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La Commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire et la Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République ont, au cours d’une réunion conjointe, entendu M. François Baroin, ministre de l’outre-mer, sur les crédits de la mission Outre-mer pour 2007.
Le Président Philippe Houillon s’est réjoui d’accueillir une deuxième fois M. François Baroin pour la présentation de la mission « Outre-mer », qui regroupe, à travers trois programmes, les efforts du ministère en faveur de l’ensemble des collectivités d’outre-mer.
Cette réunion est l’occasion d’indiquer les principales orientations du budget 2007, notamment en ce qui concerne les actions de soutien à l’emploi, l’effort en faveur de l’habitat social et la politique visant à favoriser la continuité territoriale. Mais, puisque le programme « Intégration et valorisation de l’outre-mer » prévoit que des moyens généraux de fonctionnement et d’investissement permettent au ministère de l’outre-mer d’exercer des fonctions de coordination interministérielle, notamment par la production de textes, la commission des Lois souhaiterait être informée du calendrier d’examen des projets de loi de toute nature dont le ministre a la charge.
M. Jean Proriol, vice-président de la commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, après avoir présenté les excuses du Président Patrick Ollier, empêché, a rappelé que l’examen des crédits de la mission « Outre-mer » intervient peu après la visite du Premier ministre aux Antilles, au cours de laquelle des mesures en faveur du logement ont été annoncées. On sait l’intérêt que la commission des affaires économiques porte à cette question. Elle est depuis longtemps attentive à l’acuité des problèmes du logement, singulièrement du logement social, qui frappent l’outre-mer. Les annonces du Premier ministre sont donc les bienvenues et elles ont d’ailleurs été favorablement accueillies par l’ensemble des élus ultra-marins.
Par ailleurs, il semble que le décret d’application du volet « Engagement national pour le logement » du plan de cohésion sociale, qui inclut l’outre-mer, sera prochainement publié. Il serait utile que le ministre en indique les principales dispositions.
M. François Baroin, ministre de l’outre-mer, a remercié les deux commissions pour leur accueil à l’occasion de cette audition, qui permettra à la fois de présenter les grandes lignes du budget et d’indiquer le calendrier législatif des réformes prévues.
Pour 2007, les crédits de la mission « Outre-mer » s’élèvent 2,03 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 1,96 milliard d’euros en crédits de paiement. En maintenant les crédits au niveau de l’an passé, dans un contexte marqué par de fortes contraintes pesant sur le budget de l’État, le Gouvernement manifeste son attachement aux départements et aux collectivités d’outre-mer.
Bien entendu, les crédits que gère directement le ministre de l’outre-mer ne représentent qu’une partie de l’ensemble des sommes consacrées à l’outre-mer et le chiffre à retenir pour l’ensemble de l’effort public en faveur de l’outre-mer s’élève à 15 milliards d’euros.
La première priorité du budget est naturellement le soutien au développement et l’accompagnement de l’exercice des responsabilités locales. C’est tout le sens des projets de lois organique et ordinaire portant dispositions statutaires et institutionnelles pour l’outre-mer, qui sont actuellement soumis au Parlement.
Cette priorité se concrétise par un soutien financier accentué aux collectivités d’outre-mer. Les crédits de paiement directement gérés par le ministère de l’outre-mer et destinés aux collectivités territoriales sont ainsi en hausse de 17 %.
Le partenariat de l’État pour l’aménagement du territoire sera maintenu : l’État financera à hauteur de 89 millions d’euros en 2007 les nouveaux contrats de projet qui seront conclus avec les régions d’outre-mer.
120 millions d’euros sont directement inscrits sur le budget de l’outre-mer pour le financement d’infrastructures d’aménagement des collectivités locales.
Enfin, la continuité territoriale avec la métropole sera développée : il est prévu d’engager 57,5 millions d’euros, dont plus de 32 millions pour la dotation de continuité territoriale et 19,5 millions pour le financement du passeport-mobilité. Le ministre a été amené à répondre il y a deux semaines à une question sur les difficultés de financement de ce dispositif ; en réalité, il s’agit d’un succès : les crédits ont été débloqués la semaine dernière et à ce jour à plus de 60 000 passeports-mobilité pour les étudiants qui souhaitent poursuivre leurs études supérieures, notamment en métropole, ont été financés.
L’emploi constitue toujours l’effort principal du ministère de l’outre-mer : 1,16 milliard d’euros y sont consacrés et le projet de loi de finances affecte près de 60 % des crédits de la mission outre-mer à la lutte contre le chômage. En effet, en dépit d’une amélioration de la situation, le taux de chômage, comme d’ailleurs le nombre des bénéficiaires du revenu minimum d’insertion (RMI) et des allocataires des prestations sociales est entre deux et trois fois plus élevé outre-mer qu’en métropole.
Le principe des exonérations des charges sociales spécifiques à l’outre-mer reste conforme au dispositif de la loi de programme pour l’outre-mer du 21 juillet 2003, dans l’attente des résultats définitifs de l’évaluation prévue par son article 5. La commission d’évaluation de la loi de programme pour l’outre-mer doit rendre son rapport prochainement et elle formulera des propositions sur la pertinence des dispositifs dérogatoires au droit commun et sur leur éventuelle réorientation pour accompagner les priorités du développement social.
Les dispositifs spécifiques financés par la mission outre-mer s’ajoutent aux mesures de droit commun du ministère de l’emploi et de la cohésion sociale qui s’appliquent outre-mer : contrats d’accompagnement dans l’emploi et contrats d’avenir, directement gérés par le ministère de l’emploi, de la cohésion sociale et du logement. Au total, le projet de loi de finances pour 2007 devrait permettre le financement de 57 400 contrats aidés, afin de lutter contre l’exclusion du marché du travail des publics prioritaires. Il faut savoir que les contrats aidés représentent parfois plus de la moitié de la population en activité, ce qui permet de mesurer la nécessité de maintenir ces dispositifs.
Les moyens de la formation professionnelle sont renforcés : en 2007, 3000 jeunes seront formés par le service militaire adapté, l’objectif étant d’en intégrer directement 72 % dans la vie professionnelle.
