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En préalable, le Président Pierre Méhaignerie a indiqué qu’il convient de mieux valoriser les travaux effectués par les membres de la Commission et rappelé les missions d’information en cours. MM. Yves Censi, Marc Le Fur et Daniel Garrigue ont constitué un groupe de travail sur la revalorisation des petites retraites agricoles. Il serait souhaitable que les conclusions de ce groupe soient reprises par le Gouvernement à l’occasion de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.
M. Daniel Garrigue a précisé que ce travail, mené en concertation avec la profession agricole et le ministère de l’Agriculture à partir du débat budgétaire de l’an dernier, a expertisé des mesures qui doivent permettre aux exploitants qui n’ont pas été pris en compte par les plans successifs de revalorisation des retraites agricoles d’obtenir des droits identiques à ceux qui ont été concernés par ces plans. Le coût total de ces mesures avoisine 300 millions d’euros pour 300.000 pluripensionnés et épouses d’exploitants agricoles. Il faut rappeler qu’il y a plus de 2 millions de retraités agricoles.
Les trois mesures proposées sont les suivantes : appliquer les coefficients de minoration des revalorisations en tenant compte de 37,5 années d’assurance tous régimes confondus, diminuer progressivement le seuil d’accès aux revalorisations pour les retraités d’avant 2002 ayant eu des carrières agricoles courtes et mettre en place des coefficients de revalorisation linéaires, tous régimes confondus. Le Premier ministre a annoncé avoir noté ces revendications ; il reste encore aujourd’hui à les concrétiser.
M. Marc Le Fur a estimé qu’il s’agit de propositions d’équité concernant principalement les femmes, injustement laissées pour compte des différents plans de revalorisation. Les systèmes techniques de coefficient de minoration pour le calcul de leur pension sont en effet fortement pénalisants. Il n’est cependant pas possible aux parlementaires de proposer eux-mêmes ces mesures, compte tenu de l’article 40 de la Constitution.
Le Président Pierre Méhaignerie a alors donné lecture d’un communiqué à la presse sur ce sujet, qu’il souhaite diffuser à titre personnel.
M. Jean-Louis Dumont s’est interrogé sur la représentation de la commission des Finances dans les organismes extraparlementaires. Ainsi, l’AFD doit connaître une réforme statutaire conduisant à transformer le conseil de surveillance en conseil d’administration. Comment se passera le renouvellement des parlementaires dans le nouvel organisme ? Quelles en seront les modalités ?
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La commission des Finances a commencé l’examen de la seconde partie du projet de loi de finances pour 2007 par le budget des Affaires européennes sur le rapport de M. Jean-Louis Dumont, Rapporteur spécial.
M. Jean-Louis Dumont, Rapporteur spécial, a rappelé que le prélèvement sur recettes en 2007 s’élève à 18,7 milliards d’euros en 2007. Après une stagnation sur la période 1998-2002, qui reflète en particulier la sous-consommation observée sur les fonds structurels, le budget communautaire connaît à nouveau une progression nette. Cette évolution devrait se poursuivre au cours des prochaines années, après l’accord du 17 mai 2006 sur les perspectives financières 2007-2013, qui permet de financer la solidarité nécessaire envers les nouveaux États membres, tout en préservant l’essentiel des politiques communautaires.
Le projet de budget communautaire pour 2007 inaugurera les nouvelles perspectives financières et concernera, très probablement, une Union européenne élargie à 27, avec l’adhésion de la Bulgarie et de la Roumanie le 1er janvier prochain. Les nouvelles perspectives financières stabilisent le budget communautaire à environ 1 % du PIB annuel de l’Union. La Commission européenne avait initialement proposé un budget total européen atteignant 1,26 % du revenu national brut (RNB) annuel de l’UE, soit 1.024 milliards d'euros, en prix 2004, sur sept ans. La France s’était alors jointe à cinq autres gros contributeurs nets pour demander un budget limité à 1 % du RNB communautaire annuel. Le paquet finalement adopté par le Conseil européen de décembre 2005 prévoit des dépenses à hauteur de 1,045 % du RNB communautaire (862,4 milliards d'euros sur sept ans).
