée dans le cadre du projet de loi, est celle d’un service spécialisé appartenant au ministère de tutelle de l’aviation civile et disposant d’une large autonomie. La Suède avait depuis longtemps une structure à deux niveaux, les enquêteurs, peu nombreux, agissant dans le cadre d’une Commission aéronautique permanente. C’est cette structure qui a été reprise au Danemark. La Finlande a également choisi une commission permanente mais l’a placée au sein du ministère de la justice. Enfin, les Pays-Bas ont opté pour une structure multimodale directement inspirée du modèle américain.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission de la production et des échanges a examiné, le 3 juin 1998, sous le présidence de M. Pierre Ducout, le projet de loi (n° 873) relatif aux enquêtes techniques sur les accidents et les incidents dans l’aviation civile.

I.— DISCUSSION GÉNÉRALE

M. Jean-Pierre Blazy, rapporteur, tout en caractérisant le transport aérien comme l’un des modes les plus sûrs, a toutefois précisé que les conséquences importantes d’un accident d’avion et sa perception par l’opinion publique, rendaient nécessaire un renforcement constant de la sécurité aérienne. C’est ainsi que, parallèlement à l’enquête judiciaire à la suite d’un accident, visant à déterminer les responsabilités, une enquête technique est menée afin d’analyser la cause de l’événement et émettre des recommandations pour prévenir sa répétition.

Ce souci de prévention s’impose, d’autant plus que les prévisions reprises par l’organisation de l’aviation civile internationale (OACI) font état d’une augmentation annuelle du transport aérien de 5 à 8 % d’ici 2010. Les voies de cette prévention sont principalement :

– l’amélioration de la diffusion des recommandations tirées de l’étude des événements constatés ;

– le renforcement du rôle joué par les enquêtes sur les accidents, mais aussi les incidents aériens, dont l’analyse est parfois particulièrement instructive ;

– l’amélioration du contrôle des compagnies aériennes par les administrations de tutelle nationales ;

– la mise en place par l’OACI d’un dispositif mondial de surveillance de la sécurité.

Le rapporteur a indiqué que les origines d’un accident aérien, notamment pour les transports publics, sont souvent multiples. C’est pourquoi l’enquête technique doit porter à la fois sur l’appareil, ses composants et équipements et sur le comportement du personnel navigant.

Il a rappelé que la pratique de l’enquête technique était constante depuis plus de cinquante ans en France. Ce système repose actuellement sur une base réglementaire, les articles R. 425-2 et 425-3 du code de l’aviation civile. La France se conforme ainsi aux normes et pratiques internationales qu’elle a largement contribué à établir ; celles-ci sont définies dans l’annexe 13 à la convention relative à l’aviation civile internationale, dite convention de Chicago, du 7 décembre 1944. Il a précisé que, si la base réglementaire de l’enquête technique est actuellement succincte, il existe un organisme indépendant chargé des enquêtes techniques sur les accidents aériens, le bureau enquêtes-accidents (BEA) placé sous la tutelle du ministre chargé de l’aviation civile. Les constatations et enseignements qu’il tire de l’enquête, ainsi que ses recommandations éventuelles, sont transmises au ministre chargé des transports et à la direction générale de l’aviation civile (DGAC).

Il a en revanche observé que, si le système existant donnait globalement satisfaction, les moyens mis à la disposition du BEA pourraient être utilement accrus. Il a également souligné que les éventuels problèmes rencontrés au cours des enquêtes techniques découlaient tout d’abord de l’absence d’une définition formelle de leur objectif exclusif de sécurité, ce qui peut parfois favoriser les malentendus et la mise en cause des modalités des enquêtes ; le bon déroulement des enquêtes techniques souffre en outre de l’insuffisance actuelle de moyens juridiques.

Il a ainsi précisé qu’il n’existait pas jusqu’ici de dispositions adaptées permettant au BEA d’associer des experts ou de consulter des organismes extérieurs sans risques d’indiscrétions. En outre, l’enquête technique n’a pas de statut défini, ce qui soumet l’accès des enquêteurs à l’épave et aux informations au bon vouloir des responsables de l’enquête judiciaire ou des entreprises concernées. Par ailleurs, les risques d’interférences entre les enquêtes judiciaires et techniques existent en permanence ; c’est pourquoi il paraît utile de donner une base légale aux enquêtes techniques et de définir un cadre précis et les pouvoirs d’investigation des enquêteurs.

M. Jean-Pierre Blazy a enfin indiqué que le projet de loi permettait en outre de répondre à l’obligation de transposer la directive européenne n° 94/56/CE du Conseil du 21 novembre 1994 établissant les principes fondamentaux régissant les enquêtes sur les accidents et les incidents dans l’aviation civile. Celle-ci fixe quatre objectifs principaux :

– l’obligation d’une enquête en cas d’accident ou d’incident grave ;

– l’indépendance fonctionnelle de l’organisme chargé des enquêtes ;

– la reconnaissance de pouvoirs d’investigation aux enquêteurs ;

– l’obligation d’assurer le caractère public des rapports d’enquête.

II.— EXAMEN DES ARTICLES

Article premier

Enquêtes techniques relatives aux accidents ou incidents aériens

Cet article, qui comporte l’essentiel des dispositions contenues dans le présent projet de loi, crée un Livre VII nouveau au sein de la partie législative du code de l’aviation civile.

Celui-ci trouve sa place à la fin de la première partie du code, après le dernier Livre actuel VI, dénommé “ dispositions diverses ”.

Afin, d’une part, de donner une plus grande cohérence à la présentation de la partie législative du code, et, d’autre part, de clarifier l’intitulé du nouveau Livre, la commission a adopté deux amendements modifiant les intitulés des livres VI et VII (amendements nos 1 et 2).

TITRE PREMIER

DISPOSITIONS GÉNÉRALES

Chapitre unique

Article L. 711-1 du code de l’aviation civile

Définition et conditions de l’enquête technique

L’article L. 711-1 comporte quatre paragraphes portant respectivement sur la définition de l’enquête technique (I), la définition de l’accident et de l’incident d’aviation civile (II), la compétence territoriale (III) et la compétence par type d’accident ou d’incident (IV).

Le paragraphe I précise que l’enquête technique, conduite à la suite d’un accident ou d’un incident d’aviation civile, a limitativement pour objet de collecter et d’analyser les informations utiles, de déterminer les circonstances et les causes certaines ou possibles de cet accident ou incident. Cette enquête technique, qui se déroule le cas échéant parallèlement à l’enquête judiciaire, ne peut donc se substituer, conformément au 3 de l’article 4 de la directive 94/56 du Conseil du 21 novembre 1994 à cette dernière, dès lors qu’elle ne peut notamment pas avoir pour objet de déterminer les responsabilités ou des fautes dans l’origine du sinistre.

La recherche des causes certaines ou probables se réfère aux termes du d) de l’article 3 de la directive communautaire qui définit les causes comme “ les actes, omissions, événements ou conditions ou toute combinaison de ces différents éléments qui conduisent à l’accident ou à l’incident ”. En revanche, il n’existe pas de définition des causes certaines. Cette notion, qui correspond à des facteurs dont le lien de causalité avec l’accident a été établi sans doute possible, est à rapprocher de la cause possible pour laquelle il n’a pu être établi qu’une présomption raisonnable.

S’agissant d’une enquête qui a essentiellement un objectif de prévention, il paraît opportun de faire état de telles présomptions, dès lors qu’il s’agit de mettre en garde contre un risque détecté, qui peut être ou devenir la cause d’un accident.

D’après les récentes données de l’OACI pour la décennie 1988–1997, les événements décrits pour le transport public sont les suivants par ordre de fréquence (un accident pouvant avoir plusieurs descripteurs, le total est supérieur à 100 %).

   

Collision avec le sol

28 %

Pertes de contrôle

22 %

Collision avec un objet

22 %

Incendie/explosion

17 %

Train affaissé/rentré

15 %

Pertes de puissance d’un moteur

15 %

Panne système

11 %

Evénement lié à l’atterrissage

10 %

Blessures

7 %

Dépassement de piste

7 %

Dommages à l’aéronef

6 %

Evénements liés à la météorologie

5 %

Autres

15  %

Parmi les facteurs liés au personnel, les plus fréquemment cités sont :

Maniement de l’aéronef

29 %

Procédures

27 %

Prise de décision

18 %

Utilisation de l’équipement

17 %

Perception

14 %

Maintenance/réparation/entretien

8 %

Contrôle (sol)

4 %

Source : inspection générale de l’aviation civile et de la météorologie. Bureau enquêtes-accidents.

Ce paragraphe I précise que l’enquête publique peut établir des recommandations de sécurité. Celles-ci ne sont donc pas systématiques : des recommandations de sécurité doivent être émises lorsque l’analyse du sinistre amène les enquêteurs à considérer que le lancement d’une action donnée serait de nature à renforcer la sécurité. Pour d’autres accidents ou incidents, en particulier ceux que l’application du règlement ou des procédures aurait permis d’éviter, il n’est pas toujours possible d’émettre une recommandation pertinente. En outre, le caractère redondant des recommandations de simple bon sens pourrait conduire à banaliser une information dont il faut au contraire faire ressortir l’importance et l’originalité.