L’ensemble de ces dispositifs permettra de maintenir un contexte favorable au développement de l’emploi et à la lutte contre le chômage.
La relance de la création d’emplois dans le secteur productif était l’un des engagements pour l’outre-mer pris par le Président de la République. Les résultats sont conformes aux objectifs : l’an dernier, le nombre d’emplois salariés dans le secteur marchand a progressé de 2,2 %, soit 3,5 fois plus vite qu’en métropole, et le taux de chômage a continué à diminuer pour s’établir à 21,7 %. La tendance est donc bonne, les outils produisent leurs effets, mais on est encore loin du compte et il faut amplifier ces efforts. Depuis 2002, 30 000 emplois salariés ont été créés dans les quatre départements d’outre-mer et 38 000 personnes ont quitté le chômage et trouvé un emploi.
La troisième priorité de ce budget est de réaffirmer l’État de droit et de lutter contre l’immigration clandestine. Ce sujet a déjà fait l’objet d’un débat devant la commission des Lois et l’on sait que les positions prises par le ministre ont permis de renforcer l’arsenal juridique, en incluant un bloc concernant l’outre-mer dans le texte relatif à la politique de lutte contre l’immigration clandestine présenté par le ministre d’État.
Des progrès significatifs ont été enregistrés outre-mer en matière de la lutte contre l’insécurité et contre l’immigration clandestine. Depuis le 1er janvier 2006, la délinquance de voie publique enregistre une baisse de 12,7 %. Par ailleurs, 16 707 éloignements d’étrangers en situation irrégulière ont été effectués depuis les départements et collectivités d’outre-mer. En huit mois, ces résultats dépassent ceux de toute l’année 2005 et représentent 53,39 % du total national des éloignements : plus de la moitié des reconduites à la frontière sont donc effectuées à partir de l’outre-mer.
Au-delà de ces trois grandes priorités, la dotation consacrée au logement social connaîtra un sort particulier, puisque le Premier ministre vient de décider de l’augmenter de 120 millions d’euros sur trois ans - dont 60 millions dès 2007 -, soit 281 millions en autorisations d’engagement et 236 millions en crédits de paiement, ce qui représente une hausse des moyens de paiement de plus de 38 %. Cette « rallonge » budgétaire devrait permettre d’accélérer la relance du logement social dans les départements d’outre-mer. Il faut dire que la pression y est considérable en raison du fort taux de chômage et du nombre important de ceux qui perçoivent les prestations sociales et le RMI. Mais il faut aussi tenir compte du dynamisme démographique. Ainsi, en Guyane, plus de la moitié de la population a moins de vingt-cinq ans. La pression foncière est forte pour les collectivités locales comme pour l’État et on observe donc un effet de ciseau spectaculaire entre l’augmentation de la demande de logements sociaux d’une part, les retards de construction et les retards de paiement de la part de l’État d’autre part.
Mais le Premier ministre a aussi annoncé que la dette de la ligne budgétaire unique, qui s’élève à 113 millions d’euros, sera apurée à la fin du premier trimestre 2007. Sur l’exercice 2006, 30 millions d’euros seront financés par la Caisse des dépôts et consignations et 12 millions d’euros ouverts en collectif de fin d’année. S’agissant de l’exercice 2007, la représentation nationale sera informée des décisions techniques sitôt leur définition arrêtée.
Au-delà de cette remise à niveau, le rythme des constructions de logements sociaux augmentera de 20 % chaque année dans les trois ans à venir. C’est un tournant majeur dans la politique du logement social outre-mer.
Par ailleurs, deux audits de modernisation ont été conduits sur la politique du logement social outre-mer pour recentrer le rôle de l’État sur ses fonctions de pilotage et d’animation de la politique de l’habitat. Deux autres missions ont été menées afin de mesurer l’efficacité des dispositifs issus de la loi de programme pour l’outre-mer du 21 juillet 2003 en matière d’allégement de charges et de défiscalisation de certains investissements. Les conclusions de ces audits font l’objet d’un examen par la commission d’évaluation. L’État n’engagera pas de réforme sans évaluation ni sans concertation : nombre d’orientations dépendront des préconisations de cette commission d’évaluation.
M. Joël Beaugendre, rapporteur pour avis de la Commission des affaires économiques, de l’environnement et du territoire, a constaté que le budget de l’outre-mer s’élevait cette année à 1,962 milliard d’euros, chiffre relativement stable, supérieur de 0,35 % au budget voté l’an passé. Ce maintien de l’effort en faveur de l’outre mer doit être salué dans un contexte d’une diminution de la dépense de l’État de 1 % en volume. Qui plus est, l’effort global en faveur de l’outre-mer atteindra cette année, hors dépenses fiscales, 13 milliards d’euros, soit une augmentation de près de 20 %.
La mission « Outre-mer » se décompose en trois programmes. Le programme emploi outre-mer concentre 59 % des crédits de la mission. Sur 1,158 milliard d’euros, 838 millions financent l’abaissement du coût du travail et les actions d’amélioration et de structuration du dialogue social. Il s’agit ainsi de favoriser la création d’emplois durables dans le secteur marchand. Il est vrai que le taux de chômage reste élevé, en moyenne 21,3 %, mais le nombre d’emplois salariés dans le secteur marchand a progressé de 2,2 % l’an dernier, soit trois fois plus vite qu’en métropole.
Cet effort financier doit être maintenu, notamment dans l’attente des conclusions de la mission d’évaluation chargée de se prononcer sur l’efficacité des dispositifs d’exonération et de défiscalisation de la loi de programme.
412,4 millions d’euros sont consacrés au programme « Intégration et valorisation de l’outre-mer ». Celui-ci permet notamment d’assurer les fonctions stratégiques, de soutien et d’état-major du ministère, et d’épauler les collectivités territoriales en complétant les dotations de droit commun, afin de tenir compte des charges spécifiques qu’elles supportent. Ce programme vise enfin à favoriser le développement des échanges bilatéraux entre les collectivités d’outre mer et leurs voisins, ainsi qu’à contribuer à la représentation de la France dans ces zones géographiques.
