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La commission des affaires culturelles, familiales et sociales a examiné pour avis, sur le rapport de M. Marc Bernier, les crédits pour 2007 de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».
M. Marc Bernier, rapporteur, a d’abord indiqué que le budget consacré en 2007 aux anciens combattants s’élève à 3 484,1 millions d’euros. Cela correspond à une augmentation de la dotation moyenne par pensionné de 2,25 % par rapport à l’année précédente. Au total, de 2002 à 2006, cette dotation moyenne par pensionné est passée de 7 830 euros à 8 628 euros, ce qui représente une hausse de 10,2 % sur l’ensemble de la période. Il faut s’en féliciter, d’autant que cette augmentation traduit la mise en œuvre d’un nombre important de mesures attendues de longue date par le monde combattant.
Parmi les mesures les plus emblématiques du budget des anciens combattants, qui s’inscrit dans la continuité des efforts engagés par le gouvernement depuis maintenant plusieurs années, on relève : la nouvelle augmentation, de deux points, du niveau d’indice de la retraite du combattant, porté à 37 points d’indice de pension militaire d’invalidité à compter du 1er janvier 2007 ; l’engagement de l’harmonisation des pensions d’invalidité des sous-officiers, par l’alignement des taux des pensions militaires d’invalidité des sous-officiers des différentes armées sur ceux de la marine ; la décristallisation annoncée par le Président de la République, autrement dit la mise à niveau de la retraite du combattant et des pensions militaires d’invalidité versées aux anciens combattants originaires de l’ancien empire colonial, pour un montant total de 110 millions d’euros par année ; la prise en charge des dépenses d’appareillage des mutilés de guerre avec un engagement de crédits dans le présent budget à hauteur de 635 000 euros ; la poursuite du soutien à l’Institution nationale des Invalides par l’affectation d’une dotation de fonctionnement à hauteur de 9,75 millions d’euros à l’établissement.
Le rapporteur a ensuite abordé le thème particulier qu’il a développé dans son avis, à savoir l’avenir de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC), et précisé avoir formulé ce thème de manière un peu provocatrice – « l’ONAC va-t-il mourir ? » –, car il est vraiment essentiel d’affronter aujourd’hui cette question, à l’heure où l’ONAC fête son 90è anniversaire et où va s’achever le contrat d’objectifs et de moyens qui avait été conclu en 2002 pour la période 2003-2007.
Vingt auditions et trois déplacements sur le terrain (à Rennes, à Laon et à Boulogne-Billancourt) ont permis de découvrir le travail considérable des femmes et des hommes de l’ONAC, présents sur le terrain, œuvrant au service des intérêts du monde combattant, mais aussi plus largement de l’ensemble de la société, parfois dans le silence, mais toujours par une action de proximité bienveillante. À l’issue de ces rencontres, un premier constat s’impose : l’ONAC, par ses quatre-vingt-dix années d’existence, a apporté la preuve qu’il pouvait s’adapter aux évolutions du monde contemporain et se moderniser. Cela constitue déjà un « petit miracle ».
L’ONAC constitue une spécificité française. Établissement public administratif à caractère national, il n’en possède pas moins des services dans chaque département. Parce que l’ONAC est la « maison du combattant », il se révèle bien plus qu’une administration, une véritable institution. Cela se traduit dans les faits par une gestion paritaire des conseils d’administration, national comme départementaux. C’est d’ailleurs parce que les associations sont parties prenantes du fonctionnement quotidien de l’ONAC qu’un partenariat s’est peu à peu noué entre elles et l’office, et plus particulièrement les services départementaux : l’organisation des collectes du « Bleuet de France » symbolise ce lien et, plus encore, fonde les actions tant de solidarité que de mémoire menées à la fois par l’ONAC et par les associations collectrices.
Les missions traditionnelles de l’ONAC, qui dispose d’un budget propre s’élevant pour l’année 2005 à 110,8 millions d’euros, sont bien connues. Avec l’exercice de la mission de reconnaissance, les services départementaux de l’ONAC assurent la tâche traditionnelle qui consiste à attribuer notamment la carte du combattant et le titre de reconnaissance de la Nation. Par la mission de réparation, les services de l’ONAC assurent une tâche non négligeable d’instruction des demandes de carte du combattant.
Deux missions se sont en outre plus particulièrement développées ces dernières années et préfigurent la modernité de l’action de l’ONAC, conformément à sa devise : « mémoire et solidarité ». La solidarité, telle qu’elle est assurée par l’ONAC, se caractérise par la diversité des types d’interventions, qui ne sont pas exclusivement financières, au profit des ressortissants dans le besoin, et par la multiplicité des publics concernés (anciens combattants et veuves, mais aussi pupilles de la Nation, anciens combattants de l’étranger, etc.). Les rencontres sur le terrain ont mis en évidence la spécificité de l’action de l’ONAC, liée à la fois à la parfaite connaissance qu’a l’office des besoins de ses ressortissants et à la facilité avec laquelle les ressortissants s’adressent à lui : le suivi apporté par les assistantes sociales des directions départementales est un suivi très personnalisé et global, qui prend en compte la personne dans son intégralité. Cette réalité du terrain est confirmée par les chiffres établis au niveau national : en 2005, plus de 60 000 dossiers ont ainsi été instruits dans les différents départements et 58 804 entretiens individuels réalisés. Au plan budgétaire, l’effort de l’Etat est constant : le présent projet de budget pour 2007 prévoit une augmentation des crédits sociaux de l’ONAC de 500 000 euros (après déjà deux augmentations dans les deux précédents budgets).
La politique de la mémoire s’est beaucoup développée à partir des années 1980. L’ONAC y occupe une place active aux côtés d’autres acteurs, tels le Haut conseil à la mémoire combattante, placé auprès du Président de la République, dont l’ONAC assure le secrétariat, ou encore la direction de la mémoire, du patrimoine et des archives du ministère de la défense. L’action de terrain des délégués à la mémoire combattante est particulièrement déterminante, comme le rapporteur a eu l’occasion de le constater à Rennes ou près de Laon, sur le « Chemin des Dames ». Ces jeunes licenciés d’histoire, d’une trentaine d’années, dont les emplois sont progressivement contractualisés par l’ONAC, constituent véritablement la force du réseau, grâce à une action attentive de veille, d’entretien des lieux de mémoire - comme le montre l’entretien de quelque mille monuments aux morts le long du Chemin des Dames par le responsable mémoire de Laon –, d’organisation de visites d’établissements scolaires sur les principaux lieux de mémoire, et ce grâce à un travail commun avec les associations. Après des années riches pour la commémoration de 2004 à 2006, l’effort de l’ONAC ne se dément pas. Pour 2007, d’importantes actions au service de la mémoire sont encore envisagées, telles l’organisation de concours et d’expositions ou encore la poursuite de la collecte de témoignages oraux sur la guerre d’Algérie.
Mais une chose pour l’ONAC était de s’adapter aux défis du XXè siècle, ce que l’office a finalement remarquablement réussi, une autre sera d’affronter les défis de demain … voire d’après demain. Un certain nombre d’exemples montrent cependant que l’ONAC affronte, déjà aujourd’hui, de grands défis de la modernité, cette « époque nouvelle et encore inconnue », pour reprendre les mots de la philosophe Hannah Arendt :
– En matière de solidarité, le chantier fondamental auquel est désormais attelé le ministère, à savoir la question de la prise en charge des veuves les plus démunies en lien avec les préoccupations modernes plus générales relatives à la dépendance, avance. Le groupe de travail vient d’achever ses travaux et un diagnostic a été réalisé ; des annonces concrètes du ministère sont attendues.
– L’action des écoles de reconversion professionnelle de l’ONAC au service de la reconversion des personnes handicapées est considérable – il convient de saluer à cet égard le taux de 87,7 % de réussite aux examens en 2005 – mais il faut aussi souligner la participation toute récente de ces écoles à la « bataille pour l’emploi », comme on peut le constater, par exemple, à l’école Jean-Janvier de Rennes : l’accueil de stagiaires orientés par des missions locales, pour des formations de courte durée, accompagnés grâce au parrainage d’anciens combattants, connaît des résultats en termes d’insertion dans l’emploi à hauteur de 100 %.
– Les transformations des neuf maisons de retraite de l’ONAC constituent un autre exemple de cette adaptation à la modernité, à l’image de la rénovation de l’établissement de Boulogne-Billancourt. Grâce à la signature de conventions tripartites passées entre les établissements, les conseils généraux et les directions départementales des affaires sanitaires et sociales, ces maisons s’adaptent aux évolutions législatives en matière médico-sociale. La politique de labellisation des établissements poursuivie par l’ONAC va également dans le sens d’une amélioration de la réponse à de nouveaux besoins liés à l’évolution démographique.