Le Conseil a introduit une « clause de réexamen » pour lancer une réflexion approfondie sur les finances communautaires en 2008 - 2009, et notre pays devra s’y préparer. Cette clause couvre l’ensemble du budget communautaire, en dépenses et en recettes ; elle mentionne explicitement la PAC et le chèque britannique, sans toutefois lier les deux sujets. Une ambiguïté persiste également sur la période de mise en œuvre, avant ou après 2013 ; en tout état de cause, le Conseil, statuant à l’unanimité, gardera un rôle central.
S’est engagé, au début de 2006, un « trilogue » entre la Commission, le Conseil et le Parlement européen. Ce dernier était très déçu du manque d’ambition du budget communautaire. La présidence autrichienne a alors laissé au Parlement européen une marge de manœuvre de 2 milliards d'euros, ce qui, en définitive, aboutit à un total de 864,3 milliards d'euros en crédits d’engagement (prix 2004) sur la période 2007-2013. Le résultat de ce « trilogue » est le signe d’une tendance de fond des institutions européennes vers une montée en puissance du Parlement européen. Cette évolution contribue à la résorption du « déficit démocratique » de l’UE si souvent décrié, et il faudra la consolider.
Ce budget manque singulièrement d’ambition pour l’Europe. Il faut reconnaître les limites des calculs en termes de « retour », qui ne prennent pas en compte les dynamiques communautaires. Mme Catherine Colonna, ministre déléguée aux Affaires européennes, déclarait le 29 août dernier, devant les ambassadeurs, qu’« on ne devient pas une puissance en y consacrant 1 % de son PIB ». Face à l’opposition unanime au maintien du chèque dont bénéficie le Royaume-Uni, la présidence britannique a accepté la remise en cause partielle de ce système. Au cours de la période 2007-2013, le Royaume-Uni devra verser au budget communautaire une contribution complémentaire dont le montant « ne devra pas être supérieur à 10,5 milliards d’euros ». La nouvelle décision sur les ressources propres devra faire l’objet d’un traité qui sera soumis à ratification des États membres, selon leurs procédures constitutionnelles nationales.
Le projet de budget pour 2007, issu du Conseil du 14 juillet 2006, prévoit en crédits d’engagement 125,8 milliards d’euros, soit 1,08 % du RNB de l’Union à 27 (+ 3,7 %), et en crédits de paiement, 114,6 milliards d’euros, soit 0,98 % du RNB (2,3 %). La France, quoi qu’elle ait appuyé les orientations générales de la Commission, n’a cependant pas souhaité, à ce stade, donner son accord, compte tenu du niveau d’économies jugé trop important sur les dépenses agricoles. La Commission s’oppose très fortement au compromis du Conseil, en particulier sur les économies qu’il entend réaliser sur les dépenses administratives, ce dernier proposant de supprimer la moitié des postes vacants à la suite des départs en retraite. Les parlementaires européens dénoncent, de leur côté, le calibrage restrictif des crédits de paiement.
Les contrôles sur les fonds communautaires sont traités cette année dans un chapitre spécifique de l’annexe jaune. En France, les contrôles sur les fonds structurels sont effectués par la Commission interministérielle de coordination des contrôles (CICC - fonds structurels). Pour les subventions agricoles, ils sont effectués par les offices agricoles eux-mêmes, en liaison avec les services du ministère de l’Agriculture et sous la coordination de la CICC - FEOGA garantie. On peut s’interroger sur l’efficacité des contrôles de ces fonds, afin d’en améliorer l’utilisation, en particulier en Corse et dans les collectivités d’Outre-mer. Le secrétariat de la CICC - FEOGA garantie sera assuré par le ministère des Finances à partir du 1er janvier prochain, alors qu’il l’était jusqu’à maintenant par une émanation des offices agricoles, et les contrôles devraient ainsi gagner en indépendance. Le nouveau règlement financier agricole prévoit la mise en place, à partir de 2007, d’une déclaration d’assurance signée par les organismes payeurs ; pour ce faire, ils devront tous mettre en place un système d’audit interne. Les contrôles seront allégés sur les dépenses de développement rural. Le nouveau système évitera donc les redondances et renforcera l’efficacité des contrôles.
La Cour des comptes européenne estime que les dépenses agricoles sont toujours affectées d’un taux d’erreur significatif, en France comme dans plusieurs autres États membres. La Commission européenne elle-même effectue des missions d’enquête dans les États membres. En matière agricole, les refus d’apurement à la charge du budget de l’État français constituent une charge annuelle de plus de 100 millions d’euros en moyenne depuis 1996 et un montant de 126 millions d’euros pour l’année 2006. Une correction de 118,3 millions d’euros a été décidée en 2006 au titre de la programmation du FSE. En outre, la France est concernée par 22 procédures devant la Cour de justice des Communautés européennes.
