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N° 1242

ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

ONZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 2 décembre 1998.

AVIS

PRÉSENTÉ

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU PLAN (1), SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT, relatif à l’emploi des fonds de la participation des employeurs à l’effort de construction,

PAR M. JACQUES GUYARD,

Député

——

(1) La composition de cette commission figure au verso de la présente page.

Voir les numéros :

Sénat : 43, 49, et T.A. 15 (1998-1999)

Assemblée nationale : 1192, 1217.

Logement.

La commission des finances, de l’économie générale et du plan est composée de :

M. Augustin Bonrepaux, président ; M. Didier Migaud, rapporteur général ; MM. Jean-Pierre Brard, Arthur Dehaine, Yves Tavernier, vice-présidents, MM. Pierre Bourguignon, Jean-Jacques Jégou, Michel Suchod, secrétaires ; MM.  Maurice Adevah-Poeuf, Philippe Auberger, François d'Aubert, Dominique Baert, Jean-Pierre Balligand, Gérard Bapt, François Baroin, Alain Barrau, Jacques Barrot, Alain Belviso, Christian Bergelin, Eric Besson, Jean-Michel Boucheron, Michel Bouvard, Mme Nicole Bricq, MM. Christian Cabal, Jérôme Cahuzac, Thierry Carcenac, Gilles Carrez, Henry Chabert, Didier Chouat, Alain Claeys, Yves Cochet, Charles de Courson, Christian Cuvilliez, Jean-Pierre Delalande, Francis Delattre, Yves Deniaud, Michel Destot, Patrick Devedjian, Laurent Dominati, Raymond Douyère, Tony Dreyfus, Jean-Louis Dumont, Daniel Feurtet, Pierre Forgues, Gérard Fuchs, Gilbert Gantier, Jean de Gaulle, Hervé Gaymard, Jacques Guyard, Pierre Hériaud, Edmond Hervé, Jacques Heuclin, Jean-Louis Idiart, Mme Anne-Marie Idrac, MM. Michel Inchauspé, Jean-Pierre Kucheida, Marc Laffineur, Jean-Marie Le Guen, Guy Lengagne, François Loos, Alain Madelin, Mme Béatrice Marre, MM. Pierre Méhaignerie, Louis Mexandeau, Gilbert Mitterrand, Alain Rodet, Nicolas Sarkozy, Gérard Saumade, Philippe Séguin, Jean-Pierre Soisson, Georges Tron, Philippe Vasseur, Jean Vila.

SOMMAIRE

Pages

___

INTRODUCTION 5

I.- LE “ 1%LOGEMENT ” : UN MODE DE FINANCEMENT ORIGINAL DU

LOGEMENT DES SALARIÉS 7

A.- UN MODE DE FINANCEMENT ORIGINAL 7

B.- LE RECOURS À LA COTISATION FISCALE COMME SANCTION 8

II.- L’EXTINCTION PROGRESSIVE DES PRÉLÈVEMENTS DE L’ETAT A ÉTÉ

INSCRITE DANS LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1999 9

A.- UNE EXTINCTION PRÉVUE PAR LA CONVENTION DU 3 AOÛT 1998 10

B.- UNE DIMINUTION DES PRÉLÈVEMENTS INSCRITE À L’ARTICLE 39 DU PROJET DE LOI DE FINANCES 14

III.- LE PROJET DE LOI ENTÉRINE LA DIVERSIFICATION DES EMPLOIS DU

1% LOGEMENT 15

A.- LA TRANSPOSITION LÉGISLATIVE DE LA CONVENTION DU 3 AOÛT 1998 16

B.- LA NÉCESSITÉ D’UN CONTRÔLE ACCRU DES EMPLOIS DU 1% LOGEMENT 17

1.- Les accédants à la propriété 17

2.- La sécurisation des locataires 18

3.- L’amélioration du contrôle des emplois du 1% logement 18

EXAMEN EN COMMISSION 21

Mesdames, Messieurs,

La convention quinquennale du 3 août 1998, conclue entre l’Etat et l’Union d’économie sociale du logement, a prévu l’extinction progressive des prélèvements de l’Etat sur les collecteurs du 1% logement et la modernisation de leurs interventions.

Le projet de loi qui vous est soumis entérine la diversification des emplois des ressources du 1 %, avec la sécurisation des accédants et des locataires, c’est-à-dire la mise en place de moyens facilitant la garantie de leur logement en cas d’aléa dans leur existence ou de précarisation. Cependant, parce qu’il se limite aux modifications législatives indispensables, il ne peut nous rassurer et démentir nos préventions devant certaines orientations qui pourraient entraîner une mise en oeuvre de la réforme au détriment des plus défavorisés.