Le troisième programme de cette mission est intitulé « Conditions de vie outre-mer ». Doté de 392 millions d’euros en crédits de paiement et de 459 millions en autorisations d’engagement, il est presque pour moitié consacré aux actions en faveur du logement, soit 175 millions d’euros de crédits de paiement et 220 millions d’euros d’autorisations d’engagement. À 2 millions d’euros près, le montant des crédits de paiement est identique à celui de l’année dernière. Les autorisations d’engagement sont revues à la baisse afin de les ramener à un niveau compatible avec celui des crédits de paiement et de mettre fin à cette pratique de gestion de la contrainte budgétaire, reposant sur la stagnation des crédits de paiement et l’affichage d’un niveau élevé d’autorisations d’engagement. Du fait de cet effet de ciseaux, le reste à payer sur le total des opérations en cours au 31 décembre 2005 s’élève à 800 millions d’euros.
Les retards de paiement atteignent quant à eux 113 millions d’euros, ce qui décrédibilise la parole de l’État et place les opérateurs, ainsi que les entreprises de bâtiment et travaux publics, dans une position extrêmement difficile. Cette situation est d’autant plus grave que le besoin de logements, et singulièrement de logements sociaux, est extrêmement fort outre-mer. La mission d’audit de modernisation, dans son rapport consacré à la politique du logement social outre-mer, évalue le besoin à 27 000 logements locatifs sociaux supplémentaires pour atteindre, d’ici 2011, le même ratio de logements locatifs sociaux par habitant qu’en métropole. Il s’agit d’ailleurs d’une estimation basse, qui ne tient compte ni de la proportion plus importante outre-mer des personnes éligibles au logement social, ni de la croissance démographique particulièrement dynamique.
Les engagements en faveur du logement annoncés par le Premier ministre lors de son déplacement aux Antilles ont donc été favorablement accueillis. Quelques précisions sur leur financement seraient toutefois bienvenues. Le Premier ministre s’est notamment engagé à ce que la dette de 113 millions d’euros soit réglée avant la fin du premier trimestre 2007. Il a également annoncé que 120 millions d’euros supplémentaires sur trois ans seraient consacrés au logement, dont 60 millions d’euros dès 2007. Comment seront financées ces mesures ? Feront-elles l’objet de dotations supplémentaires ou correspondront-elles à des redéploiements de crédits à moyens constants ?
Des réflexions sont en cours au sein de la commission d’évaluation afin d’apprécier les conséquences sur le logement social de la défiscalisation mise en œuvre sur le fondement de la loi de programme pour l’outre-mer du 21 juillet 2003. Elles sont notamment nourries par les conclusions de la mission d’audit de modernisation et par celles du Conseil économique et social. Il semble que la défiscalisation ait entraîné un effet d’éviction des opérations de logement social en conduisant notamment à un renchérissement du foncier, effet d’éviction qui se serait traduit par une diminution de la part des logements locatifs sociaux dans le total du parc nouveau entre 2000 et 2005. Cette part serait ainsi passée de 30 à 15 %. Dès lors, il convient sans doute de recentrer les dispositifs de défiscalisation sur le logement social, même si un tel recentrage ne doit en aucun cas justifier une baisse des subventions de ce que l’on appelait, avant l’entrée en vigueur de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) du 1er août 2001, la ligne budgétaire unique, et qui correspond à l’action 1 du programme 123 de la mission « Outre-mer ». Si cette orientation est également celle du ministre, il serait bon qu’il s’engage à ce que le recentrage de la dépense fiscale ne conduise pas à une restriction de la dépense budgétaire en faveur du logement.
Le programme « Conditions de vie outre-mer » finance également les dispositifs destinés à concrétiser le principe de continuité territoriale entre l’outre-mer et la métropole, en s’appuyant sur la dotation de continuité territoriale et le passeport-mobilité. La dotation de continuité territoriale augmente, passant de 31,8 à 32,6 millions d’euros. Évoquant l’année passée la sévérité des critères de sélection ou la longueur d’instruction des demandes adressées aux collectivités qui en assurent la gestion, le ministre avait fait état d’une sous-consommation des sommes mobilisées. Qu’en a-t-il été en 2006 ?
Le rapport d’enquête sur l’optimisation de la desserte aérienne des départements d’outre-mer évoque aussi une amélioration de ce dispositif, reposant sur une mutualisation de l’expérience des collectivités sur les critères et modalités d’attribution, ainsi que sur l’instauration d’un pouvoir de substitution pour pallier la carence d’une collectivité qui ne délibère pas sur l’attribution de cette dotation. Quelles suites le Gouvernement entend-il donner à ces préconisations ?
Les sommes consacrées au passeport-mobilité augmentent de 31 % pour s’établir à 19,5 millions d’euros. Il serait intéressant d’obtenir des précisions sur la réforme de ce dispositif qu’évoque le dossier de presse sur ce projet de budget.
Le rapport d’enquête aborde également la question des obligations de service public imposées par l’État aux transporteurs aériens sur le fondement du règlement communautaire de 1992. Ce rapport recommande la mise en place de « charters secs », c’est-à-dire sans séjour touristique associé, afin d’accroître l’offre en période de pointe. Le développement de cette offre nouvelle supposerait un assouplissement par la France des obligations de service public, notamment des obligations de desserte minimale en basse saison. Le ministre est-il favorable à cette solution ?
Un certain nombre de sujets ne sont pas directement liés à l’examen du projet de budget mais intéressent particulièrement les collectivités ultramarines. Le premier est la réforme de l’Organisation commune de marché (OCM) relative à la banane. S’agissant du volet externe, quelles ont été les conséquences du passage au système tarifaire au 1er janvier 2006, notamment sur les prix, les volumes commercialisés et l’évolution de la part de la banane communautaire dans ces volumes ?
En ce qui concerne le volet interne, quelle est la position de la France sur la proposition de réforme de la Commission européenne, qui consiste à abolir l’aide compensatoire et à opérer un transfert budgétaire vers le programme POSEI ? L’augmentation de 280 millions d’euros prévue à cet effet paraît-elle suffisante ? Peut-on envisager une évolution de cette dotation en fonction des évolutions du marché et des prix ?