– La politique de la mémoire elle aussi se transforme au gré des mutations du temps présent, en particulier par la mise en œuvre des deux concepts novateurs que sont le « tourisme de mémoire » et la « mémoire partagée ».
L’ensemble de ces exemples donne la mesure des efforts considérables de modernisation réalisés par l’ONAC aujourd’hui. Naturellement, si ce sont là des premières réponses aux enjeux d’aujourd’hui, la question reste entière de l’avenir de l’ONAC d’ici quelques années, en particulier à l’issue du contrat d’objectifs et de moyens qui avait été conclu en 2002 pour les années 2003 à 2007 et prévoyait la mise en œuvre de deux mouvements d’effectifs opposés mais complémentaires : la création de 100 postes de délégués à la mémoire combattante, 17 d’assistants de service social et 5 de secrétaires administratifs, contre la suppression de 4 postes de directeurs, 6 de conseillères techniques de service social et 277 d’agents de catégorie C.
Concernant cette question de l’avenir de l’ONAC à moyen et à long terme, il faut d’abord rappeler qu’en 2002, à la veille de la signature du contrat d’objectifs et de moyens, la pérennité de l’ONAC n’était pas assurée. Par ailleurs, un premier bilan d’application du contrat d’objectifs et de moyens, sur la période 2003-2005, a montré que ce contrat avait permis une modernisation de l’office et garanti ses sources de financement. Dans ce cadre a été menée à bien une première réorientation des missions de reconnaissance et de réparation vers la politique de la mémoire. En outre, des outils budgétaires modernes ont été mis en œuvre : constitution de pôles financiers interdépartementaux pour la gestion comptable des crédits, ouverture d’un site intranet et d’un site internet, renouvellement du contrôle de gestion par l’établissement d’une comptabilité analytique, mise en œuvre de budgets annexes dans les maisons de retraite et écoles de reconversion professionnelle.
En conclusion, trois scénarios principaux peuvent être distingués pour l’avenir :
– la disparition de l’ONAC à plus ou moins long terme serait une hypothèse peu réaliste au regard de la spécificité de l’action qu’il met en œuvre, notamment dans les domaines de la solidarité et de la mémoire ;
– la continuité, scénario envisageable qui consiste à faire preuve de pragmatisme en achevant la mise en œuvre du présent contrat puis, éventuellement, en prolongeant les efforts engagés avec la signature d’un nouveau contrat, de manière à poursuivre la rationalisation. Ce schéma aurait le mérite de la constance. La seule question que l’on peut se poser est de savoir si cette solution peut suffire, en particulier si l’on envisage le très long terme. En effet, si cette solution a le mérite du pragmatisme, elle présente le léger inconvénient de faire passer les moyens peut-être avant la fin, sans permettre une réflexion vraiment radicale sur les transformations de l’office ;
– enfin, la transformation, voie la plus ambitieuse. Il s’agirait dans ce cadre d’ouvrir une réflexion impliquant toutes les parties prenantes sur l’avenir à long terme de l’ONAC. Cette hypothèse n’exclut d’ailleurs pas la signature d’un nouveau contrat, mais elle permet d’insister sur la nécessité d’une réelle « remise à plat » des missions de l’ONAC. On peut en effet se demander si la mémoire et la solidarité, voire la seule mémoire, ne constitueront pas à long terme les uniques missions prises en charge par l’office. Encore faudra-t-il répondre à un certain nombre de questions. Comment l’ONAC peut-il affronter seul ce défi, en particulier sans un partenariat avec l’Éducation nationale ? Quels moyens budgétaires accompagneront-ils cette évolution ? Quelles seront les conséquences en termes institutionnels sur les structures de l’ONAC, notamment départementales ? Il reste que, par-delà ces questions, se trouverait dessinée une réelle perspective d’avenir, au service du monde combattant mais aussi de l’ensemble de la société, perspective à même de garantir la pérennité d’une institution qui restera en tout état de cause la maison du combattant.
Un débat a suivi l’exposé du rapporteur.
Le président Jean-Michel Dubernard a félicité le rapporteur d’avoir choisi de développer un thème clair et bien ciblé. Le taux de réponses au questionnaire adressé au ministère obtenues au 10 octobre – date butoir résultant de la loi organique relative aux lois de finances –, soit 98 %, doit également être salué. Enfin, le rappel, dans un encadré de l’avis, de l’origine à la fois patriotique et poétique du « Bleuet de France » est particulièrement bienvenu.
Mme Martine David a indiqué que son intervention se concentrera sur un seul point, la nécessité d’un engagement ferme du gouvernement en faveur de la création d’une allocation différentielle pour les conjoints survivants les plus démunis. Cette question a déjà été évoquée de nombreuses fois ; l’an dernier, le ministre délégué aux anciens combattants n’a pourtant pas semblé y être très sensible. C’est particulièrement regrettable, car il s’agit de femmes qui sont réellement dans des situations extrêmement difficiles. Le groupe socialiste dépose cette année un amendement affectant 20 millions d’euros au financement d’une telle mesure. Comme certains membres de la majorité présentent également un amendement dans ce sens, même si c’est pour un montant beaucoup plus modeste, à savoir 5 millions d’euros, il faut espérer une avancée. Cela démontre en tout état de cause – si besoin était – que la demande exprimée n’est pas incongrue et doit être étudiée avec attention.
M. Alain Néri a tout d’abord déclaré qu’un budget qui passe de 3,614 milliards d’euros en 2006 à 3,484 milliards en 2007 ne peut pas être présenté comme étant en augmentation : au contraire, il diminue de 3,58 % en euros courants, donc de 5,3 % en termes réels. Et si l’on raisonne par pensionné et par ressortissant, le budget apparaît aussi en baisse, contrairement à ce qu’indique le ministre.
Plusieurs graves problèmes, par ailleurs, ne sont toujours pas réglés :
– On ne peut naturellement que se féliciter de la mesure dite de « décristallisation ». Mais il est tout de même regrettable qu’il ait fallu cinq ans et la projection d’un film devant le Président de la République pour que cette mesure soit prise. En effet, il faut rappeler qu’une commission présidée par M. Anicet Le Pors avait analysé le problème et dégagé les moyens nécessaires dès le début de l’année 2002. On peut aussi rappeler que la cristallisation initiale avait été effectuée en 1960 par un gouvernement de droite : voulait-on faire payer leur indépendance aux pays qui venaient d’y accéder ?
– S’agissant de la retraite du combattant, le gouvernement annonce une hausse de deux points d’indice de pension militaire d’invalidité, après une augmentation d’un point pour l’année 2006. Au total, sur la législature, le gain aura été de 0,8 point par an. On est très loin de l’engagement de la majorité actuelle, qui consistait à augmenter de quinze points d’indice le niveau de cette retraite. Le groupe socialiste défendra un amendement prévoyant une augmentation de onze points afin que cet engagement puisse être tenu.
– La question de l’allocation différentielle pour les veuves a déjà été évoquée : elle est évidemment très importante et il faut rappeler, à cet égard, que l’année dernière un amendement sur ce thème a été retiré en séance publique, après les engagements du ministre à traiter cette question.
– Il y a également un sujet que le rapporteur n’a pas évoqué, et pour cause : le ministre délégué aux anciens combattants n’aime pas en entendre parler. Mais les anciens combattants, de même que la représentation nationale, ont subi une véritable injure de la part du ministre, car il a menti sur ce point, à savoir la question de la « campagne double » ; il s’agit d’un véritable mensonge d’État. En effet, on sait qu’un rapport avait été demandé sur cette question à un inspecteur général des affaires sociales, M. Christian Gal, et que le gouvernement s’était engagé à transmettre ce rapport au Conseil d’État. Dès lors, chaque fois que l’on interrogeait le ministre sur ce dossier, il déclarait que le rapport avait été adressé à la Haute juridiction. Or il n’en était rien, comme l’a indiqué le vice-président du Conseil d’État quand il a été interrogé à ce sujet.
C’est pourquoi en cohérence avec la reconnaissance solennelle par le législateur de la guerre d’Algérie en tant que guerre, le groupe socialiste défendra un amendement afin que soit – enfin – financée l’attribution du bénéfice de la « campagne double » au profit des fonctionnaires anciens combattants d’Algérie, qui méritent d’être traités comme les vétérans des autres guerres.
– Pour ce qui est du plafond majorable de la rente mutualiste, la majorité socialiste l’avait porté à 115 points d’indice de pension militaire d’invalidité ; elle avait également décidé d’exprimer ce plafond en points d’indice et non en francs, afin qu’il puisse bénéficier de revalorisations automatiques. La majorité actuelle s’est engagée à le porter à 130 points. Le groupe socialiste présente donc un amendement assurant que soit atteint ce plafond.