Il est donc indispensable que la sécurisation des accédants repose bien sur les engagements des banques et des collecteurs du 1% logement et non sur une quelconque cotisation des bénéficiaires des prêts.

Il est non moins important que la prise en charge des garanties de loyers concerne l’ensemble du parc conventionné et ne soit pas limitée aux salariés des entreprises assujetties au 1% logement.

Enfin, il est urgent de remédier au déficit d’information sur la gestion financière de l’accession sociale et sur les interventions de certains comités interprofessionnels du logement. La mise en place d’une structure de contrôle et le renforcement de la gestion paritaire constituent des moyens sûrs de moderniser la gestion du 1% logement dans un sens favorable aux salariés, conformément aux principes fondateurs de ce mode de financement.

I.- LE “ 1% LOGEMENT ” : UN MODE DE FINANCEMENT ORIGINAL DU LOGEMENT DES SALARIÉS

La participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC) s’analyse comme un mode de financement original du logement des salariés. Elle prévoit, en effet, la réalisation d’un effort par les entreprises, à raison du montant des salaires versés, pour le logement de leurs salariés. En l’absence d’un tel effort, l’entreprise est sanctionnée en devenant redevable d’une cotisation fiscale plus élevée. La distinction légale de la participation des entreprises avec la cotisation fiscale qui la sanctionne met en évidence le caractère particulier du “ 1% logement ”.

A.- UN MODE DE FINANCEMENT ORIGINAL

La participation des employeurs à l’effort de construction est née de la volonté commune d’entrepreneurs progressistes du Nord et des syndicats de salariés de faire participer l’entreprise à l’aménagement d’habitations populaires. C’est ainsi que le premier comité interprofessionnel du logement (CIL) a été créé il y a plus de cinquante ans.

Actuellement, cette participation peut prendre la forme :

– d’une aide directe au salarié, par un prêt pour l’acquisition de son logement ;

– de construction ou d’amélioration de logements destinés à être loués aux salariés ;

– de versements à des organismes collecteurs.

Deux catégories d’organismes collecteurs participent à l’utilisation des versements au titre de la PEEC.

Les collecteurs financiers utilisent les ressources du 1% pour le financement de logements par des prêts à long terme, des subventions ou des souscriptions de titres dans le cadre d’opérations locatives ou d’accession, au profit de personnes physiques ou morales. Ces collecteurs financiers sont :

– les 159 comités interprofessionnels du logement (CIL), associations à caractère professionnel ou interprofessionnel ayant pour objet exclusif de promouvoir la construction, l’acquisition, l’amélioration, la remise en état de logements, qui collectent environ 91% des ressources ;

– les 39 chambres de commerce et d’industrie, au deuxième rang des organismes collecteurs, avec moins de 6% de la collecte ;

– les sociétés immobilières filiales de la SNCF et de Renault, les sociétés anonymes de crédit immobilier et deux caisses d’allocations familiales. Chacune de ces trois catégories assure moins de 1% de la collecte.

Les CIL et les chambres de commerce sont regroupés, depuis 1997, dans l’Union d’économie sociale du logement (UESL), qui fédère et représente ces collecteurs.

Les collecteurs constructeurs sont les organismes HLM (offices publics d’HLM, offices d’aménagement et de construction, sociétés anonymes, sociétés coopératives de production et sociétés d’économie mixte de construction), qui peuvent être simultanément collecteurs et destinataires de versements en provenance des collecteurs financiers. Ils emploient les ressources du 1% dans le cadre de leurs programmes de construction. Ils ont assuré, en 1997, environ 3% de la collecte.

Le taux du prélèvement en vigueur, depuis 1991, est de 0,45% de la masse salariale plafonnée.

On observe donc que les employeurs peuvent remplir leurs obligations de participation à l’effort de construction par des aides directes à leurs salariés ou des investissements directs. Le recours aux organismes collecteurs n’est donc que facultatif, ce qui met en évidence une nouvelle fois le caractère paritaire et même privé, selon la formule employée par le Conseil économique et social, du 1% logement. Enfin, la PEEC est caractérisée par une gestion paritaire par les partenaires sociaux, qu’il serait souhaitable de renforcer.

B.- LE RECOURS À LA COTISATION FISCALE COMME SANCTION

En cas d’absence ou d’insuffisance d’investissement dans le délai prescrit, c’est-à-dire avant le 31 décembre de l’année suivant celle du paiement des salaires servant à l’assiette de la PEEC, l’employeur défaillant est redevable d’une “ cotisation ” de 2% calculée sur les mêmes bases salariales que la participation dont le versement a été éludé. L’article L. 313-4 du code de la construction et de l’habitation prévoit que cette cotisation est établie et recouvrée comme en matière d’impôts directs.