Les nouvelles rubriques de dépenses ne bouleversent pas la structure du budget communautaire.
La rubrique Compétitivité pour la croissance et l’emploi concentre les crédits affectés à la stratégie de Lisbonne. Ces dépenses d’avenir, qui incluent, au premier chef, la recherche et l’innovation, mais aussi l’éducation et la formation et les réseaux transeuropéens de transport et d’énergie, ont malheureusement constitué une variable d’ajustement de la négociation. De 114,6 milliards d’euros en crédits d’engagement proposés initialement par la Commission européenne, l’enveloppe est ramenée à 74,1 milliards d’euros en prix 2004 sur la période 2007-2013.
Deuxième poste en dépenses du budget communautaire, la politique régionale s’est vue affecter une enveloppe de 308 milliards d’euros, en prix 2004, sur la période 2007-2013, soit 36,5 % du budget communautaire en crédits d’engagement. Les crédits sont réorientés vers les priorités de la stratégie de Lisbonne (entre 60 et 75 % des crédits devront leur être affectés). La grande différence est la suppression de tout zonage, qui était source de difficulté de gestion et de complications administratives. La France devrait bénéficier de 12,7 milliards d'euros, en prix 2004, de retours sur la période 2007-2013, à comparer aux 15,7 milliards qu’elle avait reçus au cours de la précédente période 2000-2006.
Le Comité interministériel sur l’aménagement et la compétitivité des territoires du 6 mars dernier a arrêté le cadre dans lequel va s’inscrire l’utilisation des fonds structurels en France. Un Cadre de référence stratégique national, en cours de concertation, servira de matrice à l’élaboration de Programmes opérationnels, qui devront être définis pour chacune des régions françaises. Le Gouvernement a malheureusement pris la décision de maintenir la gestion des fonds structurels au niveau de l’État, c’est-à-dire des préfets de région. Seule la région Alsace continue à mener une expérience de gestion décentralisée. Dans les autres régions, des délégations de crédits pourront être accordées aux conseils régionaux, dans la limite de 40 % des enveloppes globales. Le Gouvernement envisage seulement de porter ce pourcentage à 50 %.
Ce maintien est contraire à la loi « Libertés et responsabilités locales » du 13 août 2004. Certes, certaines régions ne veulent pas assumer la gestion des fonds structurels, mais le Gouvernement aurait pu se montrer moins centralisateur, dans la mesure où, depuis de nombreux mois, les conseils régionaux ont fait la preuve de leur compétence. La Commission européenne elle-même incite d’ailleurs les États membres à favoriser l’implication des régions dans la gestion des fonds structurels, et plusieurs États le font. Le Gouvernement a décidé de faire coïncider la programmation des fonds structurels européens avec les contrats de projet État-régions pour la période 2007-2013. Si cette décision se justifie par un souci de cohérence, elle laisse craindre que les fonds européens ne suppléent les manques de crédits de l’État dans le financement des contrats de projet. Cette tentation, qui jusqu’à présent est restée marginale, est contraire aux règlements communautaires en matière d’additionalité, et pourrait être sanctionnée. En outre, le Gouvernement devra faire en sorte que la nouvelle programmation évite les « coups d’accordéon » que l’on a connus entre 2000 et 2006, tout autant que le saupoudrage des crédits, en privilégiant les grands projets structurants.
La nouvelle rubrique 2 Conservation et gestion des ressources naturelles permet d’assurer le regroupement de l’ensemble des dépenses relatives à la PAC, au secteur de la pêche et à l’environnement. Si l’enveloppe des dépenses de marché est conforme aux conclusions de l’accord de Bruxelles d’octobre 2002, les dépenses de développement rural ont été fortement réduites par rapport aux propositions initiales de la Commission européenne.
Plusieurs pistes sont évoquées pour la quatrième grande réforme de la PAC après la « clause de réexamen » en 2008 - 2009 : découplage par rapport à la logique productiviste, diversification économique, soutien de la qualité, protection sanitaire, respect de l’environnement… Il faudra, en particulier, renforcer la sécurité alimentaire à nos frontières, pour faire face aux conséquences économiques de la multiplication des risques sanitaires et écologiques, dioxine et PCB notamment. La France reste le premier bénéficiaire de la PAC, avec des retours de 10 milliards d’euros en 2005, qui ne devraient pas beaucoup baisser, en volume, jusqu’en 2013.