Il est à noter que les dispositions du paragraphe I de cet article codifié vont au delà des exigences de la directive, qui dispose que seuls les accidents ou les incidents graves doivent faire l’objet d’une enquête . Ainsi les enquêtes techniques pourront porter en France sur des incidents plus mineurs, ainsi que le précise le IV de l’article L. 711-1. Bien que facultative dans ce dernier cas, l’importance de l’enquête sera en outre bien entendu modulée en fonction de l’importance de l’événement. L’adoption d’un tel dispositif est conforme à la directive, qui prévoit que “ les Etats membres peuvent prendre des mesures pour permettre la réalisation d’une enquête sur un événement non visé (accident ou incident grave...) si l’organisme d’enquête peut espérer en tirer des enseignements en matière de sécurité aérienne ”. Il paraît dès lors plus lisible d’intégrer ici le dispositif sur ce point. La commission a adopté un amendement du rapporteur en ce sens (amendement n° 3).

Le paragraphe II définit le champ d’application de l’article L. 711-1. Il reprend, pour la définition de l’incident aérien, les éléments contenus dans l’annexe 13 de la Convention de Chicago comme dans la directive 94-56 qui précisent qu’un incident est un “ événement, autre qu’un accident, lié à l’utilisation d’un aéronef qui compromet ou pourrait compromettre la sécurité de l’exploitation ”. En revanche, le projet de loi ne reprend pas les éléments de définition contenus dans ces deux textes, relatifs à la notion d’accident. Rappelons qu’aux termes de l’annexe 13 à la Convention de Chicago comme de ceux de la directive communautaire, un accident aérien implique, dans la majorité des cas, qu’au moins une personne ait été mortellement ou grièvement blessée lors d’un événement lié à l’utilisation d’un aéronef, ou qu’un aéronef ait subi des dommages importants ou une rupture structurelle, ou encore qu’un aéronef ait disparu ou soit totalement inaccessible.

Les dispositions relatives à l’enquête technique s’appliqueront aux accidents ou incidents impliquant tout type d’aéronef, à l’exclusion :

– des aéronefs conçus exclusivement à usage militaire ou exploités en circulation aérienne militaire, la Communauté européenne n’ayant pas de compétence propre dans ce domaine. Les aéronefs conçus à usage militaire exclusif sont essentiellement des avions d’arme, tel le Mirage 2000. Ils sont ainsi distingués dans le projet de loi d’autres aéronefs, tels les hélicoptères ou le Transall, pour lesquels une utilisation civile est également possible. Dans le cas d’accidents d’avions militaires ou exploités à usage militaire, une enquête est effectuée par le ministère de la défense, outre l’enquête judiciaire ;

– des aéronefs d’Etat. La Convention de Chicago ne s’applique en effet pas à ces appareils, tels ceux exploités par la douane ou ceux utilisés pour les déplacements de certains chefs d’Etat. En revanche, si ces appareils ne sont pas tenus à être immatriculés au registre prévu à l’article 17 de la Convention de Chicago, rien n’interdit à un Etat d’immatriculer comme avions civils certains des aéronefs qu’il possède. C’est par exemple le cas des avions exploités par la DGAC pour l’entraînement de ses personnels ; ces appareils peuvent alors, le cas échéant, faire l’objet d’enquête technique dans les mêmes conditions que tout autre aéronef civil.

Le paragraphe III de l’article L. 711-1 définit la compétence des autorités françaises en matière d’enquête technique. Dans le respect de la directive européenne, la France conduira une enquête technique dans les cas suivants :

– lorsqu’un accident ou un incident d’aviation civile survient sur le territoire ou dans l’espace aérien français. Ce cas est le plus général ;

– lorsqu’un événement intervenu hors de France (territoire ou espace aérien d’un autre État, ou en dehors des territoires et espaces aériens nationaux) concerne un aéronef immatriculé en France ou exploité par une personne physique ou morale ayant en France son siège statutaire ou son principal établissement, sous réserve que l’État où s’est produit l’événement ou, le cas échéant, l’État d’immatriculation, n’ouvre pas lui-même d’enquête.

Le second alinéa du III de l’article L. 711-1 prévoit les cas où les autorités françaises peuvent déléguer tout ou partie de l’enquête à un État étranger, ou à l’inverse accepter une délégation d’un État étranger pour la réalisation d’une enquête technique. Il est à noter que certains Etats délèguent facilement la réalisation d’une enquête ou, plus généralement, de certains actes d’enquête à un État mieux à même de les effectuer. Ces délégations se font en règle générale à un des États associés à l’enquête, au titre de l’Annexe 13 à la Convention de Chicago. Ainsi, en 1995, le Kenya a délégué au bureau enquêtes accidents français la conduite de l’enquête sur un accident d’ATR. Par ailleurs, du fait des liens historiques qui peuvent exister entre pays francophones, une assistance technique est apportée à des États africains dans le cadre de certaines enquêtes.

En sens inverse, les seules délégations correspondent à des interventions ponctuelles, par exemple le suivi d’une expertise ou un entretien avec un passager retourné dans son pays, ou au traitement d’incidents à caractère opérationnel pour lesquels l’autorité de tutelle de l’exploitant paraît la mieux placée pour intervenir, puis étudier les résultats de l’enquête. Ainsi, en 1997, l’enquête sur un incident mineur concernant un transporteur allemand a été déléguée au bureau d’enquêtes de ce pays.

Le dernier paragraphe (IV) de l’article L. 711-1 distingue les accidents et incidents qui doivent obligatoirement faire l’objet d’une enquête technique de ceux pour lesquels l’enquête n’est que facultative. Visant les termes de la directive 94/56, l’enquête n’est obligatoire que pour les accidents et incidents graves d’aviation civile survenus à un aéronef muni d’un certificat de navigabilité délivré conformément à la Convention de Chicago. Les autres accidents, c’est-à-dire ceux concernant des aéronefs non munis d’un certificat de navigabilité (ULM, parapentes, mais aussi prototypes...) et les incidents autres que graves, peuvent également faire l’objet d’une enquête, notamment si l’on peut espérer en tirer des enseignements en matière de sécurité. Ainsi qu’il a été précisé plus haut, il a paru plus lisible d’insérer ce dispositif après le II de l’article codifié.

Article L. 711-2 du code de l’aviation civile

Indépendance et permanence de l’organisme d’enquête

Conformément à la directive 94/56, cet article précise que l’enquête doit être confiée à un organisme permanent, spécialisé, qui peut être ponctuellement assisté par une commission d’enquête. L’organisme permanent, comme la commission, doivent pouvoir agir en toute indépendance ; ils ne reçoivent ni ne sollicitent aucune instruction.

La seule modification par rapport au régime existant, prévu aux articles R 425-2 et R 425-3 du code de l’aviation civile, porte sur la place de la commission d’enquête. Ainsi qu’il a été exposé plus haut, aujourd’hui celle-ci peut être instituée par le ministre chargé de l’aviation civile, notamment pour les accidents les plus importants. Rappelons que la dernière en date est la commission d’enquête technique sur l’accident du Mont Sainte-Odile du 20 janvier 1992. A la différence du régime actuel, où l’enquête est conduite par la seule commission d’enquête lorsque celle-ci est créée, le dispositif de l’article L. 711-2, s’il permet la constitution de la commission d’enquête, limite son rôle à assister l’organisme permanent pour un accident déterminé. Il est prévu, selon les informations à la disposition de votre rapporteur, qu’elle soit présidée par un membre de l’inspection générale de l’aviation civile. Ses membres devront tous être indépendants des parties à l’enquête.

Aujourd’hui, l’enquête accidents est un métier à temps plein qui, compte tenu de la complexité de l’aviation moderne, exige que les enquêteurs soient simultanément des spécialistes de haut niveau, de l’enquête comme de l’aéronautique civile. L’organisation proposée vise à concilier la nécessité, d’une part, de confier la réalisation des enquêtes, et notamment des plus importantes d’entre elles, à des professionnels entraînés et formés à cet effet, d’autre part, d’assurer un large dialogue autour des grandes catastrophes. Elle confie donc l’enquête, c’est-à-dire l’ensemble des actes de celle-ci, conclusions et recommandations incluses, à un organisme permanent spécialisé, tout en assurant la possibilité d’instituer une commission lorsque le ministre la juge nécessaire.

Comme en dispose la directive 94/56, l’organisme permanent, aujourd’hui appelé “ Bureau Enquêtes-Accidents ”, conduit l’enquête, c’est-à-dire prend les dispositions nécessaires, met en place les équipes, renforcées en tant que de besoin d’experts extérieurs, associe les enquêteurs des autres États concernés, effectue ou fait effectuer sous son contrôle les expertises et recherches utiles, analyse les faits ainsi identifiés et en tire les conclusions et recommandations nécessaires.