L’article 235 bis du code général des impôts précise les modalités de recouvrement et les éléments d’assiette de la cotisation, dont le rendement pour 1999 est estimé à 156 millions de francs par l’état A annexé au projet de loi de finances pour 1999 (ligne 0325).

Pour que l’administration puisse contrôler la réalité de l’effort exposé au titre de la PEEC, les employeurs sont tenus au dépôt, le 16 avril de l’année suivant celle durant laquelle les investissements ont dû être accomplis, d’une déclaration spéciale détaillant les modalités de leur participation à l’effort de construction.

L’existence d’une cotisation fiscale servant seulement à sanctionner le défaut de versement du prélèvement souligne également le caractère privé de celui-ci.

Pour cette raison, le juge de la recevabilité financière (1) considère que sont recevables les initiatives ayant pour effet de réduire la PEEC, qui appartient au secteur de “ l’économie sociale ” et pour laquelle la cotisation fiscale constitue une pénalité.

C’est pourquoi les prélèvements opérés par l’Etat apparaissent comme revêtant clairement un caractère budgétaire et ne peuvent être considérés comme la récupération d’une quelconque imposition affectée.

II.- L’EXTINCTION PROGRESSIVE DES PRÉLÈVEMENTS DE L’ETAT A ÉTÉ INSCRITE DANS LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1999

Le présent projet de loi constitue la mise en oeuvre législative de la partie de la convention du 3 août 1998 qui concerne la diversification des emplois du 1% logement.

La question du prélèvement de l’Etat sur les organismes collecteurs, et son extinction progressive d’ici à 2002, sera réglée dans le cadre de l’article 39 du projet de loi de finances.

A.- UNE EXTINCTION PRÉVUE PAR LA CONVENTION DU 3 AOÛT 1998

Comme l’a déjà souligné votre Rapporteur général, M. Didier Migaud, dans son commentaire de l’article 39 du projet de loi de finances (2), le principe d’une contribution du “ 1% ” pour participer au financement des aides publiques au logement a été posé il y a longtemps, le taux de la participation des employeurs, encore de 1% en 1971, ayant été réduit par étapes en contrepartie d’une contribution supplémentaire au Fonds national d’aide au logement (FNAL), qui finance l’allocation de logement sociale (ALS).

La dernière mesure de réduction du taux, prise en application de l’article 26 de la loi n° 91-716 du 26 juillet 1991, a ramené le taux de cotisation des employeurs de 0,65% à 0,45%, réduction compensée par l’augmentation du taux de la contribution au FNAL de 0,3% à 0,5% de la masse salariale plafonnée.

La loi de finances rectificative du 4 août 1995 a institué une contribution exceptionnelle de 1.000 millions de francs en 1995 afin d’abonder le compte d’affectation spéciale n° 902-28 “ Fonds pour l’accession à la propriété ”, ce qui a permis le recouvrement effectif de 994 millions de francs.

L’article 28 de la loi de finances pour 1996 a créé une contribution annuelle sur les organismes collecteurs de la participation des employeurs à l’effort de construction assise sur les versements des employeurs et les remboursements des prêts consentis de l’année précédente au taux de 6,8%, qui a donné lieu au recouvrement effectif de 942,3 millions de francs.

La convention d’objectifs conclue entre l’Etat et l’UESL, le 17 septembre 1996, a prévu, pour 1997 et 1998, le prélèvement, au profit de l’Etat, de la moitié des ressources stables des collecteurs du 1% logement.

Les articles 47 de la loi de finances pour 1997 et 45 de la loi de finances pour 1998 ont organisé, dans le cadre de la convention d’objectifs conclue entre l’Etat et l’UESL, le prélèvement en 1997 et 1998 de la moitié des ressources stables de l’année précédente des collecteurs et son affectation en recettes du compte d’affectation spéciale n° 902-30 “ Fonds pour le financement de l’accession à la propriété ”. Le prélèvement pour 1997 s’est élevé à 7.274 millions de francs et celui de 1998 pourrait approcher 7.600 millions de francs (3). Ces sommes ont été affectées, pour l’essentiel, au financement du prêt à taux zéro.