Sur la période 2007-2013, le plafond de la sous-rubrique 3A Liberté, sécurité et justice s’élève à 6,6 milliards d’euros en prix 2004, ce qui permet une progression en termes réels de 15 % par an en moyenne, la plus importante de toutes, soulignant ainsi la priorité nouvelle accordée à cette politique, en particulier son volet gestion des flux migratoires. La sous-rubrique 3B Citoyenneté recouvre principalement des programmes destinés à soutenir la culture et les médias, la jeunesse, ainsi que la santé et la protection des consommateurs. On peut s’interroger sur la capacité de l’Europe à financer ses ambitions en la matière.
La nouvelle rubrique 4 dénommée « L’Union européenne en tant que partenaire mondial » regroupe l’ensemble des actions extérieures de l’Union. Les instruments financiers ont été rationalisés, selon une logique géographique : pré-adhésion, voisinage, coopération au développement, PESC. L’Union européenne devrait mieux mobiliser ses moyens pour mieux assurer son rayonnement international.
La limitation du budget communautaire à environ 1 % du PIB marque une certaine frilosité de l’Europe. Même si cette idée doit être repoussée à d’autres horizons, il faudra bien un jour que l’Europe se dote d’un budget digne de ce nom, afin de porter de véritables projets à la hauteur de ses ambitions. Parallèlement, il faut réfléchir, dès 2007, à l’instauration d’un volet recettes qui ne soit plus l’addition de contributions des États membres, avec les mécanismes de correction que l’on connaît, mais soit constitué de vraies ressources européennes représentatives de la richesse de l’espace européen. Il s’agit de marquer une volonté politique de développement et de solidarité et, au-delà des aspects financiers, d’affirmer un élément essentiel de la citoyenneté européenne.
M. Augustin Bonrepaux a estimé ne pas pouvoir voter le prélèvement européen, car cela signifierait accepter la limitation du budget communautaire et l’utilisation des crédits qui en est faite. Le Rapporteur spécial ne souhaite bien évidemment pas paralyser le fonctionnement de l’Europe, mais il explique bien en quoi un budget communautaire d’à peine plus de 1 % du RNB de l’Union européenne jusqu’en 2013 est largement insuffisant alors que le nombre de pays membres augmente. Cela risque d’avoir des conséquences sur l’aménagement du territoire et le développement rural en France, qui connaissent déjà aujourd’hui un manque de crédits. La décision du Gouvernement de coupler la programmation des fonds structurels et des contrats de projets État-régions risque d’exclure complètement les territoires ruraux des subventions publiques. Les financements vont se concentrer sur les pôles de compétitivité, plutôt situés dans des zones qui se développent naturellement, et non plus sur les zones les plus défavorisées du territoire français.
M. Daniel Garrigue a précisé que la fixation du budget communautaire à 1 % du RNB tient compte de la progression globale du PIB communautaire, avec l’arrivée de nouveaux États. Par ailleurs, la totalité des crédits de la précédente programmation financière, pourtant inférieure, n’a pas été consommée. Il convient donc, d’abord, de mieux définir les objectifs et les projets précis qu’entend conduire l’Union européenne, avant de se mettre d’accord sur une progression du budget communautaire conforme à ses légitimes ambitions. Il ne faut pas non plus faire de procès d’intention au Gouvernement en ce qui concerne les contrats de projets, car le couplage avec la programmation des fonds européens permettra une plus grande transparence des procédures. Ce souci de transparence est louable.
M. Alain Rodet a considéré qu’il y a peu de risque de fraudes aux fonds européens en France, compte tenu des contrôles menés par l’administration, notamment dans le domaine agricole. Les risques de dérives sont très rares. On peut se demander s’il en est de même en Italie du Sud par exemple, où par exemple la culture de tomates s’est développée en faisant appel à des travailleurs polonais, grâce à la PAC.