La commission d’enquête est constituée de personnalités reconnues pour leurs compétences et leur expérience dans certains domaines de l’aviation civile et désignées en fonction des spécificités de l’événement. Elle est tenue informée des travaux et des constatations de l’enquête et apporte aux enquêteurs ses éclairages et ses suggestions, tant lors de la détermination des faits que pour leur analyse. Enfin, elle peut contribuer à la bonne prise en considération des recommandations de sécurité émises. Par ses débats, la commission contribue donc à la fois au dialogue avec les diverses composantes de l’aviation civile intéressées et à la transparence de la démarche.

Selon les informations communiquées à votre rapporteur, l’indépendance de l’organisme, dont le caractère permanent sera déjà garant de sa continuité, restera placé, comme l’actuel BEA, sous l’autorité du ministre chargé de l’aviation civile au sein de l’inspection générale de l’Aviation civile et de la météorologie. Cette structure à deux niveaux constitue une garantie contre d’éventuelles tentations de pression. L’organisme ne recevra pas d’instructions dans l’exercice de sa mission d’enquête et assurera directement la communication relative aux enquêtes. Enfin, l’existence de l’enquête judiciaire parallèle, le caractère international de la quasi totalité des enquêtes et la publication des rapports constituent des garanties supplémentaires d’indépendance, l’action de l’organisme d’enquête ne se déroulant pas en vase clos mais sous le regard de la communauté aéronautique.

S’agissant du mode de rémunération des enquêteurs ceux-ci, comme tout le personnel de l’organisme, resteront agents de l’Etat, leur rémunération étant donc liée à leur corps d’origine et à leur indice fonctionnel et non à leur emploi.

Actuellement le Bureau Enquêtes-Accidents comprend cinquante-six personnes, pour la plupart mises à disposition par la Direction générale de l’Aviation civile, dont vingt-six enquêteurs, neuf assistants d’enquêteur et un médecin enquêteur. Dix nouveaux agents sont attendus avant la fin de l’année 1998, dont trois enquêteurs et deux assistants supplémentaires. Le BEA est dirigé par un ingénieur général de l’aviation civile, lui-même enquêteur de réputation internationale, et comporte un département investigations, une division technique et une division études et statistiques ainsi qu’une division support, chargée des questions administratives et des moyens généraux.

Le BEA occupe actuellement sur l’aéroport du Bourget un bâtiment de 1000m2 où sont situés ses bureaux et laboratoires ainsi que, depuis la fin 1997, un bâtiment de 1800m2 en cours de rénovation comprenant des bureaux supplémentaires et des ateliers pour le traitement d’épaves. Il dispose également d’une zone de stockage d’épaves sur l’aérodrome de Melun-Villaroche.

Hors traitements des personnels et frais de fonctionnement immobilier, le BEA dispose annuellement de 3 millions de francs en crédits d’investissement et de 6 millions de francs en fonctionnement, dont 850 000 francs pour la formation et environ 2,5 millions de francs pour les déplacements. En outre, un certain nombre de travaux d’expertise sont assurés gratuitement par les centres d’essais de la délégation générale pour l’armement, pour un coût annuel évalué à 3 millions de francs environ. La bonne exécution des tâches découlant de la directive 94/56 et du projet de loi ne devrait pas entraîner d’augmentation significative du montant de ces crédits.

Article L. 711-3 du code de l’aviation civile

Agents habilités à l’enquête technique

Le premier alinéa de cet article dispose que seuls les enquêteurs techniques commissionnés à cet effet, agents de l’organisme permanent, peuvent exercer les attributions prévues au titre II du Livre VII nouveau du code de l’aviation civile.

Selon les informations qui ont été communiquées au rapporteur, il est prévu que les enquêteurs techniques soient nommés par le ministre chargé des transports, sur proposition du responsable de l’organisme permanent ou du chef de l’inspection générale de l’aviation civile. Cette nomination entraînera commissionnement permanent, afin de préserver l’indépendance des enquêteurs. Ils seront choisis parmi les fonctionnaires de catégorie A ou les agents contractuels de l’Etat de niveau équivalent, affectés à l’organisme permanent. La qualité d’enquêteur ne pourra leur être retirée que sur la base d’un rapport circonstancié.

Par ailleurs, les enquêteurs responsables d’une enquête seront désignés par le responsable de l’organisme, ainsi que, le cas échéant, les experts extérieurs associés à l’enquête.

Le deuxième alinéa de l’article L. 711-3 codifié prévoit, par exception aux attributions exclusives des enquêteurs techniques dûment commissionnés, que des agents appartenant aux corps techniques de l’aviation civile, dits enquêteurs de première information, peuvent être agréés pour effectuer, sous le contrôle et l’autorité de l’organisme permanent, les premières interventions sur le site de l’accident, notamment dans le but de permettre la préservation des indices. Dans la pratique, les enquêteurs de première intervention devraient être des agents de la DGAC, préalablement formés et désignés à cet effet, pour une enquête déterminée.

Le dernier alinéa de cet article codifié prévoit que les conditions de nomination, d’habilitation et, le cas échéant, de recrutement des enquêteurs techniques, des commissions d’enquête et des enquêteurs de première information, seront fixées par décret en Conseil d’Etat. Cette procédure s’impose car les dispositions actuelles en matière d’enquête d’accident aéronautique, et principalement celles relatives à la notification des événements, figurent actuellement dans la deuxième partie du code de l’aviation civile et ont été prises sous forme de décrets en Conseil d’Etat ou de règlements d’administration publique. En outre, le recours à la forme du décret en Conseil d’Etat se justifie également par le fait que ces dispositions ont une incidence sur les rapports entre le pouvoir exécutif et l’autorité judiciaire et qu’elles doivent assurer dans la pratique l’indépendance de l’organisme permanent.

TITRE II

L’ENQUÊTE TECHNIQUE

chapitre premier

Pouvoirs des enquêteurs

Article L. 721-1 du code de l’aviation civile

Accès au lieu de l’accident

Cet article habilite les enquêteurs techniques et les enquêteurs de première information pour l’accès au lieu de l’accident ou de l’incident, à l’aéronef ou à son épave et à son contenu. En cas d’accident, l’autorité judiciaire devra être préalablement informée de leur intervention.

L’expression “ contenu ” de l’aéronef ou de l’épave, recouvre les éléments qui se trouvaient dans celui-ci sans en faire partie intégrante, par exemple les documents, les cartes et bagages, ou bien encore le fret.

Le second alinéa prévoit que les enquêteurs pourront prendre si nécessaire toutes les mesures de nature à permettre la préservation des indices. Cette formulation correspond au fait que les mesures destinées à la protection de l’épave et des indices sont, en règle générale, prises par l’autorité judiciaire. Cet alinéa vise ainsi à donner aux enquêteurs techniques le droit d’intervenir en cas d’urgence pour préserver de tels indices, ou de manière plus générale, lorsqu’il n’y a pas intervention de l’autorité judiciaire.

L’ensemble du dispositif de cet article codifié clarifie le rôle des enquêteurs techniques par rapport à la situation actuelle. Si aujourd’hui les rapports entre enquêteurs techniques et judiciaires sont globalement satisfaisants, rien n’empêche un juge ou un procureur d’interdire l’accès au site d’un enquêteur technique. Bien souvent, il ne s’agira pas de défiance de l’autorité judiciaire, mais cette attitude traduira simplement la crainte de voir la procédure judiciaire entachée de nullité du fait de l’intervention sans base juridique précise d’un enquêteur technique. Dans d’autres cas litigieux susceptibles d’exister dans le cadre réglementaire actuel, l’enquêteur technique sera requis par le juge ; il sera de ce fait soumis à son autorité, ainsi qu’à l’obligation du respect du secret de l’instruction, y compris pour les éléments relevés dans le strict cadre de son enquête technique.

Article L. 721-2 du code de l’aviation civile

Accès aux enregistrements

Cet article codifié vise à transposer en droit interne les dispositions contenues au c) du 2 de l’article 5 de la directive 94/56 qui prévoit que, conformément à la législation en vigueur dans les Etats membres et, le cas échéant en coopération avec les autorités responsables de l’enquête judiciaire, les enquêteurs chargés de l’enquête technique sont autorisés à accéder immédiatement au contenu des enregistreurs de bord et de tout autre enregistrement, ainsi qu’à l’exploitation de ces éléments.

Le premier alinéa de l’article L. 721-2 du code de l’aviation civile intègre ce dispositif, en précisant que les enquêteurs techniques ont accès “ sans retard ” au contenu de ces enregistrements. Cette expression vise bien à autoriser un accès immédiat, tout en permettant notamment la saisie des enregistreurs par l’autorité judiciaire et la mise sous scellés. En dehors des enregistreurs de bord, les documents visés portent sur d’autres données qui sont enregistrées en de nombreux endroits dans les aéronefs modernes, par exemple dans certains calculateurs. L’article vise également les enregistrements effectués au sol dans les centres et tours de contrôle (échanges radio et traces radar...).