Les préoccupations budgétaires ont particulièrement motivé la dernière vague de prélèvement sur les ressources des collecteurs du 1% logement, notamment parce que ces prélèvements n’ont pas été sans incidence sur la présentation de l’équilibre budgétaire. Ainsi, le Rapporteur général de l’époque, M. Philippe Auberger, observait, à l’automne 1996, que “ l’affectation de la contribution exceptionnelle [...] au nouveau compte d’affectation spéciale n° 902-30 “ Fonds pour le financement de l’accession à la propriété ” a un double effet sur la présentation budgétaire :

– il diminue les dépenses du budget général de 3.500 millions de francs correspondant aux crédits de paiement qui y sont inscrits et qui auraient été portés au budget général en l’absence d’affectation ;

– il réduit le déficit constaté au solde des opérations définitives de l’Etat de 3.500 millions de francs, différence entre 7.000 millions de francs inscrits en recettes et 3.500 millions de francs de crédits de paiement du nouveau compte d’affectation spéciale. En effet, les prévisions de recouvrement de 7.000 millions de francs (pour une assiette estimée à 14.000 millions de francs) ne donnent pas lieu à des ouvertures de crédits de paiement de même montant. 3.500 millions de francs de recettes doivent rester en attente sur le compte d’affectation spéciale en 1997 pour une consommation prévue en 1998. Leur mise en réserve en 1997 diminue d’autant le solde déficitaire des opérations définitives de l’Etat estimé à 280.901 millions de francs pour l’année 1997 ” (4).

La convention d’objectifs entre l’Etat et l’UESL du 17 septembre 1996 ne réglait leurs rapports financiers que pour 1997 et 1998.

Compte tenu de l’importance des montants en cause, la question des rapports entre l’Etat et les collecteurs du 1%, après 1998, a suscité des inquiétudes et mobilisé des énergies, avec en particulier la publication d’un rapport par le Conseil économique et social, le 25 mars 1998.

La convention quinquennale relative à la modernisation du 1% logement, signée le 3 août 1998 par le Gouvernement et l’UESL, programme l’extinction progressive de la “ contribution du 1% logement à la politique du logement ”.

En effet, la convention prévoit que :

“ L’UESL versera à l’Etat, au titre de sa contribution à la politique du logement, les montant suivants :

– 6,4 milliards de francs en 1999 ;

– 5 milliards de francs en 2000 ;

– 3,4 milliards de francs en 2001 ;

– 1,8 milliard de francs en 2002.

Cette contribution s’éteint en 2003.

Les modalités de calcul de la contribution à verser à l’UESL par chacun de ses associés collecteurs sont déterminées par le conseil d’administration de l’UESL. Une convention annuelle entre l’Etat et l’UESL fixe les modalités de versement de ces contributions.

L’Etat s’engage sur la durée de la convention à maintenir le taux de la participation à 0,45% des salaires et à n’effectuer aucun prélèvement sur les associés collecteurs de l’UESL en sus de la contribution prévue au présent article. ”

L’extinction progressive du prélèvement de l’Etat permet la restauration, dès 1999, des moyens d’intervention des associés collecteurs du 1%.

L’assiette du prélèvement opéré en 1997 et 1998 (ressources stables de l’année précédente) correspond, selon l’Agence nationale pour la participation des employeurs à l’effort de construction (ANPEEC), aux montants présentés dans les tableaux ci-après.

RESSOURCES STABLES
1996

(en millions de francs)

 


Collecte

Remboursements de prêts à long terme


Total

Comités interprofessionnels du logement

6.111

7.203

13.314

Chambres de commerce et d’industrie

331

522

853

Sociétés anonymes de crédit immobilier

58

148

206

Caisses d’allocations familiales

1

1

2

Sociétés immobilières d’entreprises nationales

16

7

23

HLM-SEM

193

0

193

Total

6.710

7.881

14.591

Source : ANPEEC.

RESSOURCES STABLES
1997

(en millions de francs)

 


Collecte

Remboursements de prêts à long terme


Total

Comités interprofessionnels du logement

6.216

7.658

13.874

Chambres de commerce et d’industrie

349

512

861

Sociétés anonymes de crédit immobilier

58

152

210

Caisses d’allocations familiales

1

1

2

Sociétés immobilières d’entreprises nationales

15

8

23

HLM-SEM

210

0

210

Total

6.849

8.331

15.180

Source : ANPEEC, données provisoires.

L’UESL considère que le prélèvement de 7.274 millions de francs en 1997 et (probablement) de plus de 7.500 millions de francs en 1998 sur l’ensemble des collecteurs l’a conduit à recourir à des emprunts auprès du Crédit local de France, comme le permet son statut de société anonyme coopérative.