Le deuxième sujet est celui du chlordécone, polluant organique persistant utilisé jusqu’en 1993 à la Martinique et à la Guadeloupe, et de ses conséquences. Comment l’État envisage-t-il d’accompagner, notamment financièrement, les agriculteurs dont la production excède les limites maximales de résidus de chlordécone fixées par l’Autorité française de sécurité sanitaire des aliments (AFSSA) et ne peut donc être commercialisée ? L’attente des agriculteurs concernés est forte et légitime et le gouvernement doit faire preuve face à cette douloureuse situation de la même sensibilité aux spécificités de l’outre-mer que sur d’autres sujets.
Concluant son propos, le rapporteur a invité les membres de la commission des Affaires économiques, de l’environnement et du territoire collègues à émettre un avis favorable à d’adoption des crédits de la mission « Outre-mer ».
M. Didier Quentin, rapporteur pour avis de la commission des Lois, a relevé que les crédits de la mission « Outre-mer » sont globalement reconduits dans le projet de loi de finances pour 2007 et s’élèvent à 1,96 milliard d’euros. Près de 1,16 milliard d’euros sont affectés à l’emploi, qui reste ainsi le principal poste de dépense budgétaire : comme l’a dit le ministre, la lutte contre le chômage est la priorité du Gouvernement, outre-mer comme en métropole. Les résultats obtenus dans ce domaine sont d’ailleurs très encourageants et plaident, a priori, pour le maintien des incitations fiscales dont bénéficient les activités économiques outre-mer : de juin 2002 à juillet 2006, le taux de chômage dans les départements d’outre-mer est passé de 25,4 % à 21,3 % de la population active.
Par ailleurs, les crédits consacrés au logement et à la continuité territoriale progressent de près de 3 %, tandis que ceux qui sont destinés à l’aménagement du territoire augmentent de 7,9 %. Autre signe d’un effort national de solidarité en faveur des collectivités ultramarines les moins favorisées, les dotations qui leur sont destinées progresseront de 16,8 %. Pour autant, le ministère de l’outre-mer contribuera à la maîtrise de la dépense publique, en ne remplaçant qu’un départ à la retraite sur deux. Il s’agit donc d’un budget à la fois dynamique, rigoureux et généreux, que le rapporteur pour avis invitera ses collègues à approuver.
Les statistiques montrent que l’action des services de police et de la justice gagne progressivement en efficacité outre-mer. C’est d’abord l’insécurité qui recule : au cours des huit premiers mois de l’année, la délinquance de voie publique a baissé de 12,7 % et les violences aux personnes de 6,5 %. La mobilisation des forces de l’ordre face à l’immigration clandestine a également donné de bons résultats : en 2005, le nombre d’éloignements a progressé dans une fourchette de 11 à 34 % dans les DOM. À Mayotte – qui a tout spécialement retenu l’attention de la commission des Lois en 2006, à l’occasion de la mission d’information présidée par René Dosière -, le renforcement des équipes de la police aux frontières, qui s’ajoute aux deux nouveaux radars, devrait permettre de dépasser l’objectif fixé de 12 000 éloignements dans l’année. À ce sujet, il serait intéressant que le ministre indique où en sont les négociations pour améliorer la coopération, notamment policière, avec les pays d’où viennent ces clandestins : Comores pour Mayotte, Guyana et Surinam pour la Guyane. Pourrait-il donner également de premiers éléments sur la mise en œuvre de la loi relative à l’immigration et à l’intégration adoptée au printemps dernier ?
Par ailleurs, la lutte contre les trafics illicites s’est intensifiée, avec une forte augmentation, dans les Caraïbes, des saisies de cocaïne et, s’agissant du blanchiment d’argent, des déclarations auprès de TRACFIN. Enfin, l’effectif des magistrats en poste outre-mer a augmenté en 2005 comme en 2006, tandis que la surpopulation carcérale a diminué. Il faut aussi rappeler à ce propos l’attention particulière que la commission des Lois a portée récemment à plusieurs établissements pénitentiaires outre-mer, en particulier à la « tristement célèbre » prison de la rue Juliette-Dodu à Saint-Denis-de-la-Réunion. Autant de signes, là encore, que le Gouvernement se donne les moyens de faire mieux respecter l’État de droit sur l’ensemble du territoire.
En ce qui concerne les évolutions institutionnelles outre-mer, le Sénat doit examiner très prochainement deux projets de loi portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’outre-mer. Ils visent à créer ou à modifier divers statuts pour tenir compte de la révision constitutionnelle du 28 mars 2003, qui a notamment supprimé les anciennes catégories de territoires d’outre-mer et de collectivités territoriales à statut particulier. Il serait intéressant que le ministre précise en quoi ce projet de loi rapprochera Mayotte du droit commun et de la départementalisation attendue par sa population, selon quelles modalités seront créées les deux nouvelles collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, et quelle est la philosophie générale de ce projet en matière de droit électoral. Enfin, il serait utile de savoir si ce projet a vocation à concerner l’outre-mer dans son ensemble, ou seulement le statut de certaines collectivités.
Sur le plan institutionnel toujours, un projet de loi constitutionnelle a été déposé au printemps pour compléter l’article 77 de la Constitution. Il s’agit, pour l’élection des membres du Congrès et des assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie, de figer le corps électoral en fonction de son état de 1998. Cela correspondrait à l’intention des parties à l’accord signé à Nouméa le 5 mai 1998, qui ne jugeaient pas satisfaisante l’interprétation par le Conseil constitutionnel des dispositions en cause dans la loi organique du 19 mars 1999. Il s’agirait donc de mettre fin à une certaine confusion, dans un cadre consensuel évidemment. Cette perspective faisant actuellement l’objet d’appréciations contradictoires, est-il envisageable que le projet puisse être examiné et adopté par l’Assemblée nationale, par le Sénat, puis par le Congrès avant la fin de la législature ?