Les deux alinéas suivants de l’article L. 721-2 précisent les conditions d’accès des enquêteurs techniques aux enregistrements, selon qu’il y a ou non ouverture d’une enquête ou d’une information judiciaire. Le I, qui vise les cas où une enquête ou une information judiciaire est ouverte, précise que les enregistreurs et supports d’enregistrement seront préalablement saisis par l’autorité judiciaire, selon les modalités prévues aux articles 97 et 163 du code de procédure pénale. Les termes d’enquête judiciaire visent les cas où il n’y a pas eu désignation d’un juge d’instruction, mais où une enquête est cependant menée par la police ou la gendarmerie. Dans ce cas, c’est le procureur de la République qui est compétent. Rappelons que le deuxième alinéa de l’article 97 du code précité prévoit notamment que “ tous les objets et documents placés sous main de justice sont immédiatement inventoriés et placés sous scellés ”. L’article 163 précise quant à lui que les scellés sont énumérés dans un procès-verbal, les experts devant en mentionner dans leur rapport toute ouverture ou réouverture. Dans ces conditions, les enregistreurs et supports d’enregistrement sont mis à leur demande à la disposition des enquêteurs techniques qui prennent copie des enregistrements qu’ils renferment, sous le contrôle d’un officier de police judiciaire.

Le II prévoit que, dans les cas où une enquête ou une information judiciaire n’est pas ouverte, le procureur de la République sollicite un officier de police judiciaire, dont la présence est obligatoire pour permettre aux enquêteurs judiciaires d’effectuer le prélèvement des enregistrements et des supports d’enregistrement.

Ces procédures, tout en assurant l’accès immédiat aux enregistrements, garantissent contre toute substitution, altération ou manipulation de nature à empêcher l’exacte constatation des conditions de réalisation de l’événement. Elles empêchent en outre que la superposition de l’enquête technique à l’enquête judiciaire ne constitue un motif d’annulation de procédure dans le cadre de cette dernière.

Article L. 721-3 du code de l’aviation civile

Prélèvement aux fins d’examen et d’analyse
au cours d’une enquête ou d’une information judiciaire

Poursuivant l’établissement d’une base légale clarifiant les interventions de l’enquêteur technique, lorsqu’elles interfèrent avec une procédure judiciaire en cours, l’article L. 721-3 du code de l’aviation civile fixe pour principe dans ce cas, que l’enquêteur technique pourra procéder aux prélèvements nécessaires sur les éléments ou sur le contenu de l’aéronef ou de l’épave, afin de procéder aux examens ou analyses susceptibles de contribuer à déterminer les circonstances et les causes de l’accident ou de l’incident.

Ces prélèvements pourront porter sur l’ensemble des éléments de l’aéronef ou contenus à son bord ou dans ses composants. L’énumération du premier alinéa de l’article vise à couvrir les différents cas de prélèvement possibles, sans risque de contestation. Ainsi, les “ fluides ” correspondent par exemple à un carburant ou du liquide hydraulique, les mots “ ensembles ”, “ organes ” et “ mécanismes ” visent à désigner des parties de l’aéronef correspondant à des fonctionnalités différentes, par exemple un “ ensemble tournant ”, ou équipement de navigation ou encore le mécanisme de sortie de train.

Les prélèvements devront être autorisés selon le cas par le procureur ou le juge d’instruction, selon qu’il s’agit d’une enquête ou d’une information judiciaire.

Le deuxième alinéa de cet article est à rattacher au principe posé par le précédent alinéa, qui fixe pour règle la possibilité pour l’enquêteur technique de procéder aux prélèvements avec l’accord de l’autorité judiciaire. A défaut d’un tel accord, l’enquêteur judiciaire pourra de plein droit assister aux opérations d’expertise diligentées par l’autorité judiciaire compétente et exploiter les constatations faites dans ce cadre pour les besoins de l’enquête technique. Votre rapporteur tient à souligner sur ce point qu’il sera attentif à ce que les dispositions réglementaires prises en application de cette disposition veillent à garantir l’effectivité de l’exercice de ce droit, et qu’il sera notamment prévu que l’enquêteur technique devra dans ce cas être prévenu dans des conditions et des délais lui permettant de se rendre aisément aux opérations d’expertise de l’autorité judiciaire.

Le dernier alinéa de l’article L. 721-3, qui vise à préserver le bon déroulement de l’enquête judiciaire, précise que les enquêteurs techniques ne pourront pas soumettre sans l’accord de l’autorité judiciaire les éléments prélevés de l’aéronef à des examens ou analyses susceptibles de les modifier.

Article L. 721-4 du code de l’aviation civile

Prélèvements aux fins d’examen et d’analyse en dehors d’une enquête
ou d’une information judiciaire

Cet article organise, en cas d’accident ou d’incident n’ayant pas entraîné l’ouverture d’une enquête ou d’une information judiciaire, les conditions de prélèvement, par les enquêteurs techniques, des éléments de l’aéronef ou de l’épave destinés à être examinés ou analysés en vue de contribuer à déterminer les circonstances et les causes de l’événement. Dans ce cas, et afin notamment d’éviter toute contestation ultérieure sur l’authenticité des éléments prélevés, cette intervention doit être effectuée en présence d’un officier de police judiciaire dont le concours est sollicité auprès du procureur de la République.

Les éléments susceptibles d’être prélevés, ainsi que leur utilisation pour les besoins de l’enquête, sont identiques à ceux prévus lorsque l’événement a entraîné l’ouverture d’une enquête ou d’une information judiciaire.

Le second alinéa de l’article L. 721-4 codifié précise que les éléments prélevés sont restitués par les enquêteurs techniques lorsque leur conservation n’apparaît plus nécessaire à la détermination des circonstances et causes de l’événement. Il prévoit en outre que la rétention, la détérioration ou la destruction des éléments prélevés, pour les besoins de l’enquête, n’entraînent pas droit à indemnité. Cette disposition constitue une extension, aux enquêtes techniques, du principe jurisprudentiel qui considère, sauf exceptions pour faute ou en cas de préjudice anormal, que tout citoyen doit se soumettre aux actes nécessités par une procédure judiciaire.

Article L. 721-5 du code de l’aviation civile

Droit de communication

Cet article permet aux enquêteurs techniques de pouvoir exiger la communication des documents de toute nature relatifs aux personnes, entreprises et matériels en relation avec l’événement, sans que puisse leur être opposé le secret professionnel. Une liste non exhaustive indique au premier alinéa que ces documents portent sur la formation et la qualification des personnes, la construction, la certification, l’entretien des matériels, la conduite, l’information et le contrôle des aéronefs impliqués dans l’accident ou l’incident.

Il s’agit là encore d’une clarification des conditions de l’enquête technique telle qu’elle se déroule déjà aujourd’hui, même s’il convient de relever que, selon les informations recueillies par votre rapporteur, ces informations sont, en règle générale, accessibles de manière satisfaisante sous l’empire de la réglementation actuelle, la communauté aéronautique ayant une tradition de transparence bien établie dans le domaine des enquêtes techniques.

Le deuxième alinéa de cet article codifié précise qu’une copie des documents est établie pour les enquêteurs techniques lorsque ces pièces sont placées sous scellés par l’autorité judiciaire.

Enfin, le troisième alinéa prévoit le cas des documents concernés par le secret médical. Une double limite est fixée à la transmission de ces éléments. D’une part, seuls sont accessibles les dossiers médicaux d’aptitude relatifs aux personnes chargées de la conduite (pilotes...), de l’information ou du contrôle des aéronefs concernés (contrôleurs aériens notamment). Sont visées des informations antérieures à l’accident ou à l’incident ; il s’agit des examens réglementaires d’aptitude que subissent ces personnels. D’autre part, la communication de ces documents n’est permise qu’aux seuls médecins attachés à l’organisme permanent d’enquête.

Il est en effet nécessaire que l’information à caractère médical soit transmise à un médecin qui soit lui-même associé à l’enquête. L’utilisation du terme “ rattachés ” serait plus adéquate que celui d’attachés, qui correspond dans certains cas à une situation administrative, statutaire, plus qu’à la notion de participation à une enquête. Il peut être utile, dans le respect des procédures, d’adjoindre dans certains cas particuliers au cours d’une enquête donnée d’autres médecins, notamment spécialistes, à ceux entrant dans les effectifs du bureau d’enquête permanent. La commission a adopté un amendement du rapporteur en ce sens (amendement n° 4).

Article L. 721-6 du code de l’aviation civile

Communication des résultats des examens médicaux effectués après l’événement

A la différence de l’article précédent, cet article codifié vise les résultats des examens pratiqués après et à cause de l’accident ou de l’incident. Il s’agit des examens et prélèvements effectués sur les mêmes personnes que celles visées au troisième alinéa de l’article L. 721-5 (pilotes, contrôleurs aériens ...) et des conclusions des rapports d’expertise médico-légale concernant les victimes.

Il s’agit de rapports d’expertise ordonnés dans le cadre d’une procédure judiciaire, non couverts par le secret médical.