M. Pierre Hériaud a rappelé que la programmation financière 2007-2013 permettra de sanctuariser les dépenses du premier pilier de la PAC, ce qui est une garantie forte pour la France. Afin de bien prendre la mesure du budget communautaire, il convient de distinguer les sommes consacrées à l’ensemble de la programmation budgétaire de celles concernant les budgets annuels. Quel est le niveau de référence du PIB choisi : ainsi, le chiffre de 1.024 milliards d’euros en « prix 2004 » est-il pertinent ?
Le Président Pierre Méhaignerie a rappelé que le taux de 1 % correspond à un accord des différents peuples européens, compte tenu de leurs sensibilités propres. Il n’est pas possible de le remettre en cause dans un Parlement national. En revanche, on doit s’interroger sur l’utilisation des crédits européens en France, qui devrait être plus concentrée plutôt que saupoudrée sur de trop nombreux projets, parfois cofinancés à plus de 80 %. Si, en matière de politique régionale, les retours à destination de la France vont diminuer de 15,7 à 12,7 milliards d’euros, cela reflète la nécessaire solidarité qui doit exister au sein de l’Europe en faveur des nouveaux entrants d’Europe centrale et orientale, qui doivent aujourd’hui bénéficier de davantage de soutien. Les retours de la PAC à 10 milliards d’euros sont cependant sanctuarisés, ce dont il faut se féliciter, mais on peut aussi s’interroger sur la gestion de cette enveloppe, en menant des comparaisons entre un système centralisé comme c’est le cas en France et une régionalisation des enveloppes comme en Allemagne, ce qui permettrait peut être plus de flexibilité. Il serait intéressant de travailler sur ces sujets au moment où le ministère de l’Agriculture développe une réflexion sur ces thèmes.
M. Jean-Louis Dumont, Rapporteur spécial, a estimé que la concordance entre la programmation des fonds structurels et des contrats de projets sera une bonne chose, si cette transparence accrue permet de cofinancer des investissements structurants. Les conditions de réussite de cette approche nécessitent à la fois un accord entre la Commission européenne et le Gouvernement français sur les objectifs des politiques à mener, ainsi qu’un accord entre le Gouvernement et les différentes régions sur les projets précis entrant dans le cadre de ces objectifs. Les dépenses agricoles sont très contrôlées, car elles sont encadrées financièrement. Les erreurs rencontrées en France résultent pour l’essentiel de la complexité des dossiers de subvention liée à la conditionnalité des aides. Un meilleur travail en commun entre les Cours des comptes européenne et française sur ce sujet permettrait d’éviter trop d’apurements.
La Commission a ensuite, sur proposition du Rapporteur spécial, adopté le budget des affaires européennes.
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Puis, M. Daniel Garrigue a rappelé que le Gouvernement devra remettre, le 15 octobre prochain, un rapport sur le programme national de réforme, dans le cadre de la stratégie de Lisbonne révisée. Cette stratégie, adoptée par le Conseil européen en 2000, a pour objet d’établir en Europe l’économie la plus compétitive du monde à l’horizon 2010. Elle se décline en objectifs extrêmement ambitieux en matière de compétitivité, d’emploi et de protection de l’environnement, notamment. En réalité, il ne s’agit pas vraiment d’une stratégie commune, car l’Union européenne s’en remet à chaque État membre pour la mettre en œuvre. Le groupe de travail mis en place en 2004 a recommandé de mieux centrer les objectifs en privilégiant la croissance et la compétitivité. Chaque État membre a établi un « programme national de réforme » pour l’application de la stratégie européenne. Les premiers programmes nationaux de réforme ont été présentés à l’automne 2005, puis ont fait l’objet d’une évaluation par la Commission européenne au début de l’année 2006. Les États membres doivent désormais élaborer un rapport de suivi annuel.
Le programme national de réforme français paraît mal articulé avec la stratégie de Lisbonne, tant sur son appareil conceptuel que sur son vocabulaire. La Commission européenne a considéré que s’il s’inscrit bien dans la stratégie de Lisbonne, il manque toutefois d’objectifs clairs en matière de déficit public, de concurrence et d’ouverture des marchés et d’investissement dans le capital humain ; la Commission européenne a, en outre, regretté l’absence de véritable bilan sur l’utilisation des fonds structurels.
Le rapport de suivi du programme, adressé à la commission des Finances, constitue un progrès. Il comporte une amorce de bilan des fonds structurels, et présente des résultats qui vont bien au-delà des objectifs fixés l’an dernier dans le programme national de réforme. En particulier, la Commission européenne devrait mettre un terme à la procédure de déficit public excessif engagée contre la France.