En réponse aux rapporteurs, le ministre a apporté les éléments d’information suivants :
S’agissant du logement, les 113 millions d’euros annoncés permettront de régler les factures des différents bailleurs sociaux en souffrance depuis longtemps. L’objectif est qu’elles remontent le plus rapidement possible aux comptables concernés, afin d’être honorées avant la fin du premier trimestre 2007.
Pour résorber la dette, une première avance de 30 millions d’euros a été faite par la Caisse des dépôts, ramenant le retard à 83 millions d’euros. Le Premier ministre s’est engagé à ce que les 113 millions permettent donc de résorber la totalité du retard. Il a également décidé que le volet logement du plan de cohésion sociale s’appliquerait effectivement outre-mer. À cet effet, le Gouvernement augmentera de 20 % les crédits de la ligne budgétaire unique (LBU) pendant les trois prochaines années. Dans la mesure où, en dépit de l’annualisation budgétaire, le plan de cohésion sociale est étalé sur trois ans, ces 120 millions d’euros seront répartis comme suit : 60 millions dès 2007, 30 millions en 2008 et 30 millions en 2009.
L’affectation de ces crédits est ensuite simple affaire de « tuyauterie » : le ministre n’est pas en mesure de dire s’ils reviendront au ministère chargé du logement ou à celui de l’outre-mer. Mais il s’agit bien d’une augmentation de moyens et non pas d’une opération à budget constant, par un jeu de bonneteau entre lignes budgétaires.
À la demande du Premier ministre, une conférence nationale du logement définira une méthode, un calendrier et des moyens durables pour cette politique du logement : on ne peut pas continuer d’accumuler des dettes au fil des années au nom de l’État et d’être obligé, tous les dix ans, d’« effacer l’ardoise ». C’est d’autant plus impossible que la démographie est dynamique et que les tensions, trop importantes, rendraient la situation explosive dans des villes en expansion, qui attirent beaucoup les populations extérieures.
Mais il n’y a dans cette politique aucun dogmatisme, seule l’efficacité important : si la gestion par le ministère du logement n’est pas satisfaisante, la ligne budgétaire devra être identifiée outre-mer et directement affectée et gérée à l’échelon local. Car c’est bien l’absence de « ponts » budgétaires entre les ministères qui crée la difficulté. Le ministre attend avec beaucoup d’impatience les propositions concrètes de la commission d’évaluation. Il faudra probablement, si tel est son choix, orienter une partie de la défiscalisation vers le logement social. Ce n’est sans doute pas la panacée, mais au moins cet outil supplémentaire devrait-il permettre de libérer plus rapidement des propriétés afin de produire plus vite des logements sociaux pour faire face à la demande.
En ce qui concerne la dotation de continuité territoriale, dans les collectivités d’outre-mer non soumises à l’obligation de validation du dispositif par la Commission européenne, ainsi qu’en Guadeloupe où le dispositif avait été validé en 2004, la consommation des crédits a été sensiblement égale à leur dotation pour le dernier exercice. En revanche, les dispositifs définis par les régions Martinique et La Réunion n’ont été agréés qu’en 2005 et les aides utilisées n’ont donc pu atteindre le montant de la dotation accordée. La région Guyane, quant à elle, n’a toujours pas mis en place son dispositif. Dans le projet de loi portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’outre-mer « DSIOM », il est prévu de permettre au département de se substituer à la région, en cas de défaillance de celle-ci pour définir et mettre en œuvre le dispositif aidé par l’État. Il faut se montrer souple, mais aussi avancer car on ne peut pas, sur un sujet aussi important, accepter que les crédits ne soient pas consommés en totalité.
Rappelant que le concept de la continuité territoriale a été élargi aux situations internes aux collectivités ultramarines, Mme Christiane Taubira a indiqué que, pour sa part, elle n’approuvait pas non plus le fait que la région Guyane n’utilise pas cette enveloppe.
Le ministre a convenu qu’en Guyane le problème de la continuité se posait moins entre Cayenne et Paris qu’entre Cayenne et Maripasoula, Saint-Laurent-du-Maroni ou Saint-Georges. De même, en Polynésie française, une partie des étudiants souhaite aller vers la métropole, une autre vers l’Australie ou la Nouvelle-Zélande et une autre se déplacer au sein de l’archipel, ce qui provoque des difficultés de validation du dispositif par la Commission européenne. Il convient donc de faire preuve de souplesse et de trouver les outils juridiques pertinents. Les négociations à ce propos avec la Commission européenne se poursuivent.
S’agissant de l’amélioration de la desserte aérienne, il faut rappeler que les obligations de service public concernent un trafic de 3 millions de passagers par an à destination des DOM. La concertation locale se développe, en particulier avec la mise en place de conférences paritaires. Il serait inacceptable de faire peser le dispositif sur les seuls vols réguliers. Il faut, par ailleurs, probablement aller vers un assouplissement des règles imposées aux bénéficiaires des congés bonifiés, afin de permettre un lissage des périodes de pointe.
Compte tenu du succès et de l’importance du passeport-mobilité, le ministre a demandé et obtenu que l’effort de l’État pour celui-ci augmente de plus de 31 % dans le projet de budget de 2007, la dotation atteignant près de 20 millions d’euros. Ceux qui ont rencontré des problèmes peuvent se tourner vers les rectorats, vers les Centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (CROUS) ou vers l’Agence nationale pour l’insertion et la promotion des travailleurs de l’outre-mer (ANT) pour se faire rembourser dès maintenant les billets qu’ils ont financés l’été dernier.
Les négociations se poursuivent pour la réforme de l’organisation commune de marché (OCM) de la banane. Les producteurs avaient demandé une enveloppe de 300 millions d’euros. Or, la première proposition de la Commission européenne était inférieure à 250 millions d’euros. La négociation s’est conclue autour de 280 millions d’euros, ce qui est apparu comme un compromis acceptable, après discussion avec les représentants des filières, qui se sont rapprochées et qui ont signé un mémorandum avec les autres pays de l’Union européenne concernés. Les ministres de l’agriculture et de l’outre-mer l’ont soutenu.