Il conviendrait de préciser que ces examens ou prélèvements visent des personnes en relation avec l’accident ou l’incident. La commission a adopté un amendement du rapporteur en ce sens (amendement n° 5).

Chapitre II

Préservation des éléments de l’enquête

Article L. 722-1 du code de l’aviation civile

Préservation de l’état des lieux et des documents

Afin de préserver les éléments pouvant permettre de déterminer les circonstances et les causes de l’accident, le premier alinéa de cet article codifié interdit à quiconque de modifier l’état des lieux où s’est produit un accident aérien, de prélever ou de manipuler quelque élément que ce soit de l’aéronef et de son contenu, sauf si ces actions sont préalablement autorisées par l’autorité judiciaire, après avis de l’enquêteur technique ou, à défaut, de l’enquêteur de première information. Un cadre équilibré est ainsi trouvé pour définir les premières interventions, organisant une coopération entre l’autorité judiciaire et le représentant de l’organisme permanent dès le début des investigations.

Cette interdiction ne s’applique pas dès lors que l’action est commandée par des impératifs de sécurité ou par la nécessité de porter secours aux victimes.

Cette rédaction est à rapprocher des dispositions de l’article 55 du code de procédure pénale relatif à la préservation des éléments de l’enquête dans les lieux où un crime a été commis. Rappelons que l’amende en cas de violation de cette interdiction est celle prévue pour les contraventions de la 4e classe.

Le second alinéa de l’article L. 722-1 précise qu’en cas d’accident ou d’incident, les personnes en possession de documents, matériels et enregistrements pouvant être utiles à l’enquête, doivent prendre toutes dispositions afin d’éviter notamment l’effacement après le vol de l’enregistrement des conversations et alarmes sonores. Les aéronefs qui n’effectuent pas du transport public ou les plus petits des aéronefs de transport, ceux dont la masse maximale au décollage ne dépasse pas 5,7 tonnes (soit l’équivalent d’un avion de 10 places), ne sont généralement pas munis d’enregistreurs de bord. En revanche, les liaisons et paramètres communiqués au sol sont enregistrés dans les tours et centres de contrôle. A l’exception des accidents les plus graves dont l’impact déclenche l’arrêt des enregistrements de bord, la plupart des enregistreurs ont un fonctionnement en boucle entraînant, si aucune disposition n’est prise, un effacement des premières données après quelques heures.

Les enregistreurs de vol sont de deux types, les enregistreurs de paramètres ou FDR (flight data recorders) et les enregistreurs phoniques ou CVR (cockpit voice recorders). Ces enregistreurs de couleur orange vif et paradoxalement surnommés “ boîtes noires ” par le public, sont protégés contre les impacts et le feu. Ils sont obligatoires sur les aéronefs de transport (arrêté du 5 novembre 1987), un seul pour les aéronefs d’une masse maximale certifiée au décollage de 5 700 kg ou autorisés à transporter 10 passagers ; deux au-dessus de 14 000 kg ou 36 passagers. Leur lecture et leur analyse est faite après un accident ou un incident, généralement par les spécialistes du bureau enquêtes accidents.

Le FDR enregistre, sur une bande magnétique ou, pour les matériels plus récents, dans des mémoires statiques, divers paramètres caractéristiques de l’état de l’avion et des conditions du vol. Ces paramètres, environ une dizaine sur les aéronefs les plus anciens, sont en très grand nombre (plusieurs centaines) sur les modèles récents. Un FDR enregistre 25 heures de vol en boucle fermée.

Le CVR enregistre également en boucle fermée et sur les mêmes supports que le FDR les conversations, bruits et alarmes sonores en poste d’équipage. Il a une durée de 30 minutes ou de 2 heures pour les modèles les plus récents.

On trouve d’autres enregistreurs à bord des avions. Destinés normalement à d’autres fins que l’enquête, ils sont parfois exploités après un accident. C’est notamment le cas d’enregistreurs dits QAR (quick access recorders) comparables au FDR mais non protégés, des enregistreurs de maintenance ou des mémoires de certains équipements électroniques.

Au sol, les radiocommunications et les données radar sont également enregistrées par les organismes de la circulation aérienne. En l’absence d'accident, ces informations sont conservées un mois.

Article L 722-2 du code de l’aviation civile

Immunités disciplinaires et administratives

L’enquête technique a pour objet d’étudier les éléments permettant de déterminer les circonstances et les causes d’un accident ou d’un incident aérien afin de procéder à des recommandations susceptibles de renforcer la sécurité aérienne. S’il est évident que les autorités auront nécessairement connaissance d’un accident aérien, il n’en va pas de même des incidents, qui doivent être signalés afin qu’une enquête technique puisse éventuellement en tirer des enseignements ou des informations utiles à la prévention.

C’est pour rassurer les personnes impliquées dans un incident, comme le pilote, le mécanicien d’entretien, ou le contrôleur aérien, et les encourager à signaler un incident, que cet article L. 722-2 propose que ces personnes ne puissent faire l’objet d’une sanction disciplinaire ou administrative pour l’action qu’elles ont commise, si elles ont informé spontanément et sans délai de cet événement.

Afin de ne pas tomber dans le travers d’autres Etats, où cette procédure, répétée à chaque incident, conduit parfois à exonérer de toute sanction des personnes irresponsables ou au comportement professionnel dangereux, le dispositif proposé ne s’appliquera pas en cas de manquement délibéré ou répété aux règles de sécurité. De ce fait, selon les informations communiquées, une personne ne pourrait éviter une sanction au cas où elle commettrait une deuxième fois un même manquement.

En outre, cette exemption ne s’appliquera pas en matière pénale et ne pourra donc notamment pas concerner les personnes ayant mis en péril la vie d’autrui.

Chapitre III

Procédures

Procès-verbaux de constat

Ce chapitre comprend un seul article, consacré aux seuls procès-verbaux. C’est pourquoi la Commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 6) limitant l’intitulé à ce seul point.

Article L. 723-1 du code de l’aviation civile

Procès-verbaux

Cet article constitue dans une certaine mesure une novation par rapport à la situation existante, puisqu’il prévoit que les enquêteurs techniques devront établir un procès-verbal à chaque stade de leur enquête, à l’occasion des prélèvements ou des vérifications auxquels ils procèdent en vertu des pouvoirs dont ils sont investis, tels que définis au chapitre précédent. La référence à l’exercice de leur droit de communication à la fin du premier alinéa correspond à celui conféré par l’article L. 721-5 du projet. La procédure de l’enquête technique sera de ce fait poursuivie dans des conditions se rapprochant de celles de l’enquête judiciaire.

Le deuxième alinéa de l’article définit les mentions qui doivent figurer au procès-verbal, tandis que le dernier alinéa précise qu’une copie de ce procès-verbal doit être adressée à l’autorité judiciaire lorsqu’une procédure judiciaire est ouverte. Le destinataire sera, soit le procureur de la République, soit le juge d’instruction, selon qu’il s’agira d’une enquête ou d’une information judiciaire.

TITRE III

DIFFUSION DES INFORMATIONS ET DES RAPPORTS D’ENQUÊTE

Chapitre unique

Article L. 731-1 du code de l’aviation civile

Secret professionnel

Cet article fixe les strictes limites et formes dans lesquelles il peut être dérogé au principe du secret professionnel, auquel sont tenus les personnels de l’organisme permanent, et les personnes rattachées à l’enquête technique.

Le I de cet article rappelle que ces personnes sont tenues au secret professionnel dans les conditions et sous les peines prévues à l’article L 226-13 du code pénal, qui punit d’un an d’emprisonnement et de 100 000 francs d’amende quiconque révèle une information à caractère secret dont il est dépositaire, soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire.

Le premier alinéa du II de l’article permet au responsable de l’organisme permanent de déroger à l’obligation de secret professionnel pour transmettre des informations résultant de l’enquête technique aux autorités administratives chargées de la sécurité de l’aviation civile, ainsi qu’aux dirigeants des entreprises de construction ou d’entretien des aéronefs ou de leurs équipements, et aux personnes chargées de l’exploitation des aéronefs ou de la formation des personnels. Cette habilitation lui permet d’intervenir s’il estime que l’information, relevant normalement d’une donnée incluse dans le rapport d’enquête, revêt un caractère d’urgence de nature à prévenir un accident ou un incident grave.

Le second alinéa du II de l’article L. 731-1 crée un autre cas de dérogation au principe du secret professionnel, auxquels sont tenus le responsable de l’organisme permanent et les présidents des commissions d’enquête. Ceux-ci pourront, dans le cadre de leur mission, rendre publiques des informations en cours d’enquête, sur les constatations faites par les enquêteurs techniques, sur le déroulement de l’enquête technique et éventuellement sur ses conclusions provisoires. Cette démarche n’est cependant pas nouvelle, puisqu’elle est déjà pratiquée en France dans le régime actuel. En revanche, elle n’aura plus à être, comme aujourd’hui, autorisée par le ministre et placée sous sa responsabilité, renforçant ainsi l’indépendance de l’organisme permanent. De telles informations peuvent notamment porter sur l’exclusion de certaines causes de l’événement ; elles permettent de mettre fin, au cours de l’enquête technique à certaines hypothèses ou rumeurs que l’état d’avancement de l’enquête a pleinement démenties.