– Il serait souhaitable que soit abaissé l’âge de jouissance de la demi-part fiscale supplémentaire, aujourd’hui réservée aux titulaires de la carte du combattant âgés d’au moins soixante-quinze ans, de façon à en faire bénéficier les anciens combattants titulaires de cette carte âgés de plus de soixante-dix ans.
– Le problème des orphelins de guerre doit être traité. La situation des orphelins des déportés a déjà été significativement améliorée : il reste maintenant à fournir un effort équivalent en faveur des orphelins des otages fusillés ou massacrés sur le territoire national et des résistants tombés au combat les armes à la main durant la Seconde Guerre mondiale, en un souci d’équité.
– Tous les députés sont attachés à l’ONAC et à son rôle social. Il est donc très opportun que les crédits sociaux de l’ONAC soient augmentés, comme le prévoit ce projet de loi de finances pour 2007, à hauteur de 500 000 euros. Il est arrivé, les années précédentes, que ces suppléments de crédit soient budgétés au titre de la réserve parlementaire ; cette année, ils figurent dans le projet de loi de finances. L’essentiel est qu’ils augmentent, afin que la reconnaissance de la Nation puisse être ainsi exprimée envers les plus démunis.
– Un autre sujet important doit trouver une réponse définitive. Il s’agit de la consécration, au profit de la « troisième génération du feu » (les anciens combattants d’Algérie), d’une journée commémorative nationale pour les victimes de la guerre. Une date a certes déjà été fixée au 5 décembre, mais c’est la date du 19 mars – jour de l’entrée en vigueur du cessez-le-feu – qui s’impose. La date du 5 décembre semble en effet avoir été choisie par le ministre délégué aux anciens combattants comme au hasard, en partie pour des raisons liées aux disponibilités du Président de la République. Alors même que le Parlement a officiellement reconnu en 1999 que s’est bien déroulée en Algérie une guerre, les anciens combattants attendent encore une reconnaissance officielle fondée sur la seule date valable, celle du 19 mars.
– Doit également être évoquée la question des soldats morts en Algérie pour des raisons non directement liées au déroulement des combats, par exemple à l’occasion d’accidents. Ces personnes, dès lors qu’elles sont décédées pour la République, ont aussi le droit à être reconnues « mortes pour la France » et cette mention doit être apposée sur leur état civil.
– En raison des insuffisances du projet de loi de finances et, évidemment, tout particulièrement en raison de la diminution des crédits de cette mission, le groupe socialiste ne votera pas pour son adoption, sauf à ce que les amendements que ses commissaires présentent soient adoptés.
M. Georges Colombier a d’abord remercié le rapporteur pour la qualité de son travail. Au nombre des éléments positifs contenus dans ce budget et dans les précédents de la législature, il faut souligner l’assouplissement des conditions d’attribution de la carte du combattant au profit des anciens combattants d’Afrique du Nord, qui remonte à la loi de finances pour 2004, ainsi que la revalorisation de deux points de la retraite du combattant résultant de la loi de finances pour 2006, cette dernière mesure étant attendue depuis 1978. Le niveau de la retraite du combattant sera en outre augmenté de deux nouveaux points d’indice de pension militaire d’invalidité au 1er juillet 2007. De plus, il faut saluer la « décristallisation » des pensions militaires d’invalidité et retraites du combattant, un premier pas dans cette direction ayant été effectué dès 2002 par le gouvernement de M. Jean-Pierre Raffarin. Enfin, la croissance des crédits sociaux de l’ONAC est, à l’évidence, tout à fait opportune.
Cependant, force est de reconnaître que beaucoup de choses restent à faire pour que soient satisfaites les revendications légitimes des anciens combattants.
Ainsi, la situation des veuves d’anciens combattants mérite toute l’attention des pouvoirs publics. Lors de la discussion budgétaire de l’année dernière, le ministre avait demandé à M. Michel Bouvard de retirer un amendement sur ce sujet, en annonçant la mise en place d’un groupe de travail. Ce groupe de travail a effectivement été créé en mai 2006 et il a rendu ses conclusions le 19 octobre dernier. La présidente de ce groupe de travail, Mme Liliane Block, a précisé aujourd’hui, en remettant le rapport au ministère délégué aux anciens combattants, que deux solutions sont envisageables : soit la création d’une allocation différentielle universelle par la loi, soit l’affectation d’une partie des crédits sociaux de l’ONAC à l’amélioration de la situation de ces veuves. La première hypothèse semble difficile à mettre en œuvre en raison des contraintes du calendrier parlementaire d’ici la fin de la législature. En revanche, la seconde hypothèse présente l’avantage de la souplesse et permet, en outre, de renforcer le rôle institutionnel de l’ONAC. C’est pourquoi un amendement a été déposé de manière à favoriser la mise en œuvre de cette seconde hypothèse.
S’agissant de l’ONAC, M. Georges Colombier a rappelé qu’il est le représentant de l’Assemblée nationale à son conseil d’administration. Or, à l’occasion de la dernière réunion de ce conseil le 31 octobre dernier, le ministre délégué aux anciens combattants a annoncé la conclusion d’un nouveau contrat d’objectifs et de moyens sur la période 2008-2012, les parlementaires comme les anciens combattants devant être associés à son élaboration. Un amendement visant à pérenniser l’ONAC a donc, dans cette même perspective, été déposé.
D’autres revendications du monde combattant sont légitimes et doivent être rappelées. Il s’agit notamment du relèvement du plafond majorable de la rente mutualiste. Compte tenu de l’état des finances publiques, un amendement dans ce sens a été déposé mais qui se limite à une dépense supplémentaire de 4,45 millions d’euros, correspondant à une augmentation de deux points et demi de ce plafond.
Le rapport de M. Christian Gal sur le thème de la « campagne double » a été effectivement transmis avec retard au Conseil d’Etat et il serait bienvenu que le ministre fasse des annonces à ce propos.
S’agissant de la simplification du « rapport constant », réalisée il y a deux ans – ce qu’il faut saluer –, il convient également de veiller à ce que celle-ci ne se traduise pas par une hausse du coût de la vie qui serait supérieure à la revalorisation régulière du point de pension militaire d’invalidité.
D’autres revendications sont également à prendre en compte, qu’il s’agisse de la jouissance d’une demi-part fiscale supplémentaire au profit des titulaires de la carte du combattant dès l’âge de soixante-dix ans, de l’apposition de la mention « mort pour la France » sur l’état civil des anciens combattants décédés en Algérie dans le cadre d’accidents – qui n’étaient quand même pas là-bas en villégiature –, de la question des modalités de l’indexation des pensions militaires d’invalidité ou encore de celle de l’indemnisation des personnes incorporées de force dans les formations paramilitaires Reichsarbeitsdienst et Kriegshilfsdienst.
Le cas des personnes ayant participé aux opérations extérieures – la quatrième génération du feu – doit aussi être étudié de près. Ces personnes se voient trop souvent refuser la qualité de combattants alors même qu’elles ont droit à la reconnaissance de la Nation.
Enfin, concernant la consécration de la date du 19 mars comme journée de commémoration pour les victimes de la guerre d’Algérie, cette question a été abordée lors du dernier congrès de la Fédération nationale des anciens combattants en Algérie, Maroc et Tunisie (FNACA) à Lyon. Le ministre a dit comprendre le problème posé et il conviendra donc de l’interroger sur ce sujet au cours de la séance publique.
M. Bernard Perrut a relevé que l’attention portée par les parlementaires à ce budget révèle un attachement à ceux qui ont marqué l’Histoire, qui ont fait que l’Histoire est bien celle qu’elle a été et, évoquant une visite rendue à la « Maison du combattant » de sa circonscription, il a souligné l’accueil privilégié reçu par les anciens combattants et leurs ayants droit dans ces structures. Le thème du rapport – « L’ONAC va-t-il mourir ? » – est à dessein provocateur et ouvre sur une réelle réflexion ; dans le même temps, on ne peut oublier que l’ONAC est très utile partout sur le territoire français.
Il est absolument nécessaire de préserver la politique menée au profit de la mémoire – qui permet la mise en œuvre du « devoir de mémoire » –, afin de rappeler aux plus jeunes générations l’effort des plus anciens. De ce point de vue, les développements du rapport sur l’origine du « Bleuet de France » sont très éclairants.
Le concept de « tourisme de mémoire » doit en outre être développé et la politique budgétaire l’honorer à sa juste valeur : les moyens budgétaires existants sont en effet aujourd’hui trop souvent insuffisants pour maintenir en état les divers monuments et lieux de mémoire.