Ils ont également obtenu le principe d’une clause de révision qui permettrait de revenir devant la Commission européenne si d’aventure le marché se retournait. Il faut encore en préciser les modalités et la qualification juridique. Les discussions se poursuivent, de même que la recherche de partenaires, comme l’Allemagne, afin de soutenir cette demande devant le Conseil des ministres de l’Union européenne.
S’agissant de la situation de l’emploi, il existait en août 2006 8 500 chômeurs de moins qu’un an plus tôt, soit une diminution de 5,2 % du taux de chômage. Mais il faut, là aussi, tenir compte du dynamisme de la démographie et de l’arrivée de nombreux jeunes sur le marché de l’emploi. L’effort doit donc, bien évidemment, être maintenu.
Enfin, le Gouvernement a décidé d’accompagner les exploitants dont il a été reconnu que les terres avaient été polluées par le chlordécone. Une indemnisation sera accordée aux agriculteurs qui ont été amenés à détruire leur récolte ou à abandonner leur production en cours. Des mesures d’investissement et de formation ont également été prises en faveur du développement de nouvelles cultures ne présentant pas de risques sanitaires, ce qui devrait faciliter les reconversions. Certains producteurs envisageraient aujourd’hui de replanter des bananiers sur les zones qui avaient été polluées.
S’agissant des questions institutionnelles, le ministre a souligné, à propos du corps électoral de la Nouvelle-Calédonie, que les engagements pris par le Président de la République en juillet 2003 à l’occasion de son déplacement en Nouvelle-Calédonie et réitérés en 2005 et 2006 à l’occasion des réunions du comité des signataires de l’accord de Nouméa seraient tenus. Le texte a été examiné en Conseil des ministres fin mars, il sera soumis à l’Assemblée nationale le 12 décembre, son examen au Sénat étant prévu le 16 janvier 2007.
C’est un sujet particulièrement important : même s’il y a quelques divergences d’interprétation sur les accords de Nouméa, la parole donnée doit être tenue. Il s’agit d’une question d’équilibre global pour bien préparer l’avenir de la Nouvelle-Calédonie, qui a beaucoup de richesses et de projets, mais qui s’interroge aussi sur l’évolution du marché du nickel et sur les effets des regroupements industriels intervenus à l’échelon mondial sur l’exploitation de ses immenses gisements. Le vote de ce texte est un élément très important pour la paix en Nouvelle-Calédonie. Le projet avait, d’ailleurs, déjà été adopté dans les mêmes termes par l’Assemblée nationale et par le Sénat en 1999. Seule la divergence entre le Premier ministre de l’époque et le Président de la République sur la composition du Conseil supérieur de la magistrature avait alors empêché la réunion du Congrès. On peut comprendre que certains aient des doutes mais la parole donnée doit être tenue.
Les deux projets de loi portant dispositions statutaires et institutionnelles relatives à l’outre-mer (DSIOM) visent à tirer les conséquences de la révision constitutionnelle du 28 mars 2003 pour ce qui concerne les nouveaux pouvoirs normatifs accordés aux départements et régions d’outre-mer ainsi que mise à jour des statuts de Mayotte, de Saint-Pierre-et-Miquelon et des Terres australes et antarctiques françaises.
S’agissant plus précisément de Mayotte, le passage au régime d’identité législative est prévu dans le cas général, et le Gouvernement se montrera très ouvert au cours de la discussion, y compris sur un éventuel avancement de la date de consultation des Mahorais sur la départementalisation, même si l’organisation d’un tel référendum paraît difficile au regard du calendrier législatif actuel.
Ces projets visent par ailleurs à créer les deux nouvelles collectivités d’outre-mer de Saint-Barthélémy et de Saint-Martin, conformément au vœu largement majoritaire des électeurs de ces deux îles, exprimé le 7 décembre 2003. Ces collectivités exerceront les pouvoirs des communes, des départements et des régions ainsi que certaines compétences complémentaires. Les modalités de la séparation juridique avec la Guadeloupe sont également étudiées. Ces collectivités pourraient être créées dès le printemps prochain avec l’élection de leurs assemblées délibérantes.
M. René Dosière a apporté son soutien au projet de loi relatif à la Nouvelle-Calédonie et souligné que le groupe socialiste, à la différence du groupe UMP, le voterait sans état d’âme.
Il a par ailleurs interrogé le ministre sur l’attitude de l’État vis-à-vis du gouvernement que se sont donné les Polynésiens dans le cadre du statut établi par l’État. Sous le gouvernement polynésien précédent, les 150 millions d’euros de la dotation générale de développement économique étaient attribués intuitu personae au président du gouvernement, qui les utilisait comme il l’entendait. On peut se demander pourquoi l’État adopte une attitude « à géométrie variable » selon que le gouvernement territorial est dirigé par M. Gaston Flosse ou par M. Oscar Temaru. En effet, une réglementation sur l’usage de ces fonds a désormais été instituée. Ce n’est pas choquant en soi, mais il conviendrait de clarifier les choses une fois pour toutes et de préciser la base juridique de l’affectation de cette somme.
Par ailleurs, ce territoire connaît depuis trois jours un conflit un peu curieux, qui n’a apparemment rien de syndical. On peut s’étonner que le haut-commissaire, qui refuse de recevoir les représentants de la majorité de l’assemblée territoriale, reçoive en revanche une délégation de ceux qui entravent les libertés publiques et qui comptent en leur sein des repris de justice et des responsables du fameux GIP, cette milice privée de M. Gaston Flosse dont la chambre territoriale des comptes vient de souligner les irrégularités. L’ordre public et la liberté de circulation ne sont pas respectés, alors qu’ils entrent bien dans les attributions du haut-commissaire de Polynésie française.
Pour toutes ces raisons, il serait bon que le ministre dise si le gouvernement français respecte totalement l’autorité du gouvernement polynésien actuel ou s’il demeure lié à l’ancien président de la Polynésie française dans ses tentatives de restaurer son ancien pouvoir.