1,5 milliard de francs a ainsi été mobilisé en 1997 et l’UESL disposait en 1998 d’une ligne de crédits auprès du Crédit local de France à hauteur de 4,5 milliards de francs, avec faculté d’emprunter jusqu’à 5,5 milliards de francs.

Il apparaît, en fait, que 6 milliards de francs devraient abonder par cette voie l’UESL en 1998, mais que, selon cet organisme, la diminution progressive des prélèvements de l’Etat devrait permettre d’éviter tout nouvel emprunt à partir de 1999.

Votre Rapporteur s’interroge sur la nécessité effective de contracter des emprunts comme sur l’emploi qui est fait de leurs ressources par les CIL. Il souhaiterait d’ailleurs qu’une plus grande transparence marque les interventions des CIL et que toutes informations nécessaires soient transmises par le comité des engagements de l’UESL. Il serait important que l’emploi des ressources du 1% logement soit mieux contrôlé, par exemple dans une structure ad hoc où seraient représentés les partenaires sociaux et des personnalités qualifiées.

En effet, les fonds du 1% logement ont pu servir dans certains cas au rachat de sociétés anonymes d’HLM ou de cabinets d’administrateurs de biens : pour de telles opérations, le maintien des ressources stables des CIL ne s’imposait manifestement pas.

B.- UNE DIMINUTION DES PRÉLÈVEMENTS INSCRITE À L’ARTICLE 39 DU PROJET DE LOI DE FINANCES

L’article 39 du projet de loi de finances pour 1999 constitue la première étape de la mise en oeuvre législative de la convention du 3 août 1998.

Il prévoit, pour l’exercice budgétaire de 1999, une contribution fixée en 1999 à 42,6% d’une assiette constituée par la collecte et les remboursements de prêts à plus de trois ans de l’année précédente. Elle serait plafonnée à 6.400 millions de francs pour les associés collecteurs de l’UESL, conformément à la convention, et non plafonnée pour les collecteurs non membres de l’UESL, les versements de ces derniers étant estimés à 200 millions de francs.

Le prélèvement, évalué globalement à 6.600 millions de francs, doit être affecté en recettes du compte d’affectation spéciale n° 902-30 “ Fonds pour le financement de l’accession à la propriété ”.

L’article 53 du projet de loi de finances procède à la clôture de ce compte au 31 décembre 1999. La recette doit servir en 1999 au financement des prêts à taux zéro attribués en 1998 et qui ont fait l’objet d’un financement cette année pour la moitié seulement de leur coût. Il en résultera un solde net positif de 3.470 millions de francs sur le compte (5).

Le rétablissement du financement du prêt à taux zéro dans le budget général, qui se traduit également par l’inscription des crédits de paiement correspondant aux mesures nouvelles (3.130 millions de francs) dans le budget du Logement, est une bonne mesure, qui lève la double hypothèque pesant sur la pérennité du financement du prêt à taux zéro et concernant la poursuite des prélèvements sur les ressources stables de la participation des employeurs à l’effort de construction.

Le projet de loi relatif à l’emploi des fonds de la participation des employeurs à l’effort de construction constitue la deuxième étape, qui n’a pas d’incidence sur les finances publiques, de mise en oeuvre de la convention du 3 août 1998.

III.- LE PROJET DE LOI ENTÉRINE LA DIVERSIFICATION DES EMPLOIS DU 1% LOGEMENT

La convention du 3 août 1998 prévoit de consolider les moyens d’intervention du 1% logement et le projet de loi de finances pour 1999 en constitue la première application.

Pour le reste, cette convention développe deux idées fortes :

– la continuation de la modernisation des structures des organismes collecteurs, avec le renforcement du paritarisme et la transformation des CIL en unions d’économie sociale ;

– la diversification des emplois du 1% logement, pour mieux adapter ses interventions aux besoins contemporains, notamment par une extension des emplois à la sécurisation des accédants à la propriété et des locataires, c’est-à-dire la mise en place de moyens tendant à garantir leur logement en cas d’aléa dans leur existence ou de précarisation.

A.- LA TRANSPOSITION LÉGISLATIVE DE LA CONVENTION DU 3 AOÛT 1998

Le présent projet de loi constitue la mise en oeuvre législative de ce dernier volet, la réforme des structures des collecteurs devant être intégrée au projet de loi, en préparation, sur l’habitat et l’urbanisme.

En résumé :

– son article premier élargit la définition des emplois du 1% logement et modifie à cet effet l’article L 313–1 du code de la construction et de l’habitation ;

– l’article 2 en tire les conséquences sur les compétences de l’Union d’économie sociale du logement (UESL) et modifie l’article L 313-19 du même code ;

– l’article 3 adapte l’organisation financière de l’UESL à ses nouvelles missions.