Cet alinéa précise que ces informations ne peuvent être rendues publiques que sous la réserve qu’elles ne portent atteinte, ni à la vie privée des personnes, ni au secret industriel, commercial ou médical, ni à la sûreté de l’Etat et à la sécurité publique, ni au secret de la défense nationale et de la politique extérieure. Même si votre rapporteur est bien entendu pleinement convaincu qu’il serait inadmissible que le responsable de l’organisme permanent ou le président d’une commission d’enquête enfreigne l’un de ces principes, ces précisions lui semblent à la fois superfétatoires et susceptibles paradoxalement d’aboutir à l’effet contraire à celui recherché. Les dispositions législatives qui existent dans l’ensemble de ces domaines pour garantir, par exemple, la vie privée, le secret médical ou la défense nationale, s’appliquent en effet de plein droit sans qu’il soit nécessaire de les viser dans le corps de ce texte, pouvant laisser ainsi planer un doute sur leur portée générale. En outre, qu’adviendrait-il si la publication intempestive d’une information, dans le cadre de l’article L. 731-1, portait atteinte à une autre liberté ou une autre disposition d’ordre public qui ne serait pas explicitement mentionnée ? Il paraît ainsi, dans le même but que celui recherché par le projet de loi, préférable de supprimer ces mentions redondantes. La commission a, en conséquence, adopté un amendement du rapporteur en ce sens (amendement n° 7).

Article additionnel après l’article L. 731-1 du code de l’aviation civile

Publication en cours d’enquête de recommandations

Il a semblé plus pertinent d’insérer ici un article codifié additionnel reproduisant les dispositions contenues dans le deuxième alinéa de l’article L. 731-2 du code de l’aviation civile, relatives à la publication en cours d’enquête de recommandations de sécurité, lorsque leur mise en oeuvre dans des délais brefs est de nature à prévenir un accident ou un incident grave. La commission a adopté un amendement du rapporteur sur ce point (amendement n° 8).

Article L. 731-2 du code de l’aviation civile

Publication du rapport d’enquête technique

Conformément aux dispositions contenues à l’article 7 de la directive 94/56, cet article codifié rend systématique la publication d’un rapport au terme de l’enquête publique. Ce rapport préserve l’anonymat des personnes et ne fait état que des informations nécessaires à la détermination des circonstances et des causes de l’événement, ainsi qu’à la compréhension des recommandations de sécurité qu’il contient.

Le rapport revêt une forme appropriée au type et à la gravité de l’événement. En pratique, comme aujourd’hui s’agissant des rapports du bureau enquêtes accident, la longueur du rapport reflétera la complexité des circonstances et causes de l’événement et l’importance, en termes de sécurité, des recommandations qui peuvent être dégagées.

Votre rapporteur, même s’il ne souhaite pas proposer de modification sur ce point au projet, tient à souligner que l’article 7 précité de la directive précise que le rapport est rendu public dans les meilleurs délais et, si possible dans les douze mois suivant la date de l’accident.

La commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur au premier alinéa de cet article (amendement n° 9).

Le deuxième alinéa permet à l’organisme permanent, en cours d’enquête, d’émettre des recommandations de sécurité s’il estime que leur mise en œuvre rapide peut prévenir un accident ou un incident grave. Rappelons que les dispositions en ont été reproduites préalablement au sein d’un article codifié additionnel spécifique après l’article L. 731-1 du code de l’aviation civile.

Le dernier alinéa de cet article L. 731-2 précise que les autorités, entreprises et personnels, consultés par l’organisme permanent en vue de recueillir leurs observations sur le rapport avant sa publication, sont tenus au secret professionnel.

TITRE IV

DISPOSITIONS PÉNALES

Chapitre unique

Il n’existait pas jusqu’ici de base légale spécifique pour sanctionner le refus de coopérer à une enquête technique. Toutefois, cette situation ne se présente pratiquement jamais au sein de la communauté aéronautique dès lors que l’accident est signalé, tant l’habitude de l’enquête technique est ancrée. C’est pourquoi, s’il est impossible de taire un accident, l’apport de ce chapitre portera surtout sur les sanctions à l’encontre des personnes ne portant pas un incident aérien à la connaissance des autorités administratives.

Article L. 741-1 du code de l’aviation civile

Manquement à l’obligation de signaler un accident ou un incident

Les personnes qui, par leurs fonctions, sont appelées à connaître d’un incident ou d’un accident aérien (au sens de l’article L. 711-1 codifié du projet) seront punies au maximum d’un an d’emprisonnement et de 100 000 francs d’amende si elles ne portent pas cet événement à la connaissance des autorités administratives. Selon les informations communiquées, il s’agit notamment des personnes chargées de l’exploitation, de la conduite, de l’information et du contrôle des aéronefs.

Le montant des sanctions, qui qualifie des manquements de nature délictueuse, est identique à celui réprimant des infractions entravant l’information de la commission nationale informatique et liberté (CNIL) découlant des dispositions de l’article 43 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés.

Article L. 741-2 du code de l’aviation civile

Entraves à l’enquête technique

L’entrave à l’action de l’organisme permanent constituera également un délit puni d’un maximum d’un an d’emprisonnement et de 100 000 francs d’amende. Il pourra s’agir soit de l’opposition à l’exercice des fonctions dont sont chargés les enquêteurs techniques, soit du refus de leur communiquer des éléments ou des renseignements, soit du fait de dissimuler, d’altérer ou de faire disparaître des pièces utiles à l’enquête.

Article L. 741-3 du code de l’aviation civile

Sanctions pénales applicables aux personnes morales

La responsabilité pénale des personnes morales s’appliquant, aux termes de l’article 121-2 du code pénal, il est prévu de sanctionner celles-ci pénalement pour des infractions définies au présent titre commises, pour leur compte, par leurs organes ou représentants.

Le projet vise ici classiquement les peines prévues en matière criminelle et correctionnelle applicables aux personnes morales, prévues aux articles 131-38 et 131-39 du code pénal.

Rappelons qu’il s’agit dans le premier cas d’une amende, dont le taux maximum est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques par la loi qui réprime l’infraction, soit ici 500 000 francs d’amende.

Dans le cas de l’article 131-39, rappelons que les peines prévues peuvent être notamment la dissolution, l’interdiction définitive ou à temps d’exercer une ou plusieurs activités, le placement pour cinq ans sous surveillance judiciaire, la fermeture, définitive ou à temps, d’un ou plusieurs établissements, l’exclusion des marchés publics, l’interdiction de faire appel publiquement à l’épargne, l’affichage ou la diffusion par presse écrite ou audiovisuelle de la décision prononcée.

Le dernier alinéa de l’article L. 741-3 précise que la peine d’interdiction, à titre définitif ou pour une durée de cinq ans au plus, d’exercer directement une ou plusieurs activités professionnelles ou sociales portera sur l’activité dans l’exercice, ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction aura été commise.

La commission a adopté l’article premier ainsi modifié.

Article 2

Décret en Conseil d’Etat

Cet article du projet de loi précise que les modalités d’application du projet de loi seront fixées par décret en Conseil d’Etat. Celui-ci devrait notamment préciser les conditions dans lesquelles seront transmises les informations relatives aux accidents et incidents, les personnes concernées, ainsi que la procédure à suivre pour effectuer ces déclarations.

Cette mention devant être explicite pour que la loi s’y applique, l’article précise également que la loi sera en vigueur dans les territoires d’outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte.

La commission a adopté l’article 2 sans modification.

Elle a ensuite adopté l’ensemble du projet de loi ainsi modifié.

*

* *

En conséquence, la commission de la production et des échanges vous demande d’adopter le projet de loi (n° 873) relatif aux enquêtes techniques sur les accidents et les incidents dans l’aviation civile, modifié par les amendements figurant au tableau comparatif ci-après.

TABLEAU COMPARATIF

___

Texte en vigueur

___

Texte du projet de loi

___

Propositions de la Commission

___

Projet de loi relatif
aux enquêtes techniques
sur les accidents et les incidents
dans l’aviation civile

Projet de loi relatif
aux enquêtes techniques
sur les accidents et les incidents
dans l’aviation civile

Projet de loi relatif
aux enquêtes techniques
sur les accidents et les incidents
dans l’aviation civile

 

Article 1er

Article 1er

   

I. - L’intitulé du livre VI : “ dispositions diverses ” du code de l’aviation civile est ainsi rédigé : “ Imputation des charges ”.