Enfin, les nombreuses et légitimes revendications du monde combattant doivent être prises en compte, à la fois dans leur permanence et dans leurs évolutions, en particulier la question de la revalorisation de la retraite des anciens combattants, celle de la nécessité d’une juste indexation du niveau des pensions militaires d’invalidité par rapport au niveau de vie et en fonction des différents conflits, celle du plafond majorable de la rente mutualiste du combattant ou encore la question de l’assouplissement des conditions d’attribution d’une demi-part fiscale aux détenteurs de la carte du combattant. Sur l’ensemble de ces thèmes des efforts supplémentaires sont requis. Dans cette perspective, les amendements déposés par M. Georges Colombier méritent un soutien appuyé.
M. Jean-Paul Anciaux a souligné que le projet de loi de finances permet de prendre en compte un certain nombre des revendications du monde combattant, en particulier des personnes ayant combattu en Afrique du Nord. Quant aux trois amendements déposés par M. Georges Colombier, ils doivent être adoptés. Alors même que l’on sent une inquiétude diffuse concernant la question du devenir de l’ONAC – comme l’ont montré récemment des entretiens avec les représentants de la Fédération nationale des anciens combattants en Algérie, Maroc et Tunisie (FNACA) –, le projet de budget permet de pérenniser l’action de cette institution au plan social, ce qui est tout à l’honneur du gouvernement. Cet office prend en effet en charge des fonctions essentielles et procède à bon escient à des prestations très individualisées.
En réponse aux différents intervenants, le rapporteur a fourni les indications suivantes :
– Créer une allocation différentielle au profit des conjoints survivants des anciens combattants constitue une initiative bien évidemment fondée dans son principe, mais dont la mise en œuvre peut paraître un peu prématurée, compte tenu de la création d’un groupe de travail ad hoc, qui vient juste de remettre ses conclusions au ministre. Il faut noter en tout état de cause que l’ONAC dispose d’ores et déjà d’un certain nombre de crédits disponibles à cet effet, notamment grâce à l’augmentation de ses crédits sociaux par le présent projet de loi de finances et du fait de l’existence d’un « reliquat » remontant aux années précédentes.
– Le budget des anciens combattants envisagé en « valeur absolue » diminue en raison de l’évolution démographique, ce que personne ne conteste. Mais il est de même indéniable que la dotation moyenne par pensionné augmente dans le présent budget de 2,25 % par rapport à l’année précédente.
– Le projet de budget comporte des avancées significatives, telles la nouvelle revalorisation de deux points du niveau de la retraite du combattant, la « décristallisation » ou encore l’augmentation de 500 000 euros des crédits sociaux de l’ONAC. Vouloir tout obtenir la même année révélerait un comportement tout de même assez irresponsable.
– S’agissant de la campagne double, on ne peut que partager les opinions exprimées sur l’absence de publication du rapport de M. Christian Gal, le présent rapport soulignant expressément qu’il faut déplorer cette absence de publication. Pour autant, faute d’informations sur le nombre de personnes concernées, il est difficile de chiffrer l’impact des mesures qu’il conviendrait de prendre. Il reste que parler d’injures et de mensonges au sujet de ce dossier peut paraître excessif.
– Il faut garder à l’esprit que le plafond majorable de la rente mutualiste a déjà été augmenté il y a quatre ans et que l’on se doit de veiller au respect des équilibres budgétaires. Ainsi, l’adoption cumulée des amendements proposés par le groupe socialiste aurait pour effet de créer une dépense nouvelle de l’ordre de 500 millions d’euros, prélevés sur le programme « Liens entre la Nation et son armée », qui regroupe notamment les crédits de la journée d’appel de préparation à la défense, de la promotion et de la valorisation du patrimoine culturel ou encore de la communication et de la politique de la mémoire. En outre, il faut rappeler que le total des crédits de ce programme est, aux termes du présent projet de loi de finances, de l’ordre de 270 millions d’euros…
– Il ne semble pas opportun de revenir sur le choix de la date du 5 décembre, choix qui a déjà été l’objet de larges discussions et le plus à même de faire consensus.
– Il faut saluer le travail de représentation de l’Assemblée nationale à l’ONAC fait par M. Georges Colombier, qui de ce fait connaît particulièrement bien ce sujet. Le rôle social de l’ONAC doit bien sûr être souligné, et il convient de s’interroger sérieusement sur l’avenir de cette institution, à la veille de la fin du contrat d’objectifs et de moyens. Chacun a compris que l’ONAC n’est pas appelé à se « saborder ». Mais il sera très probablement conduit à endosser de nouvelles missions, en particulier en matière de politique de la mémoire et de mise en œuvre du devoir de mémoire. Il est important de réfléchir à ces questions dès aujourd’hui.
– Le titre choisi pour cet avis budgétaire est certes provocateur, mais cela correspond au souci de « booster » l’ONAC et le « Bleuet de France ». Concernant le bleuet, il est vrai que son histoire est tout à fait emblématique : il s’agit en effet de l’une des seules fleurs pouvant repousser sur un champ de bataille dévasté après un conflit, et ces fleurs étaient confectionnées artisanalement après les conflits par les mutilés de guerre, ce qui leur procurait un revenu complétant leur pension militaire d’invalidité. C’est pourquoi il serait bon que les députés puissent le porter cette année. Une proposition a d’ailleurs été faite au président de l’Assemblée nationale pour inviter l’ensemble des députés à arborer le bleuet lors de la séance de questions au Gouvernement de demain, au cours de laquelle devrait être posée une question sur l’avenir de l’ONAC.
– Il est vrai que les crédits consacrés au tourisme de mémoire sont insuffisants. Un déplacement dans l’Aisne a permis de constater que les quelque mille monuments aux morts qui sont érigés le long du « Chemin des Dames » sont entretenus souvent grâce à l’action d’équipes bénévoles et avec des moyens dont il faut bien reconnaître qu’ils sont, dans certains cas, de fortune.
Puis, la commission est passée à l’examen des amendements.
Article 34 – État B : Crédits du budget général
La commission a examiné un amendement de M. Alain Néri visant à augmenter de 210 millions d’euros les crédits du programme « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ». M. Alain Néri a indiqué qu’il s’agit d’augmenter de onze points le niveau d’indice de pension militaire d’invalidité de la retraite du combattant, afin de la porter de trente-sept à quarante-huit points et d’aider ainsi le gouvernement à tenir ses engagements.
Le rapporteur a convenu qu’il s’agit d’une réelle préoccupation du monde combattant mais a souligné que la demande est peu réaliste au regard des contraintes budgétaires actuelles. Il convient en outre de noter que le présent projet de loi de finances prévoit déjà la décristallisation, une augmentation des crédits sociaux de l’ONAC ainsi qu’une nouvelle revalorisation de la retraite du combattant.
M. Alain Néri a objecté qu’il aurait été possible de doser l’effort de revalorisation tout au long de la législature, à raison d’une augmentation de trois points chaque année : mais pour cela, il aurait effectivement fallu s’y prendre un peu plus tôt.
Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté l’amendement.
La commission a examiné un amendement de M. Alain Néri visant à augmenter de 210 millions d’euros les crédits du programme « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ».
M. Alain Néri a précisé qu’il s’agit de revaloriser le montant du point de pension militaire d’invalidité en l’indexant sur l’évolution des traitements de la fonction publique, compte tenu des primes. Le mode de calcul des pensions militaires d’invalidité a fait subir une perte de pouvoir d’achat importante à leurs bénéficiaires ces dernières années. L’amendement remédie à cette injustice en instaurant un « véritable rapport constant ».
Le rapporteur a répondu que la question de la détermination de la valeur du point de pension militaire d’invalidité a déjà fait l’objet d’une réforme importante avec l’article 117 de la loi de finances pour 2005. Un amendement gouvernemental avait en effet simplifié considérablement la règle connue sous le nom de « rapport constant », au fondement de cette détermination. Il n’y a donc pas lieu de revenir sur cette réforme aujourd’hui.
M. Alain Néri a fait remarquer que l’indexation proposée intègre les primes, contrairement au dispositif prévu dans la loi de finances pour 2005 et que l’objectif visé par l’amendement n’est donc pas satisfait à ce jour.
Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté l’amendement.
La commission a examiné un amendement de M. Alain Néri visant à augmenter de 210 millions d’euros les crédits du programme « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ».
Mme Martine David a indiqué qu’il s’agit d’étendre le dispositif d’indemnisation des orphelins à tous les orphelins des otages fusillés ou massacrés sur le territoire national et des résistants tombés au combat les armes à la main durant la Seconde Guerre mondiale. Le dispositif d’indemnisation des orphelins des victimes d’actes accomplis durant la Seconde Guerre mondiale ayant déjà fait l’objet d’une extension de son périmètre, il s’agit d’une simple mesure de justice.