On se reportera aux rapports respectifs des commissions saisies au fond du Sénat et de l’Assemblée nationale (6) pour une analyse détaillée de ces articles.

Le Sénat n’a modifié le texte proposé par le Gouvernement que sur des points peu substantiels (ordre des paragraphes et décompte des alinéas), son apport principal résidant dans l’adjonction d’un article additionnel tendant à prévoir que les contrats de prêt immobilier doivent mentionner que la garantie dont pourront bénéficier les emprunteurs en cas de chômage est financée par les fonds provenant du 1% logement.

Soucieux, comme la Commission de la production et des échanges, de ne pas retarder l’application rapide de la loi par des propositions de modifications peu substantielles du texte qui vous est soumis, votre Rapporteur pour avis s’abstiendra de proposer des amendements.

Il préfère insister sur les points qu’il juge essentiel, c’est-à-dire la mise en place de la sécurisation des accédants et des locataires, ainsi qu’un meilleur contrôle des emplois de la ressource “ 1% logement ”.

B.- LA NÉCESSITÉ D’UN CONTRÔLE ACCRU DES EMPLOIS
DU 1% LOGEMENT

La convention du 3 août 1998 prévoit la sécurisation des accédants salariés d’entreprises assujetties à la PEEC ou souscripteurs d’un prêt à l’accession sociale (PAS) et, également celle des locataires en leur facilitant l’accès au logement locatif.

1.- Les accédants à la propriété

Pour les accédants à la propriété, un dispositif de mutualisation des risques devrait être mis en place dans le cadre d’un fonds de soutien pour les bénéficiaires d’un PAS et d’un fonds de prévention pour les salariés d’entreprises assujetties à la PEEC.

Selon certaines informations, il est envisagé de percevoir auprès des accédants une cotisation spécifique dont le taux pourrait être de 3,50% ou de 7,50% du prêt accordé. Votre Rapporteur observe que la participation des accédants au financement des fonds de sécurisation n’est pas mentionnée par la convention du 3 août 1998. Il considère que les taux envisagés sont extrêmement élevés, au regard des conditions actuelles du marché.

Il s’interroge également sur les conditions actuelles de fonctionnement de la société de gestion du fonds de garantie de l’accession sociale à la propriété (SGFGAS), chargée de gérer la distribution des PAS et des prêts à taux zéro (PTZ) et appelée à assurer la gestion du fonds de sécurisation des bénéficiaires de PAS.

En effet, le FGAS bénéficie déjà des cotisations des banques adhérentes et d’une subvention de l’Etat. Au 31 mars 1998, la trésorerie du fonds de garantie s’élevait à 2.574 millions de francs, selon le secrétariat d’Etat au logement.

Dans ces conditions, on ne peut que manifester une grande perplexité devant la perspective d’une contribution des accédants à la sécurisation de l’accession sociale, alors qu’une grande opacité préside aux destinées de la SGFGAS et que, notamment, il n’existe pas d’indication sur le montant et l’utilisation des produits financiers générés par la trésorerie de la société.

Dans la mesure où la SGFGAS participe à la mise en œuvre de la politique publique de l’accession à la propriété, on ne peut qu’inviter le Gouvernement à accroître sa surveillance de cette instance.

2.- La sécurisation des locataires

S’agissant des mesures tendant à faciliter l’accès au logement locatif par le financement du dépôt de garantie ou des garanties de loyers et des charges locatives, il apparaît que le Gouvernement et les CIL ne semblent pas encore retenir la même définition des bénéficiaires potentiels.

Pour les CIL, ne seraient concernés par ces mesures que les salariés des entreprises assujetties à la PEEC, alors que le Gouvernement souhaiterait que la sécurisation des locataires s’applique à l’ensemble du parc locatif conventionné, dans l’esprit et conformément à la rédaction de la convention du 3 août 1998, qui stipule que “ dans le parc locatif privé conventionné, le montant maximal [de la garantie du loyer et charges locatives] est porté à trois ans en contrepartie d’une réservation locative ”.

Votre Rapporteur considère évidemment que la sécurisation des locataires doit s’appliquer à l’ensemble du parc locatif privé conventionné, notamment dans le cadre du nouveau dispositif d’“ amortissement Besson ” prévu par l’article 68 du projet de loi de finances pour 1999. C’est l’esprit comme la lettre de la convention du 3 août 1998 qui tend à poursuivre la modernisation du 1% logement, notamment dans le sens de sa participation plus claire à des missions d’intérêt général. Ce point de vue est d’ailleurs celui des partenaires sociaux gestionnaires de l’UESL.