(amendement n° 1)

 

La première partie (législative) du code de l'aviation civile est complétée par un Livre VII ainsi rédigé :

II. - La première...

...ainsi

rédigé :

 

“ LIVRE VII

(Alinéa sans modification)

 

“ ACCIDENTS ET INCIDENTS “ ENQUÊTE TECHNIQUE

“ ENQUÊTE TECHNIQUE RELATIVE “ AUX ACCIDENTS OU INCIDENTS

(amendement n° 2)

 

“ TITRE IER

(Alinéa sans modification)

 

“ DISPOSITIONS GÉNÉRALES

(Alinéa sans modification)

 

“ CHAPITRE UNIQUE

(Alinéa sans modification)

 

“ Art. L. 711-1. - I.- L'enquête technique menée à la suite d'un accident ou d'un incident d'aviation civile a pour seul objet, dans le but de prévenir de futurs accidents ou incidents et sans préjudice le cas échéant de l'enquête judiciaire, de collecter et d'analyser les informations utiles, de déterminer les circonstances et les causes certaines ou possibles de cet accident ou incident et, s'il y a lieu, d'établir des recommandations de sécurité.

“ Art. L. 711-1. - I.- (Sans modi-fication)

 

“ II.- Pour l'application du présent livre, constitue un accident ou un incident d'aviation civile un accident ou un incident, entendu comme un événement qui compromet ou pourrait compromettre la sécurité de l'exploitation, survenu à tout type d'aéronef, à l’exclusion des aéronefs conçus exclusivement à usage militaire ou exploités en circulation aérienne militaire ou de ceux appartenant à un Etat qui ne sont pas inscrits au registre d'immatriculation prévu à l'article 17 de la convention relative à l'aviation civile internationale signée à Chicago le 7 décembre 1944.

“ II.- (Sans modification)

   

“ II bis (nouveau). - Tout accident ou incident grave d’aviation civile, au sens de la directive n° 94/56 du Conseil de l’Union européenne du 21 novembre 1994, survenu à un aéronef muni d’un certificat de navigabilité délivré en conformité avec la convention relative à l’aviation civile internationale fait l’objet d’une enquête technique. Tout autre accident d’aviation civile peut également faire l’objet d’une enquête technique.

(amendement n° 3)

 

“ III.- Conformément aux règles internationales, l'enquête technique est de la compétence des autorités françaises pour les accidents et les incidents d'aviation civile qui sont survenus :

“ III.- (Sans modification)

 

“ - sur le territoire ou dans l'espace aérien français ;

 
 

“ - sur le territoire ou dans l'espace aérien d'un autre Etat, si ce dernier n'ouvre pas d'enquête technique et si l'accident ou l'incident présente les caractéristiques définies ci-dessous pour ceux survenus en dehors des territoires ou des espaces aériens nationaux ;

 
 

“ - en dehors des territoires ou des espaces aériens nationaux, si l'accident ou l'incident concerne un aéronef immatriculé en France ou, à défaut d'être immatriculé en France, exploité par une personne physique ou morale ayant en France son siège statutaire ou son principal établis-sement, sous réserve que l'Etat d'immatriculation n'ouvre pas d'enquête.

 
 

“ Les autorités françaises peuvent déléguer à un Etat membre de la Communauté européenne la réalisation de tout ou partie de l'enquête technique. Elles peuvent également déléguer à un Etat non membre de la Communauté européenne la réalisation d'une enquête portant sur un incident survenu à un aéronef immatriculé dans cet Etat ou des investigations liées à des événements survenus sur le territoire de cet Etat. Les autorités françaises peuvent accepter la délégation par un Etat étranger de la réalisation de tout ou partie d'une enquête technique.

 
 

“ IV.- Tout accident ou incident grave d'aviation civile, au sens de la directive n° 94/56 du Conseil de l'Union européenne du 21 novembre 1994, survenu à un aéronef muni d'un certificat de navigabilité délivré en conformité avec la convention relative à l'aviation civile internationale fait l'objet d'une enquête technique. Tout autre accident ou incident d'aviation civile peut également faire l'objet d'une enquête technique.

“ IV.- Supprimé

(amendement n° 3)

 

“ Art. L. 711-2.- L'enquête tech-nique est effectuée par un organisme permanent spécialisé, assisté, le cas échéant, pour un accident déterminé, par une commission d'enquête.

“ Art. L. 711-2.- (Sans modi-fication)

 

“ Dans le cadre de l'enquête, l'organisme permanent et la com-mission agissent en toute indépendance et ne reçoivent ni ne sollicitent d'instructions d'aucune autorité.

 
 

“ Art. L. 711-3.- Seuls les agents de l'organisme permanent désignés en qualité d'enquêteur technique et com-missionnés à cet effet peuvent exercer les attributions prévues au présent livre pour les enquêteurs techniques.

“ Art. L. 711-3.- (Sans modi-fication)

 

“ Toutefois, des agents appartenant aux corps techniques de l'aviation civile pourront être agréés pour effectuer les opérations d'enquête prévues à l'article L. 721-1 sous le contrôle et l'autorité de l'organisme permanent. Ils sont appelés enquêteurs de première information.

 
 

“ Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions de recrutement, de nomination et de commissionnement des enquêteurs techniques, de nomination des membres des commissions d'enquête et de nomination et d'agrément des enquêteurs de première information.

 
 

“ TITRE II

(Alinéa sans modification)

 

“ L'ENQUÊTE TECHNIQUE

(Alinéa sans modification)

 

“ CHAPITRE 1ER

(Alinéa sans modification)

 

“ Pouvoirs des enquêteurs

(Alinéa sans modification)

 

“ Art. L. 721-1.- Les enquêteurs techniques et les enquêteurs de première information peuvent immédiatement accéder au lieu de l'accident ou de l'incident, à l'aéronef ou à son épave et à son contenu pour procéder sur place à toute constatation utile. En cas d'accident, l'autorité judiciaire est préalablement informée de leur intervention.

“ Art. L. 721-1.- (Sans modi-fication)

 

“ Si nécessaire, les enquêteurs techniques ou, à défaut, les enquêteurs de première information prennent toute mesure de nature à permettre la préservation des indices.

 
 

“ Art. L. 721-2.- Les enquêteurs techniques ont accès sans retard au contenu des enregistreurs de bord et à tout autre enregistrement jugé pertinent et peuvent procéder à leur exploitation dans les conditions ci-après :

“ Art. L. 721-2.- (Sans modi-fication)

 

“ I.- Lorsqu'il y a ouverture d'une enquête ou d'une information judiciaire, les enregistreurs et les supports d'enregistrement sont, selon les modalités prévues aux articles 97 et 163 du code de procédure pénale, préalablement saisis par l'autorité judiciaire et mis, à leur demande, à la disposition des enquêteurs techniques qui prennent copie, sous le contrôle d'un officier de police judiciaire, des enregistrements qu'ils renferment.

 
 

“ II.- Lorsqu'il n'y a pas ouverture d'une enquête ou d'une information judiciaire, les enregistreurs et les supports d'enregistrements peuvent être prélevés par les enquêteurs techniques en présence d'un officier de police judiciaire dont le concours est sollicité à cet effet par l'intermédiaire du procureur de la République.

 
 

“ Art. L. 721-3.- En cas d'accident ou d'incident ayant entraîné l'ouverture d'une enquête ou d'une information judiciaire, les enquêteurs techniques peuvent procéder, avec l'accord selon le cas du procureur de la République ou du juge d'instruction, au prélèvement, aux fins d'examen ou d'analyse, de débris, fluides, pièces, organes, ensembles ou mécanismes qu'ils estiment propres à contribuer à la détermination des circonstances et des causes de l'accident ou de l'incident.

“ Art. L. 721-3.- (Sans modi-fication)

 

“ A défaut d'accord, ils ont le droit d'assister aux opérations d'expertise diligentées par l'autorité judiciaire compétente et d'exploiter les constatations faites dans le cadre de ces opérations pour les besoins de l'enquête technique.

 
 

“ Les enquêteurs techniques ne peuvent soumettre les débris, fluides, pièces, organes, ensembles et mécanismes qui ont fait l'objet d'une saisie à des examens ou analyses susceptibles de les modifier, altérer ou détruire qu’avec l'accord de l'autorité judiciaire.

 
 

“ Art. L. 721-4.- En cas d'accident ou d'incident n'ayant pas entraîné l'ouverture d'une enquête ou d'une information judiciaire, les enquêteurs techniques peuvent, en présence d'un officier de police judiciaire dont le concours est sollicité à cet effet auprès du procureur de la République, prélever, aux fins d'examen ou d'analyse, les débris, fluides, pièces, organes, ensembles et mécanismes qu’ils estiment propres à contribuer à la détermination des circonstances et des causes de l'accident ou de l'incident.

“ Art. L. 721-4.- (Sans modi-fication)

 

“ Les objets ou les documents retenus par les enquêteurs techniques sont restitués dès lors que leur conservation n'apparaît plus nécessaire à la détermination des circonstances et des causes de l'accident ou de l'incident. La rétention et, le cas échéant, l'altération ou la destruction, pour les besoins de l'enquête, des objets ou des documents soumis à examen ou à analyse n'entraînent aucun droit à indemnité.