M. René Couanau, président, a déclaré défendre personnellement cette cause.
Le rapporteur a fait observer que cette matière est réglementaire. En outre, l’établissement du champ d’indemnisation des orphelins des victimes d’actes antisémites ou de barbarie a déjà fait l’objet, en 2000 et en 2004, d’études approfondies, notamment après avis du Conseil d’État. Il ne convient donc pas de revenir aujourd’hui sur la détermination des modalités de cette indemnisation, pour laquelle le budget prévoit déjà des crédits à hauteur de 150 millions d’euros. De plus, une telle révision pourrait générer des contentieux complémentaires, source de confusion et d’insatisfaction. Enfin, cet amendement est pour le moins curieux car, s’il était adopté, il ajouterait certes 210 millions d’euros au profit d’une nouvelle catégorie de bénéficiaires, mais il retrancherait dans le même temps cette somme au détriment de l’indemnisation des victimes de persécutions antisémites et des actes de barbarie.
Mme Martine David a répondu que le rejet de cet amendement reviendrait à maintenir une injustice et que le formalisme de la réponse du rapporteur est troublant au regard de l’importance de l’enjeu. La mesure est certes réglementaire mais il n’est pas sûr que ceux qui sollicitent les représentants de la Nation soient convaincus par l’argument faisant état de risques de contentieux ! Il est donc souhaitable que le ministre se prononce sur cette question en séance publique.
M. Alain Néri a confirmé qu’il s’agit là d’une simple mesure de justice au profit de différentes victimes de mêmes drames.
Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté l’amendement.
La commission a examiné, en discussion commune, deux amendements visant à majorer les crédits du programme « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » pour financer la création d’une allocation différentielle spécifique pour les veuves d’anciens combattants : le premier de M. Alain Néri, prévoit une majoration des crédits de 20 millions d’euros ; le second de M. Georges Colombier prévoit une majoration des crédits de 5 millions d’euros.
Mme Martine David a fait remarquer que le ministre a déjà reconnu la situation dégradée des conjoints survivants les plus démunis. Ce n’est que justice de ne pas se contenter de quelques millions d’euros résiduels – ce qui reviendrait à faire l’aumône à ces personnes – pour faire avancer cette cause. Il faut œuvrer à la création d’une véritable allocation différentielle pour des personnes qui vivent souvent des situations dramatiques.
M. Georges Colombier a indiqué que son amendement ne poursuit pas tout à fait le même objectif puisqu’il ne renforce que de cinq millions d’euros – et non de vingt millions d’euros – les possibilités d’intervention du programme « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant ». Le groupe de travail mis en place par le gouvernement et présidé par Mme Liliane Block a remis ce jour son rapport à M. Hamlaoui Mékachéra, ministre délégué aux anciens combattants. L’ONAC va donc pouvoir être rapidement opérationnel et mettre en œuvre des mesures dès le second semestre 2007. L’essentiel est que cette allocation différentielle soit attribuée en 2007. Compte tenu des crédits déjà abondés et d’un démarrage prévisionnel au second semestre 2007, cinq millions d’euros devraient suffire dans un premier temps, l’essentiel étant d’amorcer le mouvement.
Le rapporteur a reconnu l’entière légitimité de l’amendement présenté par M. Georges Colombier. Les auditions et déplacements dans les directions départementales de l’ONAC ont confirmé que la question du sort des veuves d’anciens combattants est effectivement capitale aujourd’hui. Si l’annonce de la remise au ministre du rapport du groupe de travail sur cette question est une nouvelle qu’il faut saluer, la mesure proposée par M. Alain Néri reste prématurée dans la mesure où les conclusions du groupe de travail sont à peine connues. Du reste, le projet de loi de finances pour 2007 prévoit déjà une augmentation des crédits sociaux, qui concerne bien sûr notamment les mesures en faveur des veuves les plus démunies, augmentation à laquelle il faut ajouter le reliquat de l’année dernière.
M. Georges Colombier a fait remarquer que l’adoption de l’amendement, par l’affectation de crédits au profit des veuves les plus démunies, a pour effet de réduire d’autant le prélèvement sur les crédits sociaux existants de l’ONAC et va donc dans le sens d’une économie.
Le rapporteur a indiqué être favorable à l’amendement de M. Georges Colombier, dans la mesure où le prélèvement réalisé sur le programme « Lien entre la Nation et son armée » est limité, et, partant, défavorable à l’amendement présenté par M. Alain Néri. Il conviendra toutefois d’interpeller le ministre en séance sur les conclusions du groupe de travail qui ont été rendues ce jour.
M. Alain Néri a regretté que le cadre fixé par la loi organique relative aux lois de finances rende nécessaire le prélèvement de crédits dans un autre programme, mais a souligné être en mesure de proposer un mode de financement alternatif. Ainsi, l’allocation qui, par le passé, avait été créée au profit des anciens combattants chômeurs comptant quarante annuités de cotisations à l’assurance vieillesse et âgés de moins de soixante-cinq ans est en train de disparaître car, aujourd’hui, il n’y a presque plus d’anciens combattants d’Algérie de moins de soixante-cinq ans. Cela rend disponible une source de financement.
Mme Martine David a observé qu’il n’est pas juste de faire uniquement à l’opposition le reproche de diminuer les crédits du programme « Lien entre la Nation et son armée », dans la mesure où l’amendement de M. Georges Colombier s’expose à une critique similaire.
Le rapporteur a précisé que sa remarque vise les deux amendements.
Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté l’amendement de M. Alain Néri.
Suivant l’avis favorable du rapporteur, elle a ensuite adopté l’amendement de M. Georges Colombier.
M. Alain Néri a regretté que ses collègues de la majorité n’aient pas fait un effort sur ce sujet.
La commission a examiné, en discussion commune, deux amendements visant à majorer les crédits du programme « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » pour financer une hausse du plafond majorable de la rente mutualiste : le premier de M. Alain Néri prévoit une majoration des crédits de 60 millions d’euros ; le second de M. Georges Colombier prévoit une majoration des crédits de 4,45 millions d’euros.
Mme Hélène Mignon a précisé que l’amendement de M. Alain Néri vise à prévoir, enfin, un financement effectif de l’augmentation du niveau du plafond majorable de la rente mutualiste.
M. Georges Colombier a souligné que la logique de son amendement n’est pas contradictoire avec celle de l’amendement de ses collègues socialistes, mais qu’il serait déjà important, compte tenu du coût de cette revalorisation, de proposer, dans un premier temps, une revalorisation de 2,5 points, de manière à porter le niveau du plafond à 125 points d’indice de pension militaire d’invalidité. Cela correspond à une dépense estimée à 4,45 millions d’euros. Il s’agit là d’essayer d’avancer progressivement.
M. Alain Néri a indiqué comprendre la position de M. Georges Colombier mais lui a adressé la même remarque qu’au sujet de la retraite du combattant. Si l’effort avait été réalisé sur l’ensemble de la législature, comme cela avait été le cas avec la majorité précédente, il aurait été possible de limiter la portée de la présente demande de revalorisation.
Le rapporteur a souligné l’effort du gouvernement réalisé sur le niveau de la retraite du combattant. Il est vrai que le relèvement du plafond majorable de la rente mutualiste du combattant correspond à un réel enjeu, mais il faut aussi garder à l’esprit l’augmentation de 7,5 points de ce plafond réalisée il y a quatre ans.
En outre, si l’ensemble des amendements présentés par les commissaires membres du groupe socialiste était adopté, ce serait plus de 500 millions d’euros qui seraient prélevés au détriment du programme « Lien entre la Nation et son armée », ce qui représente le double des crédits de ce programme ! Il est surprenant du reste d’envisager un prélèvement sur le programme « Lien entre la Nation et son armée » au détriment des crédits dédiés notamment à la politique de mémoire, alors que trop peu de mesures sont prises en faveur de la « majorité silencieuse », c'est-à-dire pour l’entretien des sépultures ou la construction et l’entretien des monuments et lieux commémoratifs. La proposition de M. Georges Colombier est toutefois assez raisonnable et n’empêchera pas dans le même temps d’entendre la position du ministre sur cette question à l’occasion de la séance publique.
M. Alain Néri a déclaré qu’il fera d’autres propositions de financement en séance publique.
Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté l’amendement de M. Alain Néri.
Puis, suivant l’avis favorable du rapporteur, elle a adopté l’amendement de M. Georges Colombier.
La commission a examiné un amendement de M. Alain Néri visant à augmenter de 20 millions d’euros les crédits du programme « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » afin de financer l’attribution de la bonification dite « campagne double » au profit des fonctionnaires et assimilés ayant participé à la guerre d’Algérie et aux combats du Maroc et de Tunisie.