Enfin, M. René Dosière a rappelé qu’il avait adressé au ministre une question écrite sur les fondements du versement par le ministère de l’outre-mer à la Présidence de la République, au début de chaque année, d’une somme de 300 000 euros qu’elle utilise à sa convenance. Cette manière de procéder ne paraît guère conforme à la LOLF, et il serait souhaitable que cette somme, qui semble inscrite à l’action 3 du programme 160, figure au budget de la Présidence de la République.
M. Jérôme Lambert a jugé normal, au moment d’examiner le dernier budget de la législature, de tirer le bilan des cinq années écoulées, dont on aimerait qu’il se traduise par une amélioration des conditions de vie des citoyens d’outre-mer. Hélas, il y a loin de la vision idyllique qu’a le ministre de son budget et de sa politique à la réalité. Ainsi, les besoins sont très loin d’être satisfaits par ce projet de budget.
En matière d’emploi, si le taux de chômage a effectivement diminué au cours de l’année écoulée, son augmentation sur l’ensemble de la législature est supérieure à 5 %. Dans le même temps, le nombre de bénéficiaires du RMI culmine à 26 % de la population et le ministre a lui-même reconnu la grande difficulté à construire un nombre suffisant de logements sociaux. À ce propos, l’estimation de 27 000 logements donnée par M. Joël Beaugendre paraît fort basse, les besoins étant au moins de 100 000 logements.
Depuis plusieurs années, l’affaiblissement de la politique de l’État en faveur de l’outre-mer se traduit, à périmètre constant, par une baisse du budget du ministère. Même si c’est assez légèrement, il diminue encore cette année. Plus inquiétant, la Cour des Comptes évoque un « travestissement de la réalité budgétaire contraire au principe de transparence ». On peut donc nourrir des doutes quant à la sincérité des chiffres, d’autant que plusieurs orateurs ont souligné hier, dans la discussion générale, l’insincérité globale de ce projet de loi de finances.
Dans ce contexte, la polémique de ces derniers mois concernant la loi sur le « rôle positif de la colonisation » a posé nombre de problèmes outre-mer.
On peut par ailleurs regretter que les députés ne disposent pas des conclusions de la commission d’évaluation de la défiscalisation prévue par la loi de programme pour l’outre-mer de 2003 avant d’engager l’examen de ce budget.
Les indicateurs contenus dans le « bleu » paraissent extrêmement faibles. D’ailleurs, le rapport du Conseil économique et social sur l’évaluation de cette loi de 2003 insiste sur les difficultés d’évaluation, en l’absence des instruments et des outils statistiques nécessaires. Le ministère a-t-il vraiment fait des progrès dans ce domaine ?
La légère augmentation des crédits consacrés au logement ne paraît pas suffisante au regard de l’ampleur des besoins. Comment expliquer la baisse relative des crédits destinés à l’action sanitaire et sociale, 29 millions d’euros basculant vers l’action logement ?
On peut par ailleurs se demander si la réforme statutaire prévue pour Saint-Martin et Saint-Barthélemy aura des répercussions non seulement budgétaires – notamment pour la Guadeloupe –, mais aussi électorales : y aura-t-il un député et un sénateur de plus ?
Le Gouvernement a fait le choix général de ne remplacer qu’un fonctionnaire sur deux, on peut douter de l’efficacité d’une telle mesure dans les départements et collectivités d’outre-mer.
Enfin, la représentation nationale devrait être informée de l’état de l’enquête et de la procédure à la suite des graves incidents, impliquant des militaires, qui se sont produits à Kourou.
M. Gérard Grignon a rappelé les difficultés auxquelles est confrontée la nouvelle équipe dirigeant le conseil général de Saint-Pierre-et-Miquelon, en raison du passif et de la nécessité de conclure un contrat de projet avant la fin de l’année. Il ne faudrait pas que ces aspects soient oubliés dans le cadre de l’examen de cette mission budgétaire.
Il est particulièrement souhaitable que le Gouvernement dépose un dossier pour l’extension des limites du plateau continental au-delà des 200 milles marins, conformément à l’article 76 de la Convention de Montego Bay sur le droit de la mer. Pour cela, une étude est indispensable, que seul peut effectuer le navire Marion-Dufresne. Le Gouvernement s’est engagé à le détacher à cette fin à Saint-Pierre-et-Miquelon. Les crédits nécessaires sont-ils prévus en 2007 ?
Enfin, le Canada, qui avait jusqu’à hier pour le faire, n’a pas dénoncé le procès-verbal du protocole d’accord sur la pêche de 1972 liant le Canada et la France. L’accord de 1994 est donc reconduit tacitement. Quel sera, dans ces conditions, l’avenir de la convention entre la société Interpêche et l’État, qui garantit le maintien à Saint-Pierre-et-Miquelon de 80 emplois et qui s’achève à la fin de l’année ?
En réponse aux intervenants, le ministre a apporté les précisions suivantes :
En Polynésie française, l’État est impartial : c’est une exigence qui l’oblige. Le ministère de l’outre-mer a donc une mission et une seule : appliquer les politiques publiques dans le cadre de la Constitution comme dans celui de la très large autonomie qu’elle confère à cette collectivité.
Depuis l’arrivée du ministre, les relations se sont normalisées : il a rencontré le président Oscar Temaru, il s’est rendu sur place, il a vu tous les élus, il est allé dans tous les archipels, il a évoqué l’ensemble des sujets. Avec la Polynésie française, comme avec toutes les collectivités, des relations de travail sont mises en œuvre afin de gérer les dossiers. C’est ainsi qu’une partie des dettes vis-à-vis du fonds d’intercommunalité a été effacée avant l’été et que des discussions sont menées avec les différents ministères sur les conventions éducation et santé.
Le problème de la dotation globale de développement est réglé pour 2007 et les crédits sont inscrits. Il reste un arbitrage à rendre pour l’application en 2006. Une convention y pourvoit et comme pour toute utilisation d’argent public, des contrôles sont nécessaires.
Chacun sait que M. Oscar Temaru, qui soutient d’ailleurs le parti socialiste, est indépendantiste, et qu’il souhaite par conséquent que la Polynésie française se sépare de la France. La principale question de la prochaine législature sera donc l’établissement, dans le respect de la Constitution comme des aspirations profondes des Polynésiens, d’un cadre conventionnel pluriannuel afin de poursuivre les efforts en matière de santé, d’éducation, d’infrastructures ou encore de continuité territoriale.