 
 

“ Art. L. 721-5.- Les enquêteurs techniques peuvent exiger, sans que puisse leur être opposé le secret professionnel, la communication des documents de toute nature relatifs aux personnes, entreprises et matériels en relation avec l'accident ou l'incident et concernant notamment la formation et la qualification des personnes, la construction, la certification, l'entretien, l'exploitation des matériels, la préparation du vol, la conduite, l'information et le contrôle de l'aéronef ou des aéronefs impliqués.

“ Art. L. 721-5.- (Alinéa sans modification)

 

“ Lorsque ces documents sont placés sous scellés par l'autorité judiciaire, il en est établi une copie pour les enquêteurs techniques.

(Alinéa sans modification)

 

“ Toutefois, les dossiers médicaux ne sont communiqués qu’aux médecins attachés à l’organisme permanent. Seuls peuvent être communiqués les dossiers médicaux d'aptitude relatifs aux personnes chargées de la conduite, de l'information ou du contrôle de l'aéronef ou des aéronefs concernés.

“ Toutefois...

...

médecins rattachés à l’organisme

...

(amendement n° 4)

... concernés.

 

“ Art. L. 721-6.- Les enquêteurs techniques reçoivent, sur leur demande, communication des résultats des examens ou prélèvements effectués sur les personnes chargées de la conduite, de l'information et du contrôle de l'aéronef ou des aéronefs concernés et des conclusions des rapports d'expertise médico-légale concernant les victimes.

“ Art. L. 721-6.- Les enquêteurs

...

... aéronefs en relation avec l’accident ou l’incident et des conclusions...

...les victimes.

(amendement n° 5)

 

“ CHAPITRE II

(Alinéa sans modification)

 

“ Préservation des éléments de l'enquête

(Alinéa sans modification)

 

“ Art. L. 722-1.- Il est interdit à toute personne de modifier l'état des lieux où s'est produit un accident, d'y effectuer des prélèvements quelconques, de se livrer sur l'aéronef ou son épave à quelque manipulation ou prélèvement que ce soit, de procéder à son déplacement ou à son enlèvement, sauf si ces actions sont commandées par des exigences de sécurité ou par la nécessité de porter secours aux victimes ou ont été autorisées par l'autorité judiciaire après avis de l'enquêteur technique ou, à défaut, de l'enquêteur de première information.

“ Art. L. 722-1.- (Sans modi-fication)

 

“ En cas d'accident ou d'incident, l'équipage concerné, le propriétaire ou l'exploitant de l'aéronef ainsi que les personnes ou entreprises en relation avec l'accident ou l'incident et leurs préposés prennent toutes les dispositions de nature à préserver les documents, matériels et enregistrements pouvant être utiles à l'enquête, et notamment à éviter l'effacement après le vol de l'enregistrement des conversations et alarmes sonores.

 
 

“ Art. L. 722-2.- Les personnes chargées de la conduite, de l'information, du contrôle ou de l'entretien des aéronefs qui ont spontanément et sans délai signalé un incident dans lequel elles sont impliquées ne peuvent faire l'objet d'aucune sanction disciplinaire ou administrative, sauf en cas de manquement délibéré ou répété aux règles de sécurité.

“ Art. L. 722-2.- (Sans modi-fication)

 

“ CHAPITRE III

(Alinéa sans modification)

 

“ Procédures

Alinéa supprimé

(amendement n° 6)

 

“ Procès-verbaux de constat

(Alinéa sans modification)

 

“ Art. L. 723-1.- Des procès-verbaux sont établis par les enquêteurs techniques à l’occasion des prélèvements opérés et des vérifications effectuées dans l'exercice de leur droit de communication.

“ Art. L. 723-1.- (Sans modi-fication)

 

“ Les procès-verbaux comportent la date et l'heure de début et de fin de l'intervention, le nom et la signature de l'enquêteur technique qui y procède, l'inventaire des pièces ou documents retenus ou vérifiés et, le cas échéant, les observations de la personne qui en avait la garde.

 
 

“ Lorsqu’une procédure judi-ciaire est ouverte, une copie du procès-verbal est adressée à l'autorité judiciaire.

 
 

“ TITRE III

(Alinéa sans modification)

 

“ DIFFUSION DES INFORMATIONS ET DES RAPPORTS D'ENQUÊTE

(Alinéa sans modification)

 

“ CHAPITRE UNIQUE

(Alinéa sans modification)

 

“ Art. L. 731-1.- I.- Les person-nels de l'organisme permanent, les enquêteurs de première information, les membres des commissions d'enquête, et les experts auxquels ils font appel, sont tenus au secret professionnel dans les conditions et sous les peines prévues à l'article 226-13 du code pénal.

“ Art. L. 731-1.- I.- (Sans modi-fication)

 

“ II.- Par dérogation aux dispositions qui précèdent, le responsable de l'organisme permanent est habilité à transmettre des informations résultant de l'enquête technique, s'il estime qu’elles sont de nature à prévenir un accident ou un incident grave, aux autorités administratives chargées de la sécurité de l'aviation civile, aux dirigeants des entreprises de construction ou d'entretien des aéronefs ou de leurs équipements, aux personnes physiques et morales chargées de l'exploitation des aéronefs ou de la formation des personnels.

“ II.- (Alinéa sans modification)

 

“ En outre, le responsable de l'organisme permanent et, le cas échéant, les présidents de commission d'enquête, sont habilités, dans le cadre de leur mission, à rendre publiques des informations sur les constatations faites par les enquêteurs techniques, le déroulement de l'enquête technique et éventuellement ses conclusions provisoires sous réserve de ne porter atteinte ni à la vie privée des personnes ni au secret industriel, commercial ou médical, ni à la sûreté de l’Etat et à la sécurité publique, ni au secret de la défense nationale et de la politique extérieure.

“ En outre...

...conclusions

provisoires.

(amendement n° 7)

   

“ Art. L. 731–1–1. (nouveau) –En cours d’enquête, l’organisme permanent peut émettre des recommandations de sécurité s’il estime que leur mise en œuvre dans des délais brefs est de nature à prévenir un accident ou un incident grave. 

(amendement n° 8)

 

“ Art. L. 731-2.- L'organisme permanent établit et rend public au terme de l'enquête technique un rapport sous une forme appropriée au type et à la gravité de l'événement. Ce rapport n'indique pas le nom des personnes. Il ne fait état que des informations résultant de l'enquête nécessaires à la détermination des circonstances et des causes de l'accident ou de l'incident et à la compréhension des recommandations de sécurité.

“ Art. L. 731-2.- L'organisme permanent rend public...

(amendement n° 9)

...sécurité.

 

“ En cours d'enquête, l'orga-nisme permanent peut émettre des recommandations de sécurité s'il estime que leur mise en oeuvre dans des délais brefs est de nature à prévenir un accident ou un incident grave.

Alinéa supprimé

(amendement n° 8)

 

“ Avant la remise du rapport, l'organisme permanent peut recueillir les observations des autorités, entreprises et personnels intéressés. Ceux-ci sont tenus au secret professionnel en ce qui concerne les éléments de cette consultation.

(Alinéa sans modification)

 

“ TITRE IV

(Alinéa sans modification)

 

“ DISPOSITIONS PÉNALES

(Alinéa sans modification)

 

“ CHAPITRE UNIQUE

(Alinéa sans modification)

 

“ Art. L. 741-1.- Est puni d'un an d'emprisonnement et de 100.000 F d'amende le fait, pour les personnes qui, de par leurs fonctions, sont appelées à connaître d'un accident ou d'un incident au sens de l'article L. 711-1, de ne pas le porter à la connaissance des autorités administratives.

“ Art. L. 741-1.- (Sans modi-fication)

 

“ Art. L. 741-2.- Est puni d'un an d'emprisonnement et de 100.000 F d'amende le fait d'entraver l'action de l'organisme permanent :

“ Art. L. 741-2.- (Sans modi-fication)

 

“ 1° Soit en s'opposant à l'exercice des fonctions dont sont chargés les enquêteurs techniques ;

 
 

“ 2° Soit en refusant de leur communiquer les enregistrements, les matériels, les renseignements et les documents utiles, en les dissimulant, en les altérant ou en les faisant disparaître.

 
 

“ Art. L. 741-3.- Les personnes morales peuvent être déclarées responsables pénalement, dans les conditions prévues par l'article 121-2 du code pénal, des infractions définies au présent titre.

“ Art. L. 741-3.- (Sans modi-fication)

 

“ Les peines encourues par les personnes morales sont :

 
 

“ 1° L'amende selon les moda-lités prévues par l'article 131-38 ;

 
 

“ 2° Les peines mentionnées à l'article 131-39.

 
 

“ L'interdiction mentionnée au 2° de l'article 131-39 porte sur l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise. ”

 
 

Article 2

Article 2

 

Un décret en Conseil d’Etat fixe les modalités d'application de la présente loi qui est applicable dans les territoires d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte.

(Sans modification)

     
     
     

___________

N° 951.– Rapport de M. Jean-Pierre Blazy (au nom de la commission de la production), sur le projet de loi (n° 873), relatif aux enquêtes techniques sur les accidents et les incidents dans l’aviation civile.