M. Alain Néri a indiqué qu’il s’agit simplement d’aligner les droits des combattants de la troisième génération du feu sur ceux des combattants des précédentes générations en tenant compte de la loi de 1999 relative à la guerre d’Algérie. Dans ce domaine, le gouvernement de M. Lionel Jospin n’avait pas perdu de temps. Au contraire, les parlementaires de la présente législature et le monde combattant attendent toujours que le rapport de M. Christian Gal, qui traite de cette question, leur soit communiqué et soit rendu public.
M. René Couanau, président, s’est félicité que M. Alain Néri s’acquitte d’un devoir de mémoire envers M. Lionel Jospin !
Le rapporteur a estimé que la question importante de la « campagne double » ne doit pas être négligée, indiquant qu’elle est d’ailleurs explicitement abordée dans son rapport où il est souligné, à propos de l’absence de communication du rapport de M. Christian Gal par le ministère délégué aux anciens combattants, qu’« on ne peut que déplorer cette attitude quelque peu paradoxale qui consiste à prendre au sérieux une question par l’établissement d’un diagnostic, sans que puisse être menée la réflexion en conséquence ».
Mme Martine David s’est interrogée sur le sens de cette phrase.
Le rapporteur a répondu que les auditions ont mis en évidence l’attachement du monde combattant à cette question. Il est regrettable que le rapport établi par M. Christian Gal ne soit pas communiqué ; ce sujet doit donc être l’un des motifs d’interpellation majeurs du gouvernement lors de la séance publique. Pour autant, il est difficile, en l’absence de données chiffrées et de détermination d’un champ d’application précis, d’adopter telle ou telle mesure.
Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté l’amendement.
La commission a examiné un amendement de M. Alain Néri visant à augmenter de 15 000 euros les crédits du programme « Mémoire, reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » afin de prévoir le financement de l’inscription « Algérie » sur la soie des emblèmes des unités qui ont participé à ce conflit.
M. Alain Néri a fait remarquer qu’il s’agit d’une action de mémoire à laquelle le rapporteur est attaché. La commission s’honorerait si elle adoptait cet amendement à l’unanimité.
Le rapporteur a jugé que cet amendement paraît quelque peu dépassé dans la mesure où la mention « AFN » a été portée sur les emblèmes d’un certain nombre d’unités depuis de nombreux mois. Les unités ont d’ailleurs défilé avec cette inscription à l’occasion des cérémonies du 5 décembre dernier et lors de la journée nationale d’hommage aux « morts pour la France » pendant la guerre d’Algérie et des combats du Maroc et de la Tunisie. De plus, un arrêté du 19 novembre 2004 relatif à l’attribution de l’inscription « AFN 1952 –1962 » sur les drapeaux et étendards des formations des armées et services a prévu que ladite mention soit apposée sur les emblèmes de la plupart des unités. Le dispositif proposé par l’amendement de M. Alain Néri est donc en quelque sorte déjà caduc.
Mme Martine David a estimé que c’est une raison de plus pour achever le travail et apposer cette mention sur tous les emblèmes.
M. Alain Néri a souligné le coût modéré de cette mesure.
Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté l’amendement.
Après l’article 43
La commission a examiné un amendement de M. Alain Néri visant à modifier le code général des impôts. M Alain Néri a précisé qu’il s’agit d’abaisser l’âge de jouissance de la demi-part fiscale réservée aux titulaires de la carte d’ancien combattant à soixante-dix ans.
Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté l’amendement.
La commission a examiné un amendement de M. Alain Néri visant à créer une mesure d’indemnisation au bénéfice de tous les orphelins des otages fusillés ou massacrés sur le territoire national et des résistants tombés au combat les armes à la main durant la Seconde Guerre mondiale.
M. Alain Néri a indiqué qu’il s’agit d’étendre le bénéfice des indemnisations en cours à l’ensemble des pupilles de la Nation et orphelins mineurs de la Seconde Guerre mondiale.
M. René Couanau, président, a jugé qu’on ne peut qu’être d’accord avec la finalité d’un tel amendement.
Le rapporteur a indiqué que cet amendement relève du domaine réglementaire et qu’il y est défavorable pour des raisons d’équité entre les différentes générations du feu.
Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté l’amendement.
Article additionnel après l’article 43 : « Présentation d’un rapport au Parlement sur les moyens d’assurer la pérennité de l’ONAC »
La commission a examiné deux amendements de M. Georges Colombier et de M. Alain Néri prévoyant, pour le premier, qu’un rapport sera présenté par le gouvernement au Parlement, avant le 30 juillet 2007, sur les moyens d’assurer la pérennité de l’ONAC et, pour le second, que l’office et ses structures déconcentrées seront confirmés dans leurs missions au-delà du terme de l’actuel contrat d’objectifs et de moyens.
M. Georges Colombier a estimé que l’ensemble du monde combattant et des parlementaires s’accorde aujourd’hui sur la nécessité de garantir la pérennité de l’ONAC. S’il est vrai que le ministre délégué aux anciens combattants, M. Hamlaoui Mékachéra, a indiqué lors du dernier conseil d’administration de l’ONAC, le 31 octobre 2006, qu’un nouveau contrat d’objectifs et de moyens sera élaboré, en collaboration avec les parlementaires et l’ensemble des acteurs du monde combattant, l’adoption de cet amendement n’en apparaît pas moins nécessaire : ainsi le ministre sera-t-il conduit à préciser ses intentions au cours de la séance publique.
M. Alain Néri s’est félicité de l’amendement présenté par M. Georges Colombier, dans la mesure où il s’inscrit dans la continuité des amendements déposés depuis plusieurs années par les membres du groupe socialiste pour garantir la pérennité de l’ONAC, amendements dont il faut toutefois rappeler qu’ils ont toujours été rejetés par la majorité jusqu’à présent. Dès lors, ces deux amendements pourraient être fusionnés en vue d’une adoption à l’unanimité par la commission.
Le rapporteur a salué le dépôt d’amendements abordant les thèmes développés dans l’avis budgétaire, mais a estimé que ces deux amendements ont une portée différente : l’amendement de M. Georges Colombier permet d’engager une réflexion opportune sur l’avenir des missions de l’ONAC. En revanche, l’amendement de M. Alain Néri se limite à la confirmation des missions actuelles sur l’ONAC, sans réelle réflexion.
M. Alain Néri a dénoncé les contorsions déplacées auxquelles se livre le rapporteur pour justifier le rejet de l’amendement présenté par les membres du groupe socialiste, en l’opposant artificiellement à celui de M. Georges Colombier : en réalité, la commission s’honorerait bien davantage en adoptant ces deux amendements qui poursuivent un but analogue.
M. Georges Colombier a souligné la nécessité de ne pas politiser le monde combattant, ce qui conduirait in fine à le diviser, raison pour laquelle il pourrait sembler opportun d’adopter à l’unanimité ces amendements : tous deux soulignent en effet la nécessité de poursuivre la dynamique engagée par le premier contrat d’objectifs et de moyens pour les années 2003 à 2007.
Le rapporteur a proposé aux commissaires membres du groupe socialiste de cosigner l’amendement de M. Georges Colombier, qui permet d’engager une véritable réflexion sur le champ des missions qui seront à l’avenir dévolues à l’ONAC.
Mme Martine David a de nouveau déploré les contorsions du rapporteur.
M. Alain Néri a indiqué maintenir son amendement, tout en se déclarant également favorable à celui déposé par M. Georges Colombier.
Après que M. René Couanau, président, a suggéré de rectifier la rédaction de l’amendement de M. Georges Colombier, afin d’y substituer à l’emploi du futur celui du présent, la commission, suivant l’avis favorable du rapporteur, a adopté à l’unanimité cet amendement, qui a été cosigné par M. Alain Néri, Mme Martine David et Mme Hélène Mignon.
Suivant l’avis défavorable du rapporteur, la commission a rejeté l’amendement de M. Alain Néri.
Article additionnel après l’article 43 : « Conditions d’attribution de la mention « Mort pour la France » aux militaires français tués durant la guerre d’Algérie »
La commission a examiné un amendement de M. Alain Néri prévoyant que la mention « Mort pour la France » est apposée sur l’état civil des militaires français tués durant la guerre d’Algérie.
M. Alain Néri a indiqué qu’il s’agit d’une mesure légitime de justice et de reconnaissance par la Nation des militaires français tués durant la guerre d’Algérie, dans ce pays et restés fidèles aux institutions de la République.