L’intérêt du programme national de réforme est de mettre en perspective les politiques publiques par rapport aux objectifs, fonction que remplissait autrefois le Plan. À ce titre, il gagnerait à être largement diffusé.
Le Président Pierre Méhaignerie a souligné que ce document, bien qu’intéressant, faisait montre d’un peu d’autosatisfaction alors que, sur le terrain, l’appréciation est plus nuancée. Il devrait comporter un jugement plus critique, avec un benchmarking comparant, pour chacune des lignes directrices de la stratégie de Lisbonne, les résultats de la France avec ceux des autres États membres.
M. Jean-Louis Dumont, Rapporteur spécial, a confirmé ce sentiment, qui ressort de la lecture du document. On peut cependant estimer que la Commission européenne devrait lever certaines des observations formulées à l’encontre de la France. La commission des Finances pourrait élaborer un document synthétique présentant sa position sur ce sujet.
Le Président Pierre Méhaignerie a conclu que le rapport de suivi du programme national de réforme devrait désormais se concentrer davantage sur ses aspects les plus importants. Il a enfin indiqué que M. Jean-Pierre Brard lui a fait connaître, par écrit, son désaccord avec ce rapport, en particulier sur les aspects relatifs du fonctionnement du marché du travail.
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La commission des Finances a ensuite examiné, sur le rapport de M. Alain Rodet, Rapporteur spécial, les crédits de la mission « Outre-mer » ainsi que l’article 50, rattaché à ce budget.
M. Alain Rodet, Rapporteur spécial, a indiqué que le projet de loi de finances prévoit 1.963 millions d’euros de crédits de paiement pour la mission Outre-mer, contre 1.898 millions d’euros en 2006. Les dépenses de personnel (titre 2), qui représentent 7,8 % de ces crédits, devraient s’élever à 153,5 millions d’euros en 2007. Avec 49,9 millions d’euros, les dépenses de fonctionnement (titre 3), en représenteraient 2,5 %. Les dépenses d’investissement (titre 5) devraient s’élever à 16 millions d’euros en 2007, soit 0,8 % de la mission. Les dépenses d’intervention (titre 6), qui composent l’essentiel des crédits de la mission, représentent 1.743,5 millions d’euros. Celles-ci comprennent principalement les subventions obligatoires et facultatives aux collectivités territoriales, les crédits attribués au Fonds pour l’emploi dans les DOM, à Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon et les crédits attribués à l’action sociale, culturelle et de coopération régionale. Elles comprennent également les crédits affectés à la politique du logement, les subventions au Fonds d’investissement des DOM, et au Fonds d’investissement pour le développement économique et social. Les crédits de la mission ne retracent qu’une partie de l’effort financier de l’État pour l’outre-mer, lequel, y compris les dépenses fiscales, s’élève à environ 13 milliards d’euros en 2007.
En ce qui concerne l’emploi outre-mer, l’essentiel des crédits servant à financer des dispositifs en faveur de la création d’emplois et de la création d’entreprises est affecté au « Projet initiative jeune » (12 millions d’euros) qui permet d’aider les jeunes de moins de 30 ans à créer leur propre entreprise. L’ensemble des mesures en faveur de l’emploi fait l’objet d’une évaluation triennale. Les frais de fonctionnement du service militaire adapté atteignent 15,6 millions d’euros et les frais de transport se fixent à 4,3 millions d’euros. Les dépenses d’équipement et d’infrastructure seront de 8,1 millions d’euros. Une dotation de 8,17 millions d’euros sera versée à l’agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs d’outre-mer (ANT), opérateur spécifique du ministère de l’outre-mer, au titre de ses charges de service public. Le budget total de l’agence atteindra 29,8 millions d’euros, contre 27 millions d’euros en 2006.
S’agissant des dispositifs destinés au secteur marchand, le contrat d’accès à l’emploi (CAE) est la principale mesure. Les CAE du secteur marchand seront dotés de 16,6 millions d’euros. Le congé solidarité, qui a pour objectif de favoriser l’embauche de jeunes de moins de 30 ans par la cessation d'activité de salariés âgés de plus de 55 ans, devrait mobiliser 28,7 millions d’euros en crédits de paiement. Le soutien à l’emploi des jeunes diplômés, qui concerne les DOM et Saint-Pierre-et-Miquelon devrait absorber 0,76 million d’euros. Les dotations de l’allocation de retour à l’activité, destinée à encourager le retour à l’activité des bénéficiaires de minima sociaux, atteindront 7,6 millions d’euros.