Les 300 000 euros évoqués par M. René Dosière sont bien imputés sur le chapitre qu’il a indiqué. Ils couvrent le financement d’opérations officielles de la Présidence de la République dans le cadre de la politique ultramarine. L’an dernier, il s’est agi essentiellement de la cérémonie à la mémoire des victimes de l’écrasement de l’avion martiniquais.
La charge vigoureuse menée par M. Jérôme Lambert contre les résultats de la politique du ministre est difficilement compréhensible. Les chiffres sont têtus : le chômage a baissé, c’est une réalité. Qui peut nier par ailleurs que le taux d’emplois aidés est beaucoup trop élevé outre-mer ? Mais qui souhaite, pour autant, un « grand soir » des emplois aidés ? Comment l’économie peut-elle se développer, comment les gens peuvent-ils vivre sans une forte politique publique d’accompagnement de la part de l’État ?
Ainsi, La Réunion, qui est certes la région d’outre-mer la plus dense, avec 800 000 habitants aujourd’hui et un million demain compte tenu de ses perspectives démographiques, est aussi celle où le taux d’emplois aidés est le plus élevé, où le taux de croissance du secteur marchand est le plus fort, où l’on a créé 3 000 à 4 000 emplois. L’objectif doit donc être de faire passer, grâce à la formation ainsi acquise, ces emplois aidés d’un financement public à une complète intégration dans le secteur marchand. Il est douteux que le modèle réunionnais puisse être transposé dans les autres départements d’outre-mer car chacun d’entre eux a son organisation territoriale, sa spécificité sociologique, son dynamisme économique. Il convient donc de faire preuve de pragmatisme et de faire évoluer, le cas échéant, le cadre législatif afin d’obtenir des résultats.
En 2002, le Président de la République a pris des engagements et a fixé une feuille de route au Gouvernement. Or, tous les engagements pris auront été tenus et tous les résultats auront été au rendez-vous. Certes, ils ne sont pas encore pleinement satisfaisants ; il faut donc aller plus loin, en apportant un soutien économique toujours important et dérogatoire au droit commun. Cela justifie des politiques de défiscalisation, d’exonération des charges sociales ou d’aide publique, mais également de développement de la formation et de la qualification, ou de construction de logements, afin notamment de permettre à la jeunesse, qui est une chance immense pour l’outre-mer et pour la France, d’irriguer l’économie marchande.
Les conclusions du rapport de la Cour des comptes, publié au moment même de l’arrivée du ministre, établissent que la difficulté de ce ministère tient au fait qu’il a une vocation interministérielle, qu’il est régalien, et qu’il ne gère que 2 milliards d’euros sur les 15 milliards d’euros qui sont consacrés à l’outre-mer. Son rôle politique est donc essentiel. Le supprimer susciterait l’amertume des populations ultramarines car il s’agit d’un symbole fort, mais ce constat ne saurait dispenser d’une réflexion approfondie sur les moyens d’améliorer le fonctionnement interministériel.
L’exemple de la LBU est instructif : doit-elle être gérée directement par le ministère de l’outre-mer pour satisfaire l’ego du ministre, ou bien être inscrite dans le budget du ministère chargé du logement, pour faciliter les versements, avec une coordination entre les ministres, une action efficace du comité de pilotage local, une évaluation de la politique menée ? Sur ce point aussi, l’efficacité qui doit primer. Et cela vaut aussi bien sûr pour l’éducation comme pour la santé : on ne gère pas les DOM comme les collectivités du Pacifique ou comme la Nouvelle-Calédonie.
Dans ces conditions, avant la fin de la législature, une réponse satisfaisante devrait pouvoir être apportée aux observations de la Cour des comptes.
La représentation parlementaire des nouvelles collectivités de Saint-Martin et Saint-Barthélemy n’est pas prévue dans le projet de loi organique portant DSIOM, mais le Gouvernement adoptera une attitude ouverte à l’égard des amendements qui pourraient être déposés à ce sujet.
M. René Dosière ayant rappelé qu’il était interdit aux parlementaires d’alourdir les charges publiques par voie d’amendement et qu’il appartiendrait donc au Gouvernement de proposer la création de préfets, de sénateurs et de députés, le ministre a répondu qu’il lui paraissait peu acceptable qu’un élu de la nation ne soit considéré que sous l’angle de la charge publique qu’il représente, et que si le Parlement souhaitait aborder cette question, des solutions concrètes pourront être trouvées.
Il a également indiqué qu’il ne disposait pas des éléments précis relatifs aux faits qui se sont déroulés à Kourou, mais qu’il imaginait que l’instruction suivait son cours et que les autorités compétentes donneraient des informations le moment venu.
En ce qui concerne la limite du plateau continental de Saint-Pierre-et-Miquelon, le ministre a précisé que le navire Marion-Dufresne était actuellement sur zone et que les études seraient lancées en 2007, en liaison avec le secrétariat général à la mer, afin d’avancer sur la définition technique du plateau, qui constitue bien une priorité.
S’agissant de la pêche, le ministre s’est déclaré favorable à une convention couvrant à la fois la restructuration et le redressement financier : il n’est pas possible de continuer à couvrir les dettes année après année. Cela vaut d’ailleurs dans d’autres domaines. Ainsi, compte tenu de la rigueur de l’hiver à Saint-Pierre-et-Miquelon, les dépenses de déneigement considérables grèvent les budgets des communes, qui se tournent alors vers l’État pour demander des subventions d’équilibre. Cette situation de dépendance n’est ni saine ni acceptable. Pour toutes ces raisons, il faut espérer que la convention pourra être passée avant la fin de l’année, ou du moins avant la fin de la législature.
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Après le départ du ministre, la Commission a procédé à l’examen pour avis des crédits de la Mission outre-mer pour 2007.
Conformément aux conclusions du rapporteur pour avis, M. Joël Beaugendre, la Commission a émis un avis favorable à l’adoption des crédits de la Mission outre-mer.