Le rapporteur s’est déclaré défavorable à l’amendement, en rappelant que l’attribution de la mention « Mort pour la France » est effectuée en fonction d’un certain nombre de critères définis par la loi et les règlements et qu’il ne convient pas de modifier pour les adapter à tel ou tel cas d’espèce. En effet, l’article L. 488 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre énumère déjà les situations dans lesquelles les actes de décès doivent porter cette mention. Ainsi, les militaires ayant combattu pendant la guerre d’Algérie ou en Tunisie et au Maroc ne sont pas écartés de cet honneur, grâce à des modifications législatives nombreuses et importantes intervenues dès 1955 et en 1974, mais aussi grâce à la loi du 18 octobre 1999 qui a permis de consacrer la reconnaissance par la République française, dans des conditions de stricte égalité avec les combattants des conflits antérieurs, des services rendus par les personnes qui ont participé sous son autorité à la guerre d'Algérie et aux combats en Tunisie et au Maroc entre le 1er janvier 1952 et le 2 juillet 1962. Dans ces conditions, il apparaît que l’amendement de M. Alain Néri n’a pas lieu d’être adopté.
Prenant bonne note des précisions intéressantes apportées par le rapporteur, M. Georges Colombier a cependant indiqué qu’il ne pourrait voter contre l’amendement, dans la mesure où celui-ci s’inscrit dans la continuité des propos qu’il a précédemment tenus sur cette question.
Contrairement à l’avis défavorable du rapporteur, la commission a adopté l’amendement.
Après l’article 43
La commission a examiné un amendement de M. Alain Néri visant à instituer, à la date du 27 mai, un jour de commémoration intitulé « Journée de la résistance ».
M. Alain Néri a jugé nécessaire de répondre à cette revendication légitime du monde combattant, en précisant par ailleurs que ce jour de commémoration ne sera ni chômé, ni férié.
M. René Couanau, président, a estimé, en tant que maire, qu’il n’apparaît pas toujours opportun de multiplier les journées de commémoration.
Mme Martine David a néanmoins considéré que, dans les faits, cette journée de commémoration existe déjà.
Le rapporteur s’est déclaré défavorable à l’amendement, en soulignant que la journée du 18 juin permet déjà de commémorer l’appel à la résistance et à la poursuite du combat. Il apparaît dès lors préférable d’engager une politique de mémoire unique, en évitant de se livrer à des guerres de chapelles quant au choix de la date des journées de commémoration. Le 27 mai 1943 correspond certes à la première réunion du Conseil national de la Résistance, mais il est important également de garder le souvenir de ceux qui, notamment parmi les Forces françaises libres, se sont engagés dans la Résistance et ce dès le 18 juin 1940.
Après que M. Alain Néri a répondu qu’il ne s’agit en rien d’une querelle de chapelles, mais simplement de la volonté de rendre hommage à tous ceux qui se reconnaissent dans le Conseil national de la Résistance, qui a joué un rôle déterminant dans le rétablissement de la République et dont il convient d’honorer justement la mémoire, la commission a rejeté l’amendement.
Conformément aux conclusions du rapporteur, la commission a donné un avis favorable à l’adoption des crédits pour 2007 de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation ».
*
Puis, la commission des affaires culturelles, familiales et sociales a examiné pour avis, sur le rapport de M. Gérard Cherpion, les crédits pour 2007 du programme « Handicap et dépendance ».
M. Gérard Cherpion, rapporteur, a indiqué avoir retenu pour son rapport un thème d’étude particulier, à savoir celui de la place des personnes handicapées dans les fonctions publiques à l’occasion de la mise en place du Fonds pour l’insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP).
Le rapporteur a, en premier lieu, fait une présentation succincte des principaux volets du programme « Handicap et dépendance ».
Tout d’abord, 70 % des crédits du programme sont consacrés au versement de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) qui constitue une ressource essentielle pour plus de 801 000 personnes en 2005, chiffre en augmentation de 1,9 % par rapport à 2004. Pour 2006, il semble qu’il y ait un infléchissement de cette croissance et les prévisions s’établissent autour d’un chiffre de 806 000 personnes. Pour 2007, le ministère de la santé table sur un nombre de 819 000 bénéficiaires.
Ensuite, 28 % des crédits sont consacrés au financement des établissements et services d’aide par le travail (ESAT) et de l’aide au poste versée à ces mêmes ESAT au titre de la rémunération garantie des travailleurs handicapés (GRTH). Le budget pour 2007 doit permettre de financer près de 112 811 places contre 107 811 en 2005 et 110 311 en 2006, le coût annuel budgété d’une place dans ces établissements étant de 11 597 euros. Un complément de financement est également attribué sous la forme d’une aide au poste, complément qui varie en fonction de la durée du travail exercé et du niveau de participation financière de l’ESAT lui-même. Ce complément est valorisé en 2007 à hauteur de 8 771 euros. La réforme de la GRTH a été précisée par un décret du 16 juin 2006, l’objectif étant d’augmenter les ressources des salariés concernés. Il semble cependant que ce nouveau dispositif continue à susciter de nombreuses inquiétudes et qu’une fragilisation des ESAT soit redoutée par beaucoup.
Parmi les crédits également regroupés dans le programme « Handicap et dépendance », 13 824 470 euros sont consacrés, au titre de l’action n° 1, au financement des maisons départementales des personnes handicapées dont la mise en place a commencé en 2006 et se poursuivra en 2007. L’action n° 4 « Compensation des conséquences du handicap » rassemble les crédits consacrés à soutenir l’action des instituts nationaux pour les jeunes sourds et les jeunes aveugles, ainsi que les crédits consacrés au financement des auxiliaires de vie à domicile en faveur des personnes très lourdement handicapées. Les actions nos 5 et 6 recouvrent notamment les subventions accordées aux associations nationales têtes de réseau dans le domaine des personnes âgées et du handicap.
Globalement les crédits du programme « Handicap et dépendance » pour 2007 se montent à 8 059 276 612 euros en autorisations d’engagement contre 7 820 426 011 euros en 2006, soit une augmentation de 3%.
Concernant l’emploi des personnes handicapées dans les trois fonctions publiques, une grande innovation de la loi du 11 février 2005 a notamment été la création du Fonds d’insertion pour les personnes handicapées dans la fonction publique (FIPHFP) sur le principe de l’Association pour la gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées (AGEFIPH) existant dans le secteur privé. La loi du 10 juillet 1987 posait déjà l’obligation d’employer 6 % de personnes handicapées dans la fonction publique de l’État, comme dans les collectivités territoriales et les établissements publics hospitaliers lorsqu’ils emploient plus de vingt agents en équivalent temps plein. Cette prescription n’était toutefois assortie d’aucune sanction en cas de non-respect et, dans les faits, ce taux n’était pas atteint. Les statistiques disponibles jusqu’alors étaient d’ailleurs fort approximatives, parfois même inexistantes pour ce qui est, par exemple, de l’Education nationale. Ces statistiques englobaient non seulement les personnes handicapées mais aussi l’ensemble des bénéficiaires de l’obligation d’emploi, parmi lesquels les titulaires d’un emploi réservé, dont les militaires en retraite.
L’article 36 de la loi du 11 février 2005 instaure dorénavant des pénalités financières pour les employeurs publics qui ne respectent pas l’obligation de 6 %, pénalités financières qui sont versées au bénéfice du FIPHFP. Ce nouveau fonds est géré par la Caisse des dépôts et consignations dont l’expertise en la matière est reconnue. Un comité national composé de dix-sept membres est chargé de piloter le dispositif. Ce comité se compose de représentants des administrations de tutelle, de représentants syndicaux, mais aussi des associations ou organismes en charge des personnes handicapées. Trois personnalités qualifiées, dont M. Jean-François Chossy, assistent également aux réunions de ce comité national, qui a été mis en place le 7 juin 2006 et dont la présidence est assurée par Mme Martine Faucher, déléguée ministérielle aux personnes handicapées du ministère de la justice. On peut cependant s’étonner et regretter que le comité national ne dispose pas à ce jour d’une petite structure administrative propre, lui conférant une certaine autonomie d’expertise et de communication.
Les premières déclarations des employeurs publics ont eu lieu au cours de l’été et les premières contributions ont été versées pour un montant total qui s’élève à 52,05 millions d’euros. Pour 2006 et à titre transitoire, les contributions demandées bénéficient d’un abattement de 80 %. Ce taux d’abattement sera ramené à 60 % pour 2007, 40 % pour 2008 et 20 % pour 2009. Les montants collectés par le FIPHFP sont donc amenés à augmenter de manière considérable au cours des prochaines années. Début novembre 2006, 6 133 employeurs publics étaient contributeurs, sur près de 53 000 employeurs publics potentiellement éligibles. Dans l’ensemble, la bonne volonté des administrations a été reconnue par tous et la campagne de déclaration s’est déroulée dans des conditions satisfaisantes. On peut signaler cependant que le ministère de l’économie, des finances et de l’industrie s’est mis en situation d’infraction et est passible d’un assujettissement forfaitaire coûteux. On peut également remarquer qu’en vertu de l’article 137 de la loi de finances pour 2006, l’Education nationale bénéficie d’un régime dérogatoire qui a suscité la désapprobation de beaucoup de personnes auditionnées.