Dans le secteur non-marchand, la loi de programmation de cohésion sociale du 18 janvier 2005 a permis la mise en place du CAE depuis le 1er janvier 2006. Son financement s’élève à 67,9 millions d’euros.
Globalement, l’effort en faveur du logement est de 175,75 millions d’euros en crédits de paiement. L’engagement de ces crédits est parfois difficile. La mobilisation des ressources foncières est particulièrement délicate en Guadeloupe et à la Martinique. Les dotations versées aux collectivités territoriales pour la résorption de l'habitat insalubre dans les DOM, à Mayotte et à Saint-Pierre-et-Miquelon, ainsi qu’au titre de la participation à l’aménagement des quartiers, atteindront 34,5 millions d’euros en crédits de paiement.
Les actions d’aménagement du territoire seront dotées de 101 millions d’euros. Au titre de la continuité territoriale, 52,5 millions d’euros sont inscrits, 16 millions d’euros devraient financer le passeport mobilité.
Le dispositif d’allocation vieillesse en place à Saint-Pierre-et-Miquelon représentera une dépense de 900.000 euros. Le financement de la protection sociale dans le Pacifique justifie une dépense de 22,7 millions d’euros. Le financement de l’agence de santé de Wallis-et-Futuna atteindra 21,7 millions d’euros. Les dotations aux collectivités territoriales atteindraient 313,3 millions d’euros.
La loi de programme de 2003 a renforcé le dispositif de défiscalisation au profit de l’outre-mer. La durée de validité du dispositif a été portée de 5 à 15 ans, au 31 décembre 2017. Le total des dépenses fiscales atteindrait donc 2.524 millions d’euros en 2007, contre une évaluation de 2.458 millions d’euros en 2006.
M. Jean-Louis Dumont a attiré l’attention de la Commission sur la question du logement. Depuis 1999, les crédits correspondants sont en constante augmentation. Malgré cela, un grand nombre d’acteurs se plaignent de l’inefficacité de cette politique. Manifestement, elle n’est pas en mesure de garantir le droit au logement. Le transfert des crédits du ministère du Logement vers le ministère de l’Outre-mer était pourtant censé en améliorer l’efficacité.
Le Président Pierre Méhaignerie a souligné que les crédits du logement doivent être considérés dans leur ensemble, dépenses fiscales comprises. Par ailleurs, il existe localement des goulets d’étranglement, notamment dans le bâtiment. Les mesures mises en œuvre peuvent nuire à l’emploi ou à l’équité.
M. Alain Rodet, Rapporteur spécial, a convenu que les résultats en matière de logement, sont décevants surtout aux Antilles. Des particularités locales peuvent expliquer certaines difficultés.
M. Augustin Bonrepaux a indiqué que le Groupe socialiste ne votera pas les crédits de la mission Outre-mer.
Le Rapporteur spécial s’en remettant à la sagesse de la Commission, celle-ci a adopté les crédits de la mission Outre-mer.
La Commission a ensuite examiné l’article 50, rattaché à ce budget.
Article 50 : « Ressources du fonds intercommunal de péréquation des communes de Mayotte ».
M. Alain Rodet, Rapporteur spécial, a indiqué que cet article rattaché permet de proroger en 2007 un dispositif fiscal en faveur des communes de Mayotte, dans l’attente de l’application du code général des impôts. Il s’agit, d’une part, du versement de la dotation de rattrapage et de premier équipement et, d’autre part, de proroger, pour un an, la perception de centimes additionnels à l’impôt sur le revenu au profit des communes de Mayotte.
Sur la proposition du Rapporteur spécial, la Commission a adopté cet article, sans modification.
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Informations relatives à la Commission
La commission des Finances, de l’Économie générale et du Plan a reçu, en application de l’article 12 de la LOLF :
– un projet de décret de transfert à divers ministères des crédits reportés de 2005 sur 2006 sur le programme « Gestion fiscale et financière de l’État et du secteur public local » au titre des cessions de véhicules dont la vente a été réalisée par le service des domaines pour le compte de différents ministères pour un montant de 1.106.031 euros.
– un projet de décret de virement de 1,7 million d’euros relatif au financement de visas biométriques.