3.- L’amélioration du contrôle des emplois du 1% logement

Qu’il s’agisse de la situation financière de la SGFGAS, appelée à gérer les versements du fonds de soutien (sécurisation chômage des titulaires d’un PAS) aux établissements de crédit, ou de l’action des CIL, dont certains ont pu prendre le contrôle de sociétés anonymes d’HLM ou d’administrateurs de biens, la situation actuelle n’est pas satisfaisante et doit être améliorée à plusieurs points de vue.

Votre Rapporteur a déjà évoqué la nécessité de faire la lumière sur la situation financière réelle de la SGFGAS. S’agissant des CIL, il serait souhaitable d’augmenter la participation des partenaires sociaux à leur gestion. Le regroupement des structures à raison d’un CIL par département permettrait également d’augmenter les économies de gestion et de clarifier les interventions.

La convention du 3 août 1998 prévoit que l’objectif d’investissement annuel des associés collecteurs de l’UESL est de 4,5 milliards de francs par an pour l’ensemble des opérations réglementées ou réalisées au moyen de prêts sur fonds d’épargne.

Il est important que les interventions des associés de l’UESL aient un effet certain sur le logement social : les prises de contrôle d’organismes constructeurs ne doivent plus survenir et les relations financières avec les HLM doivent être améliorées. Il n’est pas interdit d’envisager, compte tenu du niveau très bas des taux de marché, des prêts à taux zéro aux organismes HLM avec des différés de remboursement, voire des subventions. Actuellement, il est courant que soit pratiqué un taux de 2% sans différé de remboursement.

Ainsi, et conformément aux objectifs de la convention, les interventions financières du 1% devraient permettre de diminuer le loyer d’équilibre des opérations et de mieux garantir le niveau d’entretien et d’habitabilité du logement. La réduction des loyers est évidemment l’objectif essentiel de la politique de construction des logements sociaux.

Au total, votre Rapporteur prend acte que le projet de loi qui vous est soumis transpose l’un des volets de la convention du 3 août 1998.

Il est convaincu que la mise en œuvre de cette convention nécessite la plus grande vigilance afin que la modernisation du 1% logement se traduise effectivement par une prise en charge plus large des politiques publiques en faveur du logement social.

EXAMEN EN COMMISSION

La Commission des finances, de l’économie générale et du Plan a procédé à l’examen pour avis, lors de sa séance du 2 décembre 1998, du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à l’emploi des fonds de la participation des employeurs à l’effort de construction.

Votre Rapporteur pour avis a rappelé que le prélèvement effectué au titre de la participation des employeurs à l’effort de construction (PEEC), communément appelée “ 1% logement ”, représentait 0,45% de la masse salariale, puisqu’une fraction s’élevant à 0,50% avait été antérieurement affectée au Fonds national d’aide au logement (FNAL). Il a précisé que la collecte annuelle s’élevait à environ 7 milliards de francs et que s’y ajoutaient des remboursements de prêts à long terme d’un montant comparable, ce qui portait les ressources stables des collecteurs à environ 14 milliards de francs.

Il a rappelé quels étaient les emplois traditionnels des fonds du 1%, en soulignant le bouleversement introduit par la mise en oeuvre du prêt à taux zéro (PTZ), entièrement financé sur les ressources du 1%. Il a expliqué que ce choix avait justifié, en 1997 et 1998, une contribution du 1% logement au budget de l’Etat égale à la moitié des ressources stables des collecteurs.

Il a souligné la réussite du prêt à taux zéro, puisqu’environ 410.000 prêts avaient été accordés depuis l’origine, son financement étant favorisé par la baisse des taux d’intérêt, le coût moyen d’un PTZ pour l’Etat étant passé d’environ 73.000 francs en 1995 à environ 50.000 francs actuellement.

Il a ajouté que l’importance du prélèvement réalisé en 1997 et 1998 sur les ressources stables des collecteurs du 1% logement avait fait peser une hypothèque sur le financement du PTZ après 1998 et sur l’avenir du 1% logement. Il a indiqué que la préoccupation de l’Etat et des partenaires sociaux avait abouti à la conclusion de la convention du 3 août 1998, prévoyant la reprise en charge progressive par l’Etat, sur cinq ans, du financement du PTZ, la garantie de la poursuite par les organismes collecteurs de leurs missions traditionnelles et la mise en place d’un dispositif de sécurisation des accédants à la propriété et des locataires.