Les déclarations recueillies permettent aujourd’hui d’y voir un peu plus clair sur la réalité de l’emploi des personnes handicapées dans les fonctions publiques. Selon des résultats provisoires arrêtés au 6 novembre 2006 et transmis par la Caisse des dépôts et consignations, l’État et ses établissements publics administratifs emploieraient 3,62 % de personnes handicapées, les collectivités locales 3,77 % et la fonction publique hospitalière 3,76 %. Ces chiffres sont encore sujets à caution mais devraient s’affiner au cours des prochaines années. La Caisse des dépôts et consignations envisage déjà de procéder à des contrôles. Le recensement du FIPHFP fera en tout cas désormais référence et se substituera aux différentes enquêtes jusqu’alors réalisées.
Les fonds collectés par le FIPHFP doivent servir à financer des actions ou des projets d’insertion professionnelle, de maintien dans l’emploi, de formation et d’information des personnes handicapées dans les fonctions publiques. Les employeurs sont invités à présenter au FIPHFP leur demande de financement. Des comités régionaux se mettent actuellement en place et pourront rapidement examiner les dossiers. Une première estimation chiffre les demandes potentielles de financement à 20 millions d’euros. Il serait par ailleurs opportun de réfléchir à la possibilité d’une saisine directe du fonds par la commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées, ce qui renforcerait la cohérence du dispositif, la commission étant amenée à traiter de l’ensemble des questions relatives au projet de vie des personnes handicapées.
Sur les fonds collectés, 20 % sont susceptibles d’être utilisés par le comité national pour des actions transversales aux trois fonctions publiques, ce qui semble une bonne chose. Parmi les actions prioritaires, l’édition d’un guide ou vademecum à destination des directeurs d’administration ou des ressources humaines paraît nécessaire afin de les sensibiliser à la problématique du handicap. C’est en effet sur eux que repose en bonne partie le succès de l’intégration des personnes handicapées dans la fonction publique.
Il serait intéressant également que des actions en partenariat avec l’AGEFIPH puissent être envisagées, en s’appuyant par exemple sur l’expérience du réseau Cap emploi.
Pour l’utilisation des fonds, la question de la compatibilité du dispositif retenu avec les règles des marchés publics a été posée avec raison.
S’agissant de l’accessibilité des locaux au public, le FIPHFP n’envisage pas de financer des études globales ou des audits mais étudiera une contribution au prorata de l’utilisation des locaux entre les usagers et les salariés handicapés.
En matière d’emploi des personnes handicapées, les barrières psychologiques sont importantes et perdurent encore, dans la fonction publique comme ailleurs. Elles constituent de sérieux freins à l’embauche de personnes handicapées. Une prise de conscience est cependant réellement en train de se produire.
Il semble également que l’Education nationale aura un rôle clé à jouer dans l’évolution de la situation, par l’importance des recrutements qu’elle peut engager et par leur valeur symbolique, un enseignant handicapé pouvant par son métier contribuer plus que d’autres au changement des mentalités, mais aussi parce que l’emploi des personnes handicapées commence par une meilleure formation initiale. Chacun sait combien l’effort entrepris en faveur de la scolarisation des enfants handicapés est important pour l’avenir.
Un débat a suivi l’exposé du rapporteur.
Mme Hélène Mignon s’est interrogée sur la place réservée aux personnes handicapées dans la fonction publique et s’est inquiétée de la possibilité laissée à l’Éducation nationale de défalquer de sa contribution financière le coût des postes d’auxiliaire de vie scolaire. Ce n’est pas un exemple à suivre.
Le dispositif mis en place par la loi du 11 février 2005 pour assurer l’articulation entre l’allocation aux adultes handicapés et la prestation de compensation n’est pas satisfaisant car l’allocation compensatrice pour tierce personne (ACTP) permettait de fournir un revenu complémentaire aux personnes handicapées qu’elles perdent en optant pour la prestation de compensation puisque les aides humaines qu’elles financent visent à couvrir des dépenses correspondant à des charges effectives. Lorsque la personne handicapée fait appel à un aidant familial, la prestation de compensation ne lui permet pas de retrouver le financement qu’elle obtenait au titre de l’ACTP. De même, les montants de dépenses en aide humaine pris en charge au titre de la prestation de compensation sont insuffisants. Le nouveau système se traduit donc par une baisse du pouvoir d’achat des personnes lourdement handicapées.
Par ailleurs, toutes les structures d’hébergement demandent que l’aide au poste soit augmentée. La participation horaire doit être augmentée pour prendre en compte le coût réel des services au sein des entreprises et services d’aide par le travail (ESAT).
M. Michel Heinrich a souligné l’importance que revêt l’obligation d’employer des personnes handicapées au sein des fonctions publiques. la loi du 11 février 2005 a permis de faire entrer dans les faits l’obligation d’emploi en créant une contrainte financière ; son adoption était une nécessité. Il peut paraître effectivement choquant de permettre à l’Éducation nationale de déroger aux obligations posées par la loi. Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 11 février 2005, les ESAT se montrent inquiets quant à leur financement : qu’en est-il de la réalité de ces difficultés ?
M. Jean-Pierre Door a rappelé l’importance de la loi du 11 février 2005 qui répond aux demandes des acteurs de terrain et des personnes handicapées ; 2006 est certes la première année d’application des réformes mais un certain nombre de points sont désormais acquis. Par ailleurs, il paraît souhaitable de relever le nombre de postes de soins infirmiers à domicile ainsi que celui des places d’accueil de jour. En ce qui concerne la création de places en établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes (EHPAD) et leur médicalisation, il faut relever la longueur des délais dans le secteur public qui conduisent les familles à se tourner vers le secteur privé. Il convient de faciliter d’urgence la création de places en EHPAD. De nombreux territoires, dont celui de Montargis, en ont un besoin pressant.
M. René Couanau, président, a souligné l’importance du droit à compensation établi par la loi du 11 février 2005 et a souhaité que la commission des affaires culturelles, familiales et sociale soit régulièrement informée de sa mise en œuvre pratique ainsi que de celle des maisons départementales des personnes handicapées.
Mme Hélène Mignon a indiqué que la mise en place des maisons départementales des personnes handicapées s’effectuait dans de bonnes conditions en dépit de l’hétérogénéité des personnels concernés. En revanche, les montants affectés au financement de la prestation de compensation ne parviennent pas à palier la baisse du revenu disponible des personnes handicapées.
En réponse aux différents intervenants, le rapporteur a donné les éléments d’information suivants :
– Le volume de l’enveloppe financière consacrée à la prestation de compensation dépend essentiellement du budget de la CNSA, les départements venant en complément. On manque de recul pour pouvoir apprécier l’adaptation des crédits disponibles.
– Il est exact que la mise en place des maisons départementales du handicap s’effectue dans de bonnes conditions.
– Concernant le régime dérogatoire dont bénéficie l’Éducation nationale au titre du calcul de sa contribution financière au FIPHFP, presque toutes les personnes auditionnées ont fait part de leur désapprobation. Cependant, l’Éducation nationale a effectué le versement de sa contribution, d’un montant de 5,7 millions d’euros, en temps et en heure, ce qui témoigne de sa bonne volonté.
– Un des acquis de la loi du 11 février 2005 est de pouvoir chiffrer précisément la place des personnes handicapées au sein des différentes fonctions publiques, qui s’établit en moyenne à 3,69 %.
– La réforme de l’accueil en ESAT a été effectuée par un décret du 16 juin 2006. Il existe effectivement un certain nombre d’inquiétudes relatives à la pérennité de certaines de ces structures. Il faut s’interroger sur la prise en compte de la lourdeur des handicaps des travailleurs des ESAT : des différences de productivité existent entre les différents ESAT. La situation financière de certains ESAT peut se trouver fragilisée en cas de recrutement de personnes très lourdement handicapées.
– Les services de soins infirmiers à domicile de la région Centre proposaient 3 906 places fin 2005. Le nombre de places a augmenté de près de 200 places par an depuis 2001.
La commission a approuvé les conclusions du rapporteur sur les crédits du programme « Handicap et dépendance » et a donné un avis favorable à l’adoption des crédits de la mission « Solidarité et intégration » pour 2007.