Il a donc souhaité, compte tenu de la nécessité d’une mise en œuvre rapide de cette convention, que le projet de loi ne soit pas amendé et qu’il soit adopté dans le texte issu des travaux du Sénat. Il a expliqué cette volonté par le souci de ne pas compromettre la mise en oeuvre du dispositif de sécurisation le 1er janvier 1999, compte tenu des modifications peu substantielles apportées par le Sénat au projet de loi déposé par le Gouvernement.

Il a cependant indiqué que son avis écrit insisterait sur un certain nombre de questions que la convention du 3 août 1998 comme le projet de loi n’avaient pas résolues. Il s’est, en particulier, interrogé sur les modalités mêmes de gestion du 1% logement, en souhaitant le renforcement du contrôle de l’Etat et des partenaires sociaux sur son fonctionnement.

M. Pierre Méhaignerie a souhaité obtenir des précisions sur le contenu des modifications apportées par le Sénat. Il a ensuite demandé si le système de collecte allait être modifié dans le sens de la centralisation et si l’information sur l’utilisation des fonds collectés était suffisante.

Votre Rapporteur pour avis a précisé que le Sénat avait adopté un article additionnel prévoyant que tout contrat de prêt immobilier consenti à une personne susceptible de bénéficier de la prise en charge temporaire d’une partie des remboursements de prêts immobiliers destinés à l’accession sociale à la propriété devait mentionner que cette aide est financée par la participation des employeurs à l’effort de construction. Il a ensuite indiqué que le système resterait décentralisé, mais qu’il était possible d’envisager une harmonisation du réseau des collecteurs en prévoyant, par exemple, une départementalisation de la collecte. Il a ajouté que le choix de l’échelon départemental permettrait probablement d’améliorer la gestion paritaire des organismes collecteurs, faisant observer que la gestion de la plupart des comités interprofessionnels du logement (CIL) n’associait pas suffisamment les partenaires sociaux. Votre Rapporteur pour avis a enfin considéré, s’agissant de l’utilisation des fonds collectés, que le rapport annuel de l’Agence nationale pour la participation des employeurs à l’effort de construction (ANPEEC) n’était pas totalement fiable, ni exhaustif, puisque certains CIL avaient pu acheter des agences immobilières, et qu’il convenait donc d’augmenter les contrôles sur ces organismes.

M. Francis Delattre s’est enquis du montant, sur cinq ans, de la prise en charge par l’Etat du financement du prêt à taux zéro.

Votre Rapporteur pour avis a indiqué que cette prise en charge serait opérée par tranches d’environ 1,3 milliard de francs par an.

La Commission a successivement émis un avis favorable à l’adoption sans modification des articles 1er, 2, 3 et 4, puis de l’ensemble du projet de loi, adopté par le Sénat, relatif à l’emploi des fonds de la participation des employeurs à l’effort de construction.

N° 1242. - Avis de M. Jacques GUYARD (au nom de la commission des finances)sur le projet de loi, adopté par le Sénat, (n° 1192) relatif à l’emploi des fonds de la participation des employeurs à l’effort de construction

1 ) Rapport d’information sur la recevabilité financière des amendements, par M. Jacques Barrot, dixième législature, 25 mai 1994, n° 1273, pages 27 et 59.

2 ) Rapport général, tome II, examen de la première partie de la loi de finances pour 1999, n° 1111, pages 704 à 714.

3 ) Selon la direction du budget, le rendement devrait être de l’ordre de 7.400 millions de francs en 1998. Cependant les bases transmises par l’Agence nationale pour la participation des employeurs à l’effort de construction (ANPEEC) et la situation résumée des opérations du Trésor, publiée au Journal officiel, Lois et décrets, du 21 novembre 1998, page 17655, permettent d’envisager un prélèvement sur les collecteurs du 1% au profit du compte n° 902-30 compris entre 7.550 et 7.600 millions de francs (recouvrement effectif de 6.923 millions de francs au 30 septembre 1998 et base de 15.180 millions de francs).

4 ) Rapport général, tome II, examen de la première partie de la loi de finances pour 1997, n° 3030, page 472.

5 ) L’attribution d’un prêt à taux zéro donne lieu à la mobilisation des autorisations de programme correspondantes mais au versement de la moitié des crédits de paiement l’année de l’engagement des crédits et de la seconde moitié l’année suivante.

6 ) Rapport de M. Marcel Pierre Cleach, au nom de la Commission des affaires économiques et du plan du Sénat, n° 49, du 4 novembre 1998 ; et rapport n° 1217 de M. Daniel Marcovitch, au nom de la Commission de la production et des échanges de l’Assemblée nationale du 2 décembre